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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 20 MARS 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du mercredi 19 mars 2003


SOMMAIRE
présidence de M. rudy salles

1.  Lutte contre la violence routière. Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

discussion générale (suite) «...»

MM.
Patrick Delnatte,
Jean-Charles Taugourdeau,
Jean-Pierre Door,
Jean-Pierre Decool,
François Rochebloine.
Clôture de la discussion générale.
M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice.

MOTION DE RENVOI EN COMMISSION «...»

Motion de renvoi en commission de M. Jean-Marc Ayrault : MM. Armand Jung, Hervé Mariton, René Dosière, Gilles Artigues, Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; Richard Dell'Agnola, rapporteur de la commission des lois. - Rejet.

DISCUSSION DES ARTICLES «...»
Article 1er «...»

MM. François Sauvadet, Marc Le Fur, Christian Estrosi.
Amendements n°s 166 de la commission des lois et 186 de M. Le Fur : MM. le rapporteur, le ministre, Hervé Mariton. - Adoption de l'amendement n° 166 ; l'amendement n° 186 n'a plus d'objet.
MM. Marc Le Fur, le président.
Amendement n° 92 de M. Fenech : MM. Franck Marlin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 20 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 1er modifié.

Après l'article 1er «...»

Amendement n° 98 de M. Vanneste : MM. Christian Vanneste, François Sauvadet, Hervé Mariton, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Article 2 «...»

M. Philippe Vitel.
Amendement n° 167 de la commission, avec le sous-amendement n° 187 rectifié de M. Le Fur ; MM. le rapporteur, Marc Le Fur, le ministre, Hervé Mariton. - Retrait du sous-amendement n° 187 rectifié.
M. le ministre. - Adoption de l'amendement n° 167.
Amendement n° 93 de M. Fenech : M. Patrick Delnatte. - Retrait.
L'amendement n° 5 de M. Richard Mallié n'a plus d'objet.
Amendement n° 21 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendements n°s 22 corrigé de la commission, avec le sous-amendement n° 188 rectifié de M. Le Fur : MM. le rapporteur, Marc Le Fur. - Retrait du sous-amendement n° 188 rectifié.
M. le ministre. - Adoption de l'amendement n° 22 corrigé.
Amendement n° 94 de M. Fenech : M. Patrick Delnatte. - Retrait.
L'amendement n° 6 de M. Richard Mallié n'a plus d'objet.
Amendement n° 23 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 2 modifié.

Après l'article 2 «...»

Amendements n°s 24 de la commission et 90 de M. Hunault : MM. Jean-Paul Garraud, Michel Hunault, le rapporteur, le ministre, Jean-Yves Le Bouillonnec, Pascal Clément, président de la commission des lois ; Jean-Marie Le Guen, Hervé Mariton. - Adoption, par scrutin, de l'amendement n° 24 ; l'amendement n° 90 n'a plus d'objet.

Rappel au règlement «...»

MM. René Dosière, le président.

Suspension et reprise de la séance «...»
Article 3 «...»

Amendement n° 25 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 3 modifié.

Article 4 «...»

Amendement n° 150 de M. Dosière : MM. René Dosière, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 26 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 4 modifié.

Article 5 «...»

Amendement n° 27 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 28 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 30 de la commission : MM. le rapporteur, Jean-Claude Viollet, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 30 rectifié.
Amendement n° 29 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 31 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 32 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 33 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 5 modifié.

Article 6 «...»

Amendement n° 34 rectifié de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 35 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 36 de la commission : MM. le rapporteur, René Dosière, le ministre, Hervé Mariton. - Rejet.
Amendement n° 37 rectifié de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 38 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Les amendements n°s 39 à 45 de la commission n'ont plus d'objet.
Amendement n° 46 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre, Hervé Mariton. - Adoption.
Les amendements n°s 47 à 50 de la commission n'ont plus d'objet.
Adoption de l'article 6 modifié.

Après l'article 6 «...»

L'amendement n° 51 corrigé de la commission n'a plus d'objet.
Amendement n° 131 de M. Garraud : MM. Jean-Paul Garraud, le rapporteur, le ministre, Jean-Yves Le Bouillonnec. - Adoption.
Amendement n° 151 de M. Viollet : MM. Jean-Claude Viollet, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
2.  Dépôt d'un projet de loi «...».
3.  Dépôt de propositions de résolution «...».
4.  Dépôt de rapports «...».
5.  Dépôt de rapports sur des propositions de résolution «...».
6.  Dépôt de rapports d'information «...».
7.  Dépôt d'un avis «...».
8.  Communication relative aux assemblées territoriales «...».
9.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à vingt et une heures).

1

LUTTE CONTRE LA VIOLENCE ROUTIÈRE

Suite de la discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière (n°s 638, 689).

Discussion générale (suite)

    M. le président. Cet après-midi, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.
    La parole est à M. Patrick Delnatte pour cinq minutes.
    M. Patrick Delnatte. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le ministre de l'équipement, des transports, du logement et de la mer, mes chers collègues, prévention, dissuasion, répression auxquelles j'ajouterai la sécurité des infrastructures et des véhicules : sur tous ces chantiers, il nous faut agir pour lutter contre le fléau de la violence routière, qui a encore coûté plus de 8 000 vies en 2001, sans compter les blessés à vie.
    Les chiffres de février sont encourageants : deux cent vies supplémentaires ont été épargnés par rapport à février 2002. Cette baisse, pour le neuvième mois consécutif, montre toute l'efficacité d'une action qui responsabilise le conducteur.
    Le nombre de tués en France n'est pas une fatalité, il doit encore être diminué en changeant le comportement agressif ou irrespectueux des usagers de la route sur lequel on bute depuis trente ans. Les efforts doivent être poursuivis pour éviter que des vies soit inutilement sacrifiées sur les routes de France.
    En ce domaine, l'initiative gouvernementale était attendue. Les mentalités évoluent et l'opinion réclame plus de responsabilité pour lutter contre la violence routière qui brise tant de vies et de familles.
    Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui veut responsabiliser le conducteur en insistant à la fois sur une répression plus efficace et sur une prévention renforcée.
    Mais même après un accident grave, nous savons que des vies peuvent encore être sauvées - de l'ordre de 700 à 800 chaque année en accélérant l'arrivée des secours. Cela est d'ailleurs vrai non seulement pour les accidentés de la route, mais aussi pour les victimes d'accidents domestiques et de loisirs ainsi que celles d'arrêt cardiaque. Des les premières minutes après l'accident, avant même l'arrivée des secours publics, chaque usager de la route doit pouvoir se comporter en acteur responsable, au lieu de rester un usager inactif, incapable de réagir faute d'une formation minimale, voire dangereux sous l'emprise de la panique qui survient en de tels instants.
    En matière de secourisme, la France accuse un retard considérable. D'autres pays européens organisent déjà une formation aux gestes de survie : l'Allemagne depuis 1969, l'Autriche depuis 1973. En Suisse, depuis 1977, elle est obligatoire pour obtenir le permis de conduire.
    La mise en oeuvre pratique serait facilitée si, dès la vie scolaire, les jeunes bénéficiaient d'une telle formation. A cet égard, je salue ici l'initiative de l'académie d'Amiens, en pointe dans ce domaine.
    M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. C'est gentil à vous, monsieur Delnatte. (Sourires.)
    M. Patrick Delnatte. Depuis 1993, l'enseignement des règles de sécurité routière est obligatoire pour les élèves des classes primaires et des collèges. Mais cet enseignement n'est pas toujours mis en place. De plus, il n'apparaît pas superflu de rappeler lors de l'examen du permis de conduire, soit plusieurs années, voire plusieurs dizaines d'années après la formation scolaire, les comportements à adopter en cas d'accident.
    La Fédération française de cardiologie, accueillie actuellement dans les murs de l'Assemblée nationale pour notre plus grand bien à tous, fait de cette formation aux gestes de survie la priorité nationale de la Semaine du coeur 2003.
    Messieurs les ministres, la commission des lois vous propose un amendement visant à introduire dans la formation au permis de conduire une initation aux premiers secours. Cet amendement reprend l'idée que j'ai déjà formulée avec près de deux cents de mes collègues de la majorité dans une proposition de loi visant à promouvoir les « cinq gestes qui sauvent ». D'autres initiatives ont été prises en ce sens, sur d'autres bancs de cette assemblée et également au Sénat. J'espère obtenir, votre accord et votre engagement à mobiliser les autorités de ce pays pour mettre en oeuvre cette initiative. Nous ne ferions qu'appliquer enfin la décision prise par le comité interministériel de la sécurité routière du 16 novembre 1974 sous la présidence du Premier ministre de l'époque, M. Jacques Chirac, qui rendait obligatoire cette formation pour les candidats au permis de conduire. Cette mesure a été reportée jusqu'à la fin des années 1970, puis supprimée début 1980.
    Dans un texte qui veut à juste titre lutter contre la violence et l'insécurité routières, il est bon de rappeler l'impérieuse nécessité d'un comportement responsable qui constitue la meilleure des préventions.
    Trop souvent, jusqu'ici, le débat a porté sur le choix entre une formation d'élite ou rien du tout. Il faut compléter le dispositif actuel du permis de conduire par une formation simple, pour que chacun sache réagir dans les premières minutes.
    Apprendre les gestes qui sauvent est un acte citoyen. C'est aussi un moyen de renforcer la solidarité et l'altruisme, des valeurs si méconnues dans notre société à la recherche de repères. J'espère que la représentation nationale et le Gouvernement y apporteront tout leur concours. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau.
    M. Jean-Charles Taugourdeau, Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le Président de la République et le Gouvernement ont fait de la lutte contre l'insécurité routière une cause nationale et en cela je les approuve totalement. Ils ont déclaré la guerre aux chauffards, lesquels au mépris du respect de l'autre et des règles élémentaires de vie en société transforment leur véhicule en arme fatale contre les piétons, les cyclistes, les motocyclistes et les autres automobilistes. En cela, je les approuve encore totalement.
    L'électrochoc nécessaire à la prise de conscience de chaque automobiliste était incontournable. La preuve en est qu'avant même le vote de la loi, le nombre des tués sur les routes a déjà diminué. Il suffit de rouler un peu pour se rendre compte que tout le monde va moins vite. Et je ne peux que souscrire à l'effet bénéfique de la peur de la sanction si elle doit diminuer le nombre de tués et de personnes handicapés à vie par l'arme fatale de celui qui joue avec nos vies comme avec une boule qui fait tomber les quilles.
    Mais, il y a effectivement un mais, je regrette que le texte ne fasse la part belle qu'à la répression et ne traite finalement pas assez de la prévention routière. Quid de l'apprentissage du code de la route à l'école ? Du respect de l'autre au volant, c'est-à-dire des priorités ? Quid de l'élimination des points noirs sur le réseau routier ? Quid de l'obligation du port de la ceinture de sécurité à l'avant et à l'arrière ? Combien de mères de familles arrivent à l'école sans avoir attaché leur enfant ?
    La ceinture de sécurité pourrait sauver 1 000 vies par an et les contrôles pour vérifier qu'elle est attachée à l'avant comme à l'arrière des véhicules ne sont pas suffisants.
    Aujourd'hui, des règles de bases du code de la route ne sont pas toujours respectées par le conducteur, notamment par manque de civisme ou par irresponsabilité. Citons, par exemple, le non-respect du temps d'arrêt à un stop, le non-respect des priorités à droite, principalement en agglomération, le franchissement d'une ligne blanche. Certes, ces infractions sont déjà réprimées par le code de la route, mais il semble que leur contrôle doit être plus systématique pour que les sanctions existantes soient mieux appliquées.
    La violence routière n'est pas seulement le fait de la vitesse. En effet, chacun sait bien, vous aussi, messieurs les ministres, que ce n'est pas la vitesse en soi qui est dangereuse, mais l'excès de vitesse. Dans certains secteurs, rouler à 50 kilomètres-heure en ville peut se révéler dangereux car c'est une allure beaucoup trop rapide. Parfois, respecter la limitation de 130 kilomètres-heure sur autoroute peut être également dangereux car cela risque de provoquer la somnolence, donc l'accident. Or, 70 % des tués le sont sur le réseau routier contre 6 % sur autoroute. Je pense qu'à certaines heures de faible trafic, par exemple de 23 heures à 5 heures du matin, voire aux quelques heures creuses de la journée, la limitation de vitesse pourrait être suspendue. Cette mesure inciterait sans aucun doute les automobilistes à emprunter un réseau autoroutier faiblement accidentogène car d'excellente qualité. On ne peut en dire autant des routes nationales et départementales. Une telle décision permettrait aussi de réaffecter les effectifs autoroutiers de gendarmerie aux routes nationales et départementales, beaucoup plus dangereuses.
    Qu'importe que l'on roule à 60, 90 ou 110 kilomètres-heure, si en pénétrant une nappe de brouillard, l'on ne respecte pas les distances - à ce propos, avez-vous déjà essayé de laisser de l'espace entre vous et celui qui vous précède ? On risquera toujours de provoquer des carambolages dramatiques. Est-ce une raison pour limiter la vitesse par temps clair, lorsqu'il n'y a personne ?
    Je comprends l'objectif extrêmement noble des associations qui militent pour la sécurité routière, chacun d'entre nous a été meurtri par la disparition d'un enfant, d'un parent, d'un ami ou d'un voisin. Je comprends leur action, mais, en même temps, je prétends que la responsabilisation de l'individu, en lui faisant prendre conscience du risque, sera toujours plus formatrice que la répression d'un délit commis sur une longue ligne droite, en légère descente, sur une autoroute sèche et peu fréquentée.
    Je voterai certes ce texte mais en regrettant qu'il ne traite que de la violence routière. En termes juridiques, la violence implique la volonté de nuire. Je le voterai en souhaitant que la violence routière, totalement insupportable, n'engendre pas une répression routière tout aussi insupportable.
    Je préférerais l'excès de prévention à l'excès de répression.
    Messieurs les ministres, combien de petites communes peuvent-elles offrir à leurs écoliers les épreuves du critérium du jeune pilote, extrêmement formatrices en matière de sécurité routière ? Combien de communes peuvent-elles se payer les ronds-points nécessaires à l'élimination de carrefours dangereux ? Combien de conducteurs peuvent-ils acheter l'éthylotest à 1 000 euros utilisé par la police et la gendarmerie ? Pourquoi ne pas faire tous les tests avec un appareil à 100 euros qui serait en vente dans le commerce ? L'autocontrôle rigoureux doit être accessible à tous.
    Sur la route, il faut aller doucement, ici il faut aller très vite alors qu'il y aurait pourtant beaucoup à dire...
    Messieurs les ministres, je voterai ce texte, mais j'en appelle à un prochain texte donnant toute sa part à la prévention et à l'éducation routières. En attendant, pensez bien à attacher votre ceinture, même à l'arrière ! (Sourires et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François Sauvadet. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door.
    M. Jean-Pierre Door. Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ce projet de loi aborde l'un des sujets certainement les plus difficiles et sensibles que nous ayons à traiter, dans la mesure où il vise à la sauvegarde de vies humaines. Attendu depuis l'annonce de Jacques Chirac le 14 juillet dernier, il met l'accent sur la responsabilité publique, compte tenu du diagnostic accablant situant la France dans le peloton de queue des pays européens et donne aujourd'hui à la représentation nationale l'occasion de réagir.
    Je tiens à vous en remercier, messieurs les ministres, et je salue aussi notre rapporteur pour son excellent travail.
    Au dernier Mondial de l'automobile, le ministre délégué à la famille citait l'insécurité routière comme la cause première de l'éclatement des familles, et notre secrétaire d'Etat aux personnes handicapées confirmait qu'elle était l'une des principales causes du handicap.
    S'il faut bien admettre que le risque zéro n'existe pas, nous devons substituer à une certaine tradition du « pas vu, pas pris » une véritable culture de la sécurité.
    Ce texte tend à renforcer l'efficacité de la justice pénale et la répression dans certaines circonstances, mais certains expliquent volontiers que la répression mal appliquée sur le terrain peut aussi décourager, le code de la route devenant alors la loi la moins respectée en France.
    Messieurs les ministres, j'ai entendu quelques remarques sur le terrain dont je vous livre l'essentiel : sachons faire une différence dans la gradation des fautes, entre une simple maladresse et un comportement criminel ; ne considérons pas tous les conducteurs comme des délinquants et des payeurs d'amendes systématiques ; ne provoquons pas trop de réactions épidermiques chez les conducteurs en effectuant des contrôles là où, à leurs yeux, la sécurité ne les justifie pas. C'est à ces conditions que nous mettrons en oeuvre une répression efficace, perçue alors comme légitime.
    Mais il est aussi indispensable de faire prendre conscience à la fois du danger de la route et du caractère collectif de l'usage de la voiture. Sans cette prise de conscience culturelle, qui se heurtera à des années d'habitude, il vous sera quasiment impossible de faire accepter une répression qui constitue, de prime abord, un acte de limitation de la liberté individuelle dont l'automobile est et restera un outil et un symbole.
    Pour avoir été dans ma jeunesse pilote de course automobile, je pense que deux actes majeurs doivent guider notre démarche : apprendre à conduire et apprendre à se conduire
    L'automobile reste pour l'homme un objet mythique : de l'enfance où il joue avec des petites voitures, en passant par l'adolescence où il rêve d'être pilote de course jusqu'à l'âge adulte où il se croit invulnérable. Il semble impossible de ne pas établir de relation entre la fascination qu'exercent des voitures de plus en plus confortables, sûres d'une certaine façon, mais aussi de plus en plus puissantes, rapides, séduisantes et presque sensuelles, et le comportement des conducteurs.
    Le Français se sent-il un homme différent dès qu'il est derrière un volant ? L'attitude de nombre d'automobilistes pourrait le laisser penser, au vu de décisions mal maîtrisées, qui favorisent des comportements très primaires, agressifs et à risques. Il est donc légitime de se poser, comme le directeur de l'Institut de recherche sur les transports et leur sécurité, la question suivante : est-ce que l'on est fait pour conduire une voiture ?
    On ne peut répondre sans réfléchir en profondeur à la notion de formation à la conduite. A cet égard, il est temps d'intégrer la prise de conscience du danger dans la formation, tout comme l'apprentissage de certains gestes positifs souvent très différents des gestes actuellement enseignés.
    Par ailleurs, est-il normal que les constructeurs vendent des accessoires et matériels, sans que l'usager ait eu la possibilité de connaître leurs fonctions et surtout de les tester en conditions normales ou en terrain hostile ? Je pense en particulier aux systèmes ABS, antipatinage, correcteur d'assiette, dont la méconnaissance peut être nuisible en cas d'urgence.
    Et que dire des jeunes ? connaître ses possibilités et ses limites est une évidente nécessité. Or, les connaissent-ils vraiment, ces jeunes qui constituent la catégorie la plus exposée ?
    Monsieur le ministre, je terminerai par le volet médical de votre projet de loi. Vous avez raison de réduire autant que possible, par prévention, le surrisque accidentel chez tel ou tel usager. L'instauration d'un examen médical obligatoire est une bonne mesure. Elle a le soutien du médecin que je suis, agréé auprès de la FFSA, Fédération française des sports automobiles, et de la commission des permis de conduire. Un amendement de notre collègue Christian Estrosi pose l'obligation d'un tel examen tous les dix ans. C'est une très bonne chose, car de nombreuses modifications peuvent survenir au cours de toute la vie, et cela de vingt à quatre-vingts ans et plus. La vision, l'audition, le diabète instable, les affections cardiologiques, psychiques, les prises de médicaments, et enfin le syndrome d'apnée du sommeil responsable de somnolence sont des facteurs aggravants ou déclenchant l'insécurité dans la conduite d'une voiture. L'arrêté du 7 mai 1997 fixant les incapacités médicales à la conduite des véhicules légers existe, mais il n'est malheureusement que très peu respecté, contrairement d'ailleurs aux dispositions relatives à l'aptitude au permis de conduire poids lourds.
    Messieurs les ministres, votre action est bien entendu nécessaire, car la vie doit sortir en vainqueur de la route. En conclusion, nous vous soutenons et nous approuvons ce projet de loi, pour que régressent enfin les drames routiers. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
    M. Jean-Pierre Decool. Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la violence routière est l'un des plus importants fléaux de ces dernières années en France. On recense chaque année près de 8 000 morts et plus de 100 000 accidents corporels. Le président de la République a fait de la lutte contre l'insécurité routière une priorité nationale. Certes, depuis le mois de janvier 2003, le nombre d'accidents mortels a baissé. Selon les derniers chiffres, le nombre de tués aurait diminué de 35,8 % en février 2003 par rapport à février 2002. Cependant, des mesures doivent être prises afin de responsabiliser les individus dans leurs comportements face à la sécurité routière.
    Le projet de loi que vous nous soumettez aujourd'hui, messieurs les ministres, répond à cet objectif. Une grande part du texte est consacrée à rendre plus efficace la répression : aggravation des sanctions, amélioration de la répression des infractions concernant les récidivistes. Quelques mesures concernant la prévention sont envisagées et je voudrais insister sur ce point.
    La sécurité routière s'apprécie sous de nombreux aspects : infrastructures, véhicules, comportements individuels, environnement. Je mettrai ici l'accent sur la prise de conscience de chacun face aux dangers de la route. Cette prise de conscience commence dès le plus jeune âge et c'est bien avant l'obtention du permis de conduire qu'il faut responsabiliser l'individu.
    M. François Sauvadet et M. François Rochebloine. Absolument !
    M. Jean-Pierre Decool. Des dispositifs existent déjà pour les jeunes. Le brevet de sécurité routière leur permet d'appréhender les dangers. Cet examen comprend une partie théorique et une partie pratique nécessaire aux conducteurs de cyclomoteur. Mais la responsabilisation des jeunes passe également par l'apprentissage des gestes de premiers secours. De nombreuses vies pourraient être sauvées grâce à l'intervention des premiers témoins. Un programme d'enseignement existe d'ailleurs au sein du ministère de l'éducation nationale. Les élèves, dès le primaire, sont ainsi formés aux premiers secours, ce qui leur permet d'être capables de reconnaître une situation d'urgence, de savoir protéger, alerter et d'effectuer certains gestes en attendant l'arrivée des premiers secours. Cet apprentissage devrait être rendu obligatoire et gratuit pour les élèves de l'enseignement secondaire. De même, une partie de l'examen du permis de conduire devrait être consacrée à cet apprentissage, comme le prévoit une proposition de loi déposée par mon collègue, Patrick Delnatte, député du Nord.
    M. François Rochebloine. Excellente proposition de loi !
    M. Jean-Pierre Decool. Les jeunes sont les plus touchés par les accidents de la route, les quinze - vingt-quatre ans représentant plus de 25 % des tués sur la route. Le projet de loi instaure un permis probatoire et je ne peux que me féliciter de cette mesure. Il est également important d'encourager l'apprentissage anticipé de la conduite. A l'heure actuelle, cette formation ne concerne que 17 % des jeunes Français de seize ans.
    Le conducteur prend des habitudes au volant : vitesse, tenue du volant, utilisation du téléphone portable. Des formations post-permis de conduire, des rendez-vous d'évaluation ou de perfectionnement, sont déjà prévus. De même, après retrait des points, l'auteur d'une infraction peut choisir de suivre un stage de formation se substituant au paiement de l'amende, comme le prévoit l'article L. 226-6 du code de la route. Mon collègue Jacques Remiller a déposé un amendement visant à rendre obligatoire, pour tout conducteur, un stage de formation tous les douze ans pour remettre à jour ses connaissances ; ce serait une bonne mesure.
    A partir d'un certain âge, l'individu n'a plus les mêmes réflexes ni la même capacité d'attention que lors de l'obtention du permis. Il ne s'agit pas d'interdire l'utilisation d'un véhicule pour les personnes âgées de plus de soixante-dix ans. Mais il serait bon de prévoir, à partir d'un certain âge, un examen médical et d'aptitude à renouveler de manière régulière.
    Tous les aspects de la sécurité routière doivent être envisagés. Le conducteur n'est pas le seul responsable. Le manque d'attention d'un piéton, la vétusté des infrastructures, la présence d'un objet ou d'un animal sur la route sont autant de facteurs aggravants. La population entière est et doit être concernée par la violence routière.
    Messieurs les ministres, je soutiens votre texte et j'espère que des mesures préventives et efficaces seront prises rapidement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, dernier orateur inscrit.
    M. François Rochebloine. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, dans l'esprit de nos concitoyens, parler de sécurité routière a conduit bien souvent à déplorer le laxime supposé des pouvoirs publics, à souligner les insuffisances de la réglementation en vigueur, voire à dénoncer le comportement de telle ou telle catégorie d'usagers de la route. Mais en chaque citoyen, c'est bien connu, il y a souvent un mauvais conducteur qui sommeille et, reconnaissons-le, le conducteur dangereux, c'est toujours l'autre !
    En choisissant de faire de la lutte contre la violence routière une action prioritaire, le Gouvernement et vous-mêmes, messieurs les ministres, faites oeuvre utile. Je crois pouvoir dire que vous avez d'ores et déjà marqué l'opinion publique de manière significative. Les premiers mois d'action sont à ce titre un succès incontestable, comme en témoigne la diminution importante du nombre de morts et de blessés sur les routes de France. Nous ne pouvons que nous réjouir, mais prudence s'impose car, en ce domaine, rien n'est définitivement acquis ; nous devons fonc faire preuve de vigilance.
    Cela étant, j'ai l'habitude de souligner que l'action des pouvoirs publics doit être globale, et donc ne pas se limiter à des incantations et à des effets d'annonce sur le terrain répressif, comme ce fut trop souvent le cas par le passé.
    Les statistiques relatives au nombre de morts constituent un indicateur important. Mais devra-t-on se limiter, à l'avenir, à ce seul décompte pour mesurer les progrès réalisés ? Je suis persuadé qu'il faut frapper les consciences, qu'il faut marquer l'opinion par des messages clairs.
    Le durcissement des textes doit s'accompagner d'une volonté politique visant à améliorer la qualité de notre réseau routier national, ce qui passe par la suppression des points noirs, malheureusement encore beaucoup trop nombreux sur l'ensemble de notre territoire. La qualité des infrastructures est un enjeu permanent.
    M. Marc Le Fur. Tout à fait !
    M. François Rochebloine. L'Etat et les collectivités locales, responsables du domaine autoroutier et routier, ont des devoirs. Est-il aceptable en effet que l'Etat ait laissé se dégrader si longtemps un grand nombre d'infrastructures relevant de sa responsabilité ? Est-il normal que les investissements de requalification, indispensables pour la sécurité des usagers et la bonne desserte des territoires, n'aient toujours pas été programmés, alors que les statistiques signalent chaque année la dangerosité de tel carrefour, de tel virage, de telle traversée d'agglomération, etc.
    M. François Sauvadet. C'est tout à fait vrai !
    M. François Rochebloine. Comment qualifier les retards accumulés au cours des vingt dernières années sur certains secteurs, alors que la densité des trafics, y compris celle des poids lourds, croissait dans le même temps de manière exponentielle, sans pour autant que toutes les mesures de sécurité adaptée soient prises ?
    La plupart de nos collègues ici présents - comme moi-même - vous ont alerté sur les besoins criants existants dans leurs départements. Vous connaissez l'ampleur de la tâche.
    Le rapport d'audit sur les projets d'infrastructures de transport a suscité un réel émoi sur le terrain, beaucoup d'acteurs locaux découvrant une situation préoccupante. N'y a-t-il pas dans les faits une véritable défaillance de l'Etat ? Nous héritons de cette situation et croyez bien, messieurs les ministres, que les inquiétudes sont grandes.
    A l'heure où l'on évoque le problème de la dangerosité des conducteurs âgés, il me semble qu'une réflexion s'impose sur la qualité de la signalisation. En effet, celle-ci se doit d'abord d'être « instinctive » et ne pas faire obligatoirement référence à la mémoire.
    M. Christophe Masse. Vous n'avez pas tort !
    M. François Sauvadet. C'est vrai !
    M. François Rochebloine. Des conducteurs qui ont quelque peu perdu de vue leur code de la route peuvent être parfois déroutés par l'implantation des panneaux et la configuration des lieux et adopter des comportements dangereux.
    La lutte contre l'usage des toxicomanies au volant, alcool et drogues diverses, dont - hélas ! - on connaît par ailleurs les ravages, doit être durement menée. Toutefois, si je salue les avancées obtenues sur ce point au plan législatif, je n'oublie pas que les moyens financiers en matière de prévention manquent trop souvent. Or les actions de prévention et d'éducation sont indispensables, notamment en direction de la jeunesse, que l'on sait particulièrement exposée. Elles ne doivent pas être reléguées au second plan, au nom d'une politique répressive, fondée sur la seule peur du gendarme et des contrôles de vitesse. En cette matière comme en d'autres, il faut faire preuve de pédagogie à l'adresse des usagers du réseau routier et des citoyens en général, qu'il convient de responsabiliser.
    Je sais, messieurs les ministres, que vous êtes sensibles à cette approche. La prise de conscience individuelle et collective aux risques de la route demande du temps. Elle suppose une volonté politique claire, comme la vôtre, la réaffirmation de règles compréhensibles par le plus grand nombre, un régime de sanctions adpaté à la réalité des dangers et un renforcement de l'efficacité de la justice pénale, dans un cadre légal et réglementaire juste et cohérent.
    Aussi, messieurs les ministres, nous approuvons les orientations de ce projet de loi et nous vous faisons confiance pour mettre en oeuvre une politique équilibrée et volontariste, indispensable si nous voulons renforcer demain la sécurité de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La discussion générale est close.
    La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
    M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Mesdames et messieurs les députés, je souhaiterais répondre aux quelques interrogations exprimées par les différents orateurs, et concernant la partie pénale du projet de loi.
    M. Artigues a raison : nous ne souhaitons pas modifier les seuils. M. Gilles de Robien et moi-même avons décidé de laisser les règles telles qu'elles sont aujourd'hui et de faire en sorte qu'elles soient appliquées, ce qui suppose la mise en oeuvre de certains moyens.
    M. François Sauvadet. Très bien !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Au reste, peut-être qu'ultérieurement, comme l'ont suggéré certains orateurs, une évaluation nous amènera, à modifier, si nécessaire, certains seuils ou certaines règles.
    M. François Sauvadet. C'est la sagesse !
    M. le garde des sceaux. Mme Jambu s'est interrogée : l'aggravation des sanctions était-elle nécessaire pour provoquer une prise de conscience des automobilistes ? Je crois franchement que la réponse est « oui », et c'est presque dommage, oserai-je dire. L'aggravation des peines encourues participe à l'effet psychologique que nous avons voulu créer pour susciter un phénomène de dissuasion et inciter nos concitoyens à une plus grande prudence.
    J'ai, pour ma part, été attentif à ce que j'ai entendu cet après-midi, mais aussi précédemment, à propos de la nécessaire unité des réquisitions des parquets, sur l'ensemble du territoire. La justice ne doit pas donner le sentiment que, en matière de lutte contre l'insécurité routière, elle est plus ou moins sévère selon les départements...
    M. Christian Estrosi et M. François Sauvadet. Très bien !
    M. le garde des sceaux. ... et, comme je l'ai indiqué ici même en répondant à une question d'actualité, des instructions ont d'ores et déjà été données en ce sens.
    M. Christian Estrosi. Parfait, monsieur le garde des sceaux !
    M. le garde des sceaux. M. Mariton a approuvé notre choix de parler de « violences routières ». De fait, les responsables et le milieu associatif, qui a beaucoup travaillé sur ces sujets, considèrent qu'il s'agit bien d'un phénomène de violence, avec toutes ses caractéristiques - notamment l'irresponsabilité dont font preuve certains usagers de la route. Je regrette d'ailleurs qu'un amendement du groupe socialiste vise à changer le titre. J'y vois une erreur de perspective...
    M. François Rochebloine. Ils vont le retirer !
    M. le garde des sceaux. Ce serait très bien en effet... Mais l'UDF peut-elle retirer un amendement socialiste ? (Sourires.)
    M. François Rochebloine. Nous avons dit qu'ils allaient le retirer !
    M. le garde des sceaux. L'information n'était donc pas tout à fait vérifiée.
    M. François Sauvadet. Ce n'était pas une information, mais une invitation !
    M. le garde des sceaux. M. Dosière n'est pas là, mais je vais lui répondre.
    D'abord, sans refaire le débat du mois de juillet 2002, je rappellerai que, comme le souhaitait Gilles de Robien ici présent, nous avons veillé à ne pas amnistier les comportements routiers qui constituaient un risque pour les personnes.
    M. Pierre Hellier. C'est exact !
    M. le garde des sceaux. Il ne faut pas réécrire l'histoire.
    Ensuite, M. Dosière a critiqué ce qu'il a estimé être le caractère « disproportionné » des sanctions prévues par rapport à celles qui peuvent s'appliquer à d'autres infractions non intentionnelles. En cas d'homicide involontaire ou de blessures involontaires, lorsqu'il y a aggravation de peine, c'est en raison de circonstances aggravantes qui illustrent des comportements en eux-mêmes répréhensibles. Etablir une comparaison avec un accident de chasse me paraît totalement dépourvu de fondement. Certes, dans les deux cas, l'homicide et la blessure sont involontaires. Mais la conduite sans permis, une alcoolémie excessive ou l'usage de stupéfiants révèlent un comportement qui est en lui-même illicite et constituent des circonstances aggravantes.
    M. Garraud a déposé un amendement sur lequel j'ai exprimé dans mon propos liminaire, un sentiment positif. Je crois toutefois qu'il ne faut pas se tromper et rouvrir aujourd'hui un débat sur l'interruption volontaire de grossesse, voire sur le statut de l'embryon. Il convient de combler un vide juridique qui débouche sur une incohérence. Il s'agit, uniquement, de protéger la femme enceinte. Nous aurons l'occasion d'en parler ultérieurement. Mais contentons-nous de traiter du problème de la sécurité routière.
    M. Pierre Hellier. C'était un prétexte !
    M. le garde des sceaux. M. Taugourdeau a souhaité que les décideurs donnent l'exemple. J'ai cru comprendre que nous devions attacher notre ceinture. Le ministre de l'équipement a bien voulu m'indiquer qu'il le faisait. Je m'engage, ce soir, à respecter cette règle. (Sourires.) Au-delà, et plus sérieusement, je tiens à dire que le petit jeu des interventions, c'est fini ! Cette préoccupation me semble aujourd'hui très largement partagée par les décideurs, qu'ils soient parlementaires, élus locaux ou ministres, mais il était important de le préciser.
    M. Christian Estrosi. Très bien !
    M. le garde des sceaux. Le sujet est aujourd'hui considéré par tous comme trop sérieux. Il fallait sortir d'une culture qui a été elle aussi partagée par beaucoup jusqu'à présent, mais qui n'a plus lieu d'être.
    M. Jean-Pierre Door a souligné combien il est décourageant que la répression soit mal appliquée sur le terrain. Le Gouvernement entend cette remarque. Il est vrai que placer le radar justement à l'endroit où la voiture a naturellement tendance à accélérer, sans même que l'on appuie sur l'accélérateur parce que l'on est en légère descente et en ligne droite, ce n'est pas la méthode la plus pédagogique pour nos concitoyens.
    M. Lionnel Luca. C'est sûr !
    M. le garde des sceaux. Tous les membres du Gouvernement devront avoir la volonté de faire passer ce message aux forces de sécurité.
    Vous souhaitez également, monsieur Door, qu'il y ait une modulation de la sanction par rapport au comportement fautif. Tel est bien l'esprit du texte dans ses dispositions à caractère pénal, puisqu'il prévoit l'aggravation progressive des peines en fonction de l'existence de circonstances aggravantes.
    Voilà, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, les quelques réflexions dont je souhaitais vous faire part sur les dispositions dont j'ai personnellement la responsabilité. Je vais maintenant prier l'Assemblée de m'excuser parce qu'il me faut, pour des raisons de carambolage d'ordre du jour (Sourires), rejoindre le Sénat où je dois défendre un autre texte. Mais M. de Robien sera là, bien sûr, pour répondre à vos questions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Motion de renvoi en commission

    M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une motion de renvoi en commission, déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du règlement.
    La parole est à M. Armand Jung.
    M. Armand Jung. Monsieur le président, monsieur le ministre de l'équipement et des transports, mes chers collègues, un simple appel téléphonique émanant des services de police et parfois, hélas, de l'institut médico-légal peut avoir pour conséquence de briser une vie, de briser un destin, mais également de plonger toute une famille dans la douleur à la suite d'un accident mortel survenu à un fils, une fille, un père, une mère ou un proche. Nous avons tous, malheureusement, connu des témoignages de ce type sans pouvoir trouver les mots qu'il convient de prononcer dans de telles circonstances.
    Alors, à chacun sa route, à chacun son destin, en espérant que le malheur ne nous frappe pas individuellement !
    En abordant ce débat, qui se déroule dans un contexte international dramatique, j'aurai d'abord une pensée émue pour les dizaines de milliers de personnes victimes des conséquences de nos modes de déplacement, victimes de l'inconscience de ceux qui confondent vitesse et précipitation, de ceux qui confondent la route avec un circuit de formule 1. Je pense également à tous ceux qui sont restés physiquement et moralement marqués à jamais à la suite de ce simple coup de fil les informant d'un accident survenu en pleine nuit ou un samedi soir à la sortie d'une fête ou d'une discothèque.
    Je tiens à saluer la dignité et la qualité de la discussion générale qui vient de se dérouler devant notre assemblée, du moins pour la partie qui touche à la sécurité routière.
    Je veux surtout rendre hommage au travail accompli par les associations, souvent méconnues, et encourager en même temps toutes celles et tous ceux qui, dans notre pays et au-delà, militent contre la violence routière ou plus exactement en faveur de la sécurité routière. Si je fais cette nuance, c'est que j'aurais préféré, comme d'autres orateurs, un titre différent pour ce projet de loi.
    M. François Sauvadet. Pourquoi ?
    M. Armand Jung. Le Président de la République a tenu à faire de la sécurité routière un des trois grands chantiers de son quinquennat. Le Premier ministre, en septembre dernier, s'est déclaré déterminé à lutter contre la violence routière. Il a notamment répété que « l'Etat doit se sentir en première ligne ».
    Ces engagements nous obligent. Il nous obligent à élaborer une grande loi en faveur de la sécurité routière. Or le texte qui nous est soumis me semble réducteur et n'aborde pas, en tout cas, l'ensemble des problèmes liés à l'insécurité sur nos routes.
    L'élément nouveau, c'est l'engagement formel d'un président de la République élu très largement, le 5 mai dernier, par tous les républicains de ce pays. Certes, tous les gouvernements, tous les premiers ministres ont manifesté, ces vingt dernières années, dès leur prise de fonction, leur détermination à lutter contre l'insécurité routière. Je citerai pour mémoire la loi du 10 juillet 1989 créant le permis à points. Mais l'opposition de l'époque avait voté contre ce texte, considéré comme trop exclusivement répressif et portant atteinte à la liberté d'aller et venir. Je citerai également la loi du 18 juin 1999 qui a notamment créé le délit de grand excès de vitesse. Mais, une nouvelle fois, l'opposition de l'époque avait voté contre au motif que « la loi permet déjà de réprimer les comportements abusifs de certains conducteurs » et que « le retrait automatique de six points porte atteinte, de manière excessive, à la liberté individuelle ».
    Le grand débat que nous avons eu, ici même, sur la loi d'amnistie mise en oeuvre à la demande du Président de la République nouvellement élu a été l'occasion de souligner les conséquences dramatiques qu'a entraînées, non pas le texte, mais l'annonce prématurée de cette amnistie, de longs mois avant l'élection présidentielle. Chers collègues, je fais partie de ces rares députés qui, dès le mois de novembre 2001, s'étaient engagés à ne voter aucune loi d'amnistie, quel que soit le candidat élu et quelle que soit la majorité au Parlement. Je m'y suis tenu et je m'y tiendrai. Je me sens donc d'autant plus libre de tenir aujourd'hui des propos qui, au-delà de nos sensibilités politiques, sont le reflet de l'engagement qui a été le mien avant que je n'exerce des responsabilités publiques notamment dans le monde associatif et dans le domaine de la lutte pour la sécurité routière. Car enfin, ceux qui meurent sur les routes ne sont ni de droite ni de gauche ! Ils représentent, avant tout, un drame humain pour lequel il n'est ni réparation, ni consolation.
    Dans ce contexte, monsieur le ministre, le projet de votre gouvernement, qui procède notamment des travaux du comité interministériel de sécurité routière réuni le 18 novembre 2002, ne nous gêne pas tellement par son contenu, même si un certain nombre de dispositions doivent être précisées ou rectifiées au cours des débats. A cet égard, d'ailleurs, notre groupe vous proposera des amendements que, je l'espère, vous aurez à coeur d'accepter, au moins en partie. Il nous gêne par ce qui n'y figure pas et qui est pour nous l'essentiel.
    Comme cela a été souligné de part et d'autre de l'hémicycle, vous avez en effet privilégié l'aspect répressif du problème.
    Nous sommes, certes, tous d'accord pour reconnaître que la répression est nécessaire, indispensable et souvent juste. Pour illustrer mon propos et aller, d'une certaine manière, dans votre sens, je citerai le cas d'un accident spectaculaire qui s'est produit chez moi, à Strasbourg. Le 2 octobre dernier, en pleine ville, un bébé a été tué, fauché par une voiture dans sa poussette, sur un passage piéton. Le dépistage pratiqué chez la conductrice n'a révélé aucune trace d'alcool ou de drogue. La seule certitude est qu'elle s'est arrêtée 37 mètres après l'impact. Dans cet accident mortel, le comble est que l'automobiliste, qui a dissimulé son identité, encourt pour ce délit, dans l'état actuel du droit, jusqu'à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende, alors que, pour l'homicide involontaire, elle ne risque que trois ans de prison et 45 000 euros d'amende. Moralité, et c'est en cela que je vais dans votre sens : il vaut mieux aujourd'hui, dans notre pays, être responsable d'un homicide involontaire qu'usurper une identité.
    Comment voulez-vous, face à une telle incohérence, faire de la prévention routière auprès de nos concitoyens ? La prévention, c'est bien, monsieur le ministre. Mais si l'on y ajoute la pédagogie, c'est mieux ! Or la pédagogie ne transparaît pas suffisamment dans votre projet.
    Et que dire de ces deux articles étrangers à la sécurité routière relatifs, d'une part, aux enquêtes techniques concernant les accidents d'aéronef militaire et, d'autre part, aux conditions d'encellulement des détenus ? Ces deux « cavaliers » sont indignes et brouillent le message que nous voulons délivrer à l'ensemble de nos concitoyens. Jacques Floch a développé ce point de vue en défendant l'exception d'irrecevabilité. Je m'associe à son appel et vous demande solennellement, au nom de mon groupe, de retirer ces deux ajouts.
    J'ai dit que votre projet comporte de très nombreuses lacunes qui en feront une ambition inachevée. Car ce texte n'aura pas d'effets, ou risque de ne pas en avoir, au-delà des vacances d'été et il aboutira à une désillusion. Nous souhaitons une démarche de sécurité routière durable, conforme aux voeux du Président de la République et du Premier ministre. En ne misant que sur la répression et la peur du gendarme, vous obtiendrez sans doute des résultats immédiats et spectaculaires, mais le réveil peut être douloureux.
    Le chaînon manquant de votre texte, c'est une analyse approfondie des conséquences de la vitesse. Il existe dans notre pays un lobby de la vitesse, un lobby de la voiture de sport. Toute la publicité pour la vente des voitures est fondée sur cette notion.
    Dans un remarquable document édité par vos propres services, monsieur le ministre, et qui est intitulé : La vitesse, quelques vérités bonnes à dire, on peut lire la phrase suivante : « La vitesse représente la première cause de mortalité sur nos routes, devant l'alcool. Elle intervient en fait dans un accident mortel sur deux, pour moitié en tant que vitesse excessive par rapport aux limitations en vigueur et pour moitié en tant que vitesse inadaptée aux lieux et circonstances. »
    Je voudrais compléter cette citation d'une brochure du ministère des transports qui, à mon sens, mériterait une plus large diffusion, par le rappel d'une déclaration prémonitoire de M. le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, faite le lundi 30 décembre 2002 sur M 6 : « L'ennemi public numéro un, c'est la vitesse. Tous les drames viennent de la vitesse. L'alcool accélère la vitesse. »
    Monsieur le ministre, mes chers collègues, comment pouvons-nous tolérer que, dans une société comme la nôtre, on puisse impunément mettre en circulation des véhicules dont la vitesse maximale dépasse la vitesse la plus élevée autorisée sur nos routes ? Comment mettre fin à cette incohérence ? Comment, à défaut, pourrions-nous être crédibles auprès de nos concitoyens ? A cet égard, l'amendement de M. Estrosi, accepté par la commission des lois, qui porte la vitesse maximum à 150 km/h sur autoroute est, à mon sens, une véritable provocation. Je souhaite que notre assemblée le rejette fermement.
    Comment limiter la vitesse, me direz-vous ? Il existe plusieurs possibilités.
    La première est une action résolue sur les comportements. C'est la méthode police-contrôle-sanction, celle qui sous-tend votre texte, celle qui a été mise en oeuvre avec plus ou moins de fermeté et de succès par tous les gouvernements depuis quinze ans. Elle peut donner des résultats positifs mais, dès que la pression médiatique et répressive retombe, le naturel revient au galop. Or notre souhait n'est pas simplement de passer le cap des vacances d'été, mais d'aboutir à une sécurité routière apaisée, inscrite dans la durée.
    La deuxième méthode touche à la construction même des véhicules. Comment encourager les constructeurs à généraliser plus vite les innovations technologiques ? La quasi-totalité des véhicules du parc automobile français sont capables d'atteindre, sur une simple pression du pied, des vitesses interdites par la loi sur tout le réseau routier. Or le code de la route dispose dans son article L. 311-1 : « Les véhicules doivent être construits, commercialisés, exploités, utilisés, entretenus et, le cas échéant, réparés de façon à assurer la sécurité de tous les usagers de la route. »
    Le bilan annuel de la sécurité routière en France nous interdit, dans ce contexte, de nous abriter derrière le prétendu immobilisme de l'Union européenne, argument que vous-même et vos prédécesseurs avez déjà mis en avant. C'est justement à ce niveau-là que nous devons agir, soit en arrivant à convaincre nos partenaires que les véhicules produits et importés dans notre pays ne sauraient être homologués s'ils peuvent dépasser la vitesse autorisée dans le périmètre de l'Union européenne, soit en avertissant nos partenaires que, comme elle l'a fait pour protéger ses citoyens lors de la crise de la vache folle, la France prendra s'il le faut des mesures unilatérales qui lui sont indispensables pour réduire un nombre effroyable de victimes.
    Par ailleurs, les industriels peuvent et doivent proposer en option, en attendant qu'ils soient obligatoires, les enregistreurs de données qui permettent en cas de choc de reconstituer ce qui s'est passé dans les secondes qui ont suivi et précédé l'impact.
    Je suis persuadé que l'avenir de l'industrie automobile est lié à moins d'accidents et à moins de pollution. En effet, des voitures toujours plus lourdes et plus puissantes ont non seulement pour conséquence des morts supplémentaires, mais elles nous conduisent à une impasse. Les constructeurs doivent donc produire des véhicules structurellement moins dangereux.
    La troisième méthode de limitation de vitesse - que votre texte n'évoque même pas - concerne le bridage des moteurs et surtout les limiteurs de vitesse. Dans les arguments que je vais vous exposer, j'ai trouvé une alliée prestigieuse en la personne de Mme Bernadette Chirac qui déclarait au Parisien, le 13 janvier 2003 : « Moi, je serais assez pour le bridage des moteurs. »
    Le bridage consiste à équiper les voitures, par construction, d'un dispositif limitant leur vitesse à une valeur correspondant au maximum autorisé, à savoir 130 km/h, ou à limiter, toujours par construction, la puissance maximale des moteurs. Cette méthode doit être expérimentée. Nous avons voté avant-hier une modification de la Constitution qui autorise le recours à l'expérimentation, et l'Etat peut donner l'exemple. Je rappelle que cette hypothèse figure dans les conclusions du comité interministériel de sécurité routière réuni le 18 décembre dernier, mais elle n'est malheureusement pas reprise dans votre texte.
    M. Jean-Louis Idiart. C'est le business, il ne faut pas y toucher !
    M. Armand Jung. Je me suis moi-même porté candidat pour que ma propre voiture soit bridée ; j'invite tous mes collègues à en faire autant.
    A défaut de cette modification lors de la construction des véhicules, il existe une autre solution qui est techniquement au point. M. Louis Schweitzer, président-directeur général de Renault, vient encore de le confirmer lors d'une rencontre avec un groupe de parlementaires à laquelle vous-même, monsieur le rapporteur, avez participé. Il s'agit des limiteurs de vitesse intelligents, qui sont à l'essai dans plusieurs pays européens : au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, en Suède, en Allemagne... Ces pays financent des expérimentations ou développent cette technologie dont tout montre qu'elle aura un impact sur le bilan des accidents.
    Le principe consiste à aider les conducteurs à respecter l'ensemble des limitations en vigueur ; il ne s'agit donc pas seulement des autoroutes. Pour cela, la vitesse réglementaire autorisée sur chaque tronçon de route emprunté est transmise au véhicule selon des techniques variées : soit le conducteur reçoit un simple avertissement, par signal sonore ou visuel, lorsqu'il dépasse la limite en un point donné, soit une action sur le moteur ou les freins empêche physiquement de dépasser l'allure réglementaire.
    La question centrale n'est quasiment plus d'ordre technologique. Aujourd'hui, ce qui interpelle la communauté scientifique et les politiques, c'est plutôt le problème de l'acceptation sociale de cette technique.
    L'expérience que la Belgique verse au dossier est plus qu'intéressante. Dans le cadre d'un programme national de recherches centré sur la mobilité durable, l'Institut belge pour la sécurité routière a conduit une enquête auprès d'un échantillon de 2 500 personnes, pour savoir si « ce fleuron de la technique passera un jour dans le domaine public, permettant ainsi de sauver de nombreuses vies ».
    D'autres expériences de ce type ont été réalisées en Europe. En Suède, le limiteur de vitesse est expérimenté dans quatre villes, sur 5 000 véhicules. Nous connaîtrons prochainement le bilan de cette opération. Aux Pays-Bas est testé un dispositif, que le conducteur ne peut pas déconnecter, qui commande automatiquement la vitesse par une action sur l'accélarateur. Enfin, au Royaume-Uni, des expériences identiques sont menées.
    Je n'ignore pas les arguments énoncés contre cette technique. Je rappellerai cependant que les limiteurs de vitesse intelligents régulent la vitesse des voitures sur la base d'une cartographie nationale reliée par satellite aux voitures munies du système GPS. Les données cartographiques, qui indiquent toutes les limitations de vitesse sur l'ensemble du territoire, doivent évidemment être mises à jour en permanence. Je n'ignore pas non plus les pannes dues à différents facteurs, notamment climatologiques, qui peuvent brouiller les informations transmises au GPS. C'est pourquoi je propose que la France, comme d'autres pays européens, accepte le principe d'une expérimentation portant sur une région ou sur un type de véhicule, et qu'au vu de cette expérimentation des mesures significatives soient prises.
    Le deuxième grand oubli de votre texte concerne les publics les plus exposés et les plus fragiles parmi les usagers de la route. Car, bien entendu, nous ne sommes pas égaux face aux risques d'accidents corporels ou mortels sur la route. Selon que l'on est automobiliste, piéton ou cycliste, jeune ou vieux, les risques encourus ne sont pas les mêmes et surtout pas de même nature. Votre texte fait fi de la situation des piétons et des cyclistes. Or vous n'ignorez pas que de nombreuses associations de défense de piétons ou de promotion du vélo tirent le signal d'alarme depuis des années.
    Nous sommes un des rares pays où la traversée des passages protégés n'est pas systématiquement respectée...
    M. Jean-Claude Viollet. Eh oui !
    M. Armand Jung. ... alors que dans d'autres pays les automobilistes ralentissent normalement à la vue d'un piéton qui s'engage ou traverse la chaussée. L'automobiliste français, au contraire, a plutôt tendance à accélérer en pareille circonstance.
    M. Christophe Masse. C'est hélas vrai !
    M. Armand Jung. D'après mes informations, on dénombre, en France, très peu de contraventions préventives concernant ces infractions. La sanction généralement appliquée, quand il y en a une, n'intervient qu'en cas de choc avec le piéton.
    Quant aux cyclistes, ils paient un lourd tribut aux accidents de la route. Ce n'est que depuis une période récente que nous commençons à mesurer l'ampleur de ce phénomène. Il est de bon ton parfois, surtout en ville, de fustiger les cyclistes lorsqu'ils circulent sur les trottoirs, ce que bien évidemment je désapprouve, de même lorsqu'ils roulent sans lumière la nuit, ce qui constitue également une infraction. Mais, je dois vous dire, mes chers collègues, que j'ai rarement vu un cycliste renverser une voiture ! C'est toujours l'inverse qui se produit. Tel un funambule, le cycliste est à la merci du moindre choc. Or votre texte n'en dit pas un mot, ce qui est plus que regrettable.
    J'aurais aimé, pour ma part, que votre projet initie une grande politique de promotion du vélo et de protection des cyclistes dans notre pays.
    M. Christophe Masse. Très bien !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Ce n'est pas son objet !
    M. Armand Jung. Je n'ignore pas que des velléités en ce sens existent au sein de votre gouvernement. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de rencontrer M. Bussereau, pour lui exposer une proposition de loi que j'ai déposée sur le Bureau de l'Assemblée nationale ainsi que les conclusions d'un rapport que j'ai soumis au Gouvernement précédent.
    On aurait également pu imaginer des soutiens plus forts en faveur des plans de déplacements urbains. Or votre gouvernement a considérablement diminué les aides de l'Etat en direction des PDU. De même, il faudrait généraliser le développement des « zones 30 » en milieu urbain. Cela permettrait non seulement de diminuer la vitesse, mais également de sécuriser de manière plus efficace les piétons et les cyclistes.
    M. Jean-Claude Viollet. Très bien !
    M. Christophe Masse. Voilà de bonnes mesures !
    M. Armand Jung. Rien pour les piétons, rien pour les cyclistes, rien non plus, à mon grand regret, pour les enfants d'âge scolaire - personne n'a encore abordé cette question - voyageant en autocar durant leurs séjours de vacances, et qui sont souvent victimes d'accidents dont certains sont de triste mémoire. Je citerai les accidents de Beaune, de Vierzon et de Valence. Je vous propose de supprimer les autorisations de transport scolaire de nuit en autocar.
    Les travailleurs nocturnes sont unanimes pour dire que la fatigue entraîne chez les chauffeurs conduisant la nuit un phénomène physique de déconcentration. D'ailleurs, les études médicales l'attestent, à l'instar de celle réalisée par le professeur Muset à Strasbourg, qui reconnaît que c'est autour de trois heures ou quatre heures du matin que les symptômes d'endormissement apparaissent chez le conducteur. A ce phénomène physique s'ajoute le stress supplémentaire causé par l'effervescence des enfants et par les impératifs horaires que les chauffeurs doivent respecter pour se rendre dans les lieux d'hébergement. Je vous informe que plusieurs associations de conducteurs professionnels d'autocars, des associations de familles et de parents d'élèves, souhaitent que soient interdits les voyages scolaires entre vingt-deux heures et quatre heures du matin.
    En outre, votre texte ne traite pas des accidents du travail mortels, lesquels sont très souvent des accidents de la route. L'Etat doit prendre l'initiative de doter de boîtes noires tous les véhicules qui lui appartiennent directement ou indirectement.
    Certes, le chapitre III du projet de loi aborde le thème de la prévention, mais ce point mériterait d'être complété. Il serait judicieux de préciser que la mise en place d'un continuum éducatif, depuis l'école maternelle jusqu'à l'entrée du jeune en apprentissage de la conduite, doit permettre de développer des comportements civiques basés sur la prise de conscience que la route est un espace social à partager.
    Une attestation de première éducation à la route permettrait à l'enfant d'acquérir, tout au long de sa scolarité, une véritable culture de la sécurité routière qui manque aux adultes d'aujourd'hui. C'est par l'éducation à la conduite tout au long de la vie, dès le plus jeune âge, que l'on parviendra à changer la mentalité française en ce domaine.
    Plus généralement, nous savons que les crédits consacrés à la prévention routière en France sont parmi les plus faibles d'Europe, malgré l'augmentation décidée dans le dernier budget. Tous les acteurs de terrain de la prévention routière vous le confirmeront. Votre projet n'apporte malheureusement aucun moyen supplémentaire.
    Pour terminer sur les insuffisances de votre texte, je rappellerai vos propres déclarations, monsieur de Robien, parues le 15 mars dernier dans un grand magazine : « Il existe des agences européennes pour la sécurité alimentaire, pour la sécurité maritime, pour la sécurité ferroviaire, mais aucune pour la sécurité routière. Pourquoi ? » Eh bien, justement, pourquoi ne pas introduire une telle proposition dans ce texte, sur laquelle vous pourrez vous appuyer dans une discussion avec vos homologues européens ?
    L'engagement fort du Président de la République et du Gouvernement impliquait la mise en place d'une grande loi consacrée à la sécurité routière. Votre texte n'aborde qu'une partie du problème, celle consacrée aux contrôles-sanctions. Tout montre que vous souhaitez aller vite, mais en négligeant l'examen de points essentiels qui touchent à la prévention routière.
    M. Christophe Masse. Eh oui !
    M. Armand Jung. Les associations, les acteurs de la sécurité routière n'ont d'ailleurs pas été officiellement auditionnés par la commission des lois, bien que je n'ignore pas, monsieur le rapporteur, que vous les avez rencontrés pour préparer ce texte, tout comme moi d'ailleurs. L'ambition affichée par le Gouvernement impliquait un examen plus approfondi et plus fin de l'ensemble des aspects de l'insécurité routière. Je note aussi que la commission des affaires économiques, pourtant compétente en matière de transport, n'a même pas été saisie pour avis.
    C'est pour toutes ces raisons que je défends aujourd'hui le renvoi en commission, afin d'aboutir à un texte plus complet et plus équilibré. On peut craindre, en effet, que les bénéfices immédiats résultant de la forte médiatisation actuelle ne s'estompent dans les prochains mois.
    Monsieur le ministre, mes chers collègues, la technologie qui permet désormais de limiter de manière considérable et durable les accidents de la route est au point. Vous la connaissez, nous la connaissons, vous pouvez donc la mettre en oeuvre. N'attendons pas qu'un jour un procès pour non-assistance à personne en danger soit intenté à l'Etat, à ses ministres et à ses représentants. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Hervé Mariton, pour le groupe UMP.
    M. Hervé Mariton. Monsieur Jung, vous venez de dire des choses très justes, mais le mieux est l'ennemi du bien. Le texte qui nous est présenté aujourd'hui a le mérite de proposer de nombreuses dispositions solides et équilibrées ; il faut donc le voter.
    Certains des arguments que vous avez avancés sont tout à fait pertinents même s'ils ne relèvent pas tous du domaine législatif. Des orateurs de notre groupe ont insisté, comme vous, en particulier sur la responsabilité des constructeurs automobiles, ou sur la nécessité de conduire cette politique à long terme. Justement, engageons-nous en votant ce texte.
    Assez curieusement néanmoins, vous reprochez à l'opposition d'hier d'avoir stigmatisé à un moment des orientations trop répressives. Or vous-même, lorsque, en dehors des compléments que vous souhaitez apporter au texte, vous critiquez son contenu, vous le faites sur sa dimension répressive. On a un peu le sentiment que vous collez au discours d'opposition que vous critiquiez.
    M. René Dosière. Les critiques ne sont pas du même ordre.
    M. Jean-Louis Idiart. Et quand vous attaquiez les dispositions Bosson en 1994 ?
    M. Hervé Mariton. Mais ce point n'est probablement pas le principal. Il faut surtout s'attacher à la qualité de ce texte, car il permet de s'engager sur la voie utile que le Gouvernement a proposée. C'est pourquoi nous voterons contre le renvoi en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. René Dosière, pour le groupe socialiste.
    M. René Dosière. Notre collègue Armand Jung vient d'exposer avec beaucoup de sérénité tous les motifs qui nous justifient un examen approfondi de ce texte. Cela ne vaut pas critique du travail de M. le rapporteur. Son rapport mentionne le nombre de personnes qu'il a pu auditionner, un nombre remarquable compte tenu du délai très court qui a été celui de l'examen de ce texte. D'ailleurs, monsieur le ministre, cette pratique est habituelle depuis le changement de Gouvernement. On n'a vraiment plus le temps de travailler.
    M. Pierre Hellier. Il y a beaucoup à faire !
    M. Christian Estrosi. Ne perdons pas les bonnes habitudes !
    M. René Dosière. D'ailleurs, le rapporteur souligne à deux reprises dans son rapport qu'il n'a pas eu le temps d'approfondir certains points importants. Je pense, en particulier, à l'ordonnance concernant le code de la route. Le rapporteur dit très explicitement - je vous renvoie à son rapport - qu'il n'a pas eu la possibilité d'examiner cette ordonnance comme il l'aurait fallu. Le Gouvernement propose donc à la représentation nationale de ratifier en quelques secondes la partie législative du code de la route sans qu'elle ait eu le moyen de vérifier si le travail de codification avait été fait correctement.
    Je voudrais souligner un second aspect. Le Gouvernement nous dit que le permis probatoire est une très bonne mesure. Je ne demande qu'à le croire. Mais nous n'avons aucun bilan des résultats obtenus par ce permis probatoire à l'étranger. Si le rapporteur avait disposé d'un peu plus de temps, il nous aurait sûrement fourni quelques explications complémentaires pour nous convaincre. Mais peut-être M. le ministre nous le donnera-t-il.
    Tout cela montre bien que, malgré les réunions, malgré le travail que le rapporteur a accompli, ce texte doit être approfondi. Je dirai en conclusion à notre collègue Mariton, que s'il relisait les débats d'alors il constaterait qu'il n'y a aucune commune mesure entre les critiques que la majorité d'aujourd'hui nous faisait hier, et les observations que nous formulons notamment sur la volet répressif du projet de loi.
    M. Christophe Masse. Très bien !
    M. René Dosière. J'ai précisé que nous n'avions aucunement l'intention de saisir le Conseil constitutionnel sur les dispositions concernant l'automatisation des sanctions et la responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule, dispositions que certains dans vos rangs, notamment l'un de vos collègues du Gouvernement, monsieur le ministre, qualifiaient naguère de liberticide Monsieur Mariton, on peut diverger fort légitimement sur tel ou tel aspect du texte et nous avons des observations à faire dès lors qu'il s'agit de sécurité routière. Mais, engageons loyalement le débat, est c'est d'ailleurs parce que nous voulons que ce débat soit approfondi, sérieux et serein, que nous souhaitons que la commission puisse continuer son travail, et que nous voterons ce renvoi en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Gilles Artigues, pour le groupe UDF.
    M. Gilles Artigues. Le groupe UDF estime que le renvoi en commission ne se justifie pas. En effet, la commission s'est réunie à trois reprises, et ce matin encore pour examiner les derniers amendements. Par ailleurs, les deux ministres concernés ont été auditionnés, réunion à laquelle a assisté le « monsieur Sécurité routière » du Gouvernement. Les débats ont donc pu se dérouler dans de bonnes conditions. Ils vont se poursuivre ici même aujourd'hui et demain, puis au Sénat et à nouveau ici en deuxième lecture.
    On ne peut pas se permettre de le reporter, car il y a urgence. L'idéal serait que ce texte puisse entrer en vigueur avant les grands départs en vacances de cet été. C'est pourquoi nous ne voterons pas le renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Christian Estrosi. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le président, avant de répondre à M. Jung, je souhaite revenir sur les propos des orateurs qui se sont exprimés. Dans un débat aussi important, il ne serait pas décent que le ministre se dérobe aux questions très importantes qui ont été posées et aux remarques extrêmement pertinentes qui ont été émises, et qui ont retenu toute l'attention de Dominique Perben et de moi-même.
    M. René Dosière. Je ne vous suspecte pas de dérobade, monsieur le ministre.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. En effet, je n'ai pas l'intention de me dérober.
    M. Jérôme Lambert. Ni de déraper ! (Sourires.)
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Je suis persuadé que nous considérons tous que le sujet est très grave.
    M. René Dosière. Tout à fait !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. M. Gilles Artigues a été le premier à considérer que l'accent ne doit pas être mis uniquement sur la répression et il a rappelé l'importance du développement de la formation du conducteur. Combien il a raison !
    Il a insisté également sur la politique de santé publique. Je veux lui dire que le Gouvernement travaille actuellement sur ces sujets, pour aboutir à un décret dans le courant du deuxième semestre, après concertation entre les médecins, le ministère de la santé, le ministère de l'équipement et le ministère du travail. Ce décret aura pour objet de proposer une sorte de « mode d'emploi », précisant comment, à l'occasion des visites médicales annuelles dans le cadre de la médecine du travail, pourrait être portée la mention « Apte à la conduite », ou bien la préconisation « Changer de verres », ou encore une appréciation concernant les réflexes.
    Il faut, quoi qu'il en soit, comprendre que le présent projet de loi n'a pas, à lui seul, et je le répéterai souvent, vocation à régler tous les problèmes de sécurité routière. Monsieur Jung, demander le renvoi en commission du texte au motif qu'il ne prévoit pas telle ou telle disposition me paraît trop facile. Le droit français est ainsi fait : il y a des textes législatifs et des textes réglementaires. Nombre des préconisations que vous proposez sont d'ordre réglementaire et s'inscrivent dans le cadre d'une politique générale de sécurité que j'ai déjà annoncée.
    Monsieur Artigues, je tiens à saluer votre enthousiasme en faveur des dispositions de ce projet, qui est motivé, c'est vrai, par une réelle compréhension des malheurs causés par la route et je vous remercie pour la justesse de votre ton.
    Mme Jambu semble douter de la détermination du Gouvernement à se donner les moyens de sa politique. Je tiens à la rassurer : la détermination du Gouvernement, du Premier ministre, et du Président de la République est totale. J'en veux pour preuve que le budget de la sécurité routière ne sera pas touché par le gel budgétaire. Il faut que Mme Jambu sache que l'effort sera maintenu et même amplifié. En effet, le budget de la sécurité routière représente 54 millions d'euros, auxquels s'ajoutent 30 millions pour les plans régionaux d'actions de sécurité routière.
    Dans le cadre des contrats de plan, l'Etat consacrera 3 millions d'euros aux glissières dont on a déjà parlé plusieurs fois au cours de ce débat. J'ai noté que les motards ont, comme chaque année d'ailleurs, manifesté pour que les glissières soient de vraies glissières et ne se transforment pas en piquets tranchants lorsqu'il y a chute. Qu'ils soient rassurés.
    Je précise également que le budget consacré annuellement à la communication est de 12,54 millions d'euros. L'effort consenti par la nation à la sécurité routière s'élève, si on totalise la justice, la gendarmerie, la police, l'éducation nationale, les finances et la recherche, à plus de 1 500 millions d'euros et les actions de communication prévues cette année vont combler toutes les attentes que Mme Jambu a exprimées puisqu'elles vont être consacrées à la vitesse et à l'alcool, comme elle le souhaitait. J'espère, par conséquent, qu'elle sera rassurée quand elle l'apprendra.
    J'ai également suivi avec une grande attention l'intervention de M. Mariton, car je sais qu'il est depuis longtemps très motivé par ces questions.
    Concernant la politique de transport, je rejoins son souhait de voir se développer l'intermodalité. Vous avez raison, monsieur le député. Sachez qu'au mois de mai ou au plus tard, au début du mois de juin, j'irai constater sur place comment se déroule l'expérience Modalor, menée en Italie et en France, qui est la première expérimentation de transport de camions sur plates-formes ferroviaires. Nous souhaitons tous qu'elle se révèle tellement probante qu'elle draine un flux de plus en plus important, soulageant ainsi la circulation sur les routes, les autoroutes, les cols et les tunnels. C'est le premier échelon du Lyon-Turin dont nous avons abondamment parlé.
    M. Jean-Louis Idiart. Et la traversée des Pyrénées ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Je réponds en ce moment à M. Mariton, monsieur le député.
    M. Jean-Louis Idiart. La circulation se fait partout.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Vous avez, monsieur Mariton, rappelé le caractère pédagogique du titre de ce projet de loi consacré à la lutte contre la violence routière et insisté sur la nécessité de l'exemple. A l'heure où les jeunes paient le prix fort, l'Etat se doit en effet d'être exemplaire. Et il le sera. Ainsi, dans mon ministère, j'ai donné des consignes pour que soient achetés dès que possible, probablement dès 2003, toute une flotte de véhicules équipés de régulateurs de vitesse et, dès que la puce-mémoire sera au point, plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de véhicules munis de ce dispositif permettant de renseigner sur les vingt ou trente dernières secondes avant un accident, que j'espère toujours simplement matériel. Il paraît qu'il a un effet préventif assez extraordinaire, déjà expérimenté par la police municipale de Berlin. J'attends de la présence de cette puce-mémoire une responsabilisation encore accrue des conducteurs.
    M. René Dosière. Ce serait un exemple pour l'Assemblée.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Il importe, avez-vous encore dit, de ne pas piéger les automobilistes. C'est aussi l'état d'esprit dans lequel oeuvre le Gouvernement en mettant en place le contrôle automatisé. Nous avons rencontré les constructeurs à plusieurs reprises. Ils travaillent tous à la sécurité. Il s'agit souvent, c'est vrai, de sécurité passive : installation d'airbags, mise en place de systèmes de freinage de plus en plus performants. Je leur ai dit qu'il fallait qu'ils se tournent également vers la sécurité active. Il est important de protéger les conducteurs et les passagers mais il l'est tout autant de faire que les véhicules soient moins dangereux à l'extérieur.
    D'ailleurs, tout le monde s'y met. Vous avez peut-être vu, hier, dans beaucoup de grands journaux, des pages complètes achetées par les sociétés d'autoroute pour appeler les conducteurs à plus de responsabilité sur les autoroutes. C'est un acte de civisme qu'il convient de souligner.
    Pour revenir sur l'aspect exemplaire des services de l'Etat, j'ai déjà eu l'occasion de dire ici il y a quelques jours, avec la permission du ministre de l'intérieur, qu'en un an les contrôles d'alcoolémie ont augmenté de 30 % et les relevés d'infraction à la vitesse de 15 %. C'est dire si tout le monde s'y met. C'est une oeuvre collective, vous l'avez tous souligné.
    M. René Dosière, qui a dit beaucoup de choses depuis le début de ce débat, a surtout voulu le retarder.
    M. René Dosière. Le reporter !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Oui, mais qui dit reporter, dit retarder. Un jour ou l'autre, il faut bien prendre des mesures. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Certaines ont déjà été prises sous forme réglementaire. Quand un « paquet » de mesures est prêt, ne faisons pas trop la fine bouche. Le Premier ministre l'a dit, le dispositif n'est pas définitif. Si on peut l'améliorer, on présentera un nouveau projet dans trois ou six mois. La démarche n'est pas close aujourd'hui. Nous entamons une longue marche en faveur de la sécurité routière. Donc, ne boudez pas non plus le plaisir de voter aujourd'hui un texte qui, même s'il n'est pas parfait, concourt largement, vous l'avez tous souligné, au renforcement de la sécurité routière. Il a le mérite d'exister et entraînera une baisse du nombre des tués et des blessés. Personne ne peut aller contre un tel objectif. Il faut le voter aujourd'hui. Nous nous retrouverons avec plaisir pour une prochaine étape une prochaine fois.
    M. Hervé Novelli. Très bien !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. En tout cas, je vous remercie, monsieur Dosière, des constats objectifs que vous avez faits sur l'action de l'ensemble du Gouvernement. Je n'ai pas une oreille sélective.
    M. Jean-Louis Idiart. Quand même !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. J'ai entendu les louanges, avec un petit « l »,
    M. Jean-Louis Idiart. Mais au pluriel !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. ... que vous avez adressées au Gouvernement. Mais je dirai simplement qu'il a joué son rôle. Vous avez souligné à juste titre les premiers résultats enregistrés, mais c'est aux automobilistes en définitive que doivent aller les louanges.
    Vous avez souligné que la majorité d'aujourd'hui a su évoluer. Dont acte ! Si nous sommes meilleurs dans la majorité, permettez-nous donc d'y rester assez longtemps, de façon à améliorer encore nos actions. La sécurité routière s'en portera d'autant mieux ! (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je disais cela en souriant !
    M. Jean-Louis Idiart. Cela ne dépend pas de nous !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Vous voyez cependant dans le texte trop d'aspects répressifs. En plus des objectifs de prévention et de mise en conformité des infrastructures, sachez que de gros efforts, qui ne passent pas par des textes législatifs, sont accomplis au quotidien pour améliorer la sécurité de nos routes. Les chiffres que j'ai indiqués tout à l'heure sont à multiplier par deux, par trois ou par quatre du fait des initiatives prises dans le cadre des contrats de plan par les communes, les agglomérations, les départements et les régions. L'action du Gouvernement et par celle des collectivités locales se conjugue pour faire une grande politique de sécurité routière. Le Gouvernement ne prétend pas avoir le monopole de la sécurité routière, puisqu'il a insisté sur le fait que c'est un débat national, et une grande cause nationale. Donc, prenez-le comme tel !
    Vos interrogations sur le rôle du Conseil national de la sécurité routière vont, dans un avenir très proche, recevoir des réponses précises. Le Gouvernement compte donner toute son importance à cette instance dont le rôle, en matière d'orientation, d'expertise et d'impulsion, est fondamental. D'origine récente, il n'a, il est vrai, pas encore beaucoup fonctionné. Mais j'ai bien l'intention de l'activer, maintenant qu'il y a un corpus et de la matière, encore plus importante à lui donner : matière à réflexion, matière à contrôle de l'action du Gouvernement, matière à propositions.
    Enfin, sachez, pour répondre à la question que vous avez posée, que la répartition du produit des amendes entre les collectivités locales et l'Etat ne sera pas modifiée.
    Monsieur Rudy Salles, qui présidez ce soir la séance, vous avez eu raison d'insister sur le caractère déterminant et très innovant du permis probatoire. Vous l'aviez d'ailleurs, fort opportunément, suggéré il y a peu, dans une proposition de loi que vous aviez déposée. Vos deux préoccupations - le développement des régulateurs de vitesse et la mise en oeuvre de l'immatriculation des cyclomoteurs - vont être évoquées dans nos débats. Nous vous devons également ce dernier dispositif, puisque vous avez rédigé une proposition en ce sens. Sachez que, cet après-midi encore, le ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy, m'informait que ses services travaillaient sur l'immatriculation des cyclomoteurs de moins de cinquante centimètres cubes, donc jusqu'à 49,9 centimètres cubes, et qu'ils étaient tout à fait mobilisés sur ce projet. C'est important.
    M. François Sauvadet. Bravo pour M. Salles !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur Viollet, vous avez raison d'insister sur l'importance d'un continuum éducatif du conducteur, de la classe maternelle jusqu'à la formation continue. Par ailleurs, votre idée de « rendez-vous santé » retient l'attention du Gouvernement. Nous travaillons sur l'aptitude médicale du conducteur dans la continuation des décisions du comité interministériel de la sécurité routière du 18 décembre 2002.
    J'ai bien entendu, monsieur  Bertrand, vous qui siégez, avec toutes les connaissances qui sont les vôtres, au conseil national de la sécurité routière, l'idée fort intéressante que vous avez lancée de contrats d'objectif avec les auto-écoles et j'en ai tout de suite parlé à mes éminents collaborateurs. C'est vraiment une idée excellente. Je la retiens. Et j'ai demandé à mes services de travailler d'ores et déjà activement sur cette question. Développer le tropisme de « sécurité routière » dans la pratique médicale m'apparaît également une excellente suggestion et rien que pour ces deux propositions, je vous remercie très sincèrement de votre communication.
    Monsieur Lambert, la prévention a été au coeur de votre intervention. Vous avez dit que le projet de loi présentait trop de lacunes. Je vous invite à vous reporter aux décisions du Centre d'instruction et de sécurité routière - le CISR. J'y reviendrai tout à l'heure en répondant à M. Jung.
    Monsieur Luca, vous êtes préoccupé par l'état de nos infrastructures. Je ne peux pas laisser dire qu'elles sont de mauvaise qualité. Quand on voyage en Europe et au-delà, on s'aperçoit que les infrastructures routières et autoroutières de notre pays sont de très bonne qualité.
    M. Christian Estrosi. Elles sont inégales !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Cela ne veut pas dire qu'on ne peut pas les optimiser ! Mais au moins, reconnaissons que, malgré des inégalités et des contrastes d'une région, d'un département et même d'une voirie à l'autre, et parfois au sein d'un même statut, départemental ou national, la France a de bonnes infrastructures !
    Enfin, sachez qu'il est prévu que le gestionnaire de la voie pourra imposer aux concessionnaires le déplacement des obstacles latéraux. Cela répond à la demande que vous avez formulée.
    Monsieur Masse, vous souhaitez un dispositif plus ambitieux en milieu scolaire. Nous ne pouvons que partager cet objectif. Nous sommes également en concertation permanente avec les constructeurs automobiles. Ceux-ci ont compris que la sécurité répondait à une attente très forte de leur clientèle. Nos initiatives doivent néanmoins respecter le cadre communautaire dans lequel elles s'inscrivent.

    Je suis en désaccord néanmoins sur un terme. Vous avez dit : la route tue. Je crois qu'il faut, mesdames et messieurs les députés, que nous renoncions à ces formules : l'alcool tue, la route tue, etc. Ce ne sont ni la route ni l'alccol qui tuent, mais le comportement de certains conducteurs !
    M. François Sauvadet. Très bien !
    M. François Rochebloine. Absolument !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Il faut savoir adapter sa vitesse, sa boisson, son repas et ses médicaments à la fonction qu'on occupe quand on prend le volant. Arrêtons donc de rejeter sur des facteurs extérieurs la responsabilité de nos propres erreurs, voire de nos fautes. La route ne tue pas. C'est le conducteur qui s'est mal conduit, qui a commis une imprudence ou, pire, un vrai délit. Je me permets cette remarque de forme pour que, les uns et les autres, nous puissions faire passer les mêmes messages, si vous les estimez convenables, et participer ensemble à cette grande oeuvre qu'est la sécurité routière.
    M. Delnatte souhaite introduire l'apprentissage des gestes qui sauvent dans la formation du conducteur. C'est une préoccupation ancienne.
    M. Pierre Hellier. Il a raison !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Oui, il a raison.
Une sensibilisation aux premiers secours mérite en effet d'être intégrée dans la formation du conducteur. Je suis bien entendu d'accord sur cette idée.
    M. Taugourdeau a lui aussi raison quand il dit que les décideurs doivent donner l'exemple. J'ai parlé du ministère de l'équipement mais il n'est pas le seul à intervenir. Le ministère de l'intérieur a adressé aux préfets une circulaire datant de décembre 2002 pour mettre fin aux indulgences. C'était quand même un exemple déplorable d'autant que, dans la France entière, tout le monde savait. Il y avait une sorte de complicité, de pacte du silence. Maintenant, c'est fini. Et si vous connaissez des exemples, je vous demande, non pas de les dénoncer, mais d'essayer au moins de les faire cesser en vous y opposant et en expliquant que ce n'est pas bien. Montrons l'exemple ! Et refusons, si nous sommes nous-mêmes sollicités... En tous cas, pour ma part, je ne le suis plus. On a dû comprendre que ce n'était pas la bonne adresse.
    Monsieur Taugourdeau, l'éthylotest électronique, c'est pour demain : il sera vendu à un prix modique pour le rendre accessible à tous. Mes services y travaillent. Je rappelle également que les régulateurs et les puces électroniques sont eux aussi pour demain.
    Monsieur Door, vous avez dit à juste raison que la sécurité routière devait devenir une vraie culture. Apprendre à conduire, c'est apprendre à la fois à bien conduire et à bien se conduire.
    Sur l'aptitude médicale à la conduite, vous connaissez les engagements du Gouvernement. Mon ministère travaille, en concertation avec le ministère de la santé à la mise en oeuvre d'un nouveau dispositif avant la fin de l'année. Celui-ci sera d'ordre réglementaire. Il s'agira donc d'un décret.
    Monsieur Decool, vous avez évoqué l'apprentissage anticipé de la conduite. Je suis évidemment favorable à son développement. Cela existe déja mais pourrait être davantage étendu.
    Quant aux stages de formation que vous préconisez, il faut veiller à ce que le dispositif retenu soit applicable. N'oublions pas qu'il y a plus de 30 millions de conducteur en France. Décréter une mesure ne vaut que si l'on peut l'appliquer. Si elle ne peut l'être, il y a en général un retour à l'envoyeur, et c'est toute l'autorité de l'Etat qui en sort affaiblie.
    Monsieur Rochebloine, soyez certain que le Gouvernement fait le maximum pour améliorer les infrastructures. Les collectivités locales, je l'ai dit tout à l'heure, doivent aussi prendre leur part à cet effort. Elles le souhaitent, d'ailleurs. Elles sont tellement proches des citoyens et des électeurs, qu'elles savent très bien que, si elles ne mettent pas une signalétique, voire un ralentisseur à proximité des écoles, le comité de quartier et, plus généralement, la démocratie locale feront tout de suite écho du manque de sécurité dans la commune. Les collectivités locales ont un rôle très important à jouer en ce domaine.
    Dans votre discours très équilibré, vous avez souligné, la complémentarité des actions qui doivent contribuer à faire reculer l'insécurité routière : la sanction et la prévention. Là est le véritable équilibre. Finalement, il n'y a de répression qu'en cas d'infraction. Si tout le monde, ou le plus grand nombre, commencent à respecter le droit, on ne parlera plus de répression, mais simplement de règles à respecter à longueur d'année et l'aspect répressif, que certains craignent trop, disparaîtra au profit d'un aspect tout simplement dissuasif. On finit par respecter les lois mais il faut toujours, à un moment donné, marquer un coup d'arrêt. C'est ce coup d'arrêt qu'on veut donner de manière forte dans le domaine de la sécurité routière.
    Monsieur Jung, vous avez fait une intervention très longue, et je dois le dire, très intéressante, bien que je n'en partage pas, loin s'en faut, tous les développements. Mais, je vous le dis franchement, le projet de loi n'a pas besoin d'un renvoi en commission. Mais l'Assemblée est souveraine en la matière...
    Vous avez reproché au texte d'être uniquement répressif. Ce n'est pas le cas ! D'abord, je vous rappelle qu'il n'est qu'un élément de toute une politique en faveur de la sécurité routière. Ne retenez pas que le texte de ce soir. Il s'articule dans tout un ensemble de textes réglementaires, législatifs, de communication et de travail avec les associations. Ensuite, le texte lui-même n'est pas que répressif. Le permis probatoire, l'allongement du temps de l'épreuve pratique du permis de conduire de vingt ou vingt-deux minutes à trente-cinq minutes, en moyenne constituent-ils des mesures répressives ? A l'évidence non !
    Le fait de faire dépendre les inspecteurs du permis de conduire du directeur départemental de l'équipement plutôt que de l'Arche de la Défense, n'est-ce pas mettre véritablement sur le terrain celles et ceux qui sont susceptibles de faire de la pédagogie et de sanctionner les candidats par le biais du permis de conduire ?
    M. Christian Estrosi. C'est une bonne mesure !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Ce n'est pas répressif, pas plus que ne l'est la loi Dell'Agnola à laquelle le Gouvernement a donné un avis évidemment favorable. Vous voyez que le Gouvernement n'est pas répressif !
    Au titre des mesures qui seront prises par décret, j'ai cité la définition des critères médicaux d'aptitude à la conduite qui fait l'objet d'un travail intense pour que le décret puisse être pris d'ici la fin de l'année. Ce n'est pas répressif ! C'est de la médecine ! Où s'appuie sur des connaissances médicales afin de déterminer des critères qui permettent de placer chaque conducteur devant ses responsabilités. Il peut ou il ne peut pas, en l'état, conduire. S'il ne peut pas, peut-être pourrait-il en changeant ses verres de lunettes ou en se rendant chez un spécialiste, retrouver l'usage de la conduite. Ce n'est pas de la répression, les mesures sur les routes, l'amélioration de l'infrastructure non plus !
    Vous avez parlé d'un texte inachevé. Non ! En fait la démarche même ne sera jamais achevée, mesdames, messieurs les députés, tant qu'il y aura encore un mort et un blessé sur les routes. Néanmoins, la commission, avec son président, Pascal Clément, le rapporteur, et tous les députés, a réalisé un travail remarquable et le texte est vraiment prêt à être discuté ce soir et demain.
    Vous avez parlé de la vitesse et de la publicité. Peut-être ne les avez-vous pas vus, mais une grande marque de véhicules automobiles non française avait déjà fait installer dans la France entière des panneaux quatre par trois en insistant sur le thème de la sécurité pour vendre une voiture. Ne croyez-vous pas que c'est déjà un petit changement de culture ? Vous avez expliqué que les constructeurs ne se préoccupaient pas de la sécurité et que la publicité était trop axée sur la vitesse. Eh bien, ce constructeur dont je ne citerai pas le nom à cette tribune a axé sa démarche commerciale sur la sécurité du véhicule. C'est tout de même quelque chose ! Monsieur le ministre, est-il dit, vous voulez de la sécurité ? En voilà ! Et il y a une photo du véhicule.
    M. Jean-Louis Idiart. C'est de l'opportunisme !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Peut-être, mais ne critiquons pas quelqu'un qui prend une bonne initiative dans le sens que vous souhaitez.
    M. François Sauvadet. Evidemment !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Bien sûr, monsieur Jung, qu'il faut travailler avec les constructeurs. Vous avez eu raison aussi de citer Mme Chirac, qui est très mobilisée et très sensible au problème des accidents sur la route et de la sécurité routière, qui souhaite voir des véhicules moins rapides. La voie, c'est d'abord peut-être l'exemple, pas toujours une loi. Je vous ai dit ce qui se passait dans les ministères. Les limiteurs de vitesse, vous l'avez dit, sont à l'essai. Le système Lavia, limiteur s'adaptant à la vitesse autorisée, est actuellement testé en région parisienne. Le véhicule reçoit par GPS des informations envoyées par satellite et la vitesse du véhicule est limitée automatiquement, par exemple à cinquante km/heure quand la voiture traverse une agglomération.
    La preuve de notre bonne volonté à tous, c'est que ce test, nous l'encourageons, nous le suivons de près et, s'il se révèle performant, nous allons le multiplier et utiliser par exemple le système dans les véhicules de l'administration, toujours pour faire de la pédagogie.
    Brider les véhicule, ce n'est pas aussi évident que cela. D'abord, est-ce responsabiliser les conducteurs ? J'ai de multiples exemples, vous en avez aussi, de personnes qui reviennent des Etats-Unis en disant que c'est formidable, que tout le monde roule à soixante miles à l'heure.
    M. René Dosière. Pas tous !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Presque tous ! Dès qu'il y en a un qui fait une infraction, il y a une voiture avec gyrophare qui intervient. Il est arrêté, les mains sur le capot, et je pense que cela lui revient cher, au moins en amende. Or, là-bas, il y a des voitures de huit cylindres qui consomment beaucoup d'essence et qui pourraient aller très vite. Le limiteur, ce n'est donc pas la réponse universelle, le bridage automatique non plus.
    M. René Dosière. Ils dépassent tout de même souvent les soixante miles !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Et puis cela pose aussi d'autres questions. Quid du parc actuel ? On exigerait demain un bridage automatique sur tous les véhicules neufs mais il roule actuellement en France 15, 20 ou 25 millions de véhicules et eux ne seraient pas bridés ? C'est plutôt le contraire qu'il faudrait faire, car il y a quelques voitures un peu anciennes qui feraient peut-être bien de rouler moins vite et même de rester au garage.
    M. François Rochebloine. Ça s'est beaucoup amélioré !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Quid des véhicules qui viennent de l'étranger ? Je ne parle pas des marques étrangères, mais des voitures des Européens qui viennent nous rendre visite en France. Comment faites-vous pour les brider à la frontière qui n'existe plus ? Ce sont des questions utiles, pratiques.
    M. François Sauvadet. C'est le bon sens !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Et comment fait-on si des Français veulent rouler à 140 sur une autoroute allemande, qui ne sont d'ailleurs pas toutes sans limitation de vitesse, comme on le croit ? Où est leur liberté si leur véhicule a été bridé à 130 en France ? Je ne dis pas que c'est insoluble, mais je pose la question.
    Et puis brider un véhicule à 130, est-ce résoudre le problème ? La vitesse est limitée à 30 ou à 50 en ville, à 90 sur une route départementale ou nationale, 110 sur une route à quatre voies. Cela ne résout qu'une toute petite partie du problème. En tout cas, ce n'est pas la solution !
    Vous avez parlé des vélos. Vous êtes comblé, monsieur Jung, puisque je viens de prendre un décret pour les protéger sur certains espaces publics et notamment les espaces protégés, pour leur donner la possibilité en ville de mieux circuler en toute protection.
    Vous avez parlé des autocars. Vous êtes comblé. J'ai été le plus volontariste au conseil européen transport et j'ai demandé que tous les cars qui transportent des scolaires, c'est-à-dire des jeunes, les plus fragiles, soient équipés de ceintures de sécurité dans les meilleurs délais possible, et tous mes collègues ont suivi. Ils voulaient faire cela sur huit ans, sept ans, six ans. J'ai obtenu cinq ans. Il faut changer le parc, cela coûte très cher, les conseils généraux en savent quelque chose.
    M. François Rochebloine. Oui !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Cinq ans, cela apparaissait le juste milieu, le plus volontariste et le plus réaliste, et c'est encore notre gouvernement qui a fait prendre à l'Europe cette mesure.
    M. Christian Estrosi. Très bien.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. En conclusion, monsieur Jung, car je ne veux pas retarder ce débat cinq minutes de plus, renvoyer ce texte en commission, ce serait tout simplement faire perdre du temps à la sécurité routière, ce que je ne souhaite pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons ce soir un débat de qualité, sérieux, qui va au fond des problèmes. Nous sentons bien, d'ailleurs, que nous partageons tous la même préoccupation. Le ton est modéré, quelles que soient, par ailleurs, les différences.
    Tout renvoi du texte en commission entraînerait un retard préjudiciable. Nous observons aujourd'hui une tendance positive, qui se cristallise, et de bons résultats, qui doivent être suivis d'effets législatifs, sous peine de voir peut-être s'inverser la tendance. Nous sommes aujourd'hui à un moment de convergence, assez rare et précieux. L'on observe à la fois une volonté politique, un accueil favorable des Français pour ces mesures et des premiers résultats. Par conséquent, il serait dommage, et dommageable pour la sécurité routière, que cette motion de renvoi soit votée. C'est la raison pour laquelle j'exprime un avis défavorable à son adoption.
    M. le président. Je mets aux voix la motion de renvoi en commission.
    (La motion de renvoi en commission n'est pas adoptée.)

Discussion des articles

    M. le président. J'appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte du Gouvernement.

Article 1er

    M. le président. Je donne lecture de l'article 1er :

Chapitre Ier

Répression des atteintes involontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne commises à l'occasion de la conduite d'un véhicule
    « Art. 1er. - Il est inséré après l'article 221-6 du code pénal un article 221-6-1 ainsi rédigé :
    « Art. 221-6-1. - Lorsque la faute de maladresse, d'imprudence, d'inattention, de négligence ou de manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévue par l'article 221-6 est commise par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, l'homicide involontaire est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.
    « Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende lorsque :
    « 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci-après ;
    « 2° Le conducteur se trouvait en état d'ivresse manifeste ou était sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang ou dans l'air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par ce code et destinées à établir l'existence d'un état alcoolique ;
    « 3° Il résulte d'une analyse sanguine que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le code de la route destinées à établir s'il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;
    « 4° Le conducteur n'était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;
    « 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h ;
    « 6° Le conducteur ne s'est pas arrêté et a tenté ainsi d'échapper à sa responsabilité pénale ou civile alors qu'il savait qu'il avait causé un accident.
    « Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende lorsque l'homicide involontaire a été commis avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° et suivants du présent article. »
    La parole est à M. François Sauvadet, inscrit sur l'article.
    M. François Sauvadet. Monsieur le ministre, vous avez bien rappelé l'enjeu du débat qui s'est ouvert, avec beaucoup de dignité. Nous avons essayé les uns et les autres d'apporter notre contribution, notamment dans l'opposition, mais aussi dans la majorité. Il s'agit, en effet, d'un enjeu majeur, d'un enjeu national et d'une préoccupation que nous devons tous partager.
    Nous allons entrer dans le vif du sujet, c'est-à-dire l'examen des amendements. L'article 1er va tout à fait dans le sens de ce que nous souhaitons tous, il va aggraver les peines pour les fautes les plus graves commises sur la route. On a parlé de la grande vitesse, on a parlé aussi de l'alcool. C'est d'abord un appel à la responsabilité des conducteurs, car l'alcool et la grande vitesse sont les premières causes d'accident et de mortalité sur nos routes.
    Avant l'examen de cet article, je voudrais vous redire, au nom de l'UDF, comme l'ont fait d'ailleurs mes collègues, et sans anticiper sur le débat qui va s'ouvrir, que ce n'est pas la question des seuils de vitesse ou d'alcoolémie, qui doit être posée, mais celle de leur strict respect.
    M. Christian Estrosi. Absolument !
    M. François Sauvadet. Il faut se garder en la matière de toute surenchère, le président Clément l'a dit très clairement, le rapporteur aussi. Certains proposaient de ramener le taux d'alcoolémie à 0,1 ou 0,2,...
    M. François Rochebloine. Démagogique !
    M. François Sauvadet. ... ce qui est tout à fait irréaliste. Evitons aussi toute surenchère sur la vitesse sur autoroute. Ce serait un signe négatif au moment où nous voulons faire en sorte que chacun respecte les règles. L'enjeu, c'est de faire respecter les règles actuelles et d'engager chacun à adopter un comportement responsable.
    C'est bien, en effet, de responsabilité qu'il s'agit. J'ai été très frappé par des chiffres que vous avez rappelés les uns et les autres : sur 8 000 morts, 60 à 70 % d'entre eux n'étaient aucunement responsables de l'accident. Cela exige de notre part un grand esprit de responsabilité.
    J'entends bien ceux qui parlent de responsabilité individuelle, mais il y a un principe simple, c'est que la liberté individuelle, c'est aussi le respect de l'autre.
    M. François Rochebloine. Très bien !
    M. François Sauvadet. Il faut être conscient, lorsqu'on prend le volant, que, si l'on va trop vite ou si l'on a bu, on peut provoquer des accidents graves qui peuvent être mortels. Nous connaissons tous, dans nos circonscriptions, des familles qui ont été touchées. Lorsqu'on a des enfants et que l'on voit des jeunes prendre la route le soir, on se dit que, si nous pouvions contribuer, par ce débat, à réduire le nombre de familles touchées, de blessés graves, de morts sur nos routes, nous aurions servi à la conception de l'intérêt général qu'au-delà de nos différences, nous devons partager, celle qui consiste à assurer la préservation de chacun. Cela s'appelle tout simplement le sens de la responsabilité.
    En tous cas, monsieur le ministre, j'ai apprécié la tonalité que vous avez souhaité donner à ce débat comme, je le dis très sincèrement, chacun d'entre nous, dans l'opposition comme dans la majorité. Je crois que nous servons ainsi l'image que nous voulons donner d'un Parlement responsable, car, je le répète, c'est bien de responsabilité qu'il s'agit. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.
    M. Marc Le Fur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis pour mettre fin à un scandale : des morts sur la route, 8 000, de jeunes vies brisées, des familles déchiquetées. Mettons un terme à la fatalité, agissons !
    Pour agir, il faut bien identifier les causes. Dans le passé, j'ai travaillé sur des enquêtes REAGIR. C'était très clair. A chaque fois, on identifiait le conducteur, le véhicule, la route et l'environnement. Il faut que nous sachions agir sur les trois causes.
    Première cause, le conducteur : oui à la sanction quand c'est nécessaire, et nous allons en parler à l'occasion de l'article 1er, oui au retrait de permis de conduire, oui, éventuellement, à la prison, mais le délinquant routier n'est pas un délinquant comme les autres. Je ne me résous pas à l'assimiler à un cambrioleur, à un voleur, à un assassin, à quelqu'un qui s'en prend à de jeunes enfants ou à de vieilles dames. Cette délinquance routière, en effet, a une particularité : nous sommes tous potentiellement des victimes, mais nous sommes tous aussi, avouons-le, potentiellement, des délinquants.
    Mme Chantal Brunel. C'est vrai !
    M. Marc Le Fur. Il faut certes des sanctions, mais attention parfois aux mots que nous utilisons.
    Par ailleurs, un retrait de permis de conduire, cela ne veut pas dire la même chose pour tous nos concitoyens. Quand on est dans le monde rural, qu'il n'y a pas d'alternative en termes de transport, le retrait du permis de conduire, c'est la cessation de toute vie sociale durant la période de ce retrait. Je souhaite que vous en teniez compte dans les instructions que vous donnerez. La sanction, oui, mais il faut aussi former et prévenir.
    Je crois que cela vous fera plaisir, monsieur le ministre, depuis que le permis de conduire relève directement des DDE, donc de votre autorité, les choses se sont améliorées. La gestion des files d'attente est bien meilleure, tous le disent, en particulier les entreprises de conduite automobile.
    Deuxième cause d'accident, la route, ne l'oublions pas. Il y a de grandes inégalités de ce point de vue. Sur l'autoroute, il y a bon an, mal an, 300 ou 350 morts. C'est trop, bien sûr, mais c'est sur des routes de gabarit inférieur, des routes départementales, mais aussi des routes nationales, qu'il y a le plus de morts.
    M. François Sauvadet. C'est vrai !
    M. Marc Le Fur. Nous avons encore trop de routes à deux ou trois voies qui sont en elles-mêmes structurellement accidentogènes. Il faut faire porter notre effort là-dessus. Le contrat de plan sur lequel nous vivons a été très anti-routier, pour des raisons idéologiques à l'époque.
    M. François Sauvadet. Oui !
    M. François Rochebloine. C'était insuffisant financièrement !
    M. Jean-Louis Idiart. N'importe quoi !
    M. François Sauvadet. Sur les infrastructures, il a raison !
    M. Marc Le Fur. Il faut revenir à un investissement routier de qualité.
    Troisième cause d'accident, le véhicule.
    Saluons les efforts réalisés par les constructeurs automobiles. Des choses évoluent. Mais posons-nous aussi des questions. M. Jung en a posé, d'autres également. Personnellement, je pose la question de l'enregistrement. Cela existe pour les véhicules poids lourds, pourquoi cela n'existe-t-il pas pour les véhicules automobiles ordinaires, les VL ?
    Je pose aussi la question du bridage. Nous allons de plus en plus ressentir une contradiction entre la réglementation que l'on appliquera et le fait qu'on pourra toujours vendre des véhicules qui montent à 240 ou 250 km/h et les mettre entre les mains de jeunes conducteurs inexpérimentés. Que l'on veuille ou non, nous sommes en pleine contradiction ! Je mesure bien la difficulté de l'exercice, mais Mme Chirac a posé le problème, l'opinion nous le pose, et il faudra un jour que nous nous y attelions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Christian Estrosi.
    M. Christian Estrosi. Bien évidemment, j'approuve de toutes mes forces la politique qui a été initiée par ce gouvernement depuis maintenant quelques mois et qui commence à porter ses fruits. Je suis un adepte de l'impunité zéro, j'ai plaidé pour elle pendant des années s'agissant de la montée de la délinquance et de la violence et je plaide aussi pour elle dans le domaine de la violence routière.
    Le Gouvernement est en train de nous démontrer que quelles que soient les règles, à partir du moment où on exige sans complaisance et avec la plus grande fermeté qu'elles soient respectées, le citoyen qui prend une bonne leçon de civisme apprend à les respecter. Le résultat, c'est une baisse spectaculaire depuis trois mois du nombre de morts et de blessés, avant même que ce texte ne nous soit soumis et que les règles n'évoluent.
    Mais peut-on se contenter de voir baisser l'insécurité routière du seul fait de l'action politique du Gouvernement. N'est-il pas indispensable, au-delà, de reposer un certain nombre de fondamentaux à la faveur des dispositions législatives qui nous sont proposées ?
    Je suis convaincu que le projet qui nous est proposé par le Gouvernement est une bonne chose et ne pourra qu'accentuer encore la baisse que nous enregistrons aujourd'hui. Je soutiens donc totalement la démarche du Gouvernement.
    Cela étant, si nous sommes un certain nombre ici ce soir, à gauche comme à droite, c'est parce que nous nous préoccupons depuis des années de la sécurité routière et que nous suivons ces dossiers.
    M. François Sauvadet. C'est vrai !
    M. Christian Estrosi. Je pense, modestement, que j'ai quelque qualification à faire des propositions. J'en ai fait, considérant que cela permettrait d'ouvrir le débat et de prendre date pour les semaines, les mois, les années qui viennent, sans remettre en cause le texte que nous allons défendre et que nous n'allons modifier que très peu. Je remercie d'ailleurs le Gouvernement d'avoir accepté notamment des amendements de la commission qui renforcent et améliorent le texte.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Bien sûr !
    M. Christian Estrosi. Cela démontre aussi son ouverture d'esprit.
    J'écoutais François Sauvadet sur les règles. Sur le taux d'alcoolémie, je suis bien incapable de dire s'il faut accepter 0,8, 0,5, 0,2 ou 0,1 gramme d'alcool dans le sang, ou rien du tout comme dans certains pays nordiques qui interdisent purement et simplement que l'on consomme de l'alcool avant de prendre le volant. Il y a des spécialistes mieux placés que je ne le suis moi-même.
    M. François Sauvadet. Absolument !
    M. Christian Estrosi. La vitesse, c'est un domaine réglementaire, le Gouvernement aura l'occasion de le rappeler, comme le rapporteur ou le président de la commission des lois l'ont fait en commission, à propos d'un certain nombre d'amendements. Cela dit, c'était tout de même l'occasion pour nous de donner notre sentiment en tant que représentants du peuple. Les vitesses telles qu'elles sont inscrites dans le code de la route aujourd'hui ont été fixées il y a trente ans. Cela remonte au premier choc pétrolier. Elles ont été choisies en fonction d'une situation donnée, pour des raisons précises.
    Mais, là encore, je suis incapable de dire, comme le font certains, si 130 kilomètres-heure, c'est trop vite ou pas assez. Imaginons que, il y a trente ans, on ait limité à 110 plutôt qu'à 130. Le député qui proposerait aujourd'hui de passer de 110 à 130 s'attirerait les foudres de ceux qui lui reprocheraient de vouloir augmenter de 20 kilomètres-heure la vitesse limite. Mais c'est bien à 130 kilomètres-heure qu'on a fixé la limite de vitesse sur autoroute et une proposition tendant à augmenter de 3, 5, 10 ou 20 kilomètres-heure paraît aujourd'hui iconoclaste, politiquement incorrecte et même impensable.
    On dit : l'alcool tue, la vitesse tue. Mais la vitesse ne tue que là où elle est dangereuse. Et comment déterminer où elle est dangereuse ? Monsieur le ministre, vous avez dit, tout à l'heure, des choses formidables à propos de certains endroits où la vitesse est limitée à 50 kilomètres-heure alors que cela n'a aucun sens, à l'entrée des agglomérations, sur des voies en descente, larges, en ligne droite, et où l'on « planque » un radar.
    M. François Rochebloine. A la sortie des agglomérations, aussi !
    M. Christian Estrosi. Il faudra bien, un jour ou l'autre, revoir cela. A l'inverse, il y a, dans les agglomérations, des endroits où la vitesse autorisée est trop élevée, et j'ai déposé des amendements pour l'abaisser. En agglomération, en effet, les piétons sont souvent les principales victimes de ces excès de vitesse.
    De même, nous laissons les poids lourds rouler trop vite. Un 38 tonnes lancé à 90 kilomètres-heure sur une autoroute est une véritable bombe roulante.
    M. François Sauvadet. Ils roulent trop vite et trop près les uns des autres !
    M. Christian Estrosi. Certains semi-remorques sont collés les uns aux autres, se font aspirer, déboîtent au dernier moment, font prendre des risques inouïs aux véhicules qui les suivent...
    M. François Sauvadet. Là-dessus, nous sommes d'accord !
    M. Christian Estrosi. ... et mettent quelquefois trois, quatre, cinq minutes à dépasser parce qu'il n'y a que 1 ou 2 kilomètres-heure de différence entre les deux poids lourds. Ces comportements sont tout à fait inacceptables.
    Nos autoroutes comptent quelques centaines de kilomètres de voies rectilignes, d'une largeur importante, dont toutes les caractéristiques devraient permettre à un véhicule d'en dépasser un autre dans de meilleures conditions s'il disposait d'une marge de sécurité de 10, 15 ou 20 kilomètres au-delà du « 130 ». D'autres pays, en Europe, l'ont expérimenté avec succès. Je pense à l'Allemagne. Les automobilistes français sont-ils donc tous des crétins, et les automobilistes allemands tous intelligents, puisque ceux-ci, bien que roulant plus vite, ont moins d'accidents ? Le 1er juin prochain, l'Italie passera à 150 kilomètres-heure. Le Japon vient de passer à 140. Certains Etats aux Etats-Unis, tels que le Montana, ont fait la même expérience et les accidents y sont moins nombreux que par le passé.
    Il ne faut certes pas toucher le texte du Gouvernement, et nous devons le soutenir de toutes nos forces.
    M. François Sauvadet. Très juste !
    M. Christian Estrosi. Mais il n'est pas interdit d'ouvrir, aujourd'hui, une réflexion sur la révision de certaines normes.
    M. le président. Il faut conclure, monsieur Estrosi !
    M. Christian Estrosi. Vous avez raison, monsieur le président, j'ai dépassé mon temps de parole.
    M. le président. Largement !
    M. Christian Estrosi. J'en suis bien conscient. Je vous demande d'être encore un peu indulgent pour me permettre d'évoquer, après d'autres, la question des infrastructures. Si nos infrastructures autoroutières sont parmi les plus performantes d'Europe, notre voirie nationale est des plus mauvaises.
    M. François Sauvadet. La décentralisation arrive !
    M. Christian Estrosi. Seuls les contrats de plan pourraient nous permettre de rattraper notre retard. Pour l'instant, il y a, dans notre département, monsieur le président, une nationale à trois voies où, depuis des années, on voit des voitures roulant en sens contraire se télescoper sur la voie centrale. Chaque fois, on dénombre des morts et des blessés irréversibles. Nous, les élus locaux, n'avons de cesse de demander aux services déconcentrés de l'Etat d'installer un mur de béton pour séparer les voies et éviter les télescopages : on ne nous a apporté aucune réponse concrète. La France compte 150 points noirs où l'on sait qu'il y a systématiquement des morts, que l'on roule doucement ou vite. Il faut aussi s'attaquer à ce problème. Je souhaiterais que nous prenions date, aujourd'hui, pour organiser, dans les mois ou les années qui viennent, un grand débat national afin de résorber l'ensemble de ces points noirs, afin de réduire le nombre de morts et de blessés irréversibles que nous dénombrons, hélas, sur toutes les routes de France. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. René Dosière. Ce sera réglé grâce à la nouvelle étape de la décentralisation ! (Sourires.)
    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 166 et 186, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 166, présenté par M. Dell'Agnola, rapporteur, est ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le début du premier alinéa du texte proposé pour l'article 221-6-1 du code pénal :
    « Lorsque la maladresse, l'imprudence, l'inattention, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévu par l'article 221-6 est commis par le conducteur... (Le reste sans changement.) »
    L'amendement n° 186, présenté par M. Le Fur, est ainsi rédigé :
    « Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article 221-6-1 du code pénal, supprimer les mots : "de maladresse,. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 166.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel, proposé par notre collègue Houillon et repris par la commission.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.
    M. Hervé Mariton. Pouvez-vous nous préciser en quoi l'on peut considérer que cet amendement n'est que rédactionnel ? Entre « maladresse » et « faute de maladresse », des esprits peu avertis peuvent percevoir une différence.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Il y a effectivement une différence. Mais l'article 221-6 du code pénal, qui est de portée générale, ne fait pas référence à la faute, à l'inverse du texte proposé pour l'article 221-6, relatif à la conduite automobile. L'amendement n° 166 tend donc à remédier à ce déséquilibre en harmonisant les deux rédactions.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Très bonne réponse !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 166.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. En conséquence, l'amendement n° 186 tombe.
    M. Marc Le Fur. Je ne vois pas pourquoi !
    M. le président. L'adoption de l'amendement n° 166 entraîne une nouvelle rédaction du début du premier alinéa ; par conséquent, l'amendement n° 186 tombe.
    M. Marc Le Fur. J'aurais pu le transformer en sous-amendement !
    M. le président. Trop tard !
    MM. Fenech, Martin-Lalande et Marlin ont présenté un amendement, n° 92, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le 5° du texte proposé pour l'article 221-6-1 du code pénal :
    « 5° Le conducteur circulait à une vitesse manifestement excessive eu égard aux circonstances et compte tenu de la réglementation. »
    La parole est à M. Franck Marlin, pour soutenir cet amendement.
    M. Franck Marlin. Je présente au pied levé cet amendement de nos collègues Georges Fenech et Patrice Martin-Lalande. On en a parlé tout au long de cette soirée : la vitesse excessive est la première cause de mortalité sur la route. Elle est responsable, comme vous le savez, d'un accident sur deux. C'est pourquoi il convient de mieux la sanctionner. Mais pourquoi ne retenir comme circonstance aggravante, en matière d'homicide et de blessures involontaires, que le seul dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 kilomètres heures ? Cette disposition, à mon sens, pourrait s'avérer difficilement applicable et n'avoir qu'un impact limité, tant d'un point de vue préventif que répressif.
    En effet, en l'absence d'un contrôle radar préalablement effectué, il serait extrêmement difficile, en cas d'accident, de déterminer la vitesse exacte à laquelle circulait le véhicule en cause et de prouver que celle-ci était supérieure ou égale au seuil précisément défini. Ne retenir comme circonstance aggravante que les excès de vitesse égaux ou supérieurs à 50 kilomètres-heure risquerait donc de cautionner l'idée selon laquelle il n'y aurait pas de danger en dessous de ce seuil et de traiter la vitesse maximale autorisée comme une vitesse moyenne autorisée. Le risque serait alors de faire naître dans l'esprit de certains conducteurs une petite marge de tolérance, voire, ce qui serait pire encore, un sentiment d'impunité ; l'esprit de ce texte en serait transformé et passerait de la définition d'une circonstance aggravante à celle d'une circonstance atténuante.
    Notre collègue Christian Estrosi l'a dit, la tolérance zéro doit aussi s'appliquer là. En cas d'homicide ou de blessure involontaire, il n'y a pas de petit ou de grand excès de vitesse. Il me paraît donc opportun de définir plutôt comme circonstance aggravante la notion de vitesse « manifestement excessive eu égard aux circonstances et à la réglementation », et non d'instaurer un seuil à partir duquel l'excès de vitesse devient un délit.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Il est vrai que la circonstance aggravante du dépassement de 50 kilomètres-heure pourrait être difficile à prouver après une collision, en l'absence d'enregistreurs de vitesse sur les véhicules actuels. Toutefois, la rédaction proposée est très vague et laisse au juge une marge d'interprétation très large, peut-être trop. Je rappelle qu'il y a de très lourdes sanctions pénales à la clef, puisque l'on passe de cinq à sept ans de prison, puis de sept à dix ans dans le cas de circonstances aggravantes. Par conséquent, des éléments précis doivent permettre à la sanction de tomber. En outre, les automobilistes doivent avoir une vue claire des choses, et savoir, en toute hypothèse, à quoi ils s'exposent. Un dépassement de 50 kilomètres-heure a pour eux une signification précise. Une notion plus vague a naturellement moins de signification. C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. J'ajouterai à ce qu'a excellemment dit le rapporteur que le Gouvernement ne peut être favorable à cet amendement qui introduit un élément de subjectivité dans la définition de nouvelles infractions.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 92.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. L'amendement n° 4 n'est pas défendu.
    M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 20, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le 6° du texte proposé pour l'article 221-6-1 du code pénal :
    « 6° Le conducteur, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, ne s'est pas arrêté et a tenté ainsi d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut encourir. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 20.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 1er, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 1er

    M. le président. M. Vanneste a présenté un amendement, n° 98, ainsi rédigé :
    « Après l'article 1er, insérer l'article suivant :
    « Dans le I de l'article L. 234-1 du code de la route, le taux "0,80 est remplacé par le taux "0,20. »
    La parole est à M. Christian Vanneste.
    M. Christian Vanneste. Cet amendement est très clair : il s'agit d'en arriver au taux d'alcoolémie zéro. Pourquoi, dans ce cas, avoir écrit « 0,20 » et non « 0 » ? C'est que j'ai tenu compte de l'excellente remarque de l'excellent président de la commission des lois...
    M. Jean-Louis Idiart. Arrêtez, vous n'êtes plus drôle !
    M. Christian Vanneste. ... qui m'a rappelé qu'existait une fermentation naturelle. Mais « 0,20 », cela signifie « zéro ». Autrement dit, cet amendement rappelle que, selon la formule célèbre, « boire ou conduire, il faut choisir ».
    Au-delà, je voudrais développer trois arguments. L'alcool représente un danger massif dans notre pays. Deux pays, en Europe, autorisent un taux d'alcoolémie très supérieur à la moyenne : le Portugal et la France. Ce sont ceux qui ont le plus grand nombre d'accidents sur les routes. Il y a un lien évident entre les deux faits.
    M. René Dosière. Il y a des bouilleurs de cru au Portugal ?
    M. Christian Vanneste. Quelques chiffres : à 0,5 gramme, il faut treize mètres de plus, pour s'arrêter lorsqu'on roule à 90 kilomètres-heure : 85 % des accidents dus à l'alcoolisme sont le fait de conducteurs qui boivent occasionnellement, et non pas régulièrement.
    M. René Dosière. Vous pouvez faire la différence ?
    M. Christian Vanneste. Cela montre à quel point chacun est très peu conscient de son degré d'alcoolémie lorsqu'il conduit. C'est pourquoi il faut arriver à une situation claire, simple, comme en Suède : on conduit ou on boit. Si on sort à plusieurs, celui qui conduit ne boit pas. C'est une mesure de sécurité dont il faut absolument prendre conscience.
    A notre collègue Sauvadet, je dirais que nous avons tous, bien sûr, l'empreinte de la mentalité de notre pays...
    M. René Dosière. Heureusement !
    M. Christian Vanneste. ... dans lequel certaines traditions font de l'alcool un moyen essentiel de la convivialité. Il est temps que nous prenions conscience des dangers de cette culture, par ailleurs, sympathique.
    D'autre part, vous le savez, on a entendu, il y a quelque temps, des arguments qui consistaient à dire que, puisque l'on tolérait certaines conduites addictives, telles que le tabagisme et l'alcoolisme, on pouvait bien tolérer la drogue. Notre collègue Dell'Agnola a montré à quel point la drogue était dangereuse au volant. Le cercle vicieux qui conduisait à accepter la drogue parce qu'on acceptait l'alcool doit aujourd'hui être inversé et se transformer en un cercle vertueux. La drogue est dangereuse, il faut continuer à l'interdire, mais il faut aussi revenir sur l'autorisation de boire, ne serait-ce qu'un peu, lorsqu'on conduit.
    Enfin, vous avez eu raison, monsieur le ministre, d'évoquer tout à l'heure le problème de la santé. J'ai été, pendant quatre ans, président de la commission de santé de ma région : dans certains secteurs, on y dénombre 600 % de mortalité précoce due à l'alcoolisme. Lorsqu'il n'est pas maîtrisé, ce comportement, si sympathique par ailleurs, conduit à ces résultats-là.
    Il est temps que notre pays subisse un véritable électrochoc, une véritable révolution culturelle. Profitons de cette loi pour dire que, lorsqu'on prend le volant, on doit être à jeun.
    M. le président. Pour s'exprimer contre l'amendement, la parole est à M. François Sauvadet, député de Bourgogne. (Sourires et exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François Sauvadet. Monsieur le président, je ne m'exprime pas comme député de Bourgogne, cela n'a strictement rien à voir.
    M. le président. C'était un clin d'oeil !
    M. François Sauvadet. Non, monsieur le président, je proteste, car vous renvoyez là à des déclarations que j'ai lues ici ou là dans la presse, que j'ai fermement condamnées et qui laissaient entendre que nos prises de position seraient dictées par des lobbies, ce qui n'est pas acceptable. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Lionnel Luca. Je soutiens le député de Bourgogne !
    M. François Sauvadet. Nous sommes membres de la représentation nationale, et nous nous déterminons aussi en fonction de ce que nous pensons être l'intérêt général. Cette précision répond à certaines déclarations que j'attribue à la démagogie.
    Je suis d'accord avec un aspect très important de ce que vient de dire notre collègue : nous devons être résolus à lutter contre l'alcoolisme. Cela suppose aussi des mesures de prévention, notamment auprès des jeunes, qui doivent être sensibilisés aux drames auxquels peut conduire l'alcool. Trop de jeunes s'adonnent à la boisson ou à la drogue. Nous avons la responsabilité de tout faire pour qu'ils soient prévenus des dangers auxquels peuvent conduire ces comportements.
    Je partage donc totalement cette préoccupation, ainsi que celle qui entend lutter contre la conduite en état alcoolique, qui est l'une des principales causes d'accidents.
    Toutefois, la question du seuil est posée, et il faut que ce seuil soit reconnu. La communauté scientifique s'est accordée à fixer ce seuil à 0,5. Je ne pense pas qu'il soit aujourd'hui opportun de l'abaisser. La question qui se pose à nous est plutôt de le faire respecter. Le texte du Gouvernement sanctionne les comportements qui mettent en danger la vie d'autrui. Nous devons donc conserver le seuil de 0,5, être extrêmement vigilants sur son respect et intransigeants vis-à-vis des multirécidivistes, pour lesquels la sanction doit être à la hauteur des dangers qu'ils font courir aux autres.
    Le débat est légitime. Je l'ai d'ailleurs dit à M. Estrosi, à propos de la vitesse. Nous devons faire passer un message : nous avons aujourd'hui des règles reconnues par l'ensemble des associations, et des seuils acceptés. Faisons-les appliquer sévèrement, sanctionnons les multirécidivistes. C'est le travail auquel nous nous livrons aujourd'hui, sous l'impulsion du Gouvernement, et je propose donc, mes chers collègues, de rejeter cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.
    M. Hervé Mariton. Le groupe UMP souhaite aussi le rejet de cet amendement. En toutes choses, l'excès nuit. Je crois qu'il y a aujourd'hui, sur cette question, une situation d'équilibre qui est bien comprise. Le Gouvernement a fait le choix de ne pas modifier la règle du jeu, mais simplement de faire en sorte qu'elle soit mieux appliquée, avec plus de cohérence et plus de constance qu'elle ne l'est actuellement. Il me semble que l'une des pistes à explorer consisterait à appliquer aux personnes ayant déjà contrevenu à la loi des règles plus sévères que celles appliquées aux autres. En d'autres termes, alors que le dispositif actuel comporte deux seuils, 0,5 et 0,8 gramme, peut-être pourrait-on imaginer que celui qui a déjà contrevenu se voit appliquer une règle différente. Mais c'est un autre débat. Nous verrons cela à l'occasion de l'évaluation du dispositif. L'application de celui-ci pourrait d'ailleurs s'avérer complexe, mais il me paraît riche d'une logique de responsabilité des personnes. En tout cas, là, l'idée du Gouvernement et du groupe UMP est bien de maintenir la règle telle qu'elle existe aujourd'hui.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. La commission partage le point de vue qui vient d'être exprimé. Comme nous l'avons dit au cours de ce débat, les règles actuelles ne doivent pas changer. Notre objectif est que le dispositif légal soit lisible pour les Français, pour l'alcoolémie comme pour la vitesse. Car nous estimons que, à règle égale, les dispositions du Gouvernement pourront être mieux comprises. Il n'y a donc pas de raisons particulières de modifier cette règle.
    J'ajoute d'ailleurs qu'il convient, comme le disait tout à l'heure notre collègue Sauvadet, d'appliquer la règle existante. Vous savez qu'aujourd'hui le risque pour un conducteur d'être soumis à un contrôle d'alcoolémie arrive une fois tous les dix ans. Il y a donc peut-être là des efforts à faire pour une meilleure application des règles.
    Quoi qu'il en soit, la commission a émis un avis défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. L'objectif du Gouvernement - et je crois que c'est là un message qui est très fortement ressorti du comité interministériel de sécurité routière de décembre dernier -, c'est de bien appliquer les textes qui existent. Il faut bien sûr mettre l'accent sur certaines causes de mortalité, comme l'alcoolémie, mais les gens ont peu à peu appris ce que signifie 0,5 gramme d'alcool par litre de sang. Ils savent que cela représente - même si cela varie selon le sexe et le poids - quelque chose comme deux verres de vin, à onze degrés, d'une contenance de douze centimètres cubes. Et ce que nous voulons, c'est faire respecter cette règle.
    Pour cela, nous avons d'abord augmenté le nombre de points retirés en cas d'infraction entre 0,5 et 0,8 gramme. C'est déjà quelque chose. L'alcoolémie contraventionnelle entre 0,5 et 0,8 gramme devient une circonstance aggravante des homicides et des blessures involontaires dans le présent projet. Et puis, le CISR, vous le savez, prévoit le renforcement des équipements nécessaires aux forces de l'ordre pour effectuer des contrôles. A cet égard, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, il y a déjà eu sur les derniers mois 30 % de contrôle en plus.
    Le respect de la règle existante, voilà donc le principe directeur. Néanmoins, monsieur Vanneste, votre intention est louable. Et le Premier ministre a dit, il faut le souligner, que si cela ne suffisait pas, il était prêt à étudier à nouveau cette question.
    Avis défavorable, donc.
    M. le président. La parole est à M. Christian Vanneste.
    M. Christian Vanneste. Je retire l'amendement.
    M. Pascal Clément, président de la commission. C'est le bon sens !
    M. Christian Vanneste. Je voulais entamer un débat. Je ne me faisais guère d'illusions sur l'accueil qui serait réservé à ma proposition. Mais je dois dire que j'ai été agréablement surpris par la qualité et le sérieux des réponses qui m'ont été faites. C'est donc un vrai débat, tout le monde l'a bien reconnu. Oserais-je dire, sans aucune modestie, que je suis peut-être un peu en avance ? (Sourires.) Quoi qu'il en soit, je retire l'amendement.
    M. le président. L'amendement n° 98 est retiré.
    M. Lionnel Luca. Champagne !

Article 2

    M. le président. « Art. 2. - I. - Il est inséré après l'article 222-19 du code pénal un article 222-19-1 ainsi rédigé :
    « Art. 222-19-1. - Lorsque la faute de maladresse, d'imprudence, d'inattention, de négligence ou de manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévue par l'article 222-19 est commise par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois est punie de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.
    « Les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende lorsque :
    « 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci-après ;
    « 2° Le conducteur se trouvait en état d'ivresse manifeste ou était sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang ou dans l'air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par ce code et destinées à établir l'existence d'un état alcoolique ;
    « 3° Il résulte d'une analyse sanguine que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le code de la route destinées à établir s'il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;
    « 4° Le conducteur n'était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;
    « 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h ;
    « 6° Le conducteur ne s'est pas arrêté et a tenté ainsi d'échapper à sa responsabilité pénale ou civile alors qu'il savait qu'il avait causé un accident.
    « Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende lorsque l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne a été commise avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° et suivants du présent article. »
    « II. - Il est inséré après l'article 222-20 du code pénal un article 222-20-1 ainsi rédigé :
    « Art. 222-20-1. - Lorsque la faute de maladresse, d'imprudence, d'inattention, de négligence ou de manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévue par l'article 222-19 est commise par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne ayant entraîné une incapacité totale de travail d'une durée inférieure ou égale à trois mois est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.
    « Les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende lorsque :
    « 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci-après ;
    « 2° Le conducteur se trouvait en état d'ivresse manifeste ou était sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang ou dans l'air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par ce code et destinées à établir l'existence d'un état alcoolique ;
    « 3° Il résulte d'une analyse sanguine que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le code de la route destinées à établir s'il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;
    « 4° Le conducteur n'était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, suspendu ou invalidé ;
    « 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h ;
    « 6° Le conducteur ne s'est pas arrêté et a tenté ainsi d'échapper à sa responsabilité pénale ou civile alors qu'il savait qu'il avait causé un accident.
    « Les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende lorsque l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne a été commise avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° et suivants du présent article. »
    La parole est à M. Philippe Vitel, inscrit sur l'article.
    M. Lionnel Luca. Il va faire un tabac ! (Sourires.)
    M. Philippe Vitel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, 8 000 morts chaque année sur les routes de France, c'est trop, c'est beaucoup trop. Mais il n'y a pas de fatalité à ce carnage.
    Oui, monsieur le ministre, le plan anti-chauffards que nous étudions aujourd'hui est le préalable nécessaire à la lutte contre ce fléau.
    Oui, monsieur le ministre, il faut être impitoyable vis-à-vis des comportements quasi terroristes de certains conducteurs particulièrement dangereux, dont les méfaits noircissent malheureusement les pages « Faits divers » de nos quotidiens et gonflent les effroyables statistiques morbides des week-ends de départ et de retour de vacances.
    Oui, monsieur le ministre, il est nécessaire d'accompagner les débuts de citoyen automobiliste de nos enfants en les plaçant sous l'épée de Damoclès du permis probatoire.
    Toutes ces décisions me semblent très logiques, mais ne doivent constituer qu'un préalable à une nouvelle politique de sécurité routière marquée par une évolution de la réglementation, une amélioration du comportement des automobilistes et une mise à niveau de notre réseau routier. Car, oui, monsieur le ministre, il est urgent que les 150 points noirs les plus dangereux répertoriés soient éradiqués dans les plus brefs délais.
    Mais non, monsieur le ministre, il n'y a pas aujourd'hui au volant que des éthyliques ou des drogués violant les limitations de vitesse et insultant sans retenue les règles du code de la route.
    Par contre, il est temps de faire comprendre à tous les conducteurs qu'aucun déplacement n'est exempt de risques, que leur attention doit être en permanence au service de leurs décisions, que les plus petits oublis ou erreurs peuvent avoir des conséquences catastrophiques.
    Chaque conducteur a-t-il aujourd'hui conscience qu'il est nécessaire d'avoir les deux mains disponibles pour exécuter toute opération que l'urgence exigerait ? A ce sujet, que dit l'article R. 412-6 du code de la route ? Il dit que « tout conducteur doit se tenir constamment en état et en position d'exécuter commodément et sans délai toutes les manoeuvres qui lui incombent. Ses possibilités de mouvement et son champ de vision ne doivent pas être réduits par le nombre ou la position des passagers, par les objets transportés ».
    Aussi, le fait de fumer en conduisant me semble tout aussi dangeureux que l'utilisation du téléphone portable.
    M. François Rochebloine. Absolument !
    M. Philippe Vitel. C'est le sens de l'amendement que j'ai déposé et qui tend à interdire l'usage du tabac au volant. Fumer en conduisant peut d'ailleurs être à l'origine d'une faute de maladresse ou d'inattention. Il me semblerait donc paradoxal que cet amendement ne soit pas retenu, car je crois qu'il complète utilement cet article R. 412-6.
    De plus, on ne sait pas, quand un conducteur fume, quelle est la qualité du produit qu'il consomme. Cette interdiction me semble donc aussi aller dans le sens de la lutte que nous menons contre la drogue au volant, la conduite sous l'effet de stupéfiants constituant aujourd'hui un délit.
    Actuellement, il y a des règles, et nous devons nous donner les moyens de les faire respecter. Je crois que ce projet de loi prouve que c'est possible. Demain, donnons-nous les moyens de faire évoluer ces règles. Donnons-nous aussi les moyens de faire évoluer les comportements de ceux qui doivent s'y soumettre. Le conducteur du futur devra pouvoir être en mesure de comprendre l'utilité et l'intérêt de ces règles pour les intégrer, les adopter et diriger son action et son comportement vers une attitude plus responsable et par là même plus sécuritaire pour lui et pour les autres. Lançons sans tarder le grand chantier de l'évaluation des pratiques, évaluation à la lumière de laquelle nous pourrons imaginer des propositions nous permettant d'atteindre ce but. Alors, je pense, monsieur le ministre, que les bons résultats que nous obtenons aujourd'hui pourront inexorablement se pérenniser et nous permettre, je l'espère, de nous rapprocher le plus possible de notre ultime objectif : zéro mort sur les routes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 167, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le début du premier alinéa du texte proposé pour l'article 222-19-1 du code pénal :
    « Lorsque la maladresse, l'imprudence, l'inattention, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévu par l'article 222-19 est commis par le conducteur... (Le reste sans changement.) »
    Sur cet amendement, M. Le Fur a présenté un sous-amendement, n° 187 rectifié, ainsi rédigé :
    « Dans le dernier alinéa de l'amendement n° 167, supprimer les mots : "la maladresse,. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 167.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
    M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir le sous-amendement n° 187 rectifié.
    M. Marc Le Fur. Dans cet article 2, nous envisageons de sanctionner la maladresse au volant par une peine qui peut aller jusqu'à trois ans de prison. Cela pose problème, et ce sous-amendement a pour but de permettre qu'on en débatte. Je dois dire que je suis quand même un peu surpris qu'on puisse sanctionner la maladresse par une peine de prison.
    Je comprends parfaitement qu'en cas de maladresse on prive le conducteur du droit de conduire. Cela me paraît logique. Mais qu'on le mette en prison, c'est autre chose. Je ne vois pas l'intérêt de la prison dans cette hypothèse. Elle casse la vie et l'existence de ce conducteur, en supprimant toute possibilité de réhabilitation.
    M. Lionnel Luca. C'est vrai !
    M. Marc Le Fur. En outre, je voudrais répondre à une objection qui pourrait m'être faite et qui consisterait à dire que l'on peut compter, dans un tel cas, sur la sagesse du juge. Mais on peut aussi tomber sur un juge qui, pour une raison quelconque, va sanctionner cette maladresse de trois ans de prison.
    Cette disproportion me paraît d'autant plus inquiétante que l'amendement de M. Dell'Agnola, que je ne conteste pas dans son principe, supprime la référence à la notion de faute. S'il n'est même plus nécessaire de faire la preuve de la faute et que la simple maladresse suffit, il y a quelques raisons de s'inquiéter !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 187 rectifié ?
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Monsieur le président, mes chers collègues, je m'en tiendrai à la même explication que celle qui a été donnée précédemment, à savoir que cet article applique aux fautes commises au volant les dispositions de l'article 222-19 du code pénal, qui sont actuellement en vigueur et qui font référence à la maladresse, l'imprudence, la négligence et le manquement à une obligation de sécurité ou de prudence. On ne peut donc pas, à la faveur d'un débat sur la conduite automobile, modifier un article du code pénal qui est, lui, à vocation générale et qui comprend cette notion de maladresse.
    J'ajoute que cette notion a fait l'objet d'une jurisprudence déjà abondante.
    Mais, encore une fois, on ne peut pas, à la faveur d'un débat sur la conduite automobile, démembrer cet article du code pénal qui pose un fondement général.
    C'est pourquoi, au nom de la commission, je propose le rejet de ce sous-amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 167 et sur le sous-amendement n° 187 rectifié ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Si, dans le langage de tous les jours, le terme de maladresse renvoie à quelque chose de bénin, il correspond, dans le vocabulaire juridique, à une notion qui a deux siècles d'histoire ! Remettre en cause ce terme, ce serait donc pratiquement remettre en cause le code Napoléon ! Je comprends bien sûr vos interrogations, monsieur Le Fur, mais le texte du projet ne fait que reprendre une terminologie utilisée depuis le code pénal de 1810 pour réprimer les fautes d'imprudence en matière d'homicide ou de blessures involontaires. Il n'est donc juridiquement pas possible d'utiliser une rédaction différente, d'autant que cette question a déjà été étudiée de façon approfondie lorsqu'on a réformé le code pénal.
    Cela ne signifie évidemment pas, monsieur Le Fur, qu'une simple maladresse permettrait en pratique de condamner un conducteur à une peine de prison ferme. Les peines maximales prévues par la loi doivent être appliquées en respectant évidemment le principe constitutionnel de proportionnalité, comme le Conseil constitutionnel l'a rappelé dans sa décision du 13 mars 2003 relative à la loi sur la sécurité intérieure.
    Supprimer la référence à la notion juridique de maladresse aurait pour conséquence de restreindre la définition de l'homicide involontaire. Ce serait donc tout à fait incompréhensible, aujourd'hui, pour l'opinion.
    M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.
    M. Hervé Mariton. Je crois que chacun comprendra qu'on est un peu mal à l'aise dans ce débat. Car, si l'amendement se justifie par un argument de coordination, le sous-amendement, lui, correspond à un débat de fond sur un mot qui en effet pose problème. Au surplus, il me semble que le fait même que nous en débattions est utile en ceci qu'il pourra demain éclairer le juge, pour lui faire comprendre que le législateur ne veut pas que le mot « maladresse » s'applique à des situations trop largement définies, comme l'a très justement suggéré notre collègue Le Fur.
    On a bien entendu ce que vient de dire le ministre. La notion d'homicide involontaire est relativement large dans sa définition. L'imprudence, l'inattention, la négligence, le manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence définissent les circonstances de l'occurrence. La maladresse, en quelque sorte, si je comprends bien, ouvre une définition plus large. Or vous nous faites, monsieur le ministre, une réponse qui est tout de même un peu curieuse, puisque vous nous dites en somme qu'on ne peut pas légalement modifier les choses. Mais, attendez, nous sommes tout de même bien là pour définir la loi ! Ce sous-amendement peut poser un problème de cohérence, mais il ne peut pas y avoir de problème de légalité, puisque nous sommes précisément dans un débat législatif.
    Alors, moi, au nom du groupe, je ne souhaite pas défaire l'édifice qui a été construit et contredire la position du rapporteur. Simplement, je souhaiterais que l'on nous précise à nouveau ce que l'on peut entendre par le mot « maladresse ». Même si l'expression « faute de maladresse » a été retirée précédemment, il y avait tout de même bien dans cette expression l'idée que la personne n'était pas accablée par la fatalité jusques et y compris dans son propre comportement.
    Le président de la commission des lois nous ayant rejoints, il pourra peut-être nous éclairer plus complètement sur ce débat juridique assez fin, dans lequel j'avoue mes propres limites. Mais en strict bon sens, comme notre collègue Le Fur vient de l'indiquer, il me semble qu'il faut au moins que notre débat apporte un éclairage et permette de faire ressortir que la notion de maladresse ne recouvre pas toute circonstance quelle qu'elle soit. Car on pourrait objecter que s'il y a accident c'est bien qu'à un moment donné il y a maladresse. Or on ne peut pas ici accepter que toutes les circonstances, soient couvertes par cette notion, auquel cas celle-ci pourrait toujours conduire à l'emprisonnement.
    M. Pierre Hellier. Il a raison !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Je remercie M. Le Fur et M. Mariton des demandes d'explications complémentaires, car le compte rendu de nos débats pourra effectivement en faciliter l'interprétation par le juge.
    Je voudrais, pour éclairer l'Assemblée, relire l'article 221-6 du code pénal : « Le fait de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l'article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, la mort d'autrui constitue un homicide involontaire puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. »
    On pourrait donc, de la même façon, disserter sur la notion d'inattention ou sur la notion de négligence.
    Je préciserai plusieurs points. J'ai d'abord envie de vous demander de faire confiance aux juges. Ils savent apprécier les choses, et j'ai rappelé le caractère proportionnel de la peine par rapport à la faute.
    Ensuite, mesdames, messieurs les députés, la jurisprudence est là pour éclairer les juges.
    Enfin, j'ajouterai, pour que ce soit acté dans le compte rendu de nos débats, qu'en cas de simple maladresse, les peines complémentaires qui sont par ailleurs prévues par le projet pourront être prononcées en tant que peines principales à la place de l'emprisonnement. Et ces règles pourront, si besoin est, être rappelées par circulaire.
    M. Hervé Mariton. Tout à fait !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Avec toutes ces précisions, j'imagine, monsieur Le Fur, que vous ne voudrez pas ébranler tout un édifice, qui date maintenant de deux siècles, où les mots ont un sens juridique qui n'est pas tout à fait le même que dans le langage courant.
    M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.
    M. Marc Le Fur. Après avoir entendu le ministre, je crois que l'Assemblée est rassurée. Les excès que j'envisageais ne peuvent effectivement plus avoir lieu. Je remercie donc M. le ministre de ses précisions et je retire le sous-amendement.
    M. le président. Le sous-amendement n° 187 rectifié est retiré.
    Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 167 ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 167.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. MM. Fenech, Martin-Lalande et Marlin ont présenté un amendement, n° 93, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le 5° du texte proposé pour l'article 222-19-1 du code pénal :
    « 5° Le conducteur circulait à une vitesse manifestement excessive eu égard aux circonstances et compte tenu de la réglementation. »
    La parole est à M. Patrick Delnatte, pour soutenir cet amendement.
    M. Patrick Delnatte. Il est retiré, monsieur le président.
    M. le président. L'amendement n° 93 est retiré.
    L'amendement n° 5 de M. Mallié tombe.
    M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 21, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le 6° du texte proposé pour l'article 222-19-1 du code pénal :
    « 6° Le conducteur, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, ne s'est pas arrêté et a tenté ainsi d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut encourir. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 21.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Dell'Agnola, rapporteur, et M. Houillon ont présenté un amendement, n° 22 corrigé, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le début de la première phrase du texte proposé pour l'article 222-20-1 du code pénal :
    « Art. 222-20-1. - Lorsque la maladresse, l'imprudence, l'inattention, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévu par l'article 222-19 est commis par le conducteur... (Le reste sans changement.) »
    Sur cet amendement, M. Le Fur a présenté un sous-amendement, n° 188 rectifié, ainsi rédigé :
    « Dans le dernier alinéa de l'amendement n° 22 corrigé, supprimer les mots : "la maladresse,. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 22 corrigé.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Amendement de coordination.
    M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir le sous-amendement n° 188 rectifié.
    M. Marc Le Fur. Je le retire, monsieur le président.
    M. le président. Le sous-amendement n° 188 rectifié est retiré.
    Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 22 corrigé ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 22 corrigé.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. MM. Fenech, Martin-Lalande et Marlin ont présenté un amendement, n° 94, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le 5° du texte proposé pour l'article 222-20-1 du code pénal :
    « 5° Le conducteur circulait à une vitesse manifestement excessive eu égard aux circonstances et compte tenu de la réglementation. »
    La parole est à M. Patrick Delnatte pour soutenir cet amendement.
    M. Patrick Delnatte. Cet amendement est retiré.
    M. le président. L'amendement n° 94 est retiré.
    L'amendement n° 6 de M. Mallié tombe.
    M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 23, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le 6° du texte proposé pour l'article 222-20-1 du code pénal :
    « 6° Le conducteur, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, ne s'est pas arrêté et a tenté ainsi d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut encourir. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 23.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 2

    M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 24 et 90, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L'amendement n° 24, présenté par M. Dell'Agnola, rapporteur, et M. Garraud, est ainsi rédigé :
    « Après l'article 2, insérer l'article suivant :
    « I. - Les articles 223-11 et 223-12 du code pénal sont rétablis dans la rédaction suivante :
    « Art. 223-11. - L'interruption de la grossesse sans le consentement de l'intéressée causée, dans les conditions et selon les distinctions prévues par l'article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence prévue par la loi ou le règlement, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.
    « Si les faits résultent de la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, la peine est de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.
    « Art. 223-12. - Lorsque la maladresse, l'imprudence, l'inattention, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévue par le premier alinéa de l'article 223-11 est commise par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, l'interruption de la grossesse sans le consentement de l'intéressée est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.
    « Les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende lorsque :
    « 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci-après ;
    « 2° Le conducteur se trouvait en état d'ivresse manifeste ou était sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang ou dans l'air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par ce code et destinées à établir l'existence d'un état alcoolique ;
    « 3° Il résulte d'une analyse sanguine que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants, ou le conducteur a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le code de la route destinées à établir s'il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;
    « 4° Le conducteur n'était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;
    « 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h ;
    « 6° Le conducteur, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, ne s'est pas arrêté et a tenté d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut encourir.
    « Les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende lorsque l'interruption de la grossesse sans le consentement de l'intéressée a été commise avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux paragraphes 1° et suivants du présent article. »
    « II. - A l'article 223-10 du code pénal, les mots : "cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende sont remplacés par les mots : "sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende. »
    L'amendement n° 90, présenté par MM. Hunault, Pandraud et Tiberi, est ainsi libellé :
    « Après l'article 3, insérer l'article suivant :
    « L'article 221-6 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « L'homicide involontaire sur l'enfant à naître est visé par les alinéas précédents. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 24.
    M. Richard Dell'Agnola. Je laisse à M. Garraud, l'auteur de cet amendement, le soin de le défendre.
    M. le président. Vous avez la parole, monsieur Garraud.
    M. Jean-Paul Garraud. Il s'agit d'un amendement qui a fait l'objet de nombreux commentaires, parfois contradictoires. Je regrette d'ailleurs que les membres de l'opposition qui ont critiqué cet amendement ne soient plus là pour en parler.
    M. René Dosière. Si, nous sommes là !
    M. Jean-Paul Garraud. Je pensais en particulier à M. Floch.
    J'indique tout de suite que cet amendement ne vise en aucune façon à remettre en cause le statut de l'embryon ou la possibilité d'interruption volontaire de la grossesse. Je souhaite que le débat soit recentré sur la réalité : le vide juridique auquel sont confrontées un certain nombre de jeunes femmes qui perdent l'enfant qu'elles portaient lors d'un accident de la circulation.
    C'est la raison pour laquelle je souhaite utiliser les articles 223-11 et 223-12 du code pénal, laissés vacants depuis la loi du 4 juillet 2001.
    Le 29 juin 2001, l'assemblée plénière de la Cour de cassation devant statuer sur le cas d'une jeune femme, enceinte de six mois ayant perdu son enfant à naître à l'occasion d'un accident de la circulation provoqué par un conducteur en état d'ivresse, a estimé, faisant une application stricte de la loi pénale, que, dans ce cas, la mort du foetus ne constituait pas un homicide involontaire, puisque le foetus, bien que vivant, n'était pas une personne. Cela se comprend parfaitement si l'on considère que pour mourrir il faut d'abord naître.
    La Cour de cassation n'ayant pas retenu la qualification d'homicide involontaire, nous nous retrouvons devant un vide juridique complet quand une femme perd son enfant dans les conditions que je viens de décrire et qui, malheureusement, n'est pas un cas d'école - il y a des centains d'accidents de ce type. D'où cet amendement.
    Du reste, dès que le contenu de cet amendement a été connu, des associations de victimes, notamment le Collectif de parents orphelins, m'ont contacté.
    Avec cet amendement, je m'intéresse uniquement à la protection de la mère et non au statut de l'enfant à naître, qui, tout en étant une question fondamentale, ne doit pas être posée dans le cadre de ce débat sur la sécurité routière. Le problème du statut et de la protection de l'enfant à naître est, en quelque sorte, un problème de bioéthique qui nécessite un autre débat que celui de ce soir. Je comprends bien, toutefois, qu'un certain nombre d'entre nous soient sensibles à cette question fondamentale qui est celle du commencement de la vie.
    Il faut, en outre, rappeler que l'article 223-10 du code pénal réprime des faits volontaires destinés à interrompre une grossesse - c'est le cas, malheureusement attesté par la jurisprudence, où un individu porte des coups à une femme enceinte dans l'intention de lui faire perdre son enfant, c'est-à-dire, que l'enfant à naître meurt avant sa naissance : il s'agit là d'une infraction intentionnelle. Or aucun article ne prévoit les infractions involontaires ayant, si je puis dire, le même résultat : la mort du foetus, de l'enfant à naître.
    Le premier des deux articles que je propose d'utiliser - l'article 223-11 - viserait le fait d'un tiers causant cette interruption non désirée de grossesse. C'est un cas assez général.
    M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
    M. Jean-Paul Garraud. Je souhaitais bien préciser les choses, monsieur le président.
    L'article 223-12, quant à lui, s'appliquerait particulièrement à la faute de conduite - ce qui nous ramène au domaine de la circulation routière - et envisageait toutes les circonstances aggravantes qui ont été rappelées tout à l'heure : ivresse, usage de stupéfiants, délit de fuite, défaut de permis de conduire, entre autres.
    En conclusion, monsieur le président, il est très important de rappeler que, pour engager la responsabilité pénale dans ce cas, le lien de causalité entre la faute du tiers dans l'accident et cette interruption non volontaire de la grossesse doit être absolument certain. S'il y a le moindre doute - on peut imaginer toute une série de cas où la question peut se poser - il n'y aura, évidemment, pas condamnation.
    Je souhaite dire également que je ne remets aucunement en cause la loi dite Fauchon, du 10 juillet 2000, qui a considérablement restreint la responsabilité pénale du fait de fautes non intentionnelles. Comme vous le savez, cette loi a fait en sorte que la faute non intentionnelle doit être particulièrement caractérisée pour engager la responsabilité pénale.
    Sous l'effet conjugué de ces deux éléments, la mise en cause effective sera soumise - et c'est normal - à des contraintes juridiques très fortes.
    Peut-être reprendrai-je ultérieurement la parole, monsieur le président, parce qu'il s'agit là d'un débat très important et très attendu, que l'Assemblée nationale ne peut pas manquer d'aborder. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Avant de donner la parole à M. Michel Hunault pour soutenir l'amendement n° 90, j'indique que, sur le vote de l'amendement n° 24, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    Vous avez la parole, monsieur Hunault.
    M. Michel Hunault. Mon amendement a la même finalité que celui que vient de défendre excellemment Jean-Paul Garraud. Il vise en effet à combler un vide juridique, car le texte proposé par le Gouvernement ne permet pas d'incriminer pénalement le chauffard dont le comportement aurait entraîné la mort d'un enfant avant sa naissance.
    Je rappelle qu'en l'état actuel du droit, toute personne commettant un acte de négligence, d'imprudence ou de maladresse ayant entraîné la mort d'un enfant à naître échappe à des poursuites pénales. Notre collègue Garraud a raison de dire qu'il s'agit d'un vrai débat. Il convient donc de l'étudier dans le cadre de l'élaboration de la loi, d'autant que la Cour de cassation a jugé que, quel que soit le degré de développement du foetus, sa mort accidentelle provoquée par la faute d'un automobiliste n'est pas pénalement repréhensible.
    Cependant, mon amendement diffère de celui que vient de défendre Jean-Paul Garraud. En effet, celui de mon collègue vise à créer un délit spécifique d'interruption involontaire de grossesse, alors que le mien, tout en ayant également pour objectif de combler le vide juridique créé par l'arrêt de la Cour de cassation, laquelle exclut la protection pénale de l'enfant à naître, ne tend pas à créer un tel délit, car cela revient à nier l'existence même de l'enfant in utero, donc sa protection. Pour ma part, j'estime, avec M. Pandraud et M. Tiberi, qui ont cosigné l'amendement n° 90, que la vie doit être pénalement protégée.
    Cela dit, l'examen d'un projet de loi sur la sécurité routière se prête-t-il à un débat sur le statut de l'enfant à naître ? La question mérite d'être posée.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C'est en effet une bonne question !
    M. Michel Hunault. En posant des questions, nous sommes dans notre rôle de législateur : la discussion que nous venons d'avoir aura au moins eu ce mérite. Reste à savoir si c'est le moment de trancher l'importante question qui vient d'être soulevée.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 24 et 90 ?
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Ces deux amendements sont proches. Toutefois, alors que l'amendement défendu par M. Jean-Paul Garraud restreint le champ juridique de la responsabilité et s'en tient à l'interruption involontaire de grossesse - il s'agit de la protection de la mère et non du statut juridique du foetus -, l'amendement présenté par Michel Hunault ouvre le champ des questions d'éthique et de bioéthique relatives au statut de l'embryon et à la vie du foetus.
    La commission a donc rejeté l'amendement n° 90 de M. Hunault, considérant qu'un débat sur la sécurité routière n'était pas le cadre adapté pour évoquer les problèmes du début de la vie. En revanche, elle a adopté l'amendement n° 24 de M. Garraud.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Comme M. le garde des sceaux l'a indiqué lors de la discussion générale, l'amendement n° 24 de M. Garraud comble une lacune de notre droit.
    Je rappelle que le nouveau code pénal, qui a été déposé par M. Robert Badinter en 1986 et qui a été adopté à l'unanimité par le Parlement en juillet 1992, réprime, par son article 223-10, le fait de causer volontairement une interruption de grossesse sans le consentement de la femme enceinte. Il s'agit là d'une infraction totalement justifiée dans son principe et qui n'existait pas auparavant. Or il se trouve que lorsque ces faits n'ont pas été commis volontairement mais résultent d'une faute d'imprudence, en l'occurrence de l'imprudence d'un conducteur qui cause un accident de circulation, aucune infraction n'a été prévue par notre droit, comme l'a déjà constaté la Cour de cassation.
    M. Jean-Marie Le Guen. Mensonge ! Manipulation !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Cette situation a forcément provoqué une incompréhension qui est bien légitime de la part des victimes qui ont perdu l'enfant qu'elles attendaient à la suite d'un accident de circulation. La proposition de M. Garraud comble, nous semble-t-il, cette lacune, sans toucher pour autant à la problématique de la bioéthique. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Ben voyons ! Cet amendement est honteux !
    M. Hervé Mariton. Cet adjectif n'est pas convenable !
    M. le président. Monsieur Le Guen, vous pourrez vous exprimer tout à l'heure.
    M. Jean-Marie Le Guen. Cet amendement remet en cause un consensus important !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur Le Guen, vous venez d'arriver et vous attaquez bille en tête...
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est bien ce que j'ai l'intention de faire, monsieur le ministre !
    M. le président. Monsieur Le Guen, vous vous exprimerez quand je vous donnerai la parole.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Vous pouvez discuter sans être agressif, monsieur Le Guen !
    M. Jean-Marie Le Guen. Je sais bien que l'hypocrisie se distribue aussi largement qui s'accordaient les indulgences, mais je suis là pour mettre les choses au point ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Lionnel Luca. Zorro est arrivé !
    M. le président. Poursuivez, monsieur le ministre.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. L'amendement n° 24 de M. Garraud ne touche en aucune façon à la bio-éthique. La proposition qui est faite n'assimile pas le foetus à un être vivant. Elle ne soulève aucune question philosophique, pas plus que l'actuel article 223-10 dont elle constitue simplement le prolongement logique. Cette proposition vise à améliorer la protection de la femme enceinte : il ne s'agit pas d'autre chose. C'est pour cette raison que cet amendement me paraît pouvoir être adopté par l'Assemblée nationale.
    M. Christian Estrosi. Très bien !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. J'invite M. Hunault à retirer son amendement, qui devrait être satisfait par l'adoption de celui de M. Garraud. En tout cas, le Gouvernement émet un avis défavorable à l'adoption de l'amendement n° 90.
    M. le président. Le groupe socialiste a souhaité s'exprimer sur ces amendements importants. Je donne donc la parole à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, tout en soulignant que je souhaiterais que les débats conservent leur sérénité.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Lorsque un accident de la circulation provoque la perte d'un enfant à naître ou d'un foetus, on touche à l'ultime de l'horreur. En ces circonstances, le hasard apparaît d'une insupportable cruauté. C'est dire combien le problème posé rejoint les préoccupations qui nous animent au cours de l'examen de ce texte.
    Si je fais ce préalable, c'est pour soutenir avec plus de force la critique juridique, je dis bien juridique, de la proposition qui nous est faite, au-delà de la nécessaire compassion envers les femmes et les hommes concernés par ces malheurs et de la prise en compte de leur détresse. Sur le plan juridique, donc, je suis obligé de dire que cette proposition est inacceptable dans le cadre d'une discussion sur un dispositif législatif relatif à la sécurité routière.
    Je rappelle que l'assemblée pleinière de la Cour de cassation a contesté l'imputation d'homicide involontaire par imprudence, inobservation, absence de précaution, lorsque les faits avaient pour conséquence de provoquer la perte d'un enfant à naître ou d'un foetus. Elle a dit et redit que cela ne pouvait relever de la loi pénale parce que cela relevait - je cite le texte de son arrêt - des textes particuliers sur l'embryon ou le foetus.
    Je conteste le fait que les auteurs de l'amendement aient laissé entendre, dans l'exposé des motifs de celui-ci, que la Cour de cassation invitait le législateur à combler un vide juridique. La Cour de cassation ne dit pas cela ! Elle dit que le problème ne se pose pas, parce qu'il relève de la législation sur le foetus ou sur l'enfant à naître, ce qui n'est pas la même chose.
    En second lieu, il est évident que, pour introduire dans le dispositif sur la circulation routière l'incrimination proposée à l'article 223-12, laquelle permettrait de poursuivre l'auteur d'un accident de la circulation ayant provoqué la disparition de l'enfant à naître ou du foetus, ou ayant provoqué cette disparition en tuant la mère, on est obligé de créer d'abord une incrimination générale sur la mise en cause par imprudence de la vie de l'enfant à naître : c'est ce qui est proposé à l'article 223-11. Cela signifie, monsieur le ministre, que, pour répondre à une problématique qui concerne la circulation routière, on commence par traiter un problème de fond qui avait disparu de la loi pénale, puisque le contenu de l'article 223-11 avait été supprimé - c'est pourquoi, d'ailleurs, on réutilise le même numéro.
    Nous nous retrouvons donc à légiférer d'abord sur ce qui est en-dehors du champ des problèmes qui nous préoccupent actuellement, puisqu'il s'agit en fait de s'interroger sur le statut juridique du foetus ou de l'enfant à naître : est-il ou non une personne ? On ne peut pas échapper à ce débat.
    Ainsi, pour sanctionner un délit au titre de la répression routière, on commence par nous faire voter l'article 223-11. C'est inacceptable et la Cour de cassation ne l'a jamais demandé !
    Le problème de fond, la représentation nationale pourra le régler un jour en droit fondamental, en examinant des dispositions législatives qui, vous en conviendrez, monsieur le ministre, sortent du cadre des débats sur la sécurité routière.
    J'ajoute un point extrêmement important : les deux dispositifs mentionnent expressément, et d'une manière tout à fait singulière, « le consentement de la mère ». Je m'adresse donc à nos collègues éclairés, le président de la commission des lois et notre rapporteur : comment apprécier le consentement de la maman qui n'a évidemment rien à voir avec les autres éléments constitutifs du délit, dont le juge a besoin pour l'incrimination et la mise en cause de la responsabilité du conducteur ? A quoi sert-il ? Pour décider d'incriminer ou non ? Ou pour décider qui incriminer, selon que le futur père ou la future mère conduisait ?
    Je voulais poser ces questions d'ordre juridique, monsieur le président, pour prouver que ce débat, qui mérite d'être tranché, ne peut pas l'être dans le cadre de notre travail sur la sécurité routière. Monsieur le ministre, je vous en conjure, faites retirer cet amendement ! Nous risquons d'être demain dans l'impossibilité d'en assumer les conséquences juridiques, notamment en cas d'incrimination des membres de la famille. Il faut rester dans le cadre légal qui est le nôtre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
    M. Pascal Clément, président de la commission. M. Le Bouillonnec a fait une analyse assez approfondie de l'amendement de notre collègue et je me garderai d'insister là-dessus.
    Il est vrai que notre collègue Garraud a été obligé de passer par une incrimination générale pour envisager le cas particulier de l'accident de voiture. Mais, monsieur Le Bouillonnec, la quasi-totalité des cas jugés par les tribunaux concernait, comme par hasard, des accidents de la route. Certes, l'incrimination est générale, mais les cas concrets sont systématiquement des accidents de la route. Le constat ne nuit pas à votre raisonnement, mais il explique - et c'est d'ailleurs mon seul argument - cet amendement qui sort, il est vrai, totalement du sujet qui est traité aujourd'hui.
    Prenons le cas suivant : une femme perd son enfant dans un accident de voiture, à six mois de grossesse. Depuis de nombreuses années, la loi permet de déclarer l'enfant, mort, à la mairie. Il figure donc à l'état civil. Or, que constate M. Garraud ? C'est tout de même un comble : la responsabilité pénale ne peut pas être engagée alors que l'enfant a été déclaré à l'état civil !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il s'agit d'une inscription sans conséquence juridique !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Certes, mais on voit bien que se pose un problème ! L'enfant est considéré comme né.
    M. Jean-Marie Le Guen. Dites-le donc à la Cour de cassation !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Vous retenez ce qui va dans votre sens mais, moi, j'insiste précisément sur l'autre aspect de la situation.
    L'enfant est inscrit à l'état civil, et c'est une formalité nécessaire, indispensable, qui permet à la mère, enceinte par exemple de six mois - je cite ce chiffre parce qu'à ce stade l'enfant est viable -, de faire son deuil. Refuser l'incrimination pénale, c'est aggraver la douleur de la mère.
    Il est vrai que le premier paragraphe du texte proposé pour l'article 223-11 permettra d'attaquer une faute médicale, ce qui n'a rien à voir avec la sécurité routière. A cet égard, M. Le Bouillonnec soulève un vrai problème, et je ne dis pas qu'il a tort, bien au contraire. On a vu récemment, à l'occasion d'un arrêt tout à fait différent, mais célèbre, de la Cour de cassation, que la faute de diagnostic peut aujourd'hui mener très loin. Il sera désormais possible, en cas de faute médicale, d'engager des poursuites pénales, alors que jusqu'à présent, seule la responsabilité civile pouvait être mise en cause.
    Vous avez par ailleurs envisagé le cas où le conducteur est le père. Mais si votre épouse est blessée dans un accident de voiture alors que vous conduisiez, elle est, en tout état de cause, parfaitement en droit de vous demander des comptes. A cet égard, l'amendement n'apporte rien de plus à la situation actuelle.
    Il est clair que M. Garraud n'a pas tout à fait tort, et je proposerai un dernier exemple pour vous convaincre. Première hypothèse, l'enfant meurt lors de l'accident, et aucune poursuite pénale n'est alors engagée. Si, en revanche, l'enfant naît handicapé des suites de l'accident, la responsabilité pénale du conducteur peut être invoquée parce que l'enfant est né blessé. On arrive donc au paradoxe incroyable qu'il vaut mieux tuer l'enfant !
    M. Jean-Paul Garraud. Voilà !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Vous voyez bien qu'il y a un vide juridique puisque, et c'est choquant, le conducteur a intérêt à tuer l'enfant pour ne pas avoir d'ennuis, alors que si, par bonheur - parce que c'est quand même un bonheur -, l'enfant naît mais est handicapé, sa responsabilité pénale peut être mise en cause.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C'est comme pour l'arrêt Perruche !
    M. Pascal Clément, président de la commission. Je donne raison à M. Le Bouillonnec sur le fait que l'incrimination est générale, mais c'est un préalable nécessaire à l'article 223-12.
    Par ailleurs, le rapporteur devrait signaler qu'un « ou » doit être remplacé par un « et » pour rester cohérent avec ce que nous avons précédemment voté pour définir l'ensemble de la responsabilité sans faute et de la négligence.
    Si M. Garraud n'avait pas pensé à ce grave problème, la représentation nationale aurait pu l'ignorer. Mais, après les exemples que je vous ai donnés, monsieur Le Bouillonnec, il est clair que nous avons presque une obligation morale à combler ce vide juridique.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Et le consentement de la mère ?
    M. Pascal Clément, président de la commission. Cet amendement apporte des réponses à la fois juridiques et psychologiques. Car, vous le savez très bien, une femme qui perd son enfant, au-delà de six mois de grossesse, alors qu'il est viable, subit un traumatisme extrêmement grave. M. Garraud a pris le soin de ne pas déborder sur des questions, certes d'actualité, mais qui sont des questions de bioéthique. Il s'en tient rigoureusement à la responsabilité pénale et répond ainsi à l'objectif assigné par le rapporteur, en prenant en compte des situations concrètes tellement douloureuses. Aujourd'hui, des mères crient à l'injustice car elles ont le sentiment que le droit ignore leur souffrance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je voudrais qu'il soit clair, mes chers collègues, que je respecte les positions philosophiques et spirituelles de chacun. Je comprends tout à fait qu'un certain nombre de nos collègues, mus par des considérations générales ou des cas particuliers, veuillent défendre leur philosophie de la vie.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Ce n'est pas le problème.
    M. Jean-Paul Garraud et M. Pierre Hellier. Cela n'a rien à voir.
    M. Jean-Marie Le Guen. Cependant, si j'ai violemment protesté, c'est parce que le Gouvernement, qui a tous les moyens de savoir de quoi il parle, a prétendu que la Cour de cassation nous aurait incités à légiférer. C'est faux !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Evidemment.
    M. Jean-Marie Le Guen. Venant d'un de nos collègues qui aurait lu rapidement un papier, j'aurais trouvé l'erreur regrettable, mais, de la part du Gouvernement, elle est inacceptable car il s'agit d'une manoeuvre. A la veille du débat sur la bioéthique, je l'interprète comme une prise de position sur un certain nombre de sujets.
    Par ailleurs, lorsque le président de la commission dit qu'il n'y a pas d'incrimination pénale possible, il ne fait référence qu'à une incrimination pénale de la part de l'enfant, parce que la mère, en son nom propre, peut introduire une action pénale en cas d'accident de voiture.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C'est évident.
    M. Jean-Marie Le Guen. La question de l'incrimination pénale résulte donc également d'un glissement sémantique. Nous sommes, en fait, au coeur d'un débat voisin de celui né de l'arrêt Perruche. J'y reviendrai.
    Je m'aperçois donc que toutes les argumentations données aujourd'hui reposent sur des glissements sémantiques. L'argument invoquant la Cour de cassation est inexact, celui dénonçant l'absence d'incrimination pénale oublie de préciser qu'il s'agit de l'incrimination pénale au nom de l'enfant.
    Manifestement, ces amendements et la manière dont ils s'immiscent dans cette discussion ne sont rien d'autre qu'une tentative indirecte de remettre en cause l'IVG telle qu'elle existe dans notre pays. Tous ceux qui s'intéressent à ces questions, tant en France qu'aux Etats-Unis, où ce débat est pour le moins assez vif, savent combien il est difficile d'en débattre ouvertement. Ces amendements offrent un biais à ceux qui ne sont pas satisfaits de notre législation dans ce domaine.
    M. Pascal Clément, président de la commission. Mais vous vous trompez d'amendement !
    M. Jean-Marie Le Guen. Pas du tout. L'amendement de M. Hunault a certes le mérite d'être plus direct, mais je n'imagine pas une seconde qu'il ne serve pas de leurre pour masquer celui que nous discutons. S'il vous plaît, monsieur le président de la commission, ne nous prenez pas à ce point pour des naïfs ! Nous avons bien compris que ces deux amendements, l'un à découvert, l'autre plus furtif, visent à introduire une disposition visant à en circonscrire d'autres, ce que notre représentation nationale et, à ma connaissance, jusqu'à ce soir le Gouvernement avaient refusé de faire. J'ai entendu, hier encore, M. Mattei devant la commission des affaires sociales, se refuser à définir un statut juridique pour l'embryon. Par un travail souterrain, nous sommes en train de créer des sources de droit sur la question. A la veille du débat sur la bio-éthique, ce ne sera pas sans conséquence, que le Gouvernement le sache. Il est en train de reculer sur un certain nombre d'engagements qu'il avait pris.
    J'attire maintenant l'attention de l'ensemble des parlementaires sur le deuxième volet de l'amendement. Sur-estimer l'incrimination pénale en matière de conduite automobile a un côté un peu ridicule, voire dangereux. Il semble impliquer qu'on peut provoquer involontairement n'importe quel accident, qu'on peut à la limite battre sa femme, mais si on n'a pas l'intention de la faire avorter, ce sera toujours moins grave que de causer un accident de voiture ! Entre toutes les catégories d'homicide involontaire, la plus importante, la plus grave, la plus insupportable pour la société, c'est l'accident de voiture. Avouez que c'est plutôt dérisoire !
    J'en reviens maintenant au premier point, qui généralise l'incrimination pénale et qui est destiné au Conseil constitutionnel, puisqu'il existe essentiellement pour justifier le second, consacré aux accidents de voiture. Mes chers collègues, avez-vous bien réfléchi aux conséquences ? J'étais, au sein du groupe socialiste, un des plus motivés pour clore le débat sur l'arrêt Perruche - Catherine Génisson également. Mais avec de telles dispositions, on le rouvre !
    Mme Catherine Génisson. Certainement !
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous rendez-vous compte que, alors qu'il s'agit de sécurité routière, vous allez le reprendre à zéro ?
    Le texte proposé pour l'article 223-11 pose intégralement le problème de la responsabilité pénale des actes médicaux.
    A force de vouloir être subtils, mes chers collègues, vous êtes en train de vous prendre les pieds dans le tapis ! Vraiment, je vous en conjure, et je regrette que le garde des sceaux ne soit pas là, sans remettre en cause les compétences de M. le ministre de Robien, on est en train de créer un incroyable imbroglio juridique qui sera source d'une nombreuse jurisprudence, notamment en ce qui concerne les professions de santé.
    M. le président. Merci de conclure, monsieur Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je vous le dis franchement, il y a trop de malice dans cette affaire, qui risque d'aboutir à la fois à une remise en cause du consensus obtenu dans notre pays et à des conséquences juridiques qui ne sont absolument pas maîtrisées.
    A force de vouloir jouer au plus fin, vous vous apprêtez à commettre des erreurs grossières. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Ne nous faites pas de procès d'intention, monsieur Le Guen. Quand on a des choses à dire, on les dit, comme cela a été le cas dans le débat juridique, très intéressant, qui a eu lieu il y a un instant. Mais les procès d'intention que vous faites au Gouvernement et à la majorité ne sont pas acceptables, ce n'est pas tolérable entre gens de bonne foi.
    M. Jean-Marie Le Guen. Il faudra tout de même vous y faire, monsieur le ministre !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Il faut toujours préjuger de la bonne foi de votre interlocuteur, même quand il n'est pas d'accord avec vous.
    Je voulais d'abord vous dire que l'on ne rouvre pas le débat suscité par l'arrêt Perruche. Ce que vous avez affirmé est faux. On s'attache simplement à la protection de la femme, et on ne parle pas de la protection du foetus ou de l'enfant à naître.
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous n'y connaissez rien !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur Le Guen, écoutez-moi.
    M. le président. Monsieur Le Guen, vous n'avez pas la parole. Laissez le ministre s'exprimer, tout de même !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Vous vous y connaissez certainement beaucoup mieux que moi,...
    M. Jean-Marie Le Guen. En l'occurrence, oui !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. ... mais je suis aussi entouré de conseillers, et j'ai un peu de bon sens, qui me permet de comprendre que la démonstration faite par le président Clément était digne d'intérêt, et très forte sur le plan moral. Je n'imaginais pas, que son raisonnement qui m'apparaissait limpide pût heurter qui que ce soit.
    Je voulais simplement rappeler... Monsieur Le Guen, vous n'écoutez même pas les réponses que l'on vous fait !
    M. Jean-Marie Le Guen. Nous ne sommes pas à l'école !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Je le reconnais,...
    M. Jean-Marie Le Guen. Je fais ce que je veux quand je suis ici !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Soit !
    M. Jean-Marie Le Guen. Soyez un grand garçon, assumez vos choix, enfin !
    M. le président. Monsieur Le Guen, vous allez laisser le ministre s'exprimer !
    M. Lionnel Luca. C'est vraiment insupportable !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. S'il faut demander à quelqu'un d'être un grand garçon, c'est plutôt à celui qui n'écoute pas la réponse qui lui est faite, alors qu'il a interpellé le Gouvernement, et lui a fait des reproches. Le Gouvernement, quant à lui, essaie de vous répondre sur un ton serein, monsieur Le Guen.
    A propos de la Cour de cassation, je vous rappelle qu'elle a statué en assemblée plénière. C'est l'instance la plus solennelle qui se réunit quand se pose un problème de principe qui divise la juridiction.
    M. Jean-Marie Le Guen. Et que dit son arrêt ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. L'interprétation donnée par la Cour dans cet arrêt de juin 2001 confirme le vide juridique mis en évidence par la doctrine. Je n'ai rien dit de plus et vous ne pouvez pas me le reprocher. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Marie Le Guen. Justement si !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je demande la parole, monsieur le président !
    M. le président. Monsieur Le Bouillonec, vous vous êtes déjà exprimé et l'Assemblée est suffisamment éclairée. Je vais encore donner la parole à M. Mariton, qui me l'a précédemment demandée au nom du groupe UMP. Et puis nous passerons au vote. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Hervé Mariton. Le groupe UMP soutient cet amendement qui vise à la protection de la femme enceinte. L'un de nos collègues socialistes a fait une présentation assez curieuse, évoquant une sorte de malheur sans cause. Or les malheurs ont souvent des causes. Il n'est pas interdit d'y remédier, y compris sur le plan pénal.
    M. Christian Estrosi. Très bien !
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix l'amendement n° 24.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   55
Nombre de suffrages exprimés   55
Majorité absolue   28
Pour l'adoption   41
Contre   14

    L'Assemblée nationale a adopté.
    En conséquence, l'amendement n° 90 n'a plus d'objet.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous n'avons même pas eu le temps de voter, monsieur le président !
    M. le président. J'ai annoncé le scrutin il y a trois quarts d'heure !

Rappel au règlement

    M. René Dosière. Rappel au règlement !
    M. le président. Sur quel article, monsieur Dosière ?
    M. René Dosière. Sur l'article 58.
    Monsieur le président, il est regrettable que le débat n'ait pas pu aller au fond. Il nous a manqué cinq à dix minutes pour le mener à bien dans la sérénité. Pourtant, on a bien vu qu'il s'agissait d'un problème important, dont les conséquences échappent sans doute à beaucoup d'entre nous.
    M. Lionnel Luca. Merci !
    M. René Dosière. Le scrutin sur l'amendement n° 24 a été rapide. En tout état de cause, je demande une suspension de séance pour réunir mon groupe.
    M. le président. Monsieur Dosière, le débat s'est déroulé dans les meilleures conditions. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Chacun a pu s'exprimer. En outre, il y aura une deuxième lecture...
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Et alors ?
    M. le président. Mon cher collègue, ne vous énervez pas, cela ne sert à rien ! Vous vous êtes exprimé longuement et je vous ai même laissé dépasser votre temps de parole.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Vous m'avez refusé de répondre au ministre !
    M. le président. L'Assemblée était suffisamment éclairée. Nous avons voté, l'amendement est adopté.
    M. Dosière a demandé une suspension de séance, elle est de droit. Je vais donc suspendre la séance pour cinq minutes.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue le jeudi 20 mars 2003 à zéro heure vingt-cinq, est reprise à zéro heure trente.)
    M. le président. La séance est reprise.
    Les amendements n°s 114 et 115 de M. Merville ne sont pas défendus.

Article 3

    M. le président. « Art. 3. - I. - Le deuxième alinéa de l'article 434-10 du code pénal est complété par les mots : "hors les cas prévus par les articles 221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1.
    « II. - L'article L. 234-11, le II de l'article L. 234-12, le deuxième alinéa de l'article L. 234-13 et l'article L. 235-5 du code de la route sont abrogés. »
    M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 25, ainsi rédigé :
    « Compléter l'article 3 par le paragraphe suivant :
    « III. - Dans le 2° de l'article 398-1 du code de procédure pénale, les références "222-19, 222-20 sont remplacées par les références "222-19-1, 222-20-1. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 25.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié par l'amendement n° 25.
    (L'article 3, ainsi modifié, est adopté.)

Article 4

    M. le président. Je donne lecture de l'article 4 :

Chapitre II
Récidive, peines complémentaires
et amende forfaitaire

Section 1
Dispositions relatives à la répression des infractions
commises en récidive

    « Art. 4. - I. - Le 5° de l'article 131-13 du code pénal est complété par les mots suivants : " , hors les cas où la loi prévoit que la récidive de la contravention constitue un délit.
    « II. - L'article 132-11 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Dans les cas où la loi prévoit que la récidive d'une contravention de la cinquième classe constitue un délit, la récidive est constituée si les faits sont commis dans le délai de trois ans à compter de l'expiration ou de la prescription de la précédente peine. »
    « III. - Il est inséré, après l'article 132-16-1 du code pénal, un article 132-16-2 ainsi rédigé :
    « Art. 132-16-2. - Les délits d'homicide involontaire ou d'atteinte involontaire à l'intégrité physique ou psychique de la personne commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur prévus par les articles 221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1 sont considérés, au regard de la récidive, comme une même infraction.
    « Les délits prévus par les articles L. 221-2, L. 234-1, L. 235-1 et L. 413-1 du code de la route sont considérés, au regard de la récidive, comme une même infraction. Ils sont également assimilés aux délits mentionnés à l'alinéa précédent lorsqu'ils constituent le second terme de la récidive. »
    « IV. - Au premier alinéa de l'article L. 221-2 du code de la route, les mots : "au sens de l'article 132-11 du code pénal sont remplacés par les mots : "au sens du deuxième alinéa de l'article 132-11 du code pénal.
    « V. - Au premier alinéa de l'article L. 413-1 du code de la route, les mots : " dans le délai d'un an à compter de la date à laquelle cette condamnation est devenue définitive sont remplacés par les mots : "en état de récidive dans les conditions prévues par le deuxième alinéa de l'article 132-11 du code pénal. »
    M. Dosière et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 150, ainsi rédigé :
    « Substituer au premier alinéa du texte proposé pour l'article 132-16-2 du code pénal les deux alinéas suivants :
    « Art. 132-16-2. - Lorsqu'ils sont commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, les délits d'homicide involontaire ou d'atteinte involontaire à l'intégrité physique ou psychique de la personne ayant entraîné pour la victime une mutilation ou une infirmité permanente sont considérés, au regard de la récidive, comme une infraction.
    « Les délits d'atteinte involontaire à l'intégrité physique ou psychique de la personne prévus par les articles 222-19-1 et 222-20-1 sont considérés, au regard de la récidive, comme une infraction. »
    La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. L'extension de la notion de récidive pour des délits non intentionnels en matière d'infractions routières n'est acceptable qu'à la condition de viser des infractions différentes de gravité équivalente : tel n'est pas le cas de l'homicide, de l'atteinte aux personnes ayant entraîné une incapacité de travail de plus trois mois et de l'atteinte aux personnes plus légère, ayant entraîné une incapacité de travail de moins de trois mois.
    Il semble donc plus compréhensible de « jumeler » des infractions aux effets très graves comme l'homicide et l'infirmité permanente, d'une part, et les blessures involontaires ayant entraîné une incapacité de plus ou moins de trois mois, de l'autre.
    Cette proposition permettrait en outre d'éviter que les peines encourues en récidive diffèrent considérablement les unes des autres suivant l'ordre dans lequel elles auront été commises : un homicide suivi de blessures légères involontairement commises, en l'état actuel du projet, ferait encourir à son auteur, du fait de la récidive, une peine de quatre ans de prison ; si ces infractions étaient commises dans le sens inverse, un homicide suivant une atteinte légère à la personne, la peine serait de dix, quatorze, voire vingt ans de prison, soit autant qu'un vol à main armée.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Cet amendement aboutit à adoucir la règle de la récidive. Ce n'est pas le souhait du Gouvernement, qui a consolidé différentes incriminations pour constituer une récidive. Par conséquent, nous souhaitons que cet amendemlent ne soit pas adopté par l'Assemblée.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Je tiens à donner des arguments complémentaires à ceux de la commission, parce que cet amendement soulève plusieurs difficultés, d'ordre juridique et pratique.
    Il assimile les homicides involontaires et les blessures involontaires entraînant une mutilation ou une infirmité permanente. Or le code pénal n'incrimine que les blessures qui entraînent de tels dommages. En cas de blessures involontaires, il est seulement distingué entre les incapacités de travail de plus ou moins de trois mois. L'amendement est donc, sur ce point, non applicable.
    Par ailleurs, il supprime toute aggravation des peines liées à la récidive lorsqu'une personne commet un accident mortel de la circulation après avoir été condamnée auparavant pour un accident corporel. Il ne semble pourtant pas choquant qu'un conducteur qui tue une personne alors qu'il était en état d'ivresse, après avoir déjà commis un accident également causé par un abus d'alcool, mais qui par bonheur n'a causé que des blessés, soit considéré comme un récidiviste.
    En tout état de cause, je rappelle que le ministère public n'est pas obligé de retenir l'état de récidive, comme c'est le cas de façon générale.
    Enfin, si l'état de récidive est retenu, il ne s'agit que de peines maximales, que le juge doit appliquer en tenant compte du principe de proportionnalité, comme je l'ai rappelé tout à l'heure et comme le Conseil constitutionnel l'a rappelé dans sa décision du 13 mars dernier relative à la loi sur la sécurité intérieure.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 150.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 26, ainsi rédigé :
    « Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article 132-16-2 du code pénal, supprimer les mots : "physique ou psychique. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Amendement de coordination.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 26.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. L'amendement n° 11 n'est pas défendu.
    Je mets aux voix l'article 4, modifié par l'amendement n° 26.
    (L'article 4, ainsi modifié, est adopté.)

Article 5

    M. le président. Je donne lecture de l'article 5 :

Section 2
Dispositions relatives aux peines complémentaires

    « Art. 5. - I. - Le 1° de l'article 131-6 du code pénal est complété par les mots suivants : "cette limitation n'est toutefois pas possible en cas de délit pour lequel la suspension du permis de conduire est encourue comme peine complémentaire si la loi prévoit que cette peine ne peut être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ;.
    « II. - Le 1° de l'article 131-14 du code pénal est complété par les mots suivants : "cette limitation n'est toutefois pas possible en cas de contravention pour laquelle la suspension du permis de conduire est encourue comme peine complémentaire si le règlement prévoit que cette peine ne peut être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ;.
    « III. - Le 1° de l'article 131-16 du code pénal est complété par les mots suivants : "sauf si le règlement exclut expressément cette limitation.
    « IV. - L'article 132-28 du code pénal est complété par les mots suivants : "; le fractionnement de la peine de suspension de permis de conduire n'est toutefois pas possible en cas de délits ou de contraventions pour lesquels la loi ou le règlement prévoit que cette peine ne peut être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle.
    « V. - Le 3° de l'article 221-8 du code pénal est complété par les mots : "; dans les cas prévus par l'article 221-6-1, la suspension ne peut être assortie du sursis, même partiellement, et ne peut être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ; dans les cas prévus par les 1° à 6° et le dernier alinéa de l'article 221-6-1, la durée de cette suspension est de dix ans au plus.
    « VI. - Le 3° de l'article 222-44 du code pénal est complété par les mots : "; dans les cas prévus par les articles 222-19-1 et 222-20-1, la suspension ne peut être assortie du sursis, même partiellement, et ne peut être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ; dans les cas prévus par les 1° à 6° et les derniers alinéas des articles 222-19-1 et 222-20-1, la durée de cette suspension est de dix ans au plus.
    « VII. - Le 3° de l'article 223-18 du code pénal est complété par les mots : "; si le délit a été commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, la suspension ne peut être assortie du sursis, même partiellement, et ne peut être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle.
    « VIII. - A l'article 434-45 du code pénal, les mots : "cette suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle sont remplacés par les mots : "cette suspension ne pouvant être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle.
    « IX. - Le troisième alinéa de l'article 708 du code de procédure pénale est complété par la phrase suivante : "la suspension ou le fractionnement de la peine de suspension de permis de conduire n'est toutefois pas possible en cas de délits ou de contraventions pour lesquels la loi ou le règlement prévoit que cette peine ne peut être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle.
    « X. - Au 1° du IV de l'article L. 223-5, aux 1° du II des articles L. 224-16, L. 234-8, L. 235-1 et L. 235-3, au 1° du IV de l'article L. 224-17, au 1° du I de l'article L. 234-2 et au deuxième alinéa de l'article L. 413-1 du code de la route, les mots : "cette suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle sont remplacés par les mots : "cette suspension ne pouvant être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle. »
    M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 27, ainsi libellé :
    « Après les mots : "permis de conduire, rédiger ainsi la fin du I de l'article 5 : ", encourue à titre de peine complémentaire, ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 28, ainsi libellé :
    « Après les mots : "permis de conduire, rédiger ainsi la fin du II de l'article 5 : ", encourue à titre de peine complémentaire, ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Dell'Agnola, rapporteur, et M. Dosière ont présenté un amendement, n° 30, ainsi libellé :
    « Après le III de l'article 5, insérer le paragraphe suivant :
    « III bis. - Avant le dernier alinéa de l'article 131-22 du code pénal, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « Lorsque la personne a été condamnée pour un délit prévu par le code de la route ou sur le fondement des articles 221-6-1, 222-19-1, 222-20-1 et 434-10 du code pénal, elle accomplit de préférence la peine de travail d'intérêt général dans un des établissements spécialisés dans l'accueil des blessés de la route dont la liste est déterminée par décret. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola. Je laisse le soin de soutenir cet amendement à notre collègue René Dosière.
    M. René Dosière. Si vous le permettez, monsieur le président, c'est M. Viollet qui va le défendre.
    M. le président. Nous allons certainement y arriver ! (Sourires.)
    La parole est à M. Jean-Claude Viollet.
    M. Jean-Claude Viollet. Dans la discussion générale, j'ai évoqué la nécessité que la sanction ait un caractère réparateur pour le coupable comme pour la ou les victimes. Il s'agit là de délits pouvant avoir de graves conséquences : l'inaptitude temporaire au travail de plus ou moins de trois mois, ou encore l'abandon d'un blessé en cas de délit de fuite. Par cet amendement, qui a été adopté par la commission, nous souhaitons inciter le juge de l'application des peines à faire de préférence exécuter la peine de travail d'intérêt général dans des établissements spécialisés dans l'accueil des blessés de la route, dont la liste serait déterminée par décret.
    Il convient de faire prendre conscience de la gravité des conséquences collectives de certains comportements individuels. Je considère que cet amendement participerait à la restauration de l'esprit public que j'invoquais dans la discussion générale.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Compte tenu de l'objectif pédagogique de cet amendement, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée. Cela dit, il me semble inutile de renvoyer à un décret. En conséquence, les mots « dont la liste est déterminée par décret » pourraient être utilement supprimés, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
    M. René Dosière. Pas du tout !
    M. Jean-Claude Viollet. D'accord !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 30, compte tenu de la rectification proposée par le Gouvernement.
    (L'amendement, ainsi rectifié, est adopté.)
    M. le président. M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 29, ainsi rédigé :
    « I. - Dans le IV de l'article 5, après les mots : "ne peut, insérer le mot : "pas.
    « II. - En conséquence, procéder à la même insertion dans les V, VI, VII et IX de cet article. »
    La parole est M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 31, ainsi rédigé :
    « I. - Dans le VIII de l'article 5, après les mots : "ne pouvant, insérer le mot : "pas.
    « II. - En conséquence, procéder à la même insertion dans le X de cet article. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 31.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 32, ainsi rédigé :
    « Dans le X de l'article 5, substituer aux références : "Au 1° du IV de l'article L. 223-5, aux 1° du II des articles L. 224-16, L. 234-8, L. 235-1 et L. 235-3, au 1° du IV de l'article L. 224-17, les références : "Aux 1° du II des articles L. 224-16 et L. 234-8. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Cet amendement limite l'interdiction d'aménager la peine de suspension du permis de conduire aux délits les plus graves, ceux mettant en danger la vie d'autrui, en supprimant la référence aux infractions de refus de remise du permis de conduire, après un retrait de points ou une décision de suspension. Il n'a pas d'incidence pratique puisque, pour les délits mettant en danger la vie d'autrui, les juges n'autorisent pas de permis blanc.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 32.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 33, ainsi rédigé :
    « Compléter l'article 5 par le paragraphe suivant :
    « XI. - Dans le 1° du II des articles L. 235-1 et L. 235-3 du code de la route, les mots : "cette suspension peut être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle sont remplacés par les mots : "cette suspension ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle. »
    La parole est M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Amendement de coordination.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 33.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 5, ainsi modifié, est adopté.)

Article 6

    M. le président. « Art. 6. - I. - L'article 131-16 du code pénal est complété par un 6° ainsi rédigé :
    « 6° L'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de trois ans au plus ; »
    « II. - L'article 131-21 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Lorsque la chose confisquée est un véhicule qui n'a pas été saisi au cours de la procédure, le condamné doit, sur l'injonction qui lui en est faite par le ministère public, remettre ce véhicule au service ou à l'organisme chargé de sa destruction ou de son aliénation. »
    « III. - Il est inséré après l'article 131-35 du code pénal un article 131-35-1 ainsi rédigé :
    « Art. 131-35-1. - Lorsqu'elle est encourue à titre de peine complémentaire, l'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation à la sécurité routière est exécutée aux frais du condamné, dans un délai de six mois à compter de la date à laquelle la condamnation est définitive.
    « Les frais du stage ne peuvent excéder la moitié du montant de l'amende encourue.
    « L'accomplissement du stage donne lieu à la remise au condamné d'une attestation que celui-ci adresse au procureur de la République. »
    « IV. - L'article 132-45 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « 15° En cas d'infraction commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ; »
    « V. - L'article 221-8 du code pénal est complété par les dispositions suivantes :
    « 7° Dans les cas prévus par l'article 221-6-1, l'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
    « 8° Dans les cas prévus par l'article 221-6-1, l'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;
    « 9° Dans les cas prévus par l'article 221-6-1, l'immobilisation, pendant une durée d'un an au plus, du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire ;
    « 10° Dans les cas prévus par l'article 221-6-1, la confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire.
    « Toute condamnation pour les délits prévus par les 1° à 6° et le dernier alinéa de l'article 221-6-1 donne lieu de plein droit à l'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter un nouveau permis pendant dix ans au plus. En cas de récidive, la durée de l'interdiction est portée de plein droit à dix ans et le tribunal peut, par décision spécialement motivée, prévoir que cette interdition est définitive. »
     «VI. - L'article 222-44 du code pénal est complété par les alinéas suivants :
    « 8° Dans les cas prévus par les articles 222-19-1 et 222-20-1, l'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
    « 9° Dans les cas prévus par les articles 222-19-1 et 222-20-1, l'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;
    « 10° Dans les cas prévus par les 1° à 6° et le dernier alinéa de l'article 222-19-1, l'immobilisation, pendant une durée d'un an au plus, du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire.
    « Toute condamnation pour les délits prévus par les 1° à 6° et le dernier alinéa de l'article 222-19-1 donne lieu de plein de droit à l'annulation du permis de conduire avec l'interdiction de solliciter un nouveau permis pendant dix ans au plus. »
    « VII. - L'article 223-18 du code pénal est complété par un 5° et un 6° ainsi rédigés :
    « 5° Lorsque l'infraction a été commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, l'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
    « 6° Lorsque l'infraction a été commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, l'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière. »
    « VIII. - Au premier alinéa de l'article 434-41 du code pénal, il est ajouté, après les mots : "d'annulation du permis de conduire, les mots : ", d'interdiction de conduire certain véhicules à moteur, d'obligation d'accomplir un stage.
    « IX. - Le 2° de l'article 41-1 du code de procédure pénal est complété par les mots suivants : "en cas d'infraction commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, cette mesure peut consister dans l'accomplissement, par l'auteur des faits, à ses frais, d'un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;
    « X. - Le II de l'article L. 221-2 du code de la route est complété par les dispositions suivantes :
    « 3° L'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
    « 4° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;
    « 5° La confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire. »
    « XI. - Le IV de l'article L. 223-5 du code de la route est complété par les dispositions suivantes :
    « 4° L'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé pour une durée de cinq ans au plus ;
    « 5° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;
    « 6° La confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire. »
    « XII. - Le II de l'article L. 224-16 du code de la route est complété par les dispositions suivantes :
    « 4° L'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
    « 5° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;
    « 6° La confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire. »
    « XIII. - L'article L. 231-2 du code de la route est complété par un 4° et un 5° ainsi rédigés :
    « 4° L'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
    « 5° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière. »
    « XIV. - Le I de l'article L. 234-2 et le II de l'article L. 234-8 du code de la route sont complétés par un 5° et un 6° ainsi rédigés :
    « 5° L'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
    « 6° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière. »
    « XV. - Le II de l'article L. 235-1 du code de la route est complété par un 5° et un 6° ainsi rédigés :
    « 5° L'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
    « 6° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière. »
    « XVI. - Le II de l'article L. 235-3 du code de la route est complété par un 5° et 6° ainsi rédigés :
    « 5° L'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
    « 6° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière. »
    « XVII. - Le deuxième alinéa de l'article L. 413-1 du code de la route est complété par une phrase ainsi rédigée : "Il encourt également la peine d'interdiction de conduire certains véhicules à moteur, pour une durée de cinq ans au plus, la peine d'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ainsi que la peine de confiscation du véhicule dont il s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire.
    « XVIII. - A l'article L. 224-14 du code de la route, il est ajouté, après les mots : "du présent code, les mots : "ou pour les délits prévus par les articles 221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1 du code pénal.
    « XIX. - L'article L. 224-15 du code de la route est abrogé. »
    M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 34 rectifié, ainsi rédigé :
    « I. - Dans le dernier alinéa du I de l'article 6, après les mots : "certains véhicules, insérer le mot : "terrestres.
    « II. - En conséquence, procéder à la même insertion dans les deuxièmes alinéas des V, VI, VII, X, XI, XII, XIII, XIV, XV, XVI et XVII et dans le VIII de cet article. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 34 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 35, ainsi rédigé :
    « Supprimer l'avant-dernier alinéa du III de l'article 6. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Cet amendement supprime la référence aux frais de stage, dont la fixation du montant n'a pas à figurer dans la loi, mais relève du domaine réglementaire. Ce montant, jusqu'à « la moitié de l'amende encourue », peut en effet paraître excessif lorsque l'amende est elle-même très élevée, notamment en cas d'homicide involontaire aggravé.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux vois l'amendement n° 35.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Dell'Agnola, rapporteur, et M. Fenech ont présenté un amendement, n° 36, ainsi rédigé :
    « Avant le dernier alinéa du V de l'article 6, insérer l'alinéa suivant :
    « 11° Dans les cas prévus par l'article 221-6-1, l'interdiction de conduire un véhicule non équipé d'un enregistreur de vitesse, pour une durée de cinq ans au plus. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Cet amendement, présenté par notre collègue Georges Fenech, a été approuvé par la commission. Il permet au juge d'obliger les personnes qui ont commis des infractions graves à installer un enregistreur de vitesse sur leur véhicule, pour une durée de cinq ans au plus.
    Cet amendement est difficilement applicable puisque l'enregistreur de vitesse n'est pas encore une technique très au point. Par conséquent, nous serions tenté d'inviter son auteur - mais il n'est pas là aujourd'hui - à remplacer « enregistreur » par « régulateur ».
    La commission a toutefois approuvé cet amendement contre l'avis du rapporteur, et j'aimerais connaître l'opinion du Gouvernement.
    M. le président. La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. Si cet amendement est adopté, nous devrons le reprendre à de multiples reprises pour des raisons de coordination. De plus, au-delà des réserves exprimées par le rapporteur, une difficulté supplémentaire a été mise en évidence par M. Estrosi en commission, à savoir que l'intéressé ne pourra pas conduire de voitures de location, celles-ci n'étant pas équipées d'un enregistreur de vitesse.
    Bref, la mesure est totalement irréalisable et il me semble préférable de suivre l'avis du rapporteur plutôt que celui de la commission, l'assemblée étant maîtresse de sa décision.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer Cet amendement crée une nouvelle peine complémentaire : l'interdiction de conduire un véhicule non équipé d'un enregistreur de vitesse. Son intérêt, à la fois pédagogique et dissuasif, est évident. Le Gouvernement ne peut que l'approuver dans son principe et remercie M. Fenech d'en avoir eu l'idée.
    Il ne faut toutefois pas se cacher que cette disposition soulève des difficultés. La plus importante tient au fait qu'une telle peine ne pourra être immédiatement appliquée. Outre la nécessité d'en préciser les contours par décret d'application, ce que prévoit un autre amendement de M. Fenech, il faudrait que les dispositifs techniques disponibles sur le marché évoluent suffisamment pour rendre possible l'installation d'un enregistreur de vitesse sur les véhicules particuliers à un coût raisonnable, ce qui n'est pas encore le cas.
    Par ailleurs, les techniques d'enregistrement des vitesses peuvent être variables, selon qu'il s'agit d'un enregistrement limité dans le temps permettant, en cas d'accident, de connaître la vitesse du véhicule au moment de l'accident, ou d'un enregistrement disposant d'une mémoire importante permettant de connaître la vitesse du véhicule pendant une période donnée.
    En outre, on peut se demander s'il ne serait pas utile de prévoir également, ou à titre alternatif, l'interdiction de conduire un véhicule ne disposant pas d'un limitateur de vitesse.
    Enfin, il conviendrait sans doute de prévoir l'enregistrement de cette peine au fichier des personnes recherchées pour permettre à la police, en cas de contrôle routier, de savoir si le conducteur était ou non tenu de conduire un véhicule avec enregistreur.
    Toutes ces questions pourront être approfondies devant le Sénat au cours de la navette. En l'état, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée nationale, tout en soulignant les difficultés d'application.
    M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.
    M. Hervé Mariton. Cet amendement pose sans doute des difficultés d'application, mais aucune d'entre elles ne semble insurmontable. Au demeurant, les raisons d'ordre technique renvoient, me semble-t-il, au manque d'appétence des constructeurs lorsqu'il s'agit de répondre aux obligations dont on aimerait bien qu'ils s'acquittent. On a tout de même du mal à comprendre aujourd'hui que la conception et l'installation d'enregistreurs de vitesse soit une affaire si compliquée.
    Partagé entre l'intérêt d'une mesure dont la dimension pédagogique est évidente et les arguments du Gouvernement sur la complexité de sa mise en oeuvre, le groupe UMP a finalement décidé de ne pas soutenir cet amendement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 36.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 37 rectifié, ainsi rédigé :
    « I. - Dans le 9° du VI de l'article 6, substituer aux mots : "à ses frais les mots : "à leurs frais.
    « II. - En conséquence, procéder à la même substitution dans le 6° du VII et le 5° du XIII de cet article. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Amendement rédactionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 37 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 38, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi le début du 10° du VI de l'article 6 :
    « 10° Dans les cas prévus par les articles 222-19-1 et 222-20-1, l'immobilisation... (Le reste sans changement.) »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Rédactionnel.
    M. le président. Avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 38.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. En raison du rejet de l'amendement n° 36, les amendements de conséquence n°s 39 à 45 de la commission n'ont plus d'objet.
    M. Dell'Agnola, rapporteur, a présenté un amendement, n° 46, ainsi rédigé :
    « Compléter le XIII de l'article 6 par l'alinéa suivant :
    « 7° La confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. C'est un amendement de cohérence, monsieur le président.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.
    M. Hervé Mariton. J'ai été informé que la confiscation des véhicules était, dans la pratique, très difficile à obtenir. M. le ministre ne sera donc pas fâché si nous lui assurons que nous le soutiendrons bien volontiers dans toute demande qu'il adresserait à d'autres ministères pour que cette sanction puisse s'appliquer avec davantage de célérité et d'efficacité.
    M. Lionnel Luca. Très bien !
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 46.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Les amendements n°s 47 à 50 de la commission tombent.
    Je mets aux voix l'article 6, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 6, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 6

    M. le président. L'amendement n° 51 corrigé de la commission tombe.
    M. Garraud a présenté un amendement, n° 131, ainsi libellé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « Il est inséré, après l'article 223-20 du code pénal, un article 223-21 ainsi rédigé :
    « Art. 223-21. - Les personnes physiques coupables de l'infraction prévue par l'article 223-12 encourent également les peines complémentaires suivantes :
    « 1° La suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire ; dans le cas prévu par l'article 221-6-1, la suspension ne peut être assortie du sursis, même partiellement, et elle ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ;
    « 2° L'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant cinq ans au plus ;
    « 3° L'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
    « 4° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;
    « 5° L'immobilisation, pendant une durée d'un an au plus, du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire ;
    « 6° La confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire. »
    La parole est à M. Jean-Paul Garraud.
    M. Jean-Paul Garraud. Par mesure de coordination avec l'introduction de l'article 223-12 dans le code pénal, l'article 223-21 que nous proposons d'insérer permettra aux juridictions de prononcer également des peines complémentaires à l'encontre des conducteurs ayant provoqué par leur imprudence une interruption de grossesse.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Favorable.
    M. le président. Et du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Avis également favorable, parce que cet amendement ancre encore davantage la répression du délit que nous avons instituée dans le dispositif de sécurité routière.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, contre l'amendement.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je souhaite, en intervenant contre l'amendement, achever les explications que j'avais entamées tout à l'heure.
    M. le ministre a cité l'arrêt de l'assemblée plénière de la Cour de cassation, que je voudrais citer à mon tour en donnant lecture du seul considérant qui nous préoccupe, pour bien montrer que notre débat n'est pas celui qu'a ouvert l'assemblée plénière. Celle-ci déclare que « le principe de la légalité des délits et des peines, qui impose une interprétation stricte de la loi pénale, s'oppose à ce que l'incrimination prévue à l'article 221-6 du code pénal réprimant l'homicide involontaire d'autrui soit étendue au cas de l'enfant à naître, dont le régime juridique relève de textes particuliers sur l'embryon ou le foetus ». Ce considérant montre bien que le débat sur l'amendement n° 24 ne concerne pas l'incrimination évoquée par la Cour.
    J'observe également que les explications que nous avons obtenues présentent une contradiction, puisque M. Garraud a indiqué qu'il ne voulait pas s'inquiéter de l'enfant à naître et que seule la situation de la mère le préoccupait, alors que la circonstance qui génère l'incrimination est la situation du foetus perdu. Qu'on le veuille ou non, cette contradiction est au coeur de notre débat.
    Je souhaite ajouter un deuxième point important au sujet de l'amendement n° 24 : dans l'incrimination, il a été fait référence, très logiquement, au consentement de l'intéressée. La question est donc de savoir si, dans les deux cas, celui de la responsabilité du corps médical, que nous venons d'instituer à l'article 223-11, et celui de la responsabilité de l'auteur de l'accident, qui fait l'objet de l'article 223-12, l'incrimination sera liée au consentement ou à l'absence de consentement de l'intéressée, c'est-à-dire de la mère.
    En termes purement juridiques, la question est la suivante : dans les éléments constitutifs du délit - la faute, le dommage et le lien de causalité entre les deux -, où se situe l'appréciation du consentement de la mère ? Ce problème d'une importance considérable n'est pas réglé juridiquement à ce jour, et l'ouvrage sur cet article du code pénal ne peut pas être considéré comme achevé par le simple vote du précédent amendement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 131.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Viollet et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 151, ainsi libellé :
    « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
    « Après l'article L. 231-3 du code de la route, il est inséré un chapitre 1er bis intitulé : "Comportement à l'approche d'un passage prévu à l'intention des piétons et comprenant un article L. 231-3-1 ainsi rédigé :
    « Art. L. 231-3-1. - Est puni d'une amende correctionnelle de 20 000 euros ou des peines prévues par l'article L. 413-1, le conducteur d'un véhicule à moteur qui aborde un passage prévu à l'intention des piétons à une vitesse supérieure à celle maximale autorisée. »
    La parole est à M. Jean-Claude Viollet.
    M. Jean-Claude Viollet. Monsieur le ministre, cet amendement concerne les passages pour piétons que l'on appelle souvent des « passages protégés », à tort, semble-t-il, puisque, chaque année, deux cents personnes sont tuées en les empruntant. Cette question a d'ailleurs été évoquée par notre collègue Armand Jung dans sa motion de renvoi en commission.
    L'ambiguïté des règles de priorité entre automobilistes et piétons est, pour partie, à l'origine de cette situation. En effet, les piétons sont actuellement tenus d'emprunter ces passages « lorsqu'il en existe un à moins de cinquante mètres » et « ne doivent traverser la chaussée qu'après s'être assurés qu'ils peuvent le faire sans danger immédiat, en tenant compte de la visibilité ainsi que de la distance et de la vitesse des véhicules ». De leur côté, les automobilistes sont « tenus de laisser le passage aux piétons engagés, notamment lorsqu'ils tournent pour s'engager sur une voie où se trouve un passage pour piétons ». Il leur est également interdit de dépasser à l'approche d'un passage pour piétons ou d'y stationner. Mais rien ne les oblige à ralentir systématiquement ni à s'arrêter pour laisser passer les piétons qui souhaitent traverser.
    Au moment où entrent en vigueur de nombreux plans de déplacements urbains, au moyen desquels de nombreuses collectivités cherchent à favoriser les modes de déplacement autres que la voiture, il est nécessaire de mieux assurer la sécurité des citoyens susceptibles d'être séduits par la marche. C'est pourquoi, à l'instar de ce qui existe dans plusieurs pays européens, nous proposons de modifier le code de la route pour donner un véritable statut de passage protégé aux passages pour piétons.
    Tel est le sens de cet amendement, qui assimile à un délit de grande vitesse le fait d'aborder un passage pour piétons à une vitesse supérieure à la vitesse maximale autorisée, afin d'inciter les conducteurs de véhicules à deux ou quatre roues à s'en approcher à allure modérée et à céder systématiquement le passage aux piétons qui y sont engagés ou qui, de manière visible, s'apprêtent à s'y engager. Cette disposition va également dans le sens d'une plus grande protection des personnes à mobilité réduite qui empruntent ces passages.
    Ces préoccupations n'échappent pas aux associations de prévention routière. Le bulletin Circuler autrement de mars-avril 2003, qui présente la campagne d'affichage de la prévention routière pour cette année, précise que l'un des slogans retenus est « 70 km/h en ville : un enfant tué sur un passage protégé. Refusons d'être des assassins ! ».
    La commission a rejeté mon amendement au motif qu'il était de nature réglementaire. Peu importe le moyen qui sera retenu, pourvu que l'on modifie le code de la route afin que les passages pour piétons soient de véritables passages protégés et que les automobilistes sachent qu'ils doivent y respecter les piétons ou les personnes à mobilité réduite, qui sont prioritaires lorsqu'ils traversent sur ces passages, qu'ils y soient déjà engagés ou qu'ils s'apprêtent à s'y engager.
    M. le président. Quel est l'avis du la commission ?
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Nous comprenons bien les préoccupations de M. Viollet, que nous sommes d'ailleurs nombreux à partager. La prudence est en effet nécessaire à l'approche des passages dits protégés.
    Cela étant, la commission a rejeté son amendement au motif, d'une part, que la disposition proposée est d'ordre réglementaire et, d'autre part, qu'elle recèle une contradiction interne. En effet, l'article L. 231-3-1 que nous sommes invités à adopter prévoit que l'auteur de l'infraction « est puni d'une amende correctionnelle de 20 000 euros ou des peines prévues par l'article L. 413-1 ». Or l'article L. 413-1 prévoit, lui, une amende de 3 750 euros. Ces deux amendes ne sont évidemment pas compatibles.
    J'ajoute qu'il est difficile d'apprécier la vitesse d'un véhicule au moment où il arrive sur un passage protégé.
    En raison de ces éléments d'incertitude, la commission a rejeté l'amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. J'ajouterai deux éléments à l'argumentation du rapporteur.
    D'abord, le refus de priorité par le conducteur d'un véhicule à un piéton régulièrement engagé dans la traversée d'une chaussée est déjà réprimé par l'article L. 415-11 du code de la route. La sanction est une contravention de quatrième classe.
    De plus, si le conducteur commet une imprudence caractérisée qui met le piéton en danger, il encourt également les peines de l'article 223-1 du code pénal. Je rappelle que, pour des faits de mise en danger d'autrui, le conducteur encourt un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende.
    Enfin, le rapporteur l'a indiqué, cette disposition est d'ordre réglementaire. Mais comme la préoccupation est légitime, nous en tiendrons évidemment compte dans les textes réglementaires que nous aurons à prendre.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 151.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI

    M. le président. J'ai reçu, le 19 mars 2003, de M. le Premier ministre, un projet de loi portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures de simplification et de codification du droit.
    Ce projet de loi, n° 710, est renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

3

DÉPÔT DE PROPOSITIONS
DE RÉSOLUTION

    M. le président. J'ai reçu, le 19 mars 2003, de M. Christian Philip, rapporteur de la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, une proposition de résolution sur le deuxième paquet ferroviaire (documents E 1932, E 1936, E 1937 et E 1941), déposée en application de l'article 151-1 du règlement.
    Cette proposition de résolution, n° 712, est renvoyée à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, en application de l'article 83 du règlement.
    J'ai reçu, le 19 mars 2003, de M. Didier Quentin, rapporteur de la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, une proposition de résolution sur la coopération judiciaire entre l'Union européenne et les Etats-Unis d'Amérique (15748/02/E 2210), déposée en application de l'article 151-1 du règlement.
    Cette proposition de résolution, n° 715, est renvoyée à la commission des affaires étrangères, en application de l'article 83 du règlement.

4

DÉPÔT DE RAPPORTS

    M. le président. J'ai reçu, le 19 mars 2003, de Mme Marie-Anne Montchamp, un rapport, n° 702, fait au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan, sur la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à étendre aux communautés d'agglomération créées ex nihilo le régime de garantie d'évolution de la dotation globale de fonctionnement des communautés d'agglomération issues d'une transformation (n° 696).
    J'ai reçu, le 19 mars 2003, de M. Emmanuel Hamelin, un rapport, n° 703, fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, sur le projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la rémunération au titre du prêt en bibliothèque et renforçant la protection sociale des auteurs (n° 248).
    J'ai reçu, le 19 mars 2003, de M. Lionnel Luca, un rapport, n° 704, fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, sur le projet de loi, adopté par le Sénat, portant ratification de l'ordonnance n° 2000-549 du 15 juin 2000 relative à la partie législative du code de l'éducation (n° 570 rectifié).
    J'ai reçu, le 19 mars 2003, de M. Claude Birraux, président de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, un rapport, n° 705, établi au nom de cet office sur « la qualité de l'eau et de l'assainissement en France ».
    J'ai reçu, le 19 mars 2003, de M. Jean Michel, un rapport, n° 706, fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, sur la proposition de loi de MM. Jean Michel et Jean-Marc Ayrault visant à jumeler chaque école française avec une école de l'Union européenne (n° 583).
    J'ai reçu, le 19 mars 2003, de M. Jean Proriol, un rapport, n° 717, fait au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, sur le projet de loi, modifié par le Sénat, portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction.

5

DÉPÔT DE RAPPORTS
SUR DES PROPOSITIONS DE RÉSOLUTION

    M. le président. J'ai reçu, le 19 mars 2003, de M. Jean-Marc Lefranc, un rapport, n° 707, fait au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, sur la proposition de résolution de MM. Guy Lengagne et Didier Quentin, rapporteurs de la délégation pour l'Union européenne, sur la sécurité maritime en Europe (COM [2002] 780 final/E 2186, COM [2003] 001 final/E 2201) (n° 645).
    J'ai reçu, le 19 mars 2003, de M. Michel Raison, un rapport, n° 708, fait au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, sur la proposition de résolution de M. François Guillaume, rapporteur de la délégation pour l'Union européenne, sur les négociations agricoles à l'Organisation mondiale du commerce (COM [1999] 331 final E 1285) (n° 599).

6

DÉPÔT DE RAPPORTS D'INFORMATION

    M. le président. J'ai reçu, le 19 mars 2003, de MM. Joël Beaugendre et Philippe Folliot, un rapport d'information, n° 701, fait au nom de la délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire sur les conséquences des politiques européennes sur l'aménagement du territoire.
    J'ai reçu, le 19 mars 2003, de M. Christian Philip, un rapport d'information, n° 711, déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, sur le deuxième paquet ferroviaire (rapport complémentaire).
    J'ai reçu, le 19 mars 2003, de MM. Pierre Lequiller, Marc Laffineur et Didier Quentin, un rapport d'information, n° 713, déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, sur des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution du 28 janvier au 14 mars 2003 (n°s E 2193 à E 2196, E 2203, E 2204, E 2206, E 2208, E 2209, E 2218 à E 2220, E 2222 à E 2224-1, E 2227 et E 2232) et sur les textes n°s E 1987, E 2085, E 2108, E 2177, E 2178, E 2181, E 2183 et E 2187.
    J'ai reçu, le 19 mars 2003, de M. René Couanau, un rapport d'information, n° 714, déposé en application de l'article 145 du règlement, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, sur l'organisation interne de l'hôpital.
    J'ai reçu, le 19 mars 2003, de M. Didier Quentin, un rapport d'information, n° 716, déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, sur la coopération judiciaire entre l'Union européenne et les Etats-Unis d'Amérique.

7

DÉPÔT D'UN AVIS

    M. le président. J'ai reçu, le 19 mars 2003, de Mme Valérie Pecresse, un avis, n° 709, présenté au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, sur le projet de loi, modifié par le Sénat, relatif à la bioéthique (n° 593).

8

COMMUNICATION RELATIVE
AUX ASSEMBLÉES TERRITORIALES

    M. le président. J'ai reçu, de M. le Premier ministre, une lettre, en date du 18 mars 2003, relative à la consultation des assemblées territoriales de la Polynésie française, de la Nouvelle-Calédonie et de Wallis-et-Futuna, sur le projet de loi de programmme pour l'outre-mer, déposé au Sénat.
    Cette communication sera transmise à la commission compétente.

9

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Aujourd'hui, à neuf heures, première séance publique :
    Suite de la discussion du projet de loi (n° 638), renforçant la lutte contre la violence routière :
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 689) ;
    Discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, n° 696, tendant à étendre aux communautés d'agglomération créées ex nihilo le régime de garantie d'évolution de la dotation globale de fonctionnement des communautés d'agglomération issues d'une transformation :
    Mme Marie-Anne Montchamp, rapporteure au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (rapport n° 702).
    A quinze heures, deuxième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    A vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à zéro heure cinquante-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
Textes soumis en application
de l'article 88-4 de la Constitution
retrait ou caducité

    Il résulte d'une lettre de M. le Premier ministre en date du 19 mars 2003 que sont devenus caducs les textes suivants :
N° E 1574 (COM [2000] 598). - Proposition de règlement du Conseil portant mode de gestion de contingents tarifaires pour certains poissons vivants et produits de la pêche originaires de Bulgarie.
N° E 1909 (COM [2001] 761). - Proposition de règlement du Conseil arrêtant les mesures autonomes et transitoires concernant l'importation de certains produits agricoles transformés originaires de Pologne.
N° E 1952 (COM [2002] 3-3). - Proposition de règlement du Conseil portant adoption de mesures autonomes concernant l'importation de poissons et de produits de la pêche originaires de la République de Hongrie.
N° E 1953 (COM 3-5). - Proposition de règlement du Conseil portant adoption de mesures autonomes concernant l'importation de poissons et de produits de la pêche originaires de la République de Slovénie.
N° E 1961 (COM 3-1). - Proposition de règlement du Conseil portant adoption de mesures autonomes concernant l'importation de poissons et de produits de la pêche originaires d'Estonie.
N° E 1969 (COM [2002] 114). - Proposition de règlement du Conseil portant adaptation de mesures autonomes concernant l'importation de poissons et de produits de la pêche originaires de la République de Pologne.
N° E 1970 (COM 115). - Proposition de règlement du Conseil portant adoption de mesures autonomes concernant l'importation de poissons et de produits de la pêche originaires de la République tchèque.
N° E 1983 (COM 140). - Proposition de règlement du Conseil portant adoption de mesures autonomes concernant l'importation de poissons et de produits de la pêche originaires de la République slovaque.

annexe au procès-verbal
de la 2e séance
du mercredi 19 mars 2003
SCRUTIN (n° 132)


sur l'amendement n° 24 de la commission des lois après l'article 2 du projet de loi renforçant la lutte conte la violence routière (création d'un délit d'interruption involontaire de grossesse)

Nombre de votants

55


Nombre de suffrages exprimés

55


Majorité absolue

28


Pour l'adoption

41


Contre

14

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (363) :
    Pour : 38 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 2. - MM. Joël Beaugendre et Jacques Bénisti.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (148) :
    Contre : 12 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Pour : 3 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Rudy Salles (président de séance).
Groupe communistes et républicains (21).
Non-inscrits (11).