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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU MERCREDI 25 JUIN 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
3e séance du mardi 24 juin 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Réforme des retraites. - Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi «...».

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Article 16 (suite) «...»

Amendements de suppression n°s 5101 à 5107 de Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains : MM. Jacques Desallangre, Bernard Accoyer, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. - Rejet.
Amendements identiques n°s 5108 à 5114 de Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, le ministre, Jean-Claude Lefort. - Retrait.
Amendements identiques n°s 1146 de la commission des affaires culturelles et 3061 de Mme Hoffman-Rispal ; MM. le rapporteur, Gaëtan Gorce, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 11230 du Gouvernement, avec le sous-amendement n° 11235 de M. Le Fur : MM. le ministre, le rapporteur, Marc Le Fur, Maxime Gremetz.
Sous-amendement oral de M. Gremetz : M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. - Ce sous-amendement est déclaré irrecevable.
MM. Maxime Gremetz, Pascal Terrasse, Jean-Pierre Brard, Jean-Luc Préel, Denis Jacquat, Alain Néri, le président de la commission des finances, le ministre, Marc Le Fur. - Retrait du sous-amendement n° 11235.
Sous-amendement n° 11235 repris par M. Brard : M. Jean-Pierre Brard. - Rejet.
Adoption, par scrutin, de l'amendement n° 11230.
Amendements identiques n°s 5115 à 5121 de Mme Buffet des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains : M. Maxime Gremetz. - Retrait.
Adoption de l'article 16 modifié.

Après l'article 16 «...»

Amendements identiques n°s 18 de la commission des finances et 1691 à 1839 de Mme Adam et des membres du groupe socialiste et apparentés : MM. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis de la commission des finances ; Augustin Bonrepaux, le rapporteur, le ministre, Jacques Desallangre, Pascal Terrasse. - Adoption par scrutin.
Amendement n° 19 de la commission des finances, avec les sous-amendements n°s 11231 et 11232 de M. Xavier Bertrand : MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le ministre, Jacques Desallangre, Jean-Pierre Brard, Mme Paulette Guinchard-Kunstler, le président de la commission des finances, le rapporteur, le ministre.
Sous-amendement n° 11236 de M. Desallangre : M. le ministre.

Rappel au règlement «...»

MM. Pascal Terrasse, le président.

Suspension et reprise de la séance
Reprise de la discussion
«...»

MM. le ministre, Maxime Gremetz, le président. - Adoption, par scrutins, des sous-amendements n°s 11231 rectifié et 11232 ; rejet, par scrutin, du sous-amendement n° 11236 ; adoption, par scrutin, de l'amendement n° 19 modifié.

Article 17 «...»

MM. Pascal Terrasse, Denis Jacquat, Patrick Braouezec, Alain Néri, Jean-Pierre Brard.
Amendements de suppression n°s 3052 de M. Terrasse et 5178 à 5184 de Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains : MM. Gaëtan Gorce, le rapporteur, le ministre, Pierre Goldberg, Pascal Terrasse, Maxime Gremetz. - Rejet.
Amendements identiques n°s 5185 à 5191 de Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains : MM. Jean-Claude Sandrier, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 1147 de la commission des affaires culturelles : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 5025 rectifié de la commission des affaires culturelles et amendements identiques n°s 5199 à 5205 de Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains : MM. le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Brard. - Adoption de l'amendement n° 5025 rectifié ; les amendements n°s 5199 à 5205 sont satisfaits.
Amendements identiques n°s 5206 à 5212 de Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains : MM. Jean-Claude Lefort, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
MM. Maxime Gremetz, Denis Jacquat, Pascal Terrasse.
Adoption, par scrutin, de l'article 17 modifié.
M. Alain Bocquet.

Suspension et reprise de la séance «...»
Article 18 «...»

MM. Pascal Terrasse, Denis Jacquat, Daniel Paul, Alain Bocquet.
Amendements de suppression n°s 5220 à 5226 de Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains : MM. Jean-Claude Sandrier, le rapporteur, le ministre, Maxime Gremetz, Pascal Terrasse. - Rejet.
Amendements identiques n°s 5234 à 5240 de Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains : MM. Pierre Goldberg, le rapporteur, le ministre, Maxime Gremetz. - Rejet.
Amendements identiques n°s 5241 à 5247 de Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements identiques n°s 5248 à 5254 de Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains : MM. Jean-Claude Lefort, le rapporteur, le ministre, Maxime Gremetz. - Rejet par scrutin.
L'amendement n° 10809 n'est pas défendu.
Amendement n° 1148 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
MM. Alain Bocquet, Maxime Gremetz, Pascal Terrasse.
Adoption, par scrutin, de l'article 18 modifié.

Article 19 «...»

MM. Pascal Terrasse, Denis Jacquat, Daniel Paul, Alain Néri, Pierre Goldberg.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
2.  Dépôt d'un rapport «...».
3.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à vingt-deux heures.)

1

RÉFORME DES RETRAITES

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence,
d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi portant réforme des retraites (n°s 885, 898).

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée aux amendements identiques n°s 5101 à 5107 à l'article 16.

Article 16 (suite)

    M. le président. Je rappelle les termes de l'article 16 :
    « Art. 16. - I - A la section 1 du chapitre 1er du titre V du livre III du code de la sécurité sociale, est inséré l'article L. 351-1-1 rédigé comme suit :
    « Art. L. 351-1-1. - L'âge prévu au premier alinéa de l'article L. 351-1 est abaissé, pour les assurés qui ont commencé leur activité avant un âge et dans des conditions déterminées par décret et ont accompli une durée totale d'assurance et de périodes reconnues équivalentes dans le régime général et, le cas échéant, dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, au moins égale à une limite définie par décret, tout ou partie de cette durée totale ayant donné lieu au versement de cotisations à la charge de l'assuré. Un décret précise les modalités d'applications du présent article. »
    II. - A la section 2 du chapitre IV du titre III du livre VI du code de la sécurité sociale, il est inséré avant l'article L. 634-4 un article L. 634-3-2 rédigé comme suit :
    « Art. L. 634-3-2. - L'âge prévu au premier alinéa de l'article L. 351-1 est abaissé, pour les assurés qui ont commencé leur activité avant un âge et dans des conditions déterminées par décret et ont accompli une durée totale d'assurance dans les régimes d'assurance vieillesse des travailleurs non salariés des professions artisanales, industrielles et commerciales et, le cas échéant, dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires et de périodes reconnues équivalentes au moins égales à un seuil défini par décret, tout ou partie de cette durée totale ayant donné lieu au versement de cotisations à la charge de l'assuré. Un décret précise les modalités d'application du présent article. »
    Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 5101 à 5107.
    L'amendement n° 5101 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 5102 est présenté par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 5103 est présenté par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 5104 est présenté par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 5105 est présenté par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 5106 est présenté par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 5107 est présenté par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 16. »
    La parole est à M. Jacques Desallangre.
    M. Jacques Desallangre. A ce stade du débat, il est sans doute bon de rappeler que, comme pour les quinze articles précédents - et sans compter les articles additionnels dont nous avons proposé l'adoption -, la quasi-totalité de nos amendements ont été déclarés irrecevables, en vertu d'une interprétation que nous jugeons très libre de l'article 40.
    Mais faut-il revenir sur l'habileté discutable qui consiste à se réclamer d'une de nos propositions de loi pour en dénaturer complètement le contenu ? Chacun a pourtant reconnu la justesse et la légitimité de cette proposition, et l'oeuvre de réparation sociale qu'elle permettait. Qu'est-ce qui, dans ces conditions, justifie la manoeuvre qu'on nous oppose ?
    Nous avons en effet déposé en commission onze amendements, qui reprenaient notre proposition de loi, ainsi qu'un article additionnel avant l'article 16. Sur ces douze amendements, seuls nos trois amendements de suppression pourront être débattus en séance.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Ça n'est déjà pas mal !
    M. Jacques Desallangre. Nous voulions, par nos amendements, rétablir l'esprit qui nous animait sous la précédente législature, quand avait été discutée une proposition dont j'étais le premier signataire, pour le compte d'un autre groupe, et à laquelle s'était associé le groupe communiste, mais qui n'avait pu être prise complètement en compte.
    Pourquoi refuser d'accorder une retraite à taux plein aux salariés qui ont déjà cotisé cent soixante trimestres, soit quarante annuités, avant l'âge de soixante ans ? Pourquoi réduire ensuite - si l'on s'en tient aux déclarations que vous avez faites, monsieur le ministre - la portée d'un principe de justice et d'équité ? Pourquoi, si ce n'est pour allonger, par un artifice assez hypocrite, la durée de cotisation des futurs bénéficaires à quarante-deux ans ? Il est totalement incompréhensible que l'on prévoie une exception de ce type pour des femmes et des hommes qui ont été conduits à travailler dès leur jeunesse dans des métiers dont la pénibilité n'est plus à démontrer. Si cet article était adopté en l'état, vous pénaliseriez, au nom d'une prétendue justice sociale dont vous agitez l'image plus que vous ne l'appliquez, ces salariés dont tout le monde reconnaît pourtant qu'ils ont le droit à une retraite immédiate. Qu'en est-il de la pénibilité de leur travail et des périodes de chômage que beaucoup ont connues dans leur secteur professionnel ? Doit-on leur imputer la responsabilité de la casse industrielle sans précédent que nous connaissons en France depuis plusieurs années ?
    L'article additionnel avant l'article 16 que nous avons proposé visait précisément à leur offrir une retraite à taux plein dès quarante années d'activité. Pour ce faire, il suffit d'inscrire dans la loi, très simplement, que, par mesure de justice sociale, les salariés peuvent liquider leur retraite à taux plein dès lors qu'ils comptent quarante annuités de cotisation. C'était notre proposition. Elle a le mérite d'être simple, claire et juste.
    Au-delà de la contestation de tel ou tel chiffre, tout nous ramène au débat sur le financement du projet et sur l'élargissement de l'assiette des cotisations. Vous nous avez opposé le problème du coût. Entrons dans ce débat, et nous trouverons la réponse à cette question.
    M. Maxime Gremetz. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 5101 à 5107.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le président, mes chers collègues, la commission s'est étonnée de ces amendements qu'ont déposés nos collègues du groupe communiste et néanmoins républicain, d'autant plus que l'article qu'ils veulent supprimer reprend la plus grande partie de la proposition de loi qu'avait déposée le président Bocquet et qu'avait refusée le ministre des affaires sociales de l'époque, Mme Guigou.
    M. François Goulard. Quelle réactionnaire, celle-là !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Jugeant que cet article constitue une avancée sans précédent, et très onéreuse, qu'il répond aux attentes des salariés qui ont commencé à travailler à quatorze, quinze ou seize ans, qui totalisent quarante années de cotisation et souhaitent partir avant soixante ans, la commission a rejeté ces amendements.
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, pour donner l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 5101 à 5107.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 5101 à 5107.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 5108 à 5114.
    L'amendement n° 5108 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 5109 est présenté par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 5110 est présenté par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 5111 est présenté par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 5112 est présenté par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 5113 est présenté par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 5114 est présenté par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le I de l'article 16. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    Ces amendements sont-ils défendus, monsieur Gremetz ?
    M. Maxime Gremetz. Rien n'est défendu, tout doit se défendre ! Pied à pied !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Encore faut-il que ce soit défendable !
    M. Maxime Gremetz. Parce que ces amendements ne seraient pas défendables ?
    M. le président. Monsieur Gremetz, ne vous laissez pas interrompre ! Je suis le seul à pouvoir le faire.
    M. Maxime Gremetz. Vous avez raison, monsieur le président. J'ai déjà dit que ça se passait bien quand vous présidiez.
    M. Philippe Auberger. Flagorneur !
    M. Pierre Lellouche. C'est de la lèche !
    M. Maxime Gremetz. Vous, vous ne m'auriez pas laissé traiter de terroriste.
    M. Denis Jacquat. De terroriste intellectuel !
    M. Maxime Gremetz. Mais je reparlerai de cela tout à l'heure, cela fera l'objet d'un fait personnel.
    M. le président. Il n'y a pas de terroriste dans cet hémicycle ; poursuivez, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. J'ai posé des questions précises à M. le ministre. Peut-être y a-t-il déjà répondu. Je ne voudrais pas l'obliger à se répéter.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je n'ai pas répondu.
    M. Maxime Gremetz. J'ai rappelé que nous avions mené une étude en collaboration avec la commission des finances, pour chiffrer le coût de cette mesure. Or les chiffres donnés par M. le ministre ne correspondent pas aux nôtres et sont quatre fois supérieurs à l'estimation très détaillée de la commission des finances.
    J'indiquais aussi que le nombre de personnes concernées par ce dispositif devait être bien moins élevé compte tenu des restrictions apportées : quarante-deux annuités, ce n'est pas du tout la même chose que quarante annuités. C'est pour obtenir une réponse à cette question que nous avons proposé ces amendements de suppression, mais nous étions prêts à les retirer, car, même si elle est insatisfaisante, même si nous considérons que nous pouvons faire mieux, cette mesure répond à une attente légitime.
    Nous avons proposé toute une série d'amendements pour enrichir cette proposition, notamment en ce qui concerne le nombre de personnes concernées, le coût et le financement ; malheureusement, ces amendements sont tombés sous le coup de l'article 40. Voilà pourquoi nous n'avons pas voulu retirer les présents amendements, tout en ayant dit dès le départ que nous ne voulions pas nous opposer à une mesure insuffisante, mais qui était un premier pas. Nos amendements frappés par l'article 40 visaient à amplifier la portée de la mesure et à la financer autrement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est un démontage d'article classique dans la procédure d'opposition suivie par nos collègues du groupe communiste. La commission est défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. M. Gremetz m'a interrogé sur le chiffrage des différentes options concernant les départs anticipés pour ceux qui ont commencé à travailler très tôt. Le chiffrage que j'ai présenté tout à l'heure à l'Assemblée correspondait au coût brut pour l'ensemble des personnes totalisant quarante annuités avant soixante ans.
    Le chiffrage de la commission des finances auquel il a fait référence correspond à un coût net, c'est-à-dire déduction faite des personnes de cinquante-huit et cinquante-neuf ans en préretraite ou bénéficiaires de l'assurance chômage alors que la proposition du Gouvernement - celle dont nous débattons - correspond à un coût brut et concerne les personnes ayant commencé à travailler à quatorze, quinze ou seize ans, ayant les durées de cotisation dont on a parlé tout à l'heure et partant entre cinquante-six et cinquante-neuf ans. Voilà ce qui explique les différences entre les trois chiffres : entre 1,2 et 1,5 milliard pour le Gouvernement, 3,9 milliards pour la commission des finances, 11 milliards d'euros en coût brut pour la proposition du groupe communiste de 2001, qui devait toucher plus de 1 million de personnes totalisant quarante annuités avant soixante ans.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lefort.
    M. Jean-Claude Lefort. Ce débat, qui se fonde sur des chiffres réels, m'amène à vous faire une proposition, monsieur le ministre. Nous avons un différentiel de 3,9 à 11 millions d'euros.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Milliards !
    M. Jean-Claude Lefort. Vous savez, moi, je compte petit : je n'ai pas l'habitude.
    M. Pierre Lellouche. Justement, ça coûte cher !
    M. Jean-Claude Lefort. En tout cas, ces 4 milliards - pour simplifier - ne concernent pas 1 million de personnes, monsieur le ministre, mais 850 000 personnes, ...
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Moins que ça !
    M. Jean-Claude Lefort. ... à supposer que toutes prennent leur retraite au même moment, la même année, ce qui est inimaginable. Votre chiffre table sur 1 million de personnes, ce qui est absolument incompréhensible, et sur quelque 12 milliards d'euros, c'est-à-dire, en vérité, trois fois plus que notre estimation.
    Ma proposition est donc la suivante, monsieur le ministre. Etant donné que les chiffres sont contestés mais que, apparemment, vous cherchez à faire avancer ce dossier dans le sens que nous souhaitons, pour permettre à toute personne ayant cotisé quarante ans de prendre sa retraite à taux plein, quel que soit son âge, je vous propose de réserver l'examen de cet article afin que nous puissions approfondir la question ensemble.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Non.
    M. le président. Le Gouvernement ne suit pas votre proposition.
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je ne dirai qu'un mot, monsieur le président, pour que les choses soient très claires. Le chiffrage de 3,5 milliards qu'ont évoqué M. Lefort et M. Gremetz concerne 450 000 personnes totalisant quarante annuités et partant à cinquante-huit ou cinquante-neuf ans.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Nous retirons ces amendements.
    M. le président. Les amendements n°s 5108 à 5114 sont retirés.
    Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 1146 et 3061.
    L'amendement n° 1146 est présenté par M. Accoyer, rapporteur ; l'amendement n° 3061 est présenté par Mme Hoffman-Rispal, MM. Terrasse, Gorce, Le Garrec et les membres du groupe socialiste.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « I. - A la fin de la première phrase du deuxième alinéa de l'article 16, substituer aux mots : "ayant donné lieu au versement de cotisations à la charge de l'assuré, les mots : "ayant donné lieu à cotisations à la charge de l'assuré.
    « II. - En conséquence, procéder à la même substitution à la fin de la première phrase du quatrième alinéa de cet article. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 1146.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Cet amendement vise à tenir compte, pour que le salarié ne soit pas lésé, de la situation dans laquelle les cotisations ont été précomptées par l'employeur et n'ont pu être reversées aux organismes de sécurité sociale, c'est-à-dire prélevées au titre des charges patronales, d'une part, et salariales, d'autre part. Cela peut se produire en cas de cessation de paiement.
    M. le président. L'amendement identique de M. Terrasse est-il défendu ?
    M. Gaëtan Gorce. Défendu.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 1146 et 3061.
    (Ces amendements sont adoptés.)
    M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 11230, ainsi libellé :
    « I - Rédiger ainsi la dernière phrase du I de l'article 16 :
    « Un décret précise les modalités d'application du présent article, et notamment les conditions dans lesquelles le cas échéant une partie des périodes de service national peuvent être réputées avoir donné lieu au versement de cotisations. »
    « II - En conséquence, rédiger ainsi la dernière phrase du II de cet article :
    « Un décret précise les modalités d'application du présent article, et notamment les conditions dans lesquelles le cas échéant une partie des périodes de service national peuvent être réputées avoir donné lieu au versement de cotisations. »
    Sur cet amendement, M. Le Fur et M. Guillaume ont présenté un sous-amendement, n° 11235, ainsi rédigé :
    « I - Dans le dernier alinéa du I de l'amendement n° 11230, supprimer les mots : "une partie.
    « II - En conséquence, procéder à la même suppression au dernier alinéa du II de cet amendement. »
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. J'ai évoqué cet amendement en répondant tout à l'heure aux orateurs inscrits sur cet article. Plusieurs membres de l'UMP ont évoqué les difficultés que pourraient rencontrer des personnes ayant effectué leur service national et étant bénéficiaires de la mesure que le Gouvernement propose.
    M. Jean-Luc Préel. L'UDF a beaucoup insisté aussi !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. M. Préel a également insisté sur ce sujet, en effet. Le Gouvernement a donc déposé un amendement qui permettra de prendre en compte, dans le cadre d'un décret, la durée du service national. J'indique tout de suite que le Gouvernement est tout à fait prêt à intégrer une année correspondant au service national pour améliorer la proposition qui avait été faite. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission n'a pas examiné cet amendement. Toutefois, il faut remarquer qu'il répond aux attentes et aux demandes des membres de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales qui ont unanimement souhaité que les Français qui avaient servi sous les drapeaux et qui avaient consacré une partie de leur temps, de leur vie...
    M. Roland Chassain. De leur jeunesse !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. ... de leurs compétences au service national ne soient pas en situation d'infériorité...
    M. Pierre Lellouche. Très bien !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. ... par rapport à d'autres qui se seraient soustraits, pour des raisons plus ou moins légitimes, à cette obligation civique particulièrement importante.
    M. Henri Cuq. Très bien !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. A titre personnel - mais je crois pouvoir me faire l'interprète des attentes de tous les membres de la commission -, je pense que cet amendement est particulièrement heureux, légitime et utile.
    M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour présenter le sous-amendement n° 11235.
    M. Marc Le Fur. L'article 16 est très attendu par bon nombre de nos concitoyens qui ont commencé à travailler jeunes, qui ont travaillé longtemps et qui souhaitent pouvoir liquider leur retraite avant l'âge de soixante ans. C'est donc une véritable avancée, que nous devons saluer. Le problème est le suivant : quelle est la période prise en compte ?
    J'ai bien noté votre propos, monsieur le ministre, et je l'ai beaucoup apprécié. Aussi mon sous-amendement a-t-il simplement pour objet de préciser les choses.
    De quelle génération s'agit-il ? Il s'agit de gens qui avaient à peu près vingt ans en 1964, qui sont nés en 1944, 1945 ou 1946, et qui ont fait leur service militaire à une époque où il durait seize mois.
    M. Michel Voisin. Dix-huit mois !
    M. Marc Le Fur. Dix-huit mois pour les plus anciens, mais seize mois pour certains. Cette génération souhaite que cette période soit prise en compte au titre des périodes cotisées. Mon sous-amendement tend donc simplement à préciser l'amendement gouvernemental n° 11230, afin que cette période puisse être prise en compte en totalité.
    Prenons un exemple : deux jumeaux, qui ont commencé à travailler à quatorze ans dans la même entreprise, arrivent à l'âge de cinquante-huit ou cinquante-neuf ans. L'un a fait son service, l'autre pas ; l'un pourrait liquider, l'autre pas. Un tel cas de figure serait évidemment incompréhensible. Mon idée est simple : il faut pouvoir prendre en compte la période du service militaire, dans la limite, évidemment, des fortes contraintes budgétaires que nous connaissons bien.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Ce sous-amendement n'a pas été examniné par la commission.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous travaillons ici à partir d'une négociation qui a eu lieu avec les partenaires sociaux. Tout à l'heure, notamment à la suite des interpellations de l'opposition, nous avons eu une discussion sur la capacité du Gouvernement à faire accepter par les régimes complémentaires les décisions qui vous sont proposées. Je vous rappelle en effet qu'il ne sert à rien d'inscrire dans la loi des mesures extrêmement généreuses si les régimes complémentaires ne les prennent pas en compte.
    M. Pascal Terrasse. Quel aveu !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Or nous avons conclu un accord avec les partenaires sociaux, sur la base que j'ai présentée.
    M. Denis Jacquat. Très bien !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Et je viens de dire que le Gouvernement s'engageait à prendre en compte, dans le décret auquel renvoie l'article 16, les périodes correspondant au service national, dans une limite maximale d'un an.
    Naturellement, l'Assemblée nationale peut voter ce sous-amendement et chercher à aller au-delà de cette limite, mais nous sortirions alors du cadre de l'accord qui a été négocié avec les partenaires sociaux. Je ne peux pas m'engager - contrairement à ce que j'ai fait tout à l'heure en défendant l'amendement du Gouvernement - en ce qui concerne les régimes complémentaires. Je pense donc que ce sous-amendement n'améliore pas le dispositif que propose le Gouvernement. Dans une certaine mesure, il le fragilise au contraire. En tout cas, il ne permet pas d'atteindre à coup sûr l'objectif viré.
    Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, j'ai bien n'écouté ce qui a été dit. Il y a une chose qui me gêne. Moi aussi, j'ai un sous-amendement. Je propose de supprimer les mots : « le cas échéant ». Les modalités d'application, si l'on conserve l'expression « le cas échéant », sont déterminées sur quels critères ? La question est de savoir si on veut, oui ou non, qu'une partie du service national soit prise en compte ? Et si on pense que oui, il n'y a pas de raison d'ajouter : « le cas échéant ».
    M. le président. Je demande au président de la commission des finances si cet amendement est recevable.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Ce sous-amendement est irrecevable parce qu'il enlève toute liberté, toute possibilité.
    Je tiens quand même à rappeler que l'engagement pris par le ministre de prendre en compte la période d'une année laisse une grande latitude et répond à l'interrogation de nos collègues.
    M. Jean-Claude Lefort. Cela n'a rien à voir avec l'article 40 ! Ça ne prouve pas que le sous-amendement est irrecevable !
    M. le président. La parole est à M. Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président de la commission des finances, comment pouvez-vous dire que le sous-amendement est irrecevable ? A quel titre est-il irrecevable ? Il va falloir que vous m'expliquiez. D'autant que vous n'êtes pas censé savoir ce qu'a dit le Gouvernement à savoir que c'est une période d'un an qui sera prise en compte, monsieur Méhaignerie.
    Qu'est-ce qui va changer ? Qui définit le contenu du décret ? Ce n'est quand même pas la commission des finances. On peut très bien rédiger la dernière phrase du I et du II de l'article 16 de la manière suivante : « Un décret précise les modalités d'application du présent article, et notamment les conditions dans lesquelles une partie des périodes de service national peuvent être réputées avoir donné lieu au versement de cotisations. » Autrement dit, on peut très bien supprimer les mots : « le cas échéant ». « Le cas échéant », qu'est-ce que ça veut dire ? Vous n'avez rien à répondre sur ce point, monsieur Méhaignerie, en tant que président de la commission des finances.
    M. le président. Je devais le consulter sur la recevabilité du sous-amendement
    La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Ce débat devient intéressant. La majorité commence à réagir.
    M. Denis Jacquat. Elles est constructive !
    M. Pascal Terrasse. Et nous venons, pour la première fois, d'entendre un courageux député de l'UMP qui propose d'amender le texte du Gouvernement. Nous aurions souhaité que d'autres députés de la majorité le fassent avant l'examen de l'article 16.
    M. Le Fur pose une vraie question, à laquelle le ministre n'a pas répondu tout à l'heure, au sujet des périodes considérées comme ayant été effectivement cotisées. On sait que le dispositif en question ne touchera qu'une partie limitée des personnes ayant cotisé quarante-deux ans - et non pas quarante ans, contrairement à ce qui a été dit. Or il y a des périodes qui ne seront pas prises en compte. Je pense notamment aux femmes qui ont eu trois enfants. Celles-ci ne verront pas leurs périodes validées, c'est ce qui ressort de votre propre étude d'impact, monsieur le ministre.
    Par votre amendement, vous répondez très partiellement, à la question relative à la validation des périodes de service national. Et M. Le Fur a raison de dire très clairement que l'on ne peut pas parler d'équité et affirmer des principes dans le cadre d'une négociation alors qu'en réalité on fait le contraire dans le texte de loi. Moi, honnêtement, monsieur le ministre, compte tenu des éléments que la CFDT a bien voulu me fournir, je ne suis pas persuadé qu'elle ait la même lecture que vous. Et le décret en Conseil d'Etat que vous allez prendre risque, pour le coup, d'être encore plus restrictif que ce qui aura pu être annoncé dans cet hémicycle. Il me semble donc que M. Le Fur a raison de déposer un sous-amendement qui permet non pas de résoudre l'ensemble du problème, mais au moins de le résoudre partiellement, et en tout cas d'améliorer le texte.
    Et je peux vous dire, monsieur le ministre, que si l'on demandait à la Confédération générale des cadres ou à la CFDT ce qu'elles pensent de ce sous-amendement, elles y seraient forcément favorables.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le ministre, M. Méhaignerie, le président de notre commission des finances, rêve certainement de présider la commission des lois. Alors que l'on nous annonce une réforme constitutionnelle pour bientôt, sans doute prévoit-il de réviser l'article 40 de la Constitution, lequel, il faut le rappeler, est ainsi rédigé : « Les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l'aggravation d'une charge publique ». M. Méhaignerie trouve que cela n'est pas assez contraignant. On pourrait donc imaginer une nouvelle rédaction : « Les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement...
    M. Jean-Claude Lefort. « Sont irrecevables », tout simplement. Cela conviendrait bien au président de la commission des finances.
    M. Jean-Pierre Brard. ... ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence d'entraver la liberté des interlocuteurs du Gouvernement ». En effet, quand il a dit que le sous-amendement de M. Gremetz était irrecevable, M. Méhaignerie n'a pas invoqué, à l'appui de son affirmation, le fameux article 40. Il a simplement dit qu'il ne laissait pas la liberté ! Mais depuis quand avance-t-on ce genre d'argument pour décider qu'un sous-amendement est irrecevable ?
    Quant au sous-amendement de notre collègue M. Le Fur, il reste dans le domaine de la sémantique. Car le plus important, dans l'amendement du Gouvernement, ce ne sont pas les mots : « une partie des périodes du service national ». Ce sont bien les mots : « le cas échéant ».
    M. Fillon nous explique que des discussions ont eu lieu qui ont abouti à un accord. Mais celui-ci n'engage à rien, précisément parce que ces périodes de service national ne seront réputées avoir donné lieu au versement de cotisations que « le cas échéant ». En clair, s'il y a des sous, on verra ; s'il n'y en a pas, tans pis, on ne verra rien !
    M. Pascal Terrasse. C'est tout a fait ça !
    M. Jean-Pierre Brard. Pour une fois que nous aurions pu être tous d'accord sur une disposition positive, monsieur le ministre, vous nous proposez un texte qui relève du magasin des farces et attrapes.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Ah non !
    M. Michel Voisin. De tels propos sont indignes !
    M. Jean-Pierre Brard. Nous ne pouvons donc suivre ni le ministre ni le président de la commission des finances, qui fait oeuvre de rénovation constitutionnelle, ce qui n'est pas son rôle.
    M. Jean-Claude Lefort. Il n'est pas le Congrès à lui tout seul !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel.
    M. Jean-Luc Préel. Monsieur le ministre, votre amendement est intéressant parce qu'il répond en partie...
    M. Jean-Pierre Brard. En partie ? Non : « le cas échéant ».
    M. Jean-Luc Préel. ... à une question que j'avais posée à propos de l'article 16.
    Auparavant, ceux pour lesquels on prenait en compte les trimestres de service national devaient avoir travaillé avant d'avoir fait leur service national. A partir du 1er janvier 2002, on a intégré les périodes de service national, par tranches trimestrielles. Tous ceux qui avaient fait leur service ont ainsi vu leurs trimestres pris en compte dans le calcul de leur retraite. Cela a été une avancée.
    M. Pascal Terrasse. Et ces périodes étaient bonifiées.
    M. Jean-Luc Préel. Grâce à la réforme, monsieur le ministre, vous permettez à ceux qui ont cotisé quarante ans et qui ont moins de soixante ans de partir un peu avant l'âge normal de la retraite. Mais j'ai reçu des courriers de plusieurs personnes qui ont lu attentivement le projet de loi...
    M. Pascal Terrasse. Moi aussi.
    M. Jean-Luc Préel. ... et qui ont constaté que le texte exigeait que les trimestres soient cotisés et validés.
    M. Pascal Terrasse. Absolument !
    M. Jean-Luc Préel. Certes, les trimestres sont validés, mais on considère qu'ils ne sont pas encore cotisés. Or, jusque là, les trimestres de service national étaient pris en compte par le fonds de solidarité vieillesse. C'est pourquoi, monsieur le président de la commission des finances, j'ai déposé cet après-midi un sous-amendement, qui a été déclaré irrecevable en vertu de l'article 40, alors que vous semblez accepter le sous-amendement de M. Le Fur, qui revient presque au même.
    M. Jean-Claude Lefort. En effet !
    M. Jean-Luc Préel. J'aimerais comprendre pourquoi il y a deux poids, deux mesures.
    M. Pascal Terrasse. Vous êtes UDF !
    M. Jean-Luc Préel. Et je souhaiterais, monsieur le ministre, que ceux qui ont fait leur service national ne s'en trouvent pas pénalisés. La durée totale du service national doit être prise en compte dans le calcul de la durée de cotisation.
    M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. Je voudrais quand même rappeler qu'il n'y a pas très longtemps - c'était lors de la discussion du PLFSS -, nous avons été un certain nombre, dont Bernard Accoyer, à nous battre pour la validation des années de service national. Je l'avais proposé dans le cadre de l'assurance vieillesse, et cela avait été accepté à l'unanimité. C'était un énorme progrès. Dans le cadre de ce projet de loi, nous parlons maintenant d'années « cotisées », comme Jean-Luc Préel l'a noté. Mais, ainsi que l'a fort justement dit le ministre, cette mesure a un coût, et il convient d'associer les régimes complémentaires.
    Nous avons mis une dizaine d'années pour faire adopter la mesure concernant la validation. Par conséquent, je pense, très sincèrement que ce qu'il faut, c'est retenir l'esprit...
    M. Jean-Pierre Brard. L'Esprit-saint ? Esprit, es-tu là ?
    M. Roland Chassain. Quel jeu de mots !
    M. Denis Jacquat. ... de la mesure. Passer aux durées « validées » aux durées « cotisées », cela ne peut pas se faire à la seconde, car il y a un coût extrêmement important. Et vous savez que l'équilibre financier de la loi est très juste.
    M. Jean-Claude Lefort. Non : il n'existe pas !
    M. Denis Jacquat. Nous sommes dans un système de répartition, et non pas de capitalisation.
    M. le président. La parole est à M. Alain Néri.
    M. Alain Néri. Nous arrivons, eh oui, à un moment crucial de la discussion, qui est particulièrement intéressant : on va enfin éclairer la situation. Nous sommes tous d'accord pour dire que ceux qui ont dû travailler très jeunes, souvent dans des emplois pénibles, ont bien gagné le droit de partir à la retraite avant soixante ans s'ils ont quarante annuités. Cela, personne ne le discute. Arrive le moment où l'on dit : « Mais comment on paie ? »
    Mme Martine David. Combien ça coûte ?
    M. Alain Néri. D'ailleurs, c'est un sujet que nous avons abordé sous la législature précédente, comme au début de cette législature, avec les deux propositions de loi de notre collègue M. Bocquet. Chaque fois, nous nous sommes retrouvés coincés. Par quoi ? Tout simplement par l'obstacle sur lequel vous êtes en train de buter, monsieur le ministre, à savoir le financement de la retraite complète par la participation des retraites complémentaires. Et là, vous nous répondez : « J'ai un accord. » Nous voulons bien vous croire. Mais la seule différence avec hier, c'est que, aujourd'hui, aucun relevé de conclusions de cet accord n'a été porté à notre connaissance.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Si !
    M. Alain Néri. On ne sait pas à quel moment il entrera en vigueur. Ou alors, si vous le savez, éclairez la représentation nationale. Parce que c'est le problème de fond. Et vous butez sur cet obstacle parce que, quelles que soient les discussions sémantiques qu'on peut avoir, « le cas échéant » ou pas, la vraie question est de savoir si cette mesure sera réellement mise en place, ou si elle restera simplement une idée, une bonne idée, qui n'ira pas plus loin. Je crois qu'on ne peut pas se tourner vers des salariés qui ont, très jeunes, travaillé dans des conditions pénibles sans leur donner des assurances claires, nettes et précises. Ce soir, la question est la suivante : êtes-vous en mesure de nous dire que les retraites complémentaires seront payées dès la mise en oeuvre de la retraite ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Le ministre a déjà répondu ! Il n'écoute pas, monsieur le président !
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
    M. Maxime Gremetz. On va enfin comprendre !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Je l'espère. Je vais, avec beaucoup de patience,...
    M. Jean-Pierre Brard. Et d'esprit, comme dirait M. Jacquat !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. ... tenter de répondre avec précision aux multiples questions qui ont déjà été abordées trente-cinq fois au cours de nos débats.
    La première règle, c'est que, à l'inverse de la situation en matière de recettes, l'article 40 prohibe toute augmentation d'une charge publique, y compris lorsqu'elle s'accompagne de la diminution d'une autre charge ou de l'augmentation d'une recette.
    M. Pascal Terrasse. Le ministre peut lever le gage !
    M. François Goulard. Mais non !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Je dis bien : toute dépense publique. En matière de diminution de recettes, on peut gager. En matière de dépense supplémentaire, la Constitution l'interdit. Je rappelle que le Conseil constitutionnel a, de façon constante, depuis sa décision du 20 janvier 1961, inclus les dépenses sociales dans le champ de l'article 40.
    M. Jean-Claude Lefort. C'est vieux, ça !
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est plus à l'ordre du jour !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Deuxièmement, la charge publique peut être seulement éventuelle, et nous rejoignons ici le problème posé par la proposition de supprimer l'expression « le cas échéant ». Je renvoie en particulier à la décision du Conseil constitutionnel du 5 janvier 1982, qui a indiqué de la manière la plus nette que les amendements ne peuvent se traduire par une autorisation, même indirecte, de créer ou d'aggraver la charge publique.
    M. Maxime Gremetz. On n'a plus le droit de rien faire, alors ?
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Ecoutez-moi jusqu'au bout, monsieur Gremetz. Je vous signale que cette décision portait déjà sur la retraite à soixante ans et sur la retraite anticipée. C'est pour ce motif que j'ai opposé l'irrecevabilité à des amendements prévoyant des rapports, dans la mesure où ils tendent à contourner l'article 40 en demandant, dans la définition même de l'objet des rapports, la mise en place de dispositifs coûteux.
    M. Jean-Claude Lefort. Ce n'est pas clair !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Je n'ai fait, en la matière, que suivre la jurisprudence de mes prédécesseurs.
    M. Jean-Pierre Brard. Ce n'est pas une raison !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Sur ce point, je renvoie tous ceux qui auraient des doutes à la page 103 du rapport de M. Jacques Barrot, ainsi, d'ailleurs, qu'aux rapports de quelques-uns de ses prédecesseurs. Il dit ceci : « L'irrecevabilité peut être opposée à de simples demandes de rapports, malgré leur portée encore moindre que dans le cas de demandes de dépôts de projets de loi, quand elles ont clairement pour objet d'obtenir du Gouvernement des engagements financiers précis. »
    Comme l'a dit M. Préel il y a quelques jours, certains des amendements qui demandent des rapports ne sont pas, à l'évidence, des amendements de contrôle parlementaire. Ils cherchent un engagement du Gouvernement sur des dispositions coûteuses.
    M. Jean-Luc Préel. C'est vrai !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La juriprudence ne condamne nullement toute demande de rapport, et j'ai d'ailleurs admis dans ce texte beaucoup plus d'amendements demandant des rapports que je n'en ai refusé.
    En revanche, je ne peux admettre que, sous prétexte de demander un rapport, on détourne l'article 40 de son objet. Les propos de Didier Migaud en témoignent : le débat porte non sur le contrôle mais sur la mesure coûteuse elle-même. Le rapport n'est qu'un prétexte. Ce n'est donc pas du tout du fait, comme certains l'ont dit avec dérision, du coût du papier que des amendements sont déclarés irrecevables : c'est parce qu'ils constituent un contournement de l'article 40.
    J'insiste, pour la dernière fois, j'espère : j'ai fait de l'article 40 une application impartiale. D'ailleurs, personne ne le conteste. (« Si ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    J'ai admis autant que je le pouvais que des amendements soient corrigés. Les administrateurs de la commission, vous le savez, sont à la disposition de tous les groupes pour les aider à rédiger leurs amendements de telle manière qu'ils ne tombent pas sous le coup de l'article 40, et nous avons largement utilisé cette faculté.
    M. Pierre Lellouche. C'est vrai !
    M. Henri Cuq. Ils le font exprès !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Mais il m'incombe, en tant que président de la commission des finances de l'Assembléé nationale, d'appliquer la Contitution. Je rappelle qu'à l'occasion de l'examen de la révision constitutionnelle du 22 février 1996, des amendements de Bruno Bourg-Broc demandaient la modification de l'article 40.
    M. Michel Bouvard. C'est exact !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Ils ont été rejetés.
    M. Michel Bouvard. Tout à fait !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Depuis, des années se sont écoulées, et aucun amendement n'a été déposé sur ce point alors que les révisions constitutionnelles ont été nombreuses. Si nos collègues, de quelque sensibilité qu'ils soient, avaient voulu, durant ces cinq dernières années, demander une révision de la Constitution, ils pouvaient le faire. Ils ne l'ont pas fait.
    Si le contrôle en vigueur à l'Assemblée nationale peut être considéré comme sévère, je l'applique, comme mes prédécesseurs, de la manière la plus souple possible,...
    M. Maxime Gremetz et M. Jean-Claude Lefort. Non !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. ... dans les limites imposées par la Constitution.
    M. Jean-Pierre Brard. Pas du tout !
    M. Pascal Terrasse. Vous noyez le poisson ! Revenez à la question qui a été posée !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Enfin, je rappelle, mes chers collègues, que l'irrecevabilité n'empêche jamais une discussion.
    M. Maxime Gremetz. Ah !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Le règlement permet à un parlementaire de s'inscrire sur un article ou sur des amendements recevables et d'interroger le Gouvernement.
    M. Maxime Gremetz. Ah !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Puisse cette information être la dernière sur ce thème. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je voudrais faire deux remarques.
    La première a trait à l'engagement des partenaires sociaux et au relevé de décisions. J'ai entendu sur certains bancs que le relevé de décisions n'existait pas, que personne n'en avait connaissance. C'est faux. Le document est public, il a été largement diffusé. Il traduit l'engagement des partenaires sociaux qui ont accepté de soutenir la réforme. Je comprends que le fait qu'un accord ait pu être signé gêne certains sur les bancs de l'opposition parce que cela signifie qu'il y a eu une négociation.
    M. Maxime Gremetz. Cela ne me gêne pas : j'en suis heureux !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. On peut également considérer que cet accord est insuffisant, mais on ne peut pas nier son existence. Il engage les partenaires sociaux jusqu'à une certaine limite, qui est inscrite dans l'accord, il ne les engage pas au-delà. J'ai pris tout à l'heure des engagements très précis qui s'appuient sur le relevé de décisions s'agissant des régimes complémentaires. Naturellement, je ne prends pas d'engagements au-delà de ce qui a été négocié.
    La seconde remarque que je voudrais faire avant que vous ne soyez amenés à vous prononcer sur ces amendements, c'est que la crédibilité de cette réforme est aussi financière.
    Mme Martine David. N'importe quoi ! Elle n'est pas financée !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. J'ai veillé, c'était la contrainte qui était imposée au Gouvernement, à ce que la Caisse nationale d'assurance vieillesse ne soit pas mise en difficulté par les décisions que nous allons prendre. Dans ce cadre, le texte propose que les cotisations vieillesse augmentent de 0,2 % à partir de 2006. Toute mesure qui irait au-delà des propositions du Gouvernement doit être financée. Sinon, nous aurions la responsabilité de mettre en déficit la Caisse nationale d'assurance vieillesse avant même les échéances qui sont prévues.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Elle l'est déjà !
    M. François Hollande. Et elle le sera !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. C'est la raison pour laquelle j'insiste avec tant de solennité pour que l'on s'en tienne à l'amendement du Gouvernement, qui, en proposant de prendre en compte une année de service national, constitue déjà une avancée considérable. Aller au-delà risquerait de mettre en difficulté l'équilibre financier de la Caisse nationale d'assurance vieillesse dès 2005. Pour ma part, je ne veux pas prendre cette responsabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. M. Le Fur, maintenez-vous votre sous-amendement ?
    M. Marc Le Fur. Je le retire, monsieur le président.
    M. Jean-Pierre Brard. Je le reprends !
    M. Pascal Terrasse. Je le soutiens moi aussi !
    M. Marc Le Fur. Monsieur le ministre, j'ai déposé ce sous-amendement avant que vous ne vous exprimiez, et en particulier avant que vous n'évoquiez la possibilité de considérer l'année de service national comme une période cotisée.
    M. Pascal Terrasse. Non : ce n'est pas ce que dit l'amendement !
    M. Marc Le Fur. Il faut parfois distinguer le souhaitable du possible. Le souhaitable aurait été que toute la période du service national puisse être prise en compte. Je rappelle que, pour la génération qui a accompli son service en 1964, 1965 ou 1966, le service national a duré seize mois ou dix-huit mois. Mais j'ai bien entendu qu'un an serait pris en compte et je retire donc mon sous-amendement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Le sous-amendement n° 11235 est retiré. Il est repris par M. Jean-Pierre Brard.
    Vous avez la parole, monsieur Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Cette discussion est très intéressante, monsieur le ministre, car vous venez d'avouer que la situation financière de la CNAV risquait d'être délicate dès 2005. Cela donne toute sa valeur à l'expression « le cas échéant », qui figure dans l'amendement.
    M. Pascal Terrasse. Absolument !
    M. Jean-Pierre Brard. Cela souligne un caractère tout à fait aléatoire et virtuel. En fin de compte, vous prenez un engagement qui n'engage pas à grand-chose.
    Tous les subterfuges ont été utilisés, et le président Méhaignerie, bien que s'exprimant pour la trente-cinquième fois, n'a pas répondu à mon interrogation.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Je ne me suis quant à moi exprimé que trois fois !
    M. Jean-Pierre Brard. C'est vous qui avez dit « trente-cinq », ce n'est pas moi !
    M. Maxime Gremetz. Mais il n'est venu que trois fois !
    M. Jean-Pierre Brard. Non, il ne faut pas exagérer. Le président de la commission des finances est souvent là.
    M. le président. Je vous en prie !
    M. Jean-Pierre Brard. Mais il n'a pas expliqué sa lecture innovante de l'article 40 de la Constitution qui lui permet de rejeter un amendement dès lors qu'il entrave la liberté des partenaires. Mais « l'esprit y est » a indiqué M. Jacquat. Nous en sommes donc à voter des textes spirituels qui n'engagent à rien.
Monsieur le président, puisque vous semblez apprécier La Rochefoucauld...
    M. le président. En effet !
    M. Jean-Pierre Brard. ... je voudrais vous livrer cette maxime, que pourront méditer M. Jacquat et d'autres collègues : « On trouve des moyens pour guérir la folie, mais on n'en trouve point pour redresser un esprit de travers. »
    M. le président. Je mets au voix le sous-amendement n° 11235.
    (Le sous-amendement n'est pas adopté.)
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, je voulais demander un scrutin public.
    M. le président. Monsieur Gremetz, vous vous êtes manifesté trop tardivement. J'ai fait les choses régulièrement. Mais vous pouvez demander un scrutin public sur l'amendement du Gouvernement.
    M. Maxime Gremetz. Ce que je fais.
    M. le président. Sur l'amendement n° 11230 du Gouvernement, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    (Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.)
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix l'amendement n° 11230.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   230
Nombre de suffrages exprimés   199
Majorité absolue   100
Pour l'adoption   185
Contre   14

    L'Assemblée nationale a adopté.
    (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 5115 à 5121.
    L'amendement n° 5115 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 5116 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 5117 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 5118 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 5119 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 5120 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 5121 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le II de l'article 16. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. M. Méhaignerie ne vient pas souvent ici mais, quand il vient, il provoque des dégâts ! Donc, je vous en prie, monsieur le président, ne l'appelez plus, moins on le voit, mieux on se porte.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Restez correct !
    M. Maxime Gremetz. Mais je suis correct. Je parle de M. Méhaignerie, pas des terroristes. Je dis qu'il applique l'article 40 comme moi je fauche mon jardin !
    M. le président. Monsieur Gremetz, je vous écoute défendre les amendements !
    M. Maxime Gremetz. Oui, monsieur le président !
    Les amendements n°s 5115 à 5121 proposent de supprimer le II de l'article 16. Malheureusement, nos propositions d'amendement ne sont jamais prises en compte, puisqu'elles tombent sous le coup de l'article 40.
    Utilisé à l'égard des parlementaires sans parcimonie, cet article fait tomber tout ce qui pousse, un peu comme Attila !
    Compte tenu ce cet élément, je retire les amendements.
    M. le président. Les amendements n°s 5115 à 5121 sont retirés.
    Je mets aux voix l'article 16.
    M. Maxime Gremetz. Un mot, pour expliquer notre vote, monsieur le président.
    M. le président. Monsieur Gremetz, j'ai commencé le vote. Il fallait vous inscrire plus tôt ! (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Je mets aux voix l'article 16, modifié par l'amendement n° 11 230.
    M. Jean-Marc Ayrault. Abstention du groupe socialiste !
    M. Maxime Gremetz. Abstention du groupe des député-e-s communistes et républicains.
    (L'article 16, ainsi modifié, est adopté.)
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas bien du tout de ne pas m'avoir donné la parole pour une explication de vote sur l'article 16, qui est important. Je vais donc demander des scrutins publics !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Terroriste !

Après l'article 16

    M. le président. Je suis saisi de 149 amendements identiques, n°s 18 et 1691 à 1839.
    L'amendement n°  18 est présenté par M.  Xavier Bertrand, rapporteur pour avis de la commission des  finances, de l'économie générale et du Plan, M. Bonrepaux et les commissaires membres du groupe socialiste ; les amendements n°s  1691 à  1839 sont présentés par Mme Adam et les membres du groupe socialiste et apparentés.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Après l'article 16, insérer l'article suivant :
    « Les partenaires sociaux chargés de la gestion des régimes complémentaires de retraite engagent une négociation afin d'adapter le dispositif des retraites complémentaires de manière à servir une pension à taux plein aux assurés qui réunissent les conditions de durée d'assurance ou de périodes équivalentes dans les régimes de base et demandent la liquidation de leur pension de retraite avant l'âge de soixante ans. »
    La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour soutenir l'amendement n° 18.
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. La commission des finances a adopté cet amendement présenté par M. Bonrepaux. L'esprit de cet amendement nous a en effet semblé louable.
    L'une des principales avancées sociales de ce projet est la possibilité, pour les salariés ayant commencé à travailler à quatorze, quinze ou seize ans, de partir à la retraite avant d'avoir atteint l'âge de soixante ans.
    Mme Martine David. Avec des conditions très contraignantes.
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis. Toutefois, cette mesure serait sans portée si les partenaires sociaux gestionnaires des régimes complémentaires obligatoires ne s'engageaient pas eux aussi dans cette direction. C'est l'objet de cet amendement, qui invite clairement les partenaires sociaux à entamer la négociation.
    Monsieur le ministre, vous nous avez rassurés sur la confiance que nous pouvions faire aux signataires de l'accord du 15 mai. Cet amendement s'inscrit dans la même démarche.
    M. Maxime Gremetz. Nous demandons un scrutin public !
    M. le président. J'en prends note, monsieur Gremetz.
    La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour défendre les amendements identiques suivants.
    M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, je veux parler non des amendements identiques suivants, mais de l'amendement n° 18 adopté par la commission des finances. Cet amendement est présenté certes par M. Bertrand, au nom de la commission des finances saisie pour avis, mais également par M. Bonrepaux et les commissaires membres du groupe socialiste.
    M. le président. Il s'agit d'amendements identiques, qui seront donc mis aux voix par un seul vote.
    M. Augustin Bonrepaux. Cet amendement mérite quelques explications. En effet, l'article 16, qui vient d'être adopté, est nettement insuffisant. Nous aurions souhaité l'améliorer par amendement, mais l'article 40 de la Constitution ne nous a pas permis de déposer un amendement prévoyant la prise en charge des retraités ayant cotisé quarante annuités.
    Nous voulions renvoyer cette question à la discussion entre les partenaires sociaux. Notre souhait - et M. le ministre devra nous donner des explications à cet égard - était bien de mettre en place une mesure destinée à améliorer et à compléter l'article 16.
    En effet, nous n'avons aucune explication sur cet article. Les travaux de la commission des affaires sociales auraient dû être plus sérieux. Sur un article comme celui-ci, il aurait fallu savoir quelles étaient les personnes prises en compte et le coût de la mesure. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Dans le rapport de la commission des finances, l'article 16 apparaît comme complexe, parce qu'on laisse croire que tous les salariés qui ont commencé à travailler entre quatorze et quinze ans pourraient être bénéficiaires de la retraite lorsqu'ils ont atteint quarante ans de cotisation. Mais ce n'est pas vrai, puisqu'ils pourront partir à cinquante-six ou cinquante-sept ans, s'ils ont une durée validée de quarante-deux ans et une durée cotisée de quarante-deux ans, à cinquante-huit ans avec quarante-deux ans de durée validée et quarante et un de durée cotisée, et à cinquante-neuf ans à quarante-deux ans de durée validée et quarante ans de durée cotisée.
    M. Michel Bouvard. Qu'avez-vous fait quand vous étiez au pouvoir ?
    M. Augustin Bonrepaux. Je le répète, le dispositif qui vient d'être adopté est nettement insuffisant. Heureusement, le rapporteur de la commission des finances a fait un travail un peu plus sérieux que le rapporteur de la commission saisie au fond.
    En réalité, cette mesure est en trompe-l'oeil. Le rapporteur nous explique que sa mise en oeuvre suppose que les partenaires sociaux s'y engagent conjointement. A défaut, les abattements définitifs qui seraient applicables aux retraites complémentaires rendraient la mesure sans véritable portée. Quant au coût annuel de la mesure, il sera - écoutez bien, car c'est un peu fort pour une mesure aussi importante - fixé en fonction des paramètres contenus dans les décrets d'application.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est normal !
    M. Augustin Bonrepaux. Vous avez voté une mesure sans savoir ce que vous avez voté. Ou alors, le Gouvernement n'a pas communiqué ses informations à notre rapporteur.
    Il me semblerait normal, monsieur le ministre, que nous connaissions le coût total de la mesure qui permettrait aux salariés de partir à la retraite dès lors qu'ils ont cotisé quarante annuités. Or rien n'est dit à ce sujet. Vous avez donc voté dans le flou le plus total une mesure qui n'a pratiquement aucune portée. C'est pourquoi nous proposons de l'améliorer. Encore une fois, je m'appuie sur le rapport de la commission des finances, dont l'auteur estime « souhaitable que puisse s'engager, dans le cadre de la négociation collective par exemple, [...] une analyse des moyens d'améliorer la situation de ces assurés. Il pourrait s'agir, par exemple, d'un départ anticipé sur le modèle décrit ci-dessus, ou bien de la création d'une surcote spécifique pour les assurés ayant cotisé quarante ans avant l'âge de soixante ans. »
    Nous vous proposons, monsieur le ministre, d'aller plus loin et d'accepter de compléter dans ce sens les dispositions de l'article 16.

    M. le président. Sur les amendements identiques n°s 18 et 1691 à 1839, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains et par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    Quel est l'avis de la commission sur ces amendements identiques ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. L'amendement n° 18 a été accepté par la commission des affaires sociales, saisie au fond. Quant aux amendements identiques n°s 1691 à 1839, elle ne les a pas examinés.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il est assez difficile de débattre avec des membres de l'Assemblée qui n'assistent pas à toutes les séances.
    Avant la levée de la séance de cet après-midi, j'ai indiqué, d'une manière extrêmement précise, ce dont M. Terrasse m'a même remercié, le coût exact de la mesure : entre 1,2 milliard et 1,5 milliard, ce qui, pour une mesure dont on soutient qu'elle n'aura pas d'effet, n'est vraiment pas négligeable.
    Il s'agit donc d'une mesure importante qui, même si elle ne satisfait pas toutes les demandes, constitue la première avancée depuis des années et des années...
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Eh oui !
    M. Jean-Luc Warsmann. Absolument !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... dans un domaine dont vous parlez avec beaucoup de facilité, mais où vous n'avez fait quant à vous aucune avancée significative. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Vous me réinterrogez pour la énième fois sur l'engagement des partenaires sociaux qui gèrent les régimes complémentaires. J'ai rappelé tout à l'heure qu'il y avait un accord,...
    M. Dominique Dord. Ils ne savent pas ce que c'est !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... ce qui gêne un certain nombre d'entre vous, car cela signifie qu'il y a eu une négociation.
    M. Jacques Desallangre. Cela ne nous gêne pas du tout ! Si au moins vous nous laissiez nous exprimer !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Cet accord inclut les départs anticipés concernant les personnes qui ont commencé à travailler à l'âge de quatorze, quinze ou seize ans, dans les conditions que j'ai proposées.
    Je considère évidemment que les partenaires sociaux qui ont accepté de soutenir cet accord sont publiquement engagés par ses termes.
    Quant aux amendements, je n'ai pas de difficulté à les accepter, mais je ferai simplement observer aux membres de l'Assemblée qu'il n'est pas possible d'adresser une injonction de résultat aux partenaires sociaux. Si ces amendements permettent de conforter la position du législateur par rapport à l'objectif visé, ils n'ont aucune valeur juridique car les partenaires sociaux restent naturellement libres de prendre les décisions qu'ils estiment devoir prendre.
    Cependant, ma conviction, je le répète, est que les partenaires sociaux signataires sont engagés par les termes de l'accord proposé par le Gouvernement.
    M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre, pour répondre au Gouvernement.
    M. Jacques Desallangre. Monsieur le ministre, vous parlez trop vite : nous ne sommes pas du tout gênés par une proposition de négociation. D'ailleurs, notre groupe votera les amendements. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Certes, il n'y a pas d'engagement ferme, mais c'est normal puisque nous nous en remettons à une négociation avec les partenaires sociaux à laquelle nous sommes très favorables. Donnons-nous rendez-vous pour voir à quoi elle aboutira.
    M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Nous sommes arrivés à un stade où nous n'arrivons pas à nous écouter, ni surtout à nous comprendre.
    J'ai bien entendu la réponse du ministre concernant le coût de la mesure. Mais quels sont les chiffres qui figurent sur les documents qu'il veut bien mettre en ligne sur l'Internet ? Ce sont 600 millions d'euros pour la revalorisation du minimum contributif, 1 milliard d'euros pour les dispositions en faveur des pluripensionnés et 300 millions d'euros pour les retraites anticipées.
    M. Augustin Bonrepaux. Cela ne fait pas 1,2 milliard !
    M. Pascal Terrasse. En effet ! On dépasse le 1,5 milliard. Quant aux mesures consernant l'âge, le chiffrage est très inférieur à ce qu'il nous annonce.
    Lorsqu'on examine de près le dispositif tel qu'il est prévu, on s'aperçoit que les critères cumulatifs qui seront pris en compte font que l'on sera loin de répondre à l'attente des Français, car ce dispositif concernera très peu de personnes.
    M. le Premier ministre a envoyé à tous les Français un courrier leur faisant croire que tous ceux qui ont cotisé quarante annuités et qui ont moins de soixante ans pourraient bénéficier du dispositif. Mais il faudra, mes chers collègues, que vous expliquiez dans vos permanences, à partir du 1er janvier prochain, qu'une petite partie seulement des bénéficiaires potentiels satisferont aux critères.
    Monsieur le ministre, dites la vérité à l'Assemblée nationale ! Dites la vérité à ceux qui vous écoutent ! Dites-nous combien coûtera la mesure !
    Je crains que cette mesure ne soit un faux nez. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je vais une dernière fois redire à M. Terrasse et au groupe socialiste que la mesure, qui concerne environ deux cent mille personnes, coûtera entre 1,2 et 1,5 milliard d'euros, selon le nombre des bénéficiaires.
    Le chiffre que M. Terrasse a cité concerne - mais il connaît trop bien le sujet pour chercher à induire l'Assemblée en erreur - l'équilibre général du régime en 2020.
    M. Pascal Terrasse. Non : en 2013 !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Les documents consultables sur l'Internet concernent l'équilibre en 2020. Le chiffre de 300 millions d'euros vaut également, quant à lui, pour l'année 2004.
    Je repète que le coût de la mesure s'établira entre 1,2 et 1,5 milliard d'euros, en fonction du nombre de gens qui choisiront l'option.
    Il faut que les choses soient très claires. J'ai indiqué avec la plus grande clarté les enjeux financiers et le nombre de personnes intéressées. L'Assemblée me semble maintenant suffisamment éclairée pour pouvoir prendre sa décision.
    M. Maxime Gremetz. Non !
    M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 18 et 1691 à 1839.
    Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   269
Nombre de suffrages exprimés   264
Majorité absolue   133
Pour l'adoption   251
Contre   13

    L'Assemblée nationale a adopté.
    (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis, a présenté un amendement, n° 19, ainsi rédigé :
    « Après l'article 16, insérer l'article suivant :
    « Les branches professionnelles sont invitées à négocier sur les conditions de travail des salariés expérimentés, la prise en compte de la gestion prévisionnelle des emplois et le développement des compétences ainsi que sur les conditions particulières de cessation d'activité des salariés ayant accompli des travaux pénibles.
    « Un bilan de ces négociations sera établi chaque année par la Commission nationale de la négociation collective mentionnée à l'article L.136-1 du code du travail. »
    Sur cet amendement, je suis saisi de deux sous-amendements, n°s 11231 et 11232, présentés par MM. Xavier Bertrand, Barrot, Méhaignerie, Dubernard et Accoyer.
    Le sous-amendement n° 11231 est ainsi rédigé :
    « Substituer au premier alinéa de l'amendement n° 19, les deux alinéa suivants :
    « L'article L. 132-12 du code du travail est complété par l'alinéa suivant :
    « Les organisations visées au premier alinéa se réunissent pour négocier tous les trois ans sur les conditions de travail des salariés expérimentés, la prise en compte de la gestion prévisionnelle des emplois et le développement des compétences, ainsi que sur les conditions particulières de cessation d'activité des salariés ayant accompli des travaux pénibles. »
    Le sous-amendement n° 11232 est ainsi libellé :
    « Dans le dernier alinéa de l'amendement n° 19, substituer aux mots : "de ces négociations sera établi chaque année, les mots : "des négociations visées au dernier alinéa de l'article L. 132-12 du code du travail, en tant qu'elles concernent les conditions particulières de cessation d'activité des salariés ayant accompli des travaux pénibles sera établi, dans les deux ans suivant la publication de la présente loi,. »
    La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l'amendement n° 19.
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis. Dans cet hémicycle, nous avons beaucoup entendu le mot « pénibilité ». D'aucuns se sont crus autorisés à soutenir que ce mot ne figurait pas dans le projet de loi. Or il figure à l'article 12, et nous en parlons de nouveau. Nous avions promis des réponses concrètes. En voici une avec cet amendement, assorti de deux sous-amendements. Ensemble, ils prévoient de ranger la pénibilité parmi les thèmes sur lesquels les partenaires sociaux se réunissent de façon régulière, notamment pour négocier, tous les trois ans.
    Plus précisément, ces négociations régulières porteront sur les conditions de travail des salariés expérimentés, sur la gestion prévisionnelle des emplois et le développement des compétences, ainsi que sur les conditions de cessation d'activité des salariés ayant accompli des travaux pénibles.
    Pourquoi tous les trois ans ? Parce que c'est à la fois un rythme de négociation auquel les branches professionnelles sont habituées et parce qu'il y a une vraie logique à permettre aux partenaires sociaux, qui sont les mieux à même d'apprécier les critères de pénibilité au travail, de réévaluer ces critères de façon périodique.
    Ces amendement et sous-amendements sont ambitieux car ils inscrivent de nouveaux thèmes de négociation collective à l'article L. 132-12 du code du travail et prévoient un premier bilan sur la question de la pénibilité deux ans après la mise en application de la loi.
    Ils sont aussi empreints de souplesse car ils font toute confiance aux partenaires sociaux pour aborder le thème de la pénibilité, étant entendu qu'il nous faut en la matière faire du « sur mesure » pour coller à la réalité des branches et déterminer la façon dont il sera tenu compte de cette pénibilité.
    Il convient, dans la ligne des travaux du COR, de mentionner quelques pistes : on peut notamment distinguer, d'une part, la pénibilité dont les conséquences sont immédiates et prennent fin à la cessation d'activité - c'est le cas pour les travaux dangereux ou les tensions au travail - et, d'autre part, la pénibilité aux conséquences plus durables, qui influent sur l'espérance de vie sans incapacité des salariés. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Il y a, s'agissant de la pénibilité, la solution retenue par la plupart des pays européens : en parler et ne rien faire. Il y a la solution proposée par certains : seulement en parler. Et il y a ce que proposent les autres : lui donner un contenu précis - c'est ce qui est prévu avec l'amendement et les sous-amendements. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'ammendement et les sous-amendements ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission n'a pas examiné les sous-amendements. Quant à l'amendement, elle l'a accepté.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.
    M. Jacques Desallangre. Nous sommes tout à fait favorables à une négociation au niveau des branches professionnelles sur les conditions de travail des salariés, sur la gestion prévisionnelle des emplois et sur les conditions particulières de cessation d'activité.
    Mais il y a une différence avec l'amendement précédent car, cette fois-ci, l'Etat est appelé à apporter son soutien nécessaire aux actions des branches et des entreprises en utilisant ses ressources disponibles. C'est pourquoi nous sommes disposés à voter l'amendement n° 19, sous la réserve qu'il soit complété par un sous-amendement que je propose au nom de mon groupe et qui tend à insérer l'alinéa suivant :
    « Les textes fixés au niveau des branches et des entreprises et qui définissent les mécanismes éventuels de cessation d'activité pris en charge par les entreprises et qui doivent être soutenus par l'Etat devront être examinés par la représentation nationale. »
    M. le président. Monsieur Desallangre, pourriez-vous me faire parvenir un texte écrit ?
    M. Jacques Desallangre. Certainement, monsieur le président.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. En effet, monsieur Bertrand, nous parlons à nouveau de la pénibilité. Comme si parler, c'était agir !
    Vous avez dit que vous rangiez la pénibilité parmi les thèmes qui seront soumis à discussion. J'ai l'impression en vous entendant que vous rangez des livres sur les rayonnages de la bibliothèque, attendant que la poussière vienne tranquillement les recouvrir.
    Il est vrai que vous et vos amis de l'UMP vous occupez de la pénibilité, par exemple en réduisant les retraites. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Philippe Briand. On ne réduira pas celle des petits revenus !
    M. Jean-Pierre Brard. ... Cela ne vous plaît pas mais c'est la vérité !
    M. Philippe Briand. Non !
    M. Jean-Pierre Brard. Bien sûr que si puisque vous allez faire travailler les gens plus longtemps pour des retraites plus maigres ! (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Daniel Paul. Ils n'aiment pas la vérité !
    M. Jean-Pierre Brard. Il est vrai, disais-je, que vous et vos amis tenez compte de la pénibilité puisque, grâce aux dispositions que vous prenez, les travailleurs qui accomplissent les travaux les plus pénibles garderont la forme plus longtemps. Par exemple, les éboueurs continueront de courir après les bennes grâce à ce qui a été voté hier ; ils pourront même continuer de le faire jusqu'à soixante-cinq ans ! Telle est votre façon de tenir compte de la pénibilité. Et, avec la surcote, vous offrez la possibilité de travailler bien au-delà des quarante annuités pour avoir une retraite correcte.
    Tout à l'heure, M. Jacquat a défendu des dispositions qui relevaient de l'esprit. Maintenant, M. Bertrand nous propose un amendement et des sous-amendements ambitieux et empreints de souplesse.
    M. Philippe Briand. Ces propos sont insupportables !
    M. Jean-Pierre Brard. Il s'agit d'un amendement et de sous-amendements platoniques, bien que M. Bertrand n'ait pas l'âge où cet adjectif est souvent de circonstance. (Sourires.)
    M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Je souhaite répondre à M. le rapporteur pour avis.
    Monsieur Bertrand, le problème de la pénibilité a fait l'objet d'un long et important débat la semaine dernière. Dans ces conditions, vous ne pouvez pas soutenir que nous n'avons fait qu'en parler, sans faire aucune proposition ! J'ai pris moi-même la parole à plusieurs reprises sur ce sujet, et je crois que le ministre a entendu ce que j'ai dit. D'autres que moi sont intervenus. Nous avons fait des propositions très précises, que je vais rappeler, mais tous nos amendements ont été repoussés.
    Nos propositions s'appuyaient sur le rapport du COR, qui analyse très bien les trois possibilités qui s'offrent à nous pour prendre en compte la pénibilité.
    Première proposition : renvoyer à la négociation de branche. L'encadrement insuffisant de la négociation aurait cependant risqué de laisser hors de son champ un certain nombre de secteurs : nous connaissons tous des secteurs professionnels où les négociations professionnelles ne sont pas suffisantes.
    Deuxième proposition, sur laquelle, monsieur Bertrand, nous aurions pu tomber d'accord : faire en sorte que les conventions tenant compte de la pénibilité soient soumises à l'agrément ministériel.
    Troisième proposition : définir les principes des conditions de négociation - je pense en particulier à la reconnaissance de la bonification, à la mise en place d'un plan de formation pour des secondes carrières, à la reconnaissance d'un dispositif prenant concrètement en compte la pénibilité dans le cadre des négociations.
    Or vous avez refusé tous nos amendements qui allaient dans ce sens.
    Ce que vous nous proposez est un minimum, alors qu'une des conditions du pacte social est que, s'il est demandé aux gens de travailler plus longtemps, nous soyons capables de leur dire dans quelles conditions la pénibilité sera prise en compte.
    M. le président. Sur la recebabilité du sous-amendement de M. Desallangre, je vais consulter M. le président de la commission des finances.
    M. Jean-Pierre Brard. De qui veut-on entraver la liberté ?
    M. le président. Monsieur Brard, je me dois de demander l'avis du président de la commission des finances.
    Vous avez la parole, monsieur le président de la commission des finances.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Ce sous-amendement est recevable, bien qu'il vienne surcharger inutilement un texte législatif, mais ce n'est pas la première fois que cela arrive.
    Quoi qu'il en soit, il est recevable. (« Merci ! » sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. Quel est l'avis de la commission saisie au fond ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission n'a pas examiné ce sous-amendement.
    M. le président. Ce sous-amendement, n° 11236, présenté par M. Desallangre, est ainsi rédigé :
    « Compléter l'amendement n° 19 par l'alinéa suivant :
    « Les textes fixés au niveau des branches et des entreprises et qui définissent les mécanismes éventuels de cessation d'activité pris en charge par les entreprises et qui doivent être soutenus par l'Etat devront être examinés par la représentation nationale. »
    Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.

Rappel au règlement

    M. Pascal Terrasse. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
    M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse, pour un rappel au règlement.
    M. Pascal Terrasse. Je veux bien accepter qu'on nous dise que la semaine dernière nous allions trop doucement et que le débat tirait en longueur. Mais là, honnêtement, monsieur le président, je ne sais plus où nous en sommes : des sous-amendements du rapporteur de la commission des finances, qui n'ont pas été examinés par la commission saisie au fond, le ministre qui se dit favorable à un sous-amendement du groupe communiste. Sur quoi allons-nous voter ?
    M. le président. Je n'y peux rien si je reçois des sous-amendements au dernier moment.
    M. Pascal Terrasse. Pour que nos débats se poursuivent dans de bonnes conditions, je demande dix minutes de suspension de séance. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Cela nous permettra d'examiner ces sous-amendements dans la sérénité et de revenir au calme.
    M. le président. Je vais suspendre la séance pour faire distribuer le sous-amendement de M. Desallangre.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à vingt-trois heures vingt, est reprise à vingt-trois heures trente.)
    M. le président. La séance est reprise.

Reprise de la discussion

    M. le président. Sur le sous-amendement n° 11231, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    Le sous-amendement n° 11236 présenté par M. Desallangre a été distribué. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le président, à présent que nous avons tous le texte sous les yeux, je peux informer l'Assemblée nationale que si le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 11231 du rapporteur pour avis, il est en revanche extrêmement dubitatif quant au sous-amendement n° 11236 de M. Desallangre, qui n'a pas de valeur juridique.
    M. Jacques Desallangre. Votre texte non plus, monsieur le ministre !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il consiste en effet seulement à inviter le Parlement à examiner les résultats des discussions au niveau des branches et des entreprises.
    M. Jacques Desallangre. Quelle mauvaise foi, monsieur le ministre : cela ne vous grandit pas !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. La loi ne gagne rien à comporter de telles dispositions et nous rendrions service au pays en veillant à ce qu'elle soit simple et claire. (« Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 11231, rectifié. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas possible, monsieur le président !
    M. le président. Vous avez sans doute fait une erreur dans votre demande de scrutin public, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, excusez-moi, mais nous avons proposé un sous-amendement à l'amendement n° 19 et on m'a dit que je ne pouvais pas sous-amender l'amendement n° 20 parce qu'il avait retiré. Or il a été distribué.
    M. le président. Monsieur Gremetz, je vous rappelle qu'on ne peut reprendre que les amendements mis en discussion. Or l'amendement auquel vous faite, allusion a été retiré à vingt-deux heures quinze. Il n'a pas été mis en discussion mais seulement distribué.
    Vous qui êtes comme moi un ancien parlementaire, vous savez très bien que je n'ai fait que suivre une règle établie de longue date.
    M. Maxime Gremetz. Alors, notre demande de scrutin public porte donc sur l'amendement n° 19 sous-amendé.
    M. François Goulard. Monsieur le président Gremetz !
    M. le président. Monsieur Gremetz, ne polémiquons pas. Je vais interpréter. Pour que les choses soient claires, je vais faire procéder à un vote par scrutin public sur tous les sous-amendements et sur l'amendement n° 19. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Maxime Gremetz. Parfait !
    M. le président. Mais, la prochaine fois, tâchez d'être plus clair !
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas notre faute, mais la vôtre ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Mes chers collègues, cela n'a aucune importance. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Allons, calmez-vous : si quelqu'un devait se fâcher, ce serait moi.
    Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix le sous-amendement n° 11231 rectifié.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   164
Nombre de suffrages exprimés   164
Majorité absolue   83
Pour l'adoption   163
Contre   1

    L'Assemblée nationale a adopté.
    Je mets aux voix le sous-amendement n° 11232.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   173
Nombre de suffrages exprimés   166
Majorité absolue   84
Pour l'adoption   166
Contre   0

    L'Assemblée nationale a adopté.
    Je mets aux voix le sous-amendement n° 11236 de M. Desallangre.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   177
Nombre de suffrages exprimés   174
Majorité absolue   88
Pour l'adoption   21
Contre   153

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    Je mets aux voix l'amendement n° 19, modifié par les sous-amendements adoptés.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   181
Nombre de suffrages exprimés   176
Majorité absolue   89
Pour l'adoption   174
Contre   2

    L'Assemblée nationale a adopté.

Article 17

    M. le président. « Article 17. - I. - A la section 1 du chapitre Ier du titre V du livre III du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 351-1-2 rédigé comme suit :
    « Art. L. 351-1-2. - La durée d'assurance ayant donné lieu au versement de cotisations à la charge de l'assuré accomplie après l'âge prévu au premier alinéa de l'article L.351-1 et au-delà de la limite mentionnée au deuxième alinéa du même article donne lieu à une majoration de la pension dans des conditions fixées par décret. »
    « II. - L'article L. 351-6 du même code est abrogé.
    « III. - A l'article L. 634-2 du même code, après les mots : "du premier au quatrième alinéa de l'article L. 351-1, sont insérés les mots : ", à l'article L. 351-1-2, et les mots : "L. 351-6,» sont supprimés.
    « IV. - Les dispositions du présent article sont applicables aux périodes accomplies à compter du 1er janvier 2004. »
    Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.
    La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. L'article 17 instaure une « surcote » pour les salariés souhaitant poursuivre leur activité professionnelle au-delà de la durée de cotisation nécessaire pour bénéficier du taux plein. Cette majoration devrait être fixée par décret à 0,75 % par trimestre, soit 3 % par année supplémentaire. Elle sera applicable pour les trimestres validés après le 1er janvier 2004.
    L'objectif est de pousser les salariés à travailler au-delà de la durée légale de cotisation. Mais leur maintien en activité empêchera de nombreux jeunes d'entrer dans la vie active. Un tel système aura donc des effets négatifs sur l'emploi, ce qui constitue une première raison de s'y opposer.
    Par ailleurs, monsieur le ministre, au vu des éléments que vous nous avez communiqués, nous estimons que le solde entre la surcote et la décote sera positif pour les comptes de la sécurité sociale, et en particulier pour ceux de l'assurance vieillesse. Les malheureux salariés frappés par la décote vont voir le niveau de leur retraite diminuer sensiblement, tandis que ceux qui cotiseront au-delà de la durée nécessaire bénéficieront au contraire d'une augmentation de 3 % maximum par année supplémentaire. Les comptes de l'assurance vieillesse feront apparaître un solde positif de 40 millions de francs dès l'année 2004, car la comparaison entre la décote et la surcote montre un déséquilibre.
    Ce dispositif n'aura donc aucun impact en matière de créations d'emplois, ce qui n'est pas de bon augure dans une période où le taux de chômage ne cesse d'augmenter. Au contraire, votre proposition va aggraver la situation pour les nombreux jeunes qui frappent à la porte de l'emploi. En conséquence, le groupe socialiste votera contre l'article 17.
    M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. Afin de favoriser le maintien en activité des travailleurs âgés, le Gouvernement propose la mise en place d'une majoration de 3 % par année effectuée, après soixante ans, au-delà de la durée d'assurance requise pour bénéficier du taux plein. Notre ami Pascal Terrasse, qui a assisté à nos précédentes réunions, n'ignore pas que ce qu'il vient d'indiquer est totalement faux. Il connaît en effet parfaitement les statistiques européennes et sait donc très bien que le départ d'une personne âgée n'entraîne pas nécessairement l'arrivée d'une personne plus jeune.
    C'est si vrai qu'en comparaison de ses voisins européens la France connaît la situation paradoxale consistant à cumuler le plus faible taux d'activité après l'âge de cinquante-cinq ans et le nombre le plus élevé de jeunes au chômage.
    M. Pascal Terrasse. Situation que vous allez aggraver !
    M. Denis Jacquat. Il n'y a donc aucune relation entre les deux.
    Je profite de cette intervention, monsieur le ministre, pour vous lancer, au nom de l'UMP, deux appels.
    Certaines personnes en situation de handicap peuvent être pénalisées dans l'exercice de leur activité professionnelle par rapport aux personnes valides. Les difficultés qu'elles rencontrent ont des conséquences importantes sur le déroulement de leur carrière et sur le calcul de leur pension de retraite. Leur entrée dans le monde du travail est en règle générale plus tardive que pour les personnes valides. Une fragilité et une fatigabilité plus grandes entraînent des interruptions d'activité susceptibles de se révéler préjudiciables pour le cursus professionnel et d'avoir une incidence sur le montant de la pension vieillesse. En s'ajoutant au handicap, le vieillissement est ressenti de façon plus forte et se traduit par une usure prématurée de l'organisme. Ces personnes éprouvent plus de difficultés à assurer normalement une activité et à atteindre le terme prévu pour la liquidation de leur pension de vieillesse.
    Pour toutes ces raisons, il convient de faire bénéficier les personnes en situation de handicap d'un régime particulier pour le calcul de leurs droits à l'assurance vieillesse et de leur verser plus tôt une pension pour inaptitude.
    M. Pascal Terrasse. C'est à l'article 20 ! Vous êtes hors sujet !
    M. Denis Jacquat. En outre, il convient d'accorder aux assurés ayant un enfant ou un conjoint handicapé une compensation particulière pour le calcul de leur retraite en ce qui concerne, d'une part, la majoration de la durée d'assurance et, d'autre part, la majoration de la pension. Ces propositions font partie des voeux qu'au nom de l'UMP j'ai formulés l'année dernière, ici même. Car - je le dis pour nos collègues du PS et du PC - l'UMP essaie toujours de réaliser ce qu'elle propose. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Patrick Braouezec.
    M. Patrick Braouezec. L'article 17 est véritablement l'arbre qui cache la forêt. En effet, sous des aspects vertueux - et ce n'est pas le seul point sur lequel le texte laisse entrevoir des aspects vertueux -, il masque l'ensemble des dispositions du projet qui ont pour effet de laminer notre système de retraite et qui, accumulées, viennent rogner le niveau des pensions. (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous pourrions être favorables à une surcote, mais pas dans un tel cadre.
    Votre projet de loi, en effet, loin de consolider nos régimes de retraite solidaires, constitue l'amorce d'un changement de système.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Mais non !
    M. Patrick Braouezec. Le niveau des pensions sera plus bas et plus aléatoire. Chaque salarié sera placé devant la nécessité de compléter individuellement sa retraite par des systèmes d'épargne, en fonction de ses moyens. L'égalité entre régimes du public et du privé se réalisera à travers un alignement sur les situations les moins favorables.
    Quant aux améliorations, elles sont bien maigres ou hypothétiques. Si un effort en faveur des pluripensionnés et une meilleure information des assurés sont envisagés, si une réforme de la compensation est prévue, la reconnaissance des travaux pénibles et la prise en compte des carrières longues pour ouvrir la possibilité de départs anticipés sont en suspens ou renvoyés à la négociation de branche, comme nous venons de le voir.
    En revanche, les sacrifices que doivent subir les salariés sont, eux, clairement mentionnés. Vous avez refusé toutes nos propositions visant à inscrire dans le projet une garantie du taux de remplacement. Vous avez même récusé le réexamen des conséquences des mesures Balladur de 1993. C'est donc une nouvelle diminution des retraites qui est programmée, que vous le vouliez ou non, d'ici à 2020. Le texte prévoit l'allongement de la durée de cotisation sous forme d'une incitation à la prolongation d'activité. Les avantages familiaux sont, quant à eux, dans la ligne de mire.
    Enfin, tous les arguments sont utilisés pour limiter l'augmentation des ressources par une réforme des cotisations et la taxation des revenus de placements financiers. Pas de ressources supplémentaires, mais plus de retraités : c'est bien l'affaiblissement des régimes collectifs de retraite qui se profile.
    Vous pouvez dire que la surcote est une avancée, mais elle est bien maigre par rapport aux dispositions qui se révèlent régressives et à toutes celles qui manquent !
    Où est la définition d'un taux de remplacement, ce qui est pourtant la seule garantie d'un haut niveau de retraite ? Le relèvement des minima de pensions n'est même pas mentionné. La garantie du pouvoir d'achat par rapport à l'évolution des salaires est évacuée au profit de la seule indexation sur les prix. La garantie du droit à la retraite à taux plein à soixante ans est escamotée au profit d'un vague « droit au départ ». La prise en compte des travaux pénibles est renvoyée à la négociation. La garantie des ressources financières, essentielles pour le financement, se réduit à la volonté de préserver les équilibres et la compétitivité des entreprises.
    Dans les faits, ce texte est bien la confirmation des choix effectués par M. Balladur en 1993 et de leur prolongation jusqu'en 2020.
    Par conséquent, la signification de cet article est : « Travaillez plus longtemps et vous aurez de meilleures pensions. » Nous sommes loin de l'affirmation du Gouvernement selon laquelle le niveau des pensions sera garanti. Il ne l'est qu'au prix d'un allongement de la durée d'activité.
    M. le président. La parole est à M. Alain Néri.
    M. Alain Néri. Monsieur le ministre, votre proposition d'accorder une surcote à ceux qui travailleront au-delà de soixante ans peut paraître séduisante. En effet, alors que ce texte se caractérise essentiellement par une diminution du pouvoir d'achat des retraités, il semblerait que vous fassiez ici un geste en leur faveur.
    Je considère pour ma part - et je crois que cette opinion est partagée sur tous les bancs de cette assemblée, du moins je l'espère - que le droit à la retraite à soixante ans représente une avancée considérable. Ce progrès social avait d'ailleurs été perçu de façon très favorable par les salariés lorsque François Mitterrand l'a établi, en 1982.
    M. Pascal Terrasse. Il fallait le rappeler !
    M. Yves Nicolin. Vous auriez dû prendre votre retraite !
    M. Alain Néri. Mais, aujourd'hui, force est de constater que votre projet de loi vise non seulement à rogner le montant des retraites, mais également à allonger la durée du travail. Et je ne considère pas que l'on puisse, dans ces conditions, parler de progrès social.
    En accordant une surcote à ceux qui peuvent travailler au-delà de soixante ans, vous créez en fait une nouvelle discrimination et une nouvelle inégalité. Tous les salariés qui souhaiteraient pouvoir bénéficier de la surcote auront-ils la capacité de travailler plus longtemps, surtout s'ils ont commencé à travailler jeunes et s'ils ont connu des accidents de parcours dans leur carrière ? Même s'ils espèrent améliorer leur retraite, en auront-ils la capacité physique ? Je ne le crois pas.
    Une fois de plus, c'est une mesure discriminatoire qui est mise en place. Ceux qui connaissent le plus de difficultés parce qu'ils exercent les métiers les plus pénibles ne pourront pas bénéficier d'une surcote.
    Vous avez déclaré ici-même vouloir fonder ce projet de loi sur l'équité. Mais l'équité, c'est au moins donner à tout le monde la même chose, voire donner plus à ceux qui ont moins, pas donner plus à ceux qui ont plus !
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, avant d'intervenir sur l'article 17, je ferai une remarque.
    J'ai compté tout à l'heure : l'hémicycle compte pas moins de soixante-douze figurants (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), car M. Jacquat détient à droite le monopole de la parole.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Ça suffit, monsieur Brard ! Nous avons déjà entendu cela !
    M. Jean-Pierre Brard. Il est tout de même injuste de priver notre assemblée de talents aussi affirmés que ceux de MM. Bur, Godfrain, Cuq, et de nouveaux collègues comme Marie-Anne Montchamp, qui ont des choses à dire, de même...
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Monsieur le président, ce n'est pas sérieux !
    M. Jean-Pierre Brard. ... que MM. Dord, Warsmann, Michel Bouvard et Loïc Bouvard.
    M. Yves Bur. Etes-vous chargé de faire l'appel ?
    M. Jean-Pierre Brard. Tous ces collègues sont bâillonnés. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Votre intervention n'a rien à voir avec le texte !
    M. le président. Monsieur Brard !
    M. Yves Nicolin. Mieux vaut se taire que dire n'importe quoi !
    M. Jean-Pierre Brard. J'avoue m'être trompé : je pensais que c'étaient des figurants silencieux mais, si vous tendez l'oreille, vous pouvez percevoir comme un bruit de fond !
    M. le président. Poursuivez, monsieur Brard !
    M. Jean-Pierre Brard. Avec l'article 17, le Gouvernement veut instaurer une majoration de 3 % par année travaillée après soixante ans, au-delà de la durée nécessaire pour obtenir le taux plein. Cette « surcote », destinée à inciter à une prolongation de l'activité, vaut deux fois moins que la décote que vous prévoyez d'infliger à ceux qui veulent partir en retraite avant d'avoir obtenu le nombre d'annuités requis.
    Aujourd'hui, il n'existe, dans le secteur public, ni décote ni surcote. La pension est calculée en annuités. Dans le privé, en revanche, depuis la réforme Balladur de 1993 et la refonte des régimes ARRCO et AGIRC effectuée en 1996, une décote - à l'heure actuelle, elle s'élève à 0,625 % par trimestre manquant - est appliquée sur le montant de la retraite à percevoir, ce qui a eu pour principal effet de diminuer fortement le niveau des retraites. Et le Gouvernement prévoit d'appliquer ce système aux fonctionnaires. La conséquence, c'est une baisse du revenu des retraités. De plus, l'encouragement au maintien en activité ne prend pas en compte un chômage persistant.
    Je vais en rester là, monsieur le président, car je sens que vous commencez à vous impatienter. Mais regardez ce qui s'est passé depuis le gouvernement de M. Balladur.
    Le Gouvernement et l'UMP veulent l'équité, c'est-à-dire aligner la fonction publique sur le privé : quarante ans de cotisations pour tout le monde. Mais cette équité existait avant 1993 : trente-sept années et demie pour tout le monde ! Aujourd'hui, monsieur le ministre, sous prétexte d'améliorer l'ordinaire, et après avoir fait sauter la barre des soixante ans, vous donnez la « liberté » - selon votre expression - de travailler à soixante-cinq ans. Si les retraités veulent avoir un niveau de vie correct, à quand le travail à perpétuité, vers lequel vous nous conduisez, et qui existe déjà aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne ?
    M. Philippe Briand. Le travail à perpétuité, c'était au goulag ! Vous en savez quelque chose !
    M. Jean-Pierre Brard. Ecoutez, après avoir mis José Bové en prison, vous n'avez pas de leçons à donner ! (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Monsieur Brard !
    M. Jean-Pierre Brard. Vous voyez, monsieur le président, en fin de compte, ils ne se contentent pas toujours de faire de la figuration !
    M. le président. Je suis saisi des amendements identiques n°s 3052 et 5178 à 5184.
    L'amendement n° 3052 est présenté par MM. Terrasse, Gorce, Le Garrec et les membres du groupe socialiste ; l'amendement n° 5178 est présenté par Mme Buffet, MM. Sandrier et Lefort ; l'amendement n° 5179 est présenté par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 5180 est présenté par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 5181 est présenté par Mme Fraysse, MM. Chassaigne et Brunhes ; l'amendement n° 5182 est présenté par Mme Jacquaint, MM. Vaxès et Hage ; l'amendement n° 5183 est présenté par MM. Gremetz, Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 5184 est présenté par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 17. »
    M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour défendre l'amendement n° 3052.
    M. Gaëtan Gorce. Cet amendement vise à supprimer l'article 17, pour les raisons que Pascal Terrasse a développées tout à l'heure. Plus globalement, je voudrais revenir sur la politique des âges qui sous-tend le système de surcote.
    Nous avons eu l'occasion de dire la semaine dernière que nous n'avions pas une grande confiance dans l'efficacité de la politique de l'emploi que le Gouvernement pourrait mettre en oeuvre et qui serait seule susceptible de donner leur cohérence et leur efficacité aux dispositifs qui nous sont aujourd'hui proposés.
    Pour résumer, je dirai que c'est plutôt le projet du Gouvernement qui est surcoté. En réalité, il mériterait plutôt une décote de 5 %, voire de 10 % pour les questions de l'emploi. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Disant cela, je ne fais d'ailleurs que reprendre les propos du secrétaire général de la CFDT : ce dernier affirmait dans la presse, la semaine dernière - encore une citation, dans un débat où elles ont été abondantes - que ce gouvernement n'avait pas de politique de l'emploi. N'ayant pas de politique de l'emploi, il ne donne pas de crédibilité aux mesures qu'il nous propose, comme celle-ci. Et, surtout, il ne donne pas de crédibilité au financement de son dispositif.
    Monsieur le président, je ne m'éloigne pas du sujet : si nous proposons la suppression de cet article, c'est parce que nous le rattachons à l'ensemble des dispositions qui nous sont présentées sur le terrain de l'emploi, dont je ne retiendrai que deux aspects.
    Le premier aspect concerne le financement du dispositif. On nous dit en effet qu'il va être financé pour l'essentiel par les économies qui seront réalisées avec la baisse du chômage - sur laquelle nous n'avons, évidemment, aucune garantie. C'est donc en 2008 que se présentera le vrai rendez-vous. Il faudra alors savoir comment assurer l'équilibre financier, sachant que les prestations chômage n'auront pas suffisamment baissé pour compenser la hausse des prestations vieillesse.
    Au-delà - c'est une question que je voudrais poser à M. Fillon car je l'ai posée vendredi sans grand succès à M. Delevoye -, je suis surpris du dispositif qui nous est présenté. On dit que la baisse des cotisations chômage va compenser la hausse des cotisations vieillesse, ce qui revient à affirmer que les partenaires sociaux qui gèrent l'UNEDIC seront d'accord pour baisser les cotisations chômage, alors qu'on peut penser qu'ils sont d'abord responsables, statutairement, des excédents que pourrait dégager le régime. C'est une raison supplémentaire de ne pas accorder beaucoup de crédit aux propositions qui nous sont faites.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Maxime Gremetz. Elle n'a pas d'avis !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission n'a pas accepté cet amendement de suppression, monsieur le président,...
    M. Maxime Gremetz. C'est un préjugé idéologique !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. ... parce que l'article 17 met en place, avec l'instauration d'une surcote, un mécanisme particulièrement important.
    J'ajoute que je suis très surpris de l'intervention de nos collègues du groupe socialiste. Ont-ils oublié le discours de M. Lionel Jospin, dont M. Gorce et M. Terrasse étaient pourtant particulièrement proches ? Ils semblent s'en être quelque peu éloignés. M. Jospin avait en effet déclaré : « Demain, d'autres voudront peut-être travailler plus longtemps pour acquérir des droits à la retraite plus importants ou, au contraire, partir à la retraite plus tôt, quite à disposer de droits moins élevés. Cela n'est guère possible aujourd'hui. Il faut que cela devienne un choix véritablement ouvert. »
    Tel est bien l'objet de l'article 17. Une nouvelle fois, ce projet de loi, en particulier cet article, est consensuel. C'est pourquoi la commission a rejeté les amendements de suppression.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ces amendements visent à supprimer du projet de loi une avancée importante qui, comme vient de le rappeler le rapporteur, avait été proposée par M. Jospin lorsqu'il était Premier ministre et défendue par beaucoup de ceux qui siègent aujourd'hui sur les bancs du groupe socialiste. Qu'importe !
    M. Terrasse a posé des questions précises auxquelles je veux répondre.
    Il a ainsi tenté de faire accroire à l'Assemblée nationale que l'équilibre entre la surcote et la décote rapportait de l'argent au régime général. C'est évidemment faux,...
    M. Pascal Terrasse. C'est écrit !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité ... et il le sait bien parce qu'il est trop averti de ces sujets pour s'induire lui-même en erreur. La vérité, c'est que les Français qui choisiront de travailler plus longtemps pour bénéficier de la surcote vont continuer à cotiser, ce qui représente en effet, les premières années, un gain pour le régime général, de l'ordre de 40 millions. Mais chacun comprend bien que plus le temps passera, plus le nombre des bénéficiaires de cette surcote augmentera, et qu'alors celle-ci représentera un coût pour le régime général.
    Il en sera de même de la décote, actuellement de 10 % - ce dont, je le note au passage, tous ceux qui viennent à l'instant de dénoncer une décote injuste se sont satisfaits pendant des années,... (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Yves Nicolin. Ils ne l'avaient même pas vu !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... et que nous allons faire passer à 5 % pour l'ensemble des Français.
    Quant à l'argument selon lequel ces mesures seraient négatives pour l'emploi, il s'inscrit dans la vision malthusienne du marché du travail, qui, depuis longtemps, fait tant de mal à notre pays...
    M. Hervé Novelli. Absolument !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... et qui nous a conduits, comme le porte-parole de l'UMP l'a souligné tout à l'heure, à avoir le taux de chômage des jeunes le plus élevé et le taux d'activité des seniors le plus bas. Ce qui montre bien...
    M. Michel Bouvard. Qu'ils sont archaïques !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... qu'une telle conception du travail ne correspond pas aux mécanismes réels de l'économie. (Applaudissement sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Maxime Gremetz. Je souhaite répondre au Gouvernement, monsieur le président.
    M. le président. Je rappelle que les amendements n° 5178 à 5184 déposés par le groupe des député-e-s communistes...
    M. Maxime Gremetz. Et républicains !
    M. le président. ... et républicains sont identiques à l'amendement n° 3052 et que l'avis donné par la commission et le Gouvernement sur celui-ci vaut donc également pour ceux-là.
    M. Jean-Pierre Brard. Ce faisant, vous faites crédit à la commission et au Gouvernement d'une grande cohérence !
    M. le président. La parole est à M. Pierre Goldberg, pour soutenir les amendements n°s 5178 à 5484.
    M. Pierre Goldberg. Ces amendements visent à supprimer la surcote.
    Afin de maintenir les seniors au travail, l'article 17 instaure une majoration de pension pour chaque trimestre cotisé par l'assuré effectué au-delà de la durée nécessaire pour bénéficier du taux plein, soit 160 trimestres, après soixante ans. Cette majoration, dite « surcote », devrait être fixée par décret, et sera applicable pour les trimestres après le 1er janvier 2004.
    Il s'agit, dans l'esprit du Gouvernement, d'une incitation à travailler plus longtemps pour bénéficier d'une retraite plus importante, compte tenu des multiples dispositions du projet de loi qui tendent à une baisse réelle des pensions.
    Je ne peux mieux faire pour défendre cet amendement que de donner deux exemples.
    Premier cas : Sandrine, employée, cinquante et un ans, vingt-neuf années de cotisations.
    M. Philippe Briand. Vous n'avez rien avec Cosette ?
    M. Jean-Pierre Brard. Quelle indécence !
    M. Patrick Braouezec. Vous n'en connaissez pas beaucoup, de Sandrine, à droite !
    M. Philippe Briand. Vous, c'est la version Thénardier !
    M. Jean-Pierre Brard. Eux, c'est plutôt des Bérangère !
    M. Pierre Goldberg. Sandrine est employée depuis qu'elle a dix-huit ans. Mère de famille, elle s'est arrêtée de travailler quatre ans après la naissance de son deuxième enfant. Mais, compte tenu des avantages familiaux, elle aura en 2012 la durée d'assurance requise, soit quarante-et-un ans, pour bénéficier d'une retraite à taux plein.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Cela n'a rien à voir avec les amendements, monsieur le président !
    M. Pierre Goldberg. Elle pourra partir à soixante ans avec une pension brute de base - hors retraite complémentaire - de 952 euros.
    M. Philippe Briand. Et Cendrillon ?
    M. Jean-Claude Lefort. Quelle indécence !
    M. Jean-Pierre Brard. Ah ! Vous n'en fréquentez pas beaucoup, de Sandrine, à droite !
    M. Pierre Goldberg. Si elle travaille un ou deux ans de plus, la surcote « Fillon » - c'est ainsi qu'elle est appelée, monsieur le ministre - lui permettra d'améliorer sa pension de 3 % dans un cas, et de 6 % dans l'autre, ce qui la portera à 1 009 euros.
    Second cas : Martine, professeur certifié, cinquante-sept ans, trente-quatre années de cotisations...
    M. Patrick Braouezec. Eh oui !
    M. Philippe Briand. Cosette !
    M. Maxime Gremetz. C'est la première fois que nous vous voyons dans l'hémicycle, monsieur le député, et il faut que vous vous manifestiez.
    M. Philippe Briand. Eh oui ! Vous aurais-je manqué ?
    M. Pierre Goldberg. Martine est professeur de sciences naturelles. Titulaire du CAPES, elle enseigne depuis qu'elle a vingt-sept ans. Si elle part à la retraite en 2006, à soixante ans et demi, elle totalisera trente-six annuités - trente-trois années travaillées et trois années de bonification en raison de ses enfants. Sa pension sera de 2 240 euros par mois pour un traitement mensuel de 2 869 euros. Si elle travaille deux ans et demi de plus, grâce à la surcote, sa pension passera à 2 426 euros par mois.
    Monsieur le ministre, mes chers collègues, ces deux exemples parlent d'eux-mêmes et ne peuvent pas mieux justifier nos amendements de suppression.
    M. le président. La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
    La parole est à M. Pascal Terrasse, pour répondre au Gouvernement.
    M. Pascal Terrasse. Monsieur le président, certains de nos collègues font dodo.
    Mme Nadine Morano. Où çà ?
    M. Pascal Terrasse. Ils sont trois ou quatre.
    M. François Hollande. Ne réveillons pas l'UMP qui dort !
    M. le président. Monsieur Terrasse, poursuivez, je vous prie, et, surtout, ne les réveillez pas ! (Sourires.)
    M. Pascal Terrasse. M. le ministre vient de dire qu'il y avait une sorte de schizophrénie dans notre pays en ce qui concerne le taux de chômage - lequel, il est vrai, est important chez les salariés qualifiés âgés -, et que le dispositif de la surcote n'aurait aucune incidence sur l'entrée des jeunes sur le marché du travail.
    Je le renvoie à l'article 16 du projet de loi. Dans les documents qu'il a bien voulu nous envoyer, il est bien indiqué que le dispositif de départ en retraite avant soixante ans aura un impact sur l'emploi puisqu'il permettra de libérer des salariés pour permettre l'accès à l'emploi des jeunes. Pourquoi ce qui est bon à l'article 16 ne le serait-il pas à l'article 17 ?
    Quant à la citation qu'a faite le rapporteur d'un discours de Lionel Jospin, je répondrai qu'on pourrait en effet imaginer un système de surcote et de décote, mais que celui-ci ne devrait pas ressembler au système du bonus-malus en vigueur pour les automobiles, où l'on a l'impression que le bonus évolue très lentement et le malus bien plus vite.
    Si nous avions trouvé un équilibre, on aurait pu en discuter, mais tel n'est pas le cas.
    On peut encore lire dans vos documents, monsieur le ministre, s'agissant de l'équilibre financier : « Cette mesure, appréhendée avec la décote, devrait constituer, dans un premier temps, un gain en termes de cotisations pour les régimes d'assurance vieillesse. Celui-ci est estimé à 40 millions d'euros en 2004, 1,3 milliard en 2010. Après cette date, ce gain sera amoindri. »
    M. Alain Néri. Ron-ron !
    M. le président. Monsieur Néri, nous sommes à la Chambre.
    M. Alain Néri. Monsieur le président, je ne vous le fais pas dire : un de nos collègues nous en donne la preuve ! (Rires.)
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Nous sommes à la Chambre, monsieur le président, donc il faut se réveiller.
    En instaurant une surcote - qui est le pendant de la décote - vous inventez pour les retraités, monsieur le ministre - l'image est tout à fait juste - un système de bonus-malus, comme pour les automobiles. Et, comme ce dernier système, celui que vous voulez instaurer est très peu favorable au salarié qui veut obtenir une surcote et très pénalisant pour le salarié épuisé qui ne peut aller jusqu'au terme de ses cotisations.
    Je vous le dis très franchement, monsieur le ministre : ce n'est pas parce que certains ont avancé ces idées qu'il faut obligatoirement les reprendre. Ce n'est pas un argument, vous le savez bien. Ce n'est pas parce que certains font des bêtises qu'il faut les faire soi-même.
    En revanche, vous pouvez prendre modèle sur ce qui est bien. La retraite à soixante ans constitue à l'évidence un progrès de civilisation. N'hésitez pas à copier !
    Mais la réalité est souvent tout autre. Pensez-vous qu'un ouvrier du bâtiment ait vraiment le désir, au détriment de sa santé, de travailler au-delà de soixante ans et de ses 160 trimestres ? La plupart des cotisants, lorsqu'ils décident de travailler après soixante ans, veulent simplement achever leur cycle de cotisations pour percevoir une retraite à taux plein.
    Avec la disposition que vous proposez, qui incite les salariés à travailler non seulement après soixante ans, mais au-delà du nombre d'années requis, vous niez le progrès social.
    Le pessimisme fondamental de la pensée libérale qui est la vôtre ne conçoit pas le progrès social, ne considère pas qu'il soit un facteur déterminant du développement équilibré des sociétés. Il n'envisage que l'intérêt, l'appât du gain et l'oppose systématiquement au bien-être et à la qualité de la vie.
    M. le président. Je vous demande de conclure, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Je rappelle pour mémoire qu'au Moyen Age un agriculteur nourrissait entre cinq et six personnes. Il en nourrit aujourd'hui cinquante grâce à l'augmentation de la productivité. En dépit de l'augmentation continuelle de cette dernière, vous ne demandez rien d'autre aux salariés que de faire des sacrifices pour distribuer autrement cette productivité. Et vous la distribuez toujours aux mêmes : aux gros possédants, aux revenus du capital, aux revenus financiers.
    Au taux de profit, nous préférons pour notre part l'être humain, et c'est ce qui nous oppose. Cela s'appelle l'éthique !
    Mme Marylise Lebranchu. Très bien !
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 3052 et 5178 à 5184.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 5185 à 5191 déposés par Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains.
    L'amendement n° 5185 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 5186 est présenté par MM. Bocquet, Biessy, Dessalangre et Braouezec ; l'amendement n° 5187 est présenté par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 5188 est présenté par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 5189 est présenté par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 5190 est présenté par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 5191 est présenté par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le I de l'article 17. »
    La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
    M. Jean-Claude Sandrier. Il convient avant tout de combattre l'idée selon laquelle les retraites seraient uniquement une charge et un handicap pour l'économie.
    M. Alain Bocquet. C'est plutôt un atout !
    M. Jean-Claude Sandrier. En libérant des emplois et en consommant, les retraités contribuent au contraire au renouvellement des générations d'actifs et au dynamisme économique. La productivité du travail et la demande effective s'en trouvent stimulées et, par conséquent, la croissance et l'emploi aussi.
    L'instauration de la surcote et, encore plus, de la décote, montre que l'inactivité des plus de soixante ans est devenue pour le Gouvernement une préoccupation grandissante. Il serait sans doute préférable de se préoccuper des licenciements et des suppressions massives d'emplois actuels.
    En apparence, l'article 17 a pour objet de permettre aux salariés qui le désirent d'accéder à une pension plus élevée s'ils travaillent après l'âge de soixante ans. En pratique, il n'est là que pour dissimuler un certain nombre de dispositions visant à compenser la diminution du niveau des pensions.
    M. Maxime Gremetz. Oui : c'est un leurre !
    M. Jean-Claude Sandrier. Il est important de rappeler que le système des retraites doit avant tout répondre à des impératifs de justice sociale et d'équité. Or la première partie de cet article pose, de fait, l'inégalité entre les salariés. Doit-on instaurer un système de « bons points » qui pénaliserait les personnes désirant partir à la retraite à soixante ans ? C'est l'âge auquel beaucoup de salariés sont attachés pour leur départ à la retraite. Un sondage récent sur ce point est sans appel.
    M. Yves Nicolin. Méfiez-vous des sondages !
    M. Jean-Claude Sandrier. On comprend dès lors que vous ne vouliez pas soumettre votre texte à référendum.
    En fait, sous l'apparence d'un gain, d'ailleurs modeste, vous inventez avec cet article le double allongement de l'âge de départ à la retraite : au premier allongement, provoqué par l'augmentation de la durée de cotisation, s'ajoute un deuxième, avec l'instauration de cette prime incitant à travailler plus longtemps.
    Dans l'histoire du xxe siècle, le progrès social a toujours conduit, avec le progrès de la productivité et l'augmentation constante des richesses, à abaisser l'âge de départ à la retraite. Vous inventez également avec cet article, monsieur le ministre, une nouvelle machine à remonter le temps.
    Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de la première partie de cet article.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Le groupe des députés communistes et républicains procède à un démontage de l'article 17. Il propose ici de supprimer le I, qui précisément, instaure la surcote, c'est-à-dire le mécanisme essentiel de cet article. La commission a donc rejeté ces amendements.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis que la commission.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 5185 à 5191.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. M. Accoyer, rapporteur, a présenté un amendement, n° 1147, ainsi rédigé :
    « Au début du texte proposé pour l'article L. 351-1-2 du code de la sécurité sociale, substituer aux mots : "au versement de, le mot : "à. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Cet amendement vise à protéger les salariés dont les cotisations ont été prélevées et décomptées mais n'ont pas été versées aux URSSAF, et pourraient de ce fait ne pas être comptabilisées. Il a déjà été proposé et le sera encore à d'autres articles.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1147.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de huit amendements, n°s 5025 rectifié et 5199 à 5205, pouvant être soumis à une présentation commune.
    L'amendement n° 5025 rectifié, présenté par M. Accoyer, rapporteur, est ainsi rédigé :
    « I. - Supprimer le II de l'article 17.
    « II. - En conséquence, à la fin du III de cet article, supprimer les mots : "et les mots : "L. 351-6, sont supprimés.. »
    Les amendements n°s 5199 à 5205 sont identiques.
    L'amendement n° 5199 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 5200 est présenté par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 5201 est présenté par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 5202 est présenté par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 5203 est présenté par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 5204 est présenté par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 5205 est présenté par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le II de l'article 17. »
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 5025 rectifié.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. L'amendement n° 5025 rectifié tend à maintenir en vigueur les dispositions qui permettent de continuer à bénéficier d'une majoration de la durée d'assurance pour les périodes cotisées au-delà de l'âge de soixante-cinq ans.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Tous les amendements de M. Accoyer sont remarquables, monsieur le président. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir les amendements n°s 5199 à 5205.
    M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, nous avons bien entendu la remarque très élogieuse de M. Fillon à l'adresse de M. Accoyer ; il y a des compliments qui tuent !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Vous y associez-vous, monsieur Brard ?
    M. Jean-Pierre Brard. Cela dépend : encore faudrait-il savoir à quoi. Je ne vous donne, en tout cas, pas de blanc-seing, monsieur Accoyer !
    Dans la fonction publique de l'Etat, la durée moyenne de cotisation est de trente-trois ans et demi ; il manquera donc en moyenne six ans et demi sur les quarante annuités, soit une décote moyenne de 65 % du montant de la pension, ce qui entraînera la relégation d'une majorité de fonctionnaires au minimum de pension. Et que dire des agents territoriaux et hospitaliers, dont la durée moyenne de cotisation est d'un peu plus de vingt-huit ans, alors que près de 50 % d'entre eux touchent déjà le minimum de pension ?
    Ainsi, le Gouvernement - avec le soutien de M. Accoyer, certainement - veut contraindre les Français à travailler plus longtemps en prévoyant un dispositif qui les pousse à retarder l'âge de leur départ en retraite, sous peine de se voir pénaliser par une décote destinée à réduire le taux de pension de ceux qui voudraient s'en aller avant d'avoir cumulé quarante annuités.
    Jusqu'en 2008, la décote sera de 3 % par année manquante. L'objectif est de la porter au taux du privé pour réduire encore la retraite. Ainsi, dès 2008, un agent ayant cotisé trente-cinq ans au lieu de quarante ans perdra 15 % de sa retraite. Il ne pourra, dans le meilleur des cas, espérer qu'une retraite égale à 60 % de son salaire moyen des trois dernières années. Ce système de bonus-malus est inacceptable, d'où ces amendements. M. Accoyer dira encore qu'il s'agit d'une opération de démontage mais, à défaut d'avoir pu supprimer l'article 17, nous continuons effectivement à le démonter.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable, je l'ai dit, à l'amendement du rapporteur.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5025 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. En conséquence, les amendements n°s 5199 à 5205 sont satisfaits.
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 5206 à 5212, déposés par Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains.
    L'amendement n° 5206 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 5207 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 5208 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 5209 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 5210 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 5211 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 5212 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le III de l'article 17. »
    La parole est à M. Jean-Claude Lefort.
    M. Jean-Claude Lefort. Ces amendements visent à supprimer le III de l'article 17, lequel constitue une incitation à travailler plus longtemps pour bénéficier d'une retraite inchangée, principe auquel nous sommes fermement opposés.
    Nous avons eu déjà l'occasion de souligner le rôle excessif et insupportable joué par la Commission européenne dans cette affaire. Dans son rapport annuel sur l'état des finances publiques dans la zone euro, rendu public aujourd'hui, la Commission a pris parti dans le débat intérieur français en estimant « urgente » la réforme des retraites en France et en préconisant de retarder l'âge moyen de départ à la retraite. Cette ingérence est totalement inacceptable. Mais - et c'est une heureuse nouvelle - les citoyens européens ne s'y trompent pas. On peut le constater au vu de la mobilisation grandissante dans les pays de l'Union pour défendre les retraites, en Allemagne, en Autriche et dans d'autres pays où de puissants mouvements de protestations ont pris corps.
    Le caractère européen, sinon international de l'offensive contre les droits des salariés est de surcroît signalée dans un document du MEDEF traitant des retraites. Ce document vise à justifier les attaques en préparation en France en dénonçant de façon grotesque une prétendue concurrence déloyale.
    Savez-vous, mes chers collègues, qu'en Grande-Bretagne, l'âge de la retraite vient d'être porté à soixante-cinq ans ?
    M. Edouard Landrain. Ce sont des socialistes, pourtant !
    M. Jean-Claude Lefort. Et l'âge de soixante-dix ans est envisagé.
    M. Yves Bur. Quelle chance, de vivre en France ! De quoi vous plaignez-vous ?
    M. Jean-Claude Lefort. En Finlande comme aux Etats-Unis, l'âge légal de la retraite va augmenter de deux ans pour atteindre soixante-sept ans,...
    M. Yves Nicolin. Ne vous plaignez pas, alors !
    M. Jean-Claude Lefort. ... de trois ans en Nouvelle-Zélande et de cinq ans au Japon, en Corée, en Espagne et en Italie.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Voilà pourquoi nous légiférons !
    M. Maxime Gremetz. C'est ça, le libéralisme !
    M. Jean-Claude Lefort. Ce libéralisme est insupportable. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Yves Nicolin. Insupportable ? Heureux, oui !
    M. le président. Monsieur Lefort, poursuivez, je vous prie.
    M. Jean-Claude Lefort. Savez-vous qu'en l'an 2000 23 % des citoyens américains de plus de soixante-cinq ans travaillaient encore...
    M. Pascal Terrasse. Absolument !
    M. Jean-Claude Lefort. ... tandis qu'en Grande-Bretagne près d'un quart des retraités vivaient en dessous du seuil de pauvreté ? Nous sommes formellement opposés à la remise en cause de la retraite à soixante ans...
    M. Alain Néri. Très bien !
    M. Jean-Claude Lefort. ... et nos amendements vont clairement dans ce sens.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 5206 à 5212.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Sur l'article n° 17, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Maxime Gremetz pour une explication de vote.
    M. Maxime Gremetz. Les diverses et brillantes interventions de mes collègues communistes et républicains l'ont montré : véritablement, l'article 17 sort de l'ordinaire. Il invente pour les hommes et les femmes de notre pays le même principe que pour les voitures automobiles : la surcote et la décote. C'est tout de même un peu fort pour qui défend les valeurs de l'humanisme républicain et libéral ! Il fallait oser ! « Il est surcoté », « il est décoté », il est tricoté, et quoi encore ? (Rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe de l'Union pour la démocratie française.) Pour avoir la surcote, il faut travailler plus longtemps. Et si l'on travaille moins longtemps, paf ! une décote ! Une descente de mine, plutôt : à la paie, cela se voit : 5 % de moins ! Vous rendez-vous compte à quel point on joue avec les hommes et les femmes qui travaillent tous les jours, qui produisent les richesses du pays, qui défendent des valeurs ? Franchement, monsieur le ministre, ce n'est pas digne d'un pays moderne, ce n'est pas digne du pays des droits de l'homme,...
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Si !
    M. Yves Nicolin. Vous n'êtes pas moderne !
    M. Maxime Gremetz. ... ce n'est pas respectueux de la personne humaine.
    M. Yves Nicolin. Vous êtes ringard !
    M. Maxime Gremetz. Manifestement, nous n'avons pas les mêmes valeurs ! (« Ça non ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Vous, c'est la loi du fric ; nous c'est la loi de l'humain et de l'éthique ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. Monsieur le président, mes chers collègues, le groupe de l'UMP a le sens de la cohérence. M. le ministre, MM. les rapporteurs et les différents orateurs se sont largement expliqués sur ce sujet. Je n'ai donc pas d'explications complémentaires à donner, car nous aimons bien ce qui est concis. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous voterons l'article 17.
    M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Soyez aussi bref !
    M. Pascal Terrasse. Monsieur le ministre, votre projet de loi contient plusieurs dispositions de nature à faciliter l'accès et le maintien à l'emploi des travailleurs qualifiés âgés, nous avons eu l'occasion de le rappeler. Près de 50 % des salariés de plus de cinquante-cinq ans se retrouvent dans des situations d'attente en fin de carrière : aussi convient-il de renforcer l'employabilité dans les entreprises des plus de cinquante-cinq ans.
    Malheureusement, l'article 17, en faisant en sorte que les salariés qui ont déjà une durée suffisante de cotisation poursuivent leur activité, aura une incidence certaine sur le chômage. En effet, l'allongement de la durée de cotisation reviendra à fermer la porte aux jeunes qui souhaitent entrer dans la vie active. Le taux d'employabilité des jeunes ne pourra qu'en être affecté.
    M. Yves Bur. C'est faux !
    M. Pascal Terrasse. Voilà pourquoi nous considérons que, sur ce point en particulier, le dispositif prévu par l'article 17 est néfaste pour notre pays, néfaste pour l'emploi, néfaste pour les jeunes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix l'article 17, modifié par les amendement adoptés.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   200
Nombre de suffrages exprimés   200
Majorité absolue   101
Pour l'adoption   149
Contre   51

    L'Assemblée nationale a adopté.
(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Alain Bocquet.
    M. Alain Bocquet. Monsieur le président, avant l'examen de l'article 18, je demande une brève suspension de séance.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue le mercredi 25 juin à zéro heure trente, est reprise à zéro heure quarante.)
    M. le président. La séance est reprise.

Article 18

    M. le président. « Art. 18. - I. - Le premier alinéa de l'article L. 351-10 du code de la sécurité sociale est modifié comme suit :
    « 1° Après les mots : "cette prestation, sont ajoutés les mots : ", lors de sa liquidation,.
    « 2° Après les mots : "de la durée d'assurance, sont insérés les mots : "accomplie par l'assuré dans le régime général, le cas échéant rapportée à la durée d'assurance accomplie tant dans le régime général que dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, lorsque celle-ci dépasse la limite visée au deuxième alinéa de l'article L. 351-1.
    « 3° L'alinéa est complété par la phrase suivante : "Ce montant minimum est majoré au titre des périodes ayant donné lieu au versement de cotisations à la charge de l'assuré. ».
    « II. - Les dispositions du présent article sont applicables à compter du 1er janvier 2005. »
    La parole est à M. Pascal Terrasse, inscrit sur l'article.
    M. Pascal Terrasse. L'article 18 a pour objectif affiché de réformer le minimum contributif. Le groupe socialiste, monsieur le ministre, ne votera pas contre, mais il s'abstiendra. En effet, nous avions formulé des propositions visant à rétablir les conditions initiales du minimum contributif, créé sous le gouvenement de Pierre Mauroy en 1983, en le portant à 95 % du SMIC. Tel n'a pas été le choix retenu par le Gouvernement, et nous ne pouvons que le regretter.
    En réalité, l'application du dispositif du Gouvernement modifiera profondément la portée de ce minimum. La durée d'assurance nécessaire pour en bénéficier passera, sans période transitoire, de 150 trimestres en 2003 à 160 trimestres. Il faudra dix trimestres supplémentaires à compter du 1er janvier 2005 alors que, pour la pension, on a des étapes de 152, 154, 156, 158 trimestres, les deux calculs se rejoignant au 1er janvier 2008 à 160, pour passer à 164, puis à 168.
    Le calcul se fera à la date d'attribution sur les trimestres cotisés par l'assuré et non plus sur les trimestres validés, ce qui aura évidemment une incidence très importante. Les personnes ayant eu des carrières incomplètes, qui ont été au chômage notamment, pouvaient jusqu'alors faire valider le minimum contributif. Tel ne sera plus le cas, le calcul se fera au prorata de la durée d'assurance totale, même au-delà de la limite de 160 trimestres.
    Ce montant minimum sera majoré au titre des périodes ayant donné lieu au versement de cotisations à la charge de l'assuré. Les périodes pendant lesquelles l'assuré n'aura pu cotiser, pour cause notamment de maladie, de chômage, d'accident du travail, d'invalidité, de période militaire, de maternité, de formation, ainsi que les trimestres pour enfants accordés aux femmes n'ouvriront plus droit au minimum contributif mais à un minimum social, tel le minimum vieillesse.
    Pour faire accepter ces nouvelles conditions restrictives d'attribution, le présent projet prévoit une revalorisation de trois fois 3 % du minimum contributif pour 160 trimestres. En réalité, quand on regarde de près, le cadeau qui sera fait aux bénéficiaires du minimum contributif sera précisément de 150 euros par mois. Cette somme correspond à 3 % du minimum contributif. Dois-je vous rappeler que, dans le cadre de la dernière loi de financement de la sécurité sociale, les pensions ont augmenté d'une manière globale de 2,2 % ? Le gain est donc en réalité de 0,8 %.
    Dans un amendement qu'elle a présenté, Mme Boutin indique à juste titre qu'en raison des modalités de calcul du minimum contributif, les femmes seront les premières touchées par ce dispositif. Aujourd'hui, le minimum contributif est validé pour les femmes ayant élevé trois enfants. Tel ne sera plus le cas. C'est une mesure discriminante à l'égard des femmes qui ont fait le choix d'avoir des enfants et de continuer leur carrière professionnelle.
    En réalité, les orientations contenues dans ce texte sont très limitées et leur portée est très loin d'atteindre l'objectif qui était initialement prévu dans le cadre du dispositif présenté par Pierre Mauroy à l'époque. Votre projet est restrictif sur les périodes validées, restrictif sur les durées de cotisation, restrictif encore sur le montant proposé par le Gouvernement.
    Enfin, l'indexation du minimum contributif est connue jusqu'en 2008. Si, à partir de 2008, le minimum contributif n'évolue plus sur la base de l'indexation des salaires, on en reviendra, à l'horizon de 2010, à la situation d'aujourd'hui, soit, en plus, une dégradation complémentaire.
    C'est pourquoi le groupe socialiste, conscient de l'effort très limité qui est fait, ne pourra pas voter contre l'article mais s'abstiendra.
    M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. L'article 18 clarifie la nature du minimum contributif qui est un élément de liquidation et non un minimum social.
    A l'article 4, nous avons garanti une retraite minimale pour les salariés qui ont fait toute leur carrière au SMIC. Pascal Terrasse vient de rappeler l'histoire. Il y a celle d'après 1981 et il y a l'histoire actuelle. Le taux de remplacement, aujourd'hui, est de 81 %. Sans réforme, il tomberait à 60 % en 2020. Le projet de loi actuel a comme horizon pour 2008 un taux de 85 %.
    Je rappellerai aussi qu'il n'était pas logique que le minimum contributif soit tombé en dessous du minimum vieillesse. Le minimum contributif concerne des gens qui ont travaillé. Le minimum vieillesse concerne des gens qui, pour beaucoup, ont eu des accidents de la vie et n'ont pas pu travailler.
    Une fois de plus, mes chers collègues, on peut constater une chose, c'est que l'UMP met un point d'honneur à réaliser ce qu'elle promet. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Maxime Gremetz. Oh ! Ça devient le slogan ! Changez un peu : l'UMP ne fait que ce qu'elle peut, et c'est bien peu !
    M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
    M. Daniel Paul. Monsieur le ministre, votre gouvernement a voulu nous faire croire qu'avec sa réforme même un smicard prendrait sa retraite avec au moins 85 % du SMIC, sans vraiment préciser d'ailleurs qu'il s'agit du SMIC net ni que ce pourcentage sera donné à la liquidation.
    Si la pension minimale est aujourd'hui constituée d'un minimum contributif et d'une retraite complémentaire, la totalité de ces pensions représentent aujourd'hui pour un salarié ayant acquis tous ses droits et ayant toujours été au SMIC une pension de 70 à 83 % du SMIC. Dès lors, affirmer sans rire un objectif de 85 % du SMIC net est une affirmation en trompe-l'oeil qui leurre l'opinion publique.

    Oui, monsieur le ministre, vous le savez pertinemment, les retraités aujourd'hui au minimum contributif ne verront pas leur pension revalorisée en proportion, comme le demande la Caisse nationale d'assurance vieillesse. Ensuite, les futurs retraités verront leur niveau de pension se réduire comme peau de chagrin, immédiatement après la liquidation,...
    M. Alain Bocquet. Eh oui !
    M. Daniel Paul. ... par le seul fait d'une procédure d'indexation assise sur les prix et non sur les salaires. Encore la réforme Balladur ! Cette dernière implique un différentiel d'évolution entre les prix et les salaires au détriment de ces derniers. Si l'on retient les projections du COR en matière de prix et de salaires, le montant de la pension à liquider en 2003 à 85 % du SMIC net ne représentera en fait, quinze ans plus tard, que 67 % de ce même SMIC. Drôle de conception de la revalorisation des basses pensions !
    Mais ce n'est pas tout, car l'un des éléments les plus pervers de votre réforme est l'obligation que vous faites aux salariés les moins bien lotis, pour ne pas les appeler les travailleurs pauvres, de travailler jusqu'à 160 trimestres pour pouvoir bénéficier d'une retraite à taux plein. Un souci d'égalité, mais mal placé.
    Comme si cela ne suffisait pas, les personnes qui n'ont pas pu bénéficier de toutes leurs années d'activité comme périodes travaillées se verront pénalisées au moment de la liquidation de leur retraite, puisque la réforme va diminuer le poids des périodes d'assurance non cotisées. Parmi ces personnes, il faut garder en mémoire que ce sont les femmes qui supporteront le poids de cette disposition dans la mesure où elles sont les plus nombreuses à avoir des carrières professionnelles partielles.
    M. Maxime Gremetz. Absolument !
    M. Daniel Paul. Et comme si cela ne suffisait pas, même la programmation en trois étapes de la revalorisation du minimum contributif de 3 % tous les deux ans, soit environ 9,7 % d'ici à 2008, reste inférieure à la progression moyenne des salaires escomptable : 3,2 % par an selon les hypothèses du COR.
    Ainsi, la revalorisation prévue du minimum contributif, censée garantir le niveau des plus basses retraites, est d'ores et déjà inférieure à la hausse prévisible des salaires et du SMIC. Conclusion : l'objectif escompté ne peut formellement pas être atteint.
    De même, la volonté d'offrir ce minimum de pension pour tous est formulée comme « un objectif » et non comme « une garantie ». Rien alors n'empêchera la baisse anticipée de la retraite de base et de la retraite complémentaire, qui baissera d'environ 16 % selon le chiffrage du COR. Au mieux, il faudrait fixer un minimum de retraite complémentaire complétant le minimum contributif, mais cela n'est pas encore prévu dans les dossiers du patronat. Peut-être que la négociation qui s'engagera dans les mois à venir sur les retraites complémentaires permettra de le mettre en place. Sait-on jamais !
    Fondamentalement, loin de garantir un haut niveau de pension ou même de garantir les petites retraites, votre réforme, monsieur le ministre, et notamment l'article 18, entérine la dégradation constante des pensions les plus modestes.
    M. Maxime Gremetz. Exactement !
    M. le président. La parole est à M. Alain Bocquet.
    M. Alain Bocquet. Monsieur le ministre, l'article 18 du projet de loi portant réforme des retraites renvoie à la question du minimum de prestations que la nation est prête à donner à ses administrés lorsqu'ils ont contribué à la création de richesses. Au vu de l'importance du sujet, un recadrage historique et chiffré me semble nécessaire avant d'engager une quelconque discussion.
    Actuellement, une pension minimale est composée du minimum contributif et de la retraite complémentaire dont le montant résulte d'un calcul individuel.
    Le minimum contributif, chacun le sait, a été créé en 1983. L'objectif était de permettre à des salariés ayant travaillé le temps requis pour bénéficier d'une retraite à taux plein mais ayant eu durant leur carrière professionnelle un niveau de rémunération tellement bas que le montant de la pension de leur retraite ne leur permettait pas d'échapper au seuil de pauvreté, de constituer un droit à prestations, afin d'éviter aux travailleurs pauvres de rester des retraités pauvres.
    Ce droit instituait une prestation minimale de base d'un montant qui ne devait pas être inférieur à 63 % du SMIC brut de l'époque. Il est vrai que l'absence de revalorisation importante de ce montant, équivalant aujourd'hui à 533,51 euros par mois, a conduit à sa diminution relative. Il ne représente plus aujourd'hui que 46,2 % du SMIC brut actuel et 54 % du SMIC net. Ces vingt ou dix points de différence sont particulièrement difficiles à supporter pour ces personnes qui, il faut le rappeler, ont cotisé le nombre d'annuités nécessaires pour bénéficier d'une retraite à taux plein.
    On aurait pu penser alors que votre gouvernement, plein d'engouement pour la justice sociale, pour l'équité sociale et pour la défense de bien d'autres choses encore, aurait trouvé sur ce terrain les armes utiles à la mission salvatrice qu'il s'est fixée et qu'alors, sans attendre, il se serait jeté dans la bataille afin de réparer l'injustice ! Eh bien non ! Il faut croire que le sort de 4 millions de nos concitoyens aujourd'hui bénéficiaires d'une pension de retraite équivalente au minimum contributif, soit 3 498 francs - en francs, c'est plus significatif, rapporté, par exemple, au montant d'un loyer -, n'est pas la priorité de votre réforme.
    Contrairement, en effet, à ce que vous avancez, non seulement le niveau des pensions allouées au minimum contributif ne sera pas revalorisé, mais le niveau de vie des personnes retraitées risque fort de se réduire, tout d'abord par l'application de l'allongement de la durée de cotisation pour pouvoir bénéficier d'une retraite à taux plein, et ensuite, par l'application de la règle d'indexation sur les prix, d'une part, et par la faiblesse de la revalorisation des retraites de base, d'autre part.
    Reste donc l'objectif que s'est fixé le Gouvernement d'empêcher les retraités de passer au-dessous de 85 % du SMIC. On est déjà bien loin de sa réalisation.
    M. Maxime Gremetz. Tout à fait !
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 5220 à 5226.
    L'amendement n° 5220 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 5221 est présenté par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 5222 est présenté par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 5223 est présenté par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 5224 est présenté par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 5225 est présenté par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 5226 est présenté par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 18. »
    La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
    M. Maxime Gremetz. Nos troupes sont fraîches et elles attaquent ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Claude Sandrier. Ces amendements visent à supprimer un article qui ne répond que partiellement aux attentes des salariés quant au minimum contributif. Ces derniers revendiquent en effet sa revalorisation afin d'augmenter ou au moins de garantir le niveau des basses pensions. Revaloriser le minimum de pension constitue en effet un impératif de justice, d'équité et d'efficacité sociales.
    Cela constitue un impératif de justice sociale dans la mesure où le niveau moyen des basses pensions représente aujourd'hui à peine plus de 72 à 83 % du SMIC net. Or qui peut vivre décemment avec pareille pension ?
    Revaloriser les basses pensions permet de réduire les inégalités subies tout au long de la vie professionnelle des individus.
    Cela constitue une mesure d'efficacité sociale en permettant de réconsidérer la place des retraités dans la dynamique économique de la nation et dans sa cohésion sociale. Les retraités sont devenus au fil du temps, justement parce que leur pension de retraite le leur permettait en leur fournissant les moyens de vivre décemment sans être à la charge de leurs enfants, des acteurs sociaux incontournables de la nation. Ils sont parmi les citoyens les plus actifs dans les institutions publiques et citoyennes et, de fait, ils sont condition de la cohésion sociale. Refuser de revaloriser les basses pensions, c'est plonger une partie des retraités, 4 millions au total, dans des difficultés insurmontables, et c'est par conséquent les empêcher de jouer ce rôle social important pour l'équilibre social du pays.
    Or que fait l'article 18 ? Il limite la portée de la moindre tentative de revalorisation des basses pensions. Il empêche les 4 millions de retraités au minimum contributif de bénéficier de la richesse produite par la nation. Ou mieux, il n'autorise la « revalorisation » que sous condition stricte de trimestres effectués. En conséquence, non seulement cet article divise les retraités bénéficiaires du minimum contributif mais en plus il les oppose.
    Il réduit le bénéfice de la pension, en intégrant la règle des 160 trimestres au lieu des 150 initiaux pour le calcul du minimum contributif. Dorénavant, seuls les trimestres cotisés seront pris en compte pour le calcul du niveau de pension. En conséquence, en accroissant la durée de cotisation sociale, le Gouvernement réduit la portée de sa volonté de revaloriser les basses pensions puisqu'il contribue de fait à leur réduction.
    En fin de compte, il ressort de cet article que, d'une mesure de justice annoncée en faveur des retraités et des salariés socialement les plus fragiles, on est passé à une mesure régressive qui réduit le niveau des pensions les plus basses. Il faudrait prendre garde à ce genre de pratiques législatives. Car, à force de semer la misère, on finit par récolter la colère.
    C'est la raison pour laquelle, mes chers collègues, nous vous proposons de supprimer cet article et de voter notre amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement : la réforme du minimum contributif est au coeur de la très importante revalorisation que le présent projet de loi prévoit pour les carrières entièrement effectuées avec un niveau de salaire équivalent au SMIC. Par conséquent, il apparaît surprenant que nos collègues du groupe communiste et républicain aient souhaité supprimer cet article.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il y a un peu plus d'un an, une autre majorité était au pouvoir...
    M. Maxime Gremetz. Eh oui !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... et les personnes ayant fait toute leur carrière au SMIC touchaient une retraite de l'ordre de 81 % du SMIC. Nous proposons aujourd'hui une revalorisation du minimum contributif de 9,1 % hors inflation, qui permettra, en 2008, d'atteindre un objectif de 85 % du SMIC. Je pense que cet argumentaire devrait suffire à convaincre l'Assemblée de ne pas voter l'amendement du groupe communiste. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, votre explication est un peu courte.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Courte, mais juste !
    M. Maxime Gremetz. Aujourd'hui, le minimum contributif est à 81 % du SMIC, et vous indiquez qu'il sera porté à 85 %. Mais vous ne précisez jamais si c'est net ou brut.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je vous l'ai dit : c'est net.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Net !
    M. Maxime Gremetz. L'autre fois, vous m'avez expliqué que, net ou brut, c'était pareil. Je vous ai répondu que 85 % de 6 000, ce n'est pas tout à fait la même chose pour le porte-monnaie que 85 % de 4 000. C'est simple.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Par rapport à 81 %, c'est quand même mieux !
    M. Maxime Gremetz. Oui, par rapport à tout ce qu'on veut, mais, dans la poche, il ne rentre pas la même chose.
    D'autre part, 85 % d'un SMIC net,...
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Net !
    M. Maxime Gremetz. ... c'est bien moins que 85 % d'un SMIC brut.
    M. Lionnel Luca. C'est pas net !
    M. Maxime Gremetz. On se comprend. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Selon qu'on calcule sur le brut ou sur le net, ce n'est pas tout à fait la même chose, vous le savez bien.
    M. Augustin Bonrepaux. C'est nettement différent !
    M. Maxime Gremetz. C'est très nettement différent. Il ne faut pas tromper les gens. Ce minimum contributif sera de 85 % du SMIC net au moment de la liquidation de la retraite, mais comme elle est indexée sur les prix, et non plus sur les salaires, elle perdra 12 % en quelques années. Vous ne pouvez donc pas dire, monsieur le ministre, que l'on maintient le pouvoir d'achat.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Si !
    M. Maxime Gremetz. Pas du tout. D'ailleurs, le COR le confirme. On ne peut pas dire un jour que les travaux du Conseil d'orientation sont admirables et, le lendemain, contester ses conclusions parce qu'elles ne vont pas dans le sens de vos thèses. Moi, je prends le Conseil d'orientation des retraites dans sa globalité, que ses conclusions me plaisent ou non.
    M. Alain Néri. Très bien !
    M. Maxime Gremetz. Je vous ai d'ailleurs rappelé qu'il ne fallait pas lui faire dire plus qu'il ne dit : il émet des hypothèses, travaille, auditionne des experts. Franchement, monsieur le ministre, vous ne pouvez pas soutenir une telle position.
    M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Il ne faudrait pas laisser croire à l'Assemblée que la baisse du minimum contributif serait la conséquence d'une politique menée par le précédent gouvernement.
    M. Alain Néri. C'est trop facile !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il l'a augmenté ?
    M. Pascal Terrasse. Il faut tout de même revenir à la réalité des choses. Qui a mis en place un dispositif qui a affaibli le minimum contributif ? M. Balladur, en 1993. En effet, à cette date, il était indexé sur les salaires.
    M. Denis Jacquat. Et qu'avez-vous fait après 1997 ?
    M. Pascal Terrasse. La rupture du minimum contributif, c'est donc 1993.
    M. Richard Cazenave. Ensuite, qu'est-ce qui s'est passé ?
    M. Alain Néri. On va vous l'expliquer !
    M. Pascal Terrasse. Ensuite, M. Juppé a eu des responsabilités et nous lui avons succédé. Cela dit, j'invite ceux de nos collègues qui sont nouveaux dans cet hémicycle à lire les rapports de la commission des affaires sociales sur les projets de loi de financement de la sécurité sociale. Ils s'apercevront que, ces dernières années, j'avais moi-même déposé un amendement visant à porter le minimum contributif à hauteur du minimum vieillesse. Cet amendement n'a pas été retenu car on m'a répondu, comme on l'a fait ces deux dernières années, que le minimum contributif et ses modalités devaient être modifiés dans le cadre de la réforme globale des retraites. Je crois que c'est un argument valable.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. C'est ce que nous faisons !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Vous n'avez pas lu l'article 18 !
    M. Pascal Terrasse. En réalité, il serait souhaitable...
    M. Richard Cazenave. De ne rien faire !
    M. Pascal Terrasse. ... de porter le minimum contributif à 95 % du SMIC, retraite complémentaire comprise, car sont concernés les bénéficiaires des retraites les plus faibles, qui ont travaillé et cotisé. Malheureusment, ce n'est pas le choix que vous avez fait. Nous ne pouvons que le regretter.
    M. Jean-Michel Ferrand. Qu'avez-vous fait pendant cinq ans ?
    M. Pascal Terrasse. J'imagine que vous allez encore entonner ce refrain pendant quelques années, mais vous vous apercevrez qu'il lasse et qu'il n'intéresse plus personne. S'amuser, c'est très bien, mais on est là pour travailler.
    En réalité, la question qui se pose à propos du minimum contributif, monsieur le ministre, est de savoir comment vous allez financer ce dispositif sans mettre à mal l'équilibre général du budget de l'assurance vieillesse.
    M. Jean-Luc Warsmann. C'est contradictoire !
    M. Pascal Terrasse. Je rappelle en effet que vous nous avez annoncé que le précedent dispositif concernant les carrières longues avait un coût de 1,2 milliard d'euros.
    Celui-ci, si l'on en croit les éléments qui nous ont été communiqués par vos services, coûte 600 millions d'euros : le budget général de l'assurance vieillesse étant aujourd'hui en excédent d'environ 1,5 milliard d'euros, vous allez très rapidement mettre en difficulté les caisses de l'assurance vieillesse.
    Le coût de cette mesure pour l'année prochaine est précisément de 44 millions d'euros pour l'ensemble des bénéficiaires du minimum contributif. Si, à partir du 1er janvier prochain, nous indexions le minimum contributif sur les salaires, le coût serait pratiquement identique.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 5220 à 5226.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 5234 à 5240.
    L'amendement n° 5234 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 5235 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 5236 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 5237 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 5238 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 5239 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 5240 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le 1° du I de l'article 18. »
    La parole est à M. Pierre Goldberg.
    M. Pierre Goldberg. Cet amendement vise à supprimer une disposition de l'article 18 qui ajoute à l'article L. 351-10 du code de la sécurité sociale une contrainte de terme quant à la revalorisation du montant minimum de pension. En effet, loin d'engager une revalorisation des pensions minimales de façon globale, et donc équitable, vous vous orientez vers une disposition qui ne sera appliquée qu'au 1er janvier 2005, comme le prévoit ce même article, et, surtout, qui ne sera applicable qu'aux personnes qui souhaiteront liquider alors leur retraite, et non à chaque retraité déjà en retraite.
    Cette mesure contraignante, qui limite la portée de la revalorisation, affectera dans les faits 40 % des retraités, dont principalement des femmes, qui se retrouvent aujourd'hui avec un niveau de pension largement inférieur aux fameux 85 % du SMIC net dont vous parliez à l'instant et que vous prétendez mettre en oeuvre. Il s'agit là d'une mesure purement politicienne, puisque vous prétendez rehausser le niveau des pensions sans vous engager d'aucune façon dans cette direction : rien n'est fait pour revaloriser l'existant. Les retraités qui perçoivent aujourd'hui les pensions les plus basses, alors qu'ils sont confrontés à des difficultés financières souvent inimaginables, en tout cas pour vous, se verront dans l'obligation de poursuivre leur chemin de croix.
    Et rien n'est fait non plus pour mettre en oeuvre le plus rapidement possible une véritable mesure de revalorisation des basses pensions au travers d'une revalorisation significative du minimum contributif. Peut-être l'absence de telles mesures s'explique-t-elle par l'ambition masquée du Gouvernement, qui souhaite profiter de l'aubaine que constitue la situation démographique de cette catégorie de retraités, qui est amenée à disparaître, en raison à la fois du manque de personnes et de l'augmentation du taux d'activité des femmes, mais aussi - et c'est un comble - par suite de la mise en application de diverses mesures, comme le cumul emploi retraite, qui, loin de supprimer la catégorie, vont en fait la généraliser, et permettre en conséquence l'allongement de la durée d'activité. Vous appliquez à ces retraités d'aujourd'hui et de demain les mêmes dispositions en ce qui concerne l'indexation et la durée de référence pour le calcul du montant de la pension.
    Au total, et une fois de plus, vous faites la démonstration de votre vision étriquée de l'équité, voire de l'égalité. L'équité n'est concevable, à vos yeux, que tirée vers le bas, lorsqu'elle condamne les salariés et les retraités de notre pays à la misère et, disons-le, à la galère. Il y a dans votre réforme, monsieur le ministre, une réelle cohérence globale. Mais, globalement, de sa cohérence ne sortiront pas les moyens de dépasser la situation sinistre de nos concitoyens, confrontés quotidiennement à la misère sociale. Là où nous appelons, non sans raisons, à une revalorisation des basses pensions, à un niveau de 100 % du SMIC brut, vous nous opposez la généralisation de la misère sociale pour ceux qui sont déjà les précaires du monde du travail.
    Vous comprendrez, dès lors, les motifs qui nous poussent à rejeter les dispositions contenues dans le 1° du I de cet article.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est un amendement de démontage de l'article : rejet.
    M. Maxime Gremetz. Ah non !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le président, pour que l'Assemblée soit parfaitement informée, je voudrais juste ajouter à la démonstration qui a été faite tout à l'heure par M. Gremetz sur le SMIC net et le SMIC brut, que, quand il était au pouvoir, c'était 81 % du SMIC net.
    M. Maxime Gremetz. Je n'ai jamais été au pouvoir !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Pour ce qui est de l'indexation sur les prix, cette disposition qui, à ses yeux, est tout à fait condamnable, est entrée en vigueur en 1987. Je vous laisse faire le compte des années que M. Gremetz a passées au pouvoir depuis et pendant lesquelles il aurait pu faire modifier cette disposition.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Je suis bien obligé de rétablir la vérité. Vous savez bien, monsieur Fillon, pour l'avoir dit dès le départ, que je n'ai jamais été au pouvoir et que j'ai toujours été cohérent, tenant le même langage, formulant les mêmes propositions, quand mon groupe soutenait le gouvernement et aujourd'hui. Ne vous contredisez donc pas. Vous avez une bonne image chez les gens de droite. Ils vous applaudissent volontiers. Si vous vous mettez à dire une chose et son contraire, ça ne marchera plus.
    M. le président. Je mets aux voix les amendement n°s 5234 à 5240.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 5241 à 5247.
    L'amendement n° 5241 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 5242 est présenté par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 5243 est présenté par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 5244 est présenté par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 5245 est présenté par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 5246 est présenté par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 5247 est présenté par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le 2° du I de l'article 18. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. J'avais prévu ce qu'allait dire M. le ministre. Il faut argumenter sérieusement. Il faut cent fois sur le métier remettre son ouvrage. Ces amendements s'opposent à la disposition qui tend à entériner l'allongement de la durée de cotisation prévue par le projet pour l'octroi d'une pension minimale. Cet article est élastique : il allonge la durée de cotisation et raccourcit le niveau des pensions. En général, les gouvernements évitent de manger l'omelette par les deux bouts en même temps. C'est dur à accepter, et c'est pourquoi 61 % des salariés du privé et 76 % de ceux du public sont contre.
    En effet, en remettant en cause le principe d'une pension minimale versée aux personnes ayant travaillé quarante annuités, mais ne pouvant bénéficier d'une pension suffisante compte tenu de leur salaire d'activité, cet article introduit une contrainte au versement de ce minimum contributif en le rapportant à la durée d'activité réellement effectuée par le salarié.
    Ainsi, un salarié pénalisé dans sa vie professionnelle sera de nouveau pénalisé dans sa vie de retraité. C'est la double peine. Vous défendez là une belle vision de l'équité. Une réforme des retraites digne de ce nom impliquerait que l'on prenne en considération la situation des plus démunis, parmi lesquels se trouvent en bonne place les salariés ayant subi une politique salariale régressive pendant toute leur carrière.
    Monsieur le ministre, certes, vous n'avez plus les cheveux longs, mais votre gouvernement garde les idées courtes ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Je vous avais réservé cela pour cette heure tardive.
    M. Alain Néri. C'est pédagogique !
    M. Maxime Gremetz. Je savais que cela réveillerait l'Assemblée.
    Pourtant, nous vous avons suggéré des éléments qui permettaient de formuler une véritable politique de revalorisation des basses pensions ou, si vous préférez - et je vous avoue que, pour notre part, nous préférons cela -, une politique de désagrégation des basses pensions. Elle a pour nom la sécurisation de l'emploi et de la formation. Elle est simple. Si vous voulez faire disparaître la misère sociale des retraités titulaires du minimum contributif, plutôt que de généraliser cette misère aux autres retraités, sécurisez les parcours professionnels de nos concitoyens au moyen d'une politique de l'emploi digne de ce nom. La politique de l'emploi va mal. L'INSEE prévoit encore la destruction de 60 000 emplois. Il faut moduler les cotisations vieillesse des entreprises en fonction des créations d'emploi, de l'effort de formation et de la politique salariale de chaque entreprise. La cotisation sociale patronale serait toujours assise sur les salaires versés, mais son taux serait modulé, en fonction de la part des dépenses de l'entreprise sécurisant l'emploi et la formation dans sa valeur ajoutée globale.
    M. le président. Monsieur Gremetz...
    M. Maxime Gremetz. Je fais des compliments au ministre et au président et on voudrait m'empêcher de terminer ?
    M. Alain Néri. Là, il fayote !
    M. Maxime Gremetz. Une telle modulation inciterait par définition à des changements de structure favorisant l'emploi en quantité et en qualité. Elle pourrait générer en année pleine - vous ne pouvez pas le démentir - quelque 17 milliards d'euros de recettes nouvelles pour la sécurité sociale. Mais, surtout, elle engendrerait des comportements créateurs d'emplois et une dynamique de consommation et de croissance positive pour la création de richesses du pays et donc pour les recettes de la sécurité sociale.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Là, il a dû sauter une page : on ne comprend plus rien !
    M. Maxime Gremetz. Malheureusement, c'est ce que vous ne voulez pas, parce que ces revenus sont ceux du MEDEF, des grosses fortunes, les revenus financiers, le produit des spéculations financières. C'est l'argent de vos amis. Nous, nos amis, ce sont les travailleurs.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Malgré toute l'attention qu'elle a portée à cet amendement, la commission a considéré que, dans la mesure où il ne s'agit que de supprimer une partie de l'article, elle ne pouvait y être favorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 5241 à 5247.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 5248 à 5254, déposés par Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains.
    L'amendement n° 5248 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 5249 est présenté par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 5250 est présenté par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 5251 est présenté par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 5252 est présenté par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 5253 est présenté par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 5254 est présenté par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le 3° du I de l'article 18. »
    La parole est à M. Jean-Claude Lefort.
    M. Jean-Claude Lefort. Ces amendements tendent à supprimer une disposition qui introduit une restriction dans le droit à bénéficier du minimum contributif et du minimum de pension. En effet, sous prétexte de clarifier la nature du minimum contributif, ce 3° du I de l'article 18 tente d'introduire une subordination du versement de la majoration de la prestation à un prélèvement préalable de cotisation.
    D'un point de vue formel, je me permets de rappeler que le minimum contributif est un droit, alors que, par exemple, le minimum vieillesse est une allocation. Le premier donne droit à des prestations, versées de façon universelle, tandis que le second est alloué sous certaines conditions.
    Ainsi, sont exclues du champ d'application de ce dispositif les personnes, et spécialement les femmes, ayant pris des congés pour éduquer leurs enfants - elles ne pourront bénéficier que de la bonification prévue à cet effet -, mais aussi les personnes contraintes d'arrêter de travailler pendant une période longue pour prendre en charge le mieux possible un enfant, ou un parent, handicapé, ou bien encore les personnes ayant décidé, à titre personnel, de se former pour améliorer leurs compétences et leur qualification. Bref, cette disposition exclut une frange importante de nos concitoyens du bénéfice d'un minimum de contribution, pourtant vital.
    Sur le fond, cet alinéa est bien plus problématique qu'il n'y paraît, puisqu'il remet en cause, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, l'article 1er du projet de loi, qui revendique la répartition, et donc la solidarité, comme principe de notre système de retraites. A l'instar d'une maladie qui ronge progressivement l'organisme...
    M. Pierre Lellouche. L'alcoolisme ?
    M. Jean-Claude Lefort. ... vous attaquez l'esprit même de notre système par répartition, par petites touches.
    C'est pourquoi nous ne pouvons accepter le contenu de l'article et appelons aussi vivement qu'amicalement nos collègues à voter avec nous cet amendement.
    M. Maxime Gremetz. Et nous demandons un scrutin public, pour les rappeler à l'ordre, parce qu'ils n'ont rien écouté !
    M. le président. Sur les amendements identiques n°s 5248 à 5254, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Pour reprendre les termes exacts de notre collègue Lefort, je dirai que c'est par petite touches, également, que l'article 18 est démonté par nos collègues communistes. Avec cet amendement, c'est le 3° du I de l'article 18 qu'ils proposent de supprimer. Par conséquent, pour les mêmes raisons que précédemment, la commission a rejeté cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur Accoyer, vous avez raison : vous vous répétez. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mais il vaut mieux se répéter que se contredire, ça, c'est vrai. Seulement, vous ne pouvez pas vous contenter de dire chaque fois : « C'est du démontage » ! Vous ne prenez en compte qu'une partie de nos propositions, vous êtes dogmatique. Vous ne prenez que la partie « démontage » et vous ne voyez jamais la partie « proposition ».
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Mais il n'y a pas de remontage !
    M. Maxime Gremetz. Vous n'écoutez plus, au moment du remontage !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. L'amendement est clair : il ne contient rien d'autre qu'un démontage !
    M. Maxime Gremetz. Non ! L'amendement vise à substituer à ce que vous proposez, qui est mauvais, des propositions qui correspondent à l'attente du mouvement social, des organisations syndicales, des familles, des salariés.
    Donc, monsieur le rapporteur, faites un petit effort, s'il vous plaît, pour ne pas dire et répéter toujours : démontage ! démontage ! démontage ! Ce n'est pas du bricolage, c'est un travail ! Vous l'avez vu, tous nos amendements sont argumentés. C'est un travail chiffré, y compris dans le détail. C'est un gros travail qui a été fait. Ecoutez-nous et prenez-le pour ce qu'il est. Vous nous en serez redevable un peu plus tard.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 5248 à 5254.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   147
Nombre de suffrages exprimés   147
Majorité absolue   74
Pour l'adoption   42
Contre   105

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    L'amendement n° 10809 n'est pas défendu.
    M. Pascal Terrasse. C'est dommage !
    M. le président. M. Accoyer, rapporteur, a présenté un amendement, n° 1148, ainsi rédigé :
    « A la fin du dernier alinéa du 3° du I de l'article 18, substituer aux mots : "au versement de, le mot : "à. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Maxime Gremetz. Il va nous dire que ce n'est pas du démontage.
    M. Pascal Terrasse. Qui devait défendre l'amendement de Mme Boutin ?
    M. le président. Notre collègue n'est pas là.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. L'amendement n° 1148 apporte quelque chose d'important puisqu'il s'agit de prendre en compte les cotisations qui ont été précomptées par un employeur qui n'aurait pas pu les verser.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1148.
    (L'amendement est adopté.)
    M. Maxime Gremetz. Je demande dès à présent la parole pour une explication de vote sur l'article, monsieur le président. Je préfère prendre mes précautions.
    M. le président. Sur l'article n° 18, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Alain Bocquet.
    M. Alain Bocquet. J'ai subi de fortes pressions, ce soir, pour demander la vérification du quorum. Je ne l'ai pas encore demandée, j'ai résisté. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), mais je pense que, devant l'agitation et le sommeil qui gagnent une partie de l'Assemblée (Exclamations sur les mêmes bancs), il serait heureux que cette séance se termine avec le vote de l'article 18.
    Nous avons tout de même franchi cinq articles depuis cet après-midi, ce qui est la preuve de notre bonne volonté. Il serait raisonnable d'en rester là. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Ce n'est pas eux qui président, quand même !
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour expliquer son vote.
    M. Maxime Gremetz. Nous voterons contre cet article, chacun l'a bien compris, parce qu'il est grave, dangereux, et qu'il va contribuer à une régression sociale incontestable. Je pense en particulier à ces millions de retraités qui vivent aujourd'hui dans des difficultés sans nombre et qui ont un pouvoir d'achat si bas. Je pense aussi à ces millions de gens qui sont en âge de prendre leur retraite et qui vont le faire dans les pires conditions qui soient.
    M. Maxime Gremetz. Je termine, monsieur le président. J'ai été désagréablement surpris d'apprendre que M. Juppé, que j'apprécie par ailleurs (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) pour ses convictions et le fait qu'il prend ses responsabilités, même quand elles ne lui incombent pas,...
    M. le président. Cher monsieur Gremetz, je vous prie de conclure, s'il vous plaît.
    M. Maxime Gremetz. Mais ce n'est pas une plaisanterie.
    M. Philippe Briand. Ça y ressemble !
    M. Maxime Gremetz. ... a dit sur LCI - je viens seulement de l'apprendre, sinon j'aurais réagi avant - que ce n'était pas un débat, que c'était lamentable,...
    M. Pierre Lellouche. Vous vous êtes reconnu.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur Lellouche ! Monsieur le président, retenez-le ! Je crois que mon ami Alain Bocquet a raison : la sagesse voudrait qu'on lève la séance, parce qu'ils sont intenables. Nous avons fait la démonstration que, quand on veut un vrai débat, quand on ne veut pas nous houspiller avec des procédures,... (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. A aucun moment, monsieur Gremetz, je ne vous ai houspillé avec des procédures !
    M. Maxime Gremetz. Pas aujourd'hui, monsieur le président.
    M. le président. Nous sommes aujourd'hui : à chaque jour suffit sa peine.
    M. Maxime Gremetz. Quand vous êtes là, heureusement ça ne se passe pas comme ça. C'est bien.
    M. le président. Bon, alors, maintenant, concluez.
    M. Maxime Gremetz. Quand on veut débattre et qu'il y a du répondant, nous sommes là, avec nos arguments, nos propositions, et nous ne voulons pas faire de l'obstruction. Pas du tout ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Le groupe socialiste s'abstiendra, comme je l'ai dit en intervenant sur l'article 18, car on ne peut pas priver les bénéficiaires du minimum contributif d'un gain financier énorme : quinze euros par mois. Quinze euros par mois ! Voilà l'offre que vous faites aux bénéficiaires du minimum contributif ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Derrière l'affichage et les effets médiatiques qui n'ont qu'un temps, les bénéficiaires se rendront compte que cette proposition est en réalité un faux nez. Je l'ai dit il y a quelques instants, et nous ne pouvons que le regretter.
    Enfin, j'aurais souhaité que l'amendement n° 10809 de Mme Boutin puisse être défendu, tant son exposé sommaire est explicite, notamment s'agissant des périodes qui ne seront plus prises en compte dans le cadre du minimum contributif pour les femmes ayant élevé trois enfants. Dommage que Mme Boutin ne soit pas là pour défendre son amendement. Depuis maintenant plusieurs semaines, nous disons que ce projet est globalement insatisfaisant, notamment pour les femmes. Et l'article 18 est un pied de nez aux femmes. Nous ne pouvons que le déplorer.
    M. Jean-Claude Lefort. C'est vrai !
    M. Pascal Terrasse. Nous regrettons aussi que la délégation aux droits des femmes n'ait pas pu s'exprimer sur ce sujet.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je vais mettre aux voix l'article 18, modifié par l'amendement n° 1148.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Il y en a qui trichent, à gauche !
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   153
Nombre de suffrages exprimés   126
Majorité absolue   64
Pour l'adoption   124
Contre   2

    L'Assemblée nationale a adopté.

Article 19

    M. le président. « Art. 19. - I. - A la sous-section 4 de la section 1 du chapitre Ier du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale, il est ajouté un paragraphe 5 rédigé comme suit :

« Paragraphe 5
« Revalorisation des pensions de vieillesse

    « Art. L. 161-23. - Le coefficient annuel de revalorisation des pensions de vieillesse servies par le régime général et les régimes alignés sur lui est fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, conformément à l'évolution prévisionnelle des prix à la consommation hors les prix du tabac prévue dans le rapport économique, social et financier annexé à la loi de finances pour l'année considérée.
    « Si l'évolution constatée des prix à la consommation hors les prix du tabac, mentionnée dans le rapport économique, social et financier annexé à la loi de finances pour l'année suivante, est différente de celle qui avait été initialement prévue, il est procédé, dans des conditions fixées par voie réglementaire, à un ajustement destiné à assurer, pour ladite année suivante, une revalorisation conforme à ce constat.
    « Par dérogation aux dispositions du premier alinéa et sur proposition d'une conférence présidée par le ministre chargé de la sécurité sociale et réunissant les organisations syndicales et professionnelles représentatives au plan national, dont les modalités d'organisation sont fixées par décret, une correction au taux de revalorisation de l'année suivante peut être apportée, en fonction de la situation financière des régimes d'assurance vieillesse et de l'évolution de la croissance économique, par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. »
    « II. - L'article L. 351-11 du code de la sécurité sociale est rédigé comme suit :
    « Art. L. 351-11. - Les cotisations et salaires servant de base au calcul des pensions sont revalorisés chaque année par application du coefficient annuel de revalorisation mentionné à l'article L. 161-23. »
    « III. - Le chapitre VI du titre Ier du livre VIII du code de la sécurité sociale est complété par un article L. 816-2 ainsi rédigé :
    « Art. L. 816-2. - Les montants des allocations définies au présent titre et des plafonds de ressources prévus pour leur attribution sont revalorisés aux mêmes dates et selon les mêmes conditions que celles prévues pour les pensions de vieillesse de base par l'article L. 161-23-1. »
    « IV. - Les dispositions du présent article sont applicables à compter du 1er janvier 2004. »
    Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.
    La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. L'article 19 a pour objectif de reconsidérer les dispositifs en matière de revalorisation des pensions de vieillesse. Nous aurions souhaité que ces revalorisations se fassent sur la base d'un débat, ou en tout cas, de l'organisation d'une commission, qui pourrait se réunir annuellement, à l'instar de ce qui existe pour les salaires. C'est ainsi que nous avons proposé la création d'une conférence annuelle des retraites, dont l'objectif serait de vérifier, chaque année, l'évolution de l'indexation sur les prix. Nous regrettons donc que ce projet de loi ne mette pas en place une conférence annuelle des retraites... (Brouhaha.) Monsieur le président, c'est très pénible de parler, parce que ça parle dans tous les sens. C'est un peu pénible.
    M. Maxime Gremetz. Tu vois que c'est désagréable ! Je l'ai toujours dit. Et ça ne vient pas de nous !
    M. Pascal Terrasse. Il aurait été préférable, disais-je, plutôt que de renvoyer à une clause de revoyure tous les trois ans, que l'article 19 prévoie une instance dans laquelle les organisations syndicales et patronales, les représentants des régimes d'assurance vieillesse, ainsi que les associations de retraités - je pense en particulier à la Confédération française des retraités - puissent examiner tous les ans l'évolution des pensions de retraite, lors de cette conférence annuelle des retraites. Tel n'a pas été le choix du Gouvernement, qui préfère, je le répète, renvoyer à une clause de revoyure tous les trois ans.
    Par ailleurs, j'ai une question à vous poser, monsieur le ministre. Tout au long de la discussion du précédent article, vous avez affirmé que vous alliez revaloriser - ce que nous contestons - le minimum contributif. Comme vous le savez, le minimum vieillesse est attribué à celles et ceux qui n'ont malheureusement pas une durée de cotisation suffisante, les « Rmistes de la retraite », qui n'ont vraiment que le minimum pour vivre. Jusqu'alors, ce minimum vieillesse bénéficiait tous les ans d'un coup de pouce traditionnel, qui était supérieur à ce qui était fait pour les autres régimes. Or, à la lecture des excellents documents que vous m'avez communiqués, monsieur le ministre, je découvre, au détour d'un alinéa sur cet article 19, qu'à présent le minimum vieillesse, tenez-vous bien, « n'évoluera plus comme par le passé », c'est-à-dire qu'en réalité, ce minimum social, qui évoluait comme l'ensemble des minima sociaux, sera à présent indexé sur les prix.
    Je trouve que cela n'est pas très correct à l'égard de celles et ceux qui ont des revenus très faibles. Pour les deux raisons que je viens d'évoquer, le groupe socialiste ne votera pas l'article 19.
    M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. Actuellement, il n'y a plus de règles s'appliquant à la revalorisation des pensions. Celle-ci est déterminée chaque année par le projet de loi de financement de la sécurité sociale, ce qui n'est plus acceptable, car les retraités n'ont aucune visibilité sur l'évolution de leur retraite.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Très juste !
    M. Denis Jacquat. Par cet article 19, une règle claire est établie, qui garantit le pouvoir d'achat. C'est celle de l'indexation des pensions sur les prix. Au moins tous les trois ans, une négociation entre le Gouvernement et les partenaires sociaux pourra conduire ces derniers à faire des propositions sur l'évolution des pensions, en tenant compte de la santé financière des régimes de retraites et de la croissance.
    C'est vrai qu'il existe d'autres solutions, mais celle-ci, nous sommes sûrs de la tenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
    M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
    M. Daniel Paul. Monsieur le ministre, l'article 19 est bel et bien la démonstration que votre réforme n'est ni équitable ni juste.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Oh !
    M. Daniel Paul. C'est vrai...
    M. Maxime Gremetz. Ni équitable ni juste !
    M. Daniel Paul. ... et nous en faisons d'ailleurs la démonstration tous les jours depuis le début de notre discussion. En effet, par l'allongement de la durée de cotisation et la baisse des niveaux de pension, ce sont les salariés, comme nous l'avons dit à plusieurs reprises, qui supporteront 91 % de l'effort financier de la réforme.
    M. Maxime Gremetz. Il ne faut pas l'oublier, ça !
    M. Daniel Paul. Les entreprises se trouvent quant à elles largement exonérées. Aucune retraite ne sera inférieure à 85 % du SMIC, dites-vous, mais comme nous l'avons montré tout à l'heure, c'est faux. Il n'y aura rien de changé pour les quatre millions de retraités qui perçoivent déjà le minimum de pension.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Comment peut-on dire des choses pareilles ?
    M. Daniel Paul. Le niveau de toutes les retraites continuera de fondre en raison de leur indexation sur l'évolution des prix, et non sur les salaires, avec cet article qui s'inscrit dans la droite ligne de la réforme Balladur. Ainsi, un smicard ne touchera plus que 65 % après quinze ans de retraite.
    « La retraite par répartition est sauvegardée », affirmez-vous. C'est faux. Vous introduisez deux nouvelles dispositions pour « compenser » la baisse programmée, de 20 % à 30 %, du niveau des retraites : un dispositif d'épargne-retraite pour ceux qui pourront se le payer - c'est l'introduction de la capitalisation au détriment de nos droits solidaires - et la possibilité de cumuler un emploi et une retraite pour les plus pauvres - c'est l'invention des « emplois vieux ».
    « Le droit à la retraite à soixante ans est préservé », poursuivez-vous. C'est un leurre. Avec les nouvelles règles que vous fixez - quarante-deux ans de cotisation, pour l'instant, et le système de bonus-malus -, l'alternative sera, soit de partir avec une retraite largement amputée, soit de travailler bien au-delà de soixante ans. Dans ces conditions, les femmes salariées, premières victimes de la précarité et des bas salaires, verront leurs pensions laminées.
    Il suffira de « travailler simplement un peu plus longtemps pour avoir la même retraite », clamez-vous. Cela est particulièrement inexact pour les salariés du privé. Pour des millions d'entre eux, la première préoccupation c'est d'avoir un vrai travail et de le conserver. Quarante-deux ans de travail pour avoir la retraite complète, ils savent que c'est inaccessible.
    Jusqu'en 1993, le calcul de leur retraite était fondé sur les dix meilleures années de salaire. Après le décret Balladur, aux dix meilleures années se sont déjà ajoutées dix plus mauvaises. Grâce à vous, qui avez choisi de conserver ce décret en l'état, en 2008, ce sera cette fois quinze mauvaises années qui viendront « foudroyer » les dix meilleures. Donc, même en travaillant plus longtemps, le niveau des retraites va continuer à baisser dans des proportions importantes.
    Trop d'attentes sont insatisfaites. Alors qu'il faudrait des mesures spécifiques pour plusieurs catégories de salariés, comme ceux exerçant des métiers pénibles, dangereux, insalubres ou astreignants, dont l'espérance de vie est d'ailleurs inférieure à la moyenne, votre projet fait l'impasse. Alors qu'il faudrait permettre à ceux qui ont commencé à travailler jeunes et qui ont cotisé quarante ans de partir avant soixante ans, vos mesures excluent la grande majorité des intéressés.
    Monsieur le ministre, cet article 19 est à l'image de votre réforme tout entière : inacceptable. Nous le refusons.
    M. Maxime Gremetz. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Alain Néri.
    M. Alain Néri. Le Gouvernement voudrait nous faire croire, avec cet article 19, que le pouvoir d'achat des retraites sera garanti. Les retraités sont, il est vrai, très attachés à la garantie de leur pouvoir d'achat. Or, tout au long de ce texte, nous constatons qu'il n'en est pas question. Dans un premier temps, vous prétendez faire un effort considérable en portant le montant garanti des retraites à 85 % du SMIC, ce qui représente une augmentation de 3 % par rapport à ce qu'ils touchent aujourd'hui. Mais, monsieur le ministre, c'est vous-même qui nous l'avez dit, il ne s'agit nullement d'une garantie, seulement d'un objectif que vous cherchez à atteindre, et nous ne sommes absolument pas certains que vous y parviendrez. Les retraités non plus n'en sont pas sûrs, c'est même leur plus grande inquiétude.
    Si vous vouliez la garantie du pouvoir d'achat, vous seriez bien inspirés d'accepter la proposition qui vous est faite par le groupe socialiste de créer une commission nationale de la négociation des retraites, qui se réunirait une fois par an pour vérifier si le pouvoir d'achat des retraites est mainteu à son niveau. Puisque vous dites vouloir tenir cet objectif, vous ne prendriez aucun risque à créer une telle commission.
    En outre, vous parlez toujours de simplification. Une mesure simple pourrait être décidée, qui permettrait à la population de bien comprendre de quoi on parle quand on parle du pouvoir d'achat : il suffirait d'augmenter les retraites en même temps que l'on « booste », plus ou moins, le SMIC. Cela permetrait de comparer le pouvoir d'achat du SMIC et le pouvoir d'achat des retraites, ces deux ressources essentielles pour les plus modestes. Ce serait par ailleurs favorable à l'économie française : lorsque l'on augmente le SMIC et le pouvoir d'achat des retraites, on pousse la consommation des ménages, et donc on aide au développement économique du pays.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Goldberg.
    M. Pierre Goldberg. Monsieur le ministre, nous abordons, avec cet article, un aspect crucial de votre projet, puisque l'article 19 fige dans la loi un principe terrible de la réforme Balladur : l'indexation des pensions sur les prix.
    Avec cet article, vous portez encore une fois un coup fatal au niveau des pensions. Les réformes Balladur de 1993 et les accords de 1996 dans les régimes complémentaires amputent gravement les retraites des salariés du privé et creuse l'écart avec les régimes des fonctionnaires notamment.
    Présenter les fonctionnaires comme des privilégiés et réclamer l'alignement de leurs régimes de retraite sur ceux des salariés du privé relève d'une belle hypocrisie. En effet, les divers régimes présentaient, il y a dix ans, des avantages globalement comparables. Si l'écart se creuse, c'est sous l'effet de mesures prises en 1993 - je le répète - par le gouvernement Balladur. La tactique était claire : d'abord, s'attaquer aux régimes du privé ; ensuite, matraquer l'opinion de discours scandalisés sur les « avantages » des régimes du public, pour les réformer à leur tour, bien sûr, vers le bas.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Oh !
    M. Pierre Goldberg. Le vrai scandale se situe donc dans cette réforme de 1993, qui a véritablement programmé l'appauvrissement des retraités relevant du régime général. Les mesures adoptées constituaient une vraie bombe à retardement dont les effets dévastateurs ne font que commencer et joueront pleinement vers 2020.
    La réforme s'est attaquée au montant de la retraite, en modifiant le mode de calcul. Auparavant, on prenait comme référence les dix meilleures années de la carrière. Mois pas mois, on « actualisait » ces salaires en fonction de l'évolution des salaires. On faisait une moyenne. La pension versée correspondait à 50 % de cette moyenne. Après Balladur, l'« actualisation » est indexée non plus sur les salaires, mais sur les prix, ce qui est nettement moins favorable puisque les prix évoluent moins vite que les salaires.
    Par ailleurs, la période de référence passe progressivement de dix ans aux vingt-cinq meilleures années. Or, plus on élargit la fourchette, plus on fait entrer dans la moyenne des années moins bonnes de la carrière, voire des années de chômage. Le montant de la retraite s'en trouve considérablement abaissé.
    Les salariés les plus précaires sont les plus pénalisés. Cette mesure s'appliquant progressivement, le calcul se fait, par exemple, cette année, sur les vingt meilleures années. La génération de 1948, qui liquidera sa retraite en 2008, sera la première pour laquelle on prendra en compte les ving-cinq meilleures années. L'impact est énorme. Depuis 1993, le taux de remplacement, c'est-à-dire le rapport entre la pension et le dernier salaire de l'assuré, ne cesse de diminuer. Selon le COR, il pourrait « perdre une douzaine de points entre 1994 et 2010 ».
    Enfin, une fois la retraite liquidée, celle-ci n'est plus revalorisée chaque année en fonction des salaires, mais des prix.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est faux !
    M. Pierre Goldberg. Cela ne concerne que le régime de base. Mais du côté des régimes de retraite complémentaires, ARRCO et AGIRC, les droits ont aussi été réduits, par un accord signé en 1996 pour cinq ans. Dans ces régimes, les cotisations versées par le salarié servent à acheter des « points » qui, au moment de la liquidation de la retraite, sont convertis en montants de pension. Les accords ont augmenté le prix d'achat du point de 3,5 % à l'ARRCO et de 4 % à l'AGIRC. Par ailleurs, la valeur du point est indexée sur les prix et non plus sur les salaires.
    On peut dire que la chute de ces retraites est de l'ordre de 20 %.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Ça suffit, monsieur le président. On a compris ce qu'il voulait dire !
    M. Pierre Goldberg. Ces chiffres expriment une réalité : le « décrochage » programmé du niveau de vie des retraités par rapport à celui des salariés, et un appauvrissement des « anciens ». Au début des années 1970, le taux de pauvreté des retraités frôlait les 30 %. Les améliorations des paramètres des régimes de retraite ont fait chuter ce taux à moins de 5 % aujourd'hui. C'est cet acquis récent que remettent en cause les réformes des années 1990.
    Nous avons fait d'autres propositions pour déprogrammer cette paupérisation, au lieu de l'élargir aux fonctionnaires et aux agents d'entreprises publiques au nom de l'équité, et nous voterons contre l'article 19.
    M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

DÉPÔT D'UN RAPPORT

    M. le président. J'ai reçu, le 24 juin 2003, de M. Alain Venot, un rapport, n° 963, fait au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, sur le projet de loi, adopté avec modifications par le Sénat en deuxième lecture, relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages.

3

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Aujourd'hui, à quinze heures, première séance publique :
    Questions au Gouvernement ;
    Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (n° 885), portant réforme des retraites :
    M. Bernard Accoyer, rapporteur, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport n° 898),
    M. François Calvet, rapporteur pour avis, au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (avis n° 895),
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (avis n° 899),
    Mme Claude Greff, rapporteure, au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes (rapport d'information n° 892).
    A vingt et une heures trente, deuxième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la première séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée, le mercredi 25 juin 2003, à une heure cinquante.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexes au procès-verbal
de la 3e séance
du mardi 24 juin 2003
SCRUTIN (n° 229)


sur l'amendement n° 11230 à l'article 16 du projet de loi portant réforme des retraites (fixation par décret des conditions de prise en compte partiel du service national dans la période de cotisation au système d'assurance vieillesse).

Nombre de votants

230


Nombre de suffrages exprimés

199


Majorité absolue

100


Pour l'adoption

185


Contre

14

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe UMP (364) :
    Pour : 182 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 1. - M. Gilles Bourdouleix.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Abstentions : 31 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Pour : 3 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Contre : 12 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12) :
    Contre : 1. - M. Emile Zuccarelli.

Mise au point au sujet du présent scrutin
(Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)

    M. Emile Zuccarelli, qui était présent au moment du scrutin, a fait savoir qu'il avait voulu « s'abstenir volontairement ».

SCRUTIN (n° 230)


sur l'amendement n° 18 de la commission des finances et les amendements n°s 1691 à 1839 de Mme Adam et des membres du groupe socialiste après l'article 16 du projet de loi portant réforme des retraites (engagement d'une négociation par les partenaires sociaux gestionnaires des régimes complémentaires de retraite en vue de l'ouverture de droits à pension pour les assurés n'ayant pas atteint l'âge de 60 ans).

Nombre de votants

269


Nombre de suffrages exprimés

264


Majorité absolue

133


Pour l'adoption

251


Contre

13

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe UMP (364) :
    Pour : 176 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 13. - MM. Alfred Almont, Philippe Auberger, Yves Bur, Henri Cuq, Dominique Dord, Christian Estrosi, Yannick Favennec, Claude Gatignol, Jacques Godfrain, Jacques Masdeu-Arus, Jean-Marc Nesme, Yves Nicolin et Mme Juliana Rimane.
    Abstentions : 5. - MM. François Goulard, Jean Grenet, Alain Moyne-Bressand, Jean-Pierre Nicolas et Hervé Novelli.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 57 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Pour : 3 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 14 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12) :
    Pour : 1. - M. Emile Zuccarelli.

Mises au point au sujet du présent scrutin
(Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)

    MM. Alfred Almont, Philippe Auberger, Yves Bur, Henri Cuq, Dominique Dord, Christian Estrosi, Yannick Favennec, Jacques Godfrain, Jacques Masdeu-Arus, Jean-Marc Nesme, Yves Nicolin et Mme Juliana Rimane, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote, ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « pour ».

SCRUTIN (n° 231)


sur le sous-amendement n° 11231 de M. Bertrand à l'amendement n° 19 de la commission des finances après l'article 16 du projet de loi portant réforme des retraites (négociation triennale de branche relative aux conditions de travail).

Nombre de votants

164


Nombre de suffrages exprimés

164


Majorité absolue

83


Pour l'adoption

163


Contre

1

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe UMP (364) :
    Pour : 150 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 1. - M. Jacques Godfrain.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 1 membre du groupe, présent ou ayant délégué son droit de vote.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Pour : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 10 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

Mise au point au sujet du présent scrutin
(Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)

    M. Jacques Godfrain, qui était présent au moment du scrutin, a fait savoir qu'il avait voulu voter « pour ».

SCRUTIN (n° 232)


sur le sous-amendement n° 11232 de M. Bertrand à l'amendement n° 19 de la commission des finances après l'article 16 du projet de loi portant réforme des retraites (introduction de la réduction de l'espérance de vie, des travaux dangereux et des tensions au travail dans la négociation collective de branche sur les travaux pénibles dans les deux ans de la publication de la loi).

Nombre de votants

173


Nombre de suffrages exprimés

166


Majorité absolue

84


Pour l'adoption

166


Contre

0

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe UMP (364) :
    Pour : 150 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Abstentions : 4. - MM. François Goulard, Jean Grenet, Jean-Pierre Nicolas et Hervé Novelli.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 2. - MM. André Vallini et Alain Vidalies.
    Abstentions : 3 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Pour : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 12 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

SCRUTIN (n° 233)


sur le sous-amendement n° 11236 de M. Desallangre à l'amendement n° 19 de la commission des finances après l'article 16 du projet de loi portant réforme des retraites (examen par les parlementaires des conventions et accords collectifs relatifs aux mécanismes de cessation d'activité).

Nombre de votants

177


Nombre de suffrages exprimés

174


Majorité absolue

88


Pour l'adoption

21


Contre

153

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe UMP (364) :
    Pour : 2. - MM. Guy Geoffroy et Alain Gest.
    Contre : 151 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 7 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Abstentions : 3. - Mme Martine Carrillon-Couvreur, MM. David Habib et Jean-Pierre Kucheida.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Contre : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 12 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

Mises au point au sujet du présent scrutin
(Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)

    MM. Guy Geoffroy et Alain Gest, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote, ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « contre ».

SCRUTIN (n° 234)


sur l'amendement n° 19 de la commission des finances après l'article 16 du projet de loi portant réforme des retraites (négociation de branche sur les conditions de travail des salariés expérimentés, la prise en compte de la gestion prévisionnelle des emplois et le développement des compétences ainsi que sur les conditions particulières de cessation d'activité des salariés ayant accompli des travaux pénibles).

Nombre de votants

181


Nombre de suffrages exprimés

176


Majorité absolue

89


Pour l'adoption

174


Contre

2

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe UMP (364) :
    Pour : 156 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 8 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 2. - M. Henri Nayrou et Mme Odile Saugues.
    Abstentions : 5. - Mme Martine Carrillon-Couvreur, MM. David Habib, Jean-Pierre Kucheida, Didier Migaud et Mme Hélène Mignon.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Pour : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 8 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

SCRUTIN (n° 235)


sur l'article 17 du projet de loi portant réforme des retraites (majoration de  pension pour les périodes cotisées après 60 ans au-delà de la durée nécessaire pour bénéficier de la retraite à taux plein).

Nombre de votants

200


Nombre de suffrages exprimés

200


Majorité absolue

101


Pour l'adoption

149


Contre

51

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe UMP (364) :
    Pour : 148 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Contre : 37 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Pour : 1 membre du groupe, présent ou ayant délégué son droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Contre : 13 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12) :
    Contre : 1. - M. Emile Zuccarelli.

SCRUTIN (n° 236)


sur l'amendement n° 5248 de Mme Buffet et les amendements n°s 5249 à 5254 des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains à l'article 18 du projet de loi portant réforme des retraites (majoration du montant minimum de retraite).

Nombre de votants

147


Nombre de suffrages exprimés

147


Majorité absolue

74


Pour l'adoption

42


Contre

105

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe UMP (364) :
    Pour : 7. - MM. Paul-Henri Cugnenc, Olivier Dassault, Mme Claude Greff, MM. Gérard Grignon, Mansour Kamardine, Daniel Poulou et Jean-François Régère.
    Contre : 103 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 25 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Contre : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 10 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

Mises au point au sujet du présent scrutin
(Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)

    Mme Claude Greff et M. Gérard Grignon, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote, ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « contre ».

SCRUTIN (n° 237)


sur l'article 18 du projet de loi portant réforme des retraites (majoration de la retraite minimum au titre des périodes cotisées).

Nombre de votants

153


Nombre de suffrages exprimés

126


Majorité absolue

64


Pour l'adoption

124


Contre

2

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe UMP (364) :
    Pour : 122 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Contre : 2. - Mme Marylise Lebranchu et M. Gilbert Le Bris.
    Abstentions : 16 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Pour : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Abstentions : 11 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).