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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

_____________________________________________________

R A P P O R T D' I N F O R M A T I O N

Présenté à la suite de la mission effectuée au Sénégal

du 5 au 11 avril 2005

par une délégation du

GROUPE D'AMITIÉ

France - Sénégal (1)

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(1) Cette délégation était composée de Mme Martine Aurillac, Présidente, et de MM. Jacques Desallangre, Francis Hillmeyer, Serge Janquin, Marc Le Fur et Georges Siffredi.

SOMMAIRE

Pages

introduction  5

première partie : le Sénégal aujourd'hui

Une démocratie vivante  7

Une économie encore fragile 13

Des relations bilatérales anciennes et étroites 16

deuxième partie : Compte rendu de la mission

Visite de courtoisie au président de l'Assemblée nationale. 21

Réunion de travail entre les deux groupes d'amitié 22

Visite de l'Hôpital Principal 27

Entretien avec la ministre des Relations avec les Institutions 27

Entretien avec le Premier ministre 29

Audience du Président de la République 30

Dîner-débat avec les organisations patronales sénégalaises 32

Le rôle des femmes dans le développement 38

Rencontre avec le Maire de Dakar 41

Visite du lycée Jean Mermoz 42

Entretien avec le ministre des Affaires étrangères 43

Le Système éducatif au Sénégal 50

Entretien avec M. Robert Sagna, député et maire de Ziguinchor 54

Rencontre avec les Anciens combattants 57

Rencontres avec les autorités locales, à Ziguinchor 60

La reconstruction de la Casamance 63

La décentralisation et la coopération décentralisée 67

Conclusion 75

Annexes 77

Annexe 1 : Programme de la mission 79

Annexe 2 : Repères chronologiques 83

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Source: Division Géographique du Ministère des Affaires Étrangères

Introduction

Une délégation du groupe d'amitié France - Sénégal de l'Assemblée nationale s'est rendue au Sénégal du 5 au 11 avril 2005, à l'invitation de M. Pape Diop, président de l'Assemblée nationale du Sénégal. La dernière visite remontait à 1996.

Cette délégation était conduite par Mme Martine Aurillac, présidente du groupe d'amitié, députée (UMP) de Paris, accompagnée de MM. Jacques Desallangre, député (CR) de l'Aisne, Francis Hillmeyer, député (UDF) du Haut-Rhin, Serge Janquin, député (S) du Pas-de-Calais, Marc Le Fur, député (UMP) des Côtes-d'Armor, et Georges Siffredi, député (UMP) des Hauts-de-Seine, vice-présidents du groupe d'amitié.

Les très nombreux entretiens et rencontres avec des parlementaires, des membres du Gouvernement et des élus locaux, ainsi que des visites ciblées ont permis d'aborder les principaux thèmes souhaités par la délégation, tant sur le plan des relations bilatérales : la coopération décentralisée, les flux migratoires, la question des pensions d'anciens combattants, la coopération sanitaire, que sur celui du développement du Sénégal : la situation en Casamance, l'enseignement, le rôle des femmes dans le développement.

Le programme, particulièrement dense et riche, préparé par l'Assemblée nationale et le groupe d'amitié Sénégal - France a permis de traiter ces nombreux sujets dans une ambiance de travail chaleureuse et constructive.

Les membres de la délégation tiennent à rendre hommage aux autorités sénégalaises, et tout particulièrement à S.E. M. Pape Diop, président de l'Assemblée nationale et à M. Doudou Wade, président du groupe d'amitié Sénégal - France, pour la très haute qualité de l'accueil qui leur a été réservé.

Ils adressent également leurs remerciements à son excellence M. André Parant, ambassadeur de France au Sénégal pour son concours précieux dans la préparation et le déroulement de cette visite.

Première partie :
Le Sénégal aujourd'hui

I. Une démocratie vivante

Le Sénégal a été l'un des précurseurs du multipartisme en Afrique. Depuis la loi constitutionnelle du 6 mai 1981, la création et l'activité des partis politiques sont entièrement libres, alors que jusqu'à cette date seuls quatre partis avaient droit de cité, héritage de la période du parti unique, qui a duré de l'indépendance jusqu'en 1976.

L'alternance naturelle qui s'est opérée depuis 2000, avec l'élection à la tête de l'Etat de Me Abdoulaye Wade, le plus vieil opposant au Parti socialiste qui détenait le pouvoir depuis l'indépendance, a administré la preuve que la démocratie n'est pas étrangère à l'Afrique et qu'elle peut s'y exercer dans les mêmes conditions que dans le reste du monde.

Les réformes édictées à la suite de l'alternance ont peu modifié l'architecture générale des institutions et n'en ont pas altéré le caractère démocratique et pluraliste.

Les prochaines échéances électorales du Sénégal seront les élections législatives, en avril 2006, et l'élection présidentielle, en février 2007.

L'organisation politique et institutionnelle

La République du Sénégal est un Etat unitaire laïc, démocratique et social, gouverné par un régime présidentiel hybride et pluraliste. La nouvelle Constitution1 a été adoptée par référendum du 7 janvier 2001.

L'exécutif

Le président de la République est le gardien de la Constitution et le garant du fonctionnement régulier des institutions, de l'indépendance nationale et de l'intégrité du territoire. Il est élu au suffrage universel, au scrutin majoritaire à deux tours, pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois. Il détermine et conduit la politique de la nation et préside le Conseil des ministres.

Il nomme le Premier ministre, ainsi que les membres du Gouvernement, et met fin à leurs fonctions. Il peut soumettre à référendum tout projet de loi constitutionnelle et, sur proposition du Premier ministre, tout projet de loi ordinaire.

Il peut prononcer la dissolution de l'Assemblée nationale, sauf dans les deux premières années de la législature.

Le Président de la République, Me Abdoulaye Wade, a été élu le 19 mars 2000, à l'issue du second tour de l'élection présidentielle qui l'opposait au président sortant, M. Abdou Diouf, en place depuis 1981. Il l'a emporté sur son concurrent avec 58 % des suffrages exprimés.

Le Gouvernement conduit et coordonne la politique de la Nation sous la direction du Premier ministre. Il est responsable devant le Président de la République et l'Assemblée nationale. La démission ou la cessation des fonctions du Premier ministre entraîne la démission du Gouvernement dans son entier.

Le Premier ministre est, depuis avril 2004, M. Macky Sall, qui a succédé à M. Idrissa Seck.

Le législatif

Le Parlement, monocaméral, est constitué par l'Assemblée nationale qui détient le pouvoir législatif. Elle vote seule la loi, dont le domaine est limitativement délimité par la Constitution, et contrôle l'activité gouvernementale.

L'Assemblée nationale compte 120 députés, élus au suffrage universel direct, pour un mandat de cinq ans. 65 d'entre eux sont élus au scrutin départemental majoritaire à un tour et 55 au scrutin proportionnel national. Le mandat du député ne peut être abrégé que par la dissolution de l'Assemblée nationale ou par la déchéance automatique en cas de démission de son parti en cours de législature.

Elle se réunit en deux sessions annuelles d'une durée maximum de quatre mois chacune. La première s'ouvre dans le cours du 2ème trimestre et la seconde, au cours de laquelle est votée la loi de finances, débute dans la 1ère quinzaine d'octobre. A l'exception de la date d'ouverture de la première session de l'Assemblée nouvellement élue, qui est fixée par le Président de la République, l'Assemblée nationale fixe la date d'ouverture et la durée de ses sessions.

Elle peut être réunie en session extraordinaire, pour une durée maximum de quinze jours et sur un ordre du jour déterminé, sur décision de son bureau, sur demande écrite émanant de plus de la moitié de ses membres ou sur décision du président de la République, seul ou sur proposition du Premier ministre.

L'initiative des lois appartient concurremment au Président de la République, au Premier ministre et aux députés. Les projets ou proposition de lois sont débattus et votés en séance plénière, sur le rapport de celle des onze commissions permanentes qui est compétente au fond. Les onze commissions sont :

- Commission de l'Economie générale, des Finances, du Plan et la Coopération économique

- Commission de l'Urbanisme, de l'Habitat, de l'Equipement et des Transports

- Commission du Développement et de l'Aménagement du territoire

- Commission des Lois, de la Décentralisation, du Travail et des Droits humains

- Commission des Affaires étrangères, de l'Union Africaine et des Sénégalais de l'Extérieur

- Commission de la Défense et de la Sécurité

- Commission de l'Education, de la Jeunesse, des Sports et des Loisirs

- Commission de la Culture et de la Communication

- Commission de la Santé, de la Population, des Affaires sociales et de la Solidarité nationale

- Commission de Comptabilité et de Contrôle

- Commission des Délégations

Cette dernière commission présente la particularité de pouvoir prendre, entre deux sessions et sur délégation de l'Assemblée nationale, des mesures qui sont du domaine de la loi et sont promulguées comme telles, faute d'avoir été modifiées en séance plénière dans les quinze premiers jours de la session suivante.

Chaque député ne peut être membre de plus de trois commissions permanentes.

L'assemblée nationale dispose de plusieurs moyens pour exercer son contrôle sur l'activité gouvernementale : les auditions ; les questions, écrites ou orales, auxquelles les ministres sont tenus de répondre ; les résolutions présentées par une commission permanente ; les missions d'information et les commissions d'enquête ; et, arme suprême, la mise en jeu de la responsabilité du Gouvernement en lui refusant la confiance ou en le censurant à la majorité absolue des députés, ce qui entraîne automatiquement la démission du Gouvernement.

Le Président de l'Assemblée nationale assure l'intérim du Chef de l'Etat en cas démission, d'empêchement ou de décès. Il est élu par ses pairs, au scrutin uninominal secret, au début de chaque législature et pour la durée de celle-ci. Il est le chef de l'administration de l'Assemblée nationale et préside les séances plénières et les réunions du Bureau et de la Conférence des présidents. Le bureau est composé de huit vice-présidents, six secrétaires et deux questeurs, tous élus ou réélus lors de la première séance de la première session ordinaire annuelle, ainsi que des présidents des groupes parlementaires. La conférence des présidents, à laquelle assistent les membres du bureau ainsi que les présidents des commissions permanentes et où le Gouvernement peut se faire représenter, établit l'ordre du jour et le calendrier des travaux de l'Assemblée, sous réserve de l'inscription prioritaire d'un texte demandée par le Gouvernement.

L'Assemblée nationale, dont la 10ème législature est en cours, a été élue le 29 avril 2001, après dissolution par ordonnance présidentielle de l'Assemblée élue en mai 1998. Dix formations politiques sur les 25 ayant fait campagne ont obtenu des élus. La majorité présidentielle, qui réunit quatre partis au sein de la coalition SOPI (espoir, en Wolof) a obtenu 49,59 % des suffrages exprimés et emporté 89 des 120 sièges de l'Assemblée.

Les neuf partis de l'opposition se partagent les 31 sièges restant. Le Parti socialiste, qui avait obtenu 93 des 140 sièges mis aux voix en 1998, n'en a remporté que 10, avec 17,36 % des voix, tandis que l'Alliance des Forces du Progrès (AFP) de M. Moustapha Niasse, dissident du Parti socialiste et premier Premier ministre du Président Wade en remportait onze, avec 16,14 % des suffrages.

Les autres Institutions

Le Sénat et le Conseil économique et social, supprimés par la révision constitutionnelle de janvier 2001, ont été remplacés par le Conseil de la République pour les affaires économiques et sociales (CRAES), instance consultative qui reflète les préoccupations des milieux économiques, sociaux, éducatifs et culturels et contribue à faciliter la participation des différentes catégories socioprofession-nelles et des collectivités locales à la mise en œuvre de la politique économique et sociale du pays.

Saisi par les pouvoirs publics, ou de sa propre initiative, le Conseil de la République rend des avis et études sur toute question d'ordre économique, financier, social, culturel, administratif, scientifique et technique, qui sont publiés au journal officiel. Le Conseil de la République peut également être saisi pour examiner les projets et propositions de loi ainsi que des projets de décret à caractère économique et social, à l'exclusion des lois de finances. Il adopte, chaque année au cours du premier trimestre, un avis sur la situation sociale, culturelle, administrative, économique et financière du pays.

Le Conseil Constitutionnel se prononce sur la constitutionnalité du règlement intérieur de l'Assemblée nationale, sur la constitutionnalité des lois, sur le caractère réglementaire des dispositions de forme législative, sur la constitutionnalité des lois organiques, sur la recevabilité des propositions de loi et amendements d'origine parlementaire, sur la constitutionnalité des engagements internationaux, sur les exceptions d'inconstitutionnalité soulevées devant le Conseil d'Etat ou la Cour de cassation et plus généralement, sur tous les conflits de compétence entre le Conseil d'Etat et la Cour de Cassation et entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif.

L'organisation territoriale et la décentralisation

La constitution de 2001 précise (article 102) que « les collectivités locales constituent le cadre institutionnel de la participation des citoyens à la gestion des affaires publiques. Elles s'administrent librement par des assemblées élues ».

Initié de longue date, un double processus de déconcentration administrative et de décentralisation a été marqué par quelques grandes réformes, notamment :

- les lois de 1972 créant les communautés rurales ;

- les lois du 8 octobre 1992, instituant 368 collectivités locales (48 communes et 320 communautés rurales) et supprimant l'autorisation préalable à l'exécution des décisions des collectivités locales remplacée par un contrôle à posteriori du préfet.

- les lois du 22 mars 1996, érigeant la région en collectivité locale, portant transfert de compétences aux régions, communes et communautés rurales, fixant l'organisation administrative et territoriale et relative au cumul des mandats électifs et de certaines fonctions ;

- la réforme de l'organisation administrative, territoriale et locale de la République du Sénégal de janvier 2002 et le décret du 21 février 2002 fixant le ressort territorial et le chef lieu des régions et des départements.

A l'issue de ce long processus, le territoire sénégalais est désormais organisé en :

· circonscriptions administratives : 34 départements et 103 arrondissements ;

· collectivités locales : 11 régions, 110 communes, 320 communautés rurales.

Organisation territoriale et locale de la République du Sénégal

Régions

Départements

Arrondissements

Communes

Communautés rurales

Dakar

4

10

50

2

Diourbel

3

8

3

34

Fatick

3

10

7

33

Kaolack

3

10

7

41

Kolda

3

11

5

43

Louga

3

11

4

46

Matam

3

5

7

14

Saint-Louis

3

7

8

16

Tambacounda

3

13

4

35

Thiès

3

10

11

31

Ziguinchor

3

8

4

25

11

34

103

110

320

Prônée comme un levier indispensable au développement par le Président de la République, la décentralisation est affichée comme une priorité politique des autorités sénégalaises, priorité consacrée par l'érection en ministère de la direction des collectivités locales et de la décentralisation, en avril 2004, et son admission au premier rang dans l'ordre protocolaire du Gouvernement, avec le titre de ministère d'Etat.

II. Une économie encore fragile

Avec un taux de 6 %, en 2004, et 6,5 %, en 2005, le Sénégal affiche la croissance le plus élevée de l'UEMOA2. Mais avec un PIB par habitant, évalué à 720 $ en 2004, l'économie sénégalaise ne parvient pas encore à faire reculer la pauvreté, ce qui lui vaut d'être classé au 157ème rang sur 174 pays par l'indicateur de développement humain établi par le PNUD.

Le secteur primaire (15 % du PIB, pour moitié d'origine agricole, en croissance de 2 %) est caractérisé par la vulnérabilité de l'agriculture à une pluviométrie erratique et, depuis 2004, à la menace acridienne. La croissance de la production maraîchère ne compense pas encore, à l'export, le déclin des deux principales productions du Sénégal : l'arachide, en constant recul, et la pêche, essentiellement artisanale et confrontée à une raréfaction des ressources.

Le secteur secondaire (20 % du PIB, en croissance de 6,7 %) est concentré sur l'extraction et la transformation des phosphates, dont l'Inde est le premier client, et sur la transformation de l'arachide et des produits de la pêche, dont la production est déclinante. Si le bâtiment et la production de ciment se portent bien, ils le doivent essentiellement aux investissements de la diaspora sénégalaise.

Le secteur tertiaire (45 % du PIB, en croissance de 7,2 %) continue de bénéficier de l'excellence des infrastructures de télé-communications, qui induit de nouveaux investissements dans les téléservices mais les emplois créés dans les centres d'appel ne compensent pas les pertes subies par le secteur du tourisme, confronté à une importante baisse de fréquentation en 2004 (-20 %) due à une concurrence mondiale de plus en plus vive.

Le secteur quaternaire, qui couvre les activités des administrations publiques, représente 20 % du PIB. Il faut rappeler par ailleurs que l'économie sénégalaise est doublée d'un important secteur informel.

Depuis 1995, les privatisations d'entreprises publiques ont profondément modifié le paysage économique, notamment dans la filière agricole (Sonacos, pour l'arachide, et Sodefitex, pour le coton) et dans les infrastructures (eau, ferroviaire et surtout télécommunications). Il reste à finaliser principalement la privatisation de la distribution d'électricité (Sénélec) et du transport urbain.

Classé à sa demande parmi les pays les moins avancés (PMA), depuis 2001, le Sénégal a atteint, en avril 2004, le point d'achèvement de l'initiative PPTE3 et a bénéficié à ce titre d'un allègement de près de 450 M$ de sa dette publique extérieure, dont l'encours a diminué de 14,9 % sur un an, à la fin 2004, et ne représente plus que 42,9 % du PIB contre 66 % en 2000.

L'aide publique au développement, bilatérale (63 % en 2003) et multilatérale (37 % en 2003), reçue par le Sénégal représente environ 10 % de son PIB, ce qui en fait le pays le plus aidé de l'Afrique sub-saharienne avec un ratio de 47 $ par habitant. La Banque Mondiale, l'Union européenne et la France sont les principaux bailleurs de fonds, mais le rythme de leurs décaissements continue d'être très en deçà de leurs engagements, en raison de la complexité et de la multiplicité des procédures, du côté des bailleurs, et d'une insuffisance d'expertise et de moyens humains, du côté du bénéficiaire, qui limitent la capacité d'absorption du Sénégal.

Sur le plan budgétaire, la loi de finances pour 2005 devrait se solder par un déficit du même ordre de grandeur (2,9 % du PIB) qu'en 2004 (109 Mds FCFA), en doublement par rapport à celui de 2003, en raison de l'accroissement des investissements. Hors dons, le déficit budgétaire a atteint cependant 4,8 % du PIB, en 2004.

Malgré des fondamentaux économiques globalement satisfaisants et soutenus par une inflation maîtrisée (0,5 % en 2004, 1,6 % prévu pour 2005), le Sénégal ne parvient pas à amorcer un véritable décollage économique, qui nécessiterait un taux de croissance minimum de 8 % pour compenser une croissance démographique annuelle évaluée à 2,4 %. La persistance des handicaps structurels (absence de ressources naturelles, déficit énergétique, coût des facteurs de production, productivité insuffisante, insuffisance des réseaux de transports pour désenclaver l'intérieur du pays, etc.) et une insuffisance d'investissements directs étrangers expliquent pour une large part cette difficulté. Les échanges extérieurs, structurellement déficitaires, ont été aggravés par l'alourdissement de la facture pétrolière, depuis 2004.

D'autre part, si le taux de chômage selon la définition du BIT est d'environ 12 %, le problème crucial de la population reste le sous-emploi massif. Le secteur informel, qui regroupe 76,4 % des actifs occupés selon une récente étude de l'OCDE, ne procure à ceux-ci qu'un revenu mensuel moyen de 39 000 FCFA, bien inférieur à celui des actifs du secteur formel, évalué à 58 000 FCFA, et les prive de toute couverture sociale.

Le Gouvernement de M. Macky Sall a adopté, en janvier 2005, une stratégie de croissance accélérée (SCA) visant à réduire de façon significative la pauvreté en portant le taux de croissance à 7-8 % du PIB à l'horizon 2015. Ce plan, qui a reçu le soutien de la Banque Mondiale, a opté pour la promotion de cinq « grappes » de croissance, identifiées comme les vecteurs privilégiés d'un développement durable en termes d'emplois et d'exportations : « Tourisme, artisanat d'art et industries culturelles », « Agro-industrie et agroalimentaire », « Technologies de l'information et de la communication et téléservices », « Industrie textile et habillement », et « Produits de la mer ». Le programme d'action SCA devrait être présenté à l'Assemblée nationale au premier semestre 2006 à l'occasion de la mise en place d'une structure de suivi de sa mise en œuvre.

Par ailleurs, le Chef de l'Etat attend également des grands travaux, qu'il a projeté de réaliser à moyen terme et dont certains ont débuté, un effet d'entraînement de la croissance économique destiné à faire sortir le pays de son état actuel de PMA soutenu par les bailleurs de fonds. Supervisés par l'Agence nationale chargée de la promotion des investissements et des grands travaux (APIX), les projets portent sur la construction d'un nouvel aéroport international, d'une cité des affaires de l'Afrique de l'Ouest sous l'emprise de l'actuel aéroport, d'une autoroute à péage de 60 km entre Dakar et Thiès pour désenclaver la capitale, d'un port minéralier à Bargny pour l'exportation des ressources actuelles (phosphates) et futures (fer, pétrole), sur la mise à l'écartement standard du réseau ferroviaire et sur l'agrandissement du port de Dakar.

Aux yeux des partenaires qui l'accompagnent dans son développement, les principaux atouts du Sénégal sont une stabilité politique exemplaire, des efforts de bonne gouvernance productifs et une maîtrise des principaux agrégats macroéconomiques. Il devrait continuer à bénéficier de leur confiance et de leur soutien pour avancer sur la voie d'un développement économique qu'il a commencé à mettre en œuvre avec un certain succès.

III. Des relations bilatérales anciennes et etroites

Maintenant des relations étroites et ininterrompues depuis trois siècles et demi, la France et le Sénégal sont restés très proches depuis l'indépendance de ce dernier, en 1960. Ces relations, qui se déclinent à tous les niveaux -  échanges politiques, relations économiques, aide publique au développement, coopération multiforme, importante présence française - constituent un modèle de coopération entre une ancienne puissance coloniale et un pays indépendant.

Des relations politiques continues : la visite officielle du président de la République, M. Jacques Chirac, en février 2005, a constitué le point d'orgue des échanges politiques à haut niveau qui s'inscrivent dans un dialogue confiant et continu. Les nombreuses visites en France du Président Abdoulaye Wade depuis son accession à la tête de l'Etat (mai 2000, février et juin 2001, décembre 2003, février, juillet, août et décembre 2004) ont suivi le même rythme que celles de son prédécesseur, M. Abdou Diouf, et font écho aux très nombreuses visites ministérielles françaises au Sénégal (M. Josselin, en avril 2000, mars 2001 et mars 2002, M. Wiltzer, en décembre 2002, M. de Villepin, en juin 2002, Mme Alliot-Marie, en septembre 2002, M. Barnier, en juillet 2004, M. Douste-Blazy, en novembre 2004).

Sur le plan des relations interparlementaires, les deux groupes d'amitié ont maintenu, ces deux dernières décennies, un courant d'échanges réguliers en se rencontrant en France (1982, 1988, 1994, 2000) ou au Sénégal (1985, 1992, 1996, 2005).

Des échanges économiques dynamiques : au-delà des échanges commerciaux, qui en font le premier fournisseur (24,7 %) et le deuxième client (13 %) du Sénégal, la France conserve un rôle important dans l'économie sénégalaise par l'intermédiaire des 250 entreprises qui y sont implantés et réalisent un chiffre d'affaires de 1,7 Md d'Euros avec plus de 22 000 salariés. Cette présence se traduit aussi dans le flux des investissements directs étrangers (IDE) avec 62 M Euros en 2003, contre 38 en 2002.

Une Aide publique au développement importante : La France reste le premier donateur bilatéral au Sénégal, devant le Japon, les Etats-Unis, l'Allemagne et le Canada. Après avoir connu, avec 212,5 M Euros en 1999, un pic lié à des allégements de dettes de 118 M Euros, l'aide française, en 2002 (111 M Euros), représentait 41 % de l'aide bilatérale reçue par le Sénégal et 24 % de l'APD totale reçue par le pays. En 2004, l'allègement de la dette a été particulièrement important puisqu'il s'est élevé 247 M Euros, auxquels se sont ajoutés les décaissements de la coopération technique et de l'AFD4. La loi de finances du Sénégal pour 2005 a prévu 108,5 M Euros d'APD française. Celle-ci comprend trois volets :

- l'aide au titre de la coopération technique (91,3 M€ en 2003) fournie par le Ministère des Affaires Etrangères (hors Fonds de solidarité prioritaire - FSP), celui de l'Education Nationale (frais d'écolage des étudiants sénégalais en France), et celui de la Recherche (Institut Pasteur, IRD, CIRAD notamment) ;

- l'aide aux investissements (9,4 M€ en 2003), qui comptabilise à la fois les décaissements au titre des FSP, les dons et les prêts AFD ;

- le soutien économique et financier, qui regroupe plusieurs éléments gérés directement par le ministère de l'Economie et des Finances (5M€ en 2003), à savoir les allègements de dette (pics en 1999 et 2004), et les aides budgétaire à l'ajustement structurel.

Enfin, la France est le premier contributeur au Fonds européen de développement (FED), qui prend une place grandissante.

Une coopération multiforme : la coopération française est présente dans de nombreux secteurs (Santé, Culture, Education -Formation - Recherche, Développement rural et Environnement, Audiovisuel, Economie et Finances, Développement institutionnel, Armée et Défense, Coopération non gouvernementale), à travers une multitude d'actions et de programmes qu'il est impossible d'énumérer ici. Elle est mise en œuvre par le ministère des Affaires étrangères, par le biais du service de coopération et d'action culturelle (SCAC) de l'ambassade de France, et par l'Agence française de développement (AFD). Au grand dam des autorités sénégalaises, qui restent attachées à une forte présence de l'assistance technique, le nombre de coopérants français est passé de 175, en 2000, à 114, en 2004. Ce retrait contribue à alimenter dans l'opinion sénégalaise le sentiment d'un désengagement français, pourtant démenti par les faits.

Les grands axes de notre coopération ont été arrêtés pour cinq ans, lors de la 12ème commission mixte franco-sénégalaise réunie à Dakar en 2002 :

- la valorisation des ressources humaines, avec une place particulière pour l'éducation, la santé ou la culture ;

- la promotion de la bonne gouvernance, particulièrement dans les domaines de la justice, des finances publiques, de l'environnement et de l'accompagnement des réformes administratives ;

- l'amélioration de la compétitivité économique et l'appui aux organismes de la société civile ;

- le développement des services collectifs locaux.

La coopération décentralisée des collectivités territoriales françaises avec leurs homologues sénégalaises est la seconde en Afrique subsaharienne, juste après celle avec le Mali, avec une centaine de partenariats actifs. Le plus important est celui initié depuis 1982 par plusieurs collectivités de la région Nord-Pas-de-Calais avec la région de Saint Louis. Il y faut ajouter la coopération non gouvernementale des associations de solidarité internationale (ASI), dont les projets sont souvent menés en partenariat avec les collectivités territoriales. Le cofinancement global apporté par le ministère des Affaires étrangères à ces deux types de coopération non gouvernementale s'est élevé à 9,5 M Euros, entre 1999 et 2004. Il représente généralement entre 20 et 50 % du coût total des projets cofinancés.

Une importante présence française : la France compte environ 19 000 nationaux immatriculés et environ 8 000 non immatriculés sur le territoire sénégalais, binationaux compris. Deux consulats, à Dakar et à Saint Louis, cinq consulats honoraires, à Kaolack, Saly, Tambacounda, Thiès et Ziguinchor, et quatre conseillers à l'Assemblée des Français de l'Etranger assurent la cohésion de cette communauté. Le réseau des établissements d'éducation à programme français accueille 5 944 élèves, dont 2 890 français, dans dix établissements à Dakar, Saint Louis, Ziguinchor, Thiès et Richard Toll. Le réseau culturel est composé de deux instituts culturels et linguistiques, à Dakar et Saint Louis, ainsi que d'Alliances Françaises à Kaolack, Ziguinchor et Tambacounda. Enfin, les Forces françaises du Cap-Vert, présentes au Sénégal en vertu d'un « traité d'amitié et de coopération » signé en 1974, comptent 1 120 personnels des trois armées, qui travaillent étroitement avec les Forces Armées Sénégalaises (FAS) au maintien de la paix dans la sous région et en Afrique.

* * *

Deuxième partie :
compte-rendu de la mission

1. Visite de courtoisie au Président de l'Assemblée nationale, M. Pape Diop

Après avoir rappelé les liens anciens et forts de l'Histoire et du coeur qui existent entre les deux pays, Mme Martine Aurillac a présenté les membres de la délégation, en soulignant son caractère multipartite.

Elle a rappelé l'intérêt de ces échanges, et a aussi manifesté son intérêt pour la conférence préparatoire au dialogue Islamo-chrétien, qui s'ouvrait alors à Dakar, en souhaitant qu'il donne lieu à un dialogue fraternel et constructif.

Le président du groupe d'amitié Sénégal-France, M. Doudou Wade s'est réjoui de la visite d'une délégation aussi importante, synonyme de l'intérêt marqué par la France à son pays, et a souhaité qu'elle soit l'occasion de renforcer le partenariat avec la France.

Le Président Diop a remercié la délégation de sa visite et a attiré son attention sur l'importance d'œuvrer, dans le cadre de la diplomatie parlementaire, pour la paix en général et particulièrement pour la paix en Côte d'Ivoire, pays dont l'importance pour la sous région, et donc pour le Sénégal, n'est plus à démontrer. Il a réclamé l'aide des parlementaires français pour dénouer cette crise néfaste pour l'ensemble de la sous région et pour aider ce pays frère.

Il a affirmé que les relations bilatérales entre le Sénégal et la France méritent de connaître un bond en avant et souhaité que les parlementaires discutent plus souvent des problèmes communs aux deux parlements et tissent entre eux des relations plus fortes.

Mme Martine Aurillac a estimé que la crise ivoirienne constituait un problème aussi important pour la France que pour le Sénégal et a tenu, à ce propos, à manifester la reconnaissance de la France pour l'accueil si généreux offert par le Sénégal aux nombreux Français réfugiés de Côte d'Ivoire.

M. Serge Janquin a remarqué qu'il existe un espace disponible pour la diplomatie parlementaire, même si le concept est encore discuté, mais que celle-ci ne peut s'exercer qu'en plein accord avec les autorités des Etats. Très consciente de l'importance de la sous région, la France apporte tout son appui à la diplomatie sénégalaise, qu'elle soit parlementaire ou nationale, mais considère avant tout qu'il appartient à l'Afrique de s'organiser elle-même.

Pour Mme Martine Aurillac l'Afrique est majeure et l'aide de la France ne peut venir qu'en complément à ses actions. Le dialogue parlementaire est très utile en ce qu'il permet parfois de surmonter certains préjugés et d'approfondir certaines questions.

Elle s'est félicitée de la qualité du programme, riche en échanges importants et instructifs, et elle a affirmé sa disponibilité à écouter tous les messages qui seront délivrés.

* * *

2. Réunion de travail entre les deux groupes d'amitié

Après avoir souhaité la bienvenue à ses amis français, à ses frères, en espérant qu'ils se sentent chez eux, le président Doudou Wade a présenté les quinze membres présents du groupe d'amitié Sénégal - France, qui en compte 43 au total, avant d'énumérer les points sur lesquels il souhaitait voir porter la discussion : l'organisation du parlement sénégalais, le statut du député, le place de l'opposition, et le rôle du Parlement dans le Monde.

Il a ensuite dressé un rapide portrait de l'Assemblée nationale, désormais l'unique chambre du Parlement sénégalais, qui en est à sa 10ème législature 5. Il a insisté sur la modification du règlement intérieur, intervenue en mai 2002 à la suite d'une longue réflexion, qui a notamment organisé la place de l'opposition dans le débat parlementaire, à l'image de celui de l'Assemblée nationale française.

Il voulu mettre l'accent sur les difficultés rencontrées par les députés dans l'exercice de leur mandat : le bâtiment de l'assemblée nationale, dont la construction remonte à 1956, n'est plus tout à fait adapté à sa mission actuelle ; les moyens sont insuffisants, notamment en matière de bureautique et d'informatique, d'assistant parlementaire et de bureau en circonscription. Grâce cependant à la construction récente d'un bâtiment annexe, les députés sénégalais disposent désormais d'un bureau pour deux.

M. Khalifa Ababacar Sall, député (PS, opposition), a tenu à rappeler que l'Assemblée nationale est plurielle depuis 1976, date à laquelle les quatre grands courants de pensée de la vie politique sénégalaise y ont fait leur entrée, dans le cadre du système démocratique encadré mis en place par le Président Senghor. La 8ème législature a constitué un tournant avec le doublement des partis politiques autorisés. En 1998, trois groupes parlementaires étaient représentés à l'Assemblée, dont deux dans l'opposition. Sous la 10ème législature, dix partis ont fait leur entrée à l'Assemblée nationale mais face à la majorité, la coalition SOPI, qui occupe les ¾ des sièges, l'opposition regroupe neuf partis pour ¼ des sièges.

Il a exprimé son approbation sur la réforme du règlement qui organise un véritable débat pluriel et confirmé que l'opposition ne rencontre pas de problèmes pour faire entendre sa voix, que ce soit au niveau de l'organisation, de l'accès au débat, ou de l'expression positive des différences, et que toutes les tendances travaillent en bonne intelligence. Cela n'a rien d'étonnant au Sénégal où l'amitié est une vertu cultivée par l'ensemble de la population.

M. Grégoire Ngom, député (PDS, majorité) est ensuite intervenu sur un point précis de l'organisation du travail parlementaire, en évoquant les réseaux de Parlementaires, structures non statutaires qui constituent un cadre informel de concertation entre les parlementaires et la population. Il existe une vingtaine de réseaux6, au sein desquels l'appartenance partisane n'est pas un élément déterminant et dont le recrutement est basé sur le volontariat et le bénévolat pour s'investir pleinement dans le contrôle et le suivi des actions du Gouvernement. L'objectif des réseaux est de constituer un cadre de travail très souple pour organiser et améliorer le travail législatif.

Le premier réseau, sur la Population et le Développement, a été créé en 1995, au lendemain de la conférence du Caire sur la population. Il s'est beaucoup investi dans l'élaboration de l'avant-projet de loi sur la santé de la reproduction et son travail sur le terrain a beaucoup contribué au texte de loi sur les mutilations génitales. Les réseaux facilitent la lutte contre les fléaux de la société en coordination avec la population civile.

Mme Coumba Marie Louise Niang, députée (PDS) s'est étonnée d'être la seule députée du groupe d'amitié présente alors qu'il y a 25 femmes sur les 120 députés et qu'elles détiennent deux postes au bureau de l'Assemblée nationale, une vice-présidence et un secrétariat, et deux présidences de commission.

Le président Doudou Wade a confirmé qu'avec un taux de 20,83 %, les femmes sont nettement mieux représentées au parlement du Sénégal que dans beaucoup d'autres pays du monde.

M. Serge Janquin s'est félicité des thèmes de travail retenus, considérant que le statut du parlementaire constitue un bon marqueur de la vie démocratique dans un pays et que le Sénégal est mieux placé que la France dans le domaine de la parité, même s'il existe encore une marge de progrès.

Il s'est réjoui de constater le consensus existant sur l'expression démocratique au sein de cette assemblée mais il a regretté l'absence de rencontre avec chacun des groupes politiques, démarche à laquelle il attache un certain prix car le dialogue avec toutes les forces démocratiques du pays est une attitude fondatrice.

M. Cheick Bamba Sall, député (AFP, opposition), s'est inquiété du manque de solidarité et de dynamisme de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie et s'est interrogé sur les moyens de les développer.

Revenant sur les conflits dans la sous région, il a fait part de son expérience personnelle de député de l'UEMOA en Guinée Bissau, où les démarches de conciliation engagées avec plusieurs de ses collègues ont permis de rétablir le dialogue entre les deux grands partis politiques, crispés dans leur opposition mutuelle, et de déboucher sur l'organisation des élections. De la même manière, trois missions parlementaires de l'UEMOA se sont rendues en Côte d'Ivoire, pour tenter de désamorcer le conflit. Il a estimé que la connaissance personnelle entre acteurs politiques constitue un aspect important et positif de la diplomatie parlementaire.

M. Amadou Ciré Sall, député (PDS), vice-président du groupe d'amitié Sénégal - France, a exprimé le souhait que les parlementaires français fassent bénéficier leurs collègues sénégalais de leur expérience dans le domaine de la formation des élus.

Le président Doudou Wade a brièvement résumé les propos précédents, qui tournaient autour de trois questions fondamentales :
- la démocratie en Afrique qui a connu des mutations fondamentales depuis l'ère des indépendances, dans les années 60, avec des avancées significatives, telles que le retour des militaires dans les casernes à Madagascar ou en Guinée-Bissau par exemple. Le Sénégal est l'un des rares pays à avoir échappé à un coup d'État militaire ;

- la crise en Côte d'Ivoire et la question du rôle que peut y jouer la France, notamment au niveau de la diplomatie parlementaire ;

- le statut du député, au Sénégal et en France. Les députés sénégalais sont aujourd'hui installés dans un immeuble neuf et ils partagent un bureau à deux.

Répondant aux questions, Mme Martine Aurillac a estimé que le statut du député est un problème récurent dans tous les parlements, même s'il revêt des aspects différents selon les degrés de développement économique. Si les députés français disposent effectivement de certains moyens matériels, ils les ont acquis progressivement au fil des législatures. Mais ils ne disposent encore, pour la très grande majorité, que d'un bureau exigu qu'ils doivent partager avec leur(s) collaborateur(s) et regardent avec envie les députés allemands, qui disposent chacun de trois bureaux !

Le traitement réservé à l'opposition ne l'a nullement étonnée, car le Sénégal est non seulement une démocratie adulte et mature depuis longtemps, mais un pays où l'on accorde une grande importance aux relations interpersonnelles.

Sur la parité, elle a confirmé l'avance du Sénégal sur la France, où les femmes n'occupent que 12,9 % des sièges à l'Assemblée nationale, et cela malgré une loi sur la Parité qui a institué un système de quotas. Si la parité est globalement respectée à l'étape des candidatures, les élues sont beaucoup moins nombreuses pour la simple raison qu'elles ne bénéficient que rarement de circonscriptions gagnantes, réservées en priorité aux hommes déjà en place. Les femmes sont également moins bien représentées au niveau du bureau de l'Assemblée nationale et il faudra faire un effort pour rattraper les résultats du Sénégal.

Quant à la diplomatie parlementaire, qui ne doit pas être confondue avec une diplomatie parallèle, son rôle est amené à s'accroître considérablement et peut être très utile.

Qualifiant les réseaux de parlementaires de très bonne initiative, elle a reconnu qu'ils peuvent être plus concrets et plus à l'écoute de la population que les groupes d'études mis en place par l'Assemblée nationale en France.

Sur la crise ivoirienne, elle a confirmé que la France est et restera au côté du Sénégal pour tenter de la résoudre, mais qu'elle ne cherche aucunement à s'imposer. Elle a remercié le Sénégal pour l'accueil qu'il a réservé aux réfugiés de Côte d'Ivoire.

A propos de la Francophonie, elle a exprimé son accord sur l'ampleur de la tâche pour résister à l'invasion de la langue anglaise et s'est réjouie de la présence d'un Sénégalais prestigieux à la tête de l'OIF 7.

Revenant sur le mode de travail au Parlement, elle a conseillé à ses interlocuteurs de bien réfléchir avant d'adopter la session unique qui, malgré son objectif, n'a pas réussi à supprimer les séances de nuit, avouant son incertitude sur l'efficacité de cette réforme. Le parlement français légifère beaucoup trop et ne peut assurer le suivi des lois qu'il vote. Par ailleurs, une réflexion est en cours pour la réorganisation des commissions - limitées à six par la Constitution de 1958 - qui pourrait aboutir au jumelage des deux commissions de la Défense et des Affaires étrangères et créer éventuellement une nouvelle commission sur l'Union européenne.

A l'issue de la réunion, la délégation a rapidement visité les locaux de l'Assemblée nationale, installée depuis 1960 dans les bâtiments de l'ancienne assemblée de l'AOF, et s'est attardée un instant dans le nouvel « espace numérique », salle de travail dotée de vingt postes d'ordinateur à la disposition des députés.

3. Visite de l'Hôpital Principal de Dakar

Inauguré en 1884, l'Hôpital Principal de Dakar (HPD) est l'ancien hôpital militaire colonial français, dont la responsabilité a été progressivement transférée au Sénégal. Aujourd'hui Etablissement Public de Santé à statut spécial placé sous la tutelle du ministre des Forces armées, il constitue un exemple original de la coopération franco-sénégalaise, régi par une convention bilatérale, dont le dernier renouvellement date du 17 janvier 2005. Dirigé par un médecin-général français, il est doté de 450 lits et emploie plus de 1 100 agents civils et militaires, dont 22 coopérants français, pour moitié civils et pour moitié militaires. Son plateau technique, largement financé par la Coopération française, en fait l'établissement le plus moderne du Sénégal. L'inauguration, en 2005, du nouveau service d'accueil des urgences, financé par la coopération française, a accentué le rôle de centre de référence pour l'Afrique de l'Ouest que lui assignent les autorités sénégalaises.

Au cours d'une réunion de travail, le médecin-général KLOTZ a exposé les principaux aspects du fonctionnement de l'HPD, dont le budget de fonctionnement est en déficit chronique par suite d'une fréquentation sans cesse accrue. Il s'est ouvert aux parlementaires de ses difficultés financières qui, malgré le soutien de la coopération française, obèrent la maintenance et le renouvellement des équipements médicochirurgicaux. Il a notamment souligné l'urgent besoin d'un matériel d'arthroscopie chirurgicale, au sujet duquel il a sollicité leur aide pour en accélérer l'acquisition.

La délégation française, accompagnée de parlementaires sénégalais, a ensuite visité les principales installations de l'hôpital, dont elle a pu observer la tenue impeccable.

4. Entretien avec Mme Bineta Samba Ba, ministre des Relations avec les Institutions

La ministre a précisé, en préambule, que son ministère est chargé des relations avec les institutions parlementaires, tant nationale que régionales ou africaines, mais aussi avec le Conseil de la République pour les affaires économiques et sociales (CRAES) et la Médiature.

Le président Doudou Wade a ajouté que la ministre, qui assiste à la conférence des présidents, exerce non seulement un rôle de liaison entre le gouvernement et le Parlement, mais aussi qu'elle est chargée de faciliter les contacts entre ce dernier et les associations d'élus locaux et avec les parlements de l'UEMOA et de l'UA8.

La ministre a ensuite exposé les détails d'un projet, qui lui tient à cœur, visant à équiper l'hémicycle de l'Assemblée nationale d'un système de traduction simultanée pour supprimer un frein au travail législatif constitué par l'absence de maîtrise de la langue française par un certain nombre de députés. Il s'agit d'un projet onéreux, d'un montant de 640 millions de FCFA9, sur lequel elle a déjà sollicité les partenariats de l'Union européenne, du PNUD et de l'Assemblée elle-même. Il consisterait dans un premier temps à traduire les débats dans les six langues nationales les plus utilisées avant de passer plus tard à l'anglais et d'autres langues étrangères. L'assemblée nationale dispose déjà d'une régie audio, parmi les plus performantes d'Afrique, et d'un espace disponible pour installer huit cabines de traduction. Le projet inclut une formation de formateurs à l'interprétariat.

Le président Doudou Wade a cité alors une anecdote révélatrice : un député a interpellé récemment en Wolof le ministre de l'économie et des finances qui lui a répondu en Toucouleur, langue que son interlocuteur ne comprenait pas ! Mais en règle générale les débats se déroulent en français et c'est dans cette langue qu'est édité le compte rendu des débats.

M. Serge Janquin, a fait observer qu'en vertu de la séparation des pouvoirs et de ses règles internes, l'Assemblée nationale ne peut pas répondre concrètement à une demande de financement d'infrastructures mais qu'elle peut en revanche apporter un appui à la formation. Le dossier relève plutôt de la compétence du ministère de la Coopération et de celui des Finances.

Mme Martine Aurillac a alors suggéré d'informer le ministre délégué à la Coopération, M. Xavier Darcos, de cette demande et de lui transmettre le dossier.

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5. Entretien avec le Premier Ministre, M. Macky Sall

Le Premier ministre a rappelé que la visite, en février 2005, du Président de la République, M. Jacques Chirac avait constitué le point d'orgue des relations d'amitié très anciennes entre les deux pays, liés par la langue, la culture et l'histoire. La France est le premier partenaire du Sénégal à tous points de vue et il convient de consolider ce qui existe déjà.

Il a ensuite évoqué la question de la Casamance, en pleine phase de négociation à la suite de l'accord du 30 décembre 2004 par lequel le MFDC 10 a renoncé à la lutte armée et qui prévoit, en association avec plusieurs partenaires, un programme étoffé de reconstruction articulé en quatre volets : déminage, réinsertion des anciens maquisards, reconstruction des infrastructures détruites et construction de nouvelles infrastructures destinées au désenclavement de la région, notamment des routes terrestres et maritimes.

Sur ce dernier point, il a précisé que la liaison entre la Casamance et la capitale serait bientôt assurée par un nouveau bateau, financé par la coopération allemande et la Banque européenne d'investissement. En attendant, la liaison est assurée par un bateau de transition, loué en Indonésie.

Il a avoué son soulagement d'avoir pu faire aboutir cet accord car il était inquiet de l'émiettement du mouvement indépendantiste, qui devenait incontrôlable faute d'autorité centrale. Et il a considéré que la présence du chef du MFDC au défilé de la fête nationale, le 4 avril, avait apporté la preuve que la revendication d'indépendance de la Casamance est désormais un sujet dépassé.

Le Premier ministre a alors réclamé aux pays partenaires du Sénégal dans le processus de reconstruction une plus grande sincérité dans les engagements, en leur demandant de renoncer aux effets d'annonce et aux déclarations sans lendemain. Il a déploré notamment que les engagements du groupe de Paris ne soient pas encore réalisés. Le processus de paix a déjà fait naître de grands espoirs parmi les populations concernées et tout doit être mis en oeuvre pour ne pas les décevoir. Le budget du Sénégal est mis à contribution mais il dispose de moyens limités et compte beaucoup sur ses partenaires.

Il a estimé, de manière plus générale, que la coopération avec l'Afrique se doit d'être plus efficace. L'aide publique au développement a fait preuve d'une grande inefficacité, du fait des africains eux-mêmes mais également du fait des pays donateurs, dont les procédures sont trop souvent multiples et compliquées. Il a regretté que, dans les faits, très peu des engagements pris aient été réalisés.

Le Premier ministre a enfin expliqué que s'il avait existé un moment une certaine incompréhension avec la France, c'était dû au recul de son aide bilatérale, et que si par ailleurs l'aide multilatérale avait augmenté, l'aide de l'UE et celle de la France sont deux réalités bien différentes.

Mme Martine Aurillac a alors fait remarquer qu'un net rééquilibrage au profit de l'aide bilatérale était intervenu depuis deux ans et que la coopération avait connu un nouvel essor depuis 2002, le port de Ziguinchor, le lycée Mermoz ou le futur pont de Saint Louis en sont des exemples.

L'ambassadeur de France, S.E. M. André Parant, a tenu à préciser que le processus d'annulation de la dette bilatérale étant arrivé à son terme, la baisse de l'APD française était de ce fait plus apparente que réelle.

Le Premier ministre a tenu à exprimer sa reconnaissance sur l'initiative PPTE 11 grâce à laquelle de nombreux investissements sont réalisés dans le domaine social. Il s'agit d'une priorité pour le Sénégal qui a besoin d'aider ses paysans à financer leurs intrants. En conclusion, il a jugé globalement satisfaisante la coopération franco-sénégalaise.

6. Audience du Président de la République, Me Abdoulaye Wade

Etaient présents, outre la délégation française accompagnée par l'ambassadeur de France, le président et le vice-président de l'Assemblée nationale, MM. Pape Diop et Iba Der Thiam, le président du groupe d'amitié Sénégal-France, M. Doudou Wade et la ministre des relations avec les Institutions, Mme Bineta Samba Ba.

Mme Martine Aurillac a remercié le Président de la République pour l'honneur qu'il faisait à la délégation en la recevant malgré un emploi du temps chargé et lui en a présenté les membres. Rappelant ensuite que Saint Louis avait été française avant Strasbourg, elle a évoqué l'histoire commune, partagée dans le sang, qui confère aux liens entre les deux pays un caractère exceptionnel.

Elle a salué l'organisation, au même moment à Dakar, d'une conférence préparatoire au dialogue islamo-chrétien et fait remarquer que les deux pays partagent une même diversité culturelle. Elle a assuré le Président que la délégation qu'elle conduisait saurait faire le relais avec le Gouvernement français.

Le Président de la République a remercié la délégation française de sa visite, témoignage de la véritable amitié qui lie les représentants du peuple. Il a rappelé qu'effectivement l'amitié entre les deux pays plongeait très loin ses racines et a évoqué comme probable la présence de quelques soldats sénégalais dans la guerre d'indépendance des Etats-Unis. Il a affirmé que les Sénégalais revendiquent leur histoire coloniale sans cacher qu'ils ont participé aux côtés des français à la conquête de l'Afrique.

Qualifiant la coopération franco-sénégalaise de première des coopérations, difficilement mesurable, il a insisté sur la nécessité de développer les coopérations décentralisées, très importantes à ses yeux car elles sont un véritable vecteur de solidarité réelle dans un monde d'égoïsmes réels et de solidarités déclarées. Les engagements respectifs de la France et du Sénégal dans leurs propres processus d'intégration, Union européenne et Unité africaine, ne doivent pas modifier leur relation bilatérale.

Il a assuré avoir témoigné auprès de ses frères anglophones de la proximité des relations franco-sénégalaises en insistant sur le fait que la France est le seul pays qui avait su nouer des relations avec tous les pays africains, ce que beaucoup d'autres pays auraient bien aimé pouvoir faire.

Quant à la Côte d'Ivoire, il a considéré que la France ne doit pas s'en retirer si elle ne le souhaite pas et il a confié son optimisme sur les relations entre les deux pays malgré les tensions actuelles.

Le Président Wade a alors évoqué un projet, qu'il caresse depuis deux ou trois ans, de créer un Institut de langue et civilisation française. Celui-ci se consacrerait à la promotion de la langue française, en tout premier lieu auprès des Sénégalais, qui ont une certaine tendance à parler un français de piètre qualité, alors même qu'ils n'y sont pas obligés puisqu'ils disposent, avec le wolof, d'une langue nationale. Il se consacrerait également à la diffusion de l'usage du français au sein de l'Union africaine, qui est officiellement trilingue, en se chargeant de l'apprendre aux Africains anglophones. Il a assuré avoir reçu pour cela la caution morale de plusieurs Chefs d'Etat anglophones. L'Institut, qui serait installé au Sénégal et ne dépendrait pas de la Francophonie, serait crée sous la forme d'une association franco-sénégalaise. Le Sénégal est en mesure de prendre la construction et le fonctionnement à sa charge et ne demanderait que le détachement d'enseignants à la Coopération française.

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7. Dîner-débat avec les représentants des organisations patronales sénégalaises.

Participaient à cette rencontre le président de la Confédération nationale des Employeurs du Sénégal (CNES), M. Mansour Kama, le président du Conseil national du patronat (CNP), M. Baïdi Agne ainsi que plusieurs chefs d'entreprises.

Mme Martine Aurillac a remercié le président Doudou Wade d'avoir organisé cette rencontre car il est vrai que, dans le secteur privé, les échanges sont encore trop parcellaires. L'aide aux projets, promue par notre coopération, et l'encouragement aux investisseurs privés et aux exportations devraient cependant permettre de donner à ces échanges un essor certain. Des conventions d'établissement en matière fiscale ont d'ailleurs été signées par nos deux pays. Elle a assuré à ses interlocuteurs qu'elle connaissait leur souhait de faciliter les courants d'affaires, avec notamment la création d'un passeport d'affaires, et leur besoin d'une plus grande sécurité dans de nombreux domaines. La délégation serait à leur écoute pour voir et comprendre comment le France et l'Union européenne pouvaient leur apporter une aide sur ce plan. Elle a laissé alors place au dialogue, qui devrait soulever diverses questions telles que le droit du travail, la parité des changes, le crédit, etc.

M. Mansour Kama, président de la CNES, a salué l'initiative du parlement sénégalais et du Président Doudou Wade à l'origine de cette rencontre.

Il a souligné tout d'abord la forte présence du secteur privé français - environ 200 entreprises - dans l'économie du Sénégal, où elles représentent 80 % de la valeur ajoutée du pays. Liée à l'histoire commune, l'importance de cette présence, qui s'explique en partie par la faiblesse des opérateurs économiques sénégalais jusqu'à une période récente, pose néanmoins la question du partenariat. L'ouverture aux nationaux du capital des entreprises françaises installées au Sénégal apparaît comme l'option à privilégier pour répondre à la forte demande de partenariat entre secteur privé français et sénégalais. Elle permettrait l'instauration d'une véritable communauté d'affaires, base d'une nouvelle coopération, à laquelle seraient ainsi évités les déboires connus par Orange lors des derniers évènements d'Abidjan. A contrario, la SDE, la SONATEL et d'autres entreprises, où Français et Sénégalais détiennent des intérêts, constituent des exemples réussis de ce nouveau type de partenariat, qu'il conviendrait d'élargir au secteur des prestations de services.

Il a ensuite fait remarquer que, malgré les apparences, un taux de croissance annuel de 6 % ne suffit pas à faire du Sénégal un pays émergent et qu'un taux à deux chiffres est indispensable. L'ambitieux programme de développement de cinq secteurs d'activité à fort potentiel de développement - la pêche, le tourisme, les NTIC et les téléservices, le textile - habillement et l'agro-industrie, identifiés comme les principaux atouts du Sénégal à l'exportation, permettra t'il d'y parvenir ? Il a déploré le fait que la majorité des entreprises soient uniquement tournées vers un marché intérieur, insuffisant en taille, estimant qu'il fallait faire étudier de près les raisons de leur manque de compétitivité.

La présence, partout dans le monde, des Sénégalais de l'extérieur et le poids des transferts financiers effectués par les émigrés, entre 200 et 300 milliards de FCFA par an, constituent une troisième piste de réflexion. Comment réorienter cette manne vers l'investissement et la création d'emplois ? La France, première destination des émigrés sénégalais, devrait, en relation avec les autorités sénégalaises, accompagner une réflexion sur l'amélioration du niveau d'épargne des immigrés et sur la sécurisation sur leurs investissements dans leur pays d'origine. La question du retour des émigrés au pays étant d'actualité, un partenariat entre autorités françaises et sénégalaises permettrait de mettre en place un dispositif d'accompagnement basé sur la formation et l'assistance à leur réinsertion dans le tissu économique local. Il a considéré que le secteur informel jouait correctement son rôle de soupape de sécurité, pour éviter une explosion sociale, face à un taux de chômage de 30 %.

Sur le plan de la compétitivité internationale, il a fait part de ses inquiétudes concernant la capacité du Sénégal à soutenir la concurrence étrangère dans le cadre de la mondialisation en cours. Seule une ouverture maîtrisée des marchés permettrait aux structures de production naissantes de survivre à cette ouverture. Que restera-t-il du cadre ACP lorsque la préférence tarifaire aura été vidée de sens par l'OMC ? Le soutien de la France auprès de l'UE ou dans le cadre des négociations en cours à l'OMC est indispensable sur ces points. La compétitivité des entreprises sénégalaises est, par ailleurs, minée par l'actuelle taux de change entre l'euro, auquel est rattaché le Franc CFA, et le dollar, devise dans laquelle sont libellées les exportations de ses concurrents les plus directs, notamment les pays émergents d'Asie.

Il a enfin évoqué la principale demande des entrepreneurs sénégalais, l'instauration d'un visa d'affaires qui n'a d'autre objectif que de fluidifier les échanges économiques franco-sénégalais, faisant remarquer au passage qu'il est infiniment plus facile d'obtenir un visa d'affaires valable dix ans pour entrer aux Etats-Unis qu'un visa simple pour la France. De l'avis de beaucoup d'opérateurs la situation actuelle n'est pas de nature à encourager les échanges.

Mme Martine Aurillac lui a répondu que le visa d'affaires, à l'étude, devrait faciliter la résolution de ce problème.

M. Baïdi Agne, président du CNP, a indiqué qu'il se ferait le porte-parole des préoccupations de l'entreprise sénégalaise au regard des relations franco-sénégalaises mais également sur le plan intérieur.

L'ensemble des entreprises installées au Sénégal rencontre les mêmes difficultés dans leurs relations avec le pouvoir exécutif et avec les travailleurs. L'Assemblée nationale est appelée à jouer un rôle important dans ce cadre.

Pour la première fois, l'investissement privé a dépassé l'investissement public au Sénégal et il est important d'analyser la composition de l'investissement français car une coopération économique renforcée doit impliquer des sacrifices de part et d'autre. En effet, de nombreux pays neufs, l'Inde par exemple, sont prêts à s'intéresser au Sénégal. C'est pourquoi l'investissement français doit se diriger en priorité vers les secteurs où les besoins sont les plus importants, pour participer de façon dynamique à la réduction de la pauvreté. La Compagnie Fruitière a été un investissement superbe, qui en deux ans a créé 1000 emplois et qui est devenu le 2ème producteur de tomates cerises après Israël, mais on doit le compter dans les investissements sénégalais. C'est un exemple à reproduire.

La Côte d'Ivoire et le Sénégal sont les deux pays les plus affectés par la disparition de la préférence tarifaire ACP et ils ne sont pas prêts à ce démantèlement, malgré les fonds mis à disposition par l'AFD. Il a conclu en insistant sur le devoir des groupes d'amitié de mieux porter les préoccupations des entreprises africaines et, pour se résumer, sur la nécessité, pour entreprises françaises, de se porter vers les secteurs nécessitant plus de capital.

Faisant remarquer que les deux organisations patronales présentes représentaient les entreprises les plus dynamiques du pays, le président Doudou Wade s'est interrogé sur l'adéquation de la présence française au Sénégal avec les besoins réels de son économie, sur la place du système financier dans l'économie sénégalaise et sur le réinvestissement des bénéfices sur place. Il a reconnu que les relations entre les deux groupes d'amitié devaient dépasser le cadre qu'elles ont connu jusqu'à présent.

M. Baïdi Agne a remarqué que les banques françaises de la place peuvent se retirer du Sénégal du jour au lendemain, sans conséquence néfaste pour elles mais avec des conséquences dramatiques pour l'économie nationale, en raison de leur rôle prépondérant dans le système financier.

M. Marc Le Fur a souhaité obtenir des éclaircissements sur trois points précis : l'état actuel de la filière arachide ; l'avenir économique de la maîtrise de la langue française, notamment dans le cas des centres d'appels ; la persistance du procès d'intention fait à la PAC, suspectée de nuire au développement de l'agriculture africaine.

M. Mansour Kama a précisé que la production d'arachides, qui avait atteint jusqu'à un million de tonnes annuelles, connaissait un déclin certain et difficile à enrayer, plafonnant entre 100 000 et 200 000 tonnes. Les centres d'appels, au nombre de trois aujourd'hui, ont permis de créer quelques milliers d'emplois. Ils constituent une opportunité qui pourrait se révéler importante, mais très loin derrière la Tunisie ou le Maroc. Quant à la PAC, elle constitue pour le Sénégal une gène moindre que celle occasionnée par les subventions américaines à leurs producteurs de coton.

M. Baïdi Agne a déclaré que si la question des délocalisations d'emplois est toujours ressentie comme un problème en France, elle doit faire l'objet d'une concertation entre les deux pays pour instaurer un mode de coopération privilégiée conduisant à un résultat « gagnant - gagnant ». L'installation de centres d'appels a généré la création d'environ 8 000 emplois en Tunisie et au Maroc et de moins de 2 000 au Sénégal contre 250 à 300 000 emplois de ce type en France. Or, la Francophonie doit être utile à tous ses enfants !

M. Serge Janquin a évoqué l'exemple de la France - où le volume des investissements est insuffisant bien qu'elle soit le 2ème pays au monde pour le montant des investissements directs étrangers - pour avertir les chefs d'entreprise sénégalais de ne pas rejeter à priori les investissements publics qui demeurent un outil important de la croissance, y compris industrielle, et leur a demandé de s'interroger sur le rôle de l'Etat dans l'allocation des ressources, qui ne doit pas être le seul décideur mais doit rester celui qui donne l'impulsion de départ.

M. Mansour Kama a interrogé les parlementaires français sur leur rôle dans le choix des priorités lors du vote du budget, sur leur collaboration avec le patronat français et a émis le souhait de s'inspirer de leurs pratiques pour raffermir le partenariat entre le patronat et le parlement sénégalais. Il a reconnu que, si le taux de profitabilité reste élevé en Afrique malgré l'image négative véhiculée dans l'opinion publique, les vœux pieux ne suffiront pas à attirer les investisseurs français au Sénégal. Il lui est apparu nécessaire d'améliorer l'environnement juridique et économique, d'une part, et le transfert de technologie, d'autre part, faisant remarquer qu'en matière de compétitivité, le matériel français est souvent loin d'être le mieux placé.

M. Serge Janquin a précisé que le travail parlementaire éclaire et contrôle celui de l'exécutif et que chaque parlementaire est comptable avant tout de l'intérêt de la Nation.

Un chef d'entreprise s'est étonné que l'obligation de respecter des normes très strictes pour exporter vers l'Union européenne ne soit pas assortie de la réciproque, ce qui a donné lieu à de nombreux abus. Il a souhaité que les parlementaires français veillent à l'instauration de normes à l'exportation. Il a par ailleurs déploré le fait que les pays africains sont le plus souvent retenus comme plateformes à l'export et non pas tout simplement pour l'implantation de capacités de production à usage local.

Revenant sur les propos de M. Serge Janquin, Mme Martine Aurillac a déclaré que si le rôle de l'Etat en tant qu'investisseur est important, il ne faut pas méconnaître celui que jouent les PME dans les créations d'emplois et dans les mécanismes de la croissance économique. Mais il faut les y aider. Quant au rôle des parlementaires dans le vote du budget, il est très important en raison de la concertation qu'ils mettent en œuvre avec les différents acteurs économiques et avec leurs électeurs. Ce rôle s'exprime principalement au cours du débat d'orientation budgétaire, qui a lieu traditionnellement au printemps et au cours duquel ils peuvent faire toutes observations sur les grands équilibres du budget de l'année suivante, avant qu'il soit arrêté. Le contrôle a posteriori devrait être mieux assuré grâce à une nouvelle procédure, celle de la loi organique sur les lois de finances.

En réaction à une observation du président Kama, pour qui un bon législateur ne peut bien légiférer que s'il est informé correctement, le président Doudou Wade a fait remarquer que l'information du législateur sénégalais vient presque exclusivement du Gouvernement et que, consciente de cette limite, l'Assemblée nationale réfléchit actuellement au moyen de rechercher une information plurielle qui complétera celle qui lui est dispensée par le Gouvernement. Les entreprises devraient participer à l'élargissement de la vision du législateur en lui faisant part de leurs positions dès qu'elles ont connaissance du projet de loi. En France, la tâche du législateur est facilitée par l'existence des groupes d'études qui servent de relais entre les secteurs d'activité et les parlementaires. Il est donc nécessaire d'instaurer au Sénégal un contact direct entre les différents acteurs économiques et politiques, afin de mieux légiférer.

M. Ibrahim Diagne, (secteur du BTP, affilié au CNP) est revenu sur le problème du secteur financier en précisant que 80 % des banques sont des filiales d'établissements bancaires français et qu'elles sont dans l'obligation de déposer cinq mois de leurs réserves auprès de la Banque de France. Or les PME sénégalaises, qui investissent entre 200 et 300 milliards de FCFA par an, ont des besoins de crédit très importants que les banques de la place ne peuvent satisfaire qu'après avoir obtenu l'aval du siège, en France. Cette procédure ne permet pas aux banques de participer comme elles le devraient au financement de l'économie sénégalaise. Que peuvent faire les parlementaires français pour améliorer cette situation ?

Mme Martine Aurillac s'est montré étonnée de l'importance de ces réserves mais elle a fait remarquer que le secteur bancaire est intégralement privatisé en France et que le pouvoir du parlementaire se limite à faire passer le message, ce qu'elle fera. S'agissant de la mondialisation qui, c'est vrai, génère des difficultés particulières pour le Sénégal, elle a tenu à assurer les intervenants du soutien total de la France lors des discussions futures de l'OMC, notamment pour la filière coton.

En accord avec M. Serge Janquin, qui avait rappelé que le Général De Gaulle avait nationalisé plusieurs banques en France, en 1945, parce cela correspondait à un véritable besoin de l'économie, un chef d'entreprise a déclaré qu'il appartenait à l'Etat Sénégalais de créer une banque des PME qui n'appartienne pas au secteur concurrentiel.

Concluant le débat, M. Baïdi Agne a considéré que c'est à l'Etat de prendre en charge l'assainissement du secteur financier et de faire sauter le verrouillage du crédit aux PME résultant de l'importance des réserves à constituer auprès de la Banque de France.

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8. Le rôle des femmes dans le développement

Mme Aïda Mbodji, ministre de la Femme, de la Famille et du Développement social, présidait la rencontre à laquelle participaient des élues et des représentantes des milieux associatifs.

Pour Mme Thiam, députée (Coalition SOPI), on ne peut parler de développement sans évoquer le rôle des femmes sénégalaises, qui représentent 52 % de la population et qui sont les plus concernées par le problèmes de la société sénégalaise. A ce titre, elles sont présentes au sein du CRAES, et elles sont impliquées dans le développement sur le plan politique, économique et social. Alors qu'entre 1963 et 1968, une seule femme était élue au Parlement, elles sont aujourd'hui 25. Elles occupent des postes de responsabilité au sein du gouvernement, où elles dirigent sept ministères.

Après avoir évoqué la volonté politique très forte du président Wade, qui se désole de la présence insuffisante des femmes au Gouvernement, la ministre a salué l'organisation de ce forum par le groupe d'amitié Sénégal-France au lendemain de la journée internationale de la Femme du 8 mars et à la veille de la 24ème quinzaine de la Femme.

A la suite des mesures drastiques initiées par le plan d'ajustement structurel, le Sénégal a réussi à améliorer son économie mais pas autant qu'il aurait fallu. Les femmes s'organisent face à la précarité mais leur marginalisation constitue une erreur économique.

Les femmes représentent 75 % de la population rurale et 85 % des travailleurs agricoles, elles produisent plus de 50 % des cultures vivrières. Ces chiffres mettent en lumières le rôle indispensable qu'elles assurent dans la chaîne alimentaire, dont elles sont largement responsables. Bien que l'égalité entre les femmes et les hommes soit reconnue par la Constitution et que celle-ci garantisse le droit d'entreprendre et le droit de propriété, le libre accès des femmes à la terre rencontre encore de nombreux problèmes d'application pratique.

Les femmes sont également nombreuses dans le secteur de la pêche, qui traite plus de 80.000 tonnes de poisson, et bien entendu dans le secteur informel, où elles s'investissent en priorité dans le commerce alimentaire ou textile et s'organisent au travers de très nombreux réseaux, régionaux ou nationaux.

Malgré leur poids économique, les femmes rencontrent de nombreuses difficultés dans leurs activités professionnelles où, en raison de leur quasi-absence dans les processus de décision et de leur faible niveau de qualification, elles sont toujours les moins bien rémunérées. Et pourtant les femmes détiennent le monopole de la transformation des produits frais mais leur travail sur le champ familial n'est pas enregistré comme une production agricole.

La ministre a fait part de sa volonté de mettre en place des indicateurs qui permettront de quantifier la charge de travail réelle des femmes et de rendre plus visible leur apport à l'économie nationale. Par ailleurs le Gouvernement travaille sur trois projets : la lutte contre la pauvreté, la création, sous l'égide du FMI, d'une agence de financement social et l'institution de crédits spécifiquement destinés aux femmes.

Elle a estimé, en conclusion, que malgré les difficultés qu'elles rencontrent encore aujourd'hui, l'espoir d'un avenir meilleur est permis aux femmes sénégalaises et africaines. Le développement se fera grâce à elles ou n'aura pas lieu.

Mme Martine Aurillac a remercié la ministre d'avoir mis en valeur l'apport prépondérant des femmes au Sénégal et mis l'accent sur le rôle informel, c'est-à-dire non reconnu, de la femme dans tous les domaines et tout au long de l'histoire et, récemment encore, dans le conflit de la Casamance.

La France a connu une évolution parallèle mais avec un calendrier différent. Le gouvernement français a largement promu le rôle de la femme ; des dispositions récentes telles que la loi sur le divorce, la réforme de la filiation ou la création de la Prestation d'accueil jeune enfant (PAJE) ont permis d'améliorer la situation de la femme, qu'elle soit seule ou mère d'une famille.

Mais elle a déploré que la parité salariale ne soit toujours pas réalisée dans le secteur privé, espérant qu'une convention interprofessionnelle signée récemment allait enfin permettre de respecter le principe fondamental « à travail égal, salaire égal ».

Dans le domaine politique, le Sénégal fait mieux que la France au niveau de la parité. En France, les femmes sont très minoritaires au Gouvernement et au Parlement et elles exercent peu de fonctions dirigeantes. Il reste donc beaucoup de progrès à faire, la loi sur la parité n'ayant pas vraiment amélioré la situation puisque les femmes héritent souvent des circonscriptions perdues d'avance.

Elle a recommandé à la ministre de porter toute son attention à l'éducation des petites filles et l'a félicitée pour son action et sa volonté.

Mme Thiam a fait remarquer que les résultats obtenus l'ont été par la lutte partout sur la planète et a déploré qu'encore aujourd'hui trop de femmes ne soient pas conscientes du problème et ne soient pas militantes de la cause féminine.

Une éleveuse, productrice de lait et présidente d'une association d'éleveuses qui compte 20.000 membres, a témoigné que les femmes sont à la tête de la majeure partie du cheptel, ovin ou bovin.

Une intervenante a profité de l'occasion pour rendre hommage à la qualité des femmes qui sont au Gouvernement, même si elles ne sont pas assez nombreuses, et s'est félicitée que le Sénégal ait fait le choix des femmes pour assurer son développement.

Mme Khalifa Tall, membre du CRAES, a fait part de son désir de développer la coopération entre son institution et les parlements étrangers et a signalé qu'au cours des cinq dernières années le nombre de femmes chefs de famille est passé de 18 à 24 %.

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9. Rencontre avec le Maire de Dakar

M. Pape Diop, maire de Dakar, président de l'Assemblée nationale a reçu la délégation, entouré de plusieurs conseillers municipaux.

M. Pape Diop a présenté le conseil municipal, qui compte 90 membres (63 PDS, 16 CPC et divers petits partis) et précisé que le budget de sa ville est passé de 9 milliards de Francs CFA, en juin 2002, à 25 milliards, en avril 2005, sans création de nouvel impôt mais par la seule amélioration du taux des recouvrements. Il a présenté ensuite quelques unes des réalisations et quelques projets de l'actuelle équipe municipale :

Santé : doublement, en moins de trois ans, du nombre des centres de santé ; création d'un SAMU municipal ; lancement de la construction d'une clinique ophtalmologique qui permettra aux Dakarois de ne plus avoir à se déplacer à l'étranger et envoi d'ophtalmologues stagiaires en France. La meilleure salle d'opération de Dakar est installée dans un centre de santé municipal, en périphérie de la ville.

Social : le système de micro-crédits diffusés par le Crédit municipal, instauré dans le cadre de la lutte contre la pauvreté, présente un bilan positif, après un an de fonctionnement et environ un millier de projets financés.

- Education : rénovation des écoles primaires et installation d'une salle informatique dans chaque école pour initier les élèves aux nouvelles technologies informatiques et de la communication

Urbanisme : rénovation du réseau, très vétuste, d'éclairage public avec pour objectif, à terme, d'atteindre le taux d'équipement des villes européennes ; transfert d'activités marchandes, beaucoup trop concentrées dans le quartier central du Plateau, vers les quartiers périphériques.

Environnement : lancement récent d'un plan intitulé « Dakar, ville belle » axé sur une amélioration de la propreté des rues et la plantation, en cinq ans, d'un million d'arbres dont 40.000 ont déjà été plantés.

10. Visite du lycée Jean Mermoz

Le réseau des établissements à programme français du Sénégal accueille 5.944 élèves dont 2.890 français.

Le Lycée Jean Mermoz, géré directement par l'AEFE 12, est considéré comme l'établissement phare de la coopération culturelle au Sénégal. Il compte 1.683 élèves de 36 nationalités, dont 1.338 français (85 %) scolarisés dans le primaire et le secondaire, et un corps enseignant de plus de 100 personnes.

Il a dû faire face, en cours d'année scolaire 2004-2005, à l'arrivée exceptionnelle de 222 élèves réfugiés de Côte d'Ivoire, ce qui a imposé l'ouverture de 11 nouvelles classes en 15 jours, dont deux accueillies sous des tentes de l'armée et trois hébergées dans un autre établissement.

Vitrine de l'enseignement scolaire français, le lycée est saturé en effectif à chaque rentrée et se voit contraint d'accueillir moins d'élèves sénégalais qu'il ne le souhaiterait (10  % seulement) à cause des priorités accordées aux enfants français ou issus du réseau AEFE d'autres pays.

Ces raisons exceptionnelles, liées à la vocation du lycée français d'accueillir plus largement les enfants sénégalais issus de familles francophones et francophiles qui en font la demande, ont motivé la décision, annoncée par le chef de l'Etat lors de son voyage à Dakar en février 2005, de reconstruire le lycée, dans un délai de trois ou quatre ans, en portant sa capacité d'accueil à 2.500 élèves.

Le lycée Jean Mermoz, qui affiche un taux de réussite au baccalauréat de 92 %, permet aux élèves qui y sont passés un accès direct au système éducatif en France, notamment vers les classes préparatoires. En prise directe avec l'académie de Rouen, il délivre un enseignement au plus près de la pédagogie et des programmes français. Il assure également un appui au système éducatif sénégalais, notamment par le biais d'une formation continue en réseau.

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11. Entretien avec le ministre des Affaires étrangères

M. Cheik Tidiane Gadio, ministre d'Etat, ministre des Affaires étrangère,s a reçu la délégation au ministère, qui fut autrefois le siège du tribunal et celui de l'Assemblée territoriale du Sénégal.

Mme Martine Aurillac a remercié le ministre de son accueil, a présenté la délégation française et a déclaré qu'après avoir évoqué les sujets souhaités par la partie sénégalaise et notamment les flux migratoires, elle souhaiterait entendre le ministre expliquer les grandes lignes de la politique extérieure du Sénégal en Afrique et plus particulièrement à l'égard des unions dont il est membre.

Le ministre d'Etat a rappelé que l'événement de l'année a été la visite du président de la République française, qui était très attendue. Il a témoigné avoir vu le président Chirac très ému par l'accueil qu'il a reçu.

Au plan de la politique extérieure, le Sénégal conserve d'excellentes relations avec la France. Le président Wade a réussi a enrichir une diplomatie sénégalaise à laquelle le président Senghor avait déjà conféré un poids politique et diplomatique sans commune mesure avec la taille de son pays et dont le président Diouf avait assuré une bonne maintenance. Pour le président Wade, la diplomatie sénégalaise repose sur quatre socles fondamentaux :

- un panafricanisme réaffirmé, qui s'est manifesté par la réouverture de plusieurs ambassades sur le continent, par l'élaboration du Plan Oméga, à l'origine du NEPAD auquel il s'est depuis intégré, pour recentrer le débat sur le développement, et par sa participation à la construction de l'Union africaine.

- une diplomatie de médiation au service de la paix, dont l'implication dans la crise malgache est une des fiertés, mais qui compte également à son actif l'élaboration du premier cessez-le-feu en Côte d'Ivoire, à Bouaké, ou sa rencontre avec le président Charles Taylor pour lui conseiller de quitter le pouvoir dans l'intérêt de son pays.

- une diplomatie économique axée sur le développement et destinée à attirer les investisseurs. La création de l'Agence nationale chargée de la promotion des investissements et des grands travaux (APIX) en est la principale manifestation. Il s'est félicité que les investisseurs français aient été les plus rapides à réagir.

- une diplomatie de souveraineté, qui s'appuie sur des amis traditionnels tels que la France, le Maroc ou l'Arabie Saoudite et qui s'est manifestée, depuis 2001, par la première visite d'un Premier ministre britannique, d'un Président américain ou d'un Premier ministre canadien au Sénégal. On peut inscrire également à son actif l'ouverture d'une ambassade de Cuba, résultat normal du vote du Sénégal contre l'embargo de Cuba, et l'établissement de meilleures relations avec l'Iran et la Libye.

Il a ensuite fait un bref tour d'horizon des questions d'actualité en notant que des évènements inacceptables se déroulent au Darfour et que son pays est l'un des plus virulents dans leur condamnation, en signalant les interventions de son pays au Togo, en Côte d'Ivoire et en Guinée Conakry pour essayer d'y faire prévaloir le bon sens et le réalisme et en s'inquiétant de l'évolution en Guinée-Bissau, où il sentait monter les tensions.

Sur la réforme du Conseil de sécurité des Nations unies, le Sénégal n'a pas encore déclaré clairement ses intentions mais se bat pour faire aboutir la revendication africaine d'un siège permanent avec droit de veto. Le ministre a cependant jugé incompréhensible que la candidature de l'Afrique ne soit portée, pour le moment, que par des pays anglophones et n'a pas écarté l'éventualité que son pays fasse valoir les services rendus à la cause de la paix en Afrique et ailleurs dans le monde - la MONUC est dirigée par une général sénégalais, de très nombreux cadres et diplomates sénégalais sont au service de la paix et des Nations Unies - pour faire acte éventuel de candidature à ce siège, s'il était attribué à l'Afrique.

Abordant la relation bilatérale franco-sénégalaise, il a souhaité en examiner un point particulier, celui des migrations et de la politique des visas mise en place par le France. Le Sénégal comprend fort bien quelles sont les obligations de la France à l'égard de ses partenaires du traité de Schengen, mais chaque Sénégalais souhaiterait personnellement bénéficier d'un traitement particulier. La politique du co-développement est pleine de très bonnes idées, mais dans le domaine des visas ce sont des réalisations concrètes qui sont attendues, notamment par les étudiants. De nombreuses familles sont bouleversées par le refus d'un visa qui aurait permis à l'un des leurs de poursuivre ses études en France. A l'occasion d'un déjeuner du Président Wade à l'Elysée, il avait été décidé de revenir à la tradition et de faire de la France le premier choix pour des études à l'étranger, ce qui serait le meilleur moyen de limiter l'attrait des pays anglophones chez les étudiants africains. Il n'a pas mésestimé la délicate question de la gestion de l'après diplôme et du retour au pays des étudiants diplômés.

Mme Martine Aurillac a rappelé le poids exceptionnel du Sénégal sur le plan diplomatique, développé successivement par Léopold Senghor, par Abdou Diouf et par Abdoulaye Wade. Sur la question des visas, elle a confirmé la position très claire du président Chirac : il faut attirer plus d'étudiants étrangers en France mais il faut également veiller à leur retour dans leurs pays d'origine ; il faut aussi mettre en place un visa particulier pour les hommes d'affaires, indispensable au développement.

Remerciant le ministre pour l'accueil fait par le Sénégal aux réfugiés de Côte d'Ivoire, elle l'a assuré que la France serait aux côtés de l'Afrique et du Sénégal pour leur représentation au conseil de sécurité de l'ONU. Elle l'a alors interrogé sur l'état d'avancement du NEPAD.

Le ministre a expliqué que le démarrage du NEPAD rencontrait trois difficultés :

- l'hésitation des principaux partenaires à frapper un grand coup pour donner l'impulsion de départ. Les membres du G8 consacrent des dépenses faramineuses au démantèlement de leur arsenal nucléaire mais ils rechignent à mettre 10 milliards de dollars sur la table pour donner cette impulsion. Les pays africains attendent beaucoup du G8 mais aussi de la Banque mondiale et du FMI pour mettre sur pied des programmes du NEPAD qui ne soient pas que bilatéraux.

- la faiblesse des Africains : les Africains se plaignent de la lenteur et de la difficulté avec laquelle l'Union européenne débourse ses aides - il faut cinq ans par exemple pour obtenir le versement des crédits nécessaires à la construction de 100 km de route. Mais c'est aux Africains eux-mêmes de se mobiliser pour faire avancer leurs dossiers. Le Japon propose 600 millions de dollars d'aide et l'Inde 200 millions, or aucune mission n'a encore été envoyée sur place pour discuter des modalités d'utilisation de cette aide. Il faut reconnaître que l'Afrique manque d'expertise pour régler ces dossiers très complexes.

- un défaut d'organisation : les comités de pilotage, qui jouent le rôle d'experts, sont chargés de la conception des projets et c'est aux Chefs d'Etat, passés de 5 à 20 depuis la création, de décider de la mise en œuvre. C'est le monde à l'envers et cela conduit au blocage actuel : les chefs d'Etat sont débordés, ils n'ont pas la disponibilité nécessaire, et ils sont maintenant trop nombreux pour assurer la mise en oeuvre des projets préparés par les comités d'expert. De plus le G8 vient proposer un plan pour l'Afrique alors même que les Africains ne réussissent pas à faire démarrer le NEPAD. Cela étant, les Sénégalais attendent beaucoup des Britanniques, dont les intentions leurs paraissent louables.

M. Marc Le Fur est alors revenu sur la politique des visas et sur les problèmes de migration, faisant remarquer à ses interlocuteurs qu'il mesurait l'impact économique déterminant des flux financiers de la diaspora sur le développement, mais qu'ils devaient également prendre en compte l'impact important des flux migratoires sur l'économie et la population françaises. Il a tenu à préciser que le Sénégal n'est pas particulièrement maltraité sur le plan des visas puisqu'à ce jour ce sont deux demandes sur trois qui aboutissent à la délivrance d'un visa. Il a salué les efforts de l'ambassade et du consulat de France pour accueillir dans les meilleures conditions matérielles les demandeurs de visas et signalé que les délais d'examen et de délivrance des visas ont été raccourcis, quelquefois même à une journée.

Il a fait part de deux soucis de la diplomatie française sur ce sujet : aborder la question des visas dans un total esprit de dialogue et prendre en compte la spécificité sénégalaise, ce qui se traduit concrètement par :

- l'absence, statistiquement parlant, de problèmes pour la délivrance de visa aux hommes d'affaires, sous réserve de cas particuliers qui pourraient être signalés,

- l'existence d'un tropisme réel pour les universités anglo-saxonne, qui pourrait se résoudre par une meilleure adaptation du système d'éducation secondaire aux universités françaises.

La diplomatie française souhaiterait accélérer un processus de co-développement qui permettrait de faire bénéficier le Sénégal de l'expérience acquise par ses étudiants diplômés travaillant en France, sans avoir pour autant de solution concrète à proposer sur la question du retour des étudiants au pays à la fin de leurs études.

Le ministre d'Etat a reconnu que, dans cette affaire des visas, un refus opposé par l'Allemagne, l'Espagne ou les Etats-Unis est moins vivement ressenti que lorsqu'il émane de la France. Il a félicité à son tour l'ambassade de France pour les mesures prises en vue de faciliter le parcours et l'attente au guichet des visas et il a admis qu'il ne reçoit plus guère de plainte des ses compatriotes à ce sujet.

Il a manifesté son accord sur le fait que l'acquis culturel commun aux deux pays doit conduire les étudiants à faire leurs études en France, souhait fondamental des jeunes Sénégalais, même s'ils partent ensuite aux Etats-Unis ou au Canada pour obtenir une spécialisation.

Quant au retour d'expérience des expatriés sénégalais diplômés, il a mentionné le système TOKTEN 13, mis en place depuis plus de vingt ans par le PNUD 14 et qui a essentiellement profité au Pakistan ou à l'Inde. TOKTEN est destiné à faciliter leur séjour temporaire
- d'une semaine à trois mois - dans leur pays d'origine et à permettre à la fois un transfert d'expérience vers celui-ci et à faire naître chez eux l'envie de s'y installer. Dans ce cadre, il a suggéré, par exemple, que France Télécom 15 pourrait embaucher des diplômés sénégalais en France pour les mettre ensuite à la disposition de SONATEL au Sénégal.

Sur le problème des visas, il a estimé qu'il s'agit avant tout d'une question de communication entre autorités pour éviter, comme cela est arrivé, qu'un visa soit refusé à des boursiers sénégalais, et d'une question d'information à l'attention des demandeurs de visas qui doivent connaître à l'avance les règles du jeu. C'est donc plutôt une question de détails à régler.

Il existe encore de nombreuses plaintes émanant des hommes d'affaires qui, n'ayant pas obtenu le visa souhaité, font beaucoup plus de bruit dans la presse que ceux qui ont obtenu satisfaction. Il faut donc faire aboutir rapidement le passeport d'affaires, pour lequel il ne reste également plus à régler que des détails, tels que les dispositions pratiques pour éviter la fraude.

A la demande du président Doudou Wade, le ministre a fait ensuite le point sur le dialogue interreligieux et sur la lutte contre le terrorisme.

Dans le domaine du dialogue interreligieux, il a tenu à rendre un hommage appuyé au Pape Jean-Paul II, un grand homme dont l'action en faveur de la liberté, des pauvres, des femmes et de tous ceux qui subissent des discriminations a été positive. Il s'est déclaré fier, comme Sénégalais, d'avoir reçu un triple héritage africain, musulman et chrétien. Il a loué la sagesse de ses compatriotes qui font pacifiquement coexister les différentes religions, parfois au sein d'une même famille, et il a envisagé le retour à la vieille tradition des cimetières communs. Il s'est dit persuadé que les Sénégalais seraient prêts à élire à nouveau un président chrétien, car ce n'est pas sur la religion du candidat mais sur sa compétence à assumer la charge que porterait le débat électoral. En accueillant la conférence préparatoire au dialogue islamo chrétien, le Sénégal se distingue une fois de plus par sa tolérance et s'inscrit en faux contre un prétendu choc des civilisations.

L'Afrique doit, tout à la fois, ne pas s'exclure du débat sur la lutte contre le terrorisme et ne pas constituer le ventre mou qui servirait de refuge aux terroristes. Elle a d'ailleurs déjà payé un lourd tribut au terrorisme international qui a perpétré ses premiers attentats sanglants au Kenya et en Tanzanie. Le ministre a fustigé à ce propos l'attitude des médias internationaux, qui ont accordé plus de poids aux douze victimes américaines qu'aux deux cents morts africains. L'Algérie également a été une des premières victimes du terrorisme islamiste. Il a estimé qu'aucune cause n'est suffisante pour justifier le terrorisme et il a récusé la justification du terrorisme par la pauvreté.

C'est dans cet esprit que le Sénégal a soumis, il y a quelques mois, à l'Union Africaine, un projet de protocole additionnel à la Convention de l'OUA/UA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme. Ce projet de protocole vise à renforcer la Convention d'Alger et à l'adapter au contexte post-11 septembre.

Mme Martine Aurillac a déclaré que chacun peut être frappé par la tolérance rare qui règne au Sénégal. Elle a conclu en remerciant le ministre et en confirmant que le Sénégal garde une place à part au cœur des Français et que la France reste l'amie du Sénégal, qui revendique lui-même cette amitié particulière.

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12. Le système éducatif au Sénégal

Le Professeur Moustapha Sourang, ministre de l'Education, a fait un exposé sur le système éducatif au Sénégal, en présence des deux groupes d'amitié, à l'Assemblée nationale.

Le ministre a rappelé qu'il avait vécu dix ans en France, dont quatre comme enseignant. Il a convenu que l'école est un secteur bien particulier, qui partage avec la démocratie une quête de l'absolu et que le système éducatif sénégalais, très influencé par le système français, a besoin d'un cadre normatif renforcé.

Le Sénégal mise sur l'éducation comme facteur de développement et considère que l'éducation des filles est un multiplicateur du développement. Sur le plan budgétaire, l'éducation absorbe 40 % du budget national, soit l'un des plus forts taux au monde, et la moitié des ressources du pays sont consacrées à la santé et à l'éducation.

Le ministre a précisé que son gouvernement avait étendu l'âge de la scolarité obligatoire de 6 à 16 ans, contre 7 à 12 ans auparavant, et que la pré-scolarisation s'effectue désormais par la mise place progressive des « cases des tout-petits », dont l'objet est d'éveiller l'esprit de l'enfant de moins de six ans en vue de créer les conditions d'une scolarisation réussie et qui devraient avoir une conséquence positive sur le taux de scolarisation. Le Gouvernement s'oblige en contrepartie à mettre en place les moyens nécessaires à cette extension, dans le cadre du Plan Décennal pour l'Education et la Formation (PDEF) lancé, en 2000, en application des conclusions des états généraux sur l'éducation tenus en 1980.

Il a rappelé qu'au Forum mondial sur l'Education organisé par l'UNESCO à Dakar, en avril 2000, les pays africains avaient souscrit à l'engagement de scolariser gratuitement, d'ici 2015, tous les enfants en âge de l'être. Depuis, le Sénégal accueille de nombreuses délégations africaines venues observer ce qui s'y fait.

L'enjeu du PDEF est de favoriser l'accès à l'éducation à 300 000 enfants supplémentaires dans les prochaines années et de procéder pour cela au recrutement de 3 000 enseignants supplémentaires, sur la base de la contractualisation plutôt que la titularisation, dans une phase transitoire.

Pour parvenir à réaliser ses objectifs, le PDEF repose sur trois axes :

- l'élargissement de l'accès à l'éducation et à la formation. Il passe par la multiplication des infrastructures (salles de classe) et des intrants (enseignants, matériel pédagogique...). 44 % du budget de l'éducation est consacré à l'enseignement primaire, qui concerne un million et demi d'élèves.

- l'amélioration de la qualité et de l'efficacité du système éducatif à tous les niveaux. Elle s'est manifestée, depuis 2000, par la création de 9110 salles de classes et le recrutement de 22 000 nouveaux enseignants, sur la base du volontariat, avec un contrat de deux ans et la titularisation de tous ceux qui possèdent un CAP. Le recrutement annuel est ainsi passé de 500 à 3 000 enseignants ; le taux brut se scolarisation atteint quasiment 80 % et doit être amélioré de 20 % dans les dix ans à venir.

- l'optimisation des ressources humaines, financières et matérielles. Elle se fonde sur la mise en œuvre de très nombreux critères tels que la rationalisation des procédures administratives, la déconcentration accrue des services de l'Etat et la responsabilisation des collectivités locales, une utilisation rationnelle des personnels (redéploiement vers les établissements scolaires, gestion améliorée des mouvements de personnel, adoption de mesures incitatives pour fixer les enseignants, etc.), ou une amélioration des programmes, pour n'en citer que certains.

Le PDEF s'appuie sur l'aide dispensée par de nombreux bailleurs de fonds, dont la France est le chef de file. Il a déjà permis de réaliser en quatre ans le tiers de ce qui existait depuis quarante ans.

La deuxième phase du plan, au cours des années 2005 à 2007, doit privilégier la question des contenus car il faut maintenant stabiliser les avancées. Pour cela, une politique hardie de formation des formateurs a permis de faire passer les écoles de formation d'instituteurs de quatre à onze. Par ailleurs, comme l'achat de manuels scolaires constitue un luxe que ne peuvent se permettre la majorité des familles, une politique d'équipement des écoles en manuels scolaires se révèle indispensable : elle prévoit la fourniture de trois manuels par élèves dans le primaire et de cinq dans le secondaire. Entre 2000 et 2004, entre 400 et 500 établissements secondaires ont reçu un financement de l'Etat pour réaliser cet objectif.

Au niveau des infrastructures de l'enseignement secondaire, 25 lycées neufs auront été construits avant la fin 2005, auxquels il faut ajouter 30 collèges financés par l'USAID et 500 classes par la Coopération française.

Le PDEF parie sur l'introduction des NTIC, encadrée par le schéma directeur Informatique. Ce dernier prévoit de mettre dix ordinateurs à la disposition de chaque inspection académique et cinq dans chaque inspection départementale. Un millier sont déjà mis en place et 2.000 ont déjà été livrés, sur une commande globale de 10.000 ordinateurs pour équiper lycées et universités. En matière de connexion à l'Internet, le Sénégal dispose de la 2ème bande passante d'Afrique après l'Afrique du Sud. Le ministère de l'Education se penche sur la possibilité d'utiliser l'énergie solaire pour l'alimentation en électricité des écoles, ce qui permettrait de réduire de 70 % la facture énergétique et de disposer d'un accès à l'Internet en continu.

Le ministre a cependant fait remarquer que rien ne sert d'ouvrir l'école à tous les enfants si les parents ne les y laissent pas venir ou ne leur permettent pas d'y rester. C'est un problème récurrent dans les familles pauvres, surtout rurales. C'est pourquoi il faut développer les cantines scolaires et user de stratégies de suivi et de surveillance par les maîtres pour obtenir que les enfants des familles pauvres puissent pousser leur scolarité au moins jusqu'au CM2.

On voit donc que le PDEF regroupe l'Etat, les bailleurs, les maîtres et les parents d'élèves dans un partenariat privilégié. Il permet d'ores et déjà au Sénégal de se situer dans la moyenne des douze premiers pays africains et d'être classé par l'UNESCO parmi les 12 États les plus « ambitieux » dans le domaine éducatif.

Le ministre a insisté cependant pour souligner la persistance de nombreux problèmes, dont le plus important est, à son avis, le maintien de la qualité de l'enseignement dans le temps.

Il a signalé en conclusion que l'AFD contribue fortement au PDEF par ses interventions au niveau de l'accès à l'enseignement élémentaire et de la qualité et la gestion ; il s'est félicité de l'exemplarité de la Coopération française qui, entre autres, a détaché des conseillers techniques à son cabinet.

Mme Martine Aurillac a remarqué que les deux pays ont de nombreuses approches en commun, concernant en particulier une répartition géographique équilibrée, la formation des maîtres, l'importance accordée aux NTIC ainsi qu'à la concertation et à la décentralisation.

Considérant que les chiffres parlent d'eux mêmes, elle a qualifié d'admirables l'ambition du Sénégal de scolariser tous les enfants entre 10 et 16 ans et l'effort entrepris pour les maintenir à l'école malgré les difficultés rencontrées.

Elle a interrogé le ministre sur la situation de la mixité dans les écoles et sur l'accueil réservé aux enfants en difficulté.

Le ministre a précisé que la mixité constitue la règle et que s'il existe encore des lycées de jeunes filles, c'est uniquement dans le but de favoriser leur développement. Quant à l'enfance en difficulté, il existe des programmes spéciaux d'éducation intégratrice pour enfants handicapés, physiques ou mentaux, qui représentent environ 5 % des élèves. Pour favoriser l'éducation des enfants qui fréquentent uniquement les écoles coraniques, leur accueil dans les filières d'enseignement professionnel est facilité et il est prévu d'introduire un enseignement religieux facultatif à l'école publique.

Le président Doudou Wade a posé la question de l'évaluation de l'investissement fait par le Sénégal, à hauteur de 1,3 milliard de Francs CFA par an, pour subvenir aux besoins des étudiants envoyés en France.

Le ministre a d'abord rassuré son interlocuteur sur la bonne qualité de la coopération avec la France où environ 2.500 étudiants sénégalais sont envoyés avec des bourses de l'Etat sans compter ceux qui ne sont pas aidés. Il a estimé qu'avec une population proche de dix millions d'habitants, le Sénégal devrait avoir un ratio de 200.000 étudiants, or il n'en a que 75.000. Les étudiants sont envoyés en France à l'issue d'une sélection sévère. De la coopération engagée avec le CROUS, il ressort que le taux de réussite des étudiants boursiers sénégalais est bon, 90 % d'entre eux obtenant leurs diplômes. En 2005, le budget de l'Etat consacrera 2 milliards de FCFA supplémentaires aux bourses d'étudiants, pour un effort global en la matière de 6 milliards. Il a considéré que l'objectif consistant à récupérer des cadres de haut niveau n'a pas de prix.

Il a évoqué, en conclusion, la possibilité d'accentuer les coopérations décentralisées, plusieurs Conseils généraux ou régionaux ayant proposé d'offrir des bourses aux étudiants sénégalais, chacun pour 5, 10 ou 15 étudiants. Il a sollicité les parlementaires français, dont il connaît le fort ancrage local, pour qu'ils l'aident à bénéficier des gisements inexplorés de la coopération décentralisée.

* * *

13. Entretien avec M. Robert SAGNA, ancien ministre, député (P.S.) et Maire de Ziguinchor

M. Robert Sagna s'est réjoui de l'honneur que lui faisait la délégation en allant visiter la ville dont il est le maire depuis près de vingt ans, contrairement à la plupart des délégations étrangères qui s'arrêtent à Dakar, et il s'est déclaré prêt à engager le dialogue et à répondre à toutes les questions.

Mme Martine Aurillac a considéré qu'il est normal et utile de rencontrer les représentants de l'opposition et a voulu connaître son sentiment sur le problème de la Casamance : la paix est-elle revenue? Le processus engagé va-t-il arriver à bon port ?

M. Robert Sagna a d'abord rappelé que le conflit, né 22 ou 23 ans auparavant, avait plusieurs causes. D'abord un sentiment d'éloignement géographique (les Casamançais ne disent-ils pas qu' « ils vont au Sénégal » ?) autant que culturel. Il ne faut pas oublier que la Casamance n'a été colonisée qu'au cours du 19ème siècle et ne fut rattachée au Sénégal qu'en 1886, après son rachat par la France au Portugal, qui l'administrait depuis la Guinée Bissau. Cette gestion indirecte a continué par la suite, la France étant surtout intéressée par l'exploitation des zones portuaires. Ces données historiques expliquent autant le rattachement à une zone d'influence culturelle différente de celle du reste du pays que l'importance conservée plus longtemps qu'ailleurs par les pouvoirs locaux traditionnels. Longtemps sous-estimées, ces raisons culturelles ont pesé lourd au cours du conflit.

Des causes économiques ensuite : la Casamance a été longtemps négligée tout en étant considérée comme le grenier du Sénégal. Les opérateurs économiques, nordistes pour la plupart, ont eu tendance à marginaliser les authentiques Casamançais dans l'attribution des marchés, que ce soit dans le transport ou le bâtiment.

En résumé, les Casamançais se sont sentis un peu méprisés par les nordistes, qui se comportaient d'une manière souvent vexatoire, et ont eu le sentiment de subir une autre colonisation. Le phénomène s'est aggravé pendant la longue période de sécheresse qui a duré de 1973 à 1990 et entraîné une forte migration des populations du nord vers la Casamance. On a alors assisté à un favoritisme marqué de l'administration en faveur des nordistes dans l'attribution des terres, très mal vécu par la population locale, d'autant plus que la pratique religieuse des nouveaux arrivants était différente de la leur. A cette époque le député lui-même n'était plus d'origine casamançaise et ne parlait pas la langue locale !

Ayant ainsi exposé le contexte, M. Robert Sagna a expliqué que le conflit, porté par l'Abbé Diamacoune qui symbolisait la lutte, a été déclenché par un problème connexe à l'affectation de terres, de nombreuses familles n'ayant plus accès aux sépultures de leurs ancêtres restées sur des terres attribuées à des Sénégalais du Nord. La petite jacquerie du départ est devenue une véritable révolte, alimentée en armes à travers les frontières avec la Gambie, la Guinée et surtout avec la Guinée Bissau. La Casamance avait joué un rôle important dans la guerre d'indépendance de ce pays en 1975, les mêmes ethnies se retrouvant de part et d'autre de la frontière.

Les premiers contacts avec le maquis ont eu lieu en 1991 et les premières négociations ont débuté en 1999, à Banjul. En arrivant au pouvoir, Me Abdoulaye Wade s'était donné cent jours pour régler cette question qui lui tenait personnellement à cœur. En effet, les villages irrédentistes votaient PDS sous les gouvernements précédents et le nouveau président pensait pouvoir profiter de ses relations sur place pour régler rapidement le conflit. L'ambassade de France s'est elle aussi beaucoup impliquée pour rappeler que la Casamance faisait déjà partie du territoire sénégalais sous l'administration coloniale française.

Si le conflit demeure latent, on doit reconnaître que le président Wade a réussi à calmer le jeu. Les armes se sont tues depuis trois ans mais il faut savoir que l'intervention des notables locaux, et surtout des femmes, a joué un rôle très important dans l'apaisement. En effet, 90 % des maquisards appartiennent à l'ethnie Diola chez laquelle la tradition accorde une grande importance à la bénédiction donnée aux guerriers par les femmes, dans le bois sacré, avant d'aller au combat. En retirant leur soutien à cette tradition, elles ont permis les conditions de l'apaisement. Il existe des dissensions entre les femmes, mais 95 % d'entre elles sont favorables à la fin de la lutte armée.

M. Robert Sagna a néanmoins considéré que l'accord de paix avait été signé un peu précipitamment, avant même d'entreprendre des négociations, et pas forcément avec les interlocuteurs idoines. Il a été signé avec des anciens combattants, éloignés de la lutte, et entériné par l'abbé Diamacoune, contraint et forcé. Le début des négociations a d'ailleurs dû être reporté en raison de l'absence des véritables maquisards. Il a confié qu'il avait récemment rencontré le Président Wade pour mettre un terme à ce qu'il considère comme une « parodie de négociation ». Les maquisards souhaitent d'abord pouvoir se réunir entre eux afin que les différentes factions se mettent d'accord sur la désignation de leur porte parole, l'actuel ayant été désigné par le Gouvernement, et veulent que les négociations se déroulent en Gambie, territoire neutre. Le Gouvernement tient à éviter d'internationaliser le conflit, mais il l'est déjà dans les faits. Or il est indispensable d'associer aux négociations de paix la Gambie et la Guinée Bissau, dont la complicité avec la rébellion est réelle. Le président Wade a d'ailleurs pris tout récemment la décision de laisser le MFDC désigner librement les membres de sa délégation.

Il s'est dit persuadé que le Gouvernement n'est pas prêt à discuter d'une alternative à l'indépendance réclamée par le MFDC mais il a estimé que la régionalisation et un transfert massif de compétences constituent la seule possible. Il a confié son scepticisme sur la réussite de la démarche du Président Wade qui, plus qu'une négociation, vise avant tout à obtenir la réconciliation des Casamançais entre eux et avec le reste du Sénégal et surtout des irrédentistes avec les autorités légales. Or ce processus ne pourra aboutir qu'à la suite de négociations réussies et non pas l'inverse. Il a ajouté, enfin, que l'accalmie relative qui prévaut est surtout due au comportement de la société traditionnelle.

M. Serge Janquin a fait remarquer que la France ne renoncera pas à la recherche de la paix dans cette région, qui est dans l'intérêt des deux pays. Il a considéré que le développement économique devrait pouvoir gager une partie du processus et que les maquisards ne devraient pas être les seuls à décider de la paix. Il a regretté que des calculs économiques et politiques se mettent en travers de la normalisation en cours.

Pour M. Robert Sagna, la lassitude ressentie par la majorité de la population à l'encontre de cet état de guerre est un atout pour le Gouvernement, dont il doit se servir, mais il a estimé, contrairement au président Wade, que le statu quo est impossible et que ce dernier doit trouver une formule originale et nouvelle pour sortir de l'impasse.

Mme Martine Aurillac a estimé que la reconstruction, nécessaire, doit intervenir ni avant ni après mais en même temps que les négociations.

M. Robert Sagna a confirmé que les bailleurs de fonds sont tous convaincus de ce raisonnement, notamment la Banque mondiale, qui vient d'octroyer une ligne de crédit supplémentaire, mais aussi la France, le Canada ou l'Allemagne, qui sont sur la même ligne.

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14. Rencontre avec les Anciens combattants

Après le dépôt d'une gerbe sur la tombe de L. S. Senghor, la rencontre a eu lieu à la Maison des Anciens combattants (MAC) et des victimes de guerre, en présence de plusieurs dizaines d'entre eux, du directeur de la MAC, M. Alioune Kamara et du vice président de l'Assemblée nationale, M. Iba Der Thiam.

M. Alioune Kamara, directeur de l'Office national des anciens combattants (ONAC), a accueilli la délégation en rappelant que cette maison avait vu passer plusieurs générations d'anciens combattants et que les soldats sénégalais continuent à se battre hors de leurs frontières pour le maintien de la paix.

Il a fermement condamné l'article 71 de la loi de finances pour 1959, qui avait « cristallisé » depuis 1960 les pensions des anciens combattants. Alors que certains avaient parfois servi pendant 25 ans sous le drapeau français, qu'ils avaient fait l'objet des mêmes retenues sur leurs soldes leur donnant droit aux mêmes pensions que leurs frères d'armes, ils avaient ressenti cette décision comme une injustice aussi forte que si leur pension avait été supprimée. Le profond désarroi qu'elle avait entraîné chez la plupart des anciens combattants sénégalais, dont beaucoup avaient quasiment été réduits à la mendicité, a été à l'origine de la plainte déposée contre la France, plus précisément contre le gouvernement français, pour tenter de faire rétablir leurs droits. L'arrêt Diop du Conseil d'Etat leur a donné raison et condamné l'Etat français à rétablir les pensions. Ahmadou Diop, qui est tête de liste de l'UNAC, remercie la justice française pour lui avoir donné gain de cause. Mais le gouvernement français n'a toujours pas respecté l'arrêt Diop. La retraite du combattant est passée de 57.000 à 68.000 FCFA par semestre alors qu'un ancien combattant français perçoit lui 135.000 FCFA.

Il s'est félicité du soutien des anciens combattants français à leur revendication mais il a déploré que les sacrifices des combattants sénégalais aient été bafoués par une loi confiscatoire, alors même que la guerre ne s'était pas déroulée sur le territoire sénégalais. Depuis l'indépendance, les effectifs des anciens combattants sénégalais ont fondu de 60 %, réduisant d'autant la dette de la France. Faudra-t-il attendre la mort du dernier tirailleur pour leur rendre justice ? Au front, il n'y avait pas de différence dans la souffrance et la mort, le sang versé avait la même couleur.

Il a demandé aux députés français d'agir pour que justice leur soit rendue. Remerciant le Président Chirac pour sa visite et pour les gestes qu'il avait eus à leur égard, notamment l'octroi de décorations et l'attribution d'une subvention à la MAC, il a jugé cependant bien insuffisant le montant de 15.000 euros pour 7.000 anciens combattants.

Le capitaine Niang a fait alors la lecture de la lettre adressée au président français, dans laquelle il le remerciait pour ses gestes (octroi d'un véhicule tout terrain, subvention à la Maison des Anciens Combattants, possibilité d'obtention de la légion d'honneur) et exprimait l'espoir que les autres doléances seraient bientôt satisfaites. Il a cependant déploré que depuis plus de dix ans les anciens combattants africains ne soient plus associés aux cérémonies commémoratives.

M. Iba Der Thiam, ancien ministre, premier vice-président de l'Assemblée nationale, a tenu a rappeler que les tirailleurs ont participé à toutes les batailles coloniales ou métropolitaines de l'armée française et que 170.000 soldats de l'empire français - dont 70 % d'Africains - furent mobilisés entre 1914 et 1918 sous le drapeau français.

Il a rappelé également que les Africains furent encore mobilisés au service de la mère patrie lors de la 2ème guerre mondiale et que l'appel du 18 juin fut précédé par une démarche des députés africains pour refuser la capitulation. Les premiers échos à l'appel du 18 juin sont venus d'Afrique, notamment du Gouverneur général Félix Eboué. Il a rappelé l'odyssée de la 2ème DB et surtout l'apport précieux des 250.000 combattants venus de toute l'Afrique pour libérer la France du joug du nazisme. Il a insisté pour que justice soit rendue à tous ces anciens combattants pour le loyalisme dont ils ont fait preuve qui leur donne le droit de demander des comptes et de bénéficier de pensions égales à celles de leurs camarades français.

Mme Martine Aurillac a souligné que les membres de la délégation avaient tenu à venir rendre hommage aux anciens combattants et que leur présence en ces lieux constituait un temps fort de leur visite. Elle a félicité le Président Thiam pour son attachement inlassable à la cause des anciens combattants et a considéré que c'était un truisme de rappeler les liens tissés depuis toujours dans le sang et l'Histoire entre les deux pays en citant un extrait du cahier de doléance de la ville Saint Louis aux Etats généraux de 1789 : « le sang français coulera dans le sang de nos neveux ».

Elle a exprimé, au nom de la délégation qu'elle conduisait, le respect, la gratitude et la fraternité de la France à l'égard des anciens combattants sénégalais.

Elle a tenu à faire le point sur les mesures, non négligeables, prises par le Gouvernement français dans le cadre de la « décristallisation » des pensions versées aux anciens combattants sénégalais, dont les montants avaient été gelés à l'indépendance : réajustement des pensions versées en fonction de la parité des pouvoirs d'achat (PPA) calculée tous les ans par le PNUD et d'un système de points conduisant à une augmentation minimum de 20 %, versement d'un rappel équivalent à quatre années de réajustement, réouverture de droits pour les titulaires des pensions d'invalidité en cas d'aggravation de leur état de santé.

Compte tenu des ces données, le montant global des pensions versées en 2004 s'élevait, rappel compris, à 7,76 millions d'euros (5,09 milliards de FCFA) pour 5.226 titulaires d'une pension militaire française : 1.839 pensions militaires de retraite ou de réversion, 2.588 retraites du combattant et 570 pensions militaires d'invalidité.

Mme Martine Aurillac a reconnu que le nouveau régime des pensions est encore loin d'être parfait mais que le retard accumulé ne pouvait être rattrapé tout d'un coup. Elle a assuré que le Président Chirac lui avait confirmé que la subvention annuelle de l'ONAC serait dorénavant bien portée à 1 million de FCFA (15.000 €) et qu'un véhicule tout terrain lui serait attribué.

Elle a assuré, en conclusion, que l'Ambassade et le Consulat de France restaient mobilisés sur cette question, avant d'exprimer une nouvelle fois gratitude et reconnaissance pour le soutien des anciens combattants sénégalais, ainsi que la très grande considération et l'amitié qu'elle leur porte.

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15. Rencontres avec les autorités locales, à Ziguinchor

La délégation a eu trois entretiens successifs avec le Gouverneur de la région de Ziguinchor, avec le premier adjoint du maire de Ziguinchor et avec le Président du conseil régional avant de rendre une courte visite à l'abbé Diamacoune Senghor, chef historique du MFDC.

- Le gouverneur de Ziguinchor a donné des précisions sur son rôle, qui est d'accompagner les collectivités locales, tout particulièrement la région, dans leur développement et d'assurer au nom de l'Etat le suivi de toutes les actions entreprises. Il a estimé que la sérénité était revenue en Casamance après une crise de « faible intensité à évolution erratique » qui avait duré plus de vingt ans. Sous l'égide du président Wade, qui a eu des contacts directs avec les rebelles, le processus de paix se poursuit et tous y travaillent, dans l'ombre ou en pleine lumière. La réhabilitation des infrastructures de base est en cours, comme celle du port de Ziguinchor à laquelle la France participe et qui a été voulue par les parlementaires. Il s'est félicité de l'activité de l'Alliance franco-sénégalaise, ouverte depuis 1999, et de la réception, depuis 2004, des programmes de TV5. Il a enfin évoqué les nombreux jumelages, notamment entre Ziguinchor et Saint-Maur-des-Fossés, entre Octeville et Fintchiok, entre Bonaventure et Calabane et s'est réjoui de la présence de la France aux côtés de la Casamance.

Le président Doudou Wade a estimé que la région de Ziguinchor est un résumé du Sénégal dans toutes ses dimensions socioculturelles et a précisé que la délégation française avait tenu à saluer et accompagner le processus de paix et de reconstruction qui repose en grande partie sur la rénovation du port financée par l'AFD.

Mme Martine Aurillac a exprimé, au nom de tous ses collègues, sa joie de venir dans la province de Ziguinchor qui avait connu des moments particulièrement difficiles et ses vœux pour l'aboutissement du processus de paix.

- A la mairie de Ziguinchor, le premier adjoint a remercié les parlementaires français et sénégalais de leur appui à la paix et à la reconstruction. Il s'est réjoui de constater que la population avait retrouvé le sourire, signe d'un épanouissement nouveau, qui sera bien nécessaire dans cette région, autrefois la plus belle et le grenier du Sénégal, mais devenue hélas l'une des plus pauvres.

- Au conseil régional, le président Doudou Wade a estimé qu'il était indispensable de venir à Ziguinchor pour être au cœur du Sénégal. Il s'est interrogé sur la nature d'un développement sans la paix, d'une paix sans démocratie et d'une démocratie sans régionalisation.

Mme Martine Aurillac a exprimé ses vœux les plus chaleureux pour que la réconciliation conduise à la reconstruction. Elle a souligné la part active prise dans ce processus par la France, qui est aux côtés de la population casamançaise et restera un observateur vigilant.

Le président du Conseil régional a manifesté son émotion de recevoir une délégation de parlementaires français et sénégalais. Il leur a demandé de faire savoir que la paix est revenue et de rassurer les touristes. Il a déclaré sa fierté d'avoir été colonisé par la France, qui, avec le Sénégal, constituent deux Etats pour un même peuple. La présence d'un monument aux morts pour la France l'atteste, c'est l'histoire et c'est la réalité. Il a remercié la France pour l'importance se sa coopération à la reconstruction et s'est félicité de l'appui important apporté par la région Alsace.

Il s'est également félicité de l'appui important de l'Etat sénégalais et de la Banque mondiale à la région, qui constitue le niveau pertinent pour le développement. Mais il a regretté l'existence d'un handicap majeur qui entrave ce développement, l'enclavement de la Casamance derrière la Gambie, qui la coupe littéralement du reste du pays et constitue une réalité difficile à vivre. Il a manifesté son amertume à l'égard de la Gambie qui restreint drastiquement les communications à travers son territoire en imposant un péage excessif. Il a regretté que ni l'avion ni la liaison maritime ne puissent constituer une solution à cet enclavement et a déclaré que la Casamance a un impérieux besoin d'une voie de contournement que toute la population de la région naturelle de Casamance appelle désespérément de ses vœux.

Le président Doudou Wade a répondu qu'il avait bien compris et enregistré cet appel, qui venait du cœur, et Mme Martine Aurillac a considéré qu'avec une telle ardeur et un tel enthousiasme, la Casamance était bien défendue.

- La rencontre avec l'abbé Diamacoune Senghor, président du MFDC, s'est déroulée au siège du MFDC à Ziguinchor.

Le président Doudou Wade a présenté ses condoléances attristées à l'abbé pour le décès du pape Jean-Paul II.

Mme Martine Aurillac lui a apporté les vœux de la France à la réussite du processus de paix.

L'abbé Diamacoune Senghor a remercié la délégation pour sa visite et le président Doudou Wade pour ses condoléances. Il a rappelé qu'il avait été ordonné prêtre en 1956 et qu'il avait été heureux d'assister à la visite du Saint Père à Ziguinchor. Il a exprimé la reconnaissance de la Casamance à la France pour son aide et son action en faveur de la paix.

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16. La reconstruction de la Casamance

MPierre Marie BASSENE, ancien ministre, conseiller du Président de la République pour la Casamance, a exposé les programme de l'Agence nationale pour la relance des activités économiques et sociales en Casamance (ANRAC), dont il est responsable.

Le président Doudou Wade a fait observer à la délégation qu'elle avait pu mesurer, depuis son arrivée à Ziguinchor, combien le désir de paix est partagé par tous les acteurs sociaux et les détenteurs des pouvoirs locaux. Il a souligné l'importance de cette rencontre dans ce contexte.

Me Pierre-Marie Bassène a fait remarquer en préambule que l'initiative de créer, en juillet 2004, une agence chargée de créer les conditions et d'accompagner le développement économique et social de la Casamance avait constitué une démarche qui se situait aux limites de la constitutionnalité. En effet, la Casamance n'existe pas en tant que telle dans l'organisation territoriale de la République, puisqu'elle est partagée entre ceux régions, celles de Kolda et de Ziguinchor avec lesquelles elle ne se confond pas. Quand le Parlement a voté la loi d'amnistie, il a d'ailleurs préféré utiliser le terme de « Casamance naturelle », mais antérieurement à la création de l'agence, il existait déjà un poste de ministre conseiller chargé de la Casamance.

Le choix de ce nom répondait à plusieurs objectifs : bien montrer que l'on peut être en même temps en Casamance et au Sénégal, ne plus avoir peur d'utiliser ce nom qui n'est pas la propriété du MFDC, prendre en compte la spécificité de la Casamance qui correspond à une entité historique globale et qui mérite un traitement à la fois particulier et global.

L'ANRAC dépend directement du Premier ministre, qui en nomme le président. Celui-ci est assisté d'un Conseil de surveillance composé de délégués d'un certain nombre de ministères, depuis le ministère des Affaires étrangères jusqu'au ministère chargé du Développement. L'exécutif est assuré par un directeur général, assisté de cellules spécialisées, qui a autorité sur un comité de pilotage composé des représentants des bailleurs de fonds, des organisations féminines, d'élus de la région, de représentants des organes consulaires et des collectivités locales.

La mission de l'ANRAC, conformément aux directives du chef de l'Etat, est d'assurer la coordination et la planification des programmes de reconstruction et de développement en veillant à leur réalisation rapide. Cette mission se décline en quatre domaines d'intérêt et d'action, chapeautés chacun par un directeur : le déminage des zones de combat, le développement local, la démobilisation des maquisards et la reconstruction.

La démobilisation et la reconstruction, qui sont les deux tâches les plus urgentes, sont prises en charge par le Programme d'appui à la reconstruction de la Casamance (PARC), qui est financé par la Banque Mondiale à hauteur de 10-11 milliards de FCFA. Les deux autres tâches, le développement local - qui inclut également le désenclavement - et le déminage sont financés par l'Etat et par l'ANRAC, le développement local bénéficiant cependant d'une intervention indirecte de la Banque Mondiale. De leur côté, l'Union européenne, le Canada et le PNUD sont disposés à fournir une aide au déminage.

Me Pierre-Marie Bassène a ensuite résumé le rôle de l'ANRAC dans le règlement du conflit. Il a insisté sur la dimension « respect » qui est au cœur de la démarche du président Wade, pour qui la Casamance a surtout voulu exprimer par ce conflit le besoin qu'elle ressentait de voir reconnaître ses revendications. Il a parfaitement compris que différence n'est pas synonyme d'infériorité et qu'elle peut constituer un moyen d'évolution propre.

L'accord de paix du 30 décembre 2004 constitue un pas de géant, une ouverture telle que l'on voit mal comment le MFDC pourrait refuser la main tendue. Les négociations ne sont pas terminées mais les premiers jalons ont été posés. L'Etat a décidé de démarrer sans retard le processus de reconstruction, sans attendre la fin des négociations, car les besoins sont énormes dans toute la Casamance et il était important que la population soit rapidement convaincue de la réalité de la construction. La Casamance a beaucoup souffert du conflit et le Sénégal aussi, qui a perdu des enfants des deux côtés. Le naufrage du Joola, qui a emporté beaucoup de Casamançais, a rajouté à la douleur et a renforcé le sentiment de l'urgence d'entreprendre au plus vite la reconstruction pour sortir la population de cette spirale du malheur.

La Casamance est ouverte à toutes les coopérations et à la recherche des partenariats les plus divers pour rattraper le retard qu'elle pris dans son développement.

Mme Martine Aurillac a fait part de son vif intérêt pour ces propos, convenant que l'image de la Casamance est en pleine évolution et très différente de celle qui prévalait encore cinq ou six ans auparavant. Elle s'est félicitée que l'ANRAC ait les moyens de mener à bien la lourde tâche qui lui a été confiée, souhaitant avoir des précisions sur son fonctionnement et sur les premiers résultats.

M. Marc Le Fur a souhaité savoir si le MFDC est associé, ou simplement consulté, à la mise en oeuvre du plan de reconstruction de la Casamance et quelle est la situation au regard de la démobilisation.

M. Boubacar Thioube, député (URD, opposition) a remercié MBassène, dont il a mentionné le rôle d'ancien responsable d'Amnesty International, et l'a interrogé sur les critères retenus pour la reconstruction des villages désertés pendant le conflit.

M. Kéba Cissé, proviseur du lycée Djinabo de Ziguinchor, a voulu d'abord porter témoignage en tant qu'observateur de la situation locale depuis 1997. Il a rendu hommage à la France dont il a salué la coopération, qui n'est ni factuelle ni conjoncturelle mais multiforme et structurante. Il a appelé les parlementaires français à veiller à ce que ce compagnonnage soit renforcé et demeure continu. Il s'est effrayé du contexte mondial qui a conduit certains à fustiger le Sénégal à l'occasion du conflit casamançais alors que ce pays est une vitrine de la démocratie en Afrique, estimant au contraire que conforter cette vitrine c'est sauver la sous région et que marginaliser la Casamance c'est enfoncer ses enfants un peu plus dans leur désespoir.

Le premier adjoint au Maire de Ziguinchor a insisté sur le rôle joué par les femmes dans l'apaisement des tensions, de leur propre initiative et sans appui particulier.

Me Pierre-Marie Bassène a précisé, sur le fonctionnement de l'ANRAC, que toutes les étapes de son organisation sont désormais franchies, aussi bien à Dakar qu'à Ziguinchor. Il a fait état d'une visite sur place, deux semaines auparavant, en vue d'identifier sur le terrain les infrastructures à reconstruire ou à réhabiliter (routes, ponts, écoles) et précisé que le démarrage des travaux devrait être effectif dès le mois de juillet, en fonction du début de la saison des pluies.

Il a confirmé par ailleurs que le MFDC était bien partie prenante à la reconstruction de la Casamance et qu'il avait participé à l'élaboration, entre 2001 et 2003, du Programme de relance des activités sociales et économiques en Casamance (PRAESC), qui a précédé la constitution de l'ANRAC.

Il a apporté ensuite des précisions sur la démobilisation, qui s'effectue en plusieurs étapes : la démobilisation stricto sensu, en premier lieu, suivie de la réinsertion, qui est l'étape la plus importante mais aussi la plus difficile. Celle-ci se déroule en deux temps : d'abord la réintégration dans la communauté d'origine, qui a nécessité une certaine préparation de la population pour obtenir sinon son pardon du moins son accord, et ensuite la fourniture d'un emploi, qui est une condition essentielle à un retour dans la dignité à une vie normale, retour qu'il ne faut pas compromettre au risque de rendre plus difficile cette réinsertion.

Il a indiqué que l'enveloppe globale destinée à la reconstruction de la Casamance s'élève à 61 milliards de FCFA. La première difficulté consiste à faire comprendre aux collectivités locales, qui réclament aussitôt leur part de ce budget, qu'il ne s'agit pas de fonds disponibles mais du total des investissements programmés, dont une partie provient des bailleurs de fonds. La seule enveloppe dont l'agence dispose est celle de 10-11 milliards fournie par la Banque mondiale mais déjà affectée jusqu'au moindre centime. Le rôle principal de l'agence n'est donc pas de distribuer des crédits mais de veiller à la bonne utilisation et à l'affectation des aides consacrées au développement. Le chiffre de 61 milliards n'est pas définitif, la coopération est ouverte et la Banque mondiale est d'ailleurs prête à relever son offre jusqu'à 200 milliards de FCFA si le besoin s'en fait ressentir.

En réponse à la question de M. Thioum, il a précisé qu'il existe effectivement des critères en fonction de priorités établies. Le programme de l'agence comporte une double dimension, verticale d'abord par une consultation de la population, depuis ceux qui résident encore au village jusqu'à la diaspora, et transversale ensuite qui fait intervenir les différents spécialistes pour résoudre, chacun dans leur domaine de compétence, les problèmes soulevés par la population. Le décret de création de l'agence précise bien d'ailleurs qu'il s'agit de la population « en » et non pas « de » Casamance. A ce titre, le coût de fonctionnement du siège de l'agence n'est pas inclus dans l'enveloppe de la Banque Mondiale puisqu'il n'est pas situé en Casamance.

Il a ajouté qu'il serait effectivement injuste de ne pas tenir compte du rôle très important joué par les femmes sans lesquelles il n'y aurait eu ni conflit ni sortie de conflit.

Mme Martine Aurillac s'est réjouie que le chemin vers la paix et la reconstruction de cette superbe région soit ainsi ouvert et a rendu hommage à ses sœurs sénégalaises et spécialement celles de Casamance.

Le président Doudou Wade a clôturé la réunion en précisant que la reconstruction, entamée en réalité depuis deux ans avec l'envoi d'un corps de jeunes volontaires venus de tout le pays, a procédé d'une vision globale et il s'est félicité que le retour des populations réfugiées dans les pays voisins soit le vrai signe de la paix revenue.

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17. La décentralisation et la coopération décentralisée

Cette rencontre présidée par M. Abdoulaye Faye, vice-président de l'Assemblée nationale, président de Conseil régional et président de l'Union des Associations d'Elus Locaux (UAEL), s'est déroulée en présence de Mme Soukeyna Ndyaye Ba, ministre de la Coopération décentralisée et de la Planification régionale et de représentants d'associations d'élus locaux. Mme Aminata Tall, ministre d'Etat chargée des Collectivités locales et de la Décentralisation a dû annuler sa participation à la dernière minute.

M. Abdoulaye Faye a ouvert la réunion en présentant l'UAEL, qui fut fondée en 2003 par l'Association des Maires du Sénégal (AMS), l'Association nationale des Conseils ruraux (ANCR) et l'Association des présidents de région (APR) en vue de favoriser le dialogue entre les élus locaux, l'Etat et les partenaires (ONG, secteur privé, acteurs internationaux de la coopération décentralisée et bailleurs de fonds). Son objectif premier était de mettre en place la « cellule d'appui aux élus locaux » (CAEL), une structure commune d'assistance et d'appui aux associations d'élus locaux dans leurs missions. L'UAEL regroupe déjà 15 000 élus. Ses organes sont l'assemblée générale, un directoire de quinze membres et un bureau.

Il a exprimé sa certitude de pouvoir compter sur la coopération française pour réaliser ses objectifs mais il a marqué sa préférence pour une coopération horizontale, entre collectivités territoriales, plutôt qu'une coopération verticale, sous tutelle des Etats.

Il a souligné la présence importante des femmes qui, avec 1 606 élues locales, surtout présentes dans les communautés rurales (1 002), dépassent déjà la barre des 10 %.

M. Ndop, responsable de la Maison des élus locaux (MEL), a ensuite fait un bref historique des associations d'élus locaux, dont la plus ancienne est l'association des maires. Dès 1994, avant même le démarrage du processus de décentralisation, les élus locaux avaient ressenti le besoin de se doter d'une structure commune, administrée et contrôlée par eux et financée par l'ensemble des bailleurs. Les locaux ont été mis à la disposition de la MEL par l'Alliance française et le transfert de propriété est en cours.

Il a mentionné les deux principales interventions de bailleurs de fonds, qui ont donné naissance au PADDEL et à la CAEL. La Coopération française a soutenu et financé, depuis 1998, le Programme d'Appui à la Décentralisation et au Développement Local (PADDEL) qui visait à accompagner les réformes de l'Etat dans le domaine de la décentralisation, par un dispositif de formation des élus et des fonctionnaires et un appui à l'administration locale dans quatre régions pilotes. L'Agence de coopération pour le développement international (ACDI) canadienne a de son côté soutenu et financé la cellule d'appui aux élus locaux (CAEL), structure technique et bras armé de l'UAEL.

Il a fait remarquer que la MEL a inspiré plusieurs autres pays africains de l'Ouest, dans le cadre plus général du projet AFRICITÉS.

Mme Martine Aurillac a salué les élus locaux présents et, à travers eux, les 1.606 femmes élues locales, avant d'évoquer la coopération décentralisée, un domaine difficile en raison de l'éclatement des acteurs et de la faiblesse des moyens, et la décentralisation, qui est une question politique au sens noble puisqu'il s'agit de départager les rôles respectifs de l'Etat et des collectivités territoriales, déterminant ainsi la place du citoyen. La décentralisation représente un ancrage important pour la démocratie.

Elle a expliqué que la récente réforme de la décentralisation, en France, a clarifié les compétences et s'est engagée à transférer les ressources de l'Etat vers les collectivités territoriales parallèlement au transfert des compétences. Mais quelle que soit la part du pouvoir local, l'Etat conserve un rôle d'arbitrage pour rétablir la balance en faveur des collectivités les moins riches et les moins développées.

M. Alain Bergé, conseiller en développement local auprès de la MEL, a souhaité mettre l'accent sur trois points précis :

- le soutien constant de la Coopération française au processus de décentralisation au Sénégal : il a débuté par la participation au projet d'appui à la décentralisation et au développement urbain au Sénégal (PADDUS), dont la création de la première ZAC à Mbao est devenue une référence en matière de développement urbain. A la fin de 1997, la signature d'une nouvelle convention FSP entre le France et le Sénégal octroyait un financement de 1,7 milliard de Francs CFA au PADDEL. Ce projet a eu pour objectif de fournir un appui aussi bien à l'Etat, pour lui permettre de s'adapter à la mise en œuvre des lois de décentralisation de 1996, qu'aux collectivités locale,s pour leur permettre d'adapter leur organisation à la gestion des compétences transférées. Faisant le choix de l'expertise locale, l'assistance technique du projet a été assurée par une équipe composée de dix cadres sénégalais et quatre coopérants français. Une réflexion est en cours sur un nouveau projet qui succèdera au PADDEL. Si l'on y ajoute l'appui de l'AFD, la décentralisation est un domaine d'échanges très denses entre la France et le Sénégal.

- la très forte implication des bailleurs de fonds au niveau du processus de décentralisation au Sénégal : elle se manifeste par la mobilisation de 79,7 milliards de FCFA affectés, pour la période 2002 - 2006, à la réalisation du Plan d'Action pour la Décentralisation (PAD). En vue de donner aux collectivités locales les moyens de leurs politiques de développement, le PAD est organisé en six axes (finances locales, ressources humaines et formation, déconcentration et décentralisation, contrôle de la gestion publique locale, accompagnement technique des collectivités locales et dispositif de suivi de la décentralisation et coordination des interventions).

- la longue tradition de coopération décentralisée entre le France et le Sénégal, qui compte plus d'une centaine de partenariats actifs entre collectivités locales des deux pays. La part du cofinancement par le Ministère des affaires étrangères français représente environ un tiers des actions, qui génèrent un flux annuel supérieur à 3 millions d'euros.

Il a terminé en évoquant quelques perspectives nouvelles telles que l'élaboration d'une carte de la communauté sénégalaise en France, où plus de 500 communes de plus de 5.000 habitants comptent vingt habitants et plus, nés au Sénégal ou de nationalité sénégalaise, pour une population globale estimée à 67.500 personnes. L'exploitation de ces données permettra de renforcer le co-développement en facilitant, notamment, l'émergence de nouvelles coopérations décentralisées par une meilleure connaissance des associations de migrants et une meilleure prise en compte de leur rôle dans le développement local.

M. Alioune Thiam, représentant la directrice de la cellule d'appui aux élus locaux (CAEL), a exposé dans les grandes lignes le fonctionnement et l'organisation de la CAEL dont l'objectif premier est d'assister les associations d'élus locaux dans la poursuite de leurs missions communes. Les missions fixées à la CAEL sont de favoriser la concertation et le dialogue entre tous les acteurs de la décentralisation (associations d'élus, Etat, bailleurs de fonds), de contribuer à la formation des élus et des personnels administratifs et de fournir un support professionnel, technique et administratif aux associations membres. Son financement est assuré par les associations d'élus locaux, la coopération canadienne (ACDI) à hauteur de 2,6 milliards de FCFA sur la période 2002-2007 et le produit de ses activités. Elle est organisée en quatre divisions : Administration et finances, Information et communication, Formation, Recherche et action. Ses dossiers prioritaires concernent l'organisation des finances locales, les compétences transférées et la promotion des femmes dans les instances de décision locales.

M. Moustafa Ly, directeur de cabinet de la ministre d'Etat chargée des Collectivités locales et de la Décentralisation, Mme Aminata Tall, a rappelé les liens multiséculaires entre les deux pays, qui expliquent l'ancrage génétique de son pays aux cotés de la France et ne sont pas étrangers au fait que le Sénégal est aujourd'hui considéré comme une référence démocratique en Afrique. Il a présenté la coopération comme l'instrument privilégié permettant de faire face aux défis de la globalisation. Reconnaissant que si l'Etat a le bras long pour prendre, il a le bras très court pour distribuer, il a indiqué que l'année 2005 était celle de l'évaluation de la politique sénégalaise de décentralisation, particulièrement à propos des transferts financiers. Il s'est enfin félicité que le sous-comité des bailleurs de fonds soit présidé par la France.

Mme Mata Sy Diallo, ancienne ministre, ancienne parlementaire, Présidente (AFP) du conseil régional de Kaolack, a évoqué la présence des femmes en politique, où elles se sont très tôt engagées et mobilisées. Les associations de femmes ont des élues au niveau de chaque région. Lorsqu'elles ont proposé des quotas, elles ont été critiquées par les européennes mais elles ont persévéré parce que cela leur semblait être la seule solution, même transitoire, pour avancer vers la parité. La question n'étant pas pour autant entièrement résolue au sein de la MEL, elles restent vigilantes.

Elle a par ailleurs exprimé son accord avec le Président de la République sur deux points, l'appui à la promotion des femmes dans tous les domaines et la régionalisation, pour laquelle elle a souhaité qu'il applique jusqu'au bout les propositions exposées dans sa thèse de doctorat.

Mme Martine Aurillac l'a félicitée comme étant l'illustration parfaite de la réussite des femmes en politique. Elle a considéré que les femmes sénégalaises qui exercent un rôle informel très influent et qui ont plus d'élues au Parlement que leurs homologues françaises, n'ont pas particulièrement à se plaindre de la situation qui leur est faite.

M. Serge Janquin s'est félicité que, depuis le début du séjour de la délégation, la question des femmes s'est imposée, subrepticement ou avec éclat, dans toutes les discussions.

M. Ameth Saloum Boye, Président d'une communauté rurale, ancien parlementaire, conseiller de la République, a fait observer que les femmes sont très présentes au Conseil de la République pour les affaires économiques et sociales (CRAES) où elles représentent 30 % des effectifs et 60 % des membres du bureau. Il a évoqué les difficultés rencontrées par les communautés rurales pour nouer des coopérations décentralisées, ainsi que leurs difficultés financières, puisque seulement quatre des neuf compétences qui leur ont été transférées ont été accompagnées des crédits correspondants. Il a interrogé les parlementaires français sur les moyens de bénéficier d'une coopération décentralisée.

Mme Martine Aurillac a reconnu que la décentralisation, qui n'est pas la déconcentration, pose le problème du transfert des moyens qui n'est pas toujours assuré avec la rigueur qu'il faudrait. En France également, le transfert des moyens n'a pas toujours été au rendez-vous de celui des compétences, pour les collèges et les lycées par exemple. Les députés doivent rester très vigilants sur cette question et c'est un sujet de débat fréquent au parlement français entre la majorité et l'opposition.

M. Serge Janquin a estimé qu'il n'existe pas à priori d'obstacles juridiques à des relations de coopération décentralisée avec les communautés rurales, citant les multiples collaborations de la région Nord-Pas de Calais engagées, à tous les niveaux, avec les régions riveraines du fleuve Sénégal dans les trois pays. La véritable difficulté consiste plutôt à trouver des collectivités françaises prêtes à s'engager dans un partenariat car elles sont très sollicitées dans ce domaine et la coopération décentralisée n'est pas toujours ressentie comme une priorité par les citoyens français.

Il s'est dit persuadé que le débat sur le transfert des moyens aurait lieu au Sénégal comme il a eu lieu en France, où les collectivités territoriales confrontées à ce problème ont néanmoins réussi à assurer les missions qui leur avaient transférées.

M. Marc Le Fur, mentionnant sa qualité d'élu local d'une commune rurale, a fait part de son intérêt pour ce type de coopération décentralisée, dans l'intérêt commun des deux partenaires qui partagent le sentiment d'être un peu les oubliés des capitales selon le principe qui veut « qu'il pleut souvent là où c'est déjà mouillé ».

Mme Martine Aurillac a remarqué néanmoins que les expériences de coopération décentralisée qui fonctionnent sont nombreuses, dans les domaines les plus variés.

M. Aly Lô, député (coalition SOPI), président de l'Association nationale des communautés rurales (ANCR), a plaidé pour que les communautés rurales ne soient pas les grandes oubliées des jumelages tout en reconnaissant la difficulté à coopérer avec ces institutions particulières.

Un intervenant a évoqué le concept de communauté rurale, qui rend difficile toute coopération décentralisée parce qu'il est mal compris. Les communautés rurales représentent 65 % du territoire mais ne bénéficient que rarement de la coopération décentralisée. Ce sont souvent les Sénégalais de l'extérieur qui sont à l'origine directe des coopérations avec leurs villages d'origine, en court-circuitant la communauté rurale. Celle-ci rencontre pourtant les mêmes problèmes qu'une commune mais sans avoir la même visibilité.

M. Niang, élu local de la région de Saint-Louis, a précisé que cette dernière, qui bénéficie de trois coopérations décentralisées avec des collectivités territoriales françaises a mis en place une formule permettant aux collectivités rurales d'en bénéficier. Il a cité la signature d'une convention avec le conseil général du Nord au terme de laquelle la région de Saint-Louis sert de sponsor pour le compte des communautés rurales de la région.

M. Sall, élu local, est revenu sur l'implication des Sénégalais de l'extérieur dans le développement local, qui est principalement leur affaire, pour suggérer d'en faire une évaluation globale.

Mme Soukeyna Ndyaye Ba, ministre de la coopération décentralisée et de la Planification régionale a alors clôturé le débat en soulignant qu'il était emblématique des bonnes relations entre le Sénégal et la France. Elle a confirmé que le Président Wade attache depuis toujours une grande importance au processus de décentralisation. Dans un ouvrage d'économie, qui date des années cinquante, il soutenait déjà que le développement économique des pays en voie de développement passe nécessairement par la participation des communautés à la conception et à la réalisation des programmes locaux de développement destinés avant tout à satisfaire les besoins des populations à la base.

Elle a noté que les questions de financement ont été souvent évoquées, au cours du débat, laissant percer le sentiment des élus locaux de bénéficier de ressources insuffisantes mais, a-t-elle assuré, les collectivités locales doivent savoir que l'Etat ne peut pas tout donner et qu'il leur faut trouver elles-mêmes les moyens de leur développement. C'est pourquoi justement la mission fixée à son ministère est d'œuvrer à renforcer les capacités des collectivités locales pour assurer leur autonomie, notamment financière, l'Etat restant le régulateur de l'équilibre national.

Egalement en charge de la coopération décentralisée en vue d'en faire un levier efficace de développement au service des collectivités locales, elle en a reconnu le dynamisme mais a plaidé pour sa démocratisation. Elle a par ailleurs déploré le manque de visibilité entre les coopérations décentralisées des différents partenaires, qui doivent mieux se concerter pour éviter les doubles emplois et recouvrements fréquents et pour les rendre plus conformes aux besoins des collectivités sénégalaises. Elle a reconnu que l'apport des Sénégalais de l'extérieur, plutôt désordonné, manque de coordination avec les actions de l'Etat ou des collectivités alors que le co-développement constitue pourtant un formidable levier du développement local. Sur ces deux plans, elle a reconnu le besoin d'une programmation à plus long terme.

La ministre a terminé en témoignant de son implication, pendant plus de trente ans, dans les mouvements de femmes dont les combats ont obtenu moins de résultats concrets que le Président Wade en un seul jour ! Les femmes qui n'occupaient que des postes subalternes dans les gouvernements précédents occupent maintenant des postes essentiels et importants. Les femmes sont désormais présentes dans tous les rouages de la société sénégalaise et les utilisent pour la faire avancer.

En remerciant la ministre et les élus locaux de leur accueil, Mme Martine Aurillac s'est félicitée de la place importante reconnue au citoyen, au cœur des décisions ; elle a noté avec satisfaction le souci de concertation et d'harmonisation de la ministre et fait remarquer en conclusion que le Sénégal bénéficie, malgré quelques dysfonctionnements, d'une coopération décentralisée parmi les plus importantes en qualité et quantité.

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Conclusion

Cette mission du groupe d'amitié France - Sénégal, venant deux mois après le voyage triomphal du Président Jacques Chirac, a été à plusieurs titres exceptionnelle.

D'abord, par la qualité de l'accueil qui a été réservé à notre délégation par nos collègues sénégalais. Par delà tout protocole, il a démontré à l'évidence que les relations entre le Sénégal et la France, tissées par le passé, le sang et la langue, transcendent tous les archétypes imaginables concernant les rapports entre une puissance, qui fut coloniale, et un pays indépendant, dont l'histoire s'est mêlée à celle de notre pays depuis trois siècles et demi. Partout, les élus, nationaux et locaux, et la population nous ont montré amitié, voire affection, et un intérêt passionné pour les problèmes français les plus délicats.

Ensuite, par la densité du programme et la qualité des entretiens au cours desquels nos interlocuteurs, avec franchise, humour et fermeté, nous ont fait part de tout ce qu'ils attendent de la France, directement ou au travers de l'Europe. Le Sénégal se veut un pays moderne et tolérant tenant sa place dans le monde. Il l'a démontré et nous l'a affirmé en rappelant sa participation à toutes les situations de crise gérées, notamment, par l'ONU et l'Union Africaine, où la fraternité d'armes entre Sénégalais et Français a conservé toute sa valeur.

En troisième lieu, par les nombreuses manifestations de la force des relations éducatives, sanitaires, linguistiques et culturelles entre les deux pays.

S'il fallait retenir un symbole dans cette semaine passionnante, on pourrait citer le geste rare du Chef de l'Etat, S. E. Me Abdoulaye Wade, nous recevant tous, en privé, après une première audience officielle au Palais, le dimanche après-midi, veille de notre retour, dans sa résidence de Popenguine où, mieux que dans la solennité du palais présidentiel, il a pu nous parler à cœur ouvert de son amitié pour la France et de sa vision du monde.

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ANNEXES

Annexe 1 : Programme de la mission

Annexe 2 : Repères chronologiques

PROGRAMME DE LA MISSION

Mardi 5 avril

16h30 : Départ du vol AF718 pour Dakar

20h15 : Arrivée à l'aéroport international Leopold Sedar Senghor Accueil au salon d'honneur par une délégation du groupe d'amitié Sénégal - France et l'Ambassadeur de France.

22h30 Installation à l'hôtel SOFITEL-TERANGA

Mercredi 6 avril

8h15 : Petit déjeuner de travail à la Résidence de France avec l'Ambassadeur et ses collaborateurs directs

10h00 : Visite de courtoisie à M. Pape DIOP, président de l'Assemblée nationale

10h30 : Séance de travail entre les délégations des deux groupes d'amitié ; visite de l'Assemblée nationale

11h45 : Visite de l'Hôpital Principal de Dakar

13h30 : Déjeuner offert en l'honneur de la délégation française, par M. Doudou WADE, Président du groupe d'amitié Sénégal-France

17h00 Entretien avec Mme Bineta SAMB BÂ, Ministre des Relations avec les Institutions

18h15 Audience de M. Macky SALL, Premier ministre

19h30 Audience de S. E. M. Abdoulaye WADE, Président de la République

20h15 : Dîner-débat avec des représentants du Patronat Sénégalais

Jeudi 7 avril

 8h00 Visite du Consulat de France, en particulier des installations de la section chargée des visas

10h00: Départ pour l'île de Gorée

10h30 : Arrivée à Gorée ; visite guidée de la Maison des esclaves et du Musée de la Femme « Henriette Bathily »

12h30: Déjeuner au restaurant « Le Chevalier de Boufflers »

14h30 : Retour à Dakar

16h30 : Réunion de travail sur « Le rôle des femmes dans le développement » en présence de Mme Aïda MBODJI, ministre de la Famille et du développement rural

18h00 : Accueil à l'hôtel de ville par M. Pape DIOP, Maire de Dakar, entouré de membres du Conseil municipal

19h15 : Réception à la Résidence de France, offerte par Son Exc. M. André PARANT, aux représentants de la communauté française de Dakar et de la société civile sénégalaise

Vendredi 8 avril

 8h00 : Visite du Lycée français Jean MERMOZ

10h00 : Audience de M. Cheikh Tidiane GADIO, Ministre des Affaires étrangères

11h30 : Réunion de travail sur « Le système d'enseignement au Sénégal » avec le Professeur Georges SOURANG, ministre de l'Education, à l'Assemblée nationale

13h15 : Déjeuner à la Résidence de France, offert par S.E.M. André PARANT, en l'honneur des groupes d'amitié France-Sénégal et Sénégal-France

15h30 : Rencontre avec M. Robert SAGNA, ancien ministre, Député et Maire de Ziguinchor, à l'hôtel Teranga

16h00 : Départ pour le cimetière de Bel-Air ; dépôt d'une gerbe sur la tombe du Président Léopold Sédar SENGHOR

16h45 : Rencontre, à la Maison des Anciens Combattants, avec des anciens combattants

17h45 : Dépôt d'une gerbe au Monument au Tirailleur, suivi d'une brève visite de la ville.

20h30 : Dîner offert par M. Pape DIOP, Président de l'Assemblée nationale, en l'honneur de la délégation parlementaire française et de l'Ambassadeur

Samedi 9 avril

8h00 : Départ pour l'aéroport Léopold Sedar Senghor

9h00 : Départ d'une délégation de chaque groupe d'amitié à bord d'un avion militaire

9h50 : Arrivée à Ziguinchor , accueil sur le tarmac par les autorités locales et installation à l'hôtel Kadiandoumagne

11h30 Rencontre avec le Gouverneur de la région de Ziguinchor

11h45 Rencontre avec le 1er adjoint au Maire de Ziguinchor

12h15 Rencontre avec le Président du Conseil Régional de Ziguinchor

12h45 Rencontre avec l'abbé DIAMACOUNE SENGHOR, chef historique du MFDC

13h30 : Déjeuner à l'hôtel

15h30 : Réunion de travail avec Me Pierre Marie BASSENE, responsable de l'Agence nationale pour la relance des activités économiques et sociales en Casamance (Anrac), ancien ministre, conseiller du Président de la République pour la Casamance

17h00 : Visite du chantier de reconstruction du port et de la gare maritime

18h00 : Visite de l'Alliance Franco-Sénégalaise

19h00 : Tour de ville

21h00 : Dîner à l'hôtel

Dimanche 10 avril

10h00 : Départ en avion militaire pour Dakar

10h50 : Arrivée à Dakar

11h45 : Retour à l'hôtel ; déjeuner libre

16h00 : Départ pour Popenguine

17h00 : Visite de la « Case des tout-petits » de Popenguine

17h30 : Rencontre privée avec S.E. Me Abdoulaye WADE, président de la République, dans sa résidence de Popenguine

19h00 : Retour à Dakar

Lundi 11 avril

9h45 : Réunion de travail, à la Maison des Elus locaux, sur le thème « La politique de décentralisation », présidée par M. Abdoulaye FAYE, président de l'Union des Associations d'Elus locaux (UAEL, en présence de Mme Soukeyna NDIAYE BA, ministre de la coopération décentralisée et de la Planification régionale et de représentants des associations d'élus locaux

12h00 : Visite de l'Institut culturel et linguistique Léopold Sédar SENGHOR

13h00 : Déjeuner de travail avec l'Ambassadeur pour préparer la rencontre avec les médias

16h : Rencontre avec les représentants de la presse nationale, à l'Assemblée nationale

20h00 Dîner offert par la délégation au bureau du groupe d'amitié Sénégal France et à l'Ambassadeur de France, Hôtel Méridien-Président

23h00 : Départ du vol AF 719 pour Paris

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Repères Chronologiques

4 avril 1960: Indépendance du Sénégal.

20 août 1960: Le Sénégal quitte la Fédération du Mali.

5 septembre 1960: Proclamation de la République, sous la Présidence de Léopold Sédar Senghor.

10 mars 1976: Introduction d'un multipartisme limité.

26 février 1978: L. Senghor est réélu Président de la République.

31 décembre 1980 Démission de Léoplod S. Senghor qui est remplacé, conformément à la Constitution, par le Premier Ministre, M. Abdou Diouf.

14 avril 1981 Instauration du multipartisme intégral.

1er février 1982 Création de la fédération de Sénégambie.

26 décembre 1982 Violentes manifestations indépendantistes en Casamance.

29 février 1988: Arrestation d'Abdoulaye Wade.

9 avril 1989: Incidents à la frontière avec la Mauritanie.

21 août 1989: Rupture des relations diplomatiques avec la Mauritanie.

30 septembre 1989 Dissolution de la fédération de Sénégambie.

Août-septembre 89 Affrontements meurtriers en Casamance.

7 avril 1991 Entrée au gouvernement d'Abdoulaye Wade.

23 avril 1992 Rétablissement des relations diplomatiques avec la Mauritanie.

21 février 1993 Abdou DIOUF est réélu pour la 3ème fois à la Présidence de la République avec 58 % des suffrages exprimés contre 32 % à Me Wade.

15 mai 1993 Assassinat de Me Babacar SEYE, Vice-président du Conseil Constitutionnel.

2 octobre 1993 Inculpation de Me Wade pour « atteinte à la sûreté de l'État » à la suite de l'assassinat de Me Seye.

11 janvier 1994 Dévaluation de 50 % du franc CFA.

16 février 1994 Emeute à Dakar où huit policiers trouvent la mort.

24 février 1994 Inculpation de Me Wade et M. Landing Savané pour « atteinte à la sûreté de l'État ».

30 août 1994: Entrée en vigueur du traité instituant l'UMEOA.

30 août 1994: Confirmation des non-lieux prononcés le 26 mai pour l'assassinat de Me SEYE et l'émeute du 16 février.

15 mars 1995: Entrée au gouvernement de Me Wade, qui devient Ministre d'Etat à la Présidence de la République.

6 avril 1995: Disparition de 4 touristes français en Casamance.

5 février 1996: Vote de la Loi sur la régionalisation.

19 mars 2000 : Victoire de Me Wade, opposé au président sortant, M. Abdou Diouf, à l'élection présidentielle

 7 janvier 2001 : Adoption par référendum (90 %) du projet de révision de la constitution

29 avril 2001 : Victoire de la coalition SOPI (majorité présidentielle) aux élections législatives anticipées

26 septembre 2002 : Naufrage du Joola, qui assure la liaison maritime entre Ziguinchor et Dakar (1 863 morts)

30 décembre 2004 : Signature d'un accord de paix par le MFDC

7 janvier 2005 : Vote de la loi Ezzan, amnistiant les crimes et délits commis entre 1983 et 2004 en relation avec des élections ou ayant des motivations politiques.

2-4 février 2005 : Visite officielle du Président Chirac, à Dakar et Saint-Louis

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DIAN N° 002-2006 - Rapport d'information présenté à la suite de la mission effectuée au Sénégal du 5 au 11 avril 2005 par une délégation du Groupe d'amitié France - Sénégal

1 Voir le texte intégral sur Internet ( http://www.gouv.sn/textes/constitution.html )

2 : Union Economique et Monétaire Ouest Africaine

3 : Pays pauvre très endetté.

4 : Agence Française de développement

5 Voir ci-dessus, pages 8 et suivantes

6 Notamment les réseaux sur les questions de Population et de développement, sur l'Entreprise, sur l'Habitat, sur l'Environnement et la protection de la nature, sur les Migrations, les Droits humains et le Développement, sur les NTIC, sur les Droits de l'Homme, des Peuples, l'Etat de droit, la Justice te la Liberté, sur le Lutte anti-tabac, sur la Lutte contre de vol de bétail, pour les Arts et la Culture et enfin le collectif des Femmes parlementaires.

7 Organisation internationale de la Francophonie

8 Union Africaine

9 Soit environ un million d'euros

10 Mouvement des Forces Démocratiques de la Casamance

11 PPTE : Pays pauvres très endettés

12 Agence pour l'enseignement français à l'étranger

13  Transfert of Knowledge Through Expatriate Nationals

14  Programme des Nations Unies pour le Développement

15  France Télécom est, avec 46% du capital, l'actionnaire de référence de la SONATEL depuis sa privatisation.


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