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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 5 JUIN 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du mercredi 4 juin 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE
DE Mme PAULETTE GUINCHARD-KUNSTLER

1.  Initiative économique. - Suite de la discussion, en deuxième lecture, d'un projet de loi «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Article 26 bis (suite) «...»

Amendements de suppression n°s 39 de M. Goldberg et 79 de M. Vergnier : Mme la présidente,  MM. Daniel Paul, Augustin Bonrepaux, Gilles Carrez, rapporteur de la commission spéciale ; Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation ; Nicolas Forissier.

Rappel au règlement «...»

M. Gilbert Gantier, Mme la présidente, M. Augustin Bonrepaux.

Reprise de la discussion «...»

Rejet des amendements n°s 39 et 79.
Amendement n° 80 de M. Vergnier : Mme la présidente, MM. Gérard Bapt, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Gilbert Gantier, Augustin Bonrepaux. - Rejet.
Amendement n° 81 de M. Vergnier : MM. Gérard Bapt, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° 82 de M. Vergnier. - Rejet.
Amendement n° 83 de M. Vergnier. - Rejet.
Amendement n° 84 de M. Vergnier. - Rejet.
Amendement n° 104 de M. Fourgous : MM. Jean-Michel Fourgous, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° 103 de M. Fourgous : MM. Nicolas Forissier, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Gérard Bapt, Jean-Michel Fourgous. - Rejet.
Amendement n° 85 de M. Vergnier : MM. Gérard Bapt, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° 30 de la commission spéciale, avec le sous-amendement n° 102 de M. Fourgous : MM. le rapporteur, Jean-Michel Fourgous, le secrétaire d'Etat. - Retrait du sous-amendement ; adoption de l'amendement.
Adoption de l'article 26 bis modifié.

Article 26 ter «...»

M. Gérard Bapt.
Amendements de suppression n°s 40 de M. Goldberg et 86 de M. Vergnier : MM. Daniel Paul, Augustin Bonrepaux, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Gérard Bapt. - Rejet par scrutin.
Amendements identiques n°s 31 de la commission spéciale et 87 de M. Vergnier : MM. le rapporteur, Augustin Bonrepaux, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 98 de M. Vergnier : MM. Augustin Bonrepaux, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Gérard Bapt. - Rejet.
Adoption de l'article 26 ter modifié.

Article 26 quater «...»
(Pour coordination)

Amendement n° 93 de M. Carrez : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article 26 quater modifié.

Article 27 AA «...»

Amendement n° 113 corrigé de Mme Vautrin : Mme Catherine Vautrin, rapporteure, de la commission spéciale ; le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 114 de Mme Vautrin : Mme la rapporteure, M. le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article 27 AA modifié.

Article 27 B «...»

M. Marc Le Fur.
Adoption de l'article 27 B.

Article 27 C «...»

Amendement n° 32, deuxième rectification, de la commission spéciale, avec le sous-amendement n° 117 de M. Le Fur : Mme la rapporteure, MM. le secrétaire d'Etat, Marc Le Fur. - Rejet du sous-amendement ; adoption de l'amendement.
L'article 27 C est ainsi rédigé.
L'amendement n° 116 de M. Le Fur n'a plus d'objet.

Article 27 D «...»

Amendement n° 33 de la commission spéciale : Mme la rapporteure, M. le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article 27 D modifié.

Articles 27 E et 27 F. - Adoptions «...»
Article 27 G «...»

Amendement n° 34 de la commission spéciale : Mme la rapporteure, M. le secrétaire d'Etat. - Adoption.
L'article 27 G est ainsi rédigé.

Article 27. - Adoption «...»
Après l'article 27 «...»

Amendement n° 99 de M. Bonrepaux : M. Augustin Bonrepaux, Mme la rapporteure ; M. le secrétaire d'Etat, Mme Marylise Lebranchu. - Rejet.
Amendement n° 88 de M. Bonrepaux : M. Augustin Bonrepaux, Mme la rapporteure, M. le secrétaire d'Etat. - Rejet.

SECONDE DÉLIBÉRATION «...»
Article 13 B «...»

Amendement n° 1 du Gouvernement : MM le secrétaire d'Etat, le rappoteur d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article 13 B modifié.

EXPLICATIONS DE VOTE «...»

MM.
Yannick Favennec,
 Gérard Bapt,
 Charles de Courson.

VOTE SUR L'ENSEMBLE «...»

Adoption de l'ensemble du projet de loi.
M. le secrétaire d'Etat.

Suspension et reprise de la séance «...»

2.  Lutte contre la violence routière. - Discussion, en deuxième lecture, d'un projet de loi «...».
M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Richard Dell'Agnola, rapporteur de la commission des lois.

DISCUSSION GÉNÉRALE «...»

MM.
Hervé Mariton,
 René Dosière,
 Gilbert Gantier,
 André Gerin,
 Robert Lecou,
 Jean-Yves Le Bouillonnec.
Clôture de la discussion générale.

DISCUSSION DES ARTICLES «...»
Article 2. - Adoption «...»
Article 2 bis «...»

Le Sénat a supprimé cet article.
Amendement n° 4 de la commission des lois : MM. le rapporteur, Jean-Paul Garraud, le garde des sceaux, Mme Catherine Génisson, M. Hervé Mariton, Mme Muguette Jacquaint, M. Noël Mamère.

Suspension et reprise de la séance «...»

MM. Hervé Mariton, Jean-Paul Garraud, le rapporteur. - Retrait de l'amendement n° 4.
L'article 2 bis demeure supprimé.

Articles 3, 4 et 6. - Adoptions «...»
Article 6 bis «...»

Le Sénat a supprimé cet article.
L'amendement n° 5 de la commission : M. le rapporteur. - Retrait.
L'article 6 bis demeure supprimé.

Articles 6 ter, 7, 7 bis A et 8. - Adoptions «...»
Après l'article 8 «...»

Amendement n° 8 de M. Mariton : MM. Hervé Mariton, le rapporteur, le garde des sceaux. - Retrait.

Article 9 bis et 12 AA. - Adoptions «...»
Article 12 A «...»

Le Sénat a supprimé cet article.

Article 13 bis «...»

Le Sénat a supprimé cet article.

Articles 14, 16, 18, 19 bis, 20 A, 20, 20 bis, 21 quinquies,
21 sexies, 22 bis, 23, 24, 25, 25 bis A et 27. - Adoptions «...»
EXPLICATIONS DE VOTE «...»

MM.
René Dosière,
 Hervé Mariton,
 André Gérin.

VOTE SUR L'ENSEMBLE «...»

Adoption de l'ensemble du projet de loi.
3.  Dépôt d'un rapport «...».
4.  Dépôt d'un rapport sur une proposition de résolution «...».
5.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE MME PAULETTE
GUINCHARD-KUNSTLER,
vice-présidente

    Mme la présidente. La séance est ouverte.
    La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

1

INITIATIVE ÉCONOMIQUE

Suite de la discussion, en deuxième lecture,
d'un projet de loi

    Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi pour l'initiative économique (n°s 760 et 882).

Discussion des articles (suite)

    Mme la présidente. Cet après-midi, l'Assemblée a commencé la discussion des articles et s'est arrêtée après avoir entendu les orateurs inscrits sur l'article 26 bis.

Article 26 bis (suite)

    Mme la présidente. Je rappelle les termes de l'article 26 bis.
    « Art. 26 bis. - Après l'article 885 I du code général des impôts, il est inséré un article 885 I bis ainsi rédigé :
    « Art. 885 I bis. - Les parts ou les actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ne sont pas comprises dans les bases d'imposition à l'impôt de solidarité sur la fortune, à concurrence de la moitié de leur valeur si les conditions suivantes sont réunies :
    « a) Les parts ou les actions mentionnées ci-dessus doivent faire l'objet d'un engagement collectif de conservation pris par le propriétaire, pour lui et ses ayants cause à titre gratuit avec d'autres associés ;
    « b) L'engagement collectif de conservation doit porter sur au moins 20 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la société s'ils sont admis à la négociation sur un marché réglementé ou, à défaut, sur au moins 34 % des parts ou actions de la société.
    « Ces pourcentages doivent être respectés tout au long de la durée de l'engagement collectif de conservation qui ne peut être inférieur à six ans. Les associés de l'engagement collectif de conservation peuvent effectuer entre eux des cessions ou donations des titres soumis à l'engagement.
    « La durée initiale de l'engagement collectif de conservation peut être automatiquement prorogée par disposition expresse, ou modifiée par avenant sans pouvoir être inférieure à six ans. La dénonciation de la reconduction doit être notifiée à l'administration pour lui être opposable.
    « L'engagement collectif de conservation est opposable à l'administration à compter de la date de l'enregistrement de l'acte qui le constate. Dans le cas de titres admis à la négociation sur un marché réglementé, l'engagement collectif de conservation est soumis aux dispositions de l'article L. 233-11 du code du commerce.
    « Pour le calcul des pourcentages prévus au premier alinéa, il est tenu compte des titres détenus par une société possédant directement une participation dans la société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement collectif de conservation visé au a et auquel elle a souscrit. La valeur des titres de cette société bénéficie de l'exonération partielle prévue au premier alinéa à proportion de la valeur réelle de son actif brut qui correspond à la participation ayant fait l'objet de l'engagement collectif de conservation.
    « L'exonération s'applique également lorsque la société détenue directement par le redevable possède une participation dans une société qui détient les titres de la société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement de conservation.
    « Dans cette hypothèse, l'exonération partielle est appliquée à la valeur des titres de la société détenus directement par le redevable, dans la limite de la fraction de la valeur réelle de l'actif brut de celle-ci représentative de la valeur de la participation indirecte ayant fait l'objet d'un engagement de conservation.
    « Le bénéfice de l'exonération partielle est subordonné à la condition que les participations soient conservées inchangées à chaque niveau d'interposition pendant toute la durée de l'engagement collectif ;
    « c) L'un des associés mentionnés au a exerce effectivement dans la société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement collectif de conservation son activité professionnelle principale si celle-ci est une société de personnes visée aux articles 8 et 8 ter, ou l'une des fonctions énumérées au 1° de l'article 885 O bis lorsque celle-ci est soumise à l'impôt sur les sociétés, de plein droit ou sur option ;
    « d) La déclaration visée à l'article 885 W doit être appuyée d'une attestation de la société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement collectif de conservation certifiant que les conditions prévues aux a et b ont été remplies l'année précédant celle au titre de laquelle la déclaration est souscrite ;
    « e) En cas de rupture de l'engagement prévu au a par l'un des signataires, l'exonération partielle accordée au titre de l'année en cours et de celles précédant cette rupture n'est pas remise en cause à l'égard des autres signataires, dès lors qu'ils conservent entre eux leurs titres jusqu'au terme initialement prévu.
    « En cas de non-respect des conditions prévues au a ou au b par suite d'une fusion ou d'une scission au sens de l'article 817 A de la société dont les titres font l'objet de l'engagement prévu au a, l'exonération partielle accordée au titre de l'année en cours et de celles précédant cette opération n'est pas remise en cause si les signataires conservent entre eux les titres reçus en contrepartie jusqu'au terme initialement convenu.
    « En cas de non-respect de la condition prévue au b par suite d'une augmentation de capital, l'exonération partielle accordée au titre de l'année en cours et de celles précédant cette opération n'est pas remise en cause si les signataires respectent l'engagement prévu au a jusqu'à son terme.
    « En cas de non-respect de la condition prévue au b par suite d'une annulation des titres pour cause de pertes ou de liquidation judiciaire, l'exonération partielle accordée au titre de l'année en cours et de celles précédant cet événement n'est pas remise en cause.
    « Au-delà du délai de six ans, l'exonération partielle accordée au titre de la période d'un an en cours lors du non-respect de l'une des conditions prévus au a ou au b est seule remise en cause.
    « Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application du présent article, notamment les obligations déclaratives incombant aux redevables et aux sociétés. »
    Je suis saisie de deux amendements identiques n°s 39 et 79.
    L'amendement n° 39 est présenté par M. Golberg, M. Daniel Paul, et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ; l'amendement n° 79 est présenté par M. Vergnier, M. Eric Besson et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 26 bis. »
    La parole est à M. Daniel Paul, pour soutenir l'amendement n° 39.
    M. Daniel Paul. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, mes chers collègues, l'article 26 bis vise à accorder une exonération de 50 % au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune sur les parts et actions détenues dans une entreprise à condition que les actionnaires s'engagent à conserver 20 % du capital pendant au moins six ans.
    Pour justifier cette nouvelle exclusion de l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune, on prétend que l'ISF aurait des effets pervers sur l'initiative économique. Pour les limiter, mais, paraît-il, sans y parvenir totalement tant l'ISF nuirait au dynamisme des affaires, les biens professionnels ne sont pas soumis à cet impôt. Or nous continuons de penser, nous - en attendant que l'on nous démontre réellement que l'ISF est nuisible pour notre économie - que non seulement de tels biens ne devraient pas faire l'objet d'une exonération mais, aussi, que l'assiette de l'ISF devrait être élargie à l'ensemble des actifs financiers.
    Nous aurons l'occasion d'y revenir plus en détail.
    Nous savons que la majorité a toujours considéré que le champ des biens professionnels, qui permet au propriétaire actionnaire de bénéficier d'exonérations au titre de l'ISF, est déjà trop restreint. C'est d'ailleurs pourquoi les dispositions prévues par cet article élargissent encore le champ des actifs exonérés.
    Comme le souligne l'économiste Thomas Piketty, l'un des spécialistes français de ces questions, il n'est désormais plus besoin de travailler dans l'entreprise. Il suffit de signer un pacte avec un groupe quelconque d'actionnaires, dont au moins un travaille dans l'entreprise, pour être exonéré. On risque donc d'assister à la multiplication de pactes d'actionnaires purement artificiels, dans l'unique but de bénéficier d'exonérations fiscales. On chercherait en vain la stratégie de développement économique des entreprises dans de telles conditions.
    En termes d'efficacité économique, le gain risque d'être nul. On peut même penser qu'il aura sur l'activité économique des effets négatifs. Les intérêts fiscaux prenant le pas sur les intérêts économiques, la constitution de ces pactes d'actionnaires ne sera sans doute pas réalisée dans le but d'assurer des noyaux stables d'actionnaires, capables de préserver les intérêts nationaux en inscrivant le contrôle de la gestion des entreprises dans une logique de développement à moyen ou à long terme. Là encore, c'est la logique du court terme qui risque de primer, avec un avantage fiscal immédiat à la clé, en lieu et place de l'élaboration d'une réelle stratégie de croissance des firmes.
    Ces dispositions risquent donc de créer de graves distorsions économiques, ce qui nous fait considérer la suppression de cet article comme une nécessité.
    Enfin - et cela a été rappelé à plusieurs reprises au cours de ce débat - dans la situation économique actuelle, où les plans sociaux se multiplient, aggravant encore la précarité de milliers de salariés, cette suppression serait aussi une question de justice et d'éthique.
    Mme la présidente. La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour défendre l'amendement n° 79.
    M. Augustin Bonrepaux. Madame la présidente, monsieur le ministre, je n'ai pu être présent, en fin d'après-midi, pour défendre les amendements qui tendaient à développer la défiscalisation dans les zones franches rurales. J'ai cependant constaté que, une fois de plus, le Gouvernement avait refusé ces mesures qui proposaient des solutions favorables à ces zones qui connaissent d'énormes difficultés économiques. Cela n'est pas nouveau, puisque, lors de la discussion du texte en première lecture, on m'avait renvoyé à une loi future pour s'opposer à un amendement similaire.
    J'ai donc déposé un proposition de loi, pour que le Gouvernement puisse s'en inspirer. Les mesures proposées ne coûteraient pas très cher, moins cher en tout cas que les dispositions qu'on nous propose ce soir. Ainsi le coût des réductions que vous allez consentir au titre de l'ISF permettrait de créer cinq cents zones franches rurales en France. Or en accordant un million d'euros de déductions fiscales dans les zones rurales en difficulté, on permettrait de résoudre beaucoup de problèmes. En tout cas cela aurait des résultats plus probants que la diminution de l'ISF.
    Il conviendrait tout de même de savoir quelle est la finalité réelle de votre projet.
    Selon vous, l'attractivité du territoire ne serait pas suffisante et il faudrait baisser l'impôt sur toutes les grandes fortunes. Pourtant, dans un article du Figaro, l'épouse d'un de vos ministres, Mme Clara Gaymard, explique que la France est très attractive. En effet, la scolarité d'un enfant de douze ans est gratuite alors qu'elle coûte 10 000 dollars à New-York ; les trains arrivent à l'heure ; la distribution de l'électricité est fiable et réputée. Elle explique aussi que, en 2002, les investissements se sont élevés à 49 milliards d'euros.
    M. Nicolas Forissier. Ils sont en baisse !
    M. Augustin Bonrepaux. Les investissements étrangers ont bien atteint 49,8 milliards d'euros.
    Une démonstration complémentaire est apportée par le conseil d'analyse économique qui souligne qu'en France la fiscalité sur les hauts revenus n'est pas tellement élevée. Il serait donc bien qu'un jour vous nous expliquiez pourquoi vous tenez à baisser la fiscalité sur ces hauts revenus.
    Alors que vous réduisez aussi le poids de l'impôt de solidarité sur la fortune, vous imposez des sacrifices aux zones rurales. Pour elles c'est toujours moins. Ainsi les crédits alloués pour les adduction d'eau et l'assainissement ont été réduits de 50 à 75 %. Tous les conseillers généraux de France pourront vous dire que les dotations affectées aux équipements dans les zones rurales ont été diminuées de plus de 50 %. La baisse a atteint 25 % pour les crédits du fonds social du logement. Comme toujours les sacrifices sont imposés aux plus défavorisés !
    Et ce soir, on nous explique qu'il faut réduire l'impôt de solidarité sur la fortune !
    Les plus modestes des Français vont tout de même finir par s'en rendre compte. D'ailleurs, vous craignez un peu une telle réaction puisque vous n'osez pas supprimer totalement l'impôt de solidarité sur la fortune. Vous procédez certes à des réductions qui le videront progressivement de sa substance, mais vous n'avez pas le courage de dire que vous voulez donner toujours plus aux riches. Pourtant, c'est le but de votre politique, il faudrait l'avouer.
    Vous comprendrez donc que nous soyons contre cet article 26 bis et que nous proposions de le supprimer.
    Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur de la commission spéciale pour donner l'avis de la commission.
    M. Gilles Carrez, rapporteur de la commission spéciale. La commission a rejeté l'amendement présenté par notre collègue Christian Paul et, de ce fait, l'amendement identique présenté par notre collègue AugustinBonrepaux.
    Je vais aussi profiter de cette occasion pour répondre aux interventions qui ont été faites avant la suspension de séance et à celles de nos collègues.
    Je tiens d'abord à rappeler que cet article 26 bis n'a qu'un seul but : limiter la vente de nos entreprises familiales à de grands groupes, notamment étrangers.
    M. Léonce Deprez. C'est vrai !
    M. Jean-Paul Garraud. Absolument !
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Il s'agit de mettre un terme au processus infernal dont sont victimes les entreprises familiales, souvent installées dans nos provinces, par exemple, monsieur Bonrepaux, en milieu rural, et je tiens des exemples à votre disposition.
    M. Augustin Bonrepaux. Ah ! oui ? Qu'elles viennent s'installer dans la vallée du Vicdessos ! Ce serait une bonne idée !
    Mme la présidente. Monsieur Bonrepaux, seul, M. Carrez a la parole !
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Quand, à cause des effets pervers de l'ISF, une telle entreprise est rachetée, dans un premier temps le centre de décision part ailleurs. Puis ce sont les fonctions commerciales, logistiques et financières qui partent et, un an, deux ans, ou trois ans, plus tard, ce sont les fonctions mêmes de production et de fabrication que s'en vont.
    M. Nicolas Forissier. Eh oui !
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Pourquoi l'ISF joue-t-il un tel rôle de destruction d'emplois ?
    M. Gilbert Gantier C'est indéniable !
    M. Gilles Carrez, rapporteur. J'avoue que j'ignorais le problème avant de l'aborder il y a quelques mois. Je peux donc en parler sans aucun a priori idéologique, mais au contraire de façon extrêmement pragmatique. Il est simple à comprendre et découle de la position des actionnaires minoritaires.
    En effet, dans une entreprise familiale créée par le père ou le grand-père, au fur et à mesure que le temps passe et que les successions s'opèrent, l'actionnariat se disperse. Pour que les parts dans l'entreprise soient considérées comme des biens professionnels, il faut deux conditions : d'une part détenir plus de 25 % du capital et, d'autre part, exercer une fonction de dirigeant. Or, au fil des successions, l'entreprise va compter cinquante ou soixante actionnaires - les enfants, les frères, les soeurs, les cousins, les petits-enfants... - dont la plupart ne sont donc que des actionnaire minoritaires. Ils ont des parts, ils perçoivent des dividendes, mais ceux-ci ne sont rien au regard de ce que les intéressés ont à acquitter, qu'il s'agisse de l'ISF, de la CSG, du RDS ou de l'impôt sur le revenu même en tenant compte de l'avoir fiscal. En outre ces entreprises familiales ne sont pas comme ces grands groupes un peu apatrides qui ferment les usines du jour au lendemain dans vos vallées reculées, monsieur Bonrepaux, oui !
    M. Léonce Deprez. Dans le Nord-Pas-de-Calais aussi !
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Il s'agit d'entreprises familiales dans lesquelles tout le monde se connaît et qui sont attachées à leur terroir.
    Au bout d'un certain temps, la situation de ces actionnaires devient intenable, parce qu'ils paient plus d'impôts qu'ils ne reçoivent de dividendes.
    M. Léonce Deprez. Exactement !
    M. Gilles Carrez, rapporteur. En effet, pour que ces entreprises familiales fonctionnent, restent compétitives et performantes, il faut qu'elles investissent l'essentiel de leurs bénéfices. En conséquence elles distribuent peu de dividendes : entre 1 % et 1,5 % de la valeur de l'entreprise en moyenne chaque année, alors que les impôts représentent 120 %, 130 % ou 150 % des dividendes. Ainsi les actionnaires se lassent.
    Certains d'entre eux - je ne le cache pas - partent même pour l'étranger, sans forcément aller très loin de France, en Belgique par exemple.
    M. Jean-Marc Nudant. Au Luxembourg !
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Les élus du Nord connaissent bien le problème.
    D'autres décident tout simplement de vendre, la mort dans l'âme.
    Que se passe-t-il ?
    J'ai relevé les noms de quelques entreprises bien connues qui ont subi un tel sort. Ainsi les Galettes Saint-Michel ? - qui n'a jamais mangé de galettes Saint-Michel - ont été reprises par Bahlsen, puis la production a quitté Saint-Michel - Chef-Chef qui était en zone rurale à côté de Pornic. Tel a été aussi le cas de VMC, le roi de l'hameçon triple que tout le monde connaît et qui a été racheté par le finlandais Rapala, de l'entreprise Salomon près d'Annecy, des laboratoires pharmaceutiques BioBloc. Toutes ces entreprises ont fini par être vendues ou délocalisées à cause des effets pervers de l'ISF.
    Il fallait réagir. Quand on a un problème, en effet, il ne sert à rien d'exprimer de grandes considérations idéologiques ou de raisonner sur des tabous ou des symboles. Ce qui nous intéresse avec ce texte de loi, c'est la création d'emplois.
    Hier, en répondant à une question, un membre du Gouvernement a souligné que depuis le vote de ce texte en première lecture on sentait que l'esprit d'entreprise se manifestait à nouveau et on constatait que les créations d'entreprise étaient en augmentation.
    M. Christian Paul. On voit les effets sur le chômage !
    M. Jean-Marc Nudant. Cela c'est l'héritage !
    M. Gilles Carrez, rapporteur. On relève surtout un développement des créations d'entreprises individuelles.
    Pour la disposition en cause, je ne suis pas allé chercher mon inspiration très loin. Parce que je ne suis pas très imaginatif, je l'ai prise chez mon prédécesseur Didier Migaud. En effet, ce dernier, s'était rendu compte, à partir d'une approche, elle aussi pragmatique, que les droits de succession - et je me souviens de l'exemple de UPSA qu'il avait cité à l'époque - provoquaient la vente de nos plus beau fleurons parce que les héritiers ne pouvaient pas les payer.
    M. Léonce Deprez. Exactement !
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Didier Migaud avait donc proposé un amendement au projet de loi de finances pour 2000 qui consistait à mettre en place un pacte d'actionnaires afin de permettre à ceux qui acceptaient de rester engagé pour une durée de six ans de bénéficier d'une réduction des droits de succession de 50 %. On a appelé cela le dispositif Migaud-Gattaz.
    M. Jean-Marc Nudant. Voila !
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Dans l'opposition, à l'époque, nous avions cependant voté ce dispositif, parce que nous sommes des gens pragmatiques. Notre souci principal n'est pas de faire de grands discours, nous préférons essayer concrètement de sécuriser, de pérenniser le maximum d'emplois dans notre pays.
    Le dispositif de l'article 26 bis, que je propose, procède du même esprit. D'ailleurs, on pourrait presque résumer l'affaire par la formule suivante : « Migaud en avait rêvé, nous le réalisons ! » (Sourires.)
    Il n'est que de relire les déclarations de l'époque de celui-ci. Je les tiens toutes à votre disposition. Il a à plusieurs reprises évoqué l'I.S.F. Je l'ai rencontré tout à l'heure et je l'ai invité à venir écouter et participer à notre discussion, qui s'annonçait des plus concrètes.
    Le système que nous proposons est identique à celui qu'il a proposé.
    Nous envisageons un pacte d'actionnaires, d'une durée minimale de six ans, regroupant au moins 20 % - au lieu de 25 % initialement car il est apparu qu'en retenant ce seuil, il pouvait s'ensuivre des blocages du fait de la minorité dans les sociétés cotées - des droits sociaux d'une entreprise cotée au 34 % des parts ou des actions d'une entreprise non cotée.
    J'irai même plus loin : les systèmes s'emboîtent. On m'a posé la question suivante : « Si jamais l'un des actionnaires engagés dans le cadre du pacte d'actionnaires ISF vient à décéder et si nous nous retrouvons en-dessous du seuil, allons-nous être pénalisés ? » J'ai répondu : « Non, vous n'avez qu'à signer exactement le même pacte au titre du dispositif Migaud. Faites du Migaud ! » (Sourires.) C'est exactement le même contrat, le même pacte, la même démarche.
    Nous espérons ainsi endiguer une hémorragie d'emplois...
    M. Jean-Marc Nudant. Très bien !
    M. Gilles Carrez, rapporteur. ... que l'on chiffre à environ 10 000 depuis 1995-1996. Il faut garder les chiffres en tête. Je tiens à disposition de chacun la liste des entreprises concernées.
    Pourquoi ai-je pris comme référence les années 1995-1996 ? En fait - et je vais aller jusqu'au bout du raisonnement, pour vous montrer à quel point nous sommes pragmatiques dans cette affaire - l'idéal serait de revenir sur le plafonnement du plafonnement. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) On ne peut pas le faire, car le sujet est un peu difficile. Mais il est probable que le maintien du plafonnement Bérégovoy - c'est ainsi qu'on l'appelait jusqu'en 1996 - aurait permis d'éviter la destruction d'emplois à laquelle nous avons assisté.
    Nous revenons à la charge en proposant la mise en place d'un pacte d'actionnaires, comme je l'ai indiqué, afin d'enrayer cette hémorragie.
    Combien cela coûte-t-il ? On entend tout et n'importe quoi ! Ségolène Royal nous dit : « On a supprimé l'ISF ».
    M. Nicolas Forissier. C'est une honte de dire cela !
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Les amendements de nos collègues ne serviraient à rien si tel était le cas.
    L'ISF rapporte 2,2 milliards d'euros. La mesure que j'envisage, jointe à celle proposée par le Gouvernement en première lecture, représente un coût - et encore mon estimation ne vaudra que dans deux ou trois ans, parce que tout cela va se mettre en place progressivement - de l'ordre de cent millions d'euros. Que sont cent millions d'euros par rapport à 2,2 milliards d'euros, s'ils permettent de sauver des milliers d'emplois ? Cela ne mérite vraiment pas les discours idéologiques ou l'énoncé de tabous généraux que nous venons d'entendre ! J'ai tout à fait apprécié, en revanche, les interventions de Mme Lebranchu et de M. Vergnier. Ils nous ont dit avoir rencontré des chefs d'entreprise, s'être aperçu qu'il y avait des problèmes et essayer de les résoudre. J'ai fait exactement la même démarche. J'ai rencontré des dizaines de chefs d'entreprise, et je me suis rendu compte qu'il y avait vraiment une difficulté qu'il fallait résoudre.
    J'espère donc que nous allons être les plus nombreux possible à refuser ces amendements de suppression et à voter l'article 26 bis. La disposition qu'il propose, je le répète, s'inscrit exclusivement dans une démarche pragmatique, et a pour seul but, qui pour nous est une priorité absolue : sauvegarder, maintenir et crééer le plus d'emplois possible dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Alan Joyandet. Voilà une intervention pleine de bon sens.
    M. Leonce Deprez. Et très pédagogique !
    M. André Gérin. Trop poli pour être honnête !
    Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, pour donner l'avis du Gouvernement sur les amendements n° 39 et 79.
    M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Après l'excellent exposé de Gilles Carrez, je me bornerai à rappeler que, devant le Sénat, le Gouvernement a présenté des éléments d'information nouveaux et inédits puisque, pour la première fois, grâce à l'observatoire qu'il a mis en place, il dispose d'indications sur les délocalisations liées à l'ISF. Pendant longtemps il a été difficile d'y voir clair. Nous avons aujourd'hui des données. Nous savons qu'entre 1997 et 2001 des centaines de contribuables sont partis : 370 en 1997, 383 en 1998, 350 en 1999, 359 en 2000, 330 en 2001.
    M. Daniel Paul. C'est tout ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. « C'est tout ? » est effectivement la première question suscitée par ces chiffres.
    M. Daniel Paul. Je m'attendais à ce qu'ils soient suivis d'un ou deux zéros.
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. C'est parce que vous n'imaginez pas l'assiette fiscale que représente chacun de ces contribuables. Si vous le saviez, vous pourriez évaluer, comme nous l'avons fait, entre 7 et 8 milliards d'euros la substance économique qui a quitté notre pays...
    M. Daniel Paul. Il y a vraiment de l'argent !
    M. Alain Suguenot. Il y en avait, il n'y en a plus !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. ... et ce, alors que l'ISF était en place. Il l'est toujours d'ailleurs ! Ségolène Royal a dû prendre ses rêves pour des réalités.
    Ces contribuables sont partis avec de l'argent qui bien souvent créait de la richesse et de l'emploi. C'est donc de l'emploi qui a quitté la France. Je ne vois pas en quoi des représentants de la nation peuvent se féliciter de ce phénomène.
    M. André Gerin. C'est du pétainisme industriel. Ces gens jouent contre la France. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Alain Suguenot. Nous sommes dans un pays de libertés !
    M. Nicolas Forissier. Bien sûr !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Je ne vois pas dans quelle mesure il y a lieu de se réjouir de voir ces contribuables partir.
    M. André Gerin. Ils agissent contre la France !
    M. Nicolas Forissier. Nous ne sommes pas en Union soviétique.
    Mme la présidente. Mes chers collègues, M. le secrétaire d'Etat a seul la parole.
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Je vous laisse la liberté de juger de leurs motivations, mais nous sommes dans une société de libertés, et l'Europe qui a été bâtie est une Europe libre.
    Je peux vous dire où ces contribuables sont allés, puisque nous avons également les destinations de leurs migrations fiscales. Ils sont partis en Belgique, en Suisse...
    M. Jean-Michel Fourgous. Les Suisses vous remercient, chers collègues de la gauche !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation... aux Etats-Unis, au Royaume-Uni.
    Donc, du fait de cette vision très idéologique de l'impôt, beaucoup plus punitive que contributive, la France a perdu des emplois.
    M. Léonce Deprez. Eh oui !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Je ne vois pas pourquoi nous devrions nous réjouir de ce que des Français créent des emplois à Londres ou à Bruxelles plutôt que dans notre pays et nos bassins d'emplois. Expliquez-le moi. J'attends une explication à ce sujet. Pour l'instant, personne ne m'a justifié ce type d'analyse.
    La mesure que nous proposons est très équilibrée,...
    M. André Gerin. Elle est surtout libérale !
    M. Jean Michel Fourgous. Le libéralisme serait d'abandonner l'ISF !
    M. André Gerin. Ce serait agir contre la France !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation... et tout à fait modeste par rapport à ce que d'autres auraient pu imaginer. Elle contribue à la croissance, nous pouvons le démontrer, et s'inscrit donc parfaitement dans ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous avez raison, monsieur le secrétaire d'Etat. Des contribuables sont partis au Royaume-Uni, pays où les trains n'arrivent pas à l'heure et même parfois déraillent...
    M. Jean-Michel Fourgous. Ce n'est pas vrai !
    M. Augustin Bonrepaux... où la distribution d'électricité n'est pas fiable et où les infrastructures ne sont ni sérieuses ni efficaces. Oui, des contribuables se sont installés à New York, où l'éducation coûte 10 000 dollars alors qu'elle est gratuite à Paris.
    M. Jean-Michel Fourgous. En Allemagne, il n'y a pas d'ISF. C'est un impôt archaïque !
    M. Augustin Bonrepaux. Je crois que vous n'avez pas bien lu, monsieur le secrétaire d'Etat, l'article dont j'ai fait état. Et il n'est pas de mon inspiration, mais de celle de vos amis.
    Vos arguments ne sont pas très sérieux, d'autant plus que la période que vous citez, pendant laquelle la France aurait perdu des emplois est précisément - celle de 1997 à 2000 -, où le nombre de chômeurs a été réduit de plus d'un million.
    M. Alain Suguenot. Grâce à la croissance. Vous n'y êtes pour rien !
    M. Augustin Bonrepaux. Il ne faut quand même pas raconter n'importe quoi a l'Assemblée nationale !
    M. Jean-Michel Fourgous. Grâce à quoi le chômage a-t-il diminué ? Reconnaissez-le !
    M. Augustin Bonrepaux. Vous pourriez également vous inspirer du rapport du conseil d'analyse économique, qui est loin de tenir le même language.
    M. Jean-Michel Fourgous. C'est vous qui dites n'importe quoi ! Vous récupérez la croissance et parlez de ce que vous ne connaissez pas. Le secteur marchand, vous ne savez pas ce que c'est !
    M. Augustin Bonrepaux. Je croyais que cet organisme, rattaché au Premier ministre, était sérieux et que l'on pouvait s'appuyer sur ses analyses. Or il dit, contrairement à vous, que la fiscalité des hauts revenus n'est pas plus élevée en France qu'ailleurs.
    M. Jean-Michel Fourgous. Le rapport ne dit pas ça !
    M. Augustin Bonrepaux. Mais, pour baisser l'impôt sur les plus hauts revenus, vous trouvez toujours de bonnes raisons !
    Vous mettez en avant que des contribuables s'en vont. Mais il me semble, comme je l'ai expliqué tout à l'heure en m'appuyant toujours sur le même article, qui devrait être sérieux, que les investissements étaient importants en 2002. Et ils avaient encore été supérieurs en 2001. Il ne faut pas raconter n'importe quoi pour justifier votre politique !
    M. Jean-Michel Fourgous. Rachetez nos entreprises, nos capitaux !
    M. Augustin Bonrepaux. M. Carrez nous a expliqué qu'il ne faisait qu'étendre le dispositif Migaud en faveur de la transmission d'entreprise, ce qui revient en fait à l'alourdir. Si la fiscalité n'est pas plus élevée en France qu'ailleurs, comme il est écrit dans le rapport du conseil d'analyse économique, pourquoi faut-il encore l'alléger ? Il faut bien voir que tout cela se fait au détriment des comptes de notre pays.
    Si le déficit est aussi élevé aujourd'hui...
    M. Jean-Michel Fourgous. C'est à cause de vous !
    M. Augustin Bonrepaux. Vous y êtes pour quelque chose !
    M. Éric Raoult. Merci Jospin !
    M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas une invention de ma part. Il suffit de lire le rapport de la Cour des comptes. Pourquoi le déficit s'est-il aggravé depuis un an, et cela fait un an que vous êtes au Gouvernement ? Parce que vous avez réduit les recettes.
    M. Alain Suguenot. Et vous, avec les 35 heures !
    M. Augustin Bonrepaux. Quand on baisse les recettes, on ne peut pas réduire un déficit, surtout quand on aggrave les dépenses en augmentant notamment les dépenses militaires. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Alain Joyandet. Et qui est responsable de la situation de France Télécom ?
    M. Augustin Bonrepaux. M. le rapporteur général nous explique que la mesure ne coûte que 100 millions. Mais comment l'a-t-il évaluée ? Nous le vérifierons en 2004, quand nous ferons les comptes. Nous nous rendrons compte alors, qu'on aura vidé complètement l'ISF. C'est votre objectif ! Alors pourquoi ne pas le dire ? Pourquoi ne pas avouer que vous êtes contre l'ISF et contre les 35 heures et que vous voulez les supprimer ?
    M. André Gerin. Voilà !
    M. Augustin Bonrepaux. Vous manquez de courage ! Vous avez une politique libérale, affirmez-la et appliquez-la, puisque vous critiquez ce que nous avons fait.
    M. André Gerin. Tout à fait !
    M. Augustin Bonrepaux. Mais vous réduisez les recettes de l'Etat et en faites supporter les conséquences aux plus défavorisés. Une fois de plus, ce sont eux qui paieront, parce qu'il ne faut pas venir raconter ici que cela va créer des emplois...
    M. Jean-Marc Nudant. Il n'a rien compris !
    M. Jean-Michel Fourgous. Le capital dans les PME ne crée pas des emplois, c'est nouveau ça !
    M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
    M. Daniel Paul. M. le secrétaire d'Etat a estimé les sommes parties vers la Belgique, Jersey, les Etats-Unis - que sais-je encore ? -...
    M. Jean-Michel Fourgous. La Suisse, la Grande-Bretagne, le Luxembourg !
    M. Eric Raoult. Le Lichtenstein !
    M. Daniel Paul. ... à 7 ou 8 milliards d'euros, En même temps, il a dit que cette fuite de capitaux était due au départ de quelques centaines de contribuables. Je vous propose donc de faire une petite division et de calculer la somme moyenne par contribuable. Nous sommes loin des petites entreprises et encore plus des TPE ! C'est ma première remarque.
    Deuxièmement, je souhaiterais revenir sur la remarque d'un de vos collègues, dont le nom m'échappe, mais qui, en première lecture, tard le soir, dans un accès de sincérité - un petit peu comme Augustin Bonrepaux vient de l'avoir, mais pour d'autres raisons - nous a dit : « De toute façon, on va se faire... » - je passe sur l'expression - "alors autant supprimer l'ISF entièrement ». C'est bien ça votre objectif. Si vous avez reculé, c'est tout simplement parce que le moment était mal choisi. Il n'y avait pas le problème des retraites que l'on connaît actuellement...
    M. Alain Suguenot. Le problème des retraites n'est pas nouveau.
    M. Daniel Paul. ... mais un certain nombre de sites industriels comme Metaleurop étaient cassés.
    M. Jean-Marc Nudant. Ah, ça, ça vous fait plaisir !
    M. Alain Suguenot. Vous vous engraissez sur la misère !
    M. Daniel Paul. Troisième point : comme je l'ai dit cet après-midi, ma circonscription comporte une zone franche, où j'habite d'ailleurs. Il se trouve que 43 % de la population en âge de travailler est en difficulté et a besoin de recourir aux entreprises d'insertion, qui recrutent également. Alors que vous prévoyez d'alléger l'ISF, je reprends vos chiffres, je ne vais même pas les discuter - d'environ 100 millions d'euros, vous venez de décider de supprimer 75 millions d'euros de crédits destinés à payer le solde des opérations engagées en 2002.
    M. Eric Raoult. C'est hors sujet !
    M. Daniel Paul. Cela entraîne des conséquences. Premièrement, ces entreprises d'insertion ne recevront pas l'argent qui leur est dû, alors qu'elles ont lancé des programmes qui leur avaient été commandés par l'Etat, et sur lesquels celui-ci avait engagé sa parole. Deuxièmement, dans le courrier qui a été adressé aux directeurs départementaux du travail, il est indiqué que les crédits normaux affectés aux départements au titre de l'année 2003 devront être utilisés pour payer ces opérations.
    M. Jean-Michel Fourgous. Ça ne vous rappelle pas les 35 heures ?
    M. Daniel Paul. Je dis tout simplement que, d'un côté, vous allégez de 100 millions d'euros les impôts de personnages sur lesquels je ne porterai pas de jugement, parce que mes mots risqueraient de dépasser la bienséance d'usage en ces lieux,...
    M. Alain Suguenot. Ce sont les chefs d'entreprise que vous visez ?
    M. Daniel Paul. ... et, de l'autre côté, vous plongez dans la difficulté environ un millier d'entreprises d'insertion à travers le pays, ce qui met en péril 30 000 emplois.
    M. Augustin Bonrepaux. Eh oui !
    M. Daniel Paul. Et les chiffres, que je cite, sont les vôtres, ceux de vos services.
    Force est de constater qu'il y a bien là une opération, une orientation idéologique : vous avez comme objectif de supprimer l'ISF par paliers, par petites touches.
    M. Jean-Marc Nudant. Mensonges !
    M. Daniel Paul. Vous allez sans doute, pour y parvenir, si on vous en laisse le temps, utiliser toutes les possibilités - lois, amendements, cavaliers - qui s'offriront à vous dans les semaines et les mois qui viennent.
    M. Jean-Marc Nudant. Procès d'intention !
    M. Daniel Paul. Mais croyez-moi, à chaque fois, comme nous le faisons déjà dans un certain nombre d'autres domaines, nous dénonçerons la manoeuvre et nous nous y opposerons.
    Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Forissier.
    M. Nicolas Forissier. Je m'inscris en faux contre ce qui vient d'être dit et vais m'employer à rétablir quelques vérités.
    Monsieur Paul, je ne suis pas persuadé que la suppression de l'ISF soit sur le plan économique un très bon objectif...
    M. Daniel Paul. C'est vous qui l'avez dit !
    M. Nicolas Forissier. ... parce que cet impôt a aussi une valeur en économie, au sens strict du terme, puisqu'il oblige à la régénération du capital. Ce n'est donc pas forcément un mauvais impôt, simplement il doit être adapté et utile à notre économie.
    M. Gilles Carrez et M. le secrétaire d'Etat ont su, l'un comme l'autre, avec beaucoup de clarté, et de pédagogie, expliquer une nouvelle fois - il le fallait, à l'évidence, pour certains - une mesure pragmatique,...
    M. Augustin Bonrepaux. Ô combien ! (Sourires.)
    M. Nicolas Forissier. ... de réalisme...
    M. Augustin Bonrepaux. Equitable surtout. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Nicolas Forissier. ... et qui ne vise aucunement à supprimer l'ISF comme on peut l'entendre sur certaines ondes.
    Mais nous sommes dans une ère de désinformation. Et je tiens à rendre hommage à M. le rapporteur, en particulier, qui a su donner des exemples tout à fait probants.
    M. Augustin Bonrepaux. Ils vous ont fait pleurer presque !
    M. Nicolas Forissier. Ils sont réels, monsieur Bonrepaux. Nous en connaissons tous, et vous aussi certainement. Regardez dans votre région, vous verrez qu'il y existe des situations de ce type.
    M. Augustin Bonrepaux. Je n'en ai jamais rencontrées. C'est bizarre !
    M. Nicolas Forissier. Mais mon intervention a essentiellement pour but de rétablir les faits concernant ce que M. Bonrepaux a appelé un rapport de Clara Gaymart, la présidente de l'AFII, l'Agence française pour les investissements internationaux. Quand on commente des commentaires, monsieur Bonrepaux, encore faut-il donner tous les éléments. Si Mme Gaymard, dont la mission, je vous le rappelle, est de défendre l'attractivité de la France, a mis en cause une étude publiée aux Etats-Unis c'est parce que celle-ci est excessive et aligne les taux marginaux les plus élevés. Comme en France, nous avons les taux marginaux les plus élevés, nous nous retrouvons, forcément, les champions du monde en matière de misère fiscale. C'est d'ailleurs le titre de l'étude. Mme Gaymard a défendu l'image de la France en indiquant qu'il fallait prendre ce type d'étude de façon très prudente et avec des pincettes, et en rappelant que nous avions des atouts dont nous pouvions être fiers.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous ne disiez pas cela l'année dernière !
    M. Nicolas Forissier. Mais nous le disons tous, monsieur Bonrepaux ! Et je le dis régulièrement. Nous avons aussi, et c'est ce qu'elle dit dans son article, beaucoup de défauts à corriger, en particulier sur le plan fiscal.
    M. Augustin Bonrepaux. Elle a surtout corrigé vos excès de langage.
    M. Nicolas Forissier. Comparez les études sur l'attractivité et la compétitivité de la France. Elles ont toutes une méthodologie différente, mais arrivent toute à une conclusion simple : nous devrions faire beaucoup mieux.
    La mesure sur l'ISF qui est prise ce soir, d'un coût de 100 millions d'euros en gros sur les 2,2 milliards d'euros que rapporte cet impôt - ce qui est quand même extrêmement réduit - nous permettra de faire mieux et notamment de conserver les entreprises familiales qui, sinon, s'en iront. Je voulais rappeler ces vérités une nouvelle fois avec fermeté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Rappels au règlement

    M. Gilbert Gantier. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
    Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Gantier, pour un rappel au règlement.
    M. Gilbert Gantier. Madame la présidente, j'ai demandé la parole tout à l'heure, et vous m'avez fait signe que je ne pouvais pas l'avoir. J'ai pourtant le droit de répondre soit à la commission, soit au Gouvernement. Vous avez donné la parole à plusieurs orateurs de l'opposition et seulement à un orateur de la majorité.
    M. Jean-Louis Dumont. C'est la censure !
    Mme la présidente. Monsieur Gantier, le règlement permet, pour chaque amendement, de donner la parole à trois orateurs : un pour répondre à la commission, un pour répondre au Gouvernement et un contre l'amendement. C'est ce qui s'est passé : M. Bonrepaux m'a demandé la parole en premier, suivi par M. Paul et M. Forissier.
    M. Gilbert Gantier. Madame la présidente, je sais que je suis assez nouveau dans cette maison ; après tout, je n'y siège que depuis trente ans. (Rires.) Même si je suis un novice, pardonnez-moi, c'est la première fois que je vois appliquer le règlement avec une telle étroitesse.
    M. Jean-Louis Dumont. Et aux dépens de M. Gantier, qui plus est !
    Mme la présidente. Monsieur Gantier, plusieurs autres amendements ont été déposés sur le même thème, qui vous donneront l'occasion de prendre la parole.
    La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour un rappel au règlement. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Augustin Bonrepaux. Je veux juste faire remarquer, madame la présidente, que vous m'avez donné la parole pour défendre mon amendement puis pour répondre au Gouvernement et à la commission, et que nous n'en avons pas abusé.

Reprise de la discussion

    Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 39 et 79.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    Mme la présidente. M. Vergnier, M. Eric Besson et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 80, ainsi rédigé :
    « Dans le troisième alinéa (b) du texte proposé pour l'article 885 I bis du code général des impôts, substituer au taux : "20 %, le taux : "50 %. »
    Monsieur Bapt, ces amendements et les suivants, n°s 81, 82, 83 et 84, étant assez semblables, peut-être conviendrait-il d'en faire suivre une présentation commune.
    M. Gérard Bapt. Ce sont des amendements profondément différents, madame la présidente.
    Mme la présidente. Non, monsieur Bapt.
    M. Augustin Bonrepaux. Ils méritent d'être défendus, madame la présidente !
    M. Gérard Bapt. Nous aurions pu épuiser la discussion sur l'amendement de suppression et passer ensuite rapidement sur la série d'amendements suivants, madame la présidente. Mais vous avez choisi une autre méthode et préféré appliquer strictement le règlement. Nous reprendrons donc la parole sur chacun des ces amendements que nous avons eu bien raison de déposer.
    M. Jean-Paul Garraud. M. Gantier n'a pas pu parler, lui !
    Mme la présidente. Soit. La parole est à M. Gérard Bapt, pour défendre l'amendement n° 80.
    M. Gérard Bapt. M. le rapporteur général a fait lourdement allusion au dispositif Migaud. Or nous étions dans un cas de figure totalement différent : il s'agissait des problèmes de transmission des entreprises familiales. Et si, monsieur Carrez, on peut aller jusqu'à penser que le problème est réel dans certaines des entreprises familiales que vous avez cités, quelle réponse préconisez-vous ?
    Celle en tout cas que vous croyez apporter par le biais de cet article 26 bis est disproportionnée par rapport à l'objectif. Si véritablement il fallait répondre au problème de la délocalisation d'entreprises familiales, il fallait limiter le dispositif de l'article 26 bis auxdites entreprises familiales. Or de quoi s'agit-il ? D'un pacte d'actionnaires, de gens qui n'ont entre eux aucun lien familial et qui, après ce qu'a voté le Sénat, pourront se céder leurs parts. Encore ce pacte était-il à l'origine limité à six ans : le Sénat l'a désormais rendu totalement intemporel ! Autant de raisons qui font que cet article 26 bis, je vous le dis en toute franchise comme je l'ai fait dans mon exception d'irrecevabilité, est à double titre anticonstitutionnel.
    Premièrement, il introduit un avantage fiscal disproportionné dans la mesure où aucun dispositif ne vient proportionner l'avantage à son objet, en le subordonnant, par exemple, à l'existence de biens familiaux entre les associés, ou encore en plafonnant en valeur absolue le montant de l'avantage fiscal. Tout au contraire, vous créez par rapport aux autres assujettis à l'ISF des différences de traitement sans relation directe avec l'objectif d'intérêt général dont vous vous prévalez, c'est-à-dire la protection d'un certain nombre d'entreprises familiales.
    Qui plus est, et c'est la seconde critique que l'on peut faire à ce dispositif, il introduit une rupture caractérisée de l'égalité, entre des redevables de l'ISF pourtant placés dans une situation identique au regard de l'objectif que vous vous êtes assigné, par exemple lorsqu'il traite différemment les détenteurs d'une entreprise selon que celle-ci est constituée sous forme de société ou sous forme d'entreprise individuelle. Par le fait, votre article porte atteinte au principe d'égalité, puisqu'il introduit, à l'encontre des entreprises individuelles, une discrimination que rien ne justifie.
    Mais allons plus loin. Notre ami Didier Migaud avait effectivement proposé des pistes de réforme de l'ISF, afin d'en corriger, dans le cadre d'une réforme d'ensemble, certains effets pervers qui sans doute existent réellement ici ou là. La différence, c'est qu'il cherchait à le faire à rendement constant, sans distribuer à certains des avantages disproportionnés, et surtout sans se fixer l'objectif in fine de démanteler et de supprimer à terme l'impôt sur la fortune.
    M. Jean-Marc Nudant. Procès d'intention !
    M. Gérard Bapt. D'où notre série d'amendements qui, à défaut de supprimer cet avantage disproportionné, s'efforcent de le limiter un tant soit peu en proposant de relever le poursentage des parts détenues à 50 %, puis 40 %, puis 35 %. Reste que le problème de fond demeure et sera probablement tranché, nous semble-t-il, par le juge constitutionnel.
    M. Éric Raoult. Menaces, menaces !
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur. La commission n'a pas examiné cet amendement ; mais à titre personnel, j'émets un avis défavorable.
    Je voudrais toutefois rassurer notre collègue Bapt et clarifier les choses.
    Le Sénat a modifié le pacte sur un point principal en prenant en compte une série d'événements, extérieurs à la volonté des associés engagés dans le pacte, qui peuvent aboutir à ce que les conditions requises de pourcentage minimum du capital ne soient plus remplies - fusion, scission, augmentation de capital qui conduirait à une dilution ou liquidation. Et c'est tout à fait normal.
    Quant à la possiblité, pour ceux qui ont contracté cet engagement, de se céder des parts entre eux, elle existe déjà dans le dispositif Migaud relatif aux droits de succession et a d'ailleurs été confirmée par une instruction fiscale. Il n'y a donc absolument rien de nouveau à cet égard.
    M. Gérard Bapt. Mais dans ce cas, il y a des liens familiaux !
    M. Gilles Carrez, rapporteur. En revanche, monsieur Bapt, le Sénat en aucun cas n'a permis à un intervenant extérieur d'entrer dans le pacte avant l'expiration des six ans.
    Nous n'avons avec le Sénat qu'un seul point de divergence - nous le verrons tout à l'heure en examinant l'amendement n° 30 où j'ai proposé, et la commission m'a suivi, de revenir à notre rédaction : si, pour une raison dépendante cette fois de la volonté de l'un des partenaires, par exemple si un des associés décide de partir, le pacte est rompu, plus exactement, la condition de pourcentage n'est plus respectée et que l'on soit passé de 35 %, juste au-dessus du seuil de 34 %, à, disons, 25 %, il nous paraît normal que les parts de l'ensemble des membres du pacte soient reprises au titre de l'ISF, et cela de façon rétroactive. Mais si cela est dû à une cause extérieure à la volonté des membres du pacte, il ne peut évidemment être question de les pénaliser.
    Le système, en fait, est simple et logique. Il est bâti sur la confiance : à partir du moment où des actionnaires s'engagent à conserver une fraction substantielle du capital de l'entreprise pendant une durée d'au moins six ans, ils bénéficient de l'exonération de 50 % d'ISF.
    Je rends donc un avis défavorable, madame la présidente, sur cet amendement comme sur tous ceux qui, dans le même esprit, visent à réduire le seuil.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Le Gouvernement est opposé à cet amendement.
    Cela dit, force est de reconnaître que notre débat est un peu ésotérique et en tout cas très politique. J'aurais presque envie, messieurs les députés de l'opposition, de vous proposer de venir avec moi rencontrer les entreprises, par exemple dans un des secteurs de l'innovation. Allons ensemble au Genopole d'Evry. Vous y verrez des entreprises de petite taille où des équipes de chercheurs cherchent, parfois pendant des années sans rien trouver en vivant uniquement sur le capital. Et pendant tout ce temps, elles n'ont aucun revenu. Elles ont donc besoin de capital et nous avons besoin de ce type d'entreprises.
    Parmi elles, combien parviennent à atteindre une valorisation financière importante ? Une sur dix. Autrement dit, dans pratiquement neuf cas sur dix, les investisseurs auront perdu leur argent. Or ces entreprises sont indispensables parce qu'elles sont l'avenir de notre économie. Si nous voulons maîtriser de nouvelles molécules dans le secteur de la santé, si nous ne voulons pas dépendre demain de l'industrie pharmaceutique américaine, nous avons besoin d'investisseurs disposés à prendre des risques.
    Or qui peut prendre des risques à un tel niveau ? Qui peut se permettre de perdre plusieurs millions d'euros dans une entreprise ? Des gens qui ont de l'argent. Nous avons donc besoin d'investisseurs riches. Plus, nous avons besoin d'investisseurs très riches. Cela vous choque peut-être, mais c'est l'intérêt de notre pays que d'avoir des entreprises consommatrices de capitaux avec un niveau de risque très élevé et des gens prêts à permettre ce développement.
    Ce disant, je ne fais plus de politique, monsieur le député : je vous décris simplement des réalités. Si vous l'acceptez, je vous propose de vous emmener dans ces entreprises. Lorsque vous verrez ces chercheurs, ces hommes et ces femmes qui, pendant des années, cherchent sans toujours trouver, mais qui sont l'espoir de notre industrie de pointe, vous comprendrez à quel point il faut derrière eux un mécanisme financier et fiscal attractif. Tout le monde considère que ce qu'ils font est formidable. Personne ne va au Génopole d'Evry sans être profondément ému et frappé par cette concentration d'intelligences. Mais n'oublions jamais que, derrière cela, il y a tout un système financier. Et ce qui me navre, monsieur le député, c'est de voir ces entreprises rachetées. Par qui ? Par des investisseurs américains qui eux, bénéficient d'un système fiscal à ce point avantageux qu'ils peuvent prendre des risques sans pour autant être pénalisés dans leur patrimoine personnel.
    Il faut rapprocher notre débat de ce type de réalités. Et cela vaut pour bien d'autres secteurs. Même les PME d'activité courante sont soumises à la même logique de risque. A vous entendre, on finirait par croire que les entreprises n'ont finalement pas besoin de capitaux et que si ceux-ci viennent s'investir dans les entreprises à niveau de risque élevé, c'est par pure philanthropie !
    Ce n'est pas vrai et vous le savez bien. Nous vivons dans une économie ouverte, dans une économie de concurrence. Nous avons besoin de confronter nos systèmes fiscaux à ceux des autres pays. La France a un réel patrimoine d'intelligence, de savoir-faire et de matière grise. Veillons à ne pas avoir simplement la matière grise, mais également les capitaux qui permettront de la valoriser et la transformer en richesses, en emplois.
    Ce Gouvernement, parce qu'il s'est fixé pour objectif le progrès social, sait qu'il n'y aura jamais de progrès social en France s'il n'y a pas de ressources économiques pour le financer. Peut-être cette stratégie que nous mettons en oeuvre vous choque-t-elle, mais je vous assure qu'elle correspond à l'intérêt de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Gantier.
    M. Gilbert Gantier. Madame la présidente, je m'exprimerai contre cet amendement, contre ceux qui suivent tout comme je me serais opposé, si vous m'aviez donné la parole, au précédent. (Sourires.)
    Mme la présidente. Nous avions compris.
    M. Gilbert Gantier. Je ne cesse depuis quelques années de m'en étonner : chaque fois qu'il est question de l'ISF, on a l'impression qu'il s'agit d'un dogme sur lequel repose la République. Et c'est quelqu'un qui ne paie pas l'ISF qui vous parle ! Tout cela, M. le secrétaire d'Etat et M. le rapporteur général l'ont dit, est extrêmement dommageable pour le pays, pour trois raisons.
    M. André Gerin. Quelle démagogie !
    M. Gilbert Gantier. Dommageable d'abord pour l'emploi. Le secrétaire d'Etat comme le rapporteur général ont clairement expliqué que, lorsqu'une entreprise est vendue à des étrangers, c'est une façon de délocaliser et cela fait évidemment perdre des emplois.
    Je viens de participer, pour l'Assemblée nationale, à une brève mission en Suisse. Voilà un pays où, loin de faire la chasse aux riches, on essaie de faire tout ce que l'on peut pour les attirer.
    M. Daniel Paul. Bien sûr !
    M. Gilbert Gantier. M. Paul approuve !
    M. Daniel Paul. Je comprends que vous soyez d'accord avec cette politique !
    M. Gilbert Gantier. N'engageons pas de discussion, Mme la présidente nous rappellerait à l'ordre...
    Mme la présidente. Tout à fait !
    M. Christophe Caresche. Il faut le laisser parler, c'est très instructif !
    M. Gilbert Gantier. Et pourquoi attire-t-on les riches en Suisse ? Parce que les riches investissent, le secrétaire d'Etat vient de le dire, parce que les riches consomment, mais aussi, monsieur Paul, parce que les riches paient l'impôt ! Quand on envoie des riches en Suisse, en Belgique, en Angleterre ou même aux Etats-Unis, ils paient l'impôt dans leur nouvelle patrie et non pas dans la leur.
    M. Daniel Paul. Et les smicards ?
    M. Gilbert Gantier. Cela peut vous amuser, mais moi, qui suis contribuable, cela ne m'amuse pas du tout, parce que j'aimerais mieux que les riches contribuent plus qu'ils ne le font. Suis-je le seul dans ce cas ? Sans même reprendre celui de M. Didier Migaud, notre rapporteur général l'a évoqué tout à l'heure, dont on a eu bien tort de ne pas suivre les indications autant qu'il aurait fallu, prenons le rapport Charzat. On n'en entend plus parler. Mais M. Charzat n'est-il pas un de vos amis socialistes, ou serais-je en train de me tromper ?
    M. Jean-Michel Fourgous. Voulez-vous l'exclure du PS, messieurs !
    M. Gilbert Gantier. Ressortons ce rapport et voyons ce qui est écrit dedans !
    Mais il n'y a pas que M. Charzat. Lorsqu'a été rétabli, sous le nom d'ISF, l'ancien impôt sur les grosses fortunes, j'étais membre de la commission des finances. Je suis allé voir le rapporteur général, qui était des vôtres, messieurs les socialistes : M. Alain Richard.
    Je lui avais expliqué - vous pouvez vous reporter au Journal officiel, la commission des finances a du reste tout cela dans ses archives - qu'il serait dommageable pour tout le monde d'enjoindre à des contribuables de payer plus d'impôts qu'ils n'ont de revenus. C'est ainsi, mes chers collègues, qu'a été inventé le plafonnement. Alain Richard et moi-même avions proposé à M. Bérégovoy de le fixer à 60 %. M. Bérégovoy en a admis le principe mais en le portant à 70 %. Je ne reviendrai pas sur les raisons qui ont abouti à la suppression du plafonnement. Je le regrette et je n'ai pas voulu voter pour, car je maintiens que c'était contre-productif pour l'économie française. Mais je pense que le Gouvernement ne devrait pas se limiter aux mesures très limitées qui nous sont proposées dans l'actuel débat, et aller beaucoup plus loin en reprenant notamment l'amendement socialiste qui avait institué le plafonnement. Ce serait déjà un premier pas.
    M. Augustin Bonrepaux. Et voilà !
    M. Gilbert Gantier. Mais oui, monsieur Bonrepaux, reprenons le plafonnement...
    M. Daniel Paul. J'avais raison !
    M. Gilbert Gantier. ... au lieu de discuter sur des points de détail. Reprenons le plafonnement tel que M. Alain Richard l'avait proposé. Ce serait déjà une bonne mesure.
    Mme la présidente. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. M. Gantier vient de nous faire découvrir la suite du feuilleton ; après ces premières mesures, nous savons maintenant ce que sera le prochain épisode ! N'est-ce pas d'ailleurs ce qu'a annoncé tout à l'heure M. Carrez en parlant de reprendre les propositions du rapport Migaud ? Pas pour aujourd'hui, mais pour bientôt... Autrement dit, petit à petit, vous allez vider l'ISF de sa susbstance, puisque telle est votre volonté. Mais ce que je vous reproche, c'est de ne pas avoir le courage de le dire !
    M. André Gerin. Oui, annoncez la couleur !
    M. Augustin Bonrepaux. Quant à vous, monsieur le secrétaire d'Etat, il ne faudrait pas quand même nous faire la leçon. Vous rencontrez des entrepreneurs, nous aussi. La seule différence, c'est que moi, je n'en ai pas entendu un seul se plaindre de l'ISF ! Pourtant j'en ai reçu beaucoup à la commission des finances. Il est vrai que, dans l'Ariège, il n'y a pas guère de redevables de l'ISF... Ceci explique peut-être cela ! A croire M. Carrez, sitôt que l'on aura réduit l'ISF, ils vont investir. Mais qui va investir, et avec quoi ?
    N'allez pas non plus laisser entendre que nous ne nous préoccupons pas des entreprises.
    En 1997, quand il y avait un déficit que je vous laisse le soin de juger, le précédent gouvernement a augmenté les charges sur les entreprises, et elles n'en sont pas mortes. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Michel Fourgous. Vous avez créé dix-neuf impôts !
    M. Augustin Bonrepaux. Immédiatement après, on a baissé l'impôt sur les sociétés, réduit la surtaxe Juppé créée en 1995.
    M. Jean-Michel Fourgous. Baratin !
    M. Augustin Bonrepaux. Aujourd'hui, le conseil d'analyse économique vous recommande de suivre ce que nous avions proposé, c'est-à-dire au moins de ramener l'IS au niveau de la moyenne européenne.
    M. Nicolas Forissier. Que ne l'avez-vous fait !
    M. Augustin Bonrepaux. C'est ce qui était prévu. Mais vous, à ce moment-là, ce n'est pas des entreprises que vous vous préoccupiez, c'est de l'impôt sur le revenu. Il fallait réduire l'impôt pour les plus hauts revenus, et c'est ce que vous avez fait en premier. Vous avez par contre arrêté la baisse de l'impôt sur les sociétés.
    M. Nicolas Forissier. Avec les finances que vous nous avez laissées, on ne peut pas tout faire en même temps !
    M. Augustin Bonrepaux. Votre préoccupation des entreprises, aujourd'hui, c'est un prétexte pour réduire l'ISF !
    M. Augustin Bonrepaux. « Mme Gaymard défend la France », disiez-vous tout à l'heure. Mais qui a porté préjudice à la France, si ce n'est vous...
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Vous !
    M. Jean-Michel Fourgous. Faites-nous un chèque !
    M. Augustin Bonrepaux. ... quand vous avez monté en épingle les rapports qui montraient le déclin de la France. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous en avez tellement parlé que vous avez porté préjudice à notre pays. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Michel Fourgous. Remboursez vos dettes !
    M. Augustin Bonrepaux. Aujourd'hui, il faut que Mme Gaymard monte au créneau pour expliquer que, tous ces excès de langage, ce n'était pas la réalité, que tous ces rapports n'étaient pas exacts et que, finalement, la France est plus attractive que vous ne le disiez.
    Effectivement, la réduction de l'ISF, ce n'est pas pour l'emploi que vous la faites !
    M. Jean-Michel Fourgous. C'est pour les riches !
    M. Augustin Bonrepaux. C'est pour être fidèle à votre objectif : la réduction des impôts payé par les plus riches. Vous en prenez la responsabilité, mais, malheureusement, ce sont les plus pauvres de notre pays, les plus modestes qui en supporteront les conséquences !
    M. Richard Dell'Agnola. Ils ont déjà supporté les conséquences du socialisme !
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 80.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Vergnier, M. Eric Besson et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 81, ainsi rédigé :
    « Dans le troisième alinéa (b) du texte proposé pour l'article 885 I bis du code général des impôts, substituer au taux : "20 % le taux : "45 %. »
    La parole est à M. Gérard Bapt.
    M. Gérard Bapt. Monsieur le secrétaire d'Etat, si vous invitez des parlementaires dans telle ou telle entreprise, nous sommes prêts à venir voir avec vous des choses intéressantes, mais nous avons des entreprises dans nos communes. Moi, dans ma commune, j'ai trois PME qui sont entrées dans des groupes étrangers, un belge, un américain et un espagnol, et qui ont continué à se développer sur place, ce qui a été une bonne chose.
    Vous considérez, semble-t-il, le problème des capitaux propres des entreprises sous le simple angle, lorsqu'il s'agit de l'innovation, de l'investissement de personnes physiques, mais on s'est rendu compte lors de la dernière assemblée générale de l'ADERMIP, en Midi-Pyrénées, qui gère les fonds de capitaux, placements à risque, de capital-risque ou de capital-innovation, que ce qui manque actuellement, ce ne sont pas les crédits, ce sont les projets.
    Votre raisonnement, fondé sur le fait que nous manquerions de personnes physiques prêtes à investir de très grosses sommes dans des entreprises, en prenant des risques pour développer l'entreprise, peut être totalement démenti par le fait qu'il existe aujourd'hui dans les régions des fonds territorialisés, dans lesquels investissent aussi des collectivités régionales, et qui sont à la recherche de tels projets.
    Qu'il s'agisse d'innovation, de développement de l'emploi, de tel ou tel brevet, dans le médicament, ou tout autre domaine, il n'y a pas que le problème de l'investissement en capitaux propres. Tout ce qui concerne au fond le service public, tout ce qui concerne la façon dont, de la recherche fondamentale, on va passer à la recherche appliquée, et je pense notamment à la loi Allègre, tout ce qui concerne les couveuses et les pépinières d'entreprises, y compris dans des entreprises très innovantes, cela dépend aussi de l'environnement de l'entreprise, il ne faut pas simplement des gens très riches qui soient à titre personnel capables de prendre un risque et d'investir dans telle ou telle entreprise.
    Il y a, dites-vous, 150 personnes par an qui, titulaires heureux, « ayants droit à l'ISF » comme je les appelle, sont partis. Certains, sans doute, sont partis pour échapper à l'impôt, en bons citoyens, mais d'autres sont partis pour de tout autres raisons, personnelles, familiales, climatiques, que sais-je encore ?
    M. Nicolas Forissier. Zidane, par exemple !
    Mme la présidente. Laissez M. Bapt défendre son amendement !
    M. Gérard Bapt. Les sportifs de haut niveau que nous avons « cocoonés »,...
    M. Jean-Michel Fourgous. Les artistes, les chanteurs, les chercheurs !
    M. Gérard Bapt. ... que le contribuable français, dans tel fol espoir, avec telle bourse de préparation olympique, a amenés à un certain niveau et qui, le jour où ils réussissent, vont rendre ailleurs à des contribuables autres le bénéfice de ces investissements, je ne pense pas que ce soit un bon exemple à citer à notre jeunesse !
    Cela dit, il y a à l'inverse, notamment dans le Sud-Ouest ou dans le Sud-Est, des étrangers qui viennent s'établir en France et y investissent, ainsi dans de grandes propriétés sur la Côte d'Azur !
    Mme la présidente. Monsieur Bapt, vous avez épuisé votre temps de parole !
    M. Gérard Bapt. Il y a de nombreux étrangers qui viennent s'établir en France et qui vont payer l'impôt de solidarité sur la fortune.
    Quant aux investissement étrangers, nous sommes au second rang dans le monde en ce qui concerne les investissements étrangers sur notre sols. Si, ma foi, le capital y était si mal traité, nous en aurions moins !
    Voilà pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, nous ne pouvons pas adhérer à votre raisonnement. Si nous sommes prêts à envisager un certain nombre de problèmes, comme l'avait fait notre excellent collègue Didier Migaud sur un cas particulier, il est exclu que nous adhérions à votre logique.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Défavorable.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Défavorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 81.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Vergnier, M. Eric Besson et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 82, ainsi rédigé :
    « Dans le troisième alinéa (b) du texte proposé pour l'article 885 I bis du code général des impôts, substituer au taux : "20 % le taux : "40 %. »
    Cet amendement a déjà été défendu.
    La commission et le Gouvernement ont donné leur avis.
    Je mets aux voix l'amendement n° 82.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Vergnier, M. Eric Besson et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 83, ainsi rédigé :
    « Dans le troisième alinéa (b) du texte proposé pour l'article 885 I bis du code général des impôts, substituer au taux : "20 % le taux : "35 %. »
    Cet amendement a déjà été défendu.
    La commission et le Gouvernement ont donné leur avis.
    Je mets aux voix l'amendement n° 83.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Vergnier, M. Eric Besson et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 84, ainsi rédigé :
    « Dans le troisième alinéa (b) du texte proposé pour l'article 885 I bis du code général des impôts, substituer au taux : "20 % le taux : "30 %. »
    Cet amendement a déjà été défendu.
    La commission et le Gouvernement ont donné leur avis.
    Je mets aux voix l'amendement n° 84.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. MM. Fourgous, Forissier, Christ et Trassy-Paillogues ont présenté un amendement, n° 104, ainsi rédigé :
    « I. - Dans le dernier alinéa du b du texte proposé pour l'article 885 I bis du code général des impôts, après le mot : "participations, insérer les mots : "faisant l'objet de l'engagement prévu au a. »
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « La perte des recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575, 575 A et 575 B du code général des impôts. »
    La parole est à M. Jean-Michel Fourgous.
    M. Jean-Michel Fourgous. Vous prenez vos responsabilités, nous disent nos collègues socialistes. Nous avons accès nous aussi à l'opinion publique et à la presse. Qu'ils nous fassent confiance pour faire savoir qu'ils empêchent les petites entreprises en difficulté de renforcer leurs fonds propres.
    On incite simplement à transformer de l'argent qui dort, à le mettre à la disposition de nos entreprises pour créer de l'emploi et créer des richesses.
    Je vous rappelle que, dans une entreprise, le vilain chef d'entreprise, le buveur de sang des ouvriers, comme vous le dites (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), ne touche globalement que 5 % du chiffre d'affaires, le reste, 95 %, allant en recettes fiscales, en recettes sociales, aux salariés, aux fournisseurs. Même les socialistes allemands ou anglais se sont sortis d'un tel archaïsme culturel ! Vous prenez vos responsabilités. Faites-nous confiance pour le faire savoir !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Faites-le savoir ! Quel est le problème ?
    M. Christophe Caresche. Les débats sont publics !
    M. Jean-Michel Fourgous. Ne vous inquiétez pas, on va faire savoir aux entreprises de votre circonscription les propos que vous tenez ce soir !
    Mme la présidente. Présentez votre amendement !
    M. Jean-Michel Fourgous. Vous empêchez de renforcer les fonds propres de nos petites entreprises en difficulté, après le taux record de dépôts de bilan de 2002 que l'on vous doit, grâce aux 35 heures notamment !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Bien sûr ! On verra ce qu'il en sera en 2003 !
    M. Christophe Caresche. Ne parlez que si vous avez quelque chose à dire !
    M. Jean-Michel Fourgous. J'en viens à l'amendement n° 104 les obligations ne doivent porter que sur la partie des parts engagées dans le pacte et ne doivent pas paralyser les autres parts d'une autre entreprise. C'est un amendement de bon sens : seules les participations faisant l'objet du pacte doivent être concernées par l'obligation de demeurer inchangées sur la durée.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur. La commission n'a pas examiné cet amendement, mais j'émettrai un avis défavorable à titre personnel.
    M. Christophe Caresche. Voilà un homme sérieux !
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Le Sénat a introduit une bonne disposition, à savoir un niveau d'intermédiation supplémentaire. Dans la version que nous avions adoptée en première lecture, nous permettions la détention de l'entreprise, qui nous préoccupe, directement bien sûr par l'actionnaire, mais également grâce à un niveau d'intermédiation. Au Sénat, ont été avancés un certain nombre d'arguments tout à fait fondés, prouvant que, dans certains cas, il fallait pouvoir avoir deux niveaux d'intermédiation. Mais il convient que les pourcentages de détention ne varient pas selon les différents niveaux, qu'ils restent constants, qu'on les ait au niveau de la société intermédiaire et puis au niveau de ce qu'on appelle la « société cible ».
    Avec l'amendement que propose notre collègue, on aurait une variation selon les différents niveaux qui, à la limite, pourrait permettre d'introduire de nouveaux partenaires, et c'est tout à fait contraire à ce que je disais tout à l'heure. On a un objectif clair, qui est la stabilité de l'actionnariat, avec un pourcentage affiché dès le départ, que ce soit directement ou par le biais de sociétés intermédiaires, qui ne doit pas varier pendant les six ans.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, et j'ajouterai aux arguments qui ont été avancés par Gilles Carrez un risque assez réel d'inconstitutionnalité au regard du principe d'égalité. La jurisprudence du Conseil constitutionnel veille en effet à ce que les aménagements fiscaux qui sont apportés soient proportionnés les uns par rapport aux autres. Or le dispositif proposé créerait, avec des avantages comparables à ce que nous avons déjà mis en place par ailleurs, un dispositif beaucoup plus intéressant, beaucoup plus avantageux, avec une exposition au risque beaucoup plus faible. Je crois donc que nous prendrions, en l'adoptant, un risque juridique qu'il ne nous paraît pas du tout nécessaire de prendre.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 104.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. MM. Fourgous, Forissier, Christ et Trassy-Paillogues ont présenté un amendement, n° 103, ainsi rédigé :
    « I. - Compléter le c du texte proposé pour l'article 885 I bis du code général des impôts par l'alinéa suivant :
    « En cas de cessation de l'une des fonctions visées à l'alinéa précédent, l'exonération est maintenue pour ceux qui conservent leurs titres jusqu'au terme initialement prévu, à la condition qu'un nouveau dirigeant souscrive l'engagement prévu au a au plus tard au 31 décembre de l'année suivant celle au cours de laquelle la cessation de fonction est intervenue. »
    « II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :
    « La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575, 575 A et 575 B du code général des impôts. »
    La parole est à M. Nicolas Forissier.
    M. Nicolas Forissier. Nous discutons, je le rappelle, et cela ramènera le débat passionné de tout à l'heure sur l'ISF à la réalité du texte, d'une mesure qui concerne le pacte d'actionnaires et très partiellement l'ISF. Il faut considérer l'intérêt d'un pacte qui permet d'assurer la stabilité du capital des entreprises. Près de 500 000 dirigeants de petites entreprises vont partir à la retraite dans les cinq ou six ans qui viennent. La mesure que nous proposons permet de renforcer les fonds propres. Revenons donc à un peu plus de mesure.
    L'amendement n° 103 tend à introduire un petit peu de souplesse dans la mise en oeuvre pratique du pacte d'actionnaires.
    L'une des conditions, au-delà des pourcentages des parts, 20 ou 34 % selon la qualité de l'entreprise, et de la conservation des titres pendant six ans, est la présence du ou d'un dirigeant. Si ce dirigeant s'en va, en cas de décès ou de démission, par exemple, voire de révocation parce qu'il ne serait pas compétent, cela peut remettre en cause l'exonération de l'ensemble des actionnaires signataires du pacte et cela peut nuire considérablement sur le plan fiscal à ces actionnaires, mais aussi à l'entreprise.
    L'amendement propose un délai limité, jusqu'au 31 décembre suivant, pour permettre aux actionnaires restants de faire entrer un nouveau dirigeant pour maintenir le pacte et donc ne pas casser un outil utile.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur. La commission n'a pas examiné cet amendement. A titre personnel, j'y suis défavorable dans la mesure où il ne faut pas mettre en place un pacte à géométrie variable.
    L'idée, c'est que des actionnaires se lient entre eux pour une durée de six ans pendant laquelle il ne peut pas y avoir de modification parce que c'est contraire à la notion même d'engagement et de stabilité dans la durée.
    En cas de décès, la question est résolue par la signature simultanée d'un pacte pour l'ISF et d'un pacte pour la succession. S'agissant de la révocation ou de la démission du dirigeant, il suffit d'avoir un dirigeant parmi les différents associés et un autre dirigeant peut donc prendre la place. Un dirigeant, ce n'est pas obligatoirement le PDG. Il y a plusieurs autres fonctions dans l'entreprise.
    La rédaction telle qu'elle est proposée par le projet est suffisamment aérée pour permettre les évolutions nécessaires. Par contre, elle interdit, c'est vrai, la géométrie variable.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, et l'argument de tout à l'heure est valable. Le Conseil constitutionnel a considéré en 1996 dans sa jurisprudence que la présence permanente d'un dirigeant dans un dispositif en faveur de la transmission d'entreprise était nécessaire. En créant des mécanismes à géométrie variable, nous affaiblirions la solidité juridique du dispositif que nous proposons. Il est plus raisonnable de rejeter cet amendement, s'il n'est pas retiré.
    Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bapt.
    M. Gérard Bapt. M. le rapporteur et M. le secrétaire d'Etat reviennent à la raison, parce que là ç'aurait vraiment été la cerise sur le gâteau. C'est purement par opportunité que l'on aurait ainsi fait entrer un autre dirigeant en cours d'engagement dans un pacte.
    Cela étant, monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le rapporteur, ce que vous venez de dire concernant le caractère disproportionné des amendements de M. Fourgous vaut aussi pour votre propre dispositif.
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Eh non !
    M. Charles de Courson. Pas du tout !
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Fourgous.
    M. Jean-Michel Fourgous. Tout cela en dit long sur l'incompréhension de nos collègues à l'égard du monde économique.
    Un chef d'entreprise, s'il n'est pas actionnaire majoritaire, s'il est minoritaire, peut bien sûr être changé pour des raisons x et y. Le nombre de variables pour lesquelles on peut modifier l'organigramme d'une entreprise sont extrêmement nombreuses : nouveau partenariat européen, etc. C'est la vie normale d'une entreprise ! Vous n'allez pas obliger des gens à rester six ans ensemble si le dirigeant est démissionné. C'est bien ne pas connaître la vie de l'entreprise que de penser ainsi ! Franchement, c'est une question de bon sens !
    M. Gérard Bapt. Ah, l'idéologie du bon sens !
    M. Jean-Michel Fourgous. Je ne sais pas si l'Union européenne regarde les débats et entend ce genre de choses, mais c'est tout de même très préoccupant.
    Par ailleurs, il n'y a pas que le décès. Le dirigeant peut être blessé, avoir un problème comme on en a dans la vie de tous les jours, un problème affectif, un problème à l'étranger, un problème de succession... Comment peut-on bloquer quelqu'un ? Va-t-on demain obliger les couples à ne pas divorcer avant six ans ? Pourquoi ne pas prévoir une telle clause ?
    Bon sang, allez-vous faire confiance une fois pour toute au monde économique, qui a fait de votre pays la cinquième puissance mondiale marchande ? Qu'avez-vous contre ces gens ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Allez-vous arrêter de les pénaliser, de les montrer du doigt ? Ces gens évoluent. Les cinq autres ne sont pas responsables de la démission d'un dirigeant ! Ils vont se retrouver avec des pénalités, on va casser leur exonération, parce qu'il y en a un qui est parti pour des raisons dont ils n'ont pas à être solidaires ? Il y a là un minimum de choses à comprendre !
    M. Augustin Bonrepaux. Quelle honte !
    M. Jean-Michel Fourgous. Monsieur le rapporteur, avec toute l'estime que je vous porte et tout l'intérêt que je porte à cette majorité à laquelle nous appartenons, je vous assure qu'il est temps d'agir ! Ne pensez pas que le monde économique se désintéresse autant que cela de toutes les règles politiques que vous faites. Cela, c'est une mesure politique, ce n'est pas une mesure économique. Faites confiance aux gens qui ont fait de vous la cinquième puissance mondiale marchande !
    M. Gérard Bapt. Il y a des fissures dans la majorité !
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 103.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Vergnier, M. Eric Besson et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 85, ainsi rédigé :
    « Supprimer le e du texte proposé pour l'article 885 I bis du code général des impôts. »
    La parole est à M. Gérard Bapt.
    M. Gérard Bapt. L'amendement a pour but de supprimer le e de l'article 26 bis, ajouté par le Sénat, qui sécurise temporairement l'exonération partielle dans le cas où le pacte est rompu, et qui permet d'accentuer encore le caractère de véhicule de défiscalisation donné au pacte d'actionnaires.
    Mon raisonnement est donc à l'opposé de celui de M. Fourgous. En effet, ce pacte était censé viser le cas d'actionnaires proches qu'il faudrait inciter à conserver collectivement un bien professionnel. Or, il a été revu afin de devenir un simple contrat entre possesseurs de parts de l'entreprise qui souhaitent échapper à l'impôt. L'amendement n° 85 vise donc à supprimer le e de l'article 26 bis qui offre une pure occasion d'échapper à l'impôt.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Il est défavorable, mais je répondrai plus en détail en présentant l'amendement suivant.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Défavorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 85.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Carrez, rapporteur, a présenté un amendement, n° 30, ainsi rédigé :
    « Substituer aux quatre premiers alinéas du e du texte proposé pour l'article 885 I bis du code général des impôts les deux alinéas suivants :
    « e. En cas de non-respect de la condition prévue au a par l'un des signataires, l'exonération partielle accordée au titre de l'année en cours et de celles précédant cette rupture n'est pas remise en cause à l'égard des autres signataires, dès lors qu'ils conservent entre eux leurs titres jusqu'au terme initialement prévu et que la condition prévue au b demeure respectée.
    « En cas de non-respect des conditions prévues au a ou b par suite d'une fusion ou d'une scission au sens de l'article 817 A ou d'une augmentation de capital, l'exonération partielle accordée au titre de l'année en cours et de celles précédant ces opérations n'est pas remise en cause si les signataires respectent l'engagement prévu au a jusqu'à son terme. Les titres reçus en contrepartie d'une fusion ou d'une scission doivent être conservés jusqu'au même terme. Cette exonération n'est pas non plus remise en cause lorsque la condition prévue au b n'est pas respectée par suite d'une annulation des titres pour cause de pertes ou de liquidation judiciaire. »
    Sur cet amendement, MM. Fourgous, Forissier, Christ et Trassy-Paillogues ont présenté un sous-amendement, n° 102, ainsi rédigé :
    « I. - Compléter l'amendement n° 30 par l'alinéa suivant :
    « Toutefois, l'exonération n'est pas remise en cause si, dans le délai d'un an, les signataires de l'engagement reconstituent le seuil minimum mentionné au b. Dans ce cas, l'exonération est également maintenue pour ceux qui ont respecté leur engagement jusqu'à l'expiration de la durée initiale du pacte ou, en cas de mise en place d'un nouveau pacte, pour l'année en cours. »
    « II. - Compléter cet amendement par le paragraphe suivant :
    « La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575, 575 A et 575 B du code général des impôts. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 30.
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Cet amendement vise à reprendre la rédaction adoptée par le Sénat qui permet de faire vivre le pacte pendant six ans en prenant en compte différents événements extérieurs à la volonté des partenaires, fusion, scission, augmentation de capital et liquidation judiciaire.
    Mais le Sénat a également proposé dans sa rédaction que, si l'un des associés devait rompre le pacte au cours des six années, il perdrait le bénéfice de l'exonération de moitié de l'ISF, tandis que les autres associés conserveraient cette exonération pour les années passées et la perdraient évidemment pour les années restantes.
    Nous avons longuement discuté de cet aspect de la question en première lecture, en rappelant que la contrepartie de l'exonération doit être un engagement de stabilité. Il peut surgir dans la vie du pacte des événements indépendants de la volonté des actionnaires, mais, si l'un d'eux rompt le pacte, c'est de sa propre initiative. Dès lors, l'avantage fiscal doit être remis en cause.
    La commission a donc adopté une rédaction qui répond totalement aux préoccupations de notre collègue Bapt.
    M. Augustin Bonrepaux. Il fallait donc voter notre amendement !
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Fourgous, pour soutenir le sous-amendement n° 102.
    M. Jean-Michel Fourgous. L'amendement n° 30 prévoit de pénaliser tous les actionnaires si un seul d'entre eux rompt le pacte ou ne respecte pas les seuils.
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Bien sûr !
    M. Jean-Michel Fourgous. Ils devront même rembourser les réductions d'ISF et payer des intérêts de retard.
    Le sous-amendement n° 102 propose de laisser aux actionnaires un délai de un an pour reconstituer le pacte avant de perdre le bénéfice de l'exonération. Un an, ce n'est rien.
    M. Charles de Courson. C'est le délai de remariage.
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure de la commission spéciale. C'est celui de viduité.
    M. Jean-Michel Fourgous. Au bout d'un an, si le seuil est reconstitué, tous ceux qui ont respecté leurs engagements conserveront l'exonération.
    Le Gouvernement fait confiance aux particuliers en remplaçant les pièces à fournir par des attestations sur l'honneur. Les entrepreneurs seraient-ils des sous-citoyens qui ne méritent pas la même confiance ? Les actionnaires seraient pénalisés alors même qu'ils ne seraient en rien responsables de ce départ. Cela entraînerait des discussions et des conflits à n'en plus finir, notamment dans les sociétés familiales, et l'on courrait le risque de voir tous les actionnaires contraints de céder leurs actions pour payer les intérêts de rupture. C'est donc tout simplement un sous-amendement de bon sens.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 102 ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Ce sous-amendement n'a pas été examiné en commission, mais j'émets un avis défavorable. Certes, je comprends l'argument, mais on fait ici intervenir un nouvel entrant, ce qui n'est pas du tout l'esprit de l'engagement. L'engagement est pris pour six ans : si on ne le respecte pas, il faut conclure un nouveau pacte.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 30 et sur le sous-amendement n° 102 ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée à propos de l'amendement et s'oppose au sous-amendement, considérant que le système actuel qui prévoit que, après la rupture de l'engagement collectif, les associés peuvent tout à fait souscrire un nouvel engagement, assure suffisamment la respiration du dispositif et qu'il n'est donc pas nécessaire de lui donner davantage de souplesse. C'est la raison pour laquelle nous proposons le retrait de ce sous-amendement.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Fourgous.
    M. Jean-Michel Fourgous. J'appartiens à la majorité UMP...
    M. Gérard Bapt. On ne dirait pas !
    M. Jean-Michel Fourgous. ...et je vais retirer mon sous-amendement. Je déplore une nouvelle fois...
    M. Charles de Courson. C'est normal, c'est un monde de fonctionnaires !
    M. Jean-Michel Fourgous. ...qu'on ne tienne pas plus grand compte des risques que prennent les entreprises et des besoins qu'a le monde de l'économie. Cela dit, lorsque j'entends nos collègues socialistes, je préfère retirer mon sous-amendement : il y a franchement mieux à faire que de perdre son temps dans des discussions pareilles.
    M. Gérard Bapt. Qu'est-ce que ça veut dire ?
    M. André Gerin. Il va nous faire pleurer !
    M. Charles de Courson. Mais laissez-le !
    Mme la présidente. Le sous-amendement n° 102 est retiré.
    Je mets aux voix l'amendement n° 30.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 26 bis, modifié par l'amendement n° 30.
    (L'article 26 bis, ainsi modifié, est adopté).

Article 26 ter

    Mme la présidente. « Art. 26 ter. - I. - Après l'article 885 I du code général des impôts, il est inséré un article 885 I ter ainsi rédigé :
    « Art. 885 I ter. - I. - Sont exonérés les titres reçus par le redevable en contrepartie de sa souscription au capital, en numéraire ou en nature par apports de biens nécessaires à l'exercice de l'activité, d'une société répondant à la définition des petites et moyennes entreprises figurant à l'annexe I au règlement (C.E.) n° 70/2001 de la Commission, du 12 janvier 2001, concernant l'application des articles 87 et 88 du traité (C.E.) aux aides de l'Etat en faveur des petites et moyennes entreprises si les conditions suivantes sont réunies au 1er janvier de l'année d'imposition :
    « a. La société exerce exclusivement une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, à l'exclusion des activités de gestion de patrimoine mobilier définie à l'article 885 O quater, et notamment celles des organismes de placement en valeurs mobilières, et des activités de gestion ou de location d'immeubles ;
    « b. La société a son siège de direction effective dans un Etat membre de la Communauté européenne.
    « II. - Un décret fixe les obligations déclaratives incombant aux redevables et aux sociétés. »
    « II. - Non modifié. »
    La parole est à M. Gérard Bapt, inscrit sur l'article.
    M. Gérard Bapt. Cet article, qui concerne l'exonération d'impôt sur la fortune pour les capitaux investis dans les PME, a une longue histoire. Il a été modifié à plusieurs reprises, en première lecture, en commission, par un amendement parlementaire de la majorité, puis a été repris par le Gouvernement, modifié par le Sénat, et est finalement devenu cet article 26 ter qui est totalement disproportionné par rapport à son objectif que, de toute façon, il ne peut atteindre.
    Il est donc question d'exonérer l'investissement dans des PME à la seule condition qu'elles soient implantées dans l'Union européenne. En aucune façon cet article n'entend éviter des délocalisations. Quand on connaît les disparités fiscales qui existent au sein de l'Union européenne, on peut même penser qu'il va les favoriser.
    Il permet aussi de cumuler les exonérations d'ISF et les réductions d'impôt sur le revenu. Une fois de plus, monsieur le secrétaire d'Etat, nous avons là la preuve que votre logique en matière de développement économique, qui n'est absolument pas la nôtre, est uniquement fondée sur la baisse de la fiscalité. Or, le rapport récemment remis par le conseil d'analyse économique rattaché à Matignon montre bien que la notion de compétitivité ne peut être réduite à la notion de fiscalité et de charges. L'innovation est fondamentale, de même que l'environnement, les services publics et la situation de notre pays. On dit que, pour des raisons de fiscalité, les capitaux vont s'investir plutôt en Islande qu'en France. Comment ne pas voir que cet argument est particulièrement fallacieux ? En bloquant l'ensemble de votre optique de développement économique, vous passez à côté de l'essentiel. L'innovation dépend de la recherche. Or, en même temps que vous allégez l'impôt sur la fortune, vous diminuez drastiquement les crédits alloués à la recherche. Comment l'innovation pourra-t-elle subsister si notre recherche fondamentale est ainsi mise à mal ?
    Voilà pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, cet article est disproportionné par rapport à son objectif, et totalement hors de propos par rapport à l'exposé des motifs, qui prétend favoriser le développement économique et lutter contre les délocalisations.
    Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques n°s 40 et 86.
    L'amendement n° 40 est présenté par M. Goldberg, M. Daniel Paul et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains.
    L'amendement n° 86 est présenté par M. Vergnier, M. Eric Besson et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le texte proposé pour l'article 885 I ter du code général des impôts. »
    Sur les amendements n°s 40 et 86, je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Daniel Paul, pour soutenir l'amendement n° 40.
    M. Daniel Paul. La situation économique est particulièrement dégradée, et le chômage ne cesse, hélas, depuis plusieurs mois, de se développer au gré des plans de licenciements de grandes entreprises, avec toutes les conséquences que l'on connaît sur les PME et les PMI qui sont souvent sous-traitantes. Au dernier trimestre 2001, la production a même reculé, et la conjoncture économique donne aujourd'hui des signes inquiétants. On a de bonnes raisons de craindre une déflation.
    Sur le plan social, les inégalités ne cessent de se développer, au premier rang desquelles les inégalités de revenus. Notre système d'impôt avait jusqu'à maintenant permis d'éviter une trop forte concentration du patrimoine entre les mains des personnes les plus fortunées. Les dispositions fiscales que vous prenez font peser de réels risques d'un retour à de fortes inégalités patrimoniales.
    En ce qui concerne l'efficacité économique et sociale, le dynamisme entreprenarial soulève de réelles questions. Vous nous expliquez que ces mesures ont pour but de favoriser l'investissement, en mobilisant l'épargne vers les entreprises, notamment vers les plus petites d'entre elles. Pensez-vous réellement, monsieur le secrétaire d'Etat, que vos exonérations fiscales permettront de réorienter l'épargne vers la création de richesse ? Jusqu'à maintenant, les cadeaux fiscaux que le Gouvernement n'a eu de cesse de multiplier, particulièrement ces derniers temps, n'ont guère permis de stimuler l'investissement productif. Ces nouveaux cadeaux offerts aux plus riches, nous en sommes convaincus, n'auront pas d'impact sur l'emploi.
    Vous avez raison de souligner la faiblesse de l'incitation à investir comme celle des fonds propres de certaines entreprises. Encore faudrait-il en analyser concrètement les causes. Depuis des années, nos richesses sont détournées de leur utilisation productive pour assouvir les appétits boursiers. La logique qui prédomine est celle de la recherche de la rentabilité immédiate au détriment de l'élaboration de plans de développement.
    La pression qu'exercent aujourd'hui les marchés financiers unifiés à l'échelle internationale n'est pas à même de favoriser une reprise de l'investissement créatrice d'emplois. L'esprit d'entreprise fondé sur un pari à long terme, ne peut résister à l'esprit affairiste et spéculateur qui l'étouffe lorsque les marchés financiers deviennent si tyranniques. Les entrepreneurs - et nous les respectons autant que vous - investissent en richesses productives, en machines, en technologies nouvelles, tandis que les spéculateurs investissent en titres liquides, mobilisables à tout moment, afin de réaliser des plus-values juteuses.
    Nous ne réorienterons pas positivement l'épargne si nous ne mettons pas un frein à la toute-puissance des marchés financiers. Aujourd'hui, notre épargne va davantage servir à apurer les dettes d'entreprises qui ont versé en partie dans la spéculation qu'à relancer l'investissement productif.
    Sans doute cela explique-t-il en grande partie le marasme économique que nous connaissons. La clé de la reprise économique consisterait à oeuvrer en faveur d'une répartition plus égalitaire des revenus, propre à relancer la consommation. Les exonérations fiscales que vous concédez au titre de l'ISF, comme vous les concédez dans d'autres domaines au titre des impôts, vont à l'encontre de ces exigences. C'est pourquoi nous avons déposé cet amendement de suppression.
    Mme la présidente. La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour soutenir l'amendement n° 86.
    M. Augustin Bonrepaux. Cet amendement est parfaitement justifié, peut-être davantage encore que celui que j'ai précédemment défendu. Il nous est proposé une réduction de l'ISF, sous prétexte que la France n'est pas attractive. J'ai déjà cité le Conseil d'analyse économique, qui explique que la France est très bien placée derrière la Chine et l'Allemagne avec une masse d'investissement étrangers de 52,4 milliards d'euros. Difficile de la rendre plus attractive.
    M. Nicolas Forissier. Ce n'est pas de l'investissement productif ! Ce sont les fonds de pension américains !
    M. Augustin Bonrepaux. Le même rapport explique que la fiscalité française sur les revenus est tout à fait compétitive jusqu'à 300 000 euros, soit 2 millions de francs. Trouvez-vous que ce soit trop ?
    Le problème essentiel de la France, c'est que l'effort y est insuffisant en matière de recherche et de développement. Lorsque vous réduisez la fiscalité, vous diminuez du coup les moyens alloués à la recherche.
    Tout à l'heure, vous nous avez dit que 300 redevables de l'ISF se délocalisent chaque année. C'est vrai, mais on ne note pas d'accélération du phénomène, car, en 1997 et 1998, 350 contribuables assujettis s'étaient délocalisés, ce qui représentait 0,1 % des assujettis à l'ISF et une perte de seulement 0,6 % du produit de cet impôt. Cela justifie-t-il les réductions que vous accordez ? Les délocalisations n'ont d'ailleurs pas empêché le nombre d'assujettis à l'ISF de progresser de 150 % depuis 1997.
    La perte de 11 milliards d'euros sur cinq ans représente 2 milliards d'euros par an, à mettre en regard, par exemple, des investissements étrangers réalisés chaque année en France. En 2002, près de 50 milliards d'euros de capitaux étrangers sont arrivés en France. S'il est vrai que des redevables de l'ISF s'en vont, comme d'ailleurs des redevables de l'impôt sur le revenu, leur départ n'est pas motivé par la fiscalité sur l'ISF. Cela ne justifie pas du tout la réduction que vous accordez.
    Elle est encore moins justifiée pour l'article 26 ter. Vous prétendez vouloir encourager l'investissement dans les petites et moyennes entreprises. L'emploi étant menacé en France, il faudrait réduire l'ISF. Mais vous réduisez l'ISF à condition que l'investissement se fasse dans un pays de l'Union européenne, que la société ait son siège de direction effective dans un Etat membre de la Communauté européenne. Ainsi, nous allons réduire l'ISF pour permettre aux entreprises d'aller investir au Royaume-Uni, en Belgique et, peut-être, l'an prochain, en Pologne ou en Slovénie.
    M. Nicolas Forissier. Quel charabia !
    M. Paul-Henri Cugnenc. Et en Union soviétique aussi !
    M. Augustin Bonrepaux. Cela aura un effet important sur l'emploi en France. Ce simple exemple montre que vous vous souciez peu de l'emploi, et davantage des cadeaux que vous voulez offrir aux privilégiés. Et tout cela se fait au détriment de la recherche, de l'emploi et de tous les défavorisés.
    M. Nicolas Forissier. C'est insultant pour nous !
    M. Jean-Louis Dumont. Il est excellent !
    M. Gérard Bapt. Très bien !
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur. La commission est défavorable à ces amendements, car elle juge la mesure qu'ils veulent supprimer excellente. Elle a en effet pour but de favoriser la mise en place de fonds propres dans nos PME. Depuis des décennies, tous les rapports se succèdent, toutes les analyses convergent pour montrer que les PME manquent de fonds propres. Or, c'est dans les PME que se créent le plus d'emplois et que réside le plus gros potentiel d'innovation. En incitant les épargnants à investir en numéraire dans nos PME, nous favoriserons le développement de ces entreprises et celui de la recherche. C'est une excellente disposition et il n'y a aucune raison de la supprimer. Ce serait contre-productif pour l'emploi.
    M. Charles de Courson. Très bien !
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Le Gouvernement est opposé à cet amendement.
    M. Augustin Bonrepaux. C'est un peu court. Le Gouvernement manque d'arguments !
    Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bapt.
    M. Gérard Bapt. Monsieur le rapporteur, nos PME manquent de fonds propres, c'est un constat. Du reste, le Gouvernement précédent avait aussi pris un certain nombre de mesures destinées à renforcer les fonds propres des PME. Toutefois, une fois de plus, votre dispositif est disproportionné par rapport à l'objectif : en effet, là où une exonération partielle d'ISF eût été suffisante pour des capitaux investis dans une société, vous prévoyez, avec cet article, une exonération, non partielle, mais totale de l'ISF sur les titres reçus par une redevable en contrepartie de sa souscription au capital d'une société, laquelle peut, comme l'a dit M. Bonrepaux, se trouver dans un autre Etat de l'Union européenne.
    Toutefois, on ne comprend pas bien pourquoi le dispositif est limité aux seules sociétés et pourquoi les apports de capitaux réalisés dans une entreprise individuelle ne pourraient pas aussi être incités par une exonération. Les millions de PME gérées sous forme d'entreprises individuelles sont oubliées. Pourtant, elles constituent aussi des vecteurs importants de création d'impôts et elles se trouvent, elles, sur le territoire national. Elles ont tout autant besoin d'un apport de capitaux que les entreprises gérées sous forme de sociétés ; or les entreprises individuelles sont exclues de l'avantage que vous conférez aux sociétés. A notre sens, il y a là une rupture du principe d'égalité.
    J'ajoute que nous avons assisté à beaucoup de va-et-vient sur cet article, notamment en ce qui concerne l'extension que le Sénat a introduite pour les investissements, les prises de participation dans des entreprises exerçant des activités bancaires et financières, ainsi que de gestion de patrimoine. Vous avez vous-même, guidé par un souci sans doute très méritoire, exclu du champ d'application les activités ayant une dimension patrimoniale, que le patrimoine soit mobilier ou immobilier. Mais comment distinguera-t-on les PME qui exercent une activité bancaire et financière de celles qui ont une dimension patrimoniale, puisque, à l'évidence, il s'agit de plus en plus des mêmes activités ?
    Nous ne sommes pas opposés au renforcement des fonds propres aux PME - on ne nous prendra pas en défaut sur ce point -, mais au fait que le dispositif proposé exclut les très petites entreprises. Les entreprises individuelles et les entreprises artisanales sont les grandes absentes du texte !
    M. Jean-Louis Dumont. Très juste !
    M. Jean-Paul Garraud. Cela n'a rien à voir !
    Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements n°s 40 et 86.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même, et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    Mme la présidente. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   59
Nombre de suffrages exprimés   59
Majorité absolue   30
Pour l'adoption   14
Contre   45

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    Je suis saisie de deux amendements identiques, n°s 31 et 87.
    L'amendement n° 31 est présenté par M. Carrez, rapporteur, MM. de Courson, Sauvadet et Rodolphe Thomas ; l'amendement n° 87 est présenté par M. Vergnier, M. Eric Besson et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Dans le I du texte proposé pour l'article 885-I ter du code général des impôts, substituer aux mots : "au capital, en numéraire ou en nature par apports de biens nécessaires à l'exercice de l'activité, les mots : "en numéraire au capital. »
    La parole est à M. Gilles Carrez, pour soutenir l'amendement n° 31.
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Cet amendement tend à revenir à la rédaction adoptée en première lecture par l'Assemblée.
    Mme la présidente. La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour soutenir l'amendement n° 87.
    M. Augustin Bonrepaux. Cet amendement tend, lui aussi, à revenir au texte que l'Assemblée avait adoptée en première lecture. Ce serait un moindre mal, car, même si nous n'étions pas satisfait par ce texte, il est toujours préférable à celui qu'a voté le Sénat. En effet, il n'est pas souhaitable d'élargir le dispositif d'exonération de l'ISF pour les apports en nature au capital d'une PME. Afin de soutenir le développement de ces entreprises, de remédier à leurs problèmes de financement et d'éviter de possibles comportements d'optimisation fiscale, il est proposé de rétablir le dispositif réservant l'exonération aux seuls apports en numéraire.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Le Gouvernement est défavorable aux deux amendements.
    Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 31 et 87.
    (Ces amendements sont adoptés.)
    M. Vergnier et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 98, ainsi rédigé :
    « Dans le a du I du texte proposé pour l'article 885-I ter du code général des impôts, substituer aux mots : "de gestion de patrimoine mobilier définie à l'article 885 Oquater, et notamment celles des organismes de placement en valeurs mobilières, et des activités les mots : "bancaires, financières, d'assurance,. »
    La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Cet amendement tend à exclure du champ de l'exonération les souscriptions au capital des sociétés bancaires, financières et d'assurance. En effet, il s'agit d'éviter le contournement du dispositif à des fins d'optimisation fiscale.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Défavorable. Les PME, pour lesquelles nous voulons renforcer les fonds propres, exercent toutes sortes d'activités. Aujourd'hui, notre économie est de plus en plus une économie tertiaire, et les activités qui ont la plus forte valeur ajoutée sont celles qui sont les plus créatrices d'emplois, c'est-à-dire des activités qui sont souvent de nature financière, bancaire ou d'assurance. Il n'y a donc aucune raison de les exclure du dispositif.
    Les auteurs de l'amendement font un contresens. Il s'agit non d'activités de nature immobilière ou d'activités de gestion de son propre patrimoine, mais d'activités commerciales dans le domaine de la banque ou de l'assurance. Il n'y a donc pas lieu de les exclure de l'excellente mesure permettant un apport en fonds propres.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Défavorable.
    Mme la présidente. La parole est à M.  Gérard Bapt.
    M. Gérard Bapt. Monsieur le secrétaire d'Etat, dans le projet de loi initial, vous aviez exclu les activités bancaires, financières et d'assurance. Elles ont été réintroduites dans le texte à la suite du vote d'un amendement de la commission spéciale. Pour quelle raison avez-vous changé d'avis entre l'adoption du texte en conseil des ministres et maintenant ?
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 98.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. La majorité en leur faveur était très nette. Toutefois, il existe un moyen de revenir sur cette adoption.
    Je mets aux voix l'article 26 ter, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 26 ter, ainsi modifié, est adopté.)

Article 26 quater
(Pour coordination)

    Mme la président. Je vais maintenant appeler l'article 26 quater du projet, qui a été adopté par les deux assemblées dans un texte identique, mais sur lequel M. Gilles Carrez a déposé un amendement pour coordination.
    « Art. 26 quater. - I. - A la fin du troisième alinéa du 2° de l'article 885 O bis du code général des impôts, le taux : "75 % est remplacé par le taux : "50 %. »
    II. - Les dispositions du I s'appliquent pour l'impôt de solidarité sur la fortune dû au titre de l'année 2004 et des années suivantes. »
    M. Carrez a présenté un amendement, n° 93, ainsi rédigé :
    « Dans le I de l'article 26 quater, après les mots : "article 885 O bis, insérer les mots : "ainsi qu'au d de l'article 885 O quinquies. »
    La parole est à M. Gilles Carrez.
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 93.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 26quater, modifié par l'amendement n° 93.
    (L'article 26 quater, ainsi modifié, est adopté.)

Article 27 AA

    Mme la présidente. « Article 27 AA. Il est créé sous le nom d'UBIFrance, Agence française pour le développement international des entreprises, un établissement public national à caractère industriel et commercial placé sous la tutelle du ministre chargé de l'économie et des finances et du ministre chargé du commerce extérieur.
    « L'agence a pour mission de favoriser le développement international des entreprises françaises en réalisant ou coordonnant toutes actions d'information, de formation, de promotion, de coopération technique, industrielle et commerciale et de volontariat international. L'agence est représentée à l'étranger par le réseau international du ministère chargé de l'économie et des finances, qui met en oeuvre les moyens nécessaires à l'accomplissement de ses missions. Ces moyens peuvent être complétés par l'agence.
    « Pour l'accomplissement de ses missions en France, l'agence s'appuie notamment sur les collectivités territoriales et les acteurs économiques locaux.
    « L'agence est administrée par un conseil d'administration composé :
    « - de représentants de l'Etat ;
    « - de représentants des conseils régionaux, des organisations professionnelles et des chambres consulaires ;
    « - de personnalités qualifiées ;
    « - d'un député et d'un sénateur désignés par leur assemblée respective ;
    « - de représentants du personnel désignés dans les conditions prévues au chapitre II du titre II de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public.
    « Le personnel de l'agence est constitué de salariés de droit privé, mais peut comprendre des fonctionnaires civils ou militaires détachés ou mis à disposition.
    « A compter de la publication du décret d'application de la présente loi, les personnels du Centre français du commerce extérieur sont transférés à l'agence dans le cadre des dispositions du second alinéa de l'article L. 122-12 du code du travail. Les dispositions de l'article L. 132-8 du même code s'appliqueront à la négociation de l'accord collectif entre partenaires sociaux au sein de l'agence. Le transfert des personnels d'UBIFrance à l'agence est opéré dans les mêmes conditions, à compter de la dissolution de l'association.
    « L'agence est substituée au Centre français du commerce extérieur dans les contrats conclus antérieurement à l'entrée en vigueur du décret d'application de la présente loi, en ce qui concerne les personnels régis par le décret n° 60-425 du 4 mai 1960 relatif au statut des personnels du Centre français du commerce extérieur.
    « Les intéressés auront, au plus tard le 31 décembre 2004, et six mois après qu'ils auront reçu la notification des conditions d'exercice du choix, la faculté d'opter :
    « - soit pour le maintien de leur contrat relevant du décret précité,
    « - soit pour le recrutement dans le cadre d'un contrat de droit privé.
    « Les ressources de l'agence sont constituées notamment par les ventes de ses produits, la rémunération de ses services, des participations et placements financiers, des intérêts et remboursements de prêts et avances, des revenus des biens meubles et immeubles et produits de leur aliénation, des dotations de l'Etat, des subventions et contributions d'administrations, de collectivités territoriales et de tous organismes publics ou privés, nationaux, communautaires ou internationaux ainsi que de dons, legs et recettes diverses autorisées par la réglementation en vigueur et le conseil d'administration.
    « Le régime financier et comptable de l'agence est soumis aux dispositions des articles 190 à 225 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, sauf en ce qui concerne les paiements et les recouvrements relatifs à l'activité à l'étranger de l'agence, pour lesquels les règles en usage dans les sociétés commerciales pourront s'appliquer.
    « La dissolution du Centre français du commerce extérieur est prononcée à compter de l'entrée en vigueur du décret d'application de la présente loi, celle d'UBIFrance suivant les dispositions arrêtées par son assemblée générale extraordinaire.
    « Les droits et obligations attachés à l'activité du Centre français du commerce extérieur et à celle d'UBIFrance, à compter de sa dissolution, ainsi que l'ensemble de leurs biens immobiliers et mobiliers sont transférés de plein droit à l'agence. Ces transferts sont effectués à titre gratuit et ne donnent lieu ni à indemnité, ni à perception de droits ou taxes, ni à versement de salaires ou honoraires.
    « Les dispositions des 1 et 2 de l'article 210 A du code général des impôts s'appliquent à la transmission universelle des patrimoines d'UBIFrance et du Centre français du commerce extérieur au profit de l'Agence française pour le développement international des entreprises, sous réserve que cette dernière respecte les prescriptions mentionnées aux a, b, c, d et e du 3 du même article. Pour l'application de la phrase qui précède, la société absorbée s'entend de l'entité qui possédait les biens avant l'intervention de l'opération, et la société absorbante s'entend de l'entité possédant ces mêmes biens après l'opération.
    « Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article. »
    Mme Vautrin a présenté un amendement, n° 113 corrigé, ainsi rédigé :
    « Dans la première phrase du onzième alinéa de l'article 27 AA, substituer aux mots : "de la présente loi les mots : "du présent article. »
    La parole est à Mme Catherine Vautrin.
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure. Il s'agit d'un amendement d'ordre rédactionnel.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 113 corrigé.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Mme Vautrin a présenté un amendement, n° 114, ainsi rédigé :
    « I. Dans le douzième alinéa de l'article 27 AA, substituer aux mots : "de la présente loi les mots "précité.
    « II. En conséquence, procéder à la même substitution dans le dix-huitième alinéa de cet article. »
    La parole est à Mme Catherine Vautrin.
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure. Cet amendement est également d'ordre rédactionnel.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Favorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 114.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 27 AA, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 27 AA, ainsi modifié, est adopté.)

Article 27 B

    Mme la présidente. Je donne lecture de l'article 27 B :

TITRE VII
DISPOSITIONS DIVERSES

    « Art. 27 B. - Le premier alinéa de l'article L. 611-4 du code rural est ainsi modifié :
    « 1° Après les mots : "Pour faire face aux crises conjoncturelles affectant sont insérés les mots : "les animaux vifs, les carcasses ;
    « 2° Les mots : "produits issus de cycles courts de production ou les productions de la pêche maritime ou des cultures marines sont remplacés par les mots : "produits agricoles issus de cycles courts de production ou les productions de la pêche ou de l'aquaculture ;
    « 3° Les mots : "par leur producteur sont remplacés par les mots : "par les producteurs ou leurs groupements reconnus ;
    « 4° Les mots : "des trois précédentes campagnes sont remplacés par les mots : "des cinq précédentes campagnes, à l'exclusion des deux périodes au cours desquelles les prix ont été respectivement le plus bas et le plus élevé ;
    « 5° Avant les mots : "afin d'adapter l'offre, est inséré le mot : "notamment ;
    « 6° Après les mots : "en volume aux besoins des marchés sont insérés les mots : "et de tenir compte des coûts de production. »
    La parole est à M. Marc Le Fur, inscrit sur l'article.
    M. Marc Le Fur. Je m'exprimerai à la fois sur les articles 27 B et 27 C, car ils constituent un ensemble cohérent qui devrait pouvoir tous nous rassembler dans la mesure où ils visent à mettre en place un dispositif de lutte efficace contre les crises agricoles.
    Bien souvent, les crises agricoles se caractérisent par une distorsion entre l'offre et la demande. Il suffit d'un excès limité de l'offre pour que cette distorsion se traduise par un effondrement des cours et, consécutivement, par un effondrement des revenus agricoles.
    Face à une telle situation, il n'est pas possible de rester les bras ballants : il faut agir. Encore faut-il le faire de manière coordonnée avec l'ensemble de la profession, d'où la notion d'interprofession. Encore faut-il agir de manière rapide, efficace et, si possible, avec une généralisation de l'intervention de la puissance publique, et c'est ce que prévoit le dispositif proposé.
    Jusqu'à présent, le dispositif anticrise était limité aux productions végétales. Le dispositif proposé étend ce dispositif anticrise, qui était donc limité aux fruits et légumes, à l'ensemble des productions de viande et, en particulier, aux animaux vivants et aux carcasses, ce qui est extrêmement important pour un certain nombre de productions, en particulier pour les productions actuellement en crise comme la production porcine ou la production de volailles.
    Ce dispositif permettra également de calculer le prix bas - c'est-à-dire le prix qui générera l'intervention - non plus à partir d'une moyenne des cinq dernières campagnes ou des cinq dernières années, mais à partir des années pertinentes, en excluant les périodes aberrantes dont la prise en compte interdisait parfois l'intervention publique. Cette proposition est intéressante et devrait nous permettre d'agir et de réagir face à ces crises.
    Je note également que le dispositif prévu dans l'article 27 C, à la suite de la rédaction nouvelle proposée par la commission, permettra à la puissance publique d'étendre des dispositions prises par une fraction des interlocuteurs - en amont, la production primaire, et, en aval, notamment, la distribution. Si 25 % d'entre eux s'accordent pour agir, il sera possible d'étendre le dispositif, à la manière d'une convention collective en droit social, ce qui permettra de faire profiter l'ensemble de la filière de telle ou telle mesure intéressante.
    Je tenais à souligner que ces différentes propositions me semblent extrêmement intéressantes. Elles s'inscrivent parfaitement dans une logique d'initiative économique et elles sont attendues par l'ensemble des filières agricoles et agroalimentaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. Je mets au voix l'article 27 B.
    (L'article 27 B est adopté.)

Article 27 C


    Mme la présidente. « Art. 27 C. - L'article 71-1 de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole est ainsi modifié :
    « 1° Les mots : "telles que définies à l'article 71, un contrat conclu pour une catégorie de fruits ou de légumes frais sont remplacés par les mots : "et pour les produits tels que définis à l'article L. 611-4 du code rural, un contrat conclu ;
    « 2° Les mots : "et de la Commission d'examen des pratiques commerciales sont remplacés par les mots : "qui dispose d'un délai de huit jours pour rendre son avis ».
    Mme Vautrin, rapporteure, a présenté un amendement, n° 32, deuxième rectification, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 27 C :
    « I. - Après l'article L. 611-4 du code rural, il est inséré un article L. 611-4-1 ainsi rédigé :
    « Art. L. 611-4-1. - Pour faire face aux crises conjoncturelles et pour les produits tels que définis à l'article L. 611-4, un contrat conclu pour une durée déterminée qui ne peut excéder trois mois entre des organisations professionnelles représentatives de la production ou des groupements de producteurs reconnus, d'une part, et, d'autre part, des organisations professionnelles représentatives de la transformation, de la commercialisation ou de la distribution ou des distributeurs réalisant 25 % ou plus des ventes sur le marché concerné, peut être rendu obligatoire, en tout ou partie, par arrêté interministériel signé du ministre chargé de l'agriculture et du ministre chargé de l'économie, après consultation du Conseil de la concurrence qui dispose d'un délai de huit jours ouvrables pour rendre son avis. L'arrêté est pris pour une durée de validité qui ne peut excéder celle du contrat. »
    « II. - L'article 71-1 de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole est abrogé.
    Sur cet amendement, M. Lefur a présenté un sous-amendement, n° 117, ainsi rédigé :
    « Dans la première phrase du dernier alinéa du I de l'amendement n° 32, deuxième rectification, substituer au mot : "ouvrables le mot : "francs. »
    La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 32, deuxième rectification.
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure. Cet amendement procède à une réécriture complète de l'article 27 C codifiant dans le code rural des dispositions de l'article 71-1 de la loi du 9 juillet 1999 et porte le délai accordé au Conseil de la concurrence pour rendre son avis à huit jours ouvrables.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Favorable à l'amendement et, je l'indique par avance, défavorable au sous-amendement n° 117, qui tend à accorder au Conseil de la concurrence huit jours francs, et non jours ouvrables, ce qui est moins avantageux.
    Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur, pour présenter le sous-amendement n° 117.
    M. Marc Le Fur. Dans mon intervention sur cet article, j'ai insisté sur la nécessité d'une intervention rapide en cas de crise agricole. En effet, cela permet de dénouer une difficulté qui ne manquerait pas de s'aggraver si ce n'était pas le cas et de conduire à une crise de la pêche, à une crise des légumes, à une crise bovine ou à une crise porcine.
    Pour intervenir rapidement, un accord est nécessaire, qui peut être généralisé, comme le prévoit la rédaction actuelle de l'article 27 C, par les ministres compétents : ministre de l'agriculture et ministre des finances.
    Préalablement à cette généralisation, le Conseil de la concurrence doit - et c'est normal - être consulté. Encore faut-il que cette consultation soit la plus rapide possible, c'est-à-dire qu'elle ait lieu dans un délai de huit jours francs plutôt que huit jours ouvrables.
    En premier lieu, la notion de jours francs est la seule notion juridique utilisée pour fixer un délai.
    En second lieu, les jours francs présentent l'intérêt d'être décomptables, quelle que soit la période. Imaginez ce que peuvent représenter huit jours ouvrables au mois de mai ; en fait, il s'agit plutôt de quatorze ou quinze jours ! Et pendant ce temps là, une crise de la pêche, une crise avicole, ou une crise porcine peuvent se développer. Il est logique de fixer un délai au Conseil de la concurrence, mais ce délai doit être plus court ; or la notion de jours francs est à l'évidence plus pertinente que celle de jours ouvrables.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement ?
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure. La commission ne s'est pas prononcée !
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Monsieur le député, vous imaginez bien que lorsque j'ai proposé ce texte, je me suis rapproché du Conseil de la concurrence afin de voir comment il pouvait intervenir le plus rapidement possible sur un sujet sensible sans qu'il y ait de risques de contentieux.
    Le formalisme est important, et lorsque les formes ne sont pas respectées, c'est la décision elle-même qui est fragilisée. Et si je vous propose de retenir un délai de huit jours francs et non de huit jours ouvrables, c'est-à-dire un délai plus long que celui que vous proposez, monsieur Le Fur, c'est parce que le Conseil de la concurrence estime qu'il ne saurait pas faire en huit jours francs. Et pour ce qui est du mois de mai, les fonctionnaires du Conseil de la concurrence font à peu près comme tous les Français : ils sont au travail moins souvent.
    Si votre amendement était retenu, le Conseil de la concurrence serait en présence d'un texte difficilement applicable, avec la possibilité d'un risque de dépassement du délai, donc de réduire à néant le dispositif que nous voulons mettre en place. Cette disposition a été élaborée en étroite concertation avec le Conseil de la concurrence, ce qui est logique, puisque c'est lui qui sera appelé à prendre une décision.
    Par ailleurs, je tiens à souligner que, par rapport à la situation actuelle, le délai proposé est extrêmement bref, et les professionnels en sont tout à fait conscients.
    Je vous rappelle également que ce texte est la réponse très ferme à deux engagements que le Gouvernement avait pris en novembre dernier lorsque l'agriculture française était agitée par une crise. Le Gouvernement tient ses engagements, et il faut le rappeler chaque fois que c'est nécessaire.
    Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur.
    M. Marc Le Fur. Il est possible de consulter le Conseil d'Etat en quarante-huit heures ; pourquoi ne serait-il pas possible de faire de même avec le Conseil de la concurrence quand les intérêts de toute une filière sont en cause ?
    J'ajoute que la consultation intervient après accord des professionnels et des ministres compétents, laquelle doit pouvoir être tout de même relativement rapide.
    Je maintiens donc mon sous-amendement.
    Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Vous savez, monsieur Le Fur, que le contentieux du Conseil d'Etat est un contentieux sur pièces ; il s'agit d'une procédure écrite. La comparaison est donc difficile, puisque le Conseil de la concurrence doit apprécier une situation économique, ce qui est une instruction beaucoup plus délicate, qui impose en particulier d'entendre les intéressés : partenaires, distributeurs, producteurs. Pour se forger une opinion, le Conseil de la concurrence doit tout de même réaliser un travail important.
    J'imagine, monsieur le député, que vous souhaitez que le Conseil de la concurrence juge à bon escient. Or, lorsque l'on restreint par trop le délai fixé à une instance juridictionnelle pour rendre son avis, on sait très bien ce qui se passe : elle prend une décision hâtive, qui n'est pas une bonne décision.
    Une bonne justice n'est pas une justice précipitée : elle doit aller vite, mais aussi aller bien. Si nous avons proposé ce délai, c'est que nous savons que c'est le bon délai pour avoir une justice efficace.
    M. Marc Le Fur. Le Conseil de la concurrence n'est pas une juridiction.
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Certes, mais cette institution, vous le savez bien, fonctionne à peu près comme d'autres instances juridictionnelles, et rencontre les mêmes problèmes et les mêmes difficultés sur le plan du fonctionnement interne, auxquelles s'ajoute la nécessité de consulter les protagonistes, qu'ils soient producteurs ou distributeurs. Il faut bien mesurer l'ampleur de la tâche que le Conseil de la concurrence doit mener à bien dans ces situations de crise, qui sont très délicates à gérer.
    Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 117.
    (Le sous-amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 32, deuxième rectification.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. En conséquence, l'article 27 C est ainsi rédigé.
    L'amendement n° 116 de M. Le Fur tombe.

Article 27 D

    « Art. 27 D. - Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou une personne immatriculée au répertoire des métiers, de pratiquer ou de faire pratiquer en situation de crise conjoncturelle des prix de première cession abusivement bas, notamment en tenant compte des coûts de production directs, pour les produits agricoles périssables, les produits agricoles issus de cycles courts de production, les animaux vifs, les carcasses, les produits de la pêche et de l'aquaculture.
    « L'action est introduite devant la juridiction civile ou commerciale compétente par toute personne ou syndicat professionnel justifiant d'un intérêt, ou par le ministère public.
    « Lors de cette action, le ministère public peut demander à la juridiction saisie d'ordonner la cessation des pratiques mentionnées au présent article. Il peut aussi, pour toutes ces pratiques, faire prononcer la nullité des clauses ou contrats illicites, demander le reversement des sommes indûment perçues et le prononcé d'une amende civile dont le montant ne peut excéder 2 millions d'euros.
    « Le juge des référés peut ordonner la cessation des pratiques visées au présent article ou tout autre mesure provisoire.
    « Pour l'application des dispositions du présent article, le ministre chargé de l'agriculture, ou son représentant, et le ministre chargé de l'économie, ou son représentant, peuvent, devant la juridiction civile, déposer des conclusions et les développer oralement à l'audience. »
    Mme Vautrin, rapporteure, a présenté un amendement, n° 33, ainsi rédigé :
    « Dans le premier alinéa de l'article 27 D, supprimer les mots : ", notamment en tenant compte des coûts de production directs, ».
    La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure. Nous restons là dans le contexte des crises conjoncturelles. C'est parce que la notion de prix abusivement bas nous paraît suffisante que nous souhaitons supprimer la mention « tenant compte des coûts de production directs », afin d'éviter de mettre en avant plus que de raison la menace d'une sanction pour les acheteurs dans un tel contexte.
    La commission s'est prononcée favorablement sur cet amendement.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Le dispositif de l'article 27 D vise à empêcher la pratique des prix abusivement bas, qui mettrait en péril l'activité des exploitations agricoles en période de crise. Il s'agit d'éviter que les opérateurs profitent d'une période de crise conjoncturelle pour pratiquer, ou faire pratiquer, des prix « prédateurs » qui ne couvriraient pas les coûts du produit ou de la prestation et qui, de ce fait, seraient de nature à évincer du marché des entreprises pourtant compétitives.
    Il reviendra au juge de déterminer si le prix contesté est un prix bas, puis de caractériser l'abus. Les termes « notamment en tenant compte des coûts de production directs » permettent d'éclairer le juge sur un des éléments permettant d'évaluer un prix bas. Cette précision écarte la possibilité d'un détournement du dispositif par une entreprise peu performante qui porterait plainte contre un concurrent plus entreprenant ou meilleur gestionnaire, maîtrisant plus efficacement ses charges.
    En outre, le terme « notamment » signifie que le juge peut très bien ne pas utiliser cette notion s'il la juge inadaptée. Il peut s'appuyer sur d'autres éléments pour caractériser l'infraction, parmi lesquels l'ampleur de l'opération menée, en particulier en cas de chute des prix, sa durée, ou encore les efforts de publicité consentis. Les interventions possibles à l'audience des représentants des ministres permettront au demeurant d'apporter au juge des éléments de contexte économique susceptibles d'éclairer sa décision.
    Par ailleurs, la sanction n'est pas liée à la notion de coût de production direct, mais découle du non-respect du dispositif. Le retrait de cette notion ne changerait donc rien à la menace qui pèse sur les opérateurs qui pratiquent des prix abusivement bas.
    Le Gouvernement considère que le texte issu du Sénat est satisfaisant, mais il s'en remet à la sagesse de l'Assemblée sur cet amendement.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 33.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 27 D, modifié par l'amendement n° 33.
    (L'article 27 D, ainsi modifié, est adopté.)

Articles 27 E et 27 F

    « Art. 27 E. - Le II de l'article L. 632.1 du code rural est ainsi modifié :
    « 1° La dernière phrase du second alinéa est supprimée ;
    « 2° Au début du second alinéa, les mots : "Toutefois, des organisations interprofessionnelles spécifiques sont remplacés par les mots : "Par exception au premier alinéa, des organisations interprofessionnelles spécifiques ;
    « 3° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « Par exception à l'alinéa précédent, des organisations interprofessionnelles à compétence régionale peuvent toutefois être reconnues dans le secteur viticole pour un vin de pays ou un groupe de vins de pays. Pour les vins d'appellation d'origine contrôlée, l'existence d'une interprofession de portée générale reconnue exclut la possibilité de reconnaître des organisations interprofessionnelles spécifiques. La reconnaissance, en application de la première phrase du présent alinéa, d'une organisation interprofessionnelle à compétence régionale emporte modification, par exclusion du ou des produits concernés, de la reconnaissance de l'organisation interprofessionnelle nationale correspondante. Les accords conclus par l'organisation interprofessionnelle nationale et étendus en application des dispositions de l'article L. 632-3 cessent de s'appliquer à ces produits. »
    Je mets aux voix l'article 27 E.
    (L'article 27 E est adopté.)
    « Art. 27 F. - Le second alinéa du I de l'article 2 de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 précitée est ainsi rédigé :
    « La présente disposition n'est pas applicable aux organisations interprofessionnelles. Elle n'est pas non plus applicable aux établissements et organismes intervenant dans le secteur des produits à appellation d'origine. » (Adopté.)

Article 27 G

    Mme la présidente. « Art. 27 G. - A la fin de l'article 241-9 du code de la construction et de l'habitation, les mots : "conclu par écrit un contrat de sous-traitance avant l'exécution des travaux de chacun des lots de l'immeuble sont remplacés par les mots : "satisfait aux obligations contenues à l'article L. 231-13. »
    Mme Vautrin, rapporteure, a présenté un amendement, n° 34, ainsi libellé :
    « Rédiger ainsi l'article 27 G :
    « L'article L.  241-9 du code de la construction et de l'habitation est complété par les mots : "ou aura conclu un contrat ne comportant pas l'énonciation prévue à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 231-13. »
    La parole est à Mme la rapporteure.
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure. Cet amendement s'attache à un problème important, celui des sous-traitants des constructeurs de maisons individuelles. Le texte du Sénat nous paraît trop large, et cet amendement a pour objet de limiter l'extension du champ de la sanction pénale à la seule absence dans le contrat de sous-traitance de la justification de l'existence des garanties de paiement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à consommation. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 34.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. En conséquence, l'article 27 G est ainsi rédigé.

Article 27

    Mme la présidente. « Art. 27. - I. - Sont applicables en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et en Nouvelle-Calédonie les I, II bis, III et IV de l'article 1er, les I et II de l'article 2 et les articles 2 bis, 4 et 6 bis.
    II. - Est applicable en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna, en Nouvelle-Calédonie et à Mayotte l'article L. 223-7 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques. »
    L'amendement n° 111 de M. Eric Jalton n'est pas défendu.
    Je mets aux voix l'article 27.
    (L'article 27 est adopté.)

Après l'article 27

    Mme la présidente. MM. Bonrepaux, Vergnier, Eric Besson, Mme Lebranchu et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 99, ainsi rédigé :
    « Après l'article 27, insérer l'article suivant :
    « Les maîtres d'ouvrage mentionnés à l'article 1er de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée définissent les modes de financement des marchés publics en respectant l'égalité de traitement et d'accès à la commande publique. »
    La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Cet amendement a pour objet de revenir sur l'ordonnance d'habilitation votée hier par notre assemblée en ce qui concerne les marchés publics.
    La réglementation envisagée inquiète beaucoup les petites et moyennes entreprises. D'ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, personne ne sait comment vont se faire les dévolutions de marchés d'entreprises de travaux publics au-dessous du seuil qui est relevé de 90 000 euros à six millions d'euros. Ce n'est pas une mince différence !
    Il serait incohérent et contradictoire, quand on prétend vouloir renforcer l'initiative économique, d'exclure de fait les petites et moyennes entreprises de la commande publique, ou de les placer en position précaire et dans la dépendance de grands groupes en qualité d'entreprises sous-traitantes. Or c'est ce qui découle de cette réglementation des marchés.
    Cet amendement va peut-être nous permettre d'y voir plus clair, car je n'ai toujours pas eu de réponse à la question que j'ai posée hier : que se passe-t-il au-dessous de six millions d'euros ? Nous proposons, tout comme l'Association des maires de France, que la dévolution de ces marchés soit réglementée. Je ne pense pas que vous souhaitez remettre en cause la loi anti-corruption votée en 1993 ?
    Notre amendement vise à faciliter l'accès des PME à la commande publique en évitant que la définition des conditions de financement d'un marché aboutisse à exclure celles-ci, par le biais notamment de clauses sur le paiement différé. Il faut d'ailleurs rappeler que le Conseil d'Etat a très clairement indiqué que l'interdiction de telles clauses est d'ordre public.
    Comme le souligne l'instruction du ministre de l'économie et des finances du 28 août 2001 pour l'application du code des marchés publics, « les formules de marchés et notamment de marchés d'entreprises de travaux publics avec paiement différé présentent de nombreux inconvénients : endettement indirect de la collectivité locale, coût élevé, opacité dans la répartition du marché entre la construction, le financement et l'exploitation ou la maintenance, frein pour l'accès direct des petites et moyennes entreprises à la commande publique, réduction de la concurrence ».
    Monsieur le secrétaire d'Etat, j'espère que le débat sur cet amendement sera pour vous l'occasion d'apporter toutes les explications nécessaires. Et je répète ma question : comment se feront désormais, après l'adoption des ordonnances, les dévolutions de marchés au-dessous du seuil de six millions d'euros ?
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure. La commission ne s'est pas prononcée sur l'amendement, mais je voudrais rappeler à notre collègue que le Sénat, en adoptant l'article 17 ter, a prévu que le Gouvernement remettrait chaque année au Parlement un rapport sur ce sujet.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Le Gouvernement est opposé à cet amendement. Mais, monsieur le député, je puis d'ores et déjà vous indiquer que, dans le cadre du second projet de loi actuellement en préparation et qui portera sur la modernisation des entreprises, nous prévoyons de traiter le problème de l'accès des entreprises aux marchés publics, en nous inspirant en particulier des mécanismes qui ont été développés avec succès aux Etats-Unis par la Small business administration, et qui depuis maintenant près de cinquante ans ont démontré leur efficacité.
    M. Gérard Bapt. Eh oui !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Nous aurons donc l'occasion de reparler de ce sujet. Je comprends tout à fait que vous posiez la question. Elle est importante, et j'espère que nous pourrons, de façon beaucoup plus large que ne le fait votre amendement, qui est assez limité et ne répond en fait que très imparfaitement à vos préoccupations, la traiter définitivement et au fond.
    Mme la présidente. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous comprenez, madame la rapporteure, que je ne peux pas être satisfait de la réponse du Sénat... (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. André Gerin. Il a raison ! C'est de la rigolade !
    M. Augustin Bonrepaux. ... qu'un rapport sera rédigé une fois par an.
    M. André Gerin. Quelle plaisanterie !
    M. Augustin Bonrepaux. Gouverner, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est prévoir. Avant de modifier un dispositif, il vaudrait mieux savoir comment il va fonctionner. Et ce que vous nous expliquez, c'est que l'on ne le saura qu'au bout d'un an ! Quelle imprévoyance !
    M. Jean-Marc Nudant. Et l'APA ? Et les 35 heures ? Si ce n'est pas de l'imprévoyance !
    M. Augustin Bonrepaux. Alors expliquez-nous ! Vous nous dites que vous allez vous inspirer d'un dispositif appliqué aux Etats-Unis. Est-ce que cela marche mieux qu'en France ?
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Tout fonctionne mieux au pays des 35 heures !
    M. Augustin Bonrepaux. Un excellent article dans Le Monde d'hier...
    M. Jean-Marc Nudant. Qui lit Le Monde aujourd'hui ?
    Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Lisez plutôt La Face cachée du Monde !
    M. Augustin Bonrepaux. ... s'interrogeait sur le retour de la corruption ? Je pose à nouveau la question : voulez-vous le retour de la corruption ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La parole est à Mme Marylise Lebranchu.
    M. Jacques Le Guen. Arrêtez de nous donner des leçons !
    Mme Marylise Lebranchu. Je n'ai pas l'habitude de donner des leçons, monsieur Le Guen.
    M. Charles de Courson. Elle a passé l'âge !
    Mme Marylise Lebranchu. J'ai sûrement passé l'âge, j'ai surtout une expérience qui donne beaucoup d'humilité en la matière. Comme beaucoup d'entre vous, j'ai visité longuement la SBA, administration en charge des petites entreprises aux Etats-Unis. Il est vrai qu'elle a toujours été montrée comme un exemple, en particulier pour avoir mis sur pied un système qui garantit l'attribution d'un certain nombre de marchés aux petites entreprises. Mais pour peu qu'on ait tant soit un peu étudié le sujet - ce que nous avons tous fait - on se rend compte que les petites entreprises en question sont des entreprises de moins de cinq cents salariés.
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Et alors ?
    Mme Marylise Lebranchu. On est là dans une configuration qui n'a rien à voir avec celle de l'Hexagone. D'une façon générale, aucun modèle économique territorial ne peut s'imposer à un autre modèle économique territorial. Je l'ai dit dans mon propos liminaire, l'économie n'est pas une science exacte, elle ne l'a jamais été et ne le deviendra pas. Tant mieux, au fond, cela permet d'évoluer plus facilement.
    Dans nos régions, une entreprise de cinq cents salariés n'est pas considérée comme une petite entreprise. Une entreprise du bâtiment ne peut aujourd'hui accéder à des marchés du montant qu'a rappelé Augustin Bonrepaux. Un chef d'entreprise de cinquante-six salariés, qui a l'habitude de se porter candidat à des marchés d'entreprises de travaux publics - qui va d'ailleurs bientôt exprimer son inquiétude aux parlementaires - m'expliquait combien il était effrayé par le niveau des prix. Son entreprise est déjà souvent appelée en sous-traitance, pas forcément de premier niveau, ce qui suppose déjà une déclaration obligatoire et des garanties de paiement et de délais. A de tels niveaux, vous imaginez la cascade des sous-traitants !
    Cette préoccupation est partagée sur tous les bancs de cette assemblée. La structure économique de notre pays n'est pas celle des Etats-Unis, et personne sur ces bancs ne le souhaite d'ailleurs. C'est non seulement un fait d'histoire, mais aussi une question d'efficacité. S'en remettre uniquement au schéma SBA, c'est oublier que les effectifs des entreprises françaises, en particulier dans le domaine des marchés publics, qui concernent notamment le bâtiment, les travaux publics, l'eau, l'assainissement, sont bien loin des cinq cents salariés.
    Restons attentifs à ce qu'a proposé la SBA en matière d'obligation et de réserve des marchés, mais nos petites entreprises de moins de cent salariés ne peuvent pas se retrouver dans une telle démarche.
    L'amendement n° 99 est donc un amendement de prudence. On ne peut pas passer directement du système dont nous connaissons le fonctionnement dans nos collectivités locales à un autre système sans passer au moins par une période d'observation. Nous ne nous contenterons pas d'un rapport durant cette période d'observation, nous voulons des garanties.
    Un certain nombre de chefs d'entreprise, qui pensent que vous les avez écoutés, monsieur le secrétaire d'Etat, souhaitent ces garanties. Ce n'est donc pas un « non » au développement économique des grandes entreprises, c'est un « oui » au maintien du tissu économique tel qu'il est, et qu'il se porte bien ainsi d'ailleurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Didier Migaud. Il est dommage de ne pas avoir de réponse.
    M. Gérard Bapt. Oui, le secrétaire d'Etat ne répond pas.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 99.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    Mme la présidente. M. Bonrepaux et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 88, ainsi libellé :
    « Après l'article 27, insérer l'article suivant :
    « L'article 2 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Les marchés passés en vertu du code des marchés publics respectent les principes de liberté d'accès aux marchés publics, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures. L'efficacité de la commande publique et la bonne utilisation des deniers publics sont assurées par la définition préalable des besoins, le respect des obligations de publicité et de mise en concurrence ainsi que par le choix de l'offre économiquement la plus avantageuse. »
    La parole est à M. Augustin Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. A défaut d'avoir obtenu satisfaction sur l'amendement précédent, j'espère que nous pourrons l'obtenir sur l'amendement n° 88 qui ne nous paraît pas excessif.
    Il me semble que ce sont là les principes minima dont on puisse exiger le respect en matière de marchés publics puisque, je le répète, les marchés au-dessous de six millions d'euros ne sont pour le moment soumis à aucune règle et que les règles prévues au-dessus de ce seuil seront préjudiciables aux petites et moyennes entreprises.
    Il s'agit pour nous, en les inscrivant dans la loi, d'assurer que les principes fondateurs de la commande publique seront respectés.
    Ils doivent demeurer déterminants dans la constatation des infractions à l'article L. 432-14 du code pénal relatif au délit d'octroi d'avantages injustifiés, anciennement délit de favoritisme, en dépit des modifications que vous voulez apporter à la loi.
    M. Franck Gilard. Cela va de soi !
    M. Augustin Bonrepaux. L'absence totale de règles pour les marchés publics au-dessous de six millions d'euros signifierait qu'on pourrait faire n'importe quoi et que même le préfet ne pourrait pas exercer son contrôle. Ce serait une véritable remise en cause de la loi anti-corruption. Je répète donc ma question : est-ce ce que vous voulez ?
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    Mme Catherine Vautrin, rapporteur. La commission n'a pas examiné l'amendement n° 88.
    M. Gérard Bapt. C'est tout ? C'est un avis ça ?
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Nous souscrivons tous à ces principes essentiels...
    M. Augustin Bonrepaux. Ne rejetez pas l'amendement dans ce cas !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. ... Ils seront bien entendu rappelés dans le cadre de la réforme des marchés publics que le Gouvernement a entreprise. Mais cet amendement n'a visiblement pas sa place dans ce texte. Nous avons abordé au fil des heures beaucoup de questions, certes intéressantes, mais souvent hors-sujet. Celui-ci fait partie de la liste, malheureusement trop longue.
    M. Didier Migaud. C'est un peu court.
    Mme la présidente. La parole est à M. Bonrepaux.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous garantir ce que vous venez de dire ? Vos propos engagent-ils le Gouvernement ? Ces principes que je viens d'énoncer, que je propose d'introduire dans la loi par mon amendement, figureront-ils dans les ordonnances et les nouvelles règles des marchés publics ? Pouvez-vous nous l'assurer ?
    Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Des principes tels que la liberté d'accès à la commande publique, l'égalité de traitement des candidats, la transparence des procédures, la contribution au développement durable, l'efficacité de la commande publique et la bonne utilisation des deniers publics par la définition préalable des besoins, le respect des obligations de publicité et de mise en concurrence seront bien évidemment respectés, et le Gouvernement, comme d'ailleurs tout le monde, je crois, y est attaché.
    M. Augustin Bonrepaux. Est-ce qu'ils y figureront ?
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Je crois qu'il s'agit là, monsieur le député, d'un débat qui aura lieu à un autre moment.
    M. Augustin Bonrepaux. Il n'y aura pas de débat !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Nous ne sommes pas ici en train de réformer le code des marchés publics. Vous aurez à en débattre puisque vous aurez ensuite... (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) mais bien sûr que si !
    M. Didier Migaud. Après ! Après !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Bien sûr, après ! Vous aurez à en débattre, et vous serez informés très rapidement des propositions qui seront faites.
    Mme Huguette Jacquaint. Après les retraites !
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Cette proposition n'a pas d'objet en ce qui concerne ce texte. Le Gouvernement y est donc défavorable.
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 88.
(L'amendement n'est pas adopté.)

Seconde délibération

    Mme la présidente. En application de l'article 101 du règlement, le Gouvernement demande qu'il soit procédé à une seconde délibération de l'article 13B du projet de loi.
    La seconde délibération est de droit.
    La commission interviendra dans les conditions prévues à l'alinéa 3 de l'article 101 du règlement.
    Je rappelle que le rejet des amendements vaut confirmation de la décision prise en première délibération.

Article 13 B

    Mme la présidente. L'Assemblée a adopté en première délibération l'article 13 B suivant :
    « Art. 13 B. - I. - Le III de l'article 1er de la loi n° 84-578 du 9 juillet 1984 sur le développement de l'initiative économique est ainsi modifié :
    « 1° Le premier alinéa est complété par un membre de phrase et une phrase ainsi rédigés : "Sauf lorsque les sommes retirées sont affectées, dans le six mois suivant le retrait, au financement de la création ou de la reprise d'une entreprise dont le titulaire du livret, son conjoint, son ascendant ou son descendant assure personnellement l'exploitation ou la direction. Dans ce cas, le retrait peut intervenir sans délai ni remise en cause de l'exonération prévue au 9° quinquies de l'article 157 du code général des impôts ;
    « 2° Au deuxième alinéa, les mots : "A l'expiration de ce délai sont supprimés.
    « II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du I sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
    Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 1, ainsi rédigé :
    « Supprimer le II de l'article 13 B. »
    La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. L'objet de cet amendement est très simple : il s'agit de lever le gage qui figure à l'article 13 B.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Gilles Carrez, rapporteur. Toujours favorable à des levées de gage. (Sourires.)
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.
    (L'amendement est adopté.)
    Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 13 B, modifié par l'amendement n° 1.
    (L'article 13 B, ainsi modifié, est adopté.)

Explications de vote

    Mme la présidente. Dans les explications de vote, la parole est à M. Yannick Favennec, au nom du groupe UMP.
    M. Yannick Favennec. M. le ministre, mes chers collèques, la création d'entreprises en france est au plus bas. Après le dégonflement de la « bulle Internet », la création d'entreprises a recommencé décroître. Le seuil fatidique des 200 000 créations d'entreprises annuelles n'a pas été atteint. En 1989, la France voyait la création de 204 000 entreprises nouvelles ; en 2002, notre pays n'affiche que 179 000 entreprises nouvelles.
    Le Premier ministre, dans sa déclaration de politique générale, avait insisté sur la nécessité de maintenir le cap de la création d'un million d'entreprises en cinq ans, soit le niveau constaté avant le début des années 1990 : 200 000 créations d'entreprises par an.
    De nombreux freins bureaucratiques, fiscaux, sociaux, subsistent depuis longtemps et entravent la création d'entreprises, alors que celle-ci n'a jamais été autant plébiscitée. En effet, un salarié sur deux se déclare prêt créer sa propre entreprise. La « fièvre entrepreneuriale » qui s'était manifestée entre 1999 et 2000 dans le secteur des nouvelles technologies a été riche d'enseignements. Ce projet de loi en tire toutes les conséquences, qu'il s'agisse de la domiciliation du siège social dans l'habitation, des couveuses d'entreprises, ou encore des formalités de création rendues possibles directement sur Internet. Il induit une nouvelle logique, celle du « temps entrepreneurial ». Loin de se focaliser sur l'acte de création, il s'intéresse aux phases antérieures et postérieures. Il s'intéresse enfin à l'environnement de l'entrepreneur, et non au seul entrepreneur.
    Ce projet de loi est complet. Il touche à la fois à la société en formation, aux entreprises individuelles et aux sociétés commerciales. L'adéquation des instruments aux problèmes rencontrés par la jeune entreprise est à noter, comme le report des cotisations sociales la première année, qui répond aux problèmes de trésorerie des sociétés, première source de faillite en France.
    Pour toutes ces raisons, au nom de notre esprit d'entreprise, au nom de la France qui crée, au nom de la France qui gagne, le groupe UMP votera avec enthousiasme et détermination ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La parole est M. Gérard Bapt, au nom du groupe socialiste.
    M. Gérard Bapt. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous nous prononcerons, nous aussi, au nom de la France qui gagne. Et c'est pourquoi nous voterons contre ce texte. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

    Première raison : ce texte, dont l'exposé des motifs constituant un hymne vibrant à la création d'entreprise et à la petite entreprise, contient, certes, quelques dispositions positives, mais il ignore totalement la très petite entreprise et l'artisanat. Il est dépourvu de toute disposition relative à l'environnement ou à la formation.
    Deuxième raison : son volet fiscal introduit des éléments à notre sens anticonstitutionnels : disproportion des avantages consentis par rapport aux objectifs recherchés, nombreuses ruptures d'égalité devant l'impôt, qu'il s'agisse des sociétés ou des entreprises unipersonnelles, ou des différentes catégories de contribuables.
    Troisième raison : ce texte est choquant au plan social. La transformation de la prime à la création d'entreprise en avance remboursable pour les allocataires sociaux va dans le même sens que le gel de 70 % des crédits destinés aux entreprises d'insertion. Vous dites vouloir développer l'emploi et favoriser la création et le développement des entreprises, alors que vous étranglez les entreprises d'insertion. Que deviendront les trente mille salariés en difficulté qui sont réinsérés par ce biais dans la vie sociale ? Votre démarche néglige la cohésion sociale au profit de l'attractivité sur laquelle est fondée votre logique économique de diminution des charges et des impôts.
    Pour vous, l'indicateur fiscal est le seul qui vaille. Or plusieurs rapports très récents sont venus tordre le cou à cette rengaine de la perte d'attractivité de la France, que vous avez ressassée avant les élections présidentielles et législatives.
    M. Didier Migaud. Avec beaucoup de malhonnêteté !
    M. Gérard Bapt. Le rapport que le Conseil d'analyse économique vient de remettre au Premier ministre bat en brèche l'argument selon lequel la gestion socialiste aurait abouti à une perte importante de l'attractivité de notre pays.
    M. Didier Migaud. Mensonge de la majorité !
    M. Gérard Bapt. La France est le deuxième pays au monde pour l'accueil des capitaux étrangers - derrière la Chine, certes, mais devant les Etats-Unis. Parmi les facteurs d'attractivité, la fiscalité n'est pas le plus important. Comme le souligne dans le Figaro économie M. Lionel Fontagné, que l'on ne peut soupçonner de partialité, l'innovation est plus importante.
    De la même façon, le rapport du Conseil d'analyse économique indique qu'en matière d'attractivité les points positifs l'emportent sur les points négatifs. Ses auteurs notent qu'il faudrait toutefois mettre en oeuvre une réduction de l'impôt sur les sociétés pour revenir dans la moyenne européenne, mettre en place un statut fiscal avantageux pour les « impatriés », harmoniser les fiscalités en Europe, notamment en matière de stock options. Afin d'éviter les pièges des indicateurs composites, ils préconisent, proposition utile pour nos travaux et pour les citoyens, la publication annuelle d'un tableau de bord de la compétivité sous la forme d'un cahier d'indicateurs portant aussi bien sur l'éducation, l'innovation que les technologies de l'information et de la télécommunication en France et dans les autres pays. Ainsi éviterions-nous de nombreuses manipulations politiciennes qui conduisent à des mesures aussi injustes que celles que contient le texte contre lequel nous allons voter. (Applaudissements, sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Noël Mamère. Très bien !
    Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson, au nom du groupe UDF.
    M. Charles de Courson. Monsieur le secrétaire d'Etat, je confirme ce que j'avais dit en première lecture : il est rare qu'un ministre soit aussi ouvert à la discussion, aux amendements, de la majorité comme de l'opposition - qui n'a pas eu trop lieu de se plaindre.
    Didier Migaud a fait des réflexions tout à fait justes dans ses interventions. La compétitivité n'est pas, en effet, un phénomène purement fiscal. C'est un élement parmi d'autres déterminants beaucoup plus profonds.
    M. Didier Migaud. Mais je n'ai rien dit !
    M. Charles de Courson. Vous avez beaucoup écrit sur ce sujet dans vos rapports successifs.
    M. Didier Migaud. Merci de m'avoir lu !
    M. Augustin Bonrepaux. Vous devriez vous en inspirer !
    M. Charles de Courson. M. Bapt a repris ces arguments, mais il a commis l'erreur de ne pas poser la bonne question : quels facteurs l'Etat peut-il influencer ?
    M. Gérard Bapt. La recherche, les structures !
    M. Charles de Courson. Il peut influencer le cadre juridique, le cadre fiscal. Il peut essayer d'encourager l'innovation. Mais par-delà, il y a la volonté de créer. Voyez les peuples, les régions ; certains endroits sont extrêmement dynamiques alors que d'autres ne le sont pas. Les territoires des différents Etats ne sont absolument pas homogènes.
    M. Gérard Bapt. C'est une appréciation ethnique ! (Sourires.)
    M. Charles de Courson. C'est une appréciation, non pas ethnique, mais réaliste. Il suffit de regarder la réalité du territoire national français. C'est aussi valable aux Etats-Unis ou en Allemagne. Il n'y a absolument aucune homogénéité. C'est donc qu'il y a d'autres facteurs de créativité et de dynamisme : facteurs culturels, facteurs religieux... Relisez les grands sociologues.
    Ce texte va dans la bonne direction. Il favorisera la création d'entreprises. Je voudrais, une nouvelle fois, dire à nos collègues de gauche qu'ils sont vraiment, décidément, totalement ringards sur l'ISF. (Exclamation et rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Leur relation à l'argent est mauvaise et perverse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire). Et ils ne s'en rendent même pas compte ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Didier Migaud. Vous êtes ridicule !
    M. Charles de Courson. Et vous, vous pensez encore qu'il faut tuer les riches - comme disaient nos amis communistes. Mais non !
    Réjouissez-vous que des gens réussissent ! Réjouissez-vous qu'il y ait, dans notre peuple, des gens qui veulent créer. D'ailleurs, ce ne sont pas du tout ceux que vous croyez.
    M. Didier Migaud. Vous êtes grotesque !
    M. Charles de Courson. La grande masse de ceux qui créent ne sont pas, justement, les riches. Mais des personnes souvent modestes (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste),...
    M. Augustin Bonrepaux. Raison de plus !
    M. Charles de Courson. ... qui créent de petites structures. La plupart des grandes entreprises sont d'ailleurs nées de petites structures. Vous vous trompez sur la genèse de la richesse, car vous avez toujours été perdus devant ce problème simple : d'où vient la richesse ?
    M. Didier Migaud. C'est du délire total. Il est minuit, mais ce n'est pas une raison !
    M. Charles de Courson. Eh bien, chers amis, la richesse dépend avant tout d'une capacité d'aller de l'avant, de créer. Ce texte va dans la bonne direction et le groupe UDF le votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Vote sur l'ensemble

    Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?...
    Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
    (L'ensemble du projet de loi est adopté.)
    Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérale et à la consommation. Je remercie les députés de tous les groupes qui ont participé à ce débat constructif, et plus particulièrement les députés qui se sont exprimés au nom de leur groupe. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à zéro heure le jeudi 5 juin 2003, est reprise à zéro heure dix.)
    Mme la présidente. La séance est reprise.

2

LUTTE CONTRE LA VIOLENCE ROUTIÈRE

Discussion, en deuxième lecture, d'un projet de loi

    Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière (n°s 826, 865).
    La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
    M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, vous êtes saisis en deuxième lecture du projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière.
    Je me félicite, avec Gilles de Robien, qui ne peut malheureusement participer à nos débats, de l'état d'avancement de ce projet de loi.
    Moins de six mois après l'annonce des mesures arrêtées par le Gouvernement lors du comité interministériel de la sécurité routière du 18 décembre 2002, il y a tout lieu de penser que ce projet de loi pourrait être définitivement voté avant les grands départs pour les vacances d'été.
    Le travail accompli par les deux assemblées est remarquable en tous points.
    Tout d'abord, les améliorations apportées au texte du Gouvernement sont pertinentes, juridiquement opportunes et de nature à en faciliter l'application.
    Ensuite, je pense que nos concitoyens ont d'autant mieux compris le message que le Gouvernement leur adressait pour lutter contre la violence routière que ce projet a fait l'objet d'un très large consensus devant le Parlement.
    Je crois sincèrement que ce message de responsabilité a été entendu, puisque c'est le cinquième mois consécutif, depuis décembre 2002, que le nombre des tués sur les routes de France diminue.
    Je remercie tout particulièrement les deux rapporteurs, qui ont beaucoup oeuvré pour améliorer ce texte, et notamment M. Richard Dell'Agnola.
    Il fallait effectivement une volonté politique. Je crois qu'elle s'est manifestée. Notre objectif à tous est désormais d'inverser cette courbe de manière continue.
    L'originalité de ce projet de loi réside dans la politique globale de sécurité routière - éducative et répressive - qu'il met en oeuvre.
    S'agissant du permis probatoire, le travail effectué par le Gouvernement et le Parlement a permis d'aboutir à un dispositif que je crois équilibré.
    La réduction du nombre de points affecté au permis de conduire du conducteur novice et l'espoir de récupérer la totalité de son capital de points au terme de sa durée de probation incitera fortement ce dernier à conduire avec la plus grande prudence dans le respect des règles.
    L'obligation de suivi du stage de sensibilisation à la sécurité routière dès la commission d'une infraction entraînant une perte de trois points, contre quatre aujourd'hui, et la possibilité de reconstituer éventuellement, grâce à ce stage, la totalité de son capital de points, renforcera le caractère pédagogique de ce dispositif.
    S'agissant du régulateur de vitesse, le Gouvernement partage la volonté du Sénat d'installer sur les véhicules des dispositifs qui responsabilisent le conducteur, notamment en l'aidant à respecter les limitations de vitesse, même si nous souhaitons plutôt promouvoir le dispositif du limiteur de vitesse, seul actuellement homologué au niveau européen, et qui paraît offrir plus d'intérêt au regard de la sécurité.
    Je tiens à vous assurer de la volonté du Gouvernement de défendre la généralisation de ce type d'équipement, sur l'ensemble des véhicules, et cela dans les meilleurs délais.
    Cette généralisation, vous le savez, nécessite au préalable une action de concertation et de persuasion au niveau européen, à laquelle Gilles de Robien s'emploiera dès demain lors du Conseil des ministres des transports de l'Union européenne, dont l'ordre du jour abordera le programme d'action européen pour la sécurité routière d'ici à 2010.
    Mais elle nécessite aussi une forte implication des constructeurs et des importateurs d'automobiles, que le Gouvernement s'engage à réunir sur ce sujet.
    Concernant l'autre volet du projet, je vous livre ma conviction, en qualité de ministre de la justice, que le droit pénal et la procédure pénale ont leur place dans le combat que notre société engage contre la violence routière, même s'ils ne sauraient constituer les seules réponses à ce fléau.
    Les principales dispositions pénales de ce projet sont de deux natures : certaines seront immédiatement applicables, d'autres nécessiteront un bref délai d'application.
    Les mesures immédiatement applicables sont d'abord des aggravations de peines en cas d'accident mortel ou corporel de la circulation routière. Je rappelle simplement que les nouvelles dispositions - insérées, pour une meilleure lisibilité, dans le code pénal - prévoient une aggravation significative en cas d'accident mortel ou corporel causé par l'imprudence d'un conducteur.
    Les peines seront notamment aggravées lorsque les faits seront commis avec l'une des six circonstances aggravantes que vous connaissez et qui caractérisent, de la part du conducteur, une faute d'une particulière gravité.
    Les peines seront à nouveau aggravées, éventuellement, par les magistrats, si deux ou plus de ces circonstances sont réunies.
    La suppression de la possibilité, pour les infractions les plus graves, d'aménager la peine de suspension du permis de conduire est également d'application immédiate. Il s'agit d'une mesure très importante du projet de loi, qui a d'ailleurs été votée dans les mêmes termes par les deux assemblées en première lecture. Elle a vocation à entraîner un changement de comportement des usagers de la route.
    Les dispositions renforçant la répression des infractions commises en récidive et les dispositions créant ou étendant certaines peines complémentaires sont également d'application immédiate.
    Pour le reste, dès la publication de la loi au Journal officiel, j'adresserai aux procureurs généraux une circulaire d'application pour appeler leur attention sur les dispositions qui entrent immédiatement en vigueur et je leur demanderai de faire preuve de fermeté dans leur mise en oeuvre.
    D'autres dispositions pénales de la loi supposent la publication de décrets ou d'arrêtés d'application. Il s'agit principalement des dispositions relatives au renforcement de l'efficacité de la procédure de l'amende forfaitaire - point très important - , de la mise en place des contrôles automatisés et des dispositions concernant la consignation.
    Il s'agit également des dispositions créant les peines complémentaires de suivi d'un stage de sensibilisation à la sécurité routière et d'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur.
    L'élaboration de ces décrets d'application, sur lesquels mes services travaillent d'ores et déjà, sera aussi rapide que possible.
    Ces décrets viendront compléter celui du 31 mars 2003, qui a notamment anticipé en partie la nouvelle loi. Il a en effet étendu le champ de la procédure de l'amende forfaitaire et a constitué le décret d'application de la loi du 3 février 2003 sur l'usage de stupéfiants au volant issue de la proposition de loi de M. Dell'Agnola, dont le présent texte est une forme de prolongement. La circulaire concernant ces premiers textes doit être adressée aux juridictions dans les prochains jours.
    Un groupe de travail interministériel se réunit par ailleurs très régulièrement depuis plusieurs mois pour régler les différents problèmes pratiques liés à l'extension de l'automatisation des contrôles. Il ne devrait ainsi y avoir aucun retard dans l'utilisation des premiers appareils automatiques que le Gouvernement s'est engagé à installer d'ici à la fin de cette année.
    Ainsi, un an à peine après l'annonce par le Président de la République, lors de son allocution du 14 juillet 2002, de son intention de faire de la sécurité routière un des trois grands chantiers de son quinquennat, les résultats sont là.
    Ce projet de loi répond à une attente forte et légitime des Français, chez qui on peut déceler une véritable prise de conscience de l'importance et de la gravité de la délinquance routière.
    Le Gouvernement est conscient que la lutte contre la violence routière s'inscrira dans le temps et nécessitera, au-delà du vote de cette loi, une mobilisation constante des autorités concernées, et tout spécialement de l'institution judiciaire. C'est pourquoi le Premier ministre a pris l'engagement de réunir tous les trois mois un comité interministériel de la sécurité routière pour faire le point avec les ministres concernés sur l'état d'avancement des mesures précédemment arrêtées et fixer de nouveaux objectifs en fonction des résultats obtenus.
    C'est ainsi que devrait être très prochainement examiné l'état d'avancement du projet d'automatisation du système « contrôle sanction ».
    Ce projet de loi doit maintenant entrer en vigueur le plus vite possible, car nous sommes tous d'accord sur la nécessité de conforter les évolutions positives observées ces derniers mois. C'est pourquoi je vous demande d'adopter ce projet. Je vous en remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues. Il y a presque un an, le 14 juillet 2002, le Président de la République plaçait la sécurité routière parmi les trois chantiers prioritaires de son quinquennat. Depuis cette date, le nombre de morts sur les routes n'a cessé de diminuer dans notre pays : 7 250 tués en 2002 contre plus de 8000 en 2001.
    Si les résultats enregistrés de manière continue depuis cinq mois se confirment, le bilan de l'année 2003 pourrait être de l'ordre de 5 500 morts, soit la plus forte baisse depuis 1975, date des premières mesures prises par le Gouvernement concernant la vitesse et l'alcool au volant.
    Ces résultats sont le fruit de l'annonce par le Gouvernement de mesures fortes décidées lors du comité interministériel du 18 décembre 2002, de la publicité qui en a été faite par les médias et des contrôles routiers concernant la vitesse et l'alcool qui, dans le même temps, ont augmenté de 30 %.
    Toutes les mesures du CISR se retrouvent dans le présent projet de loi qui revient en deuxième lecture devant notre assemblée. Il vise, d'une part, à renforcer l'efficacité de la justice pénale dans le traitement du contentieux routier et, d'autre part, à améliorer la prévention des risques d'accident, en responsabilisant davantage les conducteurs novices et les récidivistes.
    Lors de la discussion en première lecture le 19 mars dernier, l'Assemblée nationale a approuvé le dispositif proposé par le garde des sceaux et le ministre de l'équipement et des transports, en y apportant quelques modifications qui ont enrichi le texte. Par la suite, le Sénat a poursuivi cette démarche constructive, en adoptant des amendements qui ne remettent pas en cause l'architecture globale du projet. Ces modifications claires et cohérentes ont permis d'améliorer sensiblement le texte. Permettez-moi de saluer la qualité des travaux réalisés par la Haute Assemblée, et notamment par le rapporteur Lucien Lanier.
    A ce stade de la navette, le Sénat a adopté vingt-deux articles sans modification sur les quarante issus du texte voté par l'Assemblée nationale. Ont notamment été adoptés conformes la nouvelle infraction d'homicide involontaire à l'occasion de la conduite d'un véhicule ; la suppression de la possibilité, pour certaines infractions, d'aménager la peine de suspension du permis de conduire - c'est la fin des « permis blancs » - ; l'aggravation des peines pour les délits routiers les plus graves : homicides et blessures involontaires ; le permis probatoire pour les conducteurs novices ; la sensibilisation aux notions élémentaires de premiers secours ; ou encore l'interdiction des matériels de débridage des cyclomoteurs et des détecteurs de radars. Comme vous le constatez, les principales dispositions du projet de loi figurent bien dans le texte adopté par le Sénat.
    En revanche, les sénateurs ont apporté quelques modifications sur le fond. J'en citerai trois principales.
    Tout d'abord, le Sénat a étendu le principe de la responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule, prévu à l'article 7 du projet de loi, aux contraventions aux règles d'acquittement des péages, afin de permettre la mise en place de nouvelles modalités de paiement sur les autoroutes. Cette disposition permettra de développer le télépéage et de fluidifier ainsi le trafic autoroutier. A cette occasion, le Gouvernement a proposé d'étendre ce principe aux titulaires de cartes grises étrangères. Les conducteurs étrangers, qui échappaient jusqu'à présent aux poursuites, pourront désormais être incriminés.
    Ensuite, le Sénat a prévu, de manière explicite, le principe d'une compensation financière à l'obligation faite aux collectivités locales d'établir des statistiques relatives au réseau routier dont elles assurent la gestion. Cette nouvelle rédaction de l'article 16, approuvée par la commission des lois, rappelle le principe constitutionnel de compensation des charges pour tout transfert de compétences.
    Enfin, les sénateurs ont modifié les dispositions relatives à l'encellulement individuel en maison d'arrêt prévues à l'article 24. Ils ont maintenu ce principe mais ont fixé un délai de cinq ans pour son application. C'est une solution de compromis acceptable par tous.
    M. René Dosière. Très bien ! Nous l'avions réclamée !
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Si l'encellulement individuel doit en effet rester un objectif à atteindre pour des raisons de dignité humaine, force est de reconnaître qu'une mise en oeuvre immédiate est difficile. Le plan de construction de prisons présenté par Pierre Bédier, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice, illustre la détermination du Gouvernement à atteindre cet objectif.
    Le Sénat a apporté d'autres modifications, sous forme d'articles additionnels qui confortent le texte. Il a ainsi prévu la possibilité de prononcer une peine de stage de sensibilisation à la sécurité routière en matière contraventionnelle, et non plus seulement délictuelle. Il a donné une base légale aux sanctions prononcées à l'encontre des chauffeurs de taxi et des titulaires d'autorisations de stationnement. Il a également aggravé, sur proposition du Gouvernement, les sanctions en cas de stationnement sur les places réservées aux personnes handicapées.
    En outre, les sénateurs ont permis, dans l'article 27 nouveau, le renouvellement des membres du Conseil de prévention et de lutte contre le dopage. Cette disposition, sans lien avec le projet de loi, présente un caractère d'urgence, puisque le mandat des membres actuels vient à expiration au cours de ce mois de juin.
    Par ailleurs, le Sénat a précisé l'attribution et le produit des amendes perçues lors des contrôles automatisés. L'article 7 bis A nouveau prévoit que le produit de ces amendes servira à financer les investissements des appareils de contrôle automatique. Cette précision répond aux interrogations formulées par plusieurs membres de notre assemblée lors de l'examen en première lecture.
    Enfin, les sénateurs ont apporté deux modifications plus substantielles : d'une part, la suppression du délit d'interruption involontaire de grossesse...
    M. René Dosière. Ils ont eu raison !
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. ... et, d'autre part, l'obligation d'installer un régulateur de vitesse sur les véhicules neufs - deux points sur lesquels il convient de revenir plus longuement.
    Le Sénat a supprimé les articles 2 bis et 6 bis créant un délit d'interruption involontaire de grossesse, introduit en première lecture par notre assemblée. La Haute Assemblée a en effet considéré que cette question, qui dépasse le simple cadre de la sécurité routière, devait faire l'objet d'un examen distinct.
    M. René Dosière. Elle a eu raison !
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Sur proposition de notre collègue Jean-Paul Garraud, la commission des lois a rétabli cette disposition, contre l'avis du rapporteur. Il est vrai que cet amendement comble un vide juridique dénoncé par la Cour de cassation, par les professionnels du droit et par les parents des victimes d'accident.
    Mme Catherine Génisson. Non !
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Contrairement à ce que certains ont pu craindre, cette disposition n'ouvre pas un débat sur la vie et sur le statut de l'embryon.
    M. René Dosière. Mais si !
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Il reste que ce projet de loi devrait être adopté dans les meilleurs délais, et c'est la raison pour laquelle votre rapporteur a souhaité un vote conforme sur l'ensemble du texte.
    La deuxième disposition qui fait débat concerne le régulateur de vitesse. Le Sénat a en effet prévu, dans un article 12 AA, que tous les engins terrestres à moteur vendus neufs devraient désormais être équipés d'un régulateur de vitesse. Trois observations : cette disposition revêt un caractère réglementaire ; le terme même de « régulateur » n'a pas été précisé juridiquement ; et, surtout, ce dispositif n'est pas prévu par la réglementation européenne. Cependant, l'absence de sanctions rend, de facto, cette obligation théorique. Dans ces conditions, et compte tenu, là encore, de l'urgence que revêt le vote de ce texte, la commission des lois n'a pas jugé utile de supprimer cette disposition.
    Le projet de loi soumis aujourd'hui à notre assemblée est un texte équilibré et cohérent. Certaines de ses dispositions ont fait l'objet de débats, qui ont débouché sur des compromis satisfaisants, notamment en ce qui concerne l'encellulement individuel. Il est important que ce texte soit adopté et appliqué sans tarder, compte tenu de la priorité que le Gouvernement accorde à la lutte contre la violence routière, comme le rappelait à l'instant le garde des sceaux.
    A côté de ce volet législatif, le Gouvernement a complété le dispositif par des mesures d'ordre réglementaire. C'est ainsi que le décret du 29 mars 2003 crée une nouvelle infraction d'usage du téléphone portable au volant et sanctionne de trois points l'absence de casque ou de ceinture de sécurité. Le Gouvernement a également prévu, lors du comité interministériel du 31 mars, l'immatriculation des cyclomoteurs à partir du 1er janvier prochain. Cette mesure répond aux interrogations formulées par plusieurs membres de notre assemblée lors de l'examen en première lecture. Un nouveau comité interministériel doit se tenir au tout début du mois de juillet.
    Une politique ambitieuse a été lancée par le Gouvernement pour faire reculer durablement l'un des fléaux les plus inacceptables de notre temps. Les premiers résultats obtenus sont encourageants. Il importe que le Gouvernement, qui a montré toute sa détermination, poursuive l'effort engagé en consolidant les moyens consacrés à la lutte contre la violence routière dans le projet de loi de finances pour 2004. Il est tout aussi essentiel que le Gouvernement procède à une évaluation permanente du dispositif mis en place, et en rende compte régulièrement à la représentation nationale.
    Le regard de notre société sur la violence routière est en train de changer, les mentalités évoluent et, avec elles, notre vocabulaire quotidien : ainsi les mots « fatalité » et « hasard », qui étaient souvent employés, sont de plus en plus souvent remplacés par ceux de « responsabilité » et de « faute ». Pour la première fois, les victimes de la route sont placées au coeur du dispositif mis en place par les pouvoirs publics. Il nous appartient aujourd'hui d'accompagner ce changement engagé par les associations qui oeuvrent depuis longtemps dans ce domaine et auxquelles je veux rendre hommage ici.
    Avec ce texte, nous donnons au Gouvernement les moyens de concrétiser les mesures annoncées, et ainsi de faire reculer durablement la violence routière. Je vous invite donc, au nom de la commission des lois, à adopter ce projet de loi en termes conformes, et à permettre ainsi une application rapide de ses dispositions.

Discussion générale

    Mme la présidente. Mes chers collègues, nous abordons la discussion générale. Compte tenu de l'heure, je serai assez rigoureuse, chacun le comprendra, sur les temps de parole.
    La parole est à M. Hervé Mariton, pour dix minutes.
    M. Hervé Mariton. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, c'est une conviction partagée qui nous anime dans l'examen de ce projet de loi. Le débat en première lecture l'a montré. Les échanges de nos collègues sénateurs l'ont confirmé. Cette conviction nous rassemble très largement sur tous les bancs, l'accord sur ce texte s'impose et, à dire vrai, les divergences partisanes, qui n'étaient pas apparues dans le débat de fond mais qui s'étaient tout de même manifestées au moment du vote lors de la première lecture, étaient assez navrantes. Nous nous permettons d'espérer qu'aujourd'hui tous les groupes de l'Assemblée voteront ce projet.
    Conviction partagée parce que chacun comprend que l'action pour la sécurité routière, qui s'accentue au fil des mois, comporte plusieurs dimensions. Le partage de cet enjeu suppose en effet que l'on y réponde par des initiatives nouvelles, tant vis-à-vis des conducteurs que s'agissant des véhicules ou des infrastructures.
    Le texte que vous nous proposez, monsieur le ministre, évoque principalement l'action à l'égard des conducteurs. Rappelons que, s'agissant des véhicules ou des infrastructures, des progrès importants méritent encore d'être faits. Les constructeurs automobiles, s'ils s'expriment pour eux-mêmes, participent encore trop peu, hélas, au débat d'ensemble sur ces sujets. Quant aux infrastructures, les collectivités publiques, de quelque nature qu'elles soient, ne sont pas exonérées de contribuer à un mieux pour la sécurité routière.
    Il y a bientôt un an que ce débat a pris dans notre pays une intensité particulière. Chacun comprend aujourd'hui que ce rendez-vous de l'année sera aussi un moment difficile de l'évaluation, car si, depuis un an, mois après mois, les chiffres font apparaître un progrès sur l'année antérieure, lorsque l'on entrera dans la deuxième année, le progrès sera évidemment plus difficile à accomplir, une bonne partie du chemin ayant été déjà parcourue. Mais c'est à l'aune de cette difficulté que la constance et la réalité de l'effort pourront être mesurées.
    Il sera alors important, monsieur le ministre, de bien s'assurer de la réalité de l'effort entrepris par les pouvoirs publics. Personne ici ne sous-estime la difficulté de certaines procédures que vous lancez. Elles sont indispensables, utiles, intelligentes, mais ne doivent pas, demain, buter sur des obstacles matériels que l'on peut fort bien imaginer, comme les problèmes d'accès aux fichiers et de connaissance précise des points. Ces difficultés-là ne sont pas si faciles à régler, mais nous sommes sûrs que, dans quelques mois, des progrès importants auront été réalisés.
    Le rapporteur a rappelé à juste titre que, pour témoigner de la réalité de la politique qu'il mène, le Gouvernement a, depuis quelques semaines, pris diverses dispositions réglementaires, sur lesquelles il s'était d'ailleurs engagé devant l'Assemblée, par exemple sur la répression de l'usage du téléphone au volant ou sur l'obligation d'immatriculation des cyclomoteurs.
    Après un an de mise en oeuvre, monsieur le ministre, il importe plus que jamais de s'assurer de la cohérence de cette politique, d'autant que, chaque fois que l'on évoque tel ou tel point précis, on se rend compte du chemin qu'il reste encore à parcourir avant que les conducteurs de tous les types de véhicules se sentent concernés. A cet égard, le Gouvernement a édicté l'obligation du port de la ceinture de sécurité dans les poids lourds. Il s'agit d'une bonne décision car il n'y a pas de raison que telle catégorie de conducteurs soit exonérée et non telle autre. Il faudra cependant faire en sorte que les sanctions soient également appliquées à tous les chauffeurs, français ou étrangers. La logique de ce texte est en bonne part répressive, ce qui est normal, mais celui-ci procède aussi d'une logique de responsabilité, qui, au fil des mois, devra s'imposer et venir compléter le dispositif qui nous est proposé ce soir.
    Il est un sujet auquel je me suis attaché pendant le débat en première lecture et sur lequel le Sénat a rebondi : il s'agit de l'affectation du produit des amendes. A cet égard, la Haute Assemblée a en effet précisé que, par dérogation au code général des collectivités territoriales, le produit des amendes obtenues grâce aux appareils de contrôle automatique ou dans le cadre de la chaîne automatique contrôle-sanction serait attribué à l'Etat pour financer sa politique de sécurité routière. Je me permets de souligner - car cela constitue une forme de réponse à la question que j'avais posée en première lecture - qu'en adoptant cette disposition le Sénat a implicitement, mais clairement confirmé l'interprétation, à dire vrai assez logique et évidente, des dispositions actuelles du code général des collectivités territoriales, qui dispose que la totalité du produit des amendes est destinée aux collectivités territoriales.
    En effet, si l'on édicte une exception, cela signifie que le principe général est confirmé. Or vous savez, monsieur le garde des sceaux, que, depuis vingt ans, ce principe général n'est pas appliqué. En vingt ans les collectivités territoriales ont ainsi été privées de 10 milliards d'euros, qui sont restés dans les caisses de l'Etat. Il faudrait donc que, au-delà de l'affectation précisée à titre exceptionnel par le Sénat, l'Etat respecte strictement les dispositions législatives en vigueur.
    M. René Dosière. C'est ce que la Cour des comptes avait réclamé.
    M. Hervé Mariton. La logique de responsabilité est aussi suivie avec le rôle donné au nombre de points détenus par les conducteurs dans le calcul du tarif de la police d'assurance ; j'y reviendrai à l'occasion d'un amendement.
    Monsieur le garde des sceaux, vous nous présentez une action déterminée et équilibrée qui permettra de mener une politique de sécurité routière par tous et pour tous que nous approuvons pleinement.
    Pour terminer, je veux formuler une observation de procédure. Nous avons certes bien compris que, pour des raisons d'efficacité qui sont comprises sur tous les bancs de cette assemblée, le Gouvernement souhaite obtenir un vote conforme de l'Assemblée, afin que ce texte puisse entrer en vigueur rapidement. Cela signifie cependant que, pour certains amendements - je pense en particulier à celui déposé par notre collègue Jean-Paul Garraud -, le dernier mot est donné au Sénat, ce qui, dans l'absolu, n'est pas, institutionnellement, un schéma tout à fait idéal.
    M. René Dosière. En effet !
    M. Hervé Mariton. Sans doute le calendrier commande-t-il que ce texte soit voté et mis en oeuvre rapidement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, on ne peut commencer une intervention sur ce texte sans souligner l'importance du changement de comportement des conducteurs. Il vient de se traduire - vous l'avez rappelé, monsieur le ministre -, par une diminution considérable du nombre des tués et des accidentés de la route ; je dirais presque par une rupture très sensible avec le passé. Même s'il n'est pas encore possible de retenir une explication totalement satisfaisante de ce phénomène qui commence, fort heureusement, à durer, on peut tout de même penser que la peur du gendarme a joué. En effet, les Français voient de plus en plus souvent policiers et gendarmes et davantage de contrôles.
    Cependant, il y a également eu un changement dans la perception des accidents de la route. Cela a commencé pendant la campagne électorale, et il suffit de se rappeler l'attitude des Français et leur réserve, pour ne pas dire leur hostilité au regard de l'amnistie annoncée. Ce changement d'opinion a été fortement accentué par le fait que le Président de la République, puis les ministres ont mis cette cause au premier rang de leurs préoccupations.
    Enfin, ce changement de mentalité des Français est aussi un hommage au travail accompli, depuis longtemps, par les associations qui luttent pour améliorer la sécurité routière.
    Il nous appartient de faire en sorte que ce changement soit durable. A cet égard, il convient dans l'immédiat - comme l'a souligné le rapporteur - d'adopter ce texte avant l'été. Chacun sait, en effet, que, en matière d'accidents de la route, les mois de juillet, août et septembre sont parmi les plus meurtriers. L'adoption et la mise en application rapide de ce texte constituerait un signal fort pour essayer de prolonger cette tendance durant l'été. Pour cela, l'Assemblée doit émettre un vote conforme.
    A ce propos, l'orateur précédent a regretté que le groupe socialiste ait voté contre en première lecture. Je dois donc rappeler, car il ne semble pas avoir écouté mon explication de vote, que, s'il ne s'était agi que de lutte contre l'insécurité routière, nous aurions voté pour. Mais le texte comportait alors deux dispositions étrangères au sujet ; il s'agissait de véritables cavaliers.
    La première avait d'ailleurs été au centre de la défense d'une motion d'irrecevabilité par notre collègue Jacques Floch. Si le Sénat n'avait pas retenu sa suggestion et supprimé l'article relatif à l'enseignement individuel, nous aurions déféré ce texte au Conseil constitutionnel. Dès lors que le Sénat a adopté une position de sagesse, en maintenant certes le principe de l'enseignement individuel, mais en prolongeant le délai, et, dans l'attente des possibilités matérielles, nous n'avons plus d'objection.
    La seconde, également supprimée par le Sénat, est reprise dans l'amendement de M. Garraud, qui a malencontreusement été réaccepté par la commission. J'espère que l'Assemblée, dans sa sagesse, suivra le Sénat qui a considéré, après nous d'ailleurs, que cette disposition n'avait rien à faire dans un projet concernant la sécurité routière.
    Tels étaient les deux motifs pour lesquels nous avions voté contre le projet en première lecture. Pour le reste, nous étions tout à fait d'accord, même si nous émettions certaines réserves, fondées essentiellement sur le fait que le texte était déséquilibré avec environ 90 % de répression et seulement 10 % de prévention. Nous aurions souhaité un meilleur équilibre, mais ce n'est pas une raison pour nous y opposer.
    Je formulerai simplement deux regrets.
    Le premier est que rien n'est prévu pour la normalisation des infrastructures routières. A cet égard, les efforts que j'avais entrepris pour faire voter un amendement en ce sens n'ont pas été couronnés de succès. Faut-il y voir encore une conséquence du cumul des mandats, qui fait que les présidents de conseil général qui sont par ailleurs des parlementaires n'aiment pas se voir imposer des charges, même s'ils n'hésitent pas à en donner aux autres ? En effet, je ne vois pas pourquoi, en matière de sécurité routière, tous les efforts devraient être consentis, par exemple, par les constructeurs automobiles et qu'aucun effort de normalisation des infrastructures dont les collectivités sont responsables ne soit accompli. Chacun doit assumer ses responsabilités de la même manière. Peut-être cela viendra-t-il plus tard !
    S'agissant des amendes, je ne peux que soutenir le point de vue exprimé par l'orateur précédent, en appelant simplement votre attention, monsieur le ministre - même si cela ne relève pas directement de votre compétence, mais vous représentez le Gouvernement -, sur le fait que, si leur produit est réparti au prorata du nombre des contraventions dressées, il ne faudrait pas que l'augmentation du nombre de contraventions liée au contrôle automatique pertube la répartition et la distribution des sommes. Il faudra veiller à ce que le produit de ces nouvelles amendes soit parfaitement isolé des autres.
    Pour l'avenir, j'émettrai trois souhaits.
    Le premier est, naturellement, que la loi soit appliquée rapidement. Il faudra en particulier - car je ne doute pas de la volonté du Gouvernement - que la procédure normalisée et automatique de la sanction soit effectivement mise en oeuvre dans les délais les plus rapides, et que nous puissions suivre son application. Nous y serons attentifs.
    Ensuite, je veux souligner que, en matière de lutte contre l'insécurité routière, la politique de communication est fondamentale comme de nombreux exemples étrangers - je pense notamment à l'Espagne - le montrent. S'il est vrai que, depuis les déclarations du chef de l'Etat et des ministres, la prise de conscience de la presse a fait que nous avons eu, depuis de nombreux mois, des campagnes de communication quasiment gratuites, ce temps sera bientôt révolu. Il est donc souhaitable que cela soit rapidement relayé par une politique de communication - qui sera malheureusement payante et coûteuse - régulière tout au long de l'année.
    De ce point de vue, vous disposez d'une étude qui fait apparaître que la France dépense actuellement vingt centimes d'euros par conducteur pour sa communication routière contre un euro en Espagne. Autrement dit, il faudrait multiplier par cinq les crédits nécessaires à cette communication. Cela est essentiel, car c'est ainsi que l'Espagne a réussi à provoquer une rupture dans le nombre d'accidents de la route.
    Enfin, je suggère que, pour le plus long terme, on essaie d'instaurer une sorte de compétence partagée entre l'Etat et les conseils généraux en matière de sécurité routière. En effet, 75 % des accidents de la route ont lieu dans le département d'immatriculation, et souvent à proximité du domicile, c'est-à-dire dans le canton de résidence. Or, bientôt, les conseils généraux seront responsables de la quasi-totalité du réseau routier sur lequel les accidents sont les plus nombreux. Il serait donc tout à fait légitime qu'ils assument une part plus grande dans la politique de lutte contre l'insécurité routière.
    Cela leur permettrait de donner un cadre plus précis aux diverses initiatives qui sont d'ores et déjà prises dans certains départements et dans de nombreuses communes, voire d'organiser un débat annuel sur la sécurité routière qui serait relayé par la presse locale et régionale, dont je rappelle qu'elle a un nombre de lecteurs infiniment plus élevé que la presse nationale, donc un impact beaucoup plus sensible.
    Il s'agit certes d'une démarche à plus long terme, mais je suis persuadé que les conseils généraux sont des instances parfaitement adaptées pour s'occuper d'information et de prévention en la matière.
    La lutte contre l'insécurité routière exige un changement profond des mentalités dans le rapport de chacun à l'automobile. C'est en poursuivant la réflexion sur la place de l'automobile dans notre société et, plus généralement, sur la politique des transports, que nous pourrons lutter de façon durable contre l'insécurité routière. Dans cette lutte, nous serons à vos côtés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme la présidente. La parole est à M. GilbertGantier.
    M. Gilbert Gantier. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, au moment où nous abordons ce texte relatif à la lutte contre la violence routière, je crois nécessaire de saluer les premiers résultats favorables de ce vaste chantier. Bien sûr, il nous faut rester modestes et ne pas verser dans le triomphalisme excessif. En la matière, nous nous devons de rester humbles car, même si les chiffres récents, que le ministère nous a communiqués, sont excellents - je souligne la réduction de 30 % du nombre des tués -, il y a et il y aura toujours trop de morts sur la route. Toutefois, de chiffres inacceptables nous sommes arrivés à des chiffres encourageants laissant entrevoir une diminution très sensible du nombre des tués.
    Malgré les progrès techniques considérables des véhicules, malgré des infrastructures dans l'ensemble de meilleure qualité, il n'en reste pas moins que ces chiffres étaient scandaleux et faisaient de la France l'un des plus mauvais élèves de l'Europe. Cependant, lorsque l'on décide de s'attaquer à un problème et que l'on s'en donne les moyens, les résultats ne se font pas attendre. Nous les observons.
    Quelles sont, mes chers collègues, les raisons d'une telle réussite, même si ce mot me gêne un peu dans la mesure où nous arrivons à une situation tout juste acceptable au regard des chiffres européens ? En tout cas nous ne saurions considérer qu'il s'agit d'un exploit.
    Tout d'abord, il ne faut pas négliger l'attitude plus responsable de nos concitoyens qui ont pris conscience de la gravité de la situation, prise de conscience d'ailleurs relayée par les médias. Les chiffres répétés inlassablement, les campagnes de publicité pour la sécurité routière diffusées régulièrement, les images chocs, tout cela a fini par marquer les esprits.
    Dans un deuxième temps, je crois qu'il faut féliciter notre ministre de l'équipement et des transports qui a su prendre les mesures nécessaires et radicales pour commencer à éradiquer le fléau de la mortalité routière. Tous les efforts engagés dans cette lutte ont déjà porté des fruits et continueront à le faire si nous restons vigilants. Ne nous arrêtons donc pas en si bon chemin.
    Essayons dès lors d'entrer un peu plus dans les détails de l'action entreprise puisqu'elle a eu un impact déjà relativement important.
    Les mesures préconisées par le comité interministériel sur la sécurité routière, ainsi que la campagne d'images chocs, ont eu un effet immédiat puisque, alors que ces actions ont été engagées seulement à la fin de l'année 2002, des chiffres encourageants nous sont parvenus dès le mois de février dernier.
    En outre, l'aspect peur du gendarme ne doit pas être considéré comme un phénomène mineur. En effet, les moyens mis en oeuvre sur le terrain ont eu, il faut le constater et l'admettre, un effet dissuasif sur les chauffards. Continuant dans cette même logique, vous avez soumis à la représentation nationale un texte permettant de renforcer la sécurité routière. Il s'agissait d'adapter notre législation dans les domaines de la prévention comme dans ceux de la formation et de la répression. A ce propos, permettez-moi, monsieur le garde des sceaux, puisque nous avons le privilège de vous avoir parmi nous, d'être encore plus précis sur un point et d'exprimer mon inquiétude sur ce que j'appellerais l'espace de surenchère pénale que votre texte propose.
    En effet, malgré l'effet peur du gendarme, malgré l'adage « la dissuasion passe par la répression », la réponse pénale, si elle doit exister, ne doit pas être systématique face à tous les maux qui nous frappent. Il faut ralentir l'inflation législative en la matière. A chaque problème ne correspond pas nécessairement un nouveau délit et toute actualisation des textes existants ne doit pas se traduire systématiquement par une augmentation des peines encourues.
    On offre trop souvent sur l'autel des remèdes des sacrifices qui se traduisent nécessairement par des sanctions accrues. La surenchère pénale ne doit pas être exagérée. Il faut envisager les problèmes de manière plus globale sans opérer chaque fois un traitement chirurgical ponctuel et local. Il y va de la cohérence de notre droit et de la crédibilité de tout notre système.
    La légendaire peur du gendarme, la prise de conscience collective et individuelle liée à la diffusion de campagnes de communication ont eu, semble-t-il, de biens meilleurs effets que le durcissement de la répression. C'est pourquoi le groupe UDF a souhaité s'inscrire dès la première lecture de ce projet de loi dans une logique d'éducation routière. Il semble en effet opportun de mettre en oeuvre rapidement une réforme de l'apprentissage de la conduite.
    En la matière, des solutions sont proposées régulièrement pour tester de nouvelles méthodes d'apprentissage à la conduite en incluant notamment une conduite sur circuit dès les premières heures de cours, en rendant obligatoires des stages de maîtrise du véhicule en situation d'urgence, en revoyant la formation des professeurs d'auto-écoles.
    En outre, nous sommes favorables au développement de l'éducation routière dès l'école afin d'augmenter considérablement le nombre d'heures dispensées par l'enseignement. Si l'on veut changer les mentalités et aboutir à une véritable citoyenneté de la route, il faut prendre les choses en main dès le plus jeune âge du citoyen.
    Nos voisins européens l'appliquent avec succès, notamment outre-Rhin. L'instauration du brevet de sécurité routière constitue une étape notable dans ce processus. Il faut non seulement persévérer dans cette voie mais proposer parallèlement de nouvelles mesures afin d'instituer une éducation routière à l'image de l'éducation civique. Il convient en effet de développer chez les jeunes Français, qui, je le rappelle, constituent la catégorie la plus touchée par la mortalité routière, un véritable civisme de la route. Mais l'éducation nationale ne peut porter à elle seule toute la responsabilité de la prévention routière. Il est nécessaire, parallèlement, d'améliorer les infrastructures, quelquefois insuffisantes, de sécuriser les routes et particulièrement leurs abords. Cela se révèle nécessaire lorsque l'on constate le manque de respect dont font preuve certains automobilistes envers les piétons, notamment. Marcher dans la rue devient quelquefois plus dangereux que de rouler en voiture ! On ne doit plus voir ces énumérations de faits divers où des piétons, ou des cyclistes, sont victimes de chauffards qui ont confondu les couloirs de bus avec des circuits automibiles. Un véritable combat de l'homme contre la machine s'installe et, en attendant que les mentalités évoluent, il serait peut-être bon de prévoir le développement d'infrastructures permettant notamment de protéger les piétons.
    Le groupe UDF votera bien entendu ce texte.
    Mme la présidente. La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, qui ne souhaite l'adoption d'une politique efficace en matière de sécurité routière ? Qui ne souhaite voir les chiffres des tués et des blessés sur les routes de France diminuer ?
    Pourtant, ce que nous pouvons appeler un consensus autour de la priorité donnée à la lutte contre l'insécurité routière n'implique pas forcément une lecture identique des actions à mener dans ce domaine. Le problème est que la discussion de ce projet visant à lutter contre la violence routière prend une dimension particulière, et malheureusement contraire à notre vision de la sécurité routière.
    Le terme même de « violence routière » au lieu de « sécurité routière » indique immédiatement l'orientation prise par le Gouvernement en la matière.
    Ce terme impliquerait que les conducteurs d'automobile sont par essence violents ; nous avons même entendu l'expression « assassins de la route ». Bien que la jurisprudence ait estimé que la voiture peut être considérée comme une arme, être un assassin suppose d'avoir prémédité son acte meurtrier, ce qui est quand même loin d'être le cas en matière d'accidents de la route.
    Nous ne cherchons pas à exonérer de leur responsabilité les conducteurs qui prennent le volant en état d'ivresse, par exemple. Mais il y a une différence entre être un chauffard et un assassin.
    Quant aux conducteurs, nous le savons tous, ils ne s'estiment pas violents. Selon nous, c'est donc sur un autre terrain que celui de l'aggravation de la sanction qu'il faut agir. Avec cet intitulé, il est même fort possible que certains automobilistes ne se sentent absolument pas concernés par les mesures adoptées dans ce texte puisqu'ils ne se considèrent pas comme violents au volant !
    Voilà pourquoi nous préférons mettre l'accent sur la sécurité et la prévention routières.
    Un seul argument suffit à démontrer que la prévention est nettement plus importante que la sanction systématiquement aggravée par ce projet de loi : mieux vaut agir avant, afin d'éviter les accidents, qu'après, en sanctionnant les responsables. En effet, dans ce dernier cas, le mal est déjà fait ! Nous pensons, au contraire, qu'il faut agir en priorité et de manière massive sur la prise de risques.
    Le groupe communiste et républicain ne peut que regretter la vision réductrice de la prévention que défend le Gouvernement à travers ce texte.
    Nous déplorons que la création d'un permis probatoire désigne les jeunes conducteurs du doigt. Nous regrettons que cette volonté de responsabilisation ne s'étende pas à l'ensemble des conducteurs, tout au long de la vie. Nous aurions souhaité qu'une véritable entreprise de formation et de sensibilisation des futurs et actuels conducteurs soit mise en place.
    Pourquoi ne pas prévoir une formation routière dès l'école primaire et la poursuivre jusqu'au passage du permis de conduire ? Nous pourrions aussi envisager de développer une sorte de formation continue en matière de sécurité routière au sein de l'entreprise, notamment pour les personnes dont la profession est en lien étroit avec la route.
    L'idée de faire participer les entreprises à la formation des conducteurs et de les impliquer dans la prévention des accidents de la route apparaît également justifiée dans la mesure où la très grande majorité des accidents de la route se produit lors des trajets entre le domicile et le travail.
    Par ailleurs, il semble évident de prendre en compte l'état physique des conducteurs. Il nous paraît ainsi essentiel de mettre en place un contrôle médical obligatoire tous les dix ans conditionnant l'octroi ou le maintien du permis de conduire. Cette mesure permettrait en outre de faire prendre conscience à chacun que l'acte de conduite n'a rien d'anodin et qu'il nécessite un état physique satisfaisant.
    Mais ce qui est encore préoccupant aujourd'hui, c'est l'image de l'automobile véhiculée par les publicitaires. Il est temps de rompre avec cette vision, persistante, de la voiture comme vecteur de puissance et de vitesse, conduite en toute sécurité. C'est pourquoi nous sommes favorables à un bridage des moteurs, tel qu'introduit dans ce projet de loi.
    Le problème avec le nouvel article 12 AA, qui prévoit que « les engins terrestres à moteur vendus neufs sur le territoire français devront être munis d'un régulateur de vitesse », est qu'il est inapplicable, non pas parce que ce genre de décisions se prend au niveau européen - est-il obligatoire d'attendre des décisions européennes lorsqu'il s'agit de vies humaines à sauver ? - mais parce que vous n'êtes pas allés jusqu'au bout de la démarche et n'avez pas introduit une date d'entrée en vigueur pour cette disposition. Peut-être faudrait-il fixer un agenda ?
    Mais votre frilosité en matière de sécurité et de prévention routière s'efface lorsqu'il s'agit de prévoir encore et toujours plus de sanctions pénales et votre audace vous a même poussé à créer un nouveau délit : l'interruption involontaire de grossesse.
    Nous regrettons que ce délit ait été introduit par un amendement lors de la première lecture à l'Assemblée. Le Sénat a heureusement eu la sagesse de le supprimer. Malheureusement, vous récidivez en réintroduisant ce délit par un amendement de notre collègue Garraud.
    Ce qui est choquant, c'est l'instrumentalisation de cette disposition. En effet, vous justifiez son introduction dans ce texte par le fait qu'elle comblerait un vide juridique et qu'elle permettrait enfin la prise en compte de la souffrance des parents victimes d'un tel drame ?
    En outre, la définition de cette infraction pose de nombreux problèmes juridiques, notamment en faisant l'impasse sur la nécessité d'un élément intentionnel pour caractériser l'infraction, puisque l'état de grossesse n'est pas connu. Le fait qu'il existe des délits non intentionnels n'y change rien. Nous souhaitons, comme la sagesse le voudrait, que cet amendement soit rejeté, voire que le Gouvernement en demande le retrait, de manière à rendre à votre projet de loi une meilleure perspective.
    Par ailleurs, par un article cavalier, vous remettez en cause le principe de l'encellulement individuel dans les maisons d'arrêt, que la loi du 15 juin 2000 relative à la présomption d'innocence prévoyait de rendre effectif à partir du 15 juin 2003. Votre texte, en accumulant les possibilités de dérogation à cet encellulement individuel, vise en réalité à le supprimer purement et simplement. Toutefois, pour ne pas paraître renoncer totalement au principe, le Sénat a proposé un report de l'encellulement individuel à cinq ans, tout en acceptant les nouveaux critères particulièrement extensifs du projet de loi adoptés par l'Assemblée en première lecture.
    Ces dispositions ne sont, évidemment pas, à nos yeux, acceptables. Pour remédier à l'imposibilité immédiate de mettre en application l'encellulement individuel, vous répondez, monsieur le garde des sceaux, qu'une forte augmentation des places de prison est prévue. Malheureusement, et c'est pour nous une grande déception, votre projet de loi constitue la preuve que la peine de prison toujours plus lourde est au coeur même de votre dispositif de sécurité routière. Vous semblez préoccupé par le nombre croissant des personnes incarcérées mais, dans le même temps, les sanctions prévues sont systématiquement des peines d'emprisonnement lourd. Les peines alternatives sont insignifiantes, voire inexistantes, alors qu'elles seraient autrement plus pédagogiques, notamment en matière de sécurité routière.
    Nous ne souhaitons pas nous opposer à votre texte. Notre vote sera toutefois déterminé par le rejet ou le retrait de l'amendement sur l'IVG. Ce projet de loi relatif à la violence routière est, selon nous, très important. En matière de prévention routière, beaucoup reste à faire et il faudra déployer de gros moyens éducatifs pour inciter les Français à adopter d'autres comportements. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Robert Lecou.
    M. Robert Lecou. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, chacun l'admet ici, au nom des victimes de la route, le fléau des accidents doit être combattu, d'autant que des moyens existent - l'expérience des dernières années le prouve. Comment oublier les terribles images des habitants de Mazamet allongés dans la rue, dans les années 70, pour provoquer un électrochoc : 16 445 morts - la population de Mazamet -, tel était le lourd tribut payé à la route en 1970.
    Depuis, trente ans sont passés et on a divisé par deux le nombre de tués, puisque l'on a dénombré 8 160 victimes en 2001. Entre-temps, le port de la ceinture de sécurité avait été rendu obligatoire, la limitation de vitesse s'est imposée, les contrôles d'alcoolémie ont fait la chasse aux chauffards ivres, les véhicules et les infrastructures ont bénéficié de progrès importants.
    Le résultat est là, mais il n'est toujours pas satisfaisant.
    Le Gouvernement a donc eu raison de prendre à bras-le-corps ce chantier essentiel dont le Président de la République avait fait en juillet dernier une des priorités de son quinquennat.
    D'ailleurs, depuis l'affirmation claire de la volonté du Gouvernement en ce domaine, les résultats sont là : le nombre des tués est descendu à 7 242 en 2002 et, si les résultats enregistrés depuis le début de l'année se confirment, nous pourrions constater cette année la plus forte diminution depuis 1975.
    J'interviens à ce stade du projet de loi pour exprimer ma satisfaction que nous avons pu légiférer, à la fois pour passer de la sécurité passive à la sécurité active en systématisant les contrôles et en améliorant l'automaticité des sanctions qui, pour certains cas, méritaient d'être alourdies, et également pour améliorer la prévention en encadrant mieux les conducteurs vulnérables par le permis probatoire et par l'instauration d'un suivi médical.
    Votre texte est bon, monsieur le ministre. Il permet une avancée utile et nécessaire.
    Mon intervention se justifie aussi par le fait que, au-delà du cadre législatif, qui va se trouver renforcé, bon nombre d'actions dépendantes d'une volonté politique ou du pouvoir réglementaire compléteront l'arsenal de la loi. Dans cet esprit, je voudrais énoncer quelques pistes.
    La prévention routière passe par l'éducation et, là, un important travail peut être mené grâce à la collaboration de tous les acteurs de la prévention.
    Je pense, par exemple, à la présence de policiers ou de gendarmes dans les écoles aux côtés des enseignants pour favoriser l'apprentissage des règles de sécurité. Cette action a déjà été expérimentée et elle mériterait d'être systématisée. Elle aurait pour autres conséquences positives de mieux faire connaître l'action préventive des forces de sécurité et de favoriser la connaissance mutuelle et donc le respect entre ces forces utiles pour la nation et les enfants. Se rencontrer dans la rue, c'est bien ; se connaître à l'école, c'est encore mieux !
    La prévention routière passe aussi par la formation : dans ce domaine il me paraît utile d'encourager, de favoriser l'intervention des professionnels qui peuvent apprendre « la conduite juste » pour l'automobiliste. N'oublions jamais le précepte fondamental suivant : « on appelle rester maître de son véhicule, être capable de s'arrêter dans l'espace libre et visible que l'on a immédiatement devant soi. » Voilà bien un précepte qui mérite d'être répété, mais qui, surtout, doit être expliqué dans des centres qui nécessitent moyens pédagogiques, infrastructures et expériences. Dans ce domaine de la formation, il me paraît également souhaitable d'encourager les entreprises qui ont perçu l'intérêt de cette démarche en l'intégrant dans leurs plans de formation. Le nombre d'accidents trajets-travail est bien le plus grand des fléaux.
    La prévention routière passe également par la communication.
    Les campagnes de lutte pour la sécurité routière doivent passer par l'apprentissage de la culture de la responsabilisation, et il convient, dans ce domaine, de changer le comportement de l'automobiliste.
    A titre d'exemple, il me paraît plus judicieux de lutter contre l'alcoolisme, l'une des causes les plus importantes d'accidents de la route en favorisant la notion du « conducteur-désigné » plutôt qu'en stigmatisant les alcools. Dans ce domaine, la filière des professionnels du vin, production française conviviale par excellence et pan important de notre économie, a mal vécu la dernière campagne où le vin, à travers la bouteille, était le seul coupable de l'alcoolémie meurtrière.
    Associer les acteurs responsables de cette filière à la prévention est parfaitement possible et judicieusement souhaitable.
    Il y a enfin une dernière piste que ni vous ni nous ne pouvons éluder, monsieur le ministre. Elle passe par l'amélioration des conditions de transport. Encourageons l'utilisation des transports en commun qui doivent être de qualité, sécurisés, adaptés - comme pour le ferroutage - et réguliers. Demandons aux constructeurs toujours plus d'améliorations.
    Dégageons les moyens d'investir afin d'améliorer nos infrastructures et de lutter contre ces dramatiques « points noirs » qui menacent encore si souvent l'automobiliste.
    Je conclurai, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur un thème qui m'est cher : celui de la responsabilisation de l'individu, qui doit être acteur. D'ailleurs, que constatons-nous ? Nous légiférons aujourd'hui et, je l'ai dit, c'est parfaitement justifié. Mais la diminution du nombre des accidents depuis juillet dernier, date à laquelle la lutte contre l'insécurité routière a été désignée comme une priorité et votre gouvernement a affirmé et mis en oeuvre une volonté politique, est bien la preuve qu'une prise de conscience s'est produite.
    L'absence de ceinture de sécurité, les excès de vitesse et l'alcool au volant ont bien été perçus comme des attitudes irresponsables. Votre loi, notre loi, va donc dans le bon sens. Les choix réglementaires que vous ferez la compléteront. Mais cet arsenal ne suffit pas. Les infrastructures et les mentalités devront toujours continuer à évoluer. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, je souhaite, au nom de mon groupe, profiter de la solennité de la discussion générale pour revenir sur l'amendement qui a introduit l'article 2 bis dans le dispositif présenté à l'Assemblée.
    Je rappelle que cet amendement avait eu deux conséquences distinctes. Certes, il créait un article 223-12 concernant l'interruption involontaire de grossesse par imprudence dans le cas de la circulation routière. Mais avant tout, et personne ne parle de cette petite subtilité, monsieur le garde des sceaux, il créait une infraction générale - à l'article 223-11 - à savoir le délit d'interruption involontaire de grossesse, qui dépasse le cadre de la sécurité routière et touche l'ensemble de la population.
    Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !
    M. René Dosière. Très bien !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je le dis avec insistance, parce que même les sénateurs, qui ont, avec pertinence, retiré ce dispositif, ont oublié d'évoquer cet aspect des choses.
    M. Noël Mamère. Exactement !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. On a introduit, dans une loi sur la sécurité routière, un dispositif dont le sens et la finalité engagent la responsabilité de l'ensemble du corps médical et des intervenants médicaux et nous touchent tous au quotidien.
    M. Jean-Paul Garraud. Voilà ce qui vous fait peur !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous avons alerté nos collègues, lors de la première lecture - parce que nous avons été en première ligne de ce débat - sur le fait qu'il s'agissait d'un cavalier grave car il introduisait une disposition d'une conséquence considérable sur le droit commun, qui n'avait rien à voir avec la circulation routière.
    Nous continuons à dire que les fondements juridiques de ces délits - car il s'agit de deux délits - sont très aléatoires. Un débat très intéressant au Sénat a prolongé celui que nous avions eu à l'Assemblée.
    Rappelons à nos collègues que les délits intentionnels sont des instruments exceptionnels du dispositif pénal. Or vous êtes aussi le gardien de ce caractère exceptionnel, monsieur le garde des sceaux, dans la mesure où l'intention est un élément constitutif d'une infraction. L'amendement introduit à l'article 2 bis portait une inacceptable atteinte à ce principe, car le code de la route se serait retrouvé, et seulement dans ce cas précis, à prévoir la responsabilité de la personne impliquée alors qu'elle-même est dans l'ignorance de l'état de la femme enceinte. Autrement dit, et cela a été souligné au Sénat, c'est l'ignorance d'une situation qui fondait l'infraction ! Même dans le cas d'un délit intentionnel, ce serait inacceptable.
    M. René Dosière. Très bien !
    M. Noël Mamère. Très juste !
    M. Jean-Paul Garraud. Ce n'est pas cela du tout !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. N'oublions pas du reste, et c'est très important, que les tribunaux ont toujours, bien évidemment, pris en compte ce genre de situations dans le cadre de la réparation civile au moment de déterminer le préjudice moral.
    Se pose enfin un problème d'opportunité. Introduire une telle disposition par voie d'amendement provoquerait une réaction légitime dans la mesure où l'on peut considérer qu'elle aboutit à entamer le dispositif de l'interruption volontaire de grossesse. Même si, je le sais, telle n'est pas notre intention, vous ne serez pas épargnés par cette critique.
    M. Hervé Mariton. Mais vous ne manquez pas d'y insister !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. M. Lucien Lanier lui-même, rapporteur du projet au Sénat, a tenu sur ce point des propos très pertinents. La commission des lois du Sénat, disait-il, n'a pas manqué de s'interroger, craignant de voir le statut même du foetus remis en cause à l'occasion d'un simple projet de loi relatif à la sécurité routière. C'est dire si les sénateurs ont eux aussi posé le problème et mené la même réflexion juridique que nous.
    M. Hervé Mariton. Je ne vous avais jamais encore entendu rendre un tel hommage au Sénat...
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Voilà pourquoi, monsieur le garde des sceaux, c'est à vous qu'il appartient en cet instant de prendre la décision...
    M. Noël Mamère. ... de faire retirer cet amendement !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. ... de poursuivre ou non ce débat. Nous sommes persuadés que, dans votre grande sagesse et toute la plénitude de vos compétences, vous demanderez le retrait de cet amendement. Si vous ne le faisiez pas, nous serions placés dans cette incroyable situation, où après avoir appuyé et participé à l'élaboration de ce texte sur la prévention et la lutte contre la délinquance routière, nous nous verrions contraints, à cause de ce dispositif, de ne pas l'approuver. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jean-Paul Garraud. Chantage !
    Mme la présidente. La discussion générale est close.

Discussion des articles

    Mme la présidente. J'appelle maintenant, dans le texte du Sénat, les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

Article 2

    Mme la présidente. « Art. 2. - I. - Non modifié.
    II. - Après l'article 222-20 du même code, il est inséré un article 222-20-1 ainsi rédigé :
    « Art. 222-20-1. - Lorsque la maladresse, l'imprudence, l'inattention, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévu par l'article 222-19 est commis par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne ayant entraîné une incapacité totale de travail d'une durée inférieure ou égale à trois mois est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 EUR d'amende.
    « Les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et à 45 000 EUR d'amende lorsque :
    « 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci-après ;
    « 2° Le conducteur se trouvait en état d'ivresse manifeste ou était sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang ou dans l'air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par ce code et destinées à établir l'existence d'un état alcoolique ;
    « 3° Il résulte d'une analyse sanguine que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le code de la route destinées à établir s'il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants :
    « 4° Le conducteur n'était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;
    « 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h ;
    « 6° Le conducteur, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, ne s'est pas arrêté et a tenté ainsi d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut encourir.
    « Les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 EUR d'amende lorsque l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne a été commise avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° et suivants du présent article. »
    Je mets aux voix l'article 2.
    (L'article 2 est adopté.)

Article 2 bis

    Mme la présidente. Le Sénat a supprimé l'article 2 bis.
    M. Dell'Agnola, rapporteur, et M. Garraud ont présenté un amendement, n° 4, ainsi rédigé :
    « Rétablir l'article 2 bis dans le texte suivant :
    « I. - Les articles 223-11 et 223-12 du code pénal sont ainsi rétablis :
    « Art. 233-11. - L'interruption de la grossesse sans le consentement de l'intéressée, causée dans les conditions et selon les distinctions prévues par l'article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence prévue par la loi ou le règlement est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.
    « Si les faits résultent de la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, la peine est de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende. »
    « Art. 223-12. - Lorsque la maladresse, l'imprudence, l'inattention, la négligence ou le manquement à une obligaton législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévu par le premier alinéa de l'article 223-11 est commis par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, l'interruption de la grossesse sans le consentement de l'intéressée est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.
    « Les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende lorsque :
    « 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci-après ;
    « 2° Le conducteur se trouvait en état d'ivresse manifeste ou était sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sans ou dans l'air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par ce code et destinées à établir l'existence d'un état alcoolique ;
    « 3° Il résulte d'une analyse sanguine que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants, ou le conducteur a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le code de la route destinées à établir s'il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;
    « 4° Le conducteur n'était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidité, suspendu ou retenu ;
    « 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h ;
    « 6° Le conducteur, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, ne s'est pas arrêté ou a tenté d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut encourir.
    « Les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende lorsque l'interruption de la grossesse sans le consentement de l'intéressée a été commise avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° et suivants du présent article. »
    « II. - Dans l'article 223-10 du code pénal, les mots : "cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende sont remplacés par les mots : "sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende. ».
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. Je laisse à M. Garraud le soin de soutenir cet amendement.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Paul Garraud.
    M. Jean-Paul Garraud. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, permettez-moi d'abord de rappeler le cheminement procédural de cet amendement qui a fait décidément - nous venons de le voir encore à l'instant - beaucoup parler de lui.
    Cet amendement, que j'avais présenté en première lecture à l'Assemblée nationale, avait été adopté d'abord par la commission des lois, puis par l'Assemblée elle-même avec le soutien du Gouvernement, avant d'être effectivement rejeté par le Sénat. Sitôt le texte revenu de l'Assemblée, il a été redéposé et de nouveau adopté par notre commission des lois.
    Le plus étonnant, je veux le signaler en toute franchise, c'est que les sénateurs, après avoir critiqué et finalement rejeté cette disposition, ont immédiatement après déposé une proposition de loi qui reprend mon texte in extenso !
    Pourquoi ai-je déposé cet amendement ? J'ai connu, dans ma vie professionnelle de magistrat, des cas particulièrement douloureux de vide juridique. Ainsi en est-il de ces femmes enceintes qui, à la suite d'un accident de la circulation, perdent leur enfant à naître - et contre leur volonté évidemment. Ces cas ne sont pas rares, monsieur Le Bouillonnec. Ils sont même assez fréquents, à tel point d'ailleurs qu'il s'est constitué un collectif de parents orphelins qui ont pris contact auprès de moi. On en dénombre plusieurs centaines par an.
    Le drame particulièrement affreux que vivent ces parents n'est pas pris en considération. En l'état actuel de notre droit, que des blessures occasionnelles provoquées sur des femmes enceintes conduisent ou non à la perte de l'enfant, il n'y a pas de différence : nous sommes en face d'un délit non intentionnel. En effet, lorsque l'on percute une voiture, on ne sait pas qui est dedans et on a encore moins l'intention d'y blesser quelqu'un. Reste que l'on a percuté une voiture, et la peine encourue est, si je puis dire, fonction du résultat. Quiconque a provoqué ou causé un accident de la circulation, encourra une peine plus ou moins importante en fonction de la nature des blessures et des mois d'incapacité qui en découlent. Plus ou moins de trois mois, ce n'est pas pareil. Et s'il y a homicide involontaire, la peine sera évidemment plus grave. Or, dans le cas présent, il s'agit de femmes enceintes qui perdent, du fait d'un accident, l'enfant qu'elles voulaient garder et ce n'est en aucune façon tenu en compte ! Comment dans ces conditions une famille peut-elle supporter un tel drame, la disparition de cet enfant désiré, et faire le travail de deuil ?
    Peut-être vais-je vous surprendre, mesdames, messieurs de l'opposition, mais la première personne qui a parlé dans cette affaire d'une interruption de grossesse non souhaitée, c'est Robert Badinter. En 1992, Robert Badinter a introduit dans le nouveau code pénal un article 223-10, lequel punit les coups volontairement portés à une femme enceinte dans le but de lui faire perdre son enfant.
    Mme Catherine Génisson. Oui, cinq ans d'emprisonnement !
    M. Jean-Paul Garraud. La perte de l'enfant à naître était dès lors prise en compte. Nous sommes face à un foetus, disait Robert Badinter.
    Mon amendement n° 4, qui vise à créer un article 223-11 et un article 223-12, répond exactement à la même logique et vise le même résultat : la perte du foetus. A ceci près que l'article 223-10 punit un acte volontaire - des coups - et l'article 223-11 l'acte involontaire.
    Je vais maintenant reprendre vos propos, maître Le Bouillonnec...
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur suffira !
    M. Jean-Paul Garraud. Le cas le plus fréquent, et de loin, est l'accident de la circulation. Mais ce n'est pas le seul.
    Imaginons que, dans une entreprise, une femme enceinte manie des produits toxiques au mépris de règlements de sécurité que le chef d'entreprise aurait négligé de mettre en place, et qu'en inhalant ces substances,...
    M. Noël Mamère. Du phénol, par exemple !
    M. Jean-Paul Garraud. ... elle perde son enfant. Il faut avoir une démarche cohérente : on ne peut pas incriminer la perte d'un enfant à naître dans le cas d'un accident de la circulation et ne pas faire de même ailleurs. Dans le premier cas comme dans les autres, la mort du foetus résulte de la faute d'un tiers, qu'il faut réprimer.
    Tout cela n'a strictement rien à voir avec l'interruption volontaire de la grossesse,...
    Mme Muguette Jacquaint. Si !
    M. Jean-Paul Garraud. ... malgré le lapsus révélateur de M. Gerin qui a parlé d'IVG alors qu'il voulait dire « IIG », interruption involontaire de grossesse... Dans l'interruption volontaire de grossesse, une femme désire, dans le cadre légal, mettre un terme à sa grossesse. Dans le cas présent, la fin de la grossesse n'est en aucune façon voulue : tout au contraire, l'enfant est désiré. Cela n'a rien à voir. En réalité, ce qui vous fait peur, c'est que l'on remette en cause le statut de l'embryon...
    Mme Muguette Jacquaint et Mme Catherine Génisson. Bien sûr !
    M. Jean-Paul Garraud. Derrière les faux prétextes, il y a bel et bien, il faut le dire clairement, une position idéologique !
    Mme Muguette Jacquaint. Non !
    M. Jean-Paul Garraud. Ou bien vous êtes mal informés, ou bien vous ne voulez pas comprendre. Quoi qu'il en soit, vous faites un amalgame, et pour des motivations idéologiques.
    Mme Muguette Jacquaint. Mais non !
    M. Jean-Paul Garraud. Pour moi, ce n'est pas le problème. Le statut de l'embryon est une question fondamentale. Peut-être la question devra-t-elle être posée dans le cadre des lois bioéthiques.
    Mme Catherine Génisson. Mais précisément, il n'y a pas de statut de l'embryon !
    Mme Muguette Jacquaint. Oui ! Le problème, c'est qu'il n'y en a pas !
    M. Jean-Paul Garraud. Ce que je souhaite défendre, c'est la liberté de la femme de mener sa grossesse à terme. Voilà ce qui est important. Je me situe sur le plan de la liberté de la femme...
    M. Noël Mamère. Alors, pourquoi parlez-vous du statut du foetus ?
    M. André Gerin. Vous n'en faites pas, de l'idéologie ?
    M. Jean-Paul Garraud. ... et il arrivera fréquemment que les accidents de la circulation conduisent à la perte de l'enfant qu'elle a désiré.
    Il faut, évidemment, un lien de causalité certain entre la faute du tiers, l'accident et le résultat : il n'est évidemment pas question de mettre en cause la responsabilité à tout bout de champ. L'article 121-3 du code pénal limite d'ailleurs cette mise en cause. C'est effectivement très important.
    Je tiens enfin à faire observer que, lorsqu'un enfant naît handicapé des suites d'un accident de la circulation, on pourra se retourner contre l'auteur... Mais s'il est tué dans le ventre de sa mère, il ne se passe rien ! C'est là un paradoxe absolument affreux.
    Je vais conclure, madame la présidente, mais vous conviendrez qu'il est difficile d'épuiser en cinq minutes un sujet aussi important.
    Mme Catherine Génisson. Justement, il n'a rien à faire là !
    M. René Dosière. Il faut en parler ailleurs !
    M. Jean-Paul Garraud. Je suis bien conscient de l'importance de ce texte sur la sécurité routière et je sais que le président de la République, le Gouvernement, vous-même, monsieur le garde des sceaux, comme nous tous ici, souhaitons le voir appliquer au plus tôt. Je comprends donc que nous avons tout interêt à l'adopter conforme.
    Mais d'un autre côté, il y a là, sinon un vrai problème de société, en tout cas quelque chose qui compte pour beaucoup de nos concitoyens. Je souhaiterais donc, avec votre permission, madame la présidente, connaître la position de M. le garde des sceaux sur ce sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    Mme Muguette Jacquaint et M. Noël Mamère. Nous aussi, on aimerait !
    M. Jean-Paul Garraud. Je reprendrai, éventuellement, la parole après.
    Mme la présidente. Vous aurez satisfaction, monsieur Garraud, dans la mesure où le règlement de l'Assemblée m'oblige à demander l'avis du Gouvernement sur cet amendement de la commission.
    La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. Je tenais évidemment à vous faire part de la position du Gouvernement sur cet amendement et sur son éventuelle insertion dans le présent texte.
    La chronologie des événements est rigoureusement celle que M. Garraud a rappelée tout à l'heure. Lorsque cet amendement a été déposé, j'ai effectivement émis un avis favorable : il y a effectivement là un réel problème juridique, M. Garraud ayant proposé qu'il soit réglé à l'occasion de ce texte, je n'y voyais pas d'inconvénient majeur dans la mesure où son amendement répondait effectivement à une nécessité.
    Le Sénat en a ensuite débattu. La procédure parlementaire oblige à un échange entre les deux assemblées, les navettes sont précisément faites pour réfléchir, examiner toutes les conséquences des propositions des uns et des autres. La position du Sénat me paraît devoir être prise en considération. Qu'a-t-il dit dans cette affaire ? Non que la proposition de M. Garraud n'était pas bonne : il a seulement estimé qu'elle touchait - M. Garraud lui-même vient d'ailleurs de le dire - à un problème plus large que celui des accidents de la route...
    Mme Muguette Jacquaint. Eh oui !
    M. le garde des sceaux. ... et que, dès lors, il n'était pas utile ni opportun de l'insérer dans un texte relatif à la lutte contre la violence routière.
    Le Sénat a donc fait deux choses : d'une part, il a modifié le texte pour faire disparaître les effets de l'amendement ; d'autre part, quelques jours plus tard, il a déposé une proposition de loi qui en reprenait l'esprit, tout en tenant compte du fait que la problématique dépasse largement la seule sécurité routière.
    Je crois sincèrement que la démarche du Sénat est bonne, et l'Assemblée nationale pourrait adopter une attitude similaire qui conviendrait parfaitement au Gouvernement.
    Pour que les choses soient bien claires, je ne souhaite donc pas que cet amendement, redéposé en deuxième lecture, soit adopté. Au bénéfice de ce que je viens d'indiquer, M. Garraud pourrait le retirer et prendre l'initiative, avec d'autres députés, de déposer une proposition de loi qui permettrait dès lors de traiter le sujet dans sa globalité et d'apporter une réponse juridique à un problème qui, effectivement, dépasse largement le cadre des accidents de la route.
    M. René Dosière. D'ailleurs, M. Garraud a déjà déposé une proposition de loi !
    Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Génisson.
    Mme Catherine Génisson. M. Garraud évoque la situation bien évidemment dramatique de ces femmes, de ces futures mères mais aussi de ces futurs pères qui perdent leur enfant à naître. Mais puisqu'il a argué de son expérience professionnelle, j'évoquerai également la mienne. Mon activité professionnelle m'a souvent et malheureusement conduite à accompagner dans leur détresse ces jeunes femmes, ces futures mères, ces futurs pères, y compris dans les circonstances que nous examinons aujourd'hui, autrement dit à la suite de violences routières.
    Reste, et M. Le Bouillonnec l'a excellemment exprimé, qu'avant de définir l'incrimination spécifique due aux violences routières, vous êtes obligés d'en définir une plus générale.
    Mme Muguette Jacquaint. Exact !
    Mme Catherine Génisson. Dès lors, et quoi que l'on fasse, force est tôt ou tard de poser le problème du statut du foetus ou de l'embryon. Or le législateur, jusqu'à aujourd'hui, y compris lors de la première lecture des lois de bioéthique à l'Assemblée nationale, n'a pas souhaité définir le statut de l'embryon.
    M. Hervé Mariton et M. Jean-Paul Garraud. Ce n'est pas le sujet !
    Mme Catherine Génisson. Là est bien le problème, monsieur Garraud ! Je ne dis pas que nous n'aurons pas ce débat, mais ce sera à l'occasion de la discussion des lois de bioéthique.
    M. Hervé Mariton. Ce n'est pas le sujet !
    M. Noël Mamère. Si, justement !
    Mme Catherine Génisson. Et dès lors que la question du statut du foetus ou de l'embryon sera réglée, on reviendra forcément au problème de l'interruption volontaire de grossesse.
    M. Hervé Mariton. On vous répète : ce n'est pas le sujet !
    Mme Catherine Génisson. Vous devez pouvoir accepter cette logique-là, monsieur Garraud !
    M. Jean-Paul Garraud. Et vous, vous continuerez à « accompagner »...
    Mme Catherine Génisson. Cette problématique est totalement incongrue dans un texte sur la sécurité routière. C'est pourquoi le groupe socialiste s'opposera formellement à votre amendement, sans pour autant oublier la réelle détresse de ces femmes.
    M. René Dosière. Très bien !
    Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Mariton.
    M. Hervé Mariton. Le groupe UMP prend acte de ce que le ministre a indiqué tout à l'heure. Nous souhaitons qu'une proposition de loi reprenant les termes de celle du Sénat et de l'amendement de notre collègue Garraud puisse aboutir, avec le concours favorable du Gouverment.
    M. René Dosière. M. Garraud a déjà déposé une proposition de loi !
    M. Jean-Paul Garraud. Je demanderai la parole, tout à l'heure.
    Mme la présidente. Soit, monsieur Garraud. En attendant, la parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. Je souhaite à mon tour que cet amendement, comme M. le garde des sceaux l'a lui-même demandé à M. Garraud, soit retiré. S'il ne l'est pas, nous nous y opposerons pour les raisons que je vais évoquer.
    L'une d'elles a déjà été avancée par Mme Génisson : que ces cas de détresse découlent d'un accident de la route ou d'autre chose - vous-même, M. Garraud, avez rappelé que le cas peut aussi arriver dans une entreprise - une question se pose immédiatement, qu'on le veuille ou non, celle du statut juridique de l'embryon. Le problème, monsieur Garraud, c'est que cet embryon, il n'a pas encore de statut, et qu'on ne peut pas lui en donner un !
    M. Hervé Mariton. Vous ne comprenez pas, ou vous faites exprès ?
    Mme Muguette Jacquaint. Nous aurons un débat sur la bioéthique - le 28 juin, nous a-t-on dit, en tout cas prochainement. Je souhaite réellement que vous retiriez votre amendement car il me paraît poser plus de problèmes qu'il n'en règle. J'étais cet après-midi même avec de nombreuses associations de femmes, en compagnie de Mme Fraysse. On y parlait de la liberté des femmes. Or cet amendement les inquiète beaucoup : elles redoutent une remise en cause sous-jacente de l'interruption volontaire de grossesse.
    M. Hervé Mariton. Cela n'a rien à voir !
    Mme Muguette Jacquaint. Cela n'a rien à voir, dites-vous ? Moi, je préfère que nous débattions auparavant d'un texte sur la bioéthique. En un mot, cela mérite une discussion autrement plus large, et nous ne saurions accepter une disposition aussi lourde de conséquences au détour d'un texte relatif à la violence routière.
    Mme la présidente. La parole est à M. Noël Mamère.
    M. Noël Mamère. Je soutiens les arguments qui viennent d'être développés par mes collègues des bancs de gauche et je demande à la majorité qui soutient le Gouvernement de suivre l'avis de M. le garde des sceaux qui, très sagement, a demandé à M. Garraud de retirer son amendement.
    Les raisons sont simples. Elles ont été très précisément et très brillamment évoqués par M. Le Bouillonnec. Elles sont d'ordre juridique et d'ordre éthique. Il est d'ailleurs très bizarre et très étonnant qu'un ancien magistrat ait fait ce genre de proposition qui porte atteinte aux principes généraux du droit, en particulier s'agissant du délit intentionnel.
    Vous pouvez toujours, monsieur Garraud, comme vous avez essayé de le faire tout à l'heure, rappeler ce qui a été initié par le garde des sceaux M. Badinter en 1992. C'était du ressort du droit commun. Le sujet que vous avez introduit par un cavalier doit être traité, puisqu'il concerne la détresse des parents, mais une telle disposition ne peut en aucun cas avoir valeur de droit commun et porter atteinte aux principes généraux du droit, s'agissant notamment de ce qui est constitutif d'un délit.
    Au plan de l'éthique, vous pouvez toujours avec vos amis nous dire qu'il n'est pas question pour vous de remettre en cause le statut de l'embryon. Par cet amendement, vous ne faites qu'introduire votre conception idéologique (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) du statut de l'embryon.
    M. Jean-Paul Garraud. Les femmes apprécieront.
    M. Noël Mamère. Ce n'est pas le moment de légiférer sur le statut de l'embryon. Nous attendons avec une grande impatience que la représentation nationale soit amenée à revoir les lois sur la bioéthique en fonction de l'évolution de la technologie et de l'évolution du monde. Nous pourrons à ce moment-là discuter de l'embryon surnuméraire, des manipulations et de la fécondation, mais ce n'est pas le moment aujourd'hui, dans un texte qui est nécessaire, qui ne traite pas simplement de la violence routière, mais de la violence automobile, forme de délinquance qui est sous-pénalisée, d'introduire une disposition qui inquiète à juste titre les femmes.
Je vous rappelle que c'est Mme Veil, une femme, qui appartient à votre groupe idéologique...
    M. Jean-Paul Garraud. Cela n'a rien à voir !
    M. Noël Mamère. ... qui a fait voter ici l'interruption volontaire de grossesse, après un combat très long des femmes pour pouvoir disposer comme elles le souhaitent de leur corps.
    M. Hervé Mariton. Quel est le rapport ?
    M. Noël Mamère. Vous ne pouvez pas aujourd'hui par cet amendement introduire une remise en cause de ce qui a été votée en 1975.
    Ne prenez pas les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages, monsieur Garraud ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Votre amendement n'est qu'un amendement idéologique qui pourrait ouvrir la porte à une régression pour le droit des femmes.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Paul Garraud.
    M. Maxime Gremetz. Nous allons l'écouter religieusement !
    M. Jean-Paul Garraud. Je m'aperçois, mais ce n'est pas une surprise, que mes collègues de l'opposition ne me comprennent pas, ou ne veulent pas comprendre. Je répète donc une chose importante.
    M. Maxime Gremetz. Ne recommencez pas, nous avons parfaitement compris !
    M. Jean-Paul Garraud. Quand M. Robert Badinter a mis en place l'article 223-10...
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Intentionnel !
    M. Jean-Paul Garraud. ... qui prévoit de réprimer la personne qui a tout fait pour qu'une femme perde son foetus, a-t-il remis en cause le statut de l'embryon ?
    Mme Catherine Génisson. Le foetus n'est pas un enfant !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ce n'est pas la même chose !
    M. Jean-Paul Garraud. Que ce soit volontaire ou involontaire, il y a dans les deux cas la perte d'un foetus.
    M. Noël Mamère. Vous êtes pourtant magistrat ! Ce n'est pas la même chose !
    M. Jean-Paul Garraud. Quand M. Badinter propose et obtient le vote de l'article 223-10, on parle de la perte d'un foetus, et, que je sache, il n'a pas touché au statut de l'embryon.
    M. Noël Mamère. L'intention !
    M. Jean-Paul Garraud. Que ce soit intentionnel ou pas, le résultat est le même ! Que l'on vous tue d'une façon volontaire ou d'une façon involontaire, vous êtes mort ! Enfin, essayez de le comprendre ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Et si vous ne voulez pas le comprendre, c'est que vous avez une position idéologique !
    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Vous vous réfugiez derrière ce mot, mais c'est du droit, pas de l'idéologie !
    M. Jean-Paul Garraud. On ne va pas épiloguer, mais c'est la réalité.
    Dans notre droit pénal, le fait de causer involontairement la mort d'un animal domestique est réprimé. Si par exemple, à l'occasion d'un accident de la circulation, vous tuez le caniche qui se trouve dans la voiture que vous percutez, la loi prévoit une contravention de troisième classe. Si vous tuez l'enfant à naître d'une femme enceinte, ce n'est pas prévu par la loi. Trouvez-vous cela normal, mesdames et messieurs de l'opposition ?
    Mme Jacqueline Fraysse et Mme Muguette Jacquaint. On ne dit pas ça !
    M. Jean-Paul Garraud. Pour moi, il n'est pas question d'idéologie dans cette affaire. Je souhaite savoir, monsieur le garde des sceaux, parce que je comprends bien qu'il y a l'intérêt supérieur, quelque part, de faire appliquer ce texte rapidement, si vous soutiendrez la proposition de loi que je déposerai.
    M. René Dosière et Mme Muguette Jacquaint. Vous l'avez déjà déposée !
    Mme la présidente. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. le garde des sceaux. Je regrette un peu la tournure que prend ce débat, aussi bien les propos de M. Mamère, quelque peu excessifs...
    M. Noël Mamère. Toujours provocateur !
    M. le garde des sceaux. Voilà, mais cela fait partie de votre genre de beauté ! (Sourires.)
    M. Noël Mamère. Nous n'avons pas la même, monsieur le ministre !
    M. le garde des sceaux. Monsieur Garraud, les choses sont claires, je vous ai répondu tout à l'heure, la réponse est oui.
    Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Mariton.
    M. Hervé Mariton. Madame la présidente, je demande une suspension de séance de dix minutes. (Exclamations sur les bancs du groupes des député-e-s communistes et républicains.)
    Mme la présidente. Je pense que cinq minutes seront largement suffisantes, compte tenu de l'heure.

Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à une heure quarante, est reprise à une heure quarante-cinq.)
    Mme la présidente. La séance est reprise.
    La parole est à M. Hervé Mariton.
    M. Hervé Mariton. Je laisserai M. Garraud expliquer son choix. Je souhaite simplement rappeler, sur le fond, le soutien du groupe UMP à la proposition qu'il a faite ce soir. Il ne s'agit pas de délibérer sur une question liée d'une quelconque manière à l'IVG, mais de réparer un préjudice précisément défini dans son amendement et nous souhaitons que cette lacune du droit soit comblée. Compte tenu du choix malencontreux du Sénat de ne pas maintenir cet amendement, il faut tenir compte, ce soir, de l'opportunité de présenter une telle disposition mais, sur le fond, le groupe UMP rappelle son soutien au raisonnement de M. Garraud et à ses conséquences. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-PaulGarraud.
    M. Jean-Paul Garraud. Compte tenu de tout ce qui vient d'être dit, compte tenu du soutien que j'ai obtenu de M. le garde des sceaux pour la proposition de loi que je souhaite voir aboutir, compte tenu des propos tenus par le porte-parole de l'UMP, et de l'assurance que je pourrai utiliser une niche parlementaire, sans évidemment rien retirer à tout ce que j'ai pu dire sur un sujet fondamental, je propose que cet amendement soit retiré.
    Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. J'accepte de retirer l'amendement, madame la présidente.
    Mme la présidente. L'amendement n° 4 est retiré.
    L'article 2 bis demeure donc supprimé.

Articles 3 et 4

    Mme la présidente. « Art. 3. - I et II. - Non modifiés.
    « II bis. - Les dispositions de l'article L. 234-11, du II de l'article L. 234-12, du deuxième alinéa de l'article L. 234-13 et de l'article L. 235-5 du code de la route, ainsi que celles du deuxième alinéa de l'article 434-10 du code pénal dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente loi, demeurent applicables aux infractions commises avant cette entrée en vigueur.
    « III. - Non modifié. »
    Je mets aux voix l'article 3.
    (L'article 3 est adopté.)
    « Art. 4. - I à V. - Non modifiés.
    « VI. - L'avant-dernier alinéa (5°) de l'article 769 du code de procédure pénale est complété par les mos : " ; ce délai est porté à quatre ans lorsqu'il s'agit d'une contravention dont la récidive constitue un délit. » (Adopté.)

Article 6

    Mme la présidente. « Art. 6. - I. - L'article 131-16 du code pénal est complété par un 6° et un 7° ainsi rédigés :
    « 6° L'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de trois ans au plus ;
    « 7° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière. »
    « II à VI. - Non modifiés.
    « VII. - L'article 223-18 du même code est complété par les 5° à 8° ainsi rédigés :
    « 5° Lorsque l'infraction a été commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, l'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
    « 6° Lorsque l'infraction a été commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, l'obligation d'accomplir, à leurs frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;
    « 7° Lorsque l'infraction a été commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, l'immobilisation, pendant une durée d'un an au plus, du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire ;
    « 8° Lorsque l'infraction a été commise à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur, la confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire ;
    « VIII et IX. - Non modifiés.
    « IX bis. - Le quatrième alinéa (3°) du II de l'article L. 221-2 du code de la route est supprimé.
    « X à XVII. - Non modifiés.
    « XVIII. - Supprimé.
    « XIX. - Non modifié. »
    Je mets aux voix l'article 6.
    (L'article 6 est adopté.)

Article 6 bis

    Mme la présidente. Le Sénat a supprimé l'article 6 bis.
    M. Dell'Agnola, rapporteur, et M. Garraud ont présenté un amendement, n° 5, ainsi libellé :
    « Rétablir l'article 6 bis dans le texte suivant :
    « Il est inséré, après l'article 223-20 du code pénal, un article 223-21 ainsi rédigé :
    « Art. 223-21. - Les personnes physiques coupables de l'infraction prévue par l'article 223-12 encourent également les peines complémentaires suivantes :
    « 1° La suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire ; dans le cas prévu par l'article 221-6-1, la suspension ne peut pas être assortie du sursis, même partiellement, et elle ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ;
    « 2° L'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant cinq ans au plus ;
    « 3° L'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
    « 4° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;
    « 5° L'immobilisation, pendant une durée d'un an au plus, du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire ;
    « 6° La confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire. »
    La parole est à M. Le rapporteur.
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. L'amendement est retiré.
    Mme la présidente. L'amendement n° 5 est retiré.
    L'article 6 bis demeure supprimé.

Articles 6 ter, 7 et 7 bis A

    Mme la présidente. Les articles 6 ter, 7 et 7 bis A ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.
    « Art. 6 ter. - Après le quatrième alinéa (3°) du I de l'article 23 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :
    « 3° bis Lorsqu'elle est prononcée à titre de peine complémentaire, l'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé ; ».
    Je mets aux voix l'article 6 ter.
    
(L'article 6 ter est adopté.)
    « Art. 7. - IA. - Au premier alinéa de l'article L. 121-2 du code de la route, après les mots : "des véhicules, sont insérés les mots : "ou sur l'acquittement des péages.
    « I, I bis et II. - Non modifiés.
    « III. - Après l'article 529-9 du même code, sont insérés deux articles 529-10 et 529-11 ainsi rédigés :
    « Art. 529-10. - Lorsque l'avis d'amende forfaitaire concernant une des contraventions mentionnées à l'article L. 121-3 du code de la route a été adressé au titulaire du certificat d'immatriculation ou aux personnes visées aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 121-2 de ce code, la requête en exonération prévue par l'article 529-2 ou la réclamation prévue par l'article 530 n'est recevable que si elle est adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et si elle est accompagnée :
    « 1° Soit de l'un des documents suivants :
    « a) Le récépissé du dépôt de plainte pour vol ou destruction du véhicule, ou une copie de la déclaration de destruction de véhicule établie conformément aux dispositions du code de la route ;
    « b) Une lettre signée de l'auteur de la requête ou de la réclamation précisant l'identité, l'adresse, ainsi que la référence du permis de conduire de la personne qui était présumée conduire le véhicule lorsque la contravention a été constatée ;
    « 2° Soit d'un document démontrant qu'il a été acquitté une consignation préalable d'un montant égal à celui de l'amende forfaitaire dans le cas prévu par le premier alinéa de l'article 529-2, ou à celui de l'amende forfaitaire majorée dans le cas prévu par le deuxième alinéa de l'article 530 ; cette consignation n'est pas assimilable au paiement de l'amende forfaitaire et ne donne pas lieu au retrait des points du permis de conduire prévu par le quatrième alinéa de l'article L. 223-1 du code de la route.
    « L'officier du ministère public vérifie si les conditions de recevabilité de la requête ou de la réclamation prévues par le présent article sont remplies.
    « Art. 529-11. - L'avis de contravention prévu par les articles 529-1 et 529-8 peut être envoyé à la suite de la constatation d'une contravention au code de la route réalisée grâce à un appareil homologué de contrôle automatique. En cas de réclamation portée devant le tribunal de police, le procès-verbal ou le rapport de l'officier ou de l'agent de police judiciaire faisant état du résultat de ce contrôle est alors dressé.
    « Art. 529-12. - Supprimé.
    « IV. - L'article 530 du même code est ainsi modifié :
    « 1° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
    « S'il s'agit d'une contravention au code de la route, la réclamation n'est toutefois plus recevable à l'issue d'un délai de trois mois lorsque l'avis d'amende forfaitaire majorée est envoyé par lettre recommandée à l'adresse figurant sur le certificat d'immatriculation du véhicule, sauf si le contrevenant justifie qu'il a, avant l'expiration de ce délai, déclaré son changement d'adresse au service d'immatriculation des véhicules. » ;
    « 2° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
    « La réclamation doit être accompagnée de l'avis correspondant à l'amende considérée ainsi que, dans le cas prévu par l'article 529-10, de l'un des documents exigés par cet article, à défaut de quoi elle n'a pas pour effet d'annuler le titre exécutoire. »
    « V. - Non modifié.
    « V bis. - Après l'article 530-2 du même code, il est inséré un article 530-2-1 ainsi rédigé :
    « Art. 530-2-1. - Lorsque les avis de contravention ou d'amende forfaitaire majorée sont adressées à une personne résidant à l'étranger, les délais prévus par les articles 529-1, 529-2, 529-8, 529-9 et 530 sont augmentés d'un mois.
    « Les dispositions des articles 529-10 et 530 du présent code et des articles L. 121-2 et L. 121-3 du code de la route relatives aux titulaires du certificat d'immatriculation du véhicule sont applicables aux personnes dont l'identité figure sur les documents équivalents délivrés par des autorités étrangères. »
    « V ter. - L'article 706-72 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Pour le jugement des contraventions mentionnées au premier alinéa, et notamment des contraventions au code de la route, la compétence territoriale des juridictions de proximité est celle des tribunaux de police, y compris des tribunaux d'instance ayant compétence exclusive en matière pénale en application des dispositions de l'article L. 623-2 du code de l'organisation judiciaire. »
    « V quater. - Après l'article L. 130-7 du code de la route, il est inséré un article L. 130-9 ainsi rédigé :
    « Art. L. 130-9. - Lorsqu'elles sont effectuées par des appareils de contrôle automatique ayant fait l'objet d'une homologation, les constatations relatives à la vitesse des véhicules, aux distances de sécurité entre véhicules, au franchissement par les véhicules d'une signalisation imposant leur arrêt, au non-paiement des péages ou à la présence de véhicules sur certaines voies et chaussées, font foi jusqu'à preuve du contraire.
    « Lorsque ces constatations font l'objet d'un traitement automatisé d'informations nominatives mis en oeuvre conformément aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, la durée maximale de conservation de ces informations ne peut excéder dix ans, sans préjudice de la possibilité pour le conducteur du véhicule ayant fait l'objet du contrôle de demander au procureur de la République territorialement compétent d'ordonner l'effacement des informations le concernant lorsqu'il a récupéré le nombre de points ayant été retirés de son permis de conduire ou lorsque la procédure le concernant a donné lieu à une décision définitive de relaxe.
    « Pour l'application des dispositions relatives à l'amende forfaitaire, le lieu du traitement automatisé des informations nominatives concernant les constatations effectuées par les appareils de contrôle automatisé est considéré comme le lieu de constatation de l'infraction. »
    « VI et VII. - Non modifiés. ». (Adopté.)
    « Art. 7 bis A. - I. - Par dérogation aux dispositions de l'article L. 2334-24 du code général des collectivités territoriales, le produit des amendes perçu par la voie de systèmes automatiques de contrôle sanction sera versé, de 2004 à 2006, au profit du budget général de l'Etat.
    « II. - Les investissements et les coûts induits par l'installation des appareils de contrôle automatique seront pris en charge par l'Etat. » (Adopté.)

Article 8

    Mme la présidente. « Art. 8. - I et II. - Non modifiés.
    « III. - L'article L. 223-6 du même code est ainsi modifié :
    « 1° Au premier alinéa, les mots : "sanctionnée d'un retrait de points, son permis est à nouveau affecté du nombre de points initial sont remplacés par les mots : "ayant donné lieu au retrait de points, son permis est affecté du nombre maximal de points » ;
    « 2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
    « Le titulaire du permis de conduire qui a commis une infraction ayant donné lieu à retrait de points peut obtenir une récupération de points s'il suit un stage de sensibilisation à la sécurité routière. Lorsque le titulaire du permis de conduire a commis une infraction ayant donné lieu à un retrait de points égal ou supérieur au quart du nombre maximal de points et qu'il se trouve dans la période du délai probatoire défini à l'article L. 223-1, il doit se soumettre à cette formation spécifique qui se substitue à l'amende sanctionnant l'infraction. »
    « IV. - Non modifié.
    « IV bis. - Supprimé.
    « V et VI. - Non modifiés. »
    Je mets aux voix l'article 8.
    (L'article 8 est adopté.)

Après l'article 8

    Mme la présidente. M. Mariton a présenté un amendement, n° 8, ainsi libellé :
    « Après l'article 8, insérer l'article suivant :
    « I. - L'article L. 223-7 du code de la route est ainsi modifié :
    « 1° Dans le premier alinéa, le mot ", assureurs est supprimé.
    « 2° Après le premier alinéa est inséré un alinéa ainsi rédigé :
    « Par dérogation, les assureurs de responsabilité civile automobile sont autorisés à utiliser les informations relatives aux infractions et au nombre de points détenus par le titulaire d'un permis de conduire aux seules fins de différenciation tarifaire. »
    « II. - L'article L. 211-6 du code des assurances est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Les assureurs de responsabilité civile automobile qui prennent en compte dans leur tarification les infractions au code de la route, ou le nombre de points de permis détenus par des conducteurs désignés au contrat doivent impérativement décrire dans les contrats les conditions de variation de la cotisation d'assurance en fonction des infractions constatées ou des points de permis détenus. Les assureurs ne doivent traiter que des données d'infractions utiles à l'application du contrat, et doivent détruire ces données après leur période d'utilisation. »
    La parole est à M. Hervé Mariton.
    M. Hervé Mariton. Voilà un amendement dont je ne doute pas qu'il sera voté !
    J'évoquais dans mon intervention tout à l'heure la nécessité que la politique de sécurité routière soit une politique de contrainte et de répression, parfois indispensable, mais aussi une politique d'encouragement et de contrat, de confiance avec l'automobiliste.
    J'ai évoqué un premier exemple, en passant peut-être un peu rapidement d'ailleurs, celui de l'affectation du produit des amendes. J'ai souligné la légalité d'une telle affectation aux collectivités territoriales. J'aurais dû rappeler, ce que j'ai omis de faire, qu'il est affecté aux collectivités territoriales pour la sécurité routière, finalité qui pourrait d'ailleurs être mieux précisée demain.
    Là, dans le même esprit de contrat et de confiance avec l'automobiliste, il s'agit de lui démontrer que la sécurité routière n'est pas uniquement une contrainte supplémentaire. Ce qu'il paye en amende peut aider à la sécurité. Son comportement peut lui permettre de payer moins pour sa police d'assurance.
    Le problème, c'est que les sociétés d'assurance ne peuvent pas demander à l'automobiliste le nombre de points dont il dispose. Il ne s'agit pas d'introduire un système obligatoire, il s'agit de faire en sorte que les sociétés d'assurance, si elles le souhaitent, puissent demander aux automobilistes le nombre de points qu'ils détiennent, de façon à pouvoir offrir des tarifs plus avantageux à tel conducteur ou telle ou telle catégorie de conducteurs. On peut penser en particulier aux jeunes conducteurs qui disposeraient de la totalité de leurs points.
    Cette idée avait été évoquée à l'occasion de la première lecture. Avec beaucoup de bonne volonté, le ministre de l'équipement avait même envisagé que l'amendement puisse être peaufiné dans le cours de la navette et nous avait indiqué qu'il était favorable à son esprit, mais qu'il convenait au préalable de régler certains problèmes techniques.
    J'ai bien compris que les choses étaient un peu compliquées et j'ai moi-même cherché à préciser les modalités que pouvait prendre cette intégration du nombre de points dans le calcul des primes d'assurance, d'une manière volontaire et facultative telle qu'elle est présentée là.
    On pourrait imaginer un dispositif plus large et plus contraignant, du type de celui qui existe au Canada et qui a démontré son efficacité. Nous n'en sommes pas là. Il s'agit, dans cette première étape, de permettre à l'assureur d'accorder une sorte de bonus supplémentaire à un conducteur disposant de tous ses points.
    Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Richard Dell'Agnola, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement. Comme le rappelait notre collègue Mariton, nous avons eu cette discussion en première lecture et il avait alors retiré un amendement identique. La commission considérait en effet que ce dispositif, qui permettrait aux compagnies d'assurances de détenir des données personnelles, quelquefois erronées, sur les individus et sur leur situation pénale, pouvait représenter une menace pour les libertés individuelles. Se posait en outre le problème du droit des pesonnes d'accéder aux données qui les concernent et de les contester le cas échéant. C'est un problème général de droit. Sans doute faudrait-il d'ailleurs consulter la CNIL.
    Même si elle reconnaît que la démarche peut être intéressante, il faudrait prendre tant de précautions que la commission a repoussé cet amendement.
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le garde des sceaux. L'amendement de M. Mariton pose deux problèmes.
    Le premier vient d'être signalé par la commission : il ne paraît pas envisageable de permettre à des entreprises privées d'accéder à des fichiers à caractère pénal. M. Mariton l'a d'ailleurs bien compris, et le dispositif qu'il propose aujourd'hui repose sur le volontariat, l'assuré devant lui-même communiquer l'information à la compagnie d'assurances. Je me dois de vous mettre en garde. Je sais bien qu'il n'y a que des honnêtes gens dans notre pays, mais si, après avoir contracté son assurance pour l'année, on se voit retirer trois points, ne serait-on pas tenté de ne pas prévenir la compagnie ? Est-on absolument sûr que l'on ne rentrerait pas alors dans un système de contentieux phénoménal ? De quel moyen de contrôle une compagnie d'assurances dispose-t-elle aujourd'hui dans notre arsenal législatif et réglementaire ? D'aucun. L'idée est donc bonne, intéressante, parce qu'elle est pédagogique, notamment vis-à-vis des jeunes. En même temps, je ne crois pas qu'elle soit pratiquable dans le texte tel qu'il est. Je m'en suis entretenu avec Gilles de Robien, et le ministre de l'économie et des finances est également d'accord, et je crois qu'il serait intéressant que nous puissions avancer dans les discussions avec les compagnies d'assurances, pour trouver un système d'incitation au bon comportement routier, indépendamment du système bonus-malus, qui pose d'ailleurs des problèmes au niveau de l'Union européenne, la Commission ayant fait des observations sur notre dispositif. Mais, pour être efficace, un système pédagogique devrait porter sur d'autres critères - qui restent à définir - que celui du nombre de points sur le permis. C'est la raison pour laquelle je demande à M. Mariton d'accepter de retirer son amendement.
    Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Mariton.
    M. Hervé Mariton. Je répondrai d'abord aux observations du rapporteur. Je comprends bien qu'un dispositif de ce type doit nécessairement respecter toutes les libertés publiques, mais je ne sais pas si, dans le cas où l'Assemblée envisagerait de telles dispositions, elle aurait à en saisir la CNIL. Je ne suis pas sûr, d'un point de vue de construction et d'élaboration du droit, que ce soit là une démarche raisonnable. Nous sommes ici pour voter la loi, et la CNIL n'a pas, à ma connaissance, d'autorité supralégislative.
    En ce qui concerne l'accès aux fichiers, je crois avoir compris - mais peut-être suis-je mal renseigné et le garde des sceaux pourra-t-il me corriger - que, pour rendre opératoire le système de contrôles-sanctions automatiques, et l'Etat n'étant pas tout à fait sûr de la qualité de ses fichiers, il pourrait avoir besoin - je formule cela avec toutes les précautions nécessaires - des fichiers des compagnies d'assurances. Peut-être suis-je en train de prendre le contrepied de mon amendement : en tout état de cause, cela prouve que la question de la circulation entre les fichiers des compagnies d'assurances et ceux des documents administratifs liés à la capacité de conduire se pose de manière évidente. Il est vrai, monsieur le garde des sceaux, que tout repose sur la bonne foi du déclarant, et qu'elle devrait nécessairement être contrôlée en cas de survenue d'un accident. La mauvaise foi pourrait alors être pénalisée. C'est le seul contrôle qui soit prévu, mais il me paraît suffisant.
    Cela étant, je comprends que la discussion doit être poursuivie. Il faut essayer de travailler dans cet esprit, qui correspond bien à l'objectif pédagogique qui est indispensable à la politique de sécurité routière. Sans doute cette affaire n'est-elle pas encore assez mûre aujourd'hui. Sans doute les progrès depuis la première lecture sont-ils trop partiels. Je propose donc que nous reprenions cette discussion à une prochaine occasion. Dans cet esprit, je retire cet amendement.
    Mme la présidente. L'amendement n° 8 est retiré.

Article 9 bis

    Mme la présidente. « Art. 9 bis. - I. - Non modifié.
    « II. - L'article L. 224-14 du même code est ainsi rédigé :
    « Art. L. 224-14. - En cas d'annulation du permis de conduire prononcée en application du présent code ou pour les délits prévus par les articles 221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1 du code pénal ou en cas de suspension du permis de conduire dont la durée est fixée par décret en Conseil d'Etat, l'intéressé ne peut solliciter un nouveau permis ou la restitution de son permis sans avoir été reconnu apte après un examen ou une analyse médicale, clinique, biologique, et psychotechnique effectué à ses frais. »
    Je mets aux voix l'article 9 bis.
    (L'article 9 bis est adopté.)

Article 12 AA

    Mme la présidente. Je donne lecture de l'article 12 AA.

Chapitre IV
Autres dispositions de nature à renforcer
la sécurité routière

« Section 1A

« Disposition relative au développement des équipements
de sécurité sur les véhicules neufs

    « Art. 12 AA. - Les engins terrestres à moteur vendus neufs sur le territoire français devront être munis d'un régulateur de vitesse. »
    Je mets aux voix l'article 12 AA.
    (L'article 12 AA est adopté.)

Article 12 A

    Mme la présidente. Le Sénat a supprimé l'article 12 A.

Article 13 bis

    Mme la présidente. Le Sénat a supprimé l'article 13 bis.

Article 14

    Mme la présidente. « Le titre II du livre III du code de la route est ainsi modifié :
    « 1° L'intitulé du chapitre IV est ainsi rédigé : "Organisation de la profession d'expert en automobile ;
    « 2° Au premier alinéa de l'article L. 326-3, les mots : ", en nombre égal, sont supprimés ;
    « 3° a) Les articles L. 326-10 à L. 326-12 deviennent les articles L. 327-1 à L. 327-3 et constituent un chapitre VII intitulé "Véhicules endommagés ;
    « b) Dans le premier alinéa de l'article L. 327-3, la référence : "L. 326-10 est remplacée par la référence : "L. 327-1 ;
    « 4° Le chapitre VII est complété par les articles L. 327-4 à L. 327-6 ainsi rédigés :
    « Art. L. 327-4. - Lorsqu'en raison de la gravité des dommages qu'il a subis, un véhicule a été immobilisé en application des articles L. 325-1 à L. 325-3, l'officier ou l'agent de police judiciaire qui procède aux constatations retire à titre conservatoire le certificat d'immatriculation.
    « En l'absence de remise du certificat d'immatriculation, le préfet ou, à Paris, le préfet de police avise le propriétaire de l'interdiction de circulation de son véhicule et procède à l'inscription d'une opposition au transfert du certificat d'immatriculation jusqu'à la remise de ce document.
    « Le véhicule n'est remis en circulation qu'au vu du rapport d'un expert en automobile certifiant que ledit véhicule est en état de circuler dans des conditions normales de sécurité.
    « Art. L. 327-5. - Lorsqu'un expert en automobile constate qu'en raison de son état, un véhicule ne peut circuler dans des conditions normales de sécurité, il en informe le préfet du département du lieu de constatation ou, à Paris, le préfet de police, sans que puissent y faire obstacle les règles relatives au secret professionnel. Le préfet avise le propriétaire de l'interdiction de circulation de son véhicule et procède à l'inscription d'une opposition au transfert du certificat d'immatriculation jusqu'à la remise de ce document.
    « Le véhicule n'est remis en circulation qu'au vu d'un rapport d'un expert en automobile certifiant que ledit véhicule est en état de circuler dans des conditions normales de sécurité.
    « Art. L. 327-6. - Non modifié. »
    Je mets aux voix l'article 14.
    (L'article 14 est adopté.)

Article 16

    Mme la présidente. « Art. 16. - Le titre Ier du code de la voirie routière est complété par un chapitre IX ainsi rédigé :

« Chapitre IX

« « Dispositif d'information sur le réseau routier

    « Art. L. 119-1. - Le préfet communique chaque année aux départements, aux communes ou à leurs groupements un rapport d'information sur les accidents de la circulation routière et les infractions graves commises sur le réseau routier dont ils assurent la gestion.
    « Les départements, les communes et leurs groupements établissent, dans les conditions prévues à l'article L. 1614-7 du code général des collectivités territoriales, les statistiques relatives au réseau routier dont ils assurent la gestion. Ils les communiquent au représentant de l'Etat dans le département.
    « Le seuil de population à partir duquel cette obligation s'applique, les éléments à fournir ainsi que la fréquence de leur mise à jour sont fixés par décret en Conseil d'Etat. »
    Je mets aux voix l'article 16.
    (L'article 16 est adopté.)

Article 18

    Mme la présidente. « Article 18. - La loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs est ainsi modifiée :
    « I A. - L'article 5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Sont considérés comme des transports de marchandises les opérations de transport effectuées dans le cadre d'un déménagement. »
    « I. - L'article 8 est ainsi modifié :
    « 1° Au premier alinéa du I, après les mots : « de transporteur public de marchandises, », sont insérés les mots : « de déménageur, », et, après les mots : « de loueur de véhicules industriels destinés au transport », sont insérés les mots : « , de commissionnaire de transport » ;
    « 2° Au dernier alinéa du I, après les mots : « sont considérés comme », sont insérés les mots : « commissionnaires de transport et comme », et, après les mots : « l'exécution de transport de marchandises », sont ajoutés les mots : « ou de déménagement » ;
    « 3° Au premier alinéa du II, après les mots : « transport public de marchandises », sont insérés les mots : « ou tout contrat relatif au déménagement » ; après les mots : « l'objet du transport », sont insérés les mots : « ou du déménagement » ; après les mots : « du transporteur », sont insérés les mots : « , du déménageur », et, après les mots : « le prix du transport », sont insérés les mots : « ou du déménagement ».
    « Cet alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
    « De même, le contrat de commission de transport doit faire l'objet de dispositions identiques. » ;
    « 4° Au début du deuxième alinéa du II, le mot : « A » est remplacé par les mots : « Sans préjudice de dispositions législatives en matière de contrat et à » ;
    « 5° Au IV, après les mots : « La rémunération », sont insérés les mots : « des commissaires de transport et ».
    « I bis. - Au quatrième alinéa de l'article 9, après les mots : « dans les contrats de transport », son insérés les mots : « , dans les contrats relatifs au déménagement ».
    « I ter. - Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article 12, après les mots : « des entreprises de transport », sont insérés les mots : « , de déménagement ».
    « II à IV. - Non modifiés. »
    Je mets aux voix l'article 18.
    (L'article 18 est adopté.)

Articles 19 bis, 20 A, 20, 20 bis

    « Art. 19 bis. - La loi n° 95-66 du 20 janvier 1995 relative à l'accès à l'activité de conducteur et à la profession de taxi est ainsi modifiée :
    « I. - Après l'article 2, il est inséré un article 2 bis ainsi rédigé :
    « Art. 2 bis. - L'exercice de l'activité de conducteur de taxi nécessite d'être titulaire d'une carte professionnelle délivrée par le préfet.
    « Le préfet peut, en cas de violation par le conducteur de la réglementation applicable à la profession, lui donner un avertissement ou procéder au retrait temporaire ou définitif de sa carte professionnelle. »
    « II. - Après l'article 6, il est inséré un article 6 bis ainsi rédigé :
    « Art. 6 bis. - L'autorité administrative compétente pour délivrer l'autorisation de stationnement peut, lorsque celle-ci n'est pas exploitée de façon effective ou continue, ou en cas de violation grave ou répétée par son titulaire de son contenu ou de la réglementation applicable à la profession, lui donner un avertissement ou procéder au retrait temporaire ou définitif de son autorisation de stationnement. »
    « III. - Après l'article 7, il est inséré un article 7 bis ainsi rédigé :
    « Art. 7 bis. - Les pouvoirs dévolus au préfet par la présente loi sont exercés par le préfet de police dans la zone définie pour l'exercice des attributions énumérées à l'article 1er de la loi du 13 mars 1937 ayant pour objet l'organisation de l'industrie du taxi. »
    Je mets aux voix l'article 19 bis.
    (L'article 19 bis est adopté.)
    Mme la présidente. « Art. 20 A. - Les dispositions des articles 529-10, 529-11 et 530-2-1 du code de procédure pénale résultant de l'article 7 de la présente loi sont insérés à l'article L. 121-5 du code de la route reproduisant les articles 529-7 à 530-3 du code de procédure pénale relatif à la procédure de l'amende forfaitaire. » (Adopté.)
    « Art. 20. - L'article L. 232-1 du code de la route est remplacé par les articles L. 232-1 à L. 232-3 ainsi rédigés :
    « Art. L. 232-1. - Non modifié.
    « Art. L. 232-2. - Les dispositions relatives aux atteintes involontaires à l'intégrité de la personne commises par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur sont fixées par les articles 222-19-1, 222-20-1 et 222-44 du code pénal ci-après reproduits :
    « Art. 222-19-1. - Lorsque la maladresse, l'imprudence, l'inattention, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévu par l'article 222-19 est commis par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois est punie de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 EUR d'amende.
    « Les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 EUR d'amende lorsque :
    « 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci-après ;
    « 2° Le conducteur se trouvait en état d'ivresse manifeste ou était sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang ou dans l'air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par ce code et destinées à établir l'existence d'un état alcoolique ;
    « 3° Il résulte d'une analyse sanguine que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le code de la route destinées à établir s'il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;
    « 4° Le conducteur n'était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;
    « 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h ;
    « 6° Le conducteur, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, ne s'est pas arrêté et a tenté ainsi d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut encourir.
    « Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 EUR d'amende lorsque l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne a été commise avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° et suivants du présent article.
    « Art. 222-20-1. - Lorsque la maladresse, l'imprudence, l'inattention, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de sécurité ou de prudence prévu par l'article 222-19 est commis par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne ayant entraîné une incapacité totale de travail d'une durée inférieure ou égale à trois mois est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 EUR d'amende.
    « Les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et à 45 000 EUR d'amende lorsque :
    « 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci-après ;
    « 2° Le conducteur se trouvait en état d'ivresse manifeste ou était sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang ou dans l'air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par ce code et destinées à établir l'existence d'un état alcoolique ;
    « 3° Il résulte d'une analyse sanguine que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le code de la route destinées à établir s'il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;
    « 4° Le conducteur n'était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;
    « 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h ;
    « 6° Le conducteur, sachant qu'il vient de causer ou d'occasionner un accident, ne s'est pas arrêté et a tenté ainsi d'échapper à la responsabilité pénale ou civile qu'il peut encourir.
    « Les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 EUR d'amende lorsque l'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne a été commise avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° et suivants du présent article.
    « Art. 222-44. - Les personnes physiques coupables des infractions prévues au présent chapitre encourent également les peines complémentaires suivantes :
    « 1° L'interdiction, suivant les modalités prévues par l'article 131-27, d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise ;
    « 2° L'interdiction de détenir ou de porter, pour une durée de cinq ans au plus, une arme soumise à autorisation ;
    « 3° La suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire, cette suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ; dans les cas prévus par les articles 222-19-1 et 222-20-1, la suspension ne peut pas être assortie du sursis, même partiellement, et ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ; dans les cas prévus par les 1° à 6° et le dernier alinéa des articles 222-19-1 et 222-20-1, la durée de cette suspension est de dix ans au plus ;
    « 4° L'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant cinq ans au plus ;
    « 5° La confiscation d'un ou plusieurs véhicules appartenant au condamné ;
    « 6° La confiscation d'une ou plusieurs armes dont le condamné est propriétaire ou dont il a la libre disposition ;
    « 7° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit ;
    « 8° Dans les cas prévus par les articles 222-19-1 et 222-20-1, l'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
    « 9° Dans les cas prévus par les articles 222-19-1 et 222-20-1, l'obligation d'accomplir, à leurs frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;
    « 10° Dans les cas prévus par les articles 222-19-1 et 222-20-1, l'immobilisation, pendant une durée d'un an au plus, du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction, s'il en est le propriétaire.
    « Toute condamnation pour les délits prévus par les 1° à 6° et le dernier alinéa de l'article 222-19-1 donne lieu de plein droit à l'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter un nouveau permis pendant dix ans au plus. »
    « Art. L. 232-3. - Non modifié ».- (Adopté.)
    « Art. 20 bis. - Les dispositions des articles L. 121-5, L. 231-1, L. 231-2 et L. 231-3 du code de la route reproduisant des articles du code de procédure pénale ou du code pénal sont modifiées par l'effet des modifications ultérieures de ces articles. » (Adopté.)

Articles 21 quinquies et 21 sexies

    Mme la présidente. « Art. 21 quinquies. - A la fin du 3° de l'article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales, les mots : "et constitue une infraction au sens de l'article R. 417-10 du code de la route sont supprimés. »
    Je mets aux voix l'article 21 quinquies.

    (L'article 21 quinquies est adopté.)
    Mme la présidente. « Art. 21 sexies. - L'article L. 325-9 du code de la route est complété par un alinéa ainsi rédigé :
    « Le montant des redevances pour frais de fourrière est fixé par arrêté et tient compte des difficultés de mise en oeuvre des opérations d'enlèvement et de garde liées à l'importance des communes dans lesquelles ces opérations sont effectuées et à l'existence des problèmes de circulation et de stationnement que connaissent ces communes. » (Adopté.)

Articles 22 bis, 23, 24, 25, 25 bis A

    Mme la présidente. « Art. 22 bis. - I. - L'article L. 130-4 du code de la route est ainsi rédigé :
    « Art. L.130-4. - Sans préjudice de la compétence générale des officiers et des agents de police judiciaire, ont compétence pour constater par procès-verbal les contraventions prévues par la partie Réglementaire du présent code ou par d'autres dispositions réglementaires, dans la mesure où elles se rattachent à la sécurité et à la circulation routières :
    « 1° Les personnels de l'Office national des forêts ;
    « 2° Les gardes champêtres des communes ;
    « 3° Les agents titulaires ou contractuels de l'Etat et les agents des communes, titulaires ou non, chargés de la surveillance de la voie publique, agréés par le procureur de la République ;
    « 4° Les agents, agréés par le procureur de la République, de ceux des services publics urbains de transport en commun de voyageurs qui figurent sur une liste dressée dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ;
    « 5° Les officiers de port et les officiers de port adjoints ;
    « 6° Les fonctionnaires ou agents de l'Etat chargés du contrôle des transports terrestres placés sous l'autorité du ministre chargé des transports ;
    « 7° Les agents des douanes ;
    « 8° Les agents des concessionnaires d'une autoroute ou d'un ouvrage routier ouvert à la circulation publique et soumis à péage, agréés par le préfet ;
    « 9° Les agents verbalisateurs mentionnés à l'article L. 116-2 du code de la voirie routière ;
    « 10° Les agents des exploitants d'aérodrome, assermentés et agréés par le préfet pour les seules contraventions aux règles de stationnement dans l'emprise de l'aérodrome ;
    « 11° Les agents de police judiciaire adjoints ;
    « 12° Les fonctionnaires ou agents de l'Etat, chargés des réceptions des véhicules ou éléments de véhicules, placés sous l'autorité des ministres chargés de l'industrie et des transports.
    « La liste des contraventions que chaque catégorie d'agents mentionnées ci-dessus est habilitée à constater est fixée par décret en Conseil d'Etat. »
    « II. - Après l'article L. 130-6 du même code, il est inséré un article L. 130-7 ainsi rédigé :
    « Art. L. 130-7. - Lorsqu'ils ne sont pas déjà assermentés, les agents qui ont compétence pour constater par procès-verbal les contraventions prévues à l'article L. 130-4 prêtent serment devant le juge du tribunal d'instance.
    « Ce serment, dont la formule est fixée par décret en Conseil d'Etat, est renouvelé en cas de changement de lieu d'affectation de l'intéressé. »
    « III. - Au I de l'article L. 221-2 du même code, la somme : "4 500 euros est remplacée par la somme : "3 750 euros.
    « IV. - Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés, en tant que leur légalité serait contestée pour un motif tiré de l'illégalité de l'ordonnace n° 2000-1255 du 21 décembre 2000, les actes pris en application de ladite ordonnance. »
    Je mets aux voix l'article 22 bis.
    (L'article 22 bis est adopté.)
    « Article 23. - I. - Les dispositions des I, II et III de l'article L. 711-1 et celles des articles L. 711-2 à L. 741-3 du code de l'aviation civile sont applicables à l'enquête technique relative à un accident ou un incident survenu à un aéronef conçu exclusivement à usage militaire ou exploité en circulation aérienne militaire ou à un aéronef qui n'est pas inscrit au registre d'immatriculation de l'aviation civile.
    « Pour l'application des articles L. 711-2, L. 711-3 et L. 731-1 du même code, les attributions du ministre chargé de l'aviation civile, des agents appartenant aux corps techniques de l'aviation civile et des autorités administratives chargées de la sécurité de l'aviation civile sont exercées respectivement par le ministre de la défense, les agents commissionnés ou agréés et les organismes militaires ou civils chargés de la sécurité aérienne.
    « Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article.
    « II. - Au premier alinéa de l'article L. 711-2 du code de l'aviation civile, après les mots : "organisme permanent spécialisé, sont insérés les mots : "ou sous son contrôle. » (Adopté.)
    « Art. 24. - Au I de l'article 68 de la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, les mots : "qu'à leur demande ou si les intéressés sont autorisés à travailler, en raison des nécessités d'organisation du travail sont remplacés par les mots et les 1° à 4° ainsi rédigés :
    « Que dans les cas suivants :
    « 1° Si les intéressés en font la demande ;
    « 2° Si leur personnalité justifie, dans leur intérêt, qu'ils ne soient pas laissés seuls ;
    « 3° S'ils ont été autorisés à travailler, ou à suivre une formation professionnelle ou scolaire et que les nécessités d'organisation l'imposent ;
    « 4° Dans la limite de cinq ans à compter de la promulgation de la loi n°        du        renforçant la lutte contre la violence routière, si la distribution intérieure des maisons d'arrêt ou le nombre de détenus présents ne permet pas un tel emprisonnement individuel. » (Adopté.)
    « Art. 25. - Sont applicables à Mayotte :
    « 1° Le II de l'article 3, les IV et V de l'article 4, le X et le XI de l'article 5, les X à XIX de l'article 6, le I, le VI et le VII de l'article 7, les articles 7 bis à 11 bis, les I et II de l'article 12, les articles 14 à 16 bis, les I et II de l'article 17 et les articles 20 à 24 de la présente loi.
    « 2° Les articles L. 235-1 à L. 235-4 du code de la route ;
    « 3° L'article L. 211-6 du code des assurances. » (Adopté.)
    « Art. 25 bis A. - I. - A l'article L. 141-1 du code de la route, il est ajouté un 4° ainsi rédigé :
    « 4° "Tribunal de police par "Tribunal de première instance.
    « II. - A l'article L. 142-1 du code de la route, il est ajouté un 3° et un 4° ainsi rédigés :
    « 3° "Préfet par "représentant du Gouvernement ;
    « 4° "Tribunal de police par "Tribunal de première instance.
    « III. - Après l'article L. 142-3 du code de la route, sont insérés deux articles L. 142-4 et L. 142-5 ainsi rédigés :
    « Art. L. 142-4. - Pour l'application dans la collectivité territoriale de Mayotte du 9° de l'article L. 130-4, les agents verbalisateurs compétents sont :
    « 1° Sur les voies de toutes catégories :
    « a) Les gardes champêtres des communes et les gardes particuliers assermentés,
    « b) Les agents de police municipale ;
    « 2° Sur les voies publiques ressortissant à leurs attributions :
    « a) Les ingénieurs des ponts et chaussées et les ingénieurs des travaux publics de l'Etat, assermentés,
    « b) Les techniciens des travaux publics de l'Etat, les contrôleurs principaux des travaux publics de l'Etat et les agents des travaux publics de l'Etat, quand ils sont commissionnés et assermentés à cet effet.
    « Art. L. 142-5. - Pour l'application dans la collectivité territoriale de Mayotte du présent code, il est ajouté à l'article L. 130-4 un 13° ainsi rédigé :
    « 13° Les fonctionnaires de la police de Mayotte dans les conditions prévues à l'article 879-1 du code de procédure pénale ; ».
    « IV. - Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés, en tant que leur légalité serait contestée pour un motif tiré de l'illégalité de l'ordonnance n° 2000-1255 du 21 décembre 2000, les actes pris en application de ladite ordonnance. » (Adopté.)

Article 27

    Mme la présidente. « Art. 27. - La deuxième phrase du quatorzième alinéa de l'article L. 3612-2 du code de la santé publique est ainsi rédigée :
    « Il n'est pas révocable et peut-être renouvelé une fois. »
    Je mets aux voix l'article 27.
    (L'article 27 est adopté.)

Explications de vote

    Mme la présidente. Dans les explications de vote, la parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. Le Gouvernement ayant exaucé nos souhaits en obtenant le retrait de l'amendement de M. Garraud, le groupe socialiste votera ce texte.
    Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Mariton.
    M. Hervé Mariton. Le groupe UMP, soucieux d'équilibrer répression et pédagogie, votera ce texte. Il rappelle cependant qu'il souhaite vivement que l'amendement de notre collègue Garraud soit repris dans de prochaines dispositions législatives.
    Mme la présidente. La parole est à M. André Gerin.
    M. André Gerin. Les député-e-s communistes et républicains s'abstiendront.

Vote sur l'ensemble

    Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?
    Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
    (L'ensemble du projet de loi est adopté.)

3

DÉPÔT D'UN RAPPORT

    Mme la présidente. J'ai reçu, le 4 juin 2003, de M. Gilbert Gantier un rapport, n° 896, fait au nom de la commission des affaires étrangères, sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention sur les effets transfrontières des accidents industriels (ensemble treize annexes) (n° 649).

4

DÉPÔT D'UN RAPPORT SUR UNE
PROPOSITION DE RÉSOLUTION

    Mme la présidente. J'ai reçu, le 4 juin 2003, de M. Dominique Le Mèner un rapport, n° 897, fait au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, sur la proposition de résolution de M. Christian Philip sur le deuxième paquet ferroviaire (documents n°s E 1932, E 1936, E 1937 et E 1941) (n° 712).

5

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

    Mme la présidente. Aujourd'hui, à dix heures, première séance publique :
    Discussion du projet de loi, n° 810, modifiant la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile :
    M. Jean Leonetti, rapporteur, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 883),
    M. Eric Raoult, rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires étrangères (avis n° 872).
    Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, n° 881, de programme pour l'outre-mer :
    M. Philippe Auberger, rapporteur, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 891),
    M. Joël Beaugendre, rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (avis n° 887).
    A quinze heures, deuxième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    A vingt et une heure trente, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée, le jeudi 5 juin 2003, à deux heures.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexe au procès-verbal
de la 2e séance
du mercredi 4 juin 2003
SCRUTIN (n° 156)


sur les amendements n° 40 de M. Goldberg et 86 de M. Vergnier tendant à supprimer l'article 26
ter du projet de loi, modifié par le Sénat, pour l'initiative économique (deuxième lecture) (exonération d'impôt de solidarité sur la fortune pour les souscriptions au capital de PME).

Nombre de votants

59


Nombre de suffrages exprimés

59


Majorité absolue

30


Pour l'adoption

14


Contre

45

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Contre : 43 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 10 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : Mme Paulette Guinchard-Kunstler (président de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Contre : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non inscrits (12).