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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU SAMEDI 9 NOVEMBRE 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
3e séance du vendredi 8 novembre 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Loi de finances pour 2003 (deuxième partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

OUTRE-MER (suite)

Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer.
Réponses de Mme la ministre aux questions de : MM. Christophe Payet, Louis-Joseph Manscour, Victorin Lurel.

Etat B
Titres III et IV. - Adoptions «...»
Etat C
Titres V et VI. - Adoptions «...»

Renvoi de la suite de la discussion budgétaire à la prochaine séance.
2.  Dépôt d'un rapport en application d'une loi «...».
3.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à vingt et une heures quinze.)

1

LOI DE FINANCES POUR 2003
DEUXIÈME PARTIE
Suite de la discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003 (n°s 230, 256).

OUTRE-MER (suite)

    M. le président. Nous poursuivons l'examen des crédits du ministère de l'outre-mer.
    La parole est à Mme la ministre de l'outre-mer.
    Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, l'examen, par votre assemblée, du budget du ministère de l'outre-mer me donne l'occasion de vous présenter les grandes orientations de l'action du Gouvernement pour nos dix collectivités d'outre-mer.
    C'est la première fois que j'ai l'honneur de défendre devant vous ce budget, et je le fais avec d'autant plus d'émotion et de plaisir que l'outre-mer a retrouvé cette année toute sa place au coeur de l'organisation gouvernementale, avec un ministère à part entière, dont la vocation interministérielle est enfin réaffirmée. C'est à la fois une marque de respect, de reconnaissance et d'estime à l'égard de ces Français d'outre-mer qui sont une part irremplaçable de notre communauté nationale et qui apportent à l'épanouissement de notre pays une immense et généreuse contribution. C'est avant tout pour eux que le Gouvernement a la volonté de mener une action ambitieuse, fondée sur la confiance, et avec pour objectif l'égalité économique, étape ultime de l'accès à la pleine citoyenneté de chacun par le travail et la dignité.
    Vous le savez, ce ne sont pas seulement les moyens de mon ministère qui représentent l'ensemble de l'effort que l'Etat consacre à l'outre-mer ; il s'agit seulement d'un dixième environ des crédits affectés à l'outre-mer. Il est donc de ma responsabilité d'intervenir auprès de mes collègues du Gouvernement pour qu'ils mettent en place, dans les domaines relevant de leur compétence, les financements et les moyens propres à satisfaire les besoins de l'outre-mer. Il est aussi de ma responsabilité de veiller à la cohérence de l'action de l'Etat dans nos dix collectivités, pour une bonne prise en compte de leurs particularités.
    Dans cet esprit, le ministère de l'outre-mer est très présent et directement impliqué dans les débats nationaux majeurs, comme c'est le cas actuellement avec la réforme de la décentralisation et la révision constitutionnelle en cours.
    Vous avez eu raison de le souligner, monsieur René-Paul Victoria, le socle institutionnel de nos collectivités d'outre-mer doit être solide, leur ancrage dans la République doit être encore plus fort, pour rétablir un parfait climat de confiance pour les décideurs économiques.
    Oui, monsieur le député, la Réunion gardera son statut départemental, conformément aux voeux maintes fois exprimés par les Réunionnais, dont le choix, grâce à la révision constitutionnelle présentée par le Gouvernement, sera désormais toujours respecté. Je le redis devant vous avec force et, à travers vous, à tous les Réunionnais : c'est grâce à cette révision constitutionnelle que la Réunion obtiendra enfin toutes les sécurités juridiques qu'elle souhaite et qui n'existent pas aujourd'hui, puisque le texte actuel de la Constitution n'apporte aucune garantie à ce sujet, ne met nullement à l'abri de changements statutaires décidés de façon arbitraire et autoritaire depuis Paris. Je sais que vous en êtes convaincu, monsieur Victoria et monsieur Thien Ah Koon, contrairement à ceux qui demandent la suppression de l'article 72-3 de notre texte, et qui, de ce fait, ne veulent pas prémunir la Réunion contre le « largage » dont ils accusent le Gouvernement avec la plus parfaite mauvaise foi. Il n'est, en effet, pas acceptable, lorsqu'on se dit gaulliste, de faire un tel procès d'intention à un gouvernement dont le projet de révision constitutionnelle est la traduction juridique fidèle des engagements pris par le Président de la République, dont on ne peut douter de l'attachement qu'il porte à l'outre-mer.
    L'autre grande priorité nationale est la lutte contre l'insécurité, aggravée outre-mer et en particulier en Guyane, à Mayotte et à Saint-Martin en Guadeloupe, par le poids de l'immigration clandestine. Là aussi, l'outre-mer est pleinement pris en compte. Ma présence comme membre permanent au Conseil de sécurité intérieure me permet de faire valoir certaines spécificités de l'outre-mer, qui ont déjà été intégrées dans la loi d'orientation sur la sécurité intérieure, qui prévoit un renforcement significatif des moyens de police et de gendarmerie, en particulier en Guyane. Vous avez eu raison, madame Rimane, de souligner que l'insécurité frappe au coeur une Guyane fortement déstabilisée par cette immigration clandestine.
    Nous avons, vous le savez, engagé une action déterminée pour lutter intensivement contre l'orpaillage clandestin, et les premiers résultats sont encourageants.
    Des moyens humains supplémentaires ont été affectés et des mécanismes juridiques mis en place. L'escadron dédié à la lutte contre l'orpaillage a été maintenu et la création d'un PSIG « forêt » sera accélérée.
    Je rappelle que le gouvernement précédent avait programmé pour le mois de juin dernier le départ définitif de cet escadron dont l'efficacité n'est pourtant plus à démontrer.
    En outre, nous avons, sans tarder, modifié le code minier pour permettre au procureur d'ordonner sur place la destruction des moteurs des orpailleurs clandestins. Mme Taubira l'avait recommandé dans son rapport. Je constate que le gouvernement précédent ne l'avait pas suivie. Pour notre part, nous avons agi immédiatement.
    A l'initiative du préfet de la Guyane, les opérations ciblées se succèdent depuis le 30 septembre. Plusieurs tonnes de matériels, des milliers de litres de carburant, des groupes électrogènes, du ravitaillement ont été saisis ou détruits et une centaine de personnes en situation irrégulière ont été interpellées.
    Il faut que les orpailleurs clandestins, et surtout leurs commanditaires, comprennent que désormais ces activités ne seront plus rentables en Guyane pour ceux qui les exercent dans l'illégalité.
    De telles mesures sont de nature à décourager l'immigration clandestine. Elles ont été complétées par un renforcement du personnel de la police de l'air et des frontières. Nous avons aussi donné un nouvel élan à la coopération régionale. J'ai demandé à nos ambassadeurs au Surinam et au Guyana d'activer la négociation d'accords de réadmission, à l'instar de ce qui existe déjà avec le Brésil. Une action similaire est menée, monsieur Almont, dans la Caraïbe, vis-à-vis de Sainte-Lucie et de la Dominique.
    Madame Rimane, vous m'avez proposé de donner à l'hôpital de Saint-Laurent-du-Maroni un statut d'extra-territorialité pour décourager les Surinamiennes en situation irrégulière de venir accoucher en Guyane dans la perspective d'obtenir des papiers français. Cette proposition soulève, vous le savez, d'importants problèmes juridiques et il me semble que la vraie difficulté réside surtout dans l'allongement du délai de reconnaissance d'un enfant qui a été porté à un mois par le gouvernement précédent. Le dispositif favorise la constitution d'une filière, désormais bien organisée, sur la reconnaissance en paternité.
    Pour mettre fin à ce trafic, je reviendrai sur ce dispositif en le limitant aux seules communes où il peut se justifier et j'en exclurai bien entendu Saint-Laurent-du-Maroni, ce qui réduira, je pense, considérablement l'intérêt d'un accouchement à l'hôpital de cette commune pour les étrangères en situation irrégulière qui espéraient ainsi faire bénéficier leur enfant d'une reconnaissance par un père de nationalité française qu'elles ont un mois pour trouver.
    En matière de sécurité, vous attendez tous légitimement des résultats. Je peux vous dire que nous sommes en train de renverser la tendance puisque la progression de la délinquance a sensiblement fléchi, grâce aux mesures prises par le Gouvernement, avec notamment la création, comme en métropole, des groupes d'intervention régionaux.
    En ce qui concerne les zones de compétence de la police et de la gendarmerie, plusieurs d'entre vous ont souligné les difficultés qui résultent d'un découpage ancien et inadapté. Comme vous le savez, une réflexion est actuellement menée. Les préfets, après concertation avec les maires, doivent m'adresser prochainement des propositions concrètes.
    Ces propositions devront répondre à deux principes simples : une seule force, la police nationale ou la gendarmerie, prendra en charge la totalité d'une commune dans un souci évident de cohérence ; les communes chefs-lieux de département seront couvertes par la police nationale.
    Les réaménagements nécessaires seront effectués dans le cadre de l'application de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure du 29 août 2002.
    Mesdames, messieurs les députés, la place privilégiée que le Gouvernement souhaite donner à l'outre-mer dans son action est reflétée dans ce projet de budget pour 2003 qui, vous l'avez tous souligné, à périmètre constant, augmente de 1,5 %, c'est-à-dire plus que le budget global de l'Etat. Cette hausse témoigne de l'effort consenti en faveur de l'outre-mer dans un contexte budgétaire difficile.
    Quant à la baisse des crédits destinés aux services déconcentrés par rapport à ceux de l'administration centrale, elle s'explique, monsieur Manscour, par la globalisation des crédits de la préfecture de Martinique. Je tenais à vous apporter cette précision.
    Ces dernières années, les budgets de l'outre-mer ont enregistré - c'est ainsi, monsieur Lunel, je n'y peux rien - un taux de consommation qui n'est pas convenable. Comment ne pas être troublé par des pratiques de simple affichage politique consistant à souligner l'augmentation exceptionnelle des crédits - ce qui suscite naturellement une grande satisfaction pendant la seule journée d'examen du budget de l'outre-mer par l'Assemblée - et à oublier dès le lendemain, et pendant les 364 jours suivants, qu'il faut quotidiennement agir pour consommer ces crédits utilement et efficacement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    En effet, avec plus de 727 millions d'euros reportés en cumul ces dernières années, nous avons perdu, au cours de la précédente législature, l'équivalent d'une année de budget pour l'outre-mer ! Ce n'est pas l'existence même des reports de crédits que je critique, madame Taubira. Je sais très bien que cette pratique budgétaire est assez courante. Ce que je critique, c'est leur ampleur, difficilement acceptable au regard des besoins de l'outre-mer. Les crédits reportés représentent, en effet, comme l'a indiqué fort justement Didier Quentin, l'équivalent de trois années de dotations de la ligne budgétaire unique pour le logement ou près de deux années de crédits pour l'emploi du FEDOM. Quel gâchis ! Quelles occasions manquées au profit de l'outre-mer !
    Et ceci pour en arriver à la situation étonnante où, plus le budget augmentait, plus le montant des reports de crédits progressait. Ainsi, 60 % des crédits reportés ont concerné les années 2000 et 2001.
    Dans le même temps, situation tout à fait paradoxale, l'Etat était complètement défaillant dans la tenue de ses engagements à l'égard de plusieurs collectivités d'outre-mer, et j'en donnerai trois exemples.
    Tout d'abord, dans les quatre départements d'outre-mer, comme vous l'avez justement relevé, monsieur Beaugendre, les budgets des assemblées départementales ont subi des prélèvements indus au titre de la CMU pour un montant de 70 millions d'euros. Nous mettrons un terme, en 2003, à ces errements inadmissibles.
    M. Bernard Accoyer. Très bien !
    Mme la ministre de l'outre-mer. En outre, comme l'a fort justement relevé M. Audifax, le système de la CMU a créé une inégalité insupportable, notamment pour les personnes âgées et les handicapés qui étaient jusqu'à maintenant pris en charge à 100 % et qui, avec ce système, se trouvent dans l'obligation de s'affilier à une mutuelle complémentaire. Ainsi que je l'ai indiqué lorsque je suis venue à la Réunion, nous allons régler ce problème. Il nous faut malheureusement une loi. Et si nous n'y parvenons pas avant l'adoption de la loi programme, sachez que je compte bien y introduire ce dispositif correctif pour mettre fin à cette injustice.
    Deuxième exemple de situation pour le moins paradoxale : en Polynésie Française - vous l'avez indiqué avec raison, madame Béatrice Vernaudon - ce sont les dotations pour le fonds intercommunal de péréquation que l'Etat s'est dispensé de verser depuis 2001, pour un montant de 15,8 millions d'euros. Cette question est en cours de règlement.
    Troisième exemple : en Nouvelle-Calédonie - et je comprends votre exaspération, Monsieur Frogier - la dotation pour la construction et l'équipement des collèges a été insuffisamment dotée, l'Etat ne respectant pas le critère des effectifs scolarisés pourtant fixé par la loi. Ce sont près de 2 millions d'euros qui manquent alors que les besoins sont criants. Nous sommes en train, là aussi, de mettre fin à ce manquement inacceptable de l'Etat.
    Je tiens d'ailleurs à dire à M. Frogier que je comprends parfaitement sa réaction face aux déclarations de MM. Lambert et Brunhes et que je m'y associe pleinement. Que ceux qui invoquent sans cesse l'accord de Nouméa commencent par le lire et par le respecter ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jacques Brunhes. Nous l'avons lu depuis longtemps !
    Mme la ministre de l'outre-mer. Le projet de budget que je vous présente rompt résolument avec ces pratiques et s'inscrit dans une dynamique pragmatique, au plus près des réalités de terrain et des attentes de nos compatriotes d'outre-mer.
    M. Jacques Brunhes. Non !
    Mme la ministre de l'outre-mer. Répondre aux attentes, faire ce que l'on annonce, c'est aussi respecter celles et ceux pour lesquels nous travaillons.
    Ce budget est aussi une première concrétisation des engagements du Président de la République, en particulier sur trois points.
    Premièrement, il propose une première réorientation des crédits du FEDOM vers la création de vrais emplois durables dans le secteur marchand, c'est-à-dire un retour à l'esprit de la loi Perben qui l'avait créé, et qui avait été détourné. Contrairement à ce que l'on allègue, le système des CAE a très bien fonctionné jusqu'en 1997. C'est le gouvernement qui nous a précédé qui a décidé, pour des raisons politiques évidentes, de diviser par trois les crédits.
    M. Bernard Accoyer. Oui !
    Mme la ministre de l'outre-mer. Nous réorientons la création d'emplois vers les entreprises et c'est pour cette raison que, dès 2003, nous augmenterons de plus de 11 % les contrats d'accès à l'emploi.
    Deuxièmement, le budget donne un premier contenu à la notion de continuité territoriale, avec la création, que de nombreux députés ont saluée, du passeport mobilité. Celui-ci va profiter à 11 000 étudiants et 5 000 jeunes en formation. Il répond, vous le savez, à une attente forte des jeunes d'outre-mer et permettra de faciliter leur mobilité vers la métropole ou vers une autre collectivité d'outre-mer dans le cadre de leurs études, de leur formation ou de leur accès à un premier emploi.
    Troisièmement, le budget met en place des moyens financiers supplémentaires pour le développement économique et social des collectivités nécessitant un effort particulier de rattrapage. Il s'agit des deux conventions de développement pour Mayotte et pour Wallis-et-Futuna, pour un montant respectif de 20 millions d'euros et de 2,5 millions d'euros par an, sur cinq ans, qui s'ajoutent aux contrats de plan actuels.
    Je tiens à ce sujet à remercier Victor Brial et Mansour Kamardine. Nous avons travaillé avec eux de façon très constructive pour que ces conventions puissent être signées avant la fin de l'année.
    Monsieur Brial, sachez que je suis très consciente des difficultés que rencontrent nos compatriotes de Wallis-et-Futuna, et en particulier les plus modestes, pour accéder aux services bancaires. Je m'emploie actuellement, avec mon collègue du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, à améliorer le fonctionnement de l'offre bancaire à Wallis-et-Futuna, tout d'abord, en maintenant un service public bancaire - celui-ci est indispensable - et ensuite, de façon complémentaire, en étudiant les moyens susceptibles d'inciter des banques d'initiative privée ou semi-privée à s'implanter.
    Vous avez évoqué aussi la dette de l'agence de santé. Je suis attachée au bon fonctionnement de cette agence. Le nouveau directeur, qui rejoindra bientôt son poste, aura notamment pour mission de finaliser le premier budget de l'agence, qui prendra justement en compte l'apurement de la dette contractée au cours des années précédentes. Je veillerai avec mon collègue de la santé et mon collègue du budget à ce que la dotation de l'Etat soit fixée à un niveau suffisant pour tenir cet engagement.
    Enfin, concernant la vacance du poste de chef des services de l'équipement, sachez que mon cabinet s'est déjà rapproché de celui du ministère de l'équipement, afin de pourvoir ce poste dans les meilleurs délais. Nous sommes à la recherche un bon candidat car les travaux d'ampleur à mener à Wallis-et-Futuna imposent de nommer à ce poste un agent de grande qualité.
    Au-delà de cette première concrétisation des engagements du Président de la République, ce budget, vous l'avez tous souligné, est un budget de transition en attendant la loi-programme sur quinze ans qui sera examinée par le Parlement au début de l'année prochaine. Les préoccupations majeures de l'outre-mer - l'emploi, la formation et l'insertion, d'une part, le logement, d'autre part - sont au coeur de mes priorités. Certains diront que ce n'est pas là une nouveauté, et ils auront raison : ce sont les priorités essentielles pour l'outre-mer.
    Si le budget 2003 contient des financements importants pour les emplois aidés par nature précaires, c'est dans l'attente de la loi-programme dont l'objectif sera de favoriser la création d'emplois durables, substituant ainsi une logique d'activité à une logique d'assistance.
    Beaucoup d'entre vous ont exprimé leurs préoccupations quant à l'avenir des emplois jeunes qui, comme M. Victoria, M. Paye et Mme Bello ont eu raison de le souligner, est particulièrement préoccupant à la Réunion.
    Je constate qu'aujourd'hui, près de 10 000 jeunes dans l'ensemble de l'outre-mer occupent ce type d'emploi précaire d'une durée maximale de cinq ans.
    Le gouvernement précédent n'a pas assuré pour ces jeunes une sortie positive de ce dispositif, et n'a pas respecté ses propres engagements d'élaborer et de mettre en oeuvre une instruction spécifique pour les emplois-jeunes d'outre-mer, comme le prévoyait pourtant une circulaire de mon prédécesseur.
    Pour faire face à cette situation particulièrement difficile, j'ai pris un certain nombre d'engagements, qu'a bien voulu souligner M. Thien Ah Koon. J'ai rappelé, tout d'abord, que tous les contrats en cours iraient à leur terme - cela me paraît à la fois normal et logique - ensuite, que chaque jeune, en fin de contrat, bénéficierait d'un accompagnement adapté dans le cadre d'une structure de suivi individualisé.
    Ce dispositif, qui aurait dû être créé il y a plus d'un an, est maintenant opérationnel. Je vous le confirme une nouvelle fois, aucun jeune ne sera laissé au bord du chemin. Cela signifie que tous les jeunes pour lesquels nous n'aurons pas trouvé de solution à la fin de leur contrat verront celui-ci prolongé, au cas par cas, dans l'attente de cette solution.
    En outre, pour tenir compte des besoins importants du monde associatif, nous étudions actuellement avec François Fillon un nouveau dispositif d'insertion des jeunes qui, une fois défini, comportera un volet spécifique pour l'outre-mer, que je compte bien évidemment amplifier.
    La proposition faite par René-Paul Victoria d'étendre le congé solidarité aux collectivités locales est une piste intéressante. Ce dispositif, prévu par la loi d'orientation pour l'outre-mer, a, c'est le moins que l'on puisse dire, rencontré de grandes difficultés de mise en oeuvre. En effet, à la fin du mois de septembre dernier, il avait permis le recrutement de 24 personnes seulement, alors que, je le rappelle, dans le budget initial 2002, l'objectif était de 3 000.
    C'est pourquoi, dans le cadre de la préparation de la loi-programme, je m'attache d'abord à rendre ce dispositif, moins rigide, plus attractif et donc plus opérationnel. Je souhaite qu'il marche. Or ce n'est pas le cas actuellement.
    Monsieur Lurel, vous avez évoqué, pour discréditer l'action que j'entreprends, les différentes mesures contenues dans la loi d'orientation sur l'outre-mer votée par le gouvernement précédent. Les mesures prévues par la LOUM n'ont pas eu, et vous le savez très bien, tous les effets escomptés. Mon prédécesseur avait affiché pour 2002, de façon, me semble-t-il, assez peu réaliste, 23 000 mesures pour l'emploi dont 10 000 au titre du projet initiatives jeunes, 3 000 au titre du congé solidarité et 10 000 au titre de l'allocation du retour à l'activité. Les résultats de cette année montrent que seulement un tiers de ces mesures devrait se réaliser, soit 7 550. Nous sommes loin du compte ! Aussi, pour tirer les conséquences de l'expérience de cette année, les prévisions pour 2003 ont été fixées avec pragmatisme et réalisme. Dans cet esprit, les mesures de la loi d'orientation ont été réajustées à une hauteur de 9 300. Ce sont plus de 46 millions d'euros qui seront consacrés à leur mise en oeuvre, ce qui représente - et c'est important de le souligner - une augmentation de 23 % par rapport à ce qui va être effectivement réalisé en 2002. Je ne peux donc pas accepter que l'on me reproche de réduire les efforts en faveur de l'emploi.
    Dans le cadre du FEDOM, plus de 80 000 mesures d'insertion seront financées en 2003 alors que moins de 75 000 seront réalisées en 2002. Cette approche me paraît raisonnable dans l'attente de la mise en oeuvre de la loi-programme.
    Je ne peux laisser dire, comme l'ont fait Mme Bello, M. Lambert, M. Brunhes et M. Lurel, que le Gouvernement diminue les efforts en faveur de l'emploi. Regardez les chiffres réels et non pas les chiffres virtuels. Vous savez également que la suppression de la créance de proratisation, suite à l'alignement du RMI, n'entraîne pas une baisse des moyens d'intervention pour l'outre-mer, et n'affecte en rien - je tiens à le souligner car j'ai cru déceler dans l'intervention de M. Payet une certaine crainte à ce sujet - le fonctionnement et la santé financière des ADI, les Agences départementales d'insertion. L'alignement du RMI augmente en effet mécaniquement les contributions financières des départements aux ADI, dont les fonds de roulement pour les quatre années de créance de proratisation sont particulièrement confortables : de l'ordre de 120 millions d'euros pour les quatre ADI. Sauf à vouloir organiser un effet d'aubaine, la suppression de la part insertion de la créance de proratisation est justifiée, car elle prend acte d'une économie de structure liée à la disparition du différentiel du niveau du RMI dans les DOM par rapport à celui de la métropole.
    Vous m'avez interrogée, monsieur Brunhes, sur les mesures que le Gouvernement compte prendre pour faciliter l'accession au logement. J'ai le plaisir de vous indiquer que nous avons aligné l'allocation logement pour l'outre-mer sur le niveau intermédiaire de la métropole. Je précise, à l'attention tout particulièrement de Mme Bello qui m'a posé une question à ce sujet, que l'outre-mer va ainsi bénéficier d'un rattrapage de 25 % pour toutes les familles des DOM, ce qui correspondra, pour une famille de trois enfants, à soixante-cinq euros supplémentaires. Cette mesure de rattrapage n'avait pas été prise jusqu'à maintenant. Elle établit l'égalité entre la métropole et les DOM. Je précise encore que le texte va être publié dans quelques semaines, et que la mesure aura un effet rétroactif au 1er juillet 2002.
    M. Grignon a mentionné le problème de plusieurs décrets d'application spécifiques à Saint-Pierre-et-Miquelon qui sont en cours de finalisation avec les services du ministère des affaires sociales.
    Je rappelle que ces décrets portent sur la mise en place de l'allocation spéciale vieillesse et de l'assurance invalidité, sur la coordination des différents régimes de sécurité sociale et sur la mise en oeuvre de la loi d'orientation en faveur des personnes handicapées.
    Pour ce qui concerne l'allocation logement, l'allocation jeune enfant et l'allocation rentrée scolaire, un projet de texte est en cours d'examen avec les ministères concernés. Soyez assurés que je ferai tout mon possible pour activer la sortie de ce texte. Je soutiens bien évidemment la démarche que vous souhaitez. Nous l'avons d'ailleurs déjà engagée.
    Enfin, pour ce qui concerne le régime d'assurance vieillesse, les articles 13 et 35 de la loi du 17 juillet 1987 portant réforme du régime d'assurance vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, prévoient déjà que la revalorisation est calculée sur l'évolution des salaires et sur l'inflation spécifique à Saint-Pierre-et-Miquelon.
    J'en viens à la politique en faveur de notre jeunesse d'outre-mer. A la nécessité de lui offrir de véritables perspectives d'emplois durables, s'ajoute celle de la faire bénéficier sur place d'une formation et d'un système éducatif de qualité. Vous l'avez fort bien souligné, monsieur Audifax. Parmi tous les efforts que nous faisons, l'accroissement du budget du SMA qui permettra la création de 500 postes supplémentaires a été reconnu par plusieurs d'entre vous comme une mesure très positive. Le SMA est un superbe instrument d'insertion et de formation pour les jeunes d'outre-mer. Il n'en demeure pas moins que, dans de nombreuses collectivités, les moyens ne suivent pas, notamment en matière de constructions scolaires.
    Vous avez évoqué, monsieur Victoria, la nécessité d'un plan de rattrapage pluriannuel dans la construction scolaire. C'est vrai. Il n'existe pas de plan de rattrapage en cours pour répondre aux besoins de la Réunion et ces besoins, comme vous l'avez souligné, sont très importants : ils résultent à la fois d'une forte poussée démographique et du fait que le bâti existant présente de sérieuses lacunes en matière de sécurité.
    Je partage votre avis, monsieur le député, sur la nécessité de mettre en oeuvre un véritable « plan de rattrapage » pour la Réunion. C'est la raison pour laquelle j'envisage avec mon collègue Luc Ferry, d'envoyer sur place, prochainement, une mission d'évaluation, chargée de dresser un état des lieux et d'établir des priorités dans le premier et dans le second degré.
    A Mayotte, monsieur Kamardine, les besoins sont sans doute encore plus criants et une mission est également programmée pour faire l'état de ceux-ci.
    Vous avez également évoqué le statut des instituteurs de Mayotte et soulevé la question de la fonctionnarisation de l'ensemble des agents qui remplissent une mission de service public. Maintenant que l'ancrage de Mayotte dans la République ne fait plus débat puisque nous sommes en train d'écrire son nom dans la Constitution, cette question doit être réglée. Les fonctionnaires mahorais aspirent légitimement à être intégrés dans le statut général de la fonction publique et leur message a été entendu par le Gouvernement. Ainsi, à la fin de 2002 et au début de 2003, avec l'ensemble des ministères concernés, nous allons engager un vaste chantier de titularisation de la fonction publique de Mayotte qui s'étalera sur plusieurs années. Ce chantier d'intégration devra être mené parallèlement avec celui de la partition entre les services de la préfecture et du conseil général qui doit intervenir le 1er janvier 2004, conformément au statut de Mayotte.
    Vous avez enfin souligné, avec raison, que la parution de certains textes nécessaires au financement de la décentralisation avait trop tardé. Je vous informe que celui qui permettra aux collectivités mahoraises de percevoir le FCTVA sera publié avant le 31 décembre 2002. Cette ressource d'investissement pourra donc être attribuée à Mayotte dès cette année.
    M. Almont a évoqué l'évolution de la situation des établissements hospitaliers en Martinique qui, comme dans d'autres collectivités, est en effet préoccupante.
    Trois centres ont fait l'objet récemment d'un suivi tout particulier.
    Le premier est le centre hospitalier de Cayenne où, vous le savez, madame Rimane, la situation de trésorerie était particulièrement dégradée. En liaison avec Jean-François Mattei, cet établissement a bénéficié d'un concours de trésorerie de 20 millions d'euros pour faire face à cette situation d'urgence.
    Le deuxième est le centre hospitalier de Mayotte, monsieur Kamardine, qui connaît lui aussi une situation budgétaire difficile. Là encore des décisions viennent d'être prises, de nouveaux crédits étant délégués pour un montant de 2,5 millions d'euros.
    Le troisième est le centre hospitalier de Fort-de-France qui, comme l'a indiqué M. Almont, rencontre de sérieuses difficultés liées notamment à la mise en oeuvre des 35 heures, qui a provoqué de graves perturbations dans l'organisation des services. Mon cabinet et celui de Jean-François Mattei poursuivent actuellement des discussions avec les représentants des professionnels de la santé pour trouver des réponses adaptées.
    En outre, nous devons, outre-mer, régler un double problème d'effectif médical et paramédical. Je constate, par exemple, qu'au centre hospitalier de Pointe-à-Pitre, près d'un quart des emplois de médecins sont aujourd'hui vacants. Il convient donc de rendre ces emplois plus attractifs pour l'ensemble de l'outre-mer. Par ailleurs, pour ce qui concerne le personnel infirmier, compte tenu du nombre important de départs à la retraite programmés et de la durée de la formation, qui est de trois ans, il est nécessaire, dès maintenant, d'augmenter les quotas des écoles d'infirmières.
    Je m'y emploie, là aussi, en étroite collaboration avec mon collègue de la santé.
    Vous avez été nombreux à évoquer les problèmes des transports, qu'ils soient terrestres, maritimes ou aériens et qui sont un élément essentiel de la continuité territoriale.
    Le passeport mobilité et la profonde réforme de l'ANT que nous avons engagée et que je compte mener le plus rapidement possible constituent une première étape. Il ne suffit pas de payer des billets d'avion aux jeunes d'outre-mer pour venir en métropole : encore faut-il savoir les accueillir et les suivre lorsqu'ils sont en métropole ; or, depuis plusieurs années, l'ANT ne remplit malheureusement plus sa mission. Cette première étape sera suivie d'une seconde dans le cadre de la future loi programme, pour améliorer les transports et faire baisser leur coût.
    Nous souhaitons favoriser la concurrence dans le transport aérien et éviter, bien évidemment, les situations de monopole. Aussi étudions-nous plusieurs mesures dont pourraient bénéficier les compagnies aériennes existantes, ainsi qu'une nouvelle compagnie qui serait dédiée à l'outre-mer. Sur ce dernier point, nous favoriserons, dans le cadre de la réglementation communautaire en matière d'ouverture du ciel aux compagnies européennes, les projets qui présenteront les meilleures garanties pour l'outre-mer.
    M. Jacques Brunhes. Et Air Lib ?
    Mme la ministre de l'outre-mer. Vous avez rappelé, monsieur Grignon, le problème spécifique de la desserte maritime de Saint-Pierre-et-Miquelon qui fait l'objet d'une concurrence exacerbée entre deux opérateurs, à mes yeux préjudiciable pour l'archipel. J'attends un rapport du ministère de l'équipement sous huit jours sur les perspectives d'évolution du dispositif d'aide accordé par l'Etat à cette desserte. Je soumettrai ensuite aux élus et aux professionnels les propositions qui y figureront avant de décider des mesures à prendre.
    S'agissant du problème des transports publics aux Antilles et en Guyane, vous savez, monsieur Almont, que lorsque je suis arrivée à la tête de ce ministère, j'ai trouvé une situation bloquée : une majorité des collectivités et les professionnels rejetaient la proposition de création d'une agence des transports. Le Gouvernement a décidé de ne pas donner suite à cette organisation centralisée et n'a pas demandé la ratification de l'ordonnance du 7 mars 2002. Cette ordonnance n'apportait en effet aucun plan de modernisation, mais ne faisait que créer une structure administrative supplémentaire.
    Nous souhaitons que les réformes des transports publics se poursuivent, sous la responsabilité des autorités organisatrices compétentes, car nos concitoyens attendent des transports publics plus efficaces.
    Enfin, à la suite du projet de loi constitutionnel et notamment de son article 73 révisé, le Gouvernement sera attentif aux propositions qui pourraient être faites par les élus pour adapter les modalités d'organisation de ces transports aux réalités locales.
    Vous avez, monsieur Quentin, comme M. Lagarde, souligné l'importance du tourisme qui apporte une contribution économique majeure au développement de l'outre-mer et représente de fortes potentialités en termes d'emplois.
    Toutefois, une usure certaine apparaît, accentuée par un contexte concurrentiel exacerbé et des difficultés de transport aérien, qui se traduisent depuis environ trois ans par une forte baisse de la fréquentation touristique et la fermeture inquiétante de plusieurs complexes hôteliers.
    Face à cette situation alarmante, il importe de bâtir rapidement un plan d'action pour la sauvegarde et la relance du tourisme outre-mer.
    Ma conviction est cependant que les choix en matière de développement touristique sont aussi une affaire locale et qu'il appartient en premier lieu au corps social, aux élus, aux entrepreneurs et aux collectivités d'outre-mer de définir la place que cette activité doit occuper dans leurs économies et les axes selon lesquels elle doit se développer. Je constate dans l'ensemble que ce mouvement de mobilisation générale est lancé sur le terrain.
    En accompagnement de ce mouvement, Léon Bertrand et moi-même avons engagé dès le mois de septembre au sein de nos ministères une réflexion, concertée avec les forces vives locales, et nous réfléchissons actuellement à ce que pourrait être la contribution de l'Etat au plan d'action pour le tourisme outre-mer.
    M. Didier Quentin, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Très bien !
    Mme la ministre de l'outre-mer. Nous serons très prochainement en mesure de présenter des propositions au Gouvernement.
    Ainsi que j'ai déjà eu l'occasion de le dire, il me semble que le levier fiscal doit être plus largement utilisé pour remettre à niveau nos infrastructures touristiques. Je compte proposer des mesures spécifiques pour ce secteur dans le cadre de la loi programme et du nouveau système de défiscalisation qui sera mis en place.
    MM. Beaugendre et Almont, notamment, ont évoqué la situation difficile des producteurs de banane antillais, en situation de grave crise financière.
    Pour tout ministre de l'outre-mer, le problème de la banane est un combat quotidien que nous menons sur tous les fronts, pour défendre le volet interne comme le volet externe de l'OCM banane, avec des succès, il faut l'avouer, souvent mitigés : nous sommes un peu seuls à Bruxelles et, mis à part les Espagnols et les Portugais, nous n'avons guère de soutiens. Mais nous menons une défense acharnée du secteur de production de la banane, essentiel pour le département de Guadeloupe comme pour celui de la Martinique.
    Comme vous le savez, nous avons pris récemment une mesure concernant les aides compensatoires que la BDPME a accepté de préfinancer à 100 %.
    Au-delà de cette mesure, les producteurs de bananes nous ont saisis d'une demande de transformation d'une partie des prêts de l'ODEADOM en subventions. Je peux d'ores et déjà vous indiquer que, sur le principe, le Gouvernement y est favorable. Nous allons étudier très rapidement la situation financière de chaque groupement de producteurs afin de déterminer les conditions de transformation de ces prêts en subventions. Cette mesure devrait aider les groupements à améliorer leur situation financière et à négocier de nouveaux prêts bancaires destinés à assurer la poursuite du préfinancement de l'aide compensatoire, en attendant la traditionnelle remontée des prix durant l'hiver.
    S'agissant par ailleurs de la revalorisation de l'avance sur l'aide compensatoire, la France a demandé, dès octobre dernier, à la Commission européenne, une revalorisation de 5 centimes d'euro par kilo au titre de l'année 2002. Je dois vous dire que nous avons rencontré les pires difficultés pour faire examiner notre demande au comité de gestion de l'OCM banane. Encore la veille, nous n'étions même pas sûrs que la Commission accepte de le réunir. Au prix d'une forte pression, Hervé Gaymard et moi-même avons obtenu cette réunion le 6 novembre dernier et la Commission a fini par donner accord à une augmentation de l'avance au titre de 2002, non de 5 centimes d'euro par kilo, mais seulement de 2,84 centimes d'euro par kilo. Ce résultat, même s'il n'est pas totalement satisfaisant, vaut mieux que rien. Il devrait permettre aux groupements comme et aux planteurs de retrouver un peu d'oxygène.
    Quant à la filière canne-sucre-rhum, évoquée par M. Jalton, elle reste confrontée en Guadeloupe à de sérieuses difficultés.
    La campagne sucrière 2002 a été bonne sur le plan de la quantité, mais malheureusement le taux de richesse saccharine est faible ; aussi la production totale de sucre n'a-t-elle atteint que 52 600 tonnes. La pluviométrie abondante du début de campagne explique ces résultats décevants. L'Etat soutient et continuera à soutenir financièrement les sucreries guadeloupéennes, par les moyens prévus dans les conventions concernant tant Gardel que la sucrerie et rhumerie de Marie-Galante.
    Les discussions avec les administrations sont actuellement en cours sur les conditions dans lesquelles la convention liant l'Etat à Gardel pourrait être adoptée. Par ailleurs, les planteurs semblent souhaiter avoir accès au capital de la sucrerie, comme c'est déjà le cas à Marie-Galante, où ils ont été appuyés dans leur démarche par la région Guadeloupe. Ce genre d'initiative en faveur d'une implication plus grande des acteurs de la filière dans la gestion de l'outil industriel me paraît une voie intéressante, qu'il convient d'accompagner au plan local.
    En ce qui concerne l'ananas en Martinique, monsieur Almont, nous avons décidé, avec Hervé Gaymard, d'envoyer sur place un expert du ministère de l'agriculture afin qu'il fasse le point sur la situation de la SOCOMOR et examine les possibilités d'une reconversion partielle vers la commercialisation locales et l'export d'ananas en frais. Cette mission sera sur place le 12 novembre prochain ; ses conclusions sont attendues pour la mi-décembre.
    Par ailleurs, le système d'aide communautaire qui existait depuis 1976 ayant été transféré dans le nouveau règlement POSEIDOM, les autorités françaises ont présenté cet été un programme quinquennal de soutien à la filière. Celui-ci vient d'être agréé par la Commission à hauteur de 7 millions d'euros pour 2002. La France doit présenter un nouveau programme pour la période 2003-2006, au plus tard au début de l'année prochaine. Il est à souligner que le commissaire Fischeer, dans un récent courrier adressé au ministre de l'agriculture et à moi-même, a réaffirmé son soutien politique à ce projet.
    Enfin, comme vous l'avez rappelé avec beaucoup de pertinence, monsieur Quentin, l'ancrage de nos collectivité d'outre-mer dans l'Europe est essentiel.
    Nous considérons que nos quatre régions ultrapériphériques doivent continuer à bénéficier de l'objectif 1, malgré l'élargissement. Il conviendra également de faire bénéficier Mayotte du statut de région ultrapériphérique.
    Nous sommes en outre engagés dans une action conjointe avec la Commission pour alléger les procédures de mise en place des fonds structurels européens. Nous rencontrons là aussi un réel problème de consommation de crédits. Nos DOM pourront bénéficier d'une certaine souplesse avant même la révision à mi-parcours des DOCUP ; c'est là une mesure importante à cet égard, que le commissaire Barnier nous a annoncée, récemment.
    Vous avez raison de relever, monsieur Quentin, le précieux soutien que Michel Barnier nous a apporté dans cette affaire. Il défend la cause de nos RUP et de nos PTOM avec beaucoup de conviction et d'efficacité.
    M. Marie-Jeanne a évoqué les nombreuses tracasseries administratives qui nuisent à la consommation des crédits et l'utilisation optimale des moyens. Je ne peux que regretter tout comme lui cette situation à laquelle nous devons en effet absolument remédier. C'est pourquoi j'ai souhaité inscrire l'outre-mer dans le vaste mouvement de la réforme de l'Etat et de la modernisation de la gestion publique. L'année 2003 sera marquée par un effort particulier en faveur de la déconcentration des crédits, aussi bien pour le FEDOM que pour la RHI. Ces mesures de déconcentration ont été à juste titre soulignées par M. Lagarde.
    J'ai également mis en place une cellule de contrôle de gestion pour piloter mon budget et faire chaque mois un point sur son exécution afin de ne plus nous retrouver à devoir justifier le besoin en constatant la dépense.
    Je terminerai par un dernier point que je remercie, même s'il n'est plus parmi nous, M. Lagarde d'avoir évoqué. Le fait est sufffisamment rare dans cet hémicycle pour être souligné. Je veux parler de ce million de Français d'outre-mer qui vivent en métropole. On oublie un peu trop souvent qu'un Antillais sur quatre vit dans l'Hexagone. J'approuve pleinement les propositions que M. Lagarde a avancées concernant ces Français d'outre-mer vivant en métropole. Je n'oublie pas que ce million de Français constitue sans doute le lien le plus précieux que nous ayons entre la métropole et l'ensemble de nos collectivité d'outre-mer.
    M. Victorin Lurel. Très juste !
    Mme la ministre de l'outre-mer. L'idée d'une contractualisation avec certaines communes de métropole me paraît tout à fait intéressante et mérite d'être encouragée. En tout cas, je l'appuie fortement.
    Telles sont les premières réponses que je souhaitais vous apporter, mesdames et messieurs les députés, sur ce qui n'est que la toute première étape de la politique ambitieuse que mènera le Gouvernement pour l'outre-mer, dans le strict respect des engagements pris par le Président de la République.
    Au début de l'année prochaine, nous engagerons une deuxième étape qui tracera pour quinze ans l'avenir économique et social de nos collectivités d'outre-mer, une étape importante et décisive avec le projet de loi programme promis par le Président de la République, que je défendrai avec conviction, détermination et passion. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Nous en arrivons aux questions.
    La parole est à M. Christophe Payet.
    M. Christophe Payet. Madame la ministre, ma question concerne les retraites agricoles. J'ai déjà eu l'occasion de la poser à M. le ministre de l'agriculture, mais, faute de réponse, je me retourne vers vous.
    Les épouses et les veuves des chefs d'exploitation de notre île de La Réunion, en majorité des petits planteurs, se retrouvent, à l'heure de la retraite, confrontées à des difficultés de vie considérables, du fait d'un régime d'assurance vieillesse déficient. Après une vie de dur labeur, ces petits agriculteurs se retrouvent très souvent dans le dénuement. Cette situation, vous en conviendrez, n'est pas de nature à rendre notre secteur agricole attratif ni à inciter les jeunes à reprendre l'exploitation de leurs parents.
    C'est pour remédier à cette situation de précarité qu'une loi a été adopté au cours de la précédente législature. Elle crée un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles. Ce dispositif, qui devait entrer en vigueur au 1er janvier 2003, était très attendu à la Réunion.
    Or le Gouvernement semble vouloir repousser le versement des prestations au 1er avril 2003, tandis que les cotisations seraient bien appelées dès le 1er janvier 2003. Les travailleurs agricoles ont déjà trop attendu pour qu'on les fasse attendre encore plus longtemps.
    Dans ce contexte, madame la ministre, ma question est double. Le Gouvernement est-il en mesure d'indiquer un calendrier précis pour l'application de la loi en question ? Considère-t-il le relèvement des retraites agricoles comme une priorité ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre de l'outre-mer. Monsieur le député, vous évoquez un sujet tout à fait important et qui fait effectivement l'objet des actions prioritaires que nous souhaitons mener. Vous m'avez fait part de votre souhait de voir ces textes rapidement publiés afin que le dispositif de la loi du 4 mars 2002 concernant ce régime de retraite complémentaire puisse entrer en vigueur le 1er janvier 2003.
    Je reconnais que ce dossier accuse un certain retard. En effet, l'absence de caisse de mutualité sociale agricole outre-mer rend la mise en place du dispositif de gestion plus compliquée qu'en métropole et retarde l'élaboration des mesures réglementaires.
    Je me suis donc rapprochée de mon collègue Hervé Gaymard pour que nous trouvions dans les meilleurs délais les réponses aux questions encore en suspens, notamment celle relative aux cotisations retraite complémentaire et accidents du travail. Je puis vous rassurer que nous allons tout mettre en oeuvre pour faire déboucher ce dossier dans les meilleurs délais.
    M. le président. La parole est à M. Louis-Joseph Manscour.
    M. Louis-Joseph Manscour. Madame la ministre, ma question porte sur les transports aériens. Vous avez déjà esquissé quelques éléments de réponse. Reste que, avec la disparition annoncée de la compagnie Air Lib, puisque l'on ne sait toujours rien sur l'existence de repreneurs possibles, les transports aériens dans les DOM-TOM sombrent encore plus profondément dans la crise structurelle, avec des conséquences incalculables.
    A l'approche de la haute saison touristique, la crainte des élus et des socioprofessionnels se comprend aisément. Face à une offre limitée, on se retrouve de nouveau avec une situation de quasi-monopole, comme vous l'avez d'ailleurs indiqué, où les compagnies peuvent imposer une politique tarifaire excessivement élevée.
    Les conséquences se font déjà sentir, puisque la petite hôtellerie connaît une crise importante et que plusieurs grosses unités hôtelières, exploitées en grande partie par le groupe Accor, ferment et privilégient des destinations mieux desservies des Caraïbes.
    Au-delà des conséquences, dramatiques pour le tourisme, de la crise des transports aériens dans les DOM-TOM, je souhaiterais rappeler avec force et conviction que le Gouvernement doit garantir aux Domiens, au même titre qu'à tous les Français, l'égalité du droit à la libre circulation dans l'espace français et européen, faute de quoi, madame la ministre, la continuité territoriale que vous appelez de vos voeux et le passeport mobilité que vous défendez resteront lettre morte.
    Il convient aujourd'hui de relever un défi difficile, mais vital pour nos départements, car près de 10 000 emplois sont en jeu. Le Gouvernement doit s'engager à maintenir une concurrence loyale tout en préservant les obligations de service public dans le domaine aérien.
    Madame la ministre, face à cette catastrophe, quelles initiatives le Gouvernement compte-t-il prendre pour assurer les professionnels du tourisme et les populations des DOM-TOM ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'outre-mer.
    Mme la ministre de l'outre-mer. Monsieur le député, je ne reviendrai pas sur ce que j'ai dit sur le tourisme et le transport aérien et sur la nécessité d'assurer la continuité territoriale. Le dossier d'Air Lib, sur lequel vous m'interrogez, est en effet préoccupant.
    Je tiens à souligner que, contrairement à ce qui a pu être dit, le Gouvernement n'a pas laissé tomber Air Lib, puisque, en juillet, pour faire face à la question des créances de la compagnie, il a prolongé de quatre mois le prêt de 30 millions d'euros du Fonds de développement économique et social, et finalisé, parallèlement, le montage juridique d'ingénierie fiscale qui aurait permis à la compagnie de mobiliser 30 millions d'euros supplémentaires. Faute d'investisseurs, M. Corbet n'a pu, à ce jour, réaliser ce groupement d'intérêt économique.
    De son côté, la compagnie, qui s'était engagée à reprendre le paiement de ses charges sociales et aéroportuaires en août, l'a interrompu de nouveau dès septembre, de façon unilatérale. Le niveau des dettes publiques de l'entreprise s'élève désormais à 80 millions d'euros. M. Corbet a confirmé hier qu'Air Lib travaillait avec de nouveaux investisseurs, mais sans en dévoiler l'identité.
    Réuni ce matin même, le Conseil supérieur de l'aviation marchande n'a pu émettre, à ce stade, un avis favorable quant au maintien de la licence d'exploitation d'Air Lib, compte tenu de la situation financière de la compagnie. Il a cependant estimé qu'il convenait de voir si M. Corbet était en mesure de présenter un plan crédible de redressement avant l'expiration de la licence actuelle, auquel cas elle serait prolongée. En tout état de cause, le Gouvernement attend ces échéances pour prendre une décision.
    M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel.
    M. Victorin Lurel. Avant que je ne pose ma question, vous me permettrez, monsieur le président, d'observer que vous nous faites l'amitié de présider cette séance de nuit. Je regrette seulement que nos collègues métropolitains ne soient pas venus en plus grand nombre. (« Mais nous sommes là ! » sur quelques bancs.)
    M. le président. Je vous remercie, cher collègue, de l'avoir remarqué.
    M. Victorin Lurel. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur la santé dans nos régions.
    Vous avez déjà bien voulu évoquer, dans les réponses que vous avez faites, le volet concernant la Guadeloupe, et je vois que vous avez retenu le dossier que nous vous avions présenté le 10 septembre dans votre ministère. Mais les départements français d'Amérique et l'île de la Réunion - puisque j'ai travaillé avec mes collègues Payet et Manscour - sont malades de leur hôpital, qu'il soit public ou privé. A Pointe-à-Pitre, à Cayenne, à Fort-de-France ou à Saint-Denis-de-la-Réunion, la même pénurie et, par endroits, la même misère frappent le service public et les opérateurs privés. Pour permettre à nos compatriotes et à nos visiteurs de bénéficier d'une offre globale de soins et de conditions d'accueil et de soins dignes d'un département français, un véritable « plan Marshall » est nécessaire.
    Le 21 mars 2002, à Kourou, en Guyane, la Conférence des commissions médicales d'établissements attirait votre attention et celle du ministre de la santé sur la grave crise de la démographie médicale. C'est ainsi que, pour la seule Guadeloupe, un lourd déficit continue de frapper depuis trop longtemps certaines spécialités, comme la psychiatrie, l'anesthésie-réanimation, la pédiatrie, la radiologie.
    C'est ainsi que le CHU de Pointe-à-Pitre est, à ce jour, un CHU virtuel. Seuls quatre professeurs d'université et praticiens hospitaliers y sont présents, ce qui empêche d'en faire un pôle médical de référence, de développer les études médicales sur place et de recruter des internes ou des chefs de clinique, faute de professeurs agrégés référents. En vérité, pour les deux départements de Guadeloupe et de Martinique, il faudrait mettre en place un plan pluriannuel de création d'emplois de praticiens hospitalo-universitaires, environ une quarantaine de PU-PH et MCU-PH.
    Dès 2003, il faut impérativement, vous l'avez dit, augmenter la capacité des promotions d'infirmiers et d'infirmières diplômés d'Etat, pour les porter à 100 environ, puisqu'on sait que, à partir de 2004, 70 prendront leur retraite chaque année. C'est ainsi, par ailleurs, que des filières spécialisées d'infirmiers de bloc opératoire, d'anesthésie, et des formations de sages-femmes, de puéricultrices et de kinésithérapeutes doivent être créées d'urgence, et réparties entre la Guadeloupe et la Martinique.
    Afin de faciliter le recrutement de praticiens hospitaliers dans les DOM, des mesures d'attractivité exceptionnelles et spécifiques doivent absolument être prises, et cela dans les meilleurs délais.
    Vous me permettrez de vous rappeler l'ampleur des travaux qui sont également à entreprendre en matière de patrimoine hospitalier, public et privé. Malgré les efforts importants consentis par le gouvernement précédent, il faut encore consacrer au bas mot 245 millions d'euros pour l'hôpital public en Guadeloupe, et 57 millions d'euros pour les cliniques privées. Ces dernières devraient pouvoir bénéficier d'un dispositif de cautionnement, leur permettant de garantir leur emprunt auprès des organismes bancaires, et d'un autre dispositif pour l'allégement de leurs charges sociales et fiscales.
    D'autre part, la télémédecine entre les CHU de Pointe-à-Pitre et de Fort-de-France, et entre les établissements de l'archipel guadeloupéen - Marie-Galante, Saint-Martin, Saint-Barthélemy -, doit pouvoir être encouragée dans au moins deux domaines : l'imagerie médicale, le dossier médical partagé.
    Enfin, et je le dis avec gravité, il faut redonner à Saint-Barthélemy, dans le respect du principe de précaution, la possibilité de voir naître ses enfants sur sa terre : un grave problème « d'identité Saint-Barth » se pose en effet pour cette raison-là.
    Madame la ministre, je vous l'ai dit, il faut un plan Marshall pour la santé dans les départements français d'Amérique et à la Réunion. Dites-nous ce que vous comptez faire, et, si vous le voulez, nous sommes prêts à vous accompagner.
    M. Victor Brial, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour les territoires d'outre-mer et la Nouvelle-Calédonie. Venez à l'UMP !
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre de l'outre-mer. Monsieur le député, vous l'avez dit, j'ai déjà eu l'occasion d'évoquer ces questions au cours de mon intervention. Malheureusement, le diagnostic - le terme est approprié, puisque nous parlons de questions médicales - est bien connu. Je partage votre analyse et j'ai eu l'occasion de dire que nous devions, à la fois, mettre en oeuvre un plan d'urgence pour nos différents centres hospitaliers, et traiter le problème d'emploi pour le personnel médical et paramédical. Je suis en liaison étroite avec Jean-François Mattei et nous comptons prendre ce problème à bras-le-corps pour tâcher d'améliorer la situation dans les DOM et ailleurs, puisque d'autres difficultés tout aussi graves se manifestent à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon.
    Vous avez évoqué la télémédecine. Je souhaite favoriser le développement des nouvelles technologies dans l'ensemble de l'outre-mer. La télémédecine offre, à cet égard, de réelles perspectives, et je compte soutenir fermement ce type de projets.
    Enfin, l'impossibilité de maintenir des structures hospitalières à Saint-Barthélemy et de faire naître les enfants dans cette île est bien connue. Peut-être les nouvelles perspectives offertes par la révision constitutionnelle permettront de faire avancer ce dossier, si la population de Saint-Barthélemy souhaite avoir un vrai statut d'autonomie. En tout cas, en ce qui me concerne, je suis prête à soutenir ce dossier.
    M. le président. La parole est à M. Christophe Payet.
    M. Christophe Payet. Madame la ministre, ma question porte sur les conditions de mise en oeuvre à la Réunion de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure.
    Celle-ci prévoit, pour l'ensemble du territoire, la création de 13 500 postes supplémentaires, 7 000 postes nouveaux dans la gendarmerie et 6 500 dans la police nationale, auxquels il faut ajouter la consolidation d'un peu plus de 2 000 postes existants. Si, dans notre île, les actes de délinquance et de criminalité en général revêtent des formes qui ne sont pas toujours identiques à celles du territoire national, en revanche, le sentiment d'insécurité au sein de la population grandit de la même manière qu'en métropole. Aussi, le renforcement de la lutte contre la criminalité et la délinquance doit-il pouvoir, à la Réunion également, s'appuyer sur les moyens supplémentaires ouverts par la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité intérieure.
    Pouvons-nous espérer compter sur votre soutien, madame la ministre, pour obtenir de M. le ministre de l'intérieur une juste part dans les effectifs nouveaux créés par effet de l'application de cette loi ?
    Enfin, madame la ministre, vous savez que nombreux sont les fonctionnaires de police et de gendarmerie originaires de la Réunion, actuellement en poste en métropole, et qui sont dans l'attente d'une mutation vers leur département d'origine.
    Aussi, je vous remercie de bien vouloir nous indiquer si le Gouvernement envisage une évolution de la réglementation qui favoriserait l'affectation prioritaire, sur les nouveaux postes créés à la Réunion, des fonctionnaires de police et de gendarmerie désireux d'obtenir une mutation dans leur département d'origine.
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre de l'outre-mer. Monsieur le député, sur la seule année 2002, les effectifs se sont accrus à la Réunion de soixante-sept policiers et gendarmes, hors forces mobiles.
    Comme je l'ai indiqué, une nouvelle répartition des zones de compétence de la police et de la gendarmerie est à l'étude. A priori, plus de 138 000 habitants de la Réunion devraient passer dans des zones relevant de la compétence de la police d'Etat. Les effectifs y seront sensiblement renforcés au cours des cinq années à venir, c'est-à-dire durant la période couverte par la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure.
    Je veillerai à ce que les nouveaux recrutements puissent se faire aussi par des concours déconcentrés, afin que soient recrutés des policiers réunionnais destinés à être affectés dans leur département d'origine. Cela a déjà été fait pour la Polynésie française, où trente-cinq policiers recrutés sur place par concours rejoindront leur affectation dès 2003, après leur formation en école de police. J'entends favoriser cette évolution pour la Réunion également.
    M. Christophe Payet. Je vous remercie, madame la ministre.
    M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour une seconde question.
    M. Victorin Lurel. Une seconde question, monsieur le président, mais, celle-là, un peu plus vinaigrée. (Sourires.) Il faut bien faire vivre les clivages idéologiques. Rassurez-vous, madame la ministre, ce n'est pas à vous que l'on s'en prend, mais à une vision des choses. Sans doute avez-vous déjà apporté des éléments de réponse, sur l'emploi, mais nous sommes un peu têtus et revenons à la charge.
    Pendant cinq ans, l'emploi a bien été la priorité du ministère de l'outre-mer. Au-delà des « délits » d'affichage ou d'annonce, que l'on peut parfois dénoncer, et au-delà des artifices de langage, madame la ministre, cette priorité n'est manifestement plus la vôtre,...
    M. Bernard Accoyer. Mais non !
    M. Victorin Lurel. ... et nous le regrettons.
    Votre budget, qui est totalement à contre-courant, conduit à une véritable régression dans ce domaine, en particulier au détriment des jeunes. Les projets initiative jeunes, que votre prédécesseur avait eu l'heureuse idée de lancer, voient leurs crédits diminuer de 50 % - vous essaierez bien tout à l'heure de me faire mentir. Les crédits consacrés à l'allocation de retour à l'activité, destinée aux bénéficiaires des minima sociaux, chutent également de 50 %. Alors que le nombre de Rmistes dans les DOM, tous départements confondus, augmente à peu près de 3 %, qu'il explose à 139 000 allocataires, vous ne trouvez rien de mieux, madame la ministre, que de supprimer la dotation de 31 millions d'euros des ADI.
    Quant aux crédits du FEDER, qui ont augmenté l'an dernier de 25 %, ils diminuent de 25 millions aujourd'hui.
    Rien, donc, de véritablement rassurant n'est dit ni inscrit, dans votre budget, pour l'avenir des emplois-jeunes, si ce n'est l'hypothétique prorogation d'un an pour les contrats arrivés à échéance. C'est déjà ça, mais on aimerait voir leur avenir stabilisé.
    Malgré votre satisfaction - je ne dis pas triomphalisme ou autosatisfaction, par euphémisme -, vous n'arrivez à convaincre personne, en tout cas personne à la gauche de l'hémicycle et certainement pas les jeunes, qui n'ont pas hésité, d'ailleurs, je crois, à l'île de la Réunion, à bloquer les routes.
    Vous bornez donc, madame, l'horizon professionnel des jeunes de l'outre-mer aux contrats-jeunes Fillon, réservés aux 16-22 ans, déqualifiés, et donc disqualifiés pour l'excellence et l'expertise. Etrange posture qui consiste à diaboliser tout ce qu'ont pu faire vos prédécesseurs, et qui s'aveugle à croire de façon un peu dogmatique que seul le marché peut régler les problèmes sociaux, et en particulier ceux de l'emploi.
    Je n'insultais personne, cet après-midi, en remarquant que certains se sont transformés en évangélistes du marché. Nous postulons, nous, qu'il faut marcher sur ses deux jambes. Il faut prioriser l'emploi privé et l'emploi public, et trouver un bon moteur pour faire marcher le tout. Ne péchez pas par là où nous-mêmes avons péché. Ne commettez pas cette erreur. Vous nous annoncez une grande loi de programme pour quinze ans, et nous voulons tous y croire. Espérons donc, madame. Espérons que les gnomes de Bercy auront le même enthousiasme que vous et que nous, et que l'outre-mer n'en pâtira pas.
    Madame la ministre, à la faveur de votre premier budget, que vous soumettez à l'agrément de notre Assemblée, dites-nous ou redites-nous, s'il vous plaît, vos ambitions pour la jeunesse de nos pays.
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre de l'outre-mer. Monsieur Lurel, il faudrait peut-être que vous quittiez le virtuel pour entrer un peu plus dans le réel. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Je crois vous avoir donné suffisamment de chiffres objectifs pour que vos accusations...
    M. Victorin Lurel. Mes inquiétudes !
    Mme la ministre de l'outre-mer. ... consistant à dire que je sacrifie l'emploi, que mon budget baisse, que les emplois-jeunes ou emplois aidés sont en recul, apparaissent sans objet.
    Que vous dire de plus ? Le FEDOM représente 44 % de mon budget. Le dispositif des emplois-jeunes, 15 %. Les emplois aidés augmentent de 6 %. Par rapport aux mesures de la loi d'orientation réalisée, j'augmente de 23 %. Cessez donc de dire que j'organise des baisses et que je tue l'emploi. On compte 80 000 solutions d'emplois dans ce budget 2003 : elles étaient 75 000 en 2002. Avec la meilleure volonté du monde, je n'arrive pas à voir un chiffre qui baisse. Ayons l'honnêteté et l'objectivité de le reconnaître.
    Je ne vous présente pas un budget virtuel avec des augmentations qui sont de simples affichages politiques. Je me fonde sur les réalisations de mes prédécesseurs, j'augmente ce qu'il me paraît possible d'augmenter avec réalisme et pragmatisme.
    Vous parlez de l'avenir des emplois-jeunes, vous voulez stabiliser, consolider, pérenniser. Que cherchez-vous au juste ? Vous souhaitez transformer les emplois-jeunes en emplois-adultes, et ensuite en emplois-vieux, comme me le disait récemment M. Vergès à la Réunion ? Ce n'est pas raisonnable. Si, au bout de cinq ans, les emplois-jeunes ne débouchent pas sur de vrais emplois, à quoi auront-ils servi ?
    M. Bernard Accoyer. Très bien !
    Mme la ministre de l'outre-mer. Mon objectif c'est d'offrir de vraies perspectives à ces jeunes. On ne peut pas continuer à les maintenir dans la précarité.
    M. Bernard Accoyer. Très bien !
    Mme la ministre de l'outre-mer. Lorsque, au bout de cinq ans, ces emplois débouchent sur de vrais emplois durables, j'applaudis. Au moins le dispositif a-t-il fonctionné. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Mais s'il s'agit de les pérenniser dans la précarité, franchement, je dis non. Je veux que la jeunesse puisse avoir de vraies perspectives d'emploi, un véritable avenir et lui offrir de vraies formations qui débouchent sur de vrais emplois.
    M. Victorin Lurel. On vous entendra !
    Mme la ministre de l'outre-mer. Je ne suis pas naïve, monsieur Lurel.
    M. Victorin Lurel. Je n'ai pas dit cela !
    Mme la ministre de l'outre-mer. Je ne pense pas que le seul secteur privé, les entreprises présentes sur l'île pourront absorber les 7 000 jeunes qui arrivent sur le marché de l'emploi chaque année à la Réunion. Je sais très bien qu'il faudra maintenir des emplois aidés, des emplois de solidarité, mais, par pitié, faisons baisser au maximum ce volume extraordinaire qui cantonne cette jeunesse dans un avenir peu réjouissant et que cela provoque un effet de basculement vers de vrais emplois dans les entreprises.
    Certes, il y a des jeunes que nous n'arriverons pas à faire entrer dans le secteur marchand, je l'ai indiqué tout à l'heure, et il est vrai que le monde associatif offre de véritables perspectives d'emplois, particulièrement utiles. Avec François Fillon, nous allons donc travailler à la mise en place d'un dispositif en faveur du monde associatif.
    Quand je découvre, à la Réunion, qu'une association crée subitement 180 emplois-jeunes, j'ai quelques doutes sur la réalité des tâches à accomplir.
    Mme Huguette Bello. Ah, bravo !
    Mme la ministre de l'outre-mer. Il faut aussi que nous fassions le tri entre ce qui est sérieux et qui ne l'est pas. Quantité d'emplois sont d'une utilité extraordinaire, notamment dans le secteur de l'économie solidaire et du monde associatif : ces emplois-là, nous ferons tout non seulement pour les préserver, mais aussi pour les valoriser et pour donner aux jeunes qui les occupent un véritable statut. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Victorin Lurel. Je vous transmettrai les chiffres en ma possession, madame la ministre !
    M. le président. Nous en avons terminé avec les questions.
    J'appelle les crédits inscrits à la ligne : « Outre-mer ».

ÉTAT B
Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires
des services civils (mesures nouvelles)

    « Titre III : moins 462 726 euros ;
    « Titre IV : 605 322 euros. »

ÉTAT C
Répartition des autorisations de programme et des crédits
de paiement applicables aux dépenses
en capital des services civils (mesures nouvelles)
TITRE V. - INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ÉTAT

    « Autorisations de programme : 8 970 000 euros ;
    « Crédits de paiement : 2 602 000 euros. »

TITRE VI. - SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT
ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

    « Autorisations de programme : 406 747 000 euros ;
    « Crédits de paiement : 118 194 000 euros. »
    Personne ne demande la parole ?...
    Je mets aux voix la réduction de crédits du titre III.
    M. Jacques Brunhes. Les députés communistes et républicains votent contre !
    (La réduction des crédits est adoptée.)
    M. le président. Je mets aux voix le titre IV.
    (Le titre IV est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.
    (Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)
    M. le président. Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI.
    (Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI sont adoptés.)
    M. le président. Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de l'outre-mer.
    La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

2

DÉPÔT D'UN RAPPORT
EN APPLICATION D'UNE LOI

    M. le président. J'ai reçu, le 8 novembre 2002, de M. le Premier ministre, en application de l'article 34 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le rapport portant sur l'évaluation globale du statut social de l'ensemble des personnels sous contrat travaillant à l'étranger (recrutés locaux).

3

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Mardi 12 novembre 2002, à neuf heures, première séance publique :
    Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003, n° 230 :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 256).
    Anciens combattants ; article 62 :
    M. Xavier Bertrand, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 10 du rapport n° 256),
    M. Georges Colombier, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tome V de l'avis n° 257) ;
    Fixation de l'ordre du jour.
    A quinze heures, deuxième séance publique :
    Questions au Gouvernement ;
    Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2003, n° 230 :
    Santé, famille et personnes handicapées :
    - Santé et personnes handicapées :
    M. Gérard Bapt, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 38 du rapport n° 256) ;
    - Santé :
    M. Jean-Luc Préel, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tome XI de l'avis n° 257) ;
    - Personnes handicapées :
    M. Jean-François Chossy, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tome XII de l'avis n° 257).
    A vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à vingt-deux heures trente-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
DÉCISIONS SUR DES REQUÊTES EN CONTESTATION
D'OPÉRATIONS ÉLECTORALES
(communication du Conseil Constitutionnel en application
de l'article L.O. 185 du code électoral)
Décision n° 2002-2649/2663/2664 du 7 novembre 2002
(A.N., Alpes-de-Haute-Provence, 1re circonscription)

    Le Conseil constitutionnel,
    Vu 1° la requête n° 2002-2649 présentée par M. Georges Pons, demeurant à Castellane (Alpes-de-Haute-Provence), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 25 juin 2002 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans la 1re circonscription du département des Alpes-de-Haute-Provence pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
    Vu 2° la requête n° 2002-2663 présentée par M. Francis Galizi demeurant à Peyruis (Alpes-de-Haute-Provence), enregistrée comme ci-dessus le 26 juin 2002 et tendant à l'annulation des mêmes opérations électorales ;
    Vu 3° la requête n° 2002-2664 présentée par MM. Francis Galizi et Paul Coulet, demeurant à Peyruis et Digne-les-Bains (Alpes-de-Haute-Provence), enregistrée comme ci-dessus le 26 juin 2002 et tendant à l'annulation des mêmes opérations électorales ;
    Vu le mémoire en défense présenté par M. Jean-Louis Bianco, député, enregistré comme ci-dessus le 12 juillet 2002 ;
    Vu le mémoire en réplique de MM. Galizi et Coulet, enregistré comme ci-dessus le 2 août 2002 ;
    Vu les observations du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, enregistrées comme ci-dessus le 18 juillet 2002 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment son article 38, alinéa 2 ;
    Vu le code électoral ;
    Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et sénateurs ;
    Le rapporteur ayant été entendu ;
    1. Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre la même élection ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
            Sur la requête n° 2002-2649 :
    2. Considérant que la requête de M. Georges Pons ne contient que des allégations sans rapport avec l'élection ; qu'elle ne soulève aucun grief pouvant être utilement invoqué pour contester la régularité de l'élection ; qu'elle ne peut, dès lors, qu'être rejetée ;
            Sur la requête n° 2002-2663 :
    3. Considérant que M. Galizi se borne à faire état d'une diffusion de tracts la veille du second tour de scrutin ; qu'il ne résulte pas de l'instruction, et n'est même pas allégué, que ces documents auraient contenu des propos excédant les limites de la polémique électorale ; que, dans ces conditions, cette requête ne peut qu'être rejetée ;
            Sur la requête n° 2002-2664 :
    4. Considérant que MM. Galizi et Coulet soutiennent que les résultats du second tour de scrutin ont été faussés, d'une part, par la publication le 15 juin 2002, dans le journal La Marseillaise, d'un article mettant gravement en cause M. Galizi, d'autre part, par la diffusion le même jour, dans les principales communes de la circonscription électorale, d'un tract mettant en cause son intégrité ;
    5. Considérant, en premier lieu, que la presse écrite est libre de rendre compte comme elle l'entend des campagnes électorales ; qu'en l'espèce l'article contesté, qui fait état du soutien du candidat du Front national à M. Galizi, n'a apporté aucun élément nouveau dans le débat électoral ; qu'il n'a donc pas altéré la sincérité du scrutin ;
    6. Considérant, en second lieu, que le tract critiqué reproduit un article publié le 15 juin 2002 dans le journal La Marseillaise ; que le contenu de ce texte, qui n'a ni apporté d'élément nouveau dans le débat électoral ni outrepassé les limites de la polémique électorale, n'a pu altérer la sincérité du scrutin ;
    7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête doit être rejetée,
                    Décide :
    Art. 1er. - Les requêtes de MM. Georges Pons, Francis Galizi et Paul Coulet sont rejetées.
    Art. 2. - La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 7 novembre 2002, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.

Décision n° 2002-2659/2762 du 7 novembre 2002
(A.N., Alpes-de-Haute-Provence, 1re circonscription)

    Le Conseil constitutionnel,
    Vu 1° la requête n° 2002-2659 présentée par M. Pierre Argentieri, demeurant à Nice (Alpes-Maritimes), enregistrée le 25 juin 2002 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans la 1re circonscription du département des Alpes-Maritimes pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
    Vu 2° la requête n° 2002-2762 présentée par Mme Marianne Kesteman demeurant à Nice (Alpes-Maritimes), enregistrée le 26 juin 2002 à la préfecture du département des Alpes-Maritimes et tendant à l'annulation des mêmes opérations électorales ;
    Vu les mémoires en défense présentés par M. Jérôme Rivière, député, enregistrés au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 16 juillet 2002 ;
    Vu le mémoire en réplique présenté par M Argentieri, enregistré comme ci-dessus le 14 août 2002 ;
    Vu le mémoire en duplique présenté par M. Rivière, enregistré comme ci-dessus le 5 septembre 2002 ;
    Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, enregistrées comme ci-dessus le 5 août 2002 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
    Vu le code électoral ;
    Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et sénateurs ;
    Le rapporteur ayant été entendu ;
    1. Considérant que les requêtes de M. Argentieri et de Mme Kesteman sont dirigées contre la même élection ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
            Sur le grief tiré de l'inexactitude des listes électorales :
    2. Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 162 du code électoral : « Sous réserve des dispositions de l'article L. 163, nul ne peut être candidat au deuxième tour s'il ne s'est présenté au premier tour et s'il n'a obtenu un nombre de suffrages au moins égal à 12,5 % du nombre des électeurs inscrits » ; qu'en vertu des dispositions de l'article L. 16 du même code, pendant toute l'année qui suit la clôture de la liste électorale ayant fait l'objet d'une révision, l'élection est faite sur la base de cette liste électorale qui présente caractère permanent ; que l'article L. 25 de ce code prévoit que tout électeur inscrit sur la liste électorale peut réclamer devant le tribunal d'instance l'inscription ou la radiation d'un électeur omis ou indûment inscrit ; qu'aux termes de l'article R. 18 du code précité : « Lorsqu'un électeur est décédé, son nom est rayé de la liste électorale aussitôt que l'acte de décès a été dressé. Tout électeur de la commune a le droit d'exiger cette radiation » ;
    3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que les inscriptions sur une liste électorale révisée peuvent être contestées par les électeurs devant le juge d'instance ; qu'il en est de même des omissions de radiation d'électeurs décédés ; qu'il n'appartient pas au juge de l'élection d'en connaître sauf dans la cas où l'omission en cause résulte d'une manoeuvre de nature à porter atteinte à la sincérité du scrutin ;
    4. Considérant qu'à l'issue du premier tour de scrutin qui a eu lieu le 9 juin 2002 dans la première circonscription du département des Alpes-Maritimes, M. Argentieri n'a pu prendre part au second tour de scrutin faute d'avoir recueilli un nombre de suffrage au moins égal à 12,5 % des inscrits ; que, toutefois, les requérants font valoir que, si les listes électorales n'avaient comporté indûment les noms de cent douze électeurs décédés dont la radiation avait été omise, le nombre de suffrages obtenus par ce candidat lui aurait permis de maintenir sa candidature ;
    5. Considérant qu'il est constant que les opérations électorales dans la première circonscription du département des Alpes-Maritimes se sont déroulées sur la base des listes électorales révisées à la date du 28 février 2002 et mises à jour ultérieurement jusqu'au 5 mai 2002 ; qu'en l'espèce, les requérants n'établissent pas que l'absence de radiation, après cette date, d'électeurs décédés procéderait d'une manoeuvre ; que, dans ces conditions, le moyen invoqué doit être écarté ;
            Sur le grief relatif aux bulletins de vote établis au nom de M. Rivière :
    6. Considérant qu'il n'est pas établi que la mention « votre député » portée sur les bulletins de vote établis au nom de M. Rivière, dont le suppléant avait été élu précédemment député dans la même circonscription, ait créé une confusion dans l'esprit des électeurs quant aux fonctions ou à l'identité du candidat ; que le grief doit, par suite, être rejeté ;
            Sur les autres griefs :
    7. Considérant que Mme Kesteman fait observer que les résultats mentionnés sur le procès-verbal des opérations électorales du premier tour de scrutin du bureau 1-4 ont fait l'objet de rectifications, le nombre des suffrages exprimés étant ramené de 413 à 403 et celui des suffrages regardés comme non exprimés étant porté de 4 à 14 ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que ces rectifications étaient destinées à réparer des erreurs matérielles ; que, si les dix enveloppes trouvées vides dans l'urne selon le procès-verbal et comptabilisées avec les suffrages non exprimés n'ont pas été annexées audit procès-verbal, la requérante n'établit pas, alors qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne prescrit l'annexion au procès-verbal des enveloppes réglementaires trouvées vides dans l'urne, que cette omission ait eu pour but ou pour effet de porter atteinte à la sincérité du scrutin ;
    8. Considérant, enfin, que les requérants font état d'anomalies concernant les votes émis par procuration lors du premier tour de scrutin ; que, toutefois, les griefs qu'ils présentent à cet égard sont formulés en termes trop généraux pour permettre d'en apprécier le bien-fondé ; que, par ailleurs, même en retranchant du nombre de voix recueillies respectivement par M. Rivière et par M. Allemand les quatre votes dont les requérant contestent la régularité, cette déduction n'aurait pas pour conséquence de modifier les résultats du premier tour du scrutin ni, par suite, d'affecter les conditions de déroulement du second tour ;
    9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requêtes de M. Argentieri et de Mme Kesteman doivent être rejetées,
                    Décide :
    Art. 1er. - Les requêtes de M. Pierre Argentieri et de Mme Marianne Kesteman sont rejetées.
    Art. 2. - La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 7 novembre 2002, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.

Décision n° 2002-2620/2716 du 7 novembre 2002
(A.N., Corse-du-Sud, 2e circonscription)

    Le Conseil constitutionnel,
    Vu 1° la requête n° 2002-2620 présentée par M. Roland Francisci demeurant à Porticcio (Corse-du-Sud), enregistrée le 19 juin 2002 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans la 2e circonscription du département de la Corse-du-Sud pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
    Vu 2° la requête n° 2002-2716 présentée par M. Jacques Simongiovanni demeurant à Ajaccio (Corse-du-Sud), enregistrée comme ci-dessus le 27 juin 2002 et tendant à l'annulation des mêmes opérations électorales ;
    Vu les mémoires en défense présentés par M. Camille de Rocca-Serra, député, enregistrés comme ci-dessus le 23 juillet 2002 ;
    Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, enregistrées comme ci-dessus le 12 août 2002 ;
    Vu les procès-verbaux des opérations électorales et les documents annexés ;
    Vu la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, en date du 7 octobre 2002, approuvant le compte de campagne de M. de Rocca-Serra ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
    Vu le code électoral ;
    Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
    Le rapporteur ayant été entendu ;
    1. Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre la même élection ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
            Sur le compte de campagne de M. de Rocca-Serra :
    2. Considérant que le compte de campagne de M. de Rocca-Serra a été arrêté en dépenses par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques à un montant de à 48 431 euros ; que ce montant ne dépasse pas le plafond des dépenses électorales tel qu'il résulte de l'article L. 52-12 du code électoral ; que, si les requérants allèguent que certaines dépenses auraient été omises, ils n'apportent pas d'éléments établissant une telle omission qui n'a pas été relevée par la Commission et qui ne résulte pas de l'instruction ; que, dès lors, le grief tiré de la violation de l'article L. 52-12 doit être écarté ;
            Sur les conclusions tendant à l'annulation des opérations électorales :
    3. Considérant qu'à l'issue du premier tour de scrutin, aucun des candidats les mieux placés n'a obtenu un nombre de suffrages au moins égal à 12,5 % des inscrits ; que, conformément aux dispositions du cinquième alinéa de l'article L. 162 du code électoral, seuls les deux candidats ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages, M. de Rocca-Serra et M. Robert Feliciaggi, ont pu maintenir leurs candidatures au second tour ; qu'à l'appui de leurs requêtes tendant à l'annulation de l'élection de M. de Rocca-Serra, M. Francisci, candidat arrivé en troisième position au premier tour, et M. Simongiovanni, son remplaçant, soutiennent que des irrégularités ont altéré la sincérité du premier tour et, par voie de conséquence, ont affecté les conditions de déroulement du second tour ;
            En ce qui concerne le grief tiré de l'inexactitude des listes électorales de la commune de Porto-Vecchio :
    4. Considérant que les requérants se bornent à invoquer le maintien sur les listes électorales de la commune de Porto-Vecchio de personnes qui n'auraient plus la qualité d'électeurs de cette commune, sans d'ailleurs indiquer le nombre et les noms de ces personnes ; que, dès lors qu'aucune manoeuvre de nature à porter atteinte à la sincérité du scrutin n'est établie, il n'appartient pas au juge de l'élection de statuer sur la régularité des inscriptions sur les listes électorales ;
            En ce qui concerne les griefs tirés d'irrégularités commises pendant la campagne électorale :
    5. Considérant que le grief tiré de la diffusion, le 9 juin 2002, de messages en faveur de la candidature de M. Feliciaggi au moyen d'un haut-parleur ainsi que ceux tirés de l'affichage et d'une propagande mensongère ne sont pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
    6. Considérant que la diffusion d'un courrier du maire de la commune de Bonifacio, conseiller général, adressé à titre personnel aux électeurs pour leur faire connaître son soutien à M. de Rocca-Serra, ne présente pas le caractère d'une manoeuvre de nature à altérer les résultats du scrutin ;
    7. Considérant, en revanche, que l'envoi en 500 exemplaires, par le maire de la commune de Figari, d'une lettre portant l'en-tête et le cachet de la mairie, en faveur de la candidature de M. de Rocca-Serra, a pu être de nature, eu égard aux conditions dans lesquelles ce document a été diffusé et à son contenu, à affecter les résultats du premier tour dans cette commune ;
            En ce qui concerne les griefs relatifs au déroulement du premier tour de scrutin :
    8. Considérant que, si, à un moment donné, les bulletins de vote de M. Francisci ont été recouverts par ceux d'un autre candidat dans le bureau de vote de Bastelica, il ne résulte pas de l'instruction que cette situation, qui n'a été constatée que par un seul électeur, ait été de nature à altérer la sincérité du scrutin ;
    9. Considérant que la liste d'émargement du bureau de vote de la commune de Guarguale comporte, inscrits à l'encre rouge, les noms des mandataires d'électeurs ayant donné procuration de vote ; qu'ainsi le grief tiré d'une méconnaissance des prescriptions de l'article R. 76 du code électoral manque en fait ;
    10. Considérant que les allégations des requérants relatives à l'irrégularité du vote par procuration d'électeurs non désignés de Porto-Vecchio ne sont pas assorties des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
    11. Considérant que cinq listes d'émargement comportent, chacune, une trace d'effacement recouverte par une signature ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ces corrections ponctuelles, qui n'ont pas donné lieu à observations sur les procès-verbaux, constituent des irrégularités entachant la validité des cinq votes ou qu'elles révèlent l'organisation d'une fraude ;
    12. Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 62-1 du code électoral : « Le vote de chaque électeur est constaté par sa signature apposée à l'encre en face de son nom sur la liste d'émargement » ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 64 du même code : « Lorsqu'un électeur se trouve dans l'impossibilité de signer, l'émargement prévu par le troisième alinéa de l'article L. 62-1 est apposé par un électeur de son choix qui fait suivre sa signature de la mention suivante : l'électeur ne peut signer lui-même » ; qu'il résulte de ces dispositions, destinées à assurer la sincérité des opérations électorales, que seule la signature personnelle, à l'encre, d'un électeur est de nature à apporter la preuve de sa participation au scrutin, sauf cas d'impossibilité dûment reportée sur la liste d'émargement ; qu'il suit de là que seize votes, qui ont été constatés par de simples croix, traits ou ratures, sur les listes d'émargement des bureaux de vote de Tolla, Pianottoli-Caldarello, Campo-Moro, Sartène (bureau n° 2), Figari, et Porto-Vecchio (bureaux n°s 1, 2, 3, 4 et 5), ne peuvent être tenus pour régulièrement exprimés ;
    13. Considérant que doivent être également tenus pour irrégulièrement exprimés huit suffrages dès lors qu'ils ont été constatés, sur les listes d'émargement des bureaux de vote de Porto-Vecchio (bureau n° 3), Serra di Scopamene, Cargiacca, Mela di Tallano et Conca, par une signature identique figurant en face des noms de deux électeurs différents sans que cette identité puisse être expliquée par le recours au vote par procuration ;
    14. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les signatures apposées par dix-neuf électeurs lors du premier tour de scrutin sur les listes d'émargement des bureaux de vote d'Aullène, Porto-Vecchio (bureaux n°s 2, 3, 4), Ajaccio (bureaux n°s 36 et 38) et Olivèse différaient de celles apposées lors du second tour sans que cette différence puisse être expliquée par le recours au vote par procuration ; que ces suffrages ne peuvent être tenus pour régulièrement exprimés ;
    15. Considérant que la circonstance que les résultats dans les communes de Foce Bilzeze et de Porto-Vecchio n'ont été communiqués à la préfecture qu'en fin de soirée, le 9 juin 2002, ne permet pas d'établir l'existence d'une fraude ;
    16. Considérant que, si la liste d'émargement du bureau de vote de la commune de Casalabriva ne comporte pas les signatures des membres du bureau de vote ni l'indication du nombre de votants, en méconnaissance des prescriptions de l'article R. 62 du code électoral, il résulte de l'instruction que le nombre de 103 votants porté sur le procès-verbal, qui est signé par les membres du bureau de vote, correspond au nombre d'électeurs ayant signé la liste d'émargement ; qu'ainsi, il n'est pas établi que les négligences commises dans la tenue de cette liste par les membres du bureau de vote ont entraîné un décompte inexact des suffrages ;
    17. Considérant que le grief tiré d'une méconnaissance des prescriptions de l'article L. 65 du code électoral, dans plusieurs communes non désignées, n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
    18. Considérant que, si les procès-verbaux de quelques bureaux de vote ne mentionnent pas le nombre de votants d'après la liste d'émargement, il n'est pas établi, en l'absence de discordance signalée entre, d'une part, le nombre d'enveloppes et de bulletins sans enveloppe trouvés dans l'urne et, d'autre part, le nombre de signatures figurant sur la liste d'émargement, que les omissions relevées par les requérants aient pu favoriser des erreurs ou des fraudes ;
            En ce qui concerne les conséquences de l'ensemble des irrégularités relevées ci-dessus :
    19. Considérant que, compte tenu de la répartition des suffrages au premier tour du scrutin, même après déduction hypothétique des suffrages irrégulièrement exprimés lors du déroulement des opérations de vote et de ceux de la commune de Figari, l'ensemble de ces irrégularités ne peuvent être regardées comme ayant exercé une influence déterminante sur le résultat du premier tour de scrutin et, par voie de conséquence, sur l'issue de l'élection ;
    20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requêtes de MM. Francisci et Simongiovanni doivent être rejetées,
                    Décide :
    Art. 1er. - Les requêtes de MM. Roland Francisci et Jacques Simongiovanni sont rejetées.
    Art. 2. - La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 7 novembre 2002, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.

Décision n° 2640 du 7 novembre 2002
(AN, Val-d'Oise, 9e circonscription)

    Le Conseil constitutionnel,
    Vu la requête présentée par Mme Elizabeth Hermanville, demeurant à Goussainville (Val-d'Oise), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 24 juin 2002 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans la 9e circonscription du département du Val-d'Oise pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
    Vu le mémoire en défense présenté par M. Jean-Pierre Blazy, député, enregistré comme ci-dessus le 7 juillet 2002 ;
    Vu les observations du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, enregistrées comme ci-dessus le 8 juillet 2002 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
    Vu le code électoral ;
    Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et sénateurs ;
    Le rapporteur ayant été entendu,
    1. Considérant que Mme Hermanville, qui était candidate de l'« Union pour la majorité présidentielle » à l'élection législative dans la 9e circonscription du département du Val-d'Oise, soutient que la distribution de deux tracts, le vendredi 14 juin 2002, a altéré la sincérité du scrutin en faisant croire aux électeurs qu'elle ne disposait ni du soutien du candidat local du « Pôle républicain », qui avait obtenu 526 voix au premier tour de scrutin, ni de celui du « Rassemblement pour la République » ;
    2. Considérant que le premier tract, intitulé sur une face « Appel de M. Jean-Pierre Blazy aux Goussainvillois » et sur l'autre face « Faux et usage de faux », émanait du candidat du Parti socialiste, et avait pour objet, d'une part, de déclarer que le document sur lequel se fondait Mme Hermanville pour revendiquer le soutien du candidat local du Pôle républicain était un « faux grossier » et, d'autre part, de reproduire la lettre du président de ce parti politique apportant son soutien à M. Blazy ; que le second tract, émanant d'un membre du Rassemblement pour la République, évoquait à l'aide d'une photographie les condamnations pénales de la candidate et sa prochaine mise en examen ;
    3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, malgré leur tonalité particulièrement polémique, le contenu de ces deux tracts faisait état de faits dont la presse tant locale que nationale s'était largement fait l'écho et n'introduisaient dans le débat électoral aucun élément nouveau ou inexact ; que Mme Hermanville avait la possibilité d'y répliquer préalablement au second tour de scrutin ; que, dans ces conditions, et compte tenu de l'important écart de voix entre les deux candidats du second tour, la diffusion de ces tracts ne peut être regardée comme ayant altéré les résultats du scrutin ;
    4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de Mme Hermanville doit être rejetée,
                    Décide :
    Art. 1er. - La requête de Mme Hermanville est rejetée.
    Art. 2. - La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 7 novembre 2002, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.

Décision n° 2002-2638/2639 du 7 novembre 2002
(AN, Polynésie française, 1re et 2e circonscriptions)

    Le Conseil constitutionnel,
    Vu la requête présentée par MM. Yves Conroy et Joinville Pomare demeurant respectivement à Papara et à Pirae (Polynésie française), enregistrée au haut-commissariat de la République en Polynésie française le 13 juin 2002 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 1er juin 2002 dans les 1re et 2e circonscriptions de la Polynésie française pour la désignation de deux députés à l'Assemblée nationale ;
    Vu le mémoire en défense présenté par M. Michel Buillard, député, enregistré au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 3 juillet 2002 ;
    Vu le mémoire en défense présenté par Mme Béatrice Vernaudon, députée, enregistré comme ci-dessus le 3 juillet 2002 ;
    Vu les observations du ministre de l'outre-mer, enregistrées comme ci-dessus le 18 juillet 2002 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
    Vu le code électoral ;
    Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et sénateurs ;
    Le rapporteur ayant été entendu,
            Sur les fins de non-recevoir :
    
1. Considérant que la requête susvisée doit être regardée comme tendant, d'une part, à l'annulation, à la demande de M. Yves Conroy, qui a fait acte de candidature dans la 1re circonscription du territoire de la Polynésie française, des opérations électorales de cette circonscription et, d'autre part, à l'annulation des élections de la 2e circonscription de ce territoire, à la demande de M. Joinville Pomare, électeur inscrit dans cette dernière circonscription ;
            Sur le fond :
    2. Considérant que les affiches et les professions de foi des candidats élus dans les deux circonscriptions de la Polynésie française étaient les mêmes et comportaient leurs photographies ainsi que celles de leurs suppléants ; que, toutefois, dans les circonstances de l'espèce, ces faits n'ont pas constitué une manoeuvre de nature à induire en erreur les électeurs sur les candidats briguant respectivement leurs suffrages dans chacune des deux circonscriptions ;
    3. Considérant que, à la suite de l'accident survenu, le 23 mai 2002, à un avion se dirigeant vers l'archipel des Tuamotu, quatre membres du parti politique « Fetia Api » ont été portés disparus ; que, trois jours plus tard, a été organisé un « rassemblement oecuménique », au cours duquel le haut-commissaire de la République a lu un message du Président de la République aux familles des disparus ; que le président du gouvernement territorial a pris la parole à cette occasion ; que cette réunion avait pour but d'associer, sans distinction partisane, la population de Polynésie française à un hommage aux disparus ; que les déclarations qui ont été faites dans ce cadre n'ont revêtu aucun caractère électoral ; que, dans ces conditions, le grief selon lequel ce rassemblement aurait eu une influence déterminante sur les résultats du scrutin ne peut qu'être écarté ;
    4. Considérant que, si les requérants font état de subventions que le président du gouvernement territorial, président du parti politique « Tahoeraa Huiraatira », a accordées aux communes dirigées par des maires appartenant à ce parti politique, ils ne contestent pas les observations des défendeurs selon lesquelles l'octroi de ces subventions a concerné toutes les communes ayant déposé un dossier de demande de subvention ;
    5. Considérant, enfin, que les manifestations de militants devant certains bureaux de vote le jour du scrutin, ainsi que la présence de banderoles, d'affiches et de drapeaux à l'entrée d'un bureau de vote, pour regrettables qu'elles soient, n'ont pu altérer le résultat du scrutin, eu égard à l'importante proportion de voix recueillie, dans chaque circonscription, par le candidat élu ;
    6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requêtes de MM. Conroy et Pomare doivent être rejetées,
                    Décide :
    Art. 1er. - Les requêtes de MM. Yves Conroy et Joinville Pomare sont rejetées.
    Art. 2. - La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 7 novembre 2002, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.