COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES
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Mission d'information 
sur 
les métiers artistiques
(10 janv. 2007 )
(les informations concernant les réunions à venir ont un caractère prévisionnel et sont susceptibles d’être modifiées)

Rapport d'information de M. Christian Kert n° 1975, déposé le 7 décembre 2004

illustration du dossier : palette de peintre

Objectifs de la mission d’information
La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a créé au cours de sa réunion du mercredi 3 décembre 2003 une mission d’information pour mener une réflexion sur les conditions actuelles d’exercice des métiers artistiques en France et sur la place qui leur est faite dans notre société. Cette notion de " métiers artistiques " rassemble :

- tous les artistes, qu’ils occupent un emploi permanent ou intermittent dans les domaines du spectacle vivant, du cinéma, de l’audiovisuel, ou encore qu’ils travaillent en indépendants, comme les artistes plasticiens ou les auteurs,

- les emplois de techniciens, permanents ou intermittents, qui contribuent à la création d’un spectacle, vivant ou audiovisuel.

Tous les aspects de la vie professionnelle de ces métiers seront examinés : formation, conditions d’accès, exercice, rémunération, protection sociale…

Comme toute les missions d’information, le travail s’articulera en deux temps : une analyse de la situation actuelle, avec éventuellement des comparaisons internationales, puis des propositions d’évolution, afin de garantir à ces professionnels des conditions d’emploi et de création satisfaisantes et assurer, par ce biais, la préservation de la richesse et de la diversité de la création artistique française.

Le travail de la mission d’information sera nourri par des auditions ainsi que par des déplacements en France et en Europe.

Composition de la mission
M. Dominique Paillé, président (UMP), M. Christian Kert, rapporteur (UMP), M. Emmanuel Hamelin (UMP), Mme Françoise de Panafieu (UMP), Mme Muriel Marland-Militello (UMP), M. Dominique Richard (UMP), M. Patrick Bloche (SOC), M. Michel Françaix (SOC), M. Didier Mathus (SOC), M. Pierre-Christophe Baguet (UDF), M. Frédéric Dutoit (CR

Calendrier global
Compte tenu de l'étendue du champ d'investigation de la mission d'information, du nombre de personnes à rencontrer ainsi que de la date des déplacements envisagés, la mission devrait être en mesure de rendre ses conclusions en septembre ou octobre prochain. Elle communiquera néanmoins régulièrement sur l'avancée de ses travaux et ouvrira à la presse certaines de ses auditions.

La mission se réunit tous les mercredis à 11 h. 30 pour une heure trente d’audition. Elle a interrompu ses travaux la troisième semaine de février (16-22 février) et les interrompra de nouveau au cours de la quatrième semaine de mars (22-28 mars) et de la troisième semaine d’avril (19-25 avril).

 

Contributions

Le Bureau de la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales a constitué, en novembre 2003, une mission d’information sur les conditions actuelles d’exercice des métiers artistiques en France, que ceux‑ci soient exercés à titre salarié – permanent ou intermittent – ou en indépendant.

Les objectifs de cette mission sont donc relativement larges mais elle a décidé, au regard de l’actualité, de travailler dans un premier temps sur la situation des intermittents du spectacle relevant des annexes 8 et 10 de la convention UNEDIC. A l’issue de deux mois d’auditions, elle formule aujourd’hui un certains nombre de propositions, d’urgence et à plus long terme, afin d’apporter sa contribution à un débat qui semble heureusement renaître.

Toutes ces propositions s’inscrivent dans l’idée que ce n’est pas à un régime de protection sociale d’assurer le financement de la création et de la diffusion culturelle dans notre pays. Remise au ministre de la culture et de la communication, la contribution présentée ci‑après servira donc de socle à la réflexion que la mission d’information entend désormais mener sur le financement de la vie artistique et culturelle en France et sur la place qui doit être faite aux métiers artistiques dans notre pays.

Dominique Paillé, président, Christian Kert, rapporteur,
Patrick Bloche, Pierre‑Christophe Baguet, Frédéric Dutoit, Michel Françaix, Emmanuel Hamelin, Muriel Marland‑Militello, Didier Mathus, Françoise de Panafieu, Dominique Richard,
membres de la mission d’information.

 


CONTRIBUTION AU DÉBAT SUR LE RÉGIME D’ASSURANCE CHÔMAGE DES INTERMITTENTS DU SPECTACLE
(10 mars 2004)

 Se félicitant de la reprise des négociations entre M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication et les représentants des intermittents du spectacle et souhaitant que le gouvernement aide à parvenir à un règlement rapide du conflit, les membres de la mission d’information sur les métiers artistiques ont décidé de publier un document synthétisant leurs réflexions et leurs propositions sur ce sujet, à l’issue de deux mois d’auditions.
Cette contribution reflète les positions et les souhaits de l’ensemble des membres de la mission à propos du conflit des intermittents. Elle appelle à une analyse lucide et responsable de la situation nouvelle créée par l’accord, à la prise rapide de mesures propres à apaiser les tensions et à réduire les injustices les plus criantes et enfin à une reprise du dialogue social avec tous les acteurs de ce secteur, afin d’envisager ensemble une évolution concertée du régime et, au delà, de nouveaux modes de financement pour la création et l’action culturelle.

1. UN CONSTAT de blocage et d’insatisfactions légitimes

La mission d’information ne met pas en cause la légitimité des confédérations interprofessionnelles ayant signé l’accord du 26 juin 2003, mais elle constate que celui‑ci est imparfait car il n’a pas atteint les objectifs que s’étaient fixés les partenaires sociaux et son application a rapidement généré des effets très négatifs.
ð Après deux mois d’application, l’accord n’a pour l’instant permis de réduire ni le déficit du régime, ni les abus et fraudes au dispositif, et la mission d’information doute qu’il atteigne cet objectif dans la durée.
D’un point de vue comptable, l’effet de la réduction de la période d’accumulation des droits à l’assurance chômage a été contrebalancée par l’augmentation des indemnités versées à certains allocataires par le jeu conjugué des nouvelles bases de calcul (salaire journalier) et de la réduction de la période de décote. Par ailleurs, les mécanismes d’ouverture des droits sont tellement complexes que, loin de renforcer la transparence, ils encouragent en réalité la fraude et la non-déclaration des heures travaillées.

ð Un impact social très négatif
On peut par ailleurs s’interroger sur la véritable mesure, par les partenaires sociaux signataires, de l’impact social des différentes dispositions de l’accord. De plus, la circulaire d’application publiée par l’UNEDIC va manifestement, sur différents points, au-delà du contenu de l’accord, plongeant de nombreux allocataires dans une situation injuste et désespérante.
Pour la quasi-totalité des personnes auditionnées par la mission d’information, la mise en œuvre des nouvelles annexes 8 et 10 conduit tout à la fois :
– à un exclusion des plus fragiles (les jeunes, les malades, les femmes enceintes),
– et à un système d’indemnisation inéquitable qui bénéficie aux « permittents », c'est-à-dire à ceux qui déclarent régulièrement des cachets importants pour un nombre d’heures réduit.
L’accord du 26 juin semble donc avoir oublié le véritable fondement du régime : la lutte contre la précarité qui caractérise les emplois artistiques.
Au-delà, le nouvel accord déséquilibre l’ensemble du secteur du spectacle et de l’audiovisuel en encourageant le travail au noir (la déclaration des heures travaillées au delà des 507 heures est largement découragée) et en renchérissant le coût des productions.
La mission d’information sur les métiers artistiques s’est déjà émue de ces problèmes à travers un courrier adressé à M. Denis Gautier-Sauvagnac, président de l’UNEDIC et une demande de rendez-vous au secrétaire général de la CFDT, M. François Chérèque. Ces deux démarches sont à ce jour encore sans réponses. Les membres de la mission d’information estiment qu’il est désormais impératif d’agir et de prendre des décisions rapides pour sortir de l’impasse économique et sociale dans laquelle on se trouve.

2. L’urgence de mesures d’apaisement et d’équité

Il convient avant tout de restaurer la confiance. Des solutions rapides et pragmatiques doivent donc être trouvées. Dans le cadre actuel de l’accord du 26 juin, un certain nombre d’aménagements, par le biais d’un avenant, doit permettre de rétablir l’équité sociale.
Après avoir entendu les différentes parties prenantes au débat, la mission d’information demande :

ð le retour à un calcul des droits sur la base de 507 heures réalisées sur douze mois selon l’ancien système de la date anniversaire, seul à même de garantir, dans l’immédiat, une possibilité d’entrée dans le système notamment pour les plus jeunes, 

ð le plafonnement des allocations et la restauration d’un véritable délai de carence,

ð le retour au droit antérieur pour les congés maladie et maternité,

ð la suppression des dispositions relatives à la prise en compte des droits d’auteur,

ð le renforcement des moyens de lutte contre les fraudes et les abus grâce à l’augmentation des moyens disponibles à l’inspection du travail et à la DILTI.

Au-delà de ces aménagements, tout le monde sait bien aujourd’hui que ces accords ne sont pas durables en l’état. Certes, parmi les partenaires sociaux signataires de l’accord, certains ont d’ores et déjà fait connaître leur ferme opposition à toute renégociation et leur volonté de renvoyer les problèmes à la responsabilité des pouvoirs publics, mais une telle rigidité de position n’est pas tenable face au profond sentiment d’injustice qu’éprouvent les professionnels concernés.

3. la nécessité d’une reprise du dialogue et de la négociation

Avant même la renégociation globale de la convention UNEDIC prévue pour la fin 2005, le ministre de la culture et de la communication doit réunir toutes les parties prenantes au dossier pour que les professionnels puissent exprimer leurs attentes dans la sérénité et être véritablement entendus. Ainsi, leurs positions et propositions seront connues des partenaires sociaux lorsqu’ils auront à renégocier le contenu des annexes 8 et 10 dans le cadre interprofessionnel.
Pour sa part, à ce point de ses auditions et de sa réflexion, la mission d’information estime que le régime d’assurance chômage des intermittents du spectacle doit continuer à s’insérer dans le cadre de la solidarité interprofessionnelle.
Par contre, il sera nécessaire de :

ð Redéfinir les « limites » du régime

Pour que cette solidarité sociale soit juste, il faut qu’elle ne bénéficie qu’à des personnes qui contribuent directement à la création. Lorsqu’un métier peut être exercé dans les même conditions dans le spectacle vivant (ou dans la production cinématographique et audiovisuelle) et en dehors, ce métier ne doit pas être retenu. De même, la frontière doit être mieux tracée entre amateurs et professionnels, notamment dans le domaine de l’animation culturelle.
Enfin, l’entrée dans le système doit également faire l’objet d’un filtre côté employeur : n’importe qui ne doit pas pouvoir décider, du jour au lendemain, qu’il peut employer des intermittents. Les contrôles lors de l’attribution de la licence d’entrepreneur de spectacles doivent donc être renforcés et le système étendu aux secteurs du cinéma et de l’audiovisuel. 

ð Garantir la situation des plus fragiles

L’entrée et la sortie de carrière doivent faire l’objet d’un traitement spécifique. De même, les personnes malades et les femmes enceintes ne doivent pas se trouver en situation d’être plus mal traitées que dans le régime de droit commun. La loi devra, si nécessaire, être modifiée pour prendre en compte ces cas particuliers.

ð Restaurer les conditions de l’emploi artistique en France

Les pouvoirs publics doivent, par tous les moyens possibles, inciter les « producteurs » à assumer le coût réel des spectacles qu’ils achètent ou qu’ils créent. Le contrôle du travail illégal doit donc être intensifié, de même que celui du recours abusif au CDD d’usage : les personnes embauchées sous le statut de l’intermittence doivent effectivement occuper des postes relevant de ce régime. La réflexion actuellement en cours au ministère du travail sur de nouvelles formes de contrat de travail sera également utile pour proposer de nouvelles formes d’emploi, médianes entre la précarité de l’intermittence et la rigidité d’un CDI.
Dans ce cadre, les institutions publiques du spectacle vivant comme de l’audiovisuel doivent être des employeurs et des producteurs de spectacles exemplaires : il en va de la crédibilité de l’Etat et des collectivités locales. Pour cela, il n’y a pas de solution miracle : les moyens de production doivent être renforcés et les contrôles sur leur juste et efficace utilisation, intensifiés.
L’ensemble de ces évolutions appelle néanmoins, de façon plus générale, une réflexion sur le financement de la vie culturelle en France.
Il n’est en effet pas acceptable qu’un système de protection sociale soit utilisé pour financer le soutien à la création artistique. La solidarité sociale interprofessionnelle n’a rien à voir avec les politiques publiques de soutien aux activités artistiques et culturelles.
A ce sujet, deux pistes ont été évoquées :

ð La création d’une caisse complémentaire financée par l’Etat, les collectivités locales et les entreprises du secteur, comme le propose M. François Chérèque, secrétaire général de la CFDT.

ð Le développement d’une nouvelle politique d’aides publiques par l’Etat et les collectivités locales, qu’il s’agisse d’aides directes, sous forme de subventions aux institutions de diffusion, ou d’aides indirectes et notamment fiscales, comme par exemple l’extension du crédit d’impôt « cinéma » au secteur de la production audiovisuelle. Dans les mois qui viennent, la mission d’information sur les métiers artistiques s’attachera en priorité à étudier cette perspective et proposera, en conclusion de ses travaux, les solutions qui lui sembleront les plus efficaces et les plus réalistes.


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