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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 18 JUILLET 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du mercredi 17 juillet 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Rappel au règlement «...».
MM. André Gerin, le président.
2.  Sécurité intérieure. - Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi d'orientation et de programmation «...».
M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

DISCUSSION DES ARTICLES «...»
Article 1er «...»

MM.
Patrice Martin-Lalande,
Éric Jalton,
Bertho Audifax,
Jean Dionis du Séjour,
Pierre Lellouche,
Robert Lamy,
Léonce Deprez,
Christian Vanneste,
Christian Philip,
Jean-Marie Le Guen,
André Gerin,
Pierre Cardo.
Amendement de suppression n° 85 de Mme Royal : Mme Ségolène Royal, MM. Pascal Clément, président de la commission des lois ; Christian Estrosi, rapporteur de la commission des lois ; le ministre, Jean-Pierre Blazy. - Rejet.
Amendement n° 87 de M. Mamère : MM. Noël Mamère, le rapporteur, le ministre, Pierre Cardo. - Rejet.

Amendements à l'annexe I

L'amendement n° 88 de M. Mamère tombe.
Amendement n° 74 de M. Mamère : MM. Noël Mamère, le rapporteur, le ministre, Mme Christine Boutin. - Rejet.
Amendement n° 89 de M. Mamère : MM. Noël Mamère, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 90 de M. Mamère : MM. Noël Mamère, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 34 rectifié de la commission des lois : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 93 de M. Mamère : MM. Noël Mamère, le rapporteur, le ministre, Christophe Caresche. - Rejet.
Amendement n° 91 de M. Mamère : MM. Noël Mamère, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 48 de M. Blazy : MM. Jean-Pierre Blazy, le rapporteur, le ministre, Noël Mamère, Jean-Christophe Lagarde, Pierre Cardo. - Adoption.
Amendement n° 58 de M. Caresche : MM. Christophe Caresche, le rapporteur, le ministre, Gérard Léonard. - Rejet.
Amendement n° 49 de M. Blazy : MM. Jean-Pierre Blazy, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements n°s 17 rectifié et 16 rectifié de M. Salles : MM. Rudy Salles, le rapporteur, le ministre, Gérard Léonard. - Retrait de l'amendement n° 17 rectifié ; adoption de l'amendement n° 16, deuxième rectification.
Amendement n° 32 rectifié du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur, Jean-Pierre Blazy. - Adoption.
Amendement n° 30 rectifié de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 25 rectifié de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, MM. le rapporteur, le ministre, Noël Mamère, Jean-Pierre Blazy, Jean-Christophe Lagarde. - Adoption.
Amendement n° 123 de M. Lagarde : MM. Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 108 corrigé de M. Christ : MM. Michel Sordi, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 2 de la commission des lois : MM. le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Blazy. - Adoption.
Amendement n° 50 de M. Blazy : MM. Jean-Pierre Blazy, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

PRÉSIDENCE DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE

Amendements n°s 61 de M. Caresche et 110 de M. Lagarde : MM. Christophe Caresche, Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, le ministre. - Retraits.
Amendement n° 62 corrigé de M. Caresche : MM. Christophe Caresche, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 63 de M. Caresche : MM. Christophe Caresche, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 21 rectifié de M. Salles : MM. Rudy Salles, le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Blazy. - Retrait.
Amendement n° 64 de M. Caresche : MM. Christophe Caresche, le rapporteur, le ministre, Pierre Cardo. - Rejet.
Amendement n° 51 rectifié de M. Blazy : MM. Jean-Pierre Blazy, le rapporteur, le ministre.
Amendement n° 107 de M. Moyne-Bressand : MM. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis de la commission de la défense ; le ministre, Jérôme Rivière, Jean-Pierre Blazy, André Gerin. - Retrait de l'amendement n° 107 ; rejet de l'amendement n° 51 rectifié.
Amendement n° 65 corrigé de M. Caresche : MM. Christophe Caresche, le rapporteur, le ministre, Gérard Léonard, Pierre Cardo, Marc Le Fur. - Rejet.
Amendement n° 35 de la commission des lois : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 121 de M. Lagarde : MM. Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, le ministre, Christophe Caresche, Pierre Cardo. - Retrait.
Amendement n° 111 de M. Lagarde : MM. Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 111 rectifié.
Amendement n° 92 de M. Mamère : MM. Noël Mamère, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 66 de M. Caresche : MM. Christophe Caresche, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 94 de M. Mamère : MM. Noël Mamère, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 112 de M. Lagarde : MM. Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 36 de la commission des lois : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 80 de M. Caresche : MM. Christophe Caresche, le rapporteur, le ministre, Jérôme Rivière. - Rejet.
Amendement n° 84 de M. Caresche : MM. Christophe Caresche, le rapporteur, le ministre, Jean-Christophe Lagarde, M. Rudy Salles. - Rejet.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
3.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Rappel au règlement

    M. le président. La parole est à M. André Gerin, pour un rappel au règlement.
    M. André Gerin. Monsieur le président, je voudrais, en vertu de l'article 58, alinéa 2, ...
    M. François Goulard. Comme par hasard !
    M. André Gerin. ... adresser trois remarques à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    M. Robert Pandraud. Un rappel au règlement s'adresse au président et non à un ministre ! Je suis un spécialiste !
    M. Jean-Pierre Brard. M. Pandraud est frustré !
    M. le président. C'est en effet à moi que s'adressent les rappels au règlement, monsieur Gerin.
    M. André Gerin. Vous avez raison, monsieur le président : j'ai manqué à tous mes devoirs !
    M. le président. Et j'imagine que vous intervenez au nom du groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. Gérard Hamel. Et républicains, surtout !
    M. André Gerin. J'interviens en effet au nom de ce groupe, monsieur le président.
    J'ai donc trois remarques à faire à propos de la fin de séance d'hier.
    Premièrement, j'ai le sentiment d'avoir été méprisé en tant que membre de la représentation nationale. (« Mais non ! » sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Mes chers collègues, laissez M. Gerin faire son rappel au règlement.
    M. André Gerin. Je sais ce qu'est la lutte contre l'insécurité et, étant donné la conception que je m'en fais, je n'entends pas sacrifier à la langue de bois. Toutefois, je crois que nous pouvons avoir des points de vue différents.
    M. Yves Nicolin. C'est bien le cas !
    M. André Gerin. Deuxièmement, je dirai que si, pour plaire et pour séduire, il faut faire du Tony Blair, vous ne devez pas compter sur nous. C'est en suivant cette pente que la gauche a échoué.
    M. François Goulard. Cela vous regarde ! C'est votre problème !
    M. André Gerin. Troisièmement, j'estime qu'il est important que l'opposition se sente respectée. Nous pouvons, d'un point de vue républicain, partager le même diagnostic sur ces problèmes, tout en ayant des points de vue divergents sur les réponses à y apporter. C'est très important pour le débat politique et républicain et, bien entendu, pour le respect des personnes, car il s'agit d'une question d'éthique,...
    M. Pierre Lellouche. Ce n'est pas le cas pour M. Mamère !
    M. André Gerin. ... de morale politique, chacun détenant sa part de vérité et ayant une certaine idée de la liberté et de l'éducation. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. François Goulard. Je suis persuadé qu'il n'a rien compris à ce qu'il a lu !

2

SÉCURITÉ INTÉRIEURE

Suite de la discussion,
après déclaration d'urgence,
d'un projet de loi d'orientation
et de programmation

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (n°s 36, 53).
    La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le président, je répondrai à tous les orateurs qui sont intervenus dans la longue, fructueuse et intéressante discussion que nous avons eue hier et qui nous a occupés jusque tard dans la nuit.
    J'indiquerai d'abord à M. André Gerin qu'il ne doit voir dans mes propos aucune marque de mépris à l'égard de quiconque, et surtout pas à son endroit ; nous sommes nombreux ici à l'apprécier pour ses qualité personnelles.
    Mais que les choses soient claires : je n'ai pas l'intention d'entendre des discours dans lesquels, successivement, je suis mis en cause dans ma volonté, accusé d'abuser des pauvres, de ne rien comprendre à la situation sociale, de passer à côté des réalités du pays, et, à la fin, de devoir vous dire merci. (« Très juste ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Moi, monsieur Gerin, je vous respecte, et je considère comme parfaitement normal qu'un débat s'instaure entre nous. Ce n'est pas parce que vous faites partie de la minorité...
    M. Jean-Pierre Brard. Provisoirement !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Bien sûr, provisoirement.
    Ce n'est pas parce que vous faites partie de la minorité, dis-je, que vous n'avez pas le droit de parler. Toutefois, ne vous étonnez pas que, si la charge est forte, la réponse soit à la hauteur ! (Applaudissement sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) En ce qui me concerne, je n'ai pas vu mépris de votre part quand vous m'avez critiqué et attaqué ; je ne vois pas pourquoi la réciproque ne serait pas vraie.
    M. Lionnel Luca. Parfait !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Si vous voulez que la confrontation des idées donne lieu à une charge forte, je répondrai présent. Si vous voulez que cette charge se situe un cran en dessous, eh bien, commencez par donner le ton et nous nous entendrons certainement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    S'agissant de Tony Blair, je crois savoir qu'il est responsable des socialistes anglais. Dois-je donc en conclure qu'il n'est pas confortable pour les communistes de gouverner avec les socialistes ? (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Il se trouve qu'à chaque campagne électorale, le parti socialiste a invité Tony Blair en France. L'expérience semble vous servir : eh bien, que le parti communiste poursuive sa route de façon autonome !
    S'agissant de la discussion générale - et je vous remercie, monsieur le président, d'avoir présidé vous-même pendant les nombreuses heures durant lesquelles s'est déroulée cette discussion -, elle a témoigné de l'intérêt que porte chacun des groupes aux questions de sécurité. Bien sûr, la situation est difficile et les sujets abordés sont complexes, mais je crois que, à une exception près - l'intéressé n'est pas encore là -, les débats ont été dignes, intéressants, et ils ont permis au Gouvernement de prendre connaissance des remarques de chacun.
    Monsieur Estrosi, je tiens à vous remercier pour la qualité de votre travail et pour vos propositions, qui sont inspirées par une très bonne connaissance du terrain et par l'intérêt que vous portez depuis longtemps aux questions de sécurité.
    M. Jean-Pierre Brard. Il laboure !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Oui, nous voulons placer le maire au coeur du dispositif. Nous sommes favorables à une coopération avec la police municipale, dans un souci de complémentarité, et nous restons disponibles si vous-même, ou tout autre parlementaire souhaitez, à l'automne, compléter les textes sur la police municipale. Par ailleurs, un certain nombre de décrets n'ont pas encore été pris, mais nous sommes prêts à les prendre.
    M. Daniel Vaillant. C'est dangereux !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Vous connaissez la limite fixée par le Gouvernement : il ne doit pas y avoir de municipalisation de la police nationale.
    M. Bruno Le Roux. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je sais du reste que vous ne demandez pas cela.
    Oui, nous voulons traiter la question des gens du voyage.
    Oui, nous sommes favorables, comme vous le suggérez, à la levée du secret professionnel entre l'administration fiscale et les GIR, lorsque la situation l'exige ; il suffit, pour cela, d'un amendement.
    Enfin, c'est vrai, rien ne sera possible sans la justice. Mais le garde des sceaux aura l'occasion de vous présenter lui-même ses projets.
    M. Moyne-Bressand, je vous remercie pour l'analyse très fine que vous avez faite d'une situation que vous connaissez bien. Vous avez évoqué très en détail la question du transfert des détenus. C'est une question particulièrement dramatique quand on songe qu'un jeune fonctionnaire, dont M. Vaillant a parlé lui aussi, se trouve aujourd'hui à Nice entre la vie et la mort à la suite d'un transfert de détenus ; on ne peut que former des voeux pour sa santé.
    Je ne peux pas vous répondre aussi rapidement que je l'aurais souhaité, car c'est un sujet très lourd en termes d'effectifs, et je ne veux en aucun cas mettre en difficulté mon collègue le garde des sceaux. Chacun comprendra que la question du transfert de la charge d'un détenu d'une administration à l'autre doit se régler sous l'arbitrage du Premier ministre, en plein accord entre le ministre de l'intérieur et le garde des sceaux. Nous n'avons rien à gagner à une opposition stérile que mes prédécesseurs ont si souvent connue. Du reste, le Premier ministre a décidé que des décisions en ce domaine seraient prises à la fin de l'année.
    Vous avez également évoqué la possibilité d'expérimenter. Pourquoi pas ? Peut-être s'agit-il d'une bonne idée. D'autres idées peuvent aussi être avancées. Ainsi, peut-être serait-il nécessaire que les centres hospitaliers régionaux disposent de chambres adaptées à la situation très particulière des détenus qui viennent s'y faire soigner.
    M. Jacques Masdeu-Arus. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. En effet, le personnel hospitalier n'est pas là pour garder des détenus.
    Il ne s'agit pas de changer toutes les chambres de tous les hôpitaux ni de créer de telles chambres dans tous les hôpitaux, mais uniquement dans les grands hôpitaux. Peut-être serait-ce une réponse adaptée, un premier pas dans le bon sens.
    Je suis conscient que l'encadrement dans la gendarmerie est moitié moindre que dans les autres corps d'armée, qu'il s'agisse de l'armée de terre, de la marine ou de l'armée de l'air. Cette question sera résolue en agissant sur les effectifs. Je sais pouvoir compter sur votre soutien.
    Monsieur Joyandet, vous avez insisté sur le soutien que vous apportez à notre démarche. Je vous en remercie. Vous avez noté que la lutte contre l'insécurité n'était pas uniquement financière, et vous avez parfaitement raison.
    S'agissant des rivalités entre la police et la gendarmerie, j'ai l'impression qu'elles appartiennent plus à l'histoire, à une forme de tradition, qu'à la réalité. Si j'en juge par le témoignage apporté par un très grand nombre d'entre vous, j'ai le sentiment que, sur le terrain, cela se passe beaucoup mieux qu'on ne le dit. Je suis stupéfait, au bon sens du terme, que toutes ces petites rivalités, qui appartiennent plutôt au folklore et à la tradition qu'à la réalité, aient été finalement balayées par la qualité professionnelle et l'engagement des gendarmes et des policiers, qui ont bien compris l'intérêt qu'ils avaient à travailler ensemble.
    En ce qui concerne l'évaluation, le Gouvernement sera attentif aux propositions de M. Joyandet. Elles vont dans le sens d'une véritable modernisation et nous en tiendrons le plus grand compte.
    Certaines des interventions des orateurs socialistes ont été constructives et ont montré que nous pouvions faire un bout de chemin ensemble. J'ai souligné combien j'appréciais la pondération des interventions de M. Dray, de M. Valls ou de M. le ministre Vaillant. Mais autant je comprends le raisonnement qui sous-tend ces interventions, autant leur conclusion m'échappe. Ainsi, monsieur Vaillant, on dit sur tous les tons que je vous copie. Vous-même, dans un article inimitable, avez écrit : « Sarkozy me copie ». Pourquoi pas ?
    M. Lionnel Luca. On espère que non !
    M. Pierre Lellouche. Les Français ne le souhaitent pas !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je n'ai pas d'ego. Si c'est ce que vous pensez, je le respecte. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Monsieur Vaillant, après avoir dit avec tant de talent que je vous copiais, il va de soi que vous allez voter un texte que j'ai intégralement pompé ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Daniel Vaillant. Vous n'avez pas copié suffisamment !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est la seule conclusion que l'on peut tirer de l'article que j'ai cité : il n'y en a pas d'autre. Après tout, on est plus intelligent à plusieurs que tout seul !
    Si ce que vous n'avez pas réussi à faire en cinq ans,...
    M. Daniel Vaillant. En deux ans !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... je peux le faire en deux mois, tant mieux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Si, en plus, cela peut vous faire plaisir, je ne suis vraiment pas contrariant ! Si tout ce que je propose est inspiré de ce que vous vouliez faire,...
    M. Daniel Vaillant. Pas tout, hélas !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... de ce que vous aviez prévu de faire, de ce que vous souhaitiez faire, de ce qui se trouvait dans vos cartons, du papier que vous avez eu l'amabilité et la courtoisie de me remettre et que j'ai suivi intégralement, votre vote ne pourra qu'être plus enthousiaste encore que celui des groupes de l'UMP et UDF réunis ! (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Finalement, il y a toujours plus de joie pour le rallié de la dernière heure que pour celui qui était déjà là ! C'est cruel pour vous, mesdames, messieurs de la majorité, mais nous vous ferons une place sans aucun problème !
    M. Jean-Pierre Brard. Ce sont des godillots !
    M. André Schneider. Tout le monde ne porte pas des chaussures de luxe, monsieur Brard !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Si nous pouvions faire un bout de chemin ensemble,...
    M. Christophe Caresche. Pour cela, il faut adopter nos amendements !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... deux catégories de personnes seraient particulièrement concernées.
    La première, ce sont les Français, qui verraient qu'à l'Assemblée nationale, au lendemain de quatre tours de scrutin, il n'y a pas, d'un côté ceux qui détiennent la vérité et, de l'autre, ceux qui portent le mensonge. Ils verraient que nous avons décidé d'unir nos compétences pour construire une politique de sécurité non partisane et répondant à leurs problèmes.
    M. Lionnel Luca. Les socialistes n'en ont rien à faire !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Très honnêtement, mesdames, messieurs du groupe socialiste, cela dépend plus de vous que de nous ! (« Absolument ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Le résultat de tout cela trouvera sa traduction non dans les mots, mais dans les votes.
    M. Daniel Vaillant et M. Christophe Caresche. Alors il faut adopter nos amendements !
    M. Lionnel Luca. Ils visent à supprimer le texte !
    Monsieur le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La deuxième catégorie de personnes qui serait concernée, ce sont les délinquants. Imaginez le message qui serait adressé à tous les délinquants d'aujourd'hui ou à ceux qui envisagent de le devenir si, subitement, une immense majorité de la représentation nationale disait : « l'impunité, c'est fini, on tourne la page », sans rien concéder, cela va de soi, à l'extrémisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Je ne doute pas que nous aurons l'occasion d'en parler en détail dans le cadre de la discussion des amendements.
    S'agissant toujours du groupe socialiste, j'ai cru comprendre qu'il y avait plusieurs demeures dans la maison du Père, et même qu'il y aurait plusieurs pères. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Pierre Brard. L'UMP, c'est aussi un grand ensemble !
    M.     le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Blazy, dans une démarche inimitable, vous avez reproché aux gouvernements d'Edouard Balladur et d'Alain Juppé d'avoir préparé de très mauvais budgets.
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est vrai !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Soit. Mais les chiffres montrent que c'est lorsque les budgets ont été mauvais que la délinquance a baissé (« Très juste ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française) et que c'est quand ils ont été bons que la délinquance a augmenté. Dès lors, je m'inquiète pour le mien ! (Sourires.)
    M. Christophe Caresche. Nous en reparlerons !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je vous rappelle que, entre 1994 et 1997, la délinquance a baissé de 11,5 %, et que, entre 1997 et 2001, elle a augmenté de 16 %.
    M. Christophe Caresche. Il y a eu un effet retard !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Blazy, je ne vous reproche pas d'avoir fait cette remarque mais, quitte à donner des chiffres, mieux vaut les donner complètement !
    Vous avez également proposé d'engager une réflexion sur une police pénitentiaire. Pourquoi pas ? Cette idée peut être intéressante. Il est évident, je le maintiens, que la police n'a pas pour rôle de transférer les détenus ; son métier consiste à interpeller les délinquants. Cette question mérite réflexion.
    Vous êtes, monsieur Blazy, contre l'article 3. Si vous avez de meilleures propositions à me faire...
    M. Jean-Pierre Blazy. Oui !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... le Gouvernement les étudiera. Ce qui importe, ce n'est pas la rédaction de l'article, mais le fait que, demain, nous puissions, comme l'a dit Julien Dray, inaugurer un commissariat de police moins de neuf ans après l'annonce de sa création. Si tout peut aller plus vite et si les crédits votés sont utilisés, tant mieux.
    J'ai été inquiet, monsieur Lagarde, quand je vous ai entendu commencer votre intervention au nom du groupe UDF en indiquant que vous étiez consterné. Toutefois, j'ai été rassuré dès la deuxième phrase ; quand vous avez précisé que vous étiez consterné par le fait que ce que je disais n'ait pas été dit plus tôt. C'était donc une consternation-approbation,...
    M. Rudy Falles. Une consternation positive !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... je suis rassuré et j'espère que nous finirons par nous retrouver. (Sourires.)
    Vous avez évoqué la question du convoyage des étrangers entre Roissy et le Palais de justice. Nous avons proposé au garde des sceaux d'autoriser les magistrats à siéger directement dans deux enceintes aménagées à cet effet, à Roissy et à Coquelles.
    M. Jacques Myard. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Si cette proposition était acceptée, elle permettrait de libérer de nombreux policiers et gendarmes. Plutôt que de multiplier les déplacements, la bonne solution ne consisterait-elle pas à organiser le transport des magistrats et des policiers sur des lieux conçus à cet effet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Je fais bien attention à ce que je dis car je ne voudrais pas que ce qui est simple apparaisse comme simpliste et je souhaite que personne ne se sente blessé par ma remarque, mais ne vaut-il pas mieux installer confortablement des magistrats dans une lieu adéquat, de façon à éviter l'emploi de forces de police ? (« Très juste » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Yves Nicolin et M. Jacques Myard. C'est le bon sens !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Vous souhaitez que les élus soient présents dans la chaîne de commandement. C'est peut-être le point sur lequel nous avons des sensibilités différentes. Pour ma part, je ne pense pas que les élus doivent avoir un rôle opérationnel de commandement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Ils doivent être associés, ils doivent savoir ce qui se passe, pouvoir donner leur avis d'expert, être consultés, mais, en cette matière, leur rôle doit s'arrêter là. Un commissaire de police peut déjà être requis par le procureur de la République, le préfet, le directeur de la direction départementale de la sécurité publique ; s'il peut l'être en plus par les élus, vous imaginez les situations de conflits d'intérêt dans lesquelles nous risquons de nous trouver.
    J'ajoute que, dans un pays qui compte tant de communes, qui peut penser que nous pouvons, sans changer complètement la carte administrative, confier des responsabilités de commandement à des élus ? Je sais bien que cela existe dans d'autres pays, notamment aux Etats-Unis, mais nous n'avons pas la même structure communale.
    M. Jacques Myard. Ça ne marche pas !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Qui peut penser que nous pourrions, à partir d'un certain seuil de population, donner aux uns ce que nous ne donnerions pas aux autres ? Le débat sur cette question ne manquera pas de se poursuivre et, bien entendu, je respecte vos convictions.
    M. Braouzec, dans une envolée qui lui a peut-être fait oublier le sujet,...
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Sûrement !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... nous a accusés de condamner les pauvres et de pratiquer l'amalgame entre délinquants et pauvres.
    M. Pierre Cardo. C'est lui qui a fait l'amalgame !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. S'il était là aujourd'hui, je lui demanderais quelle idée, quelle phrase, quel mot l'a choqué dans le texte ou dans les interventions des orateurs de la majorité, et quel changement il propose.
    Il est facile de scander, et d'une certaine façon d'insulter en faisant des amalgames, mais à quelle fin ? Nous, nous voulons rendre la sécurité aux gens les plus modestes. Pourquoi devrions-nous accepter de nous faire donner des leçons quand on sait que l'inaction et l'impunité qui ont régné depuis tant d'années ont d'abord pénalisé ceux qui habitent dans les quartiers les plus modestes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Franchement, ni le bilan de M. Braouezec, ni l'idéologie du parti communiste, ni le bilan des gouvernements auxquels celui-ci a participé, ne les autorisent à nous donner des leçons de cette nature et avec cette violence. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Je le dis d'autant plus volontiers que M. Braouezec a dit apporter son soutien à certains éléments du texte. Si je n'ai aucune leçon à lui donner, je n'en ai pas davantage à recevoir de lui.
    M. Jean-Pierre Brard. On peut toujours apprendre !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Vaillant, je ne reviendrai pas sur le fait que j'aurais procédé à un « copier-coller ». Vous avez en revanche posé une vraie question sur les adjoints de sécurité et les gendarmes adjoints. Une chose est claire : le travail fourni par les adjoints de sécurité et les gendarmes adjoints est devenue indispensable au fonctionnement des services, et donc les créations d'emplois que le Gouvernement propose viennent en sus.
    S'agissant des adjoints de sécurité, quel va être leur avenir ? Doit-on prolonger les contrats ? Peut-être. Doit-on changer leur statut ? Peut-être.
    Nous devons avoir ce débat à l'automne. Si j'avais proposé de créer des emplois-adjoints de sécurité ou de gendarmes adjoints, vous auriez été nombreux, et à juste titre, à parler d'une fonction publique au rabais. Ce ne sont certainement ni la droite ni le centre qui proposeront une fonction publique au rabais. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Nous proposons des postes de militaires et de fonctionnaires de plein exercice. Vous nous avez laissé des postes de fonction publique au rabais, en termes non de qualité des personnels, mais de rémunération et de statut. La preuve, c'est que vous-mêmes, vous vous inquiétez de leur devenir alors que, chacun le sait, personne ne s'inquiète du devenir des fonctionnaires. C'est donc à la droite de résoudre cette injustice sociale et statutaire.
    M. Jean-Claude Lenoir. Comme d'habitude !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Nous le ferons (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française) mais nous ne supprimerons pas les adjoints de sécurité ou les gendarmes adjoints.
    J'ajoute, et je le dis sans malice à M. Vaillant, qu'il était prévisible que des contrats conclus pour cinq ans allaient finir par arriver à échéance au bout de cinq ans. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Daniel Vaillant. On peut les pérenniser !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il aurait par conséquent peut-être été raisonnable de ne pas attendre que ces contrats soient expirés pour demander à votre successeur ce qu'il comptait faire alors que vous-même n'avez rien fait pendant cinq ans sur ce point précis. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Vous avez en revanche parfaitement raison sur un point : ces adjoints font du bon travail. Mais ils deviennent souvent gardiens de la paix après avoir passé le concours, et ils doivent donc être remplacés.
    M. Daniel Vaillant. Eh oui ! C'est un bon pré-recrutement !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Doit-on le faire dans le cadre du contrat précaire qui est le leur actuellement ou dans le cadre d'un autre statut ? Je vous propose que nous y réfléchissions ensemble en septembre pour déboucher sur des propositions d'amendements ou même sur la création d'un groupe de travail sur ce sujet - pourquoi pas ?
    M. Christophe Caresche. Si vous avez des moyens, allez-y !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je remercie tout particulièrement M. Mariani de son soutien. Car s'il y en a un ici - même s'il n'est pas le seul - qui sait ce que représente le combat contre les idées du Front national, qui est conscient du fait qu'aucun amalgame ne doit être toléré, et qui a triomphé à chaque fois, c'est bien lui, et je le remercie de ses propos. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.).
    M. Christophe Caresche. Nous avons un peu contribué à sa réélection, quand même !
    M. Daniel Vaillant. Lambertin s'est bien comporté, lui !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Dupré, je regrette de devoir dire que vous n'avez pas compris le but de la réorganisation de la gendarmerie. Je ne sais pas ce qui a pu vous faire croire à une réduction des services. Nous allons au contraire créer 7 000 emplois de gendarmes. Vous pouvez dire : « Ce n'est pas assez, on aurait fait mieux, si on avait su on y aurait pensé. » (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Mais vous ne pouvez pas prétendre que nous allons réduire le service.
    La mission de la gendarmerie, ce n'est pas de faire de la présence, c'est d'assurer la sécurité.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je le précise parce qu'on mélange souvent les choses. La gendarmerie n'est pas seulement un élément de l'aménagement du territoire, elle n'assure pas simplement une présence conviviale. Un gendarme en zone rurale ou périurbaine a une tâche de sécurité, d'interpellation, une tâche judiciaire.
    M. Pierre Cardo. Eh oui !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il n'assure pas une présence amicale, son rôle n'est pas simplement de jouer les médiateurs.
    M. Jean-Louis Idiart. Ce ne sont pas des assistantes sociales !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ce n'est pas un képi qui rassure une fois de temps en temps. C'est une présence de jour comme de nuit. Sinon, la répartition entre gendarmerie et police n'a pas de sens.
    Vous demandez que les spécificités des zones rurales soient prises en compte, elles le seront, naturellement.
    Monsieur Leonetti, je vous remercie de votre soutien. Votre solide expérience donne du poids à votre parole et je retiens tout particulièrement votre suggestion d'évaluer la prévention. C'est en effet une très bonne idée. Parce que bien souvent on parle de prévention, et on considère que le débat est clos. Comme si le mot était magique ! Quand on ne parle pas de prévention, on est accusé. Quand on parle de prévention on est protégé. Mais pour faire la différence entre la réalité des faits et la mondanité, l'évaluation de la prévention est nécessaire.
    M. Yves Bur. Eh oui !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Pour faire plus, pour faire mieux, et pour qu'enfin on sache si tout cet argent sollicité du contribuable sert à quelque chose. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.) Je crois que c'est une idée que nous pouvons tous reprendre.
    Monsieur Lambert, vous avez commencé votre intervention en disant que mon discours n'était pas clair à l'égard des populations rurales. Je veux bien répondre, mais êtes-vous certain de vouloir comprendre ? Vous confondez, me semble-t-il, le regroupement des brigades et le redéploiement entre police et gendarmerie.
    Si vous pensez que la sécurité en zone rurale ne pose pas de problème, nous pouvons continuer ce qui se fait depuis des décennies : commander des rapports qui restent sous une pile poussiéreuse, envoyer des missions... Malheureusement, les élus représentant ces zones ne cessent, à juste titre, de se plaindre d'être confrontés à la même délinquance que celle qui sévit dans les villes. Alors, j'aimerais comprendre votre position : soit la délinquance dans les zones rurales s'apparente à celle des villes et, dans ce cas, aidez-nous à réformer l'organisation du maillage territorial de la gendarmerie, soit tout va bien et dans ce cas, ne nous demandez rien. Mais ne dites pas : « tout va mal » et, dans le même temps, « il faut que cela continue comme avant ».
    Je le dis solennellement, et tous ceux qui réfléchissent à ces questions le savent : nous n'obtiendrons pas de résultat en zone périurbaine et rurale si nous n'avons pas le courage d'engager des réformes fortes concernant l'équipement, l'organisation et la répartition. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Cela ne signifie en rien que nous allons supprimer des casernements ou des brigades dans tous les cantons. Mais est-il bien normal qu'un canton compte trois brigades, comme j'ai pu le constater sur la carte ?
    M. Michel Terrot. Lequel ?
    M. Hervé Novelli. Cintegabelle ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Peu importe. Est-il normal que le département des Hauts-de-Seine, que je connais bien, compte encore des brigades de gendarmerie, alors que la zone dépend intégralement de la police ? A quoi cela sert-il ? A décourager des gendarmes qui n'ont pas les moyens de faire face à leurs obligations.
    Cela dit, que les choses soient claires, monsieur Lambert : ce que nous voulons, c'est renforcer la sécurité dans la ruralité et en zone rurale et périurbaine.
    Monsieur Bur, le Gouvernement a noté votre suggestion de mettre en fourrière les véhicules dotés de fausses immatriculations, ainsi que vos interrogations à propos des immatriculations étrangères. Je propose que votre idée soit étudiée pour qu'elle puisse trouver, si possible, une traduction juridique dès le projet de loi de l'automne.
    Quant au diagnostic sur Strasbourg, mais on pourrait en dire autant sur Mulhouse et l'ensemble de la région alsacienne, il est très mauvais, tout le monde en conviendra, quelle que soit son appartenance politique. En un an, à Strasbourg, les violences urbaines ont augmenté de 41 %. Il faut mettre un terme à cette dégradation que nous constatons depuis plusieurs années. Je ne prétends pas pouvoir le faire d'un coup de baguette magique mais commençons déjà par inverser la tendance.
    Monsieur Jung, je vous remercie de bien vouloir reconnaître que mon projet présente des aspects positifs. Je ne suis pas sûr que la réponse à la délinquance à Strasbourg puisse être apportée par la création d'un préfet de police. J'ai même tendance à penser que les structures sont déjà trop nombreuses.
    M. Hervé Novelli. C'est exact !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Vous trouvez que la prévention est insuffisante. Je vous renvoie à l'annexe I : vous y trouverez des précisions. J'accepte que l'on juge notre texte insuffisant dans le domaine de la prévention, mais j'aurais aimé, monsieur Jung, entendre vos propositions sur le sujet. N'hésitez pas ! Sans doute avez-vous manqué de temps dans votre intervention ?
    Monsieur Le Fur, j'ai apprécié la qualité de votre analyse. Vous avez raison : ce n'est pas la société qui est responsable de l'insécurité. Finalement, on pourrait peut-être s'accorder sur ce point. A force de vouloir expliquer l'inexplicable, on finit par vouloir excuser l'inexcusable ; c'est la clé du problème. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) A force de chercher des explications à tout, on finit par oublier de chercher des réponses.
    Quand des individus pratiquent un viol ou une tournante, il n'y a aucune explication à trouver, il faut sanctionner le fait d'avoir bafoué la dignité d'une personne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Quand un individu fait usage de son arme à feu contre une victime, il n'y a aucune explication à trouver, il faut sanctionner. Bien sûr, le terreau peut être mauvais, bien sûr la misère, la désespérance, le chômage, cela compte, mais si vous commencez à vouloir expliquer l'inexplicable avec ces éléments, vous n'êtes pas près d'apporter une réponse à ce qui est intolérable. (Applaudissements sur les mêmes bancs.)
    Monsieur Viollet, j'aurais, selon vous, « pillé les idées de la gauche ». Résultat : vous êtes en parfait désaccord avec ce que je propose. (Rires sur les mêmes bancs.)

    Même à un député socialiste la cohérence n'est pas interdite. Si vous êtes en profond désaccord avec ce que le Gouvernement propose, ce qui est votre droit le plus absolu, c'est sans doute que je n'ai pas pillé tant que cela vos idées !
    Vous me demandez si les conseils locaux de sécurité prendront la place des comités de pilotage et des conseils communaux de prévention de la délinquance. La réponse est oui. Nous voulons éviter la superposition des structures. Mais les contrats locaux de sécurité existants demeureront, il n'y a aucune raison de les remettre en cause.
    M. Jean-Pierre Blazy. Très bien ! Votre réponse est claire sur un point !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mme Taubira, avec le talent que chacun lui connaît, a fait un discours sans doute plus adapté à la situation d'il y a quelques décennies qu'à celle de 2002. Je n'ai pas compris ce que venait faire la lutte des classes dans son intervention. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle).
    M. Jean-Pierre Brard. Quel manque de galanterie !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mme Taubira nous accuse de vouloir supprimer les ressources des familles en difficulté. Mais les choses sont très claires : si un article proposait de supprimer les ressources des familles en difficulté, je suis sûr qu'un député déposerait un amendement pour faire disparaître cette disposition. Comme une telle mesure n'existe pas, Mme Taubira, malgré son talent, aura du mal à nous convaincre. Là encore, on ne peut pas me demander de rester dans le concret, de ne pas donner dans le fantasme, et m'infliger dans le débat des arguments fantasmagoriques.
    Nous n'avons pas à accepter la caricature. Et je dis à Mme Taubira, dont je respecte profondément les idées, que nous ne sommes pas des esclavagistes ni des racistes, que nous ne pratiquons pas l'amalgame. Nous voulons conduire une politique de sécurité républicaine et, là encore, je trouve parfaitement déplacé qu'on vienne faire un petit numéro à la tribune sur le dos de la misère et du malheur des gens qui, eux, vivent l'insécurité tous les jours. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Ségolène Royal. Oh !
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est du mépris, cela !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est trop facile ! Je suppose d'ailleurs que lorsque Mme Taubira est confrontée, dans son département, à la misère et aux agressions, son discours est moins brillant mais plus concret et plus proche de la réalité.
    M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. En tout cas, ses remarques ne m'impressionnent nullement.
    M. Yves Bur. Nous non plus !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Elles sont trop déconnectées de la réalité et je n'y ai répondu que par courtoisie.
    M. Jean-Claude Lemoine. Très bien !
    M. Jean-Pierre Blazy. Quelle courtoisie !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Enfin, monsieur Périssol, je vous remercie d'avoir fait le lien entre l'école et la sécurité. Là encore, quelle inversion des valeurs ! On se demande ce qui parfois inspire certains. L'apprentissage pour devenir demain un adulte citoyen, soucieux des valeurs républicaines, se fait à l'école, c'est évident. Une politique de sécurité globale qui voudrait s'attaquer à la racine du mal doit bien sûr se préoccuper de l'école, je ne suis pas le premier ni le dernier à le dire. A ce propos, vous nous avez donné une très bonne idée. Pourquoi, en effet, ne pas renforcer les amendes ou les sanctions contre ceux qui agressent les enseignants, lesquels font un travail de plus en plus difficile ? On le fait bien pour les agents chargés de l'autorité publique. Pourquoi ne pas renforcer la protection de ceux qui accomplissent cette si belle mission, qui transmettent les valeurs républicaines, qui s'occupent de nos enfants et les éduquent, parfois à la place de familles défaillantes, alors qu'ils n'ont pas le choix et qu'ils doivent accueillir tous les enfants qu'on leur confie ?
    M. Richard Cazenave. Absolument !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est un message très clair que je veux adresser à tous les enseignants de France : le Gouvernement, avec la majorité, est prêt à assurer votre défense et votre protection dans des conditions plus fermes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Richard Cazenave. Les éducateurs aussi le méritent !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Une telle mesure devrait, je crois, recueillir l'assentiment de tous.
    M. François Goulard. Ils n'y avaient pas pensé !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Hamel, je vous remercie pour votre soutien. Je partage pleinement votre analyse. Vous avez posé plusieurs questions pertinentes dans votre intervention, notamment sur les coffres de voitures. En effet, au nom de quoi ouvrir un coffre de voiture constituerait-il une grave atteinte à la liberté individuelle ?
    M. Jean-Pierre Brard. C'est comme pour les coffres-forts !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La disposition que vous proposez, monsieur Hamel, figurera dans le projet de loi que je présenterai à l'automne.
    M. Patrick Ollier. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Les douaniers peuvent ouvrir les coffres ; les gendarmes et les policiers n'en ont pas le droit ; il faut requérir un douanier. Le Gouvernement vous donnera donc satisfaction. C'est une question de bon sens.
    M. Jean Glavany. Et de constitutionnalité !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Buillard, je vous remercie également pour votre soutien. Les DOM-TOM sont mentionnés dans les deux annexes de la loi ; ils ne doivent pas être et ils ne seront pas oubliés.
    Les questions de sécurité dans les DOM-TOM sont, c'est vrai, particulièrement préoccupantes non seulement en Polynésie mais également en Nouvelle-Calédonie, à la Réunion, en Guyane, à la Martinique, à la Guadeloupe, dans l'ensemble des départements et territoires d'outre-mer. Je veux d'ailleurs rendre hommage aux escadrons de gendarmerie mobile et aux compagnies républicaines de sécurité qui accomplissent un travail remarquable.
    Monsieur Quentin, vous avez fait une intervention tout à fait pertinente sur les gens du voyage. Vous avez tracé des pistes sur la saisie des véhicules et les contrôles fiscaux. Je souhaite que vos propositions puissent être reprises - nous verrons sous quelle forme - dans l'arsenal législatif du mois de septembre. Vous avez tenu des propos courageux. C'est en effet l'inaction qui a permis la montée de la xénophobie et c'est l'action qui permettra de contrôler la xénophobie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
    C'est le coeur de notre politique. C'est justement parce que nous nous proposons de combattre la xénophobie, le racisme et toutes les atteintes odieuses à l'idéal républicain que nous voulons agir, et vite.
    Mme Tabarot connaît fort bien les problèmes de la vie quotidienne, le poids de ses paroles repose sur son expérience de maire, et je tiendrai bien sûr le plus grand compte de son avis.
    Je remercie M. Aeschlimann pour son amitié et son soutien.
    M. Jean-Pierre Brard. Entre voisins...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il a évoqué, avec sa compétence de maire, les initiatives locales et le droit à l'expérimentation. Dans le cadre d'une grande loi de décentralisation qui sera rythmée par plusieurs étapes - une réforme constitutionnelle, deux lois organiques, une sur les référendums, l'autre sur l'expérimentation - nous aurons l'occasion d'en parler. Mais je ne vois pas au nom de quoi l'expérimentation et la décentralisation des compétences seraient autorisées dans tous les domaines sauf dans celui de la sécurité. Monsieur Aeschlimann, vous êtes un précurseur, nous essaierons de vous donner satisfaction.
    Monsieur Grand, je vous remercie de votre soutien. La rénovation des casernements et des gendarmeries est une des priorités de notre texte.
    Vous avez parfaitement raison : il faudra revoir la question des attestations d'accueil de ressortissants étrangers à l'Union européenne. C'est une affaire de philosophie : soit on demande des papiers administratifs, et cela doit répondre à une réalité, soit cela ne répond à aucune réalité et il est alors inutile d'encombrer les services de nos mairies d'une paperasserie qui ne sert à rien. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Bernard Accoyer. Elle ne sert à rien, effectivement !
    M. François Goulard. Vraiment à rien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Les attestations d'accueil feront l'objet, comme le droit d'asile et d'autres questions difficiles, de propositions dans le projet de loi qui vous sera soumis à l'automne.
    Monsieur Victoria, vous avez évoqué la possibilité de créer un corps particulier pour certaines tâches. Pourquoi pas ? Cette hypothèse peut être formulée notamment pour les gardes statiques.
    Je ne peux par ailleurs que souscrire à votre volonté de renforcer la synergie entre police nationale et polices municipales.
    Monsieur Schreiner, quand vous dites avec courage que les caïds doivent être poursuivis, j'espère que vous sentez qu'il y a un petit changement d'époque, qui va dans votre sens. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Vous avez évoqué l'immatriculation de tous les deux-roues. Cette mesure a été prévue par l'article 19 de la loi relative à la sécurité quotidienne,...
    M. Jean Glavany. Très intéressant !
    M. Jean-Pierre Blazy. Voilà une bonne loi, que vous n'avez pas votée !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... mais elle ne peut matériellement pas être mise en oeuvre dans les préfectures faute des moyens nécessaires. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Encore une mesure votée qui ne sert à rien puisqu'on n'a pas octroyé les moyens permettant sa mise en oeuvre ! (« C'est scandaleux ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    C'est tout le problème des lois adoptées par ceux qui nous ont précédés.
    Monsieur Chartier, en vous écoutant j'ai une fois de plus constaté que ceux qui connaissent le mieux les problèmes quotidiens des Français sont aussi ceux qui sont les moins enclins à verser dans l'angélisme.
    Vous avez parlé de l'amélioration des conditions matérielles de vie des policiers et des gendarmes. Avec les 8 000 logements prévus pour les gendarmes et le doublement des crédits destinés à la réservation de logements pour les policiers, le Gouvernement va dans le sens souhaité.
    Monsieur Luca, vous avez fait allusion au caractère pénible des métiers de policier et de gendarme et vous leur avez rendu hommage. Vous avez eu raison, car on peut voter tous les crédits que l'on veut et prévoir tout l'arsenal juridique que l'on souhaite, si la police et la gendarmerie se sentent mal aimées, mal considérées, mal respectées, nous n'obiendrons pas les résultats attendus.
    Nous imaginons, nous proposons, nous décidons, nous votons, mais ce sont les gendarmes et les policiers qui mettent les mesures en oeuvre, et c'est pourquoi la dimension du soutien psychologique, moral et politique doit être clairement affirmée.
    Monsieur Rivière, je partage bien évidemment votre volonté de voir transférer un certain nombre de tâches à l'administration pénitentiaire, mais je vous ai dit quelles étaient les difficultés en la matière.
    Monsieur Hunault, vous avez rappelé, avec la connaissance qui est la vôtre, que rien ne pourrait se faire si la justice n'accompagnait pas notre projet. Je n'ai aucune raison de douter de sa volonté ni de sa mobilisation. Tout l'engagement du Gouvernement consiste justement à faire en sorte que chacun, se sentant membre de la même chaîne pénale, additionne ses compétences à celles des autres et les complète, tout en évitant les procès d'intention, dans un climat de confiance mutuelle.
    En définitive, ce qui est en jeu, c'est notre capacité à être efficaces.
    Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs, les explications que le Gouvernement entendait vous apporter. (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Debout ! Debout !

Discussion des articles

    M. le président. Nous allons maintenant examiner les articles du projet de loi du Gouvernement.

Article 1er et annexe I

    M. le président. « Art. 1er. - Les orientations de la politique de sécurité intérieure figurant à l'annexe I sont approuvées. »
    Je donne lecture de l'annexe I :

« ANNEXE I
« RAPPORT SUR LES ORIENTATIONS
DE LA POLITIQUE DE SÉCURITÉ INTÉRIEURE

    « La sécurité est un droit fondamental et l'une des conditions de l'exercice des libertés individuelles et collectives.
    « L'Etat a le devoir d'assurer la sécurité en veillant sur l'ensemble du territoire de la République à la défense des institutions et des intérêts nationaux, au respect des lois, au maintien de la paix et de l'ordre public, à la protection des personnes et des biens.
    « Or de 1981 à 2001, l'ensemble des faits constatés par la police nationale et la gendarmerie nationale ont augmenté de 40 % et, pour la première fois, la barre des quatre millions de crimes et de délits a été franchie en 2001.
    « Deux tendances se dégagent de cette période de vingt ans :
    « - l'une quantitative, l'augmentation exponentielle de la délinquance, que les chiffres illustrent de manière éloquente ;
    « - l'autre qualitative, l'importance prise par les violences contre les personnes, qui ne sont pas seulement liées à la classique délinquance d'appropriation mais qui prennent de plus en plus la forme de violences gratuites, voire de violences d'humiliation.
    « Cette situation qui frappe particulièrement les personnes les plus faibles porte atteinte aux principes fondamentaux de liberté, d'égalité et de fraternité et constitue une menace pour la cohésion nationale.
    « Ce constat de la réalité quotidienne doit conduire à la définition de priorités opérationnelles s'agissant notamment de :
    « - la montée de l'insécurité hors des grandes agglomérations. C'est l'indication nette que certains malfaiteurs n'hésitent pas à frapper loin de leurs bases en tirant profit de l'amélioration des réseaux de transport. C'est surtout le signe que de nouvelles catégories de la population ont basculé dans la délinquance et que des comportements délictuels qui se manifestaient presque exclusivement en milieu très urbanisé ont gagné les petites villes, voire les zones rurales. Ceci constitue une situation nouvelle à laquelle notre pays est confronté. Elle impose de revoir la répartition des zones de compétences entre les forces de sécurité intérieure et d'adapter l'organisation ainsi que les modes de fonctionnement des services ;
    « - la multiplication des zones où l'Etat n'exerce plus de façon suffisante la protection à laquelle nos concitoyens ont droit. L'éradication des zones de non-droit livrées à l'économie souterraine et à la loi des bandes constitue un devoir prioritaire ;
    « - la montée de la délinquance des mineurs dont la part dans la délinquance de voie publique est passée de 28 % en 1995 à 36 % en 2001. Cette délinquance dont les auteurs sont de plus en plus jeunes et de plus en plus violents s'alimente du sentiment d'impunité. Il importe de donner aux services enquêteurs les moyens nécessaires pour mettre un terme à cette situation inacceptable ;
    « - le développement du trafic de drogues qui génère en amont comme en aval, de multiples formes de délinquance et constitue un fléau sanitaire qui frappe en priorité les jeunes. Dans ce contexte, la nocivité de toutes les drogues doit être reconnue et la dépénalisation de l'usage de certains produits stupéfiants doit être rejetée.
    « Derrière les faits constatés de criminalité et de délinquance, il y a d'abord des victimes. Lorsqu'on indique que les faits constatés ont globalement progressé de 13,92 % entre 1998 et 2001, cela signifie qu'il y a eu 487 267 victimes supplémentaires, soit plus que la population de la ville de Lyon. La prise en compte par l'Etat de cette dimension humaine de la délinquance, à tous les stades de la procédure, est aussi un devoir. L'accueil, l'information et l'aide aux victimes sont donc pour les services de sécurité intérieure une priorité. Une "charte de qualité en fixant les modalités sera établie pour la police nationale et pour la gendarmerie nationale.
    « La loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité du 21 janvier 1995 a, pour la première fois, posé les principes et les orientations permanents de la politique de sécurité.
    « Ces principes et ces orientations constituent des acquis, sur le fondement desquels une nouvelle étape doit être franchie.
    « En effet, la création, voulue par le Président de la République d'un ministère en charge de la sécurité intérieure, donne à l'Etat des moyens d'action nouveaux dont il importe de tirer les conséquences.
    « Pour exercer sa mission de sécurité intérieure, l'Etat dispose, à titre principal, d'une part de la police nationale et d'autre part de la gendarmerie nationale dont les personnels ont le statut militaire et qui conserve son rattachement organique au ministère de la défense.
    « Cette spécificité permet à la gendarmerie nationale de constituer, au sein des forces de sécurité intérieure, un élément de continuité de l'action de l'Etat avec le domaine de la défense.
    « Le ministre en charge de la sécurité intérieure bénéficie du concours d'autres services de l'Etat, notamment de la direction générale des douanes et des droits indirects, de la direction générale des impôts et de la direction générale de la concurrence et de la consommation.
    « Les orientations qui sont présentées ci-après constituent le programme d'action en matière de sécurité intérieure que le Gouvernement se propose, avec le concours du Parlement, de mettre en oeuvre dans les cinq prochaines années.
    « Il s'articule autour de deux objectifs principaux :
    « - celui de fixer la nouvelle architecture institutionnelle de la sécurité intérieure et d'en tirer les conséquences sur les missions et l'organisation des forces de sécurité intérieure et le rôle des autres acteurs publics ou privés ;
    « - celui de donner aux services de sécurité intérieure un cadre juridique rénové leur permettant de lutter plus efficacement contre certaines formes de criminalité et de délinquance. Certaines des dispositions correspondant à cet objectif figurent dans la loi d'orientation et de programmation relative à la justice.
    « Un code de la sécurité intérieure regroupant l'ensemble des textes qui intéressent la sécurité publique et la sécurité civile sera préparé.

Première partie
PRINCIPES GÉNÉRAUX

    I. - « Fixer la nouvelle architecture institutionnelle de la sécurité intérieure
    « Les orientations présentées ci-après fixent la nouvelle architecture institutionnelle de la sécurité intérieure.
    « Au niveau national, le Conseil de sécurité intérieure, présidé par le Président de la République, détermine les orientations générales de la politique menées dans le domaine de la sécurité intérieure et fixe les grandes priorités.
    « Les objectifs nationaux, approuvés par le Gouvernement, sont définis et mis en oeuvre par le ministre en charge de la sécurité intérieure.
    « Cette organisation nationale est transposée au niveau départemental où le préfet assure la coordination de l'ensemble du dispositif de sécurité intérieure, sans préjudice des compétences de l'autorité judiciaire.
    « Les objectifs nationaux sont déclinés par les conférences départementales de sécurité coprésidées par le préfet et le procureur de la République, en tenant compte des caractéristiques de chaque département.
    « Une politique de gestion par objectifs sera instaurée. Les résultats obtenus en matière de lutte contre l'insécurité seront régulièrement évalués et comparés aux objectifs fixés. Les responsables locaux de la police et de la gendarmerie rendront compte de ces résultats, chacun pour ce qui les concerne, et il en sera tenu compte dans leur progression de carrière.
    « Enfin, l'ancrage des forces de sécurité intérieure dans la démocratie locale sera assuré grâce à la mise en place de conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, qui constituent l'instance de concertation sur les priorités de la lutte contre l'insécurité. Informés régulièrement des indicateurs de la délinquance et de l'ensemble des moyens mis en oeuvre par les services de police et les unités de gendarmerie, ils seront en mesure d'exprimer les attentes de la population en matière de sécurité de proximité. En matière de prévention de la délinquance, cette action de proximité sera conduite en coordination avec le conseil départemental de prévention.
    « Sur le plan opérationnel, l'accent sera mis sur les formes d'action permettant d'associer tous les services de l'Etat concernés :
    « - d'une part, au niveau national, par le renforcement des offices centraux de police judiciaire déjà existants, chargés de lutter contre les formes spécialisées de délinquance, et par la création d'un nouvel office central chargé de la recherche des malfaiteurs en fuite, ainsi que la transformation de la cellule interministérielle de lutte contre la délinquance itinérante (CILDI) en office central ;
    « - d'autre part, au niveau local, grâce aux groupes d'intervention régionaux (GIR), destinés à lutter contre la délinquance violente, les trafics illicites et l'économie souterraine, en particulier dans les zones sensibles. Ces groupes permettront de conjuguer l'action des services de police et de gendarmerie avec celle des douanes, des services fiscaux et des services de la concurrence et de la répression des fraudes ainsi que des directions du travail et de l'emploi.
    « Par ailleurs, il appartient aussi à l'Etat de veiller à ce que les maires et leurs services exercent leurs fonctions dans un cadre qui organise la complémentarité avec les services de l'Etat.
    « La conclusion de conventions de coopération entre le représentant de l'Etat et le maire au sujet des rapports entre les services de la police nationale et les unités de la gendarmerie nationale d'une part et les polices municipales d'autre part sera encouragée.
    « En Polynésie française, les agents de la police municipale feront l'objet d'un agrément conjoint du haut-commissaire et du procureur de la République et seront assermentés pour exercer leurs fonctions d'agent de police judiciaire.
    « Enfin, l'Etat veillera à ce que les autres acteurs de la sécurité que sont les professions de sécurité exercent leurs activités dans des conditions qui permettent les complémentarités. C'est ainsi que la loi du 12 juillet 1983 réglementant les activités privées de surveillance, de gardiennage et de transport de fonds sera étendue à la collectivité départementale de Mayotte.
    « Il incombe également à l'Etat de veiller à ce que les différentes réglementations en vigueur incluent la dimension relative à la sécurité. Dans ce domaine, seront proposées notamment, dans le respect des normes européennes, des dispositions prévoyant la neutralisation des téléphones portables volés ainsi que l'immobilisation automatique des véhicules pour faire obstacle aux vols.
    « II. - Utiliser de manière plus cohérente et efficace les forces de sécurité intérieure pour faire face aux nouvelles exigences de la sécurité
    « Le présent programme d'action gouvernementale vise à mieux garantir le droit des citoyens à la sécurité en faisant reculer la délinquance. Tous les moyens humains et matériels nécessaires seront mis en oeuvre pour faire disparaître les zones de non-droit du territoire français.
    « A. - Définir la nouvelle doctrine d'emploi des forces mobiles
    « Les forces mobiles ont été créées dans un contexte historique particulier marqué par des périodes d'émeutes et de troubles collectifs.
    « La démocratie apaisée que notre pays connaît depuis de nombreuses années permet aujourd'hui un changement radical de la doctrine d'emploi des forces mobiles.
    « Cette politique systématique rompant avec la priorité de l'ordre public permet de mettre les 30 000 hommes qui constituent aujourd'hui les forces mobiles au service de la sécurité quotidienne.
    « Les orientations présentées prévoient que, sans rien perdre de leur identité, ni de leur spécialisation dans le maintien de l'ordre, la plus grande partie des forces mobiles, compagnies républicaines de sécurité et escadrons de gendarmerie mobile, sera employée en appui des missions de la direction centrale de la sécurité publique et de la gendarmerie départementale, dans leurs régions d'implantation. Les CRS et EGM seront prioritairement déployés dans les zones de compétence respective des deux forces.
    « Ces forces supplémentaires seront mises à la disposition des services locaux, pendant toute la durée nécessaire, afin de leur permettre d'effectuer les opérations de sécurisation que la situation impose.
    « La vocation de ces forces à intervenir pour les besoins de l'ordre public, ainsi que le régime indemnitaire spécifique lié à cette spécialisation, seront naturellement préservés sous réserve des ajustements éventuellement nécessaires.
    « B. - Parvenir à un redéploiement rationnel et équilibré, d'une part, entre les zones de compétence de la police nationale et de la gendarmerie nationale, d'autre part, au sein même de celles-ci
    « Une répartition plus rationnelle sera recherchée entre les zones de compétence de la police nationale et de la gendarmerie nationale. Il conviendra ainsi de corriger, par le biais d'échanges compensés, les situations qui présentent au plan local un manque de logique opérationnelle. Chaque force devra s'organiser pour prendre effectivement en charge les missions de sécurité publique dans l'ensemble de la zone de responsabilité qui lui est confiée.
    « Au sein même des zones attribuées à chaque force, la répartition des effectifs devra tenir compte de la réalité des besoins de sécurité. Dans la zone de gendarmerie, le maillage territorial, confirmé dans son principe, pourra toutefois faire l'objet d'adaptations locales afin d'optimiser l'offre de sécurité au regard de l'évolution de la démographie et de la délinquance. Afin de mieux mutualiser les moyens, l'organisation du service sera développée autour du concept de communauté de brigades.
    « Cet effort de rationalisation aura pour objectifs d'assurer une meilleure qualité du service offert à la population et d'améliorer les performances des deux forces, notamment, s'agissant du taux d'élucidation des crimes et délits.
    « C. - Mettre un terme à l'emploi des policiers et des gendarmes dans des fonctions qui ne sont pas strictement liées à la sécurité
    « L'efficacité des forces de gendarmerie et de police impose qu'elles se consacrent à leurs métiers et ne soient pas immobilisées par des tâches administratives. Les dispositions nécessaires seront prises pour que les tâches administratives et techniques actuellement remplies par des policiers et des gendarmes soient confiées à des agents relevant d'autres statuts. Certaines de ces tâches techniques telles que l'entretien du parc automobile seront, à chaque fois que possible, transférées au secteur privé.
    « Dans le même esprit, les gardes statiques confiées aux policiers et gendarmes seront réduites au strict minimum. Il sera plus largement fait appel à l'externalisation de cette mission et aux moyens techniques de surveillance.
    « Une réflexion sera lancée sur les moyens de transférer à l'administration pénitentiaire la charge des extractions et transfèrements de détenus ainsi que la surveillance des détenus hospitalisés. Des premières propositions devront être faites dans le délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi.
    « III. - Mieux équilibrer la police de proximité et l'action judiciaire des forces de sécurité intérieure
    « A. - Consolider la police de proximité
    « L'objectif d'instaurer une police de proximité, initialement fixé par la loi d'orientation pour la sécurité du 21 janvier 1995, sera maintenu. Cependant, sa mise en oeuvre ne doit pas se faire au détriment des capacités d'action judiciaire et de la présence nocturne des forces. Ces capacités, affaiblies au cours des dernières années, doivent être remises à niveau.
    « De même, la doctrine d'emploi de la gendarmerie nationale, qui a toujours été marquée par l'importance de la proximité, sera confirmée, adaptée et poursuivie.
    « B. - Développer l'action judiciaire
    « Une présence accrue sur la voie publique n'a de sens que si elle est prolongée par la recherche active et systématique des auteurs d'infractions afin qu'ils soient, dans les meilleurs délais, interpellés et mis à disposition de l'autorité judiciaire.
    « Les capacités d'action de la police nationale et de la gendarmerie nationale dans le domaine judiciaire doivent donc être développées.
    « a) Augmenter le nombre des officiers de police judiciaire et revaloriser cette compétence
    « Le nombre des agents ayant la qualification d'officiers de police judiciaire sera sensiblement augmenté sur la durée de la loi de programmation, notamment dans le corps de maîtrise et d'application de la police nationale. A cet effet, le dispositif de formation à la qualification d'officier de police judiciaire sera rénové. Cette qualification sera mieux prise en compte dans la progression de carrière. Dans les deux corps les indemnités liées à cette qualification seront revalorisées.
    « b) Etendre la compétence territoriale des officiers de police judiciaire
    « La compétence territoriale des officiers de police judiciaire sera étendue. Les officiers de police judiciaire en fonction dans les circonscriptions de sécurité publique de la police nationale et les brigades de la gendarmerie nationale verront leurs compétences élargies à l'ensemble du département dans lequel ils exercent leurs attributions.
    « Pour certains agents et militaires spécialisés dans des missions de police judiciaire particulières, cette compétence pourra être étendue à la zone de défense.
    « L'exercice permanent des attributions d'agent de police judiciaire sera redonné aux gendarmes mobiles et CRS pour valoriser leur emploi dans les missions de sécurisation.
    « Les fonctionnaires affectés au service de sécurité des transports de la région Ile-de-France recevront une habilitation correspondant à la compétence géographique de leur service.
    « c) Développer les moyens de la police technique et scientifique
    « Les moyens de la police technique et scientifique seront renforcés. Le développement d'outils d'investigation performants sera poursuivi afin d'obtenir par la généralisation de nouveaux modes d'administration de la preuve, une amélioration du taux d'élucidation des faits constatés.
    « L'utilisation, l'alimentation et le rapprochement des grands fichiers de police technique et scientifique seront développés.
    « L'efficacité du fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) sera renforcée par une accélération de la mise en place des équipements des laboratoires, qui conditionne l'extension du champ d'application de la prise d'empreintes à de nouvelles infractions ou à de nouveaux stades de l'enquête judiciaire.
    « Le rapprochement des grands fichiers de police criminelle de la police et de la gendarmerie nationale (STIC, JUDEX) sera favorisé, au besoin en conférant une base législative aux échanges d'informations indispensables à l'efficacité des enquêtes judiciaires.
    « Le système de traitement uniformisé des produits stupéfiants (fichier STUP) fera l'objet d'un rapprochement entre les bases de données de la police, de la gendarmerie et des douanes sous la forme d'une mise en réseau des informations détenues par ces trois services.
    « Pour faciliter le déroulement des investigations, une architecture intégrée des fichiers informatiques de la sécurité intérieure sera mise en place. Les fichiers de la police nationale et de la gendarmerie nationale seront mis en cohérence. A terme, tous les agents de la sécurité intérieure habilités devront avoir accès à toutes les bases documentaires de recherches criminelles liées à la sécurité intérieure.
    « Une meilleure complémentarité des installations de police technique et scientifique, et notamment des laboratoires, des deux forces sera recherchée.
    « d) Adapter l'organisation des services de la gendarmerie nationale à l'exigence judiciaire
    « Les moyens des sections de recherches seront accrus.
    « Des brigades de recherches seront constituées dans chaque compagnie de gendarmerie et des plates-formes judiciaires dans chaque groupement. Dans chaque région seront développées des capacités d'appui aux unités de recherche et notamment à la section de recherche, spécialisée dans la lutte contre la moyenne et la grande délinquance.
    « IV. - Adapter l'organisation, l'administration et la gestion aux nouveaux enjeux de la sécurité
    « L'organisation administrative des services sera modernisée.
    « a) Restructuration des services relevant de la direction centrale de la police judiciaire
    « L'adaptation du maillage territorial des services relevant de la direction centrale de la police judiciaire par le regroupement des dix-neuf services régionaux de police judiciaire existants autour de neuf directions interrégionales permettra d'élargir la compétence territoriale des enquêteurs, de répondre aux défis de la coopération transfrontalière et, par la mutualisation de certains effectifs et équipements, d'accroître le potentiel opérationnel à la disposition des enquêteurs.
    « b) Réorganisation de la gendarmerie en zone périurbaine
    « Un renforcement et une réorganisation des unités de gendarmerie situées en zone périphérique des agglomérations seront mis en oeuvre afin de permettre à ces unités d'adapter leurs structures et leurs modes de fonctionnement aux attentes spécifiques de la population ainsi qu'à l'évolution de la délinquance et de l'urbanisation.
    « c) Nouvelle organisation de la gendarmerie dans les zones rurales
    « Là où, du fait des évolutions du territoire, les brigades de gendarmerie ne disposent plus de moyens leur permettant de fonctionner de façon autonome, il sera possible de les regrouper en communautés de brigades dotées d'un commandement unique agissant sur une circonscription cohérente. Comme en zone périurbaine, sans sacrifier la proximité avec la population qui, où qu'elle habite, a droit à une présence active des forces de sécurité, il convient que celles-ci disposent d'une véritable capacité opérationnelle à la mesure des besoins.
    « d) Mise en commun de moyens
    « L'efficacité de la police nationale et de la gendarmerie sera renforcée par des dispositions leur permettant de mettre en commun certains moyens, sous réserve des contraintes liées au déploiement territorial particulier de la gendarmerie nationale et à ses missions militaires : fonctions logistiques (passation de marchés publics, utilisation réciproque des moyens d'entretien automobile) et actions de formation, de recherche et d'information. Les gains d'efficacité qui en résulteront traduiront de manière concrète les avantages qui découlent de la création d'un ministère unique chargé de la sécurité intérieure.
    « e) Adapter et moderniser la formation des personnels
    « La formation tant initiale que continue constitue un outil de management indispensable dans toute organisation moderne, d'autant plus que les technologies progressent à une vitesse sans précédent. C'est pourquoi la formation devra constamment évoluer et s'adapter aux nécessités opérationnelles.
    « Les règles de déontologie, le perfectionnement des connaissances en matière de droit et de procédure, les techniques d'intervention dans les quartiers sensibles, le renseignement, les technologies nouvelles, ainsi que la gestion des ressources humaines et budgétaires constituent les grands axes de cette action de formation.
    « f) Déconcentration des pouvoirs de gestion
    « Des pouvoirs de gestion accrus seront transférés aux gestionnaires déconcentrés, soit à titre expérimental, soit à titre définitif. Ils s'appuieront, notamment, sur une plus grande globalisation de leurs moyens. Par exemple, pour la police nationale, les achats de véhicules légers pourront être intégrés dans la dotation globale déconcentrée des services et, au moins dans certains départements, l'affectation des effectifs au sein du département pourra être effectuée par le préfet.
    « Ces nouveaux pouvoirs de gestion s'accompagneront d'une responsabilisation accrue des gestionnaires : à ce titre, le dialogue de gestion sera rénové entre le niveau central et les niveaux déconcentrés, et des outils de contrôle de gestion seront mis en place.
    « La déconcentration de gestion déjà entreprise au sein de la gendarmerie nationale sera développée.
    « Dans les deux services l'accent sera mis sur un management des ressources humaines qui engage fortement la hiérarchie, en permettant la participation des agents à la détermination des objectifs comme aux méthodes de travail.
    « Seront recherchées les modalités d'une meilleure adéquation du code des marchés publics avec les impératifs de déconcentration de la gestion et d'externalisation de certaines tâches.
    « V. - Donner à la France un rôle moteur dans la coopération européenne et internationale en matière de sécurité intérieure
    « Dans le cadre des orientations politiques fixées par le Gouvernement et particulièrement le ministre des affaires étrangères, et sous réserve des compétences spécifiques du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le ministre en charge de la sécurité intérieure coordonne les actions de coopération européenne et internationale en matière de sécurité intérieure.
    « Il dispose à cette fin d'une ligne budgétaire spécifique et des emplois de policiers et de gendarmes seront créés pour être spécialement dédiés aux actions extérieures de la France en matière de sécurité intérieure.
    « Le terrorisme, le crime organisé et le blanchiment, les filières criminelles qui exploitent les candidats à l'immigration clandestine sont par nature des phénomènes transnationaux contre lesquels on ne peut lutter efficacement que grâce à la coopération entre les Etats.
    « La lutte contre ces phénomènes constitue une priorité qui implique le renforcement de la coopération européenne et internationale en matière de sécurité intérieure.
    « Le réseau des attachés de sécurité intérieure à l'étranger, formé de policiers et de gendarmes, sera développé.
    « La France doit tout particulièrement jouer un rôle moteur dans la création et la mise en place de l'espace européen de sécurité, de liberté et de justice.
    « Elle prendra des initiatives pour parvenir à l'adoption de règles communes aux Quinze en matière d'immigration et d'asile et participera activement au développement des autres réalisations de l'Union européenne telles qu'EUROPOL, la composante police de gestion civile des crises, le collège européen de police, la gestion intégrée des frontières extérieures, les accords de coopération transfrontalière créant les centres de coopération policière et douanière, et la future police européenne aux frontières.
    « Au plan national, les différents canaux de coopération opérationnelle de police (INTERPOL, SCHENGEN, EUROPOL, officiers de liaison bilatéraux, centres de coopération policière et douanière) seront mis en synergie au profit de l'ensemble des services de sécurité intérieure.
    « VI. - Créer une réserve civile de la police
    « A l'occasion d'événements exceptionnels ou de situations de crise, l'Etat doit pouvoir faire appel à des réservistes si les forces de sécurité intérieure s'avèrent insuffisantes.
    « Ce concept existe déjà dans les forces armées et donc dans la gendarmerie nationale.
    « Les orientations présentées ci-après serviront de base à la création de la réserve civile de la police nationale qui sera financée sur les moyens dégagés au titre de la présente loi.
    « Pendant les cinq années suivant leur départ à la retraite, les fonctionnaires actifs de la police nationale sont susceptibles d'être appelés, si les circonstances l'exigent, pour venir renforcer les forces de sécurité intérieure en activité.
    « Ce dispositif de réserve civile de la police nationale constitue l'un des éléments de la défense civile de notre pays.
    « Les missions confiées aux réservistes de la police nationale tiennent compte des compétences acquises par les fonctionnaires concernés pendant leur période d'activité. Elles consistent en des tâches de soutien aux forces de sécurité intérieure en activité.
    « Pendant le temps de réserve de cinq ans, les fonctionnaires actifs de la police nationale peuvent également participer, sur la base du volontariat, à des missions de solidarité relevant :
    « - soit du soutien social de proximité en assurant une permanence dans des services notamment pour faciliter l'insertion locale de leurs collègues, particulièrement les plus jeunes ;
    « - soit de la transmission des connaissances, lorsque les fonctionnaires ont acquis pendant leur activité une technicité particulière ;
    « - soit de la médiation, notamment en direction des jeunes en difficulté.
    « Un texte réglementaire précisera les modalités d'organisation et de mise en oeuvre de la réserve civile de la police nationale.
    « VII. - Développer l'accompagnement social au sein de la police et de la gendarmerie
    « Il convient d'assurer aux forces de police et de gendarmerie, la reconnaissance et le soutien dont elles ont besoin en tenant compte de la pénibilité des métiers.
    « La gestion des ressources humaines sera améliorée par un renforcement de l'accompagnement social, médical et psychologique des personnels.
    « Une attention particulière sera portée à l'amélioration des conditions de logement des agents confrontés à des difficultés dans ce domaine. Un plan d'amélioration de la qualité des hébergements sera lancé dans la gendarmerie nationale. Pour la police nationale, les moyens destinés aux réservations de logements, en particulier pour les personnels affectés dans les grandes agglomérations, seront renforcés.
    « Des mesures d'accompagnement seront par ailleurs prévues en direction des familles (crèches, aide à l'emploi des conjoints...) pour tenir compte des obligations liées aux contraintes professionnelles.
    « L'efficacité des forces de sécurité intérieure exige que les personnels affectés dans les zones sensibles y restent assez longtemps pour acquérir les compétences spécifiques permettant de lutter contre une délinquance particulièrement difficile. Des mesures incitatives seront prévues pour prolonger la durée en poste des agents affectés dans ces zones. De la même façon, des mesures analogues s'appliqueront aux personnels dans les secteurs défavorisés en raison de l'environnement géographique ou humain.
    « Au sein de chaque force, les structures chargées de cet accompagnement social seront développées et modernisées.
    « VIII. - Mieux lutter contre l'insécurité routière
    « Avec près de 8 500 morts et plus 150 000 blessés par an, les accidents de la route constituent un véritable fléau national.
    « Si les défaillances des véhicules et les défectuosités des infrastructures routières peuvent être à l'origine de certains accidents, dans la plupart des cas c'est le comportement de l'automobiliste qui est en cause.
    « Malgré de multiples campagnes d'information et de prévention, aucune baisse significative du nombre de victimes n'a pu être obtenue durablement dans la période récente.
    « Dans ce contexte, le rôle des services de police et de gendarmerie prend toute son importance.
    « Dans un souci d'efficacité le ministère de l'intérieur, dont relève l'ensemble des forces chargées des contrôles et de la constatation des infractions, doit renforcer la politique qui est la sienne dans ce domaine.
    « En complément de l'action sur le terrain des agents des forces de sécurité intérieure, des mesures seront prises pour inciter les gestionnaires publics et privés du réseau routier à implanter de manière permanente des équipements de constatation automatique des infractions.
    « IX. - Prévention et insertion sociale
    « La politique de sécurité intérieure doit être appréhendée dans sa globalité et ne se limite pas à la seule action des forces de l'ordre.
    « Si les forces de sécurité intérieure n'ont pas à se substituer aux services sociaux, en revanche, elles ont la légitimité pour intervenir dans le champ de la prévention en particulier en milieu scolaire.
    « Les forces de sécurité interviennent en amont de la commission de l'infraction dans le cadre de l'action préventive. L'augmentation de la délinquance et notamment celle des mineurs, constatée au cours des vingt dernières années, a justifié la mise en place de dispositifs institutionnels adaptés à la prévention des conduites déviantes et à la montée des incivilités.
    « La prévention situationnelle qui recouvre l'ensemble des mesures d'urbanisme, d'architecture ou techniques visant à prévenir la commission d'actes délictueux, où à les rendre moins profitables, a déjà connu une large application pratique dans de nombreux pays européens. Il est, en effet, désormais admis que certains types de réalisations urbaines ou d'activités économiques peuvent se révéler criminogènes et qu'il est possible d'y prévenir ou d'y réduire les sources d'insécurité en agissant sur l'architecture, et l'aménagement de l'espace urbain.
    « En liaison avec les autorités organisatrices de transports et les entreprises exploitantes, un effort particulier devra être entrepris pour renforcer les dispositifs d'humanisation des réseaux et développer la mise en place d'équipements de sécurité.
    « Depuis de nombreuses années, la police nationale comme la gendarmerie nationale ont réalisé de multiples actions de prévention tout particulièrement en direction des jeunes.
    « Le dialogue entre les travailleurs sociaux et les forces de l'ordre demeure essentiel dans un souci d'approche globale et cohérente des problèmes de prévention et d'insertion. Aussi, est-il nécessaire de renforcer au sein des instances locales le partenariat initié au travers des contrats locaux de sécurité.

« Deuxième partie

MOYENS JURIDIQUES

    « I. - Achever la mise en application des dispositions de la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité du 21 janvier 1995
    « Un certain nombre de dispositions de la loi précitée, notamment parmi celles relatives à la prévention de l'insécurité n'ont toujours pas été mises en oeuvre, faute de textes en précisant les modalités d'application.
    « Il s'agit des articles suivants :
    « - article 11 relatif aux études préalables à la réalisation des projets d'aménagement des équipements collectifs et des programmes de construction ;
    « - articles 14 et 15 relatifs aux dispositifs techniques de prévention et de constatation des infractions au code de la route. S'agissant plus particulièrement de l'article 15, la France prendra une initiative pour faire aboutir ce dossier qui relève désormais de la réglementation européenne.
    « Par ailleurs, les articles 1er et 23-1 de la loi du 21 janvier 1995 modifiée seront rendus applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et à Mayotte.
    « II. - Donner aux services de sécurité intérieure les moyens juridiques nouveaux dont ils ont besoin pour lutter plus efficacement contre certaines formes de criminalité et de délinquance
    « La délinquance a changé ces dernières années. Si elle a évolué quantitativement d'une manière inacceptable, elle a également changé de nature en devenant toujours plus violente, plus mobile, plus organisée. C'est ainsi que le droit élémentaire de nos concitoyens à la sûreté est trop souvent bafoué.
    « Le trafic de produits stupéfiants, quant à lui, a continué à se développer et s'étendre à de nouvelles substances. Il a contribué à la montée en puissance dans certains quartiers de l'économie souterraine, à l'exaspération de leurs habitants et à un grand nombre de dommages sociaux et sanitaires.
    « Enfin l'implication de mineurs de plus en plus nombreux dans la commission d'infractions graves ne peut qu'inquiéter.
    « Sans préjudice des dispositions contenues dans la loi d'orientation et de programmation relative à la justice, les présentes orientations prévoient de mettre à la disposition des forces de sécurité intérieure les nouveaux moyens juridiques nécessaires à l'accomplissement de leur mission, à savoir rétablir et garantir la sécurité des Français dans le respect des lois.
    « Pour ce faire, les dispositions nouvelles permettront :
    « 1° De rétablir l'autorité des agents de l'Etat dans l'exercice de leurs missions et d'améliorer leur efficacité dans l'identification et l'incrimination des auteurs des faits dont ils ont connaissance ;
    « 2° De mieux assurer les devoirs que l'Etat a à l'égard de tous ceux qui souhaitent apporter leur aide au travail des enquêteurs, en protégeant notamment les témoins et victimes de tout risque de représailles ;
    « 3° De moderniser notre droit afin de mieux appréhender certaines formes nouvelles de délinquance, causes de graves dommages à notre société, et mal supportées par nos concitoyens.
    « 1. Mesures tendant à restaurer l'autorité et la capacité des agents de l'Etat à agir
    « L'Etat se doit de renforcer la protection et la crédibilité de ceux qui travaillent dans des conditions souvent difficiles au service de la communauté. L'importance de la mission assignée aux forces de sécurité suppose que celles-ci ne soient pas distraites de leur mission par d'autres tâches. Elle suppose aussi que la protection des personnels soit assurée plus efficacement.
    « De trop nombreux délinquants sont recherchés sans succès dans le cadre d'une enquête, d'une instruction ou pour exécuter une peine. Il paraît évident que la crédibilité de notre système répressif dépend notamment de notre capacité à faire exécuter ses décisions. C'est pourquoi, la mission de rechercher activement les criminels et délinquants en fuite sera confiée à un office central. De nouvelles dispositions de procédure pénale seront mises en place afin de lui permettre d'exécuter ses missions.
    « Par ailleurs, le Gouvernement se fixe pour objectifs de faciliter et de simplifier les modalités des enquêtes judiciaires, d'élargir la compétence territoriale des officiers de police judiciaire et de sanctionner plus sévèrement les violences, menaces et outrages envers les dépositaires de l'autorité publique.
    « Enfin, les sanctions pénales pour non-respect des arrêtés municipaux seront aggravées.
    « 2. Mesures tendant au renforcement de l'efficacité des investigations policières
    « L'augmentation de la délinquance comme son changement de nature nécessitent d'alléger un certain nombre de contraintes procédurales. Afin de pouvoir réagir dans les meilleurs délais et sur tout le territoire, face à une délinquance de plus en plus violente et de plus en plus organisée, il convient d'étendre les capacités d'action des fonctionnaires de police et des militaires de la gendarmerie, de simplifier les procédures et de faciliter le travail des enquêteurs.
    « a) Faciliter le travail des enquêteurs
    « Les dispositions suivantes seront proposées :
    « 1° Afin de faciliter la recherche de preuves en matière de violences urbaines, des dotations de caméras vidéo seront prévues dans les zones sensibles ;
    « 2° Un trop grand nombre d'enquêtes judiciaires est paralysé par l'incapacité des institutions publiques ou privées (établissements financiers, opérateurs de téléphonie, administrations...) à répondre dans des délais raisonnables aux réquisitions effectuées par les officiers de police judiciaire à la demande de l'autorité judiciaire. Le plus souvent, la raison invoquée par les personnes requises pour justifier ce retard est la difficulté d'extraire, de traiter et de faire parvenir les renseignements demandés au service de police ou de gendarmerie requérant. C'est pourquoi, il sera élaboré un texte permettant aux officiers de police judiciaire, agissant dans le cadre d'une enquête judiciaire, sur autorisation d'un magistrat, d'accéder directement à des fichiers informatiques et de saisir à distance par la voie télématique ou informatique, les renseignements qui paraîtraient nécessaires à la manifestation de la vérité ;
    « 3° Dans le but d'augmenter les moyens mis à disposition des services d'enquête et d'éviter le gaspillage des deniers de l'Etat, un cadre juridique permettant l'utilisation des biens saisis appartenant directement ou indirectement aux auteurs de certaines infractions sera mis en place sous le contrôle de l'autorité judiciaire qui pourra, en cas de condamnation définitive, attribuer définitivement l'objet saisi à l'administration qui a mené l'enquête ou, en cas de déclaration d'innocence, décider de procéder à la restitution et à l'indemnisation du propriétaire ;
    « Par ailleurs, le Gouvernement se fixe pour objectifs de donner plus d'efficacité aux investigations des officiers de police judiciaire, notamment pendant la phase de flagrant délit et d'enquête préliminaire.
    « b) La mise en place de moyens nouveaux pour lutter contre les formes nouvelles de délinquance et améliorer le taux d'élucidation des enquêtes
    « Des dispositions seront proposées dans les domaines suivants :
    « - les textes nécessaires seront adoptés dans le but d'autoriser sous contrôle judiciaire l'emploi des techniques les plus modernes indispensables à l'interception des messages et à la mise en place de dispositifs de surveillance élaborés rendus nécessaires en raison du recours de plus en plus systématique des délinquants aux possibilités de brouillage de leurs échanges ou au camouflage de leurs rencontres ;
    « - le rôle de la police technique et scientifique sera étendu et développé notamment pour permettre de découvrir les responsables des faits de petite et moyenne délinquance. C'est pourquoi, afin d'augmenter l'utilité du fichier national automatisé des empreintes dans l'élucidation des enquêtes, celui-ci sera étendu aux empreintes palmaires ;
    « - afin de favoriser l'échange de renseignement, les possibilités d'accès réciproque des policiers et des gendarmes aux fichiers mis en place de manière spécifique par le ministère de l'intérieur ou le ministère de la défense seront améliorées ;
    « - dans chaque département, des fonctionnaires de police et des militaires de la gendarmerie seront désignés afin de veiller à ce que la sécurité des témoins soit préservée avant et après le jugement des procédures dans lesquelles ils seront intervenus.
    « Par ailleurs, le Gouvernement se fixe pour objectif d'étendre le champ d'application des livraisons surveillées et des infiltrations.
    « 3. Une meilleure prise en compte des formes nouvelles de criminalité
    « Certains types de comportements apparus depuis quelques années dans notre pays sont de moins en moins supportés par nos concitoyens. Le développement de l'utilisation des téléphones portables a entraîné une augmentation très importante des vols dits "à l'arraché. L'ouverture de nos frontières a facilité le vol de véhicules. L'utilisation d'enfants dans le cadre de la mendicité, le racolage en nombre dans des lieux paisibles d'habitations, la commission d'infractions sous l'emprise de la drogue ou de l'alcool se sont malheureusement généralisées.
    « La violence routière et ses conséquences dramatiques se développent également à nouveau de manière inacceptable.
    « Plusieurs moyens devront être développés afin d'enrayer la progression de ces phénomènes.
    « C'est ainsi que :
    « - le développement de la téléphonie mobile a été assorti d'une augmentation très importante du vol et du trafic de téléphones portables. Les discussions entamées avec les opérateurs et les constructeurs n'ont pas permis en l'état d'aboutir à la mise en place des dispositifs techniques permettant de bloquer l'usage des téléphones volés. C'est pourquoi, il appartiendra au Gouvernement de prendre si besoin est les mesures nécessaires pour obtenir à bref délai ce résultat ;
    « - le dispositif permettant la localisation des véhicules volés reste une nécessité du fait de l'augmentation de ce type délinquance. Sa mise en place sera opérée dans les meilleurs délais en partenariat avec les constructeurs et les compagnies d'assurances ;
    « - les infractions commises avec l'utilisation d'arme se développent. L'usage et la détention d'armes par des personnes malhonnêtes ou qui ne peuvent pour diverses raisons en détenir favorisent le climat d'insécurité. C'est pourquoi la législation actuelle, souvent obscure et ancienne, sera actualisée. Un fichier national automatisé des personnes interdites d'acquisition ou de détention d'armes sera mis en place. Des propositions d'amnistie seront faites aux détenteurs irréguliers d'armes qui les remettront aux autorités. Une obligation d'information sera expressément prévue afin de permettre aux personnels soumis au secret professionnel d'informer les autorités qu'une personne dangereuse pour elle-même ou la société détient une arme ;
    « - l'explosion du trafic portant sur les drogues synthétiques demande une adaptation de notre dispositif de lutte contre le trafic de stupéfiants. C'est pourquoi les objectifs de la Mission nationale de contrôle des précurseurs chimiques (MNCPC) seront précisés et étendus à la lutte contre le commerce illicite des produits précurseurs des drogues ;
    « - le développement de la violence routière relève d'un traitement insuffisant et trop complexe de ce type de délinquance. L'amélioration du dispositif réglementaire sera entreprise afin d'augmenter le déploiement des moyens automatiques de constatations des infractions et d'accélérer leur traitement pénal ;
    « - l'abandon d'une politique dynamique de lutte contre l'usage de certaines drogues a conduit à brouiller le message sur la nocivité de celle-ci. Une politique ambitieuse de prévention sera menée dans ce domaine. Des actions coordonnées avec l'autorité judiciaire seront par ailleurs menées notamment pour enrayer l'usage de stupéfiants chez les mineurs ;
    « - la délinquance des mineurs, outre une prise en compte judiciaire que le Gouvernement veut plus rapide et plus effective, demande de nouvelles réponses en termes de prévention et d'action. C'est pourquoi les permanences de nuit des brigades des mineurs et de protection sociale de la police nationale seront étendues dans les quartiers sensibles ;
    « - afin de lutter contre l'absentéisme scolaire qui contribue à faciliter le passage à la délinquance, les sanctions encourues par les parents qui ne respectent pas l'obligation scolaire afin de lutter contre l'absentéisme seront aggravées. Il en sera de même pour les responsables de lieux publics qui accueillent les mineurs pendant les horaires scolaires ou pour les personnes qui les emploient ou les rémunèrent illégalement pendant ces mêmes horaires. A cet égard le partenariat entre les services de l'éducation nationale, l'institution judiciaire et les forces dépendant du ministère de la sécurité intérieure sera étendu et développé ;
    « - dans le cadre de la lutte contre le développement du proxénétisme, les auteurs de racolage actif ou de racolage passif feront l'objet de mesures systématiques d'éloignement lorsqu'ils seront de nationalité étrangère ;
    « - afin de stigmatiser leurs auteurs et d'indiquer clairement que la consommation d'alcool ou de drogue ne peut en aucun cas être présentée comme excuse par l'auteur d'une infraction, il sera proposé par le Gouvernement de créer une circonstance aggravant la sanction pénale encourue chaque fois qu'une infraction sera commise sous l'effet de l'alcool ou de produits stupéfiants.
    « Par ailleurs, le Gouvernement se fixe pour objectifs de mieux réprimer des comportements qui affectent particulièrement la vie quotidienne de nos concitoyens et se sont multipliés au cours des dernières années tels que la mendicité agressive, les regroupements dans les parties communes des immeubles et l'envahissement des propriétés privées par des gens du voyage agissant en réunion, ainsi que le défaut de permis de conduire et le refus d'obtempérer.
    « Un projet de loi traduisant les orientations mentionnées ci-dessus qui nécessitent des dispositions d'ordre législatif sera déposé dès l'automne 2002. »
    Sur l'article, plusieurs orateurs sont inscrits ; ils disposent d'un temps de parole de cinq minutes.
    La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.
    M. Patrice Martin-Lalande. Monsieur le président, mes chers collègues, je voudrais, d'une part, exprimer l'inquiétude de nombreux de nos concitoyens face au problème des gens du voyage et, d'autre part, évoquer la situation de la gendarmerie et de la police dans les départements ruraux comme le mien.
    En 2000, lorsque nous avons examiné la loi sur l'accueil des gens du voyage, j'avais déjà traduit le profond sentiment de scepticisme et d'inquiétude des élus et des riverains. Oui, notre mission est de concilier durablement le respect des modes de vie et le respect des lois de la République, notamment le droit des riverains à la salubrité, à la sécurité et à la tranquillité publiques. Certes, nous ne devons pas oublier le droit des gens du voyage à une existence décente, mais n'oublions pas non plus que les riverains d'emplacements de stationnement sauvage vivent dans l'angoisse pour eux-mêmes et pour leurs biens, souvent modestes, surtout si on les compare à de nombreuses caravanes puissamment tractées.
    Prenons garde aussi d'oublier que les élus, maires en tête, vivent plusieurs fois par an, sinon par mois, le scénario de l'inacceptable.
    Par rapport au texte voté en 2000, il y a encore du chemin à parcourir pour procéder à un rééquilibrage et permettre un véritable respect de la loi.
    Nous pouvons y parvenir en permettant d'abord aux maires de constater les infractions sans avoir recours à un huissier ; en obtenant du juge une décision en vingt-quatre heures, afin de sortir de la situation d'impunité de fait résultant des délais actuels, de plusieurs jours ; en limitant à vingt-quatre heures le temps de passage dans les communes, alors que la jurisprudence fixe actuellement ce temps à quarante-huit heures au minimum ; en permettant la mise en fourrière d'un véhicule tracteur -, dissociable du domicile, qui est, nous le savons, inviolable - cause d'un stationnement illégal, puisque tous les autres Français sont sanctionnés pour une telle infraction ; en rendant plus systématique le contrôle des titres de séjour afin de maîtriser l'arrivée de nombreux étrangers parmi les gens du voyage ; en rendant plus transparente la situation professionnelle et fiscale, source de soupçons et d'incompréhensions et, enfin, en faisant respecter l'obligation de scolarisation, qui est la meilleure chance d'insertion.
    Monsieur le ministre, il nous faut sortir du face-à-face terrible et dangereux qui oppose une partie des gens du voyage et le reste de la population française.
    En ce qui concerne la gendarmerie et la police, je voudrais décrire en quelques mots la situation telle que nous la vivons dans mon département de Loir-et-Cher.
    Notre gendarmerie est surchargée et, il faut bien le constater, elle ne se consacre plus qu'à l'événementiel, délaissant bien souvent la surveillance générale. Les moyens humains sont l'urgence numéro un. Dans la compagnie qui couvre ma circonscription, il manque de dix-huit à vingt gendarmes.
    Les compétences des réservistes de la gendarmerie me semblent trop restreintes puisque ceux-ci ne peuvent ni arrêter ni contrôler un véhicule ou une personne. Il faudrait pouvoir étendre ces compétences, au moins dans le cadre de missions précises.
    Quant à la police, nous constatons que, du fait des délais d'action de la justice, personne ne peut être déféré au parquet à partir du jeudi. Il faut donc attendre trois ou quatre jours avant qu'il y ait une suite. De plus, la gestion des gardes à vue exige beaucoup de travail de la part de nos policiers : elle mobilise, comme j'ai pu l'observer, un fonctionnaire de police presque à temps plein dès que trois ou quatre personnes sont en garde à vue.
    Enfin, les problèmes d'effectifs sont aggravés par les tâches de la police de proximité, qui n'a pas été dotée des moyens suffisants. J'ai pu constater que, dans ma sous-préfecture, Romorantin, trente seulement des trente-cinq fonctionnaires prévus étaient en poste. Le déficit est donc sérieux et il rend difficile le maintien de l'efficacité de notre police. Ce déficit est aggravé par des départs en retraite plus nombreux que prévu.
    Peut-être les difficultés d'exercice de la profession de policier sont-elles liées à tout cela.
    Telles sont les quelques réflexions que je voulais faire, en souhaitant, notamment pour ce qui concerne les gens du voyage, que nous puissions avancer rapidement, afin de mettre fin à une situation qui est dangereuse pour notre République. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Eric Jalton.
    M. Eric Jalton. Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames, messieurs, la sécurité est au coeur des préoccupations des Français. Cette question, dont l'impact sur le quotidien est très certainement aggravé par sa dimension psychologique, menace les fondements mêmes de la République.
    Le projet de loi qui nous est soumis vient donc à point pour renforcer l'engagement du Gouvernement et de l'Etat devant les Français, et pour renforcer aussi les moyens, qui, incontestablement, doivent être renforcés. Cela est vrai ici, dans l'Hexagone, mais aussi, et de façon exacerbée, dans l'outre-mer, comme vous l'avez rappelé tout à l'heure, monsieur le ministre.
    A côté des délits proprement dits, le développement des actes de vandalisme et d'incivilité est inquiétant. L'abaissement de l'âge des délinquants, leur mobilité, la violence accrue de leurs actes appellent des réponses spécifiques, proportionnées et adaptées. L'existence de marchés d'armes illégaux et la facilité avec laquelle les délinquants peuvent se procurer des armes ajoutent aux préoccupations de nos concitoyens, particulièrement des plus faibles et des plus démunis, qui sont les plus touchés.
    Cette situation se complique d'un sentiment d'impunité insupportable lorsque des réponses suffisantes et promptes ne sont pas apportées en matière de sanctions et de réparations.
    Force est de constater que la sécurité des personnes et des biens peut être mieux assurée. C'est à juste titre que vous avez entrepris de mener une action énergique pour prévenir et sanctionner sans faiblesse les crimes et délits en tout genre. Car c'est bien à l'Etat qu'il revient de définir une approche commune aux services publics de la sécurité, pour faire jouer les complémentarités et les synergies en vue d'une plus grande cohérence et d'une plus grande efficacité de leur action.
    Monsieur le ministre, j'ai noté dans ce texte votre volonté de combattre l'insécurité avec une plus grande détermination, votre objectif étant de faire reculer les crimes et les délits dans notre pays et de rétablir l'autorité de l'Etat dans des zones dites de non-droit, livrées à tous les trafics. Pour cela, des crédits importants devaient être dégagés afin de renforcer les effectifs et les moyens. Au-delà, il convenait d'adapter sans tarder la législation aux nouvelles formes de délinquance, pour que tous les délinquants soient sanctionnés et que la justice puisse jouer pleinement son rôle.
    Mais il faudra aussi tarir la source qui alimente les bandes organisées en donnant à chaque jeune sortant du système éducatif une qualification professionnelle lui permettant d'exercer un métier, et faire en sorte que les jeunes mineurs qui commettent des actes interdits soient placés dans des centres fermés, tel celui de Saint-Jean-Bosquo qui existait en Guadeloupe et qui était reconnu pour ses vertus et son efficacité dans la réinsertion des mineurs déviants.
    Il convient également que les familles puissent recevoir toute l'aide et bénéficier de toute l'écoute nécessaires pour qu'elles puissent faire face aux difficultés d'éducation de leurs enfants, notamment dans le cadre de la politique de la ville.
    L'école doit être de nouveau sanctuarisée.
    Il faudra aussi aider et accompagner les victimes et leurs associations représentatives.
    Les trafics en tout genre - drogue, prostitution, blanchiment d'argent sale, traite de personnes en situation irrégulière, corruption, délivrance de faux passeports, comme dans ma commune des Abymes - doivent être combattus sans relâche avec des moyens appropriés et proportionnés, car ces fléaux qui minent notre société doivent être éradiqués.
    Les criminels en col blanc ou certains délinquants en uniforme doivent être traités tout aussi efficacement par les pouvoirs publics.
    La nouvelle architecture institutionnelle de la sécurité intérieure que vous présentez dans votre texte ainsi que l'ampleur des moyens dégagés me semblent répondre en grande partie aux attentes et aux préoccupations de nos concitoyens en matière de sécurité, notamment outre-mer.
    Vous déclarez vouloir corriger les écarts entre les territoires et prendre en compte les besoins spécifiques des départements et territoires d'outre-mer. Pour la Guadeloupe, ces besoins spécifiques seraient de l'ordre de cinquante agents de corps de maîtrise et d'application et de vingt officiers de police judiciaire.
    Il y a lieu de procéder à l'accélération du programme de création du commissariat des Abymes, qui a pris du retard, et à la réorganisation de celui du Gosier, afin de lui permettre d'assurer les tâches de commissariat de plein exercice.
    La situation d'archipel de la Guadeloupe et sa position géographique la rendent encore plus vulnérable que l'Hexagone ou sa voisine la Martinique aux trafiquants de drogue et à l'immigration clandestine. Un renforcement des contrôles aux frontières maritimes, à l'aéroport et entre Marie-Galante et le continent guadeloupéen est indispensable. Cela passe par le renforcement des effectifs et des moyens de la police de l'air et des frontières, ainsi que par le maillage fin du territoire par des brigades de gendarmerie disposant d'effectifs et de moyens suffisants.
    Il me paraît également utile de veiller à ce que la déclinaison des orientations nationales soit bien relayée sur le plan local et bien articulée avec les actions à mener localement.
    Enfin, il conviendrait de veiller à ce que le groupe d'intervention rapide de Guadeloupe dispose d'un niveau de moyens au moins équivalent à ceux de la métropole, afin qu'il dépasse le simple rôle de coordination qu'il assure aujourd'hui.
    Nos compatriotes de la Guadeloupe, à l'instar de l'ensemble de la population française et au-delà des orientations de programmation concrètes contenues dans le projet de loi, attendent des résultats rapides. A leur écoute, nous apporterons un soutien très vigilant à ce projet de loi et à la mise en oeuvre de la future loi, avec comme objectif le bien-être au quotidien de nos populations, notamment d'outre-mer, et, à terme, nous l'espérons, le recul du spectre du Front national.
    M. le président. La parole est à M. Bertho Audifax.
    M. Bertho Audifax. Monsieur le ministre, bien entendu, nous approuvons les orientations de la nouvelle politique de sécurité intérieure voulue par M. le Président de la République et M. le Premier ministre, et nous vous soutiendrons dans sa réalisation.
    Je voudrais rappeler brièvement le contexte du département de la Réunion : plus de 50 % de la population a moins de vingt-cinq ans ; le chômage connaît un taux élevé, autour de 34 %, et il touche particulièrement les jeunes, dont la formation et la qualification restent trop faibles ; le parc de logements sociaux est insuffisant en nombre, mais surtout en qualité, manquant cruellement d'équipements sportifs de proximité et d'espaces de convivialité ; le nombre des familles monoparentales est de plus en plus important.
    Tout cela contribue à une explosion de la délinquance, en particulier de la délinquance des jeunes, voire des très jeunes.
    S'il faut rattacher l'émergence de la délinquance à ces causes socio-économiques, il nous faut limiter sa banalisation et sa mécanisation. Le multirécidiviste, fût-il jeune, n'est pas le Robin des Bois de notre société : il s'attaque aux plus faibles, aux plus fragiles socialement. C'est pourquoi, sur le principe, je regrette que la loi d'amnistie s'applique à des condamnations de moins de trois mois de prison, car cela aboutit à gracier des délinquants qui ont déjà commis des dizaines de délits.
    L'augmentation des moyens doit être ciblée. Il faut créer de nouveaux commissariats dans les villes dont la population a dépassé 40 000 habitants. Il convient d'exonérer les policiers et les gendarmes des tâches subalternes de secrétariat et, bien des collègues l'ont dit avant moi, de créer un corps spécifique de fonctionnaires pour les transferts de détenus.
    Il nous paraît souhaitable, afin de mieux coller aux réalités de terrain, que des fonctionnaires de sécurité originaires de la Réunion et travaillant actuellement en métropole puissent être affectés dans leur île en fonction des nouveaux besoins.
    Cette augmentation des moyens doit s'accompagner d'une réforme de l'appareil de sécurité intérieure. On doit simplifier les procédures en maintenant des niveaux de garantie, alléger les notifications dans les gardes à vue et, bien sûr, faire face à la diminution de la capacité opérationnelle des forces de l'ordre, eu égard aux horaires de travail liés à la RTT et à l'univers ubuesque de la paperasserie.
    Enfin, nous serons vigilants sur l'évaluation et l'exigence de résultats de cette nouvelle politique. Des efforts de réinsertion sont absolument indispensables. On ne peut cependant abstraire l'Etat de l'exigence de sécurité de nos concitoyens en multipliant, par exemple dans le cadre de la politique de la ville, les fiches « actions » sans réels moyens à long terme et sans autre pouvoir que celui du verbe. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.
    M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme l'a dit, pour l'UDF Rudy Salles hier soir, l'exigence de sécurité n'est ni de droite ni de gauche : elle est tout simplement populaire. Notre soutien au texte du Gouvernement sera donc total.
    J'avoue avoir été choqué hier par l'outrance et le caractère irréaliste de la position de M. Mamère. Je recommande à notre collègue la lecture du livre de M. Algalarrondo : Sécurité : la gauche contre le peuple.
    M. Algalarrondo n'est pas un suppôt de l'UDF, ni même - pire ! - un suppôt de l'UMP : il est socialiste (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) et rédacteur en chef adjoint au service politique du Nouvel Observateur. Son livre montre, monsieur Mamère, le bout de chemin qu'une partie de la gauche - pas toute, je le reconnais - doit faire pour retrouver notre peuple.
    Sur le fond, Jean-Christophe Lagarde l'a dit, votre texte doit être complété pour faire une plus grande place aux élus dans le dispositif de sécurité. C'est pour nous une question centrale. Vous l'avez d'ailleurs évoquée, monsieur le ministre. Certes, vous réalisez une avancée en confiant au maire la présidence du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance, mais le texte reste ambigu. En effet, les élus ne peuvent intervenir dans la chaîne de commandement policière qui va de l'inspecteur de police, du commissaire, au préfet, en passant par le directeur de cabinet. Or, la hiérarchie administrative met souvent longtemps à réagir. Ce n'est pas la qualité des hommes qui est en cause, mais comment un directeur de cabinet qui reste moins d'un an en poste peut-il connaître le terrain ? Nous espérons donc que la future loi de décentralisation annoncée par le Premier ministre permettra de nouvelles avancées en la matière.
    Enfin, monsieur le ministre, vous avez le courage d'affronter le problème de l'absentéisme scolaire, mais votre texte, qui est attendu et doit être populaire, ne doit pas être caricaturé parce qu'il contient des dispositions marginales peu réalistes.
    M. Christophe Caresche. Très bien !
    M. Jean Dionis du Séjour. Vous voulez en effet impliquer les responsables de lieux publics accueillant des mineurs - je pense aux cafetiers - dans la lutte contre l'absentéisme scolaire. Or les professionnels ont unanimement estimé qu'une telle implication serait difficile, voire impossible à mettre en oeuvre. La lutte contre l'absentéisme concerne non seulement les familles, mais aussi l'institution scolaire, direction et enseignants. Nous souhaitons donc que soit supprimée la disposition irréaliste impliquant les cafetiers et qu'il soit fait mention d'une implication forte de l'institution scolaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre Lellouche.
    M. Pierre Lellouche. En vous écoutant hier et à nouveau aujourd'hui, monsieur le ministre, nombreux étaient les députés de la majorité, de même, j'en suis sûr, que certains de l'opposition, à considérer qu'enfin la France avait un ministre de l'intérieur ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Eric Raoult. Très bien !
    M. Pierre Lellouche. Vous le savez, l'attente est énorme pour que la sécurité soit enfin rétablie sur notre territoire. Vous pouvez compter sur notre soutien total pour vous aider dans cette tâche extrêmement lourde, après presque vingt années de laxisme, messieurs de l'opposition. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Eh oui, vingt et un ans depuis l'élection de M. Mitterrand !
    M. Christophe Caresche. Mais il y a eu la droite ! M. Debré a été ministre de l'intérieur !
    M. le président. Continuez, monsieur Lellouche ! Ne vous laissez pas interrompre !
    M. Pierre Lellouche. Mais je suis respectueux de l'opposition. Elle a besoin de s'exprimer !
    M. Jean-Pierre Blazy. Il met en cause l'ancien ministre de l'intérieur !
    M. le président. Les mises en cause, ce sera après ! Revenons-en à l'essentiel !
    M. Pierre Lellouche. Nous en sortons, nous, de l'opposition, et nous savons qu'il est important de garder sa liberté de parole.
    M. Christophe Caresche. Arrêtez de vous prendre pour un ministre !
    M. Pierre Lellouche. Hier, par respect pour l'opposition, justement, j'ai écouté M. Mamère d'un bout à l'autre de son intervention, mais lorsqu'il a terminé en évoquant les 4 000 enfants du Vel' d'Hiv qui sont morts et en comparant, ou en faisant mine de comparer, le gouvernement actuel et sa majorité avec le régime de Vichy,...
    M. Noël Mamère. Arrêtez !
    M. Pierre Lellouche. ... j'ai trouvé cela absolument scandaleux et je suis sorti. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Monsieur le ministre, mon intervention sera très brève. Elle ne portera pas sur vos propositions de fond et de procédure, même si elles sont importantes. A propos des procédures, toutefois, j'ouvrirai une parenthèse. Dans l'un des deux commissariats du 9e arrondissement de Paris, en raison des procédures actuelles, que vous allez réformer, sur dix véhicules de police, un seul fonctionne ! Et, l'an dernier, la ligne téléphonique d'un commissariat du même arrondissement a été coupée par France Télécom parce que la facture n'avait pas été payée, messieurs de l'opposition !
    M. Didier Quentin. Merci, monsieur Vaillant !
    M. Pierre Lellouche. Voilà donc des procédures qu'il convient de réformer !
    Mais permettez-moi d'aborder quatre thèmes chers aux Parisiens, qui touchent à leur vie quotidienne et que je voudrais que vous ayez en mémoire lorsque vous préparerez le texte normatif que vous nous présenterez à la rentrée.
    Le premier concerne la coordination des pouvoirs de police du maire de Paris, du préfet et du ministre de l'intérieur. Vous le savez, monsieur le ministre, ces dernières années, face au laxisme et à l'incompétence du gouvernement Jospin et de M. Vaillant, la droite parisienne a essayé de remédier à l'explosion de l'insécurité à Paris. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Noël Mamère. M. Tiberi a effectivement été un grand spécialiste de la sécurité des électeurs !
    M. Christophe Caresche. Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre !
    M. Pierre Lellouche. Calmez-vous, monsieur Caresche ! Vous devriez pourtant en savoir quelque chose !
    M. le président. Monsieur Lellouche, vous vous adressez au Gouvernement, pas à M. Caresche !
    M. Pierre Lellouche. Avec 2,2 millions d'habitants sur 60 millions de Français, Paris concentre près de 10 % de l'insécurité. Ces dernières années, nous avons donc revendiqué des pouvoirs de police pour essayer de compenser l'absence d'Etat. Aujourd'hui, la situation a changé, monsieur le ministre de l'intérieur, et les Parisiens comptent sur l'Etat et sur votre action pour qu'enfin la sécurité revienne à Paris. Et nous allons surveiller l'action de M. Delanoë pour que la ville de Paris mette bien à la disposition de la préfecture de police et du Gouvernement les moyens financiers et humains nécessaires, je pense notamment aux auxiliaires de police grâce auxquels les fonctionnaires de police nationale pourront être pleinement employés à des tâches de sécurité publique.
    M. Christophe Caresche. De toute façon, vous voterez contre !
    Mme Martine Billard. Qui a ouvert une crèche à l'hôtel de ville de Paris ?
    M. Pierre Lellouche. Par ailleurs, il faudra revoir le décret, pris en catimini la veille de l'élection présidentielle - comme par hasard ! - par votre prédécesseur, en liaison avec l'actuel maire de Paris, pour modifier les règles de circulation dans la capitale. Il ne vous a pas échappé en effet que certaines innovations de M. Baupin ont littéralement paralysé la capitale. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Je souhaite que, sous votre impulsion et celle du préfet de police, l'on revienne sur certaines décisions déplorables prises par l'actuelle municipalité qui pourrissent la vie des Parisiens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Eric Raoult. Et des banlieusards !
    M. Pierre Lellouche. Et des banlieusards, en effet !
    Je développerai rapidement trois points qui touchent, eux aussi, à la vie des Parisiens.
    D'abord, les squats. Depuis des années, on les voit proliférer dans tous les arrondissements et les occupants, naturellement soutenus par toutes les associations bien-pensantes, se livrent aux pires exactions. Je connais de nombreux cas dans ma circonscription. Les meubles des propriétaires ont été vendus et les locaux sont dévastés par des hordes de gens qui, souvent, se livrent à des trafics de drogue et ne quittent pas les lieux malgré les actions en justice visant à les expulser, faute d'action de la police. Les élus locaux le savent en effet très bien, à Paris, pour obtenir l'expulsion d'un squat, il faut non seulement l'accord du commissaire de police, mais aussi celui du cabinet du préfet de police et du cabinet du ministre de l'intérieur. Inutile de vous dire que, lorsque M. Vaillant était ministre de l'intérieur, aucune éviction n'a pu être réalisée dans les temps et qu'il a très souvent fallu attendre deux ou trois ans ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Christophe Caresche. C'est faux !
    M. le président. Monsieur Lellouche, si vous vouliez bien conclure... Vous avez largement dépassé le temps qui vous était imparti mais, compte tenu des interruptions, je vous ai laissé quelques minutes de plus.
    M. Christophe Caresche. Il n'est pas au Conseil de Paris, quand même ! Ce n'est pas une assemblée locale, ici !
    M. le président. Concluez et posez votre question !
    M. Pierre Lellouche. Monsieur le ministre, je vous demande donc de bien vouloir avancer sur ce dossier, comme sur celui des établissements de nuit et des fermetures administratives.
    Enfin, je reviendrai sur la question que vous avez soulevée hier, de la mendicité agressive. Dans Paris, des groupes de gens, souvent étrangers, occupent illégalement la voie publique, pourrissent la vie des gens dans des rues entières sans que la police puisse les expulser, faute de textes.
    Sur tous ces points - les squats, la mendicité agressive, les établissements de nuit et les sandwicheries -, monsieur le ministre, les Parisiens attendent...
    M. le président. Je vous remercie, monsieur Lellouche !
    M. Pierre Lellouche. ... que des décisions importantes soient prises à la rentrée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Robert Lamy.
    M. Robert Lamy. Monsieur le ministre, votre projet de loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure correspond à une attente forte des Français, cela a été dit. En effet, le nombre des crimes et délits a progressé de 40 % au cours des vingt dernières années et, pour la première fois, la barre des quatre millions a été franchie en 2001. Ce n'est plus tolérable.
    Dans de nombreux quartiers de nos villes, petites ou grandes, et jusque dans nos villages, les habitants ont un sentiment d'abandon. Nous avons tous constaté une véritable dégradation de la situation, particulièrement au cours des cinq dernières années. La volonté que vous affirmez de restaurer cette liberté fondamentale qu'est la sécurité suscite notre soutien le plus total.
    Vous voulez utiliser de façon plus cohérente et plus efficace l'ensemble des forces de sécurité intérieure de notre pays et rechercher une répartition plus rationnelle des zones de compétence de la police nationale et de la gendarmerie. Les échanges compensés que vous avez évoqués, le 10 juillet dernier, devant la commission des lois, doivent permettre de corriger des situations caractérisées par un manque flagrant de logique opérationnelle. Mais un passé récent nous a montré que les décisions autoritaires et généralisées avaient des effets désastreux. Ce n'est pas en appliquant des règles rigides élaborées uniquement en fonction de taux de délinquance ou de paliers démographiques que nos forces de sécurité retrouveront une réelle efficacité.
    Certes, il est indispensable de fixer une orientation stratégique nationale, mais il est tout aussi indispensable d'examiner chaque situation au vu du contexte local. La situation particulière de certaines petites villes situées à proximité de grandes agglomérations doit notamment être prise en compte.
    C'est très souvent dans ces zones semi-urbaines, déjà dotées de moyens plus faibles en matière de sécurité, que les petits délinquants, concentrés dans les grandes cités, trouvent un terrain propice à leurs méfaits. Il serait catastrophique de ne pas prendre en compte la réalité du terrain et de fonder un redéploiement sur les seules bases arithmétiques.
    Je tiens également à attirer votre attention, monsieur le ministre, sur la notion de qualité du service. On sait en effet que les plages d'ouverture des gendarmeries sont beaucoup moins vastes que celles des commissariats de police. Or le service de proximité fourni par ces derniers, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, revêt une importance primordiale en matière de dissuasion. Cette présence permanente, complétée par des patrouilles régulières et par l'îlotage, permet de rassurer nos concitoyens.
    La disparition de ce service continu aurait immanquablement des effets négatifs sur la vie sociale de nos petites cités. Mais je connais votre désir d'engager cette réforme dans la plus grande souplesse et dans la concertation. Il s'agit à mes yeux de conditions indispensables pour parvenir à améliorer le service offert à la population ainsi que les performances de nos policiers et gendarmes en matière d'élucidation des crimes et délits. Nous sommes favorables à une évolution dans ce domaine, mais celle-ci ne peut avoir pour conséquence de diminuer les effectifs des forces de sécurité dans les zones rurales et semi-rurales. J'ai bien entendu ce que vous venez de dire à ce sujet.
    La constitution de communautés de brigades me paraît un bon moyen de pallier l'insuffisance des effectifs des très petites brigades rurales. En revanche, la sectorisation des commandements de gendarmerie, lancée par votre prédécesseur, ne donne pas satisfaction et n'a pas apporté d'améliorations sur le terrain. Il faudra à l'évidence tirer les leçons de cet échec lors de la mise en place des communautés de brigades. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Léonce Deprez.
    M. Léonce Deprez. En ce moment même, monsieur le ministre, une partie de la population française vit sur un territoire qui n'est pas celui de son lieu de résidence habituel. Une grande partie des Français a en effet la chance de connaître l'art de vivre des vacances d'été, ce qui crée une économie touristique. Celle-ci ne se limite d'ailleurs plus à cette période de l'année. Il est donc très heureux que vous puissiez organiser désormais la sécurité en France à partir d'une nouvelle notion, celle de territoire. Pour assurer la sécurité des Français qui les peuplent et des étrangers qui y sont accueillis, il faut prendre en considération l'évolution des populations sur ces territoires.
    Compte tenu de l'importance que revêt aujourd'hui l'économie touristique dans l'économie nationale et du devoir que toutes les collectivités locales ont d'assurer la première condition du plaisir de vivre qu'est la sécurité, il faut que le Gouvernement tienne compte de cette exigence des clients que sont les touristes ou les résidents à l'égard des communes à vocation touristique.
    Le problème ne peut se régler uniquement par l'envoi de renforts de CRS pendant la saison d'été, car vous l'avez dit, l'insécurité touche de plus en plus la campagne, et non plus seulement les territoires urbains. Il faut donc rééquilibrer les forces entre zones rurales et zones urbaines.
    Il faut aussi tenir compte du fait que la présence de Français ailleurs que chez eux durant l'année se développe de plus en plus, ce qui aboutit à une activité fort heureusement pluri-saisonnière. J'insiste sur ce point, monsieur le ministre, car les collectivités locales à vocation touristique - pays à caractère rural, stations touristiques de montagne, thermales, maritimes, villes d'art ou d'histoire - sont amenées à créer des emplois qui ne sont plus précaires.
    Il faut donc assurer à tous les visiteurs, à tous les clients de ces stations qui génèrent l'économie touristique, une sécurité d'autant plus nécessaire que ces lieux sont, par définition, attractifs et que la délinquance se déplace en même temps que la clientèle. En outre, l'Etat et les collectivités locales doivent encourager l'acquisition de résidences secondaires.
    Monsieur le ministre, dans le grand effort que vous faites pour mieux répartir les forces et procéder à un rééquilibrage entre la gendarmerie et la police, tiendrez-vous compte de l'exigence de sécurité à laquelle aspirent les gens qui sont en repos, en week-end, en vacances ou en temps libre, en assurant une présence qui ne soit pas épisodique des forces de police, lesquelles doivent être de plus en plus territorialisées ? Telle est ma question. Elle est importante parce qu'elle concerne l'ensemble des régions, des 1 500 à 2 000 communes touristiques de France, sans parler des pays à vocation rurale et à qualité touristique.
    M. le président. La parole est à M. Christian Vanneste.
    M. Christian Vanneste. Monsieur le ministre, l'article 1er a été présenté comme un article philosophique dans une loi peu normative. Les socialistes ne le voteront pas, mais ils voteront l'article 2. Autrement dit, ils voteront les moyens mais pas la fin. Belle logique, assez habituelle chez eux ! On comprend mieux que, ayant sans cesse augmenté les dépenses publiques, ils n'aient guère obtenu de résultats. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    « Il n'y a pas de bon vent pour un navire qui ne sait pas vers quel port il vogue », disait Sénèque.
    M. Jean-Pierre Blazy et M. Christophe Caresche. Bravo !
    M. Christian Vanneste. Précisément, la grande nouveauté de ce texte, monsieur le ministre, c'est que, vous, vous savez où vous voulez aller, quel ennemi vous combattez. Nous vous aiderons à atteindre votre objectif.
    Cet objectif est avant tout de rétablir la réalité des droits de l'homme, comme la liberté d'aller et de venir. Certains se sont émus des arrêtés municipaux sur la circulation des mineurs le soir. Ont-ils conscience que le couvre-feu est imposé de fait par l'insécurité aux adultes les plus fragiles ? La propriété, la sûreté, la résistance à l'oppression, notamment celle qu'imposent les caïds et les bandes organisées : les droits de l'homme de 1789 sont constamment bafoués dans notre pays.
    Je relèverai dans cet article la volonté de justice qui anime ce texte. La violence frappe les personnes les plus faibles, et l'on peut légitimement parler aujourd'hui de « survictimation », comme le fait l'association douaisienne Droit à la sécurité, qui souligne à juste titre que l'on accorde souvent plus de droits et davantage de protection à l'agresseur qu'à l'agressé. Or l'agressé a le droit de voir sa plainte reçue, et pas simplement inscrite sur une main courante. Il doit lui aussi être informé de ses droits. Il doit avoir droit à un suivi médical et psychologique immédiat. Il doit jouir d'un droit à réparation, sans devoir se livrer à des dépenses supplémentaires. Personne ne semble s'inquiéter, à gauche, de la double peine que subissent les victimes. L'agressé doit enfin être protégé des représailles.
    Ces considérations m'amènent à un deuxième point : certains opposent police de proximité et action judiciaire de la police, pour préférer la première à la seconde. Le texte rétablit l'équilibre, avec raison. La police de proximité a été ces dernières années un trompe-l'oeil, un cache-misère. A quoi sert de multiplier les îlotiers, les commissariats de quartier, si l'action judiciaire ne suit pas ? L'effet risque d'être redoutable. A force d'être proche et d'être obligée de garder ses bâtiments - le jour seulement, d'ailleurs -, la police risque de perdre de l'autorité et de la mobilité.
    Dans mon secteur, les contrats locaux de sécurité ont eu des résultats désastreux. A Tourcoing, par exemple, entre 2000 et 2001, les vols avec violence ont augmenté de 44 % et la délinquance de voie publique de 7 % tandis que les gardes à vue diminuaient de 5 % et que le niveau des présentations au parquet se maintenait. Autrement dit, ce fut l'inefficacité.
    Le contrat local de sécurité des transports de la métropole de Lille est assez symbolique à cet égard. Non seulement les effectifs promis par l'Etat n'ont jamais été fournis mais le métro de Lille n'a été doté d'aucun matériel de vidéosurveillance. Le résultat a été là encore catastrophique : meurtres, viols et recrutement en urgence de 350 agents de surveillance par la communauté urbaine.
    Cet exemple me conduit à deux remarques.
    D'abord, il est nécessaire de proportionner les effectifs à la situation. Est-il normal que les départements du Nord ne comptent qu'un policier pour 500 habitants, contre un policier pour 350 habitants sur l'ensemble du pays ?
    Ensuite, il est nécessaire de surmonter les réticences et de développer la vidéosurveillance. Le Royaume-Uni a exploré cette voie avec un certain succès. Des centaines de milliers de caméras sont installées dans le pays. Elles ont permis des arrestations rapides et de déjouer des attentats. Des moyens électroniques et informatiques permettent de rendre ces systèmes encore plus performants avec relativement peu de personnel. Il ne faut pas avoir de complexe dans ce domaine : la seule liberté est celle de bien agir, dans le respect de la loi.
    Le problème des effectifs m'amène, pour conclure, à souhaiter que la coordination entre la police et la gendarmerie d'une part, et les polices municipales d'autre part, soit renforcée. C'est un autre moyen pour conforter le rôle des maires.
    Il conviendrait, dans les prochains textes, d'améliorer les conditions de cette coordination, par exemple en facilitant la création de polices municipales intercommunales, y compris dans les syndicats intercommunaux ne disposant pas de fiscalité propre. Cela permettrait que la globalisation des moyens des communes atteigne un résultat analogue à celui visé au travers des communautés de brigades de gendarmerie. Ce résultat, on le sait, c'est la permanence de la veille sur l'ensemble du territoire concerné.
    L'article 1er du projet de loi indique clairement, pour ceux qui en doutaient ou qui prétendaient le contraire afin de faire oublier le bilan de ces dernières années, que le texte que vous présentez est un texte de rupture. Certes, il ne faut pas opposer la répression à l'éducation ou à la prévention, mais on dira, en reprenant Clausewitz, que la répression est la continuation de l'éducation par d'autres moyens. Or c'est précisément ce qui nous différencie de nos prédécesseurs. Nous, nous voulons faire la guerre à l'insécurité et ne plus nous réfugier dans l'impuissance des excuses et des explications. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M.  Christian Philip.
    M. Christian Philip. Monsieur le président, monsieur le ministre, j'approuve pleinement les orientations figurant à l'annexe I. Néanmoins, j'aurais aimé que fût traitée plus explicitement la question des transports urbains et de la sécurité.
    Vous le savez, monsieur le ministre, c'est une des préoccupations quotidiennes de nos concitoyens. Le développement de multiples formes de délinquance et d'incivilité, tant à l'égard des usagers que des personnels, n'est pas acceptable, elle mine tous les efforts des collectivités locales pour renforcer l'attractivité du transport public.
    Tous les jours, de nombreux Français, pas les plus favorisés mais souvent les plus âgés ou les plus jeunes, utilisent nos réseaux de transport en commun. Ils ont droit à ce que les pouvoirs publics se préoccupent d'une manière toute particulière de leur sécurité dans le métro, le train, le tram ou l'autobus.
    Les agressions contre le personnel sont en augmentation permanente : près de trente mille jours d'arrêt de travail, l'an dernier, sans compter les grèves en résultant. Celles-ci entraînent de vraies perturbations qui portent atteinte à la crédibilité du transport public. La nuit, dans certaines banlieues, dans des couloirs de métro, l'insécurité est réelle. Toutes les enquêtes montrent que c'est une des raisons principales de la non-utilisation des transports publics.
    Les autorités organisatrices investissent pourtant beaucoup dans la sécurité : protection des conducteurs, vidéosurveillance, dont on parlait à l'instant, présence de médiateurs, contrôles accrus, localisation des véhicules par GPS, liaisons radiotéléphoniques directes avec la police. Mais tout cela n'aura pas de véritables effets sans une nouvelle organisation des forces de sécurité, sans des unités vouées spécifiquement à la protection des réseaux de transport en commun.
    Monsieur le ministre, ce que vous avez décidé pour l'Ile-de-France dès votre arrivée traduit à la fois votre souci de vous attaquer à ce problème et votre capacité à apporter très rapidement des solutions concrètes. Mais quand pourrons-nous mettre en place une telle organisation dans nos grandes agglomérations de province ? A Lyon, je me suis refusé, en tant que président du SITRAL - l'autorité organisatrice lyonnaise - jusqu'en mars 2001, à signer un contrat local de sécurité propre aux transports collectifs, faute d'un engagement de l'Etat, de me garantir qu'il voulait créer une organisation des forces de sécurité à même d'apporter une solution aux agressions constatées. A quoi bon affirmer des principes et des objectifs si l'on ne s'en donne pas certains moyens ? C'était hier la faiblesse de ces contrats. Nos concitoyens ne s'y sont pas trompés. Dire que l'on va agir et ne pas s'en donner les moyens, c'est ce qui a conduit les Français à l'exaspération que nous connaissons.
    Aussi, même si je comprends qu'il faudra quelques mois pour aboutir, je souhaite vivement, monsieur le ministre que vous demandiez aux préfets d'étudier, avec les autorités organisatrices de transports la façon de généraliser l'affectation d'unités spécialisées pour nous permettre de renverser des statistiques malheureusement encore trop préoccupantes.
    La sécurité dans les transports urbains doit être une question prioritaire pour les conférences départementales de sécurité comme pour les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance. Ainsi, vous garantirez la sécurité de proximité qui est, pour vous et pour nous, essentielle. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le ministre, bien qu'étant de l'opposition, et peut-être même parce que je suis de l'opposition,...
    M. André Santini. Aïe ! Aïe ! Aïe !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... j'essaierai d'éviter d'allonger davantage encore la liste des tâches dont mes collègues de la majorité vous chargent. Le champ de vos interventions ne cesse de s'élargir, la gravité de la situation empire de minute en minute (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) et les moyens censés y répondre deviennent de plus en plus nécessaires.
    Je me contenterai de vous interroger sur un seul sujet : la lutte contre la toxicomanie. A l'occasion de l'article 1er, notamment, vous avez rappelé votre volonté farouche de lutter contre le trafic de drogue, tout en vous prononçant contre la dépénalisation des drogues douces. J'aimerais que vous précisiez un peu plus vos orientations en la matière.
    Les produits illicites sont à la fois la cause et la conséquence d'une situation de délinquance que nous connaissons tous dans nos circonscriptions, mais qui a atteint un niveau indiscutablement préoccupant. Se pose dès lors un problème de santé publique sur lequel je ne vous demanderai pas d'intervenir car vous n'êtes pas chargé de ce secteur ; néanmoins, j'aimerais vous poser deux questions.
    Premièrement, quelle politique pénale allez-vous préconiser à l'égard des consommateurs de produits illicites ?
    Deuxièmement, les élus ici présents sont à même de vous décrire les endroits de leur circonscription où l'on fait un commerce illicite de produits stupéfiants. Il ne serait pas difficile pour vos services de s'adresser aux élus afin d'en savoir un petit peu plus. Vous qui nous avez précisé à plusieurs reprises que vos objectifs se définissaient en termes de moyens mais également en termes de résultats, quelle politique mènerez vous dans les mois qui viennent s'agissant des points de vente de produits illicites ? Avez-vous fixé un calendrier ? Quels sont vos objectifs précis en la matière ?
    M. Eric Raoult. Rattraper cinq ans de retard !
    M. le président. Monsieur Raoult, vous n'avez pas la parole.
    La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Monsieur le président, monsieur le ministre, je ne veux pas revenir sur la discussion générale mais aborder plusieurs points concrets.
    S'agissant de la nouvelle architecture institutionnelle, j'aimerais connaître la composition, le fonctionnement et le rôle du conseil de sécurité intérieure présidé par le Président de la République, de la conférence départementale présidée par le préfet et le procureur de la République, et des conseils locaux de sécurité et de prévention, dont on ne connaît d'ailleurs pas le cadre territorial.
    Il est question de renforcer les formes d'action associant tous les services de l'Etat concernés. En l'occurence, le renforcement des offices centraux de la protection judiciaire, la création d'un office central chargé de traquer les fuyards et la transformation en office de la cellule interministérielle de lutte contre la délinquance itinérante correspondent peut-être aux souhaits de la protection judiciaire mais on est loin des préoccupations quotidiennes. Et l'on peut se demander comment, concrètement, on procédera à ce renforcement.
    Il est aussi question de créer des groupes d'intervention régionaux, les GIR, au niveau local - c'est-à-dire au niveau d'une ou de plusieurs cours d'appel. Je fais remarquer que ces groupes ont déjà été créés et qu'ils ne sont en fait que des coquilles vides regroupant quelques policiers, gendarmes et agents du fisc qui manquent à leur service d'origine, où ils n'ont pas été remplacés,...
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est vrai !
    M. André Gerin. ... et auxquels peuvent être ponctuellement associés d'autres policiers, gendarmes ou agents du fisc.
    D'ailleurs, quel est le bilan de leur action ? Qui l'évalue ? Quel est leur budget ? (Protestations sur les bancs du groupe Union pour la majorité présidentielle.)
    M. André Gerin. Pourquoi rouspéter ?
    M. le président. Poursuivez, monsieur Gerin.
    M. André Gerin. Il convient de mieux utiliser les forces de sécurité. Mais quelle évaluation a été faite de la nouvelle doctrine d'emploi des unités mobiles en appui des policiers et des gendarmes ? Selon quels critères sera réalisé le redéploiement entre police - gendarmerie ? Quelle marge de manoeuvre pensez-vous conserver après l'échec des précédentes tentatives ?
    Reste une question que je ne développerai pas : la suppression des charges indues. Tous les ministres veulent recruter des administratifs pour libérer les actifs. Tous veulent réduire les gardes statiques.
    Par exemple, que fait-on encore à Lyon devant Interpol, qui devrait être un des bâtiments les plus sûrs du monde ?
    Une réflexion sera lancée pour confier à la pénitentiaire la garde des détenus hospitalisés et leur transfert. Cela fait des lustres que l'on en parle. Pourquoi ne pas créer, comme en Italie, une force autonome chargée de ces missions ? Quid de la garde des palais de justice ?
    A propos du meilleur équilibre à trouver entre police de proximité et action judiciaire des forces de sécurité intérieure, je voudrais soulever trois questions concernant les moyens d'investigation.
    Premièrement, vous parlez d'augmenter le nombre des OPJ. Est-ce vraiment la réponse au problème ? Ne vaut-il pas mieux augmenter d'abord le nombre de policiers et de gendarmes affectés à des missions d'investigation ? Ne vaut-il pas mieux intégrer cet aspect dans la formation initiale pour éviter la paralysie de services privés de collaborateurs pendant la formation continue ?
    Deuxièmement, vous envisagez la départementalisation de la compétence territoriale des OPJ. C'est un point que je trouve tout à fait positif.
    De même, je trouve tout à fait adéquat - pour rester dans le concret et étonner la majorité (Sourires) - d'avoir décidé de développer la police scientifique et technique. C'est un élément essentiel, auquel je m'intéresse depuis des années. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
    M. André Gerin. Je termine, monsieur le président.
    Nous menons actuellement, en collaboration avec le président de la communauté urbaine de Lyon, une expérimentation sur les compétences en matière de prévention, de sécurité et de tranquillité. M. le Premier ministre et vous-même, monsieur le ministre, avez confirmé cette orientation. En tant que républicains, nous continuerons à travailler sur cette question. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Monsieur le ministre, nous devons vous remercier d'avoir si rapidement amené notre assemblée à se prononcer sur une vrai loi d'orientation et de programmation sur la sécurité. Nous vous féliciterons sans doute dans quelques mois, lorsque les moyens humains, financiers et juridiques que vous avez prévus, joints à ceux des autres lois que le Gouvernement prépare, auront donné des résultats incontestables, du moins je l'espère, pour le quotidien des Français.
    M. Jean-Pierre Blazy. Nous en reparlerons !
    M. Pierre Cardo. En attendant, je voudrais vous poser quelques questions.
    Tout d'abord, vous souhaitez renforcer le rôle des maires, comme le demandent d'ailleurs de nombreux élus locaux. Dans le domaine de la coordination des actions entre prévention et répression, par exemple, vous concentrez les réunions dans un conseil local de sécurité et de prévention. Cela paraît logique, mais je voudrais vous poser une question très pratique. Jusqu'à présent, nous avons eu du mal à obtenir de la police les mains courante. Des réticences syndicales nous ont empêché de pouvoir travailler avec ce document qui est important, puisqu'il permet de connaître toutes les plaintes qui, bien que non prises en compte, concernent la vie d'un commissariat et d'une cité. Pensez-vous que vous pourrez obtenir de la part des syndicats une légère ouverture ?
    Deuxièmement, les pouvoirs de coordination. Serez-vous à même de préciser le rôle du maire dans le domaine de la prévention, qui relève un peu de l'Etat, mais beaucoup, surtout, des conseils généraux. Quelle place ces derniers vont-ils occuper au sein des conseils locaux de sécurité ? Il faudra à mon sens préciser certains points tant dans ce texte que dans ceux que nous examinerons à la rentrée. En effet, le conseil général, c'est la prévention spécialisée, l'action éducative administrative en milieu ouvert, par opposition à l'AEMO judiciaire, la PMI, la protection de l'enfance en général, les contrats d'insertion dans les CLI, l'accès au logement et bien d'autres choses encore qui forment un ensemble cohérent.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Très juste !
    M. Pierre Cardo. La coordination que vous souhaitez établir entre la prévention et la répression implique une intervention forte des conseils généraux au plan local, or cela ne me semble pas prévu pour l'instant.
    Troisièmement, la déscolarisation. En la matière, vous proposez un renforcement des sanctions. Pourquoi pas ? Je rappelle toutefois que la suppression des allocations familiales pour déscolarisation d'un enfant existe depuis la loi de 1954.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Cette disposition n'est jamais appliquée !
    M. Pierre Cardo. En effet, et je me demande bien pourquoi, comme, sans doute, de nombreux élus et acteurs de la prévention. La procédure est la suivante : l'enseignant qui constate la déscolarisation d'un enfant doit le signaler à l'académie, qui transmet à la CAF. Serait-il possible, avant d'envisager une autre étape dans l'action, de procéder à une évaluation du dispositif dans l'application pour faire apparaître où se situent les dysfonctionnements de la loi de 1954 ?
    M. Christophe Caresche. Très bien !
    M. Pierre Cardo. Je rappelle que le législateur de l'époque avait prévu cette sanction - sans enquête sociale, car il n'existait pas alors de services sociaux - pour garantir en quelque sorte l'avenir de l'enfant. Aujourd'hui, l'enjeu est le même. Je ne crois pas, en effet, qu'en enfant déscolarisé puisse avoir un avenir « normal » dans notre société. Il me paraît donc important de faire le point sur la procédure de signalement : est-elle toujours engagée, est-elle suivie ? Ces questions doivent être examinées.
    Dernier point, les certificats d'hébergement et les attestations d'accueil, qui ne sont pas évoqués dans ce texte mais dont il sera sans doute question dans les projets ultérieurs. La loi Chevènement a supprimé en la matière le rôle du maire qui, il est vrai, n'était pas clairement défini. Il n'en reste pas moins que des conditions étaient prévues pour l'hébergement. Aujourd'hui, les préfectures n'ayant pas les moyens de contrôler le départ éventuel des personnes hébergées, il est évident que c'est devenu l'une des filières les plus simples pour entrer régulièrement sur le territoire et y rester irrégulièrement. Et cela fait bien sûr l'objet de trafics.
    L'Association des maires de France, il y a déjà plus de dix ans, avait proposé une mesure simple. Ne pourrait-on pas prévoir, en effet, un enregistrement informatique des entrées sur le territoire et le déclenchement automatique d'avis de recherche en l'absence de sortie dans les trois mois ? Ce type de mesures ne peut-il pas être discuté dans le cadre de l'espace Schengen ? Enfin, ne pourrait-on pas envisager comme d'autres pays de rendre l'hébergeant responsable lorsque, par malheur, l'hébergé s'évapore dans la nature brutalement ? (Aplaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

    M. le président. Nous en arrivons à l'examen des amendements à l'article 1er.
    Mme Royal et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 85, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 1er. »
    La parole est à Mme Ségolène Royal.
    Mme Ségolène Royal. Alors que nous commençons l'examen d'une longue série d'amendements, permettez-moi, monsieur le ministre, d'émettre le voeu que, d'ici à la fin du débat, vous ne cédiez plus à la facilité qui consiste à dire que le gouvernement précédent n'a rien fait.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Mais c'est vrai !
    M. Richard Cazenave. Il n'a rien fait pendant cinq ans !
    M. Pierre Cardo. Ne nous provoquez pas, madame Royal !
    M. Richard Cazenave. Un peu de décence !
    M. le président. Monsieur Cazenave, seule Mme Royal a la parole !
    M. Jean-Pierre Blazy. Oui, monsieur Cazenave : un peu de décence !
    Mme Ségolène Royal. Non pas, monsieur le ministre - et vous aussi, mesdames, messieurs les députés de la majorité, puisque ce thème a été repris à de nombreuses reprises au cours de vos différentes interventions - pour nous faire plaisir, je n'en attendrais pas tant de vous, mais parce qu'un gouvernement ne fait rien seul. Et en mettant en cause un gouvernement qui a travaillé pendant cinq ans, ce sont tous ceux qui sont directement sur le terrain et qui contribuent à la sécurité de notre pays que vous mettez du même coup en cause.
    M. Bernard Carayon. Nul !
    Mme Ségolène Royal. Oui, tous ceux qui ont travaillé avec lui, ceux qui tous les jours sont au front pour protéger les Français : les policiers, les magistrats et les éducateurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Alors, par respect pour eux, épargnez-nous ces caricatures. D'autant que, vous l'aurez noté, au cours de nos différentes interventions, nous avons précisément veillé à ne pas caricaturer vos prises de position, monsieur le ministre, et nous continuerons ainsi.
    M. Rudy Salles. La discussion générale est close, madame Royal.
    Mme Ségolène Royal. Trois arguments justifient cet amendement de suppression : la rigueur, la cohérence et l'équilibre.
    La rigueur, d'abord. Un texte de loi, c'est un ensemble de normes précises qui entraînent des droits et des obligations et, pour la loi pénale, des sanctions. Certes, le Premier ministre a déploré l'excès de lois dans sa déclaration de politique générale. Mais aujourd'hui, monsieur le ministre, vous nous proposez un article, en trois lignes, qui renvoie à une annexe. Notons d'ailleurs au passage le décalage entre l'importance du sujet et cette appellation d'annexe.
    Mme Christine Boutin. Tout le monde comprend ce que cela signifie !
    Mme Ségolène Royal. Bien évidemment, ces dispositions non normatives ont leur place dans un exposé des motifs, celui du texte que vous avez annoncé pour l'automne prochain. Donc, dans un souci de rigueur - et le thème de la sécurité en exige beaucoup - il faut respecter le principe de la loi. Or vous nous demandez un chèque en blanc puisqu'il n'y a rien de normatif ici. C'est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cet article. Nous examinerons ensemble à l'automne des dispositions précises qui illustreront ces déclarations d'intention. Pour l'heure, nous ne pouvons même pas nous abstenir car cela reviendrait à vous donner un blanc-seing pour le texte qui sera présenté à l'automne.
    La cohérence, ensuite. En très peu de temps, le Gouvernement va nous présenter trois textes : après le premier portant sur l'amnistie qui a déjà été voté par l'Assemblée en première lecture, puis celui-ci, sur la sécurité, viendra en discussion le projet sur la justice, qui prévoit - nous l'avons appris ce matin - des mesures d'incarcération pour les enfants de treize ans. Croyez-vous vraiment que ces dispositions soient compatibles avec la loi d'amnistie, qui va remettre en liberté des délinquants, parfois multirécidivistes,...
    M. Jean-Pierre Kucheida. Excellent !
    M. Didier Quentin. Oh non ! Pas vous, pas ça !
    Mme Ségolène Royal. ... comme cela vient d'être dit sur les bancs de l'UDF ? Grâce à vous, non seulement ces délinquants vont être remis en liberté mais, pire, certains d'entre eux vont être dispensés de faire leur peine. Grâce à vous, ils vont donc retourner narguer leurs victimes. Ils leur expliqueront qu'ils le doivent à l'arrivée d'un gouvernement de droite. N'y a-t-il pas là un problème de cohérence ?
    Mme Christine Boutin. Ce propos est honteux !
    Mme Ségolène Royal. Pour notre part, nous avons voté contre la loi d'amnistie. Certes, il y en a eu d'autres dans le passé. Mais cet argument n'est guère recevable. Les temps ont changé, en effet, et nos concitoyens sont préoccupés par la sécurité. Alors que les policiers ont parfois eu du mal à interpeller ces délinquants, vous allez, vous, les relâcher. Cette démarche est parfaitement incohérente. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Troisième argument, celui de l'équilibre. Votre annexe, monsieur le ministre, est gravement déséquilibrée, je dirai même cruellement déséquilibrée car elle ne comporte aucun titre ou sous-titre relatif à l'éducation et à la famille. Or la sécurité passe par la répression, notamment pour la délinquance durablement installée, la plus grave, mais aussi par l'éducation et la prévention. Si ce deuxième volet n'est pas pris en compte, la programmation des constructions de prisons sera rapidement insuffisante. « Les prisons c'est comme les autoroutes : à peine construites, elles sont déjà saturées », m'a fait observer un gardien de prison que j'ai rencontré récemment. Imaginez ce qui va se passer si, comme le prévoit le prochain texte sur la justice, vous mettez en plus les enfants de treize ans en prison ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Il importe donc, pour respecter l'équilibre, de développer aussi la prévention et l'éducation. Peut-être cela viendra-t-il.
    M. le président. Veuillez conclure, madame Royal.
    M. Eric Raoult. Mme Royal est meilleure quand elle défend Chabichou !
    Mme Ségolène Royal. J'en ai terminé, monsieur le président.
    Il faudra compléter l'annexe par des mesures de soutien aux familles car chacun sait bien qu'un enfant correctement élevé par sa famille et qui est sur le chemin de la réussite scolaire ne sera pas un délinquant.
    S'agissant précisément d'éducation, il apparaît, au terme des premiers arbitrages budgétaires, que l'éducation nationale doit rendre 19 000 postes. Ce n'est pas un secret : les recteurs interrogent l'ensemble des responsables des écoles, des collèges et des lycées pour savoir quels postes devront être supprimés. Monsieur le ministre, si votre politique - et je ne la caricature pas -...
    Mme Christine Boutin. C'est une caricature concentrée !
    Mme Ségolène Royal. ... ou disons plutôt une partie de votre politique, puisque nous voterons l'article 2, consiste à remplacer les enseignants par des policiers, les lendemains seront douloureux et sans doute plus violents. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe de Union pour la démocratie française.) Par respect, nous vous faisons cependant la grâce de penser que ce n'est pas non plus ce que vous souhaitez. Pour vous rendre service, nous ne vous suivrons donc pas sur ce chemin.
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Madame Royal, l'examen d'un texte peut effectivement conduire à développer des arguments contre. Mais si ces arguments sont extrêmement schématiques et portent davantage sur d'autres projets, cela montre qu'on en a pas beaucoup contre le texte en question.
    M. Eric Raoult. Mme Royal ne l'a pas lu !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Ainsi, la mesure relative à l'incarcération des mineurs de treize ans figure dans un texte que nous allons examiner la semaine prochaine...
    M. Pierre Cardo. Voilà ce qui arrive, madame Royal, quand on lit trop Le Monde !
    M. Pascal Clément, président de la commission. ... et dont, apparemment, vous n'avez pas eu le temps de prendre connaissance. Permettez-moi d'expliquer d'un mot de quoi il s'agit car je ne voudrais pas que, histoire de choquer l'opinion, on s'en tienne à votre raccourci schématique.
    Il s'agira de mineurs de treize ans encourant une peine supérieure à cinq ans, qui, après avoir fait l'objet dans un premier temps de mesures éducatives, auront été placés dans un centre fermé (M. Jean-Pierre Blazy présente le journal Le Monde.) J'ignore ce que prétend Le Monde. Moi, je vous explique ce que prévoit le projet de loi.
    M. Christophe Caresche. « La détention provisoire dès l'âge de treize ans », dit Le Monde !
    M. le président. Monsieur Caresche !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Ce titre relève de la provocation, monsieur Caresche.
    M. Jean-Pierre Blazy. Peut-être. Mais nous n'avons que Le Monde pour nous informer puisque nous n'avons pas eu connaissance du projet !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Ecoutez-moi : je vous donne des explications ! Il n'est pas interdit à un parlementaire responsable d'être moins démagogue que le titre d'un journal du soir qui porte un nom cosmique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Pierre Blazy. Donnez-nous le texte de loi !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Je répète donc qu'il s'agit d'enfants de treize ans encourant une peine de plus de cinq ans, qui auront déjà bénéficié de mesures éducatives et qui auront été placés dans un centre fermé à finalité essentiellement éducative. Ce n'est que s'ils s'évadaient qu'ils pourraient se retrouver en détention.
    Alors, de grâce, évitez ces raccourcis qui sont indignes non seulement de la représentation nationale, mais tout simplement de la démocratie. Je vous demande donc, madame Royal, de vous en tenir aux questions que pourrait soulever ce projet et de ne pas faire allusion à un autre texte qui sera examiné dans une semaine et dont vous trahissez en outre l'esprit d'une façon indigne de vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. André Gerin. C'est laborieux !
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 85.
    M. Christian Estrosi, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Bien sûr, la commission a repoussé cet amendement. S'agissant du texte sur la justice, je précise qu'on peut le trouver sur le site Internet du ministère de la justice. On peut donc en prendre connaissance si l'on veut s'en donner la peine.
    Vous avez regretté, madame Royal, ce qui m'a beaucoup surpris, que certaines interventions laissent entendre que rien n'avait été fait pendant les années qui ont précédé. Or M. Le Guen vient lui-même d'expliquer que tous les sites où se développaient des réseaux d'économie souterraine ou des trafics de drogue étaient parfaitement identifiés, mais que la police n'agissait pas et ne faisait rien.
    M. Jean-Marie Le Guen. Allez-y, continuez ! Nous en reparlerons quand vous viendrez dans ma circonscription !
    M. le président. Monsieur Le Guen !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. C'est bien vous qui l'avez affirmé, monsieur Le Guen.
    En tout état de cause, votre intervention m'a beaucoup déçu, madame Royal. Les propos tenus par d'autres membres de votre groupe politique étaient en effet plus constructifs. Certains ont considéré que ce texte contribuerait à rétablir la sécurité, ils y voyaient même un copié-collé des initiatives prises antérieurement. Or voilà que, tout à coup, vous demandez à la représentation nationale de revenir complètement sur la philosophie de ce texte puisque, si nous votions votre amendement, il n'y aurait plus lieu de discuter, la suppression de l'article 1er entraînant la suppression de la programmation qui en découle. J'ai vraiment le sentiment que vous cherchez à vous défausser de vos responsabilités.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Très bien !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. D'abord, lors de la première audition du ministre devant la commission, vous avez fait le choix stratégique de quitter la séance. Ensuite, lors de la discussion en commission des lois, vous avez eu pour seul argument que le texte était présenté dans l'urgence. Enfin, aujourd'hui, vous nous proposez purement et simplement de supprimer toute la philosophie de ce projet qui tend à rétablir la sécurité dans notre pays.
    Mais n'entendez-vous pas ces citoyens français qui n'en peuvent plus d'attendre ? Ils ne voulaient pas qu'un été supplémentaire se passe sans que de premières mesures soient prises pour rétablir la sécurité dans notre pays. N'entendez-vous pas tous ces parents qui se demandent chaque matin si, aujourd'hui, leur fils ou leur fille ne se fera pas agresser, racketter, voire violer dans les toilettes du collège ou du lycée, ou si on ne lui proposera pas de la drogue ? N'entendez-vous pas ces citoyens qui, tous les jours, se demandent si ce n'est pas ce soir que leur papa ou leur maman âgés va se faire agresser dans sa cage d'escalier et se retrouver avec le col du fémur cassé parce qu'on aura tenté de lui arracher son sac ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Pierre Kucheida. Dickens de bazar !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Dans un tel climat de détresse et de privation de liberté, lorsqu'un gouvernement propose enfin, avec lucidité, pragmatisme et courage, des orientations qui associent pour la première fois l'ensemble de la représentation nationale à la définition de sa politique, pensez-vous que nous puissions nous payer le luxe d'attendre encore des mois, jusqu'à l'automne, pour traiter ces problèmes aussi graves pour l'ensemble de nos concitoyens ?
    J'en viens à vos trois arguments : la rigueur, c'est le respect des engagements que nous avons pris devant nos électeurs ; la cohérence consiste à associer les représentants du peuple aux décisions qui sont prises par le Gouvernement ; l'équilibre, c'est le traitement transversal de tous les phénomènes de société que vous n'avez pas pris en compte ces dernières années et que nous regardons enfin lucidement pour rétablir la sécurité dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Pierre Kucheida. Vous avez oublié de parler des Thénardier ! (Rires sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Madame Royal, comme il est étrange de vous voir tout à coup si sévère et si cruelle avec M. Vaillant ! Car vous proposez de supprimer tout ce que j'ai copié chez lui. Après que l'ancien ministre de l'intérieur eut expliqué que je faisais une pâle copie de ce qui avait été mis en oeuvre, avec le talent qui est le vôtre - et qui est grand, surtout lorsque la mauvaise foi est à son service (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) -, vous me proposez de tirer un trait sur toute la politique de mon prédécesseur. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme Ségolène Royal. C'est facile !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Par ailleurs, j'avoue ne pas bien comprendre ce que vous souhaitez.
    L'article 1er de la loi définit une politique. L'article 2 prévoit les moyens de cette politique. Comment pouvez-vous vous apprêter à voter les moyens après avoir fait disparaître la politique ? C'est curieux, très honnêtement ! (Mêmes mouvements sur les mêmes bancs.)
    Mme Ségolène Royal. Ce n'est pas sérieux !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Enfin, autre incohérence, vous me dites : « Nous n'avons pas eu assez de temps pour discuter de votre projet. » Or la quasi-totalité de votre intervention a été consacrée au texte de mes collègues de la justice et de l'éducation nationale.
    Mme Christine Boutin. Absolument !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Si vous avez peu de temps, au moins consacrez-le à ce texte ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

    Dernier élément, madame Royal, j'ai souvent apprécié, pour ma part, la façon dont vous présentiez vos arguments lorsque vous étiez membre du Gouvernement. Vous devriez donc goûter la présente rédaction : enfin un projet que le citoyen lambda, qui n'est pas parlementaire, peut lire sans avoir besoin d'une batterie de codes pour le traduire !
    Mme Christine Boutin. Absolument !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je vous propose même un défi : mettez donc ce texte dans votre permanence, à la disposition de vos électeurs ; je vous garantis qu'ils le comprendront ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour répondre à la commission.
    M. Jean-Pierre Blazy. Très brièvement, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, dans ce débat, vous affichez beaucoup de certitudes, beaucoup de suffisance et beaucoup de mépris pour l'opposition. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Eric Raoult. Et vous, vous faites preuve d'amnésie !
    M. Jean-Pierre Blazy. Nous, nous essayons d'aborder ce débat dans un état d'esprit constructif, et nous l'avons montré à propos non seulement de l'article 2, lors de la discussion générale, mais aussi de l'article 1er ; c'est ainsi que, ce matin, lors de la réunion de la commission des lois, nous avons présenté des amendements à cet article, mais aucun n'a été accepté.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Il s'agissait d'amendements de suppression !
    M. Jean-Pierre Blazy. Or ces amendements avaient pour but d'inciter le Gouvernement et la majorité à clarifier leur position sur un certain nombre d'orientations du texte. Puisque vous refusez ce débat - mais nous allons défendre nos amendements -, vous comprendrez que nous soutenions l'amendement de Mme Royal proposant la suppression de l'article 1er.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 85.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ont présenté un amendement, n° 87, ainsi rédigé :
    « Dans l'article 1er, substituer aux mots : "sécurité intérieure les mots "tranquillité publique ».
    La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Monsieur le président, monsieur le ministre, si chaque citoyen français a droit à la sûreté, l'expression : « sécurité intérieure » ne fait qu'illustrer la volonté de répression et de marginalisation de la prévention qui a inspiré le texte soumis à notre examen.
    M. Jean Dionis du Séjour. Lisez donc La gauche contre le peuple ! C'est un livre intéressant !
    M. Noël Mamère. A cet égard, je rejoins les critiques formulées à l'instant par Mme Royal. En effet, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, on ne peut pas, comme un charcutier qui coupe des tranches de mortadelle, étudier votre projet en le séparant de celui que va nous présenter M. le garde des sceaux. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Ces deux textes s'inscrivent dans une continuité : celle du tout-répressif, de la marginalisation de la prévention. Et quand M. Clément nous dit avec une certaine assurance que les centres fermés pour les jeunes de dix à treize ans sont des centres d'éducation, il se moque de nous ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Gérard Léonard. C'est vous qui vous moquez de nous !
    M. Noël Mamère. M. Clément n'a pas de mémoire, car il oublie que c'est un homme de son camp qui n'était pas connu pour ses appétences libérales, je veux dire M. Peyrefitte, qui, en 1979, en accord avec la protection judiciaire de la jeunesse, les magistrats et les éducateurs (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française), a décidé de supprimer les centres fermés qui, loin de favoriser la réhabilitation, étaient devenus des lieux où régnait la violence et qui marginalisaient encore davantage les jeunes qui y séjournaient...
    Mme Christine Boutin. Parlez-nous plutôt du texte !
    M. Noël Mamère. Le Gouvernement n'a consulté cette fois ni les magistrats ni les éducateurs. Or nous savons que la prison coûte trois fois plus cher que des éducateurs de rue. Mais de ces derniers, vous ne parlez pas, pas plus que des travailleurs sociaux. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Vous ne dites rien sur la revalorisation de la protection judiciaire de la jeunesse, rien sur les victimes.
    M. Dominique Dord. Démago !
    M. Noël Mamère. En réalité, vous avez fait le choix - et l'expression « sécurité intérieure » le montre bien - du tout-répressif (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française) du tout-carcéral et du tout-policier et ce choix, nous le condamnons !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La commission a, bien sûr, repoussé cet amendement. Une fois encore, M. Mamère amalgame tout. Je veux rappeler qu'il s'agit d'un texte relatif à la sécurité intérieure, présenté par le ministre de l'intérieur. En outre, monsieur Mamère, si vous voulez assurer la tranquillité publique, il faut d'abord assurer la sécurité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Je voudrais simplement répondre à M. Mamère que des consultations ont déjà été organisées sur ces problèmes qui ne datent pas d'aujourd'hui. Si, concernant les mineurs, le système carcéral était conforme à la loi, on serait bien, en France ! Mais c'est une honte de voir ce dont, pour l'instant, nous disposons. La création de centres fermés a été largement étudiée avec les professionnels mais elle sera abordée lors de l'examen du projet de loi relatif à la justice, pas aujourd'hui.
    Vous savez très bien que la violence régnait dans les anciens centres fermés, ces maisons de redressement que l'on a eu raison de supprimer, parce qu'ils accueillaient des dizaines, voire des centaines de jeunes et qu'ils étaient propices au développement du caïdat, que nous voulons combattre dans les banlieues. En revanche, les petites unités de huit à dix jeunes qu'il est prévu de mettre en place permettront de créer des centres éducatifs dirigés par des équipes éducatives et resteront liées avec le tissu social d'origine du jeune et sa famille. Celui-ci ne sera pas envoyé à 300 kilomètres de chez lui. Ainsi, la situation sera peut-être plus conforme à la loi, plus conforme à la morale et aux principes éducatifs que nous défendons. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 87.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. J'appelle maintenant les amendements à l'annexe I.
    M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ont présenté un amendement, n° 88, ainsi rédigé :
    « Dans le titre de l'annexe I, substituer aux mots : "sécurité intérieure les mots : "tranquillité publique. »
    Cet amendement tombe.
    M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ont présenté un amendement, n° 74, ainsi rédigé :
    « Substituer aux deux premiers alinéas de l'introduction de l'annexe I l'alinéa suivant :
    « Le droit à la tranquillité publique, la sécurité des personnes et la protection des biens publics et privés sont assurés par le service public de la police qui respecte et fait respecter les libertés individuelles et collectives. »
    La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. La démonstration est la même que pour l'amendement précédent. Néanmoins, je profite de l'occasion pour répondre à M. Cardo, à l'égard duquel j'éprouve le plus grand respect, que l'on ne peut pas lutter contre l'exclusion et contre certaines formes de marginalisation liées au terreau social si l'on se contente d'une politique répressive.
    M. Pierre Cardo. On ne s'en contente pas !
    M. Noël Mamère. Vouloir résumer la question de la lutte contre l'exclusion, à laquelle nous sommes tous confrontés comme élus locaux, à celle des centres fermés, en arguant qu'on y fait des aménagements, qu'aujourd'hui les jeunes ne sont plus envoyés à 300 kilomètres de chez eux, que ces centres sont ouverts sur la société...
    M. Pierre Cardo. La lutte contre l'exclusion relève du ministère des affaires sociales !
    M. Noël Mamère. ... est particulièrement caricatural ! Vous savez, mon cher collègue, combien la protection judiciaire de la jeunesse manque de moyens, combien ceux qui y travaillent sont oubliés et combien nous manquons d'éducateurs de rue. Le texte que nous présente M. le ministre de l'intérieur et celui que nous présentera, dans les semaines qui viennent, M. le garde des sceaux ne visent qu'à une seule chose : le répressif et le tout-carcéral. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Dominique Dord. Catéchisme !
    Mme Christine Boutin. N'importe quoi !
    M. Noël Mamère. Nombreux sont ceux qui, parmi vous, siégeaient sur ces bancs au cours de la XIe législature. N'avons-nous pas été quelques-uns à participer, dans la plus grande unanimité - Mme Boutin peut en témoigner - à une commission d'enquête parlementaire sur les prisons ? N'avons-nous pas, députés de gauche et de droite, unanimement constaté la grande misère qui règne dans les prisons, l'entassement dans les cellules...
    Mme Christine Boutin. Si, mais ce n'est pas le sujet !
    M. Noël Mamère. ... les freins à l'exercice de la citoyenneté, l'existence de systèmes parallèles et de mondes à part dans l'univers carcéral ?
    M. Pierre Cardo. Dans les grandes unités, oui.
    M. Noël Mamère. Dans un grand pays comme le nôtre, on ne peut pas accepter de faire des prisons le miroir déformé de nos propres turpitudes. Or ces deux textes nous sont proposés par un gouvernement qui est allé jusqu'à créer un poste de secrétaire d'Etat au programme immobilier de la justice : il y a un secrétaire d'Etat aux prisons, aujourd'hui !
    M. Thierry Mariani. C'est le résultat de cinq ans de socialisme !
    M. Noël Mamère. Est-ce dans cet esprit-là que nous allons continuer ? Alors que les magistrats sont pris dans la spirale de la sécurité et prononcent des peines de plus en plus longues, qui contribuent à l'entassement des détenus dans les prisons, on crée - et le Monde a eu raison de le souligner - la possibilité d'incarcérer des jeunes de treize ans.
    Avec les textes de M. Sarkozy et de M. Perben, nous entrons dans une spirale dangereuse dont nous allons payer durement les conséquences dans les semaines qui viennent !
    M. Pierre Cardo. Ce que nous avons payé jusqu'à présent, ce n'est rien peut-être ?
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Les deux premiers alinéas de l'introduction de l'annexe I s'inscrivent dans le prolongement de l'article 1er de la LOPS du 21 janvier 1995, qui demeure tout à fait pertinent, même si une nouvelle étape est aujourd'hui nécessaire.
    La commission a donc repoussé cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Contre.
    M. le président. La parole est à Mme Christine Boutin.
    Mme Christine Boutin. Je veux rappeler aux parlementaires de l'opposition, et notamment à M. Mamère, que nous sommes en train de discuter du projet de loi sur la sécurité intérieure. Restons dans le cadre de ce texte proposé par M. Sarkozy dont les orientations sont bonnes. On verra bien ce qui se passera lorsque nous examinerons le projet de loi relatif à la justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 74.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ont présenté un amendement, n° 89, ainsi rédigé :
    « Supprimer les troisième à sixième alinéas de l'introduction de l'annexe I. »
    La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. L'amendement est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. M. Mamère veut supprimer les troisième à sixième alinéas de l'introduction, qui portent sur les statistiques de la délinquance. Il considère peut-être qu'en supprimant les statistiques, il peut supprimer la délinquance.
    Bien évidemment, la commission a repoussé cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Bien entendu, le Gouvernement partage l'avis du rapporteur.
    Monsieur le président, je tiens à rappeler l'engagement qui a été pris hier de réaliser un travail consensuel, et à plus long terme, sur les chiffres de la délinquance. Je ne souhaite pas qu'on change le thermomètre tant qu'il n'y a pas de consensus, car une telle démarche serait à juste titre sujette à caution pour nos concitoyens, qui exprimeraient leur inquiétude.
    En revanche, qu'un groupe de travail soit créé et prenne le temps de mener une étude en y associant toutes les sensibilités politiques, afin d'examiner ce qu'il y a lieu de faire évoluer dans ce domaine, pourquoi pas ?
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 89.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ont présenté un amendement, n° 90, ainsi rédigé :
    « Supprimer les neuvième et dixième alinéas de l'introduction de l'annexe I. »
    La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Le texte affirme que l'augmentation des statistiques en zone de gendarmerie s'expliquerait par le fait que « de nouvelles catégories de population ont basculé dans la délinquance ». On aimerait savoir lesquelles ! Nous estimons que cette généralisation entraîne la stigmatisation, que nous condamnons, parce qu'elle est manifeste, de catégories entières de la population, notamment les gens du voyage. Cette stigmatisation est d'ailleurs renforcée dans le dixième alinéa où, dans des termes d'une imprécision qui frise la légèreté, on fait référence à des concepts - zone de non-droit, éradication, loi des bandes - qui ne nous semblent pas avoir leur place dans un texte législatif.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement. La délinquance a changé de nature et a évolué sur le territoire national, et il est bien évident que de telles précisions sont essentielles à cette loi d'orientation.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable également.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 90.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Estrosi, rapporteur, a présenté un amendement, n° 34 rectifié, ainsi libellé :
    « Après le mot : "violents, rédiger ainsi la fin de la deuxième phrase du onzième alinéa de l'introduction de l'annexe I : "est encouragée par la relative impunité dont ils bénéficient. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. D'accord.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 34 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ont présenté un amendement, n° 93, ainsi rédigé :
    « Supprimer le douzième alinéa de l'introduction de l'annexe I. »
    La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Ainsi que je l'évoquais hier lors de la présentation de l'exception d'irrecevabilité, il est affirmé que, « dans ce contexte de développement du trafic de drogues, la nocivité de toutes les drogues doit être reconnue et la dépénalisation de l'usage de certains produits stupéfiants doit être rejetée ». Or on ne voit pas le rapport logique entre les trois affirmations. En effet, le développement des trafics est un constat, la nocivité de toutes les drogues est une pétition de principe, démentie d'ailleurs,...
    Plusieurs députés du groupe Union pour la majorité présidentielle : « Oh ! »
    M. le président. Du calme, mes chers collègues !
    M. Noël Mamère. ... contrairement à ce qu'affirmait hier M. Estrosi, par la recherche médicale, et le rejet de la réflexion sur la dépénalisation du cannabis est une prise de position politique qui singularise la France par rapport à la quasi-totalité de nos voisins européens.
    M. Pierre Cardo. Il n'y a qu'à voir le résultat de la politique menée dans ces pays !
    M. Noël Mamère. Je rappelle au Gouvernement et à la représentation nationale ce que le gouvernement britannique a décidé la semaine dernière. Nous avons eu l'occasion, notamment lors des débats précédant l'élection présidentielle, de proposer une légalisation encadrée du cannabis. Une telle mesure permettrait d'en finir, d'une part, avec la prohibition et l'hypocrisie d'une éventuelle dépénalisation consistant à dépénaliser l'achat et la consommation de drogues douces tout en maintenant le système de trafic, donc le deal et, d'autre part, avec la loi de 1970 qui, de toute façon, est détournée, y compris avec l'assentiment de l'Etat. Quand on est attaché, comme le législateur doit l'être, au respect de la loi, il faut réintroduire ce respect par une légalisation encadrée.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. M. Mamère est constant, sa position est la même depuis longtemps.
    Nous avons assisté ces cinq dernières années à une dépénalisation de fait concernant les drogues douces. Aujourd'hui nous pouvons en mesurer les conséquences sur l'augmentation de la délinquance et de la violence et sur la santé de l'ensemble de nos jeunes.
    La plupart des rapports scientifiques sérieux démontrent que toutes les drogues, quelles qu'elles soient - il n'y a pas de drogues douces et de drogues dures - ont des conséquences néfastes sur la santé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) A cet égard, je veux saluer le nouveau gouvernement, notamment le ministre de l'intérieur, qui affirme sa volonté de rompre avec la politique du passé en faisant de ce point une orientation politique particulièrement importante de la lutte contre l'insécurité.
    Bien évidemment, la commission a repoussé cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le président, j'ajouterai un mot car je souhaite revenir sur certaines des interventions qui ont eu lieu sur l'article 1er.
    Que dit ce texte ? Deux choses, qui me semblent simples et claires et qu'il est de bon aloi de rappeler. D'abord, nous devons reconnaître la nocivité de toutes les drogues, sans exception. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Qui oserait dire que la drogue peut ne pas être en soi nocive ? Et qu'on me réponde qu'on ne dit rien sur la cigarette. En effet, je suis, comme plusieurs d'entre vous, quels que soient les bancs sur lesquels vous siégez, consterné de voir, à proximité de nos collèges et de nos lycées, de jeunes enfants fumer des cigarettes et se préparer ainsi un avenir malheureux pour leur santé.
    Je suis de ceux qui pensent qu'on ne confie pas nos enfants aux établissements - je ne dis cependant pas qu'ils en sont responsables - pour les retrouver en train de fumer. Chacun sait que le contexte social, la pression sociale, à laquelle on sait les adolescents sensibles, les poussent à agir par mimétisme.
    Nous condamnons l'usage de toutes les drogues. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Ensuite, nous disons très simplement, sans aucune intention de donner de leçons de morale, que la dépénalisation de l'usage de certains produits stupéfiants serait le signe que nous avons décidé de baisser notre garde - je ne dis pas que nous l'aurions voulu - et serait interprété, c'est certain, comme une faiblesse.
    Les expériences étrangères en la matière n'ont guère été couronnées de succès. Quand on voit ce qui se passe dans certains pays  - ne les citons pas - quelque part au-delà de la Belgique - et ce que cela représente comme marché de la drogue pour certains de nos jeunes, on n'a vraiment pas envie de suivre leur exemple !
    Mme Christine Boutin. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Enfin, bannissons toute hypocrisie. On m'a interrogé tout à l'heure sur l'existence à Paris de marchés de la drogue à ciel ouvert. Oui, cela existe, et j'ai donné des instructions très fermes à la préfecture de police pour que cela cesse. Opposer le méchant trafiquant - il l'est, certes - au gentil utilisateur relève de l'angélisme. En effet, s'il y a des trafiquants, c'est parce qu'ils savent qu'il y a des consommateurs habituels et donc un marché. Comment atteindre les trafiquants si l'on s'interdit de toucher aux consommateurs ?
    M. Christophe Caresche. Comme pour la prostitution ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il y a bien d'autres fléaux, monsieur Caresche, vous avez raison ! Et j'invite à abandonner toute hypocrisie à leur propos aussi.
    Oui, le Gouvernement revendique ce combat ferme, de tous les instants, et sous toutes les formes, contre la drogue, ce cancer qui ronge notre société et prépare des drames pour demain.
    Mme Christine Boutin. Bravo !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Les trafiquants doivent savoir que le combat que nous mènerons contre eux sera sans faiblesse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Monsieur le ministre, je pense que vous faites un amalgame. Si vous voulez sortir de l'hypocrisie que vous dénoncez, puisque vous prétendez être un combattant acharné de toutes les drogues et que vous montrez du doigt ces jeunes qui fument des cigarettes à la sortie des lycées,...
    M. le ministre, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Pas du tout !
    M. Noël Mamère. ... pourquoi acceptez-vous que l'Etat perçoive tant de taxes sur le tabac et l'alcool ? Pourquoi, avec vos amis de la droite, vous êtes-vous battus contre la loi Evin, essayant de la détourner, alors qu'elle était un des premiers pas de la lutte contre une drogue dure, beaucoup plus dure que le cannabis, l'alcool ?
    D'ailleurs M. le Président de la République, dans son intervention du 14 juillet, n'a-t-il pas fixé comme l'une de ses priorités la lutte contre la violence routière...
    Mme Christine Boutin. Contre un cancer ! Et la drogue est un cancer !
    M. Noël Mamère. ... dont nous savons bien qu'elle tient à deux causes : la vitesse et l'alcool au volant.
    Plusieurs députés de l'Union pour la majorité présidentielle. Et la drogue au volant ?
    M. Noël Mamère. Alors ne venez pas nous dire que vous êtes un partisan acharné de la lutte contre toutes les drogues ! On ne peut pas faire l'amalgame entre drogues douces et drogues dures,...
    Mme Christine Boutin. Il n'y a pas de drogue douce, il y a des drogues !
    M. Noël Mamère. ... celles qui rendent dépendants, qui provoquent des cancers, qui engendrent des accidents, celles à cause desquelles nous finançons, vous et moi, des lits d'hôpitaux pour soigner des cancéreux victimes de leur dépendance.
    Il convient, devant la représentation nationale, de faire preuve de nuance et de reconnaître qu'un jour il faudra bien sortir de l'hypocrisie. Même si la police et les magistrats ne font plus preuve de la même sévérité qu'autrefois à l'égard des consommateurs de cannabis, il y en a encore en prison ; comme on trouve en prison des sans-papiers. Mais qu'ont-ils donc à y faire ? Qu'est-ce qu'un toxicomane, un vrai toxicomane, consommateur de drogues dures, a à faire dans une prison ? Ne devrait-il pas être encadré, considéré comme un malade plutôt que comme un délinquant ?
    Puisque vous affirmez que la police de proximité doit faire son travail, que la police doit être là où les citoyens l'attendent, alors, qu'elle s'occupe de ce qui la regarde, c'est-à-dire de l'ordre public, de la sûreté des citoyens mais qu'elle ne fasse pas la chasse à de jeunes consommateurs de cannabis qui ne seront jamais dépendants !
    Oui, c'est vrai, nous sommes dans une société du risque. Chacun doit accepter le risque, y compris celui de porter atteinte à son intégrité physique et à sa santé. L'Etat n'a pas à se transformer en gendarme ; il doit fixer un cadre législatif. Nous sommes là pour ça, et pour édifier l'Etat de droit. Nous n'avons pas à nous transformer en gendarmes et à punir tous ceux qui prennent des risques. Enfin, le risque que fait courir le cannabis n'a rien à voir avec celui que font courir le crack ou l'héroïne, tous les psychiatres et les médecins vous le diront !
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. L'inconvénient de ce texte, c'est qu'il traite de nombreux sujets qui mériteraient de longues réflexions.
    En premier lieu, nous sommes bien d'accord pour admettre que toutes les drogues sont nocives. M. Bernard Kouchner avait d'ailleurs dénoncé la nocivité non seulement des drogues, mais aussi du tabac et de l'alcool.
    M. Thierry Mariani. On ne s'en souvient guère !
    M. Christophe Caresche. Sur un autre point, comme vous nous y invitez, monsieur le ministre, je voudrais lever l'hypocrisie. M. Estrosi a dit : « Désormais, la loi va s'appliquer dans son intégralité. » Or les sanctions prévues par la loi ne sont pas adaptées au simple usage de cannabis. Si vous appliquiez la loi, comme vous le demande notre collègue, dans l'état actuel de la législation, plusieurs millions de personnes devraient faire l'objet de poursuites pénales dans notre pays. Est-ce bien ce que vous entendez faire ?
    Je préférerais que l'on envisage une autre forme de sanction. La consommation de cannabis n'est pas une infraction d'ordre pénal ; peut-être qu'une contravention suffirait.
    En tout cas, la position de M. Estrosi est totalement illusoire et je ne pense pas, monsieur le ministre, que vous pourrez aller dans son sens.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 93.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ont présenté un amendement, n° 91, ainsi rédigé :
    « Supprimer les deux premières phrases du treizième alinéa de l'introduction de l'annexe I. »
    La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. L'amendement n° 91 est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable également.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 91.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Blazy et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 48, ainsi rédigé :
    « Avant la dernière phrase du treizième alinéa de l'introduction de l'annexe I, insérer la phrase suivante : "Le rôle de l'Etat étant de restituer la justice et non de prodiguer la consolation, il convient de reconnaître à la victime un véritable statut lui garantissant une réponse systématique et homogène, une réponse rapide adaptée et lisible non seulement de la part de la justice mais également des forces de sécurité qui, parce qu'elles sont souvent les premières averties, doivent s'acquitter de leur devoir de conseil en adressant les victimes à l'organisme approprié ou à la maison de la justice et du droit la plus proche ; ils doivent en outre être en mesure de recueillir avec soin à tout moment les plaintes des victimes. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.
    M. Jean-Pierre Blazy. Voilà notre premier amendement. Nous allons voir si la majorité et le Gouvernement sont capables d'accepter des amendements qui ont été refusés ce matin en commission des lois.
    Cet amendement porte sur la question essentielle du droit des victimes, lesquelles doivent être au coeur d'une politique de sécurité intérieure, bien évidemment.
    Faisant suite au rapport commandé à Marie-Noëlle Lienemann sur ce sujet par le précédent gouvernement, la loi de juin 2000, tant décriée, sur la présomption d'innocence comportait, il ne faut pas l'oublier, une partie relative aux droits des victimes.
    Ce matin, M. le rapporteur ne nous a pas convaincus en parlant de charte de qualité pour l'accueil des victimes dans les commissariats. C'est intéressant, certes, mais nous voulons aller plus loin et, dans le droit fil du rapport Lienemann et de la loi que je viens d'évoquer, nous voulons donner un véritable statut à la victime. Tel est l'objet de cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement, considérant que le texte était suffisamment complet, notamment dans sa page 15 où il aborde largement le problème des victimes, et sachant que le Gouvernement n'avait pas perdu une seconde pour s'attaquer à ce problème auquel, entre nous soit dit, monsieur Blazy, personne d'autre ne s'était intéressé auparavant. Et même, la loi sur la présomption d'innocence avait plutôt tourné en faveur des délinquants.
    M. Jean-Pierre Blazy. Nous parlons des droits des victimes !
    M. Pierre Cardo. En cinq ans, un rapport seulement à ce propos !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Je vous rappelle, monsieur Blazy, sans esprit polémique, que la loi sur la présomption d'innocence, dont la plupart des articles ont reçu notre adhésion, en comportait d'autres qui ont rendu très difficile le travail des officiers de police judiciaire, et qu'elle a complètement négligé les victimes. En effet, si elle offrait au délinquant la possibilité de disposer d'un avocat au bout d'une heure de garde à vue,...
    M. Jean-Pierre Blazy. Nous parlons des droits des victimes, je le répète !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... d'un interprète ou d'une assistance médicale, la victime était abandonnée sur le trottoir et n'avait droit à rien de tout cela !
    Dès le 20 mai 2002, dès son entrée en fonctions, le Gouvernement a diffusé une circulaire comportant des dispositions en faveur des victimes, ce qui ne s'était jamais produit auparavant. La loi vient compléter en quelque sorte cette circulaire et la consolider.
    Cela dit, votre amendement ne me choque pas, personnellement, puisqu'il ne fait qu'appuyer la démarche du Gouvernement. Je laisserai donc le soin à l'Assemblée de décider de son sort.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. S'il faut créer un statut pour la victime, c'est qu'il n'existe pas. Et s'il n'existe pas, c'est que vous ne l'avez pas créé au cours des cinq dernières années !
    M. Jean-Pierre Blazy. Nous avons commencé !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Vous nous demandez de faire ce que vous n'avez pas fait. Eh bien, le Gouvernement est d'accord ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Ce n'est pas très difficile d'être d'accord avec une proposition comme celle-ci, qui signifie à la fois tout et rien ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Merci pour ses auteurs !
    M. Noël Mamère. Je ne suis pas toujours d'accord avec mes amis du groupe socialiste, vous avez pu le constater hier au cours de la discussion générale. Nous n'avons pas le même point de vue sur la sécurité, et en particulier sur la question de la réparation.
    Une victime est une victime. Le principal problème pour elle, c'est la réparation et, surtout, l'accueil dans les commissariats de police. Or, tant qu'on prônera la police de proximité tout en gardant un système qui maintient un découpage par circonscription qui fait, par exemple, que dans des communes de la périphérie de Bordeaux, comme celle dont je suis maire, il y a un commandant de police mais que le commissariat le plus proche se trouve à une dizaine de kilomètres, il sera difficile de pratiquer ladite police de proximité et d'améliorer l'accueil des victimes.
    Connaissant les taux d'élucidation dérisoires, on n'a guère d'espoir, lorsqu'on vient porter plainte dans certains commissariats de police après avoir été victime d'une agression ou d'un délit, d'obtenir réparation.
    C'est sur la réparation qu'il faut faire un effort, mais je n'ai rien vu de convaincant, monsieur le ministre, dans votre projet de loi sur la sécurité, concernant la victime, ses droits, et en particulier ses droits à réparation.
    J'avais à cet égard proposé hier - mais vous avez paru considérer cette proposition comme négligeable - d'installer dans les commissariats de police une assistance psychologique pour les victimes, qui en ont parfois bien besoin. Vous avez balayé cette suggestion d'un revers de main. Elle me semble pourtant plus sérieuse que l'idée d'un statut de la victime !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Je voudrais appeler l'attention sur la rédaction curieuse de l'amendement de M. Blazy.
    « Le rôle de l'Etat étant de restituer la justice » : est-ce un aveu de la part des socialistes ? L'Etat rend la justice, il ne la restitue pas !
    Je poursuis ma lecture : « et non de prodiguer de la consolation » : le texte du Gouvernement ne visait-il, selon vous, qu'à donner des consolations ?
    Je suis très content que M. le ministre de l'intérieur accepte cet amendement, qui n'est pas aussi inutile et innocent qu'il paraît. Mais, puisqu'il s'agit d'une loi d'orientation, il faudra que cela soit complété par un véritable statut de la victime.
    Le rapporteur quant à lui a dit qu'on laissait les victimes sur le trottoir. C'est vrai ! Il n'est pas normal qu'une victime ne puisse pas disposer dans certains cas d'un conseil juridique, pour savoir si elle doit porter plainte, comment le faire, avec constitution de partie civile ou non, ce que signifie se porter partie civile et quels droits cela lui ouvre. Aujourd'hui, les seuls à connaître leurs droits dans ce pays sont les délinquants, pas les victimes ! Nous avons besoin d'un statut de la victime ; le groupe UDF votera donc pour cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Comme M. le ministre, je suis favorable au principe, même si je ne sais pas trop quoi penser du texte même de cet amendement. Je voudrais néanmoins apporter deux ou trois éléments de réflexion.
    Des expériences ont été menées récemment dans quelques commissariats où ont été créés des postes de travailleurs sociaux pour l'accueil et le suivi des victimes. La difficulté, c'est que leur financement incombait aux collectivités locales. Si l'on admet que le problème relève de l'Etat, il serait logique de prévoir, à terme, qu'il le prenne en charge.
    Par ailleurs, et ce n'est pas dans le présent projet de loi, mais peut-être cela figurera-t-il dans celui que nous examinerons ultérieurement, lorsque des assurances s'affrontent à propos d'une indemnisation, elles font attendre les victimes pendant des mois, voire des années. Sur ce point, nous sommes muets.
    Enfin, fréquemment, se sont créées des associations d'aide aux victimes, qui les conseillent, et c'est très bien, mais cela relève, je pense, des collectivités locales. Malheureusement, il ne leur est jamais reconnu le droit de se porter partie civile pour les victimes, ce qui pourrait être utile quand on connaît les risques qu'il y a à témoigner ou à déposer plainte dans certaines affaires.
    M. Richard Cazenave. Je ne voterai pas cet amendement : il n'est pas écrit en bon français !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 48.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. MM. Caresche, Blazy, Viollet et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 58, ainsi rédigé :
    « Dans le troisième alinéa du I de la première partie de l'annexe I, substituer aux mots : « Président de la République » les mots : « Premier ministre »
    La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Je voudrais revenir sur un sujet qui n'est pas anecdotique, le rattachement du Conseil de sécurité intérieure au Président de la République. Annoncé au cours de la campagne électorale, il est apparu comme une surenchère sur le Conseil de sécurité intérieure existant qui était placé sous l'autorité du Premier ministre. On a le sentiment que l'actuelle majorité a voulu démontrer ainsi qu'elle entendait faire davantage que la précédente.
    Ce faisant, nous procédons à une sorte d'innovation institutionnelle puisque le Président de la République se verra conférer des prérogatives qui sont celles du Gouvernement.
    Je rappelle que l'article 20 de la Constitution dispose que c'est le Premier ministre qui conduit la politique de la nation. Avec cette disposition, c'est tout simplement l'équilibre des pouvoirs qui est remis en cause.
    Cette présidentialisation de la sphère gouvernementale nous inquiète et ce sont peut-être les prémisses d'autres réformes. Dans l'état actuel de la Constitution, en tout cas, le Conseil de sécurité intérieure devrait relever du Premier ministre car c'est lui qui conduit au jour le jour la politique de la nation.
    J'ajoute un argument supplémentaire. Le Président de la République n'est pas responsable devant le Parlement. En plaçant le Conseil de sécurité sous son égide, vous faites échapper au contrôle du Parlement tout un pan de la politique qu'il devrait pouvoir contrôler et cela me paraît extrêmement grave. J'ai le sentiment que, par cette mesure, qui a peut-être été improvisée pendant la campagne électorale, nous bouleversons sensiblement l'équilibre des pouvoirs prévu par la Constitution.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Dans le titre II de la Constitution, monsieur Caresche, l'article 5 est très clair : « Le Président de la République veille au respect de la Constitution. Il assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'Etat. Il est garant de l'indépendance nationale, de l'intégrité du territoire et du respect des traités. »
    Le Président est donc parfaitement dans son rôle pour présider le Conseil de sécurité intérieure, au même titre qu'il préside le Conseil supérieur de la magistrature ou le Conseil de défense nationale. C'était un engagement très fort de sa campagne électorale. Les Français ont déjà tranché ce débat et la commission a repoussé cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable également.
    M. le président. La parole est à M. Gérard Léonard.
    M. Gérard Léonard. M. Caresche se livre à une lecture partielle, voire partiale, en tout cas étriquée, de la Constitution.
    Notre rapporteur a rappelé à juste titre les termes de l'article 5 : « le Président de la République veille au respect de la Constitution. » Or, dans notre Constitution, figure en préambule un texte qui évoque très directement le principe de sécurité, la sûreté : c'est la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Il est donc parfaitement normal que le Président de la République, garant des institutions, s'implique personnellement, en tant que Président, dans la lutte contre l'insécurité. Par là même, il contribue au respect de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
    L'argument de M. Caresche, qui relève d'une argutie, et en tout cas d'une vision étriquée de la Constitution, est donc parfaitement inacceptable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 58.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Blazy et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement n° 49, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le début du sixième alinéa du I de la première partie de l'annexe I :
    « Sans préjudice de l'exécution et de l'évolution des contrats locaux de sécurité prévus par la loi du 15 novembre 2001, déjà conclus ou à venir, les objectifs... (Le reste sans changement.) »
    La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.
    M. Jean-Pierre Blazy. Tout à l'heure, monsieur le ministre, vous avez donné un avis favorable à l'amendement n° 48 du groupe socialiste, mais en ajoutant, maniant l'ironie, que, pour l'aide aux victimes, nous n'avions rien fait. Comment pouvez-vous dire que le gouvernement précédent n'a rien fait en cette matière ? Laissez-moi vous rappeler le rapport Lienemann, la loi de juin 2000 ou encore la création des maisons du droit et de la justice et l'aide aux associations de victimes. Il faut poursuivre dans cette voie, bien évidemment, et, comme vous avez donné un avis favorable à notre amendement n° 48, sans doute allez-vous faire de même avec celui-ci.
    L'amendement n° 49 concerne l'échelon local de votre nouvelle architecture, qui n'est pas si nouvelle que cela puisque vous prévoyez vous aussi des structures locales de sécurité.
    Dans votre réponse, vous avez précisé que les contrats locaux de sécurité déjà mis en place ne seraient pas remis en cause ; mais, pour un conseil local, il n'y a pas de contrat. C'est une assemblée. Tout à l'heure, nous allons examiner un amendement n° 32 rectifié du Gouvernement. Ainsi, le Gouvernement a bien compris qu'il lui fallait clarifier sa position sur la composition des conseils locaux, parce que, pour conclure les contrats locaux de sécurité, il n'y a pas que les acteurs institutionnels, il y a aussi les bailleurs, les sociétés de transport et d'autres partenaires. C'est pourquoi nous souhaitons préciser que les conseils locaux doivent être mis en place sans préjudice de l'exécution et de l'évolution des contrats locaux de sécurité prévus par la loi du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cet amendement est sans objet et il nous paraît inutile d'ajouter une telle disposition dans la loi.
    M. le ministre lui-même vous a rassuré tout à l'heure à la tribune, monsieur Blazy, en vous disant très clairement que les contrats locaux de sécurité déjà conclus seraient préservés. Mais nous ne voulons cependant pas voir les structures s'empiler les unes sur les autres. Nous souhaitons que, là où il y a une volonté de fédérer, l'ensemble des dispositions qui nous sont proposées pour la prévention et la répression ne viennent pas se surajouter à quelque chose qui existe déjà.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 49.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 17 rectifié et 16 rectifié, présentés par MM. Salles, Dionis du Séjour et Ferry, pouvant être soumis à une présentation commune.
    L'amendement n° 17 rectifié, est ainsi rédigé :
    « Après le sixième alinéa du I de la première partie de l'annexe I, insérer l'alinéa suivant :
    « Les parlementaires du département sont membres associés de droit de ces conférences départementales de sécurité. »
    L'amendement n° 16 rectifié, est ainsi rédigé :
    « Après le sixième alinéa du I de la première partie de l'annexe I, insérer l'alinéa suivant :
    « Ces conférences publient une fois par an un rapport faisant état de la situation de la sécurité dans le département. Ce rapport est communiqué, pour information, aux parlementaires, aux présidents de conseils généraux et aux maires du département. »
    La parole est à M. Rudy Salles.
    M. Rudy Salles. Tout au long du débat que nous avons depuis bien longtemps, et pendant toute la campagne électorale, nous avons ressenti les uns et les autres une coupure entre les élus, parlementaires ou élus locaux, et les instances opérationnelles en matière de sécurité, voire en matière d'information. C'est un problème durement ressenti par les élus parce que nous sommes en première ligne, que nous sommes en permanence interrogés par nos concitoyens qui s'inquiètent que personne ne puisse rien à leurs problèmes et que les élus eux-mêmes semblent être informés par la presse de ce qui se passe sur le terrain. Bien sûr, nous essayons de sortir de cette difficulté, mais la coupure était très grande.
    Il est vrai, monsieur le ministre, que, dans ce projet de loi, il y a des avancées notables dont nous tenons à vous remercier, mais nous souhaitons faire un pas de plus. C'est la raison pour laquelle nous avons déposé deux amendements qui procèdent du même esprit. Le premier tend à associer les parlementaires aux conférences départementales de sécurité, le second à obliger ces conférences départementales de sécurité à rédiger un rapport annuel qui serait ensuite publié et distribué à l'ensemble des élus du département.
    Je rectifie d'ailleurs à nouveau l'amendement, n° 16 rectifié, en substituant les mots : « au président du conseil général » aux mots : « aux présidents de conseils généraux », puisque c'est le conseil général du département qui est concerné.
    Telle est la philosophie de ces deux amendements. Nous, élus - parlementaires, maires, présidents de conseil général et autres -, ne pouvons pas être écartés de façon permanente de ces instances dirigeantes, en tout cas de l'information dont nous avons tant besoin pour répondre à l'inquiétude de nos concitoyens et intervenir auprès des pouvoirs publics.
    Je rappelle simplement que les parlementaires votent le budget du ministère de l'intérieur. Vous avez déjà annoncé de grandes réformes et nous aurons désormais des statistiques mensuelles sur l'état de la délinquance dans notre pays. C'est un immense progrès puisque nous ne disposions pas auparavant des statistiques de l'année en cours. Alors que le budget se discute au mois de novembre, nous restions dans le flou le plus artistique pendant à peu près dix mois sans disposer de chiffres. Je reconnais que la presse ou les syndicats de policiers nous transmettaient parfois, par la bande ou sous le manteau, certaines informations, mais ce n'était pas convenable pour la représentation nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements, l'amendement n° 16 rectifié ayant été rectifié une seconde fois pour substituer aux mots : « aux présidents de conseils généraux » les mots : « au président du conseil général » ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. L'amendement n° 17 rectifié a été adopté par la commission et je vous remercie, monsieur Salles, de votre intervention qui rappelle combien, en commission, les parlementaires ont souhaité disposer d'informations.
    Cela dit, à titre personnel, je reste réservé sur cet amendement, d'abord parce qu'un parlementaire est un élu de la nation plus qu'un élu du département et que ce qui nous est proposé par le Gouvernement est une structure opérationnelle dans laquelle les parlementaires n'ont pas forcément leur place.
    Je préfère l'amendement n° 16 rectifié, qui prévoit une information des parlementaires, du président du conseil général et des maires. Tout cela complète parfaitement ce qui nous est proposé par le Gouvernement à l'article 5, avec les dispositions sur l'évaluation. Cela me paraîtrait en tout cas plus conforme à l'architecture du texte.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je prie d'abord M. Salles et M. Léonard de bien vouloir m'excuser, parce que je m'aperçois que je ne leur ai pas répondu dans la discussion générale, alors que leurs interventions étaient pertinentes et intéressantes, je vais essayer de me rattraper.
    Nous avons un point de désaccord, et je vais m'en expliquer devant la représentation nationale.
    Qu'est-ce que la conférence départementale ? C'est une structure opérationnelle qui regroupe des chefs de services, dirigée par le procureur de la République et le préfet, et qui décide notamment les opérations qui seront engagées. Qui peut imaginer que cela puisse donner lieu à un débat politique, pas au mauvais sens du terme, entre parlementaires de sensibilités différentes, lorsque tel ou tel chef de service donne une information ou décide une action ? Le parlementaire vote la loi, contrôle le Gouvernement, est informé, il n'est pas l'exécutif et ce n'est pas lui faire injure, naturellement. Dans tel ou tel département, monsieur Salles, vous qui connaissez parfaitement ces questions, cela peut se passer très bien, mais, dans tel autre il pourrait y avoir, devant l'ensemble des chefs de services, de la police, de la gendarmerie, du fisc, de la douane, un débat politique pour savoir s'il est ou non opportun de lutter contre la violence criminogène ou la violence sociale. Je vous laisse à penser ce qu'il en serait de l'efficacité.
    C'est la raison pour laquelle je prends plutôt l'amendement n° 17 rectifié comme un appel constant de votre part et du groupe UDF pour que les élus, quel que soit le niveau, soient associés à l'information, au contrôle et à la prévention, mais pas à une décision opérationnelle.
    L'amendement n° 16 rectifié, en revanche, me semble parfaitement pertinent et nécessaire.
    Donc, à moins que vous ne le retiriez, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 17 rectifié, et il accepte l'amendement n° 16 rectifié.
    M. le président. La parole est à M. Gérard Léonard.
    M. Gérard Léonard. Je partage la réserve émise par le rapporteur et les réactions du ministre.
    Cet organe n'est ni une institution de contrôle ni une instance d'évaluation ou de réflexion sur les grandes orientations, c'est un organe de mise en oeuvre d'une politique définie par le Gouvernement, et je crois que nous sortirions un peu de notre rôle en y participant, avec le risque que M. le ministre a souligné. Imaginons ce que nous avons vécu depuis hier : on voit très bien quel effet négatif cela pourrait avoir sur les forces d'intervention.
    Pour ma part, je voterai donc contre l'amendement n° 17 rectifié, notre besoin d'information n'étant pas nié.
    M. le président. Monsieur Salles, retirez-vous votre amendement ?
    M. Rudy Salles. Je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, pour la réponse que vous m'avez donnée. Effectivement, cet amendement est un appel lancé par les élus. Nous ne pouvons pas continuer d'aller à la pêche aux informations comme jusqu'à présent : une telle attitude ne nous est pas pardonnée par nos électeurs, qui considèrent qu'il n'y a plus de responsable. Nous qui sommes des élus voulons être responsables, surtout face à un problème tel que celui-ci, qui pénalise tant nos concitoyens. C'est la raison pour laquelle j'accepte de retirer l'amendement n° 17 rectifié.
    M. le président. L'amendement n° 17 rectifié est retiré.
    Je mets aux voix l'amendement n° 16 deuxième rectification.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 32 rectifié, ainsi rédigé :
    « Après le huitième alinéa du I de la première partie de l'annexe I, insérer les quatre alinéas suivants :
    « Les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, présidés par les maires, auront pour mission de répertorier les actions de prévention existantes, de dégager une stratégie s'appuyant sur des objectifs déterminés et d'animer une politique cohérente en fonction de ces objectifs.
    « Ils s'appuieront sur toutes les compétences utiles, notamment celles des services concernés de l'Etat et des collectivités locales, des acteurs sociaux, du monde associatif, des bailleurs et des sociétés de transport collectif.
    « Les résultats de cette politique seront appréciés à travers la publication d'indicateurs, qui donneront lieu à un rapport annuel, soumis au conseil départemental de prévention.
    « Les conditions dans lesquelles les compétences des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance pourront être étendues seront examinées. Une mission de réflexion sera confiée à cet effet à un élu. »
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cet amendement se justifie par son texte même. Il tient compte de la discussion générale que nous avons eue hier, où de nombreux intervenants ont demandé de bien marquer l'utilité d'une politique de prévention faisant partie intégrante de la politique de sécurité du Gouvernement, laquelle doit par ailleurs être évaluée. Il nous a semblé utile de proposer à la représentation nationale de marquer cette volonté dans les responsabilités des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La commission a accueilli très favorablement cet amendement, qui place très fortement le maire en position de charnière entre la politique de prévention et la politique de répression.
    Bien évidemment, c'est aux forces de sécurité, aux forces de l'ordre, de mener l'action en matière de répression, mais c'est le maire, qui participe désormais à la définition des missions qui appartiennent aux forces de l'ordre, et qui a aussi un rôle en matière de politique de la ville, de politique sportive, de politique culturelle, de politique sociale, qui est le mieux à même d'apprécier de manière transversale l'équilibre qu'il y a lieu de définir entre une bonne politique de prévention et une bonne politique de répression. Je vous remercie donc, monsieur le ministre, de nous proposer cet amendement qui conforte cette vision des choses.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.
    M. Jean-Pierre Blazy. Même si nous souscrivons en grande partie aux explications de M. le rapporteur, monsieur le ministre, nous ne sommes pas tout à fait rassurés, car nous craignons le démantèlement des contrats locaux de sécurité.
    Vous avez bien dit que ces derniers pourraient subsister, mais je souhaiterais que vous apportiez des précisions sur la façon dont ils s'articuleront avec les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, qui seront présidés par les maires. Il y a aujourd'hui 753 contrats locaux de sécurité, dans des villes de gauche comme dans des villes de droite, et ils sont souvent animés par des maires très dynamiques sur les questions de sécurité et de prévention. J'en connais d'ailleurs qui obtiennent des résultats, comme M. Copé à Meaux.
    Je souhaiterais également que vous apportiez des précisions sur l'articulation entre ces conseils locaux et les conseils départementaux. Je rappelle en effet que la nouvelle architecture comprendra un conseil de sécurité intérieure, dont la nature ne changera pas par rapport à ce que nous connaissons aujourd'hui, les conseils départementaux, qui sont purement opérationnels, et les conseils locaux, présidés par le maire, qui réuniront tous les acteurs de la coproduction de sécurité.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 32 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Mariani a présenté un amendement, n° 30 rectifié, ainsi rédigé :
    « Dans le onzième alinéa du I de la première partie de l'annexe I, après les mots : "Ces groupes, insérer les mots : "seront associés à la lutte intérieure contre les réseaux d'immigration clandestine. Ils. »
    La parole est à M. Thierry Mariani.
    M. Thierry Mariani. Il s'agit, par cet amendement, d'associer les groupes d'intervention régionaux, les GIR, à la lutte intérieure contre les réseaux et les filières d'immigration clandestine. Chacun voit bien que, hélas ! il y a un lien évident entre la croissance de l'immigration clandestine et la montée de l'insécurité. En effet, comment peut-on vivre de revenus réguliers quand on est en situation irrégulière ?
    Je rappelle que le précédent gouvernement a baissé les bras à cet égard durant cinq ans : le taux de reconduite aux frontières, qui est tombé en dessous de 20 %, illustre bien cet abandon.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La commission a adopté cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 30 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Mme Boutin a présenté un amendement, n° 25 rectifié, ainsi rédigé :
    « Compléter le onzième alinéa du I de la première partie de l'annexe I par la phrase suivante : "Les groupes d'intervention régionaux prendront en charge les délits commis par les gens du voyage lorsqu'ils présenteront les caractéristiques justifiant l'intervention de plusieurs administrations, notamment fiscale. »
    La parole est à Mme Christine Boutin.
    Mme Christine Boutin. Lors de la discussion générale, plusieurs parlementaires ont fait allusion aux difficultés que crée sur le terrain la présence de gens du voyage. Vous nous avez annoncé, monsieur le ministre, qu'un texte concernant plus spécifiquement cette communauté serait mis en discussion à l'automne prochain. Par cet amendement, je propose que les groupes d'intervention régionaux soient compétents pour traiter des délits commis par les gens du voyage lorsqu'ils justifient l'intervention de plusieurs administrations, notamment l'administration fiscale.
    Vous savez que nos concitoyens s'interrogent sur l'origine des fonds ayant servi à acheter les caravanes et les équipements des gens du voyage. Les groupes d'intervention régionaux que vous avez mis en place doivent pouvoir intervenir en ce domaine, d'autant qu'ils auront une vision globale des problèmes.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Ce matin, la commission a repoussé cet amendement, considérant que la mission des groupes d'intervention régionaux répondait de fait au souci exprimé par Mme Boutin. Cela étant, cet amendement ne peut que donner un peu plus de poids à l'action des GIR, notamment dans ce domaine. Je laisse donc à l'Assemblée le soin de décider et je m'en remets à sa sagesse.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cet amendement, qui fait l'objet d'une seconde rédaction, vise, en associant l'administration fiscale, à permettre l'engagement d'une action multiforme contre une délinquance bien particulière. Mme Boutin ne m'en voudra pas de dire que ce n'était pas tout à fait l'objet de la première rédaction de son amendement. Sur cette seconde rédaction, le Gouvernement, après avoir consulté le rapporteur, donne son accord.
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Je m'oppose fermement à cet amendement que je considère comme dangereux. En effet, le texte de M. le ministre de l'intérieur propose purement et simplement une stigmatisation (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française) et une discrimination de cette catégorie de Français que sont les gens du voyage. Permettre que les GIR les contrôlent revient à renforcer encore un peu plus cette discrimination.
    L'administration fiscale doit faire son travail de la même façon, quels que soient les Français. Or les gens du voyage sont des Français comme vous et moi.
    Je voudrais rappeler à mes collègues, qui sont aussi, pour la plupart, des maires, que l'ancienne majorité a, à l'instigation de M. le ministre Besson, obligé les communautés de communes et les communes à se doter d'aires de stationnement pour les gens du voyage. Or l'Etat rencontre beaucoup de difficultés pour faire appliquer cette nouvelle disposition dans le cadre des plans départementaux.
    Mme Christine Boutin. Et pour cause !
    M. Noël Mamère. Je trouve particulièrement scandaleux de voir comment, aujourd'hui, à l'aube du troisième millénaire, on stigmatise cette population !
    M. Bernard Carayon. Y a-t-il une aire de stationnement pour les gens du voyage à Bègles ?
    Mme Christine Boutin. Il y a pourtant de la place, à Bègles !
    M. Noël Mamère. Et ce n'est pas la seule catégorie de population qui est stigmatisée et discriminée dans ce projet de loi. Nous avons, là permettez-moi de le dire, des traces d'apartheid ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Rudy Salles. Ces propos sont scandaleux !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.
    M. Jean-Pierre Blazy. M. le rapporteur s'en est remis à la sagesse de l'assemblée.
    Je suis maire et je reconnais que, comme beaucoup d'autres maires, j'ai des problèmes avec les gens du voyage. Toutefois, il ne faut pas pratiquer l'amalgame. Même si les gens du voyage nous posent des problèmes, il y a parmi eux des gens honnêtes. Certes, d'autres le sont moins, et il est sûr que la délinquance existe aussi chez les gens du voyage.
    Cela dit, la sagesse voudrait, puisque plusieurs membres de la majorité ont proposé en commission de lois de demander la création d'une commission d'enquête parlementaire sur cette question, d'attendre les conclusions de cette commission et de surseoir au vote de l'amendement de Mme Boutin. Pour notre part, nous serions assez favorables à la création de cette commission d'enquête parlementaire, car il est nécessaire d'avoir une vue objective de ce problème. Cela nous permettrait ensuite de faire des recommandations au Gouvernement.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Le groupe UDF est favorable à l'adoption de l'amendement de Mme Boutin.
    Il est insupportable - pardonnez-moi de vous le dire, monsieur Mamère - d'être systématiquement accusé de vouloir stigmatiser dès lors que l'on cherche à organiser. Le fait qu'il existe des personnels de police spécialisés dans la délinquance des mineurs signifie-t-il qu'on stigmatise tous les mineurs ? Le fait qu'il existe une police de la route veut-il dire que tous les automobilistes sont des délinquants ?
    M. Noël Mamère. Il n'y a pas de police spécialisée en ce domaine !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Et la CRS spécialisée en police de la route et les gendarmes, c'est quoi, selon vous ?
    En vérité, la population des gens du voyage est tout aussi respectable que le reste de la population française et étrangère. Vous avez dit, monsieur Mamère, qu'il s'agissait de Français, mais il y a aussi des gens du voyage qui viennent de pays de l'Union européenne ou de pays extérieurs à celle-ci. Il se trouve que les forces de police ont bien du mal à contrôler les activités des gens du voyage, tout simplement parce que, par nature, ceux-ci changent de lieu régulièrement et que les circonscriptions de police ne sont pas organisées en conséquence.
    Etant donné la nature même des groupes d'intervention régionaux, l'idée de Mme Boutin nous semble excellente, car la disposition qu'elle propose permettra, non de stigmatiser, mais d'organiser le travail de la police à l'égard de personnes dont le mode de vie sort du cadre administratif classique de la police. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement a déjà indiqué qu'il était favorable à l'adoption de l'amendement de Mme Boutin. J'ajoute qu'il est d'accord avec ce que vient de dire M. Lagarde.
    S'agissant de la création d'une commission d'enquête sur les gens du voyage, il n'appartient pas au Gouvernement de donner ou non son accord : l'Assemblée nationale est souveraine en la matière.
    J'appelle simplement votre attention, mesdames, messieurs les députés, sur le fait que nous souhaitons ne pas perdre de temps et vous soumettre à l'automne des textes équilibrés permettant de répondre aux différentes questions.
    M. Blazy a raison, il s'agit d'un phénomène qui touche tout autant des communes de gauche que des communes de droite, et ce serait une grande erreur de penser que seuls les Français de droite sont exaspérés. Ceux de gauche et ceux de rien du tout le sont tout autant !
    Enfin, je dirai de la façon la plus solennelle que nous sommes en train de prévoir les conditions d'organisation d'un grand rassemblement évangélique comme il y en a chaque année sur notre territoire. Où est l'amalgame ? Où est la dénonciation ? Le Gouvernement mobilisera les moyens nécessaires pour que cet événement se déroule bien et il s'efforcera de convaincre les élus locaux d'accueillir à tour de rôle ce rassemblement dans leur région.
    Mais que les choses soient claires : nous voulons envoyer un signal très précis à tous ceux qui pensent que la France serait devenue un Etat de non-droit, un pays où l'on peut camper à un endroit et s'en servir comme d'une base, comme d'un repaire. Je ne peux pas m'empêcher de penser à ce camp que nous avons trouvé à Choisy-le-Roi, où des mineurs et des handicapés étaient exploités dans des conditions scandaleuses et vivaient dans des conditions sanitaires abominables. J'ai donné des instructions pour que la police intervienne. A cet égard, il est piquant de constater que, alors que j'étais ministre de l'intérieur depuis quelques semaines seulement, et que le campement en question existait depuis plusieurs mois, voire quelques années, un certain nombre d'élus communistes m'ont demandé pourquoi je ne faisais rien !
    Cet amendement de Mme Boutin est excellent et les remarques du groupe UDF sont tout à fait pertinentes. Nous n'avons absolument pas à nous culpabiliser. Il faut cesser d'inverser les valeurs. Ceux qui doivent être culpabilisés, ce sont les coupables, et je n'observe pas sur les bancs de cette assemblée une majorité de coupables. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 25 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Lagarde et les membres du groupe Union pour la démocratie française ont présenté un amendement, n° 123, ainsi rédigé :
    « Compléter le douzième alinéa du I de la première partie de l'annexe I par la phrase suivante : "Les maires pourront prendre l'initiative de faire des suggestions au préfet ou au procureur de la République qui coprésident la conférence départementale de sécurité et qui déterminent également les priorités d'action des GIR. »
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Il s'agit, toujours dans le sens de la démarche qu'a exposée Rudy Salles, de permettre aux élus locaux de mieux s'associer à l'action que les forces de l'ordre doivent mener pour rétablir la sécurité et la tranquillité publiques.
    Il se trouve, monsieur le ministre, que vous avez décidé de mettre en place des GIR. Or nous sommes un certain nombre de maires - je pense notamment à Nicolas Perruchot, maire de Blois, que je tiens à associer à cet amendement - qui, pour faciliter l'action des forces de l'ordre, souhaitons pouvoir prendre des positions ou transmettre des informations qui remontent jusqu'à nous.
    Nous savons ce qui se passe dans nos villes : à force de ne pas rencontrer de responsables, les citoyens se tournent vers nous, les élus locaux - ceux des villes comme ceux des campagnes, je suppose -, pour nous donner des informations, et ils se disent ainsi que celles-ci sont transmises. Nous voyons s'organiser dans nos villes un certain nombre de trafics ; nous savons quels en sont les réseaux, les ressorts. Toutefois, nous n'avons pas aujourd'hui la capacité d'intervenir auprès des forces de police.
    Or, comme vous créez des groupes d'intervention régionaux destinés justement à lutter contre les réseaux organisés, il semble utile que les maires puissent, via le préfet dans un premier temps, faire des suggestions à ces GIR. Une telle disposition permettrait de donner un peu plus de responsabilité aux élus locaux en la matière, et surtout contribuerait à assurer une meilleure diffusion de l'information au sein des différentes institutions de notre pays.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La commission a accueilli très favorablement cet amendement qui tend, encore une fois, à renforcer le rôle des maires dans la politique de lutte contre l'insécurité.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. D'accord.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 123.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Christ, Mme Grosskost, MM. Hillmeyer, Meyer, Reitzer, Sordi et Ueberschlag ont présenté un amendement, n° 108 corrigé, ainsi rédigé :
    « Dans le treizième alinéa du I de la première partie de l'annexe I, après le mot : "municipales, insérer les mots : "et les gardes champêtres ».
    La parole est à M. Michel Sordi.
    M. Michel Sordi. Monsieur le ministre, par cet amendement, mes collègues du Haut-Rhin et moi-même voulons rappeler que l'insécurité n'est malheureusement pas l'apanage du milieu urbain, qu'elle atteint aussi les zones rurales, comme le rappelle fort justement l'annexe I du projet de loi,...
    M. Jean-Luc Warsmann. Absolument !
    M. Michel Sordi. ... et que, face à la montée de l'insécurité, les maires sont souvent démunis, d'autant que, faute de moyens, peu de communes rurales disposent d'une police municipale.
    Dans le cadre de leur pouvoir de police, les maires ruraux peuvent, comme cela a été rappelé dans le rapport, s'appuyer sur la police municipale, quand elle existe, mais aussi sur les gardes champêtres.
    A côté des 12 500 policiers municipaux, il y a 3 500 gardes champêtres chargés de la police des campagnes. Il ne fallait pas les oublier : c'est chose faite au travers de cet amendement.
    Monsieur le ministre, comme vous le savez, nous avons la chance dans le Haut-Rhin de disposer depuis quatorze ans d'un syndicat mixte de gardes champêtres intercommunaux appelé « brigade verte ». Il compte une cinquantaine de gardes champêtres qui couvrent le territoire de 70 % des communes du Haut-Rhin, à la satisfaction de l'ensemble des élus concernés.
    Cette faculté, ouverte en 1988 pour nous permettre de répondre aux obligations d'emploi des gardes champêtres issues de notre droit local, a été étendue à l'ensemble des collectivités, après une longue évolution législative engagée en 1993 et parachevée par la loi du 27 févier 2002.
    Désormais, pour permettre aux élus du milieu rural d'exercer pleinement leur pouvoir de police et de le faire en complémentarité avec les services de l'Etat, en l'occurrence la gendarmerie nationale, il conviendrait d'adapter cet outil mis à leur diposition pour mieux coller aux réalités et aux besoins actuels. Cette adaptation passe notamment par une actualisation des attributions des gardes champêtres et par une amélioration de leur statut, afin de leur offir une réelle perspective de carrière.
    Monsieur le ministre, notre dossier est prêt. Je souhaite que nous puissions avancer en ce domaine dans la perspective du rendez-vous que vous avez fixé à l'automne prochain. Dès à présent, je vous en remercie.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Favorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable également.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 108 corrigé.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Estrosi, rapporteur, a présenté un amendement, n° 2, ainsi rédigé :
    « Après le quatorzième alinéa du I de la première partie de l'annexe I, insérer l'alinéa suivant :
    « De manière plus générale, les moyens de renforcer l'action des polices municipales seront recherchés. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cet amendement, adopté à une large majorité par la commission des lois, tend à renforcer l'action des polices municipales au service de la sécurité. Nous en avons débattu avec vous, monsieur le ministre, lors de votre audition en commission, et vous aviez accueilli favorablement notre intention.
    Ces dernières années, le regard porté sur les polices municipales a été trop souvent injuste.
    M. Julien Dray. Surtout à Nice !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. On a lancé à leur encontre des anathèmes, alors qu'elles sont pourtant constituées d'hommes et de femmes dont le dévouement est total,...
    M. Jean Dionis du Séjour. En effet !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... la formation de grande qualité, le niveau souvent identique à celui des personnels de la police nationale et de la gendarmerie nationale. Il n'est pas normal que, s'agissant de certaines tâches, les polices municipales fassent l'objet d'une discrimination.
    Ainsi, la loi sur la sécurité quotidienne autorise la police nationale, la gendarmerie nationale et les polices municipales à pénétrer dans les cages d'escalier et à faire des rondes dans les immeubles, mais seuls les policiers nationaux et les gendarmes peuvent disperser les rassemblements suspects, ce qui laisse les policiers municipaux exposés à des actes d'agression qui peuvent être lourds de conséquences pour eux.
    De même, lorsqu'un maire prend un arrêté de police, le préfet demande à la police nationale ou à la gendarmerie nationale de le faire appliquer, mais il ne le demande jamais aux policiers municipaux, car ceux-ci ne sont pas habilités à le faire.
    Ces deux exemples montrent qu'une telle discrimination est dommageable. En fait, les policiers municipaux pourraient apporter une contribution beaucoup plus forte à la police nationale et à la gendarmerie nationale s'ils étaient associés à la politique de sécurité menée par le Gouvernement.
    M. Jean Dionis du Séjour. Très bien !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Au moment où le Gouvernement nous propose une architecture qui consacrera la police nationale et la gendarmerie nationale comme police d'Etat en les fédérant sous la même autorité - et je tiens à dire avec force, afin qu'il n'y ait aucune ambiguïté à cet égard, que je considère que ces deux corps sont les seuls qui peuvent agir au nom de l'autorité de l'Etat -, il serait de notre intérêt, de l'intérêt général des communes et de l'ensemble des territoires qui bénéficient de l'apport de policiers municipaux, que le rôle de ces derniers soit renforcé.
    Tel est le sens de cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. L'amendement défendu par M. Estrosi tend à corriger une injustice, puisque le texte du projet de loi ne mentionne pas les polices municipales, alors même que nombre d'élus ont beaucoup investi dans une police de proximité qui rend des services à la population.
    Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.
    M. Jean-Pierre Blazy. Je souhaiterais une clarification. Si, dans le texte, le Gouvernement parle de complémentarité entre la police nationale, la gendarmerie nationale et les polices municipales quand elles existent, et nous sommes d'accord sur l'idée de complémentarité, laquelle est d'ailleurs définie dans la loi de 1999, qui précise que des conventions de coordination peuvent être passées entre le préfet et le maire - même si vous parlez aujourd'hui de « nouvelles » conventions, celles-ci existent donc d'ores et déjà -, je ne comprends pas très bien ce que veut M. Estrosi. Son amendement nous paraît flou, voire ambigu. L'article 2 de sa proposition de loi n° 2899, qu'il a annexée à son livre intitulé Insécurité, sauver la République, était ainsi conçu : « La police territoriale de proximité est composée des fonctionnaires de police nationale exerçant leur mission dans la commune, ainsi que des fonctionnaires de la police municipale. » Cela signifie-t-il qu'il souhaite faire en sorte que le maire ait, à terme, autorité sur la police municipale, cela va sans dire, mais aussi sur la police de proximité, et, finalement, fusionner ces deux polices ? L'ambiguïté est réelle et je demande au Gouvernement de clarifier sa position sur cette question.
    M. Julien Dray et M. Christophe Caresche. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. M. Blazy essaie de semer le doute en procédant par amalgame. Je le dis très clairement : la police municipale est avant tout une police de proximité. Elle l'a été avant l'heure, avant bien d'autres forces de police sur notre territoire. Elle est au contact quotidien de nos concitoyens, elle connaît la vie de nos quartiers, les problèmes des uns et des autres dans la vie associative, dans l'activité économique et sociale de la commune. Qu'elle puisse, aux côtés de la police nationale, mener plus facilement des actions de proximité, ce qui est déjà le cas dans le cadre des contrats locaux de sécurité, me paraît tout à fait juste et légitime. Cela va dans le sens de l'efficacité.
    Mais je ne veux pas laisser planer la moindre ambiguïté : la police nationale, surtout avec ce texte ambitieux, doit plus que jamais être placée uniquement sous l'autorité de l'Etat, comme la gendarmerie nationale.
    M. Jean-Pierre Blazy. Ce n'est pas ce que vous écriviez !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Il n'est pas question de s'orienter dans une autre direction, monsieur Blazy.
    M. Jean-Pierre Blazy. Vous avez changé d'avis !
    M. le président. Ce qui fait foi, c'est le texte du projet de loi, et non un livre !
    M. Jean-Pierre Blazy. Vérité dans l'opposition, contre-vérité dans la majorité !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Blazy et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 50, ainsi rédigé :
    « Substituer à la dernière phrase de l'avant-dernier alinéa du I de la première partie de l'annexe I les trois phrases suivantes :
    « C'est ainsi que la législation réglementant les activités privées de surveillance, de gardiennage et de transport de fonds sera étendue à la collectivité départementale de Mayotte. Les tâches des entreprises privées non encore régies par la loi seront définies et précisées et leurs tâches encadrées ; la professionnalisation des activités de sécurité privée sera recherchée au travers, notamment d'une compétence professionnelle plus affirmée. Grâce aux contrôles des entreprises et l'agrément des personnes, l'honorabilité indispensable de la profession sera enfin renforcée pour le plus grand intérêt des citoyens comme des 100 000 salariés et des 1 780 entrepreneurs individuels que comptent ces professions. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.
    M. Jean-Pierre Blazy. Je souhaite que nous manifestions, dans les orientations, notre volonté de légiférer sur les activités de sécurité privées. L'annexe I du projet me semble en effet très vague sur cette question. Le texte limite l'extension de la loi de 1983 à Mayotte. C'est un peu court, alors que nous assistons à une explosion des activités de sécurité privées. Nous pensons qu'il faut légiférer sur cette question, comme nous avons commencé à le faire dans la loi relative à la sécurité quotidienne sur les forces de sécurité privées dans les transports. Il faut aller plus loin : c'est l'objet de l'amendement n° 50, qui propose de retenir cette orientation dans l'article 1er.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Nous avons eu un débat très constructif en commission sur cet amendement.
    Je connais, monsieur Blazy, votre attachement à vouloir faire avancer la loi et la réglementation sur les activités privées en matière de sécurité. Vous avez déjà fait introduire, dans la loi relative à la sécurité quotidienne, plusieurs mesures concernant notamment la SNCF et la RATP, que j'ai soutenues à l'époque. Et je souhaite comme vous que nous allions plus loin dans ce domaine. Je déplore à cet égard que le texte qui avait été déposé en mai 2000 au Sénat par le précédent gouvernement n'ait jamais été discuté à l'Assemblée nationale.
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est pourquoi nous vous proposons de continuer !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. C'est bien le gouvernement que vous souteniez qui a empêché que des avancées qui auraient pu être importantes soient obtenues dans ce domaine, et je ne peux que le regretter.
    La commission a repoussé cet amendement, mais il me semble préférable de laisser à l'Assemblée le soin, dans sa sagesse, de décider si cette préoccupation mérite d'être insérée dans le texte qui nous est proposé aujourd'hui. Pour ma part, cela ne me dérangerait pas. Nous marquerions ainsi une volonté collective de faire avancer tous les éléments qui contribuent au rétablissement de la sécurité dans notre pays.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Avant 1997, le Gouvernement avait préparé un projet de loi dans le sens que vous souhaitez, monsieur Blazy. Il semble qu'il ait été oublié durant les cinq dernières années.
    M. Jean-Pierre Blazy. Il y a eu la dissolution !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mais peut-être auriez-vous pu faire en cinq ans ce que vous avez fait depuis quelques semaines en préparant votre amendement.
    M. Christophe Caresche. Nous avons fait beaucoup de choses !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Comme le rapporteur, je dirai que cet amendement ne gêne pas le Gouvernement, qui s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 50.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

    (M. Marc-Philippe Daubresse remplace M. Jean-Louis Debré au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE
DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE,
vice-président

    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 61 et 110, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 61, présenté par M. Caresche, est ainsi rédigé :
    « Compléter le A du II de la première partie de l'annexe I par l'alinéa suivant :
    « A terme, l'objectif sera de réaffecter un tiers des effectifs qui composent ces forces mobiles dans la police de proximité et la gendarmerie départementale. »
    L'amendement n° 110, présenté par M. Lagarde, est ainsi rédigé :
    « Compléter le A du II de la première partie de l'annexe I par l'alinéa suivant :
    « Progressivement, 10 % des effectifs actuels des CRS et EGM seront affectés de façon permanente aux commissariats de police et aux brigades de gendarmerie nationale. »
    La parole est à M. Christophe Caresche, pour soutenir l'amendement n° 61.
    M. Christophe Caresche. Cet amendement, comme celui de mon collègue M. Lagarde, est relatif à l'emploi des forces mobiles.
    Notre pays compte un effectif important de forces mobiles : les CRS et les gendarmes mobiles représentent en effet 30 000 hommes. Un tel effectif n'a plus la même raison d'être que par le passé, les problèmes d'ordre public ne sont plus les mêmes qu'autrefois, ainsi que le reconnaît le projet de loi.
    Vous proposez des mesures consistant à fidéliser ces forces - le mouvement avait été amorcé, vous suggérez de le poursuivre - et à donner des missions de sécurisation à ces forces pour mieux les employer, les missions de maintien de l'ordre étant aujourd'hui réduites.
    Tout cela va dans le bon sens. Mais, tout en ayant bien conscience de la difficulté de l'exercice, je voudrais qu'on aille plus loin et que l'on profite de ce projet de loi d'orientation pour afficher clairement l'objectif consistant à reconvertir une partie de ces forces mobiles dans la police de proximité ou la gendarmerie départementale. Certes, cela ne se fera pas dès demain, mais ce serait une bonne chose de marquer cette orientation.
    La fidélisation et les missions de sécurisation telles qu'elles sont envisagées, même si elles sont améliorées, ne constituent qu'une étape. Nous savons que faire faire de la police de proximité aux forces de maintien de l'ordre n'est bien souvent qu'un pis-aller. J'en ai l'expérience dans ma circonscription, le XVIIIe arrondissement, souvent évoquée ici, et notamment à Château-Rouge. La population ne comprend pas l'emploi et l'utilisation de ces forces mobiles car bien souvent, elle constate que, malgré la présence de ces forces mobiles et de leurs camions, des infractions et des délits continuent d'être commis.
    La fidélisation et les missions de sécurisation confiées aux forces mobiles, même si elles représentent une orientation intéressante, atteignent assez rapidement leurs limites. Ces mesures manquent d'efficacité et ne sont pas suffisamment comprises par la population. C'est pourquoi je crois qu'il faut envisager très clairement, même si c'est un objectif à long terme, d'affecter un certain pourcentage des effectifs des forces mobiles à la police de droit commun.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir l'amendement n° 110.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Le projet de loi le reconnaît lui-même, le niveau des effectifs de la police mobile et de la gendarmerie mobile est aujourd'hui excessif par rapport aux missions qui leur sont confiées, puisque, fort heureusement, la France ne connaît plus, ou très rarement, ces grandes périodes de troubles qui avaient justifié leur création. Je trouve donc excellente votre idée, monsieur le ministre, de leur permettre d'assurer des tâches de proximité.
    Néanmoins, celles-ci vont être perturbées par des prélèvements sur les effectifs pour telle ou telle manifestation. Je prend l'exemple de mon département, où se situe le Stade de France. Le jour où une manifestation se déroulera, au stade, les effectifs appelés à être présents dans les quartiers disparaîtront pour aller assurer la sécurité autour de cet équipement. Ce serait une bonne chose de pouvoir mettre ces forces à disposition, de façon continue, en nombre et dans le temps, et, j'espère, de manière efficace.
    De toute façon, les forces mobiles de police et de gendarmerie sont aujourd'hui structurellement en sureffectifs. Dans un souci de progressivité, nous avons fixé à 10 %, un tiers nous paraissant excessif, le pourcentage de ces fonctionnaires qui connaissent déjà leur métier, et pourraient être réaffectés dans les commissariats de police et les brigades de gendarmerie. On permettrait ainsi à l'Etat de disposer, sans dépense supplémentaire, de personnels fixes dans la territoriale et les commissariats.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Monsieur Caresche, l'une des grandes mesures de ce texte, et c'est une vraie nouveauté, c'est la fidélisation des forces mobiles.
    M. Christophe Caresche. Elle était déjà en cours !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Vous ne l'aviez jamais réalisée précédemment.
    M. Jean-Pierre Blazy. Si : nous l'avions engagée !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Pas du tout : c'est une des grandes décisions que nous avons prises immédiatement.
    M. Christophe Caresche. La décision a été prise il y a deux ans, en 2000, vous le savez bien.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Je ne prendrai que l'exemple de mon département. Chaque année depuis près de trente ans, la compagnie de CRS qui y est cantonnée est envoyée en Ile-de-France durant la période estivale, alors que, à ce moment là, la population fait plus que doubler, et que près de 30 % des forces de police et de gendarmerie partent en congé annuel. Eh bien, alors que le planning indiquait il y a encore trois mois que cette compagnie partirait dans sa totalité en Ile-de-France, comme chaque été, il a été décidé, pour la première fois, qu'elle serait fidélisée et affectée à ce département touristique.
    Je trouve que le fait d'inscrire avec beaucoup de détermination cette disposition dans la loi constitue une grande avancée.
    Quant à vouloir quantifier, comme M. Caresche et M. Lagarde se proposent de le faire, le nombre de policiers et de gendarmes mobiles qui pourraient être à terme affectés à la gendarmerie ou à la police de proximité, je crois que cela ne relève pas de notre compétence. Les parlementaires ne sont pas des techniciens dans ce domaine. Notre rôle n'est pas de faire une évaluation aussi précise, d'inscrire dans le marbre de la loi les effectifs mobiles. Ce texte nous offre une certaine souplesse, avec une phase d'adaptation, afin que la hiérarchie puisse évaluer les proportions dans les mois et les années qui viennent.
    La commission a donc rejeté ces deux amendements. Et je continue à considérer qu'il n'est pas souhaitable que nous fixions dès aujourd'hui des seuils en la matière.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Caresche, monsieur Lagarde, que se passerait-il si nous faisions ce que vous demandez avec les 19 000 gendarmes mobiles et les 14 000 CRS que comptent les forces mobiles ? Déjà, nous allons devoir leur expliquer une nouvelle stratégie d'emploi alors que ce sont des corps relativement anciens, avec une identité très forte, des traditions, un statut, une organisation auxquels ces personnels sont extraordinairement attachés.
    M. Jean-Pierre Blazy. Trop attachés, même !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mais je fais confiance au sens du service public qui est le leur pour parvenir à les convaincre de la nécessité de la fidélisation, de la territorialisation et d'un emploi tourné plus vers la sécurité publique que vers l'ordre public. Si, en plus, vous me demandez de leur dire qu'un tiers de leurs effectifs va être supprimé et que, quels que soient leur dévouement et leur compétence, ils sont condamnés à disparaître, j'aimerais que vous m'expliquiez comment je vais pouvoir obtenir d'eux l'adhésion à la nouvelle stratégie que nous définissons.
    M. Gérard Léonard. Evidemment !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Inutile de me convaincre qu'il faut les utiliser au service de la sécurité publique et pas seulement de l'ordre public. Avec toute l'amitié et la considération que j'ai pour lui, je donnerai même à M. Lagarde un exemple pris dans son département. Quand un événement se déroule au Stade de France, on est bien content de pouvoir disposer de réserves parce que, parfois, il arrive qu'un hymne national soit sifflé et qu'il faille rapatrier très vite certains éléments, afin que les spectateurs et l'ensemble des habitants de la Seine-Saint-Denis soient protégés.
    M. Gérard Léonard. Tout à fait !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Qu'on ne se méprenne donc pas sur la stratégie du Gouvernement. Il ne s'agit pas de faire disparaître une force chargé de l'ordre public dont tous les gouvernements, dans tous les pays, ont besoin.
    M. Gérard Léonard. Elle est indispensable !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il s'agit de l'affecter, par exemple dans une zone de défense, à des tâches de sécurité publique mais il s'agit aussi, comme elle est territorialisée, de pouvoir la rassembler pour des tâches de maintien de l'ordre public quand on en a besoin. En supprimant un tiers de ses effectifs, je ne vois pas comment on serait en mesure de procéder à de telles opérations.
    J'ajoute un dernier point. Je ne vois pas comment on peut à la fois être contre la création d'une réserve dans la police nationale, pour la diminution d'un tiers des effectifs des forces de l'ordre, et prétendre qu'on vit dans un monde dangereux mais qu'on n'aura plus jamais besoin d'une force qui se consacre à l'ordre public.
    M. Christophe Caresche. Ce discours n'est pas le nôtre !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Caresche, je ne vous fais pas ce procès. Je considère que vous avez attiré l'attention du Gouvernement sur la nécessité de territorialiser et d'utiliser au maximum ces effectifs pour la sécurité, et pas simplement pour l'ordre public. Mais, je vous en prie, ne perturbons pas davantage ces personnels, extrêmement dévoués, qui vont déjà subir un changement considérable. La région parisienne, par exemple, utilise 60 % des CRS, alors qu'il n'y a que 20 % des casernements. Je me suis fait communiquer tous les ordres de service de toutes les compagnies. J'ai constaté qu'une compagnie comptabilisait, en 2001, deux cent dix jours de déplacement : ce n'est pas raisonnable.
    M. Jean-Pierre Blazy. Oui, mais les personnels touchent des primes à chaque fois !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cet aspect des choses doit aussi se régler par le dialogue. Vous n'ignorez pas l'existence des syndicats. Vous savez qu'il faut discuter dans la vie. Je ne me vois pas les convaincre en leur disant : « Ecoutez, l'Assemblée nationale a décidé qu'on supprime un tiers, marchez comme ça. »
    Honnêtement, j'ai entendu l'appel de M. Lagarde et je comprends votre souci, monsieur Caresche. Mais je crois vraiment qu'il serait préférable de retirer ces amendements. A défaut, je serais obligé de demander leur rejet. Nos propos sont épluchés, notamment par les intéressés, et nous avons vraiment besoin d'une totale mobilisation de leur part. Je considère vos amendements comme un soutien à ces compagnies de CRS et de gendarmes mobiles et comme un appel à la vigilance du Gouvernement. Cet appel a été entendu.
    M. Gérard Léonard. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Monsieur le rapporteur, je ne conteste pas les éléments d'amélioration qui figurent dans le texte, mais permettez-moi de rappeler que le mouvement a été largement engagé sous la précédente législature. Il n'y a donc pas lieu de polémiquer là-dessus.
    Monsieur le ministre, vous êtes dans votre rôle quand vous en appelez à une bonne gestion et à la volonté de faire en sorte qu'une réforme de ce type puisse se mettre en place dans les meilleures conditions possible. Mais nous sommes quant à nous dans le nôtre lorsque nous rappelons que les forces mobiles doivent être mieux utilisées à long terme et qu'une partie doit être réaffectée à la police de proximité.
    Cela dit, je vous ai entendu et je retire l'amendement n° 61.
    M. le président. L'amendement n° 61 est retiré.
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le ministre, j'ai fort bien compris qu'il vous était difficile de faire à la fois une chose et l'autre, et que vous auriez du mal à recueillir l'adhésion des corps de police et de gendarmerie mobile. Quoi qu'il en soit, dans mon esprit, seuls 10 % des effectifs, soit quelque 3 000 fonctionnaires, auraient été concernés.
    Monsieur Estrosi, vous avez raison : il n'est pas dans le rôle des parlementaires de quantifier de façon précise. Mais mon amendement n'était qu'un appel de la part de notre groupe à l'adresse du Gouvernement en faveur d'une évaluation : il aurait pu s'agir de 2 500 fonctionnaires, ou peut-être de 3 500, car, ainsi que je l'ai entendu affirmer à plusieurs reprises par d'anciens responsables de la sécurité publique et d'anciens ministres, il y a bien un sureffectif.
    Je souhaite que le Gouvernement puisse, dans le cadre de l'évaluation que le ministre de l'intérieur a prévue, étudier ce problème, et que nous puissions en débattre à nouveau ultérieurement.
    En attendant, je retire l'amendement n° 110.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Merci !
    M. le président. L'amendement n° 110 est également retiré.
    M. Caresche a présenté un amendement, n° 62 corrigé, ainsi rédigé :
    « Compléter la deuxième phrase du deuxième alinéa du B du II de la première partie de l'annexe I par les mots : "et de transférer les postes des brigades de gendarmerie situées en zone de police dans la police nationale. »
    La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Cet amendement vise, eu égard au cadre de l'adaptation des forces de sécurité aux nouvelles formes de délinquance qui est proposé dans le texte, les situations où coexistent sur un même territoire des forces de sécurité différentes. En effet, la gendarmerie assume un certain nombre de missions dans des zones dites de police.
    Ainsi que l'a relevé ici même Manuel Valls, cette coexistence n'est pas toujours facile et elle n'est pas toujours un gage d'efficacité. Elle est même souvent source de confusion, voire de concurrence.
    Il faudrait clarifier les choses. Je propose que les postes des brigades de gendarmerie situées en zone de police puissent être réaffectés dans la police nationale. Ainsi, les territoires couverts par la police nationale le seraient en totalité et ceux - je pense notamment au monde rural - qui sont couverts par la gendarmerie nationale le seraient complètement par cette dernière.
    Cet élément de clarification serait tout à fait utile.
    Il est fréquent que les élus de zones périurbaines vivent très difficilement la situation que je viens de dénoncer. Ils constatent des dysfonctionnements qui sont une source d'inefficacité.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Tout est dit dans le texte. Il nous apparaît que c'est au ministère et à la hiérarchie de la police et de la gendarmerie nationales, compte tenu de la souplesse offerte par le texte lui-même pour la réorganisation territoriale, de décider ce qu'il y a lieu de faire, et non au Parlement.
    M. Gérard Léonard. Très bien !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité et des libertés locales. Monsieur Caresche, ce qui gêne le Gouvernement, ce n'est pas tant le sens de votre proposition que la méthode.
    Tout au long de la discussion générale, j'ai entendu des députés siégeant sur tous les bancs s'écrier : « Surtout pas de schémas nationaux ! Ne recommençons pas comme avant ! Pas de schémas préétablis ! Engageons une concertation locale, département après département, région après région ! »
    Or votre amendement, qui traduit les meilleures intentions du monde, obligerait à faire exactement le contraire de ce qui m'a été demandé lors de la discussion générale.
    Au sein de mon propre ministère, j'ai beaucoup de mal à faire admettre à mes collaborateurs que nous ne voulons pas de schéma national, ni de carte avec de petits points rouges et de petits points verts, ni de méthode bloquée, ni de décision de l'administration centrale, et que nous devons laisser faire, sur la base de la simple architecture des principes que nous avons définis.
    Que le schéma national résulte de l'initiative du Gouvernement ou de celle de l'Assemblée nationale n'a, permettez-moi de vous le dire, aucune importance. Le fait est que, lorsqu'il existe, on s'y réfère, se privant ainsi de toute souplesse.
    Dans ces conditions, le Gouvernement ne peut que s'opposer à votre amendement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 62 corrigé.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Caresche a présenté un amendement, n° 63, ainsi rédigé :
    « Dans la deuxième phrase du troisième alinéa du B du II de la première partie de l'annexe I, substituer aux mots : "pourra toutefois le mot : "devra. »
    La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Cet amendement vise à aider le Gouvernement. (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Blazy. Nous ne faisons d'ailleurs que cela !
    M. Christophe Caresche. Monsieur le ministre, répondant à un élu socialiste, vous avez parlé de la nécessaire adaptation, en termes de maillage territorial, de la gendarmerie.
    Dans l'annexe I, on peut lire que, « dans la zone de gendarmerie, le maillage territorial, confirmé dans son principe, pourra toutefois faire l'objet d'adaptations locales afin d'optimiser l'oeuvre de sécurité au regard de l'évolution de la démographie et de la délinquance ».
    Je propose de substituer aux mots « pourra toutefois », qui sont d'une prudence et d'une timidité remarquables, ce qui ne vous ressemble pas, le mot « devra ».
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. En ce qui concerne le maillage territorial, M. le ministre a parfaitement répondu en s'exprimant sur l'amendement précédent.
    Nous sommes dans le même cas de figure : l'amendement rigidifierait la formulation du texte et il représenterait presque une injonction au Gouvernement. La commission l'a donc rejeté.
    M. Gérard Léonard. Très bien !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Caresche, le Gouvernement est très sensible à votre volonté de lui venir en aide, mais n'en faites pas trop car vous risquez d'être suspect - à lire la presse, je vois que vous l'êtes un petit peu - et je ne suis pas sûr que cela m'aide vraiment.
    Votre amendement introduirait une rigidité de plus alors que nous voulons de la souplesse, de la concertation, de l'adaptabilité. La France est un pays divers et il faut tenir compte de sa diversité.
    Pourquoi rigidifier ?
    La majorité a changé, monsieur Caresche !
    M. Christophe Caresche. On verra comment les choses se passeront !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 63.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Salles, Dionis du Séjour et Ferry ont présenté un amendement, n° 21 rectifié, ainsi rédigé :
    « Avant la dernière phrase du deuxième alinéa du C du II de la première partie de l'annexe I, insérer la phrase suivante : "L'établissement des procurations délivrées en période électorale sera transféré aux communes. »
    La parole est à M. Rudy Salles.
    M. Rudy Salles. Monsieur le ministre, vous avez affirmé de façon claire, nette et précise que vous souhaitiez décharger les policiers de certaines tâches administratives afin qu'ils se consacrent à la sécurité.
    Je saisis l'occasion pour aborder incidemment un problème que nous avons pu déplorer ces mois derniers et qui concerne l'établissement des procurations électorales par les commissariats de police. Nous pourrions d'ailleurs évoquer plus largement le véritable parcours du combattant qu'impose l'établissement des procurations en question.
    On se plaint que les Français votent de moins en moins, mais lorsque nos concitoyens ne peuvent se déplacer pour une raison ou pour une autre, ils ne peuvent parfois s'exprimer parce que l'obtention des procurations est très compliqué.
    Nous pourrions parler des critères ouvrant droit à la procuration, mais ce n'est pas l'objet du projet de loi. Il n'en est pas de même de l'encombrement des commissariats de police et des bureaux de police pendant les longues semaines où les procurations sont en cours d'élaboration.
    Il y a quelque chose à faire pour améliorer le système et, surtout, pour permettre aux policiers de se consacrer à leur tâche principale : la sécurité de nos concitoyens.
    Je ne sais pas, monsieur le ministre, si nous pourrons, par voie d'amendement, régler aujourd'hui le problème, mais nous devons y travailler, et rapidement, car si le calendrier électoral est un peu allégé jusqu'en 2004, ce problème redeviendra d'actualité à partir de cette date.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. M. Salles pose un vrai problème, qui a suscité ce matin un large débat en commission.
    L'intention que traduit l'amendement est particulièrement louable. On sait que l'établissement d'une procuration de vote impose aujourd'hui un véritable parcours du combattant et que les commissariats de police et les brigades de gendarmerie sont saturés : ils ont du mal à répondre aux demandes et ils n'en sont d'ailleurs pas toujours capables. Lors des dernières élections, beaucoup de demandes ont été retournées.
    Quel système de remplacement peut-on prévoir pour gérer les procurations ? Le maire est-il le mieux placé ? Ne risque-t-il pas d'être juge et partie ?
    Tout en convenant que l'amendement posait un vrai problème, la commission l'a repoussé ; mais elle a jugé malgré tout qu'il était important d'ouvrir le débat.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Comme vient de le dire excellemment le rapporteur, le problème des procurations est très difficile.
    On a dénombré 1,2 million de procurations pour l'élection présidentielle et 1 million pour les élections législatives. Compte tenu de la masse que cela représente, il me semble qu'il serait imprudent de décider par voie d'amendement de transférer aux communes la compétence des juges d'instance.
    Monsieur Salles, les exemples sont multiples de la façon complexe, désagréable, dont les choses se sont passées. Alors que nos concitoyens devraient être encouragés à s'exprimer par le biais d'une procuration, tout est fait pour les décourager, ce dont le Gouvernement est tout à fait conscient.
    M. Jean Glavany. Alors, faites quelque chose !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Franchement, monsieur Glavany, ne me cherchez pas trop ! Le Gouvernement n'est en place que depuis deux mois, alors que vous avez passé cinq ans à faire de l'autosatisfaction ! Laissez-moi donc achever mon propos !
    M. Jean Glavany. Faites quelque chose et nous vous aiderons !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. J'ai demandé au ministre délégué aux libertés locales de réfléchir à cette question, pour que nous puissions y revenir à la faveur d'un des textes qui seront débattus à l'automne.
    M. Jean Glavany. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je crois qu'il est plus raisonnable de procéder ainsi. Je suis d'ailleurs persuadé que l'auteur de l'amendement, qui est un élu local, souhaitait surtout lancer un appel. Il n'en est pas moins vrai que la situation ne peut plus durer, car c'est vous, les maires et autres élus, vous vous faites morigéner par vos concitoyens, qui vous disent : « Comment ? Vous ne voulez pas qu'on vote pour vous ? » Car les électeurs ne disent jamais : « Comment ? Vous ne voulez pas qu'on vote contre vous ? » (Sourires.) Quoi qu'il en soit, vous n'y êtes pour rien puisque le dysfonctionnement vient d'ailleurs.
    Un engagement est donc pris pour l'automne avec le ministre délégué aux libertés locales. Vous pourriez donc, monsieur Salles, retirer votre amendement.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour répondre à la commission.
    M. Jean-Pierre Blazy. Ce matin, en commission des lois, comme maintenant en séance publique, nous avons soutenu la proposition de M. Salles, même si elle n'entre pas forcément dans le cadre du texte en discussion. Mais nous voulions aborder le problème car nous le rencontrons tous et il faudra le résoudre, aussi bien pour les électeurs, soumis à un véritable parcours du combattant, je le répète, que pour les forces de sécurité, à qui l'on impose une tâche indue et que nous préférerions, les uns et les autres, voir davantage sur la voie publique plutôt que préparer des procurations.
    M. le président. La parole est à M. Rudy Salles.
    M. Rudy Salles. A la lumière des arguments développés par M. le ministre de l'intérieur, il est bien évident que je retire mon amendement, rendez-vous étant pris pour essayer de régler le problème et pour lutter ainsi contre l'incivisme et l'encombrement des bureaux de police.
    En tout cas, je remercie M. le ministre de sa réponse.
    M. le président. L'amendement n° 21 rectifié est retiré.
    M. Caresche et M. Viollet ont présenté un amendement, n° 64, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le troisième alinéa du C du II de la première partie de l'annexe I :
    « Chaque fois qu'il sera possible de faire appel à l'externalisation de ces missions et aux moyens techniques de surveillance, les gardes statiques confiées aux policiers et aux gendarmes seront supprimées. »
    La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Le texte aborde à juste titre le problème des gardes statiques en faisant valoir que d'autres moyens de sécurisation doivent être trouvés. Pourquoi, en effet, mobiliser durant des heures des effectifs de police pour assurer des gardes statiques ?
    Elu parisien, je suis peut-être plus concerné que d'autres par cette question. Le préfet de police fait un travail remarquable pour alléger les gardes statiques et remettre les policiers sur le terrain afin qu'ils puissent se consacrer à des tâches de police de proximité, cet effort est tout à fait louable.
    Mon amendement n° 64 tend à introduire une formulation un peu plus contraignante car, en ce domaine, on ne peut se contenter de déclarations d'intention.
    On peut lire dans l'annexe qu'il sera plus largement fait appel à l'externalisation des missions de garde statique et aux moyens techniques de surveillance. Je propose une formulation plus précise : « Chaque fois qu'il sera possible de faire appel à l'externalisation de ces missions et aux moyens techniques de surveillance, les gardes statiques confiées aux policiers et aux gendarmes seront supprimées. »
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cet amendement n'apporte rien à un texte d'orientation, où tout est prévu. La commission l'a donc rejeté.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La France a des engagements internationaux à tenir. Chacun imagine bien que l'on ne pourrait pas supprimer les gardes statiques devant des ambassades ou des organismes internationaux uniquement parce qu'on l'aurait brutalement décidé.
    Je m'associe à l'hommage que vous avez rendu à Jean-Paul Proust. Mais il convient d'être souple car on ne peut tout supprimer du jour au lendemain. Il faut discuter notamment avec les représentations diplomatiques, et c'est ce que je vous demande de pouvoir faire.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Je partage l'avis du Gouvernement et de la commission.
    Avant de vouloir préciser un texte qui a, comme c'était son but, défini une orientation, les membres de l'opposition seraient bien avisés de se mettre d'accord. En effet, l'amendement n° 74 de Mme Billard, de M. Mamère et M. Cochet, qui n'a heureusement pas été adopté, prévoyait que la sécurité des personnes et la protection des biens publics et privés « sont assurés par le service public de la police ». D'un côté, on ne veut pas d'externalisation et, de l'autre, on veut y recourir. Mettez-vous d'accord !
    Nous allons quant à nous essayer de mettre en oeuvre les orientations prévues dans l'annexe.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 64.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Blazy et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 51 rectifié, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le début de la première phrase du dernier alinéa du C du II de la première partie de l'annexe I : « Il est créé un corps spécial de police pénitentiaire chargé d'assurer la charge... (Le reste sans changement.) »
    La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.
    M. Jean-Pierre Blazy. Monsieur le ministre, après avoir entendu votre réponse aux orateurs inscrits dans la discussion générale, j'ai l'espoir que vous réserverez un accueil favorable à cet amendement, qui vise à créer un corps spécial de police pénitentiaire.
    On peut estimer que la tâche consistant à assurer les transferts de détenus auprès des tribunaux ou à surveiller dans un hôpital un prévenu blessé ou malade ne devrait pas incomber à la police. D'ailleurs, on a pu constater les graves incidents que cela peut provoquer, comme il y a peu à l'hôpital Saint-Roch de Nice, où un policier a été grièvement blessé. Cela montre la nécessité non pas de transférer ces tâches à l'administration pénitentiaire, comme vous le proposez, mais de créer un corps spécial de police pénitentiaire. La police est à nos yeux la seule à être en mesure d'assumer ces difficultés, bien évidemment, il faut lui donner les meilleures conditions.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Monsieur Blazy, la commission a repoussé votre amendement mais nous partageons votre sentiment. Il nous semble nécessaire de décharger l'ensemble des forces de police et de gendarmerie des tâches que constituent l'accompagnement et le transfert des prisonniers. Il serait bon de créer un corps spécialisé, comme il en existe dans d'autres grandes nations.
    Le texte prévoit plusieurs pistes de réflexion. Il prévoit même l'engagement que, dans les six mois, des réponses seront apportées à ce problème.
    Le ministre de l'intérieur a montré qu'il était sensible aux préoccupations exprimées et il a souhaité apporter des réponses.
    M. Jean-Pierre Blazy. Ce n'est pas ce qu'il a dit !
    M. Christian Estrosi. rapporteur. Il va assurément nous en parler.
    En tout état de cause, nous avons estimé qu'il fallait nous en tenir au texte tel qu'il est rédigé et ne pas aller plus loin.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Avec votre autorisation, monsieur le président, je m'exprimerai ultérieurement, je souhaiterais que nous puissions examiner en même temps l'amendement n° 107, qui porte sur le même sujet. Cela me paraîtrait logique.
    M. le président. Je suis en effet saisi d'un amendement n° 107, présenté par M. Moyne-Bressand.
    Cet amendement est ainsi rédigé :
    « Compléter le C du II de la première partie de l'annexe I par l'alinéa suivant : "à l'issue, une expérience de transfert de ce type de charges devra être mis en place à titre expérimental dans une région pénitentiaire pour une durée d'un an. Il sera fait rapport de cette opération au Parlement en vue de la généralisation du transfert à toutes les régions pénitentiaires. »
    La parole est à M. Alain Moyne-Bressand.
    M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées. L'un des points forts du projet de loi sur la sécurité intérieure consiste à mettre les forces de l'ordre - police et gendarmerie - sur le terrain, en supprimant notamment une partie des gardes statiques et entre autres, la surveillance des résidences d'anciens présidents. La simplification administrative permettra, elle aussi, de mettre gendarmes et policiers sur le terrain.
    Il faut en outre procéder à une expérimentation portant sur la redéfinition du partage des tâches en matière de transfèrements judiciaires. Je propose qu'une telle expérience soit mise en place pour une année avec l'administration pénitentiaire. Cela permettrait d'évaluer les aspects positifs du transfert de charge. Les gardiens de prison disposeraient en effet des moyens nécessaires pour accomplir ce travail avec compétence et ce serait pour eux une ouverture, leur fonction étant souvent très encadrée.
    Cet amendement vise donc à permettre une redéfinition du partage des tâches en matière de transfèrements judiciaires, avec une expérimentation dans une région pénitentiaire pour une durée d'un an. Au terme de ce délai, nous pourrons faire le point et décider.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 51 rectifié et 107 ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est une question très difficile. D'ailleurs, si elle avait été facile à résoudre, elle l'aurait été par les gouvernements précédents, toutes tendances confondues, qui y ont tous été confrontés. Pourquoi est-ce difficile ?
    D'abord, parce que cela concerne 4 000 personnes, c'est-à-dire plus que les 3 700 créations de postes prévues pour l'administration pénitentiaire. Quel que soit mon désir d'affecter les forces de police et de gendarmerie à des tâches de sécurité, je dois être responsable et raisonnable.
    Ensuite, se posent des problèmes statutaires, parce que les pouvoirs et le statut des gardiens de prison ne sont pas les mêmes que ceux des gendarmes et des policiers. Il n'en reste pas moins que c'est un problème important. Je souhaite d'ailleurs que la réflexion que nous allons avoir ne se réduise pas à une question d'effectifs. On parle beaucoup du transfert des détenus, mais on peut aussi raisonner autrement. Ce ne serait pas un crime de lèse-majesté d'imaginer l'existence, dans les établissements pénitentiaires, d'installations où les magistrats pourraient organiser des rencontres avec les détenus, les auditionner.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Tout à fait !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ce n'est pas toujours possible, sans doute, mais ce serait un réel progrès, et à l'hôpital d'ailleurs. Ce serait tellement mieux de prévoir, dans les prisons, des endroits où l'on pourrait interroger, solliciter, conduire les détenus, plutôt que de mobiliser du personnel pour effectuer le transfert d'individus souvent dangereux, qui sont ainsi remis en circulation.
    Voilà pourquoi le Premier ministre propose à l'Assemblée nationale un délai de six mois à compter de la promulgation de cette loi pour déposer un rapport. Je ne veux pas préjuger de ses conclusions, mais il ne faudrait pas s'enfermer dans l'alternative police-gendarmerie ou administration pénitentiaire. Il faut faire preuve d'un peu plus d'imagination, aller plus loin et essayer de trouver d'autres solutions, comme celle que j'ai évoquée.
    Le Gouvernement considère que les remarques de M. Moyne-Bressand et celles du groupe socialiste sont parfaitement justifiées. Il est conscient de la difficulté. Mais il vous demande de ne pas vous laisser aller à la facilité qui consisterait à vouloir résoudre par le biais d'un amendement un problème qui est pendant depuis des années. Je veux dire à M. Moyne-Bressand, devant M. le ministre Bédier, que l'idée d'une expérimentation est très intéressante. C'est en effet une maladie française de n'aimer la réforme que lorsqu'elle est parfaite. Or, comme elle n'est jamais parfaite, totale et complète, bien souvent elle s'arrête avant d'avoir commencé. Je suis donc très favorable à l'idée d'une expérimentation à l'issue du dépôt du rapport, c'est-à-dire dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi. Cette réponse, je la fais également au nom de Pierre Bédier, avec lequel je travaille main dans la main. Je souhaite donc le retrait de ces amendements : je crois que ce serait raisonnable.
    M. le président. La parole est à M. Jérôme Rivière.
    M. Jérôme Rivière. Je veux simplement souligner la différence entre ces deux amendements. En effet, celui de M. Blazy prévoit la création d'un corps spécial de police pénitentiaire et a l'ambition de régler d'un coup de baguette magique un problème qui existe depuis de nombreuses années, alors que l'amendement de M. Moyne-Bressand, dont il a été longuement débattu en commission de la défense, propose une expérimentation, puisque les problèmes sont en effet nombreux et multiples, comme vous l'avez souligné, monsieur le ministre.
    Quant à la possibilité d'envoyer des magistrats dans les établissements pénitentiaires, cela rejoint le souci exprimé par M. Lagarde à propos de la police aux frontières, s'agissant du transfèrement entre les aéroports et les palais de justice. Il faut donc sortir des schémas nationaux et procéder à une expérimentation dans six mois. En tout cas, ces deux amendements diffèrent.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.
    M. Jean-Pierre Blazy. Je suis désolé monsieur le ministre, mais nous ne retirerons pas notre amendement. Nous constatons finalement que votre projet a été élaboré à la hâte. Vous ne voulez pas partir en vacances avant d'avoir légiféré, au coeur de l'été, sur la sécurité et la justice, mais, en fait, on voit bien que vous n'êtes pas prêts puisque vous demandez des délais. Notre proposition est encore plus justifiée après ce qui vient de se produire à Nice. Voilà pourquoi nous maintenons cet amendement.
    M. le président. La parole est à M. Alain Moyne-Bressand.
    M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis. Le Gouvernement fait preuve d'énergie, de volonté et de dynamisme. Il veut engager des réformes...
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est pour ça qu'on l'encourage !
    M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis. ... et c'est nécessaire. Cette réforme vous ne l'avez pas faite !
    M. Jean-Pierre Blazy. Nous en avons fait beaucoup et nous voulions continuer !
    M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis. Malheureusement, vous nous avez laissé un chantier que nous devons maintenant gérer. En matière de lutte contre l'insécurité il y a beaucoup à faire et nous avons entendu nos concitoyens.
    M. Jean-Pierre Blazy. Vous avez entendu mais vous attendez !
    M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis. Pour une réforme de cette importance, une expérimentation s'impose. Nous nous retrouverons dans six mois pour faire le bilan. Donc, je retire mon amendement.
    M. le président. L'amendement n° 107 est retiré.
    La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Je souhaite apporter un élément de réflexion dans la mesure où j'ai été rapporteur du budget sur les prisons et où j'ai participé à la commission Canivet, ainsi qu'à la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur les prisons. Il me semble très important d'avoir une discussion sur cette question, avec les personnels pénitentiaires. En effet, dans certaines prisons, des transferts s'opèrent sans la police et sans la gendarmerie essentiellement pour des raisons géographiques. Je crois que c'est le cas dans l'Oise. Et je ne suis pas sûr que créer un corps spécial de police pénitentiaire répondrait à l'attente des personnels. Puisque vous allez faire un rapport, je vous suggère de prendre en compte tous les éléments du travail qui a déjà été effectué, car il me semble avoir ouvert des pistes utiles.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 51 rectifié.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Caresche a présenté un amendement, n° 65 corrigé, ainsi rédigé :
    « Après la date "21 janvier 1995, substituer à la fin de la première phrase du deuxième alinéa du A du III de la première partie de l'annexe I, les mots et la phrase suivants : "et mis en oeuvre depuis le colloque de Villepinte de 1998, sera renforcé. Il s'agit de passer d'une police d'ordre public à une véritable police de proximité au service du citoyen. »
    La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Cet amendement concerne la consolidation de la police de proximité.
    Je suis bien conscient que notre travail de ces dernières années est inachevé, que toutes les questions n'ont pas été réglées, mais des choses ont été faites, notamment en matière de police de proximité, et je tiens à rappeler que c'est au colloque de Villepinte que cette orientation a commencé à être mise en oeuvre. Dans le projet de loi, il est fait référence à la loi d'orientation pour la sécurité du 21 janvier 1995 qui, certes, évoque la police de proximité, mais les choses ont réellement commencé en 1997 avec le gouvernement de l'époque et le colloque de Villepinte, je voulais le rappeler dans l'amendement.
    Ensuite, il importe d'affirmer clairement que la police de proximité doit non seulement être consolidée - cela figure dans le texte -, mais encore se trouver au coeur de la politique de sécurité. Vous avez dit, monsieur le ministre : « Il est temps de passer d'une police d'ordre public à une police de sécurité publique. » Nous partageons votre avis. C'est pourquoi je vous propose également d'insérer dans le texte la phrase suivante : « Il s'agit de passer d'une police d'ordre public à une véritable police de proximité au service du citoyen. » L'orientation précisée par le Gouvernement figurerait ainsi explicitement dans le projet de loi.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Je suis très surpris : c'est bien la première fois qu'on cherche à mentionner un colloque dans une loi.
    M. Gérard Léonard. Et quel colloque !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Je crois que le temps des colloques est passé. Ils n'ont pas donné grand-chose, vos colloques ! Bien entendu, la commission a repoussé cet amendement. Comment voulez-vous que l'on inscrive dans ce texte de loi une philosophie d'hier, alors que nous sommes en train d'écrire la philosophie de demain ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).
    M. Jean-Pierre Blazy. Nous ne parlons pas de philosophie !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Vous m'offrez l'occasion de dire que nous n'avons pas la même conception de la police de proximité.
    M. Jean-Pierre Blazy. Voilà ! C'est ça qui est intéressant !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La vôtre a donné les résultats catastrophiques que l'on sait.
    M. Jean-Pierre Blazy. Mais non !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Partout où vous avez organisé la police de proximité aux dépens de l'action judiciaire, de la présence nocturne des forces de police, l'insécurité et la délinquance n'ont cessé d'augmenter.
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est totalement faux !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Avec ce texte, il n'est évidemment pas question de remettre en cause la notion de police de proximité, bien au contraire. Notre philosophie consiste à lui donner des missions d'action là où vous vous êtes contentés de lui donner des missions de politesse. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jean-Pierre Blazy. Vous dites n'importe quoi !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La hiérarchie n'a cessé de donner des instructions à la police de proximité.
    M. Jean-Claude Bateux. Vous n'êtes plus en campagne électorale !
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est une caricature !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cette police de proximité est souvent venue me voir pour me dire combien elle était humiliée de recevoir des instructions de sa hiérarchie qui lui demandait de ne pas agir, considérant qu'agir aurait plus de conséquences que ne rien faire.
    M. Jean-Pierre Blazy. Vous dérapez !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. C'est à cette police de proximité que nous voulons redonner toute sa considération, toute sa dignité et toute sa fierté.
    M. André Gerin. Lamentable !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Nous voulons l'organiser différemment, en assurant une meilleure répartition en termes de tranches horaires, d'initiatives, d'action judiciaire et de répartition diurne et nocturne. Alors, pourquoi voulez-vous que nous mentionnions le colloque de Villepinte dans ce texte de loi ? Il n'en est bien sûr pas question. C'est la raison pour laquelle la commission a repoussé cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est du dérapage mal contrôlée !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis que la commission.
    M. le président. La parole est à M. Gérard Léonard.
    M. Gérard Léonard. Cet amendement d'autosatisfaction est à la fois injuste et déplacé.
    D'abord, il est injuste parce que le principe de la police de proximité n'a pas été fixé au colloque de Villepinte. Il était inscrit en toutes lettres dans la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité de janvier 1995.
    Ensuite, il est déplacé par rapport à la conception que nous avons de la police de proximité. Christian Estrosi a eu raison de rappeler les effets pervers de votre pratique. En définitive, la police de proximité s'est résumée à un simple affichage,...
    M. Jean-Pierre Blazy et M. Christophe Caresche. C'est faux !
    M. Gérard Léonard. ... avec des conséquences que j'ai eu l'occasion de souligner dans la discussion générale. La première de ces conséquences, c'est que l'on a déséquilibré les actions des forces de sécurité au détriment des forces chargées des investigations, ce qui a d'ailleurs eu pour résultat de faire diminuer de façon très importante le taux d'élucidation.
    La police de proximité joue un rôle important en matière de prévention, mais cette prévention doit s'exercer au moment où la délinquance peut se produire. Or, pour l'essentiel, elle a fonctionné pendant les jours ouvrables, aux heures ouvrables, c'est-à-dire au moment où les délinquants étaient en train de faire la sieste, de se reposer, et les agents de la police de proximité rentraient chez eux au moment où les délinquants regagnaient la voie publique. Voilà la réalité !
    M. Jean-Pierre Blazy. Quelle caricature ! C'est lamentable !
    M. Gérard Léonard. Il faut être clair et donner tout son contenu à une véritable police de proximité, qui doit bien entendu être prolongée par une police d'investigation et d'une police judiciaire efficaces.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Puisque l'opposition nous reproche de faire dans la caricature...
    M. Jean-Pierre Blazy. Absolument !
    M. Pierre Cardo. ... je vais essayer d'être un peu plus objectif. Certes, le colloque de Villepinte était animé d'excellentes intentions, de même d'ailleurs que les textes sur la présomption d'innocence et les 35 heures. Mais tous ont rencontré un problème majeur : ils n'ont jamais été accompagnés des moyens correspondants. Si vous aviez réellement interrogé les policiers sur le terrain, dans les commissariats, vous sauriez que ce qui a le plus manqué ce sont les moyens de mettre en oeuvre cette politique de proximité.
    M. Jean-Pierre Blazy. Les effectifs ont augmenté de 11 % en cinq ans !
    M. Pierre Cardo. Mais non, il n'y a pas eu de moyens, il y a eu simplement des transferts. Et pour la présomption d'innocence cela a été la même chose. Outre les désaccords de fond qui nous ont opposés sur cette loi, de nombreuses obligations nouvelles ont été créées mais les moyens n'ont pas suivi.
    M. Jean-Luc Warsmann. Absolument !
    M. Pierre Cardo. Souvenez-vous des 35 heures dans les hôpitaux !
    M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que nous devons terminer l'examen de ce texte cette nuit : il faut donc vous hâter.
    La parole est à M. Marc Le Fur.
    M. Marc Le Fur. Le Premier ministre a appelé le PS « le parti des satisfaits ». Cet amendement illustre l'autosatisfaction qui vous anime, messieurs les socialistes.
    Le colloque de Villepinte a eu des effets négatifs parce que vous avez suscité une attente. Des policiers, des gendarmes y ont cru, et ils ont été déçus. Le même phénomène s'est produit avec les contrats locaux de sécurité. Des élus ont passé des heures à travailler dessus et les moyens n'ont pas suivi. Il est très difficile, après, de remobiliser ceux qui ont déjà dépensé beaucoup d'énergie sur ces problèmes durant les cinq dernières années.
    Maintenant, passons à l'action. N'évoquons pas des colloques qui, en définitive, ont fait plus de mal que de bien.
    M. le président. Monsieur Caresche, retirez-vous votre amendement ?
    M. Christophe Caresche. Non, monsieur le président.
    M. le président. Je mets donc aux voix l'amendement n° 65 corrigé.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Estrosi, rapporteur, a présenté un amendement, n° 35, ainsi libellé :
    « Après le mot : "nationale, rédiger ainsi la fin du dernier alinéa du A du III de la première partie de l'annexe I : "restera marquée par l'importance de la proximité mais sera adaptée en tant que de besoin. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 35.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Lagarde et les membres du groupe Union pour la démocratie française ont présenté un amendement, n° 121, ainsi rédigé :
    « Compléter le A du III de la première partie de l'annexe I par l'alinéa suivant :
    « Dans plusieurs départements, au cours de l'année 2003, il sera expérimenté l'attribution au maire de l'autorité sur la police de proximité. »
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Si la philosophie de cet amendement ne convient pas au Gouvernement, la méthode lui plaira sûrement.
    M. le ministre de l'intérieur vient de dire qu'en France on adorait les réformes parfaites. Il s'agit en l'occurrence de procéder à une expérimentation au cours de l'année 2003, en s'adressant aux maires de villes de plus de 10 000 habitants qui seraient volontaires. On leur confierait durant cette période une autorité sur la police de proximité et sur les missions de proximité.
    Le groupe UDF a depuis un certain nombre d'années la conviction que si on n'implique pas les élus locaux, les seuls qui soient responsables devant les citoyens et que les citoyens puissent réellement sanctionner s'ils ne sont pas contents de la politique de sécurité, on ne parviendra pas à répondre aux attentes.
    Le maire est celui qui est interpellé le plus directement par la population, qui ne peut ni interpeller ni sanctionner quelqu'un d'autre. Le simple citoyen n'a pas toujours la possibilité de rencontrer le commissaire de police, et jamais le directeur départemental de la sécurité publique, fonctionnaire qui intervient au vu des statistiques départementales et qui dépend du préfet. Bref, cette chaîne de commandement échappe totalement à l'interpellation, à l'intervention et à la sanction du citoyen.
    Voilà pourquoi le groupe UDF souhaite que nous puissions tester en 2003 l'attribution au maire de la police de proximité. Peut-être constatera-t-on qu'il faut modifier et adapter le système avant d'envisager sa généralisation si les résultats obtenus le justifient.
    Je constate en tout cas que, dans ma commune, on a donné des directives pour lutter contre les vols de téléphones portables, qui ne sont pourtant pas ceux qui pourrissent la vie de nos concitoyens, alors que, dans le même temps, on ne s'occupe pas de faits dont les élus locaux sont parfaitement informés, mais contre lesquels ils ne peuvent agir. C'est sur ce point que le groupe UDF souhaiterait une expérimentation. Ainsi pourrait-on savoir s'il convient de donner plus de responsabilités aux élus locaux.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement. Je comprends votre souhait, monsieur Lagarde, mais j'ai le sentiment que le texte qui nous est proposé y apporte une réponse. En plaçant le maire à la présidence du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance, c'est-à-dire en lui permettant de diriger les travaux auxquels participent le préfet, le procureur et les autres institutions, on lui offre la possibilité de guider les orientations et l'action de la police de proximité.
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est faux ! Quelle hypocrisie !
    M. Christophe Caresche. Vous disiez le contraire dans votre proposition de loi !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Monsieur Lagarde, ce texte donne une nouvelle ossature à l'organisation des forces de l'ordre et des forces de sécurité.
    M. Jean-Pierre Blazy. Elle existe déjà !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Il regroupe pour la première fois, sous une même autorité, l'ensemble des forces de l'ordre, de la police nationale et de la gendarmerie nationale. Nous modifierions complètement la philosophie de ce texte en confiant au maire, même à titre expérimental, la responsabilité de diriger la tête de la police de proximité.
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est ce que vous avez proposé dans votre proposition de loi, que je viens de relire ! Vous vous contredisez ! Vous dites dans la majorité le contraire de ce que vous avez dit dans l'opposition ! Où est la cohérence !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Vous n'avez pas de chance, monsieur Blazy. Souvenez-vous d'une de vos interventions de 1998. Vous disiez alors à M. Chevènement : « Enfin, comment comptez-vous, monsieur le ministre, assurer la nécessaire complémentarité entre la police municipale et la police nationale, afin de développer la sécurité de proximité, indispensable pour répondre à la demande de nos concitoyens ? ».
    M. Jean-Pierre Blazy. Ce n'est pas du tout la même chose ! Nous, nous ne sommes pas pour le démantèlement de la police nationale !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Monsieur Blazy, vous devriez rester un peu plus modeste sur ce sujet, que vous avez vous-même abordé pendant un temps. En tout cas, s'agissant de la police de proximité, la commission considère qu'il faut laisser la responsabilité à l'Etat.
    Monsieur Lagarde, nous avons repoussé cet amendement et je pense que vous devriez le retirer.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Sans doute n'avons-nous pas les mêmes conceptions, mais ce n'est pas grave.
    Premièrement, je n'ai pas reçu mandat de municipaliser la police : que les choses soient très claires.
    M. Jean-Pierre Blazy. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La France a une tradition, une histoire, et je pense qu'il faut les respecter, je le dis sans aucun souci de provocation ni désaccord, mais parce que la politique du Gouvernement doit être claire et qu'il ne peut y avoir aucune ambiguïté.
    Deuxièmement, je demande à mes amis de l'UDF de faire attention. Que signifierait commander la police de proximité sans maîtriser ses effectifs ? Vous allez rendre un très mauvais service aux élus en les rendant responsables sans leur donner les moyens d'assurer une telle responsablité. (« En effet ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. François Baroin. Absolument !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Lagarde, je le dis avec toute la considération que j'ai pour vous : vous n'êtes pas allé au bout de votre logique. Car si tel avait été le cas, vous auriez proposé, avec le groupe UDF, que les maires dirigent la police de proximité, mais aussi qu'ils soient maîtres des recrutements et de la paye. Autant donner aux élus, et je suis maire depuis dix-neuf ans, une responsabilité qu'ils peuvent exercer.
    Lorsque vous aurez permis à ces pauvres élus de diriger la police de proximité alors même que c'est le DSP, le préfet ou le ministre qui bloque les effectifs, vous n'aurez pas mis de la transparence dans le système, monsieur Lagarde, mais de la pagaille !
    Enfin, qu'est-ce vraiment que la police de proximité ? L'objectif stratégique est clair. C'est la police qui est présente à certaines heures, dans certains endroits,...
    M. Gérard Léonard. Bien sûr !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... pour mieux combattre le sentiment d'insécurité. Mais, en vertu de ce principe, il y a aussi des BAC dans la journée. Cela voudrait donc dire que dans la même ville, sur le même territoire, une partie des effectifs obéirait à un patron et une autre partie à un autre !
    Je vous dis les choses comme je le pense. Il fallait donner un droit d'information au maire. J'affirme qu'il ne l'avait pas.
    M. Jean-Pierre Blazy. Mais si !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je suis maire depuis dix-neuf ans, je le répète. Si j'ai réussi à obtenir les statistiques des commissaires de police, c'est simplement parce qu'ils imaginaient, sans doute à tort, que j'avais un avenir sympathique. Mais si les commissaires ne veulent pas donner l'information, il ne la donnent pas. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    De la même façon, monsieur Blazy, j'affirme qu'il n'y a pas ici un seul élu qui puisse me dire qu'un jour son commissaire de police lui a rendu compte des effectifs et du nombre de véhicules de son commissariat. Jamais ! Or c'est une innovation que nous avons prévue dans ce texte.
    Monsieur Lagarde, nous avons fait un premier pas dans votre direction mais je ne souhaite pas qu'on aille au-delà pour l'instant, même sous forme d'expérimentaion. C'est un sujet trop grave pour faire l'objet d'un changement de doctrine ou de stratégie aussi important.
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche, contre l'amendement.
    M. Christophe Caresche. C'est un grand moment de voir M. Estrosi s'opposer à un amendement proposant la municipalisation de la police, qu'il n'a cessé de défendre durant toute la législature précédente...
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est vrai !
    M. Christophe Caresche. ... et qui fait explicitement partie du programme du RPR, dont il fut l'un des artisans.
    M. Jean-Luc Warsmann. C'est faux !
    M. Christophe Caresche. Voir M. Sarkozy tordre le cou à cette mesure que l'opposition, durant des mois et des années et des années, nous a resservie ici, cela fait vraiment plaisir ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Pierre Cardo. Il ne faut pas généraliser, monsieur Caresche.
    M. Christophe Caresche. C'est dans le livre que j'ai sous les yeux, dans le programme du RPR ! Cela figure dans tous les débats qui ont eu lieu ici sur les questions de sécurité !
    M. Gérard Léonard. C'est malhonnête de dire ça !
    M. Christophe Caresche. J'étais présent et je me souviens de la façon dont l'opposition intervenait sur cette question. Je suis heureux de constater que la majorité s'est rendue sur cette question à des arguments raisonnables.
    M. André Vallini. Nos arguments !
    M. Christophe Caresche. C'est bien, parce que la police nationale doit effectivement garder ses prérogatives en matière de sécurité.
    Cela dit, je voudrais exprimer une inquiétude liée aux dispositions qui seront prises dans le cadre d'une possible - peut-être même plus que possible - réforme des polices municipales. Je ne voudrais pas que nous revenions, dans les faits, sur un certain nombre de prérogatives de la police nationale. Nous serons donc extrêmement vigilants dans les mois qui viennent. Il ne faudrait pas s'engager de façon subreptice dans une municipalisation rampante de la police nationale. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Vous n'avez vraiment plus rien à dire !
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Depuis longtemps, je suis défavorable à ce qu'on mette le maire en première ligne lorsqu'il s'agit de la sécurité dans sa commune. J'ai demandé tout à l'heure des précisions sur le rôle de coordination de la prévention et de la répression qu'on va lui donner. Je vois davantage le maire comme un coordinateur, un grand médiateur qui donnera des orientations au conseil que nous allons réorganiser, mais surtout pas comme un supérieur hiérarchique.
    M. Estrosi n'est pas la seule voix de la majorité actuelle, mais, il me paraît dangereux de mettre le maire en première ligne. Ceux qui le souhaitent sont des élus qui n'ont peut-être pas à gérer au quotidien certaines violences, qui n'envoient pas leurs enfants dans les écoles des quartiers et qui n'habitent pas dans leur commune. Je vous rappelle que les maires sont quasiment les seuls assignés à résidence, dans leur commune ; les travailleurs sociaux et les policiers, dans bien des cas, n'habitent plus nos quartiers.
    Personnellement, je ne veux pas d'un maire en première ligne, avec sa famille et ses relations, qui sera le « shérif » local. Le pavé sur la figure, on peut déjà le ramasser sans raisons particulières... Je suis très heureux que l'autorité de l'Etat s'affirme dans ce domaine et qu'il ait à assurer la protection des biens et des personnes, y compris celle des élus. A ce propos, je remarque qu'on se préoccupe beaucoup de la sécurité des agents de l'Etat et de bien des fonctionnaires sur le terrain. Mais, parfois, il me semble qu'on nous oublie un petit peu, nous qui assumons aussi des responsabilités au quotidien et avons des contacts qui ne sont pas toujours faciles.
    Et puis, songez à l'esprit de la loi. Ce n'est pas au moment où l'on regroupe la police, la gendarmerie, la douane et le fisc dans des structures homogènes et cohérentes, qu'il faut créer une autorité supplémentaire au niveau local dans le domaine de la sécurité. Imaginez un peu le désordre ! Cela ferait 36 000 shérifs potentiels. Même aux Etats-Unis, ce n'est pas le cas.
    M. le président. Monsieur Lagarde, maintenez-vous votre amendement ?
    M. Jean-Christophe Lagarde. Tout en lui réaffirmant mon amitié et mon respect, je ferai observer à M. Cardo que j'habite ma commune et que je continue à y vivre. Je n'ai pas l'intention de devenir un shérif mais j'en ai assez, comme beaucoup de nos collègues, d'être le spectacteur impuissant de ce qui se passe dans ma commune, tout en me trouvant en première ligne. Les citoyens nous disent que nous ne faisons rien tout simplement parce qu'ils ignorent que nous n'avons aucun pouvoir en la matière ! Ou alors, monsieur le ministre, qu'on retire de la loi la précision : « Le maire est le garant de l'ordre public sur la commune. » Une telle responsabilité nous incombe, sans que nous ayons un quelconque pouvoir. Et, ce qui est regrettable, c'est que les citoyens savent bien nous jeter au visage que nous sommes les gardiens de l'ordre public dans la commune.
    Avec beaucoup de sérénité, j'ai écouté M. le ministre de l'intérieur nous expliquer que la majorité, dans sa diversité, pouvait avoir des points de divergence. Cet amendement était un amendement d'appel au débat et à la réflexion. Nous ne désespérons pas de convaincre et d'avancer, d'autant plus, monsieur le ministre, que votre projet de loi marque un progrès dans la responsabilisation des élus locaux en ce domaine.
    M. Christophe Caresche. Vous reculez !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Non, monsieur Caresche, nous ne reculons pas et nous ne reculerons pas ! Ce point faisait partie du projet présidentiel de François Bayrou, il fait partie de notre projet législatif et de ce que nous avons défendu devant les électeurs. Nous n'avons pas l'habitude de changer.
    Il n'en reste pas moins qu'il y aura, comme le Premier ministre l'a annoncé, un grand débat sur la décentralisation. C'est dans ce cadre que la discussion devra se poursuivre. Sur ce sujet, comme c'est arrivé sur d'autres sujets dans le passé, nous ne désespérons pas de convaincre nos collègues l'un après l'autre.
    Cela dit, je retire l'amendement n° 121, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 121 est retiré.
    Mes chers collègues, nous allons poursuivre la séance jusqu'à vingt heures. Je vous invite à développer vos arguments sur la sécurité avec vélocité.
    M. Lagarde a présenté un amendement, n° 111, ainsi rédigé :
    « Après le troisième alinéa du c du B du III de la première partie de l'annexe I, insérer l'alinéa suivant :
    « Les données doivent être inscrites aux fichiers dans un délai très sensiblement réduit. »
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Il est impératif de réduire très sensiblement le délai d'inscription des condamnations sur les fichiers de la police. Aujourd'hui, ce délai est de six à huit mois et les fichiers sont souvent obsolètes.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement, qui n'a pas de sens tel qu'il est placé. Si on l'insérait après le cinquième alinéa, il trouverait toute sa dimension et j'y serais favorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable, sous réserve de cette rectification.
    M. le président. Monsieur Lagarde, acceptez-vous la rectification proposée par le rapporteur, qui consiste à remplacer, au premier alinéa de votre amendement, « troisième » par « cinquième » ?
    M. Jean-Christophe Lagarde. Oui, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement est ainsi rectifié.
    M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ont présenté un amendement, n° 92, ainsi rédigé :
    « Compléter le quatrième alinéa du c du B du III de la première partie de l'annexe I par la phrase suivante : "Les fichiers alimentés à l'aide d'informations contenues dans des procédures judiciaires (STIC, JUDEX) seront administrés par le ministère de la justice, sous contrôle du Conseil supérieur de la magistrature. »
    La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Cet amendement se justifie par son texte même.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Nous savons que M. Mamère n'aime pas la police, à l'égard de laquelle il exprime méfiance et défiance... Tout ce qu'il pourrait lui enlever comme compétences, il est prêt à le proposer ! C'est ce qu'il fait dans cet amendement, qui n'irait pas, bien sûr, dans le sens du renforcement de l'action policière, l'objectif de l'ensemble de ce texte.
    Bien évidemment, la commission a repoussé cet amendement : nous ne pouvons pas accepter de placer les fichiers de police sous l'autorité du ministère de la justice.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable également.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 92.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Caresche a présenté un amendement, n° 66, ainsi rédigé :
    « Compléter le dernier alinéa du c du B du III de la première partie de l'annexe I par la phrase suivante : « A terme, une fusion de ces installations et de ces laboratoires sera programmée. »
    La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Le texte précise qu'on envisagera un rapprochement et une meilleure complémentarité des installations de police technique et scientifique de la gendarmerie et de la police, notamment des laboratoires. C'est une bonne orientation mais je propose d'aller plus loin, c'est-à-dire d'envisager la fusion de ces équipements.
    M. Sarkozy va certainement me répondre que cet amendement manque de souplesse. Mais il est difficile d'expliquer à la population que la police et la gendarmerie ont des laboratoires et des équipements qui ont exactement la même finalité. Ils font bien souvent la même chose et travaillent sur les mêmes éléments. Je propose que l'on s'engage vers une fusion. Ce serait un élément d'économie et de rationalisation des moyens.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cet amendement est trop rigide. Le projet propose la complémentarité, le rapprochement, et donc une certaine souplesse. La commission a donc repoussé l'amendement n° 66.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 66.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ont présenté un amendement, n° 94, ainsi rédigé :
    « Compléter le III de la première partie de l'annexe I par les deux alinéas suivants :
    « C. - Un nouveau statut pour les officiers de police judiciaire :
    « Il faut créer un statut d'officier de justice, dont le déroulement de carrière dépendra uniquement de l'autorité judiciaire, et séparer dans des corps distincts les fonctions d'inspecteur d'une part et de commandant et officier d'autre part, comme les fonctions d'enquêteurs et celles de gradés ou de gardiens de la paix. »
    La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. J'ai été très heureux d'entendre Pierre Cardo dire tout à l'heure que M. Estrosi ne représentait pas l'ensemble de la majorité d'aujourd'hui.
    M. Jean-Pierre Blazy. Cela nous rassure !
    M. Noël Mamère. C'est justement parce que je crois aux fonctions régaliennes de l'Etat et à la police républicaine que je soutiens les arguments développés par Pierre Cardo : non, les maires n'ont pas à jouer les shérifs. C'est effectivement à l'Etat, et non aux polices municipales, qu'il revient d'assurer l'ordre et la tranquillité publics.
    M. Jacques Myard. Donc il faut lui en donner les moyens !
    M. Noël Mamère. C'est à l'Etat de se doter de ces moyens et de répartir les effectifs. Je vous rappelle que, parmi tous les pays d'Europe, nous occupons le troisième rang pour le nombre de policiers par habitant. Le problème n'est donc pas lié à l'importance des effectifs mais à leur répartition.
    M. François Rochebloine. Et l'application des 35 heures ? Et la réduction du temps de travail ?
    M. Noël Mamère. L'amendement n° 94 est dans le droit-fil du précédent. Au nom de la séparation des pouvoirs, à laquelle nous sommes très attachés, nous souhaitons que les fichiers alimentés par l'autorité judiciaire soient contrôlés par cette dernière. Ainsi que j'ai souligné hier lors de l'exception d'irrecevabilité, l'un des gros défaut de ce texte réside dans le fait qu'il engendre une confusion des pouvoirs. Il porte même atteinte à l'indépendance de la justice dans la mesure où, par exemple, les GIR sont coprésidés par le préfet et le parquet, et que, bien souvent, le procureur est appelé à prendre des décisions qui dépendent du préfet.
    M. Jacques Myard. Le procureur n'est pas un juge !
    M. Noël Mamère. De la même manière, et c'est très symbolique, quand le Président de la République décide de prendre la présidence du Conseil de sécurité intérieure, il place sous une même autorité des responsabilités qui sont doubles et qui devraient être séparées entre l'exécutif et le judiciaire. Le mauvais exemple est donc donné au sommet de l'Etat.
    C'est la raison pour laquelle nous considérons qu'il faut créer un statut d'officier de justice, dont le déroulement de carrière dépendra uniquement de l'autorité judiciaire, et séparer dans des corps distincts les fonctions d'inspecteur, d'une part, et de commandant et d'officier, d'autre part, tout comme les fonctions d'enquêteur et celle de gradé ou de gardien de la paix.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Monsieur Mamère, vous proposez de placer un corps d'OPJ sous l'autorité du ministère de la justice.
    M. Noël Mamère. Tout à fait !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. C'est-à-dire que vous remettez totalement en cause l'organisation de notre système pénal. Je ne pense pas que cela aille précisément dans le sens de l'efficacité. Avoir des policiers uniquement voués à des opérations d'OPJ, sans participation à la police administrative, serait-il réellement opératoire ? Remarque annexe : qu'adviendrait-il de l'homogénéité de notre politique pénale si des magistrats avaient la possibilité de disposer d'un corps d'OPJ ? Je ne suis pas sûr que cela serait vraiment sain pour l'équilibre des pouvoirs et pour l'action tant de la justice que de la police.
    Enfin, monsieur Mamère, l'exposé sommaire de votre amendement, qui est profondément excessif et outrancier,...
    M. Jean-Pierre Blazy. Il parle simplement de Jean Tiberi !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... ne peut en rien nous inciter à aller dans la direction que vous proposez. La commission a repoussé cet amendement et j'invite l'Assemblée à faire de même.
    M. Jean-Pierre Blazy. Qu'est-ce qui est excessif ? Le refus d'assister un juge d'instruction au domicile de Jean Tiberi, par exemple ?
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable également.
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Je ne suis pas plus excessif que M. Estrosi. Mon exposé des motifs rappelait simplement, par exemple, qu'on avait réfusé d'assister un juge d'instruction au moment où l'on procédait à des investigations dans l'appartement d'un ancien maire de Paris,...
    M. Jean-Pierre Blazy. M. Tiberi.
    M. Noël Mamère. Oui.
    Monsieur Estrosi, et ce n'est pas M. le ministre de l'intérieur qui me démentira, il suffit de rappeler les derniers événements qui se sont produits, notamment place Vendôme ; le grand banditisme prospère. Cela est dû en grande partie au fait que la police n'a pas les moyens d'exercer ses fonctions de police judiciaire. Notre amendement visait précisément à renforcer le pouvoir judiciaire de la police, sous le contrôle de l'autorité judiciaire.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 94.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Lagarde a présenté un amendement, n° 112, ainsi rédigé :
    « Compléter le a) du IV de la première partie de l'annexe I par l'alinéa suivant :
    « Les activités de police de l'air et des frontières sont assurées par les agents des douanes. »
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Un amendement qui n'a pu être déposé visait à placer le service des douanes sous l'autorité du ministre de l'intérieur et non plus du ministre de l'économie et des finances. Avec l'amendement n° 112, nous souhaitons au moins que les activités actuellement exercées par la police de l'air et des frontières soient prises en charge par les agents des douanes. A la suite de la création de l'espace Schengen, ceux-ci, en effet, n'exercent plus certaines des missions qui leur étaient auparavant confiées. Peut-être pourrait-on réaffecter une partie de leurs effectifs à la surveillance et à la sécurité publique ?
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement. Monsieur Lagarde, je fais quant à moi une autre analyse que vous sur l'espace Schengen. Je crois au contraire que, depuis sa mise en place, la douane a une mission encore plus importante à remplir à l'intérieur même du territoire. M. le ministre a ainsi rappelé que les douaniers étaient dotés de compétences juridiques et législatives dont ne disposent ni nos policiers ni nos gendarmes. Dans le cadre de la nouvelle architecture qui nous est proposée, à travers les groupes d'interventions régionaux et les dispositions qui visent à fédérer l'ensemble des institutions et des forces pouvant contribuer au rétablissement de l'ordre, il s'agit précisément de jouer sur la complémentarité pour démanteler les réseaux, lutter contre les systèmes d'économie souterraine, etc. Ce n'est pas en affectant simplement les douaniers à la surveillance des frontières que nous atteindrons les objectifs que nous nous sommes fixés. Monsieur Lagarde, il serait bon que vous retiriez cet amendement qui affaiblit l'ensemble du texte et que la commission a repoussé.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La question est complexe. Je rappelle qu'il existe un code des douanes et que notre pays compte quelque 19 000 douaniers. C'est un corps extrêmement compétent que j'ai eu beaucoup de plaisir à diriger, voilà quelques années déjà. Il n'a pas que des missions aux frontières : il a aussi des missions fiscales et de régulation des marchés, je pense notamment à l'action qu'il mène en ce qui concerne la TVA et les contrefaçons. La police de l'air et des frontières et les agents des douanes n'effectuent pas exactement le même travail et bien souvent, du reste, nous voyons des douaniers ailleurs qu'à nos frontières.
    En outre, monsieur Lagarde, des évolutions sont en cours. Nous travaillons en effet avec nos partenaires européens à l'harmonisation de nos règles aux frontières et peut-être même à la création d'un corps d'officiers d'immigration aux frontières. Nous pouvons imaginer que, comme pour la police et la gendarmerie, les choses évoluent. A cet égard, je serais extrêmement surpris qu'un jour un gouvernement revienne sur le rapprochement opérationnel entre la police et la gendarmerie. Ce qui paraissait si difficile à nos prédécesseurs devient aujourd'hui une évidence.
    Sans doute la douane connaîtra-t-elle prochainement des évolutions. Pour l'heure, intervenir par un amendement, risquerait de troubler les choses. Je crains même d'avoir écrit sur ce sujet alors que j'occupais d'autres fonctions et je ne voudrais pas me contredire aujourd'hui.
    Prenons le temps de la réflexion. Commençons par mener à son terme la réforme concernant la gendarmerie et la police, puis mettons en oeuvre l'harmonisation de la législation de l'immigration au niveau européen, avec peut-être la création d'un corps d'officiers d'immigration européen. C'est alors que se posera la question de l'intégration de la douane dans cet ensemble. Comme le rapporteur, je suis opposé à la suppression de la douane en tant que telle : ce n'est pas parce qu'il y a l'espace Schengen que les trafics ont cessé.
    Au bénéfice de ces observations, nous devrions pouvoir nous mettre d'accord sur le retrait de cet amendement et sur la poursuite d'un travail en commun.
    M. le président. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Lagarde ?
    M. Jean-Christophe Lagarde. Non, monsieur le président, je le retire : les explications de la commission et du Gouvernement me donnent satisfaction.
    Monsieur le ministre, les évolutions que vous venez d'évoquer vont dans le bon sens. J'appelle toutefois votre attention sur le fait que les missions de la douane ont d'ores et déjà considérablement évolué sans qu'une réforme de ce corps soit intervenue. Celle-ci devra prendre en compte l'évolution européenne et redéfinir les missions fiscales et de surveillance du territoire de la douane.
    M. le président. L'amendement n° 112 est retiré.
    M. Estrosi, rapporteur, a présenté un amendement, n° 36, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le premier alinéa du e) du IV de la première partie de l'annexe I : " e) Adaptation et modernisation de la formation des personnels . »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Amendement réactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. D'accord.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 36.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Caresche a présenté un amendement, n° 80, ainsi rédigé :
    « Compléter le dernier alinéa du e) du IV de la première partie de l'annexe I par la phrase suivante : " Des modules de formation communs aux deux écoles de commissaires et d'officiers de gendarmerie seront mis en place. »
    La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Dans le cadre du rapprochement entre la police et la gendarmerie que le Gouvernement appelle de ses voeux et que nous avions proposé durant la campagne électorale, cet amendement vise à prévoir une formation commune des cadres de la police et de la gendarmerie. Des modules de formation communs aux deux écoles de commissaires et d'officiers de gendarmerie devront être mis en place. A terme, il faudrait même une formation commune à ces deux corps de sécurité.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Comme pour de nombreux autres points déjà évoqués, la commission a considéré que cet amendement relevait plutôt de l'organisation des services.
    M. Jean-Luc Warsmann. Absolument !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cela étant, il est vrai que nous devons nous orienter vers des modules de formation communs, et je ne vois pas d'inconvénient à ce que ce soit précisé dans le texte. Je laisse donc à l'Assemblée le soin de trancher.
    M. Jacques Myard. C'est d'ordre réglementaire !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Sagesse de l'Assemblée.
    M. le président. La parole est à M. Jérôme Rivière.
    M. Jérôme Rivière. Je rappelle que les officiers de gendarmerie sont des personnels militaires. Nous avons d'ailleurs envisagé en commission de la défense la création d'un groupe d'études concernant leur formation ; il serait donc plus judicieux d'attendre...
    M. Christophe Caresche. Je croyais que vous vouliez aller vite !
    M. Jean-Pierre Blazy. Nous cherchons à aider le Gouvernement !
    M. Jérôme Rivière. ... les conclusions d'une réflexion approfondie avant de s'engager. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 80.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Caresche a présenté un amendement, n° 84, ainsi rédigé :
    « Compléter le IV de la première partie de l'annexe I par les deux alinéas suivants :
    « g) Régionalisation des recrutements et des carrières.
    « Développer la police de proximité suppose que les policiers connaissent les lieux dans lesquels ils patrouillent et qu'il soient insérés dans les quartiers qu'ils ont la charge de surveiller. Une trop forte mobilité est un frein à la mise en oeuvre de cette police de proximité. C'est pourquoi il faut expérimenter une véritable régionalisation des recrutements et des carrières. »
    La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Avec cet amendement, nous abordons l'important problème de la fidélisation des effectifs, notamment de la police de proximité. L'objectif est d'éviter que, dans les départements urbanisés, dans les grandes villes, les policiers soient simplement de passage. Il s'agit de leur permettre d'assurer leur mission dans la durée, de leur laisser le temps de s'insérer dans les quartiers qu'ils ont la charge de surveiller. Si l'on veut que la création de la police de proximité, ou de la police de quartier - peu importe comment on l'appelle - soit un succès, il faut absolument que les policiers soient en place pour une longue période.
    Puisque l'expérimentation est à la mode, et dans le souci de ne pas brusquer les choses - je réponds peut-être là par avance à un argument qui me sera opposé -, je propose qu'on expérimente une régionalisation des recrutements et des carrières. Un policier recruté par exemple dans la région Ile-de-France ou dans la région PACA doit pouvoir faire sa carrière dans cette région et ne pas avoir, comme c'est malheureusement souvent le cas, pour seul souhait de retourner le plus vite possible dans sa région d'origine. Une trop forte mobilité constitue un frein à la mise en place d'une police proche des citoyens.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement, qui s'inspire de préoccupations spécifiques à Paris.
    M. Christophe Caresche. Pas du tout ! C'est pareil chez vous !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Nous considérons quant à nous que la mobilité n'est pas une mauvaise chose et nous ne voulons pas figer les situations et les carrières. Il faut simplement suffisamment de souplesse. A cet égard, le texte nous donne pleinement satisfaction. En outre, vous faites allusion dans votre amendement à une insertion « dans les quartiers ». L'espace régional est une chose, les quartiers en sont une autre. Imaginez-vous un policier faisant trente ans de carrière dans le même quartier !
    M. Gérard Léonard. Comme à Nice ou à Marseille !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Non : ce n'est pas souhaitable.
    M. Christophe Caresche. Ce n'est pas ce que propose cet amendement !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Je suis opposé à cet amendement pour les mêmes raisons que le rapporteur.
    Monsieur le ministre, puisqu'on évoque la mobilité des fonctionnaires, je me permets de vous adresser une supplique. Votre administration est la seule - ou en tout cas celle qui procède le plus souvent ainsi - à ne pas indiquer la date de remplacement d'un fonctionnaire muté.
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est vrai !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Et on n'attend même pas la sortie des nouvelles promotions des écoles de police pour opérer les mutations. Vous allez nous communiquer les chiffres officiels des effectifs, et je vous en remercie. Mais cet effectif est théorique car, entre juin et janvier, nous ne disposons pas de tous ces policiers. Il faut donc progresser sur ce point. Vos prédécesseurs ne l'ont jamais fait. Par pitié, lorsqu'une mutation intervient, programmez rapidement son remplacement. N'attendez plus trois, quatre, cinq ou même six mois pour le faire !
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Je voudrais répondre à M. Estrosi, qui a un peu caricaturé ma proposition, que je ne souhaite pas qu'un policier fasse toute sa carrière dans le même quartier, dans le même service ; il peut être muté. Mon amendement vise à prendre en compte la situation de policiers qui travaillent dans la région parisienne, à Neuilly, par exemple - mais il ne concerne pas seulement la région parisienne -, alors qu'ils habitent dans le Nord ou en Bretagne. Non seulement ils sont hébergés dans des conditions tout à fait désastreuses, mais ils sont également privés de leur famille, qui ne vit pas dans la région où ils exercent leur activité.
    Ces situations, que vous semblez sous-estimer, sont très préoccupantes. Je ne veux pas évoquer certains problèmes, comme les suicides de policiers, mais nous savons qu'ils peuvent être liés au fait qu'il y a une distorsion entre le lieu où est muté le policier et le lieu où réside sa famille.
    Je souhaite donc que le Gouvernement entame une réflexion sur ces questions et procède à une évaluation car, je vous le dis sincèrement, on ne peut pas tolérer la situation actuelle. Certes, elle concerne peut-être la région parisienne, mais n'oubliez pas, monsieur Estrosi, que cette région compte 8 millions d'habitants et qu'il faut aussi la prendre en considération.
    M. Jérôme Rivière. Pas d'impérialisme !
    M. le président. La parole est à M. Rudy Salles.
    M. Rudy Salles. Je vous rappelle monsieur Caresche que, lorsque le problème de la régionalisation a été évoqué avec les précédents gouvernements, leur réponse a toujours été défavorable. Je m'étonne que que vous n'ayez pas pu faire avancer ce dossier à l'époque.
    Par ailleurs, monsieur le ministre de l'intérieur, dans une région, Provence-Alpes-Côte d'Azur, les mutations posent souvent des problèmes en raison de l'insuffisance des indemnités de résidence dans un certain nombre de villes. Celles-ci devraient donc être revalorisées car beaucoup de fonctionnaires mutés dans cette région refusent leur poste à cause de ces difficultés de logement. Il faut donc absolument examiner ce problème de très près.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 84.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

3

ORDRE DU JOUR
DE LA PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, deuxième séance publique :
    Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 36, d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure :
    M. Christian Estrosi, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 53) ;
    M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (avis n° 37) ;
    M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (avis n° 52).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à vingt heures cinq.)