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le 30 décembre 2003

N° 1282 - 1ère partie

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 décembre 2003

RAPPORT

1ère partie

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES, DE L'ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE LOI, MODIFIÉ PAR LE SÉNAT (n°991), pour la confiance dans l'économie numérique,

PAR M. JEAN DIONIS DU SÉJOUR,

Député.

--

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 1re lecture 528, 612, 608 et T.A. 89.

2ème lecture 991

Sénat : 1re lecture 195, 345, 342, 351 et T.A. 140 (2002-2003).

Culture et communication - société.

1ÈRE PARTIE DU RAPPORT

INTRODUCTION

I.- LA RÉORGANISATION DU TEXTE 12

II.- LE PÉRIMÈTRE DU PROJET DE LOI 12

III.- LES ENJEUX MAJEURS 14

A.- L'AUTONOMIE JURIDIQUE DE L'INTERNET 14

B.- LA LUTTE CONTRE LES ATTEINTES AU DROIT 18

C.- L'AMÉNAGEMENT NUMÉRIQUE DU TERRITOIRE 19

D.- L'ORGANISATION DE LA LIBERTÉ CONCURRENTIELLE 21

E.- LA RESPONSABILITÉ DU COMMERÇANT EN LIGNE 23

F.- LA PROSPECTION DIRECTE 25

EXAMEN DES ARTICLES 29

TITRE IER 29

DE LA LIBERTÉ DE COMMUNICATION EN LIGNE 29

Chapitre Ier A 29

Les réseaux 29

Article 1er A 30

Conditions d'intervention des collectivités locales dans le secteur des télécommunications 30

Article 1er B 35

Couverture du territoire en téléphonie mobile par la mise en œuvre prioritaire de prestations d'itinérance locale 35

Chapitre Ier 39

La communication publique en ligne 39

Article additionnel avant l'article 1er 39

Définition au niveau du projet de loi lui-même, et non plus dans la loi du 30 septembre 1986, de la communication publique en ligne et proclamation du principe de sa liberté et de ses limites 39

Article 1er 41

(Article 2 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication) 41

Définition dans la loi du 30 septembre 1986 de la communication publique en ligne 41

Article 1er bis (nouveau) 44

Substitution du mot « radio » à celui de « radiodiffusion » 44

Chapitre II 45

Les prestataires techniques 45

Article 2 45

Responsabilité des prestataires techniques fixée dans la loi du 30 septembre 1986 45

Article additionnel après l'article 2 47

Responsabilité des prestataires techniques établie dans le texte même du projet de loi 47

Article 4 48

Responsabilité des prestataires techniques intermédiaires 48

Article 5 48

(Article L. 34-11 du code des postes et télécommunications) - 48

Attribution et gestion des noms de domaine 48

Chapitre III 48

Régulation de la communication 48

Article 5 bis 49

(articles 42-1 et 42-2 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986) 49

Cas d'infraction pénale 49

Article 5 quinquies (nouveau) 50

Limite nouvelle à l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle 50

TITRE II 51

DU COMMERCE ELECTRONIQUE 51

Chapitre Ier 51

Principes généraux 51

Article 6 51

Définition du commerce électronique et de l'établissement 51

Article 7 52

Principe de liberté du commerce électronique, exceptions et détermination de la loi applicable 52

Article 7 bis (nouveau) 53

Article 8 53

Clause de sauvegarde 53

Article 9 53

Éléments d'information obligatoires permettant l'identification du prestataire 53

Chapitre II 54

La publicité par voie électronique 54

Article 11 bis (nouveau) 54

Définition du courrier électronique 54

Article 12 55

(article L. 33-4-1 du code des postes et télécommunications et article L. 121-20-5 du code de la consommation) 55

Régime de la prospection directe 55

Article 13 bis (nouveau) 64

Coordination 64

Chapitre III 64

Les obligations souscrites sous forme électronique 64

Article 14 64

(articles 1108-1 et 1108-2 et chapitre VII nouveaux du code civil) 64

Régime des actes et contrats souscrits et conservés sous forme électronique 64

TITRE III 67

DE LA SÉCURITÉ DANS L'ÉCONOMIE NUMÉRIQUE 67

Chapitre Ier 67

Moyens et prestations de cryptologie 67

Section 1 67

Utilisation, fourniture, transfert, importation et exportation de moyens de cryptologie 67

Article 18 67

Régime juridique de l'utilisation, de la fourniture, de l'importation et de l'exportation des moyens de cryptologie 67

Section 2 67

Fourniture de prestations de cryptologie 67

Article 19 67

Régime juridique de l'activité de fourniture de prestations de cryptologie 67

Article 20 67

Responsabilité des fournisseurs de prestations de cryptologie à des fins de confidentialité 67

Article 21 68

Responsabilité des prestataires de services de certification électronique pour les certificats présentés par eux comme qualifiés 68

Section 3 71

Sanctions administratives 71

Article 22 71

Sanctions administratives à l'encontre des fournisseurs de moyens de cryptologie 71

Section 4 72

Dispositions de droit pénal 72

Article 23 72

Sanctions pénales 72

Article 24 73

Pouvoirs des agents spécialisés en matière de constatation des infractions au régime de la cryptologie 73

Article 25 73

Aggravation des sanctions pénales en cas d'utilisation de moyens de cryptologie afin de préparer ou de commettre une infraction 73

Article 26 74

Interceptions de sécurité des messages cryptés - sanctions pénales en cas de refus de communiquer la convention de déchiffrement 74

Section 5 75

Saisine des moyens de l'Etat pour la mise au clair de données chiffrées 75

Article 27 75

Réquisition des moyens de décryptage 75

Chapitre II 76

Lutte contre la cybercriminalité 76

Article 32 bis (nouveau) 76

Création d'une nouvelle incrimination 76

Article 34 77

TITRE IV 78

DES SYSTÈMES SATELLITAIRES 78

Article 36 78

Régime d'attribution des fréquences satellitaires 78

Avant l'article 37 bis 79

Article additionnel avant l'article 37 bis 79

Régime d'intervention des collectivités locales en faveur de la fourniture de services de télécommunications 79

Article 37 bis 83

Financement du service universel des télécommunications 83

Après l'article 37 bis 83

Article additionnel après l'article 37 bis 83

Facturation des communications à la seconde 83

Article additionnel après l'article 37 bis 84

Desserrement du contrôle des tarifs du service universel 84

Article additionnel après l'article 37 bis 84

Séparation comptable et fonctionnelle de l'activité d'exploitation des réseaux fixes exploités par France Télécom 84

Article additionnel après l'article 37 bis 85

Desserrement du contrôle des tarifs sur un opérateur exerçant une influence significative sur un marché de détail du secteur des communications électroniques 85

TITRE V 86

DISPOSITIONS FINALES 86

Article 38 86

Application aux territoires d'Outre-Mer 86

Article additionnel après l'article 38 86

Application du régime de préavis de grève pour les services publics prévu par le code du travail aux opérateurs de diffusion par voie hertzienne terrestre 86

Article 39 (nouveau) 86

Modalités de rémunération de certains personnels de France Télécom 86

TABLEAU COMPARATIF 197

I.- LA RÉORGANISATION DU TEXTE 10

II.- LE PÉRIMÈTRE DU PROJET DE LOI 10

III.- LES ENJEUX MAJEURS 12

A.- L'AUTONOMIE JURIDIQUE DE L'INTERNET 12

B.- LA LUTTE CONTRE LES ATTEINTES AU DROIT 16

C.- L'AMÉNAGEMENT NUMÉRIQUE DU TERRITOIRE 17

D.- L'ORGANISATION DE LA LIBERTÉ CONCURRENTIELLE 19

E.- LA RESPONSABILITÉ DU COMMERÇANT EN LIGNE 21

F.- LA PROSPECTION DIRECTE 23

EXAMEN DES ARTICLES 27

TITRE IER 27

DE LA LIBERTÉ DE COMMUNICATION EN LIGNE 27

Chapitre Ier A 27

Les réseaux 27

Article 1er A 28

Conditions d'intervention des collectivités locales dans le secteur des télécommunications 28

Article 1er B 33

Couverture du territoire en téléphonie mobile par la mise en œuvre prioritaire de prestations d'itinérance locale 33

Chapitre Ier 37

La communication publique en ligne 37

Article additionnel avant l'article 1er 37

Définition au niveau du projet de loi lui-même, et non plus dans la loi du 30 septembre 1986, de la communication publique en ligne et proclamation du principe de sa liberté et de ses limites 37

Article 1er 39

(Article 2 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication) 39

Définition dans la loi du 30 septembre 1986 de la communication publique en ligne 39

Article 1er bis (nouveau) 42

Substitution du mot « radio » à celui de « radiodiffusion » 42

Chapitre II 43

Les prestataires techniques 43

Article 2 43

Responsabilité des prestataires techniques fixée dans la loi du 30 septembre 1986 43

Article additionnel après l'article 2 45

Responsabilité des prestataires techniques établie dans le texte même du projet de loi 45

Article 4 46

Responsabilité des prestataires techniques intermédiaires 46

Article 5 46

(Article L. 34-11 du code des postes et télécommunications) - 46

Attribution et gestion des noms de domaine 46

Chapitre III 46

Régulation de la communication 46

Article 5 bis 47

(articles 42-1 et 42-2 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986) 47

Cas d'infraction pénale 47

Article 5 quinquies (nouveau) 48

Limite nouvelle à l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle 48

TITRE II 49

DU COMMERCE ELECTRONIQUE 49

Chapitre Ier 49

Principes généraux 49

Article 6 49

Définition du commerce électronique et de l'établissement 49

Article 7 50

Principe de liberté du commerce électronique, exceptions et détermination de la loi applicable 50

Article 7 bis (nouveau) 51

Article 8 51

Clause de sauvegarde 51

Article 9 51

Éléments d'information obligatoires permettant l'identification du prestataire 51

Chapitre II 52

La publicité par voie électronique 52

Article 11 bis (nouveau) 52

Définition du courrier électronique 52

Article 12 53

(article L. 33-4-1 du code des postes et télécommunications et article L. 121-20-5 du code de la consommation) 53

Régime de la prospection directe 53

Article 13 bis (nouveau) 62

Coordination 62

Chapitre III 62

Les obligations souscrites sous forme électronique 62

Article 14 62

(articles 1108-1 et 1108-2 et chapitre VII nouveaux du code civil) 62

Régime des actes et contrats souscrits et conservés sous forme électronique 62

TITRE III 65

DE LA SÉCURITÉ DANS L'ÉCONOMIE NUMÉRIQUE 65

Chapitre Ier 65

Moyens et prestations de cryptologie 65

Section 1 65

Utilisation, fourniture, transfert, importation et exportation de moyens de cryptologie 65

Article 18 65

Régime juridique de l'utilisation, de la fourniture, de l'importation et de l'exportation des moyens de cryptologie 65

Section 2 65

Fourniture de prestations de cryptologie 65

Article 19 65

Régime juridique de l'activité de fourniture de prestations de cryptologie 65

Article 20 65

Responsabilité des fournisseurs de prestations de cryptologie à des fins de confidentialité 65

Article 21 66

Responsabilité des prestataires de services de certification électronique pour les certificats présentés par eux comme qualifiés 66

Section 3 69

Sanctions administratives 69

Article 22 69

Sanctions administratives à l'encontre des fournisseurs de moyens de cryptologie 69

Section 4 70

Dispositions de droit pénal 70

Article 23 70

Sanctions pénales 70

Article 24 71

Pouvoirs des agents spécialisés en matière de constatation des infractions au régime de la cryptologie 71

Article 25 71

Aggravation des sanctions pénales en cas d'utilisation de moyens de cryptologie afin de préparer ou de commettre une infraction 71

Article 26 72

Interceptions de sécurité des messages cryptés - sanctions pénales en cas de refus de communiquer la convention de déchiffrement 72

Section 5 73

Saisine des moyens de l'Etat pour la mise au clair de données chiffrées 73

Article 27 73

Réquisition des moyens de décryptage 73

Chapitre II 74

Lutte contre la cybercriminalité 74

Article 32 bis (nouveau) 74

Création d'une nouvelle incrimination 74

Article 34 75

TITRE IV 76

DES SYSTÈMES SATELLITAIRES 76

Article 36 76

Régime d'attribution des fréquences satellitaires 76

Avant l'article 37 bis 77

Article additionnel avant l'article 37 bis 77

Régime d'intervention des collectivités locales en faveur de la fourniture de services de télécommunications 77

Article 37 bis 81

Financement du service universel des télécommunications 81

Après l'article 37 bis 81

Article additionnel après l'article 37 bis 81

Facturation des communications à la seconde 81

Article additionnel après l'article 37 bis 82

Desserrement du contrôle des tarifs du service universel 82

Article additionnel après l'article 37 bis 82

Séparation comptable et fonctionnelle de l'activité d'exploitation des réseaux fixes exploités par France Télécom 82

Article additionnel après l'article 37 bis 83

Desserrement du contrôle des tarifs sur un opérateur exerçant une influence significative sur un marché de détail du secteur des communications électroniques 83

TITRE V 84

DISPOSITIONS FINALES 84

Article 38 84

Application aux territoires d'Outre-Mer 84

Article additionnel après l'article 38 84

Application du régime de préavis de grève pour les services publics prévu par le code du travail aux opérateurs de diffusion par voie hertzienne terrestre 84

Article 39 (nouveau) 84

Modalités de rémunération de certains personnels de France Télécom 84

TABLEAU COMPARATIF 197

MESDAMES, MESSIEURS,

Cette deuxième lecture du projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique ne sera pas une simple formalité. Après son passage au Sénat, beaucoup d'articles restent en effet en discussion sur des points essentiels, et les débats apparus dans le secteur des télécommunications, notamment autour du « carcan tarifaire » imposé à l'opérateur historique, sont amenés à l'enrichir de dispositions nouvelles lourdes d'enjeux.

Dans la mesure où il apparaît souhaitable de faire de ce projet de loi un texte fondateur, la première préoccupation consiste à le restructurer, afin d'effacer les imperfections nées du travail de chantier dont il a fait l'objet en première lecture. Il s'agit d'en faire une loi cohérente et lisible.

Dans ce but, certaines suppressions d'article ayant pour contrepartie des amendements de rédaction complète plus loin dans le texte seront proposées à l'approbation de l'Assemblée nationale. De même, il nous est apparu souhaitable de réorganiser les débats en séance publique de manière à examiner les questions dans leur ordre d'importance.

En effet, si l'économie numérique constitue un sujet vaste, touchant tout à la fois au secteur des télécommunications et au secteur de l'audiovisuel, pouvant avoir des conséquences parallèlement à la fois sur le code des postes et télécommunications et la loi du 30 septembre 1986 sur la liberté de communication, son apport spécifique lui donne une grande portée symbolique parce qu'il fonde de fait dans la législation française à la fois l'Internet et le commerce électronique.

I.- LA RÉORGANISATION DU TEXTE

Le champ du projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique a été amené à évoluer à l'occasion de son examen en première lecture par l'Assemblée nationale puis par le Sénat. Il comprend, en effet, désormais des dispositions relatives à l'intervention des collectivités dans le secteur des télécommunications et des dispositions relatives à la couverture des zones blanches par les opérateurs de téléphonie mobile qui figurent dans deux articles placés avant l'article premier du projet de loi.

Ces questions sont d'une importance incontestable mais elles ne constituent pas le cœur de la problématique du projet de loi dont l'objet central reste la définition d'un cadre juridique sécurisant l'économie numérique et favorisant ainsi son développement.

Il est donc souhaitable de préserver la cohérence de ce projet de loi en déplaçant les dispositions précédemment évoquées. La Commission propose donc que ces dispositions soient examinées après l'article 37 du projet de loi au sein du titre IV bis.

C'est également dans ce titre que la Commission propose l'insertion des dispositions relatives aux questions soulevées par des amendements examinés par l'Assemblée nationale à l'occasion de son examen du projet relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom qui seront traitées, à la demande du Gouvernement, dans le projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique.

II.- LE PÉRIMÈTRE DU PROJET DE LOI

Le projet de loi tel qu'il nous revient du Sénat conserve dans son ensemble l'économie générale qu'il avait au terme de la première lecture à l'Assemblée nationale. Peu d'articles ont été rajoutés, et tous dans un esprit d'amélioration et de clarification du texte.

Ainsi, dans le cadre de l'article 2, un nouvel article 43-9-1 A de la loi du 30 septembre 1986 traite à part la sanction pour les personnes alléguant de l'illicéité de certaines données pour en obtenir indûment le retrait, alors que l'Assemblée nationale avait introduit cette sanction dans un alinéa de l'article 43-8.

Un article 5 quinquies a été rajouté pour indiquer que la protection de l'enfance et de l'adolescence pouvait justifier certaines restrictions à l'exercice de la liberté audiovisuelle.

L'article 7 bis a pour fonction d'alléger la rédaction de l'ancien article 7 en reprenant son deuxième paragraphe relatif aux règles applicables au commerce électronique lorsqu'il revêt une dimension internationale non communautaire.

L'article 11 bis isole une définition que l'Assemblée nationale avait introduite sous la forme d'un nouveau paragraphe de l'article 12.

L'article 32 bis punit quant à lui, au travers de l'article 227-23 du code pénal, des mêmes peines que le fait de fixer, d'enregistrer ou de transmettre des images pédophiles, le fait de conduire une tentative en ce sens.

Il n'y a guère qu'un sujet nouveau qui a été abordé au Sénat à travers un article additionnel : celui du régime des indemnités des fonctionnaires de France Télécom, et encore cette disposition a-t-elle été reprise dans le projet de loi relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom, où elle avait plus naturellement sa place.

A contrario cette seconde lecture à l'Assemblée nationale devrait conduire à une extension du champ couvert par le projet de loi par contrecoup des débats autour des autres textes en instance dans le domaine des télécommunications.

D'abord, il a été longtemps question que ce texte sur l'économie numérique accueille les articles du projet de loi sur les communications électroniques qui ne seraient pas insérés dans la législation par ordonnance, c'est-à-dire ceux relatifs plus spécifiquement à l'audiovisuel. Cette hypothèse n'a plus cours désormais, puisqu'il est à ce jour admis que ce projet de loi relatif aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle suivra la procédure d'examen parlementaire.

Il ne reste de l'idée d'utiliser ce véhicule pour transposer le « paquet télécoms » que l'article additionnel relatif à la mise en place du dispositif de préavis de grève prévu par le code du travail pour les services publics, dans les sociétés de diffusion par voie hertzienne terrestre. Cet article tire la conséquence de la levée du monopole de TDF, et donc de la fin du régime d'encadrement du droit de grève prévu par la loi du 30 septembre 1986 afin d'assurer la continuité du service public de diffusion des programmes.

L'autre source d'enrichissement de ce projet de loi vient des débats sur le projet de loi relatif au service public des télécommunications et à France Télécom. Les amendements visant à alléger le « carcan tarifaire » appliqué à France Télécom ont été repoussés par le Gouvernement lors de ces débats au motif qu'ils pourraient faire l'objet d'une discussion moins contrainte dans le cadre du projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique. Des amendements portant articles additionnels ont donc été déposés en ce sens par le président de la Commission des affaires économiques et par le rapporteur.

Leur sera adjoint un amendement relatif à la séparation comptable et managériale de France Télécom, qui a pour objet de rééquilibrer le dispositif juridique de contrôle de France Télécom en permettant une plus grande lisibilité des coûts de l'opérateur historique dans sa gestion du réseau. Cet amendement ouvre la perspective d'une filialisation de la gestion du réseau, qui apparaît comme une évolution incontournable dès lors que des procédures d'encadrement d'une partie de l'activité d'une entreprise apparaissent tout à fait incompatibles avec le statut de société anonyme de celle-ci, a fortiori si elle est appelée à être détenue pour une part croissante par le secteur privé.

III.- LES ENJEUX MAJEURS

A la faveur des évolutions intervenues dans le droit des télécommunications, les principaux enjeux de ce projet se trouvent un peu modifiés par rapport à ceux de la première lecture. Ainsi le financement du service universel a trouvé sa solution dans le cadre du projet de loi relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom, mais ce même projet de loi a fait surgir la question du « carcan tarifaire » et de la séparation comptable et managériale de France Télécom.

A.- L'AUTONOMIE JURIDIQUE DE L'INTERNET

La manière d'aborder la législation des activités de l'Internet reste la question centrale du projet de loi. Le rapporteur et, avec lui, la Commission des affaires économiques, confirmant leur vote d'examen en commission de première lecture, souhaitent que cette législation ne soit pas placée dans la loi du 30 septembre 1986 sur la liberté de communication, mais qu'elle constitue la matière même du projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique, qui est ainsi appelé à devenir un texte fondateur.

Il convient d'emblée d'écarter un malentendu relatif à ce point de vue. Il ne s'agit nullement d'alléger les règles de droit s'appliquant à l'Internet ; encore moins de créer un ordre juridique nouveau faisant concurrence au droit commun dans les domaines où l'Internet n'a rien de spécifique. Il s'agit simplement de prendre une à une les dispositions relatives à l'Internet que le projet de loi insère dans la loi du 30 septembre 1986 pour en faire la matière même du projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique.

Tous les amendements de suppression se combinent avec des amendements de réécriture : il ne s'agit que de déplacer les règles, sans les changer au fond.

Mais ce déplacement revêt une grande importance, du fait de sa double portée symbolique et pratique.

D'abord, d'un point de vue symbolique, il marque bien la différence fondamentale de nature entre la communication point à point et réciproque de l'Internet et la communication point à multipoint et descendante de l'audiovisuel. Il marque bien aussi la différence entre un univers de millions de producteurs d'information disséminés, et une filière très capitalistique de professionnels de l'image et du son. Il marque bien enfin la différence entre d'un côté le vecteur d'une profusion d'écrits et d'images fixes, et de l'autre le canal de diffusion d'émissions composées de suites ordonnées d'images animées ou de sons. Et c'est ce qui justifie la proposition d'une nouvelle définition du concept de communication publique en ligne qui désigne juridiquement l'Internet, une nouvelle définition qui l'affranchit d'un rattachement artificiel à la communication audiovisuelle dans laquelle elle ne saurait se fondre.

Mais le déplacement des dispositions relatives à l'Internet dans le texte même du projet de loi correspond également à une préoccupation pratique de sécurité juridique. En effet, dès lors que la communication publique en ligne est définie comme une forme de communication audiovisuelle, dès lors que cette définition, et certaines dispositions spécifiques relatives à la responsabilité des prestataires, figurent dans la loi du 30 septembre 1986, qu'est-ce qui garantit à l'investisseur du secteur de l'Internet qu'il ne lui sera pas appliqué un jour, au détour d'une interprétation, une des multiples dispositions de la nébuleuse constituée par la loi du 30 septembre 1986 sur la liberté de communication et par la loi du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle ? Si le projet de loi a véritablement pour vocation de favoriser le développement de l'économie numérique en suscitant un sentiment de confiance chez les investisseurs, mieux vaut dire positivement le droit qui s'applique, plutôt que de laisser ouverte la possibilité qu'il puisse se déduire d'une définition au départ mal ajustée. Si le droit de l'Internet est fixé dans la texture même du projet de loi, s'il s'appuie sur une définition sans renvoi à la communication audiovisuelle, alors les règles qui s'appliquent sont clairement identifiées, et tout risque d'ajout d'une nouvelle règle par une interprétation ultérieure abusive est jugulé.

Voilà pourquoi l'article 1er doit comporter une définition de la communication publique en ligne réaliste. Voilà pourquoi les dispositions de l'article 2 prévues pour aller s'insérer dans la loi du 30 septembre 1986 doivent être déplacées pour devenir la matière d'un article du projet de loi.

Cette démarche n'a rien de libertaire. Au contraire, elle vise à assurer une stabilité juridique propre à attirer les investisseurs dans le secteur de l'Internet.

Et elle s'accompagne d'une volonté ferme de placer l'Internet sous le contrôle du droit : le rapporteur propose de rétablir l'obligation de moyens à la charge des hébergeurs en se qui concerne le contrôle des informations faisant l'apologie des crimes de guerre, incitant à la haine raciale, ou promouvant la pédophilie ; le rapporteur lie la procédure de notification à la lutte contre les allégations mensongères visant à obtenir fallacieusement un retrait d'information afin de mieux protéger les droits de propriété intellectuelle.

Il faut encore souligner que toutes les parties prenantes au monde de l'Internet partagent ce point de vue :

- nos collègues de la Commission des affaires économiques du Sénat d'abord, et particulièrement les rapporteurs MM. Bruno Sido et Pierre Hérisson, dont le rapport comporte un paragraphe qui converge totalement avec le point de vue de votre rapporteur, bien qu'ils aient choisi finalement la solution d'isoler juridiquement le droit de l'Internet certes, mais dans le cadre de la loi du 30 septembre 1986  : « Votre rapporteur considère que l'architecture juridique de l'Internet dont les fondements ont ainsi été posés en 2000 et qui se trouve confortée par l'article 1er du projet de loi « économie numérique » n'est pas satisfaisante. S'il est légitime de vouloir protéger nos industries culturelles, cet objectif ne saurait justifier une distorsion juridique artificielle, c'est-à-dire une fausse définition de la communication publique en ligne. D'autres moyens existent assurément pour protéger la création culturelle française. »

- l'ART, Autorité de régulation des télécommunications, qui a regretté, dans son avis du 3 décembre 2002, que le projet de loi retienne « une définition globale qui amalgame des situations très différentes pour les assimiler à de la communication audiovisuelle. » ;

- le CSA, qui a estimé, dans son avis du 17 décembre 2002 sur le projet de loi que « l'évolution technologique aurait justifié un aménagement plus radical de la législation » et qui a regretté que « telle ne soit pas l'approche retenue dans le projet de loi pour la confiance et la sécurité dans l'économie numérique, qui se limite à des aménagements partiels et qui laisse en l'état d'importantes disparités de régimes juridiques entre des services de même nature. » ;

- le Conseil d'Etat, qui, dans son avis du 2 juillet 1998 sur « Internet et les réseaux numériques », précisait :

« La régulation des contenus et services empruntant les réseaux de télécommunications, et en particulier celle des contenus audiovisuels mis à la disposition du public doit en effet demeurer sectorielle.

Il apparaît inopportun dans ce cas, de confier à une seule autorité le soin de contrôler tous les contenus mis la disposition du public. Des services tels les forums de discussion, l'accueil de sites Web, la vente à distance, l'accès à des bases de données, la télé-médecine, la télé-formation, comportent une composante communication au public mais ne nécessitent pas le même traitement que la radio ou la télévision, qui demeurent des média de masse spécifiques.

Ainsi, de même que le CSA ne régule pas aujourd'hui la presse ou la télématique, il paraît peu adapté de confier demain à une seule autorité le soin de contrôler les contenus audiovisuels, la publicité sur tous les supports, la presse et l'ensemble des contenus mis en ligne. Il va en revanche de soi que des services de radio ou de télévision sur Internet devront rester de la compétence de l'autorité chargée de contrôler les programmes audiovisuels. Dans le cas de l'Internet, qui ne relève pas d'une traditionnelle logique de diffusion, il semble préférable de s'orienter vers la combinaison d'une corégulation avec les professionnels, sous le contrôle du juge, pour encadrer les services propres au réseau (voir, supra la quatrième partie, et infra sur l'encadrement de ces nouveaux services), et de la régulation habituelle des services traditionnels concernés. » ;

- la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications, qui a indiqué clairement, dans son avis du 10 décembre 2002, qu' « il n'y a pas lieu de placer la communication publique en ligne dans le cadre de la régulation audiovisuelle » ;

- les avocats spécialisés, et notamment l'ADIJ (Association pour le Développement de l'Informatique Juridique), qui notent à l'issue d'une table ronde du 25 juin 2003 que « le projet LEN, a opéré un mariage entre ce qui relève de la communication audiovisuelle et ce qui relève de la communication en ligne, alors même que la Directive européenne Commerce Electronique du 8 juin 2000 entretient la distinction entre les deux régimes » et que « Ces deux modes de communication sont en effet, sur le fond, des régimes clairement distincts et ne peuvent être traités par un même corps de règles. L'application du régime de la communication audiovisuelle à la communication en ligne a d'ailleurs déjà démontré ses incohérences et limites. » ;

- les organisations professionnelles : AFA (Association française des fournisseurs d'accès et de services Internet), AFORS (Association française des opérateurs de réseaux et services de télécommunications), AFORM (Association française des opérateurs de réseaux mutiservices), AFOM (Association française des opérateurs mobiles), c'est-à-dire l'ensemble des acteurs industriels du secteur des télécommunications ;

- les professionnels de la vente à distance : FEVAD (Fédération des entreprises de vente à distance), ACSEL (Association pour le commerce et les services en ligne) ;

- les associations de consommateurs ;

- les associations d'internautes.

Seul le Comité de liaison des industries culturelles (CLIC) s'y oppose encore aujourd'hui. Pourtant un vrai dialogue a été noué avec les représentants de ce secteur important de notre économie nationale, et un travail de fond a été entrepris pour modifier le texte en prenant en compte certaines de leurs remarques légitimes. Ainsi :

- d'abord, il est maintenant entendu que la radio et la télévision continueront à relever du régime de la loi du 30 septembre 1986, quel que soit le support technique de diffusion, y compris donc l'Internet ;

- ensuite, il est bien entendu que l'autonomie juridique de l'Internet ne change en rien la nécessité de lutter de manière sévère contre les atteintes au droit d'auteur ou au droit de propriété intellectuelle sur l'Internet. De ce point de vue, la lecture au Sénat a conduit à un renforcement tout à fait pertinent des sanctions. En outre, il est désormais acquis que la responsabilité des prestataires techniques doit être engagée sur des données « illicites », et non « manifestement illicite », comme il avait été un temps envisagé en première lecture, afin de tenir compte du fait que le droit de la propriété intellectuelle, doit relever sans ambiguïté de l'obligation immédiate de réaction des prestataires techniques ;

- enfin, reste l'argument avancé de la gêne occasionnée pour les négociations internationales. Celui-ci mérite à tout le moins d'être relativisé. Le CLIC affirme que l'exclusion des services de communication publique en ligne de la communication audiovisuelle empêchera à terme leur régulation en fonction de considérations proprement nationales, car elle les privera, vis-à-vis des progrès de la libéralisation internationale dans le domaine des services, de la protection du principe de l'exception culturelle.

A cet argument, on peut objecter :

- d'abord, que la régulation de l'Internet concerne avant tout la prohibition de la diffusion d'informations touchant à la pédophilie, au racisme, à l'apologie des crimes de guerre, ou portant atteinte au droit de propriété intellectuelle ou au droit d'auteur, et que ces différentes dimensions relèvent moins de la mise en œuvre de l'exception culturelle dans le cadre des négociations de libéralisation commerciale, que de négociations internationales transversales sur ces sujets mêmes, prônant des solutions indépendantes des supports de diffusion d'information ;

- ensuite, d'après les informations même transmises par le CLIC, les Etats-Unis ont accepté, dans le cadre des négociations sur les services de télécommunications du GATS (Accord général sur les services), l'offre de l'Union européenne annexée au « quatrième protocole sur les télécommunications de base », qui exclut du champ de la négociation les services consistant en une offre commerciale de contenu transporté, quel que soit le mode de transport, ce qui préserve notamment la télévision sur Internet. Or c'est exactement dans cette logique de séparation du support et du contenu que s'inscrit la proposition de mise en place d'un régime juridique autonome de l'Internet. On ne voit donc pas comment elle peut perturber les négociations en cours.

B.- LA LUTTE CONTRE LES ATTEINTES AU DROIT

Il convient d'insister sur l'importance d'un contrôle des comportements illicites dans l'espace de l'Internet.

Le renforcement significatif des sanctions décidé par le Sénat en cas de non-respect soit des règles de conservation des données, soit des obligations de publier l'identité des éditeurs de sites, va, de ce point de vue, dans le bon sens.

Pourtant, le Sénat a également supprimé en première lecture l'alinéa relatif à l'obligation de moyens à la charge des hébergeurs en ce qui concerne le contrôle des informations faisant l'apologie des crimes de guerre, incitant à la haine raciale, ou promouvant la pédophilie.

Et pourtant le rapporteur de la Commission des lois du Sénat a reconnu implicitement, à propos de la possibilité de créer des obligations « spécifiques » de surveillance, que les interprétations contradictoires de l'article 15 et des considérants 47 et 48 de la directive 2000/31/CE étaient en balance, avant d'opter pour une position contraire à celle qui a finalement prévalu à l'Assemblée nationale en première lecture.

De fait, la directive n'affecte pas la possibilité des législations nationales d'exiger des prestataires qu'ils préviennent une violation. En effet, si son article 15 interdit aux Etats membres d'imposer une obligation générale de rechercher activement des faits ou des circonstances révélant des activités illicites, - car la surveillance générale de millions de sites et de pages Web serait, en pratique, impossible, et déboucherait sur une charge disproportionnée pour les prestataires intermédiaires, ainsi que sur des coûts d'accès plus élevés pour les utilisateurs - , il n'empêche néanmoins pas les autorités publiques d'imposer une obligation de surveillance dans un cas spécifique clairement défini.

L'argument selon lequel aucun autre état membre de la Communauté n'a mis en œuvre un dispositif équivalent ne tient pas : la France s'honorerait d'ouvrir la voie d'une interprétation faisant prévaloir la lutte contre les atteintes à la dignité humaine.

Quant à la procédure de notification, s'il est entendu qu'elle ne doit pas prendre un caractère obligatoire qui exonérerait les hébergeurs des efforts que la directive leur impose s'agissant du retrait prompt des informations illicites, elle peut être utile pour protéger les droits de propriété intellectuelle face aux allégations des personnes demandant un retrait d'informations.

En effet, si le caractère illicite des informations désignées n'est pas manifeste, l'hébergeur peut choisir de subordonner leur retrait à la réception d'un bordereau de notification dûment rempli. Ainsi, la procédure de la notification permet à la personne sûre de son fait d'obtenir un retrait rapide des informations illicites, et à la justice d'identifier le coupable si la demande de retrait était malveillante.

Comme une sanction sévère est prévue en cas de demande malveillante de retrait d'information, la procédure de notification, utilisée par l'hébergeur pour se couvrir dans les situations délicates, peut jouer un rôle dissuasif vis-à-vis des comportements malveillants.

Cette utilisation facultative de la notification n'entame en rien la responsabilité de l'hébergeur, qui n'est nullement invité à s'abstenir d'effectuer spontanément des vérifications sur la licéité d'une information, dès qu'il est sollicité pour la retirer.

C.- L'AMÉNAGEMENT NUMÉRIQUE DU TERRITOIRE

Cette seconde lecture à l'Assemblée nationale devrait permettre de fixer les outils juridiques de l'intervention des collectivités locales au service de la réduction de la fracture numérique.

L'essentiel de l'effort dans ce domaine repose sur la proposition d'insertion d'un nouvel article L. 1425-1 dans le code général des collectivités territoriales, le nouveau dispositif venant se substituer à celui prévu actuellement à l'article L. 1511-6.

En ce domaine, il est acquis que les collectivités locales doivent pouvoir étendre leurs interventions aux infrastructures « actives », c'est-à-dire aux équipements électroniques, en plus des infrastructures « passives » déjà autorisées par l'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales (CGCT). Il est même acquis, au Sénat comme à l'Assemblée, au terme de la première lecture, que les collectivités locales puissent exercer le rôle d'opérateur.

Cependant une divergence existe entre le Sénat et l'Assemblée nationale quant aux conditions dans lesquelles il convient d'autoriser l'activité d'opérateur, le Sénat souhaitant la limiter au cas d'un constat de carence de l'initiative privée, tandis que l'Assemblée nationale préfère accorder une relative liberté de l'exercice du métier d' « opérateur d'opérateur », limitant la condition du constat de carence au cas de l'exercice d'une activité d'opérateur à part entière, c'est-à-dire fournissant directement un service de télécommunication aux utilisateurs finals.

De ce point de vue, il convient d'être attentif à ne pas se laisser abuser par l'utilisation, dans le contexte de la loi, de l'expression « service au public » qui couvre toutes les composantes du public, y compris les professionnels du secteur. En cherchant à limiter l'obligation préalable du constat de carence au cas d'un service de télécommunications « au public », on couvre tout à la fois la situation d'un service fourni aux utilisateurs finals, et celui d'un service fourni aux opérateurs en position d' « opérateur d'opérateur », sous la forme d'une mise à disposition d'un réseau opérationnel à exploiter. Sous cet angle, la rédaction initiale de l'article L. 1425-1 du CGCT adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale n'était pas aussi permissive que les sénateurs l'ont dit, et ceux-ci ont finalement mis en place un dispositif très similaire à celui qu'ils ont décrié, mais sous une forme plus explicite.

Par son amendement à l'article L. 1425-1, le rapporteur a enfin souhaité introduire deux autres modifications :

- d'abord, la suppression du décret en Conseil d'Etat prévu pour définir les cas où une collectivité locale peut accorder une subvention d'exploitation, le texte (celui du paragraphe IV de l'article L. 1425-1) prévoyant déjà, par lui-même, une limitation aux situations dans lesquelles les conditions économiques ne permettent pas la rentabilité de l'établissement de réseaux de télécommunications ouverts au public ou d'une activité d'opérateur de télécommunications ;

- ensuite, la reconnaissance explicite du droit pour les collectivités locales à intervenir en direction des réseaux indépendants, typiquement les réseaux entre les laboratoires publics de recherche, à travers la prise en charge des infrastructures. Lorsque ces réseaux indépendants concernent des groupes fermés d'utilisateurs relevant de leur responsabilité, typiquement les lycées pour les régions, ou les collèges pour les départements, les collectivités locales devraient ainsi pouvoir aller jusqu'à la fourniture directe de services de télécommunications.

Cette reconnaissance était importante, en hommage à l'expérience d'intervention déjà ancienne des collectivités locales en faveur des réseaux indépendants, à travers l'aide qu'elles ont historiquement fournie à la création des plaques régionales et locales de RENATER, le réseau haut débit de la recherche scientifique.

Cependant le projet de loi introduit aussi un autre outil juridique d'intervention des collectivités locales au service de la réduction de la fracture numérique ; il concerne la couverture des « zones blanches » de téléphonie mobile.

Dans ce domaine, des améliorations rédactionnelles du dispositif adopté par le Sénat paraissent indispensables, afin, en premier lieu, de le resserrer sur des prescriptions de nature réellement législative, et la Commission des affaires économiques a été unanime en ce sens. L'accent doit donc être mis sur les obligations imposées aux opérateurs.

En second lieu, il s'agit de s'écarter de l'idée initiale, très circonstancielle, qui a présidé à la rédaction de la proposition de loi de M. Bruno Sido qui a servi de matrice de l'article 1er B, afin de créer un instrument pérenne de couverture des « zones blanches ». En effet, même après l'achèvement du programme de couverture organisé sur la base de la convention entre l'Etat, les collectivités locales et les opérateurs du 15 juillet 2003, des « zones blanches » pourront ultérieurement apparaître en liaison avec les évolutions démographiques, et les modifications des réseaux de transport terrestre.

Le rapporteur a donc proposé l'instauration d'un dispositif de couverture dont le lancement peut être décidé par décret sur un périmètre géographique déterminé.

D.- L'ORGANISATION DE LA LIBERTÉ CONCURRENTIELLE

Le rapporteur reprend à son compte sur ce texte les amendements visant à alléger le « carcan tarifaire » sur l'opérateur historique, dont l'examen a été reporté sur ce présent projet de loi, par le Gouvernement, lors du débat sur le projet de loi relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom, afin de se donner la possibilité d'une adoption plus rapide de ce texte, dont la vocation principale était de réorganiser le service universel des télécommunications, de consolider la situation juridique des fonctionnaires de France Télécom, et de supprimer la contrainte de détention par l'Etat de la majorité du capital de cette entreprise.

Pour situer l'apport de ces amendements, il convient de rappeler que la concurrence doit procurer deux avantages pour le consommateur : elle incite à la baisse des prix et elle stimule l'innovation. C'est ce qui a justifié la libéralisation du secteur des télécommunications en 1998.

Mais on sait que quand on libéralise un secteur où les prix étaient administrés, l'entreprise qui en détenait le monopole en profite, dans un premier temps, pour augmenter ses tarifs, la concurrence ne se mettant en place que progressivement.

Ensuite, de nouveaux opérateurs apparaissent sur les segments du marché les plus rentables, avec le risque que l'entreprise dominante casse les prix, grâce aux revenus qu'elle retire de sa présence monopolistique sur le reste du marché.

Voilà pourquoi la libéralisation de 1998 s'est accompagnée de la mise en place d'un régulateur, l'Autorité de régulation des télécommunications, qui a pour fonction d'empêcher que l'entreprise dominante « rançonne » le consommateur sur la partie non concurrentielle du marché, en augmentant ses tarifs, et en profite pour casser les prix face à la concurrence sur les autres segments.

Or, on constate que la régulation du secteur des télécommunications ne fonctionne pas bien sur certains marchés précis. En effet, d'un côté, elle n'empêche pas France Télécom d'imposer des prestations d'un coût trop élevé là où elle est en position de quasi-monopole, et de l'autre, elle empêche France Télécom de baisser ses prix sur le marché concurrentiel, en figeant les tarifs de l'ADSL depuis l'été 2002, ou en entravant ses possibilités d'offre lors de certains marchés de fourniture de téléphonie ou de services de données aux entreprises. Cette attitude visant à soutenir artificiellement les autres opérateurs peut être comprise dans une première phase d'ouverture à la concurrence, mais à terme, la bonne concurrence est celle qui apporte au consommateur la baisse des prix et les offres innovantes : or dans un tel système, les opérateurs concurrents ne sont pas incités à faire des efforts d'innovation puisqu'on leur assure une rente de situation.

Ce comportement d'entrave est d'autant plus inopportun que France Télécom reste l'une des entreprises les plus endettées du monde, et qu'il faut lui laisser la possibilité de faire face à cette dette. Par ailleurs, elle a vocation par sa position d'opérateur du service universel à faire un effort particulier d'équipement du monde rural ; il serait injuste qu'en contrepartie, elle ne puisse pas pratiquer des tarifs plus bas dans les zones urbaines pour tenter de l'emporter sur ses concurrents.

De là, les deux amendements présentés :

- le premier concerne les tarifs hors service universel. Il impose deux limites au pouvoir du régulateur : d'une part, il ne permet que celui-ci s'oppose à la mise en œuvre d'un tarif que par une décision économiquement motivée ; d'autre part, il interdit l'encadrement tarifaire des services innovants ;

- le second concerne les tarifs du service universel. Il pose le principe que le contrôle exercé par le régulateur ne concerne que les tarifs de base, laissant France Télécom libre sur les autres offres commerciales.

Ces amendements sont contrebalancés par un amendement imposant une transparence comptable et managériale au même opérateur historique, qui a la charge de gérer le réseau mis en place par l'ancienne direction générale des télécommunications.

Il s'agit de séparer complètement l'activité « infrastructure de réseau » et l'activité « offre de services » au sein de France Télécom, sur le modèle de ce qui existe tant pour les voies ferrées, avec la SNCF et RFF, que pour l'électricité, avec EDF et RTE.

Car France Télécom est vis-à-vis de la téléphonie dans une situation de monopole très voisine de celle d'EDF : elle a la propriété de 99 % des accès physiques au réseau de télécommunications, elle détient 90 % du marché de détail et 60 % du marché de gros.

Cet objectif de séparation comptable et managériale peut être atteint, car tous les organigrammes de France Télécom montrent qu'une distinction est déjà faite entre les « unités réseaux », qui comptent quelque 23 000 agents, et les unités de gestion des services.

La séparation managériale de l'activité d'exploitation des réseaux fixes, en vue de lui permettre de rendre un service équivalent à tout opérateur qui le sollicite, soulève certes des difficultés de principe lorsqu'elle doit être mise en œuvre dans le cadre d'une société faisant appel à l'épargne publique, dont la direction doit rendre compte de sa gestion à des actionnaires intéressés. C'est pourquoi la perspective d'une filialisation, coupant le lien managérial avec l'opérateur historique, est inscrite dans l'amendement.

Le rapporteur souligne l'importance d'une approche équilibrée de la concurrence dans le secteur des télécommunications, l'assouplissement de la liberté tarifaire pour l'opérateur historique trouvant sa contrepartie dans une transparence incontestable des coûts de son activité « réseaux ».

E.- LA RESPONSABILITÉ DU COMMERÇANT EN LIGNE

Le rapporteur souhaite un retour au texte adopté en première lecture à l'Assemblée nationale en ce qui concerne le commerce électronique.

Tout d'abord, il importe de revenir à une définition correcte de cette activité. Le Sénat a admis le principe d'une définition, ce en quoi il a rejoint l'Assemblée nationale, insistant sur la nécessité de créer le concept juridique de « commerce électronique » dans le texte du projet de loi ; mais, ce faisant, le Sénat a repris la définition correspondant au texte d'origine.

Il s'agit cependant de laisser dans la loi une définition plus correcte de cette activité, en résolvant la discordance manifeste créée par la formule « activité par laquelle une personne ... assure, à distance et par voie électronique, la fourniture de biens », qui aurait plus sa place dans une désignation juridique du commerce par télétransportation.

Pour assurer une fourniture d'un bien par voie électronique, il faut en effet d'abord dématérialiser ce bien, de manière à en produire l'équivalent sous forme de message numérique, et ainsi pouvoir le transporter par le canal d'ondes électromagnétiques, que celles-ci circulent dans des câbles ou par voie aérienne. A l'arrivée, il faut traduire le message pour reconstituer le bien en question, en n'introduisant pas d'erreur dans son architecture interne. Ce dispositif est utilisé couramment pour la vente en ligne de logiciels. Mais, pour l'instant, il n'est pas encore possible, voire souhaitable, de télécharger une caisse de vins, ou un bouquet de fleurs achetés en ligne.

Il s'agit aussi de réintroduire la condition d'une passation de commande, qui est véritablement constitutive du commerce électronique, d'après les analyses conduites par les organismes de statistiques sous l'égide de l'OCDE. Les rapporteurs de la Commission des affaires économiques du Sénat ont fait le reproche à cette focalisation sur l'acte de commande d'occulter la dimension promotionnelle de l'offre en ligne. Elle est pourtant évidemment implicite, puisqu'on ne peut vendre que ce qu'on présente à la clientèle. Comment pourrait-il en être autrement ?

A contrario, on peut s'interroger sur une définition qui assimile à du commerce le fait de simplement proposer une fourniture de biens sans en assurer la vente et la livraison. On peut considérer que les catalogues en ligne renvoyant à un achat en magasin, ou les sites analysant les avantages respectifs des produits, relèvent peut-être de cet aspect de la définition retenue par le Sénat. Cependant tant qu'il ne s'agit que de proposer de l'information, le régime applicable est celui prévu en général pour la communication publique en ligne, notamment en ce qui concerne l'obligation de publier l'identité de l'éditeur. Il n'est pas nécessaire d'appliquer à ces cas le régime spécifique, renforcé, mis en place par l'article 9 du projet de loi, qui vise à assurer une meilleure sécurité juridique dans la perspective d'un acte de commande, surtout s'il est assorti d'un paiement en ligne.

Enfin et surtout, il est nécessaire de créer une responsabilité globale du marchand en ligne sur toute la prestation, celui-ci étant institué comme interlocuteur unique du client pour l'ensemble des opérations pouvant mobiliser des sous-traitants.

Le Sénat s'est opposé à cette conception du commerce électronique, en utilisant l'argument curieux qu'elle conduisait à créer une insécurité juridique pour les commerçants en ligne et les intermédiaires. S'il ne s'agit que de l'incertitude créée par le concept de « satisfaction » de la commande, il n'y avait pas là matière à supprimer l'ensemble de la disposition, et votre rapporteur en a proposé, à l'occasion de cette deuxième lecture, une nouvelle rédaction définissant l'objectif à atteindre de manière plus stricte : respecter les termes de la commande.

Sur le fond, l'instauration d'un dialogue exclusif entre l'acheteur en ligne et le vendeur en ligne constitue le meilleur moyen de surmonter le déficit de confiance que crée un contact médiatisé par un dispositif de communication électronique, et donc de favoriser le développement du commerce électronique. Si la vente à distance traditionnelle fonctionne, c'est en effet parce que le temps a créé une réputation aux grandes maisons de ce secteur, qui garantit à l'acheteur qu'il n'engage pas son argent en risquant de ne pas recevoir sa commande.

Pour assurer le développement du commerce sur Internet, il convient de récréer par le droit ce climat de confiance que le temps n'a pu encore apporter à cette activité nouvellement apparue, et la proclamation forte de la responsabilité unique du vendeur en ligne joue de ce point de vue un rôle essentiel, car l'acheteur sait alors qu'il dispose d'un recours simple, protégé par la loi, en cas de problème de livraison.

En effet, le commerce en ligne est et restera spécifique. Cette spécificité se caractérise par un dialogue limité, via Internet, avec le vendeur en ligne. Elle se caractérise également par une perception sensorielle elle aussi limitée de l'objet acheté. Elle se caractérise enfin, et surtout, si l'on se réfère en comparaison à l'acte d'achat classique en magasin, par l'importance plus grande de la fonction logistique considérée dans son ensemble (stockage, transport, livraison).

La mise au point d'une définition complète et précise du commerce en ligne constitue un enjeu central de ce projet de loi visant à créer de la « confiance dans l'économie numérique ». C'est pourquoi il apparaît indispensable à votre rapporteur de revenir à celle adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale.

Le commerce électronique ne doit pas pouvoir être vécu comme un jeu de hasard, où l'on aventure son argent sans savoir si l'on va obtenir ce que l'on a commandé, comme la pièce mise dans une machine à sous, qui risque fort d'être absorbée par la machine en pure perte.

F.- LA PROSPECTION DIRECTE

Comme cela a été rappelé, en première lecture, l'article 12 encadrant la prospection directe nécessite de définir un délicat équilibre entre, d'une part, la protection des personnes contre les messages non sollicités et donc la nécessité de faire de l'Internet un espace de droit et, d'autre part, le besoin de laisser sur Internet un espace de liberté indispensable au déploiement de l'activité des entreprises. La plupart des amendements proposés par la Commission des affaires économiques en seconde lecture continuent de s'inscrire dans cette problématique.

Avant de les rappeler, il convient toutefois d'évoquer une question nouvelle qui n'était pas apparue, en première lecture, celle de la définition de la prospection directe.

On se souvient qu'en première lecture, l'Assemblée nationale avait adopté un amendement précisant que l'interdiction de la prospection directe n'était pas applicable à la transmission d'informations visant directement la protection des personnes ou la sécurité du territoire et notamment la gestion ou la prévention de risques naturels, industriels ou sanitaires.

L'alinéa correspondant a été supprimé à l'initiative de la Commission des affaires économiques du Sénat qui a estimé que cette précision était superfétatoire, le cas visé ne pouvant être assimilé à une opération de prospection directe.

Cette divergence d'appréciation entre les deux assemblées fait apparaître l'incertitude entourant la notion de prospection directe qui n'est définie nulle part. Votre Commission vous propose donc de la définir.

Elle a d'abord envisagé de le faire à partir de la réalité du « pollupostage » (cet équivalent français du « spamming » anglo-saxon) auquel sont confrontés les internautes. Or, il est n'est pas contestable que celui-ci n'est pas exclusivement de nature commerciale.

Toutefois, pour les autres modes de communication que le courrier électronique visés par l'article 12, tels les appels réalisés par des automates et les télécopies, les communications non sollicitées semblent bel et bien être essentiellement de nature commerciale.

En outre, la directive du 12 juillet 2002, que l'article 12 transpose pour partie, semble bien considérer exclusivement les communications commerciales. Elle interdit en effet la prospection directe sans consentement préalable à l'article 13 intitulé « communications non sollicitées ». Or, son considérant 40 indique qu' « il importe de protéger les abonnés contre toute violation de leur vie privée par des communications non sollicitées effectuées à fin de prospection directe, en particulier au moyen d'automates d'appel, de télécopies et de courriers électroniques, y compris de messages cours (SMS). Si ces formes de communications COMMERCIALES peuvent être (...) ».

On peut donc, me semble-t-il, soutenir qu'il s'agit bien, dans la directive, de communications commerciales qui, elles, sont définies dans d'autres directives. En outre, l'article 7 de la directive 2000/31 qui a notamment introduit une obligation de consultation de registres d'opt-out par les émetteurs de messages vise, lui, explicitement les communications commerciales non sollicitées.

La logique du projet de loi semble aller dans le même sens puisque l'article 12 figure dans un chapitre intitulé « de la publicité par voie électronique ».

Enfin, si une définition de la prospection directe commerciale peut être assez aisément trouvée, il s'est avéré extrêmement difficile d'en donner une définition ne retenant pas le critère de la finalité commerciale sans apporter de considérables restrictions à la liberté d'expression.

La Commission a donc retenu une définition commerciale de la prospection directe, celle-ci étant entendue comme l'envoi de tout message destiné à promouvoir, directement ou indirectement, des biens, des services ou l'image d'une personne vendant des biens ou fournissant des services.

La Commission s'est, d'autre part, attachée à préserver l'équilibre entre la protection des personnes et le développement de l'activité économique.

Afin de ne pas entraver excessivement l'activité économique, en premier lieu, elle a, tout d'abord, souhaité simplifier l'obligation de consentement préalable pour la prospection directe par courrier électronique en revenant sur la distinction prévue en première lecture entre personnes morales selon qu'elles sont ou non inscrites au registre du commerce et des sociétés. Cette distinction apparaît, en effet, en définitive, comme une source potentielle de contentieux sans qu'elle apporte de garanties significatives. La Commission vous propose donc de limiter l'interdiction de prospection directe par courrier électronique sans consentement préalable aux seuls messages adressés aux personnes physiques.

Pour la même raison, la Commission a souhaité apporter une réponse pérenne à la question du sort des fichiers commerciaux constitués légalement avant la publication de la loi. Il avait été envisagé, en première lecture, aussi bien par l'Assemblée nationale que par le Sénat, de mettre en place un régime transitoire permettant aux détenteurs de ces fichiers de solliciter le consentement préalable à des prospections ultérieures des personnes dont ils avaient recueilli les coordonnées conformément à la législation actuellement en vigueur.

Le délai de transposition de la directive étant désormais échu et la rédaction retenue par le Sénat soulevant diverses difficultés, évoquées dans le commentaire de l'article 12, la Commission a abandonné ce système de période transitoire. Elle vous propose de régler le problème en prévoyant que les personnes dont les coordonnées ont été recueillies de manière licite avant la publication de la présente loi sont présumées avoir exprimé leur consentement préalable à l'utilisation de ces coordonnées à fin de prospection directe. Naturellement, ces personnes continueront, à chaque message qui leur sera adressé, d'avoir la possibilité d'exprimer leur refus d'être à nouveau sollicitées.

En second lieu, la Commission a parallèlement retenu des propositions tendant à renforcer la protection des personnes contre les communications non sollicitées.

C'est dans cette logique que s'inscrit un amendement tendant à définir le consentement préalable. En prévoyant que celui-ci devra notamment être spécifique, cette définition permettra d'empêcher que ce consentement conditionne la réalisation d'une vente, par exemple en étant lié à l'acceptation des conditions générales de vente.

De même, la Commission s'est attachée à rendre plus efficace la répression des contraventions aux règles encadrant la prospection directe. Pour cela, elle a rétabli la possibilité pour la Commission nationale de l'informatique et des libertés de transmettre au parquet les plaintes dont elle sera saisie. En outre, la Commission propose de permettre aux opérateurs de service de communication électronique dont les équipements ont été utilisés à l'occasion de la commission d'une infraction aux dispositions relatives à la prospection directe d'exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne cette infraction, lorsque l'action publique a été mise en mouvement par le ministère public ou la partie lésée.

*

* *

Les enjeux de ce projet de loi sont donc importants pour l'avenir du développement de l'Internet en France.

Il faut espérer que la conscience d'avoir à faire des choix qui vont modeler ce secteur économique stratégique pour longtemps saura à bon escient amener le législateur vers l'audace lorsqu'il le faut, vers la prudence lorsqu'elle est nécessaire.

EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IER

DE LA LIBERTÉ DE COMMUNICATION EN LIGNE

Chapitre Ier A

Les réseaux

Ce chapitre comporte deux articles introduits en première lecture par l'Assemblée nationale, qui ont tous deux pour point commun de contribuer, par la mise en place d'instruments juridiques, à la réduction de la fracture numérique territoriale.

M. Jean Dionis du Séjour, rapporteur, a estimé que l'organisation du projet de loi, dans sa rédaction actuelle, manquait de logique, les premiers articles insérés par voie d'amendements étant consacrés à des questions importantes mais relatives aux télécommunications alors que le projet de loi est essentiellement consacré à l'Internet et au commerce électronique. Il a annoncé proposer, en conséquence, des amendements tendant à déplacer les dispositions des deux premiers articles (article 1er A et article 1er B) au titre IV bis du projet de loi.

Il a, en outre, fait part de son souhait de voir la discussion en séance publique organisée selon une logique thématique permettant d'examiner d'abord le titre Ier du projet de loi, à l'exception des deux premiers articles précédemment évoqués, puis le titre IV bis puis les titres II, III, IV et V.

M. François Brottes a indiqué qu'il n'était pas hostile à ces propositions mais qu'il s'interrogeait sur l'intérêt de préserver la logique interne d'un projet de loi dont la plupart des articles modifient des codes ou d'autres dispositions législatives.

M. Claude Birraux a souhaité qu'une éventuelle réorganisation du projet de loi ne conduise pas à évacuer le débat de fond concernant l'article 1er A. Il a souhaité, sur ce point, connaître la position du rapporteur en estimant souhaitable d'ouvrir aux collectivités locales la possibilité d'être opératrices de télécommunications et non seulement opératrices d'opérateur, c'est-à-dire loueuses d'une infrastructure complète en état de marche.

Le rapporteur a indiqué qu'un débat réel aurait naturellement lieu sur cette question et a précisé qu'il proposerait à la Commission un amendement répondant aux préoccupations exprimées par M. Claude Birraux.

M. François Brottes s'est interrogé sur l'intérêt d'une organisation spécifique des débats en commission compte tenu de l'organisation ultérieure de la séance publique durant laquelle les articles sont examinés dans l'ordre du projet de loi dans sa rédaction issue des travaux du Sénat.

M. Patrick Ollier, président, a indiqué qu'il était envisageable d'organiser la discussion en séance publique en demandant la réserve de la discussion de certains articles. Il a toutefois craint qu'il n'en résulte une certaine confusion en cas de désaccords avec le Gouvernement sur l'organisation souhaitable de la discussion et du projet de loi. Il a donc souhaité que le rapporteur s'entoure de garanties sur ce point.

M. Léonce Deprez a insisté sur la nécessité de consulter également les sénateurs sur la réorganisation envisagée du projet de loi.

Le rapporteur a indiqué qu'il prendrait les contacts nécessaires.

M. François Brottes a regretté qu'au cours de la discussion en séance publique du projet de loi relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom des amendements élaborés en commission n'aient pas été adoptés en raison de l'opposition du Gouvernement.

M. Alain Gouriou a estimé logique la démarche du rapporteur mais a jugé effectivement inutile de travailler sur des propositions qui seraient abandonnées au cours de la séance publique.

Le président a estimé que la démarche du rapporteur était effectivement cohérente. Il a précisé avoir accepté le retrait d'amendements de la Commission au cours de la discussion en séance publique du projet de loi relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom afin qu'ils soient discutés dans le présent projet de loi et que tel serait le cas puisqu'il avait déposé ces amendements.

Article 1er A

Conditions d'intervention des collectivités locales
dans le secteur des télécommunications

Cet article introduit en première lecture par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement vise à élargir les possibilités d'intervention des collectivités locales dans le secteur des télécommunications.

L'assouplissement du cadre normatif en vue de permettre aux collectivités locales de jouer un rôle incitatif pour le raccordement au haut débit avait d'abord donné lieu à la modification, dans la foulée du CIADT du 9 juillet 2001, par la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel, de l'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales. Cette modification avait visé à autoriser les collectivités locales à créer des infrastructures « passives » de télécommunications (canalisations, chambres de tirage ou fibres noires destinées à supporter des réseaux filaires, pylônes et alimentation électrique pour les infrastructures de boucle locale radio ou de téléphonie mobile), sans qu'il y ait nécessairement constat de carence. Dans cette rédaction, encore actuellement en vigueur, les collectivités locales se voient explicitement interdire d'exercer elles-mêmes le métier d'opérateur : elles peuvent simplement mettre les infrastructures « passives » ainsi créées à la disposition d'un opérateur, désigné après une mise en concurrence.

Ce dispositif ne saurait cependant suffire, lorsque le point de raccordement à l'artère à haut débit la plus proche se trouve vraiment très éloigné, ou lorsque la clientèle locale n'est pas suffisante pour justifier de la part des opérateurs un investissement, même réduit aux équipements techniques. C'est pourquoi le Gouvernement a souhaité, lors du CIADT du 13 décembre 2002, octroyer aux collectivités locales le droit complémentaire de prendre en charge aussi l'installation des infrastructures « actives » (les équipements électroniques), voire d'exercer directement la fonction d' « opérateur ».

C'est là l'objet de cet article additionnel au projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale le 25 février 2003, puis modifié par le Sénat le 25 juin 2003, qui conduit à créer, dans le code général des collectivités territoriales, après suppression de l'article L. 1511-6, un article L. 1425-1, rattaché à la partie du code relative aux « services publics locaux », qui octroie aux collectivités locales ou à leurs groupements de nouveaux droits en contrepartie de la vérification d'un certain nombre de conditions :

- l'établissement du réseau, c'est-à-dire l'installation des infrastructures « passives » et « actives », est subordonné à une publication préalable du projet et à sa transmission à l'ART, de manière à ce que puisse notamment être vérifiée la cohérence du maillage en réseaux du territoire ;

- l'exploitation directe du réseau en tant qu' « opérateur de télécommunications au sens du 15° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications » suppose le constat préalable d'une « insuffisance d'initiatives privées ».

Le nouveau dispositif maintient par ailleurs au paragraphe IV de la rédaction proposée pour l'article L. 1425-1, la possibilité, déjà prévue par l'article L. 1511-6 d'un mécanisme de subvention, afin d'abaisser le seuil de rentabilité d'exploitation ; cette possibilité dépend cependant de conditions définies par un décret en Conseil d'Etat, qui n'a toujours pas été pris, sauf s'agissant du cas particulier des « aides des collectivités locales et de leurs groupements à la location d'infrastructures destinées à supporter des réseaux de téléphonie mobile » (décret n°2003-1072 du 14 novembre 2003).

S'agissant des aides financières dont peuvent bénéficier les collectivités locales dans le cadre de la prise en charge de leur raccordement au haut débit, elles peuvent avoir deux origines. D'une part, le Gouvernement a confié à la Caisse des dépôts et consignations la mission de soutenir financièrement ces opérations, en mobilisant, d'une part ses fonds propres, à hauteur de 230 millions d'euros, pour des participations en capital, et d'autre part les fonds d'épargne adossés au Livret d'épargne populaire, à hauteur de 1,5 milliard d'euros, pour des prêts à taux préférentiels sur 30 ans, en cofinancement avec les établissements de crédits.

D'autre part, une discussion a été engagée au cours des derniers mois avec la Commission européenne afin de rendre possible la mobilisation des fonds structurels au service du financement des infrastructures de l'Internet à haut débit dans les zones enclavées. La Commission européenne a été ainsi amenée à publier, le 30 juillet 2003, des « lignes directrices » sur les critères et les modalités de mise en œuvre des fonds structurels dans le secteur des communications électroniques, qui ouvrent la possibilité d'un cofinancement.

A ce jour, le nombre de projets de raccordement au haut débit à l'initiative des collectivités locales s'élève à 170.

Le Sénat a focalisé ses débats autour de cet article sur le risque encouru par les collectivités locales à bénéficier d'un régime d'intervention trop large, les amenant à exercer directement un métier d'opérateur qu'elles maîtrisent mal. De ce point de vue, la première rédaction de l'article L. 1425-1 a été critiquée comme trop permissive.

Même s'il est incontestable que les modifications rédactionnelles adoptées par le Sénat ont apporté de la clarté et de la cohérence à ce texte, il convient cependant de rendre justice au Gouvernement pour sa première tentative de rédaction d'un dispositif difficile à mettre au point, dont le deuxième alinéa n'a peut-être pas été lu avec une précision suffisante.

Il indiquait : « Les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération locale ne peuvent fournir des services de télécommunications au public qu'après avoir procédé à une consultation révélant une insuffisance d'initiatives privées propres à satisfaire les besoins des populations et des entreprises. »

Un constat de carence était donc bien requis. Et il était requis en cas de fourniture de services de télécommunications « au public ». Or, « au public », cela signifie aussi bien « aux opérateurs » qu'« aux utilisateurs finals », car les professionnels font aussi partie du « public ». En clair, cette rédaction prévoyait un constat de carence pour l'exercice de l'activité d'« opérateur d'opérateur », comme pour celle d'« opérateur », et la rédaction gouvernementale adoptée par l'Assemblée nationale recouvrait donc, de fait, sur un plan strictement juridique, même si son premier alinéa faisait usage de la formule « établir et exploiter », la même distinction que celle qui a été voulue par le Sénat, à savoir une relative liberté pour l'établissement des réseaux, et la nécessité d'un constat préalable de carence pour son exploitation, en tant qu'« opérateur d'opérateur », voire en tant qu'« opérateur ». La rédaction du Sénat est simplement plus directement explicite, ce qui, en soi, constitue sans conteste, une amélioration appréciable du texte.

De fait, la leçon qu'il convient de retenir de cette exégèse, est qu'il vaut mieux utiliser l'expression « utilisateurs finals », si l'on vise de fait les purs consommateurs, à l'exclusion des opérateurs achetant une capacité de transmission.

Pour en revenir à l'article 1er A tel qu'il se présente lors de cette seconde lecture à l'Assemblée nationale, il comporte cinq paragraphes.

Le paragraphe I, non modifié par le Sénat, supprime l'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales.

Le paragraphe II propose l'insertion dans ce code de l'article L. 1425-1, rédigé sous la forme de cinq paragraphes.

·  Le paragraphe I de l'article L. 1425-1 pose, en son premier alinéa, le principe que les collectivités territoriales ou leurs groupements sont libres d'établir (et seulement établir) un réseau de communication ou d'acheter un réseau existant.

Cette liberté est conditionnée :

- d'une part, par la publication préalable du projet adopté par son organe délibérant dans un journal d'annonces légales pendant deux mois (ceci afin que se manifestent les détenteurs de réseaux existants, ce qui devrait éviter les doublons et les gaspillages importants d'argent public), et par sa transmission à l'Autorité de régulation des télécommunications (ART) ;

- d'autre part, par un engagement à veiller à la cohérence des réseaux présents sur son territoire, à garantir l'utilisation partagée des infrastructures et à ne pas entraver le développement de la concurrence.

Le second alinéa définit les conditions requises pour exercer une activité d'opérateur (c'est-à-dire exploiter un réseau ou fournir des services, selon la définition du code des postes et télécommunications) :

- les mêmes conditions de forme et de fond que pour établir un réseau doivent être respectées ; la transmission à l'ART du projet ne suffit cependant pas : en ce cas, celle-ci doit être informée ;

- mais, il est nécessaire, de surcroît, de constater une insuffisance d'initiatives privées propres à satisfaire les besoins des utilisateurs. L'exercice de l'activité d'opérateur par les collectivités locales ne suppose donc pas une carence totale du secteur privé.

·  Le paragraphe II de l'article L. 1425-1, après avoir rappelé en son premier alinéa que l'exercice par les collectivités locales de l'activité d'opérateur est soumis à l'ensemble des droits et obligations de cette activité, explicite les conditions de la séparation juridique qu'exige la Commission européenne entre l'activité d'opérateur de télécommunications et la fonction d'octroi des droits de passage permettant l'établissement de réseaux : pour cela, il est proposé, au deuxième alinéa, d'interdire qu'une même personne morale cumule ces deux fonctions.

Le troisième alinéa oblige à la tenue d'une comptabilité séparée pour les activités d'établissement ou d'exploitation de réseaux de télécommunications, ou de fournitures de services par les collectivités locales. Ceci doit permettre à la fois d'assurer un suivi budgétaire des activités de la collectivité locale en matière de télécommunications et d'éviter toute distorsion de concurrence par subvention croisée.

·  Le paragraphe III de l'article L. 1425-1 confie à l'Autorité de régulation des télécommunications la charge de régler tout différend né de l'intervention des collectivités locales ou de leurs groupements dans le secteur des télécommunications.

La procédure suivie est celle définie à l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications : l'autorité se prononce, après avoir mis les parties à même de présenter leurs observations ; sa décision est motivée ; celle-ci peut faire l'objet d'un recours en annulation ou en réformation dans le délai d'un mois à compter de sa notification ; les recours sont de la compétence de la cour d'appel de Paris.

·  Le paragraphe IV de l'article L. 1425-1 propose quand l'établissement de réseaux ou l'activité d'opérateur n'est pas rentable, de maintenir, pour les collectivités locales, la possibilité, que leur ouvre actuellement l'article L. 1511-6, de mettre leurs réseaux à disposition des opérateurs à des tarifs inférieurs aux coûts de revient, ou de compenser par des subventions, dans le cadre d'une délégation de service public ou d'un marché public, les obligations de service public, sous la réserve du respect des conditions d'application prévues par un décret en Conseil d'Etat, dont on peut remarquer qu'il restait encore à prendre, s'agissant de l'article L. 1511-6.

·  Le paragraphe V de l'article L. 1425-1 tend à valider les interventions que les collectivités locales ont déjà menées dans le domaine du câble et à ne pas les soumettre au présent article.

Le paragraphe III de l'article Ier A introduit par le Sénat tire la conséquence de l'abrogation de l'article L. 1511-6 pour l'article L. 4424-6-1 du code général des collectivités territoriales. Celui-ci précise que le territoire de la collectivité territoriale de Corse est inclus dans les zones géographiques pour lesquelles l'article 1511-6 prévoit la possibilité d'octroyer des subventions publiques venant en déduction des loyers de mise à disposition des infrastructures de télécommunications aux opérateurs.

L'abrogation du 1511-6 du code général des collectivités territoriales et l'absence de référence à tout « zonage » dans l'article L. 1425-1 conduisent à supprimer cet article L. 4424-6-1 du même code.

Le paragraphe IV ajouté par le Sénat a pour objet d'assurer la sécurité juridique des infrastructures destinées à supporter des réseaux de télécommunications créées par les collectivités territoriales en application de l'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales que le présent projet de loi tend à abroger.

Le paragraphe V résultant également d'un amendement du Sénat, prévoit, à des fins de coordination, de compléter l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications qui définit le périmètre des différends dont le règlement relève de l'ART afin d'y inclure le cas des différends liés aux conditions techniques et tarifaires d'exercice d'une activité d'opérateur de télécommunications ou d'établissement, de mise à disposition ou de partage des réseaux et infrastructures de télécommunications visés au paragraphe III de la rédaction proposée de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales.

La Commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 1) portant suppression de cet article.

Article 1er B

Couverture du territoire en téléphonie mobile par la
mise en œuvre prioritaire de prestations d'itinérance locale

L'article 1er B, ajouté au projet de loi par un amendement parlementaire adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, reprenait en fait, au départ, le texte de la proposition de loi adoptée par le Sénat le 24 octobre 2002 « relative à la couverture territoriale en téléphonie mobile de deuxième génération par la mise en œuvre prioritaire de prestations d'itinérance locale entre opérateurs ».

Il vise à organiser l'obligation pour les opérateurs de couvrir les zones dites « blanches », c'est-à-dire les zones incluant des centres-bourgs ou des axes de transports prioritaires qui ont été identifiées par les collectivités locales comme n'étant couvertes par aucun opérateur. Le principe retenu pour la couverture est celui de « l'itinérance locale », c'est-à-dire de la prise en charge par un seul opérateur ouvrant à ses concurrents l'utilisation de la portion de réseau qu'il construit ; par dérogation, lorsque tous les opérateurs en conviennent, la couverture s'effectue sur la base d'un partage des infrastructures, c'est-à-dire que chaque pylône construit accueille les équipements de tous les opérateurs.

La première lecture au Sénat a abouti à des modifications rédactionnelles répondant à deux préoccupations :

- mettre le dispositif proposé en cohérence avec le nouveau contexte législatif ouvert par l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales ;

- tenir compte des dernières avancées de l'approche contractuelle entre le Gouvernement, l'Autorité de régulation des télécommunications, les associations d'élus et les opérateurs.

En effet un processus de couverture des « zones blanches » est d'ores et déjà en cours, fondé sur l'engagement des trois opérateurs consigné dans une lettre à l'ART du 24 septembre 2002, et entériné par le Gouvernement lors du CIADT du 13 décembre 2002.

Il s'appuie sur les deux solutions techniques de l'itinérance locale et du partage d'infrastructures, les trois opérateurs partageant à égalité l'avantage d'assurer localement l'itinérance sur les zones cohérentes. Ils supporteront, en partage d'infrastructures (on parle aussi de « mutualisation ») comme en itinérance, une part égale des investissements ; le montant total pour chacun devant s'élever à un montant de l'ordre de 50 millions d'euros.

L'Etat va prendre en charge, en partage pour moitié avec les collectivités locales, le coût des pylônes nécessaires. Lors du CIADT du 13 décembre 2002, le Gouvernement a annoncé un apport financier de 44 millions d'euros (l'apport des collectivités locales étant donc du même ordre). Ces crédits seront pris sur les moyens d'interventions de la DATAR.

La circulaire interministérielle du 25 novembre signée conjointement par les ministres chargés de l'aménagement du territoire, des libertés locales et des télécommunications a invité les collectivités locales à effectuer des campagnes de mesures en vue d'établir une cartographie des besoins de couverture en téléphonie mobile.

Une convention nationale de mise en œuvre du plan d'extension de la couverture du territoire par les réseaux de téléphonie mobile associant l'Etat, représenté par les ministères de l'industrie, de l'aménagement du territoire et des libertés locales, les opérateurs, l'Autorité de régulation des télécommunications, l'Association des départements de France et l'Association des maires de France, a été signée le 15 juillet 2003. Elle précise que les zones blanches seront couvertes majoritairement selon la technique de l'itinérance locale. Le déploiement des nouveaux sites s'effectuera en deux temps :

- dans la première phase, concernant 1 250 sites dans 1 638 communes, les collectivités territoriales vont mettre des infrastructures passives (pylônes, « points hauts »...) à disposition des opérateurs qui s'engagent à les équiper des infrastructures radio et de transmission nécessaires. Les opérateurs vont prendre en charge la maintenance des sites neufs, et contribuer à la maintenance des sites existants. Si l'exploitation de ces infrastructures se révélait génératrice de recettes nettes, les opérateurs seraient redevables d'un loyer correspondant au montant de ces recettes ;

- les sites restant seront couverts au cours d'une seconde phase ; les modalités financières en seront définies d'ici la fin 2003. Les plans de déploiement de la seconde phase, sur la période 2005-2006, seront proposés aux collectivités locales avant le 15 juin 2004. Au total, la planification pourrait concerner 2 250 sites dans 3 150 communes.

Ce processus de mise en place d'une couverture des zones blanches est assez long, car il a fallu mettre au point les modalités techniques, institutionnelles et financières du dispositif, définir un plan d'action opérationnelle s'inscrivant dans une complémentarité cohérente et efficace avec le maillage territorial existant des relais. Et la phase opérationnelle s'étalera elle aussi sur plusieurs mois, car elle suppose d'abord de trouver des lieux d'implantation pour les pylônes, ce qui implique une négociation avec les collectivités locales qui dure en général 3 à 6 mois, de régler les diverses formalités administratives afférentes par exemple à l'obtention des permis de construire, ce qui prend au mieux 3 à 5 mois ; la construction des sites nécessite par elle-même 2 à 3 mois, et l'installation des équipements également 2 à 3 mois.

Les premiers pylônes devraient apparaître dans le paysage à l'été 2004.

Le plan de couverture du territoire mis en œuvre par le Gouvernement rend donc progressivement caduques les dispositions de l'article 1er B, qui perd de l'intérêt au fur et à mesure des avancées réalisées sur le terrain, puisqu'il prend comme point de départ de son calendrier la promulgation de la loi, dont l'échéance est elle-même incertaine.

Pour illustrer la difficulté inhérente à l'exercice consistant à vouloir maintenir ce dispositif législatif bien qu'il perde progressivement de sa substance, il suffit de citer un passage des justifications données par le rapporteur du Sénat, M. Bruno Sido, s'agissant des modifications apportées à l'article 1er B :

« La limite contraignante de deux ans pour la réalisation du déploiement paraît, à l'expérience, trop sévère puisqu'en l'état actuel du projet de convention, le déploiement de la phase 2 ne devrait intervenir qu'en 2005-2006. Toutefois, cet encadrement calendaire paraît indispensable. Il est donc proposé de prévoir 3 ans pour réaliser le déploiement à partir de la promulgation de la loi. En contrepartie, il est proposé que le ministre de l'aménagement du territoire fasse un rapport au Parlement chaque année sur la progression du plan de déploiement dans les zones blanches. »

Il reste qu'in fine, cet article additionnel aura de toute façon joué un rôle essentiel d'aiguillon parlementaire pour la mobilisation des acteurs concernés, et qu'il laissera certainement une trace utile dans le code des postes et télécommunications via l'introduction de la notion d' « itinérance locale », et de son régime législatif.

Pour en revenir à son contenu actuel, tel qu'adapté et adopté par le Sénat à l'occasion de la première lecture, l'article 1er B comporte dix paragraphes.

Le premier paragraphe introduit à l'article 32 du code des postes et télécommunications une définition de l'itinérance locale.

Le deuxième paragraphe assure une coordination rédactionnelle au niveau de l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications en mettant sur le même plan le partage d'infrastructures et l'itinérance locale.

Le troisième paragraphe décrit la procédure de couverture des « zones blanches » devant être mise en œuvre à compter de la promulgation de la loi.

Les « zones blanches » sont identifiées, de manière restrictive, comme n'étant couvertes par aucun opérateur de radiocommunications mobiles de deuxième génération, et devant inclure des centres-bourgs ou des axes de transport prioritaires.

Au niveau technique, il est précisé que c'est l'itinérance locale qui doit prévaloir, la solution du partage d'infrastructures n'étant retenue que si tous les opérateurs en conviennent.

La cartographie des besoins est réalisée par le ministre chargé de l'aménagement du territoire via les préfets de région.

En cas de différend entre les collectivités locales et les opérateurs sur l'identification des « zones blanches », les départements sont chargés de conduire des campagnes de mesures selon une méthodologie validée par l'ART.

Le résultat de cette cartographie est transmis au ministre chargé des télécommunications qui élabore un plan de couverture en concertation avec les opérateurs et le concours technique de l'ART.

Il est prévu que l'ensemble du déploiement est achevé dans les trois ans suivant la promulgation de la loi.

Le quatrième paragraphe prévoit que les infrastructures établies par les collectivités territoriales sont mises à disposition des opérateurs selon des conditions techniques et tarifaires fixées par décret en Conseil d'Etat.

Le décret n°2003-1072 du 14 novembre 2003 relatif aux « aides des collectivités locales et de leurs groupements à la location d'infrastructures destinées à supporter des réseaux de téléphonie mobile », pris sur la base de l'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales, anticipe sur l'adoption de cette disposition.

Le cinquième paragraphe précise que l'opérateur de radiocommunications chargé d'assurer l'itinérance locale dans une certaine zone conclut à cette fin des accords avec les autres opérateurs de radiocommunications mobiles, et négocie par ailleurs des conventions de mise à disposition des infrastructures ou des équipements avec les collectivités territoriales.

Le sixième paragraphe indique que les conventions de mise à disposition des infrastructures par les collectivités territoriales au profit des opérateurs sont conclues sur la base du droit privé, dans le respect des dispositions de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, et qu'elles déterminent notamment les conditions de maintenance et d'entretien des infrastructures.

La référence à l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales permet en particulier que cette mise à disposition puisse s'effectuer « quand les conditions économiques ne permettent pas la rentabilité de l'établissement de réseaux ... à un prix inférieur au coût de revient, selon des modalités transparentes et non discriminatoires, ou [en compensant] des obligations de service public par des subventions ».

Le septième paragraphe insère dans le code des postes et télécommunications un article L. 34-8-1 qui organise les pouvoirs de l'ART s'agissant du contrôle de la prestation d'itinérance entre les opérateurs :

- tout accord d'itinérance locale entre les opérateurs lui est communiqué ;

- elle peut demander, après avis du Conseil de la concurrence, en vue de garantir les conditions de la concurrence ou l'interopérabilité des services, la modification d'un accord d'itinérance locale déjà conclu ;

- elle règle les différends relatifs à la conclusion ou à l'exécution de l'accord d'itinérance locale conformément à la procédure déjà décrite de l'article L. 36-8.

Le huitième paragraphe complète l'article L. 36-6 du code des postes et télécommunications, qui définit les domaines dans lesquelles l'ART a un pouvoir de préciser les règles, à travers des décisions qui font l'objet d'une homologation par arrêté du ministre chargé des télécommunications.

Il étend ce pouvoir aux prescriptions applicables aux conditions techniques et financières de l'itinérance locale, telles qu'elles sont définies par le nouvel article L. 34-8-1 du même code, qui énonce, au-delà du dispositif de contrôle qu'il met en place, le principe que la prestation d'itinérance locale doit être assurée dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires.

Le neuvième paragraphe modifie l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications relatif à la procédure de règlement des différends par l'ART, afin de coordonner sa rédaction avec l'insertion dans le même code de l'article L. 34-8-1, qui introduit un nouveau cas de compétence de l'ART en matière de règlement des différends.

Le dixième paragraphe mentionne la liste minimale des services qui doivent être fournis par l'opérateur chargé d'une prestation d'itinérance locale sur une zone, à savoir, l'émission et la réception d'appels téléphoniques en général et d'appels d'urgence en particulier, l'accès à la messagerie vocale, l'émission et la réception de messages alphanumériques courts.

La Commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 2) portant suppression de cet article.

En conséquence, le chapitre 1er A du titre Ier devrait être supprimé.

Chapitre Ier

La communication publique en ligne

Ce chapitre comporte désormais deux articles, le Sénat ayant ajouté un article consacrant la désignation « radio » pour l'ancienne « radiodiffusion sonore ».

Article additionnel avant l'article 1er

Définition au niveau du projet de loi lui-même, et non plus dans la loi
du 30 septembre 1986, de la communication publique en ligne
et proclamation du principe de sa liberté et de ses limites

La Commission a examiné un amendement du rapporteur proposant une définition nouvelle de la communication publique en ligne, proclamant la liberté de celle-ci sous certaines limites touchant au respect de certaines valeurs fondamentales, et introduisant également une définition du courrier électronique.

Le rapporteur a rappelé qu'en première lecture, la Commission avait adopté un amendement tendant également à définir la communication publique en ligne et ses principes fondamentaux hors de la loi du 30 septembre 1986, puis que cet amendement avait été retiré, en séance publique, à la demande de la ministre déléguée chargée de l'industrie.

Il a indiqué avoir depuis continué le travail sur cette question et estimé, par ses contacts, qu'un large consensus se dessinait aujourd'hui parmi les professionnels du secteur des télécommunications et du domaine du droit afférent, les associations de consommateurs et d'internautes, les professionnels de la vente en ligne, sur la nécessité d'une définition autonome de la communication publique en ligne, également reconnue par la Commission supérieure du service public des postes et des télécommunications, l'Autorité de régulation des télécommunications et le Conseil d'Etat.

Il a précisé qu'aujourd'hui, seuls des représentants des industries culturelles étaient encore opposés à cette proposition et qu'ils justifiaient cette opposition par trois arguments : la convergence technique qui brouille la distinction entre ce qui relève de l'audiovisuel et ce qui relève de l'Internet, la menace pesant sur les droits de propriété intellectuelle, qui rend nécessaire une régulation forte à l'identique de ce qui existe en matière audiovisuelle, et le risque de fragiliser les positions françaises relatives à l'exception culturelle dans les négociations commerciales internationales.

Le rapporteur a indiqué que des éléments de réponse aux deux premières préoccupations étaient apportés par le projet de loi qui propose une définition claire de l'audiovisuel indépendante de son média de diffusion et qui, à l'initiative des sénateurs, prévoient des sanctions considérablement renforcées en matière de diffusion illicite de contenus. Il a, en revanche, jugé peu pertinent le dernier argument invoqué, la France ne maîtrisant pas les définitions des secteurs retenues dans les négociations internationales.

Après s'être déclaré très profondément convaincu de la nécessité d'une définition autonome de la communication publique en ligne, il a rappelé la différence de nature séparant l'audiovisuel de la communication publique en ligne qui repose sur des échanges bidirectionnels.

M. François Brottes a souligné la nécessité de prendre en compte l'interactivité croissante des services audiovisuels et le développement de l'audiovisuel sur Internet. Il a estimé qu'au regard de la définition proposée, des services de télévision pourraient être considérés comme relevant de la communication publique en ligne. Il a, d'autre part, regretté que les critères prévus pour encadrer la liberté de communication publique n'incluent aucun élément relatif à la concentration des opérateurs du secteur de sorte que ce dispositif lui a semblé compatible avec le contrôle de l'ensemble des services en ligne par une seule entité commerciale. Il s'est, en conséquence, déclaré défavorable à l'amendement proposé.

Le rapporteur a précisé que les rédactions retenues par l'amendement et critiquées par M. François Brottes étaient très proches de celles figurant dans le projet de loi, tel qu'il avait été adopté aussi bien par le Sénat que par l'Assemblée nationale. Puis, il a estimé que seule une autorégulation de l'Internet lui paraissait susceptible d'être efficace et que le projet de loi la rendait possible en organisant la lutte par les internautes contre les contenus illicites. En ce qui concerne le contrôle des concentrations, il a rappelé que l'Internet était probablement le moyen d'expression le moins coûteux, ce qui favorise l'apparition constante de nouveaux sites. Enfin, il a indiqué qu'il avait clairement prévu de maintenir le régime actuel de contrôle de l'audiovisuel y compris lorsque la diffusion est assurée sur Internet.

La Commission a alors adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 3) portant article additionnel avant l'article 1er.

Article 1er

(Article 2 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication)

Définition dans la loi du 30 septembre 1986
de la communication publique en ligne

La rédaction initiale de cet article tendait à proposer l'insertion, dans l'article 2 de la loi du 30 septembre 1986 d'une définition de la communication publique en ligne l'assimilant à de la communication audiovisuelle. L'objectif du positionnement à cet endroit de cette définition était double : rattacher l'ensemble de la communication publique en ligne, donc le monde de l'Internet, au régime juridique de l'audiovisuel ; définir les activités de diffusion de télévision et de radio comme des modalités particulières de communication publique en ligne.

Cette approche est assez ambiguë quant aux conséquences qu'elle emporte en ce qui concerne les règles précisément applicables aux activités de l'Internet, car la loi du 30 septembre 1986 prévoit de nombreux cas où des procédures spéciales sont nécessaires (par exemple, à l'article 43, déclaration préalable à la mise en place de services de communication audiovisuelle internes à une entreprise). Elle contribue donc à susciter un sentiment d'insécurité juridique chez les professionnels du secteur.

Bien que votre rapporteur ait proposé en première lecture, avec le soutien de la Commission des affaires économiques, une autre approche, appuyée sur une définition de la communication publique en ligne plus spécifique à l'Internet, qui visait à transformer le projet de loi en texte fondateur d'un véritable droit de l'Internet circonscrivant clairement son champ d'application pour tout ce qui lui est spécifique, c'est la rédaction initiale, telle que proposée par le Gouvernement, qui a été finalement adoptée par l'Assemblée nationale.

Les rapporteurs de la Commission des affaires économiques du Sénat, MM. Pierre Hérisson et Bruno Sido ont manifesté à leur tour, lors de l'examen de cet article 1er, certaines réticences à l'égard de l'inclusion de la communication publique en ligne dans l'audiovisuel, en observant notamment que les sites de commerce en ligne, qui permettent de consulter un catalogue puis de passer commande, fonctionnent selon des modalités fort éloignées des services audiovisuels : la communication audiovisuelle relève selon eux d'une communication point à multipoint, tandis que la communication publique en ligne est une communication point à point, fournie sur demande individuelle.

Ils ont rappelé opportunément que, dans son rapport de juillet 1998 « Internet et les réseaux numériques », le Conseil d'Etat indiquait d'ailleurs que « des services tels que les forums de discussion, l'accueil de sites Web, la vente à distance, l'accès à des bases de données, la télé-médecine, la télé-formation, comportent une composante communication au public, mais ne nécessitent pas le même traitement que la radio ou la télévision, qui demeurent des média de masse spécifiques. »

Cependant, face à la même difficulté d'une définition trop large suscitée fondamentalement par le souci du Gouvernement d'assurer la protection des industries culturelles françaises, ils ont opté pour une solution moins audacieuse que l'autonomie juridique préconisée initialement par la Commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale.

Votre rapporteur considère que l'architecture juridique de l'Internet dont les fondements ont ainsi été posés en 2000 et qui se trouve confortée par l'article 1er du projet de loi « économie numérique » n'est pas satisfaisante. S'il est légitime de vouloir protéger nos industries culturelles, cet objectif ne saurait justifier une distorsion juridique artificielle, c'est-à-dire une fausse définition de la communication publique en ligne. D'autres moyens existent assurément pour protéger la création culturelle française.

Ils ont considéré qu'il fallait restructurer la loi de 1986, s'intitulant « loi sur la liberté de communication » et n'ayant donc pas vocation à ne concerner que le champ audiovisuel, de manière qu'elle comporte :

- d'une part, un « linteau » relatif aux principes (la liberté et ses conditions d'exercice) régissant l'ensemble de la communication au public, par opposition à la correspondance privée ;

- d'autre part, deux piliers : l'un relatif à la « communication audiovisuelle » recouvrant les services de la radio et la télévision, reprenant l'ensemble des dispositions actuelles de la loi de 1986 et reposant sur la régulation du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) ; l'autre concernant la « communication publique en ligne » (à savoir Internet hors les services de radio et de télévision), qui comprendrait les dispositions énoncées dans le texte « économie numérique », c'est-à-dire celles rassemblées dans le chapitre VI du titre II de la même loi, et qui, conformément aux dispositions de la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000, serait régulée par les acteurs de l'Internet eux-mêmes sous le contrôle du juge.

De là, le dispositif proposé pour l'article 1er, qui a été adopté par le Sénat en première lecture.

·  A la définition de la communication publique en ligne, reprise dans sa version initiale, est adjointe, à l'article 2 de la loi du 30 septembre 1986, une double définition des services de télévision et de radio mise au point par les services juridiques du Conseil supérieur de l'audiovisuel.

Ces définitions mettent l'accent sur le mode de diffusion point à multipoint (« accessible en temps réel et de manière simultanée pour l'ensemble du public ou d'une catégorie de public »), ainsi que sur la spécificité du principe technique de la diffusion d'un programme (« suite ordonnée d'émissions comportant des images ou des sons »).

Elles excluent le cas des émissions d'images consistant essentiellement en des lettres, ou des chiffres ou des images fixes, ce qui constitue une manière d'écarter la diffusion de documents écrits plus ou moins richement illustrés, qui fournissent l'essentiel de la matière de l'Internet. En revanche, elles sont clairement compatibles avec une diffusion des services de radio et de télévision par Internet.

·  Sur la base de ces définitions, le champ de compétence du Conseil supérieur de l'audiovisuel est explicitement restreint à la radio et à la télévision :

- les trois derniers alinéas de l'article 1er de la loi de 1986 qui définissent les missions générales du Conseil supérieur de l'audiovisuel, à travers la liste des principes qui doivent guider ses décisions, sont supprimés ;

- ils sont repris au niveau d'un nouveau paragraphe introductif de l'article 4 de la même loi, qui jusque-là décrivait seulement les modalités de constitution, de renouvellement et de fonctionnement du Conseil supérieur de l'audiovisuel. Ce nouveau paragraphe précise que les principes mentionnés s'appliquent exclusivement en matière de radio et de télévision par tout procédé de télécommunication.

Ainsi se trouve organisée une architecture isolant le « pilier » consacré à la radio et à la télévision, de manière à permettre la coexistence d'un « pilier » consacré exclusivement à l'Internet.

Dans le « linteau » constitué de l'article 1er, reste dès lors la proclamation de la liberté de la communication audiovisuelle, ainsi que la liste des limites fixées à l'exercice de cette liberté.

La Commission a examiné un amendement rédactionnel du rapporteur modifiant les définitions des services de télévision et de radio de manière à les rendre plus restrictives, et supprimant la définition de la communication publique en ligne proposée dans le cadre de la loi du 30 septembre 1986.

En effet, s'agissant définitions des services de télévision et de radio, la formule « Est nécessairement considéré comme » crée le risque que soient considérés comme relevant de la radio et de la télévision d'autres services avoisinant, et que par extension la communication publique en ligne se retrouve ainsi à nouveau incluse dans le champ de la loi du 30 septembre 1986. La suppression de l'adverbe « nécessairement » coupe court à toute possibilité d'extension interprétative.

M. François Brottes a souhaité savoir si les services de vidéo à la demande, qui ne constituent pas véritablement un mode de diffusion simultanée et en temps réel, seraient considérés comme des services de télévision au sens de la définition proposée.

Le rapporteur a estimé qu'une fois le programme choisi, la diffusion d'une vidéo à la demande se déroulait indépendamment du spectateur et que ce type de services lui paraissait donc constituer un service de télévision relevant de la loi du 30 septembre 1986.

M. Alain Gouriou a jugé que la démarche du rapporteur présentait une logique réelle mais que la cohérence du texte serait subordonnée à l'adoption de l'ensemble des amendements du rapporteur portant sur cette partie du projet de loi.

Le président a estimé que cela justifiait de se rapprocher du Gouvernement comme cela était également souhaitable quant à l'organisation interne du projet de loi et quant à l'organisation envisagée de la discussion en séance publique.

Le rapporteur s'est engagé à le faire mais a précisé que, s'il s'attacherait à rechercher un consensus sur l'organisation de la discussion et sur l'articulation générale du projet de loi, il était, en tout état de cause, fermement décidé à défendre ses amendements tendant à établir une définition autonome de la communication publique en ligne.

M. François Brottes a indiqué qu'il s'était opposé à l'amendement du rapporteur portant article additionnel avant l'article premier parce qu'il ne lui paraissait pas apporter de garanties suffisantes en ce qui concerne les services audiovisuels. Puis, il a estimé que l'amendement en cours de discussion levait des ambiguïtés et qu'il lui paraissait souhaitable que le rapporteur présente un amendement unique reprenant les dispositions de l'amendement en cours de discussion et de celui précédemment adopté.

Le rapporteur s'est engagé à travailler en ce sens dans la perspective de la séance publique.

Puis la Commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 4), ainsi que l'article 1er ainsi modifié.

Article 1er bis (nouveau)

Substitution du mot « radio » à celui de « radiodiffusion »

Cet article additionnel introduit par le Sénat vise à substituer dans l'ensemble de la législation et de la réglementation le terme de « radio » à celui de « radiodiffusion sonore ».

La justification donnée est que le terme de « radiodiffusion sonore » est devenu ambigu car il se réfère non seulement au service diffusé mais également à un mode de diffusion particulier, celui par ondes hertziennes, qui n'est plus le seul utilisé, notamment du fait du développement de l'Internet.

De fait, ce changement de vocabulaire consacre une pratique de langage désormais bien ancrée.

Chapitre II

Les prestataires techniques

Ce chapitre vise pour l'essentiel à organiser le régime de responsabilité des prestataires techniques de l'Internet, en regard des risques d'atteinte à la morale publique et au droit de la propriété intellectuelle. Les seules modifications substantielles introduites par le Sénat portent sur l'article 2.

Article 2

Responsabilité des prestataires techniques fixée
dans la loi du 30 septembre 1986

Cet article qui organise, dans le cadre de la loi du 30 septembre 1986, le cadre juridique de l'activité des prestataires techniques de l'Internet n'a été modifié par le Sénat qu'au niveau des paragraphes III et IV.

Ces modifications ont concerné six points.

En premier lieu, le Sénat a procédé à quelques améliorations rédactionnelles, en restituant notamment toute sa puissance impérative au simple présent de l'indicatif en lieu et place des formes verbales « sont tenus de ».

En second lieu, il a introduit à l'article 43-8 deux modifications ponctuelles ayant une portée juridique. D'abord, s'agissant de l'activité de stockage d'information des hébergeurs, le Sénat a substitué l'expression « stockage durable » à l'expression « stockage direct et permanent » qui avait été retenue par le Gouvernement dans le texte initial du projet de loi. Cette substitution a été justifiée, selon le rapporteur de la Commission des affaires culturelles du Sénat, M. Louis de Brossia, par le souci de respecter la lettre de la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000, et de tenir compte de la diversité des aspects techniques de l'hébergement, en prenant mieux en compte le cas des forums de discussion par exemple. Ensuite, s'agissant des conditions dans lesquelles l'hébergeur est tenu d'identifier des informations ayant un caractère illicite, le Sénat a souhaité réduire la marge d'appréciation de l'hébergeur et le risque qu'il voie sa responsabilité engagée en introduisant l'idée d'évidence dans le caractère illicite du contenu mis en cause : les faits et circonstances doivent « mettre en évidence » ce caractère illicite plutôt que simplement le « faire apparaître ».

En troisième lieu, il a considérablement renforcé les sanctions introduites par l'Assemblée nationale, à tous les niveaux où elles ont été prévues dans le régime de responsabilité des prestataires techniques, c'est-à-dire :

- d'abord aux articles 79-7 et 79-8, qui concernent les manquements aux obligations relatives respectivement à la conservation des données et à la publication en ligne d'informations d'identification sur les éditeurs des sites. Là où l'Assemblée nationale avait institué, à l'encontre des personnes physiques en infraction, une amende de 3 750 euros, le Sénat a prévu une amende de 75 000 euros assortie d'un an d'emprisonnement. Là où l'Assemblée nationale avait institué, à l'encontre de la personne morale en infraction, une amende pouvant atteindre le quintuple de celle imposée aux personnes physiques, sur la base de l'article 131-8 du code pénal, le Sénat a ajouté la possibilité d'une interdiction de l'activité pendant cinq années au plus, ainsi que la diffusion de la décision prononcée soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication audiovisuelle, sur la base de l'article 131-9 du même code ;

- ensuite, dans le cadre du dispositif visant à prévenir les actions visant à faire retirer des informations parfaitement licites. L'Assemblée nationale avait ajouté à cette fin un alinéa à l'article 43-8 sanctionnant, sur la base du premier alinéa de l'article 431-1 du code pénal, le fait de caractériser de façon abusive une apparence d'illicéité pour obtenir un tel retrait. Le Sénat, suivant en cela l'avis du rapporteur de sa Commission des lois, M. Alex Turk, l'a supprimé en considérant que les conditions d'application requises par cet article 431-1, à savoir que l'entrave se fasse de manière concertée et à l'aide de menaces, avait peu de chance d'être réunies. Il a introduit à la place un article additionnel, l'article 43-9-1 A (nouveau), reprenant les mêmes sanctions, c'est-à-dire une peine d'un an d'emprisonnement et 15.000 euros d'amende, en visant directement le fait de présenter un contenu comme étant illicite dans le but d'en obtenir le retrait alors qu'on sait cette information inexacte, et cette fois sans autre condition cumulative, ce qui a pour effet de rendre le dispositif plus opérationnel.

En quatrième lieu, le Sénat, suivant toujours en cela l'avis du rapporteur de sa Commission des lois, a supprimé la procédure de notification facultative que l'Assemblée nationale avait introduite en première lecture, au motif que l'inscription de cette procédure facultative dans la loi générerait davantage de difficultés contentieuses qu'elle n'en résoudrait, rien n'empêchant pas ailleurs les hébergeurs de mettre à la disposition des utilisateurs de l'Internet des formulaires en ligne, grâce auxquels ils guideraient les internautes qui souhaiteraient signaler certains contenus qu'ils estimeraient illicites.

En cinquième lieu, le Sénat a supprimé l'alinéa introduit par l'Assemblée nationale à l'article 43-11, visant à créer pour les hébergeurs une obligation de moyens s'agissant du repérage préventif de données relatives à l'apologie des crimes de guerre, au racisme ou à la pédophilie. En la matière, le rapporteur de la Commission des lois du Sénat a contesté les interprétations de l'article 15 et des considérants 47 et 48 de la directive 2000/31/CE qui avaient prévalu à l'Assemblée nationale, en arguant notamment de ce qu'aucun autre Etat membre de l'Union européenne n'avait prévu, en transposant cette directive, un dispositif « spécifique » semblable.

De fait, la directive n'affecte pas la possibilité des législations nationales d'exiger des prestataires qu'ils préviennent une violation. En effet, si son article 15 interdit aux Etats membres d'imposer une obligation générale de rechercher activement des faits ou des circonstances révélant des activités illicites, - car la surveillance générale de millions de sites et de pages Web serait, en pratique, impossible, et déboucherait sur une charge disproportionnée pour les prestataires intermédiaires, ainsi que sur des coûts d'accès plus élevés pour les utilisateurs - , il n'empêche néanmoins pas les autorités publiques d'imposer une obligation de surveillance dans un cas spécifique clairement défini.

En sixième lieu, le Sénat a modifié le dispositif de droit de réponse introduit par l'Assemblée nationale en première lecture à travers le nouvel article 43-14-1. D'une part, il a supprimé la limitation du droit de réponse aux seuls services de communication publique en ligne utilisant un mode écrit de diffusion de la pensée, c'est-à-dire à la seule presse écrite en ligne, le rapporteur de la Commission des lois ayant fait valoir qu'un droit de réponse existe déjà, dans le cadre de la communication audiovisuelle, en vertu de l'article 6 de la loi du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle. D'autre part, le Sénat a ajouté une précision relative à la personne auprès de laquelle ce droit de réponse est exercé.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 5) modifiant la rédaction de cet article afin de supprimer le chapitre VI du titre II de la loi du 30 septembre 1986, qui contient le régime actuel de responsabilité des fournisseurs d'accès et hébergeurs, tel que créé par la loi du 1er août 2000, ainsi que les paragraphes III et IV de l'article 2.

Il s'agissait d'ouvrir la voie à un transfert vers le projet de loi lui-même, plutôt que dans la loi du 30 septembre 1986, des dispositions du III et du IV de l'article 2.

La Commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 2

Responsabilité des prestataires techniques établie dans le texte même
du projet de loi

La Commission a examiné un amendement du rapporteur portant article additionnel après l'article 2 et reprenant, hors de la loi du 30 septembre 1986, les dispositions insérées dans cette loi par l'article 2 dans sa rédaction actuelle.

Le rapporteur a indiqué que cet amendement poursuivait la sortie de la loi du 30 septembre 1986 des dispositions adoptées à l'article 2. Il a précisé qu'il rétablissait, en outre, pour les hébergeurs, une obligation spécifique de surveillance des contenus dont la diffusion est constitutive de certaines infractions particulièrement odieuses. Il a rappelé que cette disposition avait été adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture puis supprimée par le Sénat qui l'a jugé non compatible avec la directive. Le rapporteur a estimé que cette analyse lui paraissait contestable, la directive interdisant l'institution d'une obligation générale de surveillance mais ne faisant pas obstacle à l'institution d'une obligation spécifique de surveillance proposée par le présent amendement.

M. François Brottes s'est interrogé sur le sens de l'expression « prévenir la diffusion » retenue par l'amendement à propos de cette obligation de surveillance.

Le rapporteur a indiqué qu'il appartiendrait aux hébergeurs de s'efforcer d'empêcher la diffusion des contenus visés.

Puis, la Commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 6) portant article additionnel après l'article 2.

Article 4

Responsabilité des prestataires techniques intermédiaires

Cet article n'a été modifié par le Sénat qu'en vue de le mettre en cohérence, en ce qui concerne un des articles du code des postes et télécommunications qu'il vise, avec les modifications de ce code effectuées entre-temps par la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, qui a déjà créé un article L. 32-5 en son article 72, et un article L. 32-6, reprenant l'ancien contenu de l'article L. 32-3-3 en son article 126.

Le paragraphe I de l'article 4 était donc devenu sans objet, et il fallait modifier l'article visé au paragraphe III.

La Commission a adopté cet article sans modification.

Article 5

(Article L. 34-11 du code des postes et télécommunications) -

Attribution et gestion des noms de domaine

Cet article n'est resté en discussion au terme de la lecture au Sénat qu'en raison d'une précision rédactionnelle souhaitée par le Gouvernement, à savoir le remplacement de la référence à des « adresses » par une référence à des « noms de domaine », à l'avant-dernier alinéa du II introduit en première lecture par l'Assemblée nationale.

La Commission a adopté cet article sans modification.

Chapitre III

Régulation de la communication

Ce chapitre, créé en première lecture par l'Assemblée nationale, vise à compléter le dispositif de régulation de l'audiovisuel. Son insertion dans le même titre que celui qui englobe l'Internet dans la communication publique en ligne participe de l'ambiguïté quant au régime juridique applicable à l'activité de diffusion sur Internet, même s'il est bien clair qu'il n'y est question que des services de radio et de télévision.

Le Sénat l'a complété par un article additionnel introduisant une nouvelle limite à l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle.

Article 5 bis

(articles 42-1 et 42-2 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986)

Cas d'infraction pénale

Cet article accroît le pouvoir du Conseil supérieur de l'audiovisuel en cas d'infraction d'un éditeur ou d'un distributeur de services de radio ou de télévision.

Il modifie les articles 42-1 et 42-2 de la loi du 30 septembre 1986.

Le paragraphe I a été complété par le Sénat, afin d'introduire de nouvelles modifications de l'article 42-1, qui vise les sanctions que le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut imposer à un éditeur ou un distributeur de services de radio ou de télévision s'il ne se conforme pas aux mises en demeure qui lui ont été adressées.

Après modification, les quatre sanctions sont les suivantes :

1° La suspension de l'édition ou de la distribution du ou des services ou d'une partie du programme pour un mois au plus ;

2° La réduction de la durée de l'autorisation ou de la convention dans la limite d'une année ;

3° Une sanction pécuniaire assortie éventuellement d'une suspension de l'édition ou de la distribution du ou des services ou d'une partie du programme ;

4° Le retrait de l'autorisation ou la résiliation unilatérale de la convention.

Les adaptations introduites par le Sénat ont visé pour l'essentiel à tenir compte de ce que les sanctions ne doivent pas s'appliquer seulement à des services diffusés sous un régime d'autorisation, puisque, depuis l'extension prévue par la loi n° 2000-719 du 1er août 2000, elles peuvent être prises aussi à l'encontre des chaînes et des services du câble et du satellite qui sont soumis à des régimes conventionnés ou déclaratifs.

Toutes les références à une autorisation, qui, dans le texte initial pouvait seule faire l'objet d'une suspension, d'une réduction de durée ou d'un retrait, ont donc été, soit remplacées par une référence plus générale à l'édition ou la distribution du ou des services concernées (aux 1° et 3°), soit complétées par une référence à une convention (aux 2° et 4°).

Ces modifications du Sénat ont utilement complété l'article additionnel adopté par l'Assemblée nationale, qui n'avait effectué cette mise en concordance textuelle qu'au niveau du 3°.

Le paragraphe II rassemblant les modifications de l'article 42-2 a été adopté par le Sénat sans modification.

Il concerne les règles applicables au montant des sanctions pécuniaires décidées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, et ajoute deux alinéas indiquant que ce montant ne peut dépasser celui de l'amende pénale éventuellement applicable, et peut même, si le juge l'ordonne, venir s'imputer sur cette amende pénale, lorsque celle-ci est prononcée ultérieurement.

La Commission a adopté cet article sans modification.

Article 5 quinquies (nouveau)

Limite nouvelle à l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle

Cet article additionnel introduit par le Sénat, à l'initiative du rapporteur de sa Commission des affaires culturelles, modifie le second alinéa de l'article 1er de la loi du 30 septembre 1986 décrivant les limites au principe de liberté de la communication audiovisuelle proclamé au début de cet article.

Il vise à indiquer que cette liberté peut être limitée dans la mesure requise par la protection de l'enfance et de l'adolescence.

Il s'agit là d'une certaine façon d'un hommage aux préoccupations exprimées par le rapporteur de la Commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, M. Jean Dionis du Séjour, car celui-ci avait déjà, dans le cadre de sa proposition d'amendement finalement retirée en faveur de l'autonomie juridique de la liberté de la communication publique en ligne, déjà pris en compte cette limitation nécessaire à la liberté de la communication publique en ligne. D'autre part, son amendement ayant conduit à l'ajout d'un alinéa à l'article 43-11 de la loi du 30 septembre 1986, supprimé par le Sénat, visait également une obligation de moyens pour les hébergeurs quant à la recherche préventive d'informations pouvant porter atteinte à la protection de l'enfance et de l'adolescence.

La Commission a adopté cet article sans modification.

TITRE II

DU COMMERCE ELECTRONIQUE

Chapitre Ier

Principes généraux

Article 6

Définition du commerce électronique et de l'établissement

Le Sénat a modifié cet article dans ses deux premiers alinéas.

Tout en conservant le principe consistant à poser une définition du commerce électronique, il est revenu dans le premier alinéa sur la description proposée par le texte initial, au motif que la définition retenue par l'Assemblée nationale subordonnait son exercice à un paiement, ce qui présenterait l'inconvénient d'exclure toute la part de l'activité consistant à offrir le bien ou le service, avant son achat.

Il convient de remarquer que l'expression « assure à distance et par voie électronique la fourniture de biens » relève de manière étonnante du registre d'une législation futuriste sur la télétransportation, c'est-à-dire du transport par voie d'ondes électromagnétiques des objets physiques préalablement dématérialisés, puis reconstitués à leur point d'arrivée.

Quant au deuxième alinéa affirmant le principe de la responsabilité unique du commerçant en ligne sur toutes les opérations concourant la bonne fin de la fourniture, il a été jugé par les rapporteurs de la Commission des affaires économiques du Sénat comme « de nature à remettre potentiellement en cause tout l'équilibre juridique actuel de la relation commerciale » et a été supprimé.

A contrario, cela signifierait que l'équilibre juridique actuel de la relation commerciale admettrait que l'acheteur en ligne puisse ne pas être livré sans qu'il lui soit possible d'engager d'aucune manière la responsabilité de son unique interlocuteur : le commerçant en ligne.

En l'occurrence, même si les articles L. 7 et L. 13 du code des postes et télécommunications confèrent l'irresponsabilité de La Poste sur ses services d'acheminement de base, la responsabilité du vendeur en ligne devrait rester engagée du fait qu'il a confié le transport à un intermédiaire lui-même dégagé par la loi de toute responsabilité sur la bonne fin de ses prestations.

La Commission a examiné un amendement du rapporteur modifiant la définition du commerce électronique, afin de rétablir celle que l'Assemblée nationale avait adopté en première lecture, et ajoutant un alinéa insistant sur la responsabilité du commerçant en ligne sur toutes les opérations intermédiaires de la prestation concourant au respect des termes de la commande.

Le rapporteur a rappelé que les divergences entre le Sénat et l'Assemblée nationale sur cet article concernaient, d'une part, le fait de savoir si la publicité devait être considérée comme une forme de commerce électronique et, d'autre part, le champ de la responsabilité des commerçants en ligne.

Il a notamment insisté sur la spécificité du commerce en ligne, en indiquant que cette spécificité se caractérisait par un dialogue limité, via Internet, avec le vendeur en ligne, par une perception sensorielle elle aussi limitée de l'objet acheté, et enfin par l'importance plus grande de la fonction logistique considérée dans son ensemble (stockage, transport, livraison).

M. François Brottes a souhaité savoir si le troc serait considéré comme faisait partie du commerce au sens de cette définition.

Le rapporteur lui a répondu, d'une part, que le commerce en ligne au sens de la définition proposée correspondait à une activité réalisée à titre professionnel et, d'autre part, que le paiement faisant partie de la définition proposée n'était pas nécessairement un paiement monétaire.

La Commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 7), puis l'article 6 ainsi modifié.

Article 7

Principe de liberté du commerce électronique, exceptions et détermination
de la loi applicable

Le dispositif de l'article 7 tel qu'il avait été adopté par l'Assemblée nationale n'a pas été modifié dans son contenu par le Sénat.

En revanche, l'effort de clarification rédactionnelle conduit par la Commission des lois de l'Assemblée nationale a été poursuivi par le Sénat à travers une redistribution du contenu initial sur deux articles, grâce à la création d'un article additionnel.

Le nouvel article 7 pose un principe général de liberté du commerce électronique sur le territoire national.

Le paragraphe I assortit ce principe d'exceptions visant les personnes établies en France.

Le paragraphe II définit les conditions minimales imposées aux personnes établies dans un autre Etat membre de l'Union européenne pour l'exercice de cette activité en France.

La Commission a adopté cet article sans modification.

Article 7 bis (nouveau)

Règles applicables en cas de commerce électronique international

Cet article 7 bis reprend intégralement le dispositif du paragraphe II de l'ancien article 7.

La Commission a adopté cet article sans modification.

Article 8

Clause de sauvegarde

Cet article dispose qu'un décret en Conseil d'Etat définit les cas dans lesquelles l'autorité administrative peut restreindre le libre exercice du commerce électronique.

Le Sénat a élargi le champ de ces conditions en ajoutant à la liste des différents cas envisagés, à savoir principalement l'atteinte au maintien de l'ordre et de la sécurité publics, à la protection des mineurs, à la protection de la santé publique, les circonstances où il existe un risque sérieux et grave que ces mêmes cas puissent se produire.

La Commission a adopté cet article sans modification.

Article 9

Éléments d'information obligatoires permettant
l'identification du prestataire

Le Sénat a modifié cet article en supprimant l'obligation d'information concernant les noms et les versions des logiciels utilisés, et en revenant au texte initial du projet de loi par l'ajout de trois nouvelles obligations d'information relatives respectivement :

- au numéro individuel d'identification d'assujetti à la taxe à la valeur ajoutée ;

- à l'identité de l'autorité ayant délivré l'autorisation d'exercice de l'activité, si une autorisation est requise ;

- aux coordonnées de l'ordre ou de l'organisme professionnel de rattachement, pour les professions réglementées.

Ce retour à la rédaction initiale s'est accompagné logiquement de la suppression de l'alinéa renvoyant à un simple décret le soin de préciser et compléter la portée de l'obligation de transparence.

La Commission a adopté cet article sans modification.

Chapitre II

La publicité par voie électronique

Article 11 bis (nouveau)

Définition du courrier électronique

A l'initiative des membres du groupe socialiste, l'Assemblée nationale a, en première lecture, complété l'article 12 relatif à la prospection publicitaire directe par un paragraphe, devenu le III de cet article, définissant la notion de courrier électronique. La définition retenue reprenait celle figurant à l'article 2 de la directive 2002/58/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 juillet 2002 concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques.

Votre rapporteur avait, lors de la séance publique, souligné le caractère opportun de cet ajout mais avait également regretté, pour des raisons de forme, que cette définition soit insérée dans le corps de l'article 12.

Le Sénat, à l'initiative de sa Commission des affaires économiques, a manifesté la même préoccupation de forme et a, en conséquence, déplacé cette disposition en en faisant un article additionnel devenu l'article 11 bis du projet de loi tout en supprimant par coordination le paragraphe correspondant de l'article 12.

Les sénateurs ont maintenu l'insertion de cette définition à l'article L. 32 du code des postes et télécommunications, consacré à la définition de diverses notions relatives aux télécommunications, auquel est ainsi ajouté un nouvel alinéa numéroté 10° bis.

Le Sénat a, en outre, apporté une modification d'ordre rédactionnel à la définition en substituant à l'expression de « réseau public de communications » qui figure dans la directive, celle de « réseau ouvert au public » qui figure au cinquième alinéa (3 °) de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications.

Si la définition du courrier électronique trouve mieux sa place dans cet article additionnel que dans le corps de l'article 12, il n'est pas évident que le Sénat soit parvenu à une articulation du texte pleinement satisfaisante. Le nouvel article 11 bis figure, en effet, dans le chapitre du projet de loi consacré à la publicité par voie électronique qui, fort heureusement, n'épuise pas les usages du courrier électronique. Il serait donc plus logique que cette définition figure en amont dans le projet de loi au stade des définitions générales relatives à la communication publique en ligne.

Après que M. Léonce Deprez se fut félicité que le rapporteur ait fait un effort de mise en cohérence et de clarté du texte, effort qui correspondait à une revalorisation souhaitable du rôle du législateur face à une administration qui s'arrogeait habituellement le monopole de l'initiative de la rédaction des lois, la Commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 8) portant suppression de cet article, devenu inutile compte tenu des modifications proposées à l'article 1er.

Article 12

(article L. 33-4-1 du code des postes et télécommunications
et article L. 121-20-5 du code de la consommation)

Régime de la prospection directe

Cet article concerne la prospection publicitaire directe par automate ou par courrier électronique et transpose l'article 13 de la directive 2002/58/CE du 12 juillet 2002.

Le paragraphe I de cet article propose une nouvelle rédaction de l'article L. 33-4-1 du code des postes et télécommunications.

Le premier alinéa de la nouvelle rédaction de cet article codifié interdit la prospection directe au moyen d'automates d'appel ou de télécopieurs sans consentement préalable de la personne démarchée. Il a fait l'objet, au Sénat, de deux modifications d'ordre rédactionnel.

Le deuxième alinéa de cet article codifié interdit la prospection directe au moyen de courriers électroniques d'une personne physique ou d'une personne morale non inscrite au registre du commerce et des sociétés sans consentement préalable de la personne démarchée.

La Commission a examiné un amendement du rapporteur tendant à limiter l'interdiction de prospection directe par courrier électronique sans consentement préalable aux messages adressés aux personnes physiques.

Le rapporteur a indiqué que la directive 2002/58/CE du 12 juillet 2002, que le présent article du projet de loi transpose, n'imposait une telle interdiction que pour les messages adressés aux personnes physiques. Il a rappelé qu'en conséquence et afin de ne pas entraver le développement des échanges, l'Assemblée nationale en première lecture comme le Sénat n'avait pas souhaité la rendre applicable aux messages adressés à toutes les personnes morales mais seulement à ceux adressés aux personnes morales non inscrites au registre du commerce et des sociétés. Il a indiqué que les contacts qu'il avait eus depuis la première lecture avec les professionnels concernés avaient fait apparaître le caractère peu opératoire de cette distinction parmi les personnes morales et les difficultés d'application susceptibles d'en résulter.

M. Alain Gouriou s'est interrogé sur les conditions d'obtention du consentement préalable.

Le rapporteur a expliqué que ce consentement était généralement donné en remplissant un formulaire en ligne enregistrant le souhait d'obtenir des informations sur les offres commerciales futures. Il a précisé que toute prospection directe, y compris à destination des personnes morales, devait être assortie de l'obligation d'offrir à la personne sollicitée la possibilité d'exprimer son refus de recevoir des envois ultérieurs.

M. Alain Gouriou a indiqué, en s'appuyant sur l'exemple du publipostage, et des démarcheurs faisant du porte à porte, qu'il n'était pas possible en la matière d'aller jusqu'à entraver l'exercice de la liberté du commerce, et qu'il convenait de trouver un régime équilibré pour la prospection par courrier électronique afin d'assurer la protection du consommateur ; qu'à tout le moins, il était indispensable de recueillir l'assentiment de ce dernier pour que la prospection commerciale se poursuive.

M. Léonce Deprez a contesté l'analogie avec le publipostage en faisant remarquer que la prospection par courrier électronique s'effectuait à une toute autre échelle.

M. Pierre Cohen a soutenu les propos de M. Alain Gouriou en faisant remarquer que les boîtes à lettres électroniques étaient fréquemment saturées par le démarchage publicitaire, que ce phénomène ne ferait que s'amplifier si les fichiers d'adresses pouvaient s'échanger librement, et que le groupe d'études sur les technologies de l'information de l'Assemblée nationale avait clairement marqué son souhait d'une généralisation de la règle du consentement préalable.

M. François Brottes a souligné le caractère potentiellement factice de la distinction entre personnes morales et personnes physiques en indiquant qu'il était assez facile pour un individu de se confondre avec une entité ayant le statut de personne morale. Il a insisté sur la nécessité de mettre en place une législation très sévère pour éviter la prolifération de la prospection directe par courrier électronique. Il a mis l'accent sur la différence du coût de mise en œuvre du publipostage et de la prospection directe par courrier électronique, qui incitait fortement au développement de ce dernier, sans que celui-ci eût un impact sur l'activité économique, alors que le publipostage générait, outre une partie du chiffre d'affaires de La Poste, des commandes pour l'industrie du papier et de l'imprimerie.

M. Yves Simon a ajouté que la réception d'un courrier électronique pouvait en outre induire un coût de communication, alors que le recueil de documents publicitaires dans sa boîte aux lettres restait gratuit pour le destinataire.

Le rapporteur a indiqué que le projet de loi faisait preuve d'une grande sévérité vis-à-vis de la prospection directe puisqu'il instaurait le consentement préalable comme règle générale pour la prospection à l'intention des personnes physiques. Il a ajouté que, par voie d'amendements, il proposait, en outre, d'améliorer l'efficacité de la lutte contre les pratiques illicites en la matière, d'une part, par des dispositions tendant à permettre l'intervention de la Commission nationale de l'informatique et des libertés et, d'autre part, en ouvrant la possibilité aux opérateurs de services de communication électroniques et notamment aux fournisseurs d'accès Internet de se porter partie civile contre des prospecteurs abusifs. Il a enfin confirmé l'analyse selon laquelle la prospection directe se trouvait naturellement encouragée par son faible coût.

Puis, la Commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 9).

A l'initiative du rapporteur, l'Assemblée nationale a inséré un troisième alinéa à cet article afin de définir le consentement préalable. La définition proposée était celle figurant à l'article 2 de la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données à laquelle renvoie la directive du 12 juillet 2002.

Cet alinéa a été supprimé par le Sénat sur la proposition du Gouvernement (qui s'en était pourtant remis à la sagesse de l'Assemblée nationale sur l'amendement créant cet alinéa...). La ministre déléguée à l'industrie a ainsi expliqué que « la définition du consentement ne concerne pas uniquement la prospection commerciale non sollicitée par voie électronique » mais qu'elle a « une incidence sur l'ensemble de la question de la protection des données à caractère personnel » de sorte qu'une définition législative de la notion « relèverait plutôt de la loi de transposition de la directive 95/46/CE qui a été adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale le 30 janvier 2002, et par le Sénat le 1er avril 2003 ».

Il s'agirait sans doute d'une solution intellectuellement plus satisfaisante. Toutefois, près de deux ans après sa première lecture, l'inscription à l'ordre du jour prioritaire de notre Assemblée pour une deuxième lecture de ce projet de loi (le projet de loi relatif à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés) n'est pas prévue.

Reste que la définition du consentement préalable ne concerne effectivement pas que la prospection commerciale. M. Pierre Hérisson, au nom de la Commission des affaires économiques du Sénat, avait donc formulé une proposition intéressante tendant à formuler une définition du consentement préalable tout en précisant que cette définition était valable pour l'application du présent article.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 10) définissant le consentement préalable prévu par les dispositions du présent article.

Le quatrième alinéa du texte adopté par l'Assemblée nationale pour cet article codifié a également été supprimé par le Sénat. Il s'agissait d'un alinéa introduit à l'initiative de votre rapporteur afin de préciser que l'interdiction de la prospection directe n'était pas applicable à la transmission d'informations visant directement la protection des personnes ou la sécurité du territoire et notamment la gestion ou la prévention de risques naturels, industriels ou sanitaires.

Il a été supprimé à l'initiative de la Commission des affaires économiques du Sénat qui a estimé que cette précision était superfétatoire, le cas visé ne pouvant être assimilé à une opération de prospection directe.

Ce raisonnement, qui est séduisant, le serait davantage encore si cette notion de prospection directe faisait l'objet d'une définition excluant incontestablement les communications n'ayant pour objet la promotion, à des fins commerciales, de biens et services.

Cette définition n'existe pas, à la connaissance de votre rapporteur, dans notre droit. La directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur définit ainsi clairement, au point f de son article 2, la notion de communication commerciale en précisant qu'il s'agit de « toute forme de communication destinée à promouvoir, directement ou indirectement, des biens, des services, ou l'image d'une entreprise, d'une organisation ou d'une personne ayant une activité commerciale, industrielle, artisanale ou exerçant une profession réglementée ».

Puis, la Commission a examiné un amendement du rapporteur définissant la prospection directe comme l'envoi de tout message destiné à promouvoir directement ou indirectement des biens, des services ou l'image d'une personne vendant des biens ou fournissant des services.

M. Alain Gouriou a fait observer que l'envoi de courriers électroniques en nombre ne concernait pas seulement l'offre de nature commerciale, mais aussi le démarchage à but politique ou en faveur de causes humanitaires, et que celui-ci ne semblait pas être couvert par la définition proposée alors même qu'il pouvait atteindre des niveaux insupportables à certains moments, par exemple durant les campagnes électorales.

Le rapporteur a reconnu que, de fait, une grande partie des envois non sollicités, en particulier ceux adressés aux députés, n'avait pas un caractère commercial. Il a indiqué avoir longuement réfléchi à une définition alternative de la prospection directe permettant de les prendre en compte et y avoir renoncé, à regret, faute de parvenir à une définition satisfaisante et compte tenu des risques d'atteinte à la liberté d'expression.

Le président a souhaité que le rapporteur poursuive sa réflexion afin d'élargir la définition en l'étendant aux actions de prospection à des fins politiques ou humanitaires en estimant que ces sollicitations intempestives constituaient de véritables atteintes à la vie privée, surtout lorsqu'elles utilisaient le canal de la téléphonie mobile.

M. François Brottes a suggéré d'examiner si la notion de « prosélytisme » ne pouvait pas aider à surmonter ces difficultés de définition. Il a demandé au rapporteur de repréciser les règles s'imposant aux vendeurs et aux particuliers en matière de prospection commerciale.

Le rapporteur a insisté sur le fait que le projet de loi, conformément à la directive, s'inscrivait uniquement dans une perspective de relations commerciales entre professionnels ou entre professionnels et particuliers. Il a expliqué que les différenciations en ce qui concernait le régime applicable en matière de prospection directe s'effectuaient en fonction de la nature du destinataire du courrier commercial : s'il s'agissait d'un particulier ; il bénéficiait du régime du consentement préalable ; s'il s'agissait d'un professionnel, il bénéficiait seulement du régime du désabonnement.

M. Patrick Ollier est revenu sur le fait que les atteintes à la vie privée provoquées par les courriers non sollicités étaient insupportables et qu'il convenait de trouver une solution à ce problème.

M. Alain Gouriou, estimant que le problème des envois non sollicités n'ayant pas un caractère commercial dépassait le champ de la seule « économie numérique » et sortait donc de l'objet du projet de loi, s'est alors interrogé sur la possibilité de le traiter dans le cadre de la future transposition du « paquet télécoms ».

M. Léonce Deprez a soutenu cette même idée, en constatant que l'élargissement du champ de la prospection directe relevait idéalement d'un projet de loi qui porterait sur la « communication numérique ». Il a indiqué qu'il n'était pas étonné que le rapporteur ait été confronté à des difficultés de définition dans sa tentative d'appréhender certains phénomènes, puisqu'il abordait, à travers ce projet de loi, un champ juridique complètement vierge, auquel il mériterait d'ailleurs de voir ultérieurement son nom attaché, compte tenu de son travail pionnier.

Puis, la Commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 11).

Le troisième alinéa de la rédaction adoptée par le Sénat (qui correspond donc au cinquième alinéa de la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale) établit une dérogation à l'interdiction générale de prospection directe sans consentement préalable. Il s'agit, en fait, d'autoriser la prospection directe par courrier électronique lorsque celle-ci s'inscrit dans le prolongement d'une relation commerciale existante. Trois conditions doivent être satisfaites pour que cette prospection directe soit possible.

En premier lieu, les coordonnées du destinataire doivent avoir été recueillies à l'occasion d'une vente ou d'une prestation de service dans des conditions conformes à la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, c'est-à-dire en particulier, « directement auprès de lui ».

En second lieu, le destinataire doit se voir offrir la possibilité de s'opposer à l'utilisation de ses coordonnées lorsque celles-ci sont recueillies et à chaque fois qu'un courrier électronique de prospection lui est adressé.

Enfin, cette prospection directe n'est possible que pour certains produits ou services. Outre des modifications d'ordre essentiellement rédactionnelles, c'est sur ce point que les rédactions adoptées par l'Assemblée nationale et par le Sénat divergent.

Le point 2 de l'article 12 de la directive prévoit que la prospection directe par une personne n'est autorisée que pour « des produits ou services analogues » à ceux dans le cadre de la vente desquels les coordonnées du destinataire ont été recueillies et lorsque ces « produits ou services analogues » sont fournis directement par la personne ayant réalisé la précédente vente et réalisant la prospection.

La rédaction initiale du projet de loi évoquait des « produits ou services analogues à ceux antérieurement fournis par la même personne ».

La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture autorisait, quant à elle, la prospection directe concernant « des produits ou services analogues de la même entité commerciale à ceux fournis par la même entité commerciale ». Cette rédaction, fort peu satisfaisante, résultait de l'adoption successive de deux amendements distincts, l'un de M. André Santini (pour lequel le Gouvernement s'en était remis à la sagesse de l'Assemblée) et l'autre de votre rapporteur (pour lequel le Gouvernement avait émis un avis favorable).

Afin de corriger cette erreur matérielle et dans un souci de clarification, le Sénat, à l'initiative de sa Commission des affaires économiques, a adopté une rédaction permettant la prospection directe lorsque celle-ci concerne « des produits ou services fournis par la même personne physique ou morale ».

Cette rédaction ne restreint donc plus la prospection directe autorisée à titre dérogatoire aux seuls produits et services « analogues » à ceux fournis antérieurement, notion qui figure pourtant dans la directive, comme l'a rappelé la ministre déléguée à l'industrie lors de la séance publique du Sénat, mais que le rapporteur au fond du Sénat, M. Pierre Hérisson, a jugé trop vague.

On rencontre pourtant déjà l'adjectif « analogue » dans notre droit, plutôt d'ailleurs pour qualifier des personnes que des biens. Cet adjectif figure ainsi à l'article 9 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des églises et de l'Etat qui prévoit, en cas de dissolution d'une association cultuelle, l'attribution des biens qui lui ont été dévolus à « à des associations analogues dans la même circonscription ».

Outre la notion de « corps analogues » que l'on rencontre dans divers textes réglementaires relatifs à la fonction publique, on trouve aussi cet adjectif notamment à l'article 23 de la loi de 1946 relative à la nationalisation du gaz et de l'électricité établissant le statut des distributeurs non nationalisés, à l'article 4-1, qui date de 1997, de la loi n° 92-1282 du 11 décembre 1992 relative aux procédures de passation de certains contrats dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications dite « loi Sapin » et dans divers articles codifiés (article L. 330-2 du code de commerce, article L. 611-6-1 du code de la sécurité sociale ou articles 261, 295, 1407 et 1408 du code général des impôts par exemple).

On notera également que cet adjectif figure à l'article 6 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine qui dispose que « le programme national de rénovation urbaine vise à restructurer (...) les quartiers classés en zone urbaine sensible et, à titre exceptionnel (...) ceux présentant des caractéristiques économiques et sociales analogues ». Cette rédaction trouve son origine dans un amendement adopté par le Sénat lors de sa séance du 22 juillet 2003 et présenté par M. Pierre André, rapporteur au nom de la Commission des affaires économiques.

Force est néanmoins de constater que l'adjectif reste peu fréquent dans notre droit et qu'il ne se caractérise pas par sa précision.

Le quatrième alinéa de cet article codifié interdit, dans tous les cas, l'émission de messages de prospection sans préciser au destinataire les modalités selon lesquelles il peut demander que ces envois cessent. Il interdit également de dissimuler l'identité de la personne pour le compte de laquelle le message est émis ou de mentionner un objet sans rapport avec la prestation ou le service proposé. Le Sénat a apporté deux modifications d'ordre rédactionnel à cet alinéa.

Le cinquième alinéa, qui trouve son origine dans un amendement de votre rapporteur, dispose que la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) recueille les plaintes relatives aux infractions aux dispositions du présent article.

A l'initiative de votre rapporteur, l'Assemblée nationale, à la sagesse de laquelle le Gouvernement s'en était remis, avait, en outre, complété cet alinéa par une disposition prévoyant que la CNIL utilise « les compétences qui lui sont attribuées par l'article 21 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, en vue de mettre fin aux comportements contrevenants ».

Le Sénat a supprimé cette disposition par un amendement de M. Bernard Fournier bénéficiant d'un avis favorable du Gouvernement. M. Bernard Fournier a expliqué, lors de la séance publique, que son amendement répondait au souci « d'éviter l'énoncé d'un dispositif juridique inexact » en précisant que l'article 21 de la loi du 6 janvier 1978 ne donnait à la CNIL aucun pouvoir de contrainte. Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie, a, pour sa part, indiqué qu'une référence à l'article 28 de la loi du 6 janvier 1978 risquait de devenir obsolète compte tenu des modifications apportées à cette loi par le projet de loi relatif à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés

Ces objections paraissent d'autant moins convaincantes à votre rapporteur qu'elles sont, en réalité, largement contradictoires. Si la CNIL ne dispose effectivement d'aucun pouvoir de contrainte aux termes de la loi du 6 janvier 1978, la modification de cette loi proposée par le projet de loi évoqué par la ministre déléguée à l'industrie vise justement, entre autres objets, à lui confier le pouvoir de prononcer des sanctions administratives. La disposition adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture s'inscrit donc pleinement, sur le fond, dans la logique de ce projet de loi. Sur la forme, il ne parait guère pertinent de s'opposer à une référence à la loi de 1978 au motif que sa modification est prévue par un texte en discussion depuis deux ans et demi. Il appartiendra au législateur de procéder aux coordinations nécessaires lorsque ce projet de loi sera à nouveau examiné ce qui n'est pas, à l'heure actuelle, prévu.

En second lieu, si la disposition adoptée par l'Assemblée nationale est compatible avec la modification prévue de la loi de 1978, elle l'est également avec le droit existant. L'article 21 de la loi du 6 janvier 1978 prévoit, en effet, que la CNIL « reçoit les réclamations, pétitions et plaintes »  (6°) et qu'elle « adresse aux intéressés des avertissements » et « dénonce au parquet les infractions dont elle a connaissance » (4°). Ces prérogatives ne sont toutefois ouvertes par la loi du 6 janvier 1978 que dans le cadre de sa mission qui est de veiller à ce que les traitements automatisés d'informations nominatives soient effectués conformément aux dispositions de cette loi. La CNIL n'est donc pas directement compétente, aux termes de la loi du 6 janvier 1978, pour lutter contre la prospection directe abusive sauf, naturellement, dans la mesure où celle-ci utilise illégalement un traitement informatisé de données nominatives.

Préciser simplement, comme le fait le projet pour la confiance dans l'économie numérique dans sa rédaction adoptée par le Sénat, que la CNIL « recueille les plaintes » relatives aux infractions aux dispositions du présent article revient donc, pour votre rapporteur, à rester au milieu du gué puisque la CNIL ne pourra rien faire des plaintes ainsi recueillies. La disposition supprimée par le Sénat ne donne pas à la CNIL de pouvoir de contrainte mais lui permet, en revanche, d'adresser des avertissements et, le cas échéant, de saisir le parquet.

Une précision mérite d'être apportée sur ce dernier point. Il est prévu par l'article 21 de la loi du 6 janvier 1978 que la CNIL pourra dénoncer au parquet des infractions conformément à l'article 40 du code de procédure pénale. Or, celui-ci prévoit qu'une autorité publique est tenue de saisir le procureur de la République des crimes et délits dont elle acquiert connaissance. La question de l'application de cette disposition aux contraventions pourrait donc être posée. Sauf à considérer que l'article 21 de la loi de 1978 est redondant avec l'article 40 du code de procédure pénale, qui s'impose notamment à la CNIL, on doit estimer qu'il couvre également les contraventions. Pour celles-ci, la compétence de saisine du parquet de la CNIL trouve donc bien son origine directement dans la loi de 1978. Or, les infractions au présent article sont des contraventions.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 12) disposant que la Commission nationale de l'informatique et des libertés veillerait au respect des dispositions du présent article en utilisant les compétences qui lui sont reconnues par la loi du 6 janvier 1978.

Le sixième alinéa précise les modalités de recherche et de constatation des infractions au présent article. Il n'a pas été modifié par le Sénat.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 13) ouvrant aux opérateurs de communication électronique dont les équipements ont été utilisés à l'occasion de la Commission d'une infraction aux dispositions du présent article la possibilité de se porter partie civile en ce qui concerne cette infraction lorsque l'action publique a été mise en mouvement par le ministère public ou la partie lésée.

Enfin, le dernier alinéa relatif au décret d'application du présent article n'a pas, non plus, été modifié.

Le paragraphe II reproduit l'article L. 33-4-1 du code des postes et télécommunications, qui fait l'objet d'une nouvelle rédaction au paragraphe I, à l'article L. 121-20-5 du code de la consommation

Le paragraphe III, ajouté par l'Assemblée nationale et qui comprenait une définition du courrier électronique, a été supprimé par le Sénat par coordination avec le déplacement de la disposition correspondante au sein d'un nouvel article 11 bis.

Enfin, le paragraphe IV organise un régime transitoire. Ce paragraphe a été créé par l'Assemblée nationale afin de permettre aux entreprises d'offrir à leurs clients ou prospects la possibilité d'exprimer leur consentement à de futures opérations de prospection directe. A cette fin, l'Assemblée nationale avait prévu une entrée en vigueur des dispositions du présent article au 31 octobre 2003, date limite de transposition des dispositions de la directive du 12 juillet 2002.

Compte tenu du rythme de discussion du projet de loi, cette date, qui était déjà optimiste en février 2003 lors de l'adoption en première lecture du projet de loi par l'Assemblée nationale, n'est évidemment plus adaptée. Le Sénat a donc modifié ce dispositif sur deux points.

Il a, en premier lieu, prévu une entrée en vigueur des dispositions du présent article six mois après l'entrée en vigueur de la loi. Cette disposition est manifestement incohérente (l'entrée en vigueur de la loi correspondant à l'entrée en vigueur de l'ensemble de ses dispositions y compris celles dont il s'agirait justement ici de reporter l'entrée en vigueur) et contraire à la directive.

D'autre part, le Sénat a précisé que, pendant la période transitoire, les informations loyalement acquises auprès des clients et prospects ne pourraient être utilisées qu' « une fois et une seule » afin de leur offrir la possibilité d'exprimer leur consentement à de futures opérations de prospection directe. Cette disposition paraît inadaptée au vu des pratiques habituelles de l'Internet. De nombreux internautes saisis par l'une de leurs relations commerciales ne lui répondront pas, ne serait-ce que par négligence et cette entreprise se trouverait, en conséquence, privée par la suite du droit de les relancer. Cette disposition aurait donc pour effet, d'une part, de priver les entreprises d'une grande partie sinon de l'essentiel des fichiers commerciaux qu'elles ont constitués et, d'autre part, d'interrompre des relations commerciales que des clients pourraient souhaiter voir se poursuivre par le seul fait qu'ils auraient négligé de manifester cette volonté. Elle est donc de nature à freiner le développement du commerce électronique contrairement aux objectifs généraux de la loi.

Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale en première lecture n'étant plus adapté et celui adopté par le Sénat ne l'étant pas non plus, il convient donc de définir un autre dispositif.

La Commission a examiné un amendement du rapporteur prévoyant que les personnes dont les coordonnées ont été recueillies de manière licite avant la publication de la présente loi sont présumées avoir exprimé leur consentement préalable à l'utilisation de ces coordonnées à fin de prospection directe.

Le rapporteur a rappelé que le nouveau dispositif posait un réel problème aux entreprises ayant constitué, dans le respect de la législation en vigueur, des fichiers commerciaux, représentant des actifs économiques importants puisqu'elles ne pourraient plus les utiliser. Il a rappelé que l'Assemblée nationale en première lecture et le Sénat avaient recherché une solution reposant sur l'organisation d'une période transitoire avant la mise en œuvre des dispositions du présent article mais que cette solution posait des difficultés d'application et qu'elle n'était, en tout état de cause, plus envisageable compte tenu de l'expiration du délai de transposition de la directive.

La Commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 14) puis l'article 12 ainsi modifié.

Article 13 bis (nouveau)

Coordination

L'ordonnance nº 2001-741 du 23 août 2001 portant transposition de directives communautaires et adaptation au droit communautaire en matière de droit de la consommation a notamment modifié les articles L. 121-16 et suivants du code de la consommation.

En revanche, l'article L. 121-27 du même code n'a pas été modifié alors qu'il visait notamment cet article L. 121-16. Compte tenu de sa modification, cette référence n'a plus de sens.

M. Pierre Hérisson, dont on ne peut que saluer la vigilance, a donc proposé au Sénat qui l'a suivi une modification de l'article L. 121-27 du code de consommation procédant aux coordinations nécessaires compte tenu des dispositions de l'ordonnance du 23 août 2001.

La Commission a adopté l'article 13 bis sans modification.

Chapitre III

Les obligations souscrites sous forme électronique

Article 14

(articles 1108-1 et 1108-2 et chapitre VII nouveaux du code civil)

Régime des actes et contrats souscrits et conservés
sous forme électronique

Cet article reconnaît la validité des écrits sous forme électronique (I) et établit un régime spécifique pour les contrats conclus sous cette forme (II).

Le paragraphe I crée au sein du code civil deux nouveaux articles, les articles 1108-1 et 1108-2, relatifs à la validité des écrits sous forme électronique.

Le Sénat n'a apporté, à ce paragraphe, qu'une modification d'ordre rédactionnel portant sur l'article 1108-1 du code civil.

La Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 15).

Le paragraphe II crée un nouveau chapitre dans le code civil comprenant trois articles (les articles 1369-1, 1369-2 et 1369-3) relatifs aux contrats sous forme électronique.

Le Sénat a adopté trois amendements portant sur le texte proposé pour l'article 1369-1. Celui-ci dispose notamment qu'un professionnel proposant, par voie électronique, la fourniture de biens ou la prestation de services doit transmettre les conditions contractuelles applicables d'une manière qui permette leur conservation et leur reproduction.

La rédaction initiale du projet de loi précisait que l'auteur était tenu par sa proposition tant que celle-ci restait accessible par voie électronique. L'Assemblée nationale avait, notamment pour tenir compte des systèmes de caches conservant des données retirées par leur éditeur, précisé que tel n'était le cas que dans la mesure où la proposition restait accessible par le fait de son auteur. Le Sénat a opportunément poursuivi ce travail de précision en adoptant, à l'initiative de sa Commission des lois, un amendement indiquant que cette disposition s'imposait sans préjudice des conditions de validité mentionnées dans l'offre.

Le Sénat a, en outre, inséré un nouvel alinéa après le premier alinéa de cet article disposant, d'une part, qu'un décret précisera les modalités de transmission des conditions contractuelles au destinataire de l'offre en cas d'impossibilité technique de satisfaire à l'obligation de conservation et de reproduction prévue et, d'autre part, que, dans les cas d'impossibilité technique, cette obligation ne s'appliquera pas aux services dont le montant est inférieur à un seuil fixé par arrêté ministériel.

Cet amendement, présenté par M. Christian Gaudin et les membres du groupe de l'Union centriste, vise à prendre en compte la spécificité de certains moyens de communication. M. Christian Gaudin a ainsi estimé que l'obligation créée par cet article était « inadaptée au multimédia mobile » dans la mesure où « les terminaux mobiles ne disposent pas de capacités techniques suffisantes » pour la satisfaire « notamment en matière de stockage » ou parce qu'ils « ne permettent pas l'impression des informations reçues ».

Si la Commission des lois du Sénat a émis un avis favorable à l'adoption de cet amendement, le Gouvernement s'est, en revanche, opposé en estimant, semble-t-il, qu'il n'était pas compatible avec le point 3 de l'article 10 de la directive du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur qui dispose que « les clauses contractuelles et les conditions générales fournies au destinataire doivent l'être d'une manière qui lui permette de les conserver et de les reproduire ».

Enfin, le Sénat a adopté un amendement de précision portant sur l'avant-dernier alinéa (5°) de cet article codifié.

Les rédactions proposées pour les articles 1369-2 et 1369-3 du code civil n'ont pas été modifiées par le Sénat.

La Commission a adopté l'article 14 ainsi modifié.

TITRE III

DE LA SÉCURITÉ DANS L'ÉCONOMIE NUMÉRIQUE

Chapitre Ier

Moyens et prestations de cryptologie

Section 1

Utilisation, fourniture, transfert, importation et exportation
de moyens de cryptologie

Article 18

Régime juridique de l'utilisation, de la fourniture, de l'importation
et de l'exportation des moyens de cryptologie

Trois modifications de portée rédactionnelle ont été apportées à cet article par le Sénat.

La Commission a adopté l'article 18 sans modification.

Section 2

Fourniture de prestations de cryptologie

Article 19

Régime juridique de l'activité de fourniture de prestations de cryptologie

Le Sénat a adopté un amendement portant sur cet article régissant l'activité de fourniture de prestations de cryptologie. Outre des modifications d'ordre rédactionnel, cet amendement substitue un décret en Conseil d'Etat au décret simple prévu pour préciser les conditions de mise en œuvre et les éventuelles dérogations à l'obligation de déclaration de fourniture de prestations de cryptologie instituée par le I de cet article.

La Commission a adopté l'article 19 sans modification.

Article 20

Responsabilité des fournisseurs de prestations de cryptologie
à des fins de confidentialité

Cet article établit une présomption de responsabilité des fournisseurs de prestations de cryptologie pour le préjudice subi par les personnes qui leur ont confié la gestion de leurs conventions secrètes en cas d'atteinte à l'intégrité, à la confidentialité ou à l'intégrité des données transformées à l'aide de ces conventions. Cette présomption ne peut être levée par les fournisseurs que s'ils démontrent qu'ils n'ont pas commis de faute. Elle prévaut sur d'éventuelles stipulations contractuelles contraires.

L'Assemblée nationale avait complété cet article par un alinéa disposant qu'en cas de litige, la personne qui prétend avoir subi un préjudice doit établir la matérialité des éléments de faits précis et concordants fondant son action.

Cet alinéa a été supprimé par le Sénat, à l'initiative de sa Commission des lois qui l'a jugé inutile compte tenu du droit commun. Avec un admirable souci du consensus, le Gouvernement qui était favorable à l'ajout de cet alinéa à l'Assemblée nationale a été, au Sénat, favorable à sa suppression.

La Commission a adopté l'article 20 sans modification.

Article 21

Responsabilité des prestataires de services de certification électronique
pour les certificats présentés par eux comme qualifiés

Cet article établit, sous certaines conditions, une présomption de responsabilité des prestataires de services de certification électronique pour les préjudices subis par les personnes s'étant raisonnablement fiées aux certificats qualifiés qu'ils ont émis. Il organise, en outre, la solvabilité de ces prestataires pour faire face, le cas échéant, à la mise en jeu de leur responsabilité.

Les cinq premiers alinéas de cet article sont issus d'un amendement présenté par le Gouvernement et adopté par l'Assemblée nationale en première lecture. La rédaction initiale du début de cet article étant inintelligible, votre Commission avait, en effet, présenté en première lecture un amendement en proposant une nouvelle rédaction clarifiée. L'Assemblée nationale s'était toutefois ralliée à un amendement alternatif présenté par le Gouvernement qui, tout en s'inspirant largement de la rédaction proposée par la Commission, différait de celle-ci sur trois points.

En premier lieu, la rédaction initiale du projet de loi incluait parmi les éléments conditionnant la présomption de responsabilité des prestataires de certification le fait qu'ils n'aient pas procédé à la vérification, d'une part, de « la détention par le signataire, au moment de la délivrance du certificat qualifié, des données relatives à la création de signature correspondant aux données fournies ou identifiées dans le certificat et permettant la vérification de la signature » et, d'autre part, de la « possibilité d'utiliser de façon complémentaire les données relatives à la création et à la vérification de signature, dans le cas où le prestataire de services de certification électronique peut être à l'origine de ces deux types de données ».

Il faut rappeler que le certificat établit un lien entre une personne et un couple complémentaire de clés de chiffrement, l'une dite de création de signature et l'autre dite de vérification de signature. Les deux éléments évoqués ci-dessus reviennent donc à dire que la présomption de responsabilité du prestataire de certification est engagée, d'une part, si le signataire détient bien, au moment où le certificat lui est délivré, la clé de création de signature et si, d'autre part, cette clé est effectivement complémentaire à la clé de vérification de signature.

Or, la clé de signature dont la détention doit être vérifiée est celle correspondant à la clé de vérification, comme cela était indiqué explicitement. Si ces clés correspondent, c'est évidemment qu'elles sont complémentaires. La distinction des deux conditions n'a donc pas lieu d'être et l'amendement présenté par votre rapporteur tendait à simplifier la rédaction en les rassemblant.

Le Gouvernement n'avait pas jugé cette simplification opportune et avait proposé une rédaction maintenant cette distinction à laquelle l'Assemblée nationale s'est ralliée afin, selon la ministre déléguée à l'industrie, de « suivre très exactement le libellé de la directive sur la signature électronique ».

En conséquence, le dispositif adopté par notre Assemblée sur la proposition du Gouvernement prévoyait, au 3° de cet article, que l'un des éléments conditionnant la présomption de responsabilité des prestataires de certification était le fait qu'ils n'aient pas procédé « soit à la vérification de la détention par le signataire, au moment de la délivrance du certificat, des données relatives à la création de signature correspondant aux données permettant de vérifier cette signature fournies ou identifiées dans le certificat », « soit, dans le cas où le prestataire fournit les données de création et de vérification de signature, à leur complémentarité ».

Au Sénat, M. Pierre Hérisson a regretté, dans son rapport écrit, au nom de la Commission des affaires économiques, que la rédaction de l'article 21 « en rende la compréhension assez difficile ». La Commission des affaires économiques a, en conséquence, proposé la suppression du 3° de cet article à charge pour « le Gouvernement de proposer une rédaction plus accessible ».

Lors de la séance publique du Sénat, le Gouvernement, enfin convaincu, a donc proposé une nouvelle rédaction simplifiée de cet alinéa rassemblant, comme l'avait vainement proposé votre Commission, les deux éléments figurant dans sa rédaction initiale.

Sur ce premier point, il n'y a donc plus de différence substantielle entre la rédaction adoptée par le Sénat et celle souhaitée, en première lecture, par votre Commission. Il demeure donc deux points de divergence.

Le premier concerne la référence à un décret en Conseil d'Etat figurant au premier alinéa. Il faut rappeler que la présomption de responsabilité des prestataires concerne les certificats qu'ils présentent comme qualifiés. Il est prévu qu'un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions que doit remplir un certificat pour qu'il puisse être légitimement présenté comme qualifié. Il est également prévu que la présomption de responsabilité joue notamment lorsque les données prescrites pour que le certificat puisse être regardé comme qualifié sont incomplètes.

L'esprit du dispositif est donc relativement simple : afin de protéger les utilisateurs de certificats, ceux-ci ne peuvent être présentés comme qualifiés que s'ils remplissent certaines conditions et l'utilisation abusive de cette dénomination fait jouer la présomption de responsabilité de leur fournisseur.

La rédaction adoptée par le Sénat, qui n'a pas modifié sur ce point la rédaction adoptée par l'Assemblée sur la proposition du Gouvernement, n'est donc pas pleinement satisfaisante. Elle fait, en effet, figurer la mention du décret en Conseil d'Etat au premier alinéa de l'article en indiquant que la présomption de responsabilité peut jouer au profit des personnes qui se sont fiées aux certificats présentés « comme qualifiés dans des conditions fixées en Conseil d'Etat ». Elle précise ensuite, au troisième alinéa (2°) que cette présomption joue lorsque « les données prescrites pour que le certificat puisse être regardé comme qualifié étaient incomplètes ».

La cohérence voudrait que cette mention du décret en Conseil d'Etat soit déplacée dans ce troisième alinéa. La responsabilité des prestataires doit, en effet, être mise en jeu dès lors qu'ils présentent un certificat comme qualifié, même si celui-ci ne répond pas aux conditions fixées par décret conditionnant l'utilisation légitime de cette dénomination. La référence aux conditions fixées par décret en Conseil d'Etat est donc inopportune au premier alinéa. Elle doit, en revanche, figurer au troisième alinéa justement pour préciser dans quelles conditions la dénomination de certificat qualifié peut être légitimement utilisée.

La Commission a adopté deux amendements du rapporteur, le premier précisant que les conditions engageant la présomption de responsabilité des prestataires de cryptologie ne sont pas cumulatives et supprimant la mention, au premier alinéa, d'un décret en Conseil d'Etat (amendement n° 16) et le second reprenant cette mention d'un décret en Conseil d'Etat en la déplaçant au troisième alinéa (amendement n° 17).

Enfin, la dernière différence entre la rédaction souhaitée, en première lecture, par votre Commission et celle adoptée par le Sénat et issue de la rédaction adoptée par l'Assemblée sur la proposition du Gouvernement concerne le cinquième alinéa (4°) de cet article.

Celui-ci prévoit que la présomption de responsabilité des prestataires peut jouer lorsqu'ils n'ont pas fait procéder à l'enregistrement de la révocation d'un certificat puis tenu cette information à la disposition des tiers.

Il est bien évident que ce cas ne concerne que l'hypothèse dans laquelle le certificat serait effectivement révoqué. C'est pourquoi votre Commission avait souhaité ajouter, à cet alinéa, les mots « le cas échéant ». Le Gouvernement s'était opposé à cet ajout « afin de ne pas ouvrir de brèche dans la responsabilité du prestataire ». Le risque étant nul, l'insertion de cette mention reste opportune.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 18) procédant à l'insertion de cette mention.

Le sixième alinéa limite la responsabilité des prestataires en disposant que ceux-ci ne sont pas responsables du préjudice causé par un usage du certificat dépassant les limites fixées à son utilisation ou à la valeur des transactions pour lesquelles il peut être utilisé.

La rédaction initiale du projet de loi, adoptée sans modification sur ce point par l'Assemblée nationale en première lecture conditionnait cette limitation de responsabilité au fait que « ces limites aient été clairement portées à la connaissance des utilisateurs dans le certificat ». Un amendement du Gouvernement, adopté par le Sénat, a substitué à cette formule une rédaction alternative conditionnant cette limitation de responsabilité au fait que « ces limites figurent dans le certificat et soient accessibles aux utilisateurs ». La ministre déléguée à l'industrie a précisé, en séance, qu'il s'agissait ainsi de tenir compte du fait que la « mention dans le champ libre du certificat des limites fixées à son utilisation ne peut conduire qu'à l'énonciation de mentions très restreintes ».

Enfin, le dernier alinéa vise à garantir la solvabilité des prestataires pour faire face à l'engagement de leur responsabilité en leur imposant de constituer des garanties financières suffisantes ou de contracter une assurance couvrant leur responsabilité civile professionnelle.

A l'initiative de M. Jean-Yves Le Déaut et des membres du groupe socialiste, l'Assemblée nationale avait complété cet alinéa d'une phrase disposant que faute d'une telle garantie financière ou d'une assurance, les certificats délivrés par le prestataire devront obligatoirement comporter une mention de cette absence. Cette phrase a l'ajout de laquelle le Gouvernement ne s'était pas opposé, s'en remettant à la sagesse de l'Assemblée, a été supprimée par le Sénat sur la proposition du Gouvernement. Cette suppression répondait notamment aux réserves formulées par le sénateur Turk, rapporteur pour avis au nom de la Commission des lois, qui s'était étonné de voir le même alinéa instituer une obligation et prévoir qu'elle puisse ne pas être respectée.

La Commission a adopté l'article 21 ainsi modifié.

Section 3

Sanctions administratives

Article 22

Sanctions administratives à l'encontre des fournisseurs
de moyens de cryptologie

Cet article donne au Premier ministre le pouvoir de sanctionner les fournisseurs de moyens de cryptologie ne respectant pas les obligations auxquelles ils sont assujettis.

Il n'a fait l'objet, au Sénat, que d'un amendement de portée rédactionnelle.

La Commission a adopté cet article sans modification.

Section 4

Dispositions de droit pénal

Article 23

Sanctions pénales

Cet article sanctionne pénalement divers manquements à des obligations instituées par le chapitre Ier du titre III.

Le paragraphe I n'a été modifié, au Sénat, que par l'adoption d'un amendement de précision.

La Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 19).

Les paragraphes II et III n'ont pas été modifiés par le Sénat.

Le paragraphe IV prévoit des peines complémentaires à l'encontre des personnes physiques coupables de l'une des infractions prévues au présent article.

Parmi celles-ci, le deuxième alinéa (1°) fait figurer « l'interdiction, suivant les modalités prévues par l'article 131-19 du code pénal et pour une durée de cinq ans au plus, d'émettre des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés ».

L'article 131-19 du code pénal disposant que l'interdiction d'émettre des chèques encourue à titre de peine complémentaire « ne peut excéder une durée de cinq ans », cette rédaction peut sans doute être allégée.

Elle doit, en tout état de cause, être amendée compte tenu de la modification qui a été apportée par le Sénat. A l'initiative de sa Commission des affaires économiques, celui-ci a, en effet, complété cet alinéa afin de permettre également que soit ajoutée l'interdiction d'utiliser des cartes de paiement aux peines complémentaires prévues. Celle-ci est régie par les dispositions de l'article 131-20 du code pénal auquel la rédaction adoptée par le Sénat ne renvoie malheureusement pas.

La Commission a adopté un amendement de coordination du rapporteur (amendement n° 20) renvoyant à l'article 131-20 du code pénal et supprimant la mention superfétatoire du délai maximal d'interdiction.

Le paragraphe V n'a pas été modifié par le Sénat.

A l'initiative de sa Commission des affaires économiques, celui-ci a, en revanche, complété cet article par un nouveau paragraphe VI qui complète l'article L. 39-1 du code des postes et télécommunications punissant diverses infractions de 6 mois d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende, afin de créer un nouveau délit, la commercialisation ou l'installation d'appareils conçus pour rendre inopérants les téléphones mobiles « en dehors des cas prévus à l'article L. 33-2 ».

Cet article L. 33-2 régit l'établissement de réseaux de communication indépendants soumis à autorisation et constitue une référence inexacte, l'intention des sénateurs ayant sous doute été de viser l'article L. 33-3 du même code qui précise notamment les cas dans lesquels l'installation de brouilleurs est libre.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 21) rectifiant cette erreur matérielle puis l'article 23 ainsi modifié.

Article 24

Pouvoirs des agents spécialisés en matière de constatation des infractions au régime de la cryptologie

Le Sénat a adopté deux amendements à cet article.

Le premier concerne les lieux auxquels peuvent accéder les enquêteurs habilités à cet effet dans le cadre de leurs enquêtes. La rédaction initiale du projet de loi, que n'a pas modifié, sur ce point, l'Assemblée nationale en première lecture, autorisait les agents habilités à cet effet à accéder aux « locaux, terrains ou moyens de transport à usage professionnel » mais non aux « locaux qui servent de domicile aux intéressés ».

A l'initiative de sa Commission des lois, le Sénat a adopté une rédaction alternative autorisant les mêmes agents à accéder aux « moyens de transport, terrains ou locaux à usage professionnel, à l'exclusion des parties de ceux-ci affectées au domicile privé ». Aux termes de cette rédaction, ces agents pourront donc accéder, dans un local servant pour partie de domicile et pour partie de local à usage professionnel, aux parties de celui-ci n'étant pas affecté au domicile ce qui n'était pas le cas dans la rédaction initiale.

Le second amendement adopté par le Sénat est de portée rédactionnelle.

La Commission a adopté l'article 24 sans modification.

Article 25

Aggravation des sanctions pénales en cas d'utilisation de moyens
de cryptologie afin de préparer ou de commettre une infraction

Cet article fait de l'usage de la cryptologie une circonstance aggravante lorsque ce procédé a été utilisé pour préparer ou commettre un crime ou un délit ou pour en faciliter la préparation ou la Commission. A cet effet, le présent article insère dans le code pénal, au sein du titre III, relatif aux peines, du livre premier, regroupant les dispositions générales, un article 132-76 nouveau qui aggrave les sanctions pénales lorsque le crime ou le délit a été commis sans recours à un moyen de cryptologie.

La loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure ayant créé au sein du code pénal un nouvel article 132-76 aggravant les peines encourues pour un crime ou un délit lorsque l'infraction est commise à raison de l'orientation sexuelle de la victime, le Sénat a modifié la rédaction de cet article pour insérer ces dispositions dans un nouvel article 132-78 du code pénal.

Dans la rédaction initiale du projet de loi, le dernier alinéa de cet article excluait l'application des aggravations de peines pour les auteurs et complices ayant remis aux autorités judiciaires et administratives la version en clair des messages chiffrés ainsi que les conventions secrètes nécessaires au déchiffrement.

A l'initiative du rapporteur pour avis de la Commission des lois, Mme Michèle Tabarot, l'Assemblée nationale a introduit une distinction selon la gravité de l'infraction commise de sorte que l'absence d'aggravation de peine ne s'applique, pour les infractions les plus graves, punies de plus de quinze ans d'emprisonnement, qu'aux complices de l'infraction et non aux auteurs.

Le Sénat, à l'initiative de sa Commission des lois, a rétabli, sur ce point, la rédaction initiale du projet de loi en estimant illégitime d'introduire une distinction entre l'auteur d'une infraction et ses éventuels complices.

La Commission a adopté l'article 25 sans modification.

Article 26

Interceptions de sécurité des messages cryptés - sanctions pénales
en cas de refus de communiquer la convention de déchiffrement

Cet article tendait à pérenniser les dispositions de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, imposant aux personnes fournissant des prestations de cryptologie de remettre leurs conventions de déchiffrement pour les besoins des procédures judiciaires.

Ces dispositions figuraient à l'article 31 de la loi du 15 novembre 2001. Cet article est compris au chapitre V de cette loi dont l'article 22 prévoyait que les dispositions étaient adoptées « pour une durée allant jusqu'au 31 décembre 2003 ».

L'article 31 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure a toutefois modifié cet article 22 de la loi du 15 novembre 2001 qui dispose désormais, en conséquence, que seuls les articles 24, 25 et 26 de cette loi sont adoptés pour une durée limitée, portée jusqu'au 31 décembre 2005. Les dispositions de l'article 31 de la loi du 15 novembre 2001, que l'article 26 du projet de loi tendait à pérenniser, l'ont donc été par l'article 31 de la loi du 18 mars 2003.

L'article 26 du projet de loi est dès lors inutile et le Sénat l'a, en conséquence, supprimé.

La Commission a maintenu la suppression de l'article 26.

Section 5

Saisine des moyens de l'Etat pour la mise au clair de données chiffrées

Article 27

Réquisition des moyens de décryptage

Comme l'article 26, cet article tendait à pérenniser des dispositions de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne qui figuraient à l'article 30 de cette loi.

Pour les raisons évoquées supra, cette pérennisation n'est plus nécessaire puisqu'elle a été réalisée par la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure.

Toutefois, si la rédaction initiale du projet de loi se bornait à pérenniser les dispositions de l'article 30 de la loi relative à la sécurité quotidienne créant, dans le code de procédure pénale, un chapitre relatif à la réquisition des moyens de décryptage par la justice, l'Assemblée nationale a, en première lecture, modifié le premier des articles créés dans ce chapitre, l'article 230-1 du code de procédure pénale.

Cet article prévoit notamment que le procureur de la République, la juridiction d'instruction ou la juridiction de jugement peut charger une personne de déchiffrer des données chiffrées saisies.

A l'initiative de M. Patrick Bloche et des membres du groupe socialiste, l'Assemblée nationale a adopté une disposition imposant aux personnes ainsi désignées de prêter serment d'apporter leur concours à la justice en leur honneur et leur conscience sauf lorsqu'elles sont inscrites sur les listes d'experts judiciaires ce qui implique, conformément à l'article 160 du code de procédure pénale, qu'elles aient déjà prêté ce serment.

La commission des lois du Sénat a jugé cette disposition utile et le Sénat a adopté un amendement de rédaction globale de l'article 27 du projet de loi tendant à la faire figurer à l'article 230-1 du code de procédure pénale. A cette occasion, le Sénat a, en outre, modifié cette disposition afin de faire référence, dans un souci de cohérence, aux dispositions régissant le serment de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires.

L'intérêt de cette référence peut être contesté. En effet, la loi du 29 juin 1971 concerne les experts en matière civile. Comme cela a été dit, c'est l'article 160 du code de procédure pénale qui régit la prestation de serment des experts en matière pénale.

Il convient également de noter que l'article 157-1 du code de procédure pénale dispose que si l'expert désigné est une personne morale, son représentant légal soumet à l'agrément de la juridiction le nom de la ou des personnes physiques qui, au sein de celle-ci et en son nom, effectueront l'expertise.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 22) corrigeant une référence et organisant, sur le modèle des dispositions du code de procédure pénale régissant les experts judiciaires en matière pénale, l'agrément des personnes physiques assurant, au sein d'une personne morale choisie pour assister la justice, les opérations techniques prévues.

La Commission a adopté l'article 27 ainsi modifié.

Chapitre II

Lutte contre la cybercriminalité

Article 32 bis (nouveau)

Création d'une nouvelle incrimination

A l'initiative de sa Commission des lois, le Sénat a adopté cet article additionnel qui modifie les premier et deuxième alinéas de l'article 227-23 du code pénal.

Le premier alinéa de cet article punit de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende le fait de fixer, d'enregistrer ou de transmettre l'image ou la représentation d'un mineur en vue de sa diffusion lorsque cette image ou cette représentation présente un caractère pornographique.

L'article additionnel adopté par le Sénat vise, en premier lieu, à punir des mêmes peines la tentative de commettre les mêmes faits.

Le deuxième alinéa de l'article 227-23 du code pénal punit des mêmes peines que son premier alinéa le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit, d'importer ou d'exporter, directement ou indirectement l'image ou la représentation d'un mineur présentant un caractère pornographique.

L'article additionnel adopté par le Sénat vise, en second lieu, à punir des mêmes peines le fait d'offrir de telles images ou représentations.

Dans les deux cas, il s'agit notamment, comme l'a rappelé dans son rapport écrit, M. Alex Turk, rapporteur pour avis au nom de la Commission des lois du Sénat, de mettre notre droit en conformité avec la convention sur la cybercriminalité signée le 23 novembre 2001 dans le cadre du Conseil de l'Europe.

La Commission a adopté l'article 32 bis sans modification.

Article 34

Création d'une nouvelle incrimination en matière
de droit de l'informatique

Le présent article tend à compléter les dispositions du code pénal réprimant les atteintes aux systèmes de traitement automatisé de données pour créer une nouvelle incrimination en punissant le fait de détenir, d'offrir, de céder ou de mettre à disposition un équipement, un instrument, un programme informatique ou toute donnée conçus ou spécialement adaptés pour commettre les faits prévus par les articles 323-1 à 323-3 du code pénal.

La rédaction initiale du projet de loi prévoyait que cette interdiction ne s'interdisait pas dans certains cas lorsque les actions normalement réprimées par le présent article étaient, par exemple, justifiées par les besoins de la recherche scientifique.

En première lecture, l'Assemblée nationale avait précisé ces exceptions, supprimées par le Sénat au profit d'une disposition de portée générale conduisant à ce que l'interdiction ne s'applique pas lorsque le fait normalement sanctionné est justifié par un motif légitime.

Après que le rapporteur eût indiqué qu'il estimait trop imprécise la notion de motif légitime retenue par le Sénat pour permettre à certaines personnes les opérations interdites par cet article, la Commission a adopté deux amendements du rapporteur, le premier supprimant cette notion (amendement n° 23) et le second (amendement n° 24) rétablissant, sous réserve d'adaptations rédactionnelles et de coordination, la définition précise adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture des personnes auxquelles sont autorisées les opérations interdites par le présent article.

Puis, la Commission a adopté l'article 34 ainsi modifié.

TITRE IV

DES SYSTÈMES SATELLITAIRES

Article 36

Régime d'attribution des fréquences satellitaires

L'article 36 du projet de loi crée, à travers l'ajout de trois articles au code des postes et télécommunications, les articles L.97-2, L.97-3 et L.97-4, regroupés dans un titre VIII intitulé « Assignations de fréquence relatives aux systèmes satellitaires », un ensemble législatif complet régissant une procédure d'autorisation pour l'exploitation des assignations de fréquences à des systèmes satellitaires déclarées par l'administration française à l'Union internationale des télécommunications.

Ce titre VIII explicite en effet :

- la procédure d'autorisation (article 97-2 paragraphe I) ;

- les obligations imposées au bénéficiaire (article 97-2 paragraphe II) ;

- le régime des sanctions administratives (article 97-2 paragraphe III) ;

- le rappel des autres autorisations nécessaires (article 97-2 paragraphe IV) ;

- la justification de dérogations (article 97-2 paragraphe V) ;

- le contenu du décret d'application (article 97-2 paragraphe VI) ;

- le régime des sanctions pénales (article 97-3) ;

- l'application aux territoires d'Outre-Mer (article 97-4 paragraphe I) ;

- la mission d'instruction de l'Agence nationale des fréquences (article 97-4 paragraphe II).

Cet article n'a fait l'objet que d'une modification rédactionnelle par le Sénat.

La Commission a adopté l'article 36 sans modification.

TITRE IV BIS

DU DÉVELOPPEMENT DES TECHNOLOGIES
DE L'INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION

Avant l'article 37 bis

La Commission a examiné un amendement du rapporteur créant un nouveau chapitre intitulé « de la réduction de la fracture numérique territoriale ».

M. François Brottes a jugé cet intitulé politicien en estimant qu'il était sans rapport avec les dispositions proposées consistant à faire payer les collectivités les plus pauvres pour développer des services de télécommunications.

Le président a estimé que cet intitulé était trop volontariste pour figurer dans une loi.

Après un débat au cours duquel sont intervenus MM. Léonce Deprez, Alain Gouriou et Yves Simon ainsi que le président et le rapporteur, celui-ci a modifié son amendement pour proposer l'intitulé suivant : « de la couverture du territoire par les services numériques ».

Puis, la Commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n°25).

Article additionnel avant l'article 37 bis

Régime d'intervention des collectivités locales en faveur de la fourniture
de services de télécommunications

La Commission a examiné, en discussion commune, un amendement du rapporteur proposant la suppression de l'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales, et l'insertion dans ce même code d'un article L. 1425-1, dans une rédaction modifiée par rapport à celle figurant dans l'article 1er A du projet de loi, ainsi qu'un amendement de M. Alain Cousin et un amendement de M. Jean-Michel Bertrand. Outre un élargissement de l'autorisation d'intervention des collectivités locales à l'exploitation des réseaux, leur permettant d'exercer le rôle d'opérateur d'opérateur, l'amendement du rapporteur prévoit d'une part une limitation de la condition du constat préalable d'une insuffisance d'initiatives privées au seul cas de la fourniture de services de télécommunication aux utilisateurs finals, et d'autre part, une suppression du décret en Conseil d'Etat définissant les conditions d'attribution d'une subvention d'exploitation. En outre, il ouvre la possibilité de l'intervention des collectivités locales en direction des réseaux indépendants, l'intervention pouvant aller en ce domaine, si les utilisateurs relevaient de la responsabilité juridique ou financière de ces mêmes collectivités locales, jusqu'à la fourniture directe de services de télécommunications.

M. Alain Cousin a estimé absolument nécessaire d'adopter un dispositif clair et facilement applicable. Il a rappelé que l'objectif devait être d'autoriser les collectivités locales et leurs groupements à établir et exploiter des réseaux de télécommunications en les autorisant à déployer les infrastructures et les équipements actifs nécessaires, à gérer les réseaux correspondants en assurant la fonction de transport des signaux et à gérer les fonctions de transport des réseaux afin de fournir des services à des prestataires de plus en plus divers. Il a indiqué que tel était le sens de l'amendement qu'il proposait, soutenu par de nombreuses collectivités et compatible avec le droit communautaire. Il a attiré l'attention sur l'intérêt de la rédaction concise proposé par son amendement qui lui est apparu de nature à limiter les difficultés juridiques ultérieures.

Le rapporteur a souligné la communauté de vues inspirant les différents amendements en discussion commune. Il a rappelé qu'à la différence de la rédaction adoptée par le Sénat, le dispositif qu'il proposait ouvrait aux collectivités locales la possibilité d'établir et d'exploiter des réseaux de télécommunications dans les mêmes conditions. Il a indiqué que son amendement supprimait en outre le renvoi à un décret d'application de l'article, l'expérience de l'application de l'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales portant sur le même sujet ayant mis en évidence le risque que cela entrave la mise en œuvre du dispositif.

Le président a proposé aux signataires des amendements concurrents de celui du rapporteur de se rallier à celui-ci.

M. Yves Simon a souligné que la complexité apparente d'un dispositif pouvait, en pratique, faciliter son application en permettant, par sa précision, de lever des ambiguïtés susceptibles d'apparaître au cours de la mise en œuvre. Il s'est donc rallié sans réserve à l'amendement du rapporteur.

M. Léonce Deprez a également indiqué qu'il s'associait à l'amendement du rapporteur.

M. Alain Cousin a souhaité que des précisions soient apportées sur le constat d'« insuffisance d'initiatives privées propres à satisfaire les besoins des utilisateurs finals » conditionnant la fourniture par les collectivités locales de services de télécommunications aux utilisateurs finals.

Le rapporteur a indiqué que son amendement ouvrait de manière large aux collectivités locales la possibilité d'établir et d'exploiter des réseaux et maintenait la nécessité, comme les autres amendements en discussion, d'un constat d'insuffisance pour la fourniture de services aux utilisateurs finals.

M. Alain Cousin a fait part de sa crainte de voir une telle condition utilisée par certains opérateurs commerciaux pour entraver les initiatives des collectivités locales et a donc souhaité la suppression de cette mention.

M. Yves Simon a indiqué que cette condition était nécessaire au regard du droit communautaire et pour permettre l'éligibilité des projets envisagés aux subventions attribuées au titre des fonds structurels.

Après avoir souligné l'importance de la disposition en discussion, M. François Brottes a fait part de son opposition totale à l'élargissement proposé des possibilités d'intervention des collectivités locales dans le domaine des télécommunications en rappelant les déboires subis par certaines d'entre elles à l'occasion du « plan câble » et dans d'autres cas similaires où elles s'étaient aventurées sur un terrain qui n'est pas le leur.

En second lieu, il a souligné le risque de voir les opérateurs commerciaux utiliser cette possibilité pour se défausser de leurs responsabilités en matière d'aménagement du territoire sur les collectivités locales ce qui aurait pour effet d'imposer aux collectivités concernées, qui ne sont pas les plus riches, la réalisation des investissements nécessaires. En conséquence, il a jugé que ce dispositif aurait précisément l'effet inverse de celui recherché en conduisant de fait à l'élargissement de la « fracture numérique » qu'il prétend contribuer à résorber.

Rappelant avoir été à l'origine du dispositif actuellement en vigueur sur l'intervention des collectivités locales en matière de télécommunications qui figure à l'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales, il a indiqué que ce dispositif était délibérément contraignant.

Il a jugé que le dispositif proposé par le rapporteur élargissait, au contraire, très largement les possibilités d'intervention des collectivités locales en leur permettant même de fournir des services aux utilisateurs finals sous la seule réserve d'un constat d'insuffisance d'initiative privée. Il a, en outre, souligné l'ambiguïté de ce concept, qui ne correspond pas à la carence de l'initiative privée, et l'absence de dispositions législatives ou réglementaires précisant les modalités selon lesquelles il pourra être procédé à ce constat. Enfin, il a relevé que le dispositif proposé permettait aux collectivités de devenir opérateurs de télécommunications à part entière sans autorisation du régulateur, l'Autorité de régulation des télécommunications n'étant qu'informée de leurs projets.

M. Yves Simon a rappelé l'inégalité existant entre les territoires en matière d'accès aux services de télécommunications. Il a également souligné que le Comité interministériel d'aménagement et de développement du Territoire (CIADT) réuni en juillet 2001 à Limoges n'avait été suivi d'aucune initiative concrète des pouvoirs publics. Il a estimé que l'intervention des collectivités lui paraissait la meilleure solution pour assurer l'accès aux services de télécommunications des zones rurales. Il a toutefois souligné que celles-ci devraient intervenir avec prudence et d'une manière limitée dans le temps en utilisant des instruments juridiques comme la délégation de service public ou les sociétés d'économie mixte.

M. Léonce Deprez s'est étonné de voir M. François Brottes s'opposer à ce que l'initiative publique prenne le relais d'acteurs privés défaillants. Puis, il a rappelé son profond attachement à une politique volontariste d'aménagement du territoire à tous les niveaux d'intervention publique.

Le président a souligné la nécessité que soit pallié le défaut d'initiatives privées en particulier dans les zones rurales mais a jugé insuffisamment précis la notion de « constat d'insuffisance d'initiatives privées ». Il a souhaité que la rédaction précise bien que les opérateurs commerciaux doivent être sollicités, justifient, le cas échéant, leur refus d'intervenir et que ces raisons justifient la décision de la collectivité locale. Il a craint que, faute d'un encadrement de cette nature, certaines collectivités prennent des initiatives susceptibles de se révéler ensuite inopportunes.

M. Alain Cousin a craint que, dans ce cas, des opérateurs acceptent d'intervenir mais à des conditions financières déraisonnables.

M. Yves Simon a indiqué que des procédures existaient déjà pour entourer les conditions dans lesquelles une collectivité peut constater une insuffisance de l'initiative privée.

Le président ayant estimé que si de telles procédures existaient, il serait opportun d'y faire référence, le rapporteur s'est engagé à travailler en ce sens dans la perspective de la séance publique.

M. François Brottes a indiqué que le dispositif antérieur permettait l'intervention des collectivités lorsque les opérateurs commerciaux ne formulent pas d'offre à un prix abordable.

Il a solennellement attiré l'attention sur les risques présentés par le dispositif proposé en estimant qu'il aurait pour effet, d'une part, de dissuader l'investissement privé et, d'autre part, de permettre un gaspillage des ressources publiques.

M. Yves Simon a regretté que M. François Brottes néglige les territoires dans lesquels les opérateurs commerciaux ne sont pas présents. Puis, il a indiqué que des collectivités assumaient le fait de consacrer des ressources publiques pour renforcer leur attractivité économique notamment en offrant aux entreprises qui sont installées sur leur territoire l'accès aux moyens de communication qui leur sont nécessaires.

Le président a estimé souhaitable de permettre l'intervention des collectivités dans certaines hypothèses, dans des conditions garantissant une utilisation responsable des deniers publics et a demandé au rapporteur de trouver, avant la séance publique, une rédaction satisfaisante.

La Commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n°26) portant article additionnel avant l'article 37 bis. En conséquence, l'amendement de M. Alain Cousin et l'amendement de M. Jean-Michel Bertrand sont devenus sans objet.

Article 37 bis

Financement du service universel des télécommunications

La Commission a examiné un amendement du rapporteur proposant, en lieu et place de l'ancienne rédaction de l'article 37 bis, devenue sans objet depuis la restructuration juridique du service universel opérée dans le cadre du projet de loi sur le service public des télécommunications et France Télécom, une définition de l'itinérance locale, ainsi que l'organisation d'une procédure, dont la mise en œuvre est décidée par décret, en vue d'assurer la couverture en téléphonie mobile d'un périmètre géographique déterminé.

Le rapporteur a indiqué que cet amendement se substituait au dispositif figurant actuellement à l'article 1er B en raison de ses insuffisances juridiques. Il a précisé que l'amendement proposait, en outre, de permettre que le mécanisme prévu puisse être utilisé à plusieurs reprises, si cela apparaît nécessaire au vu de l'évolution des besoins.

M. François Brottes a jugé que le dispositif proposé n'avait pas de caractère législatif et a proposé que l'itinérance soit imposée dans les zones où la carence de l'initiative privée est constatée.

Le président a également estimé que l'amendement proposé comprenait effectivement des dispositions d'ordre réglementaire.

Le rapporteur a, en conséquence, indiqué qu'il proposerait une rédaction plus concise puis a retiré son amendement.

La Commission a adopté cet article sans modification.

Après l'article 37 bis

La Commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n°27) créant un nouveau chapitre intitulé « de la liberté concurrentielle dans le secteur des télécommunications ».

Article additionnel après l'article 37 bis

Facturation des communications à la seconde

La Commission a examiné un amendement du rapporteur proposant que les communications téléphoniques ne puissent être facturées sur la base d'une unité de compte supérieure à la seconde.

Le rapporteur a indiqué que cet amendement répondait à une préoccupation exprimée par de nombreuses associations de consommateurs.

M. Yves Simon a attiré l'attention du rapporteur sur les difficultés rencontrées par certains usagers dépourvus de poste téléphonique fixe pour entrer en contact avec certains organismes notamment sociaux qui peuvent être joints par des appels qui ne sont gratuits que s'ils sont passés depuis un poste fixe.

Le rapporteur s'est engagé à travailler sur cette question puis la Commission a adopté son amendement (amendement n°28).

Article additionnel après l'article 37 bis

Desserrement du contrôle des tarifs du service universel

La Commission a adopté un amendement du président, du rapporteur et de MM. Alfred Trassy-Paillogues et Jean-Paul Charié (amendement n°29) portant article additionnel après l'article 37 bis et proposant qu'un décret en Conseil d'Etat définisse la liste des tarifs du service universel pouvant faire l'objet d'une opposition ou d'un avis préalable de l'Autorité de régulation des télécommunications.

Article additionnel après l'article 37 bis

Séparation comptable et fonctionnelle de l'activité d'exploitation
des réseaux fixes exploités par France Télécom

La Commission a examiné un amendement du rapporteur portant article additionnel après l'article 37 bis tendant à modifier la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications prévoyant :

- d'une part, l'établissement, dans la comptabilité de France Télécom, d'une séparation comptable de l'activité d'exploitation de réseaux à l'exception des réseaux radioélectriques ;

- d'autre part, la gestion de cette activité au sein d'une filiale au plus tard un an après la publication de la présente loi et, dans l'attente de la mise en place de cette filiale, au sein d'un service indépendant sur le plan de la gestion et dirigé par un directeur nommé par le conseil d'administration de France Télécom.

Le rapporteur a indiqué que d'autres amendements proposés tendaient à alléger le contrôle tarifaire pesant sur France Télécom et qu'il lui paraissait, en conséquence, nécessaire d'améliorer parallèlement la transparence de la gestion par France Télécom de ses réseaux. Il a rappelé avoir proposé un amendement similaire au cours de la discussion du projet de loi relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom mais avoir depuis adapté le dispositif proposé, qui était inspiré de la séparation de RTE au sein d'EDF, pour mieux prendre en compte les spécificités des deux entreprises.

M. François Brottes s'étant déclaré opposé à cet amendement, le rapporteur a rappelé le monopole de fait conservé par France Télécom sur divers segments des réseaux de télécommunications et la forte profitabilité de cette activité pour cette entreprise.

M. François Brottes a noté que l'évolution du dispositif de financement du service universel proposé par le projet de loi relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom conduisait, d'une part, à améliorer la connaissance des coûts supportés par France Télécom à ce titre et, d'autre part, à diminuer la charge supportée par les opérateurs concurrents. Il a estimé que l'amendement proposé tendrait à désosser France Télécom comme cela avait été souligné par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en séance publique.

Le rapporteur a demandé à M. François Brottes si celui-ci considérait que la précédente majorité avait désossé EDF en créant RTE.

Puis, la Commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n°31) portant article additionnel après l'article 37 bis.

Article additionnel après l'article 37 bis

Desserrement du contrôle des tarifs sur un opérateur
exerçant une influence significative sur un marché de détail
du secteur des communications électroniques

La Commission a adopté un amendement du président, du rapporteur et de MM. Alfred Trassy-Paillogues et Jean-Paul Charié (amendement n°30) portant article additionnel après l'article 37 bis et accordant deux garanties aux opérateurs exerçant une influence significative sur un marché de détail du secteur des communications électroniques : l'obligation pour l'ART de motiver économiquement son opposition à la mise en œuvre d'un tarif ; d'autre part, la non-application de l'encadrement tarifaire aux services innovants.

TITRE V

DISPOSITIONS FINALES

Article 38

Application aux territoires d'Outre-Mer

Cet article n'a fait l'objet que d'une modification rédactionnelle par le Sénat.

La Commission a adopté l'article 38 sans modification.

Article additionnel après l'article 38

Application du régime de préavis de grève pour les services publics prévu par le code du travail aux opérateurs de diffusion
par voie hertzienne terrestre

La Commission a examiné un amendement du rapporteur portant article additionnel après l'article 38 venant compléter le dispositif juridique remplaçant le monopole de TDF pour la diffusion des programmes, en vue d'appliquer, à l'ensemble des opérateurs de diffusion par voie hertzienne terrestre, en remplacement du régime spécifique du droit de grève prévu pour les sociétés nationales de programme par la loi du 30 septembre 1986, le régime de préavis de grève pour les services publics prévu par le code du travail.

M. François Brottes a souhaité savoir si une telle disposition était nécessaire.

Le rapporteur l'ayant confirmé, la Commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n°32) portant article additionnel après l'article 38.

Article 39 (nouveau)

Modalités de rémunération de certains personnels de France Télécom

La Commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n°33) supprimant cet article repris, sous une rédaction améliorée, au cinquième alinéa du 3° du II de l'article 3 du projet de loi sur le service public des télécommunications et France Télécom, où il trouvait plus logiquement sa place.

Puis la Commission a adopté l'ensemble du texte ainsi modifié.

TABLEAU COMPARATIF

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Voir la deuxième partie du rapport

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N° 1282 - Rapport sur le projet de loi  pour la confiance dans l'économie numérique (AN, 2ème lecture) (M. JEAN DIONIS DU SÉJOUR)


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