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le 27 janvier 2003

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N° 561

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 janvier 2003.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES SUR LA PROPOSITION DE LOI (n° 137) de M. Jean-Luc PRÉEL et plusieurs de ses collègues, relative à la création d'un ordre national de la profession d'infirmier et d'infirmière,

PAR M. Jean-Luc PRÉEL,

Député.

--

Professions de santé.

.

INTRODUCTION 5

I.- LA NÉCESSITÉ DE DOTER LA PROFESSION INFIRMIÈRE D'UN ORDRE NATIONAL 7

A. UNE REVENDICATION LÉGITIME POUR UNE PROFESSION EN MAL DE RECONNAISSANCE 7

B. UN BESOIN DEVENU URGENT 8

C. DES DISPOSITIONS DE LA LOI RELATIVE AUX DROITS DES MALADES INSATISAISANTES 8

D.- UNE STRUCTURE PROFESSIONNELLE QUI DEVRA S'INSCRIRE DANS UNE ORGANISATION RÉGIONALE ET DÉMOCRATIQUE DU SYSTÈME DE SANTÉ 9

II.- ANALYSE DES ARTICLES 11

Article 1er (Titre IV du livre III de la quatrième partie du code de la santé publique) : Abrogation des dispositions relatives au Conseil national des professions paramédicales issues de la loi relative aux droits des malades 11

Article 2 (article L. 4127-1 du code de la santé publique) : Création d'un code de déontologie de la profession de sage-femme et d'infirmier ou d'infirmière 12

Article 3 (article L. 4311-15 du code de la santé publique) : Inscription au tableau de l'ordre 12

Article 4 (articles L. 4311-16 à L. 4311-29 du code de la santé publique) : Abrogation des dispositions relatives à l'inscription obligatoire sur une liste dressée par le représentant de l'Etat 12

Article 5 (Chapitre II du titre Ier du livre III du code de la santé publique) : Création de l'ordre national des infirmières et des infirmiers 13

Article 6 (articles L. 4314-1 et L. 4314-2 du code de la santé publique) : Exercice illégal de la profession et dispositions pénales 22

TRAVAUX DE LA COMMISSION 23

INTRODUCTION

La création d'un ordre national des infirmières et des infirmiers est à l'étude depuis de nombreuses années, tant au sein de la profession que du Parlement. Il faut donc se féliciter que le groupe UDF ait choisi, pour la séance réservée à un ordre du jour d'initiative parlementaire, la proposition de M. Jean-Luc Préel relative à la création d'un ordre national de la profession infirmière.

Dès 1989, une association regroupant de nombreuses organisations représentant les infirmières et les infirmiers fut créée avec l'ambition de favoriser l'institution d'un tel ordre pour assurer la promotion de la profession. Un collectif de ces associations et de certains syndicats fut ensuite constitué pour faire, dans ce but, des propositions concrètes, à l'occasion de trois conférences de consensus en avril, mai et octobre 1997.

A l'Assemblée nationale, le sujet a fait l'objet de plusieurs propositions de loi. Sous la Xème législature, cinq propositions de loi sur ce sujet ont été déposées. Sous la précédente législature, deux propositions de loi de M. Pierre Micaux et de M. Bernard Accoyer (n° 967 et n° 343) portant création d'un ordre national de la profession ont été discutées conjointement mais n'ont pas été adoptées, l'Assemblée nationale ayant voté contre le passage à la discussion des articles le 19 juin 1998.

L'objet de cette proposition de loi est donc de créer un ordre national, auquel tous les infirmières et infirmiers adhéreraient de manière obligatoire, qu'ils appartiennent au secteur hospitalier, public ou privé, ou au secteur libéral, dans le but de rassembler la profession et de la responsabiliser dans son exercice.

La création d'un tel ordre professionnel permettrait, d'une part, de reconnaître et de renforcer le statut de ces auxiliaires de santé, dont les qualités de travail et le rôle humain ont pris une place centrale dans notre système de soins et font l'objet d'une considération et d'un attachement unanimes et d'autre part, de mettre en place une déontologie de la profession.

I.- LA NÉCESSITÉ DE DOTER LA PROFESSION INFIRMIÈRE
D'UN ORDRE NATIONAL

A. UNE REVENDICATION LÉGITIME POUR UNE PROFESSION EN MAL DE RECONNAISSANCE

La profession infirmière est numériquement la plus importante des professions de santé puisqu'elle compte près de 450 000 membres (pour 150 000 médecins et 45 000 masseurs-kinésithérapeutes), 17 % (52 700) exerçant à titre libéral. La profession de santé la plus importante en effectifs est pourtant dépourvue d'un ordre national à l'inverse des médecins, des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes.

La loi n° 95-116 du 4 février 1995 a créé un ordre pour les masseurs-kinésithérapeutes et un ordre pour les pédicures-podologues mais les décrets d'application nécessaires n'ont pas été pris. Ces ordres ont été supprimés par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades. Au sein de l'Union européenne existent des ordres de la profession infirmière dans de nombreux pays tels que le Danemark, l'Espagne, l'Irlande, l'Italie et le Royaume-Uni.

L'absence d'organe fédérateur de la profession conduit à l'éclatement de sa représentation, partagée entre plus de 150 associations et syndicats professionnels. Cependant la représentativité de ces organisations est très faible puisque seuls 4 % des infirmières et des infirmiers adhèrent à une confédération syndicale et 8 % à une association professionnelle. Les pouvoirs publics ne disposent donc pas d'un interlocuteur unique qui puisse représenter l'ensemble de la profession

Cette situation est dommageable également au niveau européen et international. La France est ainsi sous-représentée au Conseil international des infirmières (CII) où elle occupe, en termes d'affiliés, la trente-septième place sur les cent douze pays membres du Conseil, alors que l'importance numérique de la profession, si sa représentation était unifiée au sein d'un ordre, devrait en faire la première section nationale.

Pour ces raisons, un collectif réunissant trente-deux organisations et syndicats de la profession s'est formé en 1993 en faveur de la création d'un ordre de la profession infirmière et a adopté à cette fin des recommandations concrètes, dont la plupart ont inspiré la présente proposition de loi. Cependant, il faut reconnaître qu'il n'y a pas unanimité de la profession. Déjà, en 1994, le rapport Garbé de la Direction générale de la santé indiquait que 70 % des organisations d'infirmières étaient favorables à une structure professionnelle para-ordinale. Depuis, plusieurs enquêtes réalisées auprès des infirmières montrent que 65 % à 80 % de celles-ci sont favorables à une structure à cotisation obligatoire.

B. UN BESOIN DEVENU URGENT

Plusieurs circonstances accroissent l'urgence de la création d'un ordre national des infirmières et des infirmiers au premier rang desquelles l'évolution démographique de notre société et le souhait croissant, au sein de la population âgée et dépendante, de recevoir des soins à domicile ou dans des maisons de retraite médicalisées.

L'évolution des techniques médicales (génie génétique, soins palliatifs, lutte contre la douleur...) augmente encore les responsabilités des infirmières et infirmiers et l'exigence d'une formation adéquate de qualité.

Plus que jamais s'affirme ainsi la nécessité de définir et de respecter des principes déontologiques, propres à la profession et non pas calqués sur ceux des médecins, afin de garantir une qualité et une sécurité optimale des soins, au bénéfice de l'image de la profession auprès des patients.

Il faut signaler que le Conseil d'Etat, a souhaité dans ses " Réflexions sur le droit de la santé " figurant dans son rapport public de 1998, la mise en place des commissions régionales de discipline des infirmières et des infirmiers créées par la loi n° 80-527 du 12 juillet 1980, mais dont les décrets d'application n'ont jamais été pris. La haute juridiction estime que cette " anomalie " doit être supprimée dans les meilleurs délais. Elle note que : " Cette situation est d'autant plus critiquable que, comme dans toute profession, la réputation de celle-ci est parfois ternie par des actes contraires aux principes déontologiques commis par quelques-uns. Il lui serait donc très profitable de pouvoir les réprimer. "

Par ailleurs, les contraintes de la maîtrise médicalisée des dépenses rendent également nécessaire l'organisation de la profession autour d'un ordre afin qu'elle puisse, en particulier, être associée activement à l'élaboration des textes, réglementant son exercice, et à la définition de la tarification des actes infirmiers, pour que ceux-ci correspondent davantage à la nouvelle réalité des soins prodigués, à la démographie ainsi qu'à la formation initiale et continue de la profession.

C. DES DISPOSITIONS DE LA LOI RELATIVE AUX DROITS DES MALADES INSATISAISANTES

Un ordre professionnel joue un rôle irremplaçable de représentation et de rassemblement d'une profession tout en prenant des initiatives dans le domaine de la déontologie et de la discipline professionnelle. La volonté d'autres professions médicales, comme les masseurs-kinésithérapeutes ou les pédicures-podologues, de s'organiser dans un ordre professionnel a pu être consacrée par la loi du 4 février 1995 portant diverses dispositions d'ordre social, mais leurs ordres ont été supprimés par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Les textes d'application n'avaient cependant jamais été pris.

Cette loi a en effet réuni les professions d'infirmier, de masseur-kinésithérapeute, de pédicure-podologue, d'orthophoniste et d'orthopédiste dans un même conseil. Or, le caractère interprofessionnel de ce conseil l'empêche de prendre en compte les problèmes spécifiques de chacune des professions concernées, et en particulier ceux des infirmiers et infirmières. En outre, il ne concerne que les professionnels exerçant une activité libérale. Les décrets d'application de cette disposition n'ont d'ailleurs pas été pris par le précédent gouvernement.

La présente proposition de loi abroge les dispositions relatives au conseil des professions d'infirmier, masseur-kinésithérapeute, pédicure-podologue, orthophoniste et orthoptiste. Pour assurer la cohérence du dispositif, elle doit donc être jointe à deux autres propositions de loi, l'une relative à la création d'un ordre des masseurs-kinésithérapeutes et l'autre relative à la création d'un ordre des pédicures-podologues.

D. UNE STRUCTURE PROFESSIONNELLE QUI DEVRA S'INSCRIRE DANS UNE ORGANISATION RÉGIONALE ET DÉMOCRATIQUE DU SYSTÈME DE SANTÉ

L'auteur et rapporteur de la proposition de loi tient à insister sur la nécessité d'inscrire le nouvel ordre infirmier dans une nouvelle organisation régionale du système de soins.

Cette structure régionale comprendrait trois niveaux.

Au premier niveau, les ordres professionnels de chacune des professions médicales et des professions paramédicales sont chargés de la gestion et de la déontologie de la profession.

Il est souhaitable que le fonctionnement des ordres soit le plus démocratique possible. Ainsi, la présente proposition de loi prévoit des élections à l'échelon départemental, régional et national. Ces élections se faisant par collèges pour permettre la représentation de tous les modes d'exercice de la profession d'infirmier. Le cumul des mandats n'est pas autorisé. Le renouvellement s'effectue par tiers.

Les missions de ce nouvel ordre infirmier telles que définies par la présente proposition de loi sont larges. On retrouve bien sûr les compétences traditionnelles : maintien des principes de moralité, respect des devoirs professionnels, et des règles éthiques et déontologiques, gestion des conflits par la profession, avec possibilité d'appel. Mais cette proposition innove en prévoyant que l'ordre est l'interlocuteur du ministère pour les orientations de la santé publique, la préparation et l'actualisation du code de déontologie, les projets de réglementation de la profession, les actions de formation initiale et continue avec la nécessité de définir un label de qualité, valider et enregistrer les diplômes, gérer une banque de données statistiques en matière d'emploi.

Au deuxième niveau, les syndicats défendent quant à eux les intérêts matériels et moraux des professionnels.

Enfin, au niveau régional serait créé un Conseil régional de la santé regroupant l'ensemble des professions élues par collèges. Y seraient intégrées les unions régionales des médecins libéraux (URML). Seraient mises en place et incluses dans le Conseil régional des Unions régionales des professions paramédicales.

II.- ANALYSE DES ARTICLES

Article 1er

(Titre IX du livre III de la quatrième partie du code de la santé publique)

Abrogation des dispositions relatives au Conseil national des professions paramédicales issues de la loi relative aux droits des malades

Cet article abroge le titre IX du livre III de la quatrième partie du code de la santé publique créé par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades.

Ce titre IX institue un conseil des professions paramédicales. Les professions concernées sont les infirmières, les masseurs-kinésithérapeutes, les pédicures-podologues, les orthophonistes et les orthoptistes. Tout professionnel exerçant à titre libéral doit s'inscrire obligatoirement au tableau tenu par le conseil et payer une cotisation.

Les missions du conseil sont larges : qualification des professionnels, respect de la déontologie, information et protection des professionnels, amélioration de la gestion du système de santé.

Le conseil est composé au niveau régional de collèges professionnels, d'une assemblée interprofessionnelle et d'une chambre disciplinaire de première instance. Il comporte, au niveau national, une assemblée interprofessionnelle, des collèges professionnels et une chambre disciplinaire d'appel.

Les décrets d'application de ces dispositions n'ont pas été pris sous le précédent gouvernement.

Le caractère interprofessionnel de ce conseil est voué à l'échec. De plus, les professionnels concernés sont ceux exerçant à titre libéral. Cette structure est en quelque sorte hybride : à la fois syndicat et ordre professionnel.

La création d'un ordre professionnel voue le conseil à l'échec. De plus, les professionnels concernés sont uniquement ceux exerçant à titre libéral.

Enfin, cette structure dans cette mission est hybride : à la fois syndicat et ordre professionnel. La création d'un ordre professionnel des infirmiers permettrait au contraire des syndicats infirmiers de tenir leur place. En aucun cas, il ne faut mêler les missions de syndicats et celles d'un ordre professionnel.

Article 2

(article L. 4127-1 du code de la santé publique)

Création d'un code de déontologie de la profession de sage-femme

et d'infirmier ou d'infirmière

Cet article institue un code de déontologie pour les sages-femmes et infirmiers. Le code de déontologie est en effet la conséquence logique de la création d'un ordre professionnel dont la mission principale est de veiller au respect de la déontologie par tout professionnel.

Article 3

(article L. 4311-15 du code de la santé publique)

Inscription au tableau de l'ordre

Cet article propose une nouvelle rédaction de l'article L. 4311-15 du code de la santé publique prévoyant que tout infirmier ne peut exercer sa profession que s'il est inscrit sur une liste dressée par le directeur des affaires sanitaires et sociales dans le département de sa résidence professionnelle. L'inscription mentionne la catégorie professionnelle dans laquelle l'infirmier exerce : infirmier libéral, infirmier salarié du secteur privé, infirmier de secteur psychiatrique.

Les infirmières ou infirmiers exerçant à titre libéral devront s'inscrire par ailleurs au tableau du conseil des professions paramédicales institué par la loi relative aux droits des malades, conseil supprimé à l'article 1er de la présente proposition de loi.

La nouvelle rédaction de cet article précise donc qu'un infirmier ne peut exercer sa profession que s'il est inscrit au tableau de l'ordre des infirmiers.

Ainsi, outre la condition de diplôme, de certificat ou d'autre titre, l'exercice de la profession est subordonné à l'inscription au tableau, lequel, ainsi que le prévoit le paragraphe III de l'article 3 de la présente proposition, est tenu à jour par le conseil départemental de l'ordre.

Article 4

(articles L. 4311-16 à L. 4311-29 du code de la santé publique)

Abrogation des dispositions relatives à l'inscription obligatoire

sur une liste dressée par le représentant de l'Etat

Cet article supprime les articles réglementant l'actuelle inscription obligatoire des infirmiers sur une liste dressée par le représentant de l'Etat :

- article L. 4311-16  du code de la santé publique : refus de l'inscription par le représentant de l'Etat en cas d'interdiction temporaire ou définitive d'exercer.

- article L. 4311-17 : nécessité d'une connaissance suffisante de la langue française ;

- article L. 4311-18 : refus d'inscription en cas d'infirmité.

- article L. 4311-19 et 4311-20 : modification de la catégorie professionnelle d'inscription ;

- article L. 4311-21 : radiation d'office ;

- article L. 4311-22 : exercice de la profession par un infirmier ou infirmière ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne ;

- article L. 4311-23 : port de l'insigne ;

- articles L. 4311-24 à L. 4311-29 : licenciement, révocation ou suspension d'activité.

Article 5

(Chapitre II du titre Ier du livre III du code de la santé publique)

Création de l'ordre national des infirmières et des infirmiers

Paragraphe I

(titre du chapitre II du titre Ier du livre II)

Ce paragraphe a simplement pour objet de modifier le titre du chapitre II du titre Ier du livre IV du code de la santé publique, pour substituer au titre de : " Règles d'exercice de la profession (infirmière) et dispositions pénales " celui d' : " Organisation de la profession et règles professionnelles", en relation avec les nouveaux articles de ce chapitre prévus par les deux paragraphes suivants.

Paragraphe II

(article L. 4312-1 du code de la santé publique)

Ce paragraphe supprime l'article L. 4312-1 disposant que tout infirmier doit respecter les règles professionnelles fixées par décret en Conseil d'Etat, après avis de la commission des infirmiers du Conseil supérieur des professions paramédicales.

Paragraphe III

(articles L. 4312-1 à L. 4312-11 du code de la santé publique)

Ce paragraphe décrit précisément les missions et l'organisation de l'ordre national des infirmières et des infirmiers (ONII) en insérant trois sections au sein du chapitre II du titre Ier du livre III de la quatrième partie du code précité.

Section 1

Ordre national des infirmiers et des infirmières

(article L. 4312-1 du code de la santé publique)

Création de l'ordre

L'ONII, officiellement créé par cet article, a pour vocation de rassembler de manière obligatoire l'ensemble de la profession infirmière. Une dérogation est cependant prévue pour les infirmières et infirmiers du service de santé des armées.

(article L. 4312-2 nouveau du code de la santé publique)

Missions de l'ordre

Ce nouvel article propose de confier une large gamme de missions à l'ONII qui dépassent, pour la plupart, le champ de compétence traditionnel des ordres professionnels existant pour certaines professions de la santé, sur le modèle espagnol.

Au rang des compétences qui sont traditionnellement confiées à ces ordres peuvent être rangés le maintien des principes de moralité, de probité et de dévouement ; le respect des devoirs professionnels et des règles déontologiques (premier alinéa) ; la défense de l'honneur et de l'indépendance de la profession (deuxième alinéa) et le pouvoir de créer des oeuvres d'entraide et de retraite au bénéfice des membres de l'ordre et de leurs ayants droit (quinzième alinéa).

Les autres missions, confiées à l'ordre, ont un caractère plus novateur. Elles relèvent :

·  d'une fonction de consultation sur les orientations de politique de santé (troisième alinéa), sur les projets de réglementation concernant l'exercice de la profession (cinquième alinéa) et sur toutes les nominations d'infirmières et d'infirmiers dans les instances sanitaires régionales et nationales (neuvième alinéa) ;

·  d'une fonction de préparation et d'actualisation du code de déontologie de la profession, édicté après avis du Conseil national de l'ordre des infirmiers et infirmières (CNOII) par décret en Conseil d'Etat, comme le prévoit au paragraphe II l'article L. 478 ;

·  d'une fonction de validation :

- des actions de formation continue, " en fonction de leur valeur scientifique et pédagogique [...], dans le respect des priorités nationales ", pour lesquelles il délivre un " label de qualité " (septième alinéa) ; des diplômes et équivalences nationaux et internationaux (dixième alinéa) et de la conformité déontologique des contrats pouvant lier des infirmiers à leurs employeurs ou à leurs tutelles (onzième alinéa) ;

- et, " en collaboration avec les pouvoirs publics ", des agréments délivrés aux établissements, institutions et organismes de formation initiale et continue des infirmières et des infirmiers (sixième et huitième alinéas).

·  d'une fonction d'information et de suivi des statistiques concernant la profession en faveur de ses membres ou des pouvoirs publics (douzième et treizième alinéas) ;

A l'instar des ordres existant pour d'autres professions de santé, l'ONII exerce l'ensemble de ces missions par l'intermédiaire de conseils départementaux et régionaux ainsi que du CNOII, prévus à la section 3 du présent article (dernier alinéa). Par ailleurs, pour " favoriser l'évolution de la profession ", l'ordre a la possibilité de créer des commissions de travail (quatorzième alinéa), précision qui relèverait sans doute davantage du pouvoir réglementaire.

(article L. 4312-3 nouveau)

Règles communes d'exercice de la profession

Cet article étend aux infirmières les règles communes d'exercice de la profession qui s'appliquent aux médecins, aux chirurgiens-dentistes et aux sages-femmes prévues aux articles L. 4113-1 à 14 :

- enregistrement des diplômes (article L. 4113-1) ;

- liste annuelle départementale (article L. 4113-2) ;

- interdiction d'exercice sous un pseudonyme (article L. 4113-3) ;

- interdiction des consultations dans des locaux commerciaux (article L. 4113-4) ;

- interdiction par une personne ne remplissant pas les conditions d'exercice de la profession de recevoir la totalité ou une quote-part des honoraires d'un professionnel (article L. 4113-5) ;

- interdiction de recevoir des avantages procurés par des entreprises produisant des produits pris en charge par la sécurité sociale (L. 4113-6) ;

- interdiction d'utilisation et de constitution de fichiers commerciaux à partir de données issues de prescriptions médicales (article L. 4113-7) ;

- interdiction de percevoir des intérêts ou ristournes proportionnels au nombre de médicaments ou d'appareils médicaux (article L. 4113-8) ;

- transmission par les professionnels au conseil départemental de l'ordre des contrats ayant pour objet l'exercice de leur profession (articles L. 4113-9 à 12) ;

- déclaration des professionnels ayant des liens avec des entreprises produisant ou exploitant des produits de santé (article L. 4113-13) ;

- suspension immédiate du droit d'exercer pour une durée maximale de cinq mois par le représentant de l'Etat lorsque l'exercice par un professionnel expose « ses patients à un danger grave » (article L. 4113-14).

Section 2

Inscription au tableau de l'ordre

(article L. 4312-4 nouveau du code de la santé publique)

Dans cette section est inséré un article nouveau L. 4312-4. Il s'agit bien de l'article L. 4312-4 et non pas de l'article L. 431-1-4 tel qu'indiqué dans la proposition de loi à la suite d'une erreur matérielle.

Cet article renvoie aux dispositions applicables à l'inscription au tableau de l'ordre des médecins, prévues aux articles L. 4112-1 à L. 4112-7 du code de la santé publique, les règles pour l'inscription au tableau de l'ordre des infirmières et des infirmiers. Le tableau est donc établi et tenu à jour par le conseil départemental de l'ordre. Déposé à la préfecture et au parquet tu tribunal, il fait l'objet d'une publicité annuelle ; il enregistre l'inscription des professionnels ayant leur résidence professionnelle dans le département concerné, après examen de toute demande adressée au conseil départemental de l'ordre, qui statut dans un délai maximum de trois mois, sauf lorsque l'exigence de moralité ou d'indépendance nécessite, pour les ressortissants des pays membres de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen, une recherche d'information auprès de l'Etat concerné.

Les décisions d'inscription ou de rejet peuvent faire l'objet d'une procédure d'appel devant le conseil régional de l'ordre par le demandeur ou le Conseil national dans un délai de trente jours. C'est enfin l'inscription au tableau qui rend licite l'exercice de la profession sur tout le territoire français, tout changement de résidence professionnelle devant faire l'objet d'une demande de réinscription au tableau de l'ordre du département concerné.

Section 3

Conseils de l'ordre des infirmières et des infirmiers

(article L. 4312-5 nouveau du code de la santé publique)

Applicabilité des articles L. 4125-1 à L. 4125-1 et L. 4126-1 à L. 4126-7 du code de la santé publique à la profession infirmière

Cet article a pour objet d'étendre à la profession infirmière les dispositions communes à l'organisation des professions de médecin, de chirurgien-dentiste et de sage-femme, prévues au chapitre V du titre premier du livre IV du code de la santé publique, ces dispositions étant également applicables, par renvoi, aux masseurs-kinésithérapeutes et aux pédicures-podologues.

Outre la personnalité civile dont est dotée l'ordre (article L. 4125-1), les articles L. 4125-1 à L. 4125-4 visés prévoient :

·  un régime d'incompatibilité entre les fonctions de président ou de trésorier de l'ordre et une fonction syndicale correspondante quelconque (article L. 4125-2) ;

·  un dispositif de peines disciplinaires, allant du simple avertissement à la radiation du tableau de l'ordre, pouvant être prononcées par le conseil régional de l'ordre à l'encontre d'une infirmière ou d'un infirmier condamné par une juridiction pénale pour tout autre fait qu'un crime ou délit politique (article L. 4126-6) ;

·  la démission d'office de tout conseiller, départemental, régional ou national, de l'ordre qui n'aurait pas siégé pendant trois séances consécutives de son conseil (article L. 4125-3) ;

·  un régime de transmission obligatoire par les infirmières et infirmiers, au conseil départemental de l'ordre dont ils relèvent, des contrats et avenants ayant pour objet l'exercice de leur profession ou l'utilisation dans ce même but d'un matériel ou d'un local dont ils ne sont pas propriétaires (articles L. 4125-3) ;

·  un calendrier précis pour l'élection de nouveaux conseils départementaux ou régionaux et pour la désignation de leurs représentants au sein du Conseil national en cas de modification de leur ressort territorial.

Paragraphe 1er

Conseils départementaux

(articles L. 4312-6 et L. 4312-7 nouveaux du code de la santé publique)

Rôle et composition des conseils départementaux

de l'Ordre des infirmières et des infirmiers

Le premier alinéa de cet article prévoit la création de conseils départementaux de l'ordre des infirmières et des infirmiers dont les compétences sont identiques à celles qu'exercent les conseils départementaux de l'ordre des médecins, prévues par les articles L. 394 et L. 395 du code de la santé publique. Ces conseils départementaux exercent donc les attributions générales de l'ordre telles que décrites à l'article L. 479-1 précédent, à l'exception de tout pouvoir disciplinaire. Les plaintes qui peuvent être déposées devant eux devront en effet être transmises au conseil régional de l'ordre compétent, avec avis motivé. Les conseils départementaux sont également compétents pour statuer sur les inscriptions au tableau de l'ordre, pour autoriser leur président à ester en justice, à gérer les biens et les ressources du Conseil et pour créer entre eux, sous le contrôle du CNOII, des organismes de coordination.

Les deuxième et troisième alinéas déterminent la composition de chaque conseil départemental dont le nombre est fixé, comme pour les médecins, par voie réglementaire, en fonction du nombre total d'infirmières et d'infirmiers inscrits dans le département. Chaque conseil doit par ailleurs être composé de quatre collèges représentant, en fonction de leur importance numérique, les cadres infirmiers, les infirmiers spécialisés, les autres infirmiers salariés et les infirmiers libéraux.

Le quatrième alinéa fixe à six ans le mandat des membres des conseils départementaux renouvelables par tiers tous les deux ans, à l'instar des médecins, des masseurs-kinésithérapeutes et des pédicures-podologues.

Le même alinéa prévoit par ailleurs l'applicabilité des mêmes règles que celles qui sont fixées pour les conseils départementaux des médecins, à l'exception de la condition de nationalité posée à l'éligibilité de ces derniers, concernant :

- l'élection et le remplacement des membres et des suppléants des conseils et de leur président ;

- le régime applicable en cas de non-fonctionnement d'un conseil ou de démission de la majorité de ses membres et le régime de publicité et de contestation des élections ;

- les attributions des conseils départementaux précédemment décrites, qui correspondent aux missions générales de l'ordre à l'exception de tout pouvoir disciplinaire ;

- le pouvoir de représentation de l'ordre confié à son président dans tous les actes de la vie civile et le pouvoir de délégation qui lui est reconnu ;

- le régime des délibérations des conseils, lesquelles ne sont pas publiques, et la participation, avec voix consultative, du directeur départemental de la santé - formulation au demeurant obsolète qu'il convient de corriger par celle de directeur départemental.

Le dispositif prévoit par ailleurs que l'ensemble de ces règles seront applicables aux infirmières et infirmiers par décret en Conseil d'Etat après avis du CNOII. Il ne s'agit donc pas d'une application systématique et identique des règles existant pour les médecins.

(article L. 4312-7 nouveau du code de la santé publique)

Réunions communes avec les conseils départementaux des médecins

Le présent article prévoit la possibilité, pour les conseils départementaux de l'ordre des infirmières et des infirmiers, de tenir des réunions communes avec les conseils départementaux des médecins sous la présidence des présidents de ces derniers. La nature législative d'une telle disposition peut être discutée. Cependant, il convient de noter que l'article L. 491-3 du code de la santé publique prévoit la même possibilité pour les conseils départementaux de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes.

Paragraphe 2

Conseils régionaux

(article L. 4312-8 nouveau du code de la santé publique)

Rôle et composition des conseils régionaux

de l'ordre des infirmières et des infirmiers

A l'instar des conseils départementaux, les conseils régionaux de l'ordre des infirmières et des infirmiers exercent, selon le premier alinéa, les mêmes compétences que les conseils régionaux des médecins. Ils examinent donc les plaintes de nature disciplinaire, qui leur sont transmises par les conseils départementaux (article L. 4123-2 du code de la santé publique). Les décisions qu'ils rendent en la matière peuvent faire l'objet d'un appel devant la section disciplinaire du Conseil national dans un délai de trente jours (article L. 4123-11 du même code).

Le deuxième alinéa fixe à quinze le nombre des membres de chaque conseil régional et celui de ses suppléants. Ces représentants doivent être élus par les infirmières et infirmiers des départements concernés à l'occasion de l'élection des conseils départementaux, dans le respect des règles établies par décret en Conseil d'Etat après avis conforme du CNOII. Ce mode d'élection directe est tout à fait particulier ; les conseils régionaux des médecins sont en effet élus par les conseils départementaux. Un système de double élection serait donc organisé pour que l'ensemble des infirmiers et infirmières inscrits au tableau de l'ordre élisent le même jour leurs représentants au niveau départemental et au niveau régional.

(article L. 4312 -9 du code de la santé publique)

Régime des sanctions disciplinaires et autres mesures

Le présent article rend applicables aux conseils régionaux des infirmières et des infirmiers diverses dispositions applicables aux conseils régionaux des médecins prévues par le code de la santé publique.

·  L'article L. 4124-1 reconnaît la compétence du conseil régional en matière disciplinaire, précise les saisines dont il peut faire l'objet et fixe à dix mois, après le dépôt de la plainte, le délai au terme duquel il doit rendre sa décision.

·  L'article L. 4124-2 autorise le conseil régional à statuer sur des plaintes concernant une personne appartenant à la fonction publique dans l'exercice de ses missions s'il est saisi par le ministre chargé de la santé, le directeur départemental de la santé ou le procureur de la République.

_ L'article L. 4124-3 permet au conseil régional de diligenter des enquêtes sur les faits à l'origine de la plainte.

_ L'article L. 4124-4 prévoit la tenue de registres des délibérations du conseil régional.

_ L'article L. 4124-6 décrit les peines disciplinaires qui peuvent être décidées par le conseil régional, allant du simple avertissement jusqu'à la radiation du tableau de l'ordre.

_ L'article L. 4124-7 précise la composition de la chambre disciplinaire de première instance de l'ordre.

·  L'article L. 4124-8 prévoit la procédure à suivre pour un médecin, un chirurgien ou une sage-femme afin d'être relevé d'une décision de radiation du tableau.

·  Les articles L. 4124-9 à L. 4124-14 décrivent la procédure disciplinaire spécifique appliquée dans certaines collectivités territoriales : Réunion, Guadeloupe, Guyane, Martinique, St-Pierre et Miquelon.

Paragraphe 3

(article L. 4312-10 nouveau du code de la santé publique)

Rôle et composition du Conseil national

de l'ordre des infirmières et des infirmiers

Les premier et deuxième alinéas prévoient la création du Conseil national de l'ordre des infirmiers et des infirmières (CNOII) composé de quarante membres élus pour quatre ans par les conseils régionaux et de personnalités désignées par le ministre chargé de la santé. Il est cependant nécessaire de corriger une erreur de rédaction touchant à la durée de ce mandat qui doit être portée à six ans, comme l'impliquent les conditions de renouvellement des membres élus du Conseil posées par le premier alinéa de l'article. Celui-ci prévoit en effet le renouvellement du Conseil par tiers tous les deux ans, à l'instar des conseils locaux, les membres élus n'étant rééligibles qu'à l'issue d'une période égale à l'interruption du mandat qu'ils ont accompli.

Le troisième alinéa détermine précisément la composition du conseil en attribuant un nombre de représentants fixe à plusieurs catégories d'infirmières et d'infirmiers exerçant :

- dans la fonction publique hospitalière ;

- dans la fonction publique territoriale ;

- dans les administrations centrales de l'Etat ;

- dans l'Education nationale ;

- dans le secteur de la santé du travail ;

- dans le secteur hospitalier privé ;

- dans le secteur libéral ;

- dans des fonctions spécialisées ;

- et dans la direction des services de soins infirmiers.

Le dixième alinéa dispose que les membres ne sont rééligibles qu'après interruption égale à la durée du mandat accompli.

Le dernier alinéa indique enfin que le Conseil national peut tenir des séances communes avec le Conseil national de l'Ordre des médecins pour l'examen de questions intéressant les deux professions, à l'instar de ce qui est prévu précédemment pour des conseils départementaux.

(article L. 4312-11 nouveau du code de la santé publique)

Décret en Conseil d'Etat

Cet article renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de déterminer les conditions de désignation ou d'élection des membres du Conseil, ainsi que ses règles de fonctionnement.

(article L. 4312-12 nouveau du code de la santé publique)

Nature et contrôle des ressources du Conseil national

Cet article crée l'article L. 4312-12. Il s'agit bien de l'article L. 4312-12 et non l'article L. 431-1-12 tel qu'indiqué dans la présente proposition de loi à la suite d'une erreur matérielle.

_ Cet article, en étendant au CNOII, les règles prévues pour le Conseil de l'ordre des médecins par les articles L. 410 et L. 410-1 du code de la santé publique, donne à celui-ci le pouvoir de :

- fixer le montant (unique) de la cotisation obligatoire qui devra être versée par chaque infirmière ou infirmier au conseil départemental dont elle ou il relève ;

- de déterminer la part de cette cotisation qui doit être versée au conseil régional correspondant et au Conseil national lui-même ;

- de gérer les biens de l'ordre et de créer ou subventionner des œuvres d'entraide ;

- de surveiller la gestion des conseils départementaux ;

- de verser à ces derniers une somme afin d'harmoniser leurs charges au plan national.

_ Sont étendues à l'ordre national des infirmiers les règles prévues à :

- à l'article L. 4122-3 qui organise les recours en matière disciplinaire pour les médecins ;

- à l'article L. 4132-6 qui prévoit une commission de contrôle des comptes placées auprès du conseil national ;

- aux articles L. 4152-3, L. 4152-5, L. 4152-6, L. 4152-8 qui édictent les règles d'organisation du Conseil national de l'ordre des sages-femmes (présidence, présence d'un conseiller d'Etat...)

Article 6

(articles L. 4314-1 et L. 4314-2 du code de la santé publique)

Exercice illégal de la profession et dispositions pénales

Cet article, d'une part, définit les cas d'exercice illégal (article L. 4314-1 du code de la santé publique), d'autre part, rend applicable aux infirmiers et infirmières les dispositions pénales prévues pour les professions médicales (article L. 4134-2 du code de la santé publique).

_ L'article L. 4134-1 énumère les cas d'exercice illégal de la profession d'infirmier :

- toute personne pratiquant des soins infirmiers sans remplir les conditions de diplôme ou de titre ;

- toute personne prêtant son concours à des personnes exerçant illégalement la profession d'infirmiers ;

- tout infirmier, membre de la Communauté européenne, qui exécute des actes infirmiers sans remplir les conditions prévues à l'article L. 4172-7 du code précité (déclaration et attestation de l'autorité compétente de l'Etat).

_ L'article L. 4134-2 rend applicables aux infirmiers et infirmières les dispositions pénales prévues par les professions médicales.

L'article L. 4161-5 prévoit une peine d'emprisonnement d'un an et de 15 000 euros d'amende en cas d'exercice illégal (de la profession de médecin, de chirurgien-dentiste ou de sage-femme).

L'article L. 4161-6 prévoit la responsabilité pénale des personnes morales.

Les articles L. 4163-1 à 10 mentionnent toutes les autres dispositions pénales : « avantages versés par des entreprises assurant, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale », « intérêts ou ristournes » proportionnels ou non aux médicaments prescrits, exercice de la profession sous un pseudonyme, fausse déclaration en vue de l'inscription au tableau de l'ordre, utilisation à des fins commerciales des fichiers commerciaux, etc.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Luc Préel, la présente proposition de loi au cours de sa séance du 21 janvier 2003.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler a observé que le discours du rapporteur reprenait des arguments entendus et inchangés depuis des années, alors même que la situation des professions paramédicales a considérablement évoluée. Certes, la reconnaissance de la profession infirmière doit encore progresser afin de donner à ces hommes et à ces femmes toute leur place dans la chaîne de soins. Mais la proposition de loi va à l'encontre de l'évolution profonde des professions paramédicales qui ne souhaitent plus être traitées de façon segmentées et veulent, tout au contraire, être reconnues au sein d'une logique de soins collective. Cette évolution est tout à fait nette sur le terrain et l'on ne peut que s'en féliciter.

C'est ce changement profond dans les revendications des professions paramédicales qui a inspiré la création du conseil supérieur national des professions de santé. Aujourd'hui, le groupe socialiste est donc défavorable à la proposition de loi présentée par M. Jean-Luc Préel. Par contre, il saisira l'opportunité de ce débat pour réclamer la publication des décrets d'application de la loi du 4 mars 2002.

Le président Jean-Michel Dubernard a déclaré partager cette approche pleine de bon sens.

M. Alain Néri a également considéré que la profession infirmière a droit à une pleine et entière reconnaissance et a observé que tel n'est pas l'objectif premier de la proposition de loi, qui vise avant tout à remettre en cause le conseil supérieur national des professions de santé créé par la loi du 4 mars 2002, alors que celui-ci renforce la représentativité et la légitimité des professions concernées.

Plusieurs arguments développés par le rapporteur pour soutenir la proposition de loi ne sont pas recevables. Ainsi, on ne peut pas dire que le conseil supérieur national ne permet pas de traiter les problèmes spécifiques de la profession puisqu'il comprend une section spéciale pour les infirmières. Par ailleurs, l'attribution à cet ordre de compétences en matière de formation n'est pas acceptable. Enfin, le texte est sensé répondre à la demande des infirmiers or ni les professionnels exerçant en libéral ni ceux travaillant en milieu hospitalier ne s'y reconnaissent. Il n'y a donc pas de raison d'adopter un texte qui va à l'encontre des demandes et des évolutions de la profession.

Enfin, il convient peut être de rappeler que les ordres professionnels, créés par le Gouvernement de Vichy, ne sont pas des lieux essentiels du bon fonctionnement de la démocratie.

Le président Jean-Michel Dubernard a rappelé que les propos des précédents ministres de la santé sur les ordres professionnels n'étaient en rien négatifs.

Mme Claude Greff a souligné le souhait de l'ensemble des infirmières, qu'elles soient libérales ou salariées, de pouvoir travailler ensemble dans un objectif interdisciplinaire. La création d'un ordre ne leur apparaît donc pas comme une nécessité contrairement à la reconnaissance de leur profession. Plutôt que l'adoption de nouvelles dispositions, elles demandent donc l'application de ce qui existe déjà, notamment grâce à la parution des décrets d'application de la loi du 4 mars 2002.

Après avoir rappelé qu'elle avait exercé la profession d'infirmière hospitalière jusqu'à son élection comme députée, Mme Maryvonne Briot a indiqué que cherchant à connaître la position de l'ensemble de la profession sur cette proposition de loi elle a pu constater que, contrairement à son attente, les infirmières étaient totalement opposées à la création d'un ordre. Le risque de corporatisme a souvent été évoqué. Le besoin de reconnaissance de la profession est indéniable mais celle-ci a évolué vers l'interdisciplinarité. De plus, qui dit ordre dit paiement d'une cotisation d'adhésion et les infirmières sont extrêmement réticentes à cette dépense alors qu'elles ne voient pas véritablement ce qu'un ordre pourrait leur apporter. L'expérience plutôt négative des sages-femmes en la matière n'est pas très encourageante.

Par contre, la non-application des dispositions en vigueur est un véritable problème. La logique voudrait que le ministère de la santé commence par mettre en œuvre les dispositions de la loi du 4 mars 2002, puis évalue le fonctionnement des institutions avant de vouloir les remplacer par un ordre.

Dans tous les cas le contenu de la proposition de loi ne correspond pas aux attentes et comporte, de plus, des dispositions sur lesquelles on peut être extrêmement réservé comme, par exemple, les compétences accordées à l'ordre en matière de formation et de validation des diplômes. Par contre, la création de conseils départementaux est une bonne idée car cela génèrerait des espaces d'échange nécessaires mais ce n'est sûrement pas la priorité pour le moment. En résumé il semble difficile de vouloir créer un ordre contre le souhait de la profession concernée.

Après avoir indiqué qu'il adhérait aux propos tenus par les trois précédentes intervenantes, M. Simon Renucci a précisé qu'il fallait envisager la question de la création d'un ordre des infirmières en fonction de l'objectif à atteindre. Or, de ce point de vue, force est de constater que la mise en place d'un tel ordre ne s'impose pas résolument. Pour ne prendre qu'un seul exemple, un système de formation performant existe déjà et ne nécessite pas qu'une nouvelle structure s'y consacre. Les infirmières ne sont pas prêtes à cotiser pour un organisme dont elles ont peu à recevoir. Le véritable problème qui se pose à elles est celui de la reconnaissance de leur profession. En ce sens, la création d'un organisme paritaire rassemblant l'ensemble des professions de santé répondrait plus justement à leurs préoccupations.

M. Yves Bur a déclaré que tous les députés, quel que soit le banc sur lequel ils siègent, ont dans le passé soutenu la création d'un ordre spécifique à chacune des professions médicales et para-médicales. Mais, depuis lors, le système de santé a subi de profondes évolutions, notamment avec la loi relative aux droits des malades du 4 mars 2002 créant le conseil des professions paramédicales. S'il est vrai que les infirmières, et particulièrement les infirmières libérales, ont milité, il y dix ans de cela, pour la création d'un ordre, cette attente n'existe plus aujourd'hui. On imagine mal en effet que l'attribution d'un poste en milieu hospitalier soit subordonnée à l'adhésion à un ordre.

Les revendications du monde infirmier sont en réalité de deux ordres : d'une part une meilleure reconnaissance de leurs compétences, qui se sont considérablement accrues du fait des nouvelles techniques médicales, et d'autre part une indispensable revalorisation de carrière compte tenu de leur charge de travail devenue plus lourde. Il serait donc maladroit d'adopter cette proposition de loi. L'urgence est aujourd'hui à la publication des décrets d'application de la loi du 4 mars 2002.

Il serait donc préférable que la commission ne passe pas à l'examen des articles de la proposition, ce qui n'empêchera pas qu'un débat appronfondi ait lieu en séance publique.

En qualité de chirurgien hospitalier, M. Claude Leteurtre a indiqué qu'il avait une perception différente de celle de ses collègues. La création d'un ordre des infirmières répond à une vraie demande et à un réel besoin du monde infirmier. L'aspect financier, c'est-à-dire le versement obligatoire d'une cotisation par chacun des membres de l'ordre, est certes un obstacle à sa constitution. En la matière, il conviendrait de réfléchir à un autre mode de financement.

Le Président Jean-Michel Dubernard a précisé qu'il lui apparaissait impossible qu'un ordre puisse être mis en place sans cotisation de ses membres et que les infirmières qu'il avait interrogées étaient très réservées sur l'opportunité de créer un ordre.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler a ajouté que si certaines infirmières se prononçaient en faveur de la création d'un ordre pour leur profession, c'est qu'elles y voient un moyen de reconnaissance, cette dernière constituant leur seule véritable revendication. C'est pourquoi la question qui se pose aujourd'hui est celle de la date de publication et du contenu des décrets d'application de la loi du 4 mars 2002.

M. Olivier Jardé a déclaré qu'un débat sur la création d'un ordre des infirmières impliquait qu'on évoque le problème de la spécificité de leur travail. La création prochaine d'un tronc commun en première année d'études universitaires pour tous les étudiants aspirant à exercer une profession médicale ou para-médicale risque en effet de stigmatiser cette profession dans la mesure où elle sera alors la seule, dans ce tronc commun, à ne pas être dotée de son propre ordre. Il convient donc de permettre une harmonisation de l'organisation des professions médicales.

Le Président Jean-Michel Dubernard a précisé que cinq professions médicales ou paramédicales étaient actuellement dotées d'un ordre : les médecins, les orthophonistes, les dentistes, les pharmaciens et les sages-femmes. En outre, la mise en place d'un tronc commun à toutes les professions médicales et para-médicales en première année d'études universitaires n'est, à l'heure actuelle, qu'à l'état de projet.

M. Pierre-Christophe Baguet a indiqué que, du point de vue de la cohérence politique, il lui apparaissait difficile de soutenir aujourd'hui la création d'un ordre des infirmières alors que l'ordre des kinésithérapeutes, dont la création avait été votée en 1995, n'a jamais vu le jour. Il a cependant exprimé son accord de principe en faveur de la création d'ordre spécifique à chaque profession de santé estimant une telle organisation préférable au conseil interprofessionnel prévu par la loi du 4 mars 2002.

Le Président Jean-Michel Dubernard a indiqué que les infirmières souhaitent avant tout voir leur profession reconnue, la constitution d'un ordre ne constituant pas une revendication majeure. Cette demande unanime transcende le clivage infirmières libérales/infirmières en milieu hospitalier. Les premières, qui regroupent 15 % des effectifs de la profession, craignent en effet que la création d'un ordre revienne à ajouter un troisième syndicat auprès des deux principaux syndicats qui existent actuellement. Les secondes n'éprouvent tout simplement pas le besoin d'une telle structure : à quoi bon cotiser à un organisme dont elles ne perçoivent pas l'utilité ?

Le rapporteur a indiqué qu'il souhaitait soumettre à la commission trois réflexions : l'infirmière constitue un élément central de notre système de santé ; étant donné le poids démographique important de cette profession, il importe de lui donner une organisation professionnelle à l'échelle nationale, afin que les problèmes éthiques soient mieux pris en compte ; la nécessaire coordination des actions de l'ensemble des intervenants auprès du malade implique la mise en place d'une union professionnelle à l'échelon régional.

M. Pierre-Christophe Baguet a déclaré que, en termes d'affichage, la commission n'avait pas intérêt à ne pas adopter de conclusions sur la présente proposition, dans la mesure où cela serait la deuxième fois consécutive que, dans le cadre de la séance mensuelle réservé à un ordre du jour fixé par l'Assemblée nationale, une proposition de loi émanant de la majorité n'aboutirait pas.

Après voir rappelé que les circonstances sont différentes, M. Yves Bur a estimé que le système actuel des « niches » parlementaires n'est pas satisfaisant.

Le Président Jean-Michel Dubernard a convenu que l'organisation de ces « niches » pourrait être améliorée.

La commission a décidé de suspendre l'examen de la proposition de loi et de ne pas présenter de conclusions.

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561 - Rapport de M. Jean-Luc Préel : commission d'enquête - création d'un ordre national de la profession d'infirmier et d'infirmière,


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