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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 10 OCTOBRE 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du mercredi 9 octobre 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire étrangère «...».
2.  Questions au Gouvernement «...».

CONTRATS EMPLOIS-JEUNES «...»

Mme Muguette Jacquaint, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

AIDE AUX DÉPARTEMENTS SINISTRÉS
DU SUD-EST DE LA FRANCE «...»

MM. Yvan Lachaud, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

PRÉVISIONS DE CROISSANCE «...»

MM. Didier Migaud, Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

PACTE DE STABILITÉ BUDGÉTAIRE «...»

MM. Charles de Courson, Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

AFFAIRE PATRICK HENRY «...»

MM. François Baroin, Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice.

MODERNISATION DE L'ÉTAT «...»

Mme Marie-Anne Montchamp, M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.

AVENIR DES CONTRATS TERRITORIAUX
D'EXPLOITATION «...»

MM. Patrick Lemasle, Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

IMMIGRATION «...»

MM. Jean-Claude Guibal, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

GESTION DES FONDS STRUCTURELS EUROPÉENS «...»

Mme Martine Aurillac, M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.

MESURES FISCALES «...»

MM. Augustin Bonrepaux, le président, Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

AIDE AUX ASSOCIATIONS DE LUTTE
CONTRE L'EXCLUSION «...»

Mmes Claude Greff, Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion.

RETRAITES AGRICOLES «...»

MM. Jérôme Bignon, Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
3.  Fait personnel «...».
M. François Liberti.

Suspension et reprise de la séance «...»

4.  Rappel au règlement «...».
MM. Jean-Marc Ayrault, le président.
5.  Communication du Médiateur de la République «...».
M. le président.
M. Bernard Stasi, Médiateur de la République.
L'Assemblée donne acte du dépôt du rapport du Médiateur de la République.

PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES

6.  Salaires, temps de travail et développement de l'emploi. - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Article 2 (suite) «...»

Amendement n° 228 de M. Morange : MM. Pierre Morange, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité : Alain Vidalies. - Adoption.
Amendement n° 171 de M. Morin : MM. Nicolas Perruchot, le rapporteur, le ministre, Alain Vidalies, Nicolas Perruchot. - Retrait.
Amendement n° 45 de M. Gremetz : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 3 de Mme Billard : MM. Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre, Alain Vidalies. - Rejet.
Amendement n° 112 de M. Gorce : MM. Alain Vidalies, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 113 de M. Gorce : MM. Alain Vidalies, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n°s 54 de M. Gremetz, 114 et 140 de M. Gorce : Mme Muguette Jacquaint, MM. Alain Vidalies, le rapporteur, le ministre, Maxime Gremetz, Jean-Pierre Soisson. - Rejets.
Amendement n° 141 de M. Gorce : MM. Alain Vidalies, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 44 de M. Gremetz : M. Maxime Gremetz.

PRÉSIDENCE
DE Mme PAULETTE GUINCHARD-KUNSTLER

MM. le rapporteur, le ministre, Maxime Gremetz. - Rejet par scrutin de l'amendement n° 44.
M. Maxime Gremetz.

Suspension et reprise de la séance «...»

Amendements n°s 56 de M. Gremetz et 142 de M. Gorce : MM. Maxime Gremetz, Alain Vidalies, le rapporteur, le ministre. - Rejets.
Amendements identiques n°s 94 de Mme Billard et 143 de M. Gorce : MM. Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Soisson. - Rejet.
Amendement n° 58 de M. Gremetz : M. Maxime Gremetz.
Amendement n° 57 de M. Gremetz : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, le ministre. - Rejet des amendements n°s 58 et 57.
Amendement n° 59 de M. Gremetz : Mme Muguette Jacquaint, MM. le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Soisson. - Rejet.
Amendement n° 144 de M. Gorce : MM. Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 218 de M. Morin : MM. Nicolas Perruchot, le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Soisson, Hervé Morin. - Rejet.
Amendement n° 100 de la commission des affaires culturelles : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 145 de M. Gorce : MM. Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 167 de M. Morin. - Rejet.
Amendement n° 170 de M. Morin. - Rejet.
Amendement n° 146 de M. Gorce : MM. Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 2 modifié.

Après l'article 2 «...»

Amendements n°s 229 rectifié de M. Morange et 152 de M. Perruchot : MM. le rapporteur, le ministre, Nicolas Perruchot. - Retrait de l'amendement n° 152.
Mme Muguette Jacquaint, MM. Gaëtan Gorce, Jean-Pierre Soisson, Maxime Gremetz, Alain Vidalies, Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. - Adoption, par scrutin, de l'amendement n° 229 rectifié.
M. Gaëtan Gorce.

Suspension et reprise de la séance «...»

L'amendement n° 153 de M. Perruchot a été retiré.
Amendement n° 173 de M. Morin : MM. Nicolas Perruchot, le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Soisson, Alain Néri. - Retrait.
Amendement n° 172 de M. Morin : MM. Nicolas Perruchot, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 101 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Article 3 «...»

Amendements de suppression n°s 60 de M. Gremetz et 147 de M. Gorce : Mme Muguette Jacquaint, MM. Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Soisson. - Rejet.
Amendement n° 103 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 148 de M. Gorce : MM. Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 149 de M. Gorce : MM. Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 3 modifié.

Article 4 «...»

Amendements de suppression n°s 61 de M. Gremetz et 150 de M. Gorce : MM. Maxime Gremetz, Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 4.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
7.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

SOUHAITS DE BIENVENUE
À UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE
ÉTRANGÈRE

    M. le président. Mes chers collègues, je suis heureux de souhaiter, en votre nom, la bienvenue à une délégation parlementaire conduite par M. Nabih Berry, président de l'Assemblée nationale du Liban. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

2

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

    M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
    Nous commençons par une question du groupe des député-e-s communistes et républicains.

CONTRATS EMPLOIS-JEUNES

    M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. Monsieur le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, votre décision de ne pas renouveler les contrats emplois-jeunes (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française) provoque une grande inquiétude chez les jeunes et chez leurs employeurs - dont vous avez été, mes chers collègues ! -, qui sont pour la plupart des collectivités locales et des associations. Ils le feront d'ailleurs savoir en se rassemblant le 15 octobre prochain. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Ces emplois-jeunes, contrairement à ce que vous prétendez, ont fait la preuve de leur utilité.
    M. Yves Nicolin. Agitateurs !
    Mme Muguette Jacquaint. Ils répondent à un besoin ou en ont créé un. Ces jeunes veulent poursuivre ce qu'ils ont commencé et désirent que leur acquis professionnel soit validé. Leurs employeurs souhaitent tous faire durer cette dynamique efficace, au service de la vie associative et du développement local.
    Face à cette situation, monsieur le ministre, quel est ce nouveau dispositif d'aide à l'emploi dont vous annonciez hier la création ? Je doute qu'il permette à des milliers de jeunes de sortir de l'incertitude dans laquelle ils se trouvent.
    M. François Goulard. Ils étaient déjà dans l'incertitude avec les emplois-jeunes !
    Mme Muguette Jacquaint. Compte tenu des besoins nouveaux et du savoir-faire dont ces jeunes ont fait preuve, il est urgent de pérenniser ces emplois, si utiles, et de permettre à chaque jeune d'avoir un emploi durable...
    M. Yves Nicolin. Baratin !
    M. le président. Monsieur Nicolin !
    Mme Muguette Jacquaint. ... qualifié et bien rémunéré. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur de nombreux bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Madame la députée, le Gouvernement ne considère pas que les fonctions remplies par les emplois-jeunes soient inutiles.
    M. Bernard Roman. Eh bien alors !
    Mme Martine David. Ce sont les jeunes qui sont inutiles ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il est même tout à fait admiratif devant le travail accompli par de nombreux jeunes au service des associations ou des collectivités locales. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    La question qui nous est posée aujourd'hui est de savoir jusqu'à quel niveau nous pouvons augmenter l'emploi public et donc, la dépense publique et aussi où se trouve l'intérêt des jeunes qui s'engagent dans ces filières.
    M. Alain Néri. Vous allez privilégier le privé !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Si vous étiez si convaincus de l'utilité de ces missions, pourquoi avoir limité à cinq ans la durée des contrats emplois-jeunes ? (Applaudissements sur les mêmes bancs.)
    M. Bernard Roman. Zéro !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Pourquoi ne pas avoir proposé des contrats à durée indéterminée ?
    M. Albert Facon. C'est nul !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement n'a pas choisi d'interrompre les contrats jeunes. Il a décidé, d'abord, d'honorer tous les contrats qui ont été signés, y compris en 2002, et il se trouve qu'ils ont même été très nombreux au début de l'année. (Applaudissements sur les mêmes bancs. - Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    Cela nous conduit à inscrire un crédit de 2,7 milliards au budget pour 2003 pour les financer.
    M. Christian Bataille. Vous supprimez des emplois !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Deuxièmement, nous proposons aux associations de prolonger de trois ans, si elles le souhaitent, les contrats existants, avec une participation dégressive de l'Etat.
    Enfin, nous proposons à ces jeunes des filières de formation et des dispositifs de validation des acquis pour leur permettre de se réinsérer.
    Mais, comme vous l'avez entendu hier, madame la députée, le Gouvernement ne s'arrêtera pas là.
    M. Jean Glavany. C'est bien ce qui nous inquiète !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il proposera un nouveau dispositif, le contrat d'insertion dans la vie sociale, qui permettra de répondre à beaucoup des besoins exprimés par les associations, notamment dans le champ social, dans le champ humanitaire et dans le champ éducatif. Vous conviendrez avec moi que ce n'est pas à l'occasion des questions d'actualité que nous pouvons en débattre mais ce sera ici tout de même, à l'Assemblée nationale, dans quelques mois, lorsque nous vous présenterons un dispositif dont l'objectif principal sera d'aider les jeunes à s'insérer, en leur faisant confiance et en misant sur leur sens des responsabilités. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

AIDE AUX DÉPARTEMENTS SINISTRÉS
DU SUD-EST DE LA FRANCE

    M. le président. La parole est à M. Yvan Lachaud, pour le groupe UMP.
    M. Yvan Lachaud. Monsieur le président, ma question à laquelle s'associent mes collègues députés des départements sinistrés, MM. Roustan, Giro, Mourrut, Roubaud et Grand, s'adresse à monsieur le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    Mais avant d'en venir à ma question, qu'il nous soit permis de nous réjouir des chiffres annoncés ce matin, la délinquance de voie publique ayant diminué de 4 %, entre septembre 2001 et septembre 2002. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Voilà qui démontre l'action positive du Gouvernement.
    Monsieur le ministre, au cours du conseil des ministres de ce jour, vous avez débattu du plan de soutien aux départements du sud-est de la France touchés par les inondations, notamment le Gard. Il y a très exactement un mois, le 9 septembre dernier, vous vous étiez vous-même rendu sur place pour coordonner les premières actions et M. le Premier ministre, qui lui aussi s'était rendu sur place, débloquait, dès le lendemain matin, une enveloppe de 10 millions d'euros. C'est pourquoi je tiens à m'inscrire en faux contre les propos tenus hier ici même par M. Liberti, qui semble bien mal connaître le département du Gard et les autres départements ! (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    Le Gouvernement, l'ensemble des ministres et des élus locaux, toutes tendances confondues, se sont mobilisés comme jamais pour qu'il n'y ait pas de laissés-pour-compte dans la gestion de cette catastrophe.
    Monsieur le ministre, à la suite du comité interministériel qui s'est réuni hier, et devant le coût des dégâts évalué à 1,2 milliard d'euros, dont 832 millions pour le seul département du Gard, comment comptez-vous répartir les moyens mis en oeuvre par l'Etat qui, au-delà de l'indemnisation des industries, des particuliers et des agriculteurs, doit aujourd'hui s'employer à la reconstruction des bâtiments publics ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Mon cher collègue, je ne vous ai pas interrompu, mais une règle dans cette assemblée veut qu'on ne mette pas en cause un collègue : on se contente de poser une question au Gouvernement. Merci de respecter cette règle. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité et des libertés locales.
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, le sujet prête d'autant moins à polémique que, depuis ce matin, quatorze départements du sud-est de la France sont en alerte météo. Les élus du Gard et de l'Hérault notamment, savent que les forces de secours, en particulier les pompiers, multiplient les sorties. On ne peut que souhaiter que cette région de France ne subisse pas une catastrophe de la même ampleur que celle qu'ont connue les six départements au nom desquels vous exprimez.
    Ce matin, le Premier ministre a tenu à présenter lui-même au conseil des ministres le détail du plan de soutien. D'ores et déjà, plusieurs centaines de millions d'euros ont été débloqués et mis à la disposition des préfectures. J'ai demandé aux préfets des six départements concernés de faire une présentation détaillée de ce plan. D'ores et déjà, 13 millions d'euros ont été versés au FISAC pour les petits commerçants et les artisans, et 95 millions d'euros - c'est une première - vont financer des aides directes aux exploitations agricoles. Jamais des aides directes n'avaient été dégagées à cette hauteur pour soutenir des exploitations agricoles sinistrées, le ministre de l'agriculture l'a dit.
    M. Jean-Paul Charié. C'est vrai !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cent millions d'euros vont permettre aux collectivités territoriales de réparer les dégâts sur les routes et sur les réseaux. Enfin, 130 millions d'euros seront consacrés par le ministre de l'environnement à aménager les cours d'eau, afin que les mêmes causes ne puissent plus produire les mêmes effets.
    M. Jacques Barrot. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Si ce n'est pas suffisant, le Premier ministre, qui sera dans le Gard à la fin du mois de novembre, débloquera de nouveaux moyens afin que ce département comme les cinq autres retrouvent leur situation d'avant les catastrophes. Tel est l'engagement du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin : il sera scrupuleusement tenu, monsieur le député. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

PRÉVISIONS DE CROISSANCE

    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour le groupe socialiste.
    M. Didier Migaud. Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, l'INSEE vient de réviser à la baisse sa prévision de croissance pour 2002, avec les conséquences que cela peut avoir pour 2003.
    M. Yves Nicolin. La faute à qui ?
    M. Didier Migaud. Tous les économistes, en France et dans le monde, font de même pour 2003.
    M. Patrick Ollier. Jurisprudence Fabius !
    M. Didier Migaud. Le seul à rester imperturbable face à cette situation, c'est le Gouvernement,...
    M. Georges Tron. Qu'avez-vous fait il y a un an ?
    M. Didier Migaud. ... à l'exception de vous-même, monsieur le ministre, qui, dans un élan de sincérité qui vous honore, avez exprimé des inquiétudes et des doutes par rapport à votre hypothèse de croissance.
    Nous comprenons que le Gouvernement se montre ambitieux. Encore faut-il qu'il reste crédible...
    M. Yves Nicolin. Ça vous va bien !
    M. Didier Migaud. ... et que des mesures fortes viennent exprimer sa volonté de conforter la croissance. Or, nous ne trouvons rien qui aille dans ce sens dans le projet de budget pour 2003.
    Le moral des chefs d'entreprise est à la baisse, celui des Français également. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Laissez M. Migaud parler ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Didier Migaud. Merci, monsieur le président. Chacun commence à ressentir plus fortement encore les difficultés de la situation économique : la remontée du chômage - et les conséquences du krach boursier. L'injustice et l'inefficacité de vos premières mesures semblent nous conduire dans le mur et, peut-être, à un nouveau plan de rigueur comme on l'entend parfois.
    D'un côté, vous prévoyez des baisses d'impôt pour une minorité de nos concitoyens, l'exemple le plus caricatural étant la réduction supplémentaire pour les emplois à domicile, qui ne concernera que 70 000 des 28 millions de familles de notre pays. (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Le temps de parole de M. Migaud n'est pas encore écoulé. Laissez-le poursuivre !
    M. Didier Migaud. De l'autre côté, vous augmentez les prix du carburant et du fioul domestique, ce qui risque de fragiliser la consommation. (Mêmes mouvements.)
    J'en arrive à mes questions.
    Allez-vous réviser votre copie et donc vos hypothèses de croissance ? (« Non ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Que ferez-vous pour consolider la consommation ? Allez-vous enfin prendre des mesures dont le champ dépasse les quelques dizaines de milliers de personnes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, la prévision de croissance de 2,5 % est celle du Gouvernement, c'est aussi (Huées sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Maintenant, laissez M. Mer répondre ! Monsieur le ministre, ne vous laissez pas interrompre !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. C'est une prévision, ce n'est pas une prédiction. Je ne suis pas Mme Soleil ! (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Cela dit, cette prévision est celle aujourd'hui de la grande majorité des instituts...
    M. Jean Glavany. C'est faux !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... tels le Fonds monétaire international ou l'OCDE, et cela n'est absolument pas contradictoire avec les prévisions retenues au même moment par la plupart des pays membres de l'Union européenne.
    M. Jean Glavany. Mais non !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je n'en veux pour preuve que l'hypothèse de 2,8 % sur laquelle est fondé le budget italien. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Pour donner à cette prévision le maximum de chances de se révéler exacte, nous sommes en train, par notre politique, de créer les conditions pour que les acteurs de la croissance que sont l'entrepreneur et le consommateur réalisent cette croissance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Le consommateur, vous le savez, bénéficie d'un certain nombre de réductions d'impôts (« Lesquelles ? » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Lesquelles ?
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... qu'il va transformer, soit maintenant, soit un peu plus tard, en consommation.
    M. Jean Glavany. Plutôt en épargne !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. D'ailleurs je me permets de vous rappeler que l'INSEE, tout en révisant à la baisse la prévision de croissance des trois prochains mois, table sur une croissance du pouvoir d'achat des ménages supérieure au chiffre que nous avons retenu nous-mêmes dans nos prévisions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Elle annonce 2,9 % contre 2,1 % dans les prévisions du Gouvernement. Cet argent perçu en plus, ou bien sera dépensé maintenant, et l'INSEE aura tort dans les trois prochains mois ; ou bien l'INSEE aura raison, mais j'aurai raison l'année suivante (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) dans la mesure où ce supplément de pouvoir d'achat sera dépensé alors. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Deuxièmement, je vous rappelle qu'il n'importe pas seulement que le consommateur ait le moral. Il faut que l'entrepreneur aussi ait le moral. Et il n'y a aucune raison de ne pas l'encourager dans sa prise de risques par les mesures gouvernementales, y compris celles qui ont été annoncées, ce lundi, par le Premier ministre et par Renaud Dutreil à Lyon ou à Strasbourg. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

PACTE DE STABILITÉ BUDGÉTAIRE

    M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Union pour la démocratie française.
    M. Charles de Courson. Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, pour permettre la réalisation de la monnaie unique, la France avec dix de ses partenaires européens s'est engagée dans un pacte de stabilité et de croissance visant au retour à l'équilibre de ses finances publiques en 2004, date repoussée à 2006.
    Cette rigueur budgétaire est l'une des conditions de la réduction durable du chômage en France. (« Mais non ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    En 2003 le Gouvernement propose de maintenir le niveau des déficits publics, hérités de nos prédécesseurs (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) à son niveau de 2002, soit 2,6 % de la richesse nationale. (« Gigantesque » sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

    Le Gouvernement peut-il faire le point sur les négociations qui ont eu lieu hier à Luxembourg avec nos partenaires européens et indiquer à la représentation nationale comment il envisage le retour à l'équilibre des finances publiques dans les quatre années qui viennent ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, nous avons eu l'occasion, à Luxembourg, de faire le point sur la réalisation des grandes orientations politiques et économiques de nos différents pays.
    A l'issue d'une discussion intéressante, nous sommes arrivés à une conclusion commune qui reflète un consensus : le pacte de stabilité et de croissance reste la Bible sur laquelle chaque pays définit sa politique. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Ce pacte a comme objectif principal d'éviter, dans le futur, une croissance irréfléchie de la dette, laquelle devra bien être payée un jour par nos enfants ou nos petits-enfants.
    Dans ce contexte, il est clairement réaffirmé que, année après année, tous les pays devront, au minimum à hauteur de 0,5 % de leur PNB par an, réduire le déficit constaté à la fin de 2002.
    M. Jérôme Lambert. C'est mal parti !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Quel que soit le niveau d'où ils partent, sachant que certains partent de 4 %, d'autres d'un niveau supérieur à 3 %, dès l'année prochaine, nos partenaires s'y emploieront.
    En ce qui nous concerne et compte tenu du fait que nous avions pris les dispositions pour empêcher le déficit dont nous avons hérité de continuer à augmenter (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française), j'ai clairement indiqué que nous avions choisi de stabiliser le déficit pour l'année 2003, étant entendu que, à partir de 2004, à hauteur de 0,5 % par an au minimum, nous continuerions, comme nos partenaires, de nous engager dans la voie de la discipline et de la rigueur. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

AFFAIRE PATRICK HENRY

    M. le président. La parole est à M. François Baroin, pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    M. François Baroin. Ma question s'adresse à M. le ministre de la justice, garde des sceaux. Il y a, monsieur le ministre, depuis vingt-quatre heures dans notre pays, une très vive émotion, comme un cri.
    En 1976, un jeune garçon, Philippe Bertrand, était enlevé à Troyes et assassiné par Patrick Henry. Nos familles étaient liées, il aurait aujourd'hui à peu près mon âge. Cette tragédie fait partie de l'histoire contemporaine de la ville de Troyes. C'est une grande épreuve. C'est également une grande douleur, aujourd'hui encore très vive.
    En 1977, Patrick Henry est sauvé de la guillotine et condamné à perpétuité. Onze ans plus tard, il est saisi en prison pour possession de drogue et d'alcool et il est condamné une nouvelle fois, en 1989, pour trafic de drogue. En juillet 2000, Mme Guigou refuse une demande de libération conditionnelle, renvoyant en cela à la commission apte à prononcer cette nouvelle décision. En janvier 2001, la juridiction régionale prononce sa libération conditionnelle.
    M. Patrick Henry est libéré le 26 avril. Le 11 avril 2002, il parade dans Paris Match pour faire la promotion de son livre intitulé Vous ne le regretterez pas. Cet été, il est condamné pour vol dans une grande surface. Et ce week-end, il est interpellé en Espagne en possession de dix kilos de stupéfiants, sans doute pas entièrement destinés à sa consommation personnelle.
    En cette année Victor Hugo, je veux faire mienne cette phrase d'un de nos prédécesseurs : « La haine est l'hiver du coeur. » Ce n'est pas la vengeance qui anime les Troyens et l'immense majorité des Français, mais le désir de comprendre et de prévenir.
    Alors, monsieur le garde des sceaux, deux questions. Vous avez - et je vous en félicite - très rapidement demandé l'extradition de Patrick Henry. Dans quels délais sera-t-elle effective ? Seconde question : je me demande si la justice n'a pas été abusée par le symbole que représente Patrick Henry.
    M. Jacques Barrot. Eh oui !
    M. François Baroin. A force de vouloir raconter de belles histoires, on a oublié que son comportement en prison n'avait pas été exemplaire. Il y a dans notre pays des adversaires constants qui sont prêts à mettre à bas la politique de sécurité, à choisir, pour soutenir leur lutte, les pires emblèmes et, parfois, à embellir, par une curieuse inversion des valeurs, la figure du criminel. Beaucoup s'y sont laissé prendre (« La question ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Henri Emmanuelli. Des noms ?
    M. François Baroin. A la lumière de cet affreux contre-exemple, monsieur le ministre, estimez-vous que la procédure de libération conditionnelle pourrait être améliorée pour offrir des garanties supplémentaires de sécurité et faire en sorte que la justice puisse mieux dire, en conscience, à nos compatriotes, après chaque libération conditionnelle : vous ne le regretterez pas ? (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
    M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, je partage l'émotion que vous venez d'exprimer et qui illustre celle que ressentent les Troyens, mais aussi toutes les Françaises et tous les Français. Ce qui s'est passé hier provoque une immense tristesse. La société française a proposé à Patrick Henry une deuxième chance. Il ne l'a pas saisie. Compte tenu de la conception que nous partageons de la nature humaine, nous ne pouvons qu'être tristes. C'est la première chose que je voulais dire.
    Maintenant, la justice doit passer. Le juge de l'application des peines de Caen a, dès hier, lancé un mandat d'arrêt, qui vaut demande d'extradition compte tenu de la Convention européenne.
    A partir de là, deux hypothèses : soit Patrick Henry accepte son extradition, et il sera en France dans les huit jours ; soit il ne l'accepte pas spontanément, auquel cas la procédure classique se déroulera et l'Espagne remettra Patrick Henry à la justice française dans les prochaines semaines.
    Ensuite, bien sûr, il passera devant la juridiction compétente, qui annulera sa mise en libération anticipée, et il reprendra le cours de l'exécution de sa peine, c'est-à-dire la détention à perpétuité.
    Quelles conclusions tirer de cette triste aventure en ce qui concerne les libérations conditionnelles ? Je pense qu'il ne faut pas généraliser à partir d'un cas particulier. Je ne donnerai qu'un seul chiffre : il y a 5 % seulement des mesures de libération conditionnelle sur lesquelles les juges reviennent.
    Cela dit, je tire pour ma part deux conclusions pratiques de cette affaire. Premièrement, nous devons davantage accompagner les détenus à qui une libération conditionnelle est accordée, et ce au moment où ils sortent de prison, en particulier ceux qui ont purgé de très longues peines. Quand on a passé vingt-deux ans en prison, il doit être très difficile d'assumer sa liberté. Il nous faudra donc renforcer les services de probation des prisons, à qui incombe cette tâche d'accompagnement de la libération conditionnelle.
    Ma seconde conclusion concerne les victimes. Bien sûr, monsieur le maire, c'est à elles que vous pensiez tout à l'heure. J'ai l'intention, dans le cadre du plan d'action d'aide aux victimes que j'ai présenté au conseil des ministres il y a quelques jours, de faire en sorte que, tout au long de la procédure, les victimes des crimes soient écoutées et entendues, y compris lorsque la justice est amenée à prendre des décisions concernant l'application des peines. C'est bien sûr à la justice qu'il appartient de prendre les décisions qu'elle juge bon de prendre, mais je crois que cette écoute et cet accompagnement de la victime au regard de l'évolution de l'exécution de la peine du délinquant sont indispensables dans notre justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

MODERNISATION DE L'ÉTAT

    M. le président. La parole est à Mme Marie-Anne Montchamp, pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    Mme Marie-Anne Montchamp. Ma question s'adresse à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
    Le Président de la République a fait de la réforme de l'Etat une des priorités de son programme. Le Premier ministre en a fait une priorité de son action. Comme les scrutins de mai et juin derniers en témoignent clairement, les Français ne comprendraient pas que cette réforme soit différée ou compromise alors même qu'ils ont largement fondé leur vote sur cet espoir. La modernisation de l'Etat, en particulier, est un sujet très attendu. Sa mise en oeuvre est particulièrement observée, dans ses délais comme dans son contenu.
    Nos concitoyens sont trop souvent confrontés à des procédures complexes, à des réponses imparfaites, à des décisions qui interviennent trop tardivement, suivant des circuits sans aucune lisibilité. Dans le même temps, les Français savent reconnaître la compétence des agents de l'Etat. Ils savent également ne pas les rendre responsables des insuffisances qu'ils dénoncent par ailleurs. Les fonctionnaires eux-mêmes ne sont pas satisfaits de cette situation et sont demandeurs de changement, tout en exprimant leur inquiétude sur les conditions de ce changement.
    Monsieur le ministre, vous venez de rencontrer les syndicats de fonctionnaires. Comment comptez-vous conduire la nécessaire réforme de l'administration, tout en respectant les attentes des personnels ? Plus précisément, peut-on enfin mettre en oeuvre une gestion des ressources humaines digne de ce nom dans l'administration ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
    M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Madame la députée, vous avez raison d'indiquer que la volonté du Président de la République et du Premier ministre est forte sur la nécessaire modernisation de notre Etat. Permettez-moi de vous faire part de quelques-unes de nos convictions.
    La première, c'est la force du dialogue avec les acteurs sociaux.
    La seconde, c'est que nous devons relever ensemble le défi de la performance. Ceci ne se fera pas en opposant le secteur public et le secteur privé. Une économie performante a besoin d'un secteur public performant. Et nous ne sommes ni dans un camp ni dans l'autre ; nous sommes dans le camp de la France. (« Que c'est beau ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    Et nous nous sommes fixé trois objectifs : augmenter l'efficacité de l'action publique, augmenter la satisfaction de l'usager, favoriser l'épanouissement du fonctionnaire.
    Le choc démographique comme les lois de décentralisation nous amènent à ouvrir très rapidement le chantier de la gestion prévisionnelle des effectifs, mais aussi, et peut-être surtout, celui de la gestion des ressources humaines. Le vrai défi de la fonction publique, c'est de se doter aujourd'hui des compétences dont elle aura besoin demain. A cet égard, nous avons ouvert dès aujourd'hui les discussions avec les organisations syndicales concernant la mobilité, la formation continue, les concours et recrutements.
    C'est aussi d'un changement de culture et de mentalité qu'il s'agit, car nous voulons introduire la notion de performance à travers l'évaluation des résultats et des indicateurs de performance.
    Nous voulons ces réformes car le secteur public est un acteur de la croissance. La nécessaire fierté que nous devons à nos fonctionnaires implique d'associer le service public à la résolution des problèmes qui entravent notre avenir. La réduction obligatoire de notre déficit structurel pose l'équation suivante : mieux rationaliser nos moyens pour mieux optimiser nos résultats. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

AVENIR DES CONTRATS TERRITORIAUX D'EXPLOITATION

    M. le président. La parole est à M. Patrick Lemasle, pour le groupe socialiste.
    M. Patrick Lemasle. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture. La loi d'orientation agricole voulue par le Gouvernement de Lionel Jospin a été votée en décembre 1998. Le titre principal en est le contrat territorial d'exploitation, dit CTE. Le CTE est un contrat social passé entre l'agriculteur et les pouvoirs publics,...
    M. Dominique Dord. Ce n'est pas vrai !
    M. le président. Monsieur Dord !
    M. Patrick Lemasle. ... ayant pour objectif une meilleure adaptation des pratiques agricoles aux attentes et aux besoins de la société.
    Ces contrats sont un outil de redistribution des aides permettant de préserver la diversité des exploitations, de consolider les plus fragiles d'entre elles, de renforcer la prise en compte de l'environnement. A ce jour, plus de 38 000 contrats ont été signés...
    M. François Goulard. Autant dire que les CTE ont été plébiscités par l'agriculture française !
    M. Patrick Lemasle. ... et plusieurs milliers attendent leur passage devant la commission départementale d'orientation agricole, ce qui montre le réalisme des objectifs de vos prédécesseurs, Jean Glavany et François Patriat. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Les organisations professionnelles s'inquiètent de vos décisions, au-delà des discours flatteurs : arrêt de la modulation, qui supprime une partie du financement des CTE ;...
    M. François Goulard. Il fallait un tracteur pour transporter les formulaires !
    M. Patrick Lemasle. ... pas d'inscription budgétaire pour 2003 permettant la signature de nouveaux contrats. Cela est d'autant plus paradoxal que votre administration annonçait il y a quelques semaines la fin de la prime à l'herbe, avec un dernier paiement en 2002, et conseillait aux agriculteurs de souscrire un CTE. Je tiens à votre disposition le document en question.
    Vous vous abritez derrière le rapport de la mission d'audit du 5 juillet 2002, en n'en retenant malicieusement que ce qui vous arrange. Car ce rapport dit dans ses conclusions, en parlant des CTE, que « cette démarche reste porteuse d'avenir. La quasi-totalité des organisations rencontrées partagent ce point de vue ».
    Monsieur le ministre, avez-vous la volonté d'aider les agriculteurs les plus fragiles ? Vous avez bien répondu, dès le mois de juin, aux attentes des agriculteurs qui percevaient le plus d'aides communautaires, en supprimant la modulation.
    Etes-vous favorable à un contrat entre le pays et ses agriculteurs qui comporte un volet économique et un volet environnemental ?
    Je vous rappelle que cette mesure va dans le sens souhaité par la majorité des agriculteurs,...
    M. Jean Auclair. C'est faux !
    M. le président. Monsieur Auclair, ce n'est pas parce que vous vous cachez derrière Mme Greff que je ne vous entends pas. (Rires).
    M. Patrick Lemasle. ... par l'opinion publique et par les instances européennes. Monsieur le ministre, sincèrement, voulez-vous maintenir et amplifier le contrat territorial d'exploitation, en inscrivant pour 2003 les crédits nécessaires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
    M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur le député, en matière de politique agricole, il y a deux attitudes : soit l'idéologie, soit le pragmatisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Nous, nous sommes des pragmatiques, qui ne voulons pas dresser les paysans les uns contre les autres,...
    M. Alain Néri. Vous voulez les faire disparaître !
    M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. ... mais au contraire, défendre toutes les agricultures françaises. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Je ferai trois observations, monsieur le député.
    Premièrement, si vous avez assisté hier aux questions d'actualité, vous savez que non seulement la prime à l'herbe n'est pas supprimée, mais qu'elle sera augmentée en moyenne de 70 %, en 2003 et au-delà. (Applaudissements sur les mêmes bancs.) Et je vous remercie de me donner l'occasion de le rappeler.
    Deuxièmement, ce qu'on appelle la modulation ne sert pas du tout à financer les contrats territoriaux d'exploitation.
    M. Jean Glavany. Bien sûr que si ! Vous mentez !
    M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Sur 228 millions d'euros qui ont été prélevés aux exploitations françaises à revenus intermédiaires,...
    M. Jean Glavany. Ce n'est pas vrai !
    M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. ... 215 millions dorment dans un compte au FEOGA...
    M. Jean Glavany. Je croyais qu'il n'y avait plus d'argent dans les caisses !
    M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. ... compte tenu de la mauvaise négociation qui a été faite avec Bruxelles à l'époque. (Vifs applaudissements sur les mêmes bancs. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Je vous en prie. Laissez le ministre de l'agriculture terminer.
    M. Henri Emmanuelli. Mais il raconte n'importe quoi !
    M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Troisièmement, les contrats territoriaux d'exploitation sont trop compliqués, pas assez resserrés sur les mesures agro-environnementales, et ce sont des bombes budgétaires à retardement. Je confirme donc ce que j'ai dit la semaine dernière : les contrats signés seront honorés,...
    M. Maurice Leroy. Très bien !
    M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. ... ceux dont les dossiers ont commencé d'être instruits sont en train d'être examinés au cas par cas et seront signés dans les tout prochains jours, et dans les tout prochains jours également, après concertation avec les organisations professionnelles agricoles, j'annoncerai un niveau de dispositif qui sera simplifié, resserré sur les mesures agro-environnementales qui marchent, et plafonné (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), comme le demande d'ailleurs une organisation syndicale que vous connaissez bien, et qui s'appelle la Confédération paysanne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

IMMIGRATION

    M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Guibal, pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    M. Jean-Claude Guibal. Monsieur le ministre de l'intérieur, on ne peut que se réjouir que, grâce à votre initiative, le tabou de l'immigration soit enfin levé dans notre pays. Nous avions des lois et règlements en matière d'immigration : ils ne constituaient pas pour autant une politique. Celle-ci se met aujourd'hui en place. Elle aura d'autant plus de force qu'elle s'inscrira dans une approche globale de l'immigration, prenant en compte l'ensemble de ses aspects : lutte contre l'immigration clandestine, rôle des mafias, politique d'intégration, mais également aide au développement des pays dont sont issus les migrants.
    La France ne peut pas ne pas s'interroger sur la politique qu'elle entend mener en matière d'immigration, compte tenu en particulier du vieillissement de sa population, lequel touche d'ailleurs la population de l'ensemble des pays de l'Union européenne. Si immigration il doit y avoir, celle-ci doit donc être positive et contrôlée.
    Ma question porte sur trois points. Ils concernent, d'une part, les solutions que vous entendez apporter aux problèmes qui se posent aujourd'hui en matière d'immigration. Ils concernent, d'autre part, les bases sur lesquelles vous envisagez de bâtir une politique globale dans ce domaine.
    Premièrement, donc, le centre de Sangatte va être prochainement fermé. Quelles mesures concrètes comptez-vous prendre concernant les personnes qui y sont réfugiées ?
    Deuxièmement, le Gouvernement envisage de réformer le droit d'asile. Pouvez-vous nous faire connaître les principales orientations de ce projet de réforme ?
    Troisièmement enfin, les relations entre la France et les pays sources d'immigration sont une des clés de voûte de toute politique en la matière. A cet égard, pouvez-vous nous dire quels sont les objectifs du Gouvernement, envers notamment les pays inclus dans le processus de Barcelone ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Peut-être accepterez-vous, monsieur le député, qu'en l'espace de deux minutes trente je consacre ma réponse à la question de Sangatte.
    Sangatte est un double scandale. C'est un scandale pour les immigrés du bout du monde, qui sont depuis trois ans et demi sous un hangar, sans aucun avenir possible. Et Sangatte est un scandale pour la population du Calaisis, qui supporte avec sang-froid, avec dignité et avec calme ce qu'aucune autre région n'aurait supporté.
    Je veux à ce propos rendre hommage à tous les élus du Calaisis, quelle que soit leur couleur politique, pour leur sang-froid. Alors que depuis trois ans des milliers de Kurdes, d'Afghans, de Soudanais, qui ne parlent pas un mot de français, arpentent la grande rue de Sangatte d'un bout à l'autre, le Front national a recueilli 31 % des voix. Tous les gens qui vivent à cet endroit et qui ont gardé leur calme ont bien mérité de la République et surtout qu'on s'occupe, enfin, d'eux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    L'affaire n'est pas simple. J'ai tout d'abord demandé au Premier ministre l'autorisation de saisir la CNIL, pour faire ce qui n'avait jamais été fait : recenser la population réfugiée dans le hangar. Il est quand même extraordinaire qu'au bout de trois ans et demi on ne sache toujours pas qui s'y trouve.
    M. Richard Mallié. C'est scandaleux !
    M. Patrick Labaune. La faute à qui ?
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. A M. Vaillant !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. En l'occurrence, ce n'était pas M. Vaillant le responsable.
    Le recensement est terminé depuis lundi dernier. Il a révélé la présence de dix-huit cents personnes et surtout des nationalités dont on ne parlait jamais. C'est ainsi que quatre-vingts Soudanais ont demandé, sans que nous en sachions la raison, le statut de réfugiés politiques.
    Maintenant que le recensement est achevé, le HCR, qui est installé à Sangatte depuis quelques semaines, va pouvoir commencer à interroger chaque immigré pour déterminer ceux qui souhaitent un statut de réfugié politique en Angleterre, que Davis Blunkett s'est engagé à leur donner, et ceux qui demandent un statut de réfugié politique en France. Si ceux-ci sont persécutés chez eux, je pense notamment aux Kurdes, il n'y aucune raison que nous ne leur accordions pas ce statut.
    M. François Rochebloine. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. A partir du 15 novembre, date à laquelle la loi sur l'immigration devrait changer en Grande-Bretagne, aux dires du ministre de l'intérieur britannique, nous n'accepterons plus personne.
    Car si tous ces gens arrivent du bout du monde dans le Calaisis, ce n'est pas pour y résider, quels que soient par ailleurs les charmes de la région, c'est pour espérer aller en Angleterre.
    Par ailleurs, la lutte contre les passeurs est renforcée. Vingt-quatre organisateurs se trouvent d'ores et déjà sous les verrous. Une opération a encore eu lieu la nuit dernière, mais il nous reste un clan à éradiquer.
    M. Yves Fromion. Le clan Vaillant. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ce sera chose faite dans les jours qui viennent. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Donc, si je confirme la fermeture de Sangatte pour le mois d'avril 2003, il faudra naturellement vérifier que le problème ne se déplace pas sur la façade atlantique, je pense notamment à Cherbourg, où nous avons renforcé les effectifs de manière que le département de la Manche ne connaisse pas ce qu'a connu depuis trop longtemps le département du Pas-de-Calais.
    M. Claude Gatignol. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mesdames, messieurs les députés, je ne sais pas si nous réussirons à régler définitivement le problème mais si nous le faisons, je crois que nous aurons bien mérité de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

GESTION DES FONDS STRUCTURELS EUROPÉENS

    M. le président. La parole est à Mme Martine Aurillac, pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    Mme Martine Aurillac. Ma question s'adresse à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
    La France bénéficie pour la période 2000-2006, dans le cadre de la politique régionale cofinancée par les fonds structurels européens, de plus de 16 milliards d'euros de financements communautaires, qui devraient permettre de mener à bien toute une série de projets. Or, après deux années de mise en oeuvre, alors même que l'on arrive presque à mi-parcours, l'avancement des programmes européens est aujourd'hui marqué par un niveau très insuffisant tant en termes de programmation - 15 % seulement - qu'en termes de réalisation - 6 % seulement.
    Certes, la gestion de ces fonds est très lourde mais, en période de restriction budgétaire, cette incurie et ce retard sont inacceptables pour nos concitoyens. La commission des finances s'en est d'ailleurs émue et vous avez vous-même, monsieur le ministre, rencontré M. Barnier avant-hier pour évoquer ce dossier.
    Ma question est simple : est-il exact qu'au moment où l'argent public est rare et cher, la France peut se retrouver dans la situation d'avoir à rendre aux autorités de Bruxelles une part non négligeable des fonds structurels régionaux européens destinés à notre pays au titre de la solidarité régionale et sociale ?
    M. François Goulard. C'est vrai !
    Mme Martine Aurillac. Dans ce cas, quelles mesures comptez-vous ou plutôt pouvez-vous prendre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
    M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Madame la députée, chacun se souvient de la mobilisation des élus pour être éligibles aux fonds structurels européens, ce qui prouve d'ailleurs la forte adhésion à cette politique de cohésion menée par l'Europe. Mais chacun est aussi conscient de l'énorme déception des élus qui sont nombreux à dire : « Je suis éligible aux fonds européens mais les procédures sont tellement compliquées que je préfère me passer des subventions », avec le résultat que vous indiquez.
    Dès notre arrivée aux affaires, le Premier ministre a été sensible au fait que le taux de programmation n'était pas de 30 %, mais seulement de 15 %. Il a également pris conscience du risque d'être amené à devoir restituer à l'Europe, en raison de la règle de dégagement d'office, des fonds qui étaient destinés à la France. Nous avons déjà perdu beaucoup d'argent à cause de cela les années précédentes, sur les fonds sociaux notamment.
    M. Pascal Clément. C'est vrai !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Il faut dire que nous avons, en France, le génie d'ajouter aux procédures européennes des procédures françaises qui ne sont pas moins compliquées. (Applaudissements sur de nombreux rangs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    C'est la raison pour laquelle nous avons adopté, dès le conseil des ministres du 31 juillet, plusieurs mesures : simplification administrative, versement des fonds aux préfets de région dès le début de 2003, externalisation des services, expérimentation en Alsace, versement des subventions même quand les travaux sont commencés, véritable révolution pour le Trésor.
    M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Il s'agit d'une véritable révolution culturelle. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Nous avons tous les mois, à la DATAR, un comité de suivi. Le Premier ministre recevra en même temps, pour la première fois dans l'histoire de la République, les préfets de région et les présidents de région pour tirer le maximum de profit de ces mesures qui sont aujourd'hui immédiatement exécutables.
    M. Yves Fromion. Très bien !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Je me suis rendu le 7 octobre, avec ma collègue Brigitte Girardin, à Bruxelles. Nos collègues européens se sont montrés sensibles aux modifications des procédures que nous avons introduites en France, et nous avons pu obtenir du commissaire européen Michel Barnier des assouplissements pour les procédures européennes.
    Voilà un symbole fort de la réforme de l'Etat voulue par le Premier ministre. Le projet l'emporte sur les procédures, les résultats, sur les moyens.
    M. le président. Merci, monsieur le ministre.
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. L'Etat doit accompagner les projets locaux et non les asphyxier. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

MESURES FISCALES

    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour le groupe socialiste.
    M. Augustin Bonrepaux. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    Tout à l'heure, monsieur le ministre, vous avez confirmé votre prévision de croissance mais sans annoncer aucune mesure concrète et efficace pour atteindre cet objectif. (« Et le budget, alors ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Georges Tron. Vous n'avez pas écouté !
    M. Augustin Bonrepaux. La réduction d'impôt sur le revenu de 5 %, que vous avez décidée en juillet pour les catégories les plus favorisées (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), n'a rien apporté à la consommation et à la croissane, l'INSEE vient de le confirmer. Cependant, elle a aggravé d'autant le déficit.
    M. Yves Fromion. C'est faux !
    M. Georges Tron. C'est votre déficit, monsieur Bonrepaux !
    M. Augustin Bonrepaux. Dans votre projet de budget, monsieur le ministre, vous poursuivez la même erreur, avec une réduction supplémentaire de l'impôt sur le revenu pour les plus aisés et avec même, en prime, un cadeau fiscal exorbitant pour les emplois de maison. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
    M. Yves Fromion. Et alors ?
    M. Richard Mallié. Quel culot !
    M. le président. Mes chers collègues, ne vous énervez pas, M. Bonrepaux va poser sa question. (« Elle est nulle ! » sur les mêmes bancs.)
    M. Augustin Bonrepaux. L'effet d'aubaine de cette mesure sera supérieur à 10 000 francs pour chacune des 60 000 familles privilégiées. (Vives exclamations sur les mêmes bancs.)
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, veuillez avoir l'amabilité de poser votre question. (« Oui, la question ! » sur les mêmes bancs.)
    M. Augustin Bonrepaux. Je vais la poser, encore faudrait-il me laisser parler ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Pour les huit millions de travailleurs bénéficiaires de la prime pour l'emploi, vous ne prévoyez rien qu'une réformette pour encourager l'emploi à temps partiel, c'est-à-dire pour encourager la précarité. (Exclamations sur les mêmes bancs.) Pourtant, M. le Premier ministre a reconnu, à plusieurs reprises, l'utilité de la prime pour l'emploi afin d'encourager le retour à l'emploi et d'améliorer le pouvoir d'achat des revenus modestes.
    M. Georges Tron. Votre question !
    M. Augustin Bonrepaux. Ma question est simple, précise. (« Ah ! » sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, posez-la, sinon je vais être obligé de vous interrompre !
    M. Augustin Bonrepaux. A l'heure où la conjoncture s'aggrave, où le chômage s'accroît...
    M. Richard Mallié. La faute à qui ?
    M. Augustin Bonrepaux. ... seule la consommation est en mesure de soutenir l'emploi.
    M. le président. Merci, monsieur Bonrepaux, vous avez dépassé votre temps de parole.
    M. Augustin Bonrepaux. Ah non, je n'ai pas terminé !
    L'argent consacré aux cadeaux fiscaux pour les privilégiés ne serait-il pas plus efficace et plus utile pour la croissance et l'emploi, plus juste...
    M. le président. Merci, monsieur Bonrepaux, vous avez épuisé votre temps. Ne faites pas ce que vous reprochez aux autres. Nous vous avons compris.
    La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    (Cependant que M. Bonrepaux, poursuivant sans micro, devient inaudible, claquements de pupitres sur les bancs du groupe socialiste dont plusieurs membres se lèvent sous les huées des députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Messieurs, je vous en prie, asseyez-vous !
    M. Augustin Bonrepaux. C'est un scandale !
    M. le président. Le temps est égal pour tous, que l'on soit de votre côté ou de l'autre.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous m'avez interrompu ! Je n'ai même pas pu poser ma question ! (Les claquements de pupitres s'accélèrent sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Messieurs, le temps est le même pour tout le monde !
    Monsieur le ministre, vous avez la parole.
    M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, je vais essayer de répondre à une question que j'ai eu du mal à entendre. (Mmes et MM. les députés du groupe socialiste se dirigent vers la sortie de l'hémicycle en protestant. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Christian Bataille. L'opposition est bâillonnée !
    M. le président. Allons, il ne sert à rien de s'énerver ! Le temps est le même pour tous, vos cris et vos critiques n'y changeront rien.
    Monsieur le ministre, je vous en prie, on vous a posé une question, répondez-y. S'ils ne veulent pas écouter votre réponse, c'est leur problème, pas le vôtre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Les effets des mesures prises par le Gouvernement pour baisser les impôts ne sont pas encore visibles, les feuilles d'impôt arrivent seulement chez les contribuables. Il n'est donc pas étonnant qu'on ne voie pas encore de conséquences sur le comportement des consommateurs. Ce n'est qu'à partir de maintenant qu'ils peuvent constater qu'ils ont à dépenser moins d'argent pour leurs impôts et qu'ils disposent, donc, de plus pour leur consommation. (Applaudissements sur les mêmes bancs.)
    M. Edouard Landrain. Evidemment !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. En outre, je voudrais vous rappeler que toutes les mesures que nous avons prises, y compris à travers l'aménagement que nous proposons sur la prime pour l'emploi pour le temps partiel, ont pour objectif d'améliorer le pouvoir d'achat pour une grande partie de notre population : 15 millions de foyers sont redevables de l'impôt sur le revenu des personnes physiques et quelque 3 millions de plus bénéficient de la prime pour l'emploi. Donc, je ne peux pas laisser dire que les mesures que nous proposons sont des mesures qui concernent uniquement quelques privilégiés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

AIDE AUX ASSOCIATIONS DE LUTTE
CONTRE L'EXCLUSION

    M. le président. La parole est à Mme Claude Greff, pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    Mme Claude Greff. Ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion.
    Madame la secrétaire d'Etat, de nombreuses associations qui s'occupent de personnes en situation d'exclusion souffrent du retard dans le versement des subventions qui leur ont été accordées par les services de la DDASS. Cela fragilise notamment les plus petites associations qui sont souvent les plus dynamiques sur le terrain et qui voient ainsi leur fonctionnement mis en péril.
    Quelles actions comptez-vous mettre en oeuvre afin que les engagements pris par l'Etat soient tenus et que ces associations soient effectivement payées et leur financement clarifié ?
    Les associations nous signalent aussi l'extrême tension, bien avant l'hiver, du dispositif national d'hébergement. Quelles mesures comptez-vous prendre pour que les plus fragiles de nos concitoyens puissent être mis à l'abri ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
    Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Madame la députée, vous avez raison, les associations qui travaillent aux côtés de l'Etat pour mettre en place la politique de lutte contre l'exclusion souffrent, pour deux raisons.
    D'une part, elles souffrent depuis des années d'un manque de reconnaissance qui se traduit par des retards importants dans le paiement de leurs subventions.
    M. François Goulard. C'est vrai !
    Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Les subventions correspondent uniquement au paiement de ce qu'elles font pour les plus démunis. D'autre part, elles ont signalé une tension du dispositif national d'hébergement.
    Face à ces situations d'urgence, nous avons pris des mesures immédiates.
    Tout d'abord, avec le Premier ministre, nous avons donné comme instruction de payer immédiatement l'ensemble des subventions dues à toutes les associations de solidarité. Il y a urgence. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Ensuite, nous allons entreprendre une réforme des procédures et des pratiques. C'est ainsi qu'une circulaire du Premier ministre viendra confirmer la mise en place de conventions pluriannuelles d'objectifs avec les associations, qui leur permettront de recevoir 50 % de leur subvention dès le début de l'année. Et vous verrez que les associations que vous voyez partout en seront fort contentes.
    M. Edouard Landrain. Très bien !
    Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Par ailleurs, un référentiel des bonnes pratiques sera mis en place, afin de s'assurer que toute la mécanique budgétaire et de financement fonctionne correctement.
    Enfin, une mission interministérielle IGAS-IGF sera mise en place, afin d'auditer l'ensemble du dispositif national d'urgence et de veiller à ce que la mécanique budgétaire suive et soit en adéquation avec ce dispositif.
    Cela m'amène au second sujet de préoccupation : le dispositif d'urgence. Nous avons recencé 79 000 places d'hébergement d'urgence et d'insertion sur le territoire. Néanmoins, le dispositif est tendu, notamment parce qu'on ne sait jamais à l'avance combien de personnes vont se retrouver à la rue. Il faut pourtant assurer.
    M. le président. Madame la secrétaire d'Etat, si vous continuez à parler, le dernier orateur ne pourra pas passer à la télévision et je tiens à faire respecter le temps pour tout le monde, y compris pour le Gouvernement. Merci de conclure en un mot.
    Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Je conclurai simplement en disant que nous allons mobiliser 3 000 places d'urgence dès avant l'hiver et 4 718 places en 2003, j'espère qu'ainsi nous pourrons faire face. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

RETRAITES AGRICOLES

    M. le président. La parole est à M. Jérôme Bignon, pour le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    M. Jérôme Bignon. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
    La réforme des retraites est un enjeu considérable pour lequel le gouvernement précédent n'a rien fait.
    M. Jean-Claude Lenoir. D'ailleurs, l'opposition ne dit rien ! (Sourires.)
    M. Jérôme Bignon. Le Président de la République s'est engagé à en faire un des chantiers du quinquennat. Le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale nous a fixé le calendrier. Le premier semestre 2003 sera celui du temps de l'action pour la réforme des retraites.
    C'est un enjeu considérable pour les Français qui ont le sentiment d'être traités de façon inéquitable et, parmi ceux-ci, les anciens exploitants agricoles se sentent les plus concernés par l'inégalité.
    Ma question, monsieur le ministre, est simple. S'agissant de retraite de base, les anciens exploitants sont actuellement les seuls à « bénéficier » de leur pension de retraite à paiement échu trimestriellement - tous les Français perçoivent leur retraite mensuellement. Quelles perspectives le Gouvernement peut-il tracer pour avancer dans la direction de la mensualisation ?
    S'agissant de la retraite complémentaire, que les deux Assemblées ont votée à l'unanimité en mars 2002 et que le gouvernement précédent, là encore, n'avait pas prévu de financer, votre Gouvernement a décidé sa mise en application. Quand les décrets sortiront-ils ? Le financement du budget BAPSA pour 2003 permettra-t-il d'honorer cet engagement auquel nous sommes attachés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
    M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur le député, chacun sait, ici, que le niveau des retraites des paysans n'est pas digne. (« En effet ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    S'agissant de la retraite de base, des augmentations ont été acquises depuis huit ans, il faudra poursuivre dans cette voie. S'agissant de la retraite complémentaire, les paysans étaient les seuls à ne pas en bénéficier. Une loi a bien été votée voici quelques mois mais elle n'est pas financée (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Dominique Dord. Comme d'habitude !
    M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Aujourd'hui, nous avons réuni les financements et la retraite complémentaire sera versée à partir du 1er avril 2003, les droits démarrant au 1er janvier 2003. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Elle sera financé par une augmentation de la cotisation acceptée par les organisations professionnelles agricoles et une subvention du budget de l'Etat de 28 millions d'euros sur les 600 millions d'euros que versera l'Etat au budget annexe des prestations sociales agricoles. (« Bravo ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    J'en viens à la mensualisation, à laquelle les paysans sont à juste titre très attachés. Nous travaillons sur le dossier avec la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole. L'année où elle interviendra, la mensualisation représentera un coût équivalant en trésorerie à deux mois de prestations.
    Pour l'année 2003, nous avons préféré que la priorité soit donnée à la mise en place de la retraite complémentaire.
    Bien évidemment, je souhaite que nous puissions, en liaison avec la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole, mettre en place le plus rapidement possible la mensualisation dans la concertation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

3

FAIT PERSONNEL

    M. le président. En application de l'article 58 du règlement, la parole est à M. François Liberti, pour un fait personnel.
    M. François Liberti. Monsieur le président, la mise en cause dont j'ai fait l'objet à propos des inondations dans le sud de la France n'est pas correcte, non seulement sur la forme - et je vous remercie d'avoir à cet égard rappelé à l'ordre notre collègue - mais plus encore sur le fond. En effet, la polémique n'est pas de mise lorsqu'il s'agit de la situation de milliers de familles en détresse.
    Les mesures dont j'ai fait hier état à la faveur d'une question au Gouvernement que je posais au nom du groupe des députés-e-s communistes et républicains comportaient des points forts concernant les banques, les assurances et la commission parlementaire. Elles n'appellent pas de polémique : elles appellent des décisions urgentes et concrètes.
    Nous continuerons d'agir dans ce sens, monsieur le président. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze.)

4

RAPPEL AU RÈGLEMENT

    M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour un rappel au règlement.
    M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le président, je regrette que nous, députés du groupe socialiste, ayons été conduits à quitter l'hémicycle. Nous y avons été contraints.
    Je voudrais à ce sujet émettre une protestation.
    Je sais que vous faites beaucoup d'efforts pour que les séances consacrées aux questions d'actualité se déroulent de façon rythmée, pour que chacun s'exprime dans le respect du temps de parole qui lui est imparti, pour que les ministres fassent de même et pour que ces séances soient empreintes de la dignité qui convient. Mais depuis le début de cette législature, j'observe - j'avais pourtant mis en garde les députés de la majorité - une certaine dérive vers l'intolérance.
    Si tel ou tel orateur a du mal à terminer sa question, c'est parce qu'il est sans cesse interrompu. Cette intolérance est inacceptable dans un parlement démocratique comme le nôtre, où des voix différentes et discordantes doivent pouvoir s'exprimer avec force, avec conviction et dans le respect des autres. Or ce n'est pas toujours le cas.
    Il est particulièrement scandaleux, et j'ai eu l'occasion de le déplorer depuis le début du mois de juillet, ainsi que pendant toutes nos séances de questions d'actualité, un orateur de l'opposition ait peine à finir ses phrases.
    Je tiens à lancer un appel à mes collègues présidents des groupes de la majorité, et plus particulièrement au président de l'UMP, pour que les choses changent et que la tolérance soit chaque jour, à l'Assemblée nationale, à l'ordre du jour. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

    M. le président. Monsieur le président Ayrault, je voudrais rappeler à tous les députés de l'opposition comme de la majorité que l'organisation des séances consacrées aux questions au Gouvernement résulte de décisions prises d'un commun accord à la conférence des présidents.
    Il en va ainsi en particulier, et vous le savez aussi bien que moi, du temps de parole imparti à chaque auteur de question, un temps doit être évidemment le même pour tous.
    En veillant au respect de ce temps de parole, je ne fais que mon devoir et je continuerai de le faire. Je n'aime pas l'intolérance, d'où qu'elle vienne, de ce côté-ci ou de ce côté-là de l'hémicycle.
    Je demande à tous les présidents de groupe, à vous, monsieur Ayrault, comme à vos collègues, de faire en sorte que, dans cette assemblée et particulièrement lors des séances de questions d'actualité durant lesquelles nous sommes observés par les caméras de télévision, chacun se respecte et respecte les positions des autres.
    C'est cela, la démocratie, et c'est l'honneur de ce parlement que d'accepter que, les uns et les autres, nous n'ayons pas les mêmes idées, mais que nous puissions, les uns face aux autres, les exprimer tranquillement. Alors, aidez-moi !
    Je continuerai d'agir comme je l'ai fait jusqu'à présent, en faisant respecter un temps de parole qui est le même pour tous.

5

COMMUNICATION DU MÉDIATEUR
DE LA RÉPUBLIQUE

    M. le président. L'ordre du jour appelle la communication du Médiateur de la République.
    Messieurs les huissiers, veuillez faire entrer M. le Médiateur de la République.
    (M. Bernard Stasi, Médiateur de la République, est introduit avec le cérémonial d'usage.)
    Monsieur le Médiateur de la République, mes chers collègues, depuis la loi du 12 avril 2000, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le rapport sur les travaux de la médiature fait l'objet d'une communication devant chacune des assemblées.
    C'est donc, monsieur le Médiateur, la seconde occasion qui vous est donnée de présenter votre rapport devant l'Assemblée nationale, mais c'est la première fois que vous allez vous adresser aux élus de la nouvelle législature. Je suis heureux, en leur nom, de vous accueillir dans cet hémicycle.
    Je vous invite maintenant à monter à la tribune pour présenter votre communication à l'ensemble de la représentation nationale. (Applaudissements.)
    M. Bernard Stasi, Médiateur de la République. Monsieur le président, monsieur le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, mesdames, messieurs les députés, c'est pour moi un honneur de me trouver devant vous en ce début de session afin de vous présenter le rapport d'activité du Médiateur de la République pour l'année 2001.
    C'est également avec plaisir que je viens vous rendre compte, à vous, élus et représentants du peuple, des activités d'une institution dans le fonctionnement de laquelle vous êtes partenaires et jouez un rôle essentiel. Vous êtes en effet le relais de la saisine de l'institution et des réformes que je propose. Je me félicite d'ailleurs que le dialogue permanent que j'entretiens avec vous se fonde, dans le respect des valeurs républicaines, sur une relation de confiance mutuelle. Dans un esprit constructif, nous oeuvrons ensemble à la sauvegarde de la paix sociale.
    L'action du Médiateur de la République s'inscrit dans une exigence démocratique, celle de rechercher une harmonie entre société civile et pouvoirs publics, avec la volonté permanente de mieux servir nos concitoyens et de renforcer l'Etat de droit.
    Lieu de concertation et de réconciliation, l'institution du Médiateur de la République est aussi un des observatoires privilégiés de la société française. La société française est perturbée et je suis fondé à parler de ce constat.
    Quotidiennement, je traite de réclamations toujours plus nombreuses et, quotidiennement, à travers elles, je constate la multiplication des sources de litige, je perçois les besoins qui émergent, j'entends les revendications qui s'expriment. Trop nombreux sont encore ceux de nos concitoyens qui se trouvent dans l'incapacité d'affronter le maquis juridique que constitue notre droit. Trop nombreux sont ceux qui, plus généralement, se sentent démunis, désarmés, abandonnés. Ce sentiment s'est révélé dans sa dimension la plus inquiétante lors de la longue et troublante période électorale que nous avons vécue au printemps dernier, où tant de citoyens, se sentant incompris, voire rejetés, se sont dramatiquement désintéressés de la chose publique.
    Pourtant, les Français sont attachés aux principes d'un Etat de droit ainsi qu'à notre Etat républicain, qui constitue, en France, le fondement de la cohésion nationale.
    Cette inflation et cette instabilité des normes juridiques, conjugées parfois à une certaine opacité de la répartition des compétences entre les différents acteurs publics, s'accompagnent d'une montée des situations conflictuelles, source de difficultés auxquelles je tente, avec mes collaborateurs au siège et dans les départements, de remédier.
    Chargé d'aider les administrés à résoudre amiablement les conflits qu'ils peuvent connaître avec les services publics, je ne suis cependant ni l'avocat du citoyen ni le procureur de l'administration. Institution indépendante, le Médiateur de la République tient une place unique dans le champ de la médiation. Il n'est pas inutile de le rappeler à l'heure où se multiplient toutes sortes de médiateurs, où chaque entreprise, privée ou publique, chaque administration, se dote de son médiateur interne. Comment reconnaître alors au Médiateur de la République son originalité et sa spécificité ? Si je me réjouis bien entendu de l'évolution de notre société, parfois trop rigide, vers ce que j'appellerais une « culture de compromis », je regrette la confusion qui en résulte et suis inquiet de voir le mot « médiateur » ainsi banalisé et parfois galvaudé.
    Etant l'un des symboles de la vitalité démocratique de la France et servant très souvent de modèle à la création d'institutions similaires à l'étranger, le Médiateur de la République française, contrairement à la plupart des médiateurs ou ombudsmans du monde, n'est pas mentionné, et donc n'est pas garanti, par la Constitution. Je soumets donc la question du statut constitutionnel du Médiateur de la République à votre réflexion, mesdames, messieurs les députés.
    M. Loïc Bouvard. Très bien !
    M. le Médiateur de la République. Plus concrètement, je me suis attaché, en 2001, à poursuivre trois fortes ambitions : d'abord, rapprocher davantage encore l'institution de nos concitoyens, notamment des plus démunis, dans la volonté de remailler le lien social ; ensuite, utiliser pleinement le pouvoir de proposition de réforme dévolu à l'institution, dans la volonté d'accompagner la modernisation de l'Etat ; enfin, enfin, de développer l'action européenne, francophone et internationale du Médiateur, afin de contribuer à l'évolution d'une mondialisation qui, au lieu d'aboutir, comme on peut le craindre, à la domination dans tous les domaines de l'injustice et de l'arbitraire, c'est-à-dire à la loi du plus fort, doit au contraire permettre le renforcement à travers le monde des droits des citoyens.
    Au cours de l'année 2001, plus de 58 000 citoyens ont fait appel aux services du Médiateur de la République, soit 8,3 % de plus que l'année précédente. Cette augmentation, je m'empresse de le préciser, ne signifie en aucune manière que l'administration fonctionne de plus en plus mal et commet de plus en plus d'erreurs. Je tiens ici devant vous, mesdames, messieurs les députés, à rendre hommage à la compétence et au dévouement de la très grande majorité des fonctionnaires de notre pays, avec lesquels l'institution entretien des relations de confiance réciproque et de fructueuse collaboration.
    Cela dit, l'augmentation des réclamations est significative de l'importance des difficultés rencontrées par nombre de nos concitoyens dans leur vie quotidienne et dans leurs relations avec les services publics, qu'il s'agisse de la lenteur ou de la complexité des procédures administratives, de l'incompréhension de certaines décisions ou de certains agissements des services de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou de tout autre organisme investi d'une mission de service public.
    Sur ces 58 000 affaires, près de 5 000 ont été traitées par le siège et, dans huit cas sur dix, ont connu une issue favorable. Le mérite de ce succès revient surtout à mes collaborateurs du siège, dont les compétences juridiques, la parfaite connaissance des rouages de l'administration et le sens de la négociation permettent d'instruire les dossiers les plus complexes. Que leur travail soit ici reconnu et salué.
    Plus de 53 000 demandes ont, elles, été directement traitées par les 232 délégués qui, en 2001, m'ont représenté sur l'ensemble du territoire. Ils sont aujourd'hui 258. Preuve, s'il en est, de la nécessaire proximité à laquelle aspirent nos concitoyens afin que se rétablisse le lien de confiance avec les services publics. Preuve également du succès du programme de développement territorial que j'ai mis en oeuvre au sein des quartiers difficiles, afin de permettre au plus large public d'accéder aux possibilités ouvertes par la loi du 3 janvier 1973 et afin de contribuer à la mise en oeuvre des priorités nationales que sont le rapprochement des services publics et de la population, l'élargissement de l'accès au droit et la lutte contre les exclusions. Il s'agit, par là même, de toujours mieux prendre en compte les besoins, les attentes et les revendications des plus démunis.
    Si l'an 2000 avait été marqué par la mise en place du développement territorial et par l'augmentation significative du nombre de délégués du Médiateur de la République puisque plus de 100 nouveaux avaient été recrutés, 2001 a été l'année de la première évaluation concrète du programme. A cette fin, j'ai créé à mes côtés, au siège, une direction du développement territorial chargée, tout à la fois, d'adapter les outils nécessaires au bon exercice de la fonction de délégué, de remodeler leur cadre d'action et d'assurer une coordination globale du réseau avec tous nos interlocuteurs, au premier rang desquels vous-mêmes, mesdames, messieurs les députés.
    En outre, compte tenu de l'importance du nombre de délégués désormais présents sur l'ensemble du territoire, j'ai décidé de créer une nouvelle fonction de « coordonnateur départemental » afin de favoriser et de dynamiser l'animation du réseau et le relais des informations. Ces 232 délégués, qui constituent l'échelon de proximité de l'institution, ont traité les réclamations de citoyens directement, sur leurs lieux de permanence, que ce soit au chef-lieu de département, à la préfecture ou au coeur des quartiers en difficulté, dans des structures faciles d'accès telles que les maisons de la justice et du droit, les maisons de services publics ou encore les centres sociaux, structures présentant l'avantage de réunir un réseau d'acteurs complémentaires et d'offrir des conditions satisfaisantes d'accueil des publics.
    Il convient de noter que l'augmentation du nombre de délégués au sein des quartiers difficiles, ajoutée à l'accroissement de leur activité, a élargi leur sphère d'action. En effet, les délégués du Médiateur de la République, représentants d'une institution indépendante, apparaissent de plus en plus comme des interlocuteurs privilégiés, notamment par ceux de nos concitoyens en situation difficile qui espèrent trouver auprès d'eux l'aide à la solution de leurs problèmes, quelle qu'en soit la nature. Aussi, au-delà du traitement purement juridique des réclamations qui relèvent de la compétence de l'institution, les délégués, au travers des demandes qui leur ont été faites, ont largement développé leur rôle pédagogique, d'écoute, d'information et d'orientation dans des domaines qui ne relevaient pas strictement des compétences dévolues à l'institution par la loi du 3 janvier 1973.
    Mais si mes délégués peuvent être sollicités pour des questions de toute nature, la médiation institutionnelle ne peut se réduire à l'écoute, même bienveillante. Sa crédibilité et sa force s'appuient sur la sûreté juridique de l'action des délégués et sur une attitude conforme aux principes fondateurs de l'institution : l'indépendance et l'autorité morale. C'est d'ailleurs pour aider mes délégués à faire face à la diversité des publics qu'ils rencontrent et des demandes qui leur sont faites que j'ai développé, en 2001, leur formation initiale, notamment en matière d'accueil des publics en difficulté.
    J'ai, pour ma part, décidé de poursuivre ce programme de développement territorial qui concerne aujourd'hui trente-deux départements au titre de la politique de la ville, alors que près d'une trentaine d'autres pourraient en être bénéficiaires et que les zones rurales les plus fragiles ont, elles aussi, des besoins qui mériteraient d'être pris en considération. Mais je ne pourrai le faire sans votre concours,...
    M. Loïc Bouvard. Tout à fait !
    M. le Médiateur de la République. ... l'expérience révélant certaines difficultés qui doivent être surmontées avant d'aller plus loin. Je ne mentionnerai aujourd'hui que la plus importante d'entre elles, qui concerne la nécessaire clarification de la situation juridique des délégués du Médiateur de la République. Dans les faits, ceux-ci agissent dans un esprit qui est celui du bénévolat. C'est ainsi que le public perçoit leur intervention et c'est aussi de cette façon que je conçois leur mission, comme tous mes prédécesseurs avant moi. Mais il se trouve que cette conception consensuelle n'a pas encore trouvé sa traduction dans un texte, ce qui crée aujourd'hui de sérieuses difficultés pour les délégués en fonction et risque de réduire les possibilités de recrutement.
    C'est pourquoi je souhaite, dans l'intérêt du public comme dans celui des délégués, que puisse vous être soumis, dès que possible, un texte qui viendrait compléter l'article 6-1 de la loi du 3 janvier 1973 en précisant que la fonction de délégué est exercée à titre bénévole. Je serai naturellement prêt, le moment venu, à exposer cette question de façon détaillée devant votre commission spécialisée.
    Face à ce que j'appellerais le sentiment d'« insécurité administrative » qu'éprouvent les plus fragiles de nos concitoyens, il est indispensable de simplifier les relations avec les administrations, d'améliorer la qualité du service rendu, de rendre adaptés et plus accessibles les normes et les textes. Comment, en effet, assurer le respect du droit s'il n'est pas compris par chacun ? Cette modernisation de l'administration s'inscrit dans le cadre, plus large, de la nécessaire réforme de l'Etat à laquelle les citoyens aspirent et à laquelle nous devons tous ensemble oeuvrer.
    En effet, en tant que Médiateur de la République, je suis habilité par la loi à proposer des réformes et à participer activement à l'amélioration des textes et à la modernisation de l'administration. Aussi, j'aborderai maintenant le volet préventif de mon action.
    Là encore, 2001 fut une année d'évaluation après que la loi du 12 avril 2000, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, a élargi mon champ d'action en matière de réforme, me permettant d'inscrire le développement de cette mission réformatrice parmi mes objectifs prioritaires. L'attention et l'intérêt que vous portez, mesdames, messieurs les députés, aux suggestions de réformes du Médiateur de la République sont un encouragement à la poursuite du renforcement des relations de travail entre nos deux institutions dans ce domaine et je tiens à vous en remercier.
    Afin que nos concitoyens retrouvent confiance dans la capacité de l'Etat à évoluer et fort de mon pouvoir d'auto-saisine, j'ai décidé de mettre en chantier des réformes susceptibles d'avoir un plus grand retentissement dans le champ social, dans la vie quotidienne de nos concitoyens, en travaillant plus particulièrement sur le thème de la place des handicapés dans notre société. (« Très bien ! » sur de nombreux bancs.)
    L'année 2001 a également été marquée par la satisfaction de quinze de mes propositions de réforme qui, bien que caractérisées par leur aspect plus technique, n'en demeurent pas moins importantes aux yeux des catégories de citoyens qu'elles concernent. Je citerai, par exemple, l'assouplissement des conditions de validation des périodes de service militaire légal par le régime d'assurance vieillesse et les régimes alignés, l'assouplissement des règles de remboursement des aides aux jeunes agriculteurs et la possibilité, pour les agents en activité et pour les retraités de la fonction publique des départements d'outre-mer, de percevoir l'allocation de logement familial.
    Si, par les missions qui lui sont dévolues et par son pouvoir de proposition de réforme, le Médiateur de la République est un des symboles de la démocratie française, son action ne peut se limiter aux frontières de notre pays. J'évoquerai donc, pour terminer, les activités internationales de l'institution, domaine dans lequel j'ai suivi l'action engagée par mon prédécesseur, Jacques Pelletier.
    Tout d'abord, il faut noter que, sous l'effet de l'élargissement de la liberté de circulation des personnes et des biens sur le territoire de l'Union européenne, l'année 2001 a été marquée par une augmentation sensible du nombre de dossiers relevant de la compétence de différents médiateurs de l'Union et de l'application du droit communautaire. Cet état de fait m'a conduit à collaborer encore plus étroitement avec mes collègues européens, ainsi qu'avec le Médiateur de l'Union européenne.
    Par ailleurs, dans le cadre du pacte de stabilité et en liaison avec le Conseil de l'Europe, j'ai aidé à la création d'instances de médiation dans différents pays de notre continent, particulièrement au Kosovo, en Ukraine et en Bosnie-Herzégovine. Au-delà de l'Europe, l'action internationale du Médiateur de la République s'est poursuivie en 2001, car de nombreux pays, engagés dans un processus de démocratisation ou désireux de renforcer l'Etat de droit, ont décidé de créer une institution indépendante ayant pour vocation de régler les conflits entre les citoyens et l'administration. La collaboration du Médiateur de la République a été notamment sollicitée par le Bénin, le Liban et le Maroc.
    Je me réjouis de la création de ces ombudsmans ou médiateurs que je considère comme une étape essentielle, en même temps qu'un signal fort dans la voie de la construction ou de la consolidation d'un Etat démocratique. Je me réjouis également de constater que, très souvent, le modèle français est pris comme référence. Dans ce contexte, je n'ai cessé, tout au long de l'année écoulée, de développer mon action internationale, notamment dans le cadre de la francophonie, ayant été élu en octobre 2001, président de l'Association des ombudsmans et médiateurs de la francophonie, qui regroupe quarante-quatre institutions appartenant à vingt-neuf pays différents.
    Certes, la vitalité et le rayonnement de la francophonie, l'aide aux pays en voie de démocratisation, la défense des droits de l'homme dans le monde, la construction d'une Europe fondée sur l'Etat de droit ne relèvent pas explicitement du domaine de compétence du Médiateur de la République. Néanmoins, il est, j'en suis convaincu, conforme à l'esprit de notre République et aux exigences de notre temps qu'une institution comme celle dont j'ai la charge, tout en accomplissant du mieux possible la mission qui est sa raison d'être, apporte sa contribution à l'action internationale de la France dans ces domaines qui concernent les droits des citoyens.
    Je voudrais dire enfin que si le gouvernement précédent a accordé son soutien au Médiateur de la République, notamment en l'aidant à mettre en place le réseau des délégués et en lui permettant de renforcer les effectifs de ses collaborateurs au siège de l'institution, je me réjouis aussi d'avoir rapidement créé les conditions d'une confiante collaboration avec les nouveaux responsables gouvernementaux, notamment avec ceux qui ont en charge la réforme de l'Etat, la décentralisation et la politique de la ville.
    Cette continuité dans la coopération entre les hautes autorités de l'Etat et le Médiateur de la République témoigne, s'il en était besoin, que le droit de l'administré à être, en toutes circonstances, considéré et respecté comme un citoyen à part entière dans ses relations avec les services publics est une de ces valeurs de la République qui transcendent les clivages politiques.
    Cette conviction, mesdames, messieurs les députés, ne peut que renforcer ma volonté et celle de mes collaborateurs de tout mettre en oeuvre pour répondre aux attentes de nos concitoyens et aussi, sans jamais mettre en cause l'indépendance qui est l'essence même de l'institution, pour être dignes de la confiance des élus de la nation et des responsables de l'Etat. (Applaudissements sur tous les bancs.)
    M. le président. Je vous remercie, monsieur le Médiateur de la République, pour la présentation de votre rapport. Nous avons tous noté avec attention les propositions de réforme de l'institution dont vous avez la responsabilité.
    L'Assemblée nationale vous donne acte du dépôt de ce rapport. (Applaudissements.)
    Madame, messieurs les huissiers, veuillez reconduire M. le Médiateur de la République. (M. le Médiateur de la République est reconduit avec le cérémonial d'usage.)
    (M. Rudy Salles remplace M. Jean-Louis Debré au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES,
vice-président


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SALAIRES, TEMPS DE TRAVAIL
ET DÉVELOPPEMENT DE L'EMPLOI

Suite de la discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi (n°s 190, 231).

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée à l'amendement n° 228 à l'article 2.

Article 2 (suite)

    M. le président. Je rappelle les termes de l'article 2 :

TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES
AU TEMPS DE TRAVAIL

    « Art. 2. - Le code du travail est ainsi modifié :
    « I. - A l'article L. 212-5 :
    « 1° Les I et II sont abrogés et remplacés par le I suivant :
    « I. - Les heures supplémentaires donnent lieu à une majoration de salaire dont le taux est fixé par un accord de branche étendu. Ce taux ne peut être inférieur à 10 %. A défaut d'accord, chacune des huit premières heures supplémentaires donne lieu à une majoration de 25 %, et les heures suivantes à une majoration de 50 %. »
    « 2° Le III devient le II ;
    « 3° Au premier alinéa du II, les mots : "au II sont supprimés.
    « II. - A l'article L. 212-5-1 :
    « 1° Le premier alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :
    « Les heures supplémentaires de travail mentionnées à l'article L. 212-5 et effectuées à l'intérieur du contingent conventionnel fixé selon les modalités prévues au deuxième alinéa de l'article L. 212-6 lorsqu'il existe, ou, à défaut, du contingent fixé par le décret prévu au premier alinéa de l'article L. 212-6, ouvrent droit à un repos compensateur obligatoire dont la durée est égale à 50 % du temps de travail accompli en heures supplémentaires au-delà de quarante et une heures dans les entreprises de plus de vingt salariés. »
    « 2° Le troisième alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :
    « Les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent conventionnel fixé selon les modalités prévues au deuxième alinéa de l'article L. 212-6 lorsqu'il existe, ou, à défaut, du contingent fixé par le décret prévu au premier alinéa de l'article L. 212-6, ouvrent droit à un repos compensateur obligatoire dont la durée est égale à 50 % de ces heures supplémentaires, pour les entreprises de vingt salariés au plus, et à 100 % pour les entreprises de plus de vingt salariés. »
    « III. - A l'article L. 212-6, le deuxième alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :
    « Le contingent d'heures supplémentaires pouvant être effectuées après information de l'inspecteur du travail peut être fixé, par une convention ou un accord collectif de branche étendu, à un volume supérieur ou inférieur à celui déterminé par le décret prévu au premier alinéa. »
    « IV. - A l'article L. 212-8 :
    « 1° Au premier alinéa :
    « a) dans la première phrase, à la suite des mots : "n'excède pas, la fin de la phrase et supprimée et remplacée par les mots : "un plafond de 1 600 heures ;
    « b) la deuxième phrase est remplacée par les dispositions suivantes :
    « La convention ou l'accord peut fixer un plafond inférieur. » ;
    « 2° Au quatrième alinéa, les mots : "la durée moyenne annuelle calculée sur la base de la durée légale selon la règle définie au premier alinéa et, en tout état de cause, de sont supprimés. Le même alinéa est complété par les mots : "ou d'un plafond inférieur fixé par la convention ou l'accord.
    « V. - A l'article L. 212-9, dans la deuxième phrase du II sont supprimés les mots : "trente-cinq heures en moyenne sur l'année et, en tout état de cause.
    « VI. - A l'article L. 212-15-2, les mots : "occupés selon l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auquel ils sont intégrés et pour lesquels la durée du travail peut être prédéterminée sont remplacés par les mots : "dont la nature des fonctions les conduits à suivre l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auquel ils sont intégrés, sans que nécessairement leurs horaires propres s'identifient exactement ou en permanence à celui-ci. »
    « VII. - A l'article L. 212-15-3 :
    « 1° Au deuxième alinéa du II, le mot : "et est remplacé par le mot : "ou ;
    « 2° La quatrième phrase du premier alinéa du III est ainsi rédigée :
    « La convention ou l'accord définit les catégories de cadres concernés dont la nature des fonctions implique une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps. »
    « VIII. - A l'article L. 227-1 :
    « 1° Au premier alinéa, après les mots : "accord d'entreprise ou d'établissement, sont insérées les mots : "n'ayant pas fait l'objet de l'opposition prévue à l'article L. 132-26 ;
    « 2° La première phrase du deuxième alinéa est complétée par les mots : "ou de se constituer une épargne ;
    « 3° Au onzième alinéa, les mots : "les modalités de conversion en temps des primes et indemnités sont remplacés par les mots : "les modalités de valorisation en temps ou en argent des éléments affectés au compte. »
    M. Morange a présenté un amendement, n° 228, ainsi rédigé :
    « Après la deuxième occurrence du mot : "intégrés, supprimer la fin du VI de l'article 2. »
    La parole est à M. Pierre Morange.
    M. Pierre Morange, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familliales et sociales. Cet amendement, adopté par la commission, vise à clarifier la rédaction du paragraphe relatif à la situation des cadres dits intégrés vis-à-vis de la réduction du temps de travail.
    Dans l'état actuel du droit, les cadres pouvant bénéficier de la même réduction du temps de travail que les autres salariés sont les cadres « occupés selon l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auquel ils sont intégrés et pour lesquels la durée du travail peut être prédéterminée. »
    Le projet propose d'élargir cette définition aux cadres « dont la nature des fonctions les conduit à suivre l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auxquels ils sont intégrés, sans que nécessairement leurs horaires propres s'identifient exactement ou en permance à celui-ci. »
    Il paraît difficile de traiter exactement de la même manière les salariés soumis à des horaires collectifs prédéterminés et des cadres qui ne suivraient pas exactement ou en permanence ces horaires. Afin de clarifier et de sécuriser sur le plan juridique les concours de la définition des cadres intégrés, il convient de supprimer la fin de la rédaction retenue par le projet de loi. Ainsi les cadres qui bénéficieront de la même réduction du temps de travail que les autres salariés sont ceux dont la nature des fonctions les conduit à suivre l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auxquels ils sont intégrés.
    M. le président. La parole et à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité pour donner l'avis du Gouvernement.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement est favorable à cet amendement qui clarifie la rédaction initiale du Gouvernement. Cette dernière risquait en effet d'introduire une incertitude, qui pouvait se révéler inopportune, même si, dans la réalité, le cadre dirigeant doit disposer d'un peu de souplesse pour passer des consignes et pour organiser le travail de l'équipe.
    M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.
    M. Alain Vidalies. Nous voilà confrontés à une logique qui sera déclinée par la suite.
    L'amendement de la commission ne fait que compliquer les choses. La définition retenue pour les cadres ne comporte même plus les limitations ou les précisions figurant dans le projet. Au surplus, cette définition est en retrait par rapport à la disposition d'origine. L'objectif visé est clairement identifié, comme on le verra par la suite : il consiste à étendre à un maximum de cadres les dispositions très souples du forfait-jours, dispositions qui aboutissent à remettre en cause le code du travail.
    Lorsque nous discuterons d'autres amendements, je reviendrai sur les conséquences et sur les problèmes juridiques qu'entraîneront cette ouverture du champ d'application du forfait-jours et cette nouvelle définition. J'évoquerai aussi, monsieur le ministre, la réaction, notamment syndicale, sur ces propositions, et en particulier celle de la CGC, qui me semble être très représentative en la matière. La CGC a exprimé, dans des communiqués récents, ses plus vives inquiétudes, à la fois sur la rédaction d'origine, mais également, monsieur le rapporteur, sur vos propositions de modification.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 228.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Morin et M. Perruchot ont présenté un amendement, n° 171, ainsi rédigé :
    « Compléter le VI de l'article 2 par les mots : "sous réserve d'un écart d'au plus 10 % par rapport à cet horaire. »
    La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. Cet amendement concerne lui aussi les cadres dits intégrés. Votre projet, monsieur le ministre, propose une nouvelle rédaction de l'article L. 212-15-2 qui aura pour effet d'entraîner une extension de cette catégorie.
    La définition des cadres intégrés était sans doute un peu confuse. Selon la version Aubry II, il s'agissait des « cadres occupés selon l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe, auquel ils sont intégrés, et pour lesquels la durée de leur temps de travail peut être prédéterminée ». Selon la version de votre projet de loi, monsieur le ministre, ces cadres intégrés sont « des cadres dont la nature des fonctions les conduit à suivre l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auxquels ils sont intégrés, sans que nécessairement leurs horaires propres s'identifient exactement ou en permanence à celui-ci ».
    L'idéal eût été sans doute de trouver une définition plus claire, car, nous en conviendrez, celle que vous proposez n'est pas beaucoup plus limpide que celle du texte précédent.
    Le groupe UDF ne s'est pas lancé dans cet exercice, qui relève quasiment de l'impossible, une telle notion ne recouvrait en fait aucune réalité. Les praticiens du droit du travail s'accordent d'ailleurs à dire qu'ils ne savent pas quelle serait la juste définition. C'est pourquoi il nous a semblé utile de proposer une solution intermédiaire, dans laquelle nous avons admis un écart de temps de 10 %, afin de laisser plus de souplesse aux entreprises et aux salariés.
    J'alerte le Gouvernement sur la situation difficile que rencontrent les entreprises s'agissant de cette catégorie de cadres, notamment vis-à-vis de l'inspection du travail. Elles peuvent en effet être condamnées, au titre des articles L. 622 et L. 632-1 du code pénal, pour délit d'obstacle ou pour travail dissimulé. Il nous semble inique de punir sur la base d'une notion dont la définition est loin d'être claire.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement dont l'objectif est de ne considérer comme « cadres intégrés » que les cadres suivant les horaires collectifs des autres salariés, dans la limite de 10 % de l'horaire servant de référence. En effet, monsieur Perruchot, l'amendement que nous venons d'adopter me paraît répondre à votre souci en levant l'ambiguïté que vous souligniez dans la réduction originelle. Il est désormais bien clair que seuls les cadres ayant les mêmes horaires que les horaires collectifs des autres salariés pourront, en définitive, bénéficier d'une réduction identique du temps de travail.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le député, votre amendement avait un sens par rapport à la rédaction initiale. Après la précision apportée par la commission, il en a moins.
    M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.
    M. Alain Vidalies. Les propos de M. le rapporteur sont importants car ils nous éclairent définitivement sur l'amendement n° 228 de la commission au sujet duquel on pouvait encore s'interroger. M. le rapporteur vient, en effet, de nous le dire tout à fait loyalement : ne pourront bénéficier de la réduction du temps de travail que les cadres qui ont exactement les mêmes horaires que les autres salariés.
    C'est bien ce que nous avions craint. Il y a là une restriction considérable du nombre des cadres pouvant bénéficier de la réduction du temps de travail et par conséquent un élargissement, tout aussi considérable, de ceux qui ne pourront pas en bénéficier. Cette disposition constitue donc une régression sociale pour de nombreux cadres dans ce pays.
    M. le président. La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. Compte tenu de la réponse du rapporteur et de celle du ministre, je retire mon amendement.
    M. le président. L'amendement n° 171 est retiré.
    M. Gremetz, Mme Jacquaint, MM. Dutoit, Desallangre et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 45, ainsi rédigé :
    « Supprimer le VII de l'article 2. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. J'allais demander un scrutin public sur l'amendement précédent ! Eh oui : cet amendement, s'il avait été accepté par le Gouvernement, aurait eu des conséquences gravissimes. Il était temps. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Il était temps que vous arriviez, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Il était temps, en effet, car vous auriez commencé la journée comme nous l'avons finie hier : avec un amendement ayant obtenu deux voix pour ; toutes les autres voix, cent et quelque, étant contre. Ça, ce n'aurait pas été bon pour la suite des débats !
    M. le président. Présentez-nous donc l'amendement n° 45, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Bien sûr, monsieur le président.
    Avec cet article 12, nous discutons de la législation qui touche les cadres et sur laquelle il y a beaucoup à dire. Je souligne en particulier l'invention du « forfait-jours », qui permet de faire travailler les cadres autant que le veulent les patrons.
    Comme je l'ai rappelé la nuit dernière, il a fallu beaucoup de concertation, beaucoup de discussions et beaucoup de manifestations pour trouver une définition des cadres. Une distinction fut établie entre les cadres dirigeants et les autres cadres, les deux catégories n'ayant pas le même statut. Fort heureusement ! Or tous les amendements présentés sur ce sujet par la droite depuis le début de ce débat consistent, en fait, à proposer que les cadres soient tous considérés comme des cadres dirigeants et ne puissent donc pas bénéficier de la réduction du temps de travail. C'est pourquoi ils sont graves !
    Je rappelle que le forfait-jours permet une durée de travail de treize heures par jour, soit soixante-dix-huit heures par semaine et 2 821 heures par an. C'est tout à fait contraire aux traités internationaux signés par la France, ainsi que l'a reconnu le Comité européen des droits sociaux. Pour que le comité d'experts de la France soit « absous », il a fallu mettre en avant la notion d'autonomie.
    Dans la pratique, les conditions posées par la loi ne sont pas respectées et une majorité de cadres se voient « catalogués » comme cadres dirigeants et mise au forfait-jours.
    Je rappelle également que, sur plainte des syndicats, les tribunaux annulent ces accords illégaux. On l'a vu avec l'annulation de l'accord Avantis par la cour d'appel de Lyon. Mais ce n'est pas le seul cas.
    Notre amendement n° 45 est une amendement de précision, qui vise à lever toute ambiguïté.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission a rejeté l'amendement. Notre collègue M. Gremetz veut revenir à la définition actuelle et aux critères plutôt rigides du texte de loi initial. Nous en donnons acte. C'est intellectuellement cohérent avec ses positions antérieures.
    Pour définir la catégorie des cadres évoqués ici, ces critères sont au nombre de quatre : les horaires non prédéterminés, la nature des fonctions, les responsabilités exercées et le degré d'autonomie dans l'organisation de l'emploi du temps.
    Le projet de loi poursuit deux objectifs : d'une part, éviter les contentieux et sécuriser juridiquement le dispositif ; d'autre part, simplifier la situation. Aussi retient-il proposé un seul critère : celui de la réelle autonomie.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ce n'est pas le moindre des défauts des deux lois Aubry que d'avoir rigidifié à l'excès le temps de travail des cadres, catégorie qui, à l'évidence, doit pouvoir organiser son temps de travail de la manière la plus autonome et la plus adaptée à ses responsabilités et à ses fonctions.
    C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a souhaité permettre aux partenaires sociaux, dans le cadre du dialogue dans les branches, d'assouplir la situation des cadres dans les limites qui sont celles de la loi et qui sont tout à fait conformes, monsieur Gremetz, au droit français comme aux règles définies au niveau du Conseil de l'Europe.
    Le Comité européen des droits sociaux a considéré que la réforme des forfaits jours avec un encadrement législatif était conforme au traité. Notre projet est également conforme à la directive européenne du 23 novembre 1993 qui autorise à déroger au décompte en heures du temps de travail pour les salariés autonomes.
    Le Gouvernement n'est donc pas favorable à l'adoption de cet amendement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 45.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère ont présenté un amendement, n° 3, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le VII de l'article 2 :
    « VII. - La quatrième phrase du premier alinéa du III de l'article L. 212-15-3 est ainsi rédigée : "La convention ou l'accord définit les catégories de cadres concernés pour lesquels la durée du temps de travail ne peut être déterminée du fait de la nature de leurs fonctions, des responsabilités qu'ils exercent et du degré d'autonomie dont ils bénéficient dans l'organisation de leur emploi du temps. »
    La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour soutenir cet amendement.
    M. Gaëtan Gorce. Cet amendement est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. Contre. Cet amendement reviendrait au texte issu de la loi Aubry, marqué par la rigidité. D'où notre désir de simplification, qui transparaît dans le présent projet.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis.
    M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Les propos du ministre et du rapporteur sont inutilement polémiques. Pourquoi parler de la rigidité de la loi Aubry, dans un domaine où le droit du travail n'existait pas ou, plus précisément, n'était pas respecté ? Je le rappelais hier, les cadres travaillaient en moyenne plus de 45 heures ! Nous n'avons pas mis en place un système rigide, comme vous le prétendez. Nous avons fait en sorte de mettre du droit et de la sécurité juridique dans un domaine où il n'y en avait pas. Notre volonté était de faire bénéficier les cadres de la réduction du temps de travail, ce qui n'est manifestement pas l'ambition de ce gouvernement.
    M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.
    M. Alain Vidalies. Nous nous heurtons ici à plusieurs difficultés.
    Première difficulté, la rédaction que vous proposez est-elle compatible avec la directive européenne ? Déjà, sur la base de la rédaction précédente, un recours avait été exercé par la CGC devant la Comité de la charte sociale. La décision qui avait suivi remettait en cause la compatibilité de cette législation dérogatoire, sans entraîner pour autant de poursuites ou de sanctions, en raison du faible nombre de cadres concernés. Or aujourd'hui, vous étendez le nombre de cadres susceptibles d'être concernés par cette affaire. Au surplus, vous modifiez le texte par rapport à la rédaction initiale : les conditions cumulables sont devenues alternatives. Il ne s'agit pas là de « petites » modifications !
    Seconde difficulté, l'application du forfait-jours à des itinérants non cadres. Qu'est-ce qu'un itinérant non cadre qui bénéficie d'une autonomie ? Je rappelle que cela peut entraîner comme conséquence la possibilité de travailler 11 heures par jour et 78 heures par semaine ! Si l'on se réfère au texte tel qu'il se lit aujourd'hui, seront concernés des livreurs et ceux sur lesquels l'employeur n'exerce pas de contrôle direct.
    Je ne suis pas sûr qu'on ait mesuré à quel démantèlement du code du travail et de la situation de certains salariés cette disposition pourrait aboutir. Sous couvert d'une modification de la législation et sous prétexte d'introduire de la souplesse, vous allez faire courir, notamment aux itinérants non cadres, un risque majeur dans les années à venir.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Gorce, M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 112, ainsi rédigé :
    « Supprimer le 1° du VII de l'article 2. »
    La parole est à M. Alain Vidalies.
    M. Alain Vidalies. Cet amendement concerne les itinérants non cadres et les forfaits qui peuvent leur être appliqués - en l'occurrence, des forfait-heures. Mais la logique est la même : étendre au maximum le champ d'application du texte.
    Lorsque nous avons créé les forfaits, un recours a été formé auprès du Comité européen des droits sociaux. Celui-ci a considéré que le forfait-jours était contraire aux dispositions de la charte sociale signée par la France.
    Le gouvernement français avait fait valoir que ces accords susceptibles d'aboutir à ce système très dérogatoire pouvaient faire l'objet d'une opposition par application des dispositions de l'article L. 132-26 du code du travail. Mais le comité des experts européens chargé de porter une appréciation sur les engagements internationaux considéra que la mise en application de la procédure de l'article L. 132-26 n'était pas, compte tenu d'exigences très difficiles à remplir, protectrice pour les salariés et qu'en conséquence la violation de nos engagements était constituée.
    Dès lors qu'au lieu de tenir compte de cette appréciation du comité européen, on envisage d'élargir le champ d'application des dispositions incriminées, on risque de créer une situation très dangereuse tant pour les cadres que pour les non-cadres. C'est la raison pour laquelle il me semble que nous devrions au minimum en revenir à la rédaction précédente. Je rappelle qu'elle avait fait l'objet de nombreuses discussions et qu'au final nous étions parvenus à un accord en introduisant une mesure de protection. Il s'agissait de permettre aux cadres dont la rémunération ne correspondait pas au travail effectué d'engager une procédure particulière en indemnisation. Nous avions placé là une sorte de verrou de sécurité. Il y avait une cohérence dans notre démarche. Nous avions conscience qu'il fallait trouver un équilibre dans ce texte qui constituait une innovation. Aujourd'hui, votre projet ne prévoit plus aucune mesure de protection pour les salariés, qu'ils soient cadres ou non-cadres.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement qui concerne les itinérants non cadres bénéficiant d'un forfait en heures sur l'année. Le dispositif antérieur prévoyait que les horaires étaient définis à partir de critères dits cumulatifs. Le présent texte vise à introduire plus de souplesse et à leur substituer des critères alternatifs. Il n'est d'ailleurs pas inintéressant de noter que, dans le projet initial de Mme Aubry, les itinérants bénéficiaient, en fait, d'un forfait-jours annuel. Voilà qui devrait amener chacun à faire preuve d'un peu d'humilité dans ses propos. Enfin, je rappelle que le seul fait d'avoir une réelle autonomie suffit à permettre à un itinérant non cadre de bénéficier du forfait en heures.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. M. Vidalies, par le biais de la présentation de son amendement, entretient une ambiguïté dont je ne peux pas penser qu'elle est le résultat d'une erreur d'appréciation. Il cherche à mêler deux problèmes différents : celui des cadres et du forfait-jours et celui des itinérants non cadres et de la définition que nous proposons pour ces derniers pouvant être soumis à un forfait annuel en heures.
    Il ne s'agit pas avec le présent texte - M. Vidalies le sait très bien - d'étendre le forfait-jours aux itinérants non cadres. Le débat a pu avoir lieu, mais telle n'est pas la solution que le Gouvernement a retenue. Le dispositif que nous vous proposons prévoit, effectivement, une nouvelle définition des itinérants non cadres pouvant être soumis à un forfait annuel en heures. Et il est tout à fait conforme à la législation nationale et européenne. D'ailleurs, le comité des ministres - M. Vidalies le sait - avait tranché la question qu'il vient d'évoquer. Si des experts avaient pu émettre des réserves, le comité des ministres, quant à lui, s'est prononcé en faveur de la position française s'agissant de l'application de la charte sociale européenne.
    Le Gouvernement est évidemment défavorable à cet amendement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 112.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Gorce et M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 113, ainsi rédigé :
    « Supprimer le 2° du VII de l'article 2. »
    La parole est à M. Alain Vidalies, pour présenter cet amendement.
    M. Alain Vidalies. Monsieur le ministre, il est vrai que la décision du 26 mars 2002, prise à la suite du rapport, ne prévoyait pas de sanction contre la France. Mais il importe de reprendre le texte pour comprendre pourquoi :
    « Considérant la réclamation présentée le 20 juin 2000 par la CGC-CFE contre la France,
    « Vu le rapport qui lui a été transmis par le Comité européen des droits sociaux, dans lequel il est constaté que la situation des cadres avec "forfait en jours, constitue une violation des articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphe 2, de la charte sociale européenne, en premier lieu en raison de la durée excessive du travail hebdomadaire et de l'absence de garanties suffisantes et en second lieu du fait que les heures de travail anormalement élevées ne font l'objet d'aucune majoration de rémunération :
    « 1. Prend note que les mesures en cause visent à faire bénéficier d'une réduction effective de leur temps de travail les cadres autonomes dont on ne peut prédéterminer les horaires de travail ;
    « 2. Prend note que ces cadres ne représentent qu'une minorité de salariés ; »
    Voilà l'explication : c'est parce que cette loi a été considérée comme dérogatoire et comme présentant un champ d'application limité que la France a évité les sanctions.
    Aujourd'hui, monsieur le ministre, on ne peut pas ne pas évoquer une nouvelle saisine des organisations syndicales et plus particulièrement de la CGC puisque c'est elle qui était à l'origine du recours. Or l'argument d'un champ d'application limité n'existera plus puisque l'objectif de votre projet de loi, comme M. le rapporteur l'a indiqué en des termes beaucoup plus précis que tous les textes juridiques, vise précisément à élargir ce champ d'application.
    Indéniablement, il y a là une véritable difficulté juridique. Rappelons-le, ce texte, dont on peut penser qu'il est contraire aux engagements européens de la France et, plus grave, à la charte sociale européenne, a d'ores et déjà fait l'objet de mise en garde. Ne voyez aucun caractère polémique dans mes propos puisque déjà la mise en place du forfait-jours, tel que nous l'avions imaginé et qui semblait correspondre aux aspirations des entreprises comme de certaines organisations syndicales, avait été considérée comme contraire à cette charte. Comme quoi il faut parfois faire preuve de beaucoup d'humilité sur notre degré d'avancée en matière de lois sociales.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. Rejet.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le forfait-jours est favorable aux salariés. D'ailleurs, et vous l'avez reconnu, le texte dont vous parlez et que vous présentez comme contraire au droit européen et au droit des salariés est celui que vous avez voté. Vous tentez de faire croire que les mesures que nous prenons vont modifier sensiblement la nature de ce texte pour le rendre de nouveau condamnable au plan européen. Tel n'est absolument pas le cas, d'autant que dans la décision que vous avez citée et que j'ai moi-même sous les yeux, des dispositions montrent clairement que le droit français est conforme à la charte sociale européenne. Le présent projet n'y change rien.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 113.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de trois amendements pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 54, présenté par M. Gremetz, Mme Jacquaint, M. Dutoit et M. Desallangre et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains, est ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le 2° du VII de l'article 2 :
    « 2° Le III de l'article L. 212-15-3 est abrogé. »
    L'amendement n° 114, présenté par M. Gorce et M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le 2° du VII de l'article 2 :
    « 2° La première phrase du premier alinéa du III est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
    « Lorsque la convention ou l'accord collectif prévoit la conclusion de conventions de forfait en jours, seuls sont concernés les cadres qui perçoivent une rémunération au moins égale à celle prévue au premier paragraphe de l'article 6 de la convention nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, et dont la nature des fonctions implique une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps. La convention ne doit pas avoir fait l'objet d'une opposition en l'application de l'article L. 132-26. »
    L'amendement n° 140, présenté par M. Gorce, M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le 2° du VII de l'article 2 :
    « 2° Le début de la quatrième phrase du premier alinéa du III est ainsi rédigé :
    « La convention ou l'accord définit les catégories de salariés cadres concernés en fonction de l'examen des critères de classification professionnelle en vigueur dans la branche et pour lesquels la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée... (la suite sans changement). »
    La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir l'amendement n° 54.
    Mme Muguette Jacquaint. Le concept de forfait-jours n'a d'autre raison d'être que le maintien de durées excessives de travail pour la grande majorité des cadres. Or ces durées de travail doivent être fortement réduites pour préserver la santé et la vie personnelle des cadres et ingénieurs et favoriser l'emploi. En outre, les durées de travail permises par le forfait-jours sont contraires aux traités internationaux. Tout donne à croire qu'ils permettront aussi d'interpréter les directives européennes qui ne vont pas toujours dans le sens de l'amélioration des droits des salariés.
    Si de nombreux cadres ont accepté le forfait c'est en raison des jours de congés supplémentaires qui leur ont été accordés. Ces jours de repos ont été considérés, à juste titre, comme une amélioration des conditions de vie mais comme trop souvent la charge de travail n'a pas été réduite, les conditions de travail n'ont malheureusement pas toujours changé. De plus, la durée de travail quotidienne et hebdomadaire est restée la même ; elle a même été accrue parfois. Enfin, l'impact sur l'emploi a été pratiquement nul alors que, rappelons-le, la RTT visait à lutter contre le chômage. Telle est la situation aujourd'hui. Elle a été grandement favorisée par l'entretien d'une confusion à propos des forfaits. Notre amendement vise à éclaircir les choses et à rendre moins pénible la vie des cadres.
    M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies, pour soutenir l'amendement n° 114.
    M. Alain Vidalies. Dès lors que nos amendements précédents ont été rejetés, la question est maintenant de savoir quels cadres seront soumis aux forfaits-jours. La définition étant modifiée, ils seront sans doute plus nombreux. Partons du constat objectif que nous avions déjà fait lors de l'examen des lois Aubry, à savoir que certains s'étaient aperçus qu'il valait mieux donner à des gens la qualification de cadres pour pouvoir ensuite décliner toutes les dérogations spécifiques aux cadres. L'un d'entre vous a d'ailleurs reconnu hier - comme quoi ce n'est pas une invention du groupe socialiste - que, par exemple, dans la distribution, on emploie des gens qu'on qualifie de cadres et qui vont donc avoir toutes les sujétions particulières consécutives à ces régimes dérogatoires mais sans que le niveau de rémunération suive. Ils seront davantage rémunérés comme des agents de maîtrise ou des cadres débutants et, dans tous les cas, ils ne bénéficieront pas de cette autonomie dans la décision et dans l'organisation du travail sur laquelle repose la définition qui justifie la dérogation dont nous parlons.
    Comme vous n'avez pas souhaité prendre en considération nos craintes par rapport aux conséquences de l'appréciation portée par le comité des experts européens, nous proposons de préciser que seuls les cadres dont la rémunération est au moins égale au plafond de la sécurité sociale peuvent être concernés par une convention de forfait en jours. Une telle disposition répondrait en outre à une demande formulée par le CGC auprès de vos services et, je suppose, à l'occasion des rencontres que vous avez organisées.
    M. le président. Monsieur Vidalies, pouvons-nous considérer que vos explications sont également valables pour l'amendement n° 140 ?
    M. Alain Vidalies. Oui, monsieur le président.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les trois amendements ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission a rejeté ces trois amendements.
    L'amendement n° 54 prévoit la disparition pure et simple des forfaits-jours. Cette disposition a le mérite d'être claire et simple, mais elle ne répond pas à la question de fond : comment proposer une réduction du temps de travail à des cadres pour lesquels le décompte en heures est impossible ? Du reste, et de façon très concrète, il n'y a pas de réponse à cette question.
    L'amendement n° 114 me semble, quant à lui, contre-productif, car le critère pertinent pour l'application des conventions de forfait en jours est non pas la rémunération mais l'autonomie des cadres.
    Enfin, l'amendement n° 140 tend à harmoniser le système actuel en proposant que les catégories de cadres concernés par les conventions de forfait-jours soient définies à partir des critères de classification établis par les accords de branche. Se pose alors le problème des branches qui n'ont pas de classification professionnelle très claire. Que se passerait-il, en effet, si l'accord de branche était peu explicite à ce sujet ?
    Pour toutes ces raisons, la commission a rejeté ces amendements.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 54 qui vise à supprimer la possibilité de recourir aux conventions individuelles de forfait annuel en jours, alors que nous considérons que ce dispositif est nécessaire et particulièrement adapté à certains cadres dont l'autonomie est incompatible avec un décompte classique du temps de travail en heures.
    L'idée qui sous-tend l'amendement n° 114 est, je le reconnais, intéressante dans la mesure où l'un des critères habituels de définition des cadres est, en effet, le niveau de rémunération. Toutefois, monsieur Vidalies, et ce n'est pas à vous que j'ai besoin de le rappeler, je ne crois pas qu'il soit habituel qu'une loi renvoie à une convention pour la définition de son champ d'application. Sur ce point, d'ailleurs, la loi précédente n'avait pas cru devoir changer le droit et je ne crois pas qu'il soit plus indispensable de le faire aujourd'hui.
    Enfin, le Gouvernement est également défavorable à l'amendement n° 140. La loi met actuellement en avant le critère de non-prédétermination des horaires des cadres pour la mise en oeuvre des forfaits-jours. Ce critère s'est révélé inadapté : il a conduit la négociation à trouver d'autres solutions. La détermination des catégories de cadres pour lesquels le forfait en jours est adapté, dépend en effet davantage de la nature des fonctions réellement exercées, donc du critère d'autonomie. Cela me permet de rappeler une nouvelle fois que l'objectif du présent projet est non pas d'élargir la catégorie des cadres soumis au forfait-jours, mais de clarifier des critères - l'autonomie des fonctions exercées - et de sécuriser les accords conclus.
    C'est finalement dans la négociation de l'accord que les cadres trouveront la véritable garantie qu'ils recherchent.
    Au-delà de l'ensemble de ces raisons juridiques, on voit bien que deux conceptions différentes s'affrontent dans cet hémicycle : d'un côté, il y a ceux qui veulent encadrer, réglementer, faire passer l'ensemble des cadres dans le même moule,...
    M. Maxime Gremetz. Non, c'est faux !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... de l'autre, il y a ceux qui pensent qu'on se réalise dans son travail, que les cadres ont une réelle autonomie d'organisation, que le fonctionnement de l'ascenseur social nécessite que chacun puisse se dépasser par le travail. C'est notre conception, et je pense qu'elle est partagée par beaucoup de cadres aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.
    M. Alain Vidalies. Monsieur le ministre, il me paraît dans la nature des choses qu'il y ait deux conceptions de part et d'autre de l'hémicycle. En revanche, il me semble plus grave et plus singulier que le rapporteur et le ministre aient des conceptions différentes. Tout à l'heure, en effet, M. le rapporteur nous a expliqué très loyalement...
    M. Maxime Gremetz. Angéliquement, plutôt !
    M. le président. Monsieur Gremetz, n'interrompez pas M. Vidalies !
    M. Alain Vidalies. ... que ce texte avait un objectif très clair : restreindre le plus possible le nombre des cadres assimilés aux autres salariés au regard de la réduction du temps de travail afin d'en soumettre plus aux systèmes dérogatoires. Cela figure dans le compte rendu de nos débats. M. le ministre, de son côté, nous traite de polémistes et affirme que telle n'est pas du tout l'intention du texte.
    C'est une situation singulière, qui ne survient d'ailleurs pas pour la première fois dans ce débat. Il faudra bien nous éclairer à ce sujet : le rapporteur, faisant preuve de ce que M. Gremetz a appelé de l'angélisme, et que je qualifierai plutôt de franche loyauté, n'a-t-il pas exprimé tout haut la réalité de votre volonté politique, monsieur le ministre ? Quoi qu'il en soit, il me paraît plus intéressant de s'attacher à cette divergence qu'à celle, naturelle, qui nous oppose.
    En ce qui concerne, l'amendement n° 140, je veux bien accepter l'observation selon laquelle il n'est pas dans les règles habituelles de renvoyer à une négociation, en matière de droit du travail. Mais vous refusez de fixer un seuil correspondant à un salaire déterminé par référence au plafond de la sécurité sociale, tout en admettant que le problème vous préoccupe. Et alors que nous cherchons à le résoudre en nous inspirant de la ligne directrice qui court tout au long du texte et que vous nos rappelez à chaque article - renvoyer à la négociation collective -, subitement, pas de chance : vous nous dites que cela n'est pas conforme à la tradition. Permettez-moi de m'interroger sur la cohérence de cette position.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. A force de vouloir nous donner des leçons de droit, M. Vidalies finit par se mélanger sérieusement les pinceaux, puisqu'il vient d'appliquer à l'amendement n° 140 qu'il a déposé l'argumentation que je lui opposais sur l'amendement n° 114. Je lui ai en effet indiqué qu'il n'était pas traditionnel de renvoyer à une convention pour définir le champ d'application d'une loi, et non que nous étions hostiles à ce que les partenaires sociaux fixent les limites, puisque c'est au contraire l'objet du projet de loi qui vous est soumis.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, vous avez saisi une perche, je l'ai senti tout de suite, mais cela vous a permis de ne pas répondre sur le fond. Or, sur le fond, M. Vidalies a raison : on cherche à élargir la notion de cadre dirigeant. Je pourrais vous citer de nombreuses entreprises dans lesquelles tout le monde est devenu cadre dirigeant. Certes, ces cadres n'en ont pas le salaire,...
    Mme Muguette Jacquaint. Ah ça non !
    M. Maxime Gremetz. ... mais ils en subissent les sujétions, les obligations, les servitudes ! Ils s'appellent cadres dirigeants mais ne dirigent rien et ne peuvent pas bénéficier de la réduction du temps de travail. En gros, c'est : « travaille et tais-toi ! ».
    M. Jean-Claude Lemoine. C'est la conséquence des lois Aubry !
    M. Maxime Gremetz. Il faut l'avouer, cela pose un vrai problème. C'est pour cette raison que je soutiens l'amendement. Mais vous verrez, avec l'amendement n° 44 nous éclairerons les choses en précisant ce que souhaitent exactement l'ensemble des organisations syndicales de cadres...
    M. le président. Monsieur Gremetz, ne nous dévoilez pas ce que vous allez nous dire bientôt !
    M. Maxime Gremetz. Attendez, je n'ai pas fini, écoutez, soyez un peu cool ! Hier c'était bien, c'était cool. (Sourires.)
    M. le président. Pour ma part, je suis cool, monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Vous-même, quand vous intervenez, vous dites souvent : « Monsieur le président, je n'ai pas fini mes cinq minutes ! » Je parle depuis à peine trois minutes, alors, à quoi vous jouez ? Cool, monsieur le président !
    M. le président. De manière « très cool », je voudrais simplement que l'on s'en tienne aux amendements présentés !
    M. Maxime Gremetz. Je me contente d'annoncer la couleur ! Vous savez bien que l'on ne peut pas couper le débat en tranches. Derrière tout cela, il y a une philosophie générale.
    M. le président. Poursuivez, monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. D'ailleurs, le sujet est si important que je vous l'annonce tout de suite, pour que vous puissiez vous y préparer : sur l'amendement n° 44, nous demanderons un scrutin public. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Yves Nicolin. Ah, enfin ! Ça faisait longtemps !
    M. le président. Soit. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Mesdames, messieurs les députés, la confusion est en train de s'installer dans l'esprit de M. Gremetz... (Sourires.)
    M. Alain Néri. Mais non, il est très clair !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... car le texte du Gouvernement ne modifie en rien la définition des cadres dirigeants. Selon l'article L. 212-15-1 du code du travail, en effet, les cadres dirigeants sont ceux qui se voient confier des responsabilités « dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans l'entreprise ou dans leur établissement ».
    Or cette définition n'est pas remise en cause. Nous ne touchons d'ailleurs pas à la classification entre les trois catégories de cadres, ce qui signifie que vos craintes sont tout à fait infondées. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Soisson. Pour répondre au Gouvernement ?
    M. Jean-Pierre Soisson. Pour le soutenir. Premièrement, l'argumentation de M. Gremetz est une véritable caricature.
    Mme Muguette Jacquaint. On ne sait plus où elle se trouve, la caricature !
    M. Jean-Pierre Soisson. Deuxièmement, je voudrais dire à M. Vidalies et à M. Gorce que, dans leur forme actuelle, les amendements n°s 140 et 114 ne sont pas du tout conformes à ce que peut être l'application du code du travail : vous ne pouvez pas renvoyer à une convention dans ce cas, ou alors c'est la négation du rôle du Parlement. La rédaction que vous proposez n'est donc pas acceptable, non plus que la véritable caricature du texte à laquelle vous vous livrez depuis un moment.
    M. le président. Je considère l'Assemblée suffisamment éclairée. Je mets aux voix l'amendement n° 54.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 114.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 140.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Gorce, M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 141, ainsi rédigé :
    « Compléter le VII de l'article 2 par l'alinéa suivant :
    « 3° La cinquième phrase du premier alinéa du III est complétée par les mots : "ainsi que les temps de repos hebdomadaire garantissant une durée raisonnable de travail compatible avec la protection de la santé physique et morale des salariés concernés et le respect d'un équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle. »
    La parole est à M. Alain Vidalies.
    M. Alain Vidalies. L'amendement propose que les conventions de forfait en jours précisent également les temps de repos hebdomadaire. Il est d'ailleurs inspiré par notre expérience des difficultés rencontrées dans la mise en application des lois Aubry.
    Par ailleurs, monsieur le ministre, vous avez noté précédemment que je m'étais trompé dans mon argumentation. Mais la discussion commune des amendements n°s 114 et 140 favorisait cette confusion. Quoi qu'il en soit, je suis perdant à tous les coups.
    M. Jean-Pierre Soisson. Sur ce point, vous avez raison !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. Défavorable. L'amendement n° 141 constitue une déclaration d'intention sur la durée raisonnable de travail compatible avec la protection de la santé physique et morale des salariés concernés et le respect d'un équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle. Si cette préoccupation est fort louable, on chercherait en vain, dans l'amendement, des dispositions concrètes.
    En outre, on peut se demander pourquoi une telle proposition n'avait pas été envisagée lors de l'élaboration de la loi du 19 janvier 2000. Je rappelle que les forfaits en jours font déjà l'objet de règles de repos précises protectrices pour les cadres. S'y appliquent, en effet, la règle des onzes heures de repos consécutif, des trente-cinq heures de repos hebdomadaire et des six jours de travail au maximum par semaine.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous sommes en train de recommencer un débat qui a déjà eu lieu, le débat sur les lois Aubry. Il me semble me souvenir que certains de ces amendements avaient déjà été déposés par les députés placés le plus à gauche dans l'hémicycle, tandis que leurs actuels signataires les avaient alors refusés. Nous ne voulons pas trop modifier les lois Aubry (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française) et c'est pourquoi je vous propose de ne pas voter cet amendement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 141.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Avant d'appeler l'amendement n° 44 de M. Gremetz, je rappelle à l'Assemblée que sur le vote de cet amendement il y aura un scrutin public à la demande du groupe des député-e-s communistes et républicains.
    Je vais d'ores et déjà faire annoncer le scrutin, de manière à permettre à nos collègues de regagner l'Hémicycle.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    M. Gremetz, Mme Jacquaint, MM. Dutoit, Desallangre et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 44, ainsi libellé :
    « Compléter le VII de l'article 2 par les deux alinéas suivants :
    « 3° La première phrase du deuxième alinéa du III de l'article L. 212-15-3 est ainsi rédigée :
    « La durée du travail des cadres ayant conclu une convention de forfait en jour est limitée à dix heures par jour, à 48 heures par semaine, et à 1 600 heures par an, augmentée le cas échéant de la durée du contingent réglementaire ou conventionnel d'heures supplémentaires conformément aux articles L. 212-1, L. 212-7 et L. 212-8 du présent code. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Avec cet amendement, nous souhaitons faire bénéficier les cadres de la réduction du temps de travail. Il sont en effet les plus nombreux à la réclamer, mais aussi ceux qui ont été le plus floué dans ses tentatives d'application.
    Dans de nombreux cas, des excès de durée du travail ont été constatés. A l'évidence, ces abus mettent en cause la sécurité. Des durées hebdomadaires démentes de 70 ou 80 heures ne peuvent être sans conséquences sur la santé des cadres eux-mêmes, ni sur la sécurité des ouvriers qu'ils encadrent lorsque, dans le bâtiment par exemple, la vigilance est altérée par le surcroît de travail.
    Ces durées mettent aussi en cause la sécurité routière, quand le cadre prend le volant après des journées ou des semaines de travail aussi chargées. Cette dimension doit être prise en compte. Il conviendrait de sanctionner sévèrement les employeurs qui mettent ainsi en danger la vie d'autrui.
    Les durées de travail actuelles auxquelles peut conduire la législation existante sont de 13 heures par jour, 78 heures par semaine et 1 821 heures par an. Pour contenir au maximum les risques, nous proposons, de mieux maîtriser les amplitudes horaires et la flexibilité, en assurant aux cadres une réduction réelle du temps de travail. Notre amendement correspond à une demande légitime exprimée par toutes les organisations syndicales de cadres, sans exception, qui, au-delà du débat sur le forfait-jours, souhaitent voir instaurées des limites horaires à ce dispositif.
    Cet amendement, que les organisations syndicales attendent, prévoit donc que la durée de travail des cadres ayant conclu une convention de forfait en jours est limitée à 10 heures par jour, 48 heures par semaine et 1 600 heures par an, augmentées le cas échéant de la durée du contingent réglementaire ou conventionnel d'heures supplémentaires, conformément aux articles L. 212-1, L. 212-7 et L. 212-8 du code du travail.
    (Mme Paulette Guinchard-Kunstler remplace M. Rudy Salles au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE
DE Mme PAULETTE GUINCHARD-KUNSTLER,
vice-présidente

    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. Défavorable. L'amendement fait référence à la notion de forfait-jours, qui concerne les cadres dont on n'arrive pas à décompter le travail en heures, car ce décompte est impossible. Il est donc pour le moins paradoxal de vouloir limiter le nombre d'heures de travail pour cette catégorie. En revanche, je le répète, les règles de repos que je viens de rappeler s'appliquent aux cadres concernés.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Premièrement, l'amendement veut fixer des durées maximales définies en heures pour des cadres dont la durée de travail est décomptée en jours. Deuxièmement, M. Gremetz ne devrait pas être si critique à l'égard de ces dispositions, car des garanties supplémentaires sont accordées à cette catégorie de cadres. Les accords collectifs qui mettent en place les forfaits-jours doivent, en effet, prévoir des modalités de suivi de l'organisation du travail et de l'amplitude des journées d'activité des journées des cadres concernés. Je crois donc que cet amendement est tout à fait inutile.
    Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Si je comprends bien, après le refus des accords majoritaires, nous arrivons à la conclusion que les organisations syndicales ne servent à rien ? Peut-être que je ne comprends rien ? C'est possible. (Exclamations sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Peut-être ! Je peux l'admettre, à la limite.
    M. Jean-Pierre Soisson. Bonne déduction !
    M. Maxime Gremetz. Voyons, monsieur Soisson ! Un coup à gauche, un coup à droite, cela n'amène rien de bon, vous le savez. Il vaut mieux rester dans une ligne bien précise.
    M. Jean-Pierre Soisson. Et le centre alors ?
    M. Maxime Gremetz. L'ambition, le goût du pouvoir ça mène à tout, mais pas à défendre les cadres.
    Excusez-moi, madame la présidente, mais M. Soisson m'a provoqué, et je lui réponds. Un but à zéro ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

    M. Jean-Pierre Soisson. Attendons le résultat du match !
    M. Maxime Gremetz. Certains peuvent estimer qu'on ne connaît pas tous les dossiers. Mais réfléchissez : il n'y a pas une organisation syndicale de cadres, même minoritaire, qui n'ait pas signé. Elles sont unanimes - c'est rare, vous le savez bien. Toutes les organisations syndicales de cadres demandent cet amendement. Et vous estimez, messieurs de la majorité, que ces organisations, représentatives de l'immense majorité des cadres, proposent des amendements inutiles ? La réponse est dans votre vote. (« Oui, votons ! », sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la présidente. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je mets aux voix l'amendement n° 44.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    Mme la présidente. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   124
Nombre de suffrages exprimés   115
Majorité absolue    58
Pour l'adoption   4
Contre   111

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Pierre Soisson. Quand on est hors-jeu, monsieur Gremetz, on le demeure !
    M. Maxime Gremetz. Eh bien, je me réjouis d'être seul avec l'ensemble des organisations syndicales !

Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Madame la présidente, je demande une suspension de séance de dix minutes. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme la présidente. Cinq minutes, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Non, tout le monde a droit à dix minutes ! N'exagérez pas sinon je demanderai une nouvelle suspension. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Yves Nicolin. Quel motif ?
    M. Maxime Gremetz. Nous avons du travail. Il faut qu'on se réunisse ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Yves Nicolin. Vous êtes deux !
    M. Maxime Gremetz. Dix minutes comme tout le monde, autrement ce sera trois fois cinq !
    Mme la présidente. Nous reprendrons à dix-sept heures cinquante.
    La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures cinquante.)
    Mme la présidente. La séance est reprise.

Suite de la discussion

    Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 56, présenté par M. Gremetz, Mme Jacquaint, MM. Dutoit, Desallangre et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains, est ainsi libellé :
    « Compléter le VII de l'article 2 par les deux alinéas suivants :
    « 3° L'article L. 212-15-3 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
    « IV. - La convention ou l'accord collectif soumis à l'extension doit avoir recueilli les signatures d'organisations syndicales ayant obtenu la majorité des suffrages exprimés aux élections de comités d'entreprise dans les entreprises de la branche d'activité considérée et s'étant déroulées au cours des deux années précédant la signature de l'accord ; cette majorité est constatée à partir des procès verbaux d'élection qui sont adressés à l'administration compétente ; chaque année, l'administration compétente informe les organisations syndicales de salariés et d'employeurs sur l'influence chiffrée de chaque organisation syndicale. L'accord d'entreprise ou d'établissement doit avoir recueilli la majorité des suffrages exprimés aux dernières élections professionnelles. Au cas où ultérieurement à la signature de l'accord les syndicats signataires deviennent minoritaires, l'accord ne continue à produire ses effets qu'autant qu'il est renégocié et remplit à nouveau les conditions prévues au présent article. »
    L'amendement n° 142, présenté par MM. Gorce, Le Garrec et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :
    « Compléter le VII de l'article 2 par les deux alinéas suivants :
    « 3° Cet article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Les accords ou conventions étendus ou convention ou accord d'entreprise ou d'établissement prévus au présent article qui prévoient des conventions individuelles de forfait, qui peuvent être établies sur une base hebdomadaire, mensuelle ou annuelle, doivent être signés par une ou des organisations syndicales représentatives et majoritaires dans la branche ou dans l'entreprise ou l'établissement dans des conditions fixées par un accord national interprofessionnel et reprises par décret. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz, pour soutenir l'amendement n° 56.
    M. Maxime Gremetz. Nous allons poursuivre le débat que nous avons commencé hier, au sujet des accords majoritaires. Nous considérons en effet toujours, et aujourd'hui plus qu'hier, que l'ABC de la démocratie suppose que les accords soient signés par un ou des syndicats représentant la majorité des salariés. Comme leur nom l'indique, ces accords doivent être majoritaires.
    Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies, pour défendre l'amendement n° 142.
    M. Alain Vidalies. Nous avons déjà eu ce débat à propos d'autres dispositions du texte. Il s'agit en fait des conditions de rénovation de la démocratie sociale.
    En l'occurrence, nous proposons de subordonner la légalité des accords à la signature par « des organisations syndicales représentatives et majoritaires dans la branche ou dans l'entreprise ou l'établissement », en faisant référence à l'accord national interprofessionnel.
    Nous connaissons évidemment l'argumentation de M. le ministre sur la question de la branche, ainsi que le contenu de cet accord interprofessionnel, mais, s'agissant de cette question particulière, nous devons répondre à l'avis des experts européens sur ce sujet puisque nous ne disposons que de l'article L. 132-26 du code du travail sur le droit d'opposition.
    Je donne simplement lecture d'un extrait de l'avis du comité des experts européens au sujet des accords d'entreprise ; il indique : « Le comité relève que les conventions collectives peuvent être conclues au sein de l'entreprise. Or il estime qu'une telle possibilité n'est conforme à l'article 2, paragraphe 1, de la charte sociale que si des garanties spécifiques sont prévues. Il relève à cet égard que la procédure d'opposition prévue à l'article L. 132-26 du code du travail ne constitue pas une telle garantie car sa mise en oeuvre présente un caractère trop aléatoire. » En conséquence, ce comité conclut que notre dispositif n'est pas conforme à l'article 2, paragraphe 1, de la charte sociale révisée.
    Vous savez d'ailleurs bien, monsieur le ministre, que l'une des difficultés majeures de la mise en oeuvre de l'article L. 132-26 tient à la référence faite à la majorité des inscrits et non à celle des votants pour les organisations syndicales en situation de faire opposition.
    Compte tenu de l'exigence posée par la décision du comité des experts sur cette question particulière de la légalité des accords pour les forfaits-jours, vous pourriez avoir une appréciation différente à l'égard de notre proposition de mettre en oeuvre d'ores et déjà les dispositifs d'accords majoritaires.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission a rejeté ces deux amendements.
    La proposition, dans l'amendement n° 142, de faire référence à des « conditions fixées par un accord national interprofessionnel » revient à renvoyer sine die l'application de ces dispositions. En outre, proposer de les reprendre par décret amène à s'interroger sur la définition même des règles des accords majoritaires. Enfin, on peut se demander pourquoi cela n'a pas été intégré dans les lois de 2000.
    Rappelons aussi que les partenaires sociaux négocient actuellement sur les voies et moyens de la négociation collective avec pour ambition de préciser leurs positions concernant les accords majoritaires et la représentativité des syndicats. Laissons donc la discussion se poursuivre.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. M. Gremetz comme M. Vidalies ont indiqué eux-mêmes quels allaient être les arguments du Gouvernement pour repousser ces deux amendements. Je n'ai donc pas besoin de les répéter. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 56.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 142.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
    L'amendement n° 94 est présenté par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère ; l'amendement n° 143 par MM. Gorce, Le Garrec et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le VIII de l'article 2. »
    L'amendement n° 94 est-il défendu ?
    M. Gaëtan Gorce. Il l'est, M. le président.
    Mme la présidente. La parole est à M. Gaëtan Gorce pour défendre l'amendement n° 143.
    M. Gaëtan Gorce. La disposition en discussion est une nouvelle illustration de la volonté du Gouvernement de contourner la réduction du temps de travail, en tout cas de marquer sa réserve sinon son hostilité par rapport à une réduction du temps de travail, même différée dans le temps.
    La création du compte épargne temps est une initiative et une innovation des partenaires sociaux. Elle repose sur l'idée que toute une série d'activités accumulées - congés payés, repos compensateurs, certaines primes, crédits accordés directement par l'employeur - peuvent être constituées dans un compte et réservées pour être utilisées au-delà d'un délai, en l'occurrence cinq ans. Toutefois, cela doit ensuite être utilisé pour des activités évaluées en temps, c'est-à-dire pour se former, éventuellement pour préparer sa retraite, mais aussi pour d'autres activités personnelles, avec un maximum de deux mois, si mon souvenir de la rédaction de l'article du code du travail est exact.
    Il est donc complètement contradictoire de prévoir la possibilité de convertir en argent le compte épargne temps, ou alors il faut changer son nom, puisque l'idée même du compte épargne temps est précisément de faire en sorte que ce temps accumulé puisse être utilisé ultérieurement parce que l'on n'a pas pu en bénéficier sur le moment, ou parce que l'on souhaitait se constituer un capital temps nécessaire avec certains objectifs en tête.
    J'ajoute qu'une modification comme celle qui nous est proposée, outre qu'elle va véritablement à contre-courant à la fois des intentions des créateurs du compte épargne temps et de la réduction du temps de travail, est sans doute en contradiction avec les réflexions que nous pourrions avoir, notamment sur les retraites. D'ailleurs, la loi offrait une opportunité en la matière. On peut parfaitement imaginer que ces salariés, comme la loi l'a prévu, puissent utiliser ce temps accumulé en partie pour favoriser un départ plus tôt en retraite ou dans des conditions plus favorables.
    L'objet de l'amendement est donc de souligner cette contradiction qui, en réalité, n'en est pas pas une car, à l'évidence - je crois que c'est un des symptômes les plus précis de la volonté du Gouvernement -, il s'agit bien, sur des points très fins, très précis, très détaillés, d'effectuer le retour en arrière dont le ministre se défend. Néanmoins le freinage auquel il procède laisse parfois des traces. En l'occurrence, celle-là est bien visible.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission a rejeté les deux amendements. Il ne faut évidemment pas supprimer ce paragraphe VIII de l'article 2 qui traite de la monétarisation du compte épargne-temps. Il offre aux partenaires sociaux le choix entre une capitalisation en jours et une capitalisation en argent, ce qui reflète le choix politique du projet de loi qui est celui de la souplesse et de la volonté de répondre non seulement aux demandes des entreprises mais aussi et surtout des salariés.
    La monétarisation du compte épargne-temps permettra, de surcroît, d'augmenter, pour ceux qui le souhaitent, leur pouvoir d'achat.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, il ne faut évidemment pas retirer du projet cette disposition essentielle qu'est l'assouplissement des conditions d'utilisation du compte épargne-temps. Les craintes exprimées par M. Gorce sont excessives parce que le projet de loi présente des les garanties suffisantes pour écarter un usage abusif de la monétarisation du compte épargne-temps.
    Je voudrais vous en convaincre, mesdames, messieurs les députés. D'abord, le compte épargne-temps n'est pas un dispositif susceptible d'être mis en place unilatéralement par l'employeur. Il doit résulter d'un accord de branche étendu, ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement. Le projet de loi renforce d'ailleurs les exigences quant à cet accord collectif puisqu'il précise que les accords d'entreprise peuvent faire l'objet d'une opposition par les syndicats majoritaires.
    Ensuite, la monétarisation du compte épargne-temps ne constitue qu'une faculté ouverte à la négociation collective, et les partenaires sociaux peuvent encadrer les conditions et les modalités suivant lesquelles cette faculté s'exerce.
    Enfin, le compte épargne-temps reste un dispositif facultatif pour le salarié qui décide de l'utiliser ou non et qui choisit les éléments qu'il souhaite affecter à son compte. Pourquoi vouloir à tout prix empêcher les salariés, les partenaires sociaux, dans les branches, dans les entreprises, d'organiser les choses en essayant de les adapter à leurs soucis, à leurs aspirations et à leur volonté ?
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.
    M. Jean-Pierre Soisson. Je suis contre l'amendement.
    Il s'agit d'une mesure d'assouplissement essentielle...
    M. Maxime Gremetz et Mme Muguette Jacquaint. On l'avait compris !
    M. Jean-Pierre Soisson. ... et, monsieur Gremetz, même avec l'accord des organisations majoritaires ! « Et un partout ! », si vous me permettez de reprendre les formules sportives de tout à l'heure !
    C'est une très bonne mesure. Le compte épargne-temps a deux vocations : d'abord permettre l'accumulation des droits à congé rémunéré ; ensuite, faciliter la constitution d'une épargne. Et le projet de loi va très loin puisque tout dépendra finalement très largement des partenaires sociaux et des organisations majoritaires. Vous avez donc, chers collègues de la gauche, toutes garanties, ce qui devrait vous conduire naturellement à retirer vos amendements.
    Mme la présidente. La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Si, comme M. Soisson, je n'hésite pas à me référer au football et je soutiens l'AJ Auxerre, j'ai avec lui des divergences d'opinion et pas seulement sur le sujet qui nous occupe dans le présent débat !
    Je ne comprends pas pourquoi le Gouvernement souhaite transformer un dispositif créé pour capitaliser du temps, afin qu'il soit possible de transformer ce temps en argent. C'est contradictoire avec le principe même du compte épargne-temps.
    Celui-ci permet d'économiser des bonifications en temps, liées au repos compensateur : c'est l'article L. 212-5 du code du travail, lequel précise qu'un accord ou une convention étendue - je passe sur les détails - pourra prévoir effectivement que les heures supplémentaires et les majorations pourront être prises sous forme de repos, lesquels pourront être placés sur le compte épargne-temps.
    On marche sur la tête ! En effet, il sera possible de transformer de l'argent en temps, je viens de le montrer, et de le porter sur son compte épargne-temps. Mais on pourra aussi, désormais, transformer à nouveau ce temps - qui vient d'un paiement en argent - en argent ! Curieuse logique ! J'aurais pu en trouver d'autres exemples.
    Ce que j'essaie de comprendre, c'est l'intention. Pourquoi un tel dispositif ? Je pense qu'on ne cherche qu'à vider petit à petit la réduction du temps de travail d'une partie de son contenu. Je ne vois pas d'autre explication, mais celle-ci me suffit et je la trouve regrettable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix, par un seul vote, les amendements n°s 94 et 143.
    (Les amendements ne sont pas adoptés.)
    Mme la présidente. M. Gremetz, Mme Jacquaint, MM. Dutoit, Desallangre et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 58, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le VIII de l'article 2 :
    « VIII. - Après le premier alinéa de l'article L. 227-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « La convention ou l'accord collectif soumis à l'extension doit avoir recueilli les signatures d'organisations syndicales ayant obtenu la majorité des suffrages exprimés aux élections de comités d'entreprise dans les entreprises de la branche d'activité considérée et s'étant déroulées au cours des deux années précédant la signature de l'accord ; cette majorité est constatée à partir des procès-verbaux d'élection qui sont adressés à l'administration compétente ; chaque année l'administration compétente informe les organisations syndicales de salariés et d'employeurs sur l'influence chiffrée de chaque organisation syndicale. L'accord d'entreprise ou d'établissement doit avoir recueilli la majorité des suffrages exprimés aux dernières élections professionnelles. Au cas où ultérieurement à la signature de l'accord les syndicats signataires deviennent minoritaires, l'accord ne continue à produire ses effets qu'autant qu'il est renégocié et remplit à nouveau les conditions prévues au présent article. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Je défendrai en même temps l'amendement n° 57, madame la présidente.
    Mme la présidente. L'amendement n° 57, présenté par M. Gremetz, Mme Jacquaint, MM. Dutoit, Desallangre et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains. Cet amendement est ainsi rédigé :
    « Supprimer le 1° du VIII de l'article 2. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Les amendements n°s 58 et 57 relèvent de la même démarche que l'amendement n° 56 : il s'agit du principe des accords majoritaires.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission a rejeté ces deux amendements, pour les raisons déjà invoquées.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 58.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 57.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. MM. Gremetz, Dutoit, Mme Jacquaint, M. Desallangre et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 59, ainsi rédigé :
    « Supprimer les 2° et 3° du VIII de l'article 2. »
    La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. Le Gouvernement introduit un dispositif nouveau dans une loi qui souffre, par ailleurs, beaucoup de critiques.
    Vous encouragez les heures supplémentaires en monétarisant le compte épargne-temps auquel nous nous étions opposés à l'époque car il s'agissait à nos yeux, et nous l'avions dit, d'une RTT à crédit et donc de créations d'emplois à crédit. Toutefois, il s'agissait d'une forme de compensation des heures supplémentaires effectuées par les salariés.
    Vous prévoyez, à présent, le rachat du temps ainsi épargné, c'est-à-dire, en définitive, plus de RTT du tout ! Vous êtes en train de proposer aux salariés de conclure des accords aux termes desquels - même s'ils sont majoritaires - ils vont faire des heures supplémentaires, mais qui leur seront payées plus tard, dans cinq ans peut-être. De même, pour les congés annuels inclus dans le paquet - les congés ont toujours été obligatoires : vous proposez d'en payer dix par an, toujours à crédit.
    D'autres inquiétudes se font jour. Quelles garanties - j'ai eu l'occasion de le demander dans la discussion générale - aura le salarié de récupérer son dû si l'entreprise n'est plus solvable ?
    Vous accroissez également la pression fiscale car les gains placés par le salarié, lorsqu'ils seront débloqués, seront assujettis à l'impôt, alors que le compte épargne-temps, dans sa conception, ne supportait aucune fiscalité puisqu'il capitalisait des jours de repos.
    M. Maxime Gremetz. C'est vrai !
    Mme Muguette Jacquaint. Je ne pense pas que ce soit la meilleure façon d'augmenter le pouvoir d'achat des salariés, dont nous souhaitons tous qu'il soit accru, pour que soient relancées la consommation et la croissance dont nous avons tant besoin.
    Une fois encore, vous pénalisez ceux qui sont déjà bien modestes en leur proposant, en somme, un marché de dupes.
    Mais surtout, vous favorisez l'accumulation de capitaux pour les entreprises et ouvrez la voie à une spéculation financière sur les richesses créées par le travail. Vous tracez le chemin, même si vous ne l'avouez pas, de la retraite par capitalisation et des fonds de pension. D'ailleurs, M. le Premier ministre ne dissimulait pas cette perspective quand il affirmait dans son discours de politique générale : « Chacun doit avoir la possibilité de compléter sa pension, grâce à une incitation fiscale, par un revenu d'épargne. »
    Les choses paraissent claires. Personne ne sera d'ailleurs étonné que nous nous opposions à ce troisième étage déguisé des retraites. Visiblement, encore une fois, vous éprouvez beaucoup de mal à expliquer franchement ce que cette disposition réserve à nos concitoyens.
    Proposer que les salariés ouvrent une ligne de crédit à leur employeur est pour le moins original ! On ne peut certes pas empêcher les salariés d'investir dans l'entreprise, comme d'ailleurs cela se fait aujourd'hui. Mais nous voulons empêcher qu'ils y soient contraints. Nous avons toujours dit que nous étions favorables à l'épargne, mais ce doit être un libre choix et non une contrainte.
    C'est pourquoi nous proposons la suppression de cette innovation pleine de sous-entendus, et qui risque de mettre à mal la sécurité sociale solidaire.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission a rejeté l'amendement n° 59 car il s'oppose à ce principe novateur qu'est la monétarisation du compte épargne-temps. Celle-ci répond, en fait, à une demande de nombreux salariés. Je ne ferai pas de commentaires sur ce qui vient d'être dit. Qu'il soit bien clair que la monétarisation n'a pas pour ambition d'être un fonds d'investissement pour les entreprises et qu'elle n'obéit à aucune autre philosophie de ce genre. Elle offre simplement la possibilité aux salariés de récupérer leur épargne-temps.
    M. Gaëtan Gorce. C'est une plaisanterie !
    M. Pierre Morange rapporteur. Cette possibilité est à sa disposition. Il s'agit de donner un peu de souplesse à la loi et de liberté aux salariés, ce qui est le reflet du projet de loi. Au reste, là encore, les partenaires sociaux décideront : valorisation en temps ou en argent.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. J'avoue ne pas comprendre l'opposition de Mme Jacquaint à cette liberté supplémentaire offerte aux salariés, puisque, en dernier ressort, après toutes les garanties qu'offrent déjà les textes - le compte épargne-temps ne peut pas être mis en place unilatéralement par l'employeur, il faut un accord de branche et la négociation collective est très encadrée sur ce sujet - le salarié a toujours la possibilité d'accepter ou de refuser la mise en oeuvre de ce dispositif pour lui-même.
    Mme Muguette Jacquaint. Le dispositif est une contrainte !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. C'est donc une liberté que nous offrons, avec toutes les garanties. Tous les arguments que nous entendons ne s'appliquent pas, en réalité, au présent projet.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.
    M. Jean-Pierre Soisson. C'est un mauvais procès qui est fait au texte : ce qu'a dit Mme Jacquaint ne concerne nullement les deuxième et troisième alinéas du paragraphe VIII. Le troisième alinéa ne fait que prévoir la possibilité de régler par accord les modalités de valorisation, en temps ou en argent, des éléments affectés au compte. Au départ, le salarié est libre.
    Mme Muguette Jacquaint. Je sais lire !
    M. Jean-Pierre Soisson. Les partenaires sociaux sont également libres de décider. Ce n'est pas du tout ce que vous nous racontez, Madame Jacquaint !
    Mme Muguette Jacquaint. Vous êtes libre de raconter ce que vous voulez !
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 59.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Gorce, M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 144, ainsi rédigé :
    « Supprimer le 2° du VIII de l'article 2. »
    La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. L'amendement n° 144 est défendu.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. Rejeté pour les mêmes motifs.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis, madame la présidente.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 144.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. MM. Morin, Perruchot et Dionis du Séjour ont présenté un amendement, n° 218, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le 2° du VIII de l'article 2 :
    « Le deuxième alinéa est supprimé. »
    La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. Je souhaiterais, si vous me le permettez, madame la présidente, présenter également, les amendements n°s 170 et 167. Par ces amendements qui concernent tous les trois le compte épargne-temps, le groupe UDF souhaite supprimer la référence aux cinq ans, comme durée de vie de celui-ci pour permettre au salarié de pouvoir conserver ce compte tout au long de sa carrière. Les salariés pourront ainsi par exemple prendre deux années de congé sabbatique ou utiliser ce compte en fin de carrière sous forme d'une préretraite.
    Cette disposition nous semble indispensable pour une véritable utilisation du compte épargne-temps par le salarié, car, comme vous le savez, il ne fonctionne pas dans les faits. Elle donnera davantage confiance au salarié qui craint, notamment en raison de la jurisprudence sur les congés payés, de perdre le temps qu'il aurait accumulé sur son compte.
    L'idée est de permettre aux salariés de se constituer une épargne à long terme pour éviter qu'ils soient contraints de liquider leurs congés de CET en cours de carrière. Pour éviter tout problème, nous avons proposé un mécanisme destiné à sécuriser la situation sociale et fiscale de l'entreprise, un mécanisme qui permet à l'entreprise de souscrire une assurance.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission a rejeté l'amendement n° 218 parce qu'il demande la suppression du deuxième alinéa de l'article L. 227-1, c'est-à-dire la définition même du compte épargne-temps et du congé capitalisé ou en épargne. Il faut rester en harmonie avec la philosophie du projet.
    Les amendements n°s 167 et 170 s'inscrivent dans la même démarche. Je rappelle qu'il n'y a pas de logique assurantielle dans le compte épargne-temps. On mélange donc les logiques. De surcroît, la solvabilité est déjà assurée, dans le cas d'une liquidation, par l'AGS.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 218. Le délai de principe qui est de cinq ans peut déjà être étendu à dix ans dans les hypothèses particulières où le salarié a un enfant âgé de moins de seize ans ou un parent dépendant ou âgé de plus de soixante-quinze ans. Bien évidemment, il n'existe pas de délai d'utilisation dans le cas particulier de l'épargne, en vue d'une cessation progressive ou totale d'activité.
    Je voudrais aussi que l'Assemblée note que ce délai maximum ne court qu'à compter de la date à laquelle le salarié a acquis la durée minimale d'épargne fixée par la loi ou par l'accord collectif.
    Par ailleurs, la rédaction proposée par M. Perruchot présente l'inconvénient de supprimer la partie du texte qui étend l'objet du compte épargne-temps à une épargne sous forme monétaire. L'avis du Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 218.
    En ce qui concerne l'amendement n° 167 qui vise à instaurer une clause dans l'accord relatif au compte épargne-temps pour déterminer les mesures prises afin de garantir l'engagement de l'entreprise, notamment par la souscription d'un contrat d'assurance, je veux dire à M. Perruchot qu'il existe déjà des garanties dans la loi par le système de l'AGS. De plus, des accords ont prévu des clauses qui visent à répondre à cet objectif et je crois qu'il est inutile de créer une nouvelle clause obligatoire, contraignante pour les négociateurs.
    Enfin, sur l'amendement n° 170, il n'y a pas de raison d'exclure de l'assiette des cotisations sociales les différentes sources d'approvisionnement du compte épargne-temps. Il s'agit d'éléments constitutifs de la rémunération. Par ailleurs, ces cotisations sont payées une fois que le salarié décide de mobiliser son épargne-temps, elles ne sont donc pas payées au stade du provisionnement au bilan des entreprises. Il n'y a donc pas, de mon point de vue, préjudice pour l'entreprise.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.
    M. Jean-Pierre Soisson. Je souhaite m'exprimer contre l'amendement n° 218. Je voudrais faire remarquer à M. Perruchot que si nous votons cet amendement, l'ensemble des dispositions que l'Assemblée vient d'accepter tombe. Je comprends l'intention d'aller au-delà du délai prévu, mais la rédaction de l'amendement présente l'extraordinaire difficulté pour l'Assemblée que son adoption impliquerait de revenir sur les dispositions précédentes. Je m'excuse de le dire. Deuxièmement, c'est un élément d'insécurité pour le salarié que d'étendre le délai à l'ensemble de la vie professionnelle.
    Mais le premier argument, que je m'excuse de présenter, en soutenant la position du Gouvernement, devrait vous conduire à retirer cet amendement, quitte à le présenter au cours d'une autre lecture en le formulant différemment.
    Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Morin.
    M. Hervé Morin. Je crois que M. Soisson n'a pas bien compris l'esprit de l'amendement n° 218.
    M. Jean-Pierre Soisson. J'ai compris l'esprit, mais c'est le texte qui ne va pas !
    M. Hervé Morin. L'idée est toujours la même : il y a des choses qui relèvent du domaine de la loi et d'autres qui relèvent du domaine de l'accord. Je concède bien volontiers à M. le ministre que cet amendement aurait pour effet de supprimer - c'est une erreur rédactionnelle - la possibilité de financiariser le compte épargne-temps. En revanche, ce que M. Soisson ne comprend pas, c'est qu'à travers cet amendement, nous considérons que ne relève pas de l'ordre public social ni de l'article 34 de la Constitution le fait de fixer dans la loi que le congé doit être pris « avant l'expiration d'un délai de cinq ans à compter de la date à laquelle le salarié a accumulé un nombre de jours de congé égal à la durée minimale », etc. Nous considérons que cela doit relever purement et simplement de l'accord, et même d'ailleurs de l'accord d'entreprise - au moins, en tout cas, de l'accord de branche. Tout ce carcan législatif empêche une partie du dialogue. Il empêche de construire entreprise par entreprise, branche par branche, le compte épargne-temps, comme les salariés, comme les partenaires sociaux le souhaitent.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.
    M. Jean-Pierre Soisson. Je veux répondre à M. Morin. Je comprends parfaitement l'esprit de l'amendement, mais ce que j'ai dit demeure exact : votant votre amendement, nous supprimons les dispositions précédentes puisqu'il tend à la suppression du deuxième alinéa, que nous venons de voter.
    M. Maxime Gremetz. On a toujours le droit de réparer une bêtise !
    M. Jean-Pierre Soisson. On peut toujours réparer des erreurs, comme le dit Maxime Gremetz,...
    M. Jean-Claude Lemoine. C'est d'ailleurs ce que nous faisons en réparant la loi des 35 heures !
    M. Jean-Pierre Soisson. ... mais, franchement, nous nous déjugerions complètement en votant votre amendement.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 218.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Morange, rapporteur, a présenté un amendement, n° 100, ainsi rédigé :
    « Après le 2° du VIII de l'article 2, insérer l'alinéa suivant :
    « 2° bis Au sixième alinéa, les mots : "de la bonification prévue aux premier et deuxième alinéas du I de l'article L. 212-5, du repos compensateur de remplacement défini au premier alinéa du III du même article sont remplacés par les mots : "du repos compensateur de remplacement défini au premier alinéa du II de l'article L. 212-5. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Pierre Morange, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de cohérence avec le I de l'article 2 du projet de loi, qui a pour objet de remplacer les I et II de l'article L. 212-5 du code du travail par un paragraphe unique ne faisant plus référence au repos pouvant être acquis au titre de la bonification actuellement prévue pour les quatre premières heures supplémentaires.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 100.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. M. Gorce, M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 145, ainsi rédigé :
    « Supprimer le 3° du VIII de l'article 2. »
    La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Amendement est défendu.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission a rejeté l'amendement.
    M. Gaëtan Gorce. C'est une commission guillotine !
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis que la commission.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 145.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Morin et M. Perruchot ont présenté deux amendements n°s 167 et 170, qui ont été déjà défendus.
    L'amendement, n° 167 est ainsi rédigé :
    « Compléter le VIII de l'article 2 par l'alinéa suivant :
    « 4° Le onzième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : "La convention ou l'accord collectif détermine également les mesures prises afin de garantir l'engagement de l'entreprise, notamment par la souscription d'un contrat d'assurance auprès de l'un des organismes visés à l'article 1er de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989. »
    L'amendement, n° 170, est ainsi libellé :
    « I. - Compléter le VIII de l'article 2 par les deux alinéas suivants :
    « 4° L'article L. 227-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Les provisions constatées au bilan des sociétés ainsi que les primes versées dans le cadre des actions de formation visées au dixième alinéa ne sont pas des rémunérations au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale. Ces primes sont des dépenses de personnel au sens du 1° du 1 de l'article 39 du code général des impôts. »
    « II. - Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
    « III. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    Sur ces deux amendements, la commission et le Gouvernement se sont exprimés. Je vais les mettre successivement aux voix.
    Je mets aux voix l'amendement n° 167.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 170.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Gorce, M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 146, ainsi libellé :
    « Compléter le VIII de l'article 2 par les deux alinéas suivants :
    « 4° Cet article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Les accords ou conventions étendus ou convention ou accord d'entreprise ou d'établissement visés au présent article qui prévoient la création d'un compte épargne-temps, doivent être signés par une ou des organisations syndicales représentatives et majoritaires dans la branche ou dans l'entreprise ou l'établissement dans des conditions fixées par un accord national interprofessionnel et reprises par décret. »
    La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Cet amendement est défendu.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement, pour un certain nombre de raisons que nous avons déjà formulées. Je rappelle que le projet prévoit déjà que l'accord ayant mis en place le compte épargne-temps doit ne pas pouvoir faire l'objet d'une opposition au sens de l'article L. 132-26 du code du travail.
    Par ailleurs, on peut se demander quel est l'intérêt de renvoyer à un accord national interprofessionnel et à un décret. Cela remet en cause la notion de confiance dans les négociations collectives.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis que la commission.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 146.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 2

    Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 229 rectifié, présenté parM. Morange et M. Morin, est ainsi rédigé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « Art. ... . - Le premier alinéa de l'article L. 212-4 bis du code du travail est complété par la phrase suivante : "Exception faite de la durée d'intervention, la période d'astreinte est décomptée dans les durées minimales visées aux articles L. 220-1 et L. 221-4. »
    L'amendement n° 152, présenté par M. Perruchot, est ainsi rédigé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « Cette période, en l'absence d'intervention, est considérée comme un temps de repos au sens des articles L. 220-1 et L. 221-4 du code du travail. »
    La parole est à M. Pierre Morange, pour soutenir l'amendement n° 229 rectifié.
    M. Pierre Morange, rapporteur. Cet amendement a pour objet de clarifier la situation du salarié qui est d'astreinte mais qui n'a pas été amené à intervenir pendant sa période d'astreinte.
    Il faut rappeler qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 212-4 bis, l'astreinte est « une période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'entreprise, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif ».
    Cet amendement vise à indiquer de façon claire que, si le salarié n'est pas du tout intervenu au cours de sa période dite d'astreinte, celle-ci n'est manifestement pas un temps de travail effectif. Ainsi, à l'exception des durées d'intervention, le temps d'astreinte peut se décompter, dans les conditions normales, dans les durées minimales de repos visées à l'article L. 220-1 - la règle des 11 heures de repos consécutif - et à l'article L. 221-4 - la règle des 24 heures de repos hebdomadaire.
    Mme la présidente. Monsieur Morange, pourriez-vous nous donner dès à présent l'avis de la commission sur cet amendement - car vous l'avez présenté à titre personnel ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission l'a adopté.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Conformément à la définition de l'astreinte, qui est donnée par la loi de janvier 2000, un temps d'astreinte sans intervention n'est pas un temps de travail effectif. Et c'est d'ailleurs le sens de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes.
    Si ce n'est pas un temps de travail, est-ce pour autant de plein droit un temps de repos ? La Cour de cassation, notamment dans un arrêt du 10 juillet 2002, a tendance à dire non. Et la doctrine parle en fait d'un « temps gris », c'est-à-dire d'un statut intermédiaire. Cette idée implique notamment que l'astreinte soit compensée, soit en temps...
    M. Maxime Gremetz. Voilà !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... soit par une indemnisation, un bonus salarial.
    Mais on ne peut pas ignorer non plus qu'aujourd'hui une astreinte n'a pas nécessairement une portée très contraignante sur la vie personnelle. Avec les moyens de communication modernes, le salarié d'astreinte peut, en pratique, très librement vaquer à ses occupations, ce qui revient à dire qu'il est au repos.
    M. Maxime Gremetz. Mais non !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. L'amendement qui est proposé par M. Morange et M. Morin tire les conséquences de cette situation sur le décompte du temps de repos hebdomadaire et quotidien prévu par le code du travail, ce qui paraît logique.
    J'ajoute qu'il revient aux accords de branche, ou d'entreprise, de bien encadrer le recours aux astreintes, et de fixer les contreparties prévues par la loi. En cas d'abus, c'est-à-dire lorsque le salarié est soumis de façon continue et permanente à des astreintes, ou lorsque, du fait des modalités pratiques de l'astreinte, il ne peut pas vaquer librement à ses occupations personnelles, il s'agit bien alors d'un temps de travail effectif. Et il revient, face à de telles situations, à l'inspection du travail d'en tirer toutes les conséquences au regard de la violation des textes légaux relatifs au temps de travail.
    Enfin, dans le cadre du bilan sur la fixation des contingents d'heures supplémentaires, qui sera présenté à la Commission nationale de la négociation collective avant juillet 2004, un point sera fait sur le recours aux astreintes dans les entreprises.
    Dans ces conditions, le Gouvernement est favorable à l'adoption de cet amendement.
    Mme la présidente. La parole est à M. Perruchot, pour soutenir l'amendement n° 152.
    M. Nicolas Perruchot. Je me réjouis que le rapporteur ait présenté l'amendement n° 229 rectifié, qui reprend en fait l'amendement n° 152. Avec l'amendement de M. Morange et de M. Morin, beaucoup d'entreprises seront satisfaites. Je peux, dans ces conditions, retirer l'amendement n° 152.
    Mme la présidente. L'amendement n° 152 est retiré.
    La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. Cet amendement n° 229 rectifié est motivé, selon ses auteurs, par le fait que les astreintes ne font pas partie du temps de travail effectif. Ils s'appuient pour cela sur la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes.
    En fait, cet amendement a pour seul but de s'opposer à une jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation, qui, dans un arrêt de juillet 2002, a considéré que pendant son astreinte, le salarié n'était pas en repos. Par conséquent le salarié d'astreinte a droit à un repos compensateur. La Cour a bien précisé qu'il ne s'agissait pas de travail effectif - nous ne le prétendons pas non plus.
    Dès lors, les arguments des auteurs de l'amendement sont sans objet. En revanche, il est évident que le salarié d'astreinte n'est pas en repos. Il n'est pas libre lorsqu'il doit rester disponible. Aussi, le but de l'amendement est bien de priver, comme pour les heures supplémentaires, le salarié d'astreinte du droit au repos qui lui a pourtant été reconnu.
    Je voudrais donner l'exemple des ascensoristes, dont il a été beaucoup question des derniers temps. Je sais d'ailleurs que M. de Robien doit nous présenter dans quelques semaines un texte de loi sur ce sujet. Je prends cet exemple, mais il y en a bien d'autres et s'il y a bien un métier où l'astreinte est nécessaire, c'est bien celui-là. Ils sont mis à contribution très souvent, pour des raisons telles que les dégradations dans les ascenseurs, le vieillissement des appareils, le manque de professionnels. En effet, depuis de nombreuses années, cette profession n'attire plus les jeunes. Les conditions de travail y sont difficiles, et ils travaillent parfois dans l'insécurité la plus totale. Les ascensoristes sont donc, dans leur grande majorité, très souvent d'astreinte.
    Il peut arriver - mais c'est rare - que certains d'entre eux soient d'astreinte et n'aient à intervenir que pour quelques heures. Toutefois, compte tenu de la situation que je viens de décrire et du manque important de personnel dans la maintenance, nombre de ces salariés ne parviennent pas à prendre les repos auxquels ils ont droit. Si demain, ils ne peuvent plus disposer de ces repos dont ils bénéficient encore, c'est grave, y compris pour la sécurité. Je rappelle que ces professionnels travaillent dans des conditions très pénibles.
    Monsieur le ministre, je ne pense pas qu'une telle disposition, encouragera les jeunes à se tourner vers une profession dont nous reconnaissons tous qu'elle est indispensable et qu'elle impose un effort de formation urgent.
    N'oublions pas que le salaire mais aussi le repos compensateur peuvent représenter des atouts. Si l'on adopte cet amendement, je crains, et à vrai dire, c'est déjà le cas, que ces métiers éprouvants, qui demandent du savoir-faire, n'auront plus aucun attrait pour les jeunes.
    En résumé, l'amendement est contraire aux créations d'emploi, objectif que nous visons tous, si j'en crois les déclarations des uns et des autres - même si elles ne sont pas toujours sincères.
    Mme la présidente. Avant de donner la parole à M. Gorce, j'indique à l'Assemblée que sur l'amendement n° 229 rectifié, je suis saisie par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Ce sujet est extrêmement important. Le ministre l'a rappelé tout à l'heure, ce n'est que récemment que l'astreinte a fait l'objet d'une définition légale, avec la loi du 19 janvier 2000. Jusqu'alors, seule la loi quinquennale y faisait référence, en renvoyant à des décrets. Un seul décret avait d'ailleurs été publié, qui concernait les salariés agricoles.
    La jurisprudence avait, pour sa part, défini l'astreinte en indiquant notamment que pour qu'il y ait astreinte, il fallait que le salarié, sans être à la disposition immédiate de l'employeur - c'est la définition que nous avions donnée du temps de travail effectif - reste néanmoins à son domicile ou à proximité pour effectuer des interventions susceptibles de donner lieu à un temps de travail effectif et rémunéré comme tel. Voilà le cadre juridique qui avait été posé de manière stricte.
    La loi avait d'ailleurs encadré le recours à l'astreinte dans la négociation, puisque nous avions prévu que des accords conventionnels, de branche ou d'entreprise, devaient fixer les conditions du recours à l'astreinte. Faute d'accord, il fallait une information du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, avec, en outre, un délai de prévenance de quinze jours. Un dispositif de garantie avait donc été mis en place.
    Il est vrai qu'avec l'astreinte, nous sommes, comme dans d'autres sujets, à la lisière entre le temps de travail effectif et le temps de repos. Ce qui avait été conclu, c'est que l'intervention était bien du temps de travail effectif. Restait à définir la non-intervention. Jusqu'alors, la Cour de cassation, notamment dans des arrêts de 1998, avait considéré qu'il ne s'agissait ni de temps de travail effectif ni de temps de repos.
    Cela dit, cette interprétation de la Cour de cassation avait fait l'objet de nombreuses discussions entre juristes, y compris d'ailleurs au regard des dispositions européennes. Elle laissait subsister un doute, qui a été levé par un arrêt du 10 juillet 2002, dans une affaire opposant le Syndicat libre des exploitants de chauffage à la société Dalkia. Puisque l'astreinte ne permettait pas au salarié de jouir de son temps de repos, a jugé la Cour de cassation, elle devait donner lieu à l'application du repos compensateur après l'intervention ou après la fin de l'astreinte.
    L'amendement qui nous est présenté essaie de régler cette question juridique en indiquant que, hors le temps d'intervention, l'astreinte serait considérée comme du repos. Moi, je crains qu'en voulant régler un problème juridique important, on ne crée un problème encore un peu plus grave. Car on empiète sur la définition du droit au repos et du temps de repos.
    Mme Muguette Jacquaint. Tout à Fait !
    M. Gaëtan Gorce. Si l'on regarde l'évolution de notre droit du travail, on s'aperçoit que les protections dont jouissent les salariés sont de plus en plus fragiles. Compte tenu de l'individualisation du temps de travail, compte tenu du fait que le temps de travail est décompté dans des conditions différentes selon les entreprises, compte tenu même de ce que, dans certains dispositifs, le temps de travail n'est pas décompté en heures, à travers les forfaits-jours, on a intérêt à sanctuariser, si vous me permettez l'expression, des plages qui correspondent au temps de repos minimal que l'on doit pouvoir accorder aux salariés, pour des raisons de santé. Ce temps de repos minimal est journalier - ce sont les 11 heures - et hebdomadaire - ce sont les 24 heures.
    Si l'on commence à dire qu'en dehors des interventions, le temps passé en astreinte doit être assimilé à du temps de repos, on remet indiscutablement en question cette définition du temps de repos. Le ministre a d'ailleurs fait cette confusion, tout à l'heure, en indiquant que quand le salarié peut être joint - à son domicile, mais ce peut être aussi bien lors d'une sortie en ville avec ses enfants, équipé de son portable - et quand il n'est pas directement amené à intervenir, ou en tout cas sollicité immédiatement, nous sommes bien dans du temps de repos. Cela signifierait que le temps de repos pourrait être défini comme un temps au cours duquel le salarié est susceptible de recevoir une demande de prestation ou d'intervention de son employeur. Cela me paraît extrêmement grave, car cette définition est très restrictive par rapport au droit actuel.
    Le droit au repos est souvent tout ce qui reste des garanties apportées aux salariés, comparativement aux définitions antérieures, dans lesquelles c'étaient les durées maximales, sur la journée, la semaine, les douze semaines, qui apportaient les garanties. L'évolution des formes de travail et du décompte du temps de travail rend nécessaire la protection de ce droit au repos.
    S'il y a un problème juridique, nous ne pouvons pas le régler de cette manière, au détour d'une discussion qui n'a pas été organisée pour cela, et avec une argumentation qui vise simplement à contourner un problème posé par la Cour de cassation. Il faudrait aller beaucoup plus loin car la solution proposée me paraît pire que le problème lui-même : on ouvre une brèche dans la dernière garantie accordée aux salariés, et ce sans concertation, là encore, avec les organisations syndicales.
    Mme Muguette Jacquaint. Oui, il faut au moins en discuter.
    M. Gaëtan Gorce. C'est un sujet extrêmement sensible. Monsieur le ministre, je vous le demande, n'acceptez pas une modification aussi importante sans que les organisations syndicales et les partenaires sociaux aient pu donner leur sentiment : vous aurez d'autres occasions d'y revenir une fois que nous aurons pu évaluer tous les inconvénients, tous les risques de la nouvelle jurisprudence, ainsi que des dispositions qui nous sont proposées.
    Avec cet amendement, je crains que l'on ne joue à l'apprenti sorcier.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.
    M. Jean-Pierre Soisson. M. Gorce vient de le reconnaître : l'arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation de juillet dernier pose un véritable problème juridique.
    Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !
    M. Jean-Pierre Soisson. Il marque une évolution par rapport à 1998 et toute une série d'arrêts. C'est la raison pour laquelle je suis tout à fait favorable à l'amendement de M. Morin et de M. Morange. Là, monsieur Morin, vous avez totalement raison.
    Mme la présidente. Je vais vous donner la parole, monsieur Gremetz, mais je vous demanderai d'intervenir brièvement dans la mesure où Mme Jacquaint s'est déjà exprimée.
    M. Maxime Gremetz. Madame la présidente, je crois que cette question mérite qu'on s'y arrête un peu. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française).
    Mme la présidente. Monsieur Gremetz, le sujet est effectivement important mais trois orateurs sont déjà intervenus. Je vous donne donc la parole, mais à titre exceptionnel.
    M. Maxime Gremetz. Nous avions, nous aussi, l'intention de demander un scrutin public parce que cette question des astreintes est extrêmement préoccupante. On veut modifier une définition du code du travail qui a été longuement débattue, notamment avec les organisations syndicales. Il faut savoir ce qu'on veut. On nous dit : la loi ne doit pas tout prévoir, il faut s'en remettre au dialogue social et là, on passe outre alors que cette affaire relève typiquement du dialogue social.
    M. Gaëtan Gorce. Absolument !
    M. Maxime Gremetz. Vous prétendez changer le code du travail et inscrire dans la loi que le temps d'astreinte n'est pas tout à fait du repos, mais un peu quand même... Bref, vous voulez remettre en cause la définition actuelle, sans vous préoccuper des conséquences dramatiques que cela aura. Là, pour le coup, je suis très préoccupé.
    Je pensais, monsieur le ministre, que vous alliez conclure votre intervention par une demande de rejet de l'amendement. Cela aurait dû être la conclusion logique de votre démonstration. J'avoue que je ne comprends pas.
    M. Gaëtan Gorce. Cela signifie que le Gouvernement est sous astreinte.
    M. Maxime Gremetz. Pour quelle raison aboutissez-vous, au terme de votre explication, au contraire ? J'aimerais bien le savoir.
    Certes, j'ai lu dans la presse qu'il fallait que l'UDF joue un peu à « Monsieur Plus » - pas à « Monsieur moins ». L'heure n'est pas au : « Oui mais ! » ; mais faudrait donner à l'UDF quelques...
    M. Henri Nayrou. Quelques miettes !
    M. Jean-Claude Abrioux. Mais le rapporteur n'est pas à l'UDF !
    M. Maxime Gremetz. ... quelques miettes pour lui faire avaler le reste.
    Ses membres se plaignent apparemment d'être un peu maltraités.
    M. René Couanau. Vous avez connu ça !
    M. Hervé Morin. Paroles d'expert !
    M. Maxime Gremetz. Il me semble que j'ai entendu cela dimanche. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la présidente. Monsieur Gremetz, je vous demande de conclure.
    M. Maxime Gremetz. J'ai entendu un UDF éminent à la radio parler ainsi.
    M. Richard Mallié. Madame la présidente, il y a déjà eu trois orateurs. On peut passer au vote !
    M. Maxime Gremetz. Remettre en cause, pour des raisons politiciennes, une définition aussi importante pour toute une série de métiers est une erreur.
    M. Alain Marty. Il parle pour ne rien dire !
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, franchement, je vous demande de bien réfléchir et de renvoyer cette question à la négociation sur le dialogue social.
    M. Richard Mallié. Ça suffit !
    M. Maxime Gremetz. Les organisations syndicales vont apprendre dans la presse, puisque ce n'était pas prévu dans le projet initial, que la définition des astreintes est modifiée. C'est insupportable. Surtout que vous vous présentez comme un fervent défenseur du dialogue social. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Richard Mallié. Il a assez parlé ! On vote !
    Mme la présidente. Monsieur Vidalies, vous avez la parole dans les mêmes conditions, c'est-à-dire à condition d'être très bref. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Pierre Soisson. Le match est terminé !
    Mme la présidente. S'il vous plaît, messieurs, c'est moi qui préside.
    Monsieur Vidalies, je vous donne la parole à titre exceptionnel.
    M. Alain Vidalies. Nous pouvons aussi demander une suspension de séance pour réfléchir. L'heure est grave.
    D'abord, s'agissant du rôle du Parlement.
    M. Maxime Gremetz. Absolument !
    M. Alain Vidalies. L'amendement a pour seul objectif de remettre en cause un arrêt de la Cour de cassation.
    Mme Muguette Jacquaint. Bien sûr !
    M. Henri Nayrou. C'est inacceptable !
    M. Alain Vidalies. Disons peu ordinaire !
    M. Jean-Pierre Soisson. Qu'avez-vous fait dans le passé ?
    M. Alain Vidalies. Vous pouvez hurler, cet amendement est maintenant connu à l'extérieur et je vous renvoie aux appréciations portées par la société civile, notamment par les organisations syndicales dont vous nous parlez depuis cinq jours. Ainsi, la CGC a fait paraître un communiqué qui utilise des termes que ni moi ni M. Gremetz n'aurions osé employer. La CGC considère que l'astreinte telle que vous la définissez est de nature à interdire toute vie sociale aux salariés, contraints de demeurer chez eux dans l'attente d'un éventuel appel, tant en réduisant les contreparties auxquelles ils avaient droit jusqu'à présent. Je vous livre cette appréciation, au cas où vous n'auriez pas mesuré la gravité de votre proposition. La CGC se demande même si la majorité parlementaire ne veut pas entraver l'action du Gouvernement et si les recherches de sigles en cours ne vont pas aboutir à « l'Union pour un MEDEF Puissant ».
    Je crois pour ma part que vous êtes en train d'organiser une vraie régression sociale.
    M. Alain Marty. Nous pouvons maintenant voter en toute connaissance de cause.
    Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission, puis nous passerons au vote.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Madame la présidente, je voudrais quand même rappeler nos collègues à la raison. Essayons de retrouver le calme qui a régné sur nos débats jusqu'à maintenant.
    Comment ? Le Parlement ne ferait pas la loi ? (Approbations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Vraiment, je m'interroge, monsieur Vidalies, sur le sens de votre intervention. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Alain Vidalies. Nous n'avons pas de leçon de morale à recevoir de vous, monsieur le président.
    Mme la présidente. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je vais mettre aux voix l'amendement n° 229 rectifié.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    Mme la présidente. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   92
Nombre de suffrages exprimés   92
Majorité absolue   47
Pour l'adoption   75
Contre   17

    L'Assemblée nationale a adopté.
    M. Maxime Gremetz. Vous allez le payer cher.
    M. René Couanau. Pas de menaces, s'il vous plaît.
    Mme la présidente. La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Les propos du président de la commission nous ont choqués, madame la présidente. Je ne crois pas que M. le président de la commission soit chargé de faire la police des débats. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    L'opposition a voulu soulever un problème extrêmement grave, qui touche au droit du repos, et je pense avoir argumenté, comme mon collègue Alain Vidalies, d'un point de vue juridique et non pas d'un point de vue politique.
    Maintenant, si vous voulez que nous portions le débat sur un terrain politique, nous pouvons le faire très aisément. Chassez le naturel, il revient au galop : vous avez du mal à résister aux tentations qui sont les vôtres de déréguler le marché du travail, de remettre en cause le droit du travail sur des questions aussi sensibles que la question des astreintes. L'avenir du droit du travail c'est pour partie le droit du temps de travail, que manifestement vous avez du mal à prendre en compte.
    Compte tenu des observations qui ont été faites et qui traduisent, une fois de plus, l'intolérance de la majorité dans ces débats, je demande, madame la présidente, une suspension de séance de dix minutes pour réunir mon groupe. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Claude Abrioux. Quel groupe ?

Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante, est reprise à dix-neuf heures.)
    Mme la présidente. La séance est reprise.
    J'informe l'Assemblée que l'amendement n° 153 a été retiré.
    M. Morin et M. Perruchot ont présenté un amendement, n° 173, ainsi libellé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « Le deuxième alinéa de l'article L. 212-13 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : "Des dérogations aux dispositions de l'alinéa précédent peuvent être accordées, dans la limite de cinq heures par semaine, par l'inspecteur du travail après avis conforme du médecin du travail de l'établissement. »
    La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. Contrairement à ce qu'une lecture rapide pourrait laisser croire, cet amendement n'a pas pour objet d'augmenter la durée de travail des jeunes apprentis de moins de dix-huit ans. Il vise au contraire à assouplir et à faciliter leurs conditions de travail. En ne supprimant de l'article L. 212-13 du code du travail que les mots « à titre exceptionnel », il permettra de faciliter l'obtention des dérogations, qui sont par ailleurs régulièrement obtenues dans de nombreuses branches. Il permettra en outre de conférer à ces dérogations un caractère moins ponctuel.
    C'est dans l'intérêt des jeunes apprentis que nous présentons cet amendement. En effet, la situation visée est la suivante : aujourd'hui, sauf dérogation obtenue à titre exceptionnel, le jeune apprenti qui se rend sur les chantiers avec son maître d'apprentissage voit son temps de transport décompté sur son temps de travail. Or, par définition, les jeunes de moins de dix-huit ans ne sont pas titulaires du permis de conduire, ce qui rend malaisés leurs déplacements sur les chantiers. Notre amendement vise donc à faciliter l'obtention de dérogations.
    La disposition proposée concerne au minimum 70 000 jeunes dans le secteur du bâtiment et des travaux publics. Monsieur le ministre, mesdames, messieurs, je suis persuadé que vous êtes conscients de l'enjeu et que vous ne souhaitez pas entraver le bon fonctionnement de ces filières de formation très dynamiques sur le plan économique et sur le plan éducatif.
    Ces derniers jours, M. Morin et moi-même avons rencontré de nombreux artisans attendent cette mesure.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. L'amendement a été rejeté par la commission.
    L'objectif des auteurs de l'amendement est d'accroître les possibilités de dérogation en matière de temps de travail des jeunes travailleurs, notamment des apprentis.
    Je rappelle qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 212-13 du code du travail, l'apprenti peut travailler pour l'entreprise au maximum sept heures par jour et trente-cinq heures par semaine. L'employeur doit lui laisser la possibilité d'assister à ses cours.
    Le deuxième alinéa actuel prévoit qu'« à titre exceptionnel » l'inspecteur du travail, après avis conforme du médecin du travail, peut autoriser l'apprenti à être mobilisé cinq heures de plus par semaine par son employeur, soit aujourd'hui au maximum quarante heures par semaine, pour tenir compte des délais de transport des locaux de l'entreprise aux chantiers, par exemple.
    L'amendement vise à compléter ce deuxième alinéa par une phrase qui relève à peu près de la même philosophie, mais en supprimant les termes « à titre exceptionnel ». Or il est important de signaler dans le code du travail que les dérogations doivent être exceptionnelles et limitées, s'agissant de la protection de la santé de travailleurs encore jeunes.
    Il ne faut pas, de surcroît, démotiver les jeunes par ce type de disposition. L'apprentissage - école plus entreprise - doit rester attractif et ne pas rebuter les jeunes candidats potentiels.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement partage le souci de M. Perruchot de développer les formations en alternance. Dans cet esprit, il a décidé d'augmenter fortement les crédits destinés à l'apprentissage. Dans le budget de 2003, que l'Assemblée examinera dans quelques jours, le nombre des contrats d'apprentissage augmente de manière importante.
    Le Gouvernement a par ailleurs appelé les partenaires sociaux, qui semblent décidés à s'engager dans cette voie, à une grande négociation sur la formation professionnelle. Il ne me semble pas souhaitable, à l'ouverture de cette négociation, de légiférer sur un point de détail, si j'ose dire, même s'il a son importance. Il est préférable de laisser la négociation s'engager avant d'apporter, le cas échéant, un certain nombre de modifications à l'organisation de la filière de l'apprentissage, à laquelle nous sommes très attachés, que d'autres pays européens ont développée plus que nous et avec grand succès et qui est une véritable priorité pour le Gouvernement.
    Je souhaite donc que M. Perruchot entende mes arguments et retire l'amendement dans l'attente de la négociation et les conséquences législatives qui en seront immanquablement tirées.
    M. Gaëtan Gorce. Pourquoi ne tenez-vous pas le même raisonnement pour les astreintes ?
    Mme Muguette Jacquaint. C'est curieux !
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.
    M. Jean-Pierre Soisson. Nous discutons d'un amendement que j'aurais volontiers voté. Il me paraît aller dans le sens d'un réel développement de l'apprentissage, qui est, je le rappelle à tous, une compétence pleine et entière des régions. Mais je suis sensible à l'argument du ministre : la négociation sur la formation professionnelle va s'engager et la formation professionnelle est le « jardin des partenaires sociaux », expression que j'ai utilisée il y a une quinzaine d'années.
    Laissons donc s'engager la négociation et nous verrons ensuite.
    Mme la présidente. La parole est à M. Alain Néri.
    M. Alain Néri. Monsieur le ministre, nous ne pourrons pas voter l'amendement, mais nous sommes un peu étonnés par votre argumentation.
    Vous nous dites votre attachement à l'apprentissage, dont nous reconnaissons la valeur, parce qu'à l'apprentissage est liée la formation. Or nous sommes très attachés à la formation. Je comprends mal qu'aujourd'hui vous veniez défendre l'apprentissage et la formation après avoir taillé en pièces le même apprentissage et la même formation avec les contrats-jeunes que vous voulez imposer par votre loi, laquelle vise en réalité à faire en sorte que les jeunes sans formation ne puissent pas recevoir de formation.
    Vous livrez donc au patronat des jeunes sans formation, ce qui est contraire à ce que vous nous dites sur l'apprentissage.
    M. Guy Geoffroy. C'est une contre-vérité !
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Jusqu'à présent le débat a été sérieux.
    Entendre dire, alors que nous augmentons le nombre des contrats d'apprentissage, que le contrat sans charges que nous mettrons en place va tailler en pièces l'apprentissage est une telle énormité que je ne peux m'empêcher de réagir. Le contrat d'apprentissage est pour nous fondamental.
    Certains jeunes ne peuvent pas accéder aux contrats d'apprentissage en raison de leur niveau, de leur formation, de leur histoire personnelle ou de leurs difficultés. Le contrat sans charges que nous prévoyons est un moyen de les réinsérer dans la vie professionnelle avec, je vous le rappelle, un contrat à durée indéterminée à la clé.
    Tout cela n'a rien à voir avec la caricature qui vient d'être faite. (« Très juste ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. Compte tenu des remarques du ministre et de son engagement à prendre en considération les problèmes de l'apprentissage, je retire l'amendement. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la présidente. L'amendement n° 173 est retiré.
    M. Morin et M. Perruchot ont présenté un amendement, n° 172, ainsi libellé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « Le deuxième alinéa de l'article L. 212-13 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : "Des dérogations, justifiées par les conditions inhérentes à l'activité, peuvent également être prévues par convention ou accord de branche. »
    La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. Cet amendement tend à permettre des dérogations, justifiées par des conditions d'emploi, par convention ou accord de branche.
    Il répond aux mêmes préoccupations que l'amendement précédent.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission a rejeté l'amendement pour les mêmes raisons que celles que j'ai précédemment exposées.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement a le même avis que la commission.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 172.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Morange, rapporteur, a présenté un amendement, n° 101, ainsi rédigé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « A l'article 26 de la loi du 13 décembre 1926 portant code du travail maritime, les mots : "des I, II sont remplacés par les mots : "du I, et les mots : "du III sont remplacés par les mots : "du II. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Pierre Morange, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de cohérence avec les dispositions du code du travail maritime pour ce qui concerne les règles relatives aux heures supplémentaires.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 101.
    (L'amendement est adopté.)

Article 3

    Mme la présidente. « Art. 3. - La loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail est ainsi modifiée :
    « Au V de l'article 5 :
    « I. - L'alinéa actuel est précédé de "1°.
    « II. - Il est ajouté un 2° ainsi rédigé :
    « 2° Dans l'attente de l'accord de branche étendu mentionné au I de l'article L. 212-5 du code du travail ou au I de l'article L. 713-6 du code rural, le taux de majoration des quatre premières heures supplémentaires applicables aux entreprises de vingt salariés au plus reste fixé à 10 % au plus tard jusqu'au 31 décembre 2005. »
    Je suis saisie de deux amendements identiques.
    L'amendement n° 60 est présenté par M. Gremetz, Mme Jacquaint, M. Dutoit, M. Desallangre et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ; l'amendement n° 147 par M. Gorce, M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 3. »
    La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir l'amendement n° 60.
    Mme Muguette Jacquaint. L'article 3 proroge une disparition sur laquelle nous avions émis des réserves.
    S'il faut penser à la bonne santé économique des petites et moyennes entreprises, cela ne doit pas se faire au détriment des salariés. Les deux parties sont à prendre en compte.
    L'article 3 proroge jusqu'au 31 décembre 2005 la majoration des quatre premières heures supplémentaires plafonnée à 10 %. Quand elle a été votée, cette dispositin tendait à permettre aux PME de créer les conditions d'un bon passage aux 35 heures. Or celles-ci ne l'ont toujours pas réalisé et n'y sont pas encouragées, frustrant ainsi plusieurs milliers de salariés d'une réduction temporaire de leur activité.
    Une fois de plus, on prive les salariés d'une meilleure rémunération de leurs heures supplémentaires, avec de lourdes conséquences sur la consommation : moins de salaire, c'est aussi moins de moyens pour consommer. Lorsque les salariés peuvent consommer davantage, c'est bénéfique à la fois pour la croissance et pour l'emploi.
    Une nouvelle fois, vous touchez au pouvoir d'achat des salariés. Vous usez là d'un moyen supplémentaire pour éloigner les salariés des entreprises concernées de la RTT qu'ils sont en droit d'obtenir pour toutes les raisons que nous avons exposées.
    Voilà pourquoi nous proposons de supprimer l'article 3.
    Mme la présidente. La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour soutenir l'amendement n° 147.
    M. Gaëtan Gorce. La mesure prévue à l'article 3 est manifestement l'une de celles qui ont échappé à la concertation. Elle tend, au-delà de la période transitoire qui avait été initialement prévue, à proroger jusqu'au 31 décembre 2005 le dispositif que nous avions voté.
    On nous rétorquera que nous avions prévu un dispositif spécifique qui devait s'appliquer aux entreprises de plus de vingt salariés pour la première année de passage aux 35 heures. Est-il utile d'argumenter en rappelant, comme nous l'avons fait la semaine dernière, que la loi relative à la réduction du temps de travail était destinée à être mise en oeuvre progressivement et qu'elle n'a jamais fonctionné comme une loi « couperet ». Elle devait s'appuyer sur la négociation.
    Pour faciliter l'adaptation à la réduction du temps de travail, nous avions prévu une période transitoire qui prenait en compte à la fois le mode de décompte des heures supplémentaires, leur seuil de déclenchement et leur rémunération, limitée à une majoration de 10 % pour toutes les entreprises mais différemment, selon la date à laquelle elles seraient amenées à passer aux 35 heures, en 2000 ou en 2002, selon leur taille.
    Le dispositif que nous propose le Gouvernement est totalement différent puisqu'il tend à pérenniser le système, ce qui signifie, au moins pour trois ou quatre ans, une moindre rémunération des salariés des entreprises de moins de vingt salariés pour les heures supplémentaires qu'ils seront amenés à faire.
    Cette moindre rémunération est d'autant moins acceptable que nombre des salariés concernés - au moins la moitié d'entre eux - ne passeront jamais aux 35 heures. Autrement dit, la majoration de 10 % sera probablement la règle commune. On leur explique qu'ils pourront travailler plus, en réalité travailler autant. Mais ils travailleront plus en ce sens qu'ils ne bénéficieront pas de la réduction du temps de travail. Et pas pour gagner plus, contrairement à ce qui nous est dit, mais pour gagner les 10 % des quatre premières heures supplémentaires pendant plus de trois ans, soit une augmentation de leur salaire de l'ordre de 1 %. Nous sommes très loin des affirmations qui sont faites sur le sujet !
    Nous condamnons le principe et nous condamnons la méthode.
    Nous condamnons aussi le fait que l'on inscrive dans la loi un système à deux vitesses pour les petites entreprises, d'une part, et pour les grandes, d'autre part. Vous faites désormais la règle d'une mesure que nous avions adoptée à titre provisoire. Il y aura par conséquent les entreprises à 35 heures et les autres. Il y aura surtout le petites entreprises et les grandes, avec tous les problèmes qui se poseront concernant le recrutement, l'attractivité, le fonctionnement, l'égalité au regard de la législation et la capacité de développement et d'innovation.
    Un auteur qui n'est pas spécialisé dans des propos révolutionnaires, ni même particulièrement marqué à gauche, déclarait dans un journal économique qui n'est pas non plus spécialement marqué à gauche qu'il s'agit d'un mauvais cadeau fait aux petites entreprises, qui sont souvent des structures à partir desquelles se développe l'innovation et le développement économique. Ce sont ces entreprises qui seront pénalisées dans leur recrutement par ce type de dispositif.
    On pénalise donc les entreprises, on pénalise les salariés, on pénalise la négociation sociale. Autant de raisons de supprimer l'article 3.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission a rejeté ces deux amendements.
    L'article 3 permet de prolonger pendant trois ans, jusqu'au 31 décembre 2005, la période d'adaptation pour les petites et moyennes entreprises, avec un taux de majoration des quatre premières heures supplémentaires maintenu à 10 %.
    Il faut reconnaître que M. Maxime Gremetz, Mme Muguette Jacquaint et leurs amis sont tout à fait constants dans leurs propositions, puisqu'ils avaient déjà défendu le même point de vue lors de la discussion de la loi Aubry. Cela nous permet d'appeler nos collègues de l'opposition à un peu plus de modération et d'humilité, sans faire de procès d'intention. Certes, ils restent très logiquement opposés à tout dispositif de ce type, mais il ne faut pas virtualiser la vie économique ni celle des salariés, et c'est pourquoi il nous est proposé de prolonger la période d'adaptation pour les PME.
    J'ajoute que l'article 3 ne vise en aucun cas à pérenniser le dispositif d'aide aux PME puisque, dès le 1er janvier 2006, les taux légaux s'appliqueront, sauf si un accord de branche en a prévu d'autres.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. L'article 3 est le résultat de la concertation que nous avons organisée. Et une concertation, monsieur Gorce, cela se fait avec l'ensemble des partenaires sociaux, avec les représentants des organisations syndicales et avec ceux du patronat, notamment des petites et moyennes entreprises.
    Le dialogue que nous avons eu avec les partenaires sociaux nous a conduits à proposer de proroger une disposition qui ne devait pas être aussi mauvaise que cela puisque la majorité d'alors l'avait elle-même imaginée pour permettre aux petites et moyennes entreprises de faire face aux difficultés insurmontables que la loi sur les 35 heures ferait peser sur elles.
    Il est faux de dire que la mesure placera définitivement les petites et moyennes entreprises dans une situation différente. Durant une période d'adaptation, il appartiendra aux partenaires sociaux d'ouvrir les négociations qui s'imposent pour faire évoluer la situation dans les PME.
    Ainsi que je l'ai dit à plusieurs reprises, c'est le meilleur moyen de faire converger progressivement l'organisation du travail et les conditions du travail dans les différentes entreprises. Ce n'est pas en imposant des règles qui menacent la viabilité de certaines petites entreprises que l'on servira l'emploi et les salariés, mais c'est en donnant à ces entreprises plus de liberté. Et c'est bien ce que nous faisons. C'est pourquoi je demande à l'Assemblée de ne pas supprimer l'article 3.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.
    M. Jean-Pierre Soisson. Comment pouvez-vous, monsieur Gorce, justifier votre argumentation ?
    La loi de janvier 2000 a prévu un délai d'adaptation d'un an. Nous constatons que ce délai a été insuffisant notamment pour les PME. Le projet de loi prévoit de prolonger le délai jusqu'au 31 décembre 2005, tout en demeurant dans le cadre juridique défini par la loi de janvier 2000. Il n'est nullement envisagé de « pérenniser » la situation.
    Il n'y a pas de révolution, mais simplement un allongement du délai pour répondre aux besoins des PME.
    J'ajoute que, lors de la campagne électorale, toutes les PME nous ont demandé un tel assouplissement. Mais le dispositif proposé ne va sans doute pas aussi loin qu'elles ne le voudraient.
    Mme Muguette Jacquaint. Les PME ne demandent pas que cela, monsieur Soisson !
    Mme la présidente. La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Je prends acte, monsieur Soisson, qu'il ne s'agit pas d'une « révolution » concernant la partie droite de l'hémicycle : le mot « réaction » aurait suffi, si je puis me permettre cette aimable provocation ! (Sourires.)
    Le mouvement de négociation dans les petites entreprises ne s'est pas interrompu. Les chiffres des six, sept et huit premiers mois laissent au contraire percevoir une augmentation constante. Autrement dit, la réduction du temps de travail n'est pas si insurmontable que cela pour un grand nombre de petites entreprises représentant près de la moitié des salariés du secteur.
    Que l'on ne dise pas que la négociation et le passage aux 35 heures sont impossibles !
    Il est intéressant de rapprocher le dispositif proposé de celui que nous examinerons à l'article 6 et qui supprime le lien entre les allégements de cotisations patronales et la négociation. Il est clair qu'une entreprise qui sera restée aux 39 heures, qui pourra payer avec une majoration de 10 % les quatre premières heures supplémentaires représentant la différence avec la durée légale et qui bénéficiera d'allégements sans être amenée à négocier la réduction du temps de travail n'aura pas d'intérêt particulier à passer aux 35 heures. Sans doute certaines le feront-elles et le mouvement pourra-t-il réellement s'opérer, mais il s'étendra sur une période extrêmement longue.
    Je ne dis pas que vous « pérennisez » le dispositif initialement prévu, ni donc que nous ne verrons jamais les 35 heures dans les petites entreprises, ce que vous n'osez d'ailleurs pas prétendre. Mais, et c'est la preuve que les 35 heures ne sont pas aussi mauvaises que cela, le mouvement est engagé. Nous pouvions espérer atteindre notre objectif dès la fin de l'année prochaine, comme le prévoyait la loi. A l'évidence, cet objectif est repoussé aux calendes grecques, à moins que ce ne soit aux calendes bourguignonnes !
    Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 60 et 147.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    Mme la présidente. M. Morange, rapporteur, a présenté un amendement, n° 103, ainsi libellé :
    « Substituer aux quatre premiers alinéas de l'article 3 l'alinéa suivant :
    « Le V de l'article 5 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail est complété par un 2° ainsi rédigé : »
        La parole est à M. le rapporteur.
    M. Pierre Morange, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 103.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. M. Gorce, M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 148, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le dernier alinéa du II de l'article 3 :
    « 2° Pendant la première année civile au cours de laquelle la durée hebdomadaire est fixée à trente-cinq heures, chacune des quatres premières heures supplémentaires effectuées donne lieu à une bonification de 10 % donnant lieu soit à l'attribution d'un repos, soit au versement d'une majoration de salaire équivalente. »
    La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Cet amendement est défendu.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement, qui comporte sans doute une erreur de rédaction. En effet, la première année civile du passage aux 35 heures étant l'année 2002 pour les PME, quel est l'intérêt d'imaginer un dispositif qui s'éteindrait de toute façon fin 2002 ?
    De surcroît, l'amendement poursuit la logique de la loi Aubry qui privilégiait systématiquement le repos au lieu de l'argent. Or, les salariés préfèrent parfois augmenter leur pouvoir d'achat. Pourquoi leur retirer cette possibilité ? On peut concevoir la nécessité de prendre un repos dès la trente-sixième heure, mais elle n'est pas forcément liée à des considérations relatives à la santé des salariés.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.
    Mme la présidente. La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Je suis ravi d'entendre les explications du rapporteur, mais je vous ferai remarquer que ce n'est pas toujours l'opposition qui prolonge la discussion !
    Cela dit, l'intervention de M. le rapporteur a été particulièrement intéressante, car il a fait référence à Mme Aubry. Je le remercie de me donner ainsi l'occasion de rendre hommage au travail qui a été le sien dans cet hémicycle (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française) à l'occasion des différents textes dont nous avons débattu. Et puisque M. Accoyer nous a expliqué, il y a quelques jours, que nous mettions en cause le repos de nos collègues de la majorité, je vous rappelle que le Gouvernement d'alors s'était astreint ici à des semaines de discussion et que Mme Aubry avait accepté le débat sur de nombreux sujets. Je remercie donc encore une fois M. le rapporteur de m'avoir donné l'occasion de rendre un hommage bien mérité à la maire de Lille, ancien ministre de l'emploi et de la solidarité, qui a fort justement attaché son nom à ces lois. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 148.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Gorce, M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 149, ainsi libellé :
    « Compléter l'article 3 par le paragraphe suivant :
    « III. - Il est ajouté un 3° ainsi rédigé :
    « 3° A titre transitoire, dans les entreprises et unités économiques et sociales de vingt salariés et moins, le contingent annuel d'heures supplémentaires est fixé à 180 heures en 2002 et 170 heures en 2003 pour les ouvriers, employés, agents de maîtrise et cadres mentionnés à l'article L. 212-15-2 et L. 212-15-3 qui n'ont pas signé de convention individuelle de forfait.
    « Pour les entreprises de vingt salariés au plus pour lesquelles la durée légale du travail est fixée à trente-cinq heures à compter du 1er janvier 2002, le seuil à partir duquel sont prises en compte les heures effectuées pour le calcul du contingent est fixé à trente-sept heures pour l'année 2002 et à trente-six heures pour l'année 2003. »
    La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Cet amendement est défendu.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 149.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 3, modifié par l'amendement n° 103.
    (L'article 3, ainsi modifié, est adopté.)

Article 4

    Mme la présidente. « Art. 4. - Le code rural est ainsi modifié :
    « I. - A l'article L. 713-6 :
    « 1° Les I et II sont remplacés par le I suivant :
    « I. - Les heures supplémentaires donnent lieu à une majoration de salaire dont le taux est fixé par un accord de branche étendu. Ce taux ne peut être inférieur à 10 %. A défaut d'accord, chacune des huit premières heures supplémentaires donne lieu à une majoration de 25 %, et les heures suivantes à une majoration de 50 %. »
    « 2° Le III devient le II.
    « II. - Au premier alinéa de l'article L. 713-7, les mots : "au II sont remplacés par les mots : "au I.
    « III. - A l'article L. 713-9 :
    « 1° Au deuxième alinéa, les mots : "de plus de dix salariés sont remplacés par les mots : "de plus de vingt salariés.
    « 2° Le troisième alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :
    « Dans les établissements entrant dans le champ d'application du 6° de l'article L. 722-20 qui n'ont pas une activité de production agricole, les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent conventionnel fixé selon les modalités prévues au deuxième alinéa de l'article L. 713-11 lorsqu'il existe, ou, à défaut, du contingent fixé par le décret prévu au premier alinéa de l'article L. 713-11, ouvrent droit à un repos compensateur obligatoire dont la durée est égale à 50 % de ces heures supplémentaires, pour les entreprises de vingt salariés au plus, et à 100 % pour les entreprises de plus de vingt salariés. »
    « IV. - A l'article L. 713-14 :
    « 1° Dans la première phrase, à la suite des mots : "n'excède pas, la fin de la phrase est supprimée et remplacée par les mots : "un plafond de 1 600 heures ;
    « 2° La deuxième phrase est remplacée par les dispositions suivantes :
    « La convention ou l'accord peut fixer un plafond inférieur. »
    « V. - Au troisième alinéa de l'article L. 713-15 :
    « 1° Les mots : "la durée moyenne annuelle calculée sur la base de la durée légale selon la règle définie au premier alinéa et, en tout état de cause, de... sont supprimés ;
    « 2° L'alinéa est complété par les mots : "ou d'un plafond inférieur fixé par la convention ou l'accord. »
    Je suis saisie de deux amendements identiques.

    L'amendement n° 61 est présenté par M. Gremetz, Mme Jacquaint, MM. Dutoit, Desallangre et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ; l'amendement n° 150 par M. Gorce, M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 4. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz, pour soutenir l'amendement n° 61.
    M. Maxime Gremetz. L'article 4 vise à introduire, dans le code rural, les dispositions régressives, socialement anti-économiques et contraires à l'intérêt des salariés et du développement de l'emploi qui figurent à l'article 2 de ce projet. Ces dispositions remettront en cause la RTT des salariés de l'agriculture et aggraveront la flexibilité de leurs conditions de travail. Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons de supprimer l'article 4.
    Mme la présidente. La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour soutenir l'amendement n° 150.
    M. Gaëtan Gorce. Il est défendu.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pierre Morange, rapporteur. L'article 4 vise à mettre le code rural en cohérence avec le code du travail s'agissant des nouvelles dispositions introduites par le projet de loi. Cela dit, il est logique que M. Gremetz, qui s'oppose à toutes les dispositions contenues dans l'article 2, poursuive dans cet état d'esprit. Le Gouvernement a tenu à harmoniser le code du travail et le code rural. La commission s'est donc très logiquement opposée à ces amendements.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis que la commission.
    Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 61 et 150.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    Mme la présidente. L'amendement n° 10 corrigé de Mme Billard n'est pas défendu.
    Je mets aux voix l'article 4.
    (L'article 4 est adopté.)
    Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

7

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Ce soir, à vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de la discussion du projet de loi, n° 190, relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi :
    M. Pierre Morange, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport n° 231).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures vingt-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexes au procès-verbal
de la 1re séance
du mercredi 9 octobre 2002
SCRUTIN (n° 23)


sur l'amendement n° 44 de M. Gremetz à l'article 2 du projet de loi relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi (limitation de la durée maximum du travail des cadres).

Nombre de votants

124


Nombre de suffrages exprimés

115


Majorité absolue

58


Pour l'adoption

4


Contre

111

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe Union pour la majorité présidentielle (365) :
    Contre : 109 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (142) :
    Abstentions : 9 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : Mme Paulette Guinchard-Kunstler (présidente de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (28) :
    Contre : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (19).

SCRUTIN (n° 24)


sur l'amendement n° 229 rectifié de M. Morange après l'article 2 du projet de loi relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi (période d'astreinte).

Nombre de votants

92


Nombre de suffrages exprimés

92


Majorité absolue

47


Pour l'adoption

75


Contre

17

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe Union pour la majorité présidentielle (365) :
    Pour : 71 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 2. - Mme Béatrice Pavy et M. Bernard Perrut.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (142) :
    Contre : 11 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : Mme Paulette Guinchard-Kunstler (présidente de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (28) :
    Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Contre : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (19).