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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU MERCREDI 21 MAI 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
3e séance du mardi 20 mai 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE
DE Mme PAULETTE GUINCHARD-KUNSTLER

1.  Infrastructures 2003-2020. - Suite du débat sur la déclaration du Gouvernement «...».
Mme Tokia Saïfi, secrétaire d'Etat au développement durable.

Rappel au règlement «...»

M. Maxime Gremetz, Mme la présidente, M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.

Reprise du débat «...»

M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
MM.
Rudy Salles,
Maxime Gremetz.

PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES

MM.
Maxime Gremetz,
Jean-Pierre Soisson,
Pierre Ducout,
Rodolphe Thomas,
Gilbert Biessy,
Alain Juppé,
Mme
Marie-Françoise Pérol-Dumont,
MM.
François Sauvadet,
Jacques Desallangre,
Marc-Philippe Daubresse,
Jean-Jack Queyranne,
Christian Philip,
Gérard Charasse,
Francis Hillmeyer,
Jean-Yves Le Drian,
Jean-François Mancel,
Mme
Paulette Guinchard-Kunstler,
MM.
Claude Gaillard,
Pierre Forgues,
Gilbert Meyer,
Bernard Derosier,
Claude Girard,
Joël Giraud,
Philippe Douste-Blazy,
Paul Giacobbi,
Pierre Cardo,
Jean-Yves Le Déaut,
Christian Estrosi,
Yves Cochet,
Serge Grouard,
Jean Proriol,
Didier Quentin,
Michel Hunault,
Mmes
Henriette Martinez,
Marie-Josée Roig,
M.
Jean Auclair,
Mmes
Marie-Anne Montchamp,
Nathalie Kosciusko-Morizet,
M.
Jean-Pierre Grand,
Mme
Bérangère Poletti,
MM.
Martial Saddier,
Jacques Le Guen.
Clôture du débat.
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.
2.  Dépôt d'une proposition de loi constitutionnelle «...».
3.  Dépôt d'un rapport «...».
4.  Dépôt de rapports d'information «...».
5.  Dépôt d'un avis «...».
6.  Dépôt d'un projet de loi adopté avec modifications par le Sénat «...».
7.  Dépôt d'une proposition de loi adoptée par le Sénat «...».
8.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE
Mme PAULETTE GUINCHARD-KUNSTLER,
vice-présidente

    Mme la présidente. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à vingt et une heures quarante-cinq.)

1

INFRASTRUCTURES 2003-2020

Suite du débat sur la déclaration du Gouvernement

    Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite du débat sur la déclaration du Gouvernement sur les infrastructures 2003-2020.
    La parole est à Mme la secrétaire d'Etat au développement durable.
    Mme Tokia Saïfi, secrétaire d'Etat au développement durable. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, je suis heureuse de représenter Roselyne Bachelot à ce débat et d'assister à vos échanges.
    La contribution des transports à la liberté de circulation des personnes, au développement des territoires et à la mondialisation des échanges est essentielle. Pour autant, un développement des transports non maîtrisé est source d'insécurité, de bruit, de pollution et de consommation d'espace et d'énergies non renouvelables, toutes nuisances dont les conséquences sont supportées par les usagers et les riverains des infrastructures : encombrements, accidents de la route, bruits des grandes infrastructures routières, ferroviaires et aéroportuaires, dégradation de la qualité de l'air, émission de gaz à effet de serre, effets de coupure, impact sur les milieux naturels et les paysages, et je pourrais citer bien d'autres nuisances.
    Ces problèmes d'environnement sont tout particulièrement aigus dans les zones de forte concentration des trafics comme les zones urbaines ou périurbaines, les corridors de transit, les franchissements alpins et pyrénéens, ou encore les zones proches des aéroports.
    Le découplage entre la croissance de l'économie et les impacts des transports est un enjeu crucial. D'un côté, l'accroissement du revenu de la population augmente la demande de mobilité, de l'autre, nos concitoyens souhaitent améliorer leur qualité de vie.
    En ce qui concerne le changement climatique, je vous rappellerai qu'en 2001 les transports contribuaient aux émissions françaises de gaz à effet de serre à hauteur de 28 %, le transport routier étant, pour sa part, responsable de 31 % des émissions de CO2. Le plus alarmant ne tient pas au fait que les transports soient responsables de plus d'un quart des émissions, mais bien à la progression forte qu'ils enregistrent, qui menace sérieusement la capacité de notre pays à remplir les engagements pris à Kyoto. Cette situation est d'autant plus préoccupante que, pour diviser par deux les émissions planétaires de gaz à effet de serre d'ici à 2050, comme nous engage à le faire le troisième rapport d'évaluation du groupe intergouvernemental d'experts sur le climat, un pays comme la France devra, dans le même temps, diviser par quatre ses émissions.
    Par ailleurs, les transports consomment des énergies fossiles et limitent considérablement notre indépendance énergétique.
    Face à ces constats, nous avons souhaité, en accord avec M. de Robien et M. Bussereau, que les transports soient intégrés à la stratégie nationale du développement durable que nous présenterons le 3 juin prochain. Les travaux extrêmement riches conduits dans ce cadre, tant au niveau de l'administration que des acteurs socio-économiques et des associations, ont permis d'élaborer un certain nombre de propositions d'actions concrètes et mesurables à mettre en oeuvre dès aujourd'hui.
    Ces actions concernent à la fois la gestion des réseaux, la demande de mobilité, la construction des infrastructures, la technologie. Elles visent l'ensemble des instruments disponibles pour orienter les comportements individuels ou l'organisation des filières logistiques. Je vous invite donc à saisir l'occasion de ce débat pour discuter de ces actions, les prolonger et leur offrir pour cadre une politique des transports adaptée qui permettra d'assurer une mobilité durable, respectueuse de notre environnement.
    Premièrement, cette politique devra résolument être intégrée, dans le sens où elle devra porter non seulement sur l'offre d'infrastructures qui n'est, en fait, qu'un volet parmi d'autres, mais également sur d'autres leviers essentiels, tels que la maîtrise de la demande de déplacements ou l'optimisation des réseaux existants. Pour ce faire, il conviendra de rechercher notamment une meilleure exploitation, une plus grande performance des opérateurs et la poursuite de l'innovation technologique.
    Deuxièmement, cette politique devra permettre d'infléchir structurellement les pressions qu'exercent les transports sur l'environnement, notamment sur la qualité de l'air, les émissions de gaz à effet de serre, le bruit, voire sur l'urbanisation de notre territoire.
    Troisièmement, cette politique devra accorder une priorité à l'exploitation des réseaux existants, les différents rapports commandés par le Gouvernement confirmant que notre niveau d'équipement est, somme toute, relativement satisfaisant. Cette priorité accordée à l'exploitation des réseaux existants doit se traduire dans les domaines de l'entretien, de la sécurité, mais aussi tout particulièrement du bruit, dont je rappellerai qu'il est actuellement vécu par nos concitoyens comme la principale nuisance environnementale.
    Quatrièmement, cette politique doit permettre de mettre en place un nouveau cadre d'instruction et d'élaboration des projets d'infrastructures, pour raccourcir et simplifier les procédures, mais aussi pour évaluer systématiquement les projets du point de vue de la collectivité, en prenant en compte l'ensemble des coûts, notamment sociaux et environnementaux, sans inciter à la déresponsabilisation financière des maîtres d'ouvrage.
    Cinquièmement, cette politique doit permettre la construction d'alternatives ferroviaires crédibles, maritimes et fluviales, au transport routier de marchandises. Cela suppose une démarche intégrée qui ne se limite pas à la seule question des infrastructures, mais repose également sur l'amélioration du service offert, la tarification, la location des sillons et l'aide aux chargeurs. Il faut aller bien au-delà de la seule approche des investissements en matière d'infrastructures. Malheureusement, une telle démarche fait aujourd'hui encore cruellement défaut.
    Sixièmement, cette politique devra permettre d'assurer une meilleure gestion des infrastructures, notamment par la mise en place d'une tarification de l'usage de la route, qui prenne en compte les nuisances occasionnées par les transports et qui oriente les comportements vers une mobilité plus durable. Pour ce faire, la tarification doit intégrer les aspects environnementaux, sociaux et territoriaux, et bien sûr des critères de compétitivité internationale. Mais elle doit aussi permettre le financement des modes de transport plus respectueux de l'environnement.
    Je vous propose de trouver dans ce débat une occasion de nous engager collectivement sur des objectifs environnementaux lisibles et quantifiables, tout particulièrement dans trois domaines.
    Le premier concerne les gaz à effet de serre. Je rappellerai, à cet égard, que le secteur des transports, dont le niveau d'émission a connu une croissance de plus de 211 % en 2001 par rapport à 1990, manifeste des évolutions très préoccupantes, qui effacent malheureusement au bilan plus des trois quarts des progrès enregistrés dans les secteurs de l'industrie et de l'énergie.
    Le deuxième domaine concerne les particules fines dont l'effet sanitaire délétère, en cas d'exposition chronique, est maintenant bien établi. Et même si la mise en oeuvre des normes Euro 3, 4 et 5 permet d'envisager des diminutions substantielles après 2005, je pense que l'on peut, d'ores et déjà, accélérer cette progression, grâce par exemple au soutien à la diffusion d'équipements de type filtres à particules.
    Le troisième domaine est celui du bruit, qui est, comme je le disais, la première nuisance environnementale perçue par les Français. Plus du quart de la population des centres-villes se trouve ainsi exposé à des niveaux sonores supérieurs au seuil de soixante-cinq décibels établi à Gênes. La résorption de ces points noirs doit constituer une priorité. C'est tout le sens des actions contre le bruit que souhaite engager Mme Roselyne Bachelot.
    Suite au débat auquel nous participons aujourd'hui, le Gouvernement définira une politique des transports qui permette une mobilité durable et respectueuse de l'environnement. Je souhaite qu'en la matière nos échanges soient le plus riche possible et conduisent à des propositions adaptées et novatrices. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. Je vais maintenant donner la parole est à M. le ministre de la fonction publique...

Rappel au règlement

    M. Maxime Gremetz. Rappel au règlement, madame la présidente !
    Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour un rappel au règlement.
    M. Maxime Gremetz. Je trouve qu'on méprise le Parlement !
    On nous annonce un débat très important, mais, après avoir entendu le ministre, nous avons dû écouter tous les présidents des commissions. Puis le ministre a demandé, pour des convenances personnelles, de répondre en fin d'après-midi aux intervenants alors que la discussion n'était pas terminée. C'est une curieuse façon de respecter les parlementaires ! Et ce soir, sans nous prévenir, on donne la parole à Mme la secrétaire d'Etat au développement durable, puis à M. le ministre de la fonction publique ! Qui s'exprimera encore après ? Quand allons-nous enfin pouvoir parler ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Alain Juppé. Le plus simple serait de vous arrêter.
    M. Maxime Gremetz. A cette allure, on y sera encore demain matin !
    Mme la présidente. Monsieur Gremetz, vous connaissez le règlement intérieur aussi bien que moi ! Le Gouvernement a la parole quand il le souhaite !
    M. Maxime Gremetz. Non ! La règle veut que le Gouvernement, dans un débat, ne réponde aux orateurs que lorsque tous ceux-ci se sont exprimés. Il n'y a pas deux sortes de parlementaires, ici !
    Mme la présidente. Monsieur Gremetz, j'applique le règlement intérieur.
    M. Maxime Gremetz. Non, ce n'est pas le règlement !
    Mme la présidente. Vous le connaissez aussi bien que moi, monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Je trouve qu'on se moque du Parlement !
    M. Christian Estrosi. Il a raison.
    M. Maxime Gremetz. Et on ose parler de débat ?
    Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.
    M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Madame la présidente, je vous remercie de me donner la parole.
    Je voudrais répondre très cordialement à M. Gremetz...
    M. Maxime Gremetz. N'en rajoutez pas !
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Je serai très bref !
    Mme la présidente. Monsieur Gremetz, le Gouvernement a seul la parole !
    M. Maxime Gremetz. Il y a vraiment de quoi se mettre en colère. Comme débat, on fait mieux !
    Mme la présidente. Poursuivez, monsieur le secrétaire d'Etat !
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Je voudrais répondre très cordialement à M. Gremetz, dont je connais le tempérament vif et républicain,...
    M. Maxime Gremetz. C'est ça !
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. ... qu'il est normal qu'à l'issue d'une première séance de débat le ministre réponde aux présidents des commissions qui se sont exprimés en tant que tels.
    M. Maxime Gremetz. Cela ne s'est jamais fait !
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur Gremetz, je vous ferai observer que nous sommes dans un genre nouveau que le gouvernement précédent ne pratiquait pas : le débat d'orientation.
    M. Maxime Gremetz. Le débat n'est pas terminé !
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Et dans un débat d'orientation, des règles différentes s'appliquent. Il est intéressant que le Gouvernement, républicain, demande son avis au Parlement sur les grands sujets d'infrastructures. Nous ne sommes pas dans une organisation classique avec un texte du Gouvernement, des articles et des amendements. Nous sommes dans un autre cadre, où les députés expriment leur sentiment, qui sera entendu par le Gouvernement et où il est normal que, de temps en temps, pour donner une sorte de respiration, celui-ci, répondant aux orateurs, expose son point de vue.
    M. Maxime Gremetz. Elle est forte, la respiration !
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Nous avons maintenant devant nous une longue nuit passionnante et républicaine...
    M. Maxime Gremetz. Allez prendre votre respiration dans les manifs !
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. ... pour vous entendre, monsieur Gremetz. J'espère que nous vous entendrons le plus rapidement possible, après que M. Delevoye aura pu s'exprimer. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Reprise du débat

    Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
    M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, cher monsieur Gremetz - avec votre autorisation, si je comprends bien, mais comme nous parlons de transports, j'apprécierai aussi les vôtres (Sourires) -, je voudrais vous faire part de quelques réflexions après que le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer a clairement exposé les termes du débat.
    Je me réjouis en premier lieu que ce débat ait pu être précédé par deux rapports dont je tiens à souligner l'excellence. En second lieu, j'aimerais vous préciser l'état d'esprit qui est le nôtre.
    Débattre uniquement des infrastructures serait aujourd'hui extrêmement réducteur car elles ne valent que par les services qu'elles apportent.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Très juste !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Nous entrons dans une société de service. Il nous faut donc réfléchir à une question fondamentale : quelle économie logistique et quels services la France veut-elle assumer grâce aux infrastructures dont elle veut se doter pour relever les défis de l'économie du xixe siècle ?
    Il nous faut reveler un défi de compétitivité, un défi de cohérence des territoires, un défi de complémentarité et de synergie territoriale. Nous devons aussi répondre à une interrogation politique majeure : est-ce l'offre d'infrastructures qui modifie la demande ou est-ce la demande des services logistiques qui structure notre offre d'infrastructures ? Cette alternative laisse toute sa place à la volonté politique.
    Par ce débat - et c'est ce qui en rehausse l'intérêt -, nous retrouvons la grandeur, la responsabilité, la noblesse du politique d'assumer des choix tout en conciliant l'efficacité d'une économie de services et d'autres paramètres pondérateurs tels que l'environnement et la sécurité, sujets qui ont été déjà largement évoqués.
    On voit bien que l'absence de volonté politique, dont nous subissons aujourd'hui les effets,...
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Eh oui !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. ... a fait que la problématique financière de la suppression du non-stock a fait exploser les besoins de croissance du trafic. Ainsi, nous commençons à observer des phénomènes de ralentissement de croissance induits par la saturation des trafics et des infrastructures.
    Nous devons donc concilier des exigences nouvelles du monde moderne avec des perspectives d'accroissement de trafic, ce qui pose des problèmes redoutables. Nous devons adopter une approche globale et cohérente - il n'y a pas, d'un côté, le besoin de routes et le besoin de fer et, de l'autre, le besoin de liaisons aériennes - et réfléchir à des schémas prospectifs qui nous permettent de développer de la façon plus efficace qui soit une stratégie de développement de nos territoires.
    Au niveau de la DATAR, nous avons eu le souci d'inscrire notre réflexion dans une stratégie délibérément européenne. Au moment où l'espace européen est en train de s'agrandir, nous devons être bien conscients que l'un des défis politiques majeurs est le suivant : l'Europe sera-t-elle capable de développer une indépendance de taux de croissance par rapport au monde américain ? La mobilité infra-européenne et les échanges infra-européens dépendront directement des qualités de maîtrise des flux infra-européens. Il importera de réfléchir, probablement au niveau de l'Europe, aux moyens de financement nécessaires au développement des flux infra-européens, ce qui posera le problème des flux infra-nationaux et de la politique des transits.
    En deuxième lieu, toujours au niveau européen, nous devrions engager une réflexion sur la nécessité de parler le même langage. Lorsque l'on considère la valeur accordée à l'avenir, à l'environnement, aux taux d'actualisation et de rentabilité socio-économique, à la contribution respective du contribuable et de l'usager, au financement des systèmes et des infrastructures, on voit bien qu'il existe des facteurs de distorsion de concurrence, d'analyses et de temps de retour d'investissement politique.
    Nous devrions, après la transposition des décisions communautaires, être en mesure de tenir un vrai débat européen, en parlant le même langage. Il nous faudrait également mettre en place un observatoire européen des péages, qui permette de savoir très concrètement pourquoi un certain nombre de décisions politiques s'imposent très naturellement dans certains pays, et pas dans d'autres.
    La politique des transits soulève à cet égard des questions importantes quant au financement des infrastructures : faut-il distinguer le financement des infrastructures et la capacité de les exploiter ? Le sujet mérite d'être approfondi ; nous pourrions ainsi définir les assises d'un financement de dimension européenne et distinguer les utilisations à l'échelle européenne de celles qui ont un caractère infra-européen, voire national.
    Quant aux processus de décision, il est évident que la réactivité, c'est-à-dire le raccourcissement du délai entre la prise de décision politique et l'action politique, est aujourd'hui tout à fait déterminante. L'audit a clairement stigmatisé les insuffisances en ce domaine. Il n'est pas raisonnable que des projets d'équipements majeurs doivent cheminer quatorze ans, voire dix-sept ou vingt, entre leur conception et leur mise en service.
    En troisième lieu, nous devons réfléchir à la très grande cohérence qui s'impose en matière de complémentarité des territoires.
    Personne ne peut imaginer que la réflexion sur le développement de la façade maritime et du port du Havre puisse s'engager sans une articulation avec l'hinterland. Puisque nous sommes tous convaincus que le développement des territoires repose sur une main-d'oeuvre qualifiée, des infrastructures de qualité et une métropole de dimension régionale ou internationale, la mise en réseau de nos « métropôles » ne doit pas apparaître comme un privilège accordé à certains territoires par rapport à d'autres, mais comme une synergie collective qui induit une logique « gagnant-gagnant ».
    Enfin, n'oublions pas que les infrastructures ne sont que des moyens, et qu'il convient de garder toujours présent à l'esprit l'objectif que nous visons : le développement économique de nos territoires. Or, parler d'infrastructures sans aborder le problème du financement est inconcevable, et nous avons aujourd'hui besoin, comme le soulignait le ministre de Robien, de trouver de nouveaux moyens de financement. A cet égard, un débat intelligent doit mettre en évidence des éléments qui renouvellent l'alternative classique entre l'usager et le contribuable. Nous avons demandé à la DATAR de réfléchir sur la notion, toute relative, de la gratuité et sur l'arbitrage concernant les poids-lourds. C'est ainsi que nous avons proposé d'envisager le péage par tonnes kilométriques, géré par GPS, que les Allemands sont en train de tester. C'est un sujet que nous ne pouvons laisser de côté.
    Mais il nous faut en même temps souligner la dimension européenne du problème. Le financement européen de la politique des transports relève, à l'heure actuelle, du seul réseau transeuropéen, dont les budgets sont manifestement trop faibles. Aussi la France, dans le mémorandum sur l'avenir des politiques régionales de l'Union européenne, a-t-elle posé très clairement le principe d'une cohérence entre la politique des transports et la politique régionale.
    Dans cette perspective, le FEDER et autres fonds structurels peuvent être des éléments privilégiés. Nous avons rappelé la semaine dernière, lors d'une réunion des ministres des transports et de l'aménagement du territoire, que les fonds structurels et de cohésion territoriale européens, certes destinés au rattrapage des écarts de développement entre les régions, doivent aussi faciliter la mobilité infra-européenne, élément très important du développement économique qui doit permettre à l'espace européen de peser face au poids croissant du continent chinois et à la puissance américaine et de relever un certain nombre de défis. Ce développement passera en effet par la qualité des infrastructures dont l'Europe entend se doter.
    On voit bien que l'intervention financière de l'Europe pourrait à la fois soutenir des projets clés, des stratégies régionales et accompagner des grands projets. Les réseaux de TGV ne peuvent se concevoir uniquement à l'échelle française : ils doivent intégrer une nouvelle perspective. Conçu à l'image de l'Etoile de Legrand, dont les branches convergent vers Paris, ce réseau se structure désormais en un véritable axe européen - Gênes-Barcelone, Hambourg-Barcelone, Londres-Budapest. Il est de même du réseau d'aéroports, dont la loi de décentralisation en préparation confirme la gestion pour le compte de l'Etat.
    Il y a là, déjà visible, dans la stratégie des opérateurs, un réseau de plates-formes de correspondance spécialisées vers des destinations et des types de vols bien particuliers. C'est donc à une échelle nouvelle, véritablement européenne, que nous devons désormais penser l'irrigation de notre espace national.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Tout à fait d'accord !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Il y a cependant un élément, qui a été souligné dans le rapport d'audit mais auquel nous n'avons pas prêté une attention suffisante : la réflexion sur les infrastructures de dimension européenne doit être accompagnée d'une réflexion sur la dimension européenne, voire internationale, des opérateurs.
    Avoir laissé la poste allemande acquérir une dimension internationale en tant qu'affréteur et opérateur de logistique au détriment de la poste française est un crime contre l'avenir !
    M. François Brottes. Supprimez moins d'emplois !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Après avoir laissé les centres de décision à l'étranger pour réaliser des économies de logistique, nous devons adopter une approche globale sur les infrastructures, mais aussi sur les décideurs dans l'économie de la logistique.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Le ministre a raison !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Mesdames, messieurs les députés, permettez-moi, en conclusion, de rebondir sur la question de la stratégie régionale pour vous exprimer une conviction.
    Il est hors de question d'imaginer d'opposer Paris et la province, la métropole et la périphérie. Nous voulons au contraire valoriser la complémentarité des régions au sein de la communauté nationale et non les mettre en concurrence. C'est à travers cette synergie que nous tirerons tout le profit de ce débat afin de doter la France des infrastructures qui lui permettront demain de peser de plus en plus dans la compétition internationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Rudy Salles.
    M. Rudy Salles. Madame et messieurs les ministres, je tiens à vous féliciter pour l'organisation de ce débat. En effet, les choix que nous serons amenés à faire pour doter la France des grandes infrastructures engageront durablement notre pays, son développement comme ses finances. C'est pourquoi votre volonté d'écoute de la France et de ses élus à la veille de décisions stratégiques capitales doit être saluée.
    Je m'efforcerai de ne pas régionaliser mon propos - alors même que je l'illustrerai de quelques exemples relatifs à ma propre région - car je crois que le sujet est d'intérêt général et qu'il concerne tout notre pays.
    Je souhaite mettre en exergue la nécessité de développer l'intermodalité entre le transport aérien et le rail pour parvenir à une politique d'aménagement du territoire efficace et adaptée. En outre, je tiens à souligner la nécessité de rétablir l'équité entre toutes les régions dans le domaine des déplacements autoroutiers.
    Je commencerai par le transport aérien.
    Vous avez eu la sagesse de remettre en cause le projet de création d'un troisième aéroport dans la région Ile-de-France et vous avez eu raison. La question qu'il faut se poser est de savoir si, face au défi de l'augmentation régulière du trafic aérien, la seule réponse réside dans la création de ce nouvel aéroport ou s'il existe une alternative. Je pense pour ma part que la création de cette troisième plate-forme répond une fois de plus au vieux réflexe centralisateur que l'on peut qualifier de « mal français ».
    Que se passe-t-il en dehors de nos frontières ? Certains pays tels que l'Allemagne, l'Italie ou l'Espagne ont réussi à ouvrir plusieurs portes d'entrée aux longs courriers, évitant ainsi une concentration excessive et permettant du même coup le développement de plates-formes régionales avec des effets induits positifs pour l'économie de ces régions.
    Nous pourrions ainsi imaginer que, en dehors des aéroports parisiens, les grands aéroports régionaux que sont ceux de Nice, de Toulouse, de Marseille, de Lyon, de Bordeaux ou encore ceux de Nantes ou de Strasbourg, pourraient disposer de lignes internationales longs courriers permettant des correspondances nationales ou européennes. Bien entendu, il faut que les défenseurs de l'environnement soient rassurés sur le fait que de telles dispositions n'apporteraient pas leur lot de nouvelles nuisances. Il faudrait envisager, par exemple, comme c'est déjà le cas dans certains pays - en Italie notamment -, la fermeture des aéroports de nuit, exception faite pour les vols sanitaires d'urgence ou de service public comme celui de la poste.
    Par ailleurs, il convient de développer la complémentarité entre le rail et l'aérien - c'est le deuxième volet de mon intervention.
    La France est l'inventeur européen du train à grande vitesse, celui-ci devant se développer en réseau pour pouvoir mettre en relation les régions françaises entre elles ou avec la capitale. Il doit également à terme raccourcir les distances en Europe. De ce fait, les courts et moyens courriers aériens pourraient-ils peu à peu être remplacés par des liaisons TGV ? Ainsi donc, par une intermodalité bien comprise, les correspondances entres les vols longs courriers et les TGV devraient pouvoir redessiner le transport collectif dans notre pays et, demain, en Europe.
    Permettez-moi d'illustrer mon propos par l'exemple de Nice, que je connais bien. L'aéroport de Nice est le deuxième de France, avec près de 10 millions de passagers. Son niveau de saturation, qui se situe aux alentours de 16 millions de passagers, devrait être atteint dans les prochaines années. L'arrivée du TGV à Nice permettrait de diminuer ou de fermer un certain nombre de lignes de courts et de moyens courriers, mais de développer en revanche les longs courriers à destination des Etats-Unis, du Canada, du Moyen et de l'Extrême-Orient, de l'Amérique du Sud ou de l'Afrique. Pour une région touristique comme la Côte d'Azur, cela serait bien entendu un plus incontestable et ferait de l'aéroport de Nice une plaque tournante à forte valeur ajoutée.
    Je rappelle que la ligne TGV rapprocherait cette région excentrée des principaux pôles avec lesquels elle doit développer ses échanges. Elément constitutif de l'arc méditerranéen, cette ligne mettrait Nice à trois heures trente de Paris, Lyon à une heure et demie, Marseille à cinquante minutes, Barcelone à trois heures, sans compter que le prolongement d'un tel projet vers l'Italie compléterait cette nouvelle architecture ferroviaire, qui ne serait plus construite seulement en étoile depuis Paris, mais, enfin, en transversale entre les grands pôles urbains régionaux.
    Il est donc prioritaire de s'orienter dans cette direction et de l'envisager dans l'intermodalité que je viens de décrire.
    Il en est de même pour le transport des marchandises. Le ferroutage est la solution pour délester le trafic routier lorsqu'il arrive à saturation, comme c'est le cas sur l'arc méditerranéen.
    J'en viens maintenant au dernier volet de mon propos : les déplacements autoroutiers.
    Je voudrais vous rappeler, madame, messieurs les ministres, qu'en ce domaine les injustices sont flagrantes. Certaines régions bénéficient de la gratuité de larges portions du réseau autoroutier, alors que d'autres pas du tout. La plupart des grandes villes bénéficient de la gratuité des autoroutes dans une proportion de quinze à soixante kilomères, avec en prime l'éclairage public, alors que certaines n'en bénéficient absolument pas.
    M. Pierre Cohen. C'est vrai !
    M. Rudy Salles. Je citerai à nouveau Nice, qui ne bénéficie que de trois kilomètres gratuits et dont l'éclairage public est limité à quinze kilomètres alors que le tracé sinueux et dangereux de l'autoroute A 8 imposerait l'extension d'un tel dispositif.
    On peut comprendre que, pour construire de nouveaux programmes, il faille faire appel au péage, mais alors il faut, au nom de l'équité, soit généraliser ce système sans aucune exception ou bien alors généraliser les exceptions. En effet, il n'est plus concevable que certaines portions d'autoroute situées en zone urbaine - je pense notamment au contournement de Nice, dont l'amortissement est arrivé à terme - continuent d'être payantes pour pouvoir financer de nouveaux programmes autoroutiers, alors que d'autres n'ont jamais été payantes et qu'elles ne contribuent donc pas au financement du développement du réseau. Il y a là une inégalité inacceptable à laquelle il convient de remédier.
    Il faut pour cela définir de nouvelles modalités de péage car les barrières actuelles ne correspondent plus aux nécessités du trafic. Comment se fait-il, par exemple, que les véhicules disposant du télépéage soient encore obligés de s'arrêter avant que les barrières ne se lèvent alors que d'autres pays, comme les Etats-Unis, les utilisateurs de ce dispositif passent les barrières à vitesse de croisière ? A l'heure du GPS, il est temps de trouver des solutions qui permettent de fluidifier le trafic et de rendre nos autoroutes plus performantes et donc plus sûres.
    Enfin, pour conclure mon propos, je voudrais aborder l'inévitable question du financement de ces infrastructures. Vous avez, monsieur le ministre, déclaré la semaine dernière qui si l'on n'équipe pas l'Europe, alors il n'y aura pas d'Europe. C'est là que réside la réponse aux problèmes de financement. La position centrale de la France implique qu'elle soit dotée d'infrastructures capables d'absorber non seulement un trafic national mais aussi et de plus en plus un trafic européen. Comment aller d'Angleterre en Espagne, d'Espagne en Italie ou encore de l'Allemagne au Portugal, si ce n'est en traversant la France ? Les fonds structurels européens doivent donc être sollicités à la hauteur des contraintes qui sont les nôtres. C'est pourquoi je propose que ce débat ne se limite pas à notre représentation nationale mais que les décisions qui seront prises demain le soient avec nos partenaires européens. Prolonger le TGV jsuqu'à Nice n'implique-t-il pas de relier demain Barcelone à Gênes et de solliciter en conséquence les financements de Barcelone et de Gênes ?
    Voilà les quelques observations que je tenais à évoquer dans ce débat et sur lesquelles je souhaiterais connaître la position du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz pour cinq minutes.
    M. Maxime Gremetz. Vous n'allez pas commencer par me limiter.
    Mme la présidente. C'est le temps de parole qui vous est imparti.
    M. Maxime Gremetz. De deux ministres, on est passé à quatre : cela a doublé le temps de parole du Gouvernement.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Ne perdez pas de temps.
    (M. Rudy Salles remplace Mme Paulette Guinchard-Kunstler au fauteuil de la présidence).

PRÉSIDENCE DE M. RUDY SALLES,
vice-président


    M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Ah, c'est vous ?
    M. le président. Eh oui ! (Rires.)
    M. Maxime Gremetz. Il faut prévenir !
    M. le président. Vous êtes prévenu. Continuez maintenant car, sinon, c'est autant de pris sur votre temps de parole.
    M. Maxime Gremetz. J'ai fait le calcul, en fait de grand dialogue, sur quatre heures de discussion, il y a eu deux heures dix pour les ministres.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Ne vous plaignez pas, c'est qu'ils ont quelque chose à dire !
    M. Maxime Gremetz. Mais on les a seulement écoutés, on ne les a pas entendus. Un peu de calme, monsieur Ollier. (Rires.) Vous vous énervez pour rien.
    Sous le précédent gouvernement, grâce à la pression permanente de quelques élus picards obstinés, la Picardie et plus particulièrement le département de la Somme semblaient pour une fois ne pas avoir été oubliés par l'Etat en matière d'infrastructures de transport : autoroute A 24, canal à grand gabarit Seine-Nord, liaison ferroviaire Creil-Roissy et troisième aéroport international.
    Un député du groupe de l'Union pour mouvement populaire. Quel rêve !
    M. Maxime Gremetz. La solidarité nationale allait enfin largement bénéficier à une région ô combien ! délaissée, et les départements de la Somme et de l'Aisne allaient sortir de leur marasme social et économique.
    Quelle ne fut pas notre surprise, monsieur le ministre, lorsque coup sur coup vous annonciez la suspension du projet de troisième aéroport international et commandiez un audit sur l'ensemble des projets d'infrastructure de transports décidés par le précédent gouvernement.
    Et quelle n'a pas été notre tristesse d'apprendre que votre audit émet un avis négatif, contrairement à ce que vous avez dit, sur « le choix du fuseau de tracé du canal Seine-Nord » arrêté par le précédent ministre des transports le 6 avril 2002, pour une mise en service en 2004, et qu'il affirme n'être pas en mesure de se prononcer sur le projet de ligne à grande vitesse Paris-Amiens-Calaistunnel sous la Manche-Londres.
    Nous avons néanmoins gardé un petit espoir.
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Ce n'est pas la peine !
    M. Maxime Gremetz. D'abord, la DATAR de façon plus intelligente, estime que le canal Seine-Nord doit être réalisé sans tarder et qu'il se justifie tout à fait économiquement.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Elle n'a rien dit de tel !
    M. Maxime Gremetz. Ensuite, votre audit est moins réservé sur l'autoroute A 24 Amiens-frontière belge inscrite aux schémas de service par votre prédécesseur depuis 2000.
    Mais nous sommes devenus carrément euphoriques (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Bravo ! Ca nous change un peu !
    M. Maxime Gremetz. ... quand, dans un satisfecit global, que modestement vous vous adressez dans la presse régionale - j'ai mes fiches pour vous apporter des preuves, ça vaut vraiment le détour -, ...
    M. Hervé Mariton. Des fiches ?
    M. Maxime Gremetz. ... vous avez annoncé le 9 mai dernier, pour le premier anniversaire de votre arrivée au ministère, une multitude d'infrastructures de transport pour le département de la Somme. J'ai cru rêver !
    M. Hervé Mariton. Une fête !
    M. Maxime Gremetz. Au journaliste du Courrier picard qui souhaitait savoir si, dans le cadre de votre action ministérielle, vous poussiez quelques dossiers picards, vous avez répondu : « Cela permet de ressortir des dossiers que mon précédesseur avait enterrés, comme le canal Seine-Nord. » Bravo la DATAR, n'est-ce pas ? « Cela permet de déterrer aussi la liaison directe Amiens-Lille par autoroute. Cela permet de déterrer des dossiers ferroviaires et de les accélérer en ce qui concerne la liaison et l'interconnexion TGV à Roissy. » - Sept kilomètres toujours à réaliser - « Cela permet de déterrer le dossier du fret ferroviaire Le Havre-Amiens-Nesle-Est de la France. » - Vous comprenez pourquoi les autres régions n'ont rien : tout va à la Picardie, avec ça ! (Rires.)
    Sans vouloir polémiquer sur vos faux talents de terrassier (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour mouvement populaire),...
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Vous n'avez pas le temps de polémiquer !
    M. Maxime Gremetz. ... je souhaite qu'aujourd'hui, pour les Picardes et les Picards,...
    M. le président. Vous devez conclure, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Les ministres en ont pris à leur aise. Moi, je vais faire de même. (Rires.) Il n'y a pas de raison.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. L'article 33 de la Constitution donne la possibilité aux ministres de parler quand ils le veulent et le temps qu'ils veulent. Lisez-le !
    M. Maxime Gremetz. Absolument ! Seulement, ils ne doivent pas répondre aux intervenants avant que la discussion générale ne soit terminée.
    M. le président. Concluez, monsieur Gremetz !
    M. Maxime Gremetz. Il y a des règles à respecter dans ce parlement.
    M. le président. Concluez !
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, vous venez d'arriver, vous êtes en pleine forme. (Rires.) Mais depuis le début, nous avons subi bien des choses !
    Donc, monsieur le ministre, sans vouloir polémiquer (Sourires),...
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Vous l'avez déjà dit !
    M. Maxime Gremetz. Il vaut mieux se répéter que se contredire !
    Monsieur le ministre, je souhaite que vous confirmiez l'engagement pris lors du conseil municipal du 3 octobre dernier de la ville d'Amiens d'obtenir enfin une ligne grande vitesse pour Amiens, seule capitale régionale à ne pas être desservie par le TGV.
    M. Pierre Forgues et M. Jean Diébold. Il y en a d'autres !
    M. Maxime Gremetz. Voilà, monsieur le ministre, puisque nous avons l'occasion de nous parler face à face, qui est clair et précis. Maintenant, j'espère que nous aurons des réponses claires et précises. Sinon, rien ne sert de faire des promesses aux Picards qui devront malheureusement attendre très longtemps. En effet, vous avez beaucoup parlé de financement mais votre budget a encore baissé, des crédits importants ont été gelés. Pour les investissements si j'ai bien compris, ce sera aux usagers de mettre la main à la poche.
    M. Hervé Mariton. Il faut bien prendre l'argent là où il est ! (Sourires.)
    M. le président. Merci, monsieur Gremetz...
    M. Maxime Gremetz. Les gens sont donc prévenus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    M. le président. Merci...
    M. Maxime Gremetz. Vous avez une bien rude tâche, monsieur le président. (Sourires.)
    M. le président. Et je l'assume. (Sourires.)
    La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.
    M. Jean-Pierre Soisson. Monsieur le président, madame et messieurs les ministres, mes chers collègues, c'est au nom de l'association des régions du Grand Est, dont je suis le président, que je m'exprime à cette tribune, conformément au mandat qu'elle m'a donné lors de sa dernière assemblée générale. (Protestations sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    Je ne veux pas entrer dans la querelle stérile : « Mon TGV est meilleur que le tien » et je dis cela notamment à l'intention d'Alain Juppé. (Rires.) Il ne s'agit pas de faire un seul TGV, mais d'en faire au moins deux à la fois. Notre problème est en effet de trouver les moyens de conduire et donc de financer - monsieur de Robien, je vous ai bien entendu - une politique plus ambitieuse des infrastructures de transport.
    En 2002, les dépenses consacrées aux grands projets d'infrastructure, Etat et collectivités réunis, ne représentent que 0,8 % du produit intérieur brut alors qu'en Europe elles se situent en moyenne à 1,5 %. Quant aux investissements ferroviaires, ils sont au plus bas depuis trois ans.
    M. Pierre Forgues. Eh bien !
    M. Jean-Pierre Soisson. Or, les projets reconnus comme prioritaires, ou recensés comme tels par l'audit demandé par le Gouvernement, nécessitent un apport de fonds publics de l'ordre de 15 à 18 milliards d'euros d'ici à 2020 et la dette de Réseau ferré de France s'élève à 25 milliards d'euros. D'ici à 2020, nous devrons donc trouver 40 milliards d'euros !
    Dans ces conditions, comment conduire cette politique ambitieuse, qui est notre objectif commun, tout en maîtrisant la dépense publique, autre objectif de la majorité ?
    Nous réaliserons les infrastructures que nous appelons de nos voeux dans toutes les régions, et que le pays attend, seulement si nous sommes capables de mobiliser des ressources nouvelles faisant appel aux usagers plus qu'aux contribuables. Notre débat est clair à ce sujet. Et une conclusion s'impose, monsieur le ministre : la solution ne passera pas par la création de telle ou telle ressource, mais par l'ensemble des ressources qui ont été envisagées. Il vous faudra pianoter sur toute la gamme : l'augmentation progressive des péages ferroviaires, la mise en place d'une redevance domaniale pour les poids lourds sur le modèle allemand - avec cependant deux ans de mise en oeuvre et seulement 400 millions d'euros de recettes -, le rééquilibrage de la TIPP sur le gazole pour les véhicules légers. A ceux qui hésitent devant une telle augmentation,...
    M. Hervé Mariton. Oui, c'est trop !
    M. Jean-Pierre Soisson. ... je citerai un chiffre : un centime d'augmentation de cette taxe représente 200 millions de recettes supplémentaires. Quand il s'agit de trouver 40 milliards d'euros, une telle mesure ne peut être écartée.
    M. Hervé Mariton. Si !
    M. Jean-Pierre Soisson. Pensons encore à la mise en place de taxes de zone aux frontières pour la traversée des Alpes et des Pyrénées...
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    M. Jean-Pierre Soisson. ... ou à l'ouverture du capital des sociétés d'autoroutes pour alléger le poids de la dette de Réseau ferré de France.
    Je vous le dis, messieurs les ministres, c'est un point essentiel : soyez le premier gouvernement à régler le problème de la dette de Réseau ferré de France. Sans doute la privatisation ou l'ouverture progressive du capital des sociétés d'autoroutes pourra vous y aider...
    M. Jacques Desallangre. Voyons donc !
    M. Jean-Pierre Soisson. ... mais vous ne pouvez pas laisser s'accumuler une dette de 25 milliards.
    M. Maxime Gremetz. Quelle langue de bois !
    M. Jean-Pierre Soisson. Et l'honneur du Gouvernement sera de nous sortir de cette véritable impasse.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Très bien !
    M. Jean-Pierre Soisson. Pour dégager 1 milliard d'euros supplémentaires chaque année, toutes les ressources doivent donc être utilisées.
    J'ajoute que je fais mien le jugement de la DATAR sur le caractère inapproprié du calcul du taux de rentabilité des TGV. Réseau ferré de France a fixé le taux d'actualisation à 8 %. Or, si nous allégeons sa dette, ce taux pourrait être réduit d'un voire deux points en compensation. Pour le TGV Rhin-Rhône, une diminution de 8 % à 7 % représenterait ainsi un gain de 150 millions d'euros.
    Je n'aborderai pas ici tous les grands dossiers du Grand Est, vous les connaissez, messieurs les ministres, et je vous enverrai une note à ce sujet.
    Au nom de tous les élus de l'association, de Mme le maire de Strasbourg aux présidents des conseils régionaux d'Alsace-Lorraine, de Lorraine, de Franche-Comté et de Champagne-Ardenne, en passant par mes collègues ici présents, je vous dirai seulement pour conclure : créez des ressources nouvelles et faites-le rapidement car la France ne peut pas attendre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre Ducout.
    M. Pierre Ducout. Monsieur le président, messieurs les ministres, chers collègues, en s'exprimant dans ce débat, chacun adopte une vision à la fois nationale, européenne et locale des problématiques et des enjeux liés aux infrastructures de transport, issue de son parcours personnel. La mienne associe la réalisation et le suivi des grandes infrastructures portuaires et routières au niveau national à une perception particulière des nuisances, au niveau local comme au sein du Conseil national du bruit.
    Notre débat s'inscrit après la publication d'un audit analysant les projets d'infrastructure, leur coût, leur intérêt, leur rentabilité, leur financement, en proposant un ordre de priorité, et après celle d'un rapport de la DATAR suggérant d'améliorer l'accessibilité des territoires, de se placer dans une perspective européenne et de développer l'intermodalité.
    Dès lors, il paraît étonnant que nos ministres, à l'occasion du colloque parlementaire qui s'est tenu en mars sur ce sujet, aient déclaré qu'on pourrait craindre le pire pour le débat d'aujourd'hui si chacun ne s'exprimait que pour soutenir les projets de sa région ou s'attacher à son projet.
    Le diable serait dans les détails : dans notre France encore jacobine, parler des enjeux de la capitale est toujours d'intérêt national quand parler des enjeux régionaux, voire provinciaux, peut souvent sembler déplacé, surtout quand c'est avec un accent périphérique, voire ultrapériphérique au sens de la nouvelle Europe.
    Il est certain que la perception des problématiques et des priorités n'est pas forcément la même selon l'échelon où l'on se place, européen ou infrarégional ; selon que l'on oriente sa lunette suivant l'axe ouest-est, nord-sud ou suivant la diagonale de la « banane bleue » ; selon que l'on lit les grands quotidiens nationaux - dans les colonnes desquels les régions riches de l'Est, du Nord-Est et du Centre-Est, celles de la « banane bleue », ont rappelé récemment l'urgence de leurs projets dans une Europe qui s'ouvre à l'Est - ou les débats ouverts dans les grands quotidiens régionaux.
    Tout cela est constructif. Nous connaissons tous notre histoire, nous savons que les infrastructures ne sont plus faites pour envoyer les armées aux frontières, du Sud d'abord, de l'Est ensuite. Les réseaux en étoile autour de Paris, ferroviaires ou autoroutiers, avaient leur logique, ils ont été complétés depuis. Admirons la mobilisation politique qui a permis, dans les années soixante, la réalisation du plan routier breton, ou un peu plus tard l'intelligence des « Rhône-Alpins » qui, grâce aux Jeux olympiques d'hiver, ont pu faire financer les magnifiques autoroutes alpines.
    Le Grand Sud-Ouest n'a pas connu de telles occasions et de telles mobilisations. Il n'a pas vu ses infrastructures autoroutières mises à niveau. L'entrée de l'Espagne et du Portugal dans le marché commun ne pouvait peser autant que l'axe franco-allemand : le TGV Est passait avant le TGV Sud-Europe Atlantique, même en étant moins rentable.
    Mais même si ce ne sont plus que 20 % des Français qui habitent aujourd'hui dans les régions de la façade Ouest, contre 30 % lors du premier recensement, il n'est pas souhaitable que l'analyse que certaines régions font du rapport d'audit devienne réalité : « Si les conclusions du rapport d'audit sont suivies, le grand Sud-Ouest sera totalement oublié, coupé des grands axes d'échanges, en voie de marginalisation dans une France à deux vitesses, partagée entre un versant est, richement doté en équipements, et une façade atlantique négligée. »
    Le rapport de la DATAR rééquilibre cet audit, même s'il faut toujours rappeler que le nombre de poids lourds traversant chaque jour les Pyrénées est le double de ceux qui traversent les Alpes françaises et augmente de près de 10 % par an, avec les nuisances causées par ces murs de camions.
    Alors, pour ce « corridor Atlantique fret Nord-Sud », seule la construction de la ligne à grande vitesse Sud-Europe-Atlantique, dont le tronçon Tours-Bordeaux a la meilleure rentabilité et qui doit être achevée vers 2013, ainsi que son prolongement pour rejoindre les travaux en cours côté espagnol pourront libérer le corridor fret.
    M. Alain Juppé. Très bien !
    M. Pierre Ducout. Le Premier ministre s'est d'ailleurs récemment engagé à demander aux autorités européennes l'inscription de l'ensemble de l'axe Tours-Vitoria-Madrid au schéma des réseaux transeuropéens, au lieu de la liaison Dax-Vitoria-Madrid actuellement inscrite.
    Par ailleurs, la ligne TGV Bordeaux-Toulouse, reliant deux métropoles, est au moins de même niveau de pertinence que la ligne Rhin-Rhône, voire Lyon-Turin.
    Ce transfert modal indispensable, volontariste et appuyé par les conseils régionaux concernés ne sera pas suffisant à terme. Au niveau du fret ferroviaire, il faut aussi, pour la traversée des Pyrénées, reprendre la ligne Pau-Canfranc-Saragosse et poursuivre les études de traversée ferroviaire à grand gabarit des Pyrénées centrales.
    Il convient enfin d'écarter la vision sommaire et erronée de la DATAR considérant que les TER sont uniquement dévoreurs de « sillons ferroviaires ». Ils sont d'abord le RER du pauvre, pour le périurbain et les petites villes.
    Ce transfert modal, qui doit être complété par le développement du cabotage maritime sur la façade atlantique, n'exonère pas de l'urgence des infrastructures routières prévues par le rapport, selon ses deux axes, la dimension européenne et l'accessibilité du territoire, axes sur lesquels s'inscrivent le contournement de Bordeaux et le passage à deux fois trois voies de l'A 63 Bordeaux-Espagne, la liaison Bordeaux-Pau se poursuivant sur Pau-Saragosse et l'augmentation de la capacité de la RN 21 de Limoges à Tarbes.
    Ce zoom sur les besoins, les priorités, les urgences du Grand Sud-Ouest correspond bien à l'esprit de ce débat. Rappelons aussi que les échanges générés par l'ouverture de l'Europe à l'Est, qui est une bonne chose, sont à mettre en parallèle avec le développement économique du Maghreb et le renforcement de nos liens avec cette région, qui sont aussi de bonnes choses.
    L'impact économique des infrastructures de déplacement et de transport indispensables à la vie et aux échanges ne doit pas masquer l'impact des nuisances sonores, particulièrement sensibles actuellement, des pollutions, de l'aggravation de l'effet de serre pour ce qui concerne les transports routiers, ou même de la dégradation des paysages.
    M. le président. Veuillez conclure.
    M. Pierre Ducout. A ce propos, je pense en particulier à ce qui a été fait à Bordeaux, où il était logique que l'autoroute urbaine initialement prévue le long de la Garonne ne soit pas poursuivie et où on lui a préféré un grand contournement. Il faut cependant tenir compte des nuisances pour les communes rurales concernées.
    Notons aussi l'itinéraire à grand gabarit Langon-Toulouse pour l'acheminement des pièces de l'A 380, que la commission que je présidais a décidé de réaliser en procédure d'urgence.
    M. le président. Merci, monsieur Ducout...
    M. Pierre Ducout. Un dernier mot, monsieur le président, sur les financements possibles : péage pour le trafic poids lourds, péage urbain, possibilité d'ajuster la TIPP gazole, grand emprunt européen.
    En conclusion, même dans une période de difficultés budgétaires et de promesses de baisse des impôts pour les plus favorisés, notre pays ne doit pas abandonner la politique d'aménagement du territoire en matière d'infrastructures de transport, comme élément de la solidarité nationale, mais aussi pour préparer l'avenir et pour s'inscrire dans l'Europe du progrès. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Mes chers collègues, je vois que toutes vos interventions sont dactylographiées, ce qui vous permet de les calibrer. Alors, soyez gentils de vous en tenir aux cinq minutes qui vous sont imparties. Nous ne pouvons continuer à dépasser de 20 ou 30 % les temps de parole, car quarante orateurs sont encore inscrits.
    La parole est à M. Rodolphe Thomas.
    M. Rodolphe Thomas. Monsieur le président, messieurs les ministres, chers collègues, le Gouvernement ayant engagé une nouvelle dynamique de décentralisation qui attribue de nouvelles compétences aux collectivités, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter, on peut légitimement se poser la question du rôle de l'Etat en matière d'aménagement du territoire. Parce que la décentralisation permet aux collectivités de prendre en main leur avenir, l'Etat doit, dans le même temps, s'attacher à mettre en oeuvre une vision prospective d'aménagement du territoire et se porter garant de l'équité territoriale.
    Mais attention ! L'Etat ne doit pas tout décider à partir de Paris ou des seules directives de la DATAR. Je regrette d'ailleurs que celle-ci n'ait pas retenu l'agglomération caennaise dans son étude des métropoles européennes.
    J'avoue que je comprends mal. L'Etat, par le biais de la directive territoriale d'aménagement de l'estuaire de la Seine, veut renforcer, à juste titre, la place de Caen comme métropole d'équilibre de l'Ouest entre Rouen et Le Havre. Dans le même temps, la DATAR ne l'inclut pas dans son étude. C'est la preuve qu'un centralisme excessif et tatillon peut aller à l'encontre des intérêts de l'aménagement du territoire.
    La Normandie a bénéficié très tôt de l'autoroute et dipose aujourd'hui d'un réseau performant. Celui-ci nous permet non seulement d'être en moyenne à deux heures de Paris, mais il constitue également un maillage efficace du territoire, surtout avec la mise en service du pont de Normandie.
    Dans un contexte de compétition à l'échelle européenne, le schéma autoroutier doit aussi tenir compte des trajets transversaux, pour relier directement l'Ouest au reste de l'Europe sans passer par Paris. L'autoroute A 28 entre Le Havre et Le Mans est en cours de réalisation. Nous devons accélérer le démarrage de l'A 88 entre Caen et Alençon et la modernisation de la N 157 vers Cherbourg. De même, j'insiste sur la nécessité prioritaire de terminer dans les meilleurs délais la route des estuaires, entre Rouen et Amiens.
    Enfin, je souhaite que l'Etat accompagne mieux les collectivités dans les efforts qu'elles ont entrepris pour améliorer la circulation autour des grandes métropoles comme Caen et Rouen. Le contournement de Rouen est une priorité absolue : c'est désormais la seule agglomération importante qui n'en dispose pas.
    Je souhaite bien sûr mettre tout particulièrement l'accent sur les infrastructures ferroviaires, aussi bien pour le trafic voyageurs que pour le fret. Le réseau de villes Caen-Le Havre-Rouen, avec près d'un million d'habitants, constitue l'ossature essentielle autour de laquelle s'articule le réseau des villes moyennes. Pourtant, il faut encore compter une heure et demie en train entre Caen et Le Havre, deux heures entre Caen et Rouen !
    Nous subissons de plein fouet l'absence d'une liaison rapide entre les métropoles normandes et l'Ile-de-France. D'une longueur de 170 kilomètres, elle avait été inscrite au schéma directeur des liaisons ferroviaires à grande vitesse adopté en 1992. En 1995, le projet a été malheureusement abandonné.
    Depuis lors, ces programmes n'ont cessé d'être revus à la baisse.
    En signant un protocole d'accord le 18 janvier 2001, les régions normandes se sont fortement engagées financièrement. La réalisation de la liaison rapide Normandie-vallée de Seine prévoit deux étapes : les aménagements entre Paris et Mantes, pour une mise en service après 2011 ; le quadruplement des voies entre Mantes et Epône et la création d'une ligne nouvelle entre Epône et Achères. Cette étape n'en est qu'au stade des pré-études fonctionnelles.
    Je veux vous faire part de mon inquiétude, que partagent Hervé Morin, Pierre Albertini, Claude Leteurtre et l'ensemble des élus normands. A ce jour, en effet, aucun plan de financement n'a été étudié pour cette deuxième étape, qui n'apparaît donc pas planifiée avant 2020 !
    Le Conseil économique et social de Basse-Normandie considère pourtant cette liaison comme prioritaire. Et comme le souligne le rapport d'audit sur les grands projets d'infrastructures de transport, « ce projet présente un potentiel important. Il bénéficie, de plus, d'un fort soutien des régions normandes ». Le rapport ajoute qu'« il ne prend tout son intérêt pour la collectivité nationalequ'avec la réalisation du projet Charles-de-Gaulle-Express en cours d'étude ».
    Je regrette d'autant plus que la DATAR - qui décidément doit être fâchée avec la Normandie - ne mentionne pas cette ligne à grande vitesse parmi les réalisations à privilégier. Elle insiste pourtant sur la qualité indispensable de la liaison entre les métropoles régionales et Paris. Monsieur le ministre, je souhaite vivement que le Gouvernement répare rapidement cet oubli en inscrivant les crédits nécessaires.
    Je disais en commençant mon propos que l'Etat doit concentrer ses interventions en matière d'aménagement sur des projets structurants pour notre pays. Durant ce débat, je souhaite que nous nous interrogions sur les améliorations à apporter à notre réseau ferroviaire, encore majoritairement organisé en étoile autour de Paris.
    Concernant les régions bas-normandes, la DTA note que le passage par la capitale, souvent obligatoire, « s'avère très pénalisant du fait des changements de gare. Les rares liaisons ferroviaires évitant Paris vers Amiens-Lille ou Le Mans-Tours ne présentent actuellement pas un niveau de service suffisant pour être attractives ».
    En Basse-Normandie, le contrat de plan Etat-région a prévu près de 200 millions d'euros pour la « réalisation des opérations permettant d'améliorer les liaisons entre la région bas-normande et l'axe Nord-Sud atlantique ». J'ai déjà cité l'autoroute A 28 et l'A 88. Je souhaite insister tout particulièrement sur la ligne Caen-Tours, en passant par Alençon et Le Mans.
    M. le président. Merci de conclure, monsieur Thomas.
    M. Rodolphe Thomas. Une telle liaison ferroviaire de qualité est indispensable à la fois pour un développement équilibré du Grand Ouest, pour améliorer les temps de trajet et le confort des voyageurs en leur épargnant les changements de gare à Paris, pour renforcer la compétitivité des ports normands en assurant une meilleure desserte, pour éviter les retombées négatives d'une concentration du trafic en Ile-de-France, notamment sur l'environnement.
    Pour terminer, monsieur le ministre de l'équipement et des transports, je soulignerai à nouveau que la Normandie et, plus largement, le Grand Ouest ont besoin de la solidarité de l'Etat pour renforcer leurs infrastructures. Une vision d'aménagement volontariste de l'Etat peut renforcer l'attractivité de la Normandie en privilégiant les liaisons transverses, tant routières que ferroviaires. Alors l'Etat jouera pleinement son rôle de garant de l'équité territoriale et d'aménageur responsable. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Gilbert Biessy.
    M. Gilbert Biessy. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, dans le cadre de ce débat sur l'avenir des infrastructures de transport, je souhaite attirer votre attention sur la remise en cause de deux projets structurants pour le développement de nos territoires. En effet, l'audit commandé par le gouvernement et, dans une moindre mesure, le rapport de la DATAR nous conduisent à nous interroger sur l'avenir de la desserte Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, dite POLT, et de la liaison transalpine fret et voyageurs Lyon-Turin. Ces deux exemples illustrent malheureusement les écueils d'une vision gouvernementale à court terme. La volonté d'économie à tout prix risque de faire délaisser des projets pertinents pour l'aménagement et le développement des territoires.
    L'Etat risque d'abandonner la liaison pendulaire prévue entre Paris et Toulouse, à la faveur du rapport d'audit. Nous assisterions alors à une véritable remise en cause de son engagement.
    Je rappelle, pour mémoire, que les régions Limousin, Centre et Midi-Pyrénées, l'Etat, la SNCF et RFF ont signé un protocole d'accord en février 2001, suivi, en novembre de la même année, d'une convention cadre concernant l'ensemble des phases du projet et son financement jusqu'à sa mise en service en 2006.
    La mise en place de rames pendulaires permettra un gain de temps important pour les voyageurs, une amélioration des dessertes ferroviaires entre les trois métropoles régionales, une revitalisation des autres lignes régionales, un accès au réseau européen à grande vitesse grâce à l'interconnexion à Roissy.
    Le coût de l'aménagement des rames TGV Atlantique en pendulaires est par ailleurs largement inférieur à la création d'un TGV en site propre.
    Il est scandaleux qu'un projet tel que le POLT, initié par les régions concernées dans le but de désenclaver et revitaliser un territoire délaissé par les politiques d'aménagement, soit remis en cause aujourd'hui par l'Etat, alors même qu'il s'était engagé à le cofinancer.
    La décentralisation voulue par le Premier ministre est censée favoriser les territoires, libérer, selon ses dires, les initiatives régionales. La coopération librement consentie de trois régions a permis l'élaboration d'un projet cohérent, porteur de perspectives d'aménagement et de développement territorial. Sa remise en cause serait désastreuse pour l'économie et les populations de ces régions défavorisées.
    Un autre projet semble aujourd'hui remis en cause, même si le rapport de la DATAR diverge de l'audit financier : le projet de liaison ferroviaire transalpine Lyon-Turin.
    Ce projet comporte deux volets.
    Le premier concerne l'aménagement d'un itinéraire de fret ferroviaire. Il doit permettre le transit, à terme, de 40 millions de tonnes de marchandises, désengorgeant ainsi le trafic routier de plus d'un million de camions. Le développement du fret ferroviaire et du ferroutage est le meilleur moyen de répondre aux objectifs - prioritaires - que sont la lutte contre l'insécurité routière et la mise en oeuvre d'actions favorisant un développement durable et respectueux de l'environnement.
    Le deuxième volet concerne la création d'une ligne voyageurs à grande vitesse permettant la liaison avec l'Italie du Nord et les villes françaises du Sillon alpin.
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    M. Gilbert Biessy. A ce propos, monsieur le ministre, pourrions-nous obtenir des informations plus précises sur l'implantation de la future gare TGV dans le secteur de Montmélian, comme le demandent de nombreux élus locaux, notamment isérois ? Cet emplacement permettrait de desservir au mieux les vallées alpines, y compris Grenoble et Chambéry.
    Tout comme le POLT, le projet Lyon-Turin a déjà fait l'objet d'accords entre la France et l'Italie en 2001 pour la réalisation du tunnel de base et sur l'objectif d'ouverture des lignes en 2012, ainsi que d'un protocole d'accord et de définition des financements entre l'Etat, la région et les conseils généraux concernés en 2002.
    Le projet Lyon-Turin tirait sa force de la combinaison du fret et du transport voyageurs à grande vitesse. Ce projet cohérent est aujourd'hui menacé. En séparant ses deux volets, en repoussant la réalisation hypothétique de la ligne voyageurs à 2020, en changeant la nature des projets de fret ferroviaire, le Gouvernement risque de revenir sur sa parole. Là encore, nous assistons à un désengagement grave de l'Etat.
    Les dangers qui pèsent sur la pérennité des projets Lyon-Turin et POLT me paraissent révélateurs des choix néfastes que le Gouvernement s'apprête à faire. Ces projets sont utiles, protecteurs de l'environnement, porteurs de développement économique, vecteurs de cohésion territoriale et d'un aménagement durable du territoire. Ils ouvrent la France, y compris ses régions encore enclavées, sur ses voisins européens et sur le monde. En outre, ces projets, portés par les collectivités territoriales, répondent aux aspirations des populations.
    M. le président. Merci de bien vouloir conclure.
    M. Gilbert Biessy. Le développement d'un véritable service public de transports ne doit pas être remis en cause par des critères comptables à court terme. L'enjeu d'un aménagement durable du territoire doit se penser dans le temps. Aux critères de rentabilité économique que manie le Gouvernement, nous répondons que le service public doit s'évaluer selon des critères d'utilité sociale.
    M. Jacques Desallangre. Très bien !
    M. Gilbert Biessy. Le choix stratégique qui se dessine à la lecture des différents rapports dont nous avons eu connaissance est un vrai choix politique, celui - hélas ! - du tout-routier et autoroutier.
    Vous l'aurez compris, mes chers collègues, nous sommes porteurs d'une autre vision de l'aménagement du territoire qui passe par le développement d'une politique ambitieuse de transport modal, alliant l'essor du fluvial et du cabotage maritime à la multiplication des transports ferroviaires et à l'extension du ferroutage. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Alain Juppé.
    M. Alain Juppé. Messieurs les ministres, l'organisation de ce débat est une bonne idée, et je voudrais vous dire combien j'ai apprécié la manière dont vous avez cadré le problème qui nous est posé. J'ai tout particulièrement retenu, monsieur de Robien, votre affirmation selon laquelle la France devait se donner les moyens de maintenir un haut niveau d'infrastructures.
    M. François Sauvadet. Très bien !
    M. Alain Juppé. Cette affirmation s'applique tout particulièrement à l'Aquitaine.
    Mme Bérangère Poletti. Ah !
    M. Alain Juppé. Et c'est de cette région qu'au nom de mes collègues de l'UMP je voudrais, ce soir, vous parler. (Sourires.)
    M. François Sauvadet. Pas seulement !
    M. Jean Dionis du Séjour. Pas uniquement !
    M. Gilbert Meyer. Pas exclusivement !
    M. Alain Juppé. Principalement. (Sourires.)
    Cette région a été longtemps considérée comme excentrée, éloignée de la fameuse « banane bleue ». Eh bien, cette époque est révolue aujourd'hui. L'élargissement de l'Union européenne à l'Espagne et au Portugal a remis l'Aquitaine au coeur d'un des corridors de circulation transeuropéens, ce grand axe Nord-Sud, aujourd'hui de plus en plus fréquenté puisque le trafic transpyrénéen est supérieur au trafic transalpin et que, sur la façade atlantique de la barrière pyrénéenne, il est aujourd'hui en croissance plus forte que sur la façade méditerranéenne.
    Malheureusement, les infrastructures n'ont pas suivi. L'Aquitaine, nous le répétons depuis longtemps, a pris vingt ans de retard, et ce retard s'est accru de 1997 à 2002, puisque c'est à cette époque qu'ont été prises des décisions particulièrement funestes pour notre région. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. David Habib. Dites plutôt de 1995 à 1997 !
    M. Alain Juppé. Je n'en citerai que deux : l'abandon des concessions autoroutières de Bordeaux-Bayonne et de Langon-Pau. Si bien qu'un milliard et demi de francs de crédits ont été ponctionnés sur les crédits routiers de l'Etat pour la mise aux normes autoroutières de la RN 10 et n'ont pas été utilisés ailleurs.
    Résultat : Bordeaux est aujourd'hui célèbre pour ses bouchons (Sourires) : le bouchon ferroviaire, tout d'abord, et le bouchon routier et autoroutier.
    Eh bien, nous sommes décidés à nous battre pour rattraper ce retard, et à nous battre toutes sensibilités confondues, puisque j'ai apprécié ce qu'a dit Pierre Ducout sur les priorités de l'Aquitaine.
    Avant d'évoquer rapidement ces priorités, je voudrais insister sur deux exigences qui me tiennent à coeur.
    D'abord, le respect de l'environnement. Notre région fait de la qualité de ses espaces naturels un de ses grands atouts de développement économique. Nous souhaitons que les transports, comme vous l'avez souligné, monsieur de Robien, soient des transports durables.
    Ensuite, l'intermodalité, qui est une des réponses à la question de la protection de l'environnement. C'est la raison pour laquelle nous sommes attachés d'abord, je vais y venir, au TGV Tours-Bordeaux, qui libérera des sillons de fret très importants sur les lignes existantes, ensuite à la mise en oeuvre de plates-formes logistiques, comme celles d'Ourcade ou de Mauguerre.
    J'ajoute, et M. Dominique Bussereau a particulièrement insisté sur ce point, que le cabotage à partir des ports de Bayonne ou de Bordeaux est aussi un élément essentiel du développement de l'intermodalité.
    Nos priorités, vous les connaissez ; je voudrais les réaffirmer avec force.
    C'est d'abord le TGV Paris-Bordeaux-Madrid. Je ne ferai pas de publicité comparative par rapport à d'autres projets de TGV. (Sourires.) Je me satisferai de constater que la DATAR a placé ce TGV au-dessus de la pile et que, à la demande du Gouvernement, le groupe d'experts de haut niveau présidé par M. Van Miert étudie le classement de cette ligne dans les projets européens prioritaires : un TGV Paris-Bordeaux-Madrid avec, évidemment, un prolongement vers Toulouse.
    Deuxième priorité : Langon-Pau. Si nous ne réalisons pas cette liaison dans les prochaines années, la région Aquitaine perdra sa cohésion.
    M. Jean Lassalle. C'est vrai !
    M. Alain Juppé. Troisième priorité : le grand contournement de Bordeaux et la mise à deux fois trois voies de l'A 63 ainsi que de la rocade.
    Je n'oublierai pas non plus la mise à deux fois deux voies de la RN 21,...
    M. Jean Dionis du Séjour. Très bien !
    M. Alain Juppé. ... grand axe structurant de Limoges à Tarbes, qui passe par Périgueux, Bergerac et Agen, ni, à moyen et long terme, le franchissement des Pyrénées.
    Pour y parvenir, il faut de l'argent. Vous nous avez tracé quelques pistes. L'un des mérites essentiels de ce débat sera peut-être de progresser sur la recherche de financements nouveaux, car les crédits budgétaires traditionnels n'y suffiront pas. Faut-il mobiliser de l'épargne à long terme en se tournant vers l'Europe ou vers la Caisse des dépôts ? Sans doute ! Faut-il développer le partenariat public-privé ? Certainement, sans se faire d'illusions.
    M. François Sauvadet. Absolument !
    M. Alain Juppé. En effet, ce n'est pas une solution miraculeuse parce que le privé ira là où l'on peut dégager de la rentabilité et pas ailleurs.
    M. Jacques Desallangre. Eh oui !
    M. Alain Juppé. Faut-il ouvrir le capital des sociétés d'autoroutes ? Peut-être, en se disant que l'Etat aurait sans doute aussi intérêt à en rester actionnaire au moment où leurs dividendes augmentent et où ils pourraient être utilement utilisés.
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Bravo !
    M. Alain Juppé. Merci, mes chers collègues !
    On en vient donc à la recherche de ressources fiscales supplémentaires. On a évoqué le rattrapage de la TIPP sur le gazole des véhicules légers ou une redevance sur les poids lourds.
    M. François Sauvadet. Ce n'est pas une bonne idée !
    M. Alain Juppé. Pourquoi ne pas approfondir ces idées ?
    La deuxième idée me paraît particulièrement intéressante à deux conditions. Tout d'abord, il ne faut pas déstabiliser nos entreprises de transports qui sont souvent des PME régionales. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme Nadine Morano. C'est indispensable.
    M. Alain Juppé. Il faut y attacher une attention toute particulière.
    Il convient également de garantir l'affectation de ces ressources nouvelles au financement des infrastructures et à rien d'autre. Pour cela, il faut aller sans doute fort loin, peut-être jusqu'à une formule d'établissement public...
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Très bien !
    M. Alain Juppé. ... qui, si elle n'est peut-être pas conforme au sacro-saint principe de la non-affectation budgétaire, est la seule façon de crédibiliser votre plan.
    Je terminerai par un sujet qui, vous le savez, m'est cher : la simplification des procédures. J'ai été très heureux de vous entendre sur ce point, monsieur le ministre des transports. Tout à l'heure, j'ai bu du petit lait quand vous avez annoncé la suppression de l'IMEC.
    M. Michel Bouvard. Tout à fait !
    M. Alain Juppé. Ne venez pas nous annoncer dans quelques jours, monsieur le ministre, que vous allez la remplacer par la consultation inter-administrations, la CIA !
    Ou bien l'Etat fait confiance à ses services régionaux et l'IMEC n'a pas de raison d'être, ou bien il ne leur fait pas confiance, maintenons l'IMEC et supprimons les services régionaux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Je pourrais vous donner d'autres exemples de simplifications possibles. Nous allons bientôt organiser un grand débat public pour choisir entre la version ouest et la version est du grand contournement de Bordeaux. Tous les élus de la région, le président du conseil régional, celui du conseil général, le président de la CUB, le maire de Bordeaux, considèrent que ce grand contournement doit assurer la desserte de la presqu'île d'Ambès qui est à l'ouest, de l'aéroport qui est à l'ouest, du CHU qui est à l'ouest et du Médoc qui est à l'ouest. Et on nous répond qu'il faut un an pour comparer les vertus du passage à l'est et du passage à l'ouest ! (Sourires.) Pourquoi ?
    M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Parce qu'il n'y a pas d'argent !
    M. Alain Juppé. Nous nous sommes fait une raison parce qu'on nous a expliqué que, si nous ne le faisions pas, nous risquions la censure ou le contentieux. Pourtant, il y aurait là une manière assez facile et très peu coûteuse de gagner une année, ce qui permettrait d'accélérer les projets d'infrastructures. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.
    Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le débat sur les infrastructures de transport qui nous réunit ce soir ne saurait être dissocié d'une politique globale d'aménagement du territoire. A cet égard, nous ne pouvons faire abstraction du bilan de quarante années d'une politique d'aménagement du territoire conçue verticalement depuis la tour Eiffel : 50 % de la superficie de notre pays accueille à peine 10 % de la population, alors que le Bassin parisien, qui représente quelque 2 % de la superficie nationale, abrite à lui seul 20 % de la population. Dans un même temps, l'écart de PIB entre les régions françaises va de 30 % à 1 %. A l'évidence, la réflexion sur Paris et le désert français reste d'actualité et nous interroge tous.
    Dans un contexte de compétitivité accrue entre les territoires et d'élargissement de la Communauté européenne vers l'Est, l'absence de volonté gouvernementale forte ne manquerait pas d'avoir à très court terme des conséquences irréversibles pour les régions les plus fragiles et les plus enclavées. A cet égard, le rôle des grandes infrastructures de transport, qu'elles soient ferroviaires, routières ou aériennes, est déterminant, l'attractivité des territoires étant largement conditionnée par leur qualité.
    N'avez-vous pas, au demeurant, monsieur le ministre des transports, ouvert les dixièmes rencontres parlementaires sur les transports en affirmant, à juste titre, que « la France n'avait d'autre choix que de s'équiper pour ne pas courir le risque de devenir une région périphérique, voire marginalisée, que l'on éviterait car on s'y déplacerait difficilement » ?
    Comment, dès lors, accorder crédit aux rapports du ministère des finances et de la DATAR, qui préconisent la remise en cause de plusieurs grands dossiers d'infrastructures d'aménagement du territoire, pourtant légitimement considérés comme indispensables à la survie économique et sociale des territoires traversés, tant par les élus de divers bords que par les socioprofessionnels et plus largement les populations concernées ? Ainsi en est-il de la liaison ferroviaire Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, à laquelle M. Gilbert Biessy a fait largement allusion.
    Ce projet de train pendulaire autour duquel l'ensemble des partenaires publics et socio-économiques de trois régions se sont mobilisés depuis 1992 a enfin été acté en annexe aux CPER 2000-2006 selon un partenariat financier clair et accepté par tous, Etat-RFF-SNCF, et les trois régions concernées, Centre, Midi-Pyrénées et Limousin, en vue d'une réalisation à échéance 2006.
    Les conclusions des audits, qui servent de base à notre débat, reposent essentiellement sur un critère, à mes yeux irrecevable, celui d'une trop faible rentabilité socio-économique, ce dossier se situant « sous le seuil de rentabilité acceptable ».
    Je vous le demande, messieurs les ministres, les grands axes TGV existants sont-ils rentables, la RATP est-elle rentable, et, plus largement, le coût environnemental et social de la concentration de 80 % de la population sur 20 % du territoire est-il acceptable ?
    Les données économiques sont certes à considérer, mais l'équité territoriale ne l'est-elle pas tout autant ?
    A l'évidence, faire des économies sur les grandes dépenses d'investissement relèverait d'une politique à courte vue : la dynamique d'équipement de notre pays ne doit pas faire les frais des choix fiscaux contestables qui conduisent le Gouvernement à vouloir amputer des lignes budgétaires essentielles pour préparer l'avenir. Une telle politique de Gribouille condamnerait inéluctablement des régions comme celle que je représente et, plus largement, ferait planer de lourdes menaces sur la place de notre pays au sein de la Communauté européenne.
    S'appuyant toujours exclusivement sur une logique financière - mais telle était peut-être la feuille de route qui leur avait été assignée -, ces rapports avancent, par ailleurs, l'argument d'un gain de temps insuffisant par rapport aux engagements financiers.
    Si l'argument lui-même est pour le moins contestable - car gagner quasiment une demi-heure sur un trajet de trois heures entre Paris et Limoges est loin d'être anodin -, il néglige, de surcroît, des éléments qualitatifs majeurs, largement aussi importants que le gain de temps : un confort accru - pour avoir emprunté cette ligne ce matin encore, je vous mets au défi, monsieur le ministre, de lire un dossier ou d'écrire trois lignes dans les conditions actuelles de transports -, une meilleure sécurité avec la suppression de très nombreux passages à niveau - or, j'ai bien entendu que la sécurité restait une priorité gouvernementale, à laquelle, d'ailleurs, nous souscrivons tous -, ainsi que la mise en interconnexion avec le réseau européen et la valorisation des dynamiques économiques et sociales de régions qui se battent pour ne pas être reléguées au ban de l'Europe.
    « Quelle sera dans une Europe élargie la place de la France ? », demandiez-vous, monsieur le ministre des transports, lors des mêmes rencontres parlementaires ? Quelle sera, a fortiori, la place des régions enclavées ou périphériques dans ce contexte ?
    Si cette question préoccupe réellement le Gouvernement, vous ne pouvez un seul instant, monsieur le ministre, imaginer de remettre en cause le dossier ferroviaire Paris-Orléans-Limoges-Toulouse.
    « Un réseau de transports digne de ce nom ne peut ignorer un tiers ou un quart du territoire national, je pense en particulier au Massif central » affirmait à juste titre le président de RFF, le 27 mars dernier. Je reprendrai ces propos à mon compte, sachant être le porte-parole de la grande majorité de mes collègues députés des trois régions concernées. Je vous demanderai donc instamment d'user de votre pouvoir de ministre des transports et de ministre de l'aménagement du territoire pour que la parole de l'Etat soit honorée et que le train pendulaire Paris-Orléans-Limoges-Toulouse soit réalisé selon le calendrier prévu, non sous la forme au rabais que propose la DATAR dans un communiqué de presse publié le 29 avril à la suite du tollé général provoqué par le rapport initial, mais selon les engagements définis lors de la signature du contrat, le 13 novembre 2001. Cela s'impose d'autant plus que les présidents des trois régions concernées, réunis hier à Limoges, se sont dits prêts - et cela mérite d'être salué - à assumer le surcoût lié à la pendularisation des rames et que, dans un même temps, RFF, gestionnaire des infrastructures, a déclaré être à même d'entamer immédiatement les travaux nécessaires à l'adaptation de la ligne, sous réserve que l'Etat ne s'y oppose pas.
    M. le président. Madame Pérol-Dumont, merci de conclure.
    Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Dans ce contexte, le Gouvernement ne peut s'abriter derrière des prétextes financiers ou technocratiques pour remettre en cause ce dossier. La poursuite de cet aménagement vital est de votre seule responsabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. François Sauvadet.
    M. François Sauvadet. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, on ne peut que se réjouir de l'organisation d'un tel débat. Je voudrais dire aux députés de gauche que, lors de l'examen du texte sur l'aménagement et le développement du territoire, nous avions inscrit parmi les priorités la nécessité de développer nos infrastructures afin de rendre nos territoires un peu plus attractifs, notamment ceux qui se sentent abandonnés et qui l'ont d'ailleurs exprimé récemment à l'occasion des élections. Souvenez-vous, les territoires ruraux se sentaient abandonnés et estimaient que les attentes n'étaient pas prises en compte. D'ailleurs, à cette époque, nous avions demandé l'organisation d'un véritable débat. Eh bien, nous l'avons aujourd'hui. C'est un débat utile. Vous l'avez souhaité sur la base d'un audit, messieurs les ministres. C'était là une démarche tout à fait nécessaire. Vous l'avez d'ailleurs placé d'abord dans un cadre européen et plusieurs orateurs l'ont d'ailleurs rappelé à cette tribune, s'inscrivant dans des démarches régionales ou d'un autre type. Nous souscrivons à cette préoccupation. Les priorités que nous devons nous fixer doivent permettre de rendre notre territoire national attractif.
    Ensuite, vous avez défini un cadre budgétaire, c'est-à-dire qu'il faudra dégager des priorités. A cet égard, vous avez rappelé que nous devrions probablement trouver des ressources nouvelles, dans le cadre de la maîtrise de la dépense publique. Au-delà, il faut rendre notre dépense publique plus efficace, c'est-à-dire privilégier l'investissement. C'est une dimension et une exigence que nous devons partager.
    Ces priorités seront difficiles. Vous avez d'ailleurs inscrit le débat dans le cadre de 2003-2020.
    S'agissant des financements, vous avez évoqué plusieurs pistes intéressantes, dont celle des usagers. Mais là aussi, il faudra veiller à ne pas provoquer des évasions. Vous connaissez la fragilité des entreprises de transport. Certaines ont quitté le territoire national pour s'intaller dans d'autres pays, notamment au Luxembourg et en Belgique. Il faudra mener une réflexion européenne sur la façon dont nous allons taxer les entreprises de transport, ou, en tout cas, l'usage.
    Vous avez engagé également une réflexion sur la TIPP, notamment sur le gazole. Je tiens à appeler votre attention sur la portée d'une telle décision, notamment sur les territoires ruraux. Il faut se méfier de la portée politique d'une augmentation, même modeste.
    M. Hervé Mariton. Très bien !
    M. François Sauvadet. Il faudra être extrêmement prudent pour éviter que les territoires ruraux ne se sentent à nouveau taxés.
    Après avoir évoqué le sentiment d'abandon d'un certain nombre de territoires, messieurs les ministres, j'aborderai la simplification des procédures. Cela fait trente ans que l'on parle de la LINO, la liaison intercommunale nord-ouest de l'agglomération dijonnaise, trente ans qu'elle est inscrite parmi les priorités de Dijon et de son agglomération, Jean-Marc Nudant pourrait en témoigner. Il ne faut pas que nos procédures de consultation, qui sont légitimes, normales, et qui doivent prendre en compte les aspirations, les préoccupations de chacun - on parle aujourd'hui de développement durable - soient une entrave à l'intérêt général.
    On prend quotidiennement en otages des milliers de personnes tout simplement parce que nous n'arrivons pas à débloquer des situations qui, de procédures en procédures, conduisent à cette situation incongrue. On nous dit aujourd'hui qu'il faudrait encore attendre l'horizon 2015-2020. Je vous rends attentifs au sentiment qu'éprouvent nos compatriotes par rapport à la politique et à son utilité.
    Il est nécessaire de se fixer des objectifs et d'y souscrire. Les Français ne demandent pas que tout soit fait aujourd'hui, car ils savent bien que nous sommes dans un contexte difficile. Ils demandent d'abord qu'on les écoute et que nous souscrivions aux priorités que nous nous fixons. Imaginez l'état d'exaspération de nos compatriotes quand il faut quarante ans pour « boucler » tout simplement le tour d'une ville ! Je souhaite donc qu'on réfléchisse aussi aux procédures de consultation afin de mieux servir l'intérêt général, en tout cas, le sentiment que nous en avons majoritairement. J'ai entendu M. Juppé parler de Bordeaux, c'est un autre exemple. Nos compatriotes doivent être entendus et avoir le sentiment que nous agissons. Il est de la responsabilité du politique d'agir. Je souhaite donc que nous avancions sur ce dossier, messieurs les ministres, comme un exemple de ce qu'il convient de faire, en tout cas pour être utile.
    J'ai entendu les uns et les autres exprimer leur intérêt pour les liaisons à grande vitesse. Vous me permettrez de dire, monsieur Juppé, m'inscrivant dans un contexte national, que le TGV Rhin-Rhône, qui doit prévoir une ouverture vers les pays de l'Europe mais aussi vers la Suisse, constitue tout de même un élément extrêmement important. Vous savez que la première phase est prête et que le coût est limité pour l'Etat. C'est pourquoi je souhaite qu'elle soit engagée. Il ne faut pas toutefois que la rentabilité soit l'unique critère, l'aménagement et le désenclavement du territoire devant être pris en compte. C'est ce qu'on appelle la solidarité nationale. Je souhaite, à cet égard, que le débat soit serein et ouvert, et qu'il nous permette de fixer, ensemble, des priorités.
    M. le président. Monsieur Sauvadet, il faut conclure.
    M. François Sauvadet. Enfin, permettez-moi d'évoquer la voie d'eau. Je trouve à cet égard que le travail réalisé par la DATAR est bon mais aussi ingrat, car il s'agissait de fixer des priorités dans un contexte que vous connaissez. Cette contribution mérite d'être alimentée, commentée et c'est ce à quoi nous nous livrons.
    M. Daniel Paul. Tout à fait !
    M. François Sauvadet. De grâce, n'abandonnons pas la voie d'eau ! Mes chers collègues, vous avez évoqué la liaison Seine-Nord. C'est un projet intéressant. La liaison Saône-Rhin-Rhône...
    M. Daniel Paul. Moselle-Saône.
    M. François Sauvadet. ... a été abandonnée sans débat, par le fait du prince,...
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. De la princesse !
    M. François Sauvadet. ... alors qu'il s'agit d'un enjeu majeur. Si l'on veut, demain, voir moins de camions circuler sur nos routes, il faut trouver des alternatives par le fer, mais aussi par la voie d'eau.
    M. le président. Merci de conclure, monsieur Sauvadet !
    M. François Sauvadet. Il manque quelques dizaines de kilomètres pour réaliser la jonction. Vous le savez, de telles mesures sont demandées par des entrepreneurs.
    Je souhaite donc que, sur ces sujets, nous avancions volontairement, sans démagogie et que les décisions que nous prendrons soient largement partagées, en tout cas, par tous ceux qui pensent que les infrastructures sont un élément majeur de l'attractivité de nos territoires et plus largement de la France dans l'espace européen. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.
    M. Jacques Desallangre. Le Gouvernement et sa majorité nous proposent aujourd'hui un débat sur les infrastructures afin de consacrer le désengagement idéologique et financier de l'Etat. Et vous avez bien préparé le terrain, monsieur le ministre : les rapports n'ont cessé de pleuvoir, ils ont focalisé les critiques d'abord, afin que le Gouvernement puisse apparaître ensuite comme plus modéré et plus raisonnable. Mais nous ne sommes pas dupes et les salariés du secteur des transports ne se laisseront pas abuser par cette manoeuvre de diversion.
    Alors que depuis un an notre économie entre progressivement en récession, le Gouvernement campe sur une position ultra-libérale de désengagement de l'Etat. Plutôt que de favoriser une relance de l'économie par l'investissement, la consommation et l'emploi, vous soumettez la politique d'aménagement du territoire et le développement des infrastructures qui y est intimement liée à ce même diktat libéral.
    Or les transports, plus encore que d'autres activités économiques, ont besoin d'une politique interventionniste, car les investissements ne sont importants et rentables qu'à long terme. Nous ne pouvons donc nous satisfaire du laisser-faire qui favorise le transport routier et qui empêche le développement d'autres modes servant mieux l'intérêt général. Il faut en finir avec la priorité donnée à la route : le réseau autoroutier a été multiplié par huit en trente ans alors que, durant la même période, le réseau ferré régressait de 20 %. La route absorbe 70 % des investissements, quand le rail n'en consomme que 25 %. Le rééquilibrage rail-route ne doit plus être ce voeu pieux, cette formule incantatoire utilisée par des ministres en guise de camouflage.
    Sur ce sujet, le rapport de la DATAR est explicite : « L'enjeu prioritaire est l'organisation du système de transport de marchandises et plus particulièrement du report vers les modes alternatifs à la route, qu'il s'agisse du ferroviaire, du cabotage maritime ou du transport fluvial ».
    En particulier, on ne saurait déduire des difficultés de ces derniéres années que le fret ferroviaire n'a plus aucun avenir, alors que les annonces en faveur des modes alternatifs à la route restent largement à traduire en actes.
    M. Hervé Mariton. Il faut donc réformer !
    M. Jacques Desallangre. C'est valable pour tout le monde. Que chacun en prenne sa part !
    Ce rapport poursuit : « La construction d'un système de transports durable sera une oeuvre de longue haleine, qui suppose des mesures tarifaires et réglementaires, des adaptations ou créations d'infrastructure. »
    Deux de vos collègues sénateurs de l'UMP ne déméritaient pas non plus lorsqu'ils enjoignaient au Gouvernement et à l'Etat de jouer pleinement leur rôle de tutelle, en assignant à la SNCF des missions exigeantes, mais en lui donnant aussi les moyens de les remplir.
    Monsieur le ministre, il vous faut maintenant passer aux actes et rééquilibrer les investissements en faveur du fret ferroviaire, afin de créer de vrais modes alternatifs à la route. La politique de transport ne peut plus se concevoir en ignorant les enjeux de sécurité et d'environnement. L'insécurité routière trouvera aussi des solutions dans le réaménagement des politiques de déplacement.
    On ne doit plus écarter l'impact des modes de transport sur l'environnement et sur la santé de nos concitoyens. Tous les aspects médicaux, environnementaux et relatifs à la sécurité, ont trop longtemps été sous-évalués, alors qu'ils plaident en faveur de développement de modes alternatifs à la route.
    Avant de mener une politique ambitieuse en faveur du rail nous devrions au minimum, dès aujourd'hui, rétablir l'égalité de traitement entre les modes de transport. Nous assistons, en effet - qui le contestera ? -, à une concurrence faussée entre la route, dont les opérateurs ne payent qu'une infirme partie des investissements, et le rail qui supporte l'ensemble des coûts d'infrastructures.
    Cette discrimination n'est plus acceptable dans un environnement concurrentiel. L'Etat doit donc procéder au désendettement de la SNCF et réexaminer la situation de RFF, étranglé par la dette dont il a hérité par la décision de vos prédécesseurs et qu'il tente vainement de réduire en imposant des péages insupportables à l'opérateur national. A ce propos, j'ai été effaré d'entendre M. Soisson réclamer une augmentation des péages pour réduire la dette. C'est tout à fait antiéconomique ; cela n'a pas de sens !
    Parallèlement, un programme d'investissement devrait être mis en oeuvre pour assurer l'interopérabilité dans le cadre du fret ferroviaire international. Cette recommandation européenne, présentée en 2001, tranche avec l'ultralibéralisme que la Commission prône avec obstination. Bruxelles reconnaît - c'est important - n'avoir eu pour seule obsession politique depuis dix ans que la libéralisation du secteur du rail, et que cela a été un échec.
    Malgré la libéralisation et les efforts de productivité des cheminots, le rail a encore perdu des parts de marché face à la route. Pourtant, certains s'entêtent et prônent la filialisation de l'activité fret, puis, bien sûr, car cela va de soi, sa privatisation. Ce serait une erreur, car les exemples étrangers n'ont pas fait la preuve de la pertinence de cette solution et n'ont pas permis le rééquilibrage rail-route tant souhaité ; tout le monde en est bien d'accord.
    M. le président. Il faut conclure !
    M. Jacques Desallangre. Au lieu de prôner de fausses solutions comme la filiation, donnons réellement au rail et à la SNCF les moyens de leur développement, notamment par une politique européenne d'investissement, par exemple par le biais d'un grand emprunt européen.
    La libéralisation du rail à tout va a échoué. Ce n'est pas la solution miracle. Il reste donc à définir une véritable politique des transports à l'horizon 2020.
    Monsieur le ministre, vous nous avez aujourd'hui imposé un débat en trompe-l'oeil, car les bons choix, vous les connaissez. Allez-vous opérer des choix politiques responsables, courageux et volontaristes ? Allez-vous mener cette politique en fixant à la SNCF des missions et des objectifs positifs exigeants et en lui allouant les moyens de vos ambitions ? Voilà la vraie, la seule question, pour une seule et bonne réponse. Du respect de ces engagements dépend la place de la France, la place du transport ferroviaire, notamment celle du fret, dans une Europe qui s'ouvre à l'Est. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur divers bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M.  Marc-Philippe Daubresse.
    M. Marc-Philippe Daubresse. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, Paul Valéry disait : « Le futur serait plein de tous les avenirs, si le passé n'y projetait déjà son histoire. » (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.) Notre débat de ce soir illustre bien ce propos.
    En fait, quelle est la question qui nous est posée et que nous avons entendue en filigrane dans toutes les interventions qui ont eu lieu depuis le milieu de l'après-midi ? Dans un contexte européen et de mondialisation d'explosion des trafics, qu'il s'agisse du rail pour les voyageurs - pour lesquels les schémas de services collectifs prévoient une hausse de 78 % - ou de la route pour les marchandises dont le volume devrait doubler d'ici à 2020, avons-nous les moyens de conduire une stratégie des transports volontariste et, si tel est le cas, comment la financer et selon quelle répartition modale ?
    Pour répondre à cette question, monsieur le ministre, vous avez mis à la disposition des parlementaires un excellent document prospectif de la DATAR, des rapports d'audit,...
    M. Michel Destot. Moins bon !
    M. Marc-Philippe Daubresse. ... qui s'ajoutent aux nombreuses études réalisées dans ce secteur depuis dix ans. Il est vrai que les rapports sont nombreux en la matière. Cependant, il en manque un sur l'héritage que nous a laissé le précédent gouvernement. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Pierre Forgues. Et l'audit, n'était-ce pas votre héritage ?
    M. Marc-Philippe Daubresse. Le livre blanc de la Commission européenne, à laquelle M. Desallangre vient de faire allusion - La Politique européenne des transports à l'horizon 2010 : l'heure des choix -, a été présenté le 12 septembre 2001. Il invitait les gouvernements à prendre des mesures d'urgence, pour équilibrer les flux des marchandises et des passagers entre les différents modes de transport pour plus de sécurité et pour plus d'intermodalité. Or, sur ce point, cela a été un double échec : la politique de sécurité dans les transports menée depuis cinq ans a échoué et on attend toujours la mise en oeuvre d'une véritable politique d'intermodalité.
    M. Pierre Forgues. On attendra encore !
    M. Marc-Philippe Daubresse. En fait, le bilan de M. Gayssot peut être résumé ainsi : beaucoup d'effets d'annonces, mais peu de réalisation ; beaucoup d'argent pour le fonctionnement de la SNCF, mais peu d'investissements et aucune réelle perspective de développement pour l'intermodalité des transports de marchandises.
    Dans le contexte difficile de maîtrise de la dépense publique, d'augmentation du trafic routier et de déréglementation européenne, nous devons arrêter d'égrener des projets de contournement comme les articles dans un catalogue de La Redoute et nous concentrer sur des objectifs prioritaires dans chaque mode de transport ; nous devons cesser de subventionner la concurrence entre les modes de transport et choisir une bonne fois pour toutes les segments opérationnels sur lesquels chaque mode est le plus pertinent, non seulement d'un point de vue économique, mais aussi en ce qui concerne l'aspect social et l'environnement.
    Dans ce contexte, le rapport d'audit diligenté par le conseil général des Ponts et Chaussées - excusez-moi de le souligner, monsieur le ministre - m'a fait beaucoup rire. Ainsi, le classement des projets est établi selon une valeur actuelle nette qui obéit à une formule mathématique sophistiquée :

                                                                 
n
CFn
VF (r)

    VAN (r) :

(

+

-c
(1 + r)n
(1 + r)n

    Avouez qu'il y a de quoi se poser des questions. (Sourires.)
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Ce n'est pas du Paul Valéry !
    M. Marc-Philippe Daubresse. Monsieur le ministre, j'attends beaucoup plus du débat de ce soir et de la connaissance du terrain des parlementaires pour hiérarchiser les priorités que des formules technocratiques dont l'expérience montre qu'elles n'ont jamais réussi à prévoir l'avenir.
    L'échec du fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables qui était destiné à alimenter principalement les autres modes de transport que la route et qui a rapidement servi d'instrument de débudgétisation, doit nous faire réfléchir.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Eh oui !
    M. Marc-Philippe Daubresse. C'est pourquoi, monsieur le ministre, je veux formuler quelques propositions simples en matière de transport de voyageurs et de marchandises.
    Dans ce domaine, nous avons besoin de quelques investissements significatifs sur le ferroviaire et d'un projet emblématique sur le fluvial.
    S'agissant du ferroviaire, il faut, au préalable, sortir de la spirale de l'endettement. La réforme amorcée par Bernard Pons et Anne-Marie Idrac, et poursuivie par M. Gayssot était nécessaire, mais elle n'est pas suffisante. Il faut aller plus loin dans le désendettement de la SNCF et y consacrer, par exemple, le produit financier obtenu grâce à l'ouverture du capital des sociétés concessionnaires des autoroutes.
    La réalisation des lignes TGV annoncées et non financées doit évidemment être programmée avant d'en envisager de nouvelles.
    Nous devons également réaliser la liaison Lyon-Turin. C'est une évidence.
    M. Jean-Jack Queyranne. Très bien !
    M. Michel Destot. Bien sûr ! C'est votre première bonne parole !
    M. Marc-Philippe Daubresse. Il s'agit d'une liaison emblématique dont on voit bien l'intérêt pour l'ensemble de l'aménagement du territoire français.
    Il convient enfin de mettre en place un réseau de plates-formes multimodales pertinent, pour mettre fin à l'engorgement de nos routes et de nos autoroutes en engageant les crédits nécessaires pour éliminer les points de saturation du trafic ferroviaire des marchandises : Paris, Dijon et Lyon.
    Dans le secteur fluvial, le canal Seine-Nord considéré par le rapport des Ponts et chaussées comme non rentable est, au contraire, un investissement de long terme tout à fait intelligent, puisqu'il permettra d'éviter le problème de cul-de-sac de la Seine et favorisera des échanges essentiels entre l'Ile-de-France, les pays du Nord et nos grands ports comme Le Havre ou Dunkerque. Ce canal doit être réalisé, d'autant que son financement - M. le sénateur Marini l'a excellemment démontré - peut être partiellement pris en charge par l'Etat. Nous avons donc des solutions pour le financer.
    Monsieur le ministre, vous avez sans doute constaté, car vous allez de temps en temps à Amiens, que l'autoroute Lille-Paris est désormais occupée par deux files ininterrompues de camions dont certains transportent des matières dangereuses ou des marchandises dont la livraison n'est pas urgente. Cela permet de mesurer l'intérêt de réaliser ce canal Seine-Nord. A plus long terme, il faudra même se poser la question de l'autoroute ferroviaire. J'entends bien que, dans le contexte financier actuel, on ne peut pas financer ce type d'infrastructure, mais envisageons l'avenir, engageons des études et prévoyons des réserves foncières pour le très long terme, sinon nous ne les ferons jamais.
    M. le président. Veuillez conclure !
    M. Marc-Philippe Daubresse. Je conclus, monsieur le président.
    Puisque, faute de décisions courageuses au cours des années précédentes, les modes alternatifs ne seront pas opérationnels avant 2020, il faut aussi prévoir, n'en déplaise à certains idéologues, des autoroutes et des routes, mais pertinentes. C'est la raison pour laquelle je tiens à insister, au nom des députés UMP et UDF du Nord-Pas-de-Calais, sur l'autoroute A 24 qui serait une autoroute intelligente puisqu'elle permettrait de désengorger toutes les liaisons entre la région parisienne et les régions du nord de la France. Il faut qu'elle soit réalisée vite, que la concertation soit lancée rapidement et, surtout, que l'on tienne compte de l'avis des élus locaux.
    Ainsi quand, dans l'agglomération de Lille, un syndicat mixte de 125 communes, représentant 1,25 million d'habitants se prononce à 85 % pour un tracé, de grâce n'engageons pas de nouvelles consultations qui allongeraient les délais, comme l'a souligné Alain Juppé, et respectons la décision majoritaire des élus, toutes tendances confondues, sur de tels sujets.
    En matière de dépenses publiques, il ne faut pas dépenser plus, il faut dépenser mieux.
    M. le président. Monsieur Daubresse !
    M. Marc-Philippe Daubresse. Il convient de trouver des ressources nouvelles ; je n'y reviens pas.
    André Comte-Sponville disait : « Le pessimisme est d'intelligence, l'optimisme est de volonté. » A la lecture de certains rapports d'audit, j'étais pessimiste, mais après vous avoir entendu exposer votre stratégie volontariste, monsieur le ministre, je suis redevenu optimiste. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Jack Queyranne.
    M. Jean-Jack Queyranne. Monsieur le ministre, vous avez confirmé, en début de séance, que le Gouvernement respecterait la décision « historique et irréversible » - je reprends les propos du Président de la République - du sommet franco-italien de janvier 2001 en faveur de la liaison ferroviaire Lyon-Turin. C'est bien le moins que l'on pouvait attendre puisque notre pays, je le rappelle, est lié par un traité international qui a été ratifié l'an passé par les deux parlements.
    Cependant cela ne suffit pas à nous rassurer, monsieur le ministre, puisque vous n'avez pas apporté de réponse sur le calendrier, d'autant que le rapport d'audit préconise de différer la décision de réalisation du tunnel de base Lyon-Turin au-delà de 2015 en estimant « que les deux tunnels routiers du Fréjus et du Mont-Blanc ne seront pas saturés d'ici à cette date et qu'il est trop tôt pour savoir quand ils le seront ».
    Ces conclusions sont insoutenables pour les habitants des vallées alpines qui ont vécu les conséquences du drame du tunnel du Mont-Blanc et qui subissent aujourd'hui des flux de nuisances avec plus de 1,6 million de camions qui parcourent ces vallées chaque année pour accéder aux deux tunnels. Ils n'attendront pas 2025 ou 2030 : il faut donc que les travaux, pour lesquels 300 millions d'euros ont déjà été engagés, se poursuivent sans retard.
    Pour commencer à rééquilibrer le trafic, votre prédécesseur, Jean-Claude Gayssot, avait lancé le projet d'autoroute ferroviaire, fondé sur l'adoption d'un nouveau matériel, le modalhor, et sur l'élargissement du gabarit du Mont-Cenis. Là encore, l'inquiétude prévaut, puisque les rédacteurs de l'audit doutent de la réussite de ce projet, qui devrait être opérationnel - vous le confirmerez sûrement - d'ici à la fin du mois de juin. Pire, ils escomptent qu'il démontrera l'inutilité des investissements futurs. C'est pourquoi, monsieur le ministre, je voudrais savoir si le Gouvernement est prêt à contribuer à la réussite de ce projet.
    L'audit repousse aussi au-delà de 2020 le projet de ligne à grande vitesse Lyon-Sillon alpin, qui est le premier maillon français du Lyon-Turin, alors que l'Etat s'est engagé, aux côtés des collectivités rhônalpines, par un protocole signé le 19 mars 2002 qui fixe les clés de financement. Le Gouvernement entend-il assurer la continuité des engagements de l'Etat, qui ont bien été précisés à cette occasion ?
    M. Michel Destot. Absolument !
    M. Jean-Jack Queyranne. Participant à cette réunion je peux vous assurer que M. Gayssot a été très précis.
    Il faut aussi réaliser le contournement ferroviaire Est de Lyon. Si le tracé devrait être revu pour tenir compte des inquiétudes légitimes des riverains, ce projet doit être maintenu.
    Vous avez évoqué, monsieur le ministre, le développement durable comme premier critère de décision. Pourquoi s'engager à Johannesburg, par la voix du Président de la République, à promouvoir le protocole de Kyoto, et continuer à supporter que, dans les vallées alpines, plus de 275 tonnes de gaz nocifs soient lâchées chaque jour dans l'atmosphère par la circulation des poids lourds ? Le choix du « tout routier », celui de l'audit, relève d'un conformisme affligeant alors que tout plaide pour le ferroviaire.
    En exprimant la réaction des Rhônalpins, j'ai aussi la conviction de plaider pour l'Europe. Le Lyon-Turin est un outil essentiel d'aménagement du territoire européen. Il est le maillon manquant qui permettra de mettre en réseau 5 000 kilomètres de lignes existantes reliant 250 millions d'habitants. C'est le contrepoids indispensable à l'axe Rhin-Danube si l'on veut rééquilibrer les échanges en Europe. De ce point de vue, il faut obtenir que la participation européenne soit portée de 10 à 20 %.
    A projets exceptionnels, financements exceptionnels. Serions-nous plus timorés que nos voisins suisses qui ont entrepris la percée de deux grands tunnels ferroviaires : le Lötschberg et le Gothard ? Ce dernier, long de 57 kilomètres, sera livré en 2012 et aura les mêmes caractéristiques que le tunnel de base de 52 kilomètres envisagé pour le Lyon-Turin. Il ne faut pas hésiter, comme en Suisse, à faire payer à son juste prix l'usage de la route par les camions afin de rétablir la compétitivité du rail.
    Le partenariat public-privé ne peut constituer qu'un appoint dont l'intérêt sera d'optimiser les financements et de partager les risques. L'essentiel relève d'un financement public. C'est pourquoi il faut laisser au bénéfice de l'Etat les excédents de péages routiers et mobiliser ces ressources au profit des projets d'infrastructures. A ce titre, monsieur le ministre, vous devez confirmer le rôle du pôle multimodal alpin et lui réserver les résultats de la société autoroutière AREA pour financer sans retard un premier tube ferroviaire sous le massif de la Chartreuse.
    Il convient de ne pas perdre un temps précieux au prétexte de faire des économies. Bien au contraire, le contexte de marasme économique appelle le soutien de grands projets à valeur ajoutée.
    M. le président. Il faut conclure !
    M. Jean-Jack Queyranne. En conclusion, je rappelle qu'en quatorze années, de 1857 à 1871, 3 000 hommes ont creusé à la barre à mine le tunnel du Mont-Cenis. Devrons-nous compter le double, ou plus encore, avant de voire naître le Lyon-Turin ? Je crois que, à l'issue de ce débat, des engagements précis doivent être pris en faveur d'un projet qui permettra d'intensifier les échanges en Europe et de promouvoir le développement durable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Christian Philip.
    M. Christian Philip. Je ferai quatre observations.
    La première - d'autres l'ont faite avant moi - est que le débat de ce soir est nécessaire. Les grandes infrastructures de transport sont un facteur essentiel, tant du dévellopement économique que de l'aménagement du territoire et de la maîtrise de notre environnement. Il faut donc faire comprendre aux Français l'importance et la nécessité des choix que vous ferez demain, monsieur le ministre.
    Trop de projets ont été mis en avant sans que nos compatriotes aient été aidés à se les approprier et sans que des études aient permis d'avoir une idée exacte de données importantes, comme leur coût à la fois en investissement et en fonctionnement, ou les contraintes pour les riverains. Trop de projets ont été annoncés sans que l'on soit assuré, on l'a dit, de leur réalisation. Il faut donc une politique volontariste et ambitieuse tout en étant réaliste. Vous devrez choisir, monsieur le ministre, les infrastructures à réaliser d'ici à 2020 et proposer les mesures permettant de les financer dans ce délai. Voilà pourquoi, comme d'autres avant moi, je vous demanderai une loi de programmation. Elle est nécessaire. Nous devrions, après ce débat et sur la base des choix que vous ferez, pouvoir nous prononcer.
    Dans ces choix, le transport routier restera bien sûr le premier mode de transport, mais les transferts modaux devront être également favorisés et, en premier lieu, évidemment, le transfert de la route vers le rail, même si celui-ci sera beaucoup plus modeste et plus lent que certains le disent.
    Deuxième observation : dans ce débat, la dimension européenne ne peut pas être ignorée. La place de la France en Europe doit être consolidée ! Le renforcement de l'attractivité de notre territoire est une préoccupation importante à l'aune des élargissements programmés de l'Union. La France n'est plus géographiquement au coeur de l'Europe.
    M. Pierre Forgues. Elle ne l'a jamais été.
    M. Christian Philip. Il convient donc de mener cette réflexion sur les infrastructures de transport en ayant à l'esprit qu'il faut éviter que notre pays soit seulement un lieu de transit. Il ne faut pas qu'il soit évité. Il doit être un véritable carrefour. Je plaiderai donc à mon tour pour le Lyon-Turin.
    Troisième observation, ce débat doit, je l'ai dit, vous conduire à des décisions, monsieur le ministre. Il faut agir et savoir anticiper, sur le Lyon-Turin, comme sur la liaison fluviable Seine-Nord, par exemple. Mais, vous l'avez dit, être concret, décider, c'est apporter un plan de financement aux projets que l'on retiendra. M. Queyranne a fait remarquer à l'instant qu'il faudra pour le Lyon-Turin un financement exceptionnel. Peut-être. En tout cas, ce qui est sûr, c'est qu'il faudra un financement. Jusqu'à présent, seule une décision de principe avait été énoncée et personne ne savait comment cette liaison serait financée.
    Des ressources nouvelles sont donc nécessaires. J'apporte mon appui aux suggestions que vous nous faites, monsieur le ministre. J'apporte mon appui en particulier à la proposition de l'audit, même s'il faudra bien sûr en discuter les modalités, notamment avec les transporteurs routiers, essayer de l'inscrire, compte tenu de l'expérience allemande, dans le cadre de l'harmonisation européenne, et déterminer le partage éventuel des compétences entre l'Etat et les régions. Cette ressource nouvelle devra cependant respecter un axiome simple : être réellement et clairement affectée aux transports. C'est pourquoi je me prononcerai pour la création d'un établissement public spécialement conçu à cet effet.
    Il convient également de rendre possibles les financements mixtes public-privé, en assouplissant le cadre juridique nécessaire à ce type d'organisation.
    Il faudra aussi examiner la piste du grand emprunt européen. Et pourquoi ne pas demander à ce que se tienne au Parlement européen, comme aujourd'hui dans cet hémicycle, un débat sur une politique des transports digne de ce nom ?
    Dernière observation : ce débat ne peut ignorer les grandes infrastructures des transports urbains. Vous ne pouvez pas tout demander aux audits, mais force est de constater qu'ils ont laissé de côté un pan entier du sujet, un domaine qui concerne une majorité de Français, et où les besoins d'investissements sont importants. Je ne crois pas que nous puissions rester sur ce déficit, même s'il doit donner lieu à des solutions spécifiques.
    M. le président. Veuillez conclure, monsieur Philip.
    M. Christian Philip. Je vais conclure, monsieur le président. Le Gouvernement doit proposer un plan d'action, même s'il appartient à chaque collectivité de définir sa stratégie - le plan des déplacements urbains - et de la mettre en oeuvre. Mais, pour cela, il faut aussi avoir les ressources financières nécessaires. C'est pourquoi je souhaite que, dans le cadre des lois de décentralisation, le Gouvernement puisse rendre possibles des formes d'expérimentation concernant le financement des déplacements urbains. Je pense par exemple, sous une forme ou sous une autre, au péage pour les collectivités qui décideront de le faire.
    En conclusion, la politique que nous arrêterons concernant nos grandes infrastructures va, on le sait, façonner la France de demain, c'est-à-dire la vie de nos enfants. Aussi, devons-nous avoir une politique volontariste, et proposer une loi de programmation révisable régulièrement, qui permette clairement de savoir, premièrement ce que l'on fera et, deuxièmement, quand. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Mes chers collègues, je réitère ma demande de tout à l'heure. Il nous reste encore à entendre trente orateurs, la réponse de M. le ministre et celle de M. le secrétaire d'Etat. Au rythme actuel, nous n'aurons pas terminé avant quatre heures du matin. Je vous demande donc de vous en tenir scrupuleusement à vos cinq minutes.
    La parole est à M. Gérard Charasse.
    M. Gérard Charasse. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, « La France en Europe : quelle ambition pour la politique des transports ? », tel est le titre de l'étude prospective de la DATAR. Je souhaite que ce soit également la question à laquelle nous répondrons à travers ce débat.
    Je dois vous dire, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'une telle étude et qu'un tel débat quelques mois après les schémas multimodaux de services collectifs de transports et les contrats de plan Etat-Région sonnent comme si le Gouvernement s'apprêtait à effectuer un pas de côté et justifier une frilosité que l'on sent déjà dans ses propos.
    Je veux donc, en introduction, rappeler que la représentation nationale dans son ensemble, les élus locaux, les associations, bref l'ensemble de nos concitoyens, ont travaillé à ces schémas, aux contrats de plan Etat-Région, et que nous ne laisserons pas le Gouvernement modifier un cap que nous avons collectivement fixé, surtout lorsque l'investissement en infrastructure, c'est-à-dire l'avenir économique de la France, est en jeu.
    Cela dit, l'étude de la DATAR me convient car elle permet à nouveau de souligner la curieuse manière dont a souvent été traitée, au cours du temps, la région Auvergne, et, singulièrement, le département de l'Allier.
    Permettez-moi de revenir sur deux chiffres.
    Le premier est l'accès à Paris. La DATAR le classe en quatre niveaux. Un seul département est en niveau 4 : les Hautes-Alpes. L'Allier est juste derrière, en niveau 3.
    M. Bernard Accoyer, La Haute-Savoie est encore moins bien classée !
    M. Gérard Charasse. ... alors qu'il est traversé par la ligne SNCF Paris-Clermont, par la nationale 7, par la RCEA, et bordé par trois autoroutes, l'A 71, l'A 72 et l'A 75.
    Le second chiffre a trait aux bassins de vie dont la desserte ne satisfait pas aux objectifs d'une politique d'aménagement du territoire équilibrée. La DATAR les liste. On commence par Villefranche-de-Rouergue - 17 000 habitants -, Auch - 36 000 habitants -, Aurillac - 57 000 habitants -, Castres - 62 000 habitants. En haut de cette liste, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, il y a Vichy, le seul bassin de vie de 75 000 habitants qui ne soit ni contourné, ni relié aux réseaux nationaux et internationaux, et où, qui plus est, le Gouvernement veut fermer l'établissement du GIAT.
    Face à ces constats, qui ne sont donc plus seulement les nôtres, je souhaite appeler votre attention sur cinq points.
    Premièrement, il faut continuer le plan d'aménagement de la RN 7 dont je rappelle qu'il s'arrête entre Moulins, au nord du département, et Lapalisse, au sud. Les élus locaux du sud de l'Allier et du nord de la Loire, ont sollicité une audience pour vous exposer leurs positions.
    M. Jean-Pierre Soisson. Il faut descendre au sud de Nevers !
    M. Gérard Charasse. Je crois qu'ils n'ont toujours pas de réponse et je vous indique qu'une demande plus formelle vient d'être cosignée par tous les parlementaires du département.
    Deuxièmement, même si nous savons que nous aurons la primauté du train Corail TRD-train rapide pour demain - ,...
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Superbe train !
    M. Gérard Charasse. ... il faut encore améliorer la desserte ferroviaire sur l'ensemble du parcours Paris-Clermont. Elle est, tant pour le trafic passager que pour le fret, une pénétrante vers le centre de la France et peut être un axe de développement des plates-formes multimodales.
    Troisièmement, je prends acte des efforts poursuivis sur la RCEA. J'étais, hier, avec le préfet de région sur ce tracé. On comprend, in situ, l'intérêt d'une telle liaison.
    Quatrièmement, votre département ministériel a travaillé sur le contournement de Vichy et les liaisons du bassin avec la RCEA, la RN 7, l'A 71, l'A 75 et l'A 72. Puisque c'est aussi un débat d'actualité, je dois vous dire que je regrette que vous ayez autorisé votre directeur départemental à partir en retraite car il a donné une réelle impulsion à ce projet. (Sourires.) Nous sommes aujourd'hui au stade de la concertation. J'ai tenu à ce qu'elle se fasse tôt, de manière transparente. Le dossier est aujourd'hui chez vous et au Conseil d'Etat. Je vous demande, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, de ne pas le retarder ; il est vital pour un bassin d'emploi qui recèle d'énormes qualités humaines en particulier, mais qui reste isolé des grands réseaux de communication et qui vient d'être très durement touché par le plan GIAT.
    En cinquième et dernier point, permettez-moi d'évoquer la situation de l'aéroport de Vichy. Avec la direction générale de l'aviation civile, j'ai cherché s'il existait ailleurs en France une telle installation disponible. Il n'y en a pas. La sous-utilisation de cette plate-forme, qui est due, pour l'essentiel, à un gestionnaire maladroit, est flagrante. Il serait donc utile que le ministère se penchât sur ce qui est davantage une opportunité qu'un éventuel fardeau.
    M. le président. Il vous faut conclure, monsieur Charasse.
    M. Gérard Charasse. Je vais conclure, monsieur le président.
    Je sais que vous me pardonnerez d'avoir principalement évoqué les dossiers de l'Allier, région Auvergne dont je suis élu et dont j'étais, dans la liste des intervenants, l'un des trois représentants. Leurs habitants attendent tout comme moi, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, vos réponses sur ces cinq questions. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Francis Hillmeyer.
    M. Francis Hillmeyer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai déjà rappelé ici la contribution très importante de l'Alsace à la solidarité nationale : elle est la première région contributrice de France après la région parisienne.
    Or l'Alsace s'essouffle et s'anémie. Comme un corps humain, elle a besoin d'oxygène, c'est-à-dire d'une bonne ouverture aux flux de communication. Les chiffres du chômage le montrent à l'évidence. De plus, la récession qui frappe l'Allemagne et la Suisse nous inquiète : 38 000 de mes concitoyens travaillent dans ces deux pays, dont la grande majorité en Suisse.
    Il faut redonner confiance et optimisme. C'est le moment d'agir, d'investir et les Alsaciens l'attendent. Cela fait des années qu'on le dit et qu'on le répète ici, et ce n'est pas seulement des deux TGV dont je veux parler - ce thème sera largement exposé dans quelques instants par Gilbert Meyer - mais de tout ce qui reste en panne ou reste à faire et des promesses non suivies d'effets.
    La France, qui se veut avec l'Allemagne le moteur de l'Europe, se donnera-t-elle enfin les moyens de ses ambitions dans cette région carrefour par excellence ?
    Cela passe avant tout par une économie vivante et chacun sait que la vitalité, si elle ne se décrète pas, du moins, s,organise et peut même être communicative.
    Nous avons un besoin impératif d'infrastructures routières de qualité. Ainsi, Strasbourg étouffe. Le projet de grand contournement ouest doit être réalisé. A Mulhouse, la mise à deux fois trois voies de l'A 36 qui traverse toute l'agglomération s'arrête à un kilomètre du but, faute de moyens, tout comme le mur antibruit réclamé de façon récurrente par tous les élus depuis dix ans. L'absence de continuité dans cette coupure urbaine frise le scandale public.
    Le tunnel Maurice Lemaire, indispensable au trafic dans le massif vosgien sur la RN 59, attend que soient effectués des travaux de remise aux normes avec sa galerie de sécurité. Il constitue la pierre angulaire du dispositif de désenclavement de la vallée de Sainte-Marie-aux-Mines.
    Sur l'axe Mulhouse-col du Bussang, la vallée de la Thur reste bloquée, asphyxiée quatre heures par jour par des bouchons impressionnants et des chapelets de semi-remorques.
    Le projet de tram-train de Mulhouse pouvait apporter un remède, une part de solution, en favorisant le transfert sur le rail qu'une partie des automobilistes. Las. Les coupures budgétaires n'ont pas épargné ce projet et je ne puis que le déplorer à mon tour.
    On ne peut évidemment oublier que l'on a aussi, avant vous, rayé d'un trait de plume l'outil pertinent qui aurait permis d'éviter en partie les 30 000 camions qui transitent journellement par Mulhouse, l'A 36, ou la RN 66 : je veux parler du canal. La voie d'eau entre Rhin et Rhône, seule grande solution écologique, est-elle vraiment aux oubliettes ?
    M. François Sauvadet. Très bonne question !
    M. Francis Hillmeyer. Est-il possible que l'on oublie que les ports haut-rhinois sont, par l'importance de leur trafic, les deuxièmes ports français en eaux intérieures ? Etes-vous sûr, monsieur le ministre, que l'on a bien réétudié ce dossier ? Permettez-moi de vous dire que, pour ma part, j'en doute fort. Je demande donc qu'il soit rouvert.
    M. François Sauvadet. Très bien !
    M. Francis Hillmeyer. Le projet de la CNR doit être abandonné car il est trop ambitieux. Mais une voie moyenne pragmatique, réaliste et éventuellement plus rustique, doit voir le jour.
    L'Alsace n'est pas la seule à en avoir besoin, la Franche-Comté et Lyon aussi : nos marchandises, transitant par Anvers, via Marseille - l'axe mer du Nord-Méditerranée - gagneront au minimum une semaine de temps de transport.
    Enfin, monsieur le ministre, je vais à mon tour vous parler du train et, plus particulièrement, du trafic de marchandises.
    Deux choses sont nécessaires et urgentes : l'aménagement de la ligne actuelle Mulhouse-Lyon, tant pour le transport des voyageurs, qui mettent actuellement quatre heures pour aller d'une ville à l'autre, que pour les marchandises, car cette ligne doit intégrer très vite une solution de ferroutage, c'est-à-dire de mise sur le rail d'une partie des camions de longue distance. Là aussi, nous guettent, d'une part, l'asphyxie et, d'autre part, le ras-le-bol chez nos concitoyens ! J'ai proposé des solutions innovantes, mais réalistes.
    A propos de ras-le-bol, pour finir, je vais vous parler de la gare de marchandises de Mulhouse...
    M. le président. Sous forme de conclusion, monsieur Hillmeyer,...
    M. Bernard Accoyer. Ce n'est peut-être pas indispensable d'en parler !
    M. Francis Hillmeyer. ... dont on avait évoqué le déplacement hors du tissu urbain. Cette gare ne constitue pas seulement un danger potentiel pour la population riveraine, mais aussi une source de nuisances sonores souvent insupportables. Certes, je sais qu'on ne peut pas déplacer une gare de triage de cette importance sans investissements énormes,...
    M. Bernard Accoyer. Il n'y a rien d'impossible !
    M. le président. Monsieur Accoyer !
    M. Francis Hillmeyer. ... mais alors, monsieur le ministre, il faut ordonner la mise en chantier de systèmes de protection phonique : hauts merlons, murs antibruit, tunnels de rangement de freinage, sans oublier les nécessaires systèmes de confinement de wagons transportant des matières dangereuses.
    Cela, aucun des gouvernements précédents ne pouvait l'ignorer. On paie aujourd'hui leur inaction ou leur politique de gribouille (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)...
    M. Yves Bur. Surtout celle des cinq dernières années !
    M. Bernard Accoyer. Tout le monde le sait !
    M. Francis Hillmeyer. ... dans une perte d'énergie, de vitalité, de crédibilité économique entraînant une perte de qualité de vie. Cela ne peut plus et ne doit plus continuer ainsi.
    Je vous remercie, monsieur le ministre, au nom de tous mes collègues UDF et UMP du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, de prendre en compte ces demandes vitales pour l'Alsace. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme Odile Saugues. On en reparlera dans quelque temps !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Drian.
    M. Jean-Yves Le Drian. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, l'Ouest s'inquiète de vos choix futurs ! La Bretagne est préoccupée par vos décisions à venir. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Comment pourrait-il en être autrement ? Nous nous battons depuis plus de dix ans pour la mise en oeuvre du TGV Bretagne-Pays de Loire et pour que Brest et Quimper soient à trois heures de Paris et des interconnexions ferroviaires européennes.
    Nous avons surmonté progressivement et parfois difficilement les contraintes techniques, géographiques et politiques qui retardaient ce dossier pour aboutir à un projet achevé et consensuel.
    Nous avons cru le Président de la République quand il a apporté son soutien à ce projet déterminant pour le désenclavement de l'Ouest dans une Europe tirée vers l'Est. Nous avions acté les engagements de réalisation pour 2010. Et puis patratas ! Les deux rapports rendus publics récemment remettent sérieusement en cause la faisabilité, dans un temps rapproché de la liaison à grande vitesse Le Mans-Rennes.
    Ainsi, le rapport d'audit place ce projet en cinquième et dernière priorité « par ordre d'intérêt décroissant » et envisage sa réalisation au-delà de 2017, alors qu'il était question initialement, de 2010.
    Pire, le rapport de la DATAR, que l'on croyait soucieux de l'aménagement du territoire, ne place même pas le TGV Bretagne-Pays de Loire dans la liste des lignes nouvelles à grande vitesse « à privilégier ». Bref, nous avons acquis la conviction qu'une stratégie de l'abandon est mise en place subrepticement, mais systématiquement.
    Je sais qu'il ne faut pas confondre ces rapports et vos décisions. Il me paraît néanmoins utile, dans le cadre de ce débat, de souligner quatre erreurs du rapport d'audit concernant ce projet.
    Première erreur : l'audit met en doute l'impact du projet sur le trafic. Il note que la réduction du temps de parcours vers Rennes n'apportera qu'une évolution limitée du trafic car Rennes est déjà bien desservie. Il semble ignorer que notre objectif n'est pas seulement Rennes, mais bien Brest et Quimper. Il fait comme si, lorsque Rennes est desservie, la Bretagne est irriguée, ce qui est contradictoire avec la logique qui prévaut dans la mise en oeuvre du contrat de plan Etat-région. Les investissements que prévoit ce dernier sont, en effet, destinés à améliorer les infrastructures ferroviaires nord et sud de la Bretagne afin que l'aboutissement du TGV Bretagne en 2010, les TGV pendulaires puissent poursuivre jusqu'à Quimper et Brest.
    Deuxième erreur : il est écrit que le TGV ouest a « une dimension européenne peu développée ». Cette affirmation est stupéfiante. Elle revient à condamner toute région qui n'est pas au coeur de l'Europe, toute région périphérique, alors qu'au contraire, au moment où l'Europe s'élargit vers l'Est, il est capital que l'Ouest se rapproche du coeur de l'Europe. D'une certaine manière, suivre l'audit aboutirait à considérer que « hors de la banane bleue, il n'y a pas de salut TGV » !
    Troisième erreur, monsieur le ministre, l'audit estime que l'incidence sur le fret ferroviaire de ce projet ne sera pas significative. Or il s'agit là précisément d'un des arguments essentiels de notre dossier : libérer la voie actuelle pour le fret, d'autant plus que ce sillon spécifique permettrait de renforcer l'articulation avec les ports de l'Atlantique et de favoriser le cabotage dont a parlé tout à l'heure avec intérêt le secrétaire d'Etat aux transports. Je trouve regrettable que la dimension intermodale ne soit pas prise en compte pour la définition de l'intérêt du TGV Ouest.
    Enfin, quatrième erreur, on ne peut séparer l'objectif du TGV Ouest pour 2010...
    M. le président. Je vous remercie de bien vouloir conclure, monsieur Le Drian.
    M. Jean-Yves Le Drian. ... de la réalisation de l'aéroport international de Notre-Dame-des-Landes, qui, pour l'Ouest, est indispensable.
    En Bretagne comme dans les Pays de Loire, il existe aujourd'hui un consensus offensif. Vous avez, monsieur le ministre, reçu les élus de toutes les sensibilités politiques. Notre dossier est prêt et les Bretons ne comprendraient pas une exclusion qui serait incohérente et imméritée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-François Mancel.
    M. Jean-François Mancel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'exercice est pour moi difficile car je vais devoir évoquer devant le ministre de l'équipement picard des projets picards qu'il connaît mieux que moi. Néanmoins, mes collègues de l'UMP et de l'UDF de la Picardie connaissant l'impartialité de M. Robien, ont jugé souhaitable que le groupe de pression des élus picards intervienne. J'ai d'ailleurs noté avec plaisir que M. Gremetz semblait tout à l'heure faire plus confiance à Gilles de Robien qu'à son prédécesseur pour concrétiser nos ambitions en Picardie. (Rires.)
    M. Jean-Yves Le Déaut. Allez chercher M. Gremetz !
    M. Jean-François Mancel. Il a raison !
    M. Bernard Accoyer. Maxime a beaucoup de bon sens !(Sourires.)
    M. Jean-François Mancel. Voici, rapidement, quatre grands projets picards que nous avons à coeur de voir sortir : la réalisation de l'A 24 pour doubler l'autoroute A 1, pas uniquement pour des problèmes de flux économique ou pour un simple confort, mais tout simplement parce que c'est essentiel pour la sécurité ; le prolongement de l'A 16 jusqu'à la Francilienne, mais je crois que l'on avance dans cette direction ; la réalisation du TGV pendulaire Paris-Calais par Amiens pour permettre d'aller vers la très belle côte picarde ; enfin, le barreau A 1-A 16, qui permettrait d'alléger la circulation dans toute la partie sud du département de l'Oise.
    Il faudrait absolument que les collectivités territoriales voisines de l'Ile-de-France puissent connaître la vision qu'a l'Etat de la circulation dans le grand Bassin parisien car grand nombre de nos projets sont actuellement bloqués parce que nous ne savons pas où l'Etat veut aller. Je l'ai sollicité pendant des années sans avoir la moindre réponse.
    Deuxième réflexion, la décentralisation. On en a peu parlé. Prenons un exemple, la RN 31 dans l'Oise, la route qui va du Havre à l'Est en passant par Rouen, Beauvais et Reims. Il aura fallu vingt ans pour faire vingt-quatre kilomètres en deux fois deux voies. Il nous faudra donc un siècle pour la mettre totalement à deux fois deux voies. L'Etat perd toute crédibilité aux yeux du citoyen quand il n'est pas capable d'aller plus vite. Je crois que la meilleure solution c'est de décentraliser, monsieur le ministre. Je vous l'ai souvent dit, nous sommes preneurs. Mais il ne s'agit pas de faire une décentralisation à moitié ou au quart. Il s'agit de transférer le réseau national et les personnels qui y sont liés, c'est-à-dire l'ensemble du service public routier.
    Il faudra également nous dire ce que vous comptez faire des contrats de plan. La question mérite d'être posée. Pour la RN 31 dont je parlais tout à l'heure, il a fallu tout de même cinq contrats de plan avec la mobilisation, pour faire vingt-quatre kilomètres, de l'Etat, de la région, des départements et des communes ou communautés de commune.
    Troisième et dernier point, les financements.
    Je trouve très intéressante votre idée de faire appel à une redevance d'usage affectée, fondée sur la technique du GPS. Certes, cela peut comporter des inconvénients, ils ont été évoqués. Il ne s'agit pas d'alourdir les charges de nos transporteurs, cela peut au contraire renforcer leur position face à la concurrence internationale. Il faut aussi éviter les détournements de trafic. Déjà, aujourd'hui, de nombreuses routes départementales et même parfois de petites voies communales sont traversées par des poids lourds qui préfèrent passer là que d'aller vers des embouteillages sur de grandes voies ou payer des péages.
    Il faudrait intégrer cette réflexion dans celle que vous allez mener sur la redevance.
    Deuxième idée, le partenariat public-privé, qui a été défini dans son principe par la loi d'habilitation sur la simplification administrative. Il faudrait aller très loin, et avoir le courage de faire sauter de nombreux verrous du code des marchés publics, qui est fondé sur la défiance et sur l'inefficacité. Il faudra beaucoup de courage, car nous nous heurterons à des résistances que nous rencontrons en permanence, notamment des résistances étatiques fortes.
    M. le président. Ayez le courage de conclure, monsieur Mancel. (Sourires.)
    M. Jean-François Mancel. J'ai terminé, monsieur le président.
    Merci et bravo, monsieur le ministre, d'avoir organisé ce débat, merci d'agir en finançant et non pas de promettre, comme on l'a fait, sans financer. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Pierre Forgues. Conclusion stérile !
    M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, M. Sauvadet et M. Hillmeyer ont souhaité que l'on rouvre le débat sur la liaison à grand gabarit Saône-Rhin.
    M. François Sauvadet. Oui.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. J'y suis, pour ma part, tout à fait opposée.
    M. Bernard Schreiner. C'est un tort !
    M. Bernard Accoyer. Vous n'étiez pas avec Mme Voynet au gouvernement ?
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. C'est la position de la majorité de la population et des élus de cette région de Franche-Comté qui se trouve entre la Bourgogne et l'Alsace.
    Je n'avais pas prévu d'évoquer ce dossier car il y a un dossier d'aménagement de liaison qui est essentiel, c'est le TGV Rhin-Rhône, mais je souhaitais, monsieur le ministre, vous rappeler clairement ma position et celle d'un certain nombre d'élus, d'ailleurs présents ce soir sur les bancs de votre majorité.
    Revenons au TGV Rhin-Rhône. J'ai écouté votre intervention, tout à l'heure, et j'ai lu avec beaucoup d'intérêt vos déclarations dans la presse ce matin. Si je suis en accord avec vos propos repris dans un supplément économique d'un grand quotidien national, lorsque vous parlez de la nécessité de retenir comme critères pour un certain nombre de choix, ceux qui vont nous permettre d'être en bonne position pour l'élargissement de l'Europe à l'Est, je voudrais cependant vous dire mon inquiétude de ne pas vous voir citer le projet du TGV Rhin-Rhône qui représente pourtant, avec les deux autres projets, le Lyon-Turin et le TGV Est, un élément de cohérence.
    M. Jean-Pierre Soisson. Très bien !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. J'espère que vous tiendrez compte des interventions de Mme Comparini, du président de la région Bourgogne et des députés concernés par l'ensemble du tracé, qu'ils soient franc-comtois, de PACA, de l'ensemble du secteur qui fait le lien entre le Nord et le Sud.
    Le TGV Rhin-Rhône, vous le savez, est un élément majeur, structurant, du réseau ferroviaire européen. La branche Est, c'est sûrement le seul TGV véritablement « girondin », parce qu'il n'est pas dans une logique de liaison de Paris avec la province. C'est une organisation du territoire entre des éléments de vie et de développement économique essentiels que sont le Nord et le Sud de l'Europe, l'Allemagne, la Suisse et l'ensemble de la France.
    M. François Sauvadet. Là, on est complètement d'accord !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Il y a une branche Est, qui va relier Mulhouse, Belfort, Besançon, Dijon. Il y aura, après, une deuxième branche, la branche Ouest, qui nous permettra de nous relier à la ligne du Sud-Est, et il y aura, je l'espère, la branche Sud, qui nous permettra de nous relier à Lyon et à l'ensemble des systèmes. C'est ce système en étoile qui en fait la force et qui lui permet d'irradier sur l'ensemble du territoire.
    Quand on regarde l'ensemble du dispositif, c'est sûrement le TGV dont les études et les APD sont les plus avancés. C'est sûrement l'un des TGV les plus rentables, en tout cas pour la branche Est, même si on peut se poser des questions sur le système de calcul de la rentabilité. Par ailleurs, c'est sûrement le TGV le plus intéressant pour la restructuration européenne.
    Je participais, ici, il y a quelques jours, à une réunion de l'association présidée par Jean-Marie Bockel, qui a maintenant un certain nombre d'années. J'ai été impressionné par le nombre de pays, de régions, de collectivités représentés : PACA, Bourgogne, Alsace, Allemagne, Baden-Wurtenberg, Suisse, Perpignan, Espagne. Si, depuis dix ans, l'ensemble des élus de ces collectivités sont mobilisés à ce sujet, ce n'est pas sans raison.
    Mme Comparini l'a évoqué tout à l'heure, M. Soisson également, M. Girard en parlera tout à l'heure, il est important de considérer la structure de l'ensemble de ce dispositif. La première partie des APD sur la branche Est est lancée. Arrêter en cours de lancement serait très grave, non seulement pour ma région, pour le secteur que je représente, mais aussi pour l'ensemble de l'organisation du dispositif du TGV. En disant cela, je n'ai pas le sentiment de ne défendre que mon secteur. J'ai vraiment l'impression de défendre une structuration européenne. Pourquoi les Suisses ont-ils pris l'engagement de participer au financement ? Pourquoi l'ensemble des régions, des départements, des grandes agglomérations...
    M. Yves Bur. L'Europe !
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. ... ont-ils déjà bouclé leur part de financement ?
    Monsieur le ministre, j'ai envie de vous poser cette question très simple et très directe : alors que l'audit est très favorable au TGV Rhin-Rhône, qu'il s'agisse de son intérêt, de l'avancement des travaux, de la nécessité de le réaliser, et que, dans vos déclarations jusqu'à présent, je ne vous en ai pas entendu parler, est-ce oui ou non pour vous quelque chose d'essentiel pour l'ensemble des régions et des pays concernés, qui doit être réalisé en priorité ? (Applaudissements sur de nombreux bancs.)
    M. le président. La parole est à M. Claude Gaillard.
    M. Claude Gaillard. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vais essayer d'apporter ma contribution au nom de mes collègues lorrains, après avoir écouté Jean-Pierre Soisson, qui s'exprimait en tant que président du Grand Est.
    Si j'ai bien compris, monsieur le ministre, il vous manque 12 à 14 milliards d'euros pour les infrastructures, et vous recherchez 1,5 milliard. Ce soir, on parle de projets et de financements. J'ai beaucoup entendu de projets, de demandes. Votre besace doit être pleine. A défaut de trouver de l'argent, vous avez en tout cas rencontré des projets.
    Deux mots sur le financement, qui, par nature, doit être innovant.
    Le partenariat public-privé, on en a parlé, c'est compliqué, ce n'est pas neuf. Je rappelle que c'est la France qui l'a inventé pour construire la tour Eiffel, qui a été financée par ce procédé. C'est quelque chose qu'il faut certainement exploiter le plus possible.
    Deuxième possibilité de financement, c'est ce que j'appelle le péage virtuel - la construction du pont sur le Tage à Lisbonne a été payée ainsi -, c'est la redevance domaniale kilométrique. Aujourd'hui, le réseau non concédé est de toute évidence sous-tarifé. Il faut donc bien voir comment nous pouvons mettre en place ce moyen de péage sur une partie de notre réseau routier, de façon à trouver des financements, et, parallèlement, avec le GPS, améliorer la modulation tant spatiale que temporelle du péage, de façon à utiliser au mieux nos autoroutes dans la journée et dans l'année.
    Il va de soi que l'objectif n'est pas de taxer une profession mais de voir comment nous pouvons faire payer au juste prix un certain nombre de transports. Cela nécessitera un certain nombre de négociations. Il faudra éviter une distorsion entre le péage des autoroutes et le péage RFF.
    Troisième point, la meilleure utilisation du financement européen. Vous l'avez dit tout à l'heure, monsieur le ministre, pour le réseau transeuropéen, on doit avoir 550 millions d'euros par an. Ce n'est pas beaucoup et, en plus, c'est saupoudré. Il faut peut-être regarder comment on peut accroître cette enveloppe et saupoudrer un peu moins.
    La Caisse d'épargne, la capacité d'épargne, la CDC et autres, Pierre Méhaignerie s'exprimait avec conviction tout à l'heure à ce sujet, je n'y reviens pas.
    Chacun comprend bien que nos différents schémas s'inscrivent dans une perspective volontaire avec trois objectifs : développement économique, attractivité du territoire et prise en compte des enjeux environnementaux. J'ai lu, comme tout le monde, ce que dit la DATAR, qui est notre tête bien pensante : soit nous continuons le fil de l'eau, mais c'est inadmissible, soit c'est le scénario de développement durable, mais, pour l'instant, c'est inaccessible. C'est un peu la quadrature du cercle. Il faut rééquilibrer les modes et donc avoir une politique volontariste. On est tout d'accord, on dit oui, on prend l'ensemble des projets. Il y a une addition. On ne change pas, on ne vexe personne et, en conclusion, on revient au fil de l'eau. C'est ainsi que les choses vont se passer, sauf miracle, ce que j'attends de vous, monsieur le ministre.
    La première perspective, c'est certainement une prise de conscience. Le développement économique que nous vivons n'est pas soutenable. Ces fameux flux tendus, avec un stock coûtant cher et le transport ne coûtant rien, aboutissent à des incohérences et des inconséquences du comportement de production : on ballade les produits puisque le transport ne coûte pas.
    Ce type de gaspillage n'est pas tolérable dans le temps. On va chercher de plus en plus loin la production ou la main-d'oeuvre la moins chère puisque le transport ne joue qu'à la marge. Il y a certainement une réflexion politique européenne à avoir. Si l'on considère que, sur ce point, on ne peut rien faire non plus, je me demande de temps en temps s'il faut vraiment se réjouir d'avoir organisé un débat.
    Pour éviter le tout-camion, il faut développer le ferroviaire. Je le dis sans polémique mais avec une vraie douleur, quand on a eu de l'argent, quand on a privatisé beaucoup plus que les autres sur une législature de cinq ans et qu'on a laissé RFF endetté comme il l'était, c'est une faute par rapport à l'histoire.
    M. Michel Bouvard. Tout à fait !
    M. Claude Gaillard. RFF doit avoir des moyens. Or il n'en a pas. Cela m'apparaît redoutable.
    M. Michel Bouvard. Bravo !
    M. Claude Gaillard. Dernière réflexion, tout cela s'inscrit dans l'Europe, si l'on croit à l'Europe.
    Le Grand-Est a un rôle particulier en Europe. Le TGV Est est fondamental. Je ne comprends même pas qu'on n'ose pas lancer la deuxième tranche. On doit aller jusqu'à Munich.
    M. Bernard Schreiner. Très bien !
    M. Claude Gaillard. Le TGV vers Francfort doit aller jusqu'à Berlin. Et le Rhin-Rhône est tout à fait indispensable. Cela permet en plus de raccorder le TGV Est au TGV-Rhin-Rhône en direction du Sud.
    M. André Schneider et M. Yves Bur. Très bien !
    M. Claude Gaillard. Il y a une cohérence dans ce projet qu'il faut à tout prix réaliser.
    M. le président. Merci de conclure.
    M. Claude Gaillard. Laissez-moi deux secondes.
    M. le président. On a beaucoup de retard.
    M. Claude Gaillard. S'agissant du fluvial, Saône-Moselle vous permet de faire Rhin-Rhône sur un itinéraire possible. Commençons un jour. Cessons de dire qu'on n'a pas les moyens, qu'on n'a pas le temps sinon on ne commencera jamais.
    Je terminerai sur les métropoles. Il faut en construire, on n'en n'a pas assez en France. Je parlerai de la mienne, Metz-Nancy. Il faut faire une autoroute qui nous permet de nous raccorder au Nord, de désenclaver correctement Nancy. Elle doit être prioritaire, alors que le schéma de service l'avait annulée. Si on ne construit pas de métropoles, on laissera des régions dans la déshérence, on n'abordera pas l'Europe de façon intelligente et on ne bénéficiera pas de cette Europe des vingt-cinq, de cet ancrage à l'Est dont nous avons besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Pierre Forgues.
    M. Pierre Forgues. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, les rapports sont utiles. Ils permettent le nécessaire débat contradictoire avec les élus, les citoyens, mais ils ne doivent dicter ni les stratégies à mettre en oeuvre, ni les projets à retenir, qui relèvent du politique.
    C'est dans cet esprit que j'aborde le débat, mais j'ai l'impression, monsieur le ministre, que, au-delà des discussions qui ont eu lieu dans les régions ou ici à l'Assemblée nationale, vous vous retranchez derrière ces rapports commandés pour mettre en oeuvre une politique a minima dénuée de toute ambition et de toute projection vers l'avenir.
    Sans stratégie ambitieuse en matière d'infrastructures de transports, il vous sera impossible de mettre en oeuvre une politique d'aménagement du territoire équilibrée et juste.
    Une bonne stratégie pour les régions du Sud-Ouest européen ne peut supporter de découpler la réalisation du TGV Paris-Bordeaux vers l'Espagne et celle du TGV Grand Sud Bordeaux-Toulouse-Narbonne. Le même horizon 2016 doit être fixé et constituer une priorité absolue. Bordeaux serait à deux heures de Paris, Toulouse à trois heures de Paris et à une heure de Bordeaux.
    L'attractivité des métropoles françaises à vocation européenne est étroitement liée à leur accessibilité par tous les moyens de transport. Bordeaux et Toulouse doivent être ouvertes sur l'Espagne, l'Atlantique et la Méditerranée.
    Les procédures ministérielles pour le TGV Grand Sud doivent donc être engagées en même temps que la poursuite des études des lignes à grande vitesse Sud-Europe-Atlantique et Sud-Europe-Méditerranée pour une réalisation d'ici à 2016.
    Autre sujet important : la traversée centrale des Pyrénées par les deux corridors est et ouest ne permettra pas de faire face à l'accroissement prévisible du fret, même s'ils sont fortement modernisés. Aujourd'hui, plus de 16 000 camions traversent chaque jour la frontière par ces deux passages. En 2020, il y aura saturation. Il nous faut donc prévoir dès maintenant une traversée ferroviaire à grande capacité au centre des Pyrénées. Elle donnera toute sa cohérence à un axe ferroviaire européen de fret nord-sud : Paris, Orléans, Agen, Tarbes, Saragosse. Il faut maintenir ce projet dans une perspective de réalisation à long terme vers 2020. Le groupe socialiste vient de déposer sur le bureau de l'Assemblée nationale une proposition de loi afin que ce projet de traversée centrale ferroviaire des Pyrénées puisse voir le jour.
    Les études préliminaires doivent pouvoir commencer dès maintenant. Il est donc urgent que le Gouvernement français s'engage sur ce dossier et demande son inscription dans la liste des infrastructures prévues dans le cadre du réseau transeuropéen des transports, ce qui permettrait d'obtenir un cofinancement important de l'Europe pour les études.
    Pourquoi la France bloquerait-elle ce projet soutenu par l'Europe, l'Espagne, les régions Aquitaine, Aragon, Midi-Pyrénées, Catalogne, et bien d'autres ? Le Président de la République lui-même a reçu, il y a quelques jours, une lettre du Premier ministre espagnol, M. Aznar, lui demandant son appui auprès de l'Europe pour une traversée ferroviaire des Pyrénées centrales.
    Le développement du fret ferroviaire ne peut se faire que si le rail est ouvert vers les autres pays européens. Aussi la France doit-elle revoir la position qu'elle a exprimée en juin 2002 par votre voix, monsieur le ministre, au conseil des ministres des transports de l'Union européenne et permettre ainsi le lancement des études préliminaires.
    Enfin, le projet d'un nouvel aéroport dans la région toulousaine montre que la stratégie globale en matière d'infrastructures et de moyens de transport est à l'évidence insuffisante.
    M. le président. Veuillez conclure, monsieur Forgues.
    M. Pierre Forgues. On ne tient compte ni des conséquences d'une liaison TGV Paris-Bordeaux-Toulouse, ni des aéroports existants, comme celui de Tarbes-Lourdes-Pyrénées, qui peuvent répondre notamment aux besoins actuels et futurs du fret aérien et des tour-opérateurs. Dans tous les cas, le deuxième aéroport projeté serait implanté à une cinquantaine de kilomètres du centre de Toulouse.
    Il y aurait là quelques économies à réaliser. Mais la hiérarchisation des priorités ne peut pas se faire essentiellement sur les coûts et les aspects financiers.
    M. le président. Concluez, monsieur Forgues.
    M. Pierre Forgues. La priorité doit être accordée aux territoires qui sont, aujourd'hui encore, à l'écart des grands réseaux de communications.
    Les régions ont montré, à travers les contrats de plan Etat-région, leur volonté de faire des efforts financiers. Allez-vous remettre en cause certains projets par le désengagement de l'Etat, comme c'est le cas pour la liaison POLT, dont on a parlé si longuement ?
    M. le président. Abrégez, monsieur Forgues !
    M. Pierre Forgues. Oui, monsieur le président. Vous étiez en forme, au début, mais, à présent, vous êtes fatigué.
    M. le président. Vous avez droit à cinq minutes, pas une de plus. Dépêchons-nous ! Abrégez !
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, il faut être rigoureux, sinon, on ne s'en sortira pas ! Il faut respecter le temps de parole !
    M. Pierre Forgues. Il est donc nécessaire que l'Etat consacre des moyens financiers importants. Un grand emprunt européen, des droits de péage pour les marchandises,...
    M. le président. Monsieur Forgues !
    M. Pierre Forgues. ... l'appel à l'épargne sont possibles.
    Monsieur le ministre, la volonté de l'Etat ne me semble pas à la hauteur des besoins et des enjeux du Sud-Ouest de l'Europe, et tout particulièrement de la région Midi-Pyrénées, tenue à l'écart et qui se sent oubliée, abandonnée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Monsieur Forgues, votre temps de parole est écoulé. Si chacun fait comme vous, nous serons encore là à quatre heures du matin.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Au suivant !
    M. Pierre Forgues. C'est un scandale ! Je n'ai pas dépassé les cinq minutes !
    M. le président. La parole est à M. Gilbert Meyer.
    M. Gilbert Meyer. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, avec le TGV, une autre carte de France doit se dessiner. Elle est inspirée par une volonté politique d'aménagement du territoire pour contribuer au développement local et aux liaisons à grande distance suivant une logique européenne. En effet, il ne peut y avoir aménagement du territoire s'il y a rupture dans les axes de communication. Un pays ne peut vivre si l'organisation du territoire ne concerne que quelques départements reliés à une métropole. Un pays ne peut s'imposer que si tous ses territoires forment une toile d'araignée avec ses ramifications et ses services.
    Que dire d'un territoire régional comme l'Alsace, qui, pour le moment, est écarté de ces ramifications et doit encore affronter, de l'autre côté de la frontière nationale, une concurrence impitoyable ?
    Ainsi faut-il dresser aujourd'hui l'état des priorités dans ce domaine et, dans cet inventaire, dégager la priorité des priorités en matière de TGV. La liaison intégrale Paris-Strasbourg est cette priorité, avec son interconnexion au réseau allemand.
    M. Yves Bur et M. André Schneider. Très bien !
    M. Gilbert Meyer. Il en va de même pour la liaison Rhin-Rhône. Monsieur le ministre, pour aménager le territoire, on ne peut se contenter de jeter un simple regard sur le coût et la rentabilité.
    L'aménagement du territoire passe principalement par les axes de communication à grande vitesse, indispensables à l'émergence d'une dynamique économique et sociale.
    Ce raisonnement s'impose aussi bien pour la liaison à grande vitesse Paris-Strasbourg que pour celle de Rhin-Rhône. En réduisant les durées de liaison, le TGV provoque un rapprochement des pôles de développement. Cet instrument de compétitivité ne fait pas que relier les territoires : il conditionne également le futur.
    L'Alsace est lourdement pénalisée par la lenteur des liaisons ferroviaires vers l'extérieur.
    M. Yves Bur. Oui !
    M. Gilbert Meyer. Or, cette région a fait de gros efforts afin d'améliorer la situation sur son propre territoire. Elle ne peut être tenue à l'écart plus longtemps d'un réseau qui irrigue déjà de nombreuses régions.
    M. Yves Bur. C'est vrai !
    M. Gilbert Meyer. Peut-on seulement comprendre que l'Alsace ait à se battre sur ce sujet ? Les élus alsaciens croyaient avoir atteint l'objectif visé. Hélas ! les choses traînent un petit peu.
    M. Bernard Schreiner. Un petit peu beaucoup !
    M. André Schneider. C'est un euphémisme !
    M. Gilbert Meyer. Monsieur le ministre, le France ne cesse d'affirmer sa volonté de consolider la position de Strasbourg et de ses institutions européennes.
    M. Yves Bur. Il faut passer aux actes !
    M. Gilbert Meyer. Plus nous tardons à réaliser le TGV Paris-Strasbourg, plus nous fragilisons la capitale européenne.
    M. Jean-Yves Le Déaut. Il a raison !
    M. Gilbert Meyer. A quoi servirait, sinon, le combat de votre collègue Noëlle Lenoir à la tête du comité de pilotage pour Strasbourg, capitale européenne ?
    En outre, nous devons aussi, à chaque instant, rappeler l'originalité de nos TGV Est et Rhin-Rhône, doublement stratégiques en matière d'aménagement du territoire. Ils dépassent le seul cadre hexagonal pour s'inscrire dans une dimension européenne, car l'Alsace est, pour notre pays, un territoire régional de référence, cette région qui permet l'interconnexion avec l'Europe.
    M. André Schneider. Très bien !
    M. Gilbert Meyer. Le bon positionnement, au coeur du maillage européen, des liaisons ferroviaires à grande vitesse en Alsace, permettra à la France de ne pas se couper de l'Europe, ce qui est essentiel. Et c'est la dimension européenne qui doit encore être privilégiée lorsqu'on se penche, par exemple, sur l'enjeu réel du TGV Est qui a pour vocation de structurer l'axe est-ouest de l'Europe, grâce à son prolongement jusqu'à Budapest.
    M. le président. Veuillez conclure, monsieur Meyer.
    M. Gilbert Meyer. L'élargissement de l'Union à dix nouveaux pays confère à la liaison Paris-Strasbourg une vocation européenne de premier plan. Cette vision transnationale des communications est indispensable, pour donner toute leur chance à nos régions, mais surtout à la France. Notre pays ne peut pas se passer de ce choix prioritaire.
    M. le président. Monsieur Meyer, concluez.
    M. Gilbert Meyer. Je termine, monsieur le président. A ce titre, il faut aussi évoquer la liaison fluviale mer du Nord-mer Méditerranée, indispensable aux transports lourds. Au-delà de la nécessité de ces deux TGV pour conforter les institutions européennes, la liaison Paris-Strasbourg et celle de Rhin-Rhône mettront réellement la France sur les rails européens.
    Monsieur le ministre, tel est le point de vue que je devais vous faire entendre au nom de quinze parlementaires alsaciens UMP et UDF réunis.
    M. Philippe Douste-Blazy. Très bien !
    M. le président. Merci, monsieur Meyer...
    M. Gilbert Meyer. C'est la première fois que les parlementaires alsaciens de la majorité parlent d'une seule voix.
    M. Yves Bur et M. André Schneider. C'est vrai !
    M. Gilbert Meyer. Merci, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, pour votre écoute, et merci, monsieur le président, pour votre compréhension. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Bernard Derosier.
    M. Bernard Derosier. Imaginer ensemble les infrastructures de transport dont nous avons besoin, c'est ce à quoi vous nous avez invités, monsieur le ministre, en début d'après-midi. Certes, en politique, il faut de l'imagination. Mais il faut aussi de la volonté et, quels que soient les gouvernements, on en a souvent manqué en s'abritant derrière des choix budgétaires. L'orientation de votre Gouvernement, qui affiche son intention de baisse des recettes publiques, augure mal de la mise en oeuvre des produits de notre imagination collective, à moins qu'il ne s'agisse de s'en remettre à d'autres, et en particulier aux collectivités territoriales.
    La politique des transports mérite bien un débat parlementaire, car elle conditionne fortement notre avenir, le cadre de vie de nos concitoyens comme leur avenir économique.
    En matière d'aménagement du territoire, l'observation des cartes est riche d'enseignements.
    Lorsqu'il y a risque d'asphyxie, il y a urgence à agir. Outre les désagréments et les dangers, l'engorgement des infrastructures routières a forcément, à terme, un impact sur l'économie des régions.
    Les mêmes cartes sont aussi très instructives sur les logiques géographiques qui fondent les scénarii probables en matière d'évolution de trafic et, donc, les choix que nous devons faire pour préparer l'avenir.
    Au niveau régional, le débat a eu lieu dans le cadre des schémas de services collectifs. Il se poursuit aujourd'hui au quotidien dans celui des contrats de plan.
    Sur ce terrain des contrats de plan, force est de constater que les choses n'avancent pas aussi vite que nous l'espérions.
    La contractualisation rencontre ses limites : gel des crédits routiers du côté de l'Etat, difficultés techniques et financières cumulées pour l'opérateur ferroviaire.
    Manifestement, l'Etat doit mettre de l'ordre dans son action à court terme et, en premier lieu, respecter ses engagements. Il serait trop facile de renvoyer à vos prédécesseurs ce qui est aujourd'hui votre responsabilité.
    Elu d'une région qui est, par nature géographique, le trait d'union entre le nord de l'Europe et le reste de la France, je suis particulièrement sensible à ces problèmes.
    Sans prétendre être exhaustif, je rappellerai quelques dossiers que, j'espère, vous connaissez.
    En matière de routes, la priorité doit être de fluidifier le trafic autoroutier sur les axes nord-sud et est-ouest qui cumulent un important trafic national et international : mise à deux fois trois voies de l'autoroute Lille-Dunkerque ; réalisation de l'autoroute A 24 entre Amiens et la Belgique, destinée à soulager l'autoroute A 1 de son trafic de poids lourds, ou mise en oeuvre effective et rapide du ferroutage ; élargissement de l'autoroute A 1 aux abords de Paris ; renforcement des liaisons régionales avec Paris - cela concerne en particulier l'A 15 Rouen-Méru et la RN 2 Laon-Paris - ; mise en place de la liaison Creil-A 16, inscrite au contrat de plan 2000-2006 mais qui ne semble pas, à ce jour, faire partie des priorités gouvernementales.
    En ce qui concerne les liaisons ferroviaires, là aussi, la priorité est d'agir rapidement pour répondre à la saturation de certains secteurs, aussi bien dans le domaine du trafic du fret que dans celui du trafic voyageur.
    Nous ne pourrons pas nous contenter d'un scénario de rafistolage. Le ferroviaire doit bénéficier d'une véritable relance, d'une nouvelle ambition, à l'exemple de celle qui a prévalu pour la mise en place du TGV.
    La région Nord - Pas-de-Calais, pour ne citer qu'elle, en a fait son cheval de bataille, non sans succès. Elle souhaiterait cependant, aujourd'hui, rencontrer des interlocuteurs - Etat, Réseau ferré de France et SNCF - aussi enthousiastes qu'elle.
    Enfin, le Nord de la France est riche d'un important réseau fluvial. Après des efforts de mise à grand gabarit, il faut réaliser l'interconnexion du bassin de la Seine avec celui de l'Escaut par le canal Seine Nord. Je vous ai entendu, monsieur le ministre, évoquer ce projet en réponse à ceux de mes collègues qui en ont parlé. Il s'agit là d'un projet d'intérêt européen majeur, qui doit donner une nouvelle impulsion au développement de la voie d'eau, mode de transport écologique par excellence, parallèlement au ferroutage. La question, aujourd'hui, n'est pas de critiquer ceux qui, hier ou avant-hier, auraient laissé ce dossier de côté. Le canal Seine-Nord sera également un atout pour le développement des activités portuaires et des plates-formes multimodales. Il importe de le réaliser.
    M. le président. Monsieur Derosier, il vous reste quinze secondes.
    M. Bernard Derosier. Je vais respecter mon temps de parole, monsieur le président, mais vous m'avez fait perdre dix secondes. (Sourires.)
    Si la reconnaissance de l'importance de ces infrastructures est effective, si les choix sont validés, mis en cohérence et programmés à court, moyen et long terme, alors nous pouvons aborder sans tabou la question de leur financement. La politique de transport est au coeur de la politique d'aménagement du territoire. Elle doit à la fois contribuer à parfaire l'irrigation du territoire et à intégrer un grand schéma européen des transports. Je voudrais être certain que les choix du Gouvernement vont dans ce sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Claude Girard.
    M. Claude Girard. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, chers collègues, ce débat sur l'avenir de notre politique de transport à l'horizon 2020 est évidemment celui de l'avenir économique de la France. Il est d'ailleurs légitime qu'il mobilise la représentation nationale.
    La question centrale est bien celle des efforts financiers que la nation est prête à consentir en faveur de la construction d'infrastructures ferroviaires, autoroutières, routières, aéroportuaires nouvelles, face au doublement attendu du nombre de personnes et de marchandises transportées en 2020. Contrairement à ce qu'affirme la DATAR, notre pays doit combler son retard. Depuis 1997, la part des investissements d'infrastructures dans le PIB a chuté sous la barre de 1 % pour atteindre 0,8 %, taux le plus bas réalisé depuis vingt ans. Quand la France construit 50 kilomètres de lignes à grande vitesse, l'Espagne édifie trois lignes simultanément...
    M. Michel Bouvard. Tout à fait !
    M. Claude Girard. ... et la Suisse perce deux tunnels gigantesques sous les Alpes.
    M. Michel Bouvard. Et elle le fait seule ! Elle n'a pas eu les 35 heures !
    M. Claude Girard. Face à cette situation, seule une forte volonté du Gouvernement - et je sais qu'elle existe - permettra de mobiliser les ressources nécessaires pour relever ce défi.
    Permettez-moi d'insister sur plusieurs pistes de financement. La première concerne la création urgente d'une taxe sur les poids lourds pour développer le fret ferroviaire.
    M. Bernard Accoyer. Pas trop de taxes, quand même !
    M. Claude Girard. Depuis 1985, la part du marché fret en tonnes par kilomètre n'a pas évolué, alors que celle du marché routier a doublé.
    Autre piste : il convient de mobiliser les financements public-privé, sur le mode du financement réservé, il y a quelques années, au réseau autoroutier. A titre d'exemple, le barreau autoroutier désenclavant la Haute-Saône, se substituant à la RN 19, et maillon manquant d'une liaison entre l'Atlantique et le centre de l'Europe, pourrait être financé sous forme de concession.
    Il existe d'autres ressources de financement. L'Etat peut choisir, par exemple, de consacrer une part du financement affecté au réseau régional d'Ile-de-France au réseau à grande vitesse. Les perspectives européennes de notre politique des transports me conduisent, par ailleurs, à promouvoir l'idée que vous soutenez, monsieur le ministre, d'un grand emprunt européen affecté spécifiquement aux infrastructures. Ce type de financement novateur pourrait fort bien convenir au projet de liaison à grande vitesse Rhin-Rhône ou améliorer la route nationale 57, axe structurant qui relie la Lorraine à la Suisse.
    Ces trois infrastructures sont capitales pour le développement économique de la région de l'est français, la Franche-Comté.
    La ligne à grande vitesse Rhin-Rhône est unique. Elle est véritablement européenne ; elle est la plus avancée, la mieux financée et la plus rentable et elle conditionne l'avenir économique de six grandes régions : l'Alsace - on a entendu à l'instant M. Meyer -, la Franche-Comté, la Bourgogne, Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte-d'Azur, et Languedoc-Roussillon, c'est-à-dire 18 millions d'habitants, soit 30 % de la population française.
    Source de désengorgement pour la région parisienne, la liaison à grande vitesse Rhin-Rhône, pourrait, en reliant de façon permanente Bâle à Lyon, faire de la plate-forme aéroportuaire de Lyon-Saint-Exupéry le troisième aéroport français, sur lequel les interrogations ne manquent pas, monsieur le ministre. Ce projet est celui de la première ligne à grande vitesse transversale entre l'Allemagne et l'arc méditerranéen. A ce propos, je suis surpris par l'analyse quelque peu tronquée de la DATAR qui considère la liaison Rhin-Rhône comme une simple liaison Paris-Bâle ou Paris-Mulhouse, et non pas comme un maillon d'un itinéraire est-ouest européen. La France a pourtant un intérêt stratégique, me semble-t-il, à éviter de se trouver, avec l'ouverture vers l'est, excentrée à l'ouest. Il me paraît paradoxal, et pour tout dire incompréhensible, de promouvoir la réalisation de corridors européens, de vouloir faire des métropoles régionales « des petites Europes », pour reprendre l'expression de la DATAR, et de négliger en même temps l'impact très fort de cette liaison en matière de desserte des métropoles françaises situées sur l'axe rhodanien et rhénan.
    L'abandon de ce TGV, voire un simple retard, hypothéquerait le futur réseau européen de la ligne à grande vitesse. A un an de la réalisation de la grande Europe, une telle hypothèse ne peut être envisagée.
    M. le président. Je vous demande de conclure, cher collègue.
    M. Claude Girard. Messieurs les ministres, les parlementaires du collectif TGV Rhin-Rhône, que j'anime aux côtés de nos collègues Arlette Grosskost et Marcel Bonnot, et trente-six députés et sénateurs soutiennent ce projet, ils espèrent qu'il fera très vite l'objet d'une véritable priorité budgétaire - il est prêt, établi, en attente.
    M. le président. Veuillez conclure.
    M. Claude Girard. Au-delà de ses avantages les plus évidents, cette ligne représente à mes yeux un choix symbolique puissant dans l'histoire de notre politique d'infrastructure. Le Rhin-Rhône me paraît le prototype du projet d'avenir cohérent entre une France décentralisée et une croissance des échanges européens du xxie siècle. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Joël Giraud.
    M. Joël Giraud. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la situation actuelle du transport dans le grand Sud-Est de la France révèle d'inacceptables insuffisances. Tout se passe comme si l'arc méditerranéen n'existait pas. En effet, il est patent aujourd'hui de constater que les infrastructures transversales sur les axes Barcelone-Milan par Gênes ou Turin ne sont pas prises en considération, à l'exception de quelques tronçons qui permettent d'améliorer la fluidité entre Paris et le grand Sud-Est.
    Pendant ce temps, le trafic des marchandises connaît une croissance exponentielle avec des taux de près de 20 % par an, transformant ces axes en véritables couloirs à camions, phénomène appelé à s'amplifier avec l'arrivée dans l'Union européenne de nouveaux pays d'Europe centrale et orientale. Or cet élément fondamental est totalement éludé par le rapport conjoint de l'inspection générale des finances et du conseil général des Ponts.
    Pourtant, ces deux régions, Languedoc-Roussillon et Provence-Alpes-Côte d'Azur, concentrent, à elles seules, près de la moitié de l'économie touristique nationale, un secteur devenu au fil des ans prépondérant à la fois dans le développement économique, la dynamique de l'emploi et l'équilibre de la balance des paiements de la France, à laquelle le tourisme contribue deux fois plus que l'agro-alimentaire. Là encore, on n'évoque pas suffisamment, y compris dans le rapport de la DATAR, ce que peut représenter l'économie touristique, tant en termes de facteur de déplacements que de solvabilisation des infrastructures.
    Au regard de ces deux éléments, il est indispensable de relancer deux grands dossiers structurants, dont le non-classement dans les projets prioritaires, voire l'oubli pur et simple, ne peut que relever de l'erreur manifeste d'appréciation. Il s'agit de la ligne à grande vitesse entre Montpellier et Perpignan, véritable chaînon manquant d'une desserte et de la ligne nouvelle Côte d'Azur en direction de Nice pour permettre une cohérence de l'axe Barcelone-Gênes.
    Messieurs les ministres, sur ces deux dossiers, respectez les engagements pris, lancez le débat public dès la fin 2003 pour le TGV Côte d'Azur et donnez enfin un calendrier au TGV Montpellier-Perpignan.
    Dans tout pays, il y a un arrière-pays et si j'ai le privilège de m'exprimer, ici, au nom de mes collègues languedociens et provençaux, j'ai aussi celui, si l'on peut dire, de m'exprimer en tant que parlementaire du seul département, dans le rapport de la DATAR, à cumuler tous les handicaps en termes d'accessibilité. Inaccessibles par la route, par l'autoroute, par le rail, par les airs, les Hautes-Alpes détiennent donc un triste record, celui d'être le seul département à être classé en niveau 4 dans ce rapport, suivi de peu par nos voisins des Alpes de Haute-Provence, condamnant tout le massif Sud-Alpin et ses 600 000 lits touristiques à un inexorable déclin. « Un territoire sans infrastructures est un territoire sans avenir » est-il écrit dans ce rapport.
    Digne et Gap demeurent des préfectures isolées du réseau autoroutier et sans contournement routier. C'est la raison pour laquelle je vous demande d'achever le maillage de ce territoire en réalisant le barreau autoroutier de Digne et l'axe Sisteron-Gap-Grenoble avec une urgence, la rapidité de cette réalisation car nous ne pouvons plus attendre les aléas de tracé, et une exigence, que le secteur le plus touristique de la région, c'est-à-dire Briançon et la route de Turin et des stations qui accueilleront en 2006 les Jeux olympiques d'hiver, soit correctement desservi.
    Mais c'est surtout sur l'isolement ferroviaire de ce massif que je souhaite conclure. Ce matin, en venant assister à ce débat, je devais être le seul député à devoir emprunter un col à 2 058 mètres d'altitude pour aller prendre un TGV. Merci donc, messieurs les ministres, d'avoir organisé ce débat au mois de mai. A de telles altitudes, j'aurais eu plus de difficultés à vous rejoindre en hiver ! (Sourires.)
    Paradoxalement, le TGV Méditerranée a contribué encore plus à nous isoler en positionnant la gare TGV de Valence dans un lieu n'autorisant même plus à acheminer des trains de forte capacité vers les Alpes du Sud, condamnant les groupes à se voir proposer par la SNCF des acheminements par car via des cols à plus de 2 000 mètres d'altitude.
    Aujourd'hui, tous les efforts de la région PACA, des chambres de commerce et d'industrie, des conseils généraux se portent sur la nécessité de raccorder Briançon au réseau ferroviaire italien, afin de faire bénéficier le réseau sud-alpin de l'effet TGV France-Italie.
    Il nous semble important, toutes tendances politiques confondues, alpins du Nord et du Sud réunis, que le projet de tunnel ferroviaire sous le Montgenèvre, ouvrage complémentaire de l'indispensable Lyon-Turin, acté lui aussi par le Président de la République lors du sommet franco-italien de Périgueux, voie bien le jour.
    M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Je le soutiens depuis quinze ans !
    M. Joël Giraud. Avec un coût représentant la moitié des aléas de chantier du Lyon-Turin, l'on mettrait un terme à l'isolement catastrophique des Alpes du Sud - je rappelle ici qu'il faut douze heures pour aller de Paris à Briançon par train direct - , on valoriserait au passage l'économie touristique non seulement des Hautes-Alpes et des Alpes-de-Haute-Provence mais aussi de nos voisins savoyards de la Maurienne.
    M. Michel Bouvard. Très bien ! (Sourires.)
    M. Joël Giraud. On ouvrirait au port autonome de Marseille un hinterland indispensable à son expansion avec les bassins de Turin et Milan et on éviterait à l'axe du col du Montgenèvre de devenir, à terme, la déviation routière gratuite des tunnels routiers et ferroviaires du Fréjus.
    M. le président. Je vous prie de conclure.
    M. Joël Giraud. Messieurs les ministres, je conclurai sur cet appel au secours d'une région qui étouffe, asphyxiée par les poids lourds, inacessible par le rail.
    Prenez aujourd'hui l'engagement d'aller au bout de la réalisation du Lyon-Turin. Mais prenez-le sans oublier son affluent nécessaire et complémentaire du Montgenèvre. C'est ce qu'attendent, aujourd'hui, les populations des deux côtés de la frontière. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Philippe Douste-Blazy.
    M. Philippe Douste-Blazy. Monsieur le président, mes chers collègues, comme le rappelait dans son propos liminaire M. le ministre des transports, c'est la France de demain, celles des années 2020, que nous allons contribuer à façonner aujourd'hui. C'est de notre capacité à favoriser l'émergence de métropoles européennes que dépend en grande partie la place de notre pays dans cette nouvelle Europe que nous appelons de nos voeux. Ces villes, ces agglomérations doivent être reliées, non seulement à Paris et aux grandes agglomérations européennes voisines, mais aussi et surtout entre elles afin que chacune se nourrisse de la richesse des autres, que les synergies soient complètes et que la mobilité des richesses humaines et techniques puisse se renforcer. A cet égard, la région Midi-Pyrénées doit pouvoir bénéficier des infrastructures de transports à la hauteur de son apport au dynamisme économique, social et humain de notre pays. C'est loin, monsieur le ministre, d'être le cas aujourd'hui.
    C'est dans ce contexte que je tiens à attirer votre attention sur une spécifité que je qualifierais d'exception toulousaine et qui a déjà été signalée par MM. Cohen et Forgues : Toulouse, quatrième ville de France, capitale de la plus vaste région française, est la seule grande ville à ne pas être reliée à Paris par le TGV. Cette exception confine à l'aberration quand on sait que l'agglomération toulousaine, qui compte aujourd'hui 800 000 habitants, accueille chaque année 12 000 nouveaux arrivants. Dans dix ans, elle aura dépassé le million d'habitants. Comment satisferons-nous leurs besoins en déplacements ? Allons-nous laisser une métropole et une région de cette importance déconnectées du maillage des TGV ? Cela est impensable, d'autant plus que, par leur position géographique stratégique, Toulouse et Midi-Pyrénées constituent un véritable carrefour interrégional des communications pour le Grand Sud de l'Europe.
    C'est maintenant, monsieur le ministre, qu'il faut prendre la décision qui engagera l'avenir de Toulouse et de sa région. Le TGV Grand Sud doit être réalisé dans les meilleurs délais et relié au TGV Sud-Est pour former le tronçon Méditerranée-Atlantique qui desservira le Languedoc-Roussillon, puis l'Espagne. Car la réflexion qui nous réunit aujourd'hui doit nécessairement s'envisager sous l'angle européen. Toulouse, son agglomération et sa région ont besoin de se rapprocher des grandes métropoles espagnoles que sont Barcelone et Madrid et de multiplier leurs échanges avec elles. Avec le TGV Grand Sud, la réalité de demain, ce sera Toulouse-Bordeaux en une heure, Toulouse-Narbonne en une demi-heure, Toulouse-Lyon en deux heures et demie, Toulouse-Barcelone en une heure et demie, Toulouse-Madrid en quatre heures, et Toulouse-Paris en trois heures.
    Le Gouvernement, et je l'en remercie, s'est engagé lors du CIADT du 13 décembre dernier, en faveur du TGV Grand Sud, en rappelant, dans le cadre des mesures annoncées à la suite de la catastrophe d'AZF, qu'il convenait d'améliorer l'accessibilité de l'agglomération toulousaine, notamment par une desserte TGV. M. le secrétaire d'Etat aux transports est venu en personne à Toulouse, à l'occasion d'une réunion de travail que j'avais organisée au Capitole, réaffirmer très clairement la volonté du Gouvernement de concrétiser ce projet à l'horizon 2015. La DATAR, dans son rapport du 24 avril dernier, a également souligné l'intérêt d'une desserte de Toulouse par le TGV. Il nous faut maintenant, messieurs les ministres, confirmer ces dispositions.
    M. le président. Veuillez conclure !
    M. Philippe Douste-Blazy. Toujours dans le domaine ferroviaire - et j'en aurai terminé, monsieur le président - , nous devons penser à promouvoir également la traversée centrale des Pyrénées par ferroutage, qui fera partie du réseau transeuropéen de ferroutage, ainsi que la liaison POLT, Paris-Orléans-Limoges-Toulouse.
    Enfin, dans son dernier rapport, la DATAR a souligné la nécessité de prévoir un nouvel aéroport pour Toulouse et Midi-Pyrénées. Toulouse a une double caractéristique : nous avons l'aéroport le plus cerné par l'urbanisation de toutes les grandes villes de France et nous avons la croissance de trafic la plus rapide des aéroports des grandes villes de France. Imaginez que le trafic, qui n'atteignait que 700 000 passagers en 1975, est aujourd'hui de 5 400 000 passagers. Tous ces paramètres, ajoutés aux nombreuses nuisances sonores supportées par des dizaines de milliers de Toulousains, rendent nécessaire ce nouvel aéroport.
    Dernier point, Toulouse et Midi-Pyrénées ont un énorme retard dans le domaine routier, tant pour le périphérique de l'agglomération toulousaine que pour le grand contournement routier de l'agglomération.
    Tels sont, monsieur le président, mes chers collègues, les éléments sur lesquels je souhaitais attirer votre attention ce soir, en joignant à mes propos mes collègues de Midi-Pyrénées, et en particulier Jacques Godfrain et Jean Diébold. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Paul Giacobbi.
    M. Paul Giacobbi. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, j'étais heureux de ce débat, d'abord comme défenseur acharné des méthodes rationnelles de choix budgétaires, parce qu'un audit de nos réseaux publics, de leur utilité et de leur financement, éclaire notre travail. J'ai d'ailleurs été surpris d'entendre M. Daubresse ironiser sur les formules de calcul des investissements. Il devrait savoir que le monde de l'investissement est fondé sur ces formules de calcul - en deux cents ans, on n'a pas trouvé mieux. De plus, les deniers du contribuable valent bien, après tout, que l'on compte un peu !
    M. Pierre Cardo. C'est vrai !
    M. Paul Giacobbi. J'étais ensuite heureux en tant que député de la Corse, car la mise à plat des financements par l'Etat des réseaux de transports permet de replacer dans le cadre national l'effort de solidarité consenti à la Corse dans ce domaine.
    Malheureusement, ce débat est terriblement décevant sur le plan politique comme sur le plan technique. Et la Corse est absente de la réflexion.
    Sur le plan politique, votre démarche est l'inverse de celle que l'on attendait.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Ah ?
    M. Paul Giacobbi. Vous fondez le débat sur des travaux d'approche stratégique, une étude de la DATAR, ou technico-économique, l'audit conjoint de l'inspection générale des finances et du conseil général des Ponts et Chaussées, sans que ces démarches technocratiques, je ne mets aucune connotation péjorative dans cette qualification, soient précédées par votre propre vision.
    Il n'appartient pas aux fonctionaires, quel que soit leur talent, de penser une stratégie pour nos transports, leur rôle est seulement de tester et d'éclairer votre stratégie.
    De ce fait, sur le plan technique, le rapporteur d'audit s'en ressent terriblement.
    Sans objectif préalable, sans stratégie définie, les auteurs ne peuvent être précis.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. C'est une photo !
    M. Paul Giacobbi. Leur propos - qui devrait clairement apprécier en termes techniques et économiques vos hypothèses - hésite sans cesse entre l'analyse rationnelle et l'approche empirique.
    Les méthodes employées, en particulier celles du calcul de rentabilité, ne peuvent être pertinentes que si les projets sont suffisamment avancés pour que les données soient assez précises.
    De plus, dans ces calculs, l'élément déterminant, c'est le choix d'un taux d'actualisation. M. Daubresse qualifierait sans doute cette idée de fantaisie technocratique, mais je vous rappelle quand même - vous le savez bien, d'ailleurs -, qu'une variation d'un point de ce taux d'actualisation peut conduire à des résultats inversés. Or le taux d'actualisation retenu est de 8 %, ce qui est considérable si on le compare aux 4 % de la Belgique ou aux 5 % de la Grande-Bretagne.
    Pourquoi un taux aussi élevé ? Je me le demande. Il est élevé en soi, par rapport à l'inflation, aux taux d'intérêt du marché et, plus généralement, en termes économiques, à l'appréciation que l'on peut avoir sur la rareté et donc le coût du capital.
    Manque de données fiables, absence de stratégie annoncée, taux d'actualisation double de celui que l'on pourrait attendre, le seul enseignement que l'on puisse tirer de cet audit - et je ne remets pas en cause la qualité du travail, qui est excellente - c'est finalement la volonté claire, chacun l'avait compris, de désengager le budget de l'Etat du financement des infrastructures de transport.
    Venons-en à la Corse, qui n'intéresse manifestement pas la DATAR. Si elle apparaît à titre résiduel dans quelques cartes, elle est totalement absente du texte. Peu importe que la géographie fasse de l'ensemble corso-sarde un axe euro-méditerranéen évident ! Peu importe que le trafic entre l'Italie continentale et la Sardaigne passe en grande partie par la Corse et son réseau routier ! Peu importe que l'existence de cet axe et la nécessité de lui donner corps par des investissements appropriés soit un souci publiquement exprimé par M. Romano Prodi, président de la Commission européenne !
    Vous me direz que l'Etat consent en faveur de la Corse et de ses routes un effort financier remarquable. Je vous répondrai tout simplement que ce n'est pas la première région qui bénéficie de cet effort et que, jusqu'à une date récente, on pouvait considérer que l'infrastructure routière en Corse faisait l'objet d'une véritable discrimination. Or, les routes de Corse ne sont pas empruntées que par les Corses. Elles sont très fréquentées par les visiteurs, voire par le transit international, la Corse devenant le pont routier entre l'Italie continentale et la Sardaigne.
    Je vous le dis très simplement, messieurs les ministres : ne vous retirez pas des choix stratégiques que doit faire la Corse dans ce domaine !
    M. le président. Veuillez conclure.
    M. Paul Giacobbi. Le Gouvernement, qui finance majoritairement ces investissements, doit affirmer des priorités, faire un audit des projets. C'est le vrai sens d'un contrat de Plan et même de la négociation du programme exceptionnel d'investissement.
    La décentralisation, dont je suis personnellement un farouche partisan, ce n'est pas le renoncement de l'Etat à exercer son rôle, c'est au contraire ce qui doit lui permettre d'exercer pleinement son rôle en allant à l'essentiel.
    M. le président. Votre temps est écoulé.
    M. Paul Giacobbi. Ce débat aurait pu être riche et passionnant. Nous attendions les positions du Gouvernement sur les choix et les programmations d'investissement. Nous attendions un plan de promotion des outils modernes de gestion, un volontarisme appuyé sur le multimodal, et bien d'autres choses encore. Nous attendions même, pour certains d'entre nous, ses propositions sur la remise en état financière et technique de l'entretien des routes nationales avant leur transfert aux départements. Nous sommes restés sur notre faim. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. La parole est à M. Pierre Cardo.
    M. Pierre Cardo. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues. M'exprimer en cinq minutes sur l'ensemble des problèmes d'infrastructures de la région parisienne relève de l'exploit. Je ne ferai donc que survoler certains d'entre eux, attisés par le rapport de la DATAR.
    Commençons par les infrastructures routières.
    L'Ouest parisien souffre, dans ce domaine, d'un retard assez considérable, vous le savez.
    Je prendrai pour exemple le bouclage de la Francilienne entre Méry-sur-Oise et Orgeval, indispensable, certes, mais toujours pas réalisé. Le seul tracé actuellement retenu passait en pleine zone urbaine et ne faisait l'objet, lors du premier débat public, dans les années quatre-vingt-dix, d'aucune protection. En 1996, j'avais proposé un projet alternatif assez réaliste qui évitait les zones urbaines et reprenait, en fait, le tracé initial des années cinquante. Sommairement étudié, il fut écarté en raison de l'intégration du coût d'un tunnel jugé nécessaire pour protéger la forêt de Saint-Germain-en-Laye alors que, pour les milliers de riverains de l'actuel tracé, les protections restent portion congrue.
    Depuis, si les riverains de l'A 14, une autre autoroute voisine, ont eu droit, eux, à leur tunnel, ceux de l'A 104 toujours pas. Pourtant, le rapport de la DATAR démontre que le coût de l'A 104 est inférieur aujourd'hui à celui prévu par Bernard Pons, lorsqu'en avait été négociée la protection en tranchée couverte. Il est vrai que la région Ile-de-France a décidé de supprimer les crédits prévus pour la protection des riverains au motif que cela arrêterait l'autoroute.
    On voit aujourd'hui l'efficacité et la cohérence de cette décision du président de la région. C'est ce qui s'appelle une politique de l'autruche, sauf que celle-ci garde au moins ses plumes pour se protéger lorsqu'elle met la tête sous terre. (Sourires.). Les riverains risquent dorénavant d'avoir l'autoroute sans protection. Ils ne sauraient, sans doute, trop remercier M. Huchon pour ce résultat !
    L'autre aspect incohérent du projet est que ce n'est pas un bouclage de la Francilienne. Il s'agit d'une rocade, et son seul débouché à Orgeval est un cul-de-sac, le trafic étant contraint de reprendre l'A 13, radiale déjà saturée, jusqu'à Rocquencourt, puis une autre radiale, l'A 12 pour rejoindre Saint-Quentin-en-Yvelines - si l'on n'a pas perdu patience, bien sûr ! Où est la logique ?
    Sur ce dossier, j'espère, monsieur le ministre, que vous ouvrirez une vraie concertation qui permettra l'étude réaliste des tracés alternatifs et la comparaison de leurs coûts avec ceux du tracé actuel, mais qui inclura pour celui-ci aussi les protections maximales.
    Les autres infrastructures routières permettant de désengorger la région parisienne dans sa partie Seine-aval sont le C 13 qui est une radiale, puis le F 13 qui est une rocade. Alors que la DATAR prévoit de 30 000 à 40 000 véhicules par jour sur ce tracé, soit bien plus que pour d'autres projets qu'elle a jugés plus prioritaires, leur contruction est repoussée au-delà de 2020. Or le C 13, vieux de cinquante ans, reste le seul axe capable de soulager l'A 13 et l'A 15, de faciliter le développement économique de la Seine-aval durement touché sur le plan industriel depuis trente ans et de supprimer les milliers de voitures et de camions qui traversent des communes sinistrées et qui mettent en danger des milliers d'habitants. En matière de sécurité routière, cet abandon est un mauvais exemple.
    Le F 13 est quant à lui le seul projet préfigurant la troisième rocade autour de Paris, autorisant le contournement du trafic interrégional par l'Ouest parisien.
    Sans ces trois infrastructures, qui sont indispensables, ce seront à nouveau l'A 86 saturée, la Francilienne mal bouclée et des départementales inadaptées qui subiront l'afflux supplémentaire de trafics multiples.
    Parlons maintenant des transports en commun.
    Des trains en nombre insuffisant et d'une qualité discutable ne permettent toujours pas une liaison tranversale, départementale ou interdépartementale. Pour se rendre à Versailles, par exemple, quand on habite Conflans-Saint-Honorine - à quinze kilomètres de distance, pas plus -, il faut transiter par Paris. A quand une grande ceinture ?
    De plus, si la SNCF dessert parfois la grande banlieue, et seulement sur un axe Paris-Province,...
    M. le président. Veuillez conclure, monsieur Cardo !
    M. Pierre Cardo. ... la RATP ne concerne pas la plupart d'entre nous. Par contre, le déficit des lignes de transport routier, souvent les moins rentables, nous incombe fortement et leur desserte dépend donc de la richesse des collectivités locales et de la rentabilité aléatoire des trajets.
    Pendant ce temps, Paris, oubliant son rôle de capitale et les contraintes que cela suppose et bénéficiant des énormes investissements qu'ont réalisés la RATP et la SNCF avec des financements nationaux, mène une politique d'exclusion de la voiture.
    M. le président. Merci, monsieur Cardo...
    M. Pierre Cardo. Puisque vous me demandez de conclure, monsieur le président, je me contenterai pour finir d'évoquer le problème que nous pose la liaison Seine-Nord, à laquelle nous sommes très attachés. Les mariniers de la Seine-aval se considèrent comme les prisonniers de la vallée de la Seine.
    La DATAR ne considère pas la liaison Seine-Nord comme essentielle. Mais pour nous, il est vital si l'on veut relier notre secteur, de Rouen à Paris, à l'Europe.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut.
    M. Jean-Yves Le Déaut. Monsieur le ministre, le développement des liens avec l'Allemagne, le Benelux et les pays d'Europe centrale et orientale passe par une réflexion sur les moyens de transport dans l'est de la France.
    Depuis vingt-cinq ans, cet enjeu n'a pas été compris par l'Etat. Le TGV Est européen arrive bon dernier dans les réalisations françaises.
    On a beaucoup parlé du rapport de la DATAR. Nous pensons que ses informations sont particulièrement maigres sur l'est de la France. Nous avons l'impression que les régions de l'est comptent peu et que le parisiano-centrisme continue de sévir : il n'y aurait finalement de salut qu'à la condition de se tourner vers Paris. Que l'on pense au TGV Rhin-Rhône !
    Le plus incroyable est que nos « spécialistes des transports » écrivent que, grâce au TGV Est, l'aéroport de Roissy devrait devenir « l'aéroport de référence de la métropole lorraine ».
    Au moment où l'on parle d'un troisième aéroport dans la région parisienne, réalisation qui a été contestée avec raison par certains, ne serait-il pas plus judicieux d'étudier comment on pourrait développer un certain nombre d'aéroports dans des provinces françaises ?
    On ne peut pas non plus accepter que la seule priorité affichée concerne « les mesures de désaturation du sillon mosellan qui seront d'abord ferroviaires ».
    Oui, nous sommes pour le ferroviaire. Nous soutenons évidemment le scénario de développement durable par l'amélioration des dessertes, par l'aménagement d'un itinéraire de fret Athus-Toul, libérant le sillon mosellan pour le trafic voyageur, l'interconnexion des réseaux transfrontaliers et par le développement de TER régionaux.
    Mais le désenclavement et le passage du fret de la route vers le rail ne sera possible que si vous réalisez des projets de ferroutage. Mais ce n'est malheureusement pas l'avenir qui se dessine : on en parle depuis quinze ans dans cet hémicycle, mais on ne voit pas les financements venir !
    J'entends certains de nos collègues, qui siègent à droite de l'hémicycle, affirmer que la parole de l'Etat doit être crédible alors qu'il manquera 1 milliard d'euros par an pendant quinze ans pour réaliser certains projets. Mais qui a décidé, sinon ce gouvernement, d'abaisser les impôts de 5 %,...
    M. Gilbert Meyer. Cela n'a aucun rapport !
    M. Jean-Yves Le Déaut. ... ce qui coûte au budget 2,6 milliards d'euros par an ? On ne peut pas demander ici que soient réalisés des projets et manquer des recettes nécessaires.
    Je vais maintenant exposer les propositions des socialistes de l'est de la France.
    D'abord, nous préconisons, dans la foulée de la première phase du TGV Est, une deuxième phase, de Baudrecourt à Strasbourg, et l'interconnexion avec le réseau ICE allemand par le franchissement du Rhin, car on ne peut admettre qu'un réseau TGV ne soit pas interconnecté avec le réseau de l'Allemagne.
    Ensuite, nous préconisons la construction d'une gare lorraine unique à Vandières car - je sais que vous n'en êtes pas directement responsable - il est absurde d'avoir deux gares à cinq kilomètres de distance, d'autant que cela coûte très cher.
    Je soutiens également, avec les députés de la grande région Est - alsaciens, bourguignons et franc-comtois - qui l'ont évoqué tout à l'heure, le TGV Rhin-Rhône.
    Par ailleurs, il est impossible de se dire aujourd'hui favorable seulement au désenclavement ferroviaire, car l'autoroute A 31 draine sur l'axe Nord-Sud trois grands corridors de camions, dont l'un passe par la Lorraine. Cette autoroute A 31, qui devient très dangereuse et qui est saturée, doit désormais être prolongée à partir de Toul, en évitant Metz et Nancy,...
    M. le président. Veuillez conclure, monsieur Le Déaut !
    M. Jean-Yves Le Déaut. ... vers Longwy et Thionville, selon un tracé.
    M. Yves Cochet. Il ne faut pas une autoroute supplémentaire : ce qu'il faut, c'est moins de camions !
    M. le président. Monsieur Cochet, je vous en prie !
    M. Jean-Yves Le Déaut. Je suis favorable au ferroutage, mais il me semble qu'on ne peut parler de trafic routier européen si on ne le prolonge pas vers l'est.
    Enfin, les tronçons manquants de la route nationale 4 promis depuis trente ans doivent être réalisés. Il faut relier les Vosges à l'Alsace et à la Franche-Comté.
    Quant aux voies navigables, elles ne sont pas assez développées dans notre pays. Elles doivent l'être dans le Nord de la France. Je pense notamment à la jonction Nord-Seine. Mais je pense ainsi aux jonctions Seine-Moselle et Rhône-Moselle.
    Comme l'a rappelé tout à l'heure l'un de nos collègues, si le Gouvernement veut que Strasbourg reste la capitale européenne, il est évident que ces projets, notamment celui du TGV Est, doivent être développés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Christian Estrosi.
    M. Christian Estrosi. Monsieur le ministre, ce débat est un bon débat, et je vous remercie de l'avoir organisé. Il est d'intérêt national, et situe bien la place que doit occuper la France dans une Europe élargie. Mais, bien entendu, le financement d'une telle ambition impose un effort considérable.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. C'est vrai !
    M. Christian Estrosi. Il faut, en la matière, faire preuve d'audace, d'imagination et de courage.
    N'oublions pas que seul l'investissement crée des richesses ! Privilégions enfin l'investissement par rapport aux dépenses de fonctionnement inutiles !
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    M. Christian Estrosi. On nous a donné tout à l'heure des leçons sur les contrats de plan, mais, en l'an 2000, dans chaque région de France, ces contrats ont été surchargés de projets de développement d'infrastructures routières et ferroviaires qui étaient complètement sous-évalués. Aujourd'hui, à l'heure du redéploiement à mi-contrats de plan, il nous faudrait augmenter de 30, 40 ou 50 % le montant des enveloppes programmées, et nous voyons à quel point le gouvernement précédent a pratiqué les effets d'affichage en annonçant des projets qu'il est impossible de réaliser aujourd'hui.
    M. Pierre Cohen. C'est faux !
    M. Christian Estrosi. Pour autant, les contrats de plan présentent l'immense avantage, en matière d'investissement, d'engager les collectivités au volontarisme et d'être financés pour les trois quarts par les collectivités elle-mêmes, pour un quart ou pour un tiers par l'Etat - en fait pour moins que cela puisque l'Etat, maître d'ouvrage, récupère la TVA. Je vous demande en tout cas de ne pas geler les crédits inscrits aux contrats de plan,...
    M. Pierre Cohen. C'est déjà fait !
    M. Christian Estrosi. ... car ils nous permettront de poursuivre une certaine dynamique.
    Je vous remercie de faire, dans le cadre de la décentralisation, le choix du transfert des voiries nationales vers les collectivités locales, et notamment les conseils généraux, car dès l'instant où elles deviendront maîtres d'ouvrage à la place de l'Etat, elles afficheront beaucoup plus de dynamisme que les services déconcentrés de l'Etat ne l'ont fait ces dernières années.
    Parallèlement, je propose de lancer un grand emprunt, comme le gouvernement Balladur l'avait fait en son temps, réservé spécifiquement au financement des grandes infrastructures. Cet emprunt aurait le mérite d'associer l'ensemble de la collectivité nationale dans un effort partagé et concret.
    Je souhaiterais également faire résonner à mon tour la voix du Sud. Nous mesurons bien que le coeur de l'Europe bat de plus en plus au Sud, autour du bassin méditerranéen. Je voudrais donc insister sur la nécessité d'un véritable désenclavement de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.
    Monsieur Giraud, vous avez voulu donner tout à l'heure des leçons au Gouvernement alors que vous avez sacrifié, avec vos amis Gayssot, Voynet et bien d'autres encore, ce qui avait été initié par le gouvernement Balladur et par le gouvernement Juppé entre 1993 et 1997 : vous avez rayé d'un trait de plume le canal Rhin-Rhône, l'autoroute A 51, l'autoroute A 58 et l'ensemble de nos grands projets de désenclavement. Alors, ne nous donnez pas aujourd'hui de leçon !
    Tout l'enjeu de ce désenclavement est d'inscrire le grand Sud-Est dans les courants d'échanges qui relient l'Espagne à l'Italie et aux pays de l'Est. Ce désenclavement doit s'effectuer d'abord selon un axe nord-sud. Dans ce cadre, la continuité de l'axe Grenoble-Digne-Nice, que vous aviez supprimé, revêt un caractère stratégique. Il est important pour la région Provence-Alpes-Côte d'Azur que l'autoroute A 51 soit enfin raccordée par l'est de Gap. A cet égard, je me ferai l'interprète de mes collègues Daniel Spagnou et Henriette Martinez pour souligner la nécessité de créer un barreau autoroutier vers Digne, seule préfecture de France non rattachée à un réseau autoroutier.
    Ce nécessaire désenclavement passe ensuite par un meilleur franchissement des Alpes. Là encore, deux projets devraient être réalisés : la reconstruction de l'actuel tunnel de Tende, dans les Alpes-Maritimes, et une percée sous le mont Genèvre dans les Hautes-Alpes.
    Ce désenclavement doit également offrir une perspective est-ouest pour assurer la continuité de l'arc latin, d'abord par la route en traitant les chaînons manquants de cet axe. Je pense en particulier au contournement d'Arles cher à mon collègue Roland Chassain, mais aussi au nouvel axe est-ouest qui doit venir désengorger l'autoroute A 8 dans les Alpes-Maritimes. A ce sujet, le rapport du conseil général des ponts et chaussées et l'analyse de la DATAR ont respectivement souligné l'impérieuse nécessité de procéder au contournement de Nice à l'est et à l'ouest. Il faut le prolonger vers le Var par le nord des Alpes-Maritimes - c'est pour moi la priorité majeure - faute de quoi nous risquons une véritable thrombose routière dans le département.
    Un désenclavement par le rail est aussi nécessaire. J'évoquerai, dans le prolongement des propos de mon collègue Rudy Salles, qui préside désormais la séance,...
    M. le président. Et qui vous demande de conclure ! (Sourires.)
    M. Christian Estrosi. ... le grand projet de ligne à grande vitesse en direction de la Côte d'Azur et de l'Italie. Ce projet n'est pas concurrent du Lyon-Turin, auquel je tiens également.
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    M. Christian Estrosi. Dès qu'il y aura le Lyon-Turin qui nous permettra, par ferroutage, de supprimer de nos axes autoroutiers la circulation des trente-huit tonnes et autres poids lourds,...
    M. le président. Revenez à la Méditerranée, monsieur Estrosi !
    M. Christian Estrosi. ... nous dégagerons l'ensemble de nos axes routiers le long de l'arc latin.
    M. le président. Le Lyon-Turin a été suffisamment défendu !
    M. Christian Estrosi. Cette ligne Provence-Côte d'Azur, qui doit concerner aussi bien Nice que Toulon, serait, selon toutes les études, la plus rentable de France, au dire du président de la SNCF.
    M. Yves Cochet. Quel favoritisme !
    M. le président. Monsieur Cochet, je vous en prie !
    M. Christian Estrosi. C'est aussi un projet européen permettant de mieux relier entre elles des ville situées dans trois grands pays baignés par la Méditerranée : l'Italie à Gênes, la France à Marseille et l'Espagne à Barcelone.
    M. le président. Monsieur Estrosi...
    M. Christian Estrosi. Alors, ne tergiversons plus !
    Le désenclavement du Sud-Est passe aussi par une meilleure desserte aéroportuaire et, à cet égard, je suis extrêmement favorable au développement de la plate-forme aéroportuaire du Var, laquelle viendrait désengorger l'aéroport de Nice-Côte d'Azur qui approche de la saturation...
    M. Jean-Yves Le Déaut. Nous aussi ! Il y a deux poids, deux mesures !
    M. Christian Estrosi. ... car si certains prédisent qu'il pourrait accueillir 16 millions de passagers, il en accueille 10 millions aujourd'hui, ce qui est largement suffisant. Je suis sur ce point en désaccord avec ma propre chambre de commerce car je ne souhaite pas que nous allions au-delà. Il y a soixante jours par an où, sur la Côte d'Azur, nous dépassons les 165 microgrammes d'ozone par mètre cube,...
    M. le président. Monsieur Estrosi, veuillez conclure !
    M. Christian Estrosi. ... plafond fixé par les normes européennes,...
    M. le président. Monsieur Estrosi, vous empiétez sur le registre de M. Cochet ! (Sourires.)
    M. Christian Estrosi. Je considère que, pour une meilleure répartition des dessertes aéroportuaires entre Marignane, d'un côté, et l'aéroport de Nice-Côte d'Azur, de l'autre, il est désormais capital...
    M. le président. Merci, monsieur Estrosi...
    M. Christian Estrosi. ... qu'il y ait une nouvelle plate-forme aéroportuaire dans le Var. Ce ne sera que justice ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.
    M. Yves Cochet. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, les interventions se multiplient. Elles vantent qui les mérites du transport routier, qui une nouvelle bretelle de TGV ou la construction d'une portion de route. Chacun, comme M. Estrosi à l'instant, intervient pour le développement, pour le désenclavement de sa région. Bref, tout le monde ici en veut plus, quel que soit le mode de transport, pour sa région !
    Pourtant, nous savons qu'il est absurde de ne voir dans le développement rapide des infrastructures de transport que des indicateurs de bonne santé économique ou l'indice d'une croissance positive. Il faut à mon avis évaluer ce développement à l'aune de l'empreinte écologique. C'est selon ce critère du développement durable - pas celui cosmétique et rhétorique dont parlent la plupart - que nous devons examiner les projets d'infrastructures, et non en tant qu'agglomération d'intérêts particuliers défendus ici ou là.
    Or l'empreinte écologique de la France et de l'Europe est dix fois supérieure à la moyenne mondiale, majoritairement à cause des transports routiers. Cela est insoutenable. Il faut donc penser et organiser la décroissance des transports routiers.
    Les crises et les catastrophes écologiques se multiplient : naufrage du Prestige, dernier d'une longue série mais, hélas !, peut-être pas le dernier ; guerre en Irak pour le pétrole ; tempêtes et cyclones dus à un changement climatique qui n'en est qu'à ses prémices ; pollution de l'air dans les grandes agglomérations.
    Il faut en finir avec le mythe de l'abondance énergétique bon marché ! Il faut en finir avec le mythe de la pollution libre et gratuite !
    Le Gouvernement précédent avait initialisé une politique de développement durable des transports. Nous avions fait le choix de multiplier par dix les investissements ferroviaires dans les contrats de plan Etat-région, de soutenir les transports collectifs dans les régions et d'abandonner certains grands projets autoroutiers.
    M. Jean-Pierre Soisson. Hélas !
    M. Yves Cochet. Revenons un instant sur les rapports qui guident notre débat d'aujourd'hui, notamment sur le rapport d'audit sur les grands projets d'infrastructures. Cet audit a pris comme postulat le doublement supposé inéluctable des transports, en particulier routiers et autoroutiers, en sous-estimant toute évolution possible du fret ferroviaire et en excluant toute remise en état, tout développement du trafic fluvial. Cela aussi est évidemment insoutenable.
    La priorité d'aujourd'hui, c'est de prendre en compte les impératifs et les contraintes environnementaux.
    Je regrette que le rapport d'audit ne fasse pas état des efforts nécessaires de réduction des transports routiers, générateurs de gaz à effet de serre. A cet égard, notre pays a des engagements internationaux qui devront être tenus. Je regrette que le rapport d'audit se contente - comme d'habitude - de pousser les projets en cours sans anticiper de quelque manière que ce soit les changements indispensables dans le choix des modes.
    Ce sont les liaisons ferroviaires qu'il faut développer pour les voyageurs comme pour les marchandises. Or dans ces rapports, ces liaisons sont sacrifiées.
    Devant tous ces projets, nous souhaitons plus que jamais la reprise du moratoire sur les autoroutes. Contrairement à ce que disait M. Estrosi, il ne faut pas plus d'autoroutes, mais moins de camions. Il faut développer le transport à l'aide de conteneurs permettant la multimodalité. Le ferroutage peut constituer une mesure transitoire pour la traversée de certaines zones difficiles.
    Enfin, si nous approuvons l'abandon définitif, je l'espère, de l'éléphant blanc que constituait le canal Rhin-Rhône, nous soutenons le projet Seine-Nord.
    En conclusion, je citerai l'ultime phrase du rapport de la DATAR : « Le transport demeure un champ où s'exerce pleinement la volonté politique. » Vous savez que le Président de la République affiche volontiers une rhétorique donnant toute sa place à l'écologie. Aujourd'hui, messieurs les ministres, je vous mets au défi de réaliser une application concrète de l'écologie dans vos choix d'infrastructures.
    M. le président. La parole est à M. Serge Grouard.
    M. Serge Grouard. Monsieur le président, messieurs les ministres, chers collègues, d'abord, je remercierai tous les orateurs qui ont eu à coeur de respecter les cinq minutes qui leur étaient imparties.
    M. le président. Ils n'ont pas été nombreux, mon cher collègue.
    M. Serge Grouard. Ensuite, messieurs les ministres, je voudrais vous assurer de toute ma compassion. (Sourires sur tous les bancs.) Vous pardonnerez au nouveau député que je suis ces propos. Je pensais que nous étions chargés, dans cet hémicycle, de débattre de l'intérêt général et j'ai eu le sentiment que nous étions davantage dans un supermarché où chacun venait faire ses courses !
    Sacrifierai-je à la tendance en vous disant - ou en ne vous disant pas, monsieur le ministre - que je parle aussi au nom de mes collègues de la région Centre ? Je citerai, entre autres, Philippe Briand, Jean-Yves Hugon, Nicolas Forissier, Louis Cosyns, Jean-Pierre Door, Jean-Jacques Descamps et Patrice Martin-Lalande.
    Vous dirai-je que, concernant le Centre, nous avons deux préoccupations ?
    La première, vous le savez bien, est le POLT. Comme il en a déjà été question, je n'y reviens pas, sinon pour signaler que si nous ne réalisons pas cet axe vertical, nous n'aurons vers le Sud que l'axe Paris-Lyon-Marseille et l'axe Atlantique, le Centre étant un peu oublié. A cet égard, j'ai eu également l'occasion de souligner l'importance du raccordement à l'aéroport de Roissy.
    Notre deuxième préoccupation concerne les liaisons transversales qui permettraient de décongestionner la région parisienne, et notamment un certain nombre de barreaux auxquels il ne manque pas grand-chose, aujourd'hui, pour qu'ils soient achevés. Je me réfère à un grand schéma qui va de Nantes à Lyon, approximativement, mais aussi à quelques portions qui ne sont toujours pas réalisées, comme Arthenay-Courtenay, quelques petits kilomètres entre Tours et Angers, ou encore Vierzon et Tours ou Bourges et Auxerre. Beaucoup d'entre nous ont eu l'occasion d'évoquer de tels retards.
    Non, je ne vais pas vous dire tout cela, parce que votre caddie est déjà bien rempli, et je ne sais pas où vous pourriez trouver encore de la place.
    Je voudrais au contraire évoquer un autre aspect dont il a été très peu question ce soir, le développement durable et l'environnement, et vous remercier, monsieur le ministre, d'avoir insisté sur ce point dans votre propos liminaire car il est fondamental. Dans ce domaine où certains se contentent de beaucoup parler et de peu agir, vous avez eu le grand mérite d'intégrer ce paramètre dans l'ensemble des choix qui sont proposés. Cela constitue une clef pour les années à venir, sachant que les choix qui seront faits vont nous engager pour plusieurs décennies et que, dans le même temps, nous allons continuer à accroître les pollutions, en particulier les gaz à effet de serre.
    Permettez-moi de citer quelques chiffres : la part du secteur des transports dans les émissions de gaz carbonique en France est passée de 29 % en 1985 à 41 % en 2000, dont 94 % pour la route et 33 % pour les seuls poids-lourds. A cet égard, je rejoindrai quelque peu Yves Cochet...
    M. le président. Merci de conclure.
    M. Serge Grouard. ... lorsqu'il dit que, dans la durée, ce type de développement n'est pas tenable.
    Messieurs les ministres, vous n'allez sans doute pas pouvoir satisfaire l'ensemble de nos collègues, mais peut-être pourrez-vous aider leurs enfants et leurs petits-enfants ?
    M. le président. Après le Centre, place à l'Auvergne. La parole est à M. Jean Proriol.
    M. Jean Proriol. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, c'est un hasard heureux que la publication de deux rapports complémentaires vienne éclairer notre débat. Ils se rejoignent sur les problèmes de financement et, à ce sujet, j'aurai deux questions. D'une part, la procédure complexe des contrats de plan a-t-elle encore un avenir dans notre pays, compte tenu des retards constatés ? Pouvez-vous nous en dire plus ? D'autre part, la concession de réseau est-elle une formule de financement de substitution ? Pour la seule région Auvergne, trois concessions sont attendues : la desserte de Vichy vers l'A 71 ; le barreau de Balbigny sur l'A 89 qui vient heureusement de bénéficier d'une déclaration d'utilité publique signée le 17 avril dernier, par le Premier ministre et vous-même ; enfin, au-delà, l'A 45 qui doit prendre la relève de l'A 47 pour l'axe Saint-Etienne-Lyon et qui intéresse la Loire, mais aussi la Haute-Loire.
    Au nom de mes collègues auvergnats, je vais maintenant évoquer très rapidement quelques routes, inscrites ou non dans des contrats de plan, qui connaissent de grands retards de réalisation.
    Dans l'Allier d'abord, la route Centre Europe-Atlantique, pourtant bien soignée par M. Gayssot, a vu ses travaux débuter tardivement. Or, elle supporte un trafic de poids lourds, avec beaucoup d'accidents. Mes collègues Pierre-André Périssol et Yves Simon insistent pour l'accélération des travaux, notamment dans la partie centrale du département entre Molinet et Montluçon. Ils soulignent aussi l'importance de la RN 7, qui va de Magny-Cours-sud de Nevers jusqu'à Roanne, en passant par Moulins et Lapalisse, car elle constitue un axe de désenclavement.
    Dans le Cantal, les travaux viennent de commencer au tunnel du Lioran. Et la RN 122, qui relie Aurillac à Clermont-Ferrand, est prise en exemple par la DATAR comme un bassin enclavé à desservir. Il faudrait envisager un classement en LACRA - liaison assumant la continuité du réseau autoroutier. J'ajoute qu'Aurillac lorgne vers l'A 89, prenant appui sur les travaux de la RN 120.
    Dans le Puy-de-Dôme, le dossier prioritaire est la RN 89, au sud de Clermont, pour une jonction avec sa voisine, l'A 89.
    Dans la Haute-Loire, deux déviations viennent de débuter sur la RN 88. La première est celle, très importante, du Puy-en-Velay, dont l'achèvement est annoncé pour 2007. Pouvez-vous nous donner quelques assurances à ce sujet ? Quid de la place du Puy dans la grande liaison d'aménagement du territoire Lyon-Toulouse, annoncé à Mende par un Premier ministre en 1994. Le deuxième chantier est la fin de la déviation de Brioude et son raccordement à l'A 75 par la RN 102, sachant que cette route relie l'Auvergne à Aubenas et Montélimar, en passant par la montagne ardéchoise.
    Ensuite, en matière ferroviaire, la région Auvergne, privée de TGV, a acheté seule trente autorails flambant neuf. Elle a deux priorités capitales en ce domaine : la liaison Clermont-Paris en moins de trois heures, avec la suppression d'un certain nombre de passages à niveau dans l'Allier, et surtout l'arrivée rapide de TRD - trains rapides de demain - avec une liaison Clermont-Lyon en deux heures.
    Enfin, le hub de l'aéroport de Clermont-Ferrand voit transiter un million de passagers par an à travers plus de trente dessertes quotidiennes : c'est un véritable carrefour des régions. Il est essentiel qu'Air France confirme ses engagements : pourquoi ne pas les transformer en obligations de service public, peut-être avec l'intervention du FIATA ?
    M. le président. Veuillez conclure.
    M. Jean Proriol. L'achèvement des infrastructures de transport sont bien le grand enjeu de l'Auvergne, mais tout cela est bien long. Puisse ce débat abréger notre attente. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Didier Quentin.
    M. Didier Quentin. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, pour ne pas alourdir le caddie, je consacrerai l'essentiel de mon propos, en tant que président de l'association « Route Centre Europe-Atlantique », à l'urgente nécessité de cet axe transversal. Cet aménagement stratégique est attendu depuis plus de trente ans et je déplore, avec de nombreux élus d'une dizaine de départements, depuis la Saône-et-Loire jusqu'à la Charente-Maritime, qu'il ne figure pas parmi les priorités retenues.
    Depuis sa fondation en 1967, l'ARCEA milite pour la création d'un axe au centre de la France reliant notre façade atlantique à l'Allemagne, à la Suisse et à l'Italie, et, au-delà, à cette Mitteleuropa qui nous rejoint aujourd'hui dans l'Union européenne.
    Les fondateurs de l'association ont eu la prescience de la réunification de notre continent et ils ont choisi ce beau nom de « Route Centre Europe-Atlantique », dont l'appellation a été reprise par les instances officielles, en particulier par le ministère de l'équipement.
    Ils s'étaient fixé pour objectif un achèvement des travaux sur l'ensemble du réseau pour l'année 2010, date qui semblait bien lointaine à l'époque, et qui paraissait à certains comme une limite laissant une grande marge de sécurité. Or, force est de constater qu'en 2003, ce réseau n'est que partiellement réalisé sous forme autoroutière à l'est de l'A 6, hormis le contournement sud de la ville de Mâcon.
    A la fin du XIIe plan, sur les 1 000 kilomètres que compte le réseau RCEA à l'ouest de l'autoroute A 6, il restera environ 440 kilomètres de routes à deux fois deux voies à aménager, à condition que les engagements de l'actuel contrat de plan soient respectés en totalité, ce qui ne s'est malheureusement jamais produit au cours des plans précédents.
    Notre inquiétude est donc grande devant les retards successifs qui se sont accumulés au fil des plans. L'objectif de 2010 ne sera assurément pas atteint, et de loin. Les prévisions faites à partir des données dont nous disposons laissent penser qu'au rythme actuel, c'est seulement vers 2050 que l'on peut espérer la mise en service de routes à deux fois deux voies sur la totalité du parcours.
    Ainsi, il faudrait un siècle pour réaliser la première liaison routière transversale, alors que le centre de la France ne dispose ni de routes, ni de voies ferrées à caractéristiques modernes adaptées aux besoins. Cette anomalie saute aux yeux quand on regarde les cartes abondamment publiées dans la presse à l'occasion de notre débat.
    Dans un tel contexte, les difficultés de circulation s'accroissent d'année en année, au fur et à mesure que le trafic augmente, notamment celui des poids lourds. Actuellement, le taux d'augmentation du trafic est de 3,7 % par an, bien supérieur à celui des routes nationales, qui est de seulement 2 %.
    De surcroît, le trafic moyen pondéré sur l'ensemble du réseau Centre Europe-Atlantique dépasse, d'après les comptages des services de l'équipement, les 12 000 véhicules par jour, dont 2 300 poids lourds, soit près de 19 % du trafic contre 12 % pour l'ensemble des routes nationales.
    S'agisant de la sécurité, à laquelle nous sommes tous très attachés - et vous les premiers, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat -, on doit noter que si le taux d'accidents pour 100 millions de véhicules par kilomètre est très proche de celui de la moyenne des routes nationales, avec 14,2 sur les sections à deux voies de la RCEA, il tombe à 5,1 sur les sections à deux fois deux voies, taux proche de celui relevé sur les autoroutes, qui est de 4 %. Le passage à deux fois deux voies permet donc de réduire de 64 % le nombre d'accidents.
    En ce qui concerne la gravité des accidents, la situation sur les sections à deux voies de la RCEA est franchement dramatique, avec un indice de gravité - nombre de tués pour 100 accidents corporels - de 21,6, alors que cet indice est de 11,2 pour l'ensemble des routes nationales françaises, de 9,4 sur les sections à deux fois deux voies de la RCEA et de 7,7 sur les autoroutes. Le passage à deux fois deux voies permet donc de réduire de 56 % le nombre de tués. Ces chiffres sont éloquents et ils ne peuvent que nous interpeller fortement.
    C'est pourquoi, monsieur le ministre, je vous serais reconnaissant d'indiquer les mesures que vous entendez prendre pour poursuivre l'inscription dans les schémas en préparation de tronçons de la RCEA et l'accélération des travaux de celle-ci.
    M. le président. Merci de conclure, monsieur Quentin.
    M. Didier Quentin. D'autre part, pourriez-vous nous préciser les modes de financements alternatifs que vous imaginez de mettre en oeuvre pour la réalisation, dans les meilleurs délais, de cette route Centre Europe - Atlantique qui devra bien aller jusqu'à l'océan, et donc à Royan...
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. ... et à Saint-Georges-de-Didonne !
    M. Didier Quentin. En effet. (Sourires.) En conclusion, en tant qu'élu du pays royannais aux côtés du secrétaire d'Etat aux transports et à la mer, mon ami Dominique Bussereau, dont je connais la mobilisation sur ce dossier, je me permets d'insister sur la nécessité de parachever le désenclavement de Royan et de son agglomération, qui est l'une des toutes premières destinations touristiques de notre pays. Cela suppose de terminer le passage de la RN 150 entre Saintes et Royan à deux fois deux voies et, d'autre part, de connecter Royan à la future ligne ferroviaire à grande vitesse Paris-Madrid. Il semble désormais possible, sans construire de ligne spécifique, que le TGV puisse rallier Royan avec des rames directes sans rupture de charge, comme c'est déjà le cas pour Les Sables-d'Olonne, en Vendée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Michel Hunault.
    M. Michel Hunault. Monsieur le ministre, je voudrais tout d'abord me réjouir de l'organisation de ce débat. Je vous remercie d'avoir, dans votre déclaration, resitué son importance, car c'est l'occasion pour la représentation nationale de réfléchir à la politique des transports et de l'évoquer dans sa globalité. Vous avez justifié l'audit commandé par le Gouvernement en le présentant comme un outil de réflexion, mais aussi de choix, au regard des besoins de financement : près de 15 milliards d'euros pour de nombreux projets d'infrastructures qui aujourd'hui ne sont pas financés. Permettez-moi de rappeler que bon nombre de ces projets émanent de la large concertation qui avait accompagné l'élaboration du schéma de services collectifs de transport.
    Ce débat se déroule aussi quelques semaines après l'excellente étude prospective de la DATAR intitulée :
    La France en Europe : quelle ambition pour la politique des transports ? Car c'est bien de cela qu'il nous faut parler dans ce débat. Au moment où l'Europe s'élargit, nous savons fort bien que si la France ne s'équipe pas, elle risque l'isolement à l'Ouest d'une Europe dont le coeur battra plus à l'Est. Vouloir des infrastructures de transport modernes, c'est vouloir un pays mieux adapté.
    Dans cette réflexion sur les moyens de financement, je voudrais soutenir l'idée de lancer un grand emprunt européen permettant de réaliser, de façon coordonnée, de grands investissements.
    Au plan national, je souhaite aussi que soit relancée la contractualisation entre l'Etat et les collectivités territoriales. Dans cette perspective, les récentes réflexions qui ont présidé à l'élaboration des schémas de services collectifs de transport, enrichies par cet audit et le rapport de la DATAR, pourrait donner lieu à une loi de programmation ou une loi d'orientation qui donnerait de la lisibilité en dessinant la physionomie des grandes infrastructures sur dix à quinze ans. L'Etat serait ainsi un cofinanceur, aux côtés des fonds européens et des collectivités décentralisées. Mais pour qu'il ait de réels moyens financiers, il me semble souhaitable de consacrer une part des prélèvements en provenance de la TIPP au financement des infrastructures sous forme de recettes affectées. Certains évoquent même l'idée de la création d'un établissement public auquel seraient versées les ressources nécessaires au financement. Il me paraît aussi indispensable de renforcer le partenariat entre le public et le privé et, sur ce point, il est important de faire évoluer le statut juridique des sociétés d'économie mixte en prévoyant la possibilité d'y orienter l'épargne régionale.
    Dans ce débat, je voudrais me faire l'avocat du Grand Ouest.
    En ma qualité de président du syndicat d'étude du nouvel aéroport de Notre-Dame-des-Landes, future plate-forme aéroportuaire, vous comprendrez que j'évoque ce dossier. Quant au TGV Ouest, mes collègues parlementaires de la Mayenne et de la Sarthe souhaitent que le Gouvernement et la SNCF s'engagent de façon très précise sur le niveau des dessertes de la ville du Mans. La création de ces deux investissements doit être mise en perspective, comme l'a fait judicieusement la DATAR.
    La Bretagne a un besoin absolu de la nouvelle ligne TGV, car toute l'économie des régions Bretagne et Pays-de-la-Loire a besoin de sillons nouveaux, si l'on veut faire passer les TGV, les TER et le fret. Cette nouvelle ligne, à laquelle il faut ajouter le barreau sud pour l'interconnexion avec les autres lignes TGV, permettrait de répondre à un besoin urgent et contribuerait à la politique d'aménagement du territoire et de développement durable.
    Concernant le futur aéroport de Notre-Dame-des-Landes, cette plate-forme à dimension interrégionale est l'occasion pour l'Etat et les collectivités de travailler ensemble à l'élaboration d'un schéma concerté de desserte. Je pense au franchissement de la Loire, à des lignes ferroviaires modernes entre Nantes et Rennes. Ce projet rassemble la quasi-totalité des collectivités territoriales et des forces vives. Je souhaite qu'à l'issue de la procédure du grand débat, l'Etat s'engage.
    La coopération des deux régions Bretagne et Pays-de-la-Loire est en marche. Encore faut-il, monsieur le secrétaire d'Etat, que nous ayons les moyens de mener à bien ces deux projets. C'est un élu de l'Ouest qui tient à vous exprimer la farouche volonté de les voir aboutir. Vous savez fort bien que les régions qui résistent le mieux au chômage sont celles qui ont des infrastructures modernes et adaptées à l'essor des activités industrielles, économiques et de service.
    M. le président. Veuillez conclure.
    M. Michel Hunault. En retenant comme prioritaires et en finançant la ligne TGV Ouest et le nouvel aéroport, vous donnerez à l'Ouest les moyens de son développement. Je suis certain que, dans le cadre du partenariat que les collectivités proposent à l'Etat, ces deux projets seront retenus et je vous en remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme Henriette Martinez.
    Mme Henriette Martinez. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, « un territoire mal desservi verra presque toujours son avenir compromis ». Cette phrase est extraite du rapport de la DATAR dans le chapitre intitulé « Améliorer la desserte des régions enclavées ou périphériques, une question d'égalité des chances pour les territoires ».
    Je suis, avec Joël Giraud, l'élue du département des Hautes-Alpes, le plus mal desservi de France, puisque le seul classé en niveau 4 par la DATAR. Cela signifie que nous sommes sans aéroport : Gap est à 1 heure 40 de Marseille ; sans gare TGV : Gap est à 1 heure 30 d'Aix-en-Provence ; sans autoroute, puisque nous sommes dans le cul-de-sac autoroutier qui sépare les Alpes-de-Haute-Provence de l'Isère, la région PACA de la région Rhône-Alpes, celui de l'A 51 entre La Saulce et le Col de Fau.
    C'est une longue histoire que celle de l'autoroute A 51 du Val-de-Durance reliant Sisteron à Grenoble, dont la première pierre fut posée en 1982 par Gaston Defferre et que le CIADT du 13 avril 1987 inscrivit au schéma routier national. Concernant le tracé de cette autoroute, M. Pierre Méhaignerie, alors ministre de l'équipement, fit connaître, le 13 janvier 1988, sa préférence pour un passage à l'est de Gap, considérant à juste titre que cette autoroute, ayant pour but premier le doublement de l'axe de la vallée du Rhône dont la saturation était prévisible, pouvait également contribuer, en passant par Gap, à aménager le territoire enclavé des Alpes du Sud.
    Quinze années se sont écoulées ; vous êtes, monsieur de Robien, le dixième ministre chargé de ce dossier, et seulement 60 kilomètres sur 147 ont été réalisés par vos prédécesseurs.
    M. Michel Bouvard. Quatre kilomètres par an !
    Mme Henriette Martinez. Aujourd'hui, le « chaînon manquant » entre La Saulce et le col de Fau pénalise lourdement le développement économique et touristique de notre département, après l'arrêt brutal du projet de Bernard Pons par les ministres Gayssot et Voynet, le jour même du lancement de l'enquête publique,...
    M. Michel Bouvard. Scandaleux !
    Mme Henriette Martinez. ... le 10 juin 1997 à treize heures précisément, décision idéologique s'il en fut, et date historiquement funeste pour les Hautes-Alpes.
    Monsieur le ministre, vous nous avez accordé une écoute attentive dès votre prise de fonction et je vous en remercie. En venant prochainement dans notre département, vous serez le premier ministre de l'équipement à emprunter la route difficile de notre enclavement.
    J'ai lu attentivement le rapport d'audit sur les infrastructures. Il prévoit que, pour les équipements autoroutiers, « la priorité doit être accordée à l'achèvement du réseau national structurant et au développement des axes d'ores et déjà saturés ». L'A 51 s'inscrit dans cet objectif, puisqu'il s'agit de la création d'un grand itinéraire nord-sud dans les Alpes, alternatif au couloir rhodanien, comme d'ailleurs l'A 48 entre Ambérieu et Bourgoin. Mais là où le bât blesse les Hauts-Alpins, c'est lorsque le tracé préconisé par l'audit est le passage direct par le col de la Croix-Haute, tracé en limite du département et qui ne peut dès lors être considéré comme un tracé aménageur du territoire, ce qui était pourtant l'un des deux objectifs initiaux de ce projet.
    En effet, c'est en désenclavant Gap - 40 000 habitants et seule ville de plus de 20 000 habitants entre Turin et Aix-en-Provence, entre Grenoble et la Côte d'Azur - que nous développerons notre département, et que nous pourrons offrir à tous les habitants des Alpes du Sud un niveau de service satisfaisant et des retombées touristiques certaines.
    Enfin, l'autre problème que pose le rapport d'audit est celui des délais de réalisation de ce tronçon autoroutier : « La mission estime que la liaison pourrait être réalisée d'ici à 2020. » Nous attendons depuis quinze ans : dix-sept ans encore pour réaliser 80 kilomètres, c'est un délai inacceptable qui condamnerait inexorablement les Hautes-Alpes à être un territoire sans avenir.
    Ainsi, monsieur le ministre, c'est par ma voix que le département de France le plus enclavé, le seul honteusement classé en niveau 4, en appelle solennellement à la solidarité nationale pour achever l'A 51 par l'est de Gap, conformément à la volonté des élus et des socio-professionnels, conscients avec la DATAR que « des dessertes de qualité sont sans conteste une condition nécessaire pour que les personnes et les acteurs économiques locaux puissent fonder des stratégies crédibles de développement ».
    Il est urgent maintenant de décider si, oui ou non, les Hautes-Alpes doivent avoir un avenir sur le territoire national. Monsieur le ministre, je compte sur vous pour prendre dans les meilleurs délais la décision de finir cette autoroute et de nous ouvrir ainsi la voie de la confiance et de l'espoir pour développer notre territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à Mme Marie-Josée Roig.
    Mme Marie-Josée Roig. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais, après bien d'autres, saluer l'initiative courageuse du Gouvernement, qui a décidé de s'attaquer à un dossier difficile, celui des infrastructures. Un audit des projets d'infrastructures de transport était indispensable, le schéma de services collectifs de transport qui avait été établi par le précédent gouvernement n'étant qu'un inventaire de projets sans réelle prise en compte des enjeux majeurs.
    Le débat d'aujourd'hui doit permettre d'apporter au Gouvernement, de vous apporter, monsieur le ministre, un éclairage sur les grandes options à prendre afin d'engager une politique des transports cohérente, ambitieuse et réaliste.
    Je sais les questions majeures qui se posent en termes de financement dans le contexte budgétaire difficile que connaît aujourd'hui notre pays. Je ne les écarte pas. D'autres orateurs ont d'ailleurs évoqué des solutions qui pourraient remédier à cet état de fait. Mais je sais aussi, monsieur le ministre, et c'est votre souhait, que votre politique des transports doit s'appuyer également sur des projets cohérents, ambitieux et réalistes. C'est pourquoi je tiens à vous faire part, une nouvelle fois, de l'intérêt de la réalisation du projet de liaison est-ouest d'Avignon, la fameuse LEO.
    Cet ouvrage aura pour vocation, lorsqu'il sera pleinement achevé, de relier les autoroutes A 7 et A 9 et donc de détourner un important trafic de transit des voiries internes de l'agglomération avignonnaise. Cela permettra notamment d'accélérer la requalification urbaine du centre ville d'Avignon, dont l'exceptionnel patrimoine le mérite amplement. La LEO permettra également de créer un lien direct entre deux régions, Provence-Alpes-Côte d'Azur et Languedoc-Roussillon.
    Cet objectif de décongestion sera atteint, pour l'essentiel, dès la première tranche de réalisation de l'ouvrage, ce qui aura un impact considérable pour la qualité de vie des quartiers sud d'Avignon, quartiers aujourd'hui traversés par un flot ininterrompu de camions : 5 000 par jour. L'aménagement du territoire, c'est aussi le respect de la qualité de vie de nos concitoyens.
    La LEO aura également pour effet de desservir convenablement la gare TGV d'Avignon, ce vaisseau amiral de nos gares TGV, ainsi que le quartier qui se développe à ses abords et qui compte parmi les enjeux majeurs de l'agglomération en matière de développement économique.
    Atout pour la politique d'aménagement du bassin de vie d'Avignon, cette infrastructure l'est aussi pour la politique menée en matière de déplacements urbains, car elle permettra de réduire le nombre d'accidents de la route et la pollution dans les quartiers concernés.
    Comme vous pouvez le constater, monsieur le ministre, ce projet répond aux objectifs de développement économique, d'attractivité du territoire et de prise en compte des enjeux environnementaux fixés par la DATAR dans son rapport.
    Enfin, je souhaite attirer votre attention sur l'état de ce dossier, déjà très avancé. Dès 1995, les élus avaient eu le souci de définir avec M. Bernard Pons, alors ministre de l'équipement, un tracé qui, par la suite, a fait l'objet d'un véritable consensus de tous les élus des collectivités concernées et qui a largement été concerté avec tous les acteurs et riverains. Ensuite, dans le cadre de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique, la commission a émis, en juillet 2002, un avis favorable sur la section centrale, à quelques réserves près, qui ne concernent pas ses effets sur le développement urbain et qui sont d'ores et déjà levées par vos services.
    Je vous rappelle par ailleurs qu'une tranche fonctionnelle de cet ouvrage est financée par l'actuel contrat de plan Etat-région à hauteur de 122 millions d'euros.
    M. le président. Veuillez conclure.
    Mme Marie-Josée Roig. Dans ces conditions, il serait tout à fait catastrophique de remettre en question un projet dont la procédure est engagée depuis longtemps, puisque toutes les phases d'enquête sont aujourd'hui terminées, sans que l'utilité de l'ouvrage ait jamais été mise en cause.
    Monsieur le ministre, vous avez indiqué, lors des dixièmes rencontres parlementaires sur les transports, le 27 mars dernier, que la France n'avait d'autre choix que de s'équiper, faute de quoi elle courrait le risque de devenir un territoire à éviter parce que l'on y circule mal. Sachez que nous sommes prêts, sous votre conduite, à relever ce défi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jean Auclair.
    M. Jean Auclair. Monsieur le ministre, je souhaite appeler votre attention sur les équipements routiers non achevés qui traversent la Creuse et le Limousin, en particulier sur l'importance de l'achèvement de la mise à deux fois deux voies de la route Centre Europe-Atlantique. Cet aménagement doit contribuer au développement d'un réseau national structurant cohérent dont l'intérêt européen, comme son nom l'indique, est indiscutable.
    Cette mise à deux fois deux voies permettrait de répondre à deux objectifs d'intérêt national.
    Le premier consiste à renforcer l'efficacité du système logistique français pour développer la compétitivité nationale au moment de l'ouverture vers l'Est. Cette ouverture aura nécessairement des incidences sur les deux principaux couloirs de trafic traversant la France du nord au sud.
    La RCEA se caractérise comme un véritable barreau est-ouest capital pour le fonctionnement optimal des deux itinéraires nord-sud. Cet axe, reliant l'A 6 et l'A 71, offre aux flux venant de la vallée du Doubs la possibilité d'éviter Lyon et le sillon Rhodanien. La RCEA relie aussi l'A 71 et l'A 20, faisant ainsi la jonction avec le corridor ouest desservant la péninsule Ibérique.
    Ainsi, la route Centre Europe-Atlantique constitue une liaison rapide, favorable au trafic venant de l'Est. C'est l'axe obligatoire pour relier les PECO à la péninsule ibérique.
    Je tiens par ailleurs à rappeler qu'il découlerait de cet aménagement, en plus d'une fluidité accrue du trafic sur les grands corridors, une réduction des nuisances et de l'insécurité. Je précise que l'indice de gravité des accidents, sur la portion creusoise notamment, atteint 21,6 % sur les tronçons à deux voies, soit un taux supérieur de 50 % à la moyenne.
    Cette mise à deux fois deux voies a pour second objectif d'améliorer la desserte des régions enclavées vers les grandes métropoles, afin de susciter une dynamique économique en faveur de ces régions.
    Le développement du Limousin passe en priorité par une accessibilité routière de bonne qualité. Aussi, le Gouvernement étant très attaché aux enjeux d'aménagement du territoire dans ces secteurs enclavés, il doit prouver son engagement par l'aménagement de cette route.
    Je rappelle que l'enveloppe de crédit inscrite au XIIe plan pour l'aménagement de la RCEA était de 55 millions d'euros et qu'ils seront consommés d'ici à la fin de l'année prochaine. Par ailleurs, un redéploiement de 20 millions d'euros provenant du FEDER d'ici à 2006 au titre des infrastructures permettra d'améliorer sensiblement l'avancement des travaux en Creuse.
    Mais cela est insuffisant. Il semble que, comme l'a proposé la DATAR, la mise en place d'une redevance sur les poids lourds, à l'exemple du système allemand, soit une piste intéressante. Le produit de cette redevance pourrait permettre le remboursement d'un financement accordé, par exemple, par la Banque européenne d'investissement.
    Par ailleurs, dans le cadre des financements d'Etat, ne serait-il pas envisageable d'affecter d'office des crédits non utilisés par des régions voisines ?
    Le deuxième volet de mon intervention, auquel s'associent Jean-Pierre Dupont et Frédéric Soulier, députés de la Corrèze, concernera le POLT. En matière d'infrastructures ferroviaires, la Corrèze et le Limousin disposaient avec le Capitole du train le plus rapide et le plus confortable d'Europe dans les années 70. Nous étions alors une référence en matière de désenclavement.
    Depuis lors, la ligne n'a cessé de se dégrader, les temps de parcours de se rallonger, le service d'être réduit. Les élus, notamment Jean-Pierre Dupont, ont tenté à plusieurs reprises de faire inscrire le raccordement du Limousin au réseau TGV, soit par la création d'un TGV Paris-Toulouse passant par Limoges et Brive, soit via le TGV Atlantique. M. Gayssot s'était engagé à faire étudier, dans les schémas des services collectifs, le raccordement au TGV Atlantique avec la création d'un barreau d'une centaine de kilomètres reliant Limoges à Poitiers. Cette promesse, comme d'autres, n'a pas été tenue.
    M. le président. Veuillez conclure.
    M. Jean Auclair. Par contre, une opération intitulée « Amélioration de l'offre ferroviaire sur l'axe Paris-Orléans-Limoges-Toulouse » a fait l'objet, en 2001, d'une convention de financement entre l'Etat, les régions concernées, RFF et la SNCF. Elle prévoit l'amélioration de l'infrastructure, la mise en oeuvre de six rames TGV Atlantique modernisées et rendues pendulaires, et d'un matériel Corail classique, ainsi que la liaison avec la gare TGV de Roissy-Charles-de-Gaulle par Massy-Palaiseau.
    M. le président. Merci, monsieur Auclair.
    M. Jean Auclair. C'est cette option a minima qui a été retenue dans le cadre du IVe contrat du plan Etat-région. Sa mise en oeuvre devait être achevée en 2004.
    Le rapport demandé au Conseil général des Ponts et Chaussées par le Gouvernement pose la question de l'opportunité de réaliser cet investissement qui s'élève à 242 millions d'euros - valeur 1998 - pour un gain de moins de vingt minutes entre Paris et Limoges.
    M. le président. C'est fini.
    M. Jean Auclair. J'en ai pour dix secondes, monsieur le président.
    M. le président. Non, votre temps est écoulé.
    M. Jean Auclair. Jean-Pierre Dupont, député de la Corrèze et président du conseil général, a évoqué ce sujet au dernier conseil national d'aménagement et de développement du territoire. M. Nicolas Jacquet lui a réaffirmé l'attachement de la DATAR à l'amélioration de la liaison Paris-Limoges-Brive-Toulouse.
    Je pense donc, avec mes collègues Jean-Pierre Dupont et Frédéric Soulier, qu'il est indispensable que le Gouvernement mette tout en oeuvre pour que cette opération engagée aille rapidement à son terme, cette ligne ne répondant plus depuis longtemps aux attentes légitimes des usagers en termes de confort, de ponctualité et de qualité de service à bord.
    M. le président. La parole est à Mme Marie-Anne Montchamp.
    Mme Marie-Anne Montchamp. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce débat montre bien que tout parlementaire est naturellement attentif au développement de sa circonscription et, plus largement, du territoire avec lequel elle tisse des liens socio-économiques directs. Il est donc naturellement demandeur d'infrastructures.
    Mais dans le même temps, et nous l'avons vu tout au long du débat, se pose à lui la question de la pertinence de ces aménagements, d'autant que leur coût dépasse les capacités locales et régionales de financement et requiert l'investissement du pays tout entier. L'appréciation de cette pertinence réside dans la mesure de l'impact des infrastructures à réaliser. Elle nécessite de comparer les coûts induits par la situation existante - coût social, coût environnemental, capacité de développement économique pérenne, par exemple - avec le niveau de l'investissement à consentir. Cet « indice de priorité » est de nature à s'imposer aux parties prenantes publiques et privées.
    Le dossier que je souhaite aborder devant vous, monsieur le ministre, porte sur un point précis du Val-de-Marne, mais l'impact de la situation actuelle se fait sentir depuis plus de vingt ans sur un large tiers de l'Ile-de-France et sur les régions du Grand Est français, dans leur relation routière à l'Europe.
    Chaque jour se forme un embouteillage créé par la zone de convergence de l'autoroute de l'Est - l'A 4 - et de l'A 86, qui contourne Paris, à hauteur de Joinville-le-Pont et Nogent-sur-Marne. Le goulot d'étranglement créé à cet endroit conduit à la constitution quotidienne du plus gros embouteillage d'Europe, sur un axe emprunté dans le cadre des échanges Est-Ouest et Nord-Sud via Paris par quelque 260 000 véhicules-jour, dont 25 000 poids lourds.
    Si l'on considère le temps « perdu » sur cet axe, les estimations portent le coût social de ce bouchon à environ 5 milliards d'euros par an.
    Mais, au-delà, c'est la question du développement territorial de l'Est francilien qui se pose, tout particulièrement par l'intermédiaire de l'ACTEP, association de dix-neuf collectivités territoriales de l'Est parisien, qui unissent leurs forces pour se faire entendre et promouvoir le développement de cette zone pour le moins délaissée de la région Ile-de-France.
    Pourtant, toutes les études permettant d'aborder les solutions techniques pour résorber ce bouchon ont été réalisées, si bien que les travaux de désengorgement de la portion d'autoroutes concernée sont inscrits au contrat de Plan Etat-région depuis quinze ans. De même, je le rappelle, l'utilité publique a été déclarée pour ces travaux en 1990. Nous sommes en 2003 : tous les espoirs sont permis !
    Malgré cela, nous nous trouvons aujourd'hui dans une impasse, tant les investissements à consentir sont inabordables par les seules collectivités, ce qui pénalise la région Ile-de-France dans son équilibre et dans son attractivité.
    Ces éléments ont fait naître l'idée d'une concertation interrégionale vouée, notamment, à la recherche de financements innovants pour débloquer le dossier.
    Il nous faut sortir des schémas d'intervention traditionnels de l'Etat. C'est véritablement un mécanisme de coopération entre le secteur public et le secteur privé qu'il nous faut aujourd'hui mettre en oeuvre, au service de ce projet d'intérêt général, en assurant un partage des risques et des profits entre les partenaires. Je pense à la solution du partenariat public-privé, même si j'ai bien entendu les remarques que vous avez pu faire, monsieur le ministre, sur ses vertus et ses limites. Malgré tout, le PPP permet de définir un périmètre inédit dans le traitement de ce type de projet et d'identifier convenablement toutes les parties prenantes. Il s'inscrit dans une logique d'action au service de la décentralisation, notamment dans l'esprit de responsabilité économique des régions...
    M. le président. Veuillez conclure, madame Montchamp.
    Mme Marie-Anne Montchamp. ... et il participe d'une volonté de réduire la dépense publique.
    La solution que je souhaite donc vous soumettre, monsieur le ministre, nécessite l'obtention de votre part du droit à l'expérimentation sur le dossier particulier du bouchon du Val-de-Marne, pour la mise en place d'un PPP, en conformité avec les futures mesures de simplification et de codification du droit contenues dans le projet de loi portant habilitation du Gouvernement à prendre ces mesures par ordonnance.
    En d'autres termes, acceptez-vous, monsieur le ministre, que soit initiée une étude de faisabilité sur un partenariat public-privé pour le financement de cette infrastructure ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet.
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, dans nos débats aujourd'hui, j'ai reconnu deux convictions qui m'ont semblé largement partagées. La croissance économique et le développement des échanges et de la mobilité sont étroitement corrélés. Dans le même temps, les infrastructures de transport sont source de pollutions, locales et globales, de risques et de bruit.
    Dans l'un comme dans l'autre, notre confort, notre qualité de vie, mais aussi tout simplement notre santé, sont en question.
    Parce que cette tension évidente entre deux objectifs fait la difficulté d'une politique d'infrastructures, il me semble que l'accent doit être mis sur le découplage entre, d'une part, la mobilité et, d'autre part, les nuisances. Je crois qu'une des clés du développement durable est là. Voilà pour le principe.
    Les moyens sont multiples, des plus modestes aux plus ambitieux. J'en cite quelques-uns. D'abord, le développement du fret ferroviaire, qui a été longuement exposé. On sait bien, comme vous le souligniez cet après-midi, monsieur le ministre, en ouvrant ce débat, que ce n'est pas seulement une question d'infrastructures.
    Deux autres exemples simples : le progrès sur les carburants et sur les moteurs avec la systématisation du filtre à particules et la généralisation des véhicules propres dans les flottes captives.
    Le troisième exemple sur lequel je m'arrêterai un instant concerne la réduction du bruit.
    M. Yves Bur. C'est essentiel !
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Qu'il s'agisse d'infrastructures routières, ferroviaires ou aériennes, certaines solutions techniques existent qui permettent d'améliorer l'environnement sonore. Je citerai pêle-mêle les revêtements routiers spéciaux, les freins peu bruyants pour les trains ou encore les procédures d'approche à moindre bruit pour les avions et les aménagements de couloirs aériens à cette fin. Beaucoup reste d'ailleurs à faire dans ce domaine si l'on en croit le rapport de l'ACNUSA qui paraît ces jours-ci et qui, semble-t-il, souligne sans ambiguïté combien l'environnement sonore s'est détérioré en Ile-de-France du fait des derniers couloirs.
    Ces améliorations ont cependant des limites et il me semble que l'on ne pourra pas, à termes, faire l'économie de décisions claires sur un partage plus net entre lieux de vie et infrastructures bruyantes.
    Ce partage amènera en Ile-de-France, par exemple, à faire le choix d'un troisième aéroport plus éloigné. Il conduira aussi à prendre des décisions sur la requalification des nationales, je pense en particulier à la RN 7 et à la RN 20.
    Faute de tels choix, les efforts consentis pour améliorer l'environnement des infrastructures ne seront qu'un cataplasme sur une jambe de bois et nous serons condamnés à une dégradation lente et, comme les investissements, coûteuse, puisque la dégradation de l'environnement, mes chers collègues, a un coût sanitaire et environnemental.
    Finalement, et puisque les financements sont au coeur de nos débats ce soir, il me semble de mon côté qu'une part significative de tout nouveau financement éventuel devrait être consacrée à ce découplage que j'évoquais entre croissance de la mobilité, d'une part, et nuisance, d'autre part. Chacun y gagnera, avec la société tout entière. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
    M. Jean-Pierre Grand. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, les lignes ferroviaires à grande vitesse, les autoroutes, les voiries d'agglomération, les transports en commun en site propre, la politique aéroportuaire et le cabotage : tels sont les importants dossiers qui concernent directement la région Languedoc-Roussillon.
    Dans ce débat, la construction des lignes à grande vitesse est au coeur de nos préoccupations. Aussi, permettez-moi d'exprimer ma conviction, partagée par tous mes collègues UMP du Languedoc-Roussillon, que nous devons aborder ce sujet avec, en priorité, une volonté politique.
    Le contournement de Nîmes-Montpellier par la ligne à grande vitesse a été classé prioritaire par l'audit, et je m'en félicite. Cette ligne aura le double avantage de combiner le trafic voyageurs à grande vitesse et l'absorption du fret. Pour la liaison avec l'Espagne de Perpignan au Perthus, nous vous demandons, monsieur le ministre, que le contrat de concession puisse être signé avant la fin de l'année, afin de ne pas accroître les retards pris.
    J'observe qu'il manque cruellement, en Languedoc-Roussillon, un comité de pilotage pour le suivi du projet qui devrait réunir tous les acteurs du projet TGV. Je souhaite qu'il soit rapidement mis en place.
    Le tronçon TGV Nîmes-Montpellier, qui a connu ses premières interventions politiques et techniques dès 1989, sera, dans le meilleur des cas, réalisé aux alentours de 2010. Plus de vingt ans auront donc été nécessaires à la mise en service d'une soixantaine de kilomètres de voies. Si l'on projette le tracé jusqu'à l'Espagne, on approchera les trente années pour réaliser 200 kilomètres. Pour le rêve de l'arc ferroviaire Méditerranée à grande vitesse Gênes-Barcelone, il faudra patienter un demi-siècle !
    Ces délais ne sont plus à l'échelle du monde dans lequel nous vivons.
    M. Lionnel Luca. Très bien !
    M. Jean-Pierre Grand. La construction de lignes à grande vitesse doit être déclarée au moins par l'Etat « projet d'intérêt national prioritaire » et au mieux, classée par la Communauté européenne comme projet structurant européen.
    Nos régions françaises sont concurrentes entre elles pour la construction de ces lignes, le débat d'aujourd'hui l'illustre parfaitement. Si nous admettons cette fatalité, l'Etat maintiendra les structures budgétaires habituelles pour répondre à ces énormes besoins d'investissement. Plusieurs régions de notre pays seront ainsi sacrifiées, ce qui est difficile à accepter si nous voulons nous adapter aux défis de l'Europe économique d'aujourd'hui et de demain.
    Les coûts de construction des lignes à grande vitesse, nous les connaissons. Les problèmes techniques, nous les cernons. La volonté et l'engagement des collectivités locales sont globalement acquis.
    Il y a quelques instants, je vous demandais que la construction des lignes à grande vitesse soit déclarée projet d'intérêt national. Je suis conscient que cela n'a de sens que dans la mesure où nous aurons la capacité et la volonté politique de mobiliser de nouvelles ressources financières, d'allonger sensiblement les durées actuelles d'amortissement, et que les délais de réalisation ne souffriront plus de procédures anormalement contraignantes.
    Aussi, à partir de cette volonté politique forte de l'Etat, on peut imaginer que l'enveloppe financière nécessaire serait, pour l'essentiel, dégagée à partir d'un vaste emprunt national et européen.
    De nouveaux modes de financement adaptés, comme la notion de redevance ou de péage, doivent être sérieusement examinés. Une loi spécifique favorisant une exécution plus rapide du programme de lignes à grande vitesse pourrait être envisagée.
    De ce grand chantier, que je qualifierai de chantier du siècle, découleront les meilleures conséquences pour l'économie et l'emploi dans nos régions.
    Une politique concertée du développement des plates-formes aéroportuaires pour ces quinze prochaines années doit également être encouragée. Ces plates-formes constituent, en effet, un outil de vitalisation et de développement économique de premier plan.
    A cet égard, je remercie le Gouvernement d'avoir accepté de classer l'aéroport de Montpellier-Méditerranée dans la liste des aéroports nationaux.
    L'alignement géographique, dans notre région Languedoc-Roussillon, de quatre départements sur cinq, où l'on retrouve en parallèle la mer et ses ports et le réseau aéroportuaire, autoroutier et ferroviaire, permet le développement d'une ambitieuse politique d'intermodalité des transports.
    Dans cet esprit, je veux vous dire tout l'intérêt que je porte à un projet dynamique de cabotage maritime et de logistique intégrée qui concernerait le trafic de fret routier sur des lignes maritimes dans l'ouest de la Méditerranée. Le port de Sète a vocation à remplir cette mission. Il y a là, pour l'économie de notre région, une opportunité majeure qu'il convient que l'Etat soutienne.
    Vous attendez sûrement, monsieur le ministre, que j'aborde rapidement un point qui me tient à coeur, à savoir la réalisation de nos voiries d'agglomération et de transport urbain en site propre. J'évoque ici, vous l'avez bien compris, le dossier particulier du tramway de Montpellier...
    M. le président. Veuillez conclure, monsieur Grand.
    M. Jean-Pierre Grand. ... et des voiries d'agglomération qui l'accompagnent. Je demande à l'Etat de bien mesurer dans ses choix les conséquences qu'entraînerait un désengagement, même partiel, de leur financement.
    Mon collègue Robert Lecou souhaite que je vous rappelle tout l'intérêt qu'il porte à la ligne SNCF Béziers-Neussargues, à la création d'une route du Piémont Alès-Lodève-Narbonne, au doublement de l'A 9 et à la déviation de Saint-André-de-Sangonis pour achever la liaison de l'A 750. Notre collègue François Calvet souhaite également que soit abordé le problème de la RN 20 et de la RN 116, et M. Saint-Léger celui de la RN 88 dans la traversée de la Lozère qui pourrait passer à deux fois deux voies.
    Le mérite de ce débat, messieurs les ministres...
    M. le président. Merci, mon cher collègue.
    M. Jean-Pierre Grand. J'ai terminé. (Sourires.)
    M. le président. Merci pour votre compréhension.
    La parole est à Mme Bérengère Poletti.
    Mme Bérengère Poletti. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, il était initialement convenu qu'à mi-parcours nous serions conduits à évaluer et analyser l'état de réalisation des contrats de plan Etat-région et, si besoin, à en modifier certains aspects. Il y a loin de la coupe aux lèvres. Partout en France, on a pu relever des retards considérables, notamment dans le domaine des infrastructures. La région Champagne-Ardenne n'a pas échappé à cette règle générale. Elle aussi a été victime d'un manque d'engagement de l'Etat, qui n'a pas tenu sa parole. Dans un pays où l'Etat ne tient pas ses engagements, c'est forcément la nation tout entière qui en pâtit et les citoyens qui voient leur confiance diminuer.
    Pourtant, pour la Champagne-Ardenne, tout avait si bien commencé. On se souvient des belles paroles et même des beaux écrits, puisque l'Etat, à l'époque, a pris objectivement acte que la Champagne-Ardenne devait opérer un rattrapage dans le domaine des infrastructures, notamment routières. Nous avons été l'une des rares régions à obtenir que plus de 38 % des engagements de l'Etat portent sur les routes, c'est-à-dire plus que ce qui était accordé en moyenne aux autres régions. Trois ans plus tard, notre déconvenue n'en est que plus grande. Après les deux premières années catastrophiques en termes de taux de réalisation - moins de 10 % -, nous avons, dès juillet 2002, mesuré que ce que nos prédécesseurs n'avaient pas pu faire en deux ans dans une période encore marquée par une relative aisance budgétaire, liée à l'époque à la croissance, était devenu totalement impossible dans un contexte économique difficile.
    L'Etat a gâché la chance de rattrapage qu'il nous avait fait miroiter. Notre dépit est à son comble, d'autant plus, monsieur le ministre, que, refusant la fatalité, le conseil régional de Champagne-Ardenne a, avec le conseil général des Ardennes, décidé d'avancer et de prêter 46 millions d'euros. Vous voyez, c'est le monde à l'envers : l'Etat nous promet et c'est à nous de payer ! Dans ce contexte, vous avez bien eu raison de demander que deux types d'études soient conduites sur ce thème pour que l'on puisse, enfin, parler le langage de la réalité et que l'on cesse d'entretenir l'illusion.
    En ce qui concerne la région Champagne-Ardenne, nous avons besoin que l'on confirme que le rattrapage est pour nous une nécessité en matière de crédits routiers. Et, puisque les rapports du conseil général des ponts et chaussées, d'une part, et de la DATAR, d'autre part, sont tous les deux éclairés de préoccupations forcément et naturellement différentes mais souvent complémentaires, et dans la mesure où l'on a reconnu le bien-fondé d'un projet dans les deux rapports, ce projet mérite non seulement d'être soutenu mais aussi d'être dopé, quitte à faire appel à des procédures de nantissement budgétaires originales surtout quand ceux-ci représentent un engagement budgétaire modeste. C'est le cas de la branche ouest de l'« Y ardennais », l'A 34, moins de quarante kilomètres pour 200 millions d'euros. Il s'agit de l'axe Rotterdam-Marseille inscrit dans le DOCUP permettant l'ancrage du territoire dans l'espace européen.
    Cette infrastructure profitera à toute la région Champagne-Ardenne et à l'ensemble de l'axe Nord-Sud européen. Bien évidemment, ce n'est pas pour rien qu'initialement étaient prévus 38 % de crédits routiers en région Champagne-Ardenne, car à la branche ouest de l'« Y ardennais », il faut ajouter l'aménagement progressif des RN 19, RN 31, RN 51 et la mise à deux fois deux voies de la RN 4.
    Quant au tracé Troyes-Auxerre-Bourges, on ne doit pas oublier qu'il est le corollaire indispensable, soulignant encore, s'il en était besoin, l'exigence de l'A 34.
    Dans le domaine des infrastructures ferroviaires et tout particulièrement pour le TGV Est, la région Champagne-Ardenne est solidaire de la Lorraine et de l'Alsace et en appelle à la réalisation de la deuxième phase jusqu'à Strasbourg.
    C'est l'occasion de rappeler que le TGV Est est le seul pour lequel on a appelé les collectivités locales à contribuer. C'est ainsi que la région Champagne-Ardenne a dû apporter sa part. A travers la région, ce sont quatre départements qui ont naturellement participé au financement. Dans cette région tout en longueur sur plus de 350 kilomètres du Nord au Sud, le TGV Est ne concerne pourtant que les deux départements du Nord. Ceux du Sud attendent que l'Etat s'implique sur l'axe ferré qui les intéresse, à savoir Paris-Bâle.
    Sur ce trajet, depuis que la région a investi dans des matériels roulants plus modernes,...
    M. le président. Veuilez conclure, madame Poletti !
    Mme Bérengère Poletti. ... on note une augmentation du nombre des voyageurs de 7 % par an au cours de ces deux dernières années.
    Enfin, dans le cadre de l'intermodalité, l'aéroport de Vatry doit prendre toute sa place et, pour les voies navigables, la connexion du port de Givet au réseau belge, à 1 350 tonnes. Vous le savez bien, cette liste n'est pas exhaustive. Des projets d'importance auraient mérité de trouver toute leur place dans les rapports que vous avez eu soin de demander, et nous apprécions votre volonté de soumettre tous les projets à l'expertise la plus complète possible des surenchères, nous avions besoin d'une opération vérité. Merci de le faire avec la rigueur qu'on vous reconnaît. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.
    M. Martial Saddier. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, alors que mes collègues féminines de l'UMP ont été anormalement inscrites en fin de liste,...
    Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, Mme Henriette Martinez, Mme Marie-Anne Montchamp, Mme Bérengère Poletti et Mme Marie-Josée Roig. Très juste ! Merci de le reconnaître !
    M. Gilbert Meyer. Il a raison !
    M. Martial Saddier. ... je suis heureux avec M. Jacques Le Guen de conclure ce débat.
    Souhaitant mettre l'accent sur l'influence de la problématique de l'environnement dans les choix de nos projets d'infrastructures pour les vingt années à venir, c'est sous cet angle que je veux apporter ma contribution à ce débat fondamental pour notre pays et pour les générations qui nous succéderont.
    Après un audit, les rapports parlementaires, l'étude de la DATAR, la représentation nationale a été invitée par le Gouvernement à s'exprimer sur la politique d'équipement et de transport pour les années à venir que nous souhaitons tous durable, dynamique et cohérente avec le développement de l'Union européenne.
    A mon sens, les orientations que la France doit prendre en matière d'infrastructures doivent être guidées par le souci de donner un caractère durable à notre développement, dans un cadre européen élargi, en incluant le bien-être et la protection de nos concitoyens.
    Concernant le financement des infrastructures, l'évaluation du véritable coût des transports, sa transparence et la conservation d'une certaine maîtrise par l'Etat de revenus issus du transport routier semblent répondre à la problèmatique environnementale en apportant des solutions de financement pérennes.
    Vu la répartition actuelle des modes de transports, selon la Fédération des entreprises de transport et logistique de France - 82 % pour la route, 8 % pour la mer, 5 % pour les transports aériens, 3 % pour le fret ferroviaire et moins de 2 % pour le fluvial - le rééquilibrage entre les différents modes de transport apparaît comme une urgence justifiant des mesures incitatives. Comme le souligne l'étude prospective de la DATAR, une stratégie de développement durable ne sera possible que si elle favorise la compétitivité et l'attractivité du site France comme carrefour européen, véritable plate-forme logistique structurée par ses ports et un système intermodal discriminant et non comme simple pays de transit avec des retombées économiques limitées et des nuisances croissantes.
    De nombreux exemples - plates-formes de transports multimodaux, cabotage maritime et fluvial - peuvent être pris. Permettez-moi d'en choisir un qui m'est plus particulièrement cher.
    L'Union européenne continue de s'élargir, repoussant ses barrières toujours plus à l'Est. Formant une barrière naturelle de la Méditerranée jusqu'à Vienne, le massif alpin représente un obstacle naturel majeur. Son fonctionnement constitue de plus en plus un enjeu en termes tant de développement des échanges économiques européens que de recherche de solutions durables. Constituant une véritable alternative au tout routier dans ce massif, le projet Lyon-Turin, objet d'un accord franco-italien le 29 janvier 2001, ratifié par le Parlement en 2002, est en discussion pour son calendrier d'exécution - si j'ai bien compris, votre introduction, monsieur le ministre - et pour les questions relatives à son financement.
    Les innovations en matière d'ingénierie juridique et financière, comme la consolidation des possibilités de partenariats public-privé, sont à encourager afin de permettre la réalisation d'un projet d'un telle envergure. Evaluer les coûts indirects liés à sa non-réalisation aiderait peut-être à redonner un élan aux recherches de fonds nécessaires à sa réalisation.
    M. Michel Bouvard. Excellente piste !
    M. Martial Saddier. Merci, monsieur Bouvard.
    Son impact portant sur plusieurs cycles économiques, il paraît difficile d'en avoir une idée exacte aujourd'hui.
    Nuisances sonores, pollutions, désagréments divers, ces aspects de l'utilisation et du développement des infrastructures sont peu pris en compte actuellement. La part du transport routier est prépondérante dans l'émission du gaz carbonique. Or le développement durable de nos infrastructures ne peut s'envisager en dehors de la prise en compte des incidences néfastes sur l'environnement, la santé, la sécurité des personnes, des transports terrestres et aériens.
    La pénurie des transports urbains collectifs contribue à la saturation des autoroutes dans les zones urbanisées. Ce secteur a souffert pendant de nombreuses années d'un sous-investissement et il faut désormais valoriser ses atouts économiques et écologiques.
    La question de la sécurité des personnes se pose essentiellement sur la route. En la matière, je tiens à saluer la formidable action engagée avec succès par notre Gouvernement et dans laquelle vous êtes au premier rang, messieurs les ministres.
    Malgré tout, le principal enjeu du débat d'aujourd'hui est celui du financement de ces futures infrastructures. Les investissements à venir devant se concentrer sur les modes alternatifs et multimodaux de transport, je m'exprimerai plus particulièrement sur la contribution financière que la route peut et doit y apporter.
    M. le président. Veuillez conclure.
    M. Martial Saddier. A cet égard, je souscris aux mesures évoquées par plusieurs études proposant de mutualiser les ressources financières et à autoriser qu'une partie du produit de la tarification perçue sur les itinéraires routiers soit utilisée pour ce financement. Plusieurs solutions sont étudiées, notamment le projet de taxation des poids lourds. Je reviendrai sur l'impulsion que cela peut donner quant aux choix des pouvoirs publics pour les infrastructures de demain. Ainsi l'Etat ne devrait-il pas conserver des moyens de levier sur certains pôles autoroutiers ? Comment en effet, demain, encourager les camions à aller sur le Lyon-Turin...
    M. le président. Il faut conclure.
    M. Martial Saddier. ... si nous perdons tout pouvoir d'intervention sur les tunnels du Mont-Blanc et du Fréjus ?
    Arrêter de construire des routes est impossible. Je pense notamment, au désenclavement du Chablais en Haute-Savoie et à l'A 41, chers à mes collègues parlementaires du département. Toutefois ne favoriser que le développement des infrastructures routières paraît également impossible aujourd'hui : à l'avenir, il faudra réorienter et rééquilibrer nos projets d'infrastructures. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. J'indique à M. Saddier, qui a fait preuve de solidarité avec les femmes députées du groupe UMP, que je veux bien m'associer à lui. Toutefois, je dois souligner que le service de la séance n'y est pour rien : l'ordre de ses intervenants a été donné par le groupe.
    Mme Henriette Martinez. Nous le savons bien !
    M. le président. C'est donc vers lui que devra être répercutée cette plainte fort justifiée.
    La parole est M. Jacques Le Guen, dernier orateur inscrit.
    M. Jacques Le Guen. Monsieur le ministre, dans ce débat sur les infrastructures 2003-2020, je tiens à vous faire part de ma préoccupation, qui rejoint celle des acteurs économiques et institutionnels bretons, concernant le désenclavement de la Bretagne et, plus particulièrement, la réalisation du TGV Ouest.
    La Bretagne a pris connaissance des conclusions de l'audit publié en février dernier avec un certain étonnement voire une certaine irritation. Il est en effet difficilement compréhensible que le TGV Ouest arrive en cinquième position dans les priorités ferroviaires affichées par vos experts. Alors que le TGV Méditerranée roule à près de 300 km/h, plaçant désormais Marseille à trois heures de Paris pour un parcours de 850 kilomètres, savez-vous qu'il faut encore plus de 4 heures 20 en train pour rejoindre Paris au départ de Brest et de Quimper, soit une distance de 600 kilomètres ?
    S'il ne s'agit bien entendu pas d'opposer les projets entre eux, vous ne serez cependant pas surpis que les conclusions de cet audit inquiètent sérieusement les Bretons, et ce à plusieurs titres.
    D'abord, la mise en service effective du TGV Ouest serait repoussée à 2014 voire à 2017, ce que nous ne pouvons accepter. Nous demandons le respect de l'échéance de 2010-2012. Un nouveau décalage dans le temps maintiendrait la Bretagne éloignée des centres de décision et de consommation nationaux et européens. Cet éloignement sera en effet de plus en plus difficilement supportable alors que les déplacements se mesurent désormais bien plus en temps qu'en kilomètres.
    De la même manière, les réserves émises dans le rapport d'audit sur la technologie pendulaire susceptible d'être utilisée entre la pointe de la Bretagne et Rennes suscitent bien des interrogations. A ma connaissance, cette technologie fonctionne de manière tout à fait satisfaisante et rend réalisable à des coûts abordables l'objectif de placer Brest et Quimper à trois heures de Paris. La remettre en cause ajourd'hui constitue à mon sens une erreur, en l'absence de toute alternative crédible en termes tant de coûts que de calendrier.
    C'est pourquoi, messieurs les ministres, je vous demande de confirmer une nouvelle fois que cet audit ne représente en rien un engagement du Gouvernement, qu'il n'est qu'une base de travail et qu'il ne préjuge pas les décisions finales qui seront prises.
    Depuis sa mise en service, il y a un peu plus de quinze ans, près de 60 milllions de voyageurs ont utilisé le TGV Bretagne. Ce chiffre est supérieur aux prévisions initiales. La ligne TGV actuelle supplante, en termes de parts de marché, le transport aérien.
    Depuis la fin des années 60, le désenclavement de la Bretagne est au coeur des préoccupations des responsables politiques et économiques. C'est pour cette raison que le projet de prolongement de cette ligne à grande vitesse au-delà du Mans jusqu'à Rennes puis Brest et Quimper est un enjeu vital pour notre région. Cinq raisons essentielles militent en faveur du prolongement de cette ligne.
    Premièrement la ligne TGV Ouest est une réponse aux questions d'aménagement du territoire.
    Le transport ferroviaire constitue, en effet, l'un des fondements d'une politique efficace d'aménagement du territoire. Or nous savons tous que les années à venir seront marquées, en matière économique, par l'élargissement à l'Est de l'Union européenne.
    Ainsi la Bretagne risque, dans ce schéma, d'être encore plus éloignée du coeur de l'Europe. Ce que les Bretons craignent le plus, c'est de voir leur région dite périphérique se transformer en région ultrapériphérique. Elle ne pourra conserver ses entreprises et ses emplois, en particulier dans l'agroalimentaire, que si son raccordement aux espaces européens les plus dynamiques est assuré.
    Ayons bien présent à l'esprit que la Bretagne est une péninsule bordée par la mer au nord, à l'ouest et au sud. L'essentiel des flux économiques s'effectue donc vers l'est ou en provenance de l'est.
    Dans ces conditions, comme le reconnaît le rapport d'audit, la réduction, à terme, à trois heures des temps de parcours entre Brest ou Quimper et Paris constitue un enjeu d'aménagement du territoire.
    Deuxièmement, la ligne TVG Ouest s'insère dans le cadre de la politique nationale des transports.
    Après l'effort particulier réalisé dans les années 60 en matière routière, la Bretagne a besoin d'effectuer un rééquilibrage en faveur du ferroviaire. En effet, la construction de la ligne nouvelle à grande vitesse permettra une libération des voies classiques.
    Cette situation présentera deux grands avantages : d'une part, elle favorisera le fret et améliorera ainsi les relations avec les grandes plates-formes de transport combiné nationales ou européennes ; d'autre part, elle devrait permettre d'assurer le développement des transports express régionaux dans de meilleures conditions.
    M. le président. Il faudrait abrégez !
    M. Jacques Le Guen. Troisièmement, la ligne à grande vitesse est économiquement rentable.
    M. Michel Hunault. Absolument !
    M. Jacques Le Guen. Avec 2 millions de voyageurs supplémentaires attendus, le TGV Ouest est - et c'est la bonne nouvelle du rapport d'audit - considéré par vos experts comme un des projets français les plus rentables. Sa rentabilité socio-économique est estimée à 10,8 % alors que le taux minimal est fixé à 8 %.
    Quatrièmement, la création rapide de la ligne TGV Ouest n'est que la poursuite et la confirmation des engagements pris par l'Etat sur ce dossier depuis des années. Je ne les rappelle pas.
    M. le président. Allez à votre conclusion !
    M. Jacques Le Guen. Cinquièmement, la création de cette ligne à grand vitesse trouvera les financements nécessaires.
    M. le président. Monsieur Le Guen, abrégez !
    M. Jacques Le Guen. Les collectivités locales sont prêtes à prendre leur part dans le financement de ce projet. Leur position n'a pas changé depuis 1996. De plus, la mobilisation des fonds européens doit se faire sur des projets structurants.
    M. le président. Merci de conclure !
    M. Jacques Le Guen. Je conclus, monsieur le président.
    C'est pourquoi nous souhaitons, comme l'a suggéré le président du conseil régional de Bretagne, notre collègue sénateur Josselin de Rohan, la mise en place d'une commission pour évaluer les contributions respectives de l'Etat et des collectivités locales.
    M. le président. Monsieur Le Guen, c'est de la lecture à grande vitesse. Je ne suis même pas sûr que les sténos puissent suivre ! (Rires.) Il vaudrait mieux conclure et arrêter là.
    M. Jacques Le Guen. Je raccourcis et je conclus, monsieur le président.
    Aujourd'hui, messieurs les ministres, du Gouvernement nous attendons une explication claire, de manière à assurer l'égalité des chances de notre région.
    Un dernier mot...
    M. le président. Non, monsieur Le Guen !
    M. Jacques Le Guen. ... pour souligner que le projet d'aéroport international de Notre-Dame-des-Landes me paraît tout à fait nécessaire au développement du grand Ouest.
    M. le président. Sans doute !
    M. Jacques Le Guen. Il est aussi nécessaire que l'achèvement à deux fois deux voies de la RN 164. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Le débat est clos.
    La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, avec Dominique Bussereau nous allons nous partager les réponses aux orateurs. Nous ne consacrerons que quelques dizaines de secondes à chacun, ce qui sera certainement insuffisant, mais nous pourrons compléter ces indications par écrit, afin que vous ayez des réponses satisfaisantes sinon sur le fond, du moins sur la forme. (Sourires.)
    Mme Marie-Josée Roig. Vous répondrez aux femmes aussi ?
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Je n'ai pas parlé que des hommes !
    Mme Marie-Josée Roig. Non, mais comme nous nous sentions totalement exclues, nous nous demandions si vous nous répondriez !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Cela n'est pas du tout dans mon esprit, croyez le bien.
    Honneur au président, je commence par répondre à M. Rudy Salles.
    Monsieur Rudy Salles, vous avez souligné l'intérêt de développer la vocation internationale de grandes plates-formes comme l'aéroport de Nice. C'est une voie qui me paraît très prometteuse et c'est bien pour cette raison que j'avais appelé de mes voeux une analyse globale de notre politique aéroportuaire. Une mission a été lancée par la commission des affaires économiques. Elle replace la question des plates-formes aéroportuaires existantes dans cette perspective et c'est essentiel.
    Concernant la desserte à grande vitesse de votre région, j'ai demandé au préfet de mettre en place un comité de pilotage qui associera les collectivités, très mobilisées, dont j'ai recontré les représentants avec vous il y a quelques semaines.
    Par ailleurs, la concession récurrente, les problèmes d'exploitation et de sécurité dans les tunnels de l'autoroute A 8 rendent absolument indispensable la réalisation d'un nouveau contournement de Nice. L'objectif que j'ai fixé est de saisir la commission nationale du débat public à la fin de l'année.
    Monsieur Jean-Pierre Soisson, vous avez justement rappelé l'impasse financière, environ 15 milliards d'euros, qui empêche d'investir et de s'attaquer à la dette de RFF qui avoisine les 25 milliards d'euros. Vous avez eu le courage d'étudier toutes les ressources envisageables, y compris une augmentation de la TIPP, sur le gazole, des véhicules légers, avez-vous eu raison de préciser. Cela représenterait environ 200 millions d'euros par centime de plus. C'est effectivement en mobilisant une large palette de ressources que nous pourrons avoir une politique ambitieuse qui devrait prendre en compte également des projets pénalisés par un taux d'actualisation trop élevé et que nous devons revoir.
    M. Jean-Pierre Soisson. Merci.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. A M. Thomas qui s'est intéressé à l'A 88, à l'A 28, à la route des Estuaires, j'indique que cette dernière est maintenant achevée quant à sa continuité autoroutière.
    J'ai inauguré le dernier tronçon à Avranches au début de l'année.
    Pour l'A 28, les travaux, sous la direction de la société concessionnaire ALIS, ont commencé au début du mois, conformément à leur échéancier, et la mise en service doit intervenir à la fin de 2005.
    L'A 88 est un projet important du contrat de plan ; les premiers travaux sont programmés cette année.
    Le projet d'amélioration de la desserte ferroviaire de la Normandie qu'il a également évoqué est très pertinent. Il est lié au projet CDG Express. Ces deux projets sont en bonne voie, avec un montage financier probablement exemplaire pour CDG Express. C'est une première étape déjà financée pour la partie Val de Seine.
    Alain Juppé, avec le talent qu'on lui connaît, a parlé avec toute son âme de l'avenir de l'Aquitaine en regrettant les vingt années de retard prises quant à son désenclavement, son rôle dans la liaison entre la France et l'Espagne, et les bouchons routiers. Il a cité nombre d'infrastructures nécessaires à l'Aquitaine.
    En ce qui concerne la RN 21, une étude d'itinéraire est lancée.
    Pour le contournement de Bordeaux, le débat public se prépare pour l'automne.
    Sur Langon-Pau et Bordeaux-Pau, l'appel d'offres a été lancé juste après la sortie de l'audit. La remise des candidatures est fixée à une date qui va certainement lui plaire et qui plaira à beaucoup d'entre vous : le 18 juin 2003.
    M. Michel Bouvard. C'est une belle date !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. M. Juppé a beaucoup parlé des procédures. Il a cent fois raison : il faut les alléger, travailler sur le champ du débat public. A cet égard, j'ai le plaisir de lui annoncer que l'IMEC a vécu et que l'IMEC ne sera pas remplacé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Juppé ayant aussi souligné le retard de l'Aquitaine, je tiens à lui rappeler les intérêts et les limites des financements innovants, ainsi que la nécessité d'étudier des ressources nouvelles, comme la TIPP sur le gazole des véhicules légers ou une redevance sur les poids lourds pour financer davantage de projets.
    J'ai encore noté le plaidoyer de M. Juppé pour des ressources réellement dédiées aux transports, avec l'affectation de ces moyens à un établissement public. Je partage complètement cette analyse.
    S'agissant du fer et du maritime, il a également rappelé la place privilégiée de sa région, l'Aquitaine, qui fait le lien entre la péninsule Ibérique et le reste de l'Europe. La ligne Sud-Europe-Atlantique ou le cabotage maritime sont deux réponses pour assurer ce lien. J'ai d'ailleurs demandé à M. Van Miert de les inscrire dans les projets européens. Nous espérons, Dominique Bussereau et moi-même, avoir été entendus.
    François Sauvadet a souligné les inconvénients politiques d'une augmentation de la TIPP. Nous ne les sous-estimons évidemment pas. D'un autre côté, M. Sauvadet a insisté sur les besoins d'investissement, qui ne peuvent pas attendre quarante ans. C'est bien là le coeur du débat : quels efforts sommes-nous prêts à consentir pour investir plus et plus vite ?
    Une autre de ses questions concernait la longueur des procédures, mais j'y ai déjà répondu : il faut les simplifier, et la loi Plagnol va y contribuer.
    Pour le TGV Rhin-Rhône, nous n'avons pas perdu un jour. L'avant-projet détaillé est bien engagé.
    Enfin je crois aussi à l'avenir de la voie d'eau.
    Marc-Philippe Daubresse a souligné tout l'intérêt de Seine-Nord : mode alternatif dont les atouts ont été rappelés par la DATAR, ce projet est une réponse pour un développement plus équilibré des transports. Il a également indiqué que nous devons mobiliser des ressources nouvelles. Nous avons la même vision.
    Pour le projet à plus court terme de l'A 24, le président de la commission particulière a été nommé. Il s'agit de M. Carrère, le débat public doit intervenir à l'automne et se terminer au plus tard en janvier.
    Enfin, les lignes ferroviaires doivent être améliorées.
    Voilà en tout cas un bon exemple multimodal : voie d'eau, routes et rails complémentaires dans le Nord-Pas-de-Calais, la Picardie et l'Ile-de-France.
    Christian Philip - là encore, je partage complètement son analyse - a demandé que l'on garantisse les moyens. Il propose pour cela l'instauration d'une redevance sur les poids lourds et la création d'un établissement public. Il a rappelé les avantages d'une telle formule, en particulier la solidité et la dimension démocratique d'un établissement public, dans lequel la représentation nationale serait complètement et régulièrement associée. Ce sont des moyens comme ceux-là qu'il nous faut explorer.
    Bien évidemment, les transports urbains doivent aussi faire l'objet de la même démarche, avec des financements réalistes.
    Francis Hillmeyer a beaucoup parlé du TGV Est et de la liaison Rhin-Rhône.
    Pour le ferroviaire, je me suis déjà exprimé sur les deux lignes à grande vitesse pour les voyageurs, qui s'inscrivent résolument dans une dimension européenne et qui favoriseront simultanément le fret.
    Sur le grand contournement de Strasbourg, nous progressons. Une consultation locale a été organisée sur les fuseaux de 300 mètres. Elle se déroulera de mi-juin à mi-juillet 2003.
    Jean-François Mancel a évoqué les contrats de plan. Ainsi que cela a été souligné, l'Etat ne parvient pas à respecter les engagements pris en leur sein, ce qui n'est évidemment pas satisfaisant. On rencontre toujours le même problème et les ressources nouvelles que nous préconisons, sous une forme ou sous une autre, permettront d'honorer les contrats de plan Etat-région. Je félicite donc M. Mancel d'avoir défendu avec brio des projets régionaux, ferroviaires et routiers, avec un argument auquel nous sommes tous sensibles, celui de la sécurité.
    M. Claude Gaillard a raison : il faudra bien parvenir à désendetter RFF pour retrouver des marges de manoeuvre en matière d'investissement ferroviaire. C'est d'ailleurs la question qui a été posée dès le début de l'après-midi. M. Gaillard a mis le doigt sur une question de fond : facturons-nous les transports au juste coût ? Je répète donc que certaines infrastructures doivent être mieux prises en charge par les usagers. Ce sont ces pistes qui nous permettront de trouver des ressources et des marges complémentaires.
    M. Meyer, avec également beaucoup de talent, a parlé du prolongement de la ligne à grande vitesse Est jusqu'à Strasbourg et de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône. Elles ont évidemment des dimensions interrégionales et européennes.
    Il a souligné avec un intérêt supplémentaire qu'il fallait se donner les moyens de conforter Strasbourg dans sa dimension européenne. C'est l'une des fiertés que nous partageons tous ensemble : avoir Strasbourg comme siège du Parlement européen. Il faut évidemment conserver cet acquis et assurer le rayonnement de la France à travers Strasbourg. Nous devons donc doter cette ville des infrastructures indispensables au maintien de cette grande institution.
    M. Yves Bur et Gilbert Meyer. Merci, monsieur le ministre.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Je partage pleinement l'avis de Claude Girard quant à la nécessité d'une forte volonté politique pour mobiliser des ressources. Il faut également se donner les moyens de financer Rhin-Rhône et de maintenir le rythme soutenu de progression de la totalité du projet, dont la branche Est est aujourd'hui la plus avancée. Quant à la RN 19, sur laquelle Alain Joyandet a également attiré mon attention, j'examine une hypothèse de concession pour l'aménager à deux fois deux voies.
    M. Douste-Blazy a demandé qu'on relance rapidement les études sur un TGV vers Toulouse pour préparer un débat public. L'intérêt de ce projet semble évident : il faut donc le planifier. J'ai bien noté aussi que le développement de l'aéroport de Toulouse lui paraît difficilement compatible avec la défense de la qualité de vie des riverains. On le comprend !
    Pierre Cardo a parlé de l'A 104 et du bouclage de la Francilienne, qui est une priorité pour un bon fonctionnement de la région parisienne. Compte tenu de son montant, la Commission nationale de débat public devra être saisie. Nous nous y préparons car il ne faut pas perdre de temps.
    Christian Estrosi a parlé de l'antenne de Digne. Cette ville mérite en effet un bon branchement sur l'A 51.
    La congestion de l'autoroute A 8 impose de planifier aussi un contournement de Nice. L'objectif est, là également, de saisir la commission nationale de débat public avant la fin de cette année.
    M. Serge Grouard a beaucoup parlé du développement durable. Dans mon propos liminaire, j'avais également insisté sur la nécessité de concevoir un développement durable pour nos transports - c'est un impératif - et j'avais cité les orientations qu'il faut suivre : réduction à la source, intermodalité, notamment. Je souscris donc tout à fait à ses observations.
    Jean Proriol et Didier Quentin ont évoqué la RCEA et quelques projets clés la concernant. Cette grande transversale est dangereuse. Je le sais pour l'avoir pratiqué moi-même plusieurs fois. Il convient de poursuivre activement sa mise à deux fois deux voies. C'est une grande priorité de contrat de plan. S'agissant de l'antenne de Vichy, j'examine la faisabilité d'une concession au prolongement de l'antenne de Gannat pour en accélérer également la réalisation.
    En ce qui concerne l'A 89, la DUP a été prise, vous l'avez noté, le 17 avril 2003. Il faut maintenant passer à l'étape du financement.
    Concernant l'A 45, j'ai déjà répondu au président Clément. J'ai demandé au préfet de consulter les élus fin juin sur le fuseau des trois cents mètres.
    Madame Martinez, sur l'A 51, je me rendrai sur place le 26 juin prochain. Je souhaite voir le territoire dans lequel devra s'inscrire cette autoroute. Je ferai les deux itinéraires en voiture. Je n'irai pas en hélicoptère.
    M. Yves Bur. C'est d'une grande conscience professionnelle.
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. En juillet, j'organiserai une nouvelle table ronde pour prendre une orientation qui, je l'espère, sera définitive. Si l'on ne prend pas position, il s'agira encore d'un report de report. Il faut maintenant prendre une décision définitive qui engage l'Etat. La réalisation de cette autoroute est une priorité car elle constituera un itinéraire alternatif à la vallée du Rhône. Il nous faut y parvenir. Elle est très importante également pour l'espace compris entre la Suisse, l'Italie et la vallée du Rhône et pour irriguer les Alpes.

    Mme Montchamp a abordé la question du tronc commun A 4-A 86, où l'on trouve effectivement les plus grands bouchons et où nous rencontrons beaucoup de problèmes. Elle a suggéré un partenariat public-privé. C'est une opération déclarée d'utilité publique mais, il faut le savoir, très coûteuse : 700 millions d'euros. Je suis prêt à examiner, avec les élus concernés, des solutions innovantes telles que celle qu'elle a évoquée.
    M. Grouard a insisté sur le développement durable et a voulu à juste titre remettre ce sujet au centre des débats. Mme Kosciusko-Morizet a également insisté sur le nécessaire découplage entre la croissance de la mobilité et les nuisances environnementales : bruit, pollutions locales et globales. Les réponses sont multiples. Elles doivent être combinées. Le Gouvernement prépare des actions en faveur des véhicules propres et des mesures coordonnées contre le bruit. Nous devons également avoir un développement plus équilibré entre les modes de transport choisis et l'insertion des infrastructures, ce qui exige de veiller au découplage dont parlait Mme Kosciusko-Morizet.
    A M. Jean Auclair et, à travers lui, à M. Dupont et M. Soulier, qu'il a ci tés, je dois répondre que nous n'avons aucun élément d'information aujourd'hui sur une liaison à grande vitesse entre Poitiers et Limoges. Dominique Bussereau et moi, nous nous engageons donc à faire réaliser l'étude promise par M. Gayssot, mais qui n'a jamais été commencée, afin d'avoir une estimation et des indications sur les différents fuseaux possibles pour réaliser cette liaison, ceux-ci variant entre 80 et 120 kilomètres environ. S'agissant du POLT, le principe d'une amélioration de la ligne n'est absolument pas remis en cause. C'est déjà quelque chose. Je tenais à le préciser.
    Monsieur Le Guen, la desserte de la Bretagne par des lignes à grande vitesse est bien évidemment utile pour relier votre région au reste de l'Europe. Elle s'inscrit logiquement dans les projets structurants à financer.
    Mesdames et messieurs les députés, je ne prendrai pas plus de votre temps afin de laisser la parole à Dominique Bussereau. Je conclurai en vous remerciant d'avoir veillé aussi tard et d'avoir été aussi mobilisés. Ce débat aura montré à quel point les élus que vous êtes - parlementaires mais aussi, souvent, élus locaux - êtes motivés par les infrastructures à réaliser. Vos interventions ont d'ailleurs moins porté sur les aspects quantitatifs que qualitatifs de celles-ci.
    On prédisait un débat difficile, semé d'embûches. Certains disaient dans les couloirs qu'il serait ingérable. Je l'ai trouvé tout à fait passionnant et utile.
    Je ne méprise pas, loin s'en faut, celles et ceux qui sont montés à la tribune « faire leur marché », comme quelqu'un l'a dit avec humour. Ils ont abordé les questions d'aménagement du territoire de façon tout à fait naturelle. Cela a contribué à sensibiliser le Gouvernement aux problèmes de la France réelle, et c'est utile.
    Nous avons aussi parlé des contrats de plan dont ces projets locaux, régionaux ou interrégionaux constituent les déclinaisons. Vous avez tous pratiquement souligné la nécessité de poursuivre l'équipement de la France - reconnu comme source de développement économique et donc d'emplois - dans le respect de l'environnement et en concevant notre pays comme le pivot de l'Europe élargie. A cet égard aussi, ce débat a été extrêmement intéressant et même essentiel. A la quasi-unanimité, vous avez souhaité simplifier des procédures, disposer de ressources propres et affectées, développer les transports multimodaux.
    Vous demandez - je l'ai bien compris et c'est ce qui ressort pour moi de cet échange fort - que l'Etat respecte sa parole. Vous avez la parole du Gouvernement qu'il le fera. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.
    M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, j'interviendrai brièvement pour compléter les réponses de Gilles de Robien et en donner aux députés à qui il n'a pas répondu.
    Avec sa fougue habituelle, M. Gremetz a insisté sur la saturation de l'autoroute A 1. Nous lui rappelons que Gilles de Robien a mis à l'étude le projet de l'A 24, et que celui-ci a été reconnu intéressant par les auditeurs. Quant au canal Seine-Nord, nous nous sommes prononcés à plusieurs reprises à son sujet, en mettant en avant l'intérêt qu'il présentait pour l'aménagement du territoire.
    M. Ducout a évoqué un certain nombre de projets concernant la région Aquitaine. Gilles de Robien y a répondu dans sa réponse à M. Alain Juppé. Je n'y reviens donc pas.
    M. Biessy a évoqué deux points importants : le POLT et le Lyon-Turin.
    Qu'il sache que le POLT n'est nullement abandonné par le Gouvernement. Nous retenons toujours le projet de desserte du Massif central par une ligne le traversant au sud de Limoges. La question est maintenant de savoir s'il faut faire du pendulaire ou non. Cela dépendra à la fois de la technique mais aussi et surtout du coût de cette option.
    Quant au traité relatif au Lyon-Turin, qui a également été évoqué par M. Bouvard et M. Saddier, il sera respecté. Les travaux des descenderies sont en cours. Aucun retard n'a été pris pour l'instant. Il appartient maintenant de trouver les financements nécessaires pour ce projet dont l'importance dépasse largement notre pays.
    En parlant du POLT, j'ai répondu également à Mme Pérol-Dumont et à M. Roumegoux. Je souhaite que la grande entreprise française qui fait penduler les TGV y parvienne à un coût acceptable pour la SNCF. Cela nous permettrait peut-être de faire mieux avancer ce projet. Sinon, il faudra trouver d'autres solutions. En tout cas, il n'est pas question de laisser tomber la desserte du Massif central.
    M. Desallangre a évoqué de nombreuses pistes sur lesquelles le Gouvernement est d'accord : rééquilibrage, ferroutage, merroutage, développement d'offre de fret de la SNCF.
    Comme M. Bouvard et M. Saddier, et bien d'autres, M. Queyranne s'est intéressé à la liaison Lyon-sillon alpin, c'est-à-dire Lyon-Turin et au contournement de Lyon. Sur ce dernier point, le cahier des charges des études préliminaires a été signé jeudi dernier. On ne peut en effet se lancer dans l'opération Lyon-Turin sans réaliser le contournement de Lyon.
    M. Michel Bouvard. Très bien !
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Je rappelle, par ailleurs, à M. Queyranne, comme à tous les députés qui se sont exprimés, que l'audit n'est pas un instrument de décision du Gouvernement, mais une photographie des décisions - ou plutôt des non-décisions - de nos prédécesseurs. Il nous appartient maintenant, en fonction des moyens financiers que la représentation nationale voudra bien dégager, de concilier le possible et le souhaitable.
    Gilles de Robien a répondu aux préoccupations de M. Charasse quand il a parlé de la RCEA et de la desserte de Vichy.
    Jean-Yves Le Drian a évoqué la politique maritime, qu'il connaît bien, et, comme Michel Hunault, des grands projets d'aménagement de l'Ouest, en particulier Notre-Dame-des-Landes, et les TGV. Je reviendrai sur ce dernier point en répondant dans un instant à M. Hunault.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler, comme Jean-Pierre Soisson, a souligné l'intérêt du TGV Rhin-Rhône. Le projet est prêt. Il est intéressant et n'est pas contesté. Il présente la caractéristique d'être à la fois ouvert au fret et à la circulation voyageurs. Il s'agit maintenant de mettre en place les financements.
    Notre objectif, comme l'a dit Gilles de Robien, est de réaliser plusieurs TGV par législature. C'est tout l'enjeu de ce débat.
    M. Jean-Pierre Soisson. Merci !
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. M. Forgues a évoqué le débat public sur Bordeaux-Toulouse et la construction d'un nouvel aéroport toulousain. Il est clair que les Toulousains privilégient la desserte TGV de Toulouse mais il est non moins clair que Blagnac sera bientôt saturé. De plus se pose un problème de bruit du fait de la présence d'Airbus. Il faudra donc un nouvel aéroport. Par rapport aux études qui ont fait l'objet de nombreux commentaires récemment, notre position est de préconiser, tout en respectant la priorité donnée au TGV, une approche intelligente pour son implantation, ailleurs que sur un vignoble ou sur une zone fragile.
    Bernard Derosier a évoqué les contrats de plan, les dispositifs financiers et les projets du Nord. Les ambitions qu'il a évoquées sont partagées par le Gouvernement. Nous nous intéressons comme lui à un schéma qui, au-delà du Nord, s'étende jusqu'au Benelux.
    M. Giraud, qui est encore parmi nous, a évoqué l'accessibilité des Hautes-Alpes. Gilles de Robien a annoncé dans sa réponse à Mme Martinez un prochain déplacement - au mois de juin - dans ce département. Sur le mont Genèvre, des études sont en cours. Il a également évoqué Perpignan-Figueras.
    M. Michel Bouvard. Et Lyon-Turin !
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Ainsi que Lyon-Turin, M. Bouvard ne manque pas de le rappeler.
    S'agissant de la liaison Perpignan-Figueras, je vous confirme, pour avoir rencontré récemment notre collègue espagnol, que, malgré les difficultés que nous venons de connaître, le concessionnaire sera choisi avant la fin de l'année. Le retard sur ce projet ne devrait pas dépasser six mois. C'est en tout cas notre souhait.
    M. Giacobbi a soulevé la question très intéressante des taux internes de rentabilité : elle mérite d'être réexaminée de manière critique. Cela peut être une tâche de la DATAR ou du nouveau commissaire au Plan. Il a également parlé des dossiers corses.
    Sur le Rhin-Rhône qui a été évoqué par un grand nombre d'entre vous, je répondrai plus particulièrement à M. Cochet.
    M. Pierre Cardo. Il n'est plus là !
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. D'abord, il m'est revenu le souvenir que M. Cochet, quant il était ministre de l'environnement, a refusé de cosigner, avec le Premier ministre et le ministre des transports, la DUP. Mais chacun peut évoluer ! D'ailleurs, nous sommes heureux qu'il ait également évolué sur la question fluviale. Il nous a en effet indiqué qu'il soutenait le canal Seine-Nord, ce qui nous change agréablement de l'attitude de Mme Voynet, dans le gouvernement précédent, vis-à-vis des ouvrages fluviaux.
    M. Le Déaut a parlé des problèmes de la région lorraine, du sillon mosellan et de la connexion entre la France, l'Allemagne et la Lotharingie. Sur le TGV Est, les choses avancent. Il importe - Gilles de Robien l'a dit à plusieurs reprises et Gilbert Meyer, Yves Bur et Emile Blessig en sont persuadés - de réaliser la deuxième phase vers l'Allemagne et de procéder au raccordement de Strasbourg, via Kehl, Appenweier, la plaine de Bade, à l'aéroport de Francfort, ce qui se révélerait intéressant pour desservir le Parlement européen.
    M. Yves Bur. Il faudra convaincre les Allemands de l'intérêt de l'interconnexion du TGV Est avec l'ICE.
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Ce sujet sera évoqué le 10 juin par le Président de la République, le ministre des affaires étrangères et Gilles de Robien, à l'occasion du sommet franco-allemand. Il y sera question de l'interconnexion entre le réseau ICE allemand et le TGV.
    M. Gilbert Meyer. Très bien !
    M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Je remercie M. Hunault pour sa volonté d'innovation, pour l'ambition qu'il a exprimée que soit élaborée une loi d'orientation - c'est une des options que peut prendre le Gouvernement -, pour le réalisme dont il fait preuve quand il évoque les ressources nouvelles, et pour sa créativité que vous êtes nombreux à partager en ce qui concerne l'établissement public dédié, qui est une piste intéressante. Merci également pour toutes les voies qu'il a évoquées - renforcement du PPP, c'est-à-dire du partenariat entre public et privé, évolution du statut des SEM - pour participer au financement.
    Naturellement, le dossier de Notre-Dame-des-Landes, dont il préside le syndicat d'étude, est important. L'enquête confiée à M. Bergougnoux suit son cours et nous espérons pouvoir, après le débat public, prendre rapidement des décisions importantes en matière d'aménagement du territoire.
    Marie-Josée Roig a évoqué, avec sa fougue habituelle et sa passion pour sa ville, la LEO, qui sera le moyen de revivifier son centre-ville et de mieux relier sa magnifique gare TGV à l'hinterland. Nous confirmons que les moyens financiers nécessaires à l'avancement technique de cette opération ne devraient pas tarder, conformément à son souhait. Nous sommes conscients de l'importance qu'il y a à mieux relier cette gare au reste de la région, à présent qu'elle est mise en service et connaît un grand succès de fréquentation.
    Jean-Pierre Grand a évoqué non pas Air Littoral, auquel il s'est beaucoup attaché - ce dont je le remercie -, mais Perpignan-Figueras. Nous en avons déjà parlé. Les contournements de Nîmes et Montpellier sont naturellement liés à cette opération. Quant à l'aéroport de Montpellier, Gilles de Robien et moi-même avions pensé dans un premier temps, conformément à la demande du président Jacques Blanc, l'inclure plutôt, au sein d'un projet de décentralisation, dans la liste des aéroports régionaux. Mais le président Jacques Blanc a changé de position et en a fait part au Gouvernement : il préfère qu'il soit classé au nombre des aéroports nationaux. C'est donc en ce sens que le projet de loi est préparé. Il sera naturellement soumis ensuite au Parlement. Nous connaissons aussi votre attachement, monsieur Grand, au grand projet de tramway dans l'agglomération montpelliéraine et votre participation à ce débat.
    Bérengère Poletti a évoqué les Ardennes et les problèmes que pose leur désenclavement. Nous avons bien noté vos positions sur les axes routiers, madame Poletti. Ils vous sont chers. Vous avez également souligné l'intérêt de la ligne Paris-Bâle. Le jour où le Rhin-Rhône, dans sa branche Est, aura été réalisé, cette ligne aura peut-être une autre vocation. Vous avez rappelé les investissements de la région Champagne-Ardenne dans les automoteurs et ceux de la SNCF, pour que, à la gare de l'Est, les locomotives Diesel cessent de poser, aux riverains du Xe arrondissement, des problèmes de pollution.
    Toutes ces améliorations sont maintenant engagées. Elles doivent se poursuivre et nous serons naturellement à vos côtés pour y veiller.
    Je remercie Martial Saddier. Son intervention a été salué de nombreux applaudissements, qu'il a un peu sollicités (Sourires), mais il l'a fait avec talent et on ne peut que l'en féliciter. Nous apprécions l'accord qu'il apporte à de nouveaux modes de financement, reposant sur la redevance routière, son engagement militant - il est d'ailleurs assis à côté de Michel Bouvard - en faveur du projet Lyon-Turin et la réflexion qu'il a développée et qui rejoint celle de Gilles de Robien sur le rééquilibrage modal.
    Je crois n'avoir oublié personne. En tout cas, si c'était le cas, Gilles de Robien et moi-même vous prions de nous en excuser. Je m'associe aux remerciements que le ministre de l'équipement et des transports vous a adressés à l'instant aux uns et aux autres et à notre président de séance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. A mon tour, je remercie M. le ministre et M. le secrétaire d'Etat.

2

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
CONSTITUTIONNELLE

    M. le président. J'ai reçu, le 20 mai 2003, de Mme Christine Boutin, une proposition de loi constitutionnelle tendant à l'inscription du concept de développement durable dans l'exposé des motifs des propositions et projets de loi.
    Cette proposition de loi constitutionnelle, n° 867, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, dela législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

3

DÉPÔT D'UN RAPPORT

    M. le président. J'ai reçu, le 20 mai 2003, de M. Richard Dell'Agnola un rapport, n° 865, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, sur le projet de loi, modifié par le Sénat, renforçant la lutte contre la violence routière (n° 826).

4

DÉPÔT DE RAPPORTS D'INFORMATION

    M. le président. J'ai reçu, le 20 mai 2003, de M. Pierre Lequiller et plusieurs de ses collègues, un rapport d'information, n° 866, déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne sur des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution du 15 mars au 16 mai 2003 (n°s E 2237 à E 2240, E 2242, E 2243, E 2246, E 2248, E 2249, E 2253 à E 2259, E 2269 à E 2271) et sur les textes n°s E 1902, E 1923, E 1931, E 1966, E 2020, E 2050, E 2113 à E 2115, E 2182, E 2189, E 2211, E 2224-2, E. 2229 et E 2235.
    J'ai reçu, le 19 mai 2003, de M. Jean-Claude Mignon, un rapport d'information, n° 863, fait en application de l'article 29 du règlement au nom des délégués de l'assemblée nationale à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe sur l'activité de cette assemblée au cours de la deuxième partie de sa session ordinaire de 2003 (Tome I : compte rendu des travaux de la Délégation).

5

DÉPÔT D'UN AVIS

    M. le président. J'ai reçu, le 20 mai 2003, de M. François d'Aubert un avis, n° 864, présenté au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan sur l'article 11 du projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité (n° 784).

6

DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI ADOPTÉ
AVEC MODIFICATIONS PAR LE SÉNAT

    M. le président. J'ai reçu, le 16 mai 2003, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté avec modifications par le Sénat en deuxième lecture, relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages.
    Ce projet de loi, n° 862, est renvoyé à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, en application de l'article 83 du règlement.

7

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
ADOPTÉE PAR LE SÉNAT

    M. le président. J'ai reçu, le 20 mai 2003, transmise par M. le président du Sénat, une proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative à l'application des peines concernant les mineurs.
    Cette proposition de loi, n° 868, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

8

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Aujourd'hui, mercredi 21 mai, à quinze heures, première séance publique :
    Questions au gouvernement ;
    Discussion du projet de loi, n° 784, portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité :
    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 856) ;
    M. François d'Aubert, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (avis n° 864).
    A vingt et une heures trente, deuxième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée, le mercredi 21 mai, à trois heures.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
ERRATUM

Au compte rendu intégral de la 3e séance du 6 mai 2003

(Journal officiel, débats de l'Assemblée nationale, n° 40
du mercredi 7 mai 2003)

    Page 3492 ; 1e colonne :
    Au lieu de : « Je mets aux voix l'amendement n° 346.
    (L'amendement est adopté.) »
    Lire : « Je mets aux voix l'amendement n° 346.
    (L'amendement n'est pas adopté.) »

DÉCISION SUR UNE REQUÊTE
EN CONTESTATION D'OPÉRATIONS ÉLECTORALES
(Communication du Conseil constitutionnel
en application de l'article LO 185 du code électoral)
Décision n° 2003-3377 du 15 mai 2003
(AN, Wallis-et-Futuna)

    Le Conseil constitutionnel,
    Vu la requête présentée par M. Kamilo Gata, demeurant à Wallis-et-Futuna, enregistrée le 3 avril 2003 auprès des services de l'administrateur supérieur des îles Wallis-et-Futuna et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 16 et 23 mars 2003 dans la circonscription des îles Wallis-et-Futuna pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
    Vu le mémoire en défense présenté par M. Victor Brial, député, enregistré au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 5 mai 2003 ;
    Vu les observations de la ministre de l'outre-mer, enregistrées comme ci-dessus le 17 avril 2003 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
    Vu le code électoral ;
    Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et sénateurs ;
    Le rapporteur ayant été entendu ;
    1. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient M. Gata, le numéro de la publication hebdomadaire locale diffusé la veille du second tour de scrutin n'a ni « censuré » M. Penisio Tialetagi ni constitué un « appel à la censure » à son encontre ; que, par son contenu, ce numéro ne saurait être assimilé, en tout état de cause, à un tract distribué tardivement au profit de M. Brial, candidat proclamé élu ; que, d'ailleurs, il n'a pris position en faveur d'aucun des deux candidats et s'est borné à reproduire leurs programmes ;
    2. Considérant, en second lieu, en vertu des dispositions combinées des articles R. 75, R. 203 et R. 204 du code électoral, que chaque procuration est établie sur un imprimé comportant deux volets et un talon ; que les deux volets sont signés par le mandant ; que l'autorité devant laquelle est dressée la procuration, après avoir porté mention de celle-ci sur un registre spécial ouvert par ses soins, indique sur les volets et le talon ses nom et qualité et les revêt de son visa et de son cachet ; qu'elle remet ensuite le talon au mandant et adresse, par la poste, en recommandé, sans enveloppe, le premier volet au chef de la circonscription territoriale dans laquelle le mandant est inscrit et le second volet au mandataire ;
    3. Considérant, d'une part, que le seul défaut de transmission des volets en recommandé ne peut justifier l'annulation des suffrages exprimés par procuration que s'il est établi qu'il a eu pour effet de modifier le sens de ces suffrages ou qu'il a constitué une manoeuvre destinée à fausser le résultat du scrutin ; que, si M. Gata indique que 304 procurations utilisées par les mandataires n'ont pas été expédiées en recommandé, il ne soutient pas que le défaut de transmission selon ce procédé a eu une incidence sur le sens de ces suffrages ou a constitué une manoeuvre destinée à fausser le résultat de l'élection ; qu'il n'y a pas lieu dès lors de retirer ces suffrages du total des suffrages exprimés et du nombre de voix obtenues par M. Brial ;
    4. Considérant, d'autre part, que, si le requérant prétend « qu'un certain nombre de procurations ont été bloquées à la poste et distribuées après le scrutin du 23 mars 2003 », cette allégation n'est assortie d'aucune précision ; qu'ainsi, le juge de l'élection n'est pas en mesure d'apprécier si des électeurs ont été indûment privés de leur droit d'exprimer leurs suffrages et si, dans une telle hypothèse, le candidat élu ne l'aurait pas été dans le cas où tous ces suffrages auraient été accordés à l'autre candidat ;
    5. Considérant, enfin, qu'il résulte de l'instruction qu'une procuration ne porte pas la signature du mandant sans que l'autorité devant laquelle elle a été établie ait attesté une impossibilité de son auteur de signer ; que, par suite, cette procuration est entachée de nullité ; qu'il y a donc lieu de retrancher ce suffrage exprimé par procuration du total des suffrages exprimés et du nombre de voix obtenues par M. Brial ; que, compte tenu de l'écart de 318 voix séparant le candidat élu de son adversaire, cette seule rectification n'est pas de nature à modifier le résultat de l'élection contestée ;
    6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. Gata doit être rejetée,
                    Décide :
    Art. 1er. - La requête de M. Kamilo Gata est rejetée.
    Art. 2. - La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 15 mai 2003, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.

Le président,
Yves Guéna
TEXTES SOUMIS EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
Transmission

    M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale le texte suivant :

Communication du 15 mai 2003

N° E 2271 - Projet de position commune du Conseil 2002/.../PESC du... modifiant et prorogeant la position commune 2001/357/PESC concernant des mesures restrictives à l'encontre du Liberia. (PESC).

Communication du 16 mai 2003

N° E 2272 - Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant la proposition modifiée de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CEE) n° 95/93 du Conseil, du 18 janvier 1993, fixant des règles communes en ce qui concerne l'attribution des créneaux horaires dans les aéroports de la Communauté. (COM [2003] 207 final).

Communications du 19 mai 2003

N° E 2273. - Projet de budget d'EUROPOL pour 2004 (8579/03 EUROPOL 16).
N° E 2274. - Projet de budget rectificatif d'EUROPOL pour 2003 (8588/03 EUROPOL 20).
N° E 2224. - Annexe 3. - Avant-projet de budget rectificatif n° 3 au budget 2003. - état général des recettes (SEC 552 final).
N° E 2275. - Annexe 1. - Avant-projet de budget (APB) général des Communautés européennes pour l'exercice 2004. - Volume 0. - Introduction générale.