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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2004-2005 - 18ème jour de séance, 43ème séance

2ème SÉANCE DU JEUDI 4 NOVEMBRE 2004

PRÉSIDENCE de M. Éric RAOULT

vice-président

Sommaire

      LOI DE FINANCES POUR 2005 -deuxième partie- (suite) 2

      ÉCOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DURABLE 2

      QUESTIONS 24

      ETAT B - TITRE III 29

      ORDRE DU JOUR DU VENDREDI 5 NOVEMBRE 2004 31

La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

LOI DE FINANCES POUR 2005 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005.

ÉCOLOGIE ET DÉVELOPPEMENT DURABLE

M. Philippe Rouault, rapporteur spécial de la commission des finances - Le budget de l'écologie et du développement durable accomplit un effort non seulement de maîtrise de la dépense publique, mais aussi de rationalisation. Il s'élève à 825 millions en moyens de paiement, soit une diminution de 3,6 % après la hausse de 11,5 % de 2004, due pour l'essentiel à la budgétisation du fonds national de solidarité pour l'eau. Les dépenses ordinaires reculent de 7,1 %. Les principales baisses concernent l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie - ADEME - et le fonctionnement des services, et les principales hausses la protection de la nature et de l'environnement et le personnel, avec 86 emplois supplémentaires. Les crédits supplémentaires de la recherche bénéficient essentiellement à l'institut de radioprotection et de sûreté nucléaire. Les dépenses en capital augmentent de 8,2 % et les autorisations de programme de 23 %.

Même si le mouvement de rééquilibrage entre dépenses d'investissement et dépenses ordinaires doit être relativisé, il faut reconnaître que le ministère participe globalement à l'effort de maîtrise des dépenses de l'Etat. Cependant, certains mouvements nuisent à la compréhension du budget, tels que le prélèvement exceptionnel sur les agences de l'eau, décidé fin 2003 et qui finance des politiques menées en 2004, et que les mises en réserve et les annulations de crédits qui pénalisent notamment l'ADEME. C'est d'autant moins compréhensible que vous avez annoncé, Monsieur le ministre, que votre budget serait abondé de 141 millions en loi de finances rectificative pour 2004, dont 130 pour l'agence. Cette promesse doit être réitérée devant l'Assemblée nationale : ces crédits supplémentaires, même s'ils nuisent à la clarté du budget, seraient nécessaires à l'ADEME.

Dans ce contexte, le budget refuse une logique de saupoudrage et opère des choix. Le ministère se recentre sur ses missions essentielles. Il a établi cinq priorités. La première est la lutte contre le changement climatique, qui ne ressort pas d'ailleurs que du budget de l'écologie. La loi de finances prévoit également des crédits d'impôt, à compter du 1er janvier 2005, pour favoriser les équipements écologiquement performants tels que les chaudières à basse température ou à condensation, les matériaux de régulation thermique, la production d'énergie renouvelable ou les pompes à chaleur. Je souhaiterais que cette mesure soit étendue aux chauffages à bois tels que les inserts, foyers fermés et poêles mixtes, qui sont très performants. La lutte contre les changements climatiques passe également par le développement des biocarburants. L'accord de Kyoto nous engage en effet à porter de 16 à 21 % la part des énergies renouvelables dans notre pays, et l'hydroélectricité et l'éolien n'y suffiront pas. Nous avons déjà voté la défiscalisation de 130 000 tonnes supplémentaires de biocarburants pour 2004. L'objectif est de faire passer leur part dans la consommation totale à 2 % d'ici fin 2005 et à 5,75 % d'ici fin 2007. Je me réjouis qu'un amendement prévoie une majoration d'impôt pour les distributeurs qui n'ont pas une attitude responsable. Le développement des biocarburants répond en effet au souci de la réduction des gaz à effet de serre, mais aussi de l'amélioration de notre indépendance énergétique et de l'aménagement du territoire, avec des créations d'emplois dans le monde rural.

Deuxième priorité : la prévention des risques technologiques et des pollutions. Cinquante emplois vont être créés dans les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, dont 25 par un transfert depuis le ministère des finances. Certes, il est louable de vouloir renforcer le contrôle des installations classées, mais pas d'y consacrer tant de postes supplémentaires alors que les objectifs quantitatifs restent les mêmes que pour 2004 ! Il faut se garder d'une dérive des dépenses de personnel, ainsi que l'a souligné l'inspection générale de l'environnement. Autre priorité : la préservation de la biodiversité. Les crédits consacrés à la protection de la nature, des sites et des paysages progressent de 11,6 %. L'une des actions phare sera la construction du réseau européen Natura 2000.

La quatrième priorité devrait recevoir une traduction législative dans les mois qui viennent : il s'agit de la politique de l'eau. La baisse des crédits qui y sont consacrés s'explique par des économies de fonctionnement et par une redistribution des rôles entre l'Etat et les agences de l'eau, l'Etat devant se recentrer sur ses missions régaliennes, telles que la police de l'eau. Je me demande toutefois si l'effort de rationalisation de la dépense du ministère ne s'est pas porté de façon trop exclusive sur cette politique. Enfin, la dernière priorité est la promotion du développement durable, même si le soutien aux politiques environnementales connaît une légère baisse à périmètre constant, due à la diminution des moyens de fonctionnement.

Les actions visant à conforter la place de l'écologie dans le débat interministériel, à asseoir la capacité de conception et d'expertise du ministère et à garantir sa présence sur le terrain sont donc assurées pour 2005. De manière générale, Monsieur le ministre, j'approuve votre volonté de simplifier les structures. La transformation de l'institut français de l'environnement en service à compétence nationale est très positive. La réorganisation interne permettra de le recentrer sur ses missions, de mutualiser les compétences et de rendre ses prestations mieux adaptées. Les 69 emplois supplémentaires prévus sont indispensables à ce changement de statut. Il est également nécessaire de progresser dans la réforme et la simplification des services déconcentrés. L'éparpillement des compétences et des organismes rend la prise de décisions trop complexe. Il est grand temps d'envisager des fusions. J'espère ainsi que les liens entre les DRIRE et les directions régionales de l'environnement - DIREN - seront renforcés tant par la réforme de l'administration territoriale que par la création de pôles régionaux « environnement et développement durable ». Certaines régions vont d'ailleurs expérimenter un rapprochement de ces deux structures.

A propos de la modernisation de l'Etat, il faut bien sûr évoquer la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances. Je regrette que la proposition de la commission des finances visant à créer une mission interministérielle « écologie et maîtrise des risques » ait été refusée. La mission « écologie et développement durable », qui est propre au ministère, est composée de trois programmes : prévention des risques et lutte contre les pollutions, gestion des milieux et biodiversité et enfin soutien aux politiques environnementales et développement durable. Ce découpage est logique, mais un programme dédié à la politique de l'eau pourrait être créé, compte tenu de la spécificité du sujet, qui permettrait aussi d'améliorer la lisibilité budgétaire. Le ministère est également partie prenante du programme de recherche dans le domaine des risques et des pollutions mené par la mission interministérielle « recherche et enseignement supérieur ».

La mise en œuvre de la loi organique a donné lieu à une expérimentation de globalisation des crédits en 2004, menée par la DIREN de Midi-Pyrénées et qui sera étendue en 2005 à trois autres régions. En outre, afin d'appréhender l'intervention des établissements publics dans le nouveau cadre budgétaire, l'ADEME expérimentera elle aussi l'application de la LOLF. Enfin, l'avant-projet annuel de performance fait montre de plusieurs progrès. Les indicateurs proposés ne se contentent pas de reprendre ceux qui existaient déjà : ils intègrent des objectifs d'efficacité socio-économique, de qualité de service et d'efficacité de la gestion. La plupart seront mis au point d'ici à l'année prochaine. Toutefois, certains semblent trop larges ou trop vagues, comme l'indicateur fondé sur la quantité des émissions de gaz à effet de serre, qui est nécessaire mais pas suffisant.

D'autres relèvent d'une logique plus d'activité ou de moyens que d'une logique d'optimisation de la dépense publique.

Ce projet présente aussi le mérite de contribuer à la réforme de l'Etat. Il reflète enfin la philosophie d'un ministère qui n'est pas vraiment redistributeur, mais qui est à l'origine de politiques ambitieuses en matière d'environnement, en phase avec notre conception de l'Etat.

La commission des finances a adopté ces crédits et j'invite mes collègues à faire de même. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Christophe Priou, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques - Comme de nombreux autres, ce budget est placé sous le signe de la rationalisation et de l'efficacité de la dépense. Il traduit les efforts du ministère pour préparer l'entrée en vigueur de la loi organique, notamment par une expérimentation visant à individualiser les dotations affectées à la direction régionale de l'environnement Midi-Pyrénées, qui sera étendue l'an prochain aux régions Provence-Alpes-Côtes-d'Azur, Bourgogne et Rhône-Alpes, ainsi qu'aux moyens de l'ADEME.

Cela conduira à présenter les crédits en trois nouveaux programmes, ce qui en facilitera la compréhension, comme de nombreux parlementaires l'avaient souhaité.

Comme l'indique le dossier de presse, le budget de l'écologie a dû « participer à l'effort collectif du Gouvernement en matière de maîtrise de la dépense publique ». Ainsi, le bleu comme le jaune font apparaître une diminution de 3,6 % des crédits. Certains pourront y voir un décalage avec la Charte de l'environnement comme avec les nombreuses déclarations du ministre au sujet du plan climat, du plan national d'allocation des quotas d'émission de gaz à effet de serre ou du plan national santé-environnement. En fait, il s'agit d'un budget de transition, ne serait-ce que parce l'écologie bénéficiera de 141 millions supplémentaires dans le cadre de la loi de finances rectificative. Le ministre s'est engagé à ce que ces crédits ne fassent pas l'objet d'une régulation au début 2005 et qu'ils bénéficient en priorité à l'ADEME, ainsi, dans une moindre mesure, qu'au Conservatoire du littoral et à I'Office national de la chasse et de la faune sauvage.

Ces moyens nouveaux devraient permettre au premier d'honorer ses engagements, alors que ses crédits de paiement sont encore réduits de 15 %, et de faire face aux compétences nouvelles qui lui ont été attribuées dans le cadre du projet de développement des territoires ruraux.

A cette occasion, j'aimerais rendre un hommage solennel à l'action déterminante de M. Olivier Guichard, récemment disparu, dans le domaine de l'écologie et de l'aménagement du territoire. Cet ancien député de ma circonscription fut le premier délégué à la DATAR et ministre de l'aménagement du territoire. Il est à l'origine de la création des parcs naturels régionaux et fut un président particulièrement efficace et du Conservatoire du littoral.

Ce budget permettra de mener dans des conditions satisfaisantes les politiques prioritaires du ministère. En particulier, la hausse de 14 % des moyens consacrés à la protection de la nature, des sites et des paysages permettra d'accélérer la mise en place du réseau Natura 2000 ; de conforter l'action des parcs naturels régionaux, dont l'équilibre financier a été mis à mal par la fin des emplois jeunes, des réserves de biosphère, du Muséum national d'histoire naturelle et de l'ONCFS.

Cela sera favorisé par la rationalisation des moyens du Conservatoire du littoral et des parcs nationaux. Un projet de loi a été annoncé afin de réformer leur régime juridique : il serait bon qu'il permette aux parcs d'accéder à un financement pérenne.

C'est aussi grâce à une diminution des crédits accordés à la politique de l'eau que l'on a pu faire de la protection de la nature une priorité. J'observe toutefois que cette baisse résulte pour partie du décroisement du financement des agences de l'eau, qu'elle n'affectera pas la politique de prévention des inondations fluviales et que l'examen du projet sur l'eau sera I' occasion de mobiliser de nouveaux moyens. Il devra aussi permettre de clarifier définitivement le financement des agences de l'eau. Peut-être serait-il bon par ailleurs de conforter les crédits destinés à la lutte contre les pollutions marines.

J'en viens à une activité essentielle du ministère, la prévention de la pollution et des risques naturels et industriels. Si, globalement, ces crédits diminuent de 6 %, on observe cependant des évolutions contrastées. La priorité a été sans conteste accordée à la lutte contre la pollution atmosphérique. A cet égard, chacun peut se féliciter de la ratification du protocole de Kyoto par la Russie. Pour sa part, la France a décidé de ne pas s'en tenir à ces engagements internationaux : en mettant en place le 1er janvier un permis d'émission de gaz à effet de serre, le ministère entend faire de la France le bon élève européen. Mais ce résultat ne doit pas être recherché par n'importe quels moyens. En particulier, le développement des énergies renouvelables ne saurait conduire à l'implantation d'éoliennes dans des sites où elles dénatureraient le paysage.

M. Yves Cochet - Allons !

M. Christophe Priou, rapporteur pour avis - Saurait-on par ailleurs accepter, après l'explosion de l'usine AZF et les inondations dans le sud de la France, que la lutte contre la pollution atmosphérique se solde par une réduction des moyens consacrés à la lutte contre les risques industriels et naturels ? La réponse du ministre a été claire s'agissant des risques naturels puisque les moyens consacrés à l'élaboration des plans de prévention seront augmentés. On aurait aimé qu'elle le soit aussi sur la prévention des risques industriels, dont les crédits diminuent de 5,2 %. Fort heureusement, la création de 50 d'inspection des installations classées permettra d'assurer l'essentiel.

Enfin, de nombreux parlementaires demandent une réforme de la politique des déchets ménagers. Elle semble inévitable dans la mesure où le coût de ce service public augmente de 7 % par an.

M. Philippe Rouault, rapporteur spécial - Très bien !

M. Christophe Priou, rapporteur pour avis - Comme mon prédécesseur, j'invite l'Assemblée à adopter les crédits de l'écologie et du développement durable, conformément à l'avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères - La commission des affaires étrangères ne s'est saisie pour avis que de trois budgets, c'est dire l'importance qu'elle attache au contexte international dans lequel s'inscrit l'action de ce ministère, qu'ont illustré, récemment, la décision de la Russie de ratifier le protocole de Kyoto et, hier, la réélection du Président Bush, qui aura des conséquences en matière d'écologie et de développement durable.

M. Yves Cochet - Eh oui !

M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis - Aucune des priorités de ce budget ne peut d'ailleurs être détachée de ce contexte, à commencer par la lutte contre le changement climatique. La réussite de l'action que la France mène au plan national en est largement tributaire. Pour autant, notre pays doit être exemplaire car l'écologie et le développement durable sont une des clés de sa politique internationale. Depuis Rio et plus encore Johannesburg, la vision française d'une mondialisation régulée et d'une croissance économique conciliée avec le développement humain et la préservation de la planète s'est manifestée avec éclat. Elle est indissociable de l'approche multilatérale défendue par la France à l'ONU et de sa volonté de ne pas laisser à l'OMC le monopole de la régulation des échanges.

Une telle vision est partagée par nos anciens partenaires de l'Union européenne, avec plus de nuances par les nouveaux. Mais elle se heurte à des obstacles sérieux, à commencer par l'hostilité des Etats-Unis, le Président Bush ayant réitéré, au cours de sa campagne, son refus de ratifier le protocole de Kyoto.

A l'inverse, on peut se réjouir de la décision récente de la Russie qui permettra, dès la conférence des parties de Buenos-Aires le mois prochain, d'entrer dans la phase opérationnelle prévue pour la réduction des gaz à effet de serre. L'influence de la France et de l'Union européenne n'est pas étrangère à ce revirement et notre volonté ne doit pas s'infléchir.

Cela vaut d'abord pour la transformation du programme des Nations unies pour l'environnement en ONUE, que l'on peut espérer pour septembre prochain et qui sera la première étape vers la création d'une Organisation mondiale de l'environnement. Cela permettrait de rendre fonds et financements plus efficaces et de rendre obligatoires les contributions des Etats, ce qui serait gage d'indépendance de l'organisation. J'observe à ce propos que notre crédibilité serait plus grande si nous ne nous contentions pas d'être au douzième rang des contributeurs volontaires...

Il me paraît aussi important de mobiliser la francophonie, dont l'organisation compte, parmi 51 états adhérents, 24 des 49 PMA. Le prochain sommet de Ouagadougou, qui sera consacré au développement durable, devrait en être l'occasion.

Outre que, comme l'a rappelé le Président de la République à Hanoi, la défense de la diversité linguistique et culturelle doit être un des piliers du développement durable, l'espace francophone a vocation à devenir l'instrument d'une solidarité internationale active.

Afin de lutter contre la pauvreté, il est opportun que la France continue à militer pour la création de contributions financières internationales, dans la ligne du rapport Landau, et ce quelle que soit la forme adoptée : taxe Tobin ou taxe sur les émissions de gaz à effet de serre ou sur les ventes d'armes, par exemple.

Enfin, nous devons absolument mener une action crédible pour ce qui est de la lutte contre le réchauffement climatique. On ne peut douter de notre exemplarité aux niveaux national et européen - le plan climat et l'entrée en vigueur prochaine du système européen d'échanges de quotas sont là pour en attester - mais il serait souhaitable que notre volonté soit étayée par le respect des engagements pris à l'égard du groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat - GIEC - et par une contribution effective à la convention climat. Or, sur les 200 000 euros de notre contribution au GIEC, 140 000 n'ont pas été versés cette année : 20 000 au titre de la Mission interministérielle sur l'effet de serre - MIES -, 60 000 au titre du ministère de la recherche et autant au titre du ministère de l'écologie. Quant aux contributions au fonds d'affectation spéciale pour les activités complémentaires, pour le démarrage rapide du mécanisme de développement propre, 150 000 euros ont été versés sur un total de 300 000. Ces difficultés budgétaires récurrentes, pour des sommes relativement modestes, se retrouvent au niveau de la MIES qui ne dispose toujours que de 9,5 postes réels alors qu'un arbitrage ministériel de 2003 en prévoyait 14. Or les structures similaires en Allemagne et en Grande-Bretagne disposent respectivement de 90 et de 35 personnes... Tout en étant conscient que vous n'êtes pas seul en cause, j'insiste donc à nouveau pour que vous amélioriez cette situation, qui nuit à l'efficacité de notre action internationale. Il serait également utile de rendre plus lisible ce dispositif de financement et, à cet égard, il est regrettable que la LOLF n'ait pas fait prévaloir sur ce point une logique interministérielle.

II serait souhaitable de placer clairement le ministre de l'écologie et du développement durable au centre des politiques mises en œuvre dans ce domaine, même si on ne peut éviter la transversalité. La nomination d'un délégué interministériel au développement durable en juillet dernier va d'ailleurs dans ce sens d'un meilleur travail intergouvernemental.

Je me réjouis que l'Agence française du développement soit désormais mobilisée sur le thème du développement durable, mais il n'en subsiste pas moins un décalage entre la vision que défend la France dans les enceintes internationales et l'action à bien des égards exemplaires de votre ministère au plan national, d'une part, et la modicité des moyens que nous engageons au plan international, d'autre part. La transversalité explique en grande partie la modestie des crédits consacrés par votre ministère à l'action internationale : 2 914 412 euros représentant 0,36 % de votre budget, et il est un fait que cette action internationale est davantage illustrée par les 38 millions d'euros inscrits au budget du ministère des affaires étrangères - et dont les trois quarts sont consacrés à des contributions obligatoires ou volontaires.

Cependant, les chiffres dont mes collègues viennent de faire état démontrant l'exemplarité de votre action au plan national, la commission des affaires étrangères a donné un avis favorable à votre budget, certaine que cette exemplarité constitue, en dépit des problèmes que j'ai mentionnés, un atout essentiel dans l'action internationale de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet - Cette année a été une année importante pour l'écologie, d'abord en raison de la ratification par la Russie du protocole de Kyoto : provoquant l'entrée en vigueur de cet instrument, cette décision est une victoire remportée sur les « kyoto-sceptiques » qui, en France et ailleurs, mettaient en avant la fragilité de ce protocole rejeté par les Etats-Unis pour retarder le moment de l'effort. C'est aussi une invitation à agir et donc une promesse d'avenir.

Mais 2004 a également été marqué par l'adoption de la Charte constitutionnelle de l'environnement. Depuis trente ans, associations et politiques demandaient que soit constitutionnalisé le droit à l'environnement et, grâce au Président de la République, ce projet d'écologie humaniste s'est enfin concrétisé et se concrétisera encore davantage au cours de l'année qui vient. Il a vocation à devenir le troisième pilier des droits fondamentaux qui forment le socle de notre Constitution et il autorisera une transformation profonde de nos lois et de nos politiques publiques, désormais placées sous le signe du développement durable.

Enfin, cette année a vu aussi l'adoption du plan national Santé et Environnement, conformément à l'un des engagements de la stratégie nationale de développement durable. Cela s'imposait au vu de bien des indices concordants : en vingt ans, on enregistre 35 % de cancers en plus à âge égal et l'asthme infantile ou la bronchiolite ont pris un caractère endémique, par exemple.

Au regard de tous ces événements, il eût évidemment été souhaitable d'afficher une forte hausse de votre budget, Monsieur le ministre. Les restrictions budgétaires vous ont obligé et nous obligent à un exercice plus complexe et moins facile. Vos crédits sont en effet en légère régression, à 825 millions d'euros...

M. Jean-Pierre Blazy - Légère ?

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet - ...mais devraient être abondés de 141 millions en loi de finances rectificative. Même s'il ne peut totalement nous satisfaire, ne serait-ce que parce qu'il nuit à la lisibilité du budget, cet arrangement permettra de maintenir vos moyens à niveau. D'autre part, le recentrage de votre action sur trois missions essentielles - prévention des risques, préservation de la biodiversité et lutte contre les changements climatiques - répond à un souci de bonne gestion et est tout à fait cohérent avec les grands événements que je rappelais pour commencer.

Les mouvements successifs qui ont, au fil des ans, affecté ce budget - budgétisation du Fonds national de solidarité pour l'eau, décroisement des subventions dans ce même secteur de l'eau... - nous obligent à le lire désormais politique par politique. S'agissant de la sécurité environnementale, les crédits pour la prévention des dommages liés aux inondations croissent de 20 %, ceux qui sont consacrés à l'élaboration des plans de prévention des risques naturels augmentent également et le service de prévention des crues est renforcé. En matière de sécurité sanitaire et environnementale, nous nous réjouissons du doublement des crédits de l'Agence et du renforcement de l'INERIS : tout cela est conforme au plan national adopté en juin.

En cohérence avec les évolutions positives enregistrées au niveau international, les crédits pour la lutte contre le changement climatique sont portés de 26 à 40 millions d'euros. Le plan climat trouvera ainsi une première concrétisation.

Pour ce qui est de la préservation des milieux naturels, les réseaux Natura 2000 bénéficieront de moyens de paiement en progression de 25 % et les zones humides tireront profit de l'exonération de taxe sur le foncier non bâti.

En revanche, nous souhaiterions des explications sur certaines baisses. Si celle des crédits du Conservatoire du littoral doit être compensée par un abondement de 8 millions d'euros en loi de finances rectificative, quid de celle des crédits des parcs nationaux et des réserves naturelles ?

D'autre part, deux secteurs me semblent insuffisamment pris en compte dans ce budget. Tout d'abord l'eau : la diminution des crédits s'explique certes là par la redistribution des rôles entre l'Etat et les agences et par la fin des financements croisés, mais il n'en reste pas moins que les besoins de financement sont considérables. Vous avez annoncé en commission un amendement visant à relever ces crédits : nous l'accueillerons certainement avec faveur. Par ailleurs, vous annoncez une loi : quand sera-t-elle présentée ? Comment répondra-t-elle aux attentes de nos concitoyens, qui sont fortes ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

Autre secteur pour lequel nous éprouvons des inquiétudes : la gestion des déchets. Le coût du service public progresse là de quelque 7 % par an et nous constatons par ailleurs l'échec des politiques de prévention, le volume des déchets par habitant ne cessant de croître. Or le projet de budget ne répond pas à ces inquiétudes. Le budget de l'ADEME est réduit, en particulier. D'autre part, pourriez-vous préciser les grandes lignes de la loi que vous annoncez dans ce domaine aussi ? Y aura-t-il fusion de la taxe et de la redevance pour enlèvement des ordures ménagères, comme nous sommes nombreux à le souhaiter ?

Ce budget est le dernier à être présenté selon la nomenclature du 2 janvier 1959 puisque, en application de la LOLF, il se partagera désormais, à raison de 70 et de 30 % respectivement, entre une mission « Ecologie et développement durable » et une part des programmes de recherche sur les risques et pollutions. Comme M. Rouault, je regrette que l'application de la LOLF ne conduise pas à plus de lisibilité. Les thématiques de l'eau, des déchets ou encore de l'action internationale auraient gagné à être plus lisibles. Ce serait d'ailleurs le gage du développement de l'interministérialité, particulièrement importante en matière de développement durable, comme la création d'une délégation interministérielle en atteste.

Travaillant sur ce projet de budget, nous avons été alertés de nombreuses difficultés de paiement intervenues en 2004 dans les champs d'intervention de votre ministère. Enquête menée, il est apparu que la contestation par des contrôleurs financiers locaux de certaines procédures de délégation des DIREN expliquait ces dysfonctionnements. Nous espérons qu'ils ne se reproduiront pas en 2005, car ils ont beaucoup nui sur le terrain à l'image du ministère de l'environnement.

Confiant dans les réponses que vous apporterez à ses interrogations légitimes, le groupe UMP votera ce projet de budget pour 2005. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean Lassalle - Je souhaite tout d'abord vous dire, Monsieur le ministre, combien j'ai apprécié votre visite aujourd'hui dans la vallée d'Aspe qui vient de vivre un drame avec la disparition tragique de l'ourse Cannelle. Dans un contexte difficile, vous avez su, faisant preuve d'un courage qui vous honore, tenir des propos susceptibles d'être entendus de tous. Nous avons maintenant l'ardente obligation de sauver l'ours brun des Pyrénées, qui fait partie du patrimoine naturel de notre pays. Pour ma part, je ferai tout ce qui est en mon possible pour que l'on y parvienne.

J'en viens à votre budget pour 2005. Le groupe UDF soutient l'effort supplémentaire consenti en matière de prévention. En effet, les catastrophes naturelles et technologiques risquent d'être de plus en plus fréquentes. Il faut mieux préparer les populations, accélérer les indemnisations et rendre les procédures un peu moins incompréhensibles pour nos concitoyens. Lors d'une réunion dans ma circonscription, j'ai hier soir encore pu constater combien les victimes de catastrophes naturelles se sentent démunies, lorsqu'elles attendent depuis deux ans d'être indemnisées. Le même effort doit être fait en cas de catastrophe technologique.

Alors qu'il existe depuis une trentaine d'années, le ministère de l'écologie n'a pas encore assez d'importance dans notre société et devrait être davantage encore au cœur de l'actualité. Chacun se sert à l'occasion de ses crédits mais d'une manière générale, il ne dispose pas des moyens nécessaires pour relever les défis de l'époque.

Saluant également la poursuite du travail entrepris en matière de politique de l'eau et de promotion du développement durable, le groupe UDF votera ce projet de budget. Pour ma part, je m'abstiendrai au nom du combat que je mène depuis l'origine contre les directives Oiseaux et Habitats. La dernière pénalise très lourdement nos territoires (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). N'ironisez pas, chers collègues, sur ces sujets douloureux. Vous n'avez pas dans votre circonscription, Madame Perrin-Gaillard, beaucoup de zones Natura 2000. (Mêmes mouvements) Si Mme Voynet nous avait laissé faire en 1998-1999, nous aurions renforcé notre population d'ours et en aurions introduit deux. Mme Voynet a, hélas, saboté ce projet. Alors, pas de leçons de morale sur le sujet, ni de vous, ni de la part de M. Cochet, ni de celle de Mme Voynet, réfugiée politique au Sénat...

M. le Président - Mme Voynet a été élue sénatrice de la Seine-Saint-Denis.

M. Jean Lassalle - Certes, mais cela ne modifie en rien mon opinion.

Je reviens à la directive Habitats, avec laquelle je suis en désaccord total. Elle concerne hélas un quart du territoire national, dans ses zones les plus déshéritées, les plus fragiles. Il faudrait au contraire donner une nouvelle chance à ces territoires. Ce n'est pas en laissant s'agglutiner la population dans des banlieues inhumaines, tandis que nos campagnes deviennent des déserts, qu'on réglera les problèmes. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et sur plusieurs bancs du groupe UMP)

M. Patrick Braouezec - Après celles de 2003 et de 2004, le budget de l'environnement subit en 2005 une nouvelle baisse de 3,6%, pour ne se monter qu'à 825 millions d'euros. C'est depuis 2002 une baisse sensible en euros constants, qui remet en question les efforts entrepris de 1997 à 2002, période où il avait déjà fallu réparer les dégâts des années 1993-1997. Le ministre se réjouit pourtant, annonçant 140 millions d'euros escomptés en loi de finances rectificative. Mais ce n'est là qu'acrobatie budgétaire et poudre aux yeux ! Gels, dégels, puis gels de nouveaux, le tour de passe-passe ne trompe personne !

M. Michel Bouvard - Auparavant, les crédits n'étaient pas consommés.

M. Patrick Braouezec - Avec quarante suppressions d'emplois dans l'administration centrale et dans les DIREN, la structure même du ministère est menacée, même si sont par ailleurs créés cinquante emplois pour le contrôle des installations classées. Sur ces cinquante emplois, vingt-cinq proviennent d'ailleurs d'un simple transfert de Bercy. Restent vingt-cinq créations nettes, autant dire rien par rapport aux besoins, surtout après une catastrophe comme celle d'AZF.

Si entre 1997 et 2002, la constitution d'un ministère de l'environnement puissant, tant au niveau central qu'au niveau déconcentré, la tendance est aujourd'hui inverse. Voudrait-on sa disparition que l'on ne s'y prendrait pas autrement ! Mais cela est étrange après les déclarations du Président de la République en faveur de l'écologie : celles-ci n'auraient-elles été que des déclarations d'intention ?

L'ADEME est, cette année encore, la grande perdante, ses crédits passant de 100 à 63 millions d'euros. L'ensemble de ses programmes est affecté par le gel budgétaire, dans une proportion que le ministère refuse de communiquer, alors même que le plan Climat reste, dit-on, une priorité. Comment l'ADEME, principal opérateur de ce plan finalement adopté le 22 juillet dernier après des mois de tergiversations, pourra-t-elle le mettre en œuvre avec 30 % de ses crédits gelés ? Alors qu'elle a pour mission de réfléchir aux incitations fiscales à l'achat d'équipements respectueux de l'environnement, au développement des biocarburants ou à l'étiquetage des matériels gros consommateurs d'énergie, une réduction drastique de ses moyens ne peut que nuire à son efficacité.

J'en viens à la politique de l'eau, qui doit faire l'objet d'un projet de loi qui sera examiné début 2005. Celui-ci traitera de la préservation et de la gestion de la ressource, de la réforme du système des redevances perçues par les agences de l'eau, de la création de la fameuse « septième agence », de la suppression du FNDAE, ainsi que de la police de l'eau. Il semble que le ministère souhaite mettre fin aux financements croisés entre l'Etat et les agences de l'eau, voire privatiser totalement les services de l'eau. Les crédits de la politique de l'eau diminuent d'ailleurs de 12 % en 2005, ce qui n'est pas de bon augure. En 2003, les agences de l'eau avaient dû renflouer l'ADEME à hauteur de 230 millions d'euros, ce dont les usagers avaient les premières victimes. Après la disparition du FNDAE, va être créé l'ONEMA -Office national de l'eau et des milieux aquatiques-, dont le financement sera une fois encore assuré par les usagers. Cet ONEMA fusionnera avec le Conseil supérieur de la pêche, dont la subvention vient d'être réduite de trois millions d'euros. Tour de passe-passe, là encore ! Que l'Etat se désengage de la gestion de l'eau, bien commun indispensable à la vie comme au développement économique, revient à la soumettre aux lois du marché. Lors de la récente élection présidentielle en Uruguay, les citoyens étaient aussi consultés par référendum pour savoir si la gestion de certains biens communs, dont l'eau, devait être publique ou privée. Ils se sont massivement prononcés en faveur d'une gestion publique. Ils ont compris qu'il importait que chacun ait accès à l'eau dans des conditions identiques. Hélas, en France, les inégalités devant l'eau s'accroissent en même temps que les inquiétudes sur sa qualité et son prix. Il serait temps de s'acheminer vers un vrai service public qui aurait pour vocation de définir, avec les élus, une politique de l'eau mettant en avant la prévention, l'évaluation des besoins, la recherche de nouvelles ressources, la lutte contre les gaspillages et les pollutions. Ce service public devrait aussi permettre la mise en commun des compétences et offrir un conseil technique aux collectivités territoriales. Sa mission première serait de protéger le patrimoine naturel collectif qu'est l'eau en le faisant sortir de son aspect marchand.

Je ne peux donc souscrire, Monsieur le ministre, à vos orientations sur l'eau. La propriété et la gestion des services de l'eau et de l'assainissement doivent s'inscrire complètement dans le domaine public. Ce service public ne peut être construit à coups d'agences de l'eau de plus en plus nombreuses, au point de rendre opaque tout le système.

Je note enfin que les baisses affectent aussi la prévention des risques naturels et technologiques et des pollutions : ses crédits de recherche, malgré le plan santé environnement et le plan cancer, ne seront que de 0,82 millions d'euros, à comparer aux 236 millions d'euros alloués à l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire et à la recherche nucléaire... Quels moyens financiers et humains seront développés pour rendre effectif le droit de chacun de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé ? Les baisses touchent aussi le budget de la gestion des milieux et de la biodiversité, et celui du soutien à la politique environnementale : ensemble, ils perdent 10 millions d'euros. Seul l'Office national de la chasse et de la faune sauvage semble échapper au désastre avec une mesure nouvelle de 5 millions d'euros.

Dans ce contexte, à constater les baisses successives, les réductions d'effectifs, la transformation d'une agence en une autre, je me demande si le renforcement du pilier environnemental du développement durable est le premier souci du Gouvernement. Le développement durable est transversal par nature et pose un défi aux structures gouvernementales. il serait plus salutaire pour la démocratie que le Gouvernement assume ses conceptions libérales et ne se dissimule pas derrière des principes qui ne sont pas les siens. Avec ce budget, il montre qu'il ne désire pas relever le défi d'une vraie durabilité environnementale pour les générations futures.

Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons que refuser de voter ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste)

Mme Geneviève Perrin-Gaillard - Je veux avant tout saluer et encourager tous les acteurs sincères de terrain qui ont œuvré depuis une décennie au plan de sauvetage de l'ours dans les Pyrénées françaises, et qui n'ont pas été avares de leurs efforts, dans un contexte toujours difficile. C'est avec consternation que nous avons appris l'élimination de l'ourse Cannelle et le sort incertain de son ourson. Au-delà de ce constat d'échec, il faut réagir rapidement et tenter de réparer par une mesure budgétaire exceptionnelle ce qui a été qualifié par vous, Monsieur le ministre, et par le Président de la République de « catastrophe écologique » et dénoncé comme tel par la totalité des associations. Que l'Etat se porte partie civile, c'est bien, mais il faut agir : une ourse femelle importée coûte environ dix mille euros ! Nous attendons un geste fort et emblématique de l'Etat, au-delà des discours adressés au monde entier sur la diversité biologique : nous éviterons ainsi la honte d'un pays donneur de leçon et mauvais élève lui-même...

Seconde remarque préliminaire : les bleus sont devenus d'un hermétisme patent. Impact de la LOLF ou flou volontaire, je ne sais, mais c'est ainsi.

J'en viens au budget. L'année dernière, face à votre prédécesseur, je constatais l'écart entre le dire et l'agir de votre gouvernement, en comparant le budget de l'environnement et les propos du Président de la République et de la ministre elle-même. Je ne m'attendais pas à être encore plus déçue cette année, devant un budget qui accuse une baisse de 3,6 %...

Il semble en effet diminuer au rythme même auquel se dégrade notre environnement, ce qui est un comble. Comment ne pas dénoncer le fait que l'environnement, l'écologie un temps dite « humaniste », élément incontournable de la communication gouvernementale, soit - saisissant paradoxe - le parent pauvre du budget, en rupture totale avec le niveau de priorité que les Français accordent aujourd'hui à l'environnement ?

Certains diront qu'un budget peut baisser sans que les politiques menées soient mauvaises, qu'il s'agit de rationaliser et non de rationner ; d'autres ajouteront que d'autres ministères sont concernés et contribuent. C'est vrai ; malheureusement, ils contribuent souvent à la création de problèmes environnementaux plutôt qu'au développement durable... Considérons quelques exemples. Lors du débat sur l'énergie, le ministère de l'écologie a brillé par son silence, alors qu'était prise une décision lourde de conséquences, celle de construire l'EPR. Citons aussi la diminution drastique des crédits alloués par le ministère des transports aux PDU, hypothéquant la capacité des collectivités locales à garantir des transports en commun plus adaptés aux besoins de nos concitoyens et aux enjeux environnementaux. C'est encore le débat sur les OGM, dossier que votre ministère s'est vu confisquer au profit du seul ministère de l'agriculture. C'est aussi la décision bancale du ministre de l'agriculture concernant l'imidaclopride et le fipronil, qui n'a suscité aucune réaction de votre ministère. J'évoquerai également le peu de motivation de votre ministère à lutter contre les pollutions chimiques à travers le programme REACH, dont la France a même cherché à réduire l'ampleur ; la promotion des projets autoroutiers au détriment du transport de marchandises par le fer, tendance encore accentuée dans le budget de l'aménagement du territoire. A cela s'ajoute la faiblesse des crédits de recherches sur les énergies renouvelables : cent millions d'euros sont alloués au titre de l'efficacité énergétique et des énergies renouvelables alors que les crédits de recherche pour le nucléaire s'élèvent à 800 millions d'euros...

Ce n'est pas tout. L'ancien ministre des finances a fait échouer, malgré la volonté du ministère de l'écologie, le plan national d'allocation des quotas d'émissions de gaz à effet de serre, ce que vous tentez de masquer en affirmant qu'à bien calculer la France fera quand même mieux que prévu... C'est moins de l'optimisme que de l'illusionnisme ! J'évoquerai enfin l'abattage de deux loups dans les Alpes, dont un en zone Natura 2000, dans des conditions en contradiction avec le plan loup, piloté en réalité non par vous mais par un ministre de l'agriculture impatient, qui a d'ailleurs déclaré : « il n'y a pas de convergence entre les ministres de l'agriculture et de l'écologie»...Ceci est consternant, d'autant que cela ne résoudra pas les problèmes du pastoralisme.

Bref l'action du Gouvernement en matière écologique est claire : sous le fard de la communication, tout est sacrifié aux impératifs économiques à court terme. Votre marge de manoeuvre consiste à gérer la misère. Et quand vous faites preuve de fermeté, ce qui, dans ce contexte d'arbitrages défavorables, est tout à votre honneur, vous êtes désavoué par votre majorité parlementaire. Les débats sur la chasse, à l'occasion du texte relatif aux territoires ruraux, en ont donné une triste illustration .

Alors, que reste-t-il ? Quelques associations qui oeuvrent en comblant les lacunes des politiques publiques. Mais là encore l'Etat se désengage de leur action d'une façon choquante : de 2002 à 2005 le soutien aux associations, à l'emploi, à l'éducation, à l'environnement est passé de 9 à 5 millions d'euros... Leurs capacités d'intervention sont de plus en plus limitées, et les licenciements deviennent monnaie courante. Dire que le gouvernement Jospin avait institué le principe des conventions pluriannuelles d'objectifs, pour leur garantir une pérennité des soutiens de l'Etat ! Que reste-t-il encore ? Une charte de l'environnement pas encore constitutionnalisée et dont on n'entend plus guère parler...

Revenons à vos priorités affichées. La première concerne la lutte contre les changements climatiques et les émissions de gaz à effet de serre. Vous avez tenté de redorer un peu les ambitions d'un plan climat reporté quatre fois, avec des mesures prévoyant des conditions d'abaissement de la vitesse légale, et un système de bonus - malus à l'achat des voitures neuves ; mais Bercy vous a une nouvelle fois contré. Le volet transport en ressort presque insignifiant, de même que le volet logement. De plus il y a fort à parier que la baisse de 37 millions d'euros des crédits de l'ADEME se répercute sur le niveau d'exécution du plan climat. Quelle est cette politique qui étrangle l'ADEME, et que vous menez depuis que vous êtes au pouvoir, l'empêchant d'honorer les conventions passées avec les collectivités et surtout d'initier des projets auprès de ces mêmes collectivités sur des sujets clefs pour l'avenir comme l'énergie et les déchets ? Ici encore, le bleu étant trop abscons pour nous éclairer, je souhaiterais vous entendre sur l'avenir de l'ADEME.

Votre seconde priorité est la préservation de la biodiversité. Outre le tir des loups et des ours, comment ne pas déplorer la déliquescence du statut d'espèces protégées, l'absence d'analyse concernant la sur-pêche et la disparition d'espèces comme les anguilles, la disparition ciblée des abeilles sans aucune intervention du ministre de l'écologie ? Ce triste tableau est masqué par des crédits en hausse pour l'agrégat « protection de la nature, des sites et paysages », mais ils font suite à une baisse de 10 % dans le précédent budget. La présente hausse est principalement destinée au partenariat avec les collectivités au travers de l'incitation à la gestion durable du patrimoine naturel. Toutefois, si cette nouvelle ligne inscrit au bleu 9,499 millions d'euros en crédits de paiement, aucune information du ministère ne précise son contenu réel : pouvez-vous le faire aujourd'hui ?

Que dire maintenant de votre politique de l'eau ? Se soucier des inondations, c'est bien, mais d'autres menaces moins spectaculaires pèsent plus gravement sur la santé des Français... En février 2003, c'est-à-dire du temps de son indépendance, l'IFEN a commis un rapport sur la qualité des eaux françaises - je dis « commis » car on peut se demander si ce genre d'exercice en toute transparence et indépendance a été vraiment étranger à son changement de statut... Ce rapport a révélé la mauvaise qualité des eaux, l'importance de la pollution par les pesticides, et le manque de connaissances sur les effets synergiques entre différentes molécules. Constat réaffirmé en octobre 2003 : la pollution aux pesticides dépasse largement les seuils dans 57 % des eaux souterraines. Des travaux de recherche ont démontré le rapport croissant entre cancer et pesticides. Or la lutte contre le cancer est l'un des trois chantiers présidentiels ; et une étude de la Commission européenne sur huit pays a montré que plus de la moitié des fruits, légumes et céréales contiennent des résidus de pesticides. En 2003, une mission d'information parlementaire avait préconisé une redevance sur les intrants azotés afin d'accroître la contribution financière des agriculteurs à la lutte contre la pollution de l'eau par les nitrates : ce serait une application du principe pollueur-payeur que la charte de l'environnement chère au Président est censée consacrer. La Cour des comptes a d'ailleurs critiqué sévèrement une politique jugée plus curative que préventive, dénonçant le fait que les ménages contribuent pour 84 %, et les agriculteurs pour 1 % seulement, à la prise en charge du coût induit pour la dépollution de l'eau. Elle y voit une rupture évidente de l'égalité des citoyens devant l'impôt et une méconnaissance du principe pollueur-payeur.

Ces constats conduisent à juger insuffisant le programme national de réduction des pollutions par les produits phytosanitaires, dont les crédits baissent d'ailleurs de 80 %. En décembre dernier, nous avons appris que le cabinet du ministre de l'agriculture avait bloqué une synthèse statistique sur les pesticides, comme pour taire la délicate réalité débattue depuis 1998 dans le cadre du projet de loi sur l'eau du gouvernement Jospin. M. Gaymard semble avoir enterré définitivement le principe d'une redevance azote, contrairement à votre avis, Monsieur le ministre.

M. Michel Bouvard - Ne parlez pas de la loi sur l'eau du gouvernement Jospin !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard - Dois-je rappeler que les excédents d'azote agricole dans les sols sont estimés à 714 000 tonnes ? Votre projet de loi sur loi contiendra-t-il ou non ce genre de mesure ?

Nous ne pouvons pas voter un budget en totale contradiction avec l'urgence de la situation et des enjeux environnementaux. Nous considérons avec intérêt mais sans grande illusion la révision constitutionnelle tendant à adosser à la Constitution la charte de l'environnement, dont l'impact risque d'être atténué par la loi et surtout ramené à une peau de chagrin faute de moyens budgétaires décents (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) .

M. Yves Cochet - L'imagination de ce gouvernement pour réduire les crédits de l'environnement est chaque année plus ingénieuse ! Quel talent pour planquer sous des apparences de neutralité la diminution des moyens ! L'an dernier, on avait fait payer les agences de l'eau et budgétisé les comptes spéciaux du Trésor. Cette année, vous regardez ailleurs alors que notre maison brûle, selon la célèbre parole prononcée il y a deux ans.

De fait, Bercy diminue votre budget de 3,6 %, alors même qu'il stagnait depuis 2003. Ce budget, l'un des plus petits, est ainsi frappé de l'une des réductions les plus fortes. Voudrait-on faire disparaître ce ministère faute de moyens ?

Vous essayez de faire bonne figure en annonçant 140 millions supplémentaires par loi de finances rectificative, mais, comme l'a bien dit Patrick Braouezec, ce n'est que poudre aux yeux : on gèle des crédits en début d'année, on les récupère en fin d'année par un collectif, et on les regèle au début de l'année suivante. Quarante emplois sont supprimés à l'administration centrale et dans les DIREM. Or on ne peut pas sérieusement discuter avec des ministères bien plus forts quand on dispose de si peu de personnel.

M. Philippe Rouault, rapporteur spécial - Mais, il y a des créations nettes d'emplois !

M. Yves Cochet - 50 emplois sont annoncés pour le contrôle des installations classées. Mais 25 d'entre eux sont transférés depuis Bercy. Les 25 autres sont très insuffisants, face par exemple aux besoins chiffrés après l'accident d'AZF à Toulouse. 20 postes supplémentaires sont affichés, mais trois sont transférés à l'Equipement. Au total, le solde réel est de moins 5 emplois (Rires sur les bancs de la commission et du Gouvernement). C'est de la simple arithmétique ! Or ce n'est pas en réduisant le nombre des fonctionnaires de l'environnement que l'on peut construire un ministère neuf et puissant, alors qu'on pourrait diminuer les effectifs aux Douanes, à l'Agriculture...

M. Michel Bouvard - Les Douanes sont très utiles !

M. Yves Cochet - L'ADEME, cette année encore, est la grande perdante. Grâce à un subterfuge qui ressemble à un footing budgétaire avec cure d'amaigrissement, les crédits passent de 100 millions à 63 millions, ce qui réduit à presque rien les actions de l'ADEME. Vous justifiez cette évolution par un recentrage de l'Agence sur ses missions. Un recentrage par rapport à quoi ? L'ADEME a pour missions la protection de l'environnement et la maîtrise de l'énergie. Loin de recentrer l'Agence, il faut l'étendre, et lui donner plus de moyens, car elle est votre bras armé.

Pour la politique de l'eau, les crédits baissent de 12 %. Certains membres de l'UMP qui siègent dans des agences de l'eau s'en émeuvent. L'an dernier, les agences de l'eau avaient payé les CP de l'ADEME. 230 millions ont été ainsi ponctionnés. L'usager de l'eau a apprécié.

M. Philippe Rouault, rapporteur spécial - Vous inscriviez des crédits, mais vous ne les dépensiez pas !

M. Yves Cochet - M. Guillet vient de dire que certains crédits internationaux n'ont pas non plus été dépensés.

Crédits pour la prévention des risques et de la pollution, crédits pour la gestion des milieux et la biodiversité, soutien à la politique environnementale, tout cela, dans la même course à l'innovation organique, tombe de 59 à 49 millions. Les crédits de recherche de l'AFFSE, avec moins d'un million , ne pèsent pas lourd face aux 237 millions pour l'IRSN. Nous sommes des nains politiques dans le domaine écologique. A quoi bon se gorger de mots à l'extérieur ?

La politique climatique est inexistante, malgré quelques tentatives de votre part comme le bonus/malus, les autorisations d'émission de quotas, mais tout cela est si faible. Ce n'est pas ainsi que vous pourrez sauver les Maldives !

Ce budget de l'environnement est celui d'un gouvernement conservateur, malgré ses beaux discours et sa charte de l'environnement. Quand on construit un budget pour les riches, on ne peut pas s'intéresser aux conséquences des dégâts causés à l'environnement, dont les gens et les pays les plus pauvres font toujours les frais. Votre budget ne contribuera pas à éteindre le feu de notre maison. Nous ne le voterons donc pas (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Pierre Giran - S'il n'est pas surprenant que la politique de réduction des déficits publics se fasse sentir dans votre budget, on ne peut que se réjouir du taux de consommation record de vos crédits en 2004, qui atteint 99 %, contre 52 % ou 53 % il y a quelques années. Voilà une démonstration de bonne gestion, et aussi la preuve que des moyens accrus seraient utiles et donc dépensés.

Vous montrez par vos choix que votre ministère est celui du long terme et de la responsabilité collective. Saluons votre volonté d'honorer les engagements extérieurs de la France, en particulier dans la lutte contre le changement climatique et par la poursuite de la construction du réseau Natura 2000. Avec courage et sens des responsabilités, vous maintenez notre action dans le domaine de la prévention des risques, alors que l'amnésie atteint même les victimes, comme le montre dans mon département la difficulté à établir des plans de prévention contre les risques d'inondation.

Je formule un souhait, voire un regret. Le mot « paysage » ne figure guère dans vos orientations, et aucun de mes prédécesseurs à cette tribune ne l'a prononcé. Or le paysage, notion à la fois naturelle et culturelle, représente un élément essentiel de notre conscience nationale. Alors que la nation peine de plus en plus à s'affirmer comme un vouloir vivre ensemble, comment ne pas songer qu'elle est d'abord fondée sur une langue, une histoire et un territoire ? De Gaulle, Pompidou, Malraux, Guichard, Chirac l'ont bien compris, qui ont créé le ministère de l'environnement, le conservatoire du littoral et les parcs nationaux. Etre Français, c'est aussi faire partager au monde nos paysages d'exception, des Alpes aux Pyrénées, de la Camargue à la Vallée des Merveilles, des Cévennes à Port-Cros. La France doit défendre son exception naturelle. Or il ne semble pas que, hors l'effort particulier en faveur de Natura 2000, les crédits accordés aux parcs naturels régionaux, aux parcs nationaux et aux réserves naturelles se trouvent au niveau souhaitable.

S'agissant des crédits du Conservatoire du littoral, on ne peut se satisfaire qu'ils soient sauvés chaque année par des interventions de dernière minute alors même que les missions de cet organisme ne cessent de s'étendre.

J'espère, Monsieur le ministre, qu'une loi permettra la création de nouveaux parcs nationaux, car l'attente est très forte.

M. Michel Bouvard - C'est vrai !

M. Jean-Pierre Giran - Si la loi de 1960 n'est pas révisée à bref délai, les promoteurs des projets de Guyane, de la Réunion et des calanques de Marseille finiront par désespérer et renoncer. Au-delà du soutien que j'apporterai à votre budget, j'exprime donc le vœu que la politique du paysage soit placée au premier rang des priorités de votre ministère au cours de l'année à venir (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Jean-Pierre Blazy - Le budget du ministère de l'écologie est loin d'être à la hauteur des attentes, et la baisse de 3,6 % annoncée pour 2005, présentée comme une « rationalisation » par le rapporteur, a tout du rationnement. Elle contredit, en tout cas, les intentions affichées par le Président de la République et par le Gouvernement. Et vous n'aurez pas, Monsieur le ministre, les moyens de mener une politique environnementale répondant aux besoins, alors que nous attendons toujours la réunion du Congrès qui doit consacrer la valeur constitutionnelle de la charte de l'environnement.

J'insisterai particulièrement sur la faiblesse des moyens accordés à la politique publique d'action contre le bruit. Les crédits de celle-ci sont réduits à la portion congrue. Je reconnais que la situation n'est pas entièrement nouvelle et je n'ignore pas que l'Etat n'est pas seul à agir contre le bruit, puisque les collectivités locales y prennent part elles aussi. On conviendra toutefois que le « plan bruit » de Mme Bachelot était illusoire, puisqu'elle a gravement amputé les crédits affectés à la lutte contre le bruit. Je déplore qu'ils continuent de baisser cette année. Comment, dans ces conditions, espérer appliquer le « plan bruit » ?

Les moyens des services et des interventions de l'Etat stagnent, ce qui signifie qu'ils diminuent en euros constants. Les investissements réalisés par l'Etat au titre de la lutte contre le bruit chutent de 11 %, et les subventions de 20 %, hors ADEME et gestionnaires d'aéroports. L'indigence perdure pour les pôles de compétences, censés exister dans chaque préfecture mais dont une vingtaine seulement sont véritablement actifs. Quant à la « mission bruit » du ministère, elle ne compte qu'une dizaine de fonctionnaires et ne dispose pas des moyens nécessaires à une action efficace.

L'état d'avancement de la lutte contre les nuisances sonores aéroportuaires illustre cette pauvreté. La gestion des aides à l'isolation acoustique au voisinage des aérodromes a été transférée vers les gestionnaires de ces établissements. Certes, la nouvelle taxe sur les nuisances sonores aériennes produira des recettes estimées à 55 millions en 2005, mais ce montant est très insuffisant pour assurer le financement de l'insonorisation de tous les logements inclus dans les nouveaux plans de gêne sonore, dont le périmètre vient d'être élargi. Seuls 8 800 logements par an pourront être insonorisés puisque, selon l'ACNUSA, il faudra 1,1 milliard pour insonoriser les 150 000 logements concernés. Avec le produit actuel de la taxe, il y faudra vingt ans ! Le minimum serait de doubler les ressources actuelles pour y parvenir en dix ans.

Votre prédécesseur, Monsieur le ministre, a abandonné au ministère des transports nombre de ses moyens d'action contre le bruit, ce que je déplore. Cependant, le ministère de l'écologie reste associé à cette politique, ce qui est la moindre des choses. Comment comptez-vous agir pour faire évoluer le nouveau dispositif dans un sens plus favorable aux riverains ? Elargirez-vous les aides à l'insonorisation des bâtiments publics, et en particulier celle des mairies ?

Je souhaite également appeler votre attention sur le sort des commissions consultatives de l'environnement, que l'ordonnance du 1er juillet 2004 transforme, à dater de juillet 2005, en commissions consultatives des nuisances sonores aéroportuaires. Ainsi, sans aucune concertation, on a modifié leur statut et réduit leur champ de compétences. L'esprit qui avait présidé à leur création a été dénaturé : pouvez-vous agir pour obtenir le retour à la situation antérieure ?

Je maintiens que la lutte contre le bruit doit être une priorité nationale ; cela fait d'ailleurs l'objet d'un consensus. Certes, de nouveaux textes réglementaires intéressants ont été adoptés depuis un an, en particulier celui qui concerne les deux-roues. En ma qualité d'ancien président du conseil national du bruit, je sais les difficultés que rencontre le ministère de l'environnement lorsqu'il doit négocier avec les autres ministères pour faire évoluer la réglementation dans un sens favorable à l'action contre les nuisances sonores. Mais les besoins demeurent tels que de nouvelles initiatives sont nécessaires. Les prendrez-vous ? Je ne doute pas de la sincérité de votre engagement personnel, Monsieur le ministre. Mais vous avez hérité de Mme Bachelot un « plan bruit » plus virtuel que volontariste et il vous faut maintenant redresser la barre. Je crains qu'avec ce mauvais budget vous ne puissiez appliquer en 2005 ce qui aurait dû l'être. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Marcelle Ramonet - Les enjeux du budget de l'écologie et du développement durable sont nombreux, et l'on ne peut se limiter à une lecture pessimiste du projet que vous nous soumettez. Une vision plus offensive commande de tenir compte des actions prioritaires voulues par le Gouvernement et du périmètre du ministère, dont vous souhaitez qu'il se recentre sur ses missions essentielles. C'est en effet notre responsabilité première que de remédier aux atteintes à la santé et à l'environnement et de maîtriser la consommation des ressources naturelles tout en faisant cesser les dégradations multiples à l'environnement. Ces préoccupations trouvent leur traduction dans les priorités de votre budget. Ainsi, le plan « climat » doit nous permettre de respecter nos engagements internationaux. S'agissant des énergies renouvelables, je me réjouis des mesures fiscales adoptées il y a quelques jours pour inciter à l'usage des biocarburants mais je souhaite que, pour faire face à l'accroissement constant de la demande énergétique, nous nous penchions enfin sur l'hydroélectricité. Le budget que vous nous présentez, Monsieur le ministre, permettra par ailleurs d'amplifier l'action en faveur de notre patrimoine naturel ; à cet égard, l'augmentation de 25 % des crédits destinés à accompagner la montée en puissance du programme Natura 2000 est une mesure essentielle. L'action du Conservatoire du littoral est tout aussi importante et je souhaite que vous éclairiez notre assemblée sur l'engagement de l'Etat à ce sujet.

Elue de Quimper, je suis sensible à la prévention des inondations ; je me félicite donc de la hausse des crédits de 19 %. L'installation du service central d'hydrométéorologie renforcera considérablement cette prévention, ce dont chacun se réjouira. Grâce aux différents plans d'action gouvernementaux, nous disposons désormais des outils de prévention des risques technologiques et naturels et de lutte contre les pollutions. Ainsi, il y a près d'un an, le plan d'action contre le bruit était dévoilé devant le Conseil national du bruit que je préside. Je suis particulièrement satisfaite que vous poursuiviez cette politique, qui requiert moyens et volonté.

S'agissant de la gestion des déchets, les principes énoncés dans la loi de 1992 n'ont pas produit leurs effets. Les causes de cet échec sont multiples mais l'on ne peut passer sous silence le coût du service public de traitement des déchets, qui a doublé en dix ans. Pourtant, une action d'envergure s'impose. La situation de la Bretagne donne un ordre de grandeur des besoins : chaque année, la région doit traiter 1,2 million de tonnes d'ordures ménagères, 1,5 million de déchets industriels banals, 180 000 tonnes de déchets industriels spéciaux et 10 000 tonnes de déchets toxiques. Cette montagne de déchets constitue un risque pour l'environnement, même si la Bretagne a su, peut-être plus vite qu'ailleurs, recourir au tri sélectif et à la valorisation des déchets. Quelle sera, Monsieur le ministre, votre action en la matière.

J'observe enfin, avec satisfaction, que vous engagez une refonte de la politique de l'eau, qui appelle la clarification du rôle des différents acteurs. Nous pourrons débattre, au début de l'année prochaine, du renforcement du rôle des intervenants locaux, mais aussi des agences de l'eau, des schémas d'aménagement et de gestion des eaux ainsi que de la lutte contre les pollutions diffuses. J'aimerais quelques indications sur les orientations que vous comptez retenir (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Alain Gouriou - Je voudrais appeler votre attention sur le phénomène de prolifération des algues vertes sur les côtes de Bretagne. Après deux années de relative stabilisation, 2004 a atteint des records que l'IFREMER et le centre d'étude et de valorisation des algues ont expliqués par la présence de phosphates et de nitrates et par des conditions optimales de lumière et de température dans nos baies peu profondes. Cette pollution a commencé à prendre un tour catastrophique dans les années 1970. Il est aujourd'hui établi que l'énorme majorité des marées vertes de Bretagne est due aux nitrates d'origine agricole, même si les rejets des stations d'épuration et des systèmes d'assainissement individuels y participent aussi. Plusieurs de vos prédécesseurs sont venus constater la gravité de l'infection, mais le remède reste à trouver.

Cette lèpre affecte des parties de plus en plus étendues du littoral armoricain. Baies de Lannion, Saint-Brieuc, Paimpol, Douarnenez, j'en passe... La marée verte recouvre chaque année plusieurs milliers d'hectares d'estran supplémentaires ! L'image de la Bretagne, déjà souillée par les marées noires et les nappes phréatiques empoisonnées, est atteinte. Un éditorial du Monde titrait : « la Bretagne outragée ». Il s'agit en effet d'un désastre écologique, qui crée aussi de graves difficultés économiques. L'économie régionale est menacée dans ses points forts. La fréquentation touristique de certaines stations a été réduite à presque rien. Des entreprises d'hôtellerie ont cessé leur activité. Des résidences ont perdu une grande partie de leur valeur. Les ostréiculteurs, conchyliculteurs, artisans pêcheurs sont menacés. L'agriculture elle-même est touchée, son modèle ultra productiviste est rejeté par nombreux exploitants ! Le ramassage des algues représente une charge insupportable pour les petites communes, même si les conseils généraux en prennent à leur compte une grande partie. Le département des Côtes-d'Armor a ainsi ramassé plus de 30 000 tonnes par an depuis 2002 - ce qui est loin du total des algues échouées ! Le stockage de ces énormes masses pose également problème, même si elles peuvent être épandues ou mélangées en compost.

Quel ministère, quel organisme - environnement, agriculture, mer, recherche ? - prendra enfin en charge ce problème ? Les mesures relatives à la maîtrise des pollutions d'origine agricole ou aux contrats de bassin versant méritent sans doute d'être encouragées, mais d'autres efforts doivent être engagés. N'est-il pas temps de modifier un modèle économique aussi négatif ? N'est-il pas possible d'expérimenter d'autres formes d'exploitation, réduisant l'utilisation des engrais ? Chacun des ministères concernés renvoie la balle aux autres. Pourtant, l'Etat est responsable lorsqu'il ne fait pas respecter ses propres réglementations, et la Cour de justice européenne, le commissariat général au plan et la Cour des comptes ont dénoncé sa passivité. Comment envisagez-vous d'éradiquer ce fléau qui touche un littoral encore reconnu comme un de nos plus beaux patrimoines naturels ? Nous regrettons sincèrement de ne pas trouver dans votre budget la volonté ni les moyens de faire face à cette catastrophe. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Paul Chanteguet - La préservation de la biodiversité et du patrimoine naturel fait partie de vos priorités. Vous avez indiqué que le Gouvernement, pour respecter les engagements internationaux de la France, notamment la convention internationale sur la diversité biologique et les directives européennes, avait engagé une stratégie nationale qui visait à stopper la perte de biodiversité d'ici à 2010, tout en favorisant une gestion durable des territoires. Cette stratégie avait été annoncée par votre prédécesseur en février, mais nous attendons toujours les éléments opérationnels de mise en œuvre qui devaient être présentés en juin. Aucun plan d'action, dans votre budget, sur l'agriculture, l'urbanisme, les infrastructures linéaires, la mer, les espèces envahissantes ou menacées... Seul apparaît un plan d'action sur le patrimoine naturel, objet principal de l'intervention de la direction de la nature et des paysages.

Si les crédits de cette dernière augmentent de 11,6 %, nous devons déplorer la baisse, comme en 2004, des crédits affectés aux parcs nationaux. La dotation du conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres diminue, elle, de 17 %, mais le CIADT du 14 septembre a heureusement décidé de l'abonder de 8 millions. Quant aux crédits consacrés aux réserves naturelles, nous n'en savons rien ! Nous craignons qu'ils ne poursuivent la baisse constatée en 2004. Enfin, le réseau Natura 2000 est un élément clef de la politique de diversité biologique et paysagère. La progression des crédits qui y sont consacrés, après la baisse de 2004, est encourageante.

Il est d'autres outils qui participent à cette politique : les 44 parcs naturels régionaux par exemple, qui s'étendent sur plus de 13% du territoire. Contrairement aux parcs nationaux, ce ne sont pas des sanctuaires naturels, mais des territoires d'expérience pour le développement local des espaces ruraux habités. Le concept de développement durable résume assez bien leur logique : on y recherche une synergie entre protection de la nature et du patrimoine, développement économique et solidarité sociale. Le président de la fédération nationale des parcs, Jean-Louis Joseph, a rappelé la constante inquiétude des responsables des parcs pour leurs crédits : ils aimeraient que leurs ressources relèvent de la fiscalité, et que leurs moyens d'action soient ainsi pérennisés. Ils réclament également une loi pour ces parcs, et souhaitent une approche transversale, qui tienne compte de leur originalité. Les élus concernés demandent un texte refondateur, qui donne aux parcs régionaux toute leur place dans le développement durable du territoire.

Enfin, en période de rigueur budgétaire et de transferts de compétences, certains craignent un abandon aux régions de la politique des parcs. Or, il n'y a pas de politique de préservation des espaces, en particulier privés, sans contractualisation et sans mesures financières. Nous étions favorables à l'inscription dans la loi de finances pour 2004 de l'exonération totale de la taxe sur le foncier non bâti pour les propriétés situées dans une zone Natura 2000 faisant l'objet d'un contrat de gestion. Nous regrettons donc que la loi sur le développement des territoires ruraux, qui reprend cette disposition et l'étend aux zones humides à fort enjeu patrimonial, n'ait toujours pas été adoptée définitivement. La deuxième lecture par le Sénat n'ayant toujours pas eu lieu, on peut craindre que ces mesures ne soient toujours pas appliquées en 2005. Les élus des zones humides n'admettent pas, non plus, de ne pas bénéficier, comme le Marais poitevin, d'une indemnité compensatoire de handicap naturel.

Monsieur le ministre, malgré vos propos rassurants, votre volonté de bien faire et quelques avancées, nous ne pensons pas que votre budget permette d'atteindre les objectifs de la politique de protection de la nature. Nous voterons contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Philippe Tourtelier - Le budget est toujours un moment de vérité : il permet de faire le tri entre les déclarations d'intentions et la volonté d'agir. Vous avez déclaré devant le Comité 21, Monsieur le ministre, que l'écologie ne vivait pas politiquement, ce qui était un problème car en politique, le rapport de forces était pour beaucoup dans l'avancement des dossiers. Or, nous avons l'impression que le rapport de forces n'est pas en votre faveur, comme en témoignent les arbitrages récents, qui sont pour vous autant de renoncements. En matière énergétique, depuis votre entrée en fonction, vous multipliez les déclarations d'intention. Mais vous butez sur la réalité du rapport de forces au sein de la majorité.

Vous avez déclaré, toujours devant le Comité 21 : « L'écologie n'est ni de gauche, ni de droite. » C'est discutable et, pour paraphraser Coluche, je dirai simplement que si l'écologie n'est pas de gauche, elle est encore moins de droite ! (Sourires)

2005 sera l'année des rendez-vous décisifs pour votre crédibilité. Quoique responsable du plan climat, vous étiez absent lors de la première lecture de la loi d'orientation sur l'énergie. Le lendemain, vous étiez aux côtés du ministre de la justice au cours du débat sur la charte de l'eau. Serez-vous présent pour la deuxième lecture sur l'énergie, ce qui vous permettrait sans doute d'accepter nos amendements sur la prise en compte des coûts environnementaux dans les comparatifs des prix de revient des diverses énergies ?

Nous avions aussi proposé d'insérer un chapitre « énergie et effet de serre » dans la loi sur les responsabilités locales, afin d'impliquer les collectivités territoriales dans ce combat. L'utilisation du 49-3 n'ayant pas permis de poursuivre la discussion, il reste la deuxième lecture de la loi énergie, pour concrétiser ces propositions.

Par ailleurs allez-vous, pour assurer le développement des éoliennes, obtenir la suppression du plafond de 12 mégawatts ? Vous vous souciez, c'est normal, de leur impact paysager. Proposez-vous de maintenir l'avis conforme de la commission des sites pour les permis de construire, au risque d'un blocage définitif ? Comment gérez-vous le paradoxe qui fait des sites les mieux ventés, donc les plus rentables, les plus exposés du point de vue environnemental. En fait, entre l'avis conforme de la Commission des sites et votre procédure d'appel d'offres qui privilégie le prix, vous bloquez de fait l'éolien terrestre.

S'agissant toujours des énergies renouvelables, pourquoi vouloir supprimer l'avantage fiscal pour les inserts de cheminées, en totale contradiction avec les objectifs du plan climat et du plan national santé-environnement ? En effet, l'insert, en évitant l'usage des combustibles fossiles, contribue à la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre et émet moins de polluants que les cheminées ouvertes. Pourquoi remettre en cause quatre années de travail de l'ADEME et des principaux équipementiers français, qui ont élaboré le label de qualité « Flamme verte ». Alors, allez-vous proposer de rétablir cet avantage fiscal ?

Un mot, enfin, de votre souci, louable, de suivre l'efficacité de vos politiques par des tableaux de bord. J'en ai pour ma part suggéré deux, afin d'une part de comparer l'affectation des crédits de la recherche pour le nucléaire et pour les énergies renouvelables, et d'autre part de calculer le coût réel des diverses énergies en incluant les externalités. Nous disposerions ainsi de véritables comparaisons de prix entre les énergies et nous pourrions fonder nos politiques industrielles sur des critères d'avenir et affecter plus judicieusement nos moyens de recherche.

Nous voici revenus à votre budget. Vous avez déclaré que vous ne vouliez pas de taxes, mais seulement des mesures incitatives. Mais vous savez qu'elles sont très insuffisantes dans le domaine du logement et du transport.

Pour faire passer un budget en régression, vous annoncez un complément en loi de finances rectificative. C'est, hélas, cohérent : avant le gel des crédits, le budget virtuel... Vous nous avez assurés, à propos de l'ADEME, avoir « sur 130 millions d'euros un engagement de non-gel par le Premier ministre ». Mais sera-t-il en situation de tenir sa promesse jusqu'à la fin 2005 ?

Nous ne saurions nous satisfaire de ce budget insuffisant, qui faute de vous donner les moyens de vos ambitions, ne sert guère la cause de l'écologie et du développement durable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable - Vous présenter pour la première fois un projet de budget est un honneur et un moment d'émotion. Je salue à cette occasion le travail remarquable accompli par les présidents Méhaignerie et Ollier ainsi que par les trois rapporteurs. Nous avons travaillé ensemble dans un esprit de dialogue et de concertation. Je remercie également l'ensemble des orateurs pour la qualité et la pertinence de leurs interventions. Je me réjouis bien sûr du soutien des groupes UMP et UDF et je salue les discours toniques mais exempts de polémiques des groupes de l'opposition.

Je souhaite préciser dans un premier temps comment je vois ma mission. Aujourd'hui, les enjeux écologiques sont majeurs pour l'avenir de la planète tout entière et la lutte contre le changement climatique est le plus essentiel. Il convient de conduire en parallèle deux approches complémentaires : une écologie de proximité et une écologie globale. L'écologie de proximité, c'est celle de notre quotidien, dans nos lieux de vie. Elle concerne la qualité de l'air, la lutte contre le bruit, la protection de la nature et des paysages, le traitement des eaux et la gestion des déchets. Elle a une forte dimension sociale dans la mesure où les plus défavorisés subissent les plus fortes nuisances dans leur environnement.

C'est sur cette écologie que se sont concentrés les efforts des trente dernières années. C'était, et cela demeure une nécessité, mais le combat pour l'écologie a lieu aussi à une autre échelle. L'écologie globale prend à bras le corps la question du réchauffement climatique et celle de la biodiversité. Mme Perrin-Gaillard et M. Lassalle ont évoqué la catastrophe que nous avons vécue cette semaine. L'activité humaine est la principale origine de ces maux. Nous ne pouvons pas laisser les catastrophes naturelles se multiplier et le niveau de la mer augmenter, nous ne pouvons pas accepter l'altération continue des milieux et la disparition de milliers d'espèces chaque année.

Je partage le souci de M. Guillet que la France honore ses engagements internationaux et agisse en faveur de l'institution d'une organisation des Nations Unies pour l'environnement. Je serai attentif aux contributions volontaires que doit apporter le ministère des affaires étrangères au PNUE.

Aujourd'hui, il n'est plus possible d'attendre, il faut agir. Pour cela, trois principes me guident depuis sept mois. Le premier est le devoir d'alerte car je préfère l'écologie qui prépare, celle qui gère à l'avance les conséquences de nos comportements à celle qui est condamnée à réparer. Il faut ensuite donner un cap à notre développement durable, c'est à dire mettre progressivement fin à la société du tout pétrole. Troisième principe, mobiliser l'ensemble des citoyens, qui doivent s'approprier les valeurs écologiques et faire de l'écologie un réflexe quotidien. C'est ainsi qu'elle ne sera plus une contrainte mais une chance et un des fondements du progrès social.

Ce budget a été construit au service de ces orientations stratégiques, il traduit des choix politiques forts. Si l'Etat n'agit pas seul, son rôle est déterminant pour assurer la sécurité des citoyens, par la prévention des risques naturels ou industriels ; pour préserver la nature, les espèces et les milieux, qui, dans notre pays, sont souvent exceptionnels ; pour inciter l'ensemble des acteurs - autres ministères, collectivités territoriales, entreprises, citoyens à s'impliquer davantage. Tout cela doit contribuer à concilier, voire à réconcilier, l'écologie et l'économie.

Le contexte général de ce projet de loi de finances est celui d'un effort collectif pour assainir les finances publiques. Avec une diminution de crédits de 3,6 %, l'effort de mon ministère pour maîtriser la dépense publique est substantiel. Toutefois, un abondement sera proposé en loi de finances rectificative à hauteur de 130 millions pour l'ADEME, de 8 millions pour le conservatoire du littoral et de 3 millions pour l'office national de la chasse et de la faune sauvage. Il s'agit donc essentiellement de soutenir l'ADEME, relais local incontournable de mon ministère, qui se trouve dans une situation difficile, puisqu'elle doit faire face à plus de 300 millions d'engagements pris entre 2000 et 2002 et non couverts. En lui ouvrant 200 millions d'autorisations de programme, le gouvernement s'engage aussi pour les prochaines années.

Ainsi, le ministère sera doté en début d'année de 966 millions de crédits ce qui conduit à une prévision de consommation de près d'un milliard, très légèrement supérieure à celle de 2004. Grâce à nos efforts de bonne gestion, les crédits seront consommés à près de 99 % à la fin de l'année, alors que ce taux n'était que de 45 % en 2001.

M. Philippe Rouault, rapporteur spécial - Exact !

M. le Ministre - Les moyens d'engagement se monteront à 836 millions d'euros, soit une progression de 1,05 % - et même de 8 % pour les seules autorisations de programme, ce qui est de bon augure pour les années à venir.

Le ministère bénéficiera de 20 créations nettes d'emplois : 50 emplois sont créés pour le contrôle des installations industrielles et 10 pour la prévision des crues cependant que 40 sont supprimés en application du principe qui veut qu'on ne remplace que la moitié des agents partant à la retraite. L'effectif total sera de 3 650 agents.

Mais, comme Mme Perrin-Gaillard l'a dit, les moyens budgétaires ne sont pas tout : il y a aussi beaucoup à attendre des citoyens, qu'on doit inciter à adopter des comportements plus écologiques. Je souhaite que le Gouvernement et le Parlement se penchent sur ce point en veillant au développement d'instruments de régulation, fiscaux ou autres.

J'ai voulu organiser ce projet de budget autour de cinq grands thèmes d'action. Le premier de ceux-ci est la lutte contre le changement climatique, priorité majeure pour tous ceux qui veulent préserver notre mode de vie et celui des générations à venir. Le plan climat, que j'ai présenté le 22 juillet, doit permettre à notre pays d'atteindre d'ici à 2012 les objectifs fixés par le protocole de Kyoto, voire de faire mieux : il s'agit de réduire chaque année de 13 %, soit de 72 millions de tonnes, nos émissions de gaz à effet de serre. Des actions phares ont été lancées : dans le secteur des transports, la production de biocarburants doit tripler d'ici à 2007 et, dans celui de l'habitat, les ménages bénéficieront à partir du 1er janvier prochain d'un crédit d'impôt de 25 % pour l'achat de chaudières à condensation et de matériaux d'isolation et de 40 % pour l'achat d'équipements utilisant des énergies renouvelables. Ce crédit d'impôt représentera pour l'Etat un manque à gagner de 200 millions d'euros, qu'il conviendrait en bonne justice d'ajouter à ce budget...

Au passage, je rappelle à M. Tourtelier qu'il est de tradition que les projets de loi sur l'énergie soient défendus par le ministre en charge de l'industrie, dont ce sujet relève.

Monsieur Rouault, nous travaillons avec la Direction générale des impôts à une définition des équipements susceptibles d'être concernés par les crédits d'impôt dont je viens de parler. Ceux qui utilisent le bois-énergie devraient entrer au nombre des équipements utilisant des énergies renouvelables ; quant aux inserts de cheminée, ils devraient bénéficier du crédit de 25 % au même titre que les appareils de régulation du chauffage.

Madame Perrin-Gaillard, le CIADT du 18 décembre 2003 a décidé de créer une Agence de financement des infrastructures qui devrait accélérer le passage du fret de la route au rail.

Dans le secteur de l'industrie et de l'énergie, le système d'échanges de quotas d'émissions de gaz à effet de serre permettra de plafonner les émissions des entreprises les plus polluantes.

Madame Ramonet, l'énergie cinétique des vagues n'est certes pas à négliger même si nous devons en ce domaine nous préoccuper de l'impact environnemental. Notre pays exploite depuis plus de trente ans l'usine marémotrice de la Rance, qui produit de l'électricité à un coût très compétitif, mais il existe aussi des projets de recherche et de développement, portant sur les hélices sous-marines - ainsi un projet « Hydro-Helix » qui, avec le soutien de l'ADEME, devrait permettre d'installer prochainement un « démonstrateur ». Enfin, nous allons organiser avec les industriels de l'énergie marémotrice une table ronde afin d'étudier les moyens de développer celle-ci.

Au total, ce sont 40 millions d'euros qui seront consacrés à cette action contre le changement climatique, au lieu de 26 cette année. S'y ajouteront 40 millions d'euros pour la recherche sur les véhicules propres.

J'en viens au deuxième thème d'action : la préservation de la biodiversité. L'objectif, à terme, est d'arrêter la dégradation des milieux écologiquement les plus riches et, dans le cadre d'une stratégie nationale, des plans d'action seront présentés au comité interministériel du développement durable, puis validés avant la fin de l'année. Concerné au premier chef, mon ministère coordonnera leur application, mettant un accent tout particulier sur le plan d'action « patrimoine naturel ». Après dépôt d'un amendement du gouvernement, ce sont plus de 70 millions d'euros, contre 61 en 2004, qui seront affectés au soutien d'actions partenariales et contractuelles pour la gestion des espaces naturels. L'un des grands objectifs sera d'achever la mise en place du réseau Natura 2000 avant la fin de 2006.

Je rassure Mme Kosciusko-Morizet et M. Giran : la politique des paysages figurera en bonne place dans ce plan d'action « patrimoine naturel ». Notre projet en ce domaine consistera aussi bien à préserver la bonne qualité écologique des territoires qu'à organiser le suivi, au moyen notamment d'observatoires et d'un atlas des paysages.

Les crédits des réserves naturelles ne baisseront nullement en 2005 : les dépenses ordinaires et les crédits de paiement seront portés de 11,7 à 13,4 millions d'euros ! Quant à la dotation des parcs nationaux, Monsieur Giran, si elle revient de 33,6 à 32,6 millions, c'est qu'elle intègre les gains de productivité. Mais les moyens d'investissement seront maintenus. Je souhaite que le projet de loi relatif à ces mêmes parcs puisse vous être soumis avant la fin du premier semestre de 2005, de manière à être voté avant la fin de l'année.

Monsieur Lassalle, s'agissant de la directive Habitat, un dialogue approfondi a été engagé avec les élus et tous les acteurs concernés sur plus de 800 sites et ces travaux ont d'ores et déjà abouti pour 300 d'entre eux à des solutions négociées. Ainsi des communes dont les marais étaient en voie d'enfrichement ont pu trouver une réponse à leur problème.

M. Michel Bouvard - Vision idyllique !

M. le Ministre - Non. Je connais les réalités locales aussi bien que vous, ayant moi-même monté un dossier !

Je compte par ailleurs beaucoup sur deux incitations économiques décidées récemment : l'exonération de taxe sur le foncier non bâti dans les zones humides et les sites Natura 2000, votée dans le cadre du projet sur le développement des territoires ruraux, et l'éligibilité au FCTVA des dépenses exposées par les collectivités pour des travaux réalisés sur les terrains du Conservatoire du littoral. Cette dernière mesure fera l'objet d'un amendement gouvernemental, conformément aux décisions du CIADT du 14 septembre.

Madame Ramonet, un groupe de réflexion a été créé sur la question des ressources du Conservatoire du littoral : les avantages et les inconvénients de chacune des possibilités, y compris celle d'une fiscalité environnementale, seront soigneusement évaluées et la décision sera arrêtée en 2005, en concertation avec les parlementaires.

Troisième thème d'action : la rénovation de la politique de l'eau. Avant la fin de l'année, un projet vous sera soumis en vue de simplifier et de clarifier le mode de financement. Il posera en outre pour objectif de parvenir en 2015 à un bon état écologique, conformément à la directive-cadre. Il visera à adapter les services publics d'eau potable et d'assainissement pour une gestion plus transparente et environnementalement plus efficace, ainsi qu'à lutter contre les pollutions diffuses - notamment par l'affectation aux agences d'une TGAP phytosanitaire, par un contrôle technique des pulvérisateurs, par la traçabilité des produits et par le maintien d'une redevance nitrates sur les élevages. Enfin, il tendra à renforcer la gestion locale dans le cadre des schémas départementaux d'aménagement et de gestion des eaux. La future loi visera à mettre fin aux financements croisés entre l'Etat et les agences de l'eau. Cela explique qu'un amendement du Gouvernement ramène les crédits consacrés à l'eau de 112,7 à 100,4 millions d'euros. Mais je tiens à rassurer M. Rouault. Son souhait de voir les crédits rééquilibrés en faveur de la politique de l'eau sera pris en compte. Je souligne qu'il ne s'agit nullement d'un désengagement de mon ministère, mais d'un recentrage sur sa mission première, à savoir garantir la qualité de l'eau et prévenir les risques d'inondations. Ces « décroisements » financiers, évalués à 20 millions d'euros en 2005, concernent essentiellement des travaux de restauration et d'aménagement des cours d'eau, vocation première des agences de l'eau. En revanche, les moyens consacrés à la prévention des inondations sont portés de 40 à 48 millions d'euros, soit une augmentation de 20%. Dix postes seront par ailleurs créés dans les services de prévision des crues.

Quatrième thème : la prévention des risques technologiques et naturels et la prévention des pollutions. La prévention est bien entendu au cœur des missions de mon ministère, et je rejoins évidemment Jean Lassalle sur ce point : mieux vaut prévenir que réparer. Dans le domaine des risques technologiques, il convient d'élaborer des plans de prévention des risques autour des 626 établissements classés Seveso. Cinquante postes seront créés pour renforcer le contrôle des installations industrielles. Comme M. Rouault l'a noté, les chiffres du « bleu » budgétaire sont erronés : grâce à ces recrutements, entre 2004 et 2005 le nombre d'inspections passera de 27 000 à 29 000 et le nombre d'arrêtés complémentaires de 3 800 à 3 900.

De même, l'accent sera mis sur la prévention des risques naturels au travers des plans de prévention des risques naturels. Les crédits qui y sont consacrés passeront de 9,2 à 12,3 millions. La population sera mieux informée des risques encourus.

La mise en œuvre du plan national de lutte contre la pollution de l'air, décidée en novembre 2003 à la suite de l'épisode exceptionnel de pollution à l'ozone de l'été 2003, sera poursuivie.

D'une manière générale, je m'attellerai aux actions prévues dans le plan national Santé-Environnement. A ce titre, les moyens, hors recherche, de l'Agence française de la sécurité sanitaire environnementale, seront quasiment doublés, à 3,2 millions d'euros, et ceux de l'INERIS accrus de 4,5 millions pour atteindre 27 millions.

Plusieurs orateurs, dont Mme Ramonet et M. Priou, m'ont interrogé sur le projet de loi relatif aux déchets. Celui-ci s'articulera autour de cinq axes : la limitation de la production de déchets, la structuration des filières des produits en fin de vie, l'amélioration de la gestion territoriale des déchets, la mobilisation des énergies autour d'objectifs communs, enfin la réforme du financement du service public des déchets. Sur ce dernier point, Madame Kosciusko-Morizet, le Gouvernement a mis en place un groupe de travail associant des parlementaires, qui s'est encore réuni récemment. Sur la question du mixage redevance/taxe d'enlèvement des ordures ménagères, les discussions n'ont pas encore abouti. En revanche, elles ont avancé sur les modalités de recouvrement de la redevance.

S'agissant de la politique de lutte contre le bruit, évoquée plus particulièrement par M. Blazy et Mme Ramonet, présidente du Conseil national du bruit, j'indique qu'au 1er janvier prochain, le volet bruit de la TGAP sera remplacé par la taxe sur les nuisances sonores aériennes. En ce domaine, une place plus importante doit être accordée à la concertation locale et la situation particulière de chaque aéroport mieux prise en compte. La TNSA rapportera 55 millions d'euros en 2005 alors que la taxe en vigueur n'avait rapporté que 17 millions en 2003 et 34 en 2004. Les progrès sont donc significatifs. Par ailleurs, 8 000 logements pourront bénéficier chaque année d'une aide à l'insonorisation contre 3 300 auparavant. 500 crèches et 500 salles de repos d'écoles maternelles seront également mieux insonorisées, grâce à une aide conjointe de l'Etat et des collectivités. Au total, les moyens de la politique de lutte contre le bruit sont portés de 74 à 85 millions d'euros.

Avant de conclure sur ce quatrième thème, je tiens à rassurer M. Priou : la baisse de 5,2 % des crédits de la prévention des risques industriels n'est qu'apparente. Il convient en effet d'exclure la part ADEME consacrée à la lutte contre les pollutions. Hors ADEME, ces crédits passent de 60,4 à 62,5 millions, en augmentation de 3,5 %.

Cinquième thème : la promotion du développement durable. Les quatre priorités précédentes y contribuent bien évidemment, ainsi que le projet de loi constitutionnelle relatif à la Charte de l'environnement. Un délégué interministériel au développement durable, M. Christian Brodhag, a été placé auprès de moi par délégation du Premier ministre. Les crédits consacrés au développement durable seront stabilisés à hauteur de 15 millions d'euros en 2005. Il s'agit surtout d'impulser, d'animer et de coordonner des actions au niveau interministériel. M. Guillet a exprimé des inquiétudes sur le manque de personnel de la mission interministérielle à l'effet de serre. Celle-ci fonctionnera à terme avec 14 personnes. Si cet effectif est sensiblement inférieur à celui dont disposent les services analogues en Allemagne et en Grande Bretagne, depuis son rattachement à mon ministère, la MIES peut bénéficier de l'expertise de la direction de la prévention des pollutions et des risques, et rejoindra en 2005 la délégation interministérielle au développement durable.

Depuis le dépôt du projet de loi de finances, j'ai souhaité redéployer à la marge les moyens des domaines « eau » et « nature/paysage ». Malgré le décroisement des financements avec les agences de l'eau, la pression sur le domaine « eau » était trop forte. En effet, en 2004, les agences de l'eau avaient apporté, par le biais d'un fonds concours, un soutien aux programmes de prévention des inondations et aidé à la mise en œuvre de la directive-cadre. Mais cet apport tout à fait exceptionnel ne sera pas renouvelé. J'ai donc déposé un amendement tendant à augmenter de 5 millions les crédits de l'eau, dont trois pour la prévention des risques d'inondation et deux pour la surveillance de la qualité de l'eau. Ce redéploiement ne se fera pas au détriment de la préservation de la biodiversité, puisque le domaine « nature/paysage » verra ses crédits augmenter de plus de 7 %.

Mon objectif est aussi de retenir les actions les plus pertinentes et de rechercher partout où cela est possible des gains de productivité. C'est pourquoi j'ai décidé d'ouvrir cinq chantiers dans le cadre de la politique volontariste du Gouvernement en matière de réforme de l'Etat.

Premier chantier : la réorganisation de l'administration centrale, avec la création d'une délégation interministérielle au développement durable et d'un secrétariat général. Pour autant, les effectifs globaux de l'administration centrale diminueront. Deuxième chantier : le rapprochement des DIREN et des DRIRE dans le cadre de pôles régionaux, et l'expérimentation d'une direction commune aux deux services dans quatre régions en 2005. Troisième chantier : le renforcement des partenariats avec les DDE et les DDAF. Une circulaire est en cours de signature pour mettre en place dans chaque département un service unique de police de l'eau, en lieu et place des quatre à huit services aujourd'hui chargés de cette police. Quatrième chantier : la définition de nouvelles modalités de tutelle et de pilotage des établissements publics. Cinquième chantier enfin : la réforme de la gestion publique, à travers la LOLF, à l'application de laquelle mon ministère est déjà bien préparé. M. Rouault regrette l'absence de mission « écologie et maîtrise des risques » dans la nouvelle nomenclature...

M. Michel Bouvard - Il a raison !

M. le Ministre - Je comprends ce regret, mais c'est à l'issue d'une réflexion approfondie que le Gouvernement n'a pas retenu cette proposition. Il serait dangereux de mélanger les compétences et les moyens de la prévention des risques et ceux de la gestion des crises, qui relèvent de la sécurité civile. En effet, cela reviendrait à donner toujours la priorité au court terme, c'est-à-dire la gestion des crises. Pour ce qui est de la création d'un programme « eau », je m'interroge également. Elle pourrait être opportune, la nomenclature actuelle, qui comporte trois programmes, diluant les responsabilités.

Je mentionnerai enfin deux orientations générales en matière de conduite du changement : une valorisation et une évaluation systématiques des actions de mon ministère, et un rattrapage dans la transposition des directives. Tels sont les principaux éléments de la politique que je souhaite, grâce à votre appui, mener en 2005. Nous pourrons ainsi faire un pas de plus pour l'écologie - et dans ce domaine il n'y a pas de petit pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF)

QUESTIONS

M. Michel Bouvard - Monsieur le ministre, après avoir rappelé que l'écologie de proximité avait été une nécessité, et pris la peine de préciser qu'elle restait utile, vous nous avez longuement entretenu de l'écologie globale. On excusera peut-être les élus de terrain de s'intéresser autant à l'écologie de proximité. Vous avez évoqué les programmes de lutte contre le bruit, surtout à proximité des aéroports. Je souhaite parler des bruits terrestres, et de la chute libre des crédits qui leur sont consacrés. Ainsi, pour les investissements exécutés par l'Etat pour l'identification et le classement des voies bruyantes - chapitre 57-20, titre V - on est passé de 2,3 millions d'euros en 2002 à 1,35 en 2004 et 1,2 pour 2005. Pour la résorption des points noirs des transports terrestres, au chapitre 67-20, article 40, les autorisations de programme sont passées de 8,6 millions d'euros en 2002 à 3,25 en 2004 et 2,6 cette année... Il est clair que la lutte contre le bruit des transports terrestres n'est pas pour vous une priorité.

Pourtant certaines démarches, engagées depuis des années par les élus, avaient fini par aboutir début 2002 à un accord entre les ministères de l'environnement et des transports en vue de réduire le bruit le long des infrastructures ferroviaires. Je suis l'élu d'une vallée où passent 10 % du trafic de marchandises de tout le pays à destination de l'étranger, avec 140 trains quotidiens - dont on ambitionne de doubler le nombre... Dans le même temps vous avez choisi de supprimer les crédits prévus pour les campagnes d'isolation phonique le long des voies dans la vallée de la Maurienne. Ce qui a suscité la vive inquiétude des populations, et risque de faire échouer les opérations de protection : vos crédits étaient en effet la contrepartie nationale de crédits européens - alors même que le Premier Ministre affirmait que les crédits faisant l'objet de contreparties nationales pour des crédits européens devaient être attribués en priorité !

Ma question est donc simple : quelle est votre politique en matière de résorption des bruits sur les infrastructures de transport routier ? Comment comptez-vous remplir les obligations de votre ministère dans le cadre des accords passés avec le ministère de l'équipement ? Quant au bruit que subissent les populations alpines qui vivent près des infrastructures ferroviaires, et qui ont droit elles aussi à un environnement de qualité, comment comptez-vous faire qu'elles puissent enfin le trouver ?

M. Jean-Pierre Blazy - Très bien.

M. le Ministre - En 2002, 24,6 millions d'euros d'autorisations de programme ont été délégués aux régions pour subventionner les travaux d'insonorisation de plus de quatre mille logements exposés au bruit des infrastructures routières et ferroviaires nationales. C'est l'insuffisance de la dotation en crédits de paiement du ministère de l'Écologie qui a conduit mon prédécesseur à donner instruction aux préfets de faire remonter les autorisations de programme au niveau national ; elles excédaient d'ailleurs largement les moyens de paiement sur les années à venir. Mon prédécesseur a par ailleurs décidé de privilégier les opérations d'insonorisation dans les zones urbaines sensibles ; la réalisation de l'ensemble des opérations identifiées sur trois ans, de 2004 à 2006, nécessitera un budget de 9,9 millions d'euros. Je suis conscient de la situation difficile que vivent beaucoup de nos concitoyens en matière de bruit, mais les crédits de paiement sont ce qu'ils sont.

Par instruction du 25 mai 2004, j'ai demandé aux préfets d'achever dès 2005 le classement sonore des infrastructures de transport et le recensement des opérations prioritaires d'insonorisation - points noirs en zones urbaines sensibles et super-points noirs hors de ces zones - ainsi que la détermination des financements nécessaires. Enfin les crédits mobilisés par mon ministère pour le financement de protections de façades complètent les crédits affectés au financement d'opérations globales de traitement à la source, dans le cadre des contrats de plan Etat-régions, par le ministère de l'Équipement, RFF et les collectivités locales.

M. Thierry Mariani - Ma question porte sur la prévention des inondations du Rhône, problème important particulièrement dans mon département du Vaucluse, mais aussi dans les départements voisins de l'Ardèche, du Gard et des Bouches-du-Rhône. En janvier 2004, le Premier Ministre nommait le Préfet de la région Rhône-Alpes Préfet coordonnateur de bassin Rhône-Méditerranée-Corse pour assurer la gestion des crédits de réparation des digues du Rhône et de ses affluents endommagés par les dernières crues de décembre 2003, ainsi que pour élaborer une stratégie globale de prévention des inondations du Rhône. C'est donc à lui que revient désormais la responsabilité « d'imaginer l'avenir du fleuve ». Ce qui signifie avant tout trouver des solutions pour anticiper les inondations, en limiter les effets, et prendre en compte les inquiétudes et les attentes des populations sinistrées. Je pense plus particulièrement aux communes de Lapalud, Lamotte du Rhône et Mondragon, inondées cinq fois depuis 1992, ou encore à la commune de Caderousse qui, à chaque crue, voit le nombre de ses sinistrés augmenter.

Le déplacement du groupe d'études parlementaire sur les inondations, mené par son Président Max Roustan le 29 avril dernier, a clairement montré que le Plan de Prévention des Risques des Inondations, principal outil pour améliorer les conditions de sécurité pour les personnes et les biens, n'est pas mis en œuvre dans ce sens, et qu'il est temps de prendre en compte la situation réelle des sinistrés. En effet, au delà de la gestion urbanistique du risque telle qu'elle ressort des PPRI, les élus locaux et les sinistrés souhaitent également que cet outil débouche davantage sur la mise en oeuvre de solutions techniques de prévention et de protection.

Je me fais aujourd'hui l'écho de la Confédération des Riverains du Rhône et de ses affluents, qui regroupe quelques 6900 familles au sein de 46 associations, et souhaite des réponses concrètes à leurs légitimes préoccupations. Entendez-vous, Monsieur le ministre, donner des instructions afin de restaurer le lit du vieux Rhône pour laisser s'écouler l'eau dans les plaines de Donzère-Mondragon ; de supprimer la végétation sur les berges et les îles ; de rouvrir des bras morts ; et d'enlever des dépôts de sédiments derrière les ouvrages de navigation ? Des solutions existent pour minimiser les inondations et les dommages aux biens et aux personnes : il faut désormais les mettre en oeuvre.

M. le Ministre - La prévention des risques liés aux inondations est une priorité nationale. Les choix budgétaires pour 2005 permettent de poursuivre une politique dynamique de prévention après sa relance en 2002. Celle-ci se décline suivant trois axes. D'abord la réduction de la vulnérabilité : la loi sur les risques du 30 juillet 2003 renforce l'information des populations, facilite la mise en œuvre des PPR et élargit le champ d'intervention du fonds Barnier en matière de réduction de la vulnérabilité. Ensuite, l'amélioration de l'alerte des populations : le service central d'hydrométéorologie et d'appui à la prévision des inondations, ou SCHAPI, est installé à Toulouse ; sa mission est de renforcer le lien entre la météorologie et l'hydrologie, et d'accompagner la réforme des services de prévision des crues. A l'horizon 2006, ces services devront généraliser la prévision des crues et élaborer une carte de vigilance analogue à celle de Météo France. La mise en œuvre de programmes de prévention des inondations dans 42 bassins prioritaires mobilisera plus de 500 millions d'euros de fonds publics, dont 170 apportés par l'Etat, avec pour objectif de développer une action globale à l'échelle des bassins versants retenus.

Quant au bassin du Rhône, le préfet coordonnateur de bassin est chargé de coordonner la mise en place des crédits d'urgence mobilisés par l'Etat à la suite des crues de décembre dernier : ils s'élèvent à 24 millions d'euros, dont 13,4 sont déjà mobilisés, cependant que 6,4 le seront avant la fin de l'année. Ainsi, moins d'un an après les dramatiques événements de l'hiver dernier, 80 % des crédits d'urgence auront été mobilisés. Le préfet est par ailleurs chargé de l'élaboration et de la mise en œuvre de la stratégie de prévention des inondations sur le Rhône et ses affluents ; son élaboration se fera dans la plus grande concertation, et j'ai bien pris en compte les éléments que fournit votre intervention. Un comité de pilotage associant les conseils généraux et régionaux concernés a été constitué, ainsi que des comités locaux associant notamment les riverains et les élus locaux.

Je souhaite comme vous que ce programme soit mis en œuvre au plus vite. Du fait de ma détermination, les effectifs de la DIREN de bassin - qui assiste le préfet dans cette tâche - ont été renforcés, et mon ministère a mis 8 millions d'euros à la disposition du préfet pour accélérer l'engagement des premières actions. Je suivrai ce dossier avec la plus grande attention.

M. Michel Bouvard - Monsieur le ministre, permettez-moi de vous dire combien votre précédente réponse ne peut me satisfaire. J'ai bien compris que la seule priorité pour vous était les zones urbaines sensibles, et que la vallée de la Maurienne - qui n'est pas classée en ZUS mais en zone de revitalisation rurale - n'était pas une priorité, même si elle concentre 10 % du trafic ferroviaire de marchandises vers l'étranger. J'en prends acte, au nom des habitants que je représente ; ce grave recul en matière de protection contre les bruits ferroviaires ne peut évidemment entraîner mon adhésion au projet de budget que vous présentez.

Ma seconde question éclairera peut-être ma position à ce sujet. Elle concerne le coût des politiques de réintroduction des prédateurs. Autant je déplore, comme Jean Lassalle, le triste événement survenu hier dans les Pyrénées, autant il y a lieu de s'interroger sur le coût de ces politiques, et sur les risques écologiques qu'elles entraînent. Dans les massifs et les vallées de montagne, l'élevage pastoral concourt pleinement au maintien de la biodiversité et à la prévention des risques naturels. Les sols qui ne sont plus pâturés sont menacés d'éboulement, les paysages se ferment, des plantes risquent de disparaître. Le retour de prédateurs disparus parfois depuis très longtemps peut poser problème, surtout lorsqu'il entraîne le départ des alpagistes, ce qui est le cas dans plusieurs secteurs alpins. La politique de soutien aux prédateurs menée par votre ministère, alors que l'argent est rare et qu'il est difficile de financer certaines actions prioritaires pour la population, a un coût. Quelles sommes sont-elles globalement consacrées par le pays à la gestion du loup dans le massif alpin ? Un chiffre de 3,2 millions pour 50 loups a été avancé. Je pense qu'il est au-dessous de la réalité. Combien coûte la réintroduction du loup dans les Alpes au contribuable français ?

M. le Ministre - Nous avons eu des éléments chiffrés apportés par la commission d'enquête parlementaire présidée par M. Estrosi. En 2004, près de 3,4 millions ont été inscrits, dont 2 millions consacrés à la protection et au soutien du pastoralisme. L'indemnisation des dommages représente moins de 600 000 euros, et le soutien à l'indispensable activité pastorale est un souci constant de notre politique à l'égard des grands prédateurs. La moitié de ces sommes fait l'objet d'un cofinancement européen à hauteur de 50%.

M. Michel Vaxès - En avril, je vous ai déjà interrogé sur l'anomalie que constitue l'assujettissement à la TGAP des produits d'exploitation utilisés dans les centres techniques d'enfouissement de déchets banaux. Vous m'aviez répondu qu'en application de l'article 266 sexies du code des douanes, les déchets inertes admis dans un centre de stockage de déchets ne sont pas assujettis à la taxe dans la limite de 20 % du tonnage total des déchets admis. Mais vous parlez de déchets inertes quand je parle de produits d'exploitation, sur lesquels ne porte pas l'article 266 sexies.

Je réitère donc ma question. En effet, l'article L. 541.1 § II du code de l'environnement fait apparaître que ce n'est pas la nature d'un produit qui permet de le considérer comme déchet, mais son utilisation. Au reste la Cour de justice des communautés européennes, dans un arrêt du 11 septembre 2003, indique qu'un produit ne peut être qualifié de déchet si sa réutilisation est certaine, et si cette réutilisation apporte un avantage économique à son détenteur. Les produits d'exploitation utilisés dans les centres techniques d'enfouissement ne peuvent donc pas être considérés comme des déchets. Votre interprétation conduirait la France à être condamnée par la Cour européenne . En attendant, elle favorise le développement de décharges sauvages et représente une dépense indue et exorbitante pour les contribuables locaux. Confirmez-vous l'interprétation du service des douanes ?

M. le Ministre - Je regrette que vous ne m'ayez pas transmis la question au préalable, car elle est extrêmement technique. Faute d'avoir pu la faire examiner par mes services, je ne peux ce soir que vous répondre comme précédemment sur ce problème important, que je rencontre moi aussi dans mon département. Avant la création de la TGAP, les déchets inertes utilisés sur le site de la décharge pour le remblaiement et la couverture du centre étaient exonérés de la taxe sur la mise en décharge. L'instauration de la TGAP n'a pas donné lieu à une prise en compte du cas particulier de ces déchets inertes, ce qui a suscité des contentieux et des mécontentements. Pour corriger la situation, la deuxième loi de finances rectificative pour 2002 a modifié l'article 266 sexies du code des douanes, de telle sorte que les déchets inertes admis dans un centre de stockage ne sont pas assujettis à la TGAP dans la limite de 20% du tonnage total.

Nous regarderons de plus près votre argumentation pour vous répondre plus précisément.

M. Jean Lassalle - Je vous ai déjà interrogé sur la directive Habitat. Certains vont me trouver un peu rasoir...

M. Michel Bouvard - C'est pourtant une bonne question !

M. Jean Lassalle - ...mais comme le débat n'a pas eu lieu depuis quinze ou vingt ans, il faut bien que je le commence, et j'en parlerai aussi souvent que je pourrai. Cette directive concernera 20% à 25% du territoire. On pourrait dire que ce n'est pas excessif. Sauf que la forêt de Fontainebleau ou le bois de Boulogne ne sont pas concernés. En revanche, dans ma circonscription peuplée de braves Béarnais, qui n'avaient rien demandé, qui possèdent des paysages fabuleux qu'ils entretiennent, 90% du territoire sont classés. Nos braves Basques et Béarnais ont été surpris puis désappointés, car après avoir délibéré en masse pour s'opposer à cette démarche, voilà-t-il pas que M . le préfet, qui est pourtant gentil garçon, s'est mis à les classer d'office...

M. Michel Bouvard - Cela existe ailleurs, et cela continue !

M. Jean Lassalle - En effet. Et cela pose un problème de démocratie. Alors que l'Europe est l'espace le plus démocratiquement abouti au monde, il y a de quoi s'interroger. Lorsque nos 300 communes délibèrent pour conclure que c'est tellement bien que nous préférons le laisser aux autres, et que le préfet continue à vous dire non et que vous serez classé d'office, c'est ennuyeux !

Monsieur le ministre, je sais bien que vous ne pouvez pas changer la situation. Voilà deux ans que j'essaie d'avoir une entrevue avec M. le Président de la République. Si vous pouviez m'aider, je vous le revaudrais, car je crois qu'il n'a pas bien compris ce qu'il en est. Les campagnes ont voté massivement pour lui, et elles se sentent abandonnées. On veut nous transformer en réserve d'Indiens. M. le ministre m'a dit tout à l'heure qu'il me convaincrait de l'intérêt de la directive. Peut-être, au début, se laisse-t-on entraîner par l'euphorie, mais au bout du compte ce n'est plus nous qui détenons la maîtrise de notre destin, c'est la directive cosignée par l'Etat français. Elle a pour unique objectif la protection, et tout ce qui peut la gêner doit disparaître, y compris l'homme. Ces 25 % du territoire, si fragiles, si déshérités, méritent un meilleur traitement. Si le Président de la République ne me reçoit pas, l'excellent avocat que j'ai trouvé me conseille de saisir la Cour européenne des droits de l'homme, parce que l'homme est exclu de cette directive. C'est ce que je vais faire. Pourtant, pourquoi ne pas tous nous réunir pour évaluer la directive ? La directive oiseaux a plombé tous nos débats pendant quinze ans, elle nous a mis tous les chasseurs à dos, elle a fait battre les socialistes deux fois, nous une fois. Il faudrait donc essayer d'y voir clair. Comment imaginer que, par des mécanismes machiavéliques, on puisse s'apprêter à reprendre aux campagnes françaises les territoires que les maquisards se sont battus pour défendre ? Faites ce que vous pouvez, Monsieur le ministre, pour éviter aux Roumains et aux Polonais le sort que l'on veut nous faire, et pour nous sauver nous-mêmes ! (M. Michel Bouvard applaudit)

M. le Ministre - Le programme Natura 2000 a été mal lancé, c'est vrai, et certains d'entre nous avons en mémoire des directives adressées par les préfets à des maires, par lesquelles il les informaient sans aucune concertation préalable que telle proportion du territoire communal allait être classée en zone Natura 2000. Mais la procédure a été révisée pour impliquer davantage les édiles et prendre leur avis. Progressivement, la situation s'est détendue, et là où l'on accepte de s'asseoir à une table, les débats, apaisés, permettent de progresser ensemble. Mieux : ceux qui se sont lancés dans l'aventure se rendent compte des effets constructifs de Natura 2000. La concertation s'est poursuivie en 2004 en vue de la contractualisation de la gestion de 800 sites qui englobent 8 000 communes. Les premiers contrats ont été signés en 2003 et en 2004.

Cela dit, je ne nie pas que des difficultés demeurent. Mais la loi sur le développement des territoires ruraux permettra une plus forte implication des acteurs locaux ; de plus les communes concernées bénéficieront, à partir de 2006, de l'exonération de taxe sur le foncier non bâti. Sur le fond, je le répète, ceux qui se sont lancés ont constaté que ce qui paraissait n'être qu'une contrainte offre aussi des opportunités de développement.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard - Très bien.

Mme Marcelle Ramonet - La préservation de la biodiversité suppose en particulier la protection des espèces animales. On se félicitera donc des arrêtés pris par votre ministère en août 2004 pour encadrer les élevages d'agrément par des particuliers et les établissements professionnels d'élevage et de vente d'animaux sauvages. Mais qu'en est-il des entreprises de spectacles ?

M. le Ministre - Ainsi que vous l'avez souligné, le ministère s'emploie à moderniser la réglementation relative aux établissements qui présentent des animaux au public. Le texte de ces arrêtés a été élaboré en concertation avec les professionnels et les associations concernées, avec l'objectif d'assurer à la fois le bien-être des animaux et la sécurité des personnes. Dans le même esprit, une réflexion est engagée depuis le printemps pour fixer les caractéristiques qui doivent prévaloir dans les établissements mobiles que sont les cirques. J'ai prévu de recevoir les représentants de professionnels avant que l'arrêté ne soit pris, au cours des prochains mois.

M. Victor Brial - Le contrat de développement signé entre l'Etat et le territoire des îles Wallis et Futuna pour la période 2000-2004 prévoit une dotation de 991 000 euros de votre ministère. Mais, les crédits versés n'ont atteint que 10 % de l'enveloppe prévue, le ministère attribuant aux difficultés rencontrées avec le logiciel ACCOR la non-délégation, en 2002, d'une dotation de 296 000 euros et d'une autre de 74 000 euros. Et bien que vous m'ayez assuré, Monsieur le ministre, que ces crédits seraient délégués rapidement, la collectivité n'a toujours rien reçu. Puis-je avoir la garantie que l'Etat respectera ses engagements, et que ces crédits non affectés feront l'objet d'un rattrapage dans les meilleurs délais ?

M. le Ministre - Je sais l'importance des besoins d'assainissement à Wallis et Futuna...

M. Jean-Pierre Blazy - En Polynésie aussi !

M. le Ministre - ...et aussi que les crédits prévus à ce titre dans le contrat de développement n'ont pas été versés intégralement, en raison de difficultés administratives et budgétaires. Un effort de rattrapage significatif sera fait en 2004 et en 2005.

M. le Président - Nous en avons terminé avec les questions. J'appelle les crédits inscrits à la ligne « Ecologie et développement durable ».

ETAT B - TITRE III

M. Philippe Rouault, rapporteur spécial - La commission a adopté l'amendement 51 de notre collègue Michel Bouvard, qui tend à ouvrir le débat sur le financement de 50 emplois nouveaux.

M. Michel Bouvard - La commission a adopté cet amendement à la quasi-unanimité. Il ne s'agit de remettre en cause la politique de sécurité des installations classées mais d'appeler votre attention, Monsieur le ministre, sur l'excessive lenteur de la procédure d'instruction des dossiers, qui paralyse les initiatives - pour aboutir parfois à la conclusion qu'il n'y a pas lieu à classement... Surtout, la commission a voulu réaffirmer sa volonté d'une politique globale de prévention des risques, plus efficace et mieux coordonnée avec les élus mais aussi avec les industriels, qui se plaignent de la multiplication des procédures. Ainsi éviterait-on des risques de délocalisation. Pourquoi votre ministère a-t-il refusé le principe d'une meilleure synergie avec les ministères de l'industrie et de l'intérieur, qui y étaient, eux, disposés ? Enfin, il a paru inopportun à la commission de laisser croître les effectifs des services centraux (M. Blazy proteste) alors que les services locaux du ministère manquent bien souvent de personnel.

M. le Ministre - Je comprends tout l'intérêt d'une réflexion sur les points que vous avez évoqués, mais il n'en reste pas moins que l'amendement tend à supprimer certains des crédits du ministère.

M. Michel Bouvard - Crédits des services centraux !

M. le Ministre - Vos informations ne sont pas exactes : les effectifs des services centraux ne vont pas augmenter mais baisser au contraire, puisque le budget prévoit la suppression de quarante postes et que j'ai annoncé au personnel que l'effort concernerait d'abord ces services. Votre amendement touche en réalité au cœur même de la politique de mon ministère en matière de sécurité. J'ai bien entendu vos observations sur la politique de renforcement qui est menée, mais c'est une question bien différente de celle des moyens !

M. Michel Bouvard - Il s'agit d'un amendement d'appel !

M. le Ministre - Et je suis heureux que le débat ait lieu ! Cependant, en termes de moyens, l'augmentation est une réelle nécessité, qui fait consensus depuis plusieurs années. Plusieurs rapports, dont deux de la Cour des comptes, ont recommandé une mise à niveau des moyens. La sécurité est une priorité non seulement pour mon ministère, mais pour l'ensemble du Gouvernement. Depuis la catastrophe de l'usine AZF, en 2001, des mesures ont été prises pour assurer une meilleure prévention des risques technologiques. Malgré le contexte, mon budget augmente d'ailleurs fortement dans ce domaine. Un plan de renforcement du contrôle des installations à risque a été arrêté dès septembre 2002 et le Parlement a adopté en 2003 la loi relative à la prévention des risques et à la réparation des dommages, dont la mise en œuvre exige une intervention accrue de l'inspection des installations classées. Si elle n'avait pas les moyens d'exercer les missions qui lui sont confiées par la loi, c'est la responsabilité de ses agents qui serait engagée !

Le plan de renforcement prévoit 400 emplois supplémentaires entre 2004 et 2007 - pour moitié des créations et pour moitié des redéploiements. Je note à ce propos que l'origine de ces nouveaux emplois ne change rien au fait que mon ministère compte au final plus de postes ! Pour 2004, 100 emplois ont été votés, et 50 sont encore prévus pour 2005. Ce renforcement permet d'augmenter le nombre de visites d'inspection - 27 000 en 2004, soit 7,5 % d'augmentation - et de mettre en œuvre les nouvelles dispositions de la directive Seveso 2 et de la loi risques, qui constituent des avancées notables pour la sécurité.

Bien entendu, l'inspection est engagée aussi dans un programme de modernisation, qui prévoit une amélioration de la productivité et du service rendu aux entreprises. Il faut être très attentif à cet aspect des choses.

Malgré les efforts déjà réalisés, les effectifs de l'inspection doivent encore être accrus, pour que la politique de prévention dont nous avons besoin et à laquelle s'est engagé le Premier ministre puisse être menée à bien. C'est la raison pour laquelle, maintenant que le débat a eu lieu, je vous demande de retirer cet amendement.

M. Philippe Rouault, rapporteur spécial - Les nouveaux objectifs fixés aux inspecteurs des installations classées sont ambitieux et satisfaisants. Je propose donc, si M. Bouvard est d'accord, de retirer cet amendement.

M. Michel Bouvard - Je suis d'accord, puisqu'il s'agissait d'un amendement d'appel. Je regrette néanmoins que vous n'ayez fait aucune ouverture concernant la mission interministérielle écologie et prévention des risques. Il faut prendre en compte les programmes des différents ministères qui contribuent à cette mission de votre ministère, qui correspond à une politique globale de l'Etat et devrait être traitée comme telle dans le cadre de la nouvelle nomenclature budgétaire. Je redis la grande insistance de la mission sur la LOLF et de la commission des finances à ce sujet.

M. Jean-Pierre Blazy - Elles n'ont pas forcément raison !

M. Michel Bouvard - C'est le seul point de la maquette budgétaire, avec le découpage des programmes du ministère de la défense, sur lequel nous n'avons pas été suivis. Ces points correspondent pourtant à une exigence de modernisation de l'Etat et d'efficacité des finances publiques.

Les crédits inscrits à l'état B, titre III, mis aux voix, sont adoptés.

Les crédits inscrits à l'état B, titre IV sont adoptés.

M. Jean Lassalle - Je vote pour au nom de mon groupe, mais je m'abstiens à titre personnel !

Les crédits inscrits à l'état C, titre V, sont adoptés.

Les crédits inscrits à l'état C, titre VI, sont adoptés.

M. le Président - Nous en avons terminé avec l'examen des crédits du ministère de l'écologie et du développement durable.

Prochaine séance ce matin, vendredi 5 novembre, à neuf heures trente.

La séance est levée à 1 heure 5.

              Le Directeur du service
              des comptes rendus analytiques,

              François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU VENDREDI 5 NOVEMBRE 2004

A NEUF HEURES TRENTE : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005 (n° 1800).

Rapport (n° 1863) de M. Gilles CARREZ, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

Enseignement scolaire

Rapport (n° 1863 annexe 28) de M. Jean-Yves CHAMARD, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

Avis (n° 1864 tome 8) de Mme Nadine MORANO, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005 (n° 1800).

Enseignement scolaire (suite)

Industrie, Poste et télécommunications

- Indutrie

Rapport (n° 1863 annexe 17) de M. Hervé NOVELLI, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

Avis (n° 1865 tome 7) de M. Jacques MASDEU-ARUS, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

- Poste et télécommunications

Rapport (n° 1863 annexe 19) de M. Yves CENSI, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

Avis (n° 1865 tome 9) de M. Alfred TRASSY-PAILLOGUES, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

A VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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