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N° 1970

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 1er décembre 2004.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES,

sur le projet de loi de finances rectificative pour 2004 (n° 1921),

PAR M. Philippe VITEL,

Député.

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S O M M A I R E

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Pages

INTRODUCTION 5

I. -  UN PROJET DE LOI PERMETTANT DE RÉPONDRE AUX BESOINS DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE 7

A. UN PROJET DE LOI S'INSÉRANT DANS UN DISPOSITIF PLUS LARGE 7

B. LE FINANCEMENT DES SURCOÛTS OCCASIONNÉS PAR LES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES 8

1. Des besoins considérables, analogues aux précédentes années 8

2. Une couverture satisfaisante 10

3. Une procédure de financement restant peu adaptée 11

C. LES AUTRES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI 13

1. L'abondement de crédits de titre III hors opérations extérieures 13

2. Le reploiement des crédits d'équipement 14

II. -  LES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES 19

A. PRÉSENTATION GÉNÉRALE 19

1. Un effort important 19

2. Des cadres d'intervention distincts 20

B. L'AFRIQUE, PREMIER THÉÂTRE D'OPÉRATIONS EXTÉRIEURES 20

1. L'opération Licorne 20

2. Les autres missions multilatérales de rétablissement et de maintien de la paix 22

3. Les missions d'observation conduites par l'ONU 22

4. Les opérations bilatérales 23

C. LA POURSUITE DES OPÉRATIONS DANS LES BALKANS 24

1. Le maintien de la paix au Kosovo 24

2. Le maintien de la paix en Bosnie-Herzégovine 25

3. La mission Proxima en Macédoine 26

D. LA CONDUITE DES OPÉRATIONS EN AFGHANISTAN 27

E. LES AUTRES OPÉRATIONS 27

CONCLUSION 29

EXAMEN EN COMMISSION 31

INTRODUCTION

Du fait des importantes implications qu'il comporte pour le budget de la défense, le projet de loi de finances rectificative pour 2004 se doit de faire l'objet d'un examen particulier par la commission de la défense nationale et des forces armées.

Couplé à deux décrets, l'un portant ouverture de crédits et l'autre portant annulation de crédits, le présent projet de loi permet en effet de répondre aux attentes exprimées par le ministère de la défense, d'une part en assurant un financement satisfaisant des dépenses supplémentaires occasionnées par les opérations extérieures, d'autre part en abondant divers chapitres de titre III afin de satisfaire des besoins apparus en gestion.

Ce projet de loi prévoit également d'importants mouvements de crédits de paiement et d'autorisations de programme pour les titres V et VI : les crédits annulés afin de gager l'ouverture des crédits de titre III, à la fin du mois d'octobre, sont rétablis en collectif de fin d'année dans leur quasi-intégralité. Ces deux opérations successives ont donné au ministère de la défense l'occasion de procéder au redéploiement de ces moyens, afin de les adapter au déroulement et aux échéances de paiement des programmes et des prestations de maintenance des équipements. Les mouvements ainsi réalisés permettent notamment d'accroître les dotations destinées aux études amont, aux forces nucléaires et à l'entretien programmé des matériels, ainsi que de compléter le financement de la neutralité fiscale du changement de statut de DCN pour l'exercice 2005.

Enfin, le présent projet de loi permet à la commission de la défense de procéder à l'examen des opérations extérieures menées par la France, au-delà de l'analyse de leurs modalités de financement. Cette année encore, ces opérations auront été de grande ampleur et on en trouvera une présentation détaillée dans la deuxième partie du présent avis.

I. -  UN PROJET DE LOI PERMETTANT DE RÉPONDRE AUX BESOINS DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

A. UN PROJET DE LOI S'INSÉRANT DANS UN DISPOSITIF PLUS LARGE

Le présent projet de loi de finances rectificative pour 2004 ne peut s'analyser, s'agissant du budget de la défense, qu'en prenant en considération deux décrets publiés le 28 octobre, le premier portant ouverture de crédits à titre d'avance, et le second, portant annulation de crédits (1).

En effet, selon une procédure similaire à celle retenue en 2003, c'est un décret d'avance qui vient abonder les crédits de titre III afin de financer les surcoûts de rémunérations et charges sociales et de fonctionnement résultant des opérations extérieures, tandis qu'il est gagé par un décret d'annulation du même montant, portant sur les crédits de titres V et VI. Les crédits d'équipement ainsi annulés ne le sont pas définitivement, mais sont ensuite rendus dans leur quasi-intégralité au budget de la défense par le projet de loi de finances rectificative, tout en étant ventilés de façon différente afin d'ajuster les ressources du ministère à ses besoins.

Le décret d'avance a ainsi ouvert 692,2 millions d'euros de crédits de titre III, dont 540,14 millions d'euros destinés à financer les surcoûts des opérations extérieures et 152,06 millions d'euros pour permettre le versement de loyers de gendarmerie et abonder les dotations de rémunérations et charges sociales, de carburant et d'alimentation. Dans le même temps, le décret d'annulation, également d'un montant de 692,2 millions d'euros, a affecté différents chapitres des titres V et VI, principalement les chapitres 53-81 (équipements des armées), 53-71 (équipements communs, interarmées et de la gendarmerie) et 55-11 (soutien des forces).

Le projet de loi de finances rectificative pour 2004 ouvre également des crédits de titre III, à hauteur de 209,84 millions d'euros, notamment pour couvrir des dépenses en carburant, et il rétablit, sur les 692,2 millions d'euros annulés, 660,5 millions d'euros de crédits d'équipement, ces ouvertures concernant notamment les chapitres 55-21 (entretien programmé des matériels), 51-71 (forces nucléaires) et 52-81 (études). Au total, ce projet de loi ouvre 870,35 millions d'euros de crédits de paiement. Enfin, en ce qui concerne les autorisations de programme, 471 millions d'euros sont annulés sur les titres III et V et 575,5 millions d'euros sont inscrits sur les titres V et VI, soit une ouverture nette de 104,5 millions d'euros.

L'ensemble des mouvements budgétaires réalisés au cours de l'année 2004 se traduit donc par un abondement du titre III à hauteur de 902,4 millions d'euros, tandis que les crédits de titres V et VI sont préservés, les annulations de ces derniers se limitant à 35,69 millions d'euros.

Principaux mouvements de crédits budgétaires

(en millions d'euros)

2003

2004

Crédits d'avance

400,00

692,2

Ouverture de crédits en loi de finances rectificative

531,2

-

Demande d'ouverture de crédits en loi de finances rectificative

-

870,35

Total des ouvertures au titre III

432,20

902,04

Total des ouvertures aux titres V et VI

499,00

660,5

Annulations de crédits en cours d'exercice

- 420,2

- 696,2 (1)

Demande d'annulation de crédits en loi de finances rectificative

0

0

Total des annulations au titre III

- 20,00

0

Total des annulations aux titres V et VI

- 400,20

- 696,2

Solde des mouvements pour le titre III

412,20

902,04

Solde des mouvements pour les titres V et VI

98,80

- 35,69

Solde des mouvements pour l'ensemble du budget

511,00

866,35

(1) Ce montant inclut une annulation de crédits de paiement de 4 millions d'euros, par le décret n° 2004-543 du 14 juin 2004, portant sur le chapitre 53-71. Le décret annule également 10 millions d'euros d'autorisations de programme.

Source : ministère de la défense.

B. LE FINANCEMENT DES SURCOÛTS OCCASIONNÉS PAR LES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES

1. Des besoins considérables, analogues aux précédentes années

Ainsi que l'expose la deuxième partie du présent avis, les opérations extérieures auront atteint, en 2004, la même ampleur qu'en 2003. Le volume des surcoûts ainsi occasionnés s'avère lui aussi comparable ; il devrait s'établir à 649,44 millions d'euros, contre 658,17 millions d'euros en 2003, et, pour mémoire, 678,04 millions d'euros en 2002.

Au regard de leur importance, il apparaît opportun d'expliquer l'origine de tels montants. Ces derniers correspondent aux coûts additionnels découlant du déploiement de forces sur un théâtre d'opérations : pour le titre III, ils comprennent le versement de l'indemnité de sujétions pour service à l'étranger, pesant sur les crédits de rémunérations et charges sociales, ainsi que les dépenses supplémentaires d'alimentation, de fonctionnement, de transport et de carburant. Pour le titre V, ils se répartissent entre l'entretien programmé des matériels, les munitions, les infrastructures et les fabrications ; l'usage intensif qu'il est fait des matériels en opérations extérieures se traduit par l'accroissement de leur usure, affectant leur disponibilité, ainsi que par une hausse de leur taux d'attrition ; de plus, la consommation de munitions s'avère plus importante en opérations extérieures.

En 2004, ces surcoûts devraient atteindre 576,73 millions d'euros en titre III et 72,71 millions d'euros en titre V ; le tableau ci-dessous détaille leur répartition et, à titre de comparaison, présente également les montants enregistrés en 2003.

(en millions d'euros)

Titres et Chapitres

2003

2004

(prévisions octobre 2004)

Titre III

Rémunérations et charges sociales*


389,83


384,39

Alimentation

39,14

36,29

Fonctionnement

61,64

69,49

Entretien programmé du matériel

4,72

0

Carburants

26,26

23,44

Transport

67,67

63,12

Sous-total du Titre III

589,26

576,73

Titre V

68,91

72,71

Sous-total du titre V

68,91

72,71

TOTAL BUDGET DEFENSE

658,17

649,44

* Surcoût brut hors provision LFI de 24,39 M€, soit un surcoût net de 360 M€ en 2004 et 365,4 M€ en 2003.

Il convient de préciser que l'absence de dépenses en entretien programmé du matériel de titre III en 2004 s'explique par l'extinction du chapitre 34-20 réalisé par la loi de finances initiale pour 2004, les crédits correspondants étant désormais inscrits sur le chapitre 55-21 (entretien programmé des matériels) et relevant donc du titre V.

Ces surcoûts pèsent pour l'essentiel sur le budget de l'armée de terre, qui s'avère la plus sollicitée lors des opérations extérieures, ainsi que l'illustre le tableau ci-après.

(en millions d'euros)

Titres et Chapitres

Armée de l'air

Armée de terre

Marine

Gendarmerie

DGA

Autres services Communs

Total

Titre III

 

 

 

 

 

 

 

Rémunérations et charges sociales*

27,38

289,63

32,76

22,23

 

12,39

384,39

Alimentation

3,01

29,76

1,64

1,31

 

0,57

36,29

Fonctionnement

16,09

24,18

2,81

3,81

 

22,6

69,49

Carburants

8,03

12,07

3,33

0

 

0,01

23,44

Transport

12,69

49,96

0

0,4

 

0,07

63,12

Sous-total du Titre III

67,2

405,6

40,54

27,75

0

35,64

576,73

Titre V

16,43

32,44

21,97

1,17

 

0,7

72,71

Sous-total du Titre V

16,43

32,44

21,97

1,17

0

0,7

72,71

TOTAL BUDGET DEFENSE

83,63

438,04

62,51

28,92

0

36,34

649,44

* Surcoût brut hors provision LFI de 24,39 M€, soit un surcoût net de 360 M€ en 2004

2. Une couverture satisfaisante

Les crédits ouverts en fin de gestion par le décret d'avance du 28 octobre 2004 permettent d'assurer un financement satisfaisant des surcoûts résultant des opérations extérieures ; la couverture des besoins exprimés par le ministère de la défense s'avère plus extensive que celle réalisée l'année précédente, ce dont on ne peut que se féliciter.

De même qu'en 2003, l'intégralité des surcoûts en rémunérations et charges sociales est financée. Ces surcoûts sont évalués à 384,39 millions d'euros ; compte tenu de l'inscription en loi de finances initiale pour 2004 de 24,39 millions d'euros, correspondant au financement de l'opération Épervier, menée au Tchad, les besoins pour 2004 atteignent 360 millions d'euros et 360,8 millions d'euros ont été ouverts en décret d'avance à ce titre.

Les dépenses supplémentaires de titre III hors rémunérations et charges sociales, s'élevant à 192,3 millions d'euros, sont financées à hauteur de 179,4 millions d'euros, soit un taux de couverture de 93,3 %, niveau qui s'avère beaucoup plus satisfaisant que celui observé en 2003 ; ce dernier s'établissait à 33,9 %, soit un financement de 72,9 millions d'euros sur 214,9 millions d'euros de surcoûts.

En revanche, subsiste le principe du non-remboursement des surcoûts constatés en titre V ; ces derniers, s'élevant à 72,7 millions d'euros, ne font l'objet d'aucune ouverture de crédits ; il en fut de même en 2003, les surcoûts de 68,9 millions d'euros de titre V n'ayant pas été couverts. Si l'on ne peut que déplorer un tel état de fait, conduisant à laisser à la charge des armées des dépenses effectives, l'inscription de crédits de paiement considérables au chapitre 55-21 (entretien programmé des matériels) par le projet de loi de finances rectificative permet, de façon indirecte, de pallier quelque peu ce manque de financement.

Au total, les crédits ouverts pour financer les surcoûts issus des opérations extérieures atteignent 540,1 millions d'euros ; compte tenu de redéploiements internes de crédits, ce sont 76 millions d'euros qui restent à la charge du ministère.

3. Une procédure de financement restant peu adaptée

La bonne couverture des surcoûts issus des opérations extérieures pour l'année 2004 ne doit pas occulter le caractère peu satisfaisant de la procédure actuelle de financement de celles-ci. Les dépenses supplémentaires qu'elles occasionnent ne sont pas prises en compte en construction budgétaire, dans la loi de finances initiale, mais sont couvertes par des ouvertures de crédits en cours d'exécution, par une loi de finances rectificative, couplée le cas échéant à un décret d'avance, comme en 2003 et en 2004. Seule l'opération Épervier, conduite au Tchad, fait l'objet, du fait de son caractère permanent, d'une dotation en loi de finances initiale, depuis 1998 ; son montant, fixé initialement à 39,64 millions d'euros en loi de finances pour 1998, a été ramené à 24,39 millions d'euros en loi de finances pour 1999 et est maintenu à ce niveau depuis lors.

Cette procédure de financement est justifiée par le caractère en principe imprévisible des opérations extérieures, rendant difficile l'évaluation a priori du volume des ressources nécessaires. Néanmoins, compte tenu de la durée et de l'importance de certaines opérations extérieures, telles celles conduites dans les Balkans, le montant d'une large part des surcoûts est désormais aisé à estimer et le niveau total de ces dépenses supplémentaires s'établit depuis plusieurs années à environ 600 millions d'euros. De surcroît, cette procédure se traduit pour le ministère de la défense par des difficultés de gestion, puisqu'il est contraint de procéder à des avances de trésorerie tout au long de l'année, lesquelles ne peuvent se prolonger au-delà du troisième trimestre sans risquer d'interrompre le versement des rémunérations ou d'affecter l'activité opérationnelle des forces ; de même, le recours à un décret d'avance se traduit par l'annulation de crédits de titre V pour un même montant et ces crédits, même rétablis en loi de finances rectificative, ne sont pas disponibles pour l'exercice en cours et sont reportés sur l'année suivante, ce qui entraîne la mise en attente de factures et, partant, une hausse des intérêts moratoires. Il convient également de souligner que le financement de ces surcoûts est variable et plus ou moins satisfaisant ; si, depuis 2002, un terme a été mis à la pratique d'ouvertures de crédits au titre des opérations extérieures gagées par des annulations à due concurrence de crédits d'équipement du budget de la défense, la couverture des dépenses est souvent incomplète, faisant peser sur le ministère de la défense une part significative de leur financement - même si, encore une fois, l'année 2004 s'avère plus que convenable à cet égard, compte tenu des dispositions du décret d'avance sus-évoqué.

Enfin, plus généralement, il apparaît de bonne gestion que la construction du budget de l'Etat prenne en compte les dépenses prévisibles au moment où le projet de loi de finances initiale est soumis au vote du Parlement, conformément au principe posé par la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001, qui, dans son article 32, dispose que « les lois de finances présentent de façon sincère l'ensemble des ressources et des charges de l'Etat. Leur sincérité s'apprécie compte tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler. »

La question du financement des opérations extérieures fait l'objet de débats depuis plusieurs années. L'inscription d'une provision en loi de finances initiale avait été préconisée dès le printemps 2000 par un rapport d'information déposé par la commission de la défense et consacré au contrôle des opérations extérieures (2), tandis que le président de la commission de la défense a présenté un amendement en ce sens lors de l'examen de la loi de programmation militaire pour 2003-2008, le 28 novembre 2002, ce qui a conduit à insérer dans le rapport annexé à la loi l'alinéa suivant : « une ligne budgétaire spécifique aux opérations extérieures sera créée en loi de finances initiale ». Parallèlement, une mission conjointe de l'inspection générale des finances et du contrôle général des armées avait été chargée de formuler des propositions dans ce domaine. Son rapport, remis au printemps 2003, a souligné les difficultés présidant à la définition précise et exacte des opérations extérieures ainsi que les différences des modes de calcul de surcoûts par les états-majors. La résolution de ces deux difficultés constituant le préalable indispensable à tout projet de budgétisation des opérations extérieures, deux groupes de travail ont été constitués : le premier a été chargé de définir la notion d'opérations extérieures et d'en délimiter le périmètre, le second s'est vu confier la tâche d'harmoniser les modes de calcul des coûts additionnels. Les travaux de ces deux groupes de travail ont été remis en juillet 2003 et c'est sur leur base qu'une proposition d'instruction conjointe finances-défense a été transmise au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie afin de clarifier les modalités de décompte.

Sans doute grâce à l'ensemble de ces débats et travaux, le projet de loi de finances pour 2005 comporte une véritable avancée, en prévoyant l'inscription d'une provision de 100 millions d'euros pour le financement des opérations extérieures. Cette somme n'en reste pas moins très inférieure au niveau des surcoûts généralement enregistrés ; l'inflexion positive que représente cette disposition se doit d'être amplifiée dans le prochain projet de loi de finances.

C. LES AUTRES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI

1. L'abondement de crédits de titre III hors opérations extérieures

Le projet de loi de finances rectificative ainsi que certaines dispositions du décret d'avance du 28 octobre 2004 prévoient des ouvertures de crédits destinées à abonder le titre III du budget de la défense au-delà des dépenses supplémentaires résultant des opérations extérieures.

Sur 448,2 millions d'euros de crédits de rémunérations et charges sociales ouverts par le décret d'avance, 87,4 millions d'euros sont alloués au financement des insuffisances constatées pour l'exercice 2004 à ce titre, essentiellement en raison de la revalorisation du point fonction publique, dont le financement n'avait pas été provisionné en construction budgétaire pour 2004.

Sur les 37 millions d'euros alloués aux dépenses de fonctionnement de la gendarmerie par le décret d'avance, seuls 5 millions d'euros relèvent du financement des opérations extérieures, les 32 millions d'euros restants étant destinés au versement des loyers de gendarmerie. Ce poste de dépense avait déjà fait l'objet d'une ouverture de crédits en loi de finances rectificative en 2002 (3), afin d'apurer des reports de charges et de couvrir une insuffisance en gestion. Pour l'année 2004, il s'agit de répondre à ces mêmes contraintes, alors que les reports de charges sur 2004 dans ce domaine ont atteint 17 millions d'euros.

Tant le décret d'avance que le projet de loi de finances rectificative ouvrent des crédits de fonctionnement afin d'alimenter les dotations en carburant des différentes armées et services. Il s'agit de tenir compte de la forte hausse du prix du baril de pétrole enregistrée en 2004 ainsi que de l'importante sollicitation, au cours des deux dernières années, des stocks du service des essences, lesquels doivent être reconstitués. Le projet de loi de finances rectificative inscrit ainsi 72 millions d'euros pour répondre à ces besoins en carburant, dont 65 millions d'euros sur le chapitre 34-03, pour l'armée de l'air, et 7 millions d'euros sur le chapitre 34-05, pour la marine. Sur ces 72 millions d'euros, 12 millions d'euros sont inscrits au titre de la mise en œuvre d'un mécanisme de couverture de risque, lequel doit permettre au ministère de la défense de mieux gérer les brusques fluctuations du prix du baril de pétrole.

En sus de l'abondement des dotations en carburant, sont également prévus par le projet de loi de finances rectificative 100 millions d'euros pour les chapitres de fonctionnement de la marine (33 millions d'euros), de la gendarmerie (55 millions d'euros) et de la délégation générale pour l'armement (12 millions d'euros). Pour la gendarmerie, s'ajoutent 3 millions d'euros au titre de la compensation du transfert réalisé en 2004 au profit du ministère de l'intérieur pour l'acquisition de radars automatiques, ce qui porte la hausse de la dotation en fonctionnement de la gendarmerie à 58 millions d'euros.

Le projet de loi de finances rectificative inscrit également 19 millions d'euros au chapitre 36-01 afin de permettre au ministère de rembourser des dettes auprès de l'OTAN, ainsi que 3 millions d'euros au chapitre 34-01, destinés à la journée d'appel de préparation à la défense, du fait de l'intégration en son sein d'une formation de secourisme, engagée l'été dernier, et 3 millions d'euros au chapitre 34-02 pour le financement du sommet des ministres de l'OTAN.

Enfin, le présent projet de loi ouvre 9,84 millions d'euros au chapitre 37-91, relatif aux frais de contentieux, afin de couvrir l'insuffisance constatée par rapport aux moyens alloués par la loi de finances initiale pour 2004 dans ce domaine, en application de la règle selon laquelle la loi de finances rectificative doit ouvrir au minimum, sur les chapitres évaluatifs, un montant de crédits correspondant à l'écart constaté au 30 septembre entre les dépenses effectives et les crédits ouverts en loi de finances initiale.

Ouvertures de crédits de titre III
prévues par le projet de loi de finances rectificative pour 2004

(en millions d'euros)

Chapitre 34-01 (SGA.DGSE.DPSD.PPE.DSN.DICOD.CGA.AP. Entretien et fonctionnement)

3

Chapitre 34-02 (SSA.DRM.EMA/OIA.SEA. EMA/EMIA. Fonctionnement)

3

Chapitre 34-03 (fonctionnement - armée de l'air)

65

Chapitre 34-05 (fonctionnement- marine)

40

Chapitre 34-06 (fonctionnement - gendarmerie)

58

Chapitre 34-08 (fonctionnement - DGA)

12

Chapitre 36-01 (subventions de fonctionnement et participation aux dépenses de fonctionnement de divers organismes)

19

Chapitre 37-91 (frais de contentieux)

9,84

TOTAL

209,84

2. Le reploiement des crédits d'équipement

L'intervention successive du décret d'annulation et du projet de loi de finances rectificative fournit au ministère de la défense l'occasion de procéder à un redéploiement de ses crédits de paiement et de ses autorisations de programme des titres V et VI entre différents chapitres, afin de mettre en adéquation ses ressources avec ses besoins, en fonction du déroulement et des échéances de paiement des différents programmes d'armement et des prestations de maintenance.

Les annulations de crédits de paiement réalisées par décret, atteignant 692,2 millions d'euros, ont concerné pour l'essentiel les chapitres relatifs aux équipements communs et des armées, à l'espace et au soutien des forces. En contrepartie, ce sont 660,508 millions d'euros qui doivent être ouverts par le présent projet de loi ; toutefois, sur ce montant, 12,508 millions d'euros correspondent au chapitre 54-41, c'est-à-dire les infrastructures, et résultent de changements d'affectation d'immeubles entre ministères (pour l'essentiel, au bénéfice du ministère de l'intérieur). Cette ouverture de crédits de paiement, associée à une ouverture d'autorisations de programme d'un même montant, s'avère neutre pour le budget de la défense. Dès lors, l'ouverture effective de crédits de paiement prévue par le projet de loi s'élève à 648 millions d'euros, et non à 660,508 millions d'euros.

Au sein de ce montant, 85 millions d'euros sont destinés à compléter le financement de la neutralité fiscale du changement de statut de DCN pour l'année 2005. En effet, sur les 144 millions d'euros devant être ouverts à ce titre, seuls 59 millions d'euros ont été inscrits en projet de loi de finances initiale pour 2005 ; les 85 millions d'euros restants sont ouverts au chapitre 51-71 concernant les forces nucléaires, à hauteur de 60 millions d'euros, et au chapitre 55-21, relatif à l'entretien programmé des matériels, pour 25 millions d'euros. Par ailleurs, outre ces crédits, 122,8 millions d'euros sont inscrits au chapitre 51-71 afin d'ajuster les dotations des programmes correspondants, notamment celui du missile M 51 ; ce dernier entre en phase de production et un marché couvrant l'ensemble de la production et du maintien en condition opérationnelle doit être passé, avec un engagement ferme sur le premier lot de missiles, destiné au Terrible. Le chapitre 55-21 est, quant à lui, abondé à hauteur de 344,5 millions d'euros, ce montant considérable ayant vocation à compenser, au cours de la gestion de 2005, les reports de charges attendus de l'exercice 2004, résultant notamment du dynamisme continu des dépenses de maintenance.

Par ailleurs, 95 millions d'euros sont inscrits au chapitre 52-81 et sont destinés aux études-amont, afin de permettre le recours à l'équilibre financier de celles-ci en 2005, compte tenu de l'accroissement des engagements réalisés au cours des dernières années, notamment en 2003. Cette disposition montre toute l'importance accordée à la recherche et développement. Enfin, l'ouverture de 0,7 million d'euros demandée pour le chapitre 67-10 correspond aux paiements prévus en 2005 pour les travaux de réalisation de l'Historial Charles de Gaulle, dont l'ouverture est prévue en 2007, au sein du musée de l'armée.

ouvertures et annulations de crédits de paiement sur les titres v et vi en 2004

(en millions d'euros)

Annulations (1)

Ouvertures (2)

51-61 - Espace - Systèmes d'information et de communication

69,898

51-71 - Forces nucléaires

182,85

52-81 - Etudes

95

53-71 - Equipements communs

124,514

-

53-81 - Equipements des armées

341,434

-

54-41 - Infrastructures

71,469

12,508

55-11 - Soutien des forces

80,715

55-21 - Entretien programmé des matériels

369,45

66-50 - Subventions d'équipement social

4,17

67-10 - Subventions aux organismes sous tutelle

0,7

Total

692,2

660,508

(1) Crédits annulés par le décret d'annulation du 28 octobre 2004.
(2) Crédits ouverts par le projet de loi de finances rectificative.

Dans le même temps, le présent projet de loi prévoit un réajustement des autorisations de programme, par l'annulation de 471 millions d'euros et l'ouverture de 575,508 millions d'euros, soit une ouverture nette de 104,508 millions d'euros ; toutefois, compte tenu de l'inscription de 12,508 millions d'euros au chapitre 54-41, cette ouverture nette peut être ramenée à 92 millions d'euros, pour le même motif que celui mentionné plus haut.

Sur le chapitre 34-20, relevant du titre III, 250 millions d'euros d'autorisations de programme disponibles à l'affectation sont ainsi annulés ; il s'agit de tirer les conséquences de la suppression du chapitre 34-20 correspondant à l'entretien programmé des matériels, déjà mentionnée plus haut, cette extinction se traduisant par le transport de la comptabilité du chapitre et des opérations en cours vers le chapitre 55-21, également relatif à l'entretien des matériels, au sein du titre V. Par ailleurs, 221 millions d'euros d'autorisations de programme sont annulés sur le chapitre 51-61, relatif à l'espace, un montant correspondant étant ouvert sur d'autres chapitres des titres V et VI.

Ce redéploiement de 221 millions d'euros d'autorisations de programme bénéficie à plusieurs chapitres :

- 111 millions d'euros pour les forces nucléaires, dont 100 millions d'euros pour compenser les prêts consentis au cours de la gestion de 2004 pour le programme M 51 et 11 millions d'euros pour compenser l'annulation réalisée par le décret du 14 juin 2004 au titre de la participation du ministère de la défense au partenariat global du G8 contre la prolifération ;

- 90 millions d'euros sur le chapitre des études, afin de permettre le bon déroulement du plan d'engagement des études amont en 2005, ces ouvertures étant accompagnées de l'inscription des 95 millions d'euros de crédits de paiement indiquée plus haut ;

- 12 millions d'euros pour le chapitre des subventions d'équipement social, destinés à remettre à niveau les dotations du fonds pour les restructurations de la défense (FRED) ;

- 8 millions d'euros pour le chapitre des subventions aux organismes sous tutelle, afin de lancer dès 2005 les travaux de l'Historial Charles de Gaulle, parallèlement à l'inscription de crédits de paiement à ce titre.

De plus, outre 12,508 millions d'euros d'autorisations de programme au chapitre 54-41, 342 millions d'euros d'autorisations de programme sont ouverts au titre de la mise en œuvre de la neutralité fiscale du changement de statut de DCN pour 2005, ces autorisations de programme n'ayant pas été inscrites en projet de loi de finances : le présent projet de loi prévoit pour ce faire l'ouverture de 32 millions d'euros pour le chapitre 51-71, 217 millions d'euros pour le chapitre 53-81 et 93 millions d'euros pour le 55-21.

ouvertures et annulations d'autorisations de programme
sur les titres iii, v et vi demandées par le projet de loi

(en millions d'euros)

Annulations

Ouvertures

34-20 - Entretien programmé des matériels

250

51-61 - Espace

221

51-71 - Forces nucléaires

143

52-81 - Etudes

90

53-81 - Equipements des armées

217 

54-41 - Infrastructures

12,508

55-21 - Entretien programmé des matériels

93

66-50 - Subventions d'équipement social

12

67-10 - Subventions aux organismes sous tutelle

8

TOTAL

471

575,508

II. -  LES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES

A. PRÉSENTATION GÉNÉRALE

1. Un effort important

Au-delà des diverses dispositions budgétaires qu'il comporte, le projet de loi de finances rectificative constitue l'occasion pour le Parlement d'examiner la conduite des opérations extérieures et leur évolution.

Pour l'année 2004, le volume de ces opérations reste considérable. Les surcoûts qu'elles occasionnent sont estimés à 649,44 millions d'euros, soit un montant similaire à celui enregistré au cours des deux dernières années, tandis que 13 951 hommes étaient déployés à travers le monde au 1er juin 2004, contre 14 086 un an plus tôt. La structure des opérations a néanmoins connu des évolutions : l'amélioration de la situation dans les Balkans amène une diminution du poids relatif des missions qui y sont menées, tandis que mille soldats français ont été déployés à Haïti durant trois mois dans une opération multinationale de stabilisation du pays. En revanche, les opérations conduites en Afghanistan sont poursuivies selon les mêmes modalités que l'année précédente et, de même qu'en 2003, c'est l'Afrique qui se trouve au cœur de l'action militaire de la France à l'étranger, du fait de l'opération Licorne menée en Côte d'Ivoire, celle-ci ayant été significativement renforcée à la suite des événements dramatiques survenus au début du mois de novembre.

Le tableau ci-dessous présente la répartition des surcoûts résultant des différentes opérations extérieures, pour 2004, selon des prévisions réalisées en octobre dernier, et pour 2003 :

(en millions d'euros)

2003

2004

Théâtres D'opérations

Titre III

Titre V

Total général

Titre III

Titre V

Total général

bosnie

69,19

7,26

76,45

58,02

6,82

64,84

macedoine et kosovo

161,75

21,82

183,57

131,00

14,08

145,08

licorne

145,41

10,39

155,80

174,00

12,23

186,23

heracles

64,01

11,83

75,84

76,78

22,49

99,27

tchad et centrafrique

66,21

8,96

75,17

75,91

9,09

85,00

mamba

38,76

4,02

42,78

1,74

0,00

1,74

autres

43,93

4,63

48,56

59,29

8,00

67,29

TOTAL GENERAL

589,26

68,91

658,17

576,74

72,71

649,45

2. Des cadres d'intervention distincts

La France a pour politique de n'intervenir militairement à l'étranger que dans le respect des dispositions de la Charte des Nations Unies. Trois modes d'intervention peuvent être répertoriés, la France conduisant des opérations à chacun de ces titres.

Le Conseil de sécurité de l'ONU peut charger un Etat ou une coalition ad hoc d'intervenir pour rétablir la paix dans une région donnée. Il lui donne en général la capacité, expressément prévue par le chapitre VII de la Charte, d'assurer la sécurité de ses forces, ou celle de la mission, par ses propres moyens et sous sa propre responsabilité.

Le Conseil de sécurité de l'ONU peut également faire diriger des missions par le département des opérations de maintien de la paix de l'ONU (DOMP). Celles-ci sont en général d'intensité moindre que les opérations confiées à des coalitions, où figurent les membres du Conseil de sécurité eux-mêmes. Elles sont placées, soit sous chapitre VII, soit sous les dispositions du chapitre VI de la Charte ; dans ce dernier cas, c'est le pays hôte qui assure la sécurité des membres de la mission d'observation. Les membres du Conseil de sécurité ne délèguent en général dans ces missions que quelques observateurs.

Enfin, l'article 51 de la Charte des Nations Unies prévoit la possibilité de l'assistance militaire bilatérale en réponse à une agression ; c'est cette disposition qui fonde les opérations conduites par la France sous commandement national.

D'un point de vue budgétaire, il convient de préciser que la participation de la France à des opérations de maintien de la paix de l'ONU fait l'objet de remboursements des dépenses de soldes et de matériels ; toutefois, ces versements sont affectés aux recettes du budget des charges communes. Le ministère de la défense estime ce dispositif peu satisfaisant et la Cour des Comptes, dans son référé du 8 février 2001 sur le remboursement par l'ONU de la participation de l'armée française aux opérations de maintien de la paix, a abondé dans son sens, en préconisant d'affecter ces remboursements au budget de la défense ; toutefois, cette recommandation n'a, jusqu'alors, pas été suivie d'effets.

Le présent rapport pour avis a pour objet de présenter un panorama des principales opérations extérieures menées par la France, en précisant le statut de chacune d'entre elles.

B. L'AFRIQUE, PREMIER THÉÂTRE D'OPÉRATIONS EXTÉRIEURES

1. L'opération Licorne

La première des missions de la France sous commandement national est l'opération Licorne, lancée en septembre 2002. Elle a pour objet d'assurer la sécurité des ressortissants français ou de pays amis, de préserver la stabilité du pays, de contribuer à l'application du processus de Marcoussis et de l'accord Accra III et de soutenir la force de l'ONU en Côte d'Ivoire (ONUCI), qui compte 6 200 hommes. Engagée comme une opération nationale avec le soutien du gouvernement légal ivoirien, Licorne pourrait aujourd'hui être rangée parmi les opérations sur délégation du Conseil de sécurité. Par sa résolution n° 1464 du 4 février 2003, ce dernier a en effet repris à son compte les missions définies pour Licorne et il a placé son action sous le chapitre VII de la Charte des Nations Unies. En outre, par sa résolution n° 1528 votée le 27 février 2004, il a créé l'ONUCI, en fusionnant la mission des Nations Unies en Côte d'Ivoire (MINUCI) avec la force de la communauté des États d'Afrique de l'Ouest en Côte d'Ivoire (MICECI), l'ONUCI ayant pour mission d'assurer la paix, de faire respecter les différents accords, notamment de veiller au processus de démobilisation, désarmement et réinsertion (DDR). Dans ce cadre, les forces françaises se voient conférer un rôle de force de réaction rapide de l'ONUCI.

La crise majeure intervenue au début du mois de novembre, ayant entraîné le décès de neuf soldats français à la suite d'une attaque aérienne, a conduit la France à renforcer son dispositif, notamment par l'envoi, le 7 novembre 2004, de 300 soldats en provenance des forces prépositionnées à Libreville, au Gabon. Dans le même temps, une déclaration du Président du Conseil de l'ONU du 6 novembre 2004 a exprimé son plein appui à l'action menée par les forces françaises et l'ONUCI, tout en renforçant les règles d'engagement de cette dernière, lui permettant ainsi d'ouvrir le feu dans des conditions moins restrictives que celles précédemment en vigueur. Enfin, le 15 novembre 2004, le Conseil de sécurité a adopté la résolution n° 1572, prévoyant un embargo immédiat sur les armes à destination de Côte d'Ivoire, pour une durée de treize mois, ainsi que le gel des fonds et autres avoirs financiers des personnes désignées comme faisant peser une menace sur le processus de paix en Côte d'Ivoire.

A la fin du mois de novembre, 5 079 Français étaient déployés en Côte d'Ivoire, contre 4 123 fin août. Il convient d'ajouter à ces effectifs 121 personnes du détachement Air déployé au Togo depuis le 10 novembre.

Au 27 novembre, les matériels mobilisés dans cette opération étaient les suivants : s'agissant des avions, un C 130 et un C 160 basés à Abidjan, deux C 160 et un Casa 235-100 à Lomé, cinq Mirage F1 et deux C 135 à Libreville ; pour les hélicoptères, un Fennec, sept Cougar, sept Puma et sept Gazelle ; pour les matériels terrestres majeurs, 27 blindés AMX 10 RC, 184 véhicules de l'avant blindé (VAB), 160 véhicules blindés légers (VBL), 19 ERC 90 (engin de reconnaissance canon), 734 véhicules divers et 132 véhicules logistiques, auxquels s'ajoutent 24 mortiers, 28 postes de tir Milan, 29 canons de 20 millimètres et 68 postes de tir Eryx.

Les coûts supplémentaires résultant de l'opération Licorne sont estimés à 186,23 millions d'euros pour 2004 ; ils pourraient s'accroître de 6 à 7 millions d'euros compte tenu de l'évolution de l'engagement des forces françaises.

2. Les autres missions multilatérales de rétablissement et de maintien de la paix

L'opération Boali menée en République centrafricaine s'avère proche de Licorne dans ses modalités de conduite. La situation de ce pays a amené les Etats de la Communauté économique et monétaire des Etats d'Afrique centrale (CEMAC) à y dépêcher une force d'interposition. La France a décidé parallèlement d'y déployer un bataillon, qui en 2004 compte 213 militaires, équipés de cinq VAB, pour soutenir l'action de la CEMAC et concourir à la protection de ses ressortissants. Le bataillon Boali assure notamment la sécurité de l'aéroport de Bangui. Cette opération, qui a débuté en mars 2003, doit se traduire, pour l'année 2004, par des surcoûts estimés à 7,71 millions d'euros, dont 7,41 millions d'euros de titre III.

Pour mémoire, on rappellera la conduite par l'Union européenne d'une opération en Ituri, en République démocratique du Congo, de juin à septembre 2003. Il s'agissait de permettre le redéploiement de la MONUC (Mission d'observation de l'ONU en République démocratique du Congo) dans cette région. La mission de la force, dénommée Artémis, et Mamba pour la participation française, a été définie par la résolution n° 1484 du Conseil de sécurité du 30 mai 2003. L'opération a été transférée à l'Union européenne le 16 juin, la conduisant à intervenir, pour la première fois, en Afrique. Artémis a déployé 1 860 militaires, dont 1 660 Français. La France a assuré, au titre de nation-cadre, le commandement de la force, elle a fourni l'essentiel des moyens et a assuré la grande majorité du financement. Les surcoûts ont atteint 42,78 millions d'euros en 2003 et s'avèrent résiduels, compte tenu de l'achèvement de l'opération, pour l'année 2004, s'élevant à 1,74 million d'euros.

3. Les missions d'observation conduites par l'ONU

Outre les opérations Licorne et Boali, la France participe à trois missions d'observation et de maintien de la paix de l'ONU en Afrique, mais son implication reste modeste.

● La MONUC, constituée en 1999, avait essentiellement pour mission d'assurer une liaison sur le terrain entre les six Etats de la région, dont la République démocratique du Congo, signataires de l'accord de cessez-le-feu de Lusaka de juillet 1999. La MONUC comptait au départ quelques centaines de personnels de l'ONU. Les résolutions qui ont été ensuite été adoptées, dont la dernière est la n° 1493 du 28 juillet 2003, ont considérablement renforcé ses effectifs et son mandat.

Outre sa mission première, la MONUC a ainsi pour tâches de surveiller l'application de l'accord de cessez-le-feu, notamment les positions défensives occupées par les forces étrangères, et de faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire, le respect des droits de l'homme et le déminage.

Les effectifs de la force sont passés de 2 350 militaires en 2001 à 4 575 au 1er juin 2003, pour atteindre 10 581 militaires en juillet 2004. La participation française se limite à cinq officiers de liaison. Le surcoût, pour 2004, est évalué à 0,56 million d'euros.

● La Mission des Nations Unies en Ethiopie et en Erythrée (MINUEE) a été créée le 31 juillet 2000 pour superviser la mise en œuvre de l'accord de cessation des hostilités signé entre ces deux pays en juin 2000, notamment le redéploiement de chacune des deux armées. Son mandat court normalement jusqu'à l'achèvement de la délimitation et de la démarcation de la frontière entre l'Ethiopie et l'Erythrée.

Le total de la force est stable, avec 3 896 militaires en juin 2004, dont 215 observateurs. La France affecte à cette mission un observateur, pour un surcoût estimé pour l'année 2004 à 50 000 euros.

● La Mission des Nations Unies pour le Référendum au Sahara Occidental (MINURSO), créée en avril 1991, est chargée de superviser le cessez-le-feu entre les forces marocaines et sahraouies, à maintenir un dispositif d'interposition et à contrôler le processus électoral visant à établir le futur statut du Sahara occidental.

Cette mission, qui devait se terminer fin 1995, est régulièrement prolongée, le référendum d'autodétermination n'ayant pas encore pu être organisé. Au 1er juin 2004, la mission comptait 254 hommes, comprenant majoritairement des observateurs, au nombre de 202, dont 25 Français. Le surcoût de cette opération pour 2004 est estimé à 1,2 million d'euros.

4. Les opérations bilatérales

● On ne peut aborder les opérations menées par la France en Afrique sans mentionner ses forces prépositionnées dans certains pays pour l'application d'accords de défense. Ces forces disposent de moyens importants. On y inclut traditionnellement les forces présentes au Tchad au titre de l'opération Epervier. Celles-ci sont présentes au Tchad depuis 1986 et, outre leur objectif premier de concourir à la stabilité et au maintien de l'intégrité du pays, elles ont aussi pour objet de constituer un support pour intervenir sur l'ensemble de la zone, comme l'a montré le déploiement de quelque deux cents hommes le long de la frontière avec le Soudan, lorsque la crise du Darfour a atteint son paroxysme à l'été 2004.

Au 1er juin 2004, les forces prépositionnées en Afrique représentaient 6 124 militaires, dont 1 052 au Tchad au titre de l'opération Epervier et 2 688 à Djibouti, 1 143 au Sénégal, 729 au Gabon et 512 en Côte d'Ivoire. Si ces effectifs ont significativement diminué au cours des huit dernières années - hors opération Epervier, ils sont passés de 8 163 en 1996 à 5 072 en 2004, soit une diminution de plus d'un tiers -, leur volume est désormais stabilisé, des ajustements devant toutefois être réalisés à la marge en 2005. Les forces françaises prépositionnées sont amenées à participer à des opérations extérieures, soit bilatérales, soit multilatérales ; elles ont été largement sollicitées pour l'opération Licorne en Côte d'Ivoire.

● L'opération Corymbe est, dans sa définition, proche des forces prépositionnées. Comme l'opération Epervier, elle est cependant financée au titre d'une opération extérieure. C'est une mission de présence d'un bâtiment de combat au large des côtes africaines, notamment dans les eaux internationales du golfe de Guinée. Elle a pour objet de marquer l'intérêt de la France pour les pays riverains du golfe et d'apporter, le cas échéant, un soutien à toute opération qui pourrait être décidée dans la zone, notamment pour la sauvegarde ou l'évacuation de nos ressortissants. Elle est en cours depuis avril 1991. Le surcoût évalué pour l'année 2004 atteint 6,23 millions d'euros, dont 4,79 millions d'euros de titre III.

● L'opération Aramis est menée depuis le 17 février 1996 en application de l'accord de défense entre la France et le Cameroun, pour soutenir ce pays dans le contentieux qui l'oppose au Nigeria au sujet de la presqu'île de Bakassi ; la Cour internationale de justice a été saisie sur ce différend et a rendu un jugement favorable au Cameroun en 2002 ; les forces nigérianes doivent se retirer de la presqu'île d'ici la fin de 2004.

En attendant ce retrait, l'opération Aramis se traduit par une assistance aux forces camerounaises, pour leur « permettre de maintenir un contrôle défensif » dans ce conflit territorial difficile. Cette assistance porte sur l'aide au commandement, le soutien logistique, le renseignement, l'instruction opérationnelle et l'évacuation sanitaire. Sont actuellement engagés 51 hommes, sur trois sites. Le surcoût spécifique à Aramis pour 2004 est de 2,99 millions d'euros, dont 2,82 millions d'euros imputés sur le titre III.

C. LA POURSUITE DES OPÉRATIONS DANS LES BALKANS

Compte tenu du développement des opérations en Afrique, les Balkans constituent désormais la deuxième région d'opérations extérieures de la France, représentant environ le tiers des forces déployées et des surcoûts.

1. Le maintien de la paix au Kosovo

Le maintien de la paix au Kosovo reste la mission la plus importante conduite dans les Balkans. C'est la résolution du Conseil de sécurité n° 1244 du 10 juin 1999 qui a défini les grandes lignes de la mission de présence internationale au Kosovo, laquelle est placée sous le chapitre VII. Elle établit « le déploiement au Kosovo, sous l'égide de l'Organisation des Nations Unies, de présences internationales civile et de sécurité dotées du matériel et du personnel approprié, en tant que de besoin ». La présence internationale civile est dénommée MINUK (Mission intérimaire d'administration des Nations Unies au Kosovo). La présence internationale de sécurité, qui est assurée par l'OTAN, a pris le nom de KFOR (Kosovo Force).

Les deux missions étant liées - la KFOR constituant en quelque sorte le bras armé de la MINUK -, il était logique que la France participât aux deux.

· Aux termes de la résolution n° 1244, la MINUK a pour mission de faciliter, en attendant un règlement définitif, l'instauration au Kosovo d'une autonomie substantielle.

En 2004, la MINUK comprend 3 745 personnels, dont 3 735 policiers ou gendarmes et 10 procureurs internationaux. La France fournit 64 gendarmes, pour un surcoût estimé à 2,69 millions d'euros.

· La KFOR, dont la participation française est dénommée Trident, a pour mission de maintenir la paix civile et d'assurer la préservation de l'ordre et la sécurité publique dans cette province toujours rattachée à la République fédérale yougoslave. L'amélioration de la situation a conduit à réduire les effectifs de la KFOR ; ces derniers sont longtemps restés stables, autour de 45 000 militaires, pour être progressivement diminués de moitié et atteindre 24 000 militaires en 2003. Toutefois, les heurts interethniques survenus le 17 mars 2004 ont mis en lumière la fragilité de la situation actuelle. En raison des élections législatives d'octobre et de la perspective de discussions sur l'évolution du statut de la province, le contingent a été maintenu à un niveau significatif, de l'ordre de 17 750 militaires environ. La proportion des forces françaises y reste forte, avec 2 850 hommes environ, contre près de 4 300 hommes l'année précédente. Depuis le début du mois de septembre, c'est le général français Yves de Kermabon qui a pris le commandement de la KFOR.

Les surcoûts prévus pour la participation française à la KFOR ont diminué du fait de la réduction de son volume : ils s'élèvent à 143,76 millions d'euros, dont 128,7 millions d'euros de titre III.

2. Le maintien de la paix en Bosnie-Herzégovine

Le maintien de la paix en Bosnie-Herzégovine ne mobilise plus désormais que 9 500 militaires, dont moins de 1 300 Français.

L'opération de maintien de la paix est l'opération Joint Forge. Elle a été décidée par la résolution n° 1088 du 15 décembre 1996 du Conseil de sécurité des Nations Unies, régulièrement renouvelée depuis lors. L'objectif fixé à la SFOR est l'application du volet militaire des accords de Dayton. La SFOR a pour mission d'éviter une reprise des hostilités, de maintenir une situation militaire stable et d'aider à assurer un environnement sûr, dans lequel les organisations civiles internationales et les parties à l'accord de paix peuvent s'acquitter des responsabilités que l'accord leur confère, y compris en ce qui concerne la liberté de mouvement et le retour des réfugiés. Compte tenu de la quasi-disparition de la tension militaire, le volume des forces a été considérablement réduit, atteignant 8 638 militaires au 1er juin 2004 (contre 11 750 en 2003), dont 1 222 Français. Pour 2004, les surcoûts de la SFOR s'élèvent à 63,66 millions d'euros, dont 57,31 millions d'euros pour le titre V.

Aux termes de la résolution précitée, la conduite de l'opération a été déléguée par l'ONU à l'OTAN. Toutefois, à l'issue du sommet de l'OTAN réuni le 28 juin 2004 à Istanbul, il a été décidé que la SFOR serait relevée par une force placée sous l'autorité de l'Union européenne en décembre 2004, la résolution du Conseil de sécurité n° 1551 du 9 juillet 2004 prenant note de cette intention et légitimant cette opération. Celle-ci est engagée depuis le 2 décembre et constitue le premier grand test d'implication européenne en matière de maintien de la paix, les opérations Concordia en Macédoine et Artémis en Ituri s'avérant de moindre ampleur. Cette opération, baptisée Althéa, comprend 7 000 soldats européens et s'appuie sur le mécanisme dit de Berlin Plus, permettant l'utilisation par l'Union européenne des moyens et capacités de l'OTAN.

Althéa reprend toutes les missions de l'OTAN s'agissant du maintien de la paix et de la stabilité. Néanmoins, la traque des criminels de guerre sera une compétence partagée entre l'OTAN et l'Union européenne. L'OTAN maintient un quartier général résiduel, comprenant 350 hommes, dont 150 postes militaires.

Par ailleurs, l'Union européenne dirige d'ores et déjà, en accompagnement des actions de la SFOR, une mission de police (MPUE), qui a remplacé, depuis le 1er janvier 2004, la mission des Nations Unies en Bosnie-Herzégovine (MINUBH) pour former la police locale aux règles des Etats membres de l'Union et qui comporte 869 personnes, dont soixante-deux gendarmes et policiers français, lesquels représentent un surcoût estimé à 4,23 millions d'euros en 2004.

3. La mission Proxima en Macédoine

Répondant à la résolution n° 1371 de l'ONU, les pays de l'OTAN, dont la France, se sont engagés dans des opérations successives en Macédoine jusqu'en 2003 afin de contribuer à la stabilité du pays et à la sécurité de ses habitants.

A partir du 31 mars 2003, l'Union européenne a pris le relais de l'OTAN en Macédoine et l'opération Concordia a succédé à l'opération Allied Harmony. La France a assuré le commandement de Concordia jusqu'au 1er octobre 2003 au titre de nation-cadre, puis l'état-major de l'Eurofor a été désigné pour assurer la relève jusqu'au 15 décembre 2003, date à laquelle une opération de police européenne baptisée Proxima a succédé à Concordia, à la demande du gouvernement macédonien. Actuellement, quelque deux cents policiers et gendarmes restent sur place. Les surcoûts évalués pour l'année 2004 atteignent 4,56 millions d'euros, dont 4,19 millions d'euros de titre III.

D. LA CONDUITE DES OPÉRATIONS EN AFGHANISTAN

En dehors des Balkans, la France est essentiellement engagée en Afghanistan, où 1 532 soldats français étaient déployés au 1er juin 2004. Notre pays est impliqué dans trois cadres différents. Le premier, dénommé Héraclès, est la contribution française à Enduring Freedom, l'opération de lutte contre Al Qaida et le régime taliban, qui continue à s'appuyer sur les résolutions du Conseil de sécurité n° 1368 (12 septembre 2001), n° 1373 (28 septembre 2001), n° 1377 (12 novembre 2001) et n° 1378 (14 novembre 2001). Ce sont principalement les hommes du commandement des opérations spéciales (COS), au nombre de deux cents environ dans la région de Spin Boldak, et les marins présents en Océan indien, qui relèvent de ce statut ; par ailleurs, trois Mirage F 1 et un C 135 ont été déployés dans ce cadre à Douchanbé, au Tadjikistan, le 19 octobre 2004, pour une durée de trois semaines.

Le deuxième dispositif, Pamir, est la participation à la Force internationale d'assistance pour la sécurité (FIAS). Créée par la résolution du Conseil de sécurité n° 1386 du 20 décembre 2001, et prorogée par la résolution n° 1510, du 13 octobre 2003, elle a pour objet de sécuriser, autant que possible, le pays, compte tenu notamment des échéances électorales de 2004 et 2005, et de former l'armée afghane. Depuis 2003, elle est placée sous le commandement de l'OTAN. Le dernier cadre d'engagement, Epidote, consiste en une participation à la formation de l'armée afghane, réalisée en application des accords de Bonn du 3 décembre 2001 relatifs au processus de reconstruction de l'Afghanistan. Cette opération est conduite en étroite coopération avec les Etats-Unis.

Au total, les surcoûts de ces différentes opérations en Afghanistan sont estimés à 99,27 millions d'euros pour l'année 2004.

E. LES AUTRES OPÉRATIONS

Parmi les autres opérations, doit être mentionnée la participation de longue date de la France à deux missions d'observation au Proche-Orient. La première, l'ONUST (opération des Nations unies pour la surveillance de la trêve) initialement déployée afin de contrôler la trêve intervenue à l'issue du conflit israélo-arabe en 1948 et toujours en cours, compte 360 observateurs et civils en 2004, dont trois observateurs français. La seconde, la FMO (Force multinationale et observateurs), au Sinaï, est chargée, depuis 1982, en application d'un protocole d'accord signé en août 1981 entre l'Egypte et Israël, de contrôler la bonne application du traité de paix de Camp David du 26 mars 1979 entre ces deux pays. Cette force comprend 2 270 hommes, la France participant à hauteur de quinze hommes.

Par ailleurs, la France fournit des troupes à la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL), créée en 1978 afin de contribuer au maintien de la paix au Sud Liban alors occupé par Israël. A la suite de la décision israélienne de se retirer unilatéralement du Liban le 24 mai 2000, le dispositif de la FINUL a été fortement réduit. Il est désormais de 1 998 militaires et 403 civils. La contribution de la France atteint 208 militaires ; ce détachement est aussi la plus importante participation française à une force sous mandat de l'ONU. La force a été renouvelée jusqu'au 31 juillet 2005 par la résolution du Conseil de sécurité n° 1553 du 29 juillet 2004.

En outre, la France a participé à la force multinationale intérimaire en Haïti (MIF-H), créée pour trois mois par la résolution du Conseil de sécurité n° 1529, le 29 février 2004. Près de mille soldats français ont ainsi été engagés dans cette opération de stabilisation du pays, à la suite de la démission du président Jean-Bertrand Aristide, où 3 800 militaires de différentes nationalités ont été impliqués. Par l'adoption de la résolution n° 1542, le 30 avril 2004, le Conseil de sécurité lui a substitué la MINUSTAH, qui est entrée en vigueur le 1er juin pour une durée de six mois. Le désengagement français s'est achevé au 30 juin 2004.

Certaines interventions ponctuelles peuvent s'ajouter aux opérations de longue durée. On mentionnera la mobilisation de quelque 700 militaires français dans l'opération Tiran, au large de Sharm el Sheïkh, du 3 au 25 janvier 2004, afin de participer aux recherches de l'épave du Boeing 737 de la compagnie de charters égyptienne Flash Airlines. De telles opérations extérieures sont, par nature, imprévisibles et de moindre importance dans leurs implications financières.

Tableau récapitulatif

Opérations

Date de création

Objet

Effectif
de la force

Français

Surcoûts (1)

Titre III

Titre V

ONUST

1948

Surveillance de la trêve (Israël, Égypte, Syrie, Jordanie)

360

3

0,05

0,00

FMO (Israël-Égypte)

1981

Contrôle et application des accords de Camp David

2 270

15

0,63

0,41

FINUL

(Liban)

1978

Rétablissement de la paix au Sud Liban

2 391

208

6,1

0,28

Carbet (Haïti)

2004

Maintien de la paix civile

3 800

997

17,86

5,58

Tiran (Egypte)

2004

Recherche en mer des débris d'une épave aérienne, à des fins d'enquête

700

700

0,28

0,92

(1) Surcoûts estimés au 1er juin 2004 pour l'année, en millions d'euros.
Source : ministère de la défense.

CONCLUSION

L'équilibre du projet de loi de finances rectificative pour 2004 mérite d'être souligné, s'agissant du budget de la défense : couplé à deux décrets, il permet d'assurer une couverture satisfaisante des dépenses supplémentaires résultant des opérations extérieures, plus extensive que celle réalisée en 2003, tout en préservant les crédits d'équipement, les annulations de ces derniers se limitant à 35,7 millions d'euros sur l'année 2004. Le projet de loi de finances rectificative répond également à des besoins réels du ministère de la défense, notamment par l'abondement des dotations en carburant, rendu indispensable par la forte hausse du prix du baril de pétrole au cours de l'année 2004.

Pour autant, ce projet de loi illustre, une fois de plus, les limites des modalités actuelles du financement des opérations extérieures. Comme les années précédentes, la commission est amenée à préconiser l'évolution de ce dispositif, régulièrement dénoncé comme à bout de souffle. L'inscription d'une dotation de 100 millions d'euros à ce titre dans le projet de loi de finances pour 2005 constitue indéniablement un pas dans le bonne direction ; l'effort engagé mérite d'être amplifié à l'avenir, en prévoyant une somme plus proche des montants effectivement déboursés.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné, pour avis, sur le rapport de M. Philippe Vitel, le projet de loi de finances rectificative pour 2004 - n° 1921, au cours de sa réunion du mercredi 1er décembre 2004.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

M. Yves Fromion, président, a souhaité savoir quel était précisément le chapitre supprimé sur lequel 250 millions d'euros d'autorisations de programme doivent être annulés.

M. Philippe Vitel, rapporteur pour avis, a indiqué que ces autorisations de programme doivent être annulées sur le chapitre 34-20 de titre III concernant l'entretien programmé du matériel, ce chapitre ayant été mis en extinction par la loi de finances pour 2004.

M. Charles Cova s'est réjoui de la pérennisation du remboursement de la TVA pour DCN, tout en s'interrogeant sur les raisons conduisant la seule marine française à payer cette taxe. Il a ensuite demandé quel était le montant des dépenses issues des opérations extérieures restant à la charge du ministère de la défense.

M. Philippe Vitel, rapporteur pour avis, a précisé que, sur 649,4 millions d'euros de surcoûts liés aux opérations extérieures, environ 76 millions d'euros pèseraient sur le budget de la défense.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption du projet de loi de finances rectificative pour 2004.

En conséquence, la commission de la défense nationale et des forces armées demande à l'Assemblée nationale d'adopter le projet de loi n° 1921.

N  1970 - Avis de la commission de la défense sur le projet de loi de finances rectificative pour 2004 (rapporteur : M. Philippe Vitel)

1 () Décret n° 2004-1146 du 28 octobre 2004 et décret n° 2004-1147 du 28 octobre 2004.

2 () Rapport d'information n° 2237 de M. François Lamy : « Contrôler les opérations extérieures », enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale le 8 mars 2000, XIème législature.

3 () Loi de finances rectificative pour 2002 n° 2002-1050, du 6 août 2002.


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