![]() ![]() Document mis en distribution le 18 décembre 2003 ![]() N° 1290 ______ ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 DOUZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 16 décembre 2003. RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant l'approbation de l'accord sur les privilèges et immunités de la Cour pénale internationale, PAR M. FRANCOIS LONCLE, Député -- Voir les numéros : Sénat : 438 (2002-2003), 93 et T.A. 20 (2003-2004) Assemblée nationale : 1284 Traités et conventions SOMMAIRE ___ INTRODUCTION 5 I - L'HOSTILITÉ DES ETATS-UNIS : UNE ENTRAVE A A - UNE HOSTILITÉ AMÉRICAINE QUI PERDURE 8 1) Le vote de la résolution 1422 du Conseil de sécurité 8 2) La signature d'accords bilatéraux accordant des immunités 8 B - LA MISE EN PLACE PROGRESSIVE DE LA CPI 9 1) Les décisions de l'Assemblée des Etats parties 10 2) La création d'un service administratif provisoire et la question de C - LA FRANCE ET LA CPI 11 II - UN ACCORD SUR LES PRIVILÈGES ET IMMUNITÉS A - DES DISPOSITIONS CLASSIQUES PERMETTANT À LA CPI 1) Immunités et privilèges de la CPI 13 2) Privilèges et immunités des personnels 14 a) Le procureur, les juges, les procureurs adjoints et le greffier 14 b) Le greffier adjoint, le personnel du bureau du procureur c) Le personnel recruté localement 15 d) Les représentants des Etats 15 B - LES DISPOSITIONS NOUVELLES ASSURANT LA PROTECTION DES 1) Les conseils de défense et les témoins 15 2) Les victimes et autres personnes 16 3) Les autres dispositions 16 III - LA RÉGULARISATION DE L'ADHÉSION DE LA FRANCE A LA CONCLUSION 19 EXAMEN EN COMMISSION 21 ANNEXE I : liste des pays ayant conclu un accord avec les Etats-Unis 21 ANNEXE II : liste des signataires et parties au statut de la cour pénale internationale 25 ANNEXE III : Liste des pays ayant conclu un accord avec les Etats-Unis 27 Mesdames, Messieurs, Le statut de la Cour Pénale Internationale (CPI) est en vigueur depuis le 1er juillet 2002. Il compte 139 signataires et 93 parties à ce jour, dont les 15 Etats de l'Union européenne et presque tous les futurs pays membres. La France a été le 12ème Etat partie à ratifier, le 9 juin 2000. Ce Statut permet de juger les personnes responsables des crimes les plus graves qui touchent l'ensemble de la communauté internationale. Malgré l'hostilité des Etats-Unis, la CPI est en place depuis le 11 mars 2003, date de la prestation de serment des 18 juges élus par l'Assemblée des Etats parties. Les privilèges et immunités que leur confère l'accord de New York sont nécessaires à son fonctionnement. Aussi le texte soumis à votre examen concerne-t-il la ratification de l'accord sur les privilèges et immunités de la Cour Pénale internationale (CPI) signé le 9 septembre 2002 à New York. A ce jour, 41 Etats ont signé cet accord, qui n'est pas encore en vigueur puisque dix ratifications sont nécessaires. Pour l'instant, seuls la Norvège et Trinité et Tobago l'ont ratifié. Par ailleurs, un article 2 vise à régulariser l'adhésion de la France à la Convention sur les privilèges et immunités des Nations unies du 13 février 1946. I - L'HOSTILITÉ DES ETATS-UNIS : UNE ENTRAVE A A - Une hostilité américaine qui perdure Depuis le 1er juillet 2002, date d'entrée en vigueur du Statut de Rome instaurant la Cour pénale internationale (CPI), les Etats-Unis, au demeurant signataires du traité, ont multiplié les pressions sur le Conseil de sécurité pour soustraire leurs nationaux à la juridiction de cette Cour, leur objectif étant d'obtenir une immunité en faveur de leurs ressortissants et agents officiels, car ils estiment les garanties du statut insuffisantes. 1) le vote de la résolution 1422 du Conseil de sécurité Le 5 mai 2002, le secrétaire d'État Colin Powell a annoncé que les Etats-Unis ne ratifieraient pas le Statut de Rome et retiraient leur signature accordée le 31 décembre 2000 sous l'administration Clinton. Le Congrès américain a adopté au cours de l'été 2002, « l'American Service members Protection Act », qui vise à garantir une immunité de juridiction devant la CPI aux personnels militaires des Etats-Unis ainsi qu'à tout agent officiel, élu ou nommé, exerçant ses fonctions pour le compte du Gouvernement des Etats-Unis. Les Etats-Unis se sont attachés à garantir l'immunité de juridiction par deux moyens : le vote de la résolution 1422 et la signature d'accords bilatéraux avec les Etats. Bien que la majorité des Etats se soit auparavant prononcée contre la proposition américaine et contre la possibilité pour le Conseil de Sécurité de modifier le Statut de la CPI, les membres du Conseil de sécurité ont voté le 12 juillet 2002 la résolution 1422 qui altère la compétence de la Cour. Elle se superpose à l'article 16 du Statut de Rome qui permet au Conseil de Sécurité de surseoir à une enquête ou à la poursuite d'une personne, au cas par cas et de façon limitée confère une immunité absolue pendant une période de un an aux ressortissants d'Etats non parties au Statut agissant dans le cadre d'opérations de maintien de la paix. Elle est renouvelable chaque année au 1er juillet, date anniversaire de la création de la CPI. Malgré l'abstention de la France le 1er juillet 2003 la résolution 1487 a renouvelé cette immunité. 2) La signature d'accords bilatéraux accordant des immunités Les Etats-Unis ont utilisé l'article 98 du statut de la CPI qui porte sur les conflits d'obligation concernant le régime de coopération du Statut. Des tensions pouvant surgir lorsqu'un Etat partie au Statut est contraint, par une demande de la Cour, d'arrêter une personne, mais ne peut obtempérer sans violer une autre obligation de droit international. Lorsque des troupes étrangères sont présentes sur un territoire avec le consentement de l'Etat d'accueil, leur statut est généralement réglé par des accords régissant les forces armées à l'étranger. L'exemple le plus connu étant celui de l'OTAN. Il ne contient pas d'immunités au sens strict, mais établit une compétence concurrente qui donne à l'Etat d'envoi ou à celui d'accueil un droit premier d'exercer sa juridiction pour certains crimes. Ainsi, alors qu'un Etat partie pourrait avoir l'obligation de remettre à la Cour un ressortissant américain, ce dernier sera par ces accords transféré devant les juridictions américaines. En utilisant ces précédents, la diplomatie américaine a fait pression sur la plupart des Etats pour qu'ils concluent des accords bilatéraux. Le président Bush a décidé le 1er juillet 2003 de suspendre l'assistance militaire américaine destinée à 34 pays. Au 1er novembre 2003, 70 Etats ont accepté de conclure un accord bilatéral avec les Etats-unis subordonnant, pour les Etats parties au Statut, la remise à la CPI des ressortissants américains au consentement préalable des Etats-Unis et établissant une immunité aux ressortissants américains pour les Etats non parties au Statut. L'Union européenne mène parallèlement des démarches régulières visant à encourager les Etats à signer et ratifier le Statut de Rome. Au sein de l'Union européenne, le Royaume-Uni et l'Italie avaient fait connaître leur intention d'accéder à la demande américaine d'accords bilatéraux alors que l'Allemagne s'y refusait catégoriquement. Lors du Conseil européen de Bruxelles du 30 septembre 2002, un compromis sur les accords bilatéraux a été trouvé grâce aux efforts de la France. Le texte adopté énonce des « principes directeurs » dans lesquels les accords bilatéraux sont acceptables : pas d'impunité pour les ressortissants américains, non-réciprocité pour les ressortissants de l'État partie, limitation des personnes concernées par l'accord au personnel « envoyé » et non pas, comme le souhaitent les Etats-Unis à tous les « agents officiels » du gouvernement américain B - La mise en place progressive de la CPI L'Assemblée des Etats parties s'est tenue à New York en septembre 2002 et a adopté les différents textes nécessaires au fonctionnement de la Cour. 1) Les décisions de l'Assemblée des Etats parties La CPI a été dotée d'un budget de 39,4 millions de dollars pour la première année. Ses modalités de fonctionnement négociées depuis quatre ans par la Commission préparatoire, notamment le règlement de procédure et de preuves, ont été avalisées par l'Assemblée des Etats parties. Un accord sur la procédure de nomination du procureur est intervenu et M. Luis Moreno Ocampo a été élu par l'Assemblée des Etats parties en avril 2003 et le procureur adjoint, M. Serge Brammertz en septembre 2003. Un Français M. Bruno Cathala a été élu greffier de la CPI en septembre 2003. Le crime d'agression n'a pas pu être défini. Un groupe ad hoc s'est constitué au sein des Etats parties pour y travailler. Toutefois, les autres Etats sont associés à ce travail, notamment les membres du Conseil de sécurité non parties au Statut. L'accord est loin d'être trouvé. 2) La création d'un service administratif provisoire et la question de la création d'un barreau international Depuis le 1er juillet 2002, la CPI a une existence juridique. Elle peut recevoir des plaintes, même si elle n'est pas en état de les instruire. Aussi les Etats parties ont-ils créé une équipe de 40 précurseurs, sorte de service administratif provisoire, dirigé par M. Bruno Cathala, qui doit recruter près de 60 personnes. Des locaux provisoires leur ont été attribués à La Haye. A ce jour, près de 160 personnes travaillent à la CPI dont 8 Français, parmi lesquels M. Claude Jorda, juge et M. Bruno Cathala, greffier. La France estime qu'il faut créer une instance représentative des conseils au sein de la CPI aux côtés des juges et du procureur. Un travail considérable a déjà été entrepris par les représentants de barreaux, d'associations de juristes et d'avocats, d'organisations de la société civile d'une vingtaine de pays de tous les continents en vue de la constitution d'un barreau pénal international dont la première assemblée générale s'est tenue à Berlin les 21 et 22 mars 2003. Cependant, la dernière assemblée des Etats parties de septembre 2003 n'a pas permis de recueillir un consensus pour sa reconnaissance. Aucune activité juridictionnelle n'est à signaler actuellement. Toutefois le procureur a déclaré publiquement lors de la dernière assemblée des Etats parties qu'il estimait que la situation en Ituri (RDC) devait être attentivement suivie car très urgente, un certain nombre d'actes qui lui on été rapportés pouvant être constitutifs de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité. Dans la négociation du Statut, la France, du fait de ses responsabilités internationales, en particulier de la participation de personnels militaires à de nombreuses opérations de maintien de la paix des Nations Unies, avait veillé à obtenir un texte équilibré, évitant la possibilité de mises en cause d'ordre politique ou le développement d'une politique pénale allant à contre-courant de l'action du Conseil de Sécurité. Cette attitude, objet un temps de critiques notamment de la part des ONG et de certains partenaires européens a pourtant contribué à introduire dans le Statut de Rome des dispositions utiles et inédites par rapport aux statuts des deux tribunaux pénaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda : création de la chambre préliminaire qui détient certains des pouvoirs habituellement confiés à un juge d'instruction, participation des victimes à tous les stades de la procédure même si, contrairement à la procédure française de constitution de partie civile, les victimes ne peuvent pas saisir la Cour, possibilité pour la Cour d'accorder des réparations ou une indemnisation à ces victimes. Dans le cadre de la commission préparatoire, la France a été une des délégations les plus actives, à l'origine de nombreuses dispositions notamment du règlement de procédure et de preuve, de l'accord entre la Cour pénale et les Nations unies et du règlement financier de la Cour auquel la France apporte une attention toute particulière en tant que deuxième contributeur le plus important après l'Allemagne au budget de la Cour avec 12,8%. La contribution française à la CPI s'est élevée à 2 607 036 euros en 2003 et s'élèvera à 5 509 377 euros en 2004. La France a dû modifier sa constitution pour pouvoir ratifier la convention de Rome portant statut de la Cour pénale internationale, à la suite de l'avis rendu le 22 janvier 1999 par le Conseil constitutionnel. La loi de ratification a été adoptée à l'unanimité par le Parlement en 2000. Le 26 février 2002, la loi relative à la coopération avec la Cour pénale internationale a été promulguée. C'est une loi qui fixe les modalités de la coopération avec la Cour et les règles de procédure. En revanche, la France n'a pas encore adapté sa législation pénale au statut de la CPI. En effet, le crime de guerre prévu par l'article 8 du Statut de Rome n'existe pas en tant que tel en droit français. Elle est pour l'instant le seul pays à avoir utilisé la possibilité de décliner la compétence de la CPI sur les crimes de guerre malgré l'opposition des parlementaires. II - UN ACCORD SUR LES PRIVILÈGES ET IMMUNITÉS L'accord signé à New York le 9 septembre 2002 est un accord de privilèges et immunités assez classique. Sa négociation n'a pas mis en lumière de difficultés particulières, car le projet initial élaboré par le Secrétaire des Nations unies s'inspirait de conventions du même type déjà existantes et en reprenait les principales dispositions. L'adaptation a pris en compte la spécificité de l'institution et n'a été effectuée qu'à la marge. A - Des dispositions classiques permettant à la CPI d'exercer librement son activité 1) Immunités et privilèges de la CPI La personnalité juridique internationale et la capacité juridique que confère l'article 4 du Statut de Rome sont rappelés dans le préambule de l'accord du 9 septembre 2002. Les articles 2 à 11 déclinent les privilèges et immunités habituellement consentis à de telles juridictions pourvu qu'ils soient conformes à la finalité de la mission. Il s'agit de la capacité de contracter, d'acquérir et d'aliéner des biens immobiliers et mobiliers, d'ester en justice, de l'inviolabilité des locaux de la Cour et du droit d'y arborer drapeau, emblème et signes distinctifs, de l'immunité de juridiction absolue sur ses biens, fonds et avoirs où qu'ils se trouvent, sauf si la CPI y renonce expressément, de l'exemption de toute mesure d'ingérence ou d'exécution telles que perquisitions, saisies, réquisitions, confiscations, expropriations de toute réglementation, contrôle ou moratoire, de l'inviolabilité des archives, de l'exonération d'impôts, de droits de douane et de restrictions à l'importation ou à l'exportation de tous ses avoirs, revenus, biens, opérations et transactions. Cette règle souffre deux réserves. Les biens importés ne peuvent être vendus, sauf agrément de l'Etat partie concerné, et la Cour ne demandera pas l'exonération d'impôts afférents à l'utilisation de services publics, dont le montant dépend de la quantité de services rendus, et d'exonération de droits et taxes pour les achats importants. A ces privilèges et immunités, s'ajoutent la liberté de gestion, de détention, de transfert, de transport, de conversion de fonds, de devises, d'or et de valeurs mobilières, le traitement le plus favorable en matière de taux de change et les facilités de communication et de correspondance, l'interdiction de toute censure, le droit à l'utilisation de codes et chiffres, de valises scellées bénéficiant des même facilités que les valises diplomatiques, et le droit d'exploiter des installations de radiodiffusion sur les fréquences attribuées par les Etats parties. 2) Privilèges et immunités des personnels Selon l'article 28, les immunités et privilèges reconnus aux personnels de la Cour sont liés à leurs fonctions respectives. Il appartient au greffier d'en notifier périodiquement la liste aux Etats. a) Le procureur, les juges, les procureurs adjoints et le greffier Le procureur, les juges, les procureurs adjoints et le greffier jouissent, selon l'article 15, des privilèges et immunités accordés aux chefs de missions diplomatiques qui après l'expiration de leur mandat, continuent de jouir d'une immunité absolue de juridiction pour les paroles, les écrits et les actes accomplis par eux dans l'exercice de leurs fonctions officielles. Par ailleurs, ils bénéficient ainsi que leur famille, de la liberté de mouvement nécessaire à leurs fonctions à l'instar des agents diplomatiques en pareille circonstance. Les traitements, émoluments et indemnités versés par la Cour sont exonérés d'impôt. Toutefois l'article 26 prévoit que ces privilèges et immunités, octroyés dans l'intérêt de la bonne administration de la justice, doivent être levés, en cas d'entrave à la marche de la justice. Dans le cas d'un juge ou du procureur, ils sont levés par un vote à la majorité absolue des juges, dans le cas du greffier, par la présidence. b) Le greffier adjoint, le personnel du bureau du procureur et le personnel du greffe Aux termes de l'article 16, le greffier adjoint et les personnels du bureau du procureur et du greffe bénéficient d'immunités et de privilèges plus limités : l'immunité d'arrestation, de détention, de saisie de leurs bagages, l'immunité absolue de juridiction pour les paroles, écrits et actes accomplis dans le cadre de leurs fonctions, même après leurs cessations, l'inviolabilité de leurs documents, l'exonération d'impôt de leurs traitements, l'exemption des obligations du service national, l'exemption des restriction d'immigration, et de l'inspection de leurs bagages personnels, des facilités de change, d'importation et de rapatriement comparables à ceux des personnels des missions diplomatiques de grades équivalents. L'article 21 confère aux experts les mêmes immunités à l'exception des immunités fiscales. c) Le personnel recruté localement L'article 17 prévoit que les personnels recrutés localement qui ne sont pas couverts par d'autres dispositions du présent accord jouissent de l'immunité de juridiction pour les paroles, les écrits et les actes accomplis dans leurs fonctions, même après leur cessation. d) Les représentants des Etats Les représentants des Etats participant aux travaux de l'Assemblée des Etats partie au Statut, de ses organes subsidiaires ou aux travaux de la Cour jouissent dans l'exercice de leurs fonctions officielles et au cours de leurs déplacements à destination et en provenance du lieu de la réunion de privilèges et immunités similaires dont notamment : immunité d'arrestation et de détention, immunité absolue de juridiction pour les paroles, écrits et actes accomplis dans le cadre de leurs fonctions, l'inviolabilité de leurs documents, droit de faire usage de codes, de chiffre, de valises scellées (articles 13 et 14). Conformément à l'article 25, ces privilèges et immunités ne sont pas accordés à leur avantage personnel mais pour préserver leur indépendance. Les Etats ont donc l'obligation de les lever dans les cas où ils entraveraient la marche de la justice et pourraient être levés sans nuire aux fins pour lesquels ils ont été accordés. B - Les dispositions nouvelles assurant la protection des collaborateurs occasionnels de la CPI Le fonctionnement des tribunaux pénaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda ont conduit les Etats à conférer une certaine protection aux conseils de la défense, aux témoins, aux victimes, aux experts et à toute personne contribuant à l'activité de la Cour pénale internationale. L'article 26 prévoit que la levée de ces immunités est du ressort du Président de la CPI dans la plupart des cas. 1) Les conseils de défense et les témoins Les conseils de défense, leurs collaborateurs et les témoins jouissent pour la période nécessaire à l'exercice de leurs fonctions des privilèges et immunités telles que l'immunité d'arrestation, de détention et de saisie de leurs bagages personnels, l'immunité absolue de juridiction pour les paroles, écrits et actes commis dans le cadre de leurs fonctions, l'inviolabilité de leurs documents. 2) Les victimes et autres personnes Les victimes participant à la procédure sont également protégées et se voient attribuer un document attestant leur qualité. Elles bénéficient de l'immunité d'arrestation et de détention, de saisie de leurs bagages personnels, l'immunité absolue de juridiction pour leurs paroles, écrits et actes commis au cours de leur comparution et d'exemption des restrictions à l'immigration ou des formalités d'enregistrement des étrangers. Les autres personnes dont la présence est requise au siège de la Cour peuvent bénéficier de privilèges, immunités et facilités identiques aux victimes dans la mesure nécessaire à leur présence au siège de la Cour (article 22). L'article 23 prévoit que les Etats parties peuvent limiter, sur leur territoire, les privilèges accordés à leurs ressortissants ou résidents permanents participant au travail de la Cour au strict nécessaire par une déclaration au moment de la ratification. Cet article concerne les Pays-Bas, État du siège de la Cour. Pour l'instant, seule l'Allemagne a effectué une telle déclaration. Les autres dispositions concernent le principe général de coopération de la Cour avec les Etats parties pour empêcher tout abus auquel pourraient donner lieu les privilèges et immunités prévus par l'accord (article 24), les laissez-passer et visas (articles 29 et 30). Les Etats parties s'engagent d'une part à accepter les laissez-passer des Nations unies et les documents de voyage délivrés par la Cour comme documents de voyage valables et d'autre part à délivrer rapidement des visas sans frais à leurs détenteurs et aux personnes disposant d'un certificat de la Cour attestant qu'elles voyagent pour le compte de celle-ci. L'article 27 prévoit un régime de sécurité sociale des personnels de la Cour qui seront exonérés de toute cotisation aux régimes nationaux de sécurité sociale dès qu'ils seront affiliés à un régime spécifique. La CPI a choisi la Caisse commune des pensions du personnel des Nations unies. III - LA RÉGULARISATION DE L'ADHÉSION DE LA FRANCE A LA CONVENTION SUR LES PRIVILÈGES ET IMMUNITÉS Dans le cadre de la ratification de cet accord, le Sénat a adopté un article additionnel présenté par le gouvernement. Cette procédure est exceptionnelle lors de la ratification d'un accord. Cependant, il s'agit de régularisation de l'adhésion de la France à la Convention sur les privilèges et immunités des Nations unies du 13 février 1946 effectué à tort par le décret du 26 avril 1947, alors qu'il fallait une loi. En effet, le gouvernement a rappelé qu'à l'occasion d'un litige du travail opposant le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR) à un de ses collaborateurs, la question de la légalité du décret du 26 avril 1947 « relatif à l'exécution de la convention sur les privilèges et immunités des Nations unies » a été soumise au Conseil d'Etat par renvoi préjudiciel de la cour d'appel de Paris. Par décision en date du 16 juin 2003, le Conseil d'Etat a déclaré ce décret illégal au motif que la ratification n'a pas été autorisée par la loi. En effet la convention sur les privilèges et immunités des Nations unies du 13 février 1946 étant relative à l'organisation internationale et engageant les finances de l'Etat, d'une part, et modifiant des lois internes françaises, d'autre part, sa ratification devait être autorisée par la loi en vertu de l'article 27 de la Constitution du 27 octobre 1946. Il résulte de cet arrêt que cette convention n'est plus applicable en France et les stipulations qu'elle prévoit en matière d'immunité de juridiction ne sont plus invocables devant les tribunaux français. Cependant, la France demeure liée par cette convention en vigueur depuis le 18 août 1947, date du dépôt par les autorités françaises auprès du Secrétaire général des Nations unies de la notification d'adhésion prévue par la section 32 de l'article final. Il convient donc de régulariser l'adhésion de la France à la Convention sur les privilèges et immunités des Nations unies en votant l'article 2 de ce projet de loi. Après une longue gestation et une mise en place laborieuse, la CPI fonctionne enfin. L'obstruction des Etats-Unis entrave certes le rayonnement de cette juridiction mais ne devrait pas à terme empêcher que soit traduit devant elle et jugé par elle les auteurs des crimes les plus graves. En effet, 93 Etats ont à ce jour ratifié le Statut de Rome ce qui constitue un succès inespéré. La ratification de l'accord sur les privilèges et immunités de la CPI vise à renforcer à cette institution. La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du 16 décembre 2003. Après l'exposé du Rapporteur, M. Roland Blum a estimé que le retrait des Etats-Unis de la liste des Etats signataires de la convention portant statut de la Cour pénale internationale et la signature par ce même pays de 70 accords bilatéraux garantissant que les militaires américains ne puissent être déférés devant la Cour contribuaient à vider celle-ci de sa substance, voire même remettaient en cause sa raison d'être. M. Richard Cazenave a souhaité obtenir la liste des 70 Etats ayant signé un accord bilatéral avec les Etats-Unis. M. François Loncle s'est déclaré plus optimiste en rappelant que le Statut de Rome avait été signé par 139 Etats dont les quinze membres de l'Union européenne et les dix pays candidats, et que 93 Etats l'avaient ratifié. Selon lui, l'opposition des Etats-Unis ne devrait pas être permanente, même si près de 70 Etats, dont la liste figure en annexe du rapport, ont signé des accords bilatéraux excluant la compétence de la CPI pour les ressortissants américains. Déjà se dessine à propos de l'Irak une volonté de recourir à la justice internationale. Il a fait valoir que la CPI trouverait les moyens de fonctionner comme le montre le fait que le Procureur ait décidé de suivre attentivement la situation très préoccupante en Ituri (RDC), un certain nombre d'actes qui lui on été rapportés pouvant être constitutifs de génocide, de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité. Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a successivement adopté l'article 1er, l'article 2 et le projet de loi (n° 1284). * * * La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi. NB : Le texte de l'accord figure en annexe au projet de loi (n° 1284). ANNEXE I LISTE DES SIGNATAIRES ET PARTIES À L'ACCORD fait à New York le 9 septembre 2002
ANNEXE II fait à Rome le 17 juillet 1998
Liste des pays ayant conclu un accord avec les Etats-Unis Source : Amnesty International N° 1290 - Rapport sur le projet de loi - approbation de l'accord sur les privilèges et immunités de la Cour pénale internationale (Sénat 1ère lecture) (M. François Loncle) © Assemblée nationale |