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Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques

Mercredi 12 janvier 2011

Séance de 16 heures 10

Compte rendu n° 3

Présidence de M. Bernard Accoyer, Président de l’Assemblée nationale, Président du Comité

– Examen de l’étude préalable sur « politiques publiques et évolution des inégalités sociales » présentée par MM. Jean-Pierre Gorges et Jean Mallot

– Présentation par MM. Claude Goasguen et Jean Mallot  des réponses à l’appel d’offres pour un accord-cadre pour des études à faire réaliser par des prestataires externes

– Nomination de rapporteurs.

– Questions diverses

Hôtel de Lassay

La séance est ouverte à seize heures quinze.

– Examen de l’étude préalable sur « politiques publiques et évolution des inégalités sociales » présentée par MM. Jean-Pierre Gorges et Jean Mallot

M. Jean Mallot : Jean-Pierre Gorges, co-rapporteur pour la majorité, m’a fait part du fait qu’un impératif grave l’empêchait de participer à cette réunion et m’a chargé de présenter les résultats de l’étude en son nom également.

Le sujet « Politiques publiques et évolution des inégalités sociales » trouve sa première origine dans une initiative du groupe SRC, qui avait exprimé le souhait que le CEC se penche sur l’évaluation des effets sur la cohésion sociale de plusieurs politiques publiques menées depuis 2007. Ultérieurement, le sujet proposé a été défini ainsi : « Politiques publiques et évolution des inégalités sociales ». Cette formulation appelait une définition plus précise du périmètre du sujet.

L’étude a d’abord consisté à procéder à une revue de la littérature économique et sociale portant sur le thème des inégalités sociales. Il s’agissait de répondre aux premières questions méthodologiques suivantes : quelles sont les définitions, le périmètre et la mesure des inégalités sociales ? Comment ont-elles évolué pendant les vingt dernières années ? Quelles politiques publiques sont particulièrement destinées à lutter contre ces inégalités ? Quels sont leurs résultats ? L’étude a notamment donné lieu à la rédaction d’une note de documentation qui a été jointe aux documents préparatoires à la présente réunion. Il en ressort que l’évolution des inégalités connaît un bilan contrasté, notamment eu égard à la forte croissance du revenu des 1 % de la population dont les revenus sont les plus élevés (dernier centile).

Nous avons alors souhaité aborder la question par l’autre côté en nous intéressant aux politiques publiques. Dans cette perspective, nous en avons sélectionné deux : la législation fiscale et la politique relative au temps de travail. Cette approche nous a conduits à tenir deux réunions de travail, l’une avec les représentants compétents de l’Insee, l’autre avec M. Eric Heyer, directeur adjoint de l’Observatoire français de la conjoncture économique (OFCE).

La rencontre avec les représentants de l’Insee a permis de faire un rapide tour d’horizon de la mesure des inégalités et de leur évolution depuis une quinzaine d’années. Elle a confirmé qu’il serait très difficile d’imputer à une politique publique identifiée un impact précis et mesurable sur l’évolution des inégalités de revenus.

La réunion de travail avec M. Éric Heyer a porté sur les politiques relatives au temps de travail et plus précisément sur l’impact économique d’une disposition centrale de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite « TEPA » : l’exonération de prélèvements fiscaux et les allègements de prélèvements sociaux sur les heures complémentaires et supplémentaires réalisées par les salariés. M. Heyer a présenté aux rapporteurs son analyse relative à l’opportunité de la mesure en comparant avec la situation allemande. La réunion a permis de dresser un premier état des nombreuses interrogations posées par ce dispositif : s’il est possible de le mesurer, quel a été l’accroissement net, dû au dispositif, du nombre d’heures supplémentaires travaillées ? Quel a été l’accroissement du nombre total d’heures travaillées ? Y a t-il eu des effets d’aubaine ? Quel a été l’impact, à court et moyen termes, sur le pouvoir d’achat des salariés ? Quelles ont été les conséquences de la mesure, par secteur, par catégorie de salariés, par taille des entreprises ?

Quelle est la méthode qui a présidé à l’élaboration et à la formalisation de cette décision, et notamment quelle évaluation ex ante a été menée ? Comment rapproche-t-on l’intention originelle du constat ? C’est bien la définition de l’évaluation.

L’évaluation de l’article premier de la loi TEPA relatif à l’exonération fiscale et aux allègements de charges sociales portant sur les heures supplémentaires est un sujet qui se prête bien à une évaluation par le CEC. Il s’agit en effet d’évaluer une politique publique récente, en vigueur depuis le 1er octobre 2007. Ses contours et ses objectifs sont bien déterminés, répondant ainsi aux principes de l’évaluation publique décrits par M. François Mouterde, consultant en évaluation de politiques publiques, vice-président de la Société française de l’évaluation, lors de son audition par le Comité le 16 juillet 2009. De surcroît, le dispositif a un coût non négligeable, celui-ci s’élevant à plus de 4,5 milliards d’euros.

L’étude proposée au CEC présente un caractère transversal. Il est ainsi à noter que si, lors de son examen à l’Assemblée nationale, le projet de loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat avait été renvoyé à la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, trois autres commissions, dont la commission chargée des affaires sociales, s’en étaient saisies pour avis.

Il s’agira, après un bilan de l’application de cette mesure innovante, de conclure à son opportunité et à son utilité économique sur la période 2007 à 2010. L’évaluation permettra aussi d’apprécier la nécessité ou non de son maintien dans les années à venir, compte tenu de son efficience. L’efficacité de la mesure sera évaluée et surtout comparée aux prévisions et études menées en amont, s’agissant de l’impact effectif sur le volume d’heures supplémentaires, de la variation du nombre total d’heures travaillées, de l’évolution du pouvoir d’achat des salariés et du coût du travail et des conséquences pour l’emploi, la demande et finalement sur la croissance.

Les travaux commenceront par l’étude des travaux préparatoires et des débats parlementaires. Il faudra en quelque sorte reconstituer ex post l’étude d’impact, dont le dépôt à l’époque n’était pas obligatoire, afin de comparer les résultats obtenus à ceux attendus. Ce travail nécessitera peut-être des déplacements sur le terrain et des entretiens avec des responsables des ressources humaines de manière à observer l’application concrète de la mesure.

Les rapporteurs ont déjà commencé leurs travaux. Des auditions sont déjà programmées, notamment celles des partenaires sociaux. Une présentation du rapport devant le Comité pourrait être envisagée avant la fin de la session 2010-2011.

Ce sujet est un très bon sujet d’évaluation. Les conclusions relatives à la méthode pourraient améliorer la qualité du processus législatif.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires Sociales : Nous nous trouvons d’abord devant un devoir de vérité. La lutte contre les inégalités sociales, qui sont fortes en France, passe par les prestations sociales et non par l’impôt. Est-ce le bon système ? Je me rappelle d’un ouvrage écrit par M. Timothy B. Smith, canadien, qui écrivait que la France est une « social-démocratie molle mais inégalitaire ». Il y a une part de vérité : cette social-démocratie est puissante mais inefficace. Sa performance peut être améliorée. Enfin, nous nous trouvons devant un devoir d’efficacité. Il importe de remédier aux inégalités de départ plutôt qu’aux inégalités de situation. Le plus grand moyen de lutter contre les inégalités est de combattre le chômage, donc de renforcer la compétitivité de nos entreprises.

M. Olivier Carré, suppléant le président du groupe UMP : En décembre 2009, l’OCDE a publié une étude montrant que sur une longue période, seuls quatre ou cinq pays, dont la France, la Grèce, l’Irlande et le Portugal, avaient réussi à faire reculer les inégalités de revenus. Les pays qui accompagnent la France dans cette liste, et qui font l’actualité, ne peuvent nous laisser indifférents : il faut bien se poser la question du coût et de l’efficience de la politique de réduction des inégalités.

M. Jean Mallot : Si le Comité retient notre proposition, nous interrogerons naturellement par écrit la ministre compétente, Mme Christine Lagarde, en lui demandant la communication des études économiques et administratives préalables éventuellement réalisées. Une audition de ses collaborateurs et de la ministre pourrait être prévue. Il serait donc opportun que le Président du Comité appuie notre demande auprès du Premier ministre.

Le Comité décide d’inscrire à son programme de travail l’évaluation des mesures fiscales et sociales en faveur des heures supplémentaires.

MM. Jean-Pierre Gorges (UMP) et Jean Mallot (SRC) sont nommés rapporteurs de cette étude.

– Examen des réponses à l’appel d’offres pour un accord-cadre pour des études à faire réaliser par des prestataires externes

M. le Président Bernard Accoyer. L’appel d’offres pour l’accord-cadre pour la réalisation d’études par des prestataires externes, dont le Comité a validé les grandes lignes le 8 juillet dernier, a suscité 17 candidatures qui ont nécessité des analyses approfondies. Claude Goasguen et Jean Mallot vont nous présenter ces candidatures et offres ainsi que le classement qu’il est proposé au Comité de retenir, conformément à la note distribuée, qui demeure confidentielle à ce stade de la procédure.

M. Claude Goasguen. Le secrétariat du Comité a mené de façon satisfaisante le travail de dépouillement et d’analyse des candidatures. Les principes arrêtés par le Comité pour le cahier des charges et le règlement de la consultation de 2010 étaient les suivants :

– pour ne pas éliminer des candidats plus spécialisés dans un secteur donné des politiques publiques, l’accord-cadre a été décomposé en 3 lots entre politiques économiques, politiques sociales et politiques régaliennes ou traitant de questions de gestion publique ;

– les offres sont jugées à 50 % pour le prix et 50 % pour la qualité technique ;

– sont retenus les 5 premiers candidats pour chaque lot, sous réserve que les candidats soient assez nombreux.

Au total, sur le fondement de ces différents critères et après une analyse approfondie, près d’une dizaine de prestataires seraient retenus pour les trois lots considérés, dont certains sur plusieurs lots. Cette sélection se caractérise par un équilibre entre les cabinets d’audit généralistes de grande taille, les cabinets de taille plus modeste ou plus spécialisés en évaluation de politique publique, les universitaires, voire une structure d’étude au statut d’association. Certaines offres se présentent sous forme de groupements de compétences complémentaires, témoignant d’une organisation intéressante des réponses.

Il appartiendra ensuite au collège des Questeurs de décider la notification du marché, conformément aux règles internes à l’Assemblée. Compte tenu des délais procéduraux qui s’imposent, les prestataires retenus pour les premières études à venir pourraient être mis en concurrence avant la fin février, avec un délai de consultation de trois semaines.

M. Jean Mallot. Le travail réalisé par le secrétariat du Comité a été effectué selon les règles de l’art et n’appelle pas d’observation particulière. Une fois la liste des prestataires qui vous est proposée arrêtée définitivement, il sera possible d’y puiser, au cas par cas, après une nouvelle mise en concurrence dans le cadre des marchés subséquents.

Le Comité valide les propositions de ses deux rapporteurs, qui seront transmises à Mme et MM. les Questeurs.

– Nomination de rapporteurs

Le Comité prend acte de la désignation, en application de l’article 146-2 du Règlement, de nouveaux membres des commissions concernées pour participer aux travaux sur les sujets respectifs suivants, en sus des désignations déjà constatées lors de la réunion du 28 octobre 2010 (cf. liste figurant en annexe).

Le Comité prend également acte du souhait de M. Marcel Rogemont (SRC), membre du Comité, membre de la commission des Affaires culturelles et de l’éducation, de participer aux travaux du groupe de travail sur la révision générale des politiques publiques, ainsi que du souhait du président de la commission des Affaires sociales, M. Pierre Méhaignerie, et de M. Jean Mallot de participer aux travaux du groupe de travail sur la performance comparée des politiques sociales en Europe, en tant que membres du Comité.

● Évaluation de la performance des politiques sociales en Europe

Après une intervention de M. Pierre Lequiller, président de la commission des Affaires européennes, précisant que cette dernière avait désigné Mme Anne Grommerch (UMP) et M. Régis Juanico (SRC), également désigné par la commission des Affaires culturelles et de l’éducation, pour participer aux travaux,

M. Régis Juanico (SRC) est nommé rapporteur pour l’évaluation de la performance des politiques sociales en Europe.

● Évaluation des politiques d’aménagement du territoire en milieu rural

M. Jérôme Bignon (UMP), membre de la commission du Développement durable et de l’aménagement du territoire, et M. Germinal Peiro (SRC), membre de la commission des Affaires économiques, sont nommés rapporteurs pour l’évaluation des politiques d’aménagement du territoire en milieu rural.

– Questions diverses : proposition de loi

Le Président Bernard Accoyer : La proposition de loi relative aux pouvoirs de contrôle du Parlement, qui vise à donner aux rapporteurs du CEC des pouvoirs d’enquête pour la réalisation de leurs missions et à organiser les modalités d’assistance de la Cour des comptes au CEC et aux commissions permanentes en application de la Constitution, a été adoptée par le Sénat en deuxième lecture le 20 décembre dernier. Le Sénat a en particulier abandonné le principe, qu’il avait adopté en première lecture, d’une priorité des demandes émanant des commissions des Finances et des Affaires sociales dans le traitement des enquêtes demandées à la Cour. Il a en revanche maintenu sa position sur deux points :

– l’exclusion pour le CEC de la possibilité de demander à la Cour des comptes des enquêtes portant sur le domaine budgétaire, les finances publiques ou les finances sociales ;

– l’attribution des pouvoirs d’enquête aux rapporteurs du CEC sur demande faite à l’Assemblée, pour une durée de six mois.

M. Claude Goasguen. Les sénateurs avaient cependant sensiblement modifié le texte de la proposition de loi en première lecture, bien que n’étant pas concernés par le CEC. Il ne s’agit cependant ici que d’un avis personnel…

M. Marcel Rogemont. …qui n’en est pas moins partagé par d’autres !

M. le président Bernard Accoyer. Il est vrai que la commission des Finances du Sénat avait notamment envisagé en première lecture d’introduire dans cette proposition de loi courte des dispositions importantes concernant la réforme des juridictions financières. Nous sommes néanmoins parvenus aujourd’hui à un équilibre qui paraît acceptable. Le texte pourrait être adopté conforme en 3e lecture à l’Assemblée, de façon à permettre de le mettre en œuvre rapidement.

– Prochaine séance

Le Président Bernard Accoyer : Nous devrons lors d’une prochaine réunion nommer des rapporteurs sur l’évaluation de la médecine scolaire. Nos prochaines réunions pourront avoir lieu les premiers jeudis de chaque mois jusqu’en juin, à 11 heures, sauf si le calendrier de travail ne nécessite pas de nous réunir. La prochaine réunion pourrait ainsi avoir lieu le 3 février à 11 h, ou à défaut le 3 mars.

M. Jean Mallot. Je précise dans cette perspective que le groupe SRC a proposé la désignation de Mme Martine Pinville comme rapporteur sur l’évaluation de la médecine scolaire, sous réserve de sa désignation par la commission dont elle est membre.

La séance est levée à seize heures quarante-cinq.

Membres désignés par les commissions
depuis la réunion du CEC du 28 octobre 2010 pour participer aux travaux :

- Hébergement d’urgence

- RGPP

- Performance des politiques sociales en Europe

- Aménagement du territoire en faveur des zones rurales

- Médecine scolaire