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le 9 juin 2005

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N° 2359

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 8 juin 2005.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI n° 1925, autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne visant à compléter la liste des établissements culturels et d'enseignement auxquels s'appliquent les dispositions de la convention culturelle du 4 novembre 1949 et de l'accord par échange de lettres du 9 novembre et du 6 décembre 1954 relatif aux exemptions fiscales en faveur des établissements culturels,

PAR M. JEAN-CLAUDE GUIBAL,

Député

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INTRODUCTION 5

I - LES DIFFÉRENTES CONVENTIONS FRANCO-ITALIENNES EN MATIÈRE DE COOPÉRATION CULTURELLE ET LINGUISTIQUE 7

A - LA CONVENTION CULTURELLE DU 4 NOVEMBRE 1949 7

B - LES TEXTES ULTÉRIEURS 7

II - LE NOUVEL ACCORD FRANCO-ITALIEN 9

III - L'ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS EN ITALIE 11

CONCLUSION 13

EXAMEN EN COMMISSION 15

Mesdames, Messieurs,

L'accord dont l'Assemblée nationale est saisie est intervenu en la forme d'un échange de lettres entre les Gouvernements français et italien, signées le 23 novembre 2003. Cet échange de lettres vise à actualiser la liste des établissements culturels et d'enseignement français en Italie et italiens en France, afin de leur permettre de bénéficier d'un régime d'exemptions fiscales consenti de manière réciproque.

Compte tenu du caractère fiscal de cet accord bilatéral, le Gouvernement a déposé le 17 novembre 2004 sur le bureau de l'Assemblée nationale un projet de loi (n° 1925) autorisant son approbation, conformément aux dispositions de l'article 53 de la Constitution.

I - LES DIFFÉRENTES CONVENTIONS FRANCO-ITALIENNES EN MATIÈRE DE COOPÉRATION CULTURELLE ET LINGUISTIQUE

A - La convention culturelle du 4 novembre 1949

Par cette convention les Gouvernements français et italien ont entendu sceller la réconciliation des deux pays après la guerre en s'accordant mutuellement « toutes facilités pour la création et le fonctionnement de quatre instituts de haute culture qui auront pour tâche de diffuser la connaissance mutuelle de leur civilisation et de développer leurs relations dans le domaine des lettres, des sciences et des arts », ainsi que « toutes facilités aux établissements d'enseignement secondaire italien et français qui existent actuellement en France et en Italie ».

Ce texte concernait à l'époque les instituts français de Florence, Milan, Naples et Rome et du côté italien, les centres de Paris, Strasbourg, Aix-Marseille et Lyon.

B - Les textes ultérieurs venus compléter la convention de 1949

· L'échange de lettres du 9 novembre et du 6 décembre 1954

Cet accord bilatéral a défini le régime des exemptions fiscales consenti par les deux Etats en faveur des établissements culturels. Il s'agit d'exemptions des droits et taxes sur les acquisitions de terrains ou d'immeubles, ainsi que des exemptions d'impôts directs, taxes et contributions de toute nature sur les immeubles mêmes, qu'elles soient affectées à l'Etat ou aux collectivités locales. Cet accord maintient toutefois le paiement des redevances perçues au titre de services communaux, ainsi que les droits et taxes exigibles à l'entrée du territoire pour l'importation de biens.

· L'échange de lettres du 17 mai 1965

Cet échange de lettres a mis à jour pour la première fois la liste des établissements concernés par les exonérations. De nouveaux établissements avaient en effet été créés depuis 1949 : pour la France, les centres de Turin, Gênes, Palerme ; du côté italien, les instituts de Grenoble, Lyon, Bordeaux et Nice. Ont également été inclus l'Académie de France (villa Médicis) et l'Ecole française d'histoire et d'archéologie de Rome.

· L'échange de lettres du 1er juin 1971

Ce nouvel accord a permis de préciser les privilèges douaniers accordés aux personnels des institutions culturelles franco-italiennes. Leur régime d'imposition a pour sa part été réglé par la convention franco-italienne visant à éviter les doubles impositions, celle-ci permettant l'imposition dans l'Etat qui verse les rémunérations.

II - LE NOUVEL ACCORD FRANCO-ITALIEN

Cet accord a pour objet principal d'actualiser la liste des institutions culturelles et des établissements scolaires relevant des accords de 1949 et 1954. A cette fin, il abroge dans sa clause finale l'échange de lettres du 17 mai 1965, qui n'est plus utile, et précise la liste des établissements bénéficiant des exemptions fiscales.

· Établissements français en Italie

Les sept instituts et centres culturels français en Italie, à Florence, Gênes, Milan, Naples, Palerme, Rome et Turin sont des établissements relevant du régime de l'autonomie financière (décret n° 76-832 du 24 août 1976) sous tutelle du ministère des affaires étrangères. Ils sont à ce titre rattachés à l'Ambassade de France à Rome. Ces établissements culturels ont pour vocation d'assurer la diffusion et la promotion de la langue et de la culture françaises. Ils développent également des projets de coopération bilatéraux, particulièrement dans le domaine linguistique. On peut distinguer trois types d'activités proposées par ces établissements : cours de français et certifications ; médiathèque et centre d'information sur la France ; organisation de manifestations culturelles, le plus souvent en partenariat avec des institutions locales. L'accord reprend la liste de ces instituts et tient compte de la transformation, intervenue en 1994, du centre culturel de Rome en un bureau de coopération linguistique et artistique.

L'Académie de France à Rome (Villa Médicis) est un établissement public à caractère administratif placé sous la tutelle du ministère de la culture et de la communication. Elle a pour mission principale de favoriser la création artistique et littéraire, le perfectionnement dans les disciplines appliquées à la création artistique et littéraire, ainsi que dans l'histoire de l'art, plus particulièrement pour la période s'étendant de la Renaissance à nos jours. Elle participe aux échanges culturels et artistiques. Elle organise des expositions, des concerts, des projections cinématographiques, des colloques ou séminaires sur des sujets relevant des arts, des lettres et de leur histoire. L'Académie de France à Rome accueille de jeunes artistes ou chercheurs pour leur permettre de poursuivre leurs travaux, études et recherches et d'acquérir un complément de formation.

L'Ecole française de Rome est un institut de recherche de haut niveau, doté du statut d'établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel, placé sous la tutelle du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Ses missions concernent l'histoire, l'archéologie et les sciences sociales en Italie et dans le bassin méditerranéen, de la Préhistoire à nos jours, partout où Rome a été le centre de rayonnement. Ses activités sont réparties en trois sections : Antiquité, Moyen Age, époque moderne et contemporaine. Elle publie chaque année vingt-cinq à trente ouvrages. Une quinzaine de chantiers de fouilles archéologiques sont sous sa responsabilité. Elle accueille près de cent cinquante boursiers par an. Sa bibliothèque est riche de 200 000 volumes.

Enfin, les lycées Stendhal de Milan, Chateaubriand de Rome et l'école française de Naples, qui est une annexe du lycée de Rome, sont gérés par l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. L'accord ajoute également ces établissements à la liste de ceux bénéficiant des exemptions fiscales et douanières.

· Établissements italiens en France

A la liste des établissements énumérés en première partie (instituts culturels de Paris, Strasbourg, Marseille, Lyon et Grenoble) se sont ajoutés l'institut italien de la culture de Lille et l'école italienne Léonard de Vinci de Paris. Ces établissements et leurs personnels bénéficieront donc des exemptions prévues par les accords du 6 décembre 1954 et du 1er juin 1971, ainsi que de l'article 19 de la convention franco-italienne visant à éviter les doubles impositions, ce qui permet à ces personnels d'être imposés dans l'Etat qui verse les rémunérations.

III - L'ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS EN ITALIE

La coopération culturelle et linguistique entre la France et l'Italie se développe parallèlement à une coopération linguistique et éducative entre les deux pays.

· Le dispositif français de coopération linguistique et éducative en Italie

Il est constitué de :

-  6 établissements scolaires, dépendant de l'AEFE (Agence pour l'Enseignement du Français à l'Etranger), accueillant 3 115 élèves dont 45,55% de Français ;

-  52 comités d'Alliances Françaises.

· La situation du Français en Italie

La situation du français en Italie peut se résumer à travers les chiffres suivants :

-  840 000 élèves étudient le français dans le système scolaire italien (25 % des élèves, 2ème rang) ;

-  17 000 professeurs italiens de français dans l'enseignement primaire et secondaire ;

-  23 sections bilingues à option française dans 23 lycées italiens (2 700 élèves).

· Les perspectives ouvertes par la loi Moratti

La loi Moratti rend obligatoire l'apprentissage de deux langues vivantes européennes. En principe effective dans les collèges à la rentrée 2005, la loi Moratti peut être l'occasion de susciter une avancée majeure de l'enseignement du français, de consolider sa position de seconde langue et de freiner l'érosion qui la menace (-1% par an au cours de la dernière décennie).

· Le réseau des Alliances Françaises

L'Alliance Française de Rome, siège de la Délégation Générale, est le centre pilote pour l'Italie qui prépare au DELF (Diplôme d'Etudes de Langue Française) et au DALF (Diplôme Avancé de Langue Française). Elle gère 28 centres d'examen.

La Fédération des Alliances Françaises d'Italie a pour sa part son siège à Rome auprès de la Délégation Générale. Le réseau des 53 Alliances Françaises constitue un maillage très dense sur l'ensemble du territoire italien.

Ces Alliances sont fortement enracinées dans le tissu humain, social, culturel et économique italien du fait de leurs comités locaux, le plus souvent composés d'Italiens francophiles et francophones qui relaient l'action de la France tant auprès des institutions locales que d'éventuels soutiens financiers. Les Alliances Françaises peuvent ainsi s'autofinancer sans recourir aux aides de l'Etat, à la différence des centres culturels, financés et gérés par le Ministère des Affaires étrangères et qui subissent les effets d'un désengagement progressif de l'Etat.

Les Alliances Françaises s'attachent principalement à la diffusion de la langue française. Elles interviennent fréquemment dans le système éducatif italien en assurant la formation d'enseignants italiens et en prenant en charge des soutiens scolaires.

CONCLUSION

Du côté italien, le Parlement n'a toujours pas autorisé l'approbation de l'accord. Celui-ci ne soulevant pas de difficultés particulières, le Rapporteur propose l'adoption du projet de loi et souhaite que l'approbation rapide de l'échange de lettres par les autorités françaises permette d'accélérer la procédure du côté italien.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 8 juin 2005.

Après l'exposé du Rapporteur, M. Jacques Remiller a fait part de son accord sur la nécessité de conforter l'enseignement du français en Italie. Il s'est cependant interrogé sur la situation de l'enseignement de l'italien en France, surtout dans les départements riverains de l'Italie et a demandé si des accords existaient en la matière.

Mme Martine Aurillac a souhaité savoir si la France avait conclu d'autres accords du même type, notamment avec l'Espagne.

M. Yves Nicolin a demandé quel était le coût global du réseau culturel, scientifique et d'enseignement en Italie et souhaité savoir quel était le coût induit par l'accord soumis à la Commission. Il a émis le souhait qu'à l'avenir le Gouvernement transmette systématiquement l'évaluation du coût des textes soumis au Parlement.

M. Axel Poniatowski a estimé que la position du français était remise en cause, tant dans le monde diplomatique que dans celui des affaires et des milieux scientifiques et techniques. A cet égard, l'Alliance française constitue un outil essentiel, qui permet à notre pays de bénéficier de nombreux relais, tout en étant très largement autofinancé. Il serait souhaitable que la Commission fasse un point sur l'action de l'Alliance française.

Le Rapporteur a apporté les éléments de réponse suivants :

-  l'enseignement de l'italien en France a tendance à diminuer de manière symétrique avec l'enseignement du français en Italie ; il serait souhaitable de relancer le développement des sections bilingues dans les deux pays ;

-  les échanges entre les deux pays ont été plus nourris par le passé et il est nécessaire que l'Etat, les collectivités locales et les établissements d'enseignement se mobilisent afin de relancer la coopération bilatérale ;

-  l'accord soumis à la Commission constitue un instrument classique et il en existe avec la plupart des Etats ; un accord similaire est intervenu avec l'Espagne sous la forme d'un échange de lettres en novembre 2002 ;

-  le coût de cet accord est marginal, puisqu'il concerne un faible nombre d'établissements et de personnels et qu'il est consenti sur la base de la réciprocité entre les deux Etats ;

-  les établissements mentionnés dans l'accord relèvent de tutelles et de budgets différents, il est donc malaisé de donner des chiffres globaux de coûts de fonctionnement ; cette dispersion des tutelles peut nuire à la lisibilité de notre action ; à la différence des centres culturels, qui coûtent cher, les alliances françaises sont autofinancées et obtiennent de très bon résultat en matière d'enseignement du français.

Le Président Edouard Balladur a observé, à propos de la comparaison entre les centres culturels et les alliances françaises, que la qualité de l'enseignement et les missions des deux institutions différaient. Il a déploré le déclin de l'apprentissage du français en Italie en indiquant que désormais, dans ce pays, à l'exception du Saint Siège, sa maîtrise n'était plus requise pour embrasser la carrière diplomatique. La généralisation de l'obligation d'apprendre deux langues vivantes européennes dans le système secondaire ne constitue pas une panacée pour le français : à l'Est de l'Europe, il est souvent devancé par l'allemand et, dans les autres pays, par l'espagnol, qui bénéficie d'une grande attractivité. Ce recul du français a motivé le dépôt d'une proposition de résolution qui vient d'être renvoyée à la Commission et qui tend à faire du français la langue de référence pour la codification et l'interprétation des textes juridiques de l'Union européenne : il serait souhaitable que cette proposition soit discutée avant la fin de la session.

Le Président a ensuite déclaré que la Commission pourrait utilement établir un bilan de notre action culturelle, scientifique et linguistique en Espagne, en Italie, en Grèce et en Egypte. Citant le cas de ce dernier pays, il a indiqué qu'il serait nécessaire d'obtenir des informations sur la polémique à l'Institut français d'archéologie orientale, qui a suscité d'abondantes controverses dans le monde de l'égyptologie.

Suivant les conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (no 1925).

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La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

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N° 2359 - Rapport sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord France-Italie sur les établissements culturels et d'enseignement (M. Jean-Claude Guibal)

NB : Le texte de l'accord figure en annexe au projet de loi (n° 1925).


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