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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU VENDREDI 6 DÉCEMBRE 2002

COMPTE RENDU INTÉGRAL
3e séance du jeudi 5 décembre 2002


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC

1.  Négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi. - Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Article 1er (suite) «...»

Amendement n° 79 de Mme Mignon : MM. Jean-Yves Le Bouillonnec, Dominique Dord, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. - Rejet.
Amendement n° 80 de M. Le Garrec : M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
Amendements n°s 82 et 83 de M. Le Garrec, 84 de M. Claeys, 85 et 86 de Mme Génisson, 87, 88 et 89 de M. Le Garrec, 90 de M. Masse, 91 de M. Le Garrec, 92 de M. Masse et 93, 94 et 95 de M. Loncle. - Rejet des amendements n° 80 et n°s 82 à 95.
Adoption de l'article 1er modifié.

Article 2 «...»

M. Gaëtan Gorce.
Amendements de suppression n°s 5 de M. Gremetz et 107 de M. Gorce : MM. Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre, Mme Jacqueline Fraysse. - Rejet.
Amendements identiques n°s 6 de M. Gremetz et 108 rectifié de M. Gorce : MM. Maxime Gremetz, Jean-Yves Le Bouillonnec, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
M. Maxime Gremetz.

Suspension et reprise de la séance «...»

Amendement n° 109 de M. Gorce : MM. Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements n°s 111 et 112 : MM. Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre. - Rejets.
Amendement n° 110 de M. Gorce : MM. le président, Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements n°s 152 à 162 de M. Gorce. - Rejets.
Amendement n° 163 de M. Gorce : MM. Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements n° 164 rectifié à n° 168 rectifié de M. Gorce. - Rejets.
Amendement n° 169 de M. Gorce : MM. Jean-Yves Le Bouillonnec, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements n°s 170 à 176 et n°s 113 à 150 de M. Gorce. - Rejets.
Amendement n° 151 de M. Gorce : MM. Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
M. le président.
Amendement n° 55 de MM. Fourgous : M. Jean-Michel Fourgous, le rapporteur, le ministre, Gaëtan Gorce. - Retrait.
Amendement n° 7 de M. Gremetz : Mme Jacqueline Fraysse, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
M. Maxime Gremetz.
Adoption, par scrutin, de l'article 2.
MM. Maxime Gremetz, le président.

Suspension et reprise de la séance «...»
Article 3 «...»

MM. Maxime Gremetz, Gaëtan Gorce.
Amendement de suppression n° 8 de M. Gremetz : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, le ministre. - Rejet par scrutin.
Amendement n° 56 de M. Fourgous : MM. Jean-Michel Fourgous, le rapporteur, le ministre, Jean-Yves Le Bouillonnec. - Retrait.
Amendement n° 177 de M. Gorce : MM. Jean-Yves Le Bouillonnec, le rapporteur, le ministre. - Rejet par scrutin.
Adoption, par scrutin, de l'article 3.

Après l'article 3 «...»

Amendements n°s 52 de M. Fourgous et 38, deuxième rectification, de Mme Bourragué : M. Jean-Michel Fourgous. - Retrait de l'amendement n° 52.
Mme Chantal Bourragué. - Retrait de l'amendement n° 38, deuxième rectification.
Amendements n°s 106 de M. Novelli et 39 de M. Morange : M. Jean-Michel Fourgous, Pierre Morange, le rapporteur, le ministre, Maxime Gremetz, Mme Catherine Génisson, M. Patrick Bloche. - Retrait de l'amendement n° 106 ; adoption, par scrutin, de l'amendement n° 39.
Amendement n° 195 de M. Morange : MM. Pierre Morange, le rapporteur, le ministre, Mme Catherine Génisson, M. Patrick Bloche. - Adoption, par scrutin, de l'amendement n° 195 rectifié.
Amendement n° 11 de M. Gremetz : Mme Jacqueline Fraysse, MM. le rapporteur, le ministre, Maxime Gremetz. - Rejet.
Amendement n° 40 de Mme Bourragué, avec le sous-amendement n° 197 de M. Novelli, et amendement identique n° 57 de M. Fourgous : Mme Chantal Bourragué, MM. Jean-Michel Fourgous, le rapporteur, le ministre, Gaëtan Gorce. - Retrait de l'amendement n° 40.
M. Jean-Michel Fourgous. - Retrait de l'amendement n° 57.
Amendement n° 196 rectifié du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur, Maxime Gremetz, Gaëtan Gorce. - Adoption.
Amendement n° 12 de M. Gremetz : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Titre «...»

Amendement n° 41 de M. Dubernard : MM. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles ; Jean-Yves Le Bouillonnec, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Le titre du projet de loi est ainsi rédigé.
Renvoi des explications de vote et du vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi à une prochaine séance.
2.  Dépôt d'un rapport «...».
3.  Dépôt d'un rapport d'information «...».
4.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à vingt et une heures.)

1

NÉGOCIATION COLLECTIVE
SUR LES RESTRUCTURATIONS
AYANT DES INCIDENCES SUR L'EMPLOI

Suite de la discussion,
après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi (n°s 375, 386).

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée à l'amendement n° 79 à l'article 1er.

Article 1er (suite)

    M. le président. Je rappelle les termes de l'article 1er :
    « Art. 1er. - I. - L'application des dispositions du code de commerce et du code du travail dans leur rédaction issue des articles 97, 98, 99, 101, 102, 104, 106, 109 et 116 de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale est suspendue pour une période maximale de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi, sous réserve des dispositions prévues au II ci-dessous.
    « II. - La suspension des dispositions mentionnées au I est maintenue pour une durée d'un an à compter du dépôt d'un projet de loi intervenant au cours de cette période et définissant, au vu des résultats de la négociation interprofessionnelle engagée entre les organisations professionnelles et syndicales représentatives au niveau national, les procédures relatives à la prévention des licenciements économiques, aux règles d'information et de consultation des représentants du personnel et aux règles relatives au plan de sauvegarde de l'emploi. La mention de la date du dépôt du projet de loi maintenant la suspension fait l'objet d'un avis publié au Journal officiel de la République française.
    « III. - Pendant les périodes de suspension prévues aux I et II ci-dessus, les dispositions des articles L. 321-1-1, L. 321-3, L. 321-7, L. 432-1, L. 432-1 bis, L. 434-6, L. 435-3 et L. 439-2 du code du travail antérieures à leur modification par la loi du 17 janvier 2002 sont rétablies. »
    L'amendement n° 79, présenté par Mme Mignon, M. Le Garrec, M. Gorce et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours appliquées au projet de licenciement collectif de l'entreprise AZF à la date de promulgation de la présente loi. »
    La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je dirai un mot sur l'amendement n° 79 et je considérerai les suivants comme défendus.
    Nous demandons que les règles de procédure de licenciement pour motif économique contenues dans les dispositions en vigueur du code du travail continuent de s'appliquer, notamment, pour les 450 licenciements prévus dans l'entreprise AZF de Toulouse.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour donner l'avis de la commission sur cet amendement.
    M. Dominique Dord, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. La commission comprend bien l'intention des auteurs de cet amendement mais elle voit mal comment un article de loi pourrait faire bénéficier une entreprise d'une procédure transitoire. Elle a donc repoussé cet amendement tout comme ceux de la série qui suit, car ils sont de même nature.
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, pour donner l'avis du Gouvernement sur cet amendement.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le président, je donnerai également l'avis du Gouvernement sur cet amendement et sur les suivants. J'informe le groupe socialiste qu'une disposition similaire, visant le même objectif, mais de portée générale, est déjà incluse dans l'article 3 du présent projet de loi, qui est ainsi conçu : « Les dispositions du code du travail mentionnées au I de l'article 1er restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours à la date de promulgation de la présente loi, sauf accord d'entreprise passé dans les conditions prévues à l'article 2. » AZF, comme toutes les autres entreprises citées dans vos amendements, se verra appliquer les dispositions susvisées.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 79.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Le Garrec, M. Gorce et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 80, ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours appliquées au projet de licenciement collectif de l'entreprise Mine d'Or Salsigne à la date de promulgation de la présente loi. »
    La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le président, je vous propose de considérer cet amendement ainsi que les suivants, n°s 82 à 95, comme défendus.
    M. le président. Les amendements n°s 80 et 82 à 95 peuvent effectivement faire l'objet d'une présentation commune.
    L'amendement n° 82, présenté par MM. Le Garrec, Gorce, et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours appliquées au projet de licenciement collectif de l'entreprise Aulibet à la date de promulgation de la présente loi. »
    L'amendement n° 83, présenté par MM. Le Garrec, Gorce, Mesguida et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours appliquées au projet de licenciement collectif de l'entreprise BEC à la date de promulgation de la présente loi. »
    L'amendement n° 84, présenté par MM. Claeys, Le Garrec, Gorce et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours appliquées au projet de licenciement collectif de l'entreprise Futuroscope à la date de promulgation de la présente loi. »
    Les amendements n°s 85 et 86 sont présentés par Mme Génisson, M. Le Garrec, M. Gorce et les membres du groupe socialiste.
    L'amendement n° 85 est ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours appliquées au projet de licenciement collectif de l'entreprise Sollac à la date de promulgation de la présente loi. »
    L'amendement n° 86 est ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours appliquées au projet de licenciement collectif de l'entreprise Euromell à la date de promulgation de la présente loi. »
    L'amendement n° 87, présenté par MM. Le Garrec, Gorce, Terrasse et les membre du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours appliquées au projet de licenciement collectif de l'entreprise Mecelec à la date de promulgation de la présente loi. »
    Les amendements n°s 88 et 89 sont présentés par MM. Le Garrec, Gorce, Valls et les membres du groupe socialiste.
    L'amendement n° 88 est ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours appliquées au projet de licenciement collectif de l'entreprise LU-Danone à la date de promulgation de la présente loi. »
    L'amendement n° 89 est ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours appliquées au projet de licenciement collectif de l'entreprise Hélio à la date de promulgation de la présente loi. »
    L'amendement n° 90, présenté par M. Masse et M. Le Garrec, est ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours appliquées au projet de licenciement collectif de l'entreprise Rivoire et Carret Lustucru à la date de promulgation de la présente loi. »
    L'amendement n° 91, présenté par MM. Gorce, Valls et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours appliquées au projet de licenciement collectif de l'entreprise Géodis à la date de promulgation de la présente loi. »
    L'amendement n° 92, présenté par MM. Masse, Le Garrec, Gorce et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus concernant les procédures d'information et de consultation du comité d'entreprise sur tout projet de restructuration et de compression des effectifs restent applicables au projet de restructuration de l'entreprise SNCM à la date de promulgation de la présente loi. »
    Les amendements n°s 93, 94 et 95 sont présentés par MM. Loncle, Le Garrec, Gorce et les membres du groupe socialiste.
    L'amendement n° 93 est ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours appliquées au projet de licenciement collectif de l'entreprise Alizol à la date de promulgation de la présente loi. »
    L'amendement n° 94, est ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours appliquées au projet de licenciement collectif de l'entreprise Philips CMS à la date de promulgation de la présente loi. »
    L'amendement n° 95, est ainsi rédigé :
    « Après le III de l'article 1er, insérer le paragraphe suivant :
    « IV. - Les dispositions de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale visées au paragraphe I ci-dessus restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours appliquées au projet de licenciement collectif de l'entreprise Labelle à la date de promulgation de la présente loi. »
    La commission et le Gouvernement ont déjà donné leur avis sur tous ces amendements.
    Je vais successivement mettre aux voix les amendements n° 80 et n°s 82 à 95.
    (Ces amendements, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 1er, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 1er

    M. le président. Les amendements n°s 188, 54, 96 et 97, tendant à insérer des articles additionnels après l'article 1er, ne sont pas défendus.

Article 2

    M. le président. « Art. 2. - I. - A titre expérimental et, le cas échéant, par dérogation aux dispositions des livres III et IV du code du travail, des accords d'entreprise peuvent fixer les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise lorsque l'employeur projette de prononcer le licenciement pour motif économique d'au moins dix salariés sur une même période de trente jours. Ces accords peuvent fixer les conditions dans lesquelles le comité d'entreprise est réuni, a la faculté de formuler des propositions alternatives au projet économique à l'origine d'une restructuration ayant des incidences sur l'emploi et peut obtenir une réponse motivée de l'employeur à ses propositions.
    « Ces accords peuvent aussi déterminer les conditions dans lesquelles l'établissement du plan de sauvegarde de l'emploi prévu à l'article L. 321-4-1 du code du travail fait l'objet d'un accord.
    « II. - Les accords prévus au I ne peuvent déroger aux dispositions des onze premiers alinéas de l'article L. 321-4 du code du travail et à celles de l'article L. 321-9 du même code.
    « III. - La validité des accords prévus au I est subordonnée à une consultation du comité d'entreprise et à leur signature par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors du premier tour des dernières élections du comité d'entreprise.
    « IV. - Les accords prévus au I peuvent être conclus dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi et pour une durée déterminée n'excédant pas deux ans. Avant l'expiration du délai de dix-huit mois, le Gouvernement présentera au Parlement un rapport sur l'application du présent article après avoir recueilli l'avis motivé de la Commission nationale de la négociation collective. »
    La parole est à M. Gaëtan Gorce, inscrit sur l'article.
    M. Gaëtan Gorce. Si nous condamnons l'article 1er sur le fond, dans la mesure où il fragilise les protections juridiques dont peuvent bénéficier les salariés - comme nous avons essayé de le montrer en défendant nos amendements relatifs aux plans sociaux -, nous estimons que l'article 2 est contestable sur la forme, et qu'il a des conséquences importantes. Son objet, je le rappelle, est de permettre une négociation dérogatoire et expérimentale encadrée par des garanties majoritaires.
    Je souligne tout d'abord que le champ ouvert aux dérogations est extrêmement flou. Il est en effet indiqué, au tout début de l'article, qu'il s'agit des dispositions des livres III et IV du code du travail. Je rappelle, mais j'y reviendrai dans le détail, que le livre III porte sur le placement, le fonds national de l'emploi et le conseil supérieur de l'égalité professionnelle, et que le livre IV traite essentiellement des syndicats et des comités d'entreprise. Ce sont donc 190 articles du code du travail qui sont concernés.
    Le principe qui s'applique normalement, en droit du travail, pourrait réjouir M. Fourgous, car il y verrait un élément de simplification. Dommage qu'il ne soit pas présent pour entendre ma démonstration.
    M. Jean-Michel Fourgous. Rassurez-vous : je suis revenu !
    M. Gaëtan Gorce. Ah ! Vous voilà ! J'étais inquiet pour votre santé, je craignais que des mesures n'aient été prises pour limiter votre droit d'expression...
    M. le président. M. Fourgous est présent et il n'est pas nécessaire de l'interpeller.
    M. Gaëtan Gorce. Bien, monsieur le président.
    En principe, lorsque le législateur délègue une partie de ses compétences en autorisant des dérogations à des dispositions législatives, il énumère de manière exhaustive les dispositions concernées. Il a toujours procédé ainsi, et, récemment encore, dans une loi de 1996.
    Or, dans votre texte, une fois évoqués les livres III et IV dans leur globalité, vous faites simplement référence aux « modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise » pour les licenciements « d'au moins dix salariés » dans les entreprises de plus de cinquante salariés « même sur une une période de trente jours », à l'exception de l'article L. 321-4, relatif au contenu de l'information économique communiquée au comité d'entreprise, et de l'article L. 321-9, relatif aux procédures de liquidation.
    Faut-il en conclure que tous les autres articles du code du travail qui traitent de l'information et de la consultation des salariés sont concernés ? Je vais les citer rapidement. Dans le livre III, il s'agit de l'article L. 321-1-1, relatif à la consultation sur les critères retenus dans l'ordre de licenciement, du 2° de l'article L. 321-2-2, qui pose le principe de la consultation du comité d'entreprise, de l'article L. 321-3, qui prévoit deux réunions espacées d'un certain délai, de l'article L. 321-4-1, qui décrit le contenu du plan social et ses effets éventuels sur l'intervention de l'administration, et de l'article L. 321-7-1, qui porte sur le recours à l'expert comptable. Dans le livre IV, au moins trois articles sont concernés : les articles L. 431-5, L. 431-5-1 et L. 432-1, relatifs respectivement au principe de la consultation, à l'annonce publique - il en a été question tout à l'heure - et à la saisine du comité d'entreprise en temps utile.
    Ce flou juridique suscite des questions qui appellent des explications.
    Est-il possible, par exemple, de déroger au principe même de la consultation ? S'agissant du livre IV, déroger au deuxième alinéa de l'article L. 432-1 - qui pose le principe de la consultation du comité d'entreprise sur le volet économique du projet de restructuration - reviendrait à déroger au principe même de la consultation et remettrait du même coup en cause le droit des salariés à participer à la détermination de leurs conditions de travail et à la gestion de l'entreprise, garanti par le préambule de la constitution de 1946. S'agissant du livre III, sera-t-il possible de convoquer une seule réunion au lieu de deux ? En cas de recours à l'expert comptable, l'une des trois réunions normalement prévues pourra-t-elle être supprimée ? L'ordre des réunions, entre le comité central d'entreprise et le comité d'établissement, pourra-t-il être inversé ? Les délais entre toutes ces réunions pourront-ils être adaptés ?
    Tout cela est source d'incertitude juridique mais pose aussi, je le répète, un problème de constitutionnalité, à la fois au regard des garanties qui doivent être apportées quant à la nature des délégations que le législateur accorde - il ne saurait se séparer de ses compétences sans fixer des limites - et au regard du droit garanti aux salariés de participer à la définition de leurs conditions de travail et à la gestion de l'entreprise.
    Je rappelle que le Conseil constitutionnel et le Conseil d'Etat ont toujours estimé que les dérogations à ces principes ne pouvaient être acceptées que lorsqu'elles étaient plus favorables aux salariés que les acquis contenus dans le droit en vigueur.
    Le Conseil constitutionnel exige à tout le moins que la loi prévoie des garanties équivalentes, qui font totalement défaut dans la rédaction actuelle du projet.
    Je voudrais insister sur un dernier point, monsieur le président, et je m'arrêterai là.
    M. François Guillaume. Il est temps !
    M. Gaëtan Gorce. La rédaction du deuxième alinéa du I de l'article 2 est tout aussi confuse. De quel type d'accords parle-t-on ? Qu'entend-on par « conditions dans lesquelles l'établissement du plan de sauvegarde de l'emploi [...] fait l'objet d'un accord » ? S'agit-il des modalités de la négociation, de l'articulation dans le temps entre la négociation du plan de sauvegarde de l'emploi et le déroulement de la procédure de consultation, ou bien du contenu même de ce plan, ce qui susciterait naturellement beaucoup d'autres interrogations et inquiétudes ?
    Le dispositif d'expérimentation que vous proposez dans la précipitation est tellement flou que la négociation s'engagera avec une grande imprécision, avec tous les risques que cela peut présenter pour la sécurité juridique.
    Je rappelle, mais nous en rediscuterons sans doute plus tard dans la soirée, que l'irrégularité de la procédure de consultation est un facteur de nullité du licenciement et peut donc avoir des conséquences importantes. Peut-être bouclerez-vous la boucle, mais il faudrait tout de même être plus précis. Sinon, vous mettrez les entreprises, que vous défendez pourtant ardemment, dans une situation délicate.
    D'autre part, que se passera-t-il si un salarié en vient à contester un accord fixant des mécanismes de consultation ou d'information moins favorables que ceux qui figurent aujourd'hui dans le code du travail,...
    M. le président. Monsieur Gorce...
    M. Gaëtan Gorce. ... en s'appuyant sur ces derniers et en faisant référence aux règles de constitutionnalité que j'ai évoquées.
    Votre texte, en réalité, a pour seul objet de revenir sur la loi de modernisation sociale, et certainement pas d'ouvrir un champ nouveau à la négociation des licenciements.
    M. le président. Monsieur Gorce, je vous ai accordé un peu plus de cinq minutes, mais cette intervention vaudra défense de l'amendement de suppression.
    M. Gaëtan Gorce. Je n'interviens que lorsque c'est nécessaire, monsieur le président.
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 5 et 107.
    L'amendement n° 5 est présenté par M. Gremetz, Mme Jacquart, MM. Dutoit, Liberti, Desallangre et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ; l'amendement n° 107 est présenté par MM. Gorce, Le Garrec et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 2. »
    Pouvons-nous considérer que l'amendement n° 107 est défendu, monsieur Gorce ?
    M. Gaëtan Gorce. Tout à fait, monsieur le président.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. Alors que nous abordons l'article 2, il n'est peut-être pas inutile d'entrer dans le détail.
    M. le président. C'est pourquoi j'ai laissé un peu plus de temps que prévu à M. Gorce.
    M. Dominique Dord, rapporteur. Vous avez bien fait.
    Peut-être M. le ministre aura-t-il lui-même des choses à nous dire sur ce sujet. Pour éviter tout malentendu, il convient effectivement de préciser, et éventuellement de faire préciser par M. le ministre, ce qui est possible dans le cadre de la dérogation et ce qui ne l'est pas, en particulier pour tenir compte de l'inquiétude quant à la menace sur l'ordre public social.
    Il nous semble, quant à nous, que le I de l'article 2 précise très clairement le champ des dérogations : les accords d'entreprise « peuvent fixer les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise », et encore seulement dans le cas où « l'employeur projette de prononcer le licenciement pour motif économique d'au moins dix salariés sur une même période de trente jours ».
    Cette rédaction me paraît suffisamment explicite pour nous rassurer, mais je comprends la volonté de M. Gorce de clarifier cette question, de manière à lever toute inquiétude.
    Quoi qu'il en soit, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. L'article 2 contient une des innovations importantes du projet de loi, sur laquelle le Gouvernement compte beaucoup pour faire évoluer les relations sociales dans notre pays.
    Nous n'avons pas inventé le concept d'« accords de méthode », même si la loi ne les prévoit pas de manière explicite. Plusieurs ont déjà été signés dans des entreprises, généralement d'ailleurs par toutes les organisations syndicales présentes, et c'est sans doute pourquoi ils n'ont pas été remis en cause, quoique leur légalité puisse être discutée.
    Ces accords ne remettent pas en cause les prérogatives du comité d'entreprise ; ils visent simplement à déroger à la loi sur des points de procédure, comme le nombre et la périodicité des réunions, ou encore les modalités d'intervention de l'expert. Ils portent sur l'équilibre des pouvoirs, la fixation du nombre de réunions, l'organisation de la concertation, les modes d'intervention de l'expert, et ils tendent à favoriser un comportement de bonne foi, en interdisant les agissements dilatoires, les propositions uniques ou la négociation séparée avec certains syndicats, et en facilitant l'exécution loyale de la méthode définie paritairement.
    En un mot, ils ont pour objet d'établir un climat de confiance dans l'entreprise, propice à la recherche du compromis. C'est exactement ce que nous recherchons et c'est la raison pour laquelle nous voulons donner un support juridique à ces pratiques. Je précise d'emblée, pour rassurer M. Gorce, qu'elles ne dérogent pas aux règles générales du droit social, puisqu'elles ne concernent que les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise sans affecter le fond.
    La rédaction du deuxième alinéa du I de l'article 2, tout en invitant les partenaires sociaux à inscrire dans la négociation les modalités d'établissement du plan de sauvegarde de l'emploi, ne permettrait aux accords majoritaires de déroger ni aux prescriptions posées par l'article L. 321-4-1 en termes de contenu du plan social, ni, par voie de conséquence, à la possibilité de recours individuel ou collectif quant au respect de ses prescriptions.
    Avec toutes ces précisions, M. Gorce doit être rassuré...
    M. Gaëtan Gorce. Pas complètement !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... sur l'innovation que représentent les accords de méthode, qui me paraissent une façon très intéressante de faire évoluer les pratiques sociales.
    M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Je me limiterai pour l'instant à un exemple, mais j'en donnerai d'autres, malheureusement, dans le cours du débat. M. le ministre nous dit qu'il s'agit de déroger aux modalités de consultation, mais comment interpréter le recours à l'expert-comptable ? Dès lors qu'il sera possible de déroger à l'ensemble des dispositions du livre III, la faculté de recourir à l'assistance d'un expert-comptable prévue par l'article L. 321-7-1 pourra-t-elle être remise en question ou non ? Cela dit, admettons même que l'on ne puisse pas y déroger. A partir du moment où l'on peut déroger à l'article L. 321-3, qui pose le principe de deux réunions, l'expert-comptable devant remettre ses conclusions lors de la seconde réunion, si celle-ci est supprimée, ce qui semble possible, on prive d'effet le recours à l'expert-comptable. Je pense que cela pose un problème réel au regard de la constitutionnalité des droits assurés aux salariés et je voulais le souligner.
    M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
    Mme Jacqueline Fraysse. L'article 2 présente un double danger et constitue une véritable régression sociale. A l'heure où la protection des salariés doit être renforcée face à des déferlantes de licenciements sans scrupule, il détourne le sens de la négociation collective et va créer confusion et arbitraire. En effet, la négociation collective a pour objet de conférer des droits et des garanties aux salariés et non pas d'en supprimer. Or, vous la transformez en instrument de la régression sociale en remettant en cause le principe de faveur.
    Alors que les négociateurs sont soumis à la pression que l'on sait dans le cadre des plans de restructuration et de licenciement, le texte donne à la négociation le rôle de déroger aux garanties légales, dans un sens défavorable aux salariés ; c'est vraiment le monde à l'envers.
    Pour la première fois, patrons et syndicats seraient autorisés à revoir à la baisse les droits des comités d'entreprise et décideraient des procédures et des modalités de licenciement. En clair, les salariés seront conduits à négocier eux-mêmes les conditions de leurs licenciements ou de ceux de leurs collègues.
    Cette nouvelle atteinte, extrêmement grave, à l'ordre public social et à la hiérarchie des normes porte fondamentalement en elle le démantèlement annoncé du code du travail. Elle avait déjà été amorcée avec la remise en cause de la réduction du temps de travail. Que restera-t-il comme garantie si le droit de licenciement est renvoyé à la négociation d'entreprise, sans même que celle-ci soit encadrée par la négociation interprofessionnelle ou de branche ?
    D'ores et déjà, les salariés sont doublement lésés, et d'abord quant à leurs droits individuels. Jusqu'à présent, quels que soient les accords négociés et conclus dans le cadre des procédures de licenciement, les garanties légales préservaient la possibilité, pour les salariés, de contester l'aspect licite du licenciement économique. Désormais, l'accord se substitue à la loi, privant les salariés du socle minimal de garanties légales.
    Les salariés sont lésés, ensuite, quant aux droits de leurs représentants. En effet, les droits des comités d'entreprise pourront être définis, et limités, par les accords qui fixeront les conditions et les modalités d'information, de saisine, et la procédure de consultation des CE. Du même coup, la prise en charge par l'entreprise du paiement des experts disparaît.
    Pour donner un semblant de légitimité à une négociation dont la seule vocation est de déréglementer, ce texte introduit la notion d' « accord majoritaire », qui nous avait été refusée lorsque nous l'avions proposée lors de l'examen de l'assouplissement des 35 heures. En revanche, le projet se garde bien de mettre en place l'accord majoritaire pour les négociations interprofessionnelles qui doivent servir à l'élaboration de la nouvelle législation en la matière. La possibilité est donc donnée à la minorité de faire la loi.
    Enfin, je le répète, cet article va créer la confusion et l'arbitraire. Comment faire respecter l'égalité du citoyen devant le droit à l'emploi si chaque entreprise peut désormais fixer ses propres règles, faisant disparaître le socle des garanties légales ? Ici, la procédure durera tant de temps, là tel autre temps. Alors que, dans le domaine des licenciements, la rigueur de la procédure est une garantie minimale, mais essentielle, contre la volonté patronale d'en finir au plus vite, le renvoi de ces dispositions à la négociation ouvre la porte à n'importe quel abus.
    De plus, les accords d'entreprise sont dits « expérimentaux » pour deux ans, sans que l'on sache ce qui se passera par la suite. Un tel manque de lisibilité du droit ouvre la porte à l'arbitraire le plus complet. Monsieur le ministre, vous vous engagez délibérément dans une voie dangereuse. Vous allez au-devant des exigences du MEDEF,...
    M. Jean-Michel Fourgous. Vilain MEDEF ! Il faut l'interdire !
    Mme Jacqueline Fraysse. ... au mépris des salariés menacés dans leur emploi et qui auront encore moins d'appui pour s'opposer aux agissements peu scrupuleux des grands groupes dans leur recherche insatiable du profit maximal. C'est pourquoi nous proposons, par l'amendement n° 5, de supprimer l'article 2.
    M. Maxime Gremetz. Très bien !
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 5 et 107.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 6 et 108 rectifié.
    L'amendement n° 6 est présenté par M. Gremetz, Mme Jacquaint, MM. Dutoit, Liberti, Desallangre et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ; l'amendement n° 108 rectifié est présenté par M. Gorce, M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Dans la première phrase du premier alinéa du I de l'article 2, après le mot : "expérimental, insérer les mots : "et sans préjudice des dispositions de l'article L. 132-4 du code du travail,. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz, pour soutenir l'amendement n° 6.
    M. Maxime Gremetz. J'ai bien entendu les assurances données par M. le ministre mais j'aimerais qu'elles se concrétisent.
    L'article 2 comporte quatre paragraphes. Le premier autorise les partenaires sociaux à conclure des accords dérogatoires au niveau de l'entreprise. Le deuxième énumère les dispositions auxquelles ces accords ne sauraient déroger. Le troisième précise que, pour être valables, ces accords doivent être signés par des organisations syndicales majoritaires dans l'entreprise. Divine surprise que ce dernier point, puisque vous avez refusé notre proposition de généraliser le principe des accords majoritaires, et que vous continuez à le faire d'ailleurs ! Mais votre texte, sur cette partie, est limité dans son objet - et vous l'avez reconnu - au seul licenciement économique. Il s'agit là d'une avancée très partielle, qui ne saurait compenser le fait que, par la même occasion, le projet de loi ouvre la possibilité de mettre en place des dispositions conventionnelles dérogatoires au détriment des salariés.
    J'en viens à l'objet de notre amendement. Alors même que la presse fait état de plusieurs centaines de plans sociaux en cours, concernant des dizaines de milliers de salariés, le Gouvernement présente un projet de loi qui va dans un sens contraire à l'objectif de préservation de l'emploi et ouvre toute grande la porte au droit dérogatoire. Notre amendement ne vise qu'à apporter une précision. Pour que les choses soient claires et qu'il ne puisse y avoir matière à interprétation, nous proposons tout simplement de prévoir que les accords signés en vertu de l'article 2 seront conclus « sans préjudice des dispositions de l'article L. 132-4 du code du travail ». Autrement dit, nous voulons lever toute ambiguïté - et c'est pour vous l'occasion de le faire également, monsieur le ministre - quant au respect de l'ordre public social, dont vous dites qu'il ne sera pas en cause lorsque de tels accords seront conclus entre les partenaires sociaux.
    Si l'article L. 132-4 s'applique, le principe de faveur, principe fondamental du droit du travail, sera respecté et les accords en question ne pourront être valables que s'ils prévoient des dispositions plus favorables aux salariés que celles aujourd'hui en vigueur. Si votre intention est bien de préserver ce principe de faveur, comme vous l'avez affirmé à de nombreuses reprises depuis le début de ce débat et comme M. le rapporteur l'a confirmé en commission, pourquoi ne pas accepter cet éclaircissement, afin de lever toute ambiguïté ? Nous serons alors au moins d'accord sur un point : ces accords dérogatoires devront être fidèles à l'esprit de l'article L. 132-4 du code du travail. En adoptant cet amendement court, mais important, vous confirmerez que vous n'avez pas d'arrière-pensées, ça ne mange pas de pain, ça ne coûterait pas un sou et tout le monde serait content !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir l'amendement n° 108 rectifié.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C'est là un problème juridiquement important. Vous ne pouvez donner la faculté de déroger aux dispositions des livres III et IV du code du travail sans faire référence à l'article L. 132-4 du code du travail. En effet, ces dispositions sont fondamentales. Elles affirment l'idée que toute mesure dérogatoire au code du travail ne peut qu'être plus favorable aux salariés. C'est inscrit dans le marbre de la relation sociale, si je puis dire, et je suis certain que le Gouvernement n'entend pas le contester. L'article L. 132-4 précise par ailleurs qu'il est impossible de déroger aux dispositions d'ordre public. Ces deux principes ne seraient plus applicables avec le présent texte parce que vous allez permettre de déroger aux dispositions du livre IV. Nous sommes aujourd'hui dans la technique juridique et il faudrait éviter d'être demain dans la technique judiciaire. La commission pourrait donc soutenir notre position qui vise à clarifier la démarche du Gouvernement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. Comme l'ont dit les deux orateurs, ce sont des amendements très importants, sur lesquels nous devons bien nous expliquer. Nous avons déjà harmonisé nos positions sur la nature des dispositions auxquelles il pourra être dérogé. C'est la troisième ligne du I de l'article 2, en l'occurrence « les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise ». Ce n'est que là-dessus que pourront porter les accords dérogatoires.
    M. Maxime Gremetz. Et majoritaires !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Et majoritaires, ce qui n'est pas pour vous déplaire ! Sur ce point nous sommes d'accord.
    Ensuite, que dit le principe de faveur ? Selon l'article L. 132-4 du code du travail, « La convention et l'accord collectif du travail peuvent comporter des dispositions plus favorables aux salariés que celles des lois et règlements en vigueur. Ils ne peuvent déroger aux dispositions d'ordre public de ces lois et règlements. » M. le ministre a été très clair sur ce sujet. Toute la question est de savoir si, sur les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise qui seront l'objet de ces accords dérogatoires, le fait d'avoir, par exemple, des délais plus longs, d'avoir recours à une phase d'expertise supplémentaire ou à un médiateur peut être considéré comme plus favorable aux salariés. J'ai compris que pour vous c'était le cas. Nous ne sommes pas de cet avis. Je le répète pour éviter toute arrière-pensée, toute ambiguïté, ce qui est important pour les salariés licenciés, c'est bien sûr que les choses ne soient pas bâclées - on ne peut pas dire qu'elles l'étaient avant la LMS, même si celle-ci a permis quelques améliorations -, mais c'est surtout, et le Gouvernement comme la commission ont été clairs à ce sujet, que l'on ne puisse en aucun cas « brimer » le salarié pour ses droits à formation et à indemnisation. Il est hors de question de les remettre en question en n'accordant que trois mois de formation au lieu de six, par exemple. Voilà le coeur de notre conception du principe de faveur : c'est ce qui touche le salarié dans sa subsistance même, au moment où il est victime d'une procédure de licenciement.
    Par conséquent, nous ne considérons pas comme défavorable aux salariés, par principe, le fait que les accords dérogatoires puissent porter sur les modalités d'information et de consultation. Si, par exemple, on décide de raccourcir les délais, de ne prévoir qu'un seul expert, par un accord majoritaire signé par des syndicats réprésentant la majorité dans l'entreprise, c'est bien parce que les représentants syndicaux, qui sont tout de même là pour défendre les salariés, ont obtenu par ailleurs des points plus favorables que ce que prévoit la loi concernant des mesures touchant directement les salariés licenciés. S'il acceptent de raboter la procédure, c'est pour obtenir plus par ailleurs. Je vous rappelle au demeurant que le gouvernement précédent a pris des dispositions qui, de prime abord, pouvaient paraître moins favorables aux salariés que les règles existantes ; je pense, par exemple, à l'annualisation du temps de travail. Nous sommes là typiquement dans le principe de faveur. On pourrait penser a priori qu'être soumis à des rythmes différents est moins favorable pour le salarié. Je ne veux pas polémiquer, mais c'est pourtant un gouvernement que vous souteniez qui l'a décidé.
    M. Maxime Gremetz. Je n'étais pas d'accord !
    M. Dominique Dord, rapporteur. En tout cas, il paraît possible que les partenaires sociaux, parfois aidés par le législateur ou par le Gouvernement, se mettent d'accord sur ce qui pourrait être considéré comme moins favorable, sans toucher à l'esprit du principe de faveur.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. J'ai peu de chose à ajouter car M. le rapporteur vient de décrire excellemment l'esprit de la réforme que nous vous proposons. Il n'est évidemment pas question de remettre en cause l'ordre public social par un accord dérogatoire, parce que le champ de la dérogation est précisément défini par le projet de loi, monsieur Gremetz. Il s'agit de procédure, et seulement de procédure.
    La question du principe de faveur est difficile à approcher. Il ne s'agit pas d'être moins favorable ou plus favorable que la loi, mais de permettre à l'accord de faire différemment de la loi, dans des conditions encadrées par la loi et à la suite d'un accord majoritaire.
    Les exemples cités sont tout à fait pertinents. On peut ainsi raccourcir les délais mais obtenir en échange qu'il y ait deux expertises, à la faveur d'un compromis passé à l'intérieur de l'entreprise entre l'ensemble des organisations syndicales et la direction de l'entreprise. C'est ce qu'on appelle un accord « gagnant-gagnant ». Faisons confiance aux organisations syndicales et à leur maturité.
    Ces explications devraient permettre à M. Gremetz et au groupe socialiste de retirer leur amendement.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous maintenons notre amendement.
    Premièrement, certaines règles de la procédure sont d'ordre public.
    Deuxièmement, il convient de tenir compte de l'interprétation de ces règles par la jurisprudence. Par exemple, le délai suffisant, en droit du travail, est apprécié par le juge, qui se prononce sur son caractère attentatoire ou non aux règles de la prévenance.
    Par ailleurs, nous ne posons pas le problème comme M. le rapporteur. Nous considérons qu'il faut écarter l'article L. 132-4 du champ de la dérogation, pour permettre le maintien systématique du principe de la clause la plus favorable au salarié.
    Quant à savoir si la convocation répond ou non à ce principe, c'est à la juridiction de l'apprécier. Ne préjugez pas l'interprétation qui pourra être faite demain du dispositif retenu. Mais appuyez-vous sur ce principe fondamental du droit du travail qui veut qu'une convention collective ou un accord ne puisse déroger à la loi que dans un sens plus favorable au salarié. Les deux choses sont totalement différentes ; c'est pourquoi je ne pense pas qu'il y ait contradiction.
    Votre dispositif néglige les précautions les plus élémentaires : il deviendra possible de ne pas retenir des clauses plus favorables aux salariés.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, vous avez été tout à fait rassurant et votre interprétation rejoint la mienne. Reprenons vos arguments. D'une part, vous dites qu'il s'agit uniquement de la procédure, dans le cas d'un licenciement collectif ; j'en conclus donc que l'accord majoritaire est limité uniquement à cela. D'autre part, vous dites qu'il est possible, par exemple, de raccourcir les délais dans la mesure où un accord est intervenu. Pas de problème.
    Dans ces conditions, je ne vois pas ce qui vous gêne. Le Gouvernement pourrait faire le geste d'ajouter, à l'article 2 : « et sans préjudice des dispositions de l'article L. 132-4 ». Cela prouverait sa volonté d'écouter l'opposition. Ni d'un côté ni de l'autre, il n'y a matière à discussion. Nous sommes d'accord sur l'esprit de cette disposition et ça ne coûte rien d'ajouter cette phrase !
    M. le président. C'est très clair, monsieur Gremetz, mais je ne pense pas que M. le rapporteur ait changé d'avis.
    M. Dominique Dord, rapporteur. Non, monsieur le président.
    M. le président. Le Gouvernement non plus ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Non, monsieur le président.
    M. le président. Je mets donc aux voix, par un seul vote, les amendements n°s 6 et 108 rectifié.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. Maxime Gremetz. Je demande une suspension de séance.
    M. le président. Je vous accorde cinq minutes, monsieur Gremetz.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à vingt et une heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures cinquante.)
    M. le président. La séance est reprise.
    M. Gorce, M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 109, ainsi rédigé :
    « Dans la première phrase du I de l'article 2, supprimer les mots : "des livres III et IV du code du travail,. »
    La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Cet amendement vise à supprimer les références aux livres III et IV du code du travail, pour des raisons que j'ai déjà indiquées. J'ai bien compris la volonté du ministre d'essayer de nous rassurer, mais je ne crois pas qu'il y soit véritablement parvenu. La question n'est pas d'ordre psychologique, mais juridique.
    On peut d'ores et déjà imaginer que des accords pourraient supprimer des dispositifs d'information et de consultation. Je pense au recours à l'expert-comptable, qui pourrait être directement mis en cause par cette disposition dérogatoire.  Oui ou non, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, un accord pourrait-il supprimer le recours à l'expert-comptable ? Et même s'il le maintenait, ne pourrait-il avoir pour effet, en réduisant le nombre des réunions, ce qui est possible, d'empêcher l'expert-comptable de donner ses conclusions ? De la même manière, le principe de la consultation du comité d'entreprise posé au livre IV pourrait être remis en question ; c'est en tout cas mon sentiment.
    Nous touchons là un point extrêmement important. Cela signifirait que l'on ouvrirait la négociation, ce qui est très bien, mais bien au-delà des procédures actuelles et en prenant le risque de remettre en cause certaines garanties. Cela pose un problème de constitutionnalité au regard des garanties accordées aux salariés dans notre pays.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement, qui m'a d'ailleurs paru mal rédigé.
    M. Gaëtan Gorce. C'est par imitation de l'article...
    M. Dominique Dord, rapporteur. Vous trouvez que l'article est mal rédigé ?
    M. Gaëtan Gorce. J'en ai le sentiment.
    M. Dominique Dord, rapporteur. Tel qu'il est rédigé, on peut penser que cet amendement vise à supprimer les livres III et IV.
    M. Gaëtan Gorce. Justement pas !
    M. Dominique Dord, rapporteur. J'imagine que vous vouliez dire l'inverse. Il me semble que nous vous avons déjà répondu, en délimitant très précisément dans nos exposés le champ des dérogations, ce qui permet de déduire, a contrario, ce sur quoi elles ne pourraient porter. Apparemment, nous n'avons pas été assez explicites...
    M. Jean-Paul Anciaux. Si !
    M. Dominique Dord, rapporteur. ... et vous conservez vos incertitudes et vos doutes.
    M. Gaëtan Gorce. J'ai posé une question précise sur les experts-comptables !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le président, je vais essayer une dernière fois de clarifier les choses en répétant à M. Gorce que la disposition que nous proposons ne présente aucune des risques et des dangers qu'il a évoqués.
    Le champ de la dérogation est fixé par l'article 2 du projet de loi : ne sont concernées que les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise prévues par le livre III et le livre IV du code du travail et applicables lorsque l'employeur projette de prononcer le licenciement de plus de dix salariés sur une même période de trente jours.
    Loin d'ouvrir une possibilité de dérogation à l'ensemble des dispositions du livre III et du livre IV, l'article 2 ne fait que permettre aux partenaires sociaux de se doter d'une procédure d'information et de consultation adaptée aux caractéristiques de la restructuration et conforme aux intérêts des salariés et de leurs représentants, qui sont parfois eux-mêmes en situation de demander sa simplification ou son accélération. L'accord pourra également s'écarter des prescriptions légales quant au nombre de réunions, aux délais ou aux modalités d'intervention de l'expert, mais pas quant au principe même de l'intervention de l'expert.
    M. Gaëtan Gorce. Merci de le confirmer.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. J'ajoute que ce dispositif est expérimental, que les accords sont conclus pour une durée déterminée, enfin que la double référence aux livres III et IV correspond à l'une des conclusions de la concertation que vous évoquiez et qui fait suite à la réunion de la commission nationale de la négociation collective ; je vous renvoie à la déclaration de la CFDT sur ce sujet.
    Monsieur Gorce, vos interventions successives m'amènent à penser que vous vous interrogez sur la capacité des partenaires sociaux à assurer la défense des intérêts des salariés dans le cadre de ces procédures. On a le sentiment, en vous écoutant une première fois, puis une deuxième fois, puis une troisième fois, que vous n'aimez pas le principe de l'accord majoritaire dans l'entreprise. Nous avons choisi pour notre part de confier aux partenaires sociaux la responsabilité de passer un accord de méthode sur les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise.
    Nous reconnaissons que les acteurs sociaux peuvent trouver sans vous, sans nous, un bon équilibre. Alors que vous, vous voulez tout fixer dans la loi, tout codifier, et encadrer la responsabilité des partenaires sociaux. C'est sans doute ce qui explique qu'ils ont bien du mal à trouver la voie de la responsabilité. Comment faire vivre, dans notre pays, le dialogue social si l'on encadre tellement les partenaires sociaux qu'ils n'ont plus qu'à proposer des dispositions qui ne changent rien aux dispositions générales prévues par la loi ?
    En fait, vous leur ôtez, sur un sujet qui ne concerne que les modalités d'information et de consultation, toute liberté d'adapter les textes à la réalité de l'entreprise dans l'intérêt des salariés.
    L'accord majoritaire que j'ai choisi de vous proposer est la contrepartie de cette liberté que nous entendons donner aux salariés. Mais il n'est pas possible, madame Fraysse, de le mettre en oeuvre dans le cadre des accords interprofessionnels tant que la réforme de la représentativité et de la validation des accords n'est pas intervenue.
    M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Monsieur le président, cette intervention vaudra pour l'ensemble de nos amendements à l'article 2.
    D'abord, on me répond sur le plan psychologique, ensuite sur le plan politique. Je veux bien, mais j'essaie quant à moi de poser des questions de droit, car je crois que c'est bien de cela qu'il s'agit.
    La lecture de l'article 2 n'est pas aussi évidente que vous le prétendez et la manière dont il est rédigé laisse penser que toute une série de dérogations à des principes et à des dispositifs qui fonctionnent aujourd'hui pourraient intervenir.
    J'ai fait référence à la jurisprudence du Conseil constitutionnel et du Conseil d'Etat, qui considèrent que ces procédures constituent des éléments importants - certains sont d'ordre public social - et qu'on ne peut introduire de dérogations que si elles sont accompagnées de garanties équivalentes, que la loi ne fixe pas.
    Vous nous ramenez sur un terrain strictement politique en entamant une discussion sur qui aime et qui n'aime pas le dialogue social, ce qui me paraît très réducteur. Pour éviter toute polémique, il aurait suffi d'énumérer les dispositions auxquelles il est possible de déroger.
    Je ne récuse absolument pas l'idée qu'on puisse négocier à propos de ces dispositifs, notamment par des accords majoritaires. Evidemment, votre majorité aime entendre des arguments contraires, que vous utilisez complaisamment. Pourquoi pas ? Mais je souhaiterais qu'on puisse négocier dans un cadre juridique précis, qui ne puisse pas donner lieu à contestation, voire à contentieux.
    J'ai posé plusieurs questions et je ne suis pas sûr que vous ayez répondu à toutes. Heureusement, vous avez apporté quelques précisions, car je crois que le juge aura à interpréter votre volonté. Le texte qui nous est soumis n'est pas suffisamment clair - ou trop clair, si l'on devait vous faire un procès d'intention...
    M. le président. Il était important que ce débat s'engage. Nous pourrons ainsi examiner rapidement la série d'amendements qui va suivre.
    Je mets aux voix l'amendement n° 109.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 111 et 112, pouvant faire l'objet d'une présentation commune.
    L'amendement n° 111, présenté par MM. Gorce, Le Garrec et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
    « Dans la première phrase du I de l'article 2, substituer aux mots : "des livres III et IV, les mots : "aux délais fixés au dernier alinéa de l'article L. 321-3. »
    L'amendement n° 112, présenté par MM. Gorce, Le Garrec et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
    « Dans la première phrase du I de l'article 2, substituer aux mots : "des livres III et IV, les mots : "aux délais fixés au troisième alinéa de l'article L. 321-7-1. »
    La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Ces deux amendements sont dans le prolongement de ce que j'ai dit précédemment. Le ministre a signifié par un geste que, s'il avait fallu préciser toutes les dispositions auxquelles on devait déroger, on aurait trop allongé son texte. Or il s'agit simplement d'une dizaine ou d'une douzaine de mentions et, très sincèrement, cela ne me paraît pas être au-dessus de nos forces.
    Par ces amendements, nous entendons réintroduire deux types de garantie concernant les délais. Ceux-ci ne devraient être que plus favorables, et non moins favorables. On aurait pu imaginer de préciser que ces délais pouvaient être modifiés, voire réduits, à la condition que les garanties, non pas de même nature mais équivalentes, soient apportées aux salariés. Cela ne me paraît pas entraîner une complexification de la loi mais au contraire une clarification. Car le droit n'est pas forcément simple, il doit être précis.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. Nous avons compris votre démarche. En l'occurrence, il s'agit de dispositions qui visent principalement les délais, mais la commission les a repoussés dans la même logique que pour l'amendement précédent.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable également.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 111.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 112.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Les amendements n°s 31 et 32 ne sont pas défendus.
    MM. Gorce, Le Garrec et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 110, ainsi rédigé :
    « Compléter le I de l'article 2 par l'alinéa suivant :
    « Les stipulations de ces accords doivent être conformes aux dispositions de l'article L. 132-4 du code du travail. »
    Monsieur Gorce, peut-être pourriez-vous défendre en même temps la vérité de l'amendement qui suit ?
    M. Gaëtan Gorce. Il est nécessaire de rappeler que les dérogations devront respecter le principe de faveur, c'est-à-dire qu'elles devront être plus favorables, comme le veut le droit du travail.
    Je ne vais pas reprendre le débat sur ce point car nous avons déjà dit l'essentiel. Simplement, je voudrais qu'on évite les procès consistant à opposer, pour les uns, économie dirigée et économie libérée, pour les autres, autoritarisme social et dialogue social.
    Je crois que nous avons les uns et les autres, dans le passé gouvernemental récent,...
    M. Jean-Michel Fourgous. Mme Aubry, par exemple !
    M. Gaëtan Gorce. ... suffisamment d'éléments à faire valoir pour que personne ne s'arroge le monopole du dialogue social. Je pense à 1995, mais il y a d'autres exemples d'opposition des organisations syndicales à la fin des années 1990. Essayons plutôt de voir comment nous pouvons faire progresser les choses en la matière ; c'est cette préoccupation qui nous anime face à ce texte.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. Nous avons eu tout à l'heure un long débat sur cette question. Je pense que nous sommes allés suffisamment au fond des choses. Quant à l'affirmation selon laquelle il faut éviter les procès d'intention, je la partage entièrement et j'en accepte l'augure.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 110.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Les amendements n°s 152 à 162, présentés par MM. Gorce, Le Garrec et les membres du groupe socialiste, peuvent faire l'objet, si vous n'y voyez pas d'objection, monsieur Gorce, d'une présentation commune.
    L'amendement n° 152 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions, insérer les mots : "du premier alinéa de l'article L. 321-1 du code du travail,. »
    L'amendement n° 153 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions, insérer les mots : "du troisième alinéa de l'article L. 321-1 du code du travail,. »
    L'amendement n° 154 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions, insérer les mots : "de l'article L. 321-1-1 du code du travail,. »
    L'amendement n° 155 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions, insérer les mots : "de l'article L. 321-1-2 du code du travail,. »
    L'amendement n° 156 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions, insérer les mots : "de l'article L. 321-1-3 du code du travail,. »
    L'amendement n° 157 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions, insérer les mots : "du premier alinéa et des cinquième, sixième et septième alinéas de l'article L. 321-2 du code du travail,. »
    L'amendement n° 158 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions, insérer les mots : "des quatre premiers alinéas de l'article L. 321-2 du code du travail,. »
    L'amendement n° 159 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions , insérer les mots : "du premier alinéa et du huitième alinéa de l'article L. 321-2 du code du travail, »
    L'amendement n° 160 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions , insérer les mots : "du neuvième alinéa de l'article L. 321-2 du code du travail, »
    L'amendement n° 161 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions , insérer les mots : "du dixième alinéa de l'article L. 321-2 du code du travail, »
    L'amendement n° 162 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions , insérer les mots : "du onzième alinéa de l'article L. 321-2 du code du travail, »
    La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés sur tous ces amendements.
    Je vais donc successivement les mettre aux voix.
    (Les amendements n°s 152 à 162, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    M. le président. M. Gorce, M. Le Garrec et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 163, ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions , insérer les mots : "du douzième alinéa de l'article L. 321-2 du code du travail, »
    M. Gaëtan Gorce. Il s'agit non pas de ralentir votre rythme, monsieur le président mais de nous permettre de souffler après l'exercice auxquel vous venez de vous livrer, car celui-ci pourrait susciter une frustration chez les membres de la majorité ou du Gouvernement qui se trouveraient ainsi privés d'un débat sur des sujets qu'ils affectionnent.
    Tous ces différents amendements traduisent la même préoccupation, ce qui explique la méthode que vous avez, non pas imposée, monsieur le président, mais utilement employée. Ainsi que je l'ai déjà dit tout à l'heure, il me paraîtrait beaucoup plus simple et plus sain de préciser l'ensemble des dispositions auxquelles les accords ne sauraient déroger, conformément à ce qui s'est toujours fait dans ce domaine.
    Je ne vais pas reprendre toutes les dispositions auxquelles nous renvoyons, encore que, si je le faisais, cela permettrait de démontrer qu'il s'agit de questions extrêmement importantes, comme le plan de sauvegarde de l'emploi, les modalités de consultation du comité ou le nombre de réunions. Vous prenez le risque, avec votre rédaction de ce projet de loi, d'introduire une incertitude juridique alors que vous nous opposez toujours les impératifs de sécurité juridique et de simplification.
    J'ajoute que je ne vois pas l'intérêt qu'auraient les partenaires sociaux, quels qu'ils soient, à s'engager dans ce type de négociation, eu égard aux incertitudes qui pèsent sur les dispositifs qui leur seront proposés.

    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 163 ? Il faut bien nourrir un peu le débat, monsieur le rapporteur. (Sourires.)
    M. Dominique Dord, rapporteur. Monsieur Gorce, votre objectif, je le comprends bien, est d'obtenir des assurances sur différentes dispositions du code du travail. Je ne voudrais pas vous répondre la même chose que tout à l'heure mais celles-ci ne relèvent pas toutes du licenciement. Donc, elles sont hors du champ des accords.
    M. Gaëtan Gorce. Alors, pourquoi faire référence à l'ensemble du livre IV ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. Encore une fois, ces accords ne concernent que le licenciement et, dans la procédure de licenciement, que les modalités d'information et de consulation du comité d'entreprise.
    M. Gaëtan Gorce. Pourquoi ne pas faire l'énumération, monsieur le rapporteur ? Ce serait utile.
    M. Dominique Dord, rapporteur. L'article 2 est clair. Je sais qu'il vous inquiète : pourtant, il ne comporte aucun risque ; les partenaires sociaux pourront en toute sécurité discuter de ces questions.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous avons au moins trois désaccords avec M. Gorce.
    Le premier, le plus fondamental, porte sur l'esprit même de notre texte et des réformes que nous voulons mettre en oeuvre. Depuis le début de ce débat, M. Gorce nous invite à tracer le cadre dans lequel les partenaires sociaux doivent évoluer. Nous, nous voulons au contraire qu'ils nous proposent des solutions qu'ensuite nous vous soumettrons dans le cadre législatif.
    M. Gorce affirme que, s'agissant des accords de méthode, il faudrait énumérer précisément les domaines dans lesquels ceux-ci peuvent intervenir, c'est-à-dire qu'il souhaite qu'on les encadre de manière très précise. Nous ne voulons pas le faire parce que nous voulons laisser le plus de liberté possible aux partenaires sociaux sur ce sujet.
    Deuxième désaccord : selon M. Gorce, plus la rédaction descendra dans le détail, plus la sécurité juridique sera grande. Je ne le pense pas du tout. J'estime même que, si la sécurité juridique est assez faible dans le domaine du droit du travail, c'est parce qu'on a beaucoup écrit, et souvent assez mal.
    Troisième désaccord : M. Gorce doute que des organisations syndicales puissent se mettre d'accord sur des sujets aussi difficiles, surtout si cela ne se traduit pas par une amélioration significative de la condition des salariés. Mais il oublie que les accords de méthode existent déjà. Nous ne parlons pas ici d'une idée dont le Gouvernement voudrait encourager la traduction, mais d'accords qui ont déjà été conclus dans les entreprises, notamment depuis le vote de la loi de modernisation sociale. Simplement, comme ils se situent un peu à la marge de cette loi, nous voulons leur donner un support législatif. Si ces accords ont été conclus par des organisations syndicales majoritaires, et même la plupart du temps à l'unanimité c'est bien la preuve qu'il y a là un champ pour la négociation.
    Ma conviction, mesdames, messieurs les députés, c'est qu'aujourd'hui les partenaires sociaux, au-delà des discours convenus, sont avides de trouver d'autres terrains de débat pour élaborer de nouvelles normes sociales dans le cadre d'accords « gagnant-gagnant », et cela correspond parfaitement à la philosophie des accords de méthode.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Monsieur le ministre, vous vous plaisez à souligner les différences qui nous séparent et je m'en réjouis. Seulement, nous n'avons pas forcément la même conception de ces désaccords.
    La première différence importante, qui a parcouru tout le débat, c'est que là où vous considérez qu'il y a urgence à suprimer cet ensemble de dispositions de la loi de modernisation sociale, nous considérons, nous, que le contexte économique et social ne s'y prête pas. Cela pose un vrai problème de fond dont nous aurons à nous expliquer au fur et à mesure de l'évolution de la situation économique et sociale.
    La deuxième différence touche au respect du dialogue social. Moi, je veux bien croire si vous nous faites le même crédit, que vous êtes attaché à l'idée de développer ce dialogue social. Tous ceux qui ont véritablement envie que les choses avancent en ce domaine ne peuvent qu'être d'accord, à la fois pour constater les limites de la loi et pour considérer que la négociation est indispensable, y compris pour concrétiser sur le terrain les dispositions que le législateur pourra être amené à prendre. Mais respecter le dialogue social, ce n'est pas se défausser sur le dialogue social.
    Quand je vous dis, monsieur le ministre, qu'il est normal que le Gouvernement donne des orientations, c'est que c'est là le rôle d'un gouvernement, qu'il s'agisse des domaines économique, culturel ou éducatif. Ainsi quand le ministre de l'éducation nationale indique ses priorités - par exemple, la lutte contre l'illettrisme, comme nous l'a dit M. Ferry -, il ne se substitue pas aux enseignants, il donne une orientation générale.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Ça n'a rien à voir !
    M. Gaëtan Gorce. Il en va de même sur le plan social. Il ne s'agit pas de demander au Gouvernement quelles solutions il préconise pour régler la question du droit de licenciement, mais sur quelles pistes il souhaite que les partenaires s'engagent.
    Il est tout de même paradoxal d'engager les partenaires sociaux à négocier sans garde-fou et sans indications, puis, quand vous aurez le texte des accords, de porter un jugement dessus. Car vous ferez nécessairement le tri avant de présenter un projet de loi devant le Parlement.
    Il me paraîtrait plus normal de définir un cadre en indiquant ce que vous attendez de cette négociation, non pas sur la forme ou dans le détail, mais sur les objectifs que vous vous fixez. Considérez-vous, par exemple, que notre législation, voire demain la négociation, peuvent confondre licenciements de conjoncture et licenciements de compétitivité ? L'obligation de reclassement, qui a fait l'objet d'un débat dans cette enceinte, constitue-t-elle pour vous une piste à privilégier ? L'obligation d'adaptation doit-elle être interprétée uniquement à travers la mise en oeuvre du plan social, comme le moyen de garantir le reclassement, ou, à l'inverse, doit-elle être un élément de gestion prévisionnelle de l'emploi ? Autrement dit, doit-elle s'appliquer à l'employeur en amont ?
    Ce ne sont là que des indications générales mais qu'un gouvernement qui assume ses responsabilités, ce qui est, j'imagine, votre cas, se doit de donner avant que les discussions s'engagent.
    Dernier point : la sécurité juridique. Vous nous dites que vous faites confiance à la négociation et qu'à préciser trop de choses, on risquerait de la bloquer. Moi, j'estime que si nous donnons un champ à la négociation, il est nécessaire de savoir ce sur quoi peuvent porter les dérogations. Et si, comme vous le dites, il existe déjà des accords de méthode, cela signifie donc bien que, aujourd'hui, on peut déjà négocier sur ce point. En réalité, la seule dérogation que vous introduisez, c'est la dérogation au principe de faveur.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Tout à fait !
    M. Gaëtan Gorce. Autrement dit, on pourra introduire des modifications qui, au regard du droit existant, seront moins favorables. Si tel n'est pas le cas, il vous faut clairement indiquer dans le projet de loi que ces dérogations devront donner aux salariés des garanties équivalentes, ce que de toute façon le juge vous obligera à faire si vous ne le faites pas.
    Les différences que vous évoquez, je les sens bien. Simplement, nous avons des préoccupations qui ne sont pas les mêmes que les vôtres.
    M. le président. Je considère que les amendements suivants relèvent du même débat.
    Je mets aux voix l'amendement n° 163.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Les amendements n° 164 rectifié à 168 rectifié, présentés par MM. Gorce, Le Garrec et les membres du groupe socialiste, peuvent faire l'objet d'une présentation commune.
    L'amendement n° 164 rectifié est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions, insérer les mots : "de l'article L. 321-2-1 du code du travail, ».
    L'amendement n° 165 rectifié est ainsi rédigé :     « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions, insérer les mots : "du premier alinéa de l'article L. 321-3 du code du travail,. »
    L'amendement n° 166 rectifié est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions, insérer les mots : "du deuxième alinéa de l'article L. 321-3 du code du travail,. »
    L'amendement n° 167 rectifié est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions, insérer les mots : "du troisième alinéa de l'article L. 321-3 du code du travail,. »
    L'amendement n° 168 rectifié est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après le mot : "dispositions, insérer les mots : "du quatrième alinéa de l'article L. 321-3 du code du travail,. »
    La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
    Je vais successivement mettre aux voix ces amendements.
    (Les amendements n° 164 rectifié à n° 168 rectifié, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
    M. le président. MM. Gorce, Le Garrec et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 169, ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, supprimer les mots : "des onze premiers alinéas. »
    La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Selon le II de l'article 2, les accords prévus au I ne peuvent déroger aux dispositions des onze premiers alinéas de l'article L. 321-4 du code du travail relatifs aux conditions dans lesquelles est établi un plan de sauvegarde de l'emploi. Autrement dit, ils peuvent déroger aux dispositions du douzième et dernier alinéa. Or celui-ci a son importance. Il dispose en effet : « Le plan de sauvegarde de l'emploi doit déterminer les modalités de suivi de la mise en oeuvre effective des mesures contenues dans le plan de reclassement prévu à l'article L. 321-4-1. Ce suivi fait l'objet d'une consultation régulière et approfondie du comité d'entreprise ou des délégués du personnel. L'autorité administrative compétente est associée au suivi de ces mesures. »
    Si cet alinéa n'est plus susceptible d'être appliqué, la question se pose de savoir dans quelles conditions le dispositif qui permet d'associer l'autorité administrative compétente au suivi de ces accords pourra être mis en oeuvre. Il eût été plus simple, à l'évidence, de ne pas toucher à ce dernier alinéa : l'autorité administrative aurait conservé sa faculté d'intervention.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gaëtan Gorce. Pour nous rassurer !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Vous vous inquiétez que l'on puisse déroger au douzième alinéa de l'article L. 321-4, apport de la loi de modernisation sociale qui précise les modalités de suivi du plan de sauvegarde de l'emploi et le rôle de l'inspecteur du travail.
    Nous allons évidemment rester chacun dans notre logique. A nous, il ne semble pas incohérent que les partenaires sociaux déterminent eux-mêmes les modalités de suivi du plan de sauvegarde de l'emploi, dans le cadre d'un accord majoritaire.

    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. J'ajoute à la suite du rapporteur que l'article L. 321-7, qui porte sur les dispositions évoquées à l'instant, n'est pas concerné par le texte dont nous débattons. Il n'y a donc aucun risque que les accords puissent empiéter sur les pouvoirs de contrôle de l'administration.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je repose ma question : comment, dans la négociation, les parties vont-elles pouvoir introduire un suivi éventuel de l'autorité administrative ? Il faut bien que celle-ci soit partie prenante, ou tout du moins qu'on puisse la saisir. Il n'y a donc pas de solution.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je ne sais pas si ce dialogue est sincère ou si vous voulez seulement allonger le débat.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Pas du tout : il est sincère.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Les parties ne peuvent pas négocier sur le contrôle de l'administration.
    M. François Guillaume. Absolument !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Elles n'en ont ni la compétence ni la possibilité. Vous êtes là en train de fantasmer...
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Pas du tout !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... sur des sujets qui n'ont aucun rapport avec le texte qui vous est présenté.
    M. François Guillaume. Tout à fait !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. L'administration n'a pas, aux termes du douzième alinéa de l'article 321-4, un rôle de contrôle mais de suivi. Ce n'est pas la même chose ! Elle exerce bien sûr sa compétence de contrôle sans qu'on le lui demande. Mais, en matière de suivi, elle n'interviendra pas si l'accord ne le prévoit pas, et cela est regrettable.
    M. François Guillaume. C'est pourtant clair !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 169.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Les amendements n°s 170 à 176 et 113 à 150 peuvent faire l'objet d'une présentation commune.
    Ces amendements sont présentés par MM. Gorce, Le Garrec et les membres du groupe socialiste.
    L'amendement n° 170 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après la référence : "L. 321-4, insérer les mots : ", de l'article L. 321-4-1. »
    L'amendement n° 171 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2 après la référence : "L. 321-4, insérer les mots : ", de l'article L. 321-4-2. »
    L'amendement n° 172 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après la référence : "L. 321-4, insérer les mots : ", de l'article L. 321-4-3. »
    L'amendement n° 173 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après la référence : "L. 321-4, insérer les mots : ", de l'article L. 321-6. »
    L'amendement n° 174 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après la référence : "L. 321-4, insérer les mots : ", de l'article L. 321-7. »
    L'amendement n° 175 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après la référence : "L. 321-4, insérer les mots : ", de l'article L. 321-7-1. »
    L'amendement n° 176 est ainsi rédigé :
    « Dans le II de l'article 2, après la référence : "L. 321-4, insérer les mots : ", de l'article L. 321-8. »
    L'amendement n° 113 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : ", ainsi que l'article L. 321-11 du code du travail. »
    L'amendement n° 114 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : ", ainsi que l'article L. 321-13 du code du travail.. »
    L'amendement n° 115 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : ", ainsi que l'article L. 321-15 du code du travail. »
    L'amendement n° 116 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "et de l'article L. 431-5. »
    L'amendement n° 117 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-1 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 118 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : ", et du deuxième alinéa de l'article L. 432-1. »
    L'amendement n° 119 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-1 bis du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 120 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-1-1 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 121 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-1-2 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 122 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-1-3 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 123 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-2 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 124 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-2-1 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 125 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-3 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 126 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-3-1 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 127 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-3-2 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 128 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-4 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 129 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-4-1 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 130 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-4-1-1 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 131 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-4-2 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 132 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-5 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 133 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-6 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 134 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-6-1 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 135 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-7 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 136 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-8 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 137 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-9 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 138 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 432-10 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 139 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 434-1 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 140 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 434-2 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 141 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 434-3 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 142 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 434-4 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 143 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 434-5 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 144 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 434-6 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 145 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "et du premier alinéa de l'article L. 434-6. »
    L'amendement n° 146 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 434-7 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 147 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 434-8 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 148 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 434-9 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 149 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 434-10 du livre IV du code du travail. »
    L'amendement n° 150 est ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 434-11 du livre IV du code du travail. »
    La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
    Je vais successivement mettre aux voix ces amendements.
    (Les amendements n°s 170 à 176 et les amendements n°s 113 à 150, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
    M. le président. MM. Gorce, Le Garrec et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 151, ainsi rédigé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les mots : "ainsi qu'à celles de l'article L. 434-12 du livre IV du code du travail. »
    Monsieur Gorce, peut-être souhaitez-vous intervenir sur ce dernier amendement de la série ?
    M. Gaëtan Gorce. Je ne peux pas ne pas répondre à une invitation aussi pressante même si je risque d'avoir le sentiment de me répéter.
    Nous restons sur notre faim, non pas sur l'ensemble des dispositions - il était utile, à cet égard, que le ministre précise un certain nombre de points -, mais parce que nous avons la conviction que la rédaction des paragraphes I et II de l'article 2 ne présente pas toutes les garanties nécessaires. Encore une fois, le problème n'est pas de savoir si l'on fait confiance ou pas aux partenaires sociaux : cet argument est trop facile. Il s'agit simplement de fixer un cadre juridique solide sur lequel pourrait s'appuyer la négociation dérogatoire.
    Si nous n'avons pas défendu systématiquement tous les amendements qui viennent d'être appelés c'est par souci de ne pas allonger inutilement la discussion sur ce texte qui ne comporte, je le rappelle, que trois articles et dont nous débattons dans l'urgence. Cela signifie que le Gouvernement est pressé d'en finir. Et nous voulions montrer que les dispositions susceptibles de faire éventuellement l'objet d'une dérogation étaient nombreuses par manque de précision du texte. C'est cette préoccupation qui nous a animés. Nous n'avons cependant pas jugé utile de le répéter à l'occasion de chaque amendement.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Dominique Dord, rapporteur. Je tiens à remercier nos collègues de l'opposition de nous avoir épargné une discussion sur chacun des amendements qui viennent d'être appelés à grande allure. Une présentation plus classique aurait sans aucun doute prolongé inutilement nos débats.
    Je dirai en conclusion, mais cela ressemblera étrangement à mon introduction, que l'article 2 ne comporte aucun vice caché. Il ne faut chercher aucune arrière-pensée dans notre argumentation. Les choses sont claires : il s'agit de favoriser le dialogue partout où c'est possible, mais en délimitant son champ d'application. Les dix-huit mois qui viennent nous donneront d'ailleurs l'occasion de valider ce dispositif. Si nous nous sommes trompés, et si, comme vous le craignez, des failles apparaissent dans le dispositif, il sera toujours temps de les corriger dans un an et demi.
    En tout cas, je voulais encore une fois vous remercier pour l'excellent climat dans lequel s'est déroulée la discussion de l'article 2.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je me réjouis moi aussi que nous puissions avancer dans la discussion. Je me félicite surtout qu'aucun de ces amendements n'ait été adopté, car si l'un d'entre eux l'avait été, je vous laisse à penser ce qui serait advenu de la liberté des partenaires sociaux de négocier des accords d'entreprise : il ne leur serait plus resté en réalité que celle de rappeler les obligations du droit de travail.
    Depuis le début de cette législature, nous avons proposé en matière sociale des textes extrêmement simples qui rompent d'une certaine manière avec les pratiques traditionnelles, au-delà même de ce qui a été fait ces cinq dernières années.
    Nous allons poursuivre sur cette voie. Notre objectif est d'ouvrir, chaque fois que cela sera possible, de nouveaux espaces de liberté et de négociation pour les partenaires sociaux. Nous jugerons, dans quatre ou cinq ans, de l'efficacité de cette méthode. En tout cas, j'ai la conviction qu'elle peut changer profondément la nature des relations sociales en France.
    M. Jean-Paul Anciaux. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. M. le ministre ne résiste jamais au plaisir d'utiliser les circonstances et de lancer ici ou là une petite pique dans un débat qui n'en nécessitait peut-être pas.
    Ces amendements, s'ils avaient été adoptés, n'auraient pas eu pour effet de priver les partenaires sociaux de toute leur liberté. Ils auraient simplement fixé le champ des dérogations possibles, ce qui n'est pas exactement la même chose. Au risque de lasser, je suis obligé de répéter que c'est la première fois qu'après avoir ouvert un champ dérogatoire - et nous l'avons fait par exemple s'agissant de la loi sur la réduction du temps de travail -, le législateur donne une délégation aussi générale, non pas dans son principe, qui n'est pas contestable, mais dans ses modalités. Cela signifie qu'on ne précise pas les dispositions auxquelles il est possible de déroger. Il va en résulter un certain nombre d'ambiguïtés et donc vraisemblablement de contentieux, qui renforceront l'insécurité juridique, contrairement à ce que vous souhaitez.
    Il est d'ailleurs probable qu'une des raisons pour lesquelles tout cela ne vous inquiète pas trop, c'est que vous ne vous attendez pas à une foison d'accords. Ceux-ci ne constitueront donc pas une référence très importante. Mais nous nous réjouirons s'ils sont nombreux et s'ils interviennent dans les conditions que vous indiquez. Nous verrons également de quelle manière ils seront pris en compte dans la loi que vous nous présenterez dans dix-huit mois. Je reviendrai d'ailleurs à l'occasion des amendements suivants sur ce problème de chronologie et de cohabitation entre les différents dispositifs juridiques.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 151.
    (L'amendemlent n'est pas adopté.)
    M. le président. Je tiens à remercier M. Gorce, mais aussi le rapporteur et le Gouvernement, d'avoir bien posé les termes d'un débat complexe et important où chacun s'est exprimé clairement.
    M. Fourgous a présenté un amendement, n° 55, ainsi rédigé :
    « Compléter la première phrase du IV de l'article 2 par les mots : " ; leurs dispositions s'appliquent dans ce délai, nonobstant la conclusion d'accords interprofessionnels relevant de la présente loi. »
    La parole est à M. Jean-Michel Fourgous.
    M. Jean-Michel Fourgous. Je voudrais simplement demander à M. le ministre une réponse suite à l'engagement qui a été pris en 2001 de favoriser l'application des accords d'entreprise par une transposition législative.
    Il s'agit d'assurer la validité juridique des accords d'entreprise, notamment dans le cas où les accords interprofessionnels visés à l'article 1er du projet de loi comporteraient des clauses incompatibles avec ces accords d'entreprise. Cette modification permettra de favoriser l'expérimentation et la négociation au sein de l'entreprise.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement, non parce qu'elle était contre, mais parce qu'il lui a semblé redondant. Les choses sont dites très clairement : un accord d'entreprise sera valable deux années, quel que soit le moment où interviendra l'accord interprofessionnel, qui ne le rendra pas caduc. Ainsi que M. le ministre va sans doute le confirmer, le projet répond favorablement au souhait exprimé par M. Fourgous.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. M. Fourgous a d'ores et déjà satisfaction, en effet, et cet amendement me paraît inutile. Le projet de loi apporte toute la sécurité juridique nécessaire aux accords d'entreprises qui seront conclus en son fondement de façon expérimentale et pour une durée déterminée ne pouvant excéder deux ans. Au terme de cette période, un certain nombre d'accords de négociation nous ramèneront dans cette enceinte pour clarifier et fixer de manière plus définitive les règles du jeu. Monsieur Fourgous, votre souhait est donc exaucé.
    M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Je ne voudrais pas laisser penser que le fait que nous ayons laissé passer rapidement tous nos amendements - posant tous la même question, ils appelaient tous la même réponse -, n'était motivé que par le plaisir d'entendre à nouveau M. Fourgous développer ses arguments. Ce serait là une mauvaise interprétation.
    M. le président. Je vous ai proposé de reprendre la parole avant d'arriver à l'amendement de M. Fourgous.
    M. Gaëtan Gorce. Cet amendement pose le problème des rapports juridiques qui vont s'établir entre les différents dispositifs. Dans quelle situation vont se retrouver les salariés au regard du droit du licenciement ? A cet égard, nous n'allons progresser que dans la complexité, si j'ose dire.
    Il y aura d'abord les salariés soumis aux procédures en cours et qui resteront concernés par la loi de modernisation sociale, sauf accord expérimental prévu à l'article 3, auquel nous arrivons. Il y aura ensuite ceux dont la procédure de licenciement commencera après le vote de cette loi et qui seront donc soumis à la loi telle qu'elle existait antérieurement, sauf accord dérogatoire conclu en vertu de l'article 2. Il y aura enfin ceux qui relèveront de l'accord interprofessionnel et de la loi qui le reprendra, sauf accord dérogatoire visé à l'article 2. Je fais observer que ces accords s'appliqueront au-delà de la date à laquelle l'accord interprofessionnel et la loi seront intervenus. Ils seront donc toujours valables pour deux ans. Ils pourront ainsi être signés à la fin du processus de négociation et au début du processus législatif, et s'appliqueront pendant une période au cours de laquelle ces dispositions, accords interprofessionnels et lois, commenceront à être mis en oeuvre.
    Nous serons alors dans une situation ubuesque puisque coexisteront toute une série de dispositions différentes applicables aux salariés, au regard du droit de licenciement. Je ne suis pas sûr, je le répète, que cela nous apporte une sécurité juridique très grande. Quant au principe d'égalité, qu'on nous a souvent opposé, mieux vaut ne pas en parler. En cas de contentieux, quelles seront les règles applicables ? Lesquelles seront plus favorables et susceptibles d'être revendiquées ? Sous prétexte de laisser toute sa place à la négociation, le Gouvernement est en fait en train de nous construire une belle usine à gaz. Mais enfin, libre à lui ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Monsieur Fourgous, maintenez-vous votre amendement ?
    M. Jean-Michel Fourgous. Ayant obtenu une réponse claire de la part du ministre, je le retire, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 55 est retiré.
    M. Gremetz, Mme Jacquaint, MM. Dutoit, Liberti, Desallangre et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 7, ainsi rédigé :
    « Compléter l'article 2 par le paragraphe suivant :
    « VI. - Dans l'article L. 132-19 du code du travail, les mots : "au sens de l'article L. 132-2, sont remplacés par les mots : "ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés aux dernières élections au comité d'entreprise, ou à défaut, des délégués du personnel. »
    La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
    Mme Jacqueline Fraysse. Avec cet amendement, nous revenons sur la notion d'accord majoritaire, qui est à nos yeux un principe démocratique fondamental du code du travail. Alors que, le mois dernier, vous nous disiez, monsieur le ministre, qu'il n'était pas possible d'aborder cette question maintenant, qu'il fallait attendre 2003 et la concertation avec les organisations syndicales, vous venez subitement de revenir sur cette idée. Comment interpréter ce revirement ? S'agit-il de concéder dans certains cas la possibilité d'un accord majoritaire, pour finalement mieux porter atteinte au code du travail ? Nous ne voyons pas d'autre explication. Si je me trompe pour l'interprétation de ce revirement, vous pourrez rectifier en soutenant l'amendement que nous proposons.
    Il est évident qu'une question aussi importante que celle des règles régissant les licenciements économiques ne peut être tranchée par des accords que si ceux-ci sont largement représentatifs des secteurs d'activité. C'est pourquoi il faudrait que les branches concernées représentent les trois quarts des salariés. Les quelques personnes qui négocient l'accord des fabricants de chapeaux ou de boutons ne peuvent se substituer à la représentation nationale. Il faudrait, ensuite, que les syndicats signataires soient eux-mêmes majoritaires, cette règle majoritaire pouvant alors s'étendre à l'ensemble des accords de branche ou interprofessionnels.
    Tel est l'objet de cet amendement, qui vise à soumettre l'habilitation à négocier et à conclure une convention ou un accord d'entreprise à l'expression de la volonté de la majorité des salariés concernés par ces règles collectives.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. Cet amendement, très intéressant et très important, nous renvoie au débat que nous avons déjà eu partiellement tout à l'heure sur la notion et l'étendue des accords majoritaires. Mais il sort un peu du seul champ du licenciement, puisque vous souhaitez, madame Fraysse, qu'on étende cette procédure aux accords de branche. C'est précisément parce qu'il allait au-delà de la logique du texte, qui s'en tient au licenciement, que la commission a rejeté cet amendement.
    Toutefois, je ne suis pas hostile à l'idée d'avancer progressivement vers des accords majoritaires. Cela dit, et vous le savez sans doute mieux que moi, ce n'est pas la tradition française pour l'instant. D'ailleurs, si telle avait été la règle prévue dans un texte auquel vous êtes attaché, celui qui a institué les 35 heures, nous serions parvenus à peu d'accords.
    Mme Jacqueline Fraysse. C'est faux !
    M. Maxime Gremetz. Nous en aurions eu beaucoup et ils auraient été meilleurs !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Je pense, monsieur Gremetz - je m'aventure là sur des terres que je connais moins bien, mais M. le ministre rectifiera au besoin - qu'on aura d'autant plus de chances d'arriver à ce que vous souhaitez que la méthode consistant à ouvrir des négociations larges et fréquentes se confirmera. Il importe d'ancrer la négociation dans les habitudes. Mais il faut aussi que le Gouvernement n'intervienne pas sur les sujets sur lesquels les partenaires sociaux eux-mêmes ne souhaitent pas négocier. Plus ces derniers seront responsabilisés et plus on a une chance de parvenir à la généralisation ou à l'extension de la procédure de l'accord majoritaire. En l'état actuel des choses et indépendamment du fait qu'une telle disposition ne relève pas de ce texte, il me semblerait bien osé d'imaginer qu'on puisse généraliser ces accords à tout le champ du droit social.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Madame Fraysse, il n'y a pas de revirement du Gouvernement. J'ai indiqué presque aussitôt après avoir été nommé aux responsabilités que j'occupe, que j'étais favorable à une évolution des règles de la démocratie sociale. Ce que nous vous proposons aujourd'hui, et d'ailleurs plusieurs d'entre vous l'ont fait remarquer, est extrêmement limité. M. Gremetz a parlé d'un accord majoritaire pour des dérogations sur des questions extrêmement limitées touchant à l'information et aux modalités de concertation du comité d'entreprise, de manière expérimentale, pour deux ans. Donc, le champ est très limité. C'est un pas, un petit pas, me direz-vous...
    M. Maxime Gremetz. Un pas de fourmi !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... en direction des accords majoritaires. En tout cas, ce n'est pas un revirement par rapport à la position que le Gouvernement a défendue à l'occasion de la loi sur l'assouplissement des 35 heures, et selon laquelle, pour aller vers des accords majoritaires, il faut que se dessine un consensus assez large au sein des organisations syndicales et parmi les partenaires sociaux, parce qu'on touche à leur existence même, au fond des règles du dialogue social dans notre pays.
    Je ne souhaite pas qu'à la faveur de ce débat, aussi important soit-il, on modifie sans aucune concertation les règles de validation des accords d'autant, madame Fraysse, que l'on ne pourrait alors s'en tenir à la seule question de l'accord majoritaire. Si l'on veut, demain, généraliser les accords majoritaires, il faut parler de la représentativité. On ne peut pas, avec un très faible nombre de salariés syndiqués, fonder une nouvelle politique de validation des accords.
    Notre démarche doit être générale pour conforter la place des partenaires sociaux avant d'aller, par étapes, vers l'accord majoritaire avec un minimum de consensus de la part des organisations syndicales. C'est la tâche à laquelle nous nous appliquerons dès le début de l'année 2003. J'estime qu'il est prématuré, aujourd'hui, d'aller plus loin que ce que le Gouvernement propose.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, j'aimerais expliquer notre vote sur l'article 2.
    M. le président. Je vous donnerai la parole juste après la mise aux voix de l'amendement.
    Je mets aux voix l'amendement n° 7.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Sur l'article 2, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Maxime Gremetz, pour expliquer son vote.
    M. Maxime Gremetz. Je vous préviens très franchement et très solennellement...
    M. Jean-Paul Anciaux. Et très sincèrement !
    M. Maxime Gremetz. ... qu'on ne va pas continuer ce débat aussi tranquillement. Il y a des limites à ne pas franchir : par rapport au texte de départ, rien n'a bougé, pas une ligne, pas une virgule ! On dit qu'on est d'accord, mais en paroles seulement ! Nous faisons notre travail d'opposition pour améliorer le texte, lever les ambiguïtés, pour que ce soit bien clair, mais on refuse tout. Autant dire qu'un projet gouvernemental, quel qu'il soit, arrive au bout de son parcours tel qu'il était au départ, sans que rien n'ait changé.
    Si c'est ça votre conception du pluralisme, on va en parler, et jusqu'au petit matin s'il le faut ! Ça suffit, à la fin ! Gentiment, mais invariablement, on nous dit non. Vous vous souvenez de la formule devenue célèbre : niet, niet, niet ! Il y avait la télévision, à l'époque : c'est passé sur toutes les chaînes !
    Eh bien là, c'est pareil ! J'ai connu ça trop longtemps pour qu'on m'y reprenne. Pas deux fois ! Si on n'est pas d'accord, on s'explique. J'ai l'habitude de dire : « Les paroles, c'est une chose, mais la politique, ça se mesure aux actes. » Vous avez des positions que je combats, c'est évident. Pour une fois qu'on est d'accord sur quelque chose, pourquoi ne pas faire un geste ? Mais vous avez choisi votre tactique : causez, causez, causez, je vous écoute, mais je ne vous entends pas ; je vous réponds, mais ça ne changera rien !
    Eh bien, je n'ai pas l'habitude, moi, de travailler pour rien ! Sinon, je vais me coucher.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Bonne idée !
    M. Maxime Gremetz. Hors de question ! Et croyez-moi, vous allez vous coucher tard, très tard, même ! Mes amis, eux, sont habitués, n'est-ce pas ? Ce qui était vrai hier l'est aussi aujourd'hui. Toujours la cohérence ! Ça ne va vraiment pas.
    M. Jean-Michel Fourgous. Vous nous harcelez !
    M. Maxime Gremetz. Vous serez plus vite fatigués que moi ! J'en ai épuisé beaucoup ! Les marathons, je connais. Et c'est l'heure, justement, où je me sens en pleine forme. C'est ma troisième nuit ! Alors croyez-moi, on y sera encore au petit matin.
    Voilà ce que j'avais à dire.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix l'article 2.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    M. Maxime Gremetz. Je demande la parole, monsieur le président.
    M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   52
Nombre de suffrages exprimés   52
Majorité absolue   27
Pour l'adoption   40
Contre   12

    L'Assemblée nationale a adopté.
    Vous pouviez tout de même me laisser donner le résultat du scrutin, monsieur Gremetz !
    Vous avez la parole.
    M. Maxime Gremetz. Les résultats ne font aucun doute, passons !
    Je voudrais que les membres de mon groupe puissent se réunir pour examiner un important amendement du Gouvernement et je demande une suspension de séance.
    M. le président. Je vous accorde cinq minutes.
    M. Maxime Gremetz. Je vous en prie, monsieur le président. Ne m'obligez pas à demander trois fois de suite une suspension de séance !
    M. le président. Mais je vous l'ai accordée, monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Non ! Il ne faut pas cinq minutes pour examiner un amendement qui revient sur l'allocation équivalente retraite que les socialistes ont inventée pour combattre notre proposition de loi sur le départ à la retraite avant soixante ans pour ceux qui ont cotisé quarante annuités. On nous refile le bébé et on veut transférer la charge à la sécurité sociale.
    M. le président. Dans un esprit de conciliation, je suspends la sénace pour dix minutes.
    M. Maxime Gremetz. Vous mégotez !

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à vingt-deux heures cinquante, est reprise à vingt-trois heures cinq.)
    M. le président. La séance est reprise.
    Je dois dire que cette suspension n'était pas inutile.

Article 3

    M. le président. « Art. 3. - Les dispositions du code du travail mentionnées au I de l'article 1er restent applicables aux procédures de licenciement pour motif économique en cours à la date de promulgation de la présente loi, sauf accord d'entreprise passé dans les conditions prévues à l'article 2. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz, inscrit sur l'article.
    M. Maxime Gremetz. L'article 3 sacralise les dérogations à la loi et vous mettez le pied dans une logique dangereuse.
    En effet, cet article permet de déroger au principe posé par la loi et, en conséquence, d'ignorer totalement le principe de faveur pour les salariés, en vertu duquel un accord issu de la négociation ne peut être de portée moindre que le code du travail.
    Ainsi, si un accord peut être immédiatement conclu dans une entreprise dans les formes et les conditions prévues à l'article 2 - dont nous avons montré le caractère aléatoire et arbitraire, d'autant que vous avez refusé l'amendement qui permettait de lever toute ambiguïté -, les principes issus de la loi de modernisation sociale seront également suspendus. Par conséquent, lorsqu'une procédure de licenciement sera engagée, il sera possible d'appliquer directement votre projet de loi.
    En définitive, avec l'article 3, vous créez une discrimination assez incroyable entre ceux qui ont respecté les dispositions légales en vigueur et ceux qui les ont violées. A ces derniers, le nouveau texte donne l'absolution et offre la légalisation.
    Vous bouleversez complètement la hiérarchie des normes : la loi aura le second rôle. Mais vous ne dites pas encore que c'est vers cela que vous allez, et là est le danger. Vous ne donnez aux salariés aucune chance d'avoir un point d'appui pour contester les licenciements ou s'y opposer, ou pour formuler des propositions alternatives. Vous coupez court à toute possibilité de leur accorder des droits nouveaux, puisque tout sera renvoyé à la négociation et que la loi ne sera plus appliquée.
    Nous savons qu'en matière de législation sociale, et de droit du travail en particulier, il est important d'imposer le cadre dans lequel se déroulera la négociation, et de fixer un seuil minimum en deça duquel elle ne pourra aboutir. C'est ce qu'on appelle le « principe de faveur » -, qui fonde notre code du travail et constitue une garantie pour les salariés. Vous lui tordez le cou. C'est inacceptable et c'est pour cette raison que nous proposerons la suppression de l'article 3.
    Celui-ci s'inscrit dans une philosophie que j'ai trop entendue. Evidemment, vous n'aimez pas reconnaître que c'est ce que vous demandent depuis bien longtemps les employeurs et, en particulier le MEDEF. Alors que, d'ordinaire, celui-ci juge que les textes sont trop modestes et ne vont jamais assez loin, il a, pour une fois, publiquement salué ce texte, réfléchissez-y ! Il ne le fait pas à mauvais escient : il y trouve parfaitement son compte. En effet, il a continuellement appelé de ses voeux la possibilité de passer par-dessus la loi, jugée trop contraignante, pour exiger ce qu'il veut des salariés afin de mieux satisfaire les appétits des grands groupes.
    Et quand je parle du MEDEF, il ne s'agit pas des représentants de ses CGPME, mais bien du syndicat, c'est M. Seillière et de son grand ami, numéro deux du MEDEF, M. Guillaume Sarkozy. Ce n'est pas n'importe qui ! Il ne s'agit pas de petits patrons. Vous donnez délibérément un gage au baron Seillière et à M. Sarkozy, et le meilleur appui qu'ils pouvaient espérer dans leur quête de refondation sociale, qui consiste pour l'essentiel à prendre d'assaut les acquis des salariés et du monde du travail. Vous devrez dans l'avenir en assumer toute la responsabilité, car chacun saura s'en souvenir.
    Permettez-moi, monsieur le ministre, de vous rappeler quelques-unes de vos déclarations. J'ai bonne mémoire et j'ai aussi le texte de vos propos. Dès votre prise de fonctions, vous avez déclaré - cela avait attiré mon attention, parce que c'était là une question que je posais depuis longtemps - que vous n'étiez pas hostile à l'idée de revoir à la fois la question de la démocratie sociale et celle de la représentativité des organisations syndicales. Vous aviez même ajouté que l'on y verrait plus clair après les élections prud'homales. Or nous en approchons. Nous allons donc y voir tout à fait clair ! Nous allons pouvoir engager ce chantier, mais je ne suis pas sûr - c'est le moins que l'on puisse dire - qu'il sera mené à bien. Mais qui vivra verra !
    En tout cas, nous sommes très attentifs à cette question. Et, je vous le redis, monsieur le ministre, nous allons désormais nous battre pied à pied, avec le peu de moyens qui nous sont donnés. Quand on n'est pas respecté, il faut se faire respecter avec les moyens dont on dispose. Nous regrettons de devoir agir ainsi - nous n'aimons pas cela - mais nous savons le faire, nous l'avons montré. Et nous sommes, dans ce domaine, des coureurs de fond.
    M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Cet article rappelle que l'ensemble des dispositions de la LMS restent applicables aux procédures en cours pour aussitôt prévoir une dérogation pour ce qui concerne les accords expérimentaux signés en vertu de l'article précédent. Cette disposition nous paraît particulièrement dangereuse pour plusieurs raisons.
    D'abord, il n'est pas acquis - nous l'avons dit lors de l'examen de l'article 2 - que la négociation puisse réellement s'engager. Les syndicats n'y trouveront en effet pas forcément avantage dans la mesure où ils peuvent considérer qu'on leur demande de cautionner des licenciements auxquels ils n'ont pas été associés dès le départ. Le chef d'entreprise n'y a pas non plus nécessairement intérêt dans la mesure où une négociation sur le licenciement peut signifier pour lui un renchérissement de la procédure, à moins d'obtenir en contrepartie - ce que vous n'évoquez pas et ce que nous n'avons pas vu sous forme d'amendement, mais cette hypothèse a dû travailler quelques esprits - que l'accord signé devienne incontestable, autrement dit que l'on accorde aux signataires de l'accord une garantie face à d'éventuels contentieux devant les juridictions. Mais, officiellement, cela ne figure pas dans vos intentions.
    Demander à des partenaires de négocier sur les procédures avant que le licenciement ne soit engagé est à la rigueur concevable, bien que nous vous ayons fait part de nos réserves, non pas sur le principe mais sur les modalités. Mais leur demander de redéfinir en cours de procédure les modalités de consultation et d'information nous paraît extrêmement risqué. C'est la raison pour laquelle nous ne pouvons approuver cette disposition. Elle placerait les organisations syndicales qui accepteraient de s'engager dans ce processus en position de faiblesse. Je ne vois d'ailleurs pas ce qu'apporte cette dérogation à l'ensemble du dispositif. Je ne vois pas pourquoi on introduit une complexité supplémentaire. La distinction opérée entre ceux qui continueront de relever de la loi de modernisation sociale et ceux qui seront renvoyés à un accord expérimental n'est en rien justifiée. Je cherche toujours la justification de ce dispositif. Peut-être, monsieur le ministre, nous la donnerez-vous. Pour moi, il ne présente aucun avantage et n'apporte aucune garantie : il ne mérite donc pas de figurer dans ce texte.
    M. le président. M. Gremetz, Mme Jacquaint, MM. Dutoit, Liberti, Desallangre et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 8, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 3. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. J'ai déjà donné beaucoup de raisons pour supprimer l'article 3.
    J'insisterai sur le fait que cet article est particulièrement dangereux. Toutes les organisations syndicales le soulignent à l'exception de la CFDT qui, du moins à ce que j'ai cru comprendre en lisant la presse, vous demande, monsieur le ministre, d'en rester à l'équilibre que vous avez trouvé avec elle et donc de rejeter tous les amendements de votre majorité qui ont été adoptés en commission. C'est une prise de position publique, mais les autres syndicats ne sont pas du tout d'accord.
    Vous mettez en avant les mécontentements qui se sont manifestés à l'égard de la loi de modernisation sociale. Je sais bien pourquoi. Les conditions dans lesquelles elle a été élaborée et le retard très préoccupant accumulé par notre pays n'ont pas permis de procéder à la concertation nécessaire et de consulter les organisations syndicales. Je le regrette d'autant plus que je suis persuadé que si nous étions parvenus à une élaboration commune de cette loi, celle-ci aurait été plus lisible et plus efficace, et, aujourd'hui, les syndicats appelleraient à se mobiliser partout dans les entreprises pour la défendre.
    Qu'on le veuille ou non, en dépit de ses imperfections, cette loi a donné des droits nouveaux aux comités d'entreprise, aux délégués du personnel et aux salariés. Elle a amélioré la démocratie sociale, la consultation et l'information. Elle a donné aux salariés licenciés la garantie d'avoir des propositions concrètes de reclassement. Elle a obligé les employeurs - je ne parle pas des petits, mais de ceux qui restructurent et délocalisent à l'étranger, laissant derrière eux des déserts - à réindustrialiser les régions qu'ils abandonnent et à investir pour créer de nouvelles activités. C'est tout cela qu'elle a apporté.
    C'est pourquoi tous les syndicats s'opposent aujourd'hui aux dispositions de l'article 3, hormis la CFDT, qui veut que soit conservé l'équilibre du texte que le ministre du travail lui a présenté, et surtout que soient rejetés les amendements de la droite - je ne dirai pas extrémiste, ni extrême -,...
    M. Dominique Dord, rapporteur. Ultra ?
    M. Maxime Gremetz. Non plus !
    M. Jean-Michel Fourgous. La droite favorable aux entreprises !
    ... et que soient rejetés, dis-je, les amendements de la droite, de la droite la plus dure, la « médéfienne », la « sarkozienne », à la Guillaume !
    Cette droite-là a proposé en commission des amendements qui ont été retenus. Monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission, comment avez-vous pu laisser faire pareille chose ? Comment avez-vous pu accepter de tels amendements ? Aujourd'hui, le ministre est obligé, pour tenir ses engagements à l'égard d'un syndicat qui est loin d'être majoritaire, vous le savez bien, de vous dire « non ».
    Et M. Fourgous après avoir consacré toute sa journée à ses amendements, va passer sa nuit à les retirer. Moi, j'irais me coucher tout de suite. Quand je dépose un amendement, je le défends jusqu'au bout. Il faut être convaincu, ne pas faire semblant. Quand on joue au tennis, on se bat sur chaque balle. Là, c'est pareil.
    En tout cas, l'article 3 nous paraît dangereux, pour toutes les raisons que j'ai indiquées. Il nous paraît tellement dangereux que nous proposons de le supprimer. Et pour que les choses soient claires, pour que chacun prenne ses responsabilités, le mieux est évidemment de demander un scrutin public sur l'amendement n° 8.
    M. le président. A ma connaissance, ...
    M. Maxime Gremetz. Tout est prévu, monsieur le président : j'ai rempli la feuille verte de demande de scrutin public. Mais je vous rappelle, puisque vous m'avez dit que les choses devaient se faire dans les formes, qu'il n'est pas obligatoire, quand on demande publiquement un scrutin, de fournir cette feuille verte. J'ai fait vérifier ce point car j'ai eu un jour un différend très important avec un président de séance.
    Cela dit, monsieur le président je vous donne néanmoins cette feuille en cadeau.
    M. le président. Merci, monsieur Gremetz vous êtes bien aimable.
    Sur l'amendement n° 8, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 8 ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. Défendre un amendement de suppression de l'article 3 est cohérent avec l'attitude qui est la vôtre depuis le début de la discussion, monsieur Gremetz. Vous avez souhaité que l'on supprime l'article 1er, puis l'article 2. Vous proposez maintenant de supprimer l'article 3. C'est légitime et bien compréhensible.
    Néanmoins, au stade où nous en sommes, c'est-à-dire après l'adoption de l'article 1er et de l'article 2, supprimer l'article 3 ouvrirait un véritable vide juridique. Aussi longtemps que le débat n'avait pas commencé, on pouvait imaginer de supprimer l'article 3. Mais maintenant que les articles 1er et 2 ont été adoptés, nous avons besoin de l'article 3 pour savoir quel droit s'applique...
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas un argument ! On peut très bien recommencer depuis le début et reprendre l'examen de l'article 1er et de l'article 2 !
    M. Dominique Dord, rapporteur. ... pendant la période en question, et surtout, comment se dérouleront les procédures de licenciement en cours. Je pense que cet article est utile par sa précision. Pour les procédures en cours, il prévoit que les dispositions de la loi de modernisation sociale dont ce projet suspend l'application continuent de s'appliquer - ce qui ne devrait pas vous choquer -, mais qu'elles s'appliquent « sauf accord d'entreprise passé dans les conditions prévues à l'article 2 ». Je conçois que cette dernière précision vous gêne plus, monsieur Gremetz, puisque vous n'êtes pas favorable aux accords d'entreprise visés à l'article 2, mais vous comprendrez que dans la logique qui est la nôtre, et qui intègre les deux articles qui ont été votés, nous soyons, nous, hostiles à votre amendement.
    M. Maxime Gremetz. Je le comprends très bien !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur Gremetz, je croyais au contraire que l'article 3 serait le seul qui aurait votre faveur, puisqu'il permet d'appliquer aux plans sociaux en cours les dispositions que vous jugez si efficaces. Nous n'avons pas voulu de bouleversement pour les restructurations déjà engagées, et qui le sont sur la base de la législation existante. Car il faut éviter l'insécurité juridique pour les salariés et les entreprises. Il est tout à fait naturel que le Gouvernement ait souhaité que le texte que l'Assemblée s'apprête à adopter ne s'applique qu'aux entreprises qui seront concernées par des plans sociaux après sa date de promulgation.
    Je crois qu'il est même de votre intérêt, monsieur Gremetz, que cet amendement ne soit pas adopté.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je vais mettre aux voix l'amendement n° 8.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   45
Nombre de suffrages exprimés   44
Majorité absolue   23
Pour l'adoption   6
Contre   38

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    M. Fourgous a présenté un amendement, n° 56, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 3 :
    « I. - Les mesures prévues au I de l'article 1er sont applicables, sous réserve des décisons passées en force de la chose jugée, aux procédures de licenciement pour motif économique en cours à la date de promulgation de la présente loi.
    « II. - Lorsque une entreprise a entamé une procédure sur la base du livre IV et qu'elle n'est pas achevée avant l'entrée en vigueur de la présente loi, elle peut choisir de commencer immédiatement la procédure du livre III, dans le respect des dispositions visées au III de l'article 1er de la présente loi.
    « III. - Lorsqu'un expert-comptable a été désigné dans le cadre du livre IV et qu'il n'a pas encore rendu son rapport, sa mission peut-être suspendue jusqu'à la présentation par l'employeur du plan de sauvegarde de l'emploi au comité d'entreprise (première réunion du livre III). Le rapport de l'expert porte sur l'ensemble de la procédure (livre IV et livre III). »
    La parole est à M. Jean-Michel Fourgous, qui a écouté les conseils de M. Gremetz. (Sourires.)
    M. Jean-Michel Fourgous. Que fait-on pour les entreprises qui subissent déjà les effets négatifs de la loi de modernisation sociale ? Est-il cohérent, maintenant qu'on sait que les dispositions dont le projet suspend l'application sont nuisibles, de les maintenir pour les procédures en cours ?
    De plus, pour que l'équité entre toutes les entreprises soit respectée, il faut rapprocher leurs situations devant la loi en permettant l'application aux procédures en cours des nouvelles dispositions. Cet amendement vise à éviter que l'adoption de ce projet de loi ait pour effet de nous faire entrer dans une période suspecte, ce qui serait source de contentieux et entraînerait des démarches très lourdes dont les entreprises françaises n'ont vraiment pas besoin en ce moment.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement pour les raisons que j'ai déjà indiquées, mais que je voudrais développer à nouveau à l'intention de M. Fourgous, dans l'espoir de le convaincre.
    D'abord, si nous procédions comme il le propose, nous donnerions aux organisations syndicales le sentiment d'une remise en cause des négociations en cours...
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C'est le moins qu'on puisse dire !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... dans les entreprises concernées. Celles-ci mettraient en avant le fait que notre réforme serait un texte de circonstance.
    Une application immédiate des nouvelles dispositions aux procédures en cours rendrait également difficile la détermination du régime des actes antérieurs à la promulgation de cette loi. Dans le cadre d'une procédure en cours, certains actes auraient été pris sous le régime d'une loi et l'on changerait leur régime alors même que la procédure se poursuit : cela engendrerait évidemment une insécurité extrême pour l'ensemble des parties.
    En premier lieu, il serait en tout état de cause nécessaire de prendre des mesures techniques et transitoires visant à régir l'expertise. En second lieu, et surtout, l'application immédiate de la loi serait source d'insécurité juridique, sachant que le juge saisi de recours relatifs aux licenciements prononcés pourrait apprécier la validité de la procédure de licenciement, à la date de notification des licenciements, au regard des dispositions de la nouvelle loi.
    Pour éviter ce risque, il serait nécessaire de prendre des dispositions rétroactives validant au regard des prescriptions de la nouvelle loi les actes de procédure antérieurs à celle-ci. Cela supposerait qu'un motif d'intérêt général puisse être invoqué pour justifier une telle validation, sans jamais avoir l'assurance que tel ou tel juge n'écartera pas ces décisions en invoquant l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.
    Pour l'ensemble de ces raisons, les précédentes lois relatives au licenciement économique, celle de 1986, celle de 1989 et la loi de modernisation sociale, avaient toutes préservé les procédures en cours.
    Notre volonté commune, monsieur Fourgous, est de restaurer l'attractivité du territoire, d'éviter des licenciements, de favoriser l'investissement en France. Vous conviendrez avec moi qu'une application de la nouvelle loi aux procédures en cours ne pourrait rien changer à cet égard. Il n'y a donc pas de motif d'intérêt général suffisant pour changer les règles s'appliquant aux plans sociaux en cours, ce qui reviendrait au contraire à adresser aux salariés directement concernés un message qui serait à coup sûr mal compris.
    Cela dit, l'article 3 donne aux partenaires sociaux, dans l'entreprise, la liberté de convenir ensemble, par un accord de méthode majoritaire, de se placer dans le cadre juridique de la loi nouvelle. Je crois que cette disposition-là et les arguments que je viens d'évoquer devraient vous convaincre de ne pas suivre les mauvais conseils de M. Gremetz, qui ne vous les donne que pour vous nuire. (Sourires.)
    M. le président. Monsieur Le Bouillonnec, vous voulez vous exprimer contre l'amendement, je suppose ?
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Oui, monsieur le président.
    On peut dire que M. Fourgous n'y va pas de main morte ! Derrière son intervention lapidaire, il y a quand même l'idée que le seul objectif qu'il faut atteindre, et le plus vite possible, c'est empêcher qu'il y ait une procédure protégeant les salariés dans le cadre d'un licenciement pour motif économique. C'est cela que vous avez indiqué, monsieur Fourgous,...
    M. Jean-Michel Fourgous. Quelle caricature !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. ... et même M. le ministre n'a pas réussi à vous convaincre de l'intérêt qu'il y a à ouvrir une négociation, ni du fait qu'une négociation entre les salariés et l'entreprise n'a pas pour but de mettre en cause l'entreprise.
    Par ailleurs, concernant l'article 3, je voudrais souligner quelques points qui montrent que nos inquiétudes reposent sur des éléments concrets. Par exemple, mais c'est sans doute un hasard, on envisageait de suspendre la mission des experts-comptables désignés en application du livre IV lorsqu'ils n'avaient pas encore rendu leur rapport. Vous voyez que, tout à l'heure, notre collègue Gaëtan Gorce avait raison de parler des problèmes qui se posent. En examinant de près chacun d'eux, on découvre à chaque fois la même intention de déséquilibrer le processus de discussion.
    Cet amendement est donc extrêmement révélateur des intentions d'une grande partie de la majorité concernant le processus de négociation. En définitive, il s'agit d'aller vers la suppression des garanties dont bénéficient les salariés dans les procédures de licenciement collectif.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Fourgous.
    M. Jean-Michel Fourgous. Je n'avais pas compris que j'avais demandé d'en finir avec toute espèce de sécurité pour les salariés. La relecture de mes propos par notre collègue Le Bouillonnec est assez intéressante. Elle m'aide à comprendre ma propre pensée. Je vous en remercie, mon cher collègue.
    Mais redevenons sérieux : il n'est absolument pas question de toucher au minimum de protection dont bénéficient les salariés. Vous l'avez très bien compris : le but de cet amendement était d'instaurer l'équité pour les entreprises.
    Quoi qu'il en soit, M. le ministre nous ayant répondu, je retire cet amendement.
    Mme Jacqueline Fraysse. Comme d'habitude !
    M. le président. L'amendement n° 56 est retiré.
    M. Maxime Gremetz. C'est dommage, j'avais préparé une demande de scrutin public !
    M. le président. Avant d'appeler l'amendement n° 177 de M. Gorce, j'indique à l'Assemblée que, sur le vote de cet amendement, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Je vais d'ores et déjà faire annoncer le scrutin, de manière à permettre à nos collègues de regagner l'hémicycle.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    MM. Gorce, Le Garrec et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 177, ainsi rédigé :
    « Après les mots : "présente loi, supprimer la fin de l'article 3. »
    La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous avons bien compris que l'unique phrase de l'article 3 comprenait, dans sa première partie, la possibilité de laisser se dérouler les procédures actuellement en cours. Je donne acte au rapporteur que la suppression de l'article 3 aurait eu pour effet de nous placer dans une situation juridique un peu compliquée. Mais l'argument ne vaut pas pour la fin de la phrase : « sauf accord d'entreprise passé dans les conditions prévues à l'article 2 ». D'une part, nous avons contesté l'article 2 ; nous ne pouvons donc pas imaginer qu'il soit maintenu dans le dispositif législatif en discussion ou que l'on sous-entende que nous sommes d'accord.
    M. Maxime Gremetz. Vous avez raison !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. D'autre part et surtout, en maintenant la rédaction actuelle, nous consacrerions en réalité la coexistence de trois dispositifs : le dispositif ancien pour les procédures en cours ; le dispositif nouveau pour les procédures - ou la négociation - déclenchées par l'application de la loi ; et, enfin, le dispositif prévu à l'article 2. La confusion juridique dont M. le ministre et M. le rapporteur ont fait état sera donc poussée à l'extrême.
    Dans une situation comme celle-ci, il est préférable de conserver les cadres législatifs les plus clairs possible. Sans vouloir défendre une loi que je conteste depuis le début, il me semble qu'il aurait suffi de ne prévoir que deux cas : l'application de la loi de modernisation sociale pour les procédures en cours, l'application de la nouvelle loi pour celles qui vont s'engager.
    Le problème est d'une extrême importance : en effet, la faculté d'appliquer l'article 2 aux procédures en cours va pouvoir être utilisée pour les bloquer. L'objectif devrait pourtant bien être qu'elles aillent à leur terme.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. Un éventuel blocage des procédures en cours ne devrait pas vous déplaire, monsieur Le Bouillonnec, dans la mesure où vous nous avez plutôt reproché de vouloir en accélérer le déroulement. Il y a donc une faille dans votre argumentation, mais peu importe.
    Il me semble que vous avez à la fois raison et un peu tort.
    Vous avez raison parce qu'il aurait été en effet moins compliqué, par définition, de prévoir que les procédures en cours restaient sous l'empire de la loi de modernisation sociale, en renonçant à l'option, ouverte par la deuxième partie de la phrase, de conclure immédiatement un accord d'entreprise dans les conditions décrites à l'article 2 que vous avez combattu. Sur ce point, je ne peux que vous donner raison : il est plus compliqué de prévoir une option et un régime unique aurait été plus simple.
    Mais vous avez tort en affirmant qu'il s'agit d'une situation extrêmement compliquée, susceptible d'entraîner une incertitude juridique. En réalité, quand ils se reporteront à ce texte, les partenaires sociaux engagés dans une procédure de licenciement économique vont aller très vite à l'article 3 - le reste ne les concerne pas a priori -, qui les place devant un choix binaire, donc pas extrêmement compliqué : conserver la même procédure ou conclure un accord d'entreprise. Tout cela ne me paraît pas d'une complexité insurmontable, ni sur le plan pratique, ni sur le plan juridique.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. La démonstration du rapporteur est parfaite.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je vais mettre aux voix l'amendement n° 177.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   44
Nombre de suffrages exprimés   44
Majorité absolue   23
Pour l'adoption   10
Contre   34

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    Sur l'article 3, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je vais mettre aux voix l'article 3.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin.

Nombre de votants   46
Nombre de suffrages exprimés   46
Majorité absolue   24
Pour l'adoption   36
Contre   10

    L'Assemblée nationale a adopté.

Après l'article 3

    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 52 et 38, deuxième rectification, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 52, présenté par M. Fourgous, est ainsi rédigé :
    « Après l'article 3, insérer l'article suivant :
    « A la fin du premier alinéa de l'article L. 122-14-4 du code du travail, les mots et les phrases : "il prononce la nullité du licenciement et ordonne, à la demande du salarié, la poursuite du contrat de travail. Cette décision est exécutoire de droit à titre provisoire. Lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de son contrat de travail, le tribunal octroie au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des douze derniers mois sont remplacés par les mots : "il peut, à la demande du salarié, lui accorder une indemnité d'un montant maximum égal au salaire des six derniers mois. »
    L'amendement n° 38, deuxième rectification, présenté par Mme Bourragué, MM. Anciaux, Bernier, Colombier, Couanau, Cugnenc, Depierre, Fagniez, Hamelin, Juillot, Tian, Mmes Gallez, Levy, Marland-Militello et M. Dubernard, est ainsi libellé :
    « Après l'article 3, insérer l'article suivant :
    « I. - Les trois dernières phrases du premier alinéa de l'article L. 122-14-4 du code du travail sont remplacées par une phrase ainsi rédigée :
    « Lorsque le tribunal constate que le licenciement est intervenu alors que la procédure de licenciement est nulle, conformément aux dispositions du cinquième alinéa de l'article L. 321-4-1, il octroie au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des douze derniers mois ».
    « II. - Dans le cinquième alinéa de l'article L. 321-4-1 du même code, les mots : "et de nul effet sont supprimés. »
    La parole est à M. Jean-Michel Fourgous, pour défendre l'amendement n° 52.
    M. Jean-Michel Fourgous. Je le retire, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 52 est retiré.
    La parole est à Mme Chantal Bourragué, pour défendre l'amendement n° 38, deuxième rectification.
    Mme Chantal Bourragué. Je le retire également, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 38, deuxième rectification, est retiré.
    Je suis saisi de deux amendements, n°s 106 et 39, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 106, présenté par MM. Novelli, Fourgous, Moyne-Bressand et Gorges, est ainsi libellé :
    « Après l'article 1er, insérer l'article suivant :
    « I. - Le premier alinéa de l'article L. 122-49 du code du travail est ainsi rédigé :
    « Aucun salarié ne doit subir des agissements de harcèlement moral. Sont constitutifs de tels agissements les actes, propos, attitudes ou abstentions visant à humilier, isoler ou déconsidérer une personne, dès lors que, par leur répétition et la manière insidieuse dont ils sont commis, ils révèlent, de la part de leur auteur, un comportement systématique ».
    « II. - L'article L. 122-52 du code du travail est ainsi rédigé :
    « Art. L. 122-52. - En cas de litige relatif à l'application des articles L. 122-46 et L. 122-49, le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ».
    « III. - L'article 222-33-2 du code pénal est ainsi rédigé :
    « Art. 222-33-2. - Les agissements, actes, propos, attitudes ou abstentions visant à humilier, isoler ou déconsidérer une personne, qui, par leur répétition et la manière insidieuse dont ils sont commis, révèlent, de la part de leur auteur, un comportement systématique, sont punis d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende ».
    L'amendement n° 39, présenté par MM. Morange, Tian, Anciaux, Bernier, Colombier, Couanau, Cugnenc, Depierre, Fagniez, Hamelin, Juillot, Mmes Gallez, Levy, Marland-Militello et M. Dubernard, est ainsi libellé :
    « Après l'article 3, insérer l'article suivant :
    « Les deux premières phrases de l'article L. 122-52 du code du travail sont remplacées par une phrase ainsi rédigée : « En cas de litige relatif à l'application des articles L. 122-46 et L. 122-49, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. »
    La parole est à M. Jean-Michel Fourgous, pour soutenir l'amendement n° 106.
    M. Maxime Gremetz. Vous le retirez ou vous ne le retirez pas ?
    M. le président. Monsieur Gremetz, laissez M. Fourgous s'exprimer.
    M. Maxime Gremetz. C'est moins idiot de le retirer maintenant qu'après l'avoir défendu !
    M. Jean-Michel Fourgous. Mon cher collègue, vous donnez du délégué du personnel une image de spécialiste de la paralysie. Nous, nous sommes des producteurs de richesses. Nous activons, nous ne paralysons pas.
    Mme Jacqueline Fraysse. Vous êtes surtout des godillots du Gouvernement !
    M. Jean-Michel Fourgous. C'est grâce à des gens comme moi, car j'étais chef d'entreprise, que vous touchez votre salaire de délégué du personnel, monsieur Gremetz.
    L'amendement n° 106 traite du problème du harcèlement moral.
    La loi de modernisation sociale avait introduit un article pour le moins surprenant, qui avait pour effet d'anéantir la présomption d'innocence pour certaines personnes. Ainsi, un dealer, un violeur, un criminel, bénéficie de la présomption d'innocence, pas un chef d'entreprise.
    M. Patrick Bloche. N'importe quoi ! Nous sommes là dans le code du travail, pas dans le code pénal !
    M. Jean-Michel Fourgous. Un chef d'entreprise n'est pas présumé innocent et doit faire lui-même la preuve de son innocence. Ainsi, je pourrais accuser le représentant du parti communiste de harcèlement à lui de démontrer qu'il ne m'a pas harcelé.
    Comment a-t-on pu, culturellement, accoucher d'une telle atteinte à la dignité ? Et ce ne sont pas seulement les chefs d'entreprise qui sont concernés : le moindre cadre dirigeant, le moindre chef d'atelier peut être accusé.
    M. Maxime Gremetz. Ce ne sont pas toujours les chefs ! Vous insultez les chefs !
    M. le président. Monsieur Gremetz, soyez gentil, laissez parler M. Fourgous !
    M. Jean-Michel Fourgous. Les chefs veulent qu'on les laisse travailler.
    On est présumé coupable sur le plan civil, mais on est présumé innocent sur le plan pénal, alors que les définitions civile et pénale, sont strictement identiques. Comment peut-on, d'un point de vue juridique, accepter une telle différence de traitement ?
    Aux termes du code pénal, la loi ne peut pas instituer un renversement de la charge de la preuve qui serait contraire aux principes constitutionnels, notamment à l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Comment des députés ont-ils pu oser ainsi légaliser le chantage et l'intimidation ? Il est en effet fréquent qu'un salarié licencié menace la personne qui le licencie de harcèlement pour obtenir une augmentation de son indemnité, sachant qu'elle aura beaucoup de mal à se défendre. Faut-il avoir une culture de haine pour l'entreprise pour mettre les entreprises dans une telle situation !
    M. Jean-Paul Anciaux. Tout à fait !
    M. Maxime Gremetz. J'espère qu'il ne va pas retirer cet amendement, pour qu'on puisse combattre la « haine » !
    M. le président. La parole est à M. Pierre Morange, pour soutenir l'amendement n° 39.
    M. Pierre Morange. Le harcèlement moral, comme vient de le rappeler M. Fourgous, est une réalité dans le monde du travail, et le législateur a instauré un ensemble de sanctions propres à lutter contre cette infraction. Toutefois, l'une des grandes difficultés pour la victime réside dans l'établissement de la preuve du harcèlement.
    L'Union européenne, dans la directive du 29 juin 2000, propose un aménagement de la charge de la preuve favorable à la victime.
    Cependant, le précédent gouvernement, dans l'article 169 de la loi de modernisation sociale, est allé au-delà de ce que préconisait la directive européenne en n'exigeant du salarié présumé victime que de présenter « des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement », le défendeur devant, lui, « prouver que ses agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement ». Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 12 janvier 2002, a d'ailleurs émis sur cette disposition de très fortes réserves et a notamment affirmé qu'elle ne saurait dispenser la partie demanderesse « d'établir la matérialité des éléments de fait précis et concordants ».
    L'objet de cet amendement est de revenir à une rédaction conforme à la directive européenne en matière de partage de la charge de la preuve, pour préserver les intérêts des salariés, participer à la désobstruction des juridictions prud'homales et offrir plus de garanties contre les recours abusifs.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. Je ne sais pas ce que décidera M. Fourgous, mais je pense que son amendement pourrait être retiré au profit de l'amendement de M. Morange, qui me semble plus précis dans sa rédaction. En tout cas, la commission a repoussé l'amendement n° 106 et accepté l'amendement n° 39.
    M. Fourgous et M. Novelli essaient, ce n'est pas facile, on l'a vu dans d'autres occasions, de donner une définition juridique de ce que pourrait être le harcèlement.
    Mais notre travail doit viser, comme la loi de modernisation sociale avait d'ailleurs pris la précaution de le faire, la plus grande conformité avec la directive européenne, qui est assez précise sur ce sujet.
    L'amendement 39 réécrit, ai-je envie de dire...
    M. Maxime Gremetz. Mal !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Non, pas mal !
    M. Patrick Bloche. Si, il faut le dire !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Cet amendement réécrit à la marge l'article L. 122-52 du code du travail. En effet, alors que l'article L. 122-52 actuel dispose que « le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement », l'amendement n° 39 précise que « le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ». La rédaction présentée par nos collègues est plus précise, moins floue que celle du code du travail en vigueur, laquelle donne lieu à de nombreux contentieux qui commencent à faire jurisprudence. Permettra-t-elle cependant d'éviter les contentieux ? Je n'en sais rien.
    L'essentiel est tout de même la fin de l'article L. 122-52, qui n'est pas modifiée et précise : « Le juge forme sa conviction arpès avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. »
    En toute hypothèse donc, c'est le juge - et c'est heureux - qui a le dernier mot dans ces affaires délicates qui mettent en jeu la dignité de personnes à un moment particulièrement difficile de leur existence professionnelle.
    J'attends que le Gouvernement nous dise ce qu'il en pense. Je crois que l'amendement n° 39 est acceptable. La commission, en tout cas, l'a accepté et il ne me paraît pas remettre en cause de manière dramatique l'article de la loi de modernisation sociale qui portait sur cette question.
    M. Maxime Gremetz. Eh si !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Sa rédaction me semble plus précise et elle devrait donc nous convenir à tous.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ces deux amendements traitent de deux aspects du harcèlement moral : l'amendement n° 106 propose une nouvelle définition du harcèlement moral alors que l'amendement n° 39 vise à rééquilibrer la charge de la preuve.
    Honnêtement, je ne crois pas que la rédaction de l'amendement n° 106 modifie réellement la définition du harcèlement moral telle qu'elle est donnée à l'article 170 de la loi de modernisation sociale : « Le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ». Cette définition me semble claire et ne pose pas en l'état actuel de la jurisprudence, de grandes difficultés.
    En revanche, le problème est réel s'agissant de la charge de la preuve, et je suis sensible aux arguments évoqués tant par M. Fourgous que par M. Morange sur ce sujet.
    L'amendement n° 39 souligne avec raison que la loi en vigueur est allée au-delà de nos obligations communautaires en permettant à la victime présumée de saisir le juge sur la seule base d'« éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement ». Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs formulé une réserve d'interprétation pour le volet pénal des dispositions de la loi de modernisation sociale.
    Dans ces conditions, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 39, c'est-à-dire en réalité à un retour au strict texte communautaire qui devrait limiter les recours abusifs au juge, qu'il soit civil ou pénal, tout en garantissant à la victime présumée les conditions d'aménagement de la charge de la preuve exigée dans les domaines si difficiles des différentes formes de harcèlement.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Cet amendement est le premier d'une série d'amendements qui visent à remettre en cause la définition du harcèlement moral que nous avions fait adopter au prix d'un combat acharné.
    Mme Catherine Génisson. Ce n'est pas vrai !
    M. Maxime Gremetz. En voulant légiférer sur ce sujet, vous allez bien au-delà du projet de loi qui nous est soumis et nous sommes donc devant un cavalier législatif.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Pas du tout !
    Mme Catherine Génisson. C'est un mini DMOS !
    M. Maxime Gremetz. Effectivement : c'est presque un mini DMOS.
    Monsieur le ministre, relisez le titre du projet de loi, vous verrez qu'il n'a rien à voir avec ce sujet.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. On peut en dire autant pour ce qui concerne la loi de modernisation sociale.
    M. Maxime Gremetz. Le présent texte vise les articles de la loi de modernisation sociale qui concernent les licenciements.
    C'est donc un cavalier législatif qui nous est présenté, et le Conseil constitutionnel jugera.
    Lorsque, il y a deux ans, nous avons déposé une proposition de loi sur ce sujet, nous étions déjà convaincus de la nécessité de légiférer dans les plus brefs délais. Le harcèlement moral, qu'on le veuille ou non, fait malheureusement partie du quotidien des relations du travail. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle). Il constitue un véritable problème de société que la représentation nationale ne pouvait continuer à ignorer plus longtemps.
    M. François Guillaume. Il ne faut pas exagérer !
    M. Gaëtan Gorce. M. Gremetz connaît l'entreprise, lui !
    M. Maxime Gremetz. Tout à fait !
    M. Jean-Michel Fourgous. Comme délégué du personnel !
    M. Maxime Gremetz. Vous êtes un psychologue du travail, non ?
    M. Jean-Michel Fourgous. Absolument !
    M. Maxime Gremetz. C'est pour ça que je ne vous comprends pas !
    M. le président. Messieurs, je vous en prie !
    M. Maxime Gremetz. De l'importance du phénomène témoigne une floraison d'ouvrages et d'articles de presse consacrés aux pressions subies par les salariés sur leur lieu de travail. Le harcèlement moral est devenu un sujet d'inquiétude majeur pour les Français et il nous semblait inconcevable qu'une loi ayant pour objectif la modernisation sociale ne prévoie pas la mise en place d'un dispositif législatif visant à lutter efficacement contre le harcèlement moral au travail.
    M. Jean-Michel Fourgous. Efficacement ?
    M. Maxime Gremetz. Je rappelle que c'est le doyen de l'Assemblée nationale, Georges Hage, auquel j'adresse une pensée amicale, qui a conduit ce travail : il a entendu tous les spécialistes, il a organisé des réunions, il a réfléchi... (Exclamation sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et rires.)
    Vous pouvez rire mais vous n'êtes pas près de lui arriver à la cheville. Il vous manque beaucoup d'expérience,...
    M. Michel Lejeune. Pour être le doyen, c'est sûr !
    M. Maxime Gremetz. ... beaucoup d'interventions et beaucoup de nuits passées à l'Assemblée nationale, y compris au fauteuil de la présidence.
    M. le président. Pensez à conclure, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. M. Hage, malgré le scepticisme de beaucoup,...
    M. Jean-Michel Fourgous. Malgré son âge !
    M. Maxime Gremetz. ... a travaillé avec tous les intéressés sur cette proposition de loi, qui s'oriente selon trois axes. Tout d'abord, le harcèlement moral est défini, afin que puissent être clairement identifiés les comportements à sanctionner, qu'ils émanent de chefs, de cadres ou de non-cadres. En effet, aucune catégorie sociale n'a le monopole du harcèlement, si j'ose dire ; tous les rapports professionnels sont concernés.
    M. Jean-Paul Anciaux. C'est vrai !
    M. Jean-Michel Fourgous. C'est peut-être vrai, mais M. Gremetz n'a pas trouvé la solution.
    M. Maxime Gremetz. Vous voyez, vous pensez immédiatement aux employeurs !
    M. le président. Monsieur Gremetz, je vous en prie, terminez votre propos.
    Mme Catherine Génisson. Un employeur aussi peut subir un harcèlement moral !
    M. Jean-Michel Fourgous. Parler d'un problème ne le résout pas pour autant !
    M. Maxime Gremetz. Ensuite, une série de mesures de prévention sont prévues pour éviter que de tels comportements puissent se produire.
    Enfin, la sanction doit être non seulement civile, mais également, dans certains cas graves, pénale. Et personne ne doit être à l'abri.
    Quant à la définition du harcèlement moral, pierre angulaire de nos propositions, elle doit avant tout être juridiquement opérante, comme l'étaient les dispositions que nous avions fait adopter par l'ancienne majorité de gauche de l'Assemblée nationale, et même au-delà, d'ailleurs, car une partie de la droite avait également voté pour,...
    Mme Catherine Génisson. Absolument !
    M. Maxime Gremetz. ... je le rappelle pour mémoire. Comme quoi, sur ce sujet, il n'y a pas de clivage gauche-droite.
    M. Jean-Michel Fourgous. Sur la question de la charge de la preuve, nous ne sommes pas d'accord !
    M. Maxime Gremetz. Monsieur Fourgous, vous faites ce que vous voulez.
    M. le président. Monsieur Gremetz, je vous en prie !
    M. Maxime Gremetz. Ce fut le fruit d'un long travail, mené en collaboration étroite avec un collectif pluridisciplinaire composé notamment de juristes. Nous avons ainsi dégagé une définition qui se fonde sur des notions juridiques fermement établies et permet d'appréhender l'ensemble des manifestations du phénomène : le harcèlement moral est constitué par la dégradation délibérée des conditions de travail. Cette définition - que M. le ministre a d'ailleurs reprise - prend appui sur l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail, également intégrée dans le code du travail. C'est au regard de ce seul critère que la légitimité ou l'illégitimité des pressions exercées sur un salarié doit être appréciée. Si ces dernières ont une finalité professionnelle, c'est-à-dire la mise en oeuvre du contrat de travail,...
    M. le président. Monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. ... alors, même si on peut parfois les déplorer, elles n'en sont pas moins légitimes. En revanche, si la dégradation des conditions de travail résulte d'un détournement du contrat de travail, dans le but unique de nuire au salarié, il est difficilement admissible que les comportements incriminés ne soient pas sanctionnés.
    Nous tenons beaucoup à cette définition, et je signale que les députés communistes s'opposeront fermement à l'amendement de M. Fourgous comme à tous ceux déposés par la majorité sur ce sujet. Ils ont tous le même caractère de gravité car ils frappent les salariés là où ils sont le plus vulnérables. S'ils étaient adoptés, les auteurs des pressions les plus illégitimes jouiraient d'une totale impunité.
    M. le président. Monsieur Gremetz, je vous demande instamment de conclure !
    M. Maxime Gremetz. Je pourrais demander à Mme Fraysse de poursuivre.
    M. le président. Voulez-vous enfin conclure ?
    M. Maxime Gremetz. Dans la mesure où nous débattons de deux amendements en discussion commune, nous pouvons intervenir cinq minutes sur chacun.
    M. Richard Mallié. Quatre interventions sont prévues ! Ça suffit !
    M. le président. Monsieur Gremetz, ne faites pas de commentaires : je vous demande de conclure.
    M. Maxime Gremetz. Le sujet est grave !
    M. Jean-Michel Fourgous. Assez grave pour que nous soyons sérieux !
    M. Maxime Gremetz. La prochaine fois, nous demanderons la parole pour deux orateurs. Ainsi, nous pourrons mieux analyser les choses.
    Prenons le cas d'un salarié qui fait l'objet d'une insidieuse mise à l'index, hypothèse courante : aucune tâche ne lui est plus confiée, ses collègues ne lui portent plus aucune marque de considération, il se voit même supprimer certains avantages auxquels il avait droit jusque-là. Il est indubitable qu'il s'agit là de harcèlement moral. Toutefois, avec les amendements proposés par la majorité, il est fort probable que de tels comportements ne pourront être sanctionnés. En effet, l'article L. 225-14 du code pénal, qui sanctionne la soumission à des conditions de travail contraires à la dignité humaine, n'a pas permis jusqu'à présent de lutter contre le harcèlement moral.
    Les députés communistes partagent entièrement votre souci de ne pas donner une définition trop large au harcèlement moral, afin de ne pas reporter systématiquement sur le juge le soin de réguler les comportements sociaux anormaux. Le texte que nous avions fait adopter n'avait nullement cet effet, contrairement à ce que vous voulez faire croire avec vos amendements.
    M. le président. Monsieur Gremetz, je vous demande de vraiment conclure !
    M. Maxime Gremetz. Je termine.
    D'autre part, en catimini, vous gommez la protection du salarié en inversant la charge de la preuve : il incombera désormais au demandeur d'apporter les éclaircissements nécessaires.
    M. Dominique Dord, rapporteur. Mais non !
    M. le président. Monsieur le rapporteur, laissez M. Gremetz terminer son intervention !
    M. Maxime Gremetz. D'où la grande question : la loi sera-t-elle toujours applicable ? Vous invoquez un problème d'exception, mais de telles exceptions existent dans d'autres domaines. Vous aggravez la vulnérabilité des salariés et je ne comprends pas bien votre motivation, car si le présumé coupable n'a rien à se reprocher, pourquoi le dédouaner d'en apporter la preuve ?
    Telles sont les objections que nous voulions formuler. J'appelle solennellement M. le ministre à ne pas donner son aval à ces amendements sans en discuter davantage. Ne tolérons pas ces cavaliers, qui n'ont pas le moindre lien avec l'objet du présent projet de loi. Vous parlez toujours de concertation, de consultation : c'est le moment d'associer à la réflexion les spécialistes de ces questions fort complexes et délicates.
    M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.
    Mme Catherine Génisson. J'interviendrai seulement sur l'amendement n° 39, l'amendement n° 106 me semblant relever de la pure provocation.
    L'amendement n° 39 tend à redéfinir les dispositions relatives à la charge de la preuve en restreignant les possibilités ouvertes par la loi de modernisation sociale, alors même que ce nouveau régime ne constitue aucunement une inversion de la charge de la preuve : il est équilibré, et de surcroît conforme à celui défini par la Cour de cassation, qu'il enrichit. Je rappelle enfin qu'il est identique à celui retenu dans la proposition de loi relative à la lutte contre les discriminations, notamment en matière d'accès à l'emploi, proposition de loi en faveur de laquelle une partie de la droite avait également voté : voilà la preuve qu'il n'a rien de provocateur ni d'exceptionnel.
    M. Maxime Gremetz. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche.
    M. Patrick Bloche. En complément des propos de nos collègues Maxime Gremetz et Catherine Génisson, comment ne pas regretter que soient remises en cause à la sauvette des dispositions promulguées au tout début de l'année, avant même que leur application soit évaluée ?
    Il est extrêmement choquant, au demeurant, que ces amendements soient présentés par des parlementaires qui, dans l'hémicycle, mettent en avant leur qualité professionnelle de chef d'entreprise, donnant à leur démarche un côté « revanche sociale » que nous avons déjà dénoncé en d'autres occasions.
    M. Jean-Michel Fourgous. Ça vous va bien de dire ça ! La LMS, c'était uniquement de la revanche sociale !
    M. Patrick Bloche. Nous prenons acte du fait que M. le rapporteur et M. le ministre n'ont fort heureusement pas retenu l'amendement 106, qui remet en cause la définition du harcèlement moral, mais comment ne pas regretter qu'ils n'adoptent pas la même position pour l'amendement n° 39, qui revient sur un équilibre trouvé en séance, Catherine Génisson le rappelait, dans le droit-fil de la jurisprudence de la Cour de cassation ?
    Sans remettre en cause la charge de la preuve, il est présenté comme un rééquilibrage. Mais ce rééquilibrage est-il justifié ? Nous vivons fort heureusement en République et l'article L. 122-52 rappelle que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction utiles. Le salarié victime d'un harcèlement moral bénéficie de toutes les dispositions du droit civil et du droit pénal pour le prouver.
    Dans ce domaine ô combien sensible, sur lequel nous sommes souvent interpellés dans nos permanences parlementaires, nous avions fait il y a un an oeuvre d'équilibre dans l'écriture de la loi. Je regrette que cet équilibre soit aussi rapidement rompu.
    M. le président. Monsieur Fourgous, après avoir entendu l'avis de la commission et celui du Gouvernement, retirez-vous votre amendement ?
    M. Maxime Gremetz. Courageusement, il le maintient !
    M. Jean-Michel Fourgous. M. Gremetz est un de mes grands soutiens et je l'en remercie. Nous lui préparons sa carte de l'UMP !
    Puisque l'amendement n° 39 semble plus précis et mieux adapté, je retire l'amendement n° 106...
    M. Maxime Gremetz. Oh !
    M. Gaëtan Gorce. Cela devient une seconde nature !
    M. Jean-Michel Fourgous. ... et je demande à mes collègues de voter pour l'amendement n° 39.
    J'ajoute que toutes les personnes exerçant des responsabilités en entreprise sont visées. Votre haine du chef d'entreprise...
    Mme Jacqueline Fraysse. Nous n'avons aucune haine pour les chefs d'entreprise !
    M. Maxime Gremetz. Ni contre vous, monsieur Fourgous : nous vous adorons !
    M. le président. Monsieur Fourgous, je vous en prie !
    M. Jean-Paul Anciaux. Il a retiré son amendement : passons à la suite !
    M. Jean-Michel Fourgous. Les licenciements, aujourd'hui...
    M. le président. Monsieur Fourgous, je vous arrête.
    Sur l'amendement n° 39, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
     L'amendement n° 106 est donc retiré.
    M. Jean-Michel Fourgous. Oui, monsieur le président, mais je remarque que M. Gremetz dispose d'un temps de parole extraordinaire et que moi, je ne suis pas autorisé à faire le moindre commentaire, puisque vous me coupez la parole.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix l'amendement n° 39.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   46
Nombre de suffrages exprimés   46
Majorité absolue   24
Pour l'adoption   36
Contre   10

    L'Assemblée nationale a adopté.
    Avant d'appeler l'amendement n° 195, je vous informe que, sur cet amendement, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    MM. Morange, Juillot, Tian, Hamelin, Anciaux, Bernier, Colombier, Couanau, Cugnenc, Depierre, Fagnier, Mmes Lévy, Gallez, Marland-Militello et M. Dubernard ont présenté un amendement, n° 195, ainsi libellé :
    « Après l'article 3, insérer l'article suivant :
    « I. - Le premier alinéa de l'article L. 122-54 du code du travail est ainsi rédigé :
    « Une procédure de médiation peut être engagée par toute personne de l'entreprise s'estimant victime de harcèlement moral ou sexuel. Elle peut être également mise en oeuvre par la personne mise en cause. Le choix du médiateur fait l'objet d'un accord entre les parties. »
    « II. - Les deuxième, troisième et sixième alinéas du même article sont supprimés. »
    La parole est à M. Pierre Morange.
    M. Pierre Morange. L'objet de notre amendement est d'aboutir à une rédaction plus équilibrée concernant le problème de la médiation pour tenter de résoudre les drames douloureux que vivent les victimes de harcèlement. La loi de modernisation sociale a mis en place une procédure tout à fait judicieuse, il importe de le souligner, de médiation en cas de harcèlement moral ou sexuel. Mais cette disposition pose un certain nombre de problèmes dans ses modalités d'application, qui s'opposent en quelque sorte à la finalité de la procédure, c'est-à-dire le rapprochement des parties. L'amendement tend notamment à préciser que le choix du médiateur doit faire l'objet d'un accord entre les parties.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement, qui, dans un domaine aussi délicat, nous paraît en effet rééquilibrer le dispositif de médiation.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable également.
    M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.
    Mme Catherine Génisson. Comme l'a souligné M. Morange, la procédure de médiation n'est pas remise en cause.
    Je voudrais tout d'abord proposer la suppression de la procédure de médiation en cas de harcèlement sexuel, ce qui fera peut-être l'unanimité dans cet hémicycle. En effet, lorsque le harcèlement sexuel est avéré, on ne peut qu'aller jusqu'à la procédure judiciaire, et je crois que nous avons collectivement failli en envisageant une médiation dans ce cas-là.
    S'agissant du harcèlement moral, nous savons tous combien il est difficile de légiférer sur un sujet aussi délicat, complexe, et nous avons d'ailleurs attendu l'avis du Conseil économique et social, qui nous a donné beaucoup d'indications en la matière, avant de nous prononcer. L'important est évidemment d'éviter autant que faire se peut une procédure judiciaire. Si l'on y parvient grâce à une médiation interne, très bien, mais il arrive souvent que le problème se règle plus aisément grâce à une médiation extérieure, car si les parties en conflit sont soumises à une tension dans l'entreprise, il est plus difficile de faire preuve d'objectivité.
    M. Jean-Paul Anciaux. Très juste !
    Mme Catherine Génisson. L'amendement n° 195 n'est pas acceptable dans la mesure où il supprime la possibilité d'« externalisation » de la médiation. Non seulement le premier paragraphe supprime la possibilité d'une médiation extérieure à l'entreprise, mais le second, en supprimant les deuxième, troisième et sixième alinéas de l'article L. 122-54 du code du travail, supprime du même coup les dispositions concernant la désignation du médiateur, les droits de celui-ci, les modalités de la médiation, et enfin, ce qui est incompréhensible, l'obligation de discrétion faite au médiateur sur la santé des personnes concernées.
    M. le président. Vous vous rendez bien compte, madame Génisson, que l'on ne peut improviser de la sorte une modification de l'amendement : il faudrait le récrire totalement.
    M. Dominique Dord, rapporteur. M. Morange souhaite le rectifier !
    M. le président. M. Morange me fait en effet savoir qu'il souhaite supprimer, dans la première phrase du texte proposé pour le premier alinéa de l'article L. 122-54 du code du travail, les mots : « ou sexuel ». Cette phrase serait donc ainsi rédigée : « Une procédure de médiation peut être engagée par toute personne de l'entreprise s'estimant victime de harcèlement moral. »
    L'amendement n° 195 est ainsi rectifié.
    Mme Béatrice Pavy. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche.
    M. Patrick Bloche. J'attire l'attention de l'Assemblée sur la façon dont nous légiférons. S'il ne s'agissait effectivement que de rapprocher les parties pour éviter une procédure judiciaire, nous pourrions vous suivre, mais Catherine Génisson vient de démontrer très clairement que l'amendement visait à supprimer toute possibilité de faire appel à un médiateur en dehors de l'entreprise. J'ajoute qu'en écrivant sans nuance que « le choix du médiateur fait l'objet d'un accord entre les parties », les auteurs de l'amendement prennent le risque d'aboutir au résultat inverse de celui qu'ils souhaitent car, faute d'accord, tout le monde se retrouvera directement chez le juge !
    Mme Catherine Gémisson. Eh oui !
    M. Patrick Bloche. Quant à la suppression de l'obligation de discrétion faite au médiateur sur la santé des personnes concernées, elle nous semble totalement incompréhensible, mais je n'y reviendrai pas pour ne pas abuser de mon temps de parole. Cet amendement devrait être réécrit d'ici à la deuxième lecture car il va à l'encontre du but qu'il est censé viser. Le mieux serait donc qu'il soit retiré.
    M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson.
    Mme Catherine Génisson. Je tiens à préciser que je souhaite voir disparaître la référence au harcèlement sexuel dans le cadre de la médiation, mais pas dans le reste de la loi de modernisation sociale.
    M. le président. Vous maintenez votre demande de scrutin public ?
    Mme Catherine Génisson et M. Patrick Bloche. Oui, monsieur le président.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix l'amendement n° 195 rectifié.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   44
Nombre de suffrages exprimés   44
Majorité absolue   23
Pour l'adoption   34
Contre   10

    L'Assemblée nationale a adopté.
    Mes chers collègues, je vous rappelle qu'il est minuit trente et qu'il nous reste encore sept amendements à examiner. Je vous invite donc à la concision.
    M. Gremetz, Mme Jacquaint, MM. Dutoit, Liberti, Desallangre et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 11, ainsi libellé :
    « Après l'article 3, insérer l'article suivant :
    « Après l'article L. 321-15 du code du travail, il est inséré un article L. 321-16 ainsi rédigé :
    « Art. L. 321-16. - Lorsque le total du nombre de salariés employés en contrat de travail à durée déterminée ou mis à disposition par une entreprise de travail temporaire sous le motif de surcroît d'activité ou mis à disposition par une entreprise extérieure sous le couvert d'un contrat de sous-traitance ou de service excède 5 % de l'effectif de l'entreprise, le non-renouvellement des contrats de travail des salariés employés dans ces conditions est réputé être un licenciement opéré par l'entreprise utilisatrice, il est soumis aux règles relatives aux licenciements prévues par les livres I et III du code du travail. »
    « Le taux de 5 % est apprécié en rapportant la moyenne mensuelle des salariés employés dans les conditions susdites au cours des douze mois précédant l'annonce du projet de licenciement ou de non-renouvellement des contrats à l'effectif moyen de l'entreprise au cours de la même période. »
    La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
    Mme Jacqueline Fraysse. Les salariés précaires, le plus souvent employés dans des conditions illégales, sont ceux qui subissent le plus les effets des décisions de suppression d'emplois prises par les chefs d'entreprise. Il s'agit de salariés dont les contrats devraient le plus souvent être requalifiés, mais qui, espérant toujours l'embauche, n'engagent pas de procédure à cette fin. Une modification de la législation s'impose donc.
    Cet amendement ne vise que la précarité motivée par de prétendus surcroîts d'activité, sans affecter ni les possibilités de remplacement des absents ni les emplois saisonniers. Quant au pourcentage de 5 %, il s'agit d'une moyenne annuelle. Il serait donc toujours possible de recourir à un taux supérieur sur une période limitée pour faire face au surcroît conjoncturel de l'activité de l'entreprise. Il s'agit non pas d'un droit à recruter 5 % de précaires, mais d'un seuil maximal.
    Cette proposition permettrait, d'une part, d'atteindre les objectifs de la législation actuelle, qui n'est pas respectée et est même complètement détournée de son objet par les grandes entreprises et, d'autre part, de mettre un terme au recours excessif au travail précaire. Je tiens à souligner que, selon la DARES - le service statistique de votre ministère, monsieur le ministre -, 1,9 million d'inscriptions à l'ANPE en une seule année s'expliquent par la fin de CDD et de missions intérimaires.
    M. Maxime Gremetz. Tout à fait !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. Un amendement analogue avait été défendu lors de la discussion de la loi de modernisation sociale et je reprendrai les arguments qui avaient été utilisés à l'époque pour justifier son rejet. Il n'y a pas lieu de fixer un quota arbitraire puisque les CDD conclus dans des conditions abusives sont automatiquement requalifiés en CDI. En outre, le dispositif proposé paraît bien compliqué.
    La commission a donc rejeté cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable également.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. On ne pourra pas continuer longtemps dans cette voie. Si on ne fait rien, ça ira mal pour la société et pour la démocratie ! Il faut lire les études, elles montrent que ce sont les précaires, qui travaillent en moyenne trois mois par an, - chiffre officiel -, qui sont les premiers à être licenciés dans les entreprises quand il arrive des coups durs. Comme vient de le dire Mme Fraysse, selon la DARES, sur une période d'un an on enregistre 1,9 million d'inscriptions à l'ANPE dues à des fins de contrats à durée déterminée ou de missions d'intérim. Je rencontre chaque semaine, dans la zone industrielle d'Amiens, des jeunes qui ont souvent une qualification : ils sont ouvriers qualifiés, techniciens, techniciens supérieurs. Ils sont 1 200 à avoir fait leurs études, à être qualifiés et à être employés depuis deux, voire trois ans, non pas pour faire face à des pointes d'activité mais sur des postes permanents qui ne correspondent pas à leur qualification, et ils sont souvent payés au SMIC.
    Je veux bien admettre que notre solution ne soit pas parfaite, mais il faut faire quelque chose car la précarité grandit. Chacun le sait : huit embauches sur dix sont réalisées en contrats à durée déterminée. L'exception aujourd'hui, c'est le CDI ! Auparavant, c'était le CDD ! On a inversé la donne et cela crée une insécurité professionnelle et familiale qui débouche souvent, dans nos quartiers, sur l'insécurité tout court. Comment des jeunes à qui l'on n'offre aucune perspective pourraient-ils envisager de fonder une famille ou, simplement, de vivre leur vie ? Il est temps de mettre un terme au recours abusif et illégal au CDD et à l'intérim, qui est le plus souvent le fait d'une stratégie délibérée des grands groupes, et non des petites et moyennes entreprises, et qui, elles, ont besoin d'ouvriers qualifiés et stables. Monsieur le ministre, réagissons car si rien n'est fait, le coup de gueule que ces salariés condamnés à un présent terrible et privés de perspectives d'avenir nous ont adressé il y a peu, en exprimant un vote contre lequel nous avons dû nous rassembler, ne restera pas sans suites !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 40 et 57.
    L'amendement n° 40 est présenté par Mmes Bourragué, Lévy, Gallez, Marland-Militello, MM. Bernier, Colombier, Couanau, Cugnenc, Depierre, Fagniez, Hamelin, Juillot, Tian et Dubernard ; l'amendement n° 57 est présenté par M. Fourgous.
    Ces amendements sont ainsi libellé :
    « Après l'articles 3, insérer l'article suivant :
    « La première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 434-3 du code du travail est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : "L'ordre du jour est arrêté par le président et le secrétaire et communiqué aux membres trois jours au moins avant la séance. Toutefois, en ce qui concerne les réunions du comité d'entreprise relatives aux procédures de licenciement économique, et à défaut d'accord sur le contenu de l'ordre du jour, celui-ci est fixé par le président. »
    Sur l'amendement n° 40, M. Novelli et M. Fourgous ont présenté un sous-amendement, n° 197, ainsi libellé :
    « Compléter l'amendement n° 40 par le paragraphe suivant :
    « II. L'avant-dernier alinéa de l'article L. 435-4 du code du travail est ainsi rédigé :
    « L'ordre du jour est arrêté par le chef d'entreprise et le secrétaire. Toutefois, en ce qui concerne les réunions du comité central d'entreprise relatives aux procédures de licenciement économique, à défaut d'accord sur le contenu de l'ordre du jour, celui-ci est fixé par le président. Il est communiqué aux membres huit jours au moins avant la séance. »
    La parole est à Mme Chantal Bourragué, pour soutenir l'amendement n° 40.
    Mme Chantal Bourragué. L'adoption de cet amendement d'apparence relativement technique aurait des implications pour la vie de l'entreprise. L'article L. 434-3 du code du travail dispose que l'ordre du jour des réunions du comité d'entreprise est arrêté conjointement par le président et le secrétaire du comité d'entreprise. Cette obligation d'un accord est aujourd'hui utilisée pour retarder, voire pour bloquer, les consultations du comité, notamment dans le cadre de procédures de licenciement économique. Cette disposition place les entreprises dans des situations difficiles. L'amendement n° 40 vise à résoudre le problème et à éviter d'encombrer les juridictions des référés. Il préserve l'obligation d'une concertation préalable entre le président et le secrétaire du comité d'entreprise en vue d'arrêter l'ordre du jour des réunions.
    M. le président. La parole est à M. Fourgous, pour soutenir l'amendement n° 57.
    M. Jean-Michel Fourgous. Il est identique à l'amendement n° 40. Son adoption permettrait en outre une harmonisation avec la législation européenne. L'annonce d'un plan de licenciements est toujours très pénible pour une entreprise...
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Pour les salariés aussi !
    M. Jean-Michel Fourgous. ... et dégrade le climat social.
    M. le président. Pourriez-vous présenter le sous-amendement n° 197, monsieur Fourgous ?
    M. Jean-Michel Fourgous. Bien sûr, monsieur le président.
    Il vise simplement à étendre l'amendement aux comités centraux d'entreprise.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. La commission a accepté ces deux amendements mais elle n'a pas examiné le sous-amendement ; à titre personnel, je vous propose de l'adopter.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je souhaite le retrait de ces deux amendements et du sous-amendement.
    La fixation de l'ordre du jour incombe à la fois au président et au secrétaire du comité d'entreprise, donc aux représentants des salariés. On considère aujourd'hui que c'est la pierre angulaire du fonctionnement du comité d'entreprise. Cette disposition provoque toutefois de vraies difficultés, et je comprends bien l'esprit dans lequel ces amendements ont été déposés : dans un certain nombre de cas, on assiste en effet à des pratiques dilatoires inadmissibles. Gardons-nous cependant d'envoyer un signal négatif sur le rôle et les attributions du comité d'entreprise. Je souhaite que ce soient les partenaires sociaux, dans le cadre de la négociation qui s'engage, qui nous proposent des solutions pour sortir de l'impasse dans laquelle nous nous trouvons incontestablement.
    Quel que soit le résultat de la négociation nationale qui va avoir lieu, je m'engage auprès des auteurs de ces amendements à réexaminer la question à l'occasion de la seconde loi et à la faveur des négociations ou des indications que les partenaires sociaux auront pu donner. Si ce n'était pas le cas, je vous proposerais une nouvelle rédaction. Mais cette question concernant la vie des comités d'entreprise, il me semble nécessaire de passer d'abord par la négociation entre les partenaires sociaux.
    M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce. Ensuite, je demanderai aux auteurs des amendements s'ils acceptent de les retirer.
    M. Gaëtan Gorce. C'est un exercice auquel, manifestement, ils se sont entraînés.
    On nous parle beaucoup de l'entreprise et on a raison. Mais je ne voudrais pas qu'on oublie qu'en parlant de l'entreprise on parle aussi des salariés. Or j'ai le sentiment que cette conception de l'entreprise qui comprend des responsables, un chef d'entreprise et des salariés...
    M. Jean-Michel Fourgous. Heureusement que vous êtes là pour le rappeler !
    M. Gaëtan Gorce. ... est un peu passée à la trappe ; la façon dont le débat s'est engagé pouvait d'ailleurs le faire craindre. Comme nous le faisons remarquer depuis le début, ce texte n'est pas fait pour faire évoluer le droit du licenciement mais pour supprimer des garanties accordées aux salariés, dans un contexte où elles seraient pourtant bien nécessaires.
    La négociation ne serait qu'un faux-semblant et servirait de prétexte. Comme l'a dit le ministre à l'instant, il reviendra sur ces amendements lors du débat que nous aurons dans dix-huit mois. Peut-être le moment sera-t-il plus propice !
    J'observe, au regard de ce qui avait été présenté initialement par le Gouvernement, et plus encore au regard de ce qui a été adopté par notre commission, que le Gouvernement est forcé, sur quelques dispositions - sauf sur l'amendement Michelin et sur l'annonce publique -, de faire machine arrière. Jusqu'où ne pas aller trop loin ? Voilà la question.
    Vous avez fait quelques tentatives - concertées, j'imagine, entre le Gouvernement et l'UMP - mais la réaction des partenaires sociaux vous a fait comprendre que vous alliez un peu trop loin. Vous tenterez donc votre chance un peu plus tard.
    J'aimerais que Mme Bourragué me dise pourquoi elle a retiré son amendement qui remettait en cause la jurisprudence Samaritaine. Et pourquoi le président de la commission, qui n'est pas une personnalité sans importance, avait-il cosigné cet amendement qui revenait sur le principe de la réintégration des salariés lorsque le licenciement est jugé nul et de nul effet, par exemple parce que l'obligation de reclassement n'a pas été respectée ?
    J'aimerais que la vérité affleure et que l'on cesse de mener l'Assemblée et l'opinion en bateau ! Vos intentions, nous les connaissons grâce aux amendements que vous déposez. Vous menez ensuite des négociations pour trouver le bon équilibre qui vous permettra de préserver l'opinion, le temps nécessaire pour préparer un autre coup contre le droit du travail et le droit du licenciement !
    Certes, j'ai bien compris qu'il y avait dans l'UMP des sensibilités différentes et que M. Fourgous ne sera peut-être pas forcément dans le courant qu'animera M. Fillon. Mais pour celles et ceux qui sont dans l'hémicycle les différences ne semblent pas si nettes ! J'ai même eu l'impression que, comme l'a dit M. Dord, il y avait parfois un sentiment partagé. Alors, un peu de franchise ! Allez au bout de vos engagements ! Allez jusqu'où vous voulez aller ! Nous pourrons alors discuter.
    Nous pourrons vous renvoyer comme un boomerang le discours que vous tenez sur notre prétendu archaïsme. Comme le disait mon collègue Patrick Bloche, ce qui anime une large partie de la majorité, c'est un esprit de revanche contre tout ce qui s'est passé pendant cinq ans.
    M. Richard Mallié. Quand ce n'est pas bon on change, c'est tout !
    M. Gaëtan Gorce. Vous vous êtes employés depuis cinq mois à démolir systématiquement tous les textes que nous avons défendus, sans les remplacer sinon par des dispositions favorables au MEDEF. Nous avons l'occasion de le répéter : la situation économique et sociale vers laquelle nous allons ne permettra pas de faire progresser notre société.
    M. le président. Madame Bourragué, maintenez-vous votre amendement ?
    Mme Chantal Bourragué. Monsieur le président, je le retire. Et je précise que ce n'est pas l'insécurité juridique qui protège le salarié.
    Nous maintenons notre objectif de simplification. Ce n'est pas une question de procédure, nous renvoyons à la négociation entre les partenaires sociaux.
    M. le président. L'amendement n° 40 est retiré.
    Monsieur Fourgous, maintenez-vous le vôtre ?
    M. Jean-Michel Fourgous. Monsieur le ministre, le nombre de référés déclenchés par ce texte qui ne correspond pas aux règles de fonctionnement d'une entreprise, l'utilisation qui est faite de cette procédure, tout nous pousse à modifier cet article. C'est une question de bon sens, d'intelligence et de respect humain.
    Nous sommes malgré tout très prudents et modestes, ce qui n'empêche pas nos collègues socialistes de parler de revanche sociale, de remise en cause de toutes leurs lois. J'espère que notre prudence sera payante.
    Quoi qu'il en soit, monsieur le ministre, rassurez-vous : je vais moi aussi retirer l'amendement n° 57 et le sous-amendement n° 197.
    M. Maxime Gremetz. Bravo !
    M. le président. L'amendement n° 57 est retiré ; le sous-amendement n° 197 n'a plus d'objet.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Juste un mot, monsieur le président.
    M.  le président. Non, monsieur Le Bouillonnec : pas de débat virtuel sur des amendements qui ont disparu ! Me doutant qu'ils seraient retirés, j'ai déjà autorisé M. Gorce à intervenir.
    Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 196 rectifié, ainsi libellé :
    « Après l'article 3, insérer l'article suivant :
    « I. - Le I de l'article 49 de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « c) des cotisations dues à compter du 8 avril 2002 au titre des périodes de perception de l'allocation équivalent retraite mentionnée à l'article L. 351-10-1 du code du travail. »
    « II. - Le V de l'article 49 de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale est abrogé. »
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Mesdames, messieurs les députés, je vous prie d'abord de bien vouloir excuser le dépôt tardif de cet amendement très technique.
    Je souhaite que l'Assemblée nationale accepte de rectifier une malfaçon de la loi de finances pour 2002. En effet, l'article 49 de la loi de modernisation sociale a prévu la prise en charge, à partir du 1er janvier 2001, des cotisations de retraite complémentaire des 25 000 bénéficiaires de l'allocation spécifique d'attente, l'ASA, qui a été transformée, à partir d'avril 2002, en allocation équivalent retraite. Mais comme la loi de finances n'a pas prévu la prise en charge des cotisations de retraite, il faut la conforter et la légaliser.
    C'est le seul objet de cet amendement, qui se traduira par un coût de 3,9 millions d'euros, inscrits au fonds de solidarité vieillesse.
    M. le président. Chacun a pu mesurer l'importance de cet amendement.
    Quel est l'avis de la commission ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. Bien évidemment, la commission n'a pas examiné cet amendement. On aura compris qu'il est très important et je propose que nous l'adoptions.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, nous avions remarqué tout à l'heure que quelque chose n'allait pas et c'est pourquoi j'avais demandé une suspension de séance. On nous a répondu timidement que l'amendement serait rectifié. Comme quoi rien n'échappe à notre vigilance quand il s'agit de l'intérêt des salariés.
    M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce.
    M. Gaëtan Gorce. Je ne résiste pas à l'envie de réagir aux propos du ministre, qui nous a dit qu'il s'agissait de corriger une malfaçon. Il ne faut pas vous arrêter là, monsieur le ministre, car des malfaçons, il y en a beaucoup ! A l'article 1er, à l'article 2 et à l'article 3.
    M. le président. Vous êtes imprudent, monsieur Gorce : j'ai quant à moi fort bien compris de quoi il s'agissait.
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le président, les masques sont tombés : M. Gorce a travesti la vérité ! J'ai parlé de malfaçons dans le budget de 2002. Or ce budget, monsieur Gorce, vous avez dû sinon le préparer, du moins le voter.
    M. le président. C'est bien ce que je pensais.
    Je mets aux voix l'amendement n° 196 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Gremetz, Mme Jacquaint, MM. Dutoit, Liberti et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 12, ainsi rédigé :
    « Après l'article 3, insérer l'article suivant :
    « En cas de condamnation pour une des infractions à l'interdiction du travail dissimulé ou pour travail illégal prévues aux articles L. 122-1, L. 122-1-1, L. 124-1, L. 124-2, L. 124-2-1, L. 125-1, L. 125-3 et L. 324-9, les cotisations patronales prévues par le code de la sécurité sociale sont majorées de 10 % pour une durée de trois ans. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Cet important amendement concerne la lutte contre le travail dissimulé, dont on parle peu mais qui a des conséquences désastreuses pour les entreprises, dans la mesure où il suscite une concurrence tout à fait déloyale. Les dispositifs existants sont insuffisants pour éradiquer ce fléau social dont sont victimes les salariés, les organismes de protection sociale et les entreprises qui respectent les règles. Vous voyez bien, à ce propos, que nous n'avons pas une vision unilatérale des entreprises, qui seraient toutes pécheresses, et toutes à pendre !
    Il convient d'adopter rapidement des mesures dissuasives et efficaces. Certaines ont été prises dans la loi d'orientation pour l'outre-mer et contribuent, dans ces départements, à lutter contre l'emploi non déclaré.
    Aucune divergence idéologique ou politique ne devrait s'opposer à l'adoption de cet amendement, qui faciliterait le travail des groupes d'intervention régionale, les GIR - à qui vous font penser les GIR ? A Guillaume ou à Nicolas ? -, et des comités opérationnels de lutte contre le travail illégal, les COLTI.
    Pour résumer, il s'agit d'un problème dont on parle toujours sans jamais prendre aucune mesure. C'est un manque à gagner pour la société, pour les salariés, pour les entreprises qui observent les règles, et donc pour le développement social et humain.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. Il me semble que c'est vous, monsieur Gremetz, qui avez dit tout à l'heure à M. le ministre que l'amendement qu'il nous proposait était un cavalier, qu'il n'avait pas vraiment de lien avec le licenciement.
    M. Maxime Gremetz. Nous voulons combattre le travail dissimulé !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Ce n'est pas lié au licenciement.
    M. Maxime Gremetz. Le travail dissimulé provoque des licenciements !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Franchement, monsieur Gremetz, ce qui risque de provoquer des licenciements, c'est la majoration de 10 % des cotisations patronales sur trois ans que vous proposez, car cela va finir par faire lourd.
    Cela dit, je souhaite rappeler, sans esprit de polémique, que le travail dissimulé, le travail illégal, fait déjà l'objet de dispositions précises et assez sévères puisqu'elles prévoient même des peines d'emprisonnement.
    M. Maxime Gremetz. Il faudrait une révolution pour qu'elles soient appliquées !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Vraiment, cela me paraît suffisamment dissuasif. Quand ils se font prendre, les employeurs sont condamnés, et lourdement.
    M. Maxime Gremetz. Ils ne se font pas prendre souvent !
    M. Dominique Dord, rapporteur. C'est pourquoi je ne crois pas qu'il soit vraiment utile d'ajouter, comme vous le souhaitez, une sanction supplémentaire, en l'occurrence une majoration de 10 % des cotisations patronales.
    Nous proposons donc de rejeter cet amendement.
    M. Jean-Paul Anciaux. Très bien !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je veux juste ajouter que, en application de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale, cet amendement relève du domaine de la loi de financement de la sécurité sociale, et qu'il est donc irrecevable.
    La droite et la gauche - nous en débattons notamment avec M. Gremetz - s'opposent souvent dans cet hémicycle sur le point de revoir s'il faut employer le mot cotisations ou le mot charges. Or il me semble que mettre en place des cotisations sociales dont l'objectif n'est pas de financer les comptes sociaux mais de sanctionner les employeurs n'est pas souhaitable pour la notion même de cotisations sociales.
    Pour toutes ces raisons, il ne faut pas adopter cet amendement.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Grand et intéressant débat, monsieur le ministre, que celui que vous lancez à cette heure matinale ! On est bien, on a bu un café, on peut donc entamer un débat tout à fait sérieux.
    Vous avez remarqué que je fais une différence entre « charges » et « cotisations ». Pour moi, les cotisations sociales ne sont pas des charges ! En effet, elles permettent d'avoir, à la différence d'autres pays, une belle et grande sécurité sociale, et elles offrent à tous la possibilité de se soigner. S'il n'y a pas de cotisations partronales et salariales, il n'y a pas de sécurité sociale et on ne peut pas se soigner comme il faut. C'est le cas aux Etats-Unis, par exemple, avec les fonds de pension, certes pas à la française, à l'américaine cela dit, c'est pareil, même si l'affaire Enron, vous a refroidis.
    D'ailleurs, monsieur le ministre, vous lancez des ballons d'essai : je lis tous les jours des déclarations à propos des retraites. Quand ce n'est pas vous c'est... votre frère ? Au fond, je ne sais pas si vous avez un frère, du moins un frère très connu, comme chez les Sarkozy.
    Quoi qu'il en soit, quand ce n'est pas M. Fillon qui parle des retraites, c'est M. Raffarin...
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. C'est important !
    M. Maxime Gremetz. Très important !
    M. le président. Monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Vous permettez ? J'ai cinq minutes pour parler. Ils sont insupportables, ces présidents !
    M. le président. Il vous est souvent arrivé de parler dix minutes, et je n'ai rien dit !
    M. Maxime Gremetz. Donc, on parle toujours des retraites. Et qu'est-ce qu'on nous explique ? Que ça ne va pas ! Qu'il faut, comme dit Guillaume Sarkozy, travailler sept ans de plus, sinon le système va exploser.
    D'autres disent qu'il faut augmenter la durée des cotisations, parce qu'il n'y en a pas assez.
    Comme par hasard, quand ce sont les salariés qui les paient, on ne parle jamais de charges on parle seulement de charges pour les employeurs. Pensez-vous : ils ont de tels salaires avec leur SMIC que vraiment c'est un plaisir pour eux : ils investissent pour l'avenir, pour la santé, pour la formation.
    Monsieur le ministre, vous le savez, je ne partage pas du tout votre opinion. Mais nous aurons un grand débat sur les retraites car c'est un grand problème de société que la remise en cause du droit à une protection sociale de qualité, dont notre pays s'est doté à une période de son histoire particulièrement difficile, puisque la France était un pays dévasté. Mais ça, c'est le prochain feuilleton.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

Titre

    M. le président. Je donne lecture du titre du projet de loi :
    « Projet de loi relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi. »
    M. Dubernard et M. Dord ont présenté un amendement, n° 41, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le titre du projet de loi : "Projet de loi portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques. »
    La parole est à M. Jean-Michel Dubernard.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Le titre du projet de loi est précis mais peut-être un peu trop technique. C'est la raison pour laquelle la commission a suggéré : « Relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques ». « Relance », parce que c'est un mot positif, ouvert sur l'avenir et porteur d'espoir. « Négociation collective », parce que nous savons, monsieur le ministre, à quel point vous êtes attaché au dialogue social. Ce titre donne ainsi une autre dimension au projet de loi.
    Par ailleurs, si vous me le permettez, monsieur le président, je prendrai quelques instants pour vous féliciter de la manière dont vous avez conduit les débats.
    M. le président. Ce n'est pas nécessaire.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Le climat était serein ce soir et mon inquiétude du premier jour s'est très rapidement dissipée. Je tiens également à remercier et à féliciter le rapporteur.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C'est quand même extraordinaire : au terme de trois jours de débats, on essaie maintenant de nous dire sur quoi nous avons discuté. Avouez que la méthode a de quoi surprendre !
    M. Jean-Michel Fourgous. Pas du tout !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Mais elle surprend au premier abord seulement. En fait, elle reflète très exactement ce qui s'est passé pendant trois jours. En une heure seulement se sont trouvés résumés les intentions du Gouvernement et de la majorité, et les rôles attribués aux uns et aux autres.
    Revenons à l'amendement n° 38 présenté par Mme Bourragué. Il avait reçu un avis favorable de la commission alors même qu'il constituait un véritable séisme pour les salariés puisqu'il touchait au droit de demander une réintégration dans l'attente de la reprise du contrat. Mais il a été retiré. Nous sommes là au coeur de la contradiction dans laquelle se trouvent le Gouvernement et la majorité car on a bien compris qu'il s'agissait de ne pas faire trop de vagues. Cela ne vous empêchera cependant pas de revenir à la charge plus tard.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Procès d'intention !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Mais compter sur nous pour le dire aux salariés, qui sauront ce qui s'est passé.
    Quant à l'amendement n° 40, je voudrais rappeler - et cela, je reconnais que M. Fillon l'a indiqué - que la petite modification qu'il suggérait avait pour effet de remettre en cause purement et simplement les fondements de la stucture du comité d'entreprise. Mais lui aussi a été retiré.
    Il n'est donc pas anodin de voir comment à la fin de trois jours de débats vous rentez de porter atteinte aux droits des salariés. Cela ne s'est pas fait aujourd'hui mais nous pensons que ça se fera demain. Soyez-en sûrs, nous combattrons toutes ces initiatives. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 41 ?
    M. Dominique Dord, rapporteur. La commission a donné un avis favorable à cet amendement.
    Cela dit, nous aurions pu, monsieur Le Bouillonnec, achever notre débat de manière plus sereine. Mais je comprends que la passion vous ait animé.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. En effet, je n'étais pas du tout serein !
    M. Dominique Dord, rapporteur. A moi aussi, il m'arrive de me laisser entraîner.
    J'avoue avoir, comme vous, été surpris que le titre soit discuté à la fin de l'examen du projet de loi. Mais c'est notre manque d'expérience commun de la procédure qui est en cause car les titres sont toujours discutés à la fin.
    M. Maxime Gremetz. Tout à fait : j'en témoigne !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Ce n'est donc pas lié à une quelconque interprétation ou à un manque de définition de nos objectifs.
    Permettez-moi enfin de remercier tous ceux qui nous ont permis de mener ce débat dans de bonnes conditions et de dire que le groupe UMP est très heureux de donner au ministre l'occasion de préciser ce qu'il entend par ce titre.
    M. Gaëtan Gorce. C'est le rapporteur qui s'exprime, pas l'UMP !
    M. Maxime Gremetz. Quelle faute de goût !
    M. Dominique Dord, rapporteur. Nous nous félicitons, monsieur le ministre, de cette contribution du groupe. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Gaëtan Gorce. Ce n'est donc pas une loi de la République mais une loi de l'UMP ?
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement est favorable à cet amendement. J'ai déjà reconnu le titre n'était pas la partie plus inspirée de ce texte.
    Si vous me le permettez, monsieur le président, j'ajouterai que la très haute intensité sonore qui a régné du côté du groupe socialiste me paraît surtout marquer son dépit. En vérité, parce que nous avions des débats internes - et vous savez ce que c'est que les débats interne, le groupe socialiste a patiemment attendu que nous sortions du cadre qui a fait l'objet d'un accord avec les partenaires sociaux sur une méthode et sur des objectifs. Or, comme la majorité n'est pas sortie de ce cadre, le groupe socialiste est extrêmement déçu.
    M. Gaëtan Gorce. Heureusement que nous étions là !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. En fait, nous avons ouvert de grands espaces de négociation. Le dialogue social, j'en suis convaincu, va progressivement porter ses fruits et permettra à notre pays de trouver les voies modernes d'un apaisement des relations sociales qui le rendra à la fois plus compétitif, beaucoup d'entre nous le souhaitent, mais aussi plus constructif et plus protecteur des salariés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 41.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. En conséquence, le titre du projet de loi est ainsi rédigé.
    Mes chers collègues, nous avons achevé l'examen des articles.
    Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi auraient lieu le mardi 10 décembre, après la prestation de serment des juges de la Haute Cour de justice et de la Cour de justice de la République.

2

DÉPÔT D'UN RAPPORT

    M. le président. J'ai reçu, le 5 décembre 2002, de M. Philippe Houillon, un rapport n° 458, fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi modifiant la loi n° 85-99 du 25 janvier 1985 relative aux administrateurs judiciaires, mandataires judiciaires à la liquidation des entreprises et experts en diagnostic d'entreprise.

3

DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

    M. le président. J'ai reçu, le 5 décembre 2002, de Mme Marie-Jo Zimmermann, un rapport d'information n° 459, déposé au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, sur le projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, pour la sécurité intérieure (n° 381).

4

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Mardi 10 décembre 2002, à neuf heures, première séance publique ;
    Discussion de la proposition de loi, n° 350, de MM. Pierre Lellouche et Jacques Barrot visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste et à renforcer l'efficacité de la procédure pénale.
    M. Pierre Lellouche, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 452).
    Fixation de l'ordre du jour.
        A quinze heures, deuxième séance publique :
    Questions au Gouvernement ;
    Prestation de serment devant l'Assemblée nationale des juges titulaires et des juges suppléants de la Haute Cour de justice ainsi que des juges titulaires et de leurs suppléants de la Cour de justice de la République ;
    Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi ;
    Discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2002, n° 382 :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 444) ;
    M. Axel Poniatowski, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense et des forces armées (avis n° 448).
    A vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée le vendredi 6 décembre 2002, à une heure dix.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
TEXTES SOUMIS EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
Transmissions

    M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale, les textes suivants :

Communication du 4 décembre 2002

N° E 2149. - Proposition de décision du Conseil modifiant la décision 77/270/EURATOM habilitant la Commission à contracter des emprunts EURATOM en vue d'une contribution au financement des centrales nucléaires de puissance (COM [2002] 456 final).
N° E 2150. - Proposition de décision du Conseil modifiant la décision 77/271/EURATOM portant application de la décision 77/270/EURATOM habilitant la Commission à contracter des emprunts EURATOM en vue d'une contribution au financement des centrales nucléaires de puissance (COM 457 final).
N° E 2151. - Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion d'un protocole d'adaptation des aspects commerciaux de l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Slovénie, d'autre part, pour tenir compte des résultats des négociations entre les parties concernant l'établissement de nouvelles concessions agricoles réciproques (COM [2002] 607 final).
N° E 2152. - Proposition de décision du Conseil relative à la signature, au nom de la Communauté, d'un protocole additionnel à l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République d'Estonie, d'autre part, sur l'évaluation de la conformité et l'acceptation des produits industriels.
            Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion d'un protocole additionnel à l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République d'Estonie, d'autre part, sur l'évaluation de la conformité et l'acceptation des produits industriels (PECA COM [2002] 608 final).
N° E 2153. - Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant les services d'investissement et les marchés réglementés et modifiant les directives 85/611/CEE et 93/6/CEE du Conseil, ainsi que la directive 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil (COM 625 final).
N° E 2154. - Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion d'un protocole d'adaptation des aspects commerciaux de l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Lettonie, d'autre part, pour tenir compte des résultats des négociations entre les parties concernant l'établissement de nouvelles concessions agricoles réciproques (COM [2002] 643 final).

CONVOCATION
DE LA CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS

    La conférence, constituée conformément à l'article 48 du règlement, est convoquée pour le mardi 10 décembre 2002, à 10 heures, dans les salons de la Présidence.

MODIFICATION
DE L'ORDRE DU JOUR PRIORITAIRE

    Il résulte d'une lettre de M. le secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, adressée à M. le président de l'Assemblée le jeudi 5 décembre 2002, que l'ordre du jour du mardi 10 décembre 2002 est ainsi fixé :
    Mardi 10 décembre :
Le matin, à 9 
heures :
    - Discussion de la proposition de loi de MM. Pierre Lellouche et Jacques Barrot visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste et à renforcer l'efficacité de la procédure pénale (n° 350-452).
    (Séance d'initiative parlementaire.)
    L'après-midi (15 heures), après les questions au Gouvernement, et le soir à 21 heures :
    - Prestation de serment des juges de la Haute Cour de justice et de la Cour de justice de la République.
    - Explications de vote et vote par scrutin public sur le projet de loi relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi (n°s 375-386).
    - Discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2002 (n° 382-444-448).

annexes au procès-verbal
de la 3e séance
du jeudi 5 décembre 2002
SCRUTIN (n° 98)


sur l'article 2 du projet de loi relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi (expérimentations par accord d'entreprise sur la procédure à suivre en cas de licenciement d'au moins dix salariés sur une même période de trente jours).

Nombre de votants

52


Nombre de suffrages exprimés

52


Majorité absolue

27


Pour l'adoption

40


Contre

12

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe Union pour la majorité présidentielle (362) :
    Pour : 40 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 2. - MM. Bernard Brochand et Marc Joulaud.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (147) :
    Contre : 6 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (29) :
Groupe communistes et républicains (22) :
    Contre : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (13).

Mises au point au sujet du présent scrutin
(Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)

    MM. Bernard Brochand et Marc Joulaud, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote, ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « pour ».

SCRUTIN (n° 99)


sur l'amendement n° 8 de M. Gremetz tendant à supprimer l'article 3 du projet de loi relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi (droit applicable aux procédures en cours à la date de la promulgation de la loi).

Nombre de votants

45


Nombre de suffrages exprimés

44


Majorité absolue

23


Pour l'adoption

6


Contre

38

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe Union pour la majorité présidentielle (362) :
    Contre : 37 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (147) :
    Pour : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 1. - M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    Abstention : 1. - M. Patrick Bloche.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (29) :
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (13).

SCRUTIN (n° 100)


sur l'amendement n° 177 de M. Gorce à l'article 3 du projet de loi relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi (maintien des règles applicables aux procédures de licenciement).

Nombre de votants

44


Nombre de suffrages exprimés

44


Majorité absolue

23


Pour l'adoption

10


Contre

34

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe Union pour la majorité présidentielle (362) :
    Contre : 34 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (147) :
    Pour : 8 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (29) :
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (13).

SCRUTIN (n° 101)


sur l'article 3 du projet de loi relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi (droit applicable aux procédures en cours à la date de la promulgation de la loi).

Nombre de votants

46


Nombre de suffrages exprimés

46


Majorité absolue

24


Pour l'adoption

36


Contre

10

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe Union pour la majorité présidentielle (362) :
    Pour : 36 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (147) :
    Contre : 6 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (29) :
Groupe communistes et républicains (22) :
    Contre : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (13).

SCRUTIN (n° 102)


sur l'amendement n° 39 de M. Morange après l'article 3 du projet de loi relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi (partage de la charge de la preuve en matière de harcèlement moral).

Nombre de votants

46


Nombre de suffrages exprimés

46


Majorité absolue

24


Pour l'adoption

36


Contre

10

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe Union pour la majorité présidentielle (362) :
    Pour : 36 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (147) :
    Contre : 6 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (29) :
Groupe communistes et républicains (22) :
    Contre : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (13).

SCRUTIN (n° 103)


sur l'amendement n° 195 rectifié de M. Morange après l'article 3 du projet de loi relatif à la négociation collective sur les restructurations ayant des incidences sur l'emploi (procédure de médiation en cas de harcèlement moral ou sexuel).

Nombre de votants

44


Nombre de suffrages exprimés

44


Majorité absolue

23


Pour l'adoption

34


Contre

10

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe Union pour la majorité présidentielle (362) :
    Pour : 34 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (147) :
    Contre : 6 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).

Groupe Union pour la démocratie française (29) :
Groupe communistes et républicains (22) :
    Contre : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote. Non-inscrits (13).