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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU SAMEDI 26 OCTOBRE 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du vendredi 25 octobre 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC

1.  Décisions du Conseil constitutionnel sur des requêtes en contestation d'opérations électorales «...».
2.  Loi de finances pour 2003 (deuxième partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

INDUSTRIE, POSTE ET TÉLÉCOMMUNICATIONS

M. Hervé Novelli, rapporteur spécial de la commission des finances, pour l'industrie.
M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour l'industrie et l'énergie.
M. Alain Joyandet, rapporteur spécial de la commission des finances, pour La Poste et les télécommunications.
M. Pierre Micaux, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour La Poste et les télécommunications.
MM.
Christian Bataille,
Alain Cousin,
Daniel Paul,
Jean Dionis du Séjour,
Alain Gouriou,
Patrice Martin-Lalande,
François Asensi,
François Grosdidier,
Daniel Garrigue,
Jean-Pierre Decool.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie.
Réponses de Mme la ministre aux questions de : MM. David Habib, Alain Gouriou, Philippe Auberger, Yves Coussain, François Asensi, Jean-Pierre Brard, Daniel Paul, Francis Hillmeyer.
Les crédits inscrits à la ligne « Industrie, Poste et télécommunications » seront mis aux voix à la suite de l'examen des crédits de l'économie et des finances.
Amendement n° 82 de la commission des finances : M. Alain Joyandet, rapporteur spécial ; Mme la ministre. - Adoption de l'amendement n° 82 rectifié.
Amendement n° 53 de la commission des finances : M. Hervé Novelli, rapporteur spécial ; Mme la ministre. - Retrait.
Amendement n° 54 de la commission des finances : M. Hervé Novelli, rapporteur spécial ; Mmes la ministre, Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Pierre Micaux, rapporteur pour avis ; Daniel Garrigue. - Rejet.
Amendement n° 55 de la commission des finances : M. Hervé Novelli, rapporteur spécial ; Mme la ministre. - Retrait.

ÉTAT E
Lignes 27 à 32. - Adoptions «...»
Après l'article 68 «...»

Amendement n° 94 de M. Martin-Lalande : MM. Patrice Martin-Lalande, Alain Joyandet, rapporteur spécial ; Pierre Micaux, rapporteur pour avis ; Mme la ministre. - Retrait.
Renvoi de la suite de la discussion budgétaire à la prochaine séance.
3.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à neuf heures.)

1

DÉCISIONS DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
SUR DES REQUÊTES EN CONTESTATION
D'OPÉRATIONS ÉLECTORALES

    M. le président. En application de l'article L.O. 185 du code électoral, j'ai reçu du Conseil constitutionnel communication de sept décisions de rejet relatives à des contestations d'opérations électorales.
    Conformément à l'article 3 du règlement, cette communication est affichée et sera publiée à la suite du compte rendu intégral de la présente séance.

2

LOI DE FINANCES POUR 2003
DEUXIÈME PARTIE
Suite de la discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003 (n°s 230, 256).

INDUSTRIE, POSTE ET TÉLÉCOMMUNICATIONS

    M. le président. Nous abordons l'examen des crédits du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, concernant l'industrie, la poste et les télécommunications.
    La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour l'industrie.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour l'industrie. Madame la ministre déléguée à l'industrie, j'ai aujourd'hui le plaisir de rapporter devant vous les crédits du ministère de l'industrie dont vous avez la charge. Je vais donc me livrer à cet exercice rituel, non sans vous dire tout de suite ma conviction : votre budget ne recouvre qu'imparfaitement la réalité de l'environnement industriel français. Comme l'a dit un célèbre économiste landais - je ne parle évidemment pas de M. Henri Emmanuelli, vous l'aurez compris -, ...
    M. le président. Mais vous pouvez en parler !
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Il s'agit de M. Bastiat, qui disait : « Il y a ce qui se voit et ce qui ne se voit pas. » Ce qui se voit, ce sont les crédits pour 2003 affectés à votre ministère dans le budget de notre pays. Eh bien, disons-le tout de suite, pour faire cesser un suspens insoutenable : malgré un affichage légèrement en baisse - moins 1,62 % - et dans le contexte budgétaire que l'on connaît, marqué par un déficit arrêté au niveau laissé par le précédent gouvernement et sa majorité, ce budget permettra d'assurer le financement des objectifs prioritaires du ministère compte tenu des prévisions de crédits disponibles fin 2002.
    Tout cela est heureux. La répartition proposée des dépenses ordinaires et crédits de paiement par agrégat est la suivante : les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement reçoivent 141 millions d'euros ; les actions menées dans le domaine de l'énergie et des matières premières, y comris les dotations aux établissements publics sous tutelle, se voient consacrer 517 millions d'euros, soit une hausse de 2,8 % par rapport à l'exercice précédent, hors budgétisation de l'Institut français du pétrole. La commission de régulation de l'électricité, demain de l'énergie, obtient, et c'est heureux, seize emplois budgétaires supplémentaires dans la perspective de l'élargissement de ses missions au secteur du gaz et sa dotation augmente donc de 15 %, ce dont je me réjouis.
    Le soutien à l'innovation et au développement industriel local bénéficie de 406 millions d'euros, en baisse de 11 %. Les écoles d'ingénieurs et la politique de promotion de la qualité et de la métrologie obtiennent 244 millions d'euros, en hausse de 0,6 %. Une somme de 652 millions d'euros, en progression de 1 %, est consacrée aux actions de restructuration industrielle et aux aides à la reconversion ainsi qu'à « l'après-mines ». La mobilisation des reports prévisibles doit permettre de financer les objectifs prioritaires du ministère pour l'an prochain.
    Il y a donc ce qui se voit, c'est ce que je viens d'indiquer. Et il y a ce qui ne se voit pas, et c'est peut-être le plus important : quelle politique mener en matière d'industrie ? Cela n'apparaît pas clairement dans ce budget. Ce n'est pas à vous, madame la ministre, que j'en fais le reproche. Bien au contraire, alors que vous avez dû bâtir votre projet de budget dans l'urgence du fait de la lourdeur de l'héritage, un effort visible de simplification et de rationalisation est d'ores et déjà apparent dans la nomenclature budgétaire. Je veux parler du regroupement de certains crédits destinés à accompagner l'innovation dans les petites entreprises, sur le titre IV, ou le dévelopement des PMI, sur le titre VI.
    Mais, sur le fond, à lire les documents budgétaires, j'ai la ferme conviction qu'à s'épuiser en gestion de trop nombreux dispositifs juxtaposés, on laisse de côté les questions les plus importantes. Dans le temps qui m'est imparti, j'en aborderai trois qui motivent les trois amendements adoptés, sur ma propositions, par la commission des finances : l'organisation des dispositifs d'aide à la recherche, au développement et à l'innovation tout d'abord ; le rôle du ministère de l'industrie dans sa fonction de tutelle d'établissements publics, ensuite ; et, enfin, la question sur l'action industrielle des pouvoirs publics. Eneffet, je crois qu'un bon guide pour l'action que vous devrez mener pourrait être résumé en trois mots : simplification, innovation, évolution.
    Simplifier dans les structures, d'abord. Qui n'a pas rencontré dans son environnement un chef d'entreprise, un de ces chefs d'entreprise, petite ou moyenne, découragé par l'absence de soutien des pouvoirs publics à ses efforts de recherche et de développement ?
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. C'est vrai !
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Le temps n'est-il pas venu de simplifier les procédures de soutien public, de regrouper les structures redondantes, de donner aux PME et aux PMI un interlocuteur public unique, des mécanismes souples et accessibles ? Simplifions les procédures ! Elaguons les structures superflues ! Rapprochons les structures à vocation proche, comme par exemple les DRIRE et l'ANVAR ! En un seul mot : simplifions !
    A titre d'exemple, madame la ministre, l'APRODI, association qui dépend de votre ministère, gère depuis Paris une procédure de diffusion des techniques que les DRIRE ou l'ANVAR géreraient aussi bien, sinon mieux, localement. La commission des finances vous proposera la suppression de ces structures comme un premier pas dans le sens de la désinflation des procédures.
    Innovons dans les actions, ensuite ! La presse du jour nous informe que vous présenterez au printemps prochain une loi sur l'innovation. Comment ne pas s'en réjouir lorsque l'on constate combien la France reste éloignée des objectifs assignés tant par le sommet de Lisbonne que par le Président de la République d'affecter 3 % du PIB aux efforts de recherche et de développement. Mais, je vous en supplie, madame la ministre, pas de plan recherche !
    Rappelez-vous les plans « calculs », « machines-outils », « informatique pour tous », avec leur succès pour le moins discret. Intéressons-nous plutôt aux mécanismes qui freinent en France les efforts de recherche, de dévelopement et donc d'innovation : l'accessibilité des PMI aux mécanismes, leur connaissance bien sûr, en ce domaine, et surtout l'environnement fiscal, réglementaire et culturel.
    Enfin, il faut faire évoluer l'action de la tutelle des pouvoirs publics. L'action du ministère ou des organismes déconcentrés pourrait donc être plus simple, plus accessible pour le plus grand profit de tous. Elle pourrait aussi, sur d'autres points qui ne relèvent que de l'Etat, être plus importante et plus efficace. Je veux parler du rôle de tutelle qu'exercent les grandes directions du ministère de l'industrie sur des établissements aussi divers qu'imposants, stratégiques même à bien des égards. Areva, le CEA, l'IFP, EDF ou encore l'ADEME sont autant d'établissements sur lesquels la tutelle dispose d'un pouvoir de contrôle, et je dirais même d'un devoir de contrôle. La gestion d'Areva est-elle satisfaisante ? Le CEA ne devrait-il pas effectuer des choix entre ses nombreux programmes ? L'IFP a-t-il convenablement valorisé ses participations à l'occasion de la fusion entre Technip et Coflexip ? L'ADEME ne pourrait-elle améliorer sa gestion ? La situation d'EDF est-elle sous contrôle ? Je m'arrêterai brièvement sur les deux derniers cas cités. Sur EDF d'abord, pour dire sans esprit polémique que bon nombre des reproches qui peuvent être adressés à son équipe dirigeante - d'aujourd'hui ou d'hier -, et que j'évoque dans mon rapport, sont intimement liés au statut de cette entreprise.
    S'agissant des déboires à l'international, sans le principe de spécialité imposé à l'entreprise, nous n'en serions pas là. Quant à la complexité des comptes et à leur manque de transparence, si EDF était une entreprise comme les autres, nous n'en serions pas là non plus ! Enfin, pour ce qui est du frein à la croissance en Europe, avec l'ouverture du capital nous n'en serions pas là ! C'est pourquoi je me réjouis de la prochaine transformation de cet établissement public en société de plein exercice...
    M. Christian Bataille. Tiens, c'est intéressant !
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. ... et je vous remercie, madame la ministre, d'avoir enfin, selon la ligne tracée par le Président de la République et le Premier ministre, annoncé sans ambages cette réforme majeure.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Très bien !
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Bien des obstacles au développement d'EDF seront alors levés, et sa situation n'en deviendra que meilleure.
    Quant à l'ADEME, l'enjeu est tout autre : il s'agit de la ramener à plus de raison, à plus de saine gestion, et c'est le devoir de la tutelle que de s'y atteler. Nous entendons vous y aider. Dans un bel élan symbolique, deux amendements concertés, l'un sur les crédits de l'industrie, l'autre sur les crédits de l'écologie et du développement durable, visent ainsi à réduire à la marge les dotations de l'ADEME. Ce faisant, ils ont pour objet de vous soutenir dans votre mission de contrôle et d'associer la représentation nationale à cette mission.
    J'en viens au point le plus important, madame la ministre : définir les priorités qui doivent être celles d'un ministère de l'industrie aujourd'hui. Cette question peut être résumée simplement : qu'est-ce qu'une politique industrielle moderne ?
    M. Daniel Paul. Très bonne question ! J'attends la réponse.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Permettez-moi d'esquisser une réponse : une politique industrielle, ce sont les moyens humains et financiers de procurer aux PME-PMI et aux créateurs d'entreprise un environnement favorable à la liberté d'entreprendre, unenvironnement propice à la croissance et à l'investissement, un soutien nécessaire à la recherche et à l'innovation. Vous l'aurez compris, une politique industrielle n'a donc pas, selon moi, vocation à faire du ministère de l'industrie un « pompier social » ou un réservoir de crédits qui se substituerait à la politique de l'emploi. Une politique industrielle n'a pas davantage vocation à soutenir artificiellement des secteurs durablement sinistrés.
    Entendez-moi bien : je n'ai dit ni qu'une politique de reconversion n'était pas justifiée ni qu'un traitement social n'était pas nécessaire dans les bassins d'emploi les plus durement touchés, au contraire. Je m'interroge simplement sur le rôle du ministère de l'industrie au sein d'une telle politique, et j'en arrive à la conclusion qu'il y a moins sa place que le ministère des affaires sociales. C'est le message que la commission des finances espère faire passer en vous demandant d'adopter un troisième amendement qui réduit symboliquement les dotations en très forte augmentation proposées pour 2003 sur certaines actions de restructuration industrielle.
    En définitive, un véritable soutien à nos PMI mené par les pouvoirs publics doit se mesurer non pas à la progression des crédits du ministère d'une année sur l'autre, mais à la capacité à fournir à nos entreprises ce qu'elles nous demandent, à savoir l'amélioration de leur environnement fiscal, réglementaire, social, et à l'action menée en matière de soutien à l'innovation. Vous l'aurez compris, madame la ministre, nous avons besoin d'une réflexion de fond sur le rôle et la place du ministère de l'industrie aujourd'hui. Je sais que vous y êtes prête.
    Mes chers collègues, les années qui viennent devraient permettre à ce gouvernement et à cette majorité de doter notre pays d'un meilleur environnement, pour que nos entreprises industrielles puissent relever le défi de la croissance, de l'emploi et de la prospérité.
    Pour cela, je vous demande de suivre la commission des finances dans le vote favorable qu'elle a émis sur les crédits de l'industrie pour 2003. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.).
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour l'industrie et l'énergie.
    M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour l'industrie et l'énergie. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il est d'usage que les rapports pour avis sur le projet de loi de finances privilégient l'analyse des secteurs et des politiques conduites, alors que les rapports spéciaux de la commission des finances procèdent à une analyse budgétaire plus précise, notamment s'agissant de l'exécution des exercices précédents.
    Je vous présenterai donc plus succinctement que ne l'a fait notre collègue Hervé Novelli l'évolution des crédits pour 2003, mais je compléterai mon propos par une présentation des principales conclusions de l'étude de la situation économique et financière d'Electricité de France à laquelle j'ai consacré, cette année, une partie de mon rapport écrit.
    A périmètre constant, les crédits de l'industrie et de l'énergie reculent de 1,66 % en dépenses ordinaires et crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2003, tandis que les autorisations de programme sont quasiment maintenues au niveau de 2002. Je rappelle que ces crédits avaient connu une évolution beaucoup plus défavorable par le passé dans des contextes pourtant beaucoup moins difficiles.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Eh oui !
    M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis. En effet, hors crédits affectés aux secteurs de la poste et des télécommunications et à périmètre constant, les dotations budgétaires allouées à l'industrie avaient reculé de 4,11 % en 2002 et de 2 % en 2001. En outre, il importe de noter que cette évolution globale modérée a néanmoins permis des efforts exceptionnels en faveur de certains postes prioritaires.
    Il convient en particulier de saluer le renforcement important des moyens alloués aux écoles des mines, qui progressent de plus de 3 % en dépenses ordinaires et crédits de paiement et qui font plus que doubler en autorisations de programme. Cet effort budgétaire permettra de conforter ces établissements dont l'action en matière de formation et de recherche est remarquable.
    Deux autres organismes voient leurs moyens sensiblement renforcés, ce qui atteste que le projet de budget pour 2003 dégage de manière volontariste les ressources nécessaires à la mise en oeuvre des priorités de la majorité.
    En premier lieu, il s'agit de la commission de régulation de l'électricité, dont les crédits de rémunération progressent de plus de 14 % afin de lui permettre de réaliser les recrutements nécessaires à l'extension prochaine de sa mission à la régulation du secteur du gaz naturel. Il s'agit ainsi d'assurer le bon fonctionnement des marchés libéralisés de l'énergie, donc de garantir la réalité de la concurrence, condition pour que les consommateurs en tirent véritablement profit.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Très bien !
    M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis. Il faut à cet égard rappeler que si l'ouverture juridique de nos marchés de l'énergie est restée trop limitée, notamment en raison du retard pris par la précédente majorité dans la transposition de la directive « gaz », la concurrence joue réellement dans notre pays, ce qui n'est pas toujours le cas chez nos partenaires. Le projet de loi sur les marchés énergétiques que notre assemblée examinera en décembre permettra enfin d'aligner le droit sur le fait.
    En second lieu, les moyens d'intervention alloués par le ministère de l'industrie à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie - l'ADEME - sont presque triplés. Cet effort budgétaire important traduit concrètement l'engagement de la majorité en faveur des sources d'énergie renouvelables et de la maîtrise de l'énergie. En outre, il est complémentaire de la poursuite d'un soutien vigoureux à la recherche nucléaire qui reste aujourd'hui la filière la plus efficace et la plus rentable pour assurer la production d'énergie sans émission de gaz contribuant à l'effet de serre.
    Je me félicite également de la poursuite de l'augmentation des moyens alloués au Commissariat à l'énergie atomique, dont le total des ressources civiles progresse de près de 2 %.
    Dans le domaine de l'énergie, une autre évolution importante caractérise le projet de budget pour 2003 : la budgétisation des dotations de l'Institut français du pétrole qui consacre la reconnaissance de l'intérêt collectif attaché aux missions de cet organisme. Celui-ci est en effet un centre de recherche de niveau mondial. Son activité contribue au dynamisme de nos secteurs pétrolier et parapétrolier et s'inscrit résolument dans une dynamique de développement durable, dont l'encouragement figure parmi les priorités de la majorité.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Très bien !
    M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis. Au cours des années à venir, votre rapporteur et le président de notre commission, M. Patrick Ollier, seront extrêmement attentifs au respect des engagements pris dans le cadre du contrat d'objectifs 2001-2005 de l'IFP, qui garantit à l'organisme un financement public pérenne et stable, condition de son développement à venir. C'est pourquoi je souhaiterais, madame la ministre, que vous nous réaffirmiez l'engagement du Gouvernement en faveur du développement de l'IFP.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Très bien !
    M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis. Certains articles budgétaires connaissent, en revanche, une évolution moins favorable qui correspond parfois à une diminution des besoins, comme par exemple pour les aides à la construction navale, ou qui répond à un souci de gestion plus « serrée » des articles budgétaires dont la sous-consommation des crédits passés permet de disposer d'importants reports des exercices précédents.
    Des moyens importants sont en revanche dégagés pour faire face aux restructurations industrielles à venir. A ce sujet, je voudrais vous faire part, madame la ministre, de mes inquiétudes quant à l'avenir du groupe Bull et de ses établissements en France.
    Nous sommes donc en présence, mes chers collègues, d'un budget serré mais non sacrifié. Ce budget dégage, en outre, des priorités claires avec un accent particulier sur la préparation de l'avenir, notamment à travers le soutien à la formation et à l'innovation. C'est pourquoi la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire a donné un avis favorable à son adoption, que je vous invite à suivre.
    Pour compléter l'analyse des crédits, j'ai choisi, cette année d'étudier la situation économique et financière d'Electricité de France. En effet, depuis plusieurs mois, la presse fait état d'informations inquiétantes sur la situation de cette entreprise. Or la persistance d'inquiétudes est tout à fait préjudiciable, en particulier dans la perspective de l'ouverture du capital, qui est nécessaire et que la majorité est résolue à réaliser conformément aux engagements du Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin. Il est donc indispensable de faire toute la clarté sur les comptes. Nous le devons aux Français, dont EDF est la propriété collective, aux agents et anciens agents de l'entreprise, qui en ont fait le grand service public que nous apprécions tous.
    Telle est la mission que les commissions des affaires économiques et des finances, à l'occasion des auditions successives de François Roussely, président d'EDF, et dans le cadre des travaux de leurs rapporteurs, Hervé Novelli et moi-même, se sont efforcés de remplir.
    Toutefois, je n'estime pas, pour ma part, y être complètement parvenu. Du fait de la non-communication de certains documents promis par la direction d'EDF à notre commission, et en raison de la transmission d'éléments d'information partiels et parfois contradictoires avec ceux issus d'autres sources, je n'ai pas été en mesure de dresser un tableau exact de la situation économique de l'entreprise. L'analyse devra donc être poursuivie dans les mois qui viennent.
    Seule la situation de l'établissement public en France peut être connue avec précision sur la base des comptes publiés. Elle fait apparaître une profonde dégradation de l'ensemble des indicateurs depuis 1998, pour des raisons qui sont imputables, en grande partie, à la gestion de l'entreprise. Vous trouverez dans mon rapport écrit de nombreuses précisions à cet égard.
    Les interrogations les plus nombreuses qui demeurent concernent la situation des filiales du groupe à l'étranger. Il faut être très clair sur ce point : la diversification d'EDF en Europe et dans le monde est souhaitable, car elle constitue le pendant de la libéralisation et de l'intégration des marchés européens de l'électricité. Une stratégie visant à la constitution d'un groupe européen intégré et permettant de dégager des synergies est donc justifiée.
    En revanche, cette diversification ne justifiait évidemment pas l'acquisition onéreuse de certaines entreprises peu rentables. C'est pourquoi je n'ai pas été convaincu de la pertinence des prises de participation au Royaume-Uni, en Allemagne et en Italie, aux conditions dans lesquelles elles ont été réalisées.
    Il est encore plus difficile de justifier les investissements réalisés en Amérique latine en 2001 - je ne vise pas ceux de 1992, bien entendu - et il ne serait pas acceptable que l'ensemble des usagers paient le coût de ces investissements internationaux. Or, comme Hervé Novelli, je suis inquiet des pertes financières constatées.
    Il est de la responsabilité des rapporteurs, madame la ministre, d'appeler votre attention sur le fait qu'il est essentiel de réunir toutes les conditions pour réussir l'ouverture du capital d'EDF. La majorité, vous le savez, est prête à vous y aider. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Alain Joyandet, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour la poste et les télécommunications.
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour la poste et les télécommunications. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'ouverture à la concurrence du marché postal et de celui des télécommunications, l'attribution des licences UMTS, le dossier du haut débit : autant de sujets qui mettent en lumière l'importance du secteur de la poste et des télécommunications à l'heure actuelle. De l'aménagement du territoire aux enjeux économiques, de l'emploi dans la fonction publique à la qualité du service public, La Poste et France Télécom sont aujourd'hui au coeur de tous les débats sur la société de l'information.
    Le projet de loi de finances pour 2003 établit les crédits de la poste et des télécommunications à 437 millions d'euros. Cette baisse de 0,2 % par rapport à l'exercice 2002 est essentiellement liée à la diminution des dépenses en capital, elle-même justifiée par l'attente de reports massifs sur l'exercice 2003. Sous cette réserve, les crédits sont donc globalement reconduits à leur niveau de 2002.
    Surtout, je tiens à souligner que les moyens des organismes mis en place en 1997, l'Autorité de régulation des télécommunications et l'Agence nationale des fréquences radioélectriques, sont renforcés puisque leurs budgets augmentent respectivement de 4,8 et 1,5 %.
    Enfin, l'Etat poursuit son soutien au transport et à la distribution de la presse avec une subvention de près de 290 millions d'euros.
    Au-delà de l'aspect budgétaire, je voudrais m'attarder, madame la ministre, sur les bouleversements profonds que connaissent la poste et les télécommunications et qui suscitent parfois l'inquiétude de nos concitoyens. A ces bouleversements s'ajoute la crise financière de France Télécom dont l'endettement atteint près de 70 milliards d'euros.
    L'intervention financière de l'Etat apparaît inéluctable. Cette situation pose du reste, à mes yeux, le problème de la responsabilité des présidents et des administrateurs des sociétés publiques, mais c'est un autre débat que je n'aborderai pas ce matin.
    Les retards pris par la France pour la couverture du territoire en téléphonie mobile ou l'équipement en haut débit sont aussi pour moi de véritables sujets de préoccupation. De même, l'ouverture à la concurrence dans le domaine des télécommunications ne se fait pas sans heurts, comme le montre la difficile mise en place du dégroupage de la boucle locale.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. C'est vrai !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. La Poste connaît aussi des mutations essentielles. Elle doit à la fois garantir la présence du service public postal et dégager des résultats positifs dans un environnement qui va devenir de plus en plus concurrentiel.
    Face à ces enjeux, le rôle de l'Etat est essentiel. Lui seul peut garantir l'égal accès de tous les citoyens au service universel des télécommunications et de la poste. C'est justement dans cette période de turbulences et de bouleversements que l'Etat doit savoir rappeler son attachement à un service public de qualité et accessible à tous.
    Les autorités de régulation jouent dans ce contexte un rôle important, et je tiens à saluer le travail accompli par l'Autorité de régulation des télécommunications dans un secteur en mutation perpétuelle. Cependant, leur intervention ne doit pas conduire à un désinvestissement des politiques que nous sommes.
    Pour ma part, je pense que le véritable enjeu de demain est l'aménagement du territoire. Laisser jouer la seule dynamique du marché peut provoquer des inégalités très regrettables, car le développement des nouveaux services de télécommunications est devenu une composante de la compétitivé des territoires. Or l'absence d'une véritable politique nationale de développement des infrastructures de télécommunications et l'inégal déploiement territorial de ces technologies contribuent, pour l'instant, à amplifier les inégalités existantes. Pour les territoires fragiles, l'opportunité du numérique prend plutôt la forme d'une fracture numérique.
    Le développement du haut débit est un bon exemple de la nécessaire implication de l'Etat. Une étude menée par le Conseil économique et social montre que la seule dynamique du marché conduirait à une polarisation accrue des infrastructures de haut débit : 20 à 25 % de la population n'aurait pas accès à cette nouvelle technique pour des raisons de viabilité économique. Or garantir l'accès au haut débit ne constitue pas simplement un avantage technologique. C'est véritablement de l'accès de chaque citoyen au savoir qu'il s'agit.
    Je souhaiterais, madame la ministre, que vous nous indiquiez comment le Gouvernement entend s'y prendre pour résorber cette fracture numérique insupportable. Je rappelle que nous avons pris l'engagement que, d'ici à 2007, l'ensemble des communes de France pourraient se raccorder au réseau à haut débit.
    Les prochaines échéances seront l'occasion pour l'Etat de rappeler son attachement au service public de la poste et des télécommunications. Ainsi, le prochain contrat de Plan entre l'Etat et La Poste sera l'occasion de débattre sur les exigences qui s'imposent à l'établissement public : compétitivité et garantie du service public postal.
    De même, la prochaine révision des dispositions européennes sur le service universel des télécommunications devrait permettre une réflexion sur la pertinence du dispositif français. Ainsi, compte tenu de l'évolution des différentes technologies des télécommunications, il me semblerait souhaitable, madame la ministre, d'inclure la couverture du territoire et le haut débit dans le service universel des télécommunications. Quant à son mode de financement, il mériterait d'être revu afin de favoriser le développement d'Internet. Nous y reviendrons tout à l'heure lors de l'examen d'un amendement.
    La prochaine transposition des directives européennes relatives aux télécommunications sera, je l'espère, l'occasion d'un véritable débat national. Il serait également souhaitable de clarifier à l'avenir l'action des pouvoirs publics dans le domaine des télécommunications.
    S'agissant d'abord de la régulation, une réflexion sur les fonctions respectives de l'Autorité de régulation des télécommunications, de l'Agence nationale des fréquences radioélectriques et du Conseil supérieur de l'audiovisuel est souhaitable. Un rapprochement de l'Autorité de régulation et de l'Agence nationale me semble nécessaire. Je souhaiterais également, madame la ministre, entendre votre avis à ce sujet.
    De même, une clarification des compétences des différentes structures ministérielles - industrie, recherche, aménagement du territoire - me paraît indispensable, afin que l'Etat affiche, dans le domaine des nouvelles technologies, une politique claire et cohérente. Je dois dire que votre rapporteur ne sait pas toujours à quel ministre s'adresser lorsqu'il a une demande à faire...
    Je suis certain que le Gouvernement saura prendre la mesure du défi qui se présente à lui. En témoignent les engagements récents qui visent à relancer la couverture du territoire en téléphonie mobile : 44 millions d'euros devraient être consacrés à la construction de 200 pylônes. L'accord intervenu le 24 septembre dernier entre les trois opérateurs de téléphonie mobile, permettant entre autres de développer la technique de l'itinérance locale, me semble un signal très positif.
    Je sais, madame la ministre, que vous êtes particulièrement sensible à ce grand enjeu que représente l'équipement de nos territoires et de nos entreprises en technologies de communication. Les récentes déclarations faites ici même, mardi dernier, par le Premier ministre, confirment tout l'engagement du Gouvernement dans ce domaine où l'intérêt national est en jeu.
    Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter, à l'instar de la commission des finances, le budget de la poste et des télécommunications pour 2003. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour la poste et les télécommunications.
    M. Pierre Micaux, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour la poste et les télécommunications. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'élaboration du budget des P & T s'est faite dans un contexte un peu particulier cette année, car les deux principales entreprises concernées, France Télécom et La Poste, ont été soumises, vous le savez, à d'importants soubresauts au cours des toutes dernières semaines.
    C'est un petit budget, qui s'élève à moins de 500 millions d'euros. Mais il s'agit en fait d'un budget à « effet de levier », dont les manettes ont été opportunément renforcées en 2003. Il laisse cependant ouvertes un certain nombre de questions quant à l'impact, en termes d'aménagement du territoire, du devenir du service universel postal.
    L'effet de levier tient à ce que les crédits budgétaires permettent de financer des organismes qui, eux-mêmes, contrôlent les évolutions des deux secteurs de la poste et des télécommunications. Ce schéma de contrôle indirect résulte logiquement de l'autonomie de gestion dont bénéficient, depuis 1990, La Poste et France Télécom, qui oeuvrent désormais sur des marchés ouverts à la concurrence.
    Pour actionner ces leviers, des crédits de fonctionnement ont été accordés à quatre instances : la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications, dite C2SPT ; l'Autorité de régulation des télécommunications ; l'Agence nationale des fréquences ; le médiateur postal.
    Les deux poids lourds de cette liste, à savoir l'ANF, avec 28 millions d'euros, et l'ART, avec 17 millions, ont vu leurs moyens renforcés. Le tout récent service du médiateur postal, créé en 2002, et la C2SPT conserveront en 2003 leurs petits budgets, respectivement 500 000 et 240 000 euros.
    Il convient de remarquer que l'augmentation des crédits de l'ART est importante, près de 5 %, et concerne aussi bien les crédits de rémunération que les crédits de fonctionnement. Cela nous ouvrira la possibilité, soit d'élargir les pouvoirs de l'ART dans le cadre de la transposition des directives européennes sur la communication numérique, soit d'assurer une extension des compétences de l'ART au domaine postal, en réponse aux pressions exercées sur ce terrain par la Commission européenne.
    Le deuxième mécanisme qui fait jouer l'effet de levier budgétaire pour des crédits courants concerne les activités d'enseignement et de recherche.
    Le projet de budget renforce avec un certain volontarisme les moyens du Groupe des écoles des télécommunications, en lui accordant un million d'euros supplémentaires, tout en maintenant le niveau des crédits attribués spécifiquement pour la recherche.
    Par ailleurs, le réseau national de recherche en télécommunications bénéficiait en 2002 d'un soutien de 36 millions d'euros, qui serait prolongé à l'identique en 2003.
    A côté de ces mécanismes de pilotage indirect s'appuyant sur des crédits courants, le budget des postes et télécommunications comporte aussi, pour l'année 2003, des opérations exceptionnelles qui font le même usage de l'effet de levier.
    La première de ces opérations exceptionnelles concerne la couverture du territoire en téléphonie mobile. Un accord du 23 septembre dernier entre les trois opérateurs concernés, à savoir Orange, SFR et Bouygues Télécom, devrait permettre d'assurer cette couverture, notamment en assurant l'itinérance dans les zones « blanches » larges. En l'occurrence, l'effet de levier vient de ce que l'Etat prendra en charge la moitié des coûts des pylônes - 44 millions d'euros, pris principalement sur les moyens d'intervention de la DATAR -, les collectivités étant invitées à faire un effort d'investissement du même montant. Le moment venu, madame la ministre, j'aimerais savoir de quelles collectivités il s'agit.
    Un dernier mécanisme de levier concerne, en 2003, une autre opération exceptionnelle : le sauvetage financier de France Télécom.
    Un mot d'abord pour déplorer que l'on en soit arrivé à devoir sauver cette belle entreprise. Vous le savez, sa dette atteint 70 milliards d'euros - on parle même aujourd'hui de 80 milliards - et son titre est passé en dessous de 8 euros à la fin de septembre, alors que l'introduction de la société en bourse, en 1997, s'était faite au niveau de 28 euros.
    Ce désastre pour les petits actionnaires fait d'autant plus mauvaise impression qu'il va falloir trouver très vite une solution pour les retraites et que cette solution passe inévitablement par les fonds de pension. Il y a là, certainement, matière à investigation et à réflexion, en vue de mettre en place des mécanismes de gouvernance qui, dans l'avenir, évitent à nos belles entreprises de tels déboires.
    Mais, dans l'immédiat, le sauvetage de France Télécom doit permettre à l'entreprise de faire face à une charge de remboursement d'environ 15 milliards d'euros prévue pour la mi-2003. Avant-hier, M. le ministre de l'économie et des finances annonçait que, très probablement, nous nous orientions vers une recapitalisation. Le levier budgétaire imaginé par le ministère des finances, sous réserve des conclusions de l'audit interne de Thierry Breton, s'appuierait sur un apport en capital fourni par un établissement du secteur public, qui se financerait lui-même par emprunt. L'effet de ce montage ne deviendra budgétairement visible qu'une fois le dispositif mis en place, c'est-à-dire probablement dans la prochaine loi de finances rectificative.
    Cependant, l'intervention de l'Etat dans les domaine des P et T s'effectue aussi selon une autre dimension que celle de la régulation sectorielle. Elle prend la forme de l'assignation de contraintes de service public à ces deux opérateurs de service universel que sont, dans leur champ respectif, La Poste et France Télécom. Sous cet angle, le projet de budget laisse ouvertes un certain nombre de questions relatives au financement du service universel, notamment dans sa dimension d'aménagement du territoire.
    L'analyse de la situation de La Poste montre que l'absence de prise en compte, de manière transparente, des charges liées au service universel, risque de créer à terme une situation intenable.
    La Poste exerce ce que je considère comme des missions de service public irremplaçables à deux niveaux : elle doit assurer, au titre du service universel, la levée et la distribution du courrier « tous les jours ouvrables », c'est-à-dire six jours sur sept ; elle remplit de fait la fonction de « banque des pauvres », car elle ne sélectionne pas sa clientèle. Un chiffre : 60 % des détenteurs du livret A ont un avoir inférieur à 150 euros.
    La Poste a fonctionné jusqu'à présent dans un certain équilibre, sachant que cet équilibre englobait, en vertu de l'accord Galmot de 1996, la charge de l'aide au transport de la presse, qui représente, au total, plus de 750 millions d'euros et que l'Etat ne compense qu'à hauteur de 290 millions.
    Les fondements de cet équilibre se trouvent remis en cause par le rétrécissement du domaine réservé à chaque nouvelle étape de la réglementation européenne. Ce domaine ne s'étendra plus qu'au courrier de moins de 100 grammes au 1er janvier 2003 et, au 1er janvier 2006, qu'au courrier de moins de 50 grammes.
    En outre, La Poste se retrouve pénalisée par des dispositions sociales, qui profitent au contraire à ses concurrents privés. Elle a ainsi mis très tôt en oeuvre les 35 heures sans bénéficier d'aucune aide ; elle s'est vue privée du droit d'avoir recours aux contrats-jeunes en août dernier ; l'article 6 du projet de loi relatif aux salaires, au temps de travail et à l'emploi, a écarté explicitement La Poste du bénéfice des diminutions de cotisation sociale.
    Cette menace à moyen terme sur les ressources, alors que les coûts salariaux augmentent, crée une double série de tensions : d'un côté, sur le terrain, La Poste est tentée par une stratégie de rentabilité à outrance ; de l'autre, elle est amenée, pour essayer de trouver d'autres sources de revenu, à développer des stratégies agressives aux marges du domaine d'activité qui lui est reconnu par la loi, comme l'a illustré le succès d'AssurPost, qui a suscité l'inquiétude des professionnels de l'assurance.
    On perçoit donc l'urgence qu'il y a à prendre en considération, dans une pleine transparence, le problème de la compensation des missions d'intérêt général de La Poste.
    Il convient d'abord que l'Etat prenne ses responsabilités quant à l'aide à la presse, et quant à la compensation des conditions très particulières imposées aux activités financières de La Poste, ce qui pourrait se faire dans le prochain contrat de plan, actuellement en discussion.
    Surtout, il faut rétablir l'égalité des conditions de fonctionnement vis-à-vis de la concurrence. En effet, il est inadmissible que l'administration des finances refuse d'appliquer à La Poste une mesure générale d'aide, ou d'allégement de charges, uniquement sous prétexte que cela coûterait trop cher, parce que les effectifs de La Poste sont trop nombreux !
    Enfin, il convient de s'interroger sur le problème du financement du service universel postal, dans la perspective de la réduction, voire de la disparition peut-être un jour, après 2009, du domaine réservé.
    L'exemple du fonds de service universel des télécoms montre que la solution d'une répartition de la charge entre les entreprises suscite de multiples contestations, y compris devant la justice européenne. De plus, avec cette solution, c'est, de toute façon, l'utilisateur final qui paye, mais sans qu'il le sache.
    Mieux vaudrait donc revenir à la neutralité économique, en créant ouvertement une redevance affectée pesant sur l'ensemble des utilisateurs finaux - les entreprises seraient chargées de la collecter, via l'envoi des factures. Le droit européen resterait respecté, car il permet un financement à partir d'un fonds public.
    Dans l'idéal, il faudrait même que cette redevance soit commune aux deux secteurs des postes et des télécoms pour tenir compte des phénomènes de substitution entre les produits des deux secteurs. J'ai même trouvé un nom pour cette taxe commune : le denier du service universel. Un calcul de coin de table montre qu'un taux de l'ordre de 0,5 % pourrait probablement suffire.
    Comme le droit constitutionnel m'interdit de déposer un amendement pour la création d'une redevance affectée, je livre ces réflexions à la sagesse de ceux qui m'écoutent et de ceux qui liront le compte rendu des débats.
    En conclusion, je propose d'approuver sans réserve l'ensemble des crédits prévus dans le budget pour 2003 en faveur des secteurs des postes et des télécommunications. Toutefois j'appelle l'attention de mes collègues sur le fait que le cadre juridique de ces deux secteurs devra faire l'objet d'adaptation dans les prochains mois.
    Personnellement, je veillerai à ce que ces évolutions législatives prennent aussi en compte, au passage, la question de l'enfouissement des lignes téléphoniques aériennes qui est loin d'être résolue.
    Enfin, madame le ministre, je souhaite que nous parlions aussi de la téléphonie mobile. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Christian Bataille, premier orateur inscrit.
    M. Christian Bataille. Madame la ministre, nous avons pris connaissance de la présentation de ce projet de budget préparée par vos services - les services de Bercy - de façon aussi méticuleuse que d'habitude. J'en ai relevé les priorités : accompagner le développement des entreprises françaises, favoriser la création et le développement des petites et moyennes entreprises au service de l'emploi. Il prévoit aussi des moyens et deux petites cagnottes de 2,4 milliards d'euros et de 184 millions d'euros, soit environ le cinquième du budget de Bercy.
    Ce budget soutient-il une politique industrielle, ou n'est-il qu'une façade, un faux-semblant ? Malheureusement, l'abandon de l'ambition d'une politique industrielle au service de l'intérêt national et européen nous incite à penser qu'il faut plutôt retenir la seconde hypothèse. Or cet abandon est regrettable tant pour l'industrie elle-même, pour ses 170 000 entreprises et ses millions de salariés directs et indirects, que pour notre pays et notre économie, auxquels notre industrie apporte une dynamique de croissance et les 275 milliards de ses exportations.
    Madame la ministre, pourquoi estimons-nous que ce budget est couleur de muraille ?
    D'abord il est un budget de saupoudrage. Comment espérer que ces quelques cagnottes - 2,4 milliards d'euros ici, 184 millions là -, mises bout à bout, puissent former le levier d'une politique industrielle ? Comment peut-on penser orienter un secteur de 760 milliards de chiffre d'affaires avec 38 milliards d'investissement annuel ? Le compte n'y est évidemment pas.
    Certes, direz-vous - et M. Francis Mer l'a ouvertement rappelé à M. Fillon - l'industrie n'a pas besoin qu'on s'occupe d'elle ou qu'on l'aide. En fait votre gouvernement estime qu'elle peut se débrouiller toute seule. Si cette idée simple a été pertinente et féconde à l'aube de notre industrie, elle ne l'est malheureusement plus aujourd'hui. Nous avons toute une histoire derrière nous, un passé volontariste allant de la monarchie au gaullisme, ...
    M. Patrice Martin-Lalande. Ne confondons pas tout !
    M. Christian Bataille. ... passant par la Révolution, la IIIe République et les gouvernements plus récents. Nous avons ainsi connu bien des réussites dont les effets se font encore sentir aujourd'hui : aéronautique, espace, équipement nucléaire, qui ont été l'expression d'une volonté industrielle nationale.
    Désormais il convient de se tournerr vers l'avenir et le groupe socialiste prétend que notre industrie a encore besoin de nous. Quelle est en effet la situation de notre industrie ? Quelles sont ses préoccupations?
    Pour percevoir les évolutions en cours, il faut revenir sur les années 1997-2002. Peut-être est-ce une période qui vous échappe un peu...
    M. Patrice Martin-Lalande. Elle vous a échappé aussi ! (Sourires.)
    M. Christian Bataille. ... mais personne ici n'a l'intention d'éluder ce débat.
    Pendant ces cinq ans, notre action a eu deux effets importants. D'abord, nous avons consolidé l'emploi industriel avec 70 000 créations de postes, ce qui n'est pas un mince résultat, même si ces chiffres se sont amenuisés en fin de période. Toutefois, là n'est pas l'essentiel. En effet, plus que l'impact de l'industrie sur l'emploi, c'est sa structure même que nous avons modifiée, en particulier dans le secteur secondaire.
    Pour faire simple, je dirai que là où le secteur de l'industrie était jadis un et indivisé, il est désormais organisé en un coeur de métier constitué de l'industrie elle-même, production marchande de biens et d'équipements, entouré d'une vaste périphérie qui rassemble les services à l'industrie. Cette dénomination recouvre des fonctions essentielles à l'acte de produire, mais externalisées - transports, expertise juridique, formation, informatique et télécommunications, maintenance, collecte de déchets - auxquelles on peut en ajouter d'autres comme l'affacturage, le conditionnement, les achats, les relations avec la clientèle, les services d'après-vente ou d'accueil...
    L'estimation du potentiel d'emploi que représentent ces services est difficile. D'ailleurs, madame la ministre, je ne saurais trop vous inciter à commander des études sur ce point. Cependant on considérait, en 2001, que le secteur industriel effectuait le quart de ses dépenses en services.
    Telle est donc la physionomie de l'industrie française que nous vous transmettons : un potentiel organisé aux trois quarts en coeur de métier et, pour le quatrième quart, en services périphériques. Comme l'a été l'industrie pendant plus d'un siècle, ce coeur reste structurant pour l'économie, notamment pour la création d'emplois. Toutefois chacun voit bien en quoi sa périphérie en est dépendante et combien l'édifice ainsi constitué est fragile.
    C'est sur cela que vous auriez dû vous pencher, madame la ministre, c'est à cela que vous auriez dû consacrer votre budget : mieux arrimer l'industrie et les services à l'industrie, faire en sorte que l'édifice qu'ils constituent, et dans lequel les services ont probablement vocation à se développer soit cohérent, solide, économiquement harmonieux.
    Or non seulement votre budget ne répond pas à cette préoccupation, mais, pire encore, il l'ignore. C'est la raison pour laquelle nous estimons qu'il est loin, très loin des enjeux pertinents.
    Pour terminer mon propos je veux évoquer la partie du rapport de M. Masdeu-Arus consacré à EDF. Il a pris une bonne initiative en soulignant qu'il s'agissait de comptes publics ; j'espère d'ailleurs qu'ils vont le rester longtemps! Ce chapitre plein, nourri, sérieux, solide, argumenté, de qualité, mériterait un débat à lui seul, afin que nous puissions en détailler et commenter le contenu.
    En fait je ne reviendrai que sur la partie relative au développement international d'EDF dans laquelle la critique est sévère, mais étayée, en pointant les opérations internationales jugées aventureuses.
    Selon vous, monsieur le rapporteur, le bilan des opérations conduites au Royaume-Uni et en Allemagne n'est pas bon, mais on peut espérer que des synergies se développeront dans l'avenir. En revanche, vous qualifiez les opérations de développement d'EDF en Amérique du Sud d'« imprudente aventure sud-américaine », et l'opération italienne d'« échec italien ». Ces termes sont bien sévères, mais, ayant lu avec attention ce rapport, je pense que vos démonstrations méritent considération. Elles justifiraient même un débat, d'autant que cette situation ne fait que confirmer l'opinion que je défends depuis des années, à savoir que la vocation d'un service public est d'abord d'être un service public. S'il peut - pourquoi pas ? - développer des synergies avec les pays voisins,...
    M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis. C'est indispensable !
    M. Christian Bataille. ... il ne lui appartient certainement pas de mener une politique de conquête, que vous qualifiez d'« aventureuse », comme cela a été le cas d'EDF.
    En revanche je ne pense pas que nous allons tirer les mêmes conséquences de ce constat.
    Ainsi le groupe socialiste reste attaché à la notion de service public. Personnellement j'irais jusqu'à dire que si je devais choisir entre le développement international et le service public, je choisirais le service public, même si, j'en conviens, on ne peut pas couper des branches qui ne sont pas mortes, mais chargées de dettes. Je ferais donc ce choix pour éviter la dilution d'une entreprise, fruit de l'effort national, dans un contexte mondialisé très perturbant.
    Par contre, j'ai le sentiment que, dans les mois qui viennent, vous allez mettre en avant la dérive des comptes d'EDF et cette hasardeuse politique de développement international - j'entends même parler de directives qui n'existent pas encore - pour engager, de façon masquée au début, la privatisation par étapes, selon la technique du salami, que M. le Premier ministre choisira en l'occurrence. Nous en aurons d'ici peu une première illustration avec la prochaine loi sur le gaz qui, paradoxalement, aura pour plus lourd effet de favoriser le démantèlement de la loi sur l'électricité de 2000. Mais cela est une autre histoire dont nous reparlerons.
    Aujourd'hui, madame la ministre, nous ne pouvons accepter ce budget. C'est pourquoi le groupe socialiste votera contre.
    M. le président. La parole est à M. Alain Cousin.
    M. Alain Cousin. Madame la ministre, vous êtes à la tête d'un ministère qui a un rôle majeur à jouer pour nous permettre de gagner la difficile bataille du développement économique et qui, par ailleurs, a beaucoup à dire et à faire aux côtés de votre collègue Jean-Paul Delevoye pour apporter sa contribution à l'aménagement du territoire.
    S'agissant de ce budget, l'essentiel a été dit par nos excellents rapporteurs. Je serai donc aussi bref que possible pour éviter d'être redondant. Pourtant, un rapide état des lieux n'est pas inutile. En effet, monsieur Bataille, nous n'avons pas oublié la période 1997-2002.
    Tout d'abord, madame la ministre, vous vous trouvez en présence d'un secteur public industriel exsangue, le mot n'est pas trop fort, du fait des insuffisances passées - même si ce passé est encore récent - de la tutelle de l'Etat.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Eh, oui !
    M. Alain Cousin. Je vais donner quelques exemples pour illustrer mon propos.
    EDF a mené en 2000-2001 une politique d'acquisition souvent qualifiée d'aventureuse en Europe et en Amérique latine en payant au prix fort ses rachats au moyen de sa trésorerie. Sa politique d'acquisition au Brésil et en Argentine affiche des pertes de l'ordre de 1,4 milliard d'euros. François Roussely, auditionné en commission des finances le 18 septembre dernier, a reconnu que la rentabilité des investissements à l'étranger serait retardée à 2004 au lieu de 2002.
    Pour autant, au-delà de cet aspect comptable, cette entreprise est bien l'un de nos fleurons industriels. EDF dispose d'un potentiel exceptionnel en termes de ressources humaines. Cela est vrai aussi au plan technologique, sans oublier son très haut niveau de recherche et développement. Elle doit donc devenir une référence mondiale et l'ouverture du capital que vous préconisez et que nous approuvons donnera à son personnel les moyens de remporter ce challenge, ce qui n'est pas incompatible avec une excellente notion de service au public.
    Quant à France Télécom, sa situation financière catastrophique fait courir un risque systémique dans un secteur d'activité déjà très sinistré. Nous connaissons l'endettement abyssal de cette entreprise et ses pertes. Le cours de l'action qui était de 191 euros en mars 2000 est tombé à moins de 11 euros le mois dernier. Ce titre a chuté de 75 %, excusez du peu ! On peut donc légitimement s'interroger sur le manque de mesures et de pertinence dont a fait preuve le gouvernement Jospin dans la cession des licences UMTS qui est, en partie, responsable de l'endettement record de France Télécom. En effet, rappelons que le gouvernement précédent réclamait à chaque opérateur 5 milliards d'euros dans la procédure initiale de solutions comparatives, sans savoir si cette technologie serait rentable à terme.
    Toujours au titre de l'état des lieux, nous ne pouvons encore que relever une politique autiste à l'égard des échéances européennes concernant l'ouverture à la concurrence des monopoles publics.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Tout à fait !
    M. Alain Cousin. Il y a d'abord eu la transposition tardive de la directive Electricité et la non-transposition de la directive Gaz.
    Au Conseil européen de Stockholm de mars 2001, le gouvernement Jospin a ajourné la question de l'ouverture à 100 % des marchés de l'électricité et du gaz. Du fait de cette non-transposition de la directive Gaz dans les délais, la France risque de payer une astreinte de 50 millions d'euros.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. C'est vrai !
    M. Alain Cousin. De plus, le retard pris par la France dans la transposition de la directive Gaz a posé de graves problèmes au développement de Gaz de France. En effet, n'ayant pas respecté la date limite du 10 août 2000 pour transposer la directive européenne du 22 juin 1998, le gouvernement de M. Jospin a placé Gaz de France dans l'incapacité d'accéder au réseau espagnol, la GAS ayant fait, à juste titre, jouer la clause de réciprocité.
    En ce qui concerne la libéralisation du secteur postal au niveau européen, ce même gouvernement de M. Jospin a été pris, voire piégé, dans les contradictions de sa majorité dite plurielle, qui a encore mené une stratégie de retardement.
    Enfin, nouvelle illustration de l'autisme du précédent gouvernement, nous constatons que des pans entiers de l'industrie ont été laissés en jachère et sont toujours sinistrés.
    A cet égard je veux revenir sur le plan Borotra, que le précédent gouvernement n'a remplacé par aucun dispositif probant, laissant en jachère le secteur du textile, si important chez nous. Ce plan Borotra, lancé le 12 avril 1996 afin de sauvegarder la filière textile française, prévoyait des allégements de charges sociales en échange du maintien et du développement de l'emploi. Il concernait 5 500 entreprises. Cette aide, jugée illégale parce que de nature sectorielle par la Commission européenne, a été arrêtée le 31 décembre 1997, et les entreprises ayant reçu plus de 100 000 euros auront dû les rembourser d'avril 2000 à avril 2003.
    Le gouvernement Jospin a estimé que le passage aux 35 heures serait suffisant pour préserver l'emploi dans les entreprises du textile. Comme on le voit aujourd'hui, le succès de celui-ci est pour le moins discutable.
    Le gouvernement de l'époque avait pourtant été prévenu : le 6 novembre 1997, à cette même tribune, j'expliquais à Mme Aubry que Bruxelles souhaitait simplement, et à juste titre, que nous sortions de l'aspect sectoriel du plan Borotra. Je rappelle que le commissaire Van Miert avait accepté le principe d'un élargissement de la réduction des charges à l'ensemble des branches en fonction du pourcentage des salariés et de celui des bas salaires. Les experts, il y a cinq ans, presque jour pour jour, avaient estimé le coût de cette disposition à sept milliards de francs contre deux milliards pour le plan Borotra. C'était possible. A cette époque, l'idéologie l'emportait sur le pragmatisme et le bon sens, pour le malheur des salariés de cette industrie de main-d'oeuvre.
    Nous en resterons là pour l'état des lieux. Il est édifiant.
    Votre budget, madame la ministre, est réorienté vers la compétitivité des entreprises et vise trois objectifs majeurs : la mise en oeuvre d'une politique énergétique indépendante et équilibrée ; le développement d'une politique active en direction des PMI, par le soutien de l'innovation, de la recherche et du développement ; enfin, l'amélioration des mutations industrielles, par une aide appropriée aux entreprises et aux régions victimes de sinistres industriels.
    Je ne reviendrai pas sur le premier objectif, à savoir la mise en oeuvre d'une politique énergétique indépendante et équilibrée. Le sujet a été très bien évoqué par M. Jacques Masdeu-Arus.
    S'agissant de la réorientation de notre politique vers les PMI par le soutien de la recherche, du développement et de l'innovation, je rappelle que les crédits de l'ANVAR sont conformes aux engagements pris dans le contrat pluriannuel 2000-2003 de l'Agence. Les actions en matière de développement des PMI gérées au plan régional recevront les dotations prévues dans les contrats de plan Etat-régions. Enfin, les dotations budgétaires permettront de financer les interventions du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie dans les domaines couverts par les seize réseaux de recherche et d'innovation technologique qui associent l'ensemble des acteurs publics ou privés de l'innovation.
    Quant à l'aide à la reconversion et à la restructuration industrielle, elle est indispensable pour accompagner les territoires touchés par des sinistres industriels aux conséquences humaines souvent très dramatiques. Les salariés ne veulent pas être assistés. Nous devons impérativement réunir les conditions pour que les reconversions industrielles réussissent et permettent aux salariés de participer à l'oeuvre collective, tout simplement par le travail. C'est ce qu'ils attendent.
    Je ne reviendrai pas sur La Poste, M. Pierre Micaux s'est longuement exprimé sur le sujet et de très belle manière.
    Je dirai simplement quelques mots sur la réorganisation territoriale du réseau d'exploitant postal, qui continue de poser des problèmes importants notamment en milieu rural. Cette organisation pose deux problèmes majeurs : le premier concerne l'aménagement du territoire et le second la qualité de service pour les usagers. Ce sont des notions que nous devons prendre en compte.
    Il faut être d'une très grande exigence sur la notion de service au public. Je suis persuadé qu'avec de l'imagination des solutions existent.
    Le prochain contrat de plan entre l'Etat et la Poste pour 2002-2005 sera déterminant pour l'avenir de l'exploitant public. Il devra développer les services financiers de la Poste, rétablir l'équilibre financier de celle-ci, poursuivre la libéralisation du secteur postal dans le cadre de la nouvelle directive européenne du 10 juin 2002, revoir la question de son statut d'exploitant public qui prive la Poste des fonds propres nécessaires pour mener une politique d'acquisition, investir dans les nouvelles technologies ou diversifier ses services, sans pour autant prendre le risque de s'orienter vers des métiers qu'elle ne maîtrise pas - je pense notamment au secteur de l'assurance. Il devra également assurer la rentabilité du réseau dans le respect de ses missions de service public et donc veiller à la réorganisation du maillage territorial.
    Le secteur des télécommunications est sinistré. On le voit avec Alcatel, qui est obligée de licencier 27 000 personnes sur l'ensemble de l'année 2002. Je m'interroge d'ailleurs sur cette décision. Lorsque ce grand groupe n'aura plus d'usine, que restera-t-il de notre culture industrielle dans ce grand secteur ? N'allons-nous pas voir un savoir-faire, une compétence disparaître de notre territoire ?    
Alain Joyandet a parlé de la téléphonie mobile ADSL. Il serait redondant de revenir sur cette question.
    Le chantier est important et d'autant plus difficile que nous l'abordons dans un contexte international défavorable. Vous avez déjà démontré une très grande détermination, madame la ministre, et nous vous en savons gré, il va en effet en falloir beaucoup.
    Sachez que nous serons à vos côtés, car il faudra multiplier les propositions et les suggestions pour vaincre ce grand défi du développement économique. Le groupe UMP vous apporte son soutien et votera, bien sûr, votre projet de budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour dix minutes.
    M. Daniel Paul. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avec le prolongement de la crise, les annonces de restructuration s'accumulent. Après avoir longtemps contourné les procédures de licenciement collectif, les entreprises mettent en oeuvre des plans sociaux même si elles jugent, avec vous, la loi de modernisation sociale trop contraignante.
    La liste est longue des entreprises qui ont annoncé des plans de restructuration depuis la rentrée. Les secteurs concernés ne sont pas seulement ceux qui furent entraînés dans la bulle Internet.
    Pour ne citer que ma région, qui illustre parfaitement la conjoncture nationale, la situation de l'emploi en Haute-Normandie se dégrade dangereusement depuis plusieurs semaines.
    Les plans de restructuration et les suppressions d'emplois concernent des centaires de salariés : Viasystèmes à Déville-lès-Rouen, Trouvay et Cauvin au Havre, Alcatel Cit à Eu, Alizol à Alizay, Finecoeur à Maromme, etc.
    Vous me permettrez d'appeler plus particulièrement votre attention sur la situation du groupe Trouvay et Cauvin du Havre, sur laquelle j'ai déjà eu l'occasion de vous alerter, ainsi que vos collègues ministre de l'industrie et ministre du travail. Actuellement 850 salariés sont menacés par la liquidation judiciaire de leur entreprise. Dès à présent, plus de 300 suppressions d'emplois sont assurées. Et ce n'est pas l'état actuel des reprises par le biais de ventes d'appartements, bien aléatoires et limitées, qui rassure les personnels. N'était-ce pourtant pas aux pouvoirs publics de peser en ce sens, comme vous me disiez le faire il y a un mois, par une grande attention ? A juste titre, les salariés refusent la fatalité du chômage dans des bassins d'emploi où il dépasse largement la moyenne nationale. Ils demandent que les pouvoirs publics, l'Etat en premier lieu, mettent en oeuvre les moyens nécessaires, au niveau nécessaire, pour répondre à des salariés qui veulent tout simplement travailler.
    Vos amis de droite avaient invoqué la « la liberté d'entreprendre » pour refuser la loi de modernisation sociale. Souffrez que j'en appelle au « droit au travail », qui figure, lui, dans la Constitution. Je demande donc que soient mises en place les mesures que demandent les salariés et que soutiennent les élus de la région havraise. Je vous remettrai à ce sujet tout à l'heure un courrier suite à notre rencontre en sous-préfecture il y a quelques jours avec les salariés de Trouvay et Cauvin.
    Une redoutable fuite en avant est engagée. Alors que la crise trouve racine dans l'excès de croissance financière, les licenciements massifs vont aggraver les problèmes de débouchés et accélérer la dégradation des chiffres de la croissance. Face à d'aussi inquiétantes perspectives, la politique du Gouvernement, votre politique - puisque ce budget en est l'instrument - est gravement inadaptée.
    Dans votre constat, vous minimisez la lourdeur de la crise. Dans ses traitements, vous donnez quitus au patronat, qui réclame un nouvel écrasement des coûts salariaux, la liberté d'entreprendre se confondant souvent avec la liberté de licencier.
    M. Mer, ministre de l'économie, a pour habitude de dire qu'il veut donner à notre pays une politique industrielle. Mais qu'est-ce qu'une politique industrielle ? La droite estime souvent qu'il faut laisser les industriels - eux, ils savent ! -, et qu'il faut même les libérer de toutes les contraintes. On en voit les résultats, et votre volonté de lâcher la bride en ce sens fait craindre une aggravation lourde de conséquences pour les salariés et les territoires.
    Votre politique industrielle, c'est en fait la satisfaction des actionnaires et des dirigeants, la main libre aux forces du marché, la compréhension à l'égard des grands groupes qui ont entrepris de dépecer notre économie et celle de notre continent.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Quelle caricature !
    M. Daniel Paul. Ce n'est pas de la caricature, monsieur le rapporteur. Par contre, ce que je vais dire maintenant l'est.
    D'une manière caricaturale, au moment où vous vous apprêtez à réviser la loi de modernisation sociale pour la débarrasser de tout ce qui pourrait rendre les licenciements de compétitivité plus difficiles, vous nommez un « Monsieur licenciement ».
    Cette année encore, c'est le manque d'ambition qui caractérise votre budget et, par conséquent, l'intervention de l'Etat dans le domaine industriel.
    Mais pire encore, l'action de l'Etat ne se limite plus seulement à ce que l'on appelle pudiquement « l'accompagnement des mutations industrielles » et à des interventions nécessaires et utiles en faveur de l'innovation et de la formation. En effet, la déferlante de déréglementation, de réduction de l'emploi public et la vague de privatisations promise par votre gouvernement visent en fait à accentuer la soumission du politique à la loi du marché.
    Dans votre esprit, le rôle du politique, de l'Etat, consiste à garantir le bon fonctionnement des rapports marchands et, pour servir le MEDEF, à « gommer » les obstacles, les résistances ou les comportements « déviants » qui peuvent exister grâce à la mobilisation citoyenne, et aux mouvements syndicaux. Votre maître mot, pour les entreprises publiques, c'est « privatisation » et non pas performance au service des usagers et des territoires.
    Conscient de la logique dogmatique qui guide votre action, il n'est pas étonnant dans ces conditions de constater que les crédits soumis aujourd'hui à notre examen soient en diminution : - 1,66 %, cela a été rapporté.
    Il est intéressant de noter, comme l'a fait en toute objectivité notre rapporteur, que 19 % des crédits du ministère sont affectés à la politique industrielle et seulement 1 % sont destinés aux PME-PMI, pourtant créatrices d'emplois.
    Dans cette même logique, d'une politique industrielle au service du MEDEF, des services publics plongés dans la logique du marché, votre budget, en augmentant les moyens de la commission de régulation de l'électricité - la CRE - anticipe la transposition de la directive européenne relative au marché intérieur du gaz naturel, contre laquelle nous nous étions prononcés à la fin de la dernière législature.
    De la même manière, en décidant de lancer les procédures d'ouverture du capital d'EDF-GDF, le Gouvernement affirme clairement son choix de livrer ses entreprises publiques aux marchés boursiers. Il s'agit là d'un choix politique, idéologique, contesté légitimement par les agents et les usagers, et non justifié par un projet industriel.
    Mon collègue, François Asensi, aura l'occasion de développer le point de vue de notre groupe sur cette importante question dans quelques minutes.
    Il est d'ailleurs paradoxal et irresponsable d'envisager l'accélération de la libéralisation du secteur de l'énergie, alors que vous reconnaissez, avec nous - et c'est l'un de nos seuls point de convergence - qu'il est nécessaire de soutenir la recherche nucléaire qui reste aujourd'hui, selon notre collègue rapporteur, « la filière la plus efficace et la plus rentable pour assurer la production d'énergie sans émission de gaz contribuant à l'effet de serre ».
    Il serait intéressant de vous entendre sur votre volonté de décider la construction du prototype de réacteur de la nouvelle génération, EPR. Nous regarderons avec attention, surtout venant de Normandie, où se trouve la centrale de Penly, si l'on retrouve dans le budget du ministère de l'écologie et du développement durable, comme vous vous y êtes engagés en commission, les moyens nécessaires au bon exercice des missions de l'inspection des installations classées.
    Ce budget comporte aussi les crédits des postes et télécommunications dans un contexte, selon notre rapporteur lui-même, « un peu particulier cette année, car les deux principales entreprises concernées, France Télécom et La Poste, avaient été soumises à d'importants soubresauts ». C'est peu dire.
    Nous sommes, comme les agents et leurs organisations syndicales qui ont manifesté hier, indignés par les perspectives de fermeture de 500 à 700 bureaux supplémentaires, d'ici à la fin de l'année, et de disparition en quelques années d'un centre de tri sur deux. Ils sont dans l'action pour dénoncer cela et aussi la déréglementation envisagée dans l'ensemble des services postaux français à l'horizon 2009.
    Il y a danger puisque vous vous apprêtez à négocier le contrat de plan entre l'Etat et La Poste avec la volonté de renforcer la mise en oeuvre des directives européennes sur la concurrence des activités postales.
    Au moment où le Gouvernement met en débat les enjeux de la décentralisation, l'avenir de La Poste et le maintien de ses missions de proximité sont de notre point de vue une priorité, comme le règlement positif du problème des multiples situations des personnels de La Poste, héritées du passé.
    Comment préparer le départ de 140 000 postiers en retraite d'ici à 2009 ? Comment développer la réponse postale qu'offre actuellement le réseau de 17 000 bureaux dans toute la France ? Bref, comment assurer le service public sur l'ensemble du territoire avec le souci premier du service au public, de la péréquation, alors même que les directives européennes orientent La Poste vers la loi des marchés, en particulier pour les activités de courrier, de colis et de logistique ?
    Pour France Télécom, c'est encore la faillite de la logique financière. Même s'il ne faut pas exclure les erreurs de gestion de l'état-major de France Télécom,...
    M. Jean Dionis du Séjour. Du gouvernement !
    M. Daniel Paul. ... ses responsabilités ne sont pas uniques.
    En fait, dans l'esprit d'une construction européenne libérale, les directives de l'Etat, actionnaire majoritaire, se sont confondues avec celles des puissants actionnaires privés selon le mot : « faites ce que les marchés financiers attendent ! ». Les conséquences sont lourdes. On le voit avec la suppression de milliers d'emplois à Alcatel. Il est vrai que M. Tchuruk prône des entreprises sans salariés. C'est également ce qui a poussé France Télécom à vendre TDF, service public, pour 1,9 milliard d'euros à une holding où la présence d'un fonds écossais de placement montre bien les méthodes qui vont être utilisées pour « rentabiliser » l'opération. L'effet de levier attendu aura peut-être lieu, mais au détriment des salariés, en séparant les activités rentables des moins rentables. Un véritable gâchis.
    M. Patrice Martin-Lalande. C'était qui le gouvernement à l'époque ?
    M. Daniel Paul. Aider France Télécom, éviter de jeter des services publics en pâture à des rapaces de la finance serait, par exemple, réduire les charges financières, baisser les taux d'intérêt.
    M. le président. Monsieur Paul, il faut conclure.
    M. Daniel Paul. J'ai presque terminé, monsieur le président. Aujourd'hui, le Gouvernement refuse d'entendre les organisations syndicales représentatives et propose une réponse capitaliste à une situation engendrée par la logique libérale.
    Au bout du compte, les recettes sont connues : faire payer les salariés, les petits usagers, publiciser les pertes et privatiser les futurs bénéfices par le démembrement de l'entreprise.
    Avec les intéressés, nous préconisons une politique de réappropriation publique de France Télécom, reposant sur des droits nouveaux d'intervention des syndicats et des salariés, des garanties statutaires et collectives pour reconquérir le droit à la communication pour tous.
    Comme l'a souligné Marie-George Buffet cette semaine à l'occasion d'une conférence de presse, l'ensemble des réseaux et infrastructures de télécommunications en France doit appartenir au domaine public et passer sous contrôle social. Les modalités de ce qui serait ainsi une nationalisation d'un nouveau type devraient et pourraient être discutées et maîtrisées par les élus, les salariés et leurs syndicats, les usagers avec les associations de consommateurs.
    Nous estimons, dans cet esprit, que le Gouvernement a le devoir de s'opposer à la mainmise du groupe britannique Vodafone sur la filiale de Vivendi Universal, afin d'éviter d'envenimer la guerre économique dont l'Europe est devenue le champ clos dans les télécommunications, ce qui l'affaiblit considérablement face à l'impérialisme des Etats-Unis dans ce domaine.
    Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, à travers l'examen de ce budget, ce sont bien des conceptions du développement et de l'action publique qui s'affrontent. Vous avez choisi de répondre favorablement à la mobilisation sans précédent du patronat, celle du : « manifeste signé par cinquante-six chefs d'entreprise » qui, adeptes du « laisser-faire-laissez-passer, » souhaitent en fait : « licencier en paix ».
    Toutes ces raisons nous conduiront à voter contre votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.
    M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la discussion du projet de loi de finances pour 2003 pour le budget « Industrie, Postes et télécommunications » fournit l'occasion au groupe Union pour la démocratie française de dépasser la stricte analyse des chiffres du budget de l'Etat, souvent mécaniquement reconduits, pour évoquer les quelques questions clés que se posent les Français sur la politique conduite par l'Etat dans les secteurs concernés.
    L'examen des outils de politique industrielle tels qu'ils apparaissent au travers de votre budget n'appelle pas de commentaires majeurs de notre part. Ainsi la décision d'augmenter - notamment en encourageant l'innovation à travers l'ANVAR, dont les dotations atteignent 142 millions d'euros en 2003, contre 134 en 2002 - les crédits destinés à encourager l'innovation et la recherche de qualité emportent notre adhésion.
    En revanche, les secteurs de la poste et des télécommunications sont à la croisée des chemins pour des raisons diverses : fin du monopole et ouverture au marché européen pour La Poste dans son activité majeure qu'est le courrier, 60 % de son chiffre d'affaires en 2001, et crise financière de l'entreprise et du secteur concerné pour France Télécom. Les Français attendent, sur ces deux entreprises phares du service public, des réponses claires, des réponses d'avenir, bref, une véritable politique.
    La Poste, avec la libéralisation progressive du secteur courrier, est sur le point de connaître les plus profonds bouleversements de son histoire. Or force est de constater qu'elle n'est pas prête à affronter le changement, d'abord parce qu'elle a été abandonnée avec désinvolture par le gouvernement socialiste, qui n'a même pas pris la peine de signer le nouveau contrat de plan 2003-2005 entre l'Etat et l'entreprise. Il conditionne pourtant l'avenir de plus de 300 000 hommes et femmes.
    Notre première question, madame la ministre, sera donc très simple : quand les discussions préalables entre l'Etat et La Poste sur le contrat de plan seront-elles bouclées ? Quand la représentation nationale pourra-t-elle examiner celui-ci ? Quand comptez-vous le signer et le rendre opérationnel ?
    La Poste regroupe trois métiers différents et complémentaires : le colis, le courrier et la banque. Si les activités de distribution du colis, totalement concurrentielles, ne relèvent plus directement de la politique conduite par l'Etat, il en va tout autrement en ce qui concerne le courrier et les activités financières. En effet, si l'ouverture à la concurrence du secteur courrier est souhaitable et conforme à nos engagements européens, elle risque de porter un coup fatal à La Poste si l'Etat ne l'accompagne pas, voire la freine dans la voie du changement.
    La Poste doit, en effet, faire face à la disparition progressive de son monopole sur l'acheminement du courrier, qui représente 60 % de son activité. L'année 2003 verra la fin du monopole sur les courriers de plus de cent grammes, 2006 sur les courriers de plus de cinquante grammes et l'ouverture totale à la concurrence est prévue en 2009.
    La part du courrier dans le chiffre d'affaires retomberait à 50 % en 2006. La Poste va donc être confrontée à la perte potentielle de l'essentiel de ses recettes. Déjà, les clignotants sont allumés avec un résultat négatif pour 2001, ainsi qu'une prévision de résultat négatif en 2002. Des décisions urgentes de redressement s'imposent donc.
    D'abord, il faut réviser à la hausse les tarifs postaux. C'est inévitable malgré la forte valeur symbolique du timbre à 3 francs, ou 0,46 euros, et la pression exercée par la future concurrence.
    Le Premier ministre a exclu pour 2002 une hausse du prix du timbre, qui n'a pas augmenté depuis 1996, mais il ne s'est pas encore prononcé pour l'an prochain. Nous plaidons pour une hausse significative, aux alentours de 0,5 euro, qui permettrait à La Poste d'engranger à peu près 500 millions d'euros et d'augmenter d'autant son chiffre d'affaires. Cela faciliterait la modernisation de son système de production et de traitement du courrier.
    Quelle est votre politique tarifaire pour 2003 sur ce point précis ?
    Ensuite, il faut que La Poste reçoive de l'Etat la juste rétribution de son soutien à la distribution de la presse. La participation prévue au projet de budget pour 2003 est de 290 millions d'euros, alors que le coût de ce service est estimé à plus de 500 millions d'euros.
    Enfin, - et c'est un problème de fond - la libéralisation de l'activité courrier impose l'accélération des restructurations de l'appareil de distribution de La Poste. Or disons le franchement, c'est un impératif contradictoire avec le rôle que l'on veut lui faire tenir dans l'aménagement du territoire. Les trois quarts des 17 000 guichets ne sont pas rentables et on parle également d'un plan prévoyant, à terme, la fermeture de la moitié des 120 centres de tri.
    Madame la ministre, on ne résoudra pas cette contradiction majeure avec des compromis timorés. Les futures lois de décentralisation doivent nous permettre d'élaborer une solution d'avenir en confiant aux collectivités locales la responsabilité d'assurer dans leurs locaux et avec leurs personnels la présence nécessaire à la vie de chacun de nos territoires, La Poste contribuant à ces dépenses uniquement à hauteur des activités commerciales qu'elle y réalise.
    Enfin, la restructuration de l'appareil de distribution du courrier doit impérativement être pensée en liaison avec l'évolution des activités financières de La Poste. Celles-ci sont en progression constante : le chiffre d'affaires est passé de 3,5 milliards d'euros en 1999 à près de 4 milliards. L'an dernier, La Poste, malgré les restrictions qui la limitent en matière d'assurance-dommages et de crédit non adossé à l'épargne a vu son produit bancaire augmenter de 5,3 %.
    La Poste doit pouvoir élargir ses activités financières à condition de respecter tous les droits et devoirs applicables à ce secteur.
    Madame la ministre, nous devons maintenant aborder un sujet dont la gravité et le poids dans les finances publiques actuelles n'échappent pas à nos concitoyens. Les 230 000 employés de France Télécom, ses 1 600 000 actionnaires vont être spécialement attentifs à nos débats et à vos décisions. Nous leur devons toute la clarté sur leur avenir professionnel ou patrimonial.
    Les questions des Français sont simples et nous leur devons des réponses précises.
    Comment France Télécom a-t-elle pu devenir, avec 70 milliards de dettes, une des entreprises les plus endettées du monde ? Qui est responsable ? Comment éviter de nouveaux désastres d'une telle ampleur ?
    La chronologie de l'évolution de cette dette est maintenant clairement établie. Le destin de France Télécom s'est clairement noué, pour les deux tiers de cette dette, en mai 2000 lors de l'achat d'Orange et d'une licence UMTS britannique pour 41,5 milliards d'euros.
    Certes, le secteur a connu les effets pervers de la constitution de la bulle financière des télécoms et de son dégonflement brutal ensuite. Certes, il a subi une réglementation aberrante en ce qui concerne l'achat des licences UMTS. Mais, à la lecture de ces chiffres sidérants, une question revient sans cesse : où était donc passé le propriétaire, à savoir le gouvernement socialiste ? Quel contrôle a-t-il assuré sur le management de France Télécom ?
    Le plus souvent, le Gouvernement a été aux abonnés absents, sauf lorsqu'il a imposé son idéologie archaïque lors du rachat d'Orange, imposant à l'entreprise de le faire par emprunt, pour ne pas descendre en dessous du seuil sacro-saint des 50 % de participation de l'Etat dans l'entreprise.
    M. Daniel Paul. Heureusement !
    M. Jean Dionis du Séjour. L'Etat socialiste a complètement failli à sa mission d'actionnaire majoritaire. Le mythe des nationalisations a la vie dure. Il a coûté très cher à la France. A l'UDF, nous estimons qu'une révision complète du capitalisme d'Etat s'impose de manière urgente.
    M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis et M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Il a raison !
    M. Jean Dionis du Séjour. Le gouvernement de Lionel Jospin vous a laissé, madame la ministre, une bombe à retardement financière. C'est pourquoi nous demandons que toute la lumière soit faite sur l'étendue réelle d'une catastrophe dont nous ne voyons peut être que la partie émergée...
    M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis. Très bien !
    M. Jean Dionis du Séjour. ... puisque le rapporteur, tout à l'heure, parlait de 80 milliards d'euros de dettes !
    France Télécom est-elle, aujourd'hui ou à court terme, menacée de cessation de paiement ? D'après nos informations France Télécom devrait faire face à une échéance importante de 12 milliards d'euros, en mars 2003.
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Quinze milliards !
    M. Jean Dionis du Séjour. Peut-être ! Est-elle, oui ou non, capable de l'assurer sans une intervention massive de l'Etat avant ce délai ? Y aura-t-il une avance d'actionnaires ? Si oui, à quel taux ? Où en est le rééchelonnement de la dette bancaire de France Télécom ? Quelles concessions l'Etat a-t-il su obtenir des établissements financiers créanciers à court terme de France Télécom ? A moyen terme, quel est le contenu du plan de recapitalisation et quelle est sa traduction budgétaire ?
    Les Français ont le droit de connaître la gravité de la situation. L'Etat est décidé, M. le ministre l'a confirmé mercredi, à assumer ses responsabilités d'actionnaire majoritaire, pour sortir France Télécom de l'ornière. Il a raison car c'est une entreprise stratégique pour notre pays.
    Alain Lambert a estimé dans la presse le besoin de recapitalisation à 15 milliards d'euros, sans annoncer de décision quant à leur ventilation et en invitant les banques à y participer.
    Notre débat, aujourd'hui ou dans quelques jours, doit impérativement lever le voile sur cette opération.
    Madame la ministre, y aura-t-il une augmentation de capital ? Il semble que oui. Confirmez-vous le montant global de 15 milliards d'euros ? La part de l'Etat sera-t-elle donc de 9 milliards d'euros ? Quelle sera la traduction budgétaire de ces 9 milliards ?
    Mercredi soir, M. le ministre a indiqué que le débat devant la représentation nationale serait reporté de plusieurs semaines. Nous souhaitons, pour notre part, qu'il ait lieu pendant la discussion budgétaire.
    Paradoxalement, la situation dramatique de France Télécom peut être l'occasion de repenser le statut de l'opérateur historique et, plus généralement, de réorganiser de manière dynamique le marché des télécommunications en France. En effet, la crise de France Télécom et ses conséquences, ne saurait être appréciée seulement en termes financiers. France Télécom était, et restera sans doute, le moteur du développement des télécommunications en France.
    M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
    M. Jean Dionis du Séjour. Durablement pénalisé par le poids de sa dette, il occupera nécessairement un rôle plus modeste dans les années à venir. Or certains enjeux, notamment le développement du haut débit sur l'ensemble du territoire national, ne peuvent pas attendre.
    Votre décision d'augmenter les crédits en matière de régulation des marchés va, à cet égard, dans le bon sens. Mais sur le fond, la crise de France Télécom est pour nous un danger auquel il faudra répondre et une opportunité qu'il faut saisir. Nous vous faisons une proposition innovante à mettre en débat : la vente des réseaux de desserte de France Télécom aux régions françaises. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Alain Gouriou. N'importe quoi !
    M. Jean Dionis du Séjour. Nous proposons que les régions deviennent propriétaires de réseaux locaux de France Télécom, que des sociétés d'économie mixte en assurent la gestion afin de les louer aux différents opérateurs et de permettre la mise en oeuvre d'une véritable concurrence. Les investissements seraient assurés dans le cadre des politiques d'aménagement du territoire régional qui pourraient ainsi inclure la fourniture de haut débit dans le domaine des prestations du service universel. Un tel service permettrait une régulation plus efficace, car chaque opérateur pourrait utiliser également les infrastructures haut débit ramenées dans le giron d'un service public régional.
    Madame la ministre, nous vous avons présenté les questions et les propositions de l'UDF sur ce budget. Les secteurs dont nous débattons sont aujourd'hui particulièrement exposés. Ce sont cependant, si nous prenons les mesures innovantes et courageuses qui s'imposent, des secteurs d'avenir.
    L'UDF, solidaire de l'ensemble de la politique économique de votre gouvernement, votera ce budget. Elle attend néanmoins les réponses urgentes qu'exige la situation. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Alain Gouriou.
    M. Alain Gouriou. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite revenir, moi aussi, sur la partie de l'excellent rapport de M. Micaux, consacré aux télécommunications.
    De volume limité, ce budget nous semble singulèrement inadapté à la situation actuelle de ce secteur. Et je regrette, madame la ministre, avec de nombreux collègues parlementaires, de n'avoir pu échanger sur ce sujet avec vous, ni au sein de la Commission supérieure du service public des postes et des télécommunications, ni au cours des débats de la commission des affaires économiques, au moment où notre collègue M. Micaux a présenté son rapport.
    La situation de tous les secteurs d'activité des télécommunications est réellement devenue catastrophique, tous les intervenants l'ont souligné. Après l'extraordinaire embellie qu'ont connue les télécommunications de 1998 à 2000, une embellie qui a largement contribué à la croissance économique de tous les grands pays industriels, l'éclatement de la bulle spéculative Internet a provoqué un freinage très brutal dans tout ce secteur économique, opérateurs comme équipementiers, et ce dans le monde entier.
    Sans doute, les conditions d'acquisition des licences UMTS ont-elles encore aggravé la conjoncture, entraînant l'endettement vertigineux des principaux opérateurs et notamment de France Télécom - près de 70 milliards d'euros. Et je suggère à M. le président de la commission des affaires économiques de solliciter une information ou une enquête parlementaire pour mieux connaître le rôle joué par la Commission européenne dans cette affaire - ainsi d'ailleurs qu'à vous-même, madame la ministre, qui avez, au Parlement européen, assumé d'éminentes responsabilités.
    Ces ventes largement anticipées de licences UMTS à des prix faramineux - sauf en France - alors que les technologies sont loin d'être opérationnelles encore aujourd'hui, ont plombé l'endettement des opérateurs européens et diminué leurs capacités d'investissement.
    M. Patrice Martin-Lalande. C'est sûr !
    M. Alain Gouriou. Pour France Télécom, l'acquisition de ces licences représente le tiers de son endettement. Le coût des réseaux n'est évidemment pas inclus. Des spécialistes doutent même de voir ces technologies mises en oeuvre, tout au moins dans les deux ou trois ans, et l'on ignore encore le contenu des futurs téléphones de troisième génération.
    Depuis quelques mois, l'activité des principaux industriels équipementiers en télécommunications et en nouvelles technologies s'est dramatiquement réduite. Il n'est de jour, madame la ministre, où l'on n'entende annoncer de nouveaux plans de licenciements ou de suppressions d'emplois : Alcatel CIT, filiale du premier équipementier français, a annoncé, hier, 24 octobre, la suppression de 1 060 emplois supplémentaires. Le groupe, qui employait 99 000 personnes fin 2001, ne devrait plus compter que 60 000 salariés fin 2003. Alcatel n'est, hélas, pas un cas isolé. Ses concurrents pratiquent des réductions massives d'effectifs : Mitsubishi, Solectron en Bretagne et dans le Pas-de-Calais, ACT à Angers, Nortel, Ericsson, Lucent, Hewlett-Packard, Gem Plus, j'en passe. Des bassins d'emplois et des technopoles comme ceux du Trégor et de Sophia-Antipolis sont sinistrés. Je vous avais écrit, à ce sujet, madame la ministre, au mois de juin. Je ne désespère pas de recevoir une réponse.
    Il faut, bien sûr, y ajouter les suppressions d'emplois dans les PME et les PMI sous-traitantes et les suppressions de contrats à durée déterminée. Je citerai le cas de cette start-up trégoroise créant un millier d'emplois en moins de deux ans, réduite actuellement à une soixantaine de salariés.
    Pour nous maintenir au tout premier rang des pays industriels dans le secteur des télécommunications et des technologies, une intervention vigoureuse de l'Etat est urgente et indispensable. Elle est réclamée et attendue, tant par les chefs d'entreprise - M. Tchuruk en tête, qui n'est pourtant pas un interventionniste à tous crins - que par les salariés et leurs familles menacés par les suppressions d'emplois.
    Un gros effort est nécessaire, pour la recherche dans les domaines des composants électroniques et des logiciels. Selon une enquête du journal Le Monde, les entreprises ont globalement freiné leurs efforts de recherche. Si l'on peut approuver dans votre budget l'effort en faveur du groupe des écoles des télécommunications, on doit déplorer que les crédits de recherche de ce groupe d'écoles ne soit pas réactualisés, que le soutien aux programmes de la recherche-développement soit abaissé de 213 millions à 170 millions d'euros, et que les crédits du RNRT - réseau national de recherche en télécommunication - ne soient que maintenus, même si les recherches financées par le budget de la défense bénéficieront sans doute aux télécommunications et aux technologies de l'information.
    Ne pensez-vous pas, madame la ministre, que la coordination de la recherche au niveau européen mériterait d'être stimulée ? L'avenir de la France et de l'Europe en matière de TIC peut être rapidement compromis, et ce de manière irréversible.
    Dans le domaine industriel, madame, vous prolongez la décision du CIADT de juillet 2001 d'achever la couverture du réseau GSM. C'est une bonne chose, mais il en faudra beaucoup plus pour relancer l'activité des équipementiers. L'extension à l'ensemble du territoire des équipements ADSL, offrirait l'accès à haut débit à l'ensemble de nos compatriotes. Nous vous suggérons aussi de soutenir davantage l'utilisation des NTIC en particulier par les PME-PMI et les exploitants agricoles. L'information et les services des administrations et des collectivités locales gagneraient en simplicité et en efficacité par un développement de leurs équipements en télécommunications et en informatique. Je pense aussi que le débat à venir sur la décentralisation devra promouvoir le rôle et encourager les initiatives des collectivités en la matière.
    D'autres pistes pourraient être utilement explorées pour réamorcer la pompe et relancer ce secteur. Malgré ces crises cycliques sévères, les télécommunications et les technologies de communication renoueront avec la croissance et le développement. Pour hâter et favoriser cette reprise il convient que l'Etat joue pleinement son rôle. Vous conviendrez que ce budget ne vous en donne pas les moyens, loin s'en faut. Vous comprendrez que le groupe socialiste ne puisse l'approuver.
    M. Christian Bataille. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.
    M. Patrice Martin-Lalande. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, j'évoquerai simplement deux ou trois points du budget des télécommunications.
    En matière de téléphonie mobile, couvrir les zones blanches est une exigence, à la fois pour les habitants de ces zones qui doivent pouvoir vivre comme les autres habitants de notre territoire, et, par définition, pour les clients qui veulent pouvoir utiliser leur téléphone mobile - c'est bien le moins - sur l'ensemble du territoire. Avec 100 % de couverture, 2,6 milliards de francs auraient été nécessaires, selon l'estimation de l'an dernier, pour couvrir tout le pays. Le CIADT de juillet 2001 a prévu 1,4 millard de francs. Un accord a récemment été trouvé entre les opérateurs avec le concours de l'Etat, mais, malheureusement, nous restons dans la même enveloppe. Seule sa ventilation interne a changé. Cela risque d'être très insuffisant. Le montage financier doit être validé au niveau européen pour s'assurer que les 88 millions d'euros que les collectivités locales et l'Etat vont apporter sont compatibles avec les règles communautaires. Le fait de n'utiliser l'itinérance locale qu'en solution ultime, après la mutualisation, ne conduira-t-il pas, madame la ministre, à de très longs délais pour couvrir les zones blanches ? De plus, les opérateurs sont convenus d'engager une phase expérimentale pour valider les conditions de mise en oeuvre de l'itinérance locale. Il faut s'assurer que le capital d'expérience disponible sera bien utilisé pour réduire ce délai d'expérimentation. Les accords d'itinérance existent déjà entre les opérateurs français dans les pays étrangers, nous en avons les uns et les autres l'expérience aux Antilles, voire sur le territoire métropolitain pour les abonnés de Orange Caraïbes ou Orange UK.
    Les élus et la population qu'ils représentent ont besoin de savoir, madame la ministre, comment les 200 premiers sites mutualisés seront répartis sur le territoire : sur la base de quels critères, avec quelles priorités ? Comment seront prises en compte les analyses de couverture menées par de nombreux départements en liaison avec l'ART, et qui constituent une base plus solide que celle antérieurement retenue par les pouvoirs publics. Ces études seront-elles considérées par les opérateurs et par l'Etat comme la base de référencement des zones blanches ?
    En matière de haut débit, nous devons malheureusement constater que, avec seulement 11 % d'internautes français qui en bénéficient, nous sommes en retard. L'ADSL a vu ses délais d'installation rallongés. France Télécom a, certes, bénéficié d'une période pendant laquelle, le dégroupage n'étant pas réalisé, elle a pu installer un million de lignes ADSL sur le territoire, créant ainsi un quasi-monopole de fait avec une lourde distorsion de concurrence.
    En matière de satellite, j'ai présenté, avec d'autres collègues, dans le cadre de l'examen de la première partie de la loi de finances, un amendement qui avait été retenu par la commission des finances et qui visait à alléger le coût d'utilisation du satellite pour la réception haut débit, notamment pour les paraboles de moins de 2 watts. L'amendement sera repris avec l'accord du Gouvernement, dans la loi de finances rectificative. Nous devons veiller à ce que la multiplicité des moyens technologiques et la concurrence entre ces moyens soient suffisantes pour que le haut débit puisse être accessible sur l'ensemble du territoire.
    Je tiens également à vous faire part de l'inquiétude de nombre de parlementaires, dont je suis, sur l'avenir d'Eutelsat.
    Le câble est indispensable pour ouvrir la concurrence sur le haut débit. Et l'on peut se demander, ce que n'a pas fait le gouvernement précédent lorsqu'il en a été question ici, si la télévision numérique terrestre ne risque pas, d'une certaine manière, de pénaliser le câble sur une partie du territoire français.
    En matière d'UMTS, le retard est également considérable. On peut même se demander si cette nouvelle technologie sera mise en oeuvre un jour. Les milliards prélevés en Europe pour l'UMTS constituent une véritable stérilisation des fonds, qui pénalise les équipementiers. Cela débouche sur la grave crise que nous connaissons et qu'ont rappelée d'autres parlementaires.
    Si l'UMTS venait à être mise en oeuvre, il faudrait encore s'inquiéter pour la couverture. Selon le cahier des charges de l'ART, 60 % de la population seulement devrait être couvert en 2009. Il aurait mieux valu, me semble-t-il, réduire dès le départ les milliards de contributions exigés des opérateurs et élargir les obligations de couverture pour ne pas recréer, en matière d'accès aux nouvelles technologies, une France à deux vitesses.
    Le Parlement devra se prononcer dans les prochains mois sur des points importants, notamment la transposition du deuxième « paquet » télécom. Je voudrais insister auprès de vous, madame la ministre, pour que ce soit l'occasion d'organiser dans cette enceinte le véritable débat politique sur les télécommunications qui a fait défaut pendant la précédente législature. Nous n'avons, par exemple, jamais eu de débat sur l'Internet et sur la société de l'information.
    Le service universel devra, dans les prochains mois, faire l'objet des soins du Parlement, notamment sur les problèmes du coût payé par les opérateurs alternatifs. J'ai déposé un amendement - nous en parlerons tout à l'heure -, mais je voudrais dire ici qu'il nous faut redéfinir ce mode de calcul pour le fonder sur le chiffre d'affaires et non plus sur le volume du trafic si l'on veut que l'Internet puisse être plus facilement accessible, fût-ce en bas débit, pour l'ensemble des Français. On sait en effet que le coût d'accès est un important facteur de limitation de la diffusion d'Internet en France.
    Il faut aussi réfléchir à l'élargissement du service universel lors de la renégociation de 2005. Certes, elle n'est pas immédiate, mais la France doit s'y préparer si elle espère l'emporter au niveau européen. Il conviendra de se demander si l'on doit inclure dans ce service universel le haut débit et la mobilité.
    En conclusion, madame la ministre, beaucoup reste à faire pour que la France tienne sa place dans la société de l'information. Nous espérons que les années qui viennent nous permettront de rattraper notre retard.
    M. le président. La parole est à M. François Asensi.
    M. François Asensi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'ouverture annoncée du capital d'EDF et GDF et la libéralisation progressive des marchés énergétiques font peser de lourdes menaces sur le service public.
    Le Gouvernement, dans la droite ligne des positions affichées par le MEDEF...
    M. Patrice Martin-Lalande. Caricature !
    M. François Asensi. ... considère que le statut public d'EDF ne devrait pas lui permettre de se développer à l'international. Or, aucun traité européen n'interdit le développement des entreprises publiques à l'étranger, et l'article 295 du traité stipule explicitement que la règle européenne « ne préjuge en rien le régime de la propriété dans les Etats membres ».
    Un autre argument avancé en faveur d'une privatisation d'EDF - je dis bien privatisation, car l'« ouverture du capital » n'est qu'un premier pas vers la privatisation totale - serait qu'elle entraînerait une baisse des prix. A nouveau, les faits démontrent le contraire. Pour ne prendre que l'exemple de la Suède, les tarifs y ont augmenté de 25 % après la privatisation. Au cours de ces quatre dernières années, et donc sous son statut actuel, EDF, quant à elle, a vu ses prix baisser de 14 %. Notre électricité hors taxe est aujourd'hui la moins chère d'Europe.
    Aucun argument relevant de l'intérêt des consommateurs, tant au niveau des prix que de l'amélioration du service public, n'est donc valable. Nul n'ose d'ailleurs mettre en doute la réussite, à cet égard, d'EDF et de GDF. Personne ne met non plus en avant l'intérêt du personnel pour justifier les privatisations d'EDF, et pour cause.
    Face aux arguments fallacieux qui sont avancés, des craintes bien réelles existent. L'exemple de France Télécom montre que l'ouverture du capital transforme le but de l'entreprise en une recherche de rémunération des capitaux en Bourse et des parts de marché. Pour EDF, ce serait notamment la fin de la péréquation géographique complète et de l'égalité d'accès au service. Ce serait oublier aussi ces formidables élans de solidarité qui ont caractérisé les salariés d'EDF après les tempêtes de décembre 1999.
    M. Patrice Martin-Lalande. C'est vrai ! Ils ont bien travaillé !
    M. François Asensi. Ces salariés sont aujourd'hui dans une période de flou et d'interrogation légitime quant à leur futur statut. Le Gouvernement doit apporter des réponses à ces inquiétudes, notamment sur l'avenir des retraites. Ce problème des retraites soulève, d'ailleurs, d'autres questions.
    En effet, dans le cadre d'une ouverture du capital, si EDF devait provisionner 41,6 milliards d'euros pour les retraites, la somme à laquelle pourrait prétendre l'Etat en vendant sur le marché se limiterait à 23 milliards d'euros.
    C'est là une valeur théorique, qui ne prend en compte ni la situation déprimée du marché ni le risque financier inhérent à l'obligation de renouveler le parc nucléaire. Les bénéfices escomptés pour l'introduction en bourse sont donc dérisoires au regard des risques pour l'entreprise et le service public.
    Dans la perspective d'une privatisation se pose aussi la question du maintien de l'indépendance de la France et de l'Europe dans leur approvisionnement et dans leur politique énergétique. L'Allemagne vient de se doter, avec la constitution de la firme EON-Ruhrgas, d'un atout fondamental pour assurer sa sécurité d'approvisionnement. Cette opération s'est réalisée avec l'appui des pouvoirs publics. Avec EDF et GDF, la France peut constituer un pôle public français équivalent, de plein pied avec cette nouvelle firme allemande, donnant ainsi à l'Europe des capacités démultipliées. La privatisation d'EDF et GDF rendrait impossible ce projet, car ce sont Total ou Suez, firmes privées, dépendantes en grande partie des fonds de pension américains, qui sont sur les rangs pour contrôler et démanteler EDF et GDF.
    La recherche de la rentabilité des capitaux pour EDF la conduirait par ailleurs à s'inscrire dans une logique de court terme, dans l'intérêt des actionnaires, alors qu'un des grands enjeux de la politique énergétique est de s'inscrire dans le long terme et dans l'intérêt général. La politique énergétique doit répondre aux enjeux du développement durable, car on ne peut parler d'énergie sans parler d'environnement, ni de sécurité. Ces questions appellent des investissements lourds, mais nécessaires.
    A l'heure où l'Europe s'engage vers la privatisation et la libéralisation des marchés énergétiques, de nombreux exemples étrangers nous mettent en garde contre cette politique aventureuse. Aux Etats-Unis même, terre d'élection du libéralisme, on assiste, après la spectaculaire faillite d'Enron, à une remise en cause de la libéralisation et des métiers qu'elle a fait émerger. En Grande-Bretagne, Tony Blair étudie des scénarios de renationalisation des centrales nucléaires pour leur démantèlement et leur maintenance lourde, tout en laissant au privé les profits sur les kilowatts-heure vendus. Voilà les bonnes recettes des privatisations : nationalisation des pertes et des risques ; privatisation des profits.
    L'énergie, l'eau, les transports sont des domaines trop importants, trop sensibles, pour être soumis aux aléas du marché. Ils nécessitent des politiques publiques fortes, et il est donc primordial que l'Etat maîtrise ces outils de puissance publique. C'est là, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre vision d'un Etat moderne, progressiste, préoccupé par le respect des principes républicains et le bien-être de ses citoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. François Grosdidier.
    M. François Grosdidier. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, si je partage quasiment toutes les orientations de ce budget et me réjouis de l'augmentation exceptionnelle de 91 % des crédits de paiement en matière de reconversion industrielle, il est un chapitre qui m'inquiète : les crédits de la gestion après-mine ont en diminution de 32,8 % par rapport aux crédits inscrits l'an dernier, ce qui est insuffisant, car l'évolution des crédits est inversement proportionnelle à celle des besoins.
    J'en connais la raison : ici comme ailleurs, c'est la sous-consommation des crédits. Mais cela ne fait qu'ajouter au scandale de la mauvaise indemnisation des victimes de dégâts miniers. Ce n'est pas votre gestion que j'incrimine, madame la ministre. Ce dossier est complexe et a été véritablement embrouillé par votre prédécesseur. Nous travaillons avec vos collaborateurs pour y voir plus clair, et comprendre comment les mécanismes mis en place ont abouti à des solutions d'indemnisation aussi choquantes, laissant des sinistrés, quatre ou cinq ans plus tard, dans une détresse absolue.
    Dès que ce travail sera achevé - et il doit l'être vite, car cette détresse n'est plus supportable -, les crédits inscrits seront rapidement consommés et je prends le pari qu'il faudra les augmenter dans le collectif annoncé par M. Mer, à propos des CES et des CEC.
    Pour nos collègues qui ne connaissent pas le bassin minier ferrifère, quelques minutes de pédagogie ne seront peut-être pas inutiles. La fermeture des mines et l'interruption du pompage des eaux d'exhaure ont eu deux effets : les eaux sont sorties du sol là où on ne les attendait pas et surtout ont érodé les piles qui soutenaient les sols, provoquant des fissures dans les maisons situées au-dessus, ainsi que dans les réseaux d'assainissement.
    Cette question relève de l'Etat, et pas seulement de l'entreprise, comme les sinistres provoqués par des industriels, qu'il s'agisse d'entreprises classées ou non. L'exploitation minière se distingue de toutes les autres activités industrielles en ce qu'elle est une activité concédée par l'Etat qui est propriétaire du sous-sol. L'Etat fixe le cadre de l'exploitation, en définit les prescriptions, en garantit le respect en assurant la police des mines. Dès lors que l'exploitant a respecté ces prescriptions et payé sa redevance minière, il ne peut être tenu pour éternellement responsable des conséquences que l'Etat n'a pas su ou pas pu prévoir. Cette vérité, l'exploitant minier me la rappelait en 1997. Il s'appelait Francis Mer, était président-directeur général d'Usinor-Sacilor, et il avait raison.
    Il s'agit du principe de la responsabilité sans faute de l'Etat. Mais l'Etat se défausse car, selon le code minier, il n'est responsable qu'en cas de défaillance de l'exploitant.
    Ainsi, depuis des années, les sinistrés dans le désarroi assistent à une partie de ping-pong entre l'Etat, l'exploitant et ses multiples assureurs.
    L'espoir de la juste indemnisation s'évanouit dans la longueur des procédures judiciaires.
    Les assureurs, comme l'Etat, ont tout de même fait des propositions d'indemnisation : elles étaient scandaleusement basses. Je les ai communiquées à vos collaborateurs, madame la ministre. Des personnes modestes, souvent retraitées après une vie passée dans les mines de fer, sont expulsées de leur petite maison où ils aspiraient à finir leurs jours. Ils n'ont plus de jardin, car on les a souvent relogés en collectif. On les a coupés de leur environnement. On les déracine et ils perdent l'espoir de retrouver leur faible patrimoine avant de quitter ce monde. D'autres vivent depuis plus de quatre ans au-dessus d'une cave inondée, dans l'humidité et les moisissures.
    Or, dans certains cas, l'indemnisation proposée pour une maison avec jardin que l'on a dû évacuer ne suffit même pas aujourd'hui à acheter un terrain à bâtir. A Moyeuvre-Grande, certaines propositions sont inférieures à 200 000 francs pour une maison individuelle avec jardin. Où trouve-t-on de tels prix ?
    En France, si vous êtes inondé par l'eau d'une crue, vous êtes reconnu sinistré. Si vous l'êtes par l'eau d'exhaure, vous n'êtes pas reconnu comme tel. En France, si votre maison est fissurée par un glissement de terrain, vous êtes victime d'une catastrophe naturelle et, à ce titre, indemnisé selon la valeur de reconstruction à neuf. Mais, si elle est fissurée par un affaissement minier, vous n'avez le droit qu'à la valeur vénale, éventuellement majorée par l'indemnité de remploi, dans des cités où le marché s'est effondré en même temps que les sols et où les terrains sont tous inconstructibles, en raison, précisément, des affaissements. Ainsi, on en arrive à cette injustice criante et insupportable.
    Pourtant, le législateur a voulu autre chose, à l'unanimité de l'Assemblée nationale et du Sénat. La proposition de loi portant la dernière modification du code minier prévoyait d'indemniser les victimes selon la valeur de reconstruction à neuf, comme pour les catastrophes naturelles. Votre prédécesseur, madame la ministre, avait présenté un amendement la remplaçant par la valeur vénale, mais le Parlement l'a expressément refusé. Le Gouvernement a alors proposé un compromis sur une indemnisation permettant de trouver, dans les délais les plus rapides, la propriété d'un bien de consistance et de confort équivalents. En toute bonne foi, la représentation nationale l'a acceptée, car cette formule correspondait bien au niveau et à l'urgence du besoin. Mais la représentation nationale a été abusée car les décrets des circulaires d'application font à nouveau référence à la valeur vénale. Sous votre prédécesseur, l'exécutif a abusé un Parlement pourtant unanime. L'exécutif a travesti la loi et lésé les sinistrés. C'est le scandale dans le scandale.
    Madame la ministre, nous ne pouvons en rester là. Des sinistrés attendent depuis quatre à cinq ans. Certains sont déjà partis de mort naturelle, mais dans le désespoir d'avoir tout perdu. L'un s'est suicidé en exprimant ce désespoir dans une lettre qu'il nous a laissée. Il y a urgence pour ceux-là, à Moyeuvre et à Roncourt, et il faut agir vite, fût-ce en utilisant des moyens dérogatoires. Et pour les prochains - car il y en aura d'autres, avec l'ennoyage annoncé du bassin Nord -, il faut dès à présent penser à leur éviter ce chemin de croix.
    Je compte, madame la ministre, sur votre fermeté à l'égard de Bercy et sur votre humanité à l'égard des sinistrés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Daniel Garrigue.
    M. Daniel Garrigue. Madame la ministre, la catastrophe de Toulouse a été un drame humain pour des milliers de personnes et a suscité une émotion considérable. On comprend que, dans ce contexte, certaines décisions de fermeture de site soient intervenues et que l'on ait mis en oeuvre avec plus de rigueur - ce dont on se félicite - différentes procédures de contrôle. On a néanmoins le sentiment que, dans ce domaine, on est passé d'un extrême à l'autre et que l'avenir même de notre industrie chimique se trouve aujourd'hui mis en question. A cet égard, j'évoquerai brièvement trois problèmes.
    Le premier est celui de la SNPE. A aucun moment, les enquêtes qui ont été menées sur la catastrophe n'ont mis en cause la SNPE. Même si, malheureusement, des personnels de la SNPE figurent au nombre des victimes, les installations industrielles ont parfaitement résisté. Le site SNPE de Toulouse a néanmoins été fermé, ce qui se traduit, d'une part, par un plan social qui touche près de 500 salariés, et, d'autre part, par un redéploiement des activités à l'intérieur du groupe, par des pertes commerciales et, au-delà, par des cessations d'activité et des pertes de parts de marché. Or, à ce jour, aucune compensation n'a été prévue pour la SNPE.
    Nous savons bien que la SNPE est un groupe public et qu'elle bénéficie en principe de la garantie de l'Etat, mais c'est aussi un groupe qui est soumis à la concurrence internationale et qui doit honorer sa signature vis-à-vis des banques. Or, en l'absence de compensation, la SNPE risque de se trouver extraordinairement pénalisée, et son avenir gravement compromis. Pouvez-vous, madame la ministre, nous apporter des éléments d'information sur ce problème ?
    Le deuxième problème est celui des procédures mises en oeuvre pour l'établissement des plans particuliers d'intervention qui, à juste titre, ont été réactivés. A cet égard, je citerai simplement deux chiffres : notre pays compte 670 établissements classés Seveso, mais seulement huit acteurs agréés pour opérer les tierces expertises qui sont demandées dans le cadre des procédures d'établissement des PPI. Cela signifie que, par la force des choses, il y a un embouteillage extrêmement préoccupant, qui bloque non seulement les groupes industriels ou les entreprises concernés dans leurs projets et leurs perspectives d'investissement, mais aussi les sociétés dont les activités gravitent autour de celles de ces entreprises. Comment peut-on faire pour accélérer les choses ? Plusieurs possibilités s'offrent à nous : soit augmenter le nombre des cabinets pouvant procéder à ces tierces expertises ; soit développer les moyens des DRIRE ou, à tout le moins, établir des PPI provisoires permettant aux entreprises de fonctionner et de prendre les décisions indispensables en attendant l'achèvement des procédures.
    Le troisième problème concerne l'avenir même de notre industrie chimique. Je rappelle que l'industrie chimique française est, sur le plan de la production, la deuxième en Europe et la quatrième au monde. Elle est soumise à une forte concurrence internationale, puisque 60 % de la production chimique de notre pays sont exportés. C'est aussi une activité pour laquelle l'attractivité de notre territoire joue un rôle très important, puisque la moitié de notre chimie dépend d'investisseurs étrangers.
    Bien entendu, cette industrie bénéficie de toutes les mesures prises par le Gouvernement ces derniers mois pour assouplir et pour alléger les charges et bénéficier de celles qui figurent dans le projet de loi sur les salaires, le temps de travail et le développement de l'emploi, encore en discussion. Toutefois, dans le même temps, elle est soumise à des contrôles et à des procédures - je les ai évoqués précédemment -, qui sont exercés d'une façon extrêmement tatillonne. Il y a un problème évident de méthodologie : en effet, si certaines DRIRE appliquent la méthode probabiliste en matière de risques industriels, d'autres DRIRE s'inspirent de la méthode déterministe, ce qui compromet carrément l'avenir même de l'industrie chimique, car aucune entreprise ne peut tenir face aux exigences fondées sur de telles méthodes.
    Il nous paraît donc indispensable, madame la ministre, que vous adressiez des directives très fermes aux DRIRE, pour que les contrôles soient unifiés, que la méthodologie appliquée soit la même partout, qu'elle tienne compte des contraintes industrielles et n'entrave pas le développement des activités.
    Nous sommes attachés à l'industrie chimique, qui, je le répète, représente un enjeu considérable pour notre économie et pour l'emploi dans notre pays.
    Nous sommes certains, madame la ministre, que vous-même et le Gouvernement ferez en sorte que cette industrie puisse se développer et évoluer dans un contexte clair lui permettant d'assurer son avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, dernier orateur inscrit.
    M. Jean-Pierre Decool. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la discussion sur le projet de budget pour 2003, que nous avons entamée depuis maintenant une dizaine de jours, nous a permis de débattre de nombreux sujets comme l'emploi, la consommation, la simplification ou l'Europe. Cette discussion nous a également permis d'aborder certaines questions locales. Cependant, au moment où de grands projets vont être examinés par le Parlement, tels que celui concernant la décentralisation ou celui relatif au développement que présentera Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, nous devons avoir à l'esprit que la présence de l'Etat reste indispensable pour assurer le respect de principes tel celui de l'égal accès de tous au service public.
    La discussion du budget consacré à l'industrie, à La Poste et aux télécommunications me donne l'occasion d'aborder un problème qui, je sais, préoccupe un grand nombre d'élus ruraux, celui de l'implantation de La Poste dans nos campagnes et dans nos villages. Ainsi, dans le département du Nord, ce problème a mobilisé plus de 200 maires en 2001 et a abouti à l'adoption, à l'unanimité des maires du Nord, d'une motion en faveur du maintien de La Poste en milieu rural.
    A l'heure où la deuxième directive européenne concernant les services postaux, qui vise à accentuer l'ouverture à la concurrence, doit entrer en vigueur, des questions restent en suspens quant à l'implantation sur le territoire français de La Poste, à qui il revient d'assurer une mission de service public.
    Le contrat de plan signé le 25 juin 1998 entre l'Etat et La Poste pour la période s'étendant de 1998 à 2001 a été l'occasion d'affirmer les objectifs de cette entreprise. Il appartenait à cette dernière de trouver un équilibre entre la satisfaction des besoins de ses usagers et la rentabilité financière de ses activités. Pour cela, elle devait adapter son réseau par la mise en place de points de contact, en tenant compte, notamment, des évolutions démographiques, sociales et économiques, ainsi que des projets d'aménagement du territoire. Une attention particulière devait être portée aux zones les plus modestes et les plus sensibles.
    Il semble que ces objectifs aient été atteints puisque, avec 17 000 bureaux et 300 000 agents, répartis sur toute la France, La Poste dispose d'un maillage territorial très dense. Ce résultat cache, cependant, une réalité inquiétante : 19 000 communes françaises ne bénéficient plus de présence postale.
    Les villages français souffrent, aujourd'hui, d'un service postal de plus en plus inadapté. Les horaires de levée du courrier et d'ouverture des bureaux de poste ne prennent pas en compte les besoins des usagers, d'autant que 18 % de ces bureaux ne fonctionnent pas plus de deux heures par jour. Pendant les périodes estivales, de nombreux bureaux de poste ferment, faute de personnels suffisants. Des usagers doivent se déplacer loin pour déposer leur courrier. Cette entreprise applique une logique de rentabilité et de profits contraire à sa mission de service public.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Eh oui !
    M. Jean-Pierre Decool. Elle cherche à maîtriser ses dépenses en sacrifiant son implantation locale, alors que de nombreuses communes - et c'est le cas dans le Nord - ont mis à sa disposition des locaux fonctionnels et agréables pour des loyers relativement modestes, et même parfois à titre gracieux.
    M. Alain Gouriou. Très juste !
    M. Patrice Martin-Lalande. Il a raison !
    M. Jean-Pierre Decool. Or le coût réel du maintien de La Poste en milieu rural est estimé à 600 millions d'euros sur un volume annuel de dépenses de 13,7 milliards d'euros, soit 4,3 % des dépenses.
    M. Alain Gouriou. Et voilà !
    M. Jean-Pierre Decool. On sait le rôle primordial joué par les bureaux de poste dans nos campagnes. Ils assurent la distribution du courrier, mais également un service bancaire minimum.
    M. Alain Gouriou. Tout à fait !
    M. Jean-Pierre Decool. Ces points de contact sont des lieux de rencontre et de sociabilité, d'autant plus indispensables que les petits commerces ont disparu dans les villages. Le passage du facteur contribue au maintien d'un lien social et humain pour des personnes seules et âgées.
    Il convient donc de réorganiser territorialement La Poste. Cela ne doit pas se faire, comme le disait très justement Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, par la condamnation d'un territoire. Deux enjeux doivent être pris en considération : l'aménagement du territoire - et non le déménagement de celui-ci - et la qualité du service rendu.
    M. Alain Gouriou. Très bien !
    M. Christian Bataille. Très bien ! C'est une intervention de député socialiste !
    M. Jean-Pierre Decool. Tous les citoyens doivent avoir accès au service de La Poste dans un périmètre raisonnable.
    M. Christian Bataille. Excellent !
    M. Jean-Pierre Decool. Et ce service doit tenir compte de la spécificité des usagers concernés. Il appartient à l'exploitant public de combiner services de proximité et maîtrise de ses coûts.
    Le prochain contrat de plan entre La Poste et l'Etat, pour la période 2002-2005, se devra de mettre en oeuvre les moyens permettant d'aboutir à ce résultat, cette action devant, bien sûr, se faire en concertation avec les élus locaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle, du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste.)
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Pourquoi la gauche applaudit-elle ? Elle n'a pas le monopole de La Poste !
    M. Christian Bataille. Non, mais La Poste a le monopole de la gauche ! (Sourires.)
    M. le président. Vous avez reçu un soutien très large, monsieur Decool.
    M. Philippe Auberger. Il l'a mérité !
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
    Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je voudrais tout d'abord remercier très sincèrement MM. les rapporteurs et les différents orateurs pour la qualité et pour l'intérêt tout particulier de leurs interventions. J'essaierai de répondre de la façon la plus précise et la plus détaillée possible aux nombreuses questions qui m'ont été posées, mais j'en appelle par avance à votre indulgence, mesdames, messieurs les députés, si certaines ne recoivent pas une réponse dès aujourd'hui. Je peux vous assurer qu'elles recevront ultérieurement les prolongements les plus approfondis.
    Le budget du ministère de l'industrie pour 2003 a une grande ambition : favoriser la compétitivité des entreprises françaises. Pour cela, il poursuit cinq objectifs : mettre en oeuvre une politique énergétique indépendante, sûre et équilibrée ; créer les conditions d'un environnement attractif pour les entreprises grâce à une politique active en leur faveur ; faciliter les mutations industrielles, notamment dans les régions sinistrées ; préparer l'avenir de La Poste ; favoriser le développement des télécommunications. Tels sont les éléments essentiels de la politique volontariste que traduit ce projet de budget.
    Dans un contexte budgétaire ô combien difficile, les crédits d'investissement, c'est-à-dire ceux qui permettent de préparer l'avenir, ont pu être stabilisés. Par souci d'une gestion rigoureuse des deniers publics, les dépenses courantes diminuent, pour leur part, de 1,1 %, tout en permettant, grâce à l'utilisation des soldes disponibles, le financement des actions prioritaires - et je remercie M. le rapporteur spécial Novelli de l'avoir reconnu.
    Sans entrer dans le détail du contenu d'un projet de budget que vous connaissez bien, je souhaiterais néanmoins souligner, comme l'a fait justement M. le rapporteur pour avis Jacques Masdeu-Arus, que mon budget s'inscrit dans un ensemble plus vaste de réformes qui visent à refonder la politique énergétique française face à un monde qui change.
    Dans un monde de plus en plus ouvert, la libéralisation des marchés, notamment ceux de l'énergie - nous aurons l'occasion d'en reparler longuement au cours des prochaines semaines -, se poursuit partout dans le monde, entraînant des restructurations et la création de grands ensembles régionaux.
    Dans un monde de plus en plus complexe, les problèmes environnementaux, notamment ceux liés à l'effet de serre, se posent de manière globale et deviennent un élément déterminant du dialogue Nord-Sud, comme le Président de la République l'a fort opportunément souligné au sommet de Johannesburg.
    Le monde est aussi de plus en plus incertain. Les attentats du 11 septembre 2001, à New York et à Washington, comme les événements dramatiques actuels au Moyen-Orient ou la menace qui pèse sur l'Irak démontrent bien que la sécurité d'approvisionnement reste une exigence d'une parfaite actualité.
    Face à ces évolutions, le Gouvernement entend d'abord poursuivre et encadrer la libéralisation des marchés de l'énergie en veillant à une coexistence équilibrée entre concurrence et service public. Oui, monsieur Bataille, il est tout à fait possible de concilier concurrence et service public.
    M. Alain Cousin. Absolument !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Tel est l'objet du projet de loi sur les marchés énergétiques qui vous sera soumis dans quelques semaines et tel est l'objet des discussions en cours à Bruxelles sur le « deuxième paquet de directives gaz et électricité ».
    Monsieur Masdeu-Arus, vous avez eu tout à fait raison de souligner que le marché français est parfois plus ouvert que ceux de nos partenaires européens.
    M. Christian Bataille. Mais alors, pourquoi ouvrir davantage ? C'est comme si vous vous tiriez une balle dans le pied !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. J'ai écrit à la commissaire compétente à ce sujet, et, bien entendu, mesdames, messieurs les députés, vous serez tenu au courant de la réponse qu'elle me fera parvenir - je l'espère, dans les meilleurs délais.
    Le Gouvernement entend aussi donner aux deux grandes entreprises nationales que sont EDF et GDF les moyens de s'adapter à cette libéralisation et de devenir deux grandes entreprises européennes. M. Cousin a parlé de « références mondiales » ; c'est en effet le cas. Cette évolution passe d'abord par la transformation des statuts de ces entreprises et, comme vous le savez, le Gouvernement s'orientera résolument dans cette direction. Cela passe par l'ouverture minoritaire de leur capital, ce qui leur permettra, d'une part, de nouer des alliances indispensables et, d'autre part, de réunir les capitaux nécessaires à leur développement autrement que par un endettement aux conséquences difficilement maîtrisables, comme nous avons eu l'occasion de le constater dans le cas d'autres entreprises privées ou publiques.
    M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis, et M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. C'est vrai !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Cette évolution se fera évidemment sans remettre en cause le statut des agents, ce qui devrait rassurer, s'il en était besoin, M. Asensi. Nous l'avons d'ailleurs dit de la façon la plus claire, M. Francis Mer et moi-même. Cette évolution se fera aussi en veillant à ce que le système spécifique de financement des retraites reçoive les garanties nécessaires.
    Le Gouvernement entend enfin doter la France d'une loi d'orientation sur l'énergie, qui définira et précisera, au terme d'un grand débat national qui se tiendra au début de l'année prochaine, nos grandes options énergétiques en matière de nucléaire, d'énergies renouvelables, de maîtrise de la sécurité et d'approvisionnement de l'énergie.
    Monsieur Novelli, vous avez insisté sur le contrôle nécessaire des organismes intervenant dans ce secteur, lesquels ont d'ailleurs une action positive. Je puis vous indiquer que nous sommes parfaitement conscients de la nécessité d'exercer sur eux un contrôle équilibré et normal.
    M. Masdeu-Arus a évoqué notre engagement en faveur de l'IFP. Je tiens à lui préciser qu'un avenant est en cours de signature pour conforter le budget de cet organisme.
    J'en viens maintenant à la nécessité de créer un environnement favorable au développement des entreprises. M. Hervé Novelli a insisté, à juste titre, sur l'importance de l'innovation. Assurément, il s'agit d'un facteur décisif de notre compétitivité. Un des axes importants de la politique que nous souhaitons mener concerne l'innovation. La capacité de nos entreprises à innover et la diffusion des efforts de recherche et de développement dans l'industrie sont en effet un facteur déterminant de la croissance de notre économie : au cours des dernières années, la moitié de la croissance dans les pays développés a été due aux secteurs innovants et à la diffusion de l'innovation dans les entreprises.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. C'est exact !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. L'innovation permet de réaliser des gains de productivité qui sont essentiels à la compétitivité de nos produits sur le marché européen et sur le marché mondial. Elle permet aussi de donner naissance à des pans entiers d'activités nouvelles, créatrices de richesses et d'emplois. Enfin, elle permet à notre pays de maîtriser des secteurs clés des sciences et des technologies de l'avenir.
    Nos efforts dans ce domaine sont jusqu'à présent restés nettement insuffisants. Dès mon arrivée au Gouvernement, j'ai souhaité lancer un important travail de réflexion sur ce sujet au sein de mon ministère, avec le plein appui de M. Francis Mer et de M. le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, en liaison étroite avec Mme Claudie Haigneré.
    Plusieurs pistes sont en cours d'examen. Elles découlent pour l'essentiel de propositions formulées par les entreprises elles-mêmes ou par leurs instances représentatives. Nous avons bien conscience, monsieur Novelli, qu'il convient non pas d'ajouter un plan « recherche » supplémentaire mais de donner aux entreprises l'accès aux mécanismes les plus performants dans ce domaine. Avant la fin de l'année, je serai en mesure de proposer une série d'actions visant à dynamiser l'innovation dans les entreprises. Sur la base de ces propositions, j'organiserai une concertation approfondie avec les professionnels concernés afin de calibrer au mieux nos mesures.
    Je n'insiste pas sur les efforts importants que nous avons effectués en faveur de la formation des ingénieurs, plusieurs intervenants l'ont fait, s'agissant notamment des écoles des mines et de la dotation du Groupement des écoles de télécommunication, même si je regrette que l'augmentation n'ait pas pu être plus substantielle cette année.
    Une attention particulière est portée aux PMI. Les capacités d'intervention sont maintenues, vous avez pu le constater, à un haut niveau en 2003, puisqu'elles s'élèvent à 236 millions d'euros.
    Elles se décomposent en deux rubriques principales : les crédits de l'ANVAR et les actions en matière de développement des PMI et de diffusion des technologies, qui sont gérées au niveau régional et qui sont intégralement contractualisées dans le cadre des contrats de plan Etat-régions.
    M. Dionis du Séjour l'a souligné à juste titre, il est nécessaire de retrouver les moyens d'une politique dynamique en matière de reconversion et de restructuration industrielles. A ce propos, je ne partage pas le point de vue exprimé par M. Novelli dans son intervention et dans son amendement, que nous aurons l'occasion d'examiner tout à l'heure.
    Autant les aspects sociaux des crises auxquelles nous assistons relèvent du ministère des affaires sociales et donc de mon collègue, M. François Fillon, autant la restructuration financière, la réindustrialisation et la reconversion sont de la responsabilité du ministère de l'industrie. Ne comptez pas sur moi pour fuir cette responsabilité qui me semble, plus particulièrement dans le contexte actuel, extrêmement importante.
    M. Yves Coussain. Bravo !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Le ministère de l'industrie doit veiller à sauvegarder les activités des emplois qui peuvent l'être, en travaillant en étroite liaison avec le comité interministériel de restructuration industrielle et les collectivités territoriales sur tous les dossiers d'entreprises en difficulté. Je suis heureuse que les moyens de la politique d'accompagnement et de redéploiement industriel qui ont été prévus dans le projet de loi de finances pour 2003 aient pu être augmentés substantiellement. Ils seront, bien sûr, mis en oeuvre dans chacune des régions en étroite concertation avec les élus locaux.
    M. Alain Gouriou. Ce ne sera pas du luxe !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. M. Garrigue a évoqué le secteur chimique, et notamment l'avenir de la SNPE. Nous avons pris une décision extrêmement difficile pour la SNPE à Toulouse, compte tenu de la terrible catastrophe survenue avec AZF. Il ne s'agit en aucune façon d'un renoncement à l'industrie chimique. Je le rappelle, nous sommes au deuxième rang en Europe pour ce secteur et nous entendons le rester. J'ai reçu à plusieurs reprises les principaux chefs d'entreprise de la chimie française. Je puis vous dire que nous défendons ardemment la chimie française dans le concert européen. J'ai eu notamment l'occasion hier, lors d'une rencontre avec le commissaire Liikanen, de rappeler notre attachement à ce secteur industriel extrêmement important.
    Je voudrais enfin rassurer M. Grosdidier sur la volonté du Gouvernement de respecter l'intégralité des engagements pris dans ce que l'on appelle « l'après mines ». L'évolution des crédits du volet « réparation » s'explique par l'échéancier des travaux engagés. Quant au volet « prévention », il voit ses crédits augmenter pour mener les mesures prévues de surveillance des zones à risques miniers.
    Messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, l'examen du budget du ministère de l'industrie est un moment privilégié pour parler ensemble de l'avenir de La Poste. Beaucoup de collègues sont intervenus, MM. les rapporteurs Micaux et Joyandet ont souligné à quel point l'année 2003 sera importante pour l'avenir de La Poste avec la signature d'un nouveau contrat de plan avec l'Etat. Vous le savez, un nouveau président, M. Bailly, a été nommé par le Gouvernement. Ses orientations stratégiques pourraient être prêtes à la fin du mois de novembre, et il est raisonnable de penser que les propositions qui nous seraient alors faites pourraient aboutir au deuxième trimestre 2003, la date d'effet étant néanmoins le 1er janvier.
    M. Alain Gouriou. On ne sait même pas ce qu'elles seront !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Quels sont les principaux enjeux de ce contrat de plan ? A partir de 2003, une nouvelle étape de la libéralisation progressive du courrier sera franchie. Le courrier d'un poids de plus de cent grammes, contre 350 grammes aujourd'hui, pourra être ainsi librement distribué. Au reste, je voudrais souligner que la directive européenne reconnaît les missions de service universel fournies par La Poste. Vous le savez, c'est un grand succès que la France a obtenu.
    M. Philippe Auberger. Très bien !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. J'a pu d'ailleurs vivre ce succès en direct, puisque tous les députés européens français, tous groupes confondus, ont mené le combat au sein du Parlement européen.
    M. Alain Gouriou. Très bien !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Cette orientation conforte les missions actuelles de service public en France. Le Gouvernement, qui y est particulièrement attentif, veillera à l'amélioration constante de la qualité de la distribution du courrier. Je partage naturellement la préoccupation de M. le rapporteur Alain Joyandet sur la nécessaire conciliation entre la compétitivité de La Poste et l'accomplissement de ses missions de service public. Mais encore une fois, je pense que ces objectifs sont parfaitement conciliables.
    M. Dionis du Séjour m'a interrogée sur la politique tarifaire. Celle-ci sera définie dans le budget 2003 de La Poste et une trajectoire tarifaire sera prévue dans le contrat de plan.
    La Poste est une entreprise qui a la charge d'un service public, et la réponse aux questions que vous avez posées, les uns et les autres, se situe à trois niveaux : l'exercice de ses missions par La Poste, le financement desdites missions et, plus généralement, la compétitivité de l'entreprise.
     S'agissant des missions de service public, la loi en confie deux à La Poste : la distribution du courrier six jours sur sept pour tous les Français et toutes les entreprises, ainsi que le transport et la distribution de la presse.     Mais au-delà du service public, La Poste exerce des missions d'intérêt général pour la collectivité : l'aménagement du territoire, une présence en zones urbaines sensibles, la gestion des livrets A pour le compte des populations les plus fragiles.
    Le financement de ces missions de service public et de ces missions d'intérêt général est aujourd'hui partagé entre La Poste et l'Etat. L'équilibre actuel n'est pas remis en cause.
    Enfin, vous m'avez interrogée sur la compétitivité de La Poste. Il est juste de reconnaître que la poste française traite aujourd'hui le plus grand trafic du courrier d'Europe, avec un tarif parmi les plus faibles des pays européens. Elle est aussi devenue un acteur puissant en matière de services financiers et de colis. Toutes ces positions témoignent largement, il me semble, de la compétitivité de la poste française. Mais bien évidemment, le Gouvernement veillera à ce que ce service public auquel les Français et le Gouvernement sont très attachés, continue à être compétitif, et renforce même cette compétitivité en se modernisant, pour offrir des services de qualité à tous ses utilisateurs et dans les meilleures conditions de coût.
    M. Yves Coussain. Très bien !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. La modernisation des organisations et la mise en place des techniques les plus performantes font partie de la tradition postale. La Poste incorpore ces progrès pour rester le service postal de référence que nous voulons, à même de satisfaire les demandes très diverses de ses clients, qu'il s'agisse des particuliers ou des entreprises. Le Gouvernement veillera à ce que les évolutions de l'organisation soient menées dans le cadre d'un dialogue social de grande qualité grâce à une large concertation avec les organisations syndicales et les personnels concernés.
    L'accroissement de la part du courrier en concurrence ainsi que différentes observations des autorités européennes me conduisent, aujourd'hui, je le reconnais, à m'interroger sur le dispositif le plus pertinent de régulation du secteur postal. Le ministère travaille actuellement sur plusieurs dispositifs de régulation possibles. Je ferai des propositions à ce sujet à M. le Premier ministre et, le cas échéant, bien sûr, le Parlement pourrait être amené à se prononcer. Je rappellerai à ce propos à M. Gouriou que j'ai été auditionnée par la commission des affaires économiques au mois de juillet dernier, alors que je n'ai pas été invitée par la commission des finances.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Cela va venir !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Mais je suis tout à fait disposée à répondre à cette invitation si elle m'est adressée.
    M. Alain Gouriou. C'est la commission de la production qui est concernée !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Enfin, s'agissant de la Commission supérieure du service public, je rappelle à M. Gouriou que son président n'est pas encore désigné. Il va de soi que, dès que celui-ci sera nommé, je souhaiterai avoir un échange approfondi avec cette commission très importante.
    Je n'évoquerai pas la question de La Poste en milieu rural parce qu'une question plus précise me sera posée dans quelques instants.
    Parmi les grands enjeux de l'année 2003, figure également la renégociation des accords entre La Poste, l'Etat et la presse puisque les accords précédents - les accords Galmot - ont expiré fin 2001. Ces accords concernant le transport et la distribution de la presse représentent un enjeu considérable à la fois pour l'Etat, qui inscrit une contribution de 290 millions d'euros dans la loi de finances, pour La Poste, pour qui la presse représente une part significative de son trafic, et, enfin, pour la presse elle-même, dont la distribution postale permet de fidéliser les lecteurs abonnés.
    Ces grands sujets feront partie du contrat de plan à venir de La Poste. J'aurai l'occasion, au cours de l'année 2003, de m'exprimer sur les différentes dispositions de ce contrat de plan, de les mettre en perspective pour conforter l'avenir de ce grand service public auquel les Français et le Gouvernement sont très attachés et, naturellement, de vous en présenter les grandes orientations.
    J'en viens au développement des télécommunications. Sous des formes diverses, MM. les rapporteurs Joyandet et Micaux, MM. Alain Cousin et Martin-Lalande sont intervenus en évoquant, bien évidemment, les très graves difficultés que ce secteur connaît. Celui-ci reste, néanmoins, essentiel dans notre économie. D'ailleurs, si j'ai bien senti, à travers vos interventions, votre inquiétude face aux difficultés actuelles, j'ai aussi constaté votre foi dans l'incontestable potentiel de croissance de ce secteur. Le Gouvernement partage cette conviction et sa politique a pour ambition de favoriser le développement des télécommunications.
    Je suis consciente des difficultés d'Alcatel, monsieur Cousin. Cette crise touche l'ensemble de l'industrie des télécommunications dans le monde. Les grandes entreprises nord-américaines comparables sont dans des situations pour le moins aussi délicates, même si ce constat ne suffit pas à nous consoler.
    La force et la chance du groupe français est d'être le leader mondial dans les technologies d'accès à Internet à haut débit. A cet égard, monsieur Micaux, nous avons l'intention de développer ce secteur ainsi que la couverture mobile sur l'ensemble du territoire. J'aurai l'occasion de revenir sur ces deux aspects qui sont des éléments essentiels de notre politique de développement des télécommunications.
    Monsieur  Dionis du Séjour, vous m'avez interrogée sur la situation de France Télécom. Je rappellerai, s'il en était besoin, qu'il s'agit d'une très grande entreprise, performante, essentielle pour la collectivité, vous-même avez employé le terme de « stratégique ». Elle emploie 240 000 personnes. Certes elle connaît des difficultés financières liées à des investissements hasardeux et mal menés au plus haut de la bulle financière des télécommunications.
    Le Gouvernement a pris la mesure de ces difficultés Il entend les traiter avec méthode et sans précipitation. M. Thierry Breton est à pied d'oeuvre depuis le 2 octobre. Il a toute la compétence et l'expérience nécessaires et naturellement toute la confiance du Gouvernement. Actuellement, il dresse un état des lieux. Il proposera, dans quelques semaines, des orientations pour un plan global pour l'entreprise qui précisera à la fois sa stratégie et les modalités de son redressement financier.
    Comme M. Francis Mer a eu l'occasion de le dire devant cette assemblée mardi dernier, le renforcement des fonds propres de France Télécom est indispensable à son rétablissement financier. Les modalités n'en sont pas encore fixées, et les questions précises posées par M. Dionis du Séjour sont malheureusement encore un peu prématurées.
    Ces modalités devront être élaborées par l'entreprise, en liaison avec les actionnaires et les investisseurs. L'Etat soutiendra financièrement cette opération en jouant son rôle d'actionnaire dans le cadre des règles communautaires. Le Gouvernement aura aussi à coeur de prendre en compte, dans toute la mesure du possible, la situation des actionnaires individuels et des salariés.
    Enfin, toujours dans ce domaine des télécommunications, je répondrai précisément à M. Micaux qui m'a interrogée sur les crédits de l'Etat en faveur de la couverture des « zones blanches ». Les crédits budgétaires sont à la DATAR et donc inscrits au budget de mon collègue Jean-Paul Delevoye avec lequel je travaille en étroite concertation pour développer la couverture mobile du territoire. Ces crédits cofinancent les investissements supportés par les collectivités locales, c'est-à-dire le plus souvent les départements, pour s'équiper en pylônes.
    Enfin, M. Martin-Lalande a posé une question sur le développement de l'économie numérique. Dès la fin du mois de janvier de l'année prochaine, je souhaite présenter un projet de loi sur l'économie numérique qui, je l'espère, sera de nature à renforcer la confiance dans le commerce électronique, car il s'agit également d'un secteur important.
    En conclusion, monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, messieurs les rapporteurs, le budget que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui - et je remercie ceux qui ont souligné, que c'était pour moi la première fois - a pour objectif résolu de renforcer l'attractivité des industries françaises dans les contextes européen et mondial, de mettre en oeuvre une politique industrielle moderne dont la dimension européenne est évidente. A cet égard, je fonde de grands espoirs sur le nouveau Conseil européen compétitivité dont le rôle, sous l'impulsion de la France, sera majeur pour faire du site Europe et donc du site France un pôle attractif et compétitif. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Nous passons aux questions.
    Compte tenu du faible nombre de questions par groupe, nous allons traiter chaque groupe complètement.
    Je rappelle que les auteurs des questions disposent de deux minutes au plus pour poser leur question et je compte sur la concision de Mme la ministre dans ses réponses.
    Nous commençons par le groupe socialiste.
    La parole est à M. David Habib.
    M. David Habib. Madame la ministre, soumise à des logiques de plus en plus financières, à un environnement international de plus en plus dégradé et à une vague de licenciements, l'industrie française échappe de plus en plus à la conduite publique. Je ne vous en ferai pas grief car nous avons été confrontés aux mêmes réalités. Cependant, je regrette qu'aujourd'hui l'Etat y réponde par l'invraisemblable et inopportun gel de la loi de modernisation sociale.
    Dans ce contexte difficile, la situation caractéristique du pôle industriel de Lacq dans les Pyrénées-Atlantiques mérite d'être évoquée.
    Depuis cinquante ans, le gisement de Lacq offre à la France une matière première de qualité, assurant une partie de son indépendance gazière. Ce bassin emploie encore plusieurs milliers de personnes et ne connaîtra une extinction définitive qu'en 2010.
    Au mois de mai 2000, un CIADT a confirmé les efforts déjà réalisés pour maintenir ce savoir-faire chimique en favorisant le passage de la chimie d'extraction à la chimie fine. Des mesures en matière d'infrastructures, de formation, de protection de l'environnement, de sécurité des sites classés Seveso et de soutien aux unités de recherche ont été alors adoptées.
    En 2001, une décision d'une extrême importance était également prise en matière d'injection. Concernant ce dossier très technique, tous les Premiers ministres depuis trente ans avaient admis l'importance de ce procédé utilisé depuis la découverte du gisement, mais ils se refusaient à accorder la moindre autorisation, privilégiant l'opacité au nécessaire débat public. Lionel Jospin a quant à lui fait le choix de la transparence de l'expertise scientifique et a autorisé juridiquement ces injections. En contrepartie, les industriels se sont engagés à investir et à créer des emplois.
    Depuis près d'un an, nous attendons désespérément un signe de TotalFina-Elf, première entreprise industrielle française qui, pour ce qui concerne Elf, doit tout au bassin de Lacq, son histoire, sa prospérité, ses bénéfices anciens et actuels puisque l'usine de Lacq rapporte encore chaque année après impôt plus de 100 millions d'euros.
    Les différentes lignes de votre budget au titre de la recherche, des aides à l'investissement ou des soutiens à la reconversion seront vraisemblablement sollicitées par le groupe TotalFina-Elf ou par ses filiales.
    Madame la ministre, je vous demande, en mon nom et au nom de Martine Lignières-Cassou, députée des Pyrénées-Atlantiques, de tout entreprendre au préalable pour que le bassin de Lacq reçoive les contreparties attendues et de nous dire, sur un plan plus général, comment vous entendez désormais contractualiser avec les grandes entreprises nationales qui sollicitent vos services.
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le député, je crois avoir répondu tout à l'heure au problème que vous soulevez et dit à quel point mon ministère se sentait concerné par les restructurations et les reconversions, ainsi que par tous les moyens susceptibles de gérer le plus en amont possible les crises telles que celle du bassin de Lacq, que vous venez d'évoquer. A ce propos, je puis vous assurer que nous vous avons bien entendu et que nous examinerons dans les meilleurs délais l'action la plus efficace que nous pourrons engager pour remédier à la situation.
    M. le président. La parole est à M. Alain Gouriou.
    M. Alain Gouriou. Ma question, madame la ministre, concerne La Poste.
    Pourriez-vous nous informer sur l'état de la négociation du nouveau contrat de plan ? Vous avez, certes, donné des précisions quant au calendrier, mais les salariés de La Poste s'inquiètent des conséquences des restructurations annoncées sur le maintien des bureaux et des centres de tri. M. Decool partage leur inquiétude.
    M. Patrice Martin-Lalande. Nous aussi !
    M. Alain Gouriou. La stabilisation de la charge des retraites pour La Poste sera-t-elle confirmée dans le futur contrat de plan ?
    Pouvez-vous nous indiquer la position du Gouvernement sur l'éventuelle extension des services financiers de La Poste dans ce même contrat ?
    Enfin, si la situation de quelques centaines d'administrateurs qui, au sein de France Télécom, avaient fait le choix de garder leur statut de fonctionnaires des ex-PTT, a été réglée de façon satisfaisante au printemps dernier, le sort de 6 000 fonctionnaires qui ont, eux aussi, gardé, au sein de France Télécom, leur statut, reste toujours précaire. Je conviendrai avec vous, madame la ministre, que le Gouvernement précédent n'a pas pris à cet égard les mesures que l'on attendait. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Patrice Martin-Lalande. C'est le début de la repentance !
    M. Philippe Auberger. C'est plutôt de la contrition !
    M. Alain Gouriou. Cette situation entraîne un blocage dans la progression de la carrière de ces fonctionnaires, d'autant plus qu'une nouvelle convention collective doit être signée en janvier 2003 par France Télécom.
    Quelles mesures envisagez-vous de prendre afin que ces fonctionnaires soient rétablis dans leurs droits ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. S'agissant de l'avenir de La Poste, je crois avoir développé de la façon la plus approfondie possible à ce stade - je dis bien : à ce stade - les grandes orientations, les grands principes qui sous-tendront le nouveau contrat de plan. Vous comprendrez aisément que je ne puisse en dire plus.
    M. Jean-Paul Bailly travaille activement pour nous présenter ses propositions. Il procède à des consultations très approfondies. Il consulte tous ceux qui sont concernés par l'avenir de La Poste et, en premier lieu, les salariés de l'entreprise.
    M. Bailly sera en mesure de nous présenter ses propositions à la fin du mois de novembre.
    Que la ministre vous dise aujourd'hui s'il s'agira d'étendre ou non les services financiers serait tout à fait incongru : je ne puis faire état de mes orientations personnelles concernant les grandes lignes qui détermineront l'avenir de La Poste.
    La question du statut et des retraites seront, comme vous pouvez l'imaginer, abordées de la façon la plus sérieuse et la plus rigoureuse qui soit et, c'est évident, dans le respect des droits acquis.
    J'ai tout à l'heure insisté sur la nécessité d'un dialogue social d'une particulière qualité, tant j'ai conscience qu'il est important d'associer très étroitement aux discussions ceux et celles qui contribuent, avec une compétence et une disponibilité infinies, à assurer le service public sur l'ensemble du territoire français. Cela vaut également pour les personnels d'EDF et de GDF.
    J'ai déjà précisé que le Gouvernement intégrerait dans ses propositions et ses décisions la situation des actionnaires et des salariés. J'aurais pu parler aussi des salariés actionnaires car, ainsi que vous le savez, beaucoup de salariés de France Télécom qui ont acquis des actions se trouvent aujourd'hui dans une situation très difficile. L'avenir social de ces personnels sera abordé dans le souci d'un dialogue social très étroit avec les intéressés.
    M. le président. Nous en arrivons aux questions du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.
    La parole est à M. Philippe Auberger.
    M. Philippe Auberger. Madame la ministre, ma question concerne le développement international d'EDF.
    La commission des finances a été loin d'être rassurée par l'audition, le 18 septembre dernier, de M. Roussely, président d'EDF.
    Cette entreprise a pris en Argentine et au Brésil des participations qui se sont révélées coûteuses. On peut même dire aujourd'hui qu'elles étaient hasardeuses. Je vois mes collègues rapporteurs opiner du chef, ce qui me donne l'occasion de les féliciter pour l'analyse remarquable qui figure dans leurs rapports.
    La question de savoir si EDF ne devrait pas revoir complètement sa stratégie de développement international se pose d'autant plus que l'entreprise vient de prendre une participation en Chine. Il faudrait probablement réserver cette stratégie à l'Europe...
    M. Christian Bataille. Très juste !
    M. Philippe Auberger. ... car que c'est grâce aux échanges d'énergie en Europe que l'action internationale d'EDF trouve sa première justification, plutôt que de la mettre en oeuvre Outre-Atlantique ou ailleurs. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    Ces prises de participation entraînent un endettement, et l'on sait ce qui est malheureusement arrivé à France Télécom en ce domaine.
    Ne conviendrait-il pas d'attendre une possible ouverture du capital d'EDF pour procéder à des échanges d'actions ? Ce serait évidemment beaucoup moins risqué et beaucoup moins coûteux pour l'entreprise.
    Il y a donc toute une réflexion à mener sans attendre sur l'ouverture du capital. Je dirai même que, pour améliorer la situation des comptes d'EDF, le Gouvernement doit absolument, dans la perspective de cette ouverture, revoir dès à présent l'organisation de la politique internationale de l'entreprise et donner à cet égard à son président de des directives beaucoup plus strictes, de façon à ne pas obérer une situation financière déjà préoccupante.
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Monsieur Auberger, je vous remercie de votre question.
    Vous nous invitez à une réflexion approfondie sur l'avenir d'EDF, comme de GDF d'ailleurs car une grande partie de vos propos, mis à part ce que vous avez dit sur les investissements internationaux, pourrait aussi s'appliquer à cette dernière entreprise.
    Sur un plan plus général, je dirai quant à moi qu'il s'agit de sociétés dont le développement est nécessaire et donc que l'effort d'investissement doit être poursuivi. C'est la raison pour laquelle je vous proposerai de transposer dans la législation française la directive européenne sur le gaz. GDF se verra ainsi ouvrir des marchés européens importants qui lui avaient été fermés jusqu'à présent, notamment en Espagne. Ce développement, et notamment dans le cadre européen, est essentiel.
    Quant aux priorités géographiques de son développement, il est clair qu'EDF doit prioritairement viser son marché domestique, c'est-à-dire l'Europe. Cela n'exclut pas un développement international plus lointain qui doit rester, j'en suis tout à fait d'accord avec vous, à la fois secondaire et maîtrisé. Cela a-t-il été le cas pour ce qui concerne les investissements que vous avez évoqués ? Je serais tentée de partager votre avis.
    Il nous faut maintenant nous tourner vers l'avenir. Nous sommes en concertation étroite et quasi permanente avec la présidence d'EDF pour réfléchir sur la stratégie la plus opportune dans le contexte nouveau qui naîtra de la modification du statut de l'entreprise et de l'ouverture de son capital.
    Certaines décisions doivent-elles être prises avant l'ouverture du capital ? Vous comprendrez, monsieur Auberger, que je ne puisse pas en cet instant vous répondre. Mais j'ai bien noté vos suggestions à cet égard.
    M. le président. La parole est à M. Yves Coussain.
    M. Yves Coussain. Madame la ministre, je parlerai quant à moi de la couverture des territoires ruraux par la téléphonie mobile et de l'accès de ces territoires au haut débit.
    Au mois de juillet 2001, le CIADT de Limoges avait suscité beaucoup d'espoir, mais il n'a été suivi d'aucune réalisation. Il était prévu que, dans les trois ans, tout le territoire national serait couvert, mais un an et demi plus tard, rien n'a bougé en dépit de la mobilisation des conseils généraux.
    De récentes informations suscitant de nouveaux espoirs, je vous poserai plusieurs questions.
    Quel est le rythme programmé des investissements et en fonction de quels critères seront choisis les territoires d'expérimentation et d'implantation ?
    Le principe d'itinérance dans les secteurs les moins peuplés sera-t-il appliqué ?
    Dans ces zones dites « noires », non rentables pour les opérateurs, et où les collectivités sont obligées de s'impliquer fortement, ce serait un véritable contresens et un gaspillage que chaque relai ne puisse être utilisé que par un seul réseau.
    Comment se répartira la prise en charge financière des investissements ? Quelles seront les collectivités territoriales appelées en cofinancement ? Vous avez répondu par avance à cette question en disant que ce serait essentiellement les départements. Mais qu'en sera-t-il effectivement ?
    Le haut débit était considéré il y a quelque temps comme une occasion de désenclavement de nos territoires ruraux. Or il devient une source supplémentaire d'iniquité. Dans les zones à faible densité, on comptait sur le haut débit pour développer les activités de service à distance susceptibles de fixer des emplois et des populations. Mais l'accès au haut débit n'est pas assuré et les collectivités publiques doivent encore une fois intervenir.
    Quelles mesures compte prendre votre gouvernement pour accompagner les collectivités qui sont mises à l'écart des réseaux à haut débit par la loi du marché mais qui veulent cependant s'équiper ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. J'ai dit tout à l'heure que la couverture en téléphonie mobile du territoire constituait une priorité pour notre gouvernement dans le cadre de la politique de télécommunications. Nous avons voulu concrétiser immédiatement cette priorité car une chose est le discours et une autre est de passer aux actes.
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. C'est bien vrai !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. C'est ainsi que nous avons défini les grandes lignes d'un nouveau dispositif qui comporte deux innovations essentielles.
    Tout d'abord, les trois opérateurs participeront à la couverture du territoire. Il y a quelques semaines, j'ai conclu un accord avec l'un deux. Dans une toute première étape, ces trois opérateurs déploieront, à très brève échéance, 200 pylônes. Ensuite, l'itinérance sera autorisée au niveau local afin de réduire le coût du projet. Il s'agit là de deux lignes de force très importantes. Vos collègues de la Haute assemblée ont déposé une proposition de loi qui a été adoptée hier et qui vous sera, je l'espère, soumise très prochainement.
    Les préfets de région lanceront une concertation avec les élus locaux et les représentants des opérateurs pour définir les zones de couverture prioritaires. Une concertation très étroite avec les élus locaux sera donc engagée pour définir les zones de couverture du territoire.
    J'en viens au développement de l'Internet à haut débit.
    Nous poursuivons l'objectif de dix millions d'abonnés d'ici à cinq ans. Cet objectif est, j'en ai bien conscience, ambitieux mais nous avons l'intention de nous y tenir résolument.
    Le Gouvernement sait bien que la fiscalité en vigueur alourdit le coût d'installation d'une parabole pour un particulier ou même pour une petite et moyenne entreprise. Nous travaillons avec M. Alain Lambert à l'amélioration du dispositif actuel.
    M. Patrice Martin-Lalande. On ne répond qu'en partie à nos questions !
    M. le président. La parole est à M. Philippe Auberger, pour poser une seconde question.
    M. Philippe Auberger. Madame la ministre, ma seconde question porte sur les services financiers de La Poste.
    J'ai bien entendu ce que vous avez dit sur la négociation du contrat de plan et il est tout à fait normal de laisser au nouveau président de La Poste le temps d'élaborer un certain nombre de propositions.
    Il y a néanmoins un problème d'équilibre entre les souhaits de La Poste, qui vont peut-être vers un service universel assez large en matière financière, et les équilibres financiers d'ensemble en ce qui concerne aussi bien la collecte de l'épargne que la distribution du crédit.
    Les services financiers de La Poste jouent un rôle essentiel dans l'équilibre financier de l'entreprise...
    M. Alain Gouriou. Très juste !
    M. Philippe Auberger. ... et, d'un point de vue social, ils permettent d'accéder à des services bancaires à nombre de personnes qui n'y n'auraient pas accès s'ils n'existaient pas. Ils assument également une mission d'aménagement du territoire dans la mesure où les bureaux de La Poste sont beaucoup mieux répartis que l'ensemble des autres activités financières françaises.
    Tout récemment, le président Bailly a fait savoir qu'une banque postale universelle n'était pas à l'étude. Les pouvoirs publics doivent néanmoins rapidement prendre position sur le problème de l'élargissement de la gamme des crédits offerts par La Poste, notamment dans les domaines de la consommation et de l'immobilier, et sur la diversification des produits en matière d'assurance. La Poste pourra-t-elle, par exemple, distribuer des produits IARD, comme le font déjà les caisses d'Epargne ? Les pouvoirs publics devraient, à mon sens, prendre position sur ces sujets, du moins s'agissant des grandes lignes, sans attendre les propositions du président de La Poste.
    M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour répondre à cete difficile question !
    M. Philippe Auberger. C'est le président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôt qui la pose !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Comme vient de le dire M. Auberger, toutes ces questions très pertinentes seront au coeur du nouveau contrat de plan avec La Poste, mais la ministre ne peut dévoiler les orientations du Gouvernement avant même que la concertation avec le nouveau président de La Poste ait eu lieu.
    La Poste est déjà un acteur de premier plan sur le marché des particuliers - le deuxième ou le troisième, selon les critères retenus. Cette position a été rendue possible grâce à la très large gamme des produits offerts par La Poste - vous avez eu tout à fait raison de le rappeler - et au dynamisme de sa politique commerciale. Tout cela doit être poursuivi et amplifié. Pour autant, la loi du 2 juillet 1990 n'avait pas autorisé La Poste à distribuer du crédit sans épargne préalable. Cette offre commerciale est incomplète. Elle amène parfois des jeunes à solliciter d'autres établissements pour obtenir des crédits, ce qui a pour conséquence un vieillissement progressif de la clientèle.
    Par ailleurs, La Poste remplit une mission d'intérêt général puisqu'elle accepte de gérer les comptes financiers des populations les plus fragiles. Chacun connaît l'importance du réseau des bureaux de poste pour l'aménagement du territoire. A ce stade, monsieur Auberger, je puis seulement vous dire que le Gouvernement veillera à ce que toute éventuelle évolution de l'activité des services financiers préserve cette mission d'intérêt général. A partit de la stratégie qui sera proposée par le nouveau président avant la fin de l'année et en concertation avec les acteurs concernés, le Gouvernement déterminera les conditions du développement des services financiers.
    M. le président. La parole est à M. Yves Coussain, pour une seconde question.
    M. Yves Coussain. Soumise à la loi de l'équilibre financier, La Poste est de plus en plus exposée à la concurrence sur certains courriers. Elle s'est donc engagée dans la modernisation du tri et du transport et restructure son réseau de points d'accueil. Cela se traduit par des délais d'acheminement du courrier de moins en moins respectés, le « J plus un » devenant presque une exception, même pour les destinations proches, intradépartementales ou régionales. En effet, la concentration des centres de tri fait faire de très longs allers-retours au courrier et impose des heures de levée prématurées, ce qui est parfois fort contraignant pour les PME et les artisans. De même, comme l'on dit mes collègues Decool et Gouriou, dans les départements ruraux, les suppressions de bureaux de poste sont de plus en plus fréquentes.
    M. Alain Gouriou. Tout à fait !
    M. Yves Coussain. Les comités départementaux de concertation ne servent en fait, et je le déplore, qu'à donner des avis et n'ont aucune influence sur la décision prise en amont par La Poste de supprimer ces bureaux sur la base de critères objectifs d'activité.
    L'Etat a pour mission d'assurer l'égalité des citoyens et des territoires devant le service public. Que compte faire le Gouvernement pour assurer les conditions de cette égalité et garantir la présence de bureaux et d'un service postal de qualité sur l'ensemble du territoire national ? Le prochain contrat de plan entre La Poste et l'Etat intègre-t-il bien cette exigence ? Donnera-t-il aussi aux élus locaux un véritable pouvoir de proposition et de décision au sein des fameux comités de concertation ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. La question de M. Coussain rejoint les développements auxquels il s'est livré dans le cadre de son intervention générale et les réponses que j'ai déjà faites me semblent de nature à lui donner satisfaction. J'ai insisté sur la nécessité de la qualité des services, à laquelle nous devons rendre hommage - c'est justice -, mais qui doit encore être améliorée. Bien évidemment, c'est l'un des objectifs principaux qui seront poursuivis dans le nouveau contrat de plan.
    Vous avez également parlé de la présence de la Poste dans les zones rurales, monsieur le député. Je sais à quel point l'existence d'un bureau de poste est important, à la fois pour la vie de la commune et pour son tissu social, économique et culturel. Croyez moi, nous veillerons très attentivement à ce que ces aspects soient intégrés dans les orientations qui seront retenues.
    M. le président. Nous passons aux questions du groupe des député-e-s communistes et républicains.
    M. le président. La parole est à M. François Asensi.
    M. François Asensi. Madame la ministre, je reviens sur la question du régime de retraite des salariés d'EDF et de Gaz de France. Vous avez d'ailleurs tenu tout à l'heure des propos qui se voulaient rassurants sur le dialogue social. Je ne mets pas en cause votre sincérité, mais j'observe qu'avec beaucoup d'habileté votre gouvernement promet monts et merveilles sur la qualité du dialogue avec les salariés et avec la population. Dont acte. Mais, dans la perspective d'une privatisation, l'inscription du coût des retraites, pour 41,6 milliards d'euros, dans le bilan de l'entreprise, comme l'exigent les règles de comptabilité internationale, réduirait considérablement sa valeur.
    Vous savez également que les solutions à l'étude pour ne pas lester EDF du poids de ces retraites avant l'ouverture du capital ne sont pas toutes neutres pour les agents. Certaines d'entre elles prévoient d'augmenter largement les cotisations sociales. Si tel était le cas, on ne ferait que reprendre d'une main ce qui a été donné de l'autre. La formule retenue ne pourra pas non plus baisser le niveau des prestations sociales, car ce serait renier purement et simplement le contrat passé avec les salariés. L'ouverture du capital d'EDF-GDF ne rassure pas les personnels, dont l'opinion a pourtant pu mesurer le dévouement et l'efficacité après les tempêtes de décembre 1999.
    Dans le cadre d'une économie globalisée de plus en plus concurrentielle, le Gouvernement se doit de soutenir l'entreprise publique pour lui donner les moyens de maintenir le niveau des retraites et ne pas revenir sur la parole donnée. Madame la ministre, comment allez-vous aider EDF à ne pas trahir la promesse sociale donnée à ses agents sur leurs retraites et, d'une manière générale, quels moyens envisagez-vous de dégager dans le cadre de cette libéralisation pour aider l'entreprise à conserver un haut niveau d'engagement social ?
    Enfin, comment allez-vous faire pour que la privatisation ne soit pas le début d'une ère lourde d'incertitudes pour les salariés d'EDF, à l'image de ce que vivent actuellement les salariés de France Télécom ? Quand on veut tuer son chien, on l'accuse d'avoir la rage. Je tiens donc à dire ici devant la représentation nationale qu'EDF est un fleuron de l'industrie française. Heureusement qu'il y a de telles entreprises dans notre pays !
    M. Daniel Paul. Très bien !
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le député, je partage tout à fait votre sentiment sur EDF et GDF, et je pense que nous sommes nombreux ici dans ce cas. Ce sont en effet des fleurons de l'industrie française et nous pouvons en être fiers.
    Comme vous le savez, M. Francis Mer et moi-même avons invité les partenaires sociaux à engager le plus rapidement possible une négociation pour préciser les dispositions juridiques et financières qui permettraient de garantir le système de retraite dont vous avez parlé et que nous connaissons bien. Nous n'allons pas préjuger des résultats de cette négociation, mais nous avons précisé trois lignes de force qui nous semblent extrêmement importantes : cette réforme devra permettre de garantir le système de financement des retraites, le système de gestion spécifique et le respect des droits acquis. On peut difficilement être plus clair.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, dont on connaît le goût pour les belles couleurs. (Sourires.)

    M. Jean-Pierre Brard. Je vais être hors sujet, madame la ministre, mais M. le président m'y pousse ! Wolfgang von Goethe avait une théorie sur les couleurs, ce qui mettait de l'animation, y compris sous le ciel gris de la Thuringe. Il n'excluait d'ailleurs pas le rouge, parce qu'il fait partie de la diversité nationale. Cela dit, je reviens à notre sujet !
    Madame le ministre, comme l'a souligné le rapporteur spécial dans son rapport - cela suscite d'ailleurs un consensus - il nous revient de donner les moyens nécessaires à La Poste et de l'accompagner dans ses efforts pour renforcer sa présence territoriale, afin d'assurer un service public de qualité accessible à tous. Des orientations ont été définies dans le contrat d'objectifs et de progrès signé le 25 juin 1998 entre l'Etat et La Poste pour préciser les conditions d'évolution et d'amélioration du service postal, notamment dans les quartiers en difficulté où c'est souvent le seul service public qui reste.
    Or il est clair que, dans la pure tradition « juppéiste » qui s'était fixé comme objectif le passage de 6 000 à 2 000 bureaux de distribution, le Gouvernement actuel se prépare ou se préparerait - je ne sais pas si je dois utiliser le conditionnel, mais c'est tout l'intérêt de notre dialogue que vous nous fassiez passer du conditionnel à l'indicatif, ou même à la forme négative, pour me démentir - à fermer la moitié des centres de tri sur le territoire à l'horizon 2005, risquant ainsi de supprimer des milliers d'emplois. C'est l'une des principales causes du mouvement de grève lancé hier par le personnel des centres de traitement et des plates-formes colis.
    Le développement hasardeux à l'internationl d'entreprises assurant des services publics comme Vivendi ou France Télécom sont un encouragement à se battre pour sauver le service public postal, ses emplois et ses missions. Dans ma bonne ville de Montreuil, chaque jour, un à deux quartiers ne sont pas desservis en termes de distribution du courrier, avec des pics de vingt quartiers non desservis certains samedi. A ces problèmes s'ajoutent de nombreux retards dans la distribution du courrier à nos concitoyens et l'abaissement de la qualification résultant du changement des modalités de recrutement.
    Un nouveau contrat de Plan doit être signé d'ici au 1er janvier 2003 entre La Poste et l'Etat. Que prévoyez-vous, madame la ministre, en France en général et à Montreuil en particulier, dans nos quartiers, pour que salariés et usagers de La Poste n'aient pas à subir les conséquences d'une politique de démantèlement du service public entraînant une baisse des effectifs, la disparition des services postaux de proximité dans des zones déjà démunies, une remise en cause de la qualité et de la fréquence de distribution du courrier.
    M. le président. Le rouge clignote, monsieur Brard ! Il est temps de conclure !
    M. Jean-Pierre Brard. Mais vous êtes obnubilé par le rouge, monsieur le président ! (Rires.) Cela ne m'étonne pas de vous. Vous avez été teint par votre région, si j'ose dire !
    Madame la ministre, vous avez dit tout à l'heure à M. Auberger, certainement parce que vous avez le sens de la retenue et de la pudeur, que vous ne vouliez pas dévoiler ce dont vous avez discuté avec le président de La Poste, au demeurant homme de dialogue que nous avons bien connu en région parisienne quand il dirigeait la RATP et dont on souhaiterait que le Gouvernement s'inspire... Mais nous sommes des parlementaires, madame la ministre, et nous ne pouvons pas imaginer que le Gouvernement n'ait pas d'opinion sur le contenu du futur contrat de plan. Votre discrétion dût-elle en souffrir, nous aimerions recevoir de vos confidences dans la mesure où elles engagent l'avenir de La Poste.
    M. le président. Madame la ministre, allez-vous faire des confidences publiques à M. Brard ? (Sourires.)
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. J'aimerais répondre à cette demande, bien sûr, mais vous comprendrez que les appréciations personnelles que je puis avoir aujourd'hui sur ce dossier important ne présentent en l'état actuel des choses que peu d'intérêt.
    M. Jean-Pierre Brard. Vous êtres trop modeste !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Laissez-nous le temps de la maturation nécessaire, de la concertation avec un président au dynamisme et au sens du dialogue social auquel vous avez rendu hommage. J'en prends volontiers acte. C'est extrêmement porteur d'espoir pour l'avenir.
    M. Jean-Pierre Brard. Souhaitons que le Gouvernement ne soit pas en retrait par rapport à lui !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Je puis vous rassurer, monsieur le député. Je crois avoir donné des assurances très précises à cet égard. D'ailleurs, je me permettrai de dire, même si ma modestie doit en souffrir, que personne ne peut me donner des leçons de service public. Nous avons en effet combattu, et c'était un très beau combat, pour faire accepter par nos partenaires européens cette idée formidable de service public à la française qui fait partie de la culture de notre pays.
    S'agissant des centres de tri, La Poste présentera un projet au Gouvernement. Nous verrons cela ensemble dans la concertation sociale la plus large. Je note néanmoins au passage, et cela ne vous a certainement pas échappé, que le nombre de points de contact de La Poste est resté relativement stable au cours des dernières années. Il a même connu une légère augmentation, puisqu'il est passé de 16 967 en 1990 à 17 038 en l'an 2000. Cette progression devrait être de nature à vous rassurer.
    M. Jean-Pierre Brard. C'était grâce au gouvernement précédent !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Peu importe ! Ce qui compte c'est que le nombre de ces points de contact de La Poste, si importants pour l'aménagement du territoire, les salariés et les utilisateurs, reste stable.
    M. Jean-Pierre Brard. Nous verrons ce que nous dira saint Thomas !
    M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
    M. Daniel Paul. Madame la ministre, vous n'avez guère répondu aux inquiétudes dont je vous ai fait part tout à l'heure s'agissant des plans sociaux, des délocalisations et des suppressions d'emplois qui font des ravages dans notre pays.
    La gravité de la situation n'a pourtant pas pu échapper au nouveau gouvernement. Mais, pour l'heure, seule semble se dessiner la mise en place d'une sorte de cellule spéciale associant plusieurs ministères qui serait chargée d'intervenir pour apporter des solutions lorsqu'il y a des plans de licenciement ou des fermetures. On est aux antipodes de l'esprit qui avait présidé à la loi antilicenciements, dite de « modernisation sociale », adoptée en janvier dernier par l'ancienne majorité, laquelle se distinguait des législations précédentes en donnant aux représentants des salariés des droits leur permettant justement de contester un plan de licenciement avant même qu'il ne tombe et de faire valoir leurs propres propositions pour l'éviter.
    Pour l'heure, le Gouvernement revient à la vieille recette de l'allégement des charges qui serait, à l'en croire, l'arme absolue contre le chômage. A cet égard, je ne peux m'empêcher de vous lire le courrier qui a été adressé aux salariés par la famille actionnaire de Trouvay et Cauvin en octobre 1996, à la suite de la signature d'un accord dans le cadre de la loi Robien.
    M. Lassarat expliquait : « En application de l'accord conclu avec les représentants du personnel, notre société va pouvoir bénéficier de la loi de Robien qui nous permettra des économies de charges fortes, la protection de l'emploi, d'éviter le coût de licenciements économiques devenus inutiles et surtout de préserver la totalité des forces de l'entreprise en assurant l'avenir. »
    Six ans après : 850 licenciements. Diable ! Les exonérations de charges, cela ne suffit pas.
    Au vu de ces constats et de ces orientations, nous considérons, madame la ministre, que la commission de contrôle de l'utilisation des fonds publics doit pleinement jouer son rôle. Confirmez-vous - ou non - qu'elle continuera de le faire ?
    D'une manière plus générale, une véritable politique industrielle, soucieuse d'un aménagement durable du territoire, nécessite une action publique plus forte et donc plus cohérente. Quelles réponses concrètes et rapides entendez-vous apporter aux salariés et aux acteurs politiques, économiques et sociaux ? Entendez-vous, en particulier, répondre aux différents courriers relatifs à la quinzaine de plans sociaux concernant la Seine-Maritime, notamment celui de Trouvay et Cauvin ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Vous savez certainement, monsieur le député, que ma région d'origine, et donc de coeur, est la Haute-Normandie et que j'ai passé toute mon enfance au Havre. Alors, quand vous me dites que Trouvay et Cauvin, ce fleuron de l'industrie havraise, pourrait disparaître totalement dans les prochains jours, vous imaginez bien que je ne peux rester indifférente. Et si je ne vous ai pas répondu tout à l'heure à ce sujet, c'est que je pensais que vous m'interrogeriez plus précisément dans le cadre des questions.
    La lette que vous m'avez écrite à propos de cette entreprise date du 24 octobre. J'ai donc le sentiment de ne pas avoir trop perdu de temps pour vous répondre. Nous essayons d'améliorer les délais de réponse aux parlementaires.
    M. Daniel Paul. Les licenciements ont lieu mardi prochain, madame la ministre !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Je le sais et je puis vous confirmer que je suis l'évolution de ce dossier comme de tous ceux de même nature, et pas seulement parce qu'il s'agit de ma ville natale. En coordination étroite avec mon collègue François Fillon, nous ferons tous nos efforts pour sauver le maximum d'emplois.
    Par ailleurs, vous ne l'ignorez pas, nous venons de confier la création de 200 emplois sur le bassin de Fécamp à une mission d'aide qui complétera le travail de la mission précédente, chargée de créer 12 000 emplois dans le bassin du Havre. Cela montre que nos discours se concrétisent par des décisions pratiques et efficaces.
    Enfin, nous avons bien conscience de la nécessité de renforcer la compétitivité des entreprises et l'attractivité de notre territoire. C'est une exigence fondamentale, car c'est l'entreprise qui crée des emplois et non pas les emplois qui créent l'entreprise. Si nous voulons que les entreprises puissent créer des emplois, il faut que nous les aidions à le faire en leur offrant un environnement favorable. Je n'ai pas le sentiment, monsieur le député, que la loi dite de modernisation sociale ait été dans cette direction. Mais ceci est un autre débat. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Pour le groupe de l'Union pour la démocratie française, la parole est à M. Francis Hillmeyer.
    M. Francis Hillmeyer. Madame la ministre, je veux profiter de ce débat pour attirer votre attention sur un énorme gâchis industriel, celui des anciennes mines de potasse d'Alsace, site où une épopée glorieuse, dont des générations de mineurs et d'anciens mineurs restent très fiers, s'est achevée pitoyablement.
    Quasiment toutes les tentatives de reconversion annoncées triomphalement par vos prédécesseurs et leurs fidèles ont échoué ou sont en passe de s'achever dans des désastres économiques, le dernier en date étant celui des AC2R, anciens ateliers centraux. Après plus de vingt ans d'existence, cette entreprise, filiale des MDPA, et qui devait survivre aux mines, perd des sommes considérables.
    Le démantèlement de la Société commerciale des potasses et d'azote, une entreprise internationale, avec des comptoirs, des ports, des établissements dans le monde entier, et en particulier dans certains pays émergents, est un scandale, car elle n'avait aucun besoin de la potasse d'Alsace pour survivre aux MDPA, mais simplement d'une volonté politique et industrielle. Je doute qu'au stade où en est la procédure, vous puissiez faire autre chose que constater et blâmer les responsables.
    A côté de cela, ce qui vient de se passer dans ce qui restait de la mine fait figure de tragi-comédie où le burlesque le dispute au sordide, avec des conséquences, bien sûr, sur la vie et le travail d'environ 400 personnes : les derniers mineurs en activité et les employés du pôle de stockage des déchets ultimes, Stocamine. L'idée d'utiliser d'anciennes galeries taillées dans du sel gemme pour stocker des déchets ultimes n'est pas nouvelle. L'entreprise minière et chimique allemande Kali und Salz pratique ce stockage depuis des décennies avec sérieux et méthode.
    Mais l'incurie des dirigeants mène à une fin peu glorieuse pour les MDPA, qui avaient une formidable opportunité de créer autour de ce site d'enfouissement un ensemble d'installations scientifiques de haut niveau consacrées au recyclage des matières stockées, voire à leur ennoblissement. A la place de cela, on a réussi à descendre à 800 mètres sous terre des tonnes de matières, sur simple déclaration du déposant et sans réel contrôle. Et ce site sensible n'était même pas surveillé en permanence !
    Rien ne prouve que l'incendie qui s'est déclaré il y a plus d'un mois ne couve pas toujours. Le stockage est arrêté. La justice est saisie sur plainte des syndicats. La production de potasse dans la mine contiguë a dû être arrêtée, avec l'annonce de la fermeture anticipée de l'exploitation minière, qui met 300 mineurs au chômage technique pour six mois.
    Une fois de plus, les victimes sont les hommes, les mineurs et leurs familles, ainsi que l'ensemble du bassin potassique dont je suis le député avec Michel Sordi. Les décideurs qui ont loupé l'après-mine ne risquent rien : les vrais responsables sont à la retraite ou occupent des fonctions ailleurs, et ceux qui restent n'ont plus aucun pouvoir.
    D'immenses problèmes humains et matériels se posent. Ils concernent d'abord le devenir des derniers actifs, le maintien de leurs droits et salaires. Rappelons qu'ils ne sont en rien responsables de cette fermeture prématurée. Reste aussi à régler la question des propriétés foncières et celle des conséquences à long terme de l'exploitation minière, comme la montée des eaux, donc la poursuite des pompages, la stabilisation des sols, et j'en passe.
    Je pense, madame la ministre, que, devant tout ce désordre, vous devriez désigner une commission d'enquête qui viendrait sur place lister les problèmes qui restent à traiter, en dehors de toute pression locale, en travaillant avec les maires et les hommes de terrain - mais en dehors des responsables actuels de cet énorme gâchis sur fonds publics - car les MDPA restent une entreprise d'Etat, de même que l'EMC. Il faudrait donc veiller à ce que soit réglé ce qui doit l'être : problèmes humains, de cadre de vie, d'avenir économique et social.
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Monsieur Hillmeyer, je regrette inifiniment que la décision de fermeture des mines de potasse d'Alsace ait dû être prise par anticipation, puisque la fermeture initiale était prévue en avril 2003. L'incendie survenu il y a un mois dans les locaux de Stocamine a conduit à une suspension de l'activité minière et a rendu toute reprise très difficile, notamment pour des raisons de sécurité. Cette décision était donc malheureusement incontournable.
    Je dirai seulement que les conditions sociales de cette fermeture anticipée devront faire l'objet d'une négociation avec les organisations syndicales, et nous y serons extrêmement attentifs, afin de mettre en place les dispositions transitoires nécessaires sans remettre en cause, bien évidemment, le plan social exemplaire négocié en 1997 et signé par toutes les organisations syndicales.
    Enfin, Monsieur Hillmeyer, je retiens votre suggestion de venir sur le terrain pour m'entretenir avec toutes les personnes concernées par cette situation très dommageable. J'espère, sans m'y engager formellement, pouvoir lui donner suite dans les meilleurs délais.
    M. Francis Hillmeyer. Je vous remercie, madame la ministre.
    M. le président. Nous avons terminé les questions.
    Les crédits de l'industrie, de la poste et des télécommunications seront mis aux voix à la suite de l'examen des crédits de l'économie et des finances.
    Toutefois, en accord avec la commission des finances, je vais appeler les amendements n°s 82 et 53 à 55.

ÉTAT B
(Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires
des services civils (mesures nouvelles))
TITRE III
« Economie, finances, industrie : 23 126 385 euros. »

    Sur le titre III de l'état B concernant l'économie, les finances et l'industrie, M. Joyandet, rapporteur spécial, a présenté un amendement, n° 82, ainsi rédigé :
    « Réduire les crédits de 250 000 euros. »
    La parole est à M. le rapporteur spécial.
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Je ne sais même pas si j'oserai présenter cet amendement, tant il paraîtra dérisoire, comparé aux sommes que représente ce que j'appelle le « trou de France Télécom ». Mais la commission des finances, dont c'est la mission, a travaillé sérieusement pour tenter de dégager quelques économies budgétaires, sans pour autant mettre en péril le service public.
    Celle que nous proposons concerne en l'occurrence l'Autorité de régulation des télécommunications, dont je veux saluer le rôle éminent, mais dont le budget est en hausse globale de 4,8 %. La commission des finances suggère donc de réduire de 250 000 euros les crédits qui ne concernent pas le personnel.
    Il s'agit en réalité d'un amendement d'appel, car nous aimerions comprendre madame la ministre, les raisons de cette très forte augmentation des crédits de fonctionnement de l'ART.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le rapporteur, je pourrais accepter l'amendement si vous consentiez à ramener à 100 000 euros la réduction de crédits proposée.
    M. le président. Y consentez-vous, monsieur Joyandet ?
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. J'accepte bien entendu la proposition de Mme la ministre et rectifie l'amendement de la commission en substituant aux mots : « 250 000 euros », les mots : « 100 000 euros ».
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 82, tel qu'il vient d'être rectifié.
    (L'amendement, ainsi rectifié, est adopté.)
    M. le président. Nous en arrivons à l'amendement n° 53 portant sur le titre IV de l'état B.

TITRE IV
« Economie, finances, industrie : 314 525 172 euros. »

    Sur le titre IV de l'état B concernant l'économie, les finances et l'industrie, M. Novelli, rapporteur spécial, a présenté un amendement, n° 53, ainsi rédigé :
    « Réduire les crédits de 2 000 000 euros. »
    La parole est à M. le rapporteur spécial.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Comme je l'ai annoncé, cet amendement, vise à supprimer une large partie de la subvention accordée à l'Association pour la promotion et le développement industriel, l'APRODI.
    Cette association a pour objet de mettre en oeuvre la procédure ATOUT de diffusion des technologies auprès des PMI. Elle est basée à Paris et son action pourrait donc fort bien incomber aux DRIRE ou à l'ANVAR, qui disposent en outre d'un bon réseau local à la différence de la petite structure nationale qu'est l'APRODI.
    Cet amendement, vous vous en doutez bien, est déposé à titre symbolique. J'ai bien entendu ce que nous a dit Mme la ministre il y a quelques instants sur l'ensemble de la politique de soutien à l'innovation et à la recherche qu'elle aura l'occasion de présenter dans quelques semaines au Parlement. Mais le signal que nous voulons donner me semble clair : il s'agit de rationaliser la politique d'aide à l'innovation et au développement en réalisant des gains de productivité. Je note, du reste, que ce mouvement est déjà engagé puisque le projet de loi de finances prévoit des redéploiements de crédits similaires et la suppression de la subvention spécifique à une autre association, dénommée Agence nationale pour le développement de la productique appliquée à l'industrie.
    M. le président. C'est ce que M. Méhaignerie a appelé hier la recherche des économies « à petits pas. »
    Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Monsieur Novelli, votre question s'inscrit dans une réflexion plus large, que nous mènerons très prochainement ensemble sur la décentralisation.
    M. Alain Cousin. Très bien !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Vous n'ignorez certainement pas que M. Francis Mer et les ministres qui l'assistent réfléchissent très activement à des réformes importantes, précisément pour cibler les actions et leur donner le maximum d'efficacité.
    Dans ces conditions, nous pensons qu'il serait prématuré de réduire les crédits de l'APRODI. Nous souhaitons les maintenir en 2003 au niveau de l'année précédente, pour ne pas préjuger les décisions qui pourront être prises dans ce domaine. Naturellement, la situation aura évolué en 2004 et nous proposerons alors un dispositif plus conforme aux besoins des entreprises.
    Pour ces raisons, je vous demande, monsieur le rapporteur spécial, de bien vouloir retirer votre amendement.
    M. le président. Le retirez-vous, monsieur Novelli ?
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Je ne vais pas prolonger ce suspense insoutenable (Sourires.) Je vous ai bien entendue, madame la ministre, et je vais donc retirer cet amendement, tout en notant que cette structure est mise en question depuis de nombreuses années. Déjà, votre prédécesseur ayant appartenu à cette majorité souhaitait la supprimer. Je souhaite que la procédure de diffusion des technologies soit « descendue » au niveau régional dans le cadre du projet global que vous aurez bientôt l'occasion de nous proposer.
    M. le président. L'amendement n° 53 est retiré.
    Nous en venons aux amendements n°s 54 et 55 portant sur le titre VI de l'état C.

ÉTAT C

(Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils [mesures nouvelles].)

TITRE VI
Economie, finances, industrie

    « Autorisations de programme : 1 730 741 000 EUR ;
    « Crédits de paiement : 537 978 000 EUR. »
    Sur le titre VI de l'état C concernant l'économie, les finances et l'industrie, M. Novelli, rapporteur spécial, et M. Rouault ont présenté un amendement, n° 54, ainsi rédigé :
    « Réduire les crédits de paiement de 3 000 000 EUR. »
    La parole est à M. le rapporteur spécial.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. L'amendement n° 54 tend formellement à réduire les crédits de paiement de l'ADEME de 3 millions d'euros. Je signale d'ailleurs qu'en dépit de cette diminution, la progression de ces crédits demeurerait de près de 140 %.
    Mais au-delà de cette donnée chiffrée, l'amendement a une finalité plus profonde puisqu'il reflète toutes les interrogations de notre assemblée et, au-delà, de l'Inspection générale des finances ou de la Cour des comptes, concernant la gestion de l'ADEME. Il y a quelque incongruité à afficher aujourd'hui une telle augmentation des crédits de paiement. Quelle est, en effet, la logique économique qui pourrait justifier rationnellement une progression de 164,5 % ? Notre démarche vise précisément à obtenir une réponse à cette question si, du moins, il y en a une.
    J'ai rappelé, il y a quelques instants, les critiques dont la gestion de l'ADEME a fait l'objet de la part d'un certain nombre de corps d'inspection. Au-delà de ces critiques, cet amendement est un appel lancé à tous ceux qui sont convaincus de la nécessité d'améliorer la gestion de l'agence et refusent une augmentation de crédits qui ressemble à une récompense, alors que les importants moyens dont dispose l'ADEME ne semblent pas employés très efficacement au vu des indicateurs de résultats dont sont assortis ses programmes.
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. M. Novelli a raison de souligner l'augmentation des crédits de l'ADEME. Mais, connaissant sa grande compétence, je ne doute pas qu'il sache que la dotation de la loi de finances de 2002 avait réduit sérieusement - de 18,3 millions d'euros - les crédits de paiement de l'agence.
    En réalité, il s'agit tout simplement de prévoir pour l'ADEME un montant de crédits qui corresponde, en 2003, aux dotations moyennes de ces dernières années et qui lui permette, surtout, de faire face aux engagements pris. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
    M. le président. La parole est à Mme Geneviève Perrin-Gaillard.
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Je tiens à insister sur l'importance de l'ADEME, en indiquant, à l'intention de M. Novelli, que, toutes origines confondues, sa capacité d'engagement en 2003 sera inférieure de 30 % aux engagements réalisés en 2002. Par conséquent, si on l'ampute d'une partie de ses crédits, elle ne pourra absolument pas financer ses actions, alors même que le ministère de l'écologie et du développement durable impose sans cesse à l'ADEME de nouvelles tâches, par exemple, la question des farines animales, ce qui, vous en conviendrez, n'est pas négligeable. De même Mme la ministre vient de nous faire part de la volonté du Gouvernement de continuer à travailler sur les énergies renouvelables. Or il s'agit d'un travail à long terme, dont l'ADEME s'acquitte convenablement.
    Si ses crédits étaient réduits, elle ne pourrait pas tenir tous ces engagements.
    Enfin, je ne vois aucune relation de cause à effet entre la diminution d'un budget et l'amélioration de l'efficacité d'une structure.
    Pour ces raisons, nous voterons contre cet amendement. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre Micaux.
    M. Pierre Micaux, rapporteur pour avis. Etant Aubois, j'ai déjà eu connaissance du rapport du sénateur Philippe Adnot, qui a critiqué l'ADEME. Je confirme d'ailleurs les propos de Mme la ministre selon lesquels, à la suite de ce rapport, les crédits de l'ADEME ont déjà été sensiblement réduits en 2002.
    Ensuite je peux vous dire, comme président d'un nouveau syndicat d'élimination des déchets dans notre département, que nous avons une file d'attente d'investissements à réaliser, notamment pour les déchetteries.
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard et M. François Asensi. Absolument !
    M. Pierre Micaux, rapporteur pour avis. Ce n'est donc pas le moment de comprimer les dépenses de l'ADEME. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Yves Coussain. Absolument !
    M. Pierre Micaux, rapporteur pour avis. Par ailleurs, j'ai l'honneur de représenter l'Assemblée nationale au conseil d'administration de l'ADEME. Je souhaite donc qu'on me donne le maximum d'éléments pour me permettre de contrôler son action et d'essayer de clarifier ses interventions à l'avenir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Daniel Garrigue.
    M. Daniel Garrigue. Je veux également souligner que l'ADEME nous donne beaucoup d'éléments de satisfaction.
    D'abord, cette agence intervient dans des domaines très divers, comme les énergies nouvelles, la gestion des déchets et bien d'autres. La mesure à prendre serait d'opérer une clarification, parce que l'on a du mal à suivre l'évolution des crédits de l'ADEME.
    Ensuite, les participations de l'agence ont beaucoup diminué au cours des dernières années. A cet égard, président également d'un syndicat de gestion des déchets, je partage l'avis exprimé par M. Micaux. Ainsi, il faut avoir maintenant un minimum de cent colonnes de collecte du verre pour être subventionné, ce qui est considérable.
    Par ailleurs, se pose le problème du financement des déchetteries pour lesquelles les contraintes vont devenir de plus en plus fortes. Or, aucune réévaluation des aides de l'ADEME n'est intervenue depuis des années ; ses apports ne correspondent donc plus à la réalité des investissements.
    En la matière nous sommes surtout confrontés désormais à un problème plus général, dont je ne suis pas sûr qu'il puisse être résolu par l'ADEME, celui du tri sélectif. A l'origine son développement a été très encouragé avec des aides qui incitaient à la collecte des recyclables. Aujourd'hui les recyclables coûtent trois ou quatre fois plus cher que les non-recyclables, ce qui est complètement absurde.
    A défaut de pouvoir recourir à l'ADEME, ne vaudrait-il pas mieux mettre en place un système de péréquation qui rétablirait une incitation dans ce domaine ?
    Nous voulons bien voter les crédits de l'agence, mais nous souhaitons vivement que la situation soit clarifiée, peut-être par une mission commune à la commission de la production et à la commission des finances.
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Je veux appuyer la proposition de M. Garrigue, même s'il ne m'appartient pas d'en décider, car une telle mission serait très opportune.
    Je remercie également M. Micaux pour ses propos et je rappelle à M. Novelli que j'ai déjà insisté sur la nécessité de réaliser un contrôle rigoureux et positif de ces agences. Il faut à la fois bien saisir les problèmes qui se posent et leur conserver leurs capacités d'action. Par exemple la question des énergies renouvelables revêt une importance particulière et nous ne devons pas l'abandonner.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 54.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Novelli, rapporteur spécial, a présenté un amendement, n° 55, ainsi rédigé :
    « Réduire les crédits de paiement de 3 000 000 euros »
    La parole est à M. le rapporteur spécial.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Je veux d'abord dire ce que n'est pas cet amendement, ce n'est pas un arrêt des mesures de restructuration industrielle souhaitables.
    Comme avec le précédent - dont j'ai apprécié la discussion, même si je n'ai pas obtenu satisfaction - il s'agit de clarifier les choses. Puisque vous nous avez assuré, madame la ministre, que l'indispensable clarification serait menée sur l'ADEME, je souhaite qu'elle intervienne aussi sur les crédits dits de restructuration industrielle pilotés par le ministère de l'industrie.
    Depuis des années, la consommation des crédits dits CIRI, ces crédits de politique industrielle qui avaient été créés par les précédents gouvernements et qui n'ont jamais eu l'efficacité attendue, a été marquée par une forte décroissance. Ainsi, en 2001, le taux de consommation a été de 58,7 % en autorisations de programme et de 43,3 % en crédits de paiements. En 2002, les dotations en loi de finances initiale ont été de 43,5 millions d'euros en autorisations de programme et de 18,3 millions d'euros en crédits de paiements, mais les derniers renseignements dont nous disposons font apparaître des taux d'utilisation de 62,5 % en autorisations de programme et 54,3 % en crédits de paiements.
    Or le projet de budget pour 2003 propose de doter ce chapitre de 34 millions en autorisations de programme et, surtout, de 35 millions d'euros en crédits de paiements, soit une augmentation de plus de 91 % par rapport à la dotation de l'année dernière. Même si l'amendement que je propose était adopté, la progression serait encore de 75 %. En fait, cette réduction de crédits s'imputerait, sur les articles concernés, à due concurrence des taux de consommation des crédits disponibles constatés à la fin de l'exercice 2002.
    Au delà des chiffres il s'agit, je le répète, de clarifier.
    En effet les mesures de conversion sociale qui doivent être gérées à partir du ministère des affaires sociales et il me semble qu'elles devraient surtout concerner l'environnement général, lorsque se produisent des drames dans telle ou telle région par exemple, au lieu de profiter directement à telle ou telle entreprise.
    C'est donc un amendement de clarification et j'attends évidemment des explications de Mme la ministre.
    M. le président Quel est l'avis du Gouvernement ?
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. M. le rapporteur ne sera pas surpris que je sois défavorable à cet amendement pour des raisons que j'ai déjà exprimées largement.
    Cela étant, je note avec plaisir que M. Novelli ne conteste pas qu'il relève de la responsabilité du ministère de l'industrie, de conrtibuer aux opérations de reconversion et de reconstruction industrielle, de se pencher sur les besoins de revitalisation exprimés par les bassins d'emplois les plus fragilisés. Je l'en remercie.
    Par ailleurs je ne conteste évidemment pas la sous-utilisation des crédits antérieurs. C'est une réalité sur laquelle nous devrons nous pencher. A cet égard, j'ai bien une idée : je me demande si, en réalité, cette sous-utilisation n'est pas due au fait que le gouvernement précédent préférait d'autres outils. Pourtant je suis persuadée que, bien utilisés, ces crédits peuvent être extrêmement efficaces.
    C'est la raison pour laquelle, monsieur le rapporteur, je souhaiterais que vous acceptiez de retirer cet amendement.
    M. le président. M. Novelli, accédez-vous à cette demande ?
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Oui, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 55 est retiré.
    Je vais maintenant appeler les lignes 27 à 32 de l'état E, ainsi que, en accord avec la commission des finances, un amendement n° 94 tendant à insérer un article additionnel après l'article 68, présenté par M. Martin-Lalande.

ÉTAT E
Tableau des taxes parafiscales dont la perception
est autorisée en 2003
(Taxes soumises à la loi n° 53-633 du 25 juillet 1953)

LIGNES
2002 2003 DESCRIPION PRODUIT
pour
l'année 2002
ou la campagne
2001-2002
ÉVALUATION
pour
l'année 2003
ou la campagne
2002-2003
29 27 Nature versée par les entreprises de la profession
42 210 000 43 065 000
    Organismes bénéficiaires ou objet :
- membres du groupement d'intérêt économique « comité de coordination des centes de recherche en mécanique ».
    Taux effectif et assiette :
- mécanique, soudage et décolletage : 0,073 % du C.A.H.T. (taux maximum : 0,112 %) ;
- construction métallique : 0,195 % du C.A.H.T. (taux maximum : 0,32 %) ;
- activités aérauliques et thermiques : 0,148 % du C.A.H.T. (taux maximum : 0,29 %) .
    Textes :
- décret n° 98-1205 du 28 décembre 1998 ;
- arrêté du 9 novembre 2001.
    Je mets aux voix la ligne 27 de l'état E.

    (La ligne 27 de l'état E est adoptée.)

ÉTAT E
Tableau des taxes parafiscales dont la perception
est autorisée en 2003
(Taxes soumises à la loi n° 53-633 du 25 juillet 1953)

LIGNES
2002 2003 DESCRIPION PRODUIT
pour
l'année 2002
ou la campagne
2001-2002
ÉVALUATION
pour
l'année 2003
ou la campagne
2002-2003
30 28 Nature de la taxe :
- taxe versée par les industries de l'habillement
9 910 000 9 900 000
    Organismes bénéficiaires ou objet :
- comité de développement et de promotion du textile et l'habillement.
    Taux effectifs et assiette :
- 0,07 % de la valeuyr des articles d'habillement fabriqués en France ou importés, hors U.E. (taux maximum : 0,08 %).
    Textes :
- décret n° 2000-1310 du 26 décembre 2000 ;
- arrêté du 28 décembre 2001.
    Je mets aux voix la ligne 28 de l'état E.

    (La ligne 28 de l'état E est adoptée.)

ÉTAT E
Tableau des taxes parafiscales dont la perception
est autorisée en 2003
(Taxes soumises à la loi n° 53-633 du 25 juillet 1953)

LIGNES
2002 2003 DESCRIPION PRODUIT
pour
l'année 2002
ou la campagne
2001-2002
ÉVALUATION
pour
l'année 2003
ou la campagne
2002-2003
32 29 Nature de la taxe : 10 720 000 10 742 000
    - taxe à la charge des entreprises ressortissant au centre d'études et de recherches du béton manufacturé et au centre technique des tuiles et briques.
Organismes bénéficiaires ou objet :
- association « Les centres techniques des matériaux et composants pour la construction ».
Taux et assiette :
- taux en vigueur : 0,35 % pour le béton et 0,40 % pour la terre cuite sur le montant des ventes HT (taux maximum : idem).
Textes :
- décret n° 2000-1278 du 26 décembre 2000 ;
- arrêté du 26 décembre 2000.
    Je mets aux voix la ligne 29 de l'état E.

    (La ligne 29 de l'état E est adoptée.)

ÉTAT E
Tableau des taxes parafiscales dont la perception
est autorisée en 2003
(Taxes soumises à la loi n° 53-633 du 25 juillet 1953)

LIGNES
2002 2003 DESCRIPION PRODUIT
pour
l'année 2002
ou la campagne
2001-2002
ÉVALUATION
pour
l'année 2003
ou la campagne
2002-2003
33 30 Nature de la taxe : 8 700 000 9 000 000
    - taxe versée par les industriels et négociants de l'horlogerie, de la bijouterie, de la joaillerie et de l'orfèvrerie.
Organismes bénéficiaires ou objet :
- comité professionnel de développement de l'horlogerie, de la bijouterie, de la joaillerie et de l'orfèvrerie.
Taux effectif et assiette :
- 0,20 % ad valorem sur les opérations de vente (taux maximum : 0,30 %).
Textes :
- décret n° 2000-1312 du 26 décembre 2000 ;
- arrêté du 26 décembre 2000.
    Je mets aux voix la ligne 30 de l'état E.


    (La ligne 30 de l'état est adopté.)

ÉTAT E
Tableau des taxes parafiscales dont la perception
est autorisée en 2003
(Taxes soumises à la loi n° 53-633 du 25 juillet 1953)

LIGNES
2002 2003 DESCRIPION PRODUIT
pour
l'année 2002
ou la campagne
2001-2002
ÉVALUATION
pour
l'année 2003
ou la campagne
2002-2003
34 31 Nature de la taxe :
- taxe versée par les entreprises de la profession
9 300 000 9 500 000
    Organismes bénéficiaires ou objet :
- comité de développement des indiustries françaises de l'ameublement
    Taux effectif et assiette :
- 0,14 % ad valorem sur les ventes d'articles d'ameublement (taux maximum : 0,20 %).
    Textes :
- décret n° 2000-1309 du 26 décembre 2000 ;
- arrêté du 26 décembre 2000.
    Je mets aux voix la ligne 31 de l'état E.

    (La ligne 31 de l'état E est adoptée.)

ÉTAT E
Tableau des taxes parafiscales dont la perception
est autorisée en 2003
(Taxes soumises à la loi n° 53-633 du 25 juillet 1953)

LIGNES
2002 2003 DESCRIPION PRODUIT
pour
l'année 2002
ou la campagne
2001-2002
ÉVALUATION
pour
l'année 2003
ou la campagne
2002-2003
35 32 Nature de la taxe : 8 690 000 8 700 000
    - taxe versée par les entreprises des professionns.
Organismes bénéficiaires ou objet :
- comité interprofessionnel de développement des industries du cuir, de la maroquinerie et de la chaussure ;
- centre technique du cuir de la chaussure et de la maroquinerie.
Taux effectif et assiette :
- 0,18 % du montant hors taxes, fabriqués en France ou importés (UE et Espace économique européen) des ventes de cuirs bruts (à l'exclusion des peaux d'ovins), des cuirs et peaux finis ou semi-finis, et des articles de maroquinerie, articles chaussants et produits divers en cuir (taux maximum : idem) ;
- 55 % du produit de la taxe sont affectés au centre technique du cuir, de la chaussure et de la maroquinerie (taux minimum : 30 %) et 45 % du produit de la taxe sont affectés au comité interprofessionnel de développement des industries du cuir, de la maroquinerie et de la chaussure.
Textes :
- décret n° 2000-1311 du 26 décembre 2000 ;
- arrêté du 26 décembre 2000.
    Je mets aux voix la ligne 32 de l'état E.

    (La ligne 32 de l'état E est adoptée.)
10

Après l'article 68

    M. le président. MM. Martin-Lalande, Joyandet, Dionis du Séjour et Santini ont présenté un amendement, n° 94, ainsi libellé :
    « Après l'article 68, insérer l'article suivant :
    « Le troisième alinéa du 2° du II de l'article L. 35-3 du code des postes et télécommunications est ainsi rédigé :
    « La part des coûts nets que doit supporter chaque opérateur est calculée au prorata de son chiffre d'affaires sur le marché des télécommunications à l'exclusion de celui réalisé au titre des prestations d'interconnexion faisant l'objet des conventions définies au I de l'article L. 34-8. »
    La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.
    M. Patrice Martin-Lalande. La directive « Service universel » permet aux Etats membres de choisir entre deux mécanismes de financement : soit le recours aux fonds publics, soit le recours au financement par le secteur.
    En France, pour financer le service universel assumé par l'opérateur historique, les autres opérateurs apportent une contribution financière calculée à proportion du volume de trafic, donc du nombre de minutes. Cependant ce calcul pénalise les fournisseurs d'accès à Internet dans la mesure où les opérateurs répercutent sur ces derniers le montant du service universel et parce que le trafic Internet est lui-même facturé à un prix heureusement inférieur à celui du trafic téléphonique. Ces contributions représentent jusqu'à 15 % des coûts de collecte de trafic Internet pour les fournisseurs d'accès
    Comme l'a proposé à nouveau cette année l'autorité de régulation des télécommunications dans son rapport du 9 octobre 2002 sur la transposition du nouveau cadre réglementaire européen, il convient, pour ne pas pénaliser le développement de l'Internet à bas débit par la voie téléphonique, de remplacer la contribution au financement du service universel actuellement calculé en fonction du volume du trafic, par une contribution fondée sur le chiffre d'affaires hors interconnexion.
    Il y a urgence à introduire cette modification sans attendre la transposition des directives européennes du paquet Télécom. C'est la raison pour laquelle je présente de nouveau cet amendement aujourd'hui alors que j'en avais déposé un presque indentique l'an dernier. Il avait été examiné le 19 décembre 2001 et le gouvernement de l'époque s'était engagé, au Sénat, à agir rapidement. Malheureusement l'engagement n'a pas été tenu et il faut craindre que les coûts excessifs supportés par les fournisseurs d'accès - si la situation devait durer encore plusieurs mois - ne portent gravement tort à ces fournisseurs au risque d'en faire disparaître certains, comme cela a déjà été le cas.
    L'adoption de cette modification constitue donc une urgence, pour maintenir le pluralisme et la concurrence en matière d'accès à l'Internet du grand public par la voie téléphonique.
    Madame la ministre, pour ne pas renouveler le marché de dupes de 2001, je souhaite que le Gouvernement s'engage à ce que le calcul sur la base du chiffre d'affaires soit applicable au 1er janvier 2003 pour l'ensemble de l'exercice qui vient.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Je veux d'abord faire une petite rectification en séance. En effet, je n'étais pas signataire de cet amendement puisqu'il a été déposé très tardivement. Je tenais à lever cette ambiguïté. La commission ne l'ayant pas examiné, je ne peux que formuler quelques remarques à titre personnel.
    Il me semble avant tout, madame la ministre, que ce service universel mérite d'être réformé en profondeur. Le problème lié à la fracture numérique impose que, lors des futures négociations, on ne se limite pas à traiter du service universel du téléphone et des cabines téléphoniques, mais que l'on s'intéresse aux supports numériques, notamment à ceux à haut débit pour qu'ils soient concernés par cette indispensable réforme.
    Je sais que les fournisseurs d'accès à l'Internet souffrent actuellement. Le financement de ce service universel doit être revu. A cet égard, cependant, je ne suis pas en mesure de savoir quelles seraient exactement les conséquences financières, positives ou négatives, pour les différents opérateurs en fonction de la nouvelle règle du jeu.
    Même si je pense comme vous, monsieur Patrice Martin-Lalande, que cette réforme est nécessaire et si je partage votre désir de faire en sorte que soient réduites les lourdes contraintes pesant sur les fournisseurs d'accès, je m'interroge, d'une part, sur la nécessité d'agir aussi vite,...
    M. Patrice Martin-Lalande. On le demande depuis deux ans !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. ... d'autre part, sur l'opportunité de taxer davantage les opérateurs de téléphonie mobile à un moment où on leur demande de consentir des efforts pour couvrir l'ensemble du territoire.
    M. Alain Gouriou. Absolument ! Vous aviez raison !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. D'une manière plus générale, je me demande s'il faut forcément compenser, en prenant davantage aux opérateurs de téléphonie mobile, les réductions que nous sommes obligés d'accorder aux autres opérateurs pour favoriser le développement de l'Internet à bas débit. Ce sujet me semble suffisamment compliqué pour mériter une réflexion supplémentaire.
    La commission n'ayant pas examiné l'amendement je n'ose pas lui donner d'emblée un avis favorable. Je m'en remettrai donc à l'avis du Gouvernement, que je suis très intéressé d'entendre.
    Sans malice, je veux dire à nos collègues qui ont souligné que la gauche était seule détentrice du service universel et du service public (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)...
    M. Alain Gouriou. Nous n'avons jamais dit cela !
    M. Christian Bataille. C'est seulement ce que vous avez voulu entendre !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. ... que je trouve aussi un peu cocasse que nous soyons obligés aujourd'hui de nous poser des questions sur la façon dont nous allons financer notre service public universel.
    M. Christian Bataille. Nous défendons mieux le service public que vous, ça, c'est sûr !
    M. le président. Veuillez laisser M. Joyandet terminer !
    M. Christian Bataille. Mais il nous provoque ! Il cherche la polémique !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Non, je ne veux pas polémiquer. Je tenais simplement à vous répondre.
    M. Christian Bataille. Nous sommes disponibles. Si vous voulez nous pouvons débattre du service public jusqu'à quatorze heures !
    M. le président. Non, monsieur Bataille !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Sans polémique ni malice, je souligne simplement que, au cours des cinq ans qui viennent de s'écouler, nous avons peu vu le précédent gouvernement s'atteler aux problèmes de la fracture numérique et du service universel. Ce sujet n'a pas davantage été présent autour de la table du conseil d'administration de France Télécom.
    M. Jean Dionis du Séjour. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Micaux.
    M. Pierre Micaux, rapporteur pour avis. Je partage l'avis de notre collègue Alain Joyandet : je pense qu'il vaut mieux attendre un peu.
    M. Alain Gouriou. Absolument !
    M. Jean Dionis du Séjour. Cela fait trois ans qu'on attend !
    M. Pierre Micaux, rapporteur pour avis. Je voudrais cependant que l'on tienne le même raisonnement pour les télécommunications que pour La Poste.
    M. Alain Gouriou. Bien sûr !
    M. le président. J'ai plusieurs demandes d'intervention, mais je donne d'abord la parole à Mme la ministre, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Je partage tout à fait les préoccupations exprimées par M. Martin-Lalande mais je fais également miennes les réserves de M. Joyaudet.
    Je verserai au débat un autre élément : je m'interroge sur la validité constitutionnelle d'un tel amendement. Ne risque-t-il pas d'être considéré par le Conseil constitutionnel comme un cavalier budgétaire et d'être, ce qui ne serait souhaitable pour personne, annulé ?
    Ne serait-ce que pour cette raison, je serais tentée de demander à M. Martin-Lalande de bien vouloir le retirer, étant entendu que je prends l'engagement de faire étudier par mon ministère les moyens de donner des prolongements positifs à sa préoccupation, éventuellement par voie de décret.
    M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le président, je demande la parole !
    M. le président. Non, monsieur Dionis du Séjour, l'amendement est présenté et défendu par M. Martin-Lalande.
    M. Jean Dionis du Séjour. Je suis cosignataire !
    M. le président. Je l'ai bien vu. Une question est posée par le Gouvernement. M. Martin-Lalande va y répondre et, en fonction de sa réponse, je verrai s'il faut poursuivre le débat.
    La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.
    M. Patrice Martin-Lalande. J'ai bien entendu les arguments de nos collègues, notamment à propos de la difficulté d'évaluer les conséquences d'une telle modification sur la concurrence. Je me permets cependant de souligner que l'ART, dont le rôle est justement de mettre en oeuvre les conditions favorables au jeu de la concurrence sur le marché des télécommunications, est elle-même à l'origine de cette modification. L'amendement que nous avons déposé n'est rien d'autre que la reprise d'une de ses propositions et je pense que l'on ne peut soupçonner cet organisme de proposer des mécanismes qui pourraient déséquilibrer la concurrence nécessaire sur le marché des télécommunications.
    Le financement du service universel n'existe pas pour le haut débit, alors qu'il y a un prélèvement pour le bas débit ce qui paradoxalement, pénalise l'accès à Internet de la majorité des Français, puisque ce type d'accès est le plus répandu.
    Si l'on veut accélérer et généraliser l'accès à Internet par le bas débit, nous avons tout intérêt à alléger la facture. C'est à cette condition que la fracture numérique, à laquelle nous sommes tous sensibles, pourra être réduite. J'espère, madame la ministre, que le Gouvernement pourra y apporter une réponse avant la fin de cette année. Il serait bien que le problème soit réglé pour l'exercice prochain.
    Je reconnais la fragilité juridique de l'amendement. Il est pourtant la reprise d'un amendement qui avait été examiné ici-même l'année dernière. Si le Gouvernement peut apporter une réponse à ce problème par la voie du décret, j'y suis tout à fait favorable.
    M. Jean Dionis du Séjour. Je souhaiterais faire une brève intervention, monsieur le président !
    M. le président. Non, monsieur Dionis du Séjour, l'amendement est retiré. Il l'est par celui qui le présente. On ne va pas relancer le débat sur un amendement devenu virtuel, puisqu'il est est retiré !
    M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le président, j'avais demandé la parole avant.
    M. le président. Ecoutez, c'est moi qui préside.
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Très bien !
    M. le président. Un débat a eu lieu au cours duquel des questions ont été posées, le Gouvernement y a répondu et l'amendement est maintenant retiré. Voilà qui clôt la discussion.
    Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, concernant l'industrie, La Poste et les télécommunications.
    La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

3

ORDRE DU JOUR
DE LA PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :
    Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003, n° 230 :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 256).
    Ecologie et développement durable ; ligne 33 de l'état E :
    M. Philippe Rouault, rapporteur spécial, au nom de la commision des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 13 du rapport n° 256) ;
    M. Christophe Priou, rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome IV rectifié de l'avis n° 258) ;
    M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires étrangères (tome V de l'avis n° 259).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à treize heures cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT