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le 30 juin 2005

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N° 2420

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 29 juin 2005.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Bahreïn sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements,

PAR M. JEAN-CLAUDE GUIBAL

Député

--

Voir les numéros :

Sénat : 124, 232 et T.A. 113 (2004-2005)

Assemblée nationale : 2337

INTRODUCTION 5

I - BAHREÏN AUJOURD'HUI 7

· Données générales sur Bahreïn 7

· La situation économique de Bahreïn 8

· L'état des relations économiques entre la France et Bahreïn 9

II - L'ACCORD D'INVESTISSEMENT 11

· Les clauses de l'accord d'investissement 11

· Les perspectives de développement économique 11

CONCLUSION 13

EXAMEN EN COMMISSION 14

Mesdames, Messieurs,

L'Assemblée nationale est saisie du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Bahreïn sur l'encouragement et la protection réciproque des investissements (n° 2337). Ce projet de loi a été adopté par le Sénat sur le rapport de M. Jean-Pierre Plancade1 au cours de la séance publique du 12 mai 2005.

Après avoir fait état de la situation de Bahreïn aujourd'hui, le présent rapport analysera le contenu de l'accord d'investissement entre la France et ce pays du Golfe.

I - BAHREÏN AUJOURD'HUI

· Données générales sur Bahreïn

Emirat du Golfe persique, Bahreïn est un archipel constitué de sept îles situées entre la côte orientale de l'Arabie Saoudite et la péninsule du Qatar. L'archipel une superficie totale de 702 km2 (l'île principale a une surface de 600 km2) pour une population de 690 000 habitants, dont 260 000 ressortissants étrangers.

Occupée par la Perse de 1602 à 1783, l'île fut détachée de l'Empire après la prise du pouvoir par Ahmad ibn Kalifa. Ce dernier fonda la dynastie qui est toujours au pouvoir. En 1820, les souverains signèrent un traité avec l'Angleterre pour se protéger des attaques venant de Mascate (Sultanat d'Oman) et de la côte des pirates. Jusqu'en 1971, date de l'indépendance totale de Bahreïn, les décisions en matière d'affaires étrangères et de défense étaient prises par le Royaume Uni, le souverain ayant compétence sur les affaires intérieures de l'émirat.

L'émirat de Bahreïn - devenu royaume le 14 février 2002 - est placé sous l'autorité du roi Hamad bin Issa Al-Khalifa (55 ans), qui a succédé à son père le 6 mars 1999. Le gouvernement bahreïnien est dirigé par Cheikh Khalifa bin Salman Al-Khalifa (70 ans), oncle du roi et Premier ministre depuis les années 1970. Le prince héritier, Cheikh Salman bin Hamad Al-Khalifa, est commandant en chef des armées.

Dès son accession au pouvoir, le roi Hamad a lancé un processus de réforme en profondeur des institutions politiques : abolition des lois de sûreté de l'Etat, instauration d'un Parlement bicaméral (Chambre des députés et Conseil consultatif dont les membres sont nommés par le roi), octroi du droit de vote aux femmes, organisation d'élections municipales et d'élections législatives. Ces dernières (organisées en octobre 2002) ont cependant été boycottées par plusieurs mouvements politiques représentant environ la moitié de l'électorat, qui contestent les prérogatives accordées au Conseil consultatif. Un « dialogue national » est en cours entre les autorités et les différentes composantes politiques du pays, y compris les mouvements non représentés au Parlement, sur la poursuite des réformes dans les domaines politique, économique et social.

A ce jour les chiites, qui représentent 75 % des nationaux et 55 % des résidents de Bahreïn, n'ont toujours pas accès à certains emplois dans l'administration (armée, police), alors même que des étrangers sunnites y sont recrutés.

Bahreïn a clairement fait le choix de fonder sa sécurité sur une alliance stratégique avec les Etats-Unis. A ce titre, le royaume accueille le quartier général et les infrastructures de la Vème flotte qui couvre l'ensemble du Moyen Orient. Lors du conflit en Irak, les Etats-Unis ont par ailleurs pu utiliser sans restriction aucune la base aérienne située au sud de l'île.

La Grande Bretagne reste également très présente dans l'archipel. Outre une communauté britannique importante (7 000 membres), les coopérations intergouvernementales demeurent intenses, y compris dans des domaines sensibles, comme la sécurité intérieure.

· La situation économique de Bahreïn

Avec un PIB de 8,7 milliards de dollars en 2003 et un PIB par habitant de 13 000 dollars, Bahreïn se trouve au quarantième rang mondial dans le classement effectué par l'ONU en terme d'indice de développement humain. Bahreïn a été le premier pays du Golfe, au début des années 1980, à libéraliser la législation applicable à l'investissement étranger, autorisant en particulier les sociétés étrangères à prendre une participation de 100 % dans une société bahreïnienne.

Avec environ 350 banques et institutions financières, Manama, la capitale, est aujourd'hui la première place financière de la région, devant Dubaï. C'est en particulier un pôle de la finance islamique (26 banques islamiques, 6 assureurs islamiques et 45 fonds islamiques). Au total, les services financiers représentent près de 20 % du PIB de l'archipel. Le Groupement d'action financière (GAFI) y a d'ailleurs installé en novembre 2004 son siège régional pour le monde arabe. Les autorités ont, en outre, considérablement développé l'appareil industriel du pays, notamment dans le secteur de l'aluminium, ainsi que ses infrastructures touristiques.

Du fait de cette diversification, les hydrocarbures ne contribuent plus que pour 25 % du PIB, mais ils restent déterminants pour les grands équilibres du pays (70 % des recettes budgétaires et des exportations). Ils proviennent pour l'essentiel des quantités de pétrole brut du champ d'Abou Safaa, cédées par l'Arabie Saoudite.

L'Etat conserve un rôle déterminant dans l'économie. Ainsi, 60 % du PIB sont-ils générés par des entreprises détenues en majorité ou en totalité par le gouvernement ou la famille royale (Gulf International Bank, AlBa, Bapco, etc.). Toutefois, un programme de privatisation est en cours. Un bureau de supervision, de transparence et de contrôle des passations de marchés publics (tender board) a été créé et placé sous l'autorité du prince héritier. Bahreïn a signé en février 2005 la convention des Nations unies contre la corruption.

Bahreïn a signé en septembre 2004 un accord de libre-échange avec les Etats-Unis. Cet accord a provoqué des tensions entre le royaume et l'Arabie Saoudite, qui y a vu une remise en cause de son statut de puissance régionale et un obstacle à l'intégration économique du Conseil de coopération des Etats arabes du Golfe (CCEAG). L'Union européenne a, pour sa part, ouvert des négociations avec cette organisation régionale afin de conclure un accord de libre-échange. Ce dernier doit permettre à Bahreïn d'obtenir une baisse des tarifs appliqués à l'aluminium et aux produits pétroliers. Par ailleurs, Bahreïn est membre de l'Organisation mondiale du commerce depuis sa création.

Plus de 60 % des emplois sont occupés par des travailleurs étrangers. Le développement économique de l'archipel ne bénéficie que partiellement à la population bahreïnienne : le chômage est important (15 % de la population active) et continue de croître, du fait de l'arrivée de nouvelles classes d'âge sur le marché du travail.

· L'état des relations économiques entre la France et Bahreïn

La France et Bahreïn ont conclu plusieurs conventions bilatérales pour favoriser leurs échanges économiques : accord de coopération économique et industrielle du 21 avril 1977, accord de coopération touristique de mars 1980, convention de non-double imposition du 10 mai 1993, accord aérien du 3 juillet 1995, accord de protection et d'encouragement réciproques des investissements du 24 février 2004 (en cours de ratification).

La France «était en 2003, avec 5 % de parts de marché, le 10ème fournisseur de Bahreïn. La présence économique française dans l'archipel est concentrée sur les secteurs de l'aluminium, du pétrole, de l'électricité et de la banque. Les exportations bahreïniennes vers la France sont constituées en majorité de produits pétroliers raffinés et d'aluminium.

II - L'ACCORD D'INVESTISSEMENT

· Les clauses de l'accord d'investissement

L'objet de l'accord d'investissement entre la France et Bahreïn est de fournir un cadre juridique clair aux entreprises des deux pays désirant développer des partenariats, y compris sous la forme de coentreprises (joint ventures). En dehors des pays de l'OCDE, qui bénéficient d'une protection multilarérale, la protection juridique des investisseurs nécessite des accords bilatéraux qui permettent de palier les carences de la législation du pays d'accueil des investissements étrangers. Tel est l'objet du présenta accord, dont la conclusion permettra à la COFACE d'accorder sa garantie aux investisseurs français.

Le champ d'application de l'accord est vaste : s'il vise plus particulièrement les droits de la propriété intellectuelle et les concessions pétrolières, ces secteurs d'activité ne sont pas limitatifs et l'accord peut s'appliquer à l'ensemble des activités économiques.

L'accord supprime les restrictions aux investissements sur la base de la réciprocité. Les investisseurs de chaque partie doivent être traités de manière juste et équitable et ils doivent être traités aussi favorablement que les investisseurs étrangers les plus favorisés, selon la clause de la nation la plus favorisée. Ils ne pourront également recevoir un traitement moins favorables que les investisseurs nationaux, selon le principe de non discrimination.

L'accord garantit la protection des investissements en proscrivant les mesures d'expropriation ou de dépossession arbitraire. L'expropriation doit ainsi être justifiée par l'utilité publique et donner lieu à une indemnité prompte, effective et transférable. En cas de conflit armé ou de révolution, la clause de la nation la plus favorisée et le principe de non discrimination trouvent également à s'appliquer aux investissements effectués par chaque partie dans l'autre Etat.

Enfin, les éventuels différends liés à l'interprétation ou à l'application de l'accord peuvent être réglés par la voie diplomatique. Si celle-ci échoue, un tribunal d'arbitrage peut être saisi après expiration d'un délai de six mois.

· Les perspectives de développement économique

Les perspectives d'investissement à Bahreïn sont importantes, d'autant que l'économie de cet état figure parmi les plus ouvertes de la région, comme en atteste la décision prise en 2004 de libéraliser totalement le secteur des télécommunications.

Les projets intéressant les entreprises françaises sont les suivants :

-  la réalisation d'un ensemble immobilier devant abriter la place financière du royaume (1,2 milliards de dollars), qui intéresse Bouygues, Accord et Dalkia ;

-  l'extension de l'aéroport (200 millions de dollars), qui intéresse Aéroports de Paris, Thalès et Alcatel ;

-  les travaux pour le pont de Sitra (80 millions de dollars) et le projet de pont reliant Bahreïn au Qatar (1,8 millions de dollars), qui intéressent Bouygues et Vinci ;

-  la construction d'un nouvel hôpital de 300 lits (100 millions de dollars), qui intéresse Bouygues ;

-  le projet de construction de deux villes nouvelles d'une capacité de 30 000 personnes (1,2 milliards de dollars), qui intéresse STEC et SOGREAH ;

-  le projet immobilier Durrat al Bahraïn (1,6 milliards de dollars), qui pourrait impliquer Accor, Bouygues et Sophia Antipolis ;

-  la construction d'un monorail intéressant SEMAL, SYSTRA et Bouygues ;

-  la maintenance des centrales électriques pour les douze prochaines années (250 millions de dollars) qui intéresse Alsthom.

Enfin, la compagnie bahreïnienne Gulf Air a fait part de son intention d'acquérir 18 appareils de type A 318.

CONCLUSION

L'accord d'investissement entre la France et Bahreïn intervient à un moment où les relations commerciales entre les deux pays sont en pleine expansion. En 2004, le volume total des échanges entre les deux pays a plus que doublé, malgré les cours élevés de l'euro. Au premier semestre 2004, nos ventes ont atteint 202 millions d'euros et les achats 94 millions. L'excédent commercial en notre faveur est en hausse de 32 % par rapport à l'année précédente. La France devrait ainsi passer de la 10ème à la 5ème place des fournisseurs du royaume. L'accord soumis à l'Assemblée s'inscrit donc dans un contexte dynamique et porteur. Votre Rapporteur vous propose d'en autoriser l'approbation en adoptant le présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du 29 juin 2005.

Après l'exposé du Rapporteur et suivant ses conclusions, la Commission a adopté le projet de loi (no 2337).

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* *

La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de l'accord figure en annexe au projet de loi (n° 2337).

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N° 2420 - Rapport autorisant l'approbation de l'accord France-Bahreïn sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (M. Jean-Claude Guibal)

1 Rapport de M. jean-Pierre Plancade, Sénateur, au nom de la Commission des Affaires étrangères et de la Défense, n° 232 (2004-2005)


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