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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU VENDREDI 17 JANVIER 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du jeudi 16 janvier 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC

1.  Sécurité intérieure. - Suite de la discussion d'un projet de loi adopté par le Sénat après déclaration d'urgence «...».

DISCUSSION DES ARTICLES «...»
Avant l'article Ier «...»

Amendement n° 54 de la commission des lois : MM. Christian Estrosi, rapporteur de la commission des lois ; Gérard Léonard, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales ; Bruno Le Roux, André Gerin.
Sous-amendement n° 410 de M. Mamère : Mme Martine Billard, MM. le rapporteur, le ministre, Pierre Cardo, Noël Mamère, Pascal Clément, président de la commission des lois ; Bruno Le Roux, Jean-Christophe Lagarde. - Rejet.
Sous-amendement n° 411 de M. Mamère : MM. Noël Mamère, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Sous-amendement n° 451 de M. Mamère : MM. Noël Mamère, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Sous-amendement n° 413 de M. Mamère : Mme Martine Billard, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Sous-amendement n° 452 de M. Lagarde : MM. Nicolas Perruchot, le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Blazy, Jean-Pierre Brard, Jean-Christophe Lagarde, Jean-Marie Le Guen, Robert Pandraud. - Rejet par scrutin.
Sous-amendement n° 412 de M. Mamère : Mme Martine Billard, MM. le rapporteur, le ministre, Noël Mamère, Pierre Cardo. - Adoption.
Adoption de l'amendement n° 54 modifié.

Article 1er «...»

M. Noël Mamère, Mme Huguette Bello, MM. André Gerin, Jean-Christophe Lagarde.
Amendements de suppression n°s 178 de M. Gerin et 226 de M. Le Roux : MM. André Gerin, Bruno Le Roux, le rapporteur, le ministre, Pierre Cardo, Georges Fenech. - Rejet.
Amendement n° 179 de M. Gerin : MM. André Gerin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 466 de M. Estrosi : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 318 rectifié de M. Teissier : MM. Gérard Léonard, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 227 rectifié de M. Le Roux : MM. Bruno Le Roux, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 348 de M. Le Fur, avec le sous-amendement n° 443 de la commission : MM. le président de la commission, le rapporteur, le ministre. - Adoption du sous-amendement n° 443 et de l'amendement n° 348 modifié.
Amendement n° 425 du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur. - Adoption.
Adoption de l'article 1er modifié.

Après l'article 1er «...»

Amendement n° 424 du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur, Bruno Le Roux, André Gerin, Noël Mamère, Jean-Marie Le Guen, Gérard Léonard, Jean-Christophe Lagarde, le président.

Suspension et reprise de la séance «...»

Adoption, par scrutin, de l'amendement n° 424 rectifié.
Amendement n° 228 de M. Le Roux : MM. Bruno Le Roux, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 180 de M. Gerin : MM. André Gerin, le rapporteur, le ministre, Pierre Cardo. - Rejet.
Les amendements n°s 220, 221 et 222 de M. Lagarde ont été retirés.
Amendement n° 224 de M. Lagarde : MM. Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Les amendements n°s 225 et 203 rectifié de M. Lagarde sont retirés.
Amendement n° 56 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre, Bruno Le Roux. - Adoption.
Amendement n° 57 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 58 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 59 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 422 du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur, Bruno Le Roux. - Adoption.

Article 2 «...»

Amendement n° 229 de M. Le Roux : MM. Bruno Le Roux, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 230 de M. Bruno Le Roux : MM. Le Roux, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 9 de M. Fenech : MM. Georges Fenech, le rapporteur, le ministre, André Gerin, Bruno Le Roux. - Adoption.
Amendement n° 426 du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur, Bruno Le Roux. - Adoption.
Adoption de l'article 2 modifié.

PRÉSIDENCE
DE Mme PAULETTE GUINCHARD-KUNSTLER
Article 3 «...»

Amendement de suppression n° 181 de M. Gerin : MM. André Gerin, le rapporteur, le ministre, Bruno Le Roux. - Rejet.
Amendement n° 429 du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur. - Adoption.
Amendement n° 60 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 3 modifié.

Article 4 «...»

Amendements de suppression n°s 231 de M. Le Roux et 324 de Mme Billard : M. Bruno Le Roux, Mme Martine Billard, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 182 rectifié de M. Gerin : MM. André Gerin, le rapporteur, le ministre, Pierre Cardo. - Rejet.
Amendement n° 387 de M. Brard : MM. André Gerin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 4.

Article 5 «...»

MM. André Gerin, Bruno Le Roux.
Amendement n° 232 de M. Le Roux : MM. Bruno Le Roux, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 61 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 183 de M. Gerin, avec les sous-amendements n°s 403 et 404 de M. Mamère : MM. André Gerin, le rapporteur, le ministre, Mme Martine Billard. - Rejet du sous-amendement n° 403.
Mme Martine Billard. - Rejet du sous-amendement n° 404 et de l'amendement n° 183.
Amendement n° 62 rectifié de la commission : MM. Bruno Le Roux, le rapporteur, le ministre, André Gerin, Pierre Cardo. - Adoption.
Adoption de l'article 5 modifié.

Après l'article 5 «...»

Amendement n° 233 de M. Le Roux : MM. Bruno Le Roux, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Article 6 «...»

Amendement n° 236 de M. Le Roux : MM. Bruno Le Roux, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n°s 184 de M. Gerin et 325 de Mme Billard : M. André Gerin, Mme Martine Billard, MM. le rapporteur, le ministre, Bruno Le Roux, le président de la commission. - Rejets.
Amendement n° 63 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 467 de M. Estrosi : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 6 modifié.

Article 7 «...»

Amendement n° 237 de M. Le Roux : MM. Bruno Le Roux, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 7.

Article 7 bis «...»

Amendement n° 355 de M. Dord, avec le sous-amendement n° 407 de M. Mamère : MM. Gérard Léonard, le rapporteur, le ministre, Mme Martine Billard. - Rejet du sous-amendement n° 407 ; adoption de l'amendement n° 355.
Adoption de l'article 7 bis modifié.

Après l'article 7 bis «...»

Amendement n° 430 du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur. - Adoption.

Article 8. - Adoption «...»
Après l'article 8 «...»

Amendement n° 238 de M. Montebourg : MM. Jean-Pierre Blazy, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 67 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 68, troisième rectification, de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendements identiques n°s 66 de la commission, 13 rectifié de M. Vanneste, 14 rectifié de M. Cova, 15 rectifié de M. Fenech, 16 rectifié de Mme Morano et 195 de M. Luca : MM. le rapporteur, le ministre, Georges Fenech, Bruno Le Roux, André Gerin, Mme Martine Billard, M. Christian Vanneste. - Adoption.
Amendement n° 234 corrigé de M. Montebourg : MM. Jean-Pierre Blazy, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 235 corrigé de M. Montebourg : MM. Jean-Pierre Blazy, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 69 rectifié de la commission : MM. le rapporteur, le ministre, Bruno Le Roux, Gérard Léonard. - Retrait.
Les amendements n°s 323 rectifié et 212 de M. Lagarde ont été rectifiés afin d'être appelés après l'article 21.
Amendement n° 65 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
2.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

SÉCURITÉ INTÉRIEURE

Suite de la discussion d'un projet de loi
adopté par le Sénat après déclaration d'urgence

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, pour la sécurité intérieure (n°s 381, 508).

Discussion des articles

    M. le président. J'appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

Avant l'article 1er

    M. le président. Je donne lecture des intitulés du titre Ier et du chapitre Ier avant l'article 1er :
    « Titre Ier. - Dispositions relatives aux forces de sécurité intérieure et àla protection des personnes et des biens. »
    « Chapitre Ier. - Dispositions relatives aux pouvoirs des préfets en matière de sécurité intérieure. »
    M. Estrosi, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, et M. Gérard Léonard ont présenté un amendement, n° 54, ainsi libellé :
    « Avant le chapitre Ier, insérer les dispositions suivantes :

« Chapitre Ier A
    « Dispositions relatives aux missions de l'Etat
et à l'association des collectivités territoriales
en matière de sécurité intérieure
« Article 1er A

    « L'article 1er de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité est ainsi rédigé :
    « Art. 1er. - La sécurité est un droit fondamental et l'une des conditions de l'exercice des libertés individuelles et collectives.
    « L'Etat a le devoir d'assurer la sécurité en veillant, sur l'ensemble du territoire de la République, à la défense des institutions et des intérêts nationaux, au respect des lois, au maintien de la paix et de l'ordre publics, à la protection des personnes et des biens.
    « Il associe à la politique de sécurité, dans le cadre de dispositifs locaux dont la structure est définie par décret, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale, ainsi que les représentants des professions, des services et des associations confrontées aux manifestations de la délinquance ou oeuvrant dans le domaine de la prévention ou de l'aide aux victimes. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Je laisse à M. Léonard le soin de soutenir cet amendement.
    M. le président. La parole est à M. Gérard Léonard.
    M. Gérard Léonard. Cet amendement obéit à un souci de cohérence et de clarté. La loi du 15 novembre 2001 a modifié l'article 1er de la loi d'orientation de 1995 qui définissait le rôle de l'Etat en matière de sécurité. Il s'agissait de prendre en compte la création des conseils locaux de sécurité et le rôle joué par les élus et les différents acteurs intervenant en matière de sécurité. Or un décret du 17 juillet dernier a transformé ces CLS en CLSPD, c'est-à-dire en contrats locaux de sécurité et de prévention de la délinquance. Cet amendement tend précisément à introduire cette modification réglementaire dans la loi.
    Par ailleurs, cet amendement reprend en partie la rédaction de l'article 1er de la loi d'orientation et de programmation sur la sécurité de janvier 1995, la LOPSI du 29 août 2002 faisant expressément référence, dans son annexe I, à cette loi de 1995 qui définit très précisément les missions de l'Etat en matière de sécurité.
    Je précise d'ores et déjà que cette modification ne dissimule aucune arrière-pensée idéologique ou politique. Elle répond à un simple souci de cohérence. M. Le Roux s'est étonné en commission de la place faite à la défense des institutions et de l'absence de référence à certains principes. Seule l'allusion à la réduction des inégalités a disparu. Il est évident que lutter contre l'insécurité tend à réduire les inégalités. La simple référence aux institutions devrait suffire dans la mesure où ces dernières se conçoivent dans un concept organique, certes, mais également fonctionnel. Le cadre juridique recouvre ainsi la Constitution et le préambule de la Constitution dans lequel figure la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui pose très clairement ces principes.
    Tel est, brièvement exposé, le sens de cet amendement qui, je le répète, obéit à une exigence de cohérence.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Je tiens à souligner l'importance de cet amendement qui répond à la volonté exprimée par le Gouvernement et par le ministre de l'intérieur dans la LOPSI d'associer très étroitement l'action des collectivités locales à celle de l'Etat dans le domaine de la lutte contre l'insécurité et en matière de prévention.
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, pour donner l'avis du Gouvernement par l'amendement n° 54.
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. M. Léonard a raison, le débat ne doit pas s'engager sur la base de procès d'intention ou de mauvaises interprétations des textes. Cela étant, la loi sur la sécurité quotidienne avait d'ores et déjà prévu de prendre en compte le rôle des acteurs locaux de sécurité. Il aurait donc suffi de substituer aux termes « contrats locaux de sécurité les termes « contrats locaux de sécurité et de prévention de la délinquance » sans procéder à d'autres modifications. Je regrette, pour ma part, qu'il ne soit plus précisé que la sécurité est une condition de la réduction des inégalités. Mais je n'en déduis pas que vous considérez que tel n'est pas le cas.
    Ce qui me préoccupe le plus avec cette nouvelle rédaction, c'est que la sécurité des personnes et des biens n'apparaît plus comme la première priorité. Le précédent gouvernement avait engagé à cet égard une politique importante, poursuivie aujourd'hui par l'actuel ministre de l'intérieur. Encore que, sous couvert de protéger les personnes et les biens, on nous propose parfois dans ce texte des mesures relevant plus de l'ordre public. La frontière n'est pas toujours clairement établie, comme nous aurons l'occasion de le voir au cours du débat.
    En tout cas, dans la loi sur la sécurité quotidienne, la sécurité des personnes et des biens apparaissait en première position. Aujourd'hui, c'est la défense des institutions qui occupe cette place. Je n'y accorde pas plus d'importance que cela. Je considère simplement que c'est symboliquement regrettable. Il faudrait en effet réaffirmer que le devoir de l'Etat, c'est d'abord d'organiser la sécurité des biens et des personnes et donc de ce que j'appelle la sécurité publique. Mais vous avez fait un autre choix.
    M. le président. La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. La rédaction hâtive et tardive de cet amendement montre, s'il en était besoin, les limites et l'ambiguïté de l'article 1er du projet de loi. Nous allons présenter, quant à nous, un certain nombre de propositions...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Innovantes !
    M. André Gerin. ... précises sur les moyens et les missions de la police.
    M. le président. Sur l'amendement n° 54, je suis saisi de plusieurs sous-amendements.
    Les sous-amendements n°s 410, 411, 451 et 413 sont présentés par M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet.
    Le sous-amendement n° 410 est ainsi rédigé :
    « A l'amendement n° 54, après le premier alinéa de l'article 1er de la loi du 21 janvier 1995, insérer l'alinéa suivant :
    « La politique de tranquillité publique repose sur la prévention, la médiation, la sanction et l'aide aux victimes. »
    La parole est à Mme Martine Billard.
    Mme Martine Billard. Au cours de la discussion générale, il est clairement apparu que certains accordaient beaucoup d'importance à la prévention tandis que d'autres considéraient qu'en dépit des sommes investies, cette politique de prévention était un échec. Pour nous, il est essentiel de réaffirmer que toute politique en la matière ne peut être équilibrée que si elle repose sur quatre piliers : la prévention, la médiation, la sanction et l'aide aux victimes. Or comment ne pas être inquiets alors que les prisons, déjà surchargées, vont l'être plus encore et que les subventions dont bénéficient les associations assurant le suivi de sortie de prison - malheureusement insuffisantes aujourd'hui - vont être réduites ?
    Alors, vous nous expliquez que tout cela coûte cher et n'est pas probant. Certes, il est indéniable que les éducateurs de rue sont moins identifiables que les agents des forces de l'ordre, policiers ou gendarmes. Mais qu'est-ce qui vous prouve que, sans cette politique de prévention, il n'y aurait pas plus d'actes de délinquance ? Cette politique moins « visible » contribue grandement à prévenir la délinquance.
    Nous reprochons précisément à ce texte d'être totalement déséquilibré. Il ne prévoit rien au titre de la prévention en amont, et rien en matière de réinsertion à la sortie de prison, alors pourtant que le chômage remonte et que les jeunes qui auront purgé leur peine risquent donc de se retrouver sans travail, sans logement. Ne peut-on craindre qu'ils ne commettent d'autres délits s'ils ne sont pas aidés à leur sortie de prison par des associations ? D'où l'importance de la phrase que nous proposons d'ajouter avec ce sous-amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Monsieur le président, si vous le permettez, je vais me prononcer sur l'ensemble des sous-amendements, ce qui m'évitera d'intervenir longuement par la suite.
    M. le président. Très bien.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La commission des lois a souhaité rester très attachée aux principes définis par la LOPSI. Ceux-ci définissaient la nouvelle architecture en matière d'organisation de la sécurité dans notre pays, depuis le conseil de sécurité intérieure en haut de la pyramide, en passant par le ministère de la sécurité intérieure, pour arriver aux organisations qui en dépendaient au plan territorial. L'amendement présenté par M. Léonard vise simplement à réaffirmer le rôle conjoint de l'Etat et des collectivités territoriales en matière de prévention. Nous souhaitons nous en tenir à cette définition précise qu'il ne faut pas édulcorer sous peine de ne plus répondre aux objectifs fixés par la LOPSI. La commission a donc rejeté l'ensemble des sous-amendements.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis que la commission.

    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. La loi fixe des orientations ou des principes. Or, en faisant allusion à la prévention, à la médiation, à la sanction et à l'aide aux victimes, toutes notions qui relèvent des moyens, le sous-amendement n° 410 sort du cadre de la loi. En outre, il est indiqué dans l'exposé sommaire - heureusement que cela ne figure pas dans la rédaction proposée pour l'article 1er de la loi du 21 janvier 1995 - que ce projet de loi concerne « des classes dangereuses et pauvres ». Cet amalgame me paraît particulièrement dangereux. Qu'une loi sur la sécurité vise les gens dangereux ne me semble pas totalement incohérent. Quant à la supposée pauvreté des personnes concernées, je dénonce là une généralisation fort mal venue. Bien des réseaux de proxénètes ou des organisations de squats dans les cités sont loin d'être pauvres !
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Monsieur le président, je défendrai à l'occasion de cette intervention les sous-amendements n°s 451 et 413.
    Nous sommes choqués par le fait que l'amendement n° 54 de la commission inverse le sens de la politique menée jusqu'à présent en prévoyant que la loi va défendre d'abord les institutions et non pas les personnes. Il nous semblait pourtant avoir compris, après les déclarations du Président de la République le 14 juillet 2001 devant les caméras de télévision selon lesquelles la France subissait une déferlante de l'insécurité, que le Gouvernement avait pour première priorité de défendre les personnes.
    Par ailleurs, je constate une suppression grave qui en dit long sur l'état d'esprit qui anime ce gouvernement en matière de politique, de cohésion sociale, ou plutôt de démolition sociale. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme Sylvia Bassot. N'importe quoi !
    M. Noël Mamère. Il n'apparaît plus en effet dans la loi que la sécurité est une condition de la réduction des inégalités. Cette mention figurait poutant dans la loi de 1995 que vous aviez votée, messieurs de la majorité. Cela confirme les propos de Martine Billard : vous cherchez en fait à stigmatiser des populations, n'en déplaise à Pierre Cardo. Or ces populations sont vulnérables. Et on peut être riche et vulnérable. Certains jeunes connaissent des situations de grande vulnérabilité sans pour autant vivre dans la pauvreté.
    Certes, cette loi bénéficie aujourd'hui de l'appui de l'opinion. Mais celle-ci risque de se réveiller demain avec la gueule de bois. Ce gouvernement se veut le chantre d'une France propre, dans laquelle il n'y aurait plus de prostituées, plus de mendiants agressifs, plus de jeunes qui se réunissent dans les halls d'immeuble parce qu'on ne leur a rien offert d'autre dans le cadre de politiques de la ville qui ont toutes échoué. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Charles Cova. Nous allons pleurer !
    M. Noël Mamère. Ne veut-on plus voir de gens du voyage dans notre pays ? Comme je suis un affreux cumulard et que je suis aussi maire, je peux vous dire que je connais des gens du voyage sédentarisés...
    M. Pierre Cardo. Ce ne sont plus des gens du voyage, alors !
    M. Noël Mamère. ... parfaitement respectables. Tous les gens du voyage ne doivent pas être assimilés à des organisateurs de filières. Cette politique de l'amalgame vise également les prostituées : selon ce texte, toutes les prostituées feraient partie de réseaux mafieux et organisés.
    En revanche, et je m'adresse plus particulièrement à Pierre Cardo, qui a démontré qu'il était capable de comprendre ces choses (« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), il n'y a pas un mot dans ce projet sur la prévention, l'accompagnement social, la médiation ou l'aide aux victimes, qui sont autant de piliers d'une bonne politique de répression. Il ne peut y avoir de bonne politique de répression sans une bonne politique de prévention. Ce gouvernement a fait un choix hémiplégique : la répression sans la prévention. Cela fait plaisir au bon peuple de France, pour l'instant. M. le ministre de l'intérieur nous dit qu'il veut défendre d'abord les plus démunis et les plus pauvres.
    M. Pierre Cardo. Eh oui !
    M. Noël Mamère. Mais il sait bien qu'aujourd'hui les premières victimes de sa politique vont être les pauvres, ceux auxquels on a supprimé l'aide médicale d'Etat, la CMU, et qui peuvent crever entre le 15 du mois et le 1er du mois suivant...
    M. Gérard Léonard. Vos propos sont scandaleux, méprisants, inadmissibles !
    Mme Sylvia Bassot. C'est vraiment n'importe quoi, monsieur Mamère !
    M. Noël Mamère. Ce gouvernement mène une politique de démantèlement en règle des acquis difficilement obtenus par la majorité plurielle, par la gauche plurielle,...
    M. Charles Cova. On voit où cela l'a mené !
    M. Noël Mamère. ... sur un certain nombre de dossiers qui concernaient la solidarité : emplois-jeunes, CMU. C'est une véritable politique de lutte contre les pauvres. Et ce texte n'est qu'une pierre de l'édifice !
    M. Pierre Cardo. Votre propos est excessif !
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
    M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Le texte lui-même du sous-amendement de M. Mamère est, je le reconnais, autrement plus explicite et révélateur de ses arrière-pensées que l'exposé qu'en a fait Mme Billard : la référence à la tranquillité publique, qu'il veut faire figurer avant l'article 1er, sous-entend clairement, son auteur lui-même l'a indiqué, que le souci de la prévention n'est pas pris en compte dans le texte. Je ne peux, monsieur Mamère, que vous renvoyer à la loi d'orientation pour la justice votée il y a quelques mois et qui témoigne très clairement de notre attachement à toutes les mesures éducatives et même à leur renforcement. Il faut bien comprendre qu'une loi sur la sécurité n'a pas à reprendre les mêmes déclarations de principe qu'une loi sur la justice. Celle que vous voudriez inscrire ici figure déjà dans la loi d'orientation pour la justice ; elle n'a donc pas sa place dans ce texte, a fortiori avec toute la sauce que vous y rajoutez, qui relève à l'évidence du procès d'intention. En un mot, cette question ayant déjà été traitée dans le cadre de la loi d'orientation de la justice, il serait franchement malvenu de l'inscrire dans un texte qui traite de la sécurité.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. En fait, monsieur Mamère, il y a si peu à dire sur le texte que vous présente le Gouvernement, que vous en êtes réduit à critiquer, avec le talent et l'énergie qu'on vous connaît, l'ensemble de la politique gouvernementale... Nous vous connaissons bien : si vous aviez tant à dire sur mon texte, vous ne vous en priveriez pas !
    M. Jean-Christophe Lagarde. C'est vrai !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. J'interprète donc votre charge contre l'autre volant de la politique du Gouvernement comme une forme d'absolution pour celui-ci... Soyez-en remercié ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. André Gerin. Nous voilà dans la catéchèse !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Que voulez-vous : quand on connaît ses saints - entre guillemets -, on les honore ! Voici qui est fait !
    Cela dit, je voudrais en appeler à votre honnêteté intellectuelle. Vous pouvez ne pas être d'accord, c'est votre droit. Mais je ne vous laisserai pas faire un amalgame en vous servant des gens du voyage. Je ne l'accepte pas. On peut tout dire des propositions du Gouvernement, mais pas que nous n'avons rien prévu pour les gens du voyage !
    M. Pierre Hellier. Exactement !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La procédure pénale applicable aux gens du voyage qui se comportent mal est conditionnée à la réalisation d'aires d'accueil par les élus locaux. Je vous demande de me rendre les armes sur ce point, monsieur Mamère. Vous avez dit qu'il n'y avait rien. Je vous prends les doigts dans le pot de confiture : la condition de la réalisation d'aires d'accueil, c'est quelque chose de très important. Je succède à un ministre de l'intérieur sous lequel vingt-quatre départements seulement sur cent avaient un schéma départemental d'aire d'accueil. Je conditionne, et ce n'est pas si facile, la réalisation d'une politique pénale à la réalisation de ces aires. Ayez au moins l'obligeance de reconnaître, monsieur Mamère, et je sais que vous le ferez bien volontiers, que c'est déjà quelque chose.
    Nous ferions litière de la prévention, dites-vous, alors que c'est une question très importante. Mais quand et dans quel article de ce projet avez-vous trouvé une disposition qui revienne en arrière sur ce point ? Je ne touche à rien. Je prends la politique de prévention qu'avait défendu le gouvernement de Lionel Jospin en l'état...
    M. Pierre Cardo. En piteux état !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... et je la garde telle qu'elle est. J'ai dit hier que je comptais aller plus loin. Mais à aucun endroit de ce texte, à aucun moment nous ne revenons sur une seule des dispositions proposées par le gouvernement socialo-communiste et vert que vous avez supporté et soutenu ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Décidément, quel cauchemar vous vivez, monsieur le ministre !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Autrement dit, monsieur Mamère, cette politique de prévention dont vous me reprochez l'insuffisance, c'est précisément celle que le gouvernement Jospin a mise en oeuvre pendant cinq ans ! Je n'y touche pas. On peut me reprocher de ne pas aller plus loin, mais pas d'appliquer strictement la politique de prévention voulue par nos prédécesseurs. Nous allons plus loin pour donner davantage de moyens aux forces de sécurité, pour défendre les plus faibles, et nous gardons la politique de prévention proposée par le gouvernement de Lionel Jospin. Il faut croire que nos prédécesseurs ne la trouvaient pas si mal, puisqu'en cinq ans, ils l'ont toujours confirmée sans rien y changer ! Nous nous bornons à adapter la répression et vous venez nous dire que nous oublions totalement la prévention. Ou alors, soyez honnête et dites clairement que nos prédécesseurs de gauche l'ont toujours et parfaitement oublié ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. M. Bruno Le Roux et M. Lagarde m'ont demandé d'intervenir. Je leur demande de rester brefs, car nous avons beaucoup de travail devant nous. C'est un débat délicat, je le reconnais, mais prenons garde à ne pas le relancer en permanence. Aussi important soit-il, il ne s'agit que d'un sous-amendement...
    La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Je ne relancerai pas le débat, monsieur le président. Je soutiendrai pour ma part les quatre sous-amendements de nos collègues Verts, même si je comprends que le Gouvernement, par cohérence, ne veuille pas accepter les sous-amendements n°s 410 et 413. Je demande seulement au ministre et à la commission de prendre en considération le sous-amendement n° 451 qui se borne à modifier l'amendement de MM. Estrosi et Léonard en plaçant au rang de première priorité de l'Etat la protection des personnes et des biens. C'est loin d'être inutile au regard de la politique que vous entendez définir aujourd'hui. La référence à la lutte contre les inégalités et le fait d'associer le terme de sécurité à la prévention et à la médiation pourraient se retrouver aller à l'encontre du message que vous essayer de faire passer.
    M. le président. Monsieur Le Roux, le sous-amendement n° 451 sera appelé en son temps ; je peux considérer que vous avez fait d'ores et déjà connaître votre position sur ce sujet.
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Nous avons déjà eu l'occasion, monsieur Mamère, d'échanger nos arguments sur ce sujet dans le cadre de la discussion de loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure. Reste que je trouve surprenant de voir toujours revenir l'idée selon laquelle la qualification d'un type de délit reviendrait à stigmatiser une population. Or vous venez, en l'occurrence, de refaire la même opération. Retenir le délit d'occupation illégale d'un terrain par une caravane, est-ce stigmatiser les gens de voyage ? Autant dire que, dans notre législation, lorsque l'on défend aux gens de dépasser les 130 kilomètres à l'heure, ou de brûler les feux rouges, on stigmatise les automobilistes...
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est intéressant !
    M. Jean-Christophe Lagarde. ... ou que condamner la pédophilie sur Internet, c'est considérer tous les internautes comme des pédophiles ! Pas du tout ! Et que penser des sanctions prévues dans la loi SRU contre les marchands de sommeil ? Est-ce à dire que tous les bailleurs privés sont des délinquants ? Ce raisonnement reviendra sans doute souvent dans le débat, mais il est totalement faux. Dès lors que le droit pénal définit un délit, il vise évidemment ceux qui transgressent la loi et non, heureusement, l'immense majorité des gens qui, placés dans la même situation, s'appliqueront à respecter nos règles de vie. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Pierre Cardo. Parfaitement ! Il ne faut pas entrer dans ce jeu !
    M. Jean-Pierre Brard. Pour la dialectique, le ministre est meilleur. Il a davantage de métier !
    M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 410.
    (Le sous-amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Le sous-amendement n° 411 est ainsi rédigé :
    « A l'amendement n° 54, dans l'avant-dernier alinéa de l'article 1er de la loi du 21 janvier 1995, substituer au mot : « sécurité » les mots : « tranquillité publique ».
    La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. J'ai par avance largement défendu tous ces sous-amendements. Qu'il me soit toutefois permis d'apporter une remarque après les interventions de M. le ministre et de notre collègue Lagarde. Personne ne peut dire que le précédent gouvernement n'a rien fait en matière de prévention.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ce n'est pas ce que j'ai dit !
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Il n'a pas dit cela !
    M. Charles Cova. Il a dit qu'il gardait ce que ses prédécesseurs avaient fait !
    M. Noël Mamère. « Je me contente de reprendre textuellement la politique de prévention de mes prédécesseurs et je n'y ajoute rien », avez-vous dit. C'est précisément ce que nous vous reprochons, dans la mesure où, après la campagne que vous avez menée avec M. le Président de la République qui vous sert de référence, vous n'avez pas doté la politique de prévention de budgets supplémentaires.
    Mme Sylvia Bassot et M. Gérard Léonard. C'est incroyable !
    M. Pierre Cardo. La prévention, ce n'est pas une question de budget !
    M. Noël Mamère. Entre autres dispositifs mis en place, celui des contrats locaux de sécurité, rappelons-le, a permis à des organismes qui n'avaient pas l'habitude de se parler et de travailler ensemble de contribuer à la tranquillité publique et à la cohésion sociale : vous en avez modifié le nom, suivant le vieux principe du prince du Guépard : il vaut mieux tout changer, surtout pour ne rien changer...
    Quant aux gens du voyage, je n'ai jamais contesté la nécessité, dans certaines situations, de sanctionner ; mais il ne faudrait pas pour autant les rejeter et les transformer en boucs émissaires de nos propres turpitudes. Il a fallu la loi Besson, votée sous la gauche, pour imposer la mise en place des plans départementaux d'accueil de gens du voyage...
    M. Charles Cova et Mme Sylvia Bassot. Des schémas départementaux !
    M. Noël Mamère. ... et obliger les maires à créer des aires d'accueil. Le problème est qu'ils n'ont finalement pas obtempéré... Comment s'étonner dans ces conditioins que les gens du voyage se mettent à occuper illégalement des terrains ? De la même façon, peut-on s'étonner de voir ceux que l'on appelle des squatters, jeunes isolés ou familles entières vivant dans la plus grande pauvreté, occuper illégalement, paraît-il, des immeubles inhabités appartenant à des banques ou des investisseurs institutionnels, alors que rien n'a été mis en place pour le logement des plus démunis ?
    M. Charles Cova. Pendant cinq ans, vous n'avez rien fait !
    M. Noël Mamère. Mes collègues maires qui siègent sur ces bancs savent que l'on n'a guère progressé dans le domaine de ce qu'on appelle le logement très social ; je n'ai rien vu à cet égard dans la politique de ce gouvernement que ce soit du côté de chez M. Fillon ou de celui de son collègue chargé du logement.
    Ne nous faites donc pas dire ce que nous n'avons pas dit. Nous ne vous accusons pas forcément, mais vous savez bien qu'en montrant du doigt, médias à l'appui, devant l'ensemble du pays certaines catégories de population, déjà souvent stigmatisées, on pousse à les considérer comme coupables. Il en va de même pour un mis en examen : on a beau être présumé innocent, dès lors qu'on a été vu au journal de vingt heures, il est bien difficile de démontrer son innocence.
    Voilà pourquoi la politique d'affichage à court terme que vous êtes en train de mener nous paraît dangereuse...
    M. le président. Concluez, monsieur Mamère.
    M. Noël Mamère. Elle finira par se retourner contre vous, car loin d'assurer la tranquillité publique, elle ne peut qu'ajouter un peu plus de désordre.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 411.
    (Le sous-amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Le sous-amendement n° 451 est ainsi libellé :
    « A l'amendement n° 54, après le mot "République, rédiger ainsi la fin de l'avant-dernier alinéa de l'article 1er de la loi du 21 janvier 1995 :
    « ", à la protection des personnes et des biens, au respect des lois, au maintien de la paix et de l'ordre publics, à la défense des institutions et des intérêts nationaux. »
    Le sous-amendement a déjà été défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Ce sous-amendement n'a pas été examiné par la commission. A titre personnel, j'émets un avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 451.
    (Le sous-amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Le sous-amendement n° 413 est ainsi rédigé :
    « A l'amendement n° 54, compléter l'avant-dernier alinéa de l'article 1er de la loi du 21 janvier 1995 par les mots : "la cohésion sociale, la lutte contre les discriminations, l'exclusion et les inégalités sociales et territoriales, la défense de l'environnement. »
    La parole est à Mme Martine Billard.
    Mme Martine Billard. Qui sont les premiers frappés par l'insécurité ? Bien évidemment, ceux qui vivent dans les quartiers les plus difficiles ou encore les plus fragiles physiquement, les personnes âgées par exemple, mais aussi les plus démunis, qui sont le plus en situation de précarité aussi. Se faire voler cinq euros lorsqu'on est au RMI, cela n'a pas tout à fait les mêmes conséquences que lorsqu'on touche une indemnité de député.
    M. Jean-Marie Le Guen. Il y a plus riche qu'un député !
    Mme Martine Billard. Il y a effectivement plus riche que les députés, certains PDG par exemple.
    M. Jean-Pierre Brard. Mme Bettencourt !
    Mme Martine Billard. Autrement dit, il est très important de comprendre que l'insécurité ne s'apprécie pas seulement en termes d'agression ; c'est l'ensemble de ce que subissent les gens dans leur vie quotidienne, l'insécurité du lendemain, de ne pas savoir où l'on va dormir, le fait de ne pas savoir comment on va manger. Tout cela fragilise encore davantage. Voilà pourquoi nous insistons sur cet amendement.
    M. le président. La commission et le Gouvernement ont donné un avis défavorable sur le sous-amendement n° 413.
    Je le mets aux voix.
    (Le sous-amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Lagarde et M. Perruchot ont présenté un amendement, n° 452, ainsi libellé :
    « Après le mot "intercommunale, rédiger ainsi la fin du dernier alinéa de l'amendement n° 54 :
    « A leur demande, ces derniers sont informés des résultats et des moyens mis en oeuvre dans le cadre de cette politique de sécurité. Les représentants des professions, des services et des associations confrontées aux manifestations de la délinquance ou oeuvrant dans le domaine de la prévention ou de l'aide aux victimes peuvent également y être associés. »
    La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. Ce sous-amendement propose de garantir aux maires - je sais qu'ils sont nombreux aujourd'hui sur ces bancs - un droit d'information obligatoire sur la politique de sécurité locale, tant du point de vue des moyens mis en oeuvre que des résultats.
    En effet, les dispositions actuelles restent insuffisantes. La loi du 15 novembre 2001 est floue sur ce sujet et la loi d'orientation et de programmation sur la sécurité intérieure du 29 août 2002 a simplement prévu une information annuelle des élus locaux sur l'action des groupements d'intervention régionale ainsi qu'un droit de suggérer des actions aux responsables des GIR.
    Cela va aussi dans le sens de ce que nous ressentons les uns et les autres, les maires en tout cas, de plus en plus impliqués dans les financements liés à la sécurité. On nous demande de plus en plus souvent de faire de la sécurité un mot d'ordre. C'est un rôle important et nous l'assumons. Il est donc normal, aux yeux de l'UDF tout au moins, que les maires aient en retour un minimum d'informations. En adoptant ce sous-amendement, nous ferons oeuvre utile pour les maires de toutes les communes de France.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Si je partage évidemment l'intention de ce sous-amendement, je considère que l'amendement n° 54 est intangible.
    M. Jean-Pierre Brard. Il est quoi ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Rappelons que la loi de sécurité intérieure vise à procéder à une écriture normative de la loi d'orientation et de programmation sur la sécurité intérieure. Or cette mesure était globalement prévue dans la loi d'orientation et de programmation sur la sécurité intérieure, et a d'ores et déjà fait l'objet d'un décret du 17 juillet 2002. Ce sous-amendement devient dès lors inutile, dans la mesure où cette disposition est appliquée depuis le 17 juillet 2002.
    M. Pierre Cardo. En effet.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Les maires sur le terrain ont certainement eu l'occasion de s'en apercevoir. La commission suggère qu'il soit retiré, faute de quoi elle en proposera le rejet.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement partage exactement la position du rapporteur. Cette disposition, après avoir été l'occasion de longs débats lors de la loi d'orientation et de programmation sur la sécurité intérieure, a fait l'objet d'un décret et même d'une circulaire.
    On nous reproche, à nous qui les proposons comme à vous qui les votez, de faire des lois trop complexes, trop lourdes, avec trop d'articles. Je saisis cette occasion, après le rapporteur, pour confirmer notre réelle volonté de développer l'information des maires. Dans la mesure où nous avons déjà un décret et une circulaire, est-il vraiment besoin de l'inscrire dans la loi ? Peut-être le groupe UDF pourra-t-il considérer que ses préoccupations ont été entendues, mieux encore, traduites dans les faits, et ainsi retirer son amendement.
    M. Gérard Léonard. Tout à fait. C'est du domaine réglementaire.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.
    M. Jean-Pierre Blazy. Le groupe socialiste soutient le sous-amendement de nos collègues de l'UDF. Il est conforme à l'esprit de la LOPSI, mais également de la LSQ, qui a le privilège de l'antériorité. La notion de coproduction de la sécurité que celle-ci a introduit supposait la nécessité pour les maires d'être informés, d'être associés. A cet égard, le sous-amendement n° 452 précise bien les choses et nous lui apportons notre appui.
    M. Gérard Léonard. Vous enfoncez une porte ouverte !
    M. le président. La parole est M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, si d'aventure nos collègues retiraient leur sous-amendement, j'annonce d'ores et déjà, pour éviter toute ambiguïté, que je le reprendrai.
    J'entends ce que vous venez de dire après M. le rapporteur, monsieur le ministre : tout est bien, puisque c'est déjà dans le texte. Je n'imagine pas un instant que vous n'appliquiez pas la loi, monsieur le ministre, mais je vais vous raconter ce qui s'est passé dans ma ville le 31 décembre dernier, et qui montre que la loi n'est pas satisfaisante.
    M. Pierre Cardo. Une histoire de Mme Bettencourt ?
    M. Jean-Pierre Brard. Des voitures ont brûlé...
    M. Pierre Cardo. Quelle politique de prévention ! (Sourires.)
    M. Jean-Pierre Brard. Alors que nous travaillons depuis longtemps en étroite relation avec la police nationale, je ne l'ai appris, par Le Parisien, que le lendemain, sinon le surlendemain, même. C'est donc bien qu'il y a un dysfonctionnement et que la loi n'est pas suffisante pour inciter les fonctionnaires et responsables de la police nationale à informer les maires. Je ne peux pas croire un instant les sarcasmes ou propos malveillants qui m'ont été rapportés...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est pour cela que vous vous en faites l'écho ?
    M. Jean-Pierre Brard. Oui, pour que vous puissiez les démentir ! (Rires.) Vous savez comme je tiens à aller au fond des choses...
    M. le président. Quel souci, monsieur Brard !
    M. Jean-Pierre Brard. De préserver le ministre ! (Rires.) Pourquoi souriez-vous ?
    Vous auriez donné consigne, m'avait-on dit, pour que tout incident survenant dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier remonte directement et exclusivement au ministère, ce qui expliquerait que le commissaire de ma ville ne m'en ait pas informé en temps et en heure.
    M. Pierre Hellier. Il n'avait pas le temps !
    M. Jean-Pierre Brard. Si tel n'est pas le cas, ce qui me semble le plus probable, mais vous allez me le confirmer, c'est que la loi n'est pas suffisante et le sous-amendement de nos collègues de l'UDF tout à fait légitime.
    M. Charles Cova. C'est le décret qui n'est pas satisfaisant, non la loi !
    M. le président. Monsieur Lagarde, retirez-vous votre sous-amendement n° 452 ?
    M. Jean-Christophe Lagarde. Vous nous dites, monsieur le ministre, que ce que nous demandons figure dans un décret et une circulaire. Nous avons aujourd'hui un bon gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Mais si, demain, par malheur, les amis de M. Brard et de M. Le Roux revenaient au pouvoir (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), rien ne garantit que les maires puissent être encore informés.
    Nous allons donc maintenir notre amendement, monsieur Brard, pour que la loi garantisse que, malgré un renversement de majorité, les maires continueront à être informés - avancée qu'il faudra mettre au compte de notre majorité.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Avec l'accord de M. Lagarde, je voudrais ajouter à son sous-amendement que les maires d'arrondissement peuvent être concernés par cette affaire.
    M. le président. Monsieur Le Guen, on ne peut pas sous-amender un sous-amendement !
    Sur le sous-amendement n° 452, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    M. le président. La parole est à M. Robert Pandraud.
    M. Robert Pandraud. M. le rapporteur a tout à fait raison, la disposition contenue dans le sous-amendement est d'ordre réglementaire et n'a donc pas à figurer dans un texte législatif.
    Mais je voudrais m'adresser à M. le ministre. Tous les ministres que j'ai saisis de cette question depuis vingt ans, ont systématiquement oublié - et lui aussi - dans leurs circulaires les parlementaires qui ne sont pas maires. Or ceux-ci reçoivent les informations sur l'insécurité et la criminalité dans leur circonscription par l'intermédiaire, comme M. Brard, du Parisien du surlendemain !
    M. Jean-Pierre Brard. Et moi, je suis maire pourtant !
    M. Robert Pandraud. Pour ma part, je vous assure que je les obtiens par des moyens très divers, mais qu'officiellement, je n'ai jamais eu un chiffre de la préfecture. Cela doit arriver à M. Le Roux, maintenant qu'il a perdu sa qualité de magistrat municipal.
    M. Bruno Le Roux. C'est vrai !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ce qui compte dans cette affaire, c'est que la bonne foi du Gouvernement soit entendue. Ce que je voulais, et quoi qu'en pense mon administration, c'est faire en sorte que les maires aient droit à une information. Il n'est pas normal qu'ils apprennent en lisant le journal ce qui s'est passé dans leur ville. Je le pense profondément, je vous le confirme.
    M. Robert Pandraud. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. J'ai donc voulu évoquer cette question dès la LOPSI. Je pense que le décret et la circulaire suffisaient, et qu'il était de mon devoir de ministre de me conformer à la Constitution, laquelle définit ce qui est normatif ou réglementaire. C'est la raison pour laquelle, monsieur Perruchot, monsieur Lagarde, j'avais inscrit cela dans le décret et dans la circulaire, et non pas dans la loi.
    M. Robert Pandraud. Absolument !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mais si vous estimez que la volonté de transparence du Gouvernement se trouve mise en cause par ce qui n'est à mes yeux que le scrupuleux respect de nos règles et le souci de ne pas encombrer la loi d'éléments qui n'ont pas à y être, sachez que j'attache plus d'importance au climat de confiance entre les élus et le Gouvernement sur cette question de la transparence et de la vérité des chiffres, qu'à l'aspect juridique. Je n'en fais donc pas un enjeu. Je le dis à l'adresse de tous sur tous, les bancs de cette assemblée. S'il se trouve une majorité pour considérer qu'il faut l'inscrire dans la loi, je préfère qu'il en soit ainsi afin que chacun soit bien conscient de la volonté de transparence absolue du Gouvernement...
    M. Jean-Marie Le Guen. Très bien !
    M. Bruno Le Roux. C'est parfait !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... même au prix, monsieur Le Roux, d'une légère entorse au droit constitutionnel. Dans ce cas là, vous me donnerez acte que cela n'a pas à figurer dans la loi mais que compte tenu de l'importance que, sur tous les bancs, on attache à la réalisation de cet objectif de transparence, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.
    M. Jean-Marie Le Guen. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, je suis satisfait de ce que vient de dire M. le ministre.
    M. Charles Cova. Pourvu que ça dure !
    M. Jean-Pierre Brard. Parce que la confiance se gagne ! Je fais allusion à la méthode.
    Je voudrais citer un autre exemple. Je viens d'être informé par le directeur du courrier de la poste de Montreuil qu'on a refusé d'enregistrer sa plainte - c'est très important au moment où l'on affirme que les statistiques de la délinquance baissent. Alors qu'un facteur a été mordu par un pitbull - c'est inadmissible ! -, La Poste n'a pu déposer plainte au motif qu'une morsure de pitbull n'est pas une blessure ! C'est du concret, pas un fantasme ! J'ai en main la lettre du directeur du courrier de la poste de Montreuil.
    Je pense donc que l'amendement de nos collègues Lagarde et Perruchot, dans la mesure où il inscrit dans la loi l'obligation d'informer le maire, empêchera aussi que l'on joue avec les statistiques en refusant d'enregistrer des plaintes.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Monsieur le président, je voudrais faire un rappel, sans polémique aucune. Thierry Mariani, Bernard Accoyer et moi même, quelques autres encore...
    M. Jean-Pierre Brard. Tous des gauchistes !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... au cours des cinq années passées, sur tous les textes en rapport avec la sécurité intérieure, qu'il s'agisse de ceux présentés par M. Chevènement ou de ceux présentés par M. Vaillant, nous nous sommes systématiquement battus pour le droit à l'information des maires.
    M. Jean-Marie Le Guen. Dont acte !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La lecture du Journal officiel atteste qu'il nous a été systématiquement répondu que l'on courrait les plus grands risques à communiquer de telles informations aux maires, parce que l'on pouvait les soupçonner d'en faire un usage contraire à la morale publique.
    M. Bruno Le Roux. Non !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. J'aurai l'occasion au cours du débat de citer des réponses que la gauche plurielle, à l'époque au gouvernement, nous a faites à cette occasion et qui figurent au Journal officiel.
    Il se trouve que le ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy, a, pour la première fois, dans la loi d'orientation pour la sécurité intérieure, accordé aux élus, ce qui nous avait été refusé pendant cinq ans...
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est faux !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... et qu'il l'a traduit dans une circulaire qui est appliquée depuis le mois de juillet dernier. Je considère donc que le débat qu'engagent aujourd'hui le groupe communiste, le groupe socialiste et les Verts sur ce sujet témoigne d'une particulière mauvaise foi.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix le sous-amendement n° 452.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   71
Nombre de suffrages exprimés   71
Majorité absolue   36
Pour l'adoption   26
Contre   45

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    M. Jean-Marie Le Guen. Double langage !
    M. le président. M. Mamère, Mme Billard et M. Cochet ont présenté un sous-amendement, n° 412, ainsi rédigé :
    « A l'amendement n° 54, dans le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 1er de la loi du 21 janvier 1995, après le mot : "prévention, insérer les mots : "de la médiation, de la lutte contre l'exclusion. »
    La parole est à Mme Martine Billard.
    Mme Martine Billard. Je voudrais insister sur le fait que, dans certains cas, la prévention peut soulager les forces de police.
    Le sentiment d'insécurité, qui n'est pas du tout traité par ce projet de loi, tient entre autres aux agressions de personnes âgées qui se font, effectivement, voler leur porte-monnaie ou leurs courses. Il est vrai que, à part mettre des forces de police dans toutes les rues, si l'on s'en tient à la répression, on n'a pas tellement de solutions.
    Mais on pourrait recourir à la médiation. On pourrait mettre en place des dispositifs d'accompagnement des personnes âgées pour aller chercher leur argent à la banque ou à La Poste et pour aller faire leurs courses. Outre qu'on leur apporterait de l'aide, on éviterait à ces personnes de l'angoisse et le traumatisme d'une éventuelle agression. En plus, cela créerait des emplois, et des emplois qui n'exigeraient d'autre qualification que d'être aimable et attentif à son prochain. Ce serait très positif et cela soulagerait du même coup les forces de police qui pourraient se consacrer à d'autres tâches.
    Ainsi l'on voit bien que prévention et répression ne sont pas totalement étrangères et que la prévention concourt à la lutte contre l'insécurité. On nous a dit qu'une nouvelle loi sur la prévention était en préparation. On n'en connait ni le contenu, ni la date de son examen.
    Pour l'instant, nous sommes dans la continuité des lois précédentes, avec tout de même une réduction des moyens : les populations peuvent encore attendre des jours meilleurs !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Prolongeant ce qu'indiquait le ministre sur la politique de prévention, je voudrais démontrer la mauvaise foi de M. Mamère...
    M. Jean-Pierre Brard. Et c'est un expert qui parle !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... lorsqu'il accuse le Gouvernement de ne faire que de la répression et pas du tout de la prévention.
    Monsieur Mamère, vous le savez, la prévention passe d'abord par ce qu'on appelle communément la politique de la ville.
    Mme Martine Billard. Pas seulement !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Mais essentiellement, puisque 80 % de la politique de prévention est financée par ce qu'on appelle le contrat de ville, où sont croisés financement de l'Etat, de la région, des communes et des départements. Elle est souvent mise en oeuvre par la ville ou par l'intercommunalité qui se la voit confier en tant que maître d'ouvrage. On peut constater que le contrat de ville qui a été signé dans pratiquement toutes les régions de France en 2000 est parfaitement respecté, qu'il est poursuivi et que les meilleurs relais de cette politique sont, effectivement, les associations, avec leurs bénévoles, dont le tissu tissu est particulièrement dense dans les cités en difficulté, et qui constituent un vrai lien social entre les élus, les représentants de l'Etat et l'ensemble des acteurs de cette politique de prévention.
    Autant je me suis opposé à ce qu'on alourdisse le texte par une disposition déjà prévue dans une circulaire relative aux relations avec les élus, autant je trouve opportun d'y ajouter le lien entre le représentant de l'Etat, les élus locaux et les associations dans cette politique. Et bien que la commission ait repoussé cet amendement, je suis partisan de retenir le sous-amendement n° 412.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement est favorable au sous-amendement pour deux raisons.
    D'abord, je dois être cohérent avec ce que j'ai indiqué hier. On ne peut pas vouloir un débat constructif, essayer de rassembler par delà les clivages, et ne pas en tirer les conclusions. Le jugement que le rapporteur et moi-même nous portons sur ce sous-amendement ne tient donc pas à ses signataires, aussi respectables soient-ils, mais à son contenu.
    Ensuite, et je le dis avec beaucoup de force à la majorité, qui d'ailleurs le sait très bien : les associations jouent un rôle considérable et il n'y a aucune raison que nous donnions, si peu que ce soit, le sentiment que nous soutenons moins leur action de médiation qui doit être saluée sur tous les bancs de cette assemblée.
    J'espère que cette attitude d'ouverture du Gouvernement et du rapporteur au début de cette discussion inspirera l'ensemble des intervenants pour la suite.
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Nous ne pouvons que remercier le rapporteur et le ministre d'accepter ce sous-amendement. Toutefois,...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ah !
    M. Noël Mamère. ... appliquons-nous le principe de précaution. Nous ne soupçonnons pas le Gouvernement de mauvaise foi ni même d'habileté, ce serait malvenu. Simplement, nous attendons de voir. Qu'il accepte notre proposition, c'est un pas, mais ça ne suffit pas dans la mesure où ce qu'il vient de nous donner d'une main, il est en train de le retirer de l'autre à certaines associations qui travaillent dans ce champ et qui ont vu leurs subventions soit supprimées soit réduites.
    M. Robert Pandraud. Ce n'est pas vrai !
    M. Noël Mamère. Nous le voyons bien, nous qui sommes en contact régulier avec elles.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Vous verrez, il va voter contre... ! (Sourires.)
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... son propre sous-amendement !
    M. Noël Mamère. Si le Gouvernement accepte ce sous-amendement, cela doit le conduire à revoir sa politique en matière d'aide aux associations qui luttent contre l'exclusion.
    M. Robert Pandraud. Allez-vous voter contre votre sous-amendement ? C'est incompréhensible !
    M. Noël Mamère. Au demeurant, s'il avait été jusqu'au bout de sa démarche, il aurait été également favorable à notre premier sous-amendement, qui précisait que cette loi devait aussi lutter contre les inégalités sociales.
    Vous ne pouvez pas, monsieur le ministre, refuser l'ajout des termes « lutter contre les inégalités sociales », à l'amendement de la commission, et accepter une heure plus tard un sous-amendement qui touche précisément à la lutte contre les inégalités sociales. (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Vous me faites beaucoup de peine !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Un homme à la mer !
    M. Jean-Marie Le Guen. Il faudrait des sous-titres pour les bancs de la majorité : ils ne comprennent pas tout !
    M. Noël Mamère. Mon collègue Estrosi, puisqu'il est élu local, connaît bien les limites des contrats de ville. Le Premier ministre est d'ailleurs en train de lancer une réforme importante en matière de décentralisation... Il sait parfaitement que certains conseils généraux, qui appliquaient jusqu'à présent les contrats de développement social et urbain - les « CDSU » -, ont revu leur contribution à la baisse, et que cela à très largement contribué à affaiblir les contrats de ville. Au bout du compte, la question est de savoir si ce pays sortira enfin, s'il veut grandir, d'un départementalisme dépassé.
    M. le président. C'est un autre débat !
    La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Bien que je souhaite me conformer aux voeux du ministre, je voudrais toutefois signaler quelques contradictions. Il me semblait qu'il y avait trois types de prévention en France : la prévention primaire, la prévention spécialisée, la prévention générale. Quand on parle de « prévention », on est donc supposé comprendre les trois. A priori la lutte contre l'exclusion comme la médiation font partie de la prévention. Pourquoi, puisqu'on a parlé de « prévention », vouloir ajouter quoi que ce soit, puisque c'est déjà contenu dans ce terme ? D'autant que, à la faveur des amendements précédents, on nous a reproché précisément de ne pas parler de ça parce que c'était dans la prévention ! Alors il faudrait savoir ce que l'opposition souhaite réellement.
    Si le ministre accepte le sous-amendement, je suis prêt à le voter. Mais nous sommes supposés connaître le sens des termes que nous adoptons pour définir une politique que, de surcroît, nous mettons en oeuvre ! Il est un peu dommage de discuter d'un sous-amendement qui, à mon avis, n'apporte pas grand-chose au débat.
    M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 412.
    (Le sous-amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 54, modifié par le sous-amendement n° 412.
    (L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

Article 1er

    M. le président. Les deuxième, troisième, quatrième et cinquième alinéas du III de l'article 34 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions sont remplacés par six alinéas ainsi rédigés :
    « Sous réserve des dispositions du code de procédure pénale relatives à l'exercice de la mission de police judiciaire, le représentant de l'Etat dans le département, et, à Paris, le préfet de police, anime et coordonne l'ensemble du dispositif de sécurité intérieure.
    « A cet effet, sans préjudice des missions de la gendarmerie relevant de la défense nationale, il fixe les missions autres que celles qui sont relatives à l'exercice de la police judiciaire et coordonne l'action des différents services et forces dont dispose l'Etat en matière de sécurité intérieure.
    « Il dirige l'action des services de la police et de la gendarmerie nationales en matière d'ordre public et de police administrative. Les responsables locaux de ces services lui rendent compte de l'exécution et des résultats des missions qui leur ont été fixées.
    « Il s'assure, en tant que de besoin, du concours des services déconcentrés de la douane et des droits indirects, des services fiscaux, des services de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, des directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle et des agents de l'Etat chargés de la police de la chasse et de la pêche maritime et fluviale, aux missions de sécurité intérieure.
    « Les préfets de zone coordonnent l'action des préfets des départements de leur zone pour prévenir les événements troublant l'ordre public ou y faire face, lorsque ces événements intéressent au moins deux départements de cette même zone.
    « En outre, le préfet de police, en sa qualité de préfet de zone à Paris, dirige les actions et l'emploi des moyens de la police nationale et de la gendarmerie nationale concourant à la sécurité des personnes et des biens dans les transports en commun de voyageurs par voie ferrée de la région d'Ile-de-France. »
    Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits. Comme nous avons un travail très difficile devant nous, je demande à chacun de respecter son temps de parole.
    M. Pierre Cardo. Je ne m'inscris pas, à condition qu'on me laisse parler de temps en temps ! (Sourires.)
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère, premier orateur inscrit.
    M. Noël Mamère. L'article 1er donne beaucoup trop de pouvoir au préfet et crée un véritable déséquilibre institutionnel. Si l'on songe à ce qu'écrivait Montesquieu sur la séparation des pouvoirs, on se dit que l'approche constitutionnelle est aujourd'hui plutôt floue. Les députés Verts se réservent le droit de saisir le Conseil constitutionnel à propos de cet article.
    Il y a, en effet, un recul de la justice et, surtout, une confusion constitutionnelle, dont je donnerai deux exemples. Ce faisant, je mériterai peut-être d'être rangé parmi les beaux esprits, puisqu'il paraît que, désormais, lorsqu'on a une pensée qui n'est pas conforme à celle du Gouvernement, on est soit un « soixante-huitard attardé », soit un « droit-de-l'hommiste » - c'est la façon dont on insulte ceux qui sont attachés au respect des droits de la personne. On peut donc être de beaux esprits quand on rappelle, par exemple, que les inspecteurs du travail - qui, dans cette loi, dépendent du préfet - disposent d'une indépendance d'action et de verbalisation qui a été consacrée par des conventions internationales. C'est un premier motif pour saisir le Conseil constitutionnel. Si l'on devait parler de l'insécurité qu'affrontent ceux qui sont exploités, dans des conditions absolument abominables, par des entrepreneurs peu scrupuleux, on devrait augmenter le nombre d'inspecteurs du travail, pour sanctionner ces délinquants économiques, qui profitent de la vulnérabilité et de la faiblesse de ceux qui sont sans papiers ou en attente de régularisation. Mais on préfère ne pas en parler.
    Je rappelle aussi - c'est, je crois, nécessaire dans un lieu où nous construisons l'Etat de droit - l'article 41 du code de procédure pénale : « Le procureur de la République procède ou fait procéder à tous les actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des infractions à la loi pénale. » Il lui appartient donc de définir une politique pénale dans son ressort.
    L'article 1er traite de la police administrative. Celle-ci s'arrête là où commence la police judiciaire, qui met précisément en oeuvre les axes prioritaires de la politique pénale, la recherche et la constatation des infractions.
    On va maintenant pouvoir me qualifier de « représentant des obtus ». Sans doute s'offusquera-t-on que les préfets puissent, notamment par le biais des GIR, avoir accès au contenu de procédures pourtant couvertes par le secret de l'enquête et de l'instruction. Mais les rédacteurs de cette loi s'en soucient peu puisque l'article 1er concrétise les intentions affichées dans l'exposé des motifs : le « souci de traduire au niveau local l'extension des attributions du ministre de l'intérieur ». S'il faut pour cela jeter par-dessus bord quelques détails constitutionnels, comme la séparation des pouvoirs ou le respect des normes internationales, ce gouvernement les sacrifie volontiers.
    Nous voterons donc contre l'article 1er et demanderons à nos collègues de l'opposition de s'associer à notre saisine du Conseil constitutionnel.
    M. le président. La parole est à Mme Huguette Bello.
    Mme Huguette Bello. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est une réalité : la sécurité est devenue une des préoccupations majeures de la société. Aucun territoire n'y échappe. C'est ainsi qu'à la Réunion, où le chômage atteint pourtant des chiffres records, la violence constitue le souci principal de la population, avant même le manque d'emploi.
    Près des deux tiers des Réunionnais avouaient récemment avoir peur de sortir le soir. Je connais parfaitement les craintes et les angoisses des familles, des femmes, des personnes âgées qui vivent seules, des élèves, des enseignants, des commerçants qui redoutent d'être victimes de cambriolages, d'agressions, de violences. Je sais aussi le désarroi des familles dont les enfants sont surpris à commettre des forfaits, celui des femmes dont le compagnon se trouve compromis dans des infractions caractérisées, des délits, des crimes. Je n'ignore rien de ce gâchis et de ce désespoir. Et je sais encore que ces fautes doivent être punies, sanctionnées.
    Toutefois, le dispositif que le Gouvernement peaufine mois après mois reste très préoccupant et il est à craindre que ses effets pervers ne tardent pas à apparaître. Après avoir présenté les orientations qui l'inspirent et les moyens financiers qui seront destinés à mettre en oeuvre cette politique, ce texte annonce de nouveaux moyens juridiques. Mais ces trois étapes ne font que concourir à la mise en place d'une politique répressive à 100 %. Cela soulève quelques questions. La délinquance, notamment celle des plus jeunes, augmente. C'est vrai. Mais conclure à la nécessité d'une répression accrue, n'est-ce pas bien court ? D'où vient cet accroissement de l'insécurité ? Génération spontanée ? Nos concitoyens sont-ils plus mauvais que leurs ancêtres ? Pas d'angélisme, pensez-vous. Soit. Mais le catastrophisme et la surenchère sécuritaire ne sont qu'un angélisme retourné, un angélisme sombre.
    Personne n'aurait rien à redire du renforcement des effectifs de police et de gendarmerie s'il n'était pas mis surtout au service du tout-répressif. A cet égard, je souhaite attirer votre attention, monsieur le ministre, sur le projet de redéploiement des zones de compétence entre les services de police et de gendarmerie pour le département de la Réunion. La méthode employée pour élaborer ce projet ne semble pas avoir fait grand cas de votre volonté de concertation : la plupart des organisations syndicales et des élus n'ont pas été associés aux travaux. Quant au contenu du projet, aucune information n'a filtré à ce jour. Est-il vrai, par exemple, qu'on irait jusqu'à la fermeture de commissariats situés en zone urbaine ?
    En choisissant la trop grande simplicité de la réponse pénale, le Gouvernement stigmatise lourdement la pauvreté. Mais, surtout, en prenant le risque de rendre l'emprisonnement plus fréquent, il nourrit le drame auquel il dit vouloir remédier. Il suffit, pour ne parler que des établissements pénitentiaires de la Réunion, de se rappeler quelle horreur avait saisi les membres de la commission des lois de notre assemblée lorsqu'ils les visitèrent. « La maison d'arrêt de Saint-Denis, déclaraient-ils, réduit les prisonniers à l'état d'animaux. C'est une honte pour la République. » Depuis cette visite de 1999 - qui fut à l'origine de la constitution d'une commission d'enquête sur la situation des prisons françaises -, rien n'a changé à la Réunion. Emprisonner un jeune dans de telles conditions, c'est comme accepter de pourrir sa conscience à jamais. N'oublions pas, en si grave matière, la mise en garde qu'adressait ici même à un autre gouvernement notre collègue Alphonse de Lamartine : « Vous voulez bâtir avec des matériaux décomposés, avec des éléments morts, et non avec des idées qui ont la vie et qui auront l'avenir. »
    Qui peut ne pas souhaiter la sécurité ? Mais, comme toute maladie grave, l'insécurité ne peut se contenter de potions spectaculaires. Fidèle à l'enseignement du docteur Knock, notre société dispose de beaucoup de thermomètres, savamment brandis par bien des experts. Mais, face aux déréglementations de toutes sortes, au déferlement de la propagande, au triomphe cynique de l'argent, est-on sûr que le sentiment d'insécurité se nourrisse d'abord de la peur de la mauvaise rencontre ?
    M. le président. La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Nous sommes opposés à cet article, qui tend à transformer les préfets en porte-parole du Gouvernement.
    La police nationale est devenue la grande muette de la République. Les policiers eux-mêmes reconnaissent, d'après tous les contacts que j'ai pu avoir, l'importance de l'action préventive, sociale, au niveau de l'individu. Mais on ne voit pas de manière claire et précise si une répartition géographique adaptée des forces de police mettra un terme aux passe-droits qui existent depuis une trentaine d'années, avec toutes les réformes qui privilégient l'effet d'annonce.
    On ne peut apporter une solution de fond à une question de ce type sans associer, de manière approfondie et concrète, l'ensemble des policiers qui sont en première ligne dans les commissariats. La question des commissaires me paraît également importante.
    Monsieur le ministre, les policiers ont fait plusieurs propositions, dont certaines ont été retenues dans le projet de loi, mais d'autres ne sont pas prises en compte, et je voudrais insister sur l'une d'entre elles. Même si nous avons déposé un amendement de complément, nous ne sommes pas choqués par la question de la fouille des voitures. Je l'ai déjà dit dans la discussion générale, mais il vaut mieux répéter les choses deux fois, parce qu'elles ne sont pas forcément entendues.
    Cet article traite du pouvoir des maires. Il démontre, à notre avis, la volonté, sous couvert d'efficacité, d'une centralisation à l'extrême. Pour nous, la réponse du Gouvernement n'est pas adaptée au besoin de sécurité exprimé par les Français. C'est pourquoi nous nous opposerons à l'article 1er et proposerons un amendement pour replacer, selon notre point de vue, ces missions de service public de la police au centre des orientations d'une sécurité, d'une tranquillité publique.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Il nous semble, au contraire, que l'article 1er aura des effets significatifs. En effet, son objet principal est de concentrer l'organisation et la stratégie des différentes institutions de la République qui concourent à la politique de sécurité. Aujourd'hui, lorsqu'elles ne travaillent pas suffisamment ensemble, lorsque les moyens de la police, de la gendarmerie, des douanes et de bien d'autres administrations ne sont pas suffisamment coordonnés, les seuls à en bénéficier sont les délinquants, notamment celles et ceux qui ont été souvent dénoncés par l'opposition, ces grands trafiquants qui parviennent toujours à passer au travers des mailles du filet. C'était d'ailleurs l'un des objets de la création des GIR.
    Le Gouvernement a retenu le schéma selon lequel l'Etat reste entièrement le générateur de la politique de sécurité. Nous sommes très attachés, en contrepartie, à ce que les maires puissent avoir eux aussi une capacité d'association, d'intervention dans la politique de sécurité, puisqu'ils rendent compte à leurs concitoyens. Nous avions déposé un amendement n° 220 qui visait à rappeler les pouvoirs des maires. Mais nous avons vu que le Gouvernement avait remplacé le titre III pour inclure dans cet article le pouvoir des maires et des polices municipales. Nous l'en remercions et retirerons donc notre amendement. En tout cas, cet article nous paraît de bon augure : il faut que les moyens de l'Etat soient coordonnés, car les délinquants savent fort bien utiliser toutes les failles de notre système.
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques n°s 178 et 226.
    L'amendement n° 178 est présenté par MM. Gerin, Brunhes, Braouezec et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ; l'amendement n° 226 est présenté par M. Le Roux, Mme David et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 1er. »
    La parole est à M. André Gerin, pour soutenir l'amendement n° 178.
    M. André Gerin. Cet article engendre une globalisation du traitement de la sécurité dans nos départements, ce qui peut être, selon nous, contreproductif et inefficace dans l'action de la police, qui a pour objectif de trier les situations en fonction de son niveau d'intervention.
    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux, pour soutenir l'amendement n° 226.
    M. Bruno Le Roux. Je m'étais inscrit sur l'article mais ai renoncé à prendre la parole, car je devais présenter cet amendement. J'ai dit, en défendant l'exception d'irrecevabilité, en quoi cet article me semblait critiquable. Je souhaiterais donc ajouter simplement qu'il y a, tout le monde le sait, une dualité fonctionnelle du fonctionnaire de police. Toute la difficulté en a été soulignée à plusieurs reprises, que ce soit dans le rapport Delmas-Marty ou dans celui de nos collègues sénateurs Haenel et Arthuis, il y a quelques années. Sous couvert de renforcer l'autorité des préfets, nous allons vers une diminution des pouvoirs de direction et de surveillance de la police judiciaire par l'autorité judiciaire. Les syndicats de magistrats unis ont d'ailleurs intitulé une de leurs analyses de ce texte : « Recul historique du rôle de la justice dans le contrôle des pouvoirs de la police. »
    Il ne me semble pas que cet article soit un gage d'efficacité et nous souhaitons donc sa suppression.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Il me paraît particulièrement grave que des élus de la nation s'opposent à ce que l'on renforce le pouvoir, en matière de lutte contre l'insécurité, du premier représentant de l'Etat dans le département. On ne peut pas, d'un côté, affirmer, comme on l'a fait depuis deux jours, sur la plupart des bancs, à droite comme à gauche, et à cette tribune, que la lutte contre l'insécurité est une priorité nationale, qu'il faut se donner les moyens d'agir, qu'il faut confier des responsabilités - ce qui implique d'avoir un interlocuteur responsable au-dessus et parmi les autres - et, de l'autre côté, ne pas reconnaître que le préfet, représentant du Gouvernement et de l'Etat dans un département, est le mieux placé pour remplir ce rôle.
    Nous avons vu, ces dernières années, des politiques de Gribouille, désordonnées. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Martine David. Toujours dans la dentelle, ce M. Estrosi !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... où l'on mélangeait l'action et les rôles préventifs des élus locaux ou des services de l'Etat. Certains services de l'Etat agissaient dans un sens, d'autres dans le sens contraire. Selon la juridiction dans laquelle ils se trouvaient, les procureurs menaient des politiques pénales opposées. Les préfets ne voyaient pas leur rôle parfaitement défini et étaient quelquefois pris dans un véritable étau entre l'action de la gendarmerie et celle de la police nationale. Des contrats locaux de sécurité étaient mal appliqués. Les policiers municipaux avaient souvent le sentiment d'être de simples adjoints de la police nationale, sans qu'il y ait de véritable coordination.
    Enfin, nous nous dotons d'une véritable architecture, d'une véritable ossature. Après le conseil de sécurité intérieure, et pour la première fois depuis Cambacérès, me semble-t-il,...
    M. Jean-Pierre Blazy. Rien que ça !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... un ministre chargé de la sécurité intérieure se retrouve avec l'autorité opérationnelle sur la police nationale et la gendarmerie nationale. Les deux forces de l'ordre sont placées à un niveau d'égalité, reçoivent le même traitement de la part du ministre. Aucun corps ne peut plus avoir le sentiment d'avoir une suprématie hiérarchique sur l'autre. Entre le conseil de sécurité intérieur et les GIR, tous les services de l'Etat sont mis à la disposition de la lutte contre l'insécurité, les services fiscaux, l'inspection du travail, les services judiciaires, et tous ceux qui, en matière de formation professionnelle, peuvent apporter une contribution forte. Le préfet n'est-il pas le mieux placé pour diriger et coordonner l'ensemble de ces actions ? N'est-il pas le mieux placé, aussi, pour rendre des comptes, ainsi que l'a exigé très justement le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales ? On ne peut pas voir éternellement les différents services se renvoyer la balle en cas de défaillance. Il faut bien que quelqu'un coordonne toutes les actions et puisse rendre ses comptes pour que l'on sache comment rectifier le tir.
    Nous mettons aujourd'hui en place une conférence départementale de sécurité, qui permettra aux préfets et aux procureurs de travailler ensemble, alors que, longtemps, ils ont tiré dans des directions opposées. Enfin, nous faisons travailler ces deux grands corps qui représentent, d'un côté, les forces de l'ordre et, de l'autre, la justice, qui ont la volonté d'oeuvrer dans la même direction.
    Et voilà que, au moment où nous proposons d'inscrire cela de manière normative dans la loi, alors même que cela a été parfaitement validé dans les lois d'orientation et que c'est déjà mis en oeuvre, vous voudriez supprimer cet article 1er par défiance à l'égard du préfet - de même que vous n'avez cessé, tout au long de la discussion générale, d'exprimer votre méfiance à l'égard des forces de l'ordre.
    M. André Gerin. N'importe quoi !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Ces amendements de suppression n'ont aucun sens et la commission les a rejetés.
    M. Robert Pandraud. Très bien !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis.
    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Cet article 1er ne préserve pas l'équilibre entre deux fonctions pourtant essentielles pour la sécurité de nos concitoyens : la fonction de police administrative et la fonction de police judiciaire. Nous sommes donc inquiets. Peut-être n'aurons-nous plus, tout à l'heure, aucune raison de l'être, car nous avons déposé un amendement qui vise aussi à confier des pouvoirs reconnus au procureur général et au procureur sur la fonction de police judiciaire des policiers, mais ce que vient de dire M. le rapporteur ne nous a pas rassurés. Nous le sommes d'autant moins que l'Assemblée aura à examiner dans quelques minutes un amendement n° 424 du Gouvernement. Et j'ai peur qu'il y ait une grande confusion, dans le débat que nous avons aujourd'hui - et je l'ai déjà dit en défendant l'exception d'irrecevabilité - entre, d'une part, les mesures qui relèvent de l'organisation normale de notre système de sécurité en temps de paix, de l'organisation normale de notre sécurité dans un contexte lié à la lutte contre le terrorisme, et, d'autre part, des dispositions parfois exhumées de textes qui n'étaient valables dans notre pays qu'en temps de guerre ou assimilé au temps de guerre.
    M. Philippe Vitel. Mais nous faisons la guerre à l'insécurité !
    M. Bruno Le Roux. Et là, je crois qu'il y a une confusion dans les outils que nous mettons à la disposition des autorités préfectorales. Voilà pourquoi nous sommes inquiets face à cet article 1er.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Je ne me suis pas inscrit sur l'article, mais je voudrais souligner le problème que posent ces amendements de suppression.
    Voilà un article qui, enfin, essaie d'introduire un peu de cohérence dans le rôle que doit tenir le préfet. Sur le territoire de la commune, ou de la structure intercommunale, tout le monde nous parle de « travail en réseau », de « cohérence entre les différents acteurs ». Car il y a des tas de gens qui prennent leurs directives d'institutions diverses. On veut une politique territoriale adaptée aux populations. Mais attendez, s'il n'y a pas de coordonnateur, s'il n'y a pas d'animateur, comment va-t-on faire ? Il ne s'agit pas d'adopter un point de vue hiérarchique, et d'ailleurs le texte ne dit pas cela. Il dit que « le préfet anime et coordonne » un certain nombre de services.
    M. Bruno Le Roux. Il le fait déjà !
    M. Pierre Cardo. Ah oui ? Mais M. Brard, tout à l'heure, ne stigmatisait-il pas une anomalie concernant le refus d'une plainte consécutive à une morsure de pitbull dont avait été victime un facteur ? Mais qui, dans un tel cas, donne les instructions au commissaire de police ? C'est le procureur de la République. Et vous ne croyez pas que ce que nous sommes en train de mettre en place permettrait d'éviter des délicates surprises de ce genre pour la personne qui a subi un préjudice grave et qui voit que finalement il n'y aura pas de poursuites ? Il me semble que nous sommes là au coeur d'un problème dont nous faisons l'expérience tous les jours. Et je trouve intéressant que quelqu'un soit enfin clairement désigné comme responsable de la coordination et de l'animation. On aura enfin des procédures claires et transparentes pour tout le monde. On va peut-être s'y retrouver, ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent.
    M. le président. La parole est à M. Georges Fenech, pour une brève intervention.
    M. Georges Fenech. Je serai bref, monsieur le président. L'opposition dénonce le risque d'empiètement du pouvoir administratif sur le pouvoir judiciaire, ce qui serait effectivement contraire à notre Constitution.
    Mais, dans l'article 1er, je vois à trois reprises le rappel de cette séparation des pouvoirs. Premièrement : « Sous réserve des dispositions du code de procédure pénale relatives à l'exercice de la mission de police judiciaire... »
    M. Pierre Cardo. Eh oui !
    M. Georges Fenech. Et cela est de la compétence, évidemment, de l'autorité judiciaire.
    Deuxième rappel : le préfet « fixe les missions autres que celles qui sont relatives à l'exercice de la police judiciaire ».
    Enfin, troisième rappel, le préfet dirige l'action des services de la police et de la gendarmerie nationale « en matière d'ordre public et de police administrative ». On ne peut pas être plus précis. Voilà qui nous permet donc d'être pleinement rassurés quant au respect de la séparation des pouvoirs.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 178 et 226.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés).
    M. le président. MM. Gerin, Brunhes, Braouezec et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 179, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 1er :
    « La police nationale et la gendarmerie sont organisées en vue de répondre au besoin de tranquillité publique. Dans les zones dites de "non-droit ou réputées de grande insécurité, des moyens adaptés sont mis en oeuvre. Ils reposent, d'une part, sur la présence permanente, dissuasive, d'une police de proximité, présente sans discontinuité tous les jours jusqu'à deux heures du matin, capable d'exercer une médiation ou de verbaliser et capable de renseigner, ainsi que sur l'existence, d'autre part, de brigades de polices judiciaires, organisées par agglomération, chargées de déférer devant la justice les organisateurs de trafics, réseaux mafieux et toutes formes d'activités clandestines préjudiciables à la tranquillité publique. »
    La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Cet amendement me permettra de répondre à notre rapporteur. L'idée de fond est qu'il faut lutter contre toutes les formes de délinquance : les caïds de banlieue, les trafics en tous genres, les patrons d'ateliers clandestins, les marchands de sommeil, les négriers, les mafias, les délinquants en col blanc. Il est nécessaire, et nous en sommes d'accord, de procéder à une réorganisation de fond de la police, notamment en donnant plus de moyens à la police judiciaire et d'investigation. Parallèlement, il convient de renforcer la présence dans les quartiers d'une police de proximité à la fois humaine et dissuasive. Quant à la répartition des forces de police sur le territoire national, elle doit être, selon nous, complètement repensée du point de vue des méthodes. C'est l'ensemble des méthodes et des logistiques de la police qui doivent être réaménagées, sans omettre la question essentielle de la formation et des rémunérations des policiers - on n'en a pas du tout entendu parler -, notamment de ceux qui se trouvent en première ligne.
    Pour lutter contre le sentiment de suspicion - c'est exactement votre préoccupation, monsieur le rapporteur - que les Français ont souvent à l'égard de la police, il faut qu'elle puisse agir avec des orientations claires exprimant l'autorité de l'Etat. Nous pensons - et je le redis ici de manière précise et ferme - qu'il faut veiller à ce que soient appliqués le strict principe de fermeté ainsi que le principe d'équité. Il faut faire beaucoup plus souvent rappel à la loi et, dans le même temps, la police doit privilégier la gestion pacifique des conflits et travailler en étroite collaboration avec l'ensemble des partenaires qui composent le tissu social de proximité.
    Enfin, il faut opérer une clarification de la déontologie de la police en engageant un débat public national avec les citoyens afin de préciser, concrètement, les actions immédiates et les actions de fond permettant d'agir sur les causes et de proposer des remèdes aux problèmes d'insécurité.
    Tel est le sens de cet amendement.
    M. Pierre Cardo. Ce n'est pas un amendement, c'est un texte de philosophie !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Monsieur Gerin, je partage totalement votre position. Vous auriez présenté cet amendement lors de la discussion de la LOPSI, j'aurais été favorable à son adoption. Car la rédaction de cet amendement, et vous en êtes bien conscient, n'est pas normative : le texte que vous nous proposez est un texte d'orientation.
    Cela dit, j'ai sincèrement le sentiment que les dispositions du projet de loi répondent à votre préoccupation, qu'il s'agisse de l'article 1er, qui a trait aux pouvoirs des préfets, ou des articles suivants, qui renforcent notamment les pouvoirs de la police judiciaire, aussi bien du point de vue de son action territoriale, de son action dans les transports, que du point de vue des moyens que nous entendons mettre à sa disposition.
    Dans la loi d'orientation et de programmation, comme dans le budget pour 2003, nous avons engagé des moyens pour renforcer tous les corps de la police et de la gendarmerie, et plus particulièrement de la police judiciaire, parce que, de toute évidence, ce sont ceux qui nous aideront le plus sûrement à désorganiser et à porter atteinte aux réseaux que vous dénoncez, les réseaux mafieux, les réseaux de proxénétisme, les réseaux de trafic d'armes, les réseaux de blanchiment, les réseaux de trafics en tous genres.
    Nous partageons donc totalement votre volonté, monsieur Gerin, mais il est bien évident que l'amendement tel qu'il est rédigé n'est pas normatif et ne peut donc s'inscrire dans l'article 1er. C'est la raison pour laquelle la commission l'a repoussé, tout en partageant totalement ses objectifs.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 179.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Estrosi a présenté un amendement, n° 466, ainsi rédigé :
    « Dans le deuxième alinéa de l'article 1er, après les mots : "anime et coordonne, insérer les mots : "la prévention de la délinquance et. »
    La parole est à M. Christian Estrosi.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Amendement de simple coordination.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 466.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Teissier a présenté un amendement, n° 318 rectifié, ainsi rédigé :
    « Dans le quatrième alinéa de l'article 1er, substituer aux mots : "et de la gendarmerie nationales en matière d'ordre public et de police administrative. Les responsables locaux de ces services, les mots : "nationale et des unités de la gendarmerie nationale en matière d'ordre public et de police administrative. Les responsables locaux de ces services et unités. »
    La parole est à M. Gérard Léonard, pour défendre cet amendement.
    M. Gérard Léonard. M. Teissier m'a demandé de soutenir cet amendement, je le fais avec plaisir.
    Plutôt que des « services » de la gendarmerie nationale, il est préférable de parler de ses « unités ». Ce mot relève en effet de la terminologie militaire, qu'il convient d'adopter. C'est une manière de confirmer la pérennité du statut militaire des gendarmes.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Ce sont des précisions utiles. Avis favorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 318 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Le Roux, Mme David et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 227 rectifié, ainsi rédigé :
    « Dans le cinquième alinéa de l'article 1er, supprimer les mots : ", des directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle. »
    La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. L'article 1er octroie des attributions extrêmement élargies aux préfets. Elles sont censées correspondre aux attributions dévolues au ministre de l'intérieur lui-même. Mais curieusement, le décret du 15 mai 2002, dans son article 4 portant attributions du ministre de l'intérieur, ne mentionne aucune mise à disposition, même en tant que de besoin, des services des directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle. Nous avons d'ailleurs souligné dans l'exposé sommaire que cet amendement va dans le sens de l'avis de la commission nationale consultative des droits de l'homme.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Finalement, monsieur Le Roux, vous suivez une direction totalement opposée à celle de M. Gerin. Ce dernier souhaite que nous renforcions les moyens permettant de démanteler un certain nombre de réseaux. Vous, vous voulez les affaiblir.
    S'il est vrai que le décret dont vous avez parlé ne spécifie pas que les directions du travail sont notamment placées sous l'autorité du ministre de l'intérieur, il n'en demeure pas moins qu'un autre décret donne aux GIR la possibilité d'utiliser les services des directions du travail. Il serait dommage d'affaiblir l'action des services de l'Etat...
    M. Bruno Le Roux. Il ne s'agit pas de l'affaiblir. Il s'agit de vouloir des politiques claires, avec des mises à dispositions claires.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... au service du démantèlement de tous ces réseaux qui pourrissent la vie de nos concitoyens. Je ne peux donc que vous inviter à retirer cet amendement, monsieur Le Roux, car je n'imagine pas un seul instant que vous souhaitiez affaiblir l'action des GIR et des services de l'Etat.
    M. le président. Le Gouvernement partage l'avis de la commission, je suppose ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Oui, monsieur le président.
    M. le président. Monsieur Le Roux, retirez-vous votre amendement ?
    M. Bruno Le Roux. Je ne pense pas que cet amendement affaiblisse en quoi que ce soit le dispositif mis en place par le Gouvernement. Je le maintiens donc.
    M. Jean-Marie Le Guen. Très bien !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 227 rectifié.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Le Fur a présenté un amendement, n° 348, ainsi rédigé :
    « A la fin du cinquième alinéa de l'article 1er, après les mots : "pêche maritime et fluviale, insérer les mots : "ainsi que des agents chargés de la police de l'eau et de ceux qui assurent des responsabilités en matière de sécurité sanitaire. »
    Sur cet amendement, M. Estrosi, rapporteur, a présenté un sous-amendement, n° 443, ainsi rédigé :
    « Dans le dernier alinéa de l'amendement n° 348, après les mots : "des agents, insérer les mots : "de l'Etat. »
    La parole est à M. le rapporteur pour soutenir l'amendement n° 348.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Il est défendu. Il a été accepté par la commission sous réserve de l'adoption du sous-amendement de précision qu'elle a déposé.
    M. le président. Avis favorable du ministre sur l'amendement et le sous-amendement, je suppose ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Oui.
    M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 443.
    (Le sous-amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 348, modifié par le sous-amendement n° 443.
    (L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)
    M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 425, ainsi rédigé :
    « Dans le dernier alinéa de l'article 1er, substituer aux mots : "zone à Paris, les mots : "la zone de défense de Paris. »
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Amendement purement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 425.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 1er, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 1er

    M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 424, ainsi libellé :
    « Après l'article 1er, insérer l'article suivant :
    « L'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un 4° ainsi rédigé :
    « 4° En cas d'urgence, lorsque l'atteinte au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publiques l'exige, et que les moyens dont dispose le préfet ne permettent plus de poursuivre les objectifs pour lesquels il détient des pouvoirs de police, celui-ci peut, par arrêté motivé, pour toutes les communes du département ou plusieurs ou une seule d'entre elles, réquisitionner tout bien et service, requérir toute personne nécessaire au fonctionnement de ce service ou à l'usage de ce bien et prescrire toute mesure utile jusqu'à ce que l'atteinte à l'ordre public ait pris fin.
    « L'arrêté motivé fixe la nature des prestations requises, la durée de la mesure de réquisition, ainsi que les modalités de son application.
    « Le préfet peut faire exécuter d'office les mesures prescrites par l'arrêté qu'il a édicté.
    « La rétribution par l'Etat de la personne requise ne peut se cumuler avec une rétribution par une autre personne physique ou morale.
    « La rétribution doit uniquement compenser les frais matériels, directs et certains résultant de l'application de l'arrêté de réquisition.
    « Dans le cas d'une réquisition adressée à une entreprise, lorsque la prestation requise est de même nature que celles habituellement fournies à la clientèle, le montant de la rétribution est calculé d'après le prix commercial normal et licite de la prestation.
    « Conformément aux dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il délègue peut, dans les quarante-huit heures de la publication ou de la notification de l'arrêté, à la demande de la personne requise, accorder une provision représentant tout ou partie de l'indemnité précitée, lorsque l'existence et la réalité de cette indemnité ne sont pas sérieusement contestables.
    « En cas d'inexécution volontaire par la personne requise des obligations qui lui incombent en application de l'arrêté édicté par le préfet, le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il délègue peut, sur demande de l'autorité requérante, prononcer une astreinte dans les conditions prévues aux articles L. 911-6 à L. 911-8 du code de justice administrative.
    « Le refus d'exécuter les mesures prescrites par l'autorité requérante constitue un délit, qui est puni de six mois d'emprisonnement et de 10 000 euros d'amende. »
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement a décidé de déposer cet amendement n° 424 afin de donner un fondement juridique solide au pouvoir de réquisition du préfet, qui n'est pas actuellement sans présenter quelque fragilité juridique.
    Cet amendement est destiné à répondre aux situations d'urgence, telles que les catastrophes naturelles, ou aux situations exceptionnelles - catastrophes industrielles, risques sanitaires, urgences sociales - où le préfet est obligé de faire appel à des moyens matériels exceptionnels. Je pense, par exemple, à la réquisition d'engins de levage ou d'engins pour nettoyer les plages quand il s'agit de ramasser, hélas ! des hydrocarbures.
    La base juridique de niveau législatif permettra, en outre, d'indemniser plus facilement les prestataires dont les moyens ont été requis. J'en appelle au témoignage des élus locaux, qui le savent bien, la réquisition, outre qu'elle permet de disposer des équipements dont on a besoin, assure notamment aux collectivités territoriales que tout ce qui a fait l'objet d'une réquisition fera l'objet d'une compensation assumée par l'Etat.
    C'est donc un amendement de consolidation juridique.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Avis favorable.
    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Le Gouvernement souhaite octroyer aux préfets, comme le ministre vient de le dire, des pouvoirs de réquisition généraux sur les biens, les services et les personnes en cas d'urgence, lorsqu'il y a atteinte au bon ordre, à la salubrité et à la sécurité publiques. Je le rappelle, parce que les raisons que vient de donner M. le ministre touchent uniquement à des événements que nous avons connus au cours des dernières semaines et des derniers mois,...
    M. Pierre Cardo. Voire des dernières années !
    M. Bruno Le Roux. ... aux catastrophes naturelles qui se sont produites, avec leur cortège de désespoir. Mais ce texte a aussi des implications en matière de sécurité publique, et c'est de cela que nous débattons aujourd'hui.
    Aujourd'hui, seul le Gouvernement détient de telles prérogatives, et il ne peut les mettre en oeuvre que sur la base d'un décret pris en conseil des ministres.
    M. André Gerin. Exactement !
    M. Bruno Le Roux. On peut imaginer que, dans les circonstances dont a parlé M. le ministre, le Gouvernement puisse, sans tarder, mettre en oeuvre chaque semaine ce mécanisme de réquisition et le faire avec une parfaite réactivité. Sans citer la loi du 11 juillet 1938, je voudrais simplement dire à M. le ministre que cet article nous semble d'une importance capitale et aurait mérité que nous en discutions. Alors que ces catastrophes datent tout de même de quelques semaines et, pour certaines, de quelques mois, nous ne comprenons pas, monsieur le ministre, que vous n'ayez pas soumis l'article additionnel que vous proposez ici au Conseil d'Etat. Nous ne comprenons pas qu'un amendement de cette importance n'ait été examiné par la commission que lors de la réunion qu'elle a tenue au titre de l'article 88 de notre règlement !
    Nous nous interrogeons donc, non sur ce que M. le ministre nous a dit, mais sur les effets possibles d'un tel amendement en matière de sécurité publique. Car il s'agit de donner à des préfets qui n'ont pas de responsabilité politique, et en dehors de l'avis du conseil des ministres, des pouvoirs qui peuvent être exorbitants en cas d'atteinte au bon ordre dans leurs départements.
    Et je crois que, faisant cela - et nous avons essayé de rechercher quelles étaient les origines de cet article, de ces pouvoirs de réquisition étendus -, nous banaliserions des mesures d'exception que seules peuvent justifier des circonstances exceptionnelles - notamment, en matière de sécurité publique, le temps de guerre. Cet amendement nous laisse donc très perplexes, et nous pensons qu'il nous conduit sur une pente dangereuse.
    M. Pierre Cardo. Mon Dieu, que c'est dur d'essayer de remettre de l'ordre !
    M. le président. La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Monsieur le ministre, vous confirmez les craintes que nous avions à propos de cet article 1er. Cet amendement nous paraît dangereux.
    M. Pierre Cardo. Liberticide ?
    M. André Gerin. C'est la porte ouverte à un certain nombre de décisions qui seraient prises en dehors du cadre juridique et législatif actuel.
    Je veux le dire de manière solennelle, le champ très large des décisions et des réquisitions possibles nous paraît gravissime. Au fond, petit à petit, on découvre la vraie nature de ce projet de loi.
    En tous cas, cela illustre nos craintes d'une manière tout à fait inquiétante et justifie encore l'opposition à cet amendement que nous avons déjà exprimée en demandant la suppression de l'article 1er.
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Monsieur le ministre, chers collègues, j'irai dans le sens de ce que viennent de dire mes collègues Le Roux et Gerin.
    Nous sommes d'autant plus en droit de nous inquiéter de la portée de cet amendement en termes constitutionnels qu'il a été déposé subrepticement, dans le cadre d'une procédure d'examen en urgence. Cela signifie soit que le Gouvernement a fait preuve d'un manque particulier de réflexion, soit qu'il veut mettre les députés devant le fait accompli.
    Peut-être nos propos ne seront-ils pas entendus au-delà de cet hémicycle, je crois néanmoins utile de préciser, dans la ligne de ce que j'ai essayé d'expliquer à propos de l'article 1er, que, par cet amendement, le Gouvernement s'apprête à accorder un pouvoir exorbitant au préfet, qui devient une sorte de super-flic, de la même manière que dans les avant-projets de la loi Perben qui s'annoncent et que nous allons bientôt examiner, on fait du procureur de la République une sorte de super-préfet judiciaire. Il nous semble que ce sont là deux aspects inséparables d'une volonté de réduire les libertés, d'une volonté d'accaparement des pouvoirs.
    Sans chercher à exagérer et à forcer le trait, on a le sentiment, et je reprendrai volontiers ce que disait Bruno Le Roux, que l'on est en train de nous ressortir des tiroirs de vieilles procédures que l'on pensait oubliées avec la progression de l'Etat de droit. Ne s'agirait-il pas d'une sorte d'article 16 de la Constitution déguisé ? En tout cas, c'est un mauvais coup qui est porté à la démocratie, aux libertés. Par un abus de droit, le Gouvernement donne aux préfets des pouvoirs qui ne leur ont pas été attribués par la légimité démocratique. Or, dans une démocratie, ceux qui peuvent exercer le pouvoir doivent le faire, que je sache, sous le contrôle de l'opinion publique et des électeurs. Un préfet échappe à ce contrôle, et leur donner un pouvoir aussi exorbitant par délégation semble, aux députés Verts, extrêmement dangereux.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Heureusement que le ridicule ne tue plus, sinon l'hémicycle serait moins bien garni ! (Sourires.)
    M. Noël Mamère. Nous serions tous morts !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Attention à l'image que nous donnons de notre pays et de la classe politique, et ne nous faisons pas de procès grotesques. Je ne porte pas d'uniforme, et je n'ai pas une très grande habitude des coups d'Etat, monsieur Mamère.
    Simplement, nous sommes, les uns et les autres, constamment sollicités par nos concitoyens, en cas de crise, de catastrophe - j'ai vécu cela à Nîmes, dans le Gard, mais également, hélas ! lors des dernières pollutions. Que reprochent nos concitoyens à l'Etat ? De ne pas être assez rapide, pas assez efficace, de ne pas disposer de matériels suffisants, de mal rembourser et dans des délais trop longs ; bref, les critiques sont nombreuses. Et vous n'êtes pas le dernier, monsieur Mamère, à vous montrer à la télévision pour donner des leçons, expliquer que ça ne va pas, qu'on aurait dû faire plus et plus vite.
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous pouvez parler, vous êtes omniprésent à la télévision !
    M. Gérard Léonard. Très bien ! C'est utile de le rappeler : M. Mamère use d'un double langage !
    M. Noël Mamère. Vous voudriez qu'on dise que tout va bien, comme vous ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Pour ma part, j'essaie de tirer les conséquences de cette situation.
    Il n'est pas question de donner un seul pouvoir supplémentaire au préfet : le pouvoir de réquisition existe d'ores et déjà. Simplement, il est défini dans une telle myriade de textes épars, à la stabilité juridique incertaine, que j'ai souhaité donner à ce pouvoir de réquisition, dont tous les élus savent bien qu'il est indispensable pour accélérer le remboursement ou renforcer l'efficacité de l'Etat, une base législative plus forte.
    M. Charles Cova. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il y a dix minutes, vous me reprochiez de ne pas avoir prévu de publier les chiffres dans la loi ; maintenant, vous me reprochez d'y inscrire le pouvoir de réquisition. Voilà la logique de votre raisonnement. Permettez-moi de vous dire avec courtoisie, monsieur Mamère, que ce raisonnement est un exemple d'incohérence. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Monsieur le ministre, je vous invite à partager le pot de confiture dans lequel, selon vous, je trempais jusqu'à présent les doigts avec mon collègue Mamère.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Avec plaisir !
    M. Bruno Le Roux. J'entends bien ce que vous dites, mais vos arguments sont très largement contraires à ceux qui sont développés dans l'exposé sommaire de l'amendement que vous nous soumettez.
    M. André Gerin. Tout à fait !
    M. Bruno Le Roux. En effet, cet exposé indique que « le droit de réquisition des préfets n'a de base juridique solide que dans des domaines spécifiques : notamment la sécurité civile, avec la loi du 22 juillet 1987 qui autorise la réquisition des moyens privés de secours en cas de catastrophe naturelle ou industrielle ». Donc votre premier argument ne tient plus. « En revanche - je poursuis ma lecture - en matière de police administrative générale, les préfets ont besoin d'un cadre juridique solide pour organiser des réquisitions. » L'exposé sommaire dit le contraire de ce que vous venez d'indiquer. Il nous dit bien que pour une catastrophe industrielle ou naturelle, on peut faire avec la loi actuelle et que ce pouvoir de réquisition n'est nécessaire que pour la police administrative. Il vaudrait mieux que les choses soient dites clairement et que nous partagions ensemble le pot de confiture !
    M. Jean-Marie Le Guen. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Je dirai très brièvement, et moi aussi avec courtoisie, que je n'ai pas l'impression d'avoir un raisonnement incohérent, bien au contraire. La démonstration de Bruno Le Roux est révélatrice de vos intentions, monsieur le ministre. Le régime dans lequel nous vivons a sans doute ses défauts mais c'est un régime démocratique, qui fonctionne avec des pouvoirs et des contre-pouvoirs. Si nous adoptons cette disposition, que se passerait-il si des événements fragilisaient la démocratie et portaient au pouvoir des gouvernements moins sourcilleux sur le respect de l'Etat de droit et donnant une interprétation beaucoup plus large que celle que vous venez de définir devant nous de ce pouvoir de réquisition des préfets ?
    M. Charles Cova. Ils les obligeraient avec autre chose.
    M. Robert Pandraud. L'article 16 par exemple.
    M. Noël Mamère. Nous pourrions très vite nous trouver dans une situation qui n'aurait plus rien à voir avec la démocratie et, pourtant, des préfets ou des gouvernements trouveraient dans les textes que nous avons votés le motif à réduire les libertés. D'autant que le dernier alinéa de l'amendement indique clairement que les personnes qui ne se soumettraient pas à la réquisition seraient passibles d'une peine d'emprisonnement et d'une amende de 10 000 euros. Ce n'est pas rien.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Le Roux, vous tentez avec beaucoup de gourmandise de m'attraper.
    M. Bruno Le Roux. Pour partager !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Eh bien vous devez encore attendre. Ce n'est pas pour cette fois-ci. Vous voulez des explications supplémentaires ? Je vais vous les servir bien volontiers.
    Je prendrai l'exemple d'une entreprise d'équarrissage qui, faute d'avoir pris toutes les précautions nécessaires, provoquerait une crise sanitaire.
    M. Bruno Le Roux. Comme chez Saria !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La loi ne prévoit pas de pouvoir de réquisition du préfet en cas de crise sanitaire. Je vous pose la question : la survenue d'une crise sanitaire se prévoit-elle ?
    M. Noël Mamère. Pourquoi n'est-ce pas dans le texte de Roselyne Bachelot ?
    M. le président. Laissez le ministre s'expliquer, monsieur Mamère !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Mamère, ne criez pas dès que cela fait mal !
    M. Noël Mamère. Je dis simplement que vous oubliez le texte de Mme Bachelot.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je prendrai un deuxième exemple tiré de l'actualité récente. J'ai dû me rendre en Bretagne il y a quelques semaines à la suite d'une rave-party qui s'était mal déroulée. Les rave-parties rassemblent de 10 000 à 15 000 jeunes venus écouter de la musique techno. Celle dont je parle était prévue en marge du technival de Rennes. Les jeunes sont arrivés alors qu'aucun terrain n'était disponible. La préfète de région, à ma demande et avec mon accord, a réquisitionné des terrains : nous voulions éviter une catastrophe.
    M. Bruno Le Roux. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je n'irai pas jusqu'à parler de catastrophe sanitaire, ce serait désagéable, mais quand même. La baraka étant une composante de la bonne gestion, nous n'avons pas eu de catastrophe. Mais il a plu des cordes et ce rassemblement a provoqué les réactions que vous imaginez dans la population. Je me suis rendu sur place dès le lundi et j'ai autorisé la préfète à réquisitionner des entreprises de nettoyage pour débarrasser les champs des bouteilles de bière et de bien d'autres choses.
    M. Charles Cova. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il fallait le faire, je l'ai fait. Mais la base juridique pour réquisitionner, vous le savez, vous connaissez bien les textes, n'existe pas. Or, si je n'avais pas fait réquisitionner, cela aurait créé un traumatisme dans la population des petits villages concernés - je me suis d'ailleurs retrouvé dans une salle municipale avec 700 personnes qui n'étaient pas très contentes - et le dommage aurait duré. Vous imaginez ce que peut provoquer le rassemblement de 12 000 jeunes pendant trois jours, notamment l'amas d'ordures. Je m'étais engagé à rembourser les frais de nettoyage puisque c'est l'Etat qui avait réquisitionné le terrain. Mais en l'état actuel de la loi, monsieur Mamère, je vous demande de me croire - M. Le Roux est, je crois, de mon avis sur ce point -, le pouvoir de réquisition n'existe pas.
    La volonté du Gouvernement est de donner une base juridique au pouvoir de réquisition du préfet pour faire face à de tels cas. Mais je pourrais également parler de la rave-party dont nous avons autorisé le déroulement le 31 décembre au Port autonome de Marseille, pour laquelle j'ai également permis au préfet de région de réquisitionner le terrain et où nous avons assumé la totalité du nettoyage. Or le budget de l'Etat ne peut prendre en charge ces frais sans pouvoir de réquisition. Ces explications - si elles ne vous ont pas totalement convaincu -, monsieur Mamère...
    M. Noël Mamère. En effet !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... vous démontrent du moins ma bonne foi. Il ne s'agit nullement de permettre aux préfets de priver de liberté qui que ce soit. D'ailleurs, qui pourrait imaginer que ce serait possible ? J'ai le sentiment que le problème de notre société aujourd'hui n'est pas la restriction des libertés mais plutôt l'abondance, personne n'ayant de devoirs, tout le monde ayant des droits.
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est intéressant, monsieur le ministre !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Le Guen, ne sortez pas du repos profond dans lequel vous sembliez plongé. (Applaudissement sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Je ne suis pas là pour écouter vos propos de complaisance !
    M. le président. Monsieur Le Guen !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. N'essayez pas de me faire un mauvais procès ! Je mets votre observation sur le compte non de votre mauvaise foi mais d'une légère absence pendant les débats !
    M. Jean-Marie Le Guen. Votre dérapage est intéressant !
    M. le président. Monsieur Le Guen !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Chacun le sait, les libertés ne sont contestées par personne. Ce qui aujourd'hui pose problème, c'est que tout le monde se croit libre, y compris d'aller contester la liberté de son voisin. Voilà, monsieur Le Guen ; reprenez donc votre lecture. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous avez eu raison de rectifier vos propos !
    M. le président. La parole est à M. André Gerin, rapidement parce que le débat a déjà eu lieu sur le fond.
    M. Charles Gova. La majorité est convaincue, c'est l'essentiel !
    M. André Gerin. M. le ministre peut bien nous donner toutes les explications qu'il veut, je pense sincèrement que l'amplitude de la question telle qu'elle est posée dans le texte est suspecte.
    M. Jean-Marie Le Guen. La réponse est disproportionnée !
    M. Charles Cova. Il s'agit de réquisitions par le préfet, c'est tout !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Et sous le contrôle des tribunaux.
    M. André Gerin. Je n'ai aucune raison de croire à votre déclaration d'intention. Nous sommes suffisamment grands pour comprendre les exemples que vous venez de donner, mais nous restons convaincus que ce texte est dangereux. Le mot « liberticide » a été utilisé à plusieurs reprises. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Gérard Léonard. On ne peut pas laisser dire ça !
    M. André Gerin. La question sociale a été évoquée. Oui, je pense vraiment que cette partie du texte est liberticide.
    M. Pierre Cardo. Pour qui ?
    M. le président. La parole est à M. Noël Mamère, brièvement.
    M. Noël Mamère. Un mot pour dire à M. le ministre que nous ne sommes pas convaincus par ses arguments. Nous pouvons comprendre le cas des rave-parties, ce sont des cas ponctuels, mais vous vous en servez pour justifier une politique générale.
    M. André Gerin. Ce n'est pas clair.
    M. Noël Mamère. En outre, nous observons que la justice, une fois de plus, est considérée comme quantité négligeable.
    M. Maurice Giro. Pas du tout.
    M. Noël Mamère. On pourrait très bien imaginer de saisir un magistrat en référé pour mettre en oeuvre des procédures de réquisition.
    M. Pierre Cardo. Ce n'est pas toujours assez rapide !
    M. Charles Cova. On mettra quatre ans pour rembourser les propriétaires, comme d'habitude.
    M. Noël Mamère. Mais cette procédure n'est pas utilisée. Nous considérons que le spectre des réquisitions que vous nous proposez est trop large. De ce point de vue, ce texte représente un véritable danger pour la stabilité démocratique. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, rapidement.
    M. Jean-Marie Le Guen. Rapidement pour rassurer M. le ministre sur le fait que je suis attentif au débat.
    Sa démonstration repose sur des exemples ponctuels qui méritent peut-être en effet quelques évolutions de nos textes, réglementaires ou juridiques.
    M. Pierre Cardo. C'est bien de cela qu'il est question.
    M. Jean-Marie Le Guen. Le problème, c'est la disproportion considérable qui existe entre des motifs parfois légitimes et les réponses juridiques que vous apportez, monsieur le ministre. Partout, vous faites bouger des repères historiques.
    M. Pierre Cardo. Oui.
    M. Jean-Marie Le Guen. Un certain nombre de nos collègues semblent considérer que la France, son droit et sa vie sociale existent depuis cinq ans, mais, mes chers collègues, l'histoire de France, l'histoire de notre droit et de nos pratiques sociales est plus ancienne.
    M. Pierre Cardo. L'évolution de la délinquance aussi !
    M. Jean-Marie Le Guen. Tous les critères qui ont été élaborés avec une certaine finesse, si je puis dire, pour définir ce qui était légitime dans les rapports entre le pouvoir administratif et le pouvoir judiciaire, ou, pour prendre un exemple qui m'intéresse plus particulièrement, entre ce qui relève du respect du code de déontologie médicale et ce qui relève de l'ordre public.
    M. Pierre Cardo. Cela n'a pas de rapport !
    M. Jean-Marie Le Guen. Eh bien, tous ces critères évoluent.
    M. Pierre Cardo. La société aussi !
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous, vous faites évoluer de façon excessive les rapports qui existent entre le pouvoir administratif, d'une part, et l'ensemble des règles de droit qui fondent notre démocratie, d'autre part. Loin de nous l'idée de vous faire un procès d'intention...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Heureusement !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... mais nous sommes particulièrement inquiets de la perspective d'éventuels abus de droit qui pourraient naître de la pratique, au-delà du gouvernement actuel, y compris de la part d'un certain nombre de fonctionnaires à qui l'on demande d'occuper tout l'espace public sans se préoccuper de déontologie.
    M. Pierre Cardo. On ne peut pas dire ça ! Il y a des gens sérieux dans la fonction publique.
    M. Charles Cova. Ce sont les fonctionnaires qui vont être contents !
    M. Jean-Marie Le Guen. Je veux dire : sans se soucier de la déontologie des autres corps de l'Etat et de la société. Je ne leur reproche rien quant à leur propre déontologie, je ne critique pas vos pratiques actuelles, je crains les dérives que rendra possible la mise en oeuvre de nouveaux principes.
    M. Pierre Cardo. C'est un procès d'intention !
    M. le président. La parole est à M. Gérard Léonard.
    M. Gérard Léonard. Mes collègues s'opposent à ce texte, en invoquant les risques énormes qu'il ferait peser sur l'exercice de nos libertés. Je me demande s'ils l'ont bien lu car, au-delà du fait que le ministre a très clairement rappelé les situations qui aujourd'hui n'ont pas de réponse du point de vue de la police administrative - le texte n'ouvre pas une possibilité incontrôlée de réquisitionner - je leur fais remarquer que deux conditions sont posées dès le premier alinéa de l'amendement : d'une part, l'urgence, qui est une notion juridique, d'autre part, l'utilisation de cette possibilité uniquement lorsque tous les autres moyens auront été employés, en application du principe de subsidiarité qui peut faire l'objet d'un contrôle du juge administratif.
    M. Pierre Cardo. Oui ! on peut être condamné pour abus de pouvoir.
    M. Gérard Léonard. On retrouve chez nos collègues de l'opposition la même démarche depuis le début de ce débat : ils reconnaissent qu'il y a des problèmes, qu'il faut apporter des réponses, mais chaque fois que nous faisons une proposition ils protestent et nous accusent de porter atteinte aux libertés. C'est un faux procès. En tout cas, si on les suivait sur ce terrain-là, on ne pourrait pas beaucoup faire évoluer la situation que nous connaissons, pour laquelle ils ont pourtant été douloureusement sanctionnés par les Français il y a seulement quelques mois. Ils emploient un double langage qui consiste à dénoncer les problèmes et dans le même temps à refuser à la puissance publique les moyens de les résoudre. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Sous le prétexte de l'atteinte aux libertés, une fois de plus, nos collègues sont en décalage avec le « ressenti » profond de nos concitoyens. Ceux-ci ne supportent plus ces dérives qui leur donnent le sentiment depuis plus de trente ans que la puissance publique n'a plus la capacité à agir et à prendre les bonnes décisions lorsqu'un événement majeur frappe notre pays.
    Or nous sommes de plus en plus confrontés à des phénomènes, notamment naturels, qui exigent une présence immédiate sur le terrain, et une action rapide. Sinon la population a le sentiment que les gens à qui elle a fait confiance n'ont plus la capacité d'agir.
    Tous les jours, les maires prennent des décisions qui ne sont pas relayées par les pouvoirs de l'Etat, tous les jours ils se lamentent de voir le représentant de l'Etat lui-même impuissant à agir et ils prennent le risque de se faire condamner par un certain nombre de juridictions.
    Je vous demande, mes chers collègues, d'être en phase avec les gens qui attendent de notre part que nous soyons pragmatiques et réactifs.
    Pour finir, je voudrais simplement vous demander, monsieur le ministre, de retirer dans le huitième alinéa de l'amendement les termes « Conformément aux dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative » qui ne me paraissent pas utiles.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette rectification ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement est d'accord.
    M. le président. L'amendement est ainsi rectifié. On mesure la difficulté de mener un débat aussi complexe sur un amendement examiné dans le cadre de l'article 88 du règlement.
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Le groupe UDF avait d'abord considéré cet amendement tardif avec circonspection. Les explications du ministre ont permis d'éclairer les choses.
    Nous avions à l'origine un certain nombre de craintes, qu'avait également exprimées l'opposition. Mais les propos du ministre ont mis en évidence plusieurs éléments.
    D'abord, les maires, autorités élues et responsables devant les citoyens, disposent de certains droits de réquisition.
    Ensuite, le préfet, qui n'est pas quant à lui responsable devant les citoyens, peut suspendre et déférer devant le tribunal administratif la décision d'un maire en cas de catastrophe ou d'urgence absolue. Telle est la situation dans laquelle je me suis trouvé il y a quelques semaines.
    Je trouve normal que les maires disposent d'un droit de réquisition, comme les préfets lorsque le problème dépasse la cadre de la commune. Mais vous avez dit, monsieur Le Guen, que le contrôle du juge ne pourrait pas s'exercer. Or, un arrêté du préfet peut toujours être déféré devant la justice. Et quand bien même aurions-nous un jour un gouvernement moins démocratique que celui-ci, la justice, à moins de supposer un effondrement de nos institutions, permettrait de garantir le citoyen contre toute dérive.
    Pour toutes ces raisons, le groupe UDF votera l'amendement.
    M. Jean-Marie Le Guen. Il s'agit d'un article 16 déconcentré !
    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Depuis deux jours, nous parlons dans cet hémicycle de la sécurité de nos concitoyens. Aucune mesure n'a jusqu'à présent été évoquée pour autre chose que la sécurité de nos concitoyens. Mais depuis tout à l'heure, les exemples cités ne touchent pas à la sécurité publique.
    Dans ces conditions, Jean-Marie Le Guen a raison de dire que nous devons nous interroger sur les possibilités qu'auront les dispositions proposées.
    Puisque nous qualifions les atteintes au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publiques, le Gouvernement pourrait, lors d'une première phase, monsieur le ministre, voir lesquels de ces quatre termes correspondent aux exemples que vous nous avez donnés. Peut-être pourrions-nous alors réfléchir à la mise en oeuvre du pouvoir de réquisition qui est prévu. Dans cette perspective, l'amendement pourrait être réservé et nous pourrions y revenir un peu plus tard. Nous pourrions également nous entretenir du sujet à la faveur d'une suspension de séance.
    Voyez comme nous sommes constructifs !
    Quoi qu'il en soit, si l'amendement restait en l'état, nous ne pourrions le voter.
    M. Charles Cova. Nous, nous le voterons !
    M. le président. Sur l'amendement n° 424 rectifié, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    Je vais suspendre la séance afin de respecter le délai réglementaire de cinq minutes entre l'annonce du scrutin et le scrutin lui-même.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-sept heures cinq, est reprise à dix-sept heures dix.)
    M. le président. La séance est reprise.
    Je vais donc mettre aux voix, par scrutin public, l'amendement n° 424 rectifié.
    Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   56
Nombre de suffrages exprimés   55
Majorité absolue   28
Pour l'adoption   46
Contre   9

    L'Assemblée nationale a adopté.
    M. Le Roux, Mme David et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 228, ainsi libellé :
    « Après l'article 1er, insérer l'article suivant :
    « Après l'article 13 du code de procédure pénale, il est inséré un article 13-1 ainsi rédigé :
    « Art. 13-1. - Dans le cadre de son pouvoir de surveillance, en lien avec les procureurs de la République du ressort de la cour d'appel, le procureur général fixe les objectifs de la police judiciaire et coordonne son action. Sous son autorité, chaque procureur de la République anime et dirige l'action de la police judiciaire dans le ressort du tribunal de grande instance. Les responsables locaux des services de police judiciaire lui rendent compte de l'exécution et des résultats des missions qui leur ont été fixées. »
    La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Je m'en suis déjà largement expliqué : pour assurer une meilleure coordination des services de police judiciaire et accroître leur efficacité, il est nécessaire de renforcer les pouvoirs des procureurs généraux et des procureurs de la République.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Le contrôle de la police judiciaire par les procureurs n'étant ni abordé ni affecté par le projet de loi, la commission a repoussé l'amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 228.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. MM. Gerin, Brunhes, Braouezec et les membres du groupe des députés-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 180, ainsi rédigé :
    « Après l'article 1er, insérer l'article suivant :
    « Il est créé dans les agglomérations ou communautés de communes un observatoire de la tranquillité publique, sous l'autorité de la police nationale, dont la mission est de centraliser et de mutualiser l'ensemble des missions de service public, de justice, de police, d'action sociale. L'ensemble des services publics concourt à informer cet observatoire. Afin de préserver les libertés publiques, cet observatoire n'est chargé d'aucune mission de sécurité. Il peut échanger en temps réel les informations, avec l'impératif de ne pas se substituer et de ne pas confondre les compétences de chaque structure. »
    La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. L'avancée réalisée en 1997 à Villepinte n'a malheureusement pas été suivie d'une manière significative. Mais personne ne conteste aujourd'hui qu'une bonne politique de tranquillité publique puisse réellement exister sans une coordination opérationnelle de l'ensemble des acteurs sociaux susceptibles de la mettre en oeuvre.
    Monsieur le ministre, votre proposition de créer un observatoire national de la délinquance auprès de l'IHESI est très intéressante. C'est une idée que j'avais moi-même avancée il y a un an pour ce qui concerne l'agglomération lyonnaise. Notre amendement va dans ce sens puisqu'il tend à créer un observatoire national de la tranquillité publique, chargé de recenser et de centraliser l'ensemble des expériences de terrain.
    Il s'agirait de mettre en évidence tout autant ce qui va dans le bon sens que ce qui fait blocage.
    L'observatoire enverrait ses conclusions, au fur et à mesure de leur élaboration, aux acteurs de la sécurité et de la tranquillité publiques sur le terrain, afin que tous puissent tirer profit des expériences particulièrement réussies.
    La mission de l'observatoire ne se limiterait pas à l'observation et à l'étude : il constituerait en quelque sorte le deuxième étage de la fusée puisqu'il permettrait de mutualiser des missions de service public, de justice, de police, d'action sociale et d'éducation touchant directement ou indirectement à la sécurité.
    Cette mutualisation ne peut pas s'opérer de façon bureaucratique, mais elle doit émerger de manière pratique, concrètement, sur le terrain. C'est pourquoi nous prévoyons un « observatoire » dont le rôle doit être essentiellement incitatif.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. M. Gerin est pétri de bonnes intentions, mais sa proposition relève de l'orientation. Comment pourrait-on l'inclure dans un texte tel que celui que nous examinons ?
    M. Pierre Cardo. D'autant plus que ce genre de dispositif est déjà prévu !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. De plus, notre collègue me semble totalement ignorer les changements déjà introduits dans le dispositif de sécurité par le nouveau gouvernement.
    M. Pierre Cardo. Exactement !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Dans le décret du 17 juillet 2002, il retrouvera certains éléments prévus dans l'amendement et qui sont d'ores et déjà mis en oeuvre.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Tout cela est déjà prévu dans les missions des CLSPD. Si l'on veut étendre leur champ d'action, il suffit qu'ils soient intercommunaux.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 180.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Les amendements n°s 220, 221 et 222 ont été retirés.
    M. Lagarde et M. Perruchot ont présenté un amendement, n° 224, ainsi libellé :
    « Après l'article 1er, insérer l'article suivant :
    « Après l'article L. 2213-31 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2213-32 ainsi rédigé :
    « Art. L. 2213-32. - En cas de trouble manifeste à l'ordre, la sécurité et la salubrité publics, le maire peut ordonner pour une durée n'excédant un mois la fermeture administrative :
    « - des établissements de vente à emporter d'aliments assemblés et préparés sur place destinés à une remise immédiate au consommateur ;
    « - des commerces.
    « Il informe sans délai le représentant de l'Etat dans le département, qui peut suspendre cette décision et la déférer au tribunal administratif.
    « Le fait, pour le propriétaire ou l'exploitant, de ne pas se conformer à l'arrêté pris en application du premier alinéa, est puni de 3 750 euros d'amende. »
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Cet amendement vise à permettre au maire d'intervenir en cas de trouble manifeste à l'ordre, à la sécurité ou à la salubrité publics, engendré par des établissements de ventes à emporter, où les aliments sont préparés et assemblés sur place et, plus généralement, par des commerces.
    Dans nos communes, nous sommes confrontés à des situations face auxquelles l'Etat ne réagit pas assez rapidement. Je sais bien que, pour ce qui concerne les débits de boissons et les établissements détenant la licence IV, le préfet a la possibilité de sanctionner a posteriori, mais il ne peut pas mettre un frein aux troubles de manière instantanée et dans l'urgence.
    Notre amendement donne au maire la possibilité de réagir rapidement. Celui-ci devra informer sans délai le représentant de l'Etat dans le département, qui, afin d'éviter toute dérive, pourra suspendre la décision et la déférer devant le tribunal administratif. C'est bien sûr le cas pour tout arrêté municipal, mais nous avons jugé utile de l'écrire.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. M. Lagarde a raison, mais le code général des collectivités territoriales couvre déjà ces cas.
    En effet, son article L. 2212-2 dispose :
    « La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment :
    « [...]
    « 2° Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes et disputes accompagnées d'ameutement dans les rues , y compris les bruits de voisinage, les rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique ;
    «
    « 4° L'inspection sur la fidélité du débit des denrées qui se vendent au poids ou à la mesure et sur la salubrité des comestibles exposés en vue de la vente. »
    L'amendement n'ajoute rien à cela.
    M. le président. Monsieur Lagarde, maintenez-vous l'amendement ?
    M. Jean-Christophe Lagarde. J'aurais aimé entendre aussi l'avis du Gouvernement car il arrive que les préfets défèrent devant le tribunal administratif ce type d'arrêté pris par des maires.
    Même si ce que nous proposons est déjà prévu, il faudrait, de toute façon, que les préfets soient mieux informés.
    Je prendrai l'exemple d'une épicerie située dans un quartier d'habitations, ouverte jusqu'à quatre ou cinq heures du matin et qui devient un lieu de réunion du fait notamment qu'y est vendu de l'alcool. Bien évidemment, personne n'ose porter plainte alors que le trouble est manifeste. Dans une situation comparable, j'ai eu à prendre un arrêté que le préfet - nous verrons ce que cela donnera - a déféré devant le tribunal administratif.
    Quoi qu'il en soit, il est souhaitable que les préfets soient mieux informés, ce qui ne semble pas être le cas aujourd'hui.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. M. Lagarde a tellement raison !
    Nombre d'entre nous ont souvent été confrontés, notamment ces dernières années, à des décisions que des maires avaient prises en vertu des pouvoirs dont ils disposent de par le code général des collectivités territoriales mais qui hélas, alors qu'elles étaient parfaitement fondées en droit, ont été déférées devant la juridiction administrative par certains préfets. J'ai connu ce type de situation dans mon propre département.
    Nous devons donc nous en remettre au ministre pour que la manière dont les choses étaient conduites autrefois par les préfets soit, à l'avenir, différente dans la perspective, prévue par le projet de loi en discussion comme par la LOPSI, d'un rapprochement entre les préfets et les maires, dont les arrêtés doivent être respectés.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Que peut-on faire pour essayer d'arranger les choses ?
    M. Pierre Cardo. Réformer l'ENA ! (Sourires.)
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je vous propose de préparer une circulaire à adresser aux préfets pour leur préciser de nouveau les pouvoirs des maires en la matière, leurs capacités à agir, leurs limites et les alerter sur l'exaspération légitime de certains élus lorsqu'ils constatent que leurs efforts pour essayer d'assurer un minimum de tranquillité ne sont pas tout à fait compris au niveau central, c'est-à-dire à la préfecture.
    Monsieur Lagarde, l'envoi d'une circulaire, que je suis prêt à soumettre à ceux qui s'intéresseraient à la question, est préférable à un article tel que celui que vous proposez d'inclure dans le projet de loi.
    Pour autant, votre amendement aura eu au moins l'utilité de soulever une véritable question qui, je le répète, me paraît pouvoir être résolue de la façon que j'ai dite.
    J'ajoute, comme je réunis les préfets tous les deux mois, que j'inscrirai ce point précis à l'ordre du jour de la prochaine réunion pour les alerter sur ce que j'ai bien senti comme une forme d'exaspération des élus locaux, toutes tendances politiques confondues.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Sous le bénéfice des explications du Gouvernement, je retire l'amendement n° 224 et, dès à présent, l'amendement n° 225.
    M. le président. Les amendements n°s 224 et 225 sont retirés.
    L'amendement n° 203 rectifié a également été retiré.
    M. Estrosi, rapporteur, et M. Gérard Léonard ont présenté un amendement n° 56, ainsi rédigé :
    « Après l'article 1er, insérer la division et l'intitulé suivants :
    « Chapitre Ier bis
    « De la réserve civile de la police nationale. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cet amendement, en insérant une division et un intitulé nouveau, crée la réserve civile de la police nationale, conformément aux orientations prévues par l'annexe I de la loi du 29 août 2002.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable !
    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Il s'agit d'un point essentiel, d'ailleurs vécu de façon sensiblement différenciée par ceux qui ont la charge de représenter les policiers. Je m'étonne simplement que la création de la réserve de la police nationale soit le fait d'un amendement parlementaire. S'agissant d'un engagement du Gouvernement, il eût été préférable que l'initiative vienne de lui. C'est, il me semble, une légèreté.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Quelle triste conception du Parlement !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je note, monsieur Le Roux que, pour vous, accepter un amendement parlementaire est une légèreté.
    M. Bruno Le Roux. Ce n'est pas ce que j'ai dit !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je vous laisse l'entière responsabilité de ces propos et vous renvoie au pot de confiture de tout à l'heure ! (Sourires.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 56.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Estrosi, rapporteur, et M. Gérard Léonard ont présenté un amendement, n° 57, ainsi rédigé :
    « Après l'article 1er, insérer l'article suivant :
    « Il est créé une réserve civile de la police nationale destinée à effectuer des missions de soutien aux forces de sécurité intérieure et des missions de solidarité.
    « La réserve est constituée de fonctionnaires de la police nationale dégagés de leur lien avec le service. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. L'amendement n° 57 ainsi que les amendements n°s 58 et 59 sont la conséquence du précédent et précisent les conditions de mise en place de la réserve civile.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 57.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Estrosi, rapporteur, et M. Gérard Léonard ont présenté un amendement, n° 58, ainsi rédigé :
    « Après l'article 1er, insérer l'article suivant :
    « Les fonctionnaires des corps actifs de la police nationale, dans la limite de cinq ans à compter de la fin de leur lien avec le service, sont tenus à une obligation de disponibilité afin de répondre aux rappels individuels ou collectifs du ministre chargé de la sécurité intérieure en cas de menaces ou de troubles graves à l'ordre public, dans la limite de 90 jours par an.
    « Les conditions d'application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d'Etat. »
    Cet amendement a été défendu.
    Le Gouvernement a donné son avis.
    Je mets aux voix l'amendement n° 58.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Estrosi, rapporteur, et M. Gérard Léonard ont présenté un amendement, n° 59, ainsi rédigé :
    « Après l'article 1er, insérer l'article suivant :
    « Dans la limite de cinq ans à compter de la fin de leur lien avec le service, les fonctionnaires des corps actifs de la police nationale peuvent également demander à rejoindre la réserve civile en qualité de volontaires.
    « Les volontaires doivent remplir des conditions d'aptitude. Ceux dont la candidature a été acceptée souscrivent un engagement contractuel d'une durée minimum d'un an renouvelable. Ils apportent leur soutien aux services de la police nationale, dans la limite de 90 jours par an.
    « Le réserviste volontaire qui effectue les missions visées au présent article au titre de la réserve civile pendant son temps de travail doit obtenir, lorsque leur durée dépasse dix jours ouvrés par année civile, l'accord de son employeur, sous réserve de dispositions plus favorables résultant du contrat de travail, de conventions ou accords collectifs de travail, de conventions conclues entre l'employeur et le ministre chargé de la sécurité intérieure.
    « Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du présent article. Il fixe notamment le délai de préavis de la demande d'accord formulée auprès de l'employeur en application du présent article, et le délai dans lequel celui-ci notifie à l'administration son éventuel refus. »
    Cet amendement a été défendu.
    Le Gouvernement a donné son avis.
    Je mets aux voix l'amendement n° 59.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 422, ainsi rédigé :
    « Après l'article 1er, insérer l'article suivant :
    « Les périodes d'emploi des réservistes sont indemnisées.
    « Les indemnités perçues au titre de périodes effectuées dans le cadre du volontariat ou de l'obligation de disponibilité ne sont pas soumises aux dispositions du premier alinéa de l'article 16 du décret-loi du 29 octobre 1936 relatif aux cumuls de retraites, de rémunération et de fonctions.
    « Dans le cas où le réserviste exerce une activité salariée, son contrat de travail est suspendu pendant la période où il effectue des missions au titre de la réserve civile de la police nationale. Toutefois, cette période est considérée comme une période de travail effectif pour les avantages légaux et conventionnels en matière d'ancienneté, d'avancement, de congés payés et de droits aux prestations sociales.
    « Aucun licenciement ou déclassement professionnel, aucune sanction disciplinaire ne peuvent être prononcés à l'encontre d'un réserviste en raison des absences résultant des présentes dispositions.
    « Pendant la période d'activité dans la réserve, l'intéressé bénéficie, pour lui et ses ayants droit, des prestations des assurances maladie, maternité, invalidité et décès, dans les conditions visées à l'article L. 161-8 du code de la sécurité sociale, du régime de sécurité sociale dont il relève en dehors de son service dans la réserve.
    « Un décret en Conseil d'Etat détermine en tant que de besoin les modalités d'application du présent article. »
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cet amendement fait naturellement suite aux précédents, mais la disposition qu'il porte, et j'en suis désolé pour M. Le Roux, est la seule qui ne pouvait figurer dans un amendement parlementaire, en raison de l'article 40 de la Constitution, puisqu'elle concerne la rétribution des réservistes. Il ne s'agit donc pas d'une incohérence de la part du Gouvernement, mais d'une façon de surmonter un obstacle juridique.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Devant cette parfaite complémentarité entre les propositions de la commission et celles du Gouvernement, on ne peut qu'émettre un avis favorable, monsieur le président. (Sourires.)
    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Il me semble que nous pourrions réfléchir à l'opportunité de donner un caractère facultatif à la réserve civile, même si les fonctionnaires, pour une grande partie d'entre eux, peuvent souhaiter grandement y participer. C'est pourquoi j'aimerais sous-amender l'amendement n° 58 en substituant aux mots « sont tenus à une obligation de disponibilité », les mots « peuvent fournir à leur demande une disponibilité afin de répondre aux appels individuels ».
    M. le président. Monsieur Le Roux, vous semblez avoir pris du retard. L'amendement n° 58 a déjà été adopté. En tout cas, votre remarque figurera au compte rendu de nos débats...
    Je mets aux voix l'amendement n° 422.
    (L'amendement est adopté.)

Article 2

    M. le président. Je donne lecture de l'article 2 :

Chapitre II
Dispositions relatives aux investigations judiciaires

    « Art. 2. - Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
    « I. - L'article 15-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : "La compétence territoriale de ces services ou unités s'exerce, selon les distinctions prévues par ce décret, soit sur l'ensemble du territoire national, soit sur une ou plusieurs zones de défense, ou parties de celles-ci, soit sur l'ensemble d'un département.
    « II. - L'article 18 est ainsi modifié :
    « 1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
    « Les officiers de police judiciaire, mis temporairement à disposition d'un service autre que celui dans lequel ils sont affectés, ont la même compétence territoriale que celle des officiers de police judiciaire du service d'accueil. »
    « 2° La deuxième phrase du troisième alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : "Pour l'application du présent alinéa, les ressorts des tribunaux de grande instance situés dans un même département sont considérés comme un seul et même ressort. Les ressorts des tribunaux de grande instance de Paris, Nanterre, Bobigny et Créteil sont considérés comme un seul et même ressort.
    « 3° Au quatrième alinéa, les mots : "en cas d'urgence sont supprimés, et les mots : "d'un officier de police judiciaire exerçant ses fonctions dans la circonscription intéresséesont remplacés par les mots : "d'un officier de police judiciaire territorialement compétent.
    « 4° Au cinquième alinéa, les mots : "dans les limites territoriales de la circonscription des officiers de police judiciaire sont remplacés par les mots : "dans les mêmes limites de compétence territoriale que celles des officiers de police judiciaire. »
    M. le président. M. Le Roux, Mme David et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 229, ainsi rédigé :
    « Supprimer le I de l'article 2. »
    La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Aujourd'hui, en vertu de l'article 15-1 du code de procédure pénale et depuis la loi du 1er février 1994, les critères de compétence territoriale des services et unités de police judiciaire sont déterminées par décret en Conseil d'Etat, pris sur le rapport du ministre de la justice et du ministre intéressé. Il aurait donc suffi que le ministre de la justice et celui de l'intérieur se mettent d'accord pour régler cette question, ce qui suffit à justifier la suppression du I de l'article.
    En outre, comme le souligne dans son rapport le sénateur Jean-Patrick Courtois, l'évolution proposée pose un problème de dilution du lien entre chaque officier de police judiciaire et le parquet lorsque le département comprend plusieurs TGI. Elle aboutirait donc à réduire la portée de l'article 12 du code de procédure pénale, qui prévoit que le procureur de la République exerce la direction de la police judiciaire.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Je ne comprends pas la démarche de M. Le Roux, qui ne relève d'aucun bon sens. Tout à l'heure, il réclamait la suppression de l'action potentielle des directions du travail, maintenant il ne veut pas que l'on étende la compétence départementale des OPJ. Mais regardez à quelle situation ces derniers sont confrontés !
    Certes, il existe plusieurs catégories d'OPJ, en fonction de leur compétence territoriale, mais beaucoup d'entre eux doivent agir dans une circonscription limitée, en particulier quand il y a plusieurs juridictions dans le département. Nous ne voulons que donner plus d'efficacité à leur action, afin qu'ils puissent mieux déterminer les délits, poursuivre les délinquants et les mettre hors d'état de nuire. Une compétence départementale, au minimum, me paraît une proposition cohérente et efficace.
    Bien entendu, la commission a repoussé cet amendement de suppression.
    M. le président. Je suppose que le Gouvernement est du même avis ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Oui, monsieur le président.
    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. J'ai simplement le sentiment que nous aurions pu procéder différemment. Par ailleurs, la remarque de M. le rapporteur me paraît fausse, en raison du mouvement de redéploiement engagé par le ministre de l'intérieur. Je vous en félicite, monsieur le ministre, car cette initiative était nécessaire et réclamée depuis plusieurs années. Vous êtes parvenu, grâce à la concertation et à l'explication, à surmonter des blocages qui n'étaient pas simplement d'ordre administratif, mais venaient aussi des élus de terrain. Or c'est précisément à cause de ce mouvement de redéploiement, qui va dans le bon sens, que les problèmes de compétence ne me paraissent plus d'actualité : en flagrance, ils n'existent pas, et ils peuvent être aisément surmontés pour les besoins d'une enquête. Je ne vois donc pas l'intérêt de l'article, et je maintiens l'amendement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 229.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Le Roux, Mme David et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 230, ainsi rédigé :
    « Supprimer le 1° du II de l'article 2. »
    La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Les critères de compétence territoriale des groupes d'intervention régionale peuvent faire l'objet d'un décret en Conseil d'Etat prévu à l'article 15-1 du code de procédure pénale. Or la mise en place des GIR a été réalisée par une simple circulaire interministérielle du 22 mai 2002, ce qui laisse à penser qu'aucun problème de cette nature ne se pose. C'est pourquoi, sauf à dire que les GIR ne peuvent pas être opérationnels depuis le 22 mai 2002, il est nécessaire de supprimer le 1° du II de l'article 2.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Il s'agit d'une mesure qui offre plus de souplesse à l'action des OPJ, notamment dans leur mise à disposition, de manière ponctuelle, d'une circonscription à l'autre ou d'une juridiction à l'autre. Pourquoi s'en priver ?
    Une personne devient-elle totalement incompétente dès lors qu'elle est mise, le temps d'une enquête, à la disposition d'une autorité voisine ?
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 230.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Fenech a présenté un amendement, n° 9, ainsi libellé :
    « Compléter le II de l'article 2 par les deux alinéas suivants :
    « 5° Le sixième alinéa est ainsi rédigé :
    « Les officiers ou agents de police judiciaire exerçant habituellement leur mission dans les véhicules affectés aux transports collectifs de voyageurs ou dans les lieux destinés à l'accès à ces moyens de transports sont compétents pour opérer sur l'étendue de la zone de défense de leur service d'affectation, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat. »
    La parole est à M. Georges Fenech.
    M. Georges Fenech. Il s'agit, pour reprendre les termes du rapporteur, d'apporter plus de souplesse et d'efficacité à l'action des agents ou officiers de police judiciaire, en particulier de ceux qui officient habituellement dans les transports collectifs de voyageurs. En effet, nous savons que les délinquants qui opèrent sur ces lignes sont de plus en plus mobiles et agissent souvent sur plusieurs départements à la périphérie des gares. Limiter leur compétence au seul réseau ferroviaire revient donc à entraver la bonne marche des enquêtes. Cet amendement propose de leur attribuer un droit de suite en leur permettant d'opérer sur l'étendue de la zone de défense de leur service d'affectation.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La commission a beaucoup travaillé sur cet amendement, d'abord au moment de l'étude du rapport, puis dans le cadre de l'article 88 du règlement. Il donne aux officiers de police judiciaire une véritable marge de manoeuvre lorsqu'ils opèrent dans les transports. On observe aujourd'hui un phénomène de forte mobilité de la délinquance, qui concerne les transports ferroviaires, routiers, voire aériens. C'est pourquoi la commission a décidé d'adopter l'amendement présenté par M. Fenech.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Je trouve cet amendement tout à fait excellent.
    M. Georges Fenech. Merci.
    M. André Gerin. Je voterai donc sans hésiter la proposition de mon collègue du Rhône.
    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Nous voterons aussi cet amendement, même si nous nous interrogeons sur sa rédaction. L'expression « exerçant habituellement leur mission dans les véhicules affectés » est d'une légère imprécision qui, je l'espère, pourra être levée dans les faits. Quoi qu'il en soit l'amendement nous semble aller dans le bon sens.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.
    (L'amendement est adopté.)
    Je constate que le vote est acquis à l'unanimité. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 426, ainsi rédigé :
    « Compléter l'article 2 par le paragraphe suivant :
    « III. - Dans le 3° de l'article 16, après les mots : "les fonctionnaires titulaires du corps de commandement et d'encadrement de la police nationale, sont insérés les mots : "et les fonctionnaires stagiaires du corps de commandement et d'encadrement déjà titulaires de cette qualité. »
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Actuellement les fonctionnaires du corps de commandement et d'encadrement ne peuvent être habilités en qualité d'OPJ qu'à partir de la date de leur titularisation. De ce fait, les lieutenants stagiaires issus du corps de maîtrise et d'application déjà titulaires de cette qualité ne peuvent pas prétendre exercer les attributions afférentes à un OPJ dès leur sortie d'école, et ce alors qu'ils l'exerçaient pleinement avant d'y entrer, ce qui est une curiosité. Il est donc indispensable de rétablir à leur profit la qualité d'officier de police judiciaire de l'article 16 du code de procédure pénale, ce qui nous permettra d'augmenter le nombre des OPJ disponibles, comme le Gouvernement et le Parlement l'ont souhaité.
    M. Jean-Marie Le Guen. Cela fera une belle statistique !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. En effet, et pour pas cher ! (Sourires.)
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La mesure va dans le sens du renforcement des OPJ voulu par la LOPSI. Nous y sommes donc très favorables.
    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Il est en effet nécessaire d'aller vers un renforcement important du nombre des officiers de police judiciaire. Nous voterons donc cet amendement de bon sens.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 426.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je constate de nouveau que le vote est acquis à l'unanimité.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mais alors je vais devoir remercier l'opposition !
    M. le président. Je vous en laisse juge, monsieur le ministre !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le plus étonnant, c'est qu'on n'y ait pas pensé avant, n'est-ce pas, monsieur Le Guen !
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le ministre, je vous rappelle que la gauche n'a gouverné qu'à partir de 1997 !
    M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)
    M. André Gerin. Je précise que j'ai voté pour l'article 2.
    (Mme Paulette Grunchard-Kunstler remplace M. Jean Le Garrec au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE
Mme PAULETTE GUINCHARD-KUNSTLER,
vice-présidente

Article 3

    Mme la présidente. « Article 3. - Après l'article 20 du code de procédure pénale, il est inséré un article 20-1 ainsi rédigé :
    « Art. 20-1. - Les fonctionnaires de la police nationale et les militaires de la gendarmerie nationale à la retraite, ayant eu durant leur activité la qualité d'officier ou d'agent de police judiciaire, peuvent bénéficier de la qualité d'agent de police judiciaire lorsqu'ils sont appelés au titre de la réserve civile de police nationale ou au titre d'un engagement spécial dans les réserves de la gendarmerie nationale. Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article ; il précise en particulier les exigences requises des intéressés en considération de leur manière de servir pendant leur période d'activité et l'âge au-delà duquel ils ne pourront plus exercer leurs fonctions. »
    MM. Gerin, Brunhes, Braouzec et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 181, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 3. »
    La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. L'article 3 confère aux fonctionnaires et militaires de la police et de la gendarmerie nationales à la retraite la qualité d'agents de police judiciaire lorsqu'ils sont appelés au titre de la réserve civile.
    On ne peut faire abstraction des différences qui existent entre les régimes applicables à la police et à la gendarmerie. Par exemple, l'âge de départ en retraite est différent : pour les gendarmes, la retraite intervient après quinze ans d'activité ; pour les fonctionnaires de police, elle est beaucoup plus tardive. Au-delà de ce fait, qui peut paraître anecdotique, cet article remet en cause, individuellement, l'âge de départ en retraite du policier.
    La distinction entre les fonctions militaires et civiles tend à s'atténuer. Les missions de police judiciaire ne peuvent être effectuées dans un système aléatoire et précaire, au détriment de l'embauche de policiers et de fonctionnaires. Enfin, l'exercice des fonctions d'officier ou d'agent de police judiciaire par des retraités peut poser de nombreux problèmes, liés à la continuité du travail et à l'engagement personnel.
    Cet article, qui vise à répondre au manque de personnel, est porteur de risques. C'est pourquoi les député-e-s communistes et républicains vous demandent sa suppression, afin d'en rester au dispositif législatif actuel.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Comment créer une réserve civile sans lui donner les moyens d'action nécessaires ? C'est bien pourquoi le Gouvernement propose le statut d'agents de police judiciaire, ce qui complète parfaitement la création de la réserve. Il s'agit de pouvoir faire face à des besoins non satisfaits ou à des évènements exceptionnels. Si nous n'accordons pas ce statut aux réservistes, ils ne pourront pas répondre aux situations d'urgence qu'implique leur mission.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis, madame la présidente.
    Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. La réserve civile, je tiens à l'affirmer à nouveau, devrait avoir un caractère facultatif, et non pas obligatoire. Cela étant, conférer le statut d'adjoint de police judiciaire à ces retraités relève à mes yeux du bon sens et exprime une reconnaissance des responsabilités exercées et de la science qu'ils ont accumulée tout au long de leur carrière, tout en anticipant les besoins qui pourraient être ceux de la Nation. Nous voterons donc pour cette mesure.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 181.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 429, ainsi rédigé :
    « A la fin de la première phrase du texte proposé pour l'article 20-1 du code de procédure pénale, substituer aux mots : "d'un engagement spécial dans les réserves, les mots : "de la réserve opérationnelle. »
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il s'agit d'attribuer la qualité d'agent de police judiciaire aux gendarmes lorsqu'ils sont appelés dans le cadre général de la réserve de la gendarmerie nationale, et pas seulement aux gendarmes titulaires d'un engagement spécial dans la réserve.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 429.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, n°s 60 et 33, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 60, présenté par M. Estrosi, rapporteur, est ainsi libellé :
    « Après les mots : "conditions d'application du présent article, rédiger ainsi la fin du texte proposé pour l'article 20-1 du code de procédure pénale :
    « Il précise les conditions d'expérience et les qualités requises pour bénéficier de la qualité d'agent de police judiciaire au titre du présent article. »
    L'amendement n° 33, présenté par M. Mourrut, est ainsi rédigé :
    « Dans la dernière phrase du texte proposé pour l'article 20-1 du code de procédure pénale, après les mots : "période d'activité, insérer les mots : ", la période durant laquelle ils ne peuvent se soustraire à l'appel. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 60.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. C'est un simple amendement rédactionnel.
    Mme la présidente. L'amendement n° 33 n'est pas défendu.
    Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 60.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 3, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 3, ainsi modifié, est adopté.)

Article 4

    Mme la présidente. « Art. 4. - Au premier alinéa de l'article 78-2 du code de procédure pénale, les mots : "un indice faisant présumer sont remplacés par les mots : "une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner. »
    Je suis saisie de deux amendements identiques, n°s 231 et 324.
    L'amendement n° 231 est présenté par MM. Le Roux, Viollet, Mme David et les membres du groupe socialiste ;
l'amendement n° 324 est présenté par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 4. »
    La parole est à M. Bruno Le Roux, pour soutenir l'amendement n° 231.
    M. Bruno Le Roux. J'ai longuement évoqué l'article 4 dans l'exception d'irrecevabilité. La coexistence de deux définitions différentes et potentiellement concurrentes pour une seule notion de suspect dans le code de procédure pénale comporte un danger. J'ai eu beau chercher une justification au changement qui nous est proposé, je n'en ai trouvé aucune. J'attends donc les lumières du Gouvernement.
    Nous ne voyons pas comment la substitution de la notion de « raisons plausibles de soupçonner » à celle d'« indices » introduirait une sécurité juridique.
    Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.
    Mme Martine Billard. Le critère permettant à la police judiciaire de procéder à un contrôle d'identité est actuellement l'existence d'« un indice faisant présumer » que la personne a commis, tenté de commettre, se prépare à commettre un crime ou un délit, ou qu'elle est susceptible de fournir des renseignements utiles, ou encore qu'elle fait l'objet de recherches. Le contrôle d'identité est donc très précisément encadré. Or le texte du projet de loi introduit la notion floue d'« une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner » que la Commission nationale consultative des droits de l'homme avait déjà repoussée.
    M. Pierre Cardo. Elle ne fait pas la loi !
    Mme Martine Billard. Dès lors, pourquoi vouloir introduire une notion aussi floue qui permettra tout ? Qu'est ce qu'une « raison plausible » ?
    Est-ce la tenue vestimentaire, la longueur de cheveux, le port de la casquette, l'aspect physique, la marque du blouson, l'âge de la personne ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est la rédaction de la Convention européenne des droits de l'homme !
    Mme Martine Billard. Il nous semble grave d'introduire une notion aussi floue pour les contrôles d'identité, car les agents des forces de l'ordre sont, comme nous tous, soumis à certains préjugés s'agissant de l'aspect des personnes. Il n'est donc pas bon d'élargir outrageusement les possibilités de contrôle d'identité. Je ne veux pas tomber dans le politiquement correct, mais nous savons bien aujourd'hui que les jeunes de couleur se font systématiquement contrôler. Qu'un jeune soit contrôlé parce qu'il s'apprête à commettre un délit, c'est normal, mais qu'il le soit plusieurs fois dans la même journée en raison de son aspect vestimentaire ou de la couleur de sa peau est à l'origine d'un sentiment de discrimination perceptible aussi lors de la recherche d'un emploi. C'est une situation qui déstabilise une partie de notre jeunesse. Et quand on parle d'intégration, il faut savoir ce que l'on entend par là ! Cela implique que des jeunes qui n'ont rien fait ne soient pas systématiquement soumis à des contrôles parce qu'ils habitent des cités difficiles ou n'ont pas la même couleur de peau que nous tous ici présents.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. L'avez-vous dit en mars 2002 ?
    Mme Martine Billard. Je veux bien admettre que, a priori, les forces de police n'ont pas reçu l'ordre de contrôler selon la couleur de peau ou l'âge de la personne, mais dans les faits c'est ainsi que cela se passe. Combien de fois voyons-nous des personnes se faire contrôler parce qu'elles sont de couleur, jeunes ou mal vêtues, alors que l'on ne nous demande rien parce que nous sommes blancs et bien vêtus ! Les contrôles doivent être effectués dans le cadre d'une procédure judiciaire et concerner tout le monde, quelle que soit la couleur de peau ou l'aspect vestimentaire, mais ils ne doivent pas s'appliquer à des personnes qui n'ont commis aucun délit ou qui ne s'apprêtent pas à en commettre un.
    M. Pierre Cardo. Les contrôles concernent tout le monde !
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Madame la députée, l'amalgame que vous faites, les soupçons que vous faites peser sur la police, la gendarmerie, les forces de l'ordre, sont inadmissibles.
    M. Jean-Marie Le Guen. N'exagérons rien !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Qui plus est, il s'agit là simplement de nous aligner sur les propositions qui ont été faites par votre collègue Julien Dray. C'est une simple mesure de cohérence avec les changements introduits en matière de placement en garde à vue par la loi du 4 mars 2002 !
    Par ailleurs, la rédaction proposée s'inspire rigoureusement de la Convention européenne des droits de l'homme. Vous ne cessez de vous renvendiquer de la défense des droits de l'homme et quand le Gouvernement décide de se conformer aux recommandations de la Convention européenne, vous contestez ! En substituant à la notion « d'indice » celle de « raisons plausibles de soupçonner » pour le fondement des contrôles d'identité, l'article 4 du projet de loi donne une sécurité juridique aux procédures des forces de sécurité et j'insiste sur l'importance de cette sécurité juridique.
    M. Pierre Cardo. Très bien !
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je vais essayer d'être très précis, car j'ai pris l'engagement de m'expliquer sur cette question à la suite de ce qu'a excellemment dit notre rapporteur. Notre droit pénal connaît aujourd'hui deux critères. Le premier est celui de l'existence d'un « indice faisant présumer » que l'on a commis ou que l'on va commettre une infraction. Si un tel indice existe, l'OPJ peut faire un contrôle d'identité ou mettre en garde à vue. Ce critère, que l'on appelle aussi « indice simple », a été changé par le gouvernement précédent, le 4 mars 2002. Moi, je n'avais pas l'intention d'y toucher, c'est le gouvernement que vous souteniez qui a proposé ce changement trouvant que « indice faisant présumer », cela faisait ancien. La loi de mars 2002 a très exactement repris l'appellation figurant dans l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme, comme l'a dit Christan Estrosi, c'est-à-dire : « raisons plausibles de soupçonner ». C'est donc à nos prédécesseurs, madame Billard, que vous auriez dû réserver le procès outrancier que vous venez de faire au Gouvernement. J'espère que vous le leur avez dit !
    M. André Gerin. Oui !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Nous ne faisons en effet que nous inspirer strictement de ce qu'ils ont fait. Je remarque que, lorsqu'elle est retenue par nos prédécesseurs, cette expression n'est pas attentatoire à la liberté,...
    M. André Gerin. Si !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... mais qu'elle le devient quand c'est nous qui la proposons ! J'ajoute que je n'ai aucun droit d'auteur, puisque je ne fais que reprendre l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme. Et vous nous expliquez, madame, que si l'on reprend cet article c'est que l'on veut autoriser policiers et gendarmes à faire des contrôles d'identité en fonction de la couleur de peau. Ces propos sont inadmissibles ! Cela dit, je ne peux pas vous en vouloir de ne pas avoir de compétences juridiques en la matière, car le sujet est complexe, mais « indices » ou « raisons plausibles » c'est exactement la même chose. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est ce que l'on constate si l'on compare la jurisprudence de la Cour de cassation et celle de la Cour européenne des droits de l'homme - j'en appelle à ceux qui ont suivi les débats de la loi de mars 2002.
    Alors d'où vient le problème ? Du fait que la loi du 4 mars 2002 n'a pas fait le travail jusqu'au bout. Elle a omis de modifier l'article sur les contrôles d'identité. Elle a oublié d'harmoniser le code de procédure pénale et a laissé subsister dans notre droit deux critères différents, l'un pour la garde à vue, l'autre pour le contrôle d'identité. J'aimerais que l'on m'explique ici au nom de quoi les critères devraient être différents selon qu'il s'agit d'autoriser un contrôle d'identité ou une garde à vue. Nous vous proposons donc d'harmoniser le code de procédure pénale, dans un souci de clarté juridique et d'application de la Convention européenne des droits de l'homme. Si vous votez cet article, madame la députée, le code de procédure pénale contiendra mot pour mot la formulation de la Convention européenne des droits de l'homme. Voilà très exactement ce que nous voulons faire. Cela dit, je ne vous en veux pas, j'aurais peut-être dû m'expliquer avant, mais ne dites pas que cela permettra de contrôler systématiquement les jeunes de couleur !
    Mme Martine Billard. C'est malheureusement la réalité !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des solidarités locales. Ces propos ont sûrement dépassé votre pensée, car je ne peux pas croire que quelqu'un de votre qualité se livre à un tel procès d'intention. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Nous pourrions comprendre l'argumentation de M. le ministre si l'on pouvait appliquer indistinctement les notions dont nous discutons aux différents articles du code de procédure pénale. Mais une garde à vue n'est pas un contrôle d'identité et si l'expression aujourd'hui retenue par le ministre et le rapporteur ne figure pas à l'article 78-2 du code de procédure pénale, c'est justement parce qu'elle nous a semblé inadaptée à cet endroit en vertu des décisions du Conseil constitutionnel, notamment celle du 5 août 1993. En effet, à une conception matérielle du soupçon, elle substitue une conception plus virtuelle. Voilà pourquoi nous avons laissé coexister ces deux notions sous la législature précédente. Si l'on en juge par la jurisprudence constante du Conseil constitutionnel en matière de contrôles d'identité, cet article posera un problème grave. En outre, il ne me semble pas de nature à assurer la sécurité juridique que nous recherchons.
    Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 231 et 324.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    Mme la présidente. MM. Gerin, Brunhes, Braouezec et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 182 rectifié, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 4 :
    « Dans le premier alinéa de l'article 78-2 du code de procédure pénale, après le mot : "indice, est inséré le mot : "grave. »
    La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Je tiens à vous rappeler, monsieur le ministre, que je m'étais opposé à la formulation proposée dans le texte du mois de mars 2002.
    L'article 4 vise à modifier l'article 78-2 du code de procédure pénale, lequel prévoit notamment que les officiers de police judiciaire et, sur l'ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et agents de police judiciaires adjoints, peuvent inviter à justifier, par tout moyen, de son identité toute personne à l'égard de laquelle existe un indice faisant présumer qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction.
    Il est proposé de remplacer les mots « indice faisant présumer », par les mots « une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner ». Désormais, les critères permettant de procéder à des contrôles d'identité seront donc « les raisons plausibles de soupçonner ». Il convient de reconnaître, et c'était déjà notre point de vue en mars 2002, qu'il s'agit là de critères pour le moins vagues et laissant la porte ouverte à toutes les dérives. Le ministre et le rapporteur justifient cette modification par le souci d'aligner le droit des contrôles d'identité sur celui des conditions de placement en garde à vue, parce qu'il existe un lien étroit entre ces deux régimes juridiques.
    C'est la loi du 4 mars 2002 qui a introduit cette notion de « raisons plausibles de soupçonner » dans le souci, cette fois, de se conformer à la Convention européenne des droits de l'homme. Ce choix de se référer à une approche anglo-saxonne était déjà plus que contestable. L'appliquer aux contrôles d'identité devient dangereux. Les indices sont aujourd'hui clairement définis par la jurisprudence qui en a détaillé la nature et les caractéristiques. En revanche, la notion de « raisons plausibles » manque de rigueur et permet toutes les interprétations. Ainsi pouvons-nous craindre que tout devienne une « raison plausible de soupçonner ».
    En matière de contrôle d'identité, nous ne pouvons nous permettre de simples raisons plausibles de soupçonner. Cela n'est pas suffisant pour garantir la sécurité juridique et le respect des libertés individuelles constitutionnellement protégées. Le contrôle d'identité ne nous choque pas, mais nous vous proposons de réécrire l'article 78-2 du code de procédure pénale en précisant que l'indice permettant d'effectuer un tel contrôle doit être grave. Nous voterons contre l'article 4 qui sera extrêmement dangereux s'il n'est pas modifié en ce sens.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Défavorable.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable.
    Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Permettez-moi, madame la présidente, de faire un peu de sémantique. Un indice peut-être plausible, concordant - cela dit, s'il n'y en a qu'un, il le sera difficilement ! -, mais j'ignore ce qu'est un indice « grave ». Ce sont les conséquences de l'acte qui peuvent être graves. Il me semble, monsieur Gérin, que le mot n'est pas adapté et qu'il ne permettra pas de régler le problème que vous soulevez.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 182 rectifié.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Brard et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 387, ainsi rédigé :
    « A la fin de l'article 4, susbstituer aux mots : "une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner les mots : "des indices graves et concordants faisant présumer. »
    La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Cet amendement est défendu.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Défavorable.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 387.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 4.
    (L'article 4 est adopté.)

Article 5

    Mme la présidente. « Art. 5. - I. - L'article 23 de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne est abrogé.
    « II. - L'article 78-2-2 du code de procédure pénale est ainsi rétabli :
    « Art. 78-2-2. - Sur réquisitions écrites du procureur de la République aux fins de recherche et de poursuite des actes de terrorisme visés par les articles 421-1 à 421-5 du code pénal, des infractions en matière d'armes et d'explosifs visées par l'article 3 de la loi du 19 juin 1871 abrogeant le décret du 4 septembre 1870 sur la fabrication des armes de guerre et par les articles 20, 31 et 32 du décret du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions, des infractions de vol visées par les articles 311-3 à 311-11 du code pénal, de recel visées par les articles 321-1 et 321-2 du même code ou des faits de trafic de stupéfiants visés par les articles 222-34 à 222-38 dudit code, les officiers de police judiciaire, assités, le cas échéant, des agents de police judiciaire et des agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l'article 21 peuvent, dans les lieux et pour la période de temps que ce magistrat détermine et qui ne peut excéder vingt-quatre heures, renouvelables sur décision expresse et motivée selon la même procédure, procéder non seulement aux contrôles d'identité prévus au sixième alinéa de l'article 78-2 mais aussi à la visite des véhicules circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public.
    « Pour l'application des dispositions du présent article, les véhicules en circulation ne peuvent être immobilisés que le temps strictement nécessaire au déroulement de la visite qui doit avoir lieu en présence du conducteur. Lorsqu'elle porte sur un véhicule à l'arrêt ou en stationnement, la visite se déroule en présence du conducteur ou du propriétaire du véhicule ou, à défaut, d'une personne requise à cet effet par l'officier ou l'agent de police judiciaire et qui ne relève pas de son autorité administrative. La présence d'une personne extérieure n'est toutefois pas requise si la visite comporte des risques particuliers.
    « En cas de découverte d'une infraction ou si le conducteur ou le propriétaire du véhicule le demande ainsi que dans le cas où la visite se déroule en leur absence, il est établi un procès-verbal mentionnant le lieu et les dates et heures du début et de la fin de ces opérations. Un exemplaire en est remis à l'intéressé et un autre est transmis sans délai au procureur de la République.
    « Toutefois, la visite des caravanes, roulottes, maisons mobiles ou transportables et des véhicules spécialement aménagés pour le séjour ne peut être faite que conformément aux dispositions relatives aux perquisitions et visites domiciliaires lorsqu'ils sont en stationnement et sont utilisés comme résidence effective.
    « Le fait que ces opérations révèlent des infractions autres que celles visées dans les réquisitions du procureur de la République ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes. »
    La parole est à M. André Gerin, inscrit sur cet article.
    M. André Gerin. Cet article vise à modifier la loi relative à la sécurité quotidienne, votée sous la précédente législature, en supprimant son article 23 pour le remplacer par un dispositif permettant la fouille des véhicules. Cet article 23 autorise les officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire, y compris les adjoints de sécurité, à procéder, sur réquisition écrite du procureur de la République, à des fins de recherche et de poursuite des actes de terrorisme, des infractions à la législation sur les armes ou de certains faits de trafics de stupéfiants, dans les lieux et pour la durée déterminés par le procureur, à des contrôles d'identité et à la visite des véhicules. C'était un outil efficace pour lutter contre le terrorisme.
    Le dispositif prévu par l'article 5 de ce projet, outre le fait que le procès-verbal ne soit pas systématiquement prévu, est selon nous trop général et imprécis. Or des termes flous sont souvent incompatibles avec la garantie des libertés individuelles. Les circonstances dans lesquelles les officiers et les agents de police judiciaire peuvent exercer ces missions de contrôle et de fouille ne sont pas assez encadrées selon nous. Cela dit, de tels contrôles ne nous choquent pas. Nous nous abstiendrons sur cet article, mais nous proposerons qu'un procès-verbal soit établi plus systématiquement.
    Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. J'ai souvent entendu dire ces derniers jours que l'opposition ne serait pas cohérente. Il y a quelques mois, après le 11 septembre 2001, nous étions dans un contexte particulier et nous avons éprouvé la nécessité de mettre en place, dans le cadre de la loi sur la sécurité quotidienne, des mesures permettant d'assurer la sécurité de nos concitoyens et de limiter autant que possible le risque terroriste dans notre pays. Nous étions parvenus à un accord dans cette assemblée et nous avions adopté des mesures permettant la fouille des véhicules en cas de présomption d'acte terroriste ou de trafic de stupéfiants, mais elles devaient être temporaires et une évaluation était prévue.
    Il faut que les choses soient très claires ici. Il ne me semble pas que la menace terroriste soit écartée en France et nous ne devons pas aujourd'hui relâcher notre attention. Donc, si l'on nous proposait de prolonger l'application des mesures prévues dans la loi sur la sécurité quotidienne en matière de lutte antiterroriste, nous serions d'accord, quitte à discuter de la période pendant laquelle elles devront s'appliquer et de la nécessité du rapport d'évaluation. Mais l'on nous propose aujourd'hui de les pérenniser dans la loi et de les élargir à d'autres domaines de la sécurité publique. On assiste donc à un glissement. Je proposerai dès lors des amendements au texte du Gouvernement.
    Mme la présidente. M. Le Roux, Mme David et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 232, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le II de l'article 5 :
    « II. - Après l'article 706-23 du code du procédure pénale, il est inséré un article 706-23-1 ainsi rédigé :
    « Art. 706-23-1. - Pour la recherche et la poursuite des actes de terrorisme visés par les articles 421-1 à 421-5 du code pénal, à toute heure du jour et de la nuit, les officiers de police judiciaire, assistés le cas échéant, des agents de police judiciaire et des agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l'article 21 du présent code peuvent, sur réquisitions écrites du procureur de la République, dans les lieux et pour la période de temps que ce magistrat détermine et qui ne peut excéder vingt-quatre heures, renouvelables sur décision expresse et motivée, procéder à la visite des véhicules, à l'exception de ceux destinés à l'habitation, circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public.
    « Pour l'application des dispositions du présent article, les véhicules en circulation ne peuvent être immobilisés que le temps strictement nécessaire au déroulement de la visite qui doit avoir lieu en présence du conducteur.
    « Par dérogation à l'article 57, lorsqu'elle porte sur un véhicule à l'arrêt ou en stationnement, la visite se déroule en présence, à défaut du conducteur ou du propriétaire, d'un témoin requis par l'officier ou l'agent de police judiciaire, en dehors des personnes relevant de son autorité. La présence d'un témoin n'est toutefois pas requise si la visite comporte des risques graves pour la sécurité des personnes et des biens.
    « En cas de saisies, les formalités mentionnées aux articles 56 et 56-I sont prescrites à peine de nullité.
    « Le procès-verbal, dressé ainsi qu'il est dit à l'article 66, mentionne le lieu, les dates et heures du début et de la fin de ces opérations. Il est signé par les personnes présentes ; en cas de refus ou en présence de risques graves, il en est fait mention au procès-verbal.
    « En l'absence d'infractions prévues aux articles 421-1 à 421-5 du code pénal, si le conducteur ou le propriétaire du véhicule le demande ainsi que dans le cas où la visite se déroule en leur absence, il est établi un procès-verbal mentionnant le lieu et les dates et heures du début et de la fin de ces opérations. Un exemplaire en est remis à l'intéressé et un autre est transmis sans délai au procureur de la République.
    « Les actes prévus au présent article ne peuvent, à peine de nullité, être effectués pour un autre objet que la recherche et la constatation des infractions visées au premier alinéa. »
    La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Nous proposons une nouvelle rédaction du code de procédure pénale pour tenir compte de la pérennisation des fouilles en cas d'actes de terrorisme. Nous considérons que c'est dans le titre XV intitulé « De la poursuite, de l'instruction et du jugement des actes de terrorisme », qu'il convient d'insérer des dispositions donnant toutes les garanties maintenant que nous sommes dans le cadre d'une procédure non plus dérogatoire, mais de droit commun. Un certain nombre de précautions doivent être prises.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cet article est très attendu par les forces de l'ordre.
    M. Bruno Le Roux. Ils disposent déjà de la possibilité d'intervenir !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Je ne comprends pas que vous puissiez même en discuter, monsieur Le Roux, car ce n'est pas un problème idéologique. En 1995, au lendemain des attentats perpétrés dans le métro à Paris, le ministre de l'intérieur de l'époque avait déjà proposé ce type de mesures : vous les aviez déférées devant le Conseil constitutionnel. Telle n'a pas été l'attitude de l'opposition, l'année dernière, au moment de l'examen de la loi sur la sécurité quotidienne dont vous étiez le rapporteur. Spontanément et sans discuter, nous avons, comme un seul homme, voté vos propositions car nous considérions, au lendemain du 11 septembre, qu'il existait des risques graves d'actes terroristes sur le territoire national et qu'il fallait donner à M. Vaillant et à l'ensemble des forces de l'ordre les moyens d'agir.
    Et voilà qu'aujourd'hui, et alors que ces risques ne sont pas moindres - ils sont même renforcés eu égard aux mouvements qui se développent partout dans le monde - vous voulez limiter les moyens d'action des forces de l'ordre ! Nous avons au contraire un devoir de vigilance absolue tandis que, tous les jours, dans le cadre des actions des GIR, sont démantelés des réseaux de trafic d'armes de guerre sur le territoire national. Il nous faut accentuer encore les moyens à mettre à la disposition des forces de l'ordre pour leur permettre de mener à bien leur mission. Monsieur Le Roux, il s'agit là d'une exigence de solidarité pour assurer la protection de nos concitoyens face aux risques qu'ils courent aujourd'hui. Je ne comprends vraiment pas votre attitude. En tout cas, la commission a décidé de rejeter cet amendement.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. En complément de ce que vient excellemment de dire le rapporteur, j'ajouterai que, si cet amendement était retenu, tout contrôle de véhicule qui déboucherait sur la constatation d'une infraction autre que terroriste, fragiliserait la procédure. Le délinquant pris à propos d'une procédure d'ouverture de coffre qui ne serait réservée qu'à la seule action antiterroriste pourrait en effet alléguer devant les tribunaux d'un détournement de procédure et faire annuler cette dernière. Nous aurions ainsi l'assurance de rendre plus complexe le travail des forces de l'ordre. Je suis certain que ce n'est pas ce que vous souhaitez, monsieur Le Roux, mais tel serait bel et bien la conséquence de cet amendement. Je suis sûr d'ailleurs que vous avez perçu une inquiétude réelle dans mon propos. Peut-être allez-vous convenir qu'il serait plus sage de retirer cet amendement.
    Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Est-il précisé dans cet amendement qu'il ne faut plus autoriser la fouille des coffres de voiture en cas de présomption d'acte terroriste ? Non ! De même, nous considérons qu'il faut pouvoir continuer à fouiller les voitures pour la recherche d'infractions à la législation sur les stupéfiants. La nullité des procédures incidentes ne saurait s'appliquer au trafic de stupéfiants. A cet égard, nous aimerions savoir, monsieur le ministre, même si le rapport d'évaluation n'est pas prêt, comment la police a utilisé cet article.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Oui.
    M. Bruno Le Roux. Certes, nous avons été protégés et il a dû servir à quelque chose. Mais je ne suis pas sûr qu'il ait beaucoup servi.
    En tout état de cause, les dispositions prévues à l'article 5 devront être utilisées avec discernement. En 1996, le Conseil constitutionnel avait considéré que le législateur avait raison de prendre en compte la spécificité d'une entreprise terroriste organisée. Il avait toutefois fait observer que cela ne pouvait pas engendrer la suppression des libertés et des droits fondamentaux des personnes. Il a ainsi marqué que l'on ne devait pas appliquer une législation faite pour lutter contre le terrorisme à des actes de droit commun sans rapport avec le terrorisme.
    Nous estimons donc qu'il faut continuer à pouvoir fouiller les coffres de voitures, mais que, dans la mesure où vous voulez rendre cette disposition pérenne, il faut prévoir un certain nombre de précautions juridiques de façon que les droits de la défense soient assurés. De même, nous pensons qu'il est utile de pouvoir fouiller les coffres de voitures en cas de présomption de trafic de stupéfiants. En revanche, ouvrir cette possibilité pour le vol et le recel risque d'entraîner une contrainte disproportionnée par rapport à l'objectif. Il nous semble en outre que cette disposition peut être à l'origine d'actions moins ciblées et moins réfléchies qu'en matière de terrorisme ou de lutte contre les stupéfiants, ces domaines nécessitant de la part des policiers un travail en amont qui les conduit ensuite à monter des opérations. Cette troisième qualification risque de donner lieu à des actions de police menées sur des critères statistiques, la loi des plus grands nombres. On peut procéder à des fouilles de véhicules pour une présomption de vol et de recel en se disant qu'on trouvera bien quelque chose. Et, comme il n'y a pas de nullité des procédures incidentes, on aura toujours quelque chose à dire ! Cette méthode ne me paraît pas bonne et je doute de son efficacité.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 232.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Estrosi, rapporteur, et M. Gérard Léonard ont présenté un amendement, n° 61, ainsi rédigé :
    « A la fin de la dernière phrase du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 78-2-2 du code de procédure pénale, substituer au mot : "particuliers, les mots : "graves pour la sécurité des personnes et des biens. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Par cet amendement, il s'agit de renforcer la sécurité juridique du dispositif.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 61.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. MM. Gerin, Brunhes, Braouezec et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 183, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi la première phrase du troisième alinéa du texte proposé pour l'article 78-2-2 du code de procédure pénale :
    « Il est établi un procès-verbal mentionnant le lieu et les dates et heures du début et de la fin de ces opérations. »
    Sur cet amendement, M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ont présenté deux sous-amendements n°s 403 et 404.
    Le sous-amendement n° 403 est ainsi rédigé :
    « A l'amendement n° 183, après le mot : "mentionnant, insérer les mots : "le résultat. »
    Le sous-amendement n° 404 est ainsi rédigé :
    « Compléter l'amendement n° 183 par la phrase suivante : "Il est signé par les personnes présentes ; en cas de refus ou en présence de risques graves, il en est fait mention au procès-verbal. »
    La parole est à M. André Gerin, pour soutenir l'amendement n° 183.
    M. André Gerin. Par cet amendement qui vise à rendre obligatoire l'établissement d'un procès-verbal, nous voulons exprimer une réserve sur l'article 5 et non pas notre opposition. En effet, l'article prévoit trois cas d'obligation. Par déduction, la non-demande et la non-découverte d'infraction ne rendent pas obligatoire l'établissement d'un procès-verbal pour l'officier ou l'agent de police judiciaire. Cet acte exceptionnel de fouille des véhicules et les raisons invoquées par l'officier de police judiciaire ne sont pas sous-estimées. Il me paraît important qu'aucun cas ne soit écarté de l'obligation d'élaborer un procès-verbal. A chaque fouille, un procès-verbal doit être établi.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Imposer de façon systématique la remise d'un procès-verbal risque d'entraîner une charge procédurale et matérielle incompatible avec l'efficacité des opérations, au demeurant engagées sur réquisition écrite du procureur de la République.
    M. Pierre Cardo. On veut la police au bureau ou dans la rue ?
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable.
    Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir le sous-amendement n° 403.
    Mme Martine Billard. Nous soutenons l'amendement de notre collègue M. Gerin. Nous considérons cependant qu'il faut aussi préciser le résultat de la fouille sur le procès-verbal. Certes, cela va alourdir les procédures, mais dans deux cas au moins c'est justifié.
    D'abord dans le cadre d'une suite de procédure. On peut en effet ne rien avoir trouvé dans le coffre d'une personne qui sera mise en cause par la suite. Il sera alors important de faire apparaître que le contrôle n'avait rien donné.
    Ensuite, par rapport à l'opinion publique. Etre contrôlé sur les boulevards extérieurs des grandes villes n'est pas très gênant. Il en va différemment lorsque le contrôle est effectué près d'une petite ville ou d'un village, là où la rumeur publique peut s'enfler très rapidement. Il peut être important pour des personnes de pouvoir prouver que le contrôle qu'elles ont subi n'a rien révélé. Plus généralement, cela permettra de rassurer tous ceux qui seront contrôlés.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Défavorable.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 403.
    (Le sous-amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Puis-je considérer, madame Billard, que vous avez également défendu le sous-amendement n° 404 ?
    Mme Martine Billard. Oui, madame la présidente.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Même avis que sur le sous-amendement précédent.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 404.
    (Le sous-amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 183.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Estrosi, rapporteur, a présenté un amendement, n° 62 rectifié, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'avant-dernier alinéa du texte proposé pour l'article 78-2-2 du code de procédure pénale :
    « Toutefois, la visite des véhicules spécialement aménagés à usage d'habitation et effectivement utilisés comme résidence ne peut être faite que conformément aux dispositions relatives aux perquisitions et visites domiciliaires. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Avec cet amendement, nous montrons,...
    M. Bruno Le Roux. Que vous savez évoluer par rapport à la jurisprudence !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... et cela devrait satisfaire M. Le Roux, notre volonté de protéger les personnes et les libertés individuelles. L'article 5 prévoit que les forces de l'ordre doivent faire appel à une personne extérieure pour servir de témoin lorsqu'il est procédé à l'ouverture et à la fouille d'un véhicule. Aux termes du texte initial, la présence d'une personne extérieure n'était toutefois pas requise si la visite comportait des risques particuliers. Avec l'amendement n° 61, nous avons précisé que ces risques devaient être « graves pour la sécurité des personnes et des biens ».
    Avec l'amendement n° 62 rectifié, nous voulons là aussi renforcer la sécurité juridique du dispositif en ajoutant que la visite des véhicules à usage d'habitation utilisés comme résidence effective ne peut être faite que conformément aux dispositions relatives aux perquisitions et visites domiciliaires. Monsieur Le Roux, vous devriez soutenir cet amendement qui va dans le sens de la protection des libertés individuelles.
    M. Jean-Pierre Blazy. Mais vous protégez les gens du voyage ! (Sourires.)
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    Mme la présidente. La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Je voterai cet amendement.
    Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Cela va sans doute faire sourire mais connaissant l'intelligence des personnages auxquels nous sommes parfois confrontés, il est peut-être utile de préciser « usage d'habitation permanent ». Des bricoleurs peuvent en effet aménager très provisoirement un véhicule pour éviter précisément d'être contrôlés.
    Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Cet amendement, qui vise à apporter un maximum de sécurité juridique à l'article 5, va dans le bon sens, en effet. Mais ne votant pas l'article, je ne voterai pas l'amendement non plus.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 62 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'article n° 5, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 5, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 5

    Mme la présidente. M. Le Roux, Mme David et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 233, ainsi libellé :
    « Après l'article 5, insérer l'article suivant :
    « Après l'article 706-27 du code de procédure pénale, il est inséré un article 706-27-1 ainsi rédigé :
    « Art. 706-27-1. - Pour la recherche et la poursuite des faits de trafic de stupéfiants visés par les articles 222-34 à 222-38 du code pénal, à toute heure du jour et de la nuit, les officiers de police judiciaire, assistés, le cas échéant, des agents de police judiciaire et des agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l'article 21 peuvent, sur réquisitions écrites du procureur de la République, dans les lieux et pour la période de temps que ce magistrat détermine et qui ne peut excéder vingt-quatre heures, renouvelables sur décision expresse et motivée, procéder à la visite des véhicules, à l'exception de ceux destinés à l'habitation, circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public.
    « Pour l'application des dispositions du présent article, les véhicules en circulation ne peuvent être immobilisés que le temps strictement nécessaire au déroulement de la visite qui doit avoir lieu en présence du conducteur.
    « Par dérogation à l'article 57, lorsqu'elle porte sur un véhicule à l'arrêt ou en stationnement, la visite se déroule en présence, à défaut du conducteur ou du propriétaire, d'un témoin requis, par l'officier ou l'agent de police judiciaire, en dehors des personnes relevant de son autorité.
    « En cas de saisies, les formalités mentionnées aux articles 56 et 56-1 sont prescrites à peine de nullité.
    « Le procès-verbal, dressé ainsi qu'il est dit à l'article 66, mentionne le lieu, les dates et heures du début et de la fin de ces opérations. Il est signé par les personnes présentes ; en cas de refus, il en est fait mention au procès-verbal.
    « En l'absence d'infractions prévues aux articles 222-34 à 222-38 du code pénal, si le conducteur ou le propriétaire du véhicule le demande ainsi que dans le cas où la visite se déroule en leur absence, il est établi un procès-verbal mentionnant le lieu et les dates et heures du début et de la fin de ces opérations. Un exemplaire en est remis à l'intéressé et un autre est transmis sans délai au procureur de la République.
    « Les actes prévus au présent article ne peuvent, à peine de nullité, être effectués pour un autre objet que la recherche et la constatation des infractions visées au premier alinéa. »
    La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Je ne reprendrai pas l'explication que j'ai donnée pour les actes terroristes.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Rejet.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis que la commission.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 233.
    (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 6

    Mme la présidente. « Art. 6. - Après l'article 78-2-2 du code de procédure pénale, il est inséré un article 78-2-3 ainsi rédigé :
    « Art. 78-2-3. - Les officiers de police judiciaire, assistés, le cas échéant, des agents de police judiciaire et des agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l'article 21, peuvent procéder à la visite des véhicules circulant ou arrêtés sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public lorsqu'il existe à l'égard du conducteur ou d'un passager une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'il a commis, comme auteur ou comme complice, un crime ou un délit flagrant ; ces dispositions s'appliquent également à la tentative.
    « Les dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article 78-2-2 sont applicables au présent article. »
    M. Le Roux, Mme David et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 236, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 6 :
    « Après l'article 54 du code de procédure pénale, il est inséré un article 54-1 ainsi rédigé :
    « Art. 54-1. - En cas de crime ou de délit flagrants, à toute heure du jour et de la nuit, les officiers de police judiciaire assistés, le cas échéant, des agents de police judiciaire et des agents de police judiciaire adjoints mentionnés au 1°, 1° bis et 1° ter de l'article 21 peuvent procéder à la visite des véhicules, à l'exception de ceux destinés à l'habitation, circulant ou arrêtés sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public dès lors que les conducteurs ou les passagers paraissent avoir participé au crime ou au délit ou qu'ils paraissent détenir des pièces ou objets relatifs aux faits incriminés.
    « En cas de saisies, les formalités prévues aux articles 56 et 56-1 sont prescrites à peine de nullité. Par dérogation à l'article 57, lorsqu'elle porte sur un véhicule à l'arrêt ou en stationnement, la visite se déroule en présence du conducteur ou du propriétaire du véhicule ou, à défaut, d'un témoin requis à cet effet par l'officier ou l'agent de police judiciaire et qui ne relève pas de son autorité administrative. Cette formalité est prescrite à peine de nullité. Le procès-verbal, dressé ainsi qu'il est dit à l'article 66, mentionne le lieu, les dates et heures du début et de la fin de ces opérations. Il est signé par les personnes présentes ; en cas de refus, il en est fait mention au procès-verbal. »
    La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Il est proposé dans cet amendement que la procédure de visite de véhicule en présence de crime ou délit flagrant s'insère, sous un article 54-1, dans le chapitre Ier « Des crimes et délits flagrants » du titre II du livre Ier du code de procédure pénale. La « visite de véhicule » n'a pas à figurer dans le chapitre III de ce même livre, intitulé « Des contrôles, des vérifications et des relevés d'identité », comme le prévoit le projet de loi.
    La visite d'un véhicule en présence d'un crime ou d'un délit flagrant est autorisée depuis longtemps par la jurisprudence. Le véhicule n'a jamais été assimilé à un domicile ; toutefois sa visite doit bénéficier d'un régime juridique proche de celui de la fouille. C'est d'ailleurs ce qu'énonce la chambre criminelle dans un arrêt du 8 novembre 1979. Notre amendement s'inscrit dans cette ligne. Il témoigne du souci de ne pas donner à « la visite de véhicule » des garanties identiques à celles qui sont prévues pour la perquisition : possibilité en présence d'un simple délit, absence des contraintes horaires de l'article 59 du code de procédure pénale, possibilité de requérir un seul témoin en l'absence du propriétaire ou du conducteur, contrairement à ce que prévoit l'article 57.
    De plus, cette rédaction serait cohérente avec la décision 96-377 du 16 juillet 1996 du Conseil constitutionnel sur la loi tendant à renforcer la répresssion du terrorisme et les atteintes aux personnes. En votant cet amendement, nous améliorerons la sécurité juridique du dispositif.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Qui pourrait contester le droit d'un policier à faire ouvrir le coffre d'un véhicule, dès lors qu'il a une raison de soupçonner que son conducteur vient de commettre un délit ou un crime ? Cet amendement, qui s'inscrit toujours dans la même logique, amoindrit considérablement le dispositif. Il témoigne d'une méfiance incroyable à l'égard des forces de l'ordre.
    M. Bruno Le Roux. Non, nous voulons les protéger !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. En outre, on relève des positions contradictoires sur vos bancs, monsieur Le Roux.
    M. André Gerin. Vous êtes excessif, monsieur le rapporteur !
    M. Guy Geoffroy. Mais non ! Chez les socialistes, les contradictions sont systématiques !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Vous admettez ici que le véhicule n'est pas assimilable à un domicile. Mais un peu plus loin, à l'amendement n° 235, M. Montebourg affirme au contraire qu'un véhicule peut parfaitement être assimilé à un domicile. Nous notons donc, sur vos bancs, deux positions tout à fait contradictoires.
    Au total, il est surprenant de proposer une mesure encore plus restrictive que celle qui a été adoptée dans la loi sur la sécurité quotienne dont vous étiez le rapporteur. D'un amendement à l'autre, vous semblez vous reprochez à vous-même des dispositions que vous aviez inscrites dans le droit.
    M. Bruno Le Roux. Ce ne sont pas vraiment des arguments !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. En tout cas, nous rejetons cet amendement.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 236.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, n°s 184 et 325, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 184, présenté par MM. Gerin, Brunhes, Braouezec et les membres du groupe des député-e-s communistes est ainsi rédigé :
    « Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article 78-2-3 du code de procédure pénale, substituer aux mots : "une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner, les mots : "des indices graves et concordants faisant présumer. »
    L'amendement n° 325, présenté par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère est ainsi rédigé :
    « Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article 78-2-3 du code de procédure pénale, substituer aux mots : "une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner, les mots : "un indice faisant présumer. »
    La parole est à M. André Gerin, pour soutenir l'amendement n° 184.
    M. André Gerin. Comme je l'ai indiqué à l'instant, les seules « raisons plausibles de soupçonner » ne doivent pas suffire à motiver une fouille de véhicules. Ainsi proposons-nous l'expression : « des indices graves et concordants faisant présumer. »
    Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l'amendement n° 325.
    Mme Martine Billard. Notre amendement n° 325 est du même esprit. Admettre que certains contrôles sont effectués, passez-moi l'expression, « à la tête du client », ce n'est pas une mise en cause des forces de police mais un état de fait, et qui découle de préjugés que nous avons tous. Reconnaissez qu'il est très souvent plus facile d'entrer dans un endroit réservé si l'on est bien habillé et très présentable : nous-mêmes avons pu le constater au tout début de cette législature, lorsqu'un individu a réussi à s'introduire dans notre hémicycle : jamais il n'y serait arrivé si il avait été mal habillé. On l'aurait arrêté avant.
    M. Pierre Cardo. On l'aurait arrêté parce que c'est le règlement, et non parce qu'il était mal habillé !
    Mme Martine Billard. Qu'on le veuille ou non, les préjugés sont une réalité dont nous sommes tous responsables. Il est donc de notre rôle de parlementaires de préciser au maximum les termes de la loi afin de rendre le cadre incontestable et parer à tout risque de remise en cause ultérieure.
    Permettez-moi de vous raconter un exemple vécu : je me suis fait contrôler, lorsque j'étais plus jeune, en mobylette. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) On m'a soupçonnée d'un vol dans un supermarché. Pourquoi ? Parce que c'était l'hiver et que je portais un casque. Or, à l'époque, le port du casque en mobylette n'était pas obligatoire. C'était donc suspect. Et, croyez-moi, se faire ainsi contrôler par des gens en armes, ce n'est pas très agréable. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Gérard Léonard. Il ne faut tout de même pas exagérer !
    M. Guy Geoffroy. Ce n'est pas sérieux !
    Mme Martine Billard. C'est très sérieux parce que c'est vécu. De nombreuses personnes en font chaque jour l'expérience. Et pour la connaître, il ne faut pas circuler en voiture de fonction, mais plutôt en transport en commun, comme n'importe quel citoyen,...
    M. Charles Cova. C'est ridicule !
    Mme Martine Billard. ... et ce n'est peut-être pas le cas de tout le monde ici !
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Défavorable !
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis.
    Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Je ne veux pas revenir sur cet amendement, mais sur quelque chose que je commence à entendre un peu trop souvent. Les amendements que nous déposons, monsieur Estrosi, proposent des moyens d'action certes différents de ceux que vous prévoyez ; reste que nous les avons élaborés et travaillés pour assurer une certaine sécurité juridique et limiter au minimum le risque de recours. Pour cela, nous avons consulté non seulement des juristes, mais également des policiers que ces considérations juridiques intéressent pour mener aux mieux leurs interventions.
    Voilà pourquoi, monsieur Estrosi, je n'accepterai plus que l'on doute du soutien que nous apportons aux forces de l'ordre et que l'on mette en cause notre appréciation sur la manière dont elles fonctionnent. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Guy Geoffroy. Allons !
    M. Bruno Le Roux. Je me suis refusé pour l'instant à toute obstruction, madame la présidente. Mais désormais, à chaque fois que l'on mettra en cause l'attitude de l'opposition en doutant de la confiance témoignée à l'égard des forces de police, je demanderai une suspension de séance. Systématiquement ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    De nombreux députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Chantage !
    M. Bruno Le Roux. Non ! Car de tels propos sont inacceptables et je n'accepte plus de les entendre dans cet hémicycle. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Nous avons prouvé la considération dans laquelle nous tenions les forces de police durant toutes les années où nous étions aux responsabilités. C'est vous qui, aujourd'hui, leur imposez des conditions de travail parfois insupportables...
    M. Christian Estrosi, rapporteur. C'est scandaleux !
    M. Bruno Le Roux. ... et qui risquent de poser bon nombre de problèmes. Certains viennent à s'en plaindre dans des articles de presse.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. C'est inacceptable !
    M. Bruno Le Roux. Eh bien, vous l'accepterez ! Je n'ai jamais porté de jugement sur la façon dont vous considériez les forces de l'ordre, faites-en de même.
    M. Charles Cova. Nous, on les considère bien !
    M. Bruno Le Roux. A chaque fois que nous entendrons de tels propos, nous demanderons systématiquement une suspension de séance afin que vous vous calmiez ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
    M. Gérard Léonard. Qu'est-ce que c'est que ce chantage ?
    Mme la présidente. Seul M. le ministre a la parole !
    M. Jean-Marie Le Guen. Si la majorité veut bien le laisser parler !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, nul ne doit faire de procès d'intention. C'est une affaire actée. De votre côté, renoncez à accuser ou à soupçonner le Gouvernement de provoquer, par son action, des bavures et personne ne fera plus de procès à personne.
    M. Bruno Le Roux. Je ne l'ai jamais dit !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je vous l'accorde et je ne prends personne à partie. Je comprends très bien que l'on ait l'épiderme sensible quand il s'agit d'affaires de convictions. Mais évitons-nous les procès d'intention.
    M. Bruno Le Roux. Soit.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je comprends votre réaction, comprenez la mienne hier, lorsqu'un des membres de votre groupe a très clairement indiqué que les bavures augmentaient à cause de l'action du Gouvernement.
    M. Gérard Léonard. Exactement !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Tenons-nous-en là : un partout, la balle au centre, et reprenons le débat dans de bonnes conditions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Gérard Léonard. Et pas de chantage !
    Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Je conçois tout à fait, monsieur Le Roux, que vous cherchiez, comme nous tous, à encadrer ce droit de perquisition des véhicules qui depuis des années pose problème. Cela ne remonte pas à cette année, mais à quinze ans au moins. Les mentalités ont évolué et si nous ne le faisons pas aujourd'hui, nous allons, j'ose le dire, déchaîner la colère d'une partie de notre population. Je le vis chez moi : on sait très bien où cela se passe, on sait qui c'est, on sait où c'est et on s'entend répondre que personne ne peut rien faire, faute de moyens juridiques !
    J'ai noté que la commission, à travers son rapporteur, s'est attachée au même effort d'encadrement que vous : plutôt que de risque particulier, elle a préféré parler de risque grave. Vous aussi, de votre côté, cherchez à préciser le texte et personne ne vous en fait le procès. Mais je vous ferai observer que vous vous heurtez aux mêmes difficultés. Reconnaissez avec moi que vos précisions, « paraissant avoir participé au crime ou au délit » ou « paraissant détenir des pièces »,...
    M. Pierre Cardo. « Paraissant » !
    M. Guy Geoffroy. Ce n'est pas juridiquement très sûr !
    M. Pascal Clément, président de la commission. ... sont pour le moins, soyons charitables, hypersubjectives ! Autrement dit, on ne réglera jamais totalement le problème juridique ; il y aura toujours, fatalement, une relative faiblesse. D'un côté il y a les considérations sociales, de l'autre l'exigence de moyens juridiques. Et si, au bout du compte, il devait y avoir des abus, les tribunaux trancheront. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Pierre Cardo. Notre démocratie le permet encore !
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 184.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 325.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Estrosi, rapporteur, a présenté un amendement, n° 63, ainsi rédigé :
    « Dans le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 78-2-3 du code de procédure pénale, substituer aux mots : "et troisième, les mots : ", troisième et quatrième. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cet amendement vise simplement à renforcer la sécurité juridique du dispositif.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 63.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. M. Estrosi a présenté un amendement, n° 467, ainsi rédigé :
    « Dans le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 78-2-3 du code de procédure pénale, substituer au mot : "au les mots : "aux dispositions du. »
    La parole est à M. Christian Estrosi.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Amendement purement rédactionnel.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 467.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 6, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 6, ainsi modifié, est adopté.)

Article 7

    Mme la présidente. « Art. 7. - Après l'article 78-2-2 du code de procédure pénale, il est inséré un article 78-2-4 ainsi rédigé :
    « Art. 78-2-4. - Pour prévenir une atteinte grave à la sécurité des personnes et des biens, les officiers de police judiciaire et, sur l'ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et les agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l'article 21 peuvent procéder non seulement aux contrôles d'identité prévus au septième alinéa de l'article 78-2 mais aussi, avec l'accord du conducteur ou, à défaut, sur instructions du procureur de la République communiquées par tous moyens, à la visite des véhicules circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public.
    « Dans l'attente des instructions du procureur de la République, le véhicule peut être immobilisé pour une durée qui ne peut excéder trente minutes.
    « Les deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article 78-2-2 sont applicables aux dispositions du présent article. »
    M. Le Roux, Mme David et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 237, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 7 :
    « Après l'article 706-23 du code de procédure pénale, il est inséré un article 706-23-1 ainsi rédigé :
    « Art. 706-23-1. - Pour prévenir une des infractions prévues aux articles 421-1 à 421-5 du code pénal, à toute heure du jour et de la nuit, les officiers de police judiciaire, assistés, le cas échéant, des agents de police judiciaire et des agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l'article 21 peuvent procéder, avec l'accord du conducteur ou, à défaut, sur instructions du procureur de la République communiquées par tous moyens, à la visite des véhicules, n'étant pas assimilables à un domicile, circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public.
    « Dans l'attente des instructions du procureur de la République, le véhicule peut être immobilisé pour une durée qui ne peut excéder trente minutes.
    « Pour l'application des dispositions du présent article, les véhicules en circulation ne peuvent être immobilisés que le temps strictement nécessaire au déroulement de la visite qui doit avoir lieu en présence du conducteur.
    « Par dérogation à l'article 57, lorsqu'elle porte sur un véhicule à l'arrêt ou en stationnement, la visite se déroule en présence, à défaut du conducteur ou du propriétaire, d'un témoin requis par l'officier ou l'agent de police judiciaire, en dehors des personnes relevant de son autorité. La présence d'un témoin n'est toutefois pas requise si la visite comporte des risques particuliers.
    « En cas de saisies, les formalités mentionnées aux articles 56 et 56-1, sont prescrites à peine de nullité.
    « Le procès-verbal, dressé ainsi qu'il est dit à l'article 66, mentionne le lieu et les dates et heures du début et de la fin de ces opérations. Il est signé par les personnes présentes ; en cas de refus ou en présence de risques particuliers, il en est fait mention au procès-verbal.
    « En l'absence d'infractions prévues aux articles 421-1 à 421-5 du code pénal, si le conducteur ou le propriétaire du véhicule le demande ainsi que dans le cas où la visite se déroule en leur absence, il est établi un procès-verbal mentionnant le lieu et les dates et heures du début et de la fin de ces opérations. Un exemplaire en est remis à l'intéressé et un autre est transmis sans délai au procureur de la République.
    « Les actes prévus au présent article ne peuvent, à peine de nullité, être effectués pour un autre objet que la recherche et la constatation des infractions visées au premier alinéa. »
    La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Cet amendement a déjà été défendu.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pascal Clément, président de la commission. Repoussé.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 237.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Les amendements n°s 34 de M. Mourrut et 377 de M. Luca ne sont pas défendus.
    Je mets aux voix l'article 7.
    (L'article 7 est adopté.)

Article 7 bis

    Mme la présidente. « Art. 7 bis. - L'article 414 du code des douanes est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « La peine d'emprisonnement ci-dessus est doublée lorsque les faits de contrebande, d'importation ou d'exportation portent sur des marchandises dangereuses pour la santé ou la sécurité publique, ou lorsque les faits de contrebande, d'importation ou d'exportation ont été commis en bande organisée. »
    M. Dominique Dord a présenté un amendement, n° 355, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le dernier alinéa de l'article 7 bis :
    « La peine d'emprisonnement est portée à une durée maximale de dix ans et l'amende peut aller jusqu'à cinq fois la valeur de l'objet de la fraude, soit lorsque les faits de contrebande, d'importation ou d'exportation portent sur des marchandises dangeureuses pour la santé, la moralité ou la sécurité publiques, dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé des douanes, soit lorsqu'ils sont commis en bande organisée. »
    Sur cet amendement, M. Mamère, Mme Billard et M. Cochet ont présenté un sous-amendement, n° 407, ainsi rédigé :
    « Dans le dernier alinéa de l'amendement n° 355, substituer aux mots : "la moralité les mots : "les finances publiques. »
    L'amendement n° 355 est-il défendu ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Il est défendu, madame la présidente, et la commission l'a accepté, car cet amendement, en renforçant les sanctions douanières applicables à certaines infractions graves, va dans le sens d'une harmonisation des peines encourues sur le fondement du code pénal.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir le sous-amendement n° 407.
    Mme Martine Billard. Il s'agit d'étendre les possibilités de répression au blanchiment d'argent.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Pascal Clément, président de la commission. Défavorable.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 407.
    (Le sous-amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 355.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 7 bis, modifié par l'amendement n° 355.
    (L'article 7 bis, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 7 bis

    Mme la présidente. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 430, ainsi libellé :
    « Après l'article 7 bis, insérer l'article suivant :
    « Le a du 3 de l'article 324 du code des douanes est ainsi rédigé :
    « Le procès-verbal peut être rédigé au lieu de dépôt des objets saisis ou au lieu de la constatation de l'infraction.
    « Il peut être également rédigé dans les locaux de police, au siège de la brigade de gendarmerie, au bureau d'un fonctionnaire des finances, ou à la mairie du lieu. »
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Les locaux de police ne sont pas mentionnés parmi les lieux possibles de rédaction des procès-verbaux de saisie douanière. Il pourrait en découler des problèmes lorsque la police et la douane agissent ensemble. D'où cet amendement, qui a pour but d'éviter tout risque d'annulation de procédure pour ce seul motif.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Avis favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 430.
    (L'amendement est adopté.)

Article 8

    Mme la présidente. « Art. 8. - La seconde phrase du premier alinéa de l'article 166 du code de procédure pénale est ainsi rédigée : "Les experts signent leur rapport et mentionnent les noms et qualités des personnes qui les ont assistés, sous leur contrôle et leur responsabilité, pour la réalisation des opérations jugées par eux nécessaires à l'exécution de la mission qui leur a été confiée. »
    Je mets aux voix l'article 8.
    (L'article 8 est adopté.)

Après l'article 8

    Mme la présidente. Je donne lecture de l'intitulé du chapitre III :
    « Chapitre III. - Dispositions relatives aux traitements automatisés d'informations. »
    M. Montebourg a présenté un amendement, n° 238, ainsi libellé :
    « Après l'article 8, insérer l'article suivant :
    « Après le premier alinéa de l'article 434-1 du code pénal, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « Est puni des mêmes peines, toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire, ayant manqué de façon caractérisée à l'obligation de l'article 40 du code de procédure pénale. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour soutenir cet amendement.
    M. Jean-Pierre Blazy. Eu égard à la nécessité - sur laquelle nous sommes tous d'accord - de lutter contre la délinquance, il convient de responsabiliser chaque fonctionnaire, mais également les membres des autorités administratives indépendantes. Or si l'article 40 du code de procédure pénale fait obligation à tout fonctionnaire de dénoncer tout crime ou délit dont il aurait eu connaissance, le manquement à cette obligation n'est pas sanctionné. Il n'est pas question de reprendre le débat sur la méfiance ou la défiance, mais simplement de préciser les choses.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Mes chers collègues de la majorité, allons-nous devoir subir pendant toute cette séance le terrorisme intellectuel du groupe socialiste ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Pierre Blazy. Ne recommencez pas ! Nous allons demander une suspension de séance !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Aurons-nous droit à une suspension de séance à chaque fois que j'utiliserai le mot « méfiance » ou « défiance » ? Ce mot doit-il être rayé du vocabulaire ? Moi, je ne me laisserai pas terroriser. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Est-ce à dire que le ministre lui-même se serait laissé terroriser ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Comment qualifier cet amendement présenté par M. Montebourg...
    M. Guy Geoffroy. Où est-il ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... et défendu par M. Blazy, qui indique qu'« est punie des mêmes peines toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire ayant manqué de façon caractérisée à l'obligation de l'article 40 du code de procédure pénale » ? Je laisse à chacun le soin d'en apprécier le contenu. Le sentiment que j'ai exprimé à plusieurs occasions depuis le début de ce débat est constant et je le maintiens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Pierre Blazy. Ce n'est pas clair !
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. En complément des explications du rapporteur,...
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est nécessaire ! On n'a rien compris !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... je ferai remarquer que bien des orateurs du groupe socialiste et de l'opposition ont maintes fois reproché au Gouvernement de prévoir une législation à leurs yeux inutile à bien des égards. Or c'est précisément le cas ici, dans la mesure où le délit dit de non-dénonciation de crime ou de délit est précisément prévu par le code pénal.
    M. Jean-Pierre Blazy. Mais il n'est pas puni !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Autrement dit, vous êtes en train de reprocher au Gouvernement de faire l'inverse de ce que vous lui reprochiez hier ! A vous entendre, nous légiférions trop, et c'est vous-même qui me demandez aujourd'hui de prévoir un article superfétatoire !
    En outre, monsieur Blazy, vous rendez-vous compte de la pression que vous ferez peser sur les épaules de tous les fonctionnaires ? En tant que ministre du budget, il m'est arrivé de devoir me plier aux obligations de l'article 40. J'ai même eu à m'en expliquer en tant que témoin devant le juge Vichnievsky dans l'instruction sur le financement d'un parti politique de l'opposition d'alors. Si jamais l'article 40 était assorti d'une sanction pénale, que feront les fonctionnaires face à une telle pression ? Ils chercheront à se protéger.
    M. Jean-Marie Le Guen. Bien sûr.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Vous le savez très bien, monsieur Blazy, chacun peut le comprendre.
    M. Jean-Marie Le Guen. Ils sortiront le parapluie !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je ne voulais pas employer cette expression. Mais imaginez la pression sur chaque fonctionnaire, quelle que soit son administration, s'il sait - tenez-vous bien, monsieur Le Guen - qu'il risque la même peine que celui qu'il n'a pas dénoncé ! Imaginez le nombre de procédures qui s'ensuivront au titre de l'article 40 du code de procédure pénale !
    Je n'ai pas voulu vous gêner, monsieur Blazy, mais seulement rappeler que nous devons agir en législateurs raisonnables et responsables.
    M. Jean-Marie Le Guen. Dans ce domaine, vous êtes raisonnable ; dans d'autres, moins.
    M. Charles Cova. Mais M. Montebourg est-il responsable ?
    M. Guy Geoffroy. Il n'a même pas eu le courage de venir défendre lui-même son propre amendement !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. En l'occurrence, monsieur Le Guen, il s'agit d'un amendement de M. Montebourg. Honnêtement, je crois vraiment que nul ne peut faire reposer une telle responsabilité sur les épaules des fonctionnaires, quelle que soit leur administration.
    M. Charles Cova. Il ne fallait pas attendre autre chose de la part de M. Montebourg !
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 238.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Estrosi, rapporteur, et M. Gérard Léonard ont présenté un amendement, n° 67, ainsi libellé :
    « Après l'article 8, insérer l'article suivant :
    « Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
    « I. - Il est inséré après l'article 57 un article 57-1 ainsi rédigé :
    « Art. 57-1. - Les officiers de police judiciaire ou, sous leur responsabilité, les agents de police judiciaire, peuvent, au cours d'une perquisition effectuée dans les conditions prévues par le présent code, accéder par un système informatique implanté sur les lieux où se déroule la perquisition à des données intéressant l'enquête en cours et stockées dans ledit système, dans un autre système informatique ou dans une autre partie de celui-ci, dès lors que ces données sont accessibles à partir du système initial ou disponibles pour le système initial.
    « S'il est préalablement avéré que ces données, accessibles à partir du système initial ou disponibles pour le système initial, sont stockées dans un autre système informatique ou dans une autre partie de celui-ci située en dehors du territoire national, elles sont recueillies par l'officier de police judiciaire, sous réserve des conditions d'accès prévues par les engagements internationaux en vigueur.
    « Les données auxquelles il aura été permis d'accéder dans les conditions prévues par le présent article peuvent être copiées sur tout support. Les supports de stockage informatique peuvent être saisis et placés sous scellés dans les conditions prévues par le présent code. »
    « II. - Il est inséré après l'article 76-1 un article 76-2 ainsi rédigé :
    « Art. 76-2. - L'officier de police peut pour les nécessités de l'enquête, dans les conditions prévues à l'article 76, recourir aux opérations prévues par l'article 57-1. »
    « III. - Il est inséré après l'article 97 un article 97-1 ainsi rédigé :
    « Art. 97-1. - L'officier de police judiciaire, peut, pour les nécessités de l'exécution de la commission rogatoire, procéder aux opérations prévues par l'article 57-1. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cet amendement est particulièrement important.
    La révolution numérique n'a pas seulement bouleversé les économies et soufflé le chaud et le froid sur les bourses du monde entier. Elle a aussi dopé la délinquance qui sait tirer des avantages du réseau informatique. De nouveaux délits ont surgi, menaçant autant les individus, les entreprises que les Etats. Apparition de nouveaux délits, et donc de nouvelles difficultés pour les forces de l'ordre et pour la justice.
    En matière de ciminalité informatique ou de criminalité informatisée - que l'on nomme usuellement « cybercriminalité » -, dès lors que le recours à l'appareil répressif est décidé par la victime ou par le ministère public, une réalité classique s'impose encore inévitablement : le droit est l'une des expressions de la souveraineté des Etats et, en ce sens, il a une dimension territoriale.
    Or l'Internet s'affranchit de toute contrainte territoriale. En effet, en matière pénale, le juge d'instruction et la police judiciaire cherchent classiquement et principalement à localiser et à identifier l'auteur d'une infraction et à préserver les éléments de preuve pour matérialiser l'infraction qui peuvent se trouver sur le territoire d'un autre Etat.
    Appréhender les comportements délictueux sur les réseaux se heurte à trois contraintes : l'anonymat qui peut très efficacement s'organiser sur les réseaux, la volatilité des informations - possibilité de modifier et de supprimer des éléments de preuve quasi instantanément est inhérente à leur nature numérique - et, enfin, les comportements délictuels qui revêtent très souvent un caractère transnational.
    Face à ces contraintes, une harmonisation internationale du droit et des procédures ainsi qu'une étroite coopération judiciaire sont inévitables et particulièrement nécessaires face à une cybercriminalité de plus en plus organisée et internationalisée.
    Tel est l'objectif que les Etats membres du Conseil de l'Europe se sont fixé, conformément aux bases qui ont été définies par le G 8.
    Lors du sommet du G 8 de Paris sur la cybercriminalité, en mai 2000, le Président de la République a évoqué le « besoin d'un Etat de droit international, un cadre juridique universel à la mesure du caractère mondial de l'Internet. Un cadre qui, dans le respect des souverainetés, définisse les infractions soumises et fixe les procédures admises pour les établir et les réprimer. »
    C'est précisément sur cette base que se négocient les termes de la Convention de l'Europe qui aura une vocation universelle et que sera franchi un palier dans la construction de cet « Etat de droit international ».
    La commission propose, par cette précision, de conformer notre législation à la convention du Conseil de l'Europe sur la cybercriminalité, convention que la France a signée mais pas encore ratifiée.
    Il faut savoir, mes chers collègues, que, en pratique, nos forces de l'ordre sont quasi impuissantes pour remonter des réseaux de cybercriminalité. Or en matière de trafic d'armes et de stupéfiants, en matière de blanchiment d'argent sale, de pédophilie et de prostitution, l'Internet et la cybercriminialité sont de plus en plus utilisés.
    Aujourd'hui, si un officier de police judiciaire veut faire une perquisition, sur commission rogatoire d'un juge ou réquisition d'un procureur, il ne peut la faire que chez un usager d'un système de cybercriminalité. Si celui-ci est en réseau avec vingt-quatre autres sites et vingt-quatre autres usagers de ce réseau, il est obligé de faire vingt-cinq perquisitions ! C'est à peu près impossible. Les OPJ ont donc les plus grandes difficultés à démanteler ces réseaux ou au moins à leur porter atteinte.
    Désormais, avec l'amendement que vous propose la commission des lois, il suffira de faire une seule perquisition pour pouvoir, en boucle, mettre hors d'état de nuire l'ensemble d'un réseau et des sites qui sont dans ce réseau.
    Je remercie la commission des lois pour le travail important qu'elle a réalisé afin de me permettre de vous proposer d'introduire cela dans ce texte.
    M. Gérard Léonard. Très bien !
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Avis favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 67.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. M. Estrosi, rapporteur, et M. Gérard Léonard ont présenté un amendement, n° 68, troisième rectification, ainsi libellé :
    « Après l'article 8, insérer l'article suivant :
    « Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
    « I. - Il est inséré après l'article 60 un article 60-1 ainsi rédigé :
    « Art. 60-1. - Les organismes publics ou les personnes morales de droit privé, à l'exception de ceux visés au deuxième alinéa de l'article 31 et à l'article 33 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, mettent à disposition de l'officier de police judiciaire, intervenant sur autorisation du procureur de la République, les informations utiles à la manifestation de la vérité, à l'exception de celles protégées par un secret prévu par la loi, contenues dans le ou les systèmes informatiques ou traitements de données nominatives qu'ils administrent.
    « L'officier de police judiciaire, intervenant sur réquisition du procureur de la République préalablement autorisé par ordonnance du juge des libertés et de la détention, peut requérir des opérateurs de télécommunications, et notamment ceux mentionnés à l'article 43-7 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, de prendre, sans délai, toutes mesures propres à assurer la préservation, pour une durée ne pouvant excéder un an, du contenu des informations consultées par les personnes utilisatrices des services fournis par les opérateurs.
    « Les organismes ou personnes visés au présent article rendent les informations requises accessibles par voie télématique ou informatique dans les meilleurs délais.
    « Le non-respect par les organismes publics ou les personnes morales concernés des dispositions prévues au présent article est puni d'une amende de 3 750 euros. Les personnes morales peuvent également être déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues par les articles 131-38 et 131-39 du code pénal.
    « Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, détermine les catégories d'organismes visés au premier alinéa du présent article, ainsi que les modalités d'interrogation, de transmission et de traitement des informations requises. »
    « II. - Il est inséré, après l'article 77-1, un article 77-1-1 ainsi rédigé :
    « Art. 77-1-1. - Les dispositions de l'article 60-1 sont applicables aux enquêtes menées en application des articles du présent chapitre. »
    « III. - Il est inséré, après l'article 151, un article 151-1 ainsi rédigé :
    « Art. 151-1. - Pour les nécessités de l'exécution de la commission rogatoire, l'officier de police judiciaire peut réquérir des organismes publics ou des personnes morales de droit privé mentionnées au premier alinéa de l'article 60-1 de mettre à sa disposition les informations mentionnées à cet alinéa. Sur instructions du juge d'instruction, l'officier de police judiciaire peut également requérir des opérateurs de télécommunications, et notamment ceux mentionnés à l'article 43-7 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, de prendre, sans délai, toutes mesures propres à assurer la préservation des données visées au deuxième alinéa de l'article 60-1. Les organismes ou personnes concernés rendent les informations requises accessibles par voie télématique ou informatique dans les meilleurs délais. Les dispositions du quatrième alinéa de l'article 60-1 sont applicables. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Complément de l'amendement n° 67, l'amendement n° 68, 3e rectification, tend à accélérer la mise à disposition des données.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Avis favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 68, troisième rectification.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Je suis saisie de six amendements identiques n°s 66, 13 rectifié, 14 rectifié, 15 rectifié, 16 rectifié et 195.
    L'amendement n° 66 est présenté par M. Estrosi, rapporteur, M. Gérard Léonard et Mme Tabarot ; l'amendement n° 13 rectifié est présenté par M. Vanneste ; l'amendement n° 14 rectifié est présenté par M. Cova ; l'amendement n° 15 resctifié est présenté par M. Fenech ; l'amendement n° 16 rectifié est présenté par Mme Morano ; l'amendement n° 195 est présenté par M. Lucas.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Après l'article 8, insérer l'article suivant :
    « La dernière phrase du premier alinéa de l'article 63-1 du code de proédure pénale est supprimée. »
    La parole est à M. le rapporteur pour soutenir l'amendement n° 66.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Un certain nombre de députés, membres ou non de la commission des lois, dont je tiens à rappeler les noms, M. Léonard, Mme Tabarot, MM. Vanneste, Cova, Fenech, Mme Morano, M. Luca et Mme Boutin, avaient déposé des amendements identiques, que la commission des lois a décidé d'adopter. Ils portent sur une des dispositions qui ont le plus défrayé la chronique lors du vote de la loi de Mme Guigou sur la présomption d'innocence ; elle imposait aux officiers de police judiciaire de notifier à la personne placée en garde à vue son « droit au silence ».
    Cette disposition a été ressentie comme particulièrement humiliante par l'ensemble de nos policiers et gendarmes. Et je salue le travail des commissaires qui ont tenu à rendre à nos forces de l'ordre toute leur dignité en proposant de la supprimer.
    Nous pouvons tous comprendre, en effet, que, lorsqu'un officier de police judiciaire se trouve, au début de la procédure de garde à vue face au présumé violeur d'un petit enfant ou à un criminel odieux, il trouve profondément humiliant de lui dire : « Monsieur, vous avez le droit de vous taire. » La commission des lois, en tout cas, a décidé de retenir ces amendements.
    Mme la présidente. Je crois comprendre, monsieur le rapporteur, que vous avez défendu l'ensemble de ces amendements.
    Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée. Non que j'éprouve, à titre personnel, une opposition sur le fond, mais parce que je dois à l'honnêteté de reconnaître qu'on aurait pu discuter du texte où introduire cet amendement. Mais je fais confiance à la grande sagesse de l'assemblée. (Sourires.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Georges Fenech.
    M. Georges Fenech. Je rappelle, surtout à l'attention de nos collègues de l'opposition, que le droit au silence est un droit naturel, pas un droit positif. On ne peut pas obliger un prévenu à parler s'il ne le veut pas, sauf à adopter la torture. Qui ne se souvient du box laissé vide lors du procès de Lyon par Klaus Barbie lequel, comme c'était son droit, avait refusé de s'expliquer ?
    La notification du droit au silence n'existe pas devant le juge d'instruction, pas plus que devant la juridiction de jugement. Pourquoi, dès lors, obliger les fonctionnaires de police à notifier ce droit au silence, ce qui complique la procédure, crée un malaise entre le gardé à vue et l'enquêteur et, finalement, ne va pas dans le sens de la vérité, ni dans l'intérêt de la société, ni même dans celui du prévenu ?
    M. Pierre Cardo. Très bien !
    Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. La discussion de cet article me donne l'occasion de revenir sur ce qu'a déclaré M. Gérard Léonard, il y a quelques heures. Lorsque j'ai dit à la commission des lois que nos amendements étaient prêts mais que nous ne les déposions pas encore, afin de voir comment tournerait le débat, c'était parce que, dans une interview qu'avait accordée M. le rapporteur, le matin même, à un grand quotidien - grand par le format ! - généralement bien informé sur les projets de la majorité,...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des liberté locales. C'est Libé ! (Sourires.)
    M. Bruno Le Roux. ... j'avais lu que le rapporteur nous préparait une véritable réforme de la loi sur la présomption d'innocence au sein même du texte dont nous allions débattre. Il se serait agi là d'un changement de nature qui nécessitait des éclaircissements. Voilà ce que je tenais à préciser.
    En fait, il ne s'agit, dans le présent amendement, que de cette phrase dont, selon moi, nous aurions mieux fait d'attendre pour en débattre le projet que nous présentera, au début de l'année prochaine, M. le garde des sceaux. La cohérence y aurait gagné.
    M. Guy Geoffroy. Toujours remettre à plus tard !
    M. Bruno Le Roux. Cela dit, j'ai moi aussi beaucoup entendu parler d'« humiliation », dans mes contacts avec les policiers, quand il s'est agi de supprimer non pas, comme on l'a dit un peu vite en commission des lois, le droit de se taire mais sa notification. Depuis quelques mois je m'occupe tout particulièrement des questions de déontologie en matière de sécurité. Régulièrement, à la demande de policiers et de l'Ecole nationale supérieure de police, je vais discuter avec ceux qui sont en formation. J'ai toujours essayé de les convaincre qu'il n'y a rien d'humiliant dans cette obligation, en expliquant que, même si l'on exècre l'acte commis, on représente la puissance publique : ayant procédé à une arrestation, on doit faire en sorte que la procédure s'engage bien. Et pour ce faire, qu'il faut un minimum de respect des droits de la défense. J'observe en outre que supprimer la notification du droit au silence introduirait une certaine inégalité. En effet, certaines personnes savent très bien quels sont leurs droits, il n'est pas besoin de les leur notifier. Je ne crois pas que la suppression change grand-chose. Nous devons plutôt, je le répète, convaincre les policiers qu'il n'y a rien d'humiliant à notifier ce droit. C'est, en tout cas, ce que je m'efforce de faire pour ma part.
    Mme la présidente. La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Pour nous cet amendement est très dangereux car il est attentatoire aux droits élémentaires de la défense. Je trouve démagogique de citer, à ce sujet, les crimes les plus odieux. Il ne faut pas traiter cette question d'une manière générale. En outre, je pense que l'amendement n'est pas conforme au droit international.
    Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.
    Mme Martine Billard. Dès lors qu'il y a des droits, il est logique de les notifier aux personnes qui sont en garde à vue, mais alors tous les droits. Et je ne crois pas que ce soit humiliant car il est possible aussi de les mettre en garde contre les conséquences de leur silence ; je crois d'ailleurs que c'est ce que font en général les policiers.
    Ici, on commence par supprimer la notification d'un droit. Je crains que cela n'ouvre la possibilité de continuer, dans d'autres lois, pour d'autres droits.
    Comme M. Bruno Le Roux, je trouve que cela introduit des différences entre les personnes. Certes, il y a des crimes odieux et l'on comprend qu'il soit difficile pour les policiers de rester de marbre. Mais je ne pense pas que votre proposition change grand-chose. Il s'agit de faire aboutir la procédure et de démontrer que la personne qu'on a en face de soi est coupable, par toutes les méthodes d'investigation, quelles qu'elles soient. En quoi ne plus dire aux personnes quels sont leurs droits permettra d'atteindre mieux ce but ? Cela ne pénalisera nullement ceux qui sont informés, ceux qui ont de bons avocats, ceux qui appartiennent aux grands réseaux de banditisme, de drogue et de blanchiment d'argent. Ils connaissent parfaitement leurs droits. Mais les autres ?
    Cet amendement est tout de même assez malvenu.
    Mme la présidente. La parole est à M. Christian Vanneste.
    M. Christian Vanneste. Il ne faut pas confondre le droit et la psychologie. Il ne s'agit pas du tout de retirer un droit mais de supprimer une obligation qui mettait les policiers dans une dramatique situation d'infériorité psychologique au début d'une enquête.
    Mes chers collègues de l'opposition, si vous aviez participé aux nombreuses auditions qui ont accompagné la préparation des textes, vous auriez été sensibles au désarroi des policiers. Je pense en particulier à ce responsable de la brigade des mineurs de Paris, qui a d'ailleurs convié certains de nos collègues à l'accompagner au matin pour constater à quel point la lourdeur des procédures était pour les policiers source d'angoisse au point qu'ils en viennent à se préoccuper davantage du risque de la faute de procédure mettant fin à l'enquête, même quand on a la certitude de tenir le coupable, que du succès de cette enquête.
    Or, je vous rappelle que le présent projet a essentiellement deux missions : renforcer l'efficacité de la police et rétablir son autorité que, pendant cinq ans, vous avez gravement compromise ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. M. Le Roux a laissé entendre que, en commission, nous aurions visé davantage le droit au silence que la notification de ce droit. Gérard Léonard s'est exprimé clairement sur ce point et cela figure au rapport, précisant qu'il ne s'agissait nullement de supprimer le droit au silence, seule la notification de ce droit étant remise en cause.
    Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Je vous donne acte de cette précision, monsieur le rapporteur. Seul le premier intervenant en commission des lois avait commis une erreur, plus sémantique d'ailleurs que de fond.
    Mais, monsieur Vanneste, il y a danger quand je vous entends passer de la suppression de la notification du droit au silence, à la « lourdeur des procédures » ! C'est sans doute vrai, mais ce sujet appelle un débat plus sérieux, à un autre moment.
    Je suis, tout comme vous, pour une police efficace et je pourrais, tout comme vous, fournir un certain nombre d'exemples, mais de procédures qui ont permis de rendre des décisions justes, en remettant en liberté un innocent, parce qu'on s'est aperçu, précisément grâce à cette lourdeur des procédures, c'est-à-dire aux précautions prises, que, en fin de compte, il n'était pas coupable. La rapidité n'est pas souvent gage d'efficacité en matière de police et d'enquête. Je pense donc qu'il y a danger quand je vous entends, à propos de cet article, dire que vous avez rencontré des policiers qui s'étaient plaints de la lourdeur des procédures. C'est mon cas aussi, mais je leur réponds que suivre des procédures en respectant scrupuleusement les textes, c'est leur travail, que ces procédures permettent les bonnes enquêtes, et par conséquent, éventuellement, des condamnations justes. Elles sont le pilier de notre système judiciaire. Les sept amendements nous engagent donc dans un mauvais débat, car il serait mieux que nous l'ayons dans quelques semaines à l'occasion du texte qui nous sera présenté par M. le ministre de la justice. Pour l'instant, nous dérivons, et je ne tiens pas à ce qu'aujourd'hui, lors de cette séance sur la sécurité intérieure, nous commencions à remettre en cause la loi sur la présomption d'innocence et le code de procédure pénale dans son ensemble.
    Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 66, 13 rectifié, 14 rectifié, 15 rectifié, 16 rectifié et 195.
    (Ces amendements sont adoptés.)
    Mme la présidente. L'amendement n° 240 de Montebourg n'est pas défendu.
    M. Montebourg a présenté un amendement, n° 234 corrigé, ainsi rédigé :
    « Après l'article 8, insérer l'article suivant :
    « Après l'article 706-15 du code de procédure pénale, il est inséré un titre XIV bis intitulé : "De la poursuite des infractions de recel et des infractions assimilées ou voisines. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour soutenir cet amendement.
    M. Jean-Pierre Blazy. Je crois que l'Assemblée dans son ensemble devrait pouvoir accepter cet amendement. Nous sommes évidemment tous d'accord pour faire en sorte que les activités de recel soient pourchassées par la police et par la justice. Vous le savez, le livre IV du code de procédure pénale traite de quelques procédures particulières. Il s'agit tout simplement d'ajouter un titre XIV bis intitulé : « De la poursuite des infractions de recel et des infractions assimilées ou voisines ».
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Mes chers collègues, cet amendement est intéressant car il annonce le suivant qui l'est plus encore.
    Monsieur Blazy, si vous défendez cet amendement de M. de Montebourg, vous êtes contraint de défendre le suivant. Sinon, l'amendement 234 n'aurait aucun sens.
    Je vous laisse donc le soin, mes chers collègues, en vous invitant bien sûr à repousser ce premier amendement, de découvrir le suivant : il n'est pas « piqué des vers » ! (Rires.)
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même attente impatiente !
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 234.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Montebourg a présenté un amendement, n° 235 corrigé, ainsi libellé :
    « Après l'article 8, insérer l'article suivant :
    « Après l'article 706-15 du code de procédure pénale, il est inséré un article 706-15-1 ainsi rédigé :
    « Art. 706-15-1. - Pour la recherche et la poursuite des infractions de recel visées par les articles 321-1 à 321-11 du code pénal, à toute heure du jour et de la nuit, les officiers de police judiciaire assistés, le cas échéant, des agents de police judiciaire et des agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l'article 21 peuvent être expressément autorisés, sur requête du procureur de la République, par le juge des libertés et de la détention, à procéder, dans tout établissement de crédit situé sur le territoire national, à la visite des coffres dont sont titulaires des personnes physiques ou morales.
    « Par dérogation à l'article 57, la visite se déroule en présence, à défaut du titulaire du coffre, d'un témoin requis, par l'officier ou l'agent de police judiciaire, en dehors des personnes relevant de son autorité.
    « En cas de saisie, les formalités mentionnées aux articles 56 et 56-1 sont prescrites à peine de nullité.
    « Le procès-verbal, dressé ainsi qu'il est dit à l'article 66, mentionne le lieu, les dates et heures du début et de la fin de ces opérations. Il est signé par les personnes présentes ; en cas de refus, il en est fait mention au procès-verbal.
    « En l'absence d'infractions prévues aux articles 421-1 à 421-5 du code pénal, si le titulaire du coffre le demande ainsi que dans le cas où la visite se déroule en son absence, il est établi un procès-verbal mentionnant le lieu et les dates et heures du début et de la fin de ces opérations. Un exemplaire en est remis à l'intéressé et un autre est transmis sans délai au procureur de la République.
    « Les actes prévus au présent article ne peuvent, à peine de nullité, être effectués pour un autre objet que la recherche et la constatation des infractions visées au premier alinéa. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour soutenir cet amendement.
    M. Jean-Pierre Blazy. Nous voulons tous que le recel soit poursuivi. Mais celui-ci n'utilise pas que les coffres de voiture. Et comme nous sommes tous également pour l'impunité zéro, il faut pourchasser le recel partout, y compris dans les coffres de banque. Après tout, c'est là que sont recelés les fruits des abus de biens sociaux.
    Tel est l'objet de cet amendement. Il s'agit que, à l'instar du coffre d'un véhicule, un coffre de banque puisse être reconnu comme un lieu qui permet de cacher le produit d'infractions pénales. C'est pourquoi, afin de lutter contre la délinquance, contre toutes les formes de délinquance, il convient de permettre, de manière dérogatoire, des visites de coffre de banque.
    M. Gérard Léonard. Regardons sous les matelas et les piles de linge aussi !
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. L'exposé sommaire de M. Montebourg nous dit d'abord : « A l'instar du coffre d'un véhicule »...
    M. Jean-Pierre Blazy. Je viens de le lire !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Oui, mais savourons cet instant !
    « A l'instar du coffre d'un véhicule, un coffre en banque peut être le lieu qui permet de cacher le produit d'infractions pénales. »
    M. Jean-Pierre Blazy. C'est souvent le cas !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. M. Montebourg saisit donc l'opportunité, que nous créons dans la loi et à laquelle il souscrit finalement, de donner aux policiers le pouvoir de fouiller des coffres de voiture, pour l'étendre à la fouille des coffres de banque.
    M. Bruno Le Roux. Non, nous disons simplement qu'il peut y avoir le produit de vols dans un coffre de banque !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Au-delà du caractère humoristique de cet amendement, on notera qu'il reconnaît - c'est l'interprétation qu'on peut en faire - que les coffres de véhicule peuvent réellement servir à cacher les produits ou les instruments d'infractions pénales.
    En tout cas, la démarche du Gouvernement me paraît parfaitement confortée par cet amendement.
    Les contradictions ne manquent pas au sein de l'opposition, et c'est d'ailleurs sans doute pour cela que cet amendement a été défendu par M. Blazy, et non par M. Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. C'est de la cohérence !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. En effet, dans l'exposé sommaire de son amendement n° 236, à l'article 6, M. Le Roux précisait que le véhicule n'a jamais été assimilé à un domicile. Dans son exposé sommaire, M. Montebourg considère, lui, que « contrairement au véhicule, un coffre de banque ne peut jamais être assimilé à un domicile ». M. Montebourg laisse donc entendre qu'un véhicule devrait être assimilé à un domicile.
    M. Jean-Pierre Blazy. C'était pour nous dire quoi ?
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Défavorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 235 corrigé.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Estrosi, rapporteur, et M. Gérard Léonard ont présenté un amendement, n° 69 rectifié, ainsi libellé :
    « I. - Après l'article 8, insérer l'article suivant :
    « Après l'article 706-40 du code de procédure pénale, il est inséré un titre XVII bis ainsi rédigé :

« TITRE XVII bis


« DES LIVRAISONS SURVEILLÉES ET DES INFILTRATIONS DANS LE CADRE DE LA POURSUITE ET DE L'INSTRUCTION EN MATIÈRE DE CRIMINALITÉ ORGANISÉE
    « Art. 706-40-1. - Afin de constater les infractions prévues par les articles 222-34 à 222-38, 224-1 à 224-5, 227-23 et 227-24, 311-9, 312-1 à 312-8, 321-2 (2°), 324-1 et 324-2, 41-1 (4°), 441-2 et 441-3, 442-1 à 442-7, 450-1 du code pénal, d'en identifier les auteurs et complices et d'effectuer les saisies prévues par le présent code, les officiers de police judiciaire et, sous l'autorité de ceux-ci, les agents de police judiciaire peuvent, dans le cadre des enquêtes diligentées sous le contrôle de l'autorité judiciaire et après en avoir informé le procureur de la République, procéder à la surveillance de l'acheminement des substances, objets, valeurs mobilières, titres, documents, biens ou produits tirés de la commission de ces infractions.
    « Lorsque la surveillance visée au premier alinéa nécessite un franchissement de frontière, celui-ci ne peut être effectué que sur autorisation du procureur de la République territorialement compétent ou du juge d'instruction saisi.
    « L'office central compétent organise et garantit la continuité de cet acheminement transfrontalier.
    « Art. 706-40-2. - Afin de constater les infractions prévues par les articles 222-34 à 222-38, 224-1 à 224-5, 225-4-1 à 225-4-4, 225-5 à 225-10, 225-12-1 à 225-12-3, 227-23 et 227-24, 311-9, 312-1 à 312-8, 321-2 (2°), 324-1 et 324-2, 421-1 (4°), 441-2 et 441-3, 442-1 à 442-7, 450-1 du code pénal, ainsi que les infractions prévues par l'article 21 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, d'en identifier les auteurs et complices et d'effectuer les saisies prévues par le présent code, les officiers de police judiciaire peuvent, sur autorisation écrite du procureur de la République ou du juge d'instruction saisi qui en avise préalablement le parquet de son ressort, et sous leur contrôle, engager une opération d'infiltration. L'autorisation est délivrée après avis technique de l'office central compétent.
    « Dans le cadre de cette opération, des officiers ou agents de police judiciaire spécialement qualifiés peuvent accomplir les actes nécessaires à leur infiltration et participer en tant que complice ou coauteur à la commission des infractions à l'exclusion de toute atteinte à l'intégrité physique des personnes. Ils peuvent notamment acquérir, détenir, transporter ou livrer des substances, biens ou produits tirés de la commission des infractions visées à l'alinéa précédent.
    « Ils peuvent également, aux mêmes fins, utiliser ou mettre à la disposition des personnes se livrant à ces infractions des moyens de caractère administratif ou juridique ainsi que des moyens de transport, de dépôt, de stockage, de conservation et de communication.
    « Pour l'accomplissement de ces actes, les officiers ou agents de police judiciaire visés au deuxième alinéa peuvent faire l'usage d'une identité d'emprunt.
    « La décision de verser l'autorisation au dossier est prise par le magistrat après avis de l'officier de police judiciaire responsable de l'enquête ayant donné lieu à l'opération d'infiltration. Dans cette hypothèse, des procès-verbaux ou des rapports relatant les opérations conduites sont établis dans des conditions préservant la sécurité des intervenants. Lorsqu'il est fait usage d'une identité d'emprunt, ces procès-verbaux ou rapports ne révèlent pas l'identité véritable des officiers ou agents de police judiciaire infiltrés.
    « Seule l'audition de l'officier de police judiciaire responsable de l'enquête ayant donné lieu à l'opération d'infiltration est possible.
    « Toutefois, il peut être procédé à l'audition de l'agent infiltré au stade de l'enquête et de l'instruction, lorsque celle-ci est indispensable à la manifestation de la vérité, et que la sécurité des officiers et agents bénéficiaires de l'autorisation n'est pas menacée. Au stade de l'enquête, elle est réalisée par le président du tribunal de grande instance auquel est rattaché le procureur de la République qui a donné l'autorisation. Au stade de l'instruction, elle est réalisée par le juge saisi.
    « Au cours de son audition, l'agent infiltré dépose sous son identité d'emprunt. Le procureur de la République ou le juge d'instruction ayant délivré l'autorisation atteste alors de la qualité de celui-ci.
    « Il appartient à ces magistrats, en concertation avec l'officier de police judiciaire responsable de l'enquête, d'apprécier les risques qui pèsent sur la sécurité de l'agent dont l'audition est indispensable.
    « En toute hypothèse, les agents ayant participé à l'opération ne peuvent être entendus que dans des conditions matérielles permettant d'assurer la poursuite de leur activité professionnelle spécialisée.
    « Art. 706-40-3. - Les agents étrangers exerçant des missions similaires à celles des officiers et agents de police judiciaire visés à l'article 706-40-2 peuvent être autorisés par le procureur de la République ou par le juge d'instruction compétent, à accomplir ou à participer au déroulement, sur le territoire national, des opérations nécessaires à l'opération d'infiltration mise en oeuvre par un service d'enquête français.
    « Lorsqu'une opération d'infiltration débutée par un service d'enquête étranger nécessite d'être poursuivie sur le territoire national, elle est soumise, outre la demande d'entraide judiciaire et l'autorisation prévue à l'article 706-40-2, à l'avis technique conforme de l'office central compétent.
    « Pour la réalisation de celle-ci, les agents étrangers sont soumis aux règles définies à l'article 706-40-2 et bénéficient de la protection juridique prévue à l'article 706-40-4.
    « Ils sont alors dirigés par le service d'enquête saisi et, le cas échéant, assistés par les officiers ou agents de police judiciaire qualifiés visés au deuxième alinéa de l'article 706-40-2, et désignés par l'office central compétent.
    « La demande d'autorisation est émise par l'autorité compétente de l'Etat dont ces agents sont originaires.
    « Art. 706-40-4. - Les officiers et agents de police judiciaire et les agents étrangers autorisés à procéder ou à participer aux opérations visées aux articles 706-40-2 et 706-40-3 ne sont pas pénalement responsables des actes nécessaires à l'exercice de leur mission commis dans le cadre de l'autorisation délivrée par le procureur de la République ou le juge d'instruction saisi.
    « Art. 706-40-5. - Les dispositions visées aux articles 706-40-1 à 706-40-4 ne peuvent être mises en oeuvre que pour des actes ne déterminant pas la commission des infractions prévues aux articles 706-40-1 et 706-40-2.
    « Art. 706-40-6. - Les dispositions des articles 706-40-1 et 706-40-2 sont applicables aux substances qui sont utilisées pour la fabrication illicite de stupéfiants et dont la liste est fixée par décret, ainsi qu'aux matériels servant à cette fabrication. Elles s'appliquent également aux substances et matériels pouvant entrer dans la fabrication de faux ainsi qu'à tous objets, valeurs mobilières, titres, documents, bien, ou produits utilisés pour réaliser les infractions visées au premier alinéa de l'article 706-40-1 et au premier alinéa de l'article 706-40-2. »
    « II. - Au premier alinéa du VI de l'article 28-1 du code de procédure pénale, les mots : ", 706-29 et 706-32 sont remplacés par les mots : "et 706-29.
    « III. - Il est ajouté au VI de l'article 28-1 du code de procédure pénale un alinéa ainsi rédigé : « Les dispositions des articles 706-40-1 à 706-40-5 sont applicables aux agents des douanes mentionnés aux I et II pour les opérations de recherche en matière de livraisons surveillées et d'infiltration, s'agissant du trafic de stupéfiants ».
    « IV. - L'article 706-32 du code de la procédure pénale est supprimé. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. C'est la commission qui a souhaité introduire cet amendement très important, qui touche à l'extension des possibilités de surveillance des livraisons surveillées et des infiltrations dans le cadre de la poursuite et de l'instruction en matière de criminalité organisée. Aujourd'hui, dans le cadre de l'instruction en matière de criminalité organisée, les livraisons surveillées et les infiltrations, ne peuvent s'opérer que dans le domaine du trafic de drogue. Nous avons estimé que ce texte offrait une occasion idéale d'étendre cette possibilité aux infractions qui relèvent de la criminalité organisée, c'est-à-dire, par exemple, le trafic d'armes, la traite des êtres humains, la prostitution ou la pédophilie. Nous donnons ainsi aux policiers des pouvoirs beaucoup plus importants et nous élargissons le champ de leur action. La lutte contre les trafics de stupéfiants était totalement insuffisante et nous nous dotons là de moyens d'action beaucoup plus efficaces.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement partage l'objectif du rapporteur et de la commission, d'autant plus qu'il travaille d'ores et déjà sur la possibilité de préciser les conditions dans lesquelles ces infiltrations et ces livraisons peuvent être organisées. Il n'y a ici que des parlementaires expérimentés, qui connaissent le parcours d'un texte : il chemine au travers de différents comités interministériels. Des arbitrages sont rendus. Ils engagent l'ensemble du Gouvernement, et la loyauté doit être la règle. Il a donc été prévu que cette disposition très pertinente et très utile devait être logée dans le véhicule juridique et législatif du garde des sceaux, qui ne saurait être exclu de cette discussion. C'est bien volontiers que j'ai accepté cette décision, et c'est pourquoi je ne peux pas, au nom du Gouvernement, donner un avis favorable. Je ne suis donc pas défavorable sur le fond, mais sur l'opportunité du véhicule. Je devais à l'honnêteté de vous faire cette réponse. Je vous recommande par conséquent de retirer cet amendement, faute de quoi je serais contrainte de donner un avis défavorable.
    M. Claude Gaillard. Cette position vous honore, monsieur le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Vous le voyez, je ne vous fais pas de cachotteries.
    Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Le raisonnement de M. le ministre est sage, d'autant plus que quelques questions restent en suspens. Je souscris de façon générale à la proposition du rapporteur et de M. Léonard. Pour autant, à bien y regarder, les peines prévues pour certaines infractions ne me semblent pas adaptées pour des actes relevant de la criminalité organisée, et peut-être devrait-on y réfléchir un peu plus. Certaines infractions, passibles de faibles peines - trois ans ! -, me paraissent d'une extraordinaire gravité, comme celles qui mettent en jeu l'image pornographique des mineurs ou d'autres images à caractère violent ou pornographique. A l'inverse, la fabrication et l'usage commercial de faux en informatique, puni de deux ans, ne me semble pas toujours être l'oeuvre de la criminalité organisée, bien que ça puisse certainement l'être quelquefois. Cette question mérite sans doute d'être examinée plus en détail.
    Ainsi, je pense que cet amendement va dans le bon sens, mais qu'il est sage de prendre le temps d'en examiner toutes les conséquences avant que le garde des sceaux ne vienne présenter son texte en séance.
    M. Jean-Pierre Blazy. Nous soutenons le Gouvernement !
    Mme la présidente. Monsieur Estrosi, maintenez-vous votre amendement ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La commission des lois a eu le souci de renforcer la possibilité de surveillance des réseaux. Je rappelle la liste des infractions visées : enlèvement et séquestration, pédophilie, vol en bande organisée, extorsion, recel en bande organisée, blanchiment, terrorisme, fabrication de faux documents ou de fausse monnaie, participation à une association de malfaiteurs. Nous estimons que l'action menée par le ministre de l'intérieur, courageuse, déterminée, engagée au service du rétablissement de la sécurité, doit se voir renforcée par tous les moyens possibles : notre proposition ne visait qu'à lui donner une force supplémentaire dans le cadre de son action. Bien évidement, il est le meilleur juge des moyens à mettre à sa disposition...
    M. Bruno Le Roux. C'est lui le patron !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... et nous allons retirer cet amendement. Mais je relève que plusieurs collègues, à cette tribune, ont salué le courage et l'action du ministre de la sécurité intérieure, tout en formulant quelques inquiétudes. Je l'ai fait moi-même, en conclusion de mon intervention.
    Nous devons prochainement étudier un texte sur la justice. L'action de la justice est complémentaire de celle des forces de l'ordre. Aucun maillon de la chaîne pénale ne doit manquer un seul instant au ministre de l'intérieur.
    Au moment où je retire cet amendement, je souhaite que M. le ministre de l'intérieur, qui nous garantit que ces dispositions s'inscriront dans le prochain texte sur la justice, puisse nous rassurer sur le calendrier et sur les mesures complémentaires, notamment celles de la réforme de la loi sur la présomption d'innocence, que nous sommes nombreux à attendre.
    Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Léonard, quoique M. Estrosi ait retiré l'amendement.
    M. Gérard Léonard. Je vous remercie de votre grande bonté, madame la présidente, mais je suis cosignataire de l'amendement n° 69 rectifié.
    Nous avons parfaitement compris la position de M. le ministre de l'intérieur, mais je voudrais rappeler la raison qui nous a incités à introduire dans ce projet de loi un texte qui, en effet, concerne plutôt la chancellerie : il y a véritablement urgence à intervenir dans ces matières, quand on voit la manière dont se sont développés ces réseaux, les effets pervers et catastrophiques qu'ils entraînent.
    Je suis assez d'accord avec M. Le Roux : les peines sont probablement insuffisantes pour certains délits parfaitement odieux. Mais je ne partage pas l'inquiétude de mon collègue et ami Christian Estrosi : moi, j'ai confiance. Toutefois, je réitère notre souci de voir adopté, de façon urgente, un tel texte. Nous ne pouvons pas attendre des mois. Dans quel délai ce texte nous sera-t-il proposé ? M. le ministre peut-il nous apporter des précisions à ce sujet ?
    En tout état de cause, je m'associe à la décision de retrait prise par mon collègue et ami Christian Estrosi.
    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Vraisemblablement au printemps, en mai.
    Mme la présidente. L'amendement n° 69 rectifié est retiré.
    Les amendements n°s 323 rectifié et 212 de M. Lagarde ont été rectifiés par leur auteur afin d'être appelés après l'article 21.
    M. Montebourg a présenté un amendement n° 239, ainsi libellé :
    « Après l'article 8, insérer l'article suivant :
    « L'article 6 de la loi n° 2000-494 du 6 juin 2000, portant création d'une commission nationale de déontologie de la sécurité, est ainsi rédigé :
    « Art. 6. - Sur demande motivée du président de la commission nationale de déontologie de la sécurité au président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux où se sont déroulés les faits mentionnés dans la réclamation prévue à l'article 4, les membres de la commission sont autorisés à effectuer des visites ainsi qu'à procéder à la saisie de documents. Cette autorisation peut être délivrée par le président du tribunal de grande instance sous la forme d'une ordonnance énonçant les motifs de sa décision.
    « L'ordonnance n'est susceptible que d'un pourvoi en cassation selon les règles prévues par le code de procédure pénale ; ce pourvoi n'est pas suspensif. Le juge doit vérifier que la demande d'autorisation qui lui est soumise est fondée ; cette demande doit comporter tous les éléments d'information en possession de la commission nationale de déontologie de la sécurité de nature à justifier la visite. Il désigne l'officier de police judiciaire chargé d'assister à ces opérations et de le tenir informé de leur déroulement.
    « La visite s'effectue sous l'autorité et le contrôle du juge qui l'a autorisée. Il peut se rendre dans les locaux pendant l'intervention. A tout moment, il peut décider la suspension ou l'arrêt de la visite. La visite ne peut être commencée avant six heures ou après vingt et une heures dans les lieux ouverts au public, elle peut également être commencée pendant les heures d'ouverture de l'établissement. Elle est effectuée en présence de l'occupant des lieux ou de son représentant ; en cas d'impossibilité, l'officier de police judiciaire requiert deux témoins choisis en dehors des personnes relevant de son autorité ou de celle de la commission. Les membres de la commission, l'occupant des lieux ou son représentant et l'officier de police judiciaire peuvent seuls prendre connaissance des pièces avant leur saisie. L'officier de police judiciaire veille au respect du secret professionnel et des droits de la défense, conformément aux dispositions du troisième alinéa de l'article 56 du code de procédure pénale. L'article 58 de ce code est applicable.
    « Le procès-verbal de visite relatant les modalités et le déroulement de l'opération est dressé sur-le-champ par les enquêteurs de la commission. Un inventaire des pièces et documents saisis lui est annexé. Le procès-verbal et l'inventaire sont signés par les enquêteurs de la commission et par l'officier de police judiciaire ainsi que par les personnes mentionnées au deuxième alinéa du présent article ; en cas de refus de signer, mention en est faite au procès-verbal. Si l'inventaire sur place présente des difficultés, les pièces et documents saisis sont placés sous scellés. L'occupant des lieux ou son représentant est avisé qu'il peut assister à l'ouverture des scellés qui a lieu en présence de l'officier de police judiciaire ; l'inventaire est alors établi.
    « Les originaux du procès-verbal de visite et de l'inventaire sont, dès qu'ils ont été établis, adressés au juge qui a délivré l'ordonnance ; une copie de ces mêmes documents est remise à l'occupant des lieux ou à son représentant.
    « Les pièces et documents qui ne sont pas utiles à la manifestation de la vérité sont restitués à l'occupant des lieux. »
    La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour soutenir cet amendement.
    M. Jean-Pierre Blazy. Cet amendement n'est pas défendu.
    Mme la présidente. M. Estrosi, rapporteur, a présenté un amendement, n° 65, ainsi libellé :
    « Après l'article 8, insérer l'article suivant :
    « L'article 29 de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne est ainsi modifié :
    « 1° Dans le quatrième alinéa (III), le mot : "également est remplacé par le mot : "légalement.
    « 2° Le cinquième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : "Ils peuvent également conserver certaines données en vue d'assurer la sécurité de leurs réseaux. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. C'est un amendement de clarification rédactionnelle.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 65.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

    Mme la présidente. Ce soir, à vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, n° 381, pour la sécurité intérieure :
    M. Christian Estrosi, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 508) ;
    Mme Marie-Jo Zimmermann, rapporteure au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes (rapport d'information n° 459) ;
    La séance est levée.
    (La séance est levée à dix-neuf heures dix.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexes au procès-verbal
de la 2e séance
du jeudi 16 janvier 2003
SCRUTIN (n° 108)


sur le sous-amendement n° 452 de M. Lagarde à l'amendement n° 54 de la commission des lois avant le chapitre Ier du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, pour la sécurité intérieure (garantie du droit d'information obligatoire pour les maires sur la politique de sécurité locale).

Nombre de votants :
71
Nombre de suffrages exprimés :
71
Majorité absolue
36
Pour l'adoption
26
Contre
45

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe Union pour la majorité présidentielle (362) :
    Pour : 5. - M. Jean-Claude Flory, Mmes Arlette Franco, Arlette Grosskost, MM. Serge Grouard et Sébastien Huyghe.
    Contre : 45 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (147) :
    Pour : 12 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (13).
    Pour : 3. - Mmes Huguette Bello, Martine Billard et M. Noël Mamère.

SCRUTIN (n° 109)


sur l'amendement n° 424 rectifié du Gouvernement après l'article 1er du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, pour la sécurité intérieure (pouvoir de réquisition du préfet).

Nombre de votants

56


Nombre de suffrages exprimés

55


Majorité absolue

28


Pour l'adoption

46


Contre

9

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe Union pour la majorité présidentielle (362) :
    Pour : 41 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (147) :
    Contre : 8 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean Le Garrec (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 1 membre du groupe, présent ou ayant délégué son droit de vote.
Non-inscrits (13).
    Contre : 1. - Mme Martine Billard.
    Abstention : 1. - M. Noël Mamère.

Mise au point au sujet du présent scrutin
(Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)

    M. Noël Mamère, qui était présent au moment du scrutin ou qui avait délégué son droit de vote, a fait savoir qu'il avait voulu voter « contre ».