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N° 327 - 3ème partie

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 octobre 2002

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE LOI de financement de la sécurité sociale pour 2003 (n° 250),

PAR M. François GOULARD,

Député.

--

Sécurité sociale.

INTRODUCTION

PREMIÈRE PARTIE DU RAPPORT

LES COMPTES ET LES RECETTES : FAIRE FACE AU BILAN

DEUXIÈME PARTIE DU RAPPORT

LES DÉPENSES : UN NOUVEAU DIALOGUE POUR UNE ÉVOLUTION MAÎTRISÉE

CHAPITRE PREMIER : LA BRANCHE MALADIE 

CHAPITRE II : LA BRANCHE ACCIDENTS DU TRAVAIL ET DES MALADIES PROFESSIONNELLES : VERS DES RÉFORMES STRUCTURELLES ?

TROISIÈME PARTIE DU RAPPORT

CHAPITRE III 5

LA BRANCHE FAMILLE : VERS LA SIMPLIFICATION 5

I.- L'ÉQUILIBRE GÉNÉRAL DE LA BRANCHE FAMILLE 6

II.- LES CHARGES DE LA BRANCHE ET L'IMPACT FINANCIER DES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT 8

A.- LES CHARGES DE LA BRANCHE 8

B.- L'IMPACT FINANCIER DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT  DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2003 10

III.- LA CONVENTION D'OBJECTIFS 2001-2004 ET L'ACTION SOCIALE 11

CHAPITRE IV 13

LA BRANCHE VIEILLESSE 13

I.- ÉVOLUTION DES DÉPENSES D'ASSURANCE VIEILLESSE 14

II.- LES COMPTES DE LA CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE VIEILLESSE DES TRAVAILLEURS SALARIÉS 16

A.- EN 2001 16

B.- EN 2002 17

C. - EN 2003 18

III.- LE FONDS DE SOLIDARITÉ VIEILLESSE 18

A.- UN RÉSULTAT NET DÉFICITAIRE EN 2001 19

B.- UNE SITUATION AGGRAVÉE EN 2002 20

C.- LE PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE 2003 ET LE FONDS DE SOLIDARITÉ VIEILLESSE 21

IV.- LE FONDS DE RÉSERVE POUR LES RETRAITES 21

A.- LES MISSIONS ET L'ORGANISATION DU FONDS DE RÉSERVE POUR LES RETRAITES 21

B.- ÉVOLUTION DU COMPTE DU FONDS DE RÉSERVE POUR LES RETRAITES 23

1.- Les comptes 2001 et 2002 23

2.- Le compte en 2003 24

V.- LES MÉCANISMES DE COMPENSATION 25

A.- LE MÉCANISME ACTUEL 25

B.- LES MODIFICATIONS DES RÈGLES DE CALCULS DES COMPENSATIONS POUR 2003 26

EXAMEN EN COMMISSION 30

A.- AUDITION DES MINISTRES 30

B.- EXAMEN DU PROJET DE LOI 46

AMENDEMENT ADOPTÉ PAR LA COMMISSION 50

Amendement n° 3 présenté par M. François Goulard, Rapporteur pour avis 50

A N N E X E 51

CHAPITRE III

LA BRANCHE FAMILLE : VERS LA SIMPLIFICATION

Les chiffres sont clairs. Les prestations sociales en faveur des familles, y compris celles en faveur de leur logement, représentaient 3,7 % du produit intérieur brut en 2001 alors qu'elles atteignaient - un record - 3,9 % du PIB en 1997. Le déclin est comparable si l'on ne retient que les prestations rentrant dans le champ des administrations de sécurité sociale.

Si le dynamisme démographique est incontestable - la France a enregistré en 2001 774.782 naissances, l'indicateur de fécondité atteignant 1,9 enfant par femme, confirmant ainsi l'augmentation amorcée en 1995 -, il ne doit pas cacher le vieillissement inéluctable de la population : en 2011, les plus de 60 ans représenteront un tiers des Français, contre 20 % aujourd'hui, et les moins de 20 ans ne compteront plus que pour 20 % alors qu'ils représentent un quart de la population actuellement. En outre, il s'explique probablement plus par la croissance et le moral des ménages que par la politique familiale menée ces dernières années.

Celle-ci a été, en effet, marquée par des changements de cap (mise sous condition de ressources des allocations familiales en 1998 et suppression de celle-ci l'année suivante), un faible souci de cohérence, des créations de prestations louables (1) mais brouillonnes et difficiles à gérer (2), ainsi que par des prévisions d'investissements en faveur de l'accueil collectif des enfants sans mesure de leur coût de fonctionnement. L'accentuation du rôle redistributif des prestations, alors que c'est à l'impôt de corriger les inégalités, la réorientation des missions de la branche vers la lutte contre l'exclusion (la branche gère le revenu minimum d'insertion depuis 1989) et les ponctions sur les excédents de la branche ont achevé de rendre la politique familiale illisible.

La conférence de la famille n'a pu se tenir cette année au printemps, compte tenu du calendrier électoral et politique, pour en dresser un bilan, et tracer précisément de nouvelles perspectives. Cette tâche incombera à la conférence de 2003. Néanmoins, de grands axes ont été dessinés, notamment dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 et le projet de loi de finances pour 2003.

Le premier, qui rectifie légèrement l'objectif 2002 en le faisant passer de 42,1 milliards d'euros à 41,48 milliards d'euros (article 46), et prévoit pour la branche 43,63 milliards d'euros de dépenses en 2003 (article 42), amorce d'ores et déjà des inflexions. Au travers du vote sur le rapport annexé, il vous est demandé de les approuver. Il s'agit de revenir au sens premier de la politique familiale, de soutenir toutes les familles, de prendre en compte le poids que constitue pour celles-ci les « grands enfants » (3), de favoriser les emplois familiaux et simplifier les prestations.

Le projet de loi de finances pour 2003, pour sa part, en créant et distinguant un agrégat « Famille et personnes handicapés » à partir de l'agrégat « Développement social » souligne aussi la spécificité de la politique familiale. 956 millions d'euros de crédits devraient être consacrés à celle-ci, contre 885 millions en 2002, l'effort fiscal, sous forme de dépenses fiscales, atteignant près de 6 milliards d'euros. L'article 4 comporte notamment un relèvement du plafond des dépenses éligibles à la réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile. Le coût de la mesure, autant favorable à l'emploi (4) qu'aux familles, est évalué à 74 millions d'euros.

I.- L'ÉQUILIBRE GÉNÉRAL DE LA BRANCHE FAMILLE

Les comptes de la branche, en droits constatés, se présentent de la façon suivante :

(Droits constatés, en millions d'euros)

1999

2000

Évolution 2000/1999
(en %)

2001

2002

Évolution 2002/2001
(en %)

2003

Évolution 2003/2002
(en %)

Charges recalculées

40.677,9

40.940,7

0,6

42.189,2

44.605,3

5,7

45.896,3

2,9

Produits recalculés

40.932,2

42.382,6

3,5

43.873,3

45.693,7

4,1

47.571,4

4,1

Résultat net

254,4

1.441,9

1.684,1

1.088,4

1.675,1

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale.

En 2001, pour la troisième année consécutive, les comptes de la branche famille ont donc été excédentaires. Le solde positif s'est établi à 1,68 milliards d'euros contre 1,44 milliards en 2000 et 0,25 milliards en 1999. L'évolution s'explique principalement par l'augmentation des recettes assises sur la masse salariale (en 2001, + 6,5 % par rapport à 2000), les prestations légales évoluant moins (+ 0,8% en volume, + 3,3 % en valeur). Mais les excédents ont été réduits par des transferts opérés au détriment de la branche et des prélèvements sur les recettes. Si l'évolution des recettes a permis des mesures nouvelles (versement du complément familial jusqu'aux 21 ans de l'aîné en 2000, congé paternité en 2002, développement de l'accueil collectif des jeunes enfants, allocation de présence parentale en 2001), les marges de manœuvre ont, en effet, aussi été employées à faire participer la branche au financement des majorations pour enfants accordées aux retraités (15 % de ces majorations en 2001, soit 437 millions d'euros, 30 % en 2002, soit 958 millions d'euros) et à la transformation de l'allocation de rentrée scolaire, dont la majoration était jadis prise en charge par l'État, en prestation familiale (1,37 milliards d'euros en 2001).

Ainsi, pour 2001, le solde de la branche, à périmètre constant, se serait établi, d'après la Cour des comptes, à 2,72 milliards d'euros. Si l'on réaffectait à la branche la provision pour non-remboursement des exonérations de cotisations sociales et les produits à recevoir comptabilisés en 2001, l'excédent serait également plus important.

Pour 2002, le résultat devrait, selon la Commission des comptes, être une nouvelle fois positif (1,08 milliard d'euros) mais marqué par une moindre progression du produit des cotisations sociales, la poursuite du basculement progressif à la Caisse nationale des majorations pour enfant au profit du Fonds de solidarité vieillesse, une augmentation imprévue du coût du congé paternité et le développement de l'action sociale.

S'agissant de 2003, la Commission des comptes prévoit un solde positif de près de 1,7 milliard d'euros. Elle retient en effet une hausse des cotisations de 4,2 %, une augmentation de 1,7 % de la base mensuelle et une évolution soutenue des prestations extra-légales. Mais elle ne tient pas compte des mesures proposées dans le projet de loi de financement pour 2003, notamment de l'amplification du transfert de charges du Fonds de solidarité vieillesse vers la branche. Votre Rapporteur considère cependant que, s'agissant des perspectives comptables, le contexte économique doit inviter à la prudence. Il est clair que l'essoufflement de la croissance pourrait, en effet, affecter les perspectives optimistes d'excédent, par son impact tant sur les recettes que sur les prestations sous conditions de ressources.

En tout état de cause, le projet de loi prévoit un objectif de dépenses pour la branche Famille s'élevant à 43,63 milliards d'euros, correspondent à une hausse de 3,8 % par rapport à l'objectif de dépenses fixé pour 2002 dans la loi de financement pour la sécurité sociale pour 2002 du 28 décembre 2001 et de 5,1 % par rapport à l'objectif révisé.

II.- LES CHARGES DE LA BRANCHE ET L'IMPACT FINANCIER
DES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT

A.- LES CHARGES DE LA BRANCHE

La branche Famille représente un cinquième environ des dépenses de l'ensemble du régime général. Les comptes de la Caisse nationale des allocations familiales retracent les dépenses de tous les régimes servant des prestations familiales en métropole et dans les départements d'outre-mer. On y distingue classiquement les prestations légales des prestations extra-légales, celles-ci étant notamment constituées par l'action sociale des caisses, action encadrée par la convention d'orientation et de gestion.

En 2001, le montant des prestations légales (allocations familiales, complément familial, allocation pour jeune enfant, allocation d'adoption, allocation de soutien familial, allocation de parent isolé, allocation de présence parentale, prestations pour la garde des enfants, en faveur de l'éducation, du logement et des handicapés) versé par la branche s'élevait à 31,2 milliards d'euros en progression de 3,3 % par rapport à l'année antérieure.

En 2002, la progression pourrait être de 3,9 %, compte tenu de la revalorisation (de nature réglementaire) de la base mensuelle - « salaire de base » lié à l'évolution prévisionnelle des prix hors tabac et servant au calcul de plus de 75 % des prestations familiales et dont le coût est estimé à 468 millions d'euros - et de l'impact des dernières lois de financement.

Pour 2003, la Commission des comptes prévoyait, en septembre dernier, avant loi de financement, une augmentation de 2,5 %, le montant total des prestations légales atteignant 33,26 milliards d'euros, soit 2,12 % du PIB.

Les prestations d'entretien et les prestations en faveur de l'éducation diminueraient en volume, compte tenu de l'évolution démographique et de la conjoncture économique, contrairement aux prestations liées à la garde d'enfants.

Le taux de base mensuel, qui influe sur les prestations d'entretien, pourrait augmenter de 1,7 %, compte tenu de la prévision 2003 des prix hors tabac (1,5 %), du rattrapage au titre de 2001 (0,2 %). Le coût de la revalorisation pour 2002 serait alors de 389 millions d'euros.

Innovation de la loi de financement pour 2001, la création de l'allocation de présence parentale devait conduire à 32 millions d'euros de dépenses. La Commission prévoit 15 millions d'euros.

S'agissant des prestations pour la garde d'enfants, en hausse de 5,9 % en 2001, de 7,7 % en 2002 et probablement de 4,7 % en 2003, la réforme de l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée (barème progressif et non cumul avec l'allocation parentale d'éducation), qui a conduit à une augmentation du 10,4 % du coût de l'aide en 2001 et de 14,5 % en 2002, devrait voir ses effets atténués. Hors loi de financement, l'augmentation de l'aide pourrait être de 4,5 % en 2003, le montant total de celle-ci atteignant 2,3 milliards d'euros. Le coût de l'allocation de garde d'enfants à domicile, fortement réduit à la suite de l'entrée en vigueur de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, en baisse de 2,9 % en 2001 et de 0,1 % en 2002, pourrait augmenter de 3 %.

Le montant des prestations en faveur de l'éducation (allocation de rentrée scolaire et sa majoration) augmenterait de 1,5 %, pour atteindre 1,4 milliards d'euros.

Parmi les prestations liées au logement, on relève que l'allocation de logement familiale, augmenterait de 2 %, après deux années de très forte hausse (+ 7,9 % en 2001 et + 6,9 % en 2002), compte tenu de la réforme des barèmes, tandis que les contributions au Fonds national de l'habitat et au Fonds national d'aide au logement), prestations extra-légales supportées par la branche famille, croîtraient de 0,9 %. L'ensemble représenterait 5,88 milliards d'euros.

Enfin, les prestations liées au handicap (allocation aux adultes handicapés et allocation d'études spéciale) augmenteraient de 3,7 % en 2003, s'élevant alors à 5 milliards d'euros.

Il convient de rappeler que certaines de ces dépenses figurent tant dans les charges de la caisse nationale qu'en recettes. En effet, l'allocation de parent isolé et l'allocation pour adulte handicapé sont remboursées par l'État. La première figure au chapitre n° 46-34 du budget Santé, famille, personnes handicapées et solidarité (804,86 millions d'euros en 2003) et la seconde au chapitre n° 46-35 de ce même budget (4,52 milliards d'euros), les crédits budgétaires ne correspondant d'ailleurs pas rigoureusement aux prévisions de la Commission des comptes. Cependant le revenu minimum d'insertion n'est pas comptabilisé dans les comptes de la Caisse nationale, alors que les crédits (4,46 milliards d'euros inscrits au chapitre n° 46-83 du budget Santé, famille, personnes handicapées et solidarité) transitent aussi par les caisses d'allocations familiales générant d'ailleurs ainsi des frais de gestion non remboursés par l'État. Il n'est pas considéré comme une prestation familiale.

Devrait s'ajouter à ces impacts financiers celui - modeste - des mesures contenues dans le présent projet.

B.- L'IMPACT FINANCIER DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT
 DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2003

En dehors des articles fixant l'objectif de dépenses de la branche famille pour 2003 (article 42) et rectifiant celui de 2002 (article 46), le projet de loi comporte deux articles consacrés à la branche.

Le premier (article 40) crée une allocation forfaitaire de 70 euros par mois et par enfant, destinée à atténuer, pendant un an, la brutalité de la perte de ressources des familles liée à l'extinction de droits aux allocations familiales, lorsqu'un enfant atteint son vingtième anniversaire. L'avantage de 840 euros concernerait 145.000 familles. La mesure ne devant prendre effet qu'au 1er juillet 2003, son coût est évalué, pour l'an prochain, à 50 millions d'euros.

Le second article (article 41) poursuit le transfert des charges des majorations pour enfant, versées aux parents de trois enfants ou plus, financées par le Fonds de solidarité vieillesse pour le régime général et les régimes alignés, vers la branche. En effet, c'est la loi de financement pour 2001 qui a initié un tel transfert. La première année, il a été prévu que la branche verserait, par acomptes, 15 % du montant des dépenses prises en charge par le fonds. La loi de financement pour 2002 a porté ce pourcentage à 30 %, soit 958 millions d'euros. Le projet le double en le faisant passer à 60 %, soit 945 millions d'euros supplémentaires. Le total pourrait donc atteindre 1.891 millions d'euros.

Votre Rapporteur reste dubitatif devant cette consolidation, la politique familiale devant être centrée sur l'aide aux familles actuelles et les majorations étant consacrées à l'aide aux personnes qui, par définition, ne sont plus chargés de famille. Mais il conçoit que les excédents de la branche doivent être utilisés, et ce pour des objets les moins éloignés possible de la politique familiale.

III.- LA CONVENTION D'OBJECTIFS 2001-2004
ET L'ACTION SOCIALE

Les conventions d'objectif et de gestion ont été instaurées par l'ordonnance n° 96-344 du 24 avril 1996. Conclues entre l'État et les caisses nationales des principaux régimes de sécurité sociale, elles ont pour but de formaliser la délégation de gestion du service de sécurité sociale. Elles obligent les caisses et l'État à s'assigner des objectifs clairs pour améliorer la qualité de service rendu à l'usager.

La dernière convention liant l'État et la Caisse nationale des allocations familiales a été signée, le 3 juillet 2001, pour la période 2001-2004. Elle concerne la gestion administrative et l'action sociale mais elle a été complétée, pour l'action sociale, par un arrêté du 3 octobre 2001 relatif à l'action sociale des caisses d'allocations familiales, lequel a abrogé le précédent arrêté de 1987.

Votre Rapporteur attache la plus grande importance aux conditions de mise en œuvre de la convention.

Sur le fond, la convention prévoit, en effet, un meilleur accueil des allocataires, accueil dont la commission des affaires sociales de Sénat avait dressé un tableau accablant en mai 2000. Cela doit impliquer une dynamisation de la politique immobilière des caisses. 137 millions d'euros ont été prévus pour celle-ci. Elle souligne la nécessité d'une amélioration de l'information et du service personnalisé.

Elle envisage surtout un net renforcement de l'action sociale qui relève des prestations extra-légales. Le coût de celles-ci a d'ailleurs augmenté de 5,5 % en 2001. Il pourrait croître de 10,5 % en 2002 et de 10,1 % en 2003.

Chaque année, doivent être financées de nouvelles places d'accueil pour 16.000 enfants. 430 millions d'euros sont prévus sur quatre ans. La part de l'accueil des jeunes enfants dans le total des dépenses du Fonds doit continuer à s'accroître. Les structures d'accueil de la petite enfance doivent continuer de s'adapter aux besoins des familles (amplitude horaire, relais assistantes maternelles), de même que les actions en faveur des loisirs et des vacances des enfants. Enfin, des contrats temps libre doivent être ouverts à titre expérimental aux 16-18 ans dès janvier 2002.

Essentielle, dans cette perspective, est alors la mise en place, à la suite de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, au sein du Fonds national d'action sociale de la Caisse nationale (5), du Fonds pour le développement des structures d'accueil de la petite enfance.

Il a été, en effet, décidé de mobiliser pour ce fonds, par une mise en réserve placée sur les marchés, l'excédent de la branche de 1999, à hauteur de 230 millions d'euros, afin de compléter les charges permanentes du Fonds national d'action sociale (contrats enfance) et les investissements des collectivités locales, avec pour objectif le rattrapage du retard dans la création de places de crèche. Parallèlement, était annoncé des abondements du Fonds national d'action sociale destinés au fonctionnement des modes de garde collectif.

Fort du succès du fonds, n'affectant en rien le solde de la branche, le Gouvernement précédent aurait souhaité son prolongement dans la loi de financement pour 2002, l'article 59 de celle-ci prévoyant un abondement de 228,67 millions d'euros, prélevé sur l'excédent de 2000. Mais le Conseil constitutionnel a considéré que l'article ne concernait pas directement l'équilibre financier de 2002 et l'a, par suite, déclaré contraire à la Constitution.

Un avenant à la convention a donc été signé en avril 2002 afin de prévoir un financement exceptionnel des investissements au profit des structures d'accueil de la petite enfance. Celui-ci consisterait en des dotations au Fonds national d'action sociale, à hauteur des montants suivants : 30,49 millions d'euros en 2002, 106,714 millions d'euros en 2003, 91,47 millions en 2004. Elles seraient financées par des prélèvements sur le fond de roulement, résultant notamment de l'exercice 2000. Ce qui n'était pas possible dans le cadre de la loi de financement se fait donc en dehors.

Il est souhaitable que le Gouvernement, à l'occasion du débat sur le projet de loi de financement, précise à la Représentation nationale les perspectives du financement des investissements et du fonctionnement des crèches dont le Rapporteur se plait à souligner l'importance dans nos cités et la qualité, notamment au regard de ce qui existe à l'étranger.

CHAPITRE IV

LA BRANCHE VIEILLESSE

La réforme du régime des retraites en France est une des priorités du gouvernement qu'ont choisi les Français en juin dernier. Après cinq années d'inaction, il est temps d'agir pour sauver un système de retraites aujourd'hui en péril tant les réformes ont tardé depuis 1993, année de la seule réforme d'ambition du régime général.

Durant cinq ans, le précédent gouvernement n'a rien fait ou presque. Il a multiplié les rapports sans rien changer concrètement (mis à part le Fonds de réserve pour les retraites). Il ne s'agit pas de remettre en cause la qualité des travaux qui ont été effectués, le dernier en date étant le rapport du Conseil d'orientation des retraites. Cet organisme est très certainement utile comme source d'expertise sur un problème aussi complexe que celui des retraites en France. Pour autant, qu'avons-nous appris de nouveau depuis le livre blanc sur les retraites commandé par Michel Rocard, il y a dix ans ? Rien de fondamental.

Les données sont simples : la situation des régimes de retraite va se dégrader fortement. Si aujourd'hui, il n y'a que 44 retraités pour 100 actifs, on comptera en 2040 83 retraités pour 100 actifs. En effet, du fait de l'allongement de l'espérance de vie à 60 ans, si l'âge de départ à la retraite demeure inchangé, la durée de la retraite va augmenter de 21 % pour les femmes et de 28 % pour les hommes d'ici 2010. En outre, à partir de 2007, le nombre de personnes qui atteignent 60 ans chaque année sera de l'ordre de 850.000 au lieu de 600.000 par an environ jusqu'en 2005. On pourrait multiplier les chiffres mais votre Rapporteur spécial vous renvoie au rapport du conseil d'orientation des retraites pour une analyse plus détaillée. Le constat est en tout cas clair : il faut réformer.

C'est ce à quoi s'est engagé le Gouvernement. Conformément à la déclaration de politique générale du Premier ministre du 3 juillet dernier, cette réforme reposera sur les principes suivants :

- une plus grande équité entre les Français, tout en tenant compte des spécificités et des différents statuts et évidemment de la diversité des situations, notamment démographiques ;

- la liberté de choix : la retraite à 60 ans, qui est un acquis social, ne sera pas remise en cause, mais ceux qui souhaitent prolonger leur activité au-delà doivent pouvoir le faire et ainsi augmenter leurs droits ;

- la répartition équitable des efforts nécessaires ; l'État y prendra sa part, notamment par l'abondement du fonds de réserve.

L'objectif, ambitieux, du Gouvernement est de faire aboutir cette réforme, en concertation avec les partenaires sociaux, d'ici la fin du premier semestre 2003. Votre Rapporteur souhaite également que le Parlement soit activement associé à la préparation de la réforme, en amont de toute modification législative.

Le présent projet est donc maigre quant à la branche vieillesse ce qui semble tout à fait normal au vu du calendrier décrit plus tôt. Il serait absurde d'engager des réformes avant même que la concertation ne se soit engagée.

I.- ÉVOLUTION DES DÉPENSES D'ASSURANCE VIEILLESSE

L'assurance vieillesse de base est la branche qui laisse subsister l'organisation par régimes professionnels la plus morcelée. Le régime général ne représente ainsi qu'un peu plus de 46 % des prestations sociales de l'ensemble des régimes de base, soit 38 % de moins qu'en maladie. Ce morcellement, produit de l'histoire, a des conséquences fâcheuses puisqu'il nécessite des mécanismes de compensation complexes et qu'il est pour beaucoup dans la difficulté de trouver une solution globale au problème de financement des retraites.

LES RETRAITES SERVIES DANS LES PRINCIPAUX RÉGIMES AU 1er JUILLET 2000

graphique

Source : CNAV

Total des retraites servies: 19.445.753

L'ensemble des prestations légales des régimes de retraite de base représente une masse de dépenses de plus de 128,1 milliards d'euros en 2001 (+ 3,8 %). La croissance pour 2002 serait légèrement plus forte (+ 4,1 %) atteignant un niveau de 133,3 milliards d'euros. L'évolution tendancielle en 2003 devrait être plus faible qu'en 2002, avec une augmentation de 3,3 % des prestations légales. En effet, les années 2001 et 2002 sont marquées par des revalorisations sur les pensions de la Caisse nationale d'assurance vieillesse du régime général et des régimes alignés de 2,2 %, tandis que la revalorisation retenue pour 2003 est de 1,5 %. Au total, le taux de croissance annuel moyen des prestations s'établirait à 3,7 % sur la période 2000-2003. Le poids des prestations dans le produit intérieur brut resterait quasiment stable sur la période à 8,8 %.

Le Gouvernement a donc choisi, pour 2003, de revaloriser les pensions de 1,5 %, soit l'évolution prévisionnelle des prix à la consommation hors tabac. Cette solution est sage : elle permet de maintenir le pouvoir d'achat des retraités sans mettre en péril l'équilibre financier, fragile, des différents régimes. Certes, il n'est pas fait application du rattrapage positif de 0,2 % résultant de l'écart entre l'inflation prévue (1,5 %) et l'inflation constatée (1,7 %) pour 2002. Néanmoins, l'absence de rattrapage est plus que compensé par le coup de pouce de 0,3 % intervenu au 1er janvier 2002 permettant en 2003, le maintien de pouvoir d'achat des retraités.

II.- LES COMPTES DE LA CAISSE NATIONALE
D'ASSURANCE VIEILLESSE DES TRAVAILLEURS SALARIÉS

A.- EN 2001

La valeur des prestations légales vieillesse et veuvage versées par le régime général en 2001 s'est élevée à 59,5 milliards d'euros. 96 % de ce montant a été constitué de pensions vieillesse en droits directs : 70 % étaient des pensions de retraites, 12 % des pensions d'inaptitude, 7 % des pensions ex-invalides et 7 % également des majorations (en particulier pour enfants).

La progression totale des prestations a été de 4,2 % par rapport à 2000, plus élevée que celle de l'année précédente (3 %). Les pensions de retraite ont augmenté davantage (+ 5,1 %) en raison d'un effet de volume, les pensions d'inaptitude et les ex-invalides moins rapidement (1,2 % et 2,6 %) ; comme les années précédentes, la croissance la plus forte est celle de la majoration qui est appliquée au titre de l'article L. 814-2 du code de la sécurité sociale et qui concerne pour l'essentiel les travailleurs étrangers.

La progression de la valeur globale de ces prestations résulte de trois effets :

1° D'abord, un effet prix, qui n'est autre que leur revalorisation. Celle-ci a été de 2,2 % et le minimum vieillesse a été également revalorisé de 2,2 % au 1er janvier 2001 ;

2° Puis, un effet quantité, défini comme la variation du nombre de bénéficiaires. En 2001, le nombre de retraités de droit personnel au régime général a augmenté de 1,7 %. Ce taux est beaucoup plus faible que celui des années précédentes. D'ici 2006, le taux de croissance annuel devrait se stabiliser entre 1,5 et 2 %, et c'est à partir de 2006 que la progression annuelle du nombre de retraités va s'accroître, retrouvant des valeurs proches de 3 %, comme il y a une dizaine d'années ;

3° Enfin, un effet structure, qui provient du fait que la structure des prestations versées se modifie d'année en année du fait de la réglementation, d'une part, des évolutions socio-économiques d'autre part. Ainsi, l'indexation des « salaires portés au compte » sur l'évolution des prix et non plus sur celle des salaires, est un facteur permanent de modération. Quant à l'allongement de la durée d'assurance, de 150 à 160 trimestres, au rythme d'un trimestre par an, elle est transitoire et atteindra son plein effet en 2003. Enfin, l'augmentation de 10 à 25 ans de la période de référence servant au calcul du salaire moyen, est elle aussi un facteur de modération transitoire qui s'achèvera en 2008.

Ces différents facteurs de modération, qui affectent tant la quantité des bénéficiaires que la structure des prestations, expliquent que depuis plusieurs années l'effet volume, qui est la combinaison des deux effets, évolue de façon modeste. Il s'est établi en 2001 à 2 %, différence entre la progression totale des prestations (4,2 %) et l'effet-prix, c'est-à-dire leur revalorisation (2,2 %) ce qui constitue même un net ralentissement par rapport aux deux années précédentes.

À l'intérieur de cette évolution très modérée, on relève une particularité. Comme en 2000, le volume des pensions normales directes s'est accru plus vite que la moyenne alors que celui des droits dérivés, au contraire, a diminué. Cela reflète l'universalisation progressive des droits directs : en particulier, de plus en plus de femmes, en raison du développement et de la continuité croissante de l'activité féminine salariée depuis quarante ans, ont acquis des droits directs.

Les ressources de la branche retraite du régime général se sont élevées à 68,57 milliards d'euros en 2001, en augmentation de 6,8 % par rapport à 2000. L'ensemble des dépenses, obtenu en ajoutant aux prestations précédentes les charges de gestion notamment, s'est élevé à 67,06 milliards d'euros, en progression plus modérée que celle des ressources (5,3 %). Ainsi, le solde positif de la branche s'est accru de 2000 à 2001 : en droits constatés, il est passé de 507,7 millions d'euros à 1,52 milliard d'euros.

Comme le prévoit la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 et selon l'article L. 135-7 du code de la sécurité sociale, la Caisse nationale d'assurance vieillesse a versé son excédent de 2000 au Fonds de réserves des retraites, soit 483,48 millions d'euros.

B.- EN 2002

La Caisse nationale d'assurance vieillesse resterait excédentaire en 2002 avec un résultat net de 1,7 milliard d'euros. La progression des produits serait de 3,7 % : les cotisations augmenteraient de 2 % ; la progression des transferts provenant du fonds de solidarité vieillesse porterait principalement sur les cotisations prises au titre du chômage. Le rendement du prélèvement social de 2 % baisserait de près de 49 % en raison, d'une part, du contexte boursier très défavorable et, d'autre part, de la baisse de la part revenant à la caisse nationale d'assurance vieillesse, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 l'ayant fait passer de 30 % à 15 %.

La progression des charges serait de 3,6 %. Les prestations légales augmenteraient de 4,3 % en 2002, rythme comparable à celui de 2001, compte tenu d'une revalorisation identique de 2,2 % et de la poursuite de la tendance des effets volume (+ 2 %). Cette tendance reflétant la situation démographique marquée par le départ en retraite des classes creuses nées pendant la seconde guerre mondiale devrait se poursuivre jusqu'en 2005.

C. - EN 2003

La branche vieillesse du régime général verrait son excédent décroître légèrement en 2003 (1,6 milliards d'euros). Les produits progresseraient plus vite qu'en 2002 avec une évolution de 4,4 % mais les charges augmenteraient encore plus vites (+ 4,7 %).

Les cotisations des actifs augmenteraient de 4,8 % en 2003 et les prises en charge de cotisations seraient en hausse de 3,2 %. Ces prévisions de cotisations sont fondées sur une hypothèse de masse salariale à 4,1 % en 2003. Les transferts en provenance du fonds de solidarité vieillesse progresseraient de 2,9 % en 2003, à la suite notamment de l'augmentation des prises en charge de l'article L. 814-2 et des majorations pour enfant. Par ailleurs, une hypothèse de légère baisse du chômage est retenue pour 2003.

Du côté des charges, les prestations légales croîtraient de 3,7 % en 2003 compte tenu d'un effet volume de 2,2 % et d'une revalorisation de 1,5 %. Les transferts versés seraient en forte hausse (+ 18,7 %) en 2003 en grande partie à cause de la modification des règles de calculs de la compensation généralisée décrite plus loin.

III.- LE FONDS DE SOLIDARITÉ VIEILLESSE

Le Fonds de solidarité vieillesse est un établissement public de l'État à caractère administratif disposant de l'autonomie administrative, budgétaire, financière et comptable chargé du financement des avantages vieillesse à caractère non contributif relevant de la solidarité nationale.

Il a connu une histoire mouvementée ces dernières années (changement d'affectation des recettes, élargissement des missions), histoire qui s'est traduite par d'importants déficits en 2001 et en 2002. En 2003, le Fonds de solidarité vieillesse devrait renouer de peu avec les excédents. Son cas est symptomatique de la gestion des fonds sociaux par le précédent gouvernement : les recettes ont été successivement affectées au Fonds de solidarité vieillesse, au FOREC, puis au fonds de réserve des retraites puis au fonds aide personnalisée à l'autonomie sans qu'aucune logique ne conduise à ces affectations de recettes successives.

Le tableau ci-dessous retrace de façon synthétique les principaux transferts ayant affecté le Fonds de solidarité vieillesse ces trois dernières années :

(En milliards d'euros)

Impact sur le solde

En 2000

Droits perçus sur les boissons transférés au FOREC

- 1,7

Sous-total 2000

- 1,7

En 2001

Baisse du taux de CSG de 0,15 point

- 1,3

Prise en charge CNAF

   0,5

ARRCO et AGIRC

- 0,4

Sous-total 2001

- 1,2

En 2002

Baisse du taux de CSG de 0,1 point

- 0,9

Taxe de prévoyance

- 0,5

Prise en charge CNAF

- 0,5

CSSS (art. 12 de LFR pour 2001-BAPSA)

- 0,2

Sous-total 2002

- 1,1

Total

- 4,0

Source : direction de la Sécurité sociale

A.- UN RÉSULTAT NET DÉFICITAIRE EN 2001

La situation favorable du Fonds de solidarité vieillesse jusqu'en 2000 pouvait se résumer ainsi : une conjoncture très favorable joue pleinement sur les recettes et aussi sur les prises en charge au titre des cotisations chômage. Par ailleurs, les charges liées au minimum vieillesse diminuent rapidement, notamment sous l'effet des revalorisations des petites retraites des exploitants agricoles. Dans ce contexte, le Fonds de solidarité vieillesse améliore structurellement sa situation financière.

Après un résultat de + 287 millions d'euros en 2000, résultat transféré au Fonds de réserve des retraites, le Fonds de solidarité vieillesse devient cependant déficitaire de 86 millions d'euros en 2001. En effet, les allocations vieillesse diminuent moins rapidement que les années passées et les charges au titre des majorations pour enfant demeurent dynamiques même en cette période de creux démographique.

En outre, le gouvernement d'alors décide d'augmenter les charges du Fonds de solidarité vieillesse en lui confiant la prise en charge des cotisations retraites dues par l'État aux régimes complémentaires de salariés (ARRCO-AGIRC) au titre des périodes de perception des allocations de préretraite progressive, des allocations de solidarité spécifique et des allocations spéciales du Fonds national pour l'emploi.

Enfin, le taux de la CSG affecté au Fonds e solidarité vieillesse passe de 1,3 % à 1,15 %, la différence étant affectée à la Caisse nationale d'assurance-maladie. Certes, le Fonds de solidarité vieillesse reçoit, à partir de 2001, un versement de la Caisse nationale d'allocations familiales représentant 15 % de ses dépenses au titre des majorations pour enfant ainsi que 20 % du prélèvement de 2 % assis sur les revenus du patrimoine et des produits de placement. Pour autant, en 2001, l'incidence de ces modifications équivaut à une perte de 1,2 milliards d'euros. À législation constante de 2000, le Fonds de solidarité vieillesse aurait été excédentaire de 1,1 milliard d'euros.

B.- UNE SITUATION AGGRAVÉE EN 2002

En 2002, le résultat net se dégraderait fortement pour atteindre -1,4 milliard d'euros. La situation s'explique par la forte poussée des prises en charge liée à la remontée du chômage et par la perte de recettes qui atteint 1,1 milliard d'euros.

En effet, la forte augmentation du versement de la Caisse nationale d'allocations familiales au Fonds de solidarité vieillesse au titre du financement des majorations pour enfants (30 % des dépenses, soit un supplément de 436 millions d'euros) ne compense qu'en partie le transfert de la taxe de prévoyance vers le FOREC et la baisse de la CSG (transfert de 0,1 point au Fonds aide personnalisé à l'autonomie). La CSSS affectée au fonds a été en plus réduite de 200 millions d'euros au profit du BAPSA.

Du côté des charges, les prises en charge de cotisations augmenteraient de 10,3 % (pour atteindre 6,647 milliards d'euros) en raison de la remontée du chômage et les prestations de 2,6 % à 5,6 milliards d'euros.

C.- LE PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE 2003 ET LE FONDS DE SOLIDARITÉ VIEILLESSE

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 modifie, à travers plusieurs de ses articles, les produits et charges actuelles du Fonds de solidarité vieillesse.

L'article 42 augmente de nouveau la prise en charge par la Caisse nationale d'allocations familiales des dépenses liées à la majoration de pension pour enfants. Pour l'année 2003, la fraction des majorations de pension pour enfants prise en charge par la branche famille est fixée à 60 %. Ce concours supplémentaire est estimé à 945 millions d'euros et permet au Fonds de solidarité vieillesse de ne pas rester dans le rouge en 2003. Votre Rapporteur a analysé l'impact de la mesure sur la branche famille lors de son analyse des charges de celle-ci. Il n'y revient donc pas ici.

L'article 44 prévoit, à compter du 1er janvier 2003, une revalorisation de 1,5 % des pensions de vieillesse. Cette disposition impacte les charges du Fonds de solidarité vieillesse à hauteur de 37 millions d'euros.

Le montant prévisionnel des produits et des charges du Fonds de solidarité vieillesse s'égaliserait quasiment en 2003 autour de 12,7 milliards d'euros, ce qui donnerait un résultat net d'exercice bénéficiaire de 22 millions d'euros.

IV.- LE FONDS DE RÉSERVE POUR LES RETRAITES

Le Fonds de réserve pour les retraites est probablement la seule réalisation concrète du précédent gouvernement relative à la réforme du système de retraites dans notre pays. Il s'agissait de déroger au principe temporel de base de la répartition selon lequel les prestations d'une année sont couvertes par les cotisations ou autres contributions de la même année. Officiellement, le fonds de réserve n'avait bien sur rien à voir avec la capitalisation, mot tabou pour le précédent gouvernement. Pourtant, sa constitution repose sur la même hypothèse macro-économique : il s'agit bien de la mise en réserve de fonds, placés sur les marchés financiers, afin de préserver l'avenir, ce qui le rapproche des fonds de capitalisation.

A.- LES MISSIONS ET L'ORGANISATION DU FONDS DE RÉSERVE POUR LES RETRAITES

Le Fonds de réserve pour les retraites (FRR) a été instauré par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999. Il a été géré jusqu'au 31 décembre 2001 par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) au sein d'une section comptable spécifique.

L'article 6 de la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel rend autonome le fonds de réserve à compter du 1er janvier 2002. Les principaux éléments du nouveau dispositif sont les suivants :

- un établissement public de l'État à caractère administratif, dénommé « Fonds de réserve pour les retraites » est créé, dont la mission est exclusivement dédiée à la constitution de réserves ;

- les ressources du fonds sont indisponibles jusqu'en 2020 ;

- les régimes éligibles au Fonds de réserve pour les retraites sont les suivants : le régime général, les régimes de retraite des artisans et des commerçants, et le régime des salariés agricoles, intégré financièrement au sein du Régime général.

La direction du fonds est assurée par deux instances :

- un directoire composé de trois membres, présidé par le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations.

- un conseil de surveillance composé de 20 membres : 4 parlementaires, 5 représentants des assurés sociaux, 5 représentants des employeurs et travailleurs indépendants, 4 représentants de l'État et 2 personnalités qualifiées.

La gestion administrative du fonds est assurée par la Caisse des dépôts et consignations, sous l'autorité du directoire ; la gestion financière sera confiée par appel d'offres à des établissements financiers.

Les ressources du fonds peuvent être placées en actions, titres de créances, parts ou actions d'organismes de placement collectifs, instruments financiers à terme. A condition qu'il respecte les règles prudentielles énoncées par le décret cité ci-dessus, le Fonds de réserve pour les retraites disposera d'une grande liberté de choix quant aux modalités d'investissement de ses ressources. Le processus de décision arrêté par la loi du 17 juillet 2001 fonctionnera de la façon suivante :

- le directoire proposera au conseil de surveillance des grandes orientations de placement ;

- ces orientations seront arrêtées par le conseil de surveillance ;

- sur la base des orientations arrêtées, le directoire préparera des cahiers des charges pour soumettre à la concurrence la gestion des actifs du fonds ;

- les gestionnaires de portefeuille retenus effectueront ensuite les opérations de placement dans le respect des cahiers des charges et sous le contrôle du Fonds de réserve pour les retraites.

B.- ÉVOLUTION DU COMPTE DU FONDS DE RÉSERVE POUR LES RETRAITES

Les différentes catégories de ressources du fonds de réserve, mentionnées à l'article L. 135-7 du code de la sécurité sociale ont été les suivantes, en 2001 2002 :

- une fraction du solde du produit de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (CSSS) ;

- le versement de tout ou partie des excédents du FSV ;

- le versement de l'excédent de la CNAVTS au titre du dernier exercice clos, une partie de ce versement pouvant être anticipé en cours d'exercice ;

- une fraction égale à 50 % 65 % du prélèvement social de 2 % portant sur les revenus du patrimoine et les produits de placement ;

- le versement du produit des licences UMTS (téléphonie mobile de 3ème génération) affecté au fonds ;

- toute autre ressource affectée au Fonds de réserve pour les retraites, ce qui recouvre actuellement les versements de la CDC et l'affectation du produit de la vente des actifs des caisses d'épargne et le versement en 2002, à hauteur de 1,24 milliard d'euros, au titre de l'ouverture du capital des autoroutes du sud de la France (ASF), ainsi que d'autres opérations de privatisation ;

- les produits des placements du Fonds de réserve pour les retraites.

1.- Les comptes 2001 et 2002

Les réserves constituées au 31 décembre 2000 atteignaient 3.168,9 millions d'euros. En 2001, les recettes du fonds se sont élevées à 3.862 millions d'euros et les réserves constituées au 31 décembre 2001 atteignaient 7.009 millions d'euros.

En 2002, les recettes prévisionnelles du fonds de réserve devraient s'élever, à législation constante, à 5.579,3 millions d'euros. Elles sont composées de 1.248,7 millions d'euros de prélèvement social de 2 %, de 1.518,3 millions d'euros d'excédent prévisionnel en droits constatés de la caisse nationale d'assurance vieillesse au titre de 2001, de 619,2 millions d'euros au titre de la souscription d'une troisième licence UMTS, de 1.240 millions d'euros de recettes de privatisation (ouverture du capital d'ASF...), de 718 millions d'euros de recettes tirées de la souscription des parts sociales des sociétés locales d'épargne et enfin de 230 millions d'euros de produits financiers. Les comptes du Fonds de solidarité vieillesse, auquel le solde de la CSSS est intégralement versé, affichant un solde négatif pour 2001, aucun reversement n'est envisagé à ce titre au Fonds de réserve pour les retraites pour 2002.

Depuis le début de l'année 2002, et dans la perspective d'une mise en place des institutions du nouveau fonds dans un très court terme, les ressources du Fonds de réserve pour les retraites sont placées sur un compte de dépôt au Trésor. Ce compte fait l'objet d'une rémunération mensuelle sur la base du taux moyen des bons du Trésor à taux fixe et intérêts précomptés (BTF trois mois) moins 0,05 % émis au cours de la période. Cette rémunération a varié entre 3,19 % et 3,33 % au cours du 1er semestre 2002.

Les réserves constituées au 31 août 2002 s'élèvent à 8.527 millions d'euros. Elles devraient atteindre, à législation constante 12.582,7 millions d'euros à la fin 2002. Ce montant est inférieur aux 13,2 milliards d'euros prévus par le précédent gouvernement dans l'annexe f du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 du fait de la souscription en 2002 d'un seul opérateur - contre deux attendus- aux licences de téléphonie mobile (UMTS).

2.- Le compte en 2003

En 2003, les recettes du fonds de réserve devraient s'élever, à législation constante, à 4 milliards d'euros. Elles seraient composées de 1,3 milliards d'euros de prélèvement social de 2 %, de 1,65 milliards d'euros d'excédent en droits constatés de la Caisse nationale d'assurance vieillesse au titre de 2002, de 492 millions d'euros (chiffre provisoire) de recettes tirées de la souscription des parts sociales des sociétés locales d'épargne et enfin de 503 millions d'euros de produits financiers. Les comptes du Fonds de solidarité vieillesse, auquel le solde de la CSSS sera intégralement versé, affichant un nouveau déficit en 2002, aucun reversement n'interviendrait à ce titre en 2003.

Les réserves devraient ainsi atteindre, à législation constante, 16,6 milliards d'euros à la fin 2003.

V.- LES MÉCANISMES DE COMPENSATION

La pérennité de régimes organisés sur une base professionnelle est inévitablement menacée par la déformation au cours du temps de la structure de la population active résultant des évolutions économiques. Si l'on souhaite maintenir durablement une multiplicité des régimes, il est en conséquence nécessaire de prévoir des mécanismes financiers correcteurs, qui tiennent compte des inégalités de situation entre ces régimes en termes démographiques d'une part et des capacités contributives d'autre part. tel est l'objet des dispositifs de compensation financière institués à partir de 1974, au moment où le projet d'unification des régimes était abandonné au profit d'une démarche d'harmonisation.

A.- LE MÉCANISME ACTUEL

Deux premiers niveaux de compensation sont organisés, entre les régimes d'assurance vieillesse de base, par la compensation générale instituée en 1974 :

- le premier niveau assure une solidarité financière entre l'ensemble des régimes de base de salariés et l'ensemble des régimes de base des non salariés. Les transferts se font à ce niveau en fonction de critères uniquement démographiques et ne corrigent pas les effets des écarts de capacité contributive entre salariés et non salariés. Ce choix était justifié en 1974 par la mauvaise connaissance des revenus des non salariés.

- le deuxième niveau assure une solidarité plus large entre régimes de base de salariés, puisqu'elle tient compte des écarts aussi bien dans l'équilibre démographique des régimes que dans les facultés contributives de leurs cotisants.

Pour éliminer les différences de réglementation entre les régimes, les calculs se font sur la base d'une prestation de référence qui est la prestation la plus faible servie soit, en 2001, la pension moyenne du régime des cultes dans la compensation entre salariés et non salariés et la pension moyenne du régime des salariés agricoles dans la compensation entre salariés. Par ailleurs et pour les mêmes raisons, les effectifs de retraités entrant dans le calcul sont ceux des seuls retraités de droits directs âgés de 65 ans et plus. Cet âge correspond à l'âge retenu dans le régime des professions libérales et le régime des cultes, à cet égard moins favorable que les autres.

À ces étages de la compensation généralisée, s'ajoute depuis 1986 une compensation spécifique dite surcompensation dont le champ est limité aux principaux régimes spéciaux. Cette compensation s'applique à des régimes supposés assez homogènes et est calculé en tenant compte de leurs effectifs de retraités de 60 ans et plus, bénéficiaires d'une pension de droit direct ou titulaire d'une pension de reversion. Les transferts sont limités à un certain pourcentage de montants théoriquement obtenus : 22 % à l'origine, portés par la suite à 38 % puis ramenés à 34 % en 2000 et 30 % en 2001. Les principaux contributeurs sont le régimes des collectivités locales et le régime des fonctionnaires. Les principaux créditeurs sont la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines et la SNCF.

B.- LES MODIFICATIONS DES RÈGLES DE CALCULS DES COMPENSATIONS POUR 2003

Une réforme du mode de calcul des compensations devrait être engagée en 2003 par voie réglementaire. Cette réforme aurait pour effet :

- de diminuer de trois points le taux retenu dans les calculs de la compensation spécifique vieillesse entre régimes spéciaux de salariés pour l'exercice 2003. Le taux passerait de 30 % à 27 % (décret à paraître) ;

- de prendre en compte les effectifs de chômeurs pour lesquels le Fonds de solidarité vieillesse verse une cotisation au Régime général et au régime des salariés agricoles, ce qui augmente les effectifs de cotisants pris en compte pour ces régimes dans le calcul de la compensation ;

- de soustraire aux prestations de référence retenues dans le cadre de la compensation généralisée vieillesse entre salariés et non-salariés ainsi que dans la compensation interne aux salariés, les sommes déjà remboursées par le Fonds de solidarité vieillesse.

La première mesure ferait baisser le montant des transferts : les régimes qui versent, verseraient moins et les régimes qui reçoivent, recevraient moins. Cette mesure est destinée à alléger la charge pesant sur les deux principaux financeurs : la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) et le régime des fonctionnaires. La CNRACL verrait sa charge diminuer d'environ 130 millions d'euros et les fonctionnaires de plus de 90 millions d'euro.

Les deux mesures suivantes modifient la compensation généralisée vieillesse. Elles contribueraient à accroître la charge du Régime général (y compris les salariés agricoles) d'environ 825 millions d'euros. Le régime général (y compris les régimes qui lui sont intégrés financièrement) supporterait 98 % de la charge que représentent ces modifications de calculs. Le régime des fonctionnaires (y compris ouvriers de l'État) verrait au contraire le transfert à sa charge diminuer de 270 millions d'euros. Tous les régimes de non-salariés verraient leur charge allégée, hormis le régime des cultes qui est intégré au Régime général.

Globalement, l'ensemble des trois mesures précitées se solderait par un gain pour l'ensemble des régimes d'assurance vieillesse au détriment essentiellement du seul Régime général qui verrait sa charge augmenter de plus de 830 millions d'euro. Le seul régime également perdant qui ne soit ni subventionné, ni intégré financièrement est le régime des Clercs et employés de notaires dont la charge s'accroîtrait d'environ 2,4 millions d'euros Pour l'État, le gain net (transferts de compensation pour le régime des fonctionnaires et effets sur le calcul des subventions d'équilibre assurées à certains régimes spéciaux) serait d'environ 177 millions d'euros.

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EXAMEN EN COMMISSION

A.- AUDITION DES MINISTRES

La Commission des finances, de l'économie générale et du plan a procédé à l'audition conjointe avec la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, et Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'État aux personnes handicapées, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 (n°250), le 9 octobre 2002.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a tout d'abord indiqué que la philosophie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 repose sur la confiance et la responsabilité. Ce projet traduit un net changement dans la façon de concevoir la politique de santé et de sécurité sociale dans notre pays. La situation actuelle se caractérise par de nombreux éléments de crise :

- le paritarisme est remis en question, suite au départ du Mouvement des entreprises de France (MEDEF) des conseils d'administration des caisses. En outre, à force d'imbrication des rôles entre l'État et les partenaires sociaux et de l'enchevêtrement des circuits financiers, le découragement s'est installé ;

- les médecins sont désenchantés. Il en est de même pour les établissements de santé, découragés par les contraintes administratives qui sont devenues un véritable carcan ;

- enfin, les outils de régulation ont perdu une large partie de leur crédibilité. L'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) est devenu une enveloppe arbitraire et irréaliste, à l'origine d'une maîtrise comptable non seulement inefficace mais aussi totalement incomprise par les professionnels et les patients.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est un projet de changement car il rompt clairement aussi bien avec les méthodes qu'avec les orientations qui ont prévalu ces dernières années et qui ont conduit au malaise actuel. L'action du gouvernement est guidée par plusieurs principes : le principe d'humanité, qui doit conduire à donner à la santé la place qui lui revient dans notre société,  le principe de réalité qui conduit à sortir de l'illusion comptable, des prévisions irréalistes et des circuits financiers incompréhensibles pour les citoyens : ce projet de loi de financement est un projet de transparence et de crédibilité ;  enfin, le principe de la responsabilité partagée dans un système aussi complexe que notre système de santé et d'assurance maladie, chacun doit assumer son rôle.

L'équilibre financier du projet de loi marie pragmatisme et vérité. En effet, la situation prévue en 2002 et 2003 s'est considérablement dégradée.

En 2002, le solde du régime général se dégradera de plus de 4 milliards d'euros par rapport à 2001, car les dépenses augmentent à hauteur de 10 milliards d'euros, deux fois plus vite que les recettes qui devraient augmenter de 5,4 milliards. Au total, le régime général devrait, en définitive, être en déficit de 3,3 milliards d'euros en 2002. Encore ces chiffres bénéficient-ils du départ à la retraite des « classes creuses », nées pendant la seconde guerre mondiale, ce qui permet aux régimes de retraite d'afficher temporairement des excédents. Mais, il faut tenir compte de la rapide dégradation des comptes prévue à partir de 2005-2006 du fait du « papy-boom ». Dans cette évolution, l'assurance maladie est prépondérante : avec un taux d'augmentation qui devrait être, pour 2002, de 7,2 %, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) augmente bien au-delà des 4 % votés, qui n'étaient pas crédibles. Par rapport aux taux d'évolution constatés en 2000 et 2001, proches de 5,6 %, cette envolée des dépenses en 2002 tient beaucoup à la mise en place de la réduction du temps de travail à l'hôpital, qui n'était pas entièrement financée dans l'ONDAM. Pour 2003, si l'on continuait sur la même tendance, le déficit de l'assurance maladie atteindrait 10 milliards d'euros et celui du régime général dépasserait 6 milliards d'euros. Cette évolution n'est pas soutenable. Elle nous ramènerait aux pires années du régime général en 1992-1993. Un ONDAM « vérité » fixé à 5,3 % en 2003 est donc souhaitable. Ce taux relève en effet complètement des principes nouveaux mis en œuvre : réalisme, crédibilité et responsabilité partagée.

Il est impossible d'occulter le caractère structurel de la croissance des dépenses de santé. Les taux d'évolution des dépenses dans les pays de l'OCDE sont proches du nôtre. En 2000, par exemple, les dépenses de santé ont augmenté de plus de 7 % au Royaume Uni, en Italie, en Espagne et au Canada, de 6,5 % aux États-Unis, alors qu'en France, le taux de croissance était limité à 5,5 %. En second lieu, l'ONDAM doit être crédible. L'ONDAM a été systématiquement dépassé au cours des dernières années - à l'exception de 1997 - pour atteindre 9 milliards d'euros cumulés en quatre ans. Enfin, la responsabilité partagée reposera sur plusieurs mesures d'économie, tel le déremboursement de certains médicaments.

Plus globalement, au demeurant, le gouvernement s'engage à présenter au printemps un projet de loi de financement rectificatif, un « collectif sanitaire et social », en cas d'écart significatif constaté entre l'évolution réelle des différents agrégats de dépenses et de recettes et les objectifs fixés.

L'équilibre financier du projet de loi en 2003 est fondé sur la clarification et la transparence. Le gouvernement fait un pas important dans le sens de la clarification des relations financières entre l'État et la sécurité sociale. Toutefois, le caractère extrêmement complexe et opaque des circuits de financement actuels ne pourra être clarifié que progressivement, étant donné les contraintes qui pèsent sur nos finances publiques. Ainsi, une suppression pure et simple du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC) ne serait pas raisonnable dans l'immédiat. Compte tenu de l'ancienneté du dispositif, des sommes engagées, des transferts complexes, du contexte économique et du court délai, cette mesure pourtant souhaitable ne pouvait apporter, dans la précipitation, les garanties nécessaires pour l'autonomie de la sécurité sociale et les exigences des partenaires sociaux.

Néanmoins, la réforme est suffisamment engagée pour indiquer clairement les orientations et les choix autour de trois volets essentiels :

- d'abord, l'engagement de l'État de compenser intégralement les nouveaux allégements de charges, soit un milliard d'euros en 2003, dont 660 millions grâce à la taxe sur les conventions d'assurance transférée depuis le budget de l'État et 300 millions de droits tabacs supplémentaires ;

- ensuite, le principe d'une réaffectation à la sécurité sociale d'une partie des recettes utilisées pour le financement du FOREC. La modification de la clef de répartition des droits tabacs entre le FOREC et la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) apportera à l'assurance maladie 700 millions d'euros et permettra de revenir à la clef de partage prévalant avant la création du FOREC, entre 15 % et 16 %, contre 8,9 % en 2002  ;

- enfin, le remboursement de la moitié de la dette passée au titre des allégements de charges. C'est ainsi qu'1,2 milliard d'euros sera remboursé par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) au régime général, sans allonger ni la durée de vie de la CADES, ni le niveau de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS).

A la suite de l'ensemble de ces mesures, le déficit du régime général devrait donc atteindre 3,9 milliards d'euros en 2003 et celui de la branche maladie 7 milliards d'euros. La situation est donc loin d'être stabilisée, mais elle est significativement améliorée. Le redressement devra donc se poursuivre au cours des prochaines années.

S'agissant des mesures pour la santé et l'assurance maladie, le projet de loi de financement traduit les grandes priorités du gouvernement : la santé publique, la nouvelle gouvernance de l'assurance maladie et l'excellence des soins. Il traduit aussi la philosophie de la réforme fondée sur la confiance et la responsabilité partagée entre les partenaires que sont l'État , les gestionnaires, les professionnels de santé et les patients.

La responsabilité de l'État se mesure à la priorité accordée à la santé publique. Dans notre pays, la santé publique a toujours été mal comprise et mal aimée. Nous en payons un prix élevé en termes de mortalité précoce et de gaspillages. La santé publique sera donc un objectif prioritaire. Le gouvernement déposera en 2003 un projet de loi de programmation quinquennale de santé publique. La prévention en constituera l'un des fondements. C'est le sens de la hausse des droits sur les tabacs, à hauteur d'un milliard d'euros de recettes supplémentaires, qui devrait permettre de diminuer sensiblement la consommation de tabac en France.

Dans le même esprit, le débat sur la politique de santé doit relever d'une approche plus médicale et moins comptable. Les dépenses d'assurance maladie doivent être fondées sur l'évolution de l'activité de soins. Un groupe de travail constitué au sein de la Commission des comptes de la sécurité sociale remettra ses conclusions à ce sujet au premier trimestre 2003. Déjà cette année, l'élaboration des annexes du projet de loi de financement intègre cette approche médicalisée.

Il convient également de clarifier les missions des gestionnaires de l'assurance maladie par la recherche d'une nouvelle gouvernance de l'assurance maladie. Un groupe de travail constitué au sein de la Commission des comptes de la sécurité sociale est chargé d'établir un état des lieux. Sur cette base, l'ensemble des acteurs sera invité à faire des propositions à partir desquelles le gouvernement élaborera un projet de réforme.

Le présent projet de loi de financement contient une série de mesures qui rompent avec la politique suivie jusqu'à présent, notamment la suppression de la maîtrise comptable, celle des comités médicaux régionaux et l'évolution des missions du service médical des caisses, afin que soit marquée la priorité du dialogue entre les professionnels et les organismes de sécurité sociale. Un avenant à la convention d'objectifs et de gestion qui lie l'État et la CNAM est en cours de négociation, dans le but de réorienter l'action de l'assurance maladie.

Concernant les établissements de santé, trois mesures importantes annoncent le plan « Hôpital 2007 ». Elles vont dans le sens d'une plus grande souplesse et d'une plus grande responsabilité des acteurs hospitaliers, et visent à répondre à la grave crise que traverse le monde hospitalier malgré les efforts innombrables accomplis par le personnel des hôpitaux. Les établissements hospitaliers vont passer à la tarification à l'activité. Des expérimentations seront réalisées dans des établissements volontaires en 2003 et ce mode de financement sera généralisé en 2004.

Une mission permanente d'audit et d'expertise hospitalière réalisera des référentiels de bonnes pratiques et de bonne gestion. Enfin, l'investissement à l'hôpital sera relancé afin de moderniser les établissements et leur permettre de s'adapter aux contraintes de sécurité sanitaire et à la recomposition de l'offre hospitalière En 2003, une première tranche d'investissement d'un milliard d'euros est prévue.

Pour ce qui concerne la médecine de ville, les professionnels doivent s'engager dans les processus de formation médicale continue, d'évaluation et de coordination des soins. Outre le renouveau du dialogue entre les professionnels de santé et les services médicaux des caisses, plusieurs mesures importantes devront concourir à l'objectif d'excellence qui s'impose aux professionnels de santé. La promotion de l'évaluation passe par le financement des actions d'évaluation proposées par les unions régionales de médecins libéraux et la suppression du mécanisme d'incitation à la cessation d'activité (MICA), en raison de la baisse de la démographie médicale. A l'inverse, la reprise d'une activité complémentaire sera facilitée pour les médecins et les infirmières en retraite, notamment dans les zones rurales.

Dans le domaine du médicament, une nouvelle politique moderne et équilibrée sera mise en œuvre. Elle repose sur un partenariat étroit entre l'État et l'industrie pharmaceutique, qui se traduira dans un nouvel accord sectoriel.

Une augmentation de 200 millions d'euros des moyens des établissements hospitaliers pour l'achat des médicaments innovants est prévue. Elle sera accompagnée d'une amélioration des procédures d'achat des médicaments par les hôpitaux et de la mise en place d'une procédure visant à permettre l'accès au remboursement en ville en quelques semaines pour les médicaments jugés les plus innovants. Des forfaits de remboursement pour les médicaments appartenant à des groupes génériques seront établis.

Enfin, il est nécessaire de tirer toutes les conséquences de la réévaluation du service médical rendu par les médicaments, voulue par le gouvernement précédent. Le principe en est arrêté. La mise en œuvre de cette décision sera entourée de toutes les garanties de procédure et d'impartialité. Il n'y a pas de liste préétablie. La procédure sera échelonnée sur trois ans, afin de permettre aux patients et aux médecins de modifier leurs comportements et aux industriels d'adapter graduellement leurs stratégies. Cette mesure repose sur le souci de la santé publique au regard de produits anciens peu efficaces et parfois déconseillés et celui d'une solidarité plus adaptée. Les patients ont déjà été sollicités avec l'accord conventionnel sur les visites à domicile non justifiées. Ils le sont aussi avec l'instauration, prévue dans le présent projet, du forfait de remboursement des médicaments appartenant à des groupes génériques. Demain, d'autres mesures de responsabilisation devront être instaurées, tel le dossier médical partagé.

Le handicap, enfin, constitue l'un des trois grands chantiers du quinquennat que le Président de la République a lancés le 14 juillet 2002. L'objectif d'une politique du handicap est de permettre aux personnes handicapées de choisir dans toute la mesure du possible leur mode de vie et de participer à la vie en société. Or, actuellement, certaines personnes handicapées qui souhaiteraient séjourner en établissement vivent à domicile par manque de places. D'autres sont obligées d'aller à l'étranger, notamment en Belgique. En 2003, le nombre de places en établissements sera accru fortement pour diminuer les listes d'attente actuelles.

Pour ce qui concerne la médicalisation des établissements pour personnes âgées dépendantes, la réforme actuellement en cours piétine. Le calendrier doit donc être allongé jusqu'en 2006, et le dispositif doit être simplifié.

En ce qui concerne les accidents du travail, l'objectif est, dans la continuité de la loi du 25 juillet 1994, de rendre la branche accidents du travail et maladies professionnelles plus autonome. Cette branche sera donc dotée dès 2003 d'une convention d'objectifs et de gestion et d'un conseil de surveillance spécifiques. Le mode de désignation des membres de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles sera, par ailleurs, harmonisé avec celui des membres du conseil d'administration de la CNAM : ils seront désormais nommés directement par les partenaires sociaux. Enfin, l'indemnisation des victimes de l'amiante fait partie des priorités du gouvernement qui a souhaité, dès son entrée en fonctions, que les mécanismes de réparation du préjudice subi par les personnes souffrant d'une affection liée à l'amiante soient rapidement mis en place. Le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante a défini les montants des acomptes en juin 2002 ; le barème de l'indemnisation définitive sera prochainement établi.

La situation financière de la branche vieillesse est paradoxale. Elle est excédentaire, mais dans moins de cinq ans, elle devra supporter le « papy-boom ». Dans ces conditions, conformément aux engagements du gouvernement, le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité engagera au début de l'année prochaine une concertation. Pour 2003, la revalorisation des pensions permettra d'assurer le maintien du pouvoir d'achat des retraités. Elle sera alignée sur l'inflation prévue, soit 1,5 %. Tout effort supplémentaire présumerait de l'équilibre actuel et futur de la branche.

En conclusion, M. Jean-François Mattei a considéré que la sauvegarde de notre sécurité sociale appelle une modernisation de son organisation et de ses structures afin de l'adapter à son nouvel environnement. Le chemin tracé par le gouvernement est clair. C'est dans la durée, dans la concertation et le respect du dialogue social que les réformes seront menées.

M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, a rappelé la mesure très importante du projet de loi en faveur des familles d'au moins deux enfants dont l'aîné a atteint vingt ans, âge à partir duquel, jusqu'à présent, les allocations familiales ne sont plus versées. Compte tenu du fait qu'en moyenne, les jeunes entrent plutôt à vingt-et-un ans sur le marché du travail, il est proposé de reporter d'un an l'âge limite donnant droit au versement des allocations, en accordant pendant cette période supplémentaire une allocation de 70 euros par mois, soit 840 euros par an. Ainsi, une famille de trois enfants dont l'aîné atteint vingt ans perd, dans le système actuel, 160 euros mensuels sur les 400 euros qu'elle percevait ; la réforme proposée compense cette perte pour près de la moitié de son montant.

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'État aux personnes handicapées, a indiqué que, bien qu'aucun article du projet de loi de financement ne concerne explicitement son domaine d'attributions, l'enveloppe médico-sociale au sein de l'ONDAM attribuée aux actions conduites dans le domaine du handicap sert plusieurs priorités. Dans les maisons d'accueil spécialisé et les foyers à double tarification est proposé un doublement du nombre de places initialement prévu pour 2003 (2 200 au lieu de 1 100), mesure similaire à celle inscrite dans le projet de loi de finances pour 2003 concernant les centres d'aide par le travail (CAT), dont le nombre de places est lui aussi doublé. Le soutien aux soins ambulatoires en réseau pour personnes lourdement handicapées est réaffirmé, les services d'éducation spécialisée et de soins à domicile (SESSAD) sont confortés, et l'accueil temporaire sera mis en œuvre conformément à la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, s'est félicité de l'organisation d'un débat et d'un vote au Parlement sur la loi de financement, dont les montants des recettes et des dépenses dépassent ceux du budget de l'État . Il a également tenu à saluer le travail accompli en quatre mois par le gouvernement en matière sanitaire et sociale.

Tout en notant que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 est un texte de transition, il convient de souligner combien sont grands les espoirs qu'il fait naître pour les patients qui pouvaient se sentir de plus en plus exclus du système de santé, pour tous les protagonistes de la politique de santé publique, car cette politique manquait de vision d'ensemble, pour la médecine de ville, avec la fin de la maîtrise comptable des soins, pour l'hôpital et tous les personnels soignants hospitaliers, qui voyaient les équipements se dégrader d'année en année. Sur un thème connexe, celui de l'organisation interne de l'hôpital, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales va d'ailleurs mettre en place dès la fin du mois d'octobre une mission d'information, présidée par M. René Couanau. Il faut aussi saluer le courage politique dont le texte du projet de loi porte la marque, qu'il s'agisse de l'augmentation des droits sur les tabacs, de l'affichage d'un ONDAM en progression de 5,3 %, de la systématisation du recours aux médicaments génériques, ou encore de la prise en compte de la réévaluation du service médical rendu de certaines spécialités pharmaceutiques.

Votre Rapporteur pour avis a souligné les difficultés considérables du financement de la sécurité sociale. Il est très satisfaisant à cet égard que le projet de loi ne masque pas la réalité de la situation et ouvre la voie aux moyens d'aplanir les difficultés présentes. La croissance des dépenses de santé à un rythme élevé est certes inéluctable, et il est impossible de ne pas honorer ces dépenses. De ce point de vue, le changement qui s'opère, à savoir la suppression de la régulation strictement financière de l'offre de soins au profit d'une étude du rapport entre la prestation et son coût pour la collectivité, est salutaire. Les mesures annoncées - sur les génériques et sur le déremboursement des visites non médicalement justifiées ou des médicaments dont le service médical rendu s'avère insuffisant - vont dans le bon sens. Pour les établissements hospitaliers publics comme privés, l'expérimentation de la tarification à l'activité est une étape cruciale et indispensable. Il est éminemment souhaitable que, le moment venu, le Parlement soit informé de la façon la plus complète sur ces résultats.

La partie « recettes » du projet de loi présente les séquelles du bouleversement des finances sociales provoqué par le financement des trente-cinq heures et les allègements de charges inévitables à opérer en conséquence, qui conduit aujourd'hui à l'alignement du SMIC vers le haut. Cette réforme a entraîné à une hausse considérable des prélèvements, source de difficultés colossales. Le projet de loi de financement est un projet de transition, mais cette transition qui s'ouvre sera douloureuse. Le changement tout juste amorcé, par exemple en matière de transferts financiers dans le cadre du FOREC, devra aller à son terme : ce fonds devra être supprimé, car le lien entre ses dépenses et ses recettes est purement artificiel et l'affectation des recettes ne repose sur aucune logique. Quelles sont donc, au-delà de la transition, les perspectives à moyen terme ?

Le Président Pierre Méhaignerie, évoquant la nécessité de concilier les trois objectifs que sont la promotion d'une médecine de qualité, la maîtrise des prélèvements obligatoires et le refus d'une médecine à deux vitesses, a demandé quelle pédagogie serait menée pour responsabiliser les patients.

M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour les recettes et l'équilibre général, s'est félicité qu'ait été retrouvé le courage de la réforme. Dans sa volonté de « détricoter » le FOREC, le gouvernement devra passer aux actes, en allant au-delà des allègements proposés dans le projet de loi présenté par M. François Fillon, du remboursement d'1,2 milliard d'euros au titre de la dette 2000 et de la réaffectation des droits sur les tabacs. L'occasion se présente de remettre à plat l'ensemble des relations financières entre l'État et la sécurité sociale. Il faut, pour cela, fixer à l'assurance maladie un périmètre de financement clairement établi, de façon à responsabiliser tous les acteurs du système. La politique de la main tendue en direction des professionnels de santé, sous la forme d'une responsabilité partagée, implique que tous les acteurs contribuent à la recherche du « juste soin ».

M. Yves Bur a ensuite posé les questions suivantes :

- la régionalisation de la santé - via la création d'agences régionales de santé, de conseils régionaux de la santé, de structures régionales pour l'assurance maladie et la politique de santé publique et de prévention -, est-elle toujours un objectif ?

- le produit d'un milliard d'euros, attendu de l'augmentation des droits sur les tabacs, sera-t-il effectivement perçu, ou bien ne doit-on pas craindre, comme cette année, une révision à la baisse des prévisions de recettes pour cause de développement de la contrebande, ou de report de la consommation vers des produits moins chers et donc plus mauvais pour la santé ?

- La CADES, qui doit en plus rembourser 1,2 milliard d'euros de dette au titre du FOREC, a déjà été mise à contribution plusieurs fois par le précédent gouvernement ; dès lors, on peut se demander si la date de 2014, retenue pour le terme de sa mission, sera tenue.

M. Jean Bardet, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour l'assurance maladie et les accidents du travail, s'est réjoui de l'analyse lucide et des remèdes courageux contenus dans le projet de loi, en insistant sur l'abandon de la maîtrise comptable des dépenses de santé au bénéfice d'une maîtrise médicalisée. Devant le caractère inéluctable de la hausse de ces dépenses, une maîtrise s'impose en effet. A cet égard, la mesure annoncée pour promouvoir le développement du marché des médicaments génériques est bonne, car elle laisse un libre choix pour le malade et crée de l'émulation entre les laboratoires. Cependant, le risque existe que les prix des médicaments princeps soient abaissés au niveau de ceux des génériques, ruinant ainsi l'industrie des génériques. Par ailleurs, cette mesure constitue-t-elle une étape vers un remboursement par classe thérapeutique, qui ne serait pas dénué d'effets négatifs ? Que l'on songe à ce que l'on a observé dans le cas des statines, par exemple. Enfin, cette même mesure paraît contradictoire avec l'accord conclu en juin dernier, aux termes duquel les médecins généralistes acceptaient, en contrepartie de la revalorisation de leurs honoraires, de porter à 30 % le volume de leurs prescriptions en dénomination commune internationale (DCI).

Quel est le montant de l'économie attendue du mécanisme de déremboursement portant sur 835 spécialités, nombre ramené à 650 ? Ne risque-t-on pas de constater un transfert de la consommation vers d'autres spécialités, plus chères, mais remboursables ? Le processus de révision de l'autorisation de mise sur le marché, prévu par les textes mais inappliqué, sera-t-il mené à son terme ?

Le plan « Hôpital 2007 » est ambitieux ; il prévoit le déblocage, dès 2003, d'un milliard d'euros pour parer au plus pressé, mais les problèmes structurels vont demeurer ; à quand une grande loi hospitalière, pour réformer les services des urgences en particulier ? Il pourrait s'agir d'un volet du projet de loi à venir sur la décentralisation, et la mission d'information de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales va peut-être formuler des recommandations à ce sujet. Enfin, pour la médecine de ville, les accords récents de revalorisation d'honoraires et de réforme de la prise en charge des visites à domicile vont dans le bon sens, mais rien n'a encore été fait en faveur des médecins spécialistes.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour l'assurance vieillesse, a salué la volonté de clarté du ministre. Certes, la branche vieillesse donne lieu à peu d'articles dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais un texte est en préparation pour l'année prochaine, texte qui privilégiera une approche globale absolument nécessaire. Le « papy boom » qui s'annonce à horizon 2006, est effectivement très inquiétant. Il est urgent de ne plus attendre. Il a été décidé dans ce projet de revaloriser les pensions au niveau de l'inflation. Il sera très probablement reproché au gouvernement de ne pas pratiquer de coup de pouce, mais l'essentiel est qu'il n'y ait pas de perte de pouvoir d'achat pour les retraités.

Concernant la médicalisation des établissements d'hébergement pour personnes âgées, l'échéance est reportée à 2006, prenant acte du caractère totalement irréaliste de l'objectif initialement prévu. En effet, la simultanéité de la réforme de la tarification, de la signature des conventions tripartites, de la mise en place de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et des trente-cinq heures justifie ce report ; pour autant, certaines fédérations et associations souhaitent que cette échéance ne soit pas repoussée au-delà de 2004 et une concertation approfondie avec ces fédérations paraît indispensable.

La mission sur la dépendance, qui avait, la première, posé le problème de l'autonomie des personnes âgées, avait dégagé deux grands principes : la solvabilisation des familles et l'augmentation de l'encadrement médical. Ces deux objectifs sont toujours d'actualité. Lors des discussions futures sur les moyens nécessaires pour les atteindre, il conviendra de ne pas écarter l'hypothèse de la mise en place d'un cinquième risque au sein de la sécurité sociale.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, s'est félicité de la qualité du débat en commission, qui contraste avec les propos, parfois convenus, que l'on entend dans l'hémicycle. Notre pays est confronté à un problème majeur dans un domaine majeur, problème face auquel le gouvernement précédent a échoué, comme d'ailleurs les autres gouvernements, qui n'ont pas davantage réussi. Il convient donc de se garder d'une approche polémique et il faut se tourner vers l'avenir. Il est possible de trouver, comme sur certains textes d'intérêt national, un accord qui dépassera les clivages partisans ; aussi ne faut-il pas fermer la porte aux idées nouvelles, d'où qu'elles viennent. De nombreuses erreurs ont été faites par le passé : il a été tenté de limiter l'offre de soins avec le numerus clausus, ce qui a débouché sur une pénurie de professionnels de santé, puis a été appliquée une maîtrise comptable de la demande, sans que ni l'une ni l'autre de ces politiques n'ait eu d'effet significatif sur l'évolution des dépenses de santé. La seule chose qui n'ait jamais été tentée est de construire des réformes avec ceux qui sont destinés à les appliquer, c'est-à-dire les professionnels de santé. Il s'agit là d'un vrai pari.

Certes, la hausse des dépenses de santé est structurelle et on peut l'expliquer par de nombreux facteurs comme le progrès technique, le vieillissement de la population ou encore le désir de mieux vivre. Néanmoins, un pays qui consacre 10 % de son PIB à la santé doit s'assurer qu'il peut dépenser mieux avant de dépenser plus. Or, tous les directeurs d'hôpitaux publics affirment qu'ils peuvent faire d'importants gains de productivité pour peu qu'on cesse de leur imposer des règles non négociées et qu'on se débarrasse de certaines rigidités, comme celles que comporte le code des marché publics. Il est indispensable de donner à l'hôpital public les moyens lui permettant d'assurer à la fois une concurrence et une complémentarité avec le secteur privé. Dans ce domaine comme dans les autres, ces réformes prendront du temps et il ne sera pas possible d'obtenir des résultats immédiats. Avant de mettre en œuvre des déremboursements ou des baisses de cotisations, il faut s'assurer du bon état de marche de notre système de santé.

Concernant les médicaments génériques, la crainte a été exprimée que les prix des princeps s'alignent à terme sur ceux des génériques : d'une part, cela semble peu probable étant donné les contraintes qui pèsent sur l'industrie pharmaceutique à l'exportation ; d'autre part, le rôle du ministre de la santé n'est pas de faire le travail qui incombe aux industriels, mais de gérer au mieux les dépenses de protection sociale dont il a la charge. En ce qui concerne les déremboursements, nous sommes à l'aube d'une révolution des pratiques médicales, qui implique que soit menée une véritable politique du médicament. Afin de responsabiliser les patients, il est nécessaire d'aller vers l'automédication. Mme Martine Aubry avait lancé le programme de réévaluation du service médical rendu des spécialités pharmaceutiques. De nombreux médicaments d'usage courant ont été déremboursés et ils ont néanmoins continué à être utilisés. Leur déremboursement permettra de mettre l'accent sur le financement des médicaments innovants luttant contre les fléaux que sont le cancer, le SIDA et les maladies dégénératives... Il est nécessaire de faire des choix. Par ailleurs, les médicaments ont leur propre vie : ainsi un médicament a récemment fait l'objet d'une évaluation de service médical rendu insuffisant, sur ses indications initiales ; on s'est néanmoins aperçu qu'il était très utile dans la lutte contre la mucoviscidose et son déremboursement, bien sûr, ne peut plus être envisagé lorsqu'il est prescrit à cette fin. Des médicaments déremboursés ont vu leur chiffre d'affaires augmenter. Aussi faut-il se méfier des jugements sommaires ou trop rapides en la matière. Le forfait de remboursement pour les médicaments figurant dans un groupe générique n'est pas contradictoire avec l'engagement de prescription souscrit dans le cadre de l'accord conventionnel du 5 juin dernier ; les deux mesures sont complémentaires.

Il faut reconnaître que les patients sont parfois déresponsabilisés, en particulier avec la carte Vitale et le tiers payant, qui leur donnent l'impression que les soins sont gratuits. Il est indispensable de leur faire comprendre qu'ils sont également responsables des fonds sociaux qui financent ces soins, mais ce n'est pas simple. Pourquoi ne pas, par exemple, les associer à la gestion de l'assurance maladie, dans le cadre de la nouvelle gouvernance souhaitée par le gouvernement ? Les associations de patients peuvent jouer un rôle très utile, comme l'ont prouvé les associations de consommateurs dans la gestion de la crise bovine liée à la maladie du prion.

La régionalisation est un des axes prioritaires de la politique de santé du gouvernement. Les agences régionales de l'hospitalisation ont montré leur efficacité. La création d'agences régionales de santé (ARS) permettra d'aller plus loin, en associant médecine de ville et hospitalisation.

M. Claude Evin a rappelé qu'à la fin de 1993, le gouvernement d'alors avait déjà mis en avant l'instrument de la responsabilisation des professionnels de santé. Ceci relativise le caractère inédit de la politique annoncée aujourd'hui.

Les comptes 2002 reflètent certainement une part d'héritage, pourtant le déficit de l'assurance maladie, tel qu'évalué par la Commission des comptes de la sécurité sociale, s'est creusé de 900 millions d'euros entre juillet et septembre, en raison des premières mesures prises par le nouveau gouvernement. Il faut d'ailleurs rappeler qu'en 1997, le déficit du régime général a atteint 4,5 milliards d'euros.

Pour 2003, le déficit prévisionnel, compte tenu des mesures annoncées, serait de 3,9 milliards d'euros. Il faut toutefois préciser que ce résultat n'est pas atteint grâce à une politique de maîtrise des dépenses, mais par des augmentations de recettes comme les droits sur les tabacs et le prélèvement sur la CADES, qui ne pourront pas être renouvelées.

Les mesures structurelles qui sont annoncées sont très réduites et reprennent bien souvent des dispositifs déjà existants, qu'ils soient prévus par la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades et la qualité du système de santé ou par celle du 27 juillet 1999 relative à la couverture maladie universelle (CMU) pour ce qui est de la tarification à la pathologie. Sur les autres points, il apparaît en fait que ce sont les patients qui devront assumer des dépenses supplémentaires : ce sera le cas pour les visites à domicile, comme pour le médicament. Dans le cas, par exemple, où le patient n'aurait pas été informé de l'existence d'un générique ou n'aurait pas bénéficié de la substitution par le pharmacien, il aura au bout du compte à acquitter un coût supérieur.

Il faut être particulièrement vigilant par rapport aux travaux du groupe de travail annoncé par le ministre sur la répartition entre couverture de base et couverture complémentaire en matière d'assurance maladie, afin de veiller à ce que notre système reste bien fondé sur la solidarité.

M. Bernard Accoyer a remercié le ministre de la lucidité de son approche et de sa volonté de sauvegarder les principes de solidarité.

Les déficits cumulés qui conduisent aujourd'hui à faire appel à la CADES résultent des dérives d'un système d'assurance maladie non maîtrisées entre 1998 et 2001, dans une forte période de croissance économique. En effet, rien n'a alors été fait ces dernières années pour garantir l'avenir de l'assurance maladie, des retraites, ou pour conduire une politique adéquate en direction des personnes handicapées ou des familles.

Il ne peut y avoir de régime d'assurance maladie pérenne que si les responsabilités sont partagées entre les praticiens, les gestionnaires de régime de base comme complémentaire, et les patients. Il faut maintenant définir la voie commune de la concertation et de l'équilibre.

M. Jean-Luc Préel s'est réjoui d'un projet de loi de transition qui va dans la bonne direction, de la fixation d'un taux réaliste de l'ONDAM, même si il devrait être encore plus médicalisé, ainsi que de la suppression des lettres clefs flottantes et des CMR, et des mesures relatives aux médicaments et à l'hospitalisation avec le plan « Hôpital 2007 ». En revanche, on peut regretter, tant la crise est profonde, qu'il n'ait pas été procédé à un audit de la santé. La question de l'apurement des comptes reste également entière, sachant qu'aujourd'hui les reports de charges représentent environ 3 % des budgets des hôpitaux. De même, l'enveloppe hospitalière pour 2003 devra prendre en compte ces reports de crédits.

Un certain nombre de questions demeurent aussi posées en matière de médecine ambulatoire : la revalorisation des honoraires des spécialistes, les frais de déplacement des infirmières, la création d'un ordre des kinésithérapeutes, des podologues et des infirmières. Pour les personnes âgées se posent également les problèmes de la médicalisation des établissements d'hébergement, du droit à partir à la retraite avec 40 annuités de cotisation, des droits des conjoints survivants et de l'assurance veuvage, question qui n'est pas mentionnée dans le rapport annexé.

En conclusion, M. Jean-Luc Préel a observé que le transfert du financement des majorations de pensions pour enfant du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) vers la branche famille est tout aussi inacceptable cette année que les années précédentes.

M. Jean-Pierre Brard a fait les remarques suivantes. Dans son intervention, le ministre n'a évoqué ni l'existence, ni le devenir des maisons médicales d'urgence. Ces structures sont pourtant porteuses d'avenir et il conviendrait de généraliser leur expérimentation. Le budget alloué aux centres de soins spécialisés aux toxicomanes pour 2003 est réduit de 14 % et on constate également une baisse de 30 % des crédits de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT). Cette baisse est catastrophique, au regard des résultats obtenus par ces centres qui sont remarquables, tant du point de vue sanitaire que de la réduction des nuisances dans l'espace public. En la matière, il conviendrait d'associer plus étroitement les efforts du ministère de la santé et ceux du ministère de l'intérieur, plutôt que de privilégier une approche unilatérale.

M. Etienne Pinte s'est réjoui du changement d'approche de la politique de santé publique introduite par le projet de loi. Il est cependant regrettable que le transfert du financement des majorations de pensions pour enfants du FSV vers la branche famille soit maintenu et augmenté pour l'année prochaine, alors que le Président de la République a clairement annoncé qu'il était favorable à une gestion séparée des branches.

M. Jean-Louis Dumont s'est tout d'abord exprimé au nom de M. Gérard Bapt, rapporteur spécial des crédits de la santé. Ce dernier s'étonne de n'avoir, jusqu'à présent, reçu aucune réponse écrite à son questionnaire budgétaire pour 108 questions posées. Il existe pourtant des délais fixés par la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, délais expirés. En conséquence, M. Gérard Bapt se réserve le droit de ne pas rapporter tout ou partie de ce budget, lors de son examen en commission des finances ou en séance publique. Comme l'a constaté le Président Pierre Méhaignerie, il n'est pas admissible que la loi organique soit aussi mal respectée.

M. Jean-Louis Dumont a ensuite posé les questions suivantes :

- quel avenir pour la médecine générale en milieu rural ?

- quels sont les moyens pour parvenir à une meilleure utilisation des gros appareillages dans les hôpitaux, particulièrement des imageries à résonance magnétique (IRM) ?

Mme Jacqueline Fraysse a exprimé son accord avec le ministre concernant l'augmentation inévitable des dépenses de santé rapportées à la richesse nationale dans les prochaines années. Il est néanmoins regrettable de ne pas tirer pas les conclusions d'une telle situation qui devrait conduire à une réforme globale du mode de financement de la sécurité sociale, associée à l'augmentation des moyens financiers mis à sa disposition.

Mme Jacqueline Fraysse a ensuite fait les observations suivantes :

- s'il est légitime de s'interroger sur le déremboursement des médicaments dont l'efficacité thérapeutique n'est pas prouvée, il est par contre urgent de stopper le remboursement des médicaments inefficaces voire dangereux pour la santé. Par ailleurs, il est souhaitable de débloquer des moyens en faveur de l'utilisation des médicaments innovants dans les hôpitaux. Mais n'y a-t-il pas un risque de dérive financière, si les laboratoires fixent eux-mêmes le prix de tels médicaments ?

- la taxe sur les salaires pour les personnels hospitaliers va-t-elle être supprimée ?

- le ministre envisage-t-il d'étendre le bénéfice de la CMU aux titulaires de l'allocation adulte handicapé (AAH) et aux bénéficiaires du minimum vieillesse ?

M. Jean-Michel Dubernard, Président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, a indiqué à M. Jean-Louis Dumont que la question posée par M. Gérard Bapt ne relève pas du cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais que le gouvernement devra, naturellement, y répondre, dans le cadre de la loi de finances.

M. René Couanau s'est félicité du souci d'efficacité qui guide l'action du ministre et des mesures qu'il a annoncé en direction des personnes handicapées. Pour autant, il existe un décalage important dans le temps entre le moment où une décision est prise et le moment où ses effets se traduisent. Ainsi, les mesures contenues dans le présent projet n'entreront pas dans les faits avant 2005 ou 2006. Il est important de trouver les moyens d'une plus grande réactivité de l'action publique.

M. Marc Bernier a insisté sur l'injustice d'une médecine à deux vitesses. Ainsi, le remboursement des prothèses occulaires, dentaires ou auditives n'est-il pas pris en charge par la sécurité sociale de manière satisfaisante et tous les Français n'ont pas les moyens de s'offrir une bonne assurance complémentaire.

M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a apporté les réponses suivantes :

- le dérapage des dépenses de santé constaté entre le mois de juin et aujourd'hui est la conséquence d'un double phénomène : d'une part, la baisse des ressources en conséquence de la réduction de 0,2 point de la croissance de la masse salariale - en liaison mécanique avec la recrudescence du chômage - qui induit une moindre ressource de 300 millions d'euros, et le coût des dernières décisions prises par le précédent gouvernement, pour un montant de 400 millions d'euros, qui n'étaient par financées ; d'autre part, trois mesures nouvelles décidées par le gouvernement actuel : la levée des pénalités financières pour les médecins spécialistes du secteur 1, l'accord du 5 juin 2002 avec les médecins généralistes (230 millions d'euros) et la revalorisation du tarif de la consultation pour les pédiatres. Ces trois mesures étaient nécessaires ; elles ont été prises. Cependant, il n'appartient pas au gouvernement d'aller plus avant sur ces sujets car ils relèvent du dialogue social et de la négociation. Est-il logique qu'une visite de généraliste coûte 20 euros et une visite de spécialiste 22,5 euros, alors que cette dernière dure, souvent, deux fois plus longtemps ?

- le maintien des maisons médicales d'urgence est une nécessité. Ces structures ont fait la preuve de leur efficacité, notamment pour soulager les services d'urgence des hôpitaux. M. Charles Descours, sénateur honoraire, a été chargé de faire des propositions en ce sens. Il n'existe pas de solution univoque en la matière. On ne peut que constater que certaines maisons médicales fonctionnent mieux que d'autres, notamment en milieu rural. Il est important de ne pas faire table rase du passé au seul nom de la modernité. Certaines structures ont démontré leur efficacité : on redécouvre ainsi l'utilité des dispensaires de campagne et des services de porte des hôpitaux ;

- en matière de lutte contre la toxicomanie, l'expérience montre que pour être efficace, l'action doit s'effectuer au plus près du terrain. En ce sens, le rôle des associations est primordial. Le gouvernement n'entend donc pas réduire les crédits alloués à la MILDT et aux centres de soins spécialisés aux toxicomanes. La réduction des crédits observée par M. Jean-Pierre Brard n'est que le résultat d'une clarification comptable : les crédits alloués aux centres de soins spécialisés dans la toxicomanie sont désormais inscrits au budget de l'assurance maladie et non plus au budget de l'État et la création de l'Institut national de prévention et d'éducation à la santé (INPES) entraîne mécaniquement un transfert du budget de communication antérieurement inscrit dans les crédits de la MILDT vers cette nouvelle structure ;

- il est difficile de faire des pronostics sur le déficit de la branche maladie en 2003, compte tenu de l'assiette des cotisations sociales ;

- la sécurité sociale a été instituée en 1945, essentiellement pour les travailleurs salariés et leurs familles. Depuis, une protection sociale concernant aujourd'hui d'autres populations que les salariés s'est développée. Aussi le lien entre travail et offre de soins s'est-il progressivement distendu. C'est une des raisons pour lesquelles le MEDEF s'est désengagé des conseils d'administration des caisses. C'est pourquoi une réflexion d'ensemble doit être engagée dans le sens d'une nouvelle gouvernance de l'assurance maladie ;

- il faudra assurément revenir sur la CMU afin de donner « un coup de pouce » aux populations situées juste au-dessus du seuil ouvrant l'accès à cette couverture. La CNAM a déjà mis en place une aide fort utile. Probablement faudra-t-il retenir des incitations fiscales pour la généralisation des couvertures complémentaires ;

- les contributions de la branche famille au financement des majorations de retraite pour enfants ont été maintenues. En effet, la branche famille dégage des excédents considérables. Il faut les utiliser, et ils le sont à des fins de politique familiale. Il convient de noter d'ailleurs que la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) a voté les articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale relatifs à la famille ;

- s'agissant des équipements d'IRM, il convient de ne pas traiter de la même façon tous les établissements publics et privés. Même si quelques hôpitaux publics peuvent les mettre en service rapidement, les cliniques privées sont hélas souvent plus performantes ;

- une ordonnance de simplification des procédures administrative sera prise par le gouvernement, notamment afin de réduire les délais ;

- les questions relatives au remboursement des prothèses sont pertinentes. Elles ne pourront toutefois être traitées au fond que dans le cadre du groupe de travail sur la répartition entre la couverture de base et la couverture complémentaire.

B.- EXAMEN DU PROJET DE LOI

Au cours de sa séance du 22 octobre 2002, la Commission des finances, de l'économie générale et du plan a examiné le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 (n° 250).

Votre Rapporteur pour avis a indiqué que s'il était normal que le projet de loi de financement de la sécurité sociale soit analysé au fond par la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, il était tout autant justifié que la commission des Finances fournisse, chaque année, un avis, compte tenu du poids financier de la sécurité sociale, de son impact économique et de la masse des prélèvements obligatoires qui lui est affectée.

Abordant la situation financière des différentes branches, il a souligné leurs résultats contrastés.

Paradoxalement, la branche Vieillesse est excédentaire, probablement encore pour peu d'années. La branche Famille l'est également mais pour des raisons différentes, liées principalement à l'évolution de ses recettes. Les comptes les plus préoccupants concernent donc la branche Maladie. Ses dépenses augmentent de plus de 7 % par an alors que ses recettes n'augmentent qu'à un rythme de 4 %. Les déficits, par conséquent, se creusent. Face à ceux-ci, l'attitude du Gouvernement est courageuse. En effet, il assume les soldes hérités du précédent Gouvernement et propose l'adoption des mesures de contrôle qui s'imposent. La revalorisation de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) de 5,3 % participe de la nouvelle vision du Gouvernement quant à l'évolution des dépenses de santé : ne pas nier les réalités. La hausse de la consommation de soins est en effet largement inévitable : elle s'explique par le vieillissement de la population, d'une part, et par les progrès de la médecine, qui contribuent au demeurant à l'allongement de l'espérance de vie, d'autre part.

Dans ce contexte, le projet de loi de financement, comme l'a indiqué le ministre de la Santé, de la famille et des personnes handicapées, est un projet de transition. Toutes les réformes annoncées ne s'y trouvent pas détaillées.

S'agissant de l'assurance maladie, il convient de souligner l'importance du rétablissement du dialogue avec les professionnels de santé, dès les premières semaines de l'existence du Gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin. La suppression des « lettres-clés flottantes » proposée à l'article 15 du projet de loi, système qui avait le don d'irriter les professionnels de santé est une traduction du nouvel état d'esprit des relations entre ceux-ci et le Gouvernement concernant la santé. L'annonce de la modification de la tarification médicale est une autre mesure positive. Le budget global n'a conduit qu'à des gaspillages et à la pénurie. La tarification à l'activité, à l'inverse, ne peut générer que des économies et mieux responsabiliser les acteurs. Il est donc heureux que le projet de loi prépare une expérimentation en la matière.

Il faut également approuver la nouvelle politique du médicament proposée, notamment le remboursement sur la base des prix des médicaments génériques, lequel est d'ailleurs relativement bien accepté, et les déremboursements de médicaments peu efficaces.

Le projet de loi de programmation de santé publique annoncée pour le printemps 2003 ainsi que le projet de loi de financement rectificatif qui pourraient être déposés à la suite des travaux de la commission des comptes du premier semestre de l'année prochaine devraient être une nouvelle occasion pour le Parlement de faire le point sur l'évolution des dépenses maladie.

S'agissant de la politique familiale, si l'on ne peut qu'approuver l'initiative du Gouvernement consistant à atténuer les effets de la perte des allocations familiales, lorsqu'un enfant atteint son vingtième anniversaire, par la création d'une allocation forfaitaire versée pendant un an, on peut rester dubitatif devant le doublement de la participation de la branche famille au financement, par le Fonds de solidarité vieillesse, des majorations de pension pour enfants. Il paraît curieux, en effet, que la branche famille aide des retraités qui, par définition, ne sont plus chargés de famille.

La branche Vieillesse ne fait pas l'objet de mesures notables. Il convient simplement de constater que la croissance des dépenses suit la hausse des prix et que le débat sur les perspectives de la branche va s'ouvrir prochainement.

La branche Accident du travail suscite, quant à elle, des inquiétudes liées principalement à « l'explosion » de ses dépenses consacrées aux victimes de l'amiante. À cet égard, il serait souhaitable que le Parlement bénéficie d'informations prospectives.

L'ensemble des circuits de financement demeure, malheureusement, d'une complexité inouïe. Les allégements de charges liés aux 35 heures et l'affectation du produit d'une même taxe à plusieurs destinataires rendent la schématisation de ceux-ci quasiment illisible. Le projet procède heureusement à quelques mesures de clarification. Il devra être complété par un retour à la compensation intégrale des allégements de cotisations, liés au rapprochement des SMIC. Mais il faudra aller plus loin.

Il convient, en effet, de rappeler que le respect des règles de l'universalité et de l'unité budgétaire est essentiel à l'exercice du contrôle parlementaire. Les exceptions à la règle de la non-affectation des recettes aux dépenses ne peuvent, par exemple, être justifiées que si un lien logique entre une recette et une dépense est solidement établi.

Au total, le champ des lois de financement de la sécurité sociale mérite, assurément, d'être revu. Des réformes de fond restent donc à conduire et elles ne concernent pas uniquement les circuits financiers, même si ceux-ci demeureront marqués encore pour de nombreuses années par le poids exorbitant des allégements de charges liés aux 35 heures et à l'alignement des SMIC.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a souhaité connaître les risques que faisait peser sur le budget de l'État l'évolution de l'aide médicale et l'impact de la couverture maladie universelle (CMU) sur la consommation de soins. Ne peut-on considérer qu'au cours des quinze dernières années, le développement des systèmes de non-paiement des soins par le biais du tiers payant ou de la carte Vitale a contribué à déresponsabiliser les consommateurs de soins ?

M. Gérard Bapt a estimé excessifs les jugements du Rapporteur sur le poids des 35 heures. Il a ensuite interrogé celui-ci sur le rôle des Agences régionales d'hospitalisation (ARH) en ce qui concerne le partage entre le secteur public et le secteur privé et sur la portée de l'article 13 du projet de loi relatif à la fusion du Fonds pour la modernisation des établissements de santé (FMES) et du Fonds de modernisation des cliniques privées (FMCP). Faut-il craindre une diminution des moyens et conclure que les collectivités locales devront intervenir ?

M. Michel Bouvard a considéré qu'il convenait de réformer le mécanisme du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC) : les dépenses de soutien à l'emploi doivent être consolidées au sein du budget général. Il a ensuite interrogé le Rapporteur sur les perspectives d'évolution financière du fonds, à la fin de cette année.

M. Alain Joyandet a demandé des précisions sur les conditions d'utilisation des enveloppes déconcentrées vers les ARH et sur le rôle de Fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux (FIMHO).

M. Xavier Bertrand a souhaité connaître l'impact financier du mécanisme d'incitation à la cessation d'activité des médecins libéraux (MICA), tel qu'il résulte de l'article 28 du projet.

Le Président Pierre Méhaignerie a enfin interrogé le Rapporteur sur la portée de la réforme de la tarification globale des hôpitaux et sur les risques d'inégalité entre les établissements qui pourraient en résulter.

Votre Rapporteur pour avis a apporté les réponses suivantes :

- l'aide médicale, comme la CMU, sont hors du champ des lois de financement de la sécurité sociale. Ceci est tout à fait regrettable : les dépenses en cause sont de même nature que celles qui figurent dans le projet ;

- le système du tiers payant facilite sans doute les consommations médicales, mais il est difficile de prendre la mesure exacte du phénomène ;

- le maintien des allégements de cotisations sociales liés aux 35 heures est nécessaire. Celles-ci ont conduit à des hausses du coût de la main d'œuvre qui ne pourront être qu'amplifiées par l'alignement des SMIC horaires. Le maintien des aides est donc vital pour les entreprises. Il est indispensable de stimuler l'emploi en allégeant leurs charges ;

- la fusion du FMES et du FMCP n'a rien à voir avec le Fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux (FIMHO), lequel est financé sur crédits d'État ;

- la fongibilité des moyens des fonds de modernisation des hôpitaux et des cliniques n'implique en rien une réduction de l'accompagnement financier de la modernisation des établissements de santé ;

- la budgétisation du FOREC constituerait un bouleversement qui n'est pas à l'ordre du jour pour l'instant ; les comptes du FOREC, dont les dépenses atteignent quelque 15,55 milliards d'euros, devant être encore équilibrés cette année ;

- le MICA a permis d'anticiper la fin de l'activité clinique de 4.000 médecins libéraux. Le Gouvernement souhaite clore l'entrée dans ce dispositif à partir du 1er juillet 2003. Le chiffrage du dispositif n'est actuellement pas établi, et il n'est pas impossible que soient présentés des amendements prolongeant le mécanisme.

Votre Commission a ensuite abordé l'examen des amendements.

Article additionnel après l'article 1er :

Votre Commission a examiné un amendement de votre Rapporteur proposant le dépôt d'un rapport sur l'impact financier à terme de l'indemnisation des victimes de l'amiante, rapport qui complèterait celui relatif à la de gestion du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante. Votre Rapporteur pour avis a indiqué que les dommages de l'utilisation de l'amiante ne sont en effet pas seulement graves pour les victimes, mais aussi pour l'évolution des comptes sociaux. Il importe que le Parlement soit éclairé sur le coût pour la société, lors des vingt prochaines années, de ceux-ci.

Votre Commission a adopté l'amendement.

Article additionnel après l'article 46 :

M. Pierre Albertini a présenté un amendement de M. Charles de Courson tendant à exclure les effectifs de chômeurs de la base de calcul de la compensation entre les régimes de retraite, afin que la solidarité entre les régimes soit équitable. On ne peut, en effet, comparer les efforts des cotisants des régimes de retraites des fonctionnaires, des agriculteurs ou des commerçants avec ceux fournis, au sein du régime général, par les salariés. Des réformes structurelles sont attendues depuis longtemps. L'amendement est fondé sur le corollaire indispensable de la solidarité : le principe de responsabilité.

Votre Rapporteur pour avis a considéré que les règles de compensation relevaient du domaine réglementaire, ce dont M. Pierre Albertini a convenu, et que, sur le fond, il n'était pas illégitime d'inclure les demandeurs d'emplois dans la base de calcul des compensations dans la mesure où leurs cotisations sont payées par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), même si les régimes spéciaux demeurent plus favorables. En tout état de cause, les déficits de l'assurance vieillesse ne sont pas encore apparus, la branche présentant un excédent.

Le Président Pierre Méhaignerie a souligné que ces transferts suscitaient une forte incompréhension de la part de l'opinion publique et qu'il serait nécessaire de l'expliquer au mieux. Il a ensuite demandé au Rapporteur si les départs à la retraite à 50-55 ans étaient neutralisés dans les mécanismes de compensation.

Après que votre Rapporteur pour avis a précisé que la prise en compte de ces âges de la retraite n'était pas intégrale mais tenait compte d'une situation moyenne fictive, la Commission a rejeté l'amendement.

Puis votre Commission a donné un avis favorable à l'adoption de ce projet de loi.

Laisser cette page blanche sans numérotation.

AMENDEMENT ADOPTÉ PAR LA COMMISSION

Après l'article 1er

Amendement n° 3 présenté par M. François Goulard, Rapporteur pour avis

Insérer l'article suivant :

« Le Gouvernement déposera, avant le 15 octobre 2003, un rapport présentant l'impact financier de l'indemnisation des victimes de l'amiante pour l'année en cours et les vingt années suivantes. »

A N N E X E

PRINCIPAUX SIGLES UTILISÉS

ACOSS Agence centrale des organismes de sécurité sociale

AGIRC Association générale des institutions de retraite des cadres

ARRCO Association des régimes de retraite complémentaire

BAPSA Budget annexe des prestations sociales agricoles

CADES Caisse d'amortissement de la dette sociale

CANAM Caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés non agricoles

CANCAVA Caisse autonome nationale de compensation de l'assurance vieillesse artisanale

CMU Couverture maladie universelle

CNAF Caisse nationale des allocations familiales

CNAM Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés

CNAV Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés

CNRACL Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales

CRDS Contribution pour le remboursement de la dette sociale

CSB Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés

CSG Contribution sociale généralisée

C3S Contribution sociale de solidarité des sociétés

FOREC Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale

FSV Fonds de solidarité vieillesse

LFSS Loi de financement de la sécurité sociale

MEDEF Mouvement des entreprises de France

MSA Mutualité sociale agricole

ONDAM Objectif national de dépenses d'assurance maladie

ORGANIC Organisation autonome nationale de l'industrie et du commerce

PIB Produit intérieur brut

RMI Revenu minimum d'insertion

RMO Référence médicale opposable

SMIC Salaire minimum de croissance

TGAP Taxe générale sur les activités polluantes

TVA Taxe sur la valeur ajoutée

UNEDIC Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce

URSSAF Union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales

Avis n° 327 de M. François Goulard sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003.

1 () L'allocation de présence parentale, créée par la loi de financement pour 2001, n'a finalement concerné que 1.665 familles au lieu des 13.000 attendues.

2 () Les quelque 25 prestations légales représentent 15.000 règles de droit. Les caisses doivent traiter, du fait de leur existence, 70 millions de pièces justificatives et la réduction du temps de travail ne facilite pas leur gestion. Les dépenses de gestion administrative ne cessent alors d'augmenter : + 4,7 % en 2001, + 10,4 % en 2002, + 4,6 % en 2003.

3 () Les jeunes prolongent leur formation initiale, accèdent plus tardivement à des emplois stables, d'ailleurs souvent faiblement rémunérés, et obtiennent difficilement des logements sans l'aide de leurs parents. Un rapport du Conseil économique et social, présenté par M. Hubert Blin, en mars 2001, a montré qu'ils devaient être au centre de toute réflexion sur l'avenir de la politique familiale.

4 () Au titre de 2000, 2,17 millions de foyers ont déclaré des dépenses liées à l'emploi d'un salarié à domicile, contre 1,82 million en 1997, alors que le secteur constitue un réel gisement d'emplois. La demande des familles est forte et va dans le sens de l'emploi. Le développement de l'accueil collectif des enfants ne saurait se substituer aux emplois familiaux, notamment en zone rurale.

5 () Le fonds est principalement financé par un prélèvement sur les cotisations d'allocations familiales et le produit de l'écrêtement des fonds de roulement.


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