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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU MERCREDI 9 JUILLET 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du mardi 8 juillet 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC

1.  Maîtrise de l'immigration et séjour des étrangers en France. - Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Article 2 (suite) «...»

MM. Pierre Cardo, Christophe Caresche, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, Patrick Braouezec, Noël Mamère, Jean-Christophe Lagarde, Thierry Merioni, rapporteur de la commission des lois, Etienne Pinte, Serge Blisko.
Amendements de suppression n°s 248 de M. Caresche et 302 de M. Braouezec. - Rejet.
Amendement n° 249 de M. Caresche : MM. Christophe Caresche, le rapporteur, le ministre, Claude Goasguen, Jean-Christophe Lagarde. - Rejet.
Amendement n° 49 de la commission des lois : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 50 de la commission des lois : MM. le rapporteur, M. le ministre. - Adoption.
Amendement n° 181 de M. Kossowski : MM. Jacques Kossowski, le rapporteur. - Retrait.
Amendement n° 51 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 418 de M. Ferrand : MM. Etienne Morrut, le rapporteur, le ministre, Christophe Caresche, Noël Mamère, Claude Goasguen. - Adoption.
Amendement n° 52 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 360 de M. Cardo : M. Pierre Cardo. - Retrait.
Amendement n° 218 de M. Mamère : MM. Noël Mamère, le rapporteur. - Rejet.
Amendement n° 53 de la commission : M. le rapporteur. - Adoption.
Amendement n° 54 de la commission : M. le rapporteur. - Adoption.
Amendement n° 55 de la commission : M. le rapporteur. - Adoption.
Amendement n° 219 de M. Mamère : MM. Noël Mamère, le rapporteur, Serge Blisko, Patrick Braouezec, Jean-Christophe Lagarde, le ministre, Claude Goasguen, Christophe Caresche. - Rejet.
Amendement n° 56 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 57 de la commission. - Adoption.

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN

Amendement n° 369 de M. Cardo : MM. Pierre Cardo, le rapporteur, le ministre, Serge Blisko, Jean-Pierre Grand, Patrick Braouezec. - Retrait.
Amendement n° 58 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre, Christophe Caresche, Patrick Braouezec, Noël Mamère, François d'Aubert, Jean-Christophe Lagarde, Jacques-Alain Bénisti, Serge Blisko. - Adoption.
Amendement n° 59 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendements identiques n°s 220 de M. Mamère et 303 de M. Braouezec : MM. Noël Mamère, André Gerin, le rapporteur, le ministre, Pierre Cardo. - Rejet.
Amendement n° 60 de la commission : MM. Nicolas Perruchot, Christophe Caresche, le rapporteur.
Sous-amendement n° 361 de M. Cardo : MM. Pierre Cardo, le rapporteur. - Retrait.
Sous-amendement n° 453 de M. Perruchot : MM. Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Adoption de l'amendement n° 60.
Amendement n° 415 de M. Perruchot : MM. Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, le ministre, Christophe Caresche, André Gerin. - Rejet.
Amendement n° 61 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre, Christophe Caresche, Serge Blisko. - Adoption de l'amendement n° 61 rectifié.
Amendement n° 62 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 63 de la commission, avec le sous-amendement n° 452 de M. Perruchot : MM. le rapporteur, le ministre Nicolas Perruchot. - Rejet du sous-amendement n° 452 ; adoption de l'amendement n° 63.
Amendements identiques n°s 387 de la commission et 410 de M. Mourrut : MM. le rapporteur, Etienne Mourrut, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 359 de M. Cardo : MM. Pierre Cardo, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 362 de M. Cardo : MM. Pierre Cardo, le rapporteur, le ministre Serge Blisko. - Retrait.
Amendement n° 363 de M. Cardo : M. Pierre Cardo. - Retrait.
Amendement n° 368 de M. Cardo. - Retrait.
Adoption de l'article 2 modifié.

Article 3 «...»

Amendements identiques n° 64 de la commission et 45 de M. Jego : MM. le rapporteur, Yves Jego, le ministre.
Sous-amendements à l'amendement n° 64 :
Sous-amendement n° 364 de M. Cardo : MM. Pierre Cardo, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Sous-amendement n° 464 de M. Mourrut : MM. Etienne Mourrut, le rapporteur, le ministre, Noël Mamère, Jean-Christophe Lagarde. - Adoption.
Sous-amendement n° 454 de M. Perruchot : MM. Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Sous-amendement n° 182 rectifié de M. Bénisti : MM. Jacques-Alain Bénisti, le rapporteur, le ministre, Noël Mamère, Christophe Caresche, Yves Jego. - Adoption.
Adoption des amendements identiques modifiés.
L'article 3 est ainsi rédigé.

Suspension et reprise de la séance «...»
Après l'article 3 «...»

Amendement n° 65 corrigé de la commission : MM. le rapporteur, le ministre, Christian Vanneste. - Adoption.

Article 4 «...»

M. Christophe Caresche.
Amendement de suppression n° 304 de M. Braouezec : MM. André Gerin, le rapporteur, le ministre, Christian Estrosi, Claude Goasguen, Noël Mamère, Etienne Pinte. - Rejet.
Amendements n°s 460 de la commission, 343 de M. Perruchot et 365 rectifié de M. Cardo : MM. le rapporteur, Nicolas Perruchot. - Retrait de l'amendement n° 343.
M. Pierre Cardo. - Retrait de l'amendement n° 365 rectifié.
MM. le ministre, Christophe Caresche, Nicolas Perruchot. - Adoption de l'amendement n° 460.
Amendement n° 67 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre, Jean-Christophe Lagarde. - Adoption.
Adoption de l'article 4 modifié.

Article 5 «...»

M. Noël Mamère.
Amendements de suppression n°s 221 de M. Mamère et 305 de M. Braouezec : MM. Noël Mamère, André Gerin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 68 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 69 de la commission : MM. le rapporteur, Nicolas Peruchot, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 70 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 71 de la commission, avec le sous-amendement n° 467 de M. Mamère : MM. Jean-Christophe Lagarde, Claude Goasguen, Noël Mamère, le rapporteur, le ministre, Christian Cabal, Serge Blisko. - Rejet du sous-amendement n° 467 ; adoption de l'amendement n° 71.
Amendement n° 72 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 5 modifié.

Après l'article 5 «...»

Amendement n° 73 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Article 6 «...»

MM. Claude Goasguen, le ministre.
L'amendement n° 164 de M. Goasguen a été retiré.
Adoption de l'article 6.

Après l'article 6 «...»

Amendement n° 18 de M. Grand : MM. Jean-Pierre Grand, le rapporteur, le ministre, Christophe Caresche, Alain Marsaud, le président, Christian Estrosi.
Sous-amendement oral de M. Estrosi : MM. Christophe Caresche, le rapporteur, le ministre, André Gerin, Serge Blisko, Maxime Gremetz, Pascal Clément, président de la commission des lois. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement n° 18 modifié.
Amendement n° 384 de M. Perruchot : MM. Nicolas Perruchot, le rapporteur, le ministre, Serge Blisko, Jean-Christophe Lagarde, Pierre Cardo. - Rejet.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
2.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

MAÎTRISE DE L'IMMIGRATION ET SÉJOUR
DES ÉTRANGERS EN FRANCE

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence,
d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France (n°s 823, 949).

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Ce matin, l'Assemblée a commencé l'examen des articles et s'est arrêtée aux amendements identiques de suppression de l'article 2.

Article 2 (suite)

    M. le président. Je rappelle les termes de l'article 2 :
    « Art. 2. - Après l'article 5-2 de la même ordonnance, il est inséré un articles 5-3 ainsi rédigé :
    « Art. 5-3. - Tout étranger qui déclare vouloir séjourner en France pour une durée n'excédant pas trois mois doit présenter un justificatif d'hébergement. Dans le cas d'un hébergement chez une personne privée, ce justificatif prend la forme d'une attestation d'accueil signée par la personne qui se propose d'assurer le logement de l'étranger, ou son représentant légal, et validée par l'autorité administrative. Cette attestation d'accueil constitue le document prévu par la convention signée à Schengen du 19 juin 1990 pour justifier les conditions de séjour dans le cas d'une visite familiale ou privée.
    « L'attestation d'accueil, signée par l'hébergeant et accompagnée de justificatifs, est présentée pour validation au maire de la commune du lieu d'hébergement ou, à Paris, Lyon et Marseille, au maire d'arrondissement, agissant en qualité d'agent de l'Etat.
    « Le maire peut refuser de valider l'attestation d'accueil demandée dans les cas suivants :
    « - l'hébergeant ne peut pas présenter les pièces justificatives requises, qui seront déterminées par décret ;
    « - il ressort, soit de la teneur de l'attestation et des justificatifs présentés, soit de la vérification effectuée au domicile de l'hébergeant, que l'étranger ne peut être accueilli dans des conditions normales ;
    « - les mentions portées sur l'attestation sont inexactes ;
    « - les attestations antérieurement signées par l'hébergeant ont fait apparaître, après enquête demandée par l'autorité chargée de valider l'attestation d'accueil aux services de police ou de gendarmerie, un détournement de la procédure.
    « A la demande de l'autorité chargée de valider l'attestation d'accueil, l'Office des migrations internationales peut procéder à des vérifications sur place, préalablement à sa délivrance. Les agents de l'office qui sont habilités à procéder à ces vérifications ne peuvent pénétrer chez l'hébergeant qu'après s'être assurés du consentement, donné par écrit, de celui-ci. En cas de refus de l'hébergeant, les conditions d'un accueil dans des conditions normales sont réputées non remplies.
    « Tout recours contentieux dirigé contre un refus de validation d'une attestation d'accueil doit être précédé, à peine d'irrecevabilité, d'un recours administratif auprès du préfet territorialement compétent dans un délai de deux mois à compter du refus. Le préfet peut soit rejeter le recours, soit valider l'attestation d'accueil. »
    Les amendements de suppression portent les n°s 248 et 302 et sont respectivement présentés par M. Caresche, M. Blisko et les membres du groupe socialiste, d'une part, M. Braouezec, M. Gerin et les membres du groupes des député-e-s communistes et républicains, d'autre part.
    Sur ces deux amendements, la commission et le Gouvernement ont émis un avis défavorable, mais, avant de lever la séance de ce matin, M. Baroin, qui la présidait, avait inscrit cinq intervenants. Pour remplir son engagement, je vais leur donner la parole, en espérant que cela nous permettra d'examiner plus rapidement les amendements suivants.
    La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. J'ai du mal à saisir si c'est l'angélisme qui inspire le dépôt de ces amendements de suppression - s'agissant de notre collègue Braouezec, sa position politique ne semble guère compatible avec l'angélisme - ou s'il existe d'autres motifs. Comment peut-on en effet considérer qu'il est anormal d'espérer mettre un peu d'ordre dans la façon dont sont attribuées les attestations d'accueil aujourd'hui ?
    Nous avions, antérieurement, un dispositif que la gauche n'avait pas condamné, puisqu'elle l'avait en partie mis en place, qui donnait aux maires la possibilité de refuser ces attestations en fonction d'un certain nombre de critères. Désormais, il le pourra - c'est précisé dans le texte de loi - et certaines choses seront encore précisées par décret - lorsque « l'hébergeant ne peut pas présenter les pièces justificatives requises [...] lorsqu'il ressort de la teneur de l'attestation et des justificatifs présentés, que l'étranger ne peut être accueilli dans des conditions normales », ainsi que, éventuellement, lorsqu'il y aura eu abus, c'est-à-dire que des attestations d'accueil précédentes auront été utilisées à d'autres fins que du tourisme.
    Chez moi - et je ne dois pas être le seul dans ce cas - les attestations d'accueil sont passées de quelques dizaines à quelques centaines et, dans ma grande cité, il y a des gens qui s'étonnent qu'il y ait tant de personnes qui résident sans papier. En fait, elles sont entrées sur le territoire de façon régulière, mais on sait très bien que c'est une filière facile et qu'elles y restent, en situation irrégulière.
    Au moment où on parle tant de décentralisation, de territorialisation des politiques, considérer que le maire serait le dernier concerné par la délivrance de l'attestation d'accueil alors que c'est lui qui devra assumer les conséquences du maintien dans sa commune de populations qui ne seront pas en règle, ce qui lui donnera plus de charges que d'avantages, est pour le moins curieux.
    Comment se fait-il qu'un foyer SONACOTRA du Val-d'Oise ait pu accueillir autant de familles, alors qu'il n'est supposé offrir que des chambres ? C'est que des attestations d'accueil ont été signées et que, ensuite, les familles sont restées. Où ont-elles atterri quand elles ont cherché un logement que la mairie ne leur attribuait pas ? Chez moi ! Depuis un an et demi, en squat ! Si on ne peut pas reloger une partie de ces familles, c'est justement parce qu'elles sont entrées régulièrement, mais qu'elles séjournent en situation irrégulière.
    Sans doute, il y a des cas particuliers à examiner. Mais cessons, nous élus, de nous autoflageller et de considérer que nous ne sommes pas capables d'exercer un contrôle correct de l'attribution des attestations d'accueil. Au surplus, un recours est possible, contrairement à ce qu'on a prétendu tout à l'heure. Dès lors qu'un recours est possible, où est le problème ?
    Par ailleurs, que le maire contrôle des demandes un peu trop répétitives d'attestations d'accueil ne me paraît pas choquant. Ce n'est pas parce qu'il y a contrôle, qu'il y a flicage ! Il est tout de même dans notre rôle d'assurer un minimum de suivi sur ce qui se passe dans notre commune. C'est la moindre des choses et cela existe dans bien d'autres domaines.
    Ne nous voilons pas la face. Il y a des choses à surveiller, c'est normal et naturel. C'est l'intérêt de nos collectivités et nous avons été élus pour les défendre. Je ne comprends pas pour quelle raison on nous a supprimé ce contrôle que nous avions auparavant. Et je rappelle qu'après nous, le préfet est là pour éviter ce que vous dénonciez : que des maires refusent systématiquement les attestations d'accueil. Ils avaient alors tout pouvoir, mais ce ne sera plus possible avec le présent texte, qui est équilibré. Voilà la raison pour laquelle je m'oppose à la suppression de cet article.
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Monsieur le ministre, on devrait pouvoir trouver assez aisément un certain nombre d'élus de l'UMP qui, en dépit des positions qu'ils expriment ici, interviennent de façon concrète auprès des préfets en faveur de personnes sans-papiers.
    M. Claude Goasguen. Et alors ?
    M. Pierre Cardo. Ça fait partie du rôle de l'élu !
    M. Christophe Caresche. Que quelques maires socialistes - vous n'en avez trouvé qu'un, je m'attendais à plus...
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. On peut chercher !
    M. Manuel Valls. Il y en a deux, en fait !
    M. Christophe Caresche. ... posent les problèmes quant à la délivrance d'attestation d'accueil montre que chacun doit balayer devant sa porte.
    Selon M. Mariani, il n'est pas très grave qu'une vingtaine de maires aient une pratique peu orthodoxe en matière de délivrance des certificats d'hébergement. Je trouve cela, au contraire, très inquiétant.
    Voici ce qu'un parlementaire déclarait ici-même en 1997, lors de l'examen de la loi Debré : « Si j'étais éditeur, je procéderais très vite à l'impression d'un nouveau bottin des communes assorti à la politique suivie en matière de certificats d'hébergement par les maires. Je peux vous assurer que cet ouvrage aurait un gros tirage dans tous les pays d'émigration. C'est pour cela que nous vous proposons de rendre les préfets responsables de la délivrance du certificat. » Il ajoutait : « La politique de contrôle des flux migratoires est une responsabilité éminente de l'Etat,...
    M. Serge Blisko. Eh oui !
    M. Christophe Caresche. ... la vôtre - il s'adressait au ministre -, celle des fonctionnaires placés sous votre autorité. Vous êtes le seul responsable devant nous parce que vous êtes ministre et que nous sommes parlementaires. »
    M. Manuel Valls. En l'occurrence, un excellent parlementaire !
    M. Christophe Caresche. Il poursuivait : « C'est pourquoi nous voulons donner compétence au préfet, représentant de l'Etat, seul à avoir accès à tous les services et à pouvoir saisir tout le monde, y compris les maires qui ont, en la matière, une responsabilité importante. Je ne connais pas de politique d'immigration à Vitrolles, à Rosny, à Montfermeil, à Saint-Denis ou à Nantes. Il doit y avoir une politique nationale de l'immigration. »
    M. Pierre Cardo. Pour les flux, oui !
    M. Serge Blisko. Excellent !
    M. Christophe Caresche. Un autre parlementaire, M. Griotteray, d'ajouter : « C'est évident ! »
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Quelle référence ! Il ne manque plus que M. Millon !
    M. Christophe Caresche. Une référence, en effet : je viens de citer les déclarations de M. Pandraud !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Voilà le nouveau penseur du parti socialiste !
    M. Claude Goasguen. Vous travailliez avec lui !
    M. Christophe Caresche. Pour M. Pandraud, comme pour M. Mazeaud, qui assume maintenant des responsabilités éminentes au sein d'une autre instance, il convient aujourd'hui que le préfet, et donc l'Etat, garde la maîtrise de la délivrance des certificats d'hébergement. Vos propositions, monsieur le ministre, remettraient en cause cette orientation. C'est extrêmement inquiétant. Ainsi, à Paris - puisque M. Goasguen m'a interpellé à plusieurs reprises sur la question - un maire d'arrondissement pourrait être soupçonné de délivrer de façon laxiste les certificats d'hébergement,...
    M. Claude Goasguen. Le maire du 18e arrondissement, par exemple !
    M. Christophe Caresche. ... pendant que d'autres seraient suspectés d'avoir une politique limitative. Quel climat allons-nous créer avec une telle disposition dans un même département ? Ce n'est ni rendre service aux maires ni apaiser le débat sur les questions d'immigration.
    M. Pierre Cardo. Le problème, c'est qu'il y a eu, depuis 1997, une explosion des attestations d'accueil !
    M. Christophe Caresche. Dans certaines mairies, il y aura ceux qui contesteront la politique de délivrance des attestations parce qu'elle est trop limitative, et dans d'autres, ceux qui la contesteront parce qu'elle est trop laxiste.
    M. Pierre Cardo. Eh oui !
    M. Christophe Caresche. En la matière, l'Etat est, selon nous, le garant de l'égalité, et c'est la raison pour laquelle nous souhaitons que ce soient les préfets - nous proposerons un amendement en ce sens - qui, en dernier ressort, délivrent le certificat d'hébergement. Nous ne voulons pas que ce soient les maires seuls qui soient en charge d'une telle responsabilité.
    M. Manuel Valls. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. M. Caresche est totalement hors sujet. En effet, il n'est pas question de confier aux maires la politique de l'immigration.
    M. Claude Goasguen. Mais bien sûr que non !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Voilà un raisonnement formidablement socialiste ! Lorsque les attestations étaient signées par les maires et qu'aucun ne vérifiait quoi que ce soit, cela ne vous choquait pas ! La meilleure preuve en est que, pendant cinq ans, vous avez gardé ce dispositif ! L'égalité par le bas - aucune vérification -, cela ne vous dérangeait pas. Alors, vous n'avez rien fait ! Ce n'est pas vous insulter que de le dire, puisque c'est la réalité. Les attestations d'accueil, ce n'est pas moi qui les crée, et la signature par les maires, ce n'est pas moi qui l'ai prévue. Quel changement apporte notre système ? Hier, sous un gouvernement socialiste, personne ne vérifiait rien, donc M. Caresche et ses amis n'étaient pas choqués ! Egalité pour tout le monde : la passoire, le laxisme !
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Aujourd'hui, on garde les attestations d'accueil, mais on indique aux maires, élus du suffrage universel et, à ce titre, responsables, qu'ils ont le droit de demander à des organismes de vérifier la véracité de l'hébergement. C'est ça qui choque l'opposition ? Mais qui donc peut être choqué par une telle disposition ? L'attestation d'accueil subsiste et les maires vont continuer de l'attribuer. La seule différence, c'est le contrôle.
    M. Christophe Caresche. Elle est de taille !
    M. Pierre Cardo. Pour eux, le contrôle est liberticide !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il me semble que le contrôle est de nature républicaine. Tout ce discours est donc hors sujet. Inutile de fantasmer sur une prétendue localisation de la politique de l'immigration. Nous gardons la même procédure mais nous disons aux Français que désormais leurs maires, ceux qu'ils ont élus, et qui signent le document en question, auront le droit, j'allais dire le devoir, de vérifier que ce document correspond à une réalité. C'est la justice républicaine ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Patrick Braouezec.
    M. Patrick Braouezec. Monsieur le ministre, il ne s'agit nullement pour nous de jeter la suspicion sur les maires ni de remettre en cause leur légitimité. Mais dès lors que la loi permet une interprétation, cela laisse libre cours à l'arbitraire.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le choix du mot en dit long !
    M. Patrick Braouezec. Dans un sens comme dans l'autre, monsieur le ministre !
    En tout cas, il est permis de s'interroger sur l'égalité de traitement des citoyens sur l'ensemble du territoire. Et sans vouloir donner de leçon à personne, force est de constater que cette loi va favoriser l'arbitraire.
    En outre, j'ai l'impression que notre débat est un faux débat. Quel que soit le nombre de certificats d'accueil délivrés par les maires, ce sont tout de même bien les visas qui permettent d'entrer sur le territoire ! Qu'il y ait 200 000 attestations d'accueil, 300 000, 700 000 ou un million, si 9 000 visas seulement sont délivrés chaque année, avouez que le débat en devient un peu hypocrite sur le fond.
    M. Claude Goasguen. C'est pour ça qu'il n'y a pas besoin de le faire durer !
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Notre position ne consiste qu'à appliquer le principe de l'égalité de tous devant la loi. Ce que nous reprochons à l'article 2, c'est précisément de la rompre en ouvrant la voie à l'arbitraire des maires.
    M. Pierre Cardo. Toutes les communes ne sont pas égales devant la loi !
    M. Noël Mamère. Il rend possible des traitements discriminatoires, selon qu'on se trouve à Vitrolles ou ailleurs. C'est au nom de ce principe que nous refusons ce qui nous a été proposé par le rapporteur et le Gouvernement.
    On fait un mauvais procès aux parlementaires de l'opposition quand on leur reproche d'être soupçonneux à l'égard des élus. Nous partageons, avec M. le ministre, qui a développé cet argument ce matin, l'idée selon laquelle il y a une légitimité démocratique, liée à celle des urnes, comme dans toutes les démocraties, et que la légitimité associative ne saurait s'y substituer. Mais nous ne pouvons laisser penser que les députés de l'opposition seraient sous la coupe des associations. Nous sommes là parce que nous voulons faire fonctionner la vitalité démocratique, laquelle résulte non seulement de la démocratie dite de proximité, avec les élus, mais aussi de la possibilité pour certaines associations d'exercer un contre-pouvoir. Il faut qu'elles puissent s'exprimer afin de nous permettre d'être le plus fidèle possible à l'intérêt général.
    Par ailleurs, je suis assez d'accord avec l'argumentaire de notre collègue Caresche. L'attribution d'attestation d'accueil fait partie de ce que l'on appelle les fonctions régaliennes de l'Etat. Ce n'est pas au maire de décider.
    M. Claude Goasguen. Mais le préfet intervient, monsieur Mamère !
    M. Noël Mamère. Sur cette question, et pour assurer l'égalité de tous devant la loi, nous croyons aux vertus régaliennes de l'Etat. Nous ne faisons pas partie de ceux qui, comme vous, disent : « Il faut moins d'Etat. » Nous prétendons, nous, qu'il faut « mieux d'Etat ». Et je peux vous donner un exemple de la manière dont nous appliquons cette conception.
    Dans ma commune, Bègles, il n'y aura jamais, tant que je serai maire, de police municipale,...
    M. Gérard Léonard. C'est un tort !
    M. Noël Mamère. ... parce que je considère que l'ordre public n'a pas à être assumé par les petits shérifs locaux que peuvent devenir les maires, mais par les fonctions régaliennes de l'Etat.
    M. Pierre Cardo. Il n'y a pas de police municipale chez moi non plus ! Et alors ?
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Pardonnez, monsieur Mamère, au petit shérif local que je suis, qui a créé sa police municipale, de ne pas avoir l'impression de bafouer le principe d'égalité républicaine ni de nuire à sa population. Et si vous êtes réélu chez vous parce que les Béglais sont convaincus qu'ils n'ont pas suffisamment de problèmes pour avoir une police municipale, tant mieux pour vous ! Ce n'est pas tout à fait le cas de tout le monde, et je souhaiterais que ma commune ait la même chance que la vôtre !
    M. Noël Mamère. C'est à la police nationale de faire ce travail !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Mais revenons au débat. Le raisonnement de M. Caresche est parfaitement logique. Il ne souhaite pas qu'il y ait de vérification des certificats d'hébergement, dénommés désormais attestations d'accueil. Il souhaite qu'on les accorde simplement à l'appui d'une demande de visa, pour aider la personne, sans regarder s'il y a un hébergement réel. Qu'une chambre dans un foyer SONACOTRA, qui héberge déjà huit personnes soit censée en accueillir encore trois autres ne le dérange pas !
    M. Claude Goasguen. C'est la logique de la loi Chevènement !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Or ceux d'entre nous qui sont maires savent très bien que sur ce genre de dossier, et surtout quand il y en a 700 000 par an, le préfet - en l'occurrence, dans mon cas, le préfet de la Seine-Saint-Denis - ne vérifie strictement rien. Et si on lui parle de tel logement de la cité Gaston-Roulaud, il est bien incapable de dire si c'est un deux-pièces, un trois-pièces ou un quatre-pièces !
    Nous ne partageons pas cette logique, car, nous, nous voulons un contrôle.
    Je suis particulièrement agacé - comme d'ailleurs au cours du débat sur la loi sur la sécurité intérieure - qu'on donne l'impression que, dans ce pays, la plupart des maires seraient soit des irresponsables, soit des fachos, soit des gens qui s'amusent avec la chose publique et qui font n'importe quoi ! Jusqu'à preuve du contraire, la démocratie française repose justement sur les 36 500 maires, c'est-à-dire sur des gens que leurs citoyens jugent tous les jours sur leurs actes et qui sont contraints à la raison, jour après jour. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Et puisqu'on parle d'« arbitraire », il existe dans bien d'autres domaines. Nous pouvons refuser de marier des gens parce que la loi nous fait obligation de vérifier qu'il y a une réelle intention matrimoniale - cela ne se fait peut-être pas partout mais c'est tout de même la loi. Voilà qui est laissé à l'« arbitraire » des maires dans le cadre de leurs pouvoirs d'officier d'état civil ! Pourquoi ne pas leur retirer ce pouvoir ?
    Quand un enfant vient au monde mort-né il ne doit pas, en théorie, être enterré. Que répondent les maires aux familles ? C'est vrai que la décision est difficile à prendre et c'est vrai qu'il y a inégalité parce que, dans une commune, le maire acceptera l'inhumation mais pas dans une autre. Allons plus loin encore : nous avons tous des plans d'occupation des sols et des permis de construire à délivrer. Théoriquement, tout est réglé. Or vous savez très bien que c'est sujet à interprétation.
    M. Daniel Mach. Tout à fait !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Qu'on nous retire aussi ce pouvoir !
    Sous le prétexte que l'Etat va absolument tout régler pour faire respecter une égalité théorique, on laisse des gens dans des situations inextricables et, ce sans contrôle. (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Citons quelques exemples : on est passé, grosso modo, de 120 000 à 700 000 attestations d'accueil. Depuis mars 2001, dans ma commune, j'ai demandé à des employés - qui, croyez-le bien, ne sont ni militants de mon parti ni de mon bord politique, car ils ont plutôt été engagés par la précédente équipe municipale - d'essayer d'interroger et de contrôler. D'un peu plus de 6 000 demandes d'attestation d'accueil, on est passé à 3 600. Cela prouve bien que, dès lors qu'on cherche à contrôler, certaines personnes laissent tomber, parce qu'elles se rendent compte qu'elles ne peuvent pas faire n'importe quoi.
    M. Jean-Pierre Grand. C'est pareil chez moi : dès qu'il y a contrôle, ça chute de moitié !
    M. Jean-Christophe Lagarde. En fait, ce que nous dit M. Caresche, c'est qu'il faut supprimer cet article sous prétexte qu'une vingtaine de maires -  seront-ils vraiment une vingtaine, d'ailleurs ? - sur les 36 500 que compte notre pays pourraient mal appliquer la loi. Voilà une différence fondamentale entre la droite et la gauche, et elle n'est pas nouvelle. Parce que vingt maires risqueraient de sortir des clous, il faudrait renoncer à tout contrôle et retirer tout pouvoir aux autres. Aujourd'hui, nous sommes plusieurs milliers à attester de choses que nous ne vérifions pas, à signer des absurdités et à voir la loi foulée aux pieds, mais cela ne gêne personne sur vos bancs.
    Mme Maryse Joissains-Masini. Nous, ça nous gêne !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Moi, je préfère vingt exceptions à quelques milliers qui, aujourd'hui, font n'importe quoi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Le débat est relancé. Peut-être cela permettra-t-il d'avancer sur l'article 2.
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Je ne reviendrai pas sur les observations de mes collègues Cardo et Lagarde. Je ne comprends pas non plus cette suspicion à l'encontre des maires. On ne peut pas, d'un côté, dire qu'il faut rapprocher les décisions du terrain, favoriser la démocratie locale...
    M. Christophe Caresche. Comme à Orange !
    M. Patrick Braouezec. L'arbitraire, ce n'est pas de la suspicion : c'est un fait !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. ... et, de l'autre, faire moins confiance à des gens qui, tous les six ans, un dimanche à vingt heures, se demandent s'ils vont être réélus, si leurs concitoyens vont de nouveau leur accorder leur confiance, qu'à des responsables d'associations, fort estimables sans doute, mais qui ne sont élus que par un bureau, ou à des fonctionnaires.
    M. Christophe Caresche. Et les maires d'extrême-droite ?
    M. Edouard Jacque. Il y a aussi des maires d'extrême-gauche !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Monsieur Caresche, vous dites que c'est un bien mauvais cadeau à faire à certains maires que de leur laisser le choix de signer ou non ces certificats.
    M. Christophe Caresche. Tout à fait !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Je vous répondrai, d'une part, que les maires, agissent au nom de l'Etat, ne font qu'appliquer les lois, et qu'un recours est prévu auprès du préfet. D'autre part, nous n'avons pas du tout la même conception de la fonction du maire. Je vois ici Maurice Giro, maire de Cavaillon, ou Maryse Joissans-Masini, maire d'Aix. Comme moi, qui suis maire de Valréas, ils sont volontaires pour signer des attestations.
    M. Jean-Pierre Grand. On nous a élus pour ça !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Je me sens responsable de ce qui se passe dans ma commune et j'ai envie, étant élu tous les six ans, d'avoir un pouvoir de contrôle.
    M. Claude Goasguen. Très bien !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Il s'agit simplement de vérifier que les conditions d'accueil sont réunies.
    M. Serge Blisko. Vous êtes insoupçonnable, monsieur Mariani, mais votre voisin d'Orange ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Monsieur Braouezec, vous dites que, après tout, qu'il y ait 100 000, 200 000 ou 700 000 attestations, cela ne change pas grand-chose. Moi, je déteste faire des choses qui ne servent à rien. Nous croulons déjà sous la paperasse inutile, tant mieux si l'on peut en supprimer. Je revendique d'effectuer un contrôle dans l'intérêt de tous.
    Ensuite, ces 700 000 attestations d'accueil encombrent nos consulats, qui pourraient se concentrer sur les dossiers vraiment utiles.
    Enfin, monsieur Mamère, la vitalité démocratique s'exprime autant par l'intermédiaire des maires que par celui des responsables d'association tout aussi respectables qu'ils soient. Je vous le répète une fois de plus : pour les quelques maires qui pourraient abuser de la situation, dans un sens comme dans l'autre, un recours est prévu auprès du préfet. De surcroît, je propose par amendement de raccourcir le délai de réponse du préfet à un mois au lieu de deux. Toutes les garanties sont prises. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Etienne Pinte.
    M. Etienne Pinte. Monsieur Caresche, dans l'exposé des motifs de votre amendement, vous écrivez : « Les certificats d'hébergement n'ont jamais montré leur efficacité en matière de lutte contre l'immigration clandestine. » C'est pourtant sous l'empire d'une législation qui a été proposée par l'ancienne majorité qu'ont été confiées aux maires les responsabilités de contrôle des certificats d'hébergement. Certes, je suis d'accord avec vous, on peut se demander si c'est l'autorité régalienne, l'Etat au travers de ses préfets, qui doit prendre la responsabilité de valider ces attestations d'accueil, ou si ce sont les élus dits de proximité. Jusqu'à présent, vous ne l'aviez jamais proposé. Vous le faites aujourd'hui. J'aimerais connaître les raisons pour lesquelles vous avez changé d'avis.
    La grande majorité des maires, quelle que soit leur sensibilité politique, a souhaité, aux côtés du droit régalien représenté dans les départements par le préfet, pouvoir contrôler ces certificats d'hébergement. De la même manière, l'Etat a confié à tous les maires - en tout cas à ceux qui le souhaitent, c'est-à-dire à tous sauf peut-être à celui de Bègles - le soin d'assumer des responsabilités de sécurité au travers des polices municipales. Il nous a également transféré les instructions des cartes d'identité et des passeports. Ce choix a été démocratique. Les élus locaux auraient pu le refuser, et c'eût été aux préfets de contrôler les attestations d'accueil. Quoi qu'il en soit, le législateur, le maire et le préfet sont là pour faire respecter la loi : on ne pourra la faire respecter que si on la contrôle.
    Je ne vous cache pas que si, dans ma commune, je n'avais pas mis mon nez dans ces attestations d'accueil, je n'aurais pas démantelé une filière kazakh qui voulait s'introduire en France à l'aide de ces attestations d'accueil. Je suis sûr que la plupart de nos collègues, quelle que soit leur sensibilité politique, se sont trouvés dans des situations semblables.
    Dès lors que nous voulons que la loi soit respectée, il faut la contrôler. Jusqu'à preuve du contraire, ce sont les élus locaux qui l'ont souhaité.
    M. le président. La parole est à M. Serge Blisko.
    M. Serge Blisko. J'écoute ces débats avec surprise. D'une part, la comparaison entre l'attestation d'accueil qui concerne la vie des habitants d'une commune, fussent-ils des étrangers de passage, et l'accumulation de la paperasserie, liée à la déréglementation sur l'urbanisme, n'est pas pertinente. Mais c'est un autre débat.
    D'autre part, en vous écoutant, je n'arrive pas bien à comprendre à quoi sert tout cela. M. Cardo dit que les attestations d'accueil ont été multipliées par six dans sa commune. Qu'allez-vous faire, monsieur Cardo ?
    M. Pierre Cardo. Ce que je faisais avant !
    M. Serge Blisko. Allez vous dire que, le 30 avril, lorsque vous aurez signé 1 000 ou 1 500 attestations d'accueil, vous arrêterez d'en délivrer ? Vous voyez bien que cela n'a pas de sens.
    M. Pierre Cardo. Je fais comme vous ! Je pose des questions !
    M. Claude Goasguen. On enverra les Chinois dans le 13e arrondissement !
    M. Serge Blisko. Je ne veux pas reprendre l'exemple courant d'Orange qui n'appliquera pas la loi et de Valréas qui l'appliquera, mais dire que, pour résoudre le problème, il n'y aura qu'une seule manière : en passer, à un moment ou à un autre, par des organismes de contrôle que vous ne maîtriserez pas. Qui effectuera le contrôle, en effet ?
    Mme Maryse Joissains-Masini. Pourquoi ne maîtriserait-on pas les contrôles ? C'est une conception très socialiste, ça !
    M. Serge Blisko. Votre cabinet, monsieur Cardo ? Les agents du CCAS ? Vous allez leur confier des missions qui sont éminemment compliquées, subjectives, difficiles. Les employés de la mairie ? Cela n'a pas de sens !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Parce que vous maîtrisez l'employé de la préfecture ?
    M. Serge Blisko. Tout contrôle doit être assorti des moyens correspondants. Or, je ne vois pas la Direction générale des collectivités locales mettre à notre disposition des dizaines de fonctionnaires et d'agents pour effectuer des contrôles aussi délicats. A aucun moment cette mesure ne pourra donc être appliquée.
    M. Claude Goasguen. Ne prenez pas de responsabilités politiques si vous ne voulez pas les assumer !
    M. Pierre Cardo. Ce que je savais faire il y a dix ans, je ne saurais plus le faire aujourd'hui ?
    M. Serge Blisko. Certes, on l'a dit trois fois, l'attestation d'accueil n'est pas un visa d'entrée. Mais pourquoi ne pas réétudier la question des visas ? Si l'attestation ne vaut pas visa d'entrée, c'est qu'elle est soit inutile, soit inapplicable, soit superfétatoire.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. C'est vous qui l'avez mise en place !
    M. le président. Le débat a été relativement long. Nous allons essayer d'accélérer pour la suite.
    Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 248 et 302.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. M. Caresche, M. Blisko et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 249, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 :
    « Art. 5-3. - Le certificat d'hébergement exigible d'un étranger pour une visite privée doit être signé par la personne qui se propose de l'héberger et visé par le maire de la commune de résidence du signataire ou, à Paris, Lyon et Marseille, par le maire d'arrondissement.
    « Le visa ne peut être refusé que s'il ressort manifestement, soit de la teneur du certificat, soit de la vérification faite au domicile de son signataire, que l'étranger ne peut être hébergé dans des conditions normales ou que les mentions portées sur le certificat sont inexactes.
    « Lorsqu'il refuse de viser un certificat d'hébergement, le maire transmet sa décision motivée au représentant de l'Etat dans le département pour approbation. Celui-ci peut accorder le visa demandé.
    « L'Office des migrations internationales est seul habilité à procéder aux vérifications sur place demandées par le maire ou par le préfet préalablement au visa d'un certificat d'hébergement d'un étranger. Les agents de l'Office qui sont habilités à procéder à ces vérifications ne peuvent pénétrer chez l'hébergeant qu'après s'être assurés du consentement, donné par écrit, de celui-ci. En cas de refus de l'hébergeant, les conditions d'un hébergement dans des conditions normales sont réputées non remplies.
    « La demande de visa d'un certificat d'hébergement par le maire ou par le préfet donne lieu à la perception au profit de l'OMI d'une taxe d'un montant de 15 euros acquittée par l'hébergeant au moyen de timbres fiscaux.
    « Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. »
    La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Notre débat aborde quelques-uns des points importants du projet de loi. Mais il y a là comme un paradoxe. En 1997, M. Debré propose, dans un projet de loi, que les certificats d'hébergement soient délivrés par les maires. Je l'ai rappelé, M. Mazeaud, M. Pandraud et la majorité d'alors - une majorité un peu différente de celle d'aujourd'hui, sans doute plus attachée à une forme de respect de la République qui s'est peut-être perdue...
    M. Manuel Valls. Moins libérale !
    M. Christophe Caresche. ... ont refusé et demandé que cela incombe au préfet. Ne nous faites donc pas de procès d'intention sur ce sujet. En 1998, avec la loi RESEDA, nous adoptons, c'est vrai, les attestations d'accueil, mais elles ne donnent en réalité aux maires qu'un pouvoir d'appréciation limité. Je ne dis pas que c'est nécessairement satisfaisant. Et c'est pourquoi nous présentons l'amendement n° 249, inspiré - vous y faites référence dans votre rapport - des propositions de M. Weil. Cet amendement propose donc que les certificats d'hébergement, qui peuvent donner lieu à contrôle sous la responsabilité de l'OMI, notamment en fonction de la taille des logements, soient délivrés par les maires, sauf si leur avis est négatif. Dans ce cas, ce serait le préfet qui déciderait de délivrer ou non le certificat d'hébergement. C'est là une garantie essentielle, qui va au-delà de ce que propose le projet de loi, puisque celui-ci prévoit actuellement, lorsqu'un certificat d'hébergement n'est pas délivré par le maire, une possibilité d'appel auprès du préfet pour le demandeur. Mais on sait que ces recours sont en général peu connus, car ils ne font pas l'objet d'une information suffisante. On peut penser que, dans bien des cas, ils ne sont pas utilisés.
    Nous proposons donc, par cet amendement, que, en cas de refus de la part du maire, le recours au préfet soit automatique et que ce soit celui-ci qui décide alors de délivrer ou de refuser le certificat d'hébergement.
    Cette disposition vise à concilier le rôle des maires, qui est ici maintenu, et le contrôle effectif de l'Etat, le préfet ayant la possibilité d'intervenir dans la délivrance des certificats d'hébergement. Cette proposition équilibrée permettra aux maires d'exercer leur responsabilité et évitera également les dérives qui ne manqueront pas, monsieur Mariani, de se produire. Orange est, je crois, dans votre circonscription : on sait que M. Bompard appliquera ce texte de la façon la plus restrictive possible, c'est-à-dire qu'il ne délivrera pas de certificats d'hébergement.
    M. Jean-Claude Leroy. Les étrangers iront à Valréas !
    M. Christophe Caresche. Cette proposition équilibrée devrait rassembler tous les députés.
    M. Jean-Pierre Grand. La CIMADE aura du travail !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Au moins, vous êtes fidèles à votre logique : une fois de plus, un amendement dénie la capacité de juger de la qualité des demandes d'attestation d'accueil, alors même que c'est lui qui se révèle le meilleur juge en sa commune. Par ailleurs, vous soulignez que cet amendement est équilibré parce qu'il prévoit une possibilité de recours au préfet. Mais regardez les amendements qui vous sont proposés ensuite : vous verrez que, en réalité, la même possibilité sera offerte dans un délai d'un mois, qui est même plus court que celui habituellement retenu.
    Les amendements adoptés par la commission reconnaissant la compétence des agents communaux des services sociaux permettront par ailleurs d'accorder au préfet des moyens concrets de vérification, en sus des contrôles que peut demander l'OMI.
    M. Christophe Caresche. Non ! Seulement en dernier recours !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. En revanche, vous me permettrez de me réjouir d'une partie de votre amendement : vous témoignez en effet d'une volonté de rendre payante la délivrance des attestations d'accueil, seul moyen de garantir un contrôle fiable de l'OMI. Vous verrez plus loin que non seulement je reprends le même principe dans un amendement, mais que, en plus, je fixe le même tarif.
    M. Serge Blisko. On avait anticipé !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis.
    M. le président. La parole est à M. Claude Goasgen.
    M. Claude Goasguen. Monsieur Caresche, souvenez-vous, les articles de la loi Chevènement concernant le certificat d'hébergement et le contrôle du préfet - ou encore d'autres dispositions sur lesquelles nous allons revenir, comme celles relatives au regroupement familial - s'inscrivaient concernant le certificat d'hébergement et le contrôle du préfet dans une intention politique très nette du ministre de l'intérieur et du Gouvernement : il s'agissait en réalité, sous couvert de maîtrise de l'immigration, de ne plus rien contrôler !
    M. François Goulard. C'est vrai !
    M. Serge Blisko. Vous êtes inutilement polémique !
    M. Claude Goasguen. Je ne sais pas si vous étiez présent dans l'hémicycle, monsieur Blisko,...
    Mme Marie-Jo Zimmermann. Il n'était pas là !
    M. Claude Goasguen. ... mais la politique menée à l'époque consistait à laisser le préfet vérifier les cas les plus flagrants. Le résultat ne s'est pas fait attendre : pendant cinq ans, on a constaté une inflation de certificats d'hébergement qui n'était en rien conforme à l'esprit de la politique que nous souhaitons mettre en place. Nous voulons au contraire, pour notre part, régler définitivement les problèmes administratifs préalables.
    M. Pierre Cardo et M. Pierre Hellier. Très bien !
    M. Serge Blisko. Mais non !
    M. Claude Goasguen. Arrêtez donc de nous resservir les dispositions Chevènement, qui sont marquées du sceau indélébile de l'échec de votre politique d'immigration ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Manuel Valls. Tout en nuances, monsieur Goasguen !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Croyez-le, j'ai vraiment le souci de comprendre votre inquiétude concernant un éventuel refus de M. Bompard de signer des certificats d'hébergement ou des attestations d'accueil. Mais si cela vous paraît aussi scandaleux, je vous propose d'exclure immédiatement le maire PS de l'Essonne qui, pour bien faire son travail, se dit obligé de refuser tout certificat d'hébergement, toute attestation d'accueil, tout simplement parce que, comme il le dit, il ne veut pas faire des choses absurdes.
    Je trouve consternant que la représentation nationale ne puisse pas s'accorder sur une chose aussi simple et qu'un maire, qui est le premier élu de proximité, dans notre système démocratique, soit obligé de faire des choses qu'il ne peut même pas expliquer, tant c'est idiot et absurde.
    Par ailleurs, peut-être le préfet de l'Aveyron - que les députés de l'Aveyron me pardonnent, s'ils sont présents, ce département est le premier dont le nom m'est passé par la tête - serait-il en mesure d'effectuer des vérifications pour les attestations d'accueil. Mais je ne vois pas comment le préfet de la Seine-Saint-Denis ou celui de Paris pourraient vérifier quoi que ce soit, si l'on songe au flux, à la masse, au nombre des demandes : ne parle-t-on pas de 750 000 au niveau national ? Vous opposiez tout à l'heure la légitimité du maire et celle d'un employé de la collectivité locale. Mais comment cela se passera-t-il, si l'on applique votre système ? N'importe quel employé de préfecture pourra donner des coups de tampon sans jamais rien vérifier, puisqu'il n'aura jamais mis les pieds dans la ville en question. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François Goulard. Très bien !
    M. Jean-Pierre Grand. C'est ce qu'ils veulent !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Mes chers collègues, j'ai entendu tout à l'heure M. Braouezec et M. Caresche s'étonner que soit confié aux maires un pouvoir d'appréciation énorme et très dangereux,...
    M. François Goulard. Ce ne sont pas des démocrates !
    M. Jean-Christophe Lagarde. ... puisqu'il allait, par exemple, falloir juger des conditions normales d'hébergement. Et ils nous ont demandé ce qu'étaient des conditions normales d'hébergement. Permettez-moi de sourire et de faire un clin d'oeil. Monsieur Blisko, monsieur Caresche, pourquoi votre amendement demande-t-il que le préfet vérifie qu'un étranger peut être hébergé dans des conditions normales ? En fait, ce que vous contestiez, vous le reprenez dans votre amendement.
    Mme Maryse Joissains-Masini. Bravo ! Belle analyse !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 249.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 49, ainsi rédigé :
    « I. - Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, après les mots : "trois mois, insérer les mots : "dans le cadre d'une visite familiale ou privée.
    « II. - En conséquence, au début de la deuxième phrase du même alinéa, supprimer les mots : "Dans le cas d'un hébergement chez une personne privée,. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Pour la délivrance d'un visa, l'exigence d'un justificatif d'hébergement chez une personne privée ne doit concerner que les visites à but familial ou privé. Il s'agit, en fait d'affirmer clairement le principe selon lequel ne sont pas concernées les visites de tourisme, d'affaires ou, par exemple, celles des étudiants.
    M. Nicolas Perruchot et M. Jean-Christophe Lagarde. Très bien !
    M. Christophe Caresche. C'est la confiance que vous avez dans les maires !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 49.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 50, ainsi rédigé :
    « Dans la dernière phrase du premier alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, substituer au mot : "du, le mot : "le. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 50.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 171 et 181, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 171, présenté par M. Mancel, est ainsi rédigé :
    « Après le premier alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, insérer l'alinéa suivant :
    « L'attestation d'accueil engage la responsabilité financière de l'hébergeant qui, en la signant, déclare se porter caution des personnes qu'il héberge pour un montant égal au tarif des billets d'avion sur une compagnie régulière permettant leur retour dans leur pays d'origine. Cette caution est utilisée si l'étranger se maintient au-delà de la durée légale sur le territoire national ou s'il ne dispose pas à la fin de son séjour des moyens permettant son retour. »
    L'amendement n° 181, présenté par M. Kossowski, est ainsi rédigé :
    « Après le premier alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, insérer l'alinéa suivant :
    « L'hébergeant est tenu de remettre une caution financière dont le montant et les modalités de versement se verront fixées par décret. S'il est constaté par les pouvoirs publics que l'étranger accueilli n'est pas reparti dans son pays d'origine dans les délais fixés, la caution sera retenue et versée au profit de l'Etat. »
    L'amendement n° 171 n'est pas défendu.
    M. Christophe Caresche. Ça vaut mieux !
    M. Serge Blisko. La lecture de l'exposé sommaire édifiante !
    M. le président. Monsieur Blisko, vous n'avez pas la parole !
    M. Christophe Caresche. Oui, mais il va parler !
    M. le président. La parole est à M. Jacques Kossowski, pour soutenir l'amendement n° 181.
    M. Jacques Kossowski. Pour ma part, je suis favorable à l'instauration du dépôt d'une caution financière pour l'hébergeant. En tant que député et maire, je rencontre régulièrement des personnes de bonne foi qui viennent me solliciter afin de les aider à obtenir un visa de court séjour pour un étranger qu'elles souhaitent accueillir à leur domicile. Très souvent, d'ailleurs, ce visa n'est pas accordé par les autorités.
    M. Christophe Caresche. C'est ce que j'ai dit !
    M. Jacques Kossowski. Face à l'incompréhension de mes interlocuteurs, je leur réponds que cette politique restrictive mise en place par les pouvoirs publics est la conséquence de multiples fraudes commises par certains étrangers qui restent sur notre territoire au-delà de la date de validité de leur visa. Du fait de ces comportements illégaux, les étrangers qui, eux, souhaitent réellement venir pour quelques jours ou quelques semaines en France sont pénalisés et se sentent presque humiliés de n'avoir pu obtenir de visa. Certains hébergeants m'ont alors demandé pourquoi on n'exigeait pas d'eux le dépôt d'une caution financière, qui permettrait en quelque sorte de garantir le retour des personnes dans leur pays d'origine. Ce système éviterait, me semble-t-il, les fréquents détournements de la procédure de délivrance des attestations d'accueil. D'ailleurs, monsieur le ministre, vous preniez l'exemple, dans votre intervention du 3 juillet dernier, de cet hébergeant qui avait demandé quinze attestations pour une même période de quinze jours. Si une caution lui avait été réclamée, il n'aurait sans doute jamais agi de la sorte. En s'attaquant à l'une des racines de l'immigration clandestine, ce dispositif de cautionnement permettrait, en contrepartie, de délivrer plus facilement des visas de courte durée pour le plus grand profit des hébergés et des hébergeants. Notre pays resterait ainsi fidèle à sa longue tradition d'accueil et d'hospitalité.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. L'objectif est louable, mais, à mon avis, la forme choisie n'est, hélas, pas la mieux adaptée. Elle s'avère contraire aux dispositions de Schengen. En outre, je l'invite à retirer son amendement puisque nous examinerons l'amendement n° 148 qui, dans des dispositions conformes à Schengen, reprend exactement le but recherché.
    M. Claude Goasguen. Oui, il est meilleur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Donc, sur l'amendement n° 181, avis défavorable.
    M. le président. Retirez-vous votre amendement, monsieur Kossowski ?
    M. Jacques Kossowski. Oui, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 181 est retiré.
    M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 51, ainsi rédigé :
    « Dans le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, substituer aux mots : "de justificatifs, les mots : "des pièces justificatives déterminées par décret en Conseil d'Etat. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 51.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. MM. Ferrand, Mourrut, Mancel, Abrioux, Auclair, Bénisti, Biancheri, Binetruy, Etienne Blanc, Blum, Mme Brunel, MM. Carayon, Cardo, Cazenave, Cosyns, Cova, Descamps, Dionis du Séjour, Door, Dubourg, Dubrac, Dupont-Aignan, Fidelin, Francina, Garraud, Gilard, Gilles, Giro, Goasguen, Gorges, Guibal, Hamel, Hugon, Jacque, Mme Joissains-Masini, MM. Joyandet, Le Fur, Lemoine, Mallié, Mme Martinez, MM. Martin-Lalande, Ménard, Meyer, Mme Morano, MM. Mothron, Myard, Raison, Remiller, Mme Roig, MM. Spagnou, Suguenot, Terrot, Jean-Claude Thomas, de Villiers, Vachet, Vitel et Michel Voisin ont présenté un amendement, n° 418, ainsi rédigé :
    « Après le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, insérer l'alinéa suivant :
    « Elle est accompagnée de l'engagement de l'hébergeant à prendre en charge, pendant toute la durée de validité du visa ou pendant une durée de trois mois à compter de l'entrée de l'étranger sur le territoire des Etats parties à la Convention susmentionnée, et au cas où l'étranger accueilli n'y pourvoirait pas, les frais de séjour en France de celui-ci et les frais de son rapatriement si l'étranger ne dispose pas, à l'issue de cette période, des moyens lui permettant de quitter le territoire français. »
    La parole est à M. Etienne Mourrut.
    M. Etienne Mourrut. En responsabilisant financièrement l'hébergeant quant au respect de la date de départ de l'étranger en visite, on devrait parvenir à limiter le flux migratoire clandestin consécutif au court séjour.
    De fait, en mettant les frais de séjour et de rapatriement à la charge de l'hébergeant - par qui, je le rappelle, l'étranger est autorisé à entrer temporairement sur le territoire national -, on instaure un système qui permettra de faire tout simplement respecter les conditions légales du séjour initialement prévu.
    En délivrant un titre de séjour temporaire à l'étranger qui en fait la demande, les autorités françaises mettent à la charge du demandeur une certaine obligation quant à ses conditions de résidence, et notamment quant au terme de son séjour. Quoi de plus normal que de prévoir les moyens d'assurer l'efficacité de ce dispositif ?
    C'est dans cette optique que l'hébergeant pourrait être tenu pour responsable solidairement des frais de séjour et, éventuellement, de rapatriement de l'étranger en visite. Cet amendement n'a pas été déposé dans un esprit répressif (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communiste et républicains)...
    M. Patrick Braouezec. Personne ne soupçonne ça ! Ça ne nous serait jamais venu à l'esprit !
    M. Etienne Mourrut. ... mais tend simplement à assurer l'efficacité de ce dispositif en sanctionnant l'inexécution des règles légales.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. C'est un amendement intéressant, qui a reçu un avis favorable de la commission. Il reprend exactement ce que nos collègues Jacques Kossowski et Jean-François Mancel proposaient il y a quelques minutes. De plus, il complète le dispositif que nous avons adopté ce matin avant l'article 1er modifiant l'article 5 de l'ordonnance de 1945, et qui prévoit que l'étranger devra être titulaire d'une assurance permettant de couvrir ses frais éventuels de santé. La commission est donc tout à fait favorable à l'amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis que la commission.
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche, pour répondre à la commission.
    M. Christophe Caresche. Si cet amendement est « intéressant », c'est qu'il fait partie de toute une série d'amendements qui montrent bien les intentions de la majorité - ou d'une partie de celle-ci - qui sont, tout simplement, de faire en sorte, qu'un étranger vivant en France ne puisse plus recevoir, durant les vacances, une partie de sa famille ou de ses amis. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Charles Cova. Pas du tout ! Nous voulons simplement des garanties quant au retour !
    M. Christophe Caresche. Il est clair que l'objet de cet amendement, et d'autres, qui vont venir en discussion, est de poser le maximum d'obstacles à la venue de la famille ou des amis d'un étranger installé en France.
    M. Charles Cova. C'est un procès d'intention !
    M. Christophe Caresche. On voit bien, dans cette discussion sur les certificats d'hébergement, qu'il s'agit de remettre en cause un droit essentiel, reconnu tant par la Convention européenne des droits de l'homme que par la Constitution française, à savoir le droit de vivre en famille et d'avoir une vie privée. Nous nous y opposerons donc très fermement. Je ne comprends d'ailleurs pas pourquoi le rapporteur accepte cet amendement, qui me semble poser véritablement un problème par rapport à la Constitution, en ce qu'il remet très sérieusement en cause, je le répète, le droit à une vie privée et familiale.
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Je dirai - pardonnez-moi ce mot, dont vous jugerez peut-être qu'il est un peu excessif (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...
    M. Charles Cova. Nous avons l'habitude.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Un Mamère excessif ? C'est un pléonasme !
    M. Noël Mamère. Je ne vous en donne pas l'habitude, c'est la raison pour laquelle j'applique le principe de précaution : je vous préviens.
    Cet amendement, au vu de celui qui précède et de ceux qui vont suivre, dans le même esprit, est une caricature ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Comment pouvez-vous prétendre que cette trente-huitième réforme de l'ordonnance de 1945 a pour but de régler le problème de l'immigration dans le sens de l'ouverture de notre pays, de l'humanité et de la tolérance,...
    M. Charles Cova. Bla-bla-bla !
    M. Noël Mamère. ... alors que, avec cet amendement, vous en êtes aujourd'hui à nous demander pratiquement d'hypothéquer les biens de ceux qui osent héberger les étrangers ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mais oui ! C'est ça, ce que vous nous demandez !
    M. Robert Lamy. Qui est dans la caricature ?
    Mme Maryse Joissains-Masini. Tout cela est ridicule !
    M. Noël Mamère. Dans ces conditions, je ne m'étonne pas de l'initiative - que je soutiens - prise par un certain nombre d'artistes et d'intellectuels qui déclarent héberger des étrangers et en être fiers. Je réponds à M. le ministre, comme à un certain nombre de nos collègues, que si les associations n'ont pas la légitimité démocratique, elles ont le droit de s'exprimer et de nous pousser à défendre l'intérêt général plutôt que l'égoïsme. Or, excusez-moi de le dire, les propositions que vous faites aujourd'hui sont franchement indignes de la tradition française ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Claude Goasguen.
    M. Claude Goasguen. Monsieur Mamère, si nous modifions en permanence l'ordonnance de 1945, c'est parce que le problème de l'immigration - et cela ne vous a sans doute pas échappé - est un problème majeur de la constitution de notre monde en voie de mondialisation.
    M. Noël Mamère. S'il vous a fallu le faire trente-huit fois, c'est que vous n'avez pas été bons !
    M. Claude Goasguen. Le législateur que vous êtes ne devrait pas s'étonner qu'une loi soit modifiée lorsque les circonstances la rendent rapidement caduque.
    Cet amendement n'a rien de répressif : il organise au contraire la responsabilité individuelle vis-à-vis de l'immigration.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Tout à fait !
    M. Claude Goasguen. Nous l'avions d'ailleurs déposé dans le cadre de l'examen de la loi Chevènement, dont j'ai parfaite mémoire. En effet, à l'époque comme aujourd'hui, un certain nombre de bons esprits étaient favorables à l'immigration à condition cependant de ne pas être individuellement responsables de ses conséquences. C'est ainsi que l'on avait vu des cinéastes, des écrivains, des acteurs à succès...
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Les bobos, quoi !
    M. Claude Goasguen. ... proposer leurs services dans la presse. Or, monsieur Mamère, quand j'avais proposé que l'on institutionnalise, comme aux Etats-Unis, le tutorat, afin que ces personnes qui ont tellement de coeur puissent assumer les responsabilités que l'on était en droit d'attendre d'eux, vu leur honnêteté intellectuelle, je m'étais aperçu que cette proposition disparaissait tout à coup derrière les imprécations lancées contre « la-droite-qui-pourfend-en-permanence-les-immigrés ». En réalité, monsieur Mamère, cet amendement est très important, car il montre que la politique d'immigration que nous allons construire n'est pas fondée sur des mesures administratives ou sur le bon vouloir de quelques phobiques ou de quelques angéliques, mais sur la responsabilité individuelle de ceux qui veulent y participer. Il me paraît très sain que dans une nation où la politique d'immigration a été mal comprise, au point que nous avons un quart de siècle de retard, les individus soient responsabilisés. Car c'est de cela qu'il s'agit.
    Le seul bémol, à mes yeux, c'est que les conséquences juridiques de cette disposition ne me paraissent pas claires. S'agit-il d'une responsabilité civile ? Qu'incluent les dommages civils entraînés par le non-respect de cette disposition ? Les juristes du ministère de l'intérieur devront se poser cette question. Mais quoi qu'il en soit, la décision politique de responsabiliser enfin ceux qui parlent sans responsabilité est une très bonne chose et représente un progrès démocratique pour notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Noël Mamère. Puis-je répondre d'un mot, monsieur le président ?
    M. le président. Non : on ne peut pas sans cesse relancer le débat. Chacun a pu s'exprimer. Un orateur a répondu à la commission, un autre au Gouvernement.
    Je mets aux voix l'amendement n° 418.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement n° 52, ainsi rédigé :
    « Dans le troisième alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, supprimer le mot : "demandée. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Le Gouvernement est favorable.
    Je mets aux voix l'amendement n° 52.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Cardo et M. Cova ont présenté un amendement, n° 360, ainsi rédigé :
    « Après le troisième alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, insérer l'alinéa suivant :
    « - l'hébergeant ne justifie pas de ressources suffisantes pour assurer l'accueil de l'étranger. »
    La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Compte tenu de l'adoption de l'amendement n° 418, je vais retirer celui-ci. Il s'agissait de faire en sorte que l'hébergeant ait des ressources suffisantes pour assurer un accueil correct des personnes qu'il dit être prêt à accueillir chez lui. On a vu en effet des exemples assez surprenants. Des personnes qui avaient de lourds impayés de loyer, qui étaient en phase d'expulsion, accueillaient des gens alors que manifestement elles auraient dû libérer l'appartement avant même d'avoir reçu des touristes.
    M. Christophe Caresche. Ça n'a rien à voir !
    M. Pierre Cardo. Quand vous avez à gérer des cas de ce genre, c'est un peu délicat...
    M. Serge Blisko. Il y a des lois contre les mauvais payeurs !
    M. Christophe Caresche. Vous essayez de faire régler par ce texte des questions qui n'ont rien à voir !
    M. Pierre Cardo. ... et c'est d'ailleurs pour cette raison qu'il faut faire le lien avec la question des pouvoirs du maire, parce que lui au moins est totalement informé de la situation des intéressés.
    Donc, je retire l'amendement compte tenu du vote précédent, monsieur le président. Je voulais juste dire qu'il me paraît normal que quand on fait venir quelqu'un sur le territoire, on ait les moyens d'assurer son accueil.
    M. le président. L'amendement n° 360 est retiré.
    M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ont présenté un amendement, n° 218, ainsi rédigé :
    « Supprimer le quatrième alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945. »
    La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Cet amendement s'inscrit dans la logique des positions que nous avons prises dans le débat général sur l'article 2 et dans les interventions que nous avons faites, les uns et les autres, sur les bancs de l'opposition.
    Je voudrais simplement dire à mon collègue Goasguen que ces artistes, qu'il vilipende aujourd'hui comme des irresponsables...
    M. Claude Goasguen. Hier aussi !
    M. Noël Mamère. Je vous rappelle que le ministre d'un gouvernement que vous soutenez, qui est ministre de l'intérieur, a apporté des aménagements significatifs à la double peine,...
    M. Claude Goasguen. Il a bien fait !
    M. Noël Mamère. ... notamment parce que des cinéastes et des artistes « irresponsables », comme M. Tavernier, ont mené le combat contre la double peine.
    M. Claude Goasguen. Et alors ? Quel rapport ?
    M. Noël Mamère. Sans doute le ministre de l'intérieur considérait-il M. Bedos et quelques autres, quand il les a reçus place Beauvau, comme des irresponsables, avec lesquels il fallait parler de choses et d'autres, de l'esprit du temps et du vent qu'il fera demain, mais pas de double peine ?
    M. Claude Goasguen. Ça n'a rien à voir !
    M. Noël Mamère. Si, ça a à voir !
    Et je vous rappelle qu'en matière de parrainage, monsieur Goasguen, nous avons été un certain nombre d'élus, de maires...
    M. Claude Goasguen. Vous êtes fatigué, monsieur Mamère.
    M. Noël Mamère. ... à parrainer les sans-papiers.
    M. Claude Goasguen. Oh, ça ne coûte pas cher !
    M. Robert Lamy. Et ça permet d'avoir un bel article dans la presse !
    M. Noël Mamère. Et ces parrainages, nous les avons faits dans nos mairies, nous les avons faits dans des lieux publics. Et nous avons, les uns et les autres, assumé nos responsabilités en aidant ces familles qui vivaient dans la précarité et dans la peur quotidienne d'être expulsées.
    Pour ce qui concerne l'amendement n° 218, qui est l'objet de mon intervention, il s'inscrit dans l'idée que ces attestations d'accueil ne doivent pas être validées par les maires, comme nous l'avons dit tout à l'heure, d'autant qu'il faudrait préciser ce que sont les « conditions normales » dont parle le texte. Il s'agit en fait d'un retour pur et simple aux dispositions de la loi Pasqua de 1993. Or nous sommes un certain nombre sur les bancs de cette assemblée à avoir demandé l'abrogation des lois Pasqua-Debré.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. D'abord, monsieur Mamère, sans vouloir vous vexer, je crois que vous vous trompez d'alinéa. Car si j'ai bien compris le sens de votre amendement, vous souhaitez supprimer la disposition relative à la vérification des conditions normales de l'accueil. Or, permettez-moi de vous dire qu'il ne s'agit pas là du quatrième mais du cinquième alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance de 1945.
    Sur le fond, nos positions divergent radicalement. Seule la vérification des conditions normales de logement permettra de contrôler réellement la bonne foi des demandeurs. Sinon, nous retomberons dans les errements qui étaient dénoncés tout à l'heure par mon collègue Lagarde et par moi-même, à savoir que les maires ne feront aucune vérification et ce sera uniquement de la paperasse pour de la paperasse. Avis défavorable.
    M. le président. Même avis du Gouvernement.
    Je mets aux voix l'amendement n° 218.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 53, ainsi rédigé :
    « A la fin du quatrième alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, supprimer les mots : ", qui seront déterminées par décret. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Le Gouvernement est favorable.
    Je mets aux voix l'amendement n° 53.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. L'amendement n° 180 de M. Kossowski n'a plus d'objet, l'amendement n° 181 ayant été retiré.
    M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 54, ainsi rédigé :
    « Dans le cinquième alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, subsituer aux mots : "justificatifs présentés, les mots : "pièces justificatives présentées. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Le Gouvernement est favorable.
    Je mets aux voix l'amendement n° 54.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 55, ainsi rédigé :
    « I. - Compléter le cinquième alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 par les mots : "de logement.
    « II. - En conséquence, dans la dernière phrase de l'avant-dernier alinéa de cet article, après le mot : "normales, insérer les mots : "de logement. »
    Il s'agit là d'un amendement de précision, monsieur le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Tout à fait.
    M. le président. Le Gouvernement est favorable.
    Je mets aux voix l'amendement n° 55.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ont présenté un amendement, n° 219, ainsi rédigé :
    « Supprimer le sixième alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945. »
    La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Le projet de loi prévoit la possibilité pour le maire de demander aux services de police ou de gendarmerie d'enquêter sur d'éventuels détournements de procédure au vu des attestations antérieures signées par l'hébergeant. La mise en oeuvre de cette disposition semble forcément impliquer la création d'un fichier d'hébergeants.
    M. Pierre Cardo. Eh bien oui !
    M. Noël Mamère. Sinon comment garder la mémoire de ce que vous appelez les « attestations antérieures signées par l'hébergeant » et établir le détournement de procédure ? On en reviendrait indirectement à la responsabilisation...
    M. Robert Lamy. Il n'est pas scandaleux de les responsabiliser, quand même !
    M. Noël Mamère. ... et à la pénalisation des personnes accueillantes.
    Dans la pratique, l'introduction d'une telle disposition va conduire, comme nous l'avons dit à plusieurs reprises et comme nous le répétons maintenant devant vous, à une rupture du principe d'égalité devant la loi. Elle pourrait même conduire certains maires à refuser systématiquement, et désormais en toute légalité, la délivrance d'attestations d'accueil. Et nous savons qu'il y a dans ce pays des maires qui seraient très enclins à refuser systématiquement ces attestations d'accueil. Il s'agit donc là d'une rupture devant la loi.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Sur le fond, le détournement de procédure est déjà admis par la jurisprudence pour justifier un refus de certification d'attestation d'accueil. Le texte proposé prend acte de cet état de fait.
    En outre, vous verrez qu'un amendement adopté par la commission encadre, et d'une manière stricte, le fichier pour la mise en place du dispositif, ce qui doit calmer vos craintes.
    Enfin, excusez-moi, monsieur Mamère, mais là encore ce n'est pas le sixième mais c'est le septième alinéa que vous proposez de supprimer. Nous avons un réel problème de comptage des alinéas, semble-t-il. Mais c'est un détail.
    M. le président. Même avis du Gouvernement.
    La parole est à M. Serge Blisko, pour répondre à la commission.
    M. Serge Blisko. On voit bien ici la logique un peu folle dans laquelle nous sommes entrés cet après-midi avec cette histoire de certificats d'hébergement. On apprend maintenant qu'il y a un fichier des hébergeants. Il y aura ceux qui en auront trop fait, trop demandé, avec qui on n'acceptera pas parce qu'on a déjà refusé une fois. Enfin bref, on entre dans un logique totalement folle.
    M. Pierre Cardo. Qu'y a-t-il de si fou ?
    M. Serge Blisko. Je voudrais revenir un instant au débat sur l'espèce de dépôt de garantie financière. Dans la loi française, avant d'être condamné, il faut quand même qu'il soit prouvé qu'on est coupable. Prenons un cas qui peut arriver, et qui doit même arriver tous les jours : vous hébergez votre cousine chez vous - je ne regarde personne en particulier. Vous déposez de l'argent - je ne sais pas où, à la Caisse des dépôts ou ailleurs. Elle vous a dit qu'elle partirait au bout d'un mois. Elle ne part pas. Vous allez être sanctionné et, en plus, être obligé de l'accompagner à l'aéroport, de vérifier qu'elle a bien franchi le portillon ? Il y a là quelque chose de totalement inapplicable. Vous allez être condamné parce que, de bonne foi, vous avez cru que votre cousine allait partir alors qu'elle est restée ? Et on va vous inscrire sur un fichier ? Quand nous disions ce matin qu'on entrait dans une espèce de logique policière,...
    M. Claude Goasguen. N'importe quoi !
    M. Serge Blisko. ... totalement inapplicable, et contraire à la Constitution, je crois que nous étions en deça de la vérité, qui se révèle cet après-midi.
    M. Claude Goasguen. C'est le contraire !
    M. le président. La parole est à M. Patrick Braouezec, pour répondre au Gouvernement.
    M. Patrick Braouezec. M. Mamère a insisté sur la rupture d'égalité devant la loi. L'article 2 provoque déjà une véritable rupture d'égalité devant la loi, mais les amendements qui viennent d'être votés aggravent celle-ci.
    De fait, vous déniez à toute une population pauvre, française ou étrangère, le droit de recevoir de la famille ou des amis. En effet, les conditions posées vont causer une limitation des demandes d'hébergement. On peut se demander dans quel but ?
    Il est faux, monsieur Goasguen, de prétendre que ceux que vous avez appelés les bobos,...
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Il n'a jamais dit cela ?
    M. Patrick Braouezec. ... c'est-à-dire des artistes ou des intellectuels qui avaient pris la défense de sans-papiers, avaient fait cela à la légère en ne s'investissant pas personnellement. Je peux attester que nombre de parrains ou de marraines de sans-papiers, qu'ils soient artistes ou gens du peuple, notamment dans la commune dont je suis le maire, ont accompagné les sans-papiers dans leurs démarches, se sont investis personnellement et matériellement pour permettre à ceux-ci d'obtenir des papiers,...
    M. Serge Blisko. Tout à fait !
    M. Patrick Braouezec. ... alors qu'une administration parfois tatillone ne prenait pas en compte un certain nombre d'éléments figurant dans leurs dossiers.
    M. Claude Goasguen. Vous parlez de l'administration de votre commune !
    M. Patrick Braouezec. Ne niez pas le fait, monsieur Goasguen, qu'un certain nombre de personnes ont fait preuve de solidarité, et ce jusqu'au bout !
    M. Noël Mamère. Exactement !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Claude Goasguen. Monsieur le président, je veux répondre à M. Braouezec, qui m'a mis en cause personnellement !
    M. le président. Parler de mise en cause personnelle est peut-être excessif, monsieur Goasguen.
    M. Patrick Braouezec. Vous avez raison, monsieur le président.
    M. le président. Pour le moment, la parole est à M. Jean-Christophe Lagarde. Vous interviendrez après, monsieur Goasguen.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Un fichier va être créé. Deux philosophies s'opposent pour savoir qui le contrôlera : pour les uns, ce doit être le préfet ; pour les autres, le maire.
    Si c'est le préfet, je ne vois absolument pas comment il pourrait contrôler quoi que ce soit sans un fichier. En revanche, un maire a beaucoup plus de facilités : ainsi, je suis sûr que Pierre Cardo peut, dans l'instant, citer les adresses de sa commune où habitent les principaux demandeurs d'attestations d'accueil de complaisance. Pour ma part, je peux vous citer celles de ma commune. Quand vous êtes maire, vous n'avez pas besoin de fichier pour savoir ce qui se passe dans votre commune.
    M. Blisko demande à quoi peut servir l'attestation d'accueil. Et pour appuyer sa démonstration, il prend l'exemple d'une cousine qui aurait été reçue pendant un mois et qui aurait disparu dans la nature. Mais si l'attestation d'accueil sert à quelque chose, ce n'est certainement pas pour vérifier si une personne est entrée ou est sortie de France ; pour cela, il y a le visa. L'attestation d'accueil sert en fait à savoir où cette personne se trouve.
    Et si cette personne disparaît dans la nature sans que cela engage la responsabilité de quiconque, à quoi bon faire signer une attestation d'accueil par le maire, par le préfet ou par le pompier de service si elle ne sert à rien ?
    Mme Maryse Joissains-Masini. Il n'y a plus qu'à ouvrir les frontières !
    M. Jean-Christophe Lagarde. L'utilité de l'attestation d'accueil est de savoir où les gens se trouvent. S'il se déplacent et s'ils changent de résidence, il est normal que l'administration cherche à le savoir.
    Je ne connais aucun pays étranger où l'on ne vous demande pas, quand vous y arrivez, l'adresse à laquelle vous allez résider pendant votre séjour. L'attestation d'accueil, c'est la même chose ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Serge Blisko. Certes ! Mais on ne condamne pas l'hôtelier si vous avez quitté l'hôtel sans dire où vous allez !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. A ce stade du débat, peut-être convient-il d'apporter quelques éléments concrets.
    D'abord, s'agissant des fichiers, une décision de 1997 du Conseil constitutionnel a validé la possibilité pour les communes de mettre en place des fichiers d'hébergeants.
    M. Pierre Cardo. Exact !
    M. Christophe Caresche. Sous certaines conditions !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La constitution d'un tel fichier ne devrait donc plus donner lieu à débats. Ne nous faisons pas de procès d'intention, n'évoquons pas les droits de l'homme ou quoi que ce soit, cette procédure est autorisée.
    La CNIL, elle-même, l'a également admis. Il n'y a donc aucun problème. Il ne peut s'agir d'un sujet de discorde entre la gauche et la droite.
    Certains évoquent une rupture d'égalité en cas de refus d'un maire. Cela n'a pas de sens, et j'aimerais vous en convaincre. Pourquoi cela n'a-t-il pas de sens ? Tout simplement, parce que toute décision de refus sera soumise au préfet,...
    M. Christophe Caresche. Non !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... lequel pourra décréter qu'elle est parfaitement anormale.
    Mieux encore la décision du préfet sera elle-même soumise, comme il est de droit, à la juridiction administrative.
    M. Claude Goasguen. Absolument !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je ne fais le procès à personne de vouloir protéger les filières d'immigration clandestine, pas plus à M. Blisko qu'à un autre. Mais que celui-ci ne nous accuse pas de vouloir créer les conditions d'une inégalité.
    J'ai cité ce matin la déclaration du maire socialiste de Montgeron, qui refusait de signer les attestations d'accueil, puisque c'était un élément constitutif de la fraude. Que veulent la gauche et la droite ? Que ces attestations d'accueil servent à ce pour quoi elles sont faites, c'est-à-dire permettre à un hébergeant de recevoir un étranger qui veut venir moins de trois mois dans notre pays. Nous ne voulons pas que des filières puissent en profiter. Nous devrions tout de même pouvoir nous rassembler sur ce point. Qu'y a t-il d'anormal dans ce qui est proposé ? En quoi le fait de permettre à un maire de refuser de signer une attestation d'accueil qui lui paraît manifestement anormale est contraire aux droits de l'homme dès lors que cette décision est soumise au contrôle du préfet et à celui de la juridiction administrative ?
    Ce qui est contraire aux droits de l'homme, c'est qu'un maire puisse, en signant automatiquement, permettre à des filières d'immigration clandestine de faire venir chez nous des gens qu'ils exploitent en leur offrant des conditions d'hébergement indignes. C'est cette situation qui est anormale !
    Pourquoi ne nous retrouvons-nous pas sur la présente proposition ? Pourquoi ne cessons-nous pas de nous faire des procès d'intention ? Vous n'êtes pas les protecteurs des filières, et nous ne sommes pas des gens qui ne respectent pas les droits de l'homme.
    Mettons-nous d'accord sur une loi de bon sens permettant aux élus, sous le contrôle du préfet et des juridictions administratives, de refuser ce qui est manifestement malhonnête. Il n'y a vraiment pas de quoi entamer une polémique.
    M. Patrick Braouezec. Mais ce n'est pas une loi de bon sens !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Si nous ne pouvons pas nous mettre d'accord là-dessus, nous ne pourrons nous mettre d'accord sur rien en matière d'immigration.
    M. Patrick Braouezec. Si vous nous proposiez une loi de bon sens, nous la voterions. Mais ce n'est pas le cas !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Sinon, ce n'est qu'un procès d'intention, qui, ni dans un sens ni dans l'autre, ne fera progresser les choses. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Claude Goasguen.
    M. Claude Goasguen. Je voudrais répondre rapidement aux propos excessifs de M. Braouezec, que je connais bien car nous travaillons souvent ensemble.
    M. Patrick Braouezec. Si M. Goasguen m'attaque, je répondrai, monsieur le président.
    M. le président. Il ne vous attaquera pas, monsieur Braouezec.
    M. Claude Goasguen. Non, ne vous inquiétez pas, monsieur Braouezec.
    Arrêtons l'amalgame. C'est vrai que divers intellectuels ou divers artistes...
    M. Patrick Braouezec. Ou des gens du peuple !
    M. Claude Goasguen. J'en conviens. Mais vous avez parlé des « bobos », alors parlons des « bobos ».
    Il est vrai, disais-je, que des intellectuels et des artistes ont fait des interventions significatives, notamment sur la double peine. Et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle la majorité a suivi le ministre de l'intérieur sur ce point. Néanmoins, il ne faut pas tout confondre. Ainsi, M. Mamère a parlé du parrainage républicain qui avait cours en 1997. C'est de la rigolade ! Tout cela était fait pour passer au « Vingt heures », pour être pris en photo, car le parrainage républicain, à part son effet démonstratif, n'avait aucune conséquence juridique.
    J'ai parlé, quant à moi, du parrainage à l'américaine. Aux Etats-Unis, des intellectuels et des artistes prennent, eux, leur responsabilité de tuteurs : lorsqu'une personne se trouve en situation difficile, ils acceptent la responsabilité civile et pénale pour le compte de la personne dont ils sont tuteurs. En ce cas, je suis favorable au tutorat et j'apprécie que l'on aille jusqu'au bout de sa démarche.
    M. Daniel Mach. Mais oui, sinon, c'est trop facile !
    M. Claude Goasguen. Mais je n'ai aucune estime pour ces gens qui vont faire des visites en Seine-Saint-Denis et, qui, après, rentrent dans leurs hôtels particuliers du 7e ou du 16e arrondissement de Paris et ferment soigneusement leurs portes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche, qui sera le dernier intervenant sur cet amendement.
    M. Christophe Caresche. M. le ministre a eu raison d'en revenir aux faits.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mais oui, c'est mieux. Revenons-en au texte !
    M. Christophe Caresche. Je voudrais justement en revenir au projet de loi, monsieur le ministre.
    Le texte du Gouvernement prévoyait, d'une part, le rétablissement des certificats d'hébergement avec un contrôle par l'OMI des conditions d'hébergement de l'hébergeant, et, d'autre part, un contrôle exercé par les maires, assorti d'une possibilité d'appel en cas de refus du certificat d'hébergement. Cet appel n'est donc pas automatique.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Bien sûr que non ! Si le certificat est accordé, à quoi bon faire appel ?
    M. Christophe Caresche. Pour ma part, j'ai proposé que l'appel soit automatique.
    Où en sommes-nous après l'adoption des amendements de la majorité ?
    Premièrement, il a été prévu de créer un fichier des hébergeants. Et vous avez raison, monsieur le ministre, il n'y a pas, en la matière, d'obstacle constitutionnel à partir du moment où ce fichier est établi dans des conditions extrêmement précises.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Evidemment !
    M. Christophe Caresche. Je maintiens que ce qui nous gêne dans cette affaire n'est pas tant la constitution du fichier, mais le fait que les maires en aient la maîtrise. C'est là que réside notre désaccord.
    M. François d'Aubert. Vous ne devez pas être maire !
    M. Christophe Caresche. Deuxièmement, l'Assemblée a adopté un amendement qui prévoit le dépôt d'une caution.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Mais non !
    M. Christophe Caresche. Si, c'est l'amendement de M. Kossowski !
    M. Claude Goasguen. Il s'agit de la responsabilité civile !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Il n'y a pas de caution !
    M. Christophe Caresche. Troisièmement, un amendement, qui va venir en discussion dans quelques instants et qui a été accepté par la commission, prévoit que l'OMI ne sera plus le seul organisme à pouvoir contrôler les conditions d'hébergement : les services municipaux pourront également le faire.
    Ces trois amendements dénaturent le projet de loi et celui-ci ne correspond plus à ce qui était prévu initialement. Car dans cette affaire, vous avez, monsieur le ministre, cédé à votre majorité, qui ne voit dans les certificats d'hébergement qu'une possibilité de contrôler l'immigration, et ce de la façon la plus restrictive possible.
    M. François d'Aubert. On voit que vous n'êtes pas maire !
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Je vous signale, monsieur Caresche, que l'amendement de M. Kossowski a été retiré.
    Quant à l'amendement n° 418, déposé par Jean-Michel Ferrand et Etienne Mourrut et accepté par la commission, il ne prévoit pas une caution, mais un engagement moral de l'hébergeant, comme l'a rappelé M. Goasguen. C'est une question de responsabilité. Du reste, les accords de Schengen interdisent d'exiger un dépôt de caution.
    M. le président. Je considère que l'Assemblée est suffisamment éclairée.
    Je mets aux voix l'amendement n° 219.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 56, ainsi rédigé :
    « Dans le septième alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, après le mot : " apparaître, , insérer les mots : " le cas échéant . »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Cet amendement devrait faire l'unanimité.
    L'article 2 prévoit que l'attestation d'accueil, qui doit être validée par le maire, pourra être refusée, notamment s'il apparaît que les demandes antérieures de l'hébergeant ont traduit une volonté de fraude. Pour autant, l'enquête demandée aux services de police pour établir le document de procédure ne peut être diligentée de manière systématique lors d'une demande de validation. C'est pourquoi, afin de réserver ce type d'enquête aux cas les plus incertains, il convient de prévoir que cette enquête peut être demandée « le cas échéant » par le maire au vu des attestations antérieurement délivrées à l'hébergeant. Tel est l'objet de cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 56.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 57, ainsi rédigé :
    « Dans le septième alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, après le mot : " ou , insérer les mots : " aux unités . »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 57.
    (L'amendement est adopté.)
    (M. François Baroin remplace M. Jean Le Garrec au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN,
vice-président


    M. le président. M. Cardo et M. Cova ont présenté un amendement, n° 369, ainsi rédigé :
    « Après le septième alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, insérer l'alinéa suivant :
    « Lorsqu'il est démontré qu'une personne hébergée sur la base d'une précédente attestation d'accueil demandée par l'hébergeant, n'a pas quitté le territoire national dans les délais prévus, aucune nouvelle attestation d'accueil ne pourra être délivrée pendant une durée de cinq ans à l'hébergeant ou à des membres de sa famille. »
    La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Le projet de loi prévoit que le maire peut refuser de valider l'attestation d'accueil demandée lorsque « les attestations antérieurement signées par l'hébergeant ont fait apparaître, après enquête demandée par l'autorité chargée de valider l'attestation d'accueil aux services de police ou de gendarmerie, un détournement de la procédure ». Toutefois, cette disposition ne me paraît pas suffisamment précise. Aussi, pour donner un peu plus de latitude aux maires pour contrôler les demandes et, le cas échéant, les rejeter en cas de détournement de procédure je propose que, lorsqu'il est démontré qu'une personne hébergée n'a pas quitté le territoire national dans les délais prévus, aucune nouvelle attestation d'accueil ne pourra être délivrée pendant une durée de cinq ans à l'hébergeant ou aux membres de sa famille.
    Etant donné la responsabilité qu'on prend en faisant pénétrer un étranger sur le territoire national, il me paraît normal que l'on assume celle-ci jusqu'au bout.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Négatif.
    M. Serge Blisko. Très bien !
    M. Christophe Caresche. Nous l'avons échappé belle ! Bravo !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. On est parvenu à un certain équilibre, et l'amendement Ferrand-Mourrut a prévu une responsabilité financière. En revanche, l'amendement de M. Cardo pénalise l'hébergeant, lequel ne saurait, au regard du droit, être tenu responsable des agissements de l'hébergé dont il n'a pas nécessairement connaissance.
    De plus, il y a un problème technique majeur : d'une part, il est quasiment impossible de savoir quand un individu a quitté le territoire national et, d'autre part, il n'y a plus de contrôle aux frontières intérieures de l'espace Schengen. Donc, je le répète, avis défavorable.
    M. Christophe Caresche. Vous mettez fin à la dérive !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement partage l'avis de la commission, mais, là aussi, il convient d'être bien clair.
    Le texte doit être ferme et équilibré. Or cet amendement revient à punir un hébergeant pour une faute qu'il n'a pas commise. Je dis à M. Cardo, dont je connais l'humanisme, que ce serait excessif.
    Toute notre politique consiste à responsabiliser les gens. Or il n'est pas possible de punir un hébergeant parce que l'hébergé n'a pas regagné son pays. Ce n'est ni conforme à nos traditions juridiques ni à l'idée que je me fais de la responsabilité. On ne doit pas être puni pour la faute d'autrui.
    M. le président. La parole est à M. Serge Blisko.
    M. Serge Blisko. Je remercie M. le ministre et M. le rapporteur d'avoir mis un frein à la dérive extrêmement inquiétante à laquelle nous étions en train d'assister. Cet amendement aurait conduit à punir une personne pour un délit dont elle n'aurait même pas eu connaissance, mais qui aurait été commis par quelqu'un ayant séjourné chez elle !
    M. Caresche a fait une démonstration édifiante de la façon dont la barque a été chargée cet après-midi : d'abord, on a instauré une assurance obligatoire pour les frais médicaux de celui qui voulait être accueilli,...
    M. Thierry Mariani, rapporteur. C'est la moindre des choses !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Comme les socialistes l'ont fait en Allemagne !
    M. Serge Blisko. ... ensuite, on a prévu un engagement sur l'honneur de l'hébergement,...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Comme les socialistes l'ont fait en Allemagne !
    M. Patrick Braouezec. Cherchez un autre modèle, monsieur le ministre !
    M. Serge Blisko. ... alors que celui-ci ne peut absolument pas contrôler matériellement le départ de son hébergé ; puis, on a créé un fichier qui, s'il n'est pas illégal, est tout de même d'un maniement extrêmement délicat. Jusqu'où allons-nous aller ? Nous devons vraiment nous reprendre. Faute de quoi, l'article 2, qui est un article central du projet de loi, risque de durcir considérablement les conditions d'accueil.
    Les hébergeants, comme vous dites, sont des gens en situation régulière.
    M. Claude Goasguen. Et les propriétaires de squatts !
    M. Serge Blisko. Une personne en situation irrégulière ne va pas demander à recevoir sa feuille.
    Ainsi que M. Caresche l'a dit la semaine dernière, les familles régulièrement installées dans ce pays vont se retrouver déstabilisées, angoissées : elles n'oseront pas se rendre à la mairie pour signaler qu'une cousine doit venir les voir pour un mois de peur de se retrouver inscrites dans un fichier. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est exactement ce qui va se passer ! En voulant lutter contre l'immigration clandestine ou irrégulière, vous déstabilisez gravement ceux qui sont en situation régulière. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)
    M. Claude Goasguen. Connaissez-vous le 13e, monsieur Blisko ? Connaissez-vous Chinatown ?
    M. Serge Blisko. Je sais aussi bien que vous de quoi je parle, monsieur Goasguen.
    Les personnes en situation régulière vont se voir maintenant soumises à des tracasseries administratives et policières, tout simplement parce qu'elles veulent recevoir quelqu'un ! Cela ne va vraiment pas !
    M. Claude Goasguen. Visitez Chinatown !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je ne veux pas allonger le débat, mais je ne le laisserai dériver ni dans un sens ni dans un autre.
    Monsieur Blisko, nous n'avons pas de leçons à recevoir en cette matière.
    M. Claude Goasguen. Exactement !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Si vous voulez un débat équilibré, personne ne doit provoquer personne. Nous devons tous rester responsables.
    L'assurance médicale est une mesure qui est en vigueur en Allemagne, pays dont chacun connaît la couleur politique du gouvernement : une alliance entre les socialistes et les Verts. La disposition que nous avons prise est directement inspirée de ce que font nos partenaires allemands.
    Mme Maryse Joissains-Masini. Tout à fait !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Personne ne pense, j'imagine, que l'Allemagne est une dictature.
    S'agissant de l'engagement sur l'honneur, ce n'est pas une caution. La caution - je le dis en particulier à M. Caresche, avec qui je n'ai pas voulu polémiquer -, c'est une somme d'argent qu'une personne est obligée de mettre de côté et qu'elle perd si la condition n'est pas levée. Voilà ce qu'est la caution. Ce qui est prévu ici, c'est l'engagement sur l'honneur de l'hébergeant de faire face aux frais d'existence de l'hébergé au cas où celui-ci n'aurait plus les moyens d'y subvenir. Cela n'a rien à voir avec une caution. Cette mesure est aujourd'hui en vigueur en Allemagne, en Belgique, au Luxembourg et aux Pays-Bas.
    Je ne veux pas qu'on puisse laisser croire qu'il y aurait durcissement exceptionnel en France, alors que nous proposons des mesures qui ont été mises en oeuvre en Allemagne par un gouvernement socialiste et vert !
    Ou alors, monsieur Blisko, déclarez que vous n'irez plus jamais aux rassemblements de l'Internationale socialiste européenne, que vous ne connaissez plus ces gens-là, que vous ne partagez plus leurs valeurs.
    M. Pierre Forgues. Ne vous préoccupez pas de nous !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Vous ne pouvez pas continuer ainsi : dire quelque chose dans les congrès le dimanche et autre chose à l'Assemblée dans la semaine. Cette technique qui consiste à prendre des postures pour exciter une partie d'une majorité...
    M. Christophe Caresche. Ils n'ont pas besoin de nous !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... est dangereuse car, à l'arrivée, ce sont ceux que nous voulons protéger, les uns comme les autres, qui risquent de souffrir.
    M. Noël Mamère. C'est juste !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Que personne ne fasse de provocation et le débat s'en portera beaucoup mieux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
    M. Jean-Pierre Grand. La gauche est depuis longtemps unie pour refuser tout contrôle des certificats d'hébergement. Mais l'immense majorité des maires de gauche comme de droite demandent expressément à pouvoir exercer un contrôle sur les certificats d'hébergement. Pour vous convaincre de cette nécessité, permettez-moi d'évoquer un article émanant d'une mairie de gauche, celle de Montpellier.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Oh là !
    M. François d'Aubert. Il a été membre de votre groupe, M. Frêche !
    M. Jean-Pierre Grand. Il dénonçait, il y a quelques mois, l'établissement de 520 faux certificats d'hébergement. Cela veut dire que des centaines de personnes sont entrées illégalement en France et qu'elles ont pu rester sur le territoire.
    M. Christophe Caresche. Ce n'est pas vrai ! Vous ne connaissez pas le droit.
    M. Jean-Pierre Grand. Ces certificats servaient à alimenter des filières.
    M. Christophe Caresche. Un certificat d'hébergement ne donne pas droit à un visa !
    M. Jean-Pierre Grand. Pour le fun, j'ajoute, à l'intention de M. le ministre et de M. Pinte, que la personne à l'origine de ces filières était installée sur notre territoire depuis trente ans sans avoir jamais demandé la nationalité française. On comprend pourquoi. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Je n'ai pas l'habitude d'être excessif dans mes propos, surtout dans ce type de débat qui doit rester le plus serein possible. Mais j'avoue que je n'apprécie pas les procès d'intention et certains propos qui sont tenus. L'objet de cet amendement était d'essayer de contrer les détournements de procédure que nous sommes nombreux à avoir constatés. Un pourcentage d'individus, heureusement limité, déposent de très nombreuses demandes d'attestation d'accueil dans l'année. Or, ainsi que j'ai pu l'observer après que j'ai demandé, sous le précédent gouvernement, lorsque nous avons perdu, nous les maires, le pouvoir de contrôle, des enquêtes sur le terrain, des gens viennent et ne repartent pas. Il est dès lors compréhensible que les maires aient envie de voir la loi appliquée autrement.
    En cas de détournement de la procédure, la loi donne la possibilité de réagir. On peut supposer, maintenant que nous avons changé un tant soit peu de Gouvernement,...
    M. Christophe Caresche. Un tant soit peu ? Cela veut dire quoi ?
    M. Serge Blisko. Il y a eu un remaniement ?
    M. Pierre Cardo. ... que cette loi sera appliquée correctement. Avec ce texte, le maire ne sera pas obligé de se mettre en première ligne mais la loi sera mieux respectée qu'antérieurement.
    Si la demande de contrôle est aussi forte, c'est que malgré tous les détournements, il n'y a pas eu de réaction pendant des années, avec le résultat que l'on sait : une multiplication des certificats d'hébergement et du nombre des personnes qui, entrées de façon régulière sur le territoire, s'y sont maintenues de façon tout à fait anormale.
    Ce n'est pas ainsi que l'on protégera les citoyens et ceux qui font des demandes d'hébergement mais en poursuivant et en condamnant les filières.
    Quant au débat sur les fichiers, je trouve assez surprenant les réactions de quelques-uns d'entre nous.
    Cela dit, je retire l'amendement.
    M. Christophe Caresche. Maintenez-le !
    M. Pierre Cardo. Les assurances de M. le ministre et le texte lui-même me paraissent suffisants pour l'instant. Nous verrons ultérieurement s'il est nécessaire d'envisager une modification de la loi.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Merci, monsieur Cardo.
    M. le président. La parole est à M. Patrick Braouezec.
    M. Patrick Braouezec. J'apprécie que la commission et le ministre aient refusé cet amendement et que M. Cardo se soit rendu à la raison en le retirant.
    M. Pierre Cardo. Oh ! la raison... Je ne suis pas certain de l'avoir en retirant mon amendement. (Sourires.)
    M. Patrick Braouezec. Néanmoins, je maintiens que les deux amendements qui viennent d'être adoptés introduisent un arbitraire envers les populations les plus pauvres, en les pénalisant par rapport à l'accueil.
    M. Pierre Cardo. Il n'y pas que les pauvres qui font des demandes d'hébergement. Certaines personnes deviennent très riches avec les certificats d'hébergement !
    M. Patrick Braouezec. Et puis, monsieur le ministre, arrêtez de nous renvoyer au modèle allemand. Faites comme moi, vivez dans le présent, sans modèle - on sait où les modèles nous ont amenés. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Justement, appréciez l'aveu, chers collègues ! Cessez de prendre des modèles, qu'ils soient allemands ou autres, et respectez certains principes et certaines valeurs. Ce sont ces principes et ces valeurs qui doivent être les moteurs de l'action législative.
    Or les deux amendements qui ont été votés renvoient à l'arbitraire et pénalisent les populations les plus modestes.
    M. Serge Blisko. Très bien !
    M. le président. L'amendement n° 369 est retiré.
    Je suis saisi de deux amendements, n°s 58 et 172, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 58, présenté par M. Mariani, rapporteur, est ainsi libellé :
    « I. - Rédiger ainsi le début de la première phrase de l'avant-dernier alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 :
    « Des agents spécialement habilités des services sociaux de la commune ou, à la demande... (Le reste sans changement.) »
    « II. - En conséquence, dans la même phrase, substituer au mot : "peut, le mot "peuvent.
    « III. - En conséquence, dans la deuxième phrase de l'avant-dernier alinéa de cet article, supprimer les mots : "de l'office. »
    L'amendement n° 172, présenté par M. Mancel, est ainsi rédigé :
    « I. - Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, substituer aux mots : "l'Office des migrations internationales peut, les mots : "les services municipaux ou l'Office des migrations internationales peuvent.
    « II. - En conséquence, dans la deuxième phrase du même alinéa, supprimer les mots : "de l'Office. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 58.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Le texte reste équilibré avec les amendements qui ont été adoptés sur cet article. Mais il faut qu'il soit opérationnel et pratique. L'amendement n° 58 a justement pour but de faciliter les contrôles des conditions d'accueil et de rendre le dispositif plus efficace. Il propose d'étendre aux agents des services sociaux des communes la possibilité de procéder aux vérifications des renseignements portés sur l'attestation d'accueil.
    En effet, comment les agents de l'OMI pourraient-ils vérifier rapidement 730 000 attestations d'accueil ?
    M. Pierre Cardo. Surtout à distance !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Au contraire, les agents des services communaux ont deux atouts, la proximité et la rapidité. Maire d'une commune située à l'extrémité du département, j'attends parfois des jours la venue des agents de l'OMI - ce n'est pas une accusation, ils sont débordés. Au final, cela pénalise ceux qui veulent venir dans notre pays.
    M. Serge Blisko. C'est un cas un peu particulier.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. En réalité, proposer que les services sociaux puissent vérifier les conditions d'accueil me semble une solution pour rendre ces contrôles plus rapides et, en tout cas, plus efficaces. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Nicolas Perruchot. Absolument !
    M. le président. L'amendement n° 172 n'est pas défendu.
    Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 58 ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement est favorable.
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Monsieur le ministre, nous ne sommes pas ici pour provoquer qui que ce soit. Nous aussi, nous sommes attachés à l'équilibre. Simplement, nous constatons que des amendements se proposent de durcir le texte, en particulier celui-ci, avec une certaine incohérence d'ailleurs. En effet, ce projet de loi désigne l'OMI comme étant l'instance qui va pouvoir effectuer les contrôles. Dans ce but, il est même proposé de réclamer, et nous voterons cette disposition, à chaque personne qui demandera un certificat d'hébergement, une taxe de 15 euros.
    On peut donc considérer que l'OMI aura les moyens - le directeur de l'OMI que nous avons auditionné le dit - de mener les contrôles.
    Mme Maryse Joissains-Masini. Mais les services sociaux pourraient agir plus vite !
    M. Pierre Cardo. C'est bien un socialiste : l'impôt règle tous les problèmes !
    M. Christophe Caresche. La vérité, monsieur Mariani, c'est qu'une fois de plus vous cédez à la pression de certains maires qui veulent s'affranchir de la tutelle de l'Etat, de la tutelle des organismes comme l'OMI et qui veulent procéder eux-mêmes à ces contrôles.
    M. François d'Aubert. Oui, parce que ce sera mieux fait, monsieur Caresche !
    M. Christophe Caresche. Je trouve cette attitude malsaine et dangereuse. Il se peut que, dans certains cas, des hébergeants et des étrangers ne puissent pas, de fait, faire venir leur famille ou leurs amis, parce que le maire, pour des raisons purement politiques et idéologiques, refusera de délivrer les certificats d'hébergement. (Prostestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jacques-Alain Bénisti. On voit bien que vous n'êtes pas maire !
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Je vous savais soupçonneux vis-à-vis des maires, voilà que je vous découvre méfiant à l'égard des services sociaux des mairies !
    Franchement, monsieur Caresche, qui connaît le mieux la situation sociale d'une famille : les assistantes sociales de votre arrondissement, qui ont l'habitude de rencontrer la famille, qui ont déjà visité le logement, qui savent si cette famille est formée de gens stables, ou les services de l'OMI qui, parce qu'ils sont débordés, viendront mener une enquête d'un quart d'heure et repartiront ?
    Les agents sociaux des communes sont parfois amenés à suivre de manière régulière les familles, elle connaissent celles qui ne posent pas de problèmes et celles qui, au contraire, sont susceptibles d'en poser.
    Mme Maryse Joissains-Masini Absolument.
    M. Jacques-Alain Bénisti. Bien sûr !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. En outre, je le répète, pour l'hébergeant comme pour celui qui souhaite venir dans notre pays, c'est la solution de rapidité. Comment 730 000 demandes pourraient-elles être traitées par quelques centaines d'employés de l'OMI ?
    Non seulement ce texte se veut équilibré, mais il se veut aussi pratique. Je pense, comme tout à l'heure, que, par moments, rapprocher les prises de décisions du terrain, cela facilite le travail de tout le monde.
    M. le président. La parole est à M. Patrick Braouezec.
    M. Patrick Braouezec. Monsieur le rapporteur, cet amendement soulève deux problèmes.
    D'abord, le traitement des agents des services sociaux des communes relève d'une compétence départementale. Il peut être assumé par les communes - c'est le cas à Saint-Denis -, mais la plupart des services sociaux et des assistantes sociales travaillent sous la responsabilité du département.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Et les CCAS ?
    M. Nicolas Perruchot. Les CCAS, c'est purement communal !
    M. Patrick Braouezec. Les centres communaux d'action sociale, c'est autre chose ! Il n'y en a pas partout ! C'est une compétence départementale qui peut être mise en responsabilité.
    Plusieurs députés sur les bancs de l'Union pour un mouvement populaire. Non ! Ça dépend de la mairie !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Ces CCAS sont purement communaux !
    M. Patrick Braouezec. A vérifier !
    M. le président. Mes chers collègues, on ne comprend rien ! N'interpellez pas M. Braouezec, ça le pousse à répondre.
    Mme Maryse Joissains-Masini. Il dit des choses inexactes !
    M. Patrick Braouezec. Deuxième problème : les assistantes sociales sont déjà confrontées dans leur travail à des grosses difficultés. Ainsi, dans ma ville, sur dix-sept secteurs, cinq ne sont pas pourvus d'assistantes sociales !
    Vous dites que l'OMI aura des difficultés à assumer ce travail, mais les assistantes sociales auront, elles aussi, des difficultés. Sans parler de l'aspect déontologique de cette proposition et du respect du secret professionnel. Je ne suis pas certain - je suis même plutôt certain du contraire aujourd'hui - que les assistants et assistantes sociales se livreront au contrôle que vous voulez leur faire exercer et je ne sais pas si on pourra le leur imposer.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Monsieur Braouezec, dans chaque mairie, il y a des services sociaux.
    M. Pierre Cardo. Il s'en méfie !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Et franchement, je fais plus confiance, parce qu'ils sont proches du terrain, aux personnels des services sociaux de votre ville, à Saint-Denis, qu'à des agents de l'OMI qui ont vocation à s'occuper de tout un département.
    En outre, si les services sociaux de certaines communes ne veulent pas se rendre dans certains quartiers, l'OMI sera là.
    Il s'agit de donner une possibilité aux agents des services sociaux pour une action plus rapide et surtout plus efficace.
    M. Patrick Braouezec. Cette possibilité reste donc une possibilité !
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Pour conforter les arguments qui ont été exprimés par mon collègue Braouezec, je rappelle qu'il y a des services sociaux qui dépendent de la commune, comme les CCAS, les centres communaux d'action sociale, et des services sociaux qui dépendent du département, comme les CMS, les centres médico-sociaux.
    M. Daniel Mach. Merci de le rappeler : on ne le savait pas ! On est des ânes !
    M. Noël Mamère. Certaines communes, c'est le cas de la mienne, assurent une partie de ce qu'on appelle la polyvalence qui doit être assurée par le département, par une tradition historique qu'on peut ou non remettre en cause.
    Pour ma part, je rejoins les deux arguments qui ont été donnés par mon collègue Braouezec : je crains fort que les assistantes sociales et les personnels des services sociaux des communes ne nous opposent des raisons déontologiques pour ne pas se livrer à ce travail qui ne correspond ni à leur formation ni surtout, à leur rôle.
    Par ailleurs, je considère que les services sociaux dans nos communes, ont bien d'autres choses à faire, beaucoup plus importantes, pour lutter contre l'exclusion et contre la pauvreté, sans qu'on y ajoute encore ce travail de flic ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme Sylvia Bassot. Et les caisses d'allocations familiales ?
    M. Yves Jégo. Merci pour l'OMI !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Mamère, je vous l'ai déjà dit : l'expression « travail de flic » est insultante pour les fonctionnaires de la police républicaine et nationale française. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire du groupe Union pour la démocratie française.)
    Et comme je suis sûr que cette expression a dépassé votre pensée, je pense que vous allez à votre tour présenter des excuses.
    Mme Maryse Joissains-Masini. On les attend !
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère, pour un droit de réplique.
    M. Noël Mamère. Il est normal que le ministre de l'intérieur réagisse, quand on emploie une expression... Mais, j'ai entendu tout à l'heure un de nos collègues parler de fun.
    Plusieurs députés sur les bancs de l'Union pour un mouvement populaire. Ça n'a rien à voir !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. C'est même plutôt sympathique !
    M. Pierre Cardo. Le fun, c'est un vent chaud !
    M. Noël Mamère. On dit « flic » en français, cop en anglais pour désigner un flic.
    En début d'après-midi, mais peut-être aviez-vous mieux à faire que d'écouter, monsieur le ministre...
    Mme Sylvia Bassot. Oh !
    M. Jean-Claude Mignon. Quelle prétention !
    M. Noël Mamère. ... j'ai été, je crois, l'un des seuls à défendre les fonctions régaliennes de l'Etat et à vous dire que, par exemple, dans ma commune, je n'acceptais pas le principe d'une police municipale.
    M. Pierre Cardo. C'est le principe même de la police qui vous gêne !
    M. Noël Mamère. Je considère en effet que l'ordre public doit être assumé par de vrais policiers, des agents de l'Etat formés à cet effet. Alors ne me faites par dire ce que je n'ai pas dit.
    Mme Sylvia Bassot et M. Daniel Mach. Mais vous l'avez dit !
    M. Noël Mamère. Et pour être tout à fait clair, monsieur le ministre, je le répète, j'ai des doutes sur le hasard de la concordance de l'arrestation d'Yvan Colonna et du référendum. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Pierre Grand. Il fallait peut-être le laisser en liberté ?
    M. Noël Mamère. Attendez !
    M. le président. Monsieur Mamère, nous examinons l'amendement n° 58.
    M. Noël Mamère. Justement. Laissez-moi continuer. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Philippe Auberger. C'est hors sujet !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. provocateur !
    M. le président. Non ! Ne continuez pas, terminez.
    M. Noël Mamère. Personne ne se plaindra, je tiens à le dire, de l'arrestation d'Yvan Colonna. Il ne saurait y avoir d'amnistie pour des auteurs présumés de crimes de sang. Et si j'ai parlé de prise d'otage à propos de Mme Erignac, en réagissant à chaud dans les couloirs de l'Assemblée, je le regrette, je le dis publiquement, et je présente mes excuses. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Gérard Hamel. Il était temps !
    M. Pierre Cardo. Cela s'appelle botter en touche !
    M. le président. La parole est à  M. François d'Aubert.
    M. François d'Aubert. Je soutiens tout à fait cet amendement de M. Mariani.
    M. Christophe Caresche. Cela nous étonne pas !
    M. François d'Aubert. Il est en effet tout à fait légitime que les maires aient un droit de regard sur le contrôle des conditions d'hébergement et les certificats d'hébergement.
    M. Christophe Caresche. Il vient d'arriver ! cela fait deux heures que nous en parlons !
    M. François d'Aubert. Cela fait partie des missions des maires et, en plus, ce sera plus efficace.
    Monsieur Caresche, vous ne le savez peut-être pas, mais les réglements municipaux d'hygiène et d'urbanisme obligent les maires à contrôler l'état des logements dans lesquels il y a hébergement, que ce soient des personnes étrangères ou non.
    M. André Gerin. Justement, il n'y a pas besoin de loi !
    M. François d'Aubert. En quoi consiste le contrôle en matière de certificat d'hébergement ? Il s'agit de vérifier précisément le nombre de pièces, l'état sanitaire du logement et de s'assurer éventuellement des possibilités financières. Tout cela nous apparaît à tous légitime.
    Je comprends mal, monsieur Mamère, cette espèce de suspicion que vous manifestez à l'égard des maires, de ce procès d'intention que vous faites par avance aux maires.
    M. Christophe Caresche. Et M. Bompard à Orange ?
    M. François d'Aubert. Vous dites : un, ils ne sont pas capables, deux, s'ils le font, ils ne seront pas honnêtes. Je trouve ces propos scandaleux.
    M. Daniel Mach. Absolument !
    M. François d'Aubert. Vous mettez en cause l'honnêteté intellectuelle et professionnelle des services municipaux, des services des collectivités territoriales, des services sociaux, qui font remarquablement bien leur travail !(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Christophe Caresche. Merci pour eux !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Je soutiens cet amendement et j'avoue ne pas comprendre pourquoi il suscite autant d'interrogations. Pour une attestation d'accueil ou pour un regroupement familial, l'OMI fait son travail, et le maire donne son avis. Voudriez-vous obliger le maire à signer ou à donner un avis sans lui donner les moyens de s'informer ? Voudriez-vous qu'il décide en aveugle, simplement en fonction de ce que l'OMI lui dit ? En plus, le rapporteur le rappelait, l'OMI est totalement débordé - ce n'est pas lui faire un mauvais procès que de l'affirmer - même si la taxe lui apportera des moyens supplémentaires.
    Ce matin, je prenais connaissance de l'avis favorable de l'OMI à la demande d'une personne qui souhaite faire venir son enfant, alors qu'elle ne dispose que de 78 euros par mois de revenu ! Ne me dites pas que le travail a été fait convenablement !
    Je ne vois pas ce qu'il y a de choquant à permettre aux agents des services sociaux de la commune - ce ne sont pas nécessairement les assistantes sociales, je le précise - d'effectuer le contrôle, sauf à considérer là encore, que parce qu'un maire ne réagit pas convenablement, les 36 500 autres maires de ce pays sont devenus des débiles profonds, irresponsables et qui font n'importe quoi de leur pouvoir ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Des agents des services sociaux, il y en a partout, qu'ils soient délégués au département comme il en existe dans mon département, qu'ils soient employés d'un CCAS, c'est-à dire qu'ils dépendent de la commune, ou qu'ils travaillent dans un centre médico-social.
    M. Braouezec craint que les assistantes sociales qui travaillent avec la ville et qui dépendent du conseil général ne collaborent pas au système. J'ai surtout peur quant à moi qu'elles soient excessivement libérales dans l'interprétation des conditions décentes d'hébergement !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Absolument !
    M. Jean-Christophe Lagarde. L'OMI, justement, est sans doute plus restictif, plus répressif, plus ferme parce que soumis aux aléas du gouvernement, alors que les assistantes sociales agissent selon leur conscience professionnelle et n'obéiront pas aux injonctions de tel ou tel. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jacques-Alain Bénisti.
    M. Jacques-Alain Bénisti. M. Lagarde a dit des choses très justes. En effet, le débat devrait s'engager entre des parlementaires qui, en tant que maires, sont confrontés quotidiennement à ces prblèmes.
    Je suis, quant à moi, horrifié d'entendre M. Caresche et M. Blisko parler de ce qu'ils ne connaissent absolument pas ! Ces élus de Paris nous envoient, dans la petite et la grande couronne, un certain nombre d'immigrés qui se trouvent effectivement dans une situation difficile...
    M. Christophe Caresche. Vous n'êtes pas dans un meeting électoral !
    M. Serge Blisko. Ce que vous dites est scandaleux !
    M. Jacques-Alain Bénisti. ... et il nous revient en tant que maires de gérer ce genre de situation et d'informer le ministre des réalités du terrain.
    Le ministre a raison de dire que le débat devient insoutenable, car les affirmations de M. Blisko et de M. Caresche n'ont aucun sens, et elles ne correspondent pas à la réalité. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Pierre Grand. Ce sont des anarchistes !
    M. Jacques-Alain Bénisti. Notre collègue député-maire de Saint-Denis a expliqué à juste titre que nous allions peut-être, avec les assistantes sociales, être confrontés au problème du secret professionnel.
    M. Christophe Caresche. Cela, nous l'avons connu avant vous et nous le connaîtrons après vous !
    M. Jacques-Alain Bénisti. Comme l'a dit M. Lagarde, elles sont, avec les services sociaux communaux, les mieux placées pour dire la vérité sur les systèmes d'hébergement, sur les familles hébergantes et sur les conditions de l'hébergement lui-même. Il faudra sans doute se pencher sur le problème du secret professionnel, quitte éventuellement à aménager le texte.
    M. Christophe Caresche. Rendez-nous Jégou !
    M. le président. La parole est à M. Serge Blisko.
    M. Serge Blisko. Monsieur le président, je m'estime mis en cause à la fois dans ma pratique d'élu et à titre personnel. Je voudrais donc répondre à notre collègue.
    Monsieur Bénisti, ne nous donnez pas de leçons ! Vous n'avez pas, pour reprendre une expression consacrée, le monopole du traitement de la pauvreté, de la misère ou de l'émigration. Ce n'est pas parce qu'on est élu de Paris qu'on ne connaît pas toutes ces difficultés. Peut-être que, dans le 16e arrondissement de Paris - pardonnez-moi, cher collègue Goasguen -, elles sont un peu moins accentuées que dans l'est de la capitale....
    M. Claude Goasguen. Ma circonscription compte plus d'étrangers que la vôtre ! Vous feriez bien d'être plus attentif à ce que vous dites ! Au lieu de rester dans votre mairie, occupez-vous de la communauté chinoise du 13e arrondissement !
    M. le président. Je vous en prie, cher collègue ! Nous n'allons pas engager un débat municipal parisien !
    M. Serge Blisko. Je ne veux pas faire de comparaison. Nous sommes tous, les uns comme les autres, élus par une population diversifiée, qui compte à la fois des gens qui ont les moyens et des gens qui connaissent, surtout en ce moment, la paupérisation et qui sont extrêmement défavorisés. Alors, que l'on ne nous donne pas de leçons sous le prétexte que nous sommes élus de Paris !
    Jusqu'à présent, dans ce débat, nous n'étions pas d'accord, mais nous nous respections mutuellement. Vous venez, monsieur Bénisti, de franchir la ligne jaune. Je vous demande en conséquence de retirer les paroles que vous avez tenues à l'égard des élus parisiens.
    M. le président. L'Assemblée est parfaitement informée des positions des uns et des autres.
    Je mets aux voix l'amendement n° 58.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 59, ainsi rédigé :
    « A la fin de la première phrase de l'avant-dernier alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, supprimer les mots : ", préalablement à sa délivrance. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 59.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 220 et 303.
    L'amendement n° 220 est présenté par M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ; l'amendement n° 303 est présenté par MM. Braouezec, Gerin et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945. »
    La parole est à M. Noël Mamère, pour soutenir l'amendement n° 220.
    M. Noël Mamère. Cet amendement vise à supprimer le dernier alinéa de l'article 2, lequel prévoit un recours hiérarchique devant le préfet dans un délai de deux mois.
    Nous considérons qu'il s'agit là, une fois de plus, de la manifestation d'un régime d'exception, alors que le droit commun permet à l'administré de saisir d'emblée le juge, un étranger se verra privéde cette possibilité, et il devra préalablement saisir le préfet, ce qui ne fera qu'allonger les délais de procédure.
    Cette nouvelle disposition aura en outre pour effet, selon nous, d'empêcher les personnes auxquelles est opposé un refus de visa d'accueil de saisir en urgence le juge compétent dans le cadre d'un référé administratif.
    Nous proposons un alignement sur le droit commun.
    M. le président. La parole est à M. André Gerin, pour défendre l'amendement n° 303.
    M. André Gerin. Nous défendons cet amendement de repli dans la mesure où l'article 2 n'a pas été rejeté.
    Notre amendement vise à supprimer l'obligation de recours devant le préfet avant le recours contentieux pour refus d'attestation d'accueil. Nous souhaitons permettre une contestation efficace et rapide des refus par la procédure de référé devant le tribunal administratif.
    L'article 2 multiplie les obstacles à la délivrance des attestations d'accueil. Le fait que les maires puissent en refuser la délivrance se traduira par des inégalités de traitement selon les territoires, et donc par des discriminations.
    Le nombre élevé de demandes d'attestation d'accueil s'explique pour une part par les refus répétés de visas, qui conduisent les familles à déposer plusieurs demandes successivement. Nous connaissons des fils ou des filles d'étrangers, eux-même français ou résidents, qui ont essuyé cinq ou six refus de visas pour les visites de l'un de leurs parents.
    Il faut le rappeler : la réalité des quinze dernières années illustre que ce fait que toujours moins de visas, c'est toujours plus de sans-papiers ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    On ne peut que déplorer la logique absurde du projet de loi, qui tend à restreindre toujours davantage les délivrances de visas. Il risque de renforcer les filières clandestines car il réduira encore les possibilités de visites familiales et encouragera les situations irrégulières. Il ne s'agit pas là d'un jugement de valeur, mais de faits constatés. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    En tant que député-maire, je connais la question et, même si mon point de vue et mon approche sont différentes des vôtres, je les exprime avec le souci d'un respect mutuel.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Défavorable.
    Il me semble que l'on ne se comprend pas !
    L'article 2 permet de déposer un recours devant le préfet qui, selon le droit commun, doit répondre dans un délai de deux mois - délai que nous proposons de réduire à un mois dans un amendement qui sera appelé tout à l'heure -, puis de contester éventuellement la décision devant le tribunal administratif. Vous nous proposez de supprimer le recours devant le préfet et de saisir directement le tribunal administratif.
    M. Pierre Cardo. Ben voyons !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Mais savez-vous combien de temps il faut attendre en moyenne pour que le tribunal administratif statue sur un recours ? Entre un an et un an et demi !
    M. Pierre Cardo. C'est plutôt deux ans !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Sans compter la saisine de la cour administrative d'appel !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. M. le rapporteur a raison !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Sincèrement, n'est-il pas préférable que le recours se fasse d'abord devant le préfet, qui est apte à assurer l'égalité au cas où certaines communes déraperaient ? Au surplus, l'étranger concerné serait assuré d'obtenir une réponse dans un délai d'un mois. S'il saisit directement le tribunal administratif, l'étranger devra attendre un an et demi.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est évident !
    M. André Gerin. J'ai parlé d'un référé !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Nous avons assurément des désaccords de fond, mais il demeure que le recours devant le préfet est préférable, surtout pour la personne qui demande un certificat d'hébergement.
    Je m'oppose au nom de la commission, aux deux amendements. Leurs auteurs se trompent sur les moyens. Cela dit, nous sommes d'accord sur l'objectif.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis défavorable. La démonstration du rapporteur est lumineuse !
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Contre les amendements !
    Mes chers collègues, je ne comprends pas bien votre logique. Tout à l'heure, vous n'aviez pas confiance dans le maire et vous préfériez vous en remettre au contrôle du préfet et de l'Etat. Là, il s'agit de confier au préfet une responsabilité d'ordre décisionnel et, comme par hasard, vous n'avez plus confiance en lui et vous proposez de saisir directement le tribunal. Or, on sait que les tribunaux sont saturés et qu'il faut donc éviter, comme l'on s'y emploie dans bien des domaines, de trop judiciariser les contentieux afin d'éviter un encombrement et de faire en sorte que les délais dans lesquels sont prises les décisions soient compatibles avec les problèmes des individus.
    Qu'est-ce que c'est que ce bazar ? Il faut être cohérent !
    Le maire sait de quoi il parle et peut prendre les décisions. S'il y a abus, le préfet reçoit les contestations. Et si, en dépit de l'avis du maire, l'attestation est accordée, on peut saisir le tribunal administratif, qui ne se prononce pas aujourd'hui avant deux ans.
    Avec la procédure prévue dans le projet de loi, on limitera l'encombrement des tribunaux.
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Le risque d'encombrement des tribunaux n'est pas un argument. En effet, je répondrai à M. Cardo et à notre rapporteur que, pour l'éviter, il suffirait d'accorder à la justice, et notamment aux tribunaux administratifs, plus de moyens. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mais cela fait partie des choix qui inspirent votre politique : vous préférez consacrer plus d'argent aux prisons qu'aux tribunaux. (Nouvelles exclamations sur les mêmes bancs.)
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Caricatural !
    M. Claude Goasguen. Qu'avez-vous fait pendant cinq ans ?
    M. Noël Mamère. Caricature pour caricature, je rappellerai ce qui est écrit dans le projet de loi : le recours devant le préfet est obligatoire dans un délai de deux mois avant que l'on ne puisse s'adresser au tribunal administratif.
    Excusez-moi, mais la manière dont vous envisagez le raccourcissement des délais ne me paraît pas la meilleure.
    Nous maintenons notre amendement, qui est pour nous lumineux : il ramène le droit des étrangers dans le droit commun.
    M. le président. La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Je n'ai pas changé d'opinion sur l'article 2 : sur le fond, je suis en désaccord, car on transfère à l'Etat une prérogative qui doit ressortir au droit commun.
    Ce que nous proposons, c'est un référé administratif.
    M. Claude Goasguen. Vous ferez exploser les tribunaux !
    M. André Gerin. Les affaires de ce genre se règlent en quelques jours.
    M. Claude Goasguen. Encore faut-il des juges pour juger !
    M. Noël Mamère. Je ne vous le fais pas dire !
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 220 et 303.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, M. Perruchot et M. Lagarde ont présenté un amendement, n° 60, ainsi rédigé :
    « Compléter le texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 par l'alinéa suivant :
    « Le maire sera tenu informé par l'autorité consulaire des suites données à la demande de visa formulée sur la base de l'attestation d'accueil validée. »
    La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. Cet amendement prévoit que le maire est tenu informé par l'autorité consulaire des suites données à la demande de visa, qui est formulée sur la base de l'attestation d'accueil validée.
    Nous souhaitons en effet lutter contre la multiplication des demandes de justificatif d'hébergement, lesquelles n'aboutissent pas nécessairement. Le maire doit donc être informé sur l'arrivée effective de l'étranger, ainsi que sur son départ. Le justificatif d'hébergement doit se limiter à son strict objet et ne pas servir de document permettant d'entrer en France et d'y séjourner irrégulièrement après l'expiration du délai de l'attestation.
    De plus, certaines personnes multiplient les demandes sans que les bénéficiaires des attestations arrivent en France.
    Cet amendement aura l'avantage de lever la suspicion qui pèse sur les demandeurs.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Si cet amendement est très intéressant, il est aussi paradoxal. Il lie de fait la délivrance de l'attestation d'accueil à celle du visa. Or, jusqu'à présent, ce n'était pas le cas : l'attestation d'accueil n'était qu'un élément parmi d'autres qui pouvaient être pris en compte par les consulats pour délivrer un visa.
    L'amendement signifie en réalité que les consulats devront rendre compte de la délivrance des visas directement aux maires. Et je crains qu'en liant l'attestation d'accueil à la délivrance du visa on n'aboutisse au résultat inverse à celui qui est recherché. En effet, si les consulats doivent rendre compte aux maires, ils se sentiront tenus de délivrer les visas à partir du moment où il y aura attestation d'accueil. En conséquence, les 700 000 attestations d'accueil dont on nous a parlé donneront lieu à 700 000 délivrances de visa. Les consulats se sentiront sous la pression des maires. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Claude Goasguen. Vous avez dit le contraire tout à l'heure !
    M. Christophe Caresche. Je trouve cet amendement extrêmement dangereux.
    M. Claude Goasguen. Voilà un beau syllogisme !
    M. Christophe Caresche. Pas du tout ! Le maire qui constatera qu'un consulat n'aura pas délivré de visa alors qu'il avait lui-même délivré un certificat d'hébergement mettra évidemment en cause la responsabilité de ce consulat.
    Une pression s'exercera donc sur les consulats pour qu'ils délivrent des visas dès lors qu'il y aura des attestations d'accueil.
    Cet amendement est, disais-je, paradoxal en ce qu'il va manifestement à l'encontre de ce que propose le Gouvernement. Je suis donc très surpris que celui-ci l'approuve.
    D'autre part, l'amendement provoquera, sur le plan administratif, un embouteillage considérable puisque, à chaque fois qu'une attestation d'accueil sera délivrée et qu'une demande de visa sera présentée, le consulat devra écrire au maire pour savoir si le visa aura été délivré. On sera là dans une bureaucratie extrême.
    L'amendement sera inapplicable d'autant plus qu'il liera visa et attestation d'accueil, ce qui induira un changement de nature important de la délivrance des visas.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. La commission a adopté l'amendement.
    Franchement, monsieur Caresche, dire que les consulats seraient désormais placés sous la pression des maires...
    M. Christophe Caresche. Ce sera le cas !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. ... c'est user d'une formule humoristique que personne ne peut prendre au sérieux.
    Vous savez très bien que les visas de tourisme, pour voyages d'affaires ou destinés aux étudiants n'ont aucun lien avec les attestations d'accueil puisque celles-ci ne sont dans ces cas même pas demandées. Mais il y aura effectivement des attestations d'accueil qui auront un lien avec les visas quand il y aura hébergement dans une famille. L'année dernière, on a dénombré 700 000 attestations d'accueil. J'ai la faiblesse de penser qu'à partir du moment où il y aura un certain contrôle, on en viendra à des chiffres plus mesurés.
    Vous redoutez un embouteillage administratif extraordinaire. Mais à partir du moment où il y aura attestation d'accueil, il suffira tout simplement de prévoir un coupon-réponse qui pourra être adressé au maire.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Une bagatelle !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. C'est d'une grande simplicité. En effet, sur le coupon de l'attestation d'accueil, le consultat fera figurer la mention « favorable » ou « défavorable », et tout sera terminé.
    Le projet de loi illustre deux maîtres mots : équilibre et transparence. Il me semble tout à fait normal qu'un élu local soit tenu au courant des suites d'un avis qu'il a donné.
    M. Jacques-Alain Bénisti. Tout à fait !
    M. le président. Sur cet amendement, M. Cardo et M. Cova ont présenté un sous-amendement, n° 361, ainsi rédigé :
    « Compléter l'amendement n° 60 par les mots : "et notamment des dates prévues pour l'entrée en France et de la durée du séjour accordée. »
    La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Il me paraît important que le maire connaisse les dates d'entrée et de sortie du demandeur. J'ai, avec mon ami Charles Cova, longtemps travaillé sur le sujet. Les maires ne connaissent pas toujours ce qui est appliqué dans la réalité après avoir eux-mêmes signé le document. Il serait intéressant qu'ils en soient informés.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Défavorable.
    L'amendement n° 60 de la commission impose aux autorités consulaires d'informer le maire des suites données à la demande de visa formulée sur la base de l'attestation d'accueil.
    Les informations mentionnées par les auteurs du sous-amendement figurent déjà dans l'attestation d'accueil. Elles seront nécessairement incluses dans les informations transmises par les consulats.
    Le sous-amendement nous semble donc superflu. Si ses auteurs le maintiennent, j'inviterai l'Assemblée à le rejeter.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Je voulais entendre ces précisions de la bouche du rapporteur car, dans l'exposé des motifs de l'amendement, j'ai trouvé ce que je voulais y trouver, mais pas dans le texte de l'amendement lui-même.
    En conséquence, je retire le sous-amendement.
    M. le président. Le sous-amendement n° 361 est retiré.
    M. Perruchot et M. Lagarde ont présenté un sous-amendement, n° 453, ainsi rédigé :
    « Compléter l'amendement n° 60 par les mots : "et notamment les dates d'entrée et de sortie effectives du bénéficiaire. »
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Je ne comprends absolument pas, malgré son talent, l'argumentation qu'a développée M. Caresche contre l'amendement n° 60, dont je suis cosignataire.
    Monsieur Caresche, à force de nous soupçonner de tout et de n'importe quoi, vous dérapez et allez jusqu'à imaginer que les consuls ou les ambassadeurs de ce pays tremblent de peur devant les maires. Pour en avoir fait récemment l'expérience avec nos services diplomatiques à Kinshasa, je peux vous assurer qu'ils se contrefichent de ce qu'on peut leur dire ou leur écrire, que l'on soit maire, député ou autre chose,...
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Absolument !
    M. Jean-Christophe Lagarde. ... même quand il ne s'agit que de demander pour un citoyen français un extrait d'acte de naissance de sa fille ! Imaginez ce qu'il en sera avec les attestations d'accueil !
    M. Christophe Caresche. Alors, quel est l'intérêt de la mesure ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. L'information !
    M. Jean-Christophe Lagarde. En dépit de déclarations constructives, monsieur Caresche, vous restez dans le procès d'intention en affirmant que nous cherchons à mettre en place un système pernicieux. Mais ce qui est pernicieux, c'est de demander au maire comme le prévoient les amendements que nous venons d'adopter, d'exercer un contrôle sur la validité de l'attestation d'accueil en établissant si les conditions sont réunies et si les demandeurs sont de bonne foi, mais de ne l'informer ni de l'arrivée, ni du départ de la personne accueillie. Or c'est précisément ce que nous cherchons à savoir.
    En effet, quand une famille dépose en un an vingt demandes d'attestation d'accueil, elle peut être de la plus parfaite bonne foi et ne revenir à la charge que parce qu'elle n'a jamais accueilli personne sur le territoire français du fait que les visas n'ont pas été délivrés.
    Vous ne pourrez traiter de la même façon quelqu'un qui aura déposé dix demandes avec succès, mais sans que l'on sache si les bénéficiaires seront ressortis ou non du territoire, et quelqu'un qui aura déposé vingt demandes dont aucune n'aura abouti.
    C'est tout ! Nous voulons simplement assurer le suivi de ce qu'on fait ! Si on ferme les yeux sur ce qui se passera une fois l'attestation d'accueil délivrée, je me demande bien pourquoi on demande aux services municipaux et aux maires de contrôler.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Défavorable.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Le sous-amendement est retiré, monsieur le président.
    M. le président. Le sous-amendement n° 453 est retiré.
    Je mets aux voix l'amendement n° 60.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Perruchot et M. Lagarde ont présenté un amendement, n° 415, ainsi rédigé :
    « Compléter le texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 par l'alinéa suivant :
    « Dans un délai de sept jours, l'hébergeant est tenu d'informer le maire du départ de l'étranger de son domicile. Dans le cas contraire, le maire pourra refuser de valider toute nouvelle attestation d'accueil, signée par cet hébergeant. »
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Mes chers collègues, peut-être certains d'entre vous vont-ils avoir l'impression que nous revenons sur un sujet déjà abordé à l'initiative de notre collègue Pierre Cardo, mais il ne s'agit pas du même dispositif.
    Aujourd'hui, un hébergeant déclare accueillir un touriste pour quelques mois - trois au maximum. L'attestation d'accueil nous permet de savoir où se trouve la personne pendant son séjour en France. N'importe quel pays au monde demande aux étrangers au moment où ils entrent sur son territoire, où ils se rendent, dans quel hôtel, dans quelle famille, à quelle adresse. En l'espèce, il s'agit d'assurer le « suivi » de la personne. Certains hébergeants de bonne foi voient parfois disparaître dans la nature et entrer dans la clandestinité, à l'expiration de son visa touristique, la personne qu'ils ont accueillie. Nous ne cherchons pas à pénaliser l'hébergeant, nous lui demandons simplement d'informer le maire dans un délai de sept jours du fait que l'attestation d'accueil qu'il a produite n'est plus valable, puisque la personne n'est plus chez elle. Et pour que l'hébergeant se conforme à cette obligation d'information - il s'agit d'information, ni plus, ni moins -, on prévoit de pouvoir refuser de lui délivrer ultérieurement des attestations d'accueil.
    Monsieur le ministre, je vous ai entendu dire, lors d'une réunion, que vous accepteriez les amendements que vous auriez compris. Eh bien, il ne vous aura pas échappé qu'on ne peut pas d'un côté imposer à l'hébergeant de cautionner, de garantir un certain nombre de choses et de l'autre, le dispenser d'informer que l'hébergé n'a pas « respecté » le certificat d'hébergement sous prétexte que ce serait contraire à la dignité. Il n'est pas question de sanctionner un hébergeant qui n'y est pour rien, il suffit qu'il nous signale les anomalies et qu'il informe les autorités. Sinon, on saura qu'il est entré, et qu'il est passé chez l'hébergeant. Ensuite, il disparaîtra mais on mettra six, huit ou dix mois à s'en rendre compte.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Défavorable. Le système que vous proposez, mon cher collègue, est peu efficace. Premièrement, si l'hébergeant souhaite aider l'hébergé à rester en France, par principe, il n'ira pas signaler son départ à la mairie. Deuxièmement, ce dispositif risque d'être considéré comme un appel à la délation. Je crois qu'il faut garder un certain équilibre.
    Nous avons adopté, l'amendement n° 418 de M. Ferrand et de M. Mourrut sur la responsabilité personnelle de l'hébergeant et, il y a quelques minutes, l'amendement n° 60, dont vous avez eu l'initiative, monsieur Lagarde, monsieur Perruchot, qui organise l'information des maires sur les dates de départ et d'arrivée.
    Franchement, l'équilibre voudrait qu'on en reste là.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement partage l'avis du rapporteur pour deux raisons.
    D'abord ce n'est pas parce qu'un étranger aura quitté son lieu d'hébergement qu'il aura quitté notre pays. Or, c'est bien ce qui nous intéresse dans le cadre de la politique migratoire. Ensuite, par conviction profonde, je n'aime pas les systèmes qui reposent sur la délation, quels qu'ils soient. Vous proposez une délation « en creux » en quelque sorte. De deux choses l'une, soit l'hébergeant viendra déclarer le départ de l'hébergé alors que ce sera faux, soit il ne viendra pas signaler son départ et ce sera, pour ainsi dire, une délation par omission.
    Mettre un hébergeant en situation de choisir entre le silence complice ou la dénonciation à l'administration, c'est franchir une ligne et cette mesure ne correspond en rien à l'objectif qui est le nôtre, dont je voudrais rappeler qu'il est fait de fermeté et d'humanité. Or, la délation - même si ce n'était pas du tout l'ambition de M. Lagarde - n'est pas compatible avec l'humanité.
    M. Claude Goasguen. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Je serai très bref, car je partage très largement l'avis du rapporteur et du ministre. Je voudrais souligner qu'il y a bien deux logiques. La première fait du certificat d'hébergement un moyen mis à la disposition des étrangers pour faire venir leur famille ou leurs amis, sous réserve de procéder à des contrôles, y compris sur les conditions d'hébergement. La seconde, celle que nous proposent M. Lagarde et M. Perruchot, voit dans le certificat d'hébergement un dispositif pour contrôler et restreindre la liberté de l'hébergeant.
    De surcroît, ils achèvent de rendre la procédure totalement bureaucratique : échanges de courrier avec le consul, conditions supplémentaires imposées à l'hébergant qui doit prouver un certain nombre de choses, sans oublier le présent amendement qui vise à ce que l'hébergeant aille dénoncer la personne qu'il aura hébergée dans l'hypothèse où elle ne serait pas partie. Nous sommes là dans une logique inacceptable, ce n'est pas la nôtre en tout cas.
    M. le président. La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Je souhaiterais faire deux remarques. Premièrement, je prends acte des propos du rapporteur et du ministre et de leur refus de la formule « l'hébergeant est tenu d'informer le maire » qui contient une idée de délation, et qui avait été à l'époque de la loi Debré à l'origine de nombreuses pétitions. C'est important de le souligner.
    M. Christophe Caresche. Tout à fait.
    M. André Gerin. Deuxièmement, vous avez beau nous dire, monsieur le ministre, que votre projet de loi est humaniste et ferme, je crains - c'est notre point de vue et vous n'êtes pas obligé de le partager - qu'il ne favorise de telles dérives.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Les procès d'intention succèdent aux procès d'intention ! Excusez-moi, monsieur Caresche, mais il n'y a rien de restrictif dans notre amendement, il ne restreint en rien la capacité d'accueil, pas plus qu'il n'incite à la délation - je regrette d'être en désaccord avec notre excellent rapporteur et avec le ministre de l'intérieur. Nous souhaitons simplement que la personne qui accueille quelqu'un d'autre qui atteste l'héberger en soit « responsable ». Vous êtes même allés au-delà en votant l'amendement de M. Mourrut. Il n'en reste pas moins qu'il serait utile aux administrations que nous représentons de savoir si, oui ou non, la personne se trouve encore là où elle est censée être. Certes, elle peut quitter le domicile sans quitter le territoire, mais avec notre amendement, on saurait si l'attestation d'accueil correspond à la réalité - ou non - sinon, on n'aura pas la possibilité de vérifier. La formule exacte m'intéresse peu, mais il est regrettable qu'on ne puisse pas le faire. Il ne s'agit, monsieur Caresche, ni de favoriser la délation ni encore de restreindre l'accueil, mais simplement de savoir.
    M. Serge Blisko. Ce n'est pas certain.
    M. Jean-Christophe Lagarde. C'est bien la moindre des choses lorsque l'on essaie de contrôler.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 415.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 61, ainsi rédigé :
    « Compléter le texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 par l'alinéa suivant :
    « Par dérogation à l'article 21 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le silence gardé pendant plus d'un mois par le maire sur la demande de validation de l'attestation d'accueil, ou par le préfet sur le recours administratif visé au neuvième alinéa, vaut décision de rejet. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. J'ai déjà évoqué cet amendement à propos des délais de réponse. L'article 21 de la loi du 12 avril 2000 précise qu'au bout de deux mois, l'absence de réponse vaut rejet implicite de l'administration. L'amendement n° 61 vise à ramener le délai à un mois, afin de garantir à l'hébergeant un réponse du maire ou du préfet dans un délai raisonnable.
    Je précise, monsieur le président, qu'il ne s'agit plus du neuvième alinéa, mais du dixième, puisque l'amendement n° 418 a été adopté. Il convient d'effectuer ce changement.
    M. le président. L'amendement n° 61 est ainsi rectifié.
    Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. L'amendement est intéressant ; je n'aurais cependant pas proposé : « décision de rejet », mais « décision d'acceptation ».
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Non !
    M. Christophe Caresche. Si l'hébergeant ou l'étranger n'obtiennent de réponse ni du maire ni du préfet, leur demande est rejetée. C'est étonnant tout de même, il s'agit là d'une exception fâcheuse. En l'absence de réponse, la demande devrait être acceptée. Il faut faire obligation au maire et au préfet de répondre aux demandes d'attestation d'accueil. Je ne suis pas un éminent juriste, mais je pense qu'en général le silence de l'administration vaut approbation tacite, n'est-ce pas ?
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Caresche, je vous arrête, nous nous conformons, le rapporteur et moi-même, au droit commun, c'est-à-dire le rejet. Rendez-vous compte ! Si chaque fois que l'administration ne répondait pas, cela valait acceptation !
    M. le président. La parole est à M. Serge Blisko.
    M. Serge Blisko. Je ne suis pas juriste non plus, mais je remarque tout de même que suivant les circonstances, le silence de l'administration vaut acceptation ou refus. Pourrait-on un jour avoir une clarification ? Pour le permis de construire, par exemple, le silence de l'administration vaut acceptation au bout de deux mois et refus pour les attestations d'accueil ! Je sais bien que ce problème dépasse le cadre de notre débat, mais c'est un peu compliqué, le commun des mortels a du mal à s'y retrouver entre d'un côté, le « qui ne dit mot consent », et de l'autre, le « qui ne dit mot ne consent pas ».
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ce sont des administrations différentes. Il ne s'agit pas ici du permis de construire.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Je vous rappelle que le texte prévoit une réponse dans le délai d'un mois. Tout à l'heure, il s'agissait de passer par le tribunal administratif où le délai était de dix-huit mois !
    M. Serge Blisko. C'est mieux !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Reconnaissez tout de même que c'est préférable.
    M. André Gerin. Un référé administratif serait encore plus rapide !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 61 rectifié.
    (L'amendement rectifié est adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 62, ainsi rédigé :
    « Compléter le texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 par l'alinéa suivant :
    « Les demandes de validation des attestations d'accueil peuvent être mémorisées et faire l'objet d'un traitement automatisé afin de lutter contre les détournements de procédure consistant, notamment, pour un même hébergeant à déposer des demandes multiples sans rapport avec ses capacités d'hébergement. Les fichiers correspondants sont mis en place par les maires, selon des dispositions déterminées par un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. Ce décret précise la durée de conservation et les conditions de mise à jour des informations enregistrées, les modalités d'habilitation des personnes qui seront amenées à consulter ces fichiers ainsi que, le cas échéant, les conditions dans lesquelles les personnes intéressées peuvent exercer leur droit d'accès. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. L'amendement n° 62 permet de préciser l'accès et le but du fichier des attestations d'accueil, et de se conformer ainsi à la décision du Conseil constitutionnel du 22 avril 1997. Cet amendement reprend exactement les recommandations que la CNIL a faites lors d'une audition à laquelle notre collègue Caresche était présent.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable. L'amendement prévoit que la CNIL sera consultée avant de prendre le décret sur l'établissement des fichiers informatiques des demandes d'attestation d'accueil.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 62.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 63, ainsi rédigé :
    « Compléter le texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 par l'alinéa suivant :
    « La demande de validation d'une attestation d'accueil donne lieu à la perception, au profit de l'Office des migrations internationales, d'une taxe d'un montant de 15 euros par personne hébergée acquittée par l'hébergeant. Cette taxe est perçue selon les mêmes modalités que la taxe visée à l'article 1635-0 bis du code général des impôts. »
    Sur cet amendement, M. Perruchot et M. Lagarde ont présenté un sous-amendement, n° 452, ainsi rédigé :
    « Dans la première phrase de l'amendement n° 63, après les mots : "migrations internationales, insérer les mots : "ou de la commune quand les services sociaux de celle-ci ont procédé aux vérifications. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 63.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. L'amendement propose de créer une taxe de quinze euros par personne hébergée pour financer les activités de l'Office des migrations internationales, l'OMI. Mon collègue Caresche ayant fait à peu près la même proposition, je pense qu'il y aura unanimité.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Nicolas Perruchot pour soutenir le sous-amendement n° 452.
    M. Nicolas Perruchot. Mon collègue Lagarde et moi-même demandons que la taxe de quinze euros perçue au titre de l'attestation d'accueil revienne à la commune dont les services sociaux auront vérifié les conditions d'accueil. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Il convient en effet de rétablir un équilibre et de ne pas accorder à l'OMI le produit de cette taxe s'il n'a pas procédé aux vérifications requises. Je suis certain que tous mes collègues maires seront sensibles au problème budgétaire qui pourrait à terme se poser aux communes.
    M. André Gerin. Non !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. En tant que maire, j'y suis sensible, mais hélas ! en tant que rapporteur, cette disposition ne me semble pas applicable.
    On tomberait dans un système compliqué de partage de la taxe entre l'OMI et les communes. On est tous d'accord pour que le contrôle par les communes soit un gage d'efficacité, et non un moyen de leur procurer une ressource supplémentaire. Donc refus.
    M. Christophe Caresche. Il ne fallait pas l'accepter !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 452.
    (Le sous-amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 63.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques n°s 387 et 410.
    L'amendement n° 387 est présenté par M. Mariani, rapporteur ; l'amendement n° 410 est présenté par M. Mourrut et M. Ferrand.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Compléter le texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 par l'alinéa suivant :
    « Pour les séjours visés par le présent article, l'obligation d'assurance prévue au 2° de l'article 5 peut être satisfaite par une assurance ayant la même portée souscrite au profit de l'étranger par la personne qui se propose de l'héberger. Dans ce cas, l'attestation d'assurance est jointe à l'attestation d'accueil avant sa validation par le maire. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 387.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. C'est un amendement de coordination, conséquence de l'amendement n° 418.
    M. le président. La parole est à M. Etienne Mourrut, pour soutenir l'amendement n° 410.
    M. Etienne Mourrut. Comme cela a été souligné à propos de l'amendement n° 386 précédemment adopté, et qui a entériné l'obligation de justifier d'une prise en charge des dépenses médicales, il est malheureusement fréquent de constater que les demandes de court séjour ne sont qu'un prétexte pour bénéficier de soins médicaux lourds. L'hébergeant qui s'est engagé envers l'étranger qu'il accueille doit aussi prendre conscience de ses devoirs vis-à-vis de notre nation. Aussi, en cas de défaillance de l'hébergé, devrait-il souscrire au profit de ce dernier une assurance couvrant le risque maladie. Cet amendement va dans le sens du projet de loi, car si l'on admet que l'étranger doit pouvoir justifier des conditions matérielles de son séjour en France, pourquoi ne pas avoir les mêmes exigences quant aux conditions sanitaires de son séjour ?
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable, monsieur le président.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 387 et 410.
    (Ces amendements sont adoptés.)
    M. le président. M. Cardo et M. Cova ont présenté un amendement, n° 359, ainsi rédigé :
    « Compléter le texte proposé pour l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 par l'alinéa suivant :
    « Les demandes d'attestation d'accueil présentées par les titulaires d'une autorisation provisoire de séjour ou d'un récépissé de première demande de titre de séjour ou d'un récépissé de demande d'asile ne sont pas recevables. »
    La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Je voudrais avec cet amendement poser une question. Les personnes qui n'ont pas de titre de séjour stable - je pense à celles qui n'ont qu'une attestation d'accueil, ou un simple récépissé de demande d'asile - peuvent-elle prétendre obtenir une demande d'attestation d'accueil à la mairie ? L'amendement dit qu'a priori ce n'est pas possible. Le problème vient de ce qu'un certain nombre de situations changent en fonction des lois qui sont votées, monsieur le ministre, notamment sur la demande d'asile. Le cas auquel je pense pourrait ne plus se présenter selon la façon dont vous envisagez la loi et son application. Quoi qu'il en soit, quelqu'un qui dispose déjà d'un certificat d'hébergement, qui est donc en séjour provisoire, peut-il lui-même demander une attestation d'accueil pour quelqu'un d'autre ? Si ce n'est pas possible, je retire l'amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Je comprends les inquiétudes de notre collègue, mais je suis défavorable à son amendement puisqu'il est déjà satisfait par l'état du droit. En effet, l'article 2-1 du décret du 27 mai 1982, qui date de 1998, précise que : « Si l'attestation est souscrite par un ressortissant étranger, elle comporte l'indication du lieu, de la date de la délivrance et de la durée de validité du titre de séjour du signataire. Celui-ci doit être obligatoirement titulaire d'une carte de séjour temporaire, d'une carte de résident, d'un certificat de résidence, d'une carte de séjour de ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne ou de l'Espace économique européen ou d'un récépissé de demande de renouvellement d'un des titres de séjour précités, ou d'une carte diplomatique ou d'une carte spéciale délivrées par le ministre des affaires étrangères. » Ainsi, la loi répond déjà à votre question, mon cher collègue.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis.
    M. le président. Maintenez-vous l'amendement, monsieur Cardo ?
    M. Pierre Cardo. Je le retire, compte tenu des explications fournies.
    M. le président. L'amendement n° 359 est retiré.
    M. Cardo et M. Cova ont présenté un amendement, n° 362, ainsi libellé :
    « Compléter l'article 2 par le paragraphe suivant :
    « II. - Après l'article 5-3 de la même ordonnance est inséré un article 5-4 ainsi rédigé :
    « Art. 5-4 - Aucune attestation d'accueil ne peut être délivrée à un étranger vivant en France en état de polygamie. »
    La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Cet amendement pose le problème de la polygamie. D'autres amendements ultérieurs tendent au dépôt d'un rapport à ce sujet, et j'espère que ce rapport nous fournira des éléments qui nous permettront d'apprécier la situation et d'ouvrir le débat. Car j'ai à faire face, dans ma circonscription, et je pense ne pas être le seul, à des situations surprenantes. Des étrangers originaires de pays où la polygamie est tolérée font entrer en France, par le biais du certificat d'hébergement, une deuxième, voire une troisième épouse. Quelle attitude devons-nous adopter ?
    Dans certains cas - hélas ! trop fréquents, surtout dans un pays où l'on défend la condition féminine -, ces femmes sont mises totalement à l'écart, privées de tout contact avec l'extérieur, et soumises à une dépendance vis-à-vis de l'homme totalement inacceptable au regard du statut que nous souhaitons aujourd'hui pour la femme.
    Il y a là un danger auquel j'aimerais que nous réfléchissions pour les prochaines lectures. Mon inquiétude vient aussi du fait que, l'année dernière, les accords franco-marocains sur la répudiation de la femme ont été à nouveau validés, ce qui, indirectement, valide aussi la polygamie.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Avis défavorable sur la forme car, comme Pierre Cardo, bien sûr, je ne peux pas accepter la polygamie en France. Simplement, le maire n'a pas les moyens de prouver l'état de polygamie. Seul un contrôle attentif exercé par les consultats lors de la délivrance des visas peut s'avérer efficace.
    M. Pierre Cardo. C'est vrai, mais aura-t-il lieu ?
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Quelle est la loi ? Depuis 1993, les étrangers polygames n'ont plus le droit de séjour en France. La carte de résident peut leur être retirée, le regroupement familial leur est interdit et les cartes de séjour temporaires ne peuvent leur être accordées.
    M. Pierre Cardo. Sans doute, mais ils sont nombreux chez moi !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je préfère le rappeler parce qu'il est bon que chacun d'entre nous ait présent à l'esprit ce qu'est la loi. Il me semble que cet arsenal juridique satisfait la demande légitime de M. Cardo.
    M. Pierre Cardo. Devrait satisfaire !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je n'ai pas dit que c'était la réalité. La réalité, on est en train de s'en occuper.
    Dans votre amendement, vous proposez d'interdire que l'on délivre aux étrangers polygames des attestations d'accueil. Mais va-t-on interdire ainsi des visites familiales qui peuvent être celles des grands-parents ? Vous voyez bien qu'il faut faire des distinctions.
    M. Pierre Cardo. C'est sûr.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Si vous en êtes d'accord, monsieur Cardo, nous pourrions travailler ensemble sur ce problème particulier, qui demande surtout que l'on tienne compte des réalités, notamment pour les situations antérieures à 1993. Je ne crois pas qu'il y ait eu depuis une aggravation et que l'on fasse encore venir plusieurs femmes.
    Compte tenu de ces explications, je pense que, soit dans le courant du débat, soit au Sénat, nous trouverons une réponse à votre préoccupation.
    M. le président. La parole est à M. Serge Blisko.
    M. Serge Blisko. La loi de 1993 est claire. Un problème subsiste néanmoins avec la collectivité de Mayotte, où la polygamie est reconnue par le droit coutumier.
    M. Christian Vanneste. La question vient d'être réglée.
    M. Serge Blisko. Pour l'avenir, en effet.
    En tout état de cause, et pour des raisons diverses, des familles polygames vivent en France. A Paris, par exemple, je peux en témoigner, nous avons les plus grandes difficultés à régler les problèmes qui se posent pour le logement, pour la scolarisation et surtout, monsieur Cardo, pour la protection, des deuxième et troisième épouses - et même des premières - qui ont le sentiment d'être rejetées hors du monde.
    M. Pierre Cardo. Ce sont surtout les premières qui sont rejetées.
    M. Serge Blisko. Nous devons absolument protéger ces femmes, et aussi ces enfants, car je ne pense pas qu'en France un enfant puisse être heureux d'avoir, si je puis dire, une « co-maman ».
    La tâche est délicate, car il ne faut pas blesser ces personnes qui ont un mode de vie totalement inadapté à notre pays. Je m'associe donc volontiers à la proposition du ministre bien que je n'aie encore rien décidé pour l'amendement.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Je retire l'amendement.
    Ce que je souhaite, c'est que le problème soit traité de façon humaine et très pragmatique. Je ne supporte plus de voir ces enfants des premières épouses, qui ne sont plus les favorites, traités de façon dégradante et laissés dans la rue, tandis que ceux de la mère qui a la cote, qui a la faveur du mari, ont le droit de tout faire à la maison ! Vous imaginez la violence que cela peut faire naître chez ces gosses, l'image qu'ils ont du père et la façon dont ils peuvent ensuite regarder les adultes ? Vous voyez le résultat dans les quartiers où les familles polygames sont nombreuses ?
    Une telle situation est insupportable et il faut à tout prix trouver une réponse, humaine certes, car ce sont des coutumes très fortes, mais ferme aussi, car il y a une loi en France et il y a surtout le nécessaire respect de la femme et de l'enfant.
    M. Serge Blisko. Très bien !
    M. le président. L'amendement n° 362 est retiré.
    M. Cardo et M. Cova ont présenté un amendement, n° 363, ainsi libellé :
    « Compléter l'article 2 par le paragraphe suivant :
    « III. - Après l'article 5-3 de la même ordonnance est inséré un article 5-5 ainsi rédigé :
    « Art. 5-5. - Lorsqu'il est démontré que la personne hébergée n'a pas quitté le territoire national dans les délais prévus, l'hébergeant est passible d'une peine d'emprisonnement de trois mois et d'une amende de 3 750 euros. »
    La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Compte tenu des votes antérieurs, cet amendement est retiré, de même que l'amendement n° 368.
    M. le président. Les amendements n°s 363 et 368 sont retirés.
    M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)

Article 3

    M. le président. « Art. 3. - Au premier alinéa de l'article 6 de la même ordonnance, avant les mots : "Tout étranger doit, sont insérés les mots : "sous réserve des dispositions de l'article 9-1 de la présente ordonnance. »
    Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 64 et 45.
    L'amendement n° 64 est présenté par M. Mariani, rapporteur ; l'amendement n° 45 est présenté par M. Jego et M. Goasguen.
    Ces amendements sont libellés comme suit :
    « Rédiger ainsi l'article 3 :
    « L'article 6 de la même ordonnance est ainsi rédigé :
    « Art. 6. - Sous réserve des dispositions de l'article 9-1 ou des stipulations d'un accord international en vigueur régulièrement introduit dans l'ordre juridique interne, tout étranger qui souhaite séjourner en France doit, après l'expiration d'un délai de trois mois depuis son entrée sur le territoire français, être muni d'une carte de séjour. »
    « Cette carte est :
    « - soit une carte de séjour temporaire, dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont prévues au chapitre II, section I, de la présente ordonnance. La carte de séjour temporaire est valable pour une durée maximale d'un an. L'étranger qui séjourne sous couvert d'une carte de séjour temporaire peut solliciter la délivrance d'une carte de résident dans les conditions prévues aux articles 14 et 15 de la présente ordonnance ;
    « - soit une carte de résident dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont prévues au chapitre II, section II, de la présente ordonnance. La carte de résident est valable pour une durée de dix ans.
    « Lorsque la loi le prévoit, la délivrance d'une première carte de résident est subordonnée à l'intégration satisfaisante de l'étranger dans la société française, notamment au regard de sa connaissance de la langue française et des principes qui régissent la République française, qui doit être suffisante. La carte de résident est en principe renouvelable de plein droit, sauf dans les cas prévus par la présente ordonnance.
    « Le délai de trois mois prévu au premier alinéa peut être modifié par décret en Conseil d'Etat.
    « Dans les conditions prévues par l'article 6 bis de la présente ordonnance, l'obligation de détenir une carte de séjour peut être temporairement satisfaite par la détention d'un récépissé de demande de titre de séjour, d'un récépissé de demande d'asile ou d'une autorisation provisoire de séjour. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 64.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. M. Jego exposera mieux que moi cet amendement adopté par la commission et dont il est l'auteur.
    M. le président. Je vous en prie, monsieur Jego.
    M. Yves Jego. Cet amendement propose, si j'ose dire, un article d'architecture, de présentation générale de la nature des titres de séjour susceptibles d'être délivrés aux étrangers, ainsi que des conditions de leur renouvellement. Dans un souci de clarification, je crois important, dans ce maquis très complexe où l'on constate une grande diversité de situations, de renforcer la lisibilité de ces différents titres.
    L'amendement distingue, en gros, trois catégories : jusqu'à trois mois, l'étranger n'a pas besoin de carte de séjour ; de trois mois à un an, il doit être muni d'une carte de séjour temporaire ; au-delà d'un an, il lui faut obtenir la carte de résident.
    Pour la délivrance de la carte de résident, qui consacre l'intégration dpersonne, il est précisé que l'étranger doit notamment faire preuve de sa connaissance de la langue française. C'est une des conditions prévues dans le contrat d'intégration et je crois bon qu'au-delà des primo-arrivants, ceux qui aspirent à détenir la carte de résident de dix ans puissent être « évalués », si j'ose dire, au regard de leur connaissance de notre langue.
    C'est un article important, qui permettra, je l'espère, d'améliorer la lisibilité des différentes catégories d'étrangers séjournant sur notre territoire. Nos compatriotes pourront ainsi mieux comprendre qui est qui, entre ceux qui sont là pour moins de trois mois, ceux qui disposent d'une carte de séjour provisoire et ceux qui se sont vu délivrer une carte de résident au moins pour dix ans.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. M. Cardo et M. Cova ont présenté un sous-amendement, n° 364, ainsi rédigé :
    « Dans l'amendement n° 64, au premier alinéa du texte proposé pour l'article 6 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, après le mot : "étranger, insérer les mots : "entré régulièrement sur le territoire national. »
    La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Il me semble utile de préciser que l'étranger à qui l'on délivre une carte de séjour doit être « entré régulièrement sur le territoire national », pour éviter que des vices de procédure ne soient soulevés par des personnes entrées illégalement en France et qui se feraient connaître par la suite auprès des autorités.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. La commission a repoussé ce sous-amendement qui réserve la délivrance de titres de séjour aux seuls étrangers entrés régulièrement sur le territoire français. On peut être sensible à cette proposition. Mais, en pratique, il peut arriver que certains étrangers, même entrés irrégulièrement, doivent être régularisés - au titre, par exemple, de l'article 12 bis, 3°, de l'ordonnance - ou protégés contre les mesures d'éloignement : confer la réforme de la double peine.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis que la commission.
    M. le président. Retirez-vous votre sous-amendement, monsieur Cardo ?
    M. Pierre Cardo. Oui, compte tenu des explications très convaincantes du rapporteur.
    M. le président. Le sous-amendement n° 364 est retiré.
    MM. Mourrut, Ferrand et Bénisti ont présenté un sous-amendement, n° 464, ainsi rédigé :
    « Dans l'amendement n° 64, compléter la première phrase du cinquième alinéa du texte proposé pour l'article 6 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 par les mots : "ainsi que de son comportement au regard de l'ordre public. »
    La parole est à M. Etienne Mourrut.
    M. Etienne Mourrut. Ce sous-amendement vise à faire connaître aux étrangers que tout acte non conforme aux lois de la République ou que des récidives ne sont pas compatibles avec une installation durable dans notre pays.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Le sous-amendement n'a pas été examiné par la commission, mais j'émets un avis favorable, puisque ce critère me semble à considérer pour la délivrance d'une carte de résident.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis.
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère, contre le sous-amendement.
    M. Noël Mamère. J'attends que l'on m'indique comment se définit le « comportement au regard de l'ordre public ». Je pense que c'est une restriction extrêmement dangereuse pour l'intégration, et l'exposé sommaire le confirme :
    « Le sous-amendement est dans la droite ligne de l'esprit du contrat d'intégration souhaité par le chef de l'Etat et nécessaire au respect des valeurs républicaines et d'un Etat de droit. Il vise à exposer aux étrangers que tout acte de délinquance d'une certaine gravité ou que des récidives ne peuvent être compatibles avec une installation durable en France. »
    M. Christophe Caresche. Cela ne veut rien dire !
    M. Noël Mamère. On fait ainsi de l'étranger quelqu'un d'indésirable et de soupçonnable, un fraudeur par nature et par naissance !
    M. Jacques-Alain Bénisti. En l'occurrence, il s'agit tout de même de délinquants !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le président, je comprends et partage le sentiment des auteurs du sous-amendement. Mais je suis sceptique quant à la possibilité d'introduire ces dispositions dans le droit français. Peut-être est-il souhaitable que l'on veille, à l'occasion de la navette parlementaire, à en améliorer la rédaction.
    Je vous donne un exemple très simple : le préfet doit maintenant délivrer des accréditations pour autoriser les gens, quels qu'ils soient, français ou étrangers, à travailler sur l'aéroport de Roissy. Or j'ai eu à connaître le cas d'un étranger âgé aujourd'hui de trente-six ou trente-sept ans qui avait été mis en cause - pas même condamné puisque son nom figurait simplement dans le fichier de police - au titre d'un délit commis il y a une vingtaine d'années. Eh bien, alors même qu'il s'était intégré et qu'il avait déjà som emploi, il n'a pas pu continuer à travailler sur la plate-forme de Roissy.
    Si on ne précise pas ce qu'est le « comportement au regard de l'ordre public », si on ne définit pas précisément cette notion, on introduira dans notre droit une disposition extrêmement dangereuse. En effet, quelqu'un pourra avoir été simplement mis en cause et se voir refuser par une préfecture, ici une accréditation pour travailler, là un titre de résident, alors même qu'il réside en France depuis des années.
    J'ajoute que, de toute façon, on ne saura que faire des personnes auxquelles aura été refusé le titre de résident. Déjà notre machine judiciaire produit des clandestins. Il ne faudrait pas que la machine administrative se mette à en produire elle aussi. Quand le juge des libertés relâche un étranger parce qu'on ne peut pas le retenir plus longtemps, il crée officiellement un clandestin. En l'occurrence, si on refuse à quelqu'un présent sur le territoire depuis cinq ans au-delà de sa majorité, la possibilité de rester en France à cause d'une bêtise même bénigne qu'il aurait commise des années plus tôt, on va produire un clandestin parce qu'on ne pourra pas expulser cette personne qui ne sera pas expulsable. Autant l'intention qui est à l'origine de ce sous-amendement est louable, autant, sa rédaction réclame d'être améliorée pour préciser la portée de cette condition.
    M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 464.
    M. Etienne Pinte. Contre !
    (Le sous-amendement est adopté.)
    M. le président. M. Perruchot et M. Lagarde ont présenté un sous-amendement, n° 454, ainsi rédigé :
    « Dans l'amendement n° 64, après la première phrase du cinquième alinéa du texte proposé pour l'article 6 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, insérer la phrase suivante :
    « Tout étranger ayant exécuté un contrat d'intégration sera réputé remplir la condition d'intégration satisfaisante. »
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Le groupe UDF a le souci d'inciter les gens à passer un contrat d'intégration tel qu'il prévu par ailleurs.
    En l'occurrence, nous proposons que la délivrance d'une carte de résident, c'est-à-dire d'un titre de séjour de dix ans, soit « automatique » pour l'étranger ayant exécuté un contrat d'intégration. Il est clair, en effet, qu'il sera alors réputé remplir la condition d'intégration satisfaisante. C'est une manière de valoriser le contrat d'intégration que le Gouvernement se propose de créer.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Monsieur Lagarde, votre amendement est à mon sens prématuré. Les textes sur le contrat d'intégration ne sont pas encore complètement sortis et nous sommes en période d'expérimentation. Sur le fond, je partage votre idée. Pour le respect de la chronologie des textes, avis défavorable.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Cela montre encore une fois qu'il fallait tout faire en même temps !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis que la commission.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Je retire mon sous-amendement.
    M. le président. Le sous-amendement n° 454 est retiré.
    M. Bénisti a présenté un sous-amendement, n° 182 rectifié, ainsi rédigé :
    « Compléter l'amendement n° 64 par l'alinéa suivant :
    « Pour l'appréciation de la condition d'intégration, le représentant de l'Etat dans le département ou, à Paris, le préfet de police, peut saisir pour avis le maire de la commune de résidence de l'étranger qui sollicite la carte de résident. »
    La parole est à M. Jacques-Alain Bénisti.
    M. Jacques-Alain Bénisti. Ce sous-amendement vise à introduire le maire dans le processus de détermination de la condition d'intégration de l'étranger.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Nous, nous sommes toujours favorables quand on demande l'avis du maire.
    M. Christophe Caresche. Revoilà les maires ! Quelle ironie !
    M. Thierry Mariani. En quoi cela peut-il susciter l'ironie ?
    M. Christophe Caresche. Ici, c'est scandaleux ! C'est une honte !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Monsieur Caresche, un maire peut témoigner par exemple, qu'un étranger s'est parfaitement intégré parce qu'il exerce des responsabilités dans la vie associative. Qui peut le dire ? Certainement pas le préfet.
    Pour cette raison, le préfet pourra solliciter l'avis maire de la commune de résidence de l'étranger. Cette proposition est parfaitement cohérente avec l'esprit du projet de loi.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable également.
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Je trouve extraordinaire la façon dont notre rapporteur défend le sous-amendement de M. Bénisti en exaltant les vertus des associations, alors même que, tout à l'heure, le Gouvernement, par la voix du ministre de l'intérieur, nous disait qu'il n'y avait pas de légitimité associative...
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Il ne s'agit pas des mêmes associations !
    M. Noël Mamère. ... ou encore que la participation à un conseil d'administration ne suffisait pas comme témoignage de légitimité démocratique.
    M. Christian Vanneste. Cela n'a rien à voir ! Vous confondez tout !
    M. Noël Mamère. Avec ce sous-amendement, vous voulez transformer les maires en autant de représentants des renseignements généraux, ou quoi ?... (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Oh !
    M. Jean-Pierre Grand. C'est choquant !
    M. Noël Mamère. Dans les fonctions du maire définies par la Constitution, on ne voit pas qu'il soit dans ses attributions d'être celui auprès duquel on se renseigne pour vérifier la condition de l'intégration de l'étranger. Cela fait partie d'un état d'esprit que nous condamnons depuis le début de la discussion.
    M. Christian Vanneste. Vous, votre état d'esprit, c'est la « poliçophobie » !
    M. Noël Mamère. Je n'ai pas la phobie de la police, je vous parle du maire, mon cher collègue ! Il se trouve que le maire n'est pas un policier, il se trouve qu'il n'appartient pas aux renseignements généraux, ni au RAID, ni à quelque autre service de la police. Il est l'élu de ses administrés et, à ce titre, il doit servir l'intérêt public.
    M. Jacques-Alain Bénisti. Justement !
    M. Noël Mamère. Servir l'intérêt public, c'est ne pas faire de discrimination entre les administrés de sa commune. Je ne vois pas au nom de quoi, pour apprécier leur capacité d'intégration, le maire serait obligé de faire la différence entre ceux qui sont étrangers et ceux qui ne le sont pas.
    Sous la précédente législature, j'ai défendu, au nom des Verts, la citoyenneté de résidence...
    M. Christian Vanneste. C'est une absurdité !
    M. Noël Mamère. ... et j'ai eu l'honneur de présenter à cette tribune une proposition accordant, à ce titre, le droit de vote aux étrangers non communautaires dans les élections locales.
    Si nous l'avions fait, nous n'en serions pas à discuter de pareilles mesures !
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Que M. le rapporteur me pardonne, mais je n'ai pas le souvenir que la commission ait adopté ce sous-amendement.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Si, ce matin.
    M. Christophe Caresche. Ce que l'on nous propose, c'est un changement fondamental. Déjà les maires jouent un rôle central dans le dispositif des certificats d'hébergement et vous voulez maintenant les introduire au coeur même du processus de délivrance des titres de séjour. C'est leur octroyer une compétence exorbitante !
    Encore une fois, la question de l'immigration, le pouvoir de dire qui peut séjourner sur notre territoire intéresse l'Etat, est une question de souveraineté nationale.
    En vertu de quel critère, en vertu de quelle légitimité, un maire serait-il habilité à intervenir dans le cadre d'une procédure de délivrance d'un titre de séjour ? Je n'avais pas lu ce sous-amendement avant la séance, mais je le trouve extrêmement inquiétant. En l'adoptant, vous allez mettre le doigt dans un engrenage dangereux qui risque de modifier profondément la nature même de la délivrance des cartes de séjour.
    Je suis très surpris que la commission ait accepté ce sous-amendement auquel nous nous opposons avec force.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Monsieur Caresche, je vous précise d'abord que ce sous-amendement a été accepté par la commission non pas ce matin, mais au cours de la réunion qu'elle a tenue au titre de l'article 88. Il est vrai que nous en avons examiné un certain nombre dans un temps relativement restreint.
    Cela étant, il convient de redonner son sens réel à ce sous-amendement et d'éviter de tomber dans la démesure à son sujet. En effet, il indique simplement que le représentant de l'Etat « peut saisir pour avis le maire ». Cela signifie clairement qu'il conserve toute son autorité pour décider.
    M. Jacques-Alain Bénisti. Absolument !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Si l'on ne pouvait pas permettre à un préfet, en cas de doute, de demander au maire concerné ce qu'il pense des conditions d'intégration et de telle ou telle personne, où irait-on ? Il ne faut pas tomber dans la caricature : le préfet peut saisir le maire, mais force reste à l'Etat quant à la décision. Il ne s'agit pas de confier au maire le pouvoir de décider. On lui demande simplement d'émettre un avis.
    Enfin, monsieur Mamère, l'intégration dans une association, qui pourrait servir de justification pour obtenir la carte de résident de dix ans, peut avoir eu lieu aussi bien au sein du MRAP que dans un club de football. Quelle que soit la vie associative à laquelle un étranger participe dans une commune, il s'agit d'une forme d'intégration.
    M. Noël Mamère. Il y a aussi une question de dignité !
    M. le président. La parole est à M. Yves Jego.
    M. Yves Jego. La disposition proposée ne peut qu'être favorable à celui qui sollicitera l'octroi d'un titre de séjour. Il ne faut pas avoir une vision négative des avis du maire. En l'occurrence, si le préfet éprouve le besoin de l'interroger, cela ne peut aller que dans un sens positif pour l'étranger.
    M. Christophe Caresche. Pourquoi ?
    M. Yves Jego. Je veux aussi profiter de cette occasion pour parler de la fonction publique territoriale.
    En effet, depuis l'ouverture de ce débat, nous entendons mettre en cause les maires comme s'ils travaillaient, en tout cas dans les villes moyennes et dans les grandes villes, seuls,...
    M. André Gerin. Non !
    M. Yves Jego. ... sans une administration chargée d'instruire les dossiers. Il faudrait donc m'expliquer en quoi un fonctionnaire territorial qui a les mêmes obligations qu'un fonctionnaire d'Etat, lorsqu'il instruit un dossier - qu'il s'agisse d'un fonctionnaire d'un service social dont nous venons de parler, ou des collaborateurs d'un élu - serait moins digne de donner un avis que n'importe quel fonctionnaire de préfecture. Derrière la mise en cause des maires apparaît ainsi une mise en cause à la fois de l'efficacité et de la neutraité de la fonction publique territoriale qui me semble assez gênante.
    Quant à la proposition portée par le sous-amendement et tendant à permettre au préfet, dans certain cas, de demander son avis à l'élu de proximité, elle ne peut être que positive. Cela devrait même rassurer ceux qui sont attachés à cet aspect des choses. Ayons un peu confiance, faisons preuve de confiance en élaborant ce texte. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 182 rectifié.
    (Le sous-amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques n°s 64 et 45 modifiés par les sous-amendements adoptés.
    (Ces amendements, ainsi modifiés, sont adoptés.)
    M. le président. En conséquence, ce texte devient l'article 3 est ainsi rédigé et l'amendement n° 45 tombe.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures.)
    M. le président. La séance est reprise.

Après l'article 3

    M. le président. M. Mariani, rapporteur, et M. Vanneste ont présenté un amendement, n° 65 corrigé, ainsi libellé :
    « Après l'article 3, insérer l'article suivant :
    « Après l'article 6 de la même ordonnance, il est inséré un article 6 bis ainsi rédigé :
    « Art. 6 bis. - A moins qu'il ne soit statué immédiatement sur la demande, tout étranger admis à souscrire une demande de première délivrance d'une carte de séjour temporaire, d'une carte de résident ou d'un titre de séjour prévu par une stipulation internationale en vigueur régulièrement introduite dans l'ordre interne se voit remettre un récépissé. Ce document autorise la présence de l'étranger sur le territoire français jusqu'à ce qu'il soit statué sur sa demande sans préjuger de la décision définitive qui sera prise au regard de son droit au séjour.
    « La demande de renouvellement d'une carte de séjour temporaire, d'une carte de résident ou d'un titre de séjour prévu par une stipulation internationale en vigueur régulièrement introduite dans l'ordre interne vaut autorisation de séjour jusqu'à la décision prise sur la demande par l'autorité administrative, dans la limite de trois mois à compter de la date d'expiration du titre dont le renouvellement est demandé. Pendant cette période, l'étranger conserve l'intégralité de ses droits sociaux.
    « Sauf s'il s'agit d'un étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié, la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, d'un récépissé de demande de premier titre de séjour, ou d'un récépissé de demande d'asile n'a pas pour effet de régulariser les conditions de l'entrée en France. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. L'auteur de cet amendement très intéressant, car il porte une mesure de simplification, est M. Vanneste. Si vous le permettiez M. le président, je lui laisserai le soin de le défendre.
    M. le président. Vous avez la parole, monsieur Christian Vanneste.
    M. Christian Vanneste. Cet amendement, qui a été approuvé par la commission, donc par la majorité, est de nature à faire justice de la suspicion systématiquement exprimée contre ce texte. En effet, il repose sur deux principes.
    Le premier est l'humanisme,...
    M. André Gerin. Faut voir !
    M. Christian Vanneste. ... puisqu'il s'agit notamment d'améliorer les conditions d'accueil des étrangers en mettant fin aux queues qui se forment dès cinq heures du matin devant les guichets où leur sont délivrés les récépissés tant attendus pour prolonger leur séjour de quelques mois.
    Le second principe est la confiance, puisque nous proposons de supprimer la noria des récépissés de renouvellement et les attentes prolongées dans les conditions difficiles qui prévalent généralement, en demandant simplement que les étrangers renouvellent leur titre de séjour, trois mois avant la date d'expiration - six mois avant s'ils sont des résidents - tout en prévoyant un délai de trois mois après cette date, durant lesquels leurs droits ne sont pas le moins du monde suspendus.
    En fait, il est proposé d'alléger la tâche des services et de faire en sorte non seulement que l'administration soit mieux à même d'accueillir les étrangers afin que ceux-ci soient plus à l'aise, mais aussi que les contrôles soient exercés d'une manière plus détendue, plus sereine, et sans doute également beaucoup plus précise.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Très bien !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 65 corrigé.
    (L'amendement est adopté.)

Article 4

    M. le président. « Art. 4. - Le premier alinéa de l'article 8-3 de la même ordonnance est complété par les mots : "ou qui, ayant été contrôlés à l'occasion du franchissement de la frontière en provenance d'un pays tiers aux Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, ne remplissent par les conditions d'entrée prévues à l'article 5 de cette convention ou à l'article 5 de la présente ordonnance. »
    La parole est à M. Christophe Caresche, inscrit sur l'article.
    M. Christophe Caresche. Nous allons examiner deux articles qui instaurent la prise d'empreintes digitales au moment d'une demande de titre de séjour - article 4, et pour l'obtention d'un visa - article 5.
    Nous ne sommes pas opposés sur le principe à la constitution de ces fichiers...
    M. Claude Goasguen. Très bien !
    M. Christophe Caresche. ... dès lors qu'ils sont conformes aux règles édictées par la CNIL et que cela donne lieu à un décret en Conseil d'Etat. Mais le rapporteur devrait, je crois, nous fournir des précisions à cet égard.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. En effet, merci !
    M. Christophe Caresche. Cela dit, nous aimerions obtenir au cours de la discussion, des informations sur les moyens matériels qui seront mis en oeuvre pour constituer ces fichiers. Ils ne peuvent qu'être exceptionnels étant donné le nombre considérable des données.
    Le fait est que nous avons éprouvé quelque réticence au départ. Mais puisque, lors du dernier Conseil européen, tous les pays se sont engagés à constituer des fichiers de ce type, nous pensons que la France doit agir de même.
    M. le président. MM. Braouezec et Gerin et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 304, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 4. »
    La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Cet article est la première étape, avant l'article 5, de la généralisation de la prise des empreintes digitales des étrangers, laquelle avait été rendue possible par la loi Debré de 1997, pour les personnes sollicitant un titre de séjour, ces empreintes faisant l'objet d'un traitement informatisé. Le présent projet de loi en prévoit l'extension aux étrangers qui franchissent illégalement la frontière en provenance de pays tiers.
    Cette mesure, de notre point de vue, porte atteinte à la liberté individuelle, en ce qu'elle concerne des personnes qui pourraient n'avoir fait l'objet d'aucune poursuite ni d'aucune mesure d'éloignement.
    Le fichage systématique des empreintes digitales des étrangers accentue le caractère répressif de notre législation en permettant un contrôle généralisé et permanent des étrangers, en France et aux frontières. Arguant de la lutte contre l'immigration clandestine, vous allez stigmatiser un peu plus tous les étrangers qui vivent régulièrement sur notre territoire.
    M. Pierre Cardo. Par définition, les Français ne vivent pas en situation irrégulière sur notre territoire !
    M. André Gerin. Il est surprenant que vous ne fassiez pas, à ce stade de l'examen du projet de loi, référence au système EURODAC, qui a précisément pour objectif de créer, au niveau européen, un système de comparaison des empreintes digitales des demandeurs d'asile et des immigrants clandestins destiné à faciliter l'application de la convention de Dublin, et qui permet de déterminer l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile.
    Enfin, dans le nouvel article 8-4 que vous entendez ajouter à l'ordonnance de 1945, il n'est fait aucune mention des conditions de conservation des données et des empreintes digitales relevées, ce qui pose un véritable problème. C'est ce qui motive notre amendement de suppression de l'article 4.
    M. Pierre Cardo. Où est le problème ?
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. La commission a repoussé l'amendement n° 304.
    Monsieur Gerin, ce fichier est une mesure pratique. On a déjà rappelé que 90 % des clandestins sont entrés régulièrement dans notre pays. Comment voulez-vous qu'on retrouve leur origine si on ne garde pas trace de leurs empreintes digitales ?
    L'article 4 est parfaitement équilibré et j'appelle votre attention sur l'amendement suivant, n° 460, dont j'espère qu'il sera adopté. Il fournira, en effet, toutes les garanties pour l'accès à ces données et leur conservation, de même que l'amendement n° 67.
    Quant à EURODAC, c'est un fichier relatif aux demandeurs d'asile. Il n'a strictement rien à voir avec les demandeurs de visa.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis.
    M. le président. La parole est à M. Christian Estrosi.
    M. Christian Estrosi. Puisque M. Gerin prétend que nous allons stigmatiser les étrangers, je lui rappelle qu'il fut un temps où personne, en France, ne pouvait se voir délivrer une carte d'identité, dès son plus jeune âge, sans accepter de donner en échange l'empreinte de son pouce ou de son index. Cela n'a jamais choqué qui que ce soit. Qui plus est, cela s'inscrit parfaitement dans le prolongement de la loi d'orientation et de programmation sur la sécurité intérieure.
    Quant à M. Caresche, je ne peux que le remercier pour ses propos « d'ouverture ». En défendant son exception d'irrecevabilité, il s'était enquis auprès du Gouvernement des moyens qui pourraient être consacrés à l'automatisation du traitement de ces fichiers, à leur centralisation, à l'organisation de la collecte dans chaque consulat, etc.
    Qu'il ne permette, sur ce point, une réflexion personnelle que M. le ministre ne devrait pas désavouer. Si nous mettons en place un système d'empreintes digitales, nous aurons à traiter, sur notre territoire national, beaucoup moins de cas d'étrangers en situation irrégulière. Nous allons donc réaliser une économie de gestion qui pourra être réinvestie dans la police technique et scientifique, laquelle, à Ecully près de Lyon, est déjà fort bien organisée pour ce genre de traitement. Par ailleurs, la LOPSI prévoyait, tant pour les empreintes digitales, que pour les empreintes génétiques et le traitement des fichiers STIC, de renforcer les moyens de la police technique et scientifique. En rationalisant et en regroupant les énergies, nous pourrons appliquer efficacement ce projet de loi.
    M. le président. La parole est à M. Patrick Goasguen.
    M. Claude Goasguen. Je voudrais insister sur la nature de ces deux articles car l'orateur communiste les a quelque peu caricaturés. Non seulement ils ne constituent pas une régression, mais ils réorganisent notre dispositif d'immigration. Certes, monsieur Caresche, il reste à déterminer les moyens et M. le ministre devra nous en informer. Sans doute le fera-t-il dans les mois qui viennent.
    Cela dit, ce système pose un problème administratif. Les consulats sont-ils les mieux placés pour être les récepteurs d'un système d'organisation et de relevé d'empreintes digitales ? Nous évoluons tranquillement vers un système que je trouve pour ma part positif. Il ne faut pas mélanger les choses : la diplomatie, qui a des activités internationales - et l'exercice diplomatique de rapprochement est délicat ; le contrôle, qui est une activité tout aussi noble et tout aussi importante pour la collectivité nationale, mais qui ne peut pas être exercé par des gens qui viennent des mêmes administrations.
    Nous avons beaucoup à apprendre des Américains car les Etats-Unis sont nés de l'immigration, et leur politique de l'immigration est plus en avance que la nôtre. Les Américains ont finalement constitué un service de l'immigration dépendant du département de la sécurité, de manière à laisser les affaires étrangères libres de leurs activités diplomatiques.
    Les articles 4 et 5 posent un vrai principe, édifient un soubassement nécessaire. Il faut des moyens et il faut poursuivre jusqu'au bout la réflexion sur les problèmes administratifs : créons un véritable service de l'immigration, dépendant du ministère de l'intérieur, au sein des ambassades et des consulats, comme cela se fait dans les grands pays démocratiques.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Très bien !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Tout à fait !
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Comme M. Gerin, je ne comprends pas pourquoi, dans l'exposé des motifs, il n'est pas fait référence au système EURODAC, qui est en principe opérationnel depuis le 15 janvier 2003.
    Vous nous répondez, monsieur le rapporteur, qu'il ne s'applique qu'aux demandeurs d'asile, ce qui n'est pas vrai puisqu'il s'applique aussi à certaines catégories d'immigrés illégaux, dans le but de permettre l'application de la convention de Dublin.
    Vous voulez étendre la prise d'empreintes digitales aux personnes qui sollicitent un titre de séjour, et à celles qui franchissent illégalement la frontière en provenance d'un pays tiers. Et on verra que l'article 5 aggravera encore la méfiance vis-à-vis des étrangers.
    Nous trouvons ces deux articles dangereux.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Monsieur Mamère, je persiste à affirmer que le fichier EURODAC ne s'applique qu'aux demandeurs d'asile ! Je vous invite à lire le rapport dont je suis l'auteur au nom de la délégation pour l'Union européenne. J'y ai passé deux mois, je connais donc un peu le sujet ! Ce fichier a été créé uniquement pour éviter la demande multiple d'asile, pour que la même personne ne puisse pas déposer une demande d'asile dans plusieurs pays et pour faire en sorte que l'on sache quel est le pays qui, ayant reçu la demande d'asile en premier, devra la traiter.
    Du reste, si nous avions mis en relation un fichier de personnes demandant l'asile politique et des fichiers de personnes demandant des visas, vous seriez les premiers à nous accuser...
    M. Claude Goasguen. De croisement de fichiers !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. ... de « flicage » !
    M. Gérard Léonard. Tout à fait !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Là, au contraire, tout est séparé et tout est garanti.
    Si j'ai mis des guillemets, c'est...
    M. Pierre Cardo. Parce que c'est une citation !
    M. Thierry Mariani. ... parce que je le dis avec ironie. Bien évidemment, nous ne voulons pas tomber dans ce travers !
    M. le président. La parole est à M. Etienne Pinte.
    M. Etienne Pinte. Sur ces articles 4 et 5, monsieur le ministre, j'ai besoin d'éclaircissements.
    Comment lutter contre les filières de travail clandestin venant de l'étranger ?
    Je voudrais vous soumettre le problème auquel j'ai été confronté il y a quinze jours dans ma ville. Nous avons dû démanteler une filière de travailleurs clandestins d'origine égyptienne : quatorze d'un coup ! Ils étaient tous en situation régulière puisque sous visa touristique, mais ils travaillaient au noir. Ils sont donc considérés, selon la législation française actuelle, comme des victimes d'employeurs qui, eux, seront poursuivis par l'URSAFF et la direction des services fiscaux, entre autres. Je pensais qu'ils étaient tous sous visa français. Pas du tout : ils avaient des visas italiens, donc d'un pays appartenant à l'espace Schengen.
    Les services de la préfecture craignent de ne pas pouvoir les renvoyer, non pas dans l'espace Schengen, mais chez eux, ce qui serait préférable puisqu'ils ont commis une infraction à la législation du travail en France.
    La législation permet-elle aux autorités préfectorales de renvoyer chez eux des étrangers sous visa touristique mais qui ont été arrêtés pour travail clandestin ? Peut-on les renvoyer en Italie - ce qui, du reste, ne serait pas très efficace ? Ces personnes revenaient tous les six mois en Europe après être retournées au Caire et avoir redemandé un visa pour un autre pays de l'espace Schengen.
    Comment lutter contre ce phénomène récurrent ? Une harmonisation des législations des pays de l'espace Schengen ne permettrait-elle pas, grâce à des croisements de fichiers, de ne pas délivrer de visa à des personnes qui viennent tous les six mois dans nos pays respectifs pour y travailler de façon clandestine ?
    Telle est ma question. Elle n'est pas simple et j'ai été incapable de déposer un amendement susceptible d'y répondre. Les autorités préfectorales souhaitent vivement voir résoudre ce problème.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Pinte, le problème va être résolu. Actuellement, aucune santion n'est prévue à l'encontre d'un étranger en situation régulière, détenteur d'un visa de tourisme, qui travaille. Dans le cours de la discussion, un amendement de la commission va en créer une. Un peu comme pour le racolage, la commission de ce délit nous permettra de renvoyer l'étranger en situation régulière. Ainsi la filière pourra être démantelée.
    La réponse à votre question se trouve donc dans ledit amendement, qui comblera cette faille de notre législation.
    Quant à l'harmonisation entre les différents pays de l'espace Schengen, elle est évidemment nécessaire. Ainsi, au dernier conseil justice et affaires intérieures, j'ai proposé - cela a été accepté par plusieurs pays et nous l'adopterons à l'occasion de la prochaine réunion - que le pécule minimum prévu par les accords de Schengen pour l'obtention d'un visa de tourisme soit le même en Italie, en Espagne, en France, en Grande-Bretagne ou en Allemagne, ce qui n'est pas le cas. Nous travaillons à cette harmonisation, mais « à l'européenne », ce qui signifie qu'il faut que tout le monde soit d'accord.
    Cela dit, à vos deux questions, monsieur Pinte, le Gouvernement est en mesure d'apporter des réponses précises.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 304.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de trois amendements, n°s 460, 343 et 365 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 460, présenté par M. Mariani, rapporteur, est ainsi rédigé :
    « Au début de l'article 4, insérer le paragraphe suivant :
    « I. - La première phrase du premier alinéa de l'article 8-3 de la même ordonnance est ainsi rédigée : " Afin de mieux garantir le droit au séjour des personnes en situation régulière et de lutter contre l'entrée et le séjour irréguliers des étrangers en France, les empreintes digitales ainsi qu'une photographie des ressortissants étrangers, non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, qui sollicitent la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions prévues à l'article 6 sont relevées, mémorisées et font l'objet d'un traitement automatisé dans les conditions fixées par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés . »
    L'amendement n° 343, présenté par M. Perruchot et M. Lagarde, est ainsi rédigé :
    « Au début de l'article 4, insérer le paragraphe suivant :
    « I. - Au début de la première phrase du premier alinéa de l'article 8-3 de la même ordonnance, après les mots : "les empreintes digitales, sont insérés les mots : "ainsi qu'une photographie. »
    L'amendement n° 365 rectifié, présenté par M. Cardo et M. Cova, est ainsi rédigé :
    « Au début de l'article 4, insérer le paragraphe suivant :
    « I. - Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 8-3 de la même ordonnance, les mots : "peuvent être sont remplacés par le mot : "sont, et le mot : "faire est remplacé par le mot : "font. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 460.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. L'amendement n° 460, que la commission a accepté et qui est donc présenté par le rapporteur, est cependant l'aboutissement d'initiatives diverses et convergentes. Il reprend, sur le fond, un amendement n° 66 qui définissait la finalité du fichier, conformément au souhait exprimé par la CNIL dans son audition sur le projet de loi, amendement que j'ai retiré puisque je l'ai intégré à l'amendement n° 460. Cet amendement, monsieur Gerin, prend en compte vos inquiétudes.
    L'amendement n° 460 reprend également - mais je leur laisserai la parole - l'amendement n° 343 de M. Perruchot qui complète le fichier des empreintes digitales par la prise d'une photographie de l'étranger concerné, et l'amendement n° 365 rectifié de M. Cardo qui donne au relevé des empreintes digitales et des photographies un caractère obligatoire et systématique.
    Pour des raisons de forme, il est apparu préférable de regrouper ces différentes propositions, mais j'associe naturellement leurs auteurs à la rédaction de l'amendement n° 460.
    M. le président. Je remercie M. le rapporteur pour la clarté avec laquelle il a exprimé la position de la commission.
    La parole est à M. Nicolas Perruchot pour défendre l'amendement n° 343.
    M. Nicolas Perruchot. Le rapporteur a exprimé notre position. La rédaction de l'amendement n° 460 prend en compte tout ce que notre amendement proposait. Il s'agit de donner une garantie supplémentaire face aux fraudes et de rendre notre système de contrôle plus efficace. Nous avions évidemment souhaité - et la mesure a été reprise par l'amendement n° 460 - pouvoir associer à la prise d'empreintes la prise d'une photographie, ce qui nous semble pallier toute fraude posible qui rend sans effet la prise d'empreintes initiales.
    L'amendement n° 460 satisfaisant l'amendement n° 343, nous retirons ce dernier.
    M. le président. L'amendement n° 343 est retiré.
    La parole est à M. Pierre Cardo, pour défendre l'amendement n° 365 rectifié.
    M. Pierre Cardo. L'amendement n° 365 rectifié sera lui aussi retiré, puisque, comme l'a expliqué le rapporteur, l'amendement n° 460 répond parfaitement à son objet qui était de rendre obligatoire la prise d'empreintes : qu'on ne dise plus qu'elles « puissent » être prises, mais qu'elles le « soient ». Il est bien d'offrir une possibilité ; il est préférable, dans le cas présent, de rendre la mesure obligatoire. Sinon, nous n'aurons jamais de fichier complet.
    M. le président. L'amendement n° 365 rectifié est retiré.
    Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 460 ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. La référence faite, dans l'amendement n° 460, à la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés est très positive.
    Je me demande toutefois pourquoi ajouter la photographie. Je ne suis pas spécialiste, mais je croyais savoir que les empreintes digitales étaient uniques. Je ne vois pas l'intérêt d'ajouter la photographie.
    M. Claude Goasguen. C'est de l'information !
    M. Pierre Cardo. On aurait pu prévoir les empreintes vocales !
    M. Christophe Caresche. Les empreintes digitales ne suffisent-elles pas ?
    M. le président. La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. On a constaté que certaines personnes se brûlaient les phalanges et qu'il était impossible de vérifier des empreintes après cela. Il faut donc ajouter la photographie à la prise d'empreintes.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. C'est vrai !
    M. Serge Blisko. C'est Fantômas !
    M. Claude Goasguen. Regardez Mamère : il s'est brûlé les bouts des doigts !
    M. Christophe Caresche. On ne les empêchera pas de recourir à la chirurgie esthétique.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 460.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 67, ainsi libellé :
    « Compléter l'article 4 par le paragraphe suivant :
    « III. - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, fixe les modalités d'application du présent article. Il précise la durée de conservation et de mise à jour des informations enregistrées, les modalités d'habilitation des personnes pouvant y accéder ainsi que, le cas échéant, les conditions dans lesquelles les personnes intéressées peuvent exercer leur droit d'accès. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Cet amendement renvoie à un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la CNIL, le soin de préciser les modalités d'habilitation des personnes qui pourront accéder à ce fichier, la durée de conservation et les conditions de mise à jour des informations enregistrées, ainsi que l'exercice du droit d'accès par les personnes concernées.
    Il devrait faire l'unanimité, puisqu'il a été rédigé après l'audition des responsables de la CNIL qui l'ont fortement suggéré.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Le groupe UDF se réjouit de cet amendement présenté par le rapporteur après les auditions en commission. L'opposition nous soupçonne systématiquement de vouloir contourner, détourner la loi, de manipuler les fichiers et les conditions d'entrée et de séjour. Vous voyez bien que la majorité elle-même préconise ce type de contrôle.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 67.
(L'amendement est adopté.)

    M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 4, ainsi modifié, est adopté.)

Article 5

    M. le président. « Art. 5. - Après l'article 8-3 de la même ordonnance, il est créé un article 8-4 ainsi rédigé :
    « Art. 8-4. - Les empreintes digitales des ressortissants étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, qui sollicitent la délivrance, auprès d'un consulat ou à la frontière extérieure des Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, d'un visa afin de séjourner dans un Etat membre de l'Union européenne peuvent être relevées, mémorisées et faire l'objet d'un traitement automatisé dans les conditions fixées par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. »
    Plusieurs orateurs sont inscrits à l'article 5. La parole est à M. Claude Goasguen.
    M. Claude Goasguen. Je me retire.
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Je me retire.
    M. le président. M. Mamère se retire-t-il également ?
    M. Noël Mamère. Non, monsieur le président, je ne me retire pas.
    M. le président. On ne retire pas les orateurs, on ne retire que les amendements. (Sourires.)
    Vous avez la parole.
    M. Noël Mamère. Ce n'est pas pour le plaisir de m'exprimer, mais parce que je fais mon travail de député.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Ça veut dire quoi, ça ?
    M. Noël Mamère. L'article 5... (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) J'entends quelques frémissements sur vos bancs ; peut-être êtes-vous heureux quand je parle.
    M. Claude Goasguen. Oui, ça nous détend !
    M. Noël Mamère. On a le droit de s'exprimer, même lorsque l'on est dans l'opposition, même lorsque l'on n'a que trois députés. Il faudrait se souvenir de cela : nous sommes, les uns et les autres, majorité comme opposition, porteurs au même titre d'une part de la souveraineté nationale. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Christophe Lagarde. C'est de la paranoïa !
    M. Pierre Cardo. Ça lui permet de savoir ce qu'il va dire !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Ça lui donne le temps de retrouver ses notes !
    M. Christian Vanneste. Tout droit implique des devoirs, monsieur Mamère !
    M. le président. Mes chers collègues, laissez M. Mamère développer son argumentation.
    M. Noël Mamère. Nous abordons donc l'article 5, qui vient après l'article 4...
    Mme Sylvia Bassot. Bravo ! Vous savez compter jusqu'à cinq !
    M. Noël Mamère. ... et qui étend le système des empreintes à la demande de visa. Cette disposition est en quelque sorte la reprise, dans notre droit interne, des discussions qui ont déjà été entamées au niveau européen dans le cadre de la coopération. Il faut peut-être rappeler ici qu'il existe déjà, depuis le 8 mars 1996, un fichier automatisé des demandes de visa, dans le cadre de la convention de Schengen : c'est ce qu'on appelle le réseau de consultation Schengen, qui prévoit de conserver différentes données, comme l'état civil, la profession, l'état civil du conjoint, le titre de voyage, la demande de visa, le suivi des demandes ou les délivrances de visa, pendant une période de deux années pour les délivrances et de cinq ans pour les refus.
    Cet article s'inspire donc des travaux communautaires, et a pour objet d'établir des rapprochements a posteriori afin d'identifier une personne à qui un visa a été délivré et qui se maintiendrait en France sous une fausse identité. Outre que le projet entretient, une fois de plus, l'association « étranger-fraudeur », comme nous l'a prouvé il y a quelques instants M. Perruchot en expliquant que les photos étaient nécessaires car certains se coupaient les phalanges pour ne pas être reconnus, et l'idée qu'il est extrêmement facile d'obtenir un visa en trichant,...
    M. Alain Marsaud. Et allez donc !
    M. Noël Mamère. ... on peut craindre, comme ce fut le cas lors de la mise en place du système d'information Schengen, des problèmes de fonctionnement. Celui, notamment, qui aurait demandé plusieurs visas en toute légalité, pourrait être regardé avec suspicion. De quel recours - c'est la question que nous posons au rapporteur et au Gouvernement - dispose l'étranger qui réside hors de France, auquel on opposerait la mention de son nom dans ledit fichier pour lui refuser la délivrance d'un nouveau visa ?
    Il faut par ailleurs noter que le relevé des empreintes digitales à l'occasion d'une demande de visa pourrait être effectué, même - et c'est ce qui est grave - lorsque cette demande émane d'un membre de la famille d'un ressortissant de l'Union européenne. Cette disposition irait à l'encontre du droit communautaire, qui dispose que les Etats membres d'accueil doivent favoriser l'obtention de visas, sous peine de violer le droit à la libre circulation du ressortissant communautaire, souhaitant être accompagné par les membres de sa famille.
    Nous considérons donc que cette disposition n'a pas un caractère tout à fait constitutionnel, que, même si elle prétend adapter les discussions communautaires qui ont lieu pour l'harmonisation de la législation sur l'immigration, elle n'est pas en concordance avec le droit communautaire, notamment pour ce qui concerne les ressortissants de l'Union européenne. C'est la raison pour laquelle nous considérons qu'il faut combattre cet article 5.
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 221 et 305.
    L'amendement n° 221 est présenté par M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ; l'amendement n° 305 est présenté par M. Braouezec, M. Gerin et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 5. »
    Monsieur Mamère, peut-on considérer que l'amendement n° 221 est défendu ?
    M. Noël Mamère. Tout à fait, monsieur le président.
    M. le président. La parole est à M. Gerin, pour soutenir l'amendement n° 305.
    M. André Gerin. Les prises d'empreintes digitales sont également prévues pour tous ceux qui solliciteront la délivrance d'un visa, mesure encore plus scandaleuse que la précédente, puisque les étrangers qui demandent un visa ne sont pas tous, a priori, de dangereux délinquants. Pourquoi organiser leur fichage systématique ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    La mise en place d'un tel fichier automatisé aurait pour but de contrarier les récidives dans les tentatives d'entrée sur le territoire avec des documents frauduleux et sous différentes identités, et de pouvoir faire des rapprochements a posteriori pour identifier une personne pour laquelle un visa a été délivré et qui se maintiendrait en France sous une fausse identité. Avec cet article, on entretient l'amalgame qui consiste à associer systématiquement l'étranger à un fraudeur à la recherche de la moindre faille dans notre droit, et du moindre détournement de procédure susceptible de lui permettre de rester illégalement sur notre territoire.
    Une fois de plus, on veut donner l'impression qu'il est extrêmement facile d'obtenir un visa. De manière générale, cela jette le discrédit sur tous les étrangers immigrés réguliers présents en France. Comment voulez-vous que l'étranger qui demanderait plusieurs visas en toute légalité ne soit pas regardé avec suspicion ?
    Par ailleurs, rien n'est dit, dans le projet de loi, sur la conservation des données. Si cette disposition était réellement appliquée, le fichier pourrait contenir des milliers d'empreintes digitales. Nous aimerions au moins connaître les modalités de consultation des données, notamment les personnes qui seront habilitées à consulter les fichiers. Des autorités étrangères auront-elles la possibilité de le faire ? La question mérite d'être posée. J'ai d'ailleurs exprimé le même souci lors du débat, en janvier dernier, sur le projet de loi de sécurité intérieure.
    Ces nombreuses zones d'ombre et ces interrogations sur la légitimité d'un tel recensement de données personnelles nous ont conduit à déposer cet amendement de suppression de l'article 5.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Défavorable. Monsieur Gerin, prendre les empreintes digitales d'une personne ne signifie pas qu'elle est considérée comme un dangereux délinquant. Je pense que l'ensemble des personnes présentes dans cet hémicycle ont eu, un jour, à donner leurs empreintes digitales, ne serait-ce que pour une carte d'identité. Personne n'a eu, alors, l'impression d'être considéré comme le dernier des voyous.
    M. Jean Roatta. Tout ce qu'il y avait à faire, c'était de se nettoyer les doigts après !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Cela reste une formalité relativement courante qu'il convient de ne pas caricaturer.
    Par ailleurs, l'article 5 est parfaitement en phase avec les travaux en cours à l'échelle de l'Union européenne.
    M. André Gerin. C'est bien ce qui nous inquiète !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Je vous rappelle que, à l'issue du Conseil européen de Thessalonique des 19 et 20 juin derniers, la présidence a estimé « nécessaire de dégager au sein de l'Union européenne une approche cohérente en ce qui concerne les identificateurs ou les données biométriques ».
    M. André Gerin. Tout à fait !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Le Conseil européen a également invité « la Commission à élaborer les propositions appropriées en commençant par la question des visas ».
    Enfin, pour lever vos réticences sur l'accès à la consultation de ce fichier, je déposerai les mêmes amendements qu'à l'article 4. J'espère qu'ils seront adoptés, car, conformément au souhait de la CNIL, ils garantissent, entre autres, l'accessibilité et la conservation du fichier.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 221 et 305.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    Mme Marie-Jo Zimmermann. Le groupe communiste ne vote même pas pour ses amendements !
    M. Christian Vanneste. Il s'est abstenu !
    M. François Vannson. Les explications du rapporteur étaient sans doute convaincantes !
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 68, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le début du texte proposé pour l'article 8-4 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 :
    « Afin de mieux garantir le droit au séjour des personnes en situation régulière et de lutter contre l'entrée et le séjour irréguliers des étrangers en France, les empreintes digitales... (Le reste sans changement.) »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. L'amendement n° 68 précise la finalité du traitement automatisé des empreintes digitales des ressortissants étrangers qui solliciteront la délivrance d'un visa. Là encore, cet amendement fait suite aux observations de la CNIL entendues en commission des lois.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 68.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, M. Perruchot et M. Lagarde ont présenté un amendement, n° 69, ainsi rédigé :
    « Dans le texte proposé pour l'article 8-4 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, après les mots : "empreintes digitales, insérer les mots : "ainsi qu'une photographie. »
    La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. L'amendement est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 69.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 70, ainsi rédigé :
    « Dans le texte proposé pour l'article 8-4 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, substituer aux mots : "dans un Etat membre de l'Union européenne, les mots : "en France ou sur le territoire d'un autre Etat partie à ladite convention. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Amendement de précision.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 70.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, M. Perruchot et M. Lagarde ont présenté un amendement, n° 71, ainsi rédigé :
    « Dans le texte proposé pour l'article 8-4 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, substituer aux mots : "peuvent être relevées, mémorisées, et faire, les mots : "sont relevées, mémorisées, et font. »
    Sur cet amendement, M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ont présenté un sous-amendement, n° 467, ainsi rédigé :
    « Au début du dernier alinéa de l'amendement n° 71, avant le mot : "sont, insérer les mots : "à l'exception du visa étudiant. »
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir l'amendement n° 71.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Il nous semble nécessaire de rendre la prise d'empreintes obligatoire pour deux raisons. La première est qu'un fichier incomplet manquerait d'efficacité. La seconde est qu'il faut éviter les éventuels problèmes diplomatiques qu'évoquait notre collègue Claude Goasguen. Je suis tout à fait d'accord avec lui : le service de l'immigration doit être complètement déconnecté des affaires étrangères. « Peuvent être » laisse la possibilité de faire un choix entre des pays, ce qui ne manquera pas de poser un problème diplomatique avec ceux qui se verront imposer la mesure. « Sont » concerne tous les pays et évite ce type d'incident. Cela nous paraît une nécessité.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Claude Goasguen.
    M. Claude Goasguen. Un problème se pose néanmoins : si l'on rédige cet article comme une obligation, il faut veiller à ce que, a contrario, le matériel permettant de relever les empreintes digitales soit bien présent dans tous les consulats. Pour cette raison, j'avais formulé tout à l'heure une nuance. Il faut absolument que cette mesure soit matérialisée dans les plus brefs délais.
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère, pour soutenir le sous-amendement n° 467.
    M. Noël Mamère. Ce sous-amendement vise à dispenser les étudiants étrangers de la prise d'empreintes. La réglementation est déjà très stricte, mais on va mettre un frein supplémentaire à la venue de ces étudiants dans notre pays. Il est, à cet égard, intéressant de regarder l'actualité. Dans Le Monde de cet après-midi, on peut lire, page 3, à l'occasion de la visite du président américain en Afrique, un article intitulé : « Au Sénégal, l'immigration vers les Etats-Unis a le vent en poupe. » « Les jeunes sont de plus en plus nombreux à aller étudier aux Etats-Unis. "Beaucoup de copains sont partis après le bac pour intégrer une université amécicaine, constate [...] une étudiante en terminale du collège Saint-Michel à Dakar. »
    M. Claude Goasguen. Et alors ?
    M. Noël Mamère. « Aujourd'hui, près de 40 000 Sénégalais vivraient aux Etats-Unis, contre 80 000 en France. »
    Je n'ai pas l'intention de vanter dans cet hémicycle les mérites des Etats-Unis.
    M. Maxime Gremetz. Ce serait malvenu !
    M. Noël Mamère. Mais je ne raconte pas n'importe quoi. Notre façon d'accueillir les étrangers c'est de dresser des barrières devant tous ceux qui pourraient contribuer à la vitalité de notre pays et, une fois qu'ils y sont retournés, de leur pays.
    M. Pierre Cardo. Arrêtons !
    M. Noël Mamère. Il est absolument incroyable de voir que l'Amérique du républicain Bush, qui prend l'Afrique pour un nouveau terrain d'aventure, d'exploitation et de prédation, devienne l'objet du désir des Sénégalais et des autres Africains, alors que nous avons avec ces pays des relations anciennes, datant de l'époque des colonies, et que nous avons vis-à-vis d'eux non seulement une dette, mais un devoir de réparation. La première chose à faire, de ce point de vue, serait de les accueillir autrement qu'en les considérant comme de dangereux étrangers.
    Mme Marie-Jo Zimmermann. C'est la caricature permanente !
    M. Claude Goasguen. A mon avis, il doit se tromper quelque part !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Avis défavorable.
    Monsieur Mamère, je ne pense pas qu'une personne qui souhaite venir étudier en France puisse être freinée parce qu'on va prendre ses empreintes digitales.
    M. Claude Goasguen. C'est absurde !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Je ne sais pas si vous étiez présent lorsque nous avons examiné l'article 1er. Je reconnaissais que la loi Chevènement RESEDA avait - c'est peut-être sa seule vertu - relancé la venue des étudiants étrangers en France. Les statistiques montrent qu'ils étaient 20 000 en 1990, 22 000 en 1991, que leur nombre était tombé au point le plus bas en 1995, à 15 000, avant de remonter aujourd'hui à 55 500. Il est vrai qu'il y a quelques années, nous avons connu un réel problème d'arrivée des étudiants étrangers.
    M. Christophe Caresche. Le problème, il s'appelait Pasqua !
    M. Claude Goasguen. Ça n'avait rien à voir avec Pasqua !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Aujourd'hui, nous avons repris la troisième place mondiale pour l'accueil des étudiants étrangers. Votre sous-amendement ne ferait pas que la France puisse délivrer plus de visas.
    M. Maxime Gremetz. Il n'apporte rien, mais il ne coûte rien. Alors, acceptez-le !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement a le même avis que le rapporteur, mais il apporte une précision à M. Mamère. Les Etats-Unis viennent d'annoncer qu'avant la fin de l'année tout étranger sollicitant un visa pour les Etats-Unis devra donner ses empreintes digitales. L'exemple de M. Mamère ne pouvait être mieux choisi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Claude Goasguen. Je savais que M. Mamère était de la CIA ! (Sourires.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. De quoi parle-t-on ? En réalité, la prise d'empreintes n'empêchera personne de venir. Un étudiant étranger souhaitant faire ses études en France n'aura pas plus de difficultés - sinon moins - à donner ses empreintes qu'à fournir une pièce d'identité ou un numéro de sécurité sociale. Le but de la mesure n'est pas de repousser les étudiants. Mais si, lorsqu'ils ont achevé leurs études, on décide de ne pas leur délivrer de carte de résident, si l'on juge préférable qu'ils retournent dans leur pays, et si, malgré cela, ils décident de se maintenir sur le territoire français et cherchent à échapper à une reconduite à la frontière, nous devons pouvoir savoir qui ils sont. Il s'agit simplement de faire en sorte que, si l'on décide qu'ils restent, ils puissent rester, et que si l'on décide qu'ils ne restent pas, ils ne puissent pas rester.
    Essayez donc, quand vous êtes aux Etats-Unis, pour y suivre des études ou pour toute autre raison, d'y rester en situation irrégulière, et vous verrez à quelle vitesse vous serez reconduit à la frontière : il y a là une grande différence avec la France.
    M. Noël Mamère. Ce n'est pas vrai !
    M. le président. La parole est à M. Christian Cabal.
    M. Christian Cabal. Monsieur le président, je ne voulais pas intervenir jusqu'à présent, mais l'Assemblée a récemment publié, à travers l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, un intéressant rapport sur la biométrie, dont je suis l'auteur. Il apparaît, au terme de cette étude, que, loin d'être spoliatrices pour la liberté individuelle, les données biométriques permettent au contraire de la protéger.
    En fait, le plus grand problème qui se pose à l'heure actuelle est celui de l'authentification d'un individu : on connaît les difficultés qu'entraînent dans la vie courante une usurpation d'identité.
    M. Christian Vanneste. C'est vrai !
    M. Christian Cabal. Les faits divers en fournissent régulièrement des exemples. La biométrie - qu'elle concerne les empreintes digitales, la reconnaissance de l'iris, la reconnaissance faciale ou d'autres systèmes dont la valeur scientifique est démontrée - permet de s'assurer qu'une personne est bien qui elle dit être. C'est donc un des éléments essentiels de la liberté de l'individu. Personne ne peut vous spolier de votre identité.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Parfaitement !
    M. Christian Cabal. Lorsque vous franchissez les frontières, lorsque vous avez accès à certains secteurs géographiques déterminés ou à certains systèmes informatiques, toutes les grandes puissances démocratiques, sans exception, ont mis en oeuvre des systèmes biométriques. Le ministre vient de l'indiquer : dès cette année - mais, ils ne sont pas les seuls - les Etats-Unis mettent en oeuvre à l'entrée sur leur territoire et, quelles que soient les personnes concernées, y compris les Français...
    M. Christophe Caresche. Surtout les Français !
    M. Christian Cabal. ... une procédure d'identification biométrique.
    Je vous conseille donc de vous reporter à cet ouvrage - que je n'ose pas moi-même qualifier d'« excellent » ! Vous y trouverez toutes les informations susceptibles de vous rassurer. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Serge Blisko.
    M. Serge Blisko. Je n'ai pas fait de rapport sur la biométrie, mais je lirai avec intérêt celui de notre collègue. En revanche, j'ai eu la chance, dans le cadre de mes fonctions parlementaires, de voir un certain nombre de pays d'Afrique.
    M. Maxime Gremetz. Ah ? Moi, ça ne m'est jamais arrivé.
    Mme Marie-Jo Zimmermann. Vous êtes un privilégié !
    M. Serge Blisko. Tout à l'heure, M. Mariani disait, à juste titre, que s'il est une disposition de la loi RESEDA qui avait bien marché, c'est celle qui facilitait l'entrée sur le territoire des étudiants, en particulier de ceux qui viennent de ce continent, qui souhaitent venir étudier chez nous. C'est un sujet sur lequel j'aimerais qu'on parle vrai. La politique menée en la matière, et notamment à partir de l'année 1993, a été désastreuse, tant pour l'image de la France que pour le rayonnement de l'Université française et l'influence de notre pays dans ces pays. Et nous nous sommes fait damer le pion par les Etats-Unis, qui n'ont pas eu de mal à le faire, comme l'a rappelé Noël Mamère, qu'on ne peut pas soupçonner de pro-américanisme. Il aurait pu citer aussi le Canada, anglophone ou francophone. Car, pour beaucoup d'étudiants, la solution, dès lors qu'il ne maîtrisent pas bien l'anglais, c'est d'aller à l'université Laval de Québec ou à l'université francophone de Montréal.
    Nous avons perdu beaucoup de terrain. N'était-il pas navrant d'entendre des ministres africains, notamment sénégalais, nous dire que leurs enfants n'avaient pas pu étudier chez nous et qu'ils les avaient donc envoyés aux Etats-Unis. Dans ce cas, ce n'était pas une question d'argent, mais bien un problème de visa.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Ce sont des fils de ministre...
    M. Serge Blisko. Sérieusement, si nous n'avons pas cette capacité d'accueil des étudiants, des doctorants, des thésards étrangers, en particulier des pays francophones, nous perdrons de l'influence vis-à-vis des Etats-Unis. C'est totalement navrant, parce que je crois que nous avons plus à apporter à ces jeunes garçons et à ces jeunes filles que les Etats-Unis d'Amérique, du point de vue de la culture, et de la manière d'aborder la modernité.
    Je voudrais vraiment qu'on fasse tout pour remonter cette pente mauvaise, médiocre, qui fait de ces étudiants les parents pauvres de l'accueil en France.
    M. Noël Mamère. La pente est raide !
    M. Serge Blisko. Il faut être extrêmement vigilants car ce problème dépasse le débat sur l'immigration. On entend souvent dire que les étudiants étrangers que l'on accueille vont ensuite rester chez nous. D'abord, tous ne restent pas. A ce propos, je me souviens d'une anecdote extraordinaire. Nous avons beaucoup de Maliens en France. Peu d'entre eux ont réussi à obtenir des situations très en vue. Ce sont plutôt les soutiers, dans tous les sens du terme, de notre économie. Or il faut savoir que celui qui guide les tirs des fusées à la NASA, aujourd'hui, est un Malien qui a commencé ses études au Mali, qui a été ingénieur en France, et à qui on n'a pas laissé la possibilité de rester chez nous. Il a donc donné son talent aux Etats-Unis. Quand on lui demande ce qu'il pense de la France, il répond : écoutez, moi, c'est aux Etats-Unis qu'on m'a donné ma chance, et, aujourd'hui, je suis directeur des tirs de la NASA à Cap Canaveral.
    M. le président. Merci, monsieur Blisko.
    M. Serge Blisko. Je m'arrête là, monsieur le président. Je voulais simplement vous raconter cette histoire, qui montre à quel point nous avons besoin d'être plus ouverts sur cette question.
    M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 467.
    (Le sous-amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 71.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 72, ainsi rédigé :
    « Compléter le texte proposé pour l'article 8-4 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 par l'alinéa suivant :
    « Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, fixe les modalités d'application du présent article. Il précise la durée de conservation et de mise à jour des informations enregistrées, les modalités d'habilitation des personnes pouvant y accéder ainsi que, le cas échéant, les conditions dans lesquelles les personnes intéressées peuvent exercer leur droit d'accès. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Je crois que l'amendement n° 72 répondra à vos craintes, monsieur Gerin, puisque, comme pour l'article 4, il s'agit, dans ce dernier amendement de l'article 5, de préciser la durée de conservation et de mise à jour des informations enregistrées dans ce nouveau fichier ainsi que les modalités d'habilitation des personnes pouvant y accéder. Je précise que, là encore, cet amendement a été rédigé à la suite de l'audition de responsables de la CNIL.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 72.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 5, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 5

    M. le président. M. Mariani, rapporteur, a présenté un amendement, n° 73, ainsi rédigé :
    « Après l'article 5, insérer l'article suivant :
    « Dans le dernier alinéa de l'article 9 de la même ordonnance, les mots : "au 5°, sont supprimés. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Amendement de coordination.
    M. le président. L'avis du Gouvernement est favorable.
    Je mets aux voix l'amendement n° 73.
    (L'amendement est adopté.)

Article 6

    M. le président. « Art. 6. - Les deux premiers alinéas de l'article 9-1 de la même ordonnance sont remplacés par les dispositions suivantes :
    « Les ressortissants des Etats membres de la Communauté européenne ou de l'Espace économique européen qui souhaitent établir en France leur résidence habituelle ne sont pas tenus de détenir un titre de séjour.
    « S'ils en font la demande, il leur est délivré, dans des conditions précisées par décret en Conseil d'Etat, un titre de séjour, sous réserve d'absence de menace pour l'ordre public.
    « Toutefois, demeurent soumis à la détention d'un titre de séjour durant le temps de validité des mesure transitoires éventuellement prévues en la matière par le traité d'adhésion du pays dont ils sont ressortissants, et sauf si ce traité en stipule autrement, les ressortissants des Etats membres de la Communauté européenne qui souhaitent exercer en France une activité économique. »
    La parole est à M. Claude Goasguen, inscrit sur l'article.
    M. Claude Goasguen. J'avais déposé un amendement que j'ai retiré, mais je voudrais poser une question au ministre. Il y a une certaine hypocrisie dans nos relations avec les Etats en voie d'adhésion à la Communauté européenne. Je sais bien qu'il est utile de donner des signes diplomatiques permettant de se rapprocher d'une certain nombre d'Etats, je pense en particulier à la Turquie, mais de cette conduite diplomatique je trouve que nous abusons. Au niveau de la Communauté européenne, nous devons avoir une attitude beaucoup plus franche.
    Il est clair qu'un Etat en voie d'adhésion à la Communauté européenne se voit imposer par les dispositions que nous sommes en train d'adopter une pratique encore discriminatoire puisqu'il s'agit en réalité des mêmes dispositions que celles qui s'appliquent aux autres Etats. Or je crois que c'est tout à fait contraire à la démarche de la dynamique européenne.
    Alors en l'état actuel des choses, je ne voudrais pas, par un amendement prématuré, compliquer les problèmes diplomatiques. Il reste que l'on voit encore une fois à quel point les problèmes d'immigration et les problèmes diplomatiques sont différents, et qu'il nous faut sortir du langage diplomatique pour aborder les problèmes réels. La situation, en ce qui concerne la liberté de circulation des ressortissants des Etats en voie d'adhésion à la Communauté européenne, ne me paraît pas satisfaisante.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Goasguen, juste un mot, pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté. Le Gouvernement est bien sûr favorable à l'élargissement de l'Europe. Cela veut donc dire que le Gouvernement souhaite que l'Union europénne permette aux dix nouveaux pays de se développer pour donner du travail à chacuns de leurs enfants.
    Mme Maryse Joissains-Masini. Tout à fait !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mais ce n'est pas non plus pour que tous les Polonais ou les Roumains viennent chez nous.
    M. Maxime Gremetz. Ne dites pas de mal des Polonais !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Si la Roumanie, la Pologne ou la Bulgarie intègrent la Communauté européenne, c'est pour que ces économies accèdent au développement, puissent donner du travail à leurs enfants, à leurs jeunes, et non pas pour que nos pays spolient leurs élites, et pour que nous payions deux fois, une fois pour l'adhésion de ces pays, une fois pour accueillir leurs ressortissants.
    Mme Maryse Joissains-Masini. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Et c'est d'ailleurs tellement vrai, monsieur Goasguen, que, dans la discussion que j'ai menée avec la Roumanie et avec la Bulgarie, j'ai constaté que l'application de nos accords se passe très bien. Et comme vous le voyez, il y a chaque semaine des retours groupés de Roumains en Roumanie, en plein accord avec le gouvernement roumain. Il y a une totale cohérence entre l'ouverture de l'Europe à ces nouveaux pays et la maîtrise des flux migratoires entre nous. Le sens de leur adhésion, c'est que l'ensemble de leurs économies accèdent au développement. Je tiens à le préciser parce que certains dénoncent ce qu'ils voient comme une contradiction : puisqu'ils viennent dans la Communauté européenne, c'est donc qu'ils peuvent venir travailler dans tous les pays de la Communauté européenne. Ce n'est pas exact. Ils viennent dans la Communauté européenne pour que leurs économies puissent accéder à un niveau de développement leur permettant de sortir du sous-développement et de donner un travail à chacun. Regardez, monsieur Goasguen, le problème que nous avons eu avec les Roumains, notamment dans la capitale, mais on pourrait prendre d'autres exemples. Je pense notamment aux Bulgares, mais aussi à bien d'autres.
    J'avais bien compris, monsieur Goasguen, que votre amendement était un amendement d'appel. Mais de toute façon, il y aura bien des discussions sur ce sujet, qui le mérite.
    M. le président. L'amendement n° 164 de M. Goasguen a été retiré.
    Je mets aux voix l'article 6.
    (L'article 6 est adopté.)

Après l'article 6

    M. le président. MM. Grand, Vanneste, Calvet, Cugnenc, Diefenbacher, Mme Franco, MM. Jeanjean, Mourrut et Schreiner ont présenté un amendement, n° 18, ainsi rédigé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « Dans le dernier alinéa de l'article 12 de la même ordonnance, après les mots : "passible de poursuites pénales sur le fondement des articles, sont insérées les références : "222-34 à 222-38,. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
    M. Jean-Pierre Grand. Il s'agit d'étendre la possibilité, pour l'autorité administrative, de retirer un titre de séjour aux étrangers titulaires d'une carte de séjour temporaire dès lors qu'ils sont passibles de poursuites pénales pour des infractions à la législation sur les stupéfiants, telles qu'elles sont définies dans les articles 222-34 à 222-38 du code pénal. Cet amendement peut paraître de portée modeste. Pour ma part, je ne le pense pas. Aussi, monsieur le ministre, s'il était adopté, cela me conduirait à retirer les deux autres amendements n°s 15 et 16, que j'avais déposés aux articles 24 et 38.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Avis favorable. L'amendement n° 18 présenté par notre collègue Grand prévoit le retrait de la carte de séjour temporaire délivrée à l'étranger passible de poursuites pénales pour les infractions graves à la législation sur les produits stupéfiants.
    Mme Maryse Joissains-Masini. Bravo !
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Cette mesure s'inscrit dans le prolongement direct de la loi du 18 mars 2003 relative à la sécurité intérieure dont Christian Estrosi était le rapporteur, qui donnait déjà la possibilité de retirer leur titre de séjour aux étrangers passibles de poursuites pénales sur d'autres fondements : la traite, le proxénétisme, le racolage, l'exploitation de la mendicité. D'autre part, cet amendement n'est pas contradictoire, bien au contraire, avec les dispositions que nous prévoyons pour protéger certaines catégories d'étrangers contre les mesures d'éloignement. En effet, si la réforme de ce qu'on appelle la double peine répond d'abord à des préoccupations humanitaires et à des exigences en matière d'intégration, elle est aussi destinée à redonner leur effectivité aux mesures d'éloignement, en concentrant les efforts de la puissance publique sur celles qui ne sont pas, de fait, inapplicables. Dès lors et sous réserve de ces protections, il est tout à fait normal de faire preuve d'intransigeance à l'égard des étrangers qui n'ont pas d'autre lien avec notre pays que la régularité de leur séjour, ce qui est le cas des titulaires d'une carte de séjour temporaire, et qui profitent de notre accueil pour commettre des délits graves sur le sol français.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. M. Grand est préoccupé à juste titre par le trafic de drogue. Que nous propose-t-il ? Que des étrangers qui ont un visa de court séjour et qui, d'une manière ou d'une autre, se livreraient au trafic de drogue soient expulsés. Le Gouvernement donne un avis favorable.
    Mme Maryse Joissains-Masini. Bravo !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cette disposition a aussi le mérite de clarifier les choses entre nous au sujet d'une crainte légitime, qui aurait pu être la vôtre, quant à la question de la double peine. Le problème est ici d'une autre nature, et il faut qu'il soit bien clair que la volonté du Gouvernement de lutter contre les trafiquants de drogues de toute nature est implacable.
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Cet amendement est très contestable, comme l'article lui-même. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Bernard Schreiner. Quel laxisme !
    M. Jean Roatta. C'est incroyable !
    M. Christophe Caresche. Ecoutez-moi !
    M. le président. Poursuivez, monsieur Caresche.
    M. Christophe Caresche. La disposition proposée s'appliquerait en effet aux étrangers « passibles » de poursuites pénales. Contrairement à ce qu'a dit M. le ministre, ce ne sont pas des étrangers dont il est avéré qu'ils aient participé à des trafics, et encore moins des étrangers condamnés. Ce sont des étrangers « passibles ». Je trouve donc cet amendement, au contraire, extrêmement dangereux : vous allez retirer des titres de séjour à des étrangers voire les expulser, alors qu'il n'est pas démontré qu'ils aient participé à l'une des infractions visées. (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) C'est donc extrêmement inquiétant, parce que, jusqu'à preuve du contraire, pour qu'une personne soit reconnue coupable d'un fait, il faut qu'elle ait été condamnée par un tribunal,...
    M. André Gerin. Exactement !
    M. Christophe Caresche. ... au terme d'une procédure judiciaire qui garantit à l'accusé le droit de se défendre. Dans ce cas, on peut comprendre que puisse s'appliquer une mesure d'expulsion. Nous y reviendrons quand nous parlerons de la double peine. Mais ici, nous ne sommes pas dans cette situation-là. Nous sommes devant le cas d'un étranger qui est suspecté de certains faits sans que ceux-ci soient démontrés. Cet amendement est également en totale contradiction avec le principe selon lequel c'est à la justice, et non pas à l'administration, de décider si telle ou telle personne est coupable de tel ou tel fait.
    Voilà pourquoi cet amendement est extrêmement dangereux, extrêmement contestable.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Si le Gouvernement a donné un avis favorable à l'amendement de M. Grand, c'est après mûre réflexion, et en s'appuyant sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui, pour les nouvelles infractions prévues par la LSI, a prévu que, lorsqu'il s'agit d'un étranger, et que les infractions sont établies par l'intermédiaire des rapports de police, une mesure d'expulsion pourrait être prise avant même une condamnation. Je vous confirme donc, monsieur Grand, l'avis favorable du Gouvernement. Cette disposition est conforme à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, à laquelle je vous renvoie, monsieur Caresche. Il est vrai que cette jurisprudence est toute récente, puisqu'elle date de mars 2003. Si les faits sont avérés par le rapport de police, et qu'ils sont constitutifs d'un délit, il n'est pas nécessaire qu'il y ait eu condamnation pour que l'étranger soit expulsé. Monsieur Caresche, ne m'en veuillez pas, il s'agit d'une précision que je souhaitais apporter, parce que tout le monde n'est pas censé connaître la jurisprudence du Conseil constitutionnel,...
    M. Maxime Gremetz. C'est la vérité révélée, le Conseil constitutionnel ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... et je tenais à dire à M. Grand que si j'ai accepté cet amendement, c'est aussi parce qu'il est, de mon point de vue, parfaitement constitutionnel.
    M. André Gerin. C'est encore plus grave !
    M. le président. La parole est à M. Alain Marsaud.
    M. Alain Marsaud. Monsieur le ministre, je rejoins un peu M. Caresche, mais simplement du point de vue de la rédaction. En effet, les mots « passible de poursuites pénales sur le fondement de » ne me semblent pas très satisfaisants. Je voulais donc vous proposer une rédaction qui pourrait nous mettre tous d'accord, et qui reprend d'ailleurs, monsieur le ministre, votre argumentation fondée sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel. On pourrait écrire : « susceptible de faire l'objet de poursuites pénales sur le fondement de ».
    M. Maxime Gremetz C'est pareil !
    M. Christophe Caresche Cela revient au même !
    M. André Gerin. C'est même pire !
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Thierry Mariani, rapporteur. La décision du Conseil constitutionnel a validé l'expression : « passible de poursuites pénales ». Je ne vois donc pas pourquoi en choisir une autre.
    M. le président. J'ajoute que, du point de vue de la méthode, on ne peut pas procéder ainsi. Les propositions de sous-amendements doivent être transmises à la présidence. Cela dit, c'est utile au débat, que nous allons donc poursuivre.
    La parole est à M. Christian Estrosi.
    M. Christian Estrosi. Monsieur le président, je souhaite proposer un sous-amendement à l'amendement n° 18. Ce sous-amendement serait ainsi rédigé : « Avant la référence : "222-34, insérer les mots : "20 de la présente ordonnance et. » En effet, des éléments récents ont mis en évidence que certains étrangers qui bénéficiaient d'une carte de séjour ne les autorisant pas à travailler se livraient à du travail clandestin. Le présent sous-amendement a donc pour objet de sanctionner ce comportement en retirant la carte de séjour temporaire aux étrangers concernés.
    M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.
    M. Christophe Caresche. Je dissocie cette question de celle de la double peine. Vous évoquez la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Soit ! Mais, et M. Estrosi vient de le démontrer, on ne voit pas pourquoi on s'arrêterait aux infractions citées dans l'amendement. Pour notre part, nous saisirons le Conseil constitutionnel et nous verrons bien quelle sera sa position. En tout cas, cette disposition est la porte ouverte à des mesures administratives, donc non judiciaires qui auront pour conséquence de priver un individu de son titre de séjour et de l'expulser du territoire national avant même qu'il ne soit reconnu coupable. Honnêtement, il me semble que vous ouvrez là une brèche tout de même assez importante dans l'ordre juridique de notre pays.
    M. Maxime Gremetz. C'est expéditif !
    M. le président. Monsieur Marsaud, monsieur Estrosi, je fais appel à votre expérience : il me semble que nous faisons là plutôt un travail de commission.
    Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. Avis favorable au sous-amendement de notre collègue Estrosi. Il s'agit là d'un avis que l'exprime à titre personnel, car il n'a pas été examiné par la commission. Ce sous-amendement répond à un véritable problème, que le ministre a soulevé tout à l'heure en répondant à notre collègue Etienne Pinte.
    Par ailleurs, monsieur Caresche, je vous rappelle que ces dispositions concernent des titres de séjour d'un an maximum. Il ne s'agit donc pas du tout de longue durée, et je ne vois pas en quoi les mesures proposées seraient disproportionnées.
    M. Christophe Caresche et M. Serge Blisko. Si la personne n'est pas coupable, elle revient !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ces sujets sont compliqués. Il faut donc bien se mettre d'accord sur ce que l'on fait, comme l'a très bien dit le rapporteur.
    L'amendement de M. Grand concerne des étrangers qui n'ont pas d'attache avec la France, qui y résident avec des titres de séjour de brève durée et qui trafiquent de la drogue. Il est proposé que si les faits sont avérés, ceux-ci soient expulsés rapidement. Cela n'a donc rien à voir avec la double peine, celle-ci concernant des personnes qui sont de jure étrangers et de facto français. Nous ne sommes absolument pas dans ce cas de figure. Pardon d'être un peu scolaire, mais je souhaite que chacun comprenne bien.
    Quant au sous-amendement de M. Estrosi, il concerne des étrangers qui, pour reprendre l'exemple que citait M. Pinte, sont pris en train de travailler alors qu'ils ont un visa de touriste. Aujourd'hui, un étranger qui se trouve dans cette situation n'encourt pas de peine, car il n'existe pas de délit. Nous proposons donc, en donnant un avis favorable au sous-amendement de M. Estrosi, qui reprend l'interrogation de M. Pinte, d'apporter une réponse pénale qui se traduira naturellement par une expulsion.
    Enfin, si j'ai accepté cet amendement, c'est justement, monsieur Marsaud, parce qu'il reprenait l'expression validée par le Conseil constitutionnel. Nous n'allons certainement pas aller à l'encontre d'une jurisprudence du Conseil constitutionnel qui ne date que de mars 2003 !
    M. le président. La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. La présomption d'innocence existe-t-elle, oui ou non ? Dans ce cas précis, on nous répond « non ».
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mais pas du tout !
    M. André Gerin. Je n'irai pas jusqu'à dire qu'il s'agit d'une double peine,...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mais ça n'a rien à voir !
    M. André Gerin. ... mais c'est une peine qui est prononcée sans jugement. La question du respect du droit se pose de la même manière, et je trouve ça très grave.
    M. le président. La parole est à M. Serge Blisko.
    M. Serge Blisko. Grâce aux efforts de pédagogie des uns et aux autres, j'ai à peu près compris. Il n'en demeure pas moins qu'un problème se pose.
    Si la personne « passible de poursuites pénales » est reconduite à la frontière, la fera-t-on revenir pour le procès ? Et qu'adviendra-t-il si elle est reconnue non coupable ou si elle bénéficie d'un non-lieu, la fera-t-on revenir ?
    Il me semble que l'on a sauté un échelon. Je me demande vraiment comment ça va marcher.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Cela concerne les flagrants délits !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. J'ai le souci que personne ne caricature personne.
    S'il y a le moindre doute, la personne n'est pas expulsable !
    M. Maxime Gremetz. Oui, mais qui juge que cette personne est « passible de poursuites judiciaires » ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La disposition dont nous discutons concerne les flagrants délits, les situations de faits avérés. Le Conseil constitutionnel, saisi sur la LSI du même problème, a tranché, et nous savons qu'il a l'habitude extrêmement sourcilleux en la matière.
    Je comprends parfaitement l'interrogation de M. Blisko, mais le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur le sujet : si un étranger possédant un titre de séjour de courte durée a commis des faits avérés - par exemple, s'il est pris dans une affaire de trafic de drogue - il sera expulsé. S'il subsiste un doute, il ne sera pas expulsé : on attendra le prononcé du jugement.
    Voilà très exactement ce que nous vous proposons de faire, conformément à la jurisprudence la plus récente du Conseil constitutionnel.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. La situation est grave. Les mots ont un sens, comme vous le dites souvent, monsieur le ministre. Ils ont un sens en Corse ; ils ont un sens ailleurs ! Pour la Corse, vous avez tellement parlé clair qu'on a vu le résultat !
    Je n'ai pas été à l'école très longtemps, car j'ai travaillé très tôt,...
    M. Richard Mallié. Comme ça, vous partirez tôt en retraite !
    M. Maxime Gremetz. ... mais, j'en ai retenu que quand une personne est passible d'une peine, ça ne veut pas forcément dire qu'elle va être condamnée. Vous aurez beau me dire tout ce que vous voudrez, mais quand on indique qu'une personne est « passible d'une peine », cela signifie qu'elle n'a pas encore été jugée ! Une fois encore, la présomption d'innocence est mise en cause. Et qui jugera que tel ou tel fait est passible d'une peine ? La police ?
    M. Pascal Clément, président de la commission. « Etre passible » signifie « mérite » !
    M. Maxime Gremetz. Non ! passible, c'est passible ! Par exemple, cet enfant est passible d'une mauvaise note car il a fait un mauvais devoir !
    M. le président. Les interventions sur le sujet ont été nombreuses. Aussi, je ne ferai pas droit aux nouvelles demandes de prise en parole. Je considère que l'Assemblée est suffisamment informée.
    La parole est à M. le ministre, pour clore ce débat.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Gremetz, votre remarque sur la durée de vos études et l'âge auquel vous avez commencé à travailler n'éclairent en rien le dossier, pas plus que celle que vous avez faite sur la Corse ! Et s'agissant de ce dernier point, faisiez-vous allusion à l'arrestation de Colonna ou au référendum ?
    Quand des faits sont passibles de poursuites pénales, cela signifie qu'ils sont avérés mais que le tribunal ne s'est pas encore prononcé.
    M. Maxime Gremetz. J'avais compris !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est l'interprétation du Conseil constitutionnel. Si vous avez une remarque à faire, monsieur Gremetz, présentez la au Conseil constitutionnel, mais au Gouvernement et aux honorables parlementaires qui sont ici !

    Quand les faits sont avérés, on est passible d'une peine prononcée par un tribunal. La disposition proposée prévoit que si les faits avérés relevés dans le rapport de police sont commis par un étranger possédant un visa de court séjour et que ceux-ci auraient été passibles d'une peine si le tribunal s'était prononcé, cet étranger sera expulsé. C'est simple et c'est facile à comprendre, quel que soit l'âge auquel on a commencé sa vie professionnelle !
    Voilà ce que nous vous proposons. Je ne donnerai plus d'autres explications sur le sujet.
    M. le président. La parole est à Me Clément.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Pour ma part, je brûle de donner une explication supplémentaire.
    Ce qui vous gêne, monsieur Gremetz, c'est l'absence de décision de justice.
    M. Maxime Gremetz. Oui !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Le Conseil constitutionnel a estimé que si les faits étaient avérés, il était inutile que la justice se prononce, car il y a une certaine automaticité entre les faits avérés et l'expulsion. En se prononçant de la sorte, le Conseil constitutionnel a établi une sorte de raccourci judiciaire. On peut ne pas être d'accord, mais c'est sa décision !
    M. Christophe Caresche. Le Conseil constitutionnel n'a pas dit cela !
    M. Noël Mamère. C'est de la justice d'exception !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Je demande la parole pour faire une explication de vote.
    M. le président. Des orateurs de tous les groupes ont pu s'exprimer.
    Je rappelle que M. Estrosi a déposé un sous-amendement oral qui tend à insérer dans l'amendement n° 18, après les mots : « sont insérées les références », les mots : « 20 de la présente ordonnance et ». Je rappelle également que la commission et le Gouvernement ont donné un avis favorable à l'adoption de l'amendementet du sous-amendement.
    Je mets aux voix le sous-amendement oral de M. Estrosi.
    (Le sous-amendement oral est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 18, modifié par le sous-amendement oral.
    (L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)
    M. le président. M. Perruchot et M. Lagarde ont présenté un amendement, n° 384, ainsi libellé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « I. - Après l'article 32 ter de la même ordonnance, il est inséré un chapitre VII bis intitulé : " De l'intégration et comprenant quatre articles ainsi rédigés :
    « Art. 32 quater. - Tout étranger bénéficiant d'une carte de séjour temporaire peut souscrire un contrat d'intégration avec le représentant de l'Etat dans le département.
    « Art. 32 quinquies. - Le contrat d'intégration vise à assurer l'intégration satisfaisante de l'étranger dans la société française, en lui permettant notamment d'acquérir une connaissance suffisante de la langue française et des principes qui régissent la République française.
    « Les modalités de mise en oeuvre et de validation du contrat d'intégration sont précisées par décret.
    « Art. 32 sexies. - Pour tout étranger souhaitant acquérir la nationalité française, le contrat d'intégration vise également à lui assurer une connaissance des responsabilités et avantages conférés par la nationalité.
    « Art. 32 septies. - Tout étranger ayant exécuté un contrat d'intégration sera réputé remplir la condition d'intégration satisfaisante. »
    La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. Il s'agit, par cet amendement, de prolonger un débat que nous avons entamé en commission. Le groupe UDF estime que pour parvenir à un bon équilibre, il faut dès à présent mettre en place, à côté des dispositions de ce texte visant à contrôler les flux migratoires et de celles de la loi relative au droit d'asile, un contrat d'intégration, sans attendre le texte de François Fillon sur le sujet.
    Il aurait été logique d'avoir dans le présent texte un article prévoyant de créer un contrat d'intégration permettant aux ressortissants étrangers d'acquérir les bases de la langue française et une connaissance des principes qui régissent la République française. Un tel contrat permettrait de mieux intégrer toutes celles et tous ceux qui désirent venir vivre en France.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Thierry Mariani, rapporteur. La remarque que j'ai faite sur un amendement précédent du groupe Union pour la démocratie française vaut pour celui-ci : cet amendement a été repoussé par la commission car il est difficile de faire référence à un texte qui n'est pas encore déposé, en l'occurrence celui sur le contrat d'intégration.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis que la commission : défavorable.
    M. le président. La parole est à M. Serge Blisko.
    M. Serge Blisko. Pour notre part, nous aurions préféré que l'Assemblée examinât d'abord le texte sur le contrat d'intégration, ce qui aurait eu une plus grande portée symbolique que l'énième texte sur l'entrée et le séjour des étrangers.
    Cela dit, si une maîtrise suffisante de la langue française était une condition élémentaire d'intégration, nous serions beaucoup ici à ne pas la remplir.
    Avec ce type d'amendement, le bon ouvrier maçon qui parle très mal le français n'aurait pas droit au contrat d'intégration, ce qui serait regrettable car notre pays a besoin de maçons. Mettre en avant la maîtrise de la langue française n'a aucun sens. Il est vrai que pour s'intégrer, il vaut mieux connaître le français, mais le futur débat sur le contrat d'intégration serait très pauvre s'il ne portait que sur le niveau de connaissance de la langue française et des règles républicaines qui nous régissent. Nous serions complètement à côté de ce qui est attendu de ce débat sur l'intégration.
    M. le président. La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. Monsieur Blisko, je vous invite à rendre visite aux associations qui, dans les ZUP de Blois, lutte contre l'illettrisme.
    M. Serge Blisko. Pour l'alphabétisation !
    M. Nicolas Perruchot. Vous verrez à quel point le premier facteur d'intégration dans notre société est l'apprentissage de la langue.
    Notre amendement propose de mettre en place un dispositif permettant l'acquisition de la langue française. Toutefois, il s'agit surtout d'un amendement d'appel.
    Par ailleurs, comme nous l'avons dit lors de l'examen de la mention de procédure défendue par M. Valls, vous préférez intégrer les étrangers en les faisant voter, et ce avant qu'ils aient acquis un certain nombre de connaissances qui nous semblent essentielles. L'acquisition de la langue française en est une. De nombreux parlementaires qui sont maires ont pu faire ce constat.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le président, je regrette de ne pas avoir pu donner une explication de vote sur l'amendement précédent. Cela aurait été normal, car le groupe UDF ne s'était pas exprimé sur le sujet.
    M. le président. Il n'y a pas d'explications de vote sur les amendements.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Certes, mais vous auriez pu me laisser intervenir. Or vous l'avez refusé !
    M. le président. Non !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Nous sommes le seul groupe de l'Assemblée à qui vous avez refusé à un de ses membres d'intervenir.
    M. le président. Un orateur peut répondre à la commission, un autre au Gouvernement, et, ensuite, le président de séance peut donner la parole à d'autres orateurs, faculté dont j'ai largement usé. Mais il n'y a pas d'explications de vote.
    Vous avez la parole, monsieur Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. L'explication donnée tout à l'heure pour nous inviter à retirer l'un de nos amendements - ce que nous avons fait - ne vaut pas pour celui-ci.
    Si le contrat d'intégration n'existe pas aujourd'hui, c'est parce qu'aucun texte de loi ne l'a encore mis en place. Le présent amendement vise à le créer et prévoit que les modalités de sa mise en oeuvre seront précisées par décret, ce qui est un cas très fréquent dans les textes votés par l'Assemblée. Par conséquent, ce contrat pourrait parfaitement être créé aujourd'hui.
    Nous avons dit, dès le début de la discussion, que nous aurions préféré que toutes les dispositions relatives à l'immigration soient fondues dans un seul texte, mais il serait intéressant, pour l'équilibre du présent texte, que cet amendement soit adopté.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Je comprends la hâte qu'éprouvent certains à vouloir donner un contenu au contrat d'intégration. Toutefois, il me paraît quelque peu délicat d'y procéder dans les circonstances actuelles, étant donné les nombreux cas de figure qui peuvent se présenter. De surcroît, je suis circonspect quant à un décret d'application, compte tenu de la complexité du problème.
    Ainsi, des réfugiés politiques ou des étrangers qui rentrent sur le territoire français après l'âge de quarante-cinq ans seront quasiment dans l'impossibilité d'acquérir les bases du français s'ils n'ont pas de culture d'origine. Ceux d'entre nous qui connaissent des associations luttant contre l'illettrisme et pour l'alphabétisation le savent. Les étrangers ne seront pas responsables de leur manque de maîtrise de notre langue. En revanche, ceux qui ont une culture d'origine pourront acquérir le français.
    Prenons un autre cas de figure : celui de l'étranger qui, dans le cadre du regroupement familial, fait venir sur le territoire français sa jeune épouse de dix-sept ou dix-huit ans. L'un et l'autre ont besoin d'un contrat d'intégration qui leur permette d'apprendre le français, et surtout la jeune femme, car bien souvent les femmes dans cette situation sont tenues éloignées de l'apprentissage du français par leur mari, qui les maintiennent ainsi sous leur dépendance.
    Il existe de nombreux cas de figure très différents et chacun d'entre eux mérite une analyse profonde, afin que le contrat d'intégration - dispositif qu'il est souhaitable de mettre en place - soit adapté en fonction des catégories d'étrangers auxquelles il va s'appliquer.
    Cet amendement n'est pas dangereux, mais il pose un problème. De surcroît, j'ai des craintes sur le contenu du décret d'application que préparera l'administration.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 384.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :
    Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 823, relatif à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France :
    M. Thierry Mariani, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 949).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures quinze.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT