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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2004-2005 - 26ème jour de séance, 61ème séance

1ère SÉANCE DU JEUDI 18 NOVEMBRE 2004

PRÉSIDENCE de M. Jean LE GARREC

vice-président

Sommaire

      LOI DE FINANCES POUR 2005 -deuxième partie- (suite) 2

      FONCTION PUBLIQUE, RÉFORME DE L'ÉTAT,
      SERVICES GÉNÉRAUX DU PREMIER MINISTRE,
      BUDGET ANNEXE DES JOURNAUX OFFICIELS, SGDN 2

      QUESTIONS 20

      SERVICES GÉNÉRAUX 24

      ETAT B - TITRE III 24

      CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL 26

      PLAN 26

      ÉTAT B - TITRE III 26

      BUDGET ANNEXE DES JOURNAUX OFFICIELS 27

      SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DE LA DÉFENSE NATIONALE 27

La séance est ouverte à neuf heures trente.

LOI DE FINANCES POUR 2005 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005.

FONCTION PUBLIQUE, RÉFORME DE L'ÉTAT,
SERVICES GÉNÉRAUX DU PREMIER MINISTRE,
BUDGET ANNEXE DES JOURNAUX OFFICIELS, SGDN

M. le Président - Nous abordons l'examen des crédits du ministère de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, des services généraux du premier ministre, du budget annexe des journaux officiels et du Secrétariat général de la défense nationale.

M. Michel Bouvard, suppléant M. Georges Tron, rapporteur spécial de la commission des finances pour la fonction publique et la réforme de l'Etat - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Tron, en mission au Mexique à la demande du Premier Ministre.

Dans un souci de rationalisation, les crédits du ministère de la fonction publique et de la réforme de l'Etat passent de 223 millions en 2004 à 155 millions en 2005.

La réforme du transfert aux caisses d'allocations familiales de la gestion des prestations familiales dues aux agents de l' Etat permettra d'économiser 55 millions et près de 600 emplois. Une économie de 1,6 million sera par ailleurs réalisée grâce à la réforme de la politique ministérielle de réservation de logements pour les agents de l'Etat, qui sera reprise par les préfectures dans le cadre de la déconcentration.

Du fait de la réduction du nombre de places offertes au concours de l'ENA, la dotation de cette école baissera de 755 000 euros. Les surcoûts liés à son transfert seront couverts dans la prochaine loi de finances rectificative, mais il serait logique que les locaux parisiens soient mis en vente pour en financer une partie. La commission des finances veillera à ce que le budget de l'ENA revienne par la suite à un niveau raisonnable. En matière de formation, priorité est donnée aux questions communautaires, et la réforme du concours d'entrée portera en particulier sur la limite d'âge à 35 ans, et l'augmentation du nombre de postes au concours externe.

S'agissant des opérations de réimplantation d'administrations, 31 938 emplois sont transférés depuis 1991, et 3008 sont en cours de transfert.

La réforme du ministère passe par la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances. La mission « Direction de l'action du Gouvernement », instituée au ministère, a été divisée en deux programmes séparant moyens en personnels et moyens d'intervention, ce qui devra être revu. Neuf objectifs sont proposés, mais il faudrait recentrer le dispositif sur les priorités, telles que la mise en œuvre des stratégies ministérielles de réforme, la gestion prévisionnelle des effectifs ou le développement des technologies de l'information. Le ministère pourrait également réfléchir à la mobilité des effectifs, à la rémunération au mérite, au processus de déconcentration et à la simplification administrative.

La réforme de l'Etat est indispensable, et il faut cesser de demander toujours plus de crédits ou de fonctionnaires : 45% du budget de l'Etat leur est consacré ! Les prochains départs massifs à la retraite devraient être l'occasion de repenser notre administration.

Ce projet de budget pour 2005 prévoit de ne pas renouveler 10 % des départs à la retraite. Avec une moyenne annuelle de 76 000 départs sur l'ensemble de la fonction publique, nous devons réfléchir à une gestion prévisionnelle des effectifs et des compétences et poser la question de l'attractivité. Le ministre souhaite limiter les recrutements à 40 000 par an, mais il est dommage qu'il ne puisse estimer le nombre de fonctionnaires touchés par les mesures catégorielles.

La LOLF permet d'introduire une culture de la performance, mais la commission des finances se demande s'il ne serait pas possible de descendre le plafond d'emploi du niveau des ministères à celui des programmes et des établissements publics.

A la demande du Premier ministre, les missions des ministères doivent être réexaminées, mais tous ne jouent pas le jeu. Les ministères sociaux, ceux de l'outre-mer, de l'éducation nationale, de l'agriculture, de l'écologie doivent ainsi rattraper le niveau d'effort atteint par les autres, comme les finances ou la défense.

Les deux exercices de la LOLF et des stratégies ministérielles de réforme devraient être mieux coordonnés. Si une SMR conclut ainsi à l'abandon d'une mission d'un ministère, il faudra veiller à ce que les crédits et les personnels correspondants ne soient pas reconduits. La génération 2005 des SMR pourrait être établie selon la structure de la LOLF, par mission, programme et action, et non plus par ministère.

La rémunération au mérite est le pendant de la recherche de performance, et il faut saluer l'expérimentation qui a commencé, pour certains directeurs d'administration centrale, en juin 2004.

Le Gouvernement devrait prochainement déposer un projet de loi d'orientation de la fonction publique, sur la revalorisation du statut, et la transformation des quelque mille corps en véritables filières professionnelles.

La réforme passe encore par une meilleure gestion du patrimoine de l'Etat. Les logements de fonction des agents de l'Etat représentent une valeur locative de 1,4 milliard alors que le montant total des loyers ne dépasse pas les 30 millions. Malheureusement, la gestion de ce patrimoine dépend de chaque ministère, et ne fait l'objet d'aucune politique de valorisation.

La loi du 13 août dernier sera l'occasion de réorganiser les processus au sein de l'administration centrale comme des administrations territoriales, afin d'éviter les dérives de la période 1980-2001, où les effectifs de la fonction publique d'Etat avaient augmenté de 15 % et ceux de la fonction publique territoriale de 38 %.

En conclusion, tous les outils de la réforme de l'Etat sont maintenant réunis, et je recommande à l'Assemblée nationale d'adopter ces crédits (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis de la commission des lois pour la fonction publique - Ce débat est avant tout l'occasion de dresser le bilan de notre administration. Depuis trois ans, nous nous posons la même question : quelle fonction publique, pour quels services publics ?

Dans le contexte actuel, le traitement réservé à la fonction publique est effarant ! Alors que la fonction publique est à une période charnière de son évolution du fait des nombreux départs à la retraite, de l'évolution des modalités d'intervention de l'Etat et des transferts de compétences aux collectivités territoriales, ces crédits reflètent l'immobilisme d'un Gouvernement dont la politique se résume à une approche essentiellement comptable, sans souci d'évaluation de la qualité du service public.

L'accélération des départs à la retraite devrait au contraire inviter le Gouvernement à une politique plus volontariste - en 2012, près de la moitié des fonctionnaires présents en 2000 seront partis à la retraite ! Mais depuis trois ans, rien n'est fait pour améliorer l'attractivité de la fonction publique : au contraire, 1089 postes budgétaires ont été supprimés en 2003, 4651 en 2004, et 7188 disparaîtront en 2005. En tenant compte de l'évolution de l'emploi aidé, ce sont près de 20 000 emplois qui seront supprimés en 2005.

Victimes d'un climat de suspicion, les fonctionnaires doivent se soumettre à la loi de la concurrence et du mérite. Pis, le Premier ministre a rappelé au printemps dernier son objectif de supprimer un poste sur deux laissés vacants par les départs à la retraite !

Le ministre de la fonction publique a lui-même fixé l'objectif de réduction à 40 000 postes par an à moyen terme. C'est là une politique inquiétante. A ce jour, les non-renouvellements de postes n'ont donné lieu à aucune concertation, aucun débat parlementaire n'a été organisé. Dès lors, quel est, par exemple, le sens de la création de 1 000 emplois au ministère de l'équipement quand elle s'accompagne de la suppression de 3 186 emplois au ministère de l'éducation nationale ?

Ces mesures non planifiées lèsent ainsi l'ensemble des usagers. En omettant de fixer de grandes orientations à la réforme de la fonction publique, comme de la réforme de l'Etat, c'est l'avenir même du service public que le Gouvernement hypothèque. Un véritable débat d'orientation sur le devenir de la fonction publique et de son statut est donc plus que jamais nécessaire, et je souhaite que le Gouvernement dépose dans les semaines à venir un projet de loi d'orientation. Mais à ce jour, M. Dutreil a écarté l'idée d'une grande loi et s'est contenté d'annoncer une loi concernant essentiellement la fonction publique territoriale.

Par ailleurs, l'attractivité de la fonction publique devrait être le chantier prioritaire de tout ministre de la fonction publique. Or, tel n'est pas le cas : le Gouvernement s'est montré incapable de mener une politique salariale globale ; pire, la rémunération des fonctionnaires a baissé. Dès lors, comment inciter à rejoindre la fonction publique ? Cette année encore, aucune revalorisation n'est prévue. Le chapitre concernant les mesures générales intéressant les agents du secteur public ne sera pas doté en 2005. Par conséquent, en deux années, le traitement des fonctionnaires ne serait revalorisé qu'à une seule reprise, et de 0,5 % ! Même dans le secteur privé, dont on prétend s'inspirer, de telles pratiques n'ont pas cours. Le Gouvernement préfère multiplier les mesures indemnitaires catégorielles. Cette politique incohérente crée de très fortes distorsions entre les fonctionnaires et viole le principe d'égalité au sein de la fonction publique alors que, plus qu'ailleurs, il devrait y être la règle. En outre, le traitement des fonctionnaires est d'autant plus affaibli que la réforme des retraites les incite à des cotisations supplémentaires afin de pallier la baisse annoncée du niveau de leurs retraites. Enfin, la rémunération au mérite semble déjà un gadget à ranger au rayon des effets d'annonce du Gouvernement.

Le problème essentiel du recrutement n'est toujours pas réglé. Le nombre de postes ouverts aux concours internes est en baisse et le projet de « PACTE juniors et seniors », trop flou, ne répondra pas aux problèmes qui se posent.

Enfin, j'appelle votre attention sur la baisse des crédits consacrés d'une part à l'action sociale en faveur des fonctionnaires, et d'autre part au fonds interministériel pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique. Les crédits consacrés à l'action sociale interministérielle diminueront de 10,8 millions, indépendamment de la prise en charge du service de la prestation crèche par la CAF. Ces réductions remettent en cause la cohésion même de la fonction publique d'Etat. Faut-il donc que l'Etat devienne un des plus mauvais employeurs de France ?

Alors que la réforme de l'Etat a été largement relancée par le Parlement lors de la précédente législature, le Gouvernement actuel rechigne à associer les parlementaires à toute réflexion : nous assistons à une prolifération des mesures prises par ordonnance et donc soustraites au débat démocratique. Ainsi les administrations profitent-elles parfois des « lois habilitant le Gouvernement à prendre diverses dispositions d'ordre législatif» pour pousser des projets qu'il n'avait jamais eu l'occasion de présenter, voire pour imposer contre la volonté du Parlement des mesures que ce dernier avait pourtant rejetées.

Votre seul souci est de diminuer les charges budgétaires et d'économiser 1,5 milliard par an. Il est donc urgent de dénoncer cette politique. Une telle analyse m'a conduit à proposer à la commission des lois le rejet de votre budget, mais hélas je n'ai pas été suivi par la majorité, qui a donné un avis favorable à l'adoption des crédits.

M. Bernard Carayon, rapporteur spécial de la commission des finances pour le Secrétariat général de la défense nationale, le renseignement, l'environnement et la prospective de la défense - Je vous présente le dernier rapport spécial sur les crédits du SGDN, dernier rapport car la section budgétaire « SGDN » disparaîtra en raison de la mise en œuvre de la LOLF, et ces crédits figureront désormais au sein de l'action «Coordination du travail gouvernemental» du programme « Direction de l'action du Gouvernement ».

Le projet de budget du SGDN s'élève à 56 millions d'euros contre 50 millions d'euros dans la loi de finances initiale pour 2004, soit une progression apparente de 12,9%. Cependant, à périmètre constant, le budget ne progresse que de 5 % : le PLF propose en effet le transfert de 36 emplois au budget du SGDN et 43 emplois au budget de l'IHEDN.

Le champ d'action du SGDN s'élargit puisqu'il assurera désormais le suivi des crises nationales et internationales. Une cellule de veille et d'alerte fonctionnant 7 jours sur 7 avec l'aide de réservistes a été créée en septembre 2003. En outre, un haut responsable pour l'intelligence économique a été placé auprès du Secrétaire général. Compte tenu de la complexité et de la transversalité des enjeux, j'estime que cette fonction relève plutôt d'une structure interministérielle politique.

J'observe également que le ministère de l'économie a créé une délégation générale de l'Intelligence économique. Cette excellente initiative doit être transposée dans les autres ministères, en particuliers les ministères dits « de souveraineté ».

Le PLF propose la création d'un nouvel article au chapitre 57-03, intitulé « Intelligence économique », qui serait doté de 250 000 euros en AP et de 125 000 euros en CP. Ces crédits permettront au haut responsable de financer des études touchant à son domaine d'activité. La politique d'intelligence économique doit affirmer sa dimension territoriale vis-à-vis des PME et des PMI. Les préfets de région seront, avec les collectivités locales, au coeur de cette action coordonnée. Une expérimentation est actuellement menée dans neuf régions ; sa généralisation est prévue en 2005. En outre, des fonds privés d'investissement sont en cours de constitution pour aider les PME des secteurs stratégiques à développer des technologies performantes.

La prise en compte par l'État d'une définition large de la sécurité nationale - incluant donc la sécurité économique - doit résulter d'une impulsion politique forte, donnée par un conseil de sécurité économique placé auprès du chef de l'État, s'appuyant sur une structure permettant la déclinaison des orientations et la mutualisation des ressources publiques. Un fonds d'investissement à capitaux mixtes public-privé en constituera l'outil opérationnel. Je plaide donc pour la création d'un commissariat aux technologies de l'information, de la communication et de la sécurité dont la mission consisterait à stimuler le développement d'une filière industrielle et technologique.

La sécurité des systèmes d'information de l'administration et des services publics relève de la direction centrale de la sécurité des systèmes d'information. Le développement de la société de l'information s'accompagne d'une aggravation tangible de menaces contre lesquelles les Etats sont le plus souvent désarmés, les parades étant entre les mains d'acteurs privés. J'insiste une fois de plus sur la fonction d'audit de la DCSSI. Cette cellule est composée de six personnes, recrutées parmi les meilleurs spécialistes informatiques. Son effectif sera porté à huit en 2005 mais cela reste dérisoire au regard de la tâche qui lui incombe.

Par ailleurs, je me félicite de la création d'un centre opérationnel de la sécurité des systèmes d'information, chargé d'assurer une veille et une alerte en matière d'attaques informatiques sur les réseaux de l'Etat. Cette démarche s'inscrit dans la logique de la proposition que j'ai formulée dans mon rapport au Premier ministre consistant à créer une mission interministérielle d'expertise technique et industrielle des systèmes d'information des administrations publiques, dont le SGDN assurerait l'exécution. Je souligne que la sécurité des systèmes d'information doit être une priorité absolue pour l'Etat. L'Union européenne elle-même s'est dotée en mars 2004 d'une agence pour la sécurité des réseaux et de l'information.

En ce qui concerne la prévention des crises et l'élévation du niveau de sécurité de la population sur le territoire national, la direction de la protection et de la sécurité de l'Etat - qui sera dotée de cinq postes supplémentaires en 2005 - assure la veille opérationnelle dans ses domaines de compétence et anime les travaux interministériels relatifs aux équipements et aux moyens de lutte contre le terrorisme nucléaire, radiologique, biologique et chimique, ainsi que ceux relatifs à la prévention et au traitement d'attaques informatiques majeures sur les infrastructures vitales. Avec la création du comité interministériel aux crises nucléaires et radiologiques, le SGDN, qui en assure le secrétariat, est désormais chargé également de la mise en cohérence des mesures planifiées en cas d'accidents ou d'attentats et de veiller à la planification d'exercices dans ces domaines.

L'IHEDN, placé sous la tutelle du SGDN, doit s'internationaliser en renforçant ses liens avec les instituts étrangers. La perspective de la création d'un collège européen de sécurité et de défense, auquel l'IHEDN sera appelé à contribuer - s'il n'en devient pas le pivot -, illustre la nécessité de l'ouvrir davantage sur l'étranger. Cette démarche est déjà initiée par des contacts avec les instituts étrangers, par l'organisation de sessions internationales et par la participation d'intervenants et d'auditeurs étrangers aux sessions nationales et régionales.

L'ouverture internationale de l'Institut représente évidemment un surcoût. Aussi avais-je proposé l'an dernier de créer une fondation pour drainer les financements nécessaires.

Je me félicite que ces propositions aient fait l'objet d'une réflexion de la part de l'IHEDN, fût-elle modeste, et vous invite à adopter, à l'instar de la commission des finances, le budget du SGDN (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial de la commission des finances pour les services généraux, le Conseil économique et social, le Plan et le budget annexe des Journaux officiels - Le budget des Services du Premier ministre recouvre cinq fascicules dont le seul point commun est de bénéficier de crédits relevant du Premier ministre : les services généraux, le Conseil économique et social, le Plan, le budget annexe des Journaux officiels et le compte de commerce de la Documentation française.

Les services généraux représentent 90 % de l'ensemble de ces crédits. Ceux qui sont demandés pour 2005 s'élèvent à 829,8 millions d'euros, soit une diminution de 326,9 millions due pour l'essentiel au transfert sur les charges communes des crédits d'exonération de la redevance audiovisuelle.

J'appelle votre attention sur la pléthore de structures rattachées au Premier ministre.

M. Bernard Carayon, rapporteur spécial - Très bien !

M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial - On compte en effet, à côté des services administratifs et des instances concernant spécifiquement la fonction publique et la réforme de l'Etat, une nébuleuse d'organismes rattachés qui devraient faire l'objet d'un réexamen systématique.

La création, en juillet, du Conseil d'analyse de la société nécessite la mise à disposition de 150 000 euros. Sur ma proposition, la commission a décidé de les supprimer, car elle est opposée à la création d'un nouvel organisme dont l'utilité n'est pas démontrée.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial suppléant - Très bien !

M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial - Ce rôle devrait plutôt être assumé par le Plan. Au lieu d'ajouter donnons plus de cohérence à l'existant.

Dans ce budget des services généraux, les crédits de l'administration générale et des autorités administratives indépendantes représentent 425,8 millions, soit une augmentation de 55,8 millions. Les dépenses ordinaires concernant l'administration générale augmentent de 17 % : c'est le résultat de l'abondement des crédits d'indemnisation des victimes des législations antisémites sous l'Occupation et des actes de barbarie pendant la deuxième guerre mondiale.

Dans le cadre du programme «Administration électronique 2004-2007 », il est procédé à des transferts de crédits - 13,8 millions - et d'emplois au bénéfice de l'Agence pour le développement de l'administration électronique.

Les crédits destinés aux autorités administratives indépendantes, notamment au Médiateur de la République diminuent de 1,4 % grâce à des ajustements et à des efforts de gestion. A ce propos, le Médiateur de la République, estime qu'il faut supprimer la saisine préalable par un parlementaire ; il s'agirait d'un progrès de la démocratie directe, qui mettrait enfin la France à l'unisson de la plupart des démocraties.

L'entrée en vigueur de la LOLF fera relever l'année prochaine l'ensemble de ces crédits du programme « Coordination du travail gouvernemental » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ». Le Gouvernement a suivi les propositions de la commission s'agissant de la maquette, mais des problèmes de cohérence subsistent entre Ies deux programmes finalement retenus. Les programmes « Coordination du travail gouvernemental » et « Fonction publique, réforme de l'Etat et prospective » recoupent largement les agrégats budgétaires actuels, ce qui aboutit à une séparation de fait entre crédits de fonctionnement et crédits d'intervention. Cette logique de moyens ne permettra pas de connaître le coût complet d'une politique publique. Contraire aux objectifs de la LOLF, cette présentation devra être revue. Elle ne permet d'ailleurs pas de disposer d'indicateurs de performance pertinents. C'est pourquoi la commission souhaite que les moyens administratifs de soutien du programme « fonction publique, réforme de l'État et prospective » soient rattachés à ce programme.

L'identification d'un programme dédié aux relations avec les citoyens - qui est une véritable politique publique - serait du reste plus pertinent. L'autonomie du Médiateur, qui jouerait un rôle central au sein de ce programme, serait préservée au travers d'une action, d'une conférence budgétaire et d'une évaluation spécifiques. Il cohabiterait, comme dans le programme « coordination du travail gouvernemental », avec d'autres services administratifs et instances indépendantes.

La logique de mutualisation des moyens, favorable à l'exécutif car facilitant la gestion courante, ne doit pas remettre en cause la pertinence de l'autorisation budgétaire du Parlement, qui a accepté, avec la LOLF, une diminution de ses prérogatives au regard du principe de spécialité des crédits. L'équilibre n'est pas encore atteint en ce qui concerne les services du Premier ministre.

Les crédits demandés pour le Conseil économique et social s'élèvent à 32,9 millions, soit une augmentation de 0,46 %. Vous connaissez mon attachement à cette institution qui permet d'associer les forces vives de la Nation à la politique économique et sociale du Gouvernement. Je regrette qu'elle demeure dans la future nomenclature budgétaire une mission mono-programme, en dépit des demandes répétées de notre commission. Une mission ne saurait comporter un seul programme, encore moins une seule action. Si cette orientation était maintenue, cette mission devrait être découpée en au moins deux ou trois programmes, quels que soient les montants financiers.

Le budget du Commissariat général du Plan et des organismes rattachés s'élève à 18,5 millions, soit une diminution de 6,2 millions, en raison principalement du transfert vers d'autres sections budgétaires du CREDOC, du CEPREMAP et de l'OFCE.

Je ne reviendrai pas sur mon rapport de l'an dernier, mais j'observe qu'aucune suite n'a été donnée aux travaux de la mission d'évaluation et de contrôle sur les organismes publics d'évaluation et de prospective économique et sociale. Or, la MEC préconisait dès mai 2003 la création d'une instance indépendante d'évaluation des politiques publiques. A l'heure où le Plan ne fait plus d'évaluation, sur quels fondements peuvent bien se baser ses travaux de « prospective sur l'Etat stratège » ?

Enfin, je m'étonne de voir inscrits dans ce budget 1,1 million de crédits d'évaluation, notamment pour l'évaluation des contrats de plan Etat-régions, qui n'est plus assurée. On ne peut que le regretter quand on constate le faible taux de réalisation de ces contrats de plan.

Il serait donc bienvenu de mettre en conformité la situation budgétaire avec la réalité du travail de l'institution. Tel est l'objet d'un autre amendement que la commission a adopté à mon initiative. Ce sera l'occasion pour vous, Messieurs les ministres, de nous annoncer enfin à quelle instance le Premier ministre entend confier la mission d'évaluation des politiques publiques et le rôle conféré à la DATAR en la matière.

L'avenir du Plan demeure donc plus qu'incertain, et il est temps que le Premier ministre décide de la recomposition de l'ensemble du dispositif français d'évaluation et de prospective. Il ne semble pas, hélas, que la chance offerte par la nouvelle nomenclature budgétaire ait été saisie. L'action prospective ne sera pas rattachée au programme « Coordination du travail gouvernemental » et le Plan sera séparé du Conseil d'analyse économique ; ce n'est pas rationnel !

Les Journaux officiels connaissent une profonde mutation. Leur budget annexe s'élève, pour les services votés, à 158,7 millions, en diminution de 11,2 millions, et à 6,7 millions en autorisations de programme. La poursuite de la dématérialisation électronique des principales publications des JO a d'importantes conséquences sur ce budget, compte tenu de la baisse des travaux d'impression sur support papier au profit de l'internet et de l'accélération de la saisie des données à la source. Elle pose des problèmes d'accès au droit, avec la disparition d'un nombre important de textes en version papier, telles les nominations ou la régulation budgétaire, sans oublier les répercussions sur le fonctionnement des services et de l'imprimerie.

Je me suis rendu au siège des Journaux officiels où j'ai rencontré une direction responsable, prête à tirer profit de la dématérialisation des éditions, sans être en mesure de dresser des perspectives, une société de production, la Société anonyme de composition et d'impression des Journaux officiels - SACI-JO - soucieuse de s'adapter aux nouvelles technologies, et des salariés motivés mais inquiets pour leur avenir. Les Journaux officiels éditent plus de 40 éditions périodiques et les nouvelles technologies de communication et d'information ont conduit à une évolution considérable de leurs modes de diffusion. Depuis le 2 juin 2004, la diffusion du Journal officiel électronique est authentifiée, ce qui élargit la portée des textes législatifs et réglementaires. Parallèlement, le volume de l'édition papier diminue, réduisant d'autant l'activité d'impression.

Enfin, la saisie à la source du JO des débats parlementaires en améliore les délais de publication et a permis de cesser de faire fonctionner le dernier tube pneumatique de France. De cette coupure du cordon ombilical qui reliait les assemblées aux JO, il résulte une économie annuelle de 80 000 euros pour le Parlement. Je tiens à en féliciter les services de notre Assemblée.

Tout cela n'est pas sans incidence sur le travail des salariés des Journaux officiels. L'Etat doit s'engager rapidement pour leur donner des perspectives d'avenir, en leur confiant des travaux comme les publications des ministères et de la Documentation française. Aucune perspective sur un rapprochement entre les deux institutions n'a d'ailleurs été tracée, alors qu'une mission d'études a été lancée par le Premier ministre en février. Où en est-on ? La direction des Journaux officiels et ses salariés doivent être confortés dans leur mission de service public. Un engagement ferme doit donc être donné par le Premier ministre pour garantir l'avenir de cette institution.

Contrairement à mon avis, la commission a adopté les crédits des Services généraux du Premier ministre, du Conseil économique et social, des Journaux officiels et du Plan.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial suppléant - Elle a aussi adopté vos amendements !

M. André Chassaigne, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques pour le Plan - Le budget du plan pour 2005 confirme que le Gouvernement renonce à une vraie planification. C'est un budget d'abandon, dont les crédits baissent de 25 % . Le réseau scientifique est en partie démantelé, le budget de trois des centres de recherche qui travaillent avec le Plan étant transférés vers d'autres budgets. Vous me direz, Monsieur le ministre, qu'il s'agit d'une mesure purement technique, et que ces centres continueront de fonctionner. Sans doute, mais la pluridisciplinarité fait que, dans ce réseau, le tout vaut plus que la somme des parties.

Les crédits diminuent globalement de 25 % et la baisse touche tous les moyens de fonctionnement : moins 5 % pour les crédits...

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial suppléant - Très bien !

M. André Chassaigne, rapporteur pour avis - ....moins 3 % pour les effectifs...

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial suppléant - Très bien !

M. André Chassaigne, rapporteur pour avis - ...et, comme l'année dernière, la gestion du personnel consiste à privilégier l'emploi de contractuels au détriment des titulaires...

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial suppléant - Très bien !

M. André Chassaigne, rapporteur pour avis - ...ce qui me semble contraire à la loi relative à la résorption de l'emploi public précaire.

Quant aux crédits d'intervention, ils sont en baisse de 65 % et, à périmètre constant, de 8 %. Il en va de même des crédits de subvention, qui devraient permettre au Plan de collaborer avec des universitaires ou des chercheurs étrangers, s'ils n'étaient pas en baisse de 29 % en autorisations de programme et de 17 % en crédits de paiement... Pour justifier la baisse continue de ces crédits, le Gouvernement invoque deux arguments. En premier lieu, elle inciterait le Plan à rationaliser sa gestion courante ; mais cet argument rituel est désormais trompeur puisque, après des années de coupe successives, le Plan n'a plus de marge d'économie. Par ailleurs, il faudrait, nous dit-on, recentrer le Plan sur la « prospective de l'Etat stratège ». Je m'abstiendrai de commenter la profondeur sibylline de ce concept et me contenterai de noter que la prospective n'est crédible que si elle s'appuie sur des travaux de recherche pertinents et, donc, bien financés.

Ce budget d'abandon est regrettable, car la mutation rapide de l'économie rend plus nécessaires que jamais prévision et anticipation, c'est-à-dire planification. Or la France subit des crises plutôt qu'elle ne les prévient. Ainsi en est-il des restructurations industrielles, traitées au cas par cas, une fois la crise avérée, par des contrats de sites ou de territoires. Ainsi en est-il du « plan fret » de la SNCF, qui a tout de la restructuration dans la précipitation, puisque l'on sacrifie les axes secondaires, ceux-là mêmes qui éviteraient, à moyen terme, la congestion des grands axes. Dans chaque cas, la « politique économique » a été le renoncement à la détection, à l'anticipation, à la concertation et à la prévention, autrement dit à la planification industrielle à la française.

Le Gouvernement n'utilise pas le Plan comme le faisaient Jean Monnet et Charles de Gaulle. A leur époque, le Plan inspirait les grandes politiques structurelles de l'Etat ; à quoi servent, aujourd'hui, ses études prospectives, fort intéressantes certes, mais qui n'ont de rôle qu'incantatoire ? Le budget 2005 parachève l'abandon de l'évaluation des politiques publiques, réduisant les crédits du Plan au minimum nécessaire à l'expédition des affaires courantes et à l'évaluation des contrats de plan Etat-région. En ce sens, il dévoile la réalité dissimulée sous le discours relatif à « la bonne gouvernance ». De fait, le Gouvernement ne cesse de parler d'évaluation, de programmation et de concertation mais, au lieu de charger le Plan de cette mission dont il devrait être l'instrument naturel, il se contente de pétitions de principe. Pourtant, qui, sinon le Président de la République, déclarait, en 1996 : « dans un univers bouleversé par la mondialisation et la montée de l'exclusion, l'existence de lieux de concertation et d'évaluation des choix publics est indispensable ; le Plan doit être un de ces lieux privilégiés » ?

L'alternative à l'abandon du Plan, c'est la planification rénovée, ce que je propose dans mon rapport. L'examen du budget en commission a été particulièrement intéressant. Bien sûr, la majorité a soutenu son Gouvernement mais comme d'autres j'ai le sentiment qu'elle ne l'a pas fait sans regret. M. Ollier, le président de la commission, et mon prédécesseur dans la fonction de rapporteur spécial de ce budget, a lui-même relevé qu'il existe un consensus sur la nécessité de donner un sens à l'action de l'Etat et, pour cela, d'en passer par le Plan. Certes, la planification doit évoluer, je le reconnais volontiers ; bien sûr, les contrats de plan Etat-région, les plans sectoriels et ce qui reste des schémas de services collectifs, c'est déjà de la planification. Mais ce système de planification diffuse manque de cohérence et de lisibilité. C'est pourquoi je propose de remettre le Commissariat général au Plan au cœur de l'élaboration de toutes les politiques planifiées.

Pour les raisons que j'ai dites, ce budget d'abandon ne me paraît pas mériter d'être adopté par notre Assemblée (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste).

M. François Asensi - Le budget 2005 entend donner la priorité à la réduction des déficits ; il semble bien qu'il faille entendre par là la réduction des effectifs. Sa rédaction même fait s'interroger : le Gouvernement pense-t-il gérer une entreprise - à la mode libérale - ou un Etat ? Pour commencer, la règle du non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux est érigée en dogme. Ensuite, on parle d'une « économie importante » mise en parallèle avec 600 suppressions de postes, puis de « rémunération au mérite », voire « à la performance ».et, pour la troisième année consécutive, le Gouvernement va diminuer le nombre des fonctionnaires. Le mouvement s'accélérant, plus de 7 000 postes seront supprimés l'an prochain .

Et que dire de la rémunération des salariés de la fonction publique ? J'hésite, en effet, à utiliser le terme de « fonctionnaires », que le discours politique dominant a dévalorisé, en assimilant de manière abusive les fonctionnaires à des privilégiés. Ces salariés se sont vus consentir une augmentation de 0,5 % en 2004, après une année blanche en 2003, et tous les syndicats de la fonction publique s'accordent pour estimer à 6 % la perte de pouvoir d'achat des salariés du secteur public, depuis janvier 2000.

Le Gouvernement n'est pas de cet avis, qui établit une moyenne en tenant compte des primes et des avancements personnels de certains, sans prendre en compte la valeur du point indiciaire. Mais que représente une moyenne pour chaque salarié pris individuellement ? Et faut-il rappeler que les primes ne sont pas intégrées dans l'assiette du calcul de la pension ? Le système des primes est d'ailleurs profondément inégalitaire, et il crée entre les collectivités locales des concurrences qui ne devraient pas être. Que penser, encore, du chantage consistant à indiquer aux syndicats qu'il ne saurait y avoir de hausse des salaires sans un effort parallèle de l'administration pour se moderniser ? Par modernisation, faut-il d'ailleurs entendre un meilleur service aux usagers, ou toujours moins de services publics et de fonctionnaires ? Que dire de la rémunération à la performance, sinon qu'elle peut conduire à tous les excès ?

Le Gouvernement ne manquera pas de faire miroiter tous les bienfaits de l'actionnariat salarié aux salariés des entreprises publiques soumises à une ouverture de capital, puisque le Premier ministre estime très important de récompenser ceux qui travaillent. Je suis d'accord avec lui sur ce point, mais M. Raffarin précise que cette récompense doit notamment se traduire « par un accès plus important au capital des PME ». Certes. Mais les salariés de France Télécom qui ont eu la naïveté d'y croire ont vu leur portefeuille moyen divisé par dix et le portefeuille moyen des salariés actionnaires dans leur ensemble a été divisé par deux en deux ans !

J'en viens à l'Education nationale. M. Fillon explique que le Gouvernement a décidé du nombre d'enseignants en tenant compte de la démographie : « choix raisonnable qui permet d'adapter l'école aux besoins de la société », dit-il. Mais le rôle du ministre de l'Education nationale est-il d'adapter l'école aux besoins de la société sans tenir compte des inégalités qui se creusent ? Alors que chacun s'inquiète de la recrudescence des actes de violence commis dans les établissements scolaires, le Gouvernement supprime les emplois jeunes, réduisant du même coup la présence d'adultes aux côtés des élèves, et décide de faire entrer la police nationale dans les lycées !

Comme dans les grandes entreprises, la réduction des effectifs s'accompagne d'une cession d'actifs qui sert à renflouer les caisses. La réduction des déficits sera facilitée par le versement exceptionnel d'EDF, d'un montant de 7 milliards, pour la prise en charge des retraites de ses agents. L'année dernière, Air France était privatisé. L'année prochaine, ce seront les Aéroports de Paris. La fuite en avant continue. On préfère la politique du court terme à la continuité de l'Etat. Le Gouvernement brade les outils de la puissance publique qui garantissent la solidarité entre les territoires et entre les citoyens. Que reste-t-il de la res publica ?

Quand il se déleste de ses entreprises publiques, de ses services publics, le Gouvernement prend le masque de la vertu. Il s'engage à ce que l'Etat reste majoritaire, mais plus personne n'est dupe. Il prétend que la statut des salariés n'est pas menacé, même si, dans le cas d'Air France, le maintien du statut est explicitement provisoire. S'agissant des Aéroports de Paris, le texte est très hypocrite : il ne prévoit aucun changement de statut, alors que le personnel ne bénéficie d'aucune garantie.

C'est la cohésion territoriale qui est menacée. A l'aménagement, vous préférez le déménagement du territoire. Au prétexte de décentralisation, vous abandonnez les prérogatives de l'Etat. Des menaces pèsent sur la République une et indivisible : derrière l'autonomie des collectivités locales, c'est la concurrence entre les territoires qui s'annonce.

L'objectif de La Poste est de concentrer le tri près de ses principaux clients, auxquels elle dédie des moyens de production spécifique et des offres commerciales sur mesure, au détriment des particuliers. Sur 130 centres de tri, 70 à 80 pourraient être fermés, ce qui devrait entraîner, d'après les syndicats, la disparition de 4 000 à 7 500 emplois. Le président de La Poste cherche vainement à rassurer les usagers et les maires des communes rurales, où le guichet de poste reste dans de nombreux cas la dernière manifestation des services publics. C'est faire peu de cas des bureaux de poste, qui ne sont pas seulement des lieux où on affranchit le courrier. Le formidable mouvement en cours dans la Creuse témoigne de l'attachement de nos concitoyens aux services publics.

L'ouverture du marché de l'électricité fait craindre que l'offre se tourne en priorité vers les secteurs les plus rentables et que la péréquation tarifaire soit remise en question. Ces évolutions s'inscrivent dans la logique ultra-libérale de l'OMC et de l'Union européenne. Le projet de constitution européenne donne en effet une définition très restrictive des services d'intérêt économique général. Quant aux services non économiques, la Commission les entend comme les services rendus par l'Etat « sans contrepartie économique ». Concrètement, seules la police, la justice et l'armée restent à l'abri de la logique marchande, mais ce n'est pas le cas de la santé, de l'éducation ou de la culture. Le projet de directive Bolkenstein est des plus inquiétants.

Je ne peux que déplorer le spectacle pathétique que nous offrent les entreprises privatisées ou en voie de l'être. Je pense aux invectives de M. Spinetta, président d'Air France, à propos de la SNCF ou encore à cette situation dans laquelle EDF va devoir produire du gaz et GDF de l'électricité. Sont-ce là les vertus de la concurrence ?

Nous ne pouvons que sanctionner la politique du Gouvernement et nous voterons contre ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste)

M. Jacques-Alain Bénisti - Ce budget est en cohérence avec les réformes engagées par le Gouvernement. Parce qu'il concerne 5 millions de nos concitoyens, il est considéré avec un grand intérêt par le groupe UMP. Cette année encore, il comporte des avancées notables et je ne peux qu'approuver les propos de M. Bouvard.

Conformément à la LOLF, qu'il met en œuvre à titre expérimental, ce budget n'est présenté sous forme d'agrégats, mais de missions comportant chacune des programmes et des objectifs clairs et quantifiables, grâce à des outils de mesure de la performance que nous attendions depuis longtemps. Ce budget est centré sur les actions régaliennes de l'Etat, la simplification des processus administratifs et l'amélioration des services rendus à nos concitoyens.

Pour répondre à mes collègues Chassaigne et Asensi, il s'agit d'un budget équilibré et responsable, dans un contexte marqué par une dette publique sans précédent de plus de 1 000 milliards d'euros. C'est aussi un budget visionnaire qui prépare l'avenir en saisissant la chance offerte par les départs massifs à la retraite qui vont intervenir à partir de l'année prochaine. Il faut savoir lire un budget : s'il y a un retrait par rapport à 2004, il s'explique par le transfert aux caisses d'allocations familiales des prestations familiales dues aux agents de l'Etat.

M. Renaud Dutreil, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat - Très juste !

M. Jacques-Alain Bénisti - Ce budget, en revanche, met l'accent sur les missions sociales de formation et d'insertion que les fonctionnaires attendent depuis vingt ans. Les réformes en cours, loin de démanteler le service public, le modernisent et améliorent sa qualité. Avec ce budget, le rythme des réformes sera amplifié, faisant des nouvelles technologies de l'information un priorité. La dématérialisation des formulaires, la simplification du vocabulaire administratif, le décloisonnement des administrations, la simplification des démarches concourront à réduite les coûts et à améliorer l'efficacité de l'administration.

Cohérent, ce budget vise à optimiser la gestion prévisionnelle des effectifs et à renforcer la formation. Quand 45 % du budget de l'Etat vont au traitement des fonctionnaires, dont les effectifs ont augmenté de 23 % depuis 1980, il est indispensable de connaître précisément les évolutions à venir. Sans subordonner l'amélioration du service public à une diminution constante du nombre de postes, tout le monde s'accorde à dire, la Cour des comptes en tête et même les syndicats, qu'il faut saisir les opportunités offertes par les flux massifs de départ pour réduire le format de la fonction publique.

Les ministres ont évoqué en commission plusieurs projets de réforme très intéressants, comme la modernisation du cadre législatif et réglementaire, qui passe par une refonte des corps statutaires. Il faut refondre les grilles indiciaires, diversifier les voies d'accès à la fonction publique au bénéfice des jeunes sans formation ou des chômeurs de longue durée, et renforcer la formation continue. Ces projets, nous ne pouvons que les soutenir et nous encourageons le Gouvernement à avancer encore plus rapidement.

M. le Ministre - Nous le souhaitons !

M. Jacques-Alain Bénisti - L'ensemble des acteurs concernés ont beaucoup travaillé, depuis deux ans, à moderniser la fonction publique territoriale. Nous vous avons présenté, à plusieurs reprises, des propositions concrètes et consensuelles. De nombreux rapports ont souligné l'urgence de la réforme, appelée de ses vœux par M. Tron.

Je vous propose que le calendrier des réformes commence par celle de la fonction publique territoriale. Suite à de longs débats, il est possible de faire évoluer les règles statutaires et d'adapter les organes de pilotage. Mais nous pouvons aller plus loin avec la validation des acquis de l'expérience, l'assouplissement des règles de seuil et de quota, le développement des concours sur titres, la mobilité entre les fonctions publiques ou l'ajustement du régime spécial des fonctionnaires sur le régime général, plus favorable aux mères de famille.

L'autre point essentiel concerne les organes de gestion de la fonction publique territoriale. Un accord sans précédent a été conclu entre le centre national de la fonction publique territoriale et la fédération des centres de gestion pour clarifier leurs missions respectives et unifier la gestion des personnels. La fédération, qui regroupe 96 centres, est, juridiquement, une association. Or elle exerce des missions de service public, qui seront encore développées dans les prochains mois. Nous vous demandons donc de doter cet organe du statut de personne morale de droit public avec des prérogatives spécifiques de compétence nationale.

Nous saluons les efforts sans précédent engagés par le Gouvernement pour moderniser la fonction publique d'Etat. Nous souhaitons avec force qu'il soit fait de même pour la fonction publique territoriale. Nous ne doutons pas que vous saurez faire preuve du courage nécessaire. Pour soutenir votre action et vous donner des moyens à la hauteur de vos ambitions, le groupe UMP votera ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Pierre Dufau - Je vous félicite d'abord pour votre courage, qui confine à la témérité : il en faut pour présenter un budget aussi destructeur. Il est vrai que vous êtes un thuriféraire de l'idéologie libérale. Campé sur vos certitudes, coupé des attentes des usagers et des agents, vous vous livrez avec constance à votre obsession, tailler dans les effectifs de la fonction publique.

Et la situation s'aggrave. Après avoir supprimé 1089 emplois civils en 2003 et 4651 en 2004, vous en ferez disparaître 7188 en 2005, soit le solde des 10211 suppressions et de 3023 créations. On se croirait revenu un siècle en arrière, quand les classiques du libéralisme défendaient un Etat concentré sur ses fonctions régaliennes.

M. le Ministre - Quelle caricature !

M. Jean-Pierre Dufau - Pour le traitement des fonctionnaires, c'est à Napoléon que vous revenez, qui déjà voulait les rémunérer au mérite. Toutes les expériences en la matière on échoué, mais vous persévérez dans cette voie réactionnaire, au nom de la « productivité ». Mais pouvez-vous la définir ? Dans le privé, il s'agit de générer les profits, alors que l'administration n'a pas pour objet de gagner de l'argent mais de le dépenser pour le service des citoyens. Car dépenser ce n'est pas gaspiller, et du reste, votre gestion devrait vous inciter à l'humilité.

Vous voulez donc aller vers une rémunération au mérite et individualisée, pour mieux refuser toute revalorisation globale. Pourtant, c'est bien sur ce problème que les réunions avec les syndicats ont échoué en 2003 et encore le 8 novembre dernier. Selon le Gouvernement, la « rémunération moyenne des personnes en place » augmentant de 3 % en 2004 et 2,6 % en 2005, après avoir augmenté de 4 % en 2002 et 2003, le pouvoir d'achat, après avoir progressé de 2,2 % en 2002 et 2,1 % en 2003, devrait progresser de 1,3 % en 2004 et 0,8 % en 2005. Les syndicats répondent que c'est le cas des personnes bénéficiant du GVT et de mesures catégorielles, mais la baisse de pouvoir d'achat depuis 2000, avec une inflation à 2 %, nécessite une revalorisation générale du point d'indice. Certes, votre marge d'action est étroite. Le chapitre des charges générales destiné à financer les augmentations de rémunérations sera doté de 400 millions comme en 2004, 438,8 millions étant inscrits par ailleurs pour préparer le salaire au mérite. Et une augmentation du point d'indice coûte 820 millions pour les agents de l'Etat, 1,5 milliard pour l'ensemble des fonctions publiques. Gouverner, c'est choisir, et on connaît vos choix.

A périmètre constant, votre budget est amputé de 20 millions, suite à des redéploiements qui traduisent un recul de l'action interministérielle. En particulier, les crédits de l'action sociale interministérielle diminuent de 455 millions, suite au transfert de la prestation « crèches » à la CNAF, ce qui conduira à des centaines de suppressions d'emploi dans les services déconcentrés, surtout les rectorats. Pour les retraités, l'aide à l'habitat est supprimée, l'aide ménagère à domicile diminue de 3,5 millions ; l'aide à l'installation est amputée de plus du tiers, les chèques vacances baissent de 14 %. Quant aux investissements sociaux, ils diminuent de moitié.

M. Jacques-Alain Bénisti - C'est faux.

M. Jean-Pierre Dufau - C'est donc bien un budget de rupture. Pour la droite -et c'est une ligne de partage essentielle entre nous- il y a trop de fonctionnaires. Couper dans les crédits sociaux est bien dans votre logique. Pourtant la baisse, légère, des crédits d'intervention du fonds interministériel pour l'insertion des personnes handicapées s'explique mal, alors que le Président de la République affiche une priorité dans ce domaine.

Quant à la réforme de l'Etat, vous n'avez que ce mot à la bouche face aux médias, mais le financement interministériel ne passe que de 22,9 à 23,5 millions - encore faut-il tenir compte du transfert de 5,2 millions de l'enseignement scolaire, de l'enseignement supérieur et de la culture. En fait, ces crédits diminuent, sauf le chapitre « études et communication sur la gestion publique » qui, à 3 millions, augmente de 29,2 %... On voit vos priorités, Monsieur le ministre.

En 2004, sur les 19,9 millions du fonds pour la réforme de l'Etat, 6,7 millions ont été gelés ; en 2005, les crédits de fonctionnement de ce fonds baisseront de 29,4 %. Quid alors de cette fameuse réforme ?

Devant cette avalanche de mauvais chiffres, l'accueil glacial des syndicats n'a pas dû vous surprendre. De plus, l'article 73 du projet de loi de finances, qui transpose aux fonctionnaires le dispositif ouvrant droit à un départ anticipé pour les agents ayant commencé à travailler très tôt, conduira à de nouvelles inégalités.

M. le Ministre - Pas du tout.

M. Jean-Pierre Dufau - Dire que ce projet de budget ne nous convainc pas est un euphémisme. Non seulement le groupe socialiste votera contre, mais il n'aura de cesse d'en dénoncer les effets pervers et destructeurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Mansour Kamardine - Monsieur Borloo dénonçait hier à cette tribune « une certaine schizophrénie française qui consiste, pour justifier un discours compassionnel, à critiquer systématiquement les forces actives de ce pays ». Il a raison, vantons les mérites de ce qui réussit. C'est le cas de la mise en place des trois fonctions publiques à Mayotte, décidée le 6 juin 2003 avec l'extension à notre collectivité des quatre principales lois relatives à la fonction publique.

Depuis la publication de la loi du 21 juillet 2003, 40 réunions mobilisant 15 ministères ont permis d'élaborer 25 décrets dont une quinzaine sont en cours de signature pour publication avant la fin de l'année. Dans le même temps, 550 postes ont été créés, notamment dans l'Education nationale, pour intégrer les instituteurs mahorais.

C'est donc une véritable révolution qui s'opère sous nos yeux pour 8 000 agents dont la gestion s'effectuait depuis 30 ans par des arrêtés préfectoraux d'une légalité douteuse.

Votre ministère y a pris une grande part. Je souhaite donc vous exprimer ma gratitude et mon souhait que les décrets soient bien publiés avant la fin de l'année.

Mais une réforme en appelle une autre. C'est maintenant de la retraite de ces agents qu'il faut se préoccuper. Les réformes se font toujours avec un certain retard outre-mer. Celle de la fonction publique à Mayotte est faite désormais, et c'est le mérite du gouvernement Raffarin.

M. le Ministre - Merci de le dire.

M. Mansour Kamardine - Je vous demande d'entreprendre sans tarder celle des retraites.

Pour en revenir plus directement à votre projet de budget, Monsieur le ministre, je veux saluer votre action en faveur des jeunes sans qualification. J'y suis particulièrement sensible, étant confronté dans ma circonscription au désespoir des personnes sans emploi. A travers le PACTE, vous voulez permettre à des jeunes, mais aussi à des seniors, d'intégrer la fonction publique sur de vrais emplois de titulaires - et sans augmentation du nombre de fonctionnaires puisqu'il s'agit de postes existants -, en leur offrant la possibilité de suivre une formation alternée et d'obtenir un titre ou un diplôme. Cela permettra à la fonction publique d'assurer de nouveau son rôle d'ascenseur social, alors qu'actuellement les publics les moins diplômés sont de facto exclus par la concurrence de personnes qui sont surdiplômées pour les postes offerts. Cette politique tranche singulièrement avec celle de la précédente législature, avec ses « emplois jeunes » sans lendemain.

Pour toutes ces raisons, je voterai votre budget avec enthousiasme (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

La séance, suspendue à 11 heures, est reprise à 11 heures 15.

M. Renaud Dutreil, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat - J'ai l'honneur de vous présenter le projet de budget du ministère de la fonction publique et de la réforme de l'Etat. Notre fonction publique a besoin de moderniser la gestion des ressources humaines, le recrutement, et le dialogue social.

Permettez-moi tout d'abord de replacer cette politique générale dans le contexte de nos finances publiques. Tout d'abord, la dette représentait 14 % du budget de l'Etat en 2004, contre 10 % en 1990, et les charges des pensions des fonctionnaires augmentent de 5 % par an. Par ailleurs, la maîtrise des impôts reste un enjeu majeur pour le dynamisme de notre économie, et la priorité doit être accordée à la cohésion sociale - 1 milliard de plus en 2005 - à la société de l'intelligence - 1 000 emplois créés en 2005 dans l'enseignement supérieur - et au rétablissement du carré régalien - diplomatie, justice, sécurité intérieure et défense.

Pour faire face à ces contraintes, nous devons stabiliser la masse salariale de l'Etat, et limiter les flux de recrutement à 40 000 agents par an jusqu'en 2015, ce qui permettra de maintenir le pouvoir d'achat des fonctionnaires. Le flux massif de départs à la retraite dans les prochaines années nous donne l'occasion d'atteindre cet objectif. Nous réaliserons ainsi un gain de productivité de 2 % par an, sans pour autant nuire à la qualité du service public. En tout cas, ce n'est pas en un jour que nous redresserons la barre !

Venons-en aux réformes en cours.

S'agissant de la gestion des ressources humaines, le rapport Pochard a notamment mis en lumière les insuffisances de la gestion actuelle. La gestion des 900 corps est très coûteuse, et peu efficace, sans parler de leur cloisonnement qui entrave l'évolution professionnelle des fonctionnaires.

Enfin, la durée des carrières indiciaires est aujourd'hui trop brève : comment motiver des agents qui vont accomplir plus de quarante ans dans la fonction publique si leur rémunération ne progresse plus au-delà de 25 ans de carrière ?

Nous devons regrouper les corps dans de vastes espaces statutaires, correspondant à des métiers et à des filières professionnelles, revoir les déroulements de carrières indiciaires, favoriser toutes les mobilités entre filières, niveaux et ministères, mieux distinguer le grade de la fonction.

Chaque ministère doit pouvoir se comporter en véritable employeur et motiver ses agents. J'espère pouvoir soumettre au Parlement le volet législatif de ce projet dés 2005.

Sur cette question des ressources humaines, la fonction publique territoriale est à l'avant-garde, ce qui prouve que mon projet pour la fonction publique d'Etat est viable et efficace. Les acteurs territoriaux se sont beaucoup investis sur ce sujet ; je sais que les attentes sont fortes. Ce thème particulièrement cher à M. Bénisti doit être soumis à la concertation d'ici un mois.

Le rôle social de la fonction publique doit être revitalisé. Près du tiers des lauréats des concours de catégorie C de l'Etat sont titulaires d'un diplôme de l'enseignement supérieur, ce qui ferme la porte aux candidats moins diplômés. Cela n'est bon pour personne, aussi voudrais-je créer une nouvelle voie de recrutement : le PACTE - parcours d'accès aux carrières de la Territoriale et de l'Etat - qui permettra d'intégrer la fonction publique en qualité de fonctionnaire par le biais d'un examen professionnel, à l'issue d'une période de formation.

Des PACTE juniors seront ouverts aux jeunes de 16 à 26 ans sans diplôme ni qualification professionnelle reconnue, ou chômeurs de longue durée.

Des PACTE seniors seront ouverts aux chômeurs de longue durée de plus de cinquante ans.

20 000 personnes devraient être recrutées chaque année dans le cadre de ce dispositif, toutes fonctions publiques confondues.

J'en viens à la négociation salariale. Pour conserver une fonction publique de qualité, nous devons préserver le pouvoir d'achat des fonctionnaires. La feuille de paye moyenne des fonctionnaires progresse de 3 à 4 % par an, soit beaucoup plus que l'inflation moyenne. Cette feuille de paye moyenne évolue selon trois facteurs : les mesures d'avancement individuel - tous les trois ans, chaque fonctionnaire en bénéficie et sa rémunération progresse en moyenne de 6 % -, les mesures catégorielles - près de 450 millions y sont consacrés dans le PLF pour 2005 -, et, enfin, les mesures générales, notamment la revalorisation du point fonction publique. Malheureusement, les syndicats ne veulent considérer que ce troisième facteur. Même s'il faut se soucier de la situation des fonctionnaires dont la situation est la plus difficile, doit-on pour autant augmenter massivement l'ensemble des fonctionnaires ? Accéder à la revendication des syndicats sur une revalorisation du point de 6,8% impliquerait de trouver 10 milliards pour les trois fonctions publiques, ce qui représenterait 7% des recettes de TVA ou 50 % des taxes sur l'essence.

Les crédits de la fonction publique et de la réforme de l'Etat sont inscrits à la section « services généraux » du budget des services du Premier ministre et sont rassemblés dans l'agrégat « Fonction publique ». L'an prochain, à l'occasion de l'entrée en vigueur de la LOLF, ils figureront dans un programme « Fonction publique, réforme de l'Etat et prospective » avec les crédits de fonctionnement de l'agence pour le développement de l'administration électronique et ceux du commissariat général au Plan. Les autres crédits des services du Premier ministre seront inscrits dans le programme « Coordination du travail gouvernemental » et la réunion de ce programme avec le programme « Fonction publique réforme de l'Etat et prospective » constituera une mission intitulée « Direction de l'action du gouvernement ».

J'ai noté les observations des rapporteurs sur la cohérence du découpage proposé par le Gouvernement, découpage qui, s'agissant de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, aboutit à une séparation entre les moyens en personnels et les moyens généraux d'une part et les moyens d'intervention d'autre part.

Initialement, dans l'architecture du budget de l'Etat, les crédits dédiés à la direction de l'action du Gouvernement devaient constituer un programme unique. Le Parlement a souhaité que ce programme soit séparé en deux avec, d'un côté, les crédits dédiés à la coordination du travail gouvernemental et à la prospective et, de l'autre, les crédits dédiés à la fonction publique, à la réforme de l'Etat et aux relations avec les citoyens. Le Gouvernement a repris cette proposition.

Outre qu'il n'est pas contraire à la LOLF, le parti de regrouper dans le programme « Coordination du travail gouvernemental » la quasi-totalité des moyens en personnel et des fonctions support de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » vise à optimiser la gestion des dépenses de personnel et de fonctionnement des services du Premier ministre. Ce regroupement permet d'atteindre la « taille critique » nécessaire pour bénéficier des marges de manœuvre offertes par l'application de la LOLF.

M. Derosier critique les indicateurs de résultats présenté dans l'avant-projet annuel de performance relatif au programme « Fonction publique, réforme de l'Etat et prospective ». Mais il ne s'agit précisément que d'un avant-projet et nous avons devant nous un an de travail dans lequel je m'impliquerai personnellement.

Les crédits de l'agrégat « Fonction publique » s'élèvent à 154,87 millions. Les rapporteurs ont noté, pour s'en réjouir ou le déplorer, qu'ils diminuent de 30 % par rapport à la loi de finances initiales pour 2004. A structure constante, abstraction faite notamment de la suppression de la prestation service crèches pour 55 millions et du transfert au bénéficie du fonds interministériel de mutualisation pour 5,18 millions, ces crédits diminuent de 8,2 %

Nous vous proposons une réforme exemplaire : le transfert aux CAF de la gestion des prestations familiales dues aux agents de l'Etat... (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jacques-Alain Bénisti - Très bien !

M. le Ministre - ...qui permet d'économiser 55,09 millions sur le budget de mon ministère et 600 emplois équivalents temps plein, ainsi que la maîtrise globale de la dépense qui, à service quasiment inchangé, participe à l'effort général de rigueur budgétaire. Cette réforme supprime une redondance absurde qui consistait à faire gérer les prestations dues aux agents de l'Etat par deux instances différentes : d'une part les services gestionnaires de personnel et les services de paie, d'autre part les CAF, situation qui engendrait des surcoûts importants. Le transfert sera effectif le 1er janvier 2005 pour l'ensemble des ministères à l'exception de celui de l'éducation nationale qui aura lieu le 1er juillet 2005.

S'agissant de l'action sociale interministérielle, ce projet de budget comporte deux mesures d'économie : la première, de 1,3 million, est liée à la suppression de l'aide à l'amélioration de l'habitat des retraités qui faisait double emploi avec celle de l'ANAH ; la seconde, de 1,6 million, est liée à la réforme de la politique de réservation des logements pour les agents de l'Etat.

Une réduction des crédits dédiés aux aides à l'installation, à l'aide ménagère à domicile et aux chèques vacances est également prévue à hauteur de 9,5 millions. Cette réduction n'a qu'un caractère technique puisqu'il s'agit simplement de réduire l'important fonds de roulement qui existe dans les comptes de la Mutualité fonction publique, ce qui n'aura aucune conséquence sur le montant des prestations versées aux agents.

S'agissant des crédits destinés à la formation, la subvention versée à l'ENA diminuera de 775 000 euros ce qui correspond pour l'essentiel à la réduction du nombre de postes offerts au concours. A la suite du rapport de M. de Silguy, nous avons décidé une réforme qui a trois objectifs : recentrer l'ENA sur sa vocation première d'école d'application, ouvrir l'Ecole sur l'Europe et sur l'administration des territoires grâce à un adossement du centre d'études européennes de Strasbourg à l'ENA et à un rapprochement avec l'Institut national des études territoriales...

M. Louis Giscard d'Estaing - Très bien !

M. le Ministre - ...et, enfin, le regroupement des activités de formation de l'ENA à Strasbourg qui sera effectif l'été prochain. L'immeuble de la rue de l'Université actuellement occupé par l'ENA sera alors mis en vente. La commission des finances a souhaité une diminution sensible de la subvention accordée à l'ENA afin de tenir compte des économies réalisées en réduisant le nombre d'élèves par promotion et en regroupant la scolarité à Strasbourg. Nous avons en effet décidé de fixer à 95 le nombre de places offertes au concours d'entrée à l'ENA contre 100 en 2003, 117 en 2002 et 137 en 2001, ce qui permet de réduire de 350 000 euros supplémentaires le montant de la subvention. Le Gouvernement est également disposé à accepter un éventuel amendement dans ce sens. La subvention de l'ENA serait ainsi ramenée à 31 millions, soit à un niveau proche de 2003.

Le transfert à Strasbourg dégagera certes des économies de fonctionnement, mais il entraînera aussi - comme toute réforme - des surcoûts. Il faudra construire un nouveau bâtiment et financer le reclassement des personnels parisiens qui ne souhaitent pas partir à Strasbourg. L'estimation de ces économies et de ces surcoûts réclamant un peu de temps, les conséquences de la réforme ne sont pas intégrées dans ce budget : elles seront prises en compte dans le prochain collectif budgétaire.

Avant qu'Eric Woerth ne vous présente les principaux chantiers de la réforme de l'Etat et les autres dotations budgétaires des services du Premier ministre, j'insisterai sur trois objectifs essentiels. Il faut d'abord conduire un examen sans concession des missions de l'Etat : aucune mission n'est sacrée et il faut s'assurer qu'elles restent nécessaires au développement de notre société. Il faut, ensuite, améliorer l'efficacité de l'action administrative. Dans les coulisses de l'Etat, bien des services peuvent faire des gains de productivité et nous souhaitons que ces gains atteignent 2% par an. Enfin, il faut repenser l'organisation des services de l'Etat au niveau départemental, en privilégiant les regroupements de services et la mutualisation des fonctions. Le Premier ministre vient d'ailleurs de confirmer cette orientation devant les maires.

Cette réforme de l'Etat, nous la conduirons en étroite relation avec votre Assemblée, qui est une source de proposition en même temps qu'elle exerce un contrôle vigilant. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Eric Woerth, secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat - Ce budget doit être replacé dans le cadre de la politique de réforme de l'Etat. A la différence des réformes ponctuelles comme celles des retraites ou de l'assurance-maladie, la réforme de l'Etat ne s'opèrera pas par un seul projet de loi. Pas de « grand soir » à attendre, donc, mais une multitude de petits matins au service de trois grands objectifs.

Participer, d'abord, au redressement des comptes publics et redonner de la plasticité au budget de l'Etat. Pour restaurer les marges de manœuvre de l'Etat, nous devons faire des gains de productivité. Aussi avons-nous relancé en 2004, sous une forme renouvelée, les stratégies ministérielles de réforme que Michel Bouvard a évoquées. 230 mesures efficaces dégageront ainsi, à l'horizon 2007, des gains de productivité de 1,5 milliard d'euros par an et 10 000 équivalents d'emplois à temps plein.

Pour 2005, nous pérennisons les SMR, qui vont devenir des plans de réforme « glissants » dont le contenu a vocation à s'enrichir ; nous synchroniserons ce processus avec le processus budgétaire - la commission des finances y est attentive - pour créer un chaînage vertueux et l'adapter à la nouvelle architecture du budget de l'Etat ; nous réexaminerons enfin sans concession le périmètre de l'Etat. Qui dit mission abandonnée dit aussi mission nouvelle. Un objectif de productivité de 2 % par an dès 2006 sera fixé à chaque ministère.

Deuxième objectif: réconcilier les Français avec leur administration. Les réformes doivent être conduites dans l'intérêt des usagers - ou des contribuables - et non dans celui des seules administrations. Nos concitoyens veulent de la simplicité : en effet, la complexité nuit à l'intelligibilité des décisions et porte atteinte à l'égalité de tous devant la loi en créant un avantage indu au profit de ceux qui accèdent facilement à l'information. Elle constitue un surcoût pour les entreprises.

Nous avons donc engagé un mouvement sans précédent de simplification du droit en présentant chaque année un projet de loi au Parlement. Le deuxième projet de simplification, adopté par la CMP, devrait l'être cet après-midi par le Sénat. Parmi ses dispositions figurent l'allégement du régime des autorisations administratives sur les entreprises avec une nouvelle approche dite économique, la simplification des procédures d'urbanisme et d'enquête publiques et l'institution d'un rescrit dans le domaine social, comme cela se fait déjà dans le domaine fiscal. C'est une vraie avancée pour les entreprises, qui ne se verront plus opposer par les URSSAF des interprétations divergentes du droit. On y trouve également une harmonisation des règles de retrait des actes administratifs.

Nous avons décidé d'évaluer le coût économique des régimes d'autorisation pour les entreprises. Nous pourrons ainsi simplifier, transformer en déclaration, voire supprimer ces autorisations.

Certains voient dans ce texte un vrai patchwork : il est simplement à l'image de notre droit, où la colombophilie côtoie le droit de l'urbanisme... Le PLH 3 sera donc construit par catégorie d'usagers - familles, associations, entreprises, investisseurs internationaux, maires.

Troisième objectif: s'assurer que l'administration s'organise pour s'engager dans un processus permanent de changement. Les fonctionnaires sont tous désireux de bien faire, mais ils doivent retrouver le goût de l'engagement et de la prise de risque. Nous nous sommes d'abord intéressés aux plus hauts fonctionnaires, afin de créer des « champions de la réforme » capables de relayer le mouvement qui vient des politiques.

Un secrétaire général, primus inter pares, sera créé dans chaque grand ministère - Equipement, secteur social, Agriculture, Justice, Education nationale - en lieu et place du Haut fonctionnaire de modernisation et de déconcentration. Il sera directement responsable des moyens et de la réussite des réformes.

La rémunération au mérite a été instaurée pour 50 directeurs d'administration centrale. La démarche est aussi importante pour le fonctionnaire que pour son employeur, puisque chaque ministre doit formaliser ce qu'il attend de ses directeurs.

Simplicité, productivité, qualité du service public et contrôle, tels sont les maîtres-mots de notre action.

J'en viens au budget qui comporte, outre les crédits des services généraux du Premier ministre, ceux du SGDN, du Conseil économique et social, du Commissariat général au Plan et des Journaux Officiels.

Hors fonction publique, budget des services généraux du Premier ministre s'établit à 674,9 milliards contre 931,3 milliards en 2004. Cette diminution résulte pour l'essentiel du transfert vers les charges communes des crédits de compensation des exonérations de redevance audiovisuelle.

Au sein du budget des services généraux, nous avons déterminé trois priorités. D'abord le développement de l'administration électronique, grâce au Plan Adèle, lancé par le Premier ministre le 9 février 2004. Ce programme doit réaliser d'ici 2007 140 projets, créateurs de 300 nouveaux services. Les moyens humains et financiers supplémentaires dont disposera l'ADAE - 51 personnes - résultent tous de transferts de crédits et de postes budgétaires, conformément à la volonté du Gouvernement de mutualiser l'effort des ministères plutôt que de laisser perdurer un « chacun chez soi » particulièrement coûteux.

Deuxième priorité : l'indemnisation des victimes d'actes de barbarie durant la deuxième guerre mondiale. A la suite des engagements pris par le Président de la République, le décret du 27 juillet 2004 a institué un régime d'indemnisation en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins des victimes de ces actes de barbarie. De nombreux dossiers sont en cours d'instruction et donneront lieu à indemnisation dans les prochaines semaines. Une dotation de 20 millions est inscrite à cet effet au budget des services généraux.

Troisième priorité : les expérimentations au titre de la préparation de la mise en œuvre de la LOLF, dont la principale est la création d'un chapitre expérimental -globalisant - en 39-01, qui regroupe les crédits rattachés à l'action « soutien » du futur programme « coordination du travail gouvernemental ». Ce chapitre s'élève à 43,6 millions.

Le budget traduit également la création du Conseil d'analyse de la société, qui sera la vigie « sociétale » du Gouvernement, par le décret du 8 juillet 2004. Ses attributions n'empiètent ni sur celles du Gouvernement, ni sur celles du Parlement. Les membres en sont choisis à raison de leurs compétences, mais il ne dispose ni d'organe permanent, ni de fonction significative de soutien. Cette organisation inspirée de celle du Conseil d'analyse économique a fait la preuve de son succès.

Le projet de budget traduit aussi le nouvel élan donné par le Premier ministre à la défense et à la sécurité nationale. Le nombre des missions du secrétariat général de la défense nationale s'est en effet accru en 2004, ce qui justifie l'augmentation de 8 % de ses crédits de fonctionnement. Au nombre de ces nouvelles missions, je citerai en particulier alla coordination des activités d'intelligence économique, grâce à la création d'un responsable ad hoc, idée que nous devons à M. le député Carayon.

Le budget du Conseil économique et social reste stable, s'établissant 32,93 millions en 2005.

La forte diminution des crédits du budget du Plan est liée à la modification de son périmètre...

M. André Chassaigne - Pour partie !

M. le Secrétaire d'Etat - Reprenant une proposition formulée par la MEC, le Premier ministre a en effet décidé de transférer vers d'autres budgets la subvention de l'Etat en faveur de l'OFCE, du CEPREMAP et du CREDOC.

M. Jacques-Alain Bénisti - Très bien !

M. le Secrétaire d'Etat - Le Commissariat général au Plan concourra à l'effort général de rigueur des finances publiques par la suppression de six emplois. L'objectif d'une diminution annuelle des effectifs au moins égale à celle des départs en retraite sera poursuivi au cours des prochaines années. En effet, l'activité du Plan se concentre désormais sur les travaux de prospective, dont l'état d'avancement est mis à la disposition de tous sur son nouveau site internet. Il exerce de plus des missions d'expertise ponctuelle à la demande du Gouvernement. Ainsi, a-t-il apporté son concours à l'élaboration du Plan Borloo ; ainsi a-t-il conduit des travaux sur le taux d'actualisation des infrastructures. En 2004, le Plan s'est doté d'une nouvelle organisation en groupes de projets, à la fois plus souple et plus efficace.

Votre commission a proposé de supprimer les .300 000 euros qui subsistent dans le budget du Plan au titre d'évaluation des politiques publiques, le Commissariat n'étant plus chargé de cette mission. Toutefois, une réflexion est engagée sur l'organisation administrative de cette évaluation, et, par ma voix, le Gouvernement prend l'engagement de vous proposer un dispositif à cette fin avant le terme de la discussion budgétaire. Cette réflexion n'étant pas achevée, je vous propose de maintenir cette somme, à titre conservatoire, sur le budget du Plan. Elle pourra ainsi être ultérieurement déléguée à l'organisme choisi pour remplir cette mission.

Votre commission s'est également interrogée sur l'opportunité de maintenir les crédits délégués pour l'évaluation des contrats de Plan Etat-région. Il n'est pas question de supprimer ces crédits, mais l'on pourrait fort bien imaginer de transférer les 800 000 euros considérés au budget du ministère de l'intérieur. Le Gouvernement est donc tout disposé à accepter un amendement en ce sens, ou à le proposer lui-même.

Comme chacun l'aura constaté, l'année 2004 a vu la progression très rapide de la communication électronique, tant pour la saisie à la source des journaux officiels que pour leur diffusion : c'est vrai pour les avis publics à la concurrence et les avis d'attribution publiés au BOAMP, c'est vrai aussi pour la saisie à la source des débats des deux assemblées parlementaires. La principale nouveauté a consisté en la création du Journal officiel électronique authentifié, innovation dont nous pouvons nous enorgueillir. Pour toutes ces raisons, le budget de la Direction des journaux officiels sera diminué de 5 %.

Telles sont les principales orientations du budget des services du Premier ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

QUESTIONS

M. Rudy Salles - Je tiens à appeler, une nouvelle fois, l'attention du Gouvernement sur les dysfonctionnements persistants du système d'attribution des indemnités de résidence. L'une des conditions de l'amélioration de l'efficacité de l'Etat, c'est de favoriser le redéploiement des effectifs. A cet égard, la rémunération des fonctionnaires est un élément clé. Je regrette donc que le réajustement indispensable des indemnités de résidence destinées à compenser les différences du coût de la vie selon les communes, n'ait toujours pas fait. La France est en effet divisée, à ce sujet, en trois zones : en zone 1, l'indemnité de résidence représente 3 % du traitement brut, en zone 2 1 %, et en zone 3, rien. Or, la répartition remonte à 1945 et les quelques modulations intervenues depuis lors sont insuffisantes pour réduire des inégalités injustifiées. Ainsi, le département des Alpes-Maritimes est classé en zone 2 alors que le coût de la vie y est supérieur à celui constaté dans le Var, pourtant classé en zone 1.

Le manque de réaction de l'Etat a des conséquences déplorables. C'est ainsi que les refus d'affectation se multiplient à Nice, dans la police nationale mais aussi à La Poste, car les loyers, comparables aux loyers parisiens, y sont beaucoup plus élevés qu'à Toulon ou à Marseille, si bien qu'un fonctionnaire de catégorie C qui souhaite louer un deux-pièces doit y consacrer plus d'un tiers de son traitement net. A Nantes, 20 % y suffisent ! Au fil des ans, les gouvernements successifs ont pris à diverses reprises l'engagement de remédier à cette situation inéquitable. M. Delevoye avait demandé à M. de Robien la réalisation d'une étude circonstanciée qui permettrait de mener à bien la réforme indispensable du régime de l'indemnité de résidence. Je déplore que nous soyons si peu informés des résultats de cette enquête. Au nom de l'unité de la fonction publique, une révision globale ou partielle du classement des communes s'impose, notamment pour les Alpes-Maritimes. Quelles mesures prendrez-vous à cette fin ?

M. le Secrétaire d'Etat - La réglementation ne permet pas de revoir le classement des communes en dehors des périodes de recensement. A Nice, c'est la synthèse du recensement de 1999 qui a conduit au classement en zone 2, et il n'existe pas de possibilité légale de classement de la ville en zone 1 à brève échéance. Une réflexion s'impose effectivement sur l'évolution du dispositif ; elle a été engagée, mais l'extrême diversité des situations rend la réforme très délicate, d'autant que les enjeux financiers sont considérables. Je ne peux donc m'engager aujourd'hui sur ce point.

M. Rudy Salles - Je pose la même question depuis quinze ans ! C'est lamentable !

M. André Chassaigne - Le développement local s'appuie, particulièrement en zone rurale, sur des agents qualifiés qui, dans le cadre de communautés de communes, interviennent souvent aux côtés des élus, des associations et des acteurs économiques. Or, les élus locaux, pour qui les agents de développement sont indispensables, éprouvent des difficultés de recrutement considérables. Le statut de la fonction publique territoriale ne les connaissant pas, les agents de développement sont surtout des contractuels de droit privé, et le renouvellement de leur contrat est entravé par le contrôle de légalité des préfectures. Les élus doivent aussi subir une forte rotation des effectifs, voire une pénurie, car certains salariés se voient contraints de quitter le territoire sur lequel ils ont agi. Pour les retenir, il faudrait pouvoir leur offrir des emplois fonctionnels. Je suis intervenu à de multiples reprises pour demander au Gouvernement la reconnaissance de ce métier, par le statut de la fonction publique territoriale. La réponse qui m'a été faite est toujours la même : « ne vous inquiétez pas, nous travaillons à résoudre cette difficulté »... J'attends toujours, et la situation continue de s'aggraver.

Où en est précisément ce dossier ? Selon quel calendrier précis la question sera-t-elle résolue ? Quelles sont vos orientations précises sur ce point ?

M. le Secrétaire d'Etat - Je suis sensible aux préoccupations de nombreux élus concernant le recrutement d'agents de développement local. Le CNFPT, le 7 juillet dernier, a examiné une note de la direction générale des collectivités locales qui préconise la création d'une spécialité « développement local » dans le statut des attachés territoriaux, ce qui permettra de recruter des titulaires.

A condition de satisfaire aux conditions d'ancienneté, ces agents pourront accéder par concours interne au cadre d'emploi des attachés territoriaux, les épreuves devant être adaptées à leur profil. En outre, ces agents peuvent prétendre, au même titre que les personnes employées en CDD successifs, au bénéfice des dispositions introduites dans le statut de la fonction publique avec la transcription de la directive sur la précarité.

C'est au premier semestre 2005 que devrait intervenir la modification du statut des attachés territoriaux.

M. François Asensi - Lorsque le Gouvernement privatise ou restructure un service public, chaque fois qu'il ferme une école ou une gare, les collectivités locales sont en première ligne pour atténuer les effets de ces décisions. On leur demande d'assurer la continuité du service public, mais elles n'ont pas toutes les mêmes ressource. Dans cette logique de concurrence entre les territoires, l'écart de richesse ne va faire que s'accroître. A Sevran, le revenu par habitant est de 6 651 € par habitant, contre 35 780 € à Neuilly. La fracture budgétaire se traduit par la fracture territoriale.

Ce recul des politiques publiques pénalise doublement les communes les plus démunies, qui ne peuvent investir directement et n'ont plus les moyens de recruter l'encadrement nécessaire. La possibilité d'accorder de fortes primes aux cadres territoriaux aggrave la fracture territoriale, car les cadres iront au plus offrant. Comment comptez-vous garantir la cohésion sociale ?

M. le Secrétaire d'Etat - En confiant aux conseillers régionaux, généraux et municipaux la responsabilité d'un certain nombre de services, le Gouvernement a voulu garantir par une gestion de proximité un service public de meilleure qualité, plus réactif et moins coûteux.

Pour éviter des dérives constatées dans le passé, nous avons posé un verrou constitutionnel qui empêche tout transfert de charges sans compensation équivalente. Cessons donc les procès d'intention. Si un déséquilibre était constaté, il pourrait être sanctionné par le juge. Jamais les élus n'ont bénéficié d'une telle garantie.

Nous renforçons le rôle de coordination du préfet, qui va bénéficier d'une certaine liberté dans l'organisation de ses services. La qualité du contrôle de légalité va être améliorée par la télétransmission. Ainsi, le préfet pourra exercer davantage sa mission de conseiller juridique des collectivités locales. L'Etat sera donc présent partout.

M. François Asensi - Hors sujet !

M. André Chassaigne - Ma question porte sur le statut des ouvriers des parcs et ateliers de l'équipement. La décentralisation forcée de l'essentiel des routes nationales n'est pas sans conséquence pour ces 8 500 ouvriers de l'Etat. Que vont-ils devenir dans les départements où l'Etat n'aura plus la responsabilité d'aucune route nationale ? Cette situation obligera l'Etat et les départements à renforcer leurs partenariats. Or les contrats entre personnes publiques doivent maintenant respecter le droit de la concurrence. Dans ce contexte funeste, les ouvriers des parcs et ateliers ont raison de s'inquiéter. Ils ne comprennent pas l'obstination des pouvoirs publics à casser leur outil de travail, dont la qualité est unanimement reconnue.

Il est difficile de comprendre pourquoi vous avez choisi d'obérer l'activité de ces parcs, en supprimant 471 emplois sur 2005.

Quel que soit le scénario retenu, ces ouvriers ont pour exigences que leur mission de service public perdure et que leur statut reste le même. Envisagez-vous de le modifier ? Si oui, quelles garanties pouvez-vous nous donner que cette réforme n'altérera ni le service public, ni les protections garanties à ces ouvriers de l'Etat ?

M. le Secrétaire d'Etat - Les parcs de l'équipement font partie intégrante des services de l'Etat. Ils assurent des missions de service public. Les ouvriers, qui exercent des métiers qualifiés, bénéficient d'un statut qui permet de recruter des compétences spécifiques.

La loi du 13 août 2004 sur les responsabilités locales n'a prévu ni leur détachement auprès des collectivités locales, ni leur intégration dans un cadre d'emploi de la fonction publique territoriale. Il n'en reste pas moins que leur activité a changé, si bien qu'il faut définir de nouveaux positionnements. La loi du 13 août 2004 a prévu rapport sur ce sujet. Gilles de Robien a confié une mission à Jean Courtial, maître des requêtes au Conseil d'Etat. Il va rencontrer l'ensemble des partenaires concernés pour dégager des éléments de diagnostic et avancer des propositions. Cette démarche s'articulera avec une approche prévisionnelle des métiers et des effectifs. Les principaux points seront connus au milieu de l'année 2005.

M. Serge Poignant - Ma proposition de loi tendant à supprimer les limites d'âge dans les concours de la fonction publique a été discutée le 15 avril dernier. Mais elle n'est toujours pas inscrite à l'ordre du jour du Sénat, alors qu'elle devait entrer en application au 1er janvier 2005. J'ai reçu de nombreux courriers me demandant quand ce texte sera adopté définitivement.

Vous connaissez mon attachement à cette proposition. Avec M. Dutreil, nous avions rencontré les représentants syndicaux. Le Gouvernement m'avait dit que ma proposition serait intégrée au projet de modernisation de la fonction publique. Or cette réforme, qui a pris du retard, se fera par étapes, en commençant par la fonction publique territoriale...

M. le Secrétaire d'Etat - Sur le fond, M. Dutreil s'est exprimé plusieurs fois pour dire que votre proposition allait dans le bon sens. Elle tend à garantir l'égalité d'accès aux emplois publics et apporte une solution au problème de l'emploi des seniors. La France est en retard dans ce domaine. Il faut lever les barrières qui empêchent les salariés du privé d'entrer dans la fonction publique. Cela s'inscrit dans une logique générale de mobilité : les gens ne se contentent plus d'exercer un même métier tout au long de leur vie. Il faut que les fonctionnaires puissent changer d'emploi et nous devons multiplier les passerelles entre le public et le privé.

Une concertation avec les syndicats a eu lieu le 25 mai : vous en étiez. Les partenaires sociaux n'ont pas remis en question le bien-fondé de votre proposition, mais ils ont souhaité que ce point ne soit pas déconnecté du reste de la réforme. Les limites d'âge sont en effet une composante de la politique de recrutement. Une disposition sur ce sujet devrait être rattachée au texte sur la fonction publique territoriale. Si ce n'était pas le cas, il y aurait un texte autonome.

M. Mansour Kamardine - Je veux appeler l'attention du Gouvernement sur la discrimination statutaire dont sont victimes les 150 fonctionnaires de l'Etat originaires de Mayotte qui sont affectés en métropole ou dans les DOM.

Les agents de l'Etat originaires des DOM bénéficient d'un statut avantageux, comprenant une prime d'éloignement et des possibilités de congés. Les Mahorais n'ont pas les mêmes avantages, qu'ils soient affectés à Mayotte ou en métropole, et cela vaut aussi pour les allocations familiales. Ces fonctionnaires dénoncent depuis 1996, la discrimination dont ils sont victimes, en vain. Ainsi, un fonctionnaire d'origine mahoraise en poste en France métropolitaine qui est affecté à Mayotte en même temps qu'un collègue originaire de métropole n'aura pas le même régime car il est censé y être chez lui. Désormais, Mayotte est assimilée à un DOM dans plusieurs textes réglementaires. Comment comptez-vous mettre fin à ce régime discriminatoire envers les fonctionnaires d'origine mahoraise, et dans quels délais ? Il y a urgence, car l'injustice est choquante.

M. le Secrétaire d'Etat - Effectivement, les fonctionnaires Mahorais affectés en métropole ne bénéficient pas du congé bonifié, réservé aux DOM et à Saint Pierre et Miquelon, ancien DOM. Mme Girardin souhaite que nous réfléchissions ensemble à la modernisation des congés bonifiés, qui ne correspondent plus à la réalité. On ne fait plus 15 jours de bateau pour rejoindre un DOM ; en avion il ne faut parfois pas plus de temps que pour se déplacer d'une région à l'autre en métropole. En outre, il existe des disparités de situation qui ne sont pas toujours justifiées. Elles sont le fruit de l'histoire, et faire évoluer les règles n'est pas toujours facile. Il faut mener la concertation avec les acteurs territoriaux et des analyses économiques pour mesurer l'impact des réformes. M. Dutreil et moi-même ne sommes pas hostiles à ce que l'on examine cette question dans un cadre global. Mais dans le contexte budgétaire actuel, il serait plus raisonnable que les efforts financiers consentis pour Mayotte portent sur l'intégration dans la fonction publique, ce qui implique une formation et une adaptation progressive des rémunérations. Ce doit être notre première priorité.

M. Bernard Carayon - La nouvelle politique publique d'intelligence économique s'appuie sur les recommandations que j'ai faites dans le rapport que j'ai rendu au Premier ministre il y a un an. Elle porte sur la sécurité, la compétitivité, la mutualisation des moyens pour conquérir les marchés extérieurs, ainsi que sur l'influence auprès des organisations internationales et sur la formation.

Le Gouvernement s'est engagé de façon audacieuse dans ce domaine où excellent les Anglo-saxons. Cependant, le haut responsable à l'intelligence économique dépend du SGDN. Est-ce l'institution la plus adéquate ? Les expérimentations engagées dans neuf régions semblent également se dérouler lentement. Le ministre de l'Economie ayant créé une délégation générale à l'intelligence économique, le haut responsable aura-t-il une fonction de coordination, et d'autres ministères vont-ils créer des délégations de ce type ?

Enfin, je me réjouis que le Premier ministre ait décidé de faire porter l'effort sur la sécurité des réseaux publics d'information. Mais avec huit ingénieurs seulement, les moyens semblent insuffisants. Le ministère des affaires étrangères a également engagé une réflexion, et deux télégrammes diplomatiques ont été envoyés à nos postes sur ce sujet. Devant le foisonnement des initiatives, comment le Gouvernement entend-il mener cette politique publique ?

M. le Secrétaire d'Etat - Dans votre excellent rapport, vous portiez un diagnostic sans complaisance, qui a permis une prise de conscience des enjeux de cette politique. Sur la base de vos propositions, un décret du 22 décembre 2003 a institué un haut responsable pour l'intelligence économique, placé auprès du SGDN en raison du caractère interministériel de sa mission. Il a mis en œuvre un plan sur trois ans, dont les premiers résultats peuvent être présentés. Les secteurs stratégiques ont été identifiés et validés et le concept d'intelligence économique clairement défini, de même que le rôle de l'Etat, explicité dans un document de référence après concertation et consultation d'un groupe d'experts reconnus. Enfin, un dispositif interministériel d'alerte et de veille a été mis en place. Un groupe permanent assure le suivi des travaux.

Le soutien aux entreprises des secteurs stratégiques s'organise en trois volets principaux. Il s'agit d'abord de sensibiliser et de former à l'intelligence économique de façon plus cohérente qu'actuellement ; ensuite, les préfets de région et les comités régionaux de l'intelligence économique, en liaison avec les collectivités locales, mènent la phase d'expérimentation dans neuf régions, surtout au profit des PME-PMI. Enfin, l'Etat encourage la création de fonds privés d'investissement pour aider ces PME-PMI à développer des technologies performantes.

Il est également nécessaire de moderniser le cadre juridique, surtout en ce qui concerne le contrôle des investissements étrangers. Le projet de loi habilitant le gouvernement à simplifier le droit, qui viendra en CMP cet après-midi, puis devant l'Assemblée, contient des mesures à cet égard. L'année 2005 sera consacrée principalement à la pérennisation des mesures que je viens de décrire et qui figuraient toutes dans votre rapport. Par ailleurs un mécanisme de protection contre le détournement de données sensibles sera mis à l'étude.

M. Serge Poignant - C'est en fonction de quotas internes que l'on détermine le nombre de fonctionnaires territoriaux inscrits sur une liste d'aptitude qui peuvent être recrutés sur un emploi supérieur par promotion interne. Ainsi, pour le passage du grade d'agent administratif à celui d'adjoint administratif, le décret du 26 juin 2003 a fixé un quota de un pour trois. Il a suscité beaucoup d'espoirs vite déçus, étant donné le nombre d'agents inscrits sur la liste d'aptitude. En Loire-Atlantique, 562 agents ayant réussi l'examen en juin dernier ne peuvent être nommés adjoints. Comte tenu du quota, il faudrait créer 2000 postes. Le conseil supérieur de la fonction publique aurait donné son accord sur un texte réglementaire assouplissant les conditions de promotion interne et de quota au titre de l'agrément professionnel. Pouvez-vous nous donner des précisions sur ce point, car les élus locaux sont souvent sollicités par leurs agents ?

M. le Secrétaire d'Etat - Abandonner tout mécanisme de déroulement des carrières dans une des trois fonctions publiques alors qu'ils resteraient en vigueur dans les autres n'est pas souhaitable. En raison de la pénurie de certains personnels, comme les infirmières, des collectivités seraient tentées de pratiquer un « dumping statutaire » en accélérant les carrières. Pour organiser la mobilité entre les trois fonctions publiques, il faut maintenir une parité. Elle n'empêche pas des adaptations en fonction de situations spécifiques.

Dans la fonction publique territoriale, étant donné la multiplicité des employeurs, les carrières ne pourraient se dérouler de façon satisfaisante sans dispositif du type de celui qui assure au moins une nomination tous les trois ans. Je ne suis pas favorable à la suppression de tous les quotas. Le dispositif « promu-promouvable » permet de réguler de façon fluide, sans à-coups démographiques, les carrières des agents et il assure des perspectives de promotion constantes, en fonction du nombre d'agents promouvables. Dans le cadre de l'application de la LOLF, la gestion de ressources humaines va être adaptée à la fonction publique d'Etat. C'est ce mécanisme que nous souhaitons substituer à l'actuel pyramidage statutaire.

SERVICES GÉNÉRAUX

ETAT B - TITRE III

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial suppléant - La commission des finances a adopté, contre l'avis du rapporteur spécial, l'amendement 115 rectifié. Je laisse M. Giscard d'Estaing le défendre.

M. Louis Giscard d'Estaing - Cet amendement fait suite à ceux qui avaient été également adoptés par la commission des finances sur les budgets 2003 et 2004. Il s'inscrit pleinement dans la réforme de l'Etat et correspond de notre part à l'exercice de notre fonction de contrôle de la dépense publique.

Il tend à augmenter la réduction de crédits prévue dans les mesures nouvelles, afin que les services votés relatifs à la subvention de fonctionnement de l'ENA soient ramenés à leur niveau de 2003, inférieur à celui de 2004 mais supérieur à celui de 2002. Il faut en effet tenir compte des engagements qui avaient été pris lors du précédent débat budgétaire de réduire le nombre d'élèves par promotion, à la fois pour l'adapter aux besoins futurs d'encadrement dans la haute fonction publique et pour accroître la motivation des agents de la fonction publique qui ne sont pas passés par l'ENA. Il faut également tenir compte des économies de fonctionnement qui résultent des décisions prises d'abord par le gouvernement Cresson, ensuite par le gouvernement actuel, de regrouper la scolarité à Strasbourg.

M. le Secrétaire d'Etat - La subvention de l'ENA inscrite dans ce projet de budget, en diminution de 755 000 euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2004, tient déjà compte de la diminution du nombre de places offerte au concours d'entrée de la fin de l'année 2003. Le Gouvernement ayant récemment décidé une nouvelle diminution du nombre de places, elle peut être encore réduite de 351 879 euros.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial suppléant - Nous pouvons considérer que l'amendement proposé par M. Giscard d'Estaing est ainsi rectifié.

M. Louis Giscard d'Estaing - En effet.

M. Bernard Derosier, rapporteur pour avis - La commission des lois n'a pas eu à connaître de cet amendement, et c'est dommage...Il montre que la majorité ne cesse jamais de s'en prendre à la fonction publique, y compris à son plus haut niveau.

M. André Chassaigne - Je ne partage pas la volonté de mon voisin géographique de porter un nouveau coup à l'ENA, créée à la Libération afin que les politiques publiques puissent être conduites avec des agents de haut niveau, souvent appelés « commis de l'Etat ». C'est un accompagnement des lois de décentralisation, qui démantèlent notre République. L'idée directrice est celle-ci : moins de politiques publiques, moins d'Etat, pour laisser libre cours aux marchés.

M. Jean-Pierre Dufau - Je constate tout d'abord que ce gouvernement prend acte du transfert de l'ENA à Strasbourg et n'y trouve rien à redire. J'observe ensuite qu'il en a une vision comptable, puisqu'on justifie la diminution des crédits par la baisse des effectifs. Porter atteinte à l'ENA, c'est en réalité porter atteinte à la fonction publique.

L'amendement 115 modifié, mis aux voix, est adopté.

M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial - L'amendement 16 a pour but de supprimer les moyens budgétaires accordés au Conseil d'analyse de la société, que la commission unanime juge inutile dans la mesure où son rôle relève du travail normal des autorités politiques, qui peuvent en cas de besoin s'appuyer sur les travaux du Conseil économique et social et du Commissariat général au Plan. Si le Gouvernement souhaite maintenir cette instance, qu'il prenne ses responsabilités.

M. Bernard Carayon, rapporteur spécial -Il existe d'autres gisements d'économies que celle-ci, qui porte sur 150 000 euros... De minimis non curat praetor.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial suppléant - Au-delà du montant, cet amendement a une vocation pédagogique. Alors que le Gouvernement s'efforce de réduire le nombre des hauts comités et autres observatoires, nous voyons fleurir de nouvelles instances, créées par voie réglementaire ou parfois législative, dont on découvre le coût dans le budget.

A-t-on besoin d'une structure particulière ? Je tiens à souligner que nous serons particulièrement attentifs au coût de toute structure nouvelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) .

M. le Secrétaire d'Etat - Le Conseil d'analyse de la société n'est pas une structure nouvelle, mais une mission confiée à certaines personnalités. Vous savez bien que je ne suis pas favorable à la multiplication des structures, mais le Conseil d'analyse de la société remplit une mission utile, et doit recevoir les moyens de travailler. Je vous demande donc de rejeter cet amendement.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial suppléant - Peut-être s'agissait-il de redéploiement de crédits ?

M. Louis Giscard d'Estaing - Non !

Michel Bouvard, rapporteur spécial suppléant - Je précise par ailleurs que les amendements de la commission des finances ne peuvent pas être soumis aux commissions saisies pour avis.

M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial - Il ne s'agit pas de redéploiement, et j'ai proposé cette technique parce que l'article 40 nous est encore opposable cette année. Je rappelle que la commission des finances s'est prononcée à l'unanimité sur ce point : je renvoie la majorité à ses contradictions. Je maintiens cet amendement.

L'amendement 16, mis aux voix, est adopté.

Les crédits inscrits à l'état B titre III, mis aux voix, sont adoptés, de même que les crédits inscrits à l'état B titre IV, les crédits inscrits à l'état C titre V, et les crédits inscrits à l'état C, titre VI.

M. le Président - J'appelle les crédits du Conseil économique et social.

CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

Les crédits inscrits à l'état B titre III, mis aux voix, sont adoptés, de même que les les crédits inscrits à l'état C, titre V.

M. le Président - J'appelle les crédits du Plan.

PLAN

ÉTAT B - TITRE III

M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial - L'amendement 17 tend à réduire de 950 000 euros les moyens budgétaires accordés au Commissariat général du Plan pour l'évaluation des politiques publiques et des contrats de plan Etat-régions. Le Gouvernement entend-il enfin lancer une véritable évaluation des politiques publiques ? On ne peut pas être juge et partie. J'attends une réponse précise.

M. le Secrétaire d'Etat - Sur le Conseil d'analyse de la société, un amendement vient d'être voté, mais je rappelle que nous ne sommes pas favorables au rattachement de ces 150 000 euros au Commissariat général au Plan.

S'agissant de l'évaluation des politiques publiques, nous devons progresser, et le Gouvernement prendra position avant la fin de la discussion budgétaire, aussi demandons-nous le maintien des crédits d'évaluation des politiques publiques dans les crédits du commissariat général au Plan.

Quant aux contrats de plan Etat-région, nous pouvons transférer les crédits de 800 000 euros, aujourd'hui affectés au commissariat général au Plan, vers le ministère de l'Intérieur.

Le Gouvernement souhaite donc le retrait de votre amendement au bénéfice de l'amendement 205, qui va dans ce sens.

M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial - Je retire donc l'amendement de la commission des finances. Quant à l'amendement du Gouvernement, il n'a pas été examiné en commission, mais j'y suis défavorable à titre personnel. Sur l'évaluation du contrat de plan, le ministère de l'Intérieur ne peut pas être juge et partie. Rien n'est dit sur l'ensemble des politiques publiques alors qu'une instance nationale d'évaluation aurait été particulièrement utile. Enfin, nous pouvons craindre que les 800 000 euros transférés au ministère de l'intérieur soient utilisés à une toute autre fin.

M. Bernard Carayon, rapporteur spécial - Cet amendement a le mérite d'engager un débat sur l'évolution du commissariat général au Plan. Les organismes d'évaluation des politiques publiques se sont multipliés et peut-être faudra-t-il par exemple fusionner la DATAR et le commissariat général au Plan. Il est temps que l'Etat fédère ces instances à travers un outil de mutualisation des documents publics doté des moyens de communication les plus modernes.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial suppléant - L'amendement gouvernemental va dans le bon sens. Quant aux crédits, on peut espérer qu'ils ne seront pas pérennisés dans la logique de réduction des dépenses qui est la nôtre. Enfin, Monsieur Bourguignon, l'instance nationale d'évaluation des politiques publiques, c'est le Parlement.

M. Bernard Carayon, rapporteur spécial - Absolument, et en particulier la commission des finances.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial suppléant - Il n'y a pas lieu de créer de nouvelles structures quand chaque ministère devra, de plus, évaluer l'efficacité de la politique qu'il met en œuvre.

M. Jean-Pierre Dufau - Il est inacceptable que les préfets de région soient responsables de l'évaluation des contrats de plan. Pourquoi ne serait-elle pas confiée, par exemple, aux présidents de région ? De plus, c'est vous qui avez choisi de dessaisir le commissariat au Plan de l'évaluation. Nous voterons donc contre la suppression de crédits.

M. André Chassaigne, rapporteur pour avis - Les crédits de fonctionnement du commissariat général du Plan baissent déjà de 5%. Si l'on y ajoute la baisse que vous proposez, ils diminueront de 25% !

Qui sera responsable de l'évaluation ? Mes collègues Giscard d'Estaing et Launay, dans leur excellent rapport effectué dans le cadre de la commission à l'aménagement et au développement durable du territoire, ont constaté que l'évaluation des CPER n'était pas faite par la DATAR. Il faut donc redonner au commissariat général au Plan sa fonction d'évaluation, ne serait-ce que dans le pilotage des CPER, mais aussi de péréquation entre les régions.

M. Louis Giscard d'Estaing - Il est exact que jusqu'à présent l'évolution des CPER était assurée par le commissariat général au Plan, mais je rappelle que la DATAR pourrait par exemple s'en charger, comme l'avait suggéré la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances.

Enfin, ce type de mission relève-t-il du ministère de l'intérieur ou de celui de l'aménagement du territoire ? Je pose la question au Gouvernement .

M. Bernard Carayon, rapporteur spécial - Il est inacceptable, Monsieur Dufau, que les exécutifs régionaux évaluent les CPER. Seul l'Etat est responsable de l'intérêt général national, les exécutifs régionaux n'exprimant que des points de vue particuliers.

L'amendement 205, mis aux voix, est adopté.

Les crédits inscrits à l'état B titre III modifié, mis aux voix,sont adoptés, de même que le titre IV.

Les crédits inscrits à l'état C titre VI, mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président - J'appelle les crédits du budget annexe des Journaux officiels.

BUDGET ANNEXE DES JOURNAUX OFFICIELS

Les crédits inscrits aux articles 50 et 51, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président - J'appelle les crédits inscrits au secrétariat général de la défense nationale.

SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DE LA DÉFENSE NATIONALE

Les crédits inscrits à l'état B titre III, mis aux voix, sont adoptés, de même que les crédits inscrits à l'état C titres V et VI.

M. le Président - Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de la fonction publique, de la réforme de l'Etat ainsi que ceux des services généraux du Premier ministre, du budget annexe des Journaux officiels et du secrétariat général de la défense nationale.

Prochaine séance cet après-midi à 15 heures.

La séance est levée à 13 heures 25.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            François GEORGE

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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