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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 23 JANVIER 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
Séance du mercredi 22 janvier 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES

1.  Nomination de députés en mission temporaire «...».
2.  Sécurité intérieure. - Suite de la discussion d'un projet de loi adopté par le Sénat après déclaration d'urgence «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Article 19 «...»

Mmes Martine David, Chantal Brunel, MM. Serge Blisko, Jacques Myard, Jean-Jacques Descamps, Lionnel Luca, Eric Woerth, André Gerin, Guy Geoffroy, Mme Christine Boutin.
Amendement de suppression n° 334 de Mme Billard : Mme Martine Billard, MM. Christian Estrosi, rapporteur de la commission des lois ; Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. - Rejet.
Amendement n° 93, deuxième rectification, de la commission des lois, avec le sous-amendement n° 454 de M. Lagarde : MM. le rapporteur, le ministre, Bruno Le Roux, Nicolas Perruchot. - Retrait du sous-amendement.
MM. Xavier de Roux, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 93, troisième rectification.
L'article 19 est ainsi rédigé.
L'amendement n° 293 de M. Viollet tombe ; l'amendement n° 35 de M. Mourrut a été retiré ; les amendements n°s 43 de M. Mourrut, 290 et 291 de M. Le Roux, 36 rectifié de M. Mourrut, 23 de M. Mariani, 11 de M. Luca, 292 de M. Le Roux, 335 de Mme Billard, 24 de M. Mariani et 42 de M. Mourrut n'ont plus d'objet.

Après l'article 19 «...»

Amendement n° 400, deuxième rectification, de M. Woerth : MM. Eric Woerth, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 396 rectifié de M. Garrigue : MM. Gérard Léonard, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 44 corrigé de M. Mourrut, avec les sous-amendements n°s 501 et 500 de Mme Boutin : M. Etienne Mourrut, Mme Christine Boutin, MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement.

Article 19 bis «...»

MM. Nicolas Perruchot, le ministre, Pierre Cardo.
Amendement de suppression n° 294 de M. Le Roux : MM. Jean-Yves Le Bouillonnec, le ministre, le rapporteur, Jean-Christophe Lagarde, Jean-Paul Garraud, Xavier de Roux. - Rejet.
Amendement n° 201 de M. Lagarde : MM. le rapporteur, le ministre, Jean-Christophe Lagarde. - Rejet.
Amendement n° 94 de la commission : M. le rapporteur. - Adoption.
Adoption de l'article 19 bis modifié.

Après l'article 19 bis «...»

Amendement n° 95 de la commission, avec le sous-amendement n° 450 de M. Mamère, et amendement n° 211 rectifié de M. Lagarde : M. le rapporteur, Mme Martine Billard, MM. Nicolas Perruchot. - Retrait de l'amendement n° 211 rectifié.
MM. le rapporteur, le ministre, Bruno Le Roux, Pierre Cardo. - Rejet du sous-amendement n° 450 ; adoption de l'amendement n° 95.
Amendements identiques n°s 96 de la commission, 12 de Mme Zimmermann et 202, deuxième correction, de M. Lagarde : M. le rapporteur, Mme Marie-Jo Zimmermann, MM. Nicolas Perruchot, le ministre. - Adoption.

Article 20 «...»

Amendement n° 295 de M. Le Roux : MM. Bruno Le Roux, le rapporteur, le ministre, Jean-Christophe Lagarde, André Gerin. - Rejet.
Amendement n° 351 de M. Le Fur : MM. Marc Le Fur, le rapporteur, Pascal Clément, président de la commission des lois ; le ministre. - Rejet.
Amendement n° 352 de M. Le Fur : MM. Marc Le Fur, le rapporteur, le ministre, Jean-Christophe Lagarde, Jean-Paul Garraud. - Retrait.
Amendement n° 97 de la commission : M. le rapporteur. - Retrait.
Amendement n° 97 repris par M. Vanneste : MM. Christian Vanneste, le rapporteur, Georges Fenech. - Adoption.
Amendement n° 98, deuxième rectification, de la commission : MM. le rapporteur, le ministre, Bruno Le Roux, Mme Martine Billard, M. André Gerin. - Adoption de l'amendement n° 98, troisième rectification.
L'amendement n° 37 de M. Mourrut n'a plus d'objet.
Adoption de l'article 20 modifié.

Article 20 bis «...»

Amendement n° 99 rectifié de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 99, deuxième rectification.
Adoption de l'article 20 bis modifié.

Article 20 ter. - Adoption «...»
Article 21 «...»

MM. Bruno Le Roux, André Gerin, Mme Françoise de Panafieu, MM. Pierre Cardo, Jean-Christophe Lagarde, Mme Martine Billard, MM. Jean-Yves Le Bouillonnec, Nicolas Perruchot.
Amendements de suppression n°s 296 de M. Le Roux et 336 de Mme Billard : M. Bruno Le Roux, Mme Martine Billard, MM. le rapporteur, le ministre, Gérard Léonard, le président.
M. Bruno Le Roux.

Suspension et reprise de la séance «...»

M. Bruno Le Roux. - Rejet, par scrutin, des amendements n°s 296 et 336.
Amendement n° 167 de M. Asensi : MM. André Gerin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 215 de M. Jean-Christophe Lagarde : MM. Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendements identiques n°s 101 de la commission et 45 de M. Garrigue : MM. le rapporteur, ministre. - Adoption.
Les amendements n°s 216 et 217 de M. Lagarde ont été retirés.
Amendement n° 218 de M. Lagarde : M. Jean-Christophe Lagarde. - Retrait.
Amendement n° 38 de M. Mourrut : M. Etienne Mourrut. - Retrait.
Amendement n° 505 de M. Lagarde : MM. Jean-Christophe Lagarde, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 460 rectifié de M. Fromion : MM. Yves Fromion, le rapporteur, le ministre, le président de la commission. - Retrait.
Adoption de l'article 21 modifié.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
3.  Dépôt de rapports «...».
4.  Dépôt de rapports sur des propositions de résolution «...».
5.  Dépôt d'un projet de loi adopté par le Sénat «...».
6.  Dépôt d'un rapport de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques «...».
7.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à vingt et une heures.)

1

NOMINATION DE DÉPUTÉS
EN MISSION TEMPORAIRE

    M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre des lettres m'informant qu'il avait chargé M. Luc-Marie Chatel et M. Jean-Pierre Giran de missions temporaires dans le cadre des dispositions de l'article LO 144 du code électoral.
    Les décrets correspondants ont été publiés au Journal officiel du mercredi 22 janvier 2003.

2

SÉCURITÉ INTÉRIEURE

Suite de la discussion d'un projet de loi
adopté par le Sénat après déclaration d'urgence

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, pour la sécurité intérieure (n°s 381, 508).

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Hier, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles et s'est arrêtée à l'article 19.

Article 19

    M. le président. « Art. 19. - Le code pénal est ainsi modifié :
    « I. - Après l'article 322-4, il est inséré un article 322-4-1 ainsi rédigé :
    « Art. 322-4-1. - Le fait de s'installer, en réunion, en vue d'y établir une habitation, sur un terrain appartenant soit à une commune qui s'est conformée aux obligations lui incombant en application de l'article 2 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, soit à tout autre propriétaire, sans être en mesure de justifier de son autorisation ou de celle du titulaire du droit d'usage du terrain, est puni de six mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende.
    « Lorsque l'installation s'est faite au moyen d'un véhicule automobile, il peut être procédé à la saisie de ce véhicule en vue de sa confiscation par la juridiction pénale. »
    « II. - Après l'article 322-15, il est inséré un article 322-15-1 ainsi rédigé :
    « Art. 322-15-1. - Les personnes physiques coupables de l'infraction prévue à l'article 322-4-1 encourent exclusivement les peines complémentaires suivantes :
    « 1° La suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire ;
    « 2° La confiscation du ou des véhicules automobiles utilisés pour commettre l'infraction, à l'exception des véhicules destinés à l'habitation. »
    Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.
    La parole est à Mme Martine David.
    Mme Martine David. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, mes chers collègues, après avoir hésité à intervenir sur l'article, puisque j'aurai l'occasion lors de la discussion des amendements, j'ai tout de même tenu à m'exprimer brièvement sur ce sujet.
    Je suis en effet l'élue d'une région qui, comme l'Ile-de-France et quelques autres, est traversée par de grands axes de communication. Nous voyons donc passer et s'arrêter beaucoup de gens du voyage, ce qui crée depuis très longtemps de nombreux problèmes, comme ailleurs dans notre pays et en Europe.
    Pendant très longtemps, les responsables politiques qui se sont succédé au pouvoir ont plutôt joué l'immobilisme. Il ne s'est donc rien passé, malgré les demandes des maires qui devaient faire face à bien des difficultés.
    M. Jacques Myard. Et Sarko est arrivé !
    Mme Martine David. Je ne sais pas si Sarko est arrivé...
    M. Guy Geoffroy. Si !
    M. Jacques Myard. Il va arriver !
    Mme Martine David. Peut-être va-t-il arriver, mais il n'est pas encore là.
    Nous avons donc assisté à une accumulation de difficultés, d'incompréhensions, de rejets, de provocations, qui ont été et sont encore le lot de nombreux élus locaux et de bien des populations - parce que ces grands axes de communication favorisent des arrivées massives, et parfois intempestives, de gens du voyage.
    En outre, certaines expériences de réalisation d'aires d'accueil se sont plutôt mal passées,...
    M. Jacques Myard. Ça oui !
    Mme Martine David. ... ce qui n'a pas encouragé les communes et les maires à s'engager dans ce processus.
    Une première étape a été franchie avec la loi Besson. Plusieurs d'entre nous ont souvent rendu hommage à ce ministre, mais il faut rappeler qu'il s'agissait de dispositions introduites à la dernière minute dans un projet de loi ayant un autre objet, ce qui n'est jamais très bon. En l'occurrence, elles comportaient un certain nombre d'insuffisances et sans doute trop peu de contraintes. Il a donc fallu attendre le premier semestre de l'année 2000 pour que, à la suite d'une initiative parlementaire prise par le groupe socialiste notamment - il ne s'agit pas à proprement parler d'une seconde loi Besson -, soit promulguée la loi du 5 juillet 2000 qui a permis d'aller plus loin en ce qui concerne l'accueil et le passage des gens du voyage, dans l'esprit de la loi Besson, mais d'une façon beaucoup plus incitative. Elle prévoyait en particulier des aides de l'Etat tant pour la création de ces aires que pour leur fonctionnement. Cela a contribué à mon avis la deuxième étape significative en la matière.
    Actuellement, le principal problème tient au fait que l'élaboration des schémas départementaux et régionaux a pris du retard. Certes, les élections municipales ont constitué un frein, mais personne ne s'est précipité pour monter ces dossiers, d'autant que les préfectures n'ont pas fait preuve d'un empressement exemplaire. Chacun a plutôt joué la montre. Dans le Rhône, cependant, un projet de schéma a déjà été soumis aux collectivités territoriales. Certes, cette procédure n'agrée pas à tout le monde, mais elle constitue une avancée et je suis persuadée que, petit à petit, les choses rentreront dans l'ordre.
    Il conviendrait donc d'accélérer la mise en oeuvre de la loi du 5 juillet 2000 car elle est très importante. Cela retirerait à tous ceux qui, parmi les gens du voyage, sont de mauvaise foi un argument de poids, car ils justifient fréquemment le recours au stationnement sauvage par le fait qu'il n'existe aucune aire aménagée où ils pourraient s'arrêter.
    Parallèlement, il est indispensable de sanctionner ce stationnement sauvage, comme le prévoit d'ailleurs cette loi. Cela est normal à partir du moment où les communes concernées ont respecté leurs obligations légales en créant les aires nécessaires avec, par définition, la participation financière de leurs habitants. Toutefois, les mesures coercitives prévues par le projet en discussion me paraissent excessives. Nous y reviendrons lors de la discussion des amendements, mais je crains qu'elles soient délicates à appliquer par les forces de sécurité, police ou gendarmerie. Alors que les tensions se sont exacerbées au fil des décennies, notamment au cours des dernières années, je ne suis pas sûre que de telles mesures soient les meilleures.
    M. Lionnel Luca. Donc ne faisons rien !
    M. Bruno Le Roux. Faisons autre chose !
    Mme Martine David. J'ajoute que les élus locaux qui se sont conformés à la loi ou qui vont le faire devront également faire preuve de pédagogie auprès de leurs concitoyens à propos de la création de ces aires. En retour, ils attendent qu'on les aide dans les cas où ils devraient engager des procédures. Aujourd'hui, ils se plaignent à juste titre que le stationnement sauvage provoque de graves problèmes de salubrité et de sécurité non seulement pour les habitants de leurs communes, mais aussi pour les gens du voyage eux-mêmes, en particulier pour les enfants en bas âge. Ils constatent également que les procédures sont longues, même lorsqu'il s'agit de référés, et qu'elles coûtent cher.
    Les élus locaux souhaitent donc que nous les aidions, que les responsables ministériels les aident à lutter contre les stationnements sauvages, surtout lorsqu'ils se sont conformés aux obligations légales.
    M. Lionnel Luca. S'ils le peuvent !
    M. le président. Il faut conclure, madame David.
    Mme Martine David. Je termine, monsieur le président.
    L'examen du prochain texte sur la justice que nous présentera M. Perben nous donnera une nouvelle occasion d'étudier les possibilités d'accomplir d'autres avancées dans ce domaine.
    Au-delà de cette question, il ne faut pas oublier les problèmes liés à l'éducation des enfants ou à la fiscalité, sur lesquels nous devrions nous pencher également. A cet égard, nous pourrions être saisis d'un texte qui nous permettrait de remplir toutes nos obligations en la matière et d'offrir aux gens du voyage un équilibre entre les devoirs que nous leur imposons et leurs droits.
    M. le président. La parole est à Mme Chantal Brunel.
    Mme Chantal Brunel. La nouvelle élue que je suis d'une des circonscriptions les plus peuplées de France, qui comprend une grande partie de la ville de Marne-la-Vallée et des communes aussi importantes que Roissy-en-Brie, Ozoir-la-Ferrière, Thorigny-sur-Marne, ainsi que des bourgs comme Pontcarré, Ferrières-en-Brie et Guermantes, aujourd'hui si dramatiquement connu, tient à saluer ce projet de loi extrêmement positif et tant attendu.
    A cet égard, je félicite le ministre de l'intérieur pour son action qui a changé l'atmosphère. Les forces de sécurité, gendarmerie et police, regroupées en un seul commandement et réorganisées territorialement, se sentent comprises, encouragées, et la résolution des faits délictueux a augmenté.
    A Marne-la-Vallée, en plus d'une population de 85 000 habitants, 20 000 personnes viennent travailler chaque jour et nous comptons 120 000 étudiants, quatre gares de RER et, à partir du mois de février, nous aurons un centre commercial qui devrait attirer plus d'un million de visiteurs.
    Cette énumération a pour but, monsieur le secrétaire d'Etat, de vous montrer la tâche immense qui incombe au commissariat de Noisiel et son cruel besoin d'effectifs. Je tiens d'ailleurs à souligner la qualité de son action, qui a permis, malgré une population souvent confrontée à des problèmes d'intégration, à stabiliser la délinquance. Les trois autres commissariats de Chessy, Lagny et Pontault-Combault ont également un besoin cruel d'effectifs supplémentaires. Mon message est donc clair : nous avons besoin d'effectifs.
    L'article 19 dont nous abordons la discussion est particulièrement attendu. Au printemps et en été, le problème posé par les gens du voyage est l'un des plus importants auxquels nous soyons confrontés. Nos communes sont en effet régulièrement et soudainement envahies par plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de caravanes, lesquelles tournent de commune en commune, expulsion après expulsion.
    Il est incontestable que nous devons améliorer l'accueil des nomades. Jusqu'à présent, notre pays n'a pas su le faire. Les aires d'accueil sont nécessaires car l'inconfort qui est souvent le quotidien des intéressés ne fait qu'engendrer des difficultés supplémentaires en matière d'intégration et exacerber les passions.
    Le rapporteur a eu raison de rappeler les lois qui pouvaient leur laisser espérer une amélioration de leur sort, mais qui n'ont pas encore été appliquées ; je pense à celle du 31 mai 1990 et à celle du 5 juillet 2000. Alors que les schémas départementaux auraient dû être réalisés avant le 6 janvier 2002, la plupart ne sont encore qu'en cours de négociation, et l'on comprend pourquoi. Les maires sont en effet réticents à l'idée de voir s'installer des gens qui font peur à leurs administrés, qui font fuir les candidats à l'implantation d'activités et dont l'installation sera source de complications administratives et de coûts financiers.
    Je me suis personnellement investie en réunissant les élus pour étudier la création d'aires de grand passage.
    M. Gérard Léonard. Très bien !
    Mme Chantal Brunel. Le projet du Gouvernement prévoit des sanctions pour faire respecter le droit à la propriété privée et renforce le pouvoir des maires qui ont accepté de créer une aire d'accueil sur leur commune ou de participer à une telle création. Ces mesures sont positives mais toutes les difficultés ne seront pas résolues pour autant. Par exemple, les décisions d'expulsion peuvent-elles être réellement exécutées quand on sait que les effectifs et les moyens sont insuffisants ?
    M. Patrick Labaune. Très juste !
    Mme Chantal Brunel. L'expulsion de centaines de caravanes demande beaucoup d'hommes, beaucoup de matériel. La saisie des véhicules exige des dépanneuses. Or, dans notre département, il n'en existe qu'une douzaine.
    Et qu'en est-il des coûts financiers ?
    Certes, les investissements pour la création d'aires d'accueil sont pris en charge par les différentes structures - Etat, régions, départements - mais on imagine facilement les complications administratives liées à tous ces dossiers. En revanche, pour les frais de fonctionnement, les prises en charge sont moins assurées. Par exemple qui assurera le coût des procédures d'expulsion, lequel est loin d'être négligeable pour une petite commune ?
    L'action menée par le Gouvernement au cours des derniers mois est approuvée et louée. Le texte en discussion représente une grande avancée, mais j'ai voulu traduire l'inquiétude des élus de ma circonscription, qui demandent des moyens supplémentaires pour faire appliquer une loi extrêmement attendue et désirée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Serge Blisko.
    M. Serge Blisko. L'article 19, qui pose comme principe l'interdiction d'installation sans autorisation sur un espace public ou privé de toute personne en vue d'y établir une habitation, pose beaucoup de problèmes. Il pourrait d'ailleurs concerner chacun d'entre nous, ou nos enfants, si nous faisions du camping sauvage au sens large. Toutefois nous avons bien compris - et vos interventions, mes chers collègues, le montrent bien - que vous visiez implicitement la catégorie des gens du voyage. Si j'en crois le contexte qui prévaut depuis la LOPSI, laquelle a été en quelque sorte votre avant-propos à cette loi sur la sécurité intérieure, vous avez d'une manière relativement fréquente, et pour tout dire critiquable, concentré et focalisé vos critiques sur un groupe social. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jacques Myard. N'importe quoi !
    M. Lionnel Luca. Il fallait le dire hier soir !
    M. Guy Geoffroy. Créons une aire d'accueil dans le 13e arrondissement !
    M. Serge Blisko. Je ne comprends d'ailleurs pas comment on peut viser ainsi un groupe humain, car c'est tout à fait contraire au principe de la personnalisation des peines acquis depuis la Révolution française. Il s'agit d'une dérive préoccupante. Je n'avais jamais vu désigner ainsi un groupe humain.
    M. Patrick Labaune. Si : vous, c'est le grand patronat !
    M. Serge Blisko. Je voudrais que vous vous livriez à un exercice simple : remplacez les gens du voyage, dans les déclarations de tel ou tel, par un autre groupe régional ou ethnique présent en France et il y aura de quoi vous préoccuper quant à l'égalité des citoyens devant la loi. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jacques Myard. C'est lamentable d'entendre ça !
    M. Serge Blisko. Deuxièmement, vous désignez ainsi à la vindicte populaire une catégorie particulièrement maltraitée du point de vue économique. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jacques Myard. Nul !
    M. Serge Blisko. Toutes les caravanes des gens du voyage ne sont pas tirées par des Mercedes. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Philippe Cochet. Nous ne voyons pas les mêmes !
    M. Serge Blisko. Je rappelle que les seuls biens que possèdent ces personnes sont effectivement leur habitation et leur véhicule.
    M. Jacques Myard. Ça change effectivement des autres !
    M. Guy Geoffroy. C'est de l'aveuglement !
    M. Serge Blisko. Les statistiques du ministère des affaires sociales montrent que 70 % des gens du voyage recensés sont titulaires du RMI. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Patrick Labaune. Ça, ils savent faire !
    M. le président. Mes chers collègues, un peu de silence ! Laissez parler M. Blisko, s'il vous plaît !
    M. Serge Blisko. Certes, vous pouvez me répondre que cela n'empêche pas d'avoir de l'argent par ailleurs.
    M. Patrick Labaune. Ah !
    M. Serge Blisko. Bien entendu !
    Néanmoins, si l'on se penche sur les statistiques médicales réalisées par les services officiels du ministère des affaires sociales, on s'aperçoit que la durée de vie moyenne des personnes qui vivent dans ces conditions est de trente ans inférieure à celle des sédentaires. Si ces gens étaient riches et bien soignés, cela se saurait et se verrait !
    Effectivement, il y a un grave problème avec les gens du voyage. Les élus locaux l'ont tous dit. La loi Besson, dont parlait Mme David, représentait à cet égard une sortie « par le haut » et elle était raisonnable puisque nous assistons à un phénomène qui se développe depuis une dizaine d'années, la sédentarisation ou la semi-sédentarisation dans de mauvaises conditions.
    Monsieur le ministre de l'intérieur, tout cela est connu du ministère des affaires sociales et je m'étonne qu'on ne l'ait pas rappelé. Nous avons d'abord affaire à un groupe humain en pleine décrépitude sociale,...
    M. Jacques Myard. Arrêtez de les insulter !
    M. Serge Blisko. ... qui, contrairement à ce qui est dit parfois, n'est pas en expansion, mais en régression.
    La sédentarisation - ou la semi-sédentarisation - est donc nécessaire. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Monsieur le président, il est très difficile de parler dans ce climat !
    Nous ne sommes pas d'accord avec vous, mes chers collègues, laissez-nous le dire !
    On courrait un grave danger en entretenant la confusion à propos de cette population itinérante, mal connue en dépit de quelques études et de la mission qui s'en préoccupe au ministère des affaires sociales ; je rappelle que cette population est française depuis quatre ou cinq générations. Il s'agit donc d'un groupe de nos concitoyens qu'il faut aider, bien sûr, qu'il faut faire rentrer dans le cadre de la loi. On sait très bien, parce que c'est un problème qui date de plusieurs siècles, que ces personnes itinérantes éprouvent des difficultés à comprendre ce qu'est la loi commune. Nous n'allons pas changer ce que décrit notre littérature depuis cinq siècles : les sédentaires et les nomades ont bien du mal à se comprendre !
    Pour ma part, je préfère la démarche qui consistait à aménager des aires, mais en y adjoignant un travail social, médical, scolaire et culturel de nature à intégrer au mieux ces populations.
    Je vous rappelle que les sédentaires représentent, d'après les estimations du Gouvernement, 200 000 environ des 300 000 personnes recensées. Les motifs de déplacement sont certes économiques, mais aussi sociaux et religieux. La plupart des rassemblements qui posent des problèmes sont des rassemblements évangéliques.
    M. Pierre Cardo. Ce n'est qu'une partie du problème !
    M. Serge Blisko. De ce point de vue, je vous renvoie à ce que les églises catholique ou protestantes ont déclaré, et qui n'allait pas tout à fait dans le sens de l'article 19.
    M. le président. Monsieur Blisko, merci de conclure !
    M. Serge Blisko. Ne confondons pas nos ressortissants, qui ont des problèmes, avec les Roms qui arrivent aujourd'hui massivement d'Europe de l'Est et des Balkans.
    M. Patrick Labaune. Vous visez un groupe humain !
    M. Serge Blisko. En 2004, l'Union européenne s'ouvrira à des pays comme la Roumanie, la Slovaquie et la Hongrie, où de fortes minorités Roms vivent dans un état d'infériorité économique, sociale et culturelle très accusé. Légiférons-nous en pensant à ce qui va se passer en 2004, c'est-à-dire au déferlement quasiment inéluctable de dizaines de milliers de personnes ? Si nous ne prenons pas d'ores et déjà en considération ces différences énormes, bien plus importantes encore que celles qui existent dans notre pays, entre les gens du voyage et les sédentaires, nos petits dispositifs pas très au point seront alors complètement dépassés.
    M. le président. Merci monsieur Blisko !
    M. Serge Blisko. Réfléchissons-y ! Ce sont des questions graves et je voudrais qu'on les traite autrement que par la stigmatisation et l'à-peu-près.
    M. le président. Il faut vraiment conclure, monsieur Blisko !
    M. Serge Blisko. Monsieur le ministre, nous manquons cruellement d'outils statistiques fiables. Ne pourrions-nous pas créer une commission d'enquête parlementaire pour examiner la question, même s'il y a déjà eu de nombreux rapports ? Car je crois que nous faisons fausse route en ne réfléchissant pas à ce qui va arriver dans les deux ans qui viennent !
    M. le président. Mes chers collègues, avant de poursuivre le débat, je vous rappelle que le temps de parole est limité à cinq minutes. J'aimerais que vous vous y teniez. Sans quoi, nous risquons d'allonger les débats... et la séance de demain soir.
    M. Serge Blisko. Si seulement nous pouvions parler sans être interrompus !
    M. le président. La parole est à M. Jacques Myard.
    M. Jacques Myard. Monsieur le président, monsieur le ministre de l'intérieur, mes chers collègues, regardons les choses en face : il y a toujours eu des nomades dans notre pays. Tout le monde a en tête cette image d'Epinal de la caravane qui chemine le long de nos routes. Il n'y avait pas de problème autrefois mais, depuis une dizaine d'années, par esprit de système, comme on vient de le rappeler à l'instant, on a créé un appel d'air. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) On a voulu que tout le monde vive comme il l'entend dans notre société. Mais nous ne sommes pas dans les steppes de l'Asie centrale : nous sommes une société sédentarisée dans laquelle on vit selon certains us et coutumes, et l'on ne saurait revenir en arrière.
    L'esprit de 1968 est passé par là et les lobbies se sont mis à l'oeuvre. Chacun devait pouvoir vivre comme il l'entendait en ignorant les autres. Et une proposition d'origine parlementaire visant à créer des aires d'accueil a été introduite dans la loi Besson de 1990. On n'a fait que créer un appel d'air !
    Le problème existait, j'en conviens, mais il a été démultiplié par une démagogie facile.
    M. Bruno Le Roux. Ce que vous dites est scandaleux !
    M. Jacques Myard. Que le maire soit de gauche, de droite ou du centre, les incidents se multiplient dans nos communes. Les indigènes que nous sommes ne comprennent pas que les pouvoirs publics restent muets et ne fassent rien face à ce qu'on peut considérer comme une véritable dérive qui a détourné la loi de son objectif.
    Car s'il ne s'agissait que de quelques caravanes, qui, ici, en parlerait ? Le ministre de l'intérieur, homme avisé, aurait-il proposé de modifier la loi ? Certainement pas ! Il est clair, aujourd'hui, que le quantitatif - et c'est Karl Marx qui parle (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) -...
    M. Bruno Le Roux. Ça m'étonnerait !
    M. Jacques Myard. ... pose un problème qualitatif. Il ne sert à rien de se cacher derrière des dogmes surannés. Il vaut mieux apprécier et prendre en compte un phénomène qui nous assaille tous.
    Monsieur le ministre, la multiplication des aires est peut-être nécessaire dans certains cas, mais elle ne résoudra pas le problème. Je le dis tout net : elle ne fera que l'aggraver si l'on ne mène pas une politique globale d'insertion des nomades. Revenons à ce qui fut la grande politique de la IVe et du début de la Ve République, à savoir l'insertion. Il ne s'agit plus de mettre l'accent sur la volonté du nomadisme, il faut insérer véritablement ces populations.
    Que pensent donc ceux qui se prétendent les descendants de Jules Ferry quand ils voient tous ces enfants qui ne vont pas à l'école et dont on organise l'exclusion du système républicain ? Moi, j'ai honte !
    Plusieurs députés du groupe Union pour la démocratie française. C'est vrai !
    M. Jacques Myard. La solution n'est pas de laisser toutes ces populations errer sur les routes de France et d'Europe. Nous devons changer de politique, c'est incontestable.
    Aujourd'hui, monsieur le ministre, vous nous proposez un premier pas, bien modeste, avouez-le, car il ne suffit pas de créer un délit pour que tout rentre dans l'ordre. Je crois que vous aurez le soutien des maires, quelle que soit leur couleur politique, si effectivement, demain, la France met en oeuvre une politique d'insertion et de sédentarisation, afin que le nomadisme ne soit que l'exception et revienne dans des limites beaucoup plus acceptables pour notre société. Il faut se méfier de l'esprit de système dans lequel certains, à gauche, font merveille ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. la parole est à M. Jean-Jacques Descamps.
    M. Jean-Jacques Descamps. Monsieur le ministre, j'ai déjà eu l'occasion de vous remercier d'avoir pris en considération le difficile et grave problème des gens du voyage dans votre projet de loi. Effectivement, c'est un sujet délicat puisqu'il s'agit, pour les maires - et tous les maires de France sont confrontés à ce problème -, d'accueillir, sur le territoire de leur commune, une population certes parfaitement respectable, monsieur Blisko, nous le savons tous, en particulier pour sa partie semi-sédentarisée que l'on voit revenir dans nos communes très régulièrement et dont on connaît les familles et les enfants, mais dont le mode de vie ne correspond pas à celui de nos populations habituelles, ce qui crée un problème.
    Les maires de France ont joué le jeu. Je l'ai joué moi-même dans ma commune et ma communauté de communes. Nous avons établi un schéma départemental que nous appliquons. J'ai créé une aire principale ; nous créons des aires secondaires. Mais nous avons déjà subi, par deux fois, une dégradation complète de l'aire principale. Nous avons cherché, comme vous le disiez, monsieur Myard, à réaliser l'intégration, par exemple par la scolarisation. J'ai écrit à tous les nomades pour leur dire : « Vous êtes au RMI, pensez à éduquer vos enfants. » Ils ont joué le jeu aussi et, cette année, nous avons eu quatre-vingts élèves de plus dans les écoles venant du milieu des gens du voyage. Ce n'est d'ailleurs pas simple : dans quelle école les inscrire ? Avec quelle assurance ? Mais, surtout, nous avons vu arriver encore plus de gens du voyage.
    M. Jacques Myard. Et voilà !
    M. Jean-Jacques Descamps. Ainsi, plus nous jouons le jeu, plus nous avons de difficultés !
    Il fallait donc, un jour ou l'autre, prendre des mesures sévères pour encadrer l'occupation des terrains par les gens du voyage, parce que, nous le savons bien, nous n'avons pas assez de place.
    Vous nous proposez un texte à cet effet, monsieur le ministre, mais sachez que je soutiendrai l'amendement de la commission des lois, parce qu'on ne peut pas s'occuper que des terrains de la commune. Il faut aussi se préoccuper de ceux des propriétaires privés, qui souvent ne sont pas là car il s'agit de résidences secondaires ou d'usine fermées le week-end et dont les parkings sont occupés. Il faut penser aussi aux communes voisines, parce que leurs terrains sont aussi les nôtres, d'une certaine façon, et l'amendement de M. Garrigue est lui aussi très justifié.
    Monsieur le ministre, vous avez prévu des sanctions financières et des sanctions d'emprisonnement, ainsi que la saisie des véhicules. Je soutiendrai aussi l'amendement visant à assurer plus de transparence quant à la situation financière d'une large partie de cette population, lorsqu'il n'y a pas cohérence entre le train de vie et le revenu déclaré, en particulier pour bénéficier du RMI. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Je souhaiterais, au-delà des amendements que nous allons adopter, que s'ouvre à nouveau une réflexion interministérielle sur ces problèmes qui dépassent les simples questions de sécurité. Comme M. Myard, je voudrais que nous posions le problème de l'intégration des gens du voyage sous tous ses aspects, de façon que ces populations aient les mêmes droits et les mêmes devoirs que celles que nous avons l'habitude d'administrer ou, plus exactement, que les populations que nous avons l'habitude d'administrer aient l'impression qu'il n'y a pas deux poids, deux mesures pour le respect des lois républicaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Lionnel Luca.
    M. Lionnel Luca. Monsieur le ministre, merci de vous être préoccupé des difficultés que les maires éprouvent pour régler des problèmes parfois insolubles et face auxquels ils sont totalement démunis.
    Une de nos collègues a rappelé tout à l'heure l'historique de la loi Besson, et à juste titre, en disant que, malheureusement, et bien que soit créé à chaque fois un groupe d'étude sur les gens du voyage, on avait toujours l'impression que le texte arrivait en dernière minute et qu'on procédait par étapes, sans avoir une vision globale des choses.
    Il est vrai que la dernière étape de la loi Besson a un peu amélioré la situation, dans la mesure où elle a donné aux collectivités les moyens de réaliser des aires d'accueil, mais pas de remédier aux destructions. Car la remise en état des aires détruites n'est pas subventionnée. Cela pose le problème de fond de la loi Besson, que je souhaite voir améliorée dans le projet de loi relatif à l'urbanisme. Son application se heurte à deux obstacles : des structures d'accueil trop lourdes et des exigences coûteuses, malgré les subventions, sont dissuasives, d'autant que, en cas de destruction, il faut remettre en état à ses frais. Comment expliquer aussi qu'on doive y consacrer des sommes aussi considérables dans les petites communes ?
    Autre problème : l'obligation n'est imposée qu'aux communes de plus de 5 000 habitants, c'est-à-dire les plus urbanisées, où on a le plus de difficultés pour trouver des terrains. Dans un département que je connais bien, les Alpes-Maritimes, nous avons une situation assez particulière : 900 000 habitants vivent sur 10 % du territoire, dans la conurbation qui va de Théoule-sur-Mer à Menton. Comment voulez-vous trouver des terrains pour réaliser les équipements publics nécessaires et, a fortiori, des aires d'accueil qui, eu égard à l'environnement touristique, engendrent des difficultés pour ceux qui travaillent ? Ils seraient pénalisés car de tels équipements ne peuvent être sans conséquences sur la valeur même de leurs biens. Sans oublier ceux qui se sont endettés pour acquérir un bien et qui ne sont pas forcément enthousiasmés à l'idée de voir une aire d'accueil se créer à proximité, non pas simplement par « rejet de l'autre » mais parce que ce voisinage mal vécu ne va pas « anoblir » le quartier dans lequel ils vivent.
    Voilà des réalités concrètes. On ne saurait faire le reproche aux maires de ne pas vouloir appliquer la loi, car bien souvent, même lorsqu'ils se tournent vers les services de l'Etat, notamment les DDE, pour les aider à trouver des terrains, cela se révèle difficile. Dans notre département d'ailleurs, les services de la DDE n'ont trouvé qu'une dizaine de terrains, dont seulement deux étaient publics. Les autres étant des terrains privés, cela sous-entend des procédures d'expropriation, longues, qui ne peuvent que différer l'application de la loi.
    Monsieur le ministre, je considère que si l'article 19 représente un progrès notable, il n'en demeure pas moins qu'on ne doît pas s'en remettre à la seule application de la loi Besson pour les schémas départementaux. Selon les départements et les lieux, il faudrait pouvoir faire preuve d'une certaine souplesse. Je souhaiterais pour ma part que l'on prévoie, dans le cadre de l'intercommunalité, une dérogation à cette obligation pour les communes les plus urbanisées, de plus de 5 000 habitants, d'une part, et, d'autre part, qu'au lieu d'aires d'accueil très lourdes et très coûteuses, on puisse revenir aux simples aires de stationnement, plus souples, plus sommaires, mais avec des normes sanitaires et d'équipement indispensables à la vie collective, et qui permettent un stationnement de deux à cinq jours, et non pas de trois mois, comme c'est le cas avec la loi Besson aujourd'hui. Peut-être qu'avec des structures de ce type qui ne remplaceraient pas les premières, on pourrait avoir des schémas départementaux plus souples, modulés en fonction de la situation, et qui garantiraient l'accueil que nous devons effectivement aux gens du voyage et qu'il ne s'agit évidemment pas d'empêcher. Aucun maire sensé ne le dit ; il est simplement pris dans des contraintes. Si nous pouvions améliorer la loi Besson, je le répète, dans la future loi sur l'urbanisme, on pourrait parvenir à un équilibre.
    Enfin, le ministre de l'intérieur pourrait-il demander à son collègue des finances de rappeler à ses services fiscaux qu'ils peuvent mener des enquêtes sur des achats de terrain, sur l'occupation très particulière par des caravanes, en dehors de toute réglementation de terrains situés en zone agricole, parfois inondable, ce qui crée des difficultés pour l'application des PPR ? Ce sont de véritables petits centres, où personne ne pénètre et d'où partent un certain nombre de trafics, en particulier des réseaux de mendicité dont nous parlerons plus tard. Ce serait, pour nous tous, une bonne nouvelle. Ainsi nous n'aurions plus à nous interroger sur le fait que l'on puisse, bien que RMIste, posséder un véhicule peu en rapport avec cette situation sociale.
    En tout cas, merci pour cette avancée et merci de continuer avec la représentation nationale et vos collègue de l'équipement et des services fiscaux, à travailler dans le bon sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Eric Woerth.
    M. Eric Woerth. Enfin, on s'attaque au problème. Bien évidemment, il ne s'agit ni de stigmatiser ni de montrer du doigt telle catégorie sociale ou telle population. Mais, quand il y a un problème, il faut le régler. Et, c'est clair, il y a un problème avec les gens du voyage. Tout le monde le sait, on ne vit pas dans un Etat éthéré, dans un paradis sur terre, on vit en France, et les Français se rendent bien compte que le phénomène de l'occupation illégale et sauvage des terrains s'est considérablement développé.
    Les traditions de nomadisme auxquelles ont fait référence plusieurs de nos collègues ne sont plus, en France, ce qu'elles étaient il y a une dizaine ou une quinzaine d'années. Ces populations et leurs modes de vie ont considérablement évolué.
    La population française est aujourd'hui exaspérée par ces installations sauvages imposées par la force, par un train de vie souvent provocant, que trahissent des voitures ou des caravanes luxueuses, sans rapport réel avec la situation économique présumée des gens du voyage, par l'accroissement aussi, il faut le dire, des délits, notamment des vols, sur les territoires où ils se sont implantés en nombre.
    Les élus, les maires, mais aussi les représentants de l'Etat, les sous-préfets, qui ont souvent à connaître de ces problèmes, sont totalement démunis, en raison du manque de bases juridiques, de la peur du dérapage, de la peur de l'engrenage de la violence, du coût des procédures, notamment de référé, pour les petites communes.
    Il fallait donc que la législation évolue. Celle qui est en vigueur partait d'un bon sentiment : mais, une fois qu'on avait défini les schémas départementaux, on en restait là, faute de contrepartie en termes d'autorité ou d'ordre. A quoi bon s'engager dans le processus du schéma départemental pour les gens du voyage si c'était uniquement pour offrir des terrains gratuits qui seraient dégradés et ruinés ? Aujourd'hui, la loi évolue et les propositions vont dans le bon sens. Oui au respect des modes de vie, mais non lorsque les lois sont bafouées. Personne ne peut imposer son mode de vie au détriment de la liberté d'autrui. Le texte proposé est donnant-donnant, gagnant-gagnant. Peu à peu, dans tous les départements, nous allons peut-être essayer de travailler plus en profondeur sur les schémas départementaux. Tout le monde sait que ce n'est pas facile. Les maires ne s'empressent pas de mettre un terrain à disposition et créer une zone d'accueil. Ils ont d'ailleurs bien du mal à expliquer à leurs administrés qu'ils doivent créer des aires d'accueil des gens de voyage. Ce sera certainement plus facile à partir du moment où une contrepartie sera prévue, comme nous le propose le texte. A ce propos - je réagis à ce que disait l'un de nos collègues -, certains ministères sont riches en réserves foncières et l'Etat pourrait proposer des terrains, mettre certaines de ces réserves dans l'escarcelle.
    Ce texte devra être suivi d'effet, mais il devra aussi être accompagné, en premier lieu, par un travail en profondeur avec les préfets, pour élaborer les schémas départementaux qui n'ont pas été bouclés, le consensus étant difficile à obtenir.
    Il faudra également définir ce qu'est un rassemblement évangélique, tant sur le fond que sur la durée. On ne fait pas de l'évangélisation pendant un mois ou un mois et demi, avec cent cinquante ou deux cents caravanes, dans un village de deux cents habitants. L'évangélisation à ce prix-là est difficile à accepter. Il faudra aussi voir comment surveiller les aires d'accueil des gens du voyage pour éviter qu'elles ne soient pillées ou dégradées, et, pour ce faire, il conviendra de laisser un peu de liberté aux élus, en liaison avec la préfecture.
    M. Jean-Jacques Descamps. Très bien !
    M. Eric Woerth. Ces aires sont parfois occupées par des nomades sédentarisés et les gens du voyage sont obligés d'aller ailleurs. Il faudra, comme l'ont dit mes collègues, enquêter sur leurs sources de revenus, qui sont un mystère pour tout un chacun, mais je sais, monsieur le ministre, que, avec vos collègues, vous avez pris de nombreuses initiatives dans ce domaine.
    Enfin, comme pour toute loi, il faudra évaluer la pertinence du dispositif, mais très vite, après une ou deux saisons d'application, pour veiller à ce que l'efficacité prédomine.
    Quoi qu'il en soit, le texte qui nous est proposé va dans le bon sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Pour nous, cet article est dangereux. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Patrick Labaune. C'est bon signe !
    M. André Gerin. Le problème du stationnement des gens du voyage n'est pas nouveau : depuis trente ans, on se renvoie la patate chaude. La première loi intéressante et utile a été la loi Besson, mais il s'en faut de beaucoup qu'elle ait été mise en oeuvre.
    M. Pierre Cardo. Elle ne répond pas aux besoins ! Nous parlons des grands rassemblements !
    M. André Gerin. Contrairement à ce que vous pensez, je ne conteste pas la réalité des problèmes. Notre groupe a d'ailleurs proposé des mesures d'urgence pour l'aménagement d'aires d'accueil provisoires, en concertation avec les collectivités locales et sous l'autorité du Gouvernement et des préfets.
    Votre projet ne nous paraît pas promouvoir des solutions équitables. Il risque même de marginaliser ces modes de vie. Nous sommes pour l'application normale et équitable de la loi aux gens du voyage, avec la même fermeté que pour tous les autres citoyens. Cela vaut naturellement pour les signes extérieurs de richesse. D'ailleurs, sur cet aspect, il y a déjà une législation. Mais le texte que vous proposez nous semble de nature à réduire petit à petit la situation des gens du voyage à celle de SDF. Voilà pourquoi je m'oppose catégoriquement à cette pénalisation.
    M. Jacques Myard. Le dogmatisme a la vie dure !
    M. le président. La parole est à M. Guy Geoffroy.
    M. Guy Geoffroy. Comme beaucoup de mes collègues, j'ai quelques références sur la question des gens du voyage. Chacun de nous rencontre régulièrement les gens du voyage à l'occasion de leurs pérégrinations et de leurs implantations, la plupart du temps anarchiques et sauvages, tant sur les espaces publics que sur les espaces privés. Je mets tout de suite à l'aise nos collègues de l'opposition : je suis élu d'une agglomération plutôt exemplaire en la matière, qui, depuis dix ans, a implanté sur son territoire des aires d'accueil, mis en place un réseau de gestion des terrains d'accueil, et qui scolarise régulièrement les enfants des gens du voyage. Récemment encore - monsieur le ministre, vous connaissez ce dossier lourd, douloureux et toujours délicat -, nous avons pris en charge un nombre appréciable de familles roumaines, qui s'étaient regroupées dans un véritable ghetto sur la commune de Lieusaint. Nous sommes en train, petit à petit, de régler le problème en apportant à celles de ces familles que nous pouvons garder sur notre territoire tout ce qui leur est dû, mais également en leur rappelant leurs obligations.
    Nous sommes donc dans une situation où nous pourrions bénéficier en retour de la plus grande tranquillité. Or il n'en est rien. Comment le maire d'une commune qui a vingt places d'accueil ordinaires de gens du voyage, qui demain, dans le cadre du schéma départemental, en aura quarante, et qui s'apprête - ce sera probablement la seule solution possible - à aménager une aire de grand passage pour cent à cent cinquante caravanes, peut-il accepter, alors qu'il a toujours été en conformité avec la loi et est disposé à consentir des efforts supplémentaires, d'être régulièrement envahi par cent à cent cinquante caravanes sous les motifs les plus futiles, dans les conditions les plus délicates et les plus douloureuses, qui rendent les habitants sédentaires totalement hostiles, ce qui est anormal, à ce type de population ?
    Je me suis autorisé cet historique un peu personnel, monsieur le ministre, pour dire que votre loi, notamment son article 19, est particulièrement attendue et nécessaire. Nous ne traiterons cette question que lorsqu'il y aura un parfait équilibre entre les responsabilités de chacun. Dans le cadre des schémas, les communes ou groupements de communes ont des responsabilités à assumer et elles sont prêtes à le faire si l'Etat, de son côté, assume les siennes en ce qui concerne les aires de grand rassemblement. Ces grands rassemblements ne doivent pas créer une perturbation supplémentaire pour celles et ceux qui ont joué le jeu de la loi.
    Aussi, les amendements qui ont été présentés et retenus en commission des lois sont probablement utiles, voire nécessaires. Ils amélioreront ce texte et protégeront non seulement les communes concernées par les schémas, mais également celles qui n'ont pas été inscrites dans les schémas, et qui, demain, ne doivent pas souffrir de cette situation.
    Aussi, je vous demande de faire en sorte que l'Etat veille à deux aspects bien particuliers du problème. Le premier, c'est la cohérence des schémas départementaux entre eux, parce que, d'un département à l'autre, il n'y a pas beaucoup de chemin, et il faut veiller à ce qu'il n'y ait ni surabondance ni absence totale d'aires sur des territoires qui sont très proches mais concernent deux départements.
    Le deuxième aspect qui relève également de la responsabilité de l'Etat, c'est l'aide qui doit absolument être apportée par lui ainsi que par la région et le département pour permettre aux communes ou à leurs groupements de gérer ces questions, tant en investissement qu'en fonctionnement, de manière loyale et responsable, non seulement vis-à-vis des gens qu'ils accueillent sur leur territoire, mais également - pourquoi pas ? - vis-à-vis de leurs populations.
    Voilà, monsieur le ministre, les commentaires que je souhaitais faire sur cette question, qui appellera certainement, comme mes collègues l'ont déjà dit, une remise à plat complète, pour que la dignité de chacun s'accompagne du respect de tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à Mme Christine Boutin.
    Mme Christine Boutin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes au coeur d'une problématique qui oppose des intérêts divergents : la liberté d'aller et de venir, le droit de propriété, la sécurité, le respect de la dignité de tous, y compris de ceux qui ont des habitudes de vie différentes des nôtres.
    Il ne s'agit pas de stigmatiser qui que ce soit. Lorsque l'on parle de gens du voyage aujourd'hui, on désigne aussi bien des hommes, des femmes, des enfants qui respectent le bien d'autrui, tout en ayant des habitudes de vie différentes, que tous ceux qui, relevant de réseaux mafieux, volent, pillent et nuisent à l'image des honnêtes gens, toute la difficulté est là.
    J'ai l'honneur de représenter une circonscription d'Ile-de-France particulièrement touchée par la deuxième catégorie, celles des délinquants qui s'en prennent aux populations, aux entreprises et aux élus locaux. Le texte que vous nous proposez, monsieur le ministre, peut être défini par l'affirmation de ce principe : le droit à la différence, mais pas de différence des droits. (Applaudissements sur les bancs de l'Union pour la majorité présidentielle.) C'est pourquoi je le soutiendrai.
    Toutefois, après avoir consulté des élus particulièrement éprouvés - certains même, dans ma circonscription, ont dû être hospitalisés -, je vous proposerai quelques amendements permettant de mieux respecter ce droit à la différence, sans différence des droits.
    Je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir, lors de l'examen du texte en juillet, confié aux GIR une compétence accrue dans ce domaine. Cette décision a été fort appréciée et donne déjà des résultats. Les élus sont prêts à réaliser des aires de stationnement s'ils ont la certitude d'avoir des moyens efficaces.
    Les gens du voyage sont inquiets. Il faut leur montrer que nous n'avons aucune intention de les stigmatiser ou de les discriminer. C'est pourquoi je vous avais proposé, en juillet, la création d'une commission d'enquête pour que cessent les amalgames et pour réhabiliter ceux qui doivent l'être. Le droit à la différence, sans différence de droits passe par cet examen au fond. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère ont présenté un amendement, n° 334, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 19. »
    La parole est à Mme Martine Billard.
    Mme Martine Billard. J'ai écouté avec un grand intérêt l'intervention de Mme Boutin, car ce qui m'a frappé, chez nombre d'orateurs, c'étaient précisément les amalgames.
    M. Jacques Myard. Oh !
    M. Philippe Cochet. Et à Paris, il y a des aires d'accueil ?
    Mme Martine Billard. Paris est un département qui, aujourd'hui, ne respecte pas la loi Besson (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), mais l'équipe municipale actuelle prévoit la création d'une aire de stationnement.
    Mme Marie-Jo Zimmermann. Dans votre arrondissement ?
    Mme Martine Billard. Cela peut sembler bizarre mais nous avons un problème de stationnement des gens du voyage, notamment de ceux dont un parent est soigné dans nos hôpitaux. Il est normal que la ville de Paris réponde à ce besoin et elle a prévu de le faire.
    On fait l'amalgame entre les gens du voyage « traditionnels » et des populations venues de pays où elles vivaient dans la misère et étaient soumises à des discriminations. Elles ont afflué chez nous à la recherche d'un monde meilleur, comme le font spontanément beaucoup d'autres humains sur la planète. La première nécessité c'est donc d'essayer de travailler avec les pays d'origine - dont certains vont entrer dans l'Europe - pour qu'ils leur offrent des conditions de vie leur permettant de rester chez eux.
    M. Yves Fromion. Mais ce sont des nomades !
    Mme Martine Billard. D'autre part, j'ai bien entendu les remarques à propos des aires d'accueil dégradées, mais je me demande pourquoi l'on ne propose pas une mesure prévoyant que les personnes responsables de la dégradation d'un terrain doivent assurer sa remise en état. Cela semblerait pourtant normal. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jacques Masdeu-Arus. Vous rêvez !
    Mme Martine Billard. Ce que l'on a dit sur la transparence financière est fantastique et je suppose qu'on va adopter la même position dans tous les cas où cette transparence financière est nécessaire. Nous saurons en tout cas nous en souvenir lorsque des entreprises, profitant des vacances, disparaissent dans la nature et que les salariés, revenant de congé, trouvent un entrepôt vide. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Guy Geoffroy. Ça n'a rien à voir ! Si ce n'est pas un amalgame !
    Mme Martine Billard. Je suppose que, dans ce cas-là aussi, vous allez agir pour obtenir la transparence financière.
    Je dirai à certains orateurs qu'il faudrait peut-être arrêter l'hypocrisie. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Guy Geoffroy. C'est une experte qui parle !
    Mme Martine Billard. Que ceux qui pensent que, aujourd'hui, on ne peut pas être nomade en France, que c'est un refus du mode de vie dit « normal », que ceux-là aillent jusqu'au bout de leur pensée et proposent un amendement interdisant d'être gens du voyage.
    Mme Chantal Brunel. Mais non !
    Mme Martine Billard. Ce serait plus clair que cette hypocrisie consistant à réprimer toute une catégorie de population. Proposer de suspendre le permis de conduire et de confisquer des véhicules revient finalement à interdire de circuler.
    M. Jacques Myard. Mais puisque vous voulez qu'on roule à bicyclette, ça devrait vous convenir !
    M. le président. Monsieur Myard !
    Mme Martine Billard. Que leur proposez-vous ? De faire tirer leurs caravanes par des chevaux ou par des boeufs ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Cet article est une très mauvaise solution, car il stigmatise toute une catégorie de la population, tous les gens du voyage.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 334.
    M. Christian Estrosi, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Mme David a dressé un état des lieux réaliste de l'application de la loi Besson et des préoccupations que connaissent nombre de nos communes et de nos concitoyens face aux gens du voyage. De même, Mme Brunel, M. Geoffroy, Mme Boutin, M. Myard, M. Descamps ont fait preuve de beaucoup de réalisme et de pragmatisme, et Lionnel Luca a évoqué la diversité géographique et urbanistique de notre pays et la difficulté d'appliquer la loi Besson en raison de la variété des situations démographiques.
    En revanche, Mme Billard s'est inscrite dans le prolongement de l'intervention de M. Gerin et de M. Blisko. Celui-ci a été le plus caricatural des trois et j'ai relevé chez lui de nombreuses contradictions. En effet, d'un côté, il estime qu'on ne peut pas reprocher aux gens du voyage de s'acheter des Mercedes ou des BMW si tel est leur bon plaisir, et, de l'autre, il reconnaît que 70 % d'entre eux - j'ignorais ce chiffre qu'il a porté à notre connaissance - vivent du RMI. C'est tout de même une sacrée contradiction !
    Monsieur Blisko, vous donnez de belles leçons de morale à tout le monde, mais, en vous entendant, je me demandais si l'amendement qu'avait proposé M. Charasse au Sénat, et qui consistait à imposer à chaque maire d'arrondissement, de Paris d'assumer ses responsabilités dans ce domaine, n'aurait pas pu s'appliquer dans le XIIIe arrondissement dont vous êtes le maire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)

    M. Guy Geoffroy. Absolument ! Et je prendrai part à l'inauguration de cette aire de stationnement !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. M. Gerin a dit que cet article était dangereux. Vous, madame Billard, vous avez parlé d'amalgame. Mais, en vérité, de quoi s'agit-il ?
    La commission a effectué durant près de deux mois et demi des travaux de grande qualité et rencontré pratiquement toutes les associations représentatives des gens du voyage, avec lesquelles elle a tenté d'établir des statistiques. Vous avez dit notamment, madame Billard, qu'il fallait prendre contact avec un certain nombre de pays étrangers pour que les problèmes d'insertion soient plutôt réglés chez eux que chez nous. Mais sachez qu'une grande part de la population nomade dans notre pays est d'origine tzigane, que 35 % de celle-ci est sédentarisée, 35 % semi-sédentarisée et 30 % itinérante, et que, dans sa grande majorité, elle est de nationalité française. (« Bien sûr ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    C'est donc à nous, essentiellement, qu'il revient de régler ce problème. En effet, même si la loi Besson apportait une partie de la réponse, elle n'en apportait qu'un volet...
    M. Guy Geoffroy. Absolument !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... et il fallait lui en donner un second.
    Pour la première fois, on a le courage de passer à l'action et d'apporter la deuxième réponse,...
    M. Guy Geoffroy. C'est l'équilibre !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... qui est le complément indispensable de la première, et sans laquelle rien ne pourra être réglé dans notre pays. (« Très juste ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Je tiens donc à remercier le Gouvernement et, en particulier, le ministre de l'intérieur d'avoir eu le courage et la lucidité de s'attaquer à ce problème.
    M. Gérard Léonard. Très bien !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Pour que nous sachions de quoi nous parlons quand nous évoquons la loi Besson, je voudrais préciser quelques chiffres : aujourd'hui, il y a 116 aires permanentes d'accueil dans notre pays, soit 2 669 places, alors que le nombre de places nécessaires a été évalué avec l'ensemble des associations représentatives des gens du voyage à 35 000 ; on compte 17 aires de grand passage, alors qu'il en faudrait 246 ; seuls 29 schémas départementaux ont été signés, tandis que 12 devraient l'être prochainement et que 42 sont en cours d'élaboration. S'agissant de ce dernier point, je rappelle que ces schémas auraient dû être adoptés avant le 6 janvier 2002, et que, passé ce délai, l'article 1er de la loi du 5 juillet 2000 prévoit expressément qu'ils sont approuvés par le représentant de l'Etat dans le département.
    Mme David a rappelé le laxisme qui a prévalu en ce domaine.
    Mme Martine David. Je n'ai pas employé ce mot-là !
    M. Patrick Labaune. N'hésitez pas à l'employer !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Moi, je l'emploie. Réellement, les élus ont fait preuve de laxisme dans la mise en oeuvre de la loi Besson. Sans doute n'ont-ils pas déployé suffisamment d'énergie pour mettre en oeuvre, dans tous les départements de France ces schémas départementaux. Toutefois, je relève aussi que l'Etat lui-même, par le biais de ses préfets, n'a pas non plus réagi dans les délais impartis, avec l'autorité que lui conférait la loi Besson, pour pallier la défection des élus. Et c'est sans doute parce que chacun a pris conscience de la difficulté qu'il y avait à appliquer cette loi.
    Je crois utile d'ajouter, pour éclairer le débat, que c'est sous le gouvernement de M. Jospin, en 1997, qu'a été mise en place, sous l'égide des ministères de l'intérieur, de la justice et de la défense, une cellule interministérielle de liaison sur la délinquance itinérante, qui a été confiée, notamment, à la gendarmerie. Or j'observe que c'est cette commission qui a révélé qu'un rapport de 1994 de l'Institut des hautes études sur la sécurité intérieure indiquait qu'un tiers des 147 000 occupants d'habitations mobiles officiellement recensés en France auraient été condamnés comme auteurs, coauteurs ou complices de délits ou de crimes. Ce n'est pas faire un amalgame que de regarder lucidement les problèmes et de les évoquer.
    J'ajoute que, pour la seule année 2001, ladite commission impute à cette population le pillage de 429 distributeurs de billets, plus de 1 000 vols de coffres-forts, plus de 2 400 vols de fret, plus de 1 000 raids à la voiture-bélier et plus de 2 500 vols par ruse ou avec violence contre des personnes âgées.
    Est-ce à dire que l'on est forcément délinquant lorsque l'on est tzigane ou nomade ?
    M. Jacques Myard. Bien sûr que non !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Bien évidemment, chacun sur ces bancs a tenu à affirmer le contraire et a voulu démontrer que le présent texte permettrait de parvenir à un parfait équilibre, en protégeant les gens du voyage - qui, pour la plupart, sont des gens scrupuleusement respectueux des règles en vigueur dans notre pays -, tout en apportant des solutions aux problèmes périphériques posés par certains itinérants.
    Nous ne voulons pas jeter l'anathème sur une catégorie de population déterminée, pas plus que vous ne pouvez affirmer qu'il n'existe pas de délinquance itinérante. Retenez ce chiffre, mes chers collègues : pour la seule année écoulée, le coût pour le contribuable français des procédures, des destructions, de la mise en place de portiques de protection, de l'aménagement de murs, de grillages et de sanitaires s'est élevé à 200 millions d'euros. C'est un chiffre que nous ne pouvons pas ignorer.
    Oui, cette loi et l'article 19 apportent de réelles réponses aux problèmes qui se posent. Beaucoup d'entre vous, comme tous nos concitoyens, osons-le dire ici, ne peuvent plus accepter de voir des personnes s'installer sans droit ni titre sur des propriétés publiques ou privée...
    M. Guy Geoffroy. Evidemment !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... se brancher sur les réverbères pour bénéficier de l'électricité sans verser la moindre contribution, se brancher sur les bouches à incendie pour s'alimenter en eau potable sans autorisation, ou encore s'installer au-dessus des nappes phréatiques sans respecter les moindres règles sanitaires. Or les élus locaux sont totalement dépourvus de moyens juridiques pour faire face à de telles situations.
    M. Yves Fromion. Voilà un rappel utile !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Avec ce texte, nous allons enfin apporter des réponses concrètes à ces types de problèmes, en donnant les moyens juridiques d'agir aux forces de l'ordre et à la justice et en protégeant les propriétés privées. A cet égard, je remercie la commission des lois d'avoir apporté une solution complémentaire à celle fournie par le Sénat pour encadrer les conditions dans lesquelles les élus pourront agir ou seront protégés, notamment ceux des communes qui ne participent pas aux schémas départementaux.
    Je souhaite, bien sûr, que cet amendement de suppression soit rejeté. Mais, au-delà du pragmatisme qui s'est manifesté sur tous les bancs de l'Assemblée, je souhaite que nous soyons capables, collectivement, de nous doter de l'arsenal législatif propre à assurer à notre pays un équilibre entre répression et humanisme.
    Chacun a des droits et des devoirs, les gens du voyage comme les collectivités locales : ceux-ci doivent être respectés et appliqués. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la Démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, pour donner l'avis du Gouvernement sur cet amendement.
    M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis que la commission.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 334.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Estrosi, rapporteur, MM. Geoffroy, Vanneste, Quentin et Luca ont présenté un amendement, n° 93, deuxième rectification, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 19 :
    « Le code pénal est ainsi modifié :
    « I. - Après l'article 322-4, il est inséré un article 322-4-1 ainsi rédigé :
    « Art. 322-4-1. - Le fait de s'installer en réunion, en vue d'y établir une habitation, même temporaire, sur un terrain appartenant soit à une commune qui s'est conformée aux obligations lui incombant en vertu du schéma départemental prévu par l'article 2 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage ou qui n'est pas inscrite à ce schéma, soit à tout autre propriétaire autre qu'une commune, sans être en mesure de justifier de son autorisation ou de celle du titulaire du droit d'usage du terrain, est puni de six mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende.
    « Lorsque l'installation s'est faite au moyen de véhicules automobiles, il peut être procédé à leur saisie, à l'exception des véhicules destinés à l'habitation, en vue de leur confiscation par la juridiction pénale. En cas de disproportion marquée entre la valeur des véhicules et les revenus de leurs propriétaires, ces derniers ne peuvent obtenir la restitution de leur bien sans avoir justifié des moyens et de la légalité de leur acquisition. »
    « II. - Après l'article 322-15, il est inséré un article 322-15-1 ainsi rédigé :
    « Art. 322-15-1. - Les personnes physiques coupables de l'infraction prévue à l'article 322-4-1 encourent les peines complémentaires suivantes :
    « 1° La suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire ;
    « 2° La confiscation du ou des véhicules automobiles utilisés pour commettre l'infraction, à l'exception des véhicules destinés à l'habitation.
    « En cas de disproportion marquée entre la valeur des véhicules et les revenus de leurs propriétaires, ces derniers ne peuvent obtenir la restitution de leur bien sans avoir justifié des moyens et de la légalité de leur acquisition. »
    Sur cet amendement, M. Lagarde et M. Perruchot ont présenté un sous-amendement, n° 454, ainsi libellé :
    « Après le mot "saisie, rédiger ainsi la fin du dernier alinéa du I de l'amendement n° 93, deuxième rectification : ", en vue de leur confiscation par la juridiction pénale, à l'exception des véhicules destinés à l'habitation, qui peuvent faire l'objet de sanctions pécuniaires journalières en cas de maintien sur un des terrains visés par le premier alinéa. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 93, deuxième rectification.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. J'ai déjà longuement commenté cet amendement dans mon intervention précédente : il est défendu.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, sous réserve, monsieur le rapporteur, que l'on puisse supprimer l'obligation, qui figure au troisième alinéa du I et au deuximèe alinéa du 2° du II, de justifier des moyens et de la légalité de l'acquisition des véhicules confisqués préalablement à leur restitution, sachant que c'est, par définition, la mission des GIR, laquelle doit être menée à bien.
    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. En prévoyant la saisie des véhicules en vue de leur confiscation, vous introduisez dans le code de procédure pénale, monsieur le rapporteur, une procédure de saisie dont la nature reste à déterminer. Actuellement, ce code ne prévoit que les saisies judiciaires.
    Une saisie ne peut viser « que les objets et documents utiles à la manifestation de la vérité ». La seule dérogation prévue concerne la saisie des espèces, des lingots, des effets ou des valeurs.
    Manifestement, la saisie prévue dans cet amendement ne répond pas à cette exigence, sauf s'il est démontré que la saisie des véhicules des gens du voyage est utile à la manifestation de la vérité.
    En réalité, la saisie que vous nous proposez vise à faire cesser un trouble à l'ordre public - tout au moins, dans votre esprit - sans encadrement d'usage, puisque la durée de la saisie est sans limite, et sans que le procureur de la République ne l'autorise.
    Je tiens à signaler ici qu'en aucun cas il n'est possible de saisir sur le fondement d'une gêne sans respecter les garanties minimales, ou de saisir sur une infraction et de profiter de l'occasion pour rechercher une autre infraction qui n'aurait pas en soi justifié la saisie.
    A cet égard, la condition que veut poser M. le ministre est importante, même si on voit bien que, dans cette affaire, ce n'est pas l'autorité des GIR qui est en cause. En cas de contravention pour une gêne, accompagnée de la saisie du véhicule, celui-ci est d'ordinaire rendu quand la gêne a cessé et la contravention payée ; on n'en profite pas pour ouvrir une autre porte.
    L'amendement était donc juridiquement mal ficelé, et je pense que M. le ministre a raison.
    Je vous demande donc, monsieur le rapporteur, de me préciser la nature et les modalités de la saisie introduite par cet amendement.
    J'ajoute que l'utilisation de la procédure d'urgence en matière civile peut donner des résultats dans des délais très brefs, mais que l'autorité administrative ne met pas toujours en oeuvre les moyens permettant d'exécuter les décisions de justice.
    M. Xavier de Roux. Le problème n'est pas là !
    M. Bruno Le Roux. Concrètement, qu'est-ce qui changera véritablement ?
    Avec cet article, vous n'appliquez pas le principe de réalité mais vous entendez faire régner la peur attachée à la gravité de la peine encourue par ceux qui ne respectent pas les règles : la confiscation du véhicule, à laquelle peuvent s'ajouter six mois de prison.
    Nous sommes en train de voter de nouveaux délits, assortis de nouvelles peines. Hier, nous avons donné à la police la possibilité de mettre en garde à vue 12 000 prostituées.
    M. Gérard Léonard. Quinze mille !
    M. Lionnel Luca. C'est une rafle !
    M. Bruno Le Roux. Aujourd'hui, nous donnons la possibilité de mettre en garde à vue plusieurs dizaines de milliers d'autres personnes !
    Quand cessera cette instrumentalisation du droit, qui consiste uniquement à faire peur, tout en laissant entendre qu'on n'appliquera pas les dispositions visées ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. L'amendement n° 93, deuxième rectification, deviendrait, si la commission en est d'accord, l'amendement n° 93, troisième rectification.
    La phrase : « En cas de disproportion marquée entre la valeur des véhicules et les revenus de leurs propriétaires, ces derniers ne peuvent obtenir la restitution de leur bien sans avoir justifié des moyens et de la légalité de leur acquisition » serait supprimée à la fin du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 322-4-1 et dans le deuxième alinéa du 2° du texte proposé pour l'article 322-15-1.
    Est-ce bien cela, monsieur le ministre ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Tout à fait, monsieur le président.
    M. le président. La commission accepte-t-elle cette rectification, monsieur le rapporteur ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Avant toute chose, je vous indique, monsieur Le Roux, que ce n'est pas l'amendement de la commission qui fixe les conditions de la saisie, mais le texte du Gouvernement tel qu'il a été adopté par le Sénat, et notamment par un certain nombre de vos amis. Contrairement à ce que vous affirmez, cette procédure s'appliquera sous le contrôle du procureur de la République.
    Avant d'en venir à la rectification proposée par le Gouvernement, je tiens d'abord à remercier la commission des lois pour le travail qu'elle a effectué. Celle-ci propose que, en cas de saisie d'un véhicule, celui-ci ne puisse être restitué à son propriétaire sans une justification préalable des moyens et de la légalité de son acquisition. Nous sommes en effet nombreux sur ces bancs à estimer qu'il n'est pas normal que chaque contribuable français soit en permanence obligé de justifier son train de vie alors que ceux qui vivent dans l'itinérance ne devraient pas le faire chaque fois qu'ils acquièrent un bien (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle), d'un montant souvent élevé.
    M. Jacques Myard. Absolument !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Une certain nombre de Français ne comprennent pas pourquoi tous les citoyens ne sont pas traités sur un pied d'égalité...
    M. Lionnel Luca. Absolument !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... et Mme Boutin l'a rappelé lors de la discussion de la LOPSI. Elle avait d'ailleurs proposé un amendement...
    M. Marc Le Fur. Un excellent amendement !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... afin que les GIR puissent mener une action déterminée en ce sens, amendement que le Gouvernement avait accepté.
    Je remercie M. le ministre de nous confirmer que les GIR doivent également assurer une parfaite transparence dans ce domaine. Bien évidemment, à partir du moment où il prend des engagements très clairs, il n'y a aucune raison pour que nous maintenions la disposition qu'il nous demande de supprimer. En tout cas, cette discussion aura permis de montrer la détermination de la représentation nationale en ce domaine.
    J'accepte donc la rectification proposée par M. le ministre.
    M. le président. La parole est à M. Nicolas Perruchot, pour soutenir le sous-amendement n° 454.
    M. Nicolas Perruchot. Ce sous-amendement a pour objet d'apporter une solution à un problème qui risque de se poser une fois la saisie du véhicule opérée. Imaginons qu'une quarantaine de caravanes s'installent dans une commune et qu'une partie seulement des véhicules soient saisis : en effet, on ne pourra pas saisir tous les véhicules. Cette saisie peut certes avoir un effet dissuasif et contribuer au départ de quelques caravanes, mais qu'adviendra-t-il de celles qui resteront sur place faute de véhicules pour les tracter ? Le propriétaire d'un véhicule saisi devra attendre combien de temps avant de le récupérer ? Comment éviter que les caravanes restent sur place plusieurs semaines, voire plusieurs mois ?
    M. Patrick Labaune. Il faut les mettre en fourrière !
    M. Nicolas Perruchot. Le propriétaire d'un véhicule saisi aura beau jeu de dire : « Ma voiture a été saisie, je ne peux plus enlever ma caravane. » Et les élus ne pourront absolument plus rien faire pour enlever les caravanes.
    Par ce sous-amendement, je propose de prévoir des sanctions pécuniaires contre les véhicules destinés à l'habitation, lesquels ne peuvent faire l'objet d'une confiscation, s'ils continuent de stationner illégalement sur des terrains publics ou privés.
    Dans un souci d'efficacité, mais aussi afin de nous éviter un nouveau casse-tête, je propose d'introduire des pénalités financières journalières qui augmenteraient avec la durée du stationnement. Une telle disposition devrait, j'en suis sûr, jouer un rôle dissuasif majeur.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Ce sous-amendement n'a pas été examiné par la commission.
    L'instauration de sanctions pécuniaires en cas de stationnement illégal sur un terrain de véhicules à usage d'habitation me paraît une suggestion légitime. Toutefois, je fais observer que l'article 19 prévoit déjà des sanctions importantes pour empêcher les installations illicites sur les terrains : six mois d'emprisonnement et 3 750 euros d'amende.
    De surcroît, en cas de maintien sur le terrain, la voie civile permet d'obtenir l'expulsion des occupants, y compris sous astreinte, comme vous le proposez dans votre sous-amendement, monsieur Perruchot. L'article 19 bis introduit par le Sénat facilitera cette voie de recours.
    Par conséquent, avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. On voit tout l'intérêt de la discussion des amendements, car, au contraire de la discussion générale, elle permet de chercher des réponses concrètes à des problèmes concrets.
    D'abord, j'indique que le texte permettra de saisir et de dégager les véhicules qui tractent. Les véhicules caravanes sont assimilés à des habitations et ne peuvent pas faire l'objet d'une saisie.
    Vous réclamez une astreinte. Le problème, c'est que vous introduisez cette disposition dans l'article du Gouvernement, lequel porte sur le code pénal. Vous créez ainsi une astreinte pénale alors que l'astreinte existe déjà, mais dans le code de procédure civile. En résumé, si je peux comprendre l'inspiration qui vous anime, je crois que cet ajout est inutile ; le juge pénal saisi dans le cadre de la nouvelle procédure peut confisquer les véhicules et prononcer une astreinte au titre du code de procédure civile : rien ne l'en empêche. Votre sous-amendement n'est donc pas nécessaire.
    Se pose en outre un autre problème, politique celui-là, qu'il faut bien évoquer.
    Je me suis gardé d'intervenir sur l'article : je voulais éviter les pièges et me laisser la possibilité de prendre en compte toutes vos demandes. Que veulent les élus ? Disposer d'un instrument qui leur permette d'agir rapidement et efficacement. La saisie des véhicules inscrite dans le code pénal répond à ce souhait.
    J'aimerais que nous en restions là, pour ne pas donner d'arguments à ceux qui pourraient, à tort, nous accuser d'un quelconque amalgame.
    Prévoir dans le code pénal une astreinte déjà inscrite dans le code de procédure civile risquerait de déséquilibrer le texte sans rendre plus opérationnel l'ensemble du dispositif.
    M. Bruno Le Roux. Absolument !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je vous parle très franchement, je n'ai aucune arrière-pensée : je cherche simplement à répondre aux demandes des élus, de la majorité comme de l'opposition. Je connais autant d'élus communistes et socialistes que d'élus UMP qui sont ulcérés par la situation actuelle. (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Certes, comme l'un de vous l'a fait observer, il conviendra d'évaluer la mesure adoptée. Mais cela vaut pour toutes les décisions que nous prenons. Nous ne faisons pas la loi pour la garder soixante-dix ans au prétexte qu'une loi ancienne serait meilleure qu'une loi qui a seulement sept mois. Cela n'aurait aucun sens.
    Votre proposition, et je m'adresse là aux membres du groupe UDF, risquerait de déséquilibrer la stratégie que j'ai souhaité définir avec ce texte. Je ne serais pas contre si nous en retirions un avantage opérationnel, mais ce ne serait pas le cas.
    Au bénéfice de ces explications, je souhaite, monsieur Perruchot que vous retiriez ce sous-amendement. Nous verrons dans quelques mois si mon dispositif fonctionne ou non.
    M. le président. Monsieur Perruchot, maintenez-vous le sous-amendement n° 454 ?
    M. Nicolas Perruchot. Au bénéfice des explications données par M. le ministre, je retire le sous-amendement. Je souhaite que mes observations aient été entendues non seulement par le Gouvernement mais au-delà et j'espère que les maires n'auront pas, un jour ou l'autre, à regretter cette décision. Je ne suis pas absolument certain que les choses se passeront comme vous le dites, monsieur le ministre. Mais puisque vous estimez qu'il est possible d'utiliser l'astreinte civile,...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Elle existe !
    M. Nicolas Perruchot. ... je retire le sous-amendement n° 454.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je vous en remercie.
    M. le président. Le sous-amendement n° 454 est retiré.
    La parole est à M. Xavier de Roux.
    M. Xavier de Roux. Le sous-amendement de notre collègue a eu le mérite d'ouvrir un débat sur la question de la saisie. L'argument avancé est juste : vouloir distinguer entre les véhicules qui tractent et les caravanes est dangereux, parce que déjà, dans la pratique, à laquelle je suis malheureusement confronté chaque année, les contrevenants laissent la caravane et ôtent le véhicule. Si, dorénavant, on saisit le véhicule, on peut être sûr que la caravane restera sur le terrain et qu'il sera très compliqué de la faire partir.
    Je propose qu'on en reste, dans l'amendement de la commission, à la phrase : « Lorsque l'installation s'est faite au moyen de véhicules, il peut être procédé à leur saisie. » Si l'on se contente de dire qu'on peut saisir les véhicules, sans entrer dans l'explication compliquée de ce qui sert de logement et de ce qui sert de moyen de transport, je crois que l'on arrive au résultat voulu par M. Perruchot.
    M. Yves Fromion. On ne peut pas saisir la caravane !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Le Roux, vous êtes un juriste éminent et vous savez très bien que je n'ai pas l'intention de fragiliser le texte. Le mieux est l'ennemi du bien. Quand on connaît - et je parle sous le contrôle des élus, qui connaissent cela bien mieux que moi - le prix, dans tous les sens du terme, que les gens du voyage attachent à leurs véhicules, on ne peut pas imaginer une minute qu'ils pourraient les abandonner sans rien dire. Je ne voudrais pas tomber sous la critique que ne manquerait pas de me faire M. Le Roux en parlant de lois qui ne servent à rien. Dans mon esprit, la loi est dissuasive. De la même façon qu'il n'est pas besoin d'avoir un policier derrière chaque habitant parce que la présence des policiers est dissuasive.
    M. Bruno Le Roux. C'est grâce au civisme que l'on respecte la République, ce n'est pas grâce à la présence des policiers !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ne vous énervez pas, monsieur Le Roux. Honnêtement, je ne crois pas qu'il y ait un désaccord entre nous sur ce point. Je dis simplement que la loi a un caractère dissuasif, c'est parfaitement clair. En l'occurrence, le simple fait de permettre la mise en route d'une procédure pénale et la saisie du véhicule en cas d'occupation illégale d'un terrain devrait être dissuasif. Dans neuf cas sur dix, cela devrait suffire. Qui peut souhaiter le contraire, d'ailleurs ?
    Quant à la non-saisie du domicile, monsieur Le Roux, c'est une des règles de notre droit. Je n'entrerai pas dans ce débat. Ce qui compte pour moi, aujourd'hui, ce n'est pas de faire une cathédrale juridique mais de donner rapidement aux élus que vous êtes et aux préfets des instruments opérationnels pour se sortir des difficultés.
    M. Yves Fromion. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je n'ai pas du tout l'ambition de faire un nouveau code pénal, ni un nouveau code de procédure civile. Je veux, plus modestement, vous donner des outils pour vous permettre de répondre aux problèmes que vous rencontrez. Comme pour la prostitution, mon objectif est opérationnel. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 93, troisième rectification.
    (L'amendement est adopté).
    M. le président. En conséquence, l'article 19 est ainsi rédigé.
    L'amendement n° 293 de M. Viollet tombe, l'amendement n° 35 de M. Mourrut a été retiré et les amendements n°s 43 de M. Mourrut, 290 et 291 de M. Le Roux, 36 rectifié de M. Mourrut, 23 de M. Mariani, 11 de M. Luca, 292 de M. Le Roux et 335 de Mme Billard, identiques, 24 de M. Mariani et 42 de M. Mourrut n'ont plus d'objet également. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Au poker, on appelle ça la quinte flush !

Après l'article 19

    M. le président. M. Woerth, M. Bignon, Mme Joissains-Masini et M. Martin (Marne) ont présenté un amendement, n° 400 deuxième rectification, ainsi libellé :
    « Après l'article 19, insérer l'article suivant :
    « Le II de l'article 1er de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « « Le schéma départemental tient compte de l'existence de sites inscrits ou classés sur le territoire des communes concernées. La réalisation des aires permanentes d'accueil doit respecter la législation applicable, selon les cas, à chacun de ces sites. »
    La parole est à M. Eric Woerth.
    M. Eric Woerth. Cet amendement vise simplement à préciser que, sur les territoires protégés au titre des sites classés ou des sites inscrits, la législation applicable doit être respectée. Il faut qu'existe un lien cohérent entre le code de l'urbanisme et ce qui nous est proposé dans ce texte.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cet amendement avait été rejeté par la commission, mais il a été parfaitement retravaillé et il me paraît apporter des précisions utiles à l'application du texte, en protégeant notamment les sites classés. Je suis donc favorable à son adoption.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement est, lui aussi, favorable à cet amendement. Cette catégorie de la population ne saurait être la seule à avoir le droit de ne pas respecter les sites classés. Si elle doit avoir les mêmes droits que les autres, on ne voit pas pourquoi elle en aurait davantage.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 400, deuxième rectification.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Garrigue a présenté un amendement, n° 396 rectifié, ainsi rédigé :
    « Après l'article 19, insérer l'article suivant :
    « La dernière phrase du I de l'article 9 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage est complétée par les mots : "ou qui appartiennent à un groupement de communes qui s'est doté de compétences pour la mise en oeuvre du schéma départemental. »
    Cet amendement est-il défendu ?
    M. Gérard Léonard Oui, monsieur le président.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cet amendement a un double objectif : inciter les groupements de communes à s'impliquer dans la création d'aires d'accueil et clarifier les dispositions pour que les maires des communes appartenant à ces groupements disposent du pouvoir d'interdire le stationnement hors zones d'accueil.
    Cet amendement a été repoussé dans une version antérieure, mais il a été, lui aussi, retravaillé et rectifié. et me paraît désormais pouvoir être adopté. Il introduit des précisions utiles dans la loi du 5 juillet 2000 pour favoriser l'implantation d'aires d'accueil dans le cadre de l'intercommunalité, avec un renforcement des prérogatives des communes qui remplissent leurs obligations. Lionnel Luca est intervenu dans ce sens tout à l'heure.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable. Cet amendement permet d'intégrer les groupements de communes, ce qui est très important.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 396 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Mourrut a présenté un amendement, n° 44 corrigé, ainsi rédigé :
    « Après l'article 19, insérer l'article suivant :
    « Le II de l'article 9 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 précité est ainsi modifié :
    « 1° Après les mots : "le maire peut, la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : "saisir, avec dispense du ministère d'avocat, par la voie écrite ou verbale enregistrée au greffe de la juridiction, le président du tribunal de grande instance afin qu'il prenne, d'heure à heure, l'ordonnance nécessaire au seul vu de la minute permettant l'expulsion des occupants de leur habitation mobile et de leur véhicule automobile, et dont l'exécution aura lieu au seul vu de la minute.
    « 2° En conséquence, le dernier alinéa est supprimé. »
    Sur cet amendement, Mme Boutin a présenté deux sous-amendements n°s 501 et 500.
    Le sous-amendement n° 501 est ainsi rédigé :
    « Compléter le 1° de l'amendement n° 44 corrigé par les deux phrases suivantes : "La décision du juge, quel qu'en soit le sens, doit être motivée et rendue publique. L'intervention des forces de l'ordre, quelle qu'en soit la forme, doit faire l'objet d'un rapport officiel, écrit et motivé. »
    Le sous-amendement n° 500 est ainsi rédigé :
    « Compléter le 1° de l'amendement n° 44 corrigé par la phrase suivante : "Les communes peuvent, de plein droit, se constituer partie civile devant la juridiction pénale dans tous les cas d'installation entrant dans les prévisions du délit visé à l'article 322-4-1 du code pénal, constatés sur leur territoire, même sur les terrains n'appartenant pas au domaine communal. »
    La parole est à M. Etienne Mourrut, pour soutenir l'amendement n° 44 corrigé.
    M. Etienne Mourrut. Cet amendement a pour objectif de rendre la procédure plus efficace.
    M. le président. La parole est à Mme Christine Boutin, pour soutenir les sous-amendements n°s 500 et 501.
    Mme Christine Boutin. Ces deux sous-amendements sont en réalité le résultat des consultations que j'ai pu avoir depuis de très nombreuses années avec les maires de ma circonscription.
    Le sous-amendement n° 500 a pour objectif de donner aux communes et aux maires la possibilité de pouvoir se constituer partie civile devant la juridiction pénale dans tous les cas d'installation entrant dans les prévisions du délit visé à l'article 322-4-1 du code pénal. L'article 19 crée un délit spécifique permettant de sanctionner les personnes qui s'installent en réunion sans autorisation, sur un terrain appartenant à autrui en vue d'y établir une habitation.
    Sur les terrains qui appartiennent aux communes, seules celles qui se sont régulièrement conformées aux dispositions de la loi Besson pourront bénéficier de cette incrimination pénale. Toutefois, les moyens mis à la disposition des maires pourraient être complétés afin de rendre plus effective et rapide la mise en oeuvre du nouveau délit d'installation sauvage prévu à cet article.
    Il est proposé de permettre aux communes de se constituer partie civile à l'occasion de la réalisation de ce délit, même s'il s'agit de terrains privés ne leur appartenant pas.
    Les communes ne peuvent se constituer partie civile qu'en cas d'occupation de leur domaine communal, et seulement si elles justifient d'un préjudice direct et propre. Or il arrive, le cas s'est produit plusieurs fois dans la circonscription que j'ai l'honneur de représenter que des propriétaires privés victimes de stationnements illégaux, soit parce qu'ils ont peur, soit parce qu'ils sont absents, ne puisent entamer les procédures pénales, alors même que l'ordre public est mis à mal. La possibilité pour les communes de se constituer partie civile devant la juridiction pénale en cas d'installation illégale sur les terrains tant communaux que privés leur permettrait non seulement de mettre en oeuvre elles-mêmes l'action publique, notamment au moyen de la citation directe, mais aussi d'être systématiquement appelées à s'exprimer devant le juge pénal, afin notamment d'éclairer le tribunal, pour solliciter l'évacuation du terrain, la remise en état, les réparations civiles et les peines complémentaires.
    Je rappelle que la loi a habilité à se constituer partie civile les associations de protection de l'environnement et les associations de consommateurs agréées. Il serait donc normal d'autoriser les maires et les communes à en faire autant, afin de préserver l'intérêt général.
    Le sous-amendement n° 501 quant à lui répond à une demande importante des élus avec lesquels j'ai travaillé. Beaucoup de maires, vous le savez, se sentent démunis face au problème de l'occupation illicite. Bien qu'ils soient actifs pour discuter avec les gens du voyage ou pour les faire partir, il ne reste pas trace de leur action et des négociations qu'ils mènent. Un certain nombre d'élus ont donc souhaité que leurs actions, la décision du juge, l'intervention des forces de l'ordre, qui restent souvent ignorées de l'opinion, fassent l'objet d'un rapport officiel écrit et motivé afin que le maire puisse montrer à sa population qu'il n'est pas resté inactif.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 44 corrigé et les sous-amendements n°s 501 et 500 ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. M. le ministre l'a rappelé tout à l'heure à propos d'un autre amendement et ce n'était pas la première fois, il n'est pas question de modifier dans ce texte la voie civile. Au demeurant, monsieur Mourrut, le renforcement de la voie pénale est une orientation qui me paraît plus efficace.
    A partir du moment où je suis défavorable à l'amendement, je ne puis donner un avis favorable aux sous-amendements de Mme Boutin, bien qu'ils m'aient paru très intéressants.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Mourrut, je comprends votre idée de créer une procédure civile d'expulsion plus facile et plus efficace, mais je ferai plusieurs remarques.
    Premièrement, le ministère d'avocat n'est pas obligatoire pour introduire une requête en référé auprès du TGI.
    Deuxièmement, le recours à un huissier n'est pas une obligation légale pour faire constater de l'occupation illicite d'un terrain.
    Troisièmement, je me demande si la procédure de déclaration écrite ou verbale enregistrée au secrétariat du greffe, comme vous nous le proposez, serait plus efficace que celle de l'assignation.
    Dernière remarque : si nous avions adopté certains des amendements qui nous ont été proposés, nous aurions instauré un nouveau principe dans le code pénal, introduit une nouvelle petite procédure au civil et tout cela, bien sûr, au nom du désir de simplification qui nous anime tous ! Mesdames, messieurs les députés, nous avons bien dit à nos électeurs : « On légifère trop, c'est trop compliqué, etc. »
    Certes, M. Mourrut a raison quand il affirme que les maires, surtout ceux des petites communes, ne peuvent pas s'en sortir parce que la procédure est trop compliquée. Mais, là encore, le rôle du Gouvernement est de vous alerter sur les risques d'une telle législation. Tout à l'heure, on nous proposait un code de procédure fiscale différencié pour une catégorie de population, puis un code de procédure civile différencié pour un autre type de problème. A la fin, une chatte n'y retrouve plus ses petits !
    Je pense que les élus nous demandent des solutions concrètes. Expérimentons sereinement la procédure pénale de saisie des véhicules. Et puis nous verrons. M. Myard se demandait tout à l'heure si le dispositif fonctionnerait correctement. Il veut bien se contenter pour le moment de ce qu'il qualifie de premier pas mais il reste attentif. Très bien ! Tout le monde sait que le printemps et l'été sont des périodes particulièrement délicates de ce point de vue. Nous verrons donc très vite si cette procédure pénale est utile ou s'il faut la modifier. S'il faut la compléter, on le fera. Mais, sincèrement, je pense qu'elle permettra de régler beaucoup de problèmes.
    En tout cas, je vous mets en garde contre la multiplication des procédures particulières, qui peuvent être à l'origine d'autant d'amalgames, sans régler quoi que ce soit. Et puis, on vous ressortira toujours d'autres cas de figure et on vous reprochera de n'avoir rien prévu pour eux. C'est l'affaire des crimes imprescriptibles, dont on a parlé la nuit dernière. Pourquoi là, et pas ailleurs ?
    M. Gérard Léonard. Ah, c'est un bon souvenir !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Au bénéfice de ces explications, je souhaite, monsieur Mourrut, que vous retiriez cet amendement.
    M. le président. Monsieur Mourrut, maintenez-vous l'amendement n° 44 corrigé ?
    M. Etienne Mourrut. Je le retire, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 44 corrigé est retiré.

Article 19 bis

    M. le président. « Art. 19 bis. - Le II de l'article 9 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Le juge saisi par voie de requête peut étendre les effets de l'ordonnance rendue en la forme des référés à l'ensemble des occupants du terrain non visés par l'ordonnance initiale lorsque le requérant démontre l'impossibilité absolue de les identifier. »
    Sur cet article, j'ai plusieurs inscrits, le premier d'entre eux étant M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Je renonce à la parole, monsieur le président.
    M. le président. M. Philippe Martin est quant à lui absent.
    La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. Trop de maires sont confrontés à l'arrivée soudaine de dizaines de caravanes qui s'installent sans autorisation sur des terrains publics ou privés. Nous sommes aussi confrontés à l'implantation de campements sédentaires dans lesquels vivent en toute illégalité, parfois même dans une grande insécurité, de nombreuses familles. Dans ma commune, un campement sédentarisé est installé sur une zone totalement inondable. On imagine les dégâts qui pourraient en résulter.
    Les objectifs de la loi du 5 juillet 2000 n'ont pas été tous atteints. Les procédures d'expulsion par voie civile sont coûteuses, surtout pour les petites communes. Elles sont longues et peu efficaces. L'article précédent répond en grande partie à ces préoccupations.
    Avec l'article 19 bis, on complète le dispositif d'expulsion et on répond à un problème majeur : le changement régulier d'occupants des terrains, qui évite aux nouveaux occupants d'être visés par l'ordonnance initiale rendue par le juge. Cet article permet aussi de pallier les difficultés d'identification des personnes présentes sur le terrain concerné.
    Nous approuvons l'article 19 bis, qui complète le dispositif pénal prévu par l'article précédent. Néanmoins, nous souhaitons, afin de permettre une application uniforme de la loi, étendre automatiquement les effets de l'ordonnance d'expulsion des gens du voyage à toutes les personnes occupant le terrain en cause. Nous défendrons un amendement allant dans ce sens.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. L'article 19 bis est très important et le rapporteur le sait bien. Il tient compte de la pratique des élus pour les cas où il y a des problèmes d'identification, en prévoyant qu'une procédure réussie pour l'un des occupants illicites vaudra pour tous les autres occupants.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Eh oui !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cela me paraît extrêmement pratique. C'est du concret. La décision vaudra donc pour l'ensemble des occupants, sans que l'on soit obligé de rechercher qui est le frère ou le cousin de qui.
    Cet article introduit donc un changement considérable.
    M. le président. La parole est M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Nous sommes un certain nombre à vivre les situations qui ont été évoquées.
    En effet, on voit des terrains qui sont occupés par des caravanes. On identifie, ou plutôt on croit identifier leurs propriétaires. On lance la procédure et on obtient l'intervention. Mais au moment où celle-ci est lancée, ce ne sont plus tout à fait les mêmes personnes qui sont sur les terrains et la procédure n'est valable que pour certaines d'entre elles.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Exact !
    M. Pierre Cardo. Et après la troisième ou la quatrième procédure, ce qui coûte cher, les caravanes sont toujours là. Dans ces conditions, les administrés demandent si nous servons à quelque chose et si l'on ne se paye pas leur tête. Finalement, c'est le maire qui est obligé de se mettre dans la plus totale illégalité soit en envoyant une tractopelle, soit en faisant du labour, j'en passe et des meilleures.
    Je trouve cela tout à fait anormal.
    La peine pénale collective a disparu. Soit ! Mais il s'agit en l'occurrence de gens qui se trouvent au même endroit et qui ont commis le même acte répréhensible. Il faut raisonner très concrètement et penser surtout aux communes qui n'ont pas de moyens. Je ne dispose ainsi dans ma commune que d'un policier municipal, qui surveille notamment la sortie des écoles.
    On a parlé d'« expérimentation ». Eh bien ! Nous verrons comment tout cela fonctionne. S'il y a des excès, ils seront dénoncés et, à cet égard, mesdames, messieurs de l'opposition, je vous fais confiance. Mais regardons au moins si le dispositif proposé peut nous aider à régler les problèmes et s'il peut simplifier les choses.
    M. le président. Nous en venons maintenant aux amendements à l'article 19 bis.
    M. Le Roux, Mme David et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 294, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'article 19 bis. »
    La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le ministre, nous basculons dans le droit civil puisque l'article vise à étendre, comme vient de le dire M. Cardo, non le dispositif pénal, mais le dispositif civil : il prévoit en effet que l'ordonnance de référé rendue par le juge civil sera étendue à l'ensemble des personnes qui se trouveront sur le site. Cette précision est importante : elle montre que nous continuons à surfer sur le problème de l'exécution ; car le problème de fond auquel nous sommes, en tant que maires, confrontés est relatif au délai et à l'exécution.
    M. Pierre Cardo. Pas du tout !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. L'article 19 bis me paraît superfétatoire car le juge des référés, saisi par une assignation en référé, peut ordonner, sur la base d'une seule identification, l'expulsion du propriétaire du véhicule et celle de « tous occupants de son chef ». Avec une telle formule, et c'est bien ce que montre la jurisprudence ; tous les occupants peuvent être expulsés.
    Je reconnais la difficulté de l'exercice, que vous avez raison, monsieur le ministre, de souligner. Mais il demeure que le juge des référés a toute la compétence pour prendre une telle décision et même, comme il l'a fait parfois, pour maintenir la validité de l'ordonnance dans le cas d'occupations réitérées.
    L'instrument juridique civil existe, mes chers collègues, et il a les mêmes effets que ceux que nous recherchons tous, notamment l'efficacité. A ce propos, je ferai le lien avec l'article 19.
    Lorsque le propriétaire du véhicule sera interpellé et qu'il sera déféré en saisine immédiate, ce n'est pas lui qui déplacera le véhicule. Nous nous heurterons au même problème que lorsque l'ordonnance de référé exécutoire du juge était signifiée par l'huissier mais que celui-ci ne pouvait en obtenir l'exécution pour des raisons diverses, allant de l'impossibilité d'assurer un concours suffisant et massif de la force publique à celle d'obtenir les moyens d'évacuation des véhicules, c'est-à-dire la mobilisation d'une grue mobile - c'est comme cela que s'appellent ces engins, au moins dans la région parisienne. Croyez bien, monsieur le ministre, que je parle d'expéreince pour avoir connu, comme mes collègues, la difficulté et pour l'avoir plaidée, en tant qu'avocat.
    Je considère que l'article 19 bis témoigne bien de l'inutilité du dispositif car il suppose que la seule incrimination nouvelle réglera la question alors que problème auquel nous avons toujours été confrontés est celui de l'exécution de la décision. Or ce problème-là ne sera pas résolu.
    M. Pierre Cardo. Je ne suis pas d'accord !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. L'article 19 bis modifie un dispositif de la compétence du juge civil et il ne changera rien à la technique qui pouvait être utilisée là où les juridictions voulaient bien prendre en charge la situation et où elles acceptaient d'être saisies, y compris par voie de requête, sur une unique exécution. Je précise que, dans ce cas, les problèmes n'étaient pas pour autant résolus car, dans la région parisienne, pour évacuer vingt caravanes il faut évidemment mobiliser une force publique massive et des moyens imposants, que vous aurez nécessairement à solliciter, que vous soyez dans le cadre civil ou dans le cadre pénal. Cela montre bien que la loi ne peut, par le seul biais de l'incrimination, régler la difficulté.
    M. Lucien Degauchy. Il faudra être plus sévère !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Le Bouillonnec, je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous. Pourquoi ? D'abord parce que, en matière civile, si votre nom ne figure pas dans une ordonnance, cellee-ci ne peut théoriquement pas vous être imposée. Pour qu'elle puisse l'être, vous devez y être visé expressis verbis. Ce principe souffre toutefois une exception. Il existe en effet un cas où l'ordonnance s'impose de manière collective, et j'avoue qu'au Sénat je m'en suis inspiré : c'est celui de l'occupation illégale d'usine. Dans de tels cas, la jurisprudence a étendu les effets de l'ordonnance à toutes les personnes y occupant illégalement les lieux.
    D'autre part, certaines juridictions prononcent des expulsions concernant M. Untel ou Mme Unetelle et « tous les autres ». Mais ce n'est pas le cas de toutes. Je vous propose donc d'asseoir juridiquement le dispositif en le prévoyant dans la loi.
    M. Gilbert Meyer. Très bien !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ce faisant, je reconnais bien volontiers que je fais une exception au conseil que je vous ai donné moi-même de ne pas trop toucher à la procédure civile. Mais c'est pour la bonne cause, celle de l'opérationnalité.
    Monsieur Le Bouillonnec, vos collègues du groupe socialiste affirment que, dans certaines juridictions, cela fonctionne de cette manière. Mais puisque ce n'est pas le cas dans toutes, il faut, je le répète, asseoir clairement le dispositif. Nous adresserons ainsi un signal très positif à tous les maires des petites communes : si vous obtenez une ordonnance pour un contrevenant, elle vaudra pour tous les autres.
    M. Gilbert Meyer. Et voilà !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je ne vois vraiment pas pourquoi on ne le ferait pas.
    Quant à la mobilisation des forces de l'ordre et à l'utilisation de grues, c'est un autre problème, dont j'admets tout à fait qu'on doive aussi parler,...
    M. Gilbert Meyer. Evidemment !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C'est le seul !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... mais ce n'est pas le seul.
    La volonté ne suffit pas. J'avais la volonté de mettre un terme aux camps de Roms du Val-de-Marne, mais je n'ai pas eu la décision judiciaire que j'attendais. En dépit de ma volonté et de la présence des CRS, on n'a pas pu faire partir ces gens. Cela prouve que la volonté seule n'est pas suffisante.
    On compte vingt-trois  bidonvilles dans le Val-de-Marne. J'avais la volonté d'obtenir l'expulsion et mobilisé les moyens nécessaires. Or le juge des libertés n'a pas voulu que l'on garde trois jours dans un hôtel des personnes dont le juge administratif avait reconnu qu'elles devaient être expulsées. Là, il y avait la volonté, les moyens, mais pas la décision judiciaire. La volonté et les moyens n'ont donc servi à rien.
    Ne me dites pas qu'il suffit d'avoir la volonté de disposer des moyens pour régler ce genre de problèmes. Il faut une décision de justice,...
    M. Jacques Myard. Il faut un bloc de compétences !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... une volonté et des moyens. La volonté, je l'ai ; les moyens, je m'en occupe ; la décision de justice, c'est vous qui pourrez la rendre possible. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 294 ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Je voudrais que l'on soit un peu moins ignorant de la réalité du terrain.
    M. Cardo a parfaitement résumé la situation : un certain nombre d'itinérants connaissent mieux la loi que vous et moi...
    M. Pierre Cardo et M. Jacques Myard. C'est clair !
    M. Gilbert Meyer. Ils connaissent les faiblesses de la loi !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... et ils la contournent en permanence.
    Concrètement, comment les choses se passent-elles ? Ici, on discute comme si tout était réglé en vingt-quatre heures, le juge statuant en référé et les forces de l'ordre étant mises à disposition pour appliquer la décision. Or je sais, pour être suffisamment concerné dans ma propre circonscription par le problème, qu'il faut systématiquement compter de douze à quinze jours.
    Mme Marie-Jo Zimmermann. Eh oui !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Voire trois semaines !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Moi, je voudrais qu'on parle des délais.
    Quand une soixantaine de véhicules et de caravanes s'installent sans droit ni titre sur un terrain, combien de temps faut-il au maire pour obtenir des personnes habilitées à l'établissement de constats sur les identités,...
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il y a la police municipale !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... sur les immatriculations, sur l'identification des véhicules, pour vérifier que les occupants illicites sont dans une situation parfaitement légale -  en tout cas pour ce qui concerne la possession de leurs véhicules et de leurs caravanes -, et pour préparer la procédure de référé devant le juge civil ? Le juge civil, lorsqu'il instruit, vous demande en général deux, trois, voire quatre jours avant de rendre sa décision et, lorsqu'il la rend, il l'adresse au maire. Le maire, à partir du moment où il dispose de la décision du juge, demande au préfet de bien vouloir la mettre en oeuvre. Mais ce dernier prend parfois quelques jours supplémentaires pour réunir les forces de l'ordre nécessaires à l'application de la décision.
    Je le répète, le délai est aujourd'hui de douze à quinze jours.
    Les personnes concernées connaissant parfaitement la procédure, elles s'organisent pour échanger les véhicules d'un terrain à l'autre. Ainsi, dans la nuit qui précède le jour où le préfet doit envoyer les forces de l'ordre, elles occupent un autre terrain. Lorsqu'elles suivent les forces de l'ordre ne peuvent donc plus rien faire, la procédure ne pouvant plus s'appliquer.
    M. Guy Geoffroy. C'est vrai !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Le ministre l'a clairement dit : c'est un exercice pratique qu'il nous est proposé de faire. Nous aurons avec l'article 19 bis des dispositions pragmatiques qui permettront de régler le problème à partir d'une seule identification. Saisissons cette occasion !
    Je vous invite donc, monsieur Le Bouillonnec, à retirer votre amendement de suppression, qui n'a aucun sens et ne ferait qu'aggraver la situation dans laquelle se trouvent aujourd'hui les maires. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, contre l'amendement.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le président, avec votre permission, je m'exprimerai contre l'amendement n° 294 et je défendrai en même temps l'amendement n° 201 ; cela fera gagner du temps à tout le monde.
    M. le président. Parfait.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Je n'ai pas très bien compris les propos de notre collègue Le Bouillonnec ni l'exposé des motifs de l'amendement qu'il a défendu. On peut y lire que « la peine pénale collective a disparu de notre droit depuis 1789 » et qu'« il est donc inconcevable d'accepter que la condamnation d'une personne pour un délit ou pour un crime ait des effets étendus à une ou plusieurs autres personnes ». Mais notre éminent collègue nous a expliqué que c'était déjà le cas. Dans ces conditions, pourquoi vouloir supprimer un dispositif qui serait attentatoire aux libertés alors même que l'on nous soutient qu'un tel dispositif existe déjà ?
    Sur le principe, je ne vois pas ce qu'il y a de choquant.
    Supposons qu'un seul véhicule entre sur le terrain. Le juge prend une ordonnance d'expulsion. Mais quatre-vingts personnes y entrent à leur tour, l'une après l'autre, jour après jour, au-delà des quinze jours que vous avez évoqués, monsieur le rapporteur, avec un certain optimisme car dans ma circonscription, c'est plutôt un mois qu'il faut attendre sans compter le délai dont a besoin le préfet. Pendant quatre-vingts jours, on devra prononcer des référés ? La situation serait absurde !
    Avec le nouveau dispositif, dès lors qu'une personne pénètre sur un terrain qui est une propriété privée et que le juge ordonne son expulsion, une autre personne qui y entrerait après le jugement du tribunal serait soumise à la même décision, le juge estimant que l'on rien à faire sur ce terrain. Point final.
    J'en viens à l'amendement n° 201.
    Le Sénat a été très prudent - trop peut-être - en prévoyant que le juge « peut » étendre les effets de l'ordonnance rendue en la forme des référés à l'ensemble des occupants du terrain non visés par l'ordonnance initiale. En effet, il nous semble que le juge, et c'est l'objet de mon amendement, doit étendre la mesure à tout véhicule ou caravane qui se trouverait sur le terrain, de façon systématique. Si le juge ne le fait pas, il place les élus que nous sommes et les propriétaires privés dans une situation difficile. Car ce qui fait l'objet de la condamnation, ce n'est pas qu'une personne soit entrée sur un terrain, mais que ce terrain ne doit pas être envahi. L'ordonnance d'expulsion doit donc s'appliquer à toute personne qui s'y trouve. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Garraud.
    M. Jean-Paul Garraud. M. Le Bouillonnec estime que l'article 19 bis est superfétatoire et qu'il ne s'agit en fait que d'un problème d'exécution. Je dirai d'expérience qu'il fait une erreur car le juge des référés doit absolument citer nommément toutes les personnes qu'il souhaite expulser. C'est une obligation légale qui suppose qu'un huissier soit dépêché sur place pour identifier nommément toutes les personnes qui feront l'objet de l'ordonnance de référé, ce qui, nous le savons tous, est quasiment impossible.
    L'article 19 bis n'est en aucune façon superfétatoire. Il est au contraire indispensable car, sans lui, une décision d'expulsion ne pourrait tout simplement pas être rendue en droit. (« Très juste ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Xavier de Roux, qui sera le dernier orateur à s'exprimer sur cet amendement n° 294.
    M. Xavier de Roux. Je suis favorable à l'amendement.
    Je crains, en effet que le second alinéa de l'article 19 bis crée une obligation de preuve impossible.
    Il est en effet prévu que le juge puisse étendre les effets de l'ordonnance à l'ensemble des occupants du terrain non visés par l'ordonnance initiale « lorsque le requérant démontre l'impossibilité de les identifier ». J'ai peur que cette preuve ne puisse pas être apportée ou que le juge ne s'en satisfasse jamais. Il faudrait donc s'arrêter aux mots : « non visés par l'ordonnance initiale ».
    M. Jacques Myard. M. de Roux a raison !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Puis-je répondre d'un mot, monsieur le président ?
    M. le président. Monsieur Le Bouillonnec, je viens d'annoncer que M. de Roux serait le dernier à s'exprimer sur l'amendement n° 294.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je vous ai fait signe à plusieurs reprises, monsieur le président !
    M. le président. Soit. Vous avez la parole.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. D'abord, je précise que mon intervention sur l'amendement ne se fondait pas sur son exposé sommaire. J'ai simplement rappelé - et M. le ministre a bien voulu le confirmer - que l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000 relevait du droit civil.
    Ensuite, je maintiens mon argumentation. Je suis un nouveau député et c'est très récemment que j'ai abandonné mes fonctions d'avocat. Je vous confirme que la formule jurisprudentielle que j'ai citée tout à l'heure est appliquée dans la région parisienne.
    M. Pierre Cardo. Pas chez moi ! Ou alors je ne suis plus en région parisienne !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. La dénomination de la personne objet de l'expulsion n'est pas obligatoire. C'est tellement vrai qu'en matière d'habitation l'occupant sans droit ni titre est expulsé lui-même ainsi que « tous occupants de son chef ».
    M. Pierre Cardo. Ah non !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C'est la pratique des tribunaux d'instance. Je les ai quittés il n'y a pas longtemps je peux donc vous confirmer que cette technique y est pratiquée.
    M. Pierre Cardo. Dans un autre temps, dans un autre pays !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il était important d'apporter cette précision, monsieur le président.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 294.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Lagarde et M. Perruchot ont présenté un amendement, n° 201, ainsi rédigé :
    « Dans le dernier alinéa de l'article 19 bis, substituer aux mots : "peut étendre, le mot : "étend. »
    Cet amendement a déjà été défendu.
    Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. L'idée est intéressante mais il me paraît nécessaire de laisser une certaine latitude au juge : avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur Lagarde, en imposant une obligation au juge, votre amendement se heurte à un principe essentiel du droit. Le Gouvernement ne peut accepter cette injonction à l'autorité judiciaire.
    J'ajoute que l'amendement n° 94 de la commission des lois, que nous allons examiner dans un instant, répond à votre préoccupation, ainsi d'ailleurs qu'à celle de M. de Roux, puisqu'il vise à supprimer le mot « absolue », dont je reconnais bien volontiers qu'il est de trop. Il suffit en effet que les autres occupants aient refusé de donner leur identité pour que celle-ci soit impossible à établir.
    M. le président. Monsieur Lagarde, votre amendement est-il maintenu ?
    M. Jean-Christophe Lagarde. Oui, monsieur le président.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 201.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Estrosi, rapporteur, et M. Quentin ont présenté un amendement, n° 94, ainsi rédigé :
    « Dans le dernier alinéa de l'article 19 bis, supprimer le mot : "absolue. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. M. le ministre a parfaitement justifié cet amendement.
    M. le président. Le Gouvernement l'a donc défendu.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je ne me le permettrais pas !
    M. le président. J'en déduis qu'il y est favorable.
    Je mets aux voix l'amendement n° 94.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 19 bis, modifié par l'amendement n° 94.
    (L'article 19 bis, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 19 bis

    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 95 et 211 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 95, présenté par M. Estrosi, rapporteur, est ainsi libellé :
    « Après l'article 19 bis, insérer l'article suivant :
    « Le code pénal est ainsi modifié :
    « I. - Après l'article 313-6, il est inséré un article 313-6-1 ainsi rédigé :
    « Art. 313-6-1. - Le fait de mettre à disposition d'un tiers, en vue qu'il y établisse son habitation moyennant le versement d'une contribution ou la fourniture de tout avantage en nature, un bien immobilier appartenant à autrui, sans être en mesure de justifier de l'autorisation du propriétaire ou de celle du titulaire du droit d'usage de ce bien, est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. »
    « II. - Dans le premier alinéa de l'article 313-7, les mots : "et 313-6 sont remplacés par les mots : ", 313-6 et 313-6-1.
    « III. - Dans l'article 313-8, les mots : "et 313-6-1 sont remplacés par les mots : ", 313-6 et 313-6-1.
    « IV. - Le premier alinéa de l'article 313-9 est complété par les mots : "et à l'article 313-6-1. »
    Sur cet amendement, M. Mamère, Mme Billard et M. Yves Cochet ont présenté un sous-amendement, n° 450, ainsi rédigé :
    « Compléter le dernier alinéa du I de l'amendement n° 95 par les deux phrases suivantes : "Le fait d'expulser une personne dont l'habitation correspond à la résidence principale, sans décision de justice ni concours de la force publique, est punissable d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. La peine est doublée lorsque le délit est commis entre le 1er novembre et le 15 mars. »
    L'amendement n° 211 rectifié, présenté par M. Lagarde et M. Perruchot, est ainsi libellé :
    « Après l'article 19 bis, insérer l'article suivant :
    « I. - Après l'article 313-6 du code pénal, il est inséré un article 313-6-1 ainsi rédigé :
    « Art. 313-6-1. - Le fait, moyennant rémunération, de rendre possible ou de faciliter, directement ou indirectement, l'occupation de locaux par voie de fait est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende. »
    « II. - En conséquence, dans le premier alinéa de l'article 313-7 du même code, les mots : "et 313-6 sont remplacés par les mots : "313-6 et 313-6-1. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 95.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Il s'agit d'instituer un nouveau délit, qui rend passible d'un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende ceux qui mettent à disposition d'un tiers, moyennant rémunération ou avantages en nature, des logements qui ne leur appartiennent pas.
    Je souhaite insister un instant sur cet amendement, dans la mesure où la discussion au Sénat des dispositions relatives à l'occupation illicite de logements avait entraîné un certain nombre de réactions dans notre pays. Dans le cadre de nos auditions, nous sommes allés, avec la commission des lois, rencontrer l'abbé Pierre à l'association Emmaus, à Maisons-Alfort. Nous lui avons décrit la situation dans laquelle se trouvent nombre de gestionnaires de logements sociaux. L'impossibilité d'évacuer les squatteurs a des conséquences sur les familles modestes : après avoir obtenu un logement d'une commission d'attribution, et alors qu'on leur a donné les clés pour y pénétrer, ces familles s'aperçoivent qu'il est déjà occupé ! Nous avons essayé de démontrer à l'abbé Pierre le caractère tout à fait injuste de cette situation.
    Nous lui avons également fait observer que nombre de ces squatteurs faisaient l'objet d'une exploitation.
    Je le rappelle, si ce texte est équilibré, c'est parce qu'il ne s'attaque pas aux victimes mais à ceux qui les exploitent,...
    M. Jacques Myard. Très bien !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... qu'il s'agisse de la prostitution, de la mendicité ou des squatteurs, qui sont souvent les victimes de marchands de sommeil. L'abbé Pierre a parfaitement convenu qu'il fallait être sans pitié à l'égard de ces derniers. D'ailleurs, et vous l'avez sans doute relevé, mes chers collègues, depuis quelques semaines, les réactions sur ce sujet sensible, dont les médias se sont dans un premier temps fait l'écho, ne sont plus d'actualité.
    La commission a accompli un travail approfondi de concertation et de dialogue. Elle propose, à travers cet amendement, une mesure équilibrée, conforme à l'esprit du projet de loi, dont l'objectif, je le répète, est de sanctionner les exploiteurs. J'invite donc l'Assemblée nationale à adopter l'amendement n° 95.
    M. le président. La parole est à Mme Martine Billard, pour présenter le sous-amendement n° 450.
    Mme Martine Billard. ... L'amendement de la commission me paraît une bonne idée. Les gens squattent généralement par nécessité. Bien sûr, dans ce domaine comme dans d'autres, il existe des personnes qui en font une politique et considèrent qu'ils n'ont pas à payer. Mais leur cas n'est anecdotique par rapport à l'immense majorité des personnes...
    M. Lionnel Luca. Nous n'avons pas la même définition de l'anecdotique !
    Mme Martine Billard. ... notamment dans certaines grandes villes comme Paris, qui, contraintes par une crise du logement très réelle, ne parviennent pas à trouver un logement à la mesure de leurs petits moyens et se retrouvent finalement dans une situation difficile. Tombées aux mains de certaines mafias, elles peuvent, de bonne foi, croire que l'appartement qu'on leur propose est réellement disponible. Réprimer les réseaux qui organisent l'exploitation de ces familles me semble donc une très bonne idée.
    Le sous-amendement que je défends au nom des députés Verts vise, lui, à défendre les personnes expulsées sans décision de justice. C'est impossible, me direz-vous. Malheureusement, une telle réalité existe. Elle concerne des locataires en situation d'être expulsés : parfois, ils ont entamé une négociation avec l'aide du FSL ou d'associations pour résoudre leurs problèmes d'arriérés, de loyers. Souvent, ils sont contraints de partir, précisément parce qu'ils savent qu'ils ne vont plus pouvoir payer le loyer. Ils peuvent également être confrontés à une situation brutale de chômage, de séparation de la famille, de maladie. Or il arrive que des propriétaires ne veuillent pas attendre que la justice statue et que l'expulsion d'ordonnance soit rendue : ils font justice eux-mêmes.
    De la même manière qu'il faut réprimer les réseaux qui organisent l'occupation d'appartements au détriment des propriétaires, des bailleurs sociaux et des familles qui se « font avoir », il faut refuser que les propriétaires se fassent justice eux-mêmes et expulsent leurs locataires sans attendre les décisions de justice.
    M. le président. La parole est à M. Perruchot pour soutenir l'amendement n° 211 rectifié.
    M. Nicolas Perruchot. Dans la mesure où l'amendement n° 95 répond en partie à nos préoccupations, même si nous ne proposions pas les mêmes peines d'emprisonnement et d'amende, je retire le nôtre, afin de simplifier nos travaux et de les faire avancer plus rapidement.
    M. le président. L'amendement n° 211 rectifié est retiré.
    Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 450 ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Madame Billard, d'un côté vous vous déclarez favorable à l'amendement de la commission mais, de l'autre, vous en caricaturez le sens. Le sous-amendement concerne précisément les personnes que nous souhaitons écarter de toute sanction. Je n'en vois donc pas l'intérêt, d'autant plus que le code pénal permet déjà de réprimer de tels agissements.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 95 et le sous-amendement n° 450 ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Sur l'amendement n° 95, le Gouvernement émet un avis très favorable. J'avais moi-même beaucoup hésité sur la rédaction d'un article, ne voulant surtout pas qu'on puisse confondre, dans la sanction, les trafiquants de squats et les malheureux qui en sont victimes. L'amendement répond très bien à ce souci. Naturellement, mon avis est défavorable sur le sous-amendement n° 450.
    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux, contre l'amendement.
    M. Bruno Le Roux. Non, monsieur le président, pour répondre au Gouvernement.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mais je n'ai quasiment rien dit !
    M. Bruno Le Roux. Il s'agit d'un problème que nous connaissons tous. Dans une circonscription comme la mienne, il est très difficile à gérer. Mais, monsieur le rapporteur, mettre à la disposition d'un tiers, moyennant rémunération ou avantage en nature, un logement dont on n'est pas propriétaire, c'est une escroquerie. L'incrimination existe déjà. Certes, je comprends bien votre volonté d'avoir un débat structurant sur ce point, d'autant que, sur le fond, vous ajoutez quelque chose en vous attaquant aux marchands de sommeil et c'est pourquoi nous voterons l'amendement.
    J'aimerais toutefois préciser ce qu'il faut entendre concrètement par « avantage en nature » : il s'agit de procurer une habitation à des gens qui en sont dépourvus en échange de leur force de travail. Cela ne concerne donc en rien les associations qui mettent à la disposition des personnes sans toit des logements inoccupés, quelquefois depuis très longtemps, afin d'essayer d'en changer l'affectation. Ces associations agissent toujours en marge de la légalité, mais leur travail est essentiel pour les personnes qu'elles secourent.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Je voudrais remercier M. Estrosi d'avoir présenté un tel amendement, car nous sommes confrontés à des situations assez difficiles à gérer.
    Vous parliez d'escroquerie, monsieur Le Roux. Oui ! Quelqu'un qui, en échange d'argent, vous promet un appartement, feignant d'en être le propriétaire, c'est un escroc. Mais la petite main que l'on paie pour ouvrir la porte avec un pied de biche, une disqueuse, un tournevis ou une masse, comment qualifier son geste ? Il fait partie de l'opération, mais ce n'est pas un escroc, bien qu'il mérite d'être condamné aussi fermement. Songez à ce qui s'est produit chez moi l'année dernière : 85 squats en peu de temps ! Voilà qui était bien organisé ! Je sais que certains ont touché 8 000 francs pour chaque opération et, sur cette somme, des petits jeunes en ont obtenu 3 000 francs pour seulement ouvrir la porte. Ils ont d'ailleurs été interpellés par les policiers, mais comme ils avaient posé le pied-de-biche par terre, il n'y avait pas flagrant délit et on les a relâchés, je le dis pour l'anecdote.
    Si nous laissons ce genre de phénomène se développer sans marquer le coup, sans montrer une volonté politique bien affirmée, nous courons à la catastrophe : 85 logements occupés en peu de temps ! Je n'ai plus qu'à arrêter de réunir la commission d'attribution de logements.
    On m'explique que les gens sont sans doute de bonne foi. D'ailleurs on ne condamne pas les victimes. Mais les victimes n'en sont pas toujours. Même si l'on vient d'un pays lointain, on sait qu'un bail ne se signe pas dans un café de gare. Surtout lorsqu'on visite l'appartement la nuit, à la lueur d'une lampe électrique ! Cela aussi, c'est tout à fait normal, peut-être ?
    M. Lionnel Luca. C'est du vécu !
    M. Pierre Cardo. On ne va certes pas tout régler avec cet amendement mais, déjà, on avance un peu. Je pense pourtant que, plus tard, il faudra aller un peu plus loin. Vous le savez très bien, dès qu'une faille se présente, les gens s'engouffrent dedans, c'est humain. Et, pour l'instant, notre dispositif offre de nombreuses failles. Nous jugerons avec le temps de l'efficacité de cette loi. Je ne pense pas qu'elle puisse donner lieu à des excès.
    Quant aux associations, si elles assument leur rôle strictement humanitaire, sans qu'aucune manipulation ne se cache derrière, je ne vois pas pourquoi elles seraient concernées.
    S'il y a autre chose, si elles ont participé à une escroquerie, elles tomberont alors sous le coup de la loi. Mais, à ma connaissance, ce n'est pas le cas. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Puis-je, répondre, monsieur le président ?
    M. le président. Contre l'amendement ?
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Non !
    M. le président. Le règlement permet de donner la parole à un député contre l'amendement et, éventuellement, pour répondre au Gouvernement et à la commission ; encore cela n'est-il pas obligatoire.
    M. Bruno Le Roux. Cette limitation ne s'impose pas.
    M. le président. Il est inutile de prolonger le débat. L'Assemblée me paraît suffisamment éclairée sur cette question et il est souhaitable de passer au vote.
    Je mets aux voix le sous-amendement n° 450.
    (Le sous-amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 95.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. L'amendement n° 197 corrigé n'est pas défendu.
    Je suis saisi de trois amendements identiques, n°s 96, 12 et 202, deuxième correction.
    L'amendement n° 96 est présenté par M. Estrosi, rapporteur, Mmes Joissains-Masini, Tabarot, MM. Mariani, Hamel Quentin et Luca ; l'amendement n° 12 est présenté par Mmes Zimmermann, Boutin, MM. Degauchy, Grand, Vitel, Martin, Mariani Spagnou, Cova, Woerth Luca et Cardo ; l'amendement n° 202, deuxième correction, est présenté par MM. Lagarde, Perruchot et Lachaud :
    Ces amendements sont ainsi libellés :
    « Après l'article 19 bis, insérer l'article suivant :
    « Après l'article 9 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, il est inséré un article 9 bis ainsi rédigé :
    « Art. 9 bis. - Dans les communes non inscrites au schéma départemental, le maire peut, par voie d'assignation délivrée aux occupants, et, le cas échéant, au propriétaire du terrain ou au titulaire d'un droit réel d'usage, saisir le président du tribunal de grande instance aux fins de faire ordonner l'évacuation forcée des résidences mobiles installées sur un terrain privé n'appartenant pas à la commune, lorsque le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquilité publiques. »
    La parole est à M. Le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 96.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Nombre de propriétaires privés sont démunis de tout moyen pour agir. Souvent, ils ne sont même pas informés de ce qui se passe sur leur propriété s'ils en sont absents ou si leur domicile en est éloigné.
    Lorsque se pose un vrai problème de salubrité, il faut donner au maire la possiblité d'intervenir sur ces propriétés privées. C'est le sens de cet amendement proposé en commission par Mme Joissains-Marsini, Mme Tabarot, M. Mariani et M. Hamel.
    M. le président. La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann, pour soutenir l'amendement n° 12.
    Mme Marie-Jo Zimmermann. Je souligne que cet amendement reprend une proposition de loi que j'avais déposée dès 1999. Je tiens à remercier la commission des lois de l'avoir accepté car il répond à un souci majeur des maires et des propriétaires. Je suis très satisfaite d'avoir enfin été entendue. (Applaudissements ! sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Nicolas Perruchot, pour soutenir l'amendement n° 202, deuxième correction.
    M. Nicolas Perruchot. Cet amendement devrait satisfaire beaucoup de maires, du moins dans la grande majorité des 36 000 communes de France qui ne sont pas inscrites dans un schéma départemental. Il leur permettra de saisir le préfet pour qu'il engage la procédure civile à leur place. En effet, pour ces petites communes, ces procédures sont très coûteuses et de plus en plus dificiles à mener à terme. Quand plusieurs procédures doivent être engagée la même année et que le budget communal est très modeste, il faut parfois abandonner.
    L'adoption de ces amendements contribuera à redonner une efficacité à l'action quotidienne du maire. C'est ce que nous souhaitons tous.
    M. Guy Geoffroy. Très bien !
    M. le président. La commission s'est déjà exprimée.
    Quel est l'avis du Gouvernement sur ces trois amendements identiques ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable. Mme Zimmermann a d'ailleurs anticipé avec brio.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 96, 12 et 202, deuxième correction.
    (Ces amendements sont adoptés.)

Article 20

    M. le président. « Art. 20. - Le premier alinéa de l'article 433-3 du code pénal est ainsi rédigé :
    « Est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende la menace de commettre un crime ou un délit contre les personnes ou les biens proférée à l'encontre d'une personne investie d'un mandat électif public, d'un magistrat, d'un juré, d'un avocat, d'un officier public ou ministériel, d'un militaire de la gendarmerie, d'un fonctionnaire de la police nationale, des douanes, de l'administration pénitentiaire, d'un gardien assermenté d'immeubles ou de groupes d'immeubles, d'un gardien d'immeubles ou de groupes d'immeubles mentionnés au livre IV du code de la construction et de l'habitation, de toute autre personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, ou à l'encontre, et du fait de ces fonctions, du conjoint, des ascendants et des descendants en ligne directe de cette personne ou de toute autre personne vivant habituellement à son domicile. La peine est portée à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende lorsqu'il s'agit d'une menace de mort ou d'une menace d'atteinte aux biens dangereuse pour les personnes. »
    M. Le Roux, Mme David et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 295, ainsi rédigé :
    « Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article 20, après le mot : "menace, insérer les mots : ", lorsqu'elle est réitérée,. »
    La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Bien entendu, il convient de ne pas laisser passer des choses inacceptables, notamment contre les détenteurs de l'autorité publique. Cela dit, ces dernières semaines, je me suis renseigné et j'ai rencontré des policiers. J'ai ainsi appris que les plaintes déposées pour ce type de menaces font toujours état de réitération.
    Pour ne pas alourdir les procédures et les vider de leur effet, il conviendrait de distinguer la parole qui dépasse la pensée et qu'on entend assez régulièrement, les menaces qui ne sont adressées qu'une fois, et les véritables menaces que sont les menaces réitérées.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Nos forces de l'ordre ont énormément souffert ces dernières années,...
    M. Bruno Le Roux. Il n'y a pas que les forces de l'ordre !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... du manque de considération dont elles ont fait l'objet. Trop d'outrages sont restés impunis. Au point qu'au cours des cinq dernières années les outrages à agent n'ont même plus été poursuivis. Lorsqu'ils étaient insultés ou qu'on leur crachait à la figure, les agents tournaient le dos, humiliés, sachant que, s'ils intervenaient, alors que bien souvent la hiérarchie le leur avait déconseillé, les procédures ne seraient pas suivies d'effet. Telle est bien la réalité.
    M. Lucien Degauchy. En effet !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Il faut redonner un certain nombre de repères pour que nos forces de l'ordre soient à nouveau motivées et se sentent considérées.
    Cet amendement affaiblirait l'intention qui sous-tend l'article 20. J'y suis donc défavorable. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement considère que lorsqu'on menace d'assassiner quelqu'un, il n'est pas besoin de le répéter trois fois pour que ce soit punissable. La première fois suffit. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française).
    Ce n'est pas très compliqué. Quand quelqu'un dira à un représentant des forces de l'ordre, au titulaire d'un mandat électif ou à un fonctionnaire qui exerce une fonction importante : « Je te casserai la figure » ou « Je t'assassinerai », une fois suffira. Et s'il s'en prend à la famille, il y passera aussi !
    Il y avait deux solutions, monsieur Le Roux. La première, c'était d'augmenter le quantum des peines ; je ne l'ai pas voulu, parce qu'il était suffisant. La deuxième, c'était de supprimer la réitération.
    Maintenant, qu'il soit bien entendu que toute menace d'assassinat ou d'atteinte à la sécurité des personnes visées dans cet article sera punie ! Enfin, la loi signifiera quelque chose ! Qu'il y ait désaccord entre nous, ce n'est pas un drame. Mais je n'hésiterai pas à transmettre aux intéressés le contenu exact de celui-ci. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Lucien Degauchy. Voilà les paroles que les Français attendent !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Il y a quelques heures, avec les gendarmes mobiles, les policiers nationaux et les sapeurs-pompiers de ma commune, nous discutions de ce qui est en train de se décider à l'Assemblée nationale. J'ai abordé le sujet des menaces proférées à leur encontre et envers leurs familles. Je ne peux pas comprendre le raisonnement qui aboutit à demander qu'il y ait réitération. Cela signifierait qu'un écart de langage à l'encontre d'un policier, d'un gendarme, mais aussi d'un juge ou d'un gardien d'immeuble, ce n'est pas grave.
    En tant que maire, je suis vice-président d'un office d'HLM. Lorsqu'un gardien d'immeuble vient m'annoncer : « Quelqu'un est venu me dire droit dans les yeux : Je te ferai la peau ! », il n'attend pas de savoir si la menace va être réitérée ou pas pour savoir s'il a envie de rester gardien d'immeuble, et si je peux le défendre. Une fois suffit !
    M. Lucien Degauchy. C'est une fois de trop !
    M. Jean-Christophe Lagarde. On doit respecter celui qu'on a en face de soi, et il est hors de question d'admettre qu'un gardien d'immeuble ou un fonctionnaire de police soit menacé, voire insulté, ne serait-ce qu'une seule fois, parce que l'énervement, l'excitation, un moment d'égarement le permettrait. Eh bien non ! On n'a pas le droit, tout simplement, de menacer, d'insulter les gens qui servent la collectivité. Je suis donc contre cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Je soutiendrai et je voterai sans hésiter l'article 20, qui protège la police nationale - laquelle est en première ligne, les sapeurs-pompiers et les gardiens d'immeuble ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)

    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Excellent !
    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Toutes les insultes dont vient de parler M. Lagarde sont absolument inadmissibles.(« Alors ? » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle).
    M. Jacques Myard. Retirez votre amendement !
    M. Bruno Le Roux. Nous remarquons simplement, je le répète, que quasiment 100 % des plaintes déposées aujourd'hui pour ce genre de menaces font état de réitération.
    L'article 20 prévoit tout de même deux ans de prison et une amende de 30 000 euros. Je pense qu'aucune insulte n'est acceptable, mais je souhaite qu'une telle peine soit réservée à la réitération. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Lucien Degauchy. Assez de laxisme !
    M. Lionnel Luca. Ça calme !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 295.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Le Fur a présenté un amendement, n° 351, ainsi rédigé :
    « Au début de la première phrase du dernier alinéa de l'article 20 après les mots : "mandat électif public, insérer les mots : ", d'un préfet ou d'un sous-préfet. »
    La parole est à M. Marc Le Fur.
    M. Marc Le Fur. Monsieur le ministre, l'article 20 est excellent. Je m'étais permis, dès le mois de juillet, lors de notre débat sur la sécurité, de vous demander de faire en sorte que l'ensemble des détenteurs, ne fût-ce que d'une parcelle, de l'autorité publique se sentent défendus.
    Avec cet article, nous soldons un peu mai 68. Mon collègue Myard l'a déjà évoqué, mais rappelez-vous le slogan : « Il est interdit d'interdire », rappelez-vous la dénonciation de toute forme d'autorité. Eh bien, les résultats sont là : des pompiers insultés, des policiers menacés, des contrôleurs de transports publics systématiquement humiliés !
    Tous ces personnels doivent se sentir soutenus. Non à la banalisation de l'agressivité verbale dont ils sont trop souvent l'objet ! Pourquoi faut-il protéger les titulaires de l'autorité publique ? Non pas parce qu'ils jouiraient d'un quelconque privilège, mais parce que le fait qu'ils portent un uniforme les expose à l'agressivité de certains.
    Seulement, il y a un problème : comment établir la liste des personnes détentrices de l'autorité publique ? De deux choses l'une : soit on s'en tient à une rédaction générale dans la grande tradition du droit français, et c'est souvent la meilleure des solutions,...
    M. Pascal Clément, président de la commission. En effet.
    M. Marc Le Fur. ... soit on établit une liste. C'est la solution esquissée dans la rédaction actuelle de l'article 20. Mais il faut alors que cette liste soit exhaustive. Mon objectif consiste précisément à introduire deux catégories qui n'avaient pas été citées.
    Cet amendement n° 351 concerne des personnels à l'égard desquels nous-mêmes élus sommes parfois exigeants et sévères : les préfets et les sous-préfets. On a parlé des problèmes posés par les nomades, les raves, les squats. Rappelez-vous que ces personnels, parce qu'ils sont détenteurs de l'autorité publique, sont particulièrement exposés dans de telles circonstances et qu'eux aussi doivent se sentir soutenus.
    M. Jacques Myard. Vivent les préfets !
    M. Marc Le Fur. Dans la mesure où nous faisons une liste, ils doivent nécessairement y figurer. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jacques Myard. L'Etat jacobin revient !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Selon l'analyse de la commission, les préfets et sous-préfets sont bien visés par le texte. On ne peut pas considérer, en effet, qu'un préfet ou un sous-préfet n'est pas chargé d'une mission de service public. Cela étant, je ne vois personnellement aucun inconvénient à ce qu'ils figurent dans l'énumération. Je suis donc favorable à l'amendement de M. Le Fur.
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Comme l'a dit très justement M. Le Fur, si on commence à citer certaines catégories, il faut continuer. Mais on peut lui retourner l'argument. Il cite les préfets et les sous-préfets, détenteurs de l'autorité publique, donc déjà concernés par le texte, mais il oublie bien d'autres catégories. Faudra-t-il y ajouter toutes celles qu'il a oubliées ?
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement est prêt à donner satisfaction à M. Le Fur, à condition qu'il soit bien précisé que cette liste n'est pas exhaustive. Sinon, on risque d'exclure de cette liste bien plus de personnes qu'on n'en inclura !
    J'y mets une autre condition, monsieur Le Fur : c'est que vous considériez que l'amendement n° 352 est déjà défendu !
    Certes, c'est moi qui ai fauté le premier en instituant une liste. Mon intention était de donner à ce texte un aspect symbolique dans un domaine où on ne peut pas faire que du juridisme. En effet, pour 60 millions de Français « une personne dépositaire de l'autorité publique », cela ne veut pas dire grand-chose. Il en est tout autrement si on précise : les pompiers, les gardiens d'immeuble, les sous-préfets, etc.
    Le Gouvernement n'est pas opposé à cet amendement, mais il faut préciser que cette liste n'est pas exhaustive car, si on ne s'appuie que sur elle, on risque d'exclure bien des catégories.
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
    M. Pascal Clément, président de la commission. J'ai le désagréable rôle de contredire M. le ministre. En matière d'incrimination pénale, on ne peut pas dire qu'une liste n'est pas limitative. Ou l'on se contente des catégories inscrites sur la liste - et c'est pour cela que j'ai renvoyé M. Le Fur à tous les exemples qu'il avait oubliés - ou l'on se contente de ce qui est indiqué dans la loi.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Très bien !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Je veux bien que l'on fasse plaisir aux corporations, mais, au bout d'un moment, on atteint les limites juridiques de l'exercice.
    M. le président. Dans ces conditions, monsieur Le Fur, retirez-vous l'amendement n° 351 ?
    M. Marc Le Fur. Non, monsieur le président. Je le maintiens.
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le texte de l'article 20 vise « toute personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ». Les catégories de personnes que les parlementaires peuvent décider d'ajouter ne sont là qu'à titre illustratif. Cela dit, monsieur le président, je m'incline bien volontiers.
    M. Jacques Myard. Et si l'on précisait « notamment » ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mais le président Clément n'aime pas, et le Gouvernement n'aime pas faire une chose que n'aime pas le président Clément.
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Je comprends l'argument politique que défend le ministre. Et je me doute que le gardien d'immeuble sera tout heureux de figurer sur la liste. Mais mon rôle est tout de même de faire un peu de droit, à partir du moment où l'on écrit : « toute personne dépositaire de l'autorité publique », on n'a même pas à commencer l'énumération.
    En conclusion, ne supprimons pas cette liste, mais évitons de la rallonger.
    M. Jean-Christophe Lagarde. C'est le juste milieu !
    M. le président. Je mets au voix l'amendement n° 351.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Le Fur a présenté un amendement, n° 352, ainsi rédigé :
    « Dans la première phrase du dernier alinéa de l'article 20 après les mots : "d'un fonctionnaire de la police nationale, insérer les mots : "d'un agent de police municipale. »
    La parole est à M. Marc Le Fur.
    M. Marc Le Fur. Certes, il n'y avait pas d'ambiguïté quant à la qualité de « personne dépositaire de l'autorité publique » du préfet et du sous-préfet. Une rédaction abstraite du texte aurait été bien meilleure, quitte à l'accompagner d'un « notamment » qui aurait démontré que la première partie du texte n'était pas exhaustive. Mais ce n'était pas la rédaction qui nous était proposée.
    S'agissant des polices municipales, il convient d'être très explicite. Les policiers municipaux sont aussi dépositaires de l'autorité publique. Ils portent un uniforme et sont agressés verbalement comme les autres.
    Il me semble nécessaire que les policiers municipaux détenteurs d'une parcelle, fût-elle minime, de l'autorité publique soient mentionnés dans cet article, car il peut y avoir, en ce qui les concerne, une ambiguïté.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. La commission, désireuse de donner un signe fort aux policiers municipaux, a émis un avis très favorable tout en souhaitant connaître, à l'occasion du débat parlementaire, l'avis du Gouvernement.
    M. Pascal Clément, président de la commission. C'est courageux ! (Sourires.)
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Le Gouvernement n'a aucun doute à ce sujet : les policiers municipaux sont bien chargés d'une mission de service public ; ils sont habilités par le procureur de la République, ils portent un uniforme et ils peuvent verbaliser.
    On peut se ranger à l'argumentation, fort pertinente, du président Clément. Mais je ne voudrais pas vous donner le sentiment de ne pas vouloir protéger les policiers municipaux, qui, à l'évidence, font un travail remarquable. Il en est d'ailleurs de même des préfets. Je les réunirai le mois prochain, et je ne voudrais même pas pas encourir de leur part un quelconque reproche. Nous sommes dans le domaine politique. Le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse de l'Assemblée. A courage, courage et demi !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Pour ma part, je recommande de voter contre l'amendement !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. L'argumentation du président Clément me paraît lumineuse. Je comprends parfaitement le souci de M. le ministre et celui de notre collègue Le Fun. Mais en allant dans ce sens, je n'aperçois ni les gardes-chasse ni bien d'autres dépositaires de l'autorité publique.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Ni le raton laveur !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Ces corporations pouraient s'estimer déconsidérées.
    En définitive, ce qui compte le plus ici, c'est la mention : « , et du fait de ces fonctions, du conjoint, des ascendants et des descendants en ligne directe de cette personne, ou de toute autre personne vivant habituellement à son domicile ». Le cadre juridique est ainsi bien défini.
    J'ajoute, monsieur le ministre, que si les policiers municipaux deviennent des agents de police judiciaire adjoints, ils seront bien évidemment dépositaires de l'autorité publique.
    Donc, mieux vaut arrêter ; sinon, nous risquons de sombrer dans l'excès. Et toute catégorie qui ne sera pas citée pourra se scandaliser d'avoir été oubliée et de n'avoir pas été considérée.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Garraud.
    M. Jean-Paul Garraud. Je souhaite apporter une précision. Lorsqu'une personne exerçant une mission de service public est victime d'une infraction, ou d'un acte d'intimidation, la poursuite est engagée par le procureur de la République qui qualifie lui-même l'infraction et saisit, si besoin est, un juge d'instruction. Or le magistrat sait pertinemment qu'un préfet, un sous-préfet ou un agent de police municipale entrent dans cette catégorie et qu'ils sont à ce titre protégés par le texte. Techniquement, cela ne pose donc aucun problème.
    M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.
    M. Marc Le Fur. Je veux bien qu'on m'oppose ces arguments mais je rappelle tout de même que mon amendement résulte de la rédaction de l'article.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Justement, inutile d'en rajouter !
    M. Marc Le Fur. Or cette rédaction ne se limite pas à une définition abstraite.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Je le sais !
    M. Marc Le Fur. Elle procède par énumération, citant les agents des douanes, de l'administration pénitentiaire, les gardiens d'immeubles ou de groupes d'immeubles, etc. Dès lors qu'on a commencé, peut-être à tort, à dresser une liste, je ne vois pas pourquoi les catégories que j'évoquais, et en particulier les policiers municipaux, n'y figureraient pas.
    Si le ministre en est d'accord, je retirerai mon amendement, mais plaise à dieu que l'on mette à profit la deuxième lecture pour imaginer une rédaction, générale cette fois-ci, qui permette de résoudre le problème.
    M. Pascal Clément, président de la commission. D'accord.
    M. le président. Il n'y aura pas de deuxième lecture, monsieur Le Fur, l'urence ayant été déclarée.
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Faisons attention pour les gardiens d'immeubles : ils constituent une catégorie bien précise, car ils ne sont pas détenteur de l'autorité publique.
    M. Marc Le Fur. C'est vrai !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ce que l'on pourrait faire, c'est ne pas citer dans la liste les personnes qui sont incontestablement détentrices de l'autorité publique. Pour le reste, on peut y passer longtemps ; d'ailleurs suivent des amendements relatifs aux personnels du SAMU, aux médecins et à d'autres encore. Mais il ne faut pas exclure les gardiens d'immeuble de la liste car ils attendent cette disposition protectrice.
    M. le président. Monsieur Le Fur, retirez-vous votre amendement ?
    M. Pierre Cardo. Cela pose un problème.
    M. Marc Le Fur. A partir du moment où le ministre nous assure que les deux catégories que j'évoquais relèvent bien de la définition abstraite qui nous est proposée et qu'elles pourront bénéficier des dispositions de l'article 20, je retire mon amendement. Mais je regrette que cet article reste à mi-chemin entre le principe d'une définition abstraite et celui d'une liste exhaustive.
    M. le président. L'amendement 352 est donc retiré.
    M. Estrosi, rapporteur, et M. Vanneste ont présenté un amendement, n° 97, ainsi rédigé :
    « Dans la première phrase du dernier alinéa de l'article 20 après les mots : "administration pénitentiaire, insérer les mots : "d'un sapeur-pompier professionnel ou volontaire,. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Je retire cet amendement, qui a été adopté par la commission.
    Je rappelle, s'agissant de l'amendement de M. Le Fur relatif aux préfets et aux sous-préfets, que la commission l'avait initialement rejeté, considérant que tout détenteur de l'autorité publique était protégé et couvert par ce texte. Mais vous avez raison de souligner que le projet de loi du Gouvernement comporte une liste dans laquelle on trouve à la fois des personnes détentrices de l'autorité publique et d'autres, comme les gardiens d'immeubles, le ministre le rappelait à l'instant, qui ne le sont pas.
    M. Pierre Cardo. Mais qui ont tout de même une mission de service public déléguée.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Pas toujours, nous allons en parler à l'amendement suivant de la commission.
    Toutefois, je crois que l'Assemblée a été suffisamment éclairée. J'émets personnellement le souhait que dans la suite du débat, à l'occasion de la CMP, nous y toilettions cet ensemble, pour sortir de la liste tous ceux qui sont chargés d'une mission de service public et qui n'ont pas à figurer, tout en affinant la liste de ceux qui ne sont pas chargés d'une mission de service public mais qui doivent être protégés.
    M. le président. L'amendement n° 97 est retiré.
    M. Christian Vanneste. Je reprends cet amendement dont je suis cosignataire.
    M. le président. Vous avez la parole, monsieur Vanneste.
    M. Christian Vanneste. La justification formelle de cet amendement, qui a été évoquée en commission, est très simple : maintenir un équilibre entre deux articles, l'article 20 et l'article 45. Les sapeurs-pompiers professionnels et volontaires sont cités à l'article 45 relatif à la protection juridique. Dès lors, l'article 20 doit aussi en faire mention.
    Mais il y a également une raison de fond, très forte : sur un plan symbolique, après les événements du 11 septembre, il me paraîtrait assez fâcheux de ne pas citer une des professions d'autorité dont la société a fondamentalement besoin.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Je comprends la démarche de mon collègue Christian Vanneste, mais son argument ne tient pas. En effet, contrairement à l'article 20, l'article 45 est limitatif.
    M. le président. La parole est à M. Georges Fenech.
    M. Georges Fenech. Si l'on veut protéger des catégories de professionnels, comme les gardiens d'immeubles, qui n'exercent pas une mission de service public, il faut impérativement intégrer dans la liste les sapeurs-pompiers. Il me paraît donc important de voter cet amendement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 97.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Estrosi, rapporteur, et M. Gérard Léonard ont présenté un amendement, n° 98, deuxième rectification, ainsi libellé :
    « Après les mots : "assermenté d'immeubles ou de groupes d'immeubles, rédiger ainsi la fin de la première phrase du dernier alinéa de l'article 20 : "d'un agent exerçant pour le compte d'un bailleur des fonctions de gardiennage ou de surveillance des immeubles à usage d'habitation en application de l'article L. 127-1 du code de la construction et de l'habitation, d'un agent d'un exploitant de réseau de transport public de voyageurs, d'un professionnel de santé en service en période de nuit, le week-end et les jours fériés, de toute autre personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, ou à l'encontre, et du fait de ces fonctions, du conjoint, des ascendants et des descendants en ligne directe de cette personne ou de toute autre personne vivant habituellement à son domicile. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cet amendement vise clairement des personnes qui ne sont pas chargées d'une mission de service public.
    M. Pascal Clément, président de la commission. C'est très clair !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Nous avons tous pu constater que des infirmières, des médecins, des membres du SAMU refusent aujourd'hui de remplir leur mission...
    M. Lionnel Luca. Absolument !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. ... ou de répondre aux appels téléphoniques parce qu'ils ne veulent plus pénétrer, notamment la nuit, dans certains quartiers où ils sont particulièrement menacés. Il a donc paru essentiel à la commission de les faire figurer dans la liste, car ils ne font pas partie des personnels protégés en tant que chargés d'une mission de service public.
    M. Lucien Degauchy. Très bien !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. J'aimerais présenter un sous-amendement, monsieur le président.
    M. le rapporteur a raison de vouloir étendre la liste à des personnes qui sont aujourd'hui touchées dans l'exercice de leur profession. Je comprends que la rédaction insiste sur la partie de leur activité qui s'apparente à un service public d'urgence. Mais c'est toute la journée que les médecins et les professionnels de santé sont exposés. Et il n'y a aucune raison de restreindre à une partie de la journée la protection qu'on leur accorde, alors qu'on ne l'a pas fait pour d'autres professions.
    C'est pourquoi je propose de supprimer, après les mots : « d'un professionnel de santé », les mots : « en service en période de nuit, le week-end et les jours fériés ».
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle. Il a raison !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cette rectification ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Favorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable également.
    M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.
    Mme Martine Billard. Je suis dubitative. Certes, il importe de sanctionner s'il y a menace, mais il s'agit aussi de maintenir le service public en faisant en sorte que les personnes qui ont besoin de voir un professionnel de santé le puisse.
    Je sais bien que ce n'est pas dans cet article que nous allons traiter la question, mais j'aimerais qu'on réfléchisse à d'autres dispositifs pour permettre aux professionnels de santé de remplir leur mission auprès des habitants. En fait, la présente disposition n'aboutira pas à grand-chose. Elle permettra de sanctionner ceux qui auront proféré des menaces, mais elle n'aura pas réglé le problème qui fait que le médecin n'arrive pas à temps pour aider une personne en difficulté.
    M. le président. La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Nous touchons là à un sujet tabou. Depuis plusieurs années, nous avons noué un dialogue avec les services d'urgences de plusieurs communes de l'agglomération lyonnaise et nous avons pu constater que le problème n'est pas seulement le déplacement du médecin à certaines heures et à certains endroits, il concerne aussi le déplacement du patient, qui refuse de se rendre dans certains lieux, même lorsqu'il s'agit d'aller consulter le médecin de garde.
    Je soutiens donc cet amendement car il correspond bien à la réalité.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Monsieur le président, il serait préférable de conserver les mots : « en service » et d'ajouter le mot « et » avant les mots : « de toute autre personne ».
    M. Bruno Le Roux. C'est précisément cette rédaction que je viens de transmettre à M. le président.
    M. le président. Je donne donc lecture de l'amendement n° 98, troisième rectification :
    « Après les mots : "assermenté d'immeubles ou de groupes d'immeubles, rédiger ainsi la fin de la première phrase du dernier alinéa de l'article 20 : "d'un agent exerçant pour le compte d'un bailleur des fonctions de gardiennage ou de surveillance des immeubles à usage d'habitation en application de l'article L. 127-1 du code de la construction et de l'habitation, d'un agent d'un exploitant de réseau de transport public de voyageurs, d'un professionnel de santé en service et de toute autre personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, ou à l'encontre, et du fait de ces fonctions, du conjoint, des ascendants et des descendants en ligne directe de cette personne ou de toute autre personne vivant habituellement à son domicile. »
    Je mets aux voix l'amendement n° 98, troisième rectification.
    (L'amendement, ainsi rectifié, est adopté.)
    M. le président. En conséquence, l'amendement n° 37 de M. Mourrut tombe.
    Je mets aux voix l'article 20, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 20, ainsi modifié, est adopté.)

Article 20 bis

    M. le président. « Art. 20 bis. - Au cinquième alinéa (4°) des articles 221-4, 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13 du code pénal, après les mots : "de voyageurs, sont insérés les mots : ", un médecin, un gardien assermenté d'immeubles ou de groupes d'immeubles, un gardien d'immeubles ou de groupes d'immeubles mentionnés au livre IV du code de la construction et de l'habitation. »
    M. Estrosi, rapporteur, et M. Gérard Léonard, ont présenté un amendement, n° 99 rectifié, ainsi libellé :
    « Après les mots : "sont insérés les mots : ", un, rédiger ainsi la fin de l'article 20 bis : "professionnel de santé en service en période de nuit, le week-end et les jours fériés, un gardien assermenté d'immeubles ou de groupes d'immeubles, un agent exerçant pour le compte d'un bailleur des fonctions de gardiennage ou de surveillance des immeubles à usage d'habitation en application de l'article L. 127-1 du code de la construction et de l'habitation. »
    Sur cet amendement, M. Morange a présenté un sous-amendement, n° 479, ainsi rédigé :
    « Dans le dernier alinéa de l'amendement n° 99 rectifié, après les mots : "les jours fériés, insérer les mots : "ou intervenant à la demande de la régulation médicale du centre 15. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 99 rectifié.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. L'argumentation est la même que précédemment et, bien évidemment, je propose une nouvelle rectification en supprimant les mots : « en période de nuit, le week-end et les jours fériés ».
    M. le président. Le sous-amendement n° 479 n'est pas défendu.
    Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 99, deuixième rectification.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 20 bis, modifié par l'amendement n° 99, deuxième rectification.
    (L'article 20 bis, ainsi modifié, est adopté.)

Article 20 ter

    M. le président. « Art. 20 ter. - Après le cinquième alinéa (4°) des articles 221-4, 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13 du code pénal, il est inséré un 4° bis, ainsi rédigé :
    « 4° bis Sur le conjoint, les ascendants et les descendants en ligne directe des personnes mentionnées au 4° ou sur toute autre personne vivant habituellement à leur domicile, en raison des fonctions exercées par ces personnes ; ».
    Je mets aux voix l'article 20 ter.
    (L'article 20
ter est adopté.)

Article 21

    M. le président. « Art. 21. - Après l'article L. 126-2 du code de la construction et de l'habitation, il est inséré un article L. 126-3 ainsi rédigé :
    « Art. L. 126-3. - Les voies de fait ou la menace de commettre des violences contre une personne, ou l'entrave apportée, de manière délibérée, à l'accès et à la libre circulation des personnes ou au bon fonctionnement des dispositifs de sécurité et de sûreté, lorsqu'elles sont commises en réunion de plusieurs auteurs ou complices, dans des entrées, cages d'escaliers ou autres parties communes d'immeubles collectifs d'habitation, sont punies de deux mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende. »
    Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.
    La parole est à M. Bruno Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Mon intervention vaudra également pour la défense de l'amendement n° 296 de suppression.
    Le problème des halls d'immeuble occupe depuis maintenant plusieurs années, une part importante de nos débats sur les questions de sécurité. En 1995, Daniel Vaillant, au nom du groupe socialiste, avait introduit une disposition à ce sujet dans la LOPS, et d'autres ont suivi dans la loi sur la sécurité quotidienne, après de nombreux mois de travail au sein de notre assemblée et de réflexion menée, notamment avec le mouvement HLM et les spécialistes de la sécurité qui travaillent en son sein, comme ceux qui sont détachés, par exemple, par le ministère de l'éducation ou de l'intérieur pour suivre ces questions.
    Il est bien nécessaire de sécuriser des espaces qui ont une vocation publique, des espaces d'accueil qui ne sont pas seulement utilisés par ceux qui habitent l'immeuble et qui doivent rester un lieu de passage.
    Aujourd'hui, ces lieux qui, par définition, ont une vocation d'espaces publics, sont souvent occupés et, dans de nombreux cas, cela est dû au fait que nous avons abandonné la gestion de cet espace.
    Le problème se pose donc de la façon suivante : que peut-on faire aujourd'hui pour que les halls d'immeubles retrouvent leur fonction initiale ? Ce type d'interrogation vaudrait pour toute une série d'autres questions relatives à des situations d'insécurité qui touchent à la gestion de l'espace public, mais je me concentrerai sur ce cas précis.
    La première réponse que nous avons pu apporter se plaçait, bien sûr, dans une perspective de gestion, qui me semble indispensable. On ne peut pas demander aujourd'hui à la police d'aller résoudre des problèmes qui ne sont pas résolus par les propriétaires de ces immeubles.
    On ne peut pas tout attendre de la police. D'ailleurs, de nombreux policiers reconnaissent aujourd'hui l'inutilité d'interventions répétées dans des halls d'immeubles qui ne sont pas véritablement gérés, où l'on a, petit à petit, supprimé tout mode de garde et où l'on n'a pas installé de dispositifs de sécurisation. Cela ne fait que déplacer le problème. Tout le monde s'accorde aujourd'hui à dire qu'il ne peut pas y avoir d'intervention de la police efficace sans un travail de réappropriation préalable par la mise en oeuvre d'une gestion humaine mais aussi technique.
    C'était l'objectif de la loi sur la sécurité quotidienne votée il y a maintenant plus d'un an et demi qui, je le rappelle, autorisait l'intervention des forces de police, sous réserve que le bailleur ait rempli ses obligations en matière de sécurisation des lieux.
    M. Lionnel Luca. Pour quels résultats ?
    M. Bruno Le Roux. Avec ce projet de loi, monsieur le ministre, vous créez un nouveau délit. Dans votre intervention liminaire, vous nous avez dit : « Si l'occupation est une simple contravention, la police ou la gendarmerie, saisies par un voisin excédé, ne peuvent rien faire d'autre que de dresser un procès-verbal. Etant donné l'attitude de certains contrevenants, on peut supposer qu'ils seront très impressionnés ! » Je pense que vous avez manié l'ironie...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Exact !
    M. Bruno Le Roux. ... même si on ne le sent pas dans le compte rendu analytique que j'ai sous les yeux, et je la souligne donc ! Vous avez ajouté : « La qualification de délit, elle, permet l'interpellation et, si besoin, la garde à vue. Elle est donc la seule à faire cesser le trouble immédiatement. »
    Mais je me demande si, une fois de plus, on ne se laisse pas aller à la précipitation. Ne s'agit-il pas là d'un détournement de procédure, puisque l'on crée un délit à seule fin de permettre l'évacuation du lieu, voire la garde à vue. Je souhaiterais avoir l'avis du garde des sceaux sur cette façon de faire, car on privilégie la fin au détriment des moyens.
    Sans m'appesantir, je souligne que beaucoup de troubles qui ont lieu dans les halls d'immeuble peuvent être qualifiés aujourd'hui soit de contraventions, soit de délits quand il y a menaces.
    J'ai repris toutes les propositions formulées par les professionnels. Or dans aucun des colloques...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Encore des colloques !
    M. Lionnel Luca. Les gens des colloques vivent rarement les problèmes !
    M. Bruno Le Roux. ... sur les questions de sécurité - et il s'est agi de colloques intéressants, avec des professionnels -...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. A Villepinte, peut-être ?
    M. Jean-Christophe Lagarde. A Villepinte, ce n'étaient pas des professionnels !
    M. Bruno Le Roux. Il ne s'agit pas de Villepinte, où il s'est cependant produit un événement important. D'ailleurs, vous placez votre action dans la ligne de ce qui s'y est passé. Votre réorganisation de la police n'est pas autre chose que du Villepinte à grande échelle (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Je n'ai donc, dis-je, trouvé dans les propositions des professionnels du logement aucune trace de ce que vous nous présentez aujourd'hui.
    M. Pierre Cardo. Ce n'est pas leur job ! Ce ne sont pas eux qui habitent dans ces immeubles !
    M. Bruno Le Roux. J'ai déjà souligné dans la discussion générale qu'il ne me paraissait pas nécessaire d'aller jusqu'à la création de ce délit. Il me semble préférable de commencer par contraventionnaliser avant d'ajouter la pénalisation de certains délits établis sur la base de faits réellement constatés. Il suffirait sans doute pour cela de mobiliser les forces de l'ordre en renforçant leurs moyens dans les endroits les plus difficiles. Les responsables de celles qui opèrent dans les quartiers les plus sensibles soulignent en effet qu'elles n'ont ni les moyens ni les effectifs nécessaires pour agir.
    M. Pierre Cardo. Non, ce n'est pas du tout ce qu'ils disent !
    M. Bruno Le Roux. C'est tout de même important.
    M. Pierre Cardo. Ils disent surtout qu'ils ne veulent plus se déplacer pour rien !
    M. Bruno Le Roux. Si les policiers disposaient des moyens et des effectifs nécessaires, ils n'attendraient pas votre texte autant que vous voulez le laisser croire.
    M. le président. La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Monsieur le ministre, je suis opposé à cet article.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. C'est dommage !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Une fois n'est pas coutume.
    M. André Gerin. Je vais vous expliquer pourquoi.
    Mme Françoise de Panafieu. Ah bon !
    M. André Gerin. Tout le monde est bien d'accord, semble-t-il, sur le fait que de tels attroupements empoisonnent la vie de trop nombreux habitants.

    M. Guy Geoffroy. Très bien !
    M. Lionnel Luca. Jusque là, ça va !
    M. André Gerin. La question est urgente...
    M. Lionnel Luca. Mais...
    M. André Gerin. ... et les députés communistes et républicains estiment qu'il faut protéger les victimes de ces situations.
    M. Lucien Degauchy. C'est évident !
    M. Gérard Léonard. Vous êtes dans l'incantation !
    M. André Gerin. Cependant, nous reprochons à votre proposition d'accentuer la pénalisation des comportements. Or nous sommes opposés à une telle pénalisation.
    M. Lionnel Luca. Je ne comprends pas !
    M. André Gerin. Je suis d'autant mieux placé pour parler de ce problème que je le vis tous les jours dans ma commune. A cet égard, que proposons-nous ?
    M. Lionnel Luca. Un colloque ?
    M. le président. Attendez la chute, monsieur Luca !
    M. André Gerin. La création d'une mission interministérielle (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle) placée sous l'égide du ministère de l'intérieur...
    M. Pierre Cardo. C'est du Rocard !
    M. Lionnel Luca. Les voyous vont être morts de peur !
    M. André Gerin. ... et associant notamment des représentants des organisations de jeunesse et des amicales de locataires d'HLM. Elle traiterait de ce problème majeur pour les habitants de ces immeubles et aurait une durée de vie limitée, par exemple un semestre.
    Monsieur le ministre, je tiens à appeler votre attention sur cette question, même si je sens bien que certains considèrent cette proposition avec ironie. En effet, d'abord, je refuse que les jeunes qui se rassemblent ainsi, qu'ils soient mineurs ou adultes, soient tous considérés comme des voyous, sans exception.
    M. Lionnel Luca. Mais il y en a !
    M. André Gerin. Certes, mais pas tous ! Ensuite, j'estime qu'il y a, dans ces quartiers, des jeunes et des adultes positifs.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Bien sûr !
    M. André Gerin. Ils peuvent nous aider à trouver des solutions. Voilà pourquoi je formule cette proposition. Cela donnerait une dimension nouvelle à notre action en la matière, puisque nous tendrions la main à ces jeunes pour traiter ensemble le problème. Nous l'aborderions non pas sur le plan de l'accompagnement social, mais en termes de fermeté, de réinsertion, de rééducation, afin de sortir de leur situation un certain nombre de jeunes ou d'adultes qui pourrissent la vie des gens dans ces immeubles. Tel est l'esprit de notre proposition.
    M. le président. La parole est à Mme Françoise de Panafieu.
    Mme Françoise de Panafieu. Monsieur le ministre, c'est également avec mon expérience d'élue locale que j'interviens dans ce débat. Elle me conduit d'ailleurs à affirmer, monsieur Le Roux, que je ne crois pas un seul instant à la réappropriation des halls d'immeubles, comme vous dites, autrement qu'avec l'aide de la police si nécessaire.
    Cet article nous donne une nouvelle fois l'occasion d'affirmer que notre préoccupation concerne avant tout celles et ceux dont la vie quotidienne est devenue intolérable. C'est pourquoi nous voulons que soient mis en cause toutes celles et tous ceux qui mettent à mal l'indispensable paix sociale, y compris dans les halls d'immeuble.
    Monsieur le ministre, vous avez rencontré, boulevard Bessières, dans le 17e arrondissement de Paris dont je suis le maire, un homme qui, chaque soir, rentre chez lui les épaules rentrées, en larmes, les yeux baissés pour éviter les regards des voyous qui stationnent dans le hall de son immeuble. Il vit très mal cette situation, mais celui qui est chargé du gardiennage ne peut rien faire. En effet, on ne le dira jamais assez, monsieur Le Roux : on ne construit rien sur le désordre et la violence. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Avant de bâtir quoi que ce soit, il faut qu'un minimum d'ordre ait été rétabli.
    Il est un autre mal que je veux évoquer : le manque de confiance. En effet, la deuxième exigence pour améliorer la situation est le rétablissement de la confiance à tous les niveaux : confiance de la police dans sa hiérarchie, confiance de la population dans sa police, confiance dans les partenaires sociaux et dans les partenaires privés, auxquels il faut enfin donner de véritables responsabilités dans l'action. Il convient aussi de donner aux jeunes de véritables modèles destinés à se substituer, dans leur esprit, au modèle du caïd. Il faut en effet donner aux uns et aux autres la possibilité de remplacer le schéma du caïd par de vrais modèles dignes de ce nom.
    M. Guy Geoffroy. Très bien !
    Mme Françoise de Panafieu. Pourquoi le gardien ou la gardienne d'immeuble seraient-ils privés du droit de devenir, par la manière dont ils agissent, des modèles pour les jeunes ? Pour cela, il est indispensable que, auparavant, ait été rétabli un minimum d'ordre qui leur permette de se faire respecter. Or tel n'est pas le cas actuellement.
    Ainsi le gardien du 65, boulevard Bessières a essayé de composer avec ces jeunes puis, n'ayant pas obtenu de succès, il a voulu faire régner l'ordre. Eh bien, il y a un an, son gosse, qui revenait du lycée Honoré-de-Balzac, a été tabassé par la bande de petits caïds auxquels s'en était pris son père. Comment voulez-vous ensuite demander à ce gardien d'intervenir de nouveau ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Lionnel Luca. Organisons un colloque !
    M. Bruno Le Roux. Arrêtez ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Lionnel Luca. C'est ça la réalité !
    Mme Françoise de Panafieu. Nous la vivons quotidiennement dans nos quartiers !
    M. Lucien Degauchy. Nous entendons cela tous les jours !
    M. Bruno Le Roux. Il y a des gardiens d'immeubles qui ont réussi à reprendre les choses en mains ! Ne prenez pas des exemples particuliers pour les généraliser !
    Mme Françoise de Panafieu. Enfin, monsieur le ministre...
    M. Bruno Le Roux. Allez voir dans les endroits où ça se passe autrement ! Il y a des élus qui bossent !
    Mme Françoise de Panafieu. Il y a partout des élus qui bossent !
    M. le président. Monsieur Le Roux, je vous en prie ! Vous vous êtes déjà exprimé ; laissez parler Mme de Panafieu !
    M. Bruno Le Roux. Elle me prend à partie ! Je réponds !
    Mme Françoise de Panafieu. Enfin, monsieur le ministre, je m'adresse à vous en tant que ministre chargé des collectivités locales.
    En effet, les élus, les maires, qui sont vos interlocuteurs privilégiés vivent en permanence au contact du terrain. Ainsi, j'ai présidé, comme maire de mon arrondissement, les séances de travail pour l'établissement d'un contrat local de sécurité, lequel a débouché sur la création d'un conseil local de sécurité. Je suis donc bien placée pour affirmer que cette démarche est indispensable alors que nous avons, les uns et les autres, travaillé pendant des années, dans le cadre de la politique de la ville, sans aucune coordination.
    M. André Gerin. C'est faux !
    Mme Françoise de Panafieu. Cela nous a permis de faire asseoir à la même table tous les partenaires sociaux - les représentants des bailleurs, de l'éducation nationale, de la justice, de la police - et de savoir enfin ce que faisaient les uns et les autres. C'est le meilleur moyen de faire de la prévention. Alors qu'il n'y a généralement aucun retour lorsqu'un enseignant fait remonter un problème en haut de sa hiérarchie, des solutions concrètes peuvent être trouvées autour d'une table de mairie.
    A propos de cet article, je tenais donc, monsieur le ministre, à évoquer les notions d'ordre, de confiance et de coordination. Nous, les élus locaux, vous demandons de les instaurer à tous les échelons : local, régional et national. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Cela faisait longtemps que j'attendais un article de ce type.
    En effet, monsieur Le Roux, il y a des élus qui travaillent, et sur tous les bancs de l'hémicycle.
    Mme Françoise de Panafieu. Oui, des femmes et des hommes !
    M. Bruno Le Roux. Et il y a des endroits où ça marche !
    M. le président. Seul M. Cardo a la parole.
    M. Pierre Cardo. J'ai personnellement participé aux réunions d'une cellule de veille, aux discussions pour l'élaboration d'un contrat local de sécurité, le CLPD maintenant. J'ai constaté que des faits similaires revenaient sans cesse ; nous en sommes fréquemment saisis dans nos mairies par des habitants qui nous demandent d'intervenir.
    J'ai ainsi le cas d'une personne qui met régulièrement deux heures pour aller de la gare, située à deux cents mètres de chez elle, à son appartement parce qu'elle en est systématiquement empêchée par des jeunes, toujours les mêmes, qui stationnent sur son palier. Certes, la police peut intervenir et dresser contravention, mais ça leur fait une belle jambe ! Et quand on en discute avec la police et le procureur, on sent bien que, dans l'état actuel des textes, il n'est pas possible de réagir efficacement. Lorsque vous êtes confrontés à de multiples situations de ce genre et que vous vous rendez compte que vous ne pouvez pratiquement rien faire, vous finissez par vous demander quelle est votre utilité !
    Si nous voulons démontrer que l'Etat républicain est présent et capable de protéger tout le monde, il faut que nous soyons en mesure d'apporter des réponses dans ce domaine. Il ne s'agit manifestement pas de problèmes d'effectifs. En effet, la police a les moyens d'intervenir, mais elle finit par répugner à le faire car il est évident que cela ne sert à rien. Il y a au contraire un risque de provoquer des violences. A quoi sert d'aller expliquer à des jeunes, dans ces cités difficiles, qu'ils doivent s'en aller, alors qu'ils savent très bien que, s'ils ne le font pas, ils ne risquent pratiquement rien ? Il faut aussi savoir que le problème ne concerne pas la majorité des jeunes. Ce n'est qu'une petite minorité qui traîne dans les cages d'escalier et qui est violente. Mais celle-là, il ne faut pas la rater !
    M. Lionnel Luca. Absolument !
    M. Pierre Cardo. Or nous n'avons pas l'outil nécessaire. Nous devons nous en doter sinon vous savez très bien ce qui se passe : si l'action quotidienne démontre que la police et la justice ne peuvent réagir efficacement contre ces comportements, les voyous seront de plus en plus nombreux à reprendre l'exemple donné par un premier noyau dur. En l'occurrence, monsieur Gerin, il ne s'agit pas de parties privatives mais de parties privées ouvertes au public. Et pour se rendre chez soi, dans son appartement privé, il faut bien passer par là.
    M. André Gerin. Ce ne sont pas des espaces publics !
    M. Pierre Cardo. Ces occupations peuvent poser bien d'autres problèmes.
    Ainsi, quand des pompiers veulent intervenir pour lutter contre un incendie né dans un appartement ou dans une cave, ils doivent bien passer par les halls d'entrée. Or, quand des jeunes les en empêchent, il faut attendre l'arrivée de la police, ce qui nécessite plusieurs minutes. Un tel retard peut avoir des conséquences dramatiques quand des gens sont en danger. L'article 21 permettra de traiter ces cas dans lesquels il n'y a pas obligatoirement des violences, mais une simple entrave.
    Je souhaite que des réponses concrètes soient apportées à ces problèmes, car la police a d'autres actions à mener que de courir toutes les nuits dans les cages d'escalier. Elle ne devrait avoir à intervenir que dans les cas extrêmes et en étant assurée que cela aura des suites. Il faut qu'elle ne perde pas son temps ni qu'elle utilise cet article pour faire n'importe quoi. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Bruno Le Roux. C'est bien le problème !
    Mme Françoise de Panafieu. La police est responsable ! Ne dites pas n'importe quoi !
    M. Pierre Cardo. Les élus locaux ne sont pas là seulement pour compter les points. Il leur appartient aussi de contrôler l'action des services. Si, avec toutes les réunions auxquelles nous participons - CLS, CLSPDG, TLD, cellules de veille, j'en passe et des meilleures (Sourires) -, nous ne pouvons pas contrôler ce qui se passe dans l'exercice des missions de service public, à quoi servons-nous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. J'ai été très surpris par la proposition de M. Gerin de créer une mission interministérielle qui devrait recueillir, notamment, les avis des associations représentant les jeunes concernés.
    M. André Gerin. Des associations nationales !
    M. Jean-Christophe Lagarde. C'est donc encore pire que ce que je pensais ! En effet, les jeunes en question...
    M. André Gerin. Vous ne leur faites pas confiance.
    M. Lionnel Luca. Ça, c'est clair !
    M. Jean-Christophe Lagarde. A ceux-là non, alors que je fais confiance à 99 % des jeunes en règle générale, notamment dans ma ville. En revanche, les jeunes en cause ne relèvent d'aucune association et ils se contrefichent des associations nationales dont vous parlez.
    M. Guy Geoffroy. Des associations locales aussi, d'ailleurs !
    M. André Gerin. Vous mettez tout le monde dans le même sac !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Si vous demandez à des gens de parler au nom de ceux qui se contrefichent de ce type d'organisation, cela ne servira à rien.
    Mme Françoise de Panafieu. Et ce n'est pas le problème !
    M. Guy Geoffroy. Il s'agit de voyous !
    M. André Gerin. Ne dites pas de bêtises !
    M. Jean-Christophe Lagarde. J'essaie d'en dire moins que vous !
    De mon point de vue, dire que ces jeunes vont pouvoir s'exprimer au travers d'associations est une bêtise. En effet, s'ils pouvaient s'exprimer ainsi, ils ne seraient pas dans les halls d'immeubles, mais avec l'immense majorité des jeunes qui sont dans des associations et qui travaillent avec nous.
    M. Lionnel Luca. Très bien !
    M. André Gerin. Vous les stigmatisez !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Sans doute pour faire un peu de politique, pour alimenter tel ou tel journal, vous affirmez aussi que ce ne sont pas tous des voyous. Bien sûr ! Il est évident que les jeunes qui stationnent dans les halls des immeubles ne sont pas tous des voyous.
    M. André Gerin. Ce n'est pas ce que vous dites !
    M. Jean-Christophe Lagarde. En tout cas, les gens n'appellent pas les forces de l'ordre par plaisir, simplement parce que quelques jeunes sont dans un hall d'immeuble et n'y posent aucun problème. Ils commencent à se plaindre quand ils y passent toute la nuit, menacent ceux qui rentrent et les gênent. C'est prendre les Français pour des imbéciles que de penser qu'ils considèrent que tous les jeunes stationnant dans les cages d'escalier sont tous des voyous, alors qu'ils ne se décident à se plaindre, surtout dans les quartiers où plane le risque de représailles, que lorsque la nuisance est vraiment trop forte.
    L'article 21 est l'un des plus importants pour la vie des Français. Certes, j'ai un moment partagé le raisonnement de M. Le Roux, selon lequel il aurait été préférable de commencer par contraventionnaliser.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Vous m'en avez d'ailleurs parlé lors de mon audition par la commission.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Absolument !
    M. Bruno Le Roux. Vous l'avez convaincu, pas moi, monsieur le ministre !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Cela arrive : il n'y a que les imbéciles que ne changent jamais d'avis !
    Alors que la contravention est devenue inopérante, vous vous insurgez contre le fait que nous estimions que la garde à vue pourrait permettre de faire cesser le trouble en attendant qu'un juge décide s'il faut ou non infliger une peine. Or tel est souvent le cas dans notre pénal. Cela ne me paraît donc ni dramatiquement nouveau, ni proprement scandaleux. De plus, nous sommes nombreux à avoir constaté dans nos communes que cette disposition répond à une très forte et très légitime demande de nos populations.
    Enfin, monsieur Le Roux, vous avez dit que la police manquait de moyens pour intervenir. Or si, dans notre département commun, les policiers m'ont dit beaucoup de choses à ce sujet, je ne les ai jamais entendus se plaindre de manquer de moyens pour faire sortir des jeunes d'un hall d'immeuble. Ils avouent simplement que cela ne sert à rien car, dès qu'ils sont repartis après être intervenus, les jeunes reviennent, car ils ne risquent rien ; c'est le résultat de la loi Vaillant.
    Mme Françoise de Panafieu. Voilà !
    M. Guy Geoffroy. C'est l'insécurité quotidienne !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Il y a deux risques : celui de l'inutilité du recours à la police par le citoyen qui constate qu'elle ne peut rien faire d'efficace ; et pire encore, celui de voir les forces de l'ordre être obligées d'attendre, pour ne pas dire espérer, un outrage à agents pour pouvoir interpeller ! Cela revient à placer les membres de la police nationale, de la gendarmerie et, à l'avenir, de la police municipale dans des situations dangereuses en les contraignant à attendre un trouble plus grave pour intervenir. Non seulement nous voterons contre les amendements de suppression, non seulement, nous voterons pour l'article, mais nous proposerons de l'étendre à un autre problème sur lequel je reviendrai.
    M. le président. La parole est à Mme Martine Billard.
    Mme Martine Billard. Comme d'habitude, face à un problème,...
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il faut une solution !
    Mme Martine Billard. ... on prend un énorme marteau, pour taper à côté !
    M. Guy Geoffroy. Ils n'ont rien compris !
    Mme Martine Billard. On aggrave le délit. Avec cette loi, il finira par ne plus y avoir aucune hiérarchie des peines ! Ce n'est pas très instructif pour la population. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Guy Geoffroy. Ce que veut la population, c'est être protégée !
    Mme Martine Billard. Nous sommes confrontés à un problème réel, la montée de l'incompréhension entre différentes catégories de la population, entre les jeunes et les personnes âgées, par exemple,...
    M. Lucien Degauchy. Vos électeurs ne vous disent donc rien !
    Mme Martine Billard. ... qui débouche parfois sur des agressions, c'est vrai. Mais ces jeunes, ou ces moins jeunes d'ailleurs, parce qu'on stigmatise très souvent les jeunes qui ont des attitudes violentes,...
    M. Guy Geoffroy. C'est vous qui en parlez !
    Mme Martine David. ... sont-ils des « caïds » ? Les caïds, eux, n'ont nul besoin des halls d'immeubles pour attaquer les personnes, âgées ou non !
    On aggrave, disais-je, le délit en ce qui concerne l'occupation des halls d'immeubles. Demain, ces groupes, qui ne se constituent que pour agresser, iront simplement le faire devant l'immeuble. Créera-t-on alors encore un nouveau délit ?
    Il y a deux sujets un peu différents. Premièrement, l'inoccupation d'une petite partie de notre jeunesse, qui traîne sans trop savoir quoi faire et qui, effectivement, embête les gens. Bien sûr, ça existe !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Insulter et menacer, pour vous, c'est « embêter » ?
    Mme Martine Billard. Et il y a quelque chose à faire pour que ces jeunes fassent autre chose que traîner dans les halls d'immeubles. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Nous sommes tous d'accord là-dessus. Mais ce n'est pas en les menaçant de la prison et en augmentant les peines d'amende que l'on réglera le problème. Si on ne leur propose toujours pas d'activités, s'ils n'ont toujours pas de lieux où se retrouver, ils passeront des halls d'immeubles à un autre endroit, mais ils seront toujours là !
    M. Guy Geoffroy. Foutaises !
    Mme Martine Billard. Mais bien sûr !
    Deuxièmement, moi qui ai habité dans le 20e arrondissement, le quartier des cités, je sais bien que finit par se propager un sentiment d'incompréhension vis-à-vis de la jeunesse. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Si bien que, à la vue du moindre regroupement de jeunes sur un trottoir, les gens traversent ! C'est absurde !
    M. le président. Veuillez conclure, madame Billard.
    Mme Martine Billard. Oui, il faut savoir faire face à des situations d'agression et les empêcher, mais cesser de tout globaliser. Avec ce délit d'entrave on aboutira à des situations ubuesques et, finalement, à l'inverse de ce dont nous avons besoin.
    M. Lucien Degauchy. C'est vous qui avez fait l'inverse !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Grâce à nos expériences diverses, nous savons tous que le problème est pénible pour ceux qui le subissent. Ne nous renvoyons pas les uns aux autres les difficultés que nous rencontrons tous, nous sommes dans la même situation.
    Mais ce que l'on nous propose va-t-il faire avancer les choses ?
    M. Guy Geoffroy. Pourquoi pas ?
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Dans le cas contraire, cette nouvelle incrimination va poser des problèmes.
    Actuellement, lorsque les services de police, alertés à une heure tardive par des locataires, viennent, ils ne peuvent que procéder à une vérification d'identité, s'ils ne sont pas en mesure d'imputer, en le qualifiant, un fait à ceux qu'ils ont trouvés sur place.
    M. Guy Geoffroy. D'où le besoin d'une incrimination !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Attendez : j'essaye de vous expliquer !
    M. Lionnel Luca. C'est long et laborieux !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Par conséquent, si, dans la situation actuelle, les services de police appelés interviennent et sont capables de constater et de qualifier une dégradation, ils ont l'instrument pour poursuivre. Le problème, c'est de constater, d'incriminer, de qualifier, et donc d'engager le processus.
    Et nous avons tous pratiqué cela. Nous avons tous - dans le cadre des contrats locaux de sécurité, et maintenant des nouveaux dispositifs - signalé aux procureurs des problèmes dans tel quartier, ce qui amenait les services de police à être plus vigilants ou conduisait éventuellement le correspondant du parquet, voire le substitut qui s'occupait du secteur, à attirer l'attention de la police pour essayer de réunir des éléments.
    La difficulté que nous avons et que nous aurons - malgré le dispositif légal que vous allez faire adopter -, c'est d'établir constat et qualification. Demain, les services de police rencontreront tout autant d'obstacles lorsqu'ils interviendront dans un hall pour faire qualifier l'entrave !
    M. Pierre Cardo. Non, car avec l'entrave, il y aura un plaignant !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il faut donc s'interroger sur ce qui est efficace pour régler le problème, sans jamais jouer avec l'instrument de la loi pénale.
    Mme de Panafieu a déploré un manque de cohérence. Dans la commune dont je conduis la gestion, nous faisons des signalements de gardiens et des réunions avec les bailleurs depuis six ans, et des améliorations ont été apportées chaque fois que le processus a permis de prendre en charge la réalité de la situation, avec des propositions d'activités et d'autres pour régler le problème - non négligeable - de l'exiguïté des locaux et des appartements, qui complique singulièrement la vie des jeunes le soir.
    M. Pierre Cardo. Ce n'est pas aux voisins d'en subir les conséquences !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Des démarches de ce type m'ont semblé régler un certain nombre de problèmes alors que, en soi, l'instrument de l'incrimination n'ajoutera rien parce que nous serons toujours dans la même situation : la police pourra-t-elle ou non caractériser une incrimination ? La prévoir ne règle pas le problème pour autant et l'on reviendra à la case départ !
    M. le président. La parole est à M. Nicolas Perruchot.
    M. Nicolas Perruchot. Je me contenterai de faire un constat et de souligner une contradiction.
    Le constat, d'abord : à écouter ce qui se dit sur les bancs de l'opposition - et n'y voyez pas de provocation de ma part -, je me rends compte que je ne vis pas dans le même pays ! Dans ma bonne ville de Blois, les choses ne se passent pas du tout comme vous le décrivez. Peut-être Blois échappe-t-elle à la règle commune ? Je n'en ai pas vraiment le sentiment, puisqu'elle comporte une ZUP s'étendant sur un tiers de la commune et comptant 18 000 habitants.
    La contradiction - manifeste - ensuite : pour répondre aux problèmes qui se posent aujourd'hui dans les quartiers, vous avez, sous le précédent gouvernement, créé les grands projets de ville, que vous avez dotés de plusieurs centaines de millions. A quoi répondent-ils ? Ils sont destinés notamment à la démolition et à la reconstruction. Mais comment expliquer les taux de vacance dans les immeubles ? Lorsqu'un groupe de jeunes investit une cage d'escalier, commence à pourrir la vie des gens, rackette, recèle, etc., l'immeuble se vide peu à peu. Ce fut le cas, il y a quelques semaines, à Blois, où dix-huit personnes ont voulu changer d'immeuble à cause d'un racket. Il y a dans notre pays plus de mille quartiers concernés par les grands projets de ville. Cela va coûter des milliards d'euros ! Faisons des économies en votant cet article 21, qui répond en tout cas à la problématique des quartiers.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Excellent !
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 296 et 336.
    L'amendement n° 296 est présenté par M. Le Roux, M. Blazy, Mme David et les membres du groupe socialiste ; l'amendement n° 336 est présenté par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère.
    Ces amendement sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 21. »
    M. le président. Après cette discussion un peu longue sur l'article 21, je crois pouvoir considérer ces amendements comme défendus. En êtes-vous d'accord, monsieur Le Roux ?
    M. Bruno Le Roux. Oui, monsieur le président.
    M. le président. Madame Billard ?
    Mme Martine Billard. Egalement, monsieur le président.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Comme le disait M. Perruchot, je crois que nous ne fréquentons pas les mêmes Français, chers collègues de l'opposition.
    M. Michel Pajon. Mais si !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Nous sommes tous confrontés, dans nos circonscriptions, à des gens qui nous tirent par la manche, en nous disant : « Mais qu'est-ce que vous attendez pour agir ? »
    Monsieur Le Roux, vous nous proposez de supprimer un article où nous donnons la possibilité aux forces de l'ordre d'intervenir dans les cages d'escalier ! Je ne vous comprends pas du tout ! Vous auriez fait la première partie du chemin dans la LSQ, la loi sur la sécurité quotidienne, en autorisant les forces de l'ordre, à l'exclusion de la police municipale, à pénétrer dans les halls d'immeubles, et donc à s'exposer physiquement, et vous ne leur permettriez pas de se faire respecter ? Ce que propose le Gouvernement, c'est simplement d'ajouter le second volet, en donnant aux forces de l'ordre les moyens de se faire respecter. Voilà de quoi il s'agit.
    Nous nous donnons enfin les moyens de faire régner l'autorité et un peu d'ordre.
    Tous les jours, des centaines de milliers de Français sont mis en coupe réglée par quelques dizaines de voyous, et vous refuseriez les moyens d'y mettre un terme ?
    M. Bruno Le Roux. Arrêtez !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. C'est la réalité !
    M. Bruno Le Roux. Caricature !
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Vous iriez contre l'intérêt de centaines de milliers de Français qui n'en peuvent plus et auxquels nous apportons une solution ?
    M. Bruno Le Roux. Démagogie !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. J'ai reçu, le 27 septembre 2002 la lettre suivante : « Je suis un adolescent âgé de seize ans, qui vit dans une cité à Ivry-sur-Seine, dans le Val-de-Marne. Moi et ma famille souffrons de la torture d'une bande de jeunes âgés de moins de vingt ans, qui sème la pagaille dans notre bâtiment depuis plus de cinq ans. Ces gens cassent les carreaux du bâtiment, dégradent celui-ci, et font, monsieur le ministre, énormément de bruit le soir, ce qui empêche tout le monde de dormir. Aidez-nous, faites quelque chose. » (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. Jean-Christophe Lagarde. Ça, ce n'est pas stigmatiser les jeunes !
    M. Pierre Cardo. Reconnaissez que c'est vrai !
    M. Michel Pajon. N'importe quoi !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Est-ce moi qui dis n'importe quoi ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Michel Pajon. Nous pouvons tous produire des témoignages !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Moins vous comprenez, mieux c'est pour nous ! Ne soyez donc pas comme ça ! Je ne veux pas être désagréable ni polémique et je ne donne de leçons à personne.
    J'essaie de garder le contact, ce qui est le plus difficile pour un homme politique, surtout quand il est au Gouvernement. Et quand on est dans une mairie, bon an mal an, on voit trois ou quatre mille personnes. En ce qui me concerne - on ne pourra pas me reprocher le contraire -, j'essaie de lire le courrier. Si vous receviez du courrier de gens qui habitent dans ces quartiers, vous disant « tout va bien, ne faites rien », alors, je renoncerais. Mais, de tous les côtés, vous me saisissez de problèmes. Du reste, vous le reconnaissez en disant qu'il faut y réfléchir, qui avec une mission, qui avec une commission ou un colloque ! Je ne propose rien de tout cela je propose de voter.
    M. Lionnel Luca. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Gérard Léonard.
    M. Gérard Léonard. A partir d'un constat commun, même si la lecture diffère selon les bancs de notre assemblée, nous arrivons à des réponses fort différentes mais qui, en réalité, devraient être complémentaires.
    Au passage, mes chers collègues, cessez de parler des jeunes, quand il n'est question que de voyous ! Nous ne faisons pas d'amalgame !
    M. André Gerin. C'est de la stigmatisation !
    M. Gérard Léonard. Pas du tout ! C'est vous qui la faites, et c'est bien regrettable !
    M. André Gerin. C'est insupportable, vous mettez tout le monde dans le même sac !
    M. le président. Seul M. Léonard a la parole.
    M. Gérard Léonard. A l'UMP, nous ne croyons pas, comme certains de nos collègues de gauche, qu'il y aurait, d'un côté, une répression aveugle, et, de l'autre, une prévention généreuse. Les deux se complètent parfaitement.
    M. Le Roux a évoqué une mesure, que je salue, la réintroduction des gardiens dans les immeubles collectifs. Elle figure dans la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité intérieure de janvier 1995.
    Pourquoi a-t-il fallu du temps pour faire appliquer cette mesure ? Parce qu'elle s'est heurtée à l'hostilité des bailleurs sociaux, qui nous rétorquaient à l'époque que nous allions les étrangler financièrement. Le dialogue utile qu'évoquait M. Le Roux ne doit donc pas se limiter à certains acteurs qui ont un intérêt particulier, sinon à voir la situation perdurer, du moins à ne pas la voir s'améliorer. On sait fort bien que certains bailleurs sociaux préfèrent s'engager dans la voie d'une réhabilitation coûteuse, parce qu'ils obtiendront ainsi des aides de l'Etat, plutôt que d'apporter des solutions humaines qui éviteraient les dégradations.
    M. Pierre Cardo. Eh oui !
    M. Gérard Léonard. Opposer la solution préventive à la solution répressive n'a plus de sens. Et il serait parfaitement irresponsable de se cantonner à l'une des deux. Il y a une réponse préventive, évidente, très lourde, qui passe par une présence humaine et une prise en compte par les collectivités locales. C'est ce que nous faisons tous, nous les maires, sur tous les bancs. Jeter l'opprobre sur nous en disant que nous ne faisons rien est injuste. Quand un maire digne de ce nom est interpellé, il répond. Il répond aussi aux victimes de délits, qu'il faut qualifier comme tels, car ils sont inacceptables.
    La politique de prévention sur laquelle, pour l'essentiel, nous sommes d'accord, ne peut être durablement et efficacement mise en oeuvre que si, en même temps, la paix publique est rétablie. Les deux sont indissociables et vouloir les opposer n'a pas de sens.
    Mes chers collègues, voter ces amendements de suppression ruinerait toutes les actions de prévention que, les uns et les autres, nous avons engagées et que, de tout coeur, nous souhaitons poursuivre parce que l'enjeu est d'une très grande gravité.
    M. le président. Monsieur Le Roux, est-ce pour répondre à la commission que vous demandez la parole ?
    M. Bruno Le Roux. Pour répondre au Gouvernement !
    M. Pascal Clément, président de la commission. L'Assemblée est suffisamment informée !
    M. le président. Je crois que tout a été dit, monsieur Le Roux.
    M. Bruno Le Roux. Pas du tout, monsieur le président !
    M. le président. Voilà près d'une demi-heure que nous débattons sur l'article 21 !
    M. Bruno Le Roux. Dans ces conditions, sur le fondement de l'article 56 du règlement, je vous demande une suspension de séance ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Avez-vous la délégation du groupe socialiste ?
    M. Bruno Le Roux. Oui, monsieur le président.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue le jeudi 23 janvier 2003 à zéro heure quarante, est reprise à zéro heure quarante-cinq.)
    M. le président. La séance est reprise.
    M. Bruno Le Roux. Je demande la parole, monsieur le président !
    M. le président. Nous considérons que l'Assemblée est suffisamment éclairée sur les deux amendements de suppression, monsieur Le Roux. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. André Gerin et Mme Martine Billard. Non !
    M. le président. Le débat sur l'article 21 ne peut se prolonger outre mesure.
    M. Bruno Le Roux. J'ai présenté l'amendement, plusieurs orateurs sont intervenus et le ministre a argumenté.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je n'ai pas argumenté : j'ai lu une lettre.
    M. Bruno Le Roux. Justement : en guise d'argumentation, le ministre a lu une lettre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. J'ai parlé une minute !
    M. Bruno Le Roux. Nous sommes tous confrontés à la situation qu'il a vécue. Ne croyez pas que certains, ici, ne voient pas la réalité.
    M. Michel Hunault. Il n'a pas dit cela !
    M. Lionnel Luca. C'est encore plus grave de laisser faire !
    M. Bruno Le Roux. En 1995 et en 2001, c'est l'opposition d'aujourd'hui qui a introduit les dispositions sur les halls d'immeuble, et nous avons annoncé dès l'ouverture de ce débat que nous étions prêts à avancer sur cette question. Mais si nous n'avons pas été alors, comme vous maintenant, jusqu'à la création d'un délit, c'est parce que cela ne marchera pas.
    M. Yves Fromion. On verra bien !
    M. Lionnel Luca. Voyant extralucide ! On a l'horoscope en direct ! Il nous annonce à l'avance que ça ne va pas marcher !
    M. Bruno Le Roux. Je ne veux pas parier que cela ne marchera pas, mais, pour que les choses soient claires, il nous semble que toutes les incriminations existent déjà et que, pour progresser, il aurait été nécessaire de contraventionnaliser le délit d'entrave.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Exactement !
    M. Bruno Le Roux. On peut créer toutes les incriminations, elles existent déjà et peuvent s'appliquer à ce qui se passe dans les halls d'immeuble. Nous proposons de créer un délit d'entrave et de le contraventionnaliser. Vous préférez créer un délit, ce qui est beaucoup plus dur.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. En faites-vous un délit ou une contravention ?
    M. Bruno Le Roux. Nous proposons de créer une contravention pour entrave dans les halls d'immeuble.
    M. le président. Sur les amendements identiques n°s 296 et 336, je suis saisi, par le groupe de l'Union pour la majorité présidentielle, d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    Mme Martine Billard. Avant le vote, nous avons le temps de répondre !
    M. le président. Non, madame Billard.
    M. André Gerin. Juste un rapide commentaire, monsieur le président !
    M. le président. Tout a été dit. Chacun s'est exprimé. C'est sur cet article que le temps de parole a été le plus généreux. Tout le monde s'est largement exprimé, y compris vous, monsieur Gerin. Je ne suis pas là pour vous brimer. Chacun a pu dire ce qu'il avait à dire.
    M. André Gerin. Vous ne voulez pas que je fasse un commentaire, monsieur le président ?
    M. le président. Vous ferez un commentaire sur d'autres articles.
    Mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 296 et 336.
    Le scrutin est ouvert.
        M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   68
Nombre de suffrages exprimés   68
Majorité absolue   35
Pour l'adoption   16
Contre   52

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    MM. Asensi, Biessy, Bocquet, Braouezec, Brard, Brunhes, Mme Buffet, MM. Chassaigne, Dutoit, Mme Fraysse, MM. Gerin, Goldberg, Gremetz, Hage, Mme Jacquaint, Mme Jambu, MM. Lefort, Liberti, Daniel Paul, Sandrier et Vaxès ont présenté un amendement, n° 167, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 21 :
    « Une mission nationale d'étude et d'action est mise en place concernant l'entrave à la liberté de circulation dans les entrées d'immeubles, fait qui se généralise. Cette mission interministérielle est menée en concertation avec les organisations nationales de la jeunesse et la participation de représentants des collectivités territoriales, des bailleurs, des associations de locataires. Son objet est d'apporter des réponses à la fois en termes de médiation, d'insertion et de répression. Ses préconisations doivent être remises au ministre de l'intérieur au plus tard à la fin du premier semestre 2003. »
    La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Avant de défendre cet amendement, je ferai le commentaire que je voulais faire avant le scrutin. Chacun l'a compris, le Gouvernement nous annonce son intention d'apporter des réponses à ce problème, et, de fait, ses propositions sont pleines d'intentions. Et, surtout, je considère inadmissible et insupportable la manière dont vous généralisez sur un tel sujet.
    Je crois qu'il serait correct d'entendre ce que dit l'opposition, parce qu'elle fait des propositions tout à fait pertinentes. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Le temps n'est plus aux évaluations et aux missions, mais à l'action : rejet.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Même avis, monsieur le président.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 167.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Lagarde et M. Perruchot ont présenté un amendement, n° 215, ainsi rédigé :
    « Au début de l'article 21, insérer le paragraphe suivant :
    « I. - A la fin de l'intitulé du chapitre VI du titre II du livre Ier du code de la construction et de l'habitation, les mots "à usage d'habitation sont supprimés. »
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Cet amendement, premier d'une série, vise à modifier l'intitulé du chapitre VI du titre II du livre 1er du code de la construction et de l'habitation.
    Comme vous le verrez dans d'autre amendements, nous souhaiterions pouvoir étendre les délits que nous créons à deux autres catégories d'immeubles : les commerces, qui connaissent eux aussi, à leurs abords, des troubles à l'ordre public et des délits d'entrave perturbant considérablement la vie de certains quartiers, et les bâtiments publics.
    Ainsi, à Blois, mon collègue Nicolas Perruchot a constaté des perturbations, des troubles et des entraves à la circulation à proximité des médiathèques. Or qu'est-ce qu'une médiathèque, sinon, justement, le lieu où l'on cherche à faire rayonner la culture et à sociabiliser les gens ? Mais, dans certains quartiers, cela peut déranger, et suscite des attroupements qui créent des difficultés.
    Il ne s'agit ici que du premier de ces amendements, qui vise simplement à rendre cohérent l'intitulé du chapitre si les autres amendements sont adoptés, mais le problème auquel nous sommes confrontés, qui est, bien sûr, très grave quand il s'agit des halls d'immeuble, l'est également dans le cas de bâtiments publics destinés à faire rayonner le service public et à permettre une meilleure intégration sociale, ou de commerces, parce qu'un commerçant a légitimement le droit d'attendre de la force publique qu'elle garantisse le libre accès à son commerce.
    M. André Chassaigne. C'est le retour de l'ordre moral ! C'est lamentable !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cet amendement a été repoussé par la commission.
    Permettez-moi de m'exprimer, monsieur le président, sur l'amendement n° 216, puisque c'est bien celui-ci que M. Lagarde a défendu, le n° 215 n'étant qu'un amendement de coordination.
    Il s'agit pour nous, d'abord, de faire respecter le droit d'aller et venir dans les lieux privés et d'habitation, et cette extension aux bâtiments publics et aux commerces a été repoussée par la commission. Par voie de conséquence, elle ne peut que rejeter l'amendement de coordination n° 215.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Hélas, monsieur Lagarde, le Gouvernement partage l'avis du rapporteur, pour une raison simple. D'abord, nous avons voulu cibler très précisément le problème des halls d'immeuble, qui touche à la vie quotidienne, et nous nous en sommes expliqués.
    Les bâtiments publics et les centres commerciaux, que vous évoquez, sont, par construction, des lieux ouverts au public. Or - je vous mets en garde -, dans les lieux ouverts au public, la liberté de réunion ne peut être encadrée que dans des conditions très strictes, notamment pour ce qui est de la répression des attroupements menaçants sur la voie publique et leur dispersion par la force publique.
    J'ai peur, en outre, qu'on ne donne des arguments à ceux qui nous reprochent de faire un amalgame. Nous traitons la question des halls d'immeuble. Si nous étendons cette mesure à tous les centres commerciaux ou à tous les bâtiments publics,...
    M. André Gerin. Bonjour les dégâts !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... je vois d'ici le cortège de ceux qui nous accuseront de vouloir interdire aux jeunes de se réunir. Juridiquement, cela pose des problèmes, et politiquement,...
    M. André Gerin. C'est mauvais !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... ce serait interprété comme une interdiction faite aux jeunes de se rassembler. Ce n'est pas, j'imagine, ce que voulez, monsieur Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Pas du tout !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je ne vois pas comment on peut étendre le champ d'application d'une mesure prévue pour des lieux privés à des lieux qui, par définition, sont ouverts au public. Voilà pourquoi je n'y suis pas favorable.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le ministre, je comprends parfaitement votre raisonnement. Nous tenons simplement, Nicolas Perruchot et moi-même, à attirer votre attention sur le fait qu'il faudra rechercher une solution juridique à ce problème.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Tout à fait !
    M. Jean-Christophe Lagarde. Songeons au cas d'une supérette, moteur commercial d'une avenue qu'on essaie de redynamiser, qui subit ce type d'attroupement à l'entrée du magasin.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ça existe, c'est vrai !
    M. Jean-Christophe Lagarde. On ne peut en effet interdire tous les rassemblements, et nous n'avons peut-être pas trouvé la bonne solution, mais il faut continuer d'en chercher une, et je vous demande de nous aider à le faire.
    En attendant, je suis d'accord pour retirer des amendements qui visent avant tout à attirer l'attention sur un problème réel, sérieux, vécu. J'ai bien conscience, en même temps, qu'il est plus facile de trouver une solution pour les halls d'immeuble.
    J'ai bien entendu la seconde partie de votre explication. Il est vrai que, eu égard aux accusations qui nous ont été lancées à propos de l'amendement sur les halls d'immeuble - qui, je l'ai dit, me paraît l'un des plus importants pour la vie quotidienne des Français -, il vaut mieux ne pas prêter le flanc à d'autres attaques, et ne pas compromettre l'équilibre juridique que nous avons trouvé, même s'il n'est pas parfait.
    M. le président. L'amendement n° 215 est retiré. Mme Billard n'a donc pas lieu de s'exprimer contre.
    Mme Martine Billard. Quel dommage !
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 101 et 45.
    L'amendement n° 101 est présenté par M. Estrosi, rapporteur au nom de la commission des lois, et M. Hamel ; l'amendement n° 45 est présenté par M. Garrigue.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Au début de l'article 21, insérer le paragraphe suivant :
    « I. - Dans l'article L. 126-2 du code de la construction et de l'habitation, après les mots : "gendarmerie nationales, sont insérés les mots : "ou à la police municipale. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 101.
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cet amendement très important vise à permettre à la police municipale d'intervenir à l'intérieur des halls d'immeuble, alors que cette faculté, qui me paraît essentielle, lui avait été refusée par la LSQ.
    Cette possibilité leur est désormais offerte.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable.
    M. le président. Je considère que cette présentation vaut également pour l'amendement n° 45 de M. Garrigue, qui est identique.
    Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 101 et 45.
    (Ces amendements sont adoptés.)
    M. le président. Les amendements n°s 216 et 217 ont été retirés ; le sous-amendement n° 482 de M. Salles n'a donc plus d'objet.
    M. Lagarde et M. Perruchot ont présenté un amendement, n° 218, ainsi rédigé :
    « Dans le texte proposé pour l'article L. 126-3 du code de la construction et de l'habitation, après le mot : "habitation, insérer les mots : "ou à l'entrée ou à l'intérieur des commerces et des centres commerciaux. »
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Je retire également cet amendement, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 218 est retiré.
    M. Mourrut a présenté un amendement, n° 38, ainsi rédigé :
    « Dans le texte proposé pour l'article L. 126-3 du code de la construction et de l'habitation, après le mot : "habitation, insérer les mots : "ou devant les vitrines et entrées de locaux commerciaux, artisanaux ainsi que ceux accueillant des professions libérales. »
    La parole est à M. Etienne Mourrut.
    M. Etienne Mourrut. Etant donné que M. le ministre vient de donner les explications que je souhaitais obtenir, je retire cet amendement.
    M. le président. L'amendement n° 38 est retiré.
    M. Lagarde et M. Perruchot ont présenté un amendement, n° 505, ainsi rédigé :
    « Compléter le texte proposé pour l'article L. 126-3 du code de la construction et de l'habitation par l'alinéa suivant :
    « Les voies de fait ou la menace de commettre des violences contre une personne, ou l'entrave apportée, de manière délibérée, au bon fonctionnement des dispositifs de sécurité et de sûreté, lorsqu'elles sont commises sur les toits des immeubles collectifs d'habitation, sont punies de deux mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende. »
    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
    M. Jean-Christophe Lagarde. Cet amendement important concerne un problème très sérieux auquel sont confrontés notamment les bailleurs sociaux, en particulier les présidents d'office d'HLM.
    Régulièrement, des individus se regroupent sur les toits des immeubles, notamment la nuit, car ce sont des endroits bien plus tranquilles que les halls, puisque personne ne s'y rend et que l'accès ne peut pas en être interdit pour des raisons de sécurité : c'est une voie d'évacuation en cas d'incendie. Toutefois, il en résulte que, bien souvent, les dispositifs de sécurité permettant l'évacuation sont détériorés.
    Cette situation a trois conséquences.
    Premièrement, ceux qui habitent juste sous le toit d'un immeuble ont droit toute la nuit soit aux galopades, soit aux beuveries, soit à autre chose au-dessus de leur tête. Et, bien évidemment, les forces de police n'interviennent pas parce que, pour le faire, elles doivent avoir l'autorisation du bailleur, ce qui n'est guère possible à trois heures du matin. Imagine-t-on réveiller un président ou un vice-président d'office à cette heure-là ?
    Deuxième conséquence : les toits des immeubles sont utilisés pour faire le guet et avertir les délinquants sévissant dans les cités de l'arrivée d'un véhicule de police. Des gamins sont payés pour cela.
    Troisième conséquence : c'est de ces toits que sont lancés des projectiles sur les forces de l'ordre ou sur les pompiers qui sont appelés à intervenir dans le secteur.
    Nous proposons, par cet amendement, que les voies de fait ou la menace de commettre des violences contre une personne, ou l'entrave apportée délibérément au bon fonctionnement des dispositifs de sûreté et de sécurité, lorsqu'elles sont commises sur les toits des immeubles collectifs d'habitation, soient sanctionnées.
    Cet amendement a été travaillé pour « tenir la route » juridiquement. Nous aurions préféré une interdiction totale de l'accès aux toits des immeubles, mais il nous a été expliqué que cela était impossible car, dans certains cas, ces toits sont utilisés comme lieux de convivialité. En tout cas, nous voulons mettre fin à l'utilisation abusive des toits d'immeubles, car elle met en cause la sécurité en cas d'incendie ou en cas d'intervention des forces de police, et elle trouble considérablement la vie des gens qui vivent juste en dessous.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Tout ce que décrit M. Lagarde reflète la réalité. Cet amendement est parfaitement conforme à l'esprit du texte. Sachant l'usage qui est fait de certains toits, je suis favorable à son adoption.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Favorable également.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 505.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Fromion a présenté un amendement, n° 460 rectifié, ainsi rédigé :
    « Compléter le texte proposé pour l'article L. 126-3 du code de la construction et de l'habilitation par l'alinéa suivant :
    « Les atteintes à l'intégrité des lieux, à la tranquillité et aux règles d'hygiène constitutives de délits ou de contraventions aux dispositions d'un règlement intérieur approuvé par le Préfet, peuvent être constatés par des gardes particuliers assermentés dans les parties communes des propriétés dont ils ont la garde. Ils adressent leurs procès-verbaux au procureur de la République dans les conditions prévues à l'article 29 du code de procédure pénale. »
    La parole est à M. Yves Fromion.
    M. Yves Fromion. Je vais tenter de rejoindre le ministre et le rapporteur sur le terrain du pragmatisme et de l'efficacité.
    Toute la soirée, nous avons évoqué les difficultés que connaissent les grands ensembles immobiliers, notamment sociaux, du fait du comportement de quelques individus - vous pouvez constater que je ne stigmatise personne. On a parlé des nuisances sonores, de l'occupation des espaces communs, des menaces verbales, des dégradations, des atteintes aux règles d'hygiène, mais on aurait pu aussi parler des détournements d'usage des parkings, voire des espaces verts, autant d'actes qui constituent des infractions aux règlements intérieurs.
    Face à de telles situations, que peuvent faire ceux qui subissent les conséquences de ces actes ? Bien entendu, ils peuvent appeler la police ou la gendarmerie, voire les polices municipales, puisque ces dernières seront désormais autorisées à intervenir. Toutefois, comme cela a été indiqué précédemment, la police et la gendarmerie ne peuvent pas être en permanence présentes dans les escaliers ou les parties communes des grands immeubles. Dès lors, nos concitoyens ont le sentiment d'être laissés à l'abandon, ce qui, naturellement, a pour effet d'accroître leur mécontentement.
    Ils peuvent aussi porter plainte. Mais chacun sait par expérience qu'il est extrêmement difficile, pour des locataires en particulier, de s'organiser pour déposer une plainte devant le procureur de la République. Autant dire que cela ne se fait jamais, notamment par peur des représailles et en raison de la difficulté de trouver des témoins.
    Mon amendement vise à trouver une solution pragmatique à cette situation en permettant aux bailleurs, notamment aux bailleurs sociaux, de recruter des gardes particuliers assermentés, ainsi que l'autorise l'article 29 du code de procédure pénale. Ces gardes seraient chargés de constater par procès-verbal les délits ou les contraventions aux dispositions du règlement intérieur de l'immeuble dont ils sont témoins, et de saisir ensuite le procureur de la République selon les voies légales prévues par le code de procédure pénale.
    M. Jean-Marie Aubron. Vous devriez aussi construire des miradors !
    M. Yves Fromion. Cet amendement permettrait d'offrir une autre solution à nos concitoyens que l'alternative de ne rien faire du tout ou avoir recours à des solutions excessives. Ce dispositif médian permettrait d'offrir une gradation dans la réponse apportée aux nuisances et d'éviter d'arriver à certaines situations paroxystiques.
    Je pense que ceux qui ont l'expérience des difficultés de vie dans les grands ensembles trouveront dans cet amendement une réponse très pragmatique à apporter aux problèmes de nos concitoyens.
    Enfin, il est important que le règlement intérieur de l'immeuble, qui pourrait servir de base aux gardes particuliers assermentés pour la constatation des délits ou contraventions, soit approuvé par le préfet, de telle sorte qu'il n'y ait aucune dérive possible en la matière.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Christian Estrosi, rapporteur. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission.
    Cela étant, dès lors qu'il s'agit de gardes assermentés, à titre personnel, j'y suis plutôt favorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je m'apprêtais à m'en remettre à la sagesse de l'Assemblée, parce que j'ai envie de faire plaisir à M. Fromion, mais je crains que le terme de « gardes particuliers assermentés » ne crée une confusion. De plus, on voit déjà le temps qu'il faut à un maire pour faire assermenter ses policiers municipaux : en général, cela prend plusieurs mois.
    Je ne voudrais pas qu'un public moins averti que ne l'est M. Fromion se saisisse de cette affaire pour ouvrir une polémique sur les gardes particuliers assermentés.
    M. Pascal Clément, président de la commission. On en ferait des tontons macoutes !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Ce n'est pas du tout l'esprit de M. Fromion, pour qui un garde particulier assermenté s'apparente plutôt à un garde champêtre.
    Il y a déjà les policiers nationaux, les gendarmes, les policiers municipaux...
    M. Bruno Le Roux. Bref, vous êtes contre l'amendement, monsieur le ministre !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je suis plutôt réservé, mais si vous voulez me pousser à dire que je suis contre, monsieur Le Roux, je risque d'avoir envie de dire que je suis pour, afin de ne pas vous faire de cadeau.
    Je crains au fond que la disposition proposée ne crée une confusion, alors que j'essaie, depuis le début de l'examen de ce texte, de faire en sorte qu'il n'y en ait aucune. Car même quand il n'y a pas de confusion, certains essaient d'en trouver !
    Je préférerais, monsieur Fromion, que le texte de cet amendement soit retravaillé et réexaminé demain, car je ne suis pas très enthousiaste.
    M. le président. Monsieur Fromion, maintenez-vous votre amendement ou le retirez-vous comme vous y invite M. le ministre ?
    M. Yves Fromion. Je comprends votre embarras, monsieur le ministre, mais la notion de « garde particulier assermenté » n'est pas nouvelle : l'article 29 du code de procédure pénale la reconnaît, tout le monde le sait.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Justement, peut-être pas tout le monde !
    M. Yves Fromion. Dans les ensembles immobiliers, il y a certes des gardiens, mais on sait très bien qu'ils ne peuvent pas intervenir car ce n'est pas leur vocation.
    Il serait donc bon que, dans les immeubles relevant du même bailleur, des personnels puissent intervenir au moment où se commet l'infraction, car la police, la gendarmerie ou la police municipale n'interviennent que quand l'infraction a déjà été commise. L'objet de mon amendement est donc que quelqu'un puisse être sur place rapidement pour constater l'infraction au moment où elle est commise et où les locataires la subissent.
    M. Bruno Le Roux. Cet amendement est dangereux, il faut le retirer ! Vous allez créer des milices !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je comprends très bien votre souci, monsieur Fromion, mais je ne veux pas qu'on dise que je favoriserais la création de milices.
    Selon l'idée que nous nous faisons de l'Etat de droit, chacun doit pouvoir bénéficier des services de la police, de la gendarmerie et des polices municipales, grâce aux moyens que nous leur allouons, et ne doit donc pas avoir recours à des gardes particuliers - ne parlons pas de milices. Pour notre part, nous essayons de faire en sorte que chacun puisse bénéficier d'un service public de sécurité, à l'échelon national ou municipal.
    Ce qui me chiffonne un peu, ce n'est pas l'idée que vous avez, monsieur Fromion, mais le fait que, dans certains cas, on puisse autoriser des gardes privés à constater un délit.
    M. André Gerin. C'est mauvais !
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cela ne me choque pas s'ils sont assermentés. Ce qui me gêne, c'est l'idée qu'ayant recours à des gardes privés qui feront le même travail de constatation que des policiers municipaux, on admette une certaine défaillance de l'Etat républicain, un certain manque d'efficacité de la police et de la gendarmerie.
    M. Bruno Le Roux. C'est cela même !
    M. Michel Pajon. On n'osait pas le dire !
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Je viens de découvrir, monsieur Fromion, que votre amendement est totalement inutile. En effet, aux termes de l'article 29 du code de procédure pénale, « les gardes particuliers assermentés constatent par procès-verbaux tout délit et contravention portant atteinte aux propriétés dont ils ont la garde ». Vous avez donc déjà satisfaction et votre amendement est superfétatoire. Restons-en là et évitons une ambiguïté qui pourrait gâcher tout le travail que nous faisons ce soir, voire troubler les esprits.
    M. le président. La parole est à M. Yves Fromion.
    M. Yves Fromion. Je sais, bien entendu, que le code de procédure pénale permet de créer des gardes particuliers. Je l'ai même précisé dans mon amendement. Toutefois, pour toutes sortes de raison, les sociétés d'HLM, notamment, n'osent pas recourir à cette « facilité » et se demandent, en particulier, si elles ont vraiment le droit de le faire. Cela dit, je ne pousserai pas plus loin mon propos, étant déjà très heureux que ce sujet ait pu être abordé.
    Monsieur le ministre, vous m'avez proposé que cet amendement soit retravaillé.
    M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Pour demain !
    M. Yves Fromion. Je m'en réjouis. En tout état de cause, pour l'heure, je le retire.
    M. le président. L'amendement n° 460 rectifié est retiré.
    Ce qui fait que, pour la deuxième fois de la soirée, Mme Billard ne va pas pouvoir s'exprimer contre un amendement. (Sourires.)
    Je mets aux voix l'article 21, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 21, ainsi modifié, est adopté.)
    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

3

DÉPÔT DE RAPPORTS

    M. le président. J'ai reçu, le 22 janvier 2003, de M. Jean-Luc Préel, un rapport, n° 561, fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, sur la proposition de loi de M. Jean-Luc Préel et plusieurs de ses collègues relative à la création d'un ordre national de la profession d'infirmier et d'infirmière (n° 137).
    J'ai reçu, le 22 janvier 2003, de M. Gérard Vignoble, un rapport, n° 564, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, sur la proposition de loi de MM. Jean-Pierre Abelin, Pierre Albertini, Hervé Morin et des membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés tendant à la reconnaissance du vote blanc aux élections (n° 501).

4

DÉPÔT DE RAPPORTS
SUR DES PROPOSITIONS DE RÉSOLUTION

    M. le président. J'ai reçu, le 22 janvier 2003, de Mme Cécile Gallez, un rapport, n° 562, fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, sur la proposition de résolution de Mme Geneviève Colot tendant à créer une commission d'enquête sur les mineurs en danger arrivant en France (n° 396).
    J'ai reçu, le 22 janvier 2003, de M. Pierre-Louis Fagniez, un rapport, n° 563, fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, sur la proposition de résolution de M. Georges Hage tendant à la création d'une commission d'enquête afin d'évaluer les risques présentés par certains produits toxiques utilisés dans les entreprises et menaçant la santé des salariés (n° 390).
    J'ai reçu, le 22 janvier 2003, de M. Guy Geoffroy, un rapport, n° 565, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, sur la proposition de résolution de M. René André et M. Jacques Floch sur la création d'un procureur européen (COM [2001] 715 final/E 1912 et COM 272 final/E 1758) (n° 446).

5

DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI
ADOPTÉ PAR LE SÉNAT

    M. le président. J'ai reçu, le 22 janvier 2003, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la création d'une zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République.
    Ce projet de loi, n° 560, est renvoyé à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, en application de l'article 83 du règlement.

6

DÉPÔT D'UN RAPPORT DE L'OFFICE
PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION DES CHOIX
SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES

    M. le président. J'ai reçu, le 22 janvier 2003, de M. Claude Birraux, président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, un rapport, n° 566, établi au nom de cet office, sur l'évolution du secteur des semi-conducteurs et ses liens avec les micro et nanotechnologie.

7

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Aujourd'hui, à neuf heures quinze, première séance publique :
    Discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi, n° 513, relative à la conduite sous l'influence de substances ou plantes classées comme stupéfiants :
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 525) ;
    Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, n° 381, pour la sécurité intérieure :
    M. Christian Estrosi, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 508) ;
    Mme Marie-Jo Zimmermann, rapporteure au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes (rapport d'information n° 459).
    A quinze heures, deuxième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    A vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à une heure quinze.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
TEXTES SOUMIS EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
Transmissions

    M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale, les textes suivants :

Communication du 21 janvier 2003

N° E 2181. - Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la réduction des émissions de composés organiques volatils dues à l'utilisation de solvants organiques dans les peintures et vernis décoratifs et les produits de retouche automobile, et modifiant la directive 1999/13/CE (COM [2002] 750 final).
N° E 2182. - Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil arrêtant un programme pluriannuel (2004-2006) pour l'intégration efficace des technologies de l'information et de la communication (TIC) dans les systèmes d'éducation et de formation en Europe (programme eLearning) (COM  751 final).
N° E 2183. - Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 97/68/CE sur le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux mesures contre les émissions de gaz et de particules polluants provenant des moteurs à combustion interne destinés aux engins mobiles non routiers (COM [2002] 765 final).
N° E 2184. - Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 40/94 sur la marque communautaire (COM  767 final).
N° E 2185. - Proposition de règlement du Conseil concernant le commerce de certains équipements et produits susceptibles d'être utilisés à des fins de torture ou pour infliger la peine capitale ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (COM  770 final).
N° E 2186. - Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 417/2002 du Parlement européen et du Conseil du 18 février 2002 relatif à l'introduction accélérée des prescriptions en matière de double coque ou de normes de conception équivalentes pour les pétroliers à simple coque, et abrogeant le règlement (CE) n° 2978/94 (COM [2002] 780 final).

annexe au procès-verbal
de la séance
du mercredi 22 janvier 2003
SCRUTIN (n° 112)


sur les amendements n° 296 de M. Le Roux et n° 336 de Mme Billard tendant à supprimer à l'article 21 du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, pour la sécurité intérieure (incrimination des attroupements portant atteinte à la libre circulation dans les parties communes d'immeubles).

Nombre de votants

68


Nombre de suffrages exprimés

68


Majorité absolue

35


Pour l'adoption

16


Contre

52

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe Union pour la majorité présidentielle (362) :
    Contre : 47 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (147) :
    Pour : 12 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Contre : 5 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Rudy Salles (président de séance).
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 3 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (13).
    Pour : 1. - Mme Martine Billard.