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Deuxième séance du mercredi 5 mai 2004

210e séance de la session ordinaire 2003-2004



PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

    1

SOLIDARITE POUR L'AUTONOMIE DES PERSONNES ÂGÉES ET DES PERSONNES HANDICAPÉES

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées (nos 1350, 1540).

Discussion générale (suite)

M. le président. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Nathalie Gautier.

Mme Nathalie Gautier. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué aux personnes âgées, madame la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, mes chers collègues, voilà plusieurs mois que les professionnels des secteurs sanitaire et médico-social appelaient l'attention sur l'impérieuse nécessité de répondre aux besoins des personnes âgées et des personnes handicapées en perte d'autonomie. Avec les familles et les bénévoles, les personnels sont mobilisés depuis longtemps et ont rappelé à plusieurs reprises au cours de l'année 2003 l'acuité du problème.

La crise provoquée par la canicule a montré combien l'absence de mesures de solidarité et la seule préoccupation de la maîtrise comptable d'une politique de santé publique peuvent atteindre une société tout entière.

Démonstration est faite que des politiques préventives sont indispensables pour rompre l'isolement social, et qu'il est impératif de dégager les moyens financiers et humains réclamés. Il s'agit d'un choix politique en faveur de personnes qui peuvent avoir besoin de soins et, surtout, d'un accompagnement dans la vie de tous les jours.

Or, par son article 7, le projet de loi tend à créer une caisse nationale de solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées. La création d'une nouvelle branche de la sécurité sociale, telle qu'elle est ainsi proposée, porte en germe une rupture du pacte de solidarité, constitutif de la sécurité sociale. De ce fait, vous engagez, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, une partition inacceptable de la prise en charge des soins. Chacun risque de devoir s'assurer lui-même, sans jamais être sûr, au regard de son état de santé et de son âge, de le pouvoir.

De plus, le projet ignore l'expérience et les compétences acquises par les organismes de sécurité sociale et il n'améliore en rien ni la cohérence des réglementations ni la lisibilité des dispositifs.

Nous craignons en outre que les transferts de compétences en faveur des conseils généraux en matière de financement des établissements et des services pour personnes handicapées ne renforcent les inégalités territoriales.

De même, à l'exception de ce qui a trait au financement, rien n'est dit de la gestion de la nouvelle caisse et de ses véritables missions.

Comment le Parlement peut-il valablement se prononcer en l'absence d'un projet complet, cohérent et établi en concertation avec les partenaires sociaux ? Quel est le lien entre ce projet de loi et les futures propositions de réforme de l'assurance maladie ? Comment sera-t-il tenu compte des propositions du rapport de MM. Briet et Jamet sur les missions de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, sur son mode de gouvernance, sur la gestion de ses crédits par les conseils généraux et sur les conditions du transfert en sa faveur de l'ONDAM médico-social, qui ne seront connues que fin mai ?

De plus, monsieur le ministre, votre plan ne s'articule ni avec la loi du 4 mars 2002 sur le droit des malades, qui proposait pourtant un cadre d'action, des outils et des solutions nouvelles, ni avec le projet de loi relatif à la politique de santé publique, ni avec celui relatif à la décentralisation, ni avec l'ordonnance relative à la simplification administrative dans le champ de l'hospitalisation.

En outre, vous ne tenez aucun compte des partenaires sociaux. Pourtant, l'ensemble des syndicats, le Conseil économique et social, les caisses de sécurité sociale, le comité national des retraités et des personnes âgées, ont tous rendu des avis négatifs. C'est même la première fois depuis une quinzaine d'années que les caisses de sécurité sociale adoptent une position commune contre un texte soumis pour avis.

On se souvient du discours tendant à culpabiliser les Français que vous avez tenu après la canicule. Mais dois-je vous rappeler que votre gouvernement n'a pas voulu donner suite au plan de Mme Guinchard-Kunstler qui visait à donner des moyens supplémentaires aux professionnels ?

Pourtant, la situation des maisons de retraite n'est pas enviable, qu'il s'agisse de leurs tarifs élevés - les familles assumant 60 % environ du coût du placement en institution, soit 1 220 euros par mois dans le secteur public et jusqu'à 4 000 euros dans le secteur privé commercial - ou qu'il s'agisse des contrôles insuffisants et du manque de personnel régulièrement soulignés par l'association des directeurs d'établissement d'hébergement pour personnes âgées.

Pour toutes ces raisons, il importait de dresser un bilan des dispositifs existants. A cet égard, la loi du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie prévoyait que le Gouvernement devait présenter au Parlement un rapport d'évaluation quantitative et qualitative de son application. Ce travail aurait utilement éclairé la réflexion sur les divers moyens d'assurer une meilleure adéquation de l'aide distribuée aux besoins des personnes affectées par une perte d'autonomie.

Pour notre part, nous sommes favorables à la création d'un fonds national de solidarité pour l'autonomie, chargé de contribuer au financement d'une prestation correspondant à un droit à compensation pour l'ensemble des personnes en perte d'autonomie, de participer à la définition d'orientations nationales, et de garantir le respect de l'égalité de traitement sur l'ensemble du territoire.

Monsieur le ministre, il y a urgence, car il faut prendre rapidement en charge les conséquences de l'allongement de la durée de vie autrement que par la réforme injuste et inacceptable des retraites que vous avez imposée, et assurer le respect de chaque personne quels que soient son âge et son état physique.

Nous ne pouvons, face à toutes ses lacunes, que nous opposer à votre projet de loi et appeler de nos vœux une politique qui ne se limiterait pas à considérer les personnes âgées et dépendantes comme un coût pour la collectivité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Vitel.

M. Philippe Vitel. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le vieillissement de la population représente une véritable révolution sociale pour notre pays.

L'état de dépendance, qu'il soit la conséquence du grand âge ou du handicap, conduit à une telle détérioration de la qualité de vie de nos concitoyens que la collectivité nationale se devait de prendre la pleine mesure de cette réalité.

L'attention que nous nous devons d'avoir envers les plus fragilisés d'entre nous est largement au cœur du projet de loi que vous nous présentez aujourd'hui, monsieur le ministre. Il témoigne d'une prise de conscience que la terrible canicule d'août 2003 n'a fait que précipiter.

La démonstration a été faite, à l'occasion de ce drame qui a cruellement endeuillé notre pays, que les conséquences tant du vieillissement de notre société que de l'isolement et de la fragilité, largement sous-estimés, des personnes âgées et handicapées n'avaient pas suffisamment été prises en compte. Et il en va tout autant du retard enregistré par notre pays dans la prise en charge de ces populations.

Nul parmi nous, quel que soit le banc sur lequel il siège, ne peut éluder sa responsabilité. C'est d'ailleurs, monsieur le ministre, ce que vous avez eu l'honnêteté et la lucidité de souligner devant la commission d'enquête sur les conséquences sanitaires et sociales de la canicule, en déclarant : « On veut bien vieillir dans ce pays, mais on ne veut pas en parler. »

De fait, depuis des décennies, les gouvernements de gauche comme de droite n'ont ni anticipé ni accompagné les conséquences du vieillissement par des politiques adaptées. C'est ainsi que cette même commission d'enquête, à laquelle j'ai eu l'honneur de participer, a insisté, dans ses conclusions, sur les insuffisances des dispositifs de veille et d'alerte, soulignant combien la gestion de la crise avait été empirique du fait d'un manque évident de concertation, de coordination, d'expertise transversale mais aussi, malheureusement, de prise de décision. Nous avons en effet observé que la mobilisation avait cheminé du bas vers le haut, ce qui était surprenant dans une période de crise où, théoriquement, il revient aux pouvoirs publics de prendre de manière coordonnée les décisions qui s'imposent.

Monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, le titre Ier du texte que vous nous proposez nous paraît répondre parfaitement à la problématique d'une gestion de crise.

L'institution dans chaque département d'un dispositif d'alerte et d'urgence arrêté conjointement par le préfet et le président du conseil général et mis en œuvre sous l'autorité du premier, nous semble en effet pertinent. En permettant de parer aux situations de risque exceptionnel, un tel plan apportera une réponse adaptée du fait des compétences régaliennes aujourd'hui renforcées de la collectivité départementale en matière de solidarité, et du rôle de coordination des services publics dévolu au préfet, représentant décentralisé de l'Etat. Les informations ainsi collectées enrichiront les plans nationaux de prévention. Le plan « canicule » dévoilé ce matin est d'ailleurs l'exemple type de cette coordination avec les quatre niveaux d'alerte progressifs qu'il propose.

Enfin, le paragraphe II de ce même titre Ier prévoit en amont la mise en place d'un dispositif de repérage et de suivi des populations à risque grâce à l'organisation par les communes du recensement des personnes âgées et handicapées, dont l'isolement ne fait qu'accentuer le degré de dépendance et de fragilité.

Ce texte soulève tout au plus deux interrogations.

La première a trait à une éventuelle responsabilité pénale des maires au titre de l'imprudence ou de la négligence. En effet, le projet de loi prévoit que le plan de veille et d'alerte permettra une intervention sur la base des informations recueillies par les communes auprès des personnes âgées et des personnes handicapées « dont la situation le justifie ». Or l'imprécision de cette dernière formule crée une ambiguïté importante.

Ma seconde interrogation est relative au caractère volontaire de la démarche de signalement. Celle-ci ne pourrait-elle être utilement étendue à des tiers ?

Ces demandes de précisions mises à part, nous sommes, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, heureux de soutenir sans réserve ce projet de loi qui va dans le sens d'une meilleure justice sociale, ...

Mme Muguette Jacquaint. Ben voyons !

M. Philippe Vitel. Eh oui !

... d'une solidarité mieux affirmée et d'une fraternité plus marquée envers les personnes les plus fragilisées de notre société.

Le Gouvernement prend ses responsabilités. C'est notre fierté de nous engager à ses côtés pour la réussite de cette noble entreprise. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Valérie Pecresse.


Mme Valérie Pecresse
.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, personne n'est protégé contre les aléas de la vie. La dépendance, le handicap peuvent surgir à n'importe quel moment de l'existence et nous toucher personnellement ou atteindre l'un de nos proches. Malheureusement, cela n'arrive pas qu'aux autres.

Pour les personnes handicapées ou les personnes âgées dépendantes, rien n'est plus précieux que l'autonomie - sauf évidemment l'affection qu'elles reçoivent de leur entourage, familial, amical ou de voisinage. Mais nombreux sont ceux qui n'ont pas les moyens financiers nécessaires pour vivre une vie normale malgré la maladie, la vieillesse ou le handicap.

Garantir l'autonomie de chaque Français, voici la nouvelle frontière sociale que nous devons franchir aujourd'hui. Mais sommes-nous prêts à nous engager à financer collectivement ce besoin qui, avec le vieillissement de la population, va inéluctablement s'accroître ?

Si on compte, aujourd'hui, 800 000 personnes âgées dépendantes, leur nombre devrait augmenter de 30 à 50 % au cours de vingt prochaines années, avec notamment des centaines de milliers de Français touchés par la maladie d'Alzheimer.

Cette évolution commande d'agir. Mais soyons clairs : il n'y a pas de véritable avancée sociale sans argent pour la payer. Avoir une idée généreuse ne suffit pas ! Max Weber l'a dit : le vrai courage, celui du politique, c'est de faire passer l'éthique de la responsabilité avant l'éthique de conviction. C'est peut-être là toute la différence entre la gauche et la droite.

En effet, le précédent gouvernement, celui de M. Jospin, a fait ce que nous nous refusons catégoriquement de faire : présenter un projet de réforme sociale sans financement. C'est si facile ! Le progrès social acheté à crédit ! Demain on soigne gratis ! C'est ce qu'il avait fait pour l'allocation personnalisée d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes. En 2003, il manquait 1,2 milliard d'euros pour la financer. C'est nous qui avons dû les trouver. Bravo, monsieur le ministre. C'est finalement ça l'honneur de la droite, régler rubis sur l'ongle les factures sociales de la gauche. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Nous, notre action permettra de créer la VAPA, la « vraie » APA, l'APAAA, l'APA avec l'argent ! (Sourires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mais, pour cela, nous ne pouvons pas augmenter les impôts. Dans le contexte de croissance très molle qui est le nôtre, avec les déficits abyssaux du budget et de l'assurance maladie que nous ont légués nos prédécesseurs, cela n'est tout bonnement pas envisageable. Ce serait attacher un boulet supplémentaire aux pieds de notre économie et sacrifier l'emploi.

Il est donc nécessaire de créer une nouvelle source de richesse pour financer ce nouveau progrès social.

Mme Muguette Jacquaint. Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre !

Mme Valérie Pecresse. Or, permettez-moi de rappeler quelques vérités de bon sens. Il n'y a pas de richesse collective supplémentaire sans travail. Le choix du Gouvernement est donc courageux et responsable : il demande aux Français d'offrir une journée de congé au bénéfice des victimes des aléas de la vie. Il leur demande de travailler une journée de plus pour manifester leur solidarité vis-à-vis des plus fragiles d'entre nous.

Cette réforme, qui garantira l'autonomie de chaque Français à tous les âges de la vie, est donc une vraie avancée sociale : elle est financée !

Mais, parce qu'il constitue une évolution fondamentale de la solidarité nationale, j'aurais aimé que ce projet soit présenté aux Français par le Président de la République au travers d'un référendum. J'ai confiance en la générosité de nos compatriotes et en leur capacité à accepter de payer le prix de la solidarité. Je ne doute pas de leur adhésion à ce projet d'une société plus sensible et plus humaine.

Le choix du Gouvernement n'a pas été celui-là. Il a privilégié la rapidité et l'efficacité de la procédure législative. Il est vrai qu'organiser un référendum coûte plusieurs centaines de millions d'euros et qu'il n'aurait pas été responsable de gaspiller de l'argent au moment où l'on en manque tant pour financer la santé, la dépendance, le handicap et toutes nos politiques sociales.

Alors, je crois que nous devons, en votant ce projet, remercier d'avance tous les Français qui contribueront à sa réussite par leur travail, ou par leur participation financière. Qu'ils n'oublient pas qu'un jour, eux aussi, bénéficieront peut-être de cette nouvelle protection. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Hélène Mignon, qui dispose d'un temps supplémentaire de cinq minutes, puisque M. Le Guen, qui n'est pas là, s'est désisté en sa faveur.

Mme Hélène Mignon. Merci, monsieur le président. Si je l'avais su plus tôt, j'aurais noté les propos de Mme Pecresse pour lui répondre point par point. Mais nous aurons l'occasion de nous retrouver.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Inscrivez-vous sur les articles.

Mme Hélène Mignon. Monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, je ne reviendrai pas sur les appréciations critiques portées par mes collègues socialistes sur l'instauration d'une journée supplémentaire de travail non rémunérée, qui n'intéresse d'ailleurs pas toutes les personnes actives de notre pays, ni même sur l'intervention de notre collègue Morin qui a dressé un bilan pour le moins critique de la mesure que vous nous présentez. Vous me permettrez simplement de rapprocher cette décision de l'annonce du ministre de l'économie d'ouvrir les commerces le dimanche pour relancer l'économie.

Ce projet de loi, comme d'autres textes, remet en cause, sournoisement, le principe de la réduction du temps de travail. D'ailleurs, ceux qui n'en seraient pas convaincus n'ont qu'à se référer aux propos tenus par M. Seillière le 14 novembre à Prague. Le patron du MEDEF se réjouissait en déclarant que le processus était engagé puisqu'on parlait de supprimer le lundi de Pentecôte et il disait ne pas demander l'abrogation de la loi sur les trente-cinq heures afin de ne pas réveiller de bataille, préférant une « transition en douceur ». Ce sont ses propres termes.

Le projet de loi prévoit également la création d'une caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, qui sera alimentée par les sommes ainsi récupérées. Cette caisse aura pour ambition de financer le plan dépendance et la perte d'autonomie. C'est l'épreuve de la canicule de l'été dernier qui a motivé le lancement dans la précipitation de cette caisse et, médiatisation oblige, nous parlons davantage, aujourd'hui, des personnes âgées que des personnes handicapées, même si, hier, vous leur avez consacré une longue intervention, madame la secrétaire d'Etat. Pourtant les personnes handicapées devraient bénéficier de la moitié de ce nouveau financement. C'est même à leur intention, si je me souviens bien, que Mme Boisseau avait évoqué la première l'idée du jour férié travaillé.

Si la mise en parallèle de la problématique des personnes âgées avec celle des personnes handicapées peut avoir du sens, elle présente toutefois des limites. Il est difficilement concevable de résumer les situations de handicap à un problème de dépendance ou de perte d'autonomie.

Le mode de financement de la future caisse nationale de solidarité pour l'autonomie est très critiqué, vous le savez, par les acteurs sociaux. De très nombreuses associations représentant les personnes en situation de handicap sont consternées de voir qu'en 2004, le Gouvernement ne trouve pas d'autre solution que de se tourner encore vers la charité forcée, stigmatisante et non universelle, selon leur propre expression, pour répondre à leurs besoins.

Non, il ne s'agit pas de solidarité nationale mais bien d'une bonne œuvre obligatoire, sélective, et, finalement, à y regarder de près, le projet porte en lui une rupture du pacte de solidarité constitutif de la sécurité sociale.

M. Hubert Falco, ministre délégué aux personnes âgées. Oh !

Mme Hélène Mignon. Comment voulez-vous, madame la secrétaire d'Etat, contribuer à changer le regard de la société sur les personnes handicapées, citoyens à part entière, avec leurs spécificités, si, par vos décisions, vous offrez une vision charitable du handicap, alors que, très sincèrement, je ne pense pas que vous portiez ce regard sur le handicap ?

Nous le verrons lors du débat sur le projet de loi sur l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées, la définition gouvernementale actuelle du handicap est figée, voire conservatrice puisqu'elle impose une vision personnaliste du handicap. Si l'on en reste à la désignation des « personnes handicapées », on prend le risque de continuer à les enfermer dans une catégorie à part qu'il conviendrait de traiter avec charité comme on le fait depuis des siècles.

Si l'on admet enfin que le handicap est l'interaction entre la déficience de la personne et les facteurs contextuels - c'est-à-dire personnels et environnementaux - on pourra parler de « situation de handicap » ou encore de « personnes en situation de handicap ».

Mme Nathalie Gautier. Voilà !

Mme Hélène Mignon. Quel est l'intérêt d'une telle définition ? De rappeler que la priorité de l'action publique doit être de supprimer, ou à défaut, de réduire ces situations de handicap.

Cette mise en accessibilité de la société passe par une programmation régulière, datée et chiffrée. Ces chantiers prioritaires doivent s'accompagner de la compensation de ces situations de handicap.

Si cette compensation est l'objectif de la CNSA, avec le projet de nouvelle prestation de compensation, je voudrais rappeler avec force qu'elle ne doit pas exempter la société et les pouvoirs publics de leurs responsabilités en ce qui concerne cette mise en accessibilité de la société, qui ne passe pas forcément par une démarche individuelle.

En tout état de cause, la vraie solidarité, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, passe par la redistribution à partir de l'impôt sur le revenu. Force est de constater que ce n'est pas le choix qui est fait depuis 2002.

D'ailleurs, je vous pose la question, madame la secrétaire d'Etat, sur quelles bases s'est-on fondé pour estimer que 850 millions d'euros allaient suffire ?

Je m'étonne également du calendrier quelque peu hasardeux qui nous est proposé. Vous nous demandez de nous prononcer sur le mode de financement de cette nouvelle caisse sans que le contenu du droit à compensation soit entièrement défini et adopté par la représentation nationale. Vous nous demandez de faire abstraction du débat sur l'assurance maladie à venir. Vous nous demandez de ne pas tenir compte du rapport non encore publié de M. Briet et M. Jamet missionnés par le Premier ministre pour proposer - je dis bien seulement proposer - le champ d'intervention de cette nouvelle caisse. Vous nous demandez d'anticiper sur la réforme de la décentralisation et sur la nouvelle répartition des compétences qui ne sont pas encore définies. Nous insistons pour que partout sur le territoire national, l'égalité des droits soit respectée. Nous ne pourrons accepter qu'il y ait autant de politiques du handicap qu'il y a de conseils généraux amenés à gérer à leur guise des enveloppes qui leur seraient attribuées.

Qui a décrété que 850 millions d'euros sur plusieurs années allaient suffire pour financer la prestation de compensation ? Celle-ci n'est même pas encore définie et nous ne savons pas ce que cette prestation sera censée couvrir. Si des budgets déjà pris en charge, par exemple par l'assurance maladie comme le financement des structures médico-sociales, sont amenés à intégrer cette nouvelle prestation, dans quelle mesure seront opérés les transferts ? Les gestionnaires des caisses d'assurance maladie n'ont cessé de dénoncer ces projets de transferts de dépenses maladie vers le département.

L'action de ce gouvernement souffre cruellement d'un manque de vision globale sur l'ensemble de ces questions. Sans anticiper sur ces débats, je remarque que non seulement le mode de financement que vous nous proposez, madame la secrétaire d'Etat, n'est pas approprié, mais que les budgets espérés seront largement insuffisants pour envisager une politique ambitieuse de suppression ou de réduction des situations de handicap. Il me semblait pourtant que cette ambition constituait un des trois chantiers prioritaires du Président de la République.

Les personnes en situation de handicap et leur famille s'interrogent. Il vous faudra les rassurer, certes, mais surtout, madame la secrétaire d'Etat, il faudra répondre à leur attente de façon concrète. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool.

M. Jean-Pierre Decool. Le projet de loi que nous sommes amenés à discuter ce soir a suscité, depuis l'automne dernier, de nombreuses réactions. D'annonces en démentis, le texte qui nous est finalement soumis a subi des modifications.

Avant de revenir sur la question de la suppression d'un jour férié, je souhaite rappeler l'objectif principal du projet de loi : instituer un plan de solidarité en faveur des personnes les plus faibles, les personnes handicapées et les personnes âgées. Le dispositif tire les conséquences de la canicule et des effets du vieillissement de la population. Les évolutions démographiques dans les années à venir obligent l'Etat et les pouvoirs publics à prendre les mesures nécessaires afin d'améliorer l'accueil, les soins et la médicalisation des personnes dépendantes. C'est dans ce sens qu'a été créée, en 2001, l'allocation personnalisée d'autonomie. Aucun financement n'avait alors été prévu. Devant l'augmentation du nombre de demandes de dossiers, il est urgent, aujourd'hui, de trouver les fonds utiles à sa pérennité. Il faut, dès maintenant, au risque de se retrouver dans une situation dramatique dans les années à venir, prévoir des conditions d'accueil en établissements spécialisés, de prise en charge, d'aide à domicile des personnes âgées.

Ce plan dépendance et solidarité s'adresse également aux personnes handicapées. Leur intégration dans notre société est une priorité de ce gouvernement. Faciliter l'accueil en établissements spécialisés et l'avenir des personnes handicapées font partie intégrante des objectifs de ce plan. Je tiens à rappeler que, dans la région Nord-Pas-de-Calais, la pénurie des places en établissements spécialisés est telle que des familles sont dans l'obligation de placer leurs enfants en Belgique, avec les nombreux désagréments qui en découlent pour les transports, l'aménagement des horaires, la prise en charge. Selon le rapport de la Cour des comptes de juin 2003, le déficit en places est significativement plus important, de 24 %, dans la région Nord que le déficit moyen constaté en France.

Face à ces objectifs, le dispositif met en place une source de financement pérenne et stable, ce qui constitue une avancée significative. Le projet de loi crée en effet une journée de solidarité de travail supplémentaire. Créer des richesses supplémentaires, assurer à toute personne des conditions d'existence minimales et encourager le travail doivent être les trois objectifs des réformes à venir.

Cependant, comment arriver à concilier journée de travail supplémentaire et aménagement des conditions de travail acquises ces dernières années ? La chose n'est pas aisée, d'autant que notre droit du travail est d'une complexité extrême. Chaque branche ou entreprise a ses propres particularités.


La journée de solidarité doit être choisie d'un commun accord au sein de chaque structure par les différents partenaires. J'approuve donc les assouplissements prévus par le Gouvernement afin d'encourager la négociation au sein de chaque secteur d'activité, dans le privé comme dans le public.

Je suis, cependant, opposé à toute suppression d'un jour férié quel qu'il soit. Les jours fériés, peut-être nombreux en France par rapport aux autres pays européens, font partie des traditions de notre société. Faut-il aussi rappeler qu'ils génèrent une activité économique non négligeable ?

Ainsi, le lundi de Pentecôte est généralement réservé aux fêtes locales. De nombreux maires m'ont fait part de leur vive émotion le jour de l'annonce de la suppression de ce jour férié. Ces fêtes sont préparées par l'ensemble des populations, quelle que soit leur catégorie, et participent au maintien d'une solidarité intergénérationnelle et sociale. Elles suscitent des investissements importants et permettent de promouvoir une économie locale, artisanale, et un patrimoine historique et traditionnel. Elles sont aussi l'occasion d'organiser de nombreuses manifestations : tournois divers, championnats et autres épreuves sportives.

Maintien des traditions, générosité entre les générations, développement des activités sportives, réunions familiales, maintien des activités touristiques sont autant d'éléments qui me font penser que le lundi de Pentecôte doit rester un jour férié. Il pourra être choisi comme journée de travail de solidarité au sein de l'entreprise, mais avec l'accord de tous.

En outre, j'estime qu'avec l'aménagement des horaires de travail que l'on a connu ces dernières années d'autres pistes de financement sont possibles. Ainsi, dans le cadre de l'annualisation du temps de travail, il suffit d'augmenter de sept heures le quota annuel d'heures travaillées. Lorsqu'un salarié dispose de journées de RTT, obtenues à l'occasion des négociations sur les 35 heures, il doit pouvoir choisir quelle journée sera consacrée à la solidarité. De même, dans le secteur public, des accords doivent pouvoir être signés au sein de chaque fonction publique.

Un plan d'actions en faveur des personnes dépendantes, une source de financement stable et pérenne fondée sur le travail, une journée de solidarité choisie d'un commun accord au sein de chaque structure sans imposer un jour férié, tels sont les objectifs d'un texte ambitieux et durable. C'est pourquoi je soutiendrai les amendements allant dans le sens d'une liberté de choix pour chaque entreprise et supprimant les références au lundi de Pentecôte. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le drame engendré par la canicule de cet été a montré combien il était difficile pour le Gouvernement d'appréhender la situation des personnes âgées dépendantes. Après la gestion catastrophique des dramatiques conséquences de la canicule - cette remarque s'adresse au gouvernement précédent dans son ensemble, et non à vous personnellement, monsieur le ministre -, la question a connu une tentative d'escamotage dans la culpabilisation des familles d'abord, des médecins généralistes ensuite, pour en finir avec l'explication de la fatalité induite par une catastrophe naturelle.

Lorsque tous ces rideaux de fumée se sont dissipés est venu le temps de la cacophonie gouvernementale - souvenons-nous de l'augmentation du prix du timbre poste qui avait été proposée par la ministre de l'industrie de l'époque -, puis l'on s'est arrêté à la suppression d'un jour férié dans le cadre d'un plan qui se voulait ambitieux, mais qui est aussi vite retombé qu'un soufflé. Contestée au sein même de l'UMP, la suppression du jour férié du lundi de Pentecôte a été elle-même largement remise en question en commission.

La question du financement de la dépendance est pourtant un vrai sujet de société. Il est d'autant plus dommage que le Gouvernement se soit entêté à le traiter de manière contestable, incomplète et sans aucune concertation ! Avec les avis négatifs de l'ensemble des syndicats, du Conseil économique et social, des caisses de sécurité sociale, du Conseil national des retraités et personnes âgées, ce projet de loi a fait l'unanimité, mais contre lui ! Seul le MEDEF ne s'y est pas opposé. C'est la première fois depuis longtemps qu'un texte est soumis au Parlement alors que toutes les caisses d'assurance maladie et vieillesse y sont opposées. Cela est d'autant plus condamnable que cette discussion commence dans notre hémicycle alors que le Gouvernement vient d'inscrire dans la loi une obligation de dialogue social pour tout ce qui concerne les partenaires sociaux ! Où est donc la cohérence ?

Ce débat est donc contradictoire avec les proclamations de concertation et de dialogue social. Il est aussi contradictoire avec la méthode affichée pour la réforme de l'assurance maladie, qu'il télescope en la dénaturant sur les principes fondateurs eux-mêmes. Voici ce qu'a dit à cet égard M. Bertrand Fragonard, président du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, que nous avons récemment auditionné dans le cadre de la mission d'information présidée par le président de l'Assemblée nationale :

« Après l'universalité, le second principe fondateur qui régit l'assurance maladie est l'appartenance de la totalité des assurés à un système unitaire. Le Haut conseil s'est en particulier inquiété de la perspective de voir autonomisés les soins aux personnes âgées dans une sorte de sécurité sociale autonome. A nos yeux, la solidarité nationale s'exprime dans le fait que toute la communauté nationale est dans un régime unitaire. »

Or les travaux du Haut conseil ont fait l'objet d'un diagnostic partagé et d'un consensus rare sur les perspectives de la réforme de l'assurance maladie. Le Gouvernement ne cesse de s'appuyer sur le rapport du Haut conseil présenté par M. Fragonard. Le précédent ministre de la santé, comme l'actuel qui vient de voir le secrétariat d'Etat aux personnes âgées relié à son ministère, ce qui est une bonne chose d'ailleurs, n'ont cessé de faire référence aux conclusions consensuelles du Haut conseil, mais la première décision du nouveau ministre consiste à les violer !

Rédigé sans concertation et contre les partenaires sociaux, votre texte est inacceptable dans son architecture. Il est profondément injuste, puisqu'il est financé, pour l'essentiel, par les seuls salariés. Pourtant, la solidarité est l'affaire de tous, donc de tous les revenus ! Dans notre société, qui voit cohabiter quatre générations grâce à l'augmentation de l'espérance de vie, il est inacceptable de demander à la seule génération des actifs de financer la dépendance de ses grands-parents, alors qu'elle finance déjà l'éducation de ses enfants et la retraite de ses parents.

Dans cette affaire, le Gouvernement s'est arrogé le droit absolutiste de décider des conditions de travail relevant jusqu'à présent exclusivement des partenaires sociaux. Seul le MEDEF n'a pas protesté, alors que l'Union professionnelle artisanale a exprimé sa désapprobation ! Le MEDEF campe sur une position d'aveuglement, tout obstiné qu'il est à combattre à tout prix l'aménagement et la réduction du temps de travail. Cette posture idéologique l'amène à sacrifier la liberté contractuelle !

La suppression d'un jour férié va être le réel prétexte pour obliger les représentants des salariés dans les entreprises à réexaminer les termes des accords et conventions passées sur la mise en place des 35 heures avec les employeurs. Là est la revanche pour le MEDEF et pour une partie de la droite après la tentative avortée de suppression des 35 heures, mais les conséquences en sont difficilement calculables aujourd'hui ! Les interventions, cet après-midi, de M. Le Garrec, notre président de séance, et même de M. Morin, qui appartient pourtant à votre majorité (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), l'ont bien montré.

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Notre majorité ?

M. Gérard Bapt. Ce n'est pas la mienne en tout cas ! Nous, nous sommes dans l'opposition. Douteriez-vous de l'appartenance de M. Morin à la majorité, monsieur le ministre ? Tant qu'il ne vote pas de motion de censure, je considère, pour ma part, qu'il appartient à la majorité de cette assemblée !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Cela va venir !

M. Gérard Bapt. Il faut dire que les entreprises vont y gagner puisque le prélèvement qu'elles subiront est bien inférieur au gain d'une journée de travail supplémentaire non rémunérée ! Le gain moyen pour elles pourrait atteindre 0,15 point de masse salariale par an, différence entre le produit d'une journée de travail supplémentaire - de l'ordre de 0,45 point - et le prélèvement dit de solidarité de 0,3 point ! Encore que, comme l'a excellemment dit cet après-midi le député appartenant à votre majorité, M. Morin, certaines entreprises travaillent pendant le jour férié de la Pentecôte !

Le groupe socialiste lance un cri d'alarme. Il s'inquiète beaucoup des conséquences de la déréglementation, des désordres sociaux et psychologiques qui résulteront de ce texte, de même que de l'incidence que celui-ci pourrait avoir, par la suite, sur la conduite de la politique gouvernementale elle-même. Nous aurions souhaité que, dans un élan de raison, le Premier ministre accepte que ce projet de loi soit reporté et éventuellement rediscuté dans le cadre d'une réforme d'ensemble de notre système de sécurité sociale et d'offre de soins, du financement de ce système, y compris de la dépendance...

M. Bernard Accoyer. Qui n'est pas une priorité pour vous, nous l'avons compris !

M. Gérard Bapt. ...et des conséquences du vieillissement.

Voilà pourquoi, monsieur le ministre, malgré notre volonté de participer de manière constructive à ce grand débat sur l'avenir de notre système de protection sociale, nous ne pourrons que voter contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. L'objectivité oblige à reconnaître le caractère fondamental de la réforme qui nous est proposée, malgré ce que l'on a entendu sur certains bancs. Pour la première fois, en effet, on traite de la perte d'autonomie dans sa globalité et dans sa diversité, tant pour les personnes âgées dépendantes que pour les personnes handicapées dont l'intégration dans notre société est le troisième grand chantier du quinquennat.

Le Gouvernement crée les moyens financiers pérennes et sanctuarisés de cette prise en charge : 9 milliards d'euros pour les quatre ans qui viennent et les moyens de continuer au-delà, gagés par un jour de travail supplémentaire. C'est sans précédent.

La dépendance est un nouveau défi pour notre société. Nous le constatons tous et nous l'avons vécu douloureusement l'été dernier. Douze millions de plus de soixante ans, quatre millions de plus de soixante-quinze ans et 800 000 personnes âges dépendantes : le problème est désormais structurel, même si c'est la contrepartie du progrès considérable, dont nous nous réjouissons tous, que constitue l'allongement de la durée de vie.

L'autre défi est celui de l'intégration des personnes handicapées et polyhandicapées. Nous y reviendrons à l'occasion de l'examen du projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, qui sera la nouvelle grande étape après les lois de 1975 et de 1987 qui honorent notre pays.

Le présent texte prévoit deux conditions essentielles pour la réforme : la volonté d'un traitement global de la perte d'autonomie et un financement solide pour l'ensemble du plan dépendance avec la création de la journée de solidarité et de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

Je me permettrai de revenir sur certains problèmes que j'avais évoqués dans une question orale au mois de janvier dernier, et notamment sur la difficulté que rencontrent de nombreuses maisons de retraite en France - c'est le cas de quatre d'entre elles dans mon département du Loir-et-Cher - pour pourvoir leur poste de directeur. Nous connaissons en la matière un véritable déficit qui perturbe profondément le fonctionnement de certains établissements.

Dans ma commune de Lamotte-Beuvron, cela fait trois ans que la maison de retraite n'a pas de directeur et le plan d'humanisation n'est toujours pas lancé. Ce n'est malheureusement pas un cas unique. Vous m'avez répondu, monsieur le ministre, que certaines mesures étaient prises et je vous en remercie, mais je souhaite que votre ministère nous donne rapidement le feu vert pour expérimenter des recrutements contractuels qui sont indispensables si l'on veut pouvoir mettre fin rapidement à cette situation très pénalisante pour le fonctionnement quotidien de ces établissements.


J'avais aussi, au mois de janvier, souligné les problèmes afférents aux services de soins infirmiers à domicile touchés par les difficultés financières, notamment liées à l'application des 35 heures.

Mme Hélène Mignon. Ah !

M. Patrice Martin-Lalande. Dans le Loir-et-Cher, 84 places autorisées restent encore à financer sur 618 créées. De nombreuses personnes attendent donc d'être prises en charge. Je souhaite que les moyens mobilisés grâce au projet de loi que nous examinons ce soir permettent de rendre cet engagement irréversible et de le concrétiser rapidement.

J'ai réuni ces jours derniers, dans ma circonscription, les responsables du handicap et de la dépendance dans le cadre de la concertation préalable à l'examen de ce projet de loi. Je me ferai donc l'écho de deux questions qui m'ont été alors posées.

Ne serait-il pas opportun de créer - cela existe déjà dans les établissements pour personnes âgées - des salles « rafraîchies » dans les foyers occupationnels et dans les foyers d'accueil d'adultes et d'enfants handicapés tout particulièrement touchés par ce problème ? L'institution de la journée de solidarité dans les établissements du secteur médico-social avec le reversement, au titre de l'employeur, augmentera la masse salariale. Comment sera-t-elle prise en compte ? Cela ne risque-t-il pas d'avoir des conséquences financières sur les départements et autres financeurs ?

Je suis persuadé que ces questions trouveront réponses et que la volonté politique du Gouvernement et les moyens qu'il se donne pour atteindre ces objectifs nous permettront de franchir un grand pas, ce dont je me réjouis. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre délégué aux personnes âgées.

M. Hubert Falco, ministre délégué aux personnes âgées. Je vais m'efforcer d'apporter des réponses aux différentes interventions. Le débat s'est révélé riche, intéressant et jalonné d'échanges d'idées, même si elles manquaient parfois d'objectivité.

Mme Hélène Mignon et M. Gérard Bapt. Il est vrai que Mme Pecresse n'a pas été objective !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Chacun a donc pu librement s'exprimer.

Oui, monsieur Leteurtre, le temps presse. Sur les 650 000 places d'hébergement, un tiers seulement est à ce jour médicalisé. Les mesures proposées permettront d'en médicaliser près de 160 000 dès l'année 2004. Nous comptons actuellement en moyenne une place de CIAD pour sept personnes âgées de plus de soixante-quinze ans. Reconnaissons que c'est largement insuffisant. Ces mesures permettront d'en créer 17 000. Oui, l'effort de solidarité demandé aux Français sera équitablement réparti entre salaires et produits du capital. Les professions indépendantes y participeront également par le biais des salaires qu'elles versent à leurs collaborateurs. Le Gouvernement n'a pas dit qu'il s'agissait d'une branche d'assurance sociale, mais d'une branche de protection sociale destinée à prendre en charge les aides et les soins liés à la dépendance. Bien entendu, ceux liés à la maladie continueront à relever de l'assurance maladie.

Je dirai à M. Gremetz que, s'il est un reproche qui peut être indifféremment adressé à la droite comme à la gauche, c'est de n'avoir pas pendant des décennies anticipé cette véritable révolution sociale qu'est le vieillissement et de n'avoir pas adapté nos politiques à l'évolution démographique de notre pays. Aujourd'hui, nous sommes soucieux de proposer des mesures réalistes et financées qui accompagneront et anticiperont ce vieillissement.

Concernant la baisse d'impôts, dix-sept millions de foyers fiscaux imposables paieront en 2004 un impôt sur le revenu inférieur de 10 % à ce qu'il était en mai 2002 ; huit millions et demi de salariés les plus modestes bénéficieront de l'augmentation de la prime pour l'emploi...

Mme Hélène Mignon. Soixante-cinq euros !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. ...conjuguée à la hausse du pouvoir d'achat due à l'augmentation du SMIC.

Monsieur Bernard Perrut, je vous remercie de votre soutien responsable. Effectivement, la France doit accompagner ce défi de la longévité par le biais, vous l'avez souligné, d'une politique réaliste et fraternelle. Nous envisageons la dépendance dans sa globalité. Nos politiques publiques n'ont pas encore pris pleinement la mesure de ce phénomène. Ce texte nous y aidera. Nous devons effectivement tirer les leçons de l'imprévision du drame de l'été 2003. Dans ce but, le Gouvernement a élaboré, dès le mois de septembre dernier, un projet de réforme de solidarité au profit des personnes dépendantes.

M. Gérard Bapt. Ah bon ?

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Monsieur le ministre, Jean le Garrec, vous avez regretté le manque de cohérence de ce texte. Nous ne sommes pas de cet avis. Il traite globalement de la dépendance. Non, nous ne souhaitons pas toucher au pouvoir d'achat des salariés. Vous avez fait état des sondages. Vous êtes, comme moi, un élu local de longue date, et vous savez, tout comme moi, qu'il faut s'en méfier ! J'ai toujours reconnu publiquement le rôle fondamental joué par les familles dans la prise en charge des personnes âgées. Vous le savez mieux que quiconque, nul n'a le monopole du cœur et de la reconnaissance. Vous n'êtes pas les seuls à reconnaître les mérites d'autrui et à apprécier les efforts de chacun.

M. Morin a reçu le soutien marqué de la gauche, ce dont je m'étonne.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales et M. Gérard Bapt. L'écoute !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. L'institution d'une journée de solidarité permet d'éviter l'augmentation des prélèvements obligatoires qui pèsent sur nos concitoyens et qui les privent d'une part croissante des fruits de leur travail. Je ferai remarquer à M. Morin que la corvée s'effectuait au profit des seigneurs, et je ne considère pas, quant à moi, les personnes âgées et les personnes handicapées comme des seigneurs. Pour le reste, je garderai pour moi mon impression personnelle qui n'a pas sa place dans l'hémicycle. (Sourires.)

Monsieur Colombier, j'apprécie votre pragmatisme, votre lucidité, votre sens des réalités. Je reconnais en vous l'acteur de terrain attaché à la solidarité et à la générosité. Vous avez, avec raison, mis l'accent sur la maladie d'Alzheimer. Ce terrible fléau, cancer des années à venir, atteint 135 000 personnes. Nous créerons, à travers ce plan, 8 000 places d'accueil de jour et 4 000 places d'accueil temporaire permettant d'accompagner les familles. Nous devons, bien entendu, penser principalement aux malades.

M. Patrice Martin-Lalande. A leurs familles aussi !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Toutefois, lorsqu'une personne est touchée par cette maladie, il convient également de soulager la famille.

M. Gérard Bapt et M. Patrice Martin-Lalande. C'est vrai !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. C'est la raison pour laquelle des centres d'accueil de jour itinérants et des gardes itinérantes de nuit viendront compléter ce dispositif.

Je pensais sincèrement que nous aurions du mal à nous comprendre avec M. Terrasse. C'est bien normal, puisque nous discutons des orientations voulues par le Premier ministre. Ce qui nous différencie, peut-être, et cela a été souligné par plusieurs orateurs, c'est que nous finançons les mesures que nous annonçons. Telle est notre particularité ! L'affectation des ressources collectées sera garantie grâce à la transparence totale du dispositif. Les Français doivent effectivement être assurés du bien-fondé de leur effort. Le produit de cette journée de solidarité sera ainsi affecté à un organisme bien identifié qui prendra la forme d'un établissement public national à caractère administratif, dont les organes de surveillance associeront élus, partenaires sociaux et représentants des milieux associatifs.

Je précise également, puisque M. Terrasse m'a interrogé sur ce point, que les crédits d'investissement destinés à la rénovation des maisons de retraite ont tous été à ce jour délégués dans les départements. On ne peut donc pas parler de gel en 2004.

Mme Aurillac a fort justement souligné que nous assurions le financement des mesures de prise en charge de la dépendance annoncées aux Français. Je la remercie de sa confiance et de la lucidité de son analyse.

Madame Gautier, vous avez parlé de la création d'une nouvelle branche de la sécurité sociale. La Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie vient en complément des caisses de sécurité sociale existantes. Elle n'est nullement destinée à se substituer à l'une ou l'autre d'entre elles. Madame Gautier, attendre la réforme de l'assurance maladie serait se priver de financement complémentaire jusqu'à 2005 alors que chacun, à droite comme à gauche, s'accorde à reconnaître l'urgence à agir.

Il est faux d'affirmer, madame Gautier, que vous êtes seuls capables de défendre les familles. Nous essayons, chacun de notre côté, de prendre en compte et surtout de comprendre les problèmes de nos concitoyens. Nous prenons nos responsabilités en présentant ce texte réaliste.


Monsieur Vitel, vous avez décrit la situation actuelle et démontré...

M. Bernard Accoyer. Brillamment !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. ...combien il était urgent d'accompagner enfin le vieillissement et le handicap avec des objectifs, des moyens, des mesures.

Vous avez souligné le bien-fondé du plan de veille et d'alerte, qui, je le précise, n'existait pas jusqu'à présent ; voilà encore une avancée sociale que nous réalisons.

M. Gérard Bapt. Ça, c'est vrai !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Si elle avait été réalisée plus tôt,...

M. Denis Jacquat, rapporteur. Nous ne serions pas là ce soir !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. ...peut-être le terrible drame d'août 2003 aurait-il été évité, ou au moins prévenu.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Vous ne pouvez pas tenir de tels propos, monsieur Falco !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Voyez-vous, c'est l'addition des moyens, des compétences et des volontés qui évitera que de tels drames ne se reproduisent. Quoi qu'il en soit, nous mettons en place un plan de veille et d'alerte qui nous permettra de parer aux situations de risque exceptionnel.

Par ailleurs, docteur Vitel, le Gouvernement présentera un amendement pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté concernant la responsabilité des maires. Je vous remercie de votre soutien.

Madame Pecresse, vous avez fort justement souligné qu'une idée généreuse ne suffit pas si elle n'est pas financée, mais il est certain que nous ne souhaitons pas accroître les impôts pour financer cette grande avancée sociale.

Vous avez aussi mis l'accent sur la nécessité d'agir rapidement et de faire appel à la solidarité nationale ; c'est ce que nous nous efforçons de faire à travers ce texte.

Madame Mignon, votre intervention était centrée sur le handicap. Par conséquent, ma collègue Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, vous répondra, ainsi qu'à d'autres intervenants.

Monsieur Decool, vous avez mis l'accent sur les 400 millions d'euros supplémentaires qui seront dégagés chaque année pour compléter et pérenniser, enfin, le financement de l'APA. Nous ne le pourrons que grâce aux moyens dégagés par ce texte.

L'aide à domicile est prise en considération, j'ai beaucoup insisté sur ce point dans mes différentes interventions.

Le jour de solidarité sera choisi librement, avec souplesse, dans le public comme dans le privé, et le lundi de Pentecôte ne sera retenu qu'à défaut - mais je fais confiance à tout le monde pour trouver la solution la plus adaptée afin de participer à ce grand élan de solidarité.

Monsieur Bapt, nous avons tous été touchés, au plus profond de notre être, par le drame de la canicule. Personnellement, je n'oublierai jamais ces heures passées sur le terrain, dans les hôpitaux ou avec les victimes, notamment pendant les journées terribles des 12 au 15 août : rien que dans la nuit du 11 au 12, 3 000 décès ont été enregistrés. Ce sont des moments qui vous marquent à vie.

Après ce drame, il était urgent de réagir. Le dialogue a eu lieu pendant tout le mois de septembre pour préparer le plan vieillissement solidarité. Mais je suis surpris que nul n'ait pensé à interroger les personnes âgées elles-mêmes. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Nous l'avons fait !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Il faudrait peut-être connaître leur avis.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Je vous répondrai !

Mme Muguette Jacquaint. Le problème, c'est que vous les interrogez après coup !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. J'ai entendu un radio-trottoir dans lequel environ une trentaine de personnes âgées étaient interrogées : toutes se disaient favorables aux mesures que nous prenons, satisfaites de constater que des moyens leur sont enfin consacrés et que l'on va s'occuper d'elles. J'ai également lu le sondage mentionné par le président Le Garrec. Attendre 2005, monsieur Bapt, cela aurait été prendre des risques inconsidérés.

Monsieur Martin-Lalande, vous avez bien voulu souligner que ce texte sans précédent est réaliste.

Vous m'avez posé des questions précises à propos des postes de directeurs non pourvus. Le problème concerne effectivement environ 250 établissements. Plusieurs mesures sont envisagées : nomination de contractuels, amélioration du statut de directeur - car c'est une fonction difficile -...

M. Patrice Martin-Lalande. En effet !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. ...et même organisation de concours exceptionnels. Nous travaillons à ces différentes solutions car il est intolérable que, dans notre pays, 250 établissements restent encore privés de directeur.

M. Patrice Martin-Lalande. Merci, monsieur le ministre ! Il y a urgence !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Mesdames, messieurs les députés, je ne doute pas que le débat sera fructueux, dans l'intérêt des personnes âgées et des personnes handicapées. Pour notre part, nous considérons que l'effort demandé aux Français est juste et équitable. Je l'ai dit et je le répète : il fait honneur aux Français car il est vraiment généreux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées.

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, cet après-midi et ce soir, M. Bernard Perrut, M. Georges Colombier, Mme Martine Aurillac, M. Philippe Vitel, Mme Valérie Pecresse, M. Jean-Pierre Decool et, à l'instant, M. Patrice Martin-Lalande ont souligné l'importance, dans notre société, du risque dépendance, lié à la perte d'autonomie. Tous ont montré avec force, justesse et pragmatisme que le Gouvernement s'attache à mettre en œuvre, à travers ce projet, des financements nouveaux, compréhensibles par nos concitoyens, car fondés sur le don, et singulièrement le don de temps libre. De nombreux orateurs ont rappelé que les Français sont généreux et capables de se mobiliser pour des causes justes et précises ; c'est le cas du grand âge et du handicap, à propos desquels ils se sentent directement concernés.

M. Gérard Bapt. Mais pourquoi ne pas mettre les professions libérales à contribution ?

Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Ils attendent de connaître la façon dont leurs dons sont directement employés et sont sensibles à leur « traçabilité », si vous me permettez l'expression. Mesdames, messieurs les députés, soyez remerciés pour votre clairvoyance et votre sens des responsabilités.

MM. Le Garrec, Morin et Terrasse ont fait le choix d'un style flamboyant, ici pour fustiger l'incohérence des textes, là pour brandir le spectre de l'agitation sociale, et surtout pour prétendre qu'il sera impossible, dans les entreprises, d'aborder la négociation sociale collective sur la journée de solidarité. Permettez-moi d'être un peu étonnée de cette position que je trouve un peu préoccupante. Et j'observe qu'ils nous ont surtout renvoyés à des éléments de doctrine socio-économique, ce qui est légitime,...

M. Gérard Bapt. Quand on parle de l'UNEDIC, c'est en effet la moindre des choses !

Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. ...mais loin, monsieur le député, des attentes des personnes handicapées et des personnes âgées.

Madame Mignon, je vous remercie d'avoir évoqué la situation des personnes handicapées de notre pays ; je sais que vous le faites avec beaucoup de cœur et de sincérité,...

M. Gérard Bapt. Ca, c'est vrai !

Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. ...nous avons déjà eu l'occasion de nous entretenir de ce sujet.

Mon prédécesseur, Marie-Thérèse Boisseau, dont vous avez parlé, a très tôt réfléchi à l'hypothèse de la suppression d'un jour férié comme source de financement. O combien attentive à l'avis des associations, elle a eu l'occasion de présenter cette hypothèse de travail lors des nombreux contacts qu'elle avait avec elles, plus particulièrement avec la principale, l'APF, l'Association des paralysés de France.

Vous avez également évoqué, madame Mignon, la vision personnaliste du handicap, à laquelle vous avez opposé la vision environnementaliste, plus large. Certes, personne ne peut nier l'incidence de l'environnement sur le poids du handicap - c'est tout l'esprit du droit à compensation -, mais gardons-nous d'entrer dans un débat trop sémantique, qui risquerait de faire fuir nos concitoyens. Il me semble que l'un des enjeux, pour nous, est précisément d'intéresser les Français à ce sujet pour qu'ils comprennent mieux ce qu'est le handicap et, bien sûr, ce que nécessite son accompagnement.

Vous m'avez aussi demandé comment 850 millions pourraient servir à quelque chose dans ce domaine et pourquoi un montant de cet ordre de grandeur était retenu. Pour éclairer votre assemblée, mesdames, messieurs les députés, je me contenterai de vous rappeler quelques chiffres significatifs. Les restes à charge en matière d'aide technique sont évalués, dans notre pays, à quelque 300 millions d'euros. L'amélioration des aides humaines, tellement attendue par les personnes handicapées, nécessite environ 50 millions d'euros. Et, avec 100 millions d'euros, il faut savoir que l'on accroît d'environ 20 % l'allocation compensatrice pour tierce personne. Cela vous donne une idée, madame, de ce à quoi peut effectivement être utilisée une partie des nouveaux financements. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Motion de renvoi en commission

M. le président. J'ai reçu de M. Alain Bocquet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains une motion de renvoi en commission, déposée en application de l'article 91, alinéa 7, du règlement.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'ai entendu Mme Pecresse affirmer que l'adoption de ce projet de loi était urgente ; elle demandait même un référendum. Je dirai, pour ma part, qu'il s'agit plutôt d'un coup de force. Le drame, c'est qu'il s'appuie sur l'été meurtrier que nous avons traversé en août 2003 pour travestir les valeurs de notre pacte républicain.

C'est également un coup de force car il passe outre le message fort d'hostilité émis, vous ne pouvez le nier, par tous les partenaires sociaux. Certains diront que, restés sourds aux messages des urnes, il aurait été étonnant que vous soyez tout d'un coup devenu sensibles aux appels du mouvement social et associatif !

Vous maintenez votre texte, bien que nous ayons été nombreux à en demander le retrait. Par conséquent, je tâcherai, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, de vous faire la démonstration que ce projet du gouvernement Raffarin II, assumé par son jumeau Raffarin III (Sourires), reste éloigné des intentions qu'on lui prête.


Ce projet usurpe des notions fondamentales de notre protection sociale. Il n'est en rien solidaire, il ouvre la porte au démantèlement de notre protection sociale - nous y reviendrons au moment du débat sur la sécurité sociale - mais, surtout, il esquive le débat de fond, déjà exigé dans cette enceinte, sur la prise en charge de la perte d'autonomie, quels que soient l'âge et le handicap, par notre système solidaire et universel issu de la Résistance.

Enfin, vous allez nous demander de légiférer, alors que nous ne sommes pas en possession de l'ensemble des éléments qui nous le permettrait.

Pour ces raisons, nous demandons l'ajournement du projet et son renvoi en commission, que je vais justifier devant vous.

Par ailleurs, les ressources espérées de cet effort inégal entre les citoyens en faveur de la solidarité viendront financer un plan « dépendance » très largement contesté dans ses ambitions par les principaux responsables d'associations ou gestionnaires qui, eux, ont tiré tous les enseignements du drame de l'été dernier.

Les milliers de décès, de personnes âgées pour l'essentiel, survenus suite à la canicule, et ce malgré l'avertissement et l'engagement exceptionnel des personnels soignants et sociaux, ont plongé la France dans un véritable état de choc. Comment et pourquoi une telle tragédie a-t-elle pu se produire dans un pays comme le nôtre ? Les drames qui en ont résulté, inacceptables dans notre société, et les situations particulièrement alarmantes qui se sont accumulées lors de cet été caniculaire ont bouleversé et parfois révolté - c'était justifié - nos concitoyens.

De nombreuses et graves questions sont posées, qui concernent la politique de santé et de protection sociale.

Choqués par les dysfontionnements et carences découlant principalement de l'insuffisance de moyens disponibles dans les services publics, préoccupés par les conditions et les temps de réaction de ces derniers, sceptiques sur la sincérité et la transparence des informations qui leur ont été délivrées au fur et à mesure de l'aggravation de la situation, nos concitoyens attendaient du Gouvernement qu'un bilan exhaustif et précis soit établi des événements météorologiques qui se sont produits, de la façon dont ils ont été ou non analysés et pris en compte et des conséquences humaines, sociales et financières qui en ont résulté.

Ils souhaitaient également que des mesures soient prises pour que l'on n'ait plus à revivre ça !

Naturellement, ce sont d'abord les questions de santé qui ont été au cœur des préoccupations de tous et qui suscitent la plus vive et légitime attente. Comment, en effet, ne pas s'interroger, face au nombre considérable de décès survenus, sur la pertinence des politiques successives retenues en matière de santé publique, toutes - je dis bien toutes - se donnant pour objectif, à des degrés différents, de réduire les dépenses a minima au lieu de rechercher dans la mise à contribution de nouvelles sources de financement, les réponses à l'ensemble des besoins dans leur diversité.

Alors que la taxation des revenus financiers des entreprises au même taux que les salariés dégagerait 15 milliards d'euros, alors que la suppression de la taxe sur les salaires acquittée par les hôpitaux permettrait de financer 50 000 emplois, c'est la démarche régressive, lancée par le tristement célèbre plan Juppé de 1995 qui, malheureusement, s'applique toujours.

M. François Rochebloine. Ne soyez pas agressive !

Mme Muguette Jacquaint. Je ne suis pas agressive, je constate !

Vous poursuivez dans cette voie malgré les mises en garde des milieux médicaux, syndicats et associations du monde de la santé, usagers, mises en garde exprimées dans de nombreux mouvements sociaux mais aussi dans les interventions, ici, des membres du groupe communiste.

L'argument visant à culpabiliser les populations n'est pas recevable. Lorsque des milliers de morts surviennent ainsi brutalement en quelques semaines, à l'évidence, les responsabilités ne sont pas à rechercher du côté de nos concitoyens mais, bien davantage, du côté des pouvoirs publics dans leur conduite des politiques de santé et de protection sociale menées depuis plus de vingt ans.

Oui, ce sont bien les choix politiques qui sont en cause. Il n'y avait pas de fatalité et ces drames humains ne sont pas survenus comme un éclair dans un ciel serein.

Beaucoup sans doute aurait pu, et dû être évités, ainsi que n'ont pas manqué d'en donner témoignage des intervenants du secteur de la santé - médecins urgentistes, personnels soignants et sociaux. Le Gouvernement n'a pas su en tirer toutes les leçons car les solutions qui sont contenues dans ce projet de loi et dans le plan « dépendance », sont d'une bien faible dimension.

Aujourd'hui, nous est présenté un projet de loi contesté, et dont les éléments sont contraires aux annonces.

Tout d'abord, ce projet écorne la notion de solidarité. Certes, les Français sont généreux mais c'est toujours à la générosité des mêmes que l'on fait appel ; nous ne sommes pas d'accord. L'objectif est de dégager des moyens nouveaux pour la prise en charge de la dépendance. Pour cela, après quelques tergiversations et quelques fuites, volontaires ou involontaires, issues des ministères, les salariés devront travailler une journée supplémentaire.

Cette journée supplémentaire de travail provient de la suppression d'un jour précédemment chômé. Il avait été initialement prévu le lundi de Pentecôte, aussi bien pour les salariés du privé que pour les fonctionnaires. Sous l'insistance du Gouvernement, par un effet de style remarqué, notre rapporteur propose que, à défaut de meilleur accord, le choix de ce jour résulte de la négociation, à condition, bien sûr, qu'il ait été chômé auparavant. Le Gouvernement, lui, n'écarte pas la possibilité de multiplier les heures supplémentaires.

En définitive, tout cela revient au même.

Les richesses produites par ce travail supplémentaire non rémunéré seront taxées à 0,3 % pour rapporter 1,2 milliard d'euros en année pleine.

Cette proposition, qui est le cœur du projet de loi, traduit la vision étroite et partisane que vous avez de la solidarité.

Première remarque : tous nos concitoyens ne participent pas de la même façon ; il s'agit donc bien d'une conception libérale de la solidarité. En effet, seuls les actifs et les fonctionnaires sont mis à contribution, ce qui omet près de deux millions de personnes parmi les professions libérales, les exploitants agricoles et les artisans sans salariés.

En conséquence, monsieur le ministre, soit il s'agit d'un oubli et vous y remédierez en adoptant l'un de nos amendements car la solidarité et l'universalité du financement nécessitent que tout le monde y participe. Soit il s'agit de ce que certains appellent du clientélisme.

L'argument technique que vous avancez pour vous absoudre de cet oubli ne tient pas : vous ne seriez pas en mesure de mettre à contribution ces personnes, alors qu'elles cotisent à la sécurité sociale et qu'elles payent l'impôt sur le revenu ! La démonstration est faite que la solidarité, dans votre esprit, n'est pas l'affaire de tous.

Mais outre qu'elle n'est l'affaire que de quelques-uns, elle ne profite pas entièrement à ceux que vous voulez faire croire.

En réalité, votre idée de suppression du jour férié est une habile façon de satisfaire une nouvelle exigence du MEDEF !

Comment conforter le portefeuille des actionnaires et poursuivre le dynamitage des 35 heures en faisant croire que c'est pour une grande cause nationale ? En supprimant un jour férié ! Et voilà qu'on parle aujourd'hui de faire travailler le dimanche !

M. François Rochebloine. Cela, c'est une erreur !

Mme Muguette Jacquaint. Il s'agit bel et bien d'une disposition de plus visant à revenir sur la durée légale du travail, laquelle sera allongée de sept heures. Jamais, depuis 1936, un gouvernement n'avait osé allonger la durée du travail !

C'est donc un double avantage pour le Mouvement des entrepreneurs de France : trois quarts des richesses créées par cette journée iront directement dans les portefeuilles boursiers des actionnaires et la durée annuelle du temps de travail se trouve allongée ! Cette mesure offre de surcroît l'occasion de revenir sur les accords déjà conclus.

Enfin, vous négligez l'inquiétude de certains secteurs d'activité pour un impact économique très incertain. En effet, travailler un jour de plus, pour certains économistes, va compliquer l'écoulement de la production et donc risque de menacer l'efficacité économique du pays. En produisant davantage avec des effectifs identiques, les entreprises accroîtront leur productivité et, par ricochet, détruiront peut-être des emplois.

Le résultat du projet, c'est une solidarité qui sera assumée uniquement par quelques-uns, - les actifs et les fonctionnaires - qui s'exercera davantage au bénéfice du patronat que des personnes âgées, et qui pénalisera les salariés par la remise en cause d'un jour précédemment férié et par l'allongement de la durée de travail.

Ces derniers seront doublement taxés. En effet, le prélèvement supplémentaire à hauteur de deux milliards d'euros n'est pas la seule mise à contribution. Outre qu'ils devront travailler davantage, ils seront également soumis aux prélèvements afférents à la consommation supplémentaire induite par la création de valeur ajoutée le jour précédemment chômé. De surcroît, comme il est prévu un prélèvement sur les ressources des collectivités locales, qu'il faudra bien compenser, ils risquent fort de voir leurs impôts locaux augmenter d'autant.

En définitive, les salariés sont les grands perdants de cette solidarité à la sauce libérale.

Au moyen de cet élan de solidarité, associé à d'autres prélèvements, vous comptez alimenter une caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. C'est le deuxième grand axe de votre réforme qui, nous le verrons, est aussi incohérent qu'inopportun.

Incohérent, puisque vous voulez nous faire légiférer sur une caisse dont les contours ne seront précisés qu'ultérieurement. Reconnaissez que, pour le moins, la méthode pose problème !

M. le rapporteur nous annonce tranquillement que « le Premier ministre a chargé deux hauts fonctionnaires, MM Briet et Jamet, d'une mission visant à définir les contours de la CNSA, le périmètre précis de ses activités, ses modalités de fonctionnement et de financement », relayant ainsi les propos tenus par M. Fillon, ministre de l'emploi et de la solidarité de l'époque, lors de la présentation du projet.

La réforme de l'assurance maladie est également proche. A en croire certaines annonces, vous n'avez pas changé de calendrier : ce sera bien pour cet été, profitant des congés de nos concitoyens. On aurait pu attendre encore un peu, non ?


Enfin, pour résumer, ce projet de loi vient manifestement trop tôt. En effet, nous n'avons pas encore examiné le projet de loi sur le handicap et nous attendons les conclusions du rapport de MM. Briet et Jamet. Il est d'ailleurs annoncé que celles-ci influeront aussi sur la réforme de l'assurance maladie. Bref, il est impossible d'avoir une vision globale de l'architecture des réformes proposées.

En d'autres termes, vous demandez à la représentation nationale de vous signer un chèque en blanc. Pourquoi ne pas attendre d'avoir toutes les données en main pour légiférer en conscience ?

Toutes ces raisons rendent inopportune la création de cette caisse, sans oublier l'accueil qui lui a été réservé. En effet, les conseils d'administration de la CNAM, de la CNAV, de la MSA, de l'ACOSS condamnent unanimement la création de la caisse de solidarité pour l'autonomie. Si le Gouvernement, qui nous parle d'un dialogue social ouvert à tous les vents, daigne appliquer le principe qu'il vient de faire adopter en réformant la négociation collective, un projet d'accord sera rejeté en cas d'opposition d'une majorité d'organisations. C'est écrit noir sur blanc. Le Gouvernement doit donc retirer sans tarder le présent projet et le plan « dépendance » qu'il a annoncé le mois dernier.

Après les syndicats de salariés qui avaient vivement protesté contre la suppression autoritaire d'un jour férié, après les professionnels de la prise en charge des personnes âgées, qui avaient dénoncé la nette insuffisance des moyens promis, quatre caisses de sécurité sociale ont solennellement, dans une démarche commune exceptionnelle, rejeté votre dispositif dit « de solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des handicapés ». Vous ne pouvez pas négliger ces faits. C'est la réalité !

Nous voyons dans ce texte, ainsi que dans le discours du Premier ministre et de son gouvernement, un abus de langage et une perversion des notions. Le Gouvernement n'a-t-il pas affirmé qu'il s'agissait d'un projet instaurant pour la première fois dans la protection sociale de notre pays une prise en charge globale de la perte d'autonomie due à l'âge ou au handicap ? Ce sont les termes employés par M. Fillon. Notre Premier ministre n'a-t-il pas annoncé, le 6 novembre dernier, en présentant les grandes lignes du plan « dépendance », la création d'une nouvelle branche de la protection sociale ? Or permettez-moi de vous apporter une précision essentielle : la CNSA ne fera pas partie de la sécurité sociale. Elle n'est qu'un organisme collecteur mis au service des départements, lesquels auront désormais la responsabilité de la prise en charge de la dépendance. Autant de raisons pour les administrateurs de la « sécu » de voir rouge ! Car nous sommes bien loin de la création d'une nouvelle branche.

En effet, tout en acceptant de considérer désormais la dépendance comme un risque social à part entière, les quatre caisses jugent que le projet de loi n'est pas à la mesure des enjeux. En outre, il porte en germe une rupture du pacte de solidarité constitutif de la sécurité sociale et il engage une partition inacceptable dans la prise en charge des soins.

De fait, en sortant de son périmètre, le financement et la prise en charge des soins aux personnes âgées, ce projet viole le principe fondateur de la sécurité sociale consistant à assurer la protection de la personne de la naissance à la mort. Il fragilise l'exercice par la sécurité sociale de ses missions de solidarité entre jeunes et personnes âgées, malades et bien portants. Comme le fait observer Mme Jeannette Gros, de la MSA, « en segmentant une partie de l'assurance maladie pour les handicapés ou les personnes âgées, on stigmatise le coût de ces personnes » par rapport aux bien portantes.

La déclaration commune des quatre caisses dénonce l'absence de concertation préalable et souligne l'incohérence de la démarche gouvernementale qui met en place une nouvelle caisse avant même d'en définir les missions qui feront l'objet d'un projet de loi ultérieur. Et ce, au moment où se poursuit la concertation sur l'avenir de l'assurance maladie.

Nous faire légiférer aujourd'hui relève donc du coup de force.

J'ajoute que les premières conclusions du rapport à venir de MM. Briet et Jamet confirment que le Gouvernement n'a pas l'intention de faire entrer le risque dépendance dans le champ de la protection sociale.

On peut donc légitimement craindre - de nombreux observateurs l'ont d'ailleurs souligné - de voir les crédits de l'assurance maladie captés par la CNSA et d'assister au recul progressif de la couverture des soins aux personnes handicapées et aux personnes âgées par l'assurance maladie, au risque de transformer ces populations en assurés sociaux de second ordre.

Par conséquent, cette caisse, dont la création a été annoncée par M. Raffarin en novembre dernier dans le cadre du plan dépendance, et financée par la suppression d'un jour férié, est bien un dispositif indépendant de la sécurité sociale. Contrairement à ce qu'avait assuré le ministre M. François Fillon, la CNSA va donc servir à couvrir une partie des dépenses de santé des personnes âgées, en lieu et place de la sécurité sociale.

C'est une dangereuse première. Une catégorie de la population est ainsi stigmatisée et le pacte de solidarité, intergénérationnel, à la base de notre système de protection sociale, permettant de couvrir l'individu de la naissance à la mort, est rompu. Tel est le mauvais coup, mal caché derrière un montage budgétaire et un projet de loi pernicieux.

A votre projet, qui conjugue mensonge et inefficacité, nous opposons une contre-réforme en proposant la création d'une véritable prestation de sécurité sociale.

La question se pose aujourd'hui des modalités de la prise en charge de l'ensemble des personnes en situation de handicap, qui pourrait se concevoir désormais comme un nouveau risque social, dans le cadre du champ d'intervention de la sécurité sociale.

Ce risque, selon nous, pourrait être rattaché à l'assurance maladie qui gère déjà les soins médicaux, comme vous l'avez rappelé, mais aussi l'invalidité. La création d'un nouveau risque permettrait, en créant un droit unique, de mettre fin à l'inégalité de traitement constatée, selon que le handicap se manifeste avant ou après soixante ans.

Le nouveau risque pourrait être couvert par un dispositif de prestations à caractère universel et polyvalent, dans le cadre d'un socle commun, agrémenté d'un certain nombre de compléments spécifiques adaptés aux différents besoins des personnes. Nous présenterons un amendement en ce sens.

La création d'un tel dispositif, géré par la sécurité sociale et la branche assurance maladie, serait également de nature à remédier à certaines difficultés liées au rôle important aujourd'hui dévolu à l'aide sociale.

Selon certaines analyses, la place faite à l'aide sociale départementale dans la prise en charge du handicap ou de la dépendance n'est pas neutre, dans la mesure où il existe de sensibles différences de traitement selon les départements, y compris pour l'APA, dont le régime vise pourtant à faire une prestation à caractère universel.

Ces différences sont encore plus accentuées dans le cas des départements cumulant un potentiel fiscal faible et une structure démographique marquée par le vieillissement de la population. Les réserves liées à la place de l'aide sociale mettent également en avant le fait que, en dehors de l'APA, l'intervention réalisée dans le cadre de l'aide sociale a des répercussions sur le patrimoine des personnes aidées ou de leurs enfants.

Ces analyses se fondent sur le refus de la situation actuelle, dans laquelle un problème considéré comme un risque est traité dans un dispositif assimilé à l'aide sociale, qui renvoie encore, aux yeux de beaucoup, à une image de charité et d'assistance, exposant les prescripteurs à des soupçons de favoritisme et les bénéficiaires à des attitudes stigmatisantes.

C'est précisément le chemin qu'emprunte le Gouvernement, bien qu'il s'en défende.

Or la gestion d'un nouveau risque par les organismes de sécurité sociale offrirait aux personnes en situation de handicap et à leurs familles un avantage en termes d'information et d'accès aux droits, en leur permettant de bénéficier d'une approche pour l'ensemble des prestations assurées par les différentes branches de la sécurité sociale.

Certes, la question du financement de ce nouveau risque se pose dans un contexte où le déficit du régime général et de l'assurance maladie en particulier...

M. François Rochebloine. A qui la faute ?

Mme Muguette Jacquaint. ...ne laisse pas indifférent et appelle une réaction.

Je vous le rappelle, cette situation procède davantage de l'échec des plans de redressement successifs, dont l'unique objectif est de réduire les dépenses, que de la « gourmandise » supposée des Français pour les médicaments ! Or je puis affirmer, sans me tromper, que la bataille du déficit de la sécurité sociale se gagnera sur le terrain des recettes. La vraie problématique est là. Et ceux qui tentent de transposer ce débat ne cherchent pas tant à sauvegarder notre système, né de la Libération, qu'à en accélérer la privatisation.

Quelles pourraient être les modalités de financement d'un nouveau risque ? Je les ai en partie dévoilées.

Nous pouvons nous reposer sur les principes qui ont fondé le financement de notre protection sociale à condition de les adapter aux réalités d'aujourd'hui. Nous entendons souvent dire que les communistes ne veulent pas bouger. Si, mais pour avancer, non pour régresser !

Les fondateurs de la sécurité sociale, en dépassant le principe d'un financement seulement contributif et en substituant à la notion d'assurance sociale celle de sécurité sociale, avaient offert la vision d'un financement global qui a fondé la protection sociale moderne.

Aujourd'hui, c'est dans la même perspective que nous devons financer ce nouveau risque : la solidarité et l'universalité du financement.

Dans ce cadre, les prestations assurées au titre d'un nouveau risque par la sécurité sociale, quel que soit l'âge des bénéficiaires, auraient vocation à être versées à l'ensemble de la population.

Dans la mesure où notre système de protection sociale se fonde aujourd'hui sur le principe de l'assurance obligatoire et de la solidarité, qui repose elle-même sur l'universalité du financement et sur la contribution de chacun en fonction de ses moyens - M. Douste-Blazy l'a réaffirmé -, la prise en charge du nouveau risque par la sécurité sociale peut être envisagée sur la base des différentes ressources existantes, en prenant pour assiette l'ensemble des revenus de toute nature.

Il est donc nécessaire de réformer l'assiette des cotisations sociales patronales. Car on ne peut accepter que des entreprises gagnent de l'argent en supprimant des emplois et contribuent ainsi de moins en moins au financement de la protection sociale, tout en augmentant ses dépenses.

La réforme que nous proposons veut garder le lien entre la cotisation patronale et le salaire. Mais les taux doivent être modulés - ce qui permettra d'accroître les ressources de la sécurité sociale - pour tenir compte à la fois de la taille de l'entreprise et surtout de sa politique de l'emploi et des salaires. Une entreprise qui crée des emplois, relève les salaires et assure une politique de formation, relançant ainsi l'économie, pourrait bénéficier d'une baisse des taux, alors que celle qui fait le choix, comme c'est malheureusement souvent le cas, des profits financiers contre l'emploi se verrait appliquer un taux de cotisation majoré.


Cette modulation pourrait aussi être un moyen de favoriser l'intervention des salariés dans la gestion de leur entreprise.

Bien sûr, une telle réforme devrait s'accompagner de la recherche de nouvelles ressources, comme la mise à contribution des revenus financiers - hors épargne populaire -, le remboursement de la dette patronale, ou encore la suppression des exonérations de cotisations. Le débat sur ces sujets nous occupera une bonne partie de l'été. Nous y reviendrons donc en temps voulu.

Vous l'avez compris, nous récusons l'idée de la CNSA. Cette option tendrait à ignorer, tout d'abord, la réalité des compétences développées depuis de nombreuses années par les organismes de sécurité sociale, qui ont acquis une grande expérience dans la gestion de prestations complexes. Les méthodes et les instruments de travail communs qu'ils ont su élaborer se révéleront pourtant précieux lors de la mise en œuvre de dispositifs qui, malgré les améliorations attendues de la création d'une prestation spécifique, conserveront un certain degré de complexité, compte tenu de la grande diversité des situations à prendre concrètement en compte.

De plus, la création d'une nouvelle branche de la sécurité sociale, alors même que la concertation sur l'avenir de l'assurance maladie est en cours, pourrait être de nature, en organisant un traitement distinct des personnes dépendantes ou handicapées, à mettre en cause, à terme, le caractère universel de l'assurance maladie, une conquête encore très récente.

Voilà autant d'arguments qui militent en faveur du rejet de ce texte ou en démontrent le caractère prématuré.

Avant de conclure, je souhaiterais évoquer le financement du plan dépendance, dont le coût est estimé à environ 10 milliards d'euros.

Au préalable, mettons-nous d'accord sur les chiffres. La suppression d'un jour férié et la contribution de 0,3 % produisent des recettes s'élevant à 1,2 milliard d'euros, et à 1,6 milliard si on tient compte de la part des trois fonctions publiques, qui s'élève à 400 millions. Ensuite, il convient d'y ajouter 300 millions au titre d'une contribution additionnelle à la CSG sur les revenus du patrimoine et des placements, 900 millions au titre de la CSG et enfin 60 millions venant des caisses de retraite, soit un total de 2,8 milliards d'euros en année pleine.

Nous proposons pour notre part plusieurs autres pistes de financement, davantage fondées sur la justice sociale et la solidarité.

Tout d'abord, savez-vous que l'impôt dit de solidarité sur la fortune n'a pas vocation à être toujours réduit ? C'est pourtant ce que vous n'avez pas cessé de faire depuis que vous êtes arrivés au pouvoir, au risque d'édulcorer le rôle qu'il doit jouer en matière de solidarité.

En année pleine, cette recette fiscale rapporte 2,5 milliards d'euros, soit presque autant que tous les prélèvements que je viens d'énumérer. En la quadruplant, ce que nous proposerons de faire par la voie d'un amendement, vous financerez l'ensemble du plan en une année. Cet acte de courage politique pourrait se nommer journée de solidarité des fortunés... Car des fortunés, il y en a, dans ce pays ! Pourquoi les salariés devraient-ils toujours être mis à contribution ? La solidarité doit jouer à tous les niveaux.

Mais si vous n'étiez pas encore convaincus, nous pouvons vous proposer une autre possibilité, démontrant, une fois encore, que la suppression d'un jour férié n'avait rien d'inéluctable.

M. Maxime Gremetz. Absolument !

M. François Rochebloine. On pourrait passer aux 36 heures ! Cela ferait un peu plus pour la solidarité !

Mme Muguette Jacquaint. La réduction de l'impôt sur le revenu au profit des deux plus hautes tranches, c'est-à-dire celles qui concernent les plus gros revenus, correspond à 2 milliards d'euros,...

M. Maxime Gremetz. Voilà !

Mme Muguette Jacquaint. ...soit plus que ce qu'apporte la suppression d'un jour férié. Il suffit de renoncer à cette baisse d'impôt, qui ne profite qu'aux plus grandes fortunes de notre pays, et il n'est plus besoin de supprimer un jour férié ni de taxer la masse salariale.

M. François Rochebloine. Travaillons moins, et tout ira bien !

M. Maxime Gremetz. Oh ! Rappelez-vous Guizot : « Enrichissez-vous ! »

M. le président. Monsieur Gremetz, nous avons remarqué que vous étiez de retour ! (Sourires.)

Mme Muguette Jacquaint. J'ajoute que ni l'augmentation de l'ISF, ni la suppression de l'abattement sur l'impôt sur le revenu ne viendront ruiner nos concitoyens qui y sont soumis.

Enfin, dernière proposition : supprimer les exonérations de cotisations patronales et exiger le remboursement de la dette patronale.

M. Maxime Gremetz. Voilà, ça c'est une politique !

Mme Muguette Jacquaint. Dans le budget de l'emploi pour 2004, le Gouvernement a accordé 21 milliards d'exonérations de cotisations patronales, dont seulement 18 sont compensées. Pour quel résultat ? Un taux de chômage d'environ 10 %, ...

M. Maxime Gremetz. Voilà !

Mme Muguette Jacquaint. ...une croissance économique proche de zéro en 2003, et encore timide en 2004, car l'objectif de 1,7 % ne sera pas atteint !

M. Maxime Gremetz. Très bien !

Mme Muguette Jacquaint. Nous proposons de réaffecter les sommes consenties pour les exonérations au bénéfice des personnes âgées et handicapées.

Enfin - et j'en terminerai là sur le financement -, j'observe que les quelque 2 milliards et demi attendus pour abonder la CNSA correspondent à la somme qui sera offerte aux entrepreneurs par le biais de la suppression de la taxe professionnelle ; que le 1,6 milliard escompté sur le travail gratuit des salariés correspond à ce que vous accordez aux restaurateurs ; et que les 400 millions que vous allez prendre sur les budgets des fonctions publiques correspondent au montant d'abattement de l'ISF pour les plus riches. Voilà la réalité des chiffres.

Je regrette que le ministre de l'économie ne soit pas là. Il nous dirait comment il compte régler la facture des promesses électorales, qui s'élève à 7,8 milliards d'euros, alors qu'il demande à ses collègues de faire des économies pour à peu près le même montant.

Je vous rappelle qu'aux 150 millions d'euros de compensations lâchées en décembre aux buralistes, s'ajoutent les allégements de charges accordés à la mi-mars aux restaurateurs, à hauteur de 1,5 milliard d'euros pour les dix-huit prochains mois ; qu'une exonération de taxe professionnelle équivalente à 2,5 milliards a été promise urbi et orbi par Jacques Chirac aux entreprises ; qu'il va falloir débourser 400 millions avant la fin du premier trimestre pour les personnels hospitaliers en échange du rachat des jours de RTT ; que 3 milliards d'euros ont été promis aux chercheurs ; sans oublier le coup de pouce de 311 millions que viennent d'obtenir les harkis et les 35 millions d'aides accordés en urgence, début janvier, aux filières laitière et porcine. L'addition des cadeaux préélectoraux que vient de concéder Jean-Pierre Raffarin s'élève à plus de 7,8 milliards d'euros !

M. Maxime Gremetz. C'est scandaleux !

Mme Muguette Jacquaint. Impressionnant ! Et encore, ne figure pas dans cette liste déjà longue la promesse du Président de la République de ramener à 5,5 % la TVA dans le secteur de la restauration, qui va entraîner pour l'Etat un manque à gagner supplémentaire de 3 milliards à l'horizon 2005.

Pour conclure, je formulerai une dernière remarque qui milite, une fois de plus, pour le retrait de ce texte.

Pour préparer l'examen de ce projet de loi, j'ai relu attentivement l'audition, en date du 3 mars, de M. François Fillon devant notre commission des affaires sociales. Et j'ai noté cette phrase : « Quant au caractère jugé « archaïque » du mode de financement proposé, c'est d'abord aux Français qu'il appartiendra de juger ». C'est ce qu'ils ont fait les 21 et 28 mars !

M. Maxime Gremetz. Très bien !

M. François Rochebloine. Ils l'ont fait aussi le 21 avril !

M. Roland Chassain. Vous avez la mémoire courte !

Mme Muguette Jacquaint. Nous vous rappellerons autant de fois qu'il faudra cette étape de notre vie démocratique, jusqu'à ce que vous y répondiez dans le sens attendu, ce qui, en l'occurrence, se traduirait par le retrait du texte.

Il n'y a pas lieu d'en discuter, car nous ne disposons pas de tous les éléments pour légiférer. Au moment où nous entamons la dernière ligne droite sur le chemin de la réforme de l'assurance maladie, il est inopportun de discuter de la prise en charge de la perte d'autonomie et du handicap dans les conditions que vous imposez. Bien sûr, il est urgent de dégager les moyens nécessaires pour venir en aide à des personnes dont nous connaissons le drame. Mais pas dans ces conditions !

Dans le cas contraire, nous risquerions de dévoyer certaines notions et de faire naître de faux espoirs. Ce texte a en effet recours à des symboles qu'il vide de leur sens.

Pour toutes ces raisons, nous vous proposons de voter cette motion de renvoi en commission afin que nous puissions nous saisir de l'ensemble de ces questions, et pour répondre à la demande de retrait adressée par de nombreuses organisations, caisses de sécurité sociale et associations. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué aux personnes âgées.

M. Maxime Gremetz. Heureusement qu'il nous répond !

M. le président. Monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. Nous attendons sa réponse avec impatience !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Monsieur Gremetz, j'ai déjà eu l'occasion de vous répondre, mais vous n'étiez pas là.

M. Maxime Gremetz. Mais je vous ai écouté, vous le savez bien !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Madame la députée, comme vous l'avez vous-même souligné, nous n'avons pas la même vision de la solidarité. Je respecte votre point de vue, mais je doute que nous parvenions à nous convaincre mutuellement.

Mme Muguette Jacquaint. C'est ce que vous faites qui ne nous convainc pas !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Je ne peux pas vous laisser dire que nous n'avons pas tiré les conséquences du terrible drame d'août 2003. Il est l'origine de notre présence ici. Dès le mois de septembre, le Premier ministre a réuni bon nombre de partenaires pour mettre en place le plan vieillissement solidarité que nous examinons en partie ce soir.

Mme Muguette Jacquaint. Il faut les écouter, les partenaires, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Il y a des contradictions dans votre intervention, madame Jacquaint. Vous affirmez que nous répondons, par ce texte, aux exigences du Medef, quand votre collègue affirmait lors de la discussion générale que même l'organisation patronale était contre notre projet de loi.

M. Maxime Gremetz. Mais non !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Vous prétendez que nous n'avons pas tiré les leçons de la canicule, mais vous dites aussi que nous aurions pu attendre encore un peu.

Mme Muguette Jacquaint. Je ne suis pas la seule à le dire !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Certes, mais attendre encore, c'était adopter une position d'immobilisme que nous refusons face à l'urgence de la situation et à la nécessité de prendre en charge la dépendance qui touche les personnes âgées et les personnes handicapées.

Bon nombre des remarques que vous venez de faire ont déjà reçu une réponse pendant la discussion générale. Et bien entendu, madame Jacquaint, nous ne vous suivrons pas dans votre demande de renvoi en commission.


Mme Muguette Jacquaint
. Le contraire, ce serait une révolution !

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Philippe Vitel, pour le groupe UMP.

M. Philippe Vitel. Madame Jacquaint, je vais certainement vous décevoir mais, en dépit de tous vos efforts, vous ne nous avez absolument pas convaincus de la nécessité de renvoyer ce texte en commission. Aucun de vos arguments ne nous apparaît assez sérieux pour empêcher la poursuite de l'étude de ce projet si novateur et si utile aux personnes âgées et handicapées dépendantes.

Comme le ministre vient de vous le préciser, la solidarité est l'affaire de tous et rien, ni dans le texte ni dans les intentions gouvernementales, ne vous autorise aujourd'hui à dire le contraire. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

En revanche, je vous rejoins sans problème lorsque vous remettez en cause les choix faits depuis vingt ans et lorsque vous évoquez les insuffisances des politiques de santé et les faiblesses du service public de soins. Si ma mémoire est bonne, vous avez gouverné le pays pendant quinze ans au cours des deux dernières décennies (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), vous avez donc indéniablement une lourde responsabilité dans les lacunes que vous dénoncez aujourd'hui.

M. Maxime Gremetz. Non ! Nous n'avons pas voté les lois de financement de la sécurité sociale !

M. Philippe Vitel. Ce texte est une immense avancée au service des plus fragiles de notre société. Il sera certainement amélioré par les amendements que nous adopterons au cours de l'examen des articles. Le groupe UMP ne votera donc pas le renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Gautier, pour le groupe socialiste.

Mme Nathalie Gautier. Nous approuvons, nous, l'essentiel des arguments développés par Mme Muguette Jacquaint dans sa motion.

M. François Rochebloine. Pas la totalité ?

Mme Nathalie Gautier. La plupart !

Mes collègues ont en effet développé plusieurs de ces points qui justifient notre opposition au texte : l'obligation faite aux salariés de travailler un jour chômé sans être rémunérés, la remise en cause de la durée légale annuelle de travail, les difficultés de mise en application de cette mesure qui frappe les seuls salariés, à l'exclusion des professions libérales, des agriculteurs, des commerçants, des artisans, des retraités, qui peuvent pourtant eux aussi être touchés un jour par la dépendance. Pourquoi cet effort de solidarité nationale devrait-il être supporté par les seuls actifs ?

C'est par ailleurs pour les collectivités locales, à terme, une charge supplémentaire, qui se traduira inévitablement par une hausse des impôts locaux.

Sur le plan juridique, le jour travaillé non payé est d'une gravité sans précédent. Vous offrez aux employeurs la possibilité de faire travailler davantage les salariés sans les rémunérer pour ce travail supplémentaire.

Il s'agit donc d'un projet inégalitaire, qui manque d'une réflexion de fond et qui est porteur de risques réels d'inégalités entre les territoires.

Ce projet est dangereux car il remet en cause l'égalité des droits, qui implique l'unité du financement des soins et des prestations. A une prestation universelle, un droit à compensation, vous avez préféré une assurance maladie spécifique pour les personnes âgées et les handicapés, ce qui risque d'entraîner un démantèlement de la sécurité sociale, et ce en dépit de l'avis contraire émis par les quatre caisses de sécurité sociale, qui ont rejeté votre dispositif. Ce sont des positions que vous ne pouvez éluder.

Ce projet porte en lui-même de véritables risques d'inégalité, la démarche gouvernementale est incohérente, qui nous demande de légiférer sur un projet de création d'une caisse dont on ne connaît encore ni les modalités ni le contenu. C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste votera le renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Avant de passer la parole à l'orateur suivant, je vous annonce d'ores et déjà que, sur la motion de renvoi en commission, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Maxime Gremetz. J'ai été, moi, très convaincu par le très convaincant exposé de Mme Jacquaint (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), parce que c'est le bon sens et la réalité.

J'ai vu que ni le ministre, ni ses conseillers, ni mes collègues ne comprenaient ce que je disais à propos du « un tiers-deux tiers ». Comme je suppose qu'ils n'ont pas fait l'effort de chercher à comprendre, je leur en ferai donc tout à l'heure la démonstration. Lorsque nous avançons des choses, nous apportons les preuves, et vous me démontrerez le contraire si vous le voulez et si vous le pouvez.

Je n'ai pas dit, monsieur le ministre, que le MEDEF était contre ce projet. Il n'est pas contre, il fait semblant.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Il est pour !

M. Maxime Gremetz. Bien sûr, et pour plusieurs raisons.

Il faut bien alimenter la thèse selon laquelle le patronat va payer une contribution de 0,3 %, mais je vous expliquerai combien cela représente en fait. Il fait donc semblant d'être contre mais il est tout à fait pour.

Avoir la possibilité de remettre en cause les 35 heures par une voie détournée, avouez que c'est une aubaine ! Ne suspendez pas, n'atténuez pas les 35 heures, avait-il dit, il faut les remettre en cause. Voilà une occasion de le faire sans loi par un chemin détourné. Puisqu'on rallonge la durée du temps de travail, on remet en cause toutes les conventions collectives, tous les accords qui étaient passés. On a une nouvelle disposition qui s'appliquera partout dans le privé et dans la fonction publique.

Pourquoi encore est-il pour ? Parce que les patrons ne paient pratiquement rien. Si l'on voulait se donner les moyens humains et financiers nécessaires aux personnes âgées et handicapées, on n'irait pas vers une caisse indépendante alimentée hier par la vignette, aujourd'hui par un jour férié, on instituerait un cinquième risque de la sécurité sociale, mais c'est la grande peur du MEDEF. Il a même déclaré que l'assurance maladie n'était pas son affaire, que la solidarité nationale envers les personnes âgées n'était pas son affaire. Il veut bien à la limite participer à la branche accidents de travail et maladies professionnelles.

Si on créait un cinquième risque dans le cadre de la sécurité sociale, il faudrait que les patrons paient une cotisation patronale, qu'ils ne veulent pas payer aujourd'hui. C'est ça la réalité. Ils veulent payer de moins en moins de cotisations patronales. Ils ne veulent même pas que l'on augmente les cotisations pour réparer le préjudice des chômeurs dont les droits ont été bafoués, et ils ne veulent surtout pas payer pour la solidarité nationale. Ainsi, on comprend mieux les choses.

En fait, le Gouvernement veut gagner du temps et c'est extrêmement grave. Il y a un autre projet qui est la réforme de l'assurance maladie. Que va-t-on alors nous proposer ? Une fiscalisation évidemment, pas de cotisations, le grand patronat n'en veut pas.

M. François Rochebloine. Et le petit patronat ?

M. Maxime Gremetz. Il préfère qu'on fiscalise tout sous une forme ou sous une autre, y compris par la CSG, parce qu'elle touche non pas les revenus du capital mais, pour 88 %, ceux des salariés et, pour le reste, des revenus financiers, mais ceux des ménages.

Tout cela préfigure totalement une nouvelle caisse à laquelle participerait le privé, où il n'y aurait plus de gestion démocratique. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. C'est la remise en cause du fondement même de notre système original de sécurité sociale, qui est fondé précisément sur les richesses produites, avec des cotisations patronales et salariales, et sur les revenus financiers qui vont à la spéculation financière et qui ne vont ni à l'investissement ni à l'emploi ni à la formation.

Voilà la réalité. Vous comprenez donc que nous allons nous opposer longuement et fermement à tout votre projet et qu'il est nécessaire de le renvoyer en commission pour avoir une position raisonnable. Il ne tient pas debout, ce projet, ou, plutôt, il tient debout pour le MEDEF, pas pour les personnes âgées. Ecoutez un peu les 60 % de gens qui vous demandent de le retirer.

M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je vais mettre aux voix la motion de renvoi en commission.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

              Nombre de votants 47

              Nombre de suffrages exprimés 47

              Majorité absolue 24

        Pour l'adoption 12

        Contre 35

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Monsieur le président, je vous demande une suspension de séance en vertu de l'article 58 du règlement.

D'abord, je regrette que, sur un dossier aussi sensible, on s'envoie des noms d'oiseaux. S'il y a un sujet qui devrait nous rassembler, c'est bien celui-ci.

Dieu merci, ce soir, il y a quelque chose qui nous rassemble, c'est le sport. Un certain nombre d'entre nous le savent déjà, l'équipe de Monaco est qualifiée pour la finale de la ligue des champions (Applaudissements sur plusieurs bancs)...

M. Maxime Gremetz. Bravo !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Ridicule !

M. François Rochebloine. ...et, plus important, Monaco a obtenu la semaine dernière le statut d'invité spécial au Conseil de l'Europe, M. Geveaux peut en témoigner.

M. le président. Votre intervention, monsieur Rochebloine, n'avait que peu de rapport avec l'organisation de nos débats.


Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures quarante-cinq, est reprise à vingt-trois heures cinquante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Discussion des articles

M. le président. J'appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte du Gouvernement.

Article 1er

M. le président. Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. maxime Gremetz, premier orateur inscrit.

M. Maxime Gremetz. Professionnels, responsables d'administration, directeurs d'instituts, spécialistes mais aussi organisations syndicales s'accordent à le reconnaître : les choix politiques ont été responsables du drame que nous avons vécu l'été dernier.


Ils l'étaient hier, ils le sont aujourd'hui, et il n'y avait, par conséquent, pas de fatalité à ces drames humains, qui ne sont pas survenus comme un coup de tonnerre dans un ciel serein. Bon nombre de ces drames auraient sans doute pu et dû être évités, comme en ont témoigné les intervenants du secteur de la santé - médecins, urgentistes, personnels soignants et sociaux.

L'acharnement à réduire les moyens de la santé, avec la disparition d'hôpitaux de proximité, les milliers de postes de médecins et d'infirmières qui ne sont ni financés ni pourvus, les milliers de lits supprimés et le gel de crédits d'Etat destinés à la modernisation des maisons de retraite, toutes les déficiences accumulées depuis des années au nom d'une « maîtrise comptable » de la santé des Français ont pesé très lourd tout au long de ces semaines de canicule.

Cet été meurtrier a mis en lumière des situations accablantes et a fait ouvrir les yeux sur le vaste chantier à mettre en œuvre pour que nos structures hospitalières, nos services publics d'aide aux personnes âgées et nos dispositifs d'alerte et de veille sanitaire soient plus efficaces et, surtout, disposent de moyens suffisants pour faire face.

Si chacun a mesuré la gravité de ce qui s'est passé et si quelques responsables ont eu l'honnêteté de reconnaître leur responsabilité, d'autres ont fui. Or il s'agit bien d'une responsabilité collective : celle, bien sûr, du gouvernement Raffarin II dans son ensemble, à tous les niveaux - intérieur, santé, personnes âgées, budget -, mais aussi celle des gouvernements précédents, qui ont cautionné la rationalité budgétaire.

Ceux-là mêmes qui ont donné l'alerte l'an passé, s'inquiètent aujourd'hui du manque de moyens et annoncent déjà qu'en cas de nouvelle canicule, les équipements nécessaires ne seraient pas prêts, et je les crois bien volontiers ! Vous pouvez parler d'urgences, mais oserez-vous dire que dans les établissements où manquent des moyens ou du personnel médico-social - et je connais bien des endroits où c'est le cas -, on va régler la question d'ici à juillet, voire juin ?

Si le constat est partagé par tous, les réponses ne sont pas à la hauteur. La compassion affichée il y a dix mois s'est arrêtée aux portes de l'action.

Depuis quelques semaines, le Gouvernement prévoit un gel de crédits de 7 milliards d'euros, il poursuit le plan hôpital 2007 et la tarification à l'activité, véritable carcan budgétaire, qui repose sur des critères de rentabilité financière. Enfin, il impose par décret, comme nous l'avions demandé, l'installation d'une pièce climatisée dans chaque maison de retraite, mais il n'en est plus question pour les hôpitaux et le coût de cet aménagement - entre 10 000 et 30 000 euros - ne pourra pas être assumé !

Les seules mesures prises - à l'occasion du débat sur la politique de santé publique, lors de la discussion du PLFSS et aujourd'hui - sont d'ordre organisationnel. Il est, certes, important de mieux coordonner les différents intervenants, mais, sans moyens supplémentaires qu'est-ce que cela changera ? Nous soutenons, naturellement, tous les plans d'urgence, de veille ou d'alerte. Pourtant, si les moyens ne suivent pas, nous serons certes mieux informés, mais sans doute pas plus efficaces dans l'action.

Le plan prévu par l'article 1er pose aussi d'autres questions, notamment à propos du transfert de responsabilité aux maires. Lors de l'examen du texte en commission, nous avons été, comme certains collègues d'autres sensibilités politiques, exprimé nos interrogations quant au recensement des personnes vulnérables en vue de pouvoir leur porter assistance en cas de besoin.

L'efficacité de cette énième décision portant sur l'organisation du dispositif d'alerte n'est donc pas sans soulever certaines questions, notamment à propos de la manifestation spontanée des personnes vulnérables et isolées qui auraient besoin d'un soutien. Nous reviendrons sur ces questions à l'occasion d'un amendement à ce sujet.

Dans l'immédiat, nous souhaiterions que le Gouvernement soit plus à l'écoute de nos concitoyens et des professionnels des domaines social, médical et sanitaire, qui demandent plus de moyens pour agir efficacement.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. L'article 1er du projet de loi institue dans chaque département un plan d'alerte et d'urgence au profit des personnes âgées et handicapées, en cas de risque exceptionnel, et met à contribution les communes pour recueillir des données statistiques sur les personnes éventuellement concernées.

Cet article s'insère dans un dispositif plus large : le plan canicule, que M. le ministre de la santé et de la protection sociale et M. le ministre délégué aux personnes âgées ont présenté ce matin même - et dont la paternité revient sans doute davantage au second qu'au premier. Dans son architecture et dans son esprit, ce plan, qui tient compte des recommandations du Parlement, de la mission d'information conduite par M. Jacquat et de la commission d'enquête parlementaire présidée par M. Evin, nous semble un document de travail et d'impulsion complet et sérieux. Il reprend des propositions concrètes formulées sur le terrain, comme celle qui concerne les cellules interrégionales d'épidémiologie - les CIRE - dont les moyens et les compétences avaient été négligés.

Après ce satisfecit d'ensemble sur l'architecture de ce plan, se pose la question de sa mise en œuvre. Les hôpitaux auront-ils les moyens suffisants - accueil d'urgence, lits d'aval - pour prendre en charge les conséquences d'une nouvelle situation exceptionnelle que nous espérons ne pas voir se reproduire, mais dont les météorologues nous disent qu'elle pourrait se renouveler dès cet été ?

Monsieur le ministre, je souhaiterais vous interroger sur deux points.

Tout d'abord, vous avez affirmé que le plan vermeil serait, pour les maisons de retraite, l'équivalent du plan blanc pour les hôpitaux, permettant ainsi aux directeurs d'établissement de rappeler les personnels en vacances. Pour avoir visité l'été dernier des maisons de retraite, je sais combien ceux qui avaient fait face et permis d'éviter une surmortalité étaient littéralement épuisés par les conditions physiques et climatiques et par le manque de personnel. Les représentants syndicaux de ce personnel soulignent que les normes actuelles d'encadrement des maisons de retraite médicalisées sont telles que le personnel vieillit avec les malades, et que les conditions de travail sont de plus en plus lourdes. Les personnels réclament donc une augmentation du taux d'encadrement des personnes âgées dépendantes accueillies par ces établissements. Faire appel, pendant les vacances, à du personnel déjà lourdement mis à contribution et qui mérite du repos me semble être la limite de votre dispositif. La question des moyens et des effectifs des établissements est donc cruciale.

Par ailleurs, Le Parisien titrait ce matin : « un brumisateur pour chaque personne de plus de 65 ans ». Or, je n'ai rien trouvé dans votre plan sur la maîtrise d'ouvrage, le financement et les modalités pratiques de cette mesure - certainement souhaitable, d'ailleurs, comme le savent bien les mères de famille qui utilisent des brumisateurs pour rafraîchir leurs enfants quand ils ont de la température. Comment, donc, cette mesure sera-t-elle mise en œuvre ?

M. le président. La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Monsieur le ministre, vous avez reconnu que je n'avais pas voulu polémiquer en défendant cet après-midi la question préalable du groupe socialiste - et, de fait, je n'aime pas la polémique. Cependant, j'ai été déçue par l'autosatisfaction que vous affichez à propos d'un dispositif de veille et d'alerte qu'il était tout de même normal de mettre en place après le drame de l'été dernier !

Ce matin, M. le ministre de la santé a commencé sa conférence de presse en rappelant que l'été 2003 fut le plus chaud des cinquante dernières années. C'est donc sur ces cinquante dernières années qu'il faudrait juger des responsabilités ! On pourrait revenir, comme vous l'avez fait vous-même, sur la canicule de 1976, dont nous avons découvert cet été certaines conséquences que nous ignorions à l'époque. A Marseille, le professeur Sanmarco avait, dès 1982, formulé des recommandations, qui n'ont malheureusement pas franchi les limites des Bouches-du-Rhône.

C'est bien de mettre en place un dispositif d'alerte, mais la vraie question est de savoir comment, et avec quels moyens, particulièrement dans les grands centres urbains, où les personnes âgées sont souvent isolées. Vous présentez, certes, un amendement destiné à dédouaner la responsabilité des maires, et qui était largement réclamé par votre majorité.

Sur quels critères identifier les personnes isolées ? C'est une question philosophique qui dépasse nos clivages politiques. L'isolement, en effet, ne tient pas qu'au grand âge. Pour des raisons professionnelles ou familiales, spontanément ou parce que la société les y a conduites, certaines personnes se sont exclues de notre environnement sociétal. L'isolement est parfois un choix. Avons-nous le droit de repérer ces personnes sans violer la liberté individuelle, indispensable à une société moderne et civilisée ? Comment, par ailleurs, nous donner les moyens d'une véritable prévention en amont, sans attendre la canicule ou quelque autre catastrophe naturelle, pour éviter que certaines personnes vieillissent seules ?

L'article 1er ne répond pas à ces questions fondamentales, sur lesquelles nous devrons prendre un jour le temps de réfléchir sérieusement.

M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Gérard Bapt a déjà relevé que le plan canicule présenté ce matin répond bien à l'exigence d'entretenir la mémoire de ce qui s'est produit.

Par ailleurs, j'ai été, en août dernier, comme d'autres, surprise de constater que la crise a souvent été considérée comme un problème d'organisation sanitaire, et que les préfets et les responsables des préfectures ne sont pas d'emblée sentis concernés par la situation.

Le rôle des préfets est au cœur de votre plan, comme c'est le cas pour d'autres plans de vigilance. Il est important que le risque ne soit pas seulement perçu comme un risque sanitaire, mais comme un risque de sécurité civile.

Je tenais à évoquer cet aspect de la question. La mobilisation de tous les secteurs pour assurer la sécurité des personnes fragiles pourrait avoir des conséquences plus importantes qu'on ne le croit, à l'instar de ce qui a été fait pour prendre en compte les risques encourus par les sans-abri durant la période hivernale. Cela nous permettrait de sensibiliser l'ensemble de l'administration à la vulnérabilité des personnes âgées et des personnes qui vivent seuls chez elles.

Un autre point que je voudrais évoquer a été abordé tout à l'heure, sous la forme d'une question, par Pascal Terrasse. Dans le cadre du plan de vigilance, vous proposez de prendre en charge 40 % des crédits nécessaires à l'installation de salles de rafraîchissement dans les maisons de retraite. Mais ces crédits proviendront-ils de la caisse qui sera créée ou, comme l'a indiqué Pascal Terrasse, de la CNAV ? Dans le second cas, le nombre d'heures d'aide ménagère disponibles pour les associations de maintien à domicile serait du coup mis en cause, y compris en période de risque de canicule.

Enfin, sans vouloir polémiquer, je répète qu'en août 2003 fort peu d'entre nous, tous bancs confondus, connaissaient le danger. Je faisais partie de l'immense majorité qui ignorait le danger de mort qui pesait sur les personnes âgées. Certes il y avait eu l'expérience de Marseille, mais l'information n'avait pas été diffusée (« C'est vrai ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) J'ai toujours dit qu'avant ce drame, aucun responsable n'aurait eu la possibilité d'élaborer un plan sur les risques de canicule. C'est pourquoi nous ne pouvons tous être que très fiers qu'un dispositif soit mis en place par la loi. Monsieur le ministre, je vous prie donc de ne pas renvoyer le débat à un niveau polémique qui n'est pas constructif.

J'ai tenu ces propos partout. Je tenais à les répéter dans cet hémicycle.

M. le président. Sur l'article 1er, je suis saisi d'un amendement n° 8.

La parole est à M. Le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour le soutenir.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Cet amendement vise à élargir le champ du dispositif du plan d'alerte et d'urgence départemental. On ne peut qu'approuver la mise en œuvre du dispositif proposé par l'article 1er. Elle était préconisée dès le mois d'octobre par la mission d'information sur la canicule - Mme Guinchard-Kunstler vient d'en parler. Toutefois, il est trop restrictif de restreindre le champ de ce plan aux seules personnes âgées ou handicapées. Si celles-ci sont particulièrement vulnérables du fait de leur manque d'autonomie, il convient de tenir compte d'autres facteurs de vulnérabilité comme celui, essentiel, de l'isolement. Nous en avons longuement parlé en commission.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 8 ?

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Favorable.

M. le président. La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Pour les raisons que je viens d'évoquer, je me demande selon quels critères il sera possible de repérer les personnes vulnérables en raison de leur isolement. Nous n'avons toujours pas de réponse sur ce point. En l'état, nous ne pouvons donc pas voter cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 6. Cet amendement est-il défendu ?

M. Jean-Pierre Decool. Il est défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Denis Jacquat, rapporteur. Je regrette de le dire : cet amendement est inutile. En effet, la notion de handicap est en cours de définition et sera précisée dans le projet de loi que Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées nous présentera bientôt. En outre, l'amendement nous indique lui-même que la définition des personnes âgées dépendantes se trouve dans le code de l'action sociale.

Par conséquent, la première définition est en cours d'élaboration et la seconde existe déjà.

M. le président. L'avis de la commission est donc défavorable, monsieur le rapporteur ?

M. Denis Jacquat, rapporteur. Je précise même que la commission a rejeté cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Défavorable, pour les raisons que vient d'indiquer M. le rapporteur.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool.

M. Jean-Pierre Decool. l'amendement n° 6 est retiré.

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 54.

La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler, pour le soutenir.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Cet amendement a pour objet d'associer étroitement les directeurs des ARH dans la mise en place du plan d'alerte et d'urgence. Au cours des travaux de la mission d'information puis, surtout, de ceux de la commission d'enquête sur la canicule, il y a eu un grand débat pour déterminer qui devait être responsable de la mise en œuvre de ce plan. Comme je l'ai dit tout à l'heure, en confier la responsabilité aux préfets est fort judicieux et d'une grande efficacité. Mais il ne faut pas occulter la partie hospitalière du dispositif. L'enjeu est de tisser un vrai lien organisationnel entre les différents intervenants, tenant compte de la logique hospitalière. Cela me semble tomber sous le sens. Je me souviens que le ministre de l'intérieur de l'époque avait dit que les ARH ne pourraient pas mener cette mission toutes seules et que les préfets y avaient leur place. Mais les préfets auront aussi besoin des ARH.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Denis Jacquat, rapporteur. Madame Guinchard-Kunstler, vous savez fort bien, puisque vous avez fait partie comme moi de la mission d'information sur les causes et les conséquences de la canicule, que l'absence d'un responsable a été préjudiciable pendant cette période. C'est évident qu'il faut consulter l'ARH, mais il importe avant tout d'identifier un seul responsable. Dans cette perspective, l'amendement s'avère inutile et redondant. L'avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Même avis que la commission.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. J'ai plusieurs raisons pour voter contre cet amendement.

La première, c'est que je ne vois pas pourquoi ce serait toujours un directeur et non une directrice qui représenterait l'agence régionale de l'hospitalisation.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Très bonne remarque, je le reconnais ! (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. Je pensais que des députées allaient plutôt favoriser des femmes, en l'occurrence des directrices ! Cette formulation incomplète serait déjà une raison suffisante pour m'empêcher de voter cet amendement, mais il y en a une autre.

La seconde est une raison de fond : le groupe des député-e-s communistes et républicains a toujours été contre les ARH. Je me rappelle les avoir combattues dès leur institution, c'est-à-dire à l'occasion du plan Juppé. Nous avions alors dit que sous des apparences de décentralisation, il s'agissait de confier le contrôle de ces ARH à des sortes de « préfets des hôpitaux », et à eux seuls. Je me souviens que nous avons passé des jours et des nuits dans cet hémicycle - sous un gouvernement de gauche ! - pour obtenir et arracher trois milliards et demi pour les hôpitaux. Nous avons d'ailleurs bien fait, car la pénurie de moyens pose toujours un problème explosif. Du reste, quantité de gens du secteur hospitalier nous disent maintenant que les 35 heures les ont complètement mis sens dessus dessous car les emplois nécessaires n'ont pas été créés.

Cela étant, qui a été chargé de répartir les sommes que les départements ont reçues, y compris en Picardie ? Qui les a distribuées sans concertation ni discussion ? Les ARH ! Comme toutes les personnes concernées, j'ai reçu une lettre de leur part me mettant devant le fait accompli. Mais au nom de quoi ce directeur d'ARH a-t-il les pleins pouvoirs ? C'est nous qui votons les crédits, c'est donc nous qui devrions décider de leur répartition. Je suis contre les ARH. Il y a une organisation démocratique bien plus importante à mettre en place. Nous en reparlerons, y compris dans le cadre de la réforme prévue. Et je n'ai pas de raison de regretter d'avoir voté contre la création des ARH lors de l'examen du plan Juppé. Je veux d'autant moins qu'elles soient incluses dans cette loi que je suis pour leur disparition.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Premièrement, je fais remarquer à M. Gremetz que s'il fallait faire référence à des directrices dans l'amendement n° 54, il faudrait également parler de préfettes dans l'article auquel celui-ci se rapporte.

Deuxièmement, ce n'est pas parce qu'il serait sans doute nécessaire de revoir l'organisation régionale du secteur sanitaire et sociale que l'intervention du directeur de l'ARH n'est pas utile actuellement. Tel est le sens de cet amendement.

M. Denis Jacquat, rapporteur. En l'état actuel du projet de loi, il sera possible de consulter le directeur de l'ARH sur la mise en œuvre du plan.

M. Gérard Bapt. Cela dit, dans le cadre du système d'alerte du plan canicule, il est question non seulement de l'organisation médico-sociale, mais aussi des services d'urgence et des services d'accueil d'urgence des hôpitaux. Or il faut bien reconnaître qu'à l'heure actuelle, les moyens sont alloués par l'ARH sur délégation directe de crédits du ministère de la santé et de la protection sociale, sans passer par le préfet. De plus, leur affectation est très précisément ciblée par le directeur de l'ARH. Quoiqu'on pense du bien-fondé de la création de ces agences et de la nécessité de revoir leur organisation au plan régional, il apparaît que le directeur de l'ARH est aujourd'hui l'interlocuteur privilégié, de par son autorité et sa capacité à cibler les financements. Ainsi, les crédits qu'il vient d'allouer, dans le cadre du plan urgence, s'élèvent à 1,2 million d'euros pour Toulouse. Ce n'est pas faramineux, mais c'est toujours ça. C'est pourquoi il serait opportun que soit voté l'amendement soutenu par Mme Guinchard-Kunstler.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Denis Jacquat, rapporteur. Je tiens à préciser à M. Gérard Bapt qu'il s'agit de savoir qui décidera du déclenchement du plan d'alerte et d'urgence. L'amendement ne répond pas à cette question. L'ARH sera bien entendu consultée au départ, mais ce n'est pas elle qui prendra la décision. Celle-ci doit relever du préfet.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Tout à fait !

M. Denis Jacquat, rapporteur. Lors de la canicule, on a bien vu que personne n'a pris la décision de faire quoi que ce soit. Ce n'est pas à l'ARH mais au préfet d'assumer cette responsabilité.

M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. On est d'accord. C'est pourquoi nous avons proposé dans notre amendement que ce plan soit mis en œuvre « en lien avec le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation ».

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 54.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 9 corrigé et 55.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 9 corrigé.

M. Denis Jacquat, rapporteur. J'aurais volontiers, au nom de la parité, céder la parole à Mme Guinchard-Kunstler, qui a également signé comme les autres commissaires du groupe socialiste l'amendement de la commission.

Cet amendement précise que le plan d'alerte devra favoriser le rapprochement entre les actions sanitaires et sociales. En effet, la canicule de l'été dernier a démontré, s'il en était besoin, le trop grand cloisonnement entre ces deux secteurs. Il convient de développer une approche globale en direction des personnes âgées et des personnes handicapées. Je précise que les amendements n°s 9 corrigé et 55 ont été adoptés à l'unanimité par la commission des affaires sociales.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux personnes âgées. L'avis du Gouvernement est favorable. Articuler et rapprocher les actions sanitaires et sociales au profit des personnes âgées ou handicapées, surmonter les cloisonnements institutionnels, constituent à nos yeux des conditions nécessaires à la bonne prise en charge de ces populations, notamment pour faire face aux situations de crise et d'urgence.

A ce stade du débat, je vais répondre aux interventions de M. Bapt et de Mme Hoffman-Rispal.

M. Bapt m'a interrogé sur l'utilisation des brumisateurs. Le Gouvernement travaille depuis pratiquement un an sur le plan canicule. Mes services se sont consacrés à la partie qui concerne les personnes âgées, notamment au dispositif de veille et d'alerte, mais nous n'avons jamais fait allusion à des brumisateurs dans nos propositions.

Mme Hoffman-Rispal a fait référence au professeur Sanmarco. Il est vrai que celui-ci a fait des propositions intéressantes dès 1982. Je regrette comme elle que celles-ci n'aient jamais été prises en compte par les gouvernements qui se sont succédé depuis lors.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Comme vous dites !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 9 corrigé et 55.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Je suis saisi de deux amendements, nos 10 corrigé et 80, pouvant être soumis à une discussion commune. Sur l'amendement n° 10 corrigé, un sous-amendement n° 87, deuxième correction, a été présenté.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 10 corrigé.

M. Denis Jacquat, rapporteur. Cet amendement est le pendant d'un amendement précédent qui concernait le plan d'alerte et d'urgence. Ici, nous sommes dans le champ du dispositif de recueil d'informations - il y a un parallélisme.

J'ai cru comprendre tout à l'heure que le Gouvernement avait sur cet amendement un jugement différent. Nous l'avons évoqué en ce qui concerne le problème de la vulnérabilité. Je serais donc très heureux d'avoir plus de précisions de la part du Gouvernement, étant donné que plus le temps passe, plus un certain nombre d'entre nous s'interrogent.

M. le président. L'amendement n° 80 n'est pas défendu.

La parole est à M. Bernard Perrut, pour soutenir le sous-amendement n° 87, deuxième correction.

M. Bernard Perrut. L'article 1er du projet de loi indique quel est le rôle des communes dans le recensement de toutes les informations relatives aux personnes âgées et aux personnes handicapées. Il m'a paru de bon sens de prévoir que les communes recueillent ces éléments en coopération avec les structures qui, sur le terrain, peuvent être amenées à les aider dans un travail de ce type, à savoir les coordinations gérontologiques, les centres locaux d'information et de coordination gérontologiques et les maisons départementales du handicap. En effet, ce sont ces structures, et pas forcément les communes elles-mêmes, qui, au quotidien, sont au contact des personnes âgées et des personnes handicapées, qu'elles connaissent en général bien.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?

M. Denis Jacquat, rapporteur. Ce sous-amendement soulève le même problème que celui qui a été évoqué tout à l'heure par Gérard Bapt : il nous faut à tout prix un responsable clairement identifié.

Il est bien évident que la commune, qui est le responsable de l'établissement du registre, l'établira en association avec les coordinations gérontologiques, les CLIC et les maisons départementales du handicap. J'irai même plus loin : je pense qu'à l'avenir ces structures seront peut-être amenées à se regrouper. Quoi qu'il en soit, toutes devront être associées à la commune. Mais nous en sommes aujourd'hui à un stade où ce qui importe est de tirer les conclusions de ce qui s'est malheureusement passé l'été dernier : il faut des responsables désignés. Qui déclenche ? Qui enregistre ? Qui écrit ? Dans ce cas particulier, c'est la commune.

Votre sous-amendement, monsieur Perrut, est satisfait par ce qui est proposé dans l'article et dans l'amendement. Il me semble donc inutile. C'est pourquoi la commission l'a repoussé.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 10 corrigé et le sous-amendement n° 87, deuxième correction ?

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Je vais suivre l'avis de la commission sur le sous-amendement, dont je souhaite le retrait. Sur l'amendement, mon avis est défavorable.

Dans un précédent amendement, vous avez souhaité étendre aux personnes particulièrement vulnérables du fait de leur isolement le bénéfice des mesures prises dans le cadre du plan d'alerte et d'urgence, et le Gouvernement a donné à cet amendement un avis favorable. Par contre, élargir le champ du recensement effectué par les communes à l'ensemble de ces personnes ferait porter sur les collectivités - et cela a été la préoccupation de quelques-uns des orateurs - une charge trop lourde, qu'elles ne seront pas en mesure d'assumer. Etendre trop largement le champ des personnes que les communes pourront recenser porte aussi le risque de rendre inefficace le principe même de ce recensement.

M. le président. La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. L'amendement n° 10 corrigé pose un problème, qui m'amène à poser à nouveau la question que j'ai déjà posée à trois reprises en un peu plus d'une heure et à laquelle je n'ai toujours pas reçu de réponse. Repérer, oui, mais comment, avec quels critères et avec quels moyens ? Je vois des amendements arriver les uns derrière les autres, mais je n'ai toujours pas de réponse à cette question. Comment faire et avec quels moyens devons-nous le faire ?

J'ai bien noté que le sous-amendement avait été rejeté par la commission et avait reçu un avis défavorable du Gouvernement, mais permettez-moi d'en dire un mot, parce qu'il m'inspire quand même une certaine inquiétude. Je suis convaincue que les coordinations gérontologiques ont un rôle à jouer dans la mesure où elles sont l'instrument de proximité le plus efficace, en termes de coordination, pour aider au repérage. Par contre, je me souviens de la discussion du projet de loi relatif aux responsabilités locales et à la décentralisation : il avait été prévu que les coordinations gérontologiques allaient être mises sous la tutelle des départements. Et là, une fois encore, je ne sais pas quels moyens seront transférés aux départements pour gérer ces coordinations. Ce dont je suis sûre, c'est qu'elles ont besoin de moyens pour être efficaces.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Denis Jacquat, rapporteur. J'ai dit tout à l'heure que j'attendais les explications du Gouvernement. Après les explications très claires qu'il nous a données, je retire l'amendement n° 10 corrigé.

M. le président. L'amendement n° 10 corrigé est retiré. En conséquence, le sous-amendement n° 87, deuxième correction, n'a plus d'objet.

Je suis saisi de deux amendements, nos 4 et 97, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour soutenir l'amendement n° 4.

M. Jean-Pierre Decool. Cet amendement est défendu.

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 97.

M. le ministre délégué aux personnes âgées. La mise en œuvre du plan d'alerte et d'urgence est déclenchée par le préfet en cas de risques exceptionnels. Le Gouvernement vient d'ailleurs d'émettre un avis défavorable à un amendement précédent dans le but de laisser cette responsabilité à M. le préfet. Les informations nominatives recueillies préalablement par les communes auprès des personnes âgées et des personnes handicapées isolées à domicile permettent l'intervention ciblée des services sanitaires et sociaux auprès des populations les plus vulnérables, en cas de crise.

Le recensement des personnes, et cela est très important, s'effectue à leur demande. Cette disposition renvoie à un système déclaratif qui préserve les libertés individuelles, qui borne l'obligation faite aux communes, et par là même leurs responsabilités, en leur imposant uniquement une obligation de moyens et non de résultats. Voilà qui, à nos yeux, garantit un dispositif opérationnel de surveillance et d'assistance en cas de crise majeure, qui s'avérerait inconcevable s'il s'agissait de ficher le quart de la population française.

Par contre, l'expression « dont la situation le justifie », qui figure dans l'article L. 121-6-1 du code de l'action sociale et des familles, serait de nature à conférer aux maires un pouvoir d'appréciation, impliquant une évaluation sociale, médico-sociale et sanitaire de la situation des personnes concernées par le recensement, qui excède leur compétence et engage, le cas échéant, leur responsabilité en tant qu'exécutif de la commune dès lors qu'elle est susceptible de recours. Et Dieu sait si les maires sont déjà soumis à trop de responsabilités susceptibles de recours.

Le présent amendement vise donc à mettre en place un dispositif de recensement purement déclaratif et totalement objectif ne faisant pas intervenir un quelconque pouvoir d'appréciation du maire, susceptible, par définition, de recours. Autrement dit, à travers cet amendement, nous souhaitons protéger les maires de toutes les communes de France.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements ?

M. Denis Jacquat, rapporteur. La commission a rejeté l'amendement n° 4.

Elle a accepté l'amendement n° 97, qui dissipe toute ambiguïté. L'inscription dans le registre est de droit. Cet amendement permet de clarifier la question de la responsabilité pénale des maires, question qui a été très souvent abordée en commission. Je l'avais abordée dans l'amendement n° 13 corrigé, que je retirerais par conséquent si celui-ci était adopté par notre assemblée. Il est important de dégager les maires de cette responsabilité pénale.

Je n'ai rien d'autre à dire. Le ministre a été parfait. (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 97.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Veuillez m'excuser, madame Hoffman-Rispal. Vous m'aviez demandé la parole sur l'amendement n° 97 et j'aurais dû vous la donner avant la mise aux voix. Vous avez la parole.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Lorsque la question de la responsabilité des maires a été abordée en commission, j'étais un peu isolée. Je sentais bien qu'elle posait vraiment de grands problèmes dans votre majorité, et sans doute au-delà. Et il est vrai qu'on ne peut pas demander aux maires plus que ce qu'ils font déjà, surtout dans les petites communes. De ce point de vue, je crois que l'amendement n° 97 va dans le bon sens.

Cela dit, monsieur le ministre, vous nous parlez des « informations nominatives recueillies préalablement par les communes ». Mais je vous pose la question, même si j'ai une petite idée de la réponse, car je ne suis pas naïve. Quand on demande de recenser, il faut expliquer comment le faire. Demain, ou après-demain, lorsque le texte sera promulgué, verrons-nous dans la presse que les maires peuvent faire un recensement pour que les gens se déclarent ? Comment, et avec quels moyens ?

Je crois que je vous poserai cette question jusqu'à ce que j'aie une réponse, parce qu'elle est essentielle. Certes, on écarte la responsabilité pénale des maires, mais si l'on veut que le dispositif ait une quelconque efficacité, il faut éviter que pour les uns, il soit purement imaginatif, tandis que les autres ne sauraient pas très bien quelle procédure adopter. Une directive du Gouvernement visant à orienter les communes serait la bienvenue.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Je pensais avoir été clair. Les maires ont un pouvoir de signalement, dans chaque commune. Qui mieux qu'eux et que leur bureau d'aide social connaît les cas isolés et les personnes qui ont le plus besoin de solidarité ?

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Personne, en effet !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Mais, par l'amendement n° 97, nous avons voulu protéger le maire, de manière à ce que celui-ci ne soit passible d'aucun recours.

En effet, à nos yeux, le maire peut informer ou signaler telle ou telle situation. Vous le savez fort bien : dans bon nombre de communes rurales, il préside un bureau d'aide sociale. Il est donc à même d'intervenir sur ces questions.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Tout à fait !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Mais nous voulons éviter que sa responsabilité soit engagée. Pour autant, nous souhaitons qu'il soit associé pleinement à ces signalements, du fait de sa connaissance irremplaçable de la population.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. A présent, les choses sont plus claires.

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 11 corrigé.

Sur cet amendement, un sous-amendement n° 34 corrigé a été déposé.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 11 corrigé.

M. Denis Jacquat, rapporteur. Cet amendement vise à assurer l'efficacité du dispositif de recueil d'informations, en étendant à certaines catégories de tiers la possibilité de demander le recueil d'informations relatives aux personnes âgées, handicapées ou vulnérables. Sont en partie visés, comme plusieurs membres de la commission l'avaient demandé, les professionnels de santé.

L'amendement a été adopté en commission à l'unanimité.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour soutenir le sous-amendement n° 34 corrigé.

M. Maxime Gremetz. Le sous-amendement a été adopté par la commission.

M. Denis Jacquat, rapporteur. Merci : c'est une indication que je donnerai moi-même.

M. le président. M. Gremetz a le souci de faciliter votre travail de rapporteur, monsieur Jacquat. (Sourires.)

M. Maxime Gremetz. Ainsi que je l'ai dit lors de mon intervention sur l'article 1er : la disposition proposée vise à renforcer les dispositifs de veille et d'alerte en cas de catastrophe d'origine climatique. Pour ce faire, elle organise les moyens d'une meilleure identification des personnes en situation de perte d'autonomie.

Il s'agit d'abord d'instituer dans chaque département un dispositif d'alerte et d'urgence afin de parer aux situations de risques exceptionnels. Répétons-le : alors que cette sécurité devrait être garantie par l'Etat aux termes de ses missions régaliennes, le Gouvernement se décharge de sa responsabilité sur les départements, qui devront, une nouvelle fois, dégager des moyens humains et financiers pour ne pas être tenus pour responsables, si l'on constatait des complications, notamment un nombre de décès anormalement élevé.

Il faut ensuite prévoir l'organisation par les communes du recensement des personnes âgées et des personnes handicapées résidant à domicile dont la situation justifie une attention particulière de la part des pouvoirs publics. Mais pour cela, il faudra qu'elles en fassent la demande.

Cette disposition, qui peut susciter les mêmes critiques que la précédente, pose d'autres problèmes, notamment celui de la responsabilité des élus locaux. En effet, pour pouvoir prétendre, dans des situations à risque susceptibles de mettre en danger leur santé et leur sécurité, à des actions de prévention ou de secours, les personnes vulnérables doivent, aux termes de l'amendement n° 11 corrigé, se faire recenser. Je rappelle que le recensement relève de la responsabilité des communes, donc des maires.

Or, précisément parce qu'on vise des personnes isolées, il sera difficile de recueillir tous les consentements. En effet, si celles-ci sont déjà en marge, comment imaginer qu'elles se manifesteront spontanément ?

C'est pourquoi le Conseil d'Etat recommandait, dans le respect du principe du droit à la vie privé, qu'un proche - professionnel de santé, travailleur social ou encore membre de la famille - assistant dans son quotidien la personne en perte d'autonomie, donc supposée vulnérable, puisse procéder à son inscription sur le registre de recensement.

Cette proposition - émanant du Conseil d'Etat, je le rappelle - n'a pas été retenue en commission, au profit d'un amendement du rapporteur, qui, à notre sens, laisse le problème entier, notamment en matière de consentement. En effet, une incertitude demeure sur la responsabilité en cas de drame : si l'opposition à l'inscription sur le registre n'est pas clairement établie, qui sera responsable en cas de doute ? Le maire ? Le proche qui assiste la personne et qui n'a rien dit ?

J'ai bien noté, monsieur le ministre, votre volonté de dégager la responsabilité du maire et de le protéger, mais je pose la question en droit. En effet, parfois, l'opposition ne peut pas être établie par la personne, par exemple dans le cas où elle souffre de maladies neuro-dégénératives.

A ces questions importantes, la réponse apportée par l'amendement du rapporteur ne nous semble pas totalement satisfaisante.

Nous l'avons donc sous-amendé, afin de lever toute ambiguïté et de ne laisser aucune personne vulnérable en dehors d'un plan d'urgence. Nous proposons d'intégrer au texte la notion de consentement présumé, qui vaut dans d'autres législations : en cas d'absence d'opposition clairement manifestée, le consentement est présumé pour que la personne soit inscrite dans le registre, et ce, naturellement, dans le respect des principes de la CNIL.

Ainsi, en cas de doute sur l'acceptation de la personne, celle-ci bénéficiera du soutien qui lui sauvera peut-être la vie, d'une manière qui lève toute ambiguïté sur la responsabilité du maire chargé de tenir le registre de recensement.

Pardon d'avoir été un peu long, mais nous touchons là à une question essentielle, qui concerne à la fois la liberté et la responsabilité de chacun.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement ?

M. Denis Jacquat, rapporteur. M. Gremetz vient de l'indiquer : il s'agit d'un sous-amendement essentiel et, en tant que rapporteur de la commission des affaires sociales, j'ai proposé aux commissaires de l'accepter, ce qu'ils ont fait à l'unanimité.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 11 corrigé et le sous-amendement n° 34 corrigé ?

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 34 corrigé.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11 corrigé, modifié par le sous-amendement n° 34 corrigé.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n°s 12 rectifié et 5, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour soutenir l'amendement n° 5.

M. Jean-Pierre Decool. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 12 rectifié.

M. Denis Jacquat, rapporteur. L'amendement, qui a été adopté par la commission, prévoit que le recueil des informations se fait dans le respect des dispositions de la loi « informatique et libertés ».

M. le président. Par ailleurs, je ne pense pas que la commission soit favorable à l'amendement n° 5.

M. Denis Jacquat, rapporteur. Monsieur le président, vous avez une prémonition extraordinaire. (Sourires.) L'amendement n° 5 nous paraît en effet difficilement conciliable avec le respect des libertés individuelles.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements ?

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Favorable à l'amendement n° 12 rectifié et défavorable à l'amendement n° 5.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 13 corrigé. Je rappelle que cet amendement a déjà été retiré par le rapporteur.

Je suis saisi d'un amendement n° 56 corrigé. Cet amendement est satisfait par l'adoption de l'amendement n° 12 rectifié.

Je mets aux voix l'article 1er, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 1er, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 1er

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 57, portant article additionnel après l'article 1er.

La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler, pour le soutenir.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Je vais profiter de l'occasion pour interroger de nouveau M. le ministre sur le financement, annoncé dans le cadre du plan sur la canicule, de salles de rafraîchissement dans l'ensemble des structures d'hébergement, mesure qui rencontre évidemment l'appui de la plupart des spécialistes.

L'amendement prévoit un dispositif d'incitation fiscale offrant la possibilité concrète, pour les établissements, de réaliser les travaux.

Monsieur le ministre, je renouvelle ma question sur l'origine des financements que vous avez annoncés. M. Terrasse vous a interrogé tout à l'heure, comme je l'ai fait moi-même. Je pense que la mesure est attendue par les maisons de retraite. Mais je voudrais savoir sur quels crédits sont inscrites les sommes nécessaires à sa réalisation. La CNAV sera-t-elle mise à contribution, comme M. Terrasse le suggérait tout à l'heure ? Vous n'avez pas répondu sur ce point.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Denis Jacquat, rapporteur. L'amendement a été longtemps débattu en commission. Mais, outre que le Gouvernement a prévu un mode de financement, le dispositif proposé par l'amendement ne vise pas tous les établissements, puisque ceux-ci ne sont tous pas assujettis à la taxe sur les salaires.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. En effet !

M. Denis Jacquat, rapporteur. L'amendement a par conséquent été rejeté par la commission. Mais il était logique de poser la question du financement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 56 corrigé ?

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Défavorable.

Par ailleurs, je le confirme : 40 millions d'euros sont prévus pour que les maisons de retraite puissent se doter de pièces rafraîchies. L'Etat et la Caisse nationale d'assurance vieillesse, qui en a délibéré cet après-midi, garantissent une subvention de 40 % pour équiper l'ensemble des maisons de retraite publiques, privées ou associatives, à hauteur de 15 000 euros pour quatre-vingts places.

Je précise que ce financement s'effectue sur les disponibilités, sans qu'il soit touché, comme on l'a dit à tort, aux crédits destinés aux aides ménagères. Ce sont bien les disponibilités de la Caisse nationale d'assurance vieillesse qui lui ont permis de délibérer dans ce sens. Il est donc faux de prétendre que le versement s'effectue au détriment des crédits destinés aux aides ménagères.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Merci de cette précision.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.


M. Maxime Gremetz
. Tout d'abord, nous ne partageons absolument pas la démarche qui consiste à instaurer des crédits d'impôt, alors que l'on ne pose pas le problème de fond, celui du financement. Nous ne sommes donc pas d'accord avec l'amendement n° 57.

Mais venons-en précisément au fond. Chose promise chose due, puisque la question du financement a été évoquée, je vais vous citer des chiffres précis, que je pourrai communiquer à ceux qui le souhaitent. Ils permettent de démontrer ce que j'ai avancé tout à l'heure, c'est-à-dire que les gains représentés par une journée de travail supplémentaire bénéficieront pour deux tiers aux employeurs et pour un tiers aux personnes âgées.

La valeur ajoutée brute des entreprises privées non financières étant d'environ 5 160 milliards de francs pour 16 millions de salariés et 225 jours de travail, la richesse produite est de 220 euros par jour et par salarié. Or, la cotisation patronale versée à la Caisse de solidarité sera de 0,3 % des salaires annuels, soit 55 euros environ. Autrement dit, sur 220 euros, 55 iront aux personnes âgées et 165 aux employeurs, qui bénéficieront ainsi d'une journée de travail gratuite. Un tiers pour les vieillards, deux tiers pour les profits : on comprend mieux pourquoi le MEDEF applaudit ! Faites le compte, vérifiez les chiffres !

M. le ministre délégué aux personnes âgées. Je le ferai, monsieur le député.

M. Maxime Gremetz. Ma démonstration est simple et précise. Nous sommes plusieurs à avoir étudié minutieusement la question et nous n'avons rien inventé.

Comme nous souhaitons que tout le bénéfice de la corvée - car il s'agit bien d'une corvée : les salariés sont taillables et corvéables à merci - aille à nos aînés en difficulté, nous avons déposé un amendement qui viendra en discussion plus tard et qui vise à porter le taux de la cotisation de 0,3 % à 1,2 % des salaires annuels, afin que le produit de celle-ci soit égal à la richesse produite.

Je tenais à faire cette démonstration, car je ne veux pas que vous partiez dormir en pensant que j'ai avancé des chiffres sans preuve. (Sourires.) D'ailleurs, mes fiches sont toujours à votre disposition.

M. le président. Monsieur Gremetz, je suis certain que M. le ministre est très sensible à votre attention. Je ne doute pas qu'il dormira mieux cette nuit... ainsi que le rapporteur. (Sourires.)

Je mets aux voix l'amendement n° 57.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un mendement n° 81. Cet amendement n'est pas défendu.

    2

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président. Ce matin, à neuf heures trente, première séance publique :

Discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique :

M. Jean Dionis du Séjour, rapporteur (rapport n° 1553) ;

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 1350, relatif à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées :

M. Denis Jacquat, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport n° 1540).

À quinze heures, deuxième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le jeudi 6 mai 2004, à une heure cinq.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot