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Assemblée nationale

COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 2004-2005 - 92ème jour de séance, 222ème séance

SÉANCE DU JEUDI 9 JUIN 2005

PRÉSIDENCE de M. Yves BUR

vice-président

Sommaire

          NOMINATION D'UN VICE-PRÉSIDENT 2

          LOCAUX DU CONGRÈS (deuxième lecture) 2

          ARTICLE PREMIER 5

          ART. 3 5

          APPROBATION D'UN ACCORD ET
          DE DEUX CONVENTIONS INTERNATIONAUX 5

          PRIVILÈGES ET IMMUNITÉS D'ATHÉNA 6

          CONVENTION EUROPÉENNE
          SUR LE PATRIMOINE AUDIOVISUEL 8

          ORDRE DU JOUR DU MARDI 14 JUIN 2005 11

La séance est ouverte à neuf heures trente.

NOMINATION D'UN VICE-PRÉSIDENT

L'ordre du jour appelle la nomination d'un vice-président de l'Assemblée nationale.

M. le Président - N'ayant reçu qu'une candidature, celle de M. René Dosière, je le proclame vice-président de l'Assemblée nationale, et je lui adresse mes plus sincères félicitations.

LOCAUX DU CONGRÈS (deuxième lecture)

L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi tendant à mettre à la disposition du public les locaux dits du Congrès, au château de Versailles.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication - Je tiens une nouvelle fois à exprimer la reconnaissance du Gouvernement à la représentation nationale qui a décidé, le 7 avril dernier, de transférer les locaux du Congrès à l'établissement public chargé de la mise en valeur du château de Versailles, et je salue tout particulièrement le rôle de Jean-Louis Debré dans cette initiative historique.

Cette proposition généreuse a une portée civique et une véritable dimension politique, en ce qu'elle permet d'améliorer le schéma directeur, approuvé en 2003, destiné à faciliter l'accueil du public.

C'est une décision qui a un coût : la représentation nationale saura sans nul doute s'en souvenir quand elle examinera les crédits du patrimoine et des monuments historiques.

Je félicite enfin M. le président de la commission des lois, et je me réjouis que le premier texte qu'il ait à présenter en séance publique dans ses nouvelles fonctions soit consacré au patrimoine qui fait la fierté et le rayonnement de la France, comme le Premier ministre l'a rappelé hier dans sa déclaration de politique générale.

Le Gouvernement fait confiance aux assemblées parlementaires pour préciser les modalités d'une réforme qui les concerne au premier chef, mais, quelle que soit la solution finalement retenue, il me semble important qu'elle permette d'ouvrir le plus largement possible au public les espaces restitués.

S'agissant de la salle des Congrès, je comprends parfaitement que l'Assemblée nationale et le Sénat aient restreint l'usage qui pourrait être fait de ce haut lieu de notre histoire parlementaire, où se déroulent les procédures, les débats, les votes qui déterminent l'évolution constitutionnelle de nos institutions, mais je souhaiterais que cette salle puisse tout de même être accessible au public, voire même qu'elle puisse accueillir des manifestations d'intérêt général.

Quant aux amendements adoptés par la commission des lois, aux articles premier et 3, je m'en remettrai à la sagesse de l'Assemblée.

M. Philippe Houillon, président et rapporteur de la commission des lois - Depuis plus de cent ans, le Parlement est affectataire de locaux à Versailles. Je ne reviendrai pas sur l'historique, mon prédécesseur, auquel je rends hommage pour son action à la tête de la commission des lois, l'ayant excellemment fait en première lecture.

A l'Assemblée nationale, la proposition faite par notre Président de réaffecter au public l'ensemble des locaux dont le Parlement dispose à Versailles a recueilli, le 7 avril dernier, un très large consensus. Par ailleurs, une précision apportée par René Dosière a garanti un usage de la salle des Congrès conforme à sa destination, tandis que le dispositif principal de la proposition de loi permet au Parlement d'exercer sa mission de révision de la Constitution en prévoyant une mise à disposition gratuite des locaux nécessaires.

Au Sénat, l'objectif de rendre Versailles au public a également été largement partagé sur tous les bancs, mais nos collègues sénateurs ont fait un sort particulier à la salle du Congrès et à ses accès, en maintenant leur affectation à l'Assemblée nationale et au Sénat.

Là est le point sur lequel les positions de nos deux assemblées diffèrent.

Votre commission des lois vous propose de raisonner en deux temps.

Tout d'abord, le principe d'efficacité et de simplicité commande de revenir à la position de l'Assemblée nationale : tous les locaux, sans exception, doivent être réaffectés à l'établissement public de Versailles, d'autant plus que, s'agissant des périodes de Congrès, M. le ministre a pris des engagements devant nous en première lecture.

Par ailleurs, il faut prendre acte des inquiétudes légitimes du Sénat quant à la disponibilité de la salle des séances. Les engagements du Gouvernement devraient nous rassurer, mais pour aller dans le sens des sénateurs, la commission des lois vous propose d'inscrire dans la loi la limitation de l'usage de la salle des séances aux réunions du Congrès et aux réunions de nature parlementaire.

Reste une question en suspens, celle des ajouts faits à l'article 3 par le Sénat. Celui-ci a souhaité limiter à l'accueil du public l'usage des locaux qui ne sont plus affectés aux assemblées. Toutefois, ces locaux n'étant pas tous susceptibles d'être aménagés pour l'accueil du public - les caves, par exemple - il limite leur usage à l'exercice par l'établissement public de ses missions - conservation, protection, restauration, mise en valeur des collections et de l'architecture des bâtiments, concours à l'éducation et à la recherche, organisation de spectacles. Par ailleurs, il exclut toute affectation en logements de fonction.

La commission des lois a estimé que ces précisions étaient redondantes et emportaient une suspicion malséante, d'autant que les conventions d'application prévues à l'article 3 de la proposition permettront de fixer les règles de la transition et de déterminer les conditions de mise à disposition des locaux en cas de réunion du Congrès.

Nous aurons dans ces conditions un dispositif suffisamment sécurisé et souple pour recueillir, me semble-t-il, l'assentiment de tous. Aussi ne puis-je que vous inviter à adopter cette proposition de loi sous réserve des amendements que je vous présenterai. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe socialiste)

M. Emile Blessig - La réaffectation à l'établissement public du château de Versailles de 25 000 mètres carrés de locaux permet aux assemblées d'offrir aux 3 millions de visiteurs annuels, dont 600 000 élèves, de bien meilleures conditions de visite.

Je ne reviendrai pas sur la place du château dans notre histoire parlementaire, déjà largement évoquée en première lecture, mais je tiens à rendre hommage aux rapporteurs de l'Assemblée nationale et du Sénat pour l'excellence de leurs propos.

Sur le fond, un large consensus se fait sur ce texte qui illustre, pour reprendre les mots de Jean-Louis Debré qui en a pris l'initiative, « l'obligation de la République de vivre avec son temps ».

A ce stade de la discussion, deux modalités d'application restent en discussion : d'une part, les conditions de mise à disposition de la salle des séances, d'autre part, les conditions d'utilisation des locaux non directement accessibles au public. Alors que le Sénat propose que le Parlement dispose d'une « enclave » permanente au château de Versailles, l'Assemblée se contente d'une mise à disposition pour les besoins de la mission parlementaire ou constitutionnelle, ce qui, selon notre groupe, est beaucoup plus logique. Par ailleurs, la loi définissant le cadre de la réaffectation des locaux, il me semble sage que les modalités d'usage des locaux non susceptibles d'accueillir le public soient laissées à la convention. Notre groupe soutiendra donc les amendements de la commission.

Enfin, en réaffectant aux citoyens l'ensemble du château de Versailles, ce texte a une dimension symbolique et démocratique importante ; le Parlement participe ainsi à l'effort de redressement de nos finances publiques en renonçant à l'immobilisation stérile de surfaces considérables, et l'Assemblée se modernise en concentrant ses services autour du Palais Bourbon.

Le groupe UMP votera donc ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. René Dosière - Ce n'est pas un hasard si le Parlement occupe une partie du château de Versailles : c'est là qu'a été fondée la IIIe République et le Sénat créé en 1875 ; c'est là qu'à une voix de majorité la République a été instituée. Nous sommes chez nous à Versailles, même si une présence permanente ne se justifie plus et que des locaux doivent être en effet réaffectés au public - ainsi, par exemple, du bureau du comte de Vergennes, secrétaire d'Etat aux affaires étrangères de Louis XVI, où fut signée en 1783 la déclaration d'indépendance des Etats-Unis.

Si j'ai regretté que notre Président ait été personnellement mis en cause au Sénat...

MM. Guy Geoffroy et Emile Blessig - Tout à fait !

M. René Dosière - ...je note néanmoins l'accord de la Haute assemblée et avec la mise à disposition des locaux à l'établissement public, et avec la « sanctuarisation » de la salle du Congrès, même si le Sénat considère que nous devons rester affectataires de la salle des séances et de ses accès. Je pense quant à moi qu'il est préférable de remettre la gestion de la totalité des locaux à l'établissement public et qu'il convient de préciser que cette salle n'aura pas d'autre affectation que les réunions parlementaires car la République a besoin de hauts lieux symboliques.

Même si les Français ont en ce moment des préoccupations plus urgentes...

M. le Ministre - Ce texte représente aussi des emplois.

M. René Dosière - ...je considère que cette proposition de notre Président, auquel je rends hommage, concourt au bon fonctionnement de nos travaux, pour lequel il est judicieux de concentrer les efforts au Palais Bourbon. Le groupe socialiste la votera telle que modifiée par les amendements de la commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe UMP)

M. Guy Geoffroy - Très bien.

Mme Anne-Marie Comparini - Ce texte n'est pas réductible à la dévolution technique d'un bien. Nous savons tous quel rôle essentiel a joué Versailles dans l'histoire de notre démocratie parlementaire, mais la modernisation et la rationalisation de la gestion publique ne nous permettent pas de gérer comme par le passé un patrimoine aussi immense alors que nous l'utilisons de façon ponctuelle. L'initiative de M. le Président de l'Assemblée nationale est donc conforme à la conception d'un Etat modeste et moderne tout en servant le projet ambitieux du « Grand Versailles ». Elle permettra à nos concitoyens, qui manifestent un regain d'intérêt pour la fréquentation des lieux chargés de leur histoire, de revivre ses grandes heures.

Le texte adopté en première lecture a le mérite d'exposer clairement nos décisions et de poser le principe de la « sanctuarisation » de la salle du Congrès. Le renoncement aux locaux du Congrès ne doit en effet pas faire obstacle à l'organisation de celui-ci.

Les modalités d'application de nos décisions requièrent certes une convention avec l'établissement public qui en devient propriétaire : les préoccupations exprimées par nos collègues sénateurs éclaireront son élaboration. Le maintien de la proposition de loi dans sa pureté cristalline originelle,...

M. le Rapporteur et M. René Dosière - Belle formule !

Mme Anne-Marie Comparini - ...améliorée par les deux amendements de notre rapporteur et de M. Dosière, me paraît cependant la meilleure solution. C'est dans cet esprit que je voterai ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

La discussion générale est close.

M. le Président - J'appelle maintenant dans le texte du Sénat les articles de la proposition de loi sur lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

ARTICLE PREMIER

M. le Rapporteur - L'amendement 1 tend à revenir au texte de l'Assemblée nationale, qui prévoit la mise à disposition, et non l'affectation que souhaitait le Sénat.

Afin de tenir compte de la position de nos collègues sénateurs, nous avons cependant spécifié que « la salle des séances du Congrès est réservée aux réunions de ce dernier et aux réunions parlementaires. » Précisons qu'il ne s'agit évidemment pas d'empêcher les visites !

M. le Ministre - Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

M. René Dosière - Plusieurs de mes collègues m'ont fait l'amabilité de me désigner comme l'auteur de l'amendement sur la « sanctuarisation » de la salle du Congrès. S'il porte mon nom, je tiens cependant à préciser que c'est du groupe socialiste qu'émanait cette proposition dont l'auteur initial fut, il me paraît important de le dire aujourd'hui, Laurent Fabius. (Sourires)

L'amendement 1, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - A l'unanimité.

L'article premier ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 3

M. le Rapporteur - L'amendement 2 vise à supprimer les deux derniers alinéas de cet article, dont certaines dispositions sont redondantes, tandis que d'autres pourraient apparaître comme suspicieuses. Laissons la convention régler les modalités de transfert et de mise à disposition des locaux.

M. le Ministre - Sagesse.

L'amendement 2, mis aux voix, est adopté.

L'article 3 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - A l'unanimité.

L'ensemble de la proposition de loi, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre - Sans provocation aucune, je tiens à vous remercier. L'extension du périmètre confié à l'Etablissement public du domaine de Versailles est un grand projet culturel, politique, mais aussi économique. Nous devons avoir une conception stratégique et audacieuse de l'utilisation de l'ensemble de notre patrimoine : il en va de l'attractivité de notre pays et de l'emploi. Cette charge que vous nous confiez est donc une chance pour le rayonnement culturel et artistique de la France, mais aussi pour le développement de l'emploi culturel. (Applaudissements sur tous les bancs)

La séance, suspendue à 10 heures 5, est reprise à 10 heures 10.

APPROBATION D'UN ACCORD ET
DE DEUX CONVENTIONS INTERNATIONAUX

L'ordre du jour appelle le vote, selon la procédure d'examen simplifié, sur trois projets de loi, dont deux adoptés par le Sénat.

M. le Président - Conformément à l'article 107 du Règlement, je vais mettre aux voix l'article unique de chacun de ces textes.

L'article unique de l'accord France-Italie sur les exemptions fiscales en faveur des établissements culturels et d'enseignement, mis aux voix, est adopté, de même que l'article unique de la convention fiscale France-Croatie et l'article unique de la convention fiscale France-Albanie.

PRIVILÈGES ET IMMUNITÉS D'ATHÉNA

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi autorisant l'approbation de la décision des représentants des gouvernements des Etats membres, réunis au sein du Conseil le 28 avril 2004, concernant les privilèges et immunités accordés à Athéna.

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie - Afin de faciliter la mise en œuvre de la politique européenne de sécurité et de défense - PESD -, en particulier le financement des opérations de gestion des crises militaires, le Conseil a créé le 23 mai 2004 un mécanisme de gestion du financement des coûts communs des opérations ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense, dénommé Athéna. Ces opérations s'intègrent dans les « missions de Petersberg » définies par le traité sur l'Union européenne. Le présent texte complète le dispositif technique destiné à faciliter leur gestion.

La PESD étant désormais opérationnelle, ses opérations sont devenues plus fréquentes - opérations Concordia en Macédoine et Artémis en République démocratique du Congo en 2003, opération Althéa en Bosnie-Herzégovine depuis la fin 2004. Souvent gérées dans l'urgence, elles impliquent une coordination avec d'autres acteurs internationaux.

Le traité sur l'Union européenne ne permettant pas le financement sur le budget communautaire des dépenses afférentes à des opérations ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense, il était nécessaire de définir le cadre d'un financement ad hoc des coûts communs des opérations militaires de l'Union, notamment ceux de l'utilisation de quartiers généraux multinationaux et du déploiement des forces.

Structure légère mise en place au sein du Secrétariat du Conseil le 1er mars 2004, le mécanisme Athéna est géré par un administrateur sous l'autorité d'un comité spécial qui assure la représentation des Etats membres. Il est doté de la capacité juridique nécessaire pour détenir un compte bancaire, acquérir des biens, conclure des contrats et ester en justice, et dispose d'un budget annuel. Les recettes sont fournies par les Etats membres, voire, en fonction des opérations, par des Etats tiers. La décision créant le mécanisme est révisable tous les dix-huit mois.

Afin d'en assurer le bon fonctionnement, il faut le doter de règles et d'un statut équivalent à celui des autres institutions ou organes du même type. Tel est l'objet précis de cet accord intergouvernemental conclu par le Conseil le 28 avril 2004.

Il prévoit ainsi différentes exemptions en matière fiscale et permet au mécanisme Athéna de bénéficier des exonérations prévues par la législation communautaire en vigueur. Il assure l'immunité des biens, fonds et avoirs d'Athéna. Les biens appartenant à Athéna ou gérés par Athéna au nom des Etats membres sont exonérés de tout impôt direct. Athéna peut communiquer librement, y compris par courrier chiffré, et utiliser une valise diplomatique. Enfin, ses archives sont inviolables.

L'entrée en vigueur de cette décision était prévue au 1er novembre 2004, à condition que tous les Etats aient transmis leur instrument d'approbation. Les Pays-Bas, l'Irlande, la Suède et l'Autriche l'ont déjà fait.

Le système mis en place permettra d'éviter de créer dans l'urgence un cadre ad hoc pour chaque opération. Le mécanisme Athéna a pour fonction de stabiliser le concept de coûts communs et de limiter les montants des avances à effectuer par la nation cadre d'une opération ; il convenait, pour le bien de l'Union, de le faire bénéficier des privilèges et immunités prévus par l'accord aujourd'hui soumis à votre approbation.

M. François Loncle, suppléant M. Jean Glavany, rapporteur de la commission des affaires étrangères - La relève par l'Union européenne, le 2 décembre 2004, de la force de l'OTAN en Bosnie représente davantage qu'une mission supplémentaire pour la politique européenne de sécurité et de défense. Elle est symbolique d'une politique qui n'existait pas il y a quelques années et qui est aujourd'hui une réalité, institutionnelle et opérationnelle.

Reste à inscrire cette action dans un cadre pérenne. Juridique tout d'abord, et c'est pourquoi notre Assemblée a approuvé le 29 novembre dernier l'accord conférant un statut aux forces armées placées sous la bannière de l'Union. Budgétaire ensuite, et c'est le sujet de notre débat, à travers la décision concernant les privilèges et immunités accordés à Athéna, mécanisme de gestion qui permet la mise en œuvre rapide d'une décision prise par le Conseil concernant une opération.

Le financement des opérations militaires de l'Union était jusqu'alors assuré sur une base ad hoc. Ce fut le cas, par exemple, pour l'opération Concordia en Macédoine. Les limites d'un tel système sont rapidement apparues. Le mécanisme Athena, créé par décision du Conseil le 23 février 2004, constitue un instrument permanent. En outre, il tient compte de la diversité des formats d'intervention, liée à la présence d'Etats, comme le Danemark, qui ne participent pas à la politique européenne de sécurité et de défense, ou au fait que certains ne veulent pas participer à telle opération. Il fallait également prévoir un système ouvert, permettant à des Etats non membres de l'Union de participer. Enfin, le mécanisme de financement des opérations devait prendre en compte le cas où l'Union intervient avec des moyens de l'OTAN dans le cadre des accords dits de «  Berlin Plus ».

Pour répondre à ces contraintes diverses, le mécanisme Athéna repose sur le principe de la mutualisation des coûts communs : les dépenses entrant dans son périmètre sont financées selon la clé du produit national brut ; les autres sont à la charge de l'Etat membre qui met à disposition ses moyens nationaux, en application de la règle, valable à l'OTAN, d'imputation des coûts à son auteur.

Pour faciliter son bon fonctionnement dans le seul intérêt de l'Union européenne et de ses Etats membres, le Conseil, dans sa décision du 28 avril 2004, a accordé à Athéna des privilèges et immunités reconnues à d'autres offices, centres ou agences, par exemple Europol ou le Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme.

Même s'il est important - 70 millions en 2005 -, le budget d'Athéna est limité par rapport au budget militaire de fonctionnement de l'OTAN - 920 millions d'euros. Mais il ne finance qu'une fraction des coûts liés à la politique européenne de sécurité et de défense ; et cette comparaison n'enlève rien au mérite du mécanisme, qui concilie la nécessité pour l'Union de mobiliser rapidement les fonds nécessaires avec le caractère intergouvernemental du budget de gestion des crises, condition d'un contrôle effectif par les Parlements nationaux, donc de l'adhésion des opinions publiques à cette nouvelle dimension de l'Europe.

C'est pourquoi la commission des affaires étrangères, sur la recommandation de son rapporteur, a adopté ce projet le 23 mars dernier et vous demande de faire de même.

M. Bruno Bourg-Broc - L'examen de ce projet prend un relief particulier dans le contexte européen actuel, marqué par les revers successifs subis par le traité constitutionnel. Le crédit européen de notre pays est malheureusement entamé, et nous avons l'ardente obligation de redonner consistance à notre engagement pro-européen.

Il s'agit ici de donner une nouvelle impulsion au développement d'une Europe-puissance, à travers la politique de sécurité et de défense commune. Il convenait de mettre en place une structure durable, donnant à cette politique toute sa crédibilité, notamment face à l'Alliance atlantique : c'est tout l'enjeu du mécanisme Athéna, qui joue soit pour les surcoûts qui ne peuvent être imputés à un Etat en particulier, comme le fonctionnement d'un état-major, soit pour certaines catégories de dépenses facilement identifiables mais qui sont incluses dans la liste des coûts communs afin de faciliter le déploiement des capacités rares ou peu disponibles, comme les évacuations sanitaires ou les opérations de déminage. Cette mutualisation des coûts communs a également l'avantage d'échapper à la complexité d'un système de financement à clés multiples.

Le bon fonctionnement d'Athéna nécessite la reconnaissance de certains privilèges et immunités classiques, définis par la décision du Conseil du 28 avril 2004. Nous avons donc à nous prononcer sur un texte dont la mise en œuvre contribuera à la pérennisation du financement des opérations de l'Union européenne et à la réduction du temps nécessaire au financement des coûts communs. C'est un pas essentiel sur le chemin de l'efficacité et de la crédibilité de la politique européenne de sécurité et de défense. Le groupe UMP votera bien sûr ce projet, certes technique, mais aussi éminemment politique. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

L'article unique du projet, mis aux voix, est adopté.

CONVENTION EUROPÉENNE SUR LE PATRIMOINE AUDIOVISUEL

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi autorisant l'approbation de la convention européenne relative à la protection du patrimoine audiovisuel et de son protocole sur la protection des productions télévisuelles.

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie - Dans le cadre du Conseil de l'Europe, la convention relative à la protection du patrimoine audiovisuel et son protocole sur la protection des productions télévisuelles ont été adoptés à Strasbourg le 8 novembre 2001 et signés par la France le 14 mars 2002.

Ces accords se placent dans la logique de coopération culturelle du Conseil de l'Europe qui, dès ses débuts, a fait du cinéma un de ses domaines d'intervention majeure, logique qui a conduit à l'adoption de la convention européenne relative à la protection du patrimoine immatériel et de son protocole sur la protection des productions télévisuelles, premiers instruments internationaux contraignants en la matière.

Le patrimoine audiovisuel visé par la présente convention comprend exclusivement les œuvres cinématographiques, définies comme « des images en mouvement de toute durée, en particulier les œuvres cinématographiques de fiction, d'animation et les documentaires, destinées à être diffusées dans les salles de spectacle cinématographique ».

Afin de le préserver et le conserver, la convention instaure un système de dépôt légal. Il s'agit, pour les Etats, de faire déposer les images en mouvement faisant partie de son patrimoine audiovisuel, produites ou coproduites sur son territoire, auprès d'un organisme d'archives qui doit en assurer la conservation, la documentation, la restauration et la mise à disposition à des fins de consultation. À ces obligations s'ajoute celle de la mise à disposition pour des consultations à des fins scientifiques, culturelles ou de recherche, tout en respectant les législations nationales et internationales en matière de droits d'auteur.

Par ailleurs, la convention prévoit que les modalités d'application du dépôt légal aux images en mouvement autres que les œuvres cinématographiques seront précisées dans des protocoles. Celui sur la protection des productions télévisuelles a ainsi pour objectif de faire appliquer aux productions télévisuelles les principes de la convention en instaurant un système de dépôt légal obligatoire auprès d'un organisme dépositaire, pour les productions télévisuelles faisant partie du patrimoine audiovisuel d'un Etat, après l'entrée en vigueur du protocole.

La France, pionnière en matière de dépôt légal, ne pouvait que soutenir cette initiative, susceptible de donner corps à la notion de patrimoine audiovisuel européen. Dès le début des années 1990, la législation et la gestion du dépôt légal se sont organisées en France dans un double souci de sauvegarder le patrimoine audiovisuel national et de le mettre à disposition du public. C'est ainsi que la loi relative au dépôt légal a été adoptée le 20 juin 1992.

Le Centre national de la cinématographie est responsable de la collecte et de la conservation des œuvres cinématographiques. La Bibliothèque nationale de France a été créée avec la volonté d'être présente dans le milieu audiovisuel, tandis que l'Institut national de l'audiovisuel formalise la mise en place du dépôt légal pour les œuvres télévisuelles. En outre, depuis les années 2000, ces institutions travaillent sur la numérisation et la valorisation de ce patrimoine.

Telles sont les principales dispositions du projet soumis à votre approbation. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Martine Aurillac, suppléant M. Jean-Marc Nesme, rapporteur de la commission des affaires étrangères - Je vous prie d'excuser notre rapporteur, M. Jean-Marc Nesme, empêché, que je remplace.

L'objectif poursuivi par le Conseil de l'Europe est simple : généraliser le système du dépôt légal, pour écarter le risque de voir disparaître certaines œuvres du patrimoine audiovisuel européen.

Le patrimoine audiovisuel concerne non seulement le cinéma, mais également la télévision, la vidéo, les produits du multimédia, ainsi que d'autres produits issus des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Pour protéger ce vaste ensemble, la convention s'applique à l'ensemble des « images en mouvement », conformément à une notion définie par l'UNESCO.

Les modalités d'application du dépôt légal aux images en mouvement autres que les œuvres cinématographiques devaient être précisées dans des protocoles élaborés ultérieurement. Le premier conclu à cette fin, qui concerne la protection des productions télévisuelles, a été joint à la convention dans le cadre de la procédure d'approbation par les autorités françaises.

Dès l'entrée en vigueur de la convention, chaque partie est tenue d'instituer un système de dépôt légal pour toutes les œuvres cinématographiques. Si aucun système d'échantillonnage ne peut leur être appliqué, pour assurer une protection absolue, le protocole sur la protection des productions audiovisuelles prévoit, compte tenu de la masse d'images produites pour la télévision, un échantillonnage dont les règles doivent être définies par les Etats.

Les modalités des trois obligations imposées - la conservation, la restauration et la disponibilité à des fins scientifiques, culturelles et de recherche - doivent être définies par le droit interne de chaque partie. Celui-ci devra tenir compte de l'ensemble des intérêts publics dans les limites du respect des droits d'auteur et des droits voisins.

Le dépôt légal prévu par la convention concerne les images en mouvement destinées à être montrées au public. Cette formule inclut dans le champ d'application de la convention d'éventuelles œuvres inachevées ou non distribuées au public, notamment à cause de la censure. La convention ne crée aucune obligation s'agissant des produits non nationaux. Toutefois, chaque partie reste libre d'étendre la portée du dépôt légal volontaire et de décider de recueillir le dépôt des images en mouvement distribuées sur son territoire national.

Quant à la transposition de ces nouveaux instruments dans le droit français, rappelons que la France satisfait d'ores et déjà aux obligations énumérées par la convention et son protocole, avec la Cinémathèque française, fondée en 1936 et dépositaire aujourd'hui de plus de 40 000 films, 120 courts-métrages, 1 500 objets et 1 000 costumes, avec la loi du 20 juin 1992, modifiée par l'ordonnance du 20 février 2004, et le décret du 31 décembre 1993, qui régissent le dépôt légal sur le territoire français et en ont confié la charge au Centre national de la cinématographie, à la Bibliothèque nationale de France, à l'Institut national de l'audiovisuel et aux services du ministère de l'intérieur.

Afin de satisfaire pleinement aux stipulations de la convention et du protocole, il faudra cependant modifier le code de l'industrie cinématographique, afin que l'ensemble des œuvres cinématographiques, quel que soit leur support, soient déposées auprès du Centre national de la cinématographie. Il faudra également modifier la loi du 20 juin 1992 et le décret du 31 décembre 1993 afin d'étendre l'obligation de dépôt légal aux œuvres n'ayant pas été diffusées en salle, et imposer le dépôt légal des œuvres cinématographiques coproduites sur le territoire national, mais présentées pour la première fois au public dans un autre pays.

La France, vous le savez tous, est très attachée au principe de la diversité culturelle et s'engage avec force contre l'uniformité des productions cinématographiques et audiovisuelles. En consacrant l'objectif de protection du patrimoine audiovisuel, ces deux textes constituent incontestablement un progrès en la matière. Pour cette raison, la commission vous demande de bien vouloir adopter le projet de loi qui nous est soumis. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Bruno Bourg-Broc - La France, chacun le sait, a toujours été au premier rang pour défendre et promouvoir la diversité culturelle. Dans cet esprit, le projet de loi qui nous est soumis vise à généraliser la conservation des images en instaurant un dépôt légal des films de cinéma et de télévision dans l'ensemble des Etats membres du Conseil de l'Europe.

Le dépôt légal constitue une avancée notable en faveur du patrimoine audiovisuel, qu'il s'agisse des productions audiovisuelles « en mouvement », du cinéma, bien évidemment, mais aussi de la télévision, de la vidéo, des produits du multimédia, de l'interactivité et des autres produits issus des nouvelles technologies.

La convention qu'il s'agit d'approuver permet donc d'assurer la sauvegarde du patrimoine audiovisuel européen en généralisant le système du dépôt légal afin d'écarter le risque de voir disparaître certaines œuvres audiovisuelles, expression de la diversité, de la richesse et du foisonnement artistique et culturel de nos peuples. Afin d'éviter des coûts financiers trop importants, elle ne prévoit pas pour autant, et certains pourront le regretter, de rétroactivité quant à l'obligation de dépôt légal pour chaque partie.

On ne peut que se féliciter qu'une certaine liberté soit laissée aux parties en matière de conservation, de restauration et de disponibilité à des fins scientifiques, culturelles et de recherche de chaque œuvre déposée. Ces trois obligations prévues pas la convention relèvent du droit interne de chaque partie.

La France assurait déjà la sauvegarde de son héritage audiovisuel : la loi du 20 juin 1992 et son décret d'application régissent le dépôt légal qui s'applique à toutes les sortes de documents - imprimé, photographique, sonore, audiovisuel... - dès lors qu'ils sont mis à la disposition du public. Les organismes dépositaires sont le Centre national de la cinématographie, la Bibliothèque nationale de France, l'Institut national de l'audiovisuel et le ministère de l'intérieur. Ce nouveau texte nécessitera quelques ajustements : ainsi, les œuvres cinématographiques sur support numérique par exemple, qui sont aujourd'hui déposées à la Bibliothèque nationale de France, pourront l'être au Centre national de la cinématographie après une légère modification du code de l'industrie cinématographique.

En matière de promotion et de sauvegarde de sa création, la France a souvent été parmi les pionniers ; il ne faut donc plus tarder à approuver cette convention. Au nom de l'efficacité et de la diversité culturelle, le groupe UMP émettra bien sûr un avis favorable envers ce dispositif, qui s'inscrit pleinement dans l'ambition de promouvoir un système mondial fait de cultures variées s'enrichissant mutuellement. (Applaudissements)

M. François Loncle - Le groupe socialiste votera aussi cette convention, et je m'en réjouis d'autant plus qu'elle a été élaborée par le Conseil de l'Europe. J'en profite pour souhaiter, avec tous les autres membres de la délégation française au Conseil de l'Europe, que les parlements nationaux se saisissent plus souvent des textes votés par son assemblée parlementaire, notamment pour tout ce qui concerne les droits de l'homme, la culture et le patrimoine.

L'article unique du projet de loi, mis aux voix, est adopté.

Prochaine séance, mardi 14 juin, à 9 heures 30.

La séance est levée à 10 h 50.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      François GEORGE

ORDRE DU JOUR
DU MARDI 14 JUIN 2005

À 9 HEURES 30 : 1ère séance publique

- Discussion de la proposition de loi de Mme Martine AURILLAC et plusieurs de ses collègues relative au droit de préemption des locataires en cas de vente d'un immeuble.

À 15 HEURES : 2ème séance publique

1. Questions au Gouvernement.

2. Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi organique, adopté par le Sénat, relatif aux lois de financement de la sécurité sociale.

3. Discussion du projet de loi relatif au développement des services à la personne et à diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.

À 21 HEURES 30 : 3ème séance publique

- Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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