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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU VENDREDI 14 NOVEMBRE 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du jeudi 13 novembre 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC

1.  Loi de finances pour 2004 (deuxième partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi «...».

ÉCONOMIE, FINANCES ET INDUSTRIE

M. Daniel Garrigue, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les charges communes.
M. Camille de Rocca Serra, rapporteur spécial de la commission des finances, pour le commerce extérieur.
Mme Geneviève Perrin-Gaillard, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, pour le commerce extérieur.

Rappel au règlement «...»

MM. Jean-Claude Lenoir, le président.

Reprise de la discussion «...»

Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, suppléant M. Jean-Paul Bacquet, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, pour le commerce extérieur.
M. Hervé Novelli, rapporteur spécial de la commission des finances, pour l'industrie.
M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour l'industrie.
M. Alain Joyandet, rapporteur spécial de la commission des finances, pour La Poste et les télécommunications.
Mme Catherine Vautrin, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, pour La Poste et les télécommunications.
M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les services financiers et le budget annexe des Monnaies et médailles.
M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial de la commission des finances, pour le Trésor et les entreprises publiques.
MM.
François-Michel Gonnot,
René Dosière,
Jean Dionis du Séjour,
Daniel Paul,
Nicolas Forissier,
Christian Bataille,
Claude Gatignol,
Paul Giacobbi,
Marc Reymann,
François Brottes,
Alain Gouriou.

Suspension et reprise de la séance «...»

M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.

PRÉSIDENCE DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE

M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie.
Réponses de MM. les ministres et de Mme la ministre aux questions de : MM. Jean-Louis Christ, Pierre Micaux, Bernard Carayon, Jean Dionis du Séjour, Daniel Paul, Frédéric Dutoit, Mme Muguette Jacquaint.

Charges communes
Etat B
Titre Ier. - Adoption «...»
Titre II «...»

Amendement n° 185 de M. Dosière : MM. René Dosière, Daniel Garrigue, rapporteur spécial ; le ministre délégué au budget, Eric Raoult. - Retrait.
Amendement n° 186 de M. Dosière : MM. René Dosière, Daniel Garrigue, rapporteur spécial ; le ministre délégué au budget. - Retrait.
Adoption du titre II.

Titre III «...»

Amendement n° 101 de la commission des finances : MM. Daniel Garrigue, rapporteur spécial ; Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances ; le ministre délégué au budget, Bertho Audifax, Mme Béatrice Vernaudon, MM. René-Paul Victoria, Eric Raoult. - Rejet de l'amendement n° 101 rectifié.
Adoption du titre III.

Titre IV «...»

Amendement n° 182 du Gouvernement : MM. le ministre délégué au budget, Daniel Garrigue, rapporteur spécial. - Adoption.
Adoption du titre IV modifié.

Etat C
Titre VI. - Adoption «...»

Les crédits inscrits à la ligne Economie, finances et industrie seront mis aux voix à la suite de l'examen des crédits des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat.

Budget annexe des Monnaies et médailles
Articles 48 et 49. - Adoptions «...»
Article 50 «...»

Amendement n° 206 du Gouvernement : MM. le ministre délégué au budget, Michel Diefenbacher, rapporteur spécial. - Le vote sur cet amendement aura lieu lors de l'examen de l'article 50.

Article 52 «...»

Amendement n° 207 du Gouvernement : MM. le ministre délégué au budget, Michel Diefenbacher, rapporteur spécial ; Claude Gatignol. - Adoption.
Amendement n° 108 de la commission des finances : M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial. - Retrait.
Adoption de l'article 52 modifié.

Après l'article 74 «...»

Amendement n° 183 du Gouvernement : Mme la ministre, M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial. - Adoption.

Après l'article 76 «...»

Amendement n° 27 du Gouvernement : Mme la ministre, MM. Hervé Novelli, rapporteur spécial ; Claude Gatignol. - Adoption.
Renvoi de la suite de la discussion budgétaire à la prochaine séance.
2.  Retrait d'un rapport «...».
3.  Dépôt de rapports «...».
4.  Dépôt d'un avis «...».
5.  Dépôt d'un rapport d'information «...».
6.  Dépôt d'un projet de loi adopté par le Sénat «...».
7.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,

vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

LOI DE FINANCES POUR 2004

DEUXIÈME PARTIE
Suite de la discussion d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004 (n°s 1093, 1110).

ÉCONOMIE, FINANCES ET INDUSTRIE

    M. le président. Nous abordons la discussion des crédits du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, concernant l'économie et les finances.
    La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour les charges communes.
    M. Daniel Garrigue, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour les charges communes. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, mes chers collègues, le budget des charges communes, c'est un peu la logistique du budget de l'Etat. C'en est même un peu, oserai-je dire, les « tuyauteries ». En tout cas c'est un budget assez complexe à présenter. Ses contours sont mouvants. En effet, si l'on considère les crédits bruts, 120,4 milliards d'euros, il représente 34,5 % des crédits inscrits au budget de l'Etat. Si l'on déduit les remboursements et dégrèvements, il en représente près de 20 % et si l'on tient compte de l'exécution - puisque ce budget récupère en cours d'année les dépenses de pensions inscrites sur un certain nombre d'autres - c'est en réalité 30 % des dépenses nettes de l'Etat.
    Au regard de la LOLF, je ne dirai pas que c'est un budget en sursis, mais un budget dont la physionomie est appelée à évoluer. C'est d'ailleurs sur ce budget que vous avez réalisé le premier effort d'application de la loi organique puisque tout ce qui concerne la gestion de la dette publique et de la trésorerie de l'Etat a été présenté dès 2002 sous forme de « programmes ». Mais, je le répète, il est vraisemblable que, dans les années à venir, ce budget évoluera considérablement.
    En application de la LOLF, la charge de la dette fera l'objet d'un compte spécial, retraçant les charges d'intérêts et les charges et produits liés à la gestion active de la dette, notamment les swaps de taux d'intérêt. Les pensions de retraite et charges accessoires feront également l'objet d'un compte spécial. Un certain nombre d'autres masses de crédits feront l'objet de programmes spécifiques. C'est le cas des garanties, des dégrèvements et remboursements. Ce sera aussi le cas des dotations des pouvoirs publics qui feront l'objet de différents programmes regroupés au sein d'une mission unique. Je ne sais pas s'il existera encore demain un budget des charges communes, mais si tel est le cas, sa présentation sera profondément modifiée.
    Ce budget recouvre trois grandes catégories de dépenses : la charge de la dette, pour 34 %, les remboursements et dégrèvements, pour une part considérable, 53,4 %, et les crédits relatifs aux dépenses de personnels, pour 9 %.
    Concernant la charge de la dette, qui est sans doute la partie la plus importante de ce budget des charges communes, j'insisterai sur trois points.
    Je rappellerai d'abord que la dette résulte, pour l'essentiel, des déficits antérieurs. De ce point de vue, les études et analyses associées aux prévisions du mois d'octobre de la Commission européenne ont confirmé ce que l'on avait déjà souligné l'an dernier, à savoir que, à la différence de ses partenaires, la France n'a pas suffisamment réduit son déficit structurel pendant les années de forte croissance, d'où la remontée rapide de ce déficit en 2001, dès que la croissance s'est ralentie, et la difficulté, malgré vos efforts, à faire reculer ce déficit tant que la croissance n'est pas complètement revenue. C'est sans doute un des éléments qui expliquent la proposition de recommandation présentée par la Commission au Conseil, invitant à repousser de 2004 à 2005 la date butoir pour le retour de notre déficit au-dessous du seuil des 3 % du produit intérieur brut.
    Ma deuxième remarque concerne la dette publique elle-même. Elle dépasse le seuil des 60 % du PIB en 2003. Relativisons son poids : nous ne sommes pas les plus mauvais élèves en Europe, puisque chez certains de nos partenaires le déficit représente aujourd'hui plus de 100 % du PIB.
    Ce qui est plus inquiétant, c'est que, après avoir tenu une position plutôt rigoureuse dans ce domaine, avec une avance de l'ordre de 20 % sur la moyenne des pays de l'Union européenne, nous n'avons plus aujourd'hui qu'une avance d'environ 10 %.
    La France et l'Allemagne, qui sont dans une situation assez semblable, devront donc, sans doute, dans les années à venir, faire des efforts comparables à ceux qu'ont réalisés au cours des années 1997-2002 des pays comme l'Irlande, l'Espagne ou le Royaume-Uni, qui ont su profiter de la forte croissance et réduire considérablement le poids de leur dette - ce que, malheureusement, les gouvernements d'alors n'ont pas su faire en France.
    Il est un troisième élément qu'il convient de souligner, c'est l'évolution même de la charge de la dette. En effet, l'année 2003 a été marquée par des événements exceptionnels. En 2002, la charge de la dette s'élevait à 37,9 milliards d'euros ; elle était estimée, dans la loi de finances initiale pour 2003, à 38,1 milliards, l'estimation révisée la situant à environ 37,4 milliards - c'est la conséquence de la très forte baisse des taux d'intérêt que nous avons connue au cours de l'année ; si bien que, dans la loi de finances initiale pour 2004, la progression estimée est de 0,6 %, ce qui est très faible par rapport à la tendance observée depuis des années mais, si on rapporte cette progression à l'estimation révisée, le taux de progression est de 2,5 %, qui est le taux moyen d'évolution de la charge de la dette depuis un certain nombre d'années, et devrait être son taux tendanciel.
    Les objectifs de gestion de la dette publique restent les mêmes que l'an dernier. En particulier, la stratégie de diminution de la durée de vie moyenne de la dette sera poursuivie, ce qui a l'avantage de permettre de profiter dans de bien meilleures conditions des opportunités qu'offrent les marchés financiers. Il faut donc se féliciter de cette action qui a été menée par l'agence France-Trésor.
    J'apporterai également trois précisions de moindre importance. Nous avions voté, l'an dernier, la possibilité pour l'agence France-Trésor d'emprunter en devises sur les marchés financiers. Dans le contexte actuel, elle n'a pas été utilisée. Par ailleurs, la possibilité d'engager un programme de swap de taux d'intérêt avait été lancée en juillet 2002, mais avait été interrompue dès septembre, et n'a pas, jusqu'ici, été reprise, là encore, parce que les conditions des marchés financiers ne le permettent pas.
    Un autre élément intéressant, enfin, est lié à l'article 61-11 du projet de loi de finances qui, pour faciliter la gestion au jour le jour de l'agence France-Trésor, oblige désormais les collectivités locales et les établissements publics à annoncer, avec un jour de préavis, les mouvements de fonds supérieurs à un million d'euros. Rappelons que, chaque soir, l'agence France-Trésor - c'est-à-dire l'Etat - doit se trouver créditeur vis-à-vis de la Banque de France.
    J'évoquerai maintenant la question des remboursements et dégrèvements. Ils s'élèveront en 2004 à 64,2 milliards d'euros - ce n'est qu'une estimation, bien sûr - montant en progression de 1,2 % par rapport à 2003, année où l'on a connu une progression légèrement plus forte qu'à l'accoutumée, et pour plusieurs raisons. D'abord, les sociétés ont éprouvé quelque difficulté à ajuster rapidement - dès 2002 - le niveau de leurs acomptes d'impôt sur les sociétés au ralentissement de l'activité économique au cours de cette même année 2002. En matière de TVA, la progression est de 4,1 %. On sait qu'en matière de TVA, les progressions et mouvements de ces remboursements et dégrèvements sont un peu erratiques et n'ont jamais été bien maîtrisés.
    En matière d'impôts locaux, en revanche, nous constatons une réduction de près d'un point en 2003, et elle sera vraisemblablement de l'ordre de 2 % en 2004. Ce sont des phénomènes que l'on a quelque difficulté à interpréter et nous avons noté avec intérêt que le rapporteur spécial du budget des charges communes du Sénat avait décidé d'engager un travail de fond sur ce problème.
    En ce qui concerne les dépenses de personnels, aucune dotation n'est demandée cette année pour couvrir une éventuelle revalorisation du point d'indice de la fonction publique ; il n'y aura donc aucun impact à ce titre sur le budget des charges communes, alors qu'il y en aura au titre des crédits de pension qui, eux, augmenteront de 10,5 %. En fait, cette progression n'est pas réellement significative ; elle est souvent liée à des changements de périmètre du budget des charges communes. Cela dit, la réforme des retraites se traduira, à court terme, par un surcoût puisque, désormais, les pensions sont indexées sur les prix et non plus sur le point d'indice de la fonction publique. C'est un peu paradoxal mais cela méritait d'être souligné.
    Les crédits destinés à la compensation démographique des ressources et des charges des régimes de sécurité sociale progressent de 34 millions d'euros, pour s'établir à 2,3 milliards d'euros. La majeure partie correspond à l'apurement des cotisations familiales dues par l'Etat à la Caisse nationale des allocations familiales.
    Ce budget comporte encore d'autres masses de crédits, dont les crédits pour charges de garantie, qui progressent de manière relativement importante, environ 20 à 25 %, pour atteindre 121,6 millions d'euros. Ce sont surtout les procédures publiques gérées par la COFACE qui expliquent cette progression.
    Les crédits des pouvoirs publics augmentent faiblement, de 1,8 %, pour s'établir à 824,9 millions d'euros. Il convient de rappeler qu'un effort de régularisation et de clarification des crédits de la présidence de la République, qui était indispensable, a été engagé au cours des années précédentes et qu'il est maintenant arrivé à son terme, ce que traduit la progression modérée des crédits inscrits à ce titre.
    Les crédits pour dépenses accidentelles augmentent en revanche de manière plus sensible : ils sont majorés de 359 millions d'euros. Dans un contexte budgétaire quelque peu tendu, on peut se demander, monsieur le ministre, si vous ne vous réservez pas là une marge de manoeuvre pour faire face à des événements imprévus en cours d'année.
    M. Jean-Claude Lenoir et M. François-Michel Gonnot. Oh non ! Nous n'en croyons rien ! (Sourires.)
    M. Daniel Garrigue, rapporteur spécial. Les crédits inscrits au titre de la prime d'épargne logement diminueraient de 130 millions d'euros, sous l'effet, probablement, de la réforme de l'épargne logement adoptée dans la loi de finances pour 2003 : les nouveaux plans n'ouvrant droit au bénéfice de la prime d'Etat qu'en cas de réalisation d'un prêt d'épargne logement. Or, un certain nombre de personnes ont à l'évidence préféré attendre pour solliciter ces prêts et bénéficier ainsi des primes. Il est d'ailleurs très significatif que le nombre de plans ouverts au 31 décembre 2002 soit supérieur de près d'un million à celui des plans ouverts au 31 décembre 2001.
    Enfin, les versements de l'Etat à divers régimes obligatoires de sécurité sociale devraient occasionner, en 2004, une dépense de 755,2 millions d'euros, soit presque moitié moins qu'en 2003. C'est là, pour une large part, la conséquence du remodelage des recettes du BAPSA proposé dans ce projet de loi de finances, la subvention de l'Etat à ce budget annexe ayant été ramenée à zéro.
    Telles sont, mes chers collègues, les principales caractéristiques de ce budget des charges communes, qui s'inscrit parfaitement dans la logique de la loi de finances, et que la commission des finances vous invite à approuver. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour le commerce extérieur.
    M. Camille de Rocca Serra, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour le commerce extérieur. Monsieur le président, mes chers collègues, force est de constater qu'en France, le commerce extérieur n'est pas reconnu à proportion de son incidence sur l'économie nationale, et plus particulièrement sur la croissance et l'emploi. Pourtant, 20 % des emplois français en dépendent. Il faut donc encourager les entrepreneurs, et en priorité les PME et les TPE, à se tourner vers les marchés extérieurs, car seulement 122 000 entreprises françaises exportent. Cela peut sembler une évidence à l'heure de la mondialisation, mais ces marchés apparaissent trop souvent comme lointains et complexes. D'où la nécessité de l'action publique de soutien à l'exportation.
    Depuis l'année dernière, le Gouvernement a engagé la réorganisation de notre dispositif d'encouragement au commerce extérieur, alors même que la conjoncture internationale est instable. L'excédent commercial français s'inscrit dans ce contexte. Le commerce mondial a connu une croissance très modeste en 2002, de l'ordre de 3,3 %, nettement inférieure à celle de l'année précédente. En outre, cette progression est inégale et heurtée puisque, après avoir fortement rebondi au début de l'année 2002, elle a ralenti de manière continue jusqu'au premier trimestre 2003.
    Le solde commercial de la France est excédentaire en 2002, puisqu'il s'élève à 10 milliards d'euros, et au premier semestre de 2003 : 1,5 milliard d'euros. Il ne faut toutefois pas s'en féliciter car c'est dû essentiellement à une baisse des importations. De surcroît, la part de marché de la France dans les échanges de marchandises est en baisse, à 5,1 %, mais cette contraction se vérifie dans l'ensemble des pays occidentaux.
    Un contexte de blocage des négociations multilatérales, c'est le constat que nous pouvons faire à la suite de l'échec de Cancún.
    Dans un climat international difficile, instable, avec un commerce extérieur qui reste relativement stable malgré tout, le Gouvernement a poursuivi son effort de rationalisation, comme il s'y était engagé lors de la discussion budgétaire de 2002.
    Une conférence de l'exportation, dont la première réunion s'est tenue en mai 2003, a décidé de remédier à la polarisation géographique défavorable des exportations françaises en définissant des pays prioritaires ou marchés cibles. Une liste de vingt-cinq pays a été arrêtée, comprenant les dix-neuf marchés à fort potentiel d'importation, où la France doit accroître sa présence, dont les Etats-Unis, la Chine, la Russie et l'Inde, trois grands marchés européens sur lesquels nos PME doivent intensifier leur action - Allemagne, Grande-Bretagne et Italie - et les pays du Maghreb, qui doivent être soutenus pour des raisons géopolitiques. A cet égard, la délocalisation d'une partie des effectifs d'Ubifrance à Marseille montre la volonté du Gouvernement de développer les relations avec la rive sud de la Méditerranée.
    Nous devons mettre nos structures d'exportation à l'heure européenne. La modernisation du dispositif d'accompagnement des entreprises se traduit notamment par la création de l'agence Ubifrance, chargée de jouer le rôle de guichet unique, indispensable aux PME. L'unification de l'association Ubifrance et du Centre français du commerce extérieur est presque achevée, alors que la décision n'a été prise qu'il y a moins d'un an et que les difficultés juridiques étaient réelles.
    Cette simplification doit être poursuivie au niveau régional, où un interlocuteur unique doit être chargé de sensibiliser les petites entreprises aux opportunités offertes par les marchés extérieurs. Nous espérons que cela sera possible grâce à la décentralisation, pour que nos entreprises n'aient pas différents interlocuteurs. Les régions, qui vont se voir transférer les compétences et les moyens des DRCE, vont pouvoir devenir chefs de file dans le domaine du commerce et, notamment, être les relais locaux indispensables de ce guichet unique qu'est Ubifrance. La décentralisation doit achever au niveau local cette grande entreprise de rationalisation pour mieux répondre à l'ensemble de nos entreprises, notamment les PME et les TPE.
    Nous encourageons le VIE, le volontariat international en entreprise, avec l'objectif de doubler le nombre des jeunes volontaires qui seront des soutiens indispensables pour promouvoir notre commerce extérieur.
    Nous menons par ailleurs une politique de soutien aux foires et salons, qui sont un vecteur puissant pour les exportations, notamment pour les PME et les TPE.
    Ce sont des objectifs ambitieux, et le budget du commerce que vous nous présentez, monsieur le ministre, s'inscrit dans cette ambition. C'est un budget en légère progression, qui s'élève à 249,94 millions d'euros, contre 243,96 millions d'euros en 2003. Les dépenses de personnels et de fonctionnement diminuent de 4,7 % : encore un effort de rationalisation au bénéfice du fonctionnement. Les subventions aux organismes d'appui au commerce extérieur augmentent légèrement, mais augmentent, et permettent d'atteindre les objectifs qui sont fixés.
    Afin de disposer d'une vision d'ensemble des crédits consacrés au commerce extérieur, il convient d'ajouter les crédits inscrits au chapitre 14-01 du budget des charges communes pour la COFACE, qui concernent l'assurance crédit, l'assurance prospection, la garantie de change et le risque économique. Ces crédits sont stables par rapport à 2003 : 61 millions d'euros en crédits de paiement. Doivent également être pris en compte les crédits inscrits au chapitre 03 du compte spécial du Trésor « Prêt aux Etats étrangers », qui s'élèvent à 125 millions d'euros en crédits de paiement.
    Ainsi, l'effort global en faveur du commerce extérieur s'établit à 435,94 millions d'euros, contre 459,95 millions d'euros en 2003.
    On le comprend, le budget permettra de financer les nouvelles priorités du Gouvernement, notamment la rationalisation des moyens afin de favoriser l'export des PME et TPE. Il n'en reste pas moins une question majeure qu'avait déjà évoquée mon prédécesseur Nicolas Forissier : la nécessité de revoir la présentation des éléments budgétaires qui permettent d'apprécier l'effort de la France en matière de soutien au commerce extérieur. La présentation des crédits tente de s'inscrire dans la logique de la LOLF, qui doit permettre de clarifier l'autorisation parlementaire et de favoriser la modernisation de la gestion publique en mettant en place un système de gestion de la performance. Le remaniement de l'agrégat 16 « Réseau international du Minefi - Relations économiques extérieures », en est un exemple.
    Cela dit, le fait que les réponses me soient parvenues un peu tardivement, hier, n'ont pas permis à la commission des finances d'analyser la mise en oeuvre de la LOLF et les propositions que pourrait faire le ministère.
    On pourrait se demander à quelle mission rattacher les crédits du commerce extérieur. Deux options sont possibles : soit le rattachement à une mission ministérielle relevant du ministère de l'économie et des finances, soit le rattachement à une mission interministérielle dédiée à l'action extérieure de l'Etat, commune au ministère de l'économie et des finances et au ministère des affaires étrangères. C'est une question de fond, qui doit être tranchée.
    En ce qui concerne la constitution des programmes, il serait logique de rattacher les crédits relatifs aux dons aux Etats étrangers - article 10 du chapitre 68-00 - à un programme relatif à l'aide publique au développement qui serait commun à plusieurs directions du ministère de l'économie et des finances. Il serait également conforme à l'esprit de la loi organique de créer un programme spécifique à l'aide de l'Etat à l'implantation de nos entreprises à l'étranger. Il s'agit en effet d'une politique spécifique de l'Etat, qui doit être clairement identifiée dans la loi de finances et soumise à des objectifs et des indicateurs qui lui sont propres.
    A l'exception de cette réserve - mais je pense, monsieur le ministre, que les réponses qui m'ont été apportées tardivement hier correspondent aux orientations que la commission des finances attendait et c'est plutôt une observation - la commission des finances et son rapporteur demandent à notre assemblée de voter les crédits du commerce extérieur inscrits au budget, afin d'agir en faveur de la croissance et de l'emploi pour notre pays, ce qui est l'objectif de notre gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour le commerce extérieur.
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour le commerce extérieur. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous devons nous prononcer sur les crédits du commerce extérieur pour 2004. Après avoir entendu, réunion budgétaire après réunion budgétaire, et aujourd'hui encore, les rapporteurs de la majorité déployer des trésors d'ingéniosité pour justifier leurs avis favorables à l'adoption des différents budgets, j'ai peur de vous décevoir. Je ne vais, en effet, pas faire assaut de sophismes et invoquer le contexte budgétaire ou, mieux encore, tel ou tel artifice comptable, pour démontrer que, là où il y a manifestement moins, il y a en réalité plus. Je me contenterai de vous présenter brièvement le budget tel qu'il est.
    D'un mot, je voudrais toutefois vous rappeler de quoi nous parlons.
    Nous examinons les crédits du commerce extérieur, qui aident nos entreprises à exporter, notamment les plus petites d'entre elles, celles qui ont le plus besoin d'être aidées.
    L'export en France, c'est aujourd'hui 5 millions d'emplois, et nous avons tous dans nos circonscriptions des entreprises dont les marchés extérieurs conditionnent la survie. En regard de ces 5 millions d'emplois, le budget du commerce extérieur, avec moins de 300 millions d'euros en moyens d'engagement, représente environ 0,1 % des dépenses totales de l'Etat, soit véritablement une goutte d'eau.
    On aurait pu espérer que la logique économique l'emporte sur la logique financière et que ces crédits, dont on connaît l'effet d'entraînement sur notre activité économique, seraient préservés. Il n'en est rien. En moyens de paiement, le budget du commerce extérieur est en recul de 3,8 %. Pour les moyens d'engagement c'est-à-dire ceux qui conditionnent l'autorisation de dépenses nouvelles, la situation est encore pire puisque le recul est de plus de 5,2 %.
    Ces coupes budgétaires se traduisent directement sur le terrain puisqu'il est prévu soixante suppressions d'emploi. En France, c'est 10 % des effectifs des directions régionales du commerce extérieur qui sont supprimés. Quand on sait que c'est cette administration qui informe les entreprises - les PME, qui ont besoin de cette aide, et non pas les grands groupes qui vivent naturellement à l'international - des possibilités existantes à l'export et qui les aide lorsqu'elles hésitent à se lancer, on imagine l'effet dévastateur que cela aura à terme sur notre activité.
    Nous ne pouvons donc pas, mes chers collègues, accepter ce budget qui sacrifie délibérément le long terme. Cependant, je me dois de rappeler que la commission des affaires économiques n'a pas suivi ma recommandation...
    M. Eric Raoult. Très bien !
    Mme Geneviève Perrin-Gaillard, rapporteure pour avis. ... et qu'elle a malgré tout accepté de le voter.
    Ce budget s'inscrit en plus dans le contexte d'une mondialisation libérale qui nous mène dans l'impasse et au sujet de laquelle, à l'occasion de l'analyse budgétaire, il est important de revenir, en particulier en raison de l'échec signifiant de la conférence interministérielle de Cancún.
    A Cancún, le désaccord le plus net portait sur le lancement de négociations à propos des sujets dits « de Singapour » que sont l'investissement, la politique de concurrence, la transparence des marchés publics et la facilitation des échanges. Ce désaccord illustre la radicalisation de l'opposition entre les grands pays émergents réunis au sein du groupe des 21 et les Etats-Unis. Ce blocage reflète le jeu d'intérêts nationaux divergents et illustre peut-être la voie sans issue dans laquelle s'est enfoncée la mondialisation libérale sous la pression américaine telle qu'elle s'est exercée puis accélérée depuis les années 80.
    Alors même que les laudateurs des échanges internationaux de biens et de capitaux assurèrent que ceux-ci alimenteraient la prospérité de tous, en particulier des plus pauvres, la réalité s'est révélée tout autre. Stagnation voire appauvrissement de la plupart des Etats du Sud, et en particulier des pays africains, effondrement sans précédent de pays jusqu'alors plutôt prospères comme l'Argentine, persistance d'une croissance faible et d'un chômage de masse dans les économies européennes, accroissement continu des inégalités dans les pays anglo-saxons et, enfin, fragilité des économies émergentes ont mis en lumière les limites du modèle ultra-libéral.
    Loin de valider les thèses des dévots de la mondialisation financière, le succès des rares économies, principalement asiatiques, confirme cette analyse puisque ces pays ont prudemment maîtrisé l'insertion internationale de leurs économies en ne s'ouvrant que très partiellement aux importations et aux flux de capitaux spéculatifs.
    Ces faits et une mobilisation nouvelle de la société civile attestent donc de la nécessité d'une profonde réorientation des processus engagés. Le hasard qui a voulu que nous discutions du budget du commerce extérieur en plein forum social européen nous en donne encore, à travers la mobilisation et la teneur des exigences qui y sont portées, une éclatante illustration que nous ne pouvons mésestimer.
    Cette réorientation, soucieuse de l'intérêt des personnes et inscrite dans une perspective de développement durable de la mondialisation, implique trois étapes : l'arrêt des déréglementations engagées ; la satisfaction rapide de certaines revendications légitimes des pays les plus pauvres ; la mise en chantier d'une refonte profonde des mécanismes internationaux de régulation économique.
    D'abord, il convient de s'opposer fermement à la mise en oeuvre de mesures tendant à accentuer davantage la mondialisation engagée. Ainsi, de même que l'accord multilatéral sur l'investissement avait été mis en échec grâce à l'action efficace du gouvernement de Lionel Jospin, l'enjeu principal, aujourd'hui, porte sur la négociation en cours relative à l'AGCS.
    Il ne faut pas sous-estimer l'importance de cet enjeu puisque tous les services sont concernés, y compris, peut-être, à terme, la santé, l'éducation et la culture, qu'on a jusqu'à présent mollement préservées après avoir lâché l'environnement, acceptant ainsi, entre autres, la « pétrolisation » de l'eau.

    Cette négociation qui se déroule aujourd'hui dans la plus parfaite opacité et sans l'ombre d'un débat démocratique, en dépit de la mobilisation responsable des citoyens et de certains élus, doit faire l'objet d'un débat de société, aussi bien à l'échelle de l'Europe, donc au Parlement européen, qu'en France, donc au sein de son parlement. Cette situation défaillante n'est pas acceptable, monsieur le ministre, et il faut désormais que le débat s'installe enfin et vite. Dans cette attente, il faut proposer un moratoire, c'est-à-dire l'arrêt des négociations.
    En second lieu, il est urgent que les pays développés mettent leurs actes en conformité avec leurs discours en prenant en compte les demandes des pays pauvres. A cet égard, la mise en oeuvre de l'accord portant sur les droits de propriété intellectuelle est notablement insatisfaisante, en particulier en ce qui concerne la question de l'accès aux médicaments des pays en voie de développement. L'accord intervenu en août 2003 est insuffisant et inapplicable puisqu'il est soumis aux desiderata des industries pharmaceutiques. Pourtant trois pandémies - sida, tuberculose, paludisme - provoquent 6 millions de  morts par an, soit 700 toutes les heures !
    Nous devons rapidement, avec l'Europe, trouver des moyens pour rendre efficaces les fonds que notre pays concacre à ces problèmes, qui sont très largement dispersés actuellement. Le fait que Médecins sans frontières ait qualifié ce plan de « plan d'inaction » est à cet égard très parlant.
    Autre dossier déterminant pour les pays africains, les exportations de matières premières, en particulier agricoles. De ce point de vue, c'est évidemment l'attitude des Etats-Unis qui est regrettable. La forte augmentation des subventions affectées aux productions qui concurrencent les pays les plus pauvres - il en va ainsi du coton - et l'utilisation dévoyée et dévastatrice de l'aide alimentaire pour les cultures vivrières des pays en voie de développement doivent être dénoncées avec force, mais, au-delà, l'attribution de ces subventions et le maintien d'obstacles à l'accès des marchés ne doivent pas occulter la question de la stabilisation des cours erratiques de certaines matières premières, comme le café ou le cacao, dont certaines économies du Sud sont très dépendantes.
    Ainsi, une refonte totale des organisations internationales intervenant en matière économique est nécessaire. Celles-ci restant, en effet, trop régies par la voix du plus puissant, par exemple le Fonds monétaire international, qui, comme Joseph Stiglitz l'a démontré dans son essai la Grande Désillusion, privilégie outrageusement les intérêts du secteur financier essentiellement américain, en imposant aux pays débiteurs des programmes d'ajustement économiquement absurdes et socialement dévastateurs.
    Il y a donc un enjeu institutionnel, mais une réforme de cette nature n'a de sens que si elle est mise au service d'un projet alternatif qui place au centre des préoccupations le développement humain durable et non les intérêts financiers de quelques multinationales.
    Il convient, à partir des besoins réels exprimés, de rechercher des solutions les mieux adaptées pour garantir la satisfaction de quelques revendications essentielles comme l'accès à l'eau, la santé, l'éducation, sans privilégier, comme c'est le cas aujourd'hui de façon dogmatique, la logique de marché. Dans ce même esprit, il est évident que la préservation de l'environnement planétaire doit être placée au coeur des préoccupations.
    Ainsi donc, il y a lieu d'engager rapidement de profondes réformes. Dès à présent, des évolutions concrètes sont possibles et de nombreux citoyens consommateurs choisissent de les encourager en soutenant par exemple le commerce équitable. Il serait souhaitable que les pouvoirs publics participent à sa promotion, en encourageant et en renforçant de manière lisible toutes les initiatives qui relèvent de l'économie sociale et solidaire, seule alternative au libéralisme dans une économie de marché par l'internalisation des coûts sociaux et environnementaux.
    Sur l'ensemble de ces questions, l'action du Gouvernement m'apparaît notoirement insuffisante.
    Si le chef de l'Etat a tenu lors du sommet de Johannesburg un discours plein de promesses, aucune initiative concrète n'a suivi, et la réalité des politiques conduites par votre gouvernement, tant en France que dans les enceintes internationales, tranche fortement avec ces prises de positions. Ainsi, on voit mal comment un gouvernement qui laisse en jachère des pans entiers de la conservation de notre environnement, qui démantèle les services publics, peut sérieusement proposer, dans le cadre international, une alternative à un libéralisme dogmatique auquel il adhère manifestement sans état d'âme.
    Dans le souci de maîtriser le cours des choses et dans l'espoir d'inverser une fâcheuse tendance, je fais partie de celles et de ceux qui demandent la création d'une délégation parlementaire d'évaluation de la mondialisation et de ses effets. Je souhaite que droit soit donné à cette initiative.
    Pour toutes ces raisons, vous l'aurez compris, j'encourage tous ceux qui le souhaitent et se reconnaîtront dans les arguments que j'ai développés à ne pas voter ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Rappel au règlement

    M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour un rappel au règlement.
    M. Jean-Claude Lenoir. Mon intervention se fonde sur l'article 91 de notre règlement, qui dispose qu'un rapporteur doit exprimer l'avis de la commission.
    Or je voudrais dire courtoisement à Mme Perrin-Gaillard qu'elle s'est complètement écartée de l'avis qu'elle devait donner...
    M. Nicolas Forissier. Tout à fait !
    M. Jean-Claude Lenoir. ... au nom de la commission des affaires économiques. Je peux en témoigner car j'ai participé à la réunion de la commission au cours de laquelle a été examiné le projet de budget du commerce extérieur. Nous avons entendu à l'instant, non la rapporteure de la commission, mais la représentante du parti socialiste (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), laquelle a, du reste, emprunté, pour une grande partie de son intervention, des extraits du discours altermondialiste, bien que celui-ci soit un peu marginal par rapport à la ligne politique de la rue deSolférino.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial de commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour l'industrie. C'était un véritable discours trotskiste !
    M. Eric Raoult. Marxiste !
    M. Jean-Claude Lenoir. Ayant participé à la plupart des séances depuis le début de la discussion budgétaire, je n'ai pas observé qu'un rapporteur de l'opposition se soit comporté comme l'a fait Mme Perrin-Gaillard. Je voudrais, monsieur le président, qu'il me soit donné acte que le règlement doit être respecté.
    J'appelle aussi les membres de l'opposition à qui on a confié un rapport à respecter leur devoir et à présenter avec objectivité et sincérité l'avis qu'a rendu la commission au nom de laquelle ils rapportent.
    Enfin, je note que, à l'occasion de son intervention, Mme Perrin-Gaillard nous en a appris plus sur ce qu'elle pense des sujets qui sont examinés aujourd'hui que lors de la réunion de la commission, puisqu'elle ne s'y est pas exprimée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Je vous rappelle, monsieur Lenoir, que, lors de mon intervention, Mme Perrin-Gaillard a indiqué - peut-être d'une manière relativement brève - quel était l'avis de la commission,...
    M. Jean-Claude Lenoir. Vraiment très brièvement !
    M. le président. ... et que son avis n'avait pas été suivi, ce qui ne pouvait qu'inciter la majorité à voter les crédits du commerce extérieur.
    Vous avez fait votre rappel au règlement ; vous avez exprimé votre position ; Mme Perrin-Gaillard vous a écouté.

Reprise de la discussion

    M. le président. La parole est à Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, suppléant M. Jean-Paul Bacquet, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, pour le commerce extérieur.
    M. Eric Raoult. Elle sera plus modérée !
    M. le président. Pour cela, faites confiance à Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, qui, de plus, parle au nom de M. Bacquet. Vous reconnaîtrez que tout cela reste dans un cadre assez bien maîtrisé. (Sourires.)
    Vous avez la parole, madame Andrieux-Bacquet.
    Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, rapporteure pour avis suppléante. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, l'activité économique au plan mondial est restée faible au premier semestre 2003, après un ralentissement continu au cours du deuxième semestre 2002. Le point le plus bas de l'activité a été atteint au début de 2003, avec une croissance trimestrielle d'à peine 0,5 %. La tendance s'est inversée depuis, et les premiers signes de reprise se manifestent actuellement dans les pays industrialisés. Le commerce mondial pourrait donc repartir graduellement à la hausse avec des taux de croissance plus soutenus : 1 % de hausse trimestrielle selon les experts. Le commerce intrazone euro pourrait redevenir un moteur du commerce mondial.
    Malgré ce repli des échanges, le solde commercial de la France, bien que faible, est resté excédentaire : 1,5 milliard d'euros contre de 4,7 milliards d'euros au second semestre 2002. Les exportations françaises ont baissé de 4,8 % et nos importations ont également reculé d'environ 3 %.
    Je souligne que l'excédent français avec l'Afrique a été réduit de moitié, tombant à 1 milliard d'euros seulement au premier trimestre 2003. Il faut espérer que cela n'est pas une tendance lourde, et je reviendrai sur ce sujet un peu plus loin dans mon intervention.
    La commission a approuvé les efforts de rigueur, notamment la réduction des dépenses de personnel et les redéploiements effectués, que traduisent les crédits du commerce extérieur dans un contexte budgétaire difficile : ces crédits sont passés en effet de 472 millions d'euros en 2002 à 458 millions en 2003, puis à 434,4 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2004.
    Le rapporteur de la commission des affaires étrangères avait demandé au Gouvernement, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2003, de préciser de façon récapitulative un certain nombre de données : la liste des pays meilleurs clients de la France, celle des pays dans lesquels nos importations et nos investissements ont progressé significativement au cours des dernières années, ainsi que celle des pays qui constituent une priorité pour conduire un effort de relance et de dynamisation de notre commerce extérieur. Les réponses à ces questions ont été apportées par le ministre délégué, et le rapporteur l'en remercie.
    Le Gouvernement a, en outre, entrepris une démarche volontariste, qui répond aux demandes exprimées par le rapporteur l'année dernière : il s'agit de l'établissement de la liste des vingt-cinq pays « cibles » en direction desquels un effort de relance et d'impulsion sera donné au commerce extérieur français. On y trouve les pays de l'élargissement, certains pays d'Asie, comme la Chine, la Thaïlande, la Corée ou l'Inde et la Russie. Y figurent aussi nos partenaires commerciaux traditionnels que sont l'Allemagne et les Etats-Unis. Ces vingt-cinq pays ont été retenus en fonction de l'importance des marchés qu'ils représentent et du potentiel d'appréciation de la part de marché que nous pouvons espérer y conquérir, ou encore en fonction de la relation particulière qu'ils entretiennent avec la France.
    La commission a approuvé pleinement cette démarche, qui traduit une attention portée aux grandes zones de croissance actuelles dans le monde. Cependant, le rapporteur demande qu'une dimension supplémentaire soit apportée à cette liste : celle des échanges commerciaux et économiques avec l'Afrique subsaharienne francophone, liée à notre pays par des liens anciens, historiques et politiques.
    Le rapporteur souhaiterait que la liste soit complétée par une autre, ou bien par une annexe comportant les pays de cette zone, surtout si la France se trouve encore en situation d'excédent commercial par rapport à eux. Il attire l'attention du Gouvernement sur le fait que d'autres Etats développent leur présence dans lesdits pays ; cela constitue certes un élément positif, mais si la France ne maintenait pas ses efforts dans ces pays et ne leur accordait pas une attention suffisante, sa place et son influence y diminueraient assez rapidement.
    Le rapporteur approuve la priorité donnée àl'accompagnement des entreprises françaises, en particulier les PME, intervenant sur les marchés internationaux. La mise en place cette année de la nouvelle agence Ubifrance, bâtie sur le modèle des grandes agences créées chez nos partenaires européens, devrait, on le souhaite, améliorer l'efficacité de l'aide aux entreprises - cela a été souligné il y a quelques instants.
    Cependant, ayant comparé les modalités d'exercice des compétences régionales chez nos principaux concurrents en Europe, le rapporteur, appuyé en cela par la commission, juge nécessaire de procéder à un regroupement des chambres de commerce et d'industrie afin qu'elles atteignent une dimension suffisante leur conférant une crédibilité dans les actions à mener au plan international. La situation reste aujourd'hui trop confuse en ce domaine.
    Ubifrance, structure privée remplissant des missions de service public, pourrait, comme cela a été dit, jouer le rôle d'incitateur et labelliser les chambres de commerce avec lesquelles des actions pourraient être engagées. De la même façon, cet organisme pourrait être chargé de la labellisation des syndicats professionnels les plus représentatifs et pouvant, de ce fait, être opérationnels rapidement.
    L'action en faveur de l'internationalisation des PME françaises doit se poursuivre. Ainsi, des améliorations sont encore possibles, en particulier en simplifiant les procédures qui rebutent souvent les PME. Dans le même ordre d'idées, la simplification de la procédure d'accès au volontariat international en entreprise - VIE - est une bonne initiative, tout comme est approprié l'objectif visant à accroître la présence de nos entreprises dans les manifestations commerciales à l'étranger.
    Le rapporteur a souhaité aborder cette année la situation des échanges français avec l'Afrique subsaharienne, ou tout au moins un aspect de cette vaste question, en se référant à deux pays, le Bénin et le Gabon, dans lesquels il a effectué une mission. Il insiste sur le fait que cette question ne saurait être abordée en termes de stratégie commerciale, car l'Afrique subsaharienne n'est pas un marché comme les autres et ne peut être considérée de la même façon que le marché asiatique.
    Il s'agit d'une région dont l'insertion dans les flux d'échanges mondiaux recule, comme reculent les investissements : si l'on excepte les investissements consacrés au pétrole, aux mines et à l'énergie en général, on constate que le restant est très faible. Pour être plus précise, je rappellerai que la contribution de l'Afrique subsaharienne au commerce mondial de biens est passée de 3,3 % à 1,6 % entre 1980 et 2000. Sur la même période, la part du stock d'investissement mondial dans cette zone a reculé de 4,4 % à 1,8 %.
    L'idée d'un traitement particulier ne signifie pas qu'il ne faille pas promouvoir les entreprises françaises, au contraire. Leur maintien et l'implantation de nouvelles entités doivent être encouragés et soutenus par tous les moyens. Il faut appeler l'attention sur le fait que si la France est généralement encore le premier fournisseur, sa part de marché tend à diminuer d'année en année. De même, si elle est encore le premier investisseur, les privatisations effectuées progressivement dans ces pays, dans le cadre des processus de désendettement établis avec les bailleurs de fonds internationaux, favorisent l'implantation d'investisseurs d'autres pays souvent nouveaux dans la région, tels l'Autriche, le Japon ou la Chine, parfois aidés par des financements à caractère bilatéral.
    Le rapporteur approuve les propositions récemment faites par la France, notamment celle d'un moratoire sur les aides agricoles accordées par les pays riches pour les produits exportés à bas prix vers l'Afrique et celle consistant à promouvoir un mécanisme de stabilisation du cours des produits de base - le coton en premier lieu -, qui va dans le bon sens.
    Les deux pays visités par le rapporteur - le Bénin et le Gabon - illustrent deux situations très différentes, mais, dans les deux cas, la France est le premier fournisseur, le premier investisseur et aussi le premier bailleur de fonds.
    Le Bénin, engagé depuis 1989 dans un programme de réformes structurelles et d'ajustement des finances publiques, est considéré comme le « bon élève », ayant réussi à assainir son économie et à assurer une croissance de 5 % par an. Il a bénéficié d'un allégement de sa dette extérieure dans le cadre de l'initiative « pays pauvres très endettés », les PPTE.
    L'échec de la conférence de Cancún a été très mal vécu par ce pays exportateur de coton, qui a vu rejeter sa demande de traitement spécifique. Le rapporteur, présent au sein de la délégation française, a été déçu par le manque de concertation et de contact au cours de la conférence entre cette délégation française et les représentants des pays de l'Afrique subsaharienne, dont le Bénin, et ce malgré les liens privilégiés que nous avons avec ces pays.
    Le Gabon, lui, se trouve dans une situation difficile. Il éprouve de grandes difficultés pour diversifier son économie, trop dépendante du secteur pétrolier. Son endettement extérieur est tel que le règlement des échéances nécessiterait d'y consacrer plus de 40 % des recettes budgétaires, ce qui étouffe toute possibilité d'investissement. En outre, son statut de pays à revenu intermédiaire constitue aujourd'hui pour lui un handicap, car il lui interdit de bénéficier de certains types d'aides. Certes, il ne peut être assimilé à la catégorie des pays pauvres très endettés, car son économie s'appuie encore sur des revenus pétroliers. Il serait cependant souhaitable qu'une solution soit trouvée, afin que ce pays soit éligible aux allégements de dettes, aux financements et aux soutiens existants. En contrepartie, ces aides devraient être accompagnées d'engagements de bonne gestion d'investissement dans des projets contribuant à réduire la pauvreté. Il appartiendra certainement à la France, principal bailleur de fonds, de contribuer à améliorer la situation pour préserver l'avenir.
    De façon générale, nos relations commerciales et économiques avec l'Afrique subsaharienne doivent privilégier certains axes qui contribueront à améliorer la situation économique et, il faut l'espérer, à un bien-être accru. Parmi ces axes, on peut citer le renforcement des intégrations régionales, le développement de projets et d'échanges à ce même niveau régional, l'aide aux filières locales et la promotion de filières de qualité, le renforcement des capacités commerciales, l'effort vers une plus grande transparence et, bien sûr, la poursuite de la lutte contre la corruption.
    C'est pourquoi le rapporteur demande au Gouvernement de faire des échanges avec ces pays et des investissements dans ceux-ci une priorité, en élaborant au besoin des approches différentes pour que l'engagement de la France s'y traduise par une amélioration des structures économiques et commerciales sur le long terme.
    La commission des affaires étrangères a émis, à l'unanimité, un avis favorable à l'adoption des crédits du commerce extérieur pour 2004. (Applaudissements.)
    M. Eric Raoult. Voilà un bon rapport !
    M. le président. Madame Andrieux-Bacquet, vous avez fort bien suppléé M. Jean-Paul Bacquet ; nous le lui dirons. (Sourires.)
    La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour l'industrie.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour l'industrie. Monsieur le président, madame la ministre déléguée, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, si le projet de budget pour 2004 du ministère de l'industrie apparaît peu modifié dans sa masse - les crédits de paiement s'élèvent à 2,45 milliards d'euros, soit un montant pratiquement inchangé par rapport à l'an dernier -, il recèle pourtant de vrais changements, que la commission des finances a jugés positifs.
    Ce budget met d'abord l'accent sur l'innovation et la recherche comme facteurs majeurs de compétitivité des entreprises.
    Il le fait d'abord par le biais des mesures fiscales : mise en place d'un véritable cadre juridique et financier pour les sociétés unipersonnelles d'investissement à risque, rénovation en profondeur du régime du crédit impôt recherche et création d'un nouveau dispositif d'exonération de charges sociales et fiscales en faveur des jeunes entreprises innovantes. Il le fait ensuite en conférant à l'ANVAR un rôle central d'animation et de coordination en matière de soutien à la recherche industrielle et à l'innovation.
    Permettez à votre rapporteur de se féliciter que les préconisations qu'il avait faites l'an dernier dans ce domaine aient été suivies d'effets. Vous conviendrez avec moi, madame la ministre, que cela n'est pas toujours le cas.
    De la même manière et très logiquement, la centralisation des aides à l'ANVAR conduit vos services à supprimer la subvention à l'APRODI, l'association pour la promotion et le développement industriel, comme je l'avais proposé l'an dernier dans un amendement.
    Dans le même ordre d'idées, je souhaiterais que vos services étudient la possibilité d'aller au bout de cette réforme en proposant un fort rapprochement, voire une fusion, entre les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement - les DRIRE - et les délégations régionales de l'ANVAR.
    Ce rapprochement pourrait prolonger, madame la ministre, l'action utile que vous avez engagée en procédant à la fusion des deux principales directions générales de votre ministère, chargées respectivement de l'action régionale et des PMI - la DARPMI - et de l'industrie, des technologies de l'information et des postes - la DIGITIP -, dans un souci légitime de simplification et de recherche de synergies potentielles. Ces efforts de rationalisation devront être poursuivis, notamment dans le cadre nouveau qui sera instauré par la loi organique relative aux lois de finances.
    Permettez-moi, madame la ministre, à ce stade, d'évoquer rapidement la mise en place de cette loi organique. Comme nombre de mes collègues en charge des crédits du Minéfi, je souhaiterais souligner que les premières indications et informations relatives à cette mise en oeuvre par le ministère de l'économie et des finances font apparaître une certaine lenteur. La définition des objectifs et des indicateurs de performance en est encore à un stade préliminaire. Le ministère envisage la constitution d'une mission ministérielle intitulée « politique économique » qui comporterait, parmi d'autres, deux programmes relatifs à l'industrie, l'un consacré à la régulation et au contrôle réalisés par des autorités administratives, l'autre au développement durable des entreprises comportant des actions sectorielles : énergie, PME du commerce et de l'artisanat, entreprises industrielles, poste et télécommunications, mutations industrielles, prévention des pollutions et des risques.
    Le regroupement en un seul programme « fourre-tout » des politiques de l'énergie, des entreprises et de la recherche me semble trop vaste pour permettre à la représentation parlementaire de jouer utilement son rôle d'évaluation et de contrôle. Aussi, je souhaiterais que vous puissiez associer plus étroitement qu'aujourd'hui les rapporteurs spéciaux de la commission des finances à cette mise en place.
    Permettez-moi maintenant de souligner quelques points dans le secteur de l'énergie et des matières premières, où la stabilité d'ensemble des crédits de l'industrie cache des évolutions contrastées. En effet, les crédits affectés au secteur de l'énergie et des matières premières baissent pour s'établir à 704 millions d'euros en dépenses ordinaires et crédits de paiement et à 96,38 millions d'euros en autorisations de programme. Cette légère baisse permet néanmoins une augmentation des crédits de la Commission de la régulation de l'énergie - la CRE -, ce qui me semble très important et utile, et ne peut que renforcer l'activité du régulateur, si nécessaire en cette période de libéralisation.
    M. François-Michel Gonnot. Exactement !
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial pour l'industrie. Pour ce qui concerne EDF, je rappellerai que les activités à l'international de l'entreprise avaient été critiquées l'an dernier. Nous pouvons, cette année, nous féliciter que ces critiques aient été largement prises en compte par le président d'EDF et que les activités de l'entreprise soient recentrées. Je veux voir dans le redressement des comptes au premier semestre 2003 un lien de cause à effet.
    Cependant, le redressement d'EDF dans le contexte concurrentiel et globalisé qui est maintenant le sien ne peut être durable qu'avec un statut adapté et une ouverture de son capital suffisante pour lui permettre de nouer les alliances nécessaires au financement de son développement. Bien sûr, il faudra préalablement - et vous avez commencé de le faire - lancer un grand débat public, qui durera suffisamment de temps pour que toutes les parties intéressées puissent exprimer leur point de vue. Il n'en demeure pas moins que le temps presse, car EDF - comme Gaz de France, du reste - joue son avenir.
    En ce qui concerne l'Institut français des pétroles - l'IFP -, sa budgétisation s'est effectuée dans de bonnes conditions, mais un problème de gouvernance d'entreprise se pose quant au mode de contrôle de l'Etat. La Cour des comptes a, en effet, dénoncé les mouvements fréquents de personnels de direction entre l'IFP et les services de tutelle, qui font peser un risque d'insuffisance et d'incapacité du contrôle de l'Etat. Il pourrait être avisé et utile, afin d'éviter certaines dérives, de placer l'IFP - comme, d'ailleurs, les autres organismes publics vivant de crédits publics et ayant des filiales cotées en bourse - sous tutelle de la nouvelle agence des participations de l'Etat.
    Concernant AREVA, je m'interroge, comme, du reste, la Cour des comptes dans un récent rapport, sur la stratégie industrielle de cette entreprise. Du fait de sa situation de « mono-client » d'EDF, qui réalise une part importante de son chiffre d'affaires, AREVA me semble fragilisée. Elle a récemment souhaité acquérir la filiale d'Alstom consacrée à la transmission et à la distribution d'électricité, ce qui témoignait d'une intéressante recherche de diversification. Nous n'avons pas été assez loin dans l'étude du rapprochement d'AREVA et d'Alstom lorsqu'il pouvait être envisagé, mais je reste convaincu qu'une telle option aurait pu contribuer à régler tant les problèmes stratégiques d'AREVA que les difficultés d'Alstom.
    J'en viens au parc nucléaire français. Le souci légitime de maintenir la possibilité de recourir à l'option nucléaire à l'échéance du renouvellement du parc actuel demande que soient conservés les compétences d'étude et les moyens de fabrication les plus stratégiques, et conduit à examiner la possibilité de construire un modèle du réacteur EPR - European Pressurized Water Reactor. J'ai lu à ce propos avec intérêt les conclusions du rapport des députés Bataille et Birraux élaboré dans le cadre de l'office parlementaire des choix technologiques et scientifiques. J'ai en outre noté que vous aviez récemment proposé le choix d'EPR au Premier ministre, qui devrait bientôt rendre sa décision.
    En ce qui concerne l'ADEME, le Gouvernement stabilise sa dotation au même niveau que l'an dernier, ce qui devrait entraîner une meilleure gestion des crédits alloués à cette agence.
    Les crédits de paiement relatifs aux actions portant sur l'environnement et la compétitivité des entreprises hors secteur de la poste et des télécommunications s'élèvent à 313 millions d'euros, soit une augmentation de 21 %. Cette évolution traduit bien la priorité que le Gouvernement souhaite, et c'est une bonne chose, donner à la formation des ingénieurs et aux actions de promotion de la qualité, de la normalisation, de la certification, des brevets et de la métrologie, qui sont autant d'enjeux majeurs dans la compétition internationale. L'appui aux centres techniques industriels, les CTI, et aux centres de promotion et de développement des entreprises, les CPDE, bénéficie de 89,7 millions d'euros. Cet accroissement doit compenser, en 2004, la suppression des taxes parafiscales prévue par la loi organique relative aux lois de finances, puisque le Conseil d'Etat a rendu un avis, au cours de l'été, refusant de reconnaître aux activités des CPDE la qualification de missions de service public, et donc la possibilité pour ces centres de percevoir des taxes affectées. Il ne faudrait néanmoins pas tarder à trouver une solution pérenne au financement de ces organismes utiles aux entreprises.
    J'en viens maintenant aux dépenses d'accompagnement des mutations industrielles. L'année dernière, nous avions eu une discussion sur l'utilité de ces crédits de restructuration. Je m'interroge, quant à moi, non sur l'utilité de ces crédits, mais sur leur affectation au ministère de l'industrie.
    En effet, la somme de 35 millions d'euros inscrite dans le projet de loi de finances pour 2004 est très modique, si on la compare soit aux besoins réels, soit aux quelque 700 millions d'euros affectés à l'accompagnement de ces restructurations, actuellement gérés par le ministère des affaires sociales. Les amendements de réduction de ces crédits présentés l'an dernier, au motif que les crédits n'avaient pas tous été consommés et qu'ils risquaient de manquer d'efficacité du fait de leur éclatement entre les deux ministères, avaient été rejetés. Depuis, le Sénat et la Cour des comptes ont relayé ces critiques. Pour la cour, ces aides aux entreprises reposent sur une organisation administrative complexe, qui doit être simplifiée et clarifiée.
    Au vu des derniers rapports, ces crédits semblent maintenant mieux consommés, il faut s'en féliciter. Si l'on peut admettre l'utilité de ces crédits, on peut néanmoins s'interroger sur la dispersion des moyens qu'ils représentent et envisager leur regroupement au sein du ministère des affaires sociales ou dans le cadre d'une mission commune.
    On peut également s'interroger sur les résultats concrets en termes d'emploi de ces actions de reconversion industrielle du ministère de l'industrie. Je sais que vous avez demandé des évaluations à l'inspection générale de l'industrie et aux préfets, les résultats en sont attendus avec impatience.
    Madame la ministre, le budget que vous nous proposez va dans le bon sens. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé à la commission des finances, qui l'a accepté, d'adopter ces crédits. J'invite aujourd'hui la représentation nationale à faire de même, pour soutenir votre action. (Applaudissement sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour l'industrie.
    M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour l'industrie. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous le savons tous, le contexte budgétaire est cette année particulièrement difficile.
    Pour maîtriser le déficit de nos finances publiques tout en construisant un budget sincère, c'est-à-dire reposant sur une hypothèse de croissance de notre économie réaliste, le Gouvernement a dû être rigoureux dans ses choix. A structure constante, les dépenses civiles de l'Etat augmentent cette année de moins de 1,2 %, c'est-à-dire moins vite que les prix.
    Des efforts ont été nécessaires et le budget de l'industrie et de l'énergie pour 2004 y participe.
    Pour autant, du point de vue de la politique industrielle, le fait dominant de la loi de finances pour 2004 ne concerne pas les dépenses, donc les crédits de l'industrie, mais les recettes avec la mise en oeuvre du plan pour l'innovation. Celui-ci traduit l'engagement résolu du Gouvernement de porter, d'ici à 2010, notre effort total de recherche public et privé à 3 % du PIB, contre 2 % aujourd'hui, conformément aux objectifs définis par l'Union européenne lors des sommets de Lisbonne et de Barcelone.
    Modernisation et élargissement du champ du crédit impôt recherche, pour permettre à davantage d'entreprises d'en bénéficier, création d'un statut fiscalement et socialement très avantageux, notamment pour les jeunes entreprises innovantes, et renforcement des dispositifs visant à orienter l'épargne privée vers l'innovation sont autant de mesures concrètes pour y parvenir. L'effort public en faveur de l'innovation prenant la forme d'aides fiscales atteindra ainsi environ un milliard d'euros par an.
    C'est une grande satisfaction que de constater, malgré le contexte budgétaire, un tel effort. Celui-ci est, en effet, tout à fait justifié pour préparer l'avenir, les succès industriels de demain trouvant leur origine dans la recherche d'aujourd'hui.
    Comme je l'ai indiqué, cet effort repose sur des mesures fiscales. Cet instrument permet d'éviter aux entreprises les lourdes procédures administratives préalables à l'attribution de subventions et fait faire des économies de coûts de gestion à l'Etat. C'est donc un choix pertinent. La contrepartie, c'est que ces dépenses nouvelles n'apparaissent pas dans le budget de l'industrie, contrairement à ce qui se serait produit si le ministère avait dû prendre en charge des subventions.
    Pour ces raisons techniques, le budget qui nous est présenté ne rend que très imparfaitement compte de l'évolution réelle de l'effort public en faveur de l'industrie, en particulier en faveur de l'innovation industrielle.
    Pour les crédits à proprement parler, le projet de budget pour 2004 est marqué par le souci légitime d'accroître l'efficacité de la dépense publique afin de maîtriser à la fois l'évolution du déficit et celle des prélèvements.
    Les aides à l'innovation, tout d'abord, sont en recul. Ce recul sera toutefois plus que compensé par l'accroissement de l'effort fiscal précédemment évoqué. En outre, il s'accompagne d'une rationalisation des procédures d'attribution de ces aides grâce au renforcement du rôle de l'ANVAR, qui permettra de les rendre plus efficaces et plus accessibles aux entreprises.
    Les moyens alloués aux autres missions du ministère sont globalement préservés.
    Les actions destinées à améliorer l'environnement des entreprises et à développer leur compétitivité, qui figurent à l'agrégat 23 du budget, progressent de plus de 21 % en crédits de paiement, hors dépenses relatives au secteur de la poste et des télécommunications. Une part de cette augmentation résulte d'un accroissement de la prise en charge budgétaire des centres techniques industriels visant à compenser la disparition des taxes parafiscales les finançant. L'utilité de ces centres est unanimement saluée. Ils constituent, en effet, un atout majeur pour la compétitivité de nos industries, notamment dans les secteurs traditionnels dont il serait temps, l'euphorie relative aux nouvelles technologies étant retombée, de reconnaître l'importance économique.
    Il est indispensable que ces centres continuent de disposer des ressources nécessaires à leur action. Je sais que c'est la volonté du Gouvernement, qui entend mettre en place un nouveau système de financement pérenne à l'occasion de la loi de finances rectificative pour 2003. La commission des affaires économiques soutient vigoureusement cette démarche. Nous serons particulièrement attentifs à l'avenir des centres techniques industriels.
    Dans le même agrégat budgétaire, un effort particulier, cohérent avec la priorité accordée au soutien à l'innovation, est réalisé au profit des écoles d'ingénieurs, qui sont des établissements de formation mais aussi de recherche et dont les moyens, en dépenses ordinaires et crédits de paiement, progressent, à périmètre constant, de 3,4 %. J'évoque les écoles d'ingénieurs qui dépendent du ministère de l'industrie, tandis que ma collègue Catherine Vautrin traitera du groupement des écoles de télécommunications.
    Concernant les établissements d'enseignement, il convient de signaler une innovation du budget de l'industrie pour 2004 : la création d'un nouvel article budgétaire contribuant à financer la mise en place de groupements européens d'établissements d'enseignement supérieur.
    Les crédits finançant des actions d'accompagnement des mutations industrielles, qui figurent à l'agrégat 24, progressent très légèrement en crédits de paiement et augmentent de plus de 8,2 % en autorisations de programme. Ces évolutions traduisent la mise en oeuvre concrète de la solidarité nationale au profit des hommes et des territoires frappés par les restructurations industrielles. Il est nécessaire de poursuivre ces actions dont vous avez eu l'occasion, madame la ministre, de rappeler devant notre commission l'efficacité et le coût modeste au regard des créations d'emplois ainsi favorisées.
    Parmi ces crédits figurent ceux destinés à gérer l'« après-mines », dont on connaît les conséquences humaines terribles lorsque des affaissements de terrain mettent en danger des maisons acquises au prix d'un vie de travail. S'il faut, là aussi, que la solidarité nationale joue, il faut avant tout prévenir les sinistres. C'est pourquoi je me félicite du renforcement significatif de l'effort budgétaire de prévention des sinistres miniers, avec une augmentation de plus de 25 % des dotations aux organismes techniques d'appui spécialisés et de 45 % des autorisations de programme destinées à financer des travaux de mise en sécurité.
    En ce qui concerne le secteur de l'énergie, le projet de budget marque la poursuite du renforcement des moyens de la Commission de régulation de l'énergie, qui bénéficie de la création de douze  emplois. Cet organisme, dont le rôle est essentiel pour la régulation des marchés libéralisés du gaz et de l'électricité, a effectivement besoin de nouveaux moyens pour exercer ses missions, compte tenu de l'ouverture large à la concurrence qui interviendra dès juillet 2004. Le choix budgétaire du Gouvernement est donc pertinent.
    C'est également le cas en ce qui concerne les dotations budgétaires à l'Institut français du pétrole, qui sont maintenues au niveau prévu dans le cadre du contrat d'objectifs de cet organisme pour 2001-2005. L'Etat respecte donc ses engagements et la commission des affaires économiques, dont vous connaissez, madame la ministre, l'attachement à cet organisme de recherche au service du développement durable et de la compétitivité de nos secteurs pétroliers et parapétroliers, s'en félicite.
    Dans le contexte budgétaire actuel, le budget de l'industrie qui nous est proposé n'est donc pas un mauvais budget. C'est pourquoi la commission des affaires économiques, sur ma proposition, a émis un avis favorable à son adoption.
    Je veux toutefois, et j'espère, mes chers collègues, parler en notre nom à tous, souligner l'importance fondamentale du soutien public à la recherche et à l'innovation.
    M. François-Michel Gonnot. Très juste !
    M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis. Des avancées importantes auront lieu en 2004. Je m'en félicite, mais il faudra aller encore plus loin. Dès que des marges de manoeuvre budgétaires apparaîtront, vous nous trouverez résolument à vos côtés, madame la ministre, pour obtenir de votre collègue du budget un effort supplémentaire substantiel.

    Enfin, dans la mesure où l'examen de ce projet de budget est aussi l'occasion pour notre assemblée d'évoquer une politique, je voudrais vous féliciter, madame la ministre, pour votre prise de position courageuse en faveur de l'EPR - sujet sur lequel le Premier ministre doit s'exprimer dans quelque temps. Comme vous l'avez indiqué dans votre livre blanc, on ne peut pas opposer les énergies renouvelables et l'énergie nucléaire.
    M. François-Michel Gonnot. Absolument !
    M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis. Le renouvellement de notre parc nucléaire, qui contribue à la compétitivité de notre économie, à l'indépendance énergétique nationale et à la préservation de l'environnement de la planète puisqu'il n'émet pas de gaz à effet de serre, est absolument nécessaire du point de vue de la politique énergétique pour la France. Il est inenvisageable, alors que son remplacement se profile à l'horizon, d'espérer que des sources d'énergie renouvelables puissent se substituer au nucléaire. L'alternative est donc entre le gaz naturel et le nucléaire.
    M. Jean Dionis du Séjour. Exactement !
    M. Jacques Masdeu-Arus, rapporteur pour avis. Comme le président de la commission, Patrick Ollier, a eu l'occasion de le dire, il serait irresponsable écologiquement, du point de vue des émissions de dioxyde de carbone, mais aussi économiquement, pour maintenir des prix de l'électricité modérés et stables, et stratégiquement, pour assurer notre sécurité d'approvisionnement dans un contexte international troublé, de ne pas confirmer notre choix du nucléaire.
    J'ajoute que le renouvellement de notre parc nucléaire est indispensable du point de vue de la politique industrielle car le nucléaire, filière de très haute technologie dans laquelle la France détient un leadership mondial, fait partie des fleurons de l'industrie française. Nous devons donc veiller à préserver l'avenir de ce secteur et je sais, madame la ministre, que vous y êtes personnellement très attachée. J'espère que nous aurons rapidement l'occasion, dans le cadre de la future loi d'orientation sur l'énergie, de nous prononcer sur cette question. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour la poste et les télécommunications.
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour la poste et les télécommunications. Madame la ministre, le secteur des postes et télécommunications présente la particularité de rassembler deux entreprises publiques importantes, La Poste et France Télécom, sur lesquelles repose la charge de continuer à assumer les missions de service public ou d'intérêt général dans un environnement qui s'ouvre rapidement à la concurrence.
    Ces deux entreprises font face toutes les deux à des alertes sérieuses, pour des raisons diamétralement opposées : problèmes financiers et endettement, suite à des décisions hasardeuses prises dans un climat économique international difficile, pour France Télécom ; vieillissement de l'outil de travail dans un contexte de déclin du courrier pour La Poste. Trop de décisions pour l'une, pas assez pour l'autre. Vous avez hérité en 2002, madame la ministre, de deux entreprises en grande difficulté pour lesquelles l'Etat, actionnaire et tutelle, différait depuis trop longtemps, les décisions que la situation imposait.
    Dès son entrée en fonction, le Gouvernement a, très rapidement, engagé les voies et moyens permettant le sauvetage de France Télécom. Le contrat de plan Etat-Poste présenté il y a quelques jours, consacre, quant à lui, la modernisation de La Poste. Si l'an dernier le sauvetage de France Télécom a été un succès, il doit en aller de même cette année pour La Poste. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    L'importance du secteur des postes et télécommunications ne se mesure plus au montant de ses crédits affectés, au demeurant modestes, s'agissant maintenant de deux entreprises largement soumises à la concurrence. Je note cependant avec satisfaction...
    M. François Brottes. C'est l'amour aveugle !
    M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis. ... que les crédits du budget des postes et télécommunications sont maintenus à leur niveau de l'an dernier - 440 millions d'euros - pour l'Autorité de régulation des télécommunications, en prévision de ses futures compétences, pour le groupement des écoles de télécommunication et pour le transport de la presse, dossier auquel nous étions particulièrement attachés.
    C'est pourquoi je peux dès à présent annoncer que la commission des finances, sur ma proposition, a adopté ces crédits, et j'invite l'Assemblée à faire de même.
    Je dirai d'abord quelques mots sur La Poste.
    La Poste croule littéralement sous les contraintes alors qu'elle est soumise à une pression concurrentielle de plus en plus forte et qu'elle ne dispose pas de marge de manoeuvre réelle sur certains de ses produits.
    Ses contraintes sont en effet nombreuses : les tarifs préférentiels à la presse, le maintien de la présence postale en milieu rural, la poursuite de la mise en oeuvre des trente-cinq heures - 20 000 emplois non compensés -, l'exclusion du dispositif d'allègement des charges sociales, l'équilibre économique de la gestion du livret A, la retraite des postiers. J'ai presque été exhaustif. Et tout cela alors même que La Poste assume une mission d'intérêt général, puisqu'elle joue un rôle social indispensable en fournissant des services bancaires aux personnes à faibles moyens, participant ainsi à la lutte contre l'exclusion bancaire.
    Parallèlement, La Poste ne dispose que de marges d'action assez réduites sur ses principaux produits : elle ne fixe ni le prix du timbre, ni les taux administrés des livrets d'épargne et des comptes épargne logement.
    Le rapport de la Cour des comptes souligne le vieillissement de cette structure. Il pointe les retards de La Poste par rapport à ses concurrents européens, notamment allemand et néerlandais, en matière de modernisation des centres de tri de courrier, d'amélioration de la qualité du service et de développement de l'activité colis. Il demande que des clarifications soient apportées dans ses relations avec l'Etat actionnaire, notamment dans le financement des contraintes et missions qu'elle doit assumer.
    Je ne peux qu'être d'accord avec tous ces constats, qui montrent l'urgence avec laquelle l'Etat et La Poste doivent trouver des solutions.
    D'où le contrat de plan 2003-2007 qui vient d'être présenté par La Poste et l'Etat, pour permettre à La Poste de rivaliser avec ses concurrents européens avant la fin de la décennie. Ainsi, la modernisation des centres de tri est enfin programmée, pour faire face à la perspective probable de libéralisation totale du courrier en 2009. La Poste se donne donc les moyens de respecter les objectifs du contrat de plan en matière de qualité, à savoir 85 % de lettres à J + 1, c'est-à-dire le lendemain, alors que nous en étions encore à 73 % en 2002.
    Quant à la présence postale, on peut se féliciter que l'objectif du contrat de plan soit le maintien, voire l'amélioration de l'accessibilité du service, en même temps que la maîtrise des coûts. La solution retenue va vers la diversification de la présence postale. Mais les quelque 17 000 points de contact sont maintenus, sans doute avec un certain nombre de modifications géographiques ou de nature, l'engagement étant pris que tout cela sera réalisé en étroite collaboration avec les élus sur le terrain.
    M. François Brottes. Langue de bois !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Pour 2004, le Gouvernement propose dans le contrat de plan de maintenir la contribution de l'Etat au transport postal de presse au niveau de 290 millions d'euros. Le contrat de plan prévoit une renégociation en 2004, au vu des résultats attendus de la mission confiée à M. Henri Paul. Il préconise par ailleurs que la question des retraites des postiers fonctionnaires trouve une solution à la fin de l'année 2005, après le résultat des travaux d'un groupe de travail ad hoc. Entre-temps, la charge des retraites pour La Poste est stabilisée à son niveau actuel en euros constants jusqu'en 2006, soit environ 2 milliards d'euros en 2002. Le contrat de plan s'engage en outre à ce que La Poste bénéficie de l'exonération des charges sociales sur les bas salaires en 2006.
    Alors que les tarifs postaux français sont parmi les plus bas d'Europe, le contrat de plan prévoit un rattrapage tarifaire en faveur de La Poste, avec un suivi de l'évolution des prix.
    Le contrat de plan a fait les bons compromis, madame la ministre, en autorisant la création d'un établissement de crédit de La Poste et une extension prudente des services financiers au crédit immobilier sans épargne préalable.
    M. François Brottes. Dérisoire !
    M. François-Michel Gonnot. Vous ne l'aviez pas fait !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Et cela n'est pas de la langue de bois, mon cher collègue, ce sont des décisions ! Si, pendant cinq ans, vous aviez pris les décisions qui convenaient, vous ne nous auriez pas légué La Poste dans l'état où elle est.
    M. François Brottes. Dénigrement gratuit !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Puisque vous m'interpellez,...
    M. le président. Ne vous laissez pas interpeller, monsieur le rapporteur spécial !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. ... je rappellerai qu'il y a eu une certaine période, avant 2002 - Mme la ministre doit s'en souvenir -, où il y avait carrément un vide juridique puisqu'il n'y avait plus de contrat de plan entre l'Etat et La Poste. On ne peut donc pas affirmer que vous n'ayez pas donné dans la langue de bois ! En tout cas, vous n'avez rien fait du tout pour La Poste !
    M. François-Michel Gonnot. Exactement !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Vous nous l'avez léguée lestée de gros poids. Nous devons maintenant la sortir de cette situation, comme nous avons redressé France Télécom. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François Brottes. On en reparlera !
    M. Daniel Paul. Réécriture de l'histoire !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. S'agissant de France Télécom, ni Mme la ministre ni le Gouvernement n'ont fait dans la langue de bois...
    M. François Brottes. Ni dans la dentelle !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Ils ont agi avec une grande célérité. France Télécom était en grande difficulté,...
    M. François-Michel Gonnot. En faillite !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. ... avec une dette de 68 milliards d'euros au 31 décembre 2002, générant une charge d'intérêt de l'ordre de 4 milliards d'euros par an. Cette situation était notamment le résultat du financement d'opérations industrielles intervenues dans un contexte sur lequel je ne reviendrai pas.
    M. François-Michel Gonnot. Des opérations hasardeuses !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. « Hasardeuses » est en effet le bon terme.
    Le Gouvernement, dès sa prise de fonctions, a pris les décisions qui s'imposaient, suivant en cela l'avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale.
    M. François Brottes. Parlez-nous de Deutsche Telekom !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Si rien n'avait été fait, France Télécom se serait retrouvée quelques semaines plus tard en quasi-cessation de paiement puisque sa trésorerie ne permettait pas de rembourser les dettes exigibles avant le 31 décembre 2002. Il fallait donc agir avec célérité et, surtout, avec beaucoup d'intelligence,...
    M. François-Michel Gonnot. Et de courage !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. ... ce qui a été fait.
    Le plan dit des « 315 », mis en oeuvre par le nouveau président de France Télécom, a permis de mobiliser 45 milliards d'euros, répartis entre l'entreprise, les actionnaires et les marchés. Ce plan a réussi grâce à l'action rapide et confiante du Gouvernement qui, du coup, a donné confiance à l'ensemble des partenaires de France Télécom - actionnaires et marchés - et permis que l'ensemble des appels de fonds soient très largement souscrits.
    On peut dire aujourd'hui que France Télécom est sauvée et que le Gouvernement n'y est pas pour rien, même si cela vous déplaît, chers collègues de l'opposition.
    Je voudrais enfin, madame la ministre, vous faire part de quelques remarques de la commission des finances et de quelques observations aussi personnelles sur ce que l'on appelle couramment la « fracture numérique ».
    Grâce à une santé recouvrée, France Télécom pourra faire face à ses missions, notamment en ce qui concerne la téléphonie mobile et le haut débit. Une convention nationale prévoyant l'équipement progressif du territoire en téléphonie mobile a été signée le 15 juillet 2003 par les ministres concernés. Elle permettra la couverture du territoire.
    Bien que le taux d'équipement ouvrant l'accès à Internet ait progressé de neuf points entre juin 2001 et juin 2002, la France demeure à la douzième position dans l'Union européenne. Il convient toutefois de souligner que la France est le pays où le nombre de ménages abonnés à l'ADSL a progressé le plus rapidement en Europe pendant les douze derniers mois. Elle rattrape donc son retard, mais cela ne suffit pas.
    La libéralisation des télécommunications entreprise au niveau communautaire se poursuit avec un paquet de cinq directives, qui auraient dû être transposées et appliquées au plus tard le 25 juillet dernier. Les opérateurs alternatifs demandent une certaine rapidité pour mettre en place des règles de concurrence. Le Gouvernement a heureusement entamé la procédure de transposition avec le dépôt et l'inscription à l'ordre du jour des assemblées de quatre projets de loi qui nous occuperont dans les semaines qui viennent.
    A cet égard, mon souhait serait d'aboutir à plus de cohérence. Depuis vingt ans, faute de vision globale, la France est mal entrée dans la société de l'information. Face à l'incohérence des politiques et à la complexité juridique du secteur, il faut saluer l'action très volontariste du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, qui se concrétise par un rattrapage spectaculaire. Mais beaucoup reste à faire.
    La France a besoin d'une ambition encore plus marquée afin que chaque Français, quels que soient son milieu social et son territoire de vie, ait accès aux nouveaux moyens de communication, et tout particulièrement à l'Internet rapide.
    M. Jean Dionis du Séjour. Très juste !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. L'Internet rapide pour tous n'est pas un luxe : c'est un moyen incontournable pour le développement de l'individu, pour l'accès au savoir et donc à l'emploi, pour la survie des entreprises en milieu rural, pour l'équilibre territorial de la France. C'est en conséquence un enjeu de démocratie.
    Madame la ministre, je souhaite que nous puissions redéfinir la notion de service universel et, par là même, le rôle des pouvoirs publics.
    A l'heure de la communication satellitaire, le service universel peut-il se résumer à la présence de cabines téléphoniques ? Est-il normal que les plis urgents de nos concitoyens n'arrivent pas à leurs destinataires le lendemain dans près de trois cas sur dix ? Si ce n'était pas grave, nous pourrions tous ensemble en sourire.
    Avec France Télécom et La Poste notamment, l'Etat dispose d'atouts pour moderniser notre service public. C'est lui qui doit donner l'impulsion et dessiner le paysage.
    C'est grâce à notre action, à votre action, que la fracture numérique, et donc culturelle, et donc sociale, reculera. Il nous appartient de clarifier la règle du jeu et de fixer des objectifs volontaristes. Mais nous devons évidemment nous en donner les moyens.
    Le marché seul ne peut répondre à ces exigences. Seul, il consacrera la France à deux vitesses en ce domaine aussi.
    M. François Brottes. C'est faire preuve de lucidité que de le dire !
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. Certes, il faut redéfinir les contours de l'action de l'Etat, mais on voit bien que nous n'avons jamais eu autant besoin de redéfinir et de moderniser notre service au public - un nouveau service public, plus actuel, plus présent et plus proche des préoccupations de nos concitoyens.
    Je sais que le Gouvernement en est convaincu et ses décisions le prouvent. Je suis très heureux de voir côte à côte sur le banc du Gouvernement Mme la ministre déléguée à l'industrie et M. le ministre délégué au budget car le Gouvernement, grâce à sa rapidité de réaction l'année dernière et à l'intelligence du système proposé, a été le déclencheur du sauvetage de France Télécom. On ne le dit pas assez. Maintenant, il faut sauver La Poste ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est Mme la rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour La Poste et les télécommunications.
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour la poste et les télécommunications. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, chers collègues, le budget de La Poste et des télécommunications est atypique puisqu'il concerne paradoxalement les moyens affectés au pilotage de deux secteurs désormais presque complètement ouverts à la concurrence et qu'il mobilise pour ce faire des crédits très limités en volume : 440 millions d'euros dans la loi de finances pour 2004, soit une augmentation de 0,79 % par rapport à 2003, mais un peu plus de 150 millions d'euros seulement si l'on isole les 290 millions de compensation accordée par l'Etat à La Poste pour la prise en charge du transport de la presse à tarif réduit.
    Ces 150 millions d'euros sont à rapprocher du chiffre d'affaires de France Télécom - 34 milliards d'euros sur le marché français - ou de La Poste - 10 milliards d'euros pour le courrier, toujours sur le marché français. Ils ne représentent que 0,35 % de ces masses.
    C'est dire que ce budget est en fait un budget à « effet de levier », s'appuyant sur des structures administratives remplissant soit des missions d'animation ou de conception, soit des missions d'encadrement et de contrôle.
    Le budget de la poste et des télécommunications n'a donc qu'un lien très distendu avec l'intervention gouvernementale dans les deux secteurs concernés. S'il fallait, comme vient de le faire brillamment mon collègue de la commission des finances, résumer d'une phrase le contexte des deux secteurs de la poste et des télécommunications en 2003, je dirais qu'ils sont tous deux soumis à une urgence, mais que le point d'application de cette urgence s'est déplacé par rapport à ce qu'il était l'an dernier à la même époque : à l'automne 2002, l'urgence concernait l'opérateur dans le secteur des télécoms, et la régulation dans le secteur postal ; à l'automne 2003, elle concerne la régulation dans le secteur des télécoms, et l'opérateur dans le secteur postal.
    En 2002, les priorités allaient au redressement de la situation financière très critique de France Télécom, et à la formulation d'une réponse à la pression de la Commission européenne pour l'instauration d'un régulateur postal. Confrontée à un endettement net de 70 milliards d'euros, France Télécom était en 2002 dans une situation plus que difficile. En quelques mois, son nouveau président, Thierry Breton, a lancé un plan de redressement ambitieux, prévoyant d'importants efforts d'économies internes et une augmentation de capital de 15 milliards d'euros, pour ramener l'entreprise à une situation beaucoup plus saine. Sa dette est aujourd'hui inférieure à 50 milliards d'euros.
    Le redressement paraît solide pour deux raisons : d'une part, il s'inscrit dans un mouvement général d'assainissement du secteur des télécommunications dans le monde ; d'autre part, il s'appuie sur une stratégie industrielle pertinente de positionnement sur les marchés les plus dynamiques.
    Le projet de loi relatif au statut de France Télécom, que notre assemblée aura bientôt l'occasion d'examiner, lèvera la contrainte de la détention de la moitié du capital par l'Etat. Ainsi le problème de rigidité de la structure du capital, qui était au coeur des difficultés traversées par France Télécom, sera résolu.
    L'inquiétude se reporte aujourd'hui sur la situation de La Poste.
    Les difficultés de l'entreprise revêtent plusieurs aspects : une insuffisance de performance intrinsèque et une insuffisante compensation par l'Etat des charges qui lui sont imposées.
    M. François Brottes. Très juste !
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure pour avis. Le projet de contrat de plan, qui a été rendu public le 21 octobre dernier, prend en compte ces divers problèmes dans toute leur vérité et trace des perspectives pour leur résolution, même s'il s'en remet pour certains points à des études complémentaires.
    Ce contrat opte pour la création d'une filiale ayant le statut d'établissement de crédit, qui permettra à La Poste de se rapprocher de la situation des autres postes européennes et d'entrer dans le droit commun bancaire. La gamme de services est également élargie au crédit immobilier sans épargne préalable dans un premier temps, permettant à l'établissement de retenir une clientèle qui lui échappe et d'attirer une nouvelle clientèle de jeunes.
    Le contrat de plan autorise La Poste à investir 1 milliard d'euros jusqu'en 2010 pour l'automatisation des centres de tri, dont le nombre et l'implantation géographique devront être revus.
    S'agissant de la performance accrue que dégagerait une réorganisation du réseau des 17 000 points de contact - il pourrait être restructuré de manière à être mieux adapté à la réalité des densités démographiques territoriales -, la voie choisie est celle de la « diversification » des modes de présence postale. La diffusion de solutions plus souples dans le monde rural, notamment sous la forme des « points Poste » gérés par des commerçants, devrait en effet dégager des ressouces permettant d'accroître la capacité d'accueil dans les zones très densément urbanisées, où La Poste n'est pas assez présente aujourd'hui. Ainsi que vous l'avez clairement dit en commission, madame la ministre, le contact de proximité sera maintenu, mais les modalités de cette proximité seront revues.
    Quant à l'insuffisante compensation par l'Etat des charges d'intérêt général imposées à La Poste, elle a été mise en évidence dans le rapport de juillet dernier de nos collègues Douste-Blazy et Diefenbacher sur la gestion des entreprises publiques, appelant en ce domaine à une évaluation nette et à une compensation juste.
    Le contrat de plan reconduit par ailleurs les dispositifs de compensation relatifs à l'aide à la presse et aux retraites des employés fonctionnaires, en prévoyant dans chaque cas un dispositif pour avancer vers une solution plus complète. Il permet également à l'établissement de bénéficier de l'exonération sur les bas salaires.
    Une mission a été confiée à M. Henri Paul pour trouver une solution pérenne au problème de la diffusion de la presse, puisque la compensation accordée par l'Etat laisse une charge nette de près de 500 millions d'euros à La Poste.
    M. François Brottes. Très juste !
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure pour avis. S'agissant de la charge des pensions, qui représente plus de 2 millards d'euros pour La Poste, un groupe de travail se verra confier la mission de mettre en place un mécanisme de cotisation libératoire pour l'année 2005.
    Le contrat de plan devra s'accompagner d'un vaste programme de formation permettant une meilleure employabilité, une plus grande valorisation des compétences et probablement la création de nouvelles instances de dialogue social.
    En ce qui concerne la régulation, l'urgence est devenue moindre dans le secteur postal depuis le dépôt du projet de loi répondant à l'exigence européenne de mise en place d'un régulateur postal. On a choisi d'étendre les compétences de l'Autorité de régulation des télécommunications au secteur postal. Cela justifie d'ailleurs une augmentation de 1 million d'euros des crédits de l'ART dans le budget de 2004.
    L'urgence en matière de régulation s'est reportée en 2003 sur le secteur des télécommunications, qui est l'objet de bouleversements technologiques profonds, rendant indispensable l'adaptation du cadre de régulation. Le budget de La Poste et des télécommunications tient compte à sa manière de ce contexte très évolutif du secteur des télécommunications en faisant opportunément un effort particulier en faveur de la formation, à travers l'augmentation de 2 % de la subvention au « groupe des écoles de télécommunications », et en faveur de l'Agence nationale des fréquences, dont les crédits de paiement augmenteront de près de 54 % en 2004.
    L'urgence est à l'examen par le Parlement du projet de loi sur les communications électroniques, qui doit transposer les directives du « paquet télécoms ». Vous nous avez indiqué en commission, madame la ministre, que votre préférence allait à une discussion législative.
    Je voudrais enfin m'arrêter sur le problème de la « fracture numérique », qui préoccupe beaucoup la population et les élus des zones rurales...
    M. François-Michel Gonnot. Absolument !
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure pour avis. ... et qui appelle un traitement de plus en plus urgent au fur et à mesure que s'accroît le différentiel des avantages entre les zones desservies et les zones enclavées.
    S'agissant de la téléphonie mobile, la question principale qui se pose est celle de savoir quand on assistera à l'aboutissement concret du processus en cours de couverture des « zones blanches » à la suite de l'accord passé avec les trois opérateurs en septembre 2002.
    Le programme opérationnel d'équipement des sites de la première phase de déploiement prévue par la convention de juillet dernier entre l'Etat, les opérateurs et les collectivités locales est maintenant prêt. Mais il reste à passer à la construction des pylônes sur le terrain, ce qui suppose d'abord une identification des lieux d'implantation, laquelle se négocie avec les collectivités locales.
    M. François-Michel Gonnot. Et c'est long !
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure pour avis. Il faut ensuite obtenir les permis de construire et procéder enfin à la construction des sites et à l'installation des équipements.
    Le processus de construction est donc long, si bien que les premiers résultats ne devraient, au mieux, être visibles qu'à l'été prochain.
    M. François Brottes. Que d'effets d'annonce !
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure pour avis. Un accord avec la société TDF pour la réutilisation des pylônes de télévision en support à l'extension de la téléphonie mobile dans les zones blanches a été évoqué. Qu'en est-il ?
    La décision prise par le Gouvernement, lors du CIADT de septembre 2003, de rendre éligibles au fonds de compensation de la TVA, à titre dérogatoire, les investissements réalisés sous maîtrise d'ouvrage publique par les collectivités territoriales pendant la période 2004-2005 au titre de leur participation à ce plan d'action de couverture du territoire par la téléphonie mobile, contribuera elle aussi à l'accélération des réalisations sur le terrain.
    Néanmoins, la contribution essentielle sera prise en charge directement par les opérateurs de téléphonie mobile, bien que le traitement des « zones blanches » ne représente pas toujours pour eux un investissement particulièrement rentable.
    La modification des règles de financement du service universel permet une plus grande neutralité technologique du prélèvement effectué, même si elle risque d'augmenter potentiellement les cotisations des opérateurs mobiles.
    Ne pourrait-on envisager parallèlement un dispositif d'incitation, conforme au principe du pay or play, qui prévoirait des allégements de charges en fonction des avancées sur le terrain de la résorption des « zones blanches » ? A long terme, cela consisterait à engager une négociation européenne pour obtenir l'inclusion de la téléphonie mobile dans le champ du service universel, afin de pouvoir y faire jouer ce principe.
    A plus court terme, cela consisterait à profiter du renouvellement des licences GSM en 2006 et 2009 pour introduire dans la partie variable de la redevance un mécanisme d'allégement en fonction de la vitesse d'exécution du programme de couverture des « zones blanches ».
    S'agissant de l'Internet haut débit, autre priorité extrêmement importante de nos concitoyens, le Gouvernement a pris tout un ensemble d'initiatives pour favoriser le raccordement dans les zones peu denses, où la rentabilité économique de l'offre d'une fourniture d'accès à haut débit est problématique.
    Permettez-moi de suggérer une autre façon de faire avancer dans la participation financière des collectivités locales : publier le décret en Conseil d'Etat prévu pour l'application de l'actuel article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales, qui fixe les conditions dans lesquelles celles-ci peuvent subventionner la gestion des infrastructures par les opérateurs de télécommunications.
    Enfin, le Gouvernement a ouvert toutes les possibilités techniques alternatives au raccordement filaire en abaissant la taxation sur la diffusion de l'Internet par satellite ; en créant un mécanisme d'amortissement exceptionnel apportant une réduction d'impôts aux entreprises qui décideraient d'acquérir un terminal pour l'accès à l'Internet haut débit par satellite ; et en libéralisant l'utilisation de la Wi-Fi. Mais, là encore, les réalisations restent expérimentales et ne calment pas encore l'attente des populations.
    En conclusion, je souhaiterais insister, madame la ministre, sur le travail qui a déjà été accompli pour résoudre les problèmes qui se posent dans le domaine des postes et télécommunications : le projet de loi sur la régulation postale est déposé, le contrat de Plan est en passe d'être signé, le projet de loi sur les communications électroniques va être discuté, les technologies ainsi que les dispositions juridiques nécessaires pour l'accès à l'Internet à haut débit en zone rurale sont bien identifiées, et le programme d'action pour la couverture des zones blanches démarre.
    En quelques mois, tous les éléments ont ainsi été réunis pour répondre concrètement aux défis que va rencontrer le secteur des postes et télécommunications dans les mois à venir. Je ne doute pas, madame la ministre, que l'année prochaine, lors de la discussion de leur budget, nous pourrons nous réjouir de l'avancement de tous ces dossiers. C'est dans cet esprit, madame la ministre, que notre commission a donné un avis favorable à votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour les services financiers et le budget annexe des Monnaies et médailles.
    M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour les services financiers et le budget annexe des Monnaies et médailles. Madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, la présentation de la loi de finances permet d'apprécier les choix politiques d'un gouvernement. Nous avons débattu, tour à tour, du niveau de la dette, de la baisse de l'impôt sur le revenu. Nous examinons aujourd'hui vos choix de gestion du MINEFI.
    Au-delà des masses financières qui restent stables, sensiblement 15 milliards d'euros - plus 0,40 % -, pour 5,3 % des dépenses totales nettes du budget global, nous pourrons porter un jugement sur vos orientations.
    La terminologie change. Vous n'employez plus « réforme, modernisation », « contrats d'objectifs et de moyens » pour les grandes directions du ministère, mais « Bercy en mouvement » et « contrats de performances ». Par-delà les mots, c'est le fond qui évolue. Vos choix ont une signification très concrète pour nos concitoyens et les personnels.
    Les services financiers, ce sont huit agrégats budgétaires correspondant aux grandes directions du ministère : direction générale des impôts ; direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ; direction générale des douanes et des droits indirects ; Trésor public ; INSEE ; administration générale ; dépenses administratives ; Cour des comptes. Soit 177 716 agents, 10,8 milliards d'euros, en hausse de 1,53 %, et un budget annexe des Monnaies et médailles en équilibre, sans subvention, de 92 millions d'euros bruts, en baisse de 6,2 % par rapport à 2003.
    Vous souhaitez améliorer le service rendu à nos concitoyens. L'objectif et louable. Vos moyens, pour y parvenir, se résument exclusivement à la « performance » : gagner 1 % de productivité par an, notamment grâce à la suppression d'emplois publics en fonction des résultats des directions du ministère. Une baisse de 1,14 %, soit de 2 055 emplois, essentiellement en catégorie C, permettra une économie nette de 28,5 millions d'euros.
    La traduction de ces mesures sur le terrain s'appelle « rationalisation des structures » : à la DGI, par rapprochement des services distincts des centres des impôts et des centres des impôts fonciers ; à la direction de la comptabilité publique, par la suppression de treize recettes des finances en 2003 - dix-huit vont suivre. Le réseau rural sera restructuré selon deux modèles : des permanences dans les locaux de la mairie les jours de marché et des antennes spécialisées dans la gestion des collectivités locales ; à la direction générale des douanes et des droits indirects, par l'ajustement du réseau des contributions indirectes et par la suppression de 181 recettes locales, 56 SASI, huit services de la viticulture ; à la direction générale de la concurrence et de la répression des fraudes, par la fermeture de toutes les structures infra-départementales d'ici 2005, ce qui concernera 182 agents et qui générera des surcoûts liés au déplacement des enquêteurs.
    Vous procédez ainsi au « détricotage » du territoire, sans aucune vision globale. Nous sommes loin d'une amélioration du service rendu aux citoyens, quelle que soit leur localisation.
    Vous indiquez dans le bleu budgétaire qu'en zone rurale « la démarche engagée permettra d'offrir l'organisation territoriale la plus adaptée aux réalités géographiques, économiques et humaines, mais aussi aux besoins locaux des usagers et des élus ». Bel exemple de langue de bois !
    La traduction de ces mesures sur le terrain s'appelle aussi « externalisation », c'est-à-dire privatisation de certaines des missions : à la DRIRE, par l'abandon du contrôle technique des véhicules poids lourds, qui concernera 700 agents à temps plein ; à la comptabilité publique, par l'abandon des activités de vente des produits d'assurance de la CNP, qui concernera 300 agents à temps plein ; enfin, par l'abandon du contrôle de la garantie des métaux précieux rattachée à des recettes des douanes, qui concernera 100 emplois. Et tout cela sans contrepartie de contrôle de la sécurité et de l'environnement pour nos concitoyens.
    L'introduction de la « culture de la performance » passerait par une rémunération au mérite, qui deviendrait un des leviers de la nouvelle gestion. Les agents souffrent d'un certain manque de reconnaissance du travail qu'ils effectuent. Ils font preuve, dans un environnement instable, d'une réelle faculté d'adaptation et d'une grande compétence professionnelle. Ils attendent une réelle lisibilité dans la politique de gestion des personnels. La rémunération au mérite que vous souhaitez mettre en oeuvre introduit une individualisation des comportements au détriment de l'esprit d'équipe nécessaire au bon fonctionnement des services.
    La réduction des effectifs s'appuie sur d'importants investissements en équipements informatiques. En autorisations de programme, le chapitre 57-92 augmente de 33 %, et s'établit à 237 millions d'euros. Les crédits de paiement sont en hausse de 73 %, et s'établissent à 134 millions d'euros.
    Les grands projets informatiques - COPERNIC, pour à peu près 1 milliard d'euros ; HELIOS, pour 80 millions d'euros sur la période 2002-2005 ; ACCORD, dont les marchés en cours s'élèveraient à 184 millions d'euros - mobilisent d'importants efforts financiers et en personnels. Ils justifient la mise en place d'un vrai contrôle de gestion et l'engagement d'une réflexion stratégique sur l'apport de l'assistance externe. Un manque de réflexion sur le pilotage stratégique et financier de l'informatique au sein du MINEFI entraînerait une hausse des coûts qui contredirait les hypothèses de gains de productivité annoncées.
    J'aborderai maintenant quelques points que j'ai développés dans mon rapport.
    Vous avez engagé la restructuration des services de la communication. Elle conduit à supprimer 62 agents, mais dans les services déconcentrés. Le coût consolidé de la communication au ministère de l'économie et des finances s'établit à 46,82 millions d'euros, pour un effectif de 542 agents en 2003. Je rappelle qu'il était de 41,9 millions d'euros en 1999, soit une augmentation de 11,75 %. Quelles économies d'échelle entendez-vous obtenir sur ce poste, afin de diminuer nos dépenses publiques ?
    Vous avez décidé d'accroître le rôle de la direction des grandes entreprises. Celle-ci, avec 259 agents, recouvre 78 milliards d'euros, soit environ un tiers des recettes fiscales de l'Etat. Cette direction est conçue comme devant apporter un meilleur service aux entreprises, ce qui est effectivement le cas, notamment en matière de restitution accélérée de la TVA. Qu'en est-il du contrôle fiscal, qui est le corollaire indispensable d'un système déclaratif ?
    La direction générale des impôts, pour un coût de contrôle de 678 millions d'euros, a effectué près de 11,5 milliards de redressements en 2002. Il serait intéressant de connaître la position du Gouvernement sur le contrôle fiscal. Lors de l'audition de M. Mer devant la commission des finances, ce matin, j'ai cru comprendre qu'il ne constituait pas une priorité pour le Gouvernement.
    La lutte contre la consommation de tabac est devenue une priorité de santé publique. Quel est l'apport du ministère de l'économie et des finances à cette action, alors que les conditions réelles d'un trafic sont réunies au niveau national et que la direction des douanes voit le nombre de ses personnels diminuer ?
    Nous avons un réseau de proximité de 34 000 commerçants, préposés de l'Etat. Ce ne sont pas les mesures de remises sur les ventes au détail qui régleront les problèmes récemment apparus dans les zones frontalières. Certains contrats de gérance ne peuvent plus être assumés. Attendre le premier trimestre 2004, c'est bien loin pour les nombreux distributeurs concernés.
    La contrebande clandestine va se développer. En 2002, 173 tonnes de cigarettes ont été saisies. Quelles mesures entendez-vous prendre, afin de ne pas laisser se développer ces trafics et voir disparaître un réseau de commerçants de proximité ? Ceux-ci n'attendaient pas d'aide et préféreraient se voir confier de vraies missions commerciales.
    Je terminerai par les Monnaies et médailles. Le seuil le plus bas de frappe de monnaies courantes semble avoir été atteint en 2003. La commande de 760 millions de pièces, en hausse de 19 %, le prouve. Je souhaite souligner ici l'effort consenti - notamment sur leurs salaires - par les personnels de Pessac, leur professionnalisme, ainsi que celui de la direction, pour donner une perspective commerciale au site de Paris. La prépondérance de l'activité industrielle et commerciale rend malaisé le maintien d'un budget annexe après 2005. Quelles perspectives entendez-vous donner à cette mission effectuée par plus de 700 agents ? Vous ne vous êtes pas exprimé publiquement sur ce sujet depuis le dernier CTPM d'octobre 2002.
    En conclusion, le ministère de l'économie et des finances est le maître d'oeuvre de la réforme budgétaire ; une direction a été créée à cet effet en mars 2003. Le nouveau cadre budgétaire qui est ébauché donne la priorité à l'identification de politiques plus qu'à une logique organisationnelle, et présente sept programmes opérationnels pour les services financiers.
    Contrairement à certaines remarques formulées par des membres de votre majorité, je constate que vous avez bien avancé sur le terrain de la mise en oeuvre de la LOLF. On n'en attendait pas moins d'un des pères fondateurs - avec Didier Migaud - de cette réforme. Reste que votre action, qui ne peut se résumer à la seule réduction de personnels pour obtenir des gains de productivité, manque de lisibilité.
    Vos budgets de fonctionnement de la communication et de l'informatique sont encore trop opaques. Les grands projets informatiques de l'Etat pourraient conduire à une vraie politique industrielle, et ainsi contribuer à la réforme de l'Etat. Or vous n'avez pas de véritable maîtrise d'ouvrage de ce dossier informatique.
    Enfin vos restructurations, resserrements et vos externalisations ne peuvent convaincre un élu attaché à l'aménagement du territoire de la pertinence de vos choix. La réforme par la modernisation, oui. Mais pas à n'importe quel prix !
    En conséquence, devant la commission des finances, j'ai proposé le rejet de ces crédits. Mais je n'ai pas été suivi par votre majorité, qui les a approuvés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour le Trésor et les entreprises publiques.
    M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour le Trésor et les entreprises publiques. Le projet de la loi de finances pour 2004 comporte deux changements notables : les comptes spéciaux du Trésor sont moins nombreux ; leur excédent est moins marqué que par le passé.
    La diminution du nombre des comptes spéciaux est la conséquence de la mise en oeuvre progressive de la loi organique. Celle-ci prévoit en effet qu'à compter de 2006, seuls subsisteront les comptes d'affectation spéciale alimentés par des ressources qui ont un lien direct avec des dépenses.
    Le Gouvernement souhaitant que cette règle s'applique progressivement, deux comptes spéciaux seront supprimés dès 2004 : le Fonds national de l'eau et le Fonds national pour le développement de la vie associative, tous deux alimentés par une partie du prélèvement sur les paris mutuels. En application de la même règle, il restera à supprimer avant 2006 le Fonds national pour le développement du sport, également alimenté par le pari mutuel ; et le fonds de provisionnement des charges de retraite, financé par la redevance sur le chiffre d'affaires des licences UMTS. Cela dit, la suppression d'un compte spécial n'entraîne ipso facto la disparition ni de la recette, ni de la dépense. La suppression ne fait qu'annuler le lien qui a été établi entre l'une et l'autre. Si la dépense est maintenue, elle doit être financée par le budget général.
    En 2004, les comptes d'affectation spéciale passent donc de onze à neuf, et le nombre total des comptes spéciaux de trente et un à vingt-neuf. Leur excédent sera moins marqué que par le passé. Il était de près de 800 millions d'euros en 2002, en exécution ; de plus d'un milliard d'euros en 2003, en loi de finances initiale.
    Il devrait être, selon le projet de loi de finances pour 2004, de 313 millions d'euros, soit une réduction des deux tiers par rapport à l'an dernier.
    Cette baisse est liée essentiellement à l'évolution du compte d'avances sur le produit des impositions locales. Ce compte, après avoir été constamment et substantiellement excédentaire depuis 1996, devrait être marqué l'an prochain par un déficit évalué à 62 millions d'euros. Ce déficit s'explique par deux éléments : l'augmentation des impôts locaux, qui entraîne une augmentation des avances aux collectivités territoriales, et donc des dépenses supplémentaires pour le compte spécial ; une baisse des recouvrements sur les exercices antérieurs, conséquence logique de l'amélioration sensible des taux de recouvrements des dernières années. Il est clair que plus les recouvrements d'une année donnée sont performants, moins les restes à recouvrer les années suivantes sont importants.
    Cette évolution n'est pas sans conséquence sur l'équilibre du budget général, car le compte d'avances sur le produit des impositions locales pèse d'un poids considérable. Avec 60 milliards d'euros de recettes et de dépenses, il représente à lui seul les deux tiers du volume global des comptes spéciaux. La disparition de son excédent, qui était de l'ordre de 500 millions d'euros chaque année depuis 1996, représente une contrainte supplémentaire pour le budget de 2004.
    Au-delà de son impact financier, ce dossier a un aspect politique puisqu'il concerne les relations entre l'Etat et les collectivités territoriales. Le partage des responsabilités entre les collectivités territoriales, qui fixent les taux d'imposition, et l'Etat, qui perçoit les taxes, accorde les avances et gère la trésorerie, nécessitera sans doute, à l'occasion de la discussion de la prochaine loi de décentralisation, un examen particulièrement attentif.
    S'agissant des entreprises publiques, je souhaite saluer la volonté du Gouvernement de rendre plus efficace et plus transparente la gestion de son patrimoine industriel et de faire preuve de pragmatisme : en investissant lorsque des intérêts stratégiques sont en jeu, et en cédant ses participations minoritaires dans le cas contraire. La performance de la gestion du patrimoine économique du pays, ce sera la mission principale de l'Agence des participations de l'Etat, sur laquelle la commission d'enquête sur les entreprises publiques a fait, en juillet dernier, une série de propositions.
    Monsieur le ministre, la représentation nationale sera très intéressée par les informations que vous pourrez lui donner sur ce point comme sur l'ensemble des propositions de la commission d'enquête, destinées à responsabiliser les entreprises publiques, à alléger les contrôles et à réorganiser l'appareil de l'Etat. Je rappelle qu'il a été proposé, notamment, la suppression - totale ou partielle - du contrôle d'Etat, du comité des investissements à caractère économique et social et de la commission interministérielle de coordination des salaires.
    Le pragmatisme, pour l'Etat, c'est être plus présent lorsque l'intérêt national l'exige, et l'être moins lorsque la vie de l'entreprise le permet. Deux exemples illustrent la volonté du Gouvernement de s'engager activement dans des investissements stratégiques : le soutien apporté à Alstom : 500 millions d'euros de souscription de titres, 200 millions d'euros de prêts - l'intérêt était majeur, l'engagement du Gouvernement a été immédiat - et la budgétisation des concours financiers à Réseau ferré de France.
    L'an prochain, 800 millions d'euros destinés à la stabilisation de la dette et 675 millions d'euros consacrés à la régénération des voies ferrées seront financés par le budget général, ce qui libèrera à due concurrence les ressources du compte spécial 902-24, lesquelles pourront ainsi être consacrées à de réelles dotations en capital. Celles-ci pourront bénéficier aux fondations reconnues d'utilité publique dans le secteur de la recherche, dont il sera question au cours de notre discussion.
    A l'inverse, la cession des participations minoritaires s'est très logiquement poursuivie : vente des actifs résiduels du Crédit lyonnais, de Dassault Systèmes, de Thomson, et diminution de 26 à 17 % de la participation de l'Etat au capital de Renault. L'enjeu de ces mesures est certes budgétaire, puisque les cessions d'actifs ont rapporté à l'Etat 4 milliards d'euros depuis le début de l'année, malgré la fragilité du marché boursier. Mais il est également économique, le retrait de l'Etat étant l'occasion, pour les entreprises concernées, de nouer de nouveaux partenariats industriels ou commerciaux : rapprochement du Crédit lyonnais et du Crédit agricole après la cession des titres de l'Etat à la BNP Paribas ; de Thomson avec l'opérateur chinois TCL ; d'Air France avec KLM.
    Cela étant, si la ligne de conduite de l'Etat devient plus claire, la situation financière des entreprises publiques reste globalement préoccupante. Elle tient en quelques chiffres : près de 20 milliards d'euros de pertes en 2002 ; une diminution, en un an, de plus de moitié des capitaux propres, qui sont tombés à 23 milliards d'euros en 2002 ; une explosion de la dette, dont le montant est près de cinq fois supérieur aux capitaux propres.
    Je ne reviendrai pas sur les causes de cette situation, au demeurant très variables selon les entreprises. Elles ont été précisément analysées par la commission d'enquête au printemps dernier. Je me limiterai à saluer le redressement accompli par France Télécom et entrepris aujourd'hui par La Poste.
    Je souhaite souligner une fois encore la nécessité d'un effort global pour améliorer la compétitivité du secteur public. Dans un monde ouvert, seule la compétitivité est une garantie de perennité. Elle est une chance plus qu'une charge. La recherche de compétitivité doit porter sur tous les aspects de la gestion, y compris sur la gestion des personnels - s'agissant des entreprises publiques, les effectifs et les retraites.
     Les charges de personnel représentent 65 % du chiffre d'affaires de La Poste, contre 35 % pour les postes allemande et néerlandaise. Elles représentent 56 % du chiffre d'affaires de la SNCF, contre 47 % pour la Deutsche Bahn. Quant au dossier des retraites, il est suffisamment connu, et surtout suffisamment complexe, pour que je ne le détaille pas ici.
    Monsieur le ministre, la majorité parlementaire sera aux côtés du Gouvernement lorsqu'il s'agira de rechercher, en concertation avec les représentants syndicaux, le plus juste équilibre entre l'intérêt des personnels, qui est légitime, et celui des entreprises publiques, qui l'est également, entre les droits acquis et la nécessité d'une plus grande équité entre les salariés. N'oublions pas que l'essentiel est de permettre à nos entreprises publiques, entreprises auxquelles tous les Français sont profondément attachés, d'affronter la concurrence avec les meilleures chances de succès.
    Le budget du Trésor et des entreprises publiques a été approuvé par la commission des finances. Je propose à notre assemblée de l'adopter. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. François-Michel Gonnot, premier orateur inscrit.
    M. François-Michel Gonnot. Madame la ministre, l'examen des crédits de l'industrie, de la poste et des télécommunications nous donne l'occasion de nous interroger sur la difficile question de la désindustrialisation de la France. En effet, notre groupe est assez inquiet de la petite chanson, en passe de devenir un tube à la mode, sur le thème de la France qui perd sa richesse industrielle, de la France qui baisse les bras, de la France qui tombe, bref de la France qui s'appauvrit. Ce discours à la fois défaitiste et dangereux ne nous convient pas. Nous estimons que la France doit être fière de son industrie et mobilisée autour d'elle, plus encore dans les temps difficiles que nous traversons.
    Rappelons que la France est la cinquième puissance industrielle du monde, que l'industrie représente près de 18 % de son PIB et mobilise quatre millions d'emplois, que notre pays compte 22 000 entreprises industrielles de plus de vingt salariés, dont certaines parmi les premières du monde dans les secteurs de l'automobile, de l'énergie, de l'aéronautique, de l'espace, des produits de luxe, et qu'il dénombre aussi 141 000 entreprises de moins de vingt salariés, qui contribuent pour plus de 22 milliards d'euros à notre excédent commercial.
    La France perd des emplois industriels et voit un certain nombre d'entreprises quitter le sol national, c'est vrai, mais ce phénomène concerne l'ensemble des pays européens et aussi les Etats-Unis. Du reste, il ne date pas d'aujourd'hui. Ceux qui, ces dernières années, à la tête de ce pays, ont augmenté les impôts et les charges, multiplié les contraintes bureaucratiques et normatives, institué les 35 heures, voté des lois soi-disant de modernisation sociale et qui étaient en fait des lois anti-industrie, portent une lourde, une très lourde responsabilité dans la désindustrialisation de la France qu'ils dénoncent aujourd'hui.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. C'est vrai !
    M. François Brottes. Allez-y ! Ça défoule !

    M. François-Michel Gonnot. Dans ce contexte de mutation industrielle, le groupe UMP se félicite de la politique mise en place par le Gouvernement depuis depuis dix-huit mois. En baissant les impôts et les charges, en réhabilitant l'entreprise et le travail, en simplifiant autant que faire se peut la vie administrative, en relançant l'innovation, en s'attachant à revaloriser l'attractivité du site France, cette politique essaie de stopper la désindustrialisation, ce qui n'avait pas été fait au cours des dernières années.
    L'objectif, fixé par le Premier ministre, de maintenir à l'échéance 2006 le nombre d'emplois dans l'industrie et dans les services à l'industrie à son niveau actuel devrait être et est un objectif de mobilisation nationale. Nous nous félicitons, madame la ministre, de trouver dans votre budget pour 2004 les moyens nécessaires pour contribuer à la réalisation de cet objectif. Ainsi, les crédits destinés à accompagner les mutations industrielles progressent : ceux destinés à l'aide aux projets d'entreprise et à l'accompagnement des restructurations augmentent par exemple de 20 %.
    Votre budget met aussi en exergue deux enjeux majeurs pour l'industrie française : la formation des hommes ; la recherche industrielle et l'innovation. Il faut inciter les jeunes Français à regarder autrement et de façon positive les métiers de l'industrie : 209 000 millions d'euros sont inscrits pour la formation à ces métiers, soit une augmentation de près de 5 %.
    De même, l'effort public en faveur des entreprises qui innovent a doublé. Le Gouvernement consacre au total, dans votre budget et celui de la recherche, 1,4 milliard d'euros à l'innovation et à la recherche industrielle dans les entreprises. C'est un effort remarquable.
    Je voudrais néanmoins profiter de ce débat, madame et monsieur les ministres, pour mettre l'accent sur un problème déjà évoqué par l'un des rapporteurs, celui du financement des centres techniques industriels. Vous avez très récemment signé une lettre commune aux présidents des CTI pour leur dire que les PMI disposaient avec ces organismes « d'un outil de mutualisation dont chacun reconnaît l'utilité et qu'il importe de conforter ». Conforter, cela veut dire aussi soutenir financièrement. Or les solutions aux problèmes de financement des CTI ne figurent pas dans ce projet de loi de finances.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. C'est vrai !
    M. François-Michel Gonnot. Ceux qui sont financés en totalité sur le budget de l'Etat ont une dotation inchangée depuis quatre ans, ce qui signifie qu'elle baisse. Ceux qui ne sont que partiellement budgétés attendent désespérément une taxe affectée qui devait voir le jour dans le projet de loi de finances pour 2004 et que nous espérons, ainsi que les rapporteurs, voir apparaître dans le projet de loi de finances rectificative pour 2003. Faute de quoi ces établissements ne pourraient être financés à compter du 1er janvier.
    M. François Brottes. C'est très important !
    M. François-Michel Gonnot. S'agissant de la politique énergétique, je ne reviendrai pas, madame la ministre, à ce qu'ont dit les rapporteurs, mais nous souhaiterions qu'à l'occasion de cette discussion budgétaire vous nous apportiez des précisions sur un calendrier parlementaire que nous avons du mal à lire. Nous avons, les uns et les autres, rappelé combien il est urgent de faire évoluer le statut des entreprises et des opérateurs énergétiques, notamment EDF-GDF. Nous savons que vous vous êtes engagée dans le grand chantier de la loi d'orientation, texte qui devrait établir un large consensus politique sur le mix énergétique français des prochaines années. Il faudra aussi transposer les cinq directives concernant peu ou prou l'énergie qui sont encore dans vos cartons. Il faudra enfin s'attaquer aux problèmes de sûreté nucléaire. Comment voyez-vous ce calendrier parlementaire ? Les mois courent. Les réformes sont urgentes. Les échéances sont là, en particulier celle du 1er juillet 2004, nouvelle étape de la libéralisation du marché de l'électricité et du gaz pour les professionnels.
    En ce qui concerne La Poste et les télécommunications, les deux rapporteurs ont brillamment rappelé les enjeux. « Il faut sauver La Poste ! », disait M. Joyandet. Il a raison. C'est nous qui avons sauvé France Télécom.
    M. Alain Joyandet, rapporteur spécial. C'est vrai !
    M. François-Michel Gonnot. A nous de sauver La Poste ! Il subsiste néanmoins quelques problèmes que je voudrais évoquer au nom du groupe UMP.
    Je pense d'abord à la présence de La Poste en milieu rural. Le contrat de plan Etat-La Poste comporte un certain nombre de réponses à ce sujet.
    M. François Brottes. Si peu !
    M. François-Michel Gonnot. Nous sommes cependant inquiets, sur le terrain, de voir comment ces solutions pourraient se mettre en place.
    M. François Brottes. C'est un aveu !
    Mme Catherine Vautrin, rapporteure pour avis. Faute avouée est à moitié pardonnée.
    M. François-Michel Gonnot. Des menaces continuent de peser sur les bureaux de poste en milieu rural. Nous avions bien compris qu'un certain nombre devraient disparaître ou en tout cas évoluer, mais les élus locaux - nous sommes ici pour le rappeler - semblent très fortement préoccupés par la question du maintien de ces bureaux, qui sont souvent les derniers services publics de nos petites communes.
    Je n'insisterai pas sur la fracture numérique ni sur les lacunes de la couverture GSM. Je confirmerai simplement les propos de nos deux rapporteurs sur la nécessité de trouver d'urgence des solutions, maintenant que les décisions sont prises et que la volonté du Gouvernement est clairement affirmée.
    Madame la ministre, face à la désindustrialisation, le Gouvernement a su changer de cap pour soutenir l'effort des entreprises et favoriser la relance de l'économie, dans la perspective d'un retour de la croissance que nous attendons, comme vous, pour dans quelques mois. Le groupe UMP sera donc heureux de voter votre budget, dont les orientations fortes et innovantes nous paraissent aller dans le bons sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention portera sur le titre II du budget des charges communes, et plus spécialement sur le budget de la présidence de la République.
    Les crédits qu'il nous est proposé de voter pour 2004 s'élèvent à 31,3 millions d'euros. Ce n'est pas le budget réel de la présidence de la République. Il faut que vous sachiez, mes chers collègues, puisque le rapporteur ne le dit pas, que l'ensemble des ministères continuent à financer le fonctionnement, les déplacements, les investissements, le personnel mis à disposition de la présidence de la République, pour une somme que je peux évaluer, selon les réponses qui m'ont été fournies par les divers ministères, à 26 ou 27 millions d'euros.
    M. François-Michel Gonnot. C'est moins que sous Mitterrand !
    M. René Dosière. Autrement dit, le budget réel de la présidence de la République est le double de celui qu'il nous est demandé de voter dans le cadre des charges communes.
    M. Christian Bataille. C'est honteux !
    M. René Dosière. Je considère que c'est une anomalie.
    Je vous donne un dernier exemple. L'ensemble des ministères, y compris le vôtre, monsieur le ministre du budget, dépensent 16 millions d'euros pour mettre à disposition de l'Elysée 465 fonctionnaires.
    M. François-Michel Gonnot. Et sous Mitterrand, c'était combien ?
    Mme Arlette Franco. Combien coûtaient les châteaux !
    M. Christian Bataille. C'est vieux !
    M. François-Michel Gonnot. Pas tant que ça !
    M. René Dosière. L'ensemble des ministères, disais-je, mettent à disposition, donc continuent à financer, 465 fonctionnaires pour une somme de 16 millions d'euros, alors que les dépenses de personnel de l'Elysée s'élèvent à 13 millions d'euros seulement. Encore faut-il en défalquer 1,666 million d'euros destinés à rembourser à la ville de Paris les 33 fonctionnaires qui ont suivi leur maire quand il a été élu à l'Elysée.
    M. Christian Bataille. Somme qui s'ajoute en fait aux 16 millions !
    M. René Dosière. Autrement dit, quand le rapporteur spécial nous annonce que la remise à niveau du budget de l'Elysée est maintenant terminée, c'est parfaitement inexact. Ce sera vrai le jour où il y aura enfin un vrai budget de l'Elysée,...
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. C'est bien engagé !
    M. René Dosière. ... le jour où chacun d'entre nous, car c'est le rôle de la représentation nationale, en connaîtra le montant.
    M. Christian Cabal. Pourquoi ne l'avez-vous pas demandé avant ?
    M. François-Michel Gonnot. Sous Mitterrand, on ne vous a pas entendu ! Vous faites maintenant de ce sujet votre fonds de commerce !
    M. René Dosière. Il ne m'appartenait pas de poser ce genre de question.
    M. Christian Cabal. Ponce Pilate !
    M. le président. Je vous rappelle, monsieur Dosière, que vous n'avez que cinq minutes.
    M. René Dosière. Je les respecterai, monsieur le président, rassurez-vous.
    Il est facile d'invoquer les prédécesseurs, comme M. le ministre l'a fait l'année dernière.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Si vous faites la même intervention que l'année dernière, je vous ferai la même réponse. (Sourires.)
    M. René Dosière. Mais chacun sait bien que, sous la Ve République, il est des questions que l'on peut poser quand on est dans la majorité (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), et d'autres que l'on peut poser quand on est dans l'opposition.
    M. François-Michel Gonnot. Quand vous étiez dans la majorité, on ne vous a pas entendu !
    M. René Dosière. Or, quand vous étiez dans l'opposition à M. Mitterrand, je n'ai entendu aucune question sur le budget de l'Elysée.
    M. François-Michel Gonnot. Nous, on avait de la décence !
    M. René Dosière. J'espère en tout cas, monsieur le ministre, que vous répondrez cette année aux quatre questions que je vais vous poser.
    Premièrement, puisque nous sommes au terme de l'exercice 2003, pouvez-vous nous dire si l'Elysée a mis fin à la pratique qui était la sienne depuis des années, consistant, en cours d'exercice, à compléter ses crédits par des sommes quelquefois même supérieures à son budget initial.
    M. François-Michel Gonnot. Jaloux !
    M. René Dosière. On nous avait annoncé que ce serait terminé en 2003. Nous ne pouvons pas le savoir, monsieur le ministre, mais vous devez, vous, le savoir. Par conséquent, je vous pose la question : a-t-on mis fin à cette pratique ?
    Deuxièmement, pourquoi ne pas regrouper dans le titre II l'ensemble des crédits de la présidence de la République de manière à faire disparaître l'opacité et à faire apparaître la transparence ? Bref, êtes-vous pour l'opacité ou pour la transparence de ce budget ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Voilà qui n'est pas manichéen !
    M. Christian Cabal. La réponse est induite !
    M. René Dosière. Troisièmement, il apparaît dans les « jaunes » budgétaires que l'Elysée perçoit des intérêts pour un montant de 250 000 euros. Sur la base d'un rendement de l'ordre de 3,5 %, hypothèse qui n'a rien d'excessif, cela veut dire que le capital placé atteint près de 8 millions d'euros.
    M. François-Michel Gonnot. C'est de la bonne gestion !
    M. René Dosière. Pourquoi l'Elysée dispose-t-il d'une cagnotte de 8 millions d'euros ?
    M. Christian Bataille. Il faut bien payer les billets d'avion !
    M. René Dosière. C'est choquant. Cela représente trop d'argent, surtout quand on sait, mes chers collègues, que le Parlement accorde toujours aux pouvoirs publics les sommes qui lui sont demandées. Alors que la rigueur s'impose dans les finances publiques, une telle cagnotte n'a pas lieu d'être.
    Quatrièmement, enfin, la gestion du budget de la présidence de la République est entièrement privée puisqu'elle ne repose sur aucun texte, ni législatif ni réglementaire, à telle enseigne que la rémunération du Président de la République est fixée par lui-même et non par un texte quelconque, contrairement à ce qui se passe pour les ministres. La Cour des comptes a déjà observé que la présidence est le seul pouvoir public pour lequel il n'existe aucun texte. Le Gouvernement ne juge-t-il pas souhaitable que, s'agissant de fonds publics, on puisse au moins définir les conditions générales dans lesquelles cet argent doit être engagé ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.
    M. Jean Dionis du Séjour. Madame la ministre, la contribution du groupe UDF à la discussion générale du budget de l'industrie, de la poste et des télécommunications sera volontairement centrée sur quatre messages forts.
    Premièrement, un soutien sans réserve à votre politique d'amélioration de la compétitivité des entreprises françaises au travers de la recherche-développement et de l'innovation. Le Gouvernement a clairement identifié la capacité de notre industrie à créer de nouveaux produits et de nouveaux services comme un des facteurs clés de la croissance. Votre budget, sur ce point, est novateur et adapté à la situation actuelle de notre industrie.
    Le projet de budget regroupe clairement l'ensemble des crédits, et si l'on y ajoute les autres sources de financement public, le soutien public sous forme d'aides financières diverses s'élève pour 2004 à 500 millions d'euros, ce qui est, pour la première fois depuis longtemps, à la hauteur de l'enjeu que représente l'innovation industrielle.
    Votre budget met en oeuvre quatre leviers principaux : la rénovation du crédit d'impôt ; la mise en place de nouvelles mesures en faveur des business angels ; la création d'un dispositif d'aide aux jeunes entreprises ; le renforcement du rôle de l'ANVAR. Cela forme un ensemble à la fois cohérent, financé et novateur. Nous tenions à apporter notre soutien à ce volet de votre budget. Nous sommes convaincus que, sur ce point, il vise juste.
    La deuxième contribution du groupe UDF consiste en une analyse de la situation très dégradée de La Poste et des initiatives très fortes qui sont à prendre pour la redresser. La Poste est en grand danger, en raison non seulement de la diminution de l'activité courrier, mais aussi du recul permanent de sa part de marché dans les services financiers et du retard pris pour sa modernisation. Comme l'affirme le président de la commission des affaires économiques du Sénat, M. Gérard Larcher, bon connaisseur des problèmes postaux, nous en sommes probablement au stade de la dernière chance avant que la poste française ne risque de devenir une sous-traitante de la poste allemande ou néerlandaise. Nos actions doivent donc être à la mesure de la gravité de la situation.
    Madame la ministre, les 300 000 salariés de La Poste, les élus, les citoyens contribuables ont besoin de toute la vérité. Ils savent que la direction de La Poste devra nécessairement jouer sur quatre leviers pour redresser une situation extrêmement délicate : une politique sociale redéfinie ; le réajustement de l'activité courrier ; la modernisation du réseau ; la renégociation de certains engagements liant l'Etat à l'exploitant public.
    Vous venez de boucler la négociation du contrat de plan avec La Poste. Cet accord est à mettre à l'acquis de ce gouvernement. Néanmoins, le contrat est discret sur la politique sociale à conduire dans les cinq années à venir. Nous vous suggérons, nous vous demandons de dire tout simplement la vérité, y compris dans ce domaine très sensible.
    Oui, La Poste a embauché à contretemps 20 000 postiers.
    M. Daniel Paul. A contretemps ?
    M. Jean Dionis du Séjour. Elle a particulièrement souffert, en tant qu'entreprise de main-d'oeuvre, de la réforme des 35 heures. Celle-ci est parfois un bouc émissaire facile, mais, dans le cas présent, elle est la vraie responsable de l'accroissement d'environ 7 % de la masse salariale de l'entreprise.
    Oui, il y aura des départs à la retraite non remplacés et des contrats non renouvelés. Les personnels de La Poste et leurs syndicats le comprendront, à condition que leur soit présenté un plan lisible qui indique solennellement le refus de licenciements secs au profit d'une stratégie négociée de réduction d'effectifs par départs à la retraite et non-renouvellement de contrats. Nous insistons notamment sur la nécessité sociale d'offrir aux postiers des perspectives de carrière diversifiées dans les trois métiers du groupe.
    La vérité doit être celle des coûts : il faudra bien autoriser La Poste à réaligner ses tarifs postaux.
    La vérité, nous la devons aussi aux élus en ce qui concerne la modernisation du réseau postal, si nous voulons qu'ils sortent du double langage, vertueux à Paris, parfois démagogique sur le terrain.
    M. François Brottes. Très vrai !
    M. Jean Dionis du Séjour. Aux élus, il faut apporter une vision d'avenir et des propositions alternatives pour faire disparaître l'impression désastreuse de marche en arrière silencieuse sur tous les services publics : oui à la redéfinition du réseau postal, mais en développant parallèlement le haut débit et la téléphonie mobile sur tout le territoire, ainsi que les maisons de service public.
    Enfin, en ce qui concerne les services financiers, le feu vert donné par l'Etat à la distribution de crédits immobiliers va dans la bonne direction, mais il nous paraît insuffisant. L'extension des produits de La Poste aux prêts à la consommation doit être programmée le plus rapidement possible. Sur cette voie alliant réforme et discours de vérité, vous pourrez compter sur l'aide du groupe UDF.
    Troisième message : le bilan de l'action de réforme du Gouvernement dans le secteur des télécoms est positif, mais il convient d'amplifier ces réformes. Pour l'année écoulée, il faut saluer l'action essentielle du Gouvernement pour sauver France Télécom. Aujourd'hui, l'entreprise va mieux, et nous le devons à votre action et à celle de Francis Mer, soutenues par le Parlement dans le cadre d'un vrai consensus politique.
    Avec le projet de loi relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom que nous examinerons en décembre, vous poursuivez la modernisation de l'entreprise dans des conditions que, pour l'essentiel, le groupe UDF approuve. L'Etat a agi comme il le devait pour sauver France Télécom lors de la crise de 2002, et il lui faut poursuivre ce travail de modernisation sans craindre de débloquer tous les verrous de l'ancien monopole. Ainsi, le groupe UDF estime que la possibilité de revendre des abonnements en téléphonie fixe est une bonne chose, de même que la mise en place d'un véritable dégroupage de l'ADSL.
    L'ensemble du secteur des télécommunications peut maintenant faire l'objet d'un premier bilan. En lançant le plan RESO 2007, le 12 novembre 2002, le Premier ministre lui-même a défini un cadre. Trois projets de loi étaient prévus.
    Le premier, intitulé « confiance dans l'économie numérique », dont j'ai l'honneur d'être le rapporteur, viendra bientôt en deuxième lecture devant notre assemblée. Le texte a été enrichi par l'examen parlementaire et je tiens, madame la ministre, à saluer votre ouverture d'esprit lors de nos débats.
    Un deuxième dispositif législatif, visant à la transposition des directives « communication électronique » - le fameux « paquet télécoms » -, est actuellement sur le bureau de l'Assemblée nationale. Mais vous n'avez pas pu nous indiquer, en commission, sous quelle forme le Parlement pourrait en discuter : par voie d'amendements au projet de loi sur la confiance dans l'économie numérique, par voie d'ordonnance ou par la voie parlementaire classique. Comme l'a souligné Mme Vautrin, rapporteure pour avis pour le budget des postes et télécommunications, il y a une réelle urgence à définir et à adopter le cadre de la régulation. Je vous remercie de bien vouloir nous préciser vos intentions dans ce domaine.
    Enfin, un troisième texte, davantage axé sur la question de la diffusion et de l'appropriation des nouvelles technologies, devait être présenté par vous-même et par Mme Haigneré au premier trimestre 2003. Or, selon vos propres dires, le travail gouvernemental n'a pas encore commencé sur ce texte, qui est sans doute victime de la rigueur budgétaire actuelle. Ce projet n'est pourtant pas le moindre, puisqu'il devait être le vrai support d'une politique publique nationale s'attaquant à la fracture numérique et au retard que notre pays accuse aujourd'hui encore en matière d'équipement et de diffusion des NTIC et que le rattrapage des derniers mois n'a pas suffi à combler. Ainsi, seuls 29 % des foyers français sont connectés à Internet, contre 36 % en Grande-Bretagne et 54 % au Danemark. Ceux qui se connectent à domicile sont jeunes et diplômés. Seuls 7 % des internautes sont des ouvriers, alors qu'ils représentent 17 % de la population. Il convient donc, comme vous l'aviez prévu, d'encourager financièrement et fiscalement l'achat d'ordinateurs et la connexion à Internet, notamment pour les familles françaises les plus modestes.
    Madame la ministre, au cours de ses dix-huit premiers mois d'activité, le Gouvernement a beaucoup travaillé dans le secteur des télécommunications. Il lui faut veiller à garder le souffle initial et à respecter l'ensemble de la feuille de route RE SO 2007.
    Il faut noter l'apparition d'une vraie divergence entre les positions de l'UDF et celle du Gouvernement...
    M. François Brottes. Encore ?
    M. Jean Dionis du Séjour. ... en ce qui concerne la politique énergétique de la France.
    Après l'organisation d'un grand débat national, le Gouvernement s'est engagé à présenter au Parlement une loi d'orientation sur la politique énergétique de la nation avant la fin de l'année 2004. Il faut l'en féliciter. L'enjeu est de préparer notre avenir énergétique et de permettre le développement durable de notre pays tout en assurant son indépendance énergétique. Cette loi n'est pas une loi de programmation sectorielle banale, compte tenu de la dépendance de l'ensemble de nos activités vis-à-vis de nos approvisionnements énergétiques. Elle traduit en fait un vrai choix stratégique national. Or, le débat vient brusquement de se focaliser sur la question de l'opportunité du lancement urgent d'un réacteur nucléaire de type EPR. Pour le groupe UDF, un tel débat est prématuré. Entendons-nous bien. La France est un des leaders mondiaux de l'industrie électro-nucléaire. L'enjeu industriel est de taille pour AREVA, pour EDF et pour toute notre industrie. Cet enjeu est réel, et il est bien entendu de votre devoir, madame la ministre, d'y être attentive. Mais ce n'est pas la priorité. La priorité absolue est le débat énergétique, la démarche collective qui doit nous conduire à prendre de bonnes décisions,...
    M. Christian Cabal. C'est une bonne décision !
    M. Jean Dionis du Séjour. ... de long terme, dans l'intérêt national.
    M. Jean Dionis du Séjour. Pour cela, il nous faut d'abord débattre de nos besoins futurs en énergie, sans démagogie,...
    M. Christian Cabal. Ce n'est pas de la démagogie, c'est du réalisme !
    M. Jean Dionis du Séjour. ... sans rêver à un peuple de France différent de ce qu'il est, mais avec la volonté farouche de limiter l'effet de serre, de faire la guerre aux gaspillages et de modifier lentement, mais sûrement, nos comportements pour aboutir à ces résultats.
    Il est urgent d'étudier dans la transparence les réels besoins de nos concitoyens, ainsi que les différences qui existent entre ces besoins et les habitudes de consommation énergétique. Alors, de l'audace, encore de l'audace, en matière d'économies d'énergie ! Ensuite, et ensuite seulement, viendra le temps de décider de la composition du futur bouquet énergétique pour répondre à nos besoins futurs.
    Notre première priorité doit être de réduire sur le long terme notre consommation de produits pétroliers. La seconde priorité doit être de développer vigoureusement les énergies renouvelables. Le Parlement devra, ensuite, se saisir sur le fond de l'arbitrage à rendre entre le gaz et le nucléaire...
    M. Christian Bataille. Voilà ! Le lobby gazier !
    M. Jean Dionis du Séjour. ... qui resteront à court et moyen termes les deux alternatives significatives au pétrole, chacune présentant des avantages et des inconvénients qu'il ne faut pas caricaturer. Cet arbitrage, complexe, mérite un vrai débat démocratique en profondeur.
    Enfin, lorsque la place du nucléaire aura été clairement quantifiée, nous pourrons aborder en toute sérénité les arbitrages internes à la filière du nucléaire, notamment étudier l'opportunité de construire un EPR.
    Veillons à respecter le calendrier démocratique de ce débat. Toute attitude contraire réveillerait les vieilles postures pro et antinucléaires, aussi archaïques et figées l'une que l'autre. La France a besoin de tout, sauf de cela. Elle a besoin d'un cap et d'un élan. Cela mérite bien notre patience.
    En dix-huit mois, le Gouvernement et votre ministère, en particulier, ont fait avancer de manière significative plusieurs chantiers déterminants pour notre industrie. Ces progrès, toujours difficiles à obtenir, méritent le soutien du groupe UDF. Mais celui-ci saisit aussi l'occasion que lui offre cette discussion pour vous alerter très fortement sur les conséquences qu'auraient un vrai-faux débat et une vraie-fausse loi sur la politique énergétique, si une décision prématurée était prise concernant l'EPR.
    Madame la ministre, c'est donc sur le registre du « oui, mais » que l'UDF votera votre budget.
    M. Christian Cabal. Comme d'habitude !
    M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
    M. Daniel Paul. Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, le budget 2004 de l'industrie, de l'énergie, de la poste et des télécommunications s'inscrit parfaitement dans un projet politique libéral.
    Face à la crise économique, le Gouvernement n'est pas mobilisé pour lutter, non pas contre les évolutions normales du tissu industriel liées à des mutations technologiques comme on a pu en connaître dans le passé, mais contre ce qui constitue une véritable casse de notre industrie. Du reste, le premier objectif que vous affichez vise « à accompagner les mutations industrielles en aidant la reconversion des salariés ». Et vous rappelez votre ambition d'effectuer un bilan des organismes et des politiques en charge de ces reconversions, dont on sait qu'elles conduisent à la création d'emplois précaires, à l'appauvrissement et à la fragilisation de nombreux bassins d'emplois.
    La rentabilité financière, en particulier des grands groupes, vous tient lieu de politique industrielle, avec toutes les conséquences qu'entraîne une telle orientation pour les salariés, les sous-traitants et l'avenir des territoires d'implantation.
    Les crédits de l'énergie et de l'industrie progressent seulement de 0,40 %, mais les autorisations de programme reculent de 34 % et, en commission, vous avez insisté sur les nouveaux cadeaux fiscaux que vous vous apprêtez à faire aux entreprises pour les inciter à développer leurs efforts en matière de recherche-développement.
    Votre optimisme ne peut pourtant masquer la réalité des défaillances d'entreprises, en hausse de 8 % au premier semestre.
    Les annonces de plans sociaux ou de mises en redressement judiciaire se multiplient et touchent autant l'industrie que les services. Ce phénomène nouveau est un signe supplémentaire de la dégradation de la situation. Ainsi, au cours du premier semestre 2003, le solde d'emplois, toutes activités confondues, est en baisse de 0,4 % par rapport à la fin 2002, ce qui signifie que la France a perdu 57 000 postes de travail salarié en six mois.
    Dans une région que vous connaissez bien, monsieur le ministre, la Haute-Normandie, avec soixante-douze plans sociaux depuis le début de l'année et la multiplication des restructurations et des délocalisations, l'emploi dans l'industrie comme dans les services est profondément mis à mal. Avec TC-VAL, Trouvay et Cauvin et C'Jeu Télékom au Havre, Toshiba, Palace Parfums et Mars Industrie dans la région dieppoise, Via Système, Grande Paroisse et Renault Cléon dans l'agglomération rouennaise, ce sont, selon la direction régionale du travail, de l'emploi et de la formation, 2 245 emplois qui ont été supprimés depuis le début de l'année - sans compter les licenciements négociés ici ou là pour diminuer les effectifs ou les restructurations effectives dans de nombreuses petites entreprises, sous-traitantes ou non, confrontées à une conjoncture difficile.
    Le plus difficile est-il derrière nous, comme l'affirme le Premier ministre ? On voudrait croire que la France a mangé son pain noir et que la croissance économique atteindra 1,5 %, voire plus en 2004. Mais, en attendant un démarrage venu d'ailleurs, le chômage a atteint le taux de 9,6 % de la population active fin août et risque fort de passer la barre des 10 % avant la fin de l'année, sans parler de l'immense détresse des millions de nos compatriotes soumis à la précarité, à la peur de perdre même un petit boulot, synonyme malgré tout de petit salaire.
    A travers l'exemple de mon département - mais chacun, dans cet hémicycle, pourrait faire des descriptions semblables, tant chaque région a ses cas, devenus tristement célèbres, de Metaleurop à LU, d'Alstom à Giat, de Comilog à Alcatel -, on voit bien combien la logique « d'intégration marchande croissante » et l'accroissement des « exigences de rentabilité financière » conduisent au transfert du risque de l'actionnaire vers le salarié, qui devient ainsi la principale, pour ne pas dire l'unique, variable d'ajustement.
    Vous le savez, l'obstacle à une authentique politique industrielle réside dans cet impératif catégorique des marchés financiers. Mais vous partagez tellement l'idéologie libérale qui sous-tend cet impératif que vous vous abstenez de faire quoi que ce soit pour le contrecarrer. Au contraire, vous le favorisez, certains de vos amis, ici comme dans certaines collectivités locales, estimant même que cela ne va pas assez vite et pas assez loin.
    Les grands groupes de l'industrie et des services, les idéologues du MEDEF, qui inspirent largement vos projets, en ont fait leur catéchisme. Ils remodèlent, restructurent, sélectionnent leurs entreprises, leurs affaires, pour obtenir des résultats financiers importants et en hausse, si possible, d'une année sur l'autre.
    M. Eric Raoult. Arrêtez de nous insulter !
    M. Daniel Paul. Votre politique vise non pas à valoriser le travail, à le réhabiliter, mais à l'asservir toujours plus aux exigences du patronat.
    Une véritable politique industrielle induirait une tout autre logique. Car l'industrie française a un avenir, pour peu qu'elle ait les moyens d'affronter plusieurs défis majeurs, telle que la nécessité de fournir un effort de recherche et de développement, dramatiquement insuffisant aujourd'hui.
    Pour nous qui croyons en la capacité industrielle de notre pays, l'Etat a un rôle déterminant à jouer. La sauvegarde de l'emploi doit être la priorité. Le Gouvernement ne peut se contenter, face à la multiplication des sinistres industriels, d'effets d'annonce jamais concrétisés.
    L'inquiétude des salariés ne peut être que renforcée par le bilan que dresse la DARES, l'organisme d'études du ministère de l'emploi, des mesures de reconversion mises en oeuvre après les plans sociaux et par la lenteur des décisions reconnaissant les droits des salariés, victimes de patrons voyous, que, finalement, vous protégez : dix mois pour reconnaître le caractère illicite de certains licenciements ! Et pendant ce temps, les salariés n'ont pas même droit aux indemnités...
    Pour nous, la démarche de politique industrielle relève d'une responsabilité politique, au plus haut niveau. Sans doute doit-elle passer par l'élaboration de grands plans, à l'échelle nationale ou européenne, et viser, par exemple, le développement d'une vraie politique du médicament, la relance du nucléaire civil ou du fret ferroviaire. Mais elle ne saurait ignorer la nécessité de changer les rapports entre donneurs d'ordre et sous-traitants ; de lutter contre tout ce qui nourrit la précarité professionnelle, de revaloriser le travail, pas comme vous le claironnez, mais en lui donnant la priorité, en favorisant les emplois stables par rapport à l'intérim, en reconnaissant des droits aux salariés dans les entreprises. Elle ne saurait surtout pas ignorer l'urgente nécessité de soustraire l'activité économique au dogme de la rentabilité financière.
    Vous nous avez dit, madame la ministre, conduire un travail de « conviction » à Bruxelles pour favoriser l'émergence d'une politique industrielle européenne. Permettez-moi d'en douter et de montrer, à travers un simple exemple, que l'Europe, cette Europe que vous construisez, casse l'emploi - et le casserait davantage encore en cas de ratification du projet de convention européenne, pour lequel nous exigeons un référendum.
    Les Chantiers Allais - entreprise dieppoise spécialisée dans la construction de surfers, de bateaux rapides dans l'exploitation pétrolière off shore - souhaitent se développer. Ils étaient en négociation avec la chambre de commerce et d'industrie de Saint-Malo pour occuper le site laissé par Alstom. Seulement, pour fermer son site, Alstom a perçu des subventions européennes dans le cadre de son plan de sauvegarde. Or, selon une directive de Bruxelles, tout site aidé de cette manière ne peut accueillir de nouveaux chantiers navals construisant des bateaux de plus de 100 tonnes, au nom d'une clause de non-concurrence.
    Voilà une illustration de la politique industrielle telle qu'elle est conçue actuellement. On aide des entreprises à fermer et à casser l'emploi, pas à le développer.
    M. Christian Cabal. Caricatural !
    M. François-Michel Gonnot. Excessif !
    M. Daniel Paul. S'agissant des Chantiers Allais, l'idéal serait de les aider à développer leur activité sur Dieppe. Ce ne serait pas un luxe, pour une région particulièrement touchée par le chômage.
    S'agissant du secteur énergétique, dans les vingt prochaines années, la France et même l'Europe doivent, selon nous, se doter d'une politique énergétique solidaire et cohérente en privilégiant la maîtrise publique. Si, dans ce court laps de temps, nous n'encourageons pas les investissements nécessaires à la modernisation des réseaux de production, de transport et de distribution d'une énergie économiquement acceptable, écologiquement viable et socialement acceptée, nous risquons fort de connaître de lourdes difficultés, ainsi que les contrecoups de spéculations sur le marché de l'électricité - que l'on a pu observer ces derniers jours - provoquant de fortes hausses pour les usagers.
    Toutes les énergies et toutes les économies d'énergie seront nécessaires, de même que nous estimons nécessaire de diversifier les sources de production et d'accroître la part des énergies renouvelables. Mais il ne saurait être question de remettre en cause le rôle essentiel du nucléaire dans nos choix énergétiques, sauf à hypothéquer gravement l'indépendance énergétique de notre pays et à ne pas respecter nos engagements concernant le protocole de Kyoto. Un tel positionnement ne vaut évidemment qu'à condition que soit assurée la plus grande transparence de l'ensemble des filières, et pas seulement de la filière nucléaire.
    Or, toute ambition industrielle paraît absente de la stratégie actuelle, le Gouvernement étant surtout pressé d'accélérer les transpositions de directives européennes, d'anticiper sur l'échéance de juillet 2004, de permettre à GDF d'ouvrir rapidement son capital. Et pendant ce temps, la concurrence a la possibilité d'occuper les créneaux les plus immédiatement rentables, y compris dans des secteurs dépendant directement de l'Etat.
    Préparer l'avenir, conserver notre potentiel technique et industriel et développer l'emploi, c'est, pour nous, définir et maintenir sur le long terme une politique de recherche en rupture avec les baisses de budget,...
    M. Christian Cabal. Il n'y a pas de baisse de budget pour la recherche !
    M. Daniel Paul. ... garantir la pérennité de l'ingénierie intégrée d'EDF, pérenniser l'ensemble de la filière nucléaire par l'amélioration des conditions d'exploitation des centrales et l'harmonisation des garanties collectives à tous les niveaux, pour tous les salariés du secteur, y compris pour ceux qu'on appelle les « nomades du nucléaire », refuser l'appel des sirènes qui poussent au changement des statuts d'EDF et de GDF, alors que rien, dans les directives européennes, n'oblige à de telles évolutions et que les exemples sont édifiants, dans les pays voisins, de résultats catastrophiques liés à de telles décisions. Au point, d'ailleurs, de provoquer quelques inquiétudes dans vos propres rangs...
    Oui, il est aujourd'hui nécessaire de décider rapidement l'engagement de la construction d'une tête de série EPR,...
    M. Christian Cabal. Voilà qui est bien !
    M. Daniel Paul. ... afin de se préparer aux échéances du renouvellement du parc, surtout si nous voulons procéder à ce renouvellement en lissant les investissements nécessaires.
    J'ai écrit au Premier ministre dans ce sens, en soulignant que tous les critères objectifs militent pour le choix de la centrale de Penly, dans une région où la population, dans sa très grande majorité, s'est montrée réceptive et où l'expérience des deux premières tranches a nourri l'attente de tous les acteurs pour la suite du programme. Nous aurons l'occasion de revenir sur ce sujet dans les prochaines semaines.
    Avec vos propositions concernant La Poste et France Télécom, c'est l'avenir même de ces services publics qui est en jeu. Votre budget couvre plus spécifiquement les crédits alloués aux autorités de régulation, en particulier le budget de l'ART, qui augmente du fait de la décision d'étendre ses prérogatives pour y intégrer La Poste. Devenue, depuis 1991, un établissement public autonome s'acquittant de l'impôt sur les sociétés, La Poste, à en croire les conclusions du rapport Douste-Blazy, ne serait pas en mesure de faire face à l'extension de l'ouverture à la concurrence : trop de bureaux, trop de salariés, trop de services au public, inadaptation aux contraintes du marché... Mais force est de constater que vous refusez de procéder à un bilan sérieux et complet des expériences précédentes de déréglementation et de privatisation de nos entreprises publiques que, à l'instar de La Poste, de France Télécom, d'EDF et de GDF, vous bradez aujourd'hui. Nous avons déposé une demande de création de commission d'enquête parlementaire sur ce thème, à ce jour sans réponse.
    On ne peut nier que des difficultés existent. Mais elles proviennent largement de la mise en concurrence de La Poste sur les secteurs les plus rentables de ses activités, la privant ainsi des moyens d'assurer la péréquation propre à un service public sur l'ensemble du territoire. Vous connaissez notre opposition à une telle orientation, comme à la perspective d'accentuer encore cette dérive libérale qui casse notre service public.
    Mais vous aggravez encore cette situation en faisant supporter par La Poste un fardeau qui relève strictement de la responsabilité de l'Etat. Ainsi, le coût total des charges d'intérêt général assumées, sans contrepartie, par La Poste se sera élevé en 2002 à 1,76 milliard d'euros, autrement dit à près de cinquante fois le résultat net de l'ensemble du groupe La Poste ! Citons, pour mémoire, la participation à l'aménagement du territoire, pour 509 millions d'euros, la contribution au transport et à la distribution de la presse, hors presse administrative, pour 482 millions d'euros, le guichet bancaire pour les plus démunis, c'est-à-dire le livret A comme compte courant, pour 55 millions d'euros. Et, contrairement aux autres entreprises, vous-même l'avez rappelé devant la commission, La Poste n'est pas exonérée des charges sur les bas salaires !
    Si le nombre de salariés de La Poste a augmenté entre 1997 et 2002, c'est au prix d'une précarisation massive des personnels : le nombre d'agents contractuels est passé de 65 000 à 108 000 durant cette période, au détriment des emplois de fonctionnaires ; ceux-ci ne représentent plus que le tiers des effectifs de France Télécom et ses filiales. Si plus de la moitié des fonctionnaires touche, au mieux, 1 600 euros par mois, 90 % des contractuels stagnent à 1 200 euros. Cette précarisation affecte d'ores et déjà la qualité du service postal rendu et devrait s'amplifier, puisque vous comptez ne pas remplacer un départ à la retraite sur deux !
    Déclasser des bureaux de poste de plein exercice pour réduire leurs compétences ou les transformer en agences postales communales, mettre en place des points d'accueil dans les commerces ne garantit pas le maintien d'un service public de qualité sur l'ensemble de notre territoire : les services rendus sont bien plus réduits et la confidentialité des informations n'est plus garantie. De surcroît, ces mesures mettront l'usager à contribution. Quant aux collectivités locales, elles n'ont pas vraiment le choix : soit le bureau de poste ou l'agence postale disparaît purement et simplement, soit elles doivent contribuer à son financement. Enfin, quelles seront les conséquences en matière d'emplois et, au-delà, en termes de lien social ? Le rôle du postier en zone rurale est fondamental pour la cohésion sociale, pour l'information des personnes isolées. La tournée d'un facteur dépasse de loin sa mission professionnelle initiale : elle s'accompagne souvent de petits services qui concourent à éviter l'isolement des personnes âgées.
    La diversification des services financiers de La Poste prévue au contrat de plan n'est pas en soit une mauvaise chose, je vous l'ai déjà dit en commission. Par son offre de services bancaires ou d'utilisation du livret A comme compte en banque, La Poste permet aux personnes à revenu modeste d'accéder aux services bancaires. Et nous ne sommes pas opposés à l'idée qu'elle puisse offrir des prêts immobiliers sans apport préalable. Nous pourrions même travailler sur de nouveaux services d'épargne populaire finalisée sous la forme, par exemple, de mécanismes d'épargne préalable à l'achat d'équipements ou de véhicules. Cela éviterait à de nombreux ménages d'avoir à recourir aux offres de crédits d'opérateurs sans scrupules que nous avions dénoncés lors de nos débats sur le volet surendettement du projet de loi de rénovation urbaine.
    M. le président. Monsieur Paul, je vous prie de bien vouloir conclure.
    M. Daniel Paul. Je termine, monsieur le président.
    Encore faut-il éviter que La Poste ne devienne un banal établissement financier obéissant aux mêmes objectifs de rentabilité que les autres, ce qui lui ferait courir de grands risques.
    J'aimerais vous rappeler, madame, monsieur les ministres, que sur la façade d'un magnifique édifice du xixe siècle, à Manhattan, est inscrite une phrase en français, à la gloire de Louis XI, de Richelieu, de Colbert. Ces grands hommes ont construit au fil de notre histoire ce qui est devenu aujourd'hui la poste publique en France. Il s'agit de la poste centrale de New York. Elle fait partie du service public postal aux Etats-Unis.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Vous voyez que les Etats-Unis, ce n'est pas si mal ! En tout cas mieux que l'Union soviétique !
    M. Daniel Paul. C'est ce même service public postal que vous voulez aujourd'hui, par votre politique, remettre tout simplement en cause. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Pour conclure, vous mesurez le gouffre qui existe entre les valeurs que nous défendons, les propositions que nous apportons, et les résultats de votre politique : avalanche des plans sociaux, augmentation du chômage, croissance qui stagne toujours, chômage qui explose. Les salariés servent de variable d'ajustement aux aléas d'une économie mondialisée qui délocalise à tour de bras. Vous accompagnez ce mouvement en créant une société de moins-disant social. Vous cassez les outils de contrôle et les acquis sociaux. Conséquence de votre politique, les inégalités se creusent entre nos concitoyens ; la précarité et l'insécurité sociale gagnent des pans entiers de la population.
    Face à cela, vous détruisez les services publics, ceux-là mêmes qui garantissent l'égalité entre les hommes et les territoires. Et sous prétexte d'une intégration européenne, que vous soutenez pourtant à Bruxelles, vous dérégulez et privatisez à tout va. Vous brisez des outils historiques qui ont fait preuve de leur efficacité. Aussi ne serez-vous pas surprise, madame la ministre, que nous votions résolument contre votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. Nicolas Forissier.
    M. Nicolas Forissier. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, mon propos portera essentiellement, voire uniquement, sur le budget du commerce extérieur.
    Votre projet de budget, monsieur le ministre délégué au commerce extérieur, est l'occasion d'un premier rapport d'étape sur la politique que vous avez engagée. Le dispositif public d'appui au commerce extérieur a pour mission de sensibiliser, d'informer, d'accompagner, de soutenir les entreprises françaises, notamment les PME et PMI, dans leurs exportations et dans leur internationalisation. C'est là un objectif majeur.
    Aller chercher de la croissance, donc de l'emploi, dans le monde, ce sujet a pendant longtemps été quelque peu sous-estimé, considéré comme assez secondaire dans l'action d'un gouvernement ; l'importance de notre excédent commercial nous donnait le sentiment que les problèmes nationaux étaient plus urgents. Il semble, et j'en suis heureux, étant l'avocat de cette cause depuis longtemps, que les choses changent et que chacun prend peu à peu conscience qu'il nous faut faire plus et mieux en matière de soutien à nos entreprises dans le monde, et ce pour de multiples raisons que je ne développerai pas ici mais que vous connaissez probablement tous.
    Rappelons également que de sérieux efforts ont déjà été accomplis durant les années passées. Ainsi la réorganisation de la DREE, première administration à avoir été labellisée ISO 9002, qui a mis en place très tôt les premières conventions d'objectifs et de moyens, qui a su redéployer ses effectifs vers les pays émergents, ou encore la création de la procédure VIE - volontaire international en entreprise.
    Cela se traduit aujourd'hui par une stabilité de votre budget, à 294 millions d'euros, en augmentation de près de 2,5 % par rapport à 2003. Il faut également remarquer que l'effort global en faveur du commerce extérieur doit être estimé à plus de 435 millions d'euros, puisqu'il faut y compter le rôle de la COFACE, lorsqu'elle agit pour le compte de l'Etat, le FASEP garanti, même si cette procédure devrait être revue, renforcée et certainement toilettée, les prêts et dons du Trésor aux Etats étrangers et l'Agence française pour les investissements internationaux.
    Permettez-moi à ce propos d'ouvrir une parenthèse : il serait à mon avis utile de s'employer à améliorer les regroupements ou les synergies de moyens entre l'AFI, UBIFRANCE et le réseau du ministère.
    Je n'aurai garde d'oublier une mesure ponctuelle, mais très utile : le redéploiement apparemment très efficace de crédits dormants du FASEP vers les actions de l'agence UBIFRANCE : 7 millions d'euros par an pendant trois ans.
    Votre projet de budget témoigne d'une volonté de conforter l'effort engagé. On ne saurait parler, comme Mme Perrin-Gaillard tout à l'heure, d'un recul sur le plan budgétaire. Dans la mesure où ce budget marque une totale continuité avec les précédents, il est même surprenant d'entendre minimiser aujourd'hui ce que les amis socialistes de Mme Perrin-Gaillard ne minimisaient pas hier ! J'ai été moi-même rapporteur du budget pendant cinq ans sous la précédente législature. J'ai toujours appelé à voter les budgets de vos prédécesseurs, Jacques Dondoux et François Huwart, dans un esprit constructif, comme l'a fait également M. Jean-Paul Bacquet. Nous devons continuer, car il s'agit de soutenir l'équipe de France à l'export.
    M. Christian Cabal. Très bien !
    M. Nicolas Forissier. Rappelons également que la réforme, l'ambition pour notre commerce extérieur, cela ne se traduit pas seulement dans les crédits budgétaires, mais aussi dans les décisions politiques. Vous-même, monsieur le ministre délégué, avec, bien entendu, le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, avez pris à cet égard une série des décisions réellement majeures. Si, pour ce qui touche aux crédits budgétaires et aux outils de soutien au commerce extérieur, la continuité a été la règle, sur le plan de la volonté politique, en revanche, un véritable palier a été franchi pour soutenir nos PME à l'international.
    Je souscris au terme de « volontarisme » employé tout à l'heure par Mme Andrieu-Bacquet. Deux éléments fondamentaux mettent en relief cette détermination politique.
    Premièrement, la définition d'une stratégie claire : vingt-cinq pays cibles, un comité d'exportation chargé de mettre en place des plans d'action commerciale extrêmement volontaristes, dont le déroulement est respecté. C'est là une façon d'agir particulièrement efficace.
    Deuxièmement, la réforme majeure que vous avez entreprise avec le regroupement du Centre français du commerce extérieur et de l'association UBIFRANCE,...
    M. Claude Gatignol. Très bien !
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. C'est très important !
    M. Nicolas Forissier. ... autrement dit la création de l'Agence française pour le développement international des entreprises. Je veux insister sur l'importance de cette mesure. Depuis plus de dix ans, dans nombre de cénacles spécialisés comme lors de tous les débats parlementaires, ce regroupement était réclamé pour garantir une meilleure synergie de ces deux organismes phares de notre dispositif public d'appui à l'exportation. La décision désormais prise, après une longue, trop longue réflexion, nous permettra de disposer de moyens supplémentaires mais surtout de parvenir à une réelle clarification dans notre dispositif public. Elle contribuera à doper l'effort national de soutien de nos entreprises à l'exportation et dans leur internationalisation.
    UBIFRANCE jouera le rôle d'un moteur opérationnel dans cette opération. Je veux au passage saluer le savoir-faire, mais aussi l'engagement des personnels dans cette réforme - ceux du CFCE comme ceux de l'actuelle association UBIFRANCE.
    Monsieur le ministre délégué, permettez-moi toutefois trois remarques.
    Pour commencer, nous attendons tous la publication du décret qui nous permettra d'être réellement opérationnels au 1er janvier 2004.
    Il sera également très important de veiller avec soin à la bonne application de la convention d'objectifs et de moyens signée en juillet 2003 entre l'agence UBIFRANCE et la DREE. Vous savez comme moi, je parle par expérience, que cette convention induit de profonds changements de procédure interne, comme de comportement, entre le réseau de la DREE dans le monde et les agents de la future agence.
    Enfin, on peut souligner le caractère exemplaire, en termes de réforme de l'Etat, que représente la fusion entre ces deux organismes. La création de l'agence s'accompagne d'ailleurs d'une délocalisation peu facile à mettre en oeuvre mais particulièrement symbolique de la volonté de rapprocher ce service des entreprises. Il nous appartiendra également, puisqu'il sera implanté à Marseille, d'en profiter pour construire une véritable tête de pont au bénéfice de nos entreprises vers les pays du pourtour méditerranéen et du Moyen-Orient.
    Les crédits d'UBIFRANCE pour 2004 sont stables, à 39,83 millions d'euros. Je me tourne vers vous, monsieur le ministre délégué au budget, pour souligner à quel point il sera souhaitable de confirmer cette stabilité sur la moyenne période afin de permettre à l'agence de poursuivre la réorganisation et le développement de ses actions dans le contexte le plus serein possible.
    Nous avons donc, monsieur le ministre délégué, une politique tout à la fois efficace, ambitieuse, volontariste. Je finirai par trois observations.
    Premièrement, je voudrais revenir, comme je le fais tous les ans, sur le sujet de la promotion des foires et salons professionnels. Vous avez engagé un effort important - supplémentaire, je l'ai déjà dit -, puisque nous allons pouvoir consacrer trois fois 7 millions d'euros - trois années de suite - pour doper notre effort en matière de promotion et de soutien aux entreprises sur les foires et salons professionnels dans le monde. Malheureusement, force est de le répéter - la DREE le dit tous les ans dans les réponses aux questionnaires des rapporteurs, Camille de Rocca Serra l'a lui aussi rappelé tout à l'heure -, l'effort reste encore insuffisant.
    La France reste en retard sur ses principaux concurrents. Elle octroie moins de subventions publiques que nos partenaires européens, Allemagne, Espagne, Grande-Bretagne ou Italie. Nous devons impérativement faire en sorte de rattraper nos concurrents, car la promotion sur les foires et salons reste un outil essentiel pour l'apprentissage et le développement de nos PME à l'exportation. Toute la vie d'un exportateur, nous sommes plusieurs ici à le savoir, se passe sur des foires ou des salons professionnels.
    Cela suppose, monsieur le ministre du budget, un effort budgétaire au demeurant relativement modeste, mais il nous faut y réfléchir d'ici à 2005 si nous voulons accompagner le mouvement engagé cette année pour aller chercher, grâce à nos exportations, davantage de croissance dans le monde, davantage d'emplois pour notre pays. Et si je parle de 2005, c'est parce que Ubifrance aura alors achevé sa réforme et atteint son rythme de croisière.
    Toujours à propos de promotion, veillons également à ne pas négliger ce que j'appellerai « les petits marchés », les petits pays. Vous avez eu raison de définir 25 pays cibles, qui représentent les marchés à fort potentiel, les pays émergents qui se développent rapidement. Mais l'expérience montre parfois que 30 000 euros dépensés sur une semaine française dans un « petit pays », multipliés par 10, 15 ou 20 dans l'année, c'est également très utile pour la croissance de nos exportations.
    Or il est souvent plus facile pour une petite entreprise, TPE ou PME, de commencer par de « petits marchés » que par des grands marchés comme la Chine ou l'Amérique centrale. A cet égard, je souscris à la remarque de Jean-Paul Bacquet tout à l'heure sur l'effort particulier que nous devons consentir en direction des marchés de l'Afrique subsaharienne, d'autant qu'une vraie histoire nous lie à ce pays.
    Deuxième observation très rapide sur la procédure du volontariat international en entreprise. Vous avez mis en oeuvre une réforme dans le cadre de la loi conduite par Renaud Dutreil, qui permet à ces volontaires de rester 165 jours en France dans l'entreprise, de façon à mieux s'approprier l'entreprise, ses services et ses produits. Cette disposition me paraît bienvenue. Mais je veux insister sur la nécessité d'une bonne communication en direction de ces entreprises, pour l'instant peu nombreuses à s'intéresser à cette procédure. Là encore, un effort supplémentaire pourrait être souhaitable.
    Troisième et dernière observation sur la réorganisation en région. C'est aujourd'hui un élément essentiel. Nous avons besoin de beaucoup plus de clarification. Camille de Rocca Serra l'a dit tout à l'heure : les conseils régionaux sont à l'évidence appelés à jouer un rôle prééminent. Ce sera le cas avec la décentralisation des DRCE. Mais si les conseils régionaux doivent être des chefs de file, il faut également associer les chambres de commerce et d'industrie et les fédérations professionnelles, et apaiser les craintes qui peuvent se faire jour ici ou là. C'est là, me semble-t-il, l'essentiel de la réforme, car les entreprises ont le sentiment que nous allons créer une trop grande dispersion en régions, alors que, tout au contraire, nous clarifions, nous simplifions et nous mettons en synergie le dispositif national.
    Vous sentez, monsieur le ministre délégué, l'enthousiasme que peut entraîner le mouvement que vous avez engagé. C'est une réforme importante, je veux le souligner avec force. Et c'est évidemment pour cette raison, mais aussi pour toutes les autres que j'ai développées, que le groupe UMP vous accompagnera et votera ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Christian Bataille.
    M. Christian Bataille. Monsieur le président, madame la ministre de l'industrie, messieurs les ministres, mon intervention s'articulera en deux points : un aspect plutôt positif sur votre politique en matière énergétique ; une série de remarques, hélas négatives, quant à l'absence de politique industrielle.
    M. René Dosière. Pourquoi « hélas » ?
    M. Christian Bataille. Sur l'énergie, on peut relever avec satisfaction qu'en ces temps de dogmatisme libéral, l'Etat considère qu'il reste de son rôle d'organiser le marché et de prévoir à long terme. Mais il faut prendre garde : pour organiser le marché, il faut préserver les outils dont nous disposons encore en matière électrique et industrielle. Le CEA, AREVA-Framatome ont plus que jamais leur raison d'être. EDF, surtout, doit être préservée dans son intégrité en se recentrant sur l'Europe. On peut se demander si les critiques acerbes à l'encontre de la situation financière de l'entreprise n'avaient pas pour but de justifier un démantèlement, un découpage qui aurait « libéré les forces du marché » pour reprendre l'expression consacrée, mais aurait été contraire à l'intérêt de la collectivité.
    Comme je l'ai démontré dans le rapport sur les réacteurs du futur, que j'ai cosigné avec mon collègue Claude Birraux, nous avons le devoir de nous interroger sur le moyen et le long terme, c'est-à-dire sur l'approvisionnement énergétique de la génération suivante. Jusqu'alors, un continuum de décisions dépassant les à-coups de l'alternance politique a permis d'avoir une gestion maîtrisée du dossier nucléaire. A cet égard, nous nous félicitons de la grande victoire qu'a remportée l'industrie française en Finlande, avec la commande d'un EPR. L'option nucléaire restant, selon vos propres mots, « ouverte », espérons que l'électricien EDF suivra, et commandera bientôt son propre réacteur EPR. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Si l'on ajoute les décisions à prendre en 2005-2006 en matière de gestion des déchets nucléaires, c'est tout l'avenir de notre approvisionnement et de notre indépendance énergétique jusqu'en 2050 qui se joue en ce moment.
    Du fait de la canicule estivale et des pénuries qui ont affecté de grands pays tels les USA, le Canada ou l'Italie, l'opinion publique se méfie aujourd'hui d'une démagogie qui se contente de la critique radicale et ne propose aucune solution crédible.
    M. Christian Cabal. Très bien !
    M. Christian Bataille. Cependant, il ne faut pas se voiler la face.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Surtout en ce moment !

    M. Christian Bataille. Sur la question du nucléaire, les avis sont partagés à gauche, mais aussi à droite. L'immobilisme et la perplexité ne serviraient à rien. C'est en avançant sur ces dossiers, comme vous l'avez fait résolument à propos de l'EPR, que nous dégagerons des solutions.
    En matière d'industrie, ce budget voue un véritable culte à l'idéologie libérale.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. Paranoïa !
    M. Christian Bataille. En effet, il semble que le marché constitue l'alpha et l'oméga de la politique industrielle du gouvernement Raffarin. Il consacre ainsi la démission de l'Etat comme acteur à part entière d'une politique publique de soutien au développement de notre outil industriel. C'est d'autant plus critiquable que la Commission européenne elle-même commence à sérieusement s'interroger sur le dogme de la concurrence et sur la mise en place d'une véritable politique industrielle à l'échelle européenne.
    Le rapport d'Olga Zrihen Zaari, députée européenne socialiste belge, présenté le 8 octobre 2003 à Strasbourg, se réjouit que la politique industrielle « figure de nouveau, après dix ans d'absence, parmi les préoccupations de l'Union européenne ». En France, pourtant, on continue à s'en remettre à l'initiative privée pour assumer la recherche et l'innovation par le biais de crédits d'impôt.
    M. Christian Cabal. Comme dans tous les grands pays du monde !
    M. Christian Bataille. Madame la ministre, vous déclariez devant la commission des affaires économiques que la préparation de l'avenir exige d'encourager davantage l'innovation et la recherche industrielle, indispensables pour lutter contre la désindustrialisation. Nous partageons cet objectif mais divergeons sur le choix des moyens.
    Votre budget indique que, depuis 2002, le soutien aux programmes de recherche et développement industriels et les actions en faveur du développement des technologies de l'information et de la communication sont en chute libre.
    M. Jean Dionis du Séjour. Ce n'est pas vrai !
    M. Christian Bataille. Il aurait été nécessaire, au contraire, d'amplifier fortement le soutien public à la recherche et à l'innovation.
    Les emplois industriels sont en baisse et l'industrie française a perdu 150 000 emplois depuis un an. Malgré ces résultats, vous présentez un budget prétendument recentré et modernisé pour légitimer une baisse de la dotation globale qui serait censée « améliorer les performances ».
    Il est regrettable que le Gouvernement n'ait qu'une conception défensive du rôle de l'Etat, qui se borne à corriger les méfaits de la dérégulation et de la mondialisation des marchés dans les secteurs industriels sinistrés. Il n'y a aucune vision à long terme.
    Arguant de la sacro-sainte efficacité de la dépense publique, vous vous contentez de reconduire les crédits de reconversion du ministère de l'industrie. Or, si l'on considère l'augmentation de la dotation à Charbonnages de France sur injonction de la Commission européenne, on observe en fait une réduction de 10 % de la dotation allouée à la reconversion et aux restructurations industrielles, qui passe de 39 à 35 millions d'euros. Quelle ambition au moment où les plans sociaux se multiplient et où nous approchons la barre de 10 % de chômeurs principalement à cause du recul de l'emploi industriel ! Quelle rupture alors que, depuis 1977, la croissance industrielle avait été très riche en emplois, conséquence d'un abaissement du coût relatif du travail pour les moins qualifiés et d'une politique systématique de réduction de la durée conventionnelle du travail !
    Avec une baisse des autorisations de programme de 34 %, le Gouvernement montre qu'il ne croit plus en l'avenir ! Il serait cruel de vous rappeler que votre budget pour 2003 avait pour ambition, selon vos propres propos en séance, de « favoriser la compétitivité des entreprises françaises ». Or, d'après le rapport annuel 2003 de la Commission de consultation permanente pour l'industrie, plusieurs signes inquiétants caractérisent la situation industrielle française d'aujourd'hui : ... effritement de la production industrielle depuis le printemps,...
    M. Christian Cabal. Grâce aux 35 heures !
    M. Christian Bataille. ... baisse des investissements industriels, progression ralentie des investissements immatériels. Bref, la baisse de l'emploi s'est poursuivie et les parts de marché de l'industrie française ont diminué en volume.
    En conclusion, là où l'Etat assume encore son rôle directeur, en matière énergétique par exemple, nous sommes raisonnablement confiants. Mais là où il se désengage et pratique la politique du fil de l'eau, c'est-à-dire dans l'industrie, nous sommes extrêmement pessimistes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Claude Gatignol.
    M. Claude Gatignol. La présentation des moyens budgétaires est un moment important pour apprécier le rôle de l'Etat dans une politique industrielle mais aussi le message du Gouvernement aux forces vives de la nation, les entreprises.
    Dans une mauvaise passe économique, notre pays ne peut se permettre des dépenses inutiles et vous avez à juste titre défini, madame la ministre, trois priorités : le maintien des emplois industriels, l'avenir préparé par la formation et l'innovation, une énergie propre, sûre, compétitive. En raison du temps qui m'est imparti, c'est sur ce dernier point que je centrerai mon propos.
    De prime abord, je tiens à souligner ici l'action soutenue que vous avez menée tout au long de l'année. Qu'on en juge : le débat national a bien eu lieu, des conclusions en ont été tirées, ce n'était pas évident au départ et vous devez être félicitée pour votre approche réaliste de la situation.
    La place de la France dans le monde, reconnue pour l'excellence de sa filière électronucléaire, mais délibérément rabaissée pendant plusieurs années, pour des raisons idéologiques, a été confirmée grâce à votre courage politique, qui s'est exprimé encore au début du mois d'octobre, et à la pertinence de votre analyse économique et technologique, partagée par un grand nombre de députés attentifs à ce sujet sur tous les bancs de l'Assemblée.
    M. Christian Cabal. C'est vrai !
    M. Claude Gatignol. Je retiendrai deux éléments favorables qui découlent de votre démarche volontariste ; ils sont particulièrement importants et nous ouvrent des voies pour l'avenir, pour l'emploi, pour la croissance, pour le maintien des compétences dans deux très grandes entreprises, EDF et AREVA, pour ne pas les nommer.
    Ce premier élément, c'est le choix du réacteur franco-allemand EPR, dernier-né de la recherche, par un pays rigoureux s'il en est sur l'environnement, la Finlande, et qui sera, j'en suis persuadé, suivi par d'autres, demain. Sans votre déclaration très nette sur cet outil industriel, le succès de nos entreprises n'était pas acquis.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très juste !
    M. Claude Gatignol. Et nous y avons participé à vos côtés, madame la ministre.
    Vous avez présenté, le 7 novembre, le livre blanc des énergies, avec des objectifs clairs : droit d'accès à l'énergie ; préservation de l'environnement, compétitivité renforcée, sécurité d'approvisionnement. Mais vous avez également défini les moyens pour y parvenir : ils seront les bases de votre projet de loi d'orientation. C'est un réalisme que nous soutenons car il s'agit, d'abord, de retrouver l'efficacité énergétique, trop souvent oubliée dans le comportement de nos concitoyens, et d'aller vers le développement des énergies dites renouvelables en proposant des mesures de soutien fiscal actif et direct, ce qui n'était pas non plus une évidence au départ.
    Mais, madame la ministre, dans ce domaine, ne nous trompons pas, ne trompons pas les Français, à la fois sur les coûts et sur les besoins véritables de notre territoire. Le bouquet énergétique doit incorporer toutes les énergies, mais sans complexe vis-à-vis de tel ou tel pays, sachant que les vraies énergies complémentaires sont peu nombreuses et assez faibles en volume. Ce sont les énergies thermiques avant tout : le solaire, la filière végétale depuis le bois jusqu'aux biocarburants, la géothermie et ses dérivés. Nous devons développer davantage les programmes les concernant.
    Le troisième moyen, c'est la reconnaissance de la place donnée à l'électricité, qui représente 50 % de notre usage énergétique, avec l'hydraulique, d'une part, et notre parc nucléaire, d'autre part, seul capable de produire, sans effet de serre, en toute sûreté, les milliards de kilowatts d'électricité de base dont nous avons besoin en hiver et - j'insiste sur le « et » - en été, au prix le plus avantageux. Qui aurait pu prévoir, en effet, les pics de consommation de fin janvier 2003, mais aussi du début août de la même année ? Que se serait-il passé si nous n'avions pas eu les moyens d'assurer production et transport ?
    Oui, il y a bien urgence à décider la continuité pour le parc français. L'office parlementaire des choix scientifiques et technologiques le souligne grâce au rapport Birraux-Bataille. Et, avec la même attention, il faut renforcer les réseaux de transport d'électricité. Les grandes pannes de l'année 2003, qu'elles soient américaine, anglaise, italienne, scandinave, sont là pour nous le rappeler.
    M. Daniel Paul. Très juste !
    M. Claude Gatignol. En ce qui concerne les énergies pour le transport, je vous incite à prêter attention à ce qui apparaît comme la seule solution pour des véhicules « zéro pollution » - dans combien de temps, vingt ans, trente ans, l'avenir nous le dira -, c'est l'hydrogène. Les applications industrielles sont, à ce jour, en situation de blocage technologique pour l'usage de ce vecteur énergétique. Nous devons tenir compte de ce constat. Ne peut-on envisager la création d'une agence de l'hydrogène, s'inscrivant dans l'émergence de pôles spécialisés dans les énergies du futur ? D'autres pays le font. Et aux Etats-Unis, tout le monde parle de l'hydrogen economy.
    En conclusion, sachez, madame la ministre, que nous attendons avec grand intérêt la validation par le conseil des ministres de votre projet de loi d'orientation énergétique, puis son inscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale pour un débat approfondi.
    La France, dans ce domaine, doit montrer la voie. Le Parlement saura participer à ces choix fondamentaux pour les décennies du xxie siècle. Le groupe UMP apportera sa contribution et son soutien à ces orientations. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Paul Giacobbi.
    M. Paul Giacobbi. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, je me bornerai à une remarque relative aux pensions de retraite sur le budget des charges communes.
    L'an dernier, à pareille époque, presque jour pour jour, je vous faisais part de ma surprise de constater que, à la veille du grand débat sur les retraites, et alors même que le problème des pensions de retraite des personnels civils et militaires de l'Etat représentait, à l'évidence, notre principal problème budgétaire, notre loi de finances restait, à cet égard, imprécise et particulièrement complexe, pour ne pas dire obscure. J'avoue que, un an plus tard, alors même que la loi sur le financement des retraites a été votée, nous n'avons pas une idée beaucoup plus claire du formidable choc budgétaire que va représenter, dans les prochaines décennies, la retraite des fonctionnaires.
    Il me semble aussi que la présentation qui est faite de ce problème, même si elle est parfaitement exacte sur le plan des faits rapportés, des chiffres avancés et des constats dressés, pourrait donner une image exagérément optimiste de la situation, voire occulter la réalité de l'abîme devant lequel nous nous trouvons.
    Je constate, à la lecture du rapport de notre collègue Daniel Garrigue, page 118, que l'analyse du choc démographique propre au régime des fonctionnaires est faite en termes de flux. On nous indique, ce qui est certainement parfaitement exact, qu'à législation et comportements inchangés, le nombre des fonctionnaires qui partiront à la retraite s'accentuera de manière importante à compter de 2005, atteindra un point haut vers 2007-2009 et se stabilisera ensuite.
    Ainsi exposée, l'analyse de flux nous laisse à penser qu'il y a un mauvais moment à passer vers 2007-2009, et qu'après les choses se stabiliseront. Mais, en réalité, cela signifie qu'avec une augmentation de flux considérable et compte tenu de l'allongement de la durée de la vie - et même d'ailleurs sans en tenir compte - la masse des pensions se cumulant va augmenter de manière dramatique entre les années 2005 et 2040, jusqu'à rendre l'élaboration de notre budget de plus en plus difficile, voire à peu près impossible, toutes choses égales par ailleurs.
    D'ailleurs, le phénomène a déjà commencé puisque, cette année, nous devons faire face déjà à une augmentation de 6,7 % des charges de pension de retraite, taux qui, bien entendu, ne peut que croître.
    Nous pourrions, évidemment, avoir une idée exacte de l'ampleur du problème en provisionnant tout simplement - c'est-à-dire en se servant du mécanisme de la provision qui est utilisé dans toutes les comptabilités depuis la Renaissance ou peu après - la charge future des retraites, comme le ferait d'ailleurs n'importe quelle entreprise. Le compte général de l'administration des finances pour 2002 évaluait ainsi à environ 708 milliards d'euros la provision qu'il faudrait passer pour couvrir les retraites des fonctionnaires, soit environ 50 % du produit intérieur brut !
    Evidemment, selon le taux d'actualisation retenu, cela peut faire 50 milliards de plus ou 50 milliards de moins - excusez du peu ! Compte tenu de l'énormité du montant, il est impossible de rattacher à l'un de nos exercices une pareille provision.
    Mais à défaut de passer cette provision monstrueuse mais réaliste, il nous faudrait disposer au moins d'un tableau annexe qui nous indique clairement les projections actuarielles de ces charges sur trente ans, de manière que, chaque année, l'on dispose d'un document en fonction d'un calcul actuariel, retraçant le nombre de fonctionnaires partant à la retraite, les tables de décès et toutes les données classiques. Je regrette que l'on ne trouve pas un tel tableau dans toute notre loi de finances, ni dans les documents annexes, ni dans les commentaires. A certains égards, la présentation qui est faite peut même tromper.
    J'ai soulevé modestement plusieurs fois ce problème. Je constate qu'il ne passionne pas les foules, voire qu'il n'est pas très bien compris. Mais il arrivera un moment où nous n'aurons plus, pour caricaturer les choses, qu'à débattre de cela, car le problème est d'une telle ampleur qu'il va progressivement réduire notre capacité de manoeuvre, jusqu'à la rendre inexistante.
    Vous allez sûrement m'expliquer, monsieur le ministre, que le service public devra être beaucoup plus efficient. Et peut-être invoquerez-vous l'idée qu'il faut diminuer le nombre de nos fonctionnaires.
    Je pourrais alors vous demander si vous avez diminué le nombre des policiers, des enseignants ou des militaires, puisqu'ils représentent plus des trois quarts de la fonction publique civile et militaire.
    Sans entrer dans ce débat, essayons simplement de donner à notre loi de finances la clarté, la transparence et le caractère prévisionnel qui s'imposent et essayons tout de même d'engager ce débat, ici, avant qu'il ne devienne tragique. (Applaudissments sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Marc Reymann.
    M. Marc Reymann. Votre budget, monsieur le ministre délégué au commerce extérieur, ne représente que 0,1 % des dépenses totales de l'Etat. Pourtant, il concerne environ 5 millions de salariés. Grâce à une gestion efficace, vous avez même pu réduire le nombre des personnels, conformément aux demandes du Premier ministre, dans le cadre de la réforme de l'Etat.
    Cela dit, reconnaissons que votre prédécesseur à ce ministère avait déjà engagé des réformes structurelles, citées à l'époque comme exemplaires de la modernisation de la fonction publique.
    Compte tenu du temps qui m'est imparti, je me contenterai de relever deux points forts de ce budget : la sélection des pays prioritaires pour notre commerce extérieur et le renforcement de la présence des entreprises françaises dans les foires et salons à l'étranger.
    La méthode pragmatique choisie par le Gouvernement consiste à concentrer, sur ces marchés cibles, les moyens publics supplémentaires de promotion et de fédérer toutes les initiatives provenant des régions et des milieux économiques. Cette mobilisation se traduit par des plans d'action commerciale par marché cible, dont les premiers qui concernent les Etats-Unis, la Russie et la Chine sont déjà adoptés.
    Vos déplacements, monsieur le ministre, avec des délégations d'entreprises dans plus de vingt-cinq pays, traduisent mieux que tous les chiffres la volonté du Gouvernement de décrocher des marchés plus que jamais nécessaires à la relance de notre économie. Le temps que vous consacrez à ces déplacements est essentiel pour le succès de nos services et produits.
    Mais, en dépit de vos efforts, les analyses menées sur les dispositifs d'appui au commerce extérieur laissent apparaître un handicap de notre pays par rapport à nos principaux partenaires européens. S'agissant des salons et foires, nous seront présents dans 193 manifestations collectives en 2004, ce qui est un net progrès par rapport à l'année 2002. Compte tenu des dossiers en attente, le chiffre de 250 opérations pourrait même être atteint en 2004. Le rattrapage est commencé, tant mieux !
    Je terminerai en émettant deux voeux.
    L'un concerne les moyens mis à la disposition des rapporteurs pour le contrôle de la dépense publique. Je vous rappelle, monsieur le ministre, que 180 députés souhaitent améliorer la situation actuelle qui ne permet pas au Parlement de contrôler sérieusement les dépenses, alors que c'est son rôle premier. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Par ailleurs, des réformes institutionnelles sont nécessaires, afin de s'assurer de la bonne utilisation de l'argent public consacré à l'aide aux exportations françaises.
    La commission interministérielle des garanties, organe gouvernemental qui donne son avis sur les informations fournies par la COFACE, devrait comprendre également des représentants du Parlement et des observateurs de la société civile. Les critères d'octroi des garanties doivent être explicités, rendus publics et conformes aux engagements de la France en matière de développement durable. (Applaudissements sur les bancs de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Je vous remercie, Monsieur Reymann, car vous êtes le seul à avoir respecté votre temps de parole ! (Applaudissements sur divers bancs.)
    La parole est à M. François Brottes.
    M. François Brottes. Madame, messieurs les ministres, chers collègues, il n'y a pas de mots trop forts pour tirer la sonnette d'alarme à propos de l'avenir que le Gouvernement dessine pour La Poste.
    Le projet de contrat de plan que nous avons découvert il y a quelques jours n'est-il pas, comme le disent certains syndicats, un contrat de liquidation avant privatisation par appartement : colis, services financiers, courrier ?
    M. Daniel Paul. Bien sûr que si !
    M. François Brottes. Revoyons le film des derniers événements, qui démontre que le scénario était écrit d'avance.
    Premier acte : on laisse traîner pendant dix-huit mois l'élaboration d'un contrat, alors que le précédent était arrivé à son terme.
    Deuxième acte : la commission d'enquête présidée par notre collègue Douste-Blazy sur les entreprises publiques épingle sans motif sincère et sans discernement la gestion de La Poste. L'objectif est de déstabiliser !
    Troisième acte : le Gouvernement fait le choix de l'ART, régulateur des télécommunications, pour gérer à présent la régulation du courrier. Or, d'une part, je ne suis pas sûr que la gestion des mégabits ait un quelconque rapport avec la gestion des camions, des trains ou des avions, qui transportent le courrier, et, d'autre part, on peut craindre le pire pour La Poste, quand on sait que l'expérience de l'ART pour faciliter l'arrivée de nouveaux opérateurs dans le domaine de la téléphonie s'est appuyée sur un marché en forte croissance, alors que chacun sait très bien qu'à l'inverse le marché du courrier a plutôt tendance à stagner.
    Quatrième acte : le président de notre commission lance une sonde pour annoncer la fermeture de plusieurs centaines de bureaux de poste, aussitôt démentie par vous-même, madame la ministre.
    Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Oui !
    M. François Brottes. Mais compte tenu de la considération que j'ai pour le président Ollier, j'ai la naïveté de croire qu'il ne s'exprime jamais sans fondement ni par hasard !
    Cinquième acte : la Cour des comptes produit un rapport dévastateur sur la situation de La Poste, où les raccourcis et les amalgames s'accumulent.
    Sixième acte : non seulement la gestation du contrat de plan est longue, mais, de surcroît, elle se déroule sans concertation avec les représentants syndicaux, ce qui constitue une première !
    Ce scénario en six actes montre que la stratégie est simple : camoufler un contrat de plan presque vide, où l'on se gargarise du mot « performance » pour mieux dissimuler les mauvaises nouvelles.
    Première mauvaise nouvelle : la suppression probable de 40 000 à 50 000 emplois par non-remplacement de départs à la retraite, comme l'a avoué d'ailleurs à mots couverts le rapporteur Michel Diefenbacher tout à l'heure.
    Deuxième mauvaise nouvelle : la fermeture latente et progressive de plusieurs milliers de bureaux de poste.
    Troisième mauvaise nouvelle : l'allégeance du lobby bancaire qui obtient, contre l'intérêt de La Poste, un faux élargissement du périmètre de ses services financiers. En effet, ce n'est pas l'offre de prêts immobiliers sans épargne préalable qui va redynamiser la clientèle de La Poste. Cela ne sera pas suffisant pour donner à La Poste les moyens de compenser la stagnation de l'activité courrier et conforter la présence postale territoriale, dont on sait pertinemment qu'elle est fortement liée aux services financiers. Ainsi, plus tard, vous viendrez nous expliquer, pour justifier des fermetures, qu'il y a de moins en moins de clients.
    Quatrième mauvaise nouvelle : c'est la menace réelle qui pèse désormais sur le maintien du prix unique du timbre sur l'ensemble du territoire. Le Gouvernement n'a pas exprimé sa volonté de maintenir pour La Poste le monopole du courrier de moins de 50 grammes après 2009, comme le lui permet la directive européenne. Que chacun sache que c'est ce marché garanti sous monopole qui permet à La Poste de faire de la péréquation.
    Par contre, le projet de contrat de plan évoque la création d'un fonds de compensation des charges de service public alimenté par l'exonération de taxe locale dont bénéficie La Poste. Cette exonération, qui n'est pas compensée par l'Etat aux communes, n'est pas matérialisée budgétairement. Il y a donc tout lieu de penser que c'est vers les collectivités locales, une fois de plus, que l'Etat va se retourner pour abonder ce fonds.
    Pour conclure, je voudrais dénoncer la mauvaise foi qui étaye l'argumentation des détracteurs de La Poste.
    Premier argument, l'héritage. Je veux rappeler qu'avant 1997 les résultats de La Poste étaient nettement déficitaires. Ils sont positifs depuis cette époque. Je veux redire aussi que le précédent contrat de plan avait marqué des avancées significatives en matière de déprécarisation des personnels, d'autonomie de gestion des fonds CCP, de prise en charge des retraites, de qualité et de prix du service garanti à l'usager, d'amélioration de la présence postale, notamment dans les quartiers sensibles, et tout cela dans un contexte d'ouverture très faible à la concurrence, puisque le monopole concernait tout le courrier en dessous de 350 grammes. Ce n'est plus le cas aujourd'hui, monsieur Joyandet, et cela justifie un meilleur contrat de plan.
    Second argument, la comparaison avec les postes d'Europe du Nord ou allemande, qui, soit dit en passant, ont été les championnes des suppressions d'emplois et des fermetures de bureaux de poste.
    Je veux redire ici que, pour comparer honnêtement, il faut éliminer des comptes de La Poste des charges qui lui sont imposées, par l'Etat notamment, et que ne supportent pas ses concurrents.
    Premièrement, l'aide à la presse, dont le surcoût, non compensé par l'Etat, est assuré par le budget propre de La Poste. Cette dépense, que les autres opérateurs n'assument pas, est très importante puisqu'elle équivaut au surcoût de la présence postale territoriale, comme l'a rappelé Mme Vautrin tout à l'heure.
    Deuxièmement, l'abaissement des charges sociales sur les bas salaires dont ne bénéficie pas La Poste mais dont bénéficient ses concurrents. Le contrat évoque une solution : nous attendons qu'elle se confirme.
    Troisièmement, le pourcentage de contribution aux retraites, qui est bien supérieur pour La Poste à celui qu'assument ses concurrents. La loi sur la réforme des retraites n'a rien réglé de ce point de vue non plus.
    Donc, madame la ministre, avec un discours tronqué sur l'héritage, avec une stratégie d'enlisement, pour ne pas dire de pourrissement, avec une mauvaise foi évidente en matière d'analyse des résultats de La Poste et enfin, avec en prime cette idée étrange de taxer le timbre pour financer l'accompagnement des personnes âgées dépendantes alors que le courrier est le point fragile du secteur, nous avons là tous les ingrédients d'une politique déterminée de sabordage de La Poste, de ses compétences professionnelles et de ses missions de service public. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Alain Gouriou, dernier orateur inscrit.
    M. Alain Gouriou. Madame la ministre, je souhaiterais, à mon tour, à l'occasion de ce débat budgétaire concernant les télécommunications, attirer votre attention sur trois points.
    Sur le budget proprement dit, on ne peut que saluer les mesures fiscales en faveur des jeunes entreprises innovantes réalisant des projets de recherche-développement, ainsi que la pérennisation et le renforcement du crédit d'impôt pour dépenses de recherche.
    Si on ne peut qu'approuver l'accroissement des moyens de l'ART, déplorons cependant la modestie des moyens en réduction continue de la commission supérieure du service public qui travaille beaucoup et constitue un lien d'échanges et de réflexions pour les parlementaires, députés et sénateurs. Je regrette aussi la stagnation des crédits de recherche alloués au groupement des écoles supérieures des télécommunications. Nous aurons l'opportunité de nous attarder sur les télécommunications lors de la discussion des projets de loi que vous nous présenterez au début du mois de décembre.
    La crise du secteur des télécommunications se poursuit. La ponction de 150 milliards effectuée sur les opérateurs de téléphone à l'occasion des ventes des licences UMTS a stoppé net la croissance. L'Europe n'a rien fait pour l'empêcher.
    Les marchés des équipements se sont effondrés, passant en deux ans de 120 à 60 milliards d'euros. Jamais une telle crise n'avait été vécue par ce secteur depuis qu'il est mature, c'est-à-dire une trentaine d'années. Les effectifs ont fondu. En moyenne, le nombre d'emplois a été divisé par deux. Je vous l'ai dit en commission, madame la ministre, le bassin d'emplois de Lannion-Trégor, que je connais particulièrement, qui rassemblait 8 000 salariés dans les activités liées au télécoms, a perdu près de 2 000 emplois en deux ans. Et l'hémorragie se poursuit là comme sur d'autres sites. Les délocalisations se multiplient vers des pays de l'Europe de l'Est, mais surtout vers l'Asie, non seulement pour les unités de production mais aussi et surtout pour les activités de recherche-développement.
    La question importante est aujourd'hui celle du maintien en France et en Europe d'un secteur industriel stratégique sur le plan politique et même militaire. C'est l'avenir de toute la filière électronique.
    Une politique volontariste est devenue une obligation. L'achèvement de la couverture du territoire en téléphonie mobile, bien que nécessaire, n'est évidemment pas de nature, à elle seule, à relancer l'activité industrielle. Le sénateur Laffitte suggérait un plan de relance européen, financé par un emprunt de la Banque européenne d'investissement, afin de financer les infrastructures d'intérêt européen mais aussi les dépenses de recherche-développement.
    Aujourd'hui, aux Etats-Unis comme en Asie, les investissements massifs sont engagés dans la recherche-développement, et notre retard risque de transformer à terme les Européens en spectateurs et en acheteurs.
    La Corée du Sud donne l'exemple d'une politique volontariste axée sur la priorité donnée aux NTIC. Le taux de pénétration du haut débit dans les ménages y dépasse aujourd'hui 50 %. Ce taux en France n'atteint pas 15 %.
    Ce record a été atteint par des incitations fiscales, des aides à la recherche-développement, l'équipement systématique des administrations et de l'éducation. L'ensemble des industries de ce secteur des NTIC - terminaux, réseaux, accès et logiciels - ont été tirés par ce formidable développement de la demande. Le coût de cette politique pour l'Etat coréen a été, monsieur le ministre, de 10 millions de dollars pour la première phase, suivie d'une seconde pour un même montant.
    Nous plaidons avec insistance non seulement pour l'extension rapide des liaisons ADSL, mais aussi pour un réseau de fibres optiques permettant à une majorité de citoyens de se connecter à des prix abordables. Je rejoins sur ce point le voeu exprimé par notre rapporteur, M. Joyandet. Or les programmes de développement des communications enregistrent dans les contrats de plan Etat-régions des retards inquiétants.
    J'emprunterai la conclusion de ce point au projet de résolution adopté lors de la 109e assemblée de l'union interparlementaire, résolution rapportées par notre collègue Patrice Martin-Lalande - dont je regrette l'absence - : « Sans une politique publique appropriée, les NTIC ne peuvent être un facteur de progrès partagé. »
    Un dernier mot, si vous le permettez, monsieur le président - je profite de la présence de M. le ministre du budget -, à propos de la réforme de la taxe professionnelle de France Télécom.
    Depuis des années, les élus de tous bords attendaient cette réforme. Le Gouvernement a décidé que cette taxe serait attribuée directement aux collectivités locales. Nous vous en félicitons, monsieur le ministre.
    Ce qui est moins bien, c'est que le Gouvernement a décidé de prélever la même somme sur les dotations aux collectivités, et ce qui est inacceptable, c'est que ce prélèvement sur les dotations de l'Etat aux collectivités sera maintenu au même niveau, même si les bases de taxe professionnelle de France Télécom viennent à diminuer, et même si elles viennent à disparaître !
    M. François Brottes. Arnaque !
    M. Alain Gouriou. Je vous mets donc tous en garde, mes chers collègues, qui êtes également élus de collectivité.
    Voici un exemple concret : le centre de Télécommunications spatiales de Pleumeur-Bodou, dans les Côtes-d'Armor, qui représente plus de 6 millions d'euros de bases, soit 900 000 euros de produits pour la commune, va être fermé. Les bases vont donc disparaître. Avec le dispositif actuel de la loi de finances de 2003, le produit de 900 000 euros que perçoit la commune disparaîtra, mais le prélèvement sur cette dotation sera maintenu, d'où une perte sèche de 900 000 euros pour la commune, qui devra être compensée par la fiscalité locale. Le groupe socialiste a donc déposé un amendement visant à éviter aux collectivités locales les effets pervers de cette mesure, sur lesquels j'attire particulièrement votre attention, monsieur le ministre du budget.
    Les mesures envisagées par le Gouvernement pour relancer l'activité, madame la ministre, paraissent dramatiquement insuffisantes et inadaptées à la situation inquiétante de ces secteurs. Les aides de l'Etat à la recherche-développement diminuent de façon lente mais inexorable. C'est M. Gattaz, président du GIXEL, qui l'écrit. Nous le répéterons demain à Mme Haigneré. On est bien loin, monsieur Gatignol, de l'objectif de 3 % du PNB fixé par le Président de la République. Il manque enfin à notre pays, comme à l'Union européenne, une vision industrielle et de grands projets, dans le domaine de l'espace et de l'aéronautique par exemple.
    Pour ces raisons, le groupe socialiste ne peut que voter contre ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-huit heures trente-cinq, est reprise à dix-huit heures quarante-cinq.)
    M. le président. La séance est reprise.
    La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
    M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je répondrai à Daniel Garrigue, Thierry Carcenac et Michel Diefenbacher, tous trois rapporteurs spéciaux, dans l'ordre dans lequel ils sont intervenus.
    S'agissant des services financiers, le budget pour 2004 s'inscrit dans la dynamique de « Bercy en mouvement » qui a été lancé l'an dernier pour engager le ministère de l'économie et des finances dans une démarche pluriannuelle déterminée de performance au service de nos concitoyens. Trois exigences ont guidé la construction de ce budget : la recherche de l'efficacité et de la performance, qui est la condition de la maîtrise de la dépense publique ; l'adaptation de l'organisation des services aux besoins des usagers et l'évolution vers une administration de services, particulièrement dans le domaine fiscal.
    Le budget pour 2004 des services financiers est la traduction d'un objectif ambitieux d'efficacité et de performance. Il prévoit une évolution de crédits inférieure à l'inflation, le non-remplacement d'environ un départ sur deux, ce qui représente 2 000 emplois, et ce dans une perspective pluriannuelle qu'attestent les contrats de performance 2003-2005 qui ont été conclus avec la direction générale des impôts et avec le Trésor public. Il s'agit là d'une contribution significative de notre ministère à la maîtrise des dépsenses. Elle ne se fait ni au détriment de la qualité du service rendu aux Français, ni au détriment des agents eux-mêmes. C'est l'amélioration sensible de la performance qui permet de concilier maîtrise de la dépense et plus grande efficacité de nos administrations.
    Les leviers de l'accroissement de la productivité sont multiples : informatisation, « réingénierie » des procédures, raccourcissement des circuits administratifs, suppression des tâches et des formalités qui sont devenues superflues. Il s'agit au fond de simplifier.
    A titre d'exemple, je rappelle que les dispositions fiscales inscrites dans le budget pour 2004 permettront la suppression d'environ 270 000 déclarations annuelles de plus-values immobilières et de 70 000 déclarations de succession de faible montant. J'ajoute que 14 000 entreprises agricoles bénéficieront, grâce au relèvement du plafond, du régime simplifié d'imposition des bénéfices agricoles. C'est un gain de temps pour les contribuables concernés, mais aussi pour nos administrations.
    M. François-Michel Gonnot et M. Claude Gatignol. Très bien !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Bien entendu, nous avons veillé à inscrire les moyens que requièrent les grands investissements informatiques de modernisation du ministère : Accord pour la dépense de l'Etat, Copernic pour le compte fiscal unique du contribuable, Hélios pour les applications relatives au secteur public local. Ces applications, pour lesquelles des audits externes sont prévus ou en cours, permettront des gains de productivité substantiels d'ici à deux ou trois ans. Nous sommes d'ailleurs en train de les évaluer.
    La recherche de la performance ne sacrifie pas l'avenir, mais au contraire le construit. Elle ne sacrifie pas davantage, contrairement à ce qu'on peut parfois entendre ici ou là, l'aménagement du territoire. Certes, « Bercy en mouvement » comporte un volet important de réorganisation territoriale, avec la disparition de 1 200 implantations sur les 8 000 que compte le ministère. Ce volet a pour objet principal, non des économies d'emplois, mais une adaptation de l'organisation et de l'implantation des services aux besoins des usagers et aux évolutions réglementaires et technologiques.
    La grande partie de ces réorganisations concerne la fusion, toujours dans la même ville, des centres des impôts et des recettes des impôts, afin d'offrir aux PME, à l'instar de la DGE pour les grandes entreprises, un interlocuteur fiscal unique.
    Pour ce qui est du réseau du Trésor public, une trentaine de recettes des finances fermeront durant la période 2003-2005, dans le prolongement du mouvement engagé en 1996. Ces services, qui ne reçoivent d'ailleurs aucun public, n'ont plus d'utilité aujourd'hui. La majorité des personnels sera redéployée dans les autres implantations du Trésor public de la ville ou de l'arrondissement.
    Ces fermetures suscitent, j'en conviens tout à fait, une certaine émotion dans quelques départements. Pourtant, ce réseau, dense de près de 3 800 postes, doit s'adapter à son temps s'il ne veut pas perdre son efficacité. Je vous rappelle, à cet égard, que le Trésor public compte près de 1 200 postes de trois agents ou moins, qui ne peuvent plus apporter aux usagers l'ensemble des services légitimement attendus d'eux. Bon nombre de fermetures ne vont d'ailleurs qu'entériner des situations de fait et nous mettons en place des nouvelles modalités de présence des services sur le territoire.
    J'ajoute que les particuliers ont de moins en moins besoin de se rendre dans les trésoreries : il n'y a plus de comptes de particuliers ; les placements CNP cesseront à compter du 1er janvier 2004 ; les impôts sont de plus en plus souvent payés au moyen d'un TIP ou prélevés mensuellement. Certaines trésoreries n'enregistrent, mesdames et messieurs les députés, qu'une ou deux opérations par jour ! La montée en puissance des centres d'« impôts-services » amplifiera encore ce mouvement.
    En ce qui concerne les douanes, les conditions de fonctionnement des contributions indirectes et les relations avec les opérateurs ont totalement changé. Il s'agit d'en prendre acte.
    Enfin, la fermeture des implantations infra-départementales de la DGCCRF, dont l'utilité était liée au contexte de l'après-guerre, dans le cadre d'une économie de pénurie et de contrôle des prix, vise tout simplement à regrouper, dans un souci d'efficacité, les services administratifs afin de permettre que les agents passent le maximum de leur temps sur le terrain au service des consommateurs.
    En un mot, l'adaptation des structures territoriales du Minéfi a pour objectif premier la meilleure qualité possible du service rendu aux usagers. Je veillerai personnellement, en préalable à toute évolution, à ce que la concertation nécessaire avec les élus locaux puisse être menée.
    M. François Brottes. Silence, on ferme !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Le passage d'une administration de procédure à une administration de service est au coeur de la démarche de « Bercy en mouvement ». Celle-ci guide au premier chef la mission du Minéfi au service du plus grand nombre des Français pour ce qui est de l'impôt des particuliers.
    Ainsi mettrons-nous en oeuvre dès 2004 un ensemble de mesures regroupées sous le nom de « Pour vous faciliter l'impôt » et destinées à améliorer concrètement et de façon mesurable les rapports entre les services fiscaux et les particuliers. Nous continuons également à approfondir le chantier des modalités de recouvrement de l'impôt afin d'en améliorer la performance et de simplifier la tâche des particuliers. Notre démarche s'inscrit dans la perspective, déjà évoquée l'année dernière, de faire du prélèvement automatique le mode de recouvrement de référence de l'impôt et de parvenir si possible à la déclaration pré-remplie pour l'impôt sur le revenu, sans pour autant perdre de vue l'hypothèse de la retenue à la source.
    A ce propos, permettez-moi de rappeler ce que je disais l'an passé et qui parfois a été déformé depuis. Si la retenue à la source n'est pas d'actualité pendant la présente législature, il ne s'agit pas pour autant de l'enterrer pour l'avenir. Nous voulons simplement identifier les difficultés éventuelles, qui doivent être préalablement tranchées.
    La retenue à la source suppose - sans même qu'il soit besoin d'évoquer l'importante difficulté que ne manquera pas de soulever la gestion de l'année de transition - que l'on examine deux questions essentielles et qu'on y réponde : la première concerne la conjugalité de l'impôt ; la deuxième a trait à la transmission à l'employeur d'informations à caractère privé. La question de la retenue à la source n'est pas un simple sujet de technique de recouvrement. Elle conduit à nous interroger sur notre conception même de l'impôt sur le revenu.
    M. Bernard Carayon. Très juste !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. En attendant ce débat, qui aura lieu sur la base d'un travail préparatoire, nous menons nos travaux sur la déclaration pré-remplie, puisque la résolution des difficultés qu'elle comporte serait de toute manière un préalable à un éventuel passage à la retenue à la source. Il faut en effet parvenir à un haut niveau de fiabilité des données, notamment pour ce qui est de l'identifiant fiscal.
    Afin de simplifier l'impôt pour le contribuable, nous développons le recours à la déclaration par Internet : 150 000 déclarants en 2002, 600 000 cette année, et nous nous fixons l'objectif d'un million de télédéclarants en 2004.
    Le recouvrement automatique présente à nos yeux des avantages pour tous, qu'il s'agisse des prélèvements mensuels ou des prélèvements à échéance. Pour le rendre plus incitatif, nous avons décalé du 8 au 15 du mois la date du prélèvement, afin de le rendre compatible avec celle de virement des pensions, et nous avons prévu un dispositif de prise en compte facile et rapide des variations annuelles des revenus.
    Mesdames, messieurs les députés, la généralisation des prélèvements automatiques et la mise en place de la déclaration pré-remplie permettront des gains de productivité substantiels, sans doute assez proches de ceux qui sont attendus de la retenue à la source.
    On voit bien que le critère des gains de productivité, à savoir des économies d'emplois, n'est pas pertinent pour décider de la retenue à la source, à supposer toutes les difficultés techniques surmontées. Le véritable avantage de la retenue à la source réside, comme l'a souligné le conseil des impôts, dans la suppression du décalage d'un an entre la perception des revenus et leur imposition.
    En face de cet avantage très réel, il faudra, comme je vous l'ai déjà indiqué, trancher la question fondamentale de l'imposition par foyer fiscal et de la transmission à l'employeur des éléments de revenus autres que salariaux. Ce sont des questions sur lesquelles le Parlement, plus que tout autre, est bien placé pour débattre et pour donner son avis.
    Voilà, mesdames, messieurs les députés, les quelques points que je voulais signaler au sujet de la mise en mouvement des services financiers pour fournir aux Français un service meilleur, plus simple, plus réactif à leurs besoins et au meilleur coût possible.
    J'en viens aux charges communes, aux comptes spéciaux du Trésor et aux entreprises publiques. Ainsi que l'a souligné Daniel Garrigue, les enjeux sont considérables : pas moins de 120 milliards d'euros de crédits pour les charges communes, près de 70 milliards de masses financières retracées au sein des comptes spéciaux du Trésor, 200 milliards d'euros de chiffres d'affaires pour les entreprises publiques.
    Les charges communes représentent 34 % des dépenses brutes du budget général. Toutefois, la part des dépenses d'ordre au sein de ce budget est de 67 milliards, ce qui fait que 54 milliards seulement pèsent sur les dépenses nettes, ramenant la part des charges communes dans le total des dépenses à moins de 19 %.
    Les dépenses nettes se répartissent en trois catégories : la charge nette de la dette pour 38,6 milliards ; les crédits de personnels non ventilés sur les budgets des ministères pour 10,8 milliards ; les autres dépenses pour 4,5 milliards, lesquelles comprennent notamment des subventions aux régimes spéciaux de retraites, des interventions en faveur du logement, des crédits pour un fonds d'aide à la Polynésie et des crédits pour les pouvoirs publics.
    Daniel Garrigue a très justement évoqué l'avenir de cette masse hétérogène de crédits. Cet avenir est clair : à compter du 1er janvier 2006, il n'y aura plus de budget des charges communes dans sa forme actuelle. C'est donc l'avant-dernière fois que nous en débattons.
    La loi organique prévoit elle-même le sort de la plupart des crédits qui sont inscrits à ce budget : ils seront ventilés entre un programme « Dette » - qui est d'ailleurs préfiguré, pour la troisième année consécutive, au sein du fascicule « Charges communes » -, un programme « Remboursements et dégrèvements » et un programme « Garanties de l'Etat ». Par ailleurs, un compte spécial retracera la gestion des pensions des fonctionnaires et deux dotations, regroupées dans une seule mission, seront consacrées aux dépenses accidentelles et aux provisions pour dépenses de rémunération. Enfin, une mission retracera les crédits des pouvoirs publics.
    Les quelques crédits des charges communes actuelles dont le sort n'est pas réglé seront répartis dans les missions et dans les programmes susceptibles de les accueillir ; ces crédits sont peu nombreux et leur montant s'établit à environ 1,8 milliard d'euros dont 1,4 milliard environ alloués aux primes d'épargne logement.
    Je voudrais revenir un instant sur la charge de la dette, principale des dépenses retracées dans le budget des charges communes.
    Premier constat : la charge de la dette n'augmente que faiblement dans le projet de loi de finances pour 2004, puisque la dérive est de 300 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2003. Si l'on prend pour référence la prévision d'exécution pour 2003, l'augmentation s'établit toutefois à 750 millions. En définitive, la charge de la dette sera moins importante en 2003 qu'il n'était prévu en loi de finances initiale, et ce à concurrence de 450 millions d'euros.
    Deuxième constat : le répit risque de n'être que temporaire. Nous bénéficions actuellement de conditions très favorables, avec des gains de refinancement élevés. Un retournement de tendance sur les marchés nous exposerait à une forte croissance de la charge de la dette. Si nos gains de refinancement disparaissaient, le niveau actuel du déficit budgétaire nous exposerait, mécaniquement, à une croissance annuelle de 2 milliards d'euros de la charge de la dette. Méditons ce chiffre, mesdames et messieurs les députés : 2 milliards d'euros, c'est plus de deux fois ce que nous consacrons chaque année aux investissements routiers. Nous risquons de perdre cette somme, tout simplement parce que nos déficits sont très élevés. Maîtriser les dépenses, comme s'y emploie le Gouvernement, n'en est que plus indispensable.
    Troisième et dernier constat, la dette peut et doit faire l'objet d'une gestion active, comme l'a très bien observé tout à l'heure Daniel Garrigue. Je ne m'étendrai pas sur l'ensemble des procédures mises en place par l'Agence France-Trésor, elles sont décrites dans le programme gestion de la dette et de la trésorerie de l'Etat détaillé dans le fascicule des charges communes. J'évoquerai simplement deux points.
    Les perspectives de reprise des opérations de swaps de taux tout d'abord. Ces opérations ont été arrêtées en juillet 2002. Néanmoins, l'encours des swaps réalisés auparavant rapportera 290 millions d'euros en 2004. C'est une recette appréciable. Dans son principe, le ministre du budget ne peut qu'être favorable à ce type d'opérations, dès lors que les risques sont très sérieusement encadrés. A cet égard, nous avons mis deux conditions à la reprise des swaps : un niveau des taux longs adéquat, une volatilité limitée. Or les niveaux requis ne sont pas encore atteints. Nous ne comptons donc pas reprendre les swaps de taux dans l'immédiat.
    L'importance, pour l'équilibre du budget, des recettes de placement de la trésorerie. Nous attendons environ 600 millions de recettes pour 2003. Ces recettes ne sont possibles que grâce à une gestion fine de la trésorerie, qui suppose une bonne information de l'Agence France-Trésor. C'est pourquoi je tiens tout particulièrement au dispositif d'information de l'agence par les collectivités locales, sur leurs mouvements de fonds importants. Ce dispositif figure dans les articles que nous examinerons demain, mais je voulais en souligner dès aujourd'hui le caractère essentiel.
    S'agissant des comptes spéciaux du Trésor, je m'en tiendrai à quelques considérations de principe, dans la mesure où la commission des finances procède à l'examen de chacun des différents comptes à l'occasion du débat budgétaire. Je répondrai plus complètement à Michel Diefenbacher sur les entreprises publiques.
    Premièrement, nous progressons, là aussi, dans la mise en oeuvre de la loi organique. C'est ainsi que deux comptes incompatibles avec ce texte sont supprimés en projet de loi de finances pour 2004. Il s'agit du Fonds national de développement de la vie associative et du Fonds national de l'eau. Ces deux comptes bénéficiaient d'une recette sans lien avec leur objet, assise sur les enjeux du PMU. Les crédits nécessaires ont été budgétisés au budget général.
    Deuxièmement, l'excédent global procuré dans les comptes spéciaux se réduit fortement en loi de finances pour 2004. Michel Diefenbacher a insisté sur ce point, en relevant que le compte d'avances sur impôts locaux, excédentaire depuis quelques années, était désormais déficitaire. L'explication est mécanique. L'excédent provenait de deux causes principales : l'amélioration du taux de recouvrement des impôts locaux et la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle qui freinait l'augmentation d'une année sur l'autre du produit des impôts locaux. Désormais, le taux de recouvrement de la part salaires s'achève. Voilà pourquoi nous prévoyons un léger déficit en 2004 pour ce compte.
    A propos des entreprises publiques, je répondrai à Michel Diefenbacher, qui a insisté en tant que rapporteur, que l'action du Gouvernement en ce domaine est guidée par trois principes.
    Premier principe : une entreprise publique, comme toute entreprise, doit avoir pour premier objectif d'être performante, en bonne position stratégique dans son métier. C'est dans ce sens que le Gouvernement travaille, avec les directions des entreprises dont l'Etat est actionnaire. Par une approche pragmatique, adaptée à la spécificité de chaque entreprise, nous essayons de déterminer avec elles les efforts de compétitivité et les orientations stratégiques qu'il faut mettre en oeuvre. Les résultats atteints ces derniers mois montrent que cette recherche de performance porte ses fruits pour les entreprises dont l'Etat est actionnaire, comme pour toute autre entreprise. J'en rappellerai quelques-uns : le redressement engagé de France Télécom, l'alliance conclue par Air France avec KLM, Thomson qui vient de parachever son repositionnement stratégique sur l'ensemble des métiers de la chaîne de l'image en concluant un accord avec un partenaire chinois sur les activités de téléviseur.
    Il reste aujourd'hui des défis immenses pour les entreprises publiques en matière de compétitivité et de positionnement stratégique. Le Gouvernement s'y est attelé avec les directions des entreprises concernées. Le contrat de plan de La Poste qui sera signé après les consultations en cours fixe les principaux objectifs pour chacun des métiers de La Poste dans le but de permettre notamment à la branche courrier d'affronter la concurrence, Nicole Fontaine en parlera plus longuement que moi. Des échanges sont en cours avec la SNCF sur l'avenir de la branche fret. GIAT poursuit des négociations sociales pour mettre en oeuvre un plan industriel indispensable pour assurer l'avenir de l'entreprise. DCN est désormais une entreprise à part entière qui dispose des outils nécessaires pour améliorer ses performances. La préparation du changement de statut d'Aéroports de Paris a été engagée.
    Deuxième orientation : réformer les méthodes de travail de l'Etat vis-à-vis des entreprises dont il est actionnaire. Un regard critique devait être porté sur la manière dont l'Etat gère ses relations avec les entreprises publiques, notamment dans sa fonction d'actionnaire. Cette analyse a eu lieu. Elle repose notamment sur les travaux importants qui ont été menés par la commission d'enquête de votre assemblée, dont Michel Diefenbacher était le rapporteur. Le Gouvernement en partage très largement les conclusions et les recommandations. Il a bénéficié par ailleurs du diagnostic et des propositions de réforme qui ont été formulés par un groupe de personnalités conduit par M. Barbier de la Serre.
    La principale faiblesse soulignée par la commission d'enquête comme par le groupe Barbier de la Serre était le manque d'identification de la fonction d'actionnaire. La création de l'Agence des participations de l'Etat est destinée à y remédier. Je voudrais souligner par ailleurs qu'un travail important d'information a été réalisé dans le cadre du rapport annuel sur l'Etat actionnaire. On a cherché à donner la vision la plus complète et la plus précise possible de la situation et des enjeux propres à chaque entreprise publique.
    Troisième et dernière orientation, la gestion des parts de l'Etat dans le capital doit répondre à deux objectifs : l'intérêt stratégique des entreprises et l'intérêt patrimonial de l'Etat. Le Gouvernement a appliqué avec pragmatisme, au cours des douze derniers mois, le principe selon lequel l'Etat n'a pas vocation à rester durablement actionnaire d'entreprises concurrentielles.
    Cette approche pragmatique a conduit, selon les cas, à privilégier des opérations favorisant un projet stratégique à l'entreprise ou à saisir des conditions de marché favorables pour réaliser une cession. On peut citer deux cas d'opérations favorisant le développement stratégique de l'entreprise : Air France et France Télécom.
    L'Etat a réalisé quatre opérations de cession depuis douze mois, lui permettant de valoriser au mieux son patrimoine : la cession de sa participation au capital du Crédit lyonnais par mise aux enchères ; la réduction de 10 % de sa participation au capital de Renault par opération de marché accélérée ; la cession de sa participation dans Dassault Systèmes et dans Thomson. Le produit cumulé de ces cessions représente environ 5 milliards d'euros.
    Les recettes de cessions et les dotations en capital à des entreprises ou établissements publics comme Réseau ferré de France, l'Etablissement public de financement et de restructuration ou Charbonnages de France passent par le compte 902-24, qui reflète les entrées et sorties en capital de l'Etat. Le projet de loi de finances se doit de donner une estimation sur le volume de ces flux en 2004. Un chiffre indicatif de 4 milliards d'euros a été inscrit. Il ne s'agit ni d'une obligation de recettes, ni d'une obligation de dépenses. Les recettes du compte dépendront, comme cette année, des opportunités de cessions. S'agissant des dépenses, le calendrier de désendettement des entreprises concernées sera ajusté en fonction des recettes de cessions.
    Il me semble enfin utile, pour conclure sur les entreprises publiques, de souligner trois points importants sur l'utilisation des produits de cessions d'actifs. La participation de l'Etat à l'accord de financement du groupe Alstom sera financée à hauteur de 500 millions d'euros à partir des produits de cessions réalisées cette année. Une somme de 150 millions d'euros a été réservée au financement des fondations de recherche, nous en reparlerons dans la discussion des amendements. Enfin, le Gouvernement a jugé nécessaire, dans la loi de finances pour 2004, que le financement annuel de Réseau ferré de France soit repris pour une large part sous forme de dotation budgétaire. Ce choix est transparent, il est plus conforme à la nature de ces dépenses en comptabilité européenne.
    J'ai été aussi vite que j'ai pu, monsieur le président, mais j'aimerais répondre, pour terminer, aux interrogations de M. Dosière, si vous me le permettez.
    M. le président. Je vous en prie, monsieur le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. C'est d'autant plus facile pour moi que ce sont les mêmes que l'an passé.
    M. François-Michel Gonnot. Il bégaie !
    M. René Dosière. J'espère que la réponse sera plus complète !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Quand les questions sont les mêmes, les réponses sont inévitablement les mêmes, monsieur Dosière.
    M. René Dosière. Vous ne m'aviez pas répondu à l'époque !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Vous m'avez posé quatre questions.
    Premièrement, il n'y a aucune alimentation des comptes de la présidence de la République par voie de décrets de dépenses accidentelles. C'est un engagement tenu.
    M. René Dosière. Fort bien !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Deuxième question, le budget de la présidence reflète de manière fidèle les dépenses de celle-ci. Le mouvement de transparence a en effet été conduit à son terme. Les mises à disposition de fonctionnaires que vous critiquez sont une pratique courante dans tous les ministères, pleinement légale et d'ailleurs à mes yeux souhaitable car elle est bénéfique pour les agents, dont elle favorise la mobilité.
    M. René Dosière. Et les dépenses de fonctionnement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Troisièmement, la présidence n'a pas de cagnotte. C'était à une autre époque, vous le savez. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François-Michel Gonnot. C'est bien de le rappeler !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Elle place ses fonds disponibles en attente d'emploi, comme l'Assemblée nationale et le Sénat. C'est tout simplement de la bonne gestion.
    M. François-Michel Gonnot. Absolument !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Si elle faisait l'inverse, vous ne manqueriez pas de le lui reprocher !
    M. François-Michel Gonnot. Tout à fait !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Quatrièmement, la présidence applique évidemment tous les textes. Elle dispose d'ailleurs d'un comptable public, comme les autres pouvoirs publics ; il n'y a rien là que de très banal.
    En réalité, cher monsieur Dosière, le mérite de vos questions aura été de me permettre de souligner à l'Assemblée nationale que, depuis 1995, la présidence a réellement fait des efforts considérables de transparence.
    M. François-Michel Gonnot. Depuis 1995 !
    M. René Dosière. Elle a surtout multiplié son budget par sept !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Enfin, je répondrai à M. Giacobbi, qui s'est intéressé aux pensions, comme l'an passé, que la loi de finances sépare les pensions en deux. L'essentiel est imputé sur les crédits des ministères, mais les charges communes comprennent une dotation d'ajustement. En tout état de cause, la communication du Gouvernement, elle, est parfaitement claire : les pensions, ainsi que l'indique le dossier de presse, augmentent au total de 1,7 milliard d'euros. C'est la première des causes d'augmentation des dépenses.
    J'ai trouvé M. Giacobbi sévère dans sa critique sur l'information actuarielle puisque, précisément, le compte général de l'administration des finances contient, pour la première fois, une projection, à laquelle il s'est d'ailleurs référé. Sur le fond, il y a tout lieu, en effet, de prendre en compte l'inquiétude qui est la sienne. Il s'est posé la question de savoir si ceci pouvait répondre à la nécessité de maîtriser le nombre de membres de la fonction publique. Le Gouvernement s'y emploie. Pour l'instant, il le fait sans le soutien des groupes qui siègent à gauche, mais il ne désespère pas de les en convaincre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

    (M. Marc-Philippe Daubresse remplace M. Jean Le Garrec au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE
DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE,
vice-président

    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au commerce extérieur.
    M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, l'amélioration de la conjoncture économique internationale devrait permettre à nos entreprises de tirer profit de la croissance mondiale en 2004. Après une période difficile en Europe, la croissance revient. Elle repart aux Etats-Unis, en Asie et même au Japon. Nos entreprises doivent aller chercher la croissance sur les marchés extérieurs. Le commerce extérieur est, en effet, une des clés de notre croissance. Plus que d'aides, les entreprises françaises souhaitent bénéficier d'un environnement favorable au développement des affaires, d'informations pertinentes sur les marchés extérieurs et d'un accompagnement personnalisé, surtout quand elles débutent dans l'exportation.
    La mondialisation est un fait. Nous devons nous organiser pour en tirer le meilleur parti, pour nos concitoyens et nos entreprises. La vision française de la mondialisation gagne du terrain. Elle s'exprime à l'OMC et dans notre politique en faveur des pays en développement. Le Gouvernement souhaite que les négociations commerciales lancées à Doha, qui ont pris du retard à Cancún en septembre dernier, puissent repartir. Le Gouvernement déplore ce retard.
    Nous souhaitons avancer dans les domaines qui intéressent les pays en développement, en particulier pour l'Afrique. Nous nous réjouissons qu'un accord ait été trouvé pour permettre aux pays en développement, frappés par de graves épidémies, d'accéder, par des licences obligatoires, aux médicaments. Nous suivrons de près sa mise en oeuvre.
    Nous devons maintenant progresser pour prendre en compte les difficultés des pays producteurs de coton en Afrique de l'Ouest, comme Mme Perrin-Gaillard et Mme Andrieux-Bacquet l'ont souligné. L'initiative africaine du Président propose la méthode à suivre pour mieux insérer l'Afrique dans le commerce mondial et assurer à ces producteurs des prix raisonnables.
    Quant au niveau d'annulation des dettes que la France concède, sur lequel Mme Andrieux-Bacquet m'a interpellé, je rappelle qu'en 2001 la France a fait 21 millions d'euros d'annulation de dettes ; en 2002, 850 millions d'euros ; en 2003, 1,5 milliard. Pour 2004, la France a inscrit 2,5 milliards d'euros d'annulation de dettes. Nous sommes, dans ce domaine, tout à fait exemplaires. Il n'est qu'à voir l'évolution depuis 2001.
    Il faut aussi souligner que nos entreprises ont beaucoup à gagner d'une plus grande ouverture des marchés étrangers. C'est le cas bien évidemment pour nos exportateurs de produits industriels mais aussi de services. L'enjeu se situe bien sûr dans les grands marchés industrialisés mais également, de plus en plus, dans les pays émergents où une classe moyenne importante se développe.
    En même temps, cette globalisation suscite des inquiétudes chez nos concitoyens. C'est le multilatéralisme qui permet d'encadrer la mondialisation pour qu'elle prenne en compte non seulement les effets strictement économiques des échanges mais aussi leur impact plus global sur nos sociétés. La France reste fortement attachée au système multilatéral, seul à même de corriger les rapports de force mondiaux pour permettre une mondialisation maîtrisée et humanisée.
    Quatrième exportateur mondial, la France est plutôt bénéficiaire de l'ouverture internationale. Nos entreprises sont parties à la conquête du marché unique élargi qui, avec 450 millions de consommateurs, est en train de devenir notre nouveau marché intérieur. C'est un enjeu de taille, car dans moins de six mois, dix nouveaux pays auront rejoint l'Union. L'expérience de l'élargissement à l'Espagne, au Portugal, à la Grèce et à l'Irlande montre que l'enrichissement de ces Etats membres s'est révélé une source de croissance pour toutes nos économies.
    Nos entreprises s'internationalisent. Les grandes sont maintenant largement présentes sur les marchés étrangers. Ce n'est pas encore le cas des petites et moyennes entreprises : 122 000 exportent, c'est bien mais c'est encore trop peu. Il y a un vivier de 50 000 entreprises qui pourraient, si elles étaient bien informées et encouragées, devenir exportatrices.
    La réforme du dispositif d'appui au commerce extérieur, que je vous avais annoncée il y a un an et que le Gouvernement a mise en place depuis, vise précisément cet objectif : encourager les PME à l'exportation. C'est à cet effet que la fusion du Centre français du commerce extérieur et d'Ubifrance a été réalisée - le décret d'application devrait paraître au mois de décembre. Elle repose sur deux principes : une démarche véritablement commerciale vers les PME, pour les informer et les accompagner à l'exportation, et un partenariat élargi.
    S'appuyer sur les régions qui sont proches du tissu économique, telle est la première raison de la réforme du Centre français du commerce extérieur que M. Rocca-Serra a détaillée et qu'il a justement qualifiée de rationalisation. C'est l'esprit de la décentralisation, qui nous permettra d'éviter les doublons.
    Vous le savez, les compétences et les services des directions régionales du commerce extérieur seront transférés aux conseils régionaux. Les expériences d'anticipation en cours permettront, je pense, d'apaiser les craintes dont faisait état M. Nicolas Forissier tout à l'heure. UBIFRANCE délocalisera un tiers de ses emplois, soit 180, à Marseille pour aller à la rencontre des entreprises du grand Sud et développer la vocation méditerranéenne de Marseille dans le cadre du partenariat Euromed.
    Cette réforme permettra, en outre, de labelliser de nouveaux salons professionnels à l'étranger, comme le demandait Mme Sylvie Andrieux-Bacquet. Le Gouvernement souhaite doubler le nombre de salons à l'étranger auxquels participent nos entreprises. J'ai demandé à UBIFRANCE, avec les 21 millions d'euros sur trois ans de crédits supplémentaires dégagés par redéploiement, d'atteindre cet objectif dès 2004, en labellisant des salons qui répondront à des critères d'intérêt national et qui seront organisés par nos partenaires naturels : les régions, les fédérations professionnelles, les chambres de commerce, les opérateurs privés.
    Dans le même esprit, une nouvelle méthode a été retenue pour atteindre l'objectif ambitieux que s'est fixé le Gouvernement concernant les jeunes à l'international. Comme je m'y étais engagé, le volontariat international en entreprise a été assoupli pour répondre aux besoins des PME et pour faire en sorte que les jeunes acquièrent une véritable expérience professionnelle à l'étranger qui débouche ensuite sur un emploi stable. C'est désormais chose faite. Encore faut-il le faire savoir ! Là encore, la méthode retenue s'appuie sur nos partenaires qui ont tous signé des conventions de mobilisation et d'intéressement, en présence du Premier ministre, pour doubler le nombre de jeunes partant à l'étranger d'ici à 2005.
    Le nouvel établissement public UBIFRANCE s'est vu confier trois missions principales qui devraient permettre de satisfaire les PME : mieux diffuser et vendre les prestations des 154 missions économiques à l'étranger, doubler le nombre de VIE grâce à la mise en place des partenariats et doubler le nombre de salons professionnels grâce à la labellisation. Un comité pour l'exportation a été mis en place. Il regroupe l'ensemble des partenaires publics et privés qui concourent au commerce extérieur. Nous y examinons les plans d'action commerciale prioritaire qui ont été définis pour les vingt-cinq pays cibles, qui correspondent aux principaux marchés extérieurs.
    Le budget que j'ai l'honneur de vous présenter me donne les moyens de réaliser cette politique. Je l'ai déjà dit, plus d'exportations ne passe pas nécessairement par plus d'aides financières, mais surtout par une meilleure information et un meilleur accompagnement des entreprises. Les gains de productivité réalisés par les services sous mon autorité permettront d'offrir aux entreprises de meilleures prestations à moindre coût pour le contribuable. Je remercie M. Reymann de l'avoir souligné.
    Les moyens de fonctionnement du réseau - 162 millions d'euros - tirent les conséquences de la fusion des services de la DREE et du Trésor à l'étranger. Le redéploiement des effectifs vers les pays cibles et vers les fonctions commerciales est poursuivi. Comme l'a souhaité Nicolas Forissier, la convention entre la DREE et UBIFRANCE permettra de mieux vendre et diffuser les productions des missions économiques en France.
    Les crédits de l'Etat aux organismes de soutien du commerce extérieur sont, en cette année de réforme, sans changement dans le projet de loi de finances pour 2004. En fait, ils connaissent même une progression, car l'Etat va prendre à sa charge, dans la loi de finances rectificative 2003, le plan social induit par la fusion du CFCE et d'UBIFRANCE. Dans les prochains mois, le développement de l'activité d'UBIFRANCE devrait permettre de dégager de nouvelles ressources, tout comme la restructuration du parc immobilier d'UBIFRANCE qui comprend encore deux sites à Paris.
    La subvention à l'Agence française pour les investissements internationaux, sous la tutelle de la DREE et de la DATAR, est en progression de 5,8 %. Ces moyens augmenteront en réalité de 10 millions supplémentaires, qui permettront à l'AFII de développer des actions de communication à l'étranger pour promouvoir l'attractivité du territoire français.
    Le troisième grand poste du budget du commerce extérieur concerne les procédures financières de soutien aux entreprises, pour 168 millions d'euros. L'objectif est de mieux servir les PME.
    Tout d'abord, je souhaite rappeler que la COFACE, groupe privé, gère pour le compte de l'Etat l'assurance crédit qui dégage régulièrement un excédent depuis plusieurs années - 1 milliard d'euros en 2003. Aujourd'hui, l'encours porté par l'Etat est de 62 milliards d'euros et 6 milliards d'euros de nouveaux engagements ont été pris ces neuf derniers mois.
    Le budget de l'assurance prospection a été reconduit.
    Le FASEP-études, qui permet d'aider les entreprises qui souhaitent remettre des offres pour des projets financés par les organisations financières internationales, a été augmenté de 11 millions d'euros. Il est comptabilisé dans les efforts d'aide publique au développement de la France.
    Comme je vous l'avais annoncé l'année dernière, l'effort en faveur des salons professionnels est multiplié par trois. Un fonds de garantie en faveur de l'investissement à l'étranger a été partiellement redéployé dans la loi de finances rectificative pour 2003 vers des crédits de soutien aux PME désireuses de participer aux salons à l'étranger. Cet effort sera poursuivi pendant trois ans à hauteur de 7 millions d'euros chaque année.
    Enfin, la participation de l'Etat aux contrats de plan Etat-régions dans le domaine du commerce extérieur progresse de 13 %. La décentralisation dans ce domaine sera menée à bien et les crédits seront transférés aux régions dès que la loi le permettra.
    Une mondialisation maîtrisée ouvrant de nouveaux marchés à nos entreprises en nous permettant d'assumer nos responsabilités à l'égard des pays du Sud, une priorité pour nos jeunes et nos PME, véritable vivier d'exportations nouvelles, une mobilisation sur les marchés de proximité et en forte croissance, une organisation décentralisée plus proche du terrain : tous ces axes contribueront à donner confiance aux Français, qui sauront, j'en suis sûr, tirer le meilleur parti de cette ouverture sur le monde. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
    Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, permettez-moi d'abord de remercier les rapporteurs spéciaux M. Novelli et M. Joyandet, ainsi que les rapporteurs pour avis M. Masdeu-Arus et Mme Vautrin pour la qualité de leurs contributions.
    Comme je m'y étais engagée l'année dernière, le budget de 2004 du ministère de l'industrie est un budget recentré et modernisé. Il est modernisé dans le sens où les mesures de simplification et de plus grande transparence des circuits administratifs permettent de réduire de 0,33 % la dotation globale, tout en améliorant nos performances.
    Nous sommes dans des contraintes budgétaires fortes, ce qui veut dire que, lorsqu'on dispose d'un budget quasiment stable, il faut veiller encore plus à l'efficacité maximale de chaque euro. C'est d'ailleurs une saine et stimulante discipline.
    Je vous indique, à titre d'exemple, répondant ainsi à l'une des interrogations de M. le rapporteur spécial Novelli, que j'avais demandé dès le printemps dernier à l'inspection générale de l'industrie et du commerce un rapport exhaustif sur l'utilisation des crédits consacrés aux reconversions industrielles. J'avais par ailleurs demandé à tous les préfets en charge de bassins d'emploi fragilisés d'évaluer les résultats concrets des interventions du ministère en faveur du reclassement des salariés et de la réindustrialisation des sites.
    Les enseignements qui résultent de ces investigations méritent d'être évoqués. Vous allez d'ailleurs très prochainement les recevoir.
    Huit mille emplois ont été créés chaque année sur la période 1996-2002 par les trois grandes sociétés de conversion agissant pour le compte du ministère. Cela a permis d'aider sur le moyen terme la création d'un nombre d'emplois équivalant à celui supprimé dans les zones concernées. Le taux de réalisation des objectifs de créations d'emplois est de 80 %. Le coût moyen par emploi créé, de l'ordre de 3 000 euros, est raisonnable et maîtrisé.
    Sur la base de ces résultats concrets, précis et chiffrés, je vous demande de reconduire en 2004 ces crédits, soit 35 millions d'euros.
    Par ailleurs, nos décisions en matière de réforme du ministère sont lourdes et importantes : fusion de deux des quatre directions d'administration centrale avec réduction des effectifs, externationalisation de la mission de contrôle technique des poids lourds entraînant la suppression à terme de 700 emplois en administration territoriale.
    Concernant la réforme des structures administratives, M. le rapporteur spécial Novelli suggère un rapprochement entre les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, les DRIRE, et les délégations régionales de l'ANVAR. C'est une idée pertinente, mais assez largement mise en oeuvre dans les faits.
    C'est vrai, les aides publiques aux entreprises pour l'innovation sont multiples et sources de complexité. Pour améliorer l'accès des entreprises aux aides, il faut donc que les organismes chargés de gérer ces aides travaillent en réseau. Mais ce qui est important, c'est que l'ANVAR et les DRIRE coopèrent sur le terrain et non qu'elles soient fusionnées administrativement. Ce n'est d'ailleurs pas ce que M. Novelli a demandé. Or cette coopération existe et elle est efficace. Il n'est pas rare que les deux organismes partagent tout simplement les mêmes locaux, comme c'est le cas en Rhône-Alpes. En tout état de cause, les équipes régionales de l'ANVAR et celles des DRIRE travaillent ensemble sur la plupart des grands dossiers d'aide à l'innovation et une véritable fertilisation croisée existe entre eux.
    C'est comme cela, de façon pragmatique, que l'objectif de rapprochement sera atteint.
    C'est dans le même souci d'efficacité que j'ai voulu recentrer mon budget autour de trois priorités : faire face aux défis du présent, disposer d'une énergie propre, préparer l'avenir.
    Faire face aux défis du présent, d'abord.
    Il s'agit d'accompagner les mutations industrielles, d'aider à la reconversion des salariés et à la réindustrialisation des bassins d'emplois fragilisés. La France ne saurait en effet se résigner à la désindustrialisation.
    M. François-Michel Gonnot. Très bien !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. En réponse à MM. les députés François-Michel Gonnot, Christian Bataille et Daniel Paul, je voudrais à cet égard rétablir une vérité incontournable : en volume, l'activité industrielle de notre pays est en croissance, et en croissance aussi rapide que celle des services.
    La productivité de l'industrie est élevée et les prix connaissent une forte baisse tendancielle, ce qui se traduit par une baisse des emplois directs à l'intérieur des usines, mais simultanément par une croissance équivalente des emplois dans les services à l'industrie : la logistique, les services après-vente, l'informatique, la maintenance.
    Cette évolution ne se fait pas sur « un long fleuve tranquille ». Il y a des évolutions d'organisation, de produit, tel que le partenariat que met en place Thomson avec l'industriel chinois TCL dans le domaine des téléviseurs. Il y a aussi des variations brutales d'activité, comme cela a été le cas avec la fermeture des usines Daewoo ou la faillite de Metaleurop. Le rôle de l'Etat, notre rôle, est alors de veiller à ce que les salariés et les territoires ne soient pas les laissés-pour-compte de ces crises. Ainsi, en 2003, comme vous le savez, nous avons mis en place des congés de conversion cofinancés par le ministère de l'industrie pour les salariés de ces deux entreprises ainsi qu'une antenne « emploi » pour les accompagner vers un reclassement.
    Sur le bassin de Noyelles-Godault, cette mesure a été couplée avec une mission de réindustrialisation, également financée par le ministère de l'industrie.
    Je me félicite de la décision annoncée hier : la reprise par une société performante, Sita France, filiale du groupe Suez, du site de Metaleurop.
    Ces mesures sont l'expression de la solidarité nationale indispensable dans ce genre de situation pour aider les salariés à rebondir et le bassin d'emplois à se redynamiser.
    Le rôle de l'Etat est aussi de libérer et de réveiller le dynamisme de nos entreprises industrielles. Le remède à la désindustrialisation est la création de nouvelles activités industrielles. Outre les résultats obtenus par les missions des sociétés de conversion industrielle que j'ai évoqués, nous menons une action de fond, pour faciliter la création d'entreprises et renforcer notre compétitivité. Tel est l'objet de la loi pour l'initiative économique, qui porte déjà ses fruits. Tel est aussi l'objet du plan que j'ai proposé en faveur de l'innovation, dont l'objectif est clair : encourager l'innovation dont dépendra demain la moitié de notre croissance.
    Mais pour être efficaces, nous couplons cette action avec des initivatives au niveau européen. Ainsi, nous proposons, avec nos partenaires allemands, une démarche active pour renforcer l'investissement dans de grands projets de recherches et développement : les semiconducteurs, les télécommunications, les logiciels ou les biotechnologies.
    M. Jean Dionis du Séjour. Très bien !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Nous travaillons à la mise en place d'une véritable politique industrielle européenne, qui prend pour objectif la concurrence de l'Union avec le reste du monde, et pas seulement la concurrence des pays européens entre eux.
    Comme vous le savez, l'avant-projet de loi d'orientation pour l'énergie, qui déterminera le cadre énergétique de notre pays pour les vingt à trente années à venir, a été présenté vendredi dernier. Ses principales orientations portent sur la maîtrise de l'énergie, la diversification du bouquet énergétique par le développement des énergies renouvelable, le renforcement des efforts dans le domaine de la recherche et de l'innovation technologique, la nécessité de maintenir l'option nucléaire ouverte.
    Je me félicite que ces orientations aient rencontré un large soutien sur tous les bancs de cette assemblée, comme l'ont illustré les interventions de MM. Claude Gatignol, Jacques Masdeu-Arus, Daniel Paul et Christian Bataille.
    Le budget de 2004 s'inscrit dans ces perspectives, qu'il s'agisse de la contribution de mon ministère aux subventions au Commissariat à l'énergie atomique, ou de celles à l'Institut français du pétrole ou encore à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.
    Comme l'a relevé à juste titre M. le rapporteur pour avis Masdeu-Arus, deux décisions méritent d'être soulignées.
    En premier lieu, un effort particulier est consenti pour renforcer la sûreté nucléaire, avec la création de vingt-deux emplois supplémentaires, dont dix-sept dans les divisions opérationnelles de la direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection qui se trouvent implantées au niveau régional.
    En second lieu, les moyens de la commission de régulation de l'énergie, dont les compétences seront étendues au gaz, sont renforcés : les crédits progressent de 13,7 % et douze emplois supplémentaires sont créés.
    M. Novelli a évoqué le changement de statut d'EDF. Il sait que le Gouvernement est favorable au fait de donner aux entreprises EDF et GDF les moyens de lutter à armes égales contre leurs concurrents européens dans un contexte d'ouverture des marchés à la concurrence. Cela suppose que ces entreprises puissent augmenter leurs moyens financiers sans avoir recours à un endettement excessif. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a annoncé son intention de procéder à une ouverture minoritaire du capital de ces entreprises. A cet effet, il a chargé leurs deux présidents d'élaborer des projets industriels ambitieux, actuellement en cours de concertation. Sur la base de ces projets, je souhaite que le Gouvernement soit en mesure d'ouvrir le débat sur l'évolution de la forme juridique des entreprises EDF et GDF à la fin de cette année.
    M. Novelli s'est également interrogé sur la stratégie industrielle d'AREVA, en regrettant que celle-ci ne soit pas suffisamment lisible.
    AREVA doit en premier lieu consolider sa place de numéro un dans le nucléaire. La récente entrée en négociation exclusive de la Finlande avec AREVA, pour l'acquisition d'un EPR, comme les discussions positives en cours à propos de l'enrichissement de l'uranium, sont des avancées majeures dans l'accomplissement de cette stratégie.
    AREVA doit, ensuite, veiller au redressement de sa filiale de connectique FCI. Je crois pouvoir dire que les progrès accomplis en ce domaine son exemplaires.
    Quant à une éventuelle fusion avec Alstom, le problème se pose différemment. Alstom avait à résoudre un problème de financement, qui a été résolu avec le concours de l'Etat et par une cession d'actifs, comme l'activité transmission et distribution. Ces actifs ont d'ailleurs été cédés à AREVA. Cette démarche avait un sens industriel, notamment en termes de politique commerciale, les clients des centrales nucléaires étant aussi les clients des équipements de transmission et de distribution.
    Tel n'est pas le cas des activités de transport ou de chantier naval d'Alstom, qui, d'abord, ne sont pas à vendre et qui, ensuite, ne donneraient lieu à aucune synergie industrielle avec les métiers d'AREVA.
    Afin de préparer l'avenir, nous insistons sur la formation et la diffusion des savoirs.
    Le ministère de l'industrie mène une politique active de formation des ingénieurs, techniciens et cadres, que ce soit directement, à travers les écoles des mines et des télécommunications, ou indirectement, à travers toutes les écoles des chambres de commerce et d'industrie. Il s'agit de miser sur la valeur ajoutée de l'intelligence, atout majeur de notre pays dans la compétition mondiale. Plus de 209 millions d'euros seront consacrés l'an prochain à cette action, ce qui représente une hausse de 4,71 % par rapport à 2003.
    J'ai également souhaité donner une dimension européenne à notre politique de formation, en favorisant le regroupement d'établissements d'enseignement supérieur installés dans différents pays européens. En s'inspirant du modèle d'Airbus, il s'agit d'offrir aux étudiants un cursus intégrant des enseignements dispensés, par exemple, la première année en Allemagne, la deuxième en Grande-Bretagne et la dernière en France, sur la base d'un programme pédagogique commun. Le premier de ces Airbus universitaires, réunissant l'université de Mannheim et l'ESSEC, a été inauguré.
    M. Masdeu-Arus s'est à juste titre interrogé sur le devenir du financement des centres techniques de l'industrie et des comités professionnels de développement économique.
    La loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances a en effet supprimé la base juridique des taxes parafiscales des CTI et des CPDE. Notre préoccupation première a été de maintenir le financement des missions de service public ou d'intérêt collectif de ces organismes qui sont, comme cela a été rappelé, des instruments utiles au service d'un renforcement de la cohérence des secteurs industriels, et qui permettent notamment, dans un tissu composé en grande partie de PME, une approche collective qui mutualise et maximalise l'effet des moyens mis en oeuvre.
    Francis Mer, Alain Lambert et moi-même avons souhaité laisser aux professions le choix entre la budgétisation et des impositions affectées. Il s'agissait pour nous de mettre en oeuvre une vraie relation partenariale, fondée sur la revitalisation du dialogue et de la concertation.
    Cette approche pragmatique tient compte à la fois des recommandations de la commission des finances de l'Assemblée nationale, qui estime le recours aux impositions affectées « possible sur le plan juridique et souhaitable sur les plans économique et politique », et des souhaits exprimés par les fédérations professionnelles, représentantes légitimes des secteurs industriels concernés.
    La rénovation du mode de financement des CPDE et des CTI doit s'accompagner d'une évolution des relations entre l'Etat, les organismes et les fédérations professionnelles, désormais caractérisées par la signature de « contrats d'objectifs et de moyens », élaborés pour la période 2004-2007. Ces contrats seront les supports qui nous permettront de définir une stratégie collective de développement industriel ; ils s'inscriront dans une clarification progressive des actions de service public ou d'intérêt collectif.
    Cette démarche permettra enfin aux parlementaires des deux Assemblées de disposer des informations souhaitables pour décider en connaissance de cause et, ainsi, voter les ressources publiques nécessaires aux activités collectives de ces organismes.
    S'agissant de la modernisation de nos grands services publics, notamment de La Poste, ainsi que l'ont fort bien souligné vos rapporteurs M. Joyandet et Mme Vautrin, le Gouvernement a lancé dès son arrivée des travaux importants dans le secteur postal, d'abord en organisant le marché postal conformément aux directives européennes - c'est l'objet du projet de loi sur la régulation postale qui sera prochainement présenté au Parlement -, ensuite en dotant La Poste d'un ambitieux projet industriel pour la placer sur une trajectoire de rattrapage en cinq ans du niveau de ses meilleurs concurrents européens. A cet égard, je partage pleinement l'ambition exprimée par M. Dionis du Séjour de faire de la poste française un « champion européen ». La hausse du prix du timbre de février vise à assurer le financement de cette modernisation.
    Mme Vautrin a souligné la fragilité des résultats de La Poste. Le contrat de plan, qui est actuellement l'objet de consultations, fixe la feuille de route pour restaurer la santé de ce service public. Il contient plusieurs dispositions importantes.
    La qualité du service aux particuliers et aux entreprises sera améliorée par la mise en place de nouvelles organisations et par le déploiement de machines de tri plus performantes. L'objectif est d'arriver à 85 % du courrier à J + 1 en 2007.
    Dans un contexte budgétaire difficile, le Gouvernement s'est attaché à apporter des compensations aux charges d'intérêt général supportées par La Poste. Ainsi, dans l'attente des recommandations de la mission de M. Henri Paul, le contrat de plan maintient à 290 millions d'euros la contribution financière de l'Etat à La Poste pour le transport et la distribution de la presse.
    Ensuite, le contrat de plan apporte une réponse à la difficile question du financement par La Poste des charges de retraite des postiers. Un dispositif libératoire pour La Poste sera mis en place pour le traitement des comptes de 2005. Dans l'attente, les dispositions actuelles sont reconduites, l'Etat prenant en charge la stabilisation des charges de retraite des postiers fonctionnaires dues par La Poste.
    Enfin, La Poste est autorisée à bénéficier en 2006 des allégements des charges sociales sur les bas salaires. Cela représentera une charge financière de plus de 200 millions d'euros.
    Il s'agit là d'avancées importantes.
    Je tiens par ailleurs à répondre aux interrogations de M. Joyandet et de M. Gonnot sur la présence postale.
    Le contrat de performances et de convergences ne prévoit pas de plan de fermeture de bureaux de poste. Il prévoit au contraire le maintien du nombre global des points de contact - environ 17 000 aujourd'hui -, en adaptant la présence de La Poste aux modes de vie et aux contraintes de gestion de l'entreprise. Je rappellerai que plusieurs sortes de points de contact participent à la présence postale. Ils diffèrent par leur mode de gestion, en propre ou en partenariat.
    J'ajoute que le contrat de plan normalise les conditions d'exercice des services financiers et qu'afin de mieux répondre aux attentes des dix millions de clients de cette activité la gamme des produits proposée est étendue aux crédits immobiliers sans épargne préalable.

    En ce qui concerne France Télécom, je me félicite, comme M. Joyandet, de voir que cette grande entreprise publique est aujourd'hui sur la bonne voie. France Télécom doit désormais faire face à plusieurs défis : poursuivre son désendettement en améliorant sa rentabilité, sans pour autant mettre en péril sa croissance à long terme, notamment en matière d'investissement UMTS ; assurer la pleine satisfaction de ses clients et innover pour développer des services plus performants. L'entreprise dispose des compétences et de la volonté nécessaires pour réussir.
    En ce qui concerne l'évolution du statut de France Télécom, je voudrais rappeler à M. Daniel Paul que l'obligation juridique d'une détention majoritaire du capital par l'Etat pouvait constituer un handicap stratégique pour France Télécom...
    M. Hervé Novelli, rapporteur général. Tout à fait !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Ainsi, on ne saurait oublier que l'obligation de détention majoritaire du capital par l'Etat a été l'une des causes majeures de la crise traversée par France Télécom...
    M. Daniel Paul. Je vous remercie de la clarté de vos propos !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. ... en ne permettant pas à l'opérateur de financer sa croissance autrement que par la dette.
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. C'est vrai !
    M. Daniel Paul. On en reparlera dans quelques années.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Le projet de loi sur France Télécom, qui sera débattu au début du mois de décembre par votre assemblée, prévoit une évolution du statut de l'entreprise, assurant la continuité du statut des personnels, qui resteront fonctionnaires.
    M. Nicolas Forissier. Très bien !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Concernant le développement du marché des télécommunications à haut débit, je souhaite rappeler que les différentes actions prises par le Gouvernement ont enclenché un cercle vertueux qui facilite l'apparition de nouveaux services à des tarifs compétitifs, parmi les moins chers d'Europe. Ces décisions ont stimulé avec succès le marché de l'Internet à haut débit. Avec près de trois millions d'abonnés, le rythme annuel de croissance atteint 150 %.
    Enfin, l'encouragement à l'innovation et à la recherche industrielle est notre première priorité, car seule une politique ambitieuse de soutien public à l'innovation et à la recherche industrielle nous permettra de maintenir et de renforcer notre avantage comparatif, donc notre rang de quatrième puissance industrielle mondiale. C'est en encourageant ces investissements qui préparent l'avenir que nous lutterons efficacement contre la désindustrialisation.
    Comme l'ont souligné à juste titre M. Hervé Novelli et M. Jacques Masdeu-Arus, le budget de 2004 connaîtra deux évolutions importantes.
    La première consiste à clarifier l'usage de crédits consacrés à la recherche industrielle. C'est ainsi que j'ai décidé de créer un nouveau chapitre budgétaire intitulé « Recherche industrielle, innovation et compétitivité des entreprises », qui regroupe l'ensemble des crédits contribuant au financement des programmes de recherche industrielle stratégique. Si l'on ajoute à ces crédits budgétaires du ministère de l'industrie les autres sources de financement public - fonds pour la recherche technologique du ministère de la recherche, fonds de concours gérés par l'ANVAR -, le soutien public sous forme d'aides financières s'élèvera en 2004 à près de 500 millions d'euros.
    La seconde consiste à décentraliser le programme ATOUT d'aide aux PME-PMI. Ce dispositif a fait ses preuves, mais relève de l'aide aux entreprises qui sera désormais exercée par les conseils régionaux en application de la décentralisation, afin que ce type de soutien soit initié, financé et décidé au plus près du terrain.
    Ces changements strictement budgétaires s'accompagnent d'une évolution dans le mode d'organisation des aides à l'échelon local. L'ANVAR jouera ainsi un rôle accru d'animateur de réseau au niveau régional, comme l'ont souhaité les publics concernés lors de la consultation nationale sur l'innovation.
    Mais notre action en faveur de l'innovation et de la recherche industrielle ne se limite pas à ces seuls crédits budgétaires. Le projet de loi de finances crée deux outils fiscaux originaux et réforme en profondeur le crédit d'impôt recherche. C'est la mise en oeuvre législative du plan innovation que j'ai lancé en début d'année, et dont vous avez bien voulu approuver les trois outils.
    Ainsi, par la modernisation de notre système d'aide et par le renforcement très significatif de l'outil fiscal, c'est près de 1,4 milliard d'euros que le Gouvernement consacrera l'an prochain à la stimulation de l'innovation et de la recherche industrielle dans les entreprises. Cette contribution majeure à l'accroissement de nos savoir-faire et à la valeur ajoutée de nos industries et de nos services nous permettra de tirer le meilleur parti de la reprise économique et constitue la base d'une croissance durable.
    Comme vous le voyez, mesdames, messieurs les députés, le budget de l'industrie est adapté aux nécessités du présent et il prépare l'avenir. C'est pourquoi je vous remercie par avance de votre soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Nous en arrivons aux questions.
    Nous commençons par le groupe Union pour un mouvement populaire.
    La parole est à M. Jean-Louis Christ.
    M. Jean-Louis Christ. Monsieur le ministre, je souhaite vous rendre attentif à la question du conseil en placements financiers dispensé en France par de nombreux établissements bancaires et financiers, privés ou publics, auprès de leurs clients, principalement entre fin 1999 et début 2000.
    A cette époque, la majorité de ces établissements a orienté les épargnants vers des stratégies de placements dites « offensives », exposées à la volatilité des actions et à la fluctuation des marchés financiers. En l'espace de trois ans, de nombreux épargnants ont vu leur capital singulièrement écorné, en raison de la chute des cours boursiers, les pertes pouvant représenter jusqu'à 40 % des économies.
    Le déficit d'information et le défaut de conseils, dont ces personnes - le plus souvent âgées et modestes - ont été victimes sont en cause. Sur la foi de publicités promotionnelles vantant les mérites de ces produits avec des affirmations du style : « Vous restez gagnants, même si l'indice CAC 40 baisse », beaucoup se sont laissés abuser.
    Les actions médiatiques de l'association SOS petits porteurs ont été organisées dans de nombreuses régions, afin d'obtenir l'ouverture de négociations. Il s'agissait de faire réparer, par les établissements concernés, les conséquences de leurs conseils inadaptés.
    Aujourd'hui, elles se heurtent à une fin de non-recevoir de la part des établissements concernés. La Poste a toutefois décidé d'étudier de façon personnalisée les demandes d'indemnisation, en vérifiant si son devoir de conseil a été effectivement rempli.
    Devant la montée en charge de contentieux opposant les petites épargnants aux établissements concernés, il apparaît indispensable que le Gouvernement connaisse les conditions dans lesquelles tant d'épargnants ont été orientés vers des produits boursiers, alors même que le risque de baisse des cours était évident pour les spécialistes.
    Pour l'avenir, afin d'éviter aux petits épargnants de s'exposer à leur insu à des stratégies de placements qui ne correspondent ni à leur envie, ni à leur profil, il me semble primordial de faire en sorte que soit clairement indiqué dans les contrats et documents annexés des mentions bien visibles, du style : « produit financier à risques » ou « votre capital peut monter, comme il peut baisser ».
    Monsieur le ministre, quelle est votre position sur ce dossier ? Envisagez-vous de mener une information sur les placements opérés fin 1999 ? Envisagez-vous d'imposer aux établissements financiers de mentionner, systématiquement et clairement, les risques encourus ?
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le député, votre question concerne des fonds « à formules », commercialisés fin 1999, début 2000, notamment le fonds « Bénéficis » de La Poste. Elle vise à éviter que les épargnants, modestes notamment, souscrivent à des produits ne correspondant pas, en réalité, aux risques qu'ils sont prêts à accepter.
    De ce point de vue, l'information du souscripteur a déjà progressé. La Commission des opérations de bourse a publié, le 11 décembre 2002, un relevé de décisions sur le sujet qui impose désormais, au fil des nouveaux agréments de fonds « à formules », l'insertion d'avertissements dans les notices d'information. Ces informations portent sur l'existence ou non d'une garantie en capital, la description précise de la formule et son illustration par des exemples chiffrés dans des hypothèses extrêmes, ainsi que sur un calcul rétrospectif, sur la base de l'évolution passée des marchés.
    Tous ces éléments devront désormais être repris dans la documentation commerciale. Une instruction de la COB relative aux prospectus complets des OPCVM et reprenant ces obligations sera publiée dans les prochaines semaines.
    Comme vous le voyez, le régulateur a pris, avec le soutien du Gouvernement, les mesures qui vous semblaient fort logiquement indispensables pour éviter le renouvellement de ces regrettables malentendus, qui peuvent nuire à la confiance des épargnants.
    M. le président. La parole est à M. Pierre Micaux.
    QM. Pierre Micaux. Madame la ministre, ma question concerne l'enfouissement des réseaux, électriques comme téléphoniques.
    EDF s'était engagée à enfouir jusqu'à 8 000 kilomètres de lignes chaque année. Or, dans mon département, cette année, elle n'a répondu qu'à hauteur de 2 % de son engagement !
    M. Nicolas Forissier. C'est scandaleux !
    M. Pierre Micaux. Afin que la libéralisation des marchés de l'énergie n'aggrave pas la situation, il est nécessaire de mettre en place un dispositif fixant des objectifs contrôlables et contrôlés en termes de planification et d'investissements. Je pense que c'est très important.
    Depuis dix ans, les collectivités territoriales sont à l'origine d'opérations d'enfouissement des lignes électriques. Parallèlement, afin d'enfouir également les réseaux téléphoniques, elles ouvrent des tranchées. Or France Télécom nous laisse Gros Jean comme devant ! Rien n'est enfoui. Des poteaux sont même posés après que les tranchées ont été comblées. Quelle outrecuidance ! Et cela s'est produit à plusieurs reprises dans mon département.
    Il convient donc de mettre en place un dispositif de financement des travaux d'intégration dans l'environnement des ouvrages téléphoniques. En outre, la compétence des collectivités locales, pour l'établissement des infrastructures de télécommunications, doit être précisée par la loi. D'autant que les communes qui réalisent ces travaux ne bénéficient pas de DGE et ne récupèrent même pas la TVA grevant les travaux de télécommunications.
    Madame la ministre, je vous remercie par avance de votre réponse.
    M. Nicolas Forissier. Bonne question !
    M. François Brottes. Une vraie question !
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le député, le sujet que vous avez soulevé est particulièrement sensible, qu'il s'agisse des élus ou des populations concernées.
    Aujourd'hui, les réseaux de télécommunications sont très largement installés sous terre - 97 % des réseaux nationaux et départementaux et les deux tiers de la boucle locale en cuivre. Ce résultat est dû aux efforts accomplis par France Télécom, qui a consacré, pour les seuls projets conduits par les collectivités, environ 350 millions d'euros, en dix ans, à ces travaux d'enfouissement. Mais le Gouvernement continuera à veiller à ce que France Télécom respecte ses engagements en la matière.
    Pour ce qui est des lignes électriques, la situation n'est malheureusement pas aussi bonne. Des efforts restent à faire pour respecter les engagements signés, notamment avec l'Etat, s'agissant de l'insertion paysagère de ces lignes. Mais je puis vous assurer que je veillerai à rappeler ses engagements à EDF, afin que les situations que vous venez d'évoquer soient résolues à la satisfaction de l'ensemble des citoyens concernés.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Christ.
    M. Jean-Louis Christ. Monsieur le ministre, lors d'un récent colloque sur les vins de France, qui s'est tenu dans les murs de l'Assemblée, les professionnels de la viticulture se sont inquiétés de l'avenir de la filière vitivinicole. Ils ont dénoncé une crise à l'export sans précédent, face à leurs concurrents du nouveau monde qui sont très largement aidés par leur Etat d'origine. Ils ont souhaité une réaction efficace en termes de communication et de promotion. Il convient de mettre au point une stratégie globale en faveur de la filière viti-vinicole, notamment grâce à des salons bien identifiés et porteurs.
    Cette préoccupation est l'illustration concrète d'une attente forte de nos entreprises françaises en matière de soutien à l'export. Dans un contexte économique international particulièrement rude, elles doivent être placées sur un pied d'égalité avec leurs concurrents internationaux, notamment en ce qui concerne le soutien promotionnel des pouvoirs publics. Les analyses menées sur les dispositifs d'appui au commerce extérieur de nos principaux partenaires de l'Union européenne montrent que les Français accusent un déficit de présence dans les opérations de promotion commerciale à l'étranger. Ce handicap semble étroitement lié au fait que nos efforts d'accompagnement financier dans ce domaine sont sensiblement en retrait par rapport à ceux consentis par l'Allemagne, la Grande-Bretagne ou l'Italie.
    Dans ces conditions, monsieur le ministre, quel effort le Gouvernement envisage-t-il, pour renforcer la présence des entreprises françaises dans les foires et salons à l'étranger ?
    M. Nicolas Forissier. Très bonne question !
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au commerce extérieur.
    M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le député, vous posez une question très importante. Le développement du commerce extérieur commence en effet par la participation des entreprises françaises aux salons. Or nous avons constaté que, dans les années passées, le nombre de salons organisés dans le cadre du dispositif public, c'est-à-dire par l'association UBIFRANCE, avait baissé. Le plancher a été atteint en 2002, avec environ 170 salons inscrits dont, en pratique, seule la moitié n'était organisée.
    Nous avons évidemment réagi et, dès 2003, la tendance s'est inversée. Nous avons mis en place une procédure permettant de confier l'organisation de salons à d'autres organismes, comme des chambres de commerce et d'industrie, des conseils régionaux, des associations de développement, voire des partenaires privés organisateurs de salons. Nous avons ainsi décidé de « labelliser », c'est-à-dire de donner le pavillon France et d'apporter un soutien financier à ces organismes, en échange de quoi, ceux-ci s'engagent à prendre en charge le risque que constitue l'organisation d'un tel salon français.
    Le résultat que nous avons obtenu est très intéressant. Pour l'année 2004, nous en sommes déjà à 250 salons - ceux qu'organise UBIFRANCE lui-même et les autres, qui bénéficient de cette labellisation.
    Bien évidemment, une diversification sectorielle se met en place. Vous avez parlé du vin, qui est l'un des premiers produits d'exportation de notre pays. De nouvelles coopérations se sont ainsi constituées entre UBIFRANCE, qui est en charge de ces salons ou de leur labellisation, et les organismes qui s'occupent traditionnellement des salons du vin. Ainsi pourrons-nous soutenir un nombre de salons beaucoup plus important à l'étranger.
    Les Etats-Unis constituent en l'occurrence une cible privilégiée. Vous savez en effet que certains de nos vins y sont en recul, du fait de la concurrence des vins du nouveau monde. Il est donc important de se battre pied à pied contre cette concurrence. Il en est de même dans d'autres pays, où la présence française est nouvelle. Sachez, par exemple, que la Chine a décidé, à l'occasion de son entrée dans l'OMC, de baisser les droits de douane sur le vin de 64 % à 15 %, ce qui amène à espérer une entrée massive de vins sur le marché chinois.
    En conclusion, monsieur le député, la politique que nous menons permet d'augmenter le nombre de salons à l'étranger et de faire bénéficier le plus d'entreprises possible de ces dispositifs. Cette politique extérieure intéresse tout particulièrement la filière vitivinicole, qui en a besoin dans les endroits où elle perd des parts de marché, et sur les nouveaux marchés qui sont aujourd'hui accessibles aux vins français.
    M. le président. La parole est à M. Bernard Carayon.
    M. Bernard Carayon. Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur la situation des 166 entreprises locales de distribution, ELD, qui, aux côtés de l'opérateur national, couvrent 5 % du marché, alimentent en électricité 5 millions d'habitants et assurent 7 000 emplois directs. 10 % des communes françaises, à l'instar de Strasbourg, Metz ou Grenoble, plusieurs départements comme la Vienne, les Deux-Sèvres ou la Moselle sont concernés par leur avenir, qui dépend aujourd'hui de leur capacité à fournir de l'électricité dans un marché bientôt totalement ouvert à la concurrence.
    Mais, alors que la capacité d'intervention des ELD en la matière a été reconnue par la loi du 10 février 2000 modifiée, les aménagements nécessaires à sa mise en oeuvre ne semblent pas acquis. Les principes, notamment de territorialité et de spécialité, qui encadrent actuellement l'activité des régies comme, à certains égards, des sociétés d'économie mixte, font par nature obstacle à un déploiement commercial des ELD dans des conditions élémentaires d'égalité des droits et des chances avec leurs compétiteurs.
    Les ELD sont aujourd'hui les seules entreprises en Europe à être affectées de telles contraintes. Du sud au nord de l'Union européenne, tous les acteurs historiques locaux trouvent désormais la place qu'ils méritent dans le marché ouvert de la fourniture d'électricité et du gaz.
    Pour faire face à cette situation, et à défaut d'une mutation de leur droit public autorisant un alignement global du statut de leurs entreprises sur celui de leurs consoeurs européennes, je souhaite qu'on aménage l'article 23 de la loi de 1946. Il s'agirait, à tout le moins, de permettre aux ELD de constituer des sociétés filiales de droit commun, aptes à exercer leurs activités commerciales dans des conditions d'efficacité et de performance normales. Je précise que les conditions dans lesquelles elles exercent sont déjà altérées par les tarifs d'utilisation des réseaux de distribution : établis sur une moyenne nationale non représentative des conditions d'exploitation des ELD, ils ne leur permettent de couvrir les charges d'exploitation que dans des proportions de 75 % à 90 %.
    Il semble que le projet de loi modifiant le statut des opérateurs d'électricité et de gaz, en cours d'élaboration, ne retienne pas l'aménagement de l'article 23 que je suggère. L'avenir des ELD semble compromis, alors que leur gestion n'a jamais connu d'avatar ou d'aventures.
    Il m'apparaît fondamental que le principe de territorialité soit assoupli, et que leurs conditions de fonctionnement s'exercent dans un cadre au moins régional.
    Je souhaiterais, madame la ministre, connaître vos intentions à l'égard des ELD et savoir dans quel cadre juridique vous envisagez leur avenir en matière de fourniture concurrentielle d'énergie.
    M. le président. La parole est à Mme la ministre délégué à l'industrie.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le député, le Gouvernement partage votre souci de prendre les dispositions nécessaires pour permettre aux entreprises locales de distribution de faire face à l'ouverture des marchés à la concurrence le 1er juillet 2004 pour les entreprises et le 1er juillet 2007 pour les ménages.
    Il est nécessaire que ces entreprises puissent, directement ou indirectement, développer leurs activités commerciales sur l'ensemble du territoire, afin de compenser les pertes probables de parts de marché qu'elles connaîtront sur leurs zones de desserte actuelles. Des mesures législatives devront être prises dans ce sens - et telle est bien notre intention - tout en respectant la loi quant aux conditions d'intervention des collectivités locales dans le domaine concurrentiel
    Vous comprendrez que je ne puisse pas vous répondre plus précisement aujourd'hui. Des pistes, d'ailleurs très proches de celles que vous avez évoquées, sont à l'étude mais elles n'ont pas encore fait l'objet des arbitrages finalisés. Je peux donc simplement vous dire que nous nous rejoignons très fortement sur les objectifs et, encore une fois, sur l'approche.
    M. le président. Nous en venons au groupe Union pour la démocratie française.
    La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.
    M. Jean Dionis du Séjour. Madame la ministre, le Gouvernement a pour projet majeur la mise en oeuvre d'une nouvelle étape de décentralisation. Ce projet, actuellement débattu au Sénat, prévoit de confier la compétence du développement économique des territoires aux conseils régionaux. D'autre part, la modification de la Constitution votée par le Congrès le 17 mars dernier dispose que tout transfert de compétence doit s'accompagner du transfert de l'intégralité des moyens auparavant consacrés par l'Etat à celle-ci. Or l'aide au développement économique est une des compétences majeures du ministère de l'industrie. Pouvez-vous nous décrire avec précision les compétences et les ressources qui seront transférées à ce titre ? Peut-on espérer que ce transfert soit réalisé dès la loi de finances pour 2005 ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le député, mon budget, je l'ai dit, comprend deux innovations qui vont dans le sens de la décentralisation : le transfert aux régions de certaines aides à l'innovation et un accès plus direct, donc plus local, des entreprises à l'information sur ces aides.
    S'agissant du transfert du programme ATOUT, le chapitre 64-92 est doté en 2004 de 9 millions d'euros en autorisations de programme et de 10,5 millions d'euros en crédits de paiement, afin d'aider les PME-PMI à acquérir des innovations technologiques. Ce sont des crédits qui vont être transférés aux conseils régionaux, en application de la décentralisation.
    S'agissant de l'amélioration de l'accès des entreprises à l'information, l'organisation des aides à l'échelon local sera revue afin de faciliter l'accès des entreprises aux nombreuses aides à l'innovation auxquelles elles peuvent prétendre. L'ANVAR jouera un rôle accru d'animateur de réseau au niveau régional, comme cela avait été souhaité. Concrètement, l'agence proposera ses conseils aux collectivités qui voudront développer leurs interventions en faveur de l'innovation, cherchera à mobiliser toutes les ressources disponibles sur des projets, en particulier les aides des programmes européens, veillera à la bonne diffusion de l'information à l'échelon régional, en s'appuyant notamment sur les chambres de commerce et d'industrie dans le cadre d'une convention nationale, et pourra développer sa fonction d'expert localement tout en restant un établissement public de l'Etat, afin d'assurer une cohérence nationale et de diffuser les meilleures pratiques sur l'ensemble du territoire.
    M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour une seconde question.
    M. Jean Dionis du Séjour. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur la politique du Gouvernement en faveur des biocarburants en général et de l'huile végétale brute en particulier.
    Je déplore d'abord qu'aucune mesure ambitieuse de défiscalisation n'ait été adoptée lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2004, malgré de nombreux amendements que mon collègue Charles de Courson avait défendus, notamment en faveur de l'incorporation directe de bioéthanol.
    La France reste, dans le domaine des biocarburants, un élève médiocre, car elle ne tire pas tout le profit des directives européennes qui permettent une réduction ou une exonération totale de la TIPP. C'est regrettable à plus d'un titre.
    D'abord, pour des raisons écologiques. Comme le prouvent les études conduites par l'ADEME en 2003, les biocarburants produisent moins de gaz à effet de serre et peuvent contribuer à régler partiellement le problème majeur de la croissance non maîtrisée de la circulation automobile.
    Ensuite, pour des raisons industrielles. Développer un véritable savoir-faire dans ces filières peut renforcer l'autonomie énergétique de la France. Il s'agirait de promouvoir concrètement les énergies renouvables. Votre ministère me semble prioritairement concerné par les politiques de diversification de la ressource énergétique.
    Enfin, pour des raisons agricoles. La culture du maïs, du colza ou du tournesol peut valoriser des surfaces agricoles en jachère dont l'utilisation pour la production d'énergie est autorisée par l'Union européenne. Dans mon département de Lot-et-Garonne, des sociétés se lancent dans la fabrication de biocarburant, mais elles ne peuvent pas bénéficier de l'exonération de la TIPP à laquelle les derniers règlements européens leur donnent pourtant droit.
    Le groupe UDF, à l'image de mon collègue de la Somme, Stéphane Demilly, qui vient de créer un groupe d'études sur les biocarburants à l'Assemblée, entend être un des défenseurs actifs de cette filière qui n'a que des services à rendre à notre pays.
    Que compte faire le Gouvernement pour soutenir fiscalement et industriellement les biocarburants ? Leur développement figure-t-il parmi les orientations prioritaires du projet de loi de programmation dans le domaine de la politique énergétique ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Monsieur Dionis du Séjour, lorsque nous disons que le développement des énergies renouvelables est l'un des trois axes forts de notre politique énergétique, cela concerne toutes les énergies renouvelables, y compris les biocarburants.
    Le Gouvernement croit à l'avenir des biocarburants pour les trois raisons que vous avez rappelées : l'indépendance énergétique, la lutte contre l'effet de serre et le développement de l'agriculture, car c'est un moyen très intelligent de valoriser notre formidable potentiel agricole.
    C'est ainsi que la France a mis en place un système de défiscalisation qui est loin d'être négligeable, puisqu'il permet de produire environ 500 000 tonnes de biocarburants par an, soit 1 % de notre consommation de carburant. Je rappelle que nous sommes le deuxième producteur européen, juste derrière l'Allemagne.
    Dans le projet de loi de finances pour 2004, 175 millions d'euros de dépenses fiscales sont consacrés à cette filière et de nouvelles mesures seront inscrites dans le projet de loi de finances rectificative pour 2003, qui permettront d'augmenter encore les capacités produites et de se rapprocher progressivement de l'objectif indicatif qui a été fixé par la directive européenne à 5,75 % en 2010.
    Il faut cependant avoir le courage de dire que, pour atteindre cet objectif - la même observation vaut pour les autres énergies renouvelables -, la filière des biocarburants devra encore accroître fortement sa rentabilité. L'avantage environnemental des biocarburants ne saurait à lui seul justifier leur développement. Or le coût de la tonne de CO2 évitée est très élevé - 180 euros - par rapport aux résultats qui peuvent être obtenus dans d'autres secteurs, comme la maîtrise de l'énergie. Il importe donc que cette filière, encouragée par l'Etat grâce au système de défiscalisation, poursuive activement ses efforts de recherche et que le Gouvernement, bien sûr, les accompagne.
    M. le président. Nous en venons au groupe communiste.
    La parole est à M. Daniel Paul.
    M. Daniel Paul. Madame la ministre, toutes les études menées dans la dernière période confirment une évolution importante du trafic conteneurisé, avec l'arrivée prochaine de porte-conteneurs capables de transporter 8 000 équivalents vingt pieds et plus. Ces grands navires ne pourront accoster que dans très peu de ports, compte tenu du tirant d'eau nécessaire.
    L'acheminement des conteneurs à partir de ces ports d'éclatement suppose un développement important du cabotage maritime, sauf à embouteiller encore plus les liaisons terrestres des grands ports. Une telle évolution va conforter le projet de création d'« autoroutes de la mer » et sans doute nécessiter une accélération de leur mise en place.
    Rien ne sera possible sans de nombreux feeders, de 500 à 1 500 tonneaux, selon les diverses études menées à ce sujet et reprises par la presse spécialisée. Ces mêmes études évaluent entre 1 500 et 2 000 le nombre de feeders nécessaires dans les dix prochaines années, soit 150 à 200 par an.
    Notre pays, par la longueur de ses façades maritimes, par sa superficie, par son positionnement géographique, est sans doute, en Europe, le plus concerné par le développement de ce cabotage. Il serait dès lors regrettable que la construction navale française ne se positionne pas sur un tel marché, la taille des feeders correspondant à la diversité des capacités de nos chantiers répartis en divers points de nos côtes.
    Encore faut-il que les pouvoirs publics donnent l'impulsion nécessaire, sinon nos chantiers risqueraient de passer à côté d'une affaire intéressante pour leur développement, et donc pour l'emploi.
    Quelles initiatives comptez-vous prendre, madame la ministre, pour que notre pays, qui est directement concerné par l'essor du cabotage maritime, prenne toute sa part dans la construction des caboteurs ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Votre question, monsieur Paul, soulève, de façon plus générale, le problème de l'avenir de la construction navale en France et en Europe.
    Force est de constater que notre construction navale est dans une situation délicate, comme elle l'est d'ailleurs au niveau européen. La compétence de nos entreprises n'est pas en cause. Depuis les attentats du 11 septembre, dans un contexte conjoncturel dégradé, c'est l'ensemble du marché mondial qui est atone, et plus encore dans un secteur où la monnaie de référence reste le dollar.
    Nous sommes aussi confrontés, j'y insiste, au dumping commercial agressif de certains pays. Je regrette donc sincèrement que le gouvernement précédent se soit opposé à ce que Bruxelles adopte des mesures d'aide temporaire. Pour notre part, nous avons immédiatement demandé, au niveau européen, trois mesures qui nous semblaient nécessaires pour redonner un avenir à la construction navale : une stratégie offensive autour du mécanisme d'aide temporaire, un dépôt de plainte à l'OMC contre le dumping sauvage, pratiqué notamment - il faut dire son nom - par la Corée, et la relance des négociations multilatérales avec l'ensemble des principaux producteurs.
    Notre action résolue a obtenu quelques résultats puisque la Commission a engagé la phase contentieuse devant l'OMC, a étendu l'application du mécanisme d'aide temporaire au secteur des méthaniers et a lancé Leadership 2015, démarche qui vise à créer, dans un contexte global, les conditions d'une meilleure compétitivité dans ce secteur.
    Cela va dans le bon sens, mais je puis vous dire que nous serons particulièrement attentifs à la mise en oeuvre de plusieurs mesures que nous jugeons essentielles : la révision du règlement d'encadrement des aides à la construction navale, qui vient d'ailleurs à échéance à la fin de cette année ; la mise en place d'un mécanisme de garantie communautaire et d'instruments de couverture du risque de change ; l'accompagnement, en particulier par des aides, des consolidations nécessaires ; l'élaboration de règles commerciales multilatérales équitables et équilibrées ; le renforcement et le maintien des compétences.
    Je pense qu'avec ces éléments nous pouvons être confiants dans la capacité de l'ensemble de la construction navale française à remplir de nouveau son carnet de commandes et à faire face à la concurrence internationale.
    M. le président. La parole est à M. Frédéric Dutoit.
    M. Frédéric Dutoit. Madame la ministre, la quasi-totalité des foyers du territoire national ont été équipés par le passé, à des coûts abordables pour les usagers, en téléphonie fixe. Créer un tel réseau a été possible grâce à la péréquation entre activités rentables et investissements structurels lourds. C'est pourquoi la recherche, la construction et la gestion du réseau téléphonique ont été confiées à une administration publique dotée d'un budget annexe et évoluant dans un secteur non soumis à la concurrence. France Télécom a joué son rôle.
    Aujourd'hui, face au défi que représente l'accès aux nouvelles ressources de l'information et de la communication que sont l'internet haut débit, la téléphonie mobile et la convergence technologique avec l'audiovisuel, force est de constater que l'ouverture à la concurrence dans le secteur des télécommunications n'a pas permis de réaliser les infrastructures nécessaires à la couverture du territoire national. La fracture numérique est flagrante. Il est anormal que des zones entières ne puissent toujours pas accéder à ces outils fondamentaux pour évoluer en adéquation avec le monde qui nous entoure.
    La recherche effrénée de profits immédiats et la logique d'investissement en infrastructures sont antinomiques. Ce sont les usagers qui paient le prix fort. Par exemple, avec la multiplication des offres forfaitaires des opérateurs, fournisseurs d'accès et de contenu, il est presque impossible pour l'usager de connaître le coût réel d'une communication téléphonique.
    Face à cette réalité incontestable, vous affaiblissez visiblement l'opérateur historique et le service public, et vous désengagez toujours plus l'Etat. La mise en concurrence des opérateurs va accroître les inégalités, y compris si les collectivités territoriales se portent candidates.
    Le rôle de l'Etat doit être d'assumer une fonction de régulation et de solidarité. Arrêtez cette fuite en avant, suspendez vos projets de privatisation de France Télécom ! Il est urgent d'examiner sereinement le réengagement de l'Etat dans l'aménagement du territoire en vue d'assurer l'accès de tous, partout, à ces nouvelles technologies. Pour ce faire, il est possible d'introduire le fixe, le mobile et le haut débit dans les missions de service public.
    Madame la ministre, que répondez-vous aux salariés du secteur des télécommunications, aux usagers, aux élus concernés, qui proposent la création d'un grand pôle public des télécommunications afin de réduire efficacement la fracture numérique en France ?
    Mme Muguette Jacquaint et M. Daniel Paul. Très bien !
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le député, nous sommes d'accord sur l'objectif à atteindre, c'est-à-dire la réduction de la fracture numérique en France. C'est la raison pour laquelle, dès notre arrivée au pouvoir, le Premier ministre a proposé le plan RESO 2007 et a fait de la technologie haut débit une véritable priorité du Gouvernement, en fixant l'objectif de dix millions d'abonnés dès 2007. Cet objectif est ambitieux mais tout à fait réalisable, dès lors qu'il est partagé par l'ensemble des acteurs : le Gouvernement, l'autorité de régulation, les opérateurs, les industriels et tous ceux qui oeuvrent dans ce domaine.
    En revanche, nous avons une divergence de fond sur la méthode. Vous proposez des investissements publics considérables, donc de nouveaux impôts pour les financer.
    M. Frédéric Dutoit. Quelle caricature !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Le Gouvernement, pour sa part, a préféré aider les entreprises à dynamiser ce marché au bénéfice des Français.
    Dès l'été 2002, j'ai suscité une baisse des tarifs de vente en gros de l'ADSL qui a marqué un tournant majeur dans le développement du marché français. En permettant d'abaisser les tarifs du grand public de 45 à 30 euros par mois, cette baisse a enclenché un cercle vertueux qui a facilité l'apparition de nouveaux services à des tarifs extrêmement compétitifs, parmi les moins chers d'Europe. C'est ainsi que le marché de l'internet à haut débit atteint aujourd'hui près de 3 millions d'abonnés et connaît une croissance annuelle de 150 %, ce qui est loin d'être négligeable.
    S'agissant de l'aménagement du territoire, le Gouvernement a pris plusieurs décisions, souvent sur la suggestion de l'Assemblée, pour que la téléphonie mobile et l'internet rapide puissent être offerts à tous les Français, quelle que soit leur localisation géographique. C'est un impératif. Aujourd'hui, plus de dix sociétés proposent l'accès à internet par satellite, ce qui permet aux PME de se connecter.
    Comme vous le savez certainement, une convention sur la téléphonie mobile a été signée le 15 juillet dernier entre l'Etat, les trois opérateurs et les associations d'élus locaux, afin de couvrir, dans une première phase, 1 600 communes. Les opérateurs ont ainsi accepté de se répartir les zones non rentables pour diminuer le coût total des projets. Nous avons parfaitement conscience, monsieur le député, que nous ne sommes pas encore au bout du compte. Toutefois, il me semble que les quelques exemples concrets que je viens de vous citer montrent que nous allons dans la bonne direction et dans la direction que vous avez souhaitée.
    M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jaquaint. Madame la ministre, depuis l'acceptation, après les péripéties et rebondissements de l'été, du plan de sauvetage financier d'Alstom par la Commission de Bruxelles le 23 septembre, le Gouvernement et la direction du groupe sont étrangement muets. Nous n'avons plus d'informations sur la stratégie du groupe, sur son évolution, sur les restructurations qui seront mises en oeuvre et leurs conséquences sur l'emploi, en particulier concernant le site de La Courneuve. Pourtant, à ma connaissance, des décisions se prennent, qui pourraient être présentées le 18 novembre prochain devant l'assemblée générale des actionnaires qui doit avaliser l'augmentation du capital.
    Pour leur part, les organisations syndicales qui ont engagé un recours contre la procédure de consultation du comité de groupe au niveau européen élaborent des propositions alternatives aux solutions envisagées par la direction. Leurs propositions prennent appui sur le rapport des experts remis au comité de groupe qui avait démontré que ses sites industriels et ses salariés sont parmi les principaux atouts d'Alstom. Ces mêmes experts montraient aussi combien les suppressions d'emploi risquaient à nouveau de fragiliser Alstom.
    Je vous demande, en conséquence, madame la ministre, de bien vouloir me préciser si vous allez conditionner les 3,2 milliards d'aide publique à des mesures de sauvegarde de l'emploi et, en particulier, de l'emploi de recherche et industriel.
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Madame la députée, je vous rappellerai que, lorsque nous nous sommes trouvés devant la situation désastreuse - c'est le mot - d'Alstom, nous avions tous un seul objectif : éviter le dépôt de bilan, sauver l'entreprise Alstom et faire en sorte de rendre confiance à ses clients - car Alstom a potentiellement, comme vous le savez, un carnet de commandes extrêmement important. Vous avez été témoin de la difficulté de cette démarche : il nous fallait, par un plan de sauvetage qui soit à la fois précis et accepté par Bruxelles, permettre, je le répète, de retrouver la confiance des clients.
    Cette première partie de l'opération a été, je crois pouvoir le dire, aussi bien réalisée que possible. Aujourd'hui, Alstom a retrouvé des commandes fermes et a pu mettre en place une véritable stratégie industrielle qui tient compte, bien évidemment, de la situation.
    Alstom a présenté, au cours des semaines écoulées, les grandes lignes des mesures de restructuration qu'elle envisage : elle va recentrer son activité industrielle autour de deux métiers, la production d'énergie et le transport ferroviaire, dans lesquels elle dispose d'un véritable leadership technologique et qui offrent de bonnes perspectives de croissance à long terme, ainsi que des opportunités intéressantes de développement.
    J'ai la conviction qu'avec une base industrielle restructurée, en France comme dans d'autres pays, avec, dans le monde, des positions commerciales solides dans la production d'énergie et le transport et avec des équipes de haut niveau, Alstom saura se bâtir une ambition et un avenir à l'échelle mondiale.
    Je tiens néanmoins à dire que je suis, en tant que ministre de l'industrie, particulièrement attentive à l'évolution de la situation et, notamment, aux incidences qu'elle pourrait avoir sur les salariés concernés.
    M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
    M. Daniel Paul. Madame la ministre, il y a quelques semaines, le PDG de Renault annonçait, à grand renfort de médias, son excellent résultat financier, valorisant les mérites de la stratégie de croissance financière marquée notamment, ces dernières années, par le rachat de Nissan.
    En 1999, Renault avait abandonné sa filiale d'équipement automobile Renault Automation au groupe Fiat, qui héritait, avec le feu vert de l'Etat actionnaire, d'une unité de pointe très performante et en bonne santé financière. Pour se justifier, Renault avait déclaré que l'objectif de cette opération était de permettre à cette filiale de faire partie d'un groupe de taille mondiale, capable d'affronter les marchés internationaux et d'assurer la pérennité de l'entreprise.
    Force est aujourd'hui de constater, et l'exemple de RA-COMAU, filiale de Fiat, est là pour le confirmer, que cela se fait au détriment de l'emploi, de l'investissement et de la formation, pourtant indispensables à la croissance de toute entreprise.
    Renault devrait pourtant contribuer à stabiliser un pôle équipementier, en partenariat avec d'autres constructeurs, pour assurer une politique de qualité et consolider l'emploi. Or il fait pression sur les équipementiers pour qu'ils réduisent sans cesse leurs coûts, ce qui aboutit à les fragiliser, à réduire l'emploi stable et à favoriser le recours à l'intérim. C'est ainsi, comme vous le savez, que De Carbon, dans l'Eure, trop cher, a cessé de fournir à Renault des amortisseurs et a dû fermer ses portes et licencier la totalité de ses salariés.
    Renault Sandouville vient de décider, ce matin même, au cours d'un comité d'entreprise extraordinaire, de réduire jusqu'à Noël le travail hebdomadaire à trois jours au lieu de cinq, tout en maintenant sa production quotidienne de 1 200 véhicules - en maintenant, donc, la même productivité. Il serait pourtant possible de mieux répartir cette production sur cinq jours et d'alléger quelque peu les cadences infernales. Cette décision est lourde de conséquences pour les salariés de Sandouville, mais elle l'est sans doute encore plus pour tous les salariés des équipementiers, pour tous les intérimaires, qui y sont encore plus nombreux, soumis aux décisions de leur donneur d'ordre.
    Le 16 septembre dernier, le Président de la République a affirmé à Auxerre sa volonté de combattre la désindustrialisation de la France et de mettre en place de nouvelles sécurités pour l'emploi.
    Comment, à partir de Renault, dont l'Etat est actionnaire - encore actionnaire devrais-je dire -, entendez-vous donner corps à ce qui, à ce jour, reste une déclaration d'intention, qu'on voit quotidiennement mise en cause, y compris par une entreprise à laquelle vous participez ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Vous soulevez, monsieur le député, la question de la situation d'ensemble de l'industrie automobile française, et plus particulièrement de la stratégie de Renault. Je vous répondrai en faisant un certain nombre d'observations.
    Depuis dix ans, le marché français de voitures particulières neuves oscille autour de deux millions. Il s'agit d'ailleurs essentiellement d'un marché de renouvellement, et non plus d'un marché de croissance. Cela veut dire que l'avenir de nos deux grands constructeurs, donc des emplois qu'ils génèrent, ne passe plus seulement par notre marché national. Ce serait donc une erreur stratégique que de limiter leurs capacités à développer une stratégie de conquête internationale.
    Avec 22 % de leurs ventes réalisées hors d'Europe occidentale, les performances de ces constructeurs doivent être analysées désormais sur une base mondiale. Leur choix stratégique est celui de la croissance en volume. Or, ce choix indispensable à leur pérennité ne peut réussir que sur les marchés en développement. C'est ainsi qu'entre 2000 et 2002, la totalité de la croissance des ventes de Renault, c'est-à-dire environ 500 000 véhicules, et 50 % de la croissance de celles de PSA, se sont faites hors d'Europe. De plus, la part des ventes réalisées en France n'est déjà plus aujourd'hui que le tiers de celles réalisées en Europe.
    Cette stratégie de nos constructeurs, fondée sur un partenariat structurant pour Renault avec Nissan, et sur des partenariats d'opportunité pour PSA - je pense par exemple, à celui qui le lie à Toyota en Tchéquie - entraîne bien évidemment une évolution de leurs relations avec les équipementiers, d'autant que leur rôle industriel évolue vers celui d'architectes et d'assembleurs. Ces relations sont de plus en plus fondées sur une responsabilisation des équipementiers majeurs et un plus grand partage des risques, notamment en matière d'efforts de recherche et de développement. Elles restent bien évidemment inscrites dans une forte exigence de compétitivité de l'ensemble de la filière automobile. Cette compétitivité demeure en effet la condition indispensable du maintien, sur un marché ô combien concurrentiel et qui l'est de plus en plus, d'un secteur automobile puissant en France.
    Le choix des consommateurs, monsieur le député, vous le savez bien, ne se décrète pas. Il y a une réalité incontournable : le consommateur final, dont le comportement détermine aujourd'hui l'économie, qu'on l'aime ou non, va, et ira toujours, vers le produit le moins cher, à qualité égale, bien entendu, ou du moins perçue comme telle.
    M. François Brottes. Quelle découverte !
    M. Daniel Paul. Vous nous apprenez quelque chose !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Ce n'est pas par la contrainte que l'on freinera la désindustrialisation à laquelle vous faites référence, mais bien au contraire en libérant les énergies...
    M. Daniel Paul. 30 % d'intérimaires qui travaillent pour Renault, c'est ce que vous appelez « libérer les énergies » !
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. ... en faisant sauter les verrous de l'initiative et en créant les conditions favorables qui permettront aux entreprises de se développer et de prospérer, d'adapter leur stratégie industrielle et de réussir leur mutation.
    L'Etat se positionne aujourd'hui à cet égard comme un partenaire et comme un accompagnateur.
    M. Daniel Paul. En acceptant qu'on emploie 30 % d'intérimaires !
    M. le président. Nous avons terminé les questions.

Charges communes

    M. le président. J'appelle les crédits inscrits à la ligne : « Charges communes ».

ÉTAT B
Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires des services civils (mesures nouvelles)

    « Titre Ier : 4 080 000 000 euros ;
    « Titre II : 14 198 217 euros ;
    « Titre III : - 500 734 960 euros ;
    « Titre IV : - 681 183 500 euros. »

ÉTAT C
Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)
TITRE VI. - SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT
ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

    « Autorisations de programme : 151 000 000 euros ;
    « Crédits de paiement : 18 000 000 euros. »
    M. le président. Je mets aux voix les crédits inscrits au titre I de l'état B.
    (Les crédits du titre Ier sont adoptés.)
    M. le président. M. Dosière a présenté un amendement, n° 185, ainsi rédigé :
    « Sur le titre II de l'état B, réduire les crédits de 516 053 euros. »
    La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. J'ai souligné tout à l'heure que le budget de l'Elysée, qui figure au titre II, à hauteur de 31 millions d'euros, est un budget tronqué puisque son budget réel, qui prend en compte les financements en provenance des divers ministères, atteint près de 60 millions d'euros, soit pratiquement le double.
    En application de l'article 115 de la loi de finances pour 2002, la présidence de la République doit fournir au Parlement des informations sur son budget. Or celles-ci, qui sont encore succinctes, ne portent que sur le budget visible, donc sur la moitié des crédits mis à la disposition de l'Elysée. C'est pourquoi j'ai demandé tout à l'heure au ministre si le Gouvernement était prêt à renoncer à l'opacité qui règne sur le budget de l'Elysée au profit de la transparence, qui doit être la règle dans une démocratie quand il s'agit de crédits publics. Le ministre m'a répondu que la situation actuelle lui paraissait pleinement satisfaisante ; j'en conclus qu'il préfère l'opacité.
    J'appelle l'attention de l'Assemblée sur le fait qu'une telle opacité ne peut qu'entraîner la suspicion à l'égard de la gestion des crédits de la Présidence, d'autant plus que nous connaissons les pratiques qui avaient cours à la questure de la ville de Paris du temps où M. Chirac en était le maire.
    M. François-Michel Gonnot. Hors sujet !
    M. René Dosière. J'ajoute que la consolidation du budget de l'Elysée présenterait un autre avantage. En effet, par suite d'une décision du Conseil constitutionnel, les crédits du titre II ne peuvent être réduits, alors que ceux qui figurent dans le budget des ministères peuvent faire l'objet de gels, voire d'annulations, ce qui est aujourd'hui une pratique gouvernementale fort répandue.
    M. François-Michel Gonnot. Et Mazarine, c'était sur quels crédits ?
    M. René Dosière. Par conséquent, regrouper les crédits de l'Elysée au titre II est une disposition favorable, je dirai même protectrice de la présidence de la République, et en aucun cas hostile.
    J'ai pris acte de la décision du Gouvernement. Toutefois, je présenterai non pas un amendement de repli, mais un souhait de repli. Puisque, en vertu de l'article 115 précité, la présidence de la République doit publier un « gris budgétaire », c'est-à-dire un rapport d'exécution sur son budget, pourquoi ne pas ajouter dans ce document, au moins à titre informatif, les crédits qui sont dépensés par chaque ministère pour le compte de l'Elysée ? Le Gouvernement pratique de cette manière en ce qui concerne les collectivités locales en incluant à la fois les crédits qui leur sont attribués directement et ceux que chaque ministère dépense pour elles. Pourquoi ce qui est possible pour les collectivités locales ne le serait pas pour le budget de l'Elysée ?
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
    M. Daniel Garrigue, rapporteur spécial. La commission n'a pas examiné cet amendement mais, à titre personnel, j'observe que M. Dosière recherche un effet médiatique en déposant les mêmes amendements chaque année.
    M. François-Michel Gonnot. Seulement depuis 1995 !
    M. Michel Bouvard. Ce sont des marronniers !
    M. René Dosière. Je cherche à protéger l'Elysée !
    M. Daniel Garrigue, rapporteur spécial. Nous pouvons lui répondre que, ces dernières années, un effort de régularisation a été fait en ce qui concerne les crédits de la présidence de la République. Cet effort, que tout le monde a remarqué et souligné, est du reste pratiquement arrivé à son terme.
    Par ailleurs, je lui fais remarquer que les transferts de moyens et les mises à disposition de personnels font partie de la gestion courante et ne concernent pas que la présidence de la République.
    Enfin, j'ai entendu M. Dosière s'ériger en protecteur du Président de la République.
    M. René Dosière. De la présidence !
    M. Daniel Garrigue, rapporteur spécial. Ce serait sympathique si ce n'était pas risible.
    M. François-Michel Gonnot. Très bien !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. M. Dosière semble imperméable à toute explication sur ce sujet qui pourrait revêtir un caractère obsessionnel en ce qui le concerne. Je répète une nouvelle fois que nous n'avons jamais autant progressé dans la transparence des comptes, qu'il s'agisse de ceux de la présidence ou des autres.
    Dans ce souci de transparence, nous avons fait le choix d'une présentation en deux temps des crédits de la présidence dans le cadre du budget pour 2003 : d'abord, une dotation base qui résultait de la ré-agrégation des moyens qui, auparavant, étaient dispersés dans plusieurs fascicules, ce qui représente 30,36 millions ; ensuite, nous avons appliqué le taux de progression de 2003 de l'ensemble des dépenses nettes du budget général, conformément à la demande de la présidence, ce qui traduit sa volonté que ses crédits n'évoluent pas plus que l'ensemble des moyens de l'Etat.
    Les crédits de la présidence témoignent, en 2003 et en 2004, d'une accentuation de la volonté de lisibilité et de transparence déjà exprimée depuis plusieurs années, si bien que je ne comprends pas cet amendement.
    Aussi, je vous demande, monsieur Dosière, de bien vouloir le retirer. A défaut, je demande à l'Assemblée de le rejeter.
    M. le président. La parole est à M. Eric Raoult.
    M. Eric Raoult. Monsieur le président, dans cet hémicycle, nous apprécions beaucoup René Dosière,...
    M. René Dosière. Merci !
    M. Eric Raoult. ... universitaire de renom, spécialiste des problèmes de finances publiques. Il a connu, comme d'autres ici, les péripéties électorales. S'il avait défendu cet amendement depuis 1988, il serait crédible.
    M. François-Michel Gonnot. Absolument !
    M. Eric Raoult. Or il ne le défend que depuis 1995. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est donc un amendement à cohabitation variable. Autrement dit, René Dosière se réveille quand le candidat élu n'est pas le sien.
    M. Michel Bouvard. Auparavant, c'était le château de la Belle au Bois Dormant !
    M. Eric Raoult. Quant à son second amendement, qui a trait au Conseil constitutionnel, il nous étonne car le président du Conseil constitutionnel a changé, mais pas tout à fait au même moment.
    Il faudrait donc, me semble-t-il, faire preuve de cohérence. Mais je suis persuadé que si, par malheur, il devait y avoir un changement, René Dosière serait toujours là pour défendre cet amendement.
    M. René Dosière. Tout à fait !
    M. Eric Raoult. Pour l'heure, nous nous en tiendrons à l'avis du ministre et du rapporteur. Ce qui se passe ailleurs, dans une grande ville, par exemple, à propos de frais de bouche, ne doit pas faire oublier un certain nombre de dévoiements dans d'autres domaines. Ainsi, il me semble qu'une grande association qui s'est fixé comme objectif de lutter contre le racisme n'a pas toujours compté que sur les subventions du fonds d'action sociale : il lui arrivait de bénéficier d'autres financements qui venaient de plus haut.
    M. François-Michel Gonnot. Les fonds secrets !
    M. Eric Raoult. « Quand Dieu voulait, Dieu donnait », disait-on...
    M. le président. La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. J'accède à la demande du ministre et je renonce à mon amendement. Je reconnais d'ailleurs très franchement que si celui-ci était adopté par l'Assemblée, le Conseil constitutionnel pour lequel, monsieur Raoult, j'ai le plus grand respect, le déclarerait aussitôt non conforme, dans le droit-fil de sa décision relative à l'article 115 de la loi de finances, laquelle dispose que le Parlement ne peut réduire les crédits des pouvoirs publics. C'est du reste la raison pour laquelle j'ai dit que le transfert de la totalité des crédits budgétaires au titre II serait plus protecteur pour la présidence de la République - je parle de l'institution, non de son titulaire. Mais je n'aurais pu prendre la parole si mon amendement avait été rédigé autrement...
    Cela dit, cher collègue Raoult, sachez que j'ai déposé pour la première fois des amendements concernant la présidence de la République en 2001. C'était il y a trois ans et le Premier ministre de l'époque, bien qu'étant un de mes amis, appréciait fort peu que l'on aborde ce genre de question. Ainsi n'ai-je guère eu l'occasion de développer, et je n'ai du reste jamais obtenu que des réponses très dilatoires. Cela ne m'a pas empêché de poursuivre et, comme vous le dites, j'entends bien persévérer. Car ce qui m'intéresse, c'est que la présidence de la République soit au-dessus de tout soupçon, quel qu'en soit le titulaire. Or l'actuel statut financier de la présidence, héritage de pratiques passées, notamment de la IVe République, que le général de Gaulle a refusé de modifier en 1958 et qui se sont naturellement poursuivies,...
    M. Michel Bouvard. Pourquoi ne pas remonter à Napoléon III ?
    M. René Dosière. ... n'est en rien satisfaisant. J'espère, monsieur Raoult, que vous croyez en la sincérité de mes motivations. Je suis du reste persuadé qu'en 2007 les termes du débat se poseront différemment et que cette question, à défaut d'être au coeur de la campagne, sera pour le moins évoquée dans le cadre de l'élection présidentielle.
    M. le président. L'amendement n° 185 est retiré.
    M. Dosière a présenté un amendement, n° 186, ainsi rédigé :
    « Sur le titre II de l'état B, réduire les crédits de 185 000 euros. ».
    La parole est à M. René Dosière.
    M. René Dosière. L'amendement n° 186 a quant à lui trait au Conseil constitutionnel ou plus exactement à ses crédits, qui eux aussi figurent dans le titre II « Pouvoirs publics » pour un montant de 5 540 000 euros. Comparés aux 4 millions inscrits en 1999, cela représente tout de même une augmentation de 1 540 000 euros, soit presque 40 %. Ce n'est pas négligeable. On comprend, là encore, l'utilité de l'article 115 de la loi de finances pour 2002, qui impose la publication d'un « jaune » budgétaire destiné à l'information du Parlement.
    Or si vous consultez ce jaune budgétaire, vous constaterez que dans les quatres pages consacrées au Conseil constitutionnel, ce dernier nous expose la façon dont ses membres sont nommés, ses compétences, son fonctionnement, toutes choses que les parlementaires connaissent particulièrement bien pour subir assez régulièrement les décisions du Conseil. Par contre, les informations sur ses crédits, objet précisément du « jaune », tiennent en quatre lignes, avec un commentaire particulièrement succinct ! Autrement dit, le Conseil constitutionnel est pris en flagrant délit de non-application d'une loi qu'il a pourtant validée.
    J'avais déjà formulé ces observations l'année dernière à l'occasion de la première publication de ces informations dans le « jaune » budgétaire. Malheureusement, elles n'ont pas pour autant conduit le Conseil constitutionnel à modifier sa présentation, puisqu'il persiste dans sa volonté de ne pas informer le Parlement. Aussi me suis-je permis de préciser quelles indications nous font défaut. Peut-être le Conseil a-t-il besoin de connaître notre volonté d'avoir quelques précisions. Il pourrait, par exemple, s'agissant de la ligne concernant la rémunération de ses membres, nous donner quelques détails. Après tout, celle des députés figure sur Internet. Pourquoi les membres du Conseil constitutionnel, payés sur fonds publics, ne devraient-ils pas eux aussi l'indiquer ? Quand aux personnels en place au Conseil constitutionnel, quel est leur nombre ? Quelle est leur catégorie ? A, B ou C ? Quel est leur statut : mis à disposition, détachés, contractuels, vacataires ? Pour ce qui est du fonctionnement du Conseil, quelle est la part des loyers, des fournitures, des véhicules etc. ? Autant d'éléments simples dont le Conseil pourrait nous faire part.
    Pour résumer, j'attends du Conseil constitutionnel autant de transparence que nous en fournit, quelques pages, plus loin la Cour de justice de la République. En consultant le « jaune », vous verrez que, pour des sommes pourtant neuf fois inférieures à celles du Conseil constitutionnel, la Cour de justice nous fournit trois fois plus d'explications ! Ajoutons d'ailleurs que la loi organique imposera au Conseil constitutionnel, comme à la Présidence de la République, de fournir à la représentation nationale une information plus complète et plus transparente. C'est la raison pour laquelle j'ai déposé cet amendement mais, là encore, je serai amené à le retirer car, si vous acceptiez de le voter, le Conseil constitutionnel ne manquerait pas de le déclarer inconstitutionnel, à moins que vous ne souhaitiez vraiment l'alerter sur cette situation et l'obliger à vous fournir l'information qu'il vous doit et que, apparemment, il ne tient pas à transmettre.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Daniel Garrigue, rapporteur spécial. La commission ne s'est pas prononcée sur cet amendement. Je rappelle simplement que, dès lors que ces crédits évoluent dans des normes raisonnables, la tradition veut que les pouvoirs publics ne portent pas de jugement entre eux et ne cherchent pas à contrôler la manière dont fonctionnent les autres. Cela vaut également dans les relations entre le Parlement et le Conseil constitutionnel.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. M. Dosière invente une nouvelle catégorie d'amendement. Nous connaissions les amendements d'appel, les amendements de repli ; voilà maintenant les amendements non constitutionnels.
    M. René Dosière. Mais je les retire au bon moment !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Cela dit, j'ai lu attentivement le « jaune », monsieur Dosière : on y trouve même le nom d'une personne qui, jusqu'alors à mi-temps, va désormais travailler à plein temps. Libre à vous d'instruire le procès du Conseil constitutionnel sur les informations financières qu'il vous donne, mais, en toute bonne foi, je trouve que ses efforts méritent d'être remarqués.
    M. René Dosière. Vous n'êtes pas très exigeant, monsieur le ministre !
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Je vous suggère par conséquent de retirer votre amendement. A défaut, je demande à l'Assemblée de le rejeter.
    M. le président. La parole est à M. Réné Dosière.
    M. René Dosière. Je retire mon amendement.
    M. le président. L'amendement n° 186 est retiré.
    Je mets aux voix les crédits inscrits au titre II de l'état B.
    (Les crédits du titre II de l'état B sont adoptés.)
    M. Garrigue, rapporteur spécial, et M. Laffineur ont présenté un amendement, n° 101, ainsi rédigé :
    « Sur le titre III de l'état B, réduire les crédits de 15 millions d'euros. »
    La parole est à M. le rapporteur spécial.
    M. Daniel Garrigue, rapporteur spécial. Monsieur le président, cet amendement a été adopté par la commission des finances mais je précise que, à titre personnel, j'ai émis des réserves. Aussi laisserai-je au président de la commission le soin de le présenter. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. J'entends les applaudissements... Je voudrais bien faire comprendre cet amendement et convaincre de son bien-fondé. J'entends du reste moi-même le rectifier ou le sous-amender compte tenu d'un débat que nous avons eu ce matin avec les députés représentant la collectivités dont il est question. Rappelons également que cet amendement n'est qu'indicatif dans la mesure où il s'agit d'une disposition de nature réglementaire. Seul le Gouvernement peut, en s'inspirant de cet amendement indicatif, adapter le système actuel.
    Au point de départ, nous avons un rapport de la Cour des comptes qui juge la majoration de retraite applicable dans certaines collectivités d'outre-mer, où elle peut atteindre 75 %, injustifiée, injuste, incontrôlable et en forte hausse. Voilà pour le rapport de la Cour des comptes.
    Deuxième élément, l'impossibilité de contrôle du fait d'une décision du Conseil d'Etat. Cette situation peut concerner, auquel cas elle est parfaitement légitime, les retraités qui ont vécu leur vie active dans ces départements et territoires d'outre-mer et qui doivent continuer à bénéficier de la mesure. Plusieurs députés ont également évoqué le cas des gens qui ont quitté La Réunion, par exemple, pour travailler en métropole et qui souhaitent revenir au pays prendre leur retraite en bénéficiant de la majoration qui, selon les départements, peut atteindre 35 % à 75 %.
    M. René-Paul Victoria. C'est 35 % pour la Réunion !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. J'ai bien dit : selon les départements. A la Réunion, c'est effectivement 35 %. Il n'est pas question, j'y insiste bien, de porter atteinte aux droits des fonctionnaires qui sont sur place, ni de ceux qui, partis en métropole, reviennent au pays. Mais il est d'autres cas qui surviennent de plus en plus fréquemment. Plusieurs de nos collègues l'ont rapporté et nous en avons même débattu, rappelons-le, avec M. André Thien Ah Koon et plusieurs sénateurs. Un des vôtres n'a-t-il pas reconnu, je reprends son expression, que 500 personnes environ, chaque année, se faisaient domicilier de façon fictive à la Réunion afin de bénéficier de la majoration ?
    Je veux bien tout, mes chers collègues. Mais je pose la question : est-il légitime aujourd'hui, au moment où nous avons débattu des retraites et où nous nous heurtons aux difficultés que vous savez ; de permettre à nos compatriotes qui ont vécu en France, d'aller prendre leur retraite dans certains départements, sous les palmiers, ce qui est tout à fait légitime, mais en bénéficiant d'une majoration qui peut atteindre 75 % de leur retraite, sans parler des possibilités de réduction d'impôt ? Il faut savoir ce que l'on veut. Si l'on ne touche à rien, il est bien entendu que l'on peut laisser ce système se poursuivre. Pour ma part, je ne conteste pas sa légitimité, compte tenu du différentiel de niveau de vie. Mais nous ne pouvons pas laisser se développer dans ce pays des systèmes fictifs. Que des compatriotes qui ont passé toute leur vie professionnelle en métropole aient envie d'aller prendre leur retraite outre-mer pour bénéficier du soleil, ils ont raison. Mais de là à bénéficier d'une majoration de 35 % à 75 % avec une réduction d'impôt dans certains territoires, j'appelle cela un système fictif !
    M. René Dosière. C'et dur de vivre au soleil, monsieur le président, cela mérite une compensation !
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Voilà pourquoi la commission des finances, dans sa grande majorité, a jugé nécessaire d'adopter un amendement indicatif. Ce que je souhaite, monsieur le ministre, c'est que le Gouvernement travaille avec les députés d'outre-mer et moi-même. Du reste, à la suite de la réunion de ce matin, j'ai personnellement proposé de ramener la réduction proposée dans l'amendement n° 101 de 15 à 5 millions d'euros. En effet, tous nos collègues députés, l'ont dit, l'objectif est de lutter contre les abus. D'une année sur l'autre, on constate une augmentation de l'ordre de 20 à 25 millions d'euros. Je peux parfaitement admettre qu'il faille lutter uniquement contre les abus. C'est la raison pour laquelle je propose de limiter la réduction à 5 millions, pour faire la différence entre la situation de ceux qui ont vécu outre-mer, parfaitement légitimes, et celle de métropolitains qui, désireux d'aller vivre là-bas, entendent en profiter pour avoir une majoration de retraite tout en payant moins, et parfois plus du tout, d'impôt sur le revenu. Voilà ce que je vous propose, mes chers collègues, il faut savoir si nous voulons lier efficacité et justice.
    M. le président. Nous avons bien pris note, monsieur le président de la commission, que la réduction proposée par l'amendement est de 5 millions d'euros et non plus de 15 millions d'euros.
    Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 101 ainsi rectifié ?
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, monsieur le président de la commission des finances, qu'il s'agisse de 15 ou de 5 millions d'euros, l'amendement a pour objet de provoquer un changement normatif pour diminuer l'avantage alloué aux retraités de la fonction publique de l'Etat justifiant d'une résidence effective, permanente, à La Réunion, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Mayotte et à Wallis-et-Futuna.
    Je rappelle que cette disposition concerne à ce jour 25 000 retraités de la fonction publique de l'Etat dans ces six collectivités. Le Gouvernement, cohérent avec la position qu'il a déjà exprimée, notamment devant votre assemblée, est opposé à cet amendement dans la mesure où celui-ci propose une réforme ponctuelle sur des éléments particuliers du droit à pension outre-mer. Toute évolution des avantages servis à la fonction publique outre-mer - retraités comme actifs - ne saurait être à nos yeux décidée que dans le cadre d'une réforme globale, accompagnée par les forces politiques et sociales, de façon à aboutir à des solutions tout à la fois concertées et adaptées aux réalités du terrain.
    Néanmoins, dès à présent, conscient du risque d'abus attaché à la mise en oeuvre du dispositif relatif à l'indemnité temporaire, le Gouvernement examine les voies d'un renforcement des contrôles afin de vérifier que les conditions posées pour bénéficier de cette indemnité sont bien respectées. Il va donc dans le sens souhaité par la commission des finances, monsieur le président de la commission, mais en utilisant des moyens différents.
    En outre, le Gouvernement n'est pas opposé à ce qu'une expertise exhaustive soit réalisée sur l'ensemble des dispositifs relatifs à la fonction publique outre-mer, afin qu'un diagnostic complet et objectif de leurs effets négatifs comme positifs sur les économies locales soit établi. Nous ne verrions qu'avantages à ce que la commission soit associée à ces travaux.
    Voilà pourquoi il semble peu opportun au Gouvernement d'adopter cet amendement, et j'invite la commission à le retirer au bénéfice des informations que je viens de donner. A défaut, je demanderai à l'Assemblée de le rejeter.
    M. le président. La parole est à M. Bertho Audifax.
    M. Bertho Audifax. M. le Premier ministre, voilà trois ou quatre semaines, a affirmé devant les parlementaires du groupe UMP l'attachement du Gouvernement à l'outre-mer, ce dont nous ne doutions pas, sachant l'attachement maintes fois réaffirmé du Président de la République à l'outre-mer.
    A cette occasion, devant l'inquiétude qu'avaient suscitée chez les parlementaires d'outre-mer les conclusions du rapport Laffineur et les amendements préconisés par notre collègue, M. le Premier ministre nous a dit que l'outre-mer ne se gouvernait pas par des amendements. Sages paroles, mais que les faits semblent aujourd'hui contredire. Ici même, dans cette assemblée, un amendement concernant la TVA-NPR a été adopté, qui sera lourd de conséquences.
    Aujourd'hui contredits par les faits, nous voilà contraints de quitter nos circonscriptions, nos mairies, pour nous adresser à vous et tenter de vous convaincre de notre volonté de réforme, mais avant tout de notre volonté de justice.
    Le problème que nous posons aujourd'hui à notre majorité est le suivant : croyez-vous que les DOM-TOM participent au rayonnement de la France ? Croyez-vous en nous, comme nos concitoyens ont cru en vous en votant pour nous, qui faisons partie de cette majorité et soutenons l'action du Président de la République ? Si oui, alors, convenons que la méthode qui consiste à « alerter » le Gouvernement sur les dérives outre-mer par des amendements n'est pas la bonne. Convenons que, nous, parlementaires des DOM, ne sommes pas d'obtus réactionnaires ni des adeptes d'un clientélisme éhonté. Que nous sommes, tout comme vous, animés d'un esprit de réforme, que, tout comme vous, nous faisons de la politique dans nos circonscriptions, et que prédire à cette majorité des difficultés d'interprétation sur des amendements dits d'alerte a la même valeur que de l'alerter sur les difficultés des buralistes ou, de la part des députés des départements vinicoles, de venir se défendre à l'occasion de l'examen du projet de loi sur la santé publique.
    Non, mes chers collègues, on ne gouverne pas l'outre-mer par amendements. Parce que l'outre-mer, ou plutôt les outre-mers, est infiniment plus complexe.
    Mais revenons à cet « amendement Laffineur ». Oui, il est inadmissible que de malins retraités métropolitains aillent se dorer de temps en temps au soleil des DOM-TOM sans y avoir fait carrière, pour bénéficier de surretraites et d'avantages fiscaux.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission. Alors, pourquoi ne pas l'accepter ?
    M. Bertho Audifax. Aucun député de ces circonscriptions ne peut l'accepter et, solennellement, je le dis : pour ma part, je ne l'accepte pas. Mais au nom de quoi l'iniquité de quelques-uns doit-elle devenir l'iniquité de tous ?
    Ce que la commission des finanances considère comme un avantage inique remonte à une cinquantaine d'années. A l'époque, et pendant longtemps, il a été seulement réservé aux métropolitains. C'est à la suite de longues luttes syndicales qu'il est devenu un avantage pour tous les fonctionnaires des DOM. Vous nous dites que seuls les flux à venir seront concernés, pour éviter des abus. Mais que faites-vous pour ceux qui ont toujours fait carrière outre-mer, qui y sont nés, qui y mourront, qui, à la retraite, subiront, comme tous les domiens, un coût de vie supérieur à celui de la métropole ? Ils ont cotisé sur leurs rémunérations ; ils entendent, comme leurs ainés, bénéficier d'une retraite indexée. Ils ne choisiront pas de se dorer au soleil : ils y sont nés, ils y mourront. Où est l'injustice ?
    Le raisonnement vaut aussi pour les originaires de France métropolitaine qui y ont fait carrière, qui se sont installés chez nous et qui se considèrent aujourd'hui comme des Réunionnais. Plus encore, que faites-vous de ceux qui, nés outre mer, ont choisi, faute d'emploi dans nos îles sous-développées, de venir servir leur pays, la France, dans nos hôpitaux, notre police, nos prisons, notre poste, et qui, malgré leurs demandes réitérées, ne pourront jamais, de toute leur carrière, regagner leur île, par manque de postes disponibles ? Toute leur vie, ils ont espéré regagner l'île sitôt venue l'heure de la retraite, y retrouver leurs proches. Vous voulez aujourd'hui les condamner à terminer leur vie chez eux, sans doute, mais avec une retraite inférieure à celle dont ils étaient assurés et tout en subissant un coût de la vie plus élevé ?
    Tout cela, nous en sommes certains, avait échappé à M. Laffineur, de même qu'il n'avait pas évalué l'apport de ces retraites dans des équilibres financiers domiens globaux extrêmement fragiles. Pourfendeur des fraudeurs, notre collègue a ignoré les conséquences de son engagement à la Don Quichotte. Mais au fait, combien y a-t-il de fraudeurs ? Quel en est le chiffre exact pour la Réunion ? Personne ne le sait ! De combien le coût de la vie à la Réunion est-il supérieur à celui de la métropole ? Aucun gouvernement à ce jour n'a voulu ou n'a su l'apprécier !
    Notre collègue, devant la majorité des parlementaires de l'outre-mer nous a assuré que son souhait était de transférer les économies générées par ces amendements à l'économie productive de nos départements. Par quel tour de passe-passe ? L'annualité budgétaire, l'impossibilité d'affecter des économies budgétaires supposées à un objet prédéterminé l'interdisent. Erreur grossière ou volonté de tromper ? Je m'interroge, et avec moi nos électeurs - vos électeurs - s'interrogent.
    Je demande à tous mes collègues de la majorité de ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain et de rejeter purement et simplement cet amendement.
    Que le Gouvernement gouverne, et qu'il s'appuie sur nos avis ! Nous qui sommes nés dans ces départements, nous nous interrogeons tous les jours sur ce qu'il convient de faire ou de ne pas faire. Et croyez-moi, l'exercice est difficile.
    Prenez garde : se limiter à un regard faussement comptable sur les DOM-TOM conduirait la France à décevoir. Prenez garde : un nombrilisme quartiériste conduira nos populations d'outre-mer au désespoir, mais amènera la France à rapetisser et à faire douter de son rôle mondial.
    Le dire ici, vous le dire, n'est pas manquer de fidélité ou de solidarité à une majorité. Ce n'est pas faire du clientélisme. C'est, pour un député responsable, vous mettre en garde contre des solutions simplistes. N'ayez pas, comme vos prédécesseurs, un regard condescendant sur l'outre-mer. Nous méritons mieux que cela ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme Béatrice Vernaudon.
    Mme Béatrice Vernaudon. Monsieur le président, députés d'outre-mer, nous sommes aussi députés de la nation, et à ce titre soucieux de la bonne utilisation des deniers publics.
    Prenant prétexte du poids de plus en plus lourds que représente la majoration des retraites versées dans six de nos collectivités d'outre-mer, la commission des finances a souhaité, dans un premier amendement, tarir les crédits pour obliger le Gouvernement à supprimer purement et simplement la majoration aux fonctionnaires de l'Etat prenant leur retraite à compter du 1er août 2004.
    Sensible à nos arguments, et notamment aux déséquilibres dangereux que provoquerait une telle mesure dans nos économies déjà fragiles et confrontées à un taux de chômage élevé, la commission des finances propose un sous-amendement pour sanctionner notamment, et dans un premier temps, les abus.
    Sur le principe, nous ne pouvons qu'être d'accord, mais nous maintenons notre opposition ferme à toute réforme menée sans concertation, sans étude d'évaluation sur le coût de la vie, sur le pouvoir d'achat des ménages, et surtout sans que les forces politiques et sociales de nos collectivités aient été consultées.
    Aussi, au nom de tous les collègues concernés, je demande à la commission des finances, comme vient de le faire le ministre du budget, de bien vouloir retirer son amendement, faute de quoi nous voterions contre.
    M. le président. La parole est à M. René-Paul Victoria.
    M. René-Paul Victoria. Monsieur le président, je regrette, au nom de tous mes collègues de l'outre-mer, que, une fois de plus, la commission des finances ait adopté un amendement sans concertation avec les représentants de l'outre-mer. Il vise à remettre en cause la bonification dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat qui prennent leur retraite à la Réunion, à Mayotte et dans les TOM. Si l'amendement proposé ne prévoit pas la supression pure et simple de cette disposition, il n'en envisage pas moins de réduire, de 10 % environ, la ligne budgétaire affectée à cet avantage - et le président de la commission vient de nous proposer encore un sous-amendement. C'est une véritable brèche que l'on est en train d'ouvrir dans le dispositif qui concerne le développement durable de nos territoires.
    Je demande d'ores et déjà à mes collègues de rejeter cette proposition injustifiée et préjudiciable à l'économie de nos territoires. Les mesures préconisées par cet amendement et par plusieurs autres similaires, repoussées, à juste titre, par le Gouvernement, risquent, si elles étaient adoptées, d'aggraver encore nos retards de développement, avec, comme corollaire, non négligeable, des efforts supplémentaires demandés au budget de la nation, si bien que ces amendements produiraient l'inverse des effets attendus.
    Depuis qu'il est question des amendements Laffineur ou Méhaignerie, nous commençons à entrevoir des difficultés pour recruter les cadres, notamment métropolitains, qui constituaient un vivier pour nous aider à sortir de nos problèmes. Où allons-nous trouver désormais l'encadrement nécessaire à nos collèges, nos lycées et nos institutions ?
    Chez nous, lorsqu'est annoncé un cyclone, se succèdent les alertes, de niveau un, deux, trois, alerte orange puis rouge. Les amendements Laffineur et Méhaignerie vont faire dix fois plus de dégâts que ces cyclones qui portent des prénoms.
    Je vous demande donc, mes chers collègues, de rejeter cet amendement.
    M. le président. La parole est à M. Eric Raoult.
    M. Eric Raoult. Je le rappelle amicalement à mes collègues de la commission des finances, j'ai commencé mon action de député, en 1986, au sein de cette commission. Un soir, on m'avait dit qu'il fallait venir en séance parce que devait y être présenté un amendement - l'amendement Richard - sur le dossier de la défiscalisation. Je n'avais pas bien compris alors de quoi il retournait. Ce n'est que plus tard que, s'étant rendu aux Antilles puis à la Réunion, le jeune député, le « zoreille », a écouté et a pris conscience de la réalité aux abords du Chaudron, de Pointe-à-Pitre et de Fort-de-France. Le député de Montfermeil et de Clichy-sous-Bois a compris - et je veux le dire à mes collègues de la commission des finances - que ce ne sont pas des généraux ou des directeurs d'administration centrale qui vont là-bas, mais des « sous-off » du Bourget, des techniciens de Montfermeil, des gens qui touchent de petites retraites. Telles est la réalité humaine de l'outre-mer.
    On est revenu sur l'amendement Richard mais il ne faut pas qu'il y ait un amendement Laffineur !
    En fait, bon nombre de communes d'outre-mer ressemblent aux villes de banlieue et il arrive souvent que, au hasard d'une rencontre avec une jeune fille, ou d'un service national effectué là-bas, les réalités humaines des communes d'outre-mer surgissent dans nos banlieues et que l'on s'aperçoive qu'elles sont très proches.
    Là-bas, il n'y a pas beaucoup de politique de la ville. En guise de HLM, il y a des tôles ondulées. Je crois donc vraiment qu'il faut écouter nos collègues d'outre-mer, qui témoignent de cette réalité et de la diversité de notre pays.
    Peut-être ces retraites peuvent-elles donner lieu à certains abus - tout comme la défiscalisation -, mais elles permettent aussi un développement économique. S'il y a aujourd'hui des touristes sur le marché de Papeete ou à Hienghène, c'est aussi parce qu'il y a là-bas des retraités, qui ne sont pas tous généraux ou directeurs d'administration centrale, je le répète.
    Nous ne pouvons pas jouer ainsi l'avenir d'un grand nombre de nos compatriotes qui sont partis là-bas, surtout un jeudi soir, où nous ne sommes pas tous présents.
    M. René Dosière. Arrête, Eric, tu vas nous faire pleurer !
    M. Eric Raoult. Nous avons entendu plusieurs témoignages de la Réunion ou de Polynésie. Soyons attentifs à ne pas traiter d'un problème qui nous tient à coeur lorsque nous ne sommes pas tous là, que nous n'avons entendu qu'une partie des avis et qu'il s'agit de justice, d'équité, de contrôle. Et ce n'est pas un jeudi soir, à cette heure-ci, qu'il faut en débattre, je le répète.
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
    M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Monsieur le président, je suis assez désagréablement surpris par une confusion, que j'espère involontairement entretenue.
    Je tiens à rappeler les conclusions du rapport de la Cour des comptes : « L'heure n'est plus à de nouvelles et probablement vaines tentatives de rationalisation. Il importe de mettre fin à l'attribution de cette indemnité injustifiée, d'un montant exorbitant et sans le moindre équivalent dans les autres régimes de retraite. »
    S'agit-il pour nous de remettre en question les 200 millions d'acquis ? Non. S'agit-il de remettre en cause la progression dont bénéficient les retraités qui vivent dans ces départements ou qui en sont originaires et s'y réinstallent. Non. Sur les 25 millions d'euros de progression, en effet, nous ne remettons en cause que 5 millions. Tout le monde - y compris M. le ministre - dit vouloir combattre les abus, et telle était l'intention de la commission des finances, mais il semble que nous ne voulions pas nous en donner les moyens, en entretenant la confusion. Je le regrette, et je ne retire pas cet amendement.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 101 rectifié.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix les crédits inscrits au titre III de l'état B.
    (Les crédits du titre III de l'état B sont adoptés.)
    M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 182, ainsi rédigé :
    « Sur le titre IV de l'état B, réduire les crédits de 7 500 000 euros. »
    La parole est à M. le ministre qui, je crois, présentera en même temps, par cohérence, l'amendement n° 183.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. En effet, monsieur le président.
    La loi relative à la sécurité financière a transféré au fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages la gestion et le financement des majorations de rentes qui sont allouées en réparation du préjudice causé par un véhicule terrestre à moteur. En l'absence de dispositions spécifiques, ce transfert de gestion et de financement prendrait effet à compter de la publication de la loi de sécurité financière, c'est-à-dire le 2 août 2003.
    Pour simplifier la gestion de la transition, il est proposé de confier au FGAO l'intégralité des remboursements relatifs à l'exercice 2003, ces remboursements étant effectués à année échue.
    Cet amendement induit une économie de 7,5 millions d'euros.
    L'amendement suivant, n° 183, traduit quant à lui l'incidence de l'amendement que je viens de présenter.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Daniel Garrigue, rapporteur spécial. La commission n'a pas examiné l'amendement n° 182, mais, à titre personnel, j'y suis favorable, dans la mesure où il contribue à réduire la dépense publique.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 182.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Je mets aux voix les crédits inscrits au titre IV de l'état B, modifiés par l'amendement n° 182.
    (Les crédits du titre IV de l'état B, ainsi modifiés, sont adoptés.)
    M. le président. Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI de l'état C.
    (Les crédits du titre VI de l'état C sont adoptés.)
    M. le président. Les crédits inscrits à la ligne : « Economies, finances et industrie » seront mis aux voix à la suite de l'examen des crédits des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat.

BUDGET ANNEXE DES MONNAIES ET MÉDAILLES

    M. le président. J'appelle les crédits du budget annexe des Monnaies et médailles.
    « Crédits ouverts à l'article 48 au titre des services votés : 88 142 283 euros. »
    Je mets aux voix les crédits ouverts à l'article 48.
    (Ces crédits sont adoptés.)
    M. le président. Crédits ouverts à l'article 49 au titre des mesures nouvelles :
    « Autorisations de programme inscrites au paragraphe I : 2 433 000 euros ;
    « Crédits inscrits au paragraphe II : moins 1 237 681 euros. »
    Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits ouverts à l'article 49.
    (Ces crédits sont adoptés.)

Article 50

    M. le président. « Art. 50. - Le montant des crédits ouverts aux ministres, pour 2004, au titre des services votés des opérations définitives des comptes d'affectation spéciale, est fixé à la somme de 3 204 290 000 EUR. »
    En accord avec la commission des finances, j'appelle maintenant l'amendement n° 206, présenté par le Gouvernement et qui est ainsi rédigé :
    « Réduire les crédits ouverts à l'article 50 de 16 700 000 EUR. »
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Il s'agit d'un amendement de coordination qui tire les conséquences du vote de la diminution du produit de la redevance audiovisuelle, lors de l'examen de la première partie.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial pour le Trésor et les entreprises publiques. Favorable.
    M. le président. Le vote sur cet amendement aura lieu lors de l'examen de l'article 50, le vendredi 14 novembre.
    J'appelle l'article 52 rattaché à ce budget.

Article 52

    M. le président. « Art. 52. - Le dernier alinéa de l'article 71 de la loi de finances pour 1993 (n° 92-1376 du 30 décembre 1992) est remplacé par les dispositions suivantes :
    "- en dépenses, les dépenses afférentes aux achats et aux ventes de titres, de parts ou de droits de sociétés, les dotations en capital, avances d'actionnaire et autres apports aux entreprises publiques et aux établissements publics, les dotations en capital initiales aux fondations reconnues d'utilité publique du secteur de la recherche, les investissements réalisés directement ou indirectement par l'Etat dans des fonds de capital-investissement, les reversements au Fonds de réserve pour les retraites mentionné à l'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale, les reversements au budget général et les versements à la Caisse de la dette publique. »
    Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 207, ainsi rédigé :
    « Dans le dernier alinéa de l'article 52, supprimer le mot : "initiales.
    La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. Il s'agit d'une mesure qui vise à autoriser l'Etat à verser des dotations en capital à des fondations de recherche qui sont reconnues d'utilité publique, à partir des recettes du compte d'affectation spéciale n° 902-24.
    En fait, l'amendement vise à ne pas exclure de cette mesure les fondations de recherche existantes. Dans un souci d'égalité de traitement entre les fondations, il est proposé de ne pas limiter l'application de ce dispositif aux structures nouvellement créées. Cet amendement vise de plus à accélérer le développement des fondations oeuvrant dans le secteur de la recherche. La mise en place effective de ces nouvelles fondations, dès 2004, aurait été difficile, en raison des procédures de reconnaissance d'utilité publique, qui se déroulent sur plusieurs mois.
    Nous répondons ainsi, me semble-t-il, au souci exprimé par l'amendement n° 108 de Michel Diefenbacher.
    Tel est le sens de l'amendement n° 207.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial. Je me félicite que le Gouvernement ait accepté de déposer cet amendement auquel la commission des finances est tout à fait favorable.
    M. le président. La parole est à M. Claude Gatignol.
    M. Claude Gatignol. Monsieur le président, mon intervention anticipe sur le débat de demain, puisque je suis rapporteur du budget de la recherche et que j'ai été de ceux qui ont tenu à ce que les fondations à vocation scientifique, au sens large, prennent vraiment rang dans le paysage du soutien à la recherche. Aussi, je me félicite que le Gouvernement ait eu un regard suffisamment affûté pour voir que le mot « initiales » dans le projet était excessif.
    Ainsi, les fondations existantes et celles qui prendront demain leur envol pourront bénéficier de dotations répétées de l'Etat. Nous savons le rôle important que jouent ces fondations, tout particulièrement dans le domaine de la recherche. Et, bien entendu, je soutiens cette proposition.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 207.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. M. Diefenbacher, rapporteur spécial, a présenté un amendement, n° 108, ainsi rédigé :
    « Compléter l'article 52 par le paragraphe suivant :
    « Le Gouvernement présentera simultanément au dépôt du projet de loi de règlement pour 2004 un rapport au Parlement étudiant la possibilité d'étendre aux fondations d'utilité publiques dans le secteur de la recherche existantes au 1er janvier 2004 le bénéfice des dotations en capital versés à partir du compte d'affectation spéciale n° 902-24 "compte d'affectation des produits de cessions de titres, parts et droit des sociétés. »
    La parole est à M. le rapporteur spécial pour le Trésor et les entreprises publiques.
    M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial. C'était un amendement d'appel. L'appel ayant été entendu, l'amendement n'a plus d'objet. Je le retire donc.
    M. le président. L'amendement n° 108 est retiré.
    Je mets aux voix l'article 52 modifié par l'amendement n° 207.
    (L'article 52, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 74

    M. le président. En accord avec la commission des finances, j'appelle maintenant un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 74.
    M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 183, ainsi libellé :
    « Après l'article 74, insérer la division et l'article suivants :
    « Charges communes
    « Art. ... Le huitième alinéa de l'article L. 421-1 du code des assurances est ainsi rédigé :
    « Le fonds de garantie est également chargé de gérer et de financer, à compter de l'exercice 2003, les majorations de rentes prévues à l'article 1er de la loi n°74-1118 du 27 décembre 1974 relative à la revalorisation de certaines rentes allouées en réparation du préjudice causé par un véhicule terrestre à moteur et à l'article 1er de la loi n° 51-695 du 24 mai 1951 portant majoration de certaines rentes viagères, au titre des états justificatifs certifiés. Les créances relatives aux majorations de rentes visées au présent alinéa se prescrivent dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Le fonds peut contrôler sur pièces et sur place l'exactitude des renseignements fournis par les organismes débirentiers. »
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. L'amendement n° 183 a été défendu.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial. Même avis, favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 183.
    (L'amendement est adopté.)

Après l'article 76

    M. le président. En accord avec la commission des finances, j'appelle maintenant un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 76.
    M. le président. Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 27, ainsi rédigé :
    « Après l'article 76, insérer l'article suivant :
    « I. - Les gains et rémunérations, au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et de l'article L. 741-10 du code rural, versés au cours d'un mois civil aux personnes mentionnées au II du présent article appartenant aux jeunes entreprises innovantes réalisant des projets de recherche et de développement sont exonérés des cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales, des allocations familiales, des accidents du travail et des maladies professionnelles.
    « II. - Les cotisations exonérées sont celles qui sont dues au titre, d'une part, des salariés énumérés au III et au titre desquels l'employeur est soumis à l'obligation édictée par l'article L.351-4 du code du travail et, d'autre part, des mandataires sociaux qui participent, à titre principal, au projet de recherche et de développement de l'entreprise.
    « III. - Les salariés mentionnés au II sont les chercheurs, les techniciens, les gestionnaires de projets de recherche et de développement, les juristes chargés de la protection industrielle et des accords de technologie liés au projet, et les personnels chargés des tests préconcurrentiels.
    « IV. - L'avis exprès ou tacite délivré par l'administration fiscale, saisie par une entreprise dans les conditions prévues au 4° de l'article L. 80 B du Livre des procédures fiscales dans sa rédaction issue de la loi de finances pour 2004 est opposable à l'organisme chargé du recouvrement des cotisations de sécurité sociale compétent.
    « V. - L'exonération prévue au I est applicable au plus jusqu'au dernier jour de la septième année suivant celle de la création de l'entreprise. Toutefois, si au cours d'une année l'entreprise ne satisfait plus à l'une des conditions requises au I pour bénéficier du statut de jeune entreprise innovante réalisant des projets de recherche et de développement, elle perd définitivement le bénéfice de l'exonération prévue au I.
    « VI. - Le bénéfice des dispositions du présent article ne peut être cumulé, pour l'emploi d'un même salarié, ni avec une aide d'Etat à l'emploi, ni avec une autre exonération totale ou partielle de cotisations patronales, ni avec l'application de taux spécifiques, d'assiettes ou de montants forfaitaires de cotisations.
    « VII. - Le droit à l'exonération est subordonné à la condition que l'entreprise ait rempli ses obligations de déclaration et de paiement à l'égard de l'organisme de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales.
    « VIII. - Un décret détermine les modalités d'application du présent article. »
    La parole est Mme la ministre déléguée à l'industrie.
    Mme la ministre déléguée à l'industrie. Cet amendement tend à compléter la mesure « jeunes entreprises innovantes » que l'Assemblée a adoptée dans la première partie du budget. Il s'agit d'aider les entreprises de moins de huit ans qui réalisent d'importantes dépenses de recherche et de développement à passer le cap des premières années d'activité. Cet amendement instaure des allégements de charges sociales patronales pendant huit ans sur les personnels qui participent aux projets de recherche et de développement de l'entreprise.
    Nous avons trouvé plus judicieux de réintégrer cette mesure dans le projet de loi de finances afin de permettre une vision globale du dispositif en faveur des jeunes entreprises innovantes et dans un souci de clarté et de simplicité.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Hervé Novelli, rapporteur spécial. La commission a émis un avis favorable.
    M. le président. La parole est à M. Claude Gatignol.
    M. Claude Gatignol. Madame la ministre, je ne suis bien entendu pas hostile à l'amendement. Je tiens seulement à souligner que les propositions que vous faites, en particulier dans le paragraphe I, sont très importantes pour les jeunes entreprises innovantes. Evidemment, on peut s'inquiéter de la rédaction du V selon lequel si, au cours d'une année, l'entreprise ne satisfait plus à l'une des conditions requises, elle perdra définitivement le bénéfice de l'exonération prévue au paragraphe I. C'est une mesure dure, mais c'est un clignotant. Il ne faut pas déroger à la règle et sortir des rails.
    Je souhaiterais simplement qu'au moment où ces entreprises prendront place dans notre paysage économique, elles puissent bénéficier d'un correspondant fiscal, pourquoi pas au niveau départemental vu la complexité des dispositifs. De jeunes entreprises qui se lancent dans des projets de recherche développement, qui ne se préoccupent pas spécialement de l'aspect administratif, peuvent en effet passer à côté du fameux parcours dans ce domaine.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Nous avons terminé l'examen des crédits concernant l'économie et les finances.
    La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

2

RETRAIT D'UN RAPPORT

    M. le président. J'ai été avisé, le 13 novembre 2003, du retrait du rapport, n° 1205, de Mme Christine Boutin, fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, sur le projet de loi, adopté par le Sénat, portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité (n° 884).

3

DÉPÔT DE RAPPORTS

    M. le président. J'ai reçu, le 13 novembre 2003, de M. Richard Cazenave, un rapport, n° 1212, fait au nom de la commission des affaires étrangères, sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de l'accord euro-méditerranéen instituant une association entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République libanaise, d'autre part (ensemble deux annexes, cinq protocoles, un acte final, treize déclarations communes et deux déclarations unilatérales) (n° 946).
    J'ai reçu, le 13 novembre 2003, de M. Henri Sicre, un rapport, n° 1213, fait au nom de la commission des affaires étrangères, sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de l'accord euro-méditerranéen établissant une association entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République algérienne démocratique et populaire, d'autre part (ensemble six annexes, sept protocoles, un acte final, cinq déclarations communes et neuf déclarations unilatérales) (n° 948).
    J'ai reçu, le 13 novembre 2003, de M. Jacques Remiller, un rapport, n° 1214, fait au nom de la commission des affaires étrangères, sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord signé le 3 avril 2001 à Paris portant création de l'Organisation internationale de la vigne et du vin (n° 1146).
    J'ai reçu, le 13 novembre 2003, de Mme Christine Boutin, un rapport, n° 1216, fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, sur le projet de loi, adopté par le Sénat, portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité (n° 884).

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DÉPÔT D'UN AVIS

    M. le président. J'ai reçu, le 13 novembre 2003, de Mme Marie-Anne Montchamp, un avis, n° 1211, fait au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, sur le projet de loi, adopté par le Sénat, portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité (n° 884).

5

DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

    M. le président. J'ai reçu, le 13 novembre 2003, de M. Marc Laffineur, un rapport d'information, n° 1210, déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne sur les négociations à l'Organisation mondiale du commerce.

6

DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI
ADOPTÉ PAR LE SÉNAT

    M. le président. J'ai reçu, le 13 novembre 2003, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la parité entre hommes et femmes sur les listes de candidats à l'élection des membres de l'Assemblée de Corse.
    Ce projet de loi, n° 1215, est renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

7

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président. Vendredi 14 novembre 2003, à neuf heures trente, première séance publique :
    Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004, n° 1093 :
    M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport n° 1110).
    Recherche et nouvelles technologies :
    M. Christian Cabal, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 32 du rapport n° 1110) ;
    M. Claude Gatignol, rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome XV de l'avis n° 1112) ;
    Mme Brigitte Le Brethon, rapporteure pour avis, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tome X de l'avis n° 1111).
    A quinze heures, deuxième séance publique :
    Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2004, n° 1093 :
    Explications de vote et vote sur les crédits des budgets ayant fait l'objet d'un examen en commission des finances élargie :
    Ville et rénovation urbaine :
    M. François Grosdidier, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 7 du rapport n° 1110),
    M. Philippe Pemezec, rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome I de l'avis n° 1112) ;
    Sports :
    M. Denis Merville, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 39 du rapport n° 1110),
    M. Edouard Courtial, rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tome XIII de l'avis n° 1111) ;
    Petites et moyennes entreprises, commerce et artisanat : articles 75 et 76 ; articles 50, 51 et 54 à 56 (comptes spéciaux du Trésor) :
    M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe n° 17 du rapport n° 1110),
    M. Serge Poignant, rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire (tome VII de l'avis n° 1112) ;
    Articles non rattachés : articles 60 à 71 ;
    Articles « services votés » et articles de récapitulation : articles 43, 44, 45, 48, 49, 57, 58 et 59 ;
    Eventuellement, seconde délibération.
    A vingt et une heures trente, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée à vingt et une heures vingt).

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
CONVOCATION
DE LA CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS

La Conférence, constituée conformément à l'article 48 du règlement, est convoquée pour le mardi 18 novembre 2003, à 10 heures, dans les salons de la présidence.