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le 21 octobre 2002
No  251
ASSEMBLÉE  NATIONALE
CONSTITUTION  DU  4  OCTOBRE  1958
DOUZIÈME  LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 octobre 2002.
P R O J E T   D E   L O I

autorisant la ratification de l'accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Croatie, d'autre part (ensemble huit annexes et six protocoles),

(Renvoyé à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution
d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présenté
au nom de M. Jean-Pierre RAFFARIN,
Premier ministre,
par M. Dominique de VILLEPIN,
ministre des affaires étrangères.

            Traités et conventions.

EXPOSÉ  DES  MOTIFS

                    Mesdames, Messieurs,
        L'Union européenne a lancé en juin 1999 (cf. note 1) le processus de stabilisation et d'association, cadre d'une nouvelle politique ambitieuse et à long terme vis-à-vis des pays des Balkans occidentaux (Albanie, ancienne République yougoslave de Macédoine - ARYM -, Bosnie-Herzégovine, Croatie, République fédérale de Yougoslavie). Cette politique se fonde sur les éléments suivants :
        -  l'idée qu'une perspective crédible d'adhésion potentielle à l'Union européenne, une fois les conditions remplies, est le meilleur levier pour inciter ces pays à réaliser les réformes nécessaires ;
        -  la nécessité que les pays de la région établissent entre eux des relations normales, afin de contribuer à la stabilité politique et économique de la région ;
        -  la volonté d'adopter une approche fondée sur des éléments communs (conditions politiques et économiques définies précisément dans l'accord), tout en permettant à chaque pays de progresser à son rythme et selon ses mérites.
        Le processus de stabilisation et d'association représente un engagement à long terme de l'Union européenne vis-à-vis de cette région, tant sur le plan des efforts politiques que sur celui des ressources financières et humaines. Il constitue un cadre général, qui s'appuie sur trois éléments :
        -  un nouveau type de relation contractuelle, les accords de stabilisation et d'association, pierre angulaire du processus et étape fondamentale dans sa réalisation : la conclusion de ces accords, fortement inspirés des accords européens, marque l'engagement des signataires de parvenir, au terme d'une période de transition, à une pleine association avec l'Union européenne, l'accent étant mis sur le respect des principes démocratiques essentiels et sur la reprise des éléments fondamentaux de l'acquis communautaire ;
        -  un nouveau programme unique d'assistance à la région, le programme CARDS (cf. note 2) , doté d'un montant de référence financière indicatif de 4,65 milliards d'euros pour la période 2000-2006. Ce programme vise à accompagner et conforter le processus de réformes démocratiques, économiques et institutionnelles dans les pays de la région ;
        -  des préférences commerciales asymétriques exceptionnelles, destinées à favoriser l'accès au marché communautaire des produits industriels et agricoles des Balkans, de façon à contribuer au redémarrage de leurs économies par une stimulation de leurs exportations (cf. note 3) .
        La République de Croatie est, après l'ARYM, le second Etat de la région à avoir signé un accord de stabilisation et d'association. Après les conclusions favorables de l'étude de faisabilité de la Commission, le Conseil affaires générales (CAG) du 13 juin 2000 a adopté les directives de négociation en vue d'établir un accord de stabilisation et d'association (ASA). Les négociations, engagées par la Commission, sous présidence française, à l'occasion du sommet de Zagreb, le 24 novembre 2000, ont pu être conclues sous présidence suédoise, permettant de procéder au paraphe de l'accord le 14 mai 2001 à Bruxelles. Il a été signé à Luxembourg le 29 octobre 2001, entre les représentants de la Communauté et des Etats membres d'une part, et la République de Croatie d'autre part (accord mixte, sur la base de l'article 310 du TCE).

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*    *

        L'accord est structuré en un préambule et 130 articles répartis en dix titres. Y sont joints huit annexes, six protocoles et onze déclarations communes ou unilatérales.
        1o  Le préambule contient une « clause évolutive » alignée sur les conclusions des conseils européens de Cologne (§ 72) et Feira (§ 67), qui confirme à la République de Croatie sa qualité de candidat potentiel à l'adhésion : « rappelant la volonté de l'Union européenne d'intégrer dans la plus large mesure possible la Croatie dans le courant politique et économique général de l'Europe et la qualité de candidat potentiel à l'adhésion à l'Union européenne de ce pays, sur la base du traité sur l'Union européenne et du respect des critères définis par le Conseil européen de juin 1993, sous réserve de la bonne mise en œuvre du présent accord, notamment en ce qui concerne la coopération régionale ». Cette clause évolutive est similaire à celle qui avait été adoptée pour l'ASA-ARYM.
        2o  L'article 1er énonce les objectifs de l'association : le renforcement du dialogue politique, un rapprochement de la législation de la Croatie avec celle de la Communauté, l'achèvement de la transition vers une économie de marché, l'établissement progressif d'une zone de libre-échange avec la Communauté, le développement de la coopération régionale.
        3o  Le titre Ier (articles 2 à 6) porte sur les principes généraux de l'accord. Outre le respect des principes démocratiques et des droits de l'homme et de l'économie de marché, qui constituent des éléments essentiels de l'accord, sont également citées les conditionnalités politiques et économiques de l'approche régionale de l'Union européenne (UE) (telles qu'énoncées dans les conclusions du Conseil du 29 avril 1997) ainsi que le développement de la coopération régionale et de relations de bon voisinage. L'association sera entièrement réalisée au terme d'une période transitoire maximale de six ans. Le Conseil de stabilisation et d'association est chargé d'examiner régulièrement l'application de l'accord et la mise en œuvre par la Croatie des réformes juridiques, institutionnelles et économiques qu'il prévoit (article 5).
        4o  Le titre II (articles 7 à 10) porte sur le dialogue politique entre la Croatie et l'Union européenne. Le dialogue politique est appelé à se dérouler, au niveau ministériel, au sein du Conseil de stabilisation et d'association, et au niveau parlementaire, au sein de la Commission parlementaire de stabilisation et d'association. Il peut prendre d'autres formes appropriées à la demande des Parties (réunions de hauts fonctionnaires notamment).
        5o  Le titre III (articles 11 à 14) porte sur la coopération régionale. Il s'agit d'une spécificité des accords de stabilisation. La Croatie doit s'engager dans une coopération régionale avec les autres pays du processus de stabilisation et d'association. Conformément aux conclusions du sommet de Zagreb (lors duquel les pays de la région s'étaient engagés à conclure entre eux des conventions de coopération régionale), l'accord porte obligation pour la Croatie de conclure des conventions de coopération régionale avec les autres pays de la région qui conclueront un ASA avec l'Union européenne (obligation d'entamer les discussions dès la signature de l'ASA par le pays concerné et de conclure une convention de coopération régionale dans les deux ans suivant l'entrée en vigueur de cet ASA). La volonté de la Croatie de conclure une telle convention constituera l'un des facteurs déterminants du développement de ses relations avec l'Union européenne. L'accord offre également la possibilité de conclure de telles conventions avec des pays candidats à l'UE.
        6o  Le titre IV (articles 15 à 44) porte sur la libre circulation des marchandises. L'article 15 prévoit la constitution progressive d'une zone de libre-échange, pendant une période transitoire maximale de six ans, dès l'entrée en vigueur de l'accord.
        Concernant la Croatie, le détail et le calendrier de libéralisation sont précisés dans les annexes. Pour l'ensemble du commerce croate, 60 % des lignes tarifaires seront libéralisées au bout d'un an et 87,5 % d'ici six ans (fin de la période transitoire). Pour les produits industriels, 77 % des lignes tarifaires seront libéralisées dès l'entrée en vigueur de l'accord et 93 % après deux ans. Pour les produits agricoles, la Commission européenne estime que le taux de libéralisation concernera 46 % du commerce trois ans après l'entrée en vigueur de l'ASA (le solde non libéralisé se voyant appliqué une réduction de 60 % des droits applicables), le reste étant libéralisé dans un délai maximum de six ans. Une clause de rendez-vous est fixée afin d'examiner, d'ici le 1er juillet 2006 au plus tard, des mesures de libéralisation additionnelles pour les produits agricoles et de la pêche (article 29).
        De la part de l'Union européenne, les pays balkaniques ont bénéficié d'une procédure originale : le Conseil européen de Lisbonne avait en effet conclu que les accords de stabilisation et d'association devaient être précédés d'une libéralisation asymétrique des échanges. Sur cette base, le CAG du 18 septembre 2000 a adopté le règlement 2007/2000 CE offrant à ces pays de façon unilatérale et temporaire (deux ans, étendus à cinq ans depuis, à l'occasion de l'extension du champ d'application de ce règlement à l'ARYM et à la RFY) des préférences commerciales asymétriques exceptionnelles, permettant à leurs produits industriels (hors certains produits textiles) et à la quasi-totalité de leurs produits agricoles (à l'exception de certaines catégories de viande bovine, du vin et des conserves de poisson) d'accéder au marché communautaire sans quotas et à droit zéro.
        L'articulation entre ces préférences asymétriques et le volet commercial des ASA avait constitué l'un des points les plus durs des discussions à quinze. Tout en acceptant l'abandon des prix d'entrée pour les fruits et légumes (cf. note 4) dans le cadre des préférences asymétriques (en raison de leur caractère unilatéral, exceptionnel et temporaire), plusieurs délégations s'opposaient à ce que cet abandon soit contractualisé dans l'ASA, soulignant qu'une telle contractualisation ne pourrait que susciter des demandes reconventionnelles de la part d'autres pays tiers liés à l'UE par des accords et qu'ainsi l'UE risquait d'être obligée de leur accorder les mêmes préférences contractuelles conformément aux règles de l'OMC, ce qui remettrait en cause le fonctionnement de l'une des organisations communes de marché les plus sensibles de la politique agricole commune. L'accord mis en place dans le cadre de l'ASA-ARYM, conclu à l'automne 2000, a été reconduit. Il repose sur trois éléments :
        -  l'insertion, dans les décisions du Conseil concernant la signature et la conclusion de l'ASA, d'un article de non-précédent (indiquant que « les dispositions commerciales contenues dans l'accord ont un caractère exceptionnel, lié à la politique mise en œuvre dans le cadre du processus de stabilisation et d'association, et ne feront pas, pour l'Union européenne, figure de précédent à l'égard de pays tiers autres que les pays des Balkans occidentaux ») ;
        -  le renforcement des clauses de sauvegarde dans l'ASA : outre la clause de sauvegarde générale (article 38) prévoyant la possibilité pour les Parties de prendre les mesures appropriées en cas de dommages graves causés par l'importation d'un produit, une clause de sauvegarde spécifique est prévue au cas où l'importation de produits agricoles transformés, de produits agricoles et de produits de la pêche de l'une des Parties entraînerait « une perturbation grave des marchés ou des mécanismes de régulation de l'autre Partie » (article 31). Parallèlement, une double clause de sauvegarde - anti-fraude et perturbation des marchés - est introduite dans le règlement sur les mesures commerciales autonomes, à l'occasion de son extension à l'ARYM et la RFY (20 novembre 2000, règlement CE 2563/2000) ;
        -  le maintien dans l'ASA du système des prix d'entrée pour les fruits et légumes, sachant que les préférences commerciales prévoient un dispositif plus favorable (sans prix d'entrée), accordé sur une base unilatérale. Il est ainsi indiqué que, pour les fruits et légumes, pour lesquels le tarif douanier commun prévoit l'application de droits de douane ad valorem et d'un droit de douane spécifique (prix d'entrée), la suppression ne s'applique qu'au droit ad valorem (article 27). Mais dans le même temps, il est précisé que le dispositif plus favorable mis en place dans le cadre des préférences commerciales prévaut sur les dispositions de l'accord : l'article 30 prévoit que « les dispositions du présent chapitre n'affectent en rien l'application, sur une base unilatérale, de mesures plus favorables par l'une ou l'autre des Parties ». Par ailleurs, une déclaration de la Communauté et des Etats membres annexée à l'accord ajoute que « les mesures commerciales autonomes unilatérales les plus favorables s'appliquent en plus des concessions commerciales contractuelles offertes par la Communauté dans le présent accord », et que, pour les fruits et légumes, « la suppression s'applique également au droit de douane spécifique (prix d'entrée), par dérogation à la disposition correspondante de l'article 27, paragraphe 1 ». Ce dispositif permet de conserver aux pays des Balkans le bénéfice intégral des préférences commerciales, sans créer juridiquement de précédent vis-à-vis des pays tiers.
        Le régime applicable aux produits textiles et aux produits sidérurgiques est précisé dans des protocoles annexés à l'accord. Le régime applicable aux vins et spiritueux sera défini dans un accord distinct. Le régime applicable aux produits agricoles transformés est déterminé par un protocole annexé à l'accord. L'article 29 prévoit une clause de rendez-vous : d'ici le 1er juillet 2006 au plus tard, la Communauté et la Croatie devront examiner, au sein du Conseil de stabilisation et d'association, la possibilité de s'accorder de nouvelles concessions, produit par produit, pour les produits agricoles et de la pêche.
        Le chapitre III définit les dispositions communes : clause de statu quo (article 33, interdisant l'introduction, après l'entrée en vigueur de l'accord, de mesures plus restrictives dans les relations commerciales), interdiction de discrimination fiscale (article 34), clause antidumping (article 37), clause de sauvegarde générale (article 38, permettant à une Partie de suspendre les réductions tarifaires ou d'augmenter les taux pour une durée limitée, sous réserve d'une notification au comité de stabilisation et d'association, et en cas de dommage grave à la production nationale ou de perturbations sérieuses dans un secteur de l'économie causé par l'importation d'un produit. Ces mesures font l'objet de consultations au sein du comité de stabilisation et d'association, en vue d'arrêter un calendrier pour leur suppression), clause de pénurie (article 39, permettant à la partie exportatrice de prendre les mesures appropriées lorsque l'exportation d'un produit conduit à une situation ou à un risque de pénurie grave de produits alimentaires ou essentiels, ou risque de provoquer chez elle des difficultés majeures), clause anti-fraude (article 43). Il est précisé que l'accord ne fait pas obstacle au maintien ou à l'établissement d'unions douanières, de zones de libre-échange ou de régimes de trafic frontalier, dans la mesure où ils n'ont pas pour effet de modifier le régime des échanges prévu par l'accord (article 36).
        7o  Le titre V (articles 45 à 68) porte sur la circulation des travailleurs, le droit d'établissement, la prestation de services et la libre circulation des capitaux :
        -  circulation des travailleurs (chapitre Ier) : l'article 45 fixe le principe de non-discrimination en ce qui concerne les conditions de travail, de rémunération et de licenciement dans le traitement des travailleurs ressortissants de la Croatie légalement employés sur le territoire d'un Etat membre, ainsi que du conjoint et des enfants résidant légalement dans cet Etat. Le même traitement est applicable aux travailleurs ressortissants d'un Etat membre, ainsi qu'à leurs conjoint et enfants, légalement employés sur le territoire de la Croatie. L'article 46 prévoit que les Etats membres doivent préserver et si possible améliorer les possibilités d'accès à l'emploi accordées aux travailleurs croates en vertu d'accords bilatéraux, et examiner la possibilité de conclure de tels accords s'ils n'en disposent pas. Le Conseil de stabilisation et d'association devra adopter un certain nombre de dispositions afin d'établir la coordination des régimes de sécurité sociale de travailleurs croates employés dans un Etat membre (article 47) ;
        -  droit d'établissement (chapitre II) : l'article 48 fixe le principe de non-discrimination entre l'UE et la Croatie en ce qui concerne l'établissement des sociétés ainsi que l'activité des filiales et succursales de ces sociétés (exception faite des services de transport aérien, de navigation intérieure et de cabotage maritime, cf. article 51). Il ne reconnaît pas de droit d'établissement pour les travailleurs indépendants, mais prévoit que le Conseil de stabilisation et d'association devra revenir sur la question (article 49, paragraphe 4 : « quatre ans après l'entrée en vigueur du présent accord, le Conseil de stabilisation et d'association examinera les modalités permettant d'étendre les dispositions ci-dessus à l'établissement de ressortissants des deux Parties au présent accord, leur conférant le droit d'exercer des activités économiques en tant qu'indépendants »). Le Conseil de stabilisation et d'association examine les dispositions qu'il est nécessaire de prendre pour une reconnaissance mutuelle des qualifications (article 53), afin de faciliter l'accès réciproque aux activités professionnelles réglementées. La Croatie peut toutefois déroger à ces dispositions pendant les trois ans suivant l'entrée en vigueur de l'accord pour protéger certaines industries (article 55) ;
        -  prestation de services (chapitre III) : les Parties s'engagent à prendre les mesures nécessaires pour libéraliser progressivement les activités de prestation de services. Les prestations de services de transport font l'objet de dispositions particulières (article 58) ;
        -  paiements courants et mouvements de capitaux (chapitre IV) : l'accord instaure, à partir de son entrée en vigueur, la libre circulation des investissements directs effectués dans des sociétés, ainsi que des capitaux concernant les crédits liés à des transactions commerciales ou la prestation de services, et des prêts et crédits financiers d'une échéance supérieure à un an (les investissements de portefeuille, emprunts financiers et crédits d'une échéance inférieure à un an étant libéralisés dès la quatrième année suivant l'entrée en vigueur de l'accord). L'article 60 prévoit qu'à la fin de la quatrième année suivant l'entrée en vigueur de l'accord, le Conseil de stabilisation et d'association examine les moyens permettant l'application intégrale de la réglementation communautaire relative à la circulation des capitaux. Des mesures de sauvegarde sont prévues lorsque les mouvements de capitaux causent ou risquent de causer de graves difficultés dans le fonctionnement de la politique des changes ou de la politique monétaire.
        L'article 60 souligne également que la Croatie doit adapter sa législation, quatre ans après l'entrée en vigueur de l'accord, pour mettre en œuvre « progressivement » une procédure de non-discrimination en vertu de la nationalité, s'agissant de l'acquisition de biens immobiliers en Croatie par des ressortissants de l'UE.
        8o  Le titre VI (articles 69 à 74) porte sur le rapprochement des dispositions législatives : il n'est pas demandé à la Croatie de reprendre l'ensemble de l'acquis communautaire, mais de s'en « rapprocher », en donnant la priorité dans un premier temps aux éléments « fondamentaux » de l'acquis. Les Parties reconnaissent l'importance du rapprochement de la législation existante de la Croatie avec celle de la Communauté. La Croatie veille à ce que sa législation actuelle et future soit rendue progressivement compatible avec la législation de la Communauté.
        A compter de la date de signature de l'accord et dans une première phase, le rapprochement législatif se concentrera sur certains éléments fondamentaux de l'acquis dans le domaine du marché intérieur et dans d'autres domaines liés au commerce, conformément à un programme qui devra être établi avec la Commission. Des principes et des dates limites sont fixés pour la législation sur la concurrence (délai de quatre ans pour supprimer toute mesure susceptible de fausser le jeu de la concurrence et assurer la transparence des aides publiques, article 70), la propriété intellectuelle (délai de trois ans pour garantir une protection d'un niveau comparable au niveau atteint dans la Communauté, assortie de moyens réels d'application, article 71), les normes et la certification (article 73), les marchés publics (article 72 : dès l'entrée en vigueur, égalité d'accès aux marchés publics de l'UE pour les entreprises croates et égalité d'accès aux marchés publics en Croatie pour les sociétés de la Communauté établies en Croatie ; pour les sociétés de l'UE non établies en Croatie : délai maximal de trois ans pour mettre en œuvre l'égalité d'accès) ainsi que la protection des données.
        9o  Le titre VII (articles 75 à 80) porte sur le domaine de la justice et des affaires intérieures. Il prévoit la mise en place d'une coopération étroite entre l'UE et la Croatie, sur un grand nombre de secteurs :
        -  renforcement des institutions à tous les niveaux, dans les domaines de l'administration en général, et de la mise en application de la loi et de l'appareil judiciaire (article 75), auquel doit être donnée une importance particulière. La coopération en matière de justice portera en particulier sur l'indépendance de la justice, l'amélioration de son efficacité et la formation des professions judiciaires ;
        -  visas, contrôle des frontières, droit d'asile et de migration. Les Parties établissent un cadre de coopération, y compris au niveau régional (article 76), qui se fonde sur la consultation mutuelle et une coordination étroite et comporte la fourniture d'une assistance technique et administrative ;
        -  prévention et contrôle de l'immigration clandestine. Les Parties s'engagent à réadmettre leurs ressortissants présents illégalement sur le territoire de l'autre Partie, à la demande de cette dernière et sans autre formalité, et à leur fournir les documents d'identité appropriés. Elles conviennent de conclure, sur demande, un accord entre la Croatie et la Communauté sur la réadmission des ressortissants de pays tiers et apatrides (article 77) ;
        -  lutte contre le blanchiment de capitaux (article 78) ;
        -  lutte contre la drogue (article 79).
        -  prévention et lutte contre la criminalité et autres activités illégales (article 80) ;
        10o  Le titre VIII (articles 81 à 105) concerne les politiques de coopération. Il est indiqué que la Communauté et la Croatie instaurent une coopération étroite visant à promouvoir le développement et la croissance de la Croatie par le renforcement des liens économiques. Les politiques de coopération s'inscriront dans un cadre régional, une attention particulière devant être donnée aux mesures susceptibles d'encourager la coopération entre la Croatie et les pays limitrophes (article 81). Les articles 82 à 103 définissent les modalités de la coopération dans les domaines suivants : politique économique, statistiques, services bancaires, d'assurances et financiers, promotion et protection des investissements, coopération industrielle, PME, tourisme, douanes, fiscalité, questions sociales, agriculture et secteur agro-industriel, pêche, éducation et formation, culture, information et communication, audiovisuel, infrastructures de communication électronique, société de l'information, transports, énergie, sûreté nucléaire, environnement, recherche et développement technologique, développement régional et local.
        11o  Le titre IX (articles 106 à 109) concerne la coopération financière : il détaille les aides financières que l'UE peut accorder à la Croatie.
        Afin de réaliser les objectifs de l'accord, la Croatie peut recevoir une assistance sous forme d'aides non remboursables et de prêts, notamment de prêts de la Banque européenne d'investissement (BEI) (article 106). L'article 107 précise que les aides non remboursables seront couvertes par les mesures de coopération prévues dans le règlement du Conseil correspondant sur la base pluriannuelle indicative établie par la Communauté à l'issue de consultations avec la Croatie (cf. note 5) .
        En outre, à la demande de la Croatie, et en cas de besoin particulier, la Communauté peut examiner, en liaison avec les institutions financières internationales, la possibilité d'accorder à titre exceptionnel une aide financière macroéconomique soumise à certaines conditions (article 108).
        Afin d'assurer une utilisation optimale des ressources, les Parties veillent à ce qu'il y ait une coordination étroite entre les différents donateurs (article 109).
        12o  Le titre X (articles 110 à 130) porte sur les dispositions institutionnelles, générales et finales.
        Les articles 110 à 116 décrivent les institutions conjointes mises en place par l'accord.
        Le Conseil de stabilisation et d'association supervise l'application et la mise en œuvre de l'accord. Il se réunit régulièrement au niveau approprié, et lorsque les circonstances l'exigent. Chaque Partie peut le saisir de tout différend relatif à l'application et à l'interprétation de l'accord. Il est composé, d'une part de membres du Conseil de l'UE et de la Commission, d'autre part de membres du Gouvernement de la Croatie. La présidence est exercée à tour de rôle par un représentant de la Communauté et un représentant de la Croatie. La BEI participe aux travaux du Conseil comme observateur, pour les questions relevant de sa compétence. Le Conseil dispose d'un pouvoir de décision et les décisions prises sont obligatoires pour les Parties. Il réexamine régulièrement l'application de l'accord et sa mise en œuvre par la Croatie (cf. article 5).
        Le comité de stabilisation et d'association assiste le Conseil dans l'accomplissement de sa mission. Il est notamment chargé de préparer les réunions du Conseil, qui peut lui déléguer tout pouvoir. Ses tâches et son mode de fonctionnement sont déterminés dans le règlement intérieur du Conseil. Il est composé, d'une part de représentants du Conseil et de la Commission, d'autre part de représentants de la Croatie. Le comité de stabilisation et d'association peut créer des sous-comités.
        La Commission parlementaire de stabilisation et d'association constitue une enceinte de rencontre et de dialogue entre les membres du Parlement de la Croatie et ceux du Parlement européen. Elle se réunit selon une périodicité qu'elle détermine et est présidée à tour de rôle par le Parlement européen et le Parlement de la Croatie.
        L'article 118 préserve le droit des Parties de prendre des mesures nécessaires pour assurer leur sécurité ou leur défense et satisfaire à leurs obligations en vue d'assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationales.
        L'article 119 pose le principe de non-discrimination (dans le régime appliqué par la Croatie : entre les Etats membres, leurs ressortissants ou leurs sociétés et dans le régime appliqué par la Communauté : entre les ressortissants de la Croatie ou leurs sociétés).
        L'article 120 oblige les Parties à prendre toute mesure générale ou particulière nécessaire pour s'acquitter de leurs obligations au titre de l'accord. Elles veillent à ce que les objectifs définis par l'accord soient atteints. Si l'une des Parties considère que l'autre Partie n'a pas satisfait à l'une de ses obligations, elle peut prendre les mesures appropriées. Auparavant, elle doit, sauf urgence spéciale, fournir au Conseil de stabilisation et d'association toutes les informations pertinentes nécessaires en vue de rechercher une solution acceptable. Le choix doit porter en priorité sur les mesures qui perturbent le moins le fonctionnement de l'accord. Elles sont notifiées au Conseil et font l'objet de consultations au sein de celui-ci, à la demande de l'autre Partie.
        L'accord est conclu pour une durée illimitée. Chacune des Parties peut le dénoncer en notifiant son intention à l'autre Partie et il cesse alors d'être applicable six mois après cette notification (article 124).
        L'accord entre en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant la date à laquelle les Parties se notifient l'accomplissement des procédures d'approbation (article 129) et se substitue aux mesures commerciales unilatérales octroyées par les Communautés européennes à la République de Croatie le 18 septembre 2000 (cf. note 6) . Pour les dispositions, notamment celles relatives à la libre circulation des marchandises et celles concernant les transports, qui seront mises en application avant l'entrée en vigueur de l'accord par un accord intérimaire entre la Communauté et la Croatie, la date d'entrée en vigueur des obligations correspondantes sera la date de l'entrée en vigueur de l'accord intérimaire (article 130) (cf. note 7) .
        Telles sont les principales observations qu'appelle l'accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Croatie, d'autre part, qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumis au Parlement conformément à l'article 53 de la Constitution.

PROJET  DE  LOI

        Le Premier ministre,
        Sur le rapport du ministre des affaires étrangères,
        Vu l'article 39 de la Constitution,
                    Décrète :
        Le présent projet de loi autorisant la ratification de l'accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Croatie, d'autre part (ensemble huit annexes et six protocoles), délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat, sera présenté à l'Assemblée nationale par le ministre des affaires étrangères, qui est chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

Article  unique

        Est autorisée la ratification de l'accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Croatie, d'autre part (ensemble huit annexes et six protocoles), signé à Luxembourg le 29 octobre 2001, et dont le texte est annexé à la présente loi.
        Fait à Paris, le 9 octobre 2002.

Signé :  Jean-Pierre  Raffarin        

            Par le Premier ministre :

Le ministre des affaires étrangères,
Signé :
  Dominique de  Villepin

NOTE (S) :

(1) Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen du 26 mai 1999 et conclusions du Conseil du 21 juin 1999.

(2) Règlement no 2666/2000 du Conseil du 5 décembre 2000.

(3) Règlements no 2007/2000 du Conseil du 18 septembre 2000 et no 2563/2000 du Conseil du 20 novembre 2000.

(4) Le système de prix d'entrée, spécifique à l'organisation de marché fruits et légumes, permet de fixer un prix de référence communautaire et d'imposer aux pays exportant des produits vers la Communauté un « équivalent tarifaire » compensant la différence de prix si leurs produits entrent sur le marché communautaire à un prix inférieur au prix d'entrée.

(5) Il s'agit en l'occurrence du règlement créant le programme CARDS (CE 2666/2000).

(6) Règlement du Conseil 2007/2000.

(7) Un accord intérimaire entre la Communauté et la Croatie a été conclu le 29 octobre, en même temps que l'accord de stabilisation et d'association, pour permettre la mise en œuvre anticipée des articles 70 et 71 du titre IV, des protocoles 1 à 5 et des dispositions pertinentes du protocole 6 de l'accord.

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N° 251 - Projet de loi autorisant la ratification de l'accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Croatie, d'autre part


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