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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU VENDREDI 11 OCTOBRE 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du jeudi 10 octobre 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT

1.  Prélèvements obligatoires. - Déclaration du Gouvernement et débat sur cette déclaration «...».
M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
MM.
Nicolas Perruchot,
Jean-Pierre Brard,
Philippe Auberger,
Didier Migaud.
M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances.
M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances.
M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour les recettes et l'équilibre général.
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles.
MM.
Jérôme Chartier,
Michel Vaxès,
Augustin Bonrepaux,
Olivier Dassault,
Mme
Marie-Anne Montchamp,
MM.
Pierre Hériaud,
Dominique Tian.
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille.
Clôture du débat.
2.  Décision du Conseil constitutionnel «...».
3.  Administrateurs judiciaires. - Communication relative à la désignation d'une commission mixte paritaire «...».
4.  Dépôt d'un rapport «...».
5.  Dépôt d'avis «...».
6.  Dépôt de projets de loi adoptés par le Sénat «...».
7.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

Déclaration du Gouvernement
et débat sur cette déclaration

    M. le président. L'ordre du jour appelle la déclaration du Gouvernement sur les prélèvements obligatoires et le débat sur cette déclaration, en application de l'article 52 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.
    La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, pour la première fois, le Gouvernement vous soumet un rapport sur les prélèvements obligatoires et sur leur évolution. Ce rapport a été déposé sur le bureau de votre assemblée le 1er octobre, conformément à l'article 52 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.
    Rappelons les principales dispositions de ce texte. Le rapport sur les prélèvements obligatoires est, tout d'abord, présenté « en vue de l'examen et du vote du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale ». L'objectif est donc d'offrir au Parlement une vision consolidée des prélèvements de l'ensemble des administrations publiques, notamment de l'Etat et des organismes sociaux. Cette vision consolidée doit être apportée avant que ne commence le débat sur le projet de loi de finances et sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Je pense que vous conviendrez avec moi que le Gouvernement a été fidèle à la fois à la lettre et à l'esprit de la loi organique relative aux lois de finances, puisqu'il est représenté ici à la fois par le ministre de l'économie et des finances et par le ministre de la santé, qui interviendra immédiatement après moi.
    Ensuite, le rapport doit comporter l'évaluation financière, pour l'année en cours et pour les deux années suivantes, de chacune des dispositions législatives ou réglementaires envisagées par le Gouvernement. Le rapport que nous vous avons remis répond, là encore, aux voeux du législateur organique.
    Enfin, l'article 52 de la loi organique relative aux lois de finances précise que « ce rapport peut faire l'objet d'un débat à l'Assemblée nationale et au Sénat ». Votre Conférence des présidents ayant souhaité qu'un tel débat soit organisé, nous avons naturellement répondu de manière positive à sa demande et venons vous présenter le rapport en séance publique, après l'avoir soumis avant-hier à vos commissions des finances et des affaires sociales réunies. J'ajoute que j'ai pris connaissance avec le plus grand intérêt du rapport d'information de M. Gilles Carrez, qui complète de manière très utile notre propre rapport.
    Je vous présenterai tout d'abord une vue d'ensemble des prélèvements obligatoires et de leur évolution, en mettant l'accent sur l'incidence des mesures du PLF 2003. Jean-François Mattei vous exposera ensuite l'impact des mesures du PLFSS 2003 et traitera des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale.
    Je commencerai par quelques rappels sur la notion de prélèvements obligatoires, qui n'est pas une notion juridique, comme peuvent l'être l'impôt ou les taxes parafiscales, mais une notion économique.
    Tels qu'ils sont définis par l'INSEE en application du règlement de 1995 sur le système européen de comptabilité, les prélèvements obligatoires regroupent « les impôts et les cotisations sociales versées de manière non volontaire au profit des administrations publiques ».
    M. Jean-Pierre Brard. Nous ne sommes pas venus pour rien ! (Sourires.)
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le champ des prélèvements obligatoires est donc à la fois plus vaste et plus restreint que celui couvert par le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Relèvent notamment des prélèvements obligatoires sans relever du PLF ou du PLFSS les impôts locaux ou les cotisations Unedic.
    En sens inverse, certaines taxes autorisées en loi de finances ne sont pas classées parmi les prélèvements obligatoires : je pense à la plupart des taxes parafiscales, et en particulier à la redevance audiovisuelle.
    Comme vous le savez, les taxes parafiscales auront toutes disparu au 1er janvier 2004, en application de la loi organique relative aux lois de finances ; nous devrons donc être vigilants lorsque nous effectuerons des comparaisons dans la suite de cette législature entre la situation actuelle et la situation future des prélèvements obligatoires. En effet, certaines taxes parafiscales seront très probablement supprimées ; d'autres, en revanche, seront transformées en taxes fiscales et, donc, intégreront le champ des prélèvements obligatoires.
    Ainsi définis, les prélèvements obligatoires représentaient en 2001 près de 660 milliards d'euros, c'est-à-dire 45 % du PIB.
    L'étude de leur répartition révèle que les organismes sociaux en sont les premiers bénéficiaires, avec près de la moitié des prélèvements obligatoires : 48 % exactement. Je rappelle que le champ des administrations sociales dépasse celui du PLFSS, puisqu'il inclut en outre les régimes d'assurance chômage, les régimes de retraite complémentaire, le fonds couverture maladie universelle et le fonds pour l'allocation personnelle d'autonomie.
    Les prélèvements obligatoires de l'Etat et des organismes centraux occupent moins de 40 % de l'ensemble. Ces organismes centraux, que l'on dénomme les « ODAC » en comptabilité nationale, sont divers ; il s'agit, pour citer les principaux, des structures de défaisance, de la caisse d'amortissement de la dette sociale, du fonds de réserve des retraites, des offices agricoles et de l'ensemble des établissements publics administratifs de l'Etat.
    Les collectivités locales représentent quant à elles 11 % du total, et l'Union européenne 1,4 %.
    Comparé aux principaux pays de l'OCDE, le taux de prélèvements en France apparaît parmi les plus élevés. Cette situation confirme s'il en était besoin le bien-fondé de la politique de baisse des impôts et des charges menée par le Gouvernement.
    Toutefois, cette comparaison globale doit aussi être relativisée, pour deux motifs.
    En premier lieu, les écarts de taux de prélèvements obligatoires entre les pays reflètent souvent des choix différents en matière de protection sociale, qu'il s'agisse du mode de financement du système de soins ou de la nature des régimes de retraite complémentaire : répartition ou capitalisation.
    En second lieu, le taux de prélèvement global ne donne pas d'indication sur la structure des prélèvements, en particulier la part qui pèse sur le travail, le capital et la consommation. Or ceci est un élément essentiel de la compétitivité et de l'attractivité d'un pays. En France, la tendance des deux dernières décennies a été de taxer surtout le travail, ce qui n'a bien entendu pas été sans conséquences sur l'évolution du taux de chômage et sur la compétitivité de notre économie.
    Au cours de la législature précédente, le taux de prélèvements obligatoires a eu tendance à augmenter, du fait de la dynamique exceptionnelle des recettes fiscales : de 1998 à 2001, celles-ci ont progressé spontanément deux fois plus vite que l'activité économique.
    Certes, ces plus-values conjoncturelles ont été utilisées pour financer les 35 heures et les baisses d'impôts. Pourtant, le taux de prélèvement obligatoires n'a pas diminué entre 1997 et 2002. Il était de 44,8 % en 1997, avant les hausses d'impôts décidées dès son arrivée par le précédent gouvernement ; en 2002, avant que nous ne procédions à la baisse de 5 % de l'impôt sur le revenu, il s'établissait à un niveau rigoureusement identique. Ainsi, non seulement la pression fiscale n'a pas diminué sous la législature précédente, mais, de surcroît, les plus-values conjoncturelles ont été affectées à des dépenses pérennes, notamment le financement des 35 heures, au lieu de servir à la réduction du déficit public, donc de la dette.
    M. Henri Emmanuelli. Alors là !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. A l'inverse, le taux de prélèvements obligatoire devrait diminuer de 0,7 point de PIB sur la période 2002-2003, et passer ainsi de 45 % en 2001 à 44,3 % en 2003. Cette évolution résultera de trois facteurs distincts.
    En premier lieu, le taux de prélèvements obligatoires diminuera spontanément en 2003 de 0,2 point de PIB, car le produit pour 2003 de l'impôt sur les sociétés est assis sur les résultats de 2002.
    En second lieu, les mesures prévues en loi de finances initiale et en loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 par le gouvernement précédent contribuent à faire baisser le taux de prélèvements obligatoires avec un effet global de moins 0,2 point de PIB.
    En troisième lieu, les mesures nouvelles du Gouvernement contribuent à baisser ce taux de 0,4 point de PIB sur 2002-2003. Sur ce total, près de la moitié est liée à la baisse de 5 % de l'impôt sur le revenu votée en collectif d'été, l'autre moitié provenant des baisses d'impôts et de charges prévues pour 2003, qui s'élèvent, comme vous le savez, à 3 milliards d'euros.
    Je souligne que les allégements de charges liés aux contrats jeunes ne sont pas comptabilisés parmi les baisses de prélèvements obligatoires, pour des motifs conventionnels, bien que ce dispositif allège bel et bien les charges des entreprises.
    Rappelons que l'intégralité des baisses d'impôts et de charges prévues en PLF et en PLFSS 2003 seront financées ou compensées par le budget de l'Etat, pour un coût global de 3,9 milliards d'euros.
    Sur ce total, 1 milliard d'euros correspond à la baisse de 1 % de l'impôt sur le revenu, à l'amélioration de la prime pour l'emploi pour les travailleurs à temps partiel, à la majoration de la réduction de l'impôt sur le revenu pour emploi à domicile, à la donation facilitée de grands-parents à petits-enfants, et, en sens inverse, à la première étape de la réforme du régime des distributions entre sociétés.
    Par ailleurs, 1,9 milliard d'euros correspond à la compensation aux collectivités locales de la suppression de la part salaire de la taxe professionnelle, ainsi qu'à la réduction de la taxe professionnelle sur les bénéfices non commerciaux.
    Enfin, 0,7 milliard d'euros de taxe sur les conventions d'assurance est transféré au FOREC afin de compenser l'allégement des charges décidé dans le cadre de la convergence des SMIC ; Jean-François Mattei reviendra dans un instant sur ce transfert.
    Les allégements de charges en faveur des jeunes sont eux aussi compensés par l'Etat sous forme de subvention du budget général, à hauteur de 250 millions d'euros en 2003.
    L'impact net des baisses d'impôts et charges sur les prélèvements obligatoires en 2003 représente 2,9 milliards d'euros. Ce chiffre intègre l'augmentation des droits sur le tabac pour 0,7 milliard d'euros mais ne tient pas compte des allégements contrats jeunes, que l'INSEE ne devrait pas classer parmi les baisses de prélèvements obligatoires.
    Ces baisses de prélèvements obligatoires se répartissent sur l'Etat et les collectivités locales, le transfert par l'Etat au FOREC de la taxe sur les conventions d'assurance et l'augmentation des droits sur le tabac étant considérés comme une hausse des prélèvements sociaux par les comptables de l'INSEE. Ces baisses d'impôts et de charges en 2003 sont ciblées en faveur de l'emploi et du dynamisme de nos entreprises.
    Les ménages bénéficieront en effet de plus de 1 milliard d'euros de baisses d'impôts.
    M. Henri Emmanuelli. Certains ménages !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Les entreprises bénéficieront pour leur part de 2,7 milliards d'euros de baisses des prélèvements obligatoires, de 3 milliards d'euros si l'on inclut les allégements liés aux contrats jeunes.
    Au total, cela représente plus de 4 milliards d'euros en faveur de l'emploi et de l'initiative entrepreneuriale.
    Telles sont, mesdames, messieurs les députés, les grandes lignes de la politique suivie par le Gouvernement en matière de prélèvements obligatoires. Mon collègue Mattei va maintenant vous exposer la déclinaison de cette politique en matière sociale. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Henri Emmanuelli. C'était un peu sommaire et caricatural !
    M. le président. Monsieur Emmanuelli, M. Migaud s'exprimera au nom de votre groupe dans quelques instants !
    M. Henri Emmanuelli. Si j'ai envie de faire une remarque, monsieur le président, je la fais !
    M. le président. Peut-être, mais c'est contraire au règlement !
    La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je suis heureux d'être devant vous aujourd'hui, à la veille de vous présenter le projet de loi de financement de la sécurité sociale, pour ce premier débat sur les prélèvements de la sécurité sociale.
    En effet, comme vous l'a rappelé M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, les prélèvements des administrations de sécurité sociale représentent la moitié des prélèvements obligatoires de ce pays, soit plus d'un cinquième du produit intérieur brut. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne traite pas de la totalité d'entre eux mais d'une partie importante, puisque les produits des régimes de base dépassent 300 milliards d'euros.
    Il est important de noter que cette place prépondérante de la sécurité sociale se retrouve dans tous les pays développés ayant choisi de socialiser les dépenses de santé et de vieillesse. Ainsi, en Allemagne, le niveau des prélèvements obligatoires affectés à la sécurité sociale est le même qu'en France. En Suède, il est même supérieur. En fait, il est en général inférieur dans les pays moins développés ou dans les pays ayant fait le choix de couvrir les grands risques de l'existence - santé et retraite, notamment - par le secteur privé. Ce n'est pas notre choix.
    M. Jean-Pierre Brard. Vous pourriez presque être de gauche !
    M. Henri Emmanuelli. Jusque-là, il est parfait !
    M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Je voudrais d'abord compléter le discours de M. Mer en détaillant les mesures nouvelles prévues en 2003 pour la sécurité sociale. J'évoquerai ensuite les perspectives d'évolution les plus plausibles.
    Le projet de loi de financement de la sécurité sociale contient deux mesures nouvelles en matière de recettes : l'augmentation des droits sur le tabac et les mesures de clarification financière des relations entre l'Etat et la sécurité sociale.
    Les prélèvements obligatoires affectés à la sécurité sociale vont augmenter l'année prochaine. Cette hausse s'explique en fait par l'accroissement des droits sur le tabac. D'ailleurs, l'appellation « prélèvements obligatoires » est erronée s'agissant de ces droits : il s'agit en fait d'une consommation volontaire. Ce sont, certes, des prélèvements obligatoires, mais chacun pourrait s'en dispenser. Il est important de le souligner, d'autant plus que cette consommation volontaire pèse très lourdement sur la santé de nos concitoyens, notamment des jeunes.

    Sur le fond, cette augmentation est motivée d'abord et avant tout par des considérations de santé publique. La santé publique est une priorité importante de ma politique de santé. Nous aurons l'occasion d'en reparler plus en détail prochainement à l'occasion de la présentation de la loi de programmation quinquennale de santé publique. Le développement de la prévention et de la réduction des risques doit permettre non seulement d'améliorer la santé de nos concitoyens, mais aussi de faire des économies.
    La consommation de tabac est la principale cause de mortalité prématurée, c'est-à-dire avant soixante-cinq ans : 60 000 décès, soit 10 % environ des décès, sont dus au tabac, et 3 000 d'entre eux concernent les non-consommateurs, du fait du tabagisme passif. Le tabagisme est aussi le principal responsable des cancers. Les effets du tabagisme passif, longtemps méconnus, justifient de redoubler d'efforts dans la lutte contre le tabac.
    C'est pourquoi le Gouvernement souhaite une réduction de la consommation de tabac. Une des mesures possibles pour y parvenir consiste à augmenter les droits indirects, ce qui induit automatiquement une hausse des prix et donc une moindre consommation. Aussi, l'objectif pour 2003 du Gouvernement est une hausse de 1 milliard d'euros des droits sur le tabac. Cela passe notamment par un fort relèvement des minima de perception, qui sont un des outils les plus efficaces.
    Cette hausse des prélèvements est pleinement justifiée, même s'il est difficile de s'en réjouir. Je préférerais en effet que les consommateurs soient nettement moins nombreux. Le tabagisme coûte cher, non seulement en dépenses de santé, mais surtout en vies humaines. La lutte doit être engagée résolument.
    Une autre priorité du Gouvernement est de clarifier le financement de la sécurité sociale. Les circuits de financements actuels sont complexes, c'est un euphémisme. Ces dernières années, ils ont été utilisés pour faire financer par la sécurité sociale des dépenses qui n'entrent pas dans son champ de compétence, et le financement de la réduction du temps de travail à travers le FOREC en est l'illustration la plus significative.
    Démonter ces mécanismes de financement doit être un objectif prioritaire. Cela aurait pu passer par la suppression du FOREC dès 2003. Toutefois, malgré la détermination du Gouvernement - et ne doutez pas de celle de M. Mer et de la mienne - à rétablir la clarté et la transparence, cela n'a pas été possible étant donné la brièveté des délais de préparation du PLFSS. La complexité des circuits de financement et l'ampleur des montants en jeu sont trop importants.
    En effet, pour rassurer l'ensemble des partenaires sur l'application du principe de la compensation intégrale des allégements de charges, il est indispensable de discuter préalablement avec eux des garanties qui pourraient entourer le démontage de ces mécanismes compliqués et peu cohérents. Par ailleurs, les transferts à effectuer en faveur de la sécurité sociale se chiffrent en milliards d'euros ; ce n'est donc pas une mince affaire.
    Néanmoins, pour marquer l'objectif à long terme de clarification définitive, une première étape sera franchie dès 2003, malgré les contraintes qui pèsent sur les finances publiques et que vous connaissez. Elle comprend trois volets.
    Premièrement, les nouveaux allégements de charges réduiront les cotisations sociales perçues par la sécurité sociale d'environ 1 milliard d'euros. Pour la première fois depuis cinq ans, le Gouvernement s'est engagé à les compenser intégralement vis-à-vis de la sécurité sociale. Un supplément de 700 millions d'euros de taxes sur les conventions d'assurance est donc affecté au FOREC et 300 millions d'euros provenant de la hausse des droits sur le tabac lui seront également attribués. A la suite de cette double opération, les prélèvements obligatoires de la sécurité sociale ne changeront pas.
    Deuxièmement, interviendra une réaffection à la sécurité sociale d'une partie des recettes qui avaient été orientées vers le FOREC. La modification des clés de partage des droits sur le tabac entre le FOREC et la CNAMTS apportera à cette dernière 700 millions d'euros et permettra de revenir à la clé de partage prévalant avant la création du FOREC. La part des droits sur le tabac affectée à l'assurance maladie, qui se sera élevée à 8,84 % en 2002, atteindra 15,2 % en 2003, soit un niveau très proche de son niveau antérieur.
    Troisièmement, enfin, la première moitié de la dette du FOREC au titre de 2000 sera remboursée. Cela représentera 1,2 milliard d'euros.
    A la suite de ces opérations de clarification, la situation se sera améliorée dans le sens d'une plus grande transparence. En 2003, la sécurité sociale récupérera ainsi 2 milliards d'euros de son effort de financement de la réduction du temps de travail.
    Quelles sont les perspectives à moyen terme ?
    Cette clarification doit être replacée dans une réflexion sur l'évolution à moyen terme des prélèvements. Avant d'aborder ce sujet, j'aimerais toutefois revenir sur les évolutions passées.
    Le rapport sur les prélèvements obligatoires montre que le taux des prélèvements affectés à la sécurité sociale a augmenté ces dernières années. Compte tenu des nombreuses modifications des circuits de financement et du partage des responsabilités entre l'Etat et la sécurité sociale, l'évolution de cet indicateur n'a toutefois qu'une signification très limitée. Un petit exemple peut illustrer cela : la création de la CMU s'est accompagnée d'un transfert des dépenses du fait du financement de la CMU de base. Ce transfert de dépenses a été financé par un transfert de recettes, ce qui a en fait accru le taux des prélèvements affectés à la sécurité sociale sans qu'il y ait eu une hausse globale. Les allégements de charges ont eu aussi un impact significatif sur ces partages de recettes.
    De ce fait, il est difficile de tirer une conclusion quantitative sur l'évolution passée des prélèvements obligatoires à la charge de la sécurité sociale, car ils procèdent autant d'une évolution structurelle que de mouvements permanents de changements de périmètre et de législation. Cependant, il paraît certain que, à champ constant, les prélèvements au profit de la sécurité sociale ont crû au cours des vingt dernières années.
    Cette évolution est naturellement liée à celle des dépenses, notamment celle des pensions de retraite et des remboursements de l'assurance maladie.
    Ainsi, dans le domaine des retraites, la hausse des dépenses a permis d'améliorer le niveau de vie des retraités. Au cours des trente dernières années, le niveau de vie des retraités a crû fortement pour rejoindre peu à peu celui des actifs : en 1970, un retraité avait un niveau de vie inférieur d'un tiers à celui d'un actif ; aujourd'hui, les niveaux de vie sont comparables, alors que le nombre des retraités a augmenté.
    Dans le domaine des soins, le vieillissement, le développement des techniques, la plus grande attente des patients quant à leur santé constituent des déterminants structurels de cette croissance.
    Ces évolutions doivent être prises en compte dans la réflexion sur l'évolution à venir des prélèvements de la sécurité sociale. Quelles sont donc les perspectives ?
    Dans l'avenir, il ne faut pas attendre une nette inflexion de l'évolution des prélèvements de la sécurité sociale, pour deux raisons principales : d'une part, la croissance des dépenses de santé est un problème structurel qui se pose à l'ensemble des pays développés, où les taux de croissance des dépenses atteignent les mêmes niveaux qu'en France ; d'autre part, les régimes de retraite vont faire face à une véritable explosion du nombre des retraités à partir de 2005-2006.
    Une inflexion nette de l'évolution n'est donc pas très crédible. En revanche, les réformes que nous allons mener sur la sécurité sociale auront un impact significatif à moyen ou à long terme.
    Cela ne remettra pas en cause la politique d'allégement des charges dans laquelle le Gouvernement s'est engagé. L'Etat compensera en effet intégralement les nouveaux allégements de charges à la sécurité sociale. Toutefois, cette réforme ne fera que modifier la structure des recettes de la sécurité sociale, mais non leur niveau.
    Au-delà, une réforme globale du financement est nécessaire, car le mode de financement de notre système repose sur des bases datant de 1946, alors que la société s'est considérablement modifiée depuis. La réforme du financement que nous souhaitons mener aura pour objectif de remettre à plat les circuits de financement, d'accroître la lisibilité des prélèvements de la sécurité sociale et de responsabiliser les différents acteurs.
    Elle s'appuiera sur la première étape de clarification proposée pour 2003, mais cela pourrait modifier beaucoup plus profondément la structure des recettes de la sécurité sociale. La réforme sera donc progressive.
    Elle nécessitera une large concertation avec les différents partenaires. Elle s'effectuera en cohérence avec le chantier de la nouvelle gouvernance que je lancerai à l'occasion du projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean Le Garrec. Mis à part sa progressivité, quel sera le contenu de la réforme ?
    M. le président. Dans la discussion, la parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je tiens d'abord à remercier le Gouvernement d'avoir organisé ce débat sur les prélèvements obligatoires, car la nouvelle loi organique du 1er août 2001 n'en prévoit, je le rappelle, que la possibilité. Il permet pour la première fois de réunir les discussions sur le projet de loi de finances et sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
    Celles-ci sont liées évidemment, pour nous, parlementaires, mais, surtout, pour les contribuables français, qui attendent un discours clair et crédible. Or, à moins d'être un spécialiste des finances publiques, comment se retrouver dans le labyrinthe des documents budgétaires, en dépit des efforts mis en oeuvre par le Gouvernement et les fonctionnaires du ministère de l'économie et des finances pour nous fournir des informations à la fois synthétiques et exhaustives ? C'est pourquoi je souhaite évoquer devant vous non seulement l'évolution réelle du niveau des prélèvements obligatoires au cours des cinq dernières années, lequel n'a jamais correspondu à l'affichage initial, mais aussi les lacunes persistantes de la présentation comptable du budget, avant d'évoquer les projets du Gouvernement pour 2003.
    Avant toute chose, j'aimerais répondre, au nom du groupe UDF, à la question centrale de ce débat : pourquoi baisser les prélèvements obligatoires ? On nous dit que le développement d'un pays se mesure à la hauteur de son niveau d'imposition.
    M. Jean-Pierre Brard. N'importe quoi !
    M. Nicolas Perruchot. Libéraux, nous pensons, nous, que la France a besoin de liberté et qu'elle étouffe sous une pression fiscale non seulement trop élevée mais structurellement injuste car elle pénalise le travail.
    M. Jean-Pierre Brard. La Suède est-elle un pays sous-développé ?
    M. Nicolas Perruchot. La baisse des prélèvements obligatoires n'est pas un mot d'ordre régressif ; elle est une nécessité pour réduire le chômage et pour établir la compétitivité de notre pays.
    Je veux avant tout faire le point sur le bilan de la gestion socialiste, sur ce que j'appelle cinq années perdues.
    La prévision budgétaire est certes un art difficile, car il ne s'agit pas d'établir la sincérité de comptes clos, comme pour les entreprises, mais d'anticiper l'avenir, lequel est, par nature, toujours incertain. Cependant, il est un seuil à partir duquel l'incertitude affichée se mue en mensonge. Le gouvernement précédent n'a pas résisté à cette tentation en affichant, chaque année, des prévisions irréalistes de baisse en cascade du déficit, des prélèvements obligatoires, des dépenses et de la dette publiques. Elles ont été systématiquement démenties par les faits.
    Or quels sont les faits, mes chers collègues ?
    En 1997, nous avons laissé un taux de prélèvements de 44,8 % du PIB, et on nous a rendu exactement le même, en dépit des promesses et d'une croissance très forte. Chaque année, on nous a promis une baisse d'environ 0,5 point de PIB de ce taux ; en vain ! La part du prélèvement obligatoire dans le PIB s'est maintenue à 45 % de 1999 à 2001, pour retomber à 44,8 % en 2002, au lieu des 44,5 % annoncés.
    Il en a été de même pour la baisse des dépenses : entre le taux affiché et le taux réalisé chaque année, l'écart a été de 1 à 1,5 point de PIB. En fin de course, le taux des dépenses dans le PIB sera passé de 53,9 % en 1997 à 53,8 % en 2002. Nous sommes loin de la promesse de faire descendre les dépenses en dessous de 50 % du PIB.
    En particulier, les objectifs de progression des dépenses sociales ont été largement dépassés : plus de 10 milliards d'euros de dépassement en cinq ans, dont 8,6 milliards pour les dépenses maladie, qui représentent aujourd'hui 19 % du PIB, contre 17 % en 1997. Les dépenses sociales ont ainsi augmenté de 3 % en 1999, de 3,8 % en 2000 et de 4,6 % en 2001.
    Mais plus inquiétant encore est le dérapage des dépenses maladie, qui ont progressé de 4,1 % en 1998, de 2,7 % en 1999, de 6,1 % en 2000, et l'on prévoit plus de 7 % pour 2002. Les écarts auront été de 2 % en moyenne chaque année par rapport aux prévisions.
    Quant à la baisse du déficit, les performances sont ridicules. En 1997, le déficit était de 3 % du PIB. Après cinq années de croissance, on nous le rend à 2,6 %. Piètre réalisation si l'on se souvient qu'entre mars 1993 et 1997, nous avions ramené le déficit de 6,3 % à 3 % du PIB en dépit d'une croissance très faible.
    La dette publique a recommencé à augmenter depuis 2000 pour atteindre 58,4 % du PIB en 2002, alors qu'elle était de 57,3 % en 2000. Pendant ce temps, tous nos partenaires européens ont suivi une dynamique inverse : entre 1998 et 2001, l'Allemagne a enregistré une diminution de sa dette d'un point de PIB, l'Autriche de deux points, la Belgique de douze points, le Danemark de douze points, l'Espagne de sept points, la Finlande de cinq points, la Grèce de cinq points, l'Italie de sept points, l'Irlande de dix-neuf points, le Luxembourg d'un point, les Pays-Bas de quatorze points, le Royaume-Uni de huit points et la Suède de quatorze points. Seul le Portugal a fait pire que nous. Cette progression de la dette est scandaleuse, car elle a servi à financer non pas davantage d'investissements, mais uniquement des dépenses de fonctionnement qui n'engendreront aucun revenu pour les générations futures.
    Quels sont les faits, mes chers collègues ?
    La France porte aujourd'hui la marque de vingt ans de gestion socialiste. Le taux des prélèvements obligatoires dans le PIB n'est pas de 44,8 % en 2002 avant le collectif budgétaire, car, à ce chiffre, il faut ajouter 2,6 % de déficit, 3,9 % de dette publique imputée sur quinze ans et l'on pourrait encore prendre en compte une provision annuelle pour charges de retraites de la fonction publique, pour arriver à un taux d'équilibre à moyen terme, seul chiffre réel, d'au minimum 51,3 % du PIB. En appliquant la même méthode de calcul, l'Allemagne était à 44,3 % du PIB en 2001, il n'y a guère de quoi se réjouir.
    Il est donc urgent de baisser les prélèvements obligatoires et de rétablir la sincérité budgétaire.
    La nouvelle loi organique donne au principe de sincérité une valeur organique, contrôlée par le Conseil constitutionnel. Mais comment soutenir sincèrement que les comptes publics tels qu'ils sont actuellement présentés sont sincères ? Il faut redonner du sens aux mots, si nous ne voulons pas courir le risque de ne plus être crus par nos concitoyens.
    A cet égard, je tiens à féliciter M. le ministre de l'économie et des finances et son ministre du budget, qui se sont engagés à rétablir cette sincérité pour le budget de 2004 en rebudgétisant, d'une part, une partie de la prime pour l'emploi en dépenses, comme mon collègue Charles de Courson l'avait demandé lors de la discussion de la loi de règlement pour 2001, et, d'autre part, les dégrèvements portant sur les collectivités locales.
    M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas encore fait ! Ecoutez bien, monsieur le ministre !
    M. Nicolas Perruchot. En effet, les prélèvements sur recettes et les dégrèvements dissimulent la réalité de l'évolution des prélèvements obligatoires. La progression affichée des recettes entre 2002 et 2003 est de 1 %, mais, si l'on ajoute les prélèvements sur recettes, elle atteindra probablement 1,7 %.
    Je souhaite également remercier M. le ministre d'avoir pris l'engagement courageux de supprimer le FOREC l'année prochaine.
    M. Jean Le Garrec. Il n'a pas dit ça !
    M. Didier Migaud. Méfiez-vous des phrases définitives !
    M. Nicolas Perruchot. Afin de revenir sur les multiples débudgétisations et de simplifier le budget, comme le groupe UDF le souhaite depuis longtemps, il reste beaucoup à faire. Nous présenterons donc des amendements à cette fin dans le projet de loi de finances pour 2003.
    J'en viens à l'évolution des prélèvements obligatoires en 2003 et pour les années suivantes.
    Le Gouvernement a courageusement décidé, malgré les faibles marges de manoeuvre dont il dispose, de diminuer le taux des prélèvements obligatoires dans le PIB de 0,3 point. Cependant, j'appelle votre attention, monsieur le ministre, sur la fragilité de votre hypothèse économique.
    M. Didier Migaud. Ça !
    M. Nicolas Perruchot. Si la croissance n'est que de 1,5 % au lieu de 2,5 %, cela entraînera une hausse des prélèvements obligatoires de 0,4 point. Nous aurions donc alors une légère augmentation de 0,1 point de PIB. Cela signifie qu'il faut d'ores et déjà prévoir des gels et des annulations de crédits, à hauteur de 0,4 point de PIB, soit 6 milliards d'euros. Quand on sait combien il a déjà été difficile de bloquer 3 milliards d'euros, on peut se demander comment nous ferons pour 6 milliards. L'exercice sera périlleux, surtout s'il n'intervient pas dès le premier trimestre.
    Je me permets de souligner au passage que ce n'est pas notre contribution au budget communautaire, qui n'est que de 1 % du PIB, et qui ne sera guère plus élevée après l'élargissement, qui pourrait compromettre l'assainissement des finances publiques.
    Enfin, nous attendons une maîtrise rigoureuse des dépenses publiques.
    Vous avez procédé à des reports de crédits à hauteur de 6,4 milliards d'euros cet été, ce qui représente 1 % de croissance supplémentaire des dépenses pour 2003, et le double de ce qui se fait d'habitude en matière de reports.
    Les dépenses pour les retraites augmentent mécaniquement de 3,6 % par an : 2,1 % pour l'évolution démographique et 1,5 % pour l'inflation. Cela veut dire que si la croissance est inférieure à 2,1 %, le poids de ces dépenses dans le PIB dérapera.
    Enfin, l'ONDAM a été systématiquement dépassé de 2 points ces dernières années. Il a été fixé à 5,2 % dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, ce qui est déjà supérieur de 1,3 point à la croissance du PIB.
    Nous ne pourrons donc pas - nous le pensons fortement au sein du groupe UDF - faire l'économie de trois grandes réformes : une réforme de l'Etat, une réforme des retraites et une réforme de l'assurance maladie. Le groupe UDF attend ces réformes, seules garantes, à nos yeux, d'une véritable maîtrise des dépenses, non point par orthodoxie budgétaire, mais parce que reporter ces réformes urgentes à demain, c'est reporter sur nos enfants les responsabilités que nous n'aurons pas eu le courage d'assumer.
    Pour illustrer mon propos, monsieur le ministre, je me suis amusé tout à l'heure à faire un calcul et à définir un ratio dont vous ne disposez peut-être pas à Bercy, que j'appellerai la dette par berceau. Quand on dit que la dette représentera 58,8 % du PIB en 2003, le PIB étant à peu près égal à 1 500 milliards d'euros, cela signifie que nous léguons à chaque enfant qui va naître en 2003 une dette de 1,1 million d'euros. En étalant cette dette sur quinze ans, c'est un fardeau de 75 000 euros qui pèsera sur chaque berceau à partir du 1er janvier 2003.
    M. Jean-Pierre Brard. Vous allez provoquer une chute de la natalité.
    M. Nicolas Perruchot. Monsieur le ministre, notre confiance sera solide, mais, comme vous l'avez compris, elle sera exigeante.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Messieurs les ministres, nous venons d'entendre M. Perruchot évoquer le risque que vous ne « dérapiez dans le PIB ». A coup sûr, les Français comprendront immédiatement un discours aussi pédagogique ! Mais, à l'écouter, je ne crois pas qu'il craignait de vous voir déraper dans le PIB : il souhaitait tout simplement que vous dérapiez tout court...
    M. Nicolas Perruchot. N'importe quoi !
    M. Jean-Pierre Brard. Allons, monsieur Perruchot, ne m'interrompez pas. Moi, je vous ai écouté attentivement. (Exclamations sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Philippe Auberger. Mais nous ne craignons pas les dérapages verbaux !
    M. le président. Monsieur Auberger, je vous en prie !
    M. Jean-Pierre Brard. Conformément à l'article 52 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, nous sommes appelés à débattre du rapport retraçant l'ensemble des prélèvements obligatoires et leur évolution, assorti de l'évaluation financière, sur trois ans, de chacune des dispositions législatives ou réglementaires envisagées par le Gouvernement.
    Il est positif que le Parlement puisse délibérer sur ces divers éléments, et la loi organique de 2001 constitue indiscutablement un progrès à cet égard. Toutefois, faire porter l'essentiel de l'analyse et de la discussion sur les seuls prélèvements obligatoires - et, en fait, particulièrement sur leur niveau - est extrêmement réducteur. Il n'est pourtant pas douteux que de très nombreux contribuables seraient intéressés par l'analyse de l'impact des prélèvements obligatoires sur l'emploi, sur la justice fiscale et sur l'avenir de notre système de santé, ainsi que par l'analyse de l'effet redistributif de ces prélèvements dans une optique de solidarité nationale entre les individus et entre les territoires. Du reste, monsieur le ministre de l'économie et des finances, je ne crois pas vous avoir entendu prononcer ces mots dans vos propos, à la différence de votre collègue de gauche (Sourires) ; je veux dire : qui est assis à votre gauche.
    Le rapport, très technique, qui nous a été fourni ne traite pratiquement pas de ces problèmes et se focalise sur la question du taux des prélèvements obligatoires, visiblement considérée comme essentielle et décisive. Pourtant, M. le ministre de la santé a bien expliqué que c'est à tort que l'on considérait certains prélèvements comme des prélèvements obligatoires, et l'exemple du tabac était à cet égard particulièrement pertinent.
    Derrière votre priorité se confirme clairement la volonté - l'obsession, devrait-on dire - de baisser les prélèvements obligatoires et, du même coup, la mise en cause de leur utilité et de leur légitimité, qu'il nous faut, du coup, réaffirmer avec force dans ce débat, en insistant sur le rôle essentiel de l'impôt et des cotisations sociales dans la cohésion de notre société. Si la gauche l'avait mieux fait pour les dernières échéances, vous ne seriez certainement pas assis sur les bancs que vous occupez aujourd'hui.
    M. Gérard Bapt. Vous jouez à la Pythie !
    M. Jean-Marie Sermier. Pathétique !
    M. Jean-Pierre Brard. Je ne joue pas à la Pythie, monsieur Bapt, je constate seulement que ceux qui déclaraient que la gauche serait jugée sur la baisse des impôts se sont trompés,...
    M. Henri Emmanuelli. Tout à fait !
    M. Jean-Pierre Brard. ... puisque c'est sur cette base qu'elle a été battue.
    M. Gérard Bapt. Il n'y a pas que cela, monsieur Brard !
    M. Jean-Pierre Brard. A côté des fonctions régaliennes qu'ils financent, ces prélèvements permettent ou devraient permettre de faire fonctionner et de moderniser nos services publics, de renforcer notre protection sociale et notre système de santé, de réduire les inégalités et de combattre l'exclusion. C'est là une dimension fondamentale de notre contrat social. Ces prélèvements obligatoires et surtout l'impôt progressif contribuent à la réduction des inégalités qui rongent notre société.
    Le débat sur la légitimité de l'impôt n'est pas nouveau dans notre pays. Ainsi, le dernier numéro des Notes bleues de Bercy rappelle fort opportunément que le premier conflit sur l'impôt remonte à 1465, sous le règne de Louis XI. Je vous vois sourire, monsieur le ministre de l'économie et des finances, mais je ne suis pas sûr que nous tirions les mêmes enseignements de ces références historiques.
    M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille. Qu'en pensaient les communistes à l'époque ?
    M. Jean-Pierre Brard. « Les innovations audacieuses du roi, qui est allé jusqu'à remettre en question l'exemption fiscale des privilégiés, contribuent à provoquer la grande révolte aristocratique qui fait entrer cette année-là sa politique financière dans une ère de pragmatisme. Les premières batailles se livrent dans l'opinion : au nom du bien public, les princes prennent pour cible la politique financière de Louis XI et vont jusqu'à mettre en cause la légitimité de l'impôt, dont ils annoncent la suppression, tandis que leur adversaire, le roi, les accuse - avec raison - de vouloir surtout faire main basse sur les finances royales. »
    La position des détracteurs actuels de l'impôt est donc aussi archaïque que ringarde.
    M. Christian Vanneste. C'est vous qui l'êtes !
    M. Jean-Pierre Brard. Il est en effet à peine besoin de souligner la filiation directe entre les privilégiés de 1465 et ceux d'aujourd'hui, unis par-delà les siècles dans la même contestation de l'impôt en tant qu'instrument au service de l'intérêt général.
    Depuis lors, la déclaration des droits de l'homme et du citoyen a, dans son article XIII, refondé l'impôt comme un élément constitutif de notre contrat social en énonçant : « Pour l'entretien de la force publique et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable. Elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. »
    Avec la baisse uniforme de 5 % de l'impôt sur le revenu, votre majorité, messieurs les ministres, a porté un coup sévère à l'adéquation entre l'impôt et les facultés contributives. Ce n'est d'ailleurs qu'un premier coup, puisque votre objectif final est une réduction de 30 %. Vous récidivez donc dans le PLF pour 2003, avec une nouvelle baisse de l'impôt sur le revenu, l'augmentation de la réduction d'impôt pour l'emploi de salariés à domicile et le doublement de l'abattement sur les donations entre grands-parents et petits-enfants. Autant de mesures dont les smicards ne verront jamais les avantages car elles sont ciblées pour bénéficier aux ménages les plus aisés !
    Il n'est que de vous entendre parler des aides aux familles. Il est vrai que vous employez dans ce domaine un langage délibérément abscons pour l'opinion publique. A preuve, lorsque, en commission des finances, mon collègue Michel Vaxès vous a interpellé sur le devenir de l'ISF, M. Lambert n'a pas dit que vous alliez le remettre en cause, mais seulement que vous vous opposeriez aux délocalisations professionnelles. C'est là une manière de répondre positivement à la question de mon collègue, mais surtout une excellente façon de noyer le poisson ! Et si je m'emploie à décrypter vos propos, monsieur le ministre, c'est pour que les journalistes disposent eux aussi de la grille de lecture,...
    M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général. Ils n'ont pas besoin de vous !
    M. Jean-Pierre Brard. ... car vous usez des effets sémantiques comme d'autant de rideaux de fumée, afin que l'opinion ne comprenne pas pour qui vous roulez, si j'ose ainsi m'exprimer. A l'évidence, ce n'est pas pour ceux qui restent au bord de la route. Vous n'êtes par un adepte de l'auto-stop !
    M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Nous roulons pour les Français !
    M. Jean-Pierre Brard. Que vous soyez des Français, je ne le nie pas ! Louis XI aussi était français, tout comme les aristocrates qui combattaient son impôt. La différence entre nous, c'est que nous ne sommes pas du même côté. Vous êtes les fondés de pouvoir des privilégiés, ne vous en déplaise !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. De Mme Bettencourt ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Et voilà le disque qui recommence !
    M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires cuturelles.
    Il ont pourtant eu cinq ans ! Qu'ont-ils fait ?
    M. Jean-Pierre Brard. Le fait que vous réagissiez ainsi à mes propos est une confirmation dont je m'honore.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Au secours, Maxime !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Jean-Pierre, le disque s'use !
    M. le président. Mes chers collègues, ne réagissez pas aux propos de M. Brard : laissez-le terminer.
    M. Jean-Pierre Brard. Je vous remercie, monsieur le président. Heureusement que vous êtes là pour maintenir l'objectivité du débat. (Rires.)
    M. le président. Merci, monsieur Brard !
    M. Philippe Auberger. M. Brard ne fait pas beaucoup d'efforts en ce sens !
    M. le président. Monsieur Auberger, je vous en prie !
    M. Jean-Pierre Brard. Malheureusement, je doute que vos mesures suffisent aux éléments les plus dogmatiques de votre majorité. Ils sont nombreux, en particulier ceux de nos collègues arrivés récemment dans cet hémicycle et qui croient y avoir été portés par leur talent alors qu'ils n'y ont été déposés que par la vague bleue. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Christian Vanneste. Donc par les Français !
    M. Didier Quentin. Quel mépris !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Tandis que M. Brard est maintenu par la vague rouge !
    M. Yves Bur, rapporteur de la commisison des affaires culturelles. Vous êtes en survie artificielle, mon cher !
    M. Jean-Pierre Brard. Attendez la prochaine fois !
    M. Gérard Bapt. Vous verrez quand la mer se retirera !
    M. Jean-Pierre Brard. Ces dogmatiques brûlent de s'attaquer à nouveau à l'impôt de solidarité sur la fortune, qu'ils n'ont jamais accepté. Au nom de la lutte contre « la délocalisation massive des créateurs de richesses », ils rêvent de démanteler l'ISF. Pour recadrer ce débat, il faut rappeler une vérité première : les créateurs de richesses, monsieur le ministre, sont d'abord les travailleurs salariés dans les entreprises, et non leurs employeurs qui accaparent les profits créés par le travail.
    L'impôt de solidarité sur la fortune peut certes être amélioré, notamment dans l'optique d'un élargissement de son assiette ; je l'ai moi-même proposé dans un rapport contre la fraude et l'évasion fiscales. J'avais cru comprendre à l'époque que mes conclusions recueillaient l'assentiment de l'actuel président de la commission des finances. Mais je ne suis pas sûr que tel soit l'objectif des privilégiés que vous défendez ici.
    Le débat centré aujourd'hui sur le niveau des prélèvements obligatoires présente pour le Gouvernement le grand avantage de gommer la question de la justice fiscale. Le rapport présenté ne fait pas apparaître les différents types de prélèvements : dégressif, proportionnel ou progressif, et encore moins leur poids respectif dans notre système fiscal et de cotisations sociales.
    Près de 80 % des ressources publiques proviennent de taxes, d'impôts ou de cotisations dégressives en fonction des revenus ou, au mieux, proportionnelles à ces derniers. La notion, essentielle pour la justice fiscale, de prélèvements liés aux facultés contributives passe donc à la trappe et la progressivité de l'impôt devient l'exception alors qu'elle devrait être la règle.
    Par ailleurs, il est totalement irréaliste de disserter sur l'évolution du taux des prélèvements obligatoires en ne traitant que le numérateur, c'est-à-dire les prélèvements eux-mêmes, et en négligeant le dénominateur, c'est-à-dire le montant du produit intérieur brut.
    Il faut souligner que c'est là un sujet sur lequel vous êtes particulièrement mal à l'aise. En effet, votre hypothèse de croissance de 2,5 % du PIB, sur laquelle vous avez construit le projet de loi de finances pour 2003 et opérez le calcul du taux de prélèvement, est de plus en plus généralement contredite par les prévisionnistes.
    Pour justifier votre dogme de la baisse des prélèvements obligatoires, vous invoquez des raisons économiques, la perte d'attractivité de la France, la fuite des capitaux et des cerveaux, découragés par l'importance des prélèvements obligatoires dans notre pays.
    En ce qui concerne les investissements étrangers,...
    M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Ils sont en baisse !
    M. Jean-Pierre Brard. Ecoutez la suite, monsieur Bur, et voyez la tendance ! Il ne faut pas être obnubilé par l'apparence, et je vous renvoie à Platon ! Mais, si vous le voulez, nous en discuterons un autre jour, car vous nous éloignez de notre sujet.
    En ce qui concerne les investissements étrangers dans notre pays, disais-je, les chiffres du premier semestre 2002 montrent que l'attractivité de la France est restée forte, comme le relevait le journal Les Echos - qui n'est pas vraiment de gauche - des 23-24 août dernier : « Alors que les investissements directs français à l'étranger se sont repliés nettement - 29,5 milliards d'euros, contre 49 milliards au premier semestre de 2001 -, ceux réalisés par des étrangers en France restent soutenus. Ils ont été légèrement moins élevés au premier semestre de 2002, à 24,4 milliards d'euros, contre 26,7 un an plus tôt. Une situation qui contraste avec celle observée dans l'ensemble de la zone euro, où l'on note de nettes sorties de capitaux et de faibles entrées. » Voilà la réalité, monsieur Bur ! Mais vous êtes comme Tartuffe : « Cachez ce sein que je ne saurais voir... »
    M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Le Tartuffe, c'est plutôt vous !
    M. Philippe Auberger. Vous faites dans le porno, monsieur Brard ! Vous allez être taxé !
    M. Jean-Pierre Brard. Je vous mets les chiffres sous le nez, monsieur le ministre ; à moins que vous ne soyez myope, vous ne pouvez pas les contester, et M. Auberger pas davantage.
    On voit donc bien que le niveau des prélèvements obligatoires, pas plus d'ailleurs que les 35 heures, ne décourage pas les investisseurs étrangers, qui font une analyse globale du contexte français.
    S'agissant de la fuite des cerveaux, il faut inciter ceux qui sont tentés par des contrées où les impôts et les cotisations sociales sont moins élevées à s'interroger sur le niveau des services publics ainsi que sur la qualité des soins médicaux et hospitaliers qu'ils vont trouver dans le pays qu'ils ont choisi.
    M. Mattei l'a fort justement souligné tout à l'heure, au point que j'en viens presque à considérer qu'il s'est fourvoyé sur les bancs de ce gouvernement...
    Impôts et cotisations ont en France pour contrepartie directe des services publics et un système de santé de qualité. Les Français y sont tellement habitués qu'ils ont peine à imaginer qu'il puisse en être autrement, avant bien sûr d'en avoir fait la pénible expérience.
    Si les Français y sont habitués, ils y sont aussi très attachés. Or une série d'exemples étrangers désastreux en matière de privatisation et de casse des services publics, au nom de la libre concurrence et de la compétitivité, leur a fait prendre conscience que les impôts qu'ils paient et les cotisations qu'ils acquittent ne sont pas versés à fonds perdus, dans la mesure où la qualité des services publics a un coût.
    La réalité est que vous êtes désormais dans une logique implacable du fait de votre dogme de baisse du taux des prélèvements obligatoires. Comme vous vous êtes engagés, au niveau européen, à stabiliser le déficit des finances publiques, les pertes de recettes que vous avez décidées vont devoir trouver une contrepartie financière : la baisse de toute une série de budgets comme la recherche, la culture, l'éducation, l'emploi, dont l'amputation est le lourd tribut à payer pour financer les surplus de dépenses consacrées à la police, à la défense, aux prisons, qui sont vos priorités. Ces choix seront très néfastes pour l'emploi, l'avenir de la jeunesse et du pays.
    S'agissant de l'emploi, la comparaison entre les taux d'imposition implicite du facteur capital et du facteur travail, présentée dans le rapport, est préoccupante : après quelques années de relatif rééquilibrage, l'imposition du facteur capital chute brutalement en 2002 alors que celle du facteur travail se maintient. Cette dérive va être accentuée par les mesures du PLF pour 2003 et augure mal de l'évolution de l'emploi dans les années à venir.
    Vous vous êtes plaint tout à l'heure, monsieur le ministre, que le travail était trop taxé. Mais que ne taxez-vous davantage le capital ? Que pensez-vous de ma proposition ? Après tout, ce que vous prendrez en moins aux uns, il faudra bien le prendre aux autres. Il faut tout dire aux Français : expliquez-leur comment vous allez financer vos cadeaux aux privilégiés ! Les exemples que je viens de donner sur les baisses budgétaires montrent clairement où vous en êtes.
    M. le président. Veuillez conclure, s'il vous plaît !
    M. Jean-Pierre Brard. Puisque je sens que la patience de notre président a des limites, je terminerai mon propos par une référence à M. le Président de la République.
    M. Philippe Auberger. C'en est trop !
    M. Jean-Pierre Brard. Dans son interview du 14 juillet dernier, M. Chirac a invoqué, pour justifier son credo sur la baisse des prélèvements obligatoires, la situation de la France comparée à celle de ses voisins et des autres pays développés. La comparaison des taux de prélèvements obligatoires qui figure dans le rapport contredit cette analyse. On y constate que la Suède - ce n'est pas vraiment un pays sous-développé, monsieur Perruchot -, dont le taux de prélèvement est supérieur à celui de la France, ne se porte pas mal et que les électeurs y ont d'ailleurs reconduit récemment un gouvernement de gauche.
    M. Nicolas Perruchot. Personne n'est parfait !
    M. Philippe Auberger. C'est bien le seul cas, pour ne pas dire une anomalie !
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur Perruchot, écoutez la suite : sortez de votre dogmatisme totalitaire. (Rires.)
    M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Et vous, sortez du vôtre !
    M. le président. Monsieur Brard, allons !
    M. Jean-Pierre Brard. J'ai presque terminé, monsieur le président.
    En revanche, le Japon, qui affiche un taux particulièrement bas de prélèvements, 27,1 %, est depuis plusieurs années plongé dans un marasme économique dont il ne parvient pas à s'extraire. Il est donc clair, monsieur le ministre, qu'il n'y a pas de corrélation entre faible taux de prélèvements obligatoires et prospérité économique. Vos choix ne s'expliquent que par vos obsessions idéologiques ! (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Encore faut-il qu'il y ait une productivité du secteur public !
    M. le président. La parole est à M. Philippe Auberger.
    M. Philippe Auberger. Messieurs les ministres, comment ne pas éprouver de plaisir au moment où s'ouvre ce débat sur les prélèvements obligatoires, débat que nous avons demandé pendant plusieurs années, alors que nous préparions la loi du 1er août 2001 ?
    En effet, nous constations à l'époque qu'il n'y avait pas suffisamment de cohérence entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale, et que nous n'avions pas l'occasion de débattre de l'ensemble des prélèvements.
    Vous appliquez, pour la première fois, l'article 50 de la loi du 1er août 2001, en annonçant, dans le rapport économique et financier, la programmation triennale des finances publiques pour 2004-2006, que vous associez, pour la première fois aussi, directement à la loi de finances et à la loi de financement de la sécurité sociale.
    C'est dire que, désormais, nous aurons un débat complet, portant sur cinq années -  aujourd'hui 2002-2006 -, et sur l'ensemble des prélèvements obligatoires, ce qui autorise une analyse plus rigoureuse et des comparaisons plus pertinentes avec les autres pays.
    M. Henri Emmanuelli. Ah oui ?
    M. Philippe Auberger. Il s'agit donc d'un effort de clarification incontestable, d'autant que vous avez déposé un rapport écrit quelques jours avant le débat et que nous avons pu entendre les ministres en commission. Non seulement ce débat vient à point, mais il a été préparé avec beaucoup de sérieux. Il représente un progrès essentiel pour la démocratie et pour la bonne compréhension des prélèvements obligatoires, non seulement par notre assemblée mais aussi par l'ensemble de nos concitoyens.
    Ce qui est important, on l'a déjà dit avant moi et on le répétera sans doute, c'est que nos prélèvements obligatoires sont parmi les plus élevés d'Europe. Personne ne peut le contester, pas plus qu'on ne peut contester que, malgré une forte croissance et quelques efforts d'allégements fiscaux au cours des cinq dernières années, 1998-2002, le gouvernement précédent n'a pas tenu les promesses qu'il avait faites solennellement par la voix du Premier ministre en juin 1997, à savoir stabiliser, puis baisser les prélèvements obligatoires.
    M. Didier Migaud. C'est faux !
    M. Philippe Auberger. En effet, comme cela a été rappelé tout à l'heure, le précédent gouvernement avait trouvé un niveau de prélèvements obligatoires de 44,8 % en 1997...
    M. Didier Migaud. De 45 % !
    M. Philippe Auberger. Je dis bien 44,8 % avant les mesures du MURFF...
    M. Jean-Pierre Brard. Parlez français, monsieur Auberger !
    M. Philippe Auberger. ... que vous aviez décidées en septembre. Vous nous avez rendu au mois de mai dernier le même niveau de prélèvements obligatoires, soit 44,8 % ; aucun progrès n'a été accompli en dépit d'une forte croissance.
    Messieurs les ministres, ce que vous nous proposez est en rupture très nette avec le passé. Rupture, d'abord, pour le deuxième semestre 2002 car, grâce notamment à la baisse de l'impôt sur le revenu décidée au mois de juillet, nous observerons une baisse des prélèvements obligatoires de deux dixièmes de points. Et, surtout, rupture dans le cadre du projet de loi de finances que nous allons discuter la semaine prochaine, qui comportera une nouvelle baisse des prélèvements obligatoires de trois dixièmes de points - soit très exactement 3,9 milliards. Certains peuvent estimer que la baisse est modérée ; en tout cas, elle est réelle.
    Cette baisse ne répond pas, comme certains voudraient le faire croire, à des considérations idéologiques, mais à une réalité, à savoir que notre économie étouffe sous le poids des prélèvements obligatoires. L'initiative, la responsabilité, la prise de risques sont bridées par des prélèvements excessifs, qui pénalisent en permanence les facteurs de production, le travail comme le capital.
    Tous les pays qui nous entourent ont consenti des efforts de modération dans ce domaine : l'Italie, l'Espagne, la Grande-Bretagne, l'Allemagne. La France ne saurait s'en dispenser si elle veut maintenir sa compétitivité.
    Le rapport économique et financier fait litière d'une assertion totalement inexacte proférée tout à l'heure : en réalité, il y a un lien très direct entre les flux d'investissement venant de l'étranger et le niveau des prélèvements obligatoires et il est certain que la diminution de ces derniers entraînera l'augmentation des premiers.
    Mais une question se pose et elle est au coeur du présent débat : serons-nous en mesure de poursuivre l'effort engagé en 2002 et 2003, et à quel rythme ? Les progrès dépendent de deux variables : d'une part, le niveau de la croissance, et, d'autre part, celui des déficits publics.
    Pour 2003, nous espérions une croissance de 3 % ; la prévision a été ramenée au début du mois de septembre, à 2,5 %, et il faut bien admettre - nous en débattrons la semaine prochaine - qu'il demeure des incertitudes sur ce dernier chiffre.
    En ce qui concerne les déficits publics, on pouvait penser au début de cette année - en tout cas nous étions un certain nombre à l'espérer - qu'ils pourraient être limités entre 30 et 32 milliards d'euros. Malheureusement, l'audit effectué au mois de juin nous a démontré qu'ils devaient être portés à 45 milliards d'euros, soit une augmentation de 50 %. Cela constitue un handicap très sérieux pour la baisse des prélèvements obligatoires.
    Par ailleurs, des économistes lucides ont noté qu'une baisse trop rapide du déficit risquait de précipiter notre pays dans la récession, ou au moins de ralentir l'effort consenti pour soutenir la consommation. Cela ne serait pas sans dommages tant sur la croissance que sur l'emploi. Les autorités européennes l'ont reconnu récemment en demandant aux pays membres de diminuer leurs déficits à hauteur de 0,5 % de leur PIB chaque année et en allongeant l'échéancier jusqu'à 2006.
    En dépit de cette situation sur laquelle nous avons peu de marges de manoeuvre, nous enregistrons une double satisfaction.
    Non seulement les prélèvements obligatoires, fiscaux et sociaux, vont diminuer en 2003 en vertu du PLF et du PLFSS, mais la projection pour 2004-2006, qui leur est associée dans le rapport économique et financier, donne une orientation très nettement favorable à cette diminution.
    Avec une croissance de 2,5 % par an, la diminution des prélèvements atteindrait 3 milliards d'euros chaque année, ce qui ramènerait les prélèvements à 44,1 % à la fin de la période, c'est-à-dire en 2006. Et si le taux de croissance est plus favorable, par exemple 3 %, la baisse des prélèvements pourrait être portée à 4 milliards d'euros par an ; au total, la diminution atteindrait 19 milliards entre 2002 et 2009, ce qui constituerait un effort très significatif.
    M. Didier Migaud. On est loin des 30 milliards !
    M. Philippe Auberger. Mais on est loin également du déficit public annoncé de 30 milliards, qui a été porté à 45 milliards ! Sans doute 15 milliards sont-ils une bagatelle pour la gauche !
    M. Nicolas Perruchot. Une erreur de 50 %, ce n'est pas grave, pour eux !
    M. Philippe Auberger. Mais ça l'est pour nous, qui avons maintenant des responsabilités !
    J'en viens aux contraintes fortes qui s'attachent à cette programmation.
    Il faut maîtriser les dépenses de l'Etat, en prévoyant une progression de trois dixièmes de points en volume par an, en moyenne, et maîtriser aussi les dépenses de l'assurance maladie, avec une progression dynamique mais non point excessive, monsieur le ministre de la santé, de 2,5 % en volume par an. Cela nécessite des efforts, et je sais que vous en êtes conscient, ayant entendu hier en commission présenter le PLFSS.
    La maîtrise des dépenses des administrations publiques locales est également indispensable ; leur progression ne serait que de 1,9 % par an. C'est dire qu'il ne s'agira pas d'instaurer de nouveaux transferts de dépenses de l'Etat sur les départements, comme ce fut le cas pour l'allocation personnalisée d'autonomie. Plus généralement, une grande vigilance s'impose en ce qui concerne l'équilibre des tranferts dans le cadre de la décentralisation.
    Quels allégements doivent être privilégiés ? Bien sûr, je ne parle que de ceux de l'Etat.
    Un débat s'est instauré cet été pour savoir s'il fallait privilégier les allégements sociaux ou les allégements fiscaux. Je pense qu'il s'agit d'un faux débat et qu'il faut, nous l'avons dit au printemps, diminuer les uns et les autres.
    L'allégement des charges sociales est nécessaire puisque nous avons à cet égard un handicap incontestable par rapport aux autres pays, notamment européens, mais cet allégement ne peut être que combiné à une augmentation des rémunérations, laquelle est obtenue grâce à l'unification des SMIC décidée dans le cadre de la loi Fillon, mais qui n'allait pas de soi.
    Quant à la diminution de l'impôt sur le revenu, ses effets seront immédiats. Nos concitoyens l'auront constatée en recevant leur avis pour le dernier tiers prévisionnel, et ils pourront diminuer à due concurrence les tiers provisionnels de l'année prochaine. En revanche, les effets des allégements de charges se feront sentir au plus tôt le 1er juillet.
    Un autre débat s'est ouvert pour savoir si les personnes qui vont bénéficier des allégements d'impôt sur le revenu consommeraient ou épargneraient ; la consommation étant considérée en l'occurrence comme vertueuse et l'épargne beaucoup moins. Là encore, c'est un faux débat. Toutes consomment, plus ou moins, en fonction de leurs revenus. Quant à l'épargne, nous en avons besoin, mes chers collègues, ne serait-ce que pour financer le logement, dont chacun sait qu'il est une composante importante de la croissance et de l'emploi. Nous en avons également besoin pour financer les investissements des entreprises, et d'autant plus en ce moment où elles ne peuvent plus se tourner vers les marchés financiers et où les banques leur refusent souvent le crédit.
    Il y a évidemment un troisième impératif : il conviendrait de diminuer la fiscalité pesant sur les entreprises. Un premier effort sera fait en 2003, je le reconnais, mais il sera limité, bien que coûteux - 1,9 milliard - avec la suppression totale de la part salariale de la taxe professionnelle. En effet, il ne concernera que 6 000 très gros établissements, ceux dont la base salariale est supérieure à 5 millions d'euros, puisque, pour les autres, la réforme est déjà faite.
    Cet effort doit être poursuivi, et en faveur de toutes les entreprises, plus particulièrement des PME, parce que ce sont elles qui ont les plus gros besoins en investissements et en productivité, et parce qu'elles constituent un gisement d'emplois important.
    En conclusion, avec le budget pour 2003 et la prévision triennale des finances publiques pour 2004-2006, un cap a été nettement fixé : maîtrise des dépenses publiques, diminution progressive des déficits, effort continu et régulier de diminution des prélèvements obligatoires.
    Cette orientation et ce rythme nous conviennent.
    Ce que nous souhaitons à présent, messieurs les ministres, c'est que le Gouvernement s'engage à respecter ce programme tout au long de la législature. Ce débat en début de législature vous dote d'une feuille de route pour cinq ans. Respectez-la pour pouvoir, en fin de législature, dresser un bilan largement positif en ce domaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, c'est l'application de l'article 52 de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances qui nous vaut le débat aujourd'hui. Et c'est au Sénat, à l'initiative de MM. Marini et Descours, que l'idée d'un rapport sur l'ensemble des prélèvements obligatoires et leur évolution, éventuellement suivi d'un débat, s'est concrétisée dans le texte organique.
    Il est incontestable, au vu des éléments écrits, fournis par le Gouvernement dans son rapport, qu'un tel débat est nécessaire aujourd'hui, même si je regrette que les prestations orales de nos ministres aient été si brèves, et quelque peu en contradiction avec les documents écrits.
    L'objet de ce rapport est en effet de permettre à la représentation nationale, à la veille de l'examen du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, d'avoir une vision d'ensemble des finances publiques. Cette vision porte sur l'évolution pluriannuelle des prélèvements de l'ensemble des administrations publiques : Etat, organismes de sécurité sociale, administrations publiques locales.
    Nous pouvons donc nous réjouir que le Gouvernement ait accepté d'organiser un débat sur ce rapport à l'Assemblée nationale.
    La tenue de ce débat est d'autant plus intéressante qu'elle nous permet de prendre le Gouvernement en flagrant délit de promesses intenables et de contradiction.
    En effet, le rapport montre que le niveau des baisses de prélèvements proposées par le Gouvernement est en fait très réduit. La raison en est simple : la boîte noire du pilotage des finances publiques n'est pas formatée pour tenir compte des promesses électoralistes et démagogiques, mais seulement des baisses compatibles avec la réalité économique et avec nos engagements européens. Elle n'intègre donc qu'un montant réduit par rapport aux engagements pris, seulement 6 milliards d'euros jusqu'en 2006. Ces 6 milliards de baisses font bien pâle figure quand on les compare aux 30 milliards de baisses promis pendant la campagne électorale.
    Dans un premier temps, je souhaite pouvoir démontrer pourquoi M. Raffarin est responsable de l'exécution budgétaire de 2002.
    Ensuite, je vous indiquerai en quoi le rapport du Gouvernement permet de constater que les prélèvements obligatoires ont fortement diminué depuis 1999, contrairement à ce qui a été dit.
    Enfin, je constaterai que la période 2003-2006 est caractérisée par une chimère : l'introuvable baisse des prélèvements obligatoires.
    Dans les différentes présentations graphiques du Gouvernement, on constate un manichéisme totalement dénué de subtilité. Lorsqu'il s'agit d'illustrer la prétendue noirceur du passé, 2002 est imputé à l'ancienne majorité. Quand, au contraire, il s'agit de tenter d'illustrer le prétendu rétablissement immédiat, qui aurait suivi de quelques heures à peine l'arrivée de M. Raffarin à l'Hôtel Matignon, on présente des graphiques faisant apparaître un forte baisse des prélèvements en 2002 et 2003. Dans cette perspective, l'exécution budgétaire de 2002, avec ses baisses d'impôts très importantes, est, cette fois, attribuée à l'action du gouvernement Raffarin.
    Pour trancher ce débat, il faut repartir de ce qui a été fait pour le passé et l'appliquer à titre de jurisprudence. Personne ne conteste que l'exécution budgétaire de 1997 doive être attribuée au gouvernement Jospin, et pas à celui de M. Juppé. D'ailleurs, M. Raffarin lui-même nous y invite quand il fixe 1997 comme point de départ de la gestion de l'ancienne majorité. C'est-à-dire qu'il reconnaît que, si la loi de finances initiale pour 1997 a été préparée par M. Juppé, c'est M. Jospin et son gouvernement qui ont en fait exécuté le budget.
    Vous vous en souvenez, c'est l'incapacité dans laquelle se trouvait le gouvernement de M. Juppé d'exécuter le budget conformément aux exigences du Traité de Maastricht qui a conduit M. Chirac à dissoudre l'Assemblée nationale. On connaît la suite.
    C'est le gouvernement de Lionel Jospin qui a décidé et mis en oeuvre les mesures nécessaires à la qualification de la France pour l'euro.
    En bonne logique, il convient d'appliquer la « jurisprudence » 1997 à l'exercice budgétaire 2002 et donc d'attribuer la paternité de l'exécution budgétaire au gouvernement en place, qui assure cette exécution, plutôt qu'à celui qui est parti. Sinon, cela reviendrait à dire que la précédente législature à duré six ans, ce qui n'a pas été le cas.
    Monsieur le ministre, nous ne nous reconnaissons pas dans votre exécution du budget de 2002. Nous estimons que le collectif budgétaire a plombé abusivement de 9 milliards d'euros l'exécution budgétaire de 2002. Cette somme, c'est bien ce qu'il faut appeler le montant du « déficit Raffarin », qui se décompose comme suit : 1,8 milliard d'euros pour l'apurement non justifié de dettes sociales ; 1,2 milliard d'euros d'abandon de créance sur l'UNEDIC ; 3,7 milliards d'euros de crédits ouverts puis gelés à peine onze jours plus tard ; 2,5 milliards d'euros de baisse supplémentaire de l'impôt sur le revenu.
    Si le Gouvernement n'avait pas procédé à toutes ces manoeuvres, le déficit en fin d'année aurait été de l'ordre de 36 à 37 milliards d'euros plutôt que de 46 milliards.
    La responsabilité de l'actuel gouvernement dans la dégradation du déficit budgétaire, environ 9 milliards d'euros dans une situation déjà sensible, est pleine et entière.
    C'est bien l'actuel gouvernement qui a refusé d'encaisser la créance de 1,2 milliard d'euros de l'Etat sur l'UNEDIC.
    C'est bien l'actuel gouvernement qui a abusivement ouvert 3,8 milliards d'euros dans le collectif d'été, pour les geler à peine onze jours plus tard.
    C'est bien l'actuel gouvernement qui a ajouté aux baisses de l'impôt sur le revenu - 2 milliards d'euros - et de la PPE - 1,1 milliard d'euros -, déjà votées pour 2002, un rabais de 5 % pour un coût de 2,5 milliards d'euros.
    Si M. Raffarin nous attribue 1997, qu'il soit cohérent avec lui-même et qu'il accepte la paternité de 2002. Qu'il assume ses propres choix ! Je le répète : nous ne nous reconnaissons pas dans ces choix fiscaux injustes et inefficaces, ni dans ces pratiques budgétaires peu transparentes et peu convenables. Sans elles, le déficit des finances publiques aurait donc dû ressortir à environ 2,2 % du PIB, au lieu des 2,6 % que vous affichez.
    La prétendue dérive du déficit de 15 milliards d'euros, que vous tentez vainement d'utiliser pour vous dédouaner de votre responsabilité et vous dispenser des efforts nécessaires, est donc en réalité due en grande partie à vos décisions !
    Avec un déficit de 2,2 %, on se situait bien dans le cadre d'une dégradation conjoncturelle liée au jeu des stabilisateurs automatiques, comme le reconnaît d'ailleurs le rapport économique et financier du Gouvernement, et non dans une dégradation structurelle.
    Surtout, cette dégradation était compatible avec la programmation triennale transmise par la France à l'Union européenne. Il faut souligner que, sous le précédent gouvernement, la France avait retrouvé un excédent primaire : elle n'empruntait plus pour couvrir ses dépenses de fonctionnement et accélérait son désendettement. Notre rapporteur général le reconnaissait lui-même lors du débat sur le récent projet de loi de règlement pour 2001, en déplorant, certes, que cet excédent ne soit pas assez important à son goût, mais en notant l'évolution.
    Cette stratégie qui consiste à charger la barque du déficit budgétaire en 2002 et, au mépris de l'orthodoxie budgétaire, à fixer la norme de progression de la dépense pour 2003 en partant du collectif d'été, en y intégrant des dépenses non pérennes au lieu de se baser sur la loi de finances initiale, cette stratégie, donc, a pour conséquence de faire rebasculer le pays dans le déficit primaire, c'est-à-dire structurel, en 2003 ! Nous allons devoir à nouveau emprunter pour financer les dépenses de fonctionnement. Belle prouesse !
    Cette stratégie de creusement du déficit en 2002 que vous avez retenue, messieurs les ministres, s'avère donc dangereuse pour nos finances publiques, et désastreuse sur le plan européen - vous avez d'ailleurs déjà subi des remontrances, monsieur le ministre des finances. M. Raffarin pensait se donner des marges de manoeuvre. Il tablait sur un taux de croissance de 3 %. Or non seulement la croissance n'est pas au rendez-vous, mais le Gouvernement ne fait rien pour la soutenir, se contentant de mesures socialement injustes et économiquement inefficaces ; nous aurons l'occasion d'y revenir tout au long de la semaine prochaine.
    Il est légitime de s'intéresser à la question des prélèvements obligatoires, ainsi qu'aux comparaisons internationales, comme nous le propose le Gouvernement dans son rapport. Je souhaiterais toutefois attirer l'attention de chacun - mais j'ai constaté que vous l'aviez fait vous-même, monsieur le ministre - sur le danger qu'il y a à prêter plus d'attention que de raison aux comparaisons internationales concernant le taux des prélèvements obligatoires. Surtout, il faut rappeler, et sur ce point je serai d'accord avec notre collègue Jean-Pierre Brard, qu'il n'y a pas de lien établi entre le niveau des prélèvements obligatoires et le potentiel de croissance d'une économie.
    M. Xavier de Roux. Ah bon ?
    M. Didier Migaud. D'abord, et à l'évidence, des différences de taux peuvent trouver leur origine dans des choix collectifs et un pacte social très différent selon les pays concernés, et vous l'avez reconnu. L'écart entre la France et les Etats-Unis s'explique comme cela. Pour ma part, je l'assume et j'en suis fier, car c'est la preuve que la dimension de solidarité collective l'emporte, en France, sur les égoïsmes individuels.
    D'autres nuances sont susceptibles de rendre compte d'écarts qui peuvent paraître insoutenables. Comparaison n'est pas toujours raison. Par exemple, les cotisations qui forment le second étage de la retraite ont un caractère obligatoire en France, et entrent donc dans le montant des prélèvements obligatoires. En Allemagne, elles sont facultatives, et ne sont donc pas intégrées dans le calcul de ce montant, alors même que pas un seul salarié n'oublie de cotiser à ce titre, ce qui ne change donc rien en pratique. Un écart au niveau du taux des prélèvements obligatoires n'est donc pas nécessairement significatif.
    Il reste que ces comparaisons peuvent nous renseigner utilement sur les tendances à l'oeuvre chez nos voisins. De ce point de vue, il est heureux de constater qu'après avoir subi, entre 1993 et 1997, une période de forte hausse des prélèvements obligatoires, comme M. Méhaignerie doit s'en souvenir, la France s'est inscrite dans le mouvement général de stabilisation puis de baisse des prélèvements obligatoires. Il faut rappeler quelques chiffres. En 1992, le taux de prélèvements obligatoires était de 42,7 %. Entre 1993 et 1997, il a augmenté de 2,3 points, pour atteindre 45 %. Il me semble que M. Méhaignerie était alors au gouvernement. L'évolution spontanée l'a porté à 45,5 % en 1999. Depuis 1999, il a diminué de près d'un point : il sera de 44,6 % en 2002.
    L'engagement pris par la précédente majorité de stabiliser, puis de diminuer le taux des prélèvements obligatoires a donc été respecté : la droite a quitté le gouvernement avec un taux de 45 %, elle y revient avec un taux de 44,6 %.
    Les baisses des prélèvements votées sous le gouvernement de Lionel Jospin ont représenté une masse totale de 38 milliards d'euros d'allégements. Pratiquement tous les impôts ont baissé - c'est ce qui différencie notre politique de la vôtre -, et ils ont baissé pour tous.
    Pourtant, l'opposition d'hier a longtemps contesté la réalité de ces baisses d'impôts, en partant du constat que le produit des impôts continuait d'augmenter. Ce raisonnement simpliste, qu'un étudiant en finances publiques n'oserait pas tenir devant son professeur, a été martelé durant toute la campagne électorale avec aplomb et cynisme.
    Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre rapport, parce que vous proposez une heureuse distinction entre l'évolution dite spontanée des prélèvements obligatoires et celle qui découle des mesures législatives. Cette distinction permet de faire apparaître très clairement, et je tiens à vous remercier, la très forte réduction des prélèvements obligatoires engagée par Lionel Jospin depuis 1999. Vous l'avez niée tout à l'heure dans votre présentation orale, mais votre rapport écrit vous rattrape très largement.
    Chacun sait bien, et votre rapport l'explique parfaitement, qu'il faut distinguer le produit effectif des recettes fiscales, c'est-à-dire l'évolution induite par les mesures fiscales, du produit qui aurait été perçu sans mesures d'allégement, c'est-à-dire l'évolution spontanée. Le produit réel, c'est le montant des recettes fiscales tel qu'il résulte d'une évolution spontanée du seul fait de l'évolution économique des assiettes, diminué ou majoré de l'impact budgétaire des décisions fiscales contenues dans la loi de finances.
    Il faut croire que cette distinction, opportunément rappelée dans le rapport du Gouvernement, a eu des vertus pédagogiques très fortes, car je n'entends personne contester la réalité de la baisse de l'impôt sur le revenu et prétendre que les impôts augmentent. Je remarque pourtant que le produit attendu de l'impôt sur le revenu en 2003 est en augmentation de 1,6 milliard - à 53 milliards d'euros - par rapport à l'évaluation révisée associée au dernier collectif budgétaire. Si l'actuelle majorité suivait le raisonnement qu'elle tenait dans l'opposition, vous seriez contraint, mes chers collègues, de reprocher au Gouvernement de ne pas baisser l'impôt sur le revenu ! Mais nous ne voulons pas reprendre cette augmentation fallacieuse.
    Nous ne contestons pas la réalité de la baisse de l'impôt sur le revenu proposée par le Gouvernement en 2003. Nous constatons qu'elle est faible par rapport aux promesses électorales, inférieure à celle que nous avions nous-mêmes votée pour 2002. Et, surtout, nous critiquons le fait qu'elle est soit ciblée, sur quelques dizaines de milliers de foyer aisés - avec, notamment, la réduction supplémentaire d'impôt pour les emplois à domicile, dont nous avons parlé hier -, ce qui la rend très injuste et économiquement inefficace.
    On peut en tout cas se réjouir que, grâce à la distinction entre évolution spontanée et évolution volontariste, le débat politique ne soit plus pollué par des arguments infondés et politiciens.
    Une autre vertu de cette distinction est d'éclairer le passé et de souligner l'ampleur des baisses votées entre 1997 et 2001. On constate en effet clairement, à travers les données que vous fournissez, monsieur le ministre, l'ampleur des efforts accomplis à partir de 1999, puisque la différence très marquée entre l'évolution spontanée et l'évolution volontariste atteint 2,5 points de PIB en 2001. Cet écart représente les 38 milliards d'euros d'allégement votés.
    Cet effort considérable a permis, après les années de forte augmentation sous les gouvernements Balladur et Juppé, d'engager un processus de diminution du taux des prélèvements obligatoires, ramené à 44,6 % en 2002. Si ce taux n'a pas diminué autant que l'ampleur des baisses le laissait supposer, c'est parce que l'évolution spontanée des recettes fiscales a été très vigoureuse entre 1997 et 2002, reflétant la vigueur de la croissance.
    Il est en effet sans précédent de constater une élasticité des recettes fiscales par rapport à la croissance supérieure à 2 pendant trois années consécutives, de 1999 à 2001. Ce résultat tient fortement à la richesse en emplois de la croissance que la France a connue entre 1997 et 2001. Il faut en effet rappeler que jamais notre pays n'a créé autant d'emplois que ces années-là, que le nombre de chômeurs a diminué de 900 000, et que le nombre de bénéficiares du RMI a reculé pour la première fois depuis sa création. Ce sont ces bons résultats sur le front de l'emploi qui expliquent la forte évolution spontanée des prélèvements obligatoires.
    Surtout, il faut rappeler que, non content d'avoir réduit les prélèvements obligatoires, le précédent gouvernement a également profondément modifié leur structure.
    Trois principes ont guidé son action dans ce domaine.
    D'abord, il a opté pour la simplification du système des prélèvements, en réduisant les obligations fiscales, par exemple avec la création du régime micro-foncier, et en supprimant de « petits » impôts - plus de cinquante en tout - dont la vignette et le droit de timbre sur les permis de conduire et les cartes d'identité.
    Ensuite, dans un contexte d'allégements, il a souhaité renforcer la progressivité des prélèvements afin d'améliorer la justice sociale et fiscale.
    Enfin, il a fait le choix du soutien à la croissance, en améliorant l'efficacité des prélèvements et en les rendant plus incitatifs à l'égard de l'emploi.
    Chacune des baisses d'impôts réalisées pouvait se prévaloir de répondre à un ou deux de ces objectifs. J'en veux pour preuve la baisse ciblée de TVA sur le secteur du bâtiment, qui combinait l'allégement d'impôt avec une mesure fortement créatrice d'emplois : plus de 20 000.
    On aimerait trouver la trace d'un tel objectif dans le rabais sur facture ou la majoration de la réduction d'impôt pour emploi à domicile que vous proposez. Mais, à y bien regarder, on ne retrouve qu'une mesure injuste, électoraliste et ciblée, comme je l'ai dit tout à l'heure, une mesure dont, monsieur le ministre, vous avez été le premier à reconnaître, dans une interview donnée à un journal économique, qu'elle n'était pas destinée à soutenir la consommation ! Cette interview n'a pas eu l'écho qu'elle méritait.
    Aujourd'hui, en tout cas, grâce à une politique fiscale déterminée menée pendant cinq ans, notre système de prélèvement est plus progressif, plus juste, moins lourd et plus efficace.
    Il est plus progressif, car la baisse de l'impôt sur le revenu s'est faite de façon différenciée selon les tranches : elle a été plus forte pour les basses tranches que pour les plus hautes.
    Il est plus juste, car les ménages modestes ont bénéficié des allégements de taxe d'habitation et de redevance audiovisuelle, et la création de la prime pour l'emploi a permis aux non-imposables de voir leur imposition directe allégée. Car même les plus modestes payent des impôts - la TVA, la CSG, les impôts locaux, la redevance. Si on le souhaite vraiment, on peut baisser leurs impôts ! Mais il faut le faire de manière juste. Ce n'est pas le choix de ce gouvernement, qui privilégie des baisses ciblées sur un petit nombre de ménages. Notre système de prélèvement est aussi plus juste car le poids de la fiscalité indirecte, non progressive, a été fortement réduit par les baisses de TVA, avec la réduction d'un point du taux normal ainsi qu'avec des baisses ciblées. C'est aller dans le sens de la justice que de chercher une meilleure répartition entre la fiscalité directe et la fiscalité indirecte.
    Ce système de prélèvement est plus efficace, enfin, car moins complexe et plus incitatif au retour à l'emploi, avec un allégement des prélèvements qui pèsent sur le facteur travail, comme l'illustre la suppression de la part salariale de l'assiette de la taxe professionnelle, cet « impôt imbécile », comme disait François Mitterrand à propos de cette création de Jacques Chirac.
    Nous pouvons être fiers d'avoir, en cinq ans, réussi à diminuer les prélèvements de 38 milliards d'euros, dans le sens d'une justice sociale et fiscale renforcée.
    Les perspectives d'évolution des prélèvements obligatoires pour 2003, que décrit le rapport du Gouvernement, illustrent de façon flagrante l'impossibilité pour le Gouvernement de baisser les impôts de 30 milliards d'euros comme il l'avait promis.
    Je ne m'étendrai pas sur l'impact des baisses d'impôts de 2002, puisque le Gouvernement reconnaît que si l'évolution du taux des prélèvements obligatoires induite par la législation entraîne une baisse de 0,5 point de PIB, seulement 0,2 point est imputable au rabais de 5 %, tandis que 0,3 point provient des baisses d'impôts votées à l'initiative de Lionel Jospin. Le Gouvernement reconnaît donc que ses baisses d'impôts pour 2002 sont de plus faible ampleur que celles de son prédécesseur.
    Pour 2003, il prévoit une évolution des prélèvements obligatoires induite par la législation en diminution de seulement 0,1 point de PIB, la diminution totale de 0,3 point étant due pour 0,2 point à l'évolution spontanée. Si cette évolution spontanée est orientée à la baisse, à la différence des années précédentes, c'est malheureusement en raison du ralentissement économique que connaît la France. Le Gouvernement en est donc réduit à compter sur un ralentissement de la croissance pour afficher une baisse des prélèvements obligatoires. C'est un peu triste, et cela rappelle singulièrement la période 1993-1997, où le gouvernement de l'époque a asphyxié la croissance, avec des augmentations massives. Mais le plan de rigueur que vous pourriez préparer, monsieur le ministre, pourrait nous conduire à ce type d'augmentation. Durant cette période, et au contraire de la période 1997-2002, l'évolution spontanée du taux des prélèvements obligatoires était orientée à la baisse : son augmentation a été essentiellement due aux augmentations d'impôts votées sous MM. Balladur et Juppé.
    Le caractère très modeste des baisses prévues pour 2003 est amplifié par le fait que près de 80 % des baisses présentées sont en fait des baisses votées sous la majorité précédente. Sur 2,9 milliards d'euros prévus en 2003 ayant un impact sur les prélèvements obligatoires, 2,3 milliards proviennent en effet de baisses votées auparavant, l'essentiel étant d'ailleurs constitué par la suppression de la part salariale de l'assiette de la taxe professionnelle.
    Au-delà de 2003, même si le rapport sur les prélèvements obligatoires reste muet, nous trouvons d'intéressants développements dans le rapport économique et social annexé au projet de loi de finances. Nous aurons bien sûr l'occasion de revenir sur le contenu de ce rapport dans nos prochains débats, mais je ne résiste pas à la tentation de vous livrer dès à présent son contenu sur les futurs allégements d'impôts.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il faudrait pourtant résister ! Quel mélange ! Quel salmigondis !
    M. Didier Migaud. Non, car nous sommes bien dans le sujet, monsieur le rapporteur général. Il faut savoir relier les débats. Il y a un lien intime entre l'évolution des prélèvements obligatoires et la programmation pluriannuelle. D'ailleurs, vous l'avez suffisamment dit vous-même au moment de la révision de l'ordonnance organique de 1959, et vous avez eu tout à fait raison de le faire.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Votre discours servira deux fois !
    M. Didier Migaud. Ne vous inquiétez pas : la semaine prochaine, nous pourrons densifier notre propos.
    Dans sa présentation du projet de loi de finances, le Gouvernement table, avec une hypothèse de croissance annuelle de 2,5 %, sur 9 milliards d'euros de baisse des prélèvements d'ici à 2006. Mais à la page 143 du rapport économique et financier, on peut lire que « des hausses de prélèvements ont été provisionnées à hauteur de 3 milliards d'euros environ sur l'ensemble de la période ». Nous y voilà ! Non seulement le chiffre qu'avance le Gouvernement, 9 milliards d'euros de baisses d'impôts d'ici à 2006, est très inférieur aux 30 milliards promis, mais en plus il faut déduire de ces 9 milliards bruts 3 milliards de hausses « provisionnées » ! Il n'y aurait donc plus que 6 milliards d'euros de baisses nettes d'ici à 2006.
    Quelles sont ces hausses d'impôts que le Gouvernement a provisionnées ? Il s'agit d'abord, nous indique-t-il, d'une augmentation des cotisations UNEDIC, ce qui montre le peu de confiance qu'a le Gouvernement dans les dispositifs qu'il met en place pour endiguer la montée du chômage. Il s'agit aussi d'une augmentation des impôts décidée par les collectivités locales ; c'est écrit en toutes lettres dans le rapport économique et financier. Et là, mes chers collègues, nous touchons du doigt le vice caché de l'ambitieuse politique de décentralisation affichée par le Premier ministre.
    Car derrière la grande braderie du service public (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), que propose M. Raffarin aux élus locaux - qui veut mes surveillants ? qui veut mes routes ? -,...
    M. Philippe Auberger. Vous vous croyez à Lille ! Il ne manque plus que la bière, les moules et les frites !
    M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Migaud.
    M. Didier Migaud. ... il y a une mécanique infernale qui conduira immanquablement à une augmentation des impôts locaux. Du reste, je suis persuadé que vous vous posez la question.
    D'abord, chacun sait que l'effort financier de l'Etat n'est pas toujours à la hauteur des besoins véritables ; ainsi, 5 600 emplois de surveillants ont été supprimés par le Gouvernement dans le budget de l'éducation nationale.
    Ensuite, les charges de fonctionnement relatives aux compétences transférées sont nécessairement appelées à progresser. On imagine difficilement un département ou une région diminuer le nombre de surveillants dans les collèges et lycées, ou bien les crédits d'entretien des routes. Quand vous rapprochez le lieu de décision financière du lieu d'expression des besoins, vous prenez le risque que la pression qui s'exerce soit encore plus forte et plus directement suivie d'effets en termes de dépenses. C'est ce qui s'est passé pour la construction des collèges et lycées : les collectivités locales ont construit beaucoup plus d'établissements que ne l'aurait fait l'Etat. Il ne s'agit pas de déplorer cet état de fait,...
    M. Philippe Auberger. Surtout que c'est la gauche qui est à l'origine de la décision.
    M. Didier Migaud. ... mais de rappeler qu'il existe et à quoi il conduit en matière de progression de la dépense.
    En matière fiscale, le diable est souvent...
    M. Xavier de Roux. Dans le bénitier !
    M. Didier Migaud. ... dans les détails, et, pour les collectivités locales, la charge effective liée aux transferts dépendra en réalité des modalités de compensation retenues par le Gouvernement. En effet, ce dernier envisage de transférer des compétences en compensant ce transfert sur la base des dépenses engagées par l'Etat au moment de ce transfert.
    Pour les raisons déjà indiquées, l'écart entre la compensation financière, calculée sur la base des dépenses réalisées au moment du transfert, et les dépenses effectivement supportées par les collectivités locales augmentera donc chaque année.
    M. Daniel Prevost. Qui a supprimé la vignette ?
    M. Didier Migaud. Un tel mécanisme conduira inéluctablement les collectivités locales à augmenter les impôts locaux. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a prévu de faciliter cette augmentation, puisqu'il propose, dans le projet de loi de finances, de supprimer partiellement le mécanisme qui lie les taux des impôts locaux entre eux. Les collectivités locales pourront donc, au grand dam du MEDEF, faire progresser les taux de la taxe professionnelle. Le Gouvernement parie sans doute sur le caractère relativement indolore de ces futures augmentations, puisque cette taxe a fortement diminué grâce à la suppression que nous avons décidée de la part salariale de son assiette.
    Même dans le cas où l'affectation d'une partie d'un impôt national serait prévue, cela ne changerait rien. Ce serait alors cet impôt qui augmenterait pour couvrir les dépenses occasionnées, et le contribuable n'y gagnerait rien.
    C'est donc une mauvaise nouvelle pour les contribuables, puisque M. Raffarin ne propose en fait qu'un transfert du poids de la fiscalité du contribuable national vers le contribuable local, comme cela est avoué dans le rapport économique et financier.
    Au passage, il aura pris le risque de démanteler tous les mécanismes de solidarité qui jouent au niveau national et aggravé les inégalités géographiques. Ce démantèlement est d'ailleurs à l'oeuvre dans le projet de loi de finances - et nous aurons l'occasion d'y revenir avec Augustin Bonrepaux et Jean-Louis Idiart -, puisque la péréquation entre les collectivités locales diminuera en 2003, ce qui est en totale contradiction avec le discours que vous affichez.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cela a été corrigé hier soir !
    M. Augustin Bonrepaux. C'est de la manipulation !
    M. Didier Migaud. Vous avez corrigé modestement !
    En fait, qui peut imaginer que les collectivités locales pauvres pourront se payer le luxe de supporter les charges de service public que l'Etat ne veut plus assumer ?
    Pour conclure, je veux dénoncer fortement la duplicité du Gouvernement, qui ne pourra pas tenir sa promesse de baisser massivement les prélèvements obligatoires...
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Il est trop tôt pour l'affirmer !
    M. Philippe Auberger. En ce qui concerne les promesses non tenues, vous êtes des orfèvres, monsieur Migaud !
    M. le président. Monsieur Auberger, je vous en prie.
    M. Didier Migaud. ... et tente maladroitement de masquer cette impossibilité en continuant d'affirmer que cela reste possible.
    Il faut également dénoncer la mécanique secrète que masque le paravent attirant de la décentralisation libre-service. Cette mécanique, c'est d'abord l'augmentation prévisible des impôts locaux ou des impôts affectés aux collectivités locales, mais c'est aussi le démantèlement de tous les mécanismes de solidarité qui jouent au niveau national, au risque de menacer notre pacte social et de voir se développer les égoïsmes locaux.
    M. Philippe Auberger. Vous êtes en train de tuer Defferre !
    M. Didier Migaud. On le voit, l'analyse du rapport sur les prélèvements obligatoires remis par le Gouvernement est riche d'enseignements sur la politique du gouvernement de M. Raffarin.
    Cette politique socialement injuste et économiquement inefficace est prisonnière de promesses que le Gouvernement ne pourra pas tenir, faute de moyens et d'efforts adaptés à la situation. Cette politique est également irresponsable pour nos finances publiques et conduit malheureusement la France dans le mur.
    Enfin, elle provoque des réactions très virulentes de nos partenaires européens, qui ne comprennent pas et n'acceptent pas que des engagements, qu'ils ont eux-mêmes respectés, parfois au prix d'efforts rigoureux, et qui ont été librement consentis par le peuple français à l'occasion d'un référendum, soient unilatéralement remis en cause, au risque de faire exploser l'Union européenne.
    On doit déplorer que cette posture égoïste discrédite la France vis-à-vis de ses partenaires européens et dans les négociations qu'elle doit mener sur la PAC, la pêche ou encore la TVA sur la restauration. A cet égard, monsieur le ministre de l'économie, vous n'avez pas beaucoup d'arguments à opposer à nos partenaires européens.
    On ne peut que regretter une telle désinvolture de la part du Gouvernement, qui affaiblit la France sur la scène internationale à un point tel qu'il ne suffira pas d'un second porte-avions pour qu'elle retrouve le rang et le crédit qui étaient les siens.
    Il est temps que le Gouvernement comprenne que ce n'est pas en agitant de façon démonstrative ses armes aux yeux du monde que la France est respectée. Notre pays est respecté lorsqu'il parle d'une voix claire, sans duplicité ni double langage, et qu'il tient sa parole.
    M. Jean Roatta. C'est un expert qui parle !
    M. Didier Migaud. Je veux encore vous remercier du contenu de votre rapport écrit car il démontre que, sous le gouvernement précédent, on a bien opéré une réduction des prélèvements obligatoires, et que celle-ci s'est faite dans le sens d'une fiscalité plus redistributive, plus progressive et plus juste.
    Je veux aussi vous remercier pour l'aveu que vous faites en reconnaissant tout simplement qu'il ne vous sera pas possible, d'ici à 2006-2007, de réduire les prélèvements obligatoires comme vous vous y étiez engagé, ni même de réduire le déficit budgétaire. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Nicolas Perruchot. Merci pour la dette que vous nous avez laissée !
    M. Didier Migaud. Pour toutes ces raisons, nous sommes inquiets, messieurs les ministres, pour notre pays. En effet, nous savons, et nous ne nous en réjouissons pas, que les premières victimes d'une telle impasse budgétaire seront une grande majorité de nos concitoyens, vous l'avez malheureusement démontré dans le passé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le ministre délégué à la famille. Il ne fallait pas creuser la dette !
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finance, de l'économie générale et du Plan. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, afin de limiter les répétitions, je me bornerai à vous livrer quatre réflexions, qui sont autant de propositions et concernent la nature souhaitable du débat que nous avons aujourd'hui, la faible lisibilité des prélèvements obligatoires, laquelle n'incite pas au civisme fiscal, les moyens de réduire les risques de voir la montée des prélèvements des collectivités locales nuire gravement à la décentralisation et, enfin, la méthode permettant de réduire les prélèvements obligatoires.
    Selon moi, ce débat est destiné à terme à constituer une sorte de tronc commun à la discussion du budget et à celle de la loi de financement de la sécurité sociale. Mais, en pratique, cette année, il s'ajoute simplement aux discussions générales de ces deux projets de loi, compte tenu de la date à laquelle il a été décidé de l'organiser.

    Il serait préférable que ce débat optionnel sur les prélèvements obligatoires, s'il doit avoir de nouveau lieu - et je considère qu'il doit avoir lieu -, permette de réduire, par répercussion, le temps des discussions générales des deux projets qui sont examinés peu après, afin d'éviter les redites.
    Ce débat est intéressant car il constitue l'une des seules occasions pour la représentation nationale d'avoir une vue globale des prélèvements des collectivités locales, de l'Etat et, des régimes sociaux. Je pense qu'il faut donc en tirer des leçons.
    Ma deuxième réflexion concerne la lisibilité des prélèvements obligatoires, qui est loin d'être parfaite pour nos concitoyens. Ce manque d'intelligibilité ne constitue pas, cela va sans dire, une incitation forte au civisme fiscal et social. Toutes les tuyauteries qui ont été mises en place afin de permettre une prise en charge par l'Etat de dépenses des collectivités locales et, inversement une prise en charge par les collectivités locales de dépenses de l'Etat rendent le budget de la nation illisible pour nos compatriotes.
    M. Jean Roatta. Bien sûr ! Très bien !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Il nous faut donc à tout prix travailler - et cela devra probablement se faire durant les deux ans à venir - sur la lisibilité de ce budget. C'est une nécessité absolue car une meilleure lisibilité ne peut que conduire à une meilleure maîtrise des prélèvements obligatoires, qui sont passés de 38 % en 1978 à 45 % aujourd'hui, et ce sans compter que ce dernier chiffre ne prend pas en compte l'augmentation des déficits.
    Ma troisième réflexion concerne la montée des prélèvements des collectivités locales. Coûte que coûte, celles-ci doivent faire l'effort de contenir l'accroissement des prélèvements qu'elles opèrent, car, comme M. Mattei l'a souligné, les dépenses sociales ne ralentiront que lentement, surtout après l'échec manifeste de la précédente majorité à empêcher ce qui s'apparente à un véritable dérapage de la dépense publique.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous l'avez bien aidée ! Et vous, faites-vous mieux ? Regardez tout ce que vous avez décidé depuis trois mois !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Monsieur le député, la réforme constitutionnelle à venir des collectivités locales sera lourde de conséquences.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous avez agi avec démagogie !
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, vous allez pouvoir intervenir dans quelques instants.
    M. Augustin Bonrepaux. C'était juste une remarque !
    M. le président. N'oubliez pas que je pourrai couper le micro tout à l'heure si vous êtes trop long ! (Sourires.)
    M. Philippe Auberger. M. Bonrepaux a l'habitude : ça ne le changera pas.
    M. le président. Poursuivez, monsieur Méhaignerie.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Nous devons donc, mes chers collègues, analyser avec précision les mécanismes non vertueux qui poussent les collectivités locales à augmenter leurs dépenses.
    Je rappelle que, lorsqu'une collectivité dépense aujourd'hui 100 francs, elle ne demande que 10 francs à 50 % de ses contribuables. La dépense fait ainsi davantage plaisir que l'économie aux électeurs. Un tel mécanisme conduit fatalement à l'augmentation de la dépense.
    Didier Migaud a parlé d'un risque de démantèlement de la solidarité en ce qui concerne les prélèvements obligatoires. Toutefois, je vais donner un exemple qui montre que plus une collectivité prélève sur ses habitants, plus l'Etat l'aide. Ainsi, dans un département relativement riche quant au revenu par habitant, comme les Alpes-Maritimes, où les dégrèvements sur la taxe d'habitation représentent 800 millions de francs et où les dégrèvements-plafonnements en matière de taxe professionnelle s'élèvent à trois fois plus, la prise en charge par l'Etat des prélèvements et exonérations est cinq fois plus élevée par habitant que dans un département comme le Cantal ou la Creuse, où le revenu par habitant est 40 % plus faible.
    M. Didier Migaud. Il faut corriger cela ! Nous avions d'ailleurs commencé à le faire !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Ainsi, lorsqu'on nous dit que le système actuel est parfait, ...
    M. Didier Migaud. Non !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. ... je réponds, comme l'a fait Yves Mény en Avignon, lors d'une réunion où vous étiez présent avec moi, M. Migaud, que notre système de prélèvements obligatoires des collectivités locales d'une part pousse à la dépense, et, d'autre part, est profondément injuste.
    M. Jean Roatta. C'est vrai !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Messieurs les ministres, il faut que nous nous mettions ensemble au travail pour corriger ce système qui ne peut conduire qu'à l'aggravation de la dépense et à un manque de péréquations...
    M. Didier Migaud. Sur ce point nous sommes tout à fait d'accord !
    M. Augustin Bonrepaux. Nous attendons !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. ... entre les collectivités riches et les collectivités pauvres.
    En fait, depuis cinq ans, rien ne s'est amélioré ; bien au contraire, tout s'est aggravé.
    M. Didier Migaud. C'est faux !
    M. Philippe Auberger. Non : M. Méhaignerie a raison !
    M. Jean-Louis Idiart. C'est inexact !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Ma dernière réflexion a trait à la méthode permettant de réduire les prélèvements obligatoires. Si nous voulons les réduire, ce n'est pas pur plaisir, mais parce que nous savons que, dans 95 % des cas, il y a une relation directe entre le niveau élevé des prélèvements obligatoires, la faiblesse du pouvoir d'achat et la montée du chômage. Aujourd'hui, la France occupe la cinquième place dans l'Union européenne pour le coût horaire du travail mais la onzième pour le salaire net perçu par les salariés, étant donné le niveau des dépenses publiques.
    L'un de nos collègues a cité l'exemple de la Suède. Toutefois, il avait à moitié raison et à moitié tort : à moitié raison, dans la mesure où, c'est vrai, le niveau des prélèvements obligatoires en Suède est relativement élevé ; mais également à moitié tort, car à la grande différence de ce qui se passe en France, les dépenses publiques liées aux administrations et aux établissements publics y est très faible.
    Le vrai problème en France ne réside pas dans l'opposition entre secteur public et secteur privé, mais au fait que, globalement, le secteur public produit à 115 francs ce qui pourrait être produit à 100 francs. Par conséquent, si les marges de productivité qui existent dans les administrations et dans le secteur public étaient utilisées, cela permettrait de mieux préparer l'avenir et d'améliorer le pouvoir d'achat des salaires, conformément à ce que demandent nos compatriotes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Avant de conclure, je voudrais vous rappler le jugement sur le passé et sur le présent de deux hommes politiques.
    Evoquant les cinq années de gouvernement socialiste - et je réponds là à M. Migaud - M. Barre, que l'on ne peut pas accuser de manquer d'objectivité, disait : « La France n'a pas tiré du tout parti des années de croissance qu'elle vient de connaître, toutes les réformes ont été différées. »
    Quant à M. Schröder - et cela concerne M. Mattei -, il a déclaré : « L'Etat-providence, l'Etat-assistance, omniprésent, qui s'occupe de tout, retirant à la population son pouvoir de décision et décidant de tout à sa place, n'est pas viable financièrement et, de surcroît, inefficace et inhumain. »
    Nous sommes arrivés en France aux limites de ce qu'il est possible de faire en matière de prestations sociales. La priorité doit désormais être l'emploi et le pouvoir d'achat de nos compatriotes.
    Comment y parvenir ? Pour cela, il faut travailler ensemble à simplifier les procédures, à mettre fin à l'enchevêtrement des compétences - voilà du travail pour le ministre de la famille -, ainsi qu'à la superposition des pouvoirs et aux rigidités du statut du secteur public.
    Pour ma part, je crois relativement peu à la capacité des administrations d'Etat de proposer des simplifications, car, depuis trente ans, elles ne l'ont jamais fait. Je ne pense pas qu'elles le feront demain si le Gouvernement n'est pas décidé à remettre en cause la complexité des lois, l'addition de lois comportant 140 articles et la multiplication des procédures. Et, comme je ne suis pas sûr que l'Etat le fera, je vous dis, mes chers collègues : « N'attendez pas des autres qu'ils fassent ce que l'Etat ne peut pas faire. »
    Quant à moi, je vais ouvrir demain, avec le soutien de Renaud Dutreil, un bureau où nos compatriotes auront la possibilité, pendant quatre mois, de proposer eux-mêmes des simplifications des procédures...
    M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Très bien !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. ... et des moyens permettant de réduire des dépenses publiques coûteuses et rendant peu de services. Je crois, mes chers collègues, que c'est le meilleur moyen de faciliter la vie de nos compatriotes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, beaucoup de choses ayant été dites cet après-midi, je concentrerai mon propos sur quelques points particuliers.
    D'abord, je rappelle que, au cours des trente-cinq années 1965-2000, le niveau des prélèvements obligatoires a augmenté de façon continue dans l'ensemble des pays de l'OCDE, passant de 25,5 % du PIB en 1965 à 37,5 % en 2000 ; ce n'est donc pas un phénomène spécifique à la France.
    Premier constat : cette forte augmentation tient avant tout au développement des mécanismes de protection sociale et elle a été accentuée par le tassement de la croissance entre 1975 et 1985. Durant ces seules dix années, l'évolution des prélèvements obligatoires en France a augmenté de sept points de PIB, les cotisations sociales augmentant à elles seules de quatre points de PIB. Quant au taux de progression des dépenses de protection sociale, il a été deux fois plus important que celui du PIB. M. Mattei nous a indiqué hier matin, lors de son audition par la commission des finances et par celle des affaires sociales, que nous sommes confrontés aujourd'hui au même phénomène en matière de dépenses de santé. Toutefois, ce phénomène n'est pas propre à la France : on l'observe dans tous les pays développés.
    Sur la période 1985-2000, la stabilisation apparente des prélèvements obligatoires entre 1985 et 1995 masque des évolutions très divergentes selon la nature des prélèvements : la pression fiscale de l'Etat a diminué ; les prélèvements obligatoires des collectivités locales ont progressé d'environ un point de PIB ; les prélèvements de la sécurité sociale ont sensiblement progressé pour représenter plus de 20 % du PIB en 1995.
    Depuis 1995, les prélèvements obligatoires ont progressé à nouveau d'un peu plus d'un point.
    Deuxième constat : la structure des prélèvements obligatoires dans notre pays est très différente de celle des autres pays développés.
    Premier aspect : la part des prélèvements qui sert à financer la sécurité sociale est beaucoup plus élevée chez nous que chez nos voisins et elle consiste essentiellement en des cotisations sur les revenus d'activité, donc sur le travail.
    Deuxième aspect : la part de l'imposition sur la consommation représente presque un tiers du total alors que celle de l'impôt sur le revenu est plus faible que dans les autres pays. Mais, en France, l'impôt sur le revenu n'est acquitté que par la moitié des ménages, tandis que la CSG, à laquelle chacun d'entre eux est soumis, est classée parmi les prélèvements au bénéfice de la sécurité sociale et non pas parmi les impôts.
    Enfin, troisième constat, et je crois que là est le fond du problème : la structure de nos prélèvements obligatoires fait apparaître une très grande rigidité à la baisse, plusieurs orateurs l'ont souligné. J'y vois trois raisons : compte tenu de l'évolution de l'évolution démographique, il est très difficile de maîtriser la dynamique des prélèvements consacrés au financement de la protection sociale ; le poids des prélèvements sur la consommation, en particulier la TVA, entraîne une corrélation très forte entre la croissance de l'activité et la montée des prélèvements obligatoires ; la forte progressivité de l'impôt sur le revenu donne un très grand dynamisme à ce prélèvement.
    Entre 1997 et 2000, les ministres des finances successifs, Dominique Strauss-Kahn puis Christian Sautter, nous promettaient régulièrement une baisse des prélèvements obligatoires. Mais au contraire, quelques mois plus tard, on constatait systématiquement qu'ils avaient augmenté. Je rappelle que le record historique a d'ailleurs été battu fin 1999 : 45,7 % du PIB prélevés.
    M. Gilbert Gantier. Absolument !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Et c'est aussi fin 1999 qu'a été observée la constitution d'une véritable cagnotte, prouvant que l'Etat avait prélevé bien plus qu'il n'aurait dû le faire. Il est donc tout à fait faux de prétendre, comme notre collègue Didier Migaud, que les prélèvements obligatoires ont baissé.
    M. Didier Migaud. C'est pourtant dans le rapport !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Vous avez évoqué la chimère d'une baisse future des prélèvements obligatoires. Pour ma part, je veux vous parler de la réalité de la hausse constante observée entre 1997 et 2000.
    Même s'il n'y a pas lieu d'aborder aujourd'hui le débat budgétaire, monsieur Migaud, j'en profite au passage pour répondre à votre argumentaire sur le déficit de 2002. Je connais votre bonne foi, mais il me semble vraiment surréaliste ! Que s'est-il réellement passé ? En décembre 2001, vous votiez un budget en déficit de 30 milliards d'euros, mais, dès avril ou mai 2002, le déficit atteignait déjà 45 milliards d'euros, soit 50 % de plus. Et qui constatait ce déficit ? Des magistrats, M. Bonnet et M. Nasse, que Lionel Jospin avait nommés en 1997.
    M. Didier Migaud. Ils n'ont jamais dit cela !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. En juillet, vous déclariez que le rapport Bonnet-Nasse avait retenu les hypothèses les plus pessimistes. Hélas ! L'hypothèse la plus pessimiste s'est avérée exacte !
    M. Augustin Bonrepaux. Vous interprétez !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Chaque semaine qui passe montre à quel point les dépenses avaient été sous-évaluées et les recettes surévaluées.
    M. Didier Migaud. C'est vous qui le dites !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Le Gouvernement a donc hérité d'un déficit de 44,6 milliards d'euros, supérieur de 50 % à celui qui avait été voté par la précédente majorité. C'est bien ce déficit qu'il s'agit aujourd'hui de contrôler.
    M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Eh oui !
    M. Didier Migaud. Pour l'instant, vous n'avez fait que l'aggraver !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Plusieurs orateurs ont évoqué la manière de s'y prendre pour faire baisser les prélèvements obligatoires. Je souhaiterais pour ma part insister sur deux éléments essentiels.
    Le premier concerne à la fois le ministère des finances et celui de la santé : c'est l'absence de lisibilité des relations financières entre le budget de l'Etat et celui de la sécurité sociale. Tout le monde en est conscient, au premier chef le Gouvernement, qui, depuis le début de la session, a plusieurs fois insisté sur ce point. Le FOREC symbolise cette complexité, avec sa mosaïque de recettes, dont certaines devraient d'ailleurs être directement affectées à la santé, et non pas, à travers la baisse des charges, à la politique de l'emploi.
    M. Gilbert Gantier. Tout à fait !
    M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Evidemment ! C'est le cas pour les droits sur les tabacs et les alcools !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je pense en effet, par exemple, à la taxe sur les tabacs. Vous nous avez promis, messieurs les ministres, que le FOREC serait supprimé, ou plutôt rebudgétisé, à partir de 2004. Cet engagement doit impérativement être tenu.
    Deuxième élément, que Pierre Méhaignerie a rapidement évoqué : nous risquons d'assister à une dérive des prélèvements des collectivités locales. Il ne faudrait pas que, par un effet de vases communicants, à la baisse des impôts d'Etat corresponde une hausse des impôts locaux.
    M. Augustin Bonrepaux. C'est ce qui se prépare !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Or les facteurs de dérive des impôts locaux sont multiples, et essentiellement liés aux choix de l'Etat, à certaines politiques nationales. J'en citerai quelques-uns.
    Premier exemple, les 35 heures. Dans les entreprises privées, leur surcoût a été - en partie seulement - compensé par une baisse de charges. Dans les collectivités locales, les 35 heures ont été imposées, au contraire, sans la moindre réduction corrélative des charges. La politique des 35 heures se traduit donc directement par une hausse de la fiscalité locale.
    M. Gilbert Gantier et Mme Marie-Anne Montchamp. Absolument !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Le deuxième exemple a déjà été évoqué tout à l'heure. Le remplacement de la part salariale de la taxe professionnelle par une dotation versée par l'Etat prive les collectivités locales d'une fraction de recettes dynamique. L'indexation de la dotation est beaucoup moins favorable que le système précédent, qui faisait bénéficier les collectivités de l'évolution naturelle de l'assiette des salaires et les laissait libres de fixer leur taux de TP.
    M. Didier Migaud. Corrigez donc la fiscalité locale. Faites des propositions !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Le troisième exemple est l'une de ces politiques nationales certes utile, mais dont les conséquences financières et fiscales n'avaient absolument pas été évaluées par l'ancienne majorité : l'allocation personnalisée d'autonomie.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Eh oui !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Le choc de cette nouvelle allocation a engendré dès 2002 une augmentation moyenne de 3,5 points des taux de fiscalité des départements,...
    M. Xavier de Roux. Tout à fait !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... et, pour 2003, les prévisions disponibles sont extrêmement inquiétantes.
    Quatrième source de dérapage : on assiste à une explosion des normes, qu'elles viennent de Paris ou de Bruxelles, l'eau, les déchets ou sur la sécurité. Celles-ci provoquent une inflation des dépenses obligatoires que les communes n'ont d'autre choix que de subir.
    M. Xavier de Roux. Absolument !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. J'appelle tout particulièrement votre attention, messieurs les ministres, sur un point qui a déjà été évoqué par Didier Migaud et par d'autres orateurs : la relance de la décentralisation doit s'accompagner du transfert de ressources fiscales dynamiques. Si les collectivités locales conservent des assiettes fiscales archaïques et figées, elles se trouveront dans une situation extrêmement difficile et n'auront d'autre choix que d'augmenter les taux sur cette matière fiscale en déclin. On ne peut ainsi imaginer de nouveaux transferts de compétences significatifs aux régions sans leur concéder des recettes dynamiques, par exemple une partie de la taxe intérieure sur les produits pétroliers. Il faut mener une réflexion sur le lien entre la nature des compétences transférées et la nature des recettes fiscales des collectivités locales.
    Je terminerai par une évidence : il est impossible de garantir une baisse durable de l'impôt si celle-ci n'est pas gagée par une baisse durable de la dépense ; s'il y a dépense, il y a impôt.
    M. Didier Migaud. Les dépenses ? Vous les augmentez !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Sachez que la commission des finances est vraiment déterminée à obtenir la mise en place d'une nouvelle approche des budgets. A cet égard, je voudrais rappeler que la loi organique du 1er août 2001, qui institue ce débat, est également un instrument utile pour mieux approcher la dépense, en termes de missions, de programmes, d'objectifs, d'indicateurs, d'évaluation. Grâce à cette loi organique, à condition de savoir l'appliquer, on abandonnera l'idée reçue selon laquelle un bon budget est un budget qui augmente, un mauvais budget est un budget qui baisse, sans jamais se poser la question de l'efficacité de l'argent public utilisé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Soyez assurés, messieurs les ministres, que nous tous, membres de la commission des finances ou des autres commissions, nous sommes résolus à vous aider dans la recherche d'une meilleure efficacité de la dépense publique, parce que c'est la condition sine qua non d'une baisse durable des prélèvements obligatoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général, du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
    M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général, du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce premier débat sur les prélèvements obligatoires organisé dans l'hémicycle, à partir d'un rapport sans doute un peu trop technique, est l'occasion d'une première rencontre entre le Gouvernement et nos commissions des affaires sociales et des finances. Il nous donne l'occasion d'échanger nos arguments et de travailler en commun sur un sujet particulièrement compliqué : l'évolution des recettes publiques.
    En effet, la première partie de la loi de finances et la première partie de la loi de financement de la sécurité sociale traitent toutes deux des ressources publiques, celles de l'Etat et de la sécurité sociale. Il est important que nous ayons une vision commune de problèmes en forte interrelation. Les impôts et cotisations affectés aux administrations de sécurité sociale représentent en effet aujourd'hui presque la moitié du total des prélèvements obligatoires ; à titre d'exemple, la CSG rapporte plus que l'impôt sur le revenu.
    Or nous ne sommes pas parfaitement en mesure de contrôler l'évolution de masses financières aussi importantes. Pourquoi ? Tant la Cour des comptes que l'audit des finances publiques réalisé en juin dernier par M. Bonnet et M. Nasse ont insisté sur la complexité des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale ainsi que sur l'opacité croissante des comptes sociaux. Je cite les auteur de l'audit : « L'obscurité de cet inextricable dédale pose un problème général d'efficacité publique. » Nous ne pouvons plus, et surtout nous ne voulons plus continuer dans cette voie. Le système de financement de la sécurité sociale, sous la précédente législature, a été complexifié à loisir pour masquer des dépenses nouvelles non financées, à commencer par les funestes 35 heures. Il est grand temps d'y mettre bon ordre.
    Une plus grande clarté améliorera la compréhension mutuelle et donc l'appréhension des problèmes à traiter. Actuellement, chacune de son côté, la commission des affaires sociales et la commission des finances ont l'impression que ce qui est bon pour l'une est mauvais pour l'autre. Ainsi, la compensation intégrale par le budget de l'Etat des nouvelles exonérations de cotisations sociales garantit les ressources de la loi de financement, mais complique la recherche de l'équilibre de la loi de finances. Pourtant, le résultat sur le taux global des prélèvements obligatoires est complètement neutre : il n'y a pas de diminution globale de la pression fiscale, seulement un transfert entre les entreprises et les ménages, au bénéfice de l'emploi.
    Pour répondre à ce problème des flux de financement croisés, deux réponses parallèles doivent être apportées : la simplification des circuits de financement et la maîtrise des dépenses publiques et sociales.
    Simplifier les financements croisés entre l'Etat et la sécurité sociale signifie garantir à la sécurité sociale des ressources pérennes, stables et dynamiques. La loi de financement doit déterminer de manière autonome les recettes des régimes de sécurité sociale, sans qu'il soit toujours nécessaire de quémander des rallonges sur le budget de l'Etat. A cet effet, il faut déterminer, en concertation avec les partenaires sociaux, un périmètre stabilisé de financement pour la sécurité sociale.
    Cela implique notamment, à terme, la suppression du trop fameux FOREC : comment en effet discuter sereinement avec les gestionnaires de la sécurité sociale s'il faut chaque année, et même deux fois par an, trouver de nouvelles recettes pour compenser des dépenses relevant de la politique de l'emploi et dont la dynamique d'évolution n'a aucun lien avec celle des produits ?
    0Mais soyons clairs : de mon point de vue, la suppression du FOREC ne doit pas se faire au détriment de la sécurité sociale. Bien au contraire, il s'agit d'affecter directement aux branches de la sécurité sociale les recettes fiscales de ce fonds, en fonction de leur nature. Ainsi les droits sur les tabacs et les alcools doivent-ils naturellement revenir à l'assurance maladie. Le budget de l'Etat, financeur unique et naturel de la politique de l'emploi, doit seulement être la variable d'ajustement des exonérations de cotisations sociales, compensant lui-même ce qui ne l'est pas par l'affectation directe de recettes fiscales.
    Je propose l'installation d'un comité des finances sociales, associant parlementaires de nos deux commissions, gestionnaires des caisses et Gouvernement, qui permettrait de s'assurer de manière tout à fait transparente de la réalité des compensations d'exonérations de cotisations.
    En ce sens, une rebudgétisation totale du FOREC, outre qu'elle paraît peu réaliste pour le budget de l'Etat, nuirait à l'autonomie des recettes de la sécurité sociale. L'Etat, en revanche, doit intégralement respecter la loi Veil du 25 juillet 1994, qui prévoit la compensation, euro pour euro, des exonérations de cotisations. Cela implique plusieurs choses : rembourser la dette de l'Etat au titre du FOREC, soit 2,4 milliards d'euros ; compenser, pour la sécurité sociale, les 4,5 milliards d'euros qui correspondent aux 29 % des ressources du FOREC provenant de transferts effectués à partir de la sécurité sociale elle-même ; compenser intégralement les 6 milliards d'euros correspondant à la montée en charge du nouvel allègement Fillon. Au titre de ces trois mesures, l'Etat doit transférer à la sécurité sociale 13 milliards d'euros environ dans les cinq ans, puisque cet effort a commencé dès l'exercice en cours, avec le remboursement par la CADES de la moitié de la dette du FOREC. Il faudra que la croissance économique nous aide à atteindre cet objectif ambitieux, et nous comprenons fort bien qu'il ne soit pas possible de faire davantage en 2003.
    Ensuite, je tiens absolument à le rappeler, pour diminuer les prélèvements obligatoires, nous devons certes limiter la croissance des recettes publiques affectées à la sécurité sociale, mais cet objectif ne pourra être atteint qu'en maîtrisant aussi les dépenses sociales.
    Les ressources ne sont pas illimitées, pour des raisons évidentes de concurrence économique internationale, et on ne peut donc pas accepter de laisser filer les dépenses au seul motif qu'elles relèvent des « droits conquis », comme des irresponsables le disent des 35 heures, comme les mêmes l'ont fait en feignant de croire que la question des retraites était subalterne.
    Maîtriser les dépenses, c'est à l'évidence engager la réforme des retraites. C'est aussi renforcer la prévention des maladies, des accidents du travail et des conduites à risques. C'est limiter les prescriptions inutiles et centrer notre système de santé sur le juste soin. C'est éviter, enfin, l'enchevêtrement de dispositifs redondants ne permettant plus d'atteindre l'objectif visé, voire contradictoires, qu'il s'agisse de prestations familiales, de minima sociaux ou d'exonérations de cotisations.
    En définissant un cadre de financement stable pour la sécurité sociale, on pourra susciter en contrepartie un meilleur consensus sur les dépenses à prendre en charge, notamment le fameux « panier de soins », et on responsabilisera davantage les gestionnaires. Il ne faudra plus dire : « Vous avez des excédents parce que vous avez bien géré votre budget, donc on vous les pique pour donner à d'autres. » Chaque gestionnaire sera au contraire encouragé à agir pour améliorer encore ses résultats. En stabilisant la répartition des dépenses et des charges entre le budget de l'Etat, les fonds sociaux, les branches et les différents régimes, nous redonnerons du sens à la contribution sociale de chaque citoyen, et plus globalement au financement de la sécurité sociale.
    Mais nous devrons définir précisément qui paye quoi, ce qui relève de l'assurance de base, de l'assurance complémentaire et de l'assurance privée facultative, ce qui fait partie des prélèvements obligatoires et ce qui ne relève pas de la collectivité. Ce débat de fond sur le financement des dépenses de santé, comme d'ailleurs celui sur les retraites, sera l'occasion d'adopter une nouvelle philosophie des prélèvements obligatoires.
    A mon avis, nous ne sauverons notre sécurité sociale et nous n'éviterons l'explosion des prélèvements obligatoires affectés aux administrations de sécurité sociale que par la voie de la responsabilisation des acteurs, y compris et surtout de l'usager de la santé, qui devra lui aussi prendre conscience de l'impact de chaque euro dépensé sur la compétitivité du site France.
    Le chemin est difficile, nous le savons. Il serait beaucoup plus aisé de laisser croître aujourd'hui les dépenses courantes de santé et de retraite pour transmettre demain à nos enfants la charge de la dette résultant de ces dépenses. Mais une telle absence de volonté constituerait selon moi un comportement immoral que nous devons refuser. Les dettes d'aujourd'hui sont les prélèvements obligatoires de demain ; il faut s'en préoccuper tout de suite et renoncer à la cavalerie.
    Le Gouvernement que vous représentez, messieurs les ministres, a décidé d'emprunter ce chemin nouveau. C'est notamment le sens de la « politique de la main tendue » que Jean-François Mattei a proposée aux professionnels de santé. Sachez que vous pourrez compter sur notre entier soutien dans cette démarche. Dès la première loi de financement de la législature, la commission des affaires sociales vous proposera des pistes pour autonomiser et simplifier le financement de la sécurité sociale, responsabiliser les acteurs, maîtriser les dépenses et, in fine, parvenir à réduire les prélèvements obligatoires, afin de redonner le goût de l'initiative aux salariés et aux entrepreneurs de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, débattre des prélèvements obligatoires en présence des députés de nos deux commissions des finances et des affaires sociales, en présence du ministre chargé des finances publiques et de l'éminent représentant du ministre chargé de l'assurance maladie, est une première. Peut-être devrons-nous affiner nos méthodes, car de la qualité de ce débat, simple possibilité offerte par la loi organique du 1er août 2001, découlera le succès ou l'échec d'une démarche qui devrait logiquement à l'avenir prendre une place significative dans nos travaux. Je me bornerai à trois observations.
    La première est relative à la notion même de prélèvements obligatoires. Ce débat est placé en « facteur commun » de la discussion du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il n'est pas inutile de rappeler que le champ des prélèvements obligatoires, tel qu'il est défini et présenté, est beaucoup plus vaste que la simple addition des prélèvements obligatoires affectés à l'Etat et des prélèvements obligatoires affectés à la sécurité sociale. Il comprend aussi les prélèvements affectés aux collectivités locales et les prélèvements affectés aux régimes complémentaires et au régime d'assurance chômage, qui sont des « administrations de sécurité sociale », mais qui n'entrent pas dans le champ des lois de financement de la sécurité sociale, limité aux seuls régimes de base.
    Si un parlementaire particulièrement motivé tente de passer du concept « prélèvement obligatoire des ASSO » à celui des recettes présentées en loi de financement, il devra se livrer à une gymnastique intellectuelle particulière et commencer par soustraire les prélèvements obligatoires affectés aux régimes complémentaires et à l'UNEDIC, puis ajouter les « cotisations fictives » qui correspondent à des prestations fournies directement, c'est-à-dire en dehors de tout circuit de cotisations, par les régimes directs d'employeurs de la fonction publique et de certaines grandes entreprises publiques. A l'avenir, ces « tableaux de passage » devraient figurer dans ce rapport de prélèvements obligatoires ou dans une annexe du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
    La notion de prélèvements obligatoires apparaît comme un agrégat comptable. Elle donne une indication utile sur le niveau global de prélèvements dans notre pays et constitue un élément de comparaison avec à des pays européens proches, mais cette notion est-elle vraiment utile pour « clarifier » notre débat budgétaire et notre débat d'automne sur la sécurité sociale ? Je m'interroge. Un débat sur le programme pluriannuel des finances publiques aurait peut-être présenté davantage d'intérêt. La question fondamentale posée à la représentation nationale n'est-elle pas la suivante : quelles sont les priorités que nous souhaitons financer pour les années à venir, et à quel prix ?
    Ma deuxième observation est relative au « Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale », autrement dit le FOREC. A la décharge des auteurs de la loi organique relative aux lois de finances, le rapport sur les prélèvements obligatoires se justifie pour partie par la volonté de disposer d'une vision globale sur les prélèvements affectés à l'Etat et à la sécurité sociale. Cette approche est nécessaire, compte tenu notamment de la création du FOREC. A cet égard, l'affectation d'un certain nombre d'impositions au FOREC, qui n'en dénombre pas moins de huit, laisse effectivement rêveur. Je voudrais souligner un point qui me paraît important. Il convient de ne pas confondre deux éléments : d'une part, l'affectation croissante de recettes fiscales à la sécurité sociale, à travers la création du FOREC - ces recettes ne font que compenser à la sécurité sociale les pertes de cotisations ; d'autre part, l'existence d'une imposition affectée directement et de manière autonome à la sécurité sociale, la contribution sociale généralisée.
    Le fondement même de la CSG est bien de financer les régimes de sécurité sociale sur une assiette large incluant les revenus d'activité, les revenus de remplacement et les revenus du patrimoine. Il est vrai que le gouvernement précédent a jugé bon de déroger à ce principe en affectant une fraction de la CSG - 0,1 point - au financement de l'APA. La clarification des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale nécessite de marquer avec application la séparation entre les recettes sociales et les recettes budgétaires. La raison d'être des recettes de la sécurité sociale est d'être, par nature, affectées à la sécurité sociale. Cela va même au-delà. Contrairement au principe budgétaire de non-affectation, en ce domaine, il faut que la recette soit affectée à une branche de la sécurité sociale.
    Le FOREC, nous le savons tous, est avant tout une vaste opération de « débudgétisation ». Avant l'entrée en vigueur du PLFSS pour 2000, le financement des politiques de l'emploi était assuré par le budget de l'Etat, en vertu de la loi du 25 juillet 1994. Les allégements de charges constituaient des pertes de recettes de la sécurité sociale, compensées par des dépenses inscrites au budget de l'Etat.
    Avec le FOREC, les pertes de la sécurité sociale sont désormais compensées par des recettes fiscales affectées à ce fonds. Du même coup, les variations des prélèvements obligatoires affectés à l'Etat et à la sécurité sociale perdent quelque peu de leur sens ; je m'explique.
    Il est prévu une stabilisation du taux des prélèvements obligatoires affectés à la sécurité sociale en 2003. Ce taux s'élèverait à 21,9 %. Mais si l'on ne prend pas en compte l'affectation d'une fraction supplémentaire de taxe sur les conventions d'assurance - 660 millions d'euros -, ainsi que l'affectation d'une fraction supplémentaire de droits sur le tabac - 290 millions d'euros -, le montant des prélèvements obligatoires affectés aux ASSO serait inférieur à 1 milliard d'euros, ce qui correspond bien aux allégements de charges prévus. De manière plus générale, si l'on retranche l'ensemble des recettes transférées au budget de l'Etat pour abonder le FOREC entre 2000 et 2003, le montant des prélèvements obligatoires affectés aux fameuses ASSO serait inférieur de l'ordre de 10 milliards d'euros et le taux des ASSO serait non plus de 21,9 %, mais de 21,2 %, soit une différence notable.
    Je comprends naturellement les raisons qui ont conduit le Gouvernement à ne pas supprimer le FOREC en 2003. Rebasculer dans le budget le financement des allégements de charges aurait conduit à regonfler d'un seul coup les dépenses de l'Etat et à des changements importants dans ce champ, ce qui aurait été à coup sûr critiqué par de bons esprits. Il est essentiel que le financement des allégements soit compensé par la sécurité sociale. Il faut tourner le dos aux pratiques précédentes, qui ont mis le fonds de solidarité vieillesse en grande difficulté et aggravé le déficit de la caisse nationale d'assurance maladie, monsieur Migaud. Le Gouvernement s'y est engagé et je m'en félicite.
    Aujourd'hui, mais ce ne sera peut-être pas le cas demain, le FOREC est un « héritage » incontournable. Cependant, une réflexion doit rapidement s'engager sur la simplification de ses financements. Il m'apparaîtrait souhaitable pour la clarté de nos finances publiques de réduire le nombre des impositions - huit actuellement - et d'éviter le partage des impositions entre le budget de l'Etat et celui de la sécurité sociale.
    Ma troisième et dernière observation portera sur l'évolution des prélèvements affectés aux administrations de sécurité sociale. Le point crucial pour la France est la contrainte européenne de 3 % du PIB pour des déficits publics qui sont d'abord des déficits sociaux. Il sera très difficile de diminuer ce taux, tant les défis et les besoins futurs en matière de santé et de retraite apparaissent immenses. Nous espérons tous que les prélèvements chômage diminueront mais, en tout état de cause, l'impact de cette baisse ne sera pas immédiat et sera faible. Cette constatation ne doit cependant pas nous conduire à un « fatalisme de la dépense ».
    S'agissant des retraites, le premier rapport du conseil d'orientation des retraites, en décembre 2001, a fixé à quatre points de PIB le besoin de financement minimal nécessaire à l'horizon 2040, sans réforme de notre législation et de notre réglementation. Nous ne pouvons pas accepter que la compétitivité de notre économie soit remise en cause. Il faudra donc un effort partagé, comme l'a indiqué le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale du 3 juillet dernier. Les termes du débat sont clairement posés. Le Gouvernement engagera les discussions avec les partenaires sociaux dès le début de 2003, afin de pérenniser nos régimes de retraite par répartition.
    En matière de santé, il me semble important de réfléchir à ce qui doit être pris en charge par la solidarité nationale à travers l'assurance maladie obligatoire et à ce qui peut l'être par l'assurance complémentaire, sans remettre en cause la qualité des soins. Le groupe de travail annoncé par M. Jean-François Mattei lors de la réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale permettra d'y voir plus clair.
    Notre système de santé doit dépenser mieux à tout le moins, et éviter certains gâchis. Les orientations du ministre de la santé vont dans le bon sens. Les déficits sociaux sont dus à bien des égards à une insuffisance démocratique - vote de la ressource, évaluations et contrôles indépendants. La gestion comme l'héritage des années 1980-1990 resteront marqués par l'explosion d'une « société mixte » caractérisée par l'obscurité des décisions et la confusion des responsabilités.
    C'est pourquoi le problème en matière de ressources comme de dépenses publiques, c'est désormais moins leur niveau relatif ou absolu que l'affaissement démocratique des procédures qui président à leur gestion. Ce qui est en jeu, c'est donc la possibilité de rétablir une véritable démocratie financière fondée sur la transparence, que seule garantit la séparation des pouvoirs et des intérêts. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Jérôme Chartier.
    M. Jérôme Chartier. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, en vertu de l'article 52 de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances, la représentation nationale est invitée à débattre de l'évolution de l'ensemble des prélèvements obligatoires qui pèsent sur la richesse nationale.
    En cette période de transition entre l'ordonnance de janvier 1959 et celle d'août 2001, je souhaite rendre hommage à Alain Lambert et à Didier Migaud pour leur contribution et leur mobilisation, qui ont permis d'aboutir à une révolution silencieuse en matière de gestion publique et de démocratie budgétaire.
    M. Didier Migaud. Merci !
    M. Jérôme Chartier. Au fond, avec ce nouveau régime juridique, nous vivons un petit paradoxe. Pour redonner tout son sens à l'autorisation parlementaire de lever l'impôt, il a fallu rompre avec la culture du secret et de la rationalisation excessive, afin de revenir aux sources de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen et du régime parlementaire. En somme, il a fallu atténuer les excès de la seconde moitié du xxe siècle pour pouvoir concrétiser l'ambition des hommes de la Révolution quant au contrôle et à la transparence des charges publiques, fondement d'un régime démocratique.
    De ce point de vue, le débat que nous entamons aujourd'hui constitue la première étape d'une longue marche vers une double réhabilitation aux yeux de nos concitoyens : tout d'abord, la réhabilitation de la représentation nationale qui, tout en restant dans son rôle institutionnel, optimise ses capacités de contrôle de l'utilisation et de l'évolution des deniers publics ; ensuite, la réhabilitation de la légitimité même de l'impôt et des prélèvements, dont un grand nombre de nos concitoyens ignore l'utilité.
    Nous savons, monsieur le ministre des finances, que nous pouvons compter sur votre détermination pour afficher la plus grande transparence et optimiser les sommes importantes que vous gérez. Vous pouvez compter à votre tour, et vous le savez, sur notre farouche détermination pour expliquer à nos concitoyens le sens des choix du Gouvernement quant à l'utilisation des impôts qui leur sont réclamés. Pour reprendre une terminologie qui vous est chère, et que j'ai connue dans une autre vie, nous jouerons pleinement notre rôle de conseil d'administration pour faire en sorte que les Français, actionnaires-contribuables, puissent être satisfaits de leur exécutif. Le gouvernement d'entreprise est un gouvernement tout court. Le conseil d'administration est la représentation nationale, qui compte 898 représentants de 60 millions de Français collectivement propriétaires de leur Etat et qui forment, de façon prégnante, une nation qui nous est chère à tous. Le vocabulaire de l'entreprise rejoint finalement parfois utilement celui du politique.
    Alors, de quoi s'agit-il aujourd'hui ? De faire clairement le lien entre la richesse créée par les Français et l'utilisation de la part de cette richesse qui est prélevée à travers les impôts et les cotisations sociales pour l'agrément de leur vie quotidienne. En effet, pour revenir à des choses simples dans un débat qui ne l'est jamais, l'amélioration de la vie quotidienne des Français reste intemporellement la raison d'être des gouvernements, de leur majorité et de leur administration. Ensuite, il appartient à chaque gouvernement de proposer ce qu'il juge être de nature à améliorer la vie des Français, et c'est généralement là que les principales divergences d'opinion apparaissent et qu'à terme les majorités se font et se défont, à la lumière d'élections qui ne sont que le reflet du sentiment des Français face à des mesures qui ont porté leurs fruits ou qui n'ont été que des effets d'annonce.
    Dans cet esprit, je vous proposerai de réfléchir aux prélèvements obligatoires sous deux angles. Celui du passé : quelle est la situation dont hérite le Gouvernement à l'aube de cette nouvelle législature ? Celui du présent : quels sont les enjeux et l'impact du niveau des prélèvements obligatoires dans le cadre d'une économie ouverte et en concurrence, et quels instruments le Gouvernement doit-il utiliser pour que les Français paient moins de charges, moins d'impôts, tout en bénéficiant de prestations publiques efficaces et d'un niveau de protection sociale élevé, en somme l'idéal ?
    Sans vouloir redire ce que d'autres ont exprimé beaucoup mieux que moi dans cet hémicycle, je ferai quelques rappels qui ne nuiront pas. Au cours du xxe siècle, le taux des prélèvements obligatoires est passé de 10 % à 40 % dans de nombreux pays. En France, après quatorze ans de gestion socialiste pendant les vingt dernières années, nous avons atteint en 1999 le taux record de 45,6 %, soit une ponction sur la richesse nationale de plus de 615,6 milliards d'euros.
    Sur le premier aspect, qui concerne la période 1997 à 2001, je rappellerai quelques points marquants. D'abord, le gouvernement Jospin a connu une croissance d'une vigueur et d'une longévité sans précédents ces deux dernières décennies : 3,4 % en 1998, 2,9 % en 1999, 3,1 % en 2000. Contrairement à ce qui était affirmé, cette croissance était tirée par un environnement international particulièrement porteur. La politique économique et sociale du gouvernement Jospin, dont nos prédécesseurs prétendent qu'elle en fut le moteur, vint la pénaliser, la charger, et non la dynamiser. On en découvre d'ailleurs les rémanences dans un contexte économique plus tendu.
    Cette croissance très forte a permis aux administrations publiques d'engranger des recettes plus importantes que celles prévues initialement pendant cette période. Cela s'est traduit pour l'Etat par 71 milliards d'euros en plus et, pour l'ensemble des administrations publiques, par 92,6 milliards d'euros de prélèvements supplémentaires sur la richesse nationale. Ces recettes abondantes pouvaient être affectées de diverses manières. Une façon raisonnable aurait consisté à les utiliser pour le désendettement et la restauration des marges de manoeuvre de l'Etat, qui avaient été fortement amoindries par plusieurs années de réformes nécessaires pour la France. Mais tel n'a pas été le cas, puisque ces recettes ont été consacrées à la mise en oeuvre de projets politiques dont la France - l'Etat, les entreprises et les Français - n'avait pas les moyens. Je pense naturellement aux 35 heures, qui sont l'archétype de l'utopie sociale à laquelle chacun peut rêver, mais dont le poids financier et les implications concrètes étaient démesurés et, de plus, très mal anticipés. Résultat : plutôt que de jouer les fourmis, les socialistes furent les cigales de l'excédent de recettes fiscales et, non contents de ces recettes en plus, ils augmentèrent les prélèvements et creusèrent le déficit, qui passa de 267 milliards de francs en 1997 à 301 milliards en 2002, après audit des finances publiques.
    Naturellement, la dette publique augmenta en conséquence, passant de 740 milliards d'euros en 1997 à 809 milliards d'euros en 2000. A cet égard, il faut retenir deux chiffres : la dette publique représente aujourd'hui, en France, une facture de 13 720 euros par habitant ; les charges de la dette publique nette constituent aujourd'hui le second poste budgétaire de l'Etat, captant près de 14 % des ressources.
    S'agissant du bilan du précédent gouvernement, il y a toujours quelques idées fausses qui ont la vie dure et qu'il n'est jamais vain de contribuer à faire disparaître. Il en est ainsi, par exemple, des prélèvements obligatoires. Le gouvernement Jospin a effectivement engagé une très légère diminution du taux de prélèvement, mais après l'avoir considérablement augmenté en le portant à 44,9 % en 1997 et à 45,6 % en 1999, et en supprimant au passage de nombreux avantages fiscaux, ce qui pénalisa en particulier les familles.
    Il en est ainsi également de la croissance du budget de l'Etat, qui a augmenté pour mieux agir, nous a-t-on dit. Mais, en réalité, c'est le budget de fonctionnement de l'Etat, et notamment les embauches de personnel, sans véritable réflexion préalable sur les besoins, qui a capté une part croissante du budget général entre 1997 et 2002 : 40,7 % en 1997 et jusqu'à 43,3 % en 2002 d'après le rapport d'audit Nasse et Bonnet. Juste un chiffre : 26 000 postes ont été créés dans la fonction publique au cours des années 2001 et 2002.
    Ajoutez à cela les 35 heures, dont on peut estimer le coût entre 110 et 120 milliards de francs par an, soit 16 à 18 milliards d'euros, et vous aurez tout compris : la France a grignoté les fruits de la croissance en améliorant le train de vie de l'Etat, mais pas celui des Français, qui sont finalement les grands perdants des années du gouvernement Jospin.
    Là encore, deux chiffres : la France se situe à présent en treizième position au niveau européen pour le pouvoir d'achat par habitant et au treizième rang sur quinze pour le nombre de demandeurs d'emploi.
    En somme, entre 1997 et 2002 on a eu de l'argent en plus, mais on a donné de l'argent et du travail en moins aux Français. Tel est le bilan de l'entreprise France du gouvernement Jospin. Je comprends pour ma part que les Français actionnaires-propriétaires aient eu envie de changer de stratégie, et donc d'exécutif.
    Il faut maintenant que le nouveau gouvernement tienne le cap non seulement en matière de baisse des prélèvements obligatoires, mais aussi en termes de simplification de la structure de ces prélèvements, pour avoir un impôt plus lisible et un meilleur service rendu au contribuable. Ce cap, le Gouvernement le tiendra, j'en suis convaincu.
    En la matière, nous savons que notre crédibilité à baisser la pression fiscale sera directement fonction de notre capacité à réduire structurellement les dépenses de l'Etat et de la sécurité sociale. Si nous voulons être efficaces, si nous voulons obtenir des résultats, si nous voulons enfin rendre crédible la parole des décideurs publics en facilitant le quotidien de nos concitoyens, nous devons à tout prix éviter deux écueils.
    Premier écueil : annoncer le grand soir de la grande réforme de l'Etat. Cela fait des années que les gouvernements successifs parlent de grande réforme sans que nos concitoyens en voient les résultats, il ne faut plus les décevoir sur ce point.
    Second écueil : persister dans une approche strictement quantitative de la réforme. Nous avons connu les excès de l'actuelle opposition, qui consistaient à résumer l'action publique en une équation simple et systématique : si un problème se présente, on y répond par plus de fonctionnaires et plus de dépenses publiques. A l'inverse, nous devons rester vigilants : il ne faut pas juger la réforme du service public à l'aune des suppressions de postes dans la fonction publique et en cherchant systématiquement à obtenir des baisses spectaculaires.
    Soyons déterminés à diminuer les dépenses, maintenons fermement le cap fixé par le Président de la République et par le Premier ministre. Veillons toutefois à ne pas nous préoccuper seulement de l'économie sans nous interroger sur l'intérêt de la réforme. Il ne s'agit pas de nous lancer dans une course effrénée à la suppression de postes dans la fonction publique, pour figurer dans le livre Guinness des records.
    A cet égard, je tiens à saluer deux orientations du Gouvernement.
    La première consiste à concentrer massivement l'effort de réduction des prélèvements sur les charges sociales, qui pénalisent surtout les emplois peu qualifiés en créant « un péage à l'entrée » sur le marché du travail. En cela, nous répondons, je crois, au souhait des Français de travailler et de retrouver une promotion sociale par le travail.
    La seconde orientation, et j'insisterai sur ce point, monsieur le ministre des finances, consiste à développer une approche qualitative en introduisant la notion de performance et en favorisant une culture des ressources humaines pour améliorer de manière significative le service rendu aux usagers.
    Nombre d'observateurs font de la réforme de votre ministère l'un des symboles de la réforme de l'Etat. En la matière, je souhaite que l'on ne se trompe ni de rythme, ni de méthode.
    Premier impératif : la définition d'un cap clair pour la législature, celui de la simplification des règles fiscales, d'un meilleur rendement de l'impôt et d'une amélioration des relations entre les contribuables et l'administration fiscale. On peut rêver : de contrôleur, celle-ci doit devenir conseilleur.
    Second impératif : une méthode de travail fondée sur la concertation et la hiérarchisation des priorités. En d'autres termes, nous devons d'abord partir d'une définition des besoins des administrés, mettre en oeuvre une véritable politique des ressources humaines, inexistante à ce jour, avant d'en tirer toutes les conséquences en matière d'adaptation des effectifs. C'est dans cet ordre et pas dans un autre que doivent être hiérarchisées les priorités. Inverser le problème en commençant par se fixer des objectifs abstraits et dogmatiques en matière de suppressions de postes constituerait une erreur qui ne mobiliserait pas les agents de l'Etat, sans lesquels on ne peut rien faire.
    C'est bien cette méthode, monsieur le ministre, que j'ai cru déceler dans votre approche des nouvelles missions de votre ministère et des décisions relatives au traitement de l'impôt.
    Sur ce dernier point, nous avons pu lire cette semaine dans les gazettes que le Gouvernement enterrait définitivement la retenue à la source, qui figurait au rang des solutions applicables pour faciliter la vie des contribuables. Permettez-moi, là encore, quelques réflexions personnelles. Si, au lieu de rechercher des effets spectaculaires en choisissant des mesures dans l'air du temps, vous avez préféré la voie du pragmatisme en évaluant concrètement les conséquences de chaque décision, vous êtes sur la bonne voie. En effet, si la retenue à la source présente l'avantage de supprimer le décalage d'un an entre l'impôt et le revenu sur lequel il est assis, et de simplifier la vie quotidienne des Français, il faut néanmoins tenir compte des difficultés réelles de mise en place qu'elle présente.
    J'en retiendrai deux. Tout d'abord, la retenue à la source ne peut dispenser d'une déclaration annuelle - ou alors il faudrait renoncer au système des réductions et déductions dont les familles bénéficient.
    Ensuite, elle signifierait, en l'état actuel des expériences - puisque l'expérimentation existe en partie au niveau des élus locaux -, le transfert de la charge de travail à l'employeur. Or, à l'heure où nous souhaitons faciliter les relations entre l'administration et les entreprises, notamment les plus petites, serait-il vraiment judicieux de leur transférer une charge administrative supplémentaire, dont elles se passent volontiers jusqu'à présent ?
    Je suis convaincu, monsieur le ministre, que la retenue à la souce reste l'une de vos priorités d'action, et que vous engagerez le débat et la réforme le moment venu, une fois que vous vous serez assuré de son réalisme et de son bien-fondé. Soyez certain en tout cas que nous vous apporterons notre soutien dans cette démarche, et plus généralement lorsqu'il s'agira d'introduire la culture de la performance et du résultat dans la sphère publique.
    Dans la logique de suivi et de contrôle qui est la nôtre, il me reste à vous interroger sur la définition et les modalités concrètes de suivi des indicateurs de performance, qui constitueront l'armature essentielle de nos futures lois de finances. Je vous remercie par avance de votre réponse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances a été adoptée pour répondre notamment à la demande du Parlement de disposer, préalablement à l'examen de la loi de finances, d'une vision globale de l'ensemble de nos finances publiques et des choix qui les sous-tendent.
    Dans cet esprit, la loi a prévu qu'un rapport sur les prélèvements obligatoires devait être présenté au Parlement. Cette réflexion sur la politique de prélèvements doit nous permettre de répondre à des questions essentielles. D'où proviennent-ils ? Où sont-ils affectés ? Quel est leur niveau par rapport à l'activité économique ? Quels sont les sacrifices demandés à l'économie et à nos concitoyens ? Quel est l'objectif visé ?
    Le rapport présenté par le Gouvernement ne répond que partiellement à ces questions et laisse dans l'ombre un certain nombre de points. Je n'ai pas trouvé, par exemple, de réponse claire à la question, pourtant simple, de la mesure des sacrifices demandés à nos concitoyens. Or, et c'est l'un des fondements essentiels du pacte républicain, chacun doit contribuer au financement de la charge commune non pas en fonction des avantages personnels qu'il tire de l'action de l'Etat, mais à raison de ses facultés contributives. En contrepartie, l'Etat a pour mission de garantir l'intérêt général, le bien de la communauté, et d'assurer l'égalité entre les citoyens.
    A la lecture du rapport, à celle du projet de loi de finances pour 2003 et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, et après vous avoir entendu aujourd'hui, je crains que le Gouvernement ait quelque peu maltraité ce principe. En effet, les sacrifices demandés à nos concitoyens sont loin d'être équitablement répartis, et les ressources procurées par ces prélèvements sont loin d'être justement et efficacement orientées. La raison m'en paraît simple : votre gouvernement est à la recherche d'une charge égale de l'impôt plutôt que d'une égalité entre les citoyens par l'impôt.
    En effet, les mesures programmées pour 2003, ainsi que celles prises en loi de finances rectificative témoignent de votre volonté de réduire de façon outrancièrement sélective les prélèvements obligatoires. Ainsi, et pour cette raison, la seule question qui mérite d'être posée est de savoir à qui profitera cette baisse et qui en pâtira.
    A cet égard, les tableaux 4 et 5 ont le mérite d'être clairs. Le premier décrit les mesures du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 sur le facteur travail, encore que cette notion mériterait d'être clarifiée et précisée. Les baisses de prélèvement sur le facteur travail s'élèvent à 4,1 milliards d'euros : 1,1 milliard d'euros pour les ménages et 3 milliards d'euros pour les entreprises. Ce sont donc ces dernières qui profiteront pour l'essentiel de la baisse des prélèvements.
    Il est intéressant de mettre ce chiffre en perspective avec l'évolution de la part des cotisations sociales sur les revenus d'activité dans le financement de la sécurité sociale. Dans son rapport de septembre 2001 sur l'exécution de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, la Cour des comptes révèle des chiffres édifiants. Sur la période allant de 1980 à 2000, la diminution de 68 % à 97 %, soit près d'un tiers - de la part des cotisations sociales sur les revenus d'activité dans le financement du régime général de sécurité sociale - a bénéficié aux entreprises. A contrario, le taux des prélèvements sur les ménages destinés à financer le régime général a régulièrement augmenté pour passer de 3 % du PIB à 5,7 %, tandis que celui des prélèvements sur les entreprises, après avoir atteint 9,2 % entre 1984 et 1986, a régulièrement baissé pour retomber à 7,2 % en 2000.
    Une étude effectuée en 2001 par la Communauté européenne démontre par ailleurs que, contrairement aux idées reçues, la France se situe en bas de l'échelle en matière d'imposition des sociétés. En effet, par le truchement d'une multitude d'exonérations et d'allégements, le taux effectif de taxation se situait aux environs de 16,7 % en 1998, au lieu de 33,33 %, qui est le taux légal affiché.
    L'étude des mesures concernant les ménages est tout aussi intéressante. Grâce au tableau 5 du rapport, nous pouvons souligner les modifications prévues : baisse de l'impôt sur le revenu ; augmentation de la réduction d'impôt pour l'emploi de salarié à domicile ; réforme de la prime pour l'emploi pour les salariés à temps partiel ; mesure de soutien aux donations des grands-parents aux petits-enfants. Nous reviendrons sur toutes ces questions à l'occasion de la discussion de la loi de finances. Pour 2003, quatre dispositions sur cinq tendent donc à diminuer de 1 139 millions d'euros les prélèvements obligatoires, contre une qui va les augmenter de plus de 700 millions d'euros concernant la taxe sur les tabacs.
    A quels ménages vont profiter ces mesures ? Il n'est point besoin de se lancer dans des calculs savants pour comprendre que les plus hauts revenus seront les grands bénéficiaires de vos cadeaux fiscaux. Prenons l'exemple de la réduction de l'impôt sur le revenu. Elle profite à ceux qui payent des impôts, soit 53 % des foyers fiscaux. C'est donc près d'un foyer fiscal sur deux qui ne tirera aucun profit de cette mesure. Mais là n'est pas la seule raison de l'injustice. En effet, en raison du caractère uniforme de cette réduction, ce sont les plus hauts revenus qui profiteront des plus importants rabais.
    Il en va de même pour l'augmentation de la réduction d'impôt pour l'emploi de salarié à domicile. Une fois de plus, seuls les ménages qui ont les moyens d'engager des employés de maison profiteront de votre politique fiscale.
    En revanche, aucune mesure n'est prise pour diminuer la pression fiscale qui pèse sur les revenus les plus modestes. Aucune mesure ne vise à diminuer l'impôt le plus injuste qui soit : la TVA. Cet impôt indirect est pourtant celui qui pèse le plus sur les revenus des ménages. Il représente plus de 44,8 % des recettes de l'Etat, contre 18,6 % pour l'impôt sur le revenu. Ce ratio, comme par hasard, ne figure pas dans votre rapport. Il aurait pourtant éclairé l'opinion publique. En outre, cet impôt aveugle pèse plus lourdement sur les contribuables à faibles revenus. De nombreux travaux montrent en effet que les ménages les plus modestes consacrent près de 13 % de leurs revenus à cette taxe, contre seulement 8 % pour les plus aisés.
    Vous avez choisi de faire figurer dans votre rapport un graphique sur le taux des prélèvements obligatoires dans quelques pays de l'OCDE en 2000. Il place la France au deuxième rang des pays présentés, avec un prélèvement équivalent à 45,5 % du PIB. Mais vous auriez pu aussi choisir de faire figurer dans ce rapport une autre étude de l'OCDE qui démontre que la France chute au bas du tableau lorsque le montant des impôts et des cotisations sociales des pays concernés est diminué des prestations reversées.
    Un tel choix, il est vrai, n'aurait pas servi une démonstration qui tend à prouver que les Français disposant des plus hauts revenus payent trop d'impôts et de cotisations sociales et que, par conséquent, ils ont intérêt à s'exiler fiscalement. Permettez-moi d'abord de faire remarquer que toute désertion fiscale équivaut purement et simplement à un abandon de toute solidarité.
    En effet, quelle fierté peut tirer un Etat de droit à prendre des mesures ciblées, au seul prétexte de retenir quelques riches malheureux qui désapprouvent l'objectif républicain de réduction des inégalités ? Rappelons en outre qu'en 1997 et 1998 le nombre de contribuables partis à l'étranger n'a représenté que 0,2 % des personnes assujetties à l'impôt sur le revenu. La perte de recettes correspondante n'a atteint que 1,3 % du rendement annuel de l'ISF.
    Si nous comparons le montant des impôts et les taux moyens d'imposition des pays qui seraient, selon vous, plus « attirants » pour ces grosses fortunes, vous constaterez sans mal, comme l'a fait le journal Le Monde du 7 avril 1999, que en-dessous de 1,2 million de francs de revenus annuels pour un célibataire et de 1,6 million de francs pour un couple marié, il vaut mieux être imposé en France. Si le Gouvernement a pour seul souci de soulager ceux qui gagnent plus de 1 million de francs par an, je comprends ses choix en matière de politique fiscale. En revanche, s'il se préoccupe de la France d'en bas, comme il se plaît à le répéter, franchement je ne comprends plus !
    Enfin, votre rapport aurait pu également s'intéresser à une comparaison entre pays européens sur la progressivité de l'impôt. C'est ce qu'a fait fort heureusement le Conseil des impôts dans une étude portant sur les revenus de 1998. Celle-ci montre que, sur un coût salarial de 80 000 francs par an - ce qui correspond au SMIC - 42 % sont prélevés en France sous forme de cotisations et d'impôt sur le revenu contre seulement 35 % en moyenne en Allemagne, au Royaume-Uni, en Italie et aux Pays-Bas. Par contre, pour un coût salarial de 400 000 francs, le prélèvement global est de 45 % en France, comme dans les autres pays européens. Entre les deux situations, l'écart des taux de prélèvement est donc de quatre points en France contre dix chez nos voisins. Les dispositions prévues dans le projet de loi de finances pour 2003 sont de nature à réduire encore davantage cet écart et, par conséquent, à aggraver d'autant les inégalités entre contribuables, au bénéfice des plus hauts revenus.
    Pour l'ensemble de ces raisons, il faut bien convenir que les sacrifices les plus lourds sont consentis par les Françaises et les Français les plus modestes, c'est-à-dire la très grande majorité d'entre eux.
    L'objectif de corriger cette injustice fiscale rejoint celui du rétablissement du sens de l'impôt dans sa vertu première : financer les dépenses communes, assurer un bon fonctionnement des services publics, permettre l'expression de la solidarité nationale en faveur de celles et ceux qui en ont le plus besoin.
    Dans cet esprit, depuis longtemps, nous demandons la réduction du taux de la TVA, cet impôt sur la grande pauvreté qui frappe en premier lieu la consommation populaire. Il doit être principalement réduit pour les produits de première nécessité.
    Nous proposons également de nous attaquer à la spéculation financière par la suppression des avantages fiscaux dont elle bénéficie. Les revenus du capital doivent être imposés comme ceux du travail. Il est de simple justice de faire entrer les biens professionnels dans l'assiette de l'impôt sur la fortune, en veillant évidemment à épargner la quasi-totalité des petites et moyennes entreprises ; nous présenterons un amendement dans ce but. Cette mesure de justice, qui contribuerait à combattre les dérives spéculatives, a d'ailleurs été considérée par le Conseil national des impôts comme une mesure efficace.
    Dans le cadre du financement de la sécurité sociale, nous proposons une solution alternative aux exonérations de cotisations patronales. Jamais, en effet, la preuve n'a été fournie que ces exonérations créaient des emplois. Par contre, on sait que, concentrées sur les bas salaires, elles tirent toutes les rémunérations vers le bas. Nous proposons donc de les remplacer progressivement par des bonifications d'intérêts bancaires, sous condition d'investissements pour le développement et l'emploi.
    La taxation des revenus financiers doit devenir une priorité. Si la CSG touche les revenus des ménages, les revenus financiers, eux, n'y contribuent pas. Pourtant, l'actualité de la crise boursière montre la nocivité de l'extension exponentielle de ces accumulations financières. En les taxant, nous améliorerons la situation financière de la sécurité sociale et affirmerons mieux le principe de solidarité.
    Enfin, il convient de moduler les cotisations patronales. Nous pourrions différencier les taux de cotisations selon la taille des entreprises, la part des salaires dans le chiffre d'affaires ou encore selon le dynamisme de leur politique d'emploi.
    Nous reviendrons évidemment sur l'ensemble de ces propositions à l'occasion de l'examen du PLF de 2003 et du PLFSS.
    J'entends évidemment l'objection des tenants du dogme libéral, qui craignent de voir le dynamisme économique menacé par un excès de prélèvements obligatoires.
    Je les entends répéter à satiété qu'un abaissement du coût du travail par des allégements de charges conjugués à d'autres exonérations favoriserait le dynamisme des entreprises et la création d'emplois. Mais paradoxalement, je les entends aussi refuser de créer des emplois, fussent-ils moins chers, dès lors qu'ils ne seraient pas à leurs yeux économiquement justifiés, alors que, sans évolution de la demande, la production des entreprises sera privée de débouchés. C'est dans cette contradiction que se niche la très médiocre manipulation tendant à accréditer l'idée que seule la production prévaut.
    Faudra-t-il longtemps encore rappeler cette évidence que, même dans une économie de marché, la satisfaction des besoins des hommes, et donc leur capacité de consommation, peut être à l'origine de la dynamique économique ? C'est pour cette raison que seule l'égalité sociale peut être économiquement efficace.
    C'est ce qui nous fait dire, et nous fera dire encore, que les dispositions fiscales et sociales injustes que votre gouvernement propose seront économiquement inefficaces. Votre logique est contre-productive ; le choix d'une politique de l'offre au détriment de la demande n'est pas au service de la croissance et de l'emploi ; par contre, nous en sommes sûrs, elle continuera de nourrir l'accumulation et la spéculation financière, socialement et économiquement improductives et humainement insupportables.
    Notre pays souffre déjà trop d'une mauvaise répartition de l'effort contributif et d'une bien mauvaise orientation des recettes qu'il procure. Votre politique va encore aggraver ces défauts, et ce sont encore les Françaises et les Français, dans leur majorité, qui en pâtiront. C'est pourquoi, plus que jamais, nous serons à leurs côtés afin d'exiger plus de justice sociale pour plus d'emplois et plus de croissance.
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux pour dix minutes.
    Afin de respecter l'horaire que nous nous sommes fixé, je prie les orateurs de faire preuve de concision. Bien entendu, cette remarque s'adresse à l'ensemble de nos collègues, et pas particulièrement à vous, monsieur Bonrepaux.
    M. Pierre Hériaud. De toute façon, la concision n'est pas dans ses habitudes !
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce débat sur les prélèvements obligatoires a le mérite de nous donner l'occasion de souligner la différence fondamentale qui sépare notre conception de la politique fiscale de celle de la droite. C'est pourquoi je remercie le Gouvernement d'avoir appliqué l'article 52, alinéa 3, de la loi organique relative aux lois de finances.
    Certes, je ne me fais pas d'illusions sur la volonté qui est à l'origine de cette décision et que les premières interventions que nous avons entendues mettent assez en évidence : l'objectif est d'abord de minimiser les mesures de réforme et de baisse des prélèvements pourtant sans précédent mises en oeuvre par le gouvernement sortant, avant de mener une nouvelle offensive de communication autour des baisses d'impôts décidées dans la foulée des promesses démagogiques du Président de la République.
    En ce qui concerne la première tentation, celle consistant à nier la réalité des baisses d'impôts réalisées sous la précédente législature, le rapport que vous nous communiquez apporte de précieux enseignements, qui sont d'ailleurs en contradiction avec vos propos : il permet en effet de constater que la baisse des impôts a été une réalité entre 1997 et 2002, d'autant plus qu'il marque bien la différence entre l'évolution spontanée et celle provoquée par les mesures nouvelles, qui représente une baisse équivalant à plus de 2,5 % du PIB sur la période.
    Cela tranche avec la présentation tronquée de la réalité qui a été longtemps faite. Vous semblez oublier, en effet, que la progression des recettes fiscales est liée à la croissance et à la réduction du chômage. Je suis surpris que personne n'en parle, parce que cette bonne conjoncture a permis d'accroître le produit fiscal sans pour autant faire peser cette augmentation sur les contribuables, qui ont bénéficié au contraire de réductions significatives.
    Il est vrai que les avis d'imposition qui sont actuellement distribués font apparaître une baisse de 5 %. Mais si vous étiez objectif, monsieur le ministre, vous auriez également fait mention de la réduction votée en loi de finances pour 2002.
    Mais plus que sur l'ampleur des réductions d'impôts, c'est surtout sur leur philosophie que je voudrais faire porter ce débat, car celles que nous avons mises en oeuvre avaient pour but essentiel de réduire les injustices et de soutenir la croissance.
    Baisser les impôts n'a jamais représenté pour nous un impératif. Ce n'est pas une obsession idéologique. Si l'impôt peut paraître lourd à supporter pour les ménages, il ne faut jamais oublier qu'il est aussi le moyen de financer des actions publiques en faveur de l'aménagement du territoire, de la redistribution entre les plus aisés et les moins favorisés, ou du système de protection sociale dont tous les Français bénéficient. L'impôt est le fondement de la solidarité, et la recherche d'économies conduit à réduire les services. J'ai d'ailleurs entendu un orateur de la majorité s'inquiéter de certaines suppressions d'emplois.
    Vous nous expliquerez en effet comment assurer la sécurité dans les collèges avec moins de surveillants, ou la sûreté des routes en période hivernale avec moins d'agents de l'équipement. La solidarité exige de faire fonctionner certains services.
    Bien sûr, s'il s'agit d'éviter les gaspillages, nous sommes prêts à vous aider. La mission d'évaluation et de contrôle que nous avons créée est faite pour cela, et nous continuerons à contribuer à ses travaux. Mais attention aux économies d'ordre idéologique : elles ont des conséquences sur l'ensemble de nos concitoyens.
    Je l'observe avec satisfaction, le rapport n'oublie pas non plus - à la différence de beaucoup de représentants de la droite - que toute comparaison internationale des prélèvements obligatoires doit tenir compte de la manière dont est assuré le financement des systèmes de protection sociale. Quant un pays renvoie au secteur privé et aux choix individuels des domaines essentiels comme la maladie ou la retraite, il s'épargne une part conséquente des prélèvements obligatoires. Mais il prive aussi une bonne part de ses citoyens, surtout les plus défavorisés, du bénéfice des transferts de richesses et des prestations sociales, que la plupart des Français jugent essentiels. Car le taux de prélèvement obligatoire n'est pas un chiffre perdu dans les nuées, il correspond à une réalité tangible.
    A propos de la sécurité sociale, et alors que certains s'étonnent devant un déficit pourtant prévisible, je note au passage que vous avez contribué à son aggravation en augmentant les honoraires des médecins. Maintenant, bien sûr, il faut que certains paient l'addition.
    Par ailleurs, je vous rappelle que le gouvernement d'Alain Juppé, rompant avec toutes les promesses de M. Chirac, avait conduit une politique sans précédent d'augmentation des prélèvements, comprenant surtout une hausse de deux points de la TVA. A l'inverse, nous avons réduit la TVA, qui pèse sur l'ensemble des contribuables. Mus par la recherche de l'efficacité économique, nous avons même appliqué le taux réduit aux abonnements de gaz et d'électricité et aux travaux du bâtiment.
    L'exemple de la TVA est révélateur. En effet, vous prétendez que certaines personnes n'acquitent pas d'impôt. Mais tous les Français paient des impôts, non seulement la TVA, mais aussi la CSG ou les impôts locaux. Il ne faut pas parler uniquement de l'impôt sur le revenu, sous prétexte qu'il est le plus juste parce que le plus progressif. Mais c'est justement pour cette raison que vous le réduisez, aboutissant comme M. Juppé à faire porter la pression fiscale sur les impositions les plus injustes, précisément celles que nous avons diminuées.
    De même, nous avons réduit les impôts locaux. M. Méhaignerie aussi les juge injustes. Mais s'il regrette que certains contribuables n'acquittent plus l'impôt local, il reste indifférent à ce que d'autres, disposant de revenus extrêmement élevés, puissent également ne pas payer d'impôt en raison des déductions importantes dont ils vont bénéficier. Si nous avons baissé l'impôt local, c'est justement parce qu'il est injuste et extrêmement lourd pour les ménages les plus modestes, dont nous voulions revaloriser le pouvoir d'achat.
    Je n'énumérerai pas la liste complète des réductions et suppressions d'impôts que nous avons décidées. Je me contenterai, à propos des collectivités locales, d'exprimer une crainte dont j'aurai l'occasion de reparler lors de la discussion du projet de loi de finances.
    Je voudrais d'abord démentir M. Méhaignerie, qui a prétendu que la péréquation n'avait pas progressé avec le gouvernement de Lionel Jospin. Je rappellerai deux chiffres qui figurent dans le rapport sur les finances locales : en 1996, la péréquation de la DGF était de 8,69 % ; en 2001, elle était de 14,23 %. Et, cette année, pour revaloriser la DSU, vous êtes obligés de pomper sur la revalorisation qui était due aux collectivités locales.
    Les premières mesures que vous prenez vis-à-vis des collectivités locales constituent un coup d'arrêt à la péréquation, pour laquelle nous éprouvons une grande inquiétude. Vous voulez, paraît-il, l'inscrire dans la Constitution. Mais vous l'aviez déjà inscrite dans la loi Pasqua, et quel a été son sort ?
    En ce qui concerne l'impôt sur le revenu, je tiens à souligner à quel point notre réforme était différente. Nous avons en effet modifié davantage les taux les plus bas, parce ce sont ceux qui touchent les catégories les plus modestes. Certes, nous avons également réduit légèrement les tranches les plus élevées, mais nous nous sommes surtout préoccupés des catégories les plus modestes. Et pour ceux qui ne paient pas l'impôt sur le revenu, nous avons créé la prime pour l'emploi, qui bénéficie à 8 millions de travailleurs, à qui - on l'a vu à deux reprises - vous n'avez même pas trouvé le moyen de donner une petite augmentation : rien dans le collectif budgétaire et rien dans le projet de loi de finances. Il est vrai que vous procédez à une réforme de la fiscalité, mais à qui profite-t-elle ? Aux plus aisés. Pour les autres, il n'y a rien.
    Vous poursuivez la baisse de l'impôt sur le revenu à hauteur de 1 % pour bien montrer que vous souhaitez un taux de prélèvements obligatoires inférieur à 50 % mais, par ce biais, vous accordez des cadeaux fiscaux insupportables, inadmissibles, exorbitants, comme cette déduction fiscale pour l'emploi à domicile de salarié dont vont bénéficier environ 70 000 familles. Elles auront une prime de 10 000 francs. L'effet d'aubaine sera exorbitant, puisque la réduction s'applique sur les revenus de 2002. Le but n'est donc même pas de créer des emplois, puisqu'ils existent déjà ! Vous ne leur offrez ce cadeau que pour leur faire plaisir !
    Les autres, les plus modestes, vous ne leur proposez rien !
    M. le président. Je vous prie de conclure mon cher collègue.
    M. Augustin Bonrepaux. Je pense avoir suffisamment souligné l'injustice de votre politique fiscale. Je voudrais maintenant terminer en montrant combien elle est inefficace. Hier, vous n'avez pas répondu à ma question, et je vais expliquer pourquoi.
    M. le ministre délégué à la famille. Hier, vous n'avez pas écouté la réponse !
    M. le président. Que votre développement soit rapide.
    M. Augustin Bonrepaux. Je termine, monsieur le président, mais je vous fais remarquer que M. Migaud, tout à l'heure, n'a pas épuisé son temps de parole.
    M. le président. Aucune péréquation n'est prévue en ce domaine, monsieur Bonrepaux. (Sourires.)
    M. Augustin Bonrepaux. A favoriser les ménages les plus aisés, vous rendez stériles les économies d'impôts réalisées. Le rapport économique annexé au projet de budget montre bien que cette mesure est fondamentalement une mesure d'offre.
    En effet, la formule retenue devrait relativement plus bénéficier aux ménages les plus imposés, ceux dont le taux d'épargne est en moyenne le plus élevé. Cette conclusion est conforme à celle de l'INSEE, pour qui la déduction fiscale sera épargnée plus que consommée. A l'inverse, une augmentation de la prime pour l'emploi se serait tout de suite traduite dans l'évolution de la croissance.
    Ainsi, l'absence d'impact sur l'économie de ces baisses d'impôts, promises par M. Chirac et que le Gouvernement et la majorité, échaudés par l'expérience malheureuse d'Alain Juppé, s'acharnent à appliquer, ne pourra finalement conduire qu'à une hausse des prélèvements sur l'ensemble des Français, afin de réaliser le bouclage des prochains budgets. C'est ce qui nous attend, car vous allez dans le mur. La croissance ne sera pas celle que vous annoncez, vous le savez bien, d'autant plus que vous ne faites rien pour l'encourager. Il faudra donc, à un moment donné, trouver d'autres recettes, et ce seront alors les plus modestes, les plus défavorisés, qui en feront les frais. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Olivier Dassault.
    M. Olivier Dassault. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, à l'épreuve des défis d'un monde en pleine mutation, la France a plus d'atouts qu'elle croit, mais moins qu'elle pourrait en avoir.
    Dans l'univers concurrentiel, désormais sans frontières et libéré d'idéologies qui n'appartiennent plus qu'au passé, malgré ce que je viens d'entendre il y a quelques minutes encore, nous sommes, plus que beaucoup de nos partenaires, pénalisés par des pesanteurs excessives.
    Le Président de la République, le Premier ministre et vous-même, monsieur le ministre des finances, avez eu l'occasion de mesurer et de dénoncer, au cours des deux campagnes électorales de ce printemps, les entraves accumulées ces dernières années.
    Combien de fois ne les ai-je déplorées, à Beauvais et dans ma circonscription de l'Oise ?
    La charge excessive des impôts qui accablent nos concitoyens et grèvent notre activité est l'une des principales.
    Il est aisé de constater que l'essentiel de la surimposition provient des impositions directes : impôt sur les revenus, impôt sur les bénéfices, cotisations sociales, impôts sur les salaires, taxe professionnelle.
    Le constat est là, il est alarmant : le niveau global des prélèvements obligatoires français est l'un des plus élevés d'Europe, on l'a dit à plusieurs reprises ; le taux français est supérieur à 45 % du PIB, contre 37,2 au sein de l'OCDE et 41,45 % au sein de l'Union européenne.
    Les prélèvements directs sur les entreprises sont aussi plus élevés en France qu'ailleurs - 5,5 % du PIB, contre 1,6 % en Allemagne - et la fiscalité du patrimoine y est écrasante.
    Dans un contexte de concurrence fiscale accrue, la France lutte à armes inégales.
    Alors que l'harmonisation fiscale communautaire tarde à se dessiner, il est primordial que notre pays redevienne compétitif et attractif.
    En réponse, nous devons mettre en oeuvre la réforme fiscale d'envergure pour laquelle nous avons reçu la confiance des Français. C'est une exigence de justice démocratique et c'est une nécessité absolue pour nos entreprises.
    La réforme doit être juste. Mieux encore, elle devra être équitable.
    L'article XIII de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 nous rappelle que « Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable. Elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. » M. Vaxès l'a rappelé.
    Ce principe fait école, non seulement auprès de certains d'entre nous, mais aussi sur les bancs de l'opposition. Nous sommes déjà quelques-uns, en effet, à penser que l'impôt sur le revenu devrait toucher chaque Français. Les plus favorisés, certes, mais aussi les plus modestes, même si ce n'est que de manière symbolique.
    Parce que, avec Benjamin Constant, je crois que « la responsabilité est le corollaire nécessaire de la liberté », il me semble qu'il serait équitable que même les moins favorisés s'acquittent de la contribution nécessaire à l'amélioration du système de santé, à la réforme des retraites, aux efforts considérables faits pour la sécurité et la justice.
    M. Didier Migaud. Incroyable !
    M. Olivier Dassault. En participant financièrement à cet effort, les plus modestes d'entre nous seront eux aussi partie intégrante du corps social et comprendront les actions menées.
    La méthode compte autant que la portée de la réforme. Nous devons, à l'image du Premier ministre, nous montrer pédagogues.
    La réforme fiscale est une nécessité absolue pour préserver les emplois de nos entreprises et prévenir les délocalisations.
    Au-delà de la baisse des prélèvements obligatoires, la réflexion doit dès à présent s'engager sur d'autres aspects de la réforme fiscale. Je pense notamment à l'impôt sur les sociétés, dont le taux ne devrait pas être supérieur à 33,33 %. Comme l'a rappelé Philippe Auberger, il est de 25 % en Allemagne et en Grande-Bretagne. Cet exemple inspire aujourd'hui la plupart de nos partenaires européens. Même en Suède, pays le plus taxé d'Europe, les sociétés ne sont plus imposées qu'à 28 %.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Exact !
    M. Olivier Dassault. La France doit aider ses entrepreneurs et renforcer l'attractivité fiscale de son territoire.
    Pour que la France ait la place qu'elle mérite au coeur de la mondialisation, il est primordial de renforcer sa vocation mondiale, notamment en évitant la concurrence fiscale et les doubles impositions.
    Simplifier et alléger la fiscalité des revenus ou du patrimoine, permettre la transmission des entreprises, c'est aussi lutter contre les délocalisations des entrepreneurs et l'exil des experts, des savants et des jeunes qui veulent entreprendre, car eux aussi quittent le pays, comme les footballeurs et les acteurs de cinéma.
    En effet, ce ne sont plus seulement ceux qui ont réussi qui s'expatrient, mais aussi ceux qui veulent réussir. Or nous ne pouvons plus nous priver de ceux qui entreprennent et qui innovent.
    Il convient également de reconquérir, au moins partiellement, le capital de nos entreprises. Des propositions ont été formulées pour réorienter l'épargne de l'assurance vie et celle du logement vers les actions des entreprises. Vous avez raison, monsieur le ministre : il faut aussi promouvoir l'épargne salariale et l'actionnariat salarié.
    La France attire par son savoir-faire, qui sait être innovant dans la tradition. Rendons à nos entreprises, à nos manufactures, à nos industries comme à nos artisans leur compétitivité et leur liberté. Ils créeront ainsi autant de richesses que d'emplois.
    Oui, les allégements de charges sociales décidées par le gouvernement d'Edouard Balladur et poursuivis par Alain Juppé ont permis, selon une étude incontestable de l'INSEE, la création de 460 000 emplois.
    En plus des mesures pour la création d'entreprise annoncées lundi à Lyon par le Premier ministre - et dont je me réjouis -, en plus de la suppression de la dernière tranche de la part salariale dans l'assiette de la taxe professionnelle que vous mettez en oeuvre dès cette année, monsieur le ministre, et qui se traduira par un allégement pour les entreprises de 1,83 milliard d'euros, cette diminution des charges doit être accentuée. Dois-je rappeler que notre pays est le seul à cumuler les droits de succession, un impôt annuel sur le capital, une imposition des plus-values ainsi que des droits de mutation sur les transactions immobilières ?
    L'effort de simplification et de modernisation de nos impôts et de notre système fiscal dans son ensemble s'accompagne aussi d'un souci permament d'efficacité et de rationalisation de la dépense publique. Pouvons-nous à la fois réduire les impôts et les charges, réformer notre système fiscal, consolider la croissance et réduire nos dépenses ? Oui, j'en suis persuadé. Nous l'avons d'ailleurs déjà fait, et avec succès.
    Je rappelle volontiers en effet que, de 1986 à 1988, les impôts ont été réduits de 15,24 milliards d'euros et le déficit budgétaire a été diminué de 9,15 milliards d'euros. En 1994, dans une conjoncture économique particulièrement difficile, le gouvernement d'Edouard Balladur a allégé l'impôt sur le revenu de 3 milliards d'euros. Souvenons-nous également des rentrées fiscales supplémentaires engendrées par la croissance, qui n'avaient pas été prévues mais furent considérables.
    Pourquoi ne pas réussir aujourd'hui ce qui a été possible hier ?
    La France a connu, grâce à une volonté politique affirmée en 1986, et maintenue jusqu'au début des années 1990, un cycle positif de croissance et une réelle décrue du taux des prélèvements obligatoires.
    Si elle se donne une nouvelle fois les moyens de ne pas augmenter plus que de raison ses dépenses publiques, elle peut espérer une croissance des recettes fiscales qui autorisera dans le même temps la baisse des impôts et la diminution du déficit.
    Je ne doute ni de votre volonté ni de votre détermination, monsieur le ministre, pour mener à bien cette ambitieuse réforme sans plus attendre. Je vous y encourage et je vous apporte mon soutien. C'est aujourd'hui que les marges de manoeuvre, mêmes réduites, existent. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à Mme Marie-Anne Montchamp.
    Mme Marie-Anne Montchamp. Les circuits de prélèvements obligatoires en France manquent, c'est le moins que l'on puisse dire, de lisibilité, notamment dans leur découpage entre l'Etat, les collectivités locales et la sécurité sociale. On compte en effet pas moins de vingt-trois formes d'impôts directs, trente-deux formes d'impôts indirects, douze types de recettes non fiscales, huit comptes spéciaux du Trésor, vingt-sept organismes divers d'administration centrale, trente-six mesures de fiscalité locale indirecte.
    La mise en oeuvre, aujourd'hui, de l'article 52 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, s'avère donc particulièrement pertinente et nous pouvons tous nous en féliciter.
    En 2001, les prélèvements obligatoires s'élevaient à 660 milliards d'euros, soit environ 45 % du produit intérieur brut. Au cours de la législature précédente, leur taux a globalement augmenté, à cause, notamment, de la désastreuse défaillance du financement des 35 heures, défaillance qui, monsieur le rapporteur général, continuera de se faire sentir dans les collectivités locales avec de sérieuses conséquences pour la fiscalité locale, compte tenu, notamment, des accords collectifs qui produiront leurs effets dans les prochaines années.
    En 2002, le taux des prélèvements obligatoires devrait atteindre 44,6 % du PIB, soit 0,4 point de moins qu'en 2001. Le Gouvernement veut l'abaisser à 44,3 % du PIB en 2003. Cet objectif sera atteint pour moitié grâce à la baisse de l'impôt sur le revenu votée dans le collectif budgétaire d'été, et pour l'autre moitié par des baisses d'impôts et de charges de 3 milliards d'euros prévues pour 2003.
    C'est sur ce deuxième point que j'insisterai plus particulièrement, après avoir salué quelques mesures clés prévues par le Gouvernement.
    La première, le contrat-jeune sans charges, institue l'équivalent d'une franchise totale de cotisations patronales pour les jeunes peu qualifiés. Cette mesure pourrait créer quelque 40 000 emplois, sans compter la hausse du pouvoir d'achat des jeunes concernés. On ne peut que s'en féliciter. On doit également se réjouir que soit ainsi ménagé un accès direct au premier emploi pour ces jeunes qui, sans cela, resteraient à l'écart du marché du travail, donc à l'écart de la formation professionnelle et d'un projet professionnel.
    Par ailleurs, la clarification du financement de la sécurité sociale, qui représente près de la moitié des prélèvements obligatoires de notre pays, me paraît être une nécessité pour prévenir de nouveaux artifices budgétaires comme le financement de la réduction du temps de travail par le FOREC. Ainsi, dès 2003, dans un souci de transparence et de rigueur, est programmée une compensation intégrale vis-à-vis de la sécurité sociale des allégements de charges prévus par le projet de loi Fillon, soit environ 1 milliard d'euros.
    En outre, le remboursement de la réduction du temps de travail par un supplément de recettes de la taxe sur les conventions d'assurance, à hauteur de 700 millions d'euros, et par la hausse des droits sur le tabac, à hauteur de 300 millions d'euros, est une disposition qui va dans le bon sens puisque, à la suite de ces deux principales mesures, les prélèvements obligatoires de la sécurité sociale seront stabilisés. La sécurité sociale devrait donc retrouver 2 milliards d'euros de recettes compensant l'effort de financement qu'elle aura accompli en faveur de la réduction du temps de travail. La mise en place d'un système clair, simple et transparent était bien une priorité ; le Gouvernement n'a pas manqué d'y faire face : cela doit être souligné.
    J'en viens à la baisse des cotisations sociales.
    Nous le savons, le niveau des prélèvements obligatoires dans notre pays est relativement élevé par rapport à celui de nos voisins de l'Union européenne, dans un contexte international où la concurrence fiscale est de plus en plus prégnante sur le capital productif et le travail qualifié, bref sur les capacités d'attraction de notre territoire. Maintenir ce niveau élevé de prélèvements aurait de graves conséquences sur nos perspectives de croissance et d'abaissement du taux de chômage au regard des réformes fiscales déjà engagées par nos proches voisins européens.
    L'objectif affiché du Gouvernement visant à renforcer notre potentiel de production et d'incitation au travail pour stimuler l'emploi me paraît donc particulièrement pertinent : pertinent pour améliorer nos grands équilibres financiers, pertinent pour renforcer notre dynamisme social et engager la réforme.
    En réduisant le différentiel entre coût du travail et revenu net du salarié, la réduction du poids de l'impôt sur le revenu nous aidera à retrouver les conditions de la croissance, sans compter, bien sûr, la hausse du pouvoir d'achat des ménages et le soutien à court terme de la consommation. Plus spécifiquement, les baisses de charges ciblées sur les catégories de la population les moins qualifiées me semblent être la seule solution alternative.
    En effet, l'assouplissement indispensable des 35 heures induit forcément une hausse du coût du travail. De même, l'unification des différents niveaux de SMIC, tout aussi indispensable à l'équité entre les branches professionnelles et entre les entreprises, renchérit les coûts salariaux pour les personnels peu qualifiés. Or, ainsi que M. le rapporteur général l'a très justement rappelé dans son rapport sur les prélèvements obligatoires, l'offre de travail non qualifié est hypersensible aux coûts salariaux. A titre d'exemple, une hausse des cotisations sociales représentant 10 % du salaire minimum diminue de 6 % l'offre de travail non qualifié par les entreprises, en particulier par les petites et moyennes entreprises.
    Face à ce constat, on ne peut que se féliciter que le Gouvernement ait annoncé de nouveaux allégements de charges au niveau du SMIC.
    Ces différents éléments, mes chers collègues, illustrent une nouvelle fois en quoi la stratégie fiscale doit s'efforcer d'améliorer la performance de notre économie, une économie dans laquelle chacun puisse, en responsabilité, contribuer à sa mesure à l'effort collectif. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre Hériaud.
    M. Pierre Hériaud. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, pour la première fois, en application de l'article 52 de la loi organique du 1er août 2001, relative aux lois de finances, nous sommes en possession du rapport présenté par le Gouvernement, celui-ci pouvant faire l'objet d'un débat dans chacune des deux assemblées.
    Le rapport présenté par le Gouvernement comprend deux parties : la première définit et précise le champ des prélèvements obligatoires et leur nature ; la seconde traite de façon plus détaillée des prélèvements prévus en 2002, 2003 et 2004.
    La présentation est claire et, sans apporter de révélations, ce rapport constitue une synthèse des très nombreuses interventions faites dans cet hémicycle à l'occasion des diverses phases des débats budgétaires, qu'il s'agisse du budget général de l'Etat ou de ceux des administrations de sécurité sociale.
    Une comparaison avec quelques pays de l'Union européenne, le Japon et les Etats-Unis fait ressortir la deuxième place de la France, après la Suède, avec un taux de 45,5 % en système comptable européen 79, 45 % en système 95, quand les autres pays européens sont de 5 à 7 points en dessous, le Japon à 18 points et les Etats-Unis à 25 points.
    Pour intéressante qu'elle soit, cette comparaison ne rend pas compte des contreparties de ces prélèvements selon les pays, et c'est dommage.
    La France, avec 45 % de prélèvements obligatoires est l'un des tout premiers pays à y consacrer une part aussi élevée de sa richesse nationale, avec une stabilité qui ne s'est guère démentie depuis plus de vingt ans, le taux oscillant de 42,5 % à 45,6 %, avec une tendance continue à une légère hausse, les deux composantes essentielles connaissant des mouvements inverses.
    En effet, les prélèvements pour l'Etat sont passés, en vingt ans, de 18 % à 16 % du PIB, cependant que les prélèvements pour les administrations de sécurité sociale ont évolué de 18,3 % à 21,7 %.
    En 2001, nous avons eu 658 milliards d'euros de prélèvements obligatoires, et il n'est pas inintéressant de considérer la relation entre la part de ces prélèvements obligatoires et les résultats en termes de capacité ou de besoin de financement. Nous constatons alors que l'Etat a toujours un fort besoin de financement - 2,3 points de PIB en 2001 - dont 40 % sont compensés par les administrations centrales, les administrations publiques locales, ainsi que par les administrations de sécurité sociale, à condition que certains mouvements erratiques ne créent pas des besoins de financement propres, comme cela a été le cas au cours de neuf des vingt-trois dernières années.
    Nous constatons ainsi une tendance lourde de l'Etat au déficit budgétaire, donc un besoin de financement, alors que les autres agents tendent vers la stabilité à 0,2 % et 0,4 % près.
    Cela étant, il est d'autres éléments qui doivent intervenir dans le débat sur les prélèvements obligatoires et leur efficacité. Il est en effet un peu rapide d'écrire : « La hausse du taux de prélèvements obligatoires provient pour l'essentiel des organismes sociaux et des collectivités locales », même si, quelques lignes plus loin, le diagnostic est légèrement nuancé et souligne que « la hausse de la part des prélèvements obligatoires dans le PIB des collectivités locales reflète l'incidence des transferts successifs de compétences accordées aux collectivités locales depuis les lois de décentralisation »
    Tout cela n'est pas inexact, mais regardons y de plus près.
    Les prélèvements obligatoires débouchent-ils sur une utilisation efficace et judicieuse de l'argent public, ou constituent-ils un tonneau des Danaïdes ?
    Avant de donner une première réponse, il convient de considérer le volume des investissements et l'évolution de la dette pour chacun des bénéficiaires de ces prélèvements obligatoires. Cet exercice comporte des difficultés, notamment pour la comparaison entre les agents économiques dont les régimes de remboursement ne sont pas les mêmes. Alors que certains remboursent intégralement leur dette, capital et intérêts, l'Etat ne le fait pas. Ce dernier devrait donc faire apparaître un déficit majoré du montant de l'annuité en capital qui n'est remboursée que par un nouvel emprunt équivalent. A cet égard, on y verra peut-être plus clair en 2005 avec l'application complète de la loi du 1er août 2001.
    Ces difficultés n'empêchent pas, malgré tout, par des approches complémentaires, sinon de mesurer, du moins d'apprécier le bon usage des fonds publics.
    En matière d'investissements civils, la formation brute de capital fixe a atteint près de 49 milliards d'euros en 2001, dont près de 35, c'est-à-dire 71 %, ont été réalisés par les collectivités locales, contre 21 %, soit 10,3 milliards, par l'Etat et les administrations centrales, les administrations de sécurité sociale venant très loin derrière. Il faut souligner que le volume des investissements de l'Etat n'a cessé de régresser depuis vingt ans, les titres V et VI du budget servant de variable d'ajustement pour limiter le déficit budgétaire. Telle est la construction du budget.
    En matière d'endettement, la dette des administrations publiques, au sens du traité de Maastricht, s'élève à 839 milliards d'euros, c'est-à-dire 5 505 milliards de francs, ce qui correspond à 57,3 % du PIB et à 1,27 année de prélèvements obligatoires. L'Etat et les administrations centrales représentent 85 % de la dette totale et cette part ne fait que croître.
    Les administrations de sécurité sociale ont un endettement qui ne représente que 0,9 point de PIB, et celui des administrations publiques locales n'a cessé de décroître en part relative. En trente ans, l'endettement relatif des collectivités locales par rapport au PIB a été divisé par deux alors que celui de l'Etat a été doublé. L'un est passé à 15 à 7,6 % du PIB tandis que l'autre progressait de 24,5  à 49 %.
    Nous sommes au coeur du problème de la maîtrise des prélèvements obligatoires et de leur efficacité.
    En effet, l'endettement de l'Etat génère des frais financiers qui représentent désormais environ 40 milliards d'euros, soit l'équivalent du budget de la défense et le double de celui de l'équipement ou de l'intérieur.
    Cette situation ne peut que se détériorer du fait de l'accroissement annuel en volume et du risque des taux sur la moyenne période : en effet, les taux actuels, à leur plus bas niveau, ont atteint un étiage quasi historique.
    La réponse à la question de savoir comment diminuer les prélèvements obligatoires repose essentiellement sur la maîtrise des dépenses de l'Etat et de celles de la sécurité sociale.
    Messieurs les ministres, dans la construction budgétaire, il y a les dépenses difficilement compressibles et d'autres, qui le sont plus facilement. Votre budget pour 2003 et les perspectives pour les années suivantes vont dans la bonne direction : une stabilisation des dépenses de fonctionnement qui dégagera autant de possibilités pour les investissements.
    Mais il ne faut pas tout attendre de causes externes comme la croissance. Il faut certes la favoriser, en jouant du levier de la consommation, à court terme, et celui de l'investissement, à moyen terme. Mais il serait hautement souhaitable que le noyau dur de la dépense publique, c'est-à-dire les titres III et IV, soit mieux maîtrisé. Nous observons à cet égard, pour le titre IV, une légère inflexion de 2002 et 2003 : il devrait passer de 78 milliards à 75,8 milliards ; il est à noter toutefois que ces 78 milliards correspondent à la loi de finances rectificative.
    Ce premier débat sur les prélèvements obligatoires est nécessairement technique et chiffré, et il ne peut en être autrement, même si nous nous sommes efforcés de réduire cet aspect autant que possible. Ce n'est déjà pas si mal de dégager progressivement les voies et moyens de l'assainissement de la situation financière de notre pays, mais la réduction des prélèvements obligatoires, de 0,4 point en 2002, de 0,3 en 2003, et de 0,1 seulement en 2004, montre bien que l'on arrive rapidement à l'asymptote.
    La tâche du Gouvernement est difficile. L'héritage est lourd, l'horizon incertain et nous manquons de visibilité dans les domaines économique et financier. C'est pourtant dans ce cadre qu'il vous faut, qu'il nous faut agir pour le redressement de notre pays. Nous voulons vous assurer de notre total soutien pour atteindre cet objectif. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, dernier orateur inscrit.
    M. Dominique Tian. Cette déclaration du Gouvernement était très attendue par les députés, bien sûr, mais aussi par les Français. Le thème du poids des prélèvements obligatoires a été au coeur du débat des élections présidentielles et législatives.
    Nos concitoyens se plaignent souvent de payer trop d'impôts et trop de cotisations, les entreprises trop de charges. Ils n'ont pas tort, jamais la pression n'a été aussi forte.
    Bref rappel historique : au début des années 70, le taux des prélèvements était arrivé aux alentours de 35 % du PIB alors que, dans les autres pays de l'Europe des quinze, la moyenne se situait entre 31 et 33 %. Le seuil des 40 % a été franchi dans les années 80, celui des 43 % fut atteint lors de la décennie 1984-1994. Nous en sommes maintenant à 45 % de la richesse nationale, soit 658,9 milliards d'euros en 2001. L'Italie n'en est qu'à 42,3 %, l'Allemagne à 37,8 % et le Royaume-Uni à 37,7 %.
    Parallèlement, selon un rapport récent de l'agence européenne Eurostat, la France rétrogradait de la troisième place en 1992 à la douzième place en 2001 en termes de PIB par habitant, suivant une trajectoire exactement inverse de celle de l'Irlande, dopée par sa fiscalité attractive.
    M. Didier Migaud. Le seul problème, c'est que la tendance s'est inversée depuis 1997 !
    M. Dominique Tian. Doit-on rappeler que, pour ce qui concerne le chômage, la France se situe au onzième rang, avec un taux de 9 %, et que, en l'an 2000, seulement 62 % de la population des quinze - vingt-quatre ans avaient un emploi, contre 71 % au Royaume-Uni ? Ajoutons que le quart des emplois, soit 6 millions, est actuellement constitué d'emplois publics, contre seulement 10 à 15 % dans les autres pays de l'OCDE.
    En France, avec les socialistes, la tendance des deux dernières décennies aura été de taxer toujours davantage le travail et les facteurs de production des entreprises, sans se préoccuper de leur compétitivité.
    M. Didier Migaud. Ce n'est pas vrai du tout !
    M. Dominique Tian. En septembre 2000, le ministre Christian Sautter avait commandé un rapport à l'inspection des finances « sur l'entreprise et l'Hexagone ». En juillet 2001, Lionel Jospin demandait à Michel Charzat de réfléchir à l'attractivité du territoire français. Les rapporteurs firent des propositions pour restaurer l'image de la France auprès des décideurs internationaux : on évoqua la concurrence fiscale entre les Etats européens ; on parla du problème de la délocalisation des entreprises. Malheureusement, comme chacun sait, ces deux rapports furent enterrés. Pis, ce fut la promulgation autoritaire des 35 heures, dont on connaît le coût exorbitant : 71 milliards de francs de dépenses publiques pour la seule année 2000 !
    M. Didier Migaud. Faux !
    M. Dominique Tian. Une nouvelle fois, notre pays se distinguait du reste de l'Europe en créant des charges supplémentaires pour les entreprises, ce qui ne fut pas sans de sévères répercussions sur le nombre des créations. Notre pays crée moins d'entreprises que ses partenaires européens : l'Espagne en crée deux fois plus, le Royaume-Uni une fois et demie. En 1980, près de 200 000 entreprises étaient créées chaque année dans notre pays. Ce chiffre est tombé à 180 000. Plus grave : d'ici à dix ans, 500 000 entreprises auront changé de mains, une entreprise sur cinq ne fait pas l'objet d'une reprise.
    Je ne pense pas que la créativité et le dynamisme des Français soient en cause dans cette situation ; c'est plutôt le poids des prélèvements obligatoires qui décourage les initiatives.
    Heureusement, un ensemble de mesures doit être présenté à cet égard par Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises.
    Mais les entreprises ne sont pas les seules concernées. Il apparaît clairement que l'effort demandé aux contribuables a connu depuis 1997 une évolution à la hausse : plus de 56 milliards de francs pour l'impôt sur le revenu, soit 3 500 francs supplémentaires par ménage.
    Une fraction de cet effort considérable demandé aux contribuables a du reste été déviée vers la dépense publique, qui a continué de progresser. Le simple remboursement des intérêts de la dette de l'Etat s'est élevé ces dernières années à plus de 250 milliards, soit 90 000 francs par enfant qui naît !
    Contrairement à la baisse de 25 milliards de francs décidée par le gouvernement Juppé, qui s'est immédiatement traduite sur les avis d'imposition, le gouvernement Jospin s'est contenté de mesurettes publicitaires, comme la suppression de la vignette automobile - 20 francs par ménage ! -, bien insuffisantes pour faire baisser la pression fiscale.
    M. Didier Migaud. Ce n'est pas ce que dit le rapport !
    M. Dominique Tian. A l'inverse, la pression fiscale et les prélèvements obligatoires ont battu tous les records depuis 1997, avec une augmentation de 16,4 %, soit 92 milliards d'euros, sans que le Gouvernement se révèle pour autant capable de maîtriser les dépenses de l'Etat.
    Et pourtant, la France a connu depuis 1997 une phase de croissance soutenue de 3 % par an, que le gouvernement de Lionel Jospin se devait de mettre à profit pour atteindre trois objectifs : réduire très nettement le niveau du déficit budgétaire, diminuer le montant de la dette publique et faire baisser sensiblement le poids des prélèvements obligatoires. Ayant échoué sur ces trois objectifs, le gouvernement Jospin portera la responsabilité d'avoir fait passer notre pays à côté d'une chance historique. Un rapport du Sénat indiquait en 1999 que 70 % de l'augmentation de la richesse nationale avait été captée par la sphère publique.
    Le gouvernement Raffarin s'est engagé dans une autre voie. Après la réduction de 5 % de l'impôt sur le revenu, promesse de campagne tenue, le projet de loi de finances pour 2003 et le projet de loi de financement de la sécurité sociale présenté hier par Jean-François Mattei au conseil des ministres vont enfin constituer une première étape dans la réduction des prélèvements obligatoires : moins 0,4 point de PIB en 2002, moins 0,7 pour 2002-2003. Les baisses d'impôts et de charges devraient atteindre 3 milliards d'euros pour cette période.
    La méthode choisie est pragmatique, réaliste, courageuse. C'est le signal qu'attendaient nos concitoyens.
    M. Didier Migaud. On passe de la nuit à la lumière !
    M. Dominique Tian. Ils veulent que l'on dépense moins et que l'on dépense mieux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, j'ai beaucoup appris au cours de ces échanges. Mais j'ai été, je l'avoue, incapable de profiter pleinement de la qualité de toutes vos informations ; c'est pourquoi je me propose de lire avec attention la relation de vos interventions dans le Journal officiel. En effet, en dépit du caractère parfois un peu provocateur de certaines affirmations, les réflexions que vous avez développées les uns et les autres nous seront toutes utiles. Nous aurons d'ailleurs l'occasion d'en reparler, notamment la semaine prochaine, lors de la discussion du budget de 2003.
    Il est clair que les prélèvements obligatoires permettent d'assurer dans notre pays le degré de solidarité nécessaire. Celle-ci fait du reste partie de notre culture et nous n'avons pas l'intention de remettre cet effort en cause, quelles que soient les inflexions que nous souhaitons apporter à d'autres domaines de notre politique.
    La qualité de ces prélèvements obligatoires, au regard des dépenses, a besoin d'être appréciée. Il est fort probable que nous pouvons, moyennant une amélioration significative de nos performances en la matière, réduire les coûts sans diminuer le résultat associé.
    Il y a notamment, du côté de la fonction publique, dont bon nombre d'intervenants ont rappelé l'importance - 20 % des Français, de près ou de loin, sont concernés par elle -, tout un gisement d'amélioration des performances, et le même raisonnement vaut pour l'ensemble de la population active. C'est précisément ce potentiel qui, je le crois, devrait nous permettre, tout en baissant les prélèvements, d'améliorer les résultats.
    Les prélèvements obligatoires, j'en suis, tout comme l'ensemble du Gouvernement, persuadé, sont trop élevés dans une France qui vit, non derrière ses murs, mais ouverte sur le monde, une France en compétition tout à la fois pour répondre aux exigences des marchés extérieurs et pour satisfaire les besoins des consommateurs français, qui ont dorénavant toute liberté de mettre en compétition l'offre mondiale.
    Cette liberté du consommateur, cette liberté du producteur, y compris celle de décider que d'autres territoires que le nôtre sont plus propices à l'exercice de ses talents, sont des faits nouveaux dont nous commençons à mesurer les conséquences au niveau de l'Europe comme au niveau du monde : cela s'appelle la globalisation. Cette dimension nouvelle, il nous faut impérativement l'intégrer par rapport aux traditions qui, depuis des décennies, régissent nos comportements dans le domaine des prélèvements obligatoires et de leur rôle particulier de redistribution des richesses produites.
    Cette liberté de choix, y compris celle du producteur, introduit des éléments nouveaux. Dans l'intérêt même de notre collectivité - tout gouvernement est là, le nôtre en tout cas en est convaincu, pour y travailler -, il est clair que nous avons besoin de nous remettre en cause et de nous interroger sur la justification de certains prélèvements afin de les faire baisser, de les rendre plus supportables par les Français et d'en faire un outil plus efficace de croissance.
    Nous sommes, je le répète, dans un monde qui a besoin, pour conforter l'initiative individuelle, de démontrer que les choix de politique économique des divers gouvernements sont les meilleurs. Or la sanction de ces choix ne se résume pas aux seules sanctions électorales ; elle se traduit essentiellement par le jeu de la liberté d'appréciation du producteur et du consommateur.
    C'est dans ce contexte que, dans les prochaines années, et en premier lieu à l'occasion du débat sur le projet de finances pour 2003, dont les conséquences se feront sentir en 2004, 2005 et 2006, nous constaterons ensemble que nous devons et pouvons atténuer ces prélèvements obligatoires, réduire le déficit global de notre système économique afin de recréer les meilleures conditions de croissance possible en évitant, comme y ont insisté nombre d'orateurs, les risques découlant d'une charge croissante et non maîtrisée de l'endettement national.
    Notre objectif, en améliorant notre maîtrise des prélèvements, est de mettre en place les conditions d'une croissance plus efficace, plus performante, davantage au service des Français. Car ceux-ci ont dorénavant la liberté de choisir comment ils entendent construire leur propre vie, comment ils dépenseront mieux leur argent en supportant moins de prélèvements collectifs.
    Telles sont, mesdames, messieurs les députés, les réflexions de base qui, non seulement en 2003, mais dans les années à venir, conduiront la politique économique de notre gouvernement. Nous aurons la possibilité d'en rediscuter à maintes reprises. Je veux, une fois encore, souligner la qualité des informations et des échanges que nous avons eus, qui nous auront dès aujourd'hui permis de nous entendre sur plusieurs objectifs ou constatations.
    Pour commencer, nous sommes généralement d'accord pour que les prélèvements obligatoires soient autant que possible diminués et que leur qualité soit réévaluée.
    Nous sommes aussi d'accord pour reconnaître que notre système de prélèvements a besoin de clarté et de transparence afin de devenir plus compréhensible.
    Nous sommes enfin d'accord, c'est évident, sur la nécessité de maîtriser la dépense publique. Or on peut la maîtriser d'une part, en améliorant sa qualité et, d'autre part, comme l'ont rappelé M. Méhaignerie et M. Carrez, en nous interrogeant sur la nécessité de continuer à dépenser dans telle ou telle direction, en mettant en parallèle les conséquences positives ou négatives de nos décisions en la matière.
    Voilà comment nous envisageons de préparer l'avenir de notre pays. Cet avenir passe fondamentalement, vous le savez, par un potentiel de croissance aussi élevé que possible. Celui-ci est évidemment entre les mains de l'acteur économique et du consommateur, mais il dépend aussi, dans notre pays, d'une politique gouvernementale allant dans le sens de la réforme de l'Etat, de la clarification de la décentralisation, d'une meilleure maîtrise des dépenses de santé, certes, mais plus largement de la part que la collectivité entend prendre à sa charge pour garantir collectivement le mieux-être de toute notre population.
    Voilà ce que je retire de notre échange. Je suis certain que nous aurons dans le futur l'occasion de reprendre ces sujets de manière plus détaillée, mais toujours autour du même objectif : réussir ensemble pour notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la famille.
    M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, vous l'avez dit et souligné pour la plupart d'entre vous, et Jean-François Mattei a lui-même insisté sur ce point tout à l'heure : son objectif premier est de réformer profondément la sécurité sociale. Il aura du reste l'occasion d'y revenir prochainement à l'occasion de la discussion sur le PLFSS.
    Toutefois, il est quelques priorités sur lesquelles il est bon de revenir. Plusieurs d'entre vous les ont mises en exergue : un niveau de dépenses trop élevé, une croissance des prélèvements excessive.
    A quoi il faut ajouter, si l'on regarde les choses d'encore plus près, l'indispensable simplification sur laquelle Pierre Méhaignerie a insisté. C'est également un des axes forts des orientations prises par Jean-François Mattei. On sait que la simplification est source de lisibilité, mais aussi d'économies. Dans bien des cas, c'est un des moyens, et on le voit pour l'hôpital, de garantir la clarté de nos systèmes de financement. Ce thème a été développé par plusieurs d'entre vous. Notre système est en quelque sorte devenu une mécanique infernale et l'on a du mal à se retrouver dans les différentes tuyauteries mises en place avec le FOREC.
    Les décisions de Jean-François Mattei nous permettent déjà 2 milliards d'euros d'économies. Certains diront que ce n'est pas suffisant. C'est vrai, mais c'est en tout cas un signe clair, une orientation forte qui ont été donnés.
    S'agissant des transferts du fonds de solidarité vieillesse - lequel reçoit lui-même des fonds de la branche famille - vers le FOREC, depuis 2000, ils s'élèvent à 4,5 milliards d'euros.
    Aujourd'hui, il faut bien rétablir la vérité.
    Cela étant, nous ne réussirons que tous ensemble, car ce sera difficile. L'objectif est clairement affiché et, dès l'année prochaine, les engagements vont se traduire en réalités. Nous ne serons pas de trop pour atteindre nos objectifs, Gouvernement et majorité parlementaire unis mais l'opposition peut apporter si elle le veut sa contribution.
    J'ai bien noté les interventions de ses représentants et je mettrai certains propos polémiques sur le compte de l'aigreur née des échecs électoraux. Ce n'est pas grave : ils s'en remettront !
    Cependant, je n'ai pas compris l'attaque de Didier Migaud sur les emplois à domicile et sur toute notre politique de l'emploi.
    M. Augustin Bonrepaux. Précisément : ce n'est pas une politique de l'emploi !
    M. le ministre délégué à la famille. La politique de l'emploi est liée à l'équilibre du budget de la sécurité sociale. Chaque fois que l'on permet de créer de l'emploi, de relancer l'activité,...
    M. Augustin Bonrepaux. Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur le ministre ?
    M. le ministre délégué à la famille. Non, monsieur le député.
    ... chaque fois, ce sont des cotisations sociales supplémentaires.
    Quant aux emplois à domicile, c'est un mauvais exemple ; plus on incite à la création d'emplois à domicile, plus il y a de contributions sociales, et c'est bon signe. Il faut donc aller dans ce sens.
    M. Augustin Bonrepaux. Mais non !
    M. le ministre délégué à la famille. La diminution de l'AGED décidée par Lionel Jospin a eu pour conséquence, en deux ans, 30 000 emplois perdus,...
    M. Didier Migaud. Combien de familles ont été concernées par cette mesure ?
    M. le ministre délégué à la famille. ... c'est-à-dire 30 000 personnes qui n'avaient plus d'activité, qui ne pouvaient plus s'épanouir, mais aussi 30 000 personnes qui ne cotisaient plus !
    M. Didier Migaud. Pourriez-vous nous répondre ?
    M. le ministre délégué à la famille. La politique de l'emploi est clairement liée au débat sur les prélèvements sociaux et sur l'équilibre de la protection sociale.
    M. Didier Migaud. Vous ne savez pas, puisque vous ne répondez pas !
    M. Augustin Bonrepaux. Si c'est un débat, il faut nous répondre !
    M. le ministre délégué à la famille. Merci en tout cas de vos contributions.
    Mesdames, messieurs les députés, nous avons un important travail à accomplir ensemble. Je sais, de même que Jean-François Mattei, pouvoir compter sur votre contribution. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Le débat est clos.

2

DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

    M. le président. J'informe l'Assemblée que le Conseil constitutionnel, saisi de la résolution adoptée le 8 octobre 2002, modifiant l'article 36 du règlement de l'Assemblée nationale, m'a fait parvenir le texte de sa décision rendue dans sa séance du 10 octobre 2002, en application de l'article 61, alinéa premier, de la Constitution, déclarant conformes à la Constitution les dispositions contenues dans cette résolution.
    Ces dispositions sont immédiatement applicables.
    La décision du Conseil constitutionnel sera publiée à la suite du compte rendu intégral de la présente séance.

3

ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES

Communication relative
à la désignation d'une commission mixte paritaire

    M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :
    Paris, le 9 octobre 2002
    « Monsieur le président,
    « Conformément à l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, j'ai l'honneur de vous faire connaître que j'ai décidé de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi modifiant la loi n° 85-99 du 25 janvier 1985 relative aux administrateurs judiciaires, mandataires judiciaires à la liquidation des entreprises et experts en diagnostic d'entreprise.
    « Je vous serais obligé de bien vouloir, en conséquence, inviter l'Assemblée nationale à désigner ses représentants à cette commission.
    « J'adresse ce jour à M. le président du Sénat une demande tendant aux mêmes fins.
    « Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute considération. »
    Cette communication a été notifiée à M. le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

4

DÉPÔT D'UN RAPPORT

    M. le président. J'ai reçu, le 10 octobre 2002, de M. Gilles Carrez, rapporteur général, un rapport, n° 256, fait au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230).
    La liste des annexes figure à la suite du compte rendu de la présente séance.

5

DÉPÔT D'AVIS

    M. le président. J'ai reçu, le 10 octobre 2002, un avis, n° 257, présenté au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230).
    Cet avis comporte treize tomes, dont la liste est annexée au compte rendu de la présente séance.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, un avis, n° 258, présenté au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230).
    Cet avis comporte dix-sept tomes, dont la liste est annexée au compte rendu de la présente séance.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, un avis, n° 259, présenté au nom de la commission des affaires étrangères, sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230).
    Cet avis comporte sept tomes, dont la liste est annexée au compte rendu de la présente séance.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, un avis, n° 260, présenté au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées, sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230).
    Cet avis comporte dix tomes, dont la liste est annexée au compte rendu de la présente séance.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, un avis, n° 261, présenté au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230).
    Cet avis comporte sept tomes, dont la liste est annexée au compte rendu de la présente séance.

6

DÉPÔT DE PROJETS DE LOI
ADOPTÉS PAR LE SÉNAT

    M. le président. J'ai reçu, le 10 octobre 2002, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention établie sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne, relative à l'extradition entre les Etats membres de l'Union européenne (ensemble une annexe comportant six déclarations).
    Ce projet de loi, n° 263, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention établie sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne, relative à la procédure simplifiée d'extradition entre les Etats membres de l'Union européenne.
    Ce projet de loi, n° 264, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification du traité entre la République française, le Royaume d'Espagne, la République d'Italie et la République portugaise portant statut de l'EUROFOR, fait à Rome le 5 juillet 2000.
    Ce projet de loi, n° 265, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'amendement à la convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et leur élimination.
    Ce projet de loi, n° 266, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention entre la République française, le Royaume d'Espagne et la Principauté d'Andorre, relative à la circulation et au séjour en Principauté d'Andorre des ressortissants des Etats tiers.
    Ce projet de loi, n° 267, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention entre la République française, le Royaume d'Espagne et la Principauté d'Andorre, relative à l'entrée, à la circulation, au séjour et à l'établissement de leurs ressortissants.
    Ce projet de loi, n° 268, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d'Andorre, relative à la coopération administrative, signée à Andorre-la-Vieille le 14 février 2001.
    Ce projet de loi, n° 269, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention de sécurité sociale entre la République française et la Principauté d'Andorre, signée à Andorre-la-Vieille le 12 décembre 2000.
    Ce projet de loi, n° 270, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse, relative au raccordement de la Suisse au réseau ferré français, notamment aux liaisons à grande vitesse (ensemble une annexe).
    Ce projet de loi, n° 271, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification du protocole additionnel à l'accord entre la France, la Communauté européenne de l'énergie atomique et l'Agence internationale de l'énergie atomique, relatif à l'application de garanties en France, fait à Vienne le 22 septembre 1998.
    Ce projet de loi, n° 272, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie, relatif à la responsabilité civile au titre de dommages nucléaires du fait de fournitures en provenance de la République française destinées à des installations nucléaires en Fédération de Russie.
    Ce projet de loi, n° 273, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements.
    Ce projet de loi, n° 274, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 10 octobre 2002, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la décision des représentants des Gouvernements des Etats membres de l'Union européenne concernant les privilèges et immunités accordés à l'Institut d'études de sécurité et au Centre satellitaire de l'Union européenne ainsi qu'à leurs organes et aux membres de leur personnel.
    Ce projet de loi, n° 275, est renvoyé à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.

7

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Mardi 15 octobre 2002, à neuf heures, première séance publique :
    Questions orales sans débat ;
    Fixation de l'ordre du jour.
    A quinze heures, deuxième séance publique :
    Questions au Gouvernement ;
    Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi ;
    Discussion générale du projet de loi de finances pour 2003 (n° 230) :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 256).
    A vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

RENDUE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 61, ALINÉA PREMIER, DE LA CONSTITUTION SUR LA RÉSOLUTION MODIFIANT L'ARTICLE 36 DU RÈGLEMENT DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Décision n° 2002-462 DC du 10 octobre 2002

    Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 9 octobre 2002, par le président de l'Assemblée nationale, conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article 61 de la Constitution, d'une résolution en date du 8 octobre 2002 tendant à modifier l'article 36 du règlement de l'Assemblée nationale ;
    Le Conseil constitutionnel,
    Vu la Constitution, notamment son article 43 ;
    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment le chapitre II du titre II de ladite ordonnance ;
    Le rapport ayant été entendu ;
    Considérant que l'article 1er de la résolution se borne à modifier les treizième et seizième alinéas de l'article 36 du règlement de l'Assemblée nationale afin de conférer à la « commission de la production et des échanges » la dénomination de « commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire » ; que son article 2 modifie le quatorzième alinéa du même article pour ajouter expressément l'environnement à la liste des compétences de ladite commission ; que ces dispositions ne méconnaissent aucun principe ni aucune règle de valeur constitutionnelle,
                    Décide :
    Art. 1er. - La résolution soumise à l'examen du Conseil constitutionnel est déclarée conforme à la Constitution.
    Art. 2. - La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 10 octobre 2002 où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.

CONVOCATION DE LA CONFÉRENCE
DES PRÉSIDENTS

    La conférence, constituée conformément à l'article 48 du règlement, est convoquée pour le mardi 15 octobre 2002, à 10 heures, dans les salons de la présidence.

TEXTES SOUMIS EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
Transmissions

    M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale, les textes suivants :

Communication du 9 octobre 2002

N° E 2109. - Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux détergents (COM [2002] 485 final).
N° E 2110. - Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil. Le marché intérieur de l'énergie. Des mesures coordonnées en matière de sécurité des approvisionnements énergétiques. Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant le rapprochement des mesures en matière de sécurité des approvisionnements en produits pétroliers. Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l'approvisionnement en gaz naturel. Proposition de directive du Conseil abrogeant les directives 68/414/CEE et 98/93/CE du Conseil faisant obligation aux Etats membres de la CEE de maintenir un niveau minimum des stocks de pétrole et/ou de produits pétroliers, ainsi que la directive 73/238/CEE du Conseil concernant des mesures destinées à atténuer les effets des difficultés d'approvisionnement en pétrole brut et produits pétroliers. Proposition de décision du Conseil abrogeant la décision 68/416/CEE du Conseil concernant la conclusion et l'exécution des accords intergouvernementaux particuliers relatifs à l'obligation pour les Etats membres de maintenir un niveau minimum de stocks de pétrole brut et/ou de produits pétroliers, et la décision 77/706/CEE du Conseil fixant un objectif communautaire de réduction de la consommation d'énergie primaire en cas de difficultés d'approvisonnement en pétrole brut et produits pétroliers (COM [2002] 488 final).
N° E 2111. - Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion de l'accord sous forme d'échange de lettres concernant les modifications des annexes de l'accord entre la Communauté européenne et la Nouvelle-Zélande relatif aux mesures sanitaires applicables au commerce d'animaux vivants et de produits animaux (COM 503 final).

RAPPORT
de M. Gilles Carrez, rapporteur général (au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan)
sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230)
Tome I. - Rapport général
Tome II. - Examen de la première partie du projet de loi de finances : conditions générales de l'équilibre financier
Tome III. - Examen de la deuxième partie du projet de loi de finances
Moyens des services et dispositions spéciales

ANNEXES COMMISSIONS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

I. - BUDGET GÉNÉRAL
A. - Dépenses civiles
1 Affaires étrangères
Affaires étrangères
M. Eric Woerth
2Affaires étrangères
Affaires européennes
  M. Jean-Louis Dumont
3 Affaires étrangères
Coopération et développement
M. Henri Emmanuelli
4 Affaires sociales, travail et solidarité
Solidarité
Mme Marie-Anne Montchamp
5 Affaires sociales, travail et solidarité
Formation professionnelle
M. Jean-Michel Fourgous
6 Affaires sociales, travail et solidarité
Travail
M. Michel Bouvard
7 Affaires sociales, travail et solidarité
Ville
M. François Grosdidier
8 Agriculture et pêche
Agriculture
M. Alain Marleix
9 Agriculture et pêche
Pêche
M. Jean-Pierre Kucheida
10 Anciens combattants M. Xavier Bertrand
11 Culture et communication
Culture
M. Olivier Dassault
12 Culture et communication
Communication
M. Patrice Martin-Lalande
13 Ecologie et développement durable M. Philippe Rouault
14 Economie, finances et industrie
Charges communes
M. Daniel Garrigue
15 Economie, finances et industrie
Commerce extérieur
M. Nicolas Forissier
16 Economie, finances et industrie
Industrie
M. Hervé Novelli
17 Economie, finances et industrie
PME, commerce et artisanat
M. Jean-Jacques Descamps
18 Economie, finances et industrie
Poste et Télécommunications
M. Alain Joyandet
19 Economie, finances et industrie. - Services financiers M. Thierry Carcenac
Monnaies et médailles
20 Equipement, transports, logement, tourisme et mer
Equipement et transports terrestres
M. Hervé Mariton
21 Equipement, transports, logement, tourisme et mer
Logement
M. François Scellier
22 Equipement, transports, logement, tourisme et mer
Mer
M. Michel Vaxès
23 Equipement, transports, logement, tourisme et mer
Tourisme
M. Augustin Bonrepaux
24 Equipement, transports, logement, tourisme et mer
Transports aériens
M. Charles de Courson
25 Fonction publique, réforme de l'Etat et aménagement du territoire
Aménagement du territoire
M. Louis Giscard d'Estaing
26 Fonction publique, réforme de l'Etat et aménagement du territoire
Fonction publique et réforme de l'Etat
M. Georges Tron
27 Intérieur et libertés locales
Sécurité intérieure et gendarmerie
M. Marc Le Fur
28 Intérieur et libertés locales
Administration générale et territoriale
M. Jérôme Chartier
29 Intérieur et libertés locales
Collectivités locales
M. Marc Laffineur
30 Jeunesse, éducation nationale et recherche
Jeunesse et enseignement scolaire
M. Jean-Yves Chamard
31 Jeunesse, éducation nationale et recherche
Enseignement supérieur
M. Laurent Hénart
32 Jeunesse, éducation nationale et recherche
Recherche et technologie
M. Christian Cabal
33 Justice M. Pierre Albertini
34 Outre-mer
Départements d'outre-mer
M. Alain Rodet
35 Outre-mer
Territoires d'outre-mer et Nouvelle-Calédonie
M. Victor Brial
36 Premier ministre
Secrétariat général de la défense nationale et renseignements
M. Bernard Carayon
37 Premier ministre
Services généraux, Conseil économique et social, Plan et Journaux officiels
M. Pierre Bourguignon
38 Santé et personnes handicapées M. Gérard Bapt
39 Sports M. Denis Merville

B. - Dépenses militaires
40 Défense M. François d'Aubert

II. - BUDGETS ANNEXES
41 Légion d'honneur - Ordre de la Libération M. Tony Dreyfus
42 Prestations sociales agricoles M. Yves Censi

III. - AUTRES
43 Trésor et entreprises publiques M. Michel Diefenbacher
AVIS

présenté au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,
sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230)

ANNEXES COMMISSIONS RAPPORTEURS
I Affaires étrangères
Francophonie et relations culturelles internationales
Mme Henriette Martinez
II Affaires sociales, travail et solidarité
Action sociale, lutte contre l'exclusion et ville
Mme Christine Boutin
III Affaires sociales, travail et solidarité
Formation professionnelle
M. Christian Paul
IV Affaires sociales, travail et solidarité
Travail
Mme Irène Tharin
V Anciens combattants M. Georges Colombier
VI Culture et communication
Culture
M. Michel Herbillon
VII Culture et communication
Communication
M. Didier Mathus
VIII Jeunesse, éducation nationale et recherche
Enseignement scolaire
M. Pierre-André Périssol
IX Jeunesse, éducation nationale et recherche
Enseignement supérieur
M. Paul-Henri Cugnenc
X Jeunesse, éducation nationale et recherche
Recherche
M. Pierre Lasbordes
XI Santé et personnes handicapées
Santé
M. Jean-Luc Préel
XII Santé et personnes handicapées
Personnes handicapées
M. Jean-François Chossy
XIII Sports M. Edouard Landrain
AVIS

présenté au nom de la commission des affaires économiques,
de l'environnement et du territoire, sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230)

ANNEXES COMMISSIONS RAPPORTEURS
I Affaires sociales, travail et solidarité
Ville
M. Philippe Pemezec
II Agriculture et pêche
Agriculture
M. Antoine Herth
III Agriculture et pêche
Pêche
M. Aimé Kergueris
IV Ecologie et développement durable M. Christope Priou
V Economie, finances et industrie
Commerce extérieur
M. Jean Gaubert
VI Economie, finances et industrie
Industrie
M. Jacques Masdeu-Arus
VII Economie, finances et industrie
PME, commerce et artisanat
M. Serge Poignant
VIII Economie, finances et industrie
Poste et Télécommunications
M. Pierre Micaux
IX Equipement, transports, logement, tourisme et mer
Logement et urbanisme
M. Jean-Pierre Abelin
X Equipement, transports, logement, tourisme et mer
Mer
M. Jean-Yves Besselat
XI Equipement, transports, logement, tourisme et mer
Tourisme
M. Jean-Pierre Couve
XII Equipement, transports, logement, tourisme et mer
Transports aériens
Mme Odile Saugues
XIII Equipement, transports, logement, tourisme et mer
Equipement, transports terrestres et fluviaux
M. François-Michel Gonnot
XIV Fonction publique, réforme de l'Etat et aménagement du territoire
Aménagement du territoire
M. Jacques Le Nay
XV Jeunesse, éducation nationale et recherche
Recherche et technologie
M. Claude Gatignol
XVI Outre-mer M. Joël Beaugendre
XVII Premier ministre
Plan
M. André Chassaigne
AVIS

présenté au nom de la commission des affaires étrangères,
sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230)

ANNEXES COMMISSIONS RAPPORTEURS
I Affaires étrangères
Affaires européennes (art. 33 : évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes)
M. Roland Blum
II Affaires étrangères
Affaires étrangères
M. Richard Cazenave
III Affaires étrangères
Coopération et développement
M. Jacques Godfrain
IV Affaires étrangères
Francophonie et relations culturelles internationales
M. François Rochebloine
V Ecologie et développement durable M. Jean-Jacques Guillet
VI Economie, finances et industrie
Commerce extérieur
M. Jean-Paul Bacquet
VII Défense M. Paul Quilès
AVIS

présenté au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées,
sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230)

ANNEXES COMMISSIONS RAPPORTEURS
I Affaires étrangères
Affaires étrangères
M. François Lamy
II Défense
Dissuasion nucléaire
M. Antoine Carré
III Défense
Espace, communication et renseignement
M. Yves Fromion
IV Défense
Forces terrestres
M. Joël Hart
V Défense
Marine
M. Charles Cova
VI Défense
Air
M. Jean-Louis Bernard
VII Défense
Titre III et personnels civils et militaires d'active et de réserve
M. Pierre Lang
VIII Défense
Crédits d'équipement
M. François Cornut-Gentille
IX Défense
Services communs
M. Jean-Yves Le Drian
X Défense
Gendarmerie
M. Philippe Folliot
AVIS

présenté au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République,
sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230)

ANNEXES COMMISSIONS RAPPORTEURS
I Fonction publique, réforme de l'Etat et aménagement du territoire
Fonction publique
M. Bernard Derosier
II Intérieur et libertés locales
Police
M. Gérard Léonard
III Intérieur et libertés locales
Sécurité civile
M. Thierry Mariani
IV Intérieur et décentralisation
Administration générale et collectivités locales
M. Manuel Aeschlimann
V Justice
Administration centrale et services judiciaires
M. Jean-Paul Garraud
VI Justice
Services pénitentiaires et protection judiciaire de la jeunesse
Mme Valérie Pecresse
VII Outre-mer M. Didier Quentin