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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU SAMEDI 19 OCTOBRE 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du vendredi 18 octobre 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Loi de finances pour 2003 (première partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Après l'article 14 «...»

Amendement n° 284 corrigé de M. Michel Bouvard : MM. Michel Bouvard, Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances ; Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. - Retrait.
Amendement n° 249 rectifié de M. Migaud : MM. Didier Migaud, le rapporteur général, le ministre. - Adoption.
MM. le ministre, Didier Migaud, le président.
Amendements n°s 162 de M. Aeschlimann et 78 corrigé de M. Vaxès : MM. Manuel Aeschlimann, Jean-Claude Sandrier, le rapporteur général, Philippe Auberger, Marc Laffineur, Augustin Bonrepaux, le ministre, Didier Migaud, Jean-Yves Chamard. - Retrait de l'amendmeent n° 162.
Amendement n° 162 repris par M. Didier Migaud. - Rejet.
Rejet de l'amendement n° 78 corrigé.
Amendement n° 211 de M. Dumont : MM. Jean-Louis Dumont, le rapporteur général, le ministre, Philippe Auberger. - Rejet.
Amendement n° 230 de M. Carrez : M. le rapporteur général. - Retrait.
Amendement n° 134 de M. Laffineur : MM. Marc Laffineur, le rapporteur général, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 134 modifié.

Article 15 «...»

M. Jean-Louis Dumont.
Amendement n° 39 de la commission des finances : MM. le rapporteur général, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 40 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article 15 modifié.

Article 16 «...»

M. Michel Bouvard.
Amendements de suppression n°s 83 de M. Vaxès et 208 de M. Dumont : MM. Michel Vaxès, Jean-Louis Dumont, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 305 de M. Michel Bouvard : MM. Michel Bouvard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 179 de M. Michel Bouvard : MM. Michel Bouvard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 180 de M. Michel Bouvard : MM. Michel Bouvard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 16.

Article 17 «...»

MM. Didier Migaud, Jean-Pierre Brard, le président, le ministre.
Amendement n° 14 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendements n°s 41 rectifié de la commission et 288 de M. Michel Bouvard : MM. le rapporteur général, le ministre, Michel Bouvard, Didier Migaud. - Adoption de l'amendement n° 41 rectifié ; l'amendement n° 288 tombe.
Amendement n° 213 corrigé de M. Bonrepaux : MM. Didier Migaud, le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 214 de M. Emmanuelli : MM. Augustin Bonrepaux, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 17 modifié.

Après l'article 17 «...»

Amendement n° 171 de M. Vaxès : MM. Jean-Claude Sandrier, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 9 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 24 corrigé de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 105 de M. Vaxès : MM. Michel Vaxès, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 107 de M. Vaxès : M. Jean-Claude Sandrier.
Amendement n° 108 de M. Vaxès : MM. Jean-Claude Sandrier, le rapporteur général, le ministre. - Rejet des amendements n°s 107 et 108.
Amendements n°s 317 de M. Bonrepaux et 106 de M. Vaxès : MM. Didier Migaud, Jean-Claude Sandrier, le rapporteur général, le ministre, Augustin Bonrepaux, Jean-Pierre Brard.

Suspension et reprise de la séance «...»
PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT

MM. Didier Migaud, Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances ; Gérard Bapt. - Rejet, par scrutin, de l'amendement n° 317 rectifié ; rejet de l'amendement n° 106.
Amendements identiques n°s 193 de M. Myard et 281 rectifié de M. Martin-Lalande : MM. Michel Bouvard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendements n°s 192 de M. Lefort et 226 de M. Bonrepaux : MM. Michel Vaxès, Didier Migaud, le rapporteur général, le ministre, Julien Dray. - Rejets.
MM. Michel Vaxès, le président.
Amendement n° 13 de M. Brard : MM. Jean-ClaudeSandrier, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 175 de M. Vaxès : MM. Michel Vaxès, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 137 de M. Hillmeyer : MM. Maurice Leroy, le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 102 de M. Vaxès : MM. Jean-ClaudeSandrier, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 6 de M. Brard : MM. Michel Vaxès, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 150 de M. Albertini : MM. Maurice Leroy, le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 59 de M. Myard : MM. Jean-Yves Chamard, le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 57 de M. Marleix : MM. Michel Bouvard, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 64 rectifié de M. Kert : MM. Claude Gatignol, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 42 rectifié de la commission : MM. le rapporteur général, le ministre, Michel Bouvard, Alain Joyandet. - Retrait.
Amendement n° 148 de M. de Courson : MM. Maurice Leroy, le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 316 de M. Bapt : MM. Gérard Bapt, le rapporteur général, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 252 de M. Blazy : MM. Gérard Bapt, le rapporteur général, le ministre. - Rejet.

Article 18 «...»

M. Jean-Louis Dumont.
Amendement de suppression n° 262 de M. Dumont : MM. Jean-Louis Dumont, le rapporteur général, le ministre, le président. - Retrait.
Adoption de l'article 18.

Article 19 «...»

M. Jean-Claude Sandrier.
Adoption de l'article 19.

Article 20. - Adoption «...»

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
2.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

LOI DE FINANCES POUR 2003
PREMIÈRE PARTIE

Suite de la discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2003 (n°s 230, 256).

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Ce matin, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles de la première partie et s'est arrêtée à l'amendement, n° 284 corrigé, portant article additionnel après l'article 14.

Après l'article 14

    M. le président. M. Michel Bouvard a présenté un amendement, n° 284 corrigé, ainsi libellé :
    « Après l'article 14, insérer l'article suivant :
    « Le I de l'article 1407 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « 4° Pour les habitations légères de loisir occupées plus de vingt-huit jours par an par la même personne. »
    La parole est à M. Michel Bouvard.
    M. Michel Bouvard. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, mon amendement n° 284 corrigé vise à remédier à un problème de plus en plus réel, lié au développement de ce que l'on appelle les habitations légères de loisir. Celles-ci échappent en effet au régime de taxation ordinaire à la fiscalité locale. Ainsi, lorsqu'une construction de ce type est installée dans un camping, par exemple, son propriétaire, même s'il y réside à l'année, n'acquitte qu'une taxe de séjour ques les communes calculent généralement sur la base d'une occupation de vingt-huit jours. Je propose d'étendre aux habitations légères de loisir le régime de la taxe d'habitation dans la mesure où, du seul fait de leur implantation, elles influent sur les dépenses des collectivités locales, qu'il s'agisse de l'adduction d'eau, de l'assainissement ou de l'enlèvement des ordures ménagères.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 284 corrigé.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. La commission a longuement débattu de ce problème, qui est en réalité beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît. Elle a finalement rejeté l'amendement n° 284 corrigé, au motif qu'il serait extraordinairement difficile, parmi les habitations de ce type, de distinguer celles qui relèvent de la taxe de séjour de celles qui relèveraient plutôt de la taxe d'habitation.
    Il paraît qu'une jurisprudence - mais je ne la connais pas - établit la distinction en se fondant sur la forme des roues. Je suppose que ces habitations sont soumises à la taxe d'habitation quand elles ont des roues carrées, et donc qu'elles ne roulent pas, et à la taxe de séjour quand elles ont des roues rondes. (Sourires.)
    Plusieurs de nos collègues concernés par ce problème dans leur commune se sont exprimés. La commission a finalement jugé que cet amendement introduirait une complexité excessive dans la gestion des campings : comment faire le tri entre les contribuables installés de façon permanente et les touristes de passage, les premiers relevant de la taxe d'habitation et les seconds de la taxe de séjour ?
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, pour donner l'avis du Gouvernement sur cet amendement.
    M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le président, je sollicite de votre haute bienvieillance de bien vouloir excuser mon léger retard.
    M. le président. Nous vous pardonnons tout, monsieur le minisitre.
    M. Philippe Auberger. Attendez de connaître l'avis du Gouvernement : soyez prudent, monsieur le président !
    M. le président. Vous avez raison : attendons !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, au début de cette discussion, nous nous sommes fait une promesse : aller vers davantage de simplicité.
    M. Didier Migaud. Vous ne nous avez pas toujours suivis dans ce sens, monsieur le ministre !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Or votre amendement, monsieur Bouvard, menace à cet égard de nous faire rouler dans le fossé.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Avec des roues carrées, nous ne risquons rien !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Nous sommes arrivés à la limite du possible en matière de recouvrement de l'impôt. Comment vérifier la durée d'utilisation des logements, comme vous le proposez dans votre dispositif ? C'est totalement impossible. Je comprends votre préoccupation mais, franchement, la solution que vous proposez ne me paraît pas applicable. C'est la raison pour laquelle je vous demande d'y réfléchir à nouveau. Nous serions prêts à examiner tout autre amendement, mais je vous suggère de retirer celui-ci afin de m'éviter d'exprimer une demande de rejet.
    M. le président. Monsieur Bouvard, vous avez entendu que le Gouvernement comprenait votre préoccupation, mais qu'il vous demandait de retirer votre amendement.
    M. Didier Migaud. Nous sommes habitués, monsieur le président. C'est comme cela depuis le début de la semaine.
    M. Michel Bouvard. J'ai bien compris. Je vais répondre à la demande du ministre, mais je souhaiterais que l'on organise une réunion de travail avec la direction générale des collectivités locales et ses propres services, afin de trouver une solution et d'arrêter un mode de contribution aux dépenses des collectivités locales des habitations légères de loisir. Le régime de la taxe de séjour plafonnée à vingt-huit jours n'est pas satisfaisant. Il est anormal, compte tenu des dépenses qu'elles génèrent aujourd'hui et de leur multiplication, que ces constructions ne soient pas assujetties à une contribution plus significative.
    Cela dit, je conviens que ma disposition n'est pas forcément la meilleure. Au bénéfice de ce que vous venez d'indiquer, monsieur le ministre, et puisque vous vous êtes déclaré prêt à y travailler, je retire mon amendement.
    M. Didier Migaud. Un de plus !
    M. le président. Le Gouvernement organisera donc toutes les réunions nécessaires.
    L'amendement n° 284 corrigé est retiré.
    M. le président. MM. Migaud, Bonrepaux, Emmanuelli, Idiart, Brottes, Vallini, Alary et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 249 rectifié, ainsi rédigé :
    « Après l'article 14, insérer l'article suivant :
    « I. - Par dérogation au premier alinéa du II de l'article L. 1615-6 du code général des collectivités territoriales, les dépenses réelles d'investissements réalisées par les bénéficiaires du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée en 2002, 2003 ou 2004 afin de réparer les dommages directement causés par les intempéries survenues en 2002 et reconnues catastrophes naturelles, ouvrent droit à des attributions du fonds l'année au cours de laquelle les crédits correspondants ont été payés. »
    « II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Monsieur le président, je suis sûr de défendre un amendement qui vous tient particulièrement à coeur...
    M. Philippe Auberger. Cela commence mal !
    M. Michel Bouvard. Ce ne peut donc être qu'un excellent amendement !
    M. Didier Migaud. ... compte tenu des fonctions qui ont été les vôtres et de votre sensibilité tout à fait particulière sur ce sujet.
    M. le président. Vous m'inquiétez, monsieur Migaud !
    M. Didier Migaud. Au contraire, je cherche à vous rassurer et à rassurer le ministre.
    L'article 13 de la loi du 13 juillet 2000, modifiée par la loi du 28 décembre 2001, a prévu que le fonds de compensation de la TVA serait payé aux collectivités locales l'année même du paiement des dépenses d'investissement correspondantes consécutives aux intempéries de 1999.
    Tout le monde convient que les collectivités locales sont confrontées à un certain nombre de travaux et que le régime normal de remboursement des frais des collectivités les oblige à attendre deux ans. Il vous est proposé de reprendre le dispositif adopté en 2001, de l'adapter et de l'étendre aux intempéries reconnues catastrophes naturelles survenues en 2002.
    Nous avons débattu de la question de savoir - peut-être suis-je en train d'anticiper sur la réponse du ministre - s'il fallait prévoir ou non des dates, et encadrer le dispositif proposé. Nous y avons beaucoup réfléchi et nous espérons avoir convaincu la commission des finances.
    Le fait que les intempéries soient classées catastrophes naturelles par le conseil des ministres lui-même nous a finalement paru une garantie suffisante pour l'Etat : cette procédure particulièrement encadrée devrait être de nature à éviter les abus. Telle est l'économie de notre amendement n° 249 rectifié, à nos yeux très raisonnable.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a approuvé cet amendement au terme d'une réflexion assez longue. Il nous avait déjà été présenté à l'occasion du collectif de juillet. Dans un premier temps, nous l'avions rejeté en nous fondant sur le fait que, lors des violentes tempêtes de 1999, la récupération de la TVA sur les travaux de remise en état avait été encadrée par des dates. Aussi avais-je, au mois de juillet, proposé à notre collègue M. Migaud de compléter son amendement dans ce sens.
    Mais par la suite, nous nous sommes rendu compte que le fait de fixer des dates précises risquait d'avoir un caractère un peu arbitraire, discrétionnaire. Or il existe déjà une procédure tout à fait explicite, parfaitement formalisée : la déclaration d'état de catastrophe naturelle, laquelle a en outre la particularité, je veux y insister, d'être décidée dans un cadre interministériel. Le ministère des finances, aux côtés du ministère de l'intérieur, participe en effet à la commission qui déclare l'état de catastrophe naturelle. Il est donc parfaitement à même de faire valoir les implications financières, fiscales et budgétaires de cette décision.
    Deux à trois mille communes environ subissent chaque année des dégâts justifiant la déclaration de catastrophe naturelle ; autrement dit, le champ n'est pas extraordinairement étendu. Par ailleurs, le remboursement de la TVA l'année même a été ouvert de droit à toute une série d'établissements publics de coopération intercommunale, communautés d'agglomérations ou autres. Aussi sommes-nous finalement revenus à l'idée première de M. Migaud qui consiste à ne pas fixer de date mais à s'appuyer, pour bien limiter le champ, sur la déclaration d'état de catastrophe naturelle, en partant du fait que le ministère des finances était partie prenante à la décision. Voilà pourquoi nous avons émis un avis favorable à l'amendement n° 249 rectifié.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Nous sommes entre spécialistes, si j'ose dire, puisque Didier Migaud comme le rapporteur général connaissent très bien le sujet.
    La dérogation doit rester ponctuelle et limitée dans le temps. Si nous adoptons l'amendement proposé par Didier Migaud, nonobstant tous ses mérites, dont le rapporteur général vient de faire état, nous risquons de faire bénéficier de la mesure toutes les collectivités touchées par des catastrophes naturelles reconnues comme telles en 2002. Or, de l'avis du Gouvernement, il convient de limiter ce type de dérogation aux seules collectivités locales qui connaissent des difficultés d'une particulière gravité.
    C'est pourquoi, conscient des difficultés que vous avez soulevées et que nous reconnaissons volontiers, le Gouvernement a souhaité que les collectivités locales des départements du Gard, de l'Ardèche, des Bouches-du-Rhône, de l'Hérault, de la Drôme et du Vaucluse, touchées par les intempéries des 8 et du 9 septembre dernier puissent faire l'objet d'un régime dérogatoire comparable à celui appliqué en 2000.
    Cette disposition est actuellement en cours de formalisation. C'est pourquoi je vous demande, monsieur Didier Migaud, de bien vouloir accepter de retirer votre amendement, afin que nous puissions vous proposer un texte à votre convenance dans le collectif de fin d'année que nous examinerons dans quelques semaines.
    M. le président. Monsieur Migaud, vous avez entendu l'invitation du Gouvernement.
    M. Didier Migaud. L'invitation est courtoise. Je veux tout d'abord remercier le rapporteur général ainsi que la commission des finances de leur attitude ouverte. La commission a émis un avis favorable à mon amendement, à la suite d'un long échange où les arguments du Gouvernement ont pu nous être présentés.
    Cela dit, monsieur le ministre, vous me paraissez trop réservé. Sans doute est-ce dû à votre réserve naturelle, mais, conformément aux encouragements donnés par le Premier ministre lui-même, je vous invite à faire preuve d'un peu d'audace. Et ce n'est pas faire preuve de trop d'audace que d'accepter que les communes ayant subi des catastrophes reconnues comme telles à la suite d'une décision interministérielle, comme l'a rappelé Gilles Carrez, reconnaissance officialisée en conseil des ministres, puissent bénéficier de cette disposition. Prendre en considération la situation de ces collectivités ne me paraît pas de nature à faire courir un risque important aux finances publiques. Il est certes très difficile de distinguer entre les grandes et les petites catastrophes, mais, pour toutes ces communes, ce sont de réelles difficultés. La disposition tout à fait raisonnable que nous vous proposons permettrait de les aider un peu plus.
    Aussi, monsieur le président, malgré l'invitation du ministre, et à mon grand regret parce que j'entends lui être agréable le plus souvent possible, je préfère maintenir mon amendement d'autant qu'il est le fruit d'une concertation et d'une réflexion très poussées des membres de la commission des finances.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 249 corrigé.
    (L'amendement est adopté.)
    M. Jean-Louis Dumont. C'est un événement suffisamment rare pour que je le salue en applaudissant, monsieur le président !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je voudrais qu'il n'y ait pas d'ambiguïté entre nous. Le Gouvernement est très compréhensif : il écoute, il respecte les points de vue. Mais, vous l'aurez remarqué, je n'ai pas levé le gage. Je vous ai invité, monsieur le député, à comprendre que nous étions en cours de rédaction d'un document tout à fait approprié. Je vous ai indiqué le cap : le collectif. Vous me répondez : « on sait mieux faire que le Gouvernement et on le fait maintenant ». Eh bien, moi, je ne lève pas le gage, je le dis comme je le pense. On force la main de l'exécutif quand on n'estime qu'on n'a pas besoin de lui pour le gage.
    Je crois vraiment, mesdames, messieurs les députés, que nous devons être les uns et les autres entièrement responsables de nos décisions.
    M. Philippe Auberger. Ce sera pour la deuxième délibération, monsieur le ministre !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur Migaud, vous voulez voter aujourd'hui un texte alors que l'exécutif est précisément en train d'en rédiger un. Peut-être considérez-vous qu'il s'agit d'une rédaction transitoire qui pourrait faire l'objet, par exemple à l'occasion de la commission mixte paritaire, d'une adaptation.
    M. Didier Migaud. Bien sûr !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Imposer une rédaction alors que nous sommes en train d'y travailler afin de la rendre aussi parfaite que possible n'est pas de bonne méthode législative.
    M. Augustin Bonrepaux. Alors ce n'est pas la peine d'être là !
    M. Didier Migaud. Puis-je répondre, monsieur le président ?
    M. le président. Nous n'allons pas revenir sur l'amendement : il a été adopté.
    M. Philippe Auberger. Et il y aura une deuxième délibération !
    M. Didier Migaud. Juste un mot, monsieur le président !
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, mais par pur libéralisme.
    M. Didier Migaud. Je vous en remercie, monsieur le président. Je suis un peu surpris et peiné par la réaction du ministre, car elle n'est pas dans ses habitudes. Il ne faut pas mal prendre le fait que l'Assemblée nationale souhaite exprimer une volonté. Et vous connaissez bien le Sénat, monsieur le ministre.
    M. le président. Monsieur Migaud, l'Assemblée nationale a exprimé sa volonté.
    M. Maurice Leroy. Absolument !
    M. Didier Migaud. Tout à fait, et il ne faut donc pas que le ministre en soit fâché. C'est la première fois que je vois le Gouvernement refuser de lever le gage d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale. Je demande donc au ministre un peu de compréhension et je conçois parfaitement que mon amendement puisse être corrigé en première lecture au Sénat : je remarque à ce propos que l'Isère et la Savoie ont été oubliées dans l'énumération de M. le ministre, alors même que ces départements ont subi des catastrophes naturelles très sérieuses.
    Cet amendement sera soumis à la navette et les corrections nécessaires pourront être apportées.
    Quoi qu'il en soit, je le répète, je regrette l'appréciation du ministre et souhaite que ce ne soit qu'une parenthèse vite oubliée.
    M. le président. Monsieur Migaud, vous êtes un parlementaire chevronné et connaissez bien le fonctionnement de l'Assemblée : il est habituel, lorsque le Gouvernement n'est pas d'accord avec un amendement, qu'il ne lève pas le gage. Je peux vous en donner bien des exemples.
    M. Didier Migaud. Mais non !
    M. Philippe Auberger. Mais si !
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 162 et 78 corrigé, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 162, présenté par M. Aeschlimann, est ainsi rédigé :
    Après l'article 14, insérer l'article suivant :
    « I. - Dans la première phrase du II de l'article 1641 du code général des impôts, le pourcentage "5,4 % est remplacé par le pourcentage "5 %.
    « II. - Dans la dernière phrase du II du même article, le pourcentage "4,4 % est remplacé par le pourcentage "4 %.
    « III. - La perte de recettes est compensée à due concurrence par la création au profit de l'Etat d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    L'amendement n° 78 corrigé, présenté par MM. Vaxès, Brard et Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains est ainsi rédigé :
    Après l'article 14, insérer l'article suivant :
    « I. - Dans la dernière phrase du II de l'article 1641 du code général des impôts, le taux "4,4 % est remplacé par le taux "4 %.
    « II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
    La parole est à M. Manuel Aeschlimann, pour soutenir l'amendement n° 162.
    M. Manuel Aeschlimann. Depuis 1990, l'Etat perçoit une part du produit fiscal des collectivités locales, au titre du financement de la révision des valeurs locatives. Cette révision n'étant pas mise en oeuvre, il est proposé de supprimer ce prélèvement et de le compenser par ailleurs, afin que cela ne constitue pas une perte pour l'Etat. A un moment où l'on parle de décentralisation, les collectivités locales ne doivent pas avoir à supporter des prélèvements indus.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Sandrier, pour soutenir l'amendement n° 78 corrigé.
    M. Jean-Claude Sandrier. L'amendement que nous présentons vise à tirer les conséquences de la non-application de la révision des valeurs locatives en proposant de mettre un terme à la surtaxe pour mener à bien cette réforme. C'est une proposition que nous faisons chaque année. Malgré la quasi-unanimité des élus locaux, qui se plaignaient de cette majoration, le gouvernement Juppé avait pérennisé le taux de 4,4 % à l'occasion de la loi de finances pour 1996. Cependant, nombreux sont les élus appartenant à la majorité d'aujourd'hui qui ont fait état de leur volonté de revenir sur ce prélèvement supplémentaire de 0,4 %. Je pourrais rappeler certains rapports, comme le rapport Oudin, qui allaient dans ce sens, et au-delà.
    En cette période où le Gouvernement est peut-être tenté, en tout cas soupçonné, de transférer une partie des impôts sur les collectivités locales et leurs groupements, ce geste serait apprécié, d'autant plus que le coût de la révision des valeurs locatives est désormais largement couvert.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission des finances a donné un avis favorable à l'amendement de M. Aeschlimann. Ce problème exaspérant se pose en effet depuis 1996 : chaque année, des amendements de suppression sont défendus. C'est un raisonnement de bon sens : la révision ayant été faite, et, de surcroît, n'ayant pas été menée à bien, tout le travail des administrations - je profite de l'occasion pour les en remercier - et des élus étant passé par pertes et profits, et l'on ne peut qu'être exaspéré de ne voir subsister de cette malheureuse affaire que ce 0,4 %.
    Toutefois, si la commission a émis un avis favorable, c'est contre l'avis du rapporteur. Pour ma part, j'ai souligné que, révision ou pas, le 0,4 % a été intégré dans le coût général de recouvrement de l'impôt local et j'ai fait valoir que cet amendement représentait un coût supplémentaire de l'ordre de plusieurs centaines de millions d'euros.
    M. Augustin Bonrepaux. Ce sont les collectivités locales qui paient !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Les contribuables, plutôt !
    M. Augustin Bonrepaux. Oui, les contribuables locaux !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. J'exprime là un point de vue personnel en tant que rapporteur tout en comprenant bien l'esprit de cet amendement et l'exaspération des élus. Mais il faut, je crois, raison garder, et j'ai estimé qu'on ne pouvait pas renoncer ainsi à plusieurs centaines de millions d'euros.
    M. le président. Monsieur Carrez, l'amendement n° 78 corrigé a dû être lui aussi examiné par la commission, puisqu'il est antérieur à l'amendement de M. Aeschlimann, daté du 15 octobre.
    M. Didier Migaud. La réflexion de la commission des finances a mûri entre-temps !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cet amendement avait été rejeté par la commission.
    M. le président. La parole est à M. Philippe Auberger.
    M. Philippe Auberger. Je suis un peu surpris de voir cette discussion revenir sur le tapis. Cette taxe a été instituée, sauf erreur de ma part, en 1991, lorsqu'on a enclenché la révision des propriétés bâties. Elle avait une justification à ce moment-là et rapportait, me semble-t-il, 1 milliard de francs. La révision a été conduite mais n'a pas débouché sur les conclusions qu'on aurait souhaitées et n'a pas été véritablement utilisée. Cependant, bien que la révision ait été effectuée, la ressource a été maintenue en 1996 - je me souviens au demeurant d'avoir, à l'époque, rapporté son maintien définitif, si j'ose dire.
    M. Augustin Bonrepaux. J'allais le rappeler !
    M. Philippe Auberger. Cela m'a d'ailleurs été reproché par la suite. Mais nous avions des raisons.
    La première, c'est qu'aucune comptabilité analytique ne permet de savoir si les frais d'assiette et de recouvrement et les frais de non-valeur correspondent bien aux 7 % qui sont prélevés à ce titre sur les impôts locaux. En fait, ce 0,4 % est une sorte de bonus par rapport aux 7 %.
    Quel est l'usage actuel ? Des difficultés à caractère social conduisent parfois certains contribuables à solliciter auprès des responsables des centres des impôts, au niveau local, un dégrèvement partiel ou total pour la taxe d'habitation, voire pour le foncier bâti. Si nous supprimons la taxe, les services du ministère des finances seront fondés à supprimer tous les dégrèvements facultatifs accordés à des personnes en difficulté qui ne peuvent pas acquitter leur imposition mais ne rentrent pas dans les formules d'allégement partiel ou total des impositions locales.
    Dans ces conditions, je suis pour le maintien de ce 0,4 % qui a été pérennisé et contre les deux amendements.
    M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur.
    M. Marc Laffineur. Pour construire un budget, il faut faire des choix. Le Gouvernement a choisi de diminuer les impôts de façon importante, comme cela n'avait pas été réalisé depuis de nombreuses années. Je comprends l'amendement qui a été déposé par nos collègues, mais le choix s'est porté sur d'autres baisses d'impôts, et on ne peut pas les multiplier à l'infini.
    M. Didier Migaud. Vous cadenassez tout !
    M. Marc Laffineur. Peut-être pourra-t-on l'envisager ultérieurement. Pour l'heure, avec le groupe UMP, je voterai contre ces deux amendements.
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. S'agit-il de baisser, d'un côté, l'impôt sur le revenu, l'impôt le plus juste, pour, d'un autre côté, augmenter la fiscalité des collectivités locales, sur lesquelles pèse ce 0,4 % ?
    M. Marc Laffineur. Vous aviez le temps de vous en préoccuper quand vous étiez au pouvoir !
    M. Augustin Bonrepaux. Il est vrai - M. Auberger l'a rappelé - que ce prélèvement a été institué en 1991, pérennisé en 1996, et qu'il n'a pas été supprimé depuis. Mais nous avons longtemps vécu dans la perspective de la révision des valeurs locatives. Or, l'autre jour, j'ai entendu M. Devedjian expliquer qu'il allait engager une réforme différente qui serait mise en oeuvre par les collectivités locales elles-mêmes. Ainsi, on va leur faire payer deux fois la révision des valeurs locatives. D'une part, elle est inscrite dans les finances des collectivités locales, et ce sont les contribuables locaux qui la payent. D'autre part, ce sont les collectivités locales qui vont devoir financer la réforme. Par quel artifice arrivera-t-on à faire une comparaison et à établir un potentiel fiscal permettant de prendre en compte l'ensemble des communes ? Peut-être allez-vous nous éclairer sur ce point, monsieur le ministre. En tout cas, c'est en fonction de cette précision qu'on peut savoir s'il faut ou non maintenir ce prélèvement. Dans la perspective annoncée par M. Devedjian, la suppression est tout à fait justifiée. Ce prélèvement anormal pèse sur les collectivités locales - et donc sur les impôts locaux - alors que ce sont elles qui seront obligées de faire leur propre révision des valeurs locatives.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je veux remercier Philippe Auberger d'avoir eu la loyauté de rappeler l'histoire de ce prélèvement et dire à la représentation nationale que, si l'on constate aujourd'hui un grand empressement à supprimer ce prélèvement, ce ne fut pas toujours le cas dans les années qui viennent de s'écouler ; j'en fais la remarque à ceux qui sont plus prompts aujourd'hui qu'hier à corriger les anomalies.
    C'est vrai, ce prélèvement était la contrepartie d'un service - la révision des bases - qui devait être rendu. La révision s'est ensablée et le moins que l'on puisse dire, c'est que chaque partie de l'hémicycle a sa part de responsabilités dans cette affaire.
    M. Philippe Auberger. Absolument !
    M. Michel Bouvard. C'est le syndrome de la pool-tax !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Faut-il mettre fin à ce prélèvement ? Il faut avoir l'honnêteté et la loyauté de reconnaître, après Philippe Auberger, qu'il est devenu une recette récurrente dont l'Etat ne sait plus se priver, ...
    M. Didier Migaud. Ce raisonnement est trop facile !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... à moins de trouver la marge de manoeuvre nécessaire. Du reste, c'est vraisemblablement pour cela que cet effort n'a pas été accompli au cours des cinq années qui viennent de s'écouler, qui furent pourtant extraordinairement abondantes en recettes nouvelles.
    Cela constitue-t-il une injustice, non pas pour les collectivités locales, comme on l'a dit, mais pour les contribuables locaux ?
    Les contribuables locaux bénéficient de dégrèvements et d'admissions en non-valeur de la part de l'Etat. De 1992 à 2001, ces dégrèvements et admissions ont été pris en charge jusqu'à hauteur de 10 milliards d'euros l'année dernière, contre 4,8 milliards en 1992. En revanche, l'Etat a encaissé 1,3 milliard en 1992 et 2,4 milliards en 2001 au titre du prélèvement que vous souhaitez supprimer. Le coût pour les finances de l'Etat est de l'ordre de 230 millions d'euros. Je vous dis en toute sincérité, parce que c'est un climat parfait, une atmosphère de confiance totale qui ont régné tout au long de cette discussion, que je n'ai pas provisionné cette somme. Elle n'est pas dans les marges de manoeuvre du Gouvernement, non plus, je pense - je parle sous le contrôle du rapporteur général -, que dans la marge de manoeuvre implicite de la commission des finances de l'Assemblée nationale.
    Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je ne voudrais pas que l'incident de tout à l'heure se reproduise. Je ne pourrai pas lever le fameux gage sur le tabac, je vous en préviens par avance.
    M. Philippe Auberger. Ah !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Nous commençons d'ailleurs - et je parle devant des spécialistes - à nous poser des questions sur la solidité de ce « gage tabac », alors que la recette figure désormais dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il va falloir un jour adopter une attitude très responsable...
    M. Didier Migaud. C'est le moment !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... consistant à dire : si c'est devenu une recette de l'Etat, donnons-en acte, faisons-en une véritable mesure fiscale à l'occasion d'un prochain projet de loi de finances. Mais il me paraît impossible d'improviser cela en cours de discussion budgétaire.
    M. Michel Bouvard. Tout à fait !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. C'est ce qui me conduit à indiquer à l'Assemblée nationale que, si cet amendement n'était pas retiré, je serais obligé d'en demander le rejet, et en tout état de cause je préviens - ce que je n'ai pas su faire tout à l'heure - que je ne pourrai pas lever le gage.
    M. Jean-Yves Chamard. Parfait !
    M. le président. Monsieur le ministre, il n'y a pas eu d'incident, mais une interprétation différente de la pratique parlementaire et gouvernementale.
    La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Je ne pense pas que l'on puisse parler d'improvisation. Nous pourrions d'ailleurs, si besoin était, nous référer utilement aux travaux du Sénat à l'occasion sur les différents projets de loi de finances. En cherchant bien, il n'est pas impossible que l'on trouve quelques propositions allant dans ce sens et adoptées par le Sénat. Nous connaissons l'attention qu'il accorde aux questions touchant les collectivités locales. Si cette mesure a pu être formulée par le Sénat, l'Assemblée nationale devrait pouvoir en tenir compte. En tant qu'ancien rapporteur général de la commission des finances, comme Philippe Auberger, j'éprouve, au nombre de mes regrets, celui de ne pas avoir fait progresser ce dossier.
    M. Philippe Auberger. Je l'ai dit également !
    M. Didier Migaud. Je suis heureux de voir la commission reprendre cette idée, dont l'actualité est plus brûlante aujourd'hui qu'hier. Un argument devrait en effet convaincre Philippe Auberger : devant le comité des finances locales, le Gouvernement a, semble-t-il, annoncé qu'il abandonnait toute réforme des valeurs locatives. Le temps est donc venu de rendre aux contribuables locaux une somme qui est injustement perçue par l'Etat.
    Monsieur le ministre, vous nous dites que vous n'avez pas de marges de manoeuvre. Certes, je le conçois, elles sont étroites. Mais, nous avons eu l'occasion de le dire, il nous semble que vous les gaspillez, à cause de certaines des propositions que vous formulez. En tout cas, je trouve dommage que nous examinions le projet de loi de finances sans que la commission des finances de l'Assemblée, sans que l'Assemblée nationale ait la moindre marge de manoeuvre sur le plan budgétaire. Nous nous en apercevons depuis le début de la semaine : aucun amendement n'a été adopté, hormis quelques-uns qui n'influent que sur quelques millions d'euros, ce qui est peu de chose.
    M. Philippe Auberger. Vous ne nous avez pas laissé le choix, financièrement !
    M. Marc Laffineur. Vous n'avez rien laissé pour tout dire !
    M. Didier Migaud. C'est la première fois, depuis que je suis député, que je vois l'Assemblée nationale et la commission des finances aussi peu considérées.
    M. Philippe Auberger. Vous ne nous avez pas laissé de quoi financer des amendements !
    M. Didier Migaud. Je le regrette d'autant plus que je connais Alain Lambert. Il a été président de la commission des finances du Sénat et je sais combien il est attaché à ce que le Parlement puisse être entendu par le Gouvernement.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Et vous savez qu'il se méfie des compliments !
    M. Didier Migaud. Or je le vois aujourd'hui dans ses fonctions de ministre délégué au budget, et j'entends plusieurs députés de la majorité, qui sont là pour cadenasser, dire que nous n'avons strictement aucune marge de manoeuvre et qu'il ne faut pas prendre d'initiatives, même si elles sont bonnes, même s'ils les ont défendues les années précédentes.
    M. Dominique Le Mèner. C'est votre héritage !
    M. le président. Monsieur Migaud, vous avez été député de la majorité, vous savez que, selon que l'on est député de la majorité, député de l'opposition ou ministre, on défend des thèses différentes. (Sourires.)
    M. Didier Migaud. Non, monsieur le président. Nous avions davantage de marges de manoeuvre, et je suis prêt à vous le prouver, dans votre bureau, en vous rappelant tous les amendements, très importants, acceptés par la commission des finances et votés par l'Assemblée.
    M. Jean-Yves Chamard. Effectivement, vous n'aviez que des marges de manoeuvre financières !
    M. Philippe Auberger. Pour laisser filer le déficit !
    M. Michel Bouvard. Vous aviez des marges pour accroître le déficit !
    M. le président. Cela prouve, monsieur Migaud, la liaison très profonde entre le Gouvernement et sa majorité.
    M. Didier Migaud. Cela n'empêchait pas une osmose très forte entre le gouvernement et la majorité de l'époque.
    En tout cas, je veux regretter à nouveau cette position. Je souhaite que le travail de la commission des finances soit respecté et j'appelle nos collègues à voter cet amendement.
    M. Philippe Auberger. M. Migaud est intoxiqué par la lecture d'un grand journal du soir !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
    M. Jean-Claude Sandrier. Bien sûr, si l'on comptait le nombre des amendements adoptés depuis mardi, on pourrait se demander à quoi sert l'Assemblée nationale.
    M. Didier Migaud. Le débat est complètement verrouillé !
    M. Jean-Claude Sandrier. Les députés ne servent-ils qu'à dire oui au Gouvernement ? Monsieur le ministre, il faut tirer les conséquences de ce que vous venez de dire et les tirer collectivement : il faut donc renoncer définitivement à l'idée d'instituer dans l'avenir des prélèvements temporaires. Car l'Etat ne sait plus s'en passer.
    M. Michel Bouvard. C'est vrai !
    M. Jean-Claude Sandrier. Cela montre surtout qu'il ne sait pas tenir sa parole.
    M. Michel Bouvard. L'Etat a un haut niveau de dépendance !
    M. Jean-Claude Sandrier. Cela pose un problème moral. Ce matin, vous avez prononcé des paroles fortes sur la confiance entre le Gouvernement et les élus locaux. Je vous retourne d'une certaine façon le compliment : quelle confiance peut avoir l'élu local alors qu'il s'engage ponctuellement d'une façon précise, concrète, mais que l'Etat ne tient jamais parole ? Il ne peut y avoir de confiance dans ce cas.
    Quant à l'argument selon lequel cette somme servirait à des personnes en difficulté, il ne me semble pas pertinent. Je ne veux pas croire que si l'administration ne disposait pas de cette somme, elle ne viendrait pas malgré cela au secours des personnes qui en ont besoin. Je ne sais pas qui est mesquin dans cette affaire, mais je ne crois pas que nous ayons une administration mesquine.
    M. le président. La parole est M. Jean-Yves Chamard.
    M. Jean-Yves Chamard. Tout d'abord, qu'un gouvernement dise non à un amendement entraînant une dépense d'une telle ampleur - 250 millions d'euros, soit 1,5 milliard de francs, c'est une pratique constante. Soit une telle dépense a été prévue dans le projet de budget initial, soit elle ne l'a pas été, auquel cas on ne peut l'introduire comme ça, à la légère.
    Je voudrais poser une question à notre collègue qui s'étonne que l'Etat puisse prolonger des dispositifs qui devaient n'être que temporaires : n'auriez-vous pas voté la prolongation du RDS ? Je pense que si. Ce n'est donc pas la première fois que ce qui devait être transitoire est maintenu.
    Mais, surtout, je voudrais m'adresser au Gouvernement. La dernière étape de la décentralisation va bientôt avoir lieu. Cela impliquera une péréquation, car il faudra éviter que les régions ou les départements riches aient beaucoup plus d'argent que les pauvres.
    M. Augustin Bonrepaux. J'attends de voir !
    M. Jean-Yves Chamard. Comment a-t-on fait, au niveau des personnes physiques, pour assurer une redistribution ? On a créé l'impôt,...
    M. Didier Migaud. C'est vrai ! Merci de le reconnaître !
    M. Jean-Yves Chamard. ... l'impôt proportionnel ou progressif. Or, ce prélèvement est en quelque sorte un impôt proportionnel sur les collectivités locales : plus elles sont riches, plus elles paient. N'a-t-on pas là une piste à suivre pour arriver dans le futur à une péréquation qui soit juste ? Bien loin de devoir être supprimé, ce prélèvement nous offre donc une piste de réflexion pour l'avenir de la décentralisation.
    M. Jean-Pierre Brard. Vous noyez le poisson, monsieur Chamard !
    M. le président. Ah ! monsieur Brard, je ne vous avais pas vu arriver. Mais je suis content que vous soyez des nôtres.
    La parole est à M. Manuel Aeschlimann, après quoi nous passerons au vote.
    M. Manuel Aeschlimann. Je suis ouvert à la discussion, monsieur le ministre. Il serait bon que vous précisiez d'un mot si vous pensez que ce prélèvement est immuable ou pas. Pouvons-nous réfléchir ensemble à sa possible évolution ? Nous pourrions par exemple envisager un changement de type de recettes, ou bien donner à ce prélèvement un rôle accru, comme cela vient d'être dit, dans le processus de décentralisation. Dans ce cas, je serais prêt à retirer cet amendement, puisqu'il sera évolutif et que nous pourrons y travailler ensemble.
    M. le président. L'amendement n° 162 est retiré.
    M. Augustin Bonrepaux et M. Didier Migaud. Nous le reprenons, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 162, retiré par M. Aeschlimann, est repris par M. Augustin Bonrepaux et M. Didier Migaud.
    Je le mets aux voix.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 78 corrigé.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Dumont et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 211, ainsi rédigé :
    « Après l'article 14, insérer l'article suivant :
    « I. - Le prélèvement appliqué à la taxe foncière et destiné aux frais de rôle en application de l'article 1647 du code général des impôts est supprimé.
    « II. - La perte de recettes est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Jean-Louis Dumont.
    M. Jean-Louis Dumont. Voici au moins un amendement dont on ne pourra pas dire qu'il apparaît inopinément. C'est en effet la troisième ou quatrième fois que je le présente, avec détermination.
    M. Jean-Pierre Brard. Quelle persévérance !
    M. Jean-Louis Dumont. J'ai bien compris qu'il fallait faire preuve de pédagogie : il faut donc inlassablement répéter la leçon. Il y a tout de même une surprise cette année : alors que d'ordinaire mon amendement avait des cosignataires siégeant sur d'autres bancs, cette année les membres de la majorité sont restés silencieux et je me retrouve seul pour le défendre.
    L'objectif est d'alléger le poids de la fiscalité pour le foncier rural, le foncier agricole, au bénéfice des petits propriétaires, certes, mais aussi des exploitants propriétaires. Je reste profondément persuadé que l'on peut jouer sur les différentes facettes de la fiscalité pour faire bénéficier les exploitants agricoles de revenus complémentaires, au moment où les prix agricoles diminuent et où leur avenir s'assombrit, en particulier quand on pense aux quotas laitiers. Et pour fournir du lait, jusqu'à preuve du contraire, il faut bien quelques hectares de terrain.
    L'autre objectif de cet amendement est d'inciter les propriétaires à signer des baux à long terme avec de jeunes agriculteurs, ce qui leur permet d'avoir un outil de travail. En supprimant le prélèvement destiné aux frais de rôle, nous ferions oeuvre utile pour que dans nos campagnes on retrouve le sourire, monsieur le ministre. Et vous les connaissez, ces petits agriculteurs qui travaillent dans des exploitations familiales. Vous savez aussi qu'en France, la propriété foncière rurale est en moyenne de l'ordre de sept hectares. Le pilote de rallye d'origine nordique qui est propriétaire de plusieurs centaines d'hectares n'est pas représentatif des dizaines, des centaines de milliers de petits exploitants, et surtout des petits propriétaires, qui bénéficieraient de cette mesure.
    Je vous propose donc d'entendre, pour une fois, le Parlement, et j'invite mes collègues à se joindre à moi pour voter cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Malgré votre opiniâtreté, et votre capacité de persuasion, mon cher collègue Dumont, vous n'avez pas été écouté, pendant quatre années consécutives, par vos amis. Vous n'avez pas non plus été suivi par la majorité de la commission des finances, qui a émis un avis défavorable, en grande partie pour les raisons évoquées tout à l'heure, sur lesquelles il est inutile de revenir.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je comprends l'impatience de M. Dumont, mais la situation financière qu'il nous a laissée, lui et ses amis, ne rend pas facile l'audace budgétaire.
    M. Philippe Auberger. C'est une belle litote !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je crois comme lui - parce que le département de l'Orne ressemble à celui de la Meuse - ...
    M. Jean-Pierre Brard. C'est beaucoup plus joli chez vous, monsieur le ministre ! (Sourires.)
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... assez bien connaître la question du foncier bâti et du foncier non bâti.
    Votre amendement irait au-delà de l'objectif que vous avez défendu avec talent, comme toujours. Car il conduirait à supprimer tout prélèvement au profit de l'Etat sur la taxe foncière des immeubles bâtis ou non bâtis, quel qu'en soit l'usage. Et je ne peux pas croire que tel ait été votre objectif. Dans ces conditions, je vous propose de mettre à profit l'année qui vient pour reconsidérer les termes de votre amendement. Nous l'examinerons avec beaucoup d'intérêt l'année pochaine.
    M. Jean-Louis Dumont. Soit : nous nous retrouverons l'année prochaine, monsieur le ministre !
    M. le président. La parole est à M. Philippe Auberger.
    M. Philippe Auberger. Le groupe UMP votera contre cet amendement. Que les choses soient bien claires : nous ne sommes pas, naturellement, contre l'agriculture. Nous l'avons d'ailleurs démontré au cours de ce débat. Mais nous souhaitons justement que l'agriculture, dans toute la mesure du possible, rentre dans le droit commun de la fiscalité. Nous souhaitons éviter que des mesures spécifiques soient sans cesse prises concernant l'agriculture quand rien ne le justifie. Or l'exonération totale de tous frais d'assiette et de recouvrement sur des contributions qui ne sont pas simplement à vocation agricole, comme l'a très justement dit le ministre du budget, mais qui couvrent l'ensemble du champ du foncier non bâti et du foncier bâti, est une mesure qui n'est manifestement pas du tout adaptée au soutien de l'exploitation familiale agricole, à laquelle nous sommes justement attachés. Dans ces conditions, nous voterons contre cet amendement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 211.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Carrez a présenté un amendement, n° 230, ainsi libellé :
    « Après l'article 14, insérer l'article suivant :
    « I. - Après la troisième phrase du 2° du II de l'article 1648 A bis du code général des impôts, il est inséré une phrase ainsi rédigée : "Au titre des années 2004 et suivantes, cette dotation est actualisée, chaque année, en fonction du taux d'évolution de la dotation globale de fonctionnement entre 2003 et l'année de versement.
    « II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Gilles Carrez.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cet amendement est retiré, compte tenu des explications que M. le ministre nous a fournies ce matin à ce sujet.
    M. le président. L'amendement n° 230 est retiré.
    M. Laffineur a présenté un amendement, n° 134, ainsi rédigé :
    « Après l'article 14, insérer l'article suivant :
    « I. - A la fin du VI de l'article 1648 B bis du code général des impôts, la somme : "305 EUR, est remplacée par la somme : "300 EUR.
    « II. - Les pertes de recettes de l'Etat sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Marc Laffineur.
    M. Marc Laffineur. Il s'agit d'un amendement de simplification. Dans le passé, les attributions au titre du fonds national de péréquation n'étaient pas versées lorsqu'elles étaient inférieures à 2 000 francs, soit 305 euros. Je vous propose de ramener ce seuil au chiffre rond de 300 euros.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Excellente simplification ; amendement adopté par la commission.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le président, vos importantes fonctions n'ont pas pu vous permettre, j'en suis sûr, de suivre la totalité de nos débats. Nous sommes engagés dans une oeuvre de simplification tout à fait remarquable et je me réjouis que cet amendement y concoure. Avis très favorable.
    M. le président. Monsieur le ministre, je suis avec attention tous nos débats, même quand je ne suis pas au perchoir. (Sourires.) Et tout ce qui sera fait dans le sens que vous avez indiqué aura mon appui.
    Du coup, je suppose que le Gouvernement lève le gage ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Avec enthousiasme !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 134, compte tenu de la suppression du gage.
    (L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

Article 15

    M. le président. « Art. 15. - I. - La loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés est ainsi modifiée :
    « 1° A l'article 3, les mots : "le financement de l'aide est assuré par deux taxes ayant le caractère de contributions sociales et perçues annuellement : 1°, 2° Une taxe d'aide au commerce et à l'artisanat sont remplacés par les mots : "Il est institué une taxe d'aide au commerce et à l'artisanat,.
    « 2° Les dispositions de l'article 5 sont remplacées par les dispositions suivantes : "Le recouvrement de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat est assuré par la Caisse nationale de l'organisation autonome d'assurance vieillesse des professions industrielles et commerciales. Les administrations compétentes sont tenues de communiquer à la caisse, sur demande de celle-ci, les renseignements nécessaires au recouvrement.
    « 3° Les articles 1er, 2, 8 à 19-1 sont abrogés.
    « II. - Les septième et huitième alinéas de l'article 106 de la loi de finances pour 1982 (n° 81-1160 du 30 décembre 1981) sont remplacés par l'alinéa suivant :
    « L'Etat confie la gestion de cette aide aux caisses d'assurance vieillesse des artisans et commerçants. »
    « III. - Les trois premiers alinéas de l'article 4 de la loi n° 89-1008 du 31 décembre 1989 relative au développement des entreprises commerciales et artisanales et à l'amélioration de leur environnement économique, juridique et social sont remplacés par les alinéas suivants :
    « L'Etat confie à l'Organisation autonome nationale de l'industrie et du commerce, la gestion des aides qu'il apporte aux opérations visant à la sauvegarde et à la modernisation des entreprises artisanales, commerciales et de services affectées par des mutations économiques, techniques ou sociales consécutives à l'évolution de ces secteurs, ainsi qu'aux opérations visant à la création ou la reprise de ces entreprises.
    « Un décret précise les modalités d'application du présent article. »
    « IV. - Le quatrième alinéa de l'article L. 325-1 du code de l'urbanisme et le septième alinéa de l'article L. 633-9 du code de la sécurité sociale sont abrogés.
    « V. - Le solde disponible sur le compte de l'Organisation autonome nationale de l'industrie et du commerce ouvert dans les écritures de la Caisse des dépôts et consignations et constitué à partir du produit de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, constaté à la clôture des comptes 2002, est versé à l'Etat. »
    La parole est à M. Jean-Louis Dumont, inscrit sur l'article.
    M. Jean-Louis Dumont. Ce matin, j'avais qualifié l'article 14 de frileux. L'article 15, je le qualifierais plutôt de brumeux, et il est nécessaire de lever cette brume.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il n'y a pas de brume qu'à Verdun !
    M. Jean-Louis Dumont. En effet, et d'ailleurs les petites brumes automnales ont aussi leur charme, n'en déplaise à M. Brard, qui a attaqué la Meuse tout à l'heure.
    M. Jean-Pierre Brard. Je défendais l'Orne et les bouilleurs de cru, c'est différent !
    M. Jean-Louis Dumont. On vient de parler de simplification. Il faudra nous expliquer, monsieur le ministre, comment on peut simplifier. En 1972, une taxe a été instituée, qui était acquittée par les artisans et les commerçants. Elle permettait de mener des actions de caractère social et de moderniser le commerce.
    Cet article a pour objectif, dans un premier temps, de rebudgétiser le produit de cette taxe. On ne peut que s'en féliciter. Seulement, voilà, c'est l'ORGANIC, l'Organisation autonome nationale de l'industrie et du commerce, qui continuera à la percevoir. Je me demande si cette disposition n'aurait pas simplement pour but de faire en sorte que l'artisan ou le commerçant, dans nos départements, ait toujours l'impression de payer cette taxe au bénéfice d'organismes gérés par les responsables de sa profession, et ce alors que son produit sera dorénavant entièrement affecté au budget général de l'Etat, ce qui laissera à celui-ci un bénéfice, une marge.
    Certes, dans le dernier budget, l'ancienne majorité, sur proposition du Gouvernement, avait voté un prélèvement sur le solde d'opérations étalées sur plusieurs années ; les choses étaient plus claires. Et pendant des années, que ce soit pour La Poste ou pour d'autres établissements, ces prélèvements se sont étalés dans le temps, quelles que soient les majorités et les alternances politiques. Ce n'est donc pas le prélèvement, en l'occurrence, qui me choque. Quoique, si l'on se reporte à la page 220 du rapport de notre rapporteur général, on puisse s'interroger sur l'avenir des remontées du FISAC, mais aussi et peut-être surtout sur le produit financier issu d'une bonne gestion. Car si j'ai bien compris, la Caisse des dépôts et consignations n'aura plus à gérer les ressources de cette taxe. Et pourtant, vous allez affecter des ressources sur des lignes budgétaires nouvelles pour répondre aux besoins de la modernisation, à travers le FISAC ou le comité professionnel de la distribution des carburants.
    S'agissant du CPDC, je vous rappelle d'ailleurs qu'il évolue de manière inquiétante pour le petit commerce. Par exemple, lorsque, en milieu rural - du fait d'ailleurs du passage à l'euro -, un distributeur d'essence ou de fioul souhaite moderniser ses pompes, les choses ne sont pas simples, nous en avons des témoignages fréquents. Je vous le dis, monsieur le ministre, demandez à votre cabinet de faire l'expérience de téléphoner au CPDC pour obtenir le dossier, pour avoir des explications et savoir dans quelles conditions on peut être éligible à une aide ! Certes, la consommation des crédits affectés à ces diverses opérations diminue. Car ces artisans sont de moins en moins nombreux en milieu rural, malheureusement. Et il est de moins en moins fait appel à l'aide au départ, parce que, de ces artisans, il n'en restera bientôt plus !
    Mais au moins pour la modernisation des stations-service, on aurait pu renforcer les moyens mis à leur disposition. Etant donné qu'il y a moins d'artisans, il est possible de les aider un peu plus pour conserver le maillage en milieu rural. On pourrait ainsi aider, par exemple, des couples de commerçants ou d'artisans à avoir une activité supplémentaire. C'est bien souvent l'addition de diverses activités qui permettent aux couples d'artisans et de commerçants de survivre dans un milieu rural souvent difficile.
    Ce prélèvement m'apparaît trop important. Il va complètement assécher la ligne de la Caisse des dépôts et consignations au bénéfice d'une opération qui m'apparaît dangereuse pour l'avenir.
    M. le président. M. Carrez, rapporteur général, a présenté un amendement, n° 39, ainsi libellé :
    « I. - Avant les mots : "Il est institué, rédiger ainsi le début du 1° du I de l'article 15 : « Avant les mots : "assise sur, le début de l'article 3 est ainsi rédigé : » ;
    « II. - En conséquence, après le 1° du I de cet article, insérer l'alinéa suivant :
    « 1° bis Dans le premier alinéa de l'article 4, après les mots : "taxe visée, les mots : "au 2° de sont remplacés par le mot : "à. »
    La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
    Mais j'en profite pour répondre à notre collègue Dumont. Je partage une grande partie de ce que vous avez dit, monsieur Dumont, mais je voudrais appeler votre attention sur le fait que cet article s'inscrit dans le cadre de l'application de la loi organique sur les lois de finances, la loi du 1er août 2001 modifiant l'ordonnance de 1959.
    J'ajoute, et vous avez eu raison de le souligner, que le financement du FISAC va être garanti dans le budget de l'Etat. Je souhaiterais à cette occasion demander à M. le ministre si cette garantie est bien pluriannuelle et s'il a l'intention de ne pas la limiter à l'année 2003.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Un mot, d'abord, à propos de l'intervention de M. Dumont : cet article s'inscrit en effet dans le cadre de la mise en oeuvre progressive de la loi organique relative aux lois des finances. Il nous faut mettre en place l'ensemble des dispositions qui y conduisent.
    S'agissant de l'ORGANIC, puisque vous avez posé la question, notre démarche est empreinte d'un total pragmatisme. L'ORGANIC assure le recouvrement de la taxe avec un bon rapport coût-efficacité. Pourquoi faire à sa place ce qu'il fait très bien ?
    S'agissant du FISAC, je peux rassurer le rapporteur général : il est tout aussi garanti qu'auparavant, et je pense même que son efficacité va être renforcée puisque notre objectif est de le régionaliser, c'est-à-dire de faire en sorte qu'au plan régional on puisse répondre avec encore plus de rapidité et de simplicité aux besoins des artisans et des commerçants. Vous n'avez donc pas d'inquiétude à avoir.
    L'avis du Gouvernement est favorable à l'amendement n° 39 et je vous indique par avance, monsieur le président, qu'il est également favorable à l'amendement n° 40, qui est lui aussi rédactionnel.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 39.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Carrez, rapporteur général, a présenté un amendement, n° 40, ainsi rédigé :
    « I. - Au début du premier alinéa du III de l'article 15, supprimer les mots : "Les trois premiers alinéas de.
    « II. - En conséquence, à la fin du même alinéa, substituer aux mots : "sont remplacés par les alinéas suivants, les mots : "est ainsi rédigé. »
    Cet amendement a reçu un avis favorable du Gouvernement.
    Je le mets aux voix.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 15, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 15, ainsi modifié, est adopté.)

Article 16

    M. le président. « Art. 16. - I. - L'article 302 bis ZA du code général des impôts est ainsi modifié :
    « 1° Le 1 est remplacé par les dispositions suivantes :
    « 1. Les titulaires d'ouvrages hydroélectriques concédés d'une puissance électrique totale supérieure à 20 000 kilowatts implantés sur les voies non navigables acquittent une taxe assise sur le nombre de kilowattheures produits. Le tarif de la taxe est de 2,30 euros pour 1 000 kilowattheures produits. »
    « 2° Le 2 est abrogé.
    « II. - La loi du 27 mai 1921 modifiée approuvant le programme des travaux d'aménagement du Rhône, de la frontière suisse à la mer, au triple point de vue des forces motrices, de la navigation et des irrigations et autres utilisations agricoles et créant les ressources financières correspondantes est ainsi modifiée :
    « 1° Les alinéas 5, 6 et 7 de l'article 3 sont supprimés.
    « 2° Il est inséré un article 3 bis ainsi rédigé :
    « 3 bis La redevance acquittée par le concessionnaire comporte :
    « a) une part fixe ;
    « b) une part proportionnelle au nombre de kilowattheures produits ;
    « c) une part proportionnelle aux recettes résultant des ventes d'électricité issues de l'exploitation des ouvrages hydroélectriques concédés. »
    « III. - Au tableau du III de l'article 43 de la loi de finances pour 2000 du 30 décembre 1999 (n° 99-1172 du 30 décembre 1999), le montant de l'imposition forfaitaire relative aux réacteurs nucléaires de production d'énergie est fixé à 1 180 000 euros. »
    La parole est à M. Michel Bouvard, inscrit sur l'article.
    M. Michel Bouvard. Cet article nous propose de modifier une fois encore le régime de la taxe sur l'hydroélectricité. Je voudrais faire un bref historique de cette affaire, pour faire apparaître le paradoxe de la situation.
    La taxe sur l'hydroélectricité a été instituée par la loi de 1995 relative à l'aménagement du territoire, dite « loi Pasqua », pour financer le fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, conjointement avec la taxe autoroutière. Le texte initial prévoyait de l'instituer sur l'ensemble des ouvrages hydrauliques, mais à la suite des démarches que j'avais entreprises avec un certain nombre d'élus des massifs de montagne et qui trouvaient leur traduction dans un amendement que j'avais présenté, il avait été décidé de n'appliquer cette taxe que sur les centrales situées sur des voies d'eau navigables, c'est-à-dire sur les ouvrages de la Compagnie nationale du Rhône, compte tenu de l'existence de ce qu'on appelait alors la rente de la CNR.
    Une deuxième étape est intervenue en 1997 avec l'abandon du projet de canal Rhin-Rhône. A l'époque, le gouvernement de M. Lionel Jospin, tirant les conclusions de cet abandon, a décidé de relever le montant de la taxe sur l'hydroélectricité, ce qui a entraîné une augmentation des moyens du fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, qui a disparu depuis.
    Voilà un an, à l'occasion de la discussion de la loi de finances, le Gouvernement, tirant cette fois-ci les conclusions de l'ouverture à la concurrence du marché de l'électricité et de l'arrivée du groupe Suez, via Electrabel, dans le capital de la CNR, a considéré qu'il fallait améliorer la profitabilité de la CNR. Il a par conséquent décidé d'abaisser la taxe sur les centrales situées sur les voies d'eau navigables et de l'instaurer sur les ouvrages situés sur les cours d'eau non navigables, en clair les barrages d'EDF. Nous avons alors été un certain nombre à exprimer ici notre inquiétude face à une disposition qui n'allait pas manquer de provoquer un relèvement des coûts de production de l'énergie produite par ces barrages et donc des prix de vente aux consommateurs, notamment industriels. Il nous a été répondu que l'ouverture à la concurrence des marchés électriques, avec l'apparition des crédits éligibles, réglait le problème. Toutefois, cela ne le réglait que partiellement, puisque une partie des consommateurs industriels, notamment ceux qui sont installés à proximité de ces barrages, détiennent des droits issus de la nationalisation ; or dès lors qu'on applique une taxe, on renchérit le coût de l'énergie pour ces industriels.
    L'article 16 ne manquera pas de conduire à une situation assez paradoxale : seuls les barrages d'EDF seront taxés, alors que les ouvrages de la CNR échapperont à tout régime de taxation à la taxe d'hydroélectricité dite d'aménagement du territoire.
    Une telle situation soulève deux problèmes.
    Le premier, c'est de créer une discrimination entre les différents producteurs d'énergie hydraulique, ce qui est peu satisfaisant. Le second, c'est que nous maintenons un système de taxation sur l'énergie hydraulique, qui est une énergie propre...
    M. Jean-Louis Dumont. Tout à fait !
    M. Michel Bouvard. ... et souple, puisqu'elle permet de déclencher des moyens de production à des heures de forte consommation. Je souligne que l'autre moyen de production permettant de répondre à la demande lors des heures de forte consommation, c'est-à-dire les centrales fonctionnant au diesel, est particulièrement polluant.
    Et nous allons faire cela, alors que la France a souscrit au protocole de Kyoto, qu'elle s'est engagée à produire plus d'énergie propre, et que les producteurs d'énergie hydraulique distribuent dorénavant ce que l'on appelle des « certificats verts », attestant qu'un producteur industriel emploie de l'énergie propre et lui permettant ainsi de disposer du certificat ISO 14 000, qui garantit le caractère protecteur de l'environnement de son processus de production.
    La disposition proposée nous place donc à contre-courant. Voilà pourquoi, monsieur le ministre, au travers de deux amendements que je défendrai tout à l'heure, je proposerai la suppression de la taxe sur les barrages, qui n'est finalement plus qu'un ersatz de ce qu'elle a été, et le transfert de son imputation, comme cela a été fait pour la CNR, sur les centrales nucléaires. A défaut, si le Gouvernement avait d'autres suggestions de transfert susceptibles de faire disparaître cette taxe sur l'hydraulique, je n'y verrais que des avantages.
    J'ajoute que cele permettrait sans doute de relancer un certain nombre de projets hydrauliques dans notre pays, car il y a encore des projets qui peuvent être rentables, à condition que l'énergie hydraulique ne soit pas aussi lourdement taxée qu'elle l'est actuellement.
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 83 et 208.
    L'amendement n° 83 est présenté par MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ; l'amendement n° 208 est présenté par M. Dumont et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 16. »
    La parole est à M. Michel Vaxès, pour soutenir l'amendement n° 83.
    M. Michel Vaxès. L'article 16 du projet de loi de finances appelle un certain nombre d'observations dont nous ne pouvons évidemment pas manquer de vous faire part.
    Si l'on en croit l'exposé des motifs de l'article, il s'agirait de mettre en oeuvre un allégement de la fiscalité sur la production hydroélectrique, ce qui pourrait effectivement participer d'une conception écologiquement plus acceptable de la fiscalité sur l'énergie.
    Dans les faits, cependant, on peut s'interroger sur un point assez essentiel de l'article, qui vise, selon les termes mêmes de l'exposé des motifs, à « adapter » la Compagnie nationale du Rhône à son « environnement concurrentiel. »
    Le mouvement qui est en train de se mettre en place porte, soulignons-le, sur un montant de 176 millions d'euros, ce qui n'est tout de même pas une petite somme.
    Permettez-moi de me demander si la CNR doit être « adaptée à son environnement concurrentiel », celui-ci résultant fondamentalement de l'ouverture des marchés énergétiques à la concurrence, ou si elle doit continuer à poursuivre ses missions de service public, qui ne consistent d'ailleurs pas uniquement en production d'hydroélectricité, mais également en actions diverses, notamment en matière d'aménagement du territoire.
    Cette dimension de service public est pour le moins absente de débat, puisque la CNR fait l'objet d'une opération de grande envergure visant à privatiser son capital social.
    En effet, lors d'une session récente, la majorité du conseil général du Rhône a autorisé la cession des titres qu'il détenait dans la CNR au groupe belge Electrabel, filiale bien connue de Suez, moyennant une confortable plus-value de 61 millions d'euros environ.
    M. Michel Bouvard. Absolument !
    M. Michel Vaxès. La même démarche est envisagée par la SNCF en faveur du même acheteur, qui pourra ainsi prendre directement pied sur le marché énergétique français.
    De là à penser que l'opération liée à la mise en oeuvre des dispositions de l'article 16 serait en quelque sorte la contrepartie obtenue par Electrabel pour la plus-value consentie aux cédants, il n'y a qu'un pas que nous franchirons sans hésitation.
    Car, dans cette affaire, c'est sur EDF, exploitant des installations nucléaires de base, que le surplus de fiscalité sera imputé.
    Et tout cela alors qu'on sait pertinemment que l'énergie hydroélectrique est économiquement peu coûteuse à produire et que l'essentiel des investissements est aujourd'hui largement amorti.
    Nous refusons que la représentation nationale soit amenée à valider ce véritable cadeau fiscal à Electrabel et nous vous proposons donc, mes chers collègues, de rejeter sans ambiguïté l'article 16.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont, pour soutenir l'amendement n° 208.
    M. Jean-Louis Dumont. Mes deux collègues qui viennent de s'exprimer - l'un sur l'article, l'autre sur un amendement - ont démontré, s'il en était besoin, l'iniquité de l'article 16.
    Sous pretexte de « rééquilibrage », on mène une opération qui anticipe sur le débat sur l'énergie promis par le Gouvernement. Or, au regard des besoins en énergie, de la diversification nécessaire des sources d'énergie, des choix stratégiques à opérer, des besoins de financement, d'un allégement des coûts de la production énergétique, en particulier de la production électrique, il eût peut-être été nécessaire d'attendre un peu. On nous parle des contraintes - ou des prétendues contraintes - auxquelles est soumis le Gouvernement, mais, compte tenu des diverses sources d'énergie, de l'organisation même du marché de l'électricite et des différentes énergies, ainsi que des choix stratégiques à opérer, on aurait pu, avant de s'engager dans une telle voie, attendre de voir s'il n'était pas nécessaire de rééquilibrer l'ensemble des taxes.
    En fait, la mesure proposée profitera à une société privée, au détriment d'une entreprise publique française, qui aurait eu besoin de disposer de tous ses atouts pour se relancer, y compris sur le marché européen.
    Je me souviens des débats passionnés que nous avons eus à l'époque de la transposition de la directive européenne sur l'ouverture du marché de l'électricité. Je me souviens des discussions que nous avons eues avec les syndicats de la CNR, les différents partenaires et opérateurs privés ou publics. De tout cela, il ressortait qu'il y avait des choix à faire.
    C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous propose de supprimer l'article 16, et il ne s'agit pas d'une simple réaction pavlovienne tenant au numéro de cet article. Vous aurez bien compris que c'est son contenu que je vous demande de supprimer.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements de suppression ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a rejeté ces deux amendements.
    M. Jean-Pierre Brard. Ça aussi, c'est un réflexe de Pavlov !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Pas du tout, mon cher collègue, car, comme vous avez pu l'observer, la commission a accepté nombre d'amendements.
    Cet article comporte deux aspects. Il y a d'abord un consensus - en tout cas, au sein de la commission des finances - sur la nécessité de rééquilibrer, au bénéfice de l'hydroélectricité, la fiscalité qui s'applique à la production d'électricité.
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Le second aspect concerne la situation de la Compagnie nationale du Rhône.
    Sur le premier point, je tiens à rappeler, afin que chacun ait bien tous les éléments en tête, que l'hydroélectricité acquitte actuellement une taxe de 3,6 euros par mégawatt heure produit, contre 0,7 euro pour l'énergie thermique classique et 0,4 pour le nucléaire.
    M. Michel Bouvard. Tout à fait !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il y a donc une différence considérable au détriment de l'énergie hydraulique alors que, comparée aux autres modes de production d'électricité, cette source d'énergie est de loin la plus favorable.
    M. Michel Bouvard. Merci de le rappeler, monsieur le rapporteur général !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Elle est renouvelable, durable et propre.
    M. Augustin Bonrepaux et M. Didier Migaud. C'est vrai !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Bref, elle a tous les avantages.
    Le seul problème, c'est qu'elle est malheureusement limitée.
    M. Augustin Bonrepaux. Et un peu trop taxée !
    M. Michel Bouvard. En effet !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Aussi, l'article 16 vise à rééquilibrer la taxation en abaissant la taxe supportée par l'hydroélectricité de 3,6 euros par mégawatt heure à 2,2 euros et en portant celle acquittée par le nucléaire de 0,4 à 0,6 euro. Je crois que ce point fait l'objet d'un accord unanime.
    M. Didier Migaud. C'est encore insuffisant !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. S'agissant de la Compagnie nationale du Rhône, je voudrais répondre aux interrogations qui subsistent.
    M. Jean-Louis Dumont. Et qui sont légitimes !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La redevance qui lie la Compagnie nationale du Rhône à l'Etat va être redéfinie. Actuellement d'un montant de 25 millions d'euros, elle sera portée à 115 millions d'euros à partir de 2003, chiffre à comparer aux 125 millions d'euros que représente l'allégement de taxe sur l'hydroélectricité. Le gain sera donc de 10 millions d'euros.
    M. Michel Bouvard. Tout de même !
    M. Jean-Louis Dumont. Ce n'est déjà pas mal ! Ça ouvre des perspectives !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Pour justifier ce gain de 10 millions d'euros, je précise que la taxe sur l'hydroélectricité représente 42 % du chiffre d'affaires de la CNR et que, à certains moments de la journée ou de la nuit, le montant de la taxe est supérieur au prix de l'électricité sur le marché, ce qui fait que la CNR, produisant à perte, est obligée de déverser l'eau au lieu de l'utiliser à faire de l'électricité, ce qui constitue un véritable gaspillage. Manifestement, la taxe que supporte la CNR est excessive.
    Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a rejeté ces amendements.
    M. le président. Après ces explications complètes, vous avez la parole, monsieur le ministre, pour donner l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Quand on écoute le rapporteur général, on a l'impression d'être branché.
    M. le président. Attention au court-circuit !
    M. Jean-Pierre Brard. Et à l'électrocution !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je souhaite d'abord rassurer Michel Bouvard. Je lui confirme que l'article 16 vise à constituer la première étape du rééquilibrage de la fiscalité des moyens de production électrique.
    Pour la CNR, la situation financière est inchangée mais les modalités sont différentes. La concession arrive à son terme, vous le savez mieux que personne, à la fin de l'année. La taxe qu'elle acquitte sera remplacée par une redevance plus pertinente économiquement et mieux adaptée au nouvel environnement concurrentiel de l'entreprise.
    Les autres exploitants hydroélectriques ont vocation à suivre la même évolution, mais cela implique un réexamen de l'ensemble des concessions dont les renouvellements sont étalés dans le temps. Le Gouvernement est prêt à lancer cette étude. Je rappelle d'ailleurs que les dispositions prises dans le projet de loi de finances pour la CNR s'appuient sur des travaux de plusieurs mois.
    J'ajoute que la fiscalité de l'énergie fait l'objet en ce moment de débats importants pour l'avenir et qu'un accord politique a été trouvé la semaine dernière au niveau européen entre les ministres de l'économie et des finances, dont M. Francis Mer. Cet accord politique ouvre la voie à l'élaboration d'une directive sur cette question.
    Nous aurons à débattre à nouveau des rééquilibrages nécessaires de notre fiscalité dans le cadre des orientations fixées avec nos partenaires européens, mais je veux vous confirmer, monsieur le député, que nous nous préparerons très rapidement à mettre en chantier les modifications que vous souhaitez, en concertation étroite, naturellement, avec la commission des finances de l'Assemblée.
    S'agissant des deux amendements, monsieur le président, l'avis du Gouvernement est indentique à celui qui a été exprimé par le rapporteur général : rejet.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 83 et 208.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. M. Michel Bouvard a présenté un amendement, n° 305, ainsi libellé :
    « I. - Rédiger ainsi le I de l'article 16 :
    « I. - L'article 302 bis ZA du code général des impôts est supprimé. »
    « II. - En conséquence, dans le III de cet article, substituer au montant : "1 180 000 euros, le montant : "1 800 000 euros. »
    La parole est à M. Michel Bouvard.
    M. Michel Bouvard. Après avoir remercié le rapporteur général des chiffres qu'il a communiqués, je répondrai au ministre, que les collectivités locales auraient été sensibles au fait que l'Etat leur donne plus de précisions sur la manière dont la nouvelle concession va être mise en place. Nous serons très attentifs au produit de cette redevance, car, puisque le conseil général du Rhône, rompant en quelque sorte le pacte d'actionnaires entre collectivités locales, a décidé de céder ses actions pour 61 millions d'euros, nous craignons évidemment l'affaiblissement des autres collectivités dans la gestion du fleuve et les conséquences fâcheuses qui pourraient en résulter : un désengagement et des charges nouvelles pour les départements riverains.
    Quant à l'amendement, il consiste, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, à transférer sur le nucléaire, dont le rapporteur général vient de nous indiquer qu'il était beaucoup moins taxé que l'hydraulique, la part actuellement supportée par les barrages.
    Monsieur le ministre, la fiscalité sur l'hydraulique est, comme je l'ai déjà indiqué, très sensible pour le devenir d'un certain nombre d'établissements industriels de ce pays. Au moment même où nous parlons, RTE, qui est le réseau de transport d'énergie d'EDF, est en train de modifier sans crier gare, à la demande de la commission de régulation de l'électricité, les conditions tarifaires applicables à de grands établissements industriels, en prenant des bases différentes pour la part « transport » du coût de l'énergie dans les abonnements. Or cela se traduit pour plusieurs usines par des surcoûts - de 300 000 à 400 000 euros jusqu'à 2 ou 3 millions d'euros par an - susceptibles de mettre en péril l'existence de certain établissements industriels qui emploient plusieurs milliers de salariés.
    J'en appelle donc au ministre délégué au budget pour que le ministère de l'économie et des finances soit particulièrement attentif à cette question, qui peut avoir des conséquences désastreuses en matière d'emploi et de présence dans notre pays d'industries lourdes et grosses consommatrices d'énergie comme celles de l'aluminium, de l'électrométallurgie, de la papeterie et de la chimie, par ailleurs soumises à une rude concurrence étrangère.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a émis un avis défavorable à l'adoption de cet amendement.
    Le caractère ubuesque de l'histoire de cette taxe n'a pas échappé à l'esprit incisif de notre collègue Michel Bouvard.
    M. Michel Bouvard. Kafkaïen !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cette taxe a été créée en 1995 sur les voies navigables, pour être affectée à des travaux permettant d'améliorer les voies navigables, dans le cadre du projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire.
    M. Michel Bouvard. Tout à fait !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. L'administration fiscale se rendant compte que cette taxe a un bon rendement décide quelques années plus tard de l'étendre aux voies non navigables, et donc aux barrages. Grâce à la vigilance de nos collègues Bouvard et Migaud,...
    M. Philippe Auberger. Des élus de la montagne !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... une disposition est prise pour ne pas pénaliser la construction de nouveaux barrages, et donc la production d'énergie hydro-électrique, et le seuil est relevé à un niveau suffisant.
    Aujourd'hui, troisième temps de la manoeuvre, et on voit bien la perversité de l'histoire,...
    M. Michel Bouvard. En effet !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... mais cet aspect est présent ailleurs dans la fiscalité, aujourd'hui, dis-je, on supprime cette taxe pour les seules voies navigables, créée il y a cinq ans pour les voies navigables, et qu'on nous propose aujourd'hui de ne la garder que pour les seules voies non navigables. Quelle logique !
    Pourquoi ne pas la supprimer pour l'ensemble des voies navigables et non navigables, barrages compris ? Tout simplement pour des raisons budgétaires : la supprimer également pour les voies non navigables coûterait entre 80 et 95 millions d'euros. Et si on voulait récupérer cette somme, il faudrait majorer d'autant la taxe sur le nucléaire, et donc la multiplier par trois au lieu de la multiplier par deux comme le propose le Gouvernement. Ce n'est pas possible, en tout cas dans un premier temps.
    Il n'empêche : je voulais appeler votre attention, monsieur le ministre, sur le raisonnement quelque peu insolite consistant à conserver cette taxe exclusivement pour les barrages. Sans doute faudra-t-il, dans un délai aussi rapproché que possible, la supprimer complètement, pour permettre un réel rééquilibrage de la fiscalité au bénéfice de l'hydroélectricité.
    En attendant, la commission des finances, comprenant les raisons du Gouvernement, a émis un avis défavorable à l'adoption de l'amendement de M. Bouvard.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Le chantier de la modernisation et de la rationalisation de notre fiscalité est immense.
    M. Didier Migaud. Certes !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Cependant, monsieur le rapporteur général, qu'il me soit permis de vous reprendre : ce n'est pas l'administration fiscale qui a procédé à cette évolution fiscale, c'est le Parlement. Je crois que nous devons légiférer d'une main tremblante, et le juriste que vous êtes, monsieur le président, me comprendra.
    M. le président. Merci de nous rappeler quelques petites vérités.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je voudrais en effet décrire les différentes étapes de cette taxe.
    D'abord a été décidée une taxe sur les voies navigables ; ensuite, la taxe a été étendue aux voies non navigables ; aujourd'hui, on propose de la supprimer pour les voies navigables.
    La suppression de cette taxe pour les voies navigables est est une première étape. Le chantier ne fait que s'ouvrir. Nous le mènerons à bien, je vous prie de le croire, et si l'option de la suppression totale est, comme le rapporteur général l'a indiqué il y a un instant, impossible aujourd'hui, elle est envisageable pour la suite. Nous y parviendrons.
    Pour le moment, le Gouvernement, comme le rapporteur général et la commission des finances, considère que l'effort demandé aux producteurs d'énergie nucléaire ne peut aller jusqu'au triplement de leur condition ; ça ne serait pas raisonnable.
    Au bénéfice de la compréhension que j'ai voulu marquer, au nom du Gouvernement, du problème que vous avez posé, je vous propose, monsieur Bouvard, de retirer votre amendement, sachant que nous sommes tout à fait déterminés à satisfaire, dans un délai raisonnable, votre préoccupation. Laissez-nous le faire progressivement.
    M. le président. Monsieur Bouvard, retirez-vous votre amendement ?
    M. Michel Bouvard. Non, monsieur le président.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 305.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Michel Bouvard a présenté un amendement, n° 179, ainsi libellé :
    « I. - Rédiger ainsi le I de l'article 16 :
    « I. - L'article 302 bis ZA du code général des impôts est supprimé. »
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par l'instauration d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts ».
    La parole est à M. Michel Bouvard.
    M. Michel Bouvard. L'amendement est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable également.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 179.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Michel Bouvard a présenté un amendement, n° 180, ainsi rédigé :
    « A la fin du III de l'article 16, substituer au nombre : "1 180 000, le nombre : "180 000. »
    La parole est à M. Michel Bouvard.
    M. Michel Bouvard. L'amendement est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable également.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 180.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. Didier Migaud. Dommage !
    M. le président. C'est comme ça !
    Je mets aux voix l'article 16.
    (L'article 16 est adopté.)

    Article 17

    M. le président. « Art. 17. - I. - Le code des douanes est modifié comme suit :
    « 1° Les tarifs de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers, présentés au tableau B du I de l'article 265, sont ainsi modifiés :

DÉSIGNATION DES PRODUITS INDICE
d'identification
UNITÉ
de perception
TAUX
(en euros)
Supercarburant sans plomb. 11
Hectolitre   58,92
Supercarburant sans plomb contenant un additif spécifique améliorant les caractéristiques antirécession de soupape. 11 bis Hectolitre 63,96
Carburéacteur sous condition d'emploi. 13 et 17 Hectolitre 2,54
Gazole sous condition d'emploi. 20 Hectolitre 5,66
Gazole présentant un point d'éclair inférieur à 120 °C. 22 Hectolitre 39,19
Fioul lourd. 24 100 kg net 1,85
Propane liquéfié destiné à être utilisé comme carburant sous condition d'emploi. 30 bis 100kg net 4,68
Autres propanes liquéfiés destinés à être utilisés comme carburant. 30 ter 100 kg net 10,76
Gaz naturel comprimé destiné à être utilisé comme carburant. 36 100 m³ 8,47
    « 2° Les lignes du même tableau correspondant à la désignation des produits : "... fioul présentant une viscosité cinématique à 20 °C inférieure ou égale à 9,5 centistokes, "... fiouls lourds ainsi que les lignes correspondant aux produits identifiés aux indices 26, 27, 28 et 28 bis sont supprimées.

    « 3° Au cinquième alinéa de l'article 265 septies, les mots : "36,77 EUR par hectolitre pour la période du 21 janvier 2002 au 20 janvier 2003, sont remplacés par les mots : "36,77 EUR par hectolitre pour la période du 21 janvier 2002 au 31 décembre 2002, et 37,06 EUR par hectolitre pour la période du 1er janvier 2003 au 20 janvier 2003.
    « 4° A l'article 266 quinquies, il est ajouté un 5 ainsi rédigé :
    "5. Le tarif de la taxe est fixé à 1,19 EUR par millier de kilowattheures.
    « II. - Les dispositions du I entrent en vigueur le 1er janvier 2003. Elles n'entrainent pas l'application de l'article 266 bis du code des douanes. »
    La parole est à M. Didier Migaud, inscrit sur l'article.
    M. Didier Migaud. Je souhaite évoquer la taxe sur les produits pétroliers, dont il est question à l'article 17.
    Tout d'abord, je tiens à remercier le rapporteur général des précisions qu'il donne dans son rapport : en 2001, la TIPP a rapporté beaucoup moins que l'Etat aurait pu le souhaiter si le dispositif de la TIPP flottante n'avait pas été appliqué ainsi que le bonus. La perte de recettes budgétaires pour l'Etat, TVA comprise, est évaluée à 1 423 millions d'euros, ce qui est une somme importante. Mais si cette somme a manqué au budget de l'Etat, elle a profité aux automobilistes qui n'ont pas été pénalisés par les augmentations du prix du baril de pétrole.
    Là-dessus, le gouvernement Raffarin arrive. Il prend d'abord des mesures pour quelques dizaines de milliers de familles bien ciblées. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Dominique Le Mèner. Caricature !
    M. Didier Migaud. Et puis, il faut bien trouver d'autres recettes ; des recettes qui se voient moins, mais qui, en revanche, peuvent concerner beaucoup de personnes. C'est ainsi qu'ont été décidées la suppression du bonus, qui, certes, était prévue dans la loi mais que le gouvernement précédent n'avait pas voulu réaliser, et la suppression du dispositif de la TIPP flottante. Le Gouvernement s'arroge ainsi un droit qui n'est pas à lui. Je ne vois pas en effet comment il peut décider de sa propre autorité de supprimer un dispositif législatif.
    Compte tenu de cette double décision, les recettes provenant de la TIPP vont augmenter très sensiblement, d'autant que le prix du baril de pétrole va monter. L'Etat va ainsi percevoir des recettes supplémentaires. La droite, à une époque, dénonçait ce paradoxe, qu'elle appelait l'enrichissement sans cause de l'Etat du fait de l'augmentation du prix du baril de pétrole.
    Nous avions élaboré un dispositif cohérent qui permettait à l'Etat de ne pas profiter de l'augmentation du prix du baril de pétrole. Je constate que le gouvernement Raffarin n'hésite pas, lui, à profiter de cette manne, en pénalisant tous ceux qui passent à la pompe régulièrement. Le gain de recettes budgétaires, TVA comprise, est évalué pour 2002 à 512 millions d'euros : excusez du peu !
    C'est l'illustration d'une certaine conception de la justice fiscale : d'un côté, on réduit l'impôt pour quelques dizaines de milliers de familles, et de l'autre, on frappe les millions d'automobilistes.
    A entendre le ministre, le dispositif de la TIPP flottante ne se justifiait plus car le prix du baril de pétrole était passé durablement à moins de 25 dollars. Il nous avait même expliqué que le prix de l'essence et du fioul domestique baisserait compte tenu de la réduction du prix du baril de pétrole, ajoutant : « Je veillerai personnellement à la bonne répercussion par les pétroliers des mesures que nous avons prises et j'irai sur place moi-même pour vérifier qu'il en est bien ainsi. »
    Alors, monsieur le ministre, je vous interroge : quel est le résultat de vos investigations ? Avez-vous procédé aux contrôles pour savoir quelles ont été les conséquences de vos mesures en matière de TIPP ?
    Depuis, en effet, un certain nombre d'événements se sont produits, que nous regrettons. Il ne vous aura pas échappé que le prix du baril de pétrole s'est envolé. Il n'est plus de 25 dollars, mais, en moyenne, en août et septembre, de 27,5 dollars et, hier, il a atteint 28,82 dollars.
    M. Dominique Le Mener. Ça monte vite !
    M. Didier Migaud. Nous sommes, c'est vrai, encore légèrement en deçà du seuil prévu par le dispositif de la TIPP flottante. Mais celui-ci pourrait être réactivé le 21 novembre, lorsqu'il faudra réviser le niveau de la TIPP. Enfin effet, nous aurons certainement dépassé, si la courbe poursuit sa tendance, le seuil requis, qui est de 25,44 dollars plus 10 %, soit 27,98 dollars. Nous devrions en effet être à 28,5 dollars à la fin du mois de novembre.
    Pour conclure, je dénonce, monsieur le ministre, les mesures que vous avez prises en matière de TIPP, qui consistent - deux poids, deux mesures - à privilégier quelques familles, et à pénaliser un très grand nombre de nos concitoyens, et je vous demande si vous avez l'intention, le 21 novembre prochain, de réactiver le dispositif de la TIPP flottante, au cas où le seuil de réactivation serait atteint. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Brard, qui, pour une fois, a attendu que je la lui donne. (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Brard. Je vous remercie, monsieur le président. Je sais que vous présidez nos débats avec la rigueur qui convient : j'attends donc que vous me donniez la parole.
    M. le président. Monsieur Brard, voici une petite récréation. Notre règlement, dans sa version de 1926, précise : « Si la Chambre devient tumultueuse et si le président ne peut la calmer, il se couvre. Si le trouble continue, il annonce qu'il va suspendre la séance. Si le calme ne se rétablit pas, il suspend la séance pour une heure et demande à chacun des députés de se retirer dans son bureau pour réfléchir. » (Rires.)
    M. Philippe Auberger. Nous ne sommes pas à l'abbaye de Thélème !
    M. le président. La récréation est finie. Monsieur Brard, vous avez la parole.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, je ne savais pas que vous aviez des talents d'archéologue ! Même si ce n'est pas l'Antiquité, 1926, c'est déjà loin !
    Le mécanisme de la TIPP flottante fait beaucoup parler, mais j'ai trouvé Didier Migaud bien ingénu de croire que vous reviendriez peut-être à de meilleurs sentiments. D'une certaine manière, vous avez répondu par anticipation à sa question puisque vous avez indiqué que, compte tenu des choix budgétaires que vous avez faits par ailleurs, vous n'aviez plus du tout de marge.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Compte tenu de la situation que vous nous avez laissée !
    M. Jean-Pierre Brard. Je ne vous ai rien laissé du tout ! S'il n'avait tenu qu'à moi et à mes collègues, on n'aurait pas commencé par une baisse des impôts. (Sourires.)
    On peut espérer que le prix du pétrole ne s'envolera pas. Encore faut-il - et il convient de saluer à cet égard les positions du Président de la République française - que M. Bush, dont on connaît les intérêts et l'affection qu'il a, lui et sa famille, pour les puits de pétrole, ne déclenche pas l'aventure en Irak. Peut-être alors ne serons-nous pas exposés aux conséquences désastreuses qu'une telle décision aurait sur le prix de l'énergie.
    L'article 17 met en lumière votre politique, monsieur le ministre. Vous nous avez parlé de baisses d'impôts, et vous voulez faire croire que vous les baissez pour tous les Français.
    S'il est vrai que vous diminuez l'impôt sur le revenu des personnes physiques, je suis obligé de vous rappeler que seule une moitié de nos concitoyens paie cet impôt. De plus, cette baisse bénéficiera d'abord aux plus riches du fait des modalités retenues. Comme vous n'avez rien à leur refuser, vous avez également pris des dispositions pour l'emploi de salariés à domicile qui, par un effet mécanique, bénéficieront plus aux tranches hautes du barème qu'aux tranches basses. En face, il y a la TVA, qui est acquittée par tout le monde.
    Vous nous avez répété que vous ne vouliez pas opposer une partie des Français aux autres, mais votre méthode consiste à réserver vos faveurs aux uns et les dépenses aux autres. Comment, dans ces conditions, ne pas les opposer les uns aux autres ? En essayant de faire accepter aux uns des sacrifices supplémentaires pour financer les privilèges des plus fortunés. Car qui va payer ces 512 millions d'euros dont parlait M. Migaud tout à l'heure, si ce n'est l'ensemble des Français ?
    Certes, je reconnais volontiers que les propriétaires de Porsche et de Rolls seront également concernés, mais je vous avoue que ceux-là ne sont pas l'objet de notre sollicitude.
    M. Dominique Le Mèner. Ah bon ?
    M. Jean-Pierre Brard. Un grand nombre de personnes, en particulier celles qui ne paient pas l'impôt sur le revenu, qui sont obligées de prendre leur voiture pour aller travailler de banlieue à banlieue, par exemple, vont être frappées.
    M. Didier Migaud. Elles ne peuvent même pas emprunter les transports en commun !
    M. Jean-Pierre Brard. Ces gens-là, qui ne bénéficient pas de vos mesures sur l'impôt sur le revenu, et qui paient la TVA plein pot, vont supporter les effets de la suppression de la TIPP flottante ?
    Monsieur le ministre, l'article 17 est l'occasion de montrer que votre prétendu amour de tous les Français, qu'ils soient riches ou pauvres, est une illusion.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Pourquoi prétendu ? Ça ne se voit pas ?
    M. Jean-Pierre Brard. Si, mais votre affection est manifestement platonique ! (Sourires.)
    Tandis que nous vous demandons des avantages sonnants et trébuchants pour ceux qui en ont le plus besoin, vous ne leur réservez que votre considération, dont je ne doute certes pas, sans aucun avantage. Au contraire, et certainement pour faciliter leurs mouvements, vous allégez encore leur porte-monnaie.
    M. le président. Nous allons passer à la discussion des amendements sur l'article 17.
    M. Didier Migaud. Monsieur le président, je demande la parole.
    M. le président. Vous l'avez, monsieur Migaud.
    M. Didier Migaud. Monsieur le président, nous abordons un sujet important. Nous avons posé certaines questions, notamment sur le dispositif de la TIPP flottante. La moindre des choses serait, je crois, que le Gouvernement nous réponde. En tout cas, nous ne pouvons pas envisager de continuer le débat sans explication de sa part.
    M. le président. Monsieur Migaud, l'importance du sujet ne m'avait pas échappé mais je pensais que le Gouvernement allait vous répondre lors de la discussion des amendements.
    M. Didier Migaud. Ils ne concernent pas la TIPP flottante.
    M. le président. Ils la concernent notamment.
    M. Didier Migaud. Mais pas uniquement !
    M. le président. Monsieur le ministre, souhaitez-vous répondre tout de suite ou à l'occasion de l'examen des amendements ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le président, depuis que j'ai l'honneur de siéger au banc du Gouvernement, j'ai toujours, afin de ne pas rompre le rythme des travaux de l'Assemblée, choisi de répondre à l'occasion du premier amendement sur l'article concerné.
    M. le président. C'est bien ce que je pensais, monsieur le ministre.
    MM. Brard, Sandrier, Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 14, ainsi rédigé :
    « Dans la sixième ligne de la dernière colonne du tableau du 1° du I de l'article 17, substituer au taux : "39,19 le taux : "40,845. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, j'ai été impressionné par la bonne compréhension qui règne entre vous et M. le ministre.
    M. le président. Comme avec l'ensemble des députés !
    M. Jean-Pierre Brard. Je ne parlais pas des députés mais du ministre, car je sais que votre affection est partagée entre tous les députés. (Sourires.)
    M. le président. Merci.
    M. Jean-Pierre Brard. D'après un dessin paru hier dans Le Monde, il m'a semblé qu'on avait du mal, à droite, à faire entrer tout le monde dans la même maison. Mais c'est un autre débat.
    M. Philippe Auberger. Avec votre maison, vous n'avez pas de difficultés : elle est beaucoup plus grande que le nombre de nos députés !
    M. Jean-Pierre Brard. C'est plus compliqué pour vous que l'équilibre du budget, je ne vous le fais pas dire !
    M. le président. Monsieur Auberger, ne vous en mêlez pas trop ! (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur Auberger s'engage sur un terrain glissant.
    M. le président. Monsieur Brard, comme vous êtes un historien, je vous rappellerai l'article 106 de notre règlement dans sa version de 1926, lequel dispose que « si l'orateur, rappelé deux fois à la question dans le même discours, continue à s'en écarter, le président consulte la Chambre pour savoir si la parole ne sera pas interdite à l'orateur pendant le reste de la séance ». (Rires et exclamations sur divers bancs.)
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. On ne peut pas lui faire ça !
    M. le président. Poursuivez, monsieur Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, je vous propose qu'on organise un symposium pour évaluer le règlement de 1926 et se demander s'il n'y aurait pas quelque pertinence à le réactiver.
    M. Jean-Yves Chamard. Que l'on en vienne au fait !
    M. le président. Assez perdu de temps : venez-en à votre amendement, monsieur Brard !
    M. Jean-Pierre Brard. Il s'agit d'un amendement d'interrogation, comme dirait M. de Courson. Je sais bien qu'il sera rejeté, mais il pose un vrai problème, celui de la diversité de la fiscalité concernant les différents types de carburants. Ce sont les plus polluants qui sont les moins taxés.
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    M. Jean-Pierre Brard. Je veux évidemment parler du gazole. Les fines particules émises par les moteurs diesel sont une source d'inquiétude parce qu'elles pénètrent très profondément dans les alvéoles pulmonaires, avec des conséquences que l'on cerne mal mais dont on peut penser sans courir le risque de se tromper qu'elles ne sont pas bénéfiques.
    Il faut reconnaître, monsieur le ministre, que vous n'êtes pas responsable de cette situation déjà ancienne, et je ne connais pas de gouvernement qui ait, depuis que le gazole existe, su résister au lobby des pétroliers. Mais le discours qu'a prononcé le Président de la République à Johannesburg nous ouvre des horizons que nous ne soupçonnions pas, je vous l'avoue : après la fracture sociale, le Président de la République s'est converti à l'écologie.
    Je ne vous demande pas de prendre position dans la loi de finances pour 2003, mais de définir une position de principe.
    Avez-vous l'intention de réduire l'avantage dont bénéficie le gazole ? Cet avantage est tout à fait illégitime puisque le gazole est dangereux pour la santé, même s'il rapporte beaucoup aux pétroliers.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. J'admire la constance et la cohérence du raisonnement fiscal de M. Brard.
    Il y a à peine cinq minutes, notre collègue nous a affirmé que diminuer les impôts avait été une erreur funeste, en tout cas une erreur qu'il n'aurait jamais commise. Et voilà qu'il nous propose d'augmenter la taxe sur le gazole. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Pourtant, la consommation de gazole, qu'il s'agisse de l'automobile ou du chauffage, concerne au premier chef nos compatriotes les moins aisés. Ce faisant, M. Brard s'inscrit dans la politique fiscale que lui et ses amis préconisent : surtout, ne pas diminuer les impôts ! Mais il nous propose en l'occurrence de les augmenter au détriment de Français dont, tout à l'heure, dans des termes tout à fait convaincants, il nous a dit qu'il assurait la défense.
    La commission a évidemment rejeté cet amendement ; il n'est actuellement pas question d'augmenter le prix du gazole.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le président, avant de donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement qu'a soutenu M. Brard, je voudrais répondre à M. Migaud, avec toute la courtoisie que je vais essayer de mobiliser pour lui être agréable.
    Monsieur Migaud, je vous ferai d'abord observer que vos propos - mais vous n'êtes pas coutumier du fait - présentaient une petite contradiction.
    Vous avez reconnu, et c'était loyal de votre part, qu'une disposition législative a été prise mais qu'elle n'a pas été appliquée, ce qui est fâcheux pour un exécutif. Lorsque la loi de la République a été adoptée et que l'exécutif ne l'applique pas, c'est en effet un peu gênant. Sans doute le procès-verbal pourrait-il en effet venir arbitrer notre échange très amical.
    M. Maurice Leroy. Match nul !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je vous rappelle, cher Didier Migaud, que la loi de finances pour 2001 avait introduit - vous étiez alors rapporteur général - un dispositif sur lequel je pourrai revenir si vous souhaitez des explications complémentaires. L'exécutif pouvait être conduit à supprimer ce dispositif dès lors que l'on arrivait à un certain niveau. M. Pierret, qui siégeait, au nom du Gouvernement, au banc où j'ai l'honneur d'être aujourd'hui, avait déclaré : « Nous souhaitons fixer comme terme » - j'attire, monsieur le président, vous qui êtes un juriste éminent, votre attention sur ce dernier terme - « au mécanisme de stabilisation des tarifs de la taxe intérieure sur les produits pétroliers le retour à la moyenne des prix du "brent daté constatée au cours du mois de janvier 2000, à savoir 25,44 dollars par baril. » Lorsqu'on a atteint ce niveau, le dispositif s'est éteint.
    M. Didier Migaud. Pas du tout !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Vous reprochez au Gouvernement d'avoir appliqué cette règle alors que vous ne l'aviez pas fait.
    J'ai dit que je veillerai moi-même à ce que les dispositions que nous prenons n'aient pas d'effets négatifs pour les utilisateurs de véhicules. Je me suis rendu, comme j'en avais pris l'engagement, sur le terrain - pour les provinciaux il est très facile de s'y rendre. J'ai constaté que le prix de l'essence n'était pas supérieur à ce qu'il était à l'expiration du délai prévu par le précédent gouvernement.
    Les choses ont changé depuis. Mais, monsieur Migaud, si nous voulons être tout à fait responsables du point de vue juridique, nous devons adopter un nouveau dispositif, car celui auquel vous faites référence n'est juridiquement plus applicable.
    M. Didier Migaud. Proposez-en un autre !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Le Gouvernement prendra ses responsabilités si, par malheur - j'espère que vous considérerez comme moi que c'en serait un -, le prix du pétrole venait à augmenter d'une manière très importante. Dans l'état actuel des choses, il n'a pas encore atteint un niveau qui justifie l'adoption d'un nouveau dispositif. Cela étant, nous pourrions en prévoir un, à titre conservatoire si j'ose dire. En tout état de cause, le dispositif antérieur n'est plus applicable et, à cet égard, je suis prêt à soutenir une discussion juridique.
    J'en viens à la question qu'a posée M. Brard au moyen de l'amendement n° 14.
    Le souci environnemental qu'exprime M. Brard demeure une préoccupation très forte du présent gouvernement, comme de tout notre pays depuis plusieurs années. Cela étant, compte tenu du niveau actuel des cours du pétrole, le Gouvernement a fait le choix de différer une éventuelle reprise du plan de rattrapage de l'écart de taxation entre le gazole et l'essence. Je rappelle à cet égard que ce plan avait été suspendu pour les mêmes raisons par le précédent gouvernement en 2001 et en 2002.
    Soyons clairs. Imaginons, mesdames, messieurs les députés, que nous ayons voulu respecter ce plan qui, du point de vue de l'environnement, est une réelle nécessité. Si nous avions légèrement relevé le prix du gazole, nous aurions été accusés de le faire pour des raisons budgétaires. J'avoue que c'est un peu ce qui nous a empêchés d'agir en ce sens.
    M. Gérard Bapt. Profitez de l'amendement de M. Brard !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Cela dit, parvenir à une convergence des prix demeure une préoccupation du Gouvernement, mais il n'est pour l'instant pas dans sa politique de la réaliser. Nous essaierons d'y parvenir dans l'avenir et c'est pourquoi, monsieur Brard, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. A défaut, je demanderai à l'Assemblée de le rejeter.
    M. le président. Monsieur Brard, retirez-vous l'amendement ?
    M. Jean-Pierre Brard. Je voudrais expliquer pourquoi je vais peut-être le retirer si j'obtiens un signe positif.
    Monsieur le président, je ne sais pas si, dans votre règlement de 1926, une disposition prévoit de rappeler à l'ordre le rapporteur général quand il ne répond pas aux questions qu'on lui pose.(Sourires.) Il ne s'est exprimé que sur le texte de l'amendement, dont j'ai expliqué qu'il n'était qu'un artifice servant à poser le problème.
    M. Jean-Yves Chamard. « Artifice » : voilà le mot !
    M. Jean-Pierre Brard. Quant à vous, monsieur Chamard, vous n'êtes pas un artificier, mais plutôt un incendiaire !
    M. Jean-Yves Chamard. Pas terrible, comme humour !
    M. le président. Monsieur Brard, vous êtes un vieux parlementaire, et vous devez savoir que, quel que soit le règlement, le député qui s'exprime s'adresse au président et non au rapporteur général.
    M. Jean-Pierre Brard. C'est vous que j'interrogeais, monsieur le président.
    M. le président. La critique m'était donc adressée...
    M. Jean-Pierre Brard. Tout à fait !
    M. le président. Merci, monsieur Brard !
    M. Jean-Pierre Brard. Nous jouons au billard à trois bandes !
    Les préoccupations du rapporteur général concernant les consommateurs de gazole ne sont pas les mêmes, semble-t-il, dès lors qu'il s'agit des usagers du tabac. J'aurais quant à moi tendance à considérer les deux produits de la même façon, dans la mesure où tous deux sont, sans nul doute, nocifs pour la santé.
    Monsieur le ministre, vous avez précisé que vous n'aviez pas proposé de mesure de rattrapage parce que l'on aurait pu vous soupçonner de la mettre en oeuvre pour des raisons budgétaires. Mais M. Jean-FrançoisMattei nous a expliqué, lors de son audition, que l'augmentation du prix du tabac n'avait que des raisons sanitaires, et personne n'aurait osé penser que l'on recherchait là quelques piécettes pour boucher les trous du budget.
    M. le président. Monsieur Brard, retirez-vous ou non votre amendement ?
    M. Jean-Pierre Brard. Je termine, monsieur le président.
    Cet amendement m'a servi à poser une question. Le fait que le plus grand nombre consomme un produit qui est plus dangereux que les autres pose le problème de ce qui doit être le plus ou le moins taxé. Vous pourriez inverser la taxation pour ne pas favoriser le lobby pétrolier, qui a des excédents de gazole à placer et a été jusqu'à présent aidé par la fiscalité.
    Comme mon amendement était un amendement d'interrogation et qu'il n'était pas destiné à être soumis au vote, je le retire.
    M. le président. L'amendement n° 14 est retiré.
    Je suis saisi de deux amendements, n°s 41 rectifié et 288, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 41 rectifié, présenté par M. Carrez, rapporteur général, est ainsi libellé :
    « I. - Supprimer la septième ligne du tableau du 1° du I de l'article 17.
    « II. - Après le 1° du I de cet article, insérer l'alinéa et le tableau suivants :
    « 1° bis Dans le même tableau, après la ligne correspondant au produit identifié à l'indice 23, il est inséré une ligne ainsi rédigée :

NUMÉRO
du tarif
des douanes
DÉSIGNATION
des produits
INDICE
d'identification
UNITÉ
de perception
QUOTITÉ
(en euros)
  Fioul lourd 24 100 kg net 1,85
        « III. - Dans le 2° du I de cet article, après les mots : "désignation des produits :, insérer le mot : "fioul,. »

    L'amendement n° 288, présenté par M. Michel Bouvard, est ainsi rédigé :
    « I. - Dans la septième ligne de la première colonne du tableau du 1° du I de l'article 17, après les mots : "fioul lourd, insérer les mots : "d'une teneur en soufre inférieure à 2 %.
    « II. - En conséquence, après la septième ligne du tableau n° 1 du I de cet article, insérer une ligne ainsi rédigée :

Fioul lourd d'une teneur en soufre supérieure à 2 % 24 bis 100 kg net 2,49

    La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 41 rectifié.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Amendement rédactionnel, monsieur le président.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour soutenir l'amendement n° 288.
    M. Michel Bouvard. Je suis surpris, car j'avais déposé deux amendements...
    M. le président. Je n'en ai qu'un, monsieur Bouvard. Le second a dû s'évaporer !
    M. Michel Bouvard. Pourquoi ai-je déposé l'amendement n° 288 ? Au début, je pensais, comme la totalité de mes collègues sans doute, qu'avec l'article 17 il s'agissait d'intégrer à la TIPP la taxe perçue au profit de l'IFP. S'il ne s'agissait que de cela, je n'aurais pas déposé d'amendement.
    J'ai eu la curiosité de comparer le tableau qui figure dans le « bleu » budgétaire avec le régime antérieur. Je me suis aperçu que l'on avait fait disparaître l'une des catégories de taxation des fiouls lourds en unifiant ce qui était référencé sous les indices 28 et 28 bis, c'est-à-dire les fiouls lourds d'une teneur en soufre supérieure à 2 % et ceux d'une teneur en soufre supérieure à 1 %. J'ai constaté que les nouvelles dispositions introduisaient un alignement par le bas : avec l'article 17 du projet de loi de finances, nous donnerions une prime aux fiouls lourds les plus polluants en abaissant le coût de la taxe qui était perçue puisque, préalablement, nous avions, pour les fiouls lourds les moins polluants, 1,68 % de TIPP et 0,17 % de taxe IFP, soit au total 1,85 %, alors que, pour les fiouls lourds à teneur en soufre de plus de 2 %, les chiffres correspondants étaient les suivants : 2,32 %, 0,17 % et 2,49 %. J'ai donc essayé d'en savoir un peu plus.
    On m'a expliqué que comme, à compter du 1er janvier 2003, la législation communautaire n'autorisait plus la combustion de fioul lourd d'une teneur en soufre supérieure à 1 % qu'à condition que les installations qui l'utilisent soient équipées de telle façon que les volumes de dioxyde de soufre qu'elles émettent dans l'atmosphère soient inférieurs ou égaux à ce que seraient les volumes de ce gaz émis si du fioul lourd dont la teneur en soufre est inférieure ou égale à 1 % avait été utilisée.
    L'argumentation ne m'a pas du tout convaincu.
    D'abord, il faut veiller à l'application de la mesure en ce qui concerne les émanations de fumées toxiques, ce qui suppose la mobilisation de nombreux personnels des DRIRE, aujourd'hui tous très occupés par l'application des directives Seveso.
    Ensuite, il faudrait que les systèmes de filtration installés dans les usines utilisant ce type de carburant ne tombent pas en panne.
    Enfin, et c'est sans doute le plus grave, un certain nombre d'industriels étaient sur le point d'investir dans des systèmes de production d'énergie plus propres, donc plus écologiques, ce qui suppose des investissements souvent lourds.
    La disposition proposée par le Gouvenement, donnant une prime définitive aux fiouls lourds les plus polluants, dissuaderait ces industriels de passer à des systèmes plus écologiques en matière de production énergétique. En effet, dans un cas, ils doivent investir dans le système de filtration et fournissent par la suite une énergie bon marché. Dans l'autre, ils doivent supporter le coût de la transformation de leurs brûleurs et des processus énergétiques, mais leur énergie est moins compétitive.
    Nous avons là l'exemple type d'une mesure anti-écologique qui va à l'encontre de toutes les démarches engagées depuis plusieurs années, et sous plusieurs gouvernements, par le Parlement dans le sens d'une fiscalité plus écologique.
    Je propose en conséquence un alignement par le haut.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a émis un avis défavorable car, à compter du 1er janvier prochain, l'utilisation de fiouls lourds d'une teneur en soufre supérieure à 2 % sera réglementée et les installations concernées devront mettre en place les équipements nécessaires.
    La commission a estimé que la vraie question - je me tourne vers M. le ministre - était celle du contrôle et de l'effectivité de la mesure prise dans le cadre de la réglementation européenne.
    Y aura-t-il un contrôle réel de la mise en place effective de ces équipements sur les installations concernées ?
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Notre immense ambition de simplification est à l'oeuvre, mais de manière modérée. (Sourires.) Je me demande en effet si tout le monde a compris l'ensemble des échanges que nous avons sur le fioul lourd. Quoi qu'il en soit, Michel Bouvard est sans doute le meilleur spécialiste de l'assemblée sur le sujet.
    M. Jean-Pierre Brard. Il y avait aussi Super Gantier !
    M. ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur Bouvard, voici ce que nous avons voulu faire, et ce que vous pourrez faire, si vous êtes sûr de vous.
    L'article 17 ne fait que transcrire fiscalement les conséquences de la directive européenne dont les dispositions techniques entreront en vigueur au 1er janvier prochain.
    L'ancien dispositif fiscal distinguant le fioul lourd à haute teneur en soufre de celui à basse teneur en soufre devenait à nos yeux sans objet. Si d'aventure, vous nous démontriez que le fioul à teneur en soufre supérieure à 2 % existe toujours, je pourrais émettre un avis de sagesse sur votre amendement, à charge de vérifier d'ici à la CMP que le dispositif que vous nous proposez est bien le plus approprié.
    A ce stade, monsieur le président, je ne peux pas faire mieux que donner cet avis de sagesse, en appelant néanmoins M. Michel Bouvard à être sûr de sa proposition.
    M. le président. Monsieur Bouvard, vous avez signalé tout à l'heure que vous aviez déposé deux amendements. C'est exact, mais vous avez retiré le premier lorsque vous avez déposé le second.
    M. Michel Bouvard. Il y en avait un autre...
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. L'amendement de notre collègue Michel Bouvard va dans le sens de ce que nous souhaitons faire pour favoriser une fiscalité écologique.
    Monsieur le ministre, si le gouvernement précédent a fait le choix de ne pas supprimer le bonus, c'est tout simplement parce qu'il ne souhaitait pas pénaliser davantage les automobilistes, compte tenu du ralentissement économique survenu dans tous les pays du monde et en France.
    S'agissant du dispositif de la TIPP flottante, à partir du moment où le baril de pétrole est en deçà de 25,44 $, il est en effet tout à fait légitime d'y mettre fin. Mais, et c'est là que j'ai une interprétation différente de la vôtre, et qui n'est pas contradictoire avec celle exprimée par M. Christian Pierret, ce dispositif doit être réactivé dès lors que les conditions sont réunies, c'est-à-dire que l'on dépasse 25,44 $ plus 10 %, soit 27,98 $.
    Monsieur le ministre, tout comme vous je souhaite que le prix du baril de pétrole soit plus raisonnable et redescende en-deçà de 25 $. Malheureusement, depuis quelques semaines, il a franchi allègrement 25,44 $. Il a même dépassé le seuil de 27,98 $, qui est selon nous le seuil requis pour la réactivation du dispositif de la TIPP flottante.
    Si, au 21 novembre, date à laquelle le dispositif pourrait éventuellement être remis en place, il est vérifié que le prix du baril de pétrole répond aux conditions pour que le dispositif puisse s'appliquer, le seuil de 27,98 $ étant dépassé, remettrez-vous en route le dispositif de la TIPP flottante ?
    Peut-être avez-vous une autre interprétation. Mais nous nous réservons de recourir éventuellement aux moyens de droit pour savoir qui a raison, en invitant les automobilistes à contester votre interprétation devant les tribunaux.
    Admettons que vous ayez raison. Compte tenu de la charge que cela représente pour les automobilistes, compte tenu que vous avez toujours considéré qu'il n'était pas légitime que l'Etat puisse bénéficier d'un prix élevé du baril de pétrole, allez-vous nous proposer, soit au Sénat, soit au moment du collectif, de réactiver ce dispositif dans une loi de finances ? La question est simple et mérite une réponse simple.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Nous allons purger cette petite controverse.
    Je remercie Didier Migaud de son honnêteté intellectuelle. Il est vrai que le précédent gouvernement, volontairement, n'a pas mis en oeuvre un dispositif législatif prévu dans la loi de finances pour 2002. Ce n'est pas la conception du présent Gouvernement, en raison du respect qu'il doit à la représentation nationale.
    M. Jean-Yves Chamard. Très bien !
    M. Didier Migaud. Pendant cette période, l'Assemblée ne siègeait pas, vous le savez !
    M. le ministre délégué au budget et la réforme budgétaire. C'est ce qui le conduit à se montrer très prudent et sage dans les nouvelles dispositions qu'il pourrait être conduit à vous proposer.
    Je réaffirme que, selon notre interprétation juridique, le dispositif antérieur n'est pas, pour reprendre l'expression de Didier Migaud, « réactivable ». Dès lors que nous faisons cette analyse, nous pourrions vous proposer un nouveau dispositif, susceptible d'être mis en oeuvre au moment nécessaire. Je me réserve, au nom du Gouvernement, la possibilité de le faire, mais je considère à ce stade que ce n'est pas nécessaire. Quoi qu'il en soit, nous avons échangé très loyalement et en toute bonne foi nos propositions respectives sur ce sujet.
    M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.
    M. Michel Bouvard. Je confirme que les fiouls lourds à teneur en soufre supérieure à 2 % vont continuer à exister, même si une partie d'entre eux sera effectivement traitée en raffinage, de manière à abaisser ce taux en dessous de 2 %.
    La directive européenne rend obligatoire les systèmes de filtration des dioxydes capables de ramener le taux d'émanation de fumée en dessous de ce que produirait du fioul lourd à teneur de 1 % maximum. Mais elle n'interdit pas de brûler en France, des fiouls lourds de plus de 2 % de teneur en soufre, dès lors qu'on est équipé.
    Dans ces conditions, comme vous l'avez vous-même suggéré, monsieur le ministre, il me semble sage de continuer à taxer ces fiouls les plus polluants au niveau où ils étaient taxés auparavant, en intégrant la taxe IFP. Cela nous dispensera de faire des opérations de contrôle dont nous ne sommes peut-être pas capables et évitera de donner une prime au maintien des fiouls lourds les plus polluants.
    Une telle mesure incitera à mettre au point des systèmes de raffinage plus performants, permettant d'éliminer définitivement les fiouls lourds de plus de 2 % de teneur en soufre et encouragera les industriels à opter pour d'autres modes énergétiques.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 41 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. En conséquence, l'amendement n ° 288 tombe.
    M. Michel Bouvard. C'est dommage !
    M. Didier Migaud. Le verrouillage continue. Nous en sommes désolés pour M. Bouvard.
    M. Michel Bouvard. J'en suis surtout désolé pour les riverains des usines !
    M. Didier Migaud. Nous sommes désolés pour le travail que vous faites, et qui n'est pas récompensé à sa juste valeur. (Sourires.)
    M. le président. L'amendement n° 56 de M. Mariton n'est pas défendu.
    MM. Bonrepaux, Migaud, Emmanuelli, Idiart, Bapt, Mme Lignières-Cassou et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 213 corrigé, ainsi rédigé :
    « Compléter le I de l'article 17 par l'alinéa suivant :
    « 5° Dans le quatrième alinéa du d) du 2 du I de l'article 265 du code des douanes, les mots : "par l'autorité administrative compétente sont remplacés par les mots et trois phrases ainsi rédigés : "par une commission composée de trois représentants du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, trois représentants des entreprises des secteurs de la production et de la distribution de produits pétroliers et trois représentants des consommateurs, désignés dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. La commission se réunit le 15 du premier mois de chacun des bimestres mentionnés au deuxième alinéa. Son avis est immédiatement transmis au ministre chargé du budget. Il est publié au Journal officiel du 21 de chacun de ces mois. »
    La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Nous estimons, monsieur le ministre, en désaccord avec vous, que le mécanisme de la TIPP flottante est un dispositif pérenne et qu'à partir du moment où les conditions sont remplies, il peut être réactivé. Et pour répondre au souci que vous avez exprimé tout à l'heure - que ce ne soit pas le Gouvernement qui, de sa propre autorité, puisse décider - nous proposons d'instituer une commission représentant l'administration, les professionnels du secteur et les consommateurs, afin de constater de façon indépendante l'évolution des cours du brent pour la mise en oeuvre de ce dispositif.
    Une fois l'avis de la commission rendu, le ministre n'aura plus qu'à constater que les conditions de mise en oeuvre du dispositif ne sont pas réunies, ou à tirer par arrêté les conséquences de l'évolution du cours du brut en modifiant le taux de la TIPP dans les conditions prévues par l'article 265 du code des douanes.
    Cet amendement pourrait vous inspirer, monsieur le ministre, si jamais vous décidiez de proposer un nouveau dispositif.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.
    Monsieur le ministre, nous considérons que le dispositif de TIPP flottante mis en place à l'automne 2000 était fait pour ne jouer qu'une fois. Cela figure clairement dans le compte rendu de nos travaux auquel vous vous êtes référé tout à l'heure. J'étais moi-même dans l'hémicycle lors de ce débat. En écoutant l'intervention de Christian Pierret,...
    M. Didier Migaud. Vous avez mal compris !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... sur la base, d'ailleurs, du mécanisme que vous-même aviez mis au point, monsieur Migaud,...
    M. Didier Migaud. Justement, je peux en juger !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... j'avais compris, de bonne foi, que l'application de ce dispositif était liée à la flambée des cours du pétrole de la fin de l'année 2000.
    M. Didier Migaud. Il peut y avoir d'autres flambées !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nos interprétations divergent. Si l'on estime que ce dispositif n'existe plus sur le plan juridique, l'amendement n° 213 ne peut être que rejeté. Cet amendement consisterait en effet à modifier les modalités d'application d'un dispositif qui n'existe plus.
    M. Didier Migaud. Etes-vous favorable au nouveau dispositif ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Justement, j'y viens. En tant que rapporteur général,...
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Honoraire !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. M. Migaud est trop jeune pour être honoraire, monsieur le ministre ! (Sourires.)
    ... vous aviez, grâce à ce mécanisme, pu répondre à un problème. M. le ministre vient d'indiquer que si, par malheur, le prix du pétrole devait flamber, il était tout à fait ouvert à la mise en place d'un nouveau dispositif, qui ne serait peut-être pas exactement de même nature, mais qui répondrait au problème.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur Migaud, l'honorariat dont je parlais à l'instant à votre égard n'a rien à voir avec votre âge, mais avec la durée de votre fonction de rapporteur général !
    Je souhaitais également vous dire que j'aurais préféré vous donner maintenant la réponse que je vous ai faite tout à l'heure. Pensons aux nouveaux députés. De tels débats sont très difficiles à suivre dès lors qu'ils sont sectionnés et c'est sur votre insistance que je me suis laissé aller à vous répondre...
    M. Jean-Pierre Brard. Mais les nouveaux députés écoutent attentivement !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. J'imagine qu'ils apprennent beaucoup en vous écoutant !
    Dès lors que les prix du pétrole avaient affiché, au cours des trois premiers bimestres de l'année 2002, un cours durablement inférieur au cours de référence de janvier 2000, soit 25,4 dollars le baril, le Gouvernement a supprimé, à compter du 21 juillet 2002, le dispositif de la TIPP flottante. En cela, il n'a fait qu'appliquer la loi.
    M. Didier Migaud. Je ne le crois pas !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Il a modifié en conséquence les tarifs de la taxe applicables au supercarburant, au gazole et au fioul domestique.
    Selon les données acutellement disponibles, en dépit d'une hausse des cours du pétrole brut, il apparaît que les prix des carburants n'ont pas atteint le niveau qui avait justifié la mise en place du dispositif institué en 2000. Cela étant, le Gouvernement ne s'interdit pas de réagir, selon les modalités qui lui paraîtraient les plus appropriées, au cas où les prix du pétrole augmenteraient. Mais il confirme que les modalités antérieures ne sont pas « réactivables », pour reprendre, monsieur Migaud, l'expression que vous avez employée.
    Dans ces conditions, monsieur le député, je vous propose de retirer votre amendement. A défaut, je serais obligé de demander son rejet.
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Monsieur le ministre, j'accepte de le retirer dès lors que vous nous donnez un nouveau rendez-vous. Si les conditions ne sont effectivement pas réunies aujourd'hui, elles risquent malheureusement de l'être dans les jours qui viennent. Il sera alors utile de faire des propositions. J'espère pouvoir compter sur le soutien du rapporteur général, pour alimenter la réflexion du Gouvernement. Je pense que nous devrions être en mesure de vous faire une proposition lors de la discussion du collectif budgétaire.
    M. le président. L'amendement n° 213 corrigé est retiré.
    MM. Emmanuelli, Migaud, Bonrepaux, Idiart, Bapt, Mme Lignières-Cassou et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 214, ainsi rédigé :
    « Compléter l'article 17 par le paragraphe suivant :
    « III. - Les entreprises dont l'objet principal est d'effectuer la première transformation du pétrole brut ou de distribuer les carburants issus de cette transformation doivent acquitter, au titre du premier exercice clos à compter du 20 septembre 2002, une taxe exceptionnelle assise sur la fraction excédant 15,24 millions d'euros du montant de la provision pour hausse des prix prévue au onzième alinéa du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts et inscrite au bilan à la clôture de cet exercice, ou à la clôture de l'exercice précédent si le montant correspondant est supérieur.
    « Le taux de la taxe est fixé à 30 %.
    « La taxe est acquittée dans les quatre mois de la clôture de l'exercice. Elle est liquidée, déclarée, recouvrée et contrôlée comme en matière de taxe sur le chiffre d'affaires et sous les mêmes garanties et sanctions. Elle est imputable, par le redevable de cet impôt, sur l'impôt sur les sociétés dû au titre de l'exercice au cours duquel la provision sur laquelle elle est assise est réintégrée. Elle n'est pas admise en charge déductible pour la détermination du résultat imposable. »
    La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Dans un contexte de tension sur les prix des produits pétroliers comparable à celui que connaît aujourd'hui l'économie mondiale, le gouvernement précédent et les députés socialistes avaient mis en place, dans le cadre de l'article 11 de la loi de finances pour 2001, un prélèvement exceptionnel sur les compagnies pétrolières.
    Ce prélèvement est justifié par le fait qu'indépendamment de toute décision propre à ces entreprises, leurs résultats s'améliorent mécaniquement en période de forte hausse des prix du pétrole. Ainsi, il est légitime, comme cela avait été fait avec la mise en place de la « TIPP flottante », de considérer qu'une partie de ces revenus exceptionnels peut être réintégrée dans le budget général au profit de l'ensemble des Français.
    Il est donc à nouveau proposé de mettre en place une taxation exceptionnelle des entreprises pétrolières.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable. Il est tout à fait exact que les lois de finances de 2001 et 2002 avaient institué une taxe exceptionnelle sur le montant de la provision pour hausse de prix, qui est constituée par les entreprises réalisant en France la première transformation du pétrole ou effectuant la distribution des carburants issus de cette transformation.
    Cet amendement vise à instituer une nouvelle taxe exceptionnelle au taux de 30 %.
    M. Augustin Bonrepaux. Cela donnerait quelques marges de manoeuvre !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cher collègue Bonrepaux, cette taxe qui est en fait imputable à l'impôt sur les sociétés n'a pratiquement rien apporté ; elle n'a donc absolument aucun intérêt.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. L'application du dispositif proposé porterait le taux global de prélèvement à 63,33 %, ce qui serait supérieur à l'économie d'impôt réalisée par les entreprises en cause lors de la constitution des provisions pour hausse des prix. Dans ces conditions, il convient de rejeter cet amendement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 214.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 17, modifié par l'amendement n° 41 rectifié.
    (L'article 17, ainsi modifié, est adopté.)
    M. le président. Il serait bon que nous avancions en accélérant tranquillement notre rythme.
    L'amendement n° 235 de M. Gérard Voisin n'est pas défendu.
    M. Didier Migaud. Ils savent que tout est verrouillé !
    M. le président. MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 171, ainsi rédigé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « Dans le quatrième alinéa du I de l'article 158 bis du code général des impôts, les mots : "à la moitié sont remplacés par les mots : "au tiers. »
    La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
    M. Jean-Claude Sandrier. Cet amendement est un classique : il s'agit de revoir le mécanisme de l'avoir fiscal et de revenir à l'alignement de son taux sur celui de l'impôt sur les sociétés. Certes, le nouveau régime concernant les personnes morales et les bénéficiaires du régime « sociétés mères et filiales » va dans le bon sens mais, concernant les personnes physiques, le taux du crédit d'impôt reste une ineptie fiscale. Il favorise la financiarisation de l'économie, regrettée d'ailleurs à demi-mot par le Premier ministre, et ne permet pas un réel équilibre entre la fiscalité du travail et celle du capital et des placements financiers.
    Maintenir cet avoir fiscal à 50 % prouverait que tout ce qui contribue à orienter la fiscalité vers la création de richesse vous est interdit. Votre dogme, qui consiste à favoriser les placements financiers, a pourtant été mis à rude épreuve ces derniers mois. En effet, la réalité économique se rappelle durement à tous ceux qui ont favorisé cette « enflure » spéculative et entraîné dans leur chute des millions de petits porteurs crédules et dépouillés.
    Notre amendement a pour but de remobiliser ces disponibilités sur des projets porteurs d'emplois et de richesses, et non de dividendes. C'est pourquoi nous vous demandons de rétablir la corrélation entre l'avoir fiscal et l'impôt sur les sociétés.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nous avons déjà eu une discussion hier soir sur les modifications de l'avoir fiscal et vous nous avez indiqué, monsieur le ministre, que vous vous apprêtiez à engager une vaste réforme qui conduirait, si j'ai bien compris, à sa suppression. Avis défavorable dans cette attente.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable également.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 171.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Sandrier, Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 9, ainsi libellé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « L'article 209 quinquies du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Les dispositions du présent article ne peuvent conduire à réduire de plus de 20 % l'impôt qui serait normalement dû par les sociétés françaises si elles ne bénéficiaient pas de l'agrément. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. J'entends bien ce que M. le rapporteur général vient de dire, et on connaît le pas prudent du ministre, que je trouve pour ma part - peut-être est-ce lié à la prudence - un peu lent. Notre amendement vise donc à réduire, plus précisément à plafonner, l'avantage fiscal tiré de l'autorisation de consolider au niveau mondial les résultats des exploitations directes et indirectes, situées en France ou à l'étranger, des sociétés françaises. C'est le mécanisme connu sous le nom de bénéfice mondial consolidé.
    Certes, le nombre de sociétés françaises directement concernées par l'article 209 quinquies du code général des impôts peut sembler faible : elles ne sont en effet qu'une douzaine de privilégiées à bénéficier, sur agrément du ministre des finances, de ce régime équivalent à celui de l'intégration fiscale à l'échelle mondiale. Mais le coût annuel pour l'Etat, donc pour le contribuable, n'est pas mince, puisqu'il approche de 3 milliards de francs.
    Pour le fleuron des sociétés hexagonales, de quoi s'agit-il en fait ? Tout simplement d'additionner les bénéfices réalisés dans le monde entier, de les amputer des pertes réelles ou supposées, de calculer l'impôt théorique au taux français et d'en soustraire les impôts déjà payés dans chaque pays par les filiales étrangères. On voit bien tout le bénéfice que peuvent retirer de ce dispositif les multinationales concernées et c'est pourquoi nous proposons de limiter l'avantage à 20 % de l'impôt qui serait normalement dû.
    D'autant qu'il faut y ajouter l'avantage que les sociétés ou les groupes en question s'accordent, elles ou eux-mêmes, en ouvrant des comptes dans les paradis fiscaux, question que j'ai évoquée avant-hier. Je pense, monsieur le ministre, qu'il ne serait pas trop difficile pour l'Etat, quand il détient une part du capital, d'examiner de beaucoup plus près les pratiques de ces sociétés qui participent en fin de compte à la fraude ou à l'évasion fiscales à l'échelle planétaire et y permettent aux paradis fiscaux de se pérenniser.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable. Cet amendement, monsieur Brard, n'a absolument rien à voir avec les paradis fiscaux.
    M. Jean-Pierre Brard. Je n'ai rien dit de tel !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il s'agit des conséquences de l'internationalisation de l'économie et des entreprises. La règle qui veut que le bénéfice soit apprécié dans le pays d'implantation à partir des résultats de toutes les filiales existant dans le monde et soit ensuite consolidé s'applique dans tous les pays, occidentaux en tout cas. Dans tous les pays comparables au nôtre, les bénéfices et les pertes sont mondialisés puis consolidés dans le pays d'origine. Votre amendement créerait donc une distorsion de concurrence au détriment de nos entreprises. Après la longue discussion que nous avons eue hier, je croyais pourtant que tout le monde était convaincu de la nécessité de renforcer l'attractivité de notre territoire et de défendre et promouvoir nos emplois.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis que la commission.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, je pense que vous allez devoir consulter à nouveau votre règlement de 1926, car M. Carrez a répondu à un propos que je n'ai pas tenu.
    M. le président. Ce cas-là n'est pas prévu dans le règlement de 1926. Je regarderai donc dans celui de 1928. (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Brard. Je vous remercie de votre compréhension.
    J'ai simplement dit que les groupes multinationaux ajoutaient souvent à l'avantage fiscal du bénéfice mondial consolidé celui de la localisation dans des paradis fiscaux. Ce sont deux choses différentes, même si M. Bapt me souffle à l'oreille que cette consolidation est déjà, en elle-même, paradisiaque !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Sandrier et Vaxès et les membres du groupe des députés-e-s, communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 24 corrigé, ainsi libellé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « Le deuxième alinéa du I de l'article 219 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : "Toutefois, les bénéfices distribués sont assujettis au taux de 36 %. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. La faiblesse actuelle des investissements des entreprises est une des raisons du ralentissement économique auquel nous sommes confrontés. Il faut donc inciter les entreprises à investir et c'est pourquoi nous proposons de favoriser fiscalement les bénéfices - mais oui, vous entendez bien, monsieur le ministre, et je suis sûr que vous êtes étonné -, à condition qu'ils soient réinvestis. Nous sommes persuadés que la redistribution de bénéfices ne doit pas être l'objectif prioritaire des entrepreneurs, qui seront ainsi incités à faire progresser la compétitivité de leurs entreprises par des investissements en matériels, en technologies nouvelles, mais aussi en hommes et dans le domaine de la recherche. Voilà pourquoi nous vous proposons d'assujettir les bénéfices distribués à un taux majoré de 36 % au titre de l'impôt sur les sociétés.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Avis défavorable : le taux de l'IS est déjà assez élevé, surtout quand on prend en compte la contribution sociale sur les bénéfices et ce qui reste de la surtaxe dite Juppé.
    M. le président. Avez-vous été étonné, monsieur le ministre ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Oui, monsieur le président, mais je me méfie des redistributions de M. Brard. (Sourires.) Mon avis est donc défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 24 corrigé.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 105, ainsi rédigé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - Dans la première phrase du premier alinéa du 1. de l'article 231 du code général des impôts, après les mots : "et de leurs groupements, sont insérés les mots : "des établissements publics de santé,
    « II. - Le taux applicable à l'impôt sur le bénéfice des sociétés est relevé à due concurrence. »
    La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. M. Mattei, ministre de la santé, vient d'annoncer que la sécurité sociale, avec le soutien du secteur privé, devait faire plus dans le domaine de l'investissement hospitalier pour compenser le désengagement de l'Etat depuis plusieurs années. Nous pouvons sans doute discuter sur le point de savoir si ce désengagement est justifié, mais cette annonce rend encore plus inacceptable le prélèvement de taxes sur les hôpitaux et sur les cliniques, alors que ces établissements sont entièrement financés par la sécurité sociale.
    Pour nous en tenir à l'hôpital public, la taxe sur les salaires représente un peu plus de 1,6 milliard d'euros, la taxe sur la valeur ajoutée à peu près autant et la surcompensation de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales 763 millions d'euros. Le total atteint environ 4 millliards d'euros, soit l'équivalent de 10 % du budget des hôpitaux.
    La somme de 1,6 milliard d'euros correspond aussi au financement des 45 000 emplois que le gouvernement précédent s'est engagé à créer l'an passé. Vous dites que vous tiendrez cet engagement. Pourtant nous ignorons toujours comment ils seront financés.
    Le groupe des député-e-s communistes et républicains propose donc de supprimer la taxe sur les salaires acquittée par les établissements de la fonction publique hospitalière. Cependant, afin de ne pas être accusés de favoriser une distorsion de concurrence avec les cliniques privées, comme cela nous a été reproché l'an passé - et tel pourrait être votre argument pour rejeter notre amendement - nous sommes prêts à le sous-amender pour y inclure l'ensemble du secteur de la santé.
    La totalité des syndicats hospitaliers et la Fédération hospitalière de France défendent cette revendication et nous sommes avec conviction à leurs côtés.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement qui nous est régulièrement soumis depuis une dizaine d'années et qui tend à supprimer la taxe sur les salaires dans les hôpitaux. Chacun voit les limites d'un système qui fait que le budget global, lui-même financé par les prélèvements obligatoires, est chargé par cette taxe.
    Je ferai néanmoins la même réponse que mes prédécesseurs : supprimer la taxe sur les salaires est bien entendu un objectif mais, dans l'immédiat, pour les seuls hôpitaux, elle procure à l'Etat 1,5 milliard d'euros. C'est la raison pour laquelle nous avons rejeté cet amendement, tout en comprenant son fondement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Comme j'ai commis un rapport sur ce sujet lorsque j'étais au Sénat, je ne voudrais que M. Vaxès pense que j'ai oublié ce que j'ai écrit. J'avais constaté à l'époque, et les choses n'ont sans doute pas changé, que la sphère publique était contributrice à hauteur de 45 % du produit de la taxe sur les salaires, ce qui est naturellement un mauvais système. Il demeure que l'écheveau est difficile à dénouer. Il faudra aller vers cet objectif, mais au sein de la sphère publique, car si vous exonérez les hôpitaux, vous allégez leurs difficultés, mais vous chargez d'autant le budget général.
    Nous avons un travail à mener à bien sur ce sujet, ce qui était totalement impossible en quatre mois. J'ai entendu votre appel, monsieur Vaxès, mais je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. A défaut, j'émettrais un avis défavorable.
    M. Jean-Pierre Brard. Pourrions-nous, monsieur le ministre, avoir un exemplaire dédicacé de votre rapport ? (Sourires.)
    M. le président. Je suis sûr que vous l'aurez, monsieur Brard.
    L'amendement est-il retiré ?
    M. Michel Vaxès. Je le maintiens, monsieur le président.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 105.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 107, ainsi libellé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - Après le 2 bis de l'article 231 du code général des impôts, il est inséré un paragraphe 2 ter ainsi rédigé :
    « 2 ter. - Le taux majoré de 13,60 % prévu au 2 bis ne s'applique pas aux salaires, indemnités et émoluments versés par les associations à caractère sportif, éducatif, social ou philanthropique régies par la loi du 1er juillet 1901 et qui bénéficient d'un agrément ministériel. »
    « II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
    La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
    M. Jean-Claude Sandrier. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps l'amendement de repli n° 108, qui est presque identique.
    M. le président. Ces deux amendements peuvent en effet faire l'objet d'une présentation commune.
    L'amendement n° 108, également présenté par MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains, est ainsi libellé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - Après le 2 bis de l'article 231 du code général des impôts, il est inséré un paragraphe 2 ter ainsi rédigé :
    « 2 ter. - Le taux majoré de 13,60 % prévu au 2 bis ne s'applique pas aux salaires, indemnités et émoluments versés par les associations à caractère sportif, éducatif, social ou philanthropique régies par la loi du 1er juillet 1901 et qui sont reconnues d'utilité publique. »
    « II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
    Je vous en prie, monsieur Sandrier.
    M. Jean-Claude Sandrier. La taxe sur les salaires pénalise lourdement l'emploi associatif, malgré l'abattement qui permet aujourd'hui aux associations d'être exonérées du paiement pour plusieurs postes de travail. Si cet abattement est très positif et si des milliers d'associations en bénéficient, son impact économique reste insuffisant, notamment lorsque l'effectif salarié de l'association augmente. C'est pourquoi nous proposons de supprimer le taux supérieur majoré intervenant dans le calcul de la taxe sur les salaires pour les associations dont l'action relève de l'intérêt général et qui, soit bénéficient d'un agrément ministériel, soit sont reconnues d'utilité publique, le second amendement étant légèrement en retrait.
    L'adoption d'une telle mesure favoriserait l'emploi dans un secteur qui représente un véritable gisement à cet égard. Nous ne pouvons nous permettre de la négliger dans un contexte où il est plus nécessaire que jamais de relancer la croissance. Notre proposition constituerait également une amorce de suppression de la taxe dans le secteur associatif. Enfin, il est particulièrement injuste, sinon illogique, que la charge supportée par les associations au titre de la taxe sur les salaires soit souvent supérieure à celle supportée par les entreprises au titre de la taxe professionnelle.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 107 et 108 ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Tout en étant parfaitement conscient du coût que représente pour les associations la taxe sur les salaires, je rappelle que l'abattement de 5 182 euros est très efficace pour les petites associations qui emploient un ou deux salariés. Il exonère en réalité de la taxe sur les salaires une grande partie des associations. Avis défavorable, donc, sur ces deux amendements.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 107.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 108.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 317 et 106, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 317, présenté par MM. Bonrepaux, Migaud, Emmanuelli, Idiart, Mme Lignières-Cassou, MM. Bourguignon, Clayes, Bapt et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - Dans la première phrase de l'article 1679 A du code général des impôts, la somme : "5 185, est remplacée par la somme : "10 000.
    « II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    L'amendement n° 106, présenté par MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains, est ainsi rédigé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - Dans la première phrase de l'article 1679 A du code général des impôts, le nombre "5 185 est remplacé par le nombre "10 000.
    « II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
    La parole est à M. Didier Migaud, pour soutenir l'amendement n° 317.
    M. Didier Migaud. Ce débat relatif à la taxe sur les salaires est intéressant et je remercie nos collègues communistes de l'avoir engagé. Ils sont constants dans leurs propositions, qui ont un coût budgétaire important.
    A l'instant, le ministre évoquait un de ses rapports, toujours très pertinents, et Jean-Pierre Brard souhaitait en obtenir un exemplaire. J'ai le mien sous les yeux et, relisant son intitulé : « La taxe sur les salaires, ou comment s'en débarrasser », je me dis, monsieur le ministre, que vous allez pouvoir passer aux exercices pratiques puisque vous êtes maintenant à Bercy. (Sourires.)
    Nous sommes conscients, néanmoins, que vous n'étiez pas en mesure de faire des propositions trop ambitieuses, importantes et c'est pourquoi nous vous proposons un amendement que vous devriez être à même d'accepter car il est beaucoup plus modeste, bien qu'il emporte des effets très positifs pour les associations. Nous souhaitons simplement que soit revalorisé l'abattement dont elles bénéficient. Ce serait d'autant plus utile que plusieurs mesures prises par votre gouvernement et votre majorité, notamment la suppression des emplois-jeunes, vont plonger de nombreuses associations dans de grandes difficultés.
    Afin de limiter cet impact négatif, et pour que la majorité puisse prendre une mesure plus positive en faveur des associations, nous proposons d'augmenter de manière significative l'abattement spécifique dont elles bénéficient en le portant à 10 000 euros, ce qui leur permettra d'être exonérées de taxe sur les salaires à hauteur de deux emplois à plein temps payés au SMIC. C'est une proposition modeste, j'en conviens, mais qui pourrait être singulièrement appréciée par le monde associatif.
    Pour conclure, j'aimerais citer le sénateur Lambert, le président Lambert, qui aurait vraisemblablement appuyé cet amendement, bien que le trouvant sûrement trop modeste. (Sourires.) Mais je suis conscient, monsieur le ministre, que vos marges de manoeuvre sont étroites et je veux vous aider.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je n'en doute pas !
    M. Didier Migaud. Qu'avez-vous écrit l'an dernier ? « L'abattement prévu par l'article 1679 A du code général des impôts pour les associations de la loi de 1901 et fixé à 33 470 francs » - ce qui équivaut, en euros, au montant actuel - « pour la taxe due au titre des salaires versés en 2001, ne semble pas » - on reconnaît là la rédaction sénatoriale, mais on voit bien ce que cela veut dire - « alléger suffisamment la charge que constitue la taxe sur les salaires. En effet, il ne joue de façon significative que pour les associations les plus modestes. L'application de l'abattement, qui n'est d'ailleurs pas subordonnée au caractère désintéressé de la gestion, devrait être, dans ce sens, élargie ».
    Eh bien, monsieur le ministre, nous vous proposons de mettre votre suggestion en application immédiate. Je suis conscient, j'y insiste, de la modestie de cette initiative, qui tient compte d'un contexte économique difficile pour le budget de la nation. Mais comme il sera rendu plus difficile encore pour les associations, compte tenu des mesures proposées par le Gouvernement et votées par la majorité, nous vous donnons l'occasion, avec cet amendement, de faire un geste en leur faveur.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Sandrier, pour soutenir l'amendement n° 106.
    M. Jean-Claude Sandrier. Il s'agit par cet amendement d'affirmer la nécessité de prendre des mesures significatives afin d'éviter le gâchis que ne manquerait pas de générer une sortie brutale et non accompagnée du dispositif « nouveaux services, nouveaux emplois ». La collectivité se doit de faire beaucoup plus pour assurer un débouché sur l'emploi pour chacun des jeunes actuellement dans le dispositif. Il serait humainement et socialement désastreux que tous ceux qui ont bénéficié d'un emploi-jeune et qui, ainsi, ont pu retrouver leur indépendance, se projeter dans l'avenir et se construire en tant que jeunes adultes, soient ramenés à la case départ de la précarité et des petits boulots sans perspective.
    Il convient de prendre également en compte la situation des associations qui, grâce aux emplois-jeunes, ont mis en place de nouvelles activités et ont amélioré qualitativement les services rendus à la population.
    Si le dispositif doit effectivement être évalué - le milieu associatif y est d'ailleurs favorable -, on ne saurait accepter que, sous couvert d'un changement de cap de la politique gouvernementale, des activités qui se sont révélées socialement utiles soient passées par pertes et profits sous prétexte qu'actuellement elles ne sont pas solvables. La suppression des emplois-jeunes risque de fragiliser les associations et ne pourra que pénaliser la vie sociale de nos quartiers dans un contexte de forte reprise du chômage. Notre amendement n'entend pas règler à lui seul la question. Il vise simplement à apporter une aide aux associations, actuellement premier initiateur d'emplois-jeunes.
    En outre, nous appuyons la demande de la conférence permanente des coordinations associatives d'engager des négociations sur toutes les questions relatives à la sortie du dispositif emplois-jeunes.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a émis un avis défavorable...
    M. Didier Migaud. C'est dommage !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... sur ces amendements. Mais je n'ose pas reprendre tous ses arguments car notre collègue Didier Migaud s'est montré très convaincant en citant le rapport Lambert.
    M. Didier Migaud. Eh oui !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Au nom de la commission, je me bornerai donc, pour justifier le rejet, à invoquer le coût de la mesure : 200 millions d'euros.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je voudrais tout d'abord remercier Didier Migaud pour l'aide qu'il a proposé de m'apporter. Je regrette toutefois qu'il n'ait pas pensé à le faire lorsqu'il occupait la fonction de rapporteur général, car il avait à l'époque les moyens de mettre en oeuvre des mesures qui me sont interdites aujourd'hui, en raison de l'héritage que nous avons à gérer.
    M. Didier Migaud. Ce que vous dites est injuste, monsieur le ministre !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Pour avoir beaucoup travaillé sur le sujet, je peux vous dire en tout cas qu'il faut éviter que la sphère publique soit elle-même redevable de cet impôt. Il faut commencer par dénouer l'écheveau. Ensuite, nous pourrons travailler au bénéfice de ceux qui n'appartiennent pas directement à la sphère publique. En tout état de cause, cela demande un examen assez approfondi, qu'il était totalement impossible de faire pour un gouvernement nommé en juin et alors que la préparation de la loi de finances commence en juillet. Sous le bénéfice de ces observations, je propose à leurs auteurs de retirer ces amendements. A défaut, je demande à l'Assemblée de les repousser.
    M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Je tiens à souligner l'importance de cet amendement au moment où les associations, notamment celles qui favorisent l'insertion et permettent de ramener des exclus au travail, risquent d'être confrontées à de grandes difficultés du fait de la suppression des CES et des emplois-jeunes. Nous ne savons d'ailleurs toujours pas à quoi nous en tenir exactement : vous nous dites que 80 000 CES sont prévus dans ce projet de budget. Nous avons entendu dire qu'il devait y en avoir 240 000. Où figureront-ils ? La discussion budgétaire s'achève sans que nous ayons pu obtenir une réponse. Les associations sont inquiètes et se demandent comment elles vont pouvoir continuer à assumer leur mission d'insertion.
    Le rapporteur général a exprimé un avis négatif sur notre amendement sans toutefois se montrer très convaincant. Sa seule objection était de nature financière : 200 millions au bénéfice des associations ce serait trop parce que la croissance n'atteindra pas le niveau attendu. Mais, monsieur le rapporteur général, pourquoi ne pas faire pour les associations ce que vous faites pour 60 000 familles, avec les emplois à domicile ? Je propose de sous-amender notre amendement n° 317 et de ramener l'abattement de 10 000 à 7 000 euros. Passer de 5 185 à 7 000 euros est-ce vraiment au-dessus des moyens de l'Etat, compte tenu de l'enjeu que cela représente pour les associations. C'est justement, à peu de chose près, la somme que vous venez de dégager pour faire ce cadeau exorbitant concernant les emplois à domicile. Si vous voulez soutenir l'emploi, augmentez l'abattement spécifique dont bénéficient les associations sur la taxe sur les salaires.
    M. le président. Il s'agit en fait, monsieur Bonrepaux, d'une rectification de votre amendement : vous remplacez « 10 000 » par « 7 000 ».
    M. Augustin Bonrepaux. C'est cela même, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 317 est ainsi rectifié.
    La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Le sujet est très important. En effet, quel sort va être réservé aux associations, compte tenu des incertitudes - et c'est une litote ! - qui pèsent sur les emplois-jeunes ? En réalité, il n'y a même aucune incertitude puisque nous savons tous que ces emplois vont être progressivement supprimés. Quant aux CES, nous savons plus ou moins ce qu'il en est. Dans ces conditions, c'est vers les collectivités territoriales que vont se tourner les associations. D'une certaine manière, en refusant de voir les difficultés auxquelles vont être confrontées les associations, qui constituent pourtant un réservoir d'emplois non négligeable, vous déplacez le problème vers les collectivités locales. Dans tous les cas, celles-ci porteront la responsabilité politique de leur décision : responsabilité à l'égard des associations si elles considèrent qu'elles ne peuvent pas les financer ; responsabilité vis-à-vis de la population quand, ayant accepté de se substituer à l'Etat, elles sont amenées à augmenter la fiscalité locale. C'est pourquoi agir sur la taxe sur les salaires -  ô combien injuste - serait une façon de desserrer la contrainte. L'amendement rectifié de notre collègue Bonrepaux montre à quel point les députés de gauche ont la volonté d'aboutir en préservant les associations.
    M. le président. Sur l'amendement n° 317, tel qu'il a été rectifié, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, compte tenu de l'importance du sujet et afin de permettre à chacun de prendre le temps de la réflexion avant de passer au vote, je demande, au nom du groupe socialiste, une suspension de séance. Bien sûr, nous attendons une réponse du Gouvernement et de la commission.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante, est reprise à dix-sept heures cinquante-cinq, sous la présidence de M. Eric Raoult.)

PRÉSIDENCE
DE M. ÉRIC RAOULT,
vice-président

    M. le président. La séance est reprise.
    Nous allons passer au vote sur l'amendement n° 317 rectifié.
    M. Didier Migaud. Non, monsieur le président ! Nous avons fait un pas en direction de la commission et du Gouvernement et nous attendons une réponse de leur part. Je dirai, pour résumer leur point de vue, qu'ils trouvent que c'est un bon amendement.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je crois qu'il vaut mieux que nous résumions nous-mêmes notre point de vue.
    M. Didier Migaud. C'est mon interprétation, monsieur le ministre, mais elle s'appuie sur une lecture passionnante.
    A priori, donc, il s'agit d'un bon amendement mais qui pourrait coûter un peu cher. Nous considérions pour notre part que 200 millions d'euros était une somme raisonnable eu égard à certaines dépenses d'impôts ou aux diminutions dont vont bénéficier quelques milliers de familles. Cependant, après vous avoir entendu et souhaitant être constructifs à l'égard des associations concernées, nous proposons de ramener l'abattement spécifique de 10 000 à 7 000 euros. En adoptant l'amendement n° 317 rectifié, nous répondrons aux préoccupations de nombreuses associations et du secteur associatif dans son ensemble, qui attendait beaucoup du rapport Lambert.
    Le monde associatif est d'autant plus inquiet que certaines dispositions prises actuellement par le Gouvernement et la majorité vont totalement à l'encontre de ses intérêts.
    Monsieur le ministre, on ne peut pas avoir un double discours. On ne peut pas, d'un côté, louer sans cesse le travail des bénévoles et des associations dans les domaines sportif, culturel et social et, de l'autre, refuser systématiquement toute disposition leur permettant de bénéficier de meilleures conditions de travail pour répondre aux besoins exprimés par la population. Dans nos discours d'élus locaux, nous saluons toujours l'action du mouvement associatif. Eh bien, aujourd'hui, nous avons l'occasion non seulement de lui rendre hommage, mais de prendre une mesure concrète en sa faveur.
    M. Dominique Le Mèner. Pourquoi ne l'avez-vous pas fait plus tôt ?
    M. Didier Migaud. Si, nous l'avons fait ! Alors que vous ne siégiez pas encore dans cet hémicycle, nous avions relevé le montant de l'abattement. Nous vous demandons aujourd'hui de poursuivre sur cette voie.
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Ce qui n'a pas été vraiment fait dans le passé...
    M. Didier Migaud. Mais si !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. ... est encore moins aisé à faire dans une période difficile. Cela dit, nous sommes, tout comme vous, attentifs au monde associatif.
    M. Didier Migaud. Ça ne se voit pas !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Vous le verrez tout à l'heure dans ma proposition.
    Nous sommes, disais-je, attentifs au monde associatif. Nous avons dégagé, monsieur le ministre, quelques moyens budgétaires. Et nous voudrions vraiment, d'ici au prochain débat sur ce sujet à l'Assemblée nationale, traiter le cas des emplois-jeunes du monde associatif sportif. Le monde sportif rend un énorme service pour l'insertion des jeunes. La plupart des emplois-jeunes dans ce secteur ont été recrutés par des associations. Il est certain que leur prolongation pour quelques années, le temps que les associations puisse dégager suffisamment d'autofinancement, nécessite des moyens. Aussi souhaitons-nous que le Gouvernement nous présente, pour ces 20 000 ou 22 000 emplois-jeunes, un plan qui permettrait de sécuriser les associations et d'apporter ainsi au mouvement sportif une réponse à la mesure du rôle important qu'il joue dans nos collectivités locales, sans augmenter pour autant la dépense publique globale. Je vous en remercie par avance, monsieur le ministre.
    M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.
    M. Gérard Bapt. J'irai dans le sens de M. Méhaignerie, mais en élargissant son propos, car les associations sportives ne sont pas les seules concernées : il en va de même pour les associations dans le domaine culturel - après tout, les maisons des jeunes et de la culture organisent tout à la fois des activités sportives et des activités culturelles - et pour le secteur social. Je viens d'apprendre, dans le quotidien régional de Toulouse, que Act Up avait occupé la direction du travail. L'annonce de l'extinction des emplois-jeunes et de la diminution des emplois aidés a provoqué dans cette association une réelle angoisse à l'idée de ne plus pouvoir assurer des missions d'intérêt général dans le domaine social. C'est tout le tissu associatif, bien au-delà du mouvement sportif, qui non seulement s'inquiète du lendemain de ses actuels salariés, mais se demande tout bonnement s'il pourra poursuivre sa mission.
    Le relèvement de l'abattement de la taxe sur les salaires serait un geste dans sa direction. Peut-être pouvez-vous le gager sur l'amendement de votre majorité concernant la réduction d'impôt pour emploi de salariés à domicile. « Pourquoi ne l'avez-vous pas relevé plus tôt ? » nous a demandé tout à l'heure un de nos collègues. Non seulement nous avions commencé à le faire,...
    M. Yves Censi. C'était une période de croissance !
    M. Gérard Bapt. ... mais nous sommes intervenus dans le cadre d'un effort d'ensemble : les contrats aidés, les emplois-jeunes, la recherche de la pérennisation par le dispositif « nouveaux emplois, nouveaux services ». Or tout cela, vous l'abandonnez. Il faut donc absolument trouver des compensations. L'activité aujourd'hui déployée par l'ensemble du tissu associatif serait gravement compromise si aucune action n'était menée en matière d'abattement de la taxe sur les salaires.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je mets au voix l'amendement n° 317 rectifié.
    Le scrutin est ouvert.
    Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   41
Nombre de suffrages exprimés   41
Majorité absolue   21
Pour l'adoption   14
Contre   27

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    Je mets aux voix l'amendement n° 106.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. Didier Migaud et M. Gérard Bapt. Le monde associatif appréciera !
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 193 et 281 rectifié.
    L'amendement n° 193 est présenté par M. Myard ; l'amendement n° 281 rectifié est présenté par M. Martin-Lalande.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - A la fin du dernier alinéa du I de l'article 235 ter ZA du code général des impôts, les mots : "à compter du 1er janvier 2002 sont remplacés par les mots : "en 2003. »
    « II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    M. Michel Bouvard. L'amendement n° 193 est défendu.
    M. Patrice Martin-Lalande. L'amendement n° 281 également.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable également.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 193 et 281 rectifié.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements n°s 192 et 226, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 192, présenté par MM. Lefort, Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains est ainsi libellé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « L'article 235 ter ZD du code général des impôts est ainsi modifié :
    « I. - Le III est ainsi rédigé :
    « III. - Le taux de la taxe est fixé à 0,05 % à compter du 1er septembre 2003. »
    « II. - Le IV est supprimé. »
    L'amendement n° 226, présenté par MM. Bonrepaux, Migaud, Emmanuelli, Idiart, Mme Lignières-Cassou, MM. Bourguignon, Clayes, Bapt et les membres du groupe socialiste est ainsi rédigé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « L'article 235 ter ZD du code général des impôts est ainsi modifié :
    « 1° le VI est supprimé.
    « 2° le III est ainsi rédigé :
    « Le taux de la taxe est fixé à 0,05 % à compter du 1er septembre 2003. »
    La parole est à M. Michel Vaxès, pour soutenir l'amendement n° 192.
    M. Michel Vaxès. L'an dernier, dans le cadre de la loi de finances pour 2002, nous avons adopté, à l'initiative des parlementaires de la précédente majorité, un dispositif prévoyant la mise en place d'une taxe sur les transactions financières du type taxe Tobin. Si nous ne pouvons que nous féliciter que le Parlement ait décidé d'adopter cette taxation, nous regrettons que rien n'ait été fait au niveau européen, ne serait-ce que pour en parler. Faute de quoi, la loi française qui a prévu sa mise en place à la date à laquelle les autres Etats membres de l'Union européenne auront achevé l'intégration dans leur droit interne d'une taxe sur les transactions, restera lettre morte. Ce n'est pas acceptable.
    Aussi proposons-nous cette année que la France applique cette taxe dès le 1er septembre 2003 et fixe son taux à 0,05 %, sans attendre la mise en place du dispositif par nos autres partenaires européens.
    Mon ami Jean-Claude Lefort, qui ne peut être présent aujourd'hui pour défendre cet amendement, bien qu'il y tienne beaucoup, tout comme l'ensemble des membres du groupe communiste, disait à l'Assemblée : « Il existe un consensus pour ne pas limiter cette taxe à un cadre national. Il est vrai qu'elle tirerait le maximum de son efficacité si elle était appliquée en Europe, à une "zone Tobin recouvrant une masse critique qui pourrait entraîner le reste du monde, y compris les pays récalcitrants. »
    Cependant, nous ne voudrions pas que cet argument serve a contrario de prétexte à l'inaction au niveau national. Le montant de la taxe proposé, infime - 0,05 %, soit 0,5 centimes pour 10 euros - ne pénaliserait pratiquement pas les mouvements financiers ordinaires dans notre pays.
    Les attentats du 11 septembre ont montré, tout le monde l'a relevé, que la pauvreté du Sud constituait pour une bonne part le terreau du terrorisme. Adopter notre amendement reviendrait donc à ne plus faire le lit des marchands de mort que sont les terroristes. C'est la misère qu'il faut tuer, non les peuples. La justice et la sécurité, en l'occurrence, ont partie liée.
    Voilà pourquoi nous avons déposé l'amendement n° 192, très semblable, le fait est à noter, à celui proposé par une partie de nos collègues du groupe socialiste. Notre pays doit affirmer sa volonté politique de lutter véritablement contre la toute-puissance des marchés financiers. Ce faisant, il répondrait au souhait exprimé par le Président de la République lors du sommet de Johannesburg, où il s'est prononcé pour la mise en place rapide d'une telle taxation, afin de financer le développement des pays les moins avancés. Raison de plus, chers collègues de la majorité, pour adopter l'amendement de notre collègue Lefort.
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, pour soutenir l'amendement n° 226.
    M. Didier Migaud. Dans le cadre de la loi de finances pour 2002, sous la majorité précédente, et contre l'avis de l'opposition d'alors, a effectivement été mise en place une taxe sur les transactions financières, de type taxe Tobin, dont le taux devait être déterminé par référence à une décision du Conseil européen.
    Nous avons été sensibles aux récentes déclarations du Président de la République au sommet de Johannesburg. Il appelait notamment à la mise en place rapide d'une telle taxation, afin de financer le développement des pays les moins avancés. De telles déclarations doivent être rapidement suivies d'effet, faute de quoi elles resteront lettre morte. « Trouvons de nouvelles sources de financement », insistait le Président de la République dans son discours, « par exemple par un nécessaire prélèvement de solidarité sur les richesses considérables engendrées par la mondialisation. » Une telle déclaration ne peut que mériter tout notre intérêt. Aussi souhaitons-nous, et c'est l'objet de notre amendement n° 226, aider le Président de la République et l'actuelle majorité à respecter cet engagement.
    Vous avez exprimé hier quelques doutes, quelques interrogations sur la volonté dont pouvait faire preuve le Président dans la défense de certains dossiers. Il a suffi d'une déclaration du ministre pour vous rassurer quant à la réalité de l'engagement solennel du Président sur la question de la réduction ciblée de TVA pour la restauration. Vous avez là une occasion concrète de témoigner votre souci de le voir honorer ses promesses.
    Nous souhaitons que cette taxe puisse être mise en application à compter du 1er septembre 2003, car nous sommes tout à fait conscients de la nécessité de convaincre également nos partenaires européens, ce qui exigera un certain délai. La capacité de conviction du Président de la République, appuyé par une majorité du Parlement, devrait grandement y aider.
    Quoi qu'il en soit, le sujet est sérieux. Nous avons fait une première avancée l'année dernière. Nous avons cette fois-ci la possibilité de la concrétiser. Il est fondamental que la France puisse être un élément moteur dans ce domaine, monsieur le rapporteur général, je suis persuadé que vous en serez convaincu. Non seulement c'est la volonté, si j'ai bien compris, du Président, mais elle est partagée par de nombreux élus et associations qui souhaitent que la France soit fidèle à son image aux yeux du monde : celle d'un pays qui est du côté des plus faibles. Cela permettrait enfin, monsieur le ministre, de résoudre plusieurs des difficultés budgétaires que vous avez évoquées. Ce serait de l'argent bien utilisé, d'autant que nous souhaitons voir ces crédits mobilisés pour aider au développement des pays qui en ont besoin. Cet amendement ne peut donc que recevoir votre approbation.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
    Pour commencer, mon cher collègue et prédécesseur Didier Migaud, c'est la première fois que je vous entends aussi convaincant, et convaincu de l'intérêt de la taxe Tobin.
    M. Didier Migaud. Non : l'amendement était de moi !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Quant à notre collègue Vaxès, il a présenté l'amendement n° 192 au nom de Jean-Claude Lefort, en compagnie duquel je me suis rendu au forum social mondial de Porto-Allegre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. N'était-ce pas une compromission ? (Sourires.)
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Pas du tout, monsieur le ministre. Là-bas, nous avons beaucoup discuté de l'intérêt de la taxe Tobin ; rappelons d'ailleurs que son auteur estime aujourd'hui qu'elle n'a plus lieu d'être.
    M. Didier Migaud. Il a vieilli !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ce débat nous a passionnés pendant des jours et des nuits ici même et nous n'allons pas le refaire. Reste qu'il a permis de dégager un point de convergence entre nous sur le fait que cette taxe, à supposer qu'elle soit mise en oeuvre, ne peut fonctionner que si l'ensemble ou tout au moins la majorité des pays qui ont des flux financiers importants acceptent eux-mêmes de l'appliquer. Tout le monde est d'accord sur ce point. C'est exactement dans cet esprit que Didier Migaud, dans le cadre de la loi de finances pour 2002, a présenté un amendement, un peu à reculons, reconnaissons-le.
    M. Didier Migaud. Non !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Que proposait-il ? De fixer un taux maximum de 0,1 % en précisant que cette disposition ne pourrait devenir effective en droit interne, c'est-à-dire s'appliquer en France, qu'après un décret en Conseil d'Etat, lequel ne serait pris qu'à partir du moment où l'ensemble des Etats de l'Union européenne auraient accepté la mise en place de cette taxe. Aussi, conformément à l'accord intervenu entre nous sur le fait qu'une telle taxe ne peut fonctionner que pour autant qu'un nombre suffisant de pays l'adoptent,...
    M. Didier Migaud. Qu'a fait le Président de la République ? Il faut bien prendre des initiatives !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... nous entendons rester dans le cadre de la disposition de la loi de finances de 2002. Autrement dit, tant que le principe de cette taxe n'aura pas été décidé par l'ensemble des Etats de l'Union européenne,...
    M. Didier Migaud. Il faut provoquer cette décision !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. ... il nous est totalement impossible d'adopter une telle taxe et a fortiori d'en fixer le taux.
    M. Didier Migaud. C'est une démission !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ces deux amendements sont donc prématurés et n'ont aucune raison d'être. C'est la raison pour laquelle nous avons émis un avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable également.
    M. le président. La parole est à M. Julien Dray.
    M. Julien Dray. C'est un débat qui revient depuis plusieurs années dans toutes les discussions budgétaires. Mais l'année dernière avait été marquée par une avancée importante : le Parlement français, rejoignant en cela le Parlement canadien, avait voté le principe d'une telle taxe.
    Le problème est maintenant de savoir si ce vote restera un voeu pieux ou s'il prendra un sens. L'occasion nous est donnée aujourd'hui de lui faire prendre un sens, après le signal politique adressé l'an dernier par le Parlement français à ses homologues. Au demeurant, le mouvement s'est développé pour prendre une dimension planétaire dans la mesure où cette discussion a lieu dorénavant dans tous les parlements démocratiques, tandis que des milliers d'associations se sont mobilisées autour d'une même volonté : maîtriser les flux financiers et, partant, exercer un minimum de contrôle sur les mouvements qui, par exemple, affectent dramatiquement les économies d'Amérique latine.
    Encore faut-il se demander si le Gouvernement aura le courage de faire ce pas supplémentaire ou s'il préférera oublier les propos et les engagements de la campagne électorale pour en revenir au dur principe de réalité, qui veut que les promesses ne restent que des promesses ou, comme l'on dit souvent, qu'elles n'engagent que ceux qui veulent y croire. La question posée par le vote qui va intervenir est simple : c'est de savoir si le Parlement français prendra ses responsabilités et instaurera de lui-même une telle taxe.
    Il y a évidemment l'argument de confort intellectuel : cette taxe n'est valable que si elle existe à l'échelle planétaire. Encore faut-il qu'à un moment ou à un autre, quelqu'un se décide à commencer ; s'il faut attendre que tout le monde commence, personne ne le fera. Dans bien des domaines, sur bien des sujets de politique internationale, et c'est tout à son honneur, la France a su prendre ses responsabilités, parfois même à contre-courant. Et cela ne manque jamais de susciter des échos.
    Si, en votant cet amendement, nous prenions aujourd'hui la responsabilité d'instaurer cette taxe, nous enverrions un signal positif qui entraînerait inévitablement, par effet de contagion, l'ensemble des autres parlements, au moins dans l'Union européenne. Sans oublier les effets annexes qui en découleraient. Les services de l'Assemblée nationale avaient, à notre demande, calculé les recettes budgétaires que produirait une telle taxe : plus de 80 milliards de francs à l'époque. Quelle fantastique manne budgétaire nous nous offrons là, monsieur le ministre !
    M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.
    M. Didier Migaud. Une petite question au Gouvernement. Le Président de la République avait pris à ce sujet des engagements qu'il a d'ailleurs renouvelés après son élection. Pourquoi le Gouvernement, par la voix du ministre délégué au budget, ne soutient-il pas la proposition formulée le 2 décembre dernier, au nom de la France, par le Président de la République ?
    M. Christian Cabal. Oh !
    M. Didier Migaud. Il me paraît important que le Gouvernement nous réponde sur ce point. Nous sommes sensibles au fait que la France parle d'une seule et même voix. On ne saurait imaginer le Président de la République s'adresser à l'extérieur, au nom du pays, et un gouvernement en total décalage par rapport à ses propositions.
    Nous avons donc besoin de précisions à ce sujet...
    M. Alain Joyandet. Quel numéro !
    M. Didier Migaud. ... pour savoir, au cas où le Gouvernement ne serait pas favorable à cette initiative, quelles mesures il compte prendre pour concrétiser l'engagement solennel du Président de la République à Johannesburg.
    M. Gérard Bapt. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. le ministre. Je considérerai ensuite que l'Assemblée est suffisamment éclairée.
    M. Michel Bouvard. Elle est plus qu'éclairée, elle est illuminée ! (Sourires.)
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je ne voudrais pas laisser naître l'impression que M. Migaud est le gardien des relations entre le Président de la République et le Gouvernement. Je comprends qu'il ait lui-même eu dans le passé quelques difficultés à conserver une certaine unité à la majorité à laquelle il appartenait, mais ce n'est pas le cas de la présente majorité.
    M. Jean-Claude Sandrier. Ce n'est pas une réponse !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le député, vous avez rappelé que le Président de la République avait évoqué l'opportunité de réfléchir à ce type de prélèvement universel sur les mouvements de capitaux. Si nous étions déjà capables, au sein de l'Union européenne, d'adopter une démarche commune sur un tel sujet, ce serait franchement plus opérant que de le faire, comme vous le proposez, au sein d'un parlement national, d'une manière un peu hypocrite - pardonnez-moi de le dire -, comme ce fut le cas récemment lorsqu'il s'est agi de faire en quelque sorte - j'espère que ceux qui nous écoutent ne le prendront pas mal - du journalisme législatif, de proclamer une bonne intention législative,...
    M. Didier Migaud. Et le discours de Johannesburg, c'est quoi ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... en disant que, si le monde entier décidait d'adopter un tel impôt, la France accepterait de se l'appliquer à elle-même.
    M. Didier Migaud. Vous êtes sévère avec le Président de la République !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur Migaud, je ne suis pas sévère : je veux simplement vous dire qu'il ne m'est jamais venu à l'idée, lors de la précédente législature, de vous demander si vous étiez d'accord les uns avec les autres.
    Le Gouvernement, installé récemment, a pris ses responsabilités.
    Il n'a aucune leçon à recevoir de la majorité qui soutenait le précédent gouvernement, en raison de la situation financière dans laquelle nous avons trouvé les comptes publics français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Didier Migaud. Vous l'avez aggravée !
    M. Michel Vaxès et M. Jean-Claude Sandrier. Nous demandons une suspension de séance, monsieur le président !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 192.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. Didier Migaud. C'est scandaleux !
    M. le président. Le vote était déjà appelé !
    Je mets aux voix l'amendement n° 226.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. Michel Vaxès. J'ai demandé une suspension de séance, monsieur le président.
    M. le président. Monsieur Vaxès, vous êtes coauteur de plusieurs amendements et vous aurez donc toute latitude pour vous exprimer. J'attire votre attention sur le fait que nous sommes en fin de séance. La présidence ne manque ni de mansuétude ni de compréhension, mais, si nous voulons que le débat se poursuive normalement, vous pourrez, sans suspension de séance, intervenir à votre guise et faire les digressions que vous souhaitez à propos de l'amendement n° 13. Ne tendons pas une atmosphère qui était excellente depuis hier.
    M. Didier Migaud. C'est vous qui la tendez !
    M. le président. Je ne pense pas tendre l'atmosphère, monsieur Migaud, vos propos sont injustes !
    M. Didier Migaud. Ça se passait très bien !
    M. Michel Vaxès. Il aurait suffi, monsieur le président, que, après l'intervention de M. le ministre...
    M. le président. ... il y ait un orateur pour et un orateur contre, monsieur Vaxès, et c'est bien ce qui s'est passé.
    M. Michel Vaxès. Sans vouloir offenser personne, je remarque que le ton sur lequel le ministre a commenté notre proposition justifiait qu'on nous laisse au moins la possibilité de réagir. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Marc Laffineur. Hypocrisie !
    M. Michel Vaxès. Je vous en prie ! Ce n'est pas nous qui tendons l'atmosphère !
    M. le président. Monsieur Vaxès, je vous propose de poursuivre le débat. Défendez l'amendement n° 13, puis M. Dray pourra répondre, soit à la commission, soit au Gouvernement, ou s'inscrire contre cet amendement. Mais une suspension de séance à dix-huit heures vingt-cinq n'aurait pour effet que de déséquilibrer la fin de la discussion.
    M. Michel Bouvard. Absolument !
    M. Michel Vaxès. C'est M. Sandrier qui va défendre l'amendement n° 13 mais, si vous le permettez, monsieur le président, je dirai deux mots sur ce qui s'est passé à propos de l'amendement précédent.
    La France est un grand pays,...
    M. Michel Bouvard. Jusque-là, nous sommes d'accord !
    M. Michel Vaxès. M. le ministre l'a souligné et nous partageons cette appréciation. On ne peut pas concevoir qu'elle ne soit pas, comme toute son histoire en témoigne, à l'initiative de grandes propositions et de grandes valeurs. Fallait-il attendre, en 1789, l'accord des autres nations pour prendre l'initiative des transformations indispensables qu'attendait notre pays ? Nous ne serions toujours pas en République !
    Oui, la France est un grand pays, et ouvrir en permanence le parapluie de l'Europe, c'est museler l'histoire de notre pays. La qualité, la hauteur et la force des initiatives qu'elle a pu prendre tout au long de son histoire, c'est ça, la tradition française.
    Le gouvernement et le Parlement français s'honoreraient en soutenant une nouvelle fois une proposition visant à réduire les inégalités dans le monde, comme le Président de la République l'a proposé à Johannesburg.
    M. Didier Migaud. Très bien !
    M. le président. MM. Brard, Sandrier, Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 13, ainsi rédigé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - L'article 242 bis du code général des impôts est rétabli dans le texte suivant :
    « Art. 242 bis. - Sans préjudice des dispositions des articles 57 et 238 A, les charges de toute nature payées ou dues par une personne physique ou morale domiciliée ou établie en France à des personnes physiques ou morales qui sont domiciliées ou établies dans un Etat étranger ou un territoire situé hors de France et qui y sont soumises à un régime fiscal privilégié ne sont admises comme charges déductibles pour l'établissement de l'impôt que si elles ont été mentionnées d'une manière détaillée, précise et exacte dans le cadre d'une déclaration spécifique remise à l'administration fiscale, en même temps que la déclaration de leurs résultats et que si celle-ci n'en a pas rejeté le bien fondé dans un délai de six mois.
    « II. - Les dispositions du I s'appliquent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2003. »
    La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
    M. Jean-Claude Sandrier. Cet amendement vise à renforcer la transparence indispensable en matière de déduction des charges pour l'établissement de l'impôt, et à donner au fisc les moyens d'éviter l'évasion fiscale.
    Il prévoit que les charges versées par des entreprises implantées dans des paradis fiscaux ou bénéficiant de régimes fiscaux privilégiés ne seront dorénavant déductibles que si elles ont été communiquées à l'administration fiscale dans le cadre d'une présentation détaillée, versement par versement, sous une forme similaire à celle des mentions expresses au moment de la déclaration des bénéfices de la société ou de la déclaration de revenu pour les sociétés transparentes, et que si l'administration n'en a pas rejeté le principe dans un délai de six mois, sans préjudice d'une éventuelle remise en cause de la déductibilité en cas de renseignements erronés ou inexacts.
    Nous vous proposons d'adopter cet amendement d'assainissement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a émis un avis défavorable à l'adoption de cet amendement dans la mesure où existe d'ores et déjà tout un ensemble de contrôles sur les transferts à l'étranger. Nous avons d'ailleurs eu hier une discussion à propos des transferts d'avoir fiscal. Par ailleurs a été instituée, au sein de la direction des impôts, une direction des grandes entreprises qui a pour mission de suivre, avec encore plus de précision, les différents mouvements qui sont opérés au sein de ces grandes entreprises, en particulier en direction de l'étranger. Les contrôles paraissent aujourd'hui suffisants.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je vais donner quelques informations aux auteurs de cet amendement pour qu'ils soient absolument convaincus que notre dispositif législatif vise tout à fait les objectifs qu'ils ont exprimés. Le droit de déduire les commissions, courtages et autres rémunérations qui sont versés à des tiers, établis ou non dans des paradis fiscaux, est d'ores et déjà subordonné à l'obligation de les mentionner sur une déclaration spéciale à laquelle faisait allusion il y a un instant M. le rapporteur général.
    De plus, lorsque ces charges sont versées à une personne domiciliée dans un pays à fiscalité privilégiée, l'entreprise doit actuellement, pour pouvoir les déduire, apporter la preuve que les dépenses correspondent à des opérations réelles et qu'elles ne sont pas anormales ou exagérées.
    Les services de vérification de la direction générale des impôts sont ainsi, depuis longtemps, mobilisés sur le contrôle de ces versements à destination des paradis fiscaux et sont dotés des outils nécessaires à l'exercice de ce contrôle.
    Eu égard aux informations que je viens de vous donner, je vous propose de retirer votre amendement. A défaut, je serais obligé de demander un rejet.
    M. le président. Monsieur Sandrier, maintenez-vous l'amendement ?
    M. Jean-Claude Sandrier. Oui, monsieur le président.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 175, ainsi libellé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « L'article 242 quater du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Le taux d'impôt prévu au premier alinéa du II de l'article 158 bis est fixé à 5 % pour les crédits d'impôts utilisés à compter du 1er janvier 2002 par une personne morale non résidente, dans le cadre d'une convention fiscale prévue par l'alinéa précédent. »
    La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Cet amendement complète notre gamme de propositions sur l'avoir fiscal. Puisque vous mettez en oeuvre pour les personnes morales une baisse de l'avoir fiscal de 15 à 10 %, nous proposons de le réduire à 5 % pour les personnes morales non résidentes en France. Sachant que cette proposition ne peut se concrétiser qu'à partir d'une convention fiscale, nous suggérons de l'intégrer dans ce cadre. Ainsi, nous diminuerons l'avantage injustifié constitué par le mécanisme de l'avoir fiscal.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.
    Nous avons examiné un amendement semblable mercredi soir. J'ai rappelé à cette occasion que l'avoir fiscal pour les personnes morales a fortement diminué depuis quelques années. Une nouvelle diminution sera opérée en 2003. Ces diminutions sont liées au fait qu'il fallait contenir le montant des transferts au titre de l'avoir fiscal, car il avait sensiblement augmenté il y a quelques années. M. le ministre nous a indiqué mercredi que, en tout état de cause, une réflexion allait être engagée dans le courant de l'année 2003 pour conduire à une véritable réforme, si ce n'est à la suppression de l'avoir fiscal et du précompte.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Même avis que la commission. Nous nous sommes longuement expliqués sur ce sujet mercredi.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 175.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. L'amendement n° 141 n'est pas soutenu.
    M. Hillmeyer a présenté un amendement, n° 137, ainsi libellé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - L'article 719 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Le paiement des droits d'enregistrement peut être fractionné selon les modalités fixées par décret. »
    « II. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés par les articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Maurice Leroy.
    M. Maurice Leroy. Les cessions de fonds de commerce et opérations assimilées sont en principe constatées par un acte qui doit être enregistré dans le mois de sa date. Conformément au principe général qui prévaut, le droit doit être intégralement acquitté avant l'enregistrement. Pour l'acquéreur, le paiement de cet impôt de 4,8 % sur la fraction du prix excédant 32 000 euros à compter du 1er janvier 2002 peut constituer un frein à la reprise d'une entreprise.
    Chaque année, 30 000 entreprises artisanales périclitent faute de repreneur. Les chambres de métiers et les chambres professionnelles nous transmettent régulièrement des informations sur le problème posé par le paiement immédiat des droits d'enregistrement. Pour l'acquéreur, je l'ai dit, le paiement de cet impôt constitue souvent un frein à la reprise d'une entreprise, et certains repreneurs ne disposent pas toujours d'une trésorerie suffisante à la date de la reprise. Voilà pourquoi notre collègue Francis Hillmeyer a proposé l'amendement n° 137, que je défends et qui a pour objet de fractionner le paiement de ces droits.
    Ce dispositif existe déjà pour les acquisitions d'entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire et en cas de mutation par décès. Il ne s'agit donc pas de réduire une recette fiscale, mais d'étaler son recouvrement. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, si je défends volontiers l'amendement de Francis Hillmeyer, c'est que j'aimerais que vous nous apportiez quelques précisions sur le projet de loi en cours d'élaboration que va défendre votre collègue Renaud Dutreil. D'après les informations en provenance des chambres professionnelles et des chambres consulaires, rien ne serait prévu pour le moment à cet égard dans le projet de loi. Nous entendons donc alerter le Gouvernement. En fonction de vos réponses, monsieur le ministre, je suis prêt à retirer cet amendement, mais nous aimerions faire progresser ce dossier récurrent, qui devrait recueillir l'assentiment général.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a rejeté cet amendement tout en étant très attentive au problème général des cessions de fonds de commerce. Elle a en particulier repoussé les amendements qui portaient sur l'augmentation du seuil en deçà duquel la plus-value n'est pas imposée, pour une raison simple : ce problème sera traité dans le cadre du projet de loi « Agir pour l'initiative économique ».
    M. Maurice Leroy. S'il est certain que ce sera traité...
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Le ministre nous l'a assuré avant-hier soir.
    En revanche, la commission n'a pas jugé utile de reprendre l'idée du paiement fractionné des droits d'enregistrement à l'occasion de la transmission, car le problème est différent. Ces droits ont en effet été très sensiblement réduits depuis 2000. Il est possible que cette réduction ne soit pas encore totalement entrée dans les esprits, mais elle est importante puisque les droits sont passés de 6 % à 4,8 %. C'est un allégement considérable et il faut laisser passer un peu de temps pour en voir l'effet. Il serait prématuré d'envisager dès maintenant un paiement fractionné de ces droits d'enregistrement.
    La commission a donc émis un avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je confirme simplement que, depuis la baisse très substantielle des droits de mutation à titre onéreux des fonds de commerce, nous ne rencontrons plus vraiment de difficultés. Monsieur Leroy, au bénéfice des explications qui vous ont été données, je propose que vous retiriez cet amendement.
    M. Maurice Leroy. Je le retire.
    M. le président. L'amendement n° 137 est retiré.
    M. le président. MM. Vaxès, Brard, Sandrier et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 102, ainsi libellé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - Le dernier alinéa de l'article 885 A du code général des impôts est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
    « Les biens professionnels définis aux articles 885 N à 885 Q du code général des impôts sont pris en compte pour l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune.
    « Lorsque le patrimoine comprend des biens professionnels, le plancher à partir duquel le tarif de l'impôt est applicable est porté à 914 694,10 euros.
    « II. - Après l'article 885 U du même code, il est inséré un article 885 U bis ainsi rédigé :
    « Art. 885 U bis. - Les biens professionnels sont inclus dans les bases de l'impôt pour 50 % de leur valeur. Le taux d'intégration varie pour chaque contribuable en fonction de l'évolution du ratio masse salariale/valeur ajoutée des sociétés et entreprises où sont situés les biens professionnels qu'ils possèdent sur la base suivante :

EVOLUTION DU RATIO
Masse salariale/valeur ajoutée
POURCENTAGE
taux d'intégration
Egale ou supérieure à une évolution de 2 points 15
Egale ou supérieure à une évolution de 1 point 35
Egale à 1 50
Entre 1 et - 1 65
Entre - 1 et - 2 85
Entre - 2 et - 3 100
Entre - 3 et - 4 et au-delà 125
    « Un décret d'application visera à prévenir les tentatives d'utiliser ce système de modulation pour essayer de diminuer de façon injustifiée la contribution à l'ISF. »

    La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
    M. Jean-Claude Sandrier. Il s'agit, avec cet amendement, de prendre en compte les biens professionnels dans l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune, comme cela se fait dans divers pays de l'Union européenne. Il est aujourd'hui nécessaire de moderniser cet impôt, notamment en tenant compte de la manière dont se constituent les grands patrimoines, et de l'adapter aux réalités économiques du moment. C'est pourquoi nous proposons une nouvelle logique d'imposition des grandes fortunes, en plaçant leurs détenteurs face à une responsabilité sociale et nationale vis-à-vis de l'emploi.
    Nous préconisons d'abord le principe d'un abattement de base suffisant pour assurer l'exonération de la plupart des travailleurs indépendants des PME et des PMI.
    Nous proposons ensuite d'intégrer les biens professionnels pour le calcul de l'ISF à hauteur de 50 % de leur valeur, en modulant le taux d'intégration en fonction des choix faits par l'entreprise en matière d'emploi et de salaires. Cette modulation répondrait au souci de renforcer l'efficacité de l'incitation fiscale pour l'emploi.
    C'est dans cet esprit que nous proposons l'inscription des actifs financiers dans l'assiette de la taxe professionnelle ou l'introduction d'une modulation de l'impôt sur les sociétés. Avec notre proposition, l'impôt payé par les entreprises serait alourdi lorsque les bénéfices imposés ont pour origine une croissance purement financière, ou au contraire allégé quand ces bénéfices sont engendrés par une croissance réelle, riche en emplois qualifiés.
    Cette réforme de l'ISF participe de notre volonté de servir le progrès social et l'activité économique réelle pour l'emploi.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable. Cet amendement extrêmement complexe fait varier la plus ou moins grande prise en compte des biens professionnels en fonction d'un ratio qui compare la masse salariale à la valeur ajoutée. Autant dire que la base varierait grandement d'une année à l'autre, ce qui serait un facteur d'incertitude supplémentaire. Au moment où nous nous interrogeons sur les risques que font peser certains mécanismes de l'ISF et de la fiscalité, en termes de délocalisation des emplois et de non-attractivité de notre territoire, il nous paraît beaucoup plus sage de rejeter cet amendement.
    M. Jean-Claude Sandrier. Pourtant, il vise à écarter ces risques !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Déforable également.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 102.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Brard, Sandrier, Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 6, ainsi libellé :
    « I. - Dans le premier alinéa de l'article 885 I du code général des impôts, après le mot : "collection, sont insérés les mots : "visés à l'article 795 A ou présentés au moins trois mois par an au public dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, les objets d'art dont le créateur est vivant au 1er janvier de l'année d'imposition. »
    « II. - L'article 885 I du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Le décret en Conseil d'Etat prévu au premier alinéa détermine notamment les conditions dans lesquelles les contribuables peuvent justifier que les objets qu'ils détiennent sont présentés au public ainsi que les modalités selon lesquelles ils peuvent souscrire une convention décennale avec les ministres chargés de la culture et des finances. »
    « III. - L'article 885 S du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « La valeur des objets d'antiquité, d'art ou de collection autres que ceux exonérés en application de l'article 885 I est réputée égale à 3 % de l'ensemble des autres valeurs mobilières et immobilières du patrimoine déclaré. Les redevables peuvent cependant apporter la preuve d'une valeur inférieure en joignant à leur déclaration les éléments justificatifs de la valeur des biens en cause. »
    La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Cet amendement devient un classique. Il a déjà été adopté l'an passé en commission et en séance publiques,et il est toujours d'une grande actualité.
    Dans un souci de justice fiscale, il est soigneusement ciblé pour éviter tout effet collatéral indésirable.
    Dans un souci d'équité et de transparence, il tend à intégrer les oeuvres d'art ainsi que les objets d'antiquité et de collection dans l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune en ne maintenant l'exonération actuelle que pour les biens meubles qui constituent le complément artistique des immeubles classés ou inscrits à l'inventaire supplémentaire des Monuments historiques, pour les oeuvres présentées au public ainsi que pour les oeuvres des artistes contemporains encore en vie.
    L'exonération des deux premières catégories de biens tend à permettre au public d'accéder aux oeuvres des collections privées.
    L'exonération de la dernière catégorie vise à vivifier le marché de l'art en relançant l'intérêt des investisseurs pour les oeuvres contemporaines les plus récentes. Elle devrait également favoriser les acquisitions auprès des jeunes créateurs, pour lesquels la politique d'acquisition publique et le mécénat d'entreprise sont loin de représenter une aide suffisante.
    S'agissant de la présentation des oeuvres au public, l'amendement propose de fixer une durée minimale de trois mois par an et de renvoyer les modalités précises d'exposition à un décret en Conseil d'Etat, tant il est délicat de les définir toutes.
    Il prévoit également que des conventions décennales pourront être conclues entre le propriétaire et les administrations culturelles et fiscales. Cette formule devrait notamment intéresser les grandes collections privées, ainsi que les oeuvres majeures détenues par des particuliers.
    En ce qui concerne les modalités d'évaluation des oeuvres, dans le souci de donner au dispositif une certaine souplesse, il est proposé de laisser au contribuable la possibilité d'opter entre une évaluation forfaitaire égale à 3 % du patrimoine taxable à l'ISF et une évaluation selon la valeur vénale, si celle-ci est inférieure.
    Il s'agit donc, vous le voyez, d'un texte peaufiné, équilibré, mais on n'en attendait pas moins d'un amendement présenté par notre collègue Jean-Pierre Brard.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a rejeté cet amendement, qui est en effet un grand classique, vous avez eu raison, mon cher collègue, de le souligner. Nous nous souvenons encore des accents éloquents de notre collègue Jean-Pierre Brard lorsqu'il nous proposait d'adopter un tel amendement. Je rappelle d'ailleurs que cela a été le cas à deux reprises, non seulement en commission mais aussi en séance publique. L'an dernier, il n'a été adopté qu'en commission mais, il y a deux ou trois ans, le Gouvernement avait dû recourir au vote bloqué pour se sortir d'une situation difficile pour lui.
    M. Maurice Leroy. C'est vrai.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Sur cette question, nous sommes donc restés dans le droit-fil ; la commission a rejeté cet amendement.
    M. Maurice Leroy. Très bien !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. C'est une bonne idée de rejeter cet amendement. (Sourires.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Albertini, de Courson, Maurice Leroy, Perruchot et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement, n° 150, ainsi libellé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - Après l'article 885 L du code général des impôts est inséré un article 885 L bis ainsi rédigé :
    « Art. 885 L bis. - Sont exonérées d'impôt de solidarité sur la fortune, à concurrence de la moitié de leur valeur, les parts et les actions qui font l'objet d'un engagement de conservation des titres, tel que visé aux articles 789 A et B du code général des impôts ».
    « II. - La perte de ressources pour le budget de l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Maurice Leroy.
    M. Maurice Leroy. Cet amendement a pour objet de mettre fin à la vente de nos entreprises patrimoniales, qui devient pour notre pays une véritable hémorragie. A cette fin, il introduit un abattement de 50 % sur les parts et les actions que les dirigeants et les salariés de ces entreprises se sont engagés à conserver pendant un certain nombre d'années, dans le cadre d'un pacte d'entreprise.
    En effet, la pérennité des entreprises patrimoniales françaises a été fiscalement interdite, je n'hésite pas à le dire, par le doublement, en 1983, des droits de succession, portés à 40 % en ligne directe, ce qui constitue un record mondial. Depuis, notre pays connaît une grave perte de ses meilleures entreprises patrimoniales, celles dont les dirigeants possèdent une part significative du capital.
    Pourtant, l'accord est unanime sur les performances de ces entreprises et leur utilité pour notre économie et nos emplois. Vingt-six d'entre elles figurent parmi les cent premières entreprises françaises, dont elles représentent 27 % des effectifs et réalisent 28 % du chiffre d'affaires.
    On estime souvent la création d'un emploi nouveau à quelque 100 000 euros ; le coût de notre proposition d'exonération, 50 millions d'euros au maximum, correspond au coût de la création de 500 emplois seulement alors qu'elle en sauverait sûrement plusieurs milliers.
    Tels sont les arguments qu'aurait sans doute avancés notre collègue Charles de Courson s'il avait pu être parmi nous.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cet amendement transpose en fait à l'ISF un dispositif analogue introduit il y a trois ans par notre collègue Didier Migaud, qui concernait les droits de succession.
    M. Maurice Leroy. Tout à fait !
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission souhaite que la réflexion sur l'assujettissement des biens professionnels à l'ISF se fasse dans un cadre global, bien délimité, l'idée de base étant d'améliorer l'attractivité de notre territoire. Le ministre nous a assuré que cette réflexion globale pourrait avoir lieu dès le début de l'année prochaine. Dans ces conditions, la commission a préféré rejeter l'amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Nous avons évoqué hier ce très important sujet, sur lequel il est bon de revenir.
    Un dispositif analogue a été introduit dans le droit existant par le précédent gouvernement, qui concerne les droits de mutation par décès. Cela montre qu'il y a un vrai enjeu pour l'avenir économique de notre pays. Votre raisonnement, monsieur le député, consiste à dire : en adaptant ce dispositif à l'ISF, on résoudra peut-être le problème.
    A ce stade, je ne saurais vous dire si c'est la meilleure solution. Cela étant, il est clair que la sauvegarde de nos entreprises et de nos emplois constitue une réelle préoccupation. S'il est vrai que, dans le droit existant, les actions et parts sociales sont exonérées lorsqu'elles constituent pour leurs porteurs des biens professionnels, cela n'est pas le cas pour tous les actionnaires. Ce n'est pas le cas, notamment, pour les actionnaires « familiaux ». Ceux-ci détiennent leurs titres non seulement pour que l'entreprise reste dans la famille, mais plus généralement pour qu'elle reste en France. Et cela est vrai pour des entreprises qui peuvent être très importantes. J'ai rencontré l'autre jour le président d'une entreprise détenue par un groupe familial depuis 160 ans, et dont les membres actuels constituent la sixième génération. Naturellement, au terme de la sixième génération, le lien familial, sans être tout à fait distendu, est tout de même un peu ténu. Et certains redevables de l'ISF sont très tentés de céder leurs titres. S'ils venaient à les céder collectivement, c'est tout le contrôle de l'entreprise qui serait en péril. Ce n'est pas seulement un danger immédiat pour ceux qui exercent ce contrôle aujourd'hui, mais un danger pour notre pays. Car lorsqu'une entreprise comme celle-ci, une entreprise française leader mondial sur son marché, risque de passer sous contrôle extérieur - je n'ose pas dire étranger, car nous avons tous l'esprit européen, mais nous sommes aussi attachés à notre pays -, c'est à terme la question de la localisation des activités elles-mêmes, et donc des emplois, qui est posée.
    Par conséquent, il faut absolument traiter ce sujet, même s'il est de bon ton de dire qu'il est « délicat ». Ce n'est pas parce qu'il est délicat qu'il ne faut pas le traiter. Et il fera l'objet d'un examen complet au cours de l'année 2003. Je tiens à vous rappeler que le présent gouvernement a eu à peu près un mois pour élaborer le projet de budget qui vous est soumis. J'envisage de consacrer l'année 2003 à un travail très exhaustif sur la fiscalité du patrimoine en général, qu'il s'agisse de la détention ou de la transmission, cette question devant être aussi abordée sous l'angle de l'emploi. Il n'est pas impossible que certaines dispositions puissent être introduites dans le texte qui sera présenté par mon collègue Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. L'enjeu, c'est la place de l'entreprise en France, son avenir, sa solidité et sa capacité à être créatrice d'emplois. Il est donc très possible, monsieur Leroy, qu'un dispositif comme celui auquel vous songez puisse être introduit à cette occasion. Mais, à ce stade, je ne peux pas vous apporter de garanties concernant tous les éléments du texte qui vous sera proposé au début de l'année prochaine. Cela dit, je prends l'engagement, pour ma part, de mener un travail en profondeur sur ce sujet au cours de l'année 2003, afin que nous puissions traiter ce problème dans le projet de loi de finances pour 2004.
    Sous le bénéfice de ces observations - et je crois vraiment que, sur ce sujet, j'ai toujours essayé d'être le plus clair et le plus sincère possible -, je vous demande de me faire confiance, et si vous vouliez bien retirer votre amendement, cela m'éviterait de demander son rejet, ce qui serait désagréable pour moi.
    M. le président. La parole est à M. Maurice Leroy.
    M. Maurice Leroy. Monsieur le ministre, j'accède volontiers à votre demande et je voudrais vous remercier, au nom du groupe UDF, et de Charles de Courson en particulier, de votre réponse approfondie, argumentée et très charpentée sur ce sujet important, de même que je remercie notre rapporteur général, Gilles Carrez.
    Je souhaite vraiment que notre collègue Charles de Courson puisse être associé à la réflexion ministérielle sur ce sujet, parce qu'il y a beaucoup travaillé.
    M. Gérard Bapt. Faisons-le entrer au Gouvernement, ce serait plus simple !
    M. Maurice Leroy. Je voulais simplement faire cette suggestion. Cela dit, et sous le bénéfice de vos observations, monsieur le ministre, je retire volontiers l'amendement, dont vous avez sans doute compris que le but essentiel était de faire avancer le débat.
    M. le président. L'amendement n° 150 est retiré.
    M. Myard a présenté un amendement n° 59, ainsi libellé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - Le dernier alinéa de l'article 885 S du code général des impôts est supprimé.
    « II. - Après l'article 885 I du code général des impôts, il est inséré un article 885 I bis ainsi rédigé :
    « Art. 885 I bis. - « La résidence principale n'est pas comprise dans les bases d'imposition à l'impôt de solidarité sur la fortune ».
    « III. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une augmentation des droits sur les tabacs prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Chomard.
    M. Jean-Yves Chomard. L'amendement est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a donné un avis défavorable à cet amendement qui appelle quelques commentaires.
    Je donnerai quelques chiffres qui parlent d'eux-mêmes. Entre 1997 et 2002, 100 000 contribuables supplémentaires sont entrés dans le champ de l'ISF. On est ainsi passé de 170 000 à 270 000 assujettis, essentiellement à cause de ce qu'on peut appeler « l'effet résidence principale ». Le barème n'a pas été révisé et, du fait de l'augmentation rapide - en tout cas dans les grandes villes, par exemple dans la région parisienne - des prix de l'immobilier, le seuil à partir duquel on est assujetti à l'ISF, 750 000 euros, peut être atteint assez rapidement.
    S'agissant de l'ISF, nous connaissons ses effets pervers sur l'attractivité du territoire. Le projet de loi « Agir pour l'initiative économique » nous donnera l'occasion d'améliorer, par un certain nombre de dispositions, notre fiscalité, et d'éviter les risques de délocalisation des emplois, ce qui est une priorité absolue. Mais cette question de la résidence principale reste posée, monsieur le ministre, et il faut absolument la régler.
    Un autre chiffre est parlant. Entre 2001 et 2002, le produit de l'ISF a diminué ; par contre, le nombre de contribuables a augmenté. On voit là très nettement l'effet résidence principale. Beaucoup de contribuables qui n'ont pas une fortune démesurée entrent dans le champ de l'ISF uniquement à cause de leur habitation. C'est un des problèmes sur lesquels il faudra inévitablement réfléchir pendant l'année 2003 pour lui trouver une solution.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Ce que le rapporteur général vient de dire montre que l'impôt de détention pose un immense problème dès lors que le bien détenu n'est pas générateur de revenus. Certes, le fait de ne pas avoir à se loger ailleurs peut être évalué mais, lorsqu'un bien n'est pas générateur de revenus et qu'il est générateur de charges fiscales qui deviennent lourdes - ce peut être le cas, par exemple, parce que, par les hasards de l'histoire, le bien a une valeur vénale non négligeable -, le détenteur de ce patrimoine n'a que deux solutions : s'acquitter de l'impôt s'il a des ressources personnelles qui le lui permettent, ou, sinon, vendre son bien. Tous ces problèmes doivent être examinés dans le cadre de la réflexion sur la fiscalité du patrimoine que je souhaite engager. On voit bien que la situation est différente selon qu'il s'agit d'une entreprise - et là, l'objectif est de sauvegarder l'emploi dans notre pays - ou de la résidence principale, auquel cas il s'agit de concilier équité fiscale et « soutenabilité » fiscale.
    D'un autre côté, il ne faudrait pas qu'on en arrive à une situation où il n'y aurait plus d'assiette du tout. Vous voyez bien la difficulté à laquelle nous sommes confrontés. Cela suppose que nous puissions réunir toutes les bonnes volontés pour la résoudre ; c'est ce que je m'apprête à faire pour l'année 2003.
    M. Jean-Yves Chamard. Je retire l'amendement, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 59 est retiré.
    L'amendement n° 127 de M. Suguenot n'est pas défendu.
    MM. Marleix, Auberger et Mariton ont présenté un amendement, n° 57, ainsi libellé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. L'article 885 P du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Les mises à disposition de biens donnés à bail à long terme dans les conditions susvisées et réalisées conformément aux dispositions des articles L. 411-37 ou L. 323-14 du code rural ne remettent pas en cause la qualification de biens professionnels. »
    « II. « La perte des recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts ». »
    La parole est à M. Michel Bouvard, pour soutenir cet amendement.
    M. Michel Bouvard. Il est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je me suis longuement expliqué sur ce sujet. Défavorable également.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 57.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Kert a présenté un amendement, n° 64 rectifié, ainsi rédigé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. L'article 1594 F bis du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
    « Art. 1594 F bis. Sous réserve des dispositions de l'article 1020 du présent code, les ventes d'immeubles par les particuliers sont partiellement exonérées, dans des conditions fixées par décret, des droits et taxes d'enregistrement à condition :
    « a. qu'ils se conforment aux obligations particulières qui leur sont faites par l'article 290 ;
    « b. qu'ils puissent attester ou faire attester de leur mutation professionnelle ou celle de leur conjoint dans un délai de trois ans et à une distance d'au moins 100 km du lieu de leur domicile ;
    « c. qu'ils attestent que cette transaction porte sur leur résidence principale. »
    « II. La perte de recettes pour l'Etat est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle sur les droits visés aux articles 575 A et suivants du code général des impôts. »
    La parole est à M. Claude Gatignol, pour soutenir cet amendement.
    M. Claude Gatignol. Un certain nombre de familles sont appelées à déménager fréquemment en raison de leur emploi : il s'agit généralement de jeunes foyers. C'est pourquoi un allégement des droits d'enregistrement sur les ventes de biens immobiliers pour ces personnes serait nécessaire. Toutefois, pour éviter qu'une telle disposition ne favorise une certaine spéculation immobilière, il convient de l'encadrer strictement.
    Nous savons que ces fameux droits d'enregistrement sont coûteux. Je précise, monsieur le ministre, qu'il s'agit bien des droits fiscaux : il ne s'agit pas de faire un amalgame avec la rémunération justifiée des actes notariés.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, en prenant notamment en considération le fait que ce problème, qui était très grave il y a quelques années, a été en partie résolu par les baisses successives intervenues sur les droits de mutation, notamment à partir de 1996.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable également.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 64 rectifié.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 42 rectifié et 22, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 42 rectifié, présenté par M. Carrez, rapporteur général, M. Martin-Lalande et M. Joyandet, est ainsi libellé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - Le I de l'article L. 33-1 du code des postes et des télécommunications est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
    « Les exploitants de réseaux de télécommunication par satellite ouverts au public sont exonérés de toute redevance de mise à disposition et de gestion de fréquences radioélectriques lorsque celles-ci sont affectées à un service de communication électronique utilisant des antennes paraboliques bi-directionnelles d'une puissance de transmission inférieure à deux watts. »
    « II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits de consommation sur les tabacs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    L'amendement n° 22, présenté par M. Micaux, est ainsi libellé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - L'article 45 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986) est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
    « IX. - Les exploitants de réseaux de télécommunications par satellite ouverts au public sont exonérés de toute redevance de mise à disposition et de gestion de fréquences radioélectriques lorsque celles-ci sont affectées à un service de communication électronique utilisant des antennes paraboliques bidirectionnelles d'une puissance de transmission inférieure à deux watts. »
    « II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. le rapporteur général pour soutenir l'amendement n° 42 rectifié.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cet amendement de M. Martin-Lalande a été approuvé à l'unanimité par la commission. Je le défends en son absence, comme il me l'a demandé.
    La redevance de mise à disposition et la redevance de gestion risquent d'entraver la diffusion de l'Internet à haut débit. Il ne s'agit pas, en l'occurrence, de l'Internet à haut débit au bénéfice des entreprises, mais au bénéfice des particuliers. Il nous a donc semblé qu'il fallait absolument encourager la diffusion de ce type de technologie.
    M. le président. L'amendement n° 22 de M. Micaux n'est pas soutenu.
    Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 42 rectifié ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Pour être, comme Alain Joyandet, un gros utilisateur des technologies de l'information et de la communication, je suis très favorable à leur développement, en particulier dans le secteur rural, puisque c'est le moyen d'effacer toute distance entre les lieux où ces technologies sont utilisées et le reste du monde.
    M. Maurice Leroy. Très bien !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Cela étant, monsieur le rapporteur général, je vous demande, de même que je l'ai demandé à M. Martin-Lalande avant qu'il ne quitte l'hémicycle, et après l'avoir informé de ma position, de m'accorder la faveur de me laisser du temps, c'est-à-dire jusqu'à l'examen de la prochaine loi de finances rectificative, pour répondre à la préoccupation que vous exprimez à travers cet amendement, dont la rédaction, au demeurant, ne me paraît pas satisfaisante.
    Toutefois, désireux de montrer ma détermination en la matière, je m'engage à examiner avec tous les membres de l'Assemblée sensibilisés par le développement de l'Internet en zone rurale, en particulier avec M. Martin-Lalande, qui est l'auteur de cet amendement, dans quelles conditions cette question pourrait être résolue de façon satisfaisante, ce qui ne passe pas obligatoirement par la solution proposée par l'amendement.
    Bref, monsieur le rapporteur général, puisque nous sommes de toute façon appelés à nous revoir, je vous demande de me laisser le temps de travailler sur ce sujet jusqu'au moment où le collectif sera présenté.
    M. le président. La parole est M. Michel Bouvard.
    M. Michel Bouvard. Monsieur le ministre, je me réjouis de votre approche positive sur ce problème, dont la solution permettrait d'éviter que ne se produise dans notre pays ce que l'on a coutume d'appeler une fracture numérique, et que ne se crée une France à deux vitesses.
    Au début, le développement de l'Internet a fait naître beaucoup d'espoirs, car ce système a été perçu comme un moyen de réduire les distances et de permettre aux territoires ruraux, notamment ceux de montagne, de combler leur handicap. Toutefois, on s'est aperçu très rapidement que, pour que ce handicap soit comblé, il fallait avoir accès au haut débit afin de travailler dans des conditions satisfaisantes et échanger des volumes significatifs.
    La solution proposée par Patrice Martin-Lalande est très intéressante et c'est la raison pour laquelle la commission l'a adoptée. Il n'en reste pas moins qu'il existe également d'autres voies qui méritent d'être explorées sérieusement par le Gouvernement.
    Au terme d'un échange de plusieurs mois avec le ministre de l'industrie, je voudrais appeler votre attention, monsieur le ministre, sur le problème que pose, alors qu'il s'agit de satisfaire des besoins de service public, l'accès aux réseaux de fibres optiques développés par le secteur autoroutier, qui est pourtant concessionnaire de service public. Aujourd'hui, nous sommes face à un paradoxe. Dans un certain nombre de territoires, les réseaux de fibre optique réalisés par des sociétés d'autoroute dans lesquelles les capitaux publics sont majoritaires ne sont pas entièrement occupés par les besoins des grands opérateurs qui les louent. Et pourtant, ces réseaux ne sont pas accessibles pour les besoins de service public, car leur accès est conditionné soit par l'achat d'une fibre au même prix que celui que paient les opérateurs traditionnels comme LDcom ou France-Télécom, soit par la location de la fibre dans les mêmes conditions que celles qui sont accordées auxdits opérateurs, ce qui est hors de portée des moyens financiers des collectivités locales.
    Certes, aux termes d'une loi précédemment votée ici sur laquelle nous avons tous beaucoup travaillé, il est possible de procéder à des branchements et à des raccordements sur ces réseaux que l'on a coutume d'appeler « les autoroutes de l'information », mais encore faut-il que le coût d'accès au réseau ne soit pas prohibitif.
    Je souhaite donc que le Gouvernement envisage de réserver un certain volume de transit pour les besoins de service public au niveau local, pour les besoins culturels, pour les besoins des écoles, à des conditions tarifaires qui soient abordables. Il s'agit d'un véritable défi à relever, mais je crois que, ajoutée aux mesures satellitaires, l'utilisation des réseaux installés sur le domaine autoroutier permettrait déjà d'assurer un maillage du territoire intéressant.
    M. le président. La parole est à M. Alain Joyandet.
    M. Alain Joyandet. Je souhaite, en tant que cosignataire de cet amendement, apporter quelques informations complémentaires.
    D'abord, je voudrais souligner que l'amendement n'a pas de coût pour la collectivité, puisque cette technologie n'est pas encore en place.
    Ensuite, je comprends la réticence de M. le ministre quant à la rédaction de cet amendement : celle-ci peut effectivement poser quelques problèmes. Cependant, je ne voudrais pas qu'après la réflexion promise l'intervention de certains opérateurs fasse que nous en restions là !
    Nombre de territoires sont dans une situation intenable : des intervenants refusent d'y installer ces technologies parce que ce n'est pas rentable, ...
    M. Michel Bouvard. Très juste !
    M. Alain Joyandet. ... et chaque fois qu'on propose d'y implanter une technologie nouvelle, il y a toujours une bonne raison de refuser de le faire.
    M. Didier Migaud et M. Augustin Bonrepaux. Vous avez raison !
    M. Alain Joyandet. C'est bien de réfléchir, mais il ne faudrait pas que ceux qui ne font rien ou qui ne veulent rien faire, ou qui ne peuvent rien faire, empêchent les autres de prendre des initiatives et de proposer des solutions de substitution.
    M. Michel Bouvard. Très juste !
    M. Alain Joyandet. Car il faut savoir que, actuellement, même s'il y a carence, la collectivité publique ne peut rien faire ; du reste, ce n'est pas forcément son travail.
    Cela dit, on voit bien qu'il existe une opposition généralisée à la mise en oeuvre de technologies de substitution ou de technologies annexes. Pourtant, ce ne sont pas des technologies qui vont mettre en difficulté les grands groupes. Il faut tout de même que nous puissions utiliser les technologies nouvelles là où nous ne pouvons pas faire autrement.
    Par exemple, l'une d'elles, très intéressante, autorise l'aller et le retour par satellite, ce qui présente un grand intérêt pour les zones de montagne.
    M. Michel Bouvard. Merci de vous intéresser à la montagne !
    M. Alain Joyandet. Grâce à cette technologie, il n'y a plus besoin de liaison filaire terrestre ou de liaison hertzienne, lesquelles, nous le savons, posent toutes les deux des problèmes.
    M. Michel Bouvard. Bien sûr !
    M. Alain Joyandet. Ce système doit être encouragé au profit de tous les groupes scolaires situés dans les zones rurales, au profit des collectivités, bref de tous ceux qui, pour l'instant, ont des difficultés à avoir accès à l'information et au savoir, qui est un droit pour tous et permet le développement personnel et le développement économique des territoires.
    Même si un délai de réflexion est nécessaire, vous devez absolument, monsieur le ministre, prendre l'engagement que nous puissions installer des systèmes de substitution dans nos territoires pour lutter contre la fracture numérique. L'enjeu est d'intérêt national. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française, ainsi que sur de nombreux bancs du groupe socialiste.)

    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Alain Joyandet, éminent ancien commissaire aux finances de la Haute assemblée, ne pourra laisser croire à l'Assemblée nationale que l'ancien président de sa commission utilise des manoeuvres dilatoires.
    M. Alain Joyandet. Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Si j'ai sollicité du temps, c'est bien parce que j'ai l'intention de travailler sur ce sujet.
    Comme l'a souligné Michel Bouvard, il existe toute une offre de haut débit qui n'est pas utilisée,...
    M. Maurice Leroy. Bien sûr !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. ... celle des autoroutes, mais aussi celle de la SNCF ou d'EDF. Presque toutes les entreprises à réseau ont constitué leurs infrastructures, leurs réseaux de fibre optique. Ce qui manque, c'est parfois un partenaire local qui puisse organiser la distribution du haut débit, car, pour l'instant, ces entreprises ne jugent pas économiquement rentable de gérer la distribution.
    M. Michel Bouvard. Le problème, c'est le coût d'accès !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je voudrais étudier attentivement comment il serait possible, en accord avec les collectivités territoriales, d'organiser cette offre afin qu'elle puisse être utilisée.
    Mesdames, messieurs les députés, c'est là un enjeu considérable. Historiquement, il n'y a pas eu de telle solution pour désenclaver le territoire depuis les grandes infrastructures routières ou ferroviaires, et pour un coût très modéré. Il faut que nous prenions la mesure de cet enjeu. C'est pourquoi je pense qu'il ne serait pas opportun d'adopter ce soir un amendement imparfait.
    Vous savez combien je suis attaché à la qualité de la norme. Lorsque nous gravons un texte dans le marbre de la loi, il faut vraiment qu'il puisse être appliqué immédiatement.
    Cela étant, je prends sous vos yeux l'engagement d'avancer, et je sais que vous ne me lâcherez pas.
    M. le président. En raison de l'importance du sujet, je donne la parole à titre exceptionnel à M. Michel Bouvard.
    M. Michel Bouvard. Monsieur le président, je n'en abuserai pas.
    Un certain nombre d'entre nous étaient au congrès de l'Association nationale des élus de la montagne, à Remiremont, il y a deux ans.
    M. Didier Migaud. Tout à fait !
    M. Michel Bouvard. M. Christian Pierret, ministre de l'industrie, et M. Poncelet, président du Sénat, étaient présents. Nous avons consacré une partie de ce congrès à évoquer l'enjeu que représentent le numérique et le haut débit pour les territoires de montagne. On nous avait promis une loi et le ministre de l'industrie avait même commencé la concertation. Mais, depuis deux ans, on n'a pas avancé.
    M. Didier Migaud. M. Pierret n'a pas eu le temps !
    M. Michel Bouvard. En tout cas, moi qui suis frontalier, j'observe que la SITAF, la société italienne du tunnel du Fréjus, qui exploite une autoroute entre la frontière française et Turin, peut faire des choses que la SFTRF, la société équivalente du côté français, n'a pas le droit de faire pour respecter le droit français de la concurrence.
    Il y a vraiment urgence. Nous avons bien compris qu'un délai de réflexion supplémentaire était nécessaire, mais n'oubliez pas que le problème n'est pas purement fiscal. Ce qui est en jeu, c'est l'attractivité des territoires de montagne,...
    M. Didier Migaud. Tout à fait !
    M. Michel Bouvard. ... des territoires désenclavés, mais aussi du territoire français dans son ensemble. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. J'ai bien noté, monsieur le ministre, que vous vous étiez engagé à ce que cette proposition soit réexaminée dès le collectif de fin d'année. Dans ces conditions, je suis prêt, au nom de la commission des finances, à retirer l'amendement n° 42 rectifié, sous réserve de l'accord de M. Alain Joyandet, qui, avec Patrice Martin-Lalande, a beaucoup travaillé sur ces questions.
    M. le président. La parole est à M. Alain Joyandet.
    M. Alain Joyandet. Monsieur le ministre, si la réflexion n'a pour but que de peaufiner la rédaction de cet amendement afin de trouver le meilleur moyen de mettre en place le dispositif proposé par les industriels, j'y souscris. Mais s'il s'agit de replacer cette proposition dans le cadre du contexte d'ensemble de la diffusion du numérique, de tenir compte de l'existence des câbles qui ont été tirés ici ou là, des potentiels non utilisés, bref s'il s'agit de remettre à plat l'ensemble du système, je crains que ce ne soit trop long, voire hors sujet.
    Je voudrais simplement préciser à nos collègues de quoi il s'agit. Actuellement, on demande la même redevance à l'utilisateur d'une petite parabole satellite connectée à quinze ou vingt ordinateurs et à France Télécom pour une parabole énorme qui dessert tout un territoire. Je propose simplement de faire une différence entre un système conçu pour un usage limité et un système de grande envergure utilisant des paraboles énormes, et de ne faire payer au petit utilisateur qu'une redevance très modeste, si elle ne peut être nulle. Peut-être est-ce le fait que nous proposions dans l'amendement une exonération de la redevance qui pose problème, mais cela pourrait être réglé très facilement.
    Au bénéfice des déclarations de M. le ministre, je retire l'amendement.
    M. le président. L'amendement n° 42 rectifié est retiré.
    M. de Courson et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement, n° 148, ainsi rédigé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - En cas de création d'options de souscription d'actions pour les salariés ou les mandataires sociaux ou de souscription d'actions réservées aux salariés ou aux mandataires sociaux, une provision constituant une charge déductible de l'assiette de l'impôt sur les sociétés doit être passée dans les comptes de l'entreprise concernée dès l'exercice au cours duquel la décision a été prise par les organes sociaux compétents. Cette provision doit être égale à la différence entre la valeur de chaque action et le prix de souscription ou d'achat desdites actions, multipliée par le nombre d'actions maximum susceptibles d'être concernées. Cette provision est ajustée chaque année en fonction du nombre de souscriptions effectivement utilisées et de l'évolution de la valeur de l'action.
    « II. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Maurice Leroy.
    M. Maurice Leroy. Cet amendement vise à obliger les entreprises qui proposent des options de souscription d'actions réservées à leurs salariés ou à leurs mandataires sociaux à constituer une provision sous la forme d'une charge déductible de l'impôt sur les sociétés devant être passée dans les comptes de l'entreprise. Cette provision sera constituée pour un montant représentatif de l'appauvrissement subi par les actionnaires initiaux de l'entreprise du fait de ces émissions qui ont pour effet d'augmenter le capital.
    Au-delà du dispositif fiscal que propose cet amendement, il s'agit d'appeler l'attention du Gouvernement sur le traitement comptable qu'il faut prévoir, à terme, pour ces émissions, qui, à l'heure actuelle, ne font l'objet d'aucune comptabilisation dans le bilan des entreprises, ni même dans les comptes hors bilan.
    Enfin, il faut noter que certaines entreprises américaines procèdent désormais à des provisions relatives à ces émissions, ce qui justifie de préparer notre législation fiscale à l'apparition d'un tel système.
    A de très rares exceptions près, le coût potentiel des options de souscription d'actions pour les salariés ou les mandataires sociaux ou de souscription d'actions réservées à ces derniers ne fait l'objet d'aucune charge dans les comptes de résultat au moment où sont émis les bons ou les actions pour les salariés ou les mandataires sociaux. Or les rabais consentis constituent bien une perte pour les actionnaires de l'entreprise. L'absence de comptabilisation adaptée de ces opérations tend à faire croire qu'elles n'ont pas de coût, si bien qu'un nombre croissant de spécialistes de la comptabilité d'organismes de surveillance des marchés boursiers et de responsables d'entreprises préconisent un changement du mode actuel de comptabilisation.
    Pour illustrer l'intérêt de cet amendement, il suffit de se souvenir du scandale Enron. Ce groupe texan a, selon l'association de contribuables Citizen for tax justice, accumulé 1,8 milliard de dollars de bénéfices au cours des cinq derniers exercices, mais n'a payé des impôts qu'une seule année sur cinq. Le taux de l'impôt étant de 35 %, il aurait dû verser au fisc environ 625 millions de dollars, mais il a pu réduire considérablement ce montant en distribuant pour 600 millions de dollars d'options.
    Selon une étude interne de la Réserve fédérale, citée par le Wall Street Journal, la croissance annuelle des profits des entreprises composant l'indice Standard & Poor's 500 serait tombée de 12 % à 9,4 % entre 1995 et 2000, si les sommes distribuées sous forme de stock-options avaient été déduites des résultats. C'est la raison pour laquelle Alan Greenspan lui-même est monté au créneau devant le Congrès pour réclamer une plus grande vérité des comptes.
    Par cet amendement, le groupe UDF souhaite sécuriser davantage l'épargne populaire et garantir une plus grande transparence financière.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a émis un avis défavorable à cet amendement, mais après une très longue discussion. Notre collègue Charles de Courson a posé, à travers plusieurs amendements, de vrais problèmes de traitement comptable. On a longuement discuté, dans l'hémicycle, du traitement comptable de la prime pour l'emploi. Cette fois M. de Courson soulève un problème extrêmement important concernant la comptabilité des entreprises.
    Celles-ci sont conduites à prendre des engagements, par exemple au titre des stocks-options, sans provisionner pour autant dans leurs comptes les montants afférents. Au moment où de très grandes entreprises ont connu des difficultés qui ont révélé l'existence, en dépit des audits et des expertises des commissaires aux comptes, de véritables défaillances comptables, il paraît indispensable de mettre en place des règles comptables plus strictes, et c'est dans cet esprit que s'inscrit l'amendement n° 148.
    Un de nos collègues de la commission des finances a pris l'exemple de la distribution de miles aériens gratuits qui, dès lors qu'ils représentent un montant extrêmement important, peuvent constituer un véritable engagement qu'il faut bien provisionner dans les comptes de l'entreprise. Mais nous pourrions aussi parler des droits à retraite comme nous l'avons fait avec le président d'EDF, que nous avons récemment auditionné.
    Cette question doit se situer au coeur de la réflexion sur la nécessaire sincérité des comptes des entreprises. Si nous voulons restaurer la confiance des marchés financiers, la confiance des épargnants, il faut absolument que la comptabilité des entreprises soit aussi fidèle que possible.
    Cela étant, nous avons rejeté cet amendement qui nous paraît prématuré et qui aurait sa place plutôt dans un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre financier et fiscal que dans un projet de loi de finances.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable également.
    M. le président. Monsieur Leroy, maintenez-vous votre amendement ?
    M. Maurice Leroy. Non, monsieur le président, je le retire.
    M. le président. L'amendement n° 148 est retiré.
    MM. Bapt, Bonrepaux, Migaud, Emmanuelli, Idiart, Claeys, Bourguignon, Viollet, Vallini, Brottes, Alary et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 316, ainsi rédigé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « I. - Les aides d'urgence distribuées par les chambres consulaires et provenant d'un fonds de solidarité constitué après une catastrophe naturelle ou industrielle sont exclues de la base imposable de la taxe professionnelle, de l'impôt sur les sociétés et des bénéfices non commerciaux des entreprises concernées.
    « II. - Les pertes de recettes pour les collectivités locales sont compensées, à due concurrence, par le relèvement de la dotation globale de fonctionnement.
    « III. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée, à due concurrence, par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    La parole est à M. Gérard Bapt.
    M. Gérard Bapt. Monsieur le ministre, le problème que soulève cet amendement relève de la technique fiscale mais il concerne un sujet douloureux, les suites de catastrophes naturelles ou industrielles ; je pense tout naturellement à l'explosion de l'usine AZF de Toulouse, mais également aux tragiques inondations qui ont touché l'Isère et le Gard ces derniers mois.
    Sans doute ferez-vous bénéficier ces personnes d'un certain nombre de dégrèvements ou d'exonérations, comme votre prédécesseur en avait accordé dans des cas similaires. Il reste néanmoins, dans le cas particulier de Toulouse, une anomalie qui est ressentie douloureusement par les chefs d'entreprise, notamment des PME, et les artisans concernés.
    Un grand mouvement de solidarité s'est manifesté à Toulouse après la catastrophe. Sous l'impulsion des organismes consulaires, des fonds de solidarité ont été mis en place pour attribuer des aides aux entreprises en difficulté.
    Or ces aides sont considérées comme entrant dans l'actif net de ces entreprises, ce qui va accroître leurs bases imposables au titre de l'impôt sur les sociétés ou de la taxe professionnelle.
    Je voulais, monsieur le ministre, soulever à nouveau cette question devant vous, sachant qu'elle a déjà été soumise à votre cabinet par l'association des entreprises sinistrées. Je souhaite que l'Assemblée nationale, avec l'accord du Gouvernement, se montre solidaire et fasse en sorte que les sommes versées au titre de la solidarité ne soient pas imposées.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission n'a pas examiné cet amendement, que je découvre.
    Il pose, me semble-t-il, plusieurs questions, que je vais exposer sous le contrôle de notre collègue M. Bapt.
    Je suis d'abord très surpris que des aides d'urgence, versées en l'occurrence par la chambre de commerce, puissent être assujetties à l'impôt.
    Si c'est vrai, cela me paraît anormal, et nécessite de trouver le moyen, sans passer par la loi, mais par le biais d'une instruction fiscale, de poser clairement le principe que des aides d'urgence de ce type ne peuvent pas être assujetties à l'impôt.
    Ensuite, je m'étonne que M. Bapt n'évoque pas les bénéfices industriels et commerciaux. Ceux-ci devraient être également concernés au même titre que l'impôt sur les sociétés et les bénéfices non commerciaux. En revanche, il parle de la taxe professionnelle, alors que je ne vois pas comment une aide d'urgence, qui est un flux, pourrait être intégrée dans la base de la taxe professionnelle.
    En bref, compte tenu du désastre qu'ont subi la ville de Toulouse et ses habitants, n'y a-t-il pas moyen, par le biais d'une instruction fiscale, de signifier clairement que les aides d'urgence ne sont pas assujetties à l'impôt, quel qu'il soit ? C'est bien cela le sens de votre amendement, monsieur Bapt ?
    M. Gérard Bapt. Tout à fait !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme bugétaire. Ma volonté est de résoudre le problème que vous soulevez, monsieur Bapt, mais je pense qu'une solution législative ne serait pas la meilleure formule.
    Je ne conteste pas les éléments que vous avez donnés puisque la perception d'aides ou d'indemnités de toute nature à caractère définitif entraîne pour l'entreprise qui en bénéficie une augmentation de son actif net. Les dispositions du code général des impôts prévoient que ces sommes, qui sont destinées à compenser des charges mêmes déductibles, ou un manque à gagner, sont imposables dans les conditions de droit commun au titre de l'exercice pendant lequel elles sont acquises, et ceci est vrai pour les professions qui relèvent du régime des bénéfices non commerciaux.
    Néanmoins, l'application de ces principes n'est théoriquement pas de nature à pénaliser fiscalement les entreprises puisqu'ils ne conduisent pas à une imposition effective, la déduction concomitante des charges ou pertes que les indemnités viennent couvrir compensant l'imposition de ces indemnités.
    Enfin, pour la taxe professionnelle supportée par la généralité des entreprises, les secours n'entrent pas en tant que tels dans l'assiette imposable.
    Cette réponse n'est qu'un commentaire du droit existant et je tiens à vous dire, monsieur le député, que les redevables qui rencontreraient encore des difficultés de trésorerie pour acquitter leurs impositions pourront toujours présenter aux services locaux une demande gracieuse, qui sera examinée avec une attention toute particulière. Je prends l'engagement de donner des instructions en ce sens. Néanmoins, si des difficultés survenaient, veuillez m'alerter directement.
    Il est plus sage de procéder de cette manière que d'introduire le dispositif prévu dans votre amendement.
    Sous le bénéfice des engagements que je viens de prendre, je vous demande de retirer votre amendement. Sinon, je serais obligé de demander son rejet.
    M. le président. Monsieur Bapt, retirez-vous l'amendement ?
    M. Gérard Bapt. J'apprécie la qualité des réponses du rapporteur général et de M. le ministre, qui témoignent de la compréhension du problème. Je soumettrai votre proposition, monsieur le ministre, aux organismes consulaires concernés ainsi qu'à l'association des entreprises sinistrées. Sous réserve que nous puissions en reparler, j'accepte de retirer l'amendement.
    M. le président. L'amendement n° 316 est retiré.
    M. Blazy a présenté un amendement, n° 252, ainsi rédigé :
    « Après l'article 17, insérer l'article suivant :
    « A compter du 1er janvier 2000, il est institué une taxe de solidarité pour le développement économique et la protection de l'environnement assise sur le nombre de passagers et la masse de fret et de courrier embarqué en France, et liquidée dans les mêmes conditions que la taxe de l'aviation civile prévue à l'article 302 bis K du code général des impôts.
    « Cette taxe est due par les entreprises de transport aérien au tarif unitaire unique de 3 F par passager embarqué et de 1 F par tonne de fret ou de courrier embarqué.
    « Les entreprises de transport aérien déclarent chaque mois, sur un imprimé fourni par l'administration civile, le nombre de passagers et la masse de fret et de courrier embarqué le mois précédent pour les vols effectués au départ de chaque aérodrome situé dans les zones aéroportuaires définies à l'article premier de la présente loi.
    « Les règles de contrôle, sanction, recouvrement et contentieux applicables à la taxe de solidarité sont celles prévues à l'article 302 bis K précité. »
    La parole est à M. Gérard Bapt, pour soutenir cet amendement.
    M. Gérard Bapt. Cet amendement vise à instituer une taxe environnementale qui devrait permettre de mettre en avant des projets de développement durable autour des aéroports.
    M. Blazy se préoccupe depuis plusieurs années de l'environnement des aéroports, les prédécesseurs de M. le ministre et de M. le rapporteur général peuvent en témoigner.
    M. Didier Migaud. C'est vrai !
    M. Gérard Bapt. Une plate-forme aéroportuaire est un établissement exceptionnel à double titre : juridiquement, bien sûr, mais aussi du fait des activités et nuisances qu'il génère. Cette proposition permettra de réparer les dégâts occasionnés par l'existence pendant trop d'années de zones de non-droits environnementales qu'a permises un développement aéroportuaire uniquement centré sur l'exigence économique et la sécurité. L'exigence environnementale nécessite un effort spécifique de solidarité envers les communes sinistrées et une attention particulière au développement économique respectant le principe pollueur-payeur, au service du développement durable du transport aérien.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a émis un avis défavorable à l'adoption de cet amendement, non pas qu'elle ne soit pas consciente de la nécessité d'améliorer par divers équipements l'environnement à proximité des aéroports - c'est un problème que connaissent en particulier le Val-d'Oise, la Seine-Saint-Denis et le Val-de-Marne avec les plates-formes de Roissy et d'Orly, mais elle considère qu'il ne serait pas opportun de créer une telle taxe aujourd'hui, alors que le transport aérien connaît une période extrêmement difficile.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Défavorable également.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 252.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 18

    M. le président. Je donne lecture de l'article 18 :

C. Mesures diverses

    « Art. 18. - Les associés collecteurs de l'Union d'économie sociale du logement sont autorisés à verser, en 2003, 250 millions d'euros au budget de l'Etat, à partir des fonds issus de la participation des employeurs à l'effort de construction. L'Union se substitue à ses associés collecteurs pour le versement de cette contribution.
    « Les modalités et la répartition entre les associés collecteurs de ce versement seront prévues dans une convention entre l'Etat et l'Union d'économie sociale du logement conclue en application du 2° de l'article L. 313-19 du code de la construction et de l'habitation. »
    La parole est à M. Jean-Louis Dumont, inscrit sur l'article.
    M. Jean-Louis Dumont. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne me lancerai pas dans l'historique du mouvement du 1 %. Je rappellerai simplement qu'à un moment donné de la vie de ce pays, et particulièrement après la Seconde Guerre mondiale dans le pays du Nord, le patronat et les syndicats ont voulu mettre en place, dans le cadre d'une politique paritaire, un fonds consacré au logement social, tant dans le secteur locatif que pour l'accession à la propriété.
    Les années passant, on s'est rendu compte que la collecte devenait de plus en plus importante et qu'elle commençait à représenter des sommes conséquentes. Au cours des dernières années, on a vu les gouvernements successifs passer des conventions avec le mouvement du 1 %. L'architecture du mouvement tend à concentrer l'ensemble de la collecte sur l'organisation professionnelle nationale.
    Aujourd'hui, on s'aperçoit sur le terrain que le 1 % n'a plus ni présence, ni efficacité, ni capacités de financement surtout au bénéfice de nos régions, en particulier dans le milieu rural.
    J'ai été un peu étonné à la lecture du rapport du rapporteur général, mais sans doute me donnera-t-il une explication simple. A aucun moment, le rapport n'évoque la Foncière, nouvel opérateur du logement, nouvel intervenant, et même promoteur dans des zones qui ont été définies par référence à la loi SRU. La liste Borloo, par exemple, ou les listes qui circulent actuellement éliminent pratiquement tous les espaces ruraux et les villes moyennes.
    C'est sur ce point, monsieur le ministre, que je voudrais attirer votre attention. J'ai déposé un amendement pour m'opposer à cette nouvelle ponction, qui n'est somme toute qu'un prélèvement arrivant après bien d'autres. Aujourd'hui, on ne mesure plus très bien l'efficacité du 1 %, réservé le plus souvent à de grandes opérations, au détriment de la plupart des autres demandes.
    Prenons l'exemple de l'accession sociale à la propriété : à une époque, les salariés pouvaient bénéficier de presque 100 000 francs de prêt à ce titre. Aujourd'hui, la somme maximale est de 6 000 euros, et sous conditions. On dit même que les bénéficiaires du 1 % ne doivent pas être éligibles au prêt à taux zéro. Vous imaginez ce que cela signifie ?
    Il y a quelques années, en 1996, 1997, 1998, la production de logements locatifs sociaux était, non pas en panne, mais très faible. Il y avait des projets d'opérations dans les tiroirs, mais il était impossible de les concrétiser, parce qu'elles n'étaient pas équilibrées sur le plan financier. Et, sans l'intervention du 1 %, les plafonds de ressources établis en fonction du montant des loyers étaient dépassés.
    Comprenez bien que si j'interviens sur l'article 18, c'est pour attirer votre attention, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, sur les conditions d'exécution du budget du logement en 2003, car il reprend pratiquement, à montants constants, les lignes budgétaires des années antérieures, alors même que les ministres du Gouvernement tiennent des propos très dynamiques et très offensifs.
    Ainsi, le ministre du logement a indiqué devant le congrès de l'Union des HLM qu'il fallait démolir, construire et réhabiliter. Sur tous les bancs de cette assemblée, nous ne pouvons qu'approuver ces orientations.
    Le ministre de la ville a annoncé son intention de présenter au Parlement un plan quinquennal pour résorber le logement insalubre, pour intervenir dans les quartiers en difficulté ou « difficiles » et en finir avec tous ses logements vacants dont personne ne veut plus.
    L'ambition est grande chez ce gouvernement et les ministres concernés, comme elle l'était chez les ministres précédents, qui avaient commencé à réaliser des efforts conséquents dans ce domaine.
    Mais la déconcentration des décisions est problématique : par exemple, comment mener des opérations de démolition si par ailleurs on n'a pas les moyens d'intervenir financièrement avec des apports importants, lorsque le bâtiment à démolir n'est pas complètement amorti et qu'il a peut-être déjà bénéficié d'opérations PALULOS ?
    Monsieur le ministre, je souhaiterais que vous soyez très attentif aux moyens mis à la disposition des opérateurs, tout particulièrement des organismes HLM.
    Monsieur le président, peut-être pourrais-je présenter dès à présent mon amendement n° 262 ?
    M. le président. Je vous en prie.
    Je suis en effet saisi par M. Dumont d'un amendement, n° 262, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 18. »
    Vous avez la parole, monsieur Dumont.
    M. Jean-Louis Dumont. Cet amendement de suppression est un amendement d'appel, qui, je n'en doute pas, sera repoussé.
    Monsieur le ministre, une partie des sommes que vous allez affecter au budget général de l'Etat ne pourrait-elle pas bénéficier non seulement au logement locatif social, mais aussi au logement privé ? Par exemple, on pourrait doter cette grande agence qu'est l'ANAH des moyens supplémentaires nécessaires à son action sans obérer ses fonds propres.
    Surtout, et vous comprendez que j'insiste sur ce point, vous devriez réaffecter environ 20 millions d'euros à la PATS, la prime d'accession très sociale, qui a permis à des collectivités locales, à des organismes HLM et autres opérateurs, dans le cadre du 1 % logement, par le biais d'une convention ou d'un contrat partenarial, d'offrir à des couples, à des familles, un patrimoine. Son effet économique au bénéfice des ménages est évident mais son effet social l'est tout autant.
    Je compte sur vous pour qu'au moment où nous étudierons le budget du logement, tant en commission des finances qu'en séance publique, nous puissions améliorer certaines lignes budgétaires.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission a émis un avis défavorable.
    Je rappelle que l'article 18 porte sur un prélèvement de 250 millions d'euros, compatible avec la convention du 11 octobre 2001 qui a provisionné, au titre du 1 %, un montant de 457 millions d'euros chaque année, lequel doit servir à mettre en place la Foncière et à réaliser un ensemble de démolitions-reconstructions dans les quartiers les plus difficiles. Le programme est très ambitieux puisqu'il prévoit 20 000 ou 30 000 logements par an.
    Bien entendu, il faut un certain temps pour que cette politique atteigne son rythme de croisière, ce qui avait conduit le précédent gouvernement à proposer, dans la loi de finances pour 2002, un prélèvement de 427 millions d'euros au bénéfice du budget de l'Etat, sur les 457 millions prévus par la convention du 11 octobre 2001, pour mener des actions dans le cadre de la politique de la ville.
    Les 250 millions d'euros concernés par l'article 18 du projet de loi de finances pour 2003 s'inscrivent dans la droite ligne de la mesure déjà prise en 2002. La politique conduite au titre de l'Union d'économie sociale pour le logement, à travers les objectifs de la convention et la création de la Foncière, n'en sera pas handicapée. Certes, il peut y avoir ici ou là des difficultés sur des financements du 1 %, notamment pour ce qui concerne l'accession, mais nous serons tous très vigilants.
    Honnêtement, il me semble encore possible - ce sera peut-être la dernière fois, monsieur le ministre - de prélever ces 250 millions compte tenu de la montée en régime du dispositif.
    Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 262, alors même que l'ensemble de ses membres est très sensible à l'historique des prélèvements successifs sur le 1 %. Des conventions ont été signées, puis remises en cause.
    Je vous le répète, mon cher collègue Dumont, nous serons extrêmement vigilants.
    M. Jean-Louis Dumont. Très bien !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le président, je vais donner à Jean-Louis Dumont des informations qui, je l'espère, lui permettront de retirer son amendement, qu'il a lui-même qualifié d'« appel ».
    Le versement total des collecteurs du 1 % logement au budget de l'Etat sera en 2003 très inférieur à ce qu'il était en 2002, où il a atteint 700 millions d'euros. M. Dumont le sait bien, lui qui connaît parfaitement les chiffres.
    Le mouvement de baisse progressive de ce versement se poursuit donc, ce qui fait que les collecteurs du 1 % logement disposent de ressources croissantes pour des emplois directs. On ne peut donc pas dire que le versement prévu à l'article 18 ait pour effet de réduire leurs interventions.
    La convention entre l'Etat et l'UESL du 11 octobre 2001 a prévu une réorientation d'une partie des emplois du 1 % vers le renouvellement urbain. L'objectif d'un investissement de 457 millions d'euros par an dans des actions qui concourent à cette politique a été affiché. C'est dans le cadre de cette orientation que le conseil d'administration de l'UESL a décidé, pour optimiser l'utilité économique et sociale de ses concours, de réduire l'enveloppe consacrée aux prêts traditionnels à l'accession, sans d'ailleurs cibler cette restriction sur les ménages déjà bénéficiaires d'un prêt à taux zéro.
    Compte tenu de la montée en puissance progressive des actions en faveur du renouvellement urbain, il avait été décidé, dans la convention du 11 octobre 2001, que l'UESL verserait 427 millions d'euros à l'Etat en 2002. Un amendement avait été déposé en ce sens par le précédent gouvernement lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2002.
    L'article 18 qui vous est présenté reprend les termes de cet amendement, mais il réduit le montant du versement. En effet, la réalisation des opérations de démolition progresse lentement : 7 000 en 2001, de 8 000 à 10 000 attendues en  2002 et 12 000 en 2003.
    Une convention est en cours de finalisation avec l'UESL pour préciser les conditions de ce versement. J'ai d'ailleurs reçu personnellement les responsables de l'Union pour parfaire l'accord en cours.
    C'est pourquoi je vous demande, monsieur Dumont, de bien vouloir retirer votre amendement.
    J'en viens en quelques mots à la question essentielle : les moyens.
    Longtemps maire d'une ville qui accueille sur son territoire une cité de 6 500 personnes, un « quartier difficile » qui a fait l'objet de tous les classements depuis l'opération Banlieues 89, j'ai la conviction profonde que, si nous voulons atteindre le plus rapidement possible les objectifs que nous partageons tous, nous devons assurément mobiliser des moyens, mais nous devons aussi - je l'ai dit au ministre délégué à la ville - alléger le droit de l'urbanisme car celui-ci est devenu si complexe que les opérations prennent un retard considérable. Et comme il s'agit de surcroît d'opérations faisant l'objet de cofinancements, l'harmonisation de ces financements est elle aussi source de retards.
    Il n'y a pas, j'en suis intimement convaincu, de différence entre la volonté qui est la vôtre, en tant que responsable engagé dans le mouvement HLM, et celle du Gouvernement, y compris quant au rythme.
    M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que, d'un commun accord, nous avions envisagé une séance prolongée. Nous avons examiné cinquante amendements en un peu plus de trois heures, je vous invite donc à faire un effort de concision.
    M. Augustin Bonrepaux. Je proteste, monsieur le président !
    M. le président. Monsieur Bonrepaux, vous pourrez intervenir dans quelques instants, si vous le souhaitez.
    Monsieur Dumont, retirez-vous votre amendement ?
    M. Jean-Louis Dumont. Oui, monsieur le président. Je sais que, sur tous les bancs de cette assemblée, nous pouvons être d'accord sur les objectifs définis par les ministres successifs dans le sens de l'efficacité, au bénéfice du logement. Mais si je retire mon amendement, c'est aussi dans l'espoir que le ministre chargé du logement et le ministre délégué à la ville tiennent compte des besoins et répondent à l'exigence de simplification.
    M. le président. L'amendement n° 262 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 18.
    (L'article est adopté.)

Article 19

    M. le président. « Art. 19. - A l'article 5 de la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel, l'année : "2002 est remplacée par l'année : "2003. »
    La parole est à M. Jean-Claude Sandrier, inscrit sur l'article.
    M. Jean-Claude Sandrier. L'article 19 prévoit que l'UNEDIC versera en 2003 un peu plus de 1,2 milliard d'euros à l'Etat.
    Le groupe des députés communistes et républicains s'inquiète d'une telle mesure qui privera l'UNEDIC d'une partie de ses ressources alors même que le chômage est reparti à la hausse et que les perspectives en ce domaine ne sont pas des plus optimistes : les plans de licenciement s'accumulent et la sortie des emplois-jeunes en fin de contrat va, à l'évidence, provoquer une augmentation du chômage. L'INSEE estime qu'il y aura 80 000 chômeurs de plus par an et les instituts réalistes qui prévoient de 1,8 % à 2 % de croissance du PIB pour 2003 ont calculé que cette situation augmenterait de 200 000 à 250 000 le nombre des chômeurs.
    L'UNEDIC aura donc à faire face à un afflux de chômeurs : ce n'est donc pas le moment, pensons-nous, de la priver de ressources.
    En conséquence, nous voterons contre l'article 19.
    M. le président. Je mets aux voix l'article 19.
    (L'article 19 est adopté.)

Article 20

    M. le président. Je donne lecture de l'article 20 :

II. - Ressources affectées

    « Art. 20. - Sous réserve des dispositions de la présente loi, les affectations résultant de budgets annexes et comptes spéciaux ouverts à la date de dépôt de la présente loi sont confirmées pour l'année 2003. »
    Je mets aux voix l'article 20.
    (L'article 20 est adopté.)
    M. le président. Mes chers collègues, je vous propose, compte tenu de l'heure, d'interrompre nos travaux et de les reprendre à vingt et une heures trente.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Vingt et une heures !
    M. le président. Nous avons des délais à respecter : nous nous retrouverons à vingt et une heures quinze !
    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Ce soir, à vingt et une heures quinze, troisième séance publique :
    Suite de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2003 (n° 230) :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 256).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures cinquante.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexe au procès-verbal
de la 2e séance
du vendredi 18 octobre 2002
SCRUTIN (n° 32)


sur l'amendement n° 317 rectifié de M. Bonrepaux après l'article 17 du projet de loi de finances pour 2003 (augmentation de l'abattement de la taxe sur les salaires applicable aux associations).

Nombre de votants

41


Nombre de suffrages exprimés

41


Majorité absolue

21


Pour l'adoption

14


Contre

27

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe de l'Union pour la majorité présidentielle (364) :
    Contre : 27 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votants : MM. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale) et Eric Raoult (président de séance).
Groupe socialiste (142) :
    Pour : 10 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe Union pour la démocratie française (28) :
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (19).