Accueil > Archives de la XIIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus intégraux (session ordinaire 2002-2003)

 

ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU VENDREDI 18 OCTOBRE 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du jeudi 17 octobre 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES

1.  Loi de finances pour 2003 (première partie).  - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

Rappels au règlement «...»

MM. Augustin Bonrepaux, le président, Jean-Pierre Brard.

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Après l'article 2 (suite) «...»

Amendement n° 98 de M. Vaxès : MM. Jean-Claude Sandrier, Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances ; Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. - Rejet.
Amendement n° 28 de la commission des finances : MM. le rapporteur général, Charles de Courson, Jean-Pierre Brard, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 173 de M. Vaxès : MM. Michel Vaxès, le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 297 de M. Laffineur : MM. Marc Laffineur, le rapporteur général, le ministre, Gérard Bapt. - Retrait.
Amendement n° 145 de M. de Courson : MM. Charles de Courson, le rapporteur général, le ministre, Jean-Pierre Brard. - Rejet.
Amendement n° 163 de M. Albertini : MM. Charles de Courson, le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 259 de M. Albertini : MM. Charles de Courson, le rapporteur général, le ministre, Jean-Pierre Balligand, Jean-Pierre Brard. - Retrait.
Amendement n° 273 de M. Merville : MM. Daniel Garrigue, le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 100 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 99 de M. Vaxès : MM. Jean-Claude Sandrier, le rapporteur général, le ministre, Didier Migaud. - Rejet.
Amendement n° 8 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 96 de M. Vaxès : MM. Michel Vaxès, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 97 de M. Vaxès : MM. Jean-Claude Sandrier, le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 299 de M. Laffineur : MM. Marc Laffineur, le rapporteur général, le ministre, Gérard Bapt, Jean-Pierre Brard, Didier Migaud, Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. - Retrait.
Amendement n° 299 repris par M. Brard : M. Jean-Pierre Brard. - Rejet.

Rappel au règlement «...»

M. Augustin Bonrepaux.

Suspension et reprise de la séance «...»

MM. Michel Vaxès, le président.

Article 3 «...»

MM. Didier Migaud, Augustin Bonrepaux, Daniel Garrigue, Philippe Auberger, Michel Vaxès.
Amendement n° 29 de la commission : MM. le rapporteur général, Augustin Bonrepaux, le président de la commission, Didier Migaud, Charles de Courson, le ministre. - Adoption.

Rappel au règlement «...»

M. Augustin Bonrepaux.

Suspension et reprise de la séance «...»

Amendement n° 240 de M. Bonrepaux : MM. Augustin Bonrepaux, le président de la commission, Didier Migaud, le rapporteur général.

Suspension et reprise de la séance «...»
Rappels au règlement «...»

MM. Augustin Bonrepaux, le président, Jean-Pierre Brard, le président de la commission, Charles de Courson, le ministre.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
2.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à neuf heures.)

1

LOI DE FINANCES POUR 2003
PREMIÈRE PARTIE
Suite de la discussion des articles
de la première partie d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2003 (n°s 230, 256).

Rappels au règlement

    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, je demande la parole pour un rappel au règlement.
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour un rappel au règlement.'
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, nous devons disposer de toutes les informations nécessaires pour que le débat se déroule dans les meilleures conditions. M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire nous a d'ailleurs fait savoir hier que telle était sa volonté. Cependant, je constate que les questions que j'ai posées sont restées sans réponse. Elles revêtent pourtant une importance particulière, car le monde de l'éducation nationale est aujourd'hui en grève. Hier soir, j'ai demandé à M. le ministre si ce budget prévoyait des moyens suffisants pour l'éducation nationale et il m'a renvoyé à la discussion des crédits du ministère.
    Monsieur le ministre, je suis surpris que vous ignoriez que le directeur de cabinet du ministre de l'éducation nationale a annoncé que les maîtres d'internat et surveillants d'externat seront remplacés par des jeunes retraités ou par des mères de famille. Nous voulons des explications dans la journée. Le ministre de l'éducation nationale ou son ministre délégué, M. Xavier Darcos, peuvent vous les communiquer. Si nous ne les avons pas, nous ne pourrons pas poursuivre ce débat. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Richard Mallié. Cela ne nous dérange pas ! Ça ira plus vite !
    M. Augustin Bonrepaux. Ce rappel au règlement risque de ne pas être le dernier si nous n'avons pas de réponse. M. le ministre du budget nous a dit hier que le budget prévoyait les crédits nécessaires, mais où les trouverez-vous puisque la croissance sera sans doute inférieure à 2 % alors que vous l'avez évaluée à 2,5 % pour construire votre budget ? Nous voulons savoir où sont ces crédits, quel est leur montant et comment seront assurés, à la prochaine rentrée scolaire, la sécurité, la surveillance et l'accompagnement des enfants dans les établissements scolaires ?
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, il faut conclure !
    M. Augustin Bonrepaux. Cette année, la rentrée scolaire s'est bien passée, c'est vrai, mais grâce au budget élaboré par le gouvernement précédent. Je demande à M. le ministre délégué au budget de se renseigner, de nous apporter ces informations. Nous aurons l'occasion de reposer ces questions dans la journée et, si nous n'obtenons pas de réponse, nous ne pourrons pas poursuivre ce débat.
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, je vous rappelle que vous avez fait une demande de rappel au règlement, or vous commencez déjà le débat !
    M. Didier Migaud. Mais non ! c'était bien un rappel au règlement !
    M. le président. Nous sommes dans le débat budgétaire et le Gouvernement vous donnera toutes les réponses que vous souhaitez au cours de la discussion !
    M. Augustin Bonrepaux. J'espère bien, c'est ce que je demande !
    M. le président. Vos questions ont été posées, le Gouvernement les a enregistrées et y répondra.
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour un rappel au règlement.
    M. Jean-Pierre Brard. Mon intervention est fondée sur l'article 58, alinéa 2, de notre règlement relatif aux conditions du débat.
    Vous avez tous écouté la radio ce matin. Le 3 octobre au soir, M. Jean-François Copé assurait avoir reçu le message « cinq sur cinq » mais, aujourd'hui, les enseignants sont dans la rue ! Les parlementaires, qui sont plus près des concitoyens, doivent donc aider le Gouvernement à mieux entendre le message. Ce sont, en quelque sorte, des médiateurs et ils doivents garantir aux citoyens que le Gouvernement ne s'éloigne pas d'eux.
    Mes collègues Jean-Claude Sandrier, Michel Vaxès et moi-même pensons donc que nous devons aller à la rencontre des manifestants pour les écouter et expliquer au Gouvernement pourquoi ils sont dans la rue. Cela nous éviterait d'être dans la même situation dans quinze jours. C'est très important, dans la mesure où il faudrait revenir sur des mesures prévues par ce projet de la loi de finances.
    Monsieur le président, nous souhaitons donc que la conférence des présidents, en accord avec le Gouvernement, nous permette d'interrompre nos travaux pour que nous puissions rencontrer les représentants du mouvement social.
    M. Christian Cabal. Allez-y !
    M. Richard Mallié. Personne ne vous en empêche !
    M. Jean-Pierre Brard. Je vois d'ailleurs que M. Cabal partage mon opinion.
    M. le président. Monsieur Brard, si votre intervention est terminée, nous allons en revenir à la discussion des articles.
    M. Jean-Pierre Brard. Mais vous ne m'avez pas répondu !

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Hier soir, l'Assemblée a commencé la discussion des articles de la première partie et s'est arrêtée à l'amendement n° 98 portant article additionnel après l'article 2.

Après l'article 2 (suite)

    M. le président. MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 98, ainsi rédigé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « Dans le premier alinéa du 1 du I de l'article 150-0 A du code général des impôts, le nombre "7 650 est remplacé par le nombre "5 000 ».
    La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
    M. Jean-Claude Sandrier. Aux termes de l'article 150-0 A du code général des impôts, les gains nets retirés des cessions à titre onéreux des valeurs mobilières sont soumis à l'impôt sur le revenu lorsque le montant de ces cessions dépasse, pour une année donnée, 7 650 euros par foyer fiscal. Cet amendement vise à réduire ce plafond en le fixant à 5 000 euros. Nous sommes en effet attachés à ce que l'ensemble des revenus des particuliers soient, à terme, soumis à l'impôt progressif. C'est l'exonération des plus-values réalisées sur les actions et autres droits sociaux qui est ici en cause. La législation actuelle encourage les pratiques spéculatives sur les marchés boursiers. C'est pourquoi nous souhaitons réduire la portée d'une telle exonération. La réduction du bénéfice de cette mesure fiscale est d'autant plus justifiée que les ménages les plus favorisés vont profiter pleinement des mesures fiscales prévues par le projet de loi de finances : baisse des taux du barème, augmentation de la réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile et doublement de l'abattement sur la part de chacun des petits-enfants pour la perception des droits de mutation à titre gratuit entre vifs.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 98.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. La commission a donné un avis défavorable à cet amendement. Cet abattement existe depuis des décennies. Il est indispensable pour orienter l'épargne vers le financement des entreprises et il serait extrêmement préjudiciable de le supprimer au moment même où les marchés financiers connaissent des difficultés.
    M. Jean-Claude Sandrier. Il s'agit de le réduire, pas de le supprimer !
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, pour donner l'avis du Gouvernement sur cet amendement.
    M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je m'étonne de cet amendement qui vise à rendre imposables les petits porteurs qui cèdent des valeurs mobilières pour des montants modérés. Je ne pense pas que ce soit le souhait de M. Sandrier. Je l'invite donc à retirer son amendement. A défaut, mon avis sera défavorable.
    M. le président. Maintenez-vous l'amendement, monsieur Sandrier ?
    M. Jean-Claude Sandrier. Oui, monsieur le président !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 98.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Carrez, rapporteur général, MM. Albertini, de Courson, Maurice Leroy et Perruchot ont présenté un amendement, n° 28, ainsi rédigé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « A la fin du premier alinéa du 12 de l'article 150-0 D du code général des impôts, les mots : "soit le jugement de clôture de la liquidation judiciaire, sont remplacés par les mots : "soit le dépôt de bilan. »
    La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Si vous le permettez, monsieur le président, je laisse la parole à M. de Courson, qui est l'auteur de cet amendement.
    M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.
    M. Charles de Courson. Cet amendement pourrait s'intituler « amendement Moulinex ». Le code général des impôts contient une bizarrerie. En effet, lorsqu'une entreprise dépose le bilan, les actionnaires ne peuvent pas imputer la déduction de la moins-value dans l'assiette de leur impôt tant qu'un jugement définitif du tribunal de commerce n'est pas intervenu. Moulinex est un très bel exemple. L'entreprise a déposé le bilan il y a maintenant presque deux ans et ses actionnaires ne peuvent toujours pas imputer la moins-value constatée dans l'assiette de leurs revenus. Moulinex était en effet une société cotée et, à partir du moment où il y a dépôt de bilan, il y a suspension de la cotation.
    J'ai proposé cet amendement, qui a été adopté par la commission, car je pense que l'erreur du code général des impôts c'est de ne pas permettre aux particuliers d'imputer les moins-values réalisées avant la date du jugement définitif. Il serait préférable de prévoir, comme date d'ouverture du droit à imputation, la date du dépôt de bilan. On nous objecte que ce serait excessif en cas de retour à meilleure fortune de l'entreprise,...
    M. Gérard Bapt. Certes !
    M. Charles de Courson. ... mais cet argument ne tient pas. En effet, seulement 5 % des entreprises qui déposent le bilan connaissent un retour à meilleure fortune et, même si l'on se place dans une telle hypothèse, lorsque les actionnaires céderont leurs actions après un retour à meilleure fortune, trois, quatre ou cinq ans plus tard, on constatera une plus-value, tout simplement ! Le problème peut donc être aisément résolu.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Je comprends que le rapporteur général n'ait pas souhaité présenter lui-même cet amendement. En effet, il est plutôt homme de raison et préfère éviter les effets d'affichage.
    On nous chante sur tous les tons qu'il faut encourager la prise de risques et que, si les actionnaires gagnent de l'argent, c'est légitime parce qu'ils ont justement pris des risques. Mais, dans sa bonté qui n'a pas de limite, M. de Courson, pour protéger les nantis, propose non seulement qu'on leur garantisse les produits quand ils sont positifs, mais surtout, qu'on les protège contre tout risque à l'avenir. C'est ce que certains appellent trivialement « l'assurance imperméable et parapluie ».
    M. Charles de Courson. Vous n'avez rien compris à l'amendement !
    M. Jean-Pierre Brard. Il est évidemment dans son rôle, mais aucune personne sensée ne peut le suivre. M. de Courson a parlé de Moulinex. La référence est excellente. Avez-vous déjà entendu notre collègue proposer des mesures pour venir au secours des salariés de Moulinex ? Il n'en a cure ! Il ne pense qu'à ceux qui sont responsables du fait qu'ils sont jetés sur le pavé.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cet amendement a été adopté par la commission. Pour ma part, j'avais néanmoins émis quelques réserves, absolument pas sur le fond, mais d'ordre technique.
    Je veux avant tout rappeler que les moins-values dont il s'agit viennent en déduction non pas du revenu, mais de plus-values qui pourraient être constatées par ailleurs. Ce n'est donc pas une imputation directe sur le revenu.
    Cela dit, il est tout à fait exact, et c'est dommage, que des années peuvent s'écouler entre le dépôt de bilan et le jugement de clôture de la liquidation judiciaire, mais le dépôt de bilan n'est pas une décision définitive. Ce n'est pas une étape à l'occasion de laquelle on constate de façon définitive une perte de valeur. C'est hélas peu fréquent, mais il arrive qu'une entreprise reprenne son activité après avoir déposé son bilan. Dans ce cas, il faudrait restituer l'éventuel débit d'impôt auquel il aurait été procédé si la moins-value avait été imputée.
    Telles sont les raisons pour lesquelles il ne me paraissait pas bon de retenir la date du dépôt de bilan. Cela dit, la commission a recherché une étape intermédiaire entre le dépôt de bilan et le jugement de clôture, mais n'en a pas trouvé.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je ne reviendrai pas sur les propos du rapporteur général, qui sont toujours très pertinents. Je voudrais à mon tour exprimer des doutes sur le choix de la date du dépôt de bilan. Comme vous le savez, celui-ci ne fait que traduire la cessation de paiement. En France, les entreprises déposent d'ailleurs leur bilan trop tardivement, ce qui rend souvent leur redressement impossible.
    Monsieur de Courson, il est à mes yeux tout à fait impossible de retenir le dépôt de bilan comme étant l'acte générateur, car il est trop prématuré. Il faut cependant, j'en suis d'accord, rechercher une date à laquelle la perte devient quasi inévitable et qui soit en même temps la moins tardive possible. Et il est exact en effet que, lors de certains dépôts de bilan, on sait déjà que les perspectives de solutions pour l'entreprise concernée sont très faibles, voire nulles.
    Nous allons y travailler, nous allons essayer de prévoir un dispositif qui permette également, en cas de retour à meilleure fortune, la reprise de la perte déduite par anticipation et qui ne s'est pas juridiquement matérialisée. Je suis prêt à expertiser plus avant cette question et je prends l'engagement de vous proposer une solution, peut-être d'ici à la discussion du collectif de fin d'année. Dans cette hypothèse, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
    M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.
    M. Charles de Courson. Monsieur le ministre, vous reconnaissez comme nous tous que c'est un vrai problème et vous nous dites que vous n'avez pas encore la solution. Mais pouvez-vous prendre l'engagement précis de la trouver pour le collectif ? Car nous devons sortir de cette situation : on ne peut pas laisser des actionnaires pendant cinq ou six ans avec des pertes non imputables sur les plus-values de leurs portefeuilles.
    M. Richard Mallié. Surtout les petits actionnaires.
    M. Charles de Courson. Si vous vous engagez pour le collectif, pas de problème, je retire mon amendement. C'est bien votre intention, monsieur le ministre ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je croyais l'avoir dit clairement.
    M. le président. L'amendement n° 28 est donc retiré.
    MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député(e)s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 173, ainsi libellé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « I. - La première phrase du deuxième alinéa du a du 5 de l'article 158 du code général des impôts est ainsi rédigée :
    « Les pensions et retraites font l'objet d'un abattement de 10 % dans la limite de 30 500 EUR.
    « II. - Les taux fixés au III bis de l'article 125 A du code général des impôts sont relevés à due concurrence. »
    La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Nous ne partageons pas les mêmes soucis que M. de Courson. En effet, l'amendement que nous proposons permettrait de rétablir l'abattement de 10 % dont bénéficiaient les retraités jusqu'en 1978. Cette mesure se justifie d'abord par référence à un principe simple : les pensions et les retraites sont des salaires différés. Et comme ce sont aussi des revenus clairement identifiés, dépendant d'un calcul effectué sur la base de dispositions législatives claires par des organismes gestionnaires bien connus, il est anormal de les traiter fiscalement de manière discriminatoire par rapport aux revenus et traitements salariés.
    Cette mesure se justifie tout autant par un souci de justice et d'efficacité fiscale. Elle prend en compte le fait que le poids démographique des retraités a sensiblement évolué. Elle traduit notre volonté de soutenir la consommation et l'activité, qui seraient favorisées par une augmentation du pouvoir d'achat des retraités et des pensionnés. Et elle est d'autant plus légitime que nous constatons depuis de nombreuses années une insuffisante progression des pensions et retraites.
    Pour ces raisons, mes chers collègues, nous vous proposons de faire profiter les retraités et les pensionnés de l'abattement de 10 %, dans la limite, bien évidemment, de 30 500 EUR.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a repoussé cet amendement qui traduit, de la part de nos collègues, un surprenant accès de générosité à l'égard des retraités les plus nantis. En effet, l'abattement de 10 % est plafonné à 3 000 EUR et ils nous proposent de porter le plafond à 30 000 EUR, ce qui correspond à une retraite de 300 000 EUR. Je ne suis pas sûr, monsieur Brard, que même Mme Liliane Bettencourt ait une retraite de ce montant ! (Sourires.)
    M. Marc Laffineur. Tout pour les riches !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je pense que la commission a été sage de limiter le bénéfice de l'abattement aux revenus moyens et modestes et de ne pas offrir un tel avantage à des revenus aussi élevés.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je vois bien que le groupe communiste essaie de réparer l'oubli qu'il a commis en ne votant pas la baisse de l'impôt sur le revenu. (Sourires.) J'estime que le système actuel a atteint un point d'équilibre. Je rappelle d'ailleurs que l'abattement de 10 % dont bénéficient les retraités n'a pas de contrepartie en termes de frais professionnels et qu'il est indexé sur le barème de l'impôt sur le revenu, ce qui permet de le préserver d'année en année. Par ailleurs, les retraités bénéficient de l'allégement général de l'impôt sur le revenu engagé par le Gouvernement dès l'imposition des revenus de 2001 et poursuivi dans le projet de loi de finances pour 2003.
    Du point de vue de la méthode fiscale, l'allégement général de l'impôt sur le revenu est préférable aux mesures catégorielles, qu'il s'agisse d'en créer de nouvelles ou de renforcer celles qui existent déjà, car elles nuisent à la lisibilité de l'impôt et, en définitive, à son acceptation.
    Pour toutes ces raisons, monsieur Vaxès et monsieur Sandrier, je vous propose de retirer votre amendement. A défaut, j'en demanderais le rejet.
    M. Daniel Garrigue. Au parti communiste, il n'y a plus que des retraités : c'est ce qui justifie cet amendement !
    M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Vaxès ?
    M. Michel Vaxès. Nous allons retirer cet amendement qui souffre en effet d'une maladresse de rédaction. Après avoir évalué le nombre de retraités concernés par l'abattement de 10 %, nous reviendrons à ce sujet en deuxième lecture.
    M. le président. L'amendement n° 173 est retiré.
    M. Laffineur a présenté un amendement, n° 297, ainsi rédigé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « I. - Après les mots "du contribuable, le deuxième alinéa du I de l'article 194 du code général des impôts est complété par les mots : "et en majorant le nombre de parts d'une demi-part par enfant multiple né au sein d'un même foyer fiscal jusqu'à l'âge de six ans.
    « II. - La perte de recettes est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Marc Laffineur.
    M. Marc Laffineur. Ce petit amendement n'a que peu d'influence financière et je suis certain que M. le ministre y sera très sensible. Pour les familles confrontées à des naissances multiples - jumeaux, triplés, quadruplés - le coût supplémentaire est élevé et il convient de les aider. Cependant, pour que l'octroi d'une demi-part supplémentaire par enfant ne revienne pas trop cher à l'Etat, j'ai prévu que cet avantage ne serait attribué que jusqu'à l'âge de six ans.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a repoussé cet amendement, comme elle l'avait déjà fait l'an dernier. On ne peut nier qu'il y ait un coût supplémentaire pour les familles en cas de naissances multiples, mais il en va de même en cas de naissances rapprochées. Cette mesure introduirait une rupture dans le mécanisme du quotient familial et des inégalités dans la prise en compte fiscale des enfants. Elle compliquerait également le système des parts.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. L'intention est bonne, mais la solution retenue n'est sans doute pas la meilleure. Comme vous le savez, monsieur Laffineur, le système du quotient familial a pour objet de proportionner l'impôt aux facultés contributives de chaque redevable. Celles-ci dépendent notamment du nombre de personnes qui vivent du revenu du foyer. Or votre proposition serait source d'inégalités, notamment vis-à-vis des familles qui doivent faire face à des naissances rapprochées et dont les difficultés sont assez proches de celles des familles confrontées à des naissances multiples. Cette inégalité serait d'autant plus grande que l'avantage serait accordé pendant six années. Plus généralement, un aménagement de la fiscalité n'est sans doute pas la meilleure solution pour aider les familles à faire face à des naissances multiples.
    Pour ces raisons, tout en comprenant votre intention et en étant bien conscient du devoir de la nation à l'endroit de ceux qui participent à sa politique familiale, je vous suggère de retirer votre amendement. A défaut, je serais contraint d'en demander le rejet.
    M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur.
    M. Marc Laffineur. Permettez-moi de vous dire, monsieur le ministre, que les arguments que vous m'opposez ne sont pas recevables. Cette mesure ne serait pas source d'inégalités parce que les situations des familles ne sont pas comparables. Ce n'est pas du tout la même chose d'avoir des triplés ou trois enfants à un an d'intervalle.
    M. Jean-Pierre Brard. Il faut juste acheter une grande poussette ! (Sourires.)
    M. Marc Laffineur. Je retire néanmoins l'amendement, mais j'aurais aimé en connaître le coût.
    M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.
    M. Gérard Bapt. Je partage les préoccupations de M. Laffineur. Les techniques modernes d'aide à la procréation font qu'il y a de plus en plus de naissances multiples. Dans ma commune, il y a quelques années, une famille a eu des quintuplés. Pour l'aider à faire face aux dépenses immédiates, les organismes sociaux, en particulier la CAF, sont intervenus. Mais les coûts supplémentaires vont bien au-delà car, très rapidement, cette famille s'est vue dans l'obligation de déménager.
    Pour les familles confrontées à des naissances multiples, il faut donc absolument faire respecter l'égalité devant l'impôt, mais cela ne suffit pas car les contraintes nouvelles qu'elles subissent dépassent largement la simple approche fiscale. Et je pense que la commission des finances devrait également se pencher sur de tels cas dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je ne nie pas le fait que les naissances multiples occasionnent des dépenses supplémentaires. Mais le mécanisme du quotient familial, déjà complexe, n'est pas adapté pour répondre à ce type de situation. Comme vient de le dire M. Bapt, c'est plutôt le rôle des caisses d'allocations familiales et aussi des communes. En général, les budgets municipaux prévoient des crédits spécifiques pour aider ces familles.
    M. le président. L'amendement n° 297 est retiré.
    M. de Courson et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement, n° 145, ainsi libellé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « I. - Après le premier alinéa du 6 de l'article 195 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « Le quotient familial prévu à l'article 194 est augmenté d'une part pour les contribuables mariés lorsque chacun des conjoints remplit les conditions fixées au f du 1. »
    « II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés par les articles 575 et suivants du code général des impôts. »
    La parole est à M. Charles de Courson.
    M. Charles de Courson. Cet amendement pose une question simple : faut-il que les couples mariés dont les conjoints ont plus de soixante-quinze ans et sont tous deux pensionnés de guerre ou anciens combattants divorcent ?
    M. Jean-Pierre Brard. Mon Dieu !
    M. Charles de Courson. Pourquoi cette question ? Parce qu'il y a une anomalie dans la fiscalité. Vous savez que les anciens combattants ou pensionnés de guerre de plus de soixante-quinze ans bénéficient d'une demi-part supplémentaire. Mais si les deux conjoints remplissent ces conditions, le couple n'a toujours droit qu'à une demi-part. Mon amendement tend à lui accorder deux fois une demi-part.
    J'aimerais connaître la position du Gouvernement face à ce risque de divorce. (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Brard. Il faut consulter le conseil pontifical !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Le commission a émis un avis défavorable.
    M. Jean-Pierre Balligand. C'est scandaleux ! (Sourires.)
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Mais je m'empresse de préciser qu'elle n'a pas souhaité pour autant pousser au divorce les conjoints pensionnés de guerre de plus de soixante-quinze ans ! (Sourires.)
    Là encore, il nous est apparu inutile de compliquer encore le mécanisme déjà très complexe du quotient familial pour des cas dont je ne nie pas qu'ils existent, mais qui restent des cas extrêmes. Le quotient familial n'est vraiment pas fait pour cela.
    On peut imaginer d'autres formes d'action. Pour prendre un exemple dans un autre domaine, il est évident qu'un couple bénéficiera, si les deux conjoints sont handicapés, de deux allocations pour adulte handicapé. Ainsi, comme je le disais à propos de l'amendement précédent, c'est plutôt sous la forme de prestations ou d'allocations que l'on peut répondre à des situations qui sont assez exceptionnelles, et non pas en bricolant le quotient familial.
    M. Jean-Pierre Balligand. C'est déjà une usine à gaz !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Là encore, l'intention est bonne, mais la solution choisie n'est pas la meilleure. Je rappelle d'ailleurs à l'Assemblée que, pendant toute la discussion générale, de nombreux appels très légitimes ont été lancés en faveur de la simplification, et je ne suis pas sûr, hélas, que ce dispositif aboutirait à une vraie simplification. (Sourires.)
    Cela étant, monsieur de Courson, les personnes qui connaissent la situation que vous décrivez perçoivent le dispositif actuel comme un manque de reconnaissance de la nation envers leur dévouement. Vous me demandez une réponse, et je vais essayer de vous en donner une, aussi solennelle que possible, car les redevables concernés le méritent.
    L'objectif du quotient familial, je le souligne à nouveau, est de proportionner l'impôt aux charges des foyers, qu'il s'agisse des charges de famille ou de celles qui sont liées à l'invalidité. Or l'avantage du quotient familial accordé au titre de la qualité d'ancien combattant ne répond pas à cette logique.
    Cela étant, les anciens combattants bénéficient de dispositions fiscales favorables qui leur sont spécialement dédiées, ce qui est de meilleure législation. On peut citer l'exemple des versements en vue de la constitution de la retraite mutualiste du combattant, qui sont déductibles du revenu imposable lorsqu'ils sont destinés à la constitution d'une rente donnant lieu à une majoration de l'Etat. Cette retraite est, en outre, exonérée d'impôt sur le revenu et de contributions sociales.
    Il semble donc que les dispositions actuelles prennent équitablement en compte la situation des anciens combattants. Si, néanmoins, elles devaient s'avérer insuffisantes, il faudrait sans doute travailler à les améliorer, mais le quotient familial n'est certainement pas le cadre qui convient.
    Ces explications me conduisent à vous inviter, si vous le voulez bien, à retirer votre amendement.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Je suis vraiment très intéressé par cet amendement, mais je note que M. de Courson, comme vous-même, monsieur le ministre, vous intéressez surtout aux anciens combattants quand il n'y en a presque plus.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. J'arrive tout juste au Gouvernement.
    M. Jean-Pierre Brard. Certes.
    M. Jean-Pierre Balligand. Mais le rapport constant, c'est nous.
    M. Jean-Pierre Brard. Vous avez raison, monsieur le ministre, vous ne faites qu'arriver au Gouvernement, et d'ailleurs, s'il n'avait tenu qu'à nous, vous n'y seriez toujours pas. Mais c'est quand même avec beaucoup de plaisir que nous débattons avec vous.
    Cela dit, puisque vous vous intéressez maintenant aux anciens combattants, je vous propose de satisfaire les demandes formulées par les anciens d'Afrique du Nord, et par la FNACA en particulier. C'est à votre aptitude à satisfaire les demandes de la FNACA que nous mesurerons la sincérité de votre inclination nouvelle pour le monde combattant.
    M. le président. Monsieur de Courson, retirez-vous votre amendement ?
    M. Charles de Courson. Je suis un peu ennuyé, monsieur le ministre, car si vous m'avez fait une ouverture à propos de l'amendement précédent, vous ne nous dites pas, en l'occurrence, comment vous voyez la solution du problème. Vous reconnaissez que la règle fiscale n'est pas très cohérente, mais vous n'êtes pas pour le divorce suivi de concubinage, ce qui serait une possibilité. (Sourires.)
    Vous me diriez que, pour deux anciens combattants de plus de soixante-quinze ans, on en reste à la demi-part, mais qu'on peut réfléchir, par exemple, à une majoration du plafond, je serais prêt à retirer cet amendement qui ne contribuerait pas, en effet, à la simplification. Mais, faute de proposition de votre part, je le maintiens.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Dans ces conditions, avis défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 145.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Albertini, de Courson, Maurice Leroy, Perruchot et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement, n° 163, ainsi libellé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « I - Après le 1° du I de l'article 199 sexies du code général des impôts, il est inséré un 2° ainsi rédigé :
    « 2° Intérêts afférents aux cinq premières années des prêts contractés par les contribuables pour l'achat de leur résidence principale.
    « Le montant des intérêts à retenir pour le calcul de la réduction d'impôt est limité à 3 000 euros pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et à 6 000 euros pour un couple soumis à une imposition commune. Ces montants sont augmentés dans les conditions prévues au quatrième alinéa du 1° du I du présent article. »
    « II - La première phrase du I de l'article 199 sexies A du code général des impôts est complétée par les mots : "et à 25 p. 100 du montant des dépenses mentionnées au 2° du I du même article.
    « III - La perte de recettes pour le budget de l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Charles de Courson.
    M. Charles de Courson. C'est un amendement d'appel sur la situation du logement. Après les cinq années du gouvernement précédent, on assiste en effet à une crise du logement très grave, notamment, mais pas seulement dans les agglomérations.
    M. Jean-Pierre Balligand. La crise était là bien avant !
    M. Charles de Courson. Jamais la construction sociale ne s'est autant effondrée que sous le gouvernement de gauche, mes chers collègues. Ce sont des faits !
    M. Jean-Pierre Brard. Avec Périssol, c'était bien !
    M. Charles de Courson. Eh oui, heureusement qu'il y a eu Périssol pour relancer le logement.
    Mme Martine Lignières-Cassou, M. Jean-Pierre Balligand et M. Jean-Claude Sandrier. Pas le logement social !
    M. Charles de Courson. Je parle du logement dans son ensemble. Il n'y a pas que le logement social.
    M. Marc Laffineur. Il faut les deux, voyons !
    M. Charles de Courson. Il faut de tout ! Et le logement social s'est effondré aussi.
    M. Marc Laffineur. Jamais il n'y a eu aussi peu de PLA que sous la gauche !
    M. Jean-Pierre Balligand. Voilà neuf ans que le logement social est en crise. Vous ne savez rien, monsieur Laffineur !
    M. Charles de Courson. Auparavant, il existait un dispositif d'encouragement à l'accession qui consistait à déduire de l'impôt une part des intérêts affectée d'un plafond assez bas. L'idée est de le recréer dans les mêmes conditions en prévoyant un crédit d'impôt de 25 % sur un montant d'intérêts également plafonné.
    Tel est, monsieur Le ministre, le contenu de cet amendement d'appel dont la finalité est d'inviter le Gouvernement à nous préciser les actions qu'il envisage pour relancer le logement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a repoussé cet amendement pour deux raisons.
    D'une part, la suppression de cette réduction d'impôt avait été décidée il y a quelques années au moment de la mise en place, dans le cadre de l'accession sociale à la propriété, du dispositif dit « prêt à taux zéro » qu'elle avait permis de financer en partie, le 1 % logement ayant été par ailleurs mobilisé.
    D'autre part, comme il faut tout faire - notre collègue de Courson a eu raison de le souligner pour relancer ou soutenir le secteur de la construction - sera proposé un peu plus tard dans la discussion, un amendement adopté par la commission afin d'améliorer le dispositif Besson.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. M. Charles de Courson a parlé d'un amendement d'appel. Or il faut bien considérer qu'il marquerait un retour en arrière puisque nous avions voulu simplifier l'impôt sur le revenu en évitant de multiplier les dispositions de ce type. Ce n'est donc pas la meilleure solution.
    Le Gouvernement de l'époque avait instauré le prêt à taux zéro, auquel le Gouvernement actuel est très attaché. Il constitue une mesure plus efficace et plus juste, incontestablement, qui encourage les ménages à acquérir leur logement. C'est plutôt dans cette direction qu'il faut agir et dans celle que le rapporteur général vient d'indiquer, à savoir l'extension du dispositif dit Besson. Surtout n'ajoutez pas de disposition particulière. Nous nous sommes promis, les uns les autres, d'aller vers plus de simplification, il ne faut pas réintroduire de la complexité.
    J'ai bien entendu votre amendement d'appel, monsieur de Courson, mais je vous demande de bien vouloir le retirer. A défaut, mon avis sera défavorable.
    M. Charles de Courson. Je le retire, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 163 est retiré.
    MM. Albertini, de Courson, Maurice Leroy, Perruchot et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement, n° 259, ainsi libellé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « I. - Le dernier alinéa du 2° de l'article 199 septies du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
    « Par dérogation aux limitations précédentes, la réduction d'impôt s'applique aux contrats qui portent pour au moins 50 % sur des actions européennes.
    « II. - La perte de recettes pour le budget de l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Charles de Courson.
    M. Charles de Courson. Cet amendement, qui concerne les épargnants, est destiné à préparer le volet de la réforme des retraites portant sur les fonds de pension. Pour réussir cette réforme, il faudrait monter un dispositif d'incitation à l'investissement dans des fonds type DSK, par définition investis en majorité dans des actions de sociétés européennes. Je voulais donner au Gouvernement l'occasion de nous préciser où en sont ses intentions en la matière.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a rejeté l'amendement en partant d'une considération générale : l'épargne placée en assurance-vie a connu une grande instabilité au début des années 90. Plus exactement, elle était si abondante qu'au milieu des années 90, on a été conduit, par étapes successives, à limiter les différents avantages fiscaux dont elle bénéficiait à l'entrée, pendant la détention et à la sortie. Il semble qu'on ait atteint aujourd'hui un point d'équilibre.
    Les contrats anciens toujours en vigueur bénéficient encore de réductions d'impôts au titre des versements annuels : ils représentent un coût fiscal de l'ordre de 200 millions d'euros.
    Notre collègue propose, certes, de s'inspirer des contrats de type DSK mais il n'en retient pas toutes les contraintes. Ces contrats imposent d'investir au moins 5 % sous forme de placements à risque, clause qu'on ne retrouve pas dans le dispositif proposé par M. de Courson.
    En fonction de ces considérations, tant générales que particulières, la commission a rejeté cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. M. Charles de Courson a souhaité connaître la position du Gouvernement sur cette importante question. Le Premier ministre a pris devant l'Assemblée l'engagement d'offrir à chacun de nos compatriotes la possibilité de compléter sa pension par un revenu d'épargne grâce à une incitation fiscale, nous sommes donc tout à fait d'accord sur l'objectif. En outre, il a souhaité qu'une réflexion approfondie soit menée au cours du premier semestre 2003.
    L'année prochaine, des mesures seront soumises à la représentation nationale sur cette question de la plus haute importance, en effet. Il me paraît prématuré d'adopter un dispositif à ce stade. Cela dit, vous aurez naturellement toute latitude pour avancer des propositions lorsque le texte viendra en discussion devant l'Assemblée l'année prochaine.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.
    M. Jean-Pierre Balligand. Je vois deux sujets dans l'amendement de M. de Courson.
    Le premier concerne les dispositifs de retraite et il est bon, me semble-t-il, que le Gouvernement se donne un peu de temps, ne serait-ce que pour réfléchir, le sujet le mérite, à l'état actuel des fonds de pension et des retraites des salariés américains, par exemple. Ce délai nous permettra d'avoir un débat intéressant.
    Aujourd'hui les prises de position se font beaucoup plus rares, je pense en particulier au secrétaire général de l'UMP, M. Douste-Blazy, qui ne tient d'ailleurs plus aucun propos sur la question, lui qui dans cet hémicycle, me reprochait pourtant, au moment de la discussion sur l'épargne salariale, de ne pas vouloir généraliser le dispositif aux retraites.
    La crise actuelle des valeurs nominales des actions sur l'ensemble des bourses du monde sera l'occasion d'un vrai débat car, même si les cours remontent un peu, il faudra beaucoup de temps aux salariés pour retrouver le capital qu'ils ont investi.
    Second sujet abordé par l'amendement de M. de Courson, le problème des contrats d'assurance-vie. Pour ceux qui pensent - j'en suis, mais il y en a sur tous les bancs - que les flux financiers doivent être réorientés du marché obligataire vers le marché en actions, il n'est pas certain que les contrats d'assurance-vie soient le meilleur moyen d'opérer ce basculement ; d'ailleurs, M. de Courson le reconnaît honnêtement dans son exposé des motifs. Les contrats d'assurance-vie étaient d'abord basés sur un portefeuille de taux. Ils se sont, progressivement, rééquilibrés entre les produits de taux et les actions. Mais je suis persuadé qu'il y a des supports bien plus adaptés pour soutenir le financement des entreprises dans notre pays.
    La proposition de M. de Courson qui consiste à revenir sur une disposition supprimée en 1996 par un gouvernement de droite - ce que nous-mêmes nous n'avons pas fait pour des raisons qui tiennent à la structure de notre marché financier et à l'insuffisance de financement en actions - ne me paraît pas très pertinente.
    Enfin, je voudrais souligner que les contrats d'assurance-vie, même si les temps sont devenus plus difficiles, avaient, début 2000, dépassé le cap des 4 000 milliards de francs d'encours selon les projections faites en 1999 pour le 1er janvier 2000. A l'époque, l'épargne salariale - participation, intéressement, plans d'épargne entreprise et tutti quanti - ne représentait que 350 milliards. Je ne pense donc pas que le développement des contrats d'assurance-vie soit adapté pour relever le défi que représente le financement des entreprises.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Les arguments de la commission, monsieur le rapporteur général, ne me semblent pas tout à fait pertinents. Il y a du maquillage et de l'habillage dans l'exposé sommaire de M. de Courson lorsqu'il dit qu'il faut relancer l'actionnariat populaire alors que, en réalité, il s'agit seulement de favoriser la défiscalisation de placements non productifs.
    Pourtant, sa référence à l'actionnariat populaire ne manque pas d'intérêt. Il est amené, comme nous tous, à faire le constat de l'échec du libéralisme échevelé, celui que vous avez réussi à instiller dans l'opinion des salariés, souvent modestes, qui ont cru bon d'acheter des actions. Voyez les aventures d'Eurotunnel, de Vivendi, de France Télécom... Je connais dans ma ville, comme vous tous certainement, chers collègues, des salariés de France Télécom qui ont emprunté pour acheter des actions de leur entreprise. Le moins qu'on puisse dire, c'est que ce n'était pas une bonne idée ! A propos d'actionnariat populaire, regardez, par exemple : AXA, dévalorisation de 53 %, Bull moins 66 %, France Télécom moins 80 %, Orange moins 51 %, Péchiney moins 52 %, Pinault-Printemps-Redoute moins 56 %...
    M. François Goulard. Vous n'allez pas lire toute la cote !
    M. Philippe Auberger. C'est sa lecture favorite ! (Sourires)
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur Goulard, je sais que vous connaissez la cote par coeur ! J'avoue ne pas fréquenter la corbeille tous les jours : c'est une grande différence entre nous. (Sourires.) Mais, je comprends, comme me le souffle Jean-Pierre Balligand, ça vous fait mal...
    M. François Goulard. Je n'ai pas d'actions !
    M. Jean-Pierre Brard. ... parce que chaque fois que je cite un chiffre, je mets le doigt sur une logique idéologique qui plombe le pays...
    M. Jean-Pierre Balligand. Moi, c'est idéologiquement que j'ai mal ! (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Brard. ... mais, à quelque chose malheur est bon, ces événements catastrophiques pour le petit épargnant vont faire réflechir. J'ai oublié de citer Vivendi Universal, qui avait perdu à ce moment-là 77 %.
    Comme le disait monsieur le ministre hier, il faut que l'opinion comprenne très clairement que nous n'avons pas les mêmes idées !
    M. Marc Laffineur. Eh non !
    M. Jean-Pierre Brard. Certains sont à droite, d'autres à gauche. Vous, au moins, monsieur le ministre, il faut vous le reconnaître, vous affichez clairement vos opinions, vous êtes manifestement de droite. Dans l'Orne, ça se comprend, en plus.
    Mais, nous, nous sommes à gauche. Notre démarche, ce n'est pas d'inciter à boursicoter, mais au contraire de faire en sorte que soient développées des politiques publiques qui poussent à l'augmentation des revenus du travail. Se pose donc pour nous la question de la revalorisation des salaires, en particulier des plus modestes. Mais ce n'est pas votre philosophie, n'est-ce pas...
    M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.
    M. Charles de Courson. Deux remarques à mes collègues de gauche..., surtout à notre collègue Brard, parce que M. Balligand a dit des choses plutôt sensées. D'une part, monsieur Brard, vous lisez un article du Monde sur l'actionnariat salarié, ce qui nous permet de constater que vous ne savez pas ce qu'est un fonds de pension. Le fonds de pension éviterait précisément ce que vous venez de décrire. Dans la conception de l'UDF, transcrite dans un texte que nous avions voté ici, il s'agit de fonds externalisés, qui ont interdiction de détenir des actions de l'entreprise concernée au-delà d'un pourcentage très bas de leur portefeuille, des fonds qui respectent des règles de division des risques. Monsieur Brard, si vous couchiez un peu plus avec la cote,...
    M. Jean-Pierre Brard. Pas d'obscénité !
    M. Gérard Bapt. Qui est donc cette dame La Cote ?
    M. Charles de Courson. ... En outre, si vous regardiez les choses non pas à court terme mais à long terme, vous verriez que les actions restent le meilleur placement, monsieur Brard.
    M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur de Courson ?
    M. Charles de Courson. Non, monsieur le président il est retiré dans la mesure où le Gouvernement a confirmé, c'était l'objectif recherché, qu'il y aurait bien un volet sur les fonds de pension dans le projet de loi sur les retraites.
    M. le président. L'amendement n° 259 est retiré.
    M. Merville a présenté un amendement, n° 273, ainsi libellé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « I. - L'article 199 terdecies OA du code général des impôts est ainsi modifié :
    « 1° Le a du I est complété par les mots : "ou à l'impôt sur le revenu. »
    « 2° Le II est ainsi rédigé :
    « II. - Les versements ouvrant droit à la réduction d'impôt mentionnée au I sont retenus dans la limite annuelle de 24 000 EUR pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et de 48 000 EUR pour les contribuables mariés soumis à imposition commune. »
    « 3° Le 2 du VI est ainsi rédigé :
    « 2. Les versements ouvrant droit à la réduction d'impôt mentionnée au 1 sont retenus dans les limites annuelles de 48 000 EUR pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et de 96 000 EUR pour les contribuables mariés soumis à imposition commune. »
    « II. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Daniel Garrigue, pour soutenir cet amendement.
    M. Daniel Garrigue. L'amendement qui porte sur l'article 199 terdecies OA du code général des impôts, tend à élargir les possibilités de réduction d'impôt pour les particuliers qui souscrivent au capital de PME, soit lors de la création de ces entreprises, soit à l'occasion d'augmentations de capital. L'objectif est de permettre le renforcement des fonds propres de ces PME.
    M. Merville propose que ce dispositif puisse s'appliquer également aux sociétés de personnes lorsqu'elles sont imposées à l'impôt sur le revenu, et que le plafond de l'investissement ouvrant droit à cette réduction soit porté à 24 000 euros pour des personnes isolées et à 48 000 euros pour des contribuables mariés. Il demande également que la date limite d'application, le 31 décembre 2006, soit reportée.
    Il s'agit là, peut-être, d'une des dispositions susceptibles d'être étudiées dans le projet de loi sur lequel travaille actuellement M. Dutreil. Si vous pouviez nous le confirmer, je retirerais l'amendement de M. Merville.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a rejeté cet amendement tout en le jugeant extrêmement intéressant et en convenant de la nécessité de rehausser le plafond. Il semble en effet que le projet de loi « agir pour l'initiative économique », dit projet de loi Dutreil, comporterait une disposition analogue. J'ai pu lire dans la presse, d'ailleurs, que le plafond serait même supérieur à celui qui est proposé par l'amendement. Monsieur le ministre, nous souhaiterions, comme vient de l'indiquer notre collègue Daniel Garrigue, avoir confirmation de votre part que cette disposition sera bien prévue.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je vais préparer, en effet, le texte sur l'entreprise qui viendra devant votre assemblée en début d'année prochaine. Mais par loyauté je dois vous dire ma crainte que la préoccupation exprimée dans cet amendement ne puisse être satisfaite à cette occasion. L'extension du dispositif Madelin, ainsi que nous l'appelons, aux souscriptions au capital des sociétés de personnes imposables à l'impôt sur le revenu ne sera vraisemblablement pas envisagée.
    Les souscripteurs sont, en effet, des redevables qui seraient en quelque sorte co-exploitants. On s'écarterait alors totalement de l'esprit de la réduction d'impôt Madelin qui consiste, au contraire, à encourager l'apport en capital par des investisseurs extérieurs à la société. Sur ces sujets, il vaudrait mieux envisager, au moment de la préparation du texte qui viendra devant vous en début d'année prochaine, de modifier le dispositif introduit par cet amendement parce qu'il me paraît avoir assez peu de chances d'aboutir.
    Après ces explications, je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement.
    M. le président. Monsieur Garrigue ?
    M. Daniel Garrigue. Je retire l'amendement.
    M. le président. L'amendement n° 273 est retiré.
    MM. Brard, Sandrier, Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 100, ainsi libellé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « I. - Après l'article 200 quinquies du code général des impôts, il est inséré un article 200 quinquies A ainsi rédigé :
    « Art. 200 quinquies A. - I. Les contribuables résidant en France qui, entre le 1er novembre 2002 et le 31 décembre 2003 acquièrent des équipements électroménagers de classe A peuvent bénéficier à ce titre d'un crédit d'impôt.
    « Ce crédit d'impôt égal au plus à 15 % du montant des dépenses est accordé sur présentation des factures. »
    « II. - Pour un même contribuable, le montant des dépenses ouvrant droit au crédit d'impôt ne peut excéder au cours de la période définie au premier alinéa du I la somme de 200 euros.
    « Le crédit d'impôt est imputé sur le montant de l'impôt dû au titre de l'impôt sur le revenu de l'année au cours de laquelle les dépenses ont été payées, après imputation des réductions d'impôt mentionnées aux articles 199 quater B à 200, de l'avoir fiscal, des crédits d'impôt et des prélèvements ou retenues non libératoires. S'il excède l'impôt dû, l'excédent est restitué.
    « III. - La liste des équipements pouvant bénéficier de ce crédit d'impôt est fixée par arrêté. »
    « IV. - La perte de recettes pour le budget de l'Etat est compensée par le relèvement à due concurrence du taux de l'impôt sur les sociétés. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Depuis que nous avons entamé la discussion vous nous répétez à l'envi, monsieur le ministre, chers collègues de droite, que vous voulez tenir les engagements du Président de la République. Voilà un amendement qui me permet de vous mettre au pied du mur, si j'ose ainsi m'exprimer.
    Lors du sommet de Johannesburg, en effet, le Président de la République française a tenu des propos tout à fait intéressants auxquels nombre d'entre nous peuvent adhérer. Pour ce qui nous concerne, nous proposons de passer du discours à la pratique.
    Les dérèglements climatiques majeurs que connaît depuis quelques années la planète, et qui ont aussi des conséquences graves dans notre pays, nécessitent que l'on veille à une utilisation rationnelle et économe de l'énergie électrique. En France, sa production, qui est aux trois quarts nucléaire, pose de très difficiles problèmes de gestion des déchets ultimes et de démantèlement des centrales arrivées en fin de vie. Tous ces éléments soulignent le caractère impératif, non seulement de la poursuite de la recherche, mais aussi des économies d'énergie dès maintenant, dans l'intérêt des générations futures. C'est pourquoi nous proposons d'inciter les consommateurs à l'acquisition d'équipements électroménagers économes en termes de consommation d'énergie, incitation concrétisée au moyen d'un crédit d'impôt ciblé sur les appareils de classe A qui ont la consommation énergétique la plus faible. Vous savez en effet que la caractéristique de tels appareils, c'est d'être plus chers que les autres.
    Puisque vous avez évoqué tout à l'heure Mme Bettencourt, je vous réponds qu'elle ne va pas faire les achats elle-même et que, si d'aventure elle y va, peu lui chaut le prix, si j'ose dire, tandis que, pour des gens modestes, il faut des incitations afin que l'esprit de long terme l'emporte sur la logique immédiate du porte-monnaie qui fait qu'on ne peut dépenser que ce que l'on a.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a rejeté cet amendement, d'abord pour une raison d'ordre général. En effet, il est difficile de multiplier les crédits d'impôt qui complexifient notre système, déjà assez opaque, de barèmes, de quotients, de calcul de l'impôt sur le revenu.
    Ensuite les rares crédits d'impôt existants concernent précisément les équipements qui permettent de réduire la pollution et de favoriser l'utilisation d'énergies renouvelables : acquisition de véhicules fonctionnant au GPL ou équipement de chauffage à base d'énergies renouvelables, tels les panneaux solaires, par exemple.
    Il ne paraît pas raisonnable de multiplier les crédits d'impôt, même si l'objectif est louable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Il est indéniable que la protection de notre environnement est un grand enjeu. De ce point de vue, monsieur Brard, il n'y a pas de divergence entre nous.
    Néanmoins, ainsi que l'a souligné le rapporteur général, il faut savoir ce que nous voulons. Alors que, durant toute la journée d'hier, nous avons répété que la simplification devait être notre priorité, depuis ce matin, on essaie d'introduire des dispositifs particuliers.
    De plus, je vous indique que nous avons prévu de reconduire, dans la deuxième partie du budget, toutes les dispositions adoptées sous le précédent gouvernement en matière de véhicules propres. Elles ne coûtent d'ailleurs pas cher à l'Etat car ces dispositions sont peu utilisées. Je crois qu'il faut étudier l'efficacité des dispositifs relatifs aux véhicules automobiles avant d'en prévoir d'autres.
    C'est la raison pour laquelle je vous demande, tout en partageant cette ambition qui doit nous être commune de réduire les pollutions et de protéger l'environnement, de retirer votre amendement. A défaut, j'en demanderai le rejet.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. J'ai bien entendu, monsieur le ministre, que vous alliez maintenir les dispositions en vigueur pour les voitures fonctionnant au GPL - que j'avais d'ailleurs proposées lors de la précédente législature - parce qu'elles étaient peu utilisées et ne coûtaient donc pas grand-chose.
    Instituteur de profession, j'estime qu'il est toujours utile d'expliciter le propos. J'ai un souci pédagogique, non seulement à votre égard, même si j'ai peu de chances de vous convaincre, mais surtout envers les gens qui nous écoutent, qui nous regardent ou qui nous liront. Vous avez une telle habilité dans le maniement de la sémantique, qu'il me paraît indispensable d'expliciter vos propos pour que chacun en saisisse bien la quintessence : dès que cela ne coûte rien, vous êtes d'accord.
    En revanche force est de constater que vous êtes pour le moins réticent à accepter que l'esprit du Président de la République, qui vous habite, soit traduit dans des dispositions législatives. Quand il s'agit de « passer à l'acte » comme dirait M. de Courson, le refus est de règle et je le regrette.
    M. Philippe Auberger. C'est freudien comme explication !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 100.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 99, ainsi libellé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « Après l'article 200 sexies du code général des impôts, il est inséré un article 200 septies ainsi rédigé :
    « Art. 200 septies. - Les réductions d'impôt visées aux articles 144 à 200 quinquies ne pourront produire une réduction du montant de la cotisation excédant 4 500 EUR. »
    La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
    M. Jean-Claude Sandrier. Comme j'ai eu l'occasion de le rappeler hier soir, nous sommes particulièrement attachés au principe républicain qui veut que chacun participe aux charges communes en fonction de ses facultés contributives. Or le respect de ce principe essentiel pour la cohésion sociale et nationale est aujourd'hui largement mis à mal. Les contribuables les plus favorisés peuvent, en effet, échapper davantage encore à l'impôt progressif, voire ne payer aucun impôt sur le revenu, en faisant simplement jouer le bénéfice cumulatif des diverses mesures d'allégement ou d'exonération mises en place, au fil des ans, par le législateur.
    Si nombre de ces niches fiscales mériteraient assurément d'être revisitées, tant leur légitimité et leur efficacité s'avèrent des plus discutables, ce qui est en cause, avec le cumul de gains réalisés dans le cadre d'optimisations fiscales, est d'une autre nature. Alors que tous nos concitoyens paient l'impôt sur leurs revenus, à travers notamment la CSG, les ménages les plus favorisés peuvent échapper à toute imposition à ce titre, et même devenir créditeurs de l'Etat. Il s'agit d'une dérive qui pervertit le principe d'incitation qui a pu être mis en avant pour justifier telle ou telle disposition fiscale.
    Nous proposons donc en conséquence de limiter à 4 500 euros le cumul des réductions d'impôt pouvant être déduites de l'impôt sur le revenu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a émis un avis défavorable. Les différentes réductions d'impôt en vigueur aujourd'hui visent des politiques qui peuvent être très différentes et qui ont chacune leur propre logique. Qu'il s'agisse du domaine familial, du logement, des équipements propres, chaque réduction d'impôt a son intérêt spécifique.
    Puisque vous avez évoqué la multiplication des niches fiscales, je vous rappelle que la réforme de l'impôt sur le revenu votée en 1996, mais qui n'a connu qu'une année d'application, en 1997, prévoyait la suppression d'un certain nombre d'entre elles.
    Pour toutes ces raisons, il n'y a pas lieu d'introduire un plafond général qui limiterait l'intérêt de chacune de ces réductions d'impôt dont chacune, prise isolément, poursuit des objectifs d'intérêt général.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Chacune des réductions d'impôt est déjà plafonnée pour concilier la contrainte budgétaire et l'efficacité économique et sociale. Les plafonner globalement équivaudrait à renoncer aux objectifs politiques qu'elles sont supposées poursuivre. Nous avons essayé de ne pas les multiplier, mais celles qui perdurent ont des objectifs d'intérêt économique évidents. Le plafonnement proposé est une mauvaise idée et cela me conduit à proposer le rejet de cet amendement.
    M. François Goulard. Bien sûr !
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Monsieur le ministre, on peut concevoir que certaines politiques méritent des crédits d'impôt, lesquels peuvent effectivement aboutir à réduire le montant de l'impôt sur le revenu.
    Cela étant, l'idée même d'un plafonnement global me paraît intéressante, à partir du moment où un cumul de réductions d'impôt peut remettre complètement en cause l'idée de l'impôt citoyen. A cet égard, je me souviens que des députés de l'opposition d'hier, Pierre Méhaignerie en tête, nous expliquaient qu'il était essentiel que les contribuables bénéficiant de revenus corrects contribuent à l'effort national à travers l'impôt sur le revenu. L'idée que des citoyens ayant des revenus élevés puissent totalement échapper à l'impôt sur le revenu est choquante.
    Il serait d'ailleurs intéressant, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, que nous ayons des précisions sur le nombre des foyers fiscaux qui, du fait des réductions d'impôt, échappent à l'impôt sur le revenu. Cette information nous permettrait de déterminer ensuite le niveau de plafonnement adéquat. En effet, la multiplication de ce type de mesures conduit à exempter du paiement de l'impôt sur le revenu des personnes ou des familles qui bénéficient pourtant de revenus confortables.
    Nous reviendrons vraisemblablement sur ce sujet quand nous examinerons l'article 4 qui tend à instaurer une réduction supplémentaire de l'impôt sur le revenu pour l'emploi d'une personne à domicile, mais je suis étonné que ni le ministère ni la commission des finances ne puissent nous donner des précisions sur le nombre de ceux qui échappent à l'impôt sur le revenu grâce aux crédits d'impôt, grâce aux niches fiscales.
    J'appuie donc l'idée d'un plafonnement global, même si son montant peut mériter discussion. En tout cas, l'idée est intéressante et, pour le moins, des précisions devraient nous être apportées.
    M. François Goulard. Ce travail aurait pu être réalisé depuis cinq ans !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 99.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. L'amendement n° 131 de M. Suguenot n'est pas défendu.
    M. Jean-Pierre Brard. Ne pourrait-on pas avoir une photo de notre collègue ? Ses amendements sont appelés, mais nous ne l'avons toujours pas vu ! (Sourires.)
    M. le président. MM. Brard, Sandrier, Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 8, ainsi rédigé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « L'article 242 quater du code général des impôts est abrogé. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le ministre, voilà un amendement qui va certainement recueillir votre assentiment, puisqu'il peut vous aider à trouver de l'argent sans augmenter les prélèvements obligatoires.
    La France fait parfois preuve, en matière fiscale, d'une générosité tout à fait injustifiée, surtout dans le contexte actuel des finances publiques, au moment où l'on commence à reparler de rigueur. Cet amendement va rapporter, puisque nous voulons mettre un terme à une redistribution injustifiée de l'avoir fiscal au bénéfice des non-résidents, parmi lesquels figurent des ex-Français et des étrangers complètement étrangers, si j'ose dire. (Sourires.)
    L'avantage en cause est une spécificité du droit fiscal de notre pays qui n'a pas vraiment de raison d'être. Sa suppression est d'autant plus justifiée que le poids de cette restitution tend, au fil des ans, à représenter une part croissante du coût budgétaire de l'avoir fiscal attaché aux dividendes des sociétés.
    S'il faut prévoir une négociation avec les pays avec lesquels nous avons une convention fiscale, il y a d'autres Etats avec lesquels nous n'avons pas de convention fiscale, et donc aucune contrainte. Or l'avoir fiscal est systématiquement reversé à des possédants qui ont délocalisé, c'est-à-dire qu'ils sont partis dans les paradis fiscaux, et vous savez bien, monsieur le ministre, qu'il en existe même au sein de l'Union européenne. Officiellement, ils sont devenus des non-résidents. Alors que vous disiez hier que vous vouliez garder ces gens sur le territoire national, vous les incitez à partir, puisque, quand ils sont partis, vous leur envoyez des chèques ! Dans ces conditions, pourquoi resteraient-ils sur le territoire national alors qu'ils ont déjà d'autres raisons égoïstes de le quitter ?
    Bien qu'ils soient partis, en emportant un morceau de la patrie à la semelle de leurs souliers, à notre corps défendant, donc en portant atteinte à l'intérêt national, ces gens bénéficient de véritables primes. Il s'agit d'une question non seulement budgétaire, mais aussi d'éthique.
    C'est pourquoi, monsieur le ministre, nous vous proposons de retenir cet amendement qui pourrait s'appliquer immédiatement à ceux vivant dans des pays avec lesquels nous n'avons pas de convention fiscale.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a rejeté cet amendement.
    Je rappelle que le montant de l'avoir fiscal accordé aux personnes morales a été sensiblement réduit au cours de ces dernières années. Une disposition du projet de loi de finances pour 2003 poursuit dans la même voie. Cette évolution répond au désir de limiter les transferts, qui devenaient très importants, vers des personnes morales non résidentes.
    En l'occurrence l'amendement vise les seules personnes physiques. Il est indéniable qu'il existe des transferts vers des non-résidents. Toutefois ils sont nettement moins importants que ceux concernant les personnes morales. De plus la plupart de ces transferts sont opérés vers des non-résidents qui vivent dans des pays avec lesquels nous avons des conventions fiscales.
    Par ailleurs, en vertu de la réglementation communautaire, les avantages conférés aux résidents français sont étendus aux personnes qui habitent les autres pays de l'Union.
    Quant au problème des versements effectués au profit de personnes physiques résidant dans des pays avec lesquels la France n'a pas signé de convention fiscale, il est très limité.
    La dernière raison pour laquelle la commission n'a pas adopté cet amendement tient au fait que la baisse supplémentaire de l'avoir fiscal au bénéfice des personnes morales - il ne sera plus que de 10 % - déclenchera une réforme d'ensemble de ce dispositif, qui concernera autant les personnes morales que les personnes physiques. M. le ministre pourra nous en dire plus à ce sujet s'il le souhaite.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. M. Brard m'ayant dit que je maîtrisais la sémantique, je peux me permettre de lui répondre que j'admire beaucoup sa dialectique. (Sourires sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    En effet, il nous a expliqué que son amendement avait pour objet de pénaliser ceux de nos compatriotes qui ont choisi un domicile fiscal hors de nos frontières, alors qu'il n'a rien à voir avec ce sujet ! Il vise essentiellement à pénaliser toutes les personnes physiques non résidentes, dont certaines, d'ailleurs, habitent dans des pays ayant conclu des conventions fiscales avec la France.
    Certes, monsieur Brard, vous avez sans doute dû préparer cet amendement dans la précipitation et vous n'avez pas eu le temps de le peaufiner. Néanmoins, je dois vous dire que l'objectif consistant à diminuer le montant des transferts d'avoir fiscal dont bénéficient les non-résidents ne peut être atteint que par des mesures qui visent également les résidents. Or je ne suis pas certain que ce soit votre proposition.
    M. François Goulard. Il en est bien capable ! (Sourires.)
    M. Christian Cabal. Avec lui, rien n'est impossible !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Accordez à M. Brard le bénéfice du doute.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il est malin !
    M. Christian Cabal. Il ne doute jamais !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. S'agissant des personnes physiques qui ne sont pas concernées par l'article 7 du projet de loi de finances, le Gouvernement, monsieur le rapporteur général, a en effet annoncé qu'il souhaitait engager dès l'an prochain - il vous invitera d'ailleurs à participer à ces travaux - une réflexion dont l'objectif est de réformer le régime de distribution. Cette réforme tendra à rapprocher notre situation de celle de la plupart des Etats membres de l'Union européenne qui ont eux-mêmes abandonné l'avoir fiscal. L'ensemble de ces mesures aura pour effet de réduire, puis de faire disparaître, la charge budgétaire qui est liée au transfert de l'avoir fiscal à destination des non-résidents. Je vous demande en conséquence, monsieur Brard, de bien vouloir retirer votre amendement. C'est sans doute ce que vous vous apprêtiez à faire.
    M. Christian Cabal. Bien sûr !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. A défaut, je serai obligé d'en demander le rejet, à regret.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le ministre, vous noyez le poisson avec une habileté qui ne vous déshonore pas.
    M. François Goulard. Le poisson rouge en l'occurrence ! (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Brard. Néanmoins, vous avez certainement mal entendu mon propos. J'ai parlé de ceux, que je nomme les ex-Français, qui, faisant fi de tout patriotisme, sont partis, mais j'ai aussi évoqué les résidents étrangers. Je vise donc les deux dans cette affaire. D'autant plus que l'avoir fiscal est une curiosité française...
    M. Jean-Yves Chamard. Non !
    M. Jean-Pierre Brard. ... qui, sauf cas exceptionnel - n'est-ce pas monsieur Goulard ? Je m'adresse à vous puisque vous semblez très bien informé - ne bénéficie pas de la réciprocité.
    Vous essayez de vous en sortir en soulignant que ce n'est plus vraiment un problème parce qu'il y a des personnes morales dont on a déjà beaucoup réduit l'avantage. Mais, si j'ose dire, moi je m'intéresse plus aux personnes immorales (Rires), c'est-à-dire footballeurs et autres top models, monsieur le ministre.
    Or vous avez une position idéologique à ce sujet. Quand j'ai travaillé sur la fraude, je me suis intéressé à ce problème. A l'époque, le manque à gagner s'élevait à plusieurs milliards de francs, des milliards de francs qui manquent dans nos coffres et que vous envoyez, par adhésion à des postulats idéologiques, à l'étranger.
    Le rapporteur général a minimisé l'importance de cette question en la qualifiant de limitée, mais il a reconnu qu'elle se posait, ce qui est une concession dans ma direction.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Le rapporteur général est objectif.
    M. Jean-Pierre Brard. Ça dépend des jours. Mais, admettons que, dans le cas particulier qui nous occupe, il soit objectif. Passez donc à l'acte, monsieur le rapporteur général ! Rien ne nous oblige à maintenir cette injustice.
    Quand je vois votre âpreté dès qu'il s'agit d'augmenter le SMIC de trois francs six sous et votre générosité dès qu'il s'agit d'envoyer des chèques à l'étranger, il était utile que nous ayons ce débat pour que l'opinion publique soit éclairée.
    M. le président. Monsieur Brard, j'ai cru comprendre que vous ne répondiez pas à l'invitation du ministre du budget de retirer votre amendement.
    M. Jean-Pierre Brard. Malgré le souhait d'être sympathique à mon compatriote, je ne peux pas accéder à sa prière. (Sourires.)
    M. le président. Je mets aux vois l'amendement n° 8.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 96, ainsi rédigé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « I. - Il est institué du 1er octobre 2002 au 31 décembre 2003 un crédit d'impôt au bénéfice des contribuables ayant obtenu le permis transport de marchandises ou le permis transport en commun de voyageurs ; ce crédit d'impôt ne peut excéder 50 % du coût correspondant, dans la limite de 762,25 EUR.
    « II. - Les trois plus hautes tranches de l'impôt sur le revenu sont relevées à due concurrence. »
    La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Cet amendement, s'il était adopté...
    M. Marc Laffineur. Il ne le sera pas !
    M. Michel Vaxès. ... permettrait de prendre en compte la situation paradoxale que connaît le secteur du transport routier : celui-ci est en effet confronté à des difficultés de recrutement de salariés qualifiés alors que, dans le même temps, les salariés, en particulier les jeunes, rebutés par le coût élevé de l'inscription à la préparation du permis de poids lourds et du permis de transport en commun, renoncent à s'y préparer. C'est la conséquence indirecte de la suppression du service national obligatoire, qui permettait à de nombreux jeunes de passer gratuitement des permis militaires, qu'ils faisaient ensuite valider dès leur retour à la vie civile.
    Afin de tenir compte de cette situation spécifique, nous proposons - pour une durée déterminée, afin de pouvoir évaluer l'efficacité de l'aide que nous envisageons - d'instaurer un crédit d'impôt correspondant à 50 % des sommes engagées, dans la limite de 762,25 euros. Cette mesure d'un coût modeste, si on la rapporte au nombre de personnes qui passent ces permis chaque année, peut cependant avoir un effet de levier non négligeable.
    Agir pour l'emploi suppose de prendre en compte les réalités spécifiques de tel ou tel secteur d'activité et d'encourager la formation qualifiante de jeunes. C'est ce que nous ferions, mes chers collègues, en adoptant cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a donné un avis défavorable à cet amendement. Nous sommes en effet réticents à multiplier les crédits d'impôt. J'ajoute que, sur le problème particulier du recrutement dans ces professions, qui est un problème réel, le crédit d'impôt n'est manifestement pas la solution adaptée.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le président, je pense pouvoir donner à l'auteur de l'amendement des informations qui vont apaiser ses inquiétudes. Le problème soulevé mérite tout à fait d'être pris en compte.
    Je rappelle tout d'abord que les dépenses supportées par les salariés en vue d'acquérir une qualification leur permettant d'améliorer leur situation constituent, sous certaines conditions, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu, des frais professionnels déductibles. Ces dispositions peuvent concerner, sous réserve de justifier de la réalité des frais engagés, les dépenses exposées pour obtenir le permis de conduire des véhicules dits « poids lourds » - il s'agit du permis C - ou affectés ou transport en commun - il s'agit du permis D.
    J'ajoute qu'il est déjà possible d'aider les personnes en insertion à préparer le permis poids lourds. Des fonds peuvent être mobilisés à cet effet. Les préfets peuvent aussi utiliser des crédits du Fonds social européen, qui, je le rappelle, est très excédentaire et loin de servir autant qu'il le pourrait.
    Les dispositions actuelles du droit répondent largement aux souhaits que vous avez exprimés, monsieur Vaxès, et sous le bénéfice de ces indications, je vous propose de retirer votre amendement. A défaut, j'en demanderais le rejet.
    M. le président. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Vaxès ?
    M. Michel Vaxès. Oui, monsieur le président.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 96.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 97, ainsi rédigé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « I. - Il est institué du 1er octobre 2002 au 31 décembre 2003 un crédit d'impôt au bénéfice des contribuables ayant eu recours dans l'année de référence aux prestations d'une entreprise de déménagement. Ce crédit d'impôt ne peut excéder 50 % du coût correspondant dans la limite de 762,25 EUR, il ne peut se cumuler avec le bénéfice au titre de la déclaration aux frais réels tels que définis au 3° de l'article 83 du code général des impôts.
    « II. - Les trois plus hautes tranches de l'impôt sur le revenu sont relevées à due concurrence. »
    La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
    M. Jean-Claude Sandrier. Nous vous proposons de baisser la TVA sur les prestations de déménagement. Une telle baisse favoriserait l'emploi dans ce secteur, au même titre que la baisse de la TVA sur les travaux d'entretien et d'amélioration, et favoriserait l'emploi dans le secteur du bâtiment.
    M. François Goulard. Ce n'est pas de cela qu'il s'agit !
    M. Philippe Auberger. Il est question d'un crédit d'impôt dans l'amendement n° 97.
    M. Jean-Claude Sandrier. L'activité de déménagement nécessite une main-d'oeuvre relativement importante et le fait qu'une grande partie de cette activité soit plutôt estivale incite, malheureusement, certaines entreprises à recourir au travail illégal.
    M. François Goulard. En l'occurrence, c'est M. Sandrier qui déménage. (Sourires.)
    M. Jean-Claude Sandrier. L'adoption de notre amendement permettrait d'accroître le volume d'activité de ce secteur et permettrait de faire reculer le travail au noir. Là aussi, nous avons pu observer ce qui se passait dans le bâtiment.
    Le coût de la mesure que nous vous proposons de voter est estimé à 65 millions d'euros. Nous connaissons, bien sûr, les difficultés posées par l'euro comptabilité. Néanmoins, nous souhaitons attirer votre attention sur les difficultés de ce secteur afin que le Gouvernement puisse y apporter les réponses les plus appropriées.
    En outre, nous considérons que l'ensemble des secteurs d'activité et de main-d'oeuvre mériteraient, d'un point de vue social et économique, de bénéficier d'un taux réduit de TVA.
    M. Philippe Auberger. M. Sandrier s'est trompé de disque !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Notre collègue semble avoir défendu un amendement, qui sera examiné ultérieurement, tendant à réduire la TVA sur les prestations de déménagement.
    M. François Goulard. L'amendement n° 97 n'est donc pas défendu !
    M. Philippe Auberger. D'ailleurs, il est indéfendable !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je vais considérer, les deux amendements étant d'inspiration similaire, que notre collègue a défendu l'amendement n° 97 tendant à la création d'un crédit d'impôt au bénéfice des contribuables ayant eu recours aux services d'une entreprise de déménagement. Ce crédit d'impôt ne serait pas approprié d'autant qu'il est défini dans l'amendement de façon beaucoup trop extensive. J'ajoute que l'option de l'imposition sur frais réels peut permettre de prendre en compte, le cas échéant, les frais de déménagement. On ne déménage pas plusieurs fois par an !
    Pour toutes ces raisons, avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je me réjouis, pour ma part, que M. Sandrier nous aide à accélérer nos travaux en présentant plusieurs amendements à la fois. Je trouve, monsieur Auberger, que vos critiques étaient presque contre-productives par rapport à notre souhait d'aller vite. (Sourires.)
    Monsieur Sandrier, les règles actuelles du droit répondent déjà partiellement à vos préoccupations, puisque les frais sont déductibles pour les contribuables qui optent pour la réduction des frais professionnels réellement exposés. Votre proposition de crédit d'impôt n'est donc pas recevable. En conséquence je vous propose de retirer votre amendement. A défaut, j'en demanderai le rejet.
    M. le président. Retirez-vous votre amendement, monsieur Sandrier ?
    M. Jean-Claude Sandrier. Oui, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 97 est retiré.
    M. Laffineur a présenté un amendement, n° 299, ainsi rédigé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « I. - Les personnes détachées en France (impatriés) par un employeur étranger sont exonérées d'impôt sur le revenu pour la part de rémunération liée à l'expatriation. »
    « II. - La perte de recettes est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et aux articles 265 et suivants du code des douanes. »
    La parole est à M. Marc Laffineur.
    M. Marc Laffineur. Monsieur le ministre, cet amendement est un amendement d'appel.
    Des délocalisations, que ce soit de personnes ou d'entreprises, ont lieu tous les jours. Les étrangers, de leur côté, se heurtent à des difficultés pour investir dans notre pays. Selon une étude menée chez les principaux décideurs, les raisons du manque d'attractivité de notre territoire sont, pour 93 % de ceux-ci, la lourdeur de la fiscalité et, pour 82 %, la complexité juridique et de l'environnement de notre territoire. Il faut absolument instaurer un débat sur ce sujet et proposer au Parlement un projet de loi visant à rendre notre territoire beaucoup plus attractif qu'il ne l'est.
    Je sais, monsieur le ministre, que vous êtes très sensible à cette question et c'est la raison pour laquelle j'ai déposé cet amendement. Un nombre croissant de jeunes Français surdiplômés, attirés par les avantages qui leur sont offerts à l'étranger - dont je demande l'équivalent en France dans mon amendement - quittent notre pays et ils ne reviennent malheureusement pas tous. Il y a aussi des fortunes qui s'expatrient, nous faisant perdre beaucoup de capitaux. De nombreux frontaliers préfèrent habiter de l'autre côté de la frontière : en Belgique, en Suisse ou en Allemagne. Il faudra également débattre de l'ISF.
    Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous nous donniez votre avis sur ce point et que le Gouvernement s'engage à déposer un texte visant à rendre plus attractif notre territoire chez nous afin d'encourager les investissements étrangers chez nous.
    M. Pierre Hellier. C'est de l'anti-Brard !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. L'amendement n° 299 est en fait le symétrique de celui examiné hier soir concernant l'expatriation. Il vous est proposé d'accorder un statut fiscal plus favorable aux impatriés. Cette proposition, qui figure dans le rapport Charzat, n'a pu être mise en oeuvre. Tout en reconnaissant la nécessité de favoriser l'entrée et le séjour sur notre territoire du plus grand nombre possible de talents dans tous les domaines, la commission a rejeté l'amendement parce qu'il n'est pas ciblé sur des professions bien définies. Il est rédigé de façon tellement générale que tout salarié étranger qui viendrait dans notre pays et y séjournerait bénéficierait de ce statut d'impatrié. Or, ce que l'on souhaite, c'est veiller à l'attractivité de notre territoire - et cela vaut pour les impatriés comme pour ceux qui seraient tentés de s'expatrier - avant tout pour des hommes et des femmes, chercheurs, sportifs, artistes qui peuvent vraiment contribuer au développement des talents.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le député, favoriser l'arrivée sur notre territoire du maximum de personnes, et en particulier de celles qui sont les mieux formées, pour rendre compétitif notre territoire, y faire vivre une économie prospère et y créer des emplois est un objectif pleinement partagé par le Gouvernement. Reste à déterminer quelles sont les mesures les plus appropriées pour atteindre cet objectif auquel le Gouvernement souscrit totalement et que vous avez parfaitement exposé dans votre amendement, monsieur le député.
    Le Gouvernement souhaite qu'une réflexion globale soit engagée sur l'attractivité de ce qui est désormais communément appelé le « site France ». Je suis favorable à ce que des dispositions soient prises pour les salariés impatriés, mais je considère qu'il nous faut prendre ensemble le temps de la réflexion pour pouvoir, comme nous y invite le rapporteur général, préparer un plan d'ensemble en vue de rendre notre territoire attractif. C'est d'ailleurs, monsieur le président de la commission des finances, un point sur lequel vous avez beaucoup insisté.
    La préoccupation que vous avez émise, monsieur le député, est, de toute évidence, d'intérêt national. Elle trouvera naturellement sa place et sa réponse dans le texte à venir sur l'attractivité de notre territoire. C'est ce qui me conduit à vous proposer, si vous le voulez bien, de retirer votre amendement.
    M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.
    M. Gérard Bapt. Je tiens à exprimer mon étonnement. Depuis cinq ans, j'ai entendu tant de discours sur le manque d'attractivité de notre territoire et les problèmes de délocalisation de patrimoines et d'entreprises, j'ai vu passer tant de rapports, dont certains venaient parfois des rangs de mon groupe...
    M. François Goulard. C'est vrai !
    M. Gérard Bapt. ... que je suis surpris qu'on nous renvoie encore à des études et que l'on prône la réflexion. Depuis cinq ans, on nous dit que la France est tellement peu accueillante que ses cerveaux, ses patrimoines et ses entreprises ne cessent de se délocaliser et, alors que M. Laffineur propose une mesure précise qui permettrait de remédier à cette situation, le rapporteur général et le Gouvernement la repoussent. Cessons donc ce discours sempiternel !
    M. Migaud vous réclamait récemment un état exact des patrimoines délocalisés au cours des dernières années. Nous l'attendons toujours.
    M. Christian Cabal. Voilà cinq ans qu'on l'attend.
    M. Gérard Bapt. Qui plus est, j'ai lu récemment que l'entreprise Skoda venait de décider de fermer un établissement en République tchèque pour aller s'établir à Singapour. Il faut être conscient que la poursuite perpétuelle de l'attractivité par le moindre coût tirera sans arrêt vers le bas l'ensemble des conditions.
    M. Christian Cabal. Que proposez-vous ?
    M. Gérard Bapt. Ce que nous proposons, c'est une harmonisation, au niveau européen et mondial, des conditions fiscales touchant à la fois les particuliers et les entreprises. En d'autres termes, ce que nous réclamons, c'est la lutte contre les paradis fiscaux. Or vous avez refusé tout à l'heure une mesure concrète proposée par M. Brard concernant l'avoir fiscal.
    M. Christian Cabal. Vous ne l'avez pas fait pendant cinq ans ! C'est dommage.
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. En entendant le début du propos de M. Bapt, je pensais qu'il nous reprochait de ne pas être assez ambitieux, mais la fin était plus ambiguë.
    Monsieur Bapt, la politique menée pendant cinq ans par le gouvernement que vous avez soutenu, et pour laquelle il avait reçu mandat des Français, a abouti, je l'ai souligné hier, à accroître la progressivité de l'impôt, c'est-à-dire à chasser ceux qui avaient atteint un certain niveau de revenu, lesquels étaient aussi ceux qui avaient atteint un niveau de performance tel que celui-ci permettait de tirer l'ensemble du pays. Votre choix a été de les taxer au point de les inviter à quitter le territoire. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Christian Cabal. Absolument.
    M. Gérard Bapt. Donnez des chiffres !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Le présent gouvernement a choisi de faire exactement le contraire. Vous nous demandez en quelque sorte, monsieur Bapt, de résoudre en quatre mois tous les problèmes que vous avez contribué à aggraver pendant cinq ans.
    M. Philippe Auberger. Mais oui ! Ce n'est pas raisonnable !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Permettez au Gouvernement de décider des mesures à prendre. Ai-je besoin de rappeler que vous n'avez pas voulu voter, hier, la baisse de l'impôt sur le revenu ? Nous comptons résoudre l'année prochaine les problèmes soulevés par l'amendement de M. Laffineur. Croyez-moi, monsieur Bapt, au cours des cinq prochaines années, l'ensemble des acteurs qui veulent réussir le développement de leur pays, qui est la France, comprendront parfaitement que la politique que vous avez menée n'est plus en vigueur et ils feront confiance au nouveau gouvernement, et à la majorité qui le soutient, pour redonner toutes ses chances à la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Notre débat est très important parce que s'affrontent des logiques complètement opposées.
    M. Christian Cabal. Heureusement !
    M. Jean-Pierre Brard. Vous vous situez dans une logique de recul et de capitulation face à ceux qui refusent la solidarité et les politiques fiscales mises au service de politiques publiques.
    M. François Goulard. La France est le seul pays à avoir des services publics.
    M. Jean-Pierre Brard. L'harmonisation fiscale au sein de l'Union nécessite une attitude volontariste. Or l'on n'observe aucune volonté.
    On pouvait lire, dans Le Monde, il y a tout juste une semaine : « L'Union s'est entendue en 2000 pour mettre en place un système automatique d'échange d'informations sur les comptes bancaires des non-résidents » - je sais que rien que cette idée en fait frémir plus d'un parmi vous - « pour que chaque pays soit en mesure de taxer ses propres contribuables, mais cet accord est suspendu à la demande du Luxembourg et de l'Autriche, à ce que la Suisse, notamment, accepte de changer son propre système. Berne propose en échange un système de retenues à la source sur les revenus des citoyens européens, proposition jugée insuffisante par les Quinze et, plus particulièrement, par Londres. Accusée d'hypocrisie et de gourmandise, la Grande-Bretagne est la cible privilégiée des banquiers suisses. Les Suisses expliquent que son acharnement à l'encontre de l'impôt à la source vient du fait qu'un impôt européen risquerait de ruiner le paradis fiscal du marché des euro-obligations qui fait depuis plusieurs décennies le bonheur de la City. »
    Vous, vous voulez récupérer ceux qui fuient notre pays ? C'est cela, votre logique. Eh bien ! Qu'ils fuient, comme en 1789 ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Il reste les autres et ceux-là, il faut les aider pour qu'eux réussissent leurs études. Des talents, j'en connais dans ma ville. Kenny Clarke, par exemple, pensez-vous qu'il soit venu habiter Montreuil pour des raisons de politique fiscale ? Ou encore Bennami Kohler, David Applefield, et bien d'autres : ils sont chez nous parce que nous sommes un pays de culture, un pays qui rayonne, un pays dans lequel ils se sentent bien. Mais vous, vous doutez de notre pays, vous doutez de notre nation.
    M. Richard Mallié. Et c'est reparti ! Quel toupet !
    M. Jean-Pierre Brard. Face à la pression des égoïstes, monsieur le ministre, vous capitulez...
    M. Marc Laffineur. Vous vous y connaissez en capitulation !
    M. Jean-Pierre Brard. ... en essayant de leur donner des privilèges, en ouvrant la boîte de Pandore, en acceptant le principe d'une harmonisation fiscale vers le bas. Vous rêvez de transformer la France en paradis fiscal, à l'image de la patrie de Tony Blair et de Mme Thatcher.
    M. François Goulard. Pour cela, il y a du travail ! (Rires.)
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. En effet, monsieur le président, car j'ai été choqué des propos que vient de tenir le ministre dans le prolongement de ceux de notre collègue Marc Laffineur, scandaleux et totalement contre-performants pour notre économie. Prétendre que des entreprises se délocaliseraient chaque jour pour aller dans d'autres pays... (« Mais c'est vrai ! », sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Non, ce n'est pas vrai, heureusement, et vous le savez ! Ou alors, donnez-nous la preuve du contraire !
    M. Daniel Mach. Vous ne nous regardez pas, vous ne nous écoutez pas. Pourtant, nous le vivons tous les jours.
    Mme Arlette Franco. Venez à Perpignan !
    M. Didier Migaud. Lisez correctement tous les rapports. J'ai toujours été sensible à ce problème mais je n'accepte pas que l'on dise n'importe quoi sur ce sujet.
    M. Jean-Pierre Brard. Exactement !
    M. Didier Migaud. Or il se dit n'importe quoi. Tenir ce genre de propos revient précisément à décourager les investissements étrangers dans notre pays comme tous les efforts déployés pour améliorer notre attractivité.
    M. Daniel Mach. Regardez les sportifs ! Où vont-ils ? Et les entreprises !
    M. Didier Migaud. En Isère, Motorola vient d'implanter une usine. C'est le plus gros investissement étranger que nous ayons connu ces dernières années.
    M. Jean-Pierre Brard. Eh oui !
    M. Didier Migaud. Croyez-vous que les Américains soient venus chez nous tout simplement pour nos beaux yeux ? Evidemment non. C'est parce que notre pays reste attractif !
    M. Daniel Mach. C'est tout simplement parce qu'il y a un marché ! Ce n'est pas pour notre attractivité fiscale !
    M. Didier Migaud. L'étude d'Eurostat, que j'ai citée hier, montre que la France a plutôt progressé ces dernières années sur le plan de l'accueil des investissements étrangers.
    M. Jean-Pierre Brard. Eh oui !
    M. Christian Cabal. Mais non, on a reculé !
    M. Daniel Mach. Jusqu'au douzième rang !
    M. Didier Migaud. Si nous avons reculé, je vous demande de le prouver et de me montrer les éléments qui vous autorisent à contester une étude d'Eurostat.
    M. Jean-Pierre Brard. Très bien !
    Mme Arlette Franco. On le voit tous les jours !
    M. Didier Migaud. Je vous l'accorde, monsieur le ministre : nous avons accru la progressivité de l'impôt sur le revenu.
    M. Daniel Mach. Ah, quand même !
    M. Didier Migaud. Oui, légèrement !
    M. Christian Cabal. Vous l'avez augmentée, point à la ligne !
    M. Philippe Auberger. Et cela vous a rapporté 50 milliards !
    M. Didier Migaud. Nous l'avons légèrement augmentée, certes, mais dans le cadre - et cela, j'aurais aimé vous l'entendre dire, d'autant que vous l'avez écrit - d'une réduction de l'impôt sur le revenu et de l'ensemble des charges et impôts. Mais de là à prétendre que cette progressivité accrue aurait provoqué une fuite de cerveaux, de spécialistes,...
    Mme Arlette Franco. Et des entreprises !
    M. Didier Migaud. ... c'est totalement faux, monsieur le ministre. Ou alors, donnez-nous les chiffres qui le prouvent. De surcroît, l'application de cette mesure n'a commencé que cette année. Autrement dit, votre raisonnement est purement idéologique et c'est bien cela qui m'attriste et qui m'inquiète. Vous n'avez pas le droit de dire que notre réforme présentée et votée l'année dernière a entraîné une fuite de cerveaux.
    Mme Arlette Franco. On a des exemples !
    M. François Loncle. A l'époque du gouvernement Juppé !
    M. Christian Cabal. C'est l'hôpital qui se moque de la charité !
    M. Didier Migaud. Et vos réductions de crédit dans l'enseignement supérieur et la recherche ? Ne croyez-vous pas qu'elles auront de lourdes conséquences sur l'attractivité de notre pays pour nombre de chercheurs étrangers ?
    M. Christian Cabal. Il n'y a pas de réduction des moyens de la recherche !
    M. Didier Migaud. Epargnez-nous ce double discours ou ce discours à géométrie variable : il est à mon avis totalement contre-performant. Si je m'emporte quelque peu,...
    M. Christian Cabal. Beaucoup !
    M. Didier Migaud. ... c'est parce que je trouve que les propos que vous tenez sont graves, d'autant plus que vous ne les appuyez pas sur grand-chose...
    Mme Arlette Franco. C'est pourtant ce qu'on voit tous les jours !
    M. Didier Migaud. Ou alors apportez-nous les éléments qui les démontrent. Ajoutons que cela n'améliore en rien la situation économique dans notre pays. Nous avons tous, me semble-t-il, la volonté de faire en sorte que la France soit un pays attractif pour les investissements étrangers. Nous avons tous envie d'accueillir le plus grand nombre de chercheurs étrangers dans notre pays. Ce n'est pas par un discours dénigrant précisément tout ce que peut faire notre pays en la matière que vous y contribuerez. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Christian Cabal. Baratin !
    M. Didier Migaud. C'est vous qui baratinez !
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cher collègue Didier Migaud, revenons à l'amendement n° 299.
    M. Didier Migaud. Je ne parlais pas de l'amendement.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. A quoi vise-t-il ? A favoriser les impatriés, à rendre le territoire français attractif pour des chercheurs étrangers, des cadres supérieurs. Il trouve son inspiration directe, je l'ai dit tout à l'heure, dans le rapport de Michel Charzat.
    M. Augustin Bonrepaux. Il n'est pas là !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Or Michel Charzat a, entre autres, mis en évidence l'effet de la très grande progressivité de l'impôt sur le revenu...
    M. Didier Migaud. Il n'a pas tenu des propos irresponsables, lui !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... en prenant l'exemple, particulièrement criant, de la place financière de Paris, que bon nombre de cadres supérieurs de la banque, de l'assurance, des marchés financiers ont désertée, préférant s'installer plutôt à Londres ou aux Pays-Bas. Pourquoi ? Parce que non seulement notre taux marginal de l'impôt sur le revenu dépassait le niveau symbolique de 50 %, mais il posait un problème vis-à-vis de l'entreprise employeur pour répondre aux prétentions de son futur salarié dans le mesure où celui-ci se basait sur un salaire net d'impôt. Elle se retrouvait par voie de conséquence obligée de compenser au niveau du salaire le coût marginal de l'impôt sur le revenu - d'autant plus lourd qu'il s'agit de salaires très élevés. Toutes ces raisons, tant du point de vue du salarié que du point de vue de l'entreprise, expliquent que la place financière de Paris, exemple explicitement repris dans le rapport de Michel Charzat, se heurtait à un sérieux problème de concurrence. Grâce à la baisse du barème de l'impôt sur le revenu, particulièrement de son taux marginal qui, dès 2003, c'est-à-dire à l'occasion de l'imposition des revenus 2002, passera en dessous de ce seuil symbolique de 50 %,...
    M Gérard Bapt. Les impatriés seront contents !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... une bonne partie du problème soulevé à juste titre par notre collègue Charzat sera résolu.
    M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur, pour conclure sur cet amendement.
    M. Marc Laffineur. Jean-Pierre Brard donnait l'exemple de Londres, à ses yeux épouvantable. Remarquons tout de même que l'on vient d'annoncer là-bas un taux de chômage de 3,2 % !
    M. Jean-Pierre Brard. Evidemment, ce ne sont pas les mêmes statistiques que les nôtres ! C'est comme si vous compariez des degrés Celsius et Fahrenheit !
    M. Marc Laffineur. Leur premier ministre, vous le savez, n'est pourtant pas de droite... Et je vois mal nos amis européens approuver l'idée d'une harmonisation « par le haut » de la fiscalité. Ce n'est pas parce que vous voulez déménager les emplois en France que l'ensemble de l'Europe veut déménager les emplois d'Europe !
    Quant à vous, chers collègues socialistes, pardonnez-moi, mais vous nous donnez une belle image de vos divisions. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Gérard Bapt. Défendez plutôt votre amendement !
    M. Marc Laffineur. Un de vos amis commence par reconnaître qu'il se pose un véritable problème de délocalisation en France, à peine a-t-il fini que Didier Migaud dit exactement l'inverse !
    M. Didier Migaud. Non ! Décidément, vous travestissez tout !
    M. Marc Laffineur. Et d'abord, d'où l'ai-je sorti, cet amendement ? Du rapport d'un député socialiste, M. Charzat.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous avez une lecture sélective !
    M. Marc Laffineur. Que dit-il ? Entre autres, je peux en citer exactement les termes, que la plus grosse entreprise de travail temporaire a déménagé son siège de France en Suisse.
    Son principal actionnaire, français, est parti habiter à Londres. Voilà ce que dit le rapport Charzat ! Dans les salles de marché à Londres, on trouve en majorité des jeunes Français, tout simplement parce que, en Angleterre, ils paient moins d'impôts. Et que dire des footballeurs et autres dont a parlé tout à l'heure ! Nous avons un véritable problème d'attractivité.
    M. Jean-Pierre Brard. C'est cela, défendez les Judas !
    M. Marc Laffineur. Monsieur le ministre, cela fait dix ans que nous nous entendons répondre : on verra ça dans un rapport, on en reparlera dans un an, deux ans... Nous ne pouvons plus nous en satisfaire.
    M. Gérard Bapt. C'est exactement ce qu'il vient de vous dire !
    M. Marc Laffineur. Ce que je vous demande simplement, monsieur le ministre, car je sais que vous y êtes très favorable, c'est de prendre l'engagement que, au cours de cette session le Gouvernement nous présentera un texte permettant d'aborder tous ces problèmes.
    M. Gérard Bapt. Faites une commission !
    M. Marc Laffineur. C'est vraiment primordial pour notre pays, pour les emplois de notre pays, pour tous les salariés de notre pays, de l'autre côté de l'hémicycle, on se fiche peut-être des Français, nous, nous y intéressons. Tout ce que nous voulons, c'est leur donner du travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Didier Migaud. Vous n'avez pas le droit de dire ça !
    M. Augustin Bonrepaux. On voit le résultat !
    Mme Arlette Franco. En quatre mois ?
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Monsieur le président, monsieur le ministre, nous avons besoin d'un débat serein sur ce point. (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Des auditoires me semble-t-il, seront organisés au cours du mois de janvier et peut-être du mois de février.
    Cela dit, il faut distinguer deux choses. Sur la compétitivité coût horaire du travail, la France est relativement bien placé en Europe.
    M. Didier Migaud. Voilà !
    M. Jean-Pierre Brard. Il fallait le dire !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. En revanche, sur le plan de la fiscalité et des rigidités administratives, la France est vraiment mal placée aujourd'hui en Europe. Un recensement, effectué il y a quelques mois, des entreprises internationales installées en France montrait clairement que 45 % des entreprises regrettaient leur choix...
    M. Daniel Mach. Eh oui, 45 % !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. ... et que si elles devaient le refaire, elles s'implanteraient ailleurs.
    M. Jean-Pierre Brard. Il n'y a pas que cela à considérer !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Il y a là un vrai problème et M. Fabius lui-même l'avait d'ailleurs reconnu.
    M. Jean-Pierre Brard. C'est tant pis pour Fabius !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Par conséquent, je souhaite vraiment que nous ayons un débat serein sur cette affaire Mais je suis convaincu que nous ne pouvons pas avoir un site industrie puissant en France sans prendre des mesures pour favoriser l'attractivité de notre territoire. Nous avons besoin, monsieur le ministre, d'auditions sérieuses, d'experts ayant suffisamment d'éléments, pour convaincre l'ensemble de nos compatriotes, comme l'était du reste M. Fabius lui-même.
    M. Marc Laffineur. De toute façon, ce n'était qu'un amendement d'appel.
    M. le président. Bon, l'amendement n° 299 est retiré.
    M. Jean-Pierre Brard. Je le reprends, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement est repris. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Il est temps de mettre fin à ce théâtre d'ombres où vous affirmez des points de vue, mais sans avoir le courage de les assumer jusqu'au bout, parce que vous savez bien qu'ils sont politiquement nuisibles.
    Monsieur le président, je vais expliquer pourquoi tout à la fois je reprends cet amendement et j'appelle à voter contre. Pour commencer, ce que l'on nous dit n'est pas exact... Ne fuyez pas monsieur Laffineur, c'est de vous qu'il va être question...
    Remarquons d'abord que, parmi les gens qui s'expatrient, certains reviennent.
    M. Marc Laffineur. De moins en moins !
    M. Jean-Pierre Brard. Ce que vous dites n'est pas vrai et vous êtes du reste incapable de produire des chiffres.
    M. Daniel Mach. Vous non plus !
    M. Jean-Pierre Brard. Il y a les expatriés qui se rapatrient après s'être aperçus, par exemple, que notre système de santé, c'est l'évidence, est infiniment meilleur qu'en Grande-Bretagne où vous avez plus de chance d'obtenir satisfaction auprès des pompes funèbres qu'auprès de votre médecin.
    Par ailleurs, monsieur Laffineur, vous donnez des informations inexactes : 3,2 % de chômeurs, c'est un chiffre totalement hypocrite et vous le savez. Un million de gens sont déclarés en Grande-Bretagne inaptes au travail, et ne figurent pas dans les statistiques, sans compter la nuée de précaires, comme aux Etats-Unis. Il est facile, dans ces conditions...
    M. François Grosdidier. En France, tout le monde n'est pas inscrit à l'ANPE, loin s'en faut.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur Grosdidier, ce n'est pas à vous que je m'adresse, mais à M. Laffineur.
    M. le président. Ne vous laissez pas interrompre, monsieur Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Je vous remercie, monsieur le président.
    En réalité, cette discussion est très intéressante en ce qu'elle démontre à quel point nos collègues de droite sont en quelque sorte imbibés de préjugés. (Sourires.) Ils ne vivent qu'avec des images d'Epinal, ne s'expriment qu'à coup d'affirmations non démontrées : à cet égard, notre débat de ce matin frôle la caricature.
    Mme Arlette Franco. Nous le vivons sur le terrain !
    M. François Grosdidier. Comment quantifier l'évasion ?
    M. Jean-Pierre Brard. Ce sont les actes de foi que vous produisez, mais vous n'êtes pas capables de sortir un argument chiffré. Vous n'avez pour les privilégiés - mais ce n'est pas une découverte - que les yeux de Chimène ou encore, M. Goulard l'a montré tout à l'heure, les yeux fixés sur la cote.
    M. Daniel Mach. Sur la Côte d'Azur ?
    M. Jean-Pierre Brard. Nous n'avons pas les mêmes valeurs : nous, ce sont les valeurs universelles, vous, les valeurs cotées en Bourse !
    M. Marc Laffineur. Je suis fier de ne pas avoir les mêmes valeurs que vous !
    M. Jean-Pierre Brard. Vous n'avez que des points de vue idéologiques.
    Notre débat a au moins l'intérêt d'éclairer l'opinion sur ce que vous êtes, sur ce que vous voulez, sur ce que vous faites.
    M. Richard Mallié. C'est phénoménal !
    M. Jean-Pierre Brard. Nous, nous sommes là pour défendre nos valeurs, celles de fraternité, d'égalité, de légitimité de l'impôt (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), ne vous en déplaise !
    Si j'ai repris l'amendement de M. Laffineur, monsieur le président, ce n'est pas parce que j'y adhère, vous l'avez bien compris, mais pour empêcher l'hyprocrisie de s'installer dans le débat, obliger nos collègues, par leur vote, à prendre position et les mettre ainsi devant leurs responsabilités.
    M. Augustin Bonrepaux. Je demande la parole.
    M. le président. Non, monsieur Bonrepaux, le débat a assez duré. J'estime l'assemblée suffisamment éclairée.
    M. Augustin Bonrepaux. Rappel au règlement !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 299.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

Rappel au règlement

    M. Augustin Bonrepaux. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour un rappel au règlement.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, mon rappel au règlement s'appuie sur l'article 58. Des questions précises avaient été posées à M. le ministre. Or c'est M. Laffineur qui a répondu ; je ne pense pas qu'il ait pris des fonctions au Gouvernement, en tout cas pas pour l'instant !
    Depuis ce matin, monsieur le président, vous en êtes témoin, je ne cesse de poser des questions. Sur l'éducation nationale, par exemple, et vous-même m'avez dit que le Gouvernement me répondrait. Mais également sur bien d'autres sujets : nous avons notamment demandé combien d'entreprises s'étaient expatriées.
    M. François Grosdidier. Le ministre répondra en deuxième partie !
    M. Jean-Pierre Brard. Et nous voulons des chiffres précis !
    M. François Grosdidier. C'est inquantifiable !
    M. Christian Cabal. C'est considérable en tout cas !
    M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas vous, le Gouvernement ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) C'est le ministre que j'interroge !
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, je vous en prie.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, je demande une suspension de séance d'une demi-heure,...
    M. Richard Mallié. Refusée !
    M. Augustin Bonrepaux. ... afin que le Gouvernement puisse retrouver ses chiffres, mais aussi corriger ses propos et qu'il revienne ici en reconnaissant que c'est dans le cadre d'une baisse de l'impôt sur le revenu que nous avons augmenté sa progressivité...
    M. François Grosdidier. Ce n'est pas Laffineur, c'est vous qui voulez intervenir à la place du ministre !
    M. Augustin Bonrepaux. ... dans la mesure où nous avons corrélativement diminué les tranches les plus basses. Il faut faire preuve d'objectivité, monsieur le ministre délégué...
    M. Daniel Mach. Vous aussi !
    M. Augustin Bonrepaux. Vous ne pouvez affirmer que les entreprises émigrent à cause de la progressivité alors que nous avons réduit la fiscalité. Je demande une suspension de séance...
    M. François Grosdidier. C'est la RTT ?
    M. le président. Pour réunir votre groupe, monsieur Bonrepaux ?
    M. Augustin Bonrepaux. Oui, monsieur le président.
    M. le président. La suspension vous est accordée.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à onze heures, est reprise à onze heures dix.)
    M. le président. La séance est reprise.
    M. Michel Vaxès. Monsieur le président, je demande la parole pour un rappel au règlement.
    M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Je me fonde sur l'article 58, alinéa 1er, de notre règlement.
    Je souhaite éclairer le débat, parce que certaines informations ne nous sont pas données.
    Alors que nous débattons depuis plusieurs heures, on nous affirme avec entêtement que la France serait le pays à avoir les impôts sur le revenu et sur les bénéfices, les prélèvements les plus dissuasifs. La réalité est différente. J'en veux pour preuve le tableau que j'ai en main, dont les sources sont celles de l'OCDE.
    M. François Goulard. Ce n'est pas un rappel au règlement !
    M. le président. Effectivement, monsieur Vaxès, votre intervention ne concerne pas le déroulement de nos travaux. je vous invite donc à vous exprimer un peu plus tard.
    Jean-Pierre Brard. Ça sent la suspension de séance !
    M. Michel Vaxès. En effet ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Richard Mallié. Oh, ça suffit !
    M. le président. C'est M. Migaud, inscrit sur l'article, qui s'exprimera d'abord.
    M. Didier Migaud. Non, monsieur le président, si une suspension de séance est demandée, elle est de droit, me semble-t-il !
    M. le président. Monsieur Vaxès, inscrivez-vous sur l'article 3, vous pourrez ainsi dire ce que vous avez à dire !
    M. Michel Vaxès. D'accord, monsieur le président.

Article 3

    M. le président. Art. 3. - L'article 200 sexies du code général des impôts est ainsi modifié :
    « I. Les montants figurant dans l'article sont remplacés par les montants suivants :
ANCIENS

Montants

NOUVEAUX

Montants

11 772 11 972
Au A du I. 23 544 23 944
3 253 3 308
Au 1° du B du I, au 3° du A du II et au B du II. 3 187 3 265
Au 1° du A du II. 10 623 10 882
Aux 1° et 2° du B du I, aux 1° et 3° (a et b) du A du II et au C du II. 14 872 15 235
Au 3° (b et c) du A du II. 21 246 21 764
Aux 1° et 2° du B du I, au 3° (c) du A du II et au C du II. 22 654 23 207
Au 3° (a et b) du A du II. 78 79
Au B du II. 62 64
Au B du II. 31 32
Au IV. 25 25
    « II. Au 2° du A du II, sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
    « Lorsque ces coefficients sont inférieurs ou égaux à 3 1/3 et supérieurs ou égaux à 2, le montant de la prime ainsi obtenu est majoré de 45 %.
    « Lorsque ces coefficients sont inférieurs à 2 et supérieurs à 1, le montant résultant des dispositions du premier alinéa est multiplié par un coefficient égal à 0,55. La prime est égale au produit ainsi obtenu, majoré de 45 % du montant de la prime calculé dans les conditions prévues au 1°. »
    Sur cet article plusieurs orateurs sont inscrits.
    La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. L'article 3 concerne la prime pour l'emploi, créée l'année dernière par la majorité précédente, pour tenir compte, certes, d'une décision du Conseil constitutionnel annulant une réduction de la CSG, mais surtout pour encourager la reprise de l'emploi, le retour à l'activité et, par voie de conséquence, donner un coup de pouce au pouvoir d'achat des salariés modestes.
    Nous avions engagé une réduction de l'ensemble des prélèvements pesant sur nos concitoyens, mais, je l'ai déjà dit, nous le faisions d'une manière totalement différente de la vôtre, cette année. En effet, s'agissant de l'impôt sur le revenu, nous avions proposé une réduction différenciée, plus importante pour les tranches basses que pour les tranches hautes. Cela avait effectivement pour conséquence, monsieur le ministre, une augmentation de la progressivité de l'impôt sur le revenu, mais dans le cadre d'une réduction globale de cet impôt. Vous n'aviez donc aucune raison de tenir le discours que vous avez tenu sur les conséquences de ces mesures.
    Surtout, nous en avons pris d'autres, concernant notamment la TVA : réduction d'un point du taux normal de TVA et réductions ciblées pour encourager la consommation. Nous en avons pris d'autres encore, mais qui touchaient l'ensemble de nos concitoyens, parce que nous pensons que seules sont justes des mesures qui les concernent tous. C'est grâce à de telles dispositions que la consommation en France a pu être le moteur de la croissance et que notre pays a mieux résisté que beaucoup d'autres au ralentissement économique général.
    Certes, vous avez accepté de reconduire la prime pour l'emploi. Le Premier ministre nous l'a annoncé d'ailleurs comme si c'était une mesure nouvelle qui s'adressait à 8 millions de foyers. En fait, elle n'a été que reconduite alors que nous aurions souhaité qu'elle augmente sensiblement, comme nous l'avions prévu l'année dernière.
    Vous proposez d'en élargir le bénéfice mais sans nous dire le nombre de personnes qui vont être concernées. Nous ne connaissons pas non plus quel montant elles touchent. Si nous n'obtenons pas de réponses à ces questions, nous estimons ne pas être en mesure de voter sur l'article.
    Par ailleurs, hier, le président de la commission des finances a soulevé la question de savoir comment il fallait considérer la prime pour l'emploi. Nous avions proposé un amendement qui s'insérait, bien sûr, dans la première partie de la loi de finances. Or M. Méhaignerie, considérant la prime pour l'emploi comme une charge, une dépense pour l'Etat, l'a déclaré irrecevable. De la réponse à la question que je vais maintenant poser à M. le ministre dépendra donc la poursuite de nos débats.
    Pour vous, monsieur le ministre, quel est le statut de la PPE ? La considérez-vous comme une réduction de recettes ou comme une dépense ? Selon votre réponse, il pourrait être nécessaire de réunir à nouveau la commission des finances.
    M. Philippe Auberger et M. François Goulard. Nous en avons déjà traité !
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le ministre, je pensais que vous auriez mis à profit la suspension de séance, que nous avons demandée afin de réunir notre groupe, pour préparer les réponses aux questions que nous avons posées.
    Monsieur le président, je vous fais remarquer que c'est la seconde fois aujourd'hui que je réclame ces réponses sans obtenir satisfaction, pas plus que nous n'avons reçu réponse à nos interrogations d'hier. Je ne pense pas que nous puissions poursuivre sereinement ce débat si nous n'obtenons pas de réponse et si, en outre, le représentant du Gouvernement tient des propos provocants.
    Monsieur le ministre, n'est-ce pas dans votre rapport sur les prélèvements obligatoires que je vois un schéma qui montre que, grâce aux mesures nouvelles, le taux des prélèvements obligatoires a diminué à partir de 1999 et n'a pas suivi l'augmentation que vous qualifiez de « spontanée » qui aurait porté ce taux à 47 %. Vous avez prétendu que si des entreprises avaient quitté le territoire national, c'est parce que nous aurions augmenté la progessivité de l'impôt, laissant entendre que nous aurions augmenté la pression fiscale. Vous n'avez pas corrigé ce propos, comme je vous le demandais.
    Comme Didier Migaud, je répète que nous souhaitions, nous, que la baisse des prélèvements s'adresse à tous. Nous avons réduit l'impôt davantage pour les tranches les plus basses, c'est vrai. Aussi, bien sûr, la progressivité paraît avoir augmenté. Et nous avons voulu aussi baisser les prélèvements pour ceux qui ne sont pas redevables de l'impôt sur le revenu, afin d'améliorer leur situation et de favoriser le retour à l'emploi. Voilà pourquoi nous avons diminué la taxe d'habitation ou encore la vignette ; c'est aussi la raison pour laquelle nous avions proposé une réduction de la CSG, que le Conseil constitutionnel a refusée - ce qui nous a conduits à proposer la prime pour l'emploi. Bien entendu, celle-ci répond au même souci de réduire la fiscalité, toute la fiscalité. J'entends dire qu'il y aurait des gens qui ne seraient pas imposés. Mais lorsqu'ils achètent leur nourriture, passent à la pompe ou simplement habitent un logement, ne sont-ils pas imposés ?
    Alors, oui, nous aimerions savoir comment vous considérez la prime pour l'emploi.
    Cela dit, je veux surtout souligner que les mesures que vous proposez, comme la suppression ou la réduction de l'impôt de solidarité sur la fortune, concernent les catégories privilégiées. Vous ne pouvez pas le nier.
    Depuis avant-hier, je vous demande ce que vous faites pour les bénéficiaires de la prime pour l'emploi. M. le rapporteur général nous explique que tout le monde s'y retrouvera. Vous annoncez 180 millions d'euros de plus pour la PPE, 100 autres résultant d'une simple indexation. Mais vous ne dites pas combien il y aura de bénéficiaires. S'il y en a peu, alors il s'agira d'une broutille ; s'ils sont nombreux, alors les montants seront ridiculement bas.
    Permettez-moi, monsieur le ministre, de vous poser trois questions. D'abord, combien de personnes bénéficieront de la PPE ? Ensuite, quel sera son montant pour chacune d'elles ? Enfin, combien n'en bénéficieront pas ?
    Il importe de connaître les chiffres car ils permettront de connaître le nombre de ceux qui resteront à l'écart de la réduction d'impôt que vous nous proposez, et de celle que vous avez déjà décidée en juillet, à la faveur desquelles la prime pour l'emploi a été oubliée.
    M. le président. Il vous faut conclure, monsieur Bonrepaux. Vous avez dépassé votre temps de parole.
    M. Augustin Bonrepaux. Pour conclure, monsieur le ministre, je dirai que, si vous considérez la prime pour l'emploi comme une réduction de recettes, nos amendements sont justifiés et je ne comprendrai pas que M. le président de la commission des finances s'y oppose. Mais si vous la considérez comme une dépense, il faut qu'elle figure - sous quelle forme ? - dans le budget, et alors l'application de l'article 40 est justifiée.
    M. le président. La parole est à M. Daniel Garrigue.
    M. Daniel Garrigue. Depuis un certain temps, un débat sur le poids des prélèvements obligatoires et sur la justice fiscale dans notre pays est engagé. J'ai le sentiment qu'il y a deux manières différentes de l'aborder.
    Depuis le début de la discussion du projet de loi de finances, l'opposition nous fait un mauvais procès. En effet, puisqu'on a évoqué les promesses électorales, j'ai vérifié quelques points en me reportant aux campagnes de la présidentielle et des législatives. Je puis donc rappeler que M. Lionel Jospin avait bien promis une baisse de l'impôt sur le revenu...
    M. Didier Migaud. On l'a faite !
    M. Daniel Garrigue. Il ne s'agissait pas d'une petite baisse, puisqu'elle devait être de l'ordre de 100 milliards d'euros, c'est-à-dire davantage que ce que nous avons accepté hier en adoptant l'article 2.
    M. Jean-Pierre Brard. Et Lionel Jospin a été battu !
    M. Daniel Garrigue. Je suis par conséquent un peu étonné. Si vous étiez vraiment sincères, on pourrait imaginer que vous proposiez des modalités différentes de celles qui ont été prévues dans le projet de loi de finances. Mais à aucun moment l'opposition n'a présenté d'amendement allant dans ce sens.
    Vous avez purement et simplement combattu la baisse de l'impôt sur le revenu, ce qui montre le manque de sincérité de vos promesses.
    M. Didier Migaud. Il faut resituer les choses dans un ensemble ! C'est vous qui n'êtes pas honnête !
    M. Daniel Garrigue. Vous nous attaquez aujourd'hui sur le fait que nous ne relevons pas suffisamment la prime pour l'emploi. Or si, en 2001, le montant de la prime était de 2,5 milliards d'euros, vous l'aviez vous-mêmes ramené en 2002 à 2,2 milliards d'euros.
    En ce qui nous concerne, nous suivons la méthode du Gouvernement, laquelle consiste à tenir les promesses qui ont été énoncées. C'est ce que nous avons fait hier à propos de l'impôt sur le revenu en adoptant l'article 2. (« Très bien ! » sur les bancs de l'Union pour la majorité présidentielle.) Et nous allons même au-delà des promesses puisque le Gouvernement nous propose de relever sensiblement les crédits de la prime pour l'emploi de 12 % par rapport à l'an dernier.
    En somme, les Français, lorsqu'ils ont voté il y a quelques mois, ne se sont pas trompés. Ils ont clairement identifié ceux qui étaient sincères. Ils ont fait leur choix et ils ont eu raison de faire ce choix puisque, je le répète, les promesses sont tenues et que les dispositions proposées vont même au-delà de ce qui avait été annoncé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Philippe Auberger.
    M. Philippe Auberger. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouis qu'en la matière nous soyons demeurés cohérents avec la position que nous avions adoptée lors de notre premier débat sur la prime pour l'emploi.
    Nous étions favorables à la mesure, mais nous contestions un certain nombre de ses modalités pratiques. Maintenant que nous sommes aux responsabilités, nous poursuivons dans la même voie. Je ne peux donc que me féliciter que le Gouvernement ait maintenu la prime pour l'emploi.
    Je me réjouis encore plus que celui-ci l'ait améliorée sur deux points : d'abord en révisant les seuils, ce qui est tout à fait normal, et, surtout, en accroissant l'efficacité du dispositif pour le travail à temps partiel, qui est bien souvent l'antichambre d'un travail à temps plein. Il est logique d'inciter les personnes à exercer un travail à temps partiel dans la perspective que celui-ci devienne un travail à temps plein.
    Cela dit, monsieur le ministre, la prime pour l'emploi n'a pas encore, à mon avis, son profil de croisière, si j'ose dire. Un certain nombre d'améliorations doivent être apportées, mais je suis bien conscient que vous ne pourrez pas forcément les apporter cette année compte tenu du délai et du fait que les masses en jeu sont très élevées ; ainsi que l'a rappelé M. Daniel Garrigue, elles dépassent 2,2 milliards d'euros.
    Trois modifications sont à mon avis indispensables. En premier lieu, il convient de simplifier la déclaration. Vous avez d'ailleurs reconnu que, lorsque vous vous rendiez dans les centres des impôts, on vous parlait de l'application de la prime pour l'emploi et du problème que posait son assiette.
    Des quelque 8 millions de bénéficiaires de la prime, 6,5 millions ne sont pas redevables de l'impôt sur le revenu. Il est anormal de leur imposer une déclaration très lourde. Une déclaration très simplifiée permettrait une régularisation à la fin de l'année.
    En deuxième lieu, il importe de simplifier le barème. L'objectif de la prime pour l'emploi est clair : favoriser la reprise d'un travail plutôt que la non-activité. Mais pourquoi, alors, prendre en compte des considérations familiales ? Le fait que le couple travaille ou non et le nombre d'enfants n'ont rien à voir avec l'objectif de la prime.
    Il faudrait que ceux qui vont reprendre un travail connaissent le montant de la prime à laquelle ils auront droit.
    Enfin, il convient de rapprocher le versement de la prime du fait générateur, c'est-à-dire de la reprise du travail ou du travail lui-même, et donc de procéder à un versement trimestriel par l'employeur. Un versement mensuel serait plus satisfaisant mais, compte tenu du montant de la prime, il serait peu pratique. Si le barème est simplifié, la tâche de l'employeur ne sera pas très compliquée : le versement donnera lieu à un remboursement par l'URSSAF ou à une déduction des déclarations mensuelles qu'il adresse à l'URSSAF.
    Un tel système, simple et très incitatif, permettra aux salariés de connaître l'origine et la justification de la prime, actuellement versée par chèque.
    Dans l'émission télévisée à laquelle a participé M. le Premier ministre, on a pu voir une personne qui, recevant son chèque, s'écriait : « La prime pour l'emploi, c'est très bien ! » Mais elle reconnaissait qu'elle ne savait pas comment sa prime avait été calculée ni pourquoi elle la recevait.
    Nos concitoyens doivent clairement identifier l'objet, le montant et la justification de la prime pour l'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. J'ai rappelé tout à l'heure la nécessité d'éclairer le débat et de communiquer à la représentation nationale ce que M. le ministre se refuse de livrer, avec une rare obstination, en martelant une contrevérité qui vient nourrir son argumentaire en faveur des dispositions prévues par le projet de loi de finances en faveur des nantis.
    Depuis plusieurs heures, monsieur le ministre, vous répétez à satiété que notre pays serait celui qui imposerait, au titre de l'impôt sur le revenu et de l'impôt sur les sociétés, le plus sévèrement les contribuables. Vous justifiez ainsi les comportements inadmissibles de ceux qui refusent de servir la France pour servir leurs intérêts égoïstes et immoraux.
    Je tiens à votre disposition un tableau qui figure dans la documentation de votre propre ministère et qui met en évidence la part que représentent les principaux prélèvements obligatoires par rapport au PIB des pays de la Communauté économique européenne.
    D'après l'OCDE, pour la France, la part que représentent l'impôt sur les sociétés et l'impôt sur le revenu est de 11 % ; de 11,2 % pour l'Allemagne, c'est-à-dire plus ; de 17,6 % pour la Belgique, c'est-à-dire plus ; de 29,8 % pour le Danemark, c'est-à-dire plus ; de 13,7 % pour l'Irlande, c'est-à-dire plus ; de 15,5 % pour l'Italie, c'est-à-dire plus ; de 15,2 % pour le Luxembourg, c'est-à-dire plus ; de 14,1 % pour le Royaume-Uni, c'est-à-dire plus ; de 21,4 % pour la Suède, c'est-à-dire plus. Hors Communauté économique européenne, pour les Etats-Unis, le taux en est de 14,3 %, c'est-à-dire plus, là aussi ! La moyenne de l'Union européenne est de 14,6 % quand le taux en France est de 11 %.
    Si l'on y ajoute, ce que vous faites, les impôts destinés au financement de la sécurité sociale, les chiffres sont évidemment modifiés. Mais quel pays de l'Union européenne offre les mêmes prestations que la France en matière de couverture de santé et de couverture sociale ?
    Voilà la réalité ! L'argument selon lequel les prélèvements seraient plus forts en France qu'ailleurs n'est pas correct.
    M. Jean-Pierre Brard. Très bien ! Comme cela, vous ne pourrez plus mentir, chers collègues !
    M. le président. M. Carrez, rapporteur général, a présenté un amendement, n° 29, ainsi rédigé :
    « Dans le deuxième alinéa du II de l'article 3, supprimer les mots : "inférieurs ou égaux à 3 1/3 et. »
    La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre cet amendement rédactionnel.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il s'agit d'un amendement...
    M. Didier Migaud. Monsieur le président, nous ne pouvons continuer ainsi !
    M. Augustin Bonrepaux. Je demande la parole.
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, nous ne pouvons aborder l'examen de l'amendement n° 29 sans avoir, en référence à l'article 92 du règlement, reçu de réponse à propos de celui de nos amendements qui a été censuré par la commission des finances au titre de l'article 40 de la Constitution. La prime pour l'emploi est-elle un dégrèvement, auquel cas notre amendement est justifié, ou une dépense ? Dans ce dernier cas, où cette dépense doit-elle être inscrite ? Pour l'instant, il s'agit d'un dégrèvement ; et notre amendement est donc recevable.
    Je souhaite avoir des réponses et du Gouvernement et de la commission. Nous apprécierons, dans la mesure où elles seront concordantes, si nous pouvons poursuivre la discussion ou s'il nous faut aller plus loin pour tirer au clair une situation particulièrement compliquée. M. le ministre nous explique que son budget est sincère et que tout est clair. Mais nous n'y comprenons rien !
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, vous avez déposé un amendement n° 240, qui sera appelé tout à l'heure - il fait l'objet d'une demande de scrutin public...
    M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas de celui-là qu'il s'agit, mais de la censure qui a frappé un autre de nos amendements !
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. J'ai déjà abordé le problème hier. Il est vrai que la nature spécifique de la prime pour l'emploi introduit quelques ambiguïtés, sur lesquelles je reviendrai.
    M. Didier Migaud. Il faut les lever !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Mon choix a été de suivre la jurisprudence de la commission des finances et de mon prédécesseur, M. Emmanuelli.
    De quoi s'agit-il ? Le débat est important car il porte sur les conditions d'application de l'article 40, mais aussi, comme l'a dit clairement Charles de Courson, sur l'évaluation de la dépense publique.
    Selon moi, la partie de la prime pour l'emploi qui s'impute sur le montant de l'impôt dû est traitée en réduction de recettes d'impôt dû sur le revenu. En revanche, et c'est là toute l'ambiguïté, la partie de la prime qui s'impute au-delà de l'impôt dû constitue une véritable dépense. Pour ce qui me concerne, j'en reste à la définition, à la délimitation décidée par mon prédécesseur. Je n'ai donc d'autre possibilité que d'appliquer l'article 40 tel qu'il l'a été dans le passé.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous critiquez M. Emmanuelli ?
    M. Gérard Bapt. Il faut le consulter.
    M. le président. Revenons-en à l'amendement n° 29...
    M. Didier Migaud. Nous ne pouvons pas, monsieur le président !
    M. le président. Pourquoi ne le pouvons-nous pas, monsieur Migaud.
    M. Didier Migaud. Nous souhaitons que M. le ministre s'exprime sur un point important. Soit, il s'agit d'une réduction de recettes, et le débat doit alors être entier dans le cadre de la première partie de la loi de finances. Soit, c'est le point de vue du président de la commission des finances et la prime pour l'emploi doit être considérée, au moins en grande partie, comme une dépense, et dans ce cas le budget qui nous est présenté est non seulement virtuel, mais faux.
    M. Augustin Bonrepaux. Eh oui !
    M. Didier Migaud. Car il faut alors changer les colonnes « recettes » et « dépenses ». Il faut être cohérent !
    Lorsque nous avons créé la prime pour l'emploi, à la suite d'une décision du Conseil constitutionnel invalidant la ristourne de CSG, c'était clairement, dans notre esprit, une réduction d'impôt. Il me semble que le gouvernement actuel se conforme à cette logique : si l'on se réfère à ses rapports, notamment au rapport économique et financier, il apparaît que, pour le Gouvernement, il s'agit bien, contrairement à ce qu'a pensé la Cour des comptes, d'une réduction des prélèvements opérés sur nos concitoyens. Mais il faut en tirer toutes les conséquences, et les amendements concernant la prime pour l'emploi doivent tous être traités dans le cadre de la première partie du projet de loi de finances.
    Tout ce que nous demandons, c'est de la cohérence !
    M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.
    M. Charles de Courson. Je suis un peu étonné par l'atitude de l'opposition. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste).
    D'abord, monsieur Migaud, il faut vous souvenir que, dans la loi de finances rectificative pour 2001 et dans la loi de finances initiale pour 2002, vous avez présenté intégralement cette prime en dégrèvement.
    M. Didier Migaud et M. Augustin Bonrepaux. Exactement !
    M. Charles de Courson. Le président Emmanuelli, qui était alors président de la commission des finances, a refusé tous les amendements concernant la partie afférente aux personnes non imposables. Il ne faut pas en vouloir au président Méhaignerie...
    M. Didier Migaud. Nous ne lui en voulons pas, mais nous lui demandons de changer d'optique.
    M. Charles de Courson. Pourquoi n'avez-vous pas demandé au président Emmanuelli de changer en son temps sa doctrine ?
    Ensuite, qui a déposé l'amendement tendant à traiter séparément la partie de la PPE afférente aux personnes non imposables - que le groupe UDF considère comme une dépense - et à maintenir en dégrèvement celle afférente aux personnes imposables ? C'est le groupe UDF.
    Votre attitude est un peu bizarre...
    M. Jean-Pierre Brard. Et vous, vous n'êtes pas bizarre ?
    M. Charles de Courson. Vous avez accepté l'incohérence quand vous étiez dans la majorité et maintenant vous changez complètement d'opinion. Alors, monsieur Migaud, monsieur Bonrepaux, de grâce, soyez plus modérés dans vos propos. Reconnaissez que vous avez fait une erreur et que, pour plus de clarté, un changement est nécessaire. C'est un dialogue tout à fait républicain.
    M. Augustin Bonrepaux. C'est une question de degrèvement !
    M. Charles de Courson. Pas d'excès de langage alors que vous avez changé d'avis.
    M. Didier Migaud. Pas du tout !
    M. Charles de Courson. A tout pécheur, miséricorde, et si l'amendement du groupe UDF venait en discussion maintenant et non pas à la fin de la première partie, vous pourriez peut-être vous convertir à notre position.
    Simplement, ne faites pas un mauvais procès d'intention au président de la commission et au ministre. Certes, je pense que le Gouvernement n'a pas raison dans l'analyse qu'il a faite dans l'annexe au rapport sur les prélèvements obligatoires il reprend même l'idée qu'il s'agirait d'une compensation sur la CSG et la RDS, ce qui n'est pas le cas. Mais, s'il le voulait, il pourrait maintenant faire discuter l'amendement du groupe UDF qui rebascule à peu près 80 % de la PPE en dépenses. Cela ne change rien au solde, mes chers collègues : cette opération est neutre.
    A cet égard, je suis aussi sensible à l'argument du président Méhaignerie qui consiste à dire que si l'on fait cela, il faudrait le faire aussi pour d'autres crédits qui ne concernent pas des gens imposables. C'est vrai aussi, mais on n'améliore pas comme ça, d'un coup de baguette magique, les documents budgétaires. Il faut le faire progressivement.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Avant d'en venir aux questions procédurales, je vais répondre aux questions posées par Augustin Bonrepaux. Je veux d'ailleurs le rassurer : je m'efforce de donner à toutes les questions qu'il me pose des réponses, simplement, je souhaite qu'elles soient le plus proche possible de la vérité, ce qui suppose, en matière de statistiques, que mes services aient le temps de chercher les informations. Je ne veux pas retouver la situation que nous avons connue où il m'était reproché de donner une information erronée alors que je l'avais donné en toute bonne foi. Monsieur Bonrepaux, je vous communiquerai donc les informations dont je dispose à l'instant où je vous parle et, si vous souhaitez des compléments, ils vous seront transmis.
    Tout à l'heure, si je ne vous ai pas répondu à propos des questions relevant des dépenses, c'est simplement parce que nous en sommes à la partie des recettes. Ce n'est pas à vous qui avez été président de la commission des finances que je l'apprendrai. Vous savez également parfaitement que les questions au Gouvernement donnent à tous ceux qui, comme vous, ne sont pas d'accord avec la politique du Gouvernement sur tel ou tel aspect des dépenses l'occasion de l'interpeller. Il faut que nos travaux soient ordonnés. Nous traitons ici des recettes et, de surcroît, d'un problème très compliqué, celui de la prime pour l'emploi. Et si les problèmes de procédure sont tels, c'est peut-être parce que l'instrument lui-même, comme le disait Philippe Auberger, a été confectionné dans la hâte et qu'à dire vrai, il doit être reconfiguré.
    S'agissant des bénéficiaires de la revalorisation pour le temps partiel, monsieur Bonrepaux, 2,7 millions de foyers, soit 3,2 millions de personnes, seront concernés. Pour une personne à mi-temps touchant le SMIC, cela représente plus de 50 % de hausse, la prime passant de 240 euros à 350 euros. Le coût de la seule revalorisation du temps partiel s'élève à 130 millions d'euros, les autres facteurs de hausse, dont l'indexation, se montant à 150 millions d'euros.
    J'en viens aux remarques de Philippe Auberger. Il a suggéré de simplifier la déclaration et le barème. J'en prends note. Il a suggéré aussi de rapprocher la prime de la situation actuelle du bénéficiaire. Il y a, en effet, un décalage d'une année pendant laquelle la situation du bénéficiaire a pu changer, ce qui montre bien que la conception de cet instrument n'est pas satisfaisante à l'heure actuelle. La déclaration de revenus 2002 sera en partie simplifiée en ce qui concerne la prime pour l'emploi : avec une nouvelle présentation des rubriques touchant aux revenus d'activité et au nombre d'heures travaillées. Mais je voudrais très loyalement lui dire qu'aller plus loin est difficile, compte tenu de l'extrême complexité de la prime pour l'emploi dont nous avons hérité.
    A ce propos, j'évoquerai le témoignage d'une fonctionnaire de Cannes que j'ai rencontrée à l'occasion d'un de mes déplacements dans les services des impôts. Alors que je lui demandais à quoi elle consacrait son temps, elle m'a répondu qu'elle se partageait entre l'impôt et la prime pour l'emploi, mais que cette dernière lui prenait 40 % de son activité. Le directeur général des impôts était d'ailleurs à mes côtés. Cela montre bien l'extrême complexité de ce dispositif qu'il faudra simplifier et même reconfigurer presque totalement.
    Passons maintenant aux questions plus procédurales évoquées tout à l'heure. Je le rappelle, il y a deux régimes pour la prime pour l'emploi : un régime pour les imposables qui s'impute sur l'impôt dû et un régime pour les non-imposables où la prime se traite comme une restitution sur le chapitre 15-01 des charges communes. S'agissant de l'application de l'article 40, la commission des finances est bien évidemment souveraine, mais puisque le Gouvernement est interpellé, je dirai humblement qu'elle a toute légitimité à traiter différemment ces deux solutions. Son président a choisi de tenir compte de l'interprétation de son prédécesseur. Mais, mesdames, messieurs les députés, parlant au nom du Gouvernement, je crois pouvoir dire qu'il faut éviter de se déchirer sur des questions de procédure. Ce qui compte, c'est que nous puissions débattre de la prime pour l'emploi et que les Français soient pleinement informés. En tout état de cause, pour éviter des situations procédurales aussi inextricables, la meilleure voie sera la réforme complète de la prime pour l'emploi.
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Je constate que nous n'avons toujours pas eu toutes les réponses à nos questions. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    D'abord, monsieur Méhaignerie, je vous rappellerai que dans un rapport, votre prédécesseur, M. Jacques Barrot, a montré que sur l'article 40 les appréciations variaient d'une présidence à l'autre. Ne nous dites pas : « M. Emmanuelli en a décidé ainsi » car l'appréciation a pu être pour d'autres différente sur l'évaluation d'une dépense pour d'autres. Je pourrais vous donner des exemples très précis.
    Ensuite, monsieur le ministre, nous voulions savoir comment cette prime est inscrite dans le budget. Est-ce en dégrèvement ? Est-ce pour partie en dégrèvement et pour partie en dépenses ? Et combien représente-t-elle en dépenses ? Vous n'avez répondu qu'à deux de nos trois questions. Je vous rappelle la dernière : combien de bénéficiaires de la prime pour l'emploi ne recevront rien ? C'est une simple soustraction entre le nombre des bénéficiaires actuels et les 3,2 millions de personnes évoquées. J'aimerais que vos services, très compétents, fassent le calcul parce que, moi, je risque de me tromper.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Juste une précision technique. Mais il faut l'apporter.
    S'agissant de la recevabilité, le débat est tranché.
    M. Augustin Bonrepaux. Non, il ne l'est pas !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Dans ce projet de budget, la partie restituable de la PPE est inscrite en charges à l'article 10 du chapitre 15-01 du budget des charges communes pour un montant de 1,735 milliard d'euros. Les choses sont donc claires pour 2003.
    En revanche, pour l'avenir, nous avons posé la question de la méthode de comptabilisation à l'occasion de l'examen du projet de la loi de règlement et des observations de la Cour des comptes. M. de Courson a proposé un amendement visant à distinguer, dans la comptabilisation, la partie qui vient en diminution de l'impôt traitée en tant que telle, de celle qui est restituée sous forme de chèque et qu'il convient de traiter comme une charge.
    M. le président. Monsieur le ministre, peut-on considérer que vos services répondront à M. Bonrepaux ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Nous avons quelques jours devant nous, monsieur le prrésident.
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. M. le ministre nous a donné quelques chiffres et, je le remercie pour ces précisions, mais ils ne semblent correspondre ni à ceux du « bleu » ni à ceux du rapport général. Il nous a dit que 130 millions d'euros étaient destinés à prendre en compte la revalorisation pour les travailleurs à temps partiel soit 400 euros par foyer. Mais il y a un petit problème : si je divise 130 par 2,7 millions de foyers cela ne fait pas tout à fait autant. Ne pourrait-il donc pas nous donner quelques précisions sur le chiffre réel pour chacune des personnes concernées ?
    Dans ce débat quelque peu théorique, monsieur de Courson, nous, nous ne changeons pas d'avis. Nous considérons toujours qu'il s'agit d'une réduction d'impôt, avec toutes les conséquences que cela peut avoir. Le président de la commission des finances avait l'année dernière tenu un raisonnement qui lui appartient. Ce n'était pas le mien, puisque j'ai écrit des choses contraires. Je reste donc logique avec moi-même.
    Mais si on entre dans la logique du président de la commission des finances, il faut être cohérent jusqu'au bout. Si cela doit être considéré comme une dépense, cela signifie que le budget ne nous est pas présenté de façon sincère. Nous nous ferons taper sur les doigts par la Commission européenne, par nos partenaires, par la Cour des comptes. Il faudrait alors, monsieur le ministre, présenter le budget de manière différente. S'il s'agit d'une dépense, elle doit figurer à une autre place, ce qui change complètement l'analyse que l'on peut faire de l'évolution du montant de la dépense publique et affecte même le taux de prélèvements obligatoires.
    Nous avons besoin de savoir, monsieur le ministre : soit c'est votre doctrine qui l'emporte, et tous les amendements concernés devraient être examinés dans le cadre de cette première partie de la loi de finances, soit c'est la doctrine du président de la commission des finances - raisonnement que je suis prêt à entendre - et, à ce moment-là, en toute logique, il conviendrait qu'il amende le projet de loi de finances pour corriger sa présentation afin que celui-ci devienne plus sincère qu'il ne l'est.
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Je voudrais répondre sur le fond, car beaucoup n'ont abordé que la forme. C'est un problème qu'on ne peut pas régler en quelques minutes dans le cadre de cette discussion.
    Alors que la prime pour l'emploi avait recueilli l'accord unanime de cette assemblée, le Conseil constitutionnel, par sa décision, a rendu son application extrêmenent complexe.
    M. Gérard Bapt. Mais c'est vous qui l'avez saisi.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Je suis pour ma part persuadé que nous devrons remettre l'ouvrage sur le métier. Puisque notre objectif est de réhabiliter le travail, fruit de l'effort personnel, mieux vaudrait faire figurer la prime pour l'emploi dans le salaire mensuel, afin que chaque salarié comprenne que c'est un moyen d'alléger le poids des charges. C'est l'ambition commune que nous devons avoir car là est l'essentiel du problème.
    S'agissant de la justice, je crois que le Gouvernement a essayé de la concilier avec l'exigence d'efficacité de la baisse de l'impôt sur le revenu. Comme le disait Francis Mer, nous sommes dans un monde ouvert, globalisé, où il nous faut tenir compte de la situation de nos partenaires. En même temps, le Gouvernement a fait un choix : il pouvait poursuivre l'accroissement de la prime pour l'emploi mais il a préféré, à mon avis, à juste titre, consacrer 6 milliards d'euros à l'allégement des charges, afin de remédier à une injustice en relevant le niveau des SMIC. Il a ainsi fait un effort financier en faveur des salaires modestes trouvant là un bon équilibre entre l'exigence d'efficacité et de justice.
    Cela dit, les problèmes de fond ne sont pas réglés. Il va bien falloir les aborder dans les semaines, les mois qui viennent. Et je souhaiterais que nous travaillions avec le Gouvernement à cette réhabilitation du travail dont j'ai parlé.
    M. le président. Je considère que l'Assemblée est éclairée sur ce point...
    M. Augustin Bonrepaux. Pas nous !
    M. le président. Monsieur Carrez l'amendement n° 29 est un amendement rédactionnel ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. En effet. Depuis deux ans, le barème des seuils de la PPE et l'évolution du SMIC n'ont pas été exactement identiques. L'amendement vise à corriger cette différence.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Avis favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29.
    (L'amendement est adopté.)

Rappel au règlement

    M. Augustin Bonrepaux. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour un rappel au règlement.
    M. Augustin Bonrepaux. Nous ne nous y retrouvons pas. Les chiffres donnés par le ministre - 130 millions d'euros pour le temps partiel et 150 millions d'euros pour l'indexation - ne correspondent pas à ceux qui figurent dans le projet de loi. De plus, nous n'avons pas obtenu de réponse à l'ensemble de nos quesions. Afin d'étudier plus précisément ce document et de permettre au Gouvernement d'affiner ses réponses, je demande une suspension de séance de trente minutes.
    M. le président. La suspension de séance, qui est de droit, sera de cinq minutes.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à douze heures, est reprise à douze heures dix.)
    M. le président. La séance est reprise.
    Avant d'appeler l'amendement n° 240, j'indique à l'Assemblée que sur le vote de cet amendement il y aura un scrutin public à la demande du groupe socialiste.
    Je vais d'ores et déjà faire annoncer le scrutin, de manière à permettre à nos collègues de regagner l'hémicycle.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    MM. Bonrepaux, Migaud, Idiart, Claeys, Bapt, Mme Lignières-Cassou et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 240, ainsi rédigé :
    « Compléter l'article 3 par les trois paragraphes suivants :
    « I. - A la première phrase du 1° du A du II, le taux de "4,4 % est remplacé par le taux de "6,6 % et au deuxième alinéa du 1° du A du II, le taux de "11 % est remplacé par le taux de "16,5 %.
    « II. - Cette disposition n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
    « III. - La perte de recettes résultant de l'application de cette disposition est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Avant tout, monsieur le président, je voudrais demander au président de la commission des finances et au ministre délégué au budget si nous allons avoir des éclaircissements sur les chiffres qui nous sont annoncés, ceux qui figurent dans le bleu budgétaire. La prime pour l'emploi est-elle un dégrèvement ou une dépense ? Comment le Gouvernement va-t-il modifier ces chiffres si son appréciation diffère de celle du président de la commission ? Nous ne pouvons pas continuer notre discussion si nous ne savons pas comment sera appréciée cette prime pour l'emploi. Si nous n'avons pas de réponse, ce qui semble bien être le cas, le plus simple sera de suspendre une nouvelle fois la séance pour permettre au président de la commission des finances de réunir celle-ci et pour que nous puissions entendre les réponses de M. le ministre. Pour l'instant, le groupe socialiste est dans le brouillard. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Patrice Martin-Lalande. Ça c'est sûr !
    M. Richard Mallié. Il y a longtemps qu'on le sait que vous êtes dans le brouillard !
    M. Augustin Bonrepaux. Si quelqu'un ici est éclairé, ce n'est pas nous ! Je demande donc une suspension de séance pour que nous puissions obtenir des réponses précises et examiner un peu mieux les documents. En cinq minutes, nous n'avons pas eu le temps de le faire. Quant aux longs conciliabules qui ont eu lieu entre le Gouvernement et le groupe majoritaire, ils n'ont abouti à rien, et surtout pas à faire la lumière.
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. M. Bonrepaux nous demande de régler en une heure ce qui ne l'a pas été dans le passé ! Je l'ai dit tout à l'heure : sur le fond, il y a un vrai problème d'ambiguïté et il faudra le traiter dans l'année. L'enjeu, c'est le devenir de la prime pour l'emploi.
    M. Michel Bouvard. Tout à fait !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Lorsque nous étions dans l'opposition, je crois que nous étions coopératifs. Vous savez très bien que le président de la commission des finances ne peut revoir sa position en une minute, puisque ce sont toutes les conditions d'application de l'article 40 qui sont en jeu. Ce problème devra être traité au cours de l'année en tenant compte du devenir de certains crédits d'impôt. Vous nous demandez l'impossible ! Nous avons eu le temps de travailler sur le fond. Nous sommes tout à fait d'accord pour y revenir plus tard, mais nous n'allons pas suspendre la séance à tout moment...
    M. Augustin Bonrepaux. Mais c'est important !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. ... pour des problèmes que vous n'avez vous-mêmes pas réglés dans le passé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Qu'il y ait un problème de fond, monsieur le président, je peux en convenir, mais nous l'avons réglé en traitant la PPE comme une réduction de prélèvement. Et cela n'a été contesté à l'époque ni par le Gouvernement ni par le rapporteur général que j'étais. Peut-être le président de la commission des finances a-t-il fait une interprétation différente de l'article 40, mais cela ne change rien au fond. Si vous confirmez cette interprétation, monsieur le président de la commission, cela signifie qu'il faut considérer la prime pour l'emploi comme une dépense, avec toutes les conséquences que cela entraîne sur la présentation du budget. D'ailleurs, si le ministre reste silencieux ; c'est sans doute qu'il préfère ; comme le gouvernement précédent, que la PPE soit considérée comme une réduction d'impôt et non comme une dépense.
    Monsieur le président de la commission des finances, je ne veux même pas prendre parti sur le fond, mais si votre interprétation est la bonne, proposez-nous un amendement pour en tirer toutes les conséquences. En effet, cela change complètement les données et nous ne pouvons plus débattre sereinement, de manière constructive, de certains sujets comme la norme d'évolution de la dépense publique ou le taux des prélèvements obligatoires. Le problème se pose en des termes complètement différents selon que l'on considère la PPE comme une réduction de recettes ou comme une dépense.
    Nous ne faisons pas du tout de l'obstruction. Nous sommes là sur un vrai débat qui intéresse à la fois la commission des finances et le Gouvernement. Vous nous avez dit tout à l'heure, monsieur le président de séance, que vous étiez « éclairé ». Vous avez beaucoup de chance et nous serions prêts à entendre vos explications s'il vous était permis de nous les apporter, parce que nous, nous ne sommes pas du tout éclairés !
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nos collègues de l'opposition, qui étaient tous là lors de la précédente législature, sont en fait déjà parfaitement éclairés.
    La prime pour l'emploi conduit à deux résultats tout à fait différents. Pour les personnes qui paient l'impôt sur le revenu, elle se traduit par une diminution de l'impôt, qui a toujours été traitée au titre des réductions et dégrèvements fiscaux. Quant aux foyers dont l'impôt sur le revenu est inférieur à la prime à laquelle ils vont avoir droit ou qui ne sont pas imposables - ce sont les deux tiers des bénéficiaires -, ils bénéficient d'une restitution sous forme de chèque. Cela occasionne une charge pour le budget de l'Etat, et cela apparaît bien en charge ! (« Mais non ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    M. Didier Migaud. Ce n'est pas une dépense !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. On ne peut pas le nier ! Vous le savez d'ailleurs tellement bien, mes chers collègues de l'opposition, que celui qui, il y a deux ans, nous a proposé cette distinction et, à partir de là, une jurisprudence sur l'interprétation de l'article 40 n'était autre que le président de la commission des finances d'alors, notre collègue Henri Emmanuelli ! Vous êtes donc parfaitement éclairés sur ce sujet, encore bien plus que nous !
    J'ajoute que nous avons abordé cette question du point de vue du traitement comptable à mettre en oeuvre pour l'avenir dès le collectif de juillet dernier, par le biais d'un excellent amendement de notre collègue Charles Amédée de Courson, et que nous y sommes revenus lors de l'examen de la loi de règlement. Nous en avions discuté pendant des heures et des heures en commission des finances.
    Quant au Gouvernement, il s'est engagé, à l'occasion du débat sur les prélèvements obligatoires, à nous proposer une solution adéquate en matière de traitement budgétaire et comptable de la prime pour l'emploi.
    Nous avons passé des journées et des nuits entières sur ce problème. Il est donc tout à fait faux de dire que vous n'êtes pas éclairés.
    Quant aux montants de la prime pour l'emploi, lisez le rapport général ! Les choses sont extrêmement claires et je vais vous les expliquer en quelques chiffres simples. En 2001, la prime pour l'emploi a été versée en deux fois, car son doublement est intervenu en loi de finances rectificative 2001. Cette décision s'est d'ailleurs traduite par l'envoi de chèques - je le rappelle au passage - en février, voire en mars 2002. Vous imaginez pourquoi ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Mais c'est une parenthèse.
    M. Patrice Martin-Lalande. Au cas où cela pourrait servir !
    M. Richard Mallié. Le hasard fait bien les choses !
    M. Jean-Pierre Brard. Ce n'est pas vrai !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. En 2001, cette prime pour l'emploi a représenté un total de 2,55 milliards d'euros. Elle a profité à 8 675 000 foyers pour un montant moyen de 288 euros. C'est une moyenne entre les chèques, d'une part, et les réductions d'impôt, d'autre part.
    Dans le budget de 2002, voté par la précédente majorité, la prime pour l'emploi est passée de 2,5 à 2,29 milliards d'euros. Elle a donc bien été diminuée. Pourquoi ? Cela tient à sa structure. La prime pour l'emploi comprend en effet une part proportionnelle au salaire et une majoration forfaitaire liée au nombre de membres de la famille, en particulier au nombre d'enfants. En optant pour cette formule, le gouvernement précédent a répondu à l'objection du Conseil constitutionnel qui avait fait observer que la première approche de la PPE - une réduction de CSG - n'était pas équitable parce qu'elle ne prenait pas en compte la situation familiale. Or, si la fraction proportionnelle au salaire a bien été doublée en 2002, la part forfaitaire liée aux charges de famille, elle, ne l'a pas été, alors que l'ensemble de la prime avait été doublé en 2001 par le biais du versement complémentaire. C'est ce qui explique que le montant global soit en diminution.
    En 2003, le Gouvernement propose une majoration de 280 millions d'euros qui portera la prime pour l'emploi de 2,29 à 2,57 milliards d'euros.
    M. Michel Bouvard. C'est cela qui est important !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Quel est l'objet de cette majoration ? Je rappelle, après Pierre Méhaignerie, que l'opposition, il y a deux ans, avait voté, je crois même à l'unanimité, le principe de la prime pour l'emploi. Vous voyez que nous avons toujours fait preuve d'un esprit constructif et que nous n'avons jamais cherché à mener des combats d'arrière-garde comme celui auquel nous assistons ce matin sur le plan de la méthode. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Augustin Bonrepaux. Vous nous reprochez de faire notre travail. C'est inacceptable !
    M. le président. Monsieur Bonrepaux...
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nous avions donc, à l'époque, voté la création de la prime pour l'emploi et nous nous félicitons que le Gouvernement nous propose de la maintenir sous réserve des quelques correctifs qui, nous en sommes tous conscients, doivent lui être apportés. Nous nous réjouissons de cette consolidation-amélioration de la prime pour l'emploi, puisque nous constatons, au bout de deux ans d'existence, qu'elle n'était pas bien adaptée à ceux qui reprennent un travail à temps partiel. En effet, comme l'a dit excellemment Philippe Auberger, le temps partiel est souvent l'antichambre de la reprise réelle du travail pour ceux qui viennent des revenus d'assistance.
    M. Michel Bouvard. Très juste !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. C'est pour répondre à ce problème que le Gouvernement majore de 280 millions d'euros la prime pour l'emploi.
    Voilà, mes chers collègues, vous avez tous les chiffres, les plus clairs. Vous les connaissez parfaitement, mieux que nous-mêmes, et c'est vous-mêmes qui avez mis en place cette jurisprudence que le président de la commission des finances utilise à bon escient aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Je considère que le débat est clos.
    Voulez-vous nous présenter l'amendement n° 240, monsieur Bonrepaux ?
    M. Augustin Bonrepaux. Non, monsieur le président, je maintiens ma demande de suspension. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Les propos du rapporteur général sont provocateurs. (Protestations sur les mêmes bancs.) Il nous accuse de faire durer la séance alors que nous voulons seulement y voir clair.
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, vous avez demandé une suspension de séance pour réunir votre groupe. Je vous accorde deux minutes.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à douze heures vingt, est reprise après quelques minutes.)
    M. le président. La séance est reprise.

Rappels au règlement

    M. le président. Vous avez maintenant la parole, monsieur Bonrepaux, pour soutenir l'amendement n° 240.
    M. Augustin Bonrepaux. Non, monsieur le président, je veux faire un nouveau rappel au règlement, car la façon dont vous venez de traiter le groupe socialiste pose un problème de reconnaissance des droits de l'opposition. Vous savez très bien qu'un groupe ne peut pas se réunir en deux minutes !
    Mme Arlette Franco. Vous n'êtes même pas sortis de l'hémicycle !
    M. Augustin Bonrepaux. Nous n'en avions pas le temps ! Je demande donc une suspension de séance qui permette au groupe de se réunir et de rencontrer, s'il en est d'accord, le président de la commission des finances, pour voir comment la question peut être réglée dans la sérénité mais en y consacrant le temps qui convient. C'est ainsi seulement que seront reconnus les droits de l'opposition.
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, les suspensions de séance se sont succédé ce matin et vous avez eu tout loisir de réunir votre groupe.
    M. Augustin Bonrepaux. Deux fois cinq minutes ! Pas davantage !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour un rappel au règlement.
    Fondé sur l'article 58, mon cher collègue ?...
    M. Jean-Pierre Brard. Je vois que vous connaissez vos classiques, monsieur le président.
    Notre rapporteur général, lui, connaît parfaitement son sujet et c'est, par ailleurs, un homme plein d'urbanité, ce qui ne gâche rien. Mais tout à l'heure, emporté par son enthousiasme, il a commis deux erreurs qu'il importe de rectifier pour que ceux qui, après nous, écriront l'histoire, ne pêchent pas par inexactitude.
    Vous avez dit, monsieur Carrez, que la création de la prime pour l'emploi avait donné lieu à un vote consensuel, ce qui est vrai formellement : vous ne pouviez pas dire à vos électeurs que vous étiez contre. Mais qui a saisi le Conseil constitutionnel pour faire retoquer, précisément, la prime pour l'emploi ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Sur la CSG, pas sur la prime pour l'emploi !
    M. Jean-Pierre Brard. Oh ! Tout cela n'était qu'alibi et habillage. C'est donc bien vous. Et c'était la première inexactitude.
    La deuxième est plutôt une insinuation délicate que vous avez instillée dans votre propos. Vous avez dit que le doublement de la prime pour l'emploi avait été voté dans dans la loi de finances rectificative de 2001 et que le complément n'avait été payé qu'au mois de février 2002, ce qui, pour le coup, est parfaitement exact. Mais il ne faut pas voir la gauche à l'image de la droite, mue par la volonté de séduire et, d'une certaine manière, de solliciter des réactions.
    M. Richard Mallié. Quel culot !
    M. le président. Monsieur Brard, pourriez-vous revenir au déroulement de la séance ?
    M. Jean-Pierre Brard. C'est justement l'objet de mon rappel au règlement. Pour la transparence du débat, il est essentiel que vous sachiez, monsieur le président, qu'à l'époque où le ministre présidait la commission des finances du Sénat, c'est sur la proposition des députés communistes et apparentés que le doublement de la prime pour l'emploi a été décidé.
    M. le président. Monsieur Brard, je suis désolé, mais vous abordez le fond et ce n'est plus un rappel au règlement. Je vous demande ou bien de revenir au règlement, ou bien de cesser de prendre la parole.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ce sera difficile !
    M. Jean-Pierre Brard. Difficile, en effet, le moment où on la prend est si fugace... (Sourires.)
    Mais je conclus d'un mot, monsieur le président : le délai nécessaire au versement tenait à des complications techniques et au fait que le doublement n'avait pas été imaginé initialement. C'est le résultat du pluralisme qui régnait dans la majorité plurielle et qu'on cherche en vain aujourd'hui dans l'UMP.
    M. le président. Veuillez présenter l'amendement n° 240, monsieur Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. J'ai suffisamment argumenté, monsieur le président. Je demande une suspension de séance d'une durée suffisante pour réunir le groupe et rencontrer le président de la commission de finances, s'il en est d'accord.
    M. le président. Non, monsieur Bonrepaux, je vous la refuse.
    M. Didier Migaud. Qu'est-ce que cela veut dire, monsieur le président ?
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Monsieur le président, dans le souci de trouver des solutions, encore que je juge la demande excessive, je propose de rencontrer M. Bonrepaux avec le rapporteur général à quatorze heures trente. Et j'ajoute, à l'intention du Gouvernement, que c'est un travail de longue haleine qu'il faut mener à bien avec le Parlement dans les prochaines semaines. C'est la solution de conciliation que je propose, mais peut-être M. de Courson a-t-il une meilleure idée.
    M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.
    M. Charles de Courson. Deux questions sont posées. La première est l'interprétation de l'article 40 faite par le président de la commission. Mais ayant discuté avec Didier Migaud pendant la suspension, je pense que la vraie demande de nos collègues concerne la seconde, à savoir la comptabilisation correcte de la prime pour l'emploi.
    J'avais moi-même proposé à l'ancienne majorité, dès la création de cette prime, de la compter pour 20 % en dégrèvements et pour 80 % en dépenses. Et moi, je n'ai pas changé d'avis. Je l'ai proposé à nouveau dans la loi de règlement, mais mon amendement a été repoussé, et j'ai récidivé dans la loi de finances, en déposant un nouvel amendement que la commission a rejeté hier. Je me permets toutefois de rappeler à nos collègues du groupe socialiste qu'à l'époque ils n'avaient pas critiqué le Gouvernement pour la présentation budgétaire de la prime.
    Alors, je vais proposer une solution. Pourquoi le Gouvernement ne s'engage-t-il pas à réfléchir sur cette présentation lors de la préparation du budget 2004 ? Sinon, on n'en sortira pas. Et que gagne-t-on à faire suspension de séance sur suspension de séance ? Rien, ça ne fait pas avancer le schmilblik !
    Quelle est votre position, monsieur le ministre ? Mon amendement relancera de toute façon le débat, mais seulement en fin de première partie.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. J'ai indiqué que le Gouvernement allait travailler à cette question. Mais comme nous sommes tous des femmes et des hommes de bonne volonté et que l'heure du déjeuner approche...
    M. Jean-Pierre Brard. Ventre affamé n'a point d'oreilles !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Si vous pouviez me laisser finir mes phrases, monsieur Brard, je n'ai pas votre agilité intellectuelle.
    M. Jean-Pierre Brard. Ne soyez pas trop modeste, monsieur le ministre, vous n'êtes pas crédible ! (Sourires.)

    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Comme nous sommes tous, monsieur le président, des hommes de bonne volonté et que le déjeuner approche, ne pourriez-vous pas lever immédiatement la séance, ce qui permettrait de réunir dès maintenant la commission des finances et de traiter le sujet. Nous pourrions alors reprendre nos travaux en début d'après-midi sans perdre de temps. C'est la solution qui me paraît la plus sage.
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Compte tenu des observations de M. le ministre, je réunis immédiatement la commission des finances.
    M. le président. J'enregistre avec satisfaction l'initiative du président de la commission.
    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :
    Discussion de l'article 33 du projet de loi de finances pour 2003, n° 230 (évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes) :
    M. Jean-Louis Dumont, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe II du rapport n° 256),
    M. Roland Blum, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires étrangères (tome I de l'avis n° 259) ;
    Suite de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2003, n° 230 :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 256).
    A vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à douze heures trente-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT