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le 15 décembre 2003

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N° 1268

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 2 décembre 2003.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement français et le Gouvernement macédonien en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune,

PAR M. LOÏC BOUVARD,

Député

--

Voir les numéros :

Sénat : 397 (2001-2002), 122 et T.A. 51 (2002-2003)

Assemblée nationale : 549 rect.

Traités et conventions

SOMMAIRE

___

INTRODUCTION 5

I - SITUATION INTÉRIEURE ET INTERNATIONALE DE
     L'ANCIENNE RÉPUBLIQUE YOUGOSLAVE DE MACÉDOINE
7

A - DES DIFFICULTÉS PERSISTANTES SUR LE PLAN INTÉRIEUR 7

1) Un Etat récent qui a connu des moments difficiles en 2001 7

2) Une situation apaisée mais fragile en raison de la stagnation
    du processus d'Ohrid et d'incidents récurrents
8

B - L'ANCIENNE RÉPUBLIQUE YOUGOSLAVE DE MACÉDOINE
     SUR LA SCÈNE INTERNATIONALE
10

1) L'Ancienne République yougoslave de Macédoine et les
    Organisations internationales
10

2) L'Ancienne République yougoslave de Macédoine
    et l'Union européenne
10

3) L'Ancienne République yougoslave de Macédoine et
    les Etats voisins
11

II - LES RELATIONS BILATÉRALES ENTRE LA FRANCE ET
     L'ANCIENNE RÉPUBLIQUE YOUGOSLAVE DE MACÉDOINE
14

A - LES RELATIONS POLITIQUES BILATÉRALES 14

B - LES RELATIONS COMMERCIALES 14

C - LA COOPÉRATION 14

1) La coopération culturelle, scientifique et technique 14

2) La coopération militaire 15

3) La coopération en matière de sécurité intérieure 16

4) La coopération judiciaire 17

III - LE DISPOSITIF DE LA CONVENTION FISCALE 18

A - LA CONVENTION FISCALE FRANCO-MACÉDONIENNE
S'INSPIRE TRÈS LARGEMENT DU MODÈLE ÉLABORÉ PAR L'OCDE
18

1) Les conventions fiscales et le modèle de l'OCDE 18

2) Les dispositions techniques de la Convention fiscale
    franco-macédonienne
18

B - NOMBRE DE PERSONNES CONCERNÉES PAR L'ENTRÉE
      EN VIGUEUR DE LA CONVENTION
20

CONCLUSION 23

EXAMEN EN COMMISSION 25

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi soumis à votre examen, adopté par le Sénat lors de sa séance du 16 janvier 2003, vise à autoriser l'approbation d'une Convention fiscale liant la France à l'Ancienne République yougoslave de Macédoine.

Ce texte a été signé le 10 février 1999 par MM. Hubert Védrine et Aleksandar Dimitrov, respectivement Ministre des Affaires étrangères du Gouvernement de la République française et du Gouvernement macédonien. Il a pour but d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune.

Aussi, après avoir présenté brièvement l'Ancienne République yougoslave de Macédoine, en particulier sa situation intérieure et internationale, et fait le point sur l'état des relations bilatérales entre cet Etat et la France, votre Rapporteur examinera plus en détail les dispositions techniques de la Convention fiscale.

I - LA SITUATION INTÉRIEURE ET INTERNATIONALE
DE L'ANCIENNE RÉPUBLIQUE YOUGOSLAVE DE MACÉDOINE

A - Des difficultés persistantes sur le plan intérieur

1) Un Etat récent qui a connu des moments difficiles en 2001

Petit Etat enclavé de 25 713 km² et de 2,1 millions d'habitants, l'Ancienne République yougoslave de Macédoine (ARYM) a longtemps été convoitée par ses voisins bulgare, serbe et grec avant de devenir, en 1946, l'une des républiques yougoslaves puis, pour la première fois de son histoire, d'accéder à l'indépendance à l'issue du référendum du 8 septembre 1991.

En effet, historiquement, la Macédoine1 a été successivement incorporée à l'Empire romain, puis à l'Empire byzantin avant d'être intégrée à l'Empire ottoman au XIVème siècle. Elle a reçu sa dénomination de Tito en 1947 et, comme tous les pays des Balkans, est habitée par des populations très diverses : Macédoniens (66 %), Albanais (23 %), Turcs (4,7 %), Roms (2,7 %), Serbes (2,2 %) et Valaques (0,4 %). La présence d'une forte minorité albanaise en Macédoine a, comme votre Rapporteur va le préciser, conféré à la crise du Kosovo un impact considérable sur la situation politique intérieure de l'Ancienne République yougoslave de Macédoine. S'agissant de la religion, les orthodoxes sont majoritaires (65 %) par rapport aux musulmans (33 %) et aux catholiques (1 %).

Sur le plan politique, la Constitution, adoptée le 17 novembre 1991, institue un régime du type « IVème République » : Les pouvoirs du Président sont limités à la politique extérieure (signature des lois et traités, nomination du chef d'état-major des armées, des ambassadeurs, tutelle de l'Agence de renseignement) et il ne peut dissoudre l'unique chambre du Parlement, composée de 120 députés. A la suite des élections législatives du 15 septembre 20022, le Président conservateur Boris Trajkovski (VRMO, nationalistes macédoniens) a confié à M. Branko Crvenkovski (SDSM, sociaux-démocrates) la tâche de former un gouvernement.

L'Ancienne République yougoslave de Macédoine a traversé une grave crise en février 2001 avec l'entrée dans ce petit pays de groupes armés albanais issus d'une nouvelle UCK (l'UCK-M), en provenance du Kosovo, dont l'objectif était de mener une guérilla contre les forces gouvernementales. Les accrochages se sont multipliés autour de Tetovo et de Kumanovo, et la situation s'est rapidement aggravée, entraînant des affrontements violents, une montée extrêmement forte des tensions intérieures, notamment interethniques entre Slaves et Albanais, au point de faire craindre la désintégration de ce pays indépendant depuis à peine dix ans.

La communauté internationale, et surtout l'Union européenne, de concert avec les Etats-Unis, a très rapidement réagi et géré cette crise d'une façon exemplaire. Sur proposition française, le Haut Représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), M. Javier Solana, a nommé, dès la fin du mois de juin, un envoyé spécial en la personne de M. François Léotard, parlementaire en mission, rapidement rejoint par M. James Pardew, l'envoyé spécial des Etats-Unis. Tous deux ont travaillé en très bonne intelligence, à partir notamment des propositions de réforme institutionnelle présentées aux parties par M. Robert Badinter. En octobre 2001, un autre Français, M. Alain Le Roy, a succédé à M. François Léotard.

Le 13 août 2001, les plus hauts responsables macédoniens ont signé les accords d'Ohrid. Ces « accords cadre » posent, de façon consensuelle, les bases d'une profonde réforme du pays, non pas sous la forme d'un partage territorial selon des critères ethniques comme l'auraient souhaité les Albanais, mais selon les trois principes de la décentralisation, de la subsidiarité et de la protection des minorités.

La signature de cet accord a permis le déploiement parallèle, en septembre 2001, de la mission de l'OTAN « Moisson essentielle », chargée de collecter les armes remises volontairement par l'UCKM3. L'opération « Amber fox » lui a ensuite succédé et a permis de protéger les observateurs civils de l'Union européenne et de l'OSCE.

2) Une situation apaisée mais fragile en raison de la stagnation du processus d'Ohrid et d'incidents récurrents

La mise en œuvre du processus d'Ohrid se heurte tout d'abord à l'immobilisme de la classe politique macédonienne. L'essoufflement des réformes s'explique par des raisons techniques (complexité des dossiers, pénurie de ressources humaines et impéritie des ministres DUI) mais aussi par la reprise des querelles politiciennes. En effet l'exécutif est divisé puisque la cohabitation entre le Président Trajkovski (VMRO, nationaliste) et le Premier Ministre Crvenkovski (SDSM, social-démocrate) se tend de plus en plus dans la perspective des élections présidentielles de 2004 qui devraient les voir s'affronter. En outre, la coalition gouvernementale traverse une période de turbulence : face à l'immobilisme du SDSM, le DUI d'Ali Ahmeti se sent floué, d'où un renforcement de la méfiance entre les deux partenaires de la coalition gouvernementale.

La stagnation du processus d'Ohrid est, par ailleurs, favorisée par le marasme de l'économie macédonienne depuis la crise de 2001 qui empêche le gouvernement d'appliquer un programme de réformes et qui contribue rapidement à la paupérisation de la population. En effet, le taux de chômage est supérieur à 30 % (50 % chez les Albanais), la croissance économique est ralentie depuis 2 ans, les récoltes ont été médiocres en 2002, le budget est grevé par l'accroissement des dépenses militaires et le Trésor public a été littéralement asséché par le VMRO, ancien parti au pouvoir, avant son départ dans l'opposition. De surcroît, la faillite des entreprises d'Etat n'a pas réduit l'attrait pour la fonction publique alors que le FMI exige une réduction drastique de celle-ci et que les Albanais revendiquent une meilleure représentation des leurs. Aussi les Slaves se sentent-ils dépossédés par les Albanais des quelques rares emplois publics ouverts au recrutement.

En l'absence de résultats tangibles sur le terrain, la déception croît au sein de la communauté albanaise. Sa frustration fait le jeu des groupes extrémistes armés et est exploitée par le DPA, qui pousse à la surenchère nationaliste. Dans ce contexte, les extrémistes albanais (AKSH) liés aux réseaux mafieux jouent délibérément la déstabilisation du pays. Les incidents violents tendent à se multiplier : fusillade à Aracinovo le 12 juin entre activistes albanais et policiers macédoniens, explosion à Skopje le 23 juin, apparition des « Cobras » dans la vallée de Kumanovo (paramilitaires albanais surarmés cherchant surtout à impressionner), ultimatum lancé par l'AKSH aux autorités macédoniennes le 1er septembre pour qu'elles retirent leurs forces de sécurité du nord de la Macédoine, enlèvement le 27 septembre de deux policiers vite relâchés par le groupe politico-mafieux de « Cakala », opération de « nettoyage » lancée le 7 septembre par les forces de sécurité macédoniennes dans la région isolée de Brest se soldant par plusieurs morts parmi les Albanais, dont peut-être des civils.

En outre, le VMRO est tenté, lui aussi, par la politique du pire. L'ancien Premier Ministre, L. Georgievski, préconise ouvertement la partition du pays. Si M. Gruevski, nouveau président du VMRO (parti qui conserve en son sein une fraction pro-bulgare), a officiellement récusé cette idée, elle fait son chemin. On assiste ainsi à une convergence des extrêmes entre le DPA et une partie du VMRO.

Enfin, une grande partie de l'armée macédonienne et des partis politiques slaves considère que l'intervention de la communauté internationale en 2001 a privé les Macédoniens de la victoire sur les Albanais. Le revanchisme est dans de nombreuses têtes qui n'attendent que le départ des forces internationales. Les "Lions", paramilitaires slaves démobilisés, dont les connivences avec les Bérets rouges et les groupes mafieux serbes sont maintenant mis en lumière, et des membres de partis extrémistes pourraient fomenter des provocations. L'inscription sur la liste noire américaine de l'ancien Ministre de l'Intérieur, M. Boskosvi, et le retrait, de celle-ci, des noms des dirigeants albanais de l'UCK-M alimentent un sentiment de deux poids deux mesures chez les Macédoniens.

Votre Rapporteur tient, toutefois, à relativiser le tableau sombre qu'il vient de dresser. Certes, la Macédoine connaît des difficultés mais elle n'est pas la seule dans ce cas et bien des Etats de la région sont soumis à des problèmes semblables ou connaissent, en leur sein, de vives tensions. L'Ancienne République yougoslave de Macédoine bénéficie d'un atout : la communauté internationale, instruite de ses erreurs passées, ne l'a pas abandonnée et entend l'aider à surmonter les difficultés auxquelles elle est confrontée.

B - L'Ancienne République yougoslave de Macédoine sur la scène internationale

1) L'Ancienne République yougoslave de Macédoine et les Organisations internationales

L'Ancienne République yougoslave de Macédoine est devenue membre de l'Organisation des nations unies (ONU) en avril 1993, puis du Conseil de l'Europe et de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en 1995. Elle a par ailleurs adhéré à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) en octobre 2002.

2) L'Ancienne République yougoslave de Macédoine et l'Union européenne

L'Union européenne est présente militairement en Ancienne République yougoslave de Macédoine. Elle a pris le relais le 1er avril 2003 de l'opération de l'OTAN. Il s'agit de la première opération militaire de l'Union européenne (mission « Concordia »). En tant que nation-cadre pour 6 mois, la France est, avec 193 hommes parmi les 424 déployés sur le terrain, le plus gros contributeur devant la Belgique, l'Allemagne et l'Italie. Le 30 septembre dernier, la France a passé la main à l'EUROFOR sous commandement portugais jusqu'au 15 décembre. Une force de police européenne pourrait prendre la relève au-delà de cette date afin de prolonger une présence internationale à l'évidence indispensable pour favoriser un climat propice aux réformes en cours et lutter contre la criminalité organisée et la corruption.

La mission « Concordia », commandée par le Général Maral, a prouvé l'aptitude des Européens à concrétiser la PESD en instaurant un climat plus favorable à l'action du représentant spécial de l'Union européenne, M. Alexis Brouhns.

Sur le plan institutionnel, on assiste à un rapprochement progressif de l'Ancienne République yougoslave de Macédoine avec l'Union européenne. Elle a été le premier des cinq pays des Balkans occidentaux à avoir signé un Accord de stabilisation et d'association avec l'Union européenne le 10 avril 20014. Toutefois, les évènements de 2001 ont retardé la mise en œuvre des obligations figurant dans cet accord. Aussi, comme l'a relevé le 5ème conseil de coopération UE/ARYM (5 juillet 2002), l'accent doit maintenant être mis sur la mise en œuvre du paquet législatif adopté par le Parlement de Skopje, le renforcement de l'administration macédonienne et le rapprochement avec la législation communautaire.

Sur le plan financier, en 2003, l'aide de l'Union européenne à l'Ancienne République yougoslave de Macédoine dans le cadre du programme CARDS a atteint 37,3 millions d'euros. S'inspirant de l'exemple de la Croatie, la Macédoine voudrait déposer sa candidature à l'adhésion à l'Union mais, dans leurs contacts bilatéraux, les Etats-membres tentent de l'en dissuader.

3) L'Ancienne République yougoslave de Macédoine et les Etats voisins

Douze ans après l'indépendance de l'Ancienne République yougoslave de Macédoine, les liens politiques et familiaux entre Skopje et Belgrade demeurent particulièrement étroits. Par exemple, l'assassinat du Premier Ministre serbe Zoran Djindjic, a provoqué une émotion sincère et profonde en Macédoine. Cette tragédie ne laisse pas non plus indifférent le gouvernement macédonien actuellement engagé lui aussi dans la lutte contre la criminalité organisée. La question de l'accord yougo-macédonien de démarcation frontalière conclu le 21 février 2001 reste une question sensible au sein de la coalition gouvernementale. Le groupe de travail conjoint MINUK-ARYM créé le 18 mars à l'initiative de M. Michael Steiner, ancien administrateur des Nations Unies au Kosovo, et du Président Boris Trajkovski et chargé de régler les problèmes liés à l'application de cet accord, s'est réuni en marge de la conférence d'Ohrid sur la gestion des frontières (22 mai) : un accord sur l'ouverture de deux passages frontières supplémentaires entre l'Ancienne République yougoslave de Macédoine et le Kosovo a été signé. Il devrait faciliter le quotidien des Albanais habitant à cheval sur la frontière.

Premier investisseur et partenaire commercial de l'Ancienne République yougoslave de Macédoine, la Grèce a participé aux opérations de l'OTAN et à la mission « Concordia ». S'agissant de la querelle sur le nom, selon les responsables grecs, Athènes reste disposée à parvenir à un accord. Les termes d'un possible compromis tournent autour des appellations géographiques « Haute Macédoine » ou « Nouvelle Macédoine », mais les pourparlers n'aboutissent pas.

II - LES RELATIONS BILATÉRALES ENTRE LA FRANCE ET
L'ANCIENNE RÉPUBLIQUE YOUGOSLAVE DE MACÉDOINE

A - Les relations politiques bilatérales

Les deux Etats entretiennent des relations politiques assez soutenues comme le montre la fréquence des visites officielles au cours des cinq dernières années. En effet, depuis 1998, l'Ancienne République yougoslave de Macédoine a reçu le Président de la République (février 1999), deux Premiers Ministres (M. Lionel Jospin en mai 1999 et M. Jean-Pierre Raffarin en avril dernier) et accueilli des Ministres français à onze reprises. Du côté macédonien, depuis 1998 également, les Présidents Gliborov et Trajkovski se sont rendus en France à deux reprises chacun et, sur la même période, dix visites ministérielles ont eu lieu.

B - Les relations commerciales

La position de notre pays est faible, en particulier si on la compare à celle de l'Allemagne et de l'Italie, nos principaux concurrents sur les marchés de la région. La part de marché de la France dans le pays progresse de 1,8 % en 2001 à 2,7 % en 2002. L'automobile demeure le premier poste avec plus de 20 % du total. Les échanges sont caractérisés par un excédent en augmentation, notamment depuis 2001 : la récession consécutive à la crise semble avoir incité les entreprises macédoniennes à se tourner vers la France, les réseaux traditionnels d'approvisionnement faisant défaut.

La présence française5 est restreinte en raison des incertitudes politiques et des déficiences du droit des affaires : seules 16 entreprises sont implantées en Ancienne République yougoslave de Macédoine dont la plus importante est une société d'exploitation minière (Fini Industrie SCMM) qui emploie plus de 2.000 personnes.

C - La coopération

1) La coopération culturelle, scientifique et technique

L'enveloppe affectée au poste diplomatique français en Ancienne République yougoslave de Macédoine a été fixée, en 2003, à 442.500 euros (dont 290.000 euros de titre IV, c'est-à-dire les dépenses d'intervention) et 7 projets ont été retenus en sus de la programmation pour près de 300.000 euros dans le cadre du COCOP6 (367.534 euros en moyenne les quatre dernières années).

A ces chiffres, il faut ajouter la rémunération de trois assistants techniques auprès de l'Université du Sud-est et de Skopje, l'aide militaire, la part affectée à la Macédoine dans le cadre du «  paquet à démarrage rapide » du Pacte de stabilité, et les 750.000 euros « pré-affectés » à des projets macédoniens à vocation régionale (coopération médicale /transfusion sanguine, magistrature et université interculturelle de Tetovo) du Fonds de solidarité prioritaire (FSP) accordé à titre exceptionnel, hors ZSP (zone de solidarité prioritaire), en décembre 2001, au bénéfice des pays d'Europe du sud-est.

Le projet FASP de formation de hauts fonctionnaires (en coopération avec l'ENA), la formations d'élus locaux dans le cadre du programme CARDS, celle de magistrats dans le cadre du Pacte de stabilité, le soutien à la nouvelle Académie de police ou encore les sessions régionales de formation de professeurs et de responsables culturels regroupant notamment des participants albanais, kosovars et bulgares sont autant de projets qui contribuent à la consolidation des bases d'un État de droit. D'autres domaines ne sont pas en reste : le tourisme avec le concours de l'UNESCO pour la protection des sites naturels, l'agriculture avec un projet d'accord développement d'une filière caprine associant éleveurs, instituts de recherche et industrie. Dans le domaine de la santé publique des projets aboutissent, notamment la création du premier centre de transfusion sanguine. Dans le domaine de la recherche, des échanges de chercheurs ont abouti à la mise en place d'une coopération avec l'INRA.

2) La coopération militaire

En nommant, en avril 2003, un Français (qui occupe par ailleurs depuis 2002 le poste de conseiller d'infanterie auprès du Chef d'état major général macédonien) dans les fonctions d'adjoint du directeur du NAT (Nato Advisory Team), la France a démontré sa volonté de soutenir l'Ancienne République yougoslave de Macédoine en vue de son adhésion à l'OTAN7.

Une action de formation franco-britannique de garde-frontières fin 2002, proposée dans le cadre du Partenariat pour la Paix, a été particulièrement appréciée et a permis de poser les bases d'une nouvelle coopération en vue d'une opération de protection des frontières des anciennes zones de crise en 2004/2005.

Le Ministère de la Défense entretient des contacts réguliers avec les ministères macédoniens de la défense et des affaires étrangères, alors que des commissions mixtes franco-macédoniennes se réunissent régulièrement. Un projet de comité stratégique avait été envisagé mais n'a pas vu le jour en raison du changement de gouvernement suite aux législatives de septembre 2002.

L'adhésion de l'Ancienne République yougoslave de Macédoine à l'OTAN est espérée à l'horizon 2006. En attendant, l'Alliance atlantique poursuit sa mission d'assistance technique auprès de l'armée macédonienne d'autant plus que le MAP (Plan d'action pour l'adhésion) adopté en 1999 a dû être révisé pour prendre en compte dans ses objectifs la capacité des forces armées à lutter contre les insurrections armées sur le territoire national.

En matière d'armement, les relations franco-macédoniennes se limitent, pour des raisons principalement budgétaires, à des cessions à titre gratuit ou à faible prix de matériels destinés essentiellement à la sécurisation des frontières et à la lutte contre le crime organisé.

3) La coopération en matière de sécurité intérieure

La criminalité organisée est très puissante en Ancienne République yougoslave de Macédoine et sévit sous toutes formes jusque dans les allées du pouvoir. Elle trouve notamment en pays albanophone une zone franche pour ses activités de prostitution et de trafics et tend à se rapprocher par sa violence et ses méthodes (enlèvements) des usages connus en Albanie. La large autonomie accordée aux échelons locaux par les accords d'Ohrid semble encourager la corruption, le clientélisme et la soumission des élus locaux aux groupes criminels. Le nouveau gouvernement parait toutefois déterminé à s'attaquer à ce qu'il considère être l'héritage laissé par les prédécesseurs du VRMO et s'est engagé à la Conférence de Londres en 2002 puis au sommet de Thessalonique à améliorer son dispositif et à présenter un plan d'action national. Il a émis le souhait que la mission militaire « Concordia », soit relevée par une mission de police.

La coopération bilatérale dans ce domaine est mise en œuvre par un attaché de sécurité intérieure, également compétent au Kosovo. Elle se matérialise par des missions de renseignement ainsi que des actions de formation et de conseil, dans les domaines de la lutte anti-drogue, des techniques d'intervention, de la sûreté aéroportuaire, de la lutte contre la délinquance économique et financière. Un accord de sécurité intérieure (ASI) dont le texte est agréé par les deux parties doit être prochainement finalisé.

La France est également présente dans les actions de coopération multilatérale : réforme des administrations du secteur JAI (Commission), formation d'une police multiethnique macédonienne (OSCE), organisation dans le cadre d'Europaid8 de plusieurs jumelages (« administration pénitentiaire », « Asile, Migration, et politique des visas » et « police, crime organisé »).

4) La coopération judiciaire

La coopération judiciaire porte essentiellement sur la formation de magistrats que ce soit dans le cadre bilatéral ou par le biais de projets européens. La mise en place d'une école nationale de la magistrature, vivement souhaitée par l'Ancienne République yougoslave de Macédoine, est à l'étude et un assistant technique français sera chargé de ce dossier dès janvier 2004 depuis Belgrade.

En termes de coopération judiciaire deux conventions nous lient à la Macédoine dans le domaine pénal (entraide judiciaire et extradition). Dans le domaine civil et commercial, notre coopération est très réduite. L'Ancienne République yougoslave de Macédoine est partie à la plupart des instruments du Conseil de l'Europe et à 8 des 12 conventions des Nations unies contre le terrorisme.

III - LE DISPOSITIF DE LA CONVENTION FISCALE

A - La Convention fiscale franco-macédonienne s'inspire très largement du modèle élaboré par l'OCDE

1) Les conventions fiscales et le modèle de l'OCDE

Les droits fiscaux nationaux fixant des critères proches quant à la domiciliation, une même personne peut être considérée comme résident fiscal dans deux pays en même temps. Un risque de double imposition existe alors. Pour éviter cet inconvénient, les Etats concluent entre eux des accords bilatéraux (les « conventions fiscales ») qui répartissent les compétences fiscales entre le pays de résidence et le pays de la source du revenu et exigent que le pays de résidence élimine la double imposition en cas de compétences fiscales concurrentes. Ainsi, ce type de convention vise à assurer aux ressortissants des Etats contractants le bénéfice d'une certaine stabilité juridique mais également à favoriser le développement des relations économiques avec un pays étranger et à sécuriser les recettes fiscales des deux Etats signataires sur la base d'une répartition du droit d'imposer tel ou tel revenu qui se veut équitable.

L'OCDE s'est penchée sur cette question et propose à ses membres un modèle de convention fiscale bilatérale9. La plupart de celles conclues suivent les principes et les dispositions détaillées de ce modèle. Ainsi, il y a près de 350 conventions entre les Etats membres de l'OCDE et plus de 1500 conventions à l'échelle mondiale fondées sur ce modèle qui a une influence considérable sur les conventions fiscales conclues entre pays non membres.

2) Les dispositions techniques de la Convention fiscale franco-macédonienne

Sur plusieurs points, la Convention soumise à votre examen est conforme aux stipulations du modèle OCDE. Par exemple, les personnes concernées par le texte sont les résidents d'un ou des deux États contractants (article 1er), les impôts visés sont les impôts sur le revenu et sur la fortune perçus pour le compte de l'Etat, les subdivisions politiques et les collectivités territoriales quel que soit le système de perception (article 2). La Convention, conformément au modèle OCDE, pose le principe de l'imposition des revenus immobiliers dans l'Etat de situation des biens (article 6). Une entreprise d'un Etat qui exerce une activité dans l'autre Etat contractant n'est imposable dans cet autre Etat que si l'activité dans cet Etat est exercée par l'intermédiaire d'un établissement stable et uniquement à raison des bénéfices dégagés par cet établissement stable. Hors ce cas, les bénéfices des entreprises sont imposables dans l'Etat dans lequel elles sont situées (article 7). S'agissant des revenus liés à un emploi, le principe de l'imposition dans l'Etat d'activité prévaut. Cependant, la Convention prévoit une exception pour les missions temporaires effectuées dans l'autre Etat, dans les conditions prévues par le modèle de l'OCDE, notamment un séjour de moins de 183 jours dans l'Etat d'exercice de l'activité : dans ce cas, l'imposition des revenus revient à l'Etat de résidence (article 15). L'article 25 de la Convention prévoit l'interdiction des discriminations en matière fiscale fondées sur la nationalité. A situation égale, les nationaux de l'autre Etat ne peuvent être traités moins favorablement que les propres nationaux de l'Etat concerné. Il prévoit également que l'imposition d'un établissement stable ne peut être moins favorable que l'imposition d'une entreprise résidente. Enfin, ce principe de non discrimination s'applique à tous les impôts (même ceux qui ne sont pas visés par la convention).

Toutefois, quelques stipulations de la Convention dérogent au modèle de l'OCDE. Cela s'explique par le fait que lors de la négociation d'un tel texte, il est nécessaire d'adapter l'accord à la législation de chaque Partie :

« Trafic international » : à la demande de l'Ancienne République yougoslave de Macédoine, le transport routier a été inclus dans le champ d'application du « trafic international » (ce qui n'est pas prévu par le modèle de convention de l'OCDE) car les trafics maritime et aérien sont quasi inexistants dans ce pays. Du côté français, cela apportera une sécurité juridique, en Macédoine, aux entreprises françaises de transport routier.

« Résidence » : la notion de résidence constitue un critère essentiel de répartition des droits d'imposer entre les États contractants. La France a pu obtenir de considérer les sociétés de personnes qui ont leur siège de direction effective en France comme des résidents pour l'application de la convention. Elles seront alors soumises au régime fiscal prévu par l'article 8 du code général des impôts qui prévoit que les associés de telles sociétés sont personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société.

« Dividendes » : aux termes de la Convention, l'État dans lequel ils sont générés peut les imposer à un taux n'excédant pas 15 % de leur montant brut. Toutefois, le régime applicable aux dividendes payés aux sociétés mères est l'imposition exclusive dans l'État de résidence du bénéficiaire effectif. En outre, la définition des dividendes est reprise du modèle OCDE mais, afin de lever tout doute sur la solution à appliquer aux distributions déguisées ou occultes, cette définition précise que la notion de dividendes couvre tous les revenus soumis au régime fiscal des distributions de bénéfices.

« Intérêts » : s'agissant du paiement d'intérêts à un résident d'un des deux Etats signataires en provenance de l'autre Etat, le modèle OCDE propose une retenue à la source de 10 %. La Convention franco-macédonienne prévoit, elle, l'imposition exclusive dans l'Etat de résidence du bénéficiaire.

« Élimination des doubles impositions » : la rédaction de la clause voulue par la France et visant à éliminer les doubles impositions permet à notre pays d'appliquer sa législation interne relative aux filiales ou établissements étrangers de sociétés françaises établies dans des États ou Territoires à fiscalité privilégiée. Cette disposition est particulièrement importante dans le cas de l'Ancienne République yougoslave de Macédoine puisque le taux de son impôt sur les sociétés n'est que de 15 %.

B - Nombre de personnes concernées par l'entrée en vigueur de la Convention

Dès son entrée en vigueur, la convention s'appliquera à toute personne physique ou morale résidente fiscale d'un des États et ayant une activité ou possédant un bien dans l'autre, quelle que soit sa nationalité. A ce titre, toutes les entreprises françaises opérant en Ancienne République yougoslave de Macédoine sont visées par le texte.

Or, les relations économiques entre la France et l'Ancienne République yougoslave de Macédoine restent modestes. Ce pays était en 2002 notre 122ème client et notre 138ème fournisseur. Notre solde commercial est excédentaire de 47 millions d'euros.

Répondant à une question de votre Rapporteur, le Ministère des Affaires étrangères a, en outre, précisé qu'en 2002, le nombre d'immatriculés français à Skopje était de 186 (en hausse de 44,2 % par rapport à 2001). Selon le ministère de l'Intérieur, le nombre de Macédoniens en France est de 2301.

CONCLUSION

La Convention fiscale signée le 10 février 1999 par les Gouvernements français et macédonien poursuit le double objectif dévolu à ce genre de texte : l'élimination des doubles impositions et la lutte contre l'évasion et la fraude fiscales.

Au-delà de ces buts légitimes, le présent instrument revêt un aspect important aux yeux de nos partenaires macédoniens. En effet, les négociations ont été engagées à la demande de Skopje dans un souci de reconnaissance internationale, alors que l'ancienne convention fiscale franco-yougoslave du 28 mars 1974 avait été maintenue en vigueur par échange de lettres diplomatiques en 1996. De même, les procédures requises, en Ancienne République yougoslave de Macédoine, pour l'entrée en vigueur du présent traité ont été rapidement menées à bien puisque le Parlement local l'a ratifié dès le 15 avril 1999.

Pour la France, l'intérêt d'une telle convention ne se mesure pas tant à l'aune du nombre de personnes physiques et morales potentiellement visées mais du point de vue de la sécurité juridique qu'elle apportera à nos échanges économiques.

C'est donc au bénéfice de ces observations que votre Rapporteur vous invite à adopter le projet de loi qui nous est soumis.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mardi 2 décembre 2003.

Après l'exposé du Rapporteur, M. Jean-Jacques Guillet l'a interrogé sur la question du nom officiel de la Macédoine et sur l'état des relations entre cet Etat et la Grèce.

M. Loïc Bouvard a fait observer que la Macédoine était internationalement reconnue sous le nom d'ARYM, acronyme d'Ancienne République Yougoslave de Macédoine.

Faisant remarquer que le projet de loi soumis à l'examen de la Commission des Affaires étrangères mentionnait le « Gouvernement macédonien », le Président Edouard Balladur s'est étonné que la couverture du texte distribué aux députés sous le numéro 549 porte le titre « Convention fiscale avec la République de Macédoine » et a demandé qu'il soit rectifié pour être conforme au texte transmis par le Gouvernement.

M. Loïc Bouvard a indiqué que la Grèce était le premier investisseur et partenaire commercial de la Macédoine. La Grèce a participé aux opérations de l'OTAN et à la mission « Concordia » de l'Union européenne. S'agissant de la querelle sur le nom, selon les responsables grecs, Athènes reste disposée à parvenir à un accord. Les termes d'un possible compromis tournent autour des appellations géographiques « Haute Macédoine » ou « Nouvelle Macédoine », mais les pourparlers n'aboutissent pas.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 549 rectifié).

*

* *

La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de la convention figure en annexe au projet de loi (n° 549 rectifié).

N° 1268 - Rapport sur le projet de loi autorisant la convention avec le Gouvernement macédonien - doubles impositions - évasion fiscale - impôts sur le revenu et sur la fortune (M. Loï  Bouvard)

1 La Macédoine historique est plus étendue que la Macédoine politique, car elle s'étendait au nord de la Grèce et au sud de la Bulgarie. Son ancienne capitale était Thessalonique.

2 Élections de septembre 2002 : 60 SDSM socio-démocrates), 17 DUI (parti albanais), 7 DPA (parti albanais d'opposition), 1 NDP (Parti démocratique du peuple), 34 VRMO (nationalistes macédoniens) et 1 PS.

3 Toutefois, l'efficacité de cette mission a été très limitée. Les chiffres transmis à votre rapporteur par le Ministère des Affaires étrangères sont édifiants puisque à peine 314 fusils, 6 lance-roquettes et des munitions ont été collectés alors que l'estimation du nombre d'armes illégales en circulation varie entre 300.000 et 900.000.

4 L'Accord de stabilisation et d'association avec l'Union européenne doit encore, au demeurant, être ratifié par les 15 États membres pour entrer en vigueur. En France, la loi autorisant cette formalité a été votée par les assemblées (voir notamment le rapport de votre Rapporteur sur ce texte, rapport n° 373 du 13 novembre 2002) et a été promulguée en mars 2003 (Loi n° 2003-212 du 12 mars 2003 publiée au Journal officiel du 13 mars 2003, page 4330).

5 La liste des entreprises françaises est consultable sur le site de l'Ambassade de France, à cette adresse : http://www.ambafrance-mk.org/carnetdadress.html

6 COCOP : Comité d'orientation, de coordination et de projets

7 Les neuf pays ayant fait part de leur intérêt pour une adhésion à l'OTAN et participant au MAP sont l'Albanie, la Bulgarie, l'Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Roumanie, la Slovaquie, la Slovénie et l' Ancienne République yougoslave de Macédoine. Pour information, votre Rapporteur tient à rappeler que la France a signé, à Bruxelles, le 26 mars 2003, les protocoles au Traité de l'Atlantique Nord sur l'accession des Républiques de Bulgarie, d'Estonie, de Lettonie, de Lituanie, de Roumanie, de Slovaquie et de Slovénie. Le projet de loi (n° 1107) autorisant leur ratification a été déposé le 8 octobre dernier sur le Bureau de notre Assemblée.

8 Opérationnel depuis janvier 2001, Europaid est une structure de coordination des programmes de coopération menés par l'Union européenne, créée dans un souci de rationalisation de ceux-ci.

9 le modèle de l'OCDE peut être téléchargé sur le site Internet de cette organisation, à l'adresse suivante : www.oecd.org/dataoecd/52/34/1914467.pdf (en anglais uniquement)


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