Version PDF
Retour vers le dossier législatif

Document

mis en distribution

le 26 avril 2005

graphique

N° 2253

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 avril 2005.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR :

- LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant l'approbation de l'annexe V au protocole au traité sur l'Antarctique, relatif à la protection de l'environnement, protection et gestion des zones,

- LE PROJET DE LOI n° 2235 autorisant l'approbation de la Mesure relative à l'institution du secrétariat du Traité sur l'Antarctique,

PAR M. JEAN-JACQUES GUILLET,

Député

--

Voir les numéros :

Sénat : 429 (2003-2004), 198 et T.A. 76 (2004-2005)

Assemblée nationale : 2173

INTRODUCTION 5

I - L'ANNEXE V AU PROTOCOLE DE MADRID 7

A - LE TRAITÉ SUR L'ANTARCTIQUE 7

B - LE PROTOCOLE DE MADRID ET SES ANNEXES 8

II - L'INSTITUTION D'UN SECRÉTARIAT DU TRAITÉ SUR L'ANTARCTIQUE 11

CONCLUSION 13

EXAMEN EN COMMISSION 15

Mesdames, Messieurs,

L'Assemblée nationale est saisie de deux projets de loi autorisant l'approbation de conventions internationales se rapportant à l'Antarctique :

-  le premier, adopté par le Sénat1 le 22 mars 2003, autorisant l'approbation de l'annexe V au protocole au traité sur l'Antarctique, relatif à la protection de l'environnement (n° 2173) ;

-  le second, délibéré en Conseil des ministres le 6 avril 2005, autorisant l'approbation de la Mesure relative à l'institution du secrétariat du traité sur l'Antarctique (n° 2235).

Ces deux textes, de nature technique, ne posent pas de problèmes particuliers. Le premier a déjà été introduit dans l'ordre juridique interne par la loi n° 2003-347 du 15 avril 2003 relative à la protection de l'environnement en Antarctique. Le second a, pour sa part, une incidence financière, puisqu'il a pour conséquence de rendre obligatoires les contributions versées par les Etats parties au traité sur l'Antarctique. Les exigences de l'article 53 de la Constitution impliquent que le législateur autorise l'approbation de ces deux textes, dont les principaux traits seront présentés ici.

I - L'ANNEXE V AU PROTOCOLE DE MADRID

A - Le traité sur l'Antarctique

Découvert en 1820 par Fabian von Bellingshausen et exploré par Ross, Dumont d'Urville et Wilkes, le continent antarctique a rapidement suscité l'intérêt des Etats, attirés par la richesse halieutique et par d'hypothétiques ressources minières. Les Britanniques, les Argentins, les Norvégiens, les Néo-Zélandais, les Australiens et les Français ont ainsi émis des revendications territoriales et cherché à affirmer leur présence sur place, notamment par l'établissement de bases scientifiques.

Afin de mettre un terme aux rivalités de ces Etats dits « possessionnés » et de protéger l'environnement de la zone antarctique, le traité de Washington, conclu le 1er décembre 1959, a conféré à ce continent un régime international spécifique, fondé sur les éléments suivants :

-  le caractère totalement démilitarisé de la région, excluant tout essai nucléaire et tout dépôt de déchets radioactifs ;

-  le gel de toutes les revendications territoriales existantes et la cessation de toute nouvelle prétention sur le continent antarctique ;

-  la liberté de la recherche scientifique et la coopération internationale en la matière sur l'ensemble des terres et des glaces situées au sud du 60ème degré de latitude sud.

Le traité de Washington place l'ensemble des Etats parties sur un pied d'égalité, qu'ils soient ou non possessionnés, comme l'est la France pour la Terre Adélie. Les 44 Parties au traité ont la responsabilité de co-administrer la zone ; celles d'entre-elles qui sont reconnues comme « Etats possessionnés » et celles qui disposent de bases scientifiques ont le statut de « Parties consultatives », actuellement au nombre de 27.

Un important droit dérivé découle du traité de Washington : de nombreuses recommandations ont ainsi été adoptées par la conférence des Parties, afin de garantir la conservation des ressources biologiques (mammifères marins, oiseaux, poissons, krill, flore, etc...) ; certaines conventions internationales découlent également de ce traité, comme la Convention de Londres (1er juin 1972), qui tend à la protection des phoques dans l'Antarctique par un système de gestion des prises, ou la Convention de Canberra (20 mai 1980), sur la conservation de la faune et de la flore marines de l'Antarctique. Le protocole de Madrid (4 octobre 1991), qui vise à protéger l'environnement de la zone antarctique, découle également du traité.

B - Le protocole de Madrid et ses annexes

La France a joué un rôle important dans l'élaboration du protocole de Madrid et de ses cinq annexes. Entré en vigueur le 14 janvier 1998, le protocole énonce le principe selon lequel « la protection de l'environnement en Antarctique et des systèmes dépendants et associés, ainsi que la préservation intrinsèque de l'Antarctique (...) constituent des éléments fondamentaux à prendre en considération dans l'organisation et la conduite de toute activité dans la zone du traité. » Il fait de l'Antarctique une « réserve naturelle consacrée à la paix et à la science ».

A ce titre, le protocole impose que l'autorisation de toute activité dans la zone soit précédée d'une étude d'impact environnemental. La coopération internationale en matière scientifique est encouragée, afin de rationaliser le déploiement des moyens mis en œuvre. Par ailleurs, le protocole interdit toute exploitation des ressources minérales du continent et prévoit des mécanismes d'inspection, placés sous la responsabilité de la Réunion consultative des Parties.

Lors de son entrée en vigueur le protocole de Madrid comportait les quatre annexes suivantes :

-  l'annexe I précise les modalités de mise en œuvre du protocole en matière d'autorisation des activités et de réalisation des études d'impact environnemental ;

-  l'annexe II instaure l'interdiction de toute « interférence nuisible » à la faune et la flore indigènes ;

-  l'annexe III impose l'élimination et la gestion des déchets résultant des activités humaines sur zone ;

-  l'annexe IV vise à prévenir les pollutions marines en interdisant tout rejet à la mer d'hydrocarbures.

L'annexe V a pour sa part été élaborée au cours de la 16ème Conférence consultative des Parties (1991) - soit deux semaines après l'adoption du protocole de Madrid - à la demande de la France, afin d'assurer un contrôle efficace du développement du tourisme en Antarctique. Elle prévoit à cette fin la création de « zones spécialement protégées », dans lesquelles l'accès est interdit aux personnes dépourvues d'un permis spécial, ainsi que la création de « zones gérées spéciales », permettant de limiter au maximum les répercussions négatives des activités touristiques.

L'annexe V donne à toute Partie au traité, ainsi qu'au Comité pour la protection de l'environnement, au Comité scientifique pour la recherche en Antarctique ou à la Commission pour la conservation de la faune et de la flore marines de l'Antarctique, la faculté de proposer le classement d'un territoire en zone de protection ou en zone de gestion. L'instance décisionnaire est la Conférence consultative du traité de l'Antarctique.

Malgré l'implication des autorités françaises en faveur de l'élaboration du protocole de Madrid, celles-ci ont pris un important retard dans sa mise en œuvre. Alors que la loi autorisant l'approbation du protocole a été définitivement adoptée en 1992, le décret de publication s'y rapportant n'est paru qu'en 1998. Par ailleurs, l'intégration de l'annexe V en droit interne nécessitait une réforme législative.

La loi n° 2003-347 du 15 avril 2003 relative à la protection de l'environnement en Antarctique y a pourvu. Elle a ainsi modifié le code de l'environnement afin de prévoir l'obligation de réaliser une étude d'impact avant toute activité soumise à autorisation, de permettre la création de « zones spécialement protégées » et de poser le principe de l'interdiction de toute « interférence nuisible à l'environnement ». La loi a par ailleurs prévu des sanctions administratives et pénales.

Le Gouvernement a déposé l'instrument d'approbation de l'annexe V le 18 novembre 2003. Il avait alors estimé qu'une autorisation législative n'était pas nécessaire. Il a depuis changé d'analyse et déposé un projet de loi d'autorisation spécifique. Le Parlement ayant d'ores et déjà modifié le code de l'environnement, afin d'y intégrer les stipulations de l'annexe V, l'adoption du présent projet de loi s'apparente davantage à une régularisation formelle, qu'à une véritable autorisation législative.

II - L'INSTITUTION D'UN SECRÉTARIAT DU TRAITÉ SUR L'ANTARCTIQUE

La 26ème réunion des Parties consultatives au traité de Washington sur l'Antarctique, qui s'est tenue à Madrid du 9 au 20 juin 2003, a marqué l'aboutissement des négociations tendant à l'institution d'un secrétariat permanent. Jusqu'à maintenant, les parties au traité de Washington co-administraient la zone antarctique par les seules réunions des Parties consultatives, organisées avec une fréquence approximative d'un an. Le besoin d'une structure permanente est toutefois apparu et a motivé l'adoption d'une « Mesure » qui constitue une décision contraignante prise sur le fondement de l'article 9 du traité de Washington.

Cette « Mesure », dont l'approbation est soumise à l'autorisation du Parlement en raison de son incidence financière comporte cinq articles.

L'article 1er précise le statut juridique du secrétariat. Il s'agit d'un organe technique subordonné à la réunion consultative du traité sur l'Antarctique, qui dispose seule du pouvoir décisionnaire.

L'article 2 énumère les fonctions du secrétariat. Il s'agit de l'organisation des réunions consultatives ; de la garantie de la continuité entre les sessions de la réunion consultative ; de l'amélioration du fonctionnement du système antarctique tant en termes administratif que de suivi du droit dérivé.

L'article 3 crée un poste de secrétaire exécutif, nommé par la réunion consultative, sur proposition des Etats.

L'article 4 définit le mode de calcul des contributions versées par les Etats parties. Celles-ci sont calculées en fonction du degré d'engagement des Parties à travers leurs activités scientifiques dans la zone.

Enfin l'article 5 confère au secrétariat une capacité juridique et définit le régime des privilèges et immunités qui lui sont conférés. Il établit en outre le siège du secrétariat à Buenos Aires.

Jusqu'à présent, les contributions versées par la France au titre du traité sur l'Antarctique l'étaient sur une base volontaire. Ainsi, en 2004 et 2005, la France a-t-elle versé 20 000 euros pour chaque exercice, imputés sur le budget du Ministère des Affaires étrangères. L'approbation de la mesure du 16 juin 2003 aura pour conséquence de rendre obligatoires ces contributions qui passeront à 47 468 dollars américains (soit environ 36 000 euros) lors de son entrée en vigueur prévue pour 2007, compte tenu de l'état des approbations des différents Etats parties (2).

CONCLUSION

Le Rapporteur propose d'adopter les deux projets de loi qui vont dans le sens d'un renforcement du système antarctique. Ce dernier, mis en place par le traité de Washington, constitue un exemple de coopération internationale réussie en matière de gestion durable d'un écosystème remarquable dans lequel la France est très impliquée.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 13 avril 2005.

M. Jean-Jacques Guillet a indiqué que le projet de loi autorisant l'approbation de l'annexe V au protocole de Madrid constituait une régularisation nécessaire à la publication de ce texte au Journal officiel. Le second projet de loi, adopté en Conseil des ministres le 6 avril 2005, met pour sa part en place le secrétariat permanent prévu par le traité sur l'Antarctique de 1959.

La France est présente depuis le 19ème siècle en Antarctique, tout d'abord par ses explorateurs comme Dumont d'Urville puis par ses bases scientifiques. La France fait partie aux côtés de la Grande-Bretagne, de l'Argentine, de la Norvège, de la Nouvelle-Zélande et de l'Australie, des Etats dits « possessionnés ». Le traité de Washington conclu le 1er décembre 1959 a conféré au continent Antarctique un régime international spécifique protégeant l'environnement et encourageant la coopération internationale en matière scientifique. L'action de recherche conduite sur ce continent est importante, qu'il s'agisse de l'étude de la couche d'ozone ou de celle des variations climatiques. La base scientifique Concordia étudie un carottage de 2 500 mètres de profondeur qui permet d'étudier les évolutions du climat sur 500 000 années. Il est apparu nécessaire de renforcer le régime de protection de l'Antarctique alors même que certains Etats comme l'Australie, la Nouvelle-Zélande et le Chili ont fait part lors de la discussion de la convention de Wellington en 1988 de leur désir d'exploiter les ressources minérales du continent et d'y développer le tourisme. La France, notamment grâce à l'action du Commandant Cousteau, s'est mobilisée pour faire de l'Antarctique une zone exclusivement consacrée à la science et à la paix.

Le protocole de Madrid conclu en 1991, garantit la protection de l'environnement en Antarctique. Ses dispositions ont été intégrées par une réforme du code de l'environnement adoptée par la voie législative en 2003. Cette réforme prévoit un régime d'autorisation des activités humaines assorti de sanctions administratives et pénales, ainsi que d'un système d'inspection des bases scientifiques. L'annexe V de ce protocole vise à restreindre l'activité touristique qui est en plein développement dans la zone. A titre d'exemple, 15 000 touristes s'y sont rendus en 2002.

La Mesure instituant un secrétariat du traité sur l'Antarctique découle pour sa part de l'article 9 du traité de Washington. Elle fixe le siège du secrétariat à Buenos Aires. Son entrée en vigueur aura pour conséquence de porter la contribution française annuelle de 20 000 à environ 36 000 euros.

Le Rapporteur a conclut son propos en indiquant que l'adoption de ces deux projets de loi était souhaitable compte tenu de l'implication de la France en faveur de la protection de l'environnement dans la zone Antarctique.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté les projets de loi (n° 2173 et n° 2235).

*

* *

La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

___________________

N° 2252 - Rapport sur :
- le projet de loi, adopté par le sénat, autorisant l'approbation de l'annexe V au protocole au traité sur l'Antarctique, relatif à la protection de l'environnement, protection et gestion des zones,

- le projet de loi n° 2235 autorisant l'approbation de la Mesure relative à l'institution du secrétariat du Traité sur l'Antarctique (Jean-Jacques Guillet)

NB : Les textes de l'annexe V et de la Mesure figurent en annexe aux projets de loi (n° 2173 et n° 2235).

1 Rapport de M. André Vantome, Sénateur, au nom de la Commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées, n° 198 (2004-2005).

2 () A ce jour huit états sur les vingt-sept requis ont approuvé la Mesure : Allemagne, Argentine, Belgique, Bulgarie, Chine, Finlande, Japon, Nouvelle-Zélande.


© Assemblée nationale