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N° 2221

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 janvier 2010.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE
ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE

sur la politique du spectacle vivant

ET PRÉSENTÉ

par M. Richard DELL’AGNOLA,

Député

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OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL 5

A.– LA PROGRESSION TRÈS MODÉRÉE DU SOUTIEN DE L’ÉTAT AU SPECTACLE VIVANT IMPOSE UNE NOUVELLE DYNAMIQUE DE LA PART DES FINANCEURS 6

1.– Progression de la dépense, dont les contours, l’origine et la répartition sont mal connus 7

2.– Croissance du nombre des artistes et professionnalisation souvent insuffisante du secteur 8

3.– Stabilisation de la dépense de l’État en faveur du spectacle vivant 10

4.– Émergence d’une réflexion prospective nouvelle partagée par l’État et les collectivités 11

B.– LE PILOTAGE DE L’ÉTAT DOIT ÉVITER LES CONTRADICTIONS ET LES INCOHÉRENCES 12

1.– Accroître l’effort de diffusion : la nouvelle ligne de force du rôle de l’État 13

2.– Modérer l’attribution de nouveaux labels, accordés à titre non définitif 13

3.– Formaliser les critères de sélection pour l’attribution des aides et la communication sur les décisions 15

4.– Préciser le statut et le rôle des conseillers sectoriels des DRAC 16

5.– Définir la politique nationale, respecter la déconcentration des compétences et les conditions d’un dialogue budgétaire efficace 17

C.– DES PROJETS DE RÉFORME ET DE RÉORGANISATION À CONCRÉTISER 18

1.– Les projets de réforme concernant les aides déconcentrées 18

2.– Les projets de réforme concernant les aides accordées par la DMDTS 18

CONCLUSION 21

TRAVAUX DE LA COMMISSION 23

1.– Audition du 25 novembre 2009 23

2.– Réunion du 13 janvier 2010 38

ANNEXE : COMMUNICATION DE LA COUR DES COMPTES RELATIVE AUX DÉPENSES D’INTERVENTION DU MINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION AU TITRE DE L’ACTION SOUTIEN À LA CRÉATION, À LA PRODUCTION ET À LA DIFFUSION DU SPECTACLE VIVANT 45

OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

Le soutien de l’État au spectacle vivant a fait l’objet d’une mission d’audit de modernisation en 2007, qui portait plus particulièrement sur les modalités d’attribution des crédits d’intervention (1).

La mission avait souligné la très forte progression des crédits attribués au spectacle vivant au cours de la période 2000-2005, ainsi que des disparités notables entre réseaux et entre disciplines. Elle décrivait aussi l’accompagnement par l’État de l’effort consenti par les collectivités territoriales, accompagnement qui selon les cas, compense la faiblesse de leur apport ou se repose sur leur engagement lorsque celui-ci est important. La part du financement régional, variable, peut en effet atteindre 80 % du montant affecté au spectacle vivant pour une région donnée.

De façon générale, les analyses consacrées à ce domaine font apparaître une multiplication des structures et une complexité du dispositif de soutien, les premières comme le second s’étant constitués par « empilement historique ». Il en ressort une politique peu lisible, notamment dans sa présentation budgétaire, et qui se prête mal au contrôle de l’amélioration de la performance.

Afin de disposer du point de vue de la Cour des comptes sur ce dispositif et sur les moyens de préserver les acquis, tout en améliorant l’efficacité de l’ensemble des financements publics, la commission des Finances a demandé à la Cour, le 4 décembre 2008, de procéder à une enquête sur les dépenses d’intervention du budget de l’État en faveur du spectacle vivant, en application des dispositions du 2° de l’article 58 de la loi organique relative aux lois de finances.

En réponse à cette demande, après une réunion d’orientation avec le Rapporteur spécial, la Cour a adressé une communication dressant un état approfondi des modalités du soutien de l’État au spectacle vivant. Elle constate tout d’abord que l’objectif de soutien à la création et au spectacle vivant, apparu dans les années 1960 et constamment réaffirmé depuis, a été largement atteint : l’offre de spectacle vivant est en effet riche et variée sur tout le territoire, des disparités de moyens persistant cependant mais tendant à correspondre à celles des populations. Le Rapporteur spécial se félicite de cette situation, qui profite largement aux citoyens. Toutefois, la Cour constate ensuite qu’en dépit de ce constat favorable, les prochaines années devront être consacrées à réformer et réorganiser les modalités du soutien public.

La communication fait apparaître notamment que :

– le défaut de lisibilité des aides affecte les bénéficiaires potentiels des crédits, les dirigeants et les lieux d’expression artistique : une formalisation accrue des évaluations des projets améliorerait la transparence de l’action publique défauts principaux ;

– l’État doit repenser son rôle pour tirer les conséquences du soutien croissant des collectivités territoriales au spectacle vivant, et réviser sa stratégie globale d’intervention ;

– la contraction des budgets publics suppose un dialogue institutionnel entre les différents financeurs publics : ce dialogue doit conduire à la définition d’une stratégie régionale du spectacle vivant et à la rationalisation de la carte nationale des labels accordés par l’État.

Cette communication est publiée dans le présent rapport d’information. Elle est précédée du compte rendu de la réunion de la commission des Finances au cours de laquelle la synthèse des travaux de la Cour a été présentée devant les commissaires, suivie par la réponse du directeur de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles au ministère de la Culture et de la communication.

Le Rapporteur spécial souhaite, au préalable, formuler quelques observations relatives aux conclusions de la Cour des comptes, dont il note la rigueur approfondie et la qualité de l’analyse, et dont il approuve la teneur.

A.– LA PROGRESSION TRÈS MODÉRÉE DU SOUTIEN DE L’ÉTAT AU SPECTACLE VIVANT IMPOSE UNE NOUVELLE DYNAMIQUE DE LA PART DES FINANCEURS

Le périmètre de l’étude est celui de l’ensemble des crédits d’intervention, centraux et déconcentrés, consacrés par le ministère au spectacle vivant, en excluant les subventions pour charges de service public accordées aux grands opérateurs nationaux. Cet ensemble a représenté 356 millions d’euros en 2008. Ce montant se décompose en crédits de fonctionnement pour 320,8 millions d’euros et en crédits d’investissement pour 35,31 millions d’euros. Cependant, la Cour a écarté du champ de son étude les dépenses d’investissement ci-dessus mentionnées car leurs modalités d’attribution sont tout autres, et 40 millions d’euros représentant des dépenses de fonctionnement gérées en administration centrale.

Les dépenses d’intervention prises en compte s’élèvent donc à 280,6 millions d’euros en 2008.

On mentionnera pour mémoire que l’ensemble des crédits consacrés au spectacle vivant, réunis dans l’action Spectacle vivant du programme Création, s’élève à 667,29 millions d’euros pour 2010. Ils étaient de 648,72 millions d’euros en 2008.

1.– Progression de la dépense, dont les contours, l’origine et la répartition sont mal connus

La dépense consacrée par le ministère au spectacle vivant a progressé de 300 à 356 millions d’euros, soit 18,8 %, entre 2000 et 2008, les autres dépenses d’intervention du ministère augmentant quant à elles de 21,4 %.

Les éléments d’information exploités par la Cour montrent que les collectivités territoriales consacrent des montants beaucoup plus élevés à la dépense culturelle de manière générale (un montant de 7 milliards d’euros en 2006 est mentionné) et en particulier en ce qui concerne les dépenses de fonctionnement relatives au spectacle vivant : 2,9 milliards d’euros, soit dix fois plus que la dépense de l’État. Néanmoins, la Cour souligne les incertitudes liées à ces montants car les données collectées par la direction de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles (DMDTS) sur les subventions publiques aux réseaux ne sont que partielles et ne couvrent pas, et de loin, l’ensemble des subventions allouées par les collectivités territoriales.

L’État s’avère en tout cas, au sein des subventions publiques, un financeur minoritaire du spectacle vivant, sa contribution étant estimée à 31 % du subventionnement total des structures financées.

Le Rapporteur spécial a pu constater que l’administration déconcentrée a une connaissance très profonde du travail des équipes artistiques œuvrant sur le territoire ; elle s’accompagne d’une vision large des soutiens accordés aux équipes par les collectivités territoriales, même dans le cas où l’État n’intervient pas dans le subventionnement.

Pourtant, de manière globale, les contours de la dépense engagée par les collectivités sont mal connus, car d’une part la nomenclature budgétaro-comptable des collectivités locales ne permet pas d’isoler cette dépense, d’autre part les subventions des collectivités ne sont agrégées par les DRAC que lorsqu’elles participent au financement. Enfin, les statistiques ne prennent pas en compte les dépenses des communes de moins de 10 000 habitants.

Il est donc impossible d’appréhender la dépense globale consacrée au spectacle vivant. La DMDTS a décidé de mettre en place, en lien avec les DRAC, une remontée d’informations statistiques par questionnaires d’enquête spécifiques concernant les politiques et les dépenses culturelles menées par les régions dans ce domaine.

La Cour, dans la lettre de transmission de la communication, préconise de rendre l’ensemble du dispositif plus transparent en créant une base de données librement accessible via Internet retraçant les subventions accordées par l’État, voire par l’ensemble des collectivités publiques, aux structures, lieux, ensembles et compagnies œuvrant dans le domaine du spectacle vivant. Le Rapporteur spécial approuve pleinement cette suggestion qui constituerait à ses yeux une avancée considérable, dans la mesure où d’une part, le citoyen peut légitimement avoir accès à ces informations qui traduisent l’emploi des crédits publics, et que d’autre part, une telle transparence permettrait à chacun de faire la part du soutien engagé par chacune des collectivités en faveur d’une structure, d’un projet ou d’un événement culturel, ce qui peut contribuer à lever les malentendus sur les coûts et l’origine des soutiens.

2.– Croissance du nombre des artistes et professionnalisation souvent insuffisante du secteur

Le développement de cette politique de soutien a eu pour conséquence la croissance de l’offre, avec une progression de la population des artistes et des structures. Le rapport Latarjet de 2004 (2) indiquait en 2004 que, au terme de la décennie 1994-2004, la population des comédiens était passée de 12 000 à 25 000 personnes. Le nombre de musiciens a été multiplié par quatre entre 1980 et 2000, pour atteindre 25 000 interprètes.

Le nombre d’entreprises du spectacle a progressé corrélativement, et la progression des crédits n’a pas pu suivre, ainsi que l’indiquait le DMDTS en 2008, l’accroissement des dépenses liées à la multiplication des lieux aidés et des équipes. Les études conduites à ce sujet sont hélas très peu nombreuses, et les données permettant le mieux de prendre la mesure de la situation sont celles de la Caisse des congés spectacle qui gère une partie des droits sociaux des intermittents du spectacle.

En effet, comme le souligne l’étude de l’Agence régionale du spectacle vivant dans une étude de 2007 sur les salariés du spectacle vivant en Poitou-Charentes, étude citée par la Cour, « l’emploi intermittent est le vecteur principal de la progression de l’emploi ».

« Bulle » de l’emploi intermittent et précarité

La précarisation de la situation des salariés intermittents, liée à la croissance de leurs effectifs, apparaît à travers le recensement effectué par la Caisse de congés spectacles (basé sur les personnes ayant demandé la liquidation de leurs droits à congés).

En 2006, 32 104 entreprises ont été recensées au sein du secteur du spectacle. Celui-ci se caractérise par la petite taille des structures : la moitié des établissements du spectacle emploient au plus un salarié, ce qui les rend plus fragiles aux aléas de la conjoncture. Cette caractéristique est moins nette dans le spectacle enregistré que dans le spectacle vivant, où un établissement compte en moyenne 4 salariés.

En 2006, 503 926 personnes ont travaillé au moins une heure dans le champ du spectacle, tous types de contrats confondus – contrat à durée indéterminée, déterminée ou d’usage. Mais c’est l’emploi intermittent qui a longtemps tiré la croissance de l’emploi : le nombre d’intermittents a plus que triplé entre 1986 et 2005, passant de 37 000 artistes et techniciens à 125 000 en moins de vingt ans. À titre de comparaison, sur la même période, l’ensemble des actifs a vu ses effectifs augmenter d’un peu plus de 10 %.

La croissance de l’emploi intermittent est très largement portée, depuis le milieu des années 1990, par le dynamisme du spectacle vivant, qui connaît une très forte augmentation annuelle de son volume d’emploi.

La croissance du volume d’emploi reste néanmoins, depuis près de vingt ans, nettement inférieure à la croissance des effectifs, d’où une réduction de la quantité moyenne de travail disponible pour chaque individu. Entre 1987 et 2003, le volume moyen de travail d’un intermittent a ainsi diminué de 33 %. Parallèlement, la durée moyenne des contrats a fortement chuté sur la période 1986-2005 : elle était de 19 jours en 1986 contre seulement 4,25 jours en 2005.

Source : données de la Caisse de congés spectacles, présentées dans le rapport de l’Inspection générale des affaires culturelles et de l’Inspection générale des affaires sociales, Mars 2009.

Le Rapporteur spécial rappelle à cet égard que la réforme du régime de l’intermittence est restée « au milieu du gué », car ce régime continue à couvrir des personnes qui relèvent d’un statut contractuel à durée indéterminée, et il sert souvent à produire des spectacles. Les pistes de réformes évoquées par M. Hirsch, Directeur de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles, constituent une bonne base de départ, s’agissant de redéfinir le périmètre des annexes VIII et X, d’une part, de ménager des possibilités de passer du régime de l’intérim au régime dont dépendent les techniciens, d’autre part.

Il conviendrait également de réfléchir à une réforme du dispositif d’aides déconcentrées liant moins le subventionnement à la constitution d’une structure, associative ou autre. En effet, la nécessité de se constituer en structure (d’où la multiplication des associations) pour recevoir une aide au projet conduit à une forme de professionnalisation très fragile, qui ne s’appuie pas sur la constitution d’un public et a besoin du renouvellement de la subvention d’année en année : la remise en cause du soutien public génère un sentiment de frustration et de désaveu, voire conduit à la remise en cause pure et simple de l’activité pour les petites structures. Dans ce contexte, une restriction des crédits publics disponibles dans les prochaines années peut avoir des conséquences sociales dont la gestion risque d’être difficile.

Malgré la croissance des subventions allouées et la croissance de l’emploi au cours des dix dernières années, la progression de la fréquentation, qui est affirmée comme objectif de la performance de l’action de l’État, n’apparaît pas de manière évidente : elle serait de 1 % seulement sur dix ans pour les lieux du spectacle vivant subventionnés par les DRAC, selon le rapport de 2004 déjà cité. D’autres chiffres de progression plus favorable sont communiqués par la DMDTS, notamment pour les centres dramatiques régionaux dont la fréquentation aurait progressé au cours des dernières années.

Là encore, les statistiques disponibles étant partielles, une évaluation fiable de la fréquentation s’avère difficile.

3.– Stabilisation de la dépense de l’État en faveur du spectacle vivant

La révision générale des politiques publiques établit à 0 % la progression du budget de l’État, ce qui conduit à examiner la manière dont le dispositif de soutien au spectacle vivant peut évoluer dans les prochaines années.

Les moyens de fonctionnement déconcentrés représentent 276 millions d’euros pour 2010, soit un montant stabilisé par rapport à 2009. Ces crédits avaient été augmentés en moyenne de 2 % à 3 % par an au cours des dix dernières années : la volonté est aujourd’hui de les stabiliser au niveau de 2009, ce qui représenterait selon le Gouvernement une économie potentielle d’environ 11 millions d’euros par rapport aux besoins d’actualisation prévisibles sur les deux prochaines années.

Le maintien des crédits du spectacle vivant en 2010 permet à l’État d’assumer ses engagements contractuels d’actualisation auprès de certaines institutions, mais il impose déjà une réforme des modes d’intervention. Du côté des équipes artistiques, la simple reconduction des budgets a pour impact la baisse de la part de l’activité artistique d’une structure. Il est essentiel que l’État assure le maintien des engagements, d’autant plus que certaines collectivités procèdent à des réductions de leurs budgets culturels, ce qui suscite une certaine inquiétude. Celles-ci ont en effet tendance à interroger leurs propres politiques vis-à-vis des labels du ministère de la Culture.

Les objectifs de performance définis pour la présentation budgétaire des crédits du programme Création devraient entraîner une évolution. Ainsi, l’objectif 2 a pour ambition de « donner des bases économiques et professionnelles solides à la création ». Les leviers en sont : l’équilibre financier des opérateurs, la garantie de l’emploi artistique, le conventionnement et l’optimisation de la procédure de traitement des demandes de subvention. Pour le deuxième indicateur « levier », la cible est de consacrer 40 % de la masse salariale aux artistes interprètes employés, l’indicateur étant calculé sur trois années, pour un objectif d’allongement de la durée d’embauche.

Cet objectif de structuration de la profession doit être approuvé. Néanmoins le Rapporteur spécial souhaiterait savoir de quelle manière l’objectif peut se décliner en direction de l’ensemble des structures, l’indicateur cité étant instruit à partir des comptes financiers de l’Opéra de Paris, des théâtres nationaux et de l’Opéra Comique (3).

La Cour conclut que la recherche de structuration et de professionnalisation conduira à renforcer la sélectivité et donc à aider moins de projets.

Cependant, l’analyse effectuée par la Cour des montants alloués aux structures et aux équipes artistiques dans les régions étudiées montre que les DRAC procèdent avec une réelle sélectivité : 15 % des compagnies étaient aidées en Rhône-Alpes, et 6 % seulement des équipes en Poitou-Charentes. Cependant, la progression du nombre des compagnies conventionnées conduit à s’interroger, même si elle est équilibrée financièrement par la réduction des crédits alloués aux équipes et la diminution des aides au projet.

4.– Émergence d’une réflexion prospective nouvelle partagée par l’État et les collectivités

Les entretiens de Valois, ouverts par la ministre de la Culture et de la communication en 2008 et clôturés le 30 janvier 2009, ont abordé de manière très ouverte, avec l’ensemble des acteurs, la question de la place de l’État dans le soutien au spectacle vivant. En effet, se pose la question du rôle de l’État, auparavant clef de voûte du dispositif, dans un contexte où les collectivités territoriales jouent un rôle croissant et apportent la majorité des financements.

Les entretiens ont permis de dégager des orientations générales pour l’action future de l’État, mais les principes d’action n’ont pas été clairement énoncés. Néanmoins, la perspective d’une réforme de l’intervention de l’État devrait s’imposer, et il convient d’en définir le contenu et le rythme.

Les conclusions des entretiens de Valois ont dégagé trois grands axes de réforme :

– réviser les critères d’intervention de l’État, artistiques et économiques, réexaminer les labels du spectacle vivant et rationaliser la carte des financements, en systématisant les conventions cadre pluriannuelles ;

– améliorer les conditions de production et de diffusion des œuvres créées, en développant les liens entre le secteur public et le privé, mettre en place de nouvelles sources de financement (apports des entreprises audiovisuelles, idée d’un fonds national d’aide à la diffusion), poursuivre la professionnalisation des entreprises de spectacle, développer des pôles européens de spectacle intégrés et favoriser l’exportation, responsabiliser les établissements publics sur leur mission de diffusion sur le territoire ;

– par cette clarification des critères d’intervention et la progression de la diffusion, retrouver des marges de manœuvres pour le soutien de l’émergence et de l’innovation artistiques.

Le ministère annonçait attendre de cette dynamique, dans un délai de trois années, une carte revue des labels, une politique d’interventions de l’État mieux ciblée et mieux articulée avec celle des collectivités, une augmentation de la diffusion des spectacles favorisant leur rentabilité et la professionnalisation accrue des artistes et des diffuseurs. Les possibilités de rapprochement et de mutualisation d’institutions doivent être examinées.

Cette phase d’échanges au niveau national se prolonge depuis 2009 par la tenue de conférences du spectacle vivant dans les régions. Pour le moment, les questions liées aux objectifs énumérés ci-dessus n’y ont pas été abordées : les directions régionales éprouvent le besoin d’établir un diagnostic des atouts et des difficultés affrontées par chacun des partenaires, y compris les difficultés de maintenir le financement à son niveau actuel, rencontrées par l’État ou plus souvent, au cours des toutes dernières années, par les collectivités territoriales.

Ce nouveau dialogue donne lieu dans certaines régions à un travail de contractualisation de la région avec ses structures bénéficiant d’un label et les collectivités territoriales qui les financent, en élaborant de nouveaux cahiers des charges des labels, dans le cadre de contrats d’objectifs et de moyens.

Après l’établissement de ce diagnostic partagé, certaines DRAC souhaitent aborder le domaine de la formation professionnelle des acteurs du spectacle vivant, avec un double enjeu à considérer dès aujourd’hui. Pour le premier, il s’agit pour les DRAC d’aborder la question de la mise en place de formations supérieures qualifiantes pour donner des outils plus pérennes aux candidats à l’exercice des métiers du spectacle vivant, mise en place nécessitant l’appui des régions. Pour le second, il s’agit de pouvoir offrir des possibilités d’accompagnement professionnel, voire de reconversion, si l’économie du secteur vient à évoluer à moyen ou plus long terme.

Ainsi par exemple, la DRAC du Nord Pas-de-Calais a diligenté des études-action, l’une devant faire l’état des lieux de l’emploi et de la formation dans le secteur, l’autre devant porter sur la faisabilité d’un pôle d’enseignement supérieur du spectacle vivant dans la région.

B.– LE PILOTAGE DE L’ÉTAT DOIT ÉVITER LES CONTRADICTIONS ET LES INCOHÉRENCES

Les orientations citées plus haut, issues des entretiens de Valois, ont été reprises par la directive nationale d’orientation (DNO) adressée peu après sa nomination par le ministre de la Culture, M. Frédéric Mitterrand. Cette directive précise que les objectifs à poursuivre consisteront à « clarifier les modalités d’intervention de l’État, notamment en ce qui concerne la politique de labellisation, réexaminer la carte des équipements et la faire évoluer si nécessaire, mieux répartir les financements de l’État et des collectivités territoriales, appliquer strictement les avis et préconisations des comités d’experts et étudier la possibilité de rapprocher les structures majoritairement financées par l’État, notamment en Ile-de-France ».

Les lignes d’action ainsi définies doivent être approuvées. Cependant, dès à présent, les observations faites par la Cour, corroborées par les auditions qu’a pu conduire le Rapporteur spécial, conduisent à attirer l’attention sur certaines incohérences et contradictions qui peuvent être relevées entre les principes définis par le ministère d’une part, et les décisions prises et évolutions observées, d’autre part.

1.– Accroître l’effort de diffusion : la nouvelle ligne de force du rôle de l’État

La Cour rappelle que depuis 2005, l’objectif d’une plus large diffusion des spectacles est rappelé de manière récurrente par les directives nationales d’orientation. Cet objectif a été promu sur la base du constat, réalisé par le rapport Latarjet déjà cité, qu’un spectacle est représenté en moyenne sept fois dans un centre dramatique national et à peine trois fois sur une scène nationale. La DMDTS reconnaît l’insuffisante diffusion des spectacles et précise que la diffusion moyenne des spectacles des compagnies de théâtre, d’arts du cirque et d’arts de la rue est évaluée à 34,5 représentations, ce chiffre comprenant les représentations données hors du réseau subventionné, telles les interventions en milieu scolaire, dans des théâtres de ville non subventionnés, par exemple.

Malgré les appels du ministère à la plus grande diffusion des productions, à l’ouverture des lieux et au décloisonnement des réseaux et des structures, la Cour ne peut constater que la volonté de mieux diffuser s’est traduite par un meilleur soutien aux lieux de diffusion au cours des dernières années. Si les structures de création-production ont vu leurs crédits progresser de près de 3 % entre 2005 et 2008, les crédits attribués aux structures et lieux de diffusion ont au contraire baissé de 0,6 %. Il s’agit d’un constat de caractère plutôt indicatif, dans la mesure où la distinction entre les deux types de lieux est ambiguë.

Néanmoins, dans le contexte de la seule reconduction des crédits qui prévaut aujourd’hui, l’enjeu de la diffusion est essentiel pour l’accès de tous aux spectacles comme pour une rentabilité acceptable des structures. Les entretiens de Valois ont confirmé cette nécessité, et il a été indiqué que la diffusion pourrait devenir un critère essentiel d’attribution des aides de l’État. Un fonds d’aide à la diffusion est évoqué, mais l’on peut se demander s’il s’agit là du levier le plus approprié.

Il semble que de nouveaux outils soient nécessaires pour cela. Le Ministère et les DRAC doivent mettre en place un réseau permettant aux lieux de diffusion d’accéder aux informations relatives aux structures et aux spectacles qu’elles proposent. L’incitation à diffuser des spectacles existants devrait être renforcée, probablement par le biais des critères permettant d’accéder au subventionnement mentionné ci-dessus.

Alors que le rôle de l’État dans le soutien au spectacle vivant doit être repensé, il serait souhaitable qu’il contribue à assurer une diffusion interrégionale et internationale des productions, qu’elles soient importantes ou plus modestes. Il serait souhaitable qu’une réflexion s’ouvre sur les méthodes à mettre en œuvre pour obtenir rapidement des résultats dans ce domaine.

2.– Modérer l’attribution de nouveaux labels, accordés à titre non définitif

L’aide aux structures absorbe près de 70 % des crédits d’intervention. Ces aides s’inscrivent principalement dans le cadre de dix labels définis par l’État, que la Cour joint en annexe à la communication : trois labels différents peuvent être attribués aux structures du théâtre, des arts de la rue et du cirque, quatre peuvent être attribués aux structures intervenant dans le domaine musical et trois aux structures œuvrant dans le domaine de la danse.

L’octroi par l’État d’un label à une structure de spectacle vivant, qui ouvre droit au subventionnement, s’accompagne d’un cahier des charges des missions à accomplir et des obligations à respecter. Toutefois, la Cour souligne que sept catégories de label n’ont pas d’encadrement réglementaire et que, pour l’ensemble des labels, la répartition des missions, avec notamment l’effort de diffusion à accomplir, n’est pas précisément formulée. Il convient de remédier à cette lacune, car les labels doivent correspondre à une mission confiée par l’État, en lien avec un programme budgétaire et ses objectifs de performance, aussi est-il essentiel que la mission et ses éléments constitutifs soient clairement définis.

Les entretiens de Valois ont abordé la question des labels, pour décider de ne pas les modifier, d’en limiter le nombre à dix, d’en définir mieux le périmètre et de demander aux structures de se concentrer sur la mission principale qui leur est confiée lors de la labellisation. L’objectif de structuration du secteur poursuivi par l’État depuis plusieurs années conduirait à limiter le nombre des labels attribués afin de ne pas éparpiller les financements entre des structures qui sont déjà nombreuses à se partager les crédits distribués par l’État. Pourtant l’administration centrale a créé de nouveaux labels en 2009 : pôle national des arts du cirque (il s’agissait auparavant de pôles régionaux) et centre de développement chorégraphique.

En conséquence, des labels ont été nouvellement attribués en 2009 à des structures qui, bien que déjà soutenues auparavant, s’attendent à présent à une augmentation du soutien public en leur faveur. Cinq labellisations nouvelles ont été en conséquences attribuées à des structures dans la seule région parisienne : deux pour le théâtre, une pour la danse et deux revenant à des orchestres. Deux labellisations sont intervenues dans la région Nord Pas de Calais.

Or l’attribution de nouveaux labels sans que des retraits de labels interviennent par ailleurs contribue à alourdir la charge financière du soutien au spectacle vivant, en figeant encore davantage la répartition des crédits. En effet, l’attribution du label entraîne la pérennisation du subventionnement à la structure qui l’obtient, contrairement au conventionnement auquel il peut être mis fin si l’évaluation par le comité d’experts s’avère défavorable. Outre cet inconvénient, créer de nouveaux labels contribue à alourdir la proportion des financements aux structures par contractualisation au détriment de la part qui pourra être consacrée aux appels à projets. Ainsi les financements relèvent pour 90 % de la contractualisation et seulement 10 % pour les appels à projet en ce qui concerne le théâtre.

Il ne paraît guère souhaitable, à moyens constants, de créer de nouveaux labels ou de continuer à labelliser des structures nouvelles sans procéder à des remises en cause régulières de labels attribués dans le passé.

L’administration reconnaît rencontrer des difficultés aujourd’hui pour aider durablement les structures afin de leur permettre de se renforcer. Des choix ont dû être opérés, ce qui a été fait au détriment de festivals par exemple, alors que la mise en balance de l’intérêt d’aider une structure et l’intérêt d’aider un festival n’a pas été faite. Le Rapporteur estime que les lieux de diffusion ou les lieux importants pour l’animation et le développement régionaux ne doivent pas être sacrifiés au profit des structures de création et de production : il convient aujourd’hui de faire des choix entre les structures, surtout si de nouvelles structures ou de nouvelles disciplines doivent être aidées. Les marges de manœuvre sont extrêmement faibles et l’administration centrale doit faire preuve de prudence.

L’idée, émise par le directeur de la Musique, de la danse, du théâtre et du spectacle, d’une labellisation distinguant une excellence artistique mais distincte du financement, est une piste intéressante, dont un équivalent existe par exemple pour les enseignements spécialisés. En effet, le label crée à lui seul de la valeur au profit des structures et compagnies bénéficiaires, afin de faire effet de levier auprès des collectivités partenaires qui pourraient s’appuyer sur l’expertise de l’État pour s’engager dans le financement d’une structure.

3.– Formaliser les critères de sélection pour l’attribution des aides et la communication sur les décisions

La communication de la Cour des comptes dresse un tableau détaillé de la manière dont les aides sont attribuées, par l’administration centrale d’une part, par les services déconcentrés, d’autre part.

Pour les aides attribuées en administration centrale, la Cour souligne l’absence de critères de sélection, aucun texte ne précisant par exemple les critères devant éclairer les décisions des commissions consultatives pour les aides à la création ou les commandes d’œuvres. Elle note aussi que les garanties d’indépendance des commissions consultatives ne sont pas réunies. Cela n’empêche pas la sélectivité des commissions de s’exercer.

Des améliorations substantielles devront être apportées à ces procédures, ainsi qu’une meilleure information du Parlement.

De même, la politique de conventionnement des compagnies aidées par le ministère doit être dynamisée : il n’est plus envisageable de renouveler de manière quasi automatique l’aide attribuée sans que cette reconduction soit liée à un projet artistique ; il faut également que l’aide soit limitée dans le temps avec la possibilité d’une prorogation.

La méthode d’attribution des aides par les DRAC est également perfectible, selon la Cour, par une énonciation plus claire des critères d’allocation et des objectifs à mettre en œuvre pour les structures bénéficiaires, ainsi qu’un meilleur suivi des fonds.

Il faut tout d’abord reconnaître que les directions régionales sont très sollicitées et que l’instruction des demandes de subvention exige un travail considérable, d’autant plus que l’on constate une dispersion en petites subventions de l’ordre du millier d’euros, pour lesquelles 40 dossiers peuvent être en concurrence…La Cour des comptes dans son rapport thématique sur les effectifs de l’État, présenté en décembre 2009, note d’ailleurs que la poursuite de la déconcentration, à partir de la fin des années 1990, a cessé de s’accompagner d’un transfert de personnel de l’administration centrale vers les services déconcentrés, alors que les DRAC ont été investies de nouvelles charges réglementaires impliquant en particulier l’instruction de dossiers en plusieurs domaines4.

Les échanges qu’a pu avoir le Rapporteur spécial avec des représentants de l’administration déconcentrée lui ont permis de constater que les DRAC s’efforcent de promouvoir des critères d’attribution assez nombreux et objectifs pour l’attribution des aides dans le cadre du contrat de conventionnement : les critères permettent en effet de qualifier les projets et de formuler la mission et les objectifs fondant l’aide de l’État au « théâtre en ordre de marche ». Cette démarche, initiée en 1998, concerne à présent toutes les scènes nationales et va être appliquée aux centres dramatiques. Elle autorise théoriquement la remise en cause du soutien de l’État si les objectifs ne sont pas respectés.

Cette démarche qui se veut exigeante semble entrée dans les habitudes en région parisienne ; elle est peut-être moins prégnante dans les régions.

En réponse aux observations de la Cour portant sur l’imprécision des critères de subventionnement, la DMDTS a émis des suggestions très appropriées qui pourraient être mises en œuvre sous forme d’expérimentation : l’idée de communiquer un « avis artistique global et synthétisé » sur le travail d’une compagnie, ou encore l’idée d’objectiver le vote des membres des commissions par des notes portant sur les différentes composantes de l’évaluation : qualité artistique, professionnalisme, conditions de diffusion.

Les échanges qu’a pu avoir le Rapporteur spécial avec les représentants des DRAC l’ont conduit à appréhender la question des critères de sélection de manière nuancée. Les comités d’experts voient leur rôle et leur fonction précisés par des circulaires et mettent de ce fait en œuvre des critères explicites. Par contre, les critères utilisés par les conseillers sectoriels des DRAC pourraient être définis de manière plus explicite pour intégrer par exemple la diffusion, la viabilité économique ou le nombre de co-producteurs.

4.– Préciser le statut et le rôle des conseillers sectoriels des DRAC

La Cour observe la fragilité de la limite entre l’atout que peut représenter l’expérience d’un conseiller du spectacle vivant en poste depuis plusieurs années au sein d’une DRAC et l’inconvénient évident du risque du manque d’impartialité lorsque des relations personnelles se sont instaurées avec les équipes artistiques, dans un contexte local. L’avis des comités d’experts peut certes contribuer à atténuer ce risque.

Il serait souhaitable d’établir des règles imposant une mobilité minimale pour les conseillers sectoriels ; il conviendrait de même de formaliser plus précisément l’exigence dont ils doivent faire preuve dans l’examen du bilan des subventions accordées.

Enfin, la transparence doit être renforcée avec une information même minimale délivrée aux compagnies sur les appréciations portées par la commission d’attribution ou les motifs d’un refus de subvention. Il semble d’ailleurs, selon les informations recueillies par le Rapporteur, que les DRAC ne sont pas opposées à communiquer plus systématiquement aux équipes artistiques une synthèse argumentée de l’avis les concernant.

La participation d’une personne représentant les attentes du public, actuellement non prévue ainsi que le relève la Cour, serait également un élément important dans le processus de décision : l’adjonction d’un élu, nommé pour une période n’excédant pas un an, pourrait être une expérience intéressante, étant noté que la règle d’incompatibilité a aussi sa justification si l’élu dispose d’un pouvoir consultatif ou décisionnel dans une autre procédure d’aide publique.

5.– Définir la politique nationale et respecter la déconcentration des compétences

Les conditions du dialogue budgétaire dans le nouveau cadre législatif budgétaire doivent être respectées afin d’éviter aux gestionnaires de budget opérationnels de programme de se contredire face aux professionnels et aux partenaires publics régionaux : l’exemple donné par la Cour sur les à coups observés dans la gestion de la réserve de précaution a pu être observé dans d’autres départements ministériels, aussi cette règle ne vaut-elle pas que pour l’administration de la culture.

Il est certain que les efforts menés par les responsables budgétaires locaux pour opérer des choix et les faire accepter dans un contexte de contraction des crédits ne doivent pas être réduits à néant par le dégel de crédits, surtout si la gestion des crédits dégelés est fléchée par l’administration centrale.

Cette gestion heurtée, dont il faut souhaiter qu’elle ne s’est pas reproduite en 2009, est l’un des éléments évoqués par les représentants des directions régionales soucieux du respect de leurs prérogatives.

En effet, la DMDTS doit affirmer son rôle de tutelle et de pilotage du spectacle vivant ; il lui appartient de redessiner la politique nationale à mettre en œuvre, ce qui s’avère particulièrement délicat en la période actuelle de restriction budgétaire, où l’enjeu est de maintenir l’accès à la culture et le soutien à la création. Elle ne peut laisser aux DRAC la définition de la politique nationale et les choix à opérer, et cela ne doit pas être le but déguisé des conférences du spectacle vivant en région.

Par contre, l’administration centrale doit entendre les évolutions et aspirations émanant du niveau régional sans cultiver de défiance à son égard lorsqu’il traduit dans ses décisions de soutien les directives nationales d’orientation.

Une réflexion devrait être initiée pour clarifier et formaliser les compétences entre les différents niveaux d’administration, à l’exemple de ce qui a été réalisé concernant le patrimoine.

C.– DES PROJETS DE RÉFORME ET DE RÉORGANISATION À CONCRÉTISER

Les travaux d’analyse et de contrôle portant sur le spectacle vivant, effectués au cours des dernières années par les corps de contrôle, ont abouti à la formulation de plusieurs pistes de réforme par la DMDTS.

1.– Les projets de réforme concernant les aides déconcentrées

Une réforme du dispositif des aides déconcentrées aux équipes artistiques est tout d’abord envisagée, qui distinguerait deux niveaux d’aides :

– l’aide au projet à caractère ponctuel attribuée soit à une nouvelle production, soit à prolonger la présentation au public d’une production déjà créée ;

– l’aide pluriannuelle, destinée à accompagner la structuration et le développement de compagnies et ensembles professionnels. Cette aide serait accordée pour au moins deux années dans le cadre d’un conventionnement avec la DRAC.

2.– Les projets de réforme concernant les aides accordées par la DMDTS

À la suite d’une évaluation interne du dispositif d’aides aux équipes indépendantes, la DMDTS a constaté que l’enveloppe budgétaire consacrée à l’aide aux compagnies dramatiques était en progression car de nouveaux bénéficiaires doivent être pris en charge, ce qui se poursuivra en 2010 car plusieurs directeurs d’institutions dramatiques quitteront leur poste, soit par le fait de l’âge soit parce que leur mandat vient à échéance. La direction a également reconnu que l’actuelle gestion du conventionnement avec l’administration centrale n’était pas satisfaisante, laissant trop de place à la reconduction automatique de l’aide.

La réforme a pour objectif de réduire les crédits budgétaires attribués dans ce cadre, à déconcentrer la majeure partie des aides et à faire entrer progressivement les bénéficiaires dans le circuit déconcentré des aides au spectacle vivant. Le nouveau dispositif d’aide mis en place à partir de 2010 pour les anciens directeurs de théâtres nationaux ou de centres dramatiques nationaux illustre cette réorganisation en permettant à ces anciens directeurs, au terme d’une période de six mois, de signer une convention triennale avec une DRAC pour réaliser un projet artistique d’implantation territoriale.

Une réforme des commissions consultatives nationales a été engagée en 2008, qui devrait aboutir en 2010. Il s’agit de renforcer l’indépendance des commissions et d’en réduire le nombre ; il s’agit également de mieux définir l’action de l’État à chaque niveau pour les aides au cirque et aux arts de la rue pour lesquels la répartition des interventions entre administration centrale et déconcentrée donnait lieu à des doublons source d’inefficacité.

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CONCLUSION

Ainsi que l’observait le Premier président de la Cour des comptes, M. Philippe Séguin, dans sa lettre de transmission de la communication au président de la commission des Finances, les constats formulés par la Cour ressortaient déjà des travaux conduits au cours des cinq dernières années. Pourtant, le Gouvernement tarde à définir la nouvelle politique du spectacle vivant que les institutions de contrôle appellent de leurs vœux, et les préconisations formulées, en dernier lieu encore dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, ne sont pas encore mises en œuvre.

Le ministère de la Culture et de la communication a annoncé un certain nombre de réformes du dispositif, ainsi que des améliorations de la gestion des aides au spectacle vivant, qui semblent appropriés. Il convient de les voir s’inscrire dans les faits dès cette année.

L’évaluation des résultats de la politique de subventionnement est difficile : « nous soulignons les difficultés dans l’évaluation des résultats – si ce n’est une absence complète d’évaluation » a observé pour sa part M. Jean Picq, président de la troisième chambre de la Cour des comptes, devant la commission des Finances (voir compte rendu ci-après).

Les éléments de mesure de la performance de l’action de l’administration centrale et des directions régionales, quoique imparfaits, ainsi que le relève la Cour, sont adaptés et permettront de juger de la concrétisation de certaines des évolutions recherchées. En particulier, les trois indicateurs prioritaires fixés par la DMDTS pour le spectacle vivant – le renouvellement des équipes aidées, la progression du conventionnement et la fréquentation par le public scolaire – sont très appropriés et leur progression sera l’objet d’un examen attentif par le Rapporteur spécial.

L’objectif de diffusion devrait toutefois faire l’objet d’une mesure plus complète et notamment concerner la plupart des lieux comme des projets aidés.

En conclusion, le Rapporteur spécial souligne la nécessité de poursuivre la réforme du statut de l’intermittence, malgré les difficultés prévisibles. En effet, nous savons aujourd’hui que l’existence d’un régime spécifique d’indemnisation du chômage a conduit à la constitution d’une population très nombreuse revendiquant le statut d’artiste ou pouvant en bénéficier par le jeu des annexes ad hoc de ce régime. De ce fait, le lien entre ce statut et le processus de création n’existe pas toujours. Cette confusion interfère sur la conduite de la politique culturelle par l’État comme par les collectivités territoriales.

Il conviendrait également d’établir les aides au projet sur de nouvelles bases moins systématiquement liées à la constitution d’une structure, associative ou autre. En effet, la nécessité de constituer une structure pour recevoir une aide conduit à une forme de professionnalisation très fragile, qui a besoin du renouvellement de la subvention d’année en année : la remise en cause du soutien public conduit à la remise en cause pure et simple de l’activité. Aussi une restriction des crédits publics disponibles dans les prochaines années peut avoir des conséquences sociales difficiles à traiter, qu’il convient d’anticiper.

Il souhaite enfin rappeler, même si cette question peut paraître incidente, que le secteur du spectacle vivant fait face à de nombreuses difficultés que les travaux ici présentés ont pu mettre en évidence. Parmi ces difficultés, la lourdeur et la complexité de son système déclaratif en matière sociale ont été dénoncées par les organismes de contrôle. Le Rapporteur spécial avait souligné à l’occasion de l’examen des crédits de ce secteur pour 2010 le nombre élevé des procédures déclaratives et la complexité du système des assiettes de cotisation et des taux.

Après les ajouts successifs de cotisations diverses et la création d’organismes pas toujours adaptés au secteur du spectacle et à sa fragilité, le moment est venu de la clarification et de la simplification. Le Rapporteur spécial considère très souhaitable de simplifier et de clarifier plus particulièrement le système en priorité pour les petites entreprises, les plus fragiles et les plus nombreuses dans le spectacle vivant, et qui sont, souvent, source de créativité et de renouveau artistique.

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TRAVAUX DE LA COMMISSION

1.– Audition du 25 novembre 2009

La commission des Finances se réunit le 25 novembre 2009 à 11 h 30 pour auditionner M. Jean Picq, président de la troisième chambre de la Cour des comptes, et M. Georges-François Hirsch, directeur de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles, sur un rapport demandé à la Cour des comptes, en application de l’article 58-2° de la LOLF, relatif au spectacle vivant.

M. le président Didier Migaud. Chers collègues, j'ai le plaisir de souhaiter en votre nom la bienvenue à M. Jean Picq, président de la troisième chambre de la Cour des comptes, et à M. Georges-François Hirsch, directeur de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles au ministère de la Culture et de la communication.

Sur proposition de notre Rapporteur spécial, M. Richard Dell'Agnola, la Commission a souhaité faire le point sur la politique de l'État dans le domaine du spectacle vivant. Les enjeux budgétaires paraissent comparativement modestes, puisque le périmètre de l'enquête n'a englobé que – si l’on peut dire – 350 millions d'euros en 2008. Mais ces crédits, qui représentent au demeurant une part significative des subventions du ministère, ont un fort effet de levier. L'intervention de l'État est déterminante dans la vie de très nombreuses troupes et salles de spectacle, ce qui lui donne une influence et une visibilité exceptionnelle.

Se pose en conséquence la question de la prévisibilité de l'action de l'État et du cadre contractuel de ses interventions.

Dans un autre domaine relevant du même ministère, celui de la communication, l'État a des interlocuteurs peu nombreux et puissants, avec lesquels la procédure du contrat d'objectifs et de moyens s'impose et a fait ses preuves. Mais, dans un secteur où les parties prenantes sont nombreuses et ont un fort enracinement local, une méthode d'intervention rationnelle est plus difficile à définir et à appliquer. L'État est-il parvenu à une méthode satisfaisante ? Non, répond clairement le rapport de la Cour. Permettez-moi de citer la lettre de transmission de M. Philippe Séguin : « Le rapport met en évidence la complexité, la fragmentation et simultanément la rigidité d'un dispositif de soutien à la création élaboré par strates successives depuis un demi-siècle. »

Le rapport souligne certes des progrès récents, mais il reste que cette situation n'est pas le gage d'une politique satisfaisante et qu’en tout état de cause elle est dommageable pour le contrôle de la représentation nationale, pour l'information des citoyens et pour l'action des artistes et organisateurs de spectacle.

Après que M. Richard Dell’Agnola, notre Rapporteur spécial, aura rappelé pourquoi nous avons demandé à la Cour des comptes – que je remercie pour le panorama très complet qu’elle nous livre – de procéder à cette enquête, nous vous écouterons avec intérêt, monsieur le président, nous en exposer les principales conclusions. Ensuite, les remarques et les questions de notre Rapporteur spécial nous permettront d’engager le dialogue avec M. Georges-François Hirsch sur les pistes d'amélioration de la politique du spectacle vivant, pour ce qui concerne notamment la clarification des critères d'attribution des aides, leur prévisibilité et leur contrôle dans un cadre contractuel.

Vous serez certainement amené, monsieur le directeur, à évoquer la réflexion en cours sur un sujet sensible : le rôle respectif de l'État et des collectivités territoriales. En effet, après les entretiens de Valois dont, vu du Parlement, les conclusions n'apparaissent pas clairement, la concertation se poursuit à ce propos dans le cadre des conférences du spectacle vivant en régions.

M. Richard Dell’Agnola, Rapporteur spécial. Nous souhaitions évaluer de manière urgente la politique de l’État en matière de spectacle vivant ; nous devions pour cela être en mesure de mieux appréhender l’empilement historique des structures et des aides, ainsi qu’un certain manque de transparence et diverses insuffisances. Aussi nous a-t-il paru souhaitable qu’au terme des entretiens de Valois, qui visaient à dégager de nouvelles pistes dans les relations entre l’État et les acteurs du spectacle vivant, la Cour des comptes enquête à ce sujet.

Le président Didier Migaud l’a rappelé, l'étude réalisée par la Cour porte sur quelque 350 millions d'euros. Si la somme est relativement modeste, ces subventions représentent 44 % des dépenses d'intervention de la mission Culture ; leur taux de déconcentration, sans cesse croissant, s’est établi à 84 % en 2008. Mais, pour mieux situer le rôle du ministère en faveur du spectacle vivant, il convient de rapporter ces 350 millions de subventions aux 2,9 milliards d’euros de dépenses effectuées dans le même cadre par les collectivités territoriales, qui jouent donc un rôle éminent en ce domaine.

Une plus grande transparence devrait prévaloir dans l’action du ministère et il serait bon de comprendre quelles rigidités empêchent une diffusion satisfaisante du spectacle vivant sur l’ensemble du territoire.

M. Jean Picq, président de la troisième chambre de la Cour des comptes. Au regard de la somme en jeu – moins de 300 millions d’euros –, le sujet peut sembler d’importance modeste sur le plan financier, mais ce n’est pas parce que les montants sont faibles que les choses sont simples. Le spectacle vivant est un domaine compliqué parce qu’un nombre considérable d’équipes et de lieux se trouvent être les bénéficiaires potentiels ou réels d’aides de l’État. Je mettrai l’accent sur ce qui constitue l’essentiel du contenu de notre rapport.

Ainsi que vous l’avez souligné, il convient de mettre en regard les quelque 300 millions de subventions provenant du ministère de la culture et la dépense, grossièrement estimée à 2,9 milliards d’euros, des collectivités territoriales dans le même domaine. Étant donné ce rapport de un à dix au moins, il nous a paru impossible d’enquêter sans nous rendre dans quatre régions. Nous avons choisi les régions Bretagne, Nord-Pas-de-Calais, Rhône-Alpes, et Poitou-Charentes – dans un souci d’équilibre qui ne vous échappera pas. Les quatre directions régionales des affaires culturelles (DRAC) considérées dispensent ensemble 70 millions d’euros de crédits d'intervention, soit un quart des crédits gérés à ce titre au sein des directions régionales, le reste étant géré par la direction centrale. Outre les directeurs régionaux, nos enquêteurs ont rencontré deux agences régionales du spectacle vivant et les responsables de six lieux ou équipes artistiques. Je ne prétends pas que nous ayons pu ainsi connaître intimement le spectacle vivant, mais je tenais à souligner que nous n’avons pas mené un travail exclusivement parisien ni bureaucratique.

Le rapport étudie successivement la stratégie de l'État et son cadre, les critères d'attribution des subventions, la multiplicité des sources de financement. Nous soulignons enfin les difficultés dans l’évaluation des résultats – si ce n’est une absence complète d’évaluation. Il faut dire qu’en cette matière la chose est particulièrement compliquée.

Le premier constat est que l’État a, depuis longtemps, une stratégie claire qui a permis de développer de manière remarquable l’offre culturelle sur tout le territoire au cours des trois ou quatre dernières décennies. Ses objectifs, repris dans le projet annuel de performances, consistent à soutenir la création, favoriser la diffusion des œuvres et donner des bases économiques et professionnelles solides à un secteur dont l’économie se caractérise par de faibles besoins de trésorerie, mais aussi par des coûts fixes élevés et d'importants aléas.

Cette politique a permis l’existence d’une offre abondante et désormais bien répartie sur tout le territoire national, puisque toutes les régions, à l'exception de la Picardie, sont dotées d'un centre dramatique national, et que les deux tiers des départements accueillent une scène nationale. La pratique professionnelle s’est développée : entre 1994 et 2004, la population des comédiens a doublé pour atteindre 25 000 personnes réparties au sein de 1 500 compagnies, et la France comptait 25 000 musiciens professionnels en l’an 2000, soit quatre fois plus qu’en 1980.

Les subventions accordées par l'État visent à soutenir soit des structures, c'est-à-dire des lieux de représentation, soit des compagnies. L'aide aux structures, qui représente 70 % des crédits, est distribuée par le biais de onze labels établis par l'État, dont quatre seulement sont encadrés par des textes juridiques contraignants. Les aides aux équipes comptent donc pour 30 % des crédits, dont près d’un cinquième est attribué directement par l'administration centrale, le reste l’étant par les DRAC.

Le rapport met ensuite en évidence la complexité, la fragmentation et simultanément la rigidité d'un dispositif de soutien à la création élaboré par strates successives depuis cinquante ans. Il faut distinguer la manière dont les choses se passent à l'administration centrale, d’une part, et dans les DRAC, d’autre part.

La direction de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles du ministère de la Culture et de la communication attribue des aides à des équipes indépendantes. Ces aides sont de deux catégories. Des subventions, dont le montant s’est établi à 4,8 millions d’euros en 2008, sont d’abord versées à d'anciens directeurs d'institutions dramatiques et chorégraphiques. Ils reçoivent cette aide à la création à dater de leur sortie de fonctions et jusqu'à la fin de leur activité professionnelle. Ce dispositif a pour objectif de permettre aux anciens directeurs de poursuivre leur activité créatrice avec leur compagnie, et aussi de réintégrer le régime d'assurance sociale des artistes. En 2008, une trentaine de metteurs en scène et de chorégraphes bénéficiaient de ce mécanisme, dont il convient de souligner qu'il est réservé aux artistes reconnus. Par ailleurs, six ensembles musicaux distingués pour leur rayonnement bénéficient chacun d'une subvention récurrente, pour un montant total de 3 millions d’euros en 2008. La direction de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles a engagé une réforme qui prévoit des modalités progressives de réduction des aides d'État aux directeurs sortis d'institutions.

Outre ces aides directes discrétionnaires, d'autres aides sont attribuées par l'administration centrale avec l’intervention de commissions nationales. Nous observons que le fonctionnement de ces commissions est perfectible mais, surtout, qu’elles ne sont pas toujours consultées. Ainsi, en 2008, en matière de commandes musicales, alors que 58 dossiers avaient été retenus sur 128 présentés, 22 autres commandes ont été passées sans que la commission compétente ait été consultée.

La direction cherche aujourd'hui à se recentrer sur sa fonction de pilotage en transférant à des opérateurs nationaux la responsabilité d'attribuer les aides qui ne peuvent pas être déconcentrées car le nombre de bénéficiaires potentiels dans chaque région est très faible. C’est ainsi que l'attribution de l'aide à la création d'œuvres dramatiques sera transférée au Centre national du théâtre.

Dans les régions, le paysage de l'offre artistique est fortement modelé par l'histoire. Dans le Nord-Pas-de-Calais par exemple, les collectivités territoriales ont investi le domaine du spectacle vivant depuis les années quatre-vingt pour en faire un élément d'attractivité de leur territoire. Les chiffres traduisent ce dynamisme : la région compte ainsi sept scènes nationales contre cinq en Rhône-Alpes, mais une seule scène conventionnée, contre dix en Rhône-Alpes.

Nous avons aussi observé que les aides accordées localement par les DRAC ne sont pas toujours parfaitement connues par l'échelon central. Ainsi, la DRAC de Bretagne a choisi d'accorder des aides à des scènes de territoire, donnant ainsi en quelque sorte un label d’État au niveau régional dans des communes d’au moins 15 000 habitants. De même, en Poitou-Charentes, six théâtres de ville, par ailleurs soutenus par la région, bénéficient de subventions de la DRAC.

L’enquête a par ailleurs mis en évidence le fait que les DRAC ont des stratégies de subventions croisées. L'État aide ainsi, à hauteur de 1 million d’euros, l'Opéra de Lille, lequel achète lui-même pour 700 000 euros de spectacles à l'ensemble Le Concert d'Astrée, alors que cet ensemble musical est lui-même subventionné par l’État à hauteur de 200 000 euros. Interrogée sur les raisons de ce financement croisé, la DRAC fait valoir que réduire la subvention accordée à l’Opéra diminuerait l’autonomie de programmation de la structure et que, inversement, augmenter la subvention de l'Opéra au détriment de l'ensemble musical affaiblirait l'équipe artistique.

Sur le plan local, l'attribution des aides repose sur des conseillers sectoriels du spectacle vivant, compétents mais dont l'ancienneté est parfois grande – certains sont en place depuis vingt ans. Ils sont aidés dans leurs choix par des commissions consultatives d'experts indépendants, dont les avis ne sont pas publics, même si leurs critères d'exigence artistique sont connus. Nous avons souligné les faiblesses de ce dispositif et indiqué quelques pistes d'amélioration. Le ministère s'est déclaré favorable à ce que la sélection des projets se fasse en fonction de critères objectifs préalablement annoncés ; à ce que le vote des experts sur les composantes de l'évaluation artistique soit connu ; à ce que les commissions émettent un « avis artistique global et synthétisé » qui pourrait être communiqué aux demandeurs, alors qu’aujourd’hui les choses se passent par le biais d’entretiens personnels.

Il ne faut pas déduire de ce que je viens de rappeler qu’il n’y aurait pas de sélectivité des aides accordées par l'État : la sélectivité est avérée. Ainsi, en Rhône-Alpes, 101 compagnies et 45 structures sont aidées sur un total de 650 compagnies et 300 lieux, soit une proportion de 15 %. En Poitou-Charentes, seules 6 % des équipes artistiques bénéficient d'une aide de l'État. Il ne faut donc pas sous-estimer l’effet sélectif du mécanisme, même si son objectivité et sa transparence pourraient, à l’évidence, être améliorées.

La Cour a également observé que, pour des raisons qui tiennent à la qualité des hommes et à la singularité de ce métier, l'État éprouve de grandes difficultés à appliquer les règles de renouvellement des mandats des directeurs de centres dramatiques nationaux. Alors que la durée maximale de présence est normalement limitée à trois mandats, soit neuf ans, plusieurs directeurs sont en place depuis dix ans, voire quinze ans.

Autre constat, déjà signalé : le ministère de la Culture et de la communication n’a pas de vision précise et complète des dépenses des collectivités territoriales en matière de spectacle vivant. Les liens avec l’État sont peu formalisés et l’enquête n’a pas fait apparaître qu’il y ait eu un partage des rôles entre l’État et les collectivités locales, alors même que le cofinancement est la règle, puisque la part de l’État représente moins du tiers des subventions publiques accordées. Dans les quatre DRAC étudiées, 94 % des compagnies dramatiques aidées par l'État reçoivent aussi des financements de la région, 72 % en reçoivent d'un département et 62 % de la commune. La même remarque vaut, à quelque chose près, pour les compagnies chorégraphiques et pour les ensembles musicaux.

Notre dernier constat est celui de l'incertitude quant aux résultats de cette politique, incertitude que les entretiens de Valois ont parfaitement mise en évidence en suggérant la création d’un observatoire du spectacle vivant. Actuellement, il est difficile de concilier les objectifs assignés à la politique du spectacle vivant, qui sont parfois contradictoires. Inciter à une création de qualité peut pénaliser l’effort de diffusion et de restructuration si l’État préfère aider les projets plutôt que les structures. Si l’on souhaite privilégier une politique de structuration et de professionnalisation, il faut être plus sélectif et donc aider moins de projets.

Pour ce qui est de l’objectif de fréquentation du public, le rapport fait apparaître que, si les crédits ont augmenté d’environ 20 % entre 1997 et 2007, la fréquentation n’a augmenté que de 1 % pendant la même période.

Pour finir, je mettrai l’accent sur trois recommandations que la Cour soumet à votre réflexion.

La première porte sur la stratégie de l'État. Depuis quelques années, le ministère a dit vouloir réorienter sa stratégie pour favoriser la diffusion d’une part, le renforcement de l’économie du secteur d’autre part. Mais nous avons constaté que cette orientation peine à se traduire dans les répartitions budgétaires ; ainsi, l'aide aux structures chargées de la diffusion était en recul sur la période 2005-2008. Il nous paraît nécessaire que l'État repense son rôle pour tirer les conséquences du soutien croissant des collectivités territoriales et qu'il recentre ses interventions sur l'objectif qualitatif d'innovation et de diversité de la création, en favorisant la diffusion.

La création d'un dispositif national indépendant d'observation et d'évaluation du spectacle vivant dont les travaux fourniraient les éléments de référence indispensables à la rationalisation de la carte des labels doit se faire sans délai. Ce serait un levier utile pour une politique de labellisation. J’appelle votre attention sur ce sujet compliqué. En France, un artiste qui cherche une subvention commence par la demander à l’échelon local, avant de réitérer sa demande à l’échelon départemental et régional, l’aide de l’État représentant en quelque sorte une consécration. Il serait souhaitable de découpler le label, par lequel on reconnaîtrait la qualité artistique, du financement. Toutefois, ayant entendu les quatre DRAC et m’adressant à des élus, j’observe que l’opération, qui paraît simple dans son principe, est difficile à mettre en œuvre compte tenu de l’attachement manifeste à l’idée que, lorsque l’État apporte un label, il ne doit pas se contenter de n’apporter que cela.

Deuxième recommandation : renforcer la lisibilité et la transparence de l'action à l'égard de la représentation nationale. La présentation des dispositifs d'aide dans les projets annuels de performances et dans les rapports annuels de performances est en effet très complexe, ventilée en catégories de dépenses peu explicites, dont le périmètre est instable dans le temps. Il est parfois difficile, en dépit des efforts du Rapporteur spécial, de rapprocher les données budgétaires des éléments figurant dans les réponses aux questions parlementaires, et nous y avons passé beaucoup de temps. Enfin, il serait utile que les documents budgétaires comme les réponses aux questionnaires budgétaires comportent davantage d'éléments de contexte, de nature à mieux éclairer le débat public sur les enjeux liés aux aides de l'État au spectacle vivant.

La troisième recommandation, probablement la plus importante, porte sur le financement partagé entre l’État et les collectivités locales de la politique publique du spectacle vivant. Lors de son audition par la Cour, le directeur de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles a souligné que deux éléments pouvaient permettre d’espérer une évolution. Ainsi, la situation financière plus difficile des collectivités locales pourrait être l’occasion de réfléchir à une meilleure allocation des ressources par les différents financeurs publics. Mais cela suppose, dans le prolongement des entretiens de Valois, l’installation des conférences régionales du spectacle vivant, lieux d’élaboration des objectifs de cette politique partagée. C’est là un des moyens permettant de favoriser la rationalisation de la carte des labels du spectacle vivant.

J’indique pour conclure qu’au cours de la contradiction conduite avec le ministère de la Culture et de la communication, deux enjeux connexes non négligeables ont été mis en évidence. Le premier a trait à la formation des artistes : il a été souligné que le développement de filières qualifiantes dans l’enseignement supérieur favoriserait la structuration de ce secteur professionnel. Le second concerne le devenir du régime d'assurance chômage propre aux artistes. L’attractivité du régime des intermittents contribue évidemment au développement de l'offre de spectacles, ce qui entraîne l’augmentation corrélative des demandes de subventions publiques ; lors des entretiens de Valois, la directrice des Affaires culturelles de la Ville de Paris avait souligné que, pour un jeune artiste, créer une compagnie était le moyen le plus rapide de trouver une activité professionnelle.

M. le Rapporteur spécial. Je vous remercie, monsieur le président, d’avoir rappelé devant nous les observations de la Cour, qui mettent en évidence ce que nous pressentions : il faut en effet réorienter les crédits, favoriser la diffusion et assurer une plus grande lisibilité de l’action de l’État. Ces nécessités sont désormais reconnues, y compris, crois-je savoir, par le directeur de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles, qui nous le dira sans doute lui-même en répondant à nos questions.

La première de mes questions porte sur la répartition des crédits en régions. La Cour des comptes note que, si l'offre de spectacle vivant est aujourd'hui abondante et territorialement mieux répartie qu'il y a vingt ans, les crédits de l'État sont principalement absorbés par les grands organismes, réseaux et institutions conventionnés, installés dans les principales villes de chaque région, si bien que « les DRAC peinent à dégager des moyens pour l'aménagement et le renforcement du tissu culturel de l'ensemble du territoire régional ». Comment mieux équilibrer l'effort financier entre les grandes structures des métropoles et le tissu culturel régional ?

Dans un autre domaine, le renforcement de la diffusion est aujourd'hui défini comme un objectif prioritaire, mais sa traduction budgétaire n'est pas encore assurée. Quelles dispositions compte prendre le ministère pour lui donner plus d'efficacité ?

D’autre part, la direction de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles envisage de réformer le dispositif d'aides déconcentrées aux équipes artistiques en alignant l'ensemble des disciplines sur le modèle de dispositif en vigueur pour le théâtre. Quelles seraient les modalités d’une telle réforme ?

Pourriez-vous, monsieur Hirsch, préciser l’état d'avancement et l'objectif de la réforme des commissions consultatives nationales ? La Cour signale des doublons dans les aides en certains domaines.

Elle évoque également le difficile problème de la valeur ajoutée de l'action de l'État, et dénonce l'empilement des relations contractuelles ainsi que la faible lisibilité des subventions. L'action de l'État doit-elle se concentrer sur la diffusion interrégionale, sur la diffusion internationale ? Comme le souligne la Cour, il faut mesurer l'efficacité de cette action.

Enfin, monsieur le directeur, je vous saurai gré de préciser les avantages de l’« avis labellisant », qui permettrait de reconnaître la qualité d'une démarche artistique sans impliquer obligatoirement un financement. Où en est la réflexion de la direction à ce sujet ?

M. François Goulard. Le rapport de la Cour sur la politique du spectacle vivant, dont j’observe qu’il est particulièrement critique, m’a beaucoup intéressé. Bien des élus remarquent comme moi que, si le ministère de la Culture est désormais très déconcentré, il semble ne pas avoir perçu le mouvement de décentralisation engagé au début des années quatre-vingt. Dans un domaine qui, financièrement, est largement l’apanage des collectivités territoriales, il continue à se vouloir prescripteur et prétend détenir le monopole des valeurs et du bon goût. Il y a là une sorte de fixisme, comme si le ministère, probablement toujours impressionné par l’ombre tutélaire d’André Malraux, son fondateur, n’avait pas pris la mesure de l’évolution de notre pays.

Mes constatations rejoignent celles de la Cour : la disproportion du financement du spectacle vivant est telle entre l’État et les collectivités territoriales que l’on peut légitimement s’interroger sur le bien-fondé du maintien de structures aussi lourdes que le sont les DRAC, dont les directeurs aux idées très arrêtées prennent, pas toujours dans une parfaite transparence, des décisions discrétionnaires. Dans le contexte que nous connaissons, faut-il maintenir un ministère comme celui-là ?

M. Michel Vergnier. Chaque fois que j’entends évoquer ce genre de constat, je tremble pour les territoires ruraux. Pourtant, je le répète régulièrement, il n’y a pas de développement économique dans les déserts culturels. On voit dans le Limousin, combien, au nom de la rentabilité mesurée par le montant de l’aide rapportée au spectateur, il serait dommageable de pénaliser les territoires ruraux dont les habitants ont droit, autant que les autres, à une offre culturelle de qualité.

M. Jean-Claude Mathis. Les compagnies et les équipes indépendantes redoutent que la redistribution des responsabilités et des compétences entre l’État et les collectivités territoriales ne remette en cause les financements. Comment garantir, dans un tel contexte, la pluralité de l’offre et la stabilité des partenariats au service de la création et de l’éducation ?

M. Claude Bartolone. Si les subventions croisées sont amenées à disparaître, le spectacle vivant sera plongé dans l’incertitude. En outre, la suppression de la clause de compétence générale des collectivités, dont on parle de plus en plus, pourrait faire disparaître les aides accordées, disons par les départements, et qui ne se retrouveraient pas forcément aux échelons subsistants, comme la région ou l’État. Enfin, les troupes ont besoin de visibilité à moyen terme pour pouvoir monter des projets. Elles risquent d’être à leur tour victimes des incertitudes que vont connaître les collectivités locales en matière de financement. Un mauvais portage de la part de l’État et un portage affaibli de la part des collectivités locales ne risquent-ils pas d’avoir des conséquences néfastes pour le monde de la culture ?

M. René Couanau. Nous nous interrogeons beaucoup sur les critères objectifs de qualité des spectacles et lieux qui sont soutenus année après année par les DRAC, au détriment de toute innovation provenant du niveau infrarégional. Quel est donc le rôle de l’État dans les régions ? François Goulard n’a-t-il pas raison de suggérer de passer aussi les DRAC au crible de la RGPP de façon qu’elles contribuent à une meilleure diffusion de la culture dans nos territoires ?

Le rapport souligne qu’il est très difficile de savoir quelle est la contribution exacte des collectivités territoriales à la politique culturelle. Les statistiques ne prennent en compte que les lieux et les spectacles qui bénéficient des subventions de la DRAC et des régions. Or le moment me paraît particulièrement judicieux pour informer le Gouvernement sur le rôle des collectivités dans tous les domaines, y compris culturel, car il n’a pas une conscience claire de ce qui se passe sur le terrain, ni des conséquences de ce qu’il propose.

Les moyens financiers vont manquer, ce qui se répercutera sur l’organisation d’événements culturels et sur le soutien aux troupes. Dans ce contexte, quelle fiscalité l’État va-t-il appliquer au secteur culturel, lui qui, non content d’ignorer superbement ce que les collectivités font sur le terrain, menace ce secteur de taxations supplémentaires, ce qui lui retirerait encore des moyens financiers ? Les collectivités alimenteraient ainsi les caisses de l’État en contribuant à l’essor culturel.

M. le président Didier Migaud. Je remercie notre Rapporteur spécial de nous offrir l’occasion d’une audition et d’un échange intéressants.

M. Georges-François Hirsch, directeur de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles. Je commencerai par un rapide préambule sur l’évolution de la réflexion au ministère de la Culture, compte tenu des critiques que je viens d’entendre.

Depuis quelques mois, voire quelques années, les relations entre partenaires s’étaient tendues, souvent par manque de dialogue en amont. C’est la raison pour laquelle nous avons organisé les entretiens de Valois, dont le principal but était de réunir autour de la même table les professionnels, les collectivités territoriales et l’État, pour instaurer un « trialogue » qui n’avait jamais existé sous cette forme. Un an et demi plus tard, après 450 réunions, nous avons appris à travailler ensemble et avons élaboré toute une série de préconisations. Aujourd’hui, il est acquis que l’État, les collectivités territoriales et les professionnels doivent travailler ensemble et il a été mis fin à l’opposition permanente entre les professionnels et l’État, mais aussi entre l’État et les collectivités, qui lui réclament de l’argent mais veulent qu’il les laisse tranquilles. Les professionnels sont entrés dans la boucle de la responsabilité collective.

Nous ne parlons plus, monsieur Goulard, d’État prescripteur, mais d’État partenaire. C’est l’expression – et elle est importante politiquement – que j’ai utilisée dès les premières réunions car il est clair que doit s’instaurer, entre les collectivités locales qui financent une part considérable de la politique culturelle et l’État, un partenariat. L’État souhaite, premièrement, mieux définir les règles qui président à l’attribution de subventions ou de labels, et, deuxièmement, s’entendre avec les collectivités pour savoir qui fera quoi et qui paiera quoi dans les années à venir. Enfin, il a paru nécessaire d’amorcer la réflexion plus en amont, pour éviter des décisions prises un peu à la va-vite.

Pour ce faire, Mme Christine Albanel a relancé le Conseil des collectivités pour le développement culturel. Par ailleurs, conformément aux recommandations des entretiens de Valois, nous avons mis en place des conférences du spectacle vivant en région. Elles sont destinées à établir en amont une concertation entre l’État et les collectivités, au besoin par le biais d’une contractualisation pluriannelle dans le respect du cadre législatif. Une fois qu’ils se sont mis d’accord, les professionnels leur soumettent leurs projets pour donner corps à la politique culturelle. Au départ, ces conférences suscitaient de la condescendance, en particulier au sein des DRAC qui les considéraient comme une « usine à gaz » de plus. Maintenant que nous en sommes à une dizaine de conférences, les parties concernées sont demandeuses de ce dialogue qui se déroule, après une séance plénière qui règle les problèmes fondamentaux d’organisation, au sein de groupes thématiques. Dans un an, nous aurons une idée plus précise de ce que pourrait être une nouvelle répartition des responsabilités, sur le plan tant financier que culturel. Si nous ne réfléchissons pas en amont, les choses se passent mal. Mais l’État et les collectivités ont des intérêts en commun, et les professionnels ont aussi leur part de responsabilité dans cette politique.

Pour éviter que les grandes institutions ne soient trop avantagées par rapport aux compagnies indépendantes ou conventionnées, nous avons, dans le cadre des entretiens de Valois, écrit ou réécrit toutes les règles du jeu des labels, y compris pour les compagnies indépendantes. Nous disposons désormais d’un « tableau de bord » pour mesurer les évolutions budgétaires et artistiques des institutions en région. Les indicateurs que nous avons définis commencent à remonter au ministère. Une des raisons de cette clarification était le rééquilibrage entre les compagnies indépendantes et les compagnies conventionnées. Nous avons fait obligation aux scènes nationales, aux centres dramatiques nationaux (CDN) et aux centres chorégraphiques nationaux (CCN) d’accueillir régulièrement des compagnies ou des artistes qui disposent donc dorénavant de créneaux dans la programmation des grandes institutions.

Par ailleurs, il est impératif de mieux diffuser les spectacles, car on produit beaucoup mais on ne diffuse pas assez.

Dans un cadre budgétaire contraint, nous avons la nécessité absolue de maintenir les aides de l’État et des collectivités en évitant les écueils du saupoudrage et de la reconduite systématique. Nous devons donc cesser d’élargir constamment le périmètre d’intervention, ce qui signifie que, si l’on décide d’aider tel ou tel projet ou label, il faut renoncer à tel ou tel autre. Cet environnement nous oblige à retrouver des marges de manœuvre pour diffuser et produire mieux. Autrement dit, il ne doit plus être possible que deux maisons d’opéra, distantes de 300 kilomètres, jouent le même week-end deux productions différentes d’une même œuvre – Carmen, par exemple, avec un coût important de production pour chacune de ces maisons d’opéra. A contrario, il faut encourager dix-sept maisons d’opéra à s’unir pour produire un spectacle qui sera représenté soixante-quinze fois, ce qui permettra de mieux répartir et de mieux amortir les coûts, l’ego de tel ou tel dut-il en souffrir. Il importe d’avoir davantage la main sur l’organisation, les plannings et les budgets. Nous demanderons également des projections sur trois ans concernant le budget, la fréquentation, le montage et le financement des productions, l’accueil des compagnies enfin.

Nous souhaitons réformer l’aide déconcentrée aux équipes artistiques. D’ailleurs, toutes les commissions vont être réorganisées sur de nouvelles bases. À cette occasion, nous serons obligés, pour nous conformer aux recommandations de la Cour des comptes, de procéder à une cotation des dossiers selon des critères objectifs et de rédiger des comptes rendus des décisions sous une forme préalablement définie.

Enfin, je conviens que, quels que soient leurs talents, les conseillers des DRAC doivent être plus mobiles. On ne peut pas rester vingt ou vingt-cinq ans au même poste sans nouer des amitiés, comme des inimitiés. Pour ce qui concerne les relations entre les DRAC et l’administration centrale, il faut savoir qu’elles ne sont pas toujours simples. Vous n’ignorez pas que nous envoyons chaque année aux DRAC une directive nationale d’orientation (DNO) qui constitue pour elles une feuille de route. Elles s’en servent tantôt comme levier pour appuyer leur propre politique de gestion des crédits déconcentrés, tantôt comme repoussoir en accusant l’administration centrale du pire. Au préalable, les conférences budgétaires n’ont pas toujours été très sereines, mais les choses sont en voie d’amélioration.

Quant à la valeur ajoutée de l’action de l’État, Monsieur le Rapporteur spécial, elle est faible en termes strictement financiers, mais, comme le rappelait le président Picq, l’État, c’est l’État. Et même les collectivités territoriales, même les élus, souhaitent avoir un label national. La question de savoir si ce label doit rester synonyme de financement national sera posée dans le cadre des conférences du spectacle vivant en région et du Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel.

Le président Picq a parlé de la mobilité des directeurs des centres dramatiques nationaux à qui il arrive de rester en poste au-delà de trois mandats successifs. Il est souvent difficile d’avoir des discussions rationnelles avec les artistes, mais nous essayons. Cela nous demande du courage politique, mais il arrive que notre effort soit contrebalancé par des pressions locales. En tout cas, ce n’est pas si simple.

La fiscalité doit s’adapter et nous sommes en grande discussion avec Bercy, en particulier à propos de la TVA sur les subventions et de la taxe sur les salaires. Des poursuites ont été engagées contre certaines institutions. Nous nous efforçons d’arranger les choses, même si ce n’est pas facile. M. Woerth et Mme Lagarde ont été saisis, et nous espérons trouver une solution dans les mois qui viennent.

M. Jean Picq. Le travail que nous avons mené a eu le mérite de remettre en cause les certitudes que nous avions au départ. Comme je vous l’ai dit en commençant, ce n’est pas parce que les sommes en jeu sont faibles que les choses sont simples, au contraire, notamment parce que les bénéficiaires sont très nombreux.

Premièrement, il faut relativiser l’enjeu. Mais, en recevant les représentants des quatre DRAC dont j’ai parlé, nous avons été frappés de la dimension très sensible de la question. Derrière la floraison culturelle, se profile un enjeu social et politique très important. Et, s’il y a une chose qui a changé dans notre pays en trente ans, c’est bien que la décentralisation culturelle est devenue une réalité.

Deuxièmement, Monsieur Goulard, vingt-huit ans de décentralisation, c’est à la fois beaucoup et peu. Entre le système très centralisé qui a caractérisé les quatre premières Républiques et une bonne moitié de la cinquième, et la décentralisation complète qui prévaut en Allemagne, par exemple, nous sommes à la croisée des chemins, à devoir penser et mettre en œuvre une politique culturelle partagée. Et rien n’interdit d’être plus optimiste parce que la crise peut être l’occasion de réfléchir à un meilleur partage des rôles entre l’État et les collectivités territoriales, ni d’être inventif.

Monsieur Bartolone, vous avez insisté sur l’inquiétude que suscitait chez les artistes la conjugaison d’une réduction de l’effort de l’État et de la contraction des budgets locaux. La tentation existe de donner davantage de visibilité à des compagnies qui prennent des risques par le biais du conventionnement, avec l’inconvénient de rendre plus difficile le renouvellement des artistes. Il y a ainsi un paradoxe à vouloir renouveler les équipes et à donner une plus grande visibilité à des équipes solides.

Troisièmement, pour répondre aux députés des régions moins favorisées, assurément, l’une des responsabilités de l’État est de veiller à l’égalité des chances et d’éviter que les écarts ne se creusent entre les régions riches et les régions pauvres. De ce point de vue, le partage entre la « labellisation » et la répartition de l’effort est un enjeu commun à l’État et aux collectivités locales.

Enfin, pour sortir d’une approche pessimiste focalisée sur la réduction des budgets publics, on peut considérer l’avantage qu’il y a à avoir une République décentralisée, même si le mouvement n’est pas achevé. Puisque les grands bénéficiaires ont plusieurs sources de financement, ils sont aujourd’hui moins vulnérables à une contraction brutale de tel ou tel budget public.

M. Alain Rodet. Au moment où nous commémorons le cinquantième anniversaire de la mort de Gérard Philipe, n’oubliez pas, Monsieur le directeur, que vous êtes en quelque sorte le continuateur de Mme Jeanne Laurent, qui a illuminé notre vie culturelle.

Pour que l’État devienne un partenaire, qu’il commence par être en accord avec lui-même ! Il arrive, s’agissant du financement d’un festival, que la position du ministère de la Culture ne soit pas cohérente avec celle d’un autre ministère, celui des Affaires étrangères, par exemple.

Vous avez enfin déclaré que les conseillers des DRAC restaient trop longtemps en place. Il faudrait vous intéresser également aux inspecteurs généraux qui traînent derrière eux autant, sinon plus, de haines recuites que les conseillers. Il faudrait faire parler la poudre !

M. Laurent Hénart. Ma question porte sur la régulation de l’accès aux professions artistiques dont les entretiens de Valois et le rapport de la Cour des comptes ont montré qu’il est si facile que cela complique la maîtrise des crédits et perturbe la politique de soutien au spectacle vivant dans les territoires. Les rapports ont même établi que, si le nombre de spectacles progressait dans le pays depuis une quinzaine d’années, celui des spectateurs ne suivait pas toujours. Des pistes sont-elles évoquées pour remédier à cette situation ?

M. le Rapporteur spécial. Les compagnies sont incitées à avoir 20 % de ressources propres. Mais ce ratio n’est pas toujours vérifié et, quand il ne l’est pas, il n’y a pas de conséquence sur le contrat.

M. Georges-François Hirsch. Monsieur Rodet, je n’ignore pas l’existence de Jeanne Laurent, vous vous en doutez. Nous sommes dans le droit fil de l’esprit de décentralisation qu’elle a insufflé, tout en utilisant des outils plus modernes. Mme Trautmann, quand elle était ministre de la Culture, avait instauré une charte culturelle des services publics qu’il faut relire régulièrement, parce qu’elle le mérite. L’État, avez-vous dit, retire d’une main ce qu’il a donné de l’autre. Vous faites sans doute allusion aux Francofolies. Puis-je vous rappeler que, l’année dernière, quand le ministère des Affaires étrangères a retiré 35 000 euros de subvention à cette manifestation, le ministère de la Culture les a aussitôt compensés ? Je reconnais que la situation n’était pas idéale, mais l’État a fait son devoir et tenu ses engagements.

En ce qui concerne les inspecteurs généraux, je ne me prononcerai pas. La poudre, il y aurait tellement d’endroits où on pourrait la faire parler…

Monsieur Hénart, vous avez eu raison d’aborder le sujet de la professionnalisation et de la structuration des professions du spectacle vivant. Nous y avons beaucoup réfléchi dans le cadre des entretiens de Valois et avons tracé quelques pistes de réflexion, en particulier un label de qualification pour professionnaliser et structurer les entreprises. Ce label serait, pour elles, la condition sine qua non pour obtenir des subventions de l’État ou des collectivités. Nous sommes en train d’essayer de le mettre en place.

Nous nous préoccupons des ressources propres qui font désormais partie des critères de performance – même si d’aucuns contestent cette expression. Elles figurent dans la batterie d’indicateurs qui seront suivis par l’Observatoire national du spectacle vivant et qui serviront à attribuer les subventions. Les régions ont déjà leur observatoire régional. Il est normal que nous ayons un observatoire national qui sera un outil simple et transparent. Il centralisera les mêmes indicateurs calculés d’après des données homogènes, pour que chacun puisse s’y retrouver.

M. Jean Picq. M. Hénart a raison de revenir sur le sujet. Le Premier président de la Cour des comptes a d’ailleurs insisté sur cet enjeu dans la lettre qui accompagne notre rapport. En effet, le régime de l’intermittence, qui est attractif, contribue au développement de l’offre de spectacles et, corrélativement, à la demande de subventions, qui a une dimension sociale.

M. Georges-François Hirsch. Sur ce point, je serai plus abrupt que le président Picq. L’intermittence sert souvent à produire des spectacles alors que ce n’est pas son but. Dans un an et demi, nous renégocierons les annexes VIII et X. Il faut y réfléchir dès aujourd'hui avec les professionnels, même si le ministère de la Culture n’est pas directement partie prenante. Le système doit être impérativement réformé, pour limiter les débordements et fixer des règles plus claires.

Je soumettrai deux idées au petit groupe de travail que j’ai mis en place : premièrement, redéfinir le périmètre des annexes VIII et X car je trouve inconséquent que l’événementiel soit inclus dedans. C’est la porte ouverte au « n’importe quoi » : un peintre en bâtiment qui repeint un stand à la Foire de Paris peut devenir intermittent du spectacle, et le rester ; un chauffeur livreur qui suit une tournée de Johnny Hallyday aussi. Deuxièmement, il est indispensable de donner la souplesse nécessaire au passage entre l’annexe IV, c'est-à-dire l’intérim, et l’annexe VIII dont dépendent les techniciens. Il faut ménager des passerelles dans les deux sens entre les deux régimes car une trop grande rigidité de l’annexe VIII n’est pas une bonne chose.

M. le président Didier Migaud. Monsieur le président, Monsieur le directeur, nous vous remercions.

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2.– Réunion du 13 janvier 2010

Au cours de sa réunion du 13 janvier 2010 à 10 heures, la Commission entend une communication de M. Richard Dell’Agnola, Rapporteur spécial, sur la politique du spectacle vivant.

M. Didier Migaud, Président. Le 25 novembre dernier, nous avons entendu le président de la troisième chambre de la Cour des comptes ainsi que le directeur de la Musique, de la danse, du théâtre et des spectacles sur une enquête que nous avions demandée à la Cour des comptes en application de l’article 58, 2° de la LOLF.

Cette audition avait permis de clarifier le diagnostic sur les acquis de la politique de l’État, mais aussi sur les insuffisances et les difficultés identifiées par la Cour des comptes.

Avant que la commission autorise la publication de ce rapport, notre Rapporteur spécial a souhaité procéder à de nouvelles auditions. Il s’agissait pour lui de clarifier les leçons à tirer des « entretiens de Valois ». Il s’agissait aussi de présenter ses propres préconisations concernant l’évolution de la politique de l’État, en ce qui concerne la cohérence de son pilotage, le rôle des autres financeurs, et les réformes à prévoir à brève échéance.

Après l’intervention du Rapporteur spécial, un débat s’engage.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général. Quels pourraient être les contours d’une nouvelle politique du spectacle vivant, du point de vue de l’État ? L’évolution constatée conduit, à terme, à un transfert de cette politique vers les régions. Le régime des intermittents du spectacle demeure le principal outil d’intervention de l’État, sans doute le plus efficace. Le Rapporteur spécial a-t-il une idée de ce que pourrait être, à horizon de 10-15 ans, un paysage simplifié ? On peut imaginer que l’État continue à intervenir pour aider certaines équipes artistiques ayant un rayonnement national. Il me semble qu’il a cependant de moins en moins sa place dans le domaine du spectacle vivant.

M. Richard Dell’Agnola, Rapporteur spécial. Le spectacle vivant a vocation à être, de plus en plus, pris en charge par les régions, mais aussi les autres collectivités. Mais il ne faut pas que l’État se désengage, notamment afin d’éviter le retrait corrélatif des régions. Les orientations générales de la politique du spectacle vivant gagneront à être définies en collaboration entre l’État et les collectivités. À ce titre, les entretiens de Valois, qui se poursuivent à présent au niveau régional, sont utiles. S’agissant du statut des intermittents du spectacle, une évolution est nécessaire, afin de faire en sorte que le système bénéficie à ceux qui exercent effectivement une activité artistique.

M. Didier Migaud, Président. Un désengagement complet de l’État ne serait pas souhaitable ; son soutien est en effet nécessaire en particulier aux grandes scènes et manifestations nationales.

M. Jean Launay. Au cours de la précédente législature, j’avais présenté à la délégation à l’Aménagement et au développement durable du territoire un rapport sur l'action culturelle diffuse, instrument de développement des territoires. Ce rapport constatait le « superbe émiettement » de la production, une mosaïque d’initiatives rendant très délicate l’appréciation de la dépense globale. En ce qui concerne le statut des intermittents, il faut éviter que les véritables « saltimbanques » pâtissent de l’octroi trop large de ce statut. À ce titre, un parallèle peut être établi avec la politique de labellisation. Par exemple, le fait d’octroyer à davantage de villes le label « Ville d’art et d’histoire » réduit le soutien moyen accordé par l’État, car les moyens globaux demeurent constants. Je m’inquiète donc quelque peu lorsque le Rapporteur spécial évoque la nécessité pour l’État de réviser sa stratégie globale d’intervention ; il ne faudrait pas que les collectivités, avec le garrot financier qu’elles subissent, aient trop de nouvelles charges à assumer.

M. Richard Dell’Agnola, Rapporteur spécial. La modification du statut des intermittents doit avoir pour objectif la consolidation des métiers et des fonctions. Par ailleurs, ainsi que je l’ai relevé dans mon dernier rapport spécial sur les crédits de la Culture pour 2010, il est nécessaire de réformer le système des congés spectacles qui présentait de graves dysfonctionnements, avec en particulier 16 millions d'euros non distribués aux salariés du secteur. Les directions régionales de l’action culturelle sont bien conscientes des difficultés que rencontrent les acteurs du spectacle vivant et la fragilité de leur situation au cas où le soutien de tel ou tel financeur public viendrait à diminuer. Les représentants de la direction du Nord-Pas-de-Calais, que j’ai entendus, ont évoqué la nécessité d’un double accompagnement : en faveur de la formation qualifiante pour les candidats aux métiers du spectacle d’une part, en faveur de l’accompagnement professionnel, voire la reconversion, d’autre part. En dépit de la contraction de la dépense du budget national, il est, encore une fois, nécessaire que l’État ne se désengage pas. Il ne l’a pas fait jusqu’à présent.

M. Jean-Yves Cousin. Je m’interroge d’une part sur l’opportunité de décliner les entretiens de Valois en région et d’autre part sur l’éventualité d’un subventionnement moins systématiquement lié à l’existence d’une structure : quels critères doit-on privilégier dans ce cas ?

M. Richard Dell’Agnola. Les entretiens de Valois, après la phase tenue au plan national, doivent se poursuivre au sein des régions pour établir dans chacune un diagnostic des points forts et des difficultés, y compris celles qui peuvent se poser pour maintenir le financement au niveau actuel. Il s’agit de faire émerger une réflexion partagée entre État et collectivités sur les réorientations de la politique du spectacle vivant. Cette phase réunit d’ailleurs des interlocuteurs très habitués à travailler ensemble.

La recherche par les équipes artistiques de crédits publics pour leurs projets les conduit généralement à créer une structure, le plus souvent associative. Il s’agit là d’un mode de professionnalisation très fragile qui conduit à redemander une ou des subventions aux financeurs publics année après année, sans que la recherche d’un public soit l’élément central ; l’interruption du soutien public peut mettre en question la poursuite de l’activité, ce qui est mal vécu par les artistes et toujours difficile à gérer pour les financeurs publics. Il conviendrait de privilégier pour les petites équipes artistiques un mode de financement qui ne conduise pas à la création d’une structure à la pérennité incertaine.

M. Alain Rodet. Le travail de notre collègue ne doit pas conduire à une stigmatisation du régime des intermittents du spectacle. Une période probatoire pourrait être envisagée par les structures contribuant au financement du régime des intermittents, afin de vérifier le sérieux et la viabilité des projets culturels financés. Pour les collectivités territoriales aujourd’hui engagées dans le financement du spectacle vivant, le problème tient aussi à la manière dont les manifestations ont été créées pendant la saison estivale. Un certain héliotropisme explique la multiplication des festivals dans le Sud de la France, attirant l’intervention de grands mécènes grâce au jeu des relations publiques. Le poids du mécénat devrait être mieux pris en compte dans les sources de financement pour parvenir à une meilleure synergie des participations et des soutiens au spectacle vivant.

M. Richard Dell’Agnola. Il est très important de maintenir un soutien aux événements et festivals qui participent à l’animation du territoire, mais il faut rappeler que certains d’entre eux sont organisés par des structures privées, comme le Festival d’art lyrique d’Aix-en-Provence par exemple. Je rappelle qu’en fonction de leur statut, privé ou public, certaines structures, comme les SARL, ne peuvent bénéficier du mécénat et il est difficile de les subventionner.

M. Olivier Carré. Il faudrait également se pencher sur l’importance de la dépense fiscale en faveur du mécénat qui est aussi une forme de soutien au spectacle vivant.

M. Richard Dell’Agnola. Un examen attentif s’impose : avec la crise économique, on assiste à un certain repli de l’intervention du secteur privé par la voie du mécénat. Il est donc essentiel de continuer à encourager ce type de soutien. On citera à cet égard l’exemple emblématique du musée du Louvre qui grâce au projet d’Abou Dhabi, peut bénéficier d’apports significatifs. Mais il convient d’éviter que de telles interventions emblématiques, réservées en pratique à de grands opérateurs prestigieux ou à des événements culturels de premier plan, ne captent l’ensemble des ressources du mécénat, dont les structures et équipes artistiques moins visibles ont aussi besoin.

M. Claude Bartolone. Il me semble qu’il manque une dimension dans le travail de notre collègue : celle de l’urgence, au regard des difficultés de financement du spectacle vivant qui commencent déjà à apparaître pour les départements. Les amputations de crédits non obligatoires se font sentir dès cette année. Si l’on peut comprendre la stratégie de financement régional évoquée par le Rapporteur spécial, il faut également rappeler que l’évolution des contributions au spectacle vivant, et à la culture en général, entre les différents niveaux de collectivités territoriales, ne se fait pas à périmètre constant. Il faut donc évaluer les conséquences des restrictions financières que vont subir certaines collectivités et de la suppression de la clause de compétence générale. Car s’il y a un domaine dont le financement demande de la visibilité, c’est bien le spectacle vivant. Aujourd’hui, de moins en moins de troupes peuvent bénéficier d’une réelle visibilité sur leurs perspectives de financement à moyen terme.

Lors de ses vœux aux acteurs du monde culturel, le Président de la République a promis que la nouvelle répartition des compétences des collectivités territoriales dans ce domaine n’entraînerait pas de conséquences financières négatives. Mais cela n’est pas assuré : il faudra donc vérifier que sur la période 2010-2014, le financement du spectacle vivant ne pâtisse pas de cette réforme institutionnelle, car la culture sera bien une dépense non obligatoire pour nombre des collectivités qui financent actuellement le secteur. On peut dès lors douter de l’existence d’une compensation à l’euro près par rapport au financement antérieur.

M. Richard Dell’Agnola. Je comprends ces inquiétudes. Une nouvelle définition de la politique du spectacle vivant est attendue. Par ailleurs, nous avons besoin d’interventions dans le cadre de conventions pluriannuelles afin que les équipes artistiques et les établissements puissent adopter une vision à plus long terme. C’est parce que les acteurs du secteur craignent une décrue de l’aide de l’État, ou selon les cas une baisse de l’aide d’une collectivité, qu’il était indispensable de décliner les entretiens de Valois au niveau déconcentré.

M. François de Rugy. Il convient de clarifier le propos sur le statut des intermittents : on peut comprendre le problème, évoqué par le Rapporteur spécial, lié au fait qu’il y aurait trop de personnes affiliées à ce régime et qui sont parfois très éloignées de l’activité créatrice et artistique. Il faut peut-être clarifier les règles de l’affiliation à ce régime : mais si cela devait signifier raboter le niveau d’indemnisation de l’ensemble des affiliés, alors ce ne serait pas une bonne réforme et j’y serais opposé.

Il faut rappeler l’importance du rôle du spectacle vivant dans le développement local, le soutien à certaines activités comme la restauration ou l’hôtellerie : rappelons l’expérience du festival d’Avignon et du soutien apporté par les cafetiers et les restaurateurs au mouvement de grève des intermittents. Il faudrait dès lors envisager que ces secteurs par exemple participent, directement ou indirectement, par le biais d’une dotation de l’État, à l’équilibre du régime des intermittents.

Enfin, on parle de compétence locale et régionale : je suis favorable à ce que les collectivités prennent une responsabilité plus grande en la matière, elles y sont d’ailleurs prêtes, mais cela ne se fera pas sans les moyens financiers afférents, qu’il s’agisse de moyens transférés ou de recettes fiscales.

M. Richard Dell’Agnola. Je rappelle que les crédits de l’État en faveur du spectacle vivant non seulement sont maintenus mais progressent très légèrement : il n’y a donc pas de retrait de l’État de ce secteur. Il continue à fournir un effort soutenu.

S’agissant du statut des intermittents, il relève de deux annexes à la convention de l’Unedic sur l’indemnisation du chômage. La rédaction actuelle, très large, permet l’affiliation de nombre de personnes, dont des catégories de techniciens qui ne peuvent s’apparenter aux artistes du spectacle vivant et qui devraient relever d’un autre statut. Il conviendra de redéfinir le champ du régime tout en préservant les garanties aux acteurs du spectacle vivant pour une bonne prise en compte des spécificités de leur métier.

M. Pierre-Alain Muet. L’État ne doit pas se désengager du soutien au spectacle vivant : certaines compagnies doivent faire face à la disparition d’une subvention sans aucune explication, ce qui peut être dramatique pour de jeunes créateurs. La suppression de la compétence générale des régions est un vrai problème : elle risque de remettre en cause le financement global du spectacle vivant.

S’agissant du régime des intermittents du spectacle, il a permis un financement remarquable de la création, mais il a en réalité été dévoyé par quelques grandes entreprises qui ne sont pas d’authentiques acteurs du spectacle vivant. Le régime des intermittents n’est pas un système d’indemnisation du chômage, mais un mode de financement de la création artistique et c’est à ce titre qu’il faut savoir le défendre. La réforme qui a consisté à réduire de douze mois à dix mois et demi la durée de l’indemnisation a des conséquences graves pour le secteur.

M. Richard Dell’Agnola. Certes, les équipes artistiques ont besoin de stabilité, mais il faut aussi savoir détecter et aider les nouveaux talents : les financeurs doivent respecter un équilibre très délicat entre structuration des équipes et soutien d’un côté, fluidité de l’aide au profit de nouvelles équipes et nouveaux projets de l’autre. Il s’agit de renouveler les bénéficiaires des soutiens, comme tentent de faire les directions régionales des affaires culturelles (DRAC). Les objectifs de performance que nous examinons chaque année à travers le rapport de performances incluent d’ailleurs le renouvellement partiel des bénéficiaires des aides, hors le cas de structures conventionnées pour lesquelles le soutien est défini sous réserve du respect par chacune de sa mission. Les représentants des DRAC que j’ai auditionnés ont souligné leur volonté d’améliorer l’information des structures sur les avis des commissions examinant les demandes de soutien.

M. Jean-Pierre Brard. Si l’on m’interroge sur l’opportunité de persister dans la voie de la réforme, je réponds par la négative. Au plus fort du conflit avec les intermittents du spectacle, un certain nombre de nos collègues sont courageusement intervenus, mettant en évidence la position délicate des professionnels de la restauration et de l’hôtellerie confrontés à la grève des intermittents. Le Gouvernement était resté sourd à ces arguments. Il faut également déplorer le manque de poids politique des ministres de la Culture successifs. J’ai entendu l’un d’eux invoquer l’opposition du syndicat du patronat pour écarter les arguments des intermittents, révélant à la fois l’impuissance du gouvernement et l’entêtement du Medef.

L’existence d’un système de solidarité interprofessionnelle pour assurer le financement du régime des intermittents est une bonne chose, mais il faut débarrasser ce régime du vol organisé qu’il subit de la part des grandes entreprises de l’audiovisuel privé.

Je ne souscris pas à l’enthousiasme du Rapporteur spécial sur les financements croisés des différents niveaux de collectivités qui resteraient inchangés avec la réforme en préparation : cette réforme aura justement pour conséquence la fin des financements croisés.

M. Richard Dell’Agnola. Le but de la réforme de la politique du spectacle vivant, tel qu’elle a été définie lors des entretiens de Valois, est bien de promouvoir et pérenniser les financements croisés et les partenariats entre les différents acteurs : la part que veut prendre chacun sera définie au plan régional. Les collectivités territoriales ne font pas toutes les mêmes efforts. L’État doit justement engager des partenariats efficaces avec elles et demeurer le garant d’une politique culturelle sur l’ensemble du territoire.

M. Henri Emmanuelli. Le Rapporteur spécial nous parle de financements croisés et de l’importance de la région pour le soutien au spectacle vivant. Or, dans les Landes, force est de constater que la structure motrice dans ce domaine est bien le département. Et si le département ne peut plus financer ce secteur, des conséquences fâcheuses seront inévitables : elles conduiront directement à la diminution du soutien au monde culturel comme sportif d’ailleurs.

M. Henri Nayrou. Le département de l’Ariège a d’ores et déjà décidé de diminuer de 15 % sur quatre ans son financement au secteur associatif, pour maintenir son budget à flot.

M. Richard Dell’Agnola. Cet exemple montre bien que ce n’est pas la réforme qui aura une incidence sur le financement des collectivités territoriales, puisqu’elle n’est pas encore intervenue.

Je conclus de ce débat qu’il est utile de continuer à observer les évolutions dans le domaine de la politique du spectacle vivant et de son financement afin d’en rendre compte régulièrement à notre commission.

La Commission autorise ensuite la publication du rapport présentant les conclusions du Rapporteur spécial et la communication de la Cour des comptes.

ANNEXE :

COMMUNICATION DE LA COUR DES COMPTES RELATIVE AUX DÉPENSES D’INTERVENTION DU MINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION AU TITRE DE L’ACTION SOUTIEN À LA CRÉATION, À LA PRODUCTION ET À LA DIFFUSION DU SPECTACLE VIVANT

PA 56201

COMMUNICATION A LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ECONOMIE GENERALE ET DU CONTROLE BUDGETAIRE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE

article 58-2 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances

Les dépenses d’intervention du ministère de la culture et de la communication au titre de l’action « soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant »

Septembre 2009


CADRAGE DES TRAVAUX

Le présent rapport a été rédigé dans le cadre de la demande formulée par le président de la commission des finances de l’Assemblée nationale en application de l’article 58-2 de la LOLF et visant à ce que la Cour mène une enquête portant sur « les subventions du budget de l’État au spectacle vivant ».

Un entretien entre le Président de la troisième chambre et Monsieur DELL’AGNOLA, député, rapporteur spécial du budget du programme « Création » du ministère de la culture et de la communication et membre de la commission des finances, a permis de préciser le sujet et de le centrer sur l’analyse des dépenses d’intervention du ministère de la culture et de la communication au titre de l’action « soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant ». Le rapporteur spécial a en particulier indiqué qu’il souhaitait mieux identifier les critères d’allocation des subventions aussi bien par l’administration centrale que par les services déconcentrés et comprendre les modalités de suivi et d’évaluation des politiques ainsi réalisées. Il souhaitait enfin pouvoir apprécier si, dans sa politique d’attribution de subventions, le ministère de la culture tient compte des actions des collectivités territoriales (cf. lettre de mission en annexe).

Dans le cadre de l’instruction, des entretiens ont eu lieu, en administration centrale, avec le directeur de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles (DMDTS) et le secrétaire général de la DMDTS, le secrétaire général adjoint de la DMDTS.

Pour l’examen de l’attribution des aides en services déconcentrés, les contrôles ont porté sur quatre régions, identifiées lors de l’entretien préalable avec le rapporteur spécial du budget du programme « Création » : Bretagne, Nord Pas-de-Calais, Poitou-Charentes, Rhône-Alpes. Les crédits d’intervention gérés par les quatre directions régionales des affaires culturelles (DRAC) concernées s’élèvent à 70 M€, soit un quart des dépenses d’intervention de l’ensemble des DRAC en faveur du spectacle vivant.

Les diligences sur place, sur une ou deux journées, ont permis de rencontrer les agents de la DRAC directement concernés par le sujet, et notamment les directeurs régionaux et conseillers sectoriels. Dans chacune des DRAC, dix dossiers relatifs à des scènes ou équipes artistiques ont été étudiés afin d’examiner les modalités d’attribution des aides, les conventions passées avec l’État, l’évaluation de leurs activités. Au total, ce sont donc 10 % des dossiers traités par les quatre DRAC qui ont été examinés par les rapporteurs de la Cour.

Deux agences régionales dédiées au spectacle vivant, cofinancées par l’État et le conseil régional, en Poitou-Charentes et en Rhône-Alpes, ainsi que six lieux ou équipes artistiques actuels ou anciens bénéficiaires de subventions de l’État, ont également été rencontrés.

INTRODUCTION

Le droit français ne définit pas directement le spectacle vivant. C’est l’encadrement des conditions de travail dans ce secteur d’activité qui a conduit le législateur à définir cette notion.

Le spectacle vivant a d’abord été défini par l’ordonnance du 13 octobre 1945 relative aux spectacles, inchangée depuis et reprise à l’article L. 7122-1 du code du travail : «Les dispositions de la présente section s'appliquent aux entrepreneurs de spectacles vivants qui, en vue de la représentation en public d'une œuvre de l'esprit, s'assurent la présence physique d'au moins un artiste du spectacle percevant une rémunération».

Trois éléments caractérisent ainsi le spectacle vivant en droit français :

- la représentation d’une œuvre de l’esprit ;

- la présence d’un public ;

- la présence physique d’au moins un artiste rémunéré.

La qualification de spectacle « vivant » s’oppose en outre au terme « enregistré » et renvoie aux conditions dans lesquelles le spectacle est diffusé.

Le rapport Latarjet5 rappelle combien toute tentative de définir – et par la même de circonscrire – le spectacle vivant doit être abordée avec prudence, tant les évolutions en la matière sont nombreuses. « Au regard de la notion historique des arts représentés sur la scène d’un théâtre rassemblant un public, il faut considérer de nos jours une réalité plus large. Celle-ci se caractérise notamment par un foisonnement de disciplines et de formes – inédites ou en profond renouveau, telles le cirque contemporain, le théâtre de rue, les marionnettes, les musiques amplifiées –, des espaces et des lieux de représentation – la piste et le chapiteau, la rue, l’entreprise, l’appartement, l’école –, des acteurs professionnels ou amateurs, des ambitions artistiques ou sociales. »

Le présent rapport inclut dans la définition du spectacle vivant les disciplines suivantes :

- le théâtre,

- la danse,

- la musique (acoustique et amplifiée),

- le cirque,

- les arts de la rue.

Sur le plan budgétaire, il inclut dans son périmètre l’ensemble des crédits d’intervention, centraux et déconcentrés, consacrés par le ministère de la culture et de la communication au spectacle vivant, hors opérateurs, enseignement et pratiques amateurs. Cet ensemble a représenté en 2008 un montant de 356,1 millions d’euros correspondant aux crédits d’intervention de l’action n° 1 du programme 131 « Création » (rattaché à la mission culture). Un tel périmètre conduit à exclure de l’analyse les subventions pour charges de service public accordées aux grands opérateurs nationaux du spectacle vivant6, qui ne relèvent pas des crédits d’intervention.

Au sein des dépenses d’intervention de la mission culture (802,4 M€ en 2008), celles consacrées au spectacle vivant (44,4 % du total) ont crû de manière significative et constante depuis 2000 (+18,8 %), mais à un rythme néanmoins inférieur à celui des autres dépenses d’intervention du ministère (21,4 %). La déconcentration de ces crédits budgétaires a elle aussi progressé, atteignant un taux de 84 % en 2008.

Tableau n° 1 : Évolution des dépenses d’intervention accordées par l’État au spectacle vivant (en € courants)

en € courants

2000

2002

2004

2006

2008

2008 / 2000

Crédits d'intervention spectacle vivant

299 700 000

307 220 000

338 250 000

342 200 000

356 100 000

18,8 %

dont crédits centraux

68 040 000

62 410 000

56 250 000

54 120 000

57 450 000

-15,6 %

dont crédits déconcentrés

231 660 000

244 810 000

282 000 000

288 080 000

298 650 000

28,9 %

Taux de déconcentration des crédits d'intervention SV

77,3 %

79,7 %

83,4 %

84,2 %

83,9 %

-

Crédits d'intervention du MCC

661 140 000

673 940 000

682 050 000

765 740 000

802 415 000

21,4 %

Part des crédits d'intervention SV dans les crédits d'intervention MCC

45,3 %

45,6 %

49,6 %

44,7 %

44,4 %

-

Source : Mission d’audit de modernisation pour les données 2000 à 2004, RAP 2006 et 2008.

Tableau n° 2 :  Parts respectives d’investissement et de fonctionnement dans les dépenses d’intervention accordées par l’État au spectacle vivant (en €)

 

2005

2006

2007

2008

2008 / 2005

 

Montant

Montant

Montant

Montant

 

Crédits déconcentrés

279 920 000

288 080 000

287 510 000

298 650 000

6,7 %

dont fonctionnement

262 295 000

269 760 000

268 330 000

269 970 000

2,9 %

dont investissement

17 625 000

18 320 000

19 180 000

28 680 000

62,7 %

Crédits centraux

56 410 000

54 128 804

56 190 000

57 450 000

1,8 %

dont fonctionnement

-

52 850 000

53 810 000

50 820 000

-

dont investissement

-

1 278 804

2 380 000

6 630 000

-

Total

336 330 000

342 208 804

343 700 000

356 100 000

5,9 %

Source : loi de règlement 2005, RAP 2006 à 2008.

De ces crédits ont toutefois été écartées, dans le cadre de ce rapport, les dépenses d’investissement (35,3 M€ dont 28,7 M€ en déconcentré), dont les modalités d’attribution s’inscrivent dans un cadre pour partie interministériel (CPER), ainsi que certaines dépenses assez hétérogènes de fonctionnement gérées en administration centrale (représentant au total 40 M€). Le présent rapport s’en tient par conséquent aux seules dépenses centrales et déconcentrées de fonctionnement visant directement à soutenir soit des équipes artistiques du spectacle vivant, soit des structures (des « lieux ») permettant l’accueil de ces équipes et la représentation publique de leurs spectacles. Les crédits correspondants, très largement déconcentrés, se sont élevés à 280,6 M€ en 2008.

Tableau n° 3 : Évolution des dépenses d’intervention examinées dans le cadre du présent rapport (2006-2008, en M €).

 

2006

2007

2008

2008/2006

Dépenses d'intervention (fonctionnement) déconcentrées

269,76

268,33

269,97

0,1 %

dont aides aux structures de création-production

123,15

122,29

123,85

0,6 %

dont aides aux structures de diffusion

80,04

77,96

78,60

-1,8 %

dont aides aux autres structures de création et de diffusion

20,60

21,63

23,31

13,2 %

dont aides aux équipes artistiques

45,97

46,45

44,21

-3,8 %

Dépenses d'intervention (fonctionnement) centrales

11,13

11,55

10,62

-4,6 %

dont aides aux équipes indépendantes

6,98

7,34

7,88

12,9 %

dont aides à la création et à la diffusion (commissions nationales)

4,15

4,21

2,74

-34,0 %

Total des dépenses d'intervention du périmètre d'étude

280,89

279,88

280,59

-0,1 %

Source : RAP 2006 à 2008

En regard de ces montants, le ministère de la culture dispose de données partielles concernant les financements alloués par les collectivités territoriales au spectacle vivant (cf. partie III) qui, sans être exhaustives, permettent de conclure que ces dépenses sont nettement plus importantes que les dépenses d’intervention de l’État. Une étude publiée en mars 2009 par le département des études, de la prospective et des statistiques du ministère de la culture indique ainsi que les dépenses culturelles des principales collectivités territoriales (Communes de plus de 10 000 habitants et leurs groupements, Départements, Régions) s’élevaient en 2006 à près de 7 milliards d’euros. Dans cette enveloppe, dont sont exclues la plupart des communes françaises7, les dépenses de fonctionnement relatives au spectacle vivant représenteraient 2,9 milliards d’euros, soit dix fois le budget dont disposent les DRAC en la matière sur tout le territoire8. Par ailleurs, la DMDTS a indiqué dans sa réponse que de nombreux coûts directs des structures du spectacle vivant sont pris en charge par les collectivités territoriales et ne peuvent être identifiés au sein du budget de ces collectivités. Ces dépenses ne figurent en outre pas dans les comptes des organismes bénéficiaires, de sorte qu’il s’avère très difficile d’évaluer correctement le soutien apporté par les collectivités territoriales au spectacle vivant.

Après avoir rappelé les objectifs de l’action n° 1 du programme 131 « soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant », le présent rapport présentera le dispositif adopté par l’État pour structurer l’attribution de subventions au secteur du spectacle vivant (partie I). Dans un second temps, les critères et modalités d’attribution de ces subventions seront analysés, tant en administration centrale qu’à l’échelon déconcentré (partie II). Il apparaîtra ensuite que l’État ne tient que peu de compte des autres ressources, pourtant majoritaires, du secteur (partie III). Enfin, les résultats de sa politique en matière de spectacle vivant s’avéreront difficiles à cerner (partie IV).

UNE STRATÉGIE RECEMMENT INFLECHIE, INSCRITE DANS UN CADRE D’INTERVENTION COMPLEXE

L’ÉTAT CONCENTRE SES OBJECTIFS SUR LE RENFORCEMENT DES BASES ECONOMIQUES ET PROFESSIONNELLES DU SECTEUR

Les aides de l’État au spectacle vivant s’inscrivent dans le cadre d’une stratégie forgée pour l’essentiel lors de la constitution du ministère de la culture et visant à développer la création et à permettre un accès plus large, sur tout le territoire, au spectacle vivant. Cette politique de soutien à la création constamment réaffirmée depuis 50 ans a produit d’indéniables résultats. Mais la vitalité qui caractérise la création dans le domaine du spectacle vivant est aussi, dans un contexte de forte contrainte budgétaire, ce qui menace le dispositif visant à la soutenir. C’est pourquoi l’État a récemment réorienté sa stratégie sur la structuration9 économique et professionnelle du secteur et, dans une moindre mesure, sur la diffusion.

Un ensemble d’objectifs, de la création à la diffusion des spectacles

Depuis la création du ministère de la culture, la politique de l’État en faveur du spectacle vivant vise à stimuler la création et à favoriser le développement de l’offre de spectacle sur l’ensemble du territoire.

Aux termes des attributions du Ministre de la culture et de la communication, la politique culturelle de l’État poursuit trois principaux objectifs10 :

- « rendre accessibles au plus grand nombre les œuvres capitales de l’humanité et d’abord de la France » ;

- « favoriser la création des œuvres d’art et de l’esprit » ;

- « développer les pratiques artistiques ».

En matière de spectacle vivant, ces objectifs se traduisent par trois axes principaux d’intervention : la création, la diffusion, l’économie des professions culturelles.

Assurer le soutien à la création et à l’innovation

L’État entend favoriser l’émergence des équipes artistiques pour renouveler le processus de création et améliorer la qualité des œuvres. Économiquement, l’intervention de l’État est ici légitimée par :

- la structure des coûts de production d’un spectacle : en règle générale, la part des coûts fixes dans la production d’un spectacle vivant est très élevée : les dépenses engagées pendant la phase de création (rémunération des équipes pendant les répétitions, achat de matériel) ne peuvent être amorties que pendant la phase d’exploitation ; il en résulte un fort besoin de trésorerie en phase de création ;

- l’aléa, particulièrement fort dans le domaine du spectacle vivant, qui se traduit souvent par une carence du marché (les spectacles ne sont pas financés car ils emportent trop de risques financiers) ou par un phénomène d’antisélection (les spectacles sont financés en raison de la réputation des équipes artistiques mais non de la qualité intrinsèque du travail). En se substituant au marché, l’État provoque, au stade la création, une demande artificielle qui permet de financer la production des spectacles ; en outre, l’État envoie un signal de qualité aux structures de diffusion.

L’objectif de soutien à la création est particulièrement présent dans le corpus juridique encadrant l’action de l’État en matière de spectacle vivant. Les circulaires relatives aux différents dispositifs d’aide aux équipes artistiques précisent ainsi que les dispositifs mis en œuvre visent à :

- créer une nouvelle dynamique en faveur de la production théâtrale, favoriser l’émergence de nouveaux talents et permettre la réalisation de projets ambitieux11,

- soutenir des projets et des équipes artistiques qui, sur l’ensemble du territoire, contribuent au développement de la création et de l’innovation en musique12,

- soutenir la création chorégraphique indépendante d’intérêt national sur l’ensemble du territoire13.

Donner des bases économiques et professionnelles solides au secteur

Les données les plus contradictoires circulent sur le poids du spectacle vivant dans l’économie française. Les sources les plus fiables émanent du rapport Latarjet, citant lui-même le rapport d’activité pour 2002 du ministère de la culture et de la communication. D’après ces sources, « le spectacle vivant représente 25 millions d’entrées par an, 3 000 équipes artistiques et plus de 90 000 personnes (hors industries culturelles). » Les données collectées au cours du contrôle dans les régions visitées tendent à indiquer que le nombre d’équipes artistiques a fortement crû depuis 2002.

Eu égard au poids économique du secteur, d’une part, et dans la continuité de la politique de soutien à l’emploi, d’autre part, l’État poursuit un objectif de structuration économique du secteur du spectacle vivant. L’enjeu est d’abord celui de rendre possibles la création et la diffusion de spectacles par des lieux ou des équipes artistiques qui ne pourraient pas atteindre l’équilibre économique sans un apport financier extérieur.

Dans ce contexte, le dispositif d’aides publiques aux structures répond à des enjeux spécifiques. Économiquement, ce dispositif comporte trois fondements. Il repose, d’une part, sur l’efficience présumée de ces structures, capables de créer ou de diffuser plusieurs spectacles au cours d’une année, ce qui conduit à une diminution des coûts de production et des coûts de transaction. D’autre part, la croissance de l’aide publique est rendue nécessaire par l’existence d’un effet de ciseau, mis en évidence par les économistes américains William Baumol et William Bowen (loi de Baumol) :

- l’absence d’innovation technologique dans les structures de création et de diffusion du spectacle vivant ne permet pas à ces structures de bénéficier de gains de productivité ;

- les charges fixes de ces structures, essentiellement liées à la rémunération des personnels artistiques et techniques, augmentent dans les mêmes proportions que ceux des autres secteurs économiques dont le dynamisme est assuré par l’existence de gains de productivité.

Enfin, les aides aux structures de diffusion ont vocation à améliorer l’efficacité des aides à la création. Les diffuseurs ont en effet tendance à coproduire des spectacles aidés :

- l’effet de levier des aides à la création est alors amplifié ;

- l’augmentation du nombre de représentations conduit à un meilleur amortissement du coût fixe de production.

Par ailleurs, l’action de l’État s’inscrit dans une logique de pérennisation. L’économie du spectacle vivant est en effet une économie de projet : la valeur est créée, diffusée, puis disparaît. L’aide apportée par l’État vise à encourager, sur la durée, les activités de création et de diffusion de lieux et d’équipes artistiques, de manière à garantir à ces différents acteurs la stabilité nécessaire à l’exercice de leur activité. Simultanément, l’État accompagne les évolutions du régime spécifique d’indemnisation du chômage des artistes, régime dont l’analyse dépasse le cadre de la présente étude mais dont le devenir constitue l’un des aspects les plus essentiels à prendre en compte dans la réorganisation des soutiens à ce secteur (cf. annexe IV).

Les circulaires relatives aux différents dispositifs d’aide aux équipes artistiques précisent ainsi que les dispositifs mis en œuvre visent à :

- « accompagner les équipes artistiques dans les évolutions de leur parcours », « consolider le statut de certaines compagnies dans un cadre contractuel, qui devra être régulièrement évalué de manière à ne pas figer des situations acquises »,

- « accompagner la structuration et la pérennisation d’équipes déjà porteuses d’un propos artistique identifié et dont les capacités de diffusion se développent sur le plan national et, le cas échéant, international »,

- « contribuer au soutien des compagnies indépendantes et des ensembles musicaux, en provoquant des opportunités de diffusion, de coproduction, de résidences »,

- « concourir à la stabilisation du fonctionnement des structures (recrutement des personnels et pérennisation des emplois créés) ».

Favoriser la diffusion des œuvres

Le soutien à la diffusion vise à faciliter la transformation de l’œuvre artistique en produit culturel, susceptible d’être échangé sur un marché.

Formulé par l’État, l’objectif de diffusion comporte quatre composantes :

- fournir un débouché aux équipes artistiques, indispensable à leur équilibre économique ;

- garantir, en tout point du territoire, l’accès à une offre de spectacles de qualité,

- permettre la démocratisation culturelle en rendant les œuvres accessibles,

- maintenir, voire accroître, quantitativement et qualitativement, la fréquentation du spectacle vivant.

Ces trois enjeux sont intrinsèquement liés dans les textes, comme le reflète la porosité entre le programme 131 « Création » et le programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation culturelle ». La proximité de l’objectif de diffusion avec l’objectif global de démocratisation culturelle, porté par un programme budgétaire spécifique (le programme 224), a conduit à recentrer l’objectif de diffusion sur la circulation des œuvres et la fréquentation des infrastructures à partir de 2006.

Un objectif de soutien a la création largement atteint, au prix d’une augmentation constante des dépenses d’intervention

Une offre abondante et territorialement mieux répartie qu’il y a vingt ans

La croissance de l’offre de spectacle vivant est manifeste sur une longue période. À cet égard, le rapport Latarjet a mis en évidence les éléments suivants :

- au cours de la période 1994-2004, la population des comédiens est passée de 12 000 à 25 000 personnes, réparties au sein de 1 500 compagnies dramatiques. Entre 1980 et 2000, la France a vu le nombre de ses musiciens multiplié par quatre pour atteindre un total de 25 000 interprètes. La population des danseurs est quant à elle estimée à 5 000 interprètes. La DMDTS indique ainsi14 que « la politique en faveur de l’émergence et de la lisibilité de toutes les esthétiques (…) a encouragé la vitalité du spectacle vivant qui s’est traduite notamment par le fort développement du nombre de compagnies et d’ensembles et du nombre de spectacles, avec dans le domaine du théâtre une présence renforcée des créations d’auteurs vivants. Cependant un risque d'étouffement menace aujourd’hui la production, si l’offre devenait surabondante » ;

- sur le plan territorial, la répartition des aides accordées par les DRAC présente des disparités persistantes mais tend à correspondre à celle des populations. Chaque région métropolitaine est ainsi aujourd’hui dotée d’au moins un centre dramatique national (à l’exception de la Picardie) ; les deux tiers des départements accueillent une scène nationale.

Répartition régionale du soutien des DRAC au spectacle vivant par habitant en 2006

Région

€ / hab

 

Région

€ / hab

Alsace

8,20

 

Limousin

7,24

Aquitaine

3,67

 

Lorraine

4,72

Auvergne

4,15

 

Martinique

3,29

Basse-Normandie

4,42

 

Midi-Pyrénées

5,25

Bourgogne

4,85

 

Nord - Pas-de-Calais

4,15

Bretagne

4,37

 

Pays de la Loire

4,16

Centre

4,45

 

Picardie

2,42

Champagne-Ardenne

4,14

 

Poitou-Charentes

6,53

Franche-Comté

5,66

 

PACA + Corse

5,87

Guadeloupe

2,06

 

Réunion

2,55

Guyane

1,93

 

Rhône-Alpes

6,18

Haute-Normandie

5,14

 

TOTAL

5,32

Île-de-France

6,94

 

Ecart-type

1,58

Languedoc-Roussillon

5,65

     

Source : DMDTS, cartographie nationale du spectacle vivant.

Il est en revanche avéré que les crédits de l’État sont principalement absorbés par les grands organismes, réseaux et institutions conventionnés et que, ceux-ci étant installés dans les principales villes de chaque région, les DRAC peinent à dégager des moyens pour l’aménagement et le renforcement du tissu culturel sur l’ensemble du territoire régional. Il y a là un facteur d’inégalité dont la responsabilité n’incombe toutefois pas principalement à l’État, mais qui pourrait le conduire à mener une action plus incitative à l’égard des collectivités territoriales.

Une dynamique de financement préoccupante dans le contexte budgétaire actuel

En ouverture des entretiens de Valois, le DMDTS indiquait que « depuis 2000, l’État a accru ses concours au spectacle vivant de 100 m€ hors inflation, soit plus de 5 % chaque année en moyenne, aujourd’hui 640 m€15. Les collectivités locales, qui financent près des trois-quarts des dépenses liées au spectacle vivant en région, ont quant à elles amplifié ce mouvement : + 12 % pour les villes sur la période, et plus encore pour les régions dont le niveau de départ était plus faible16 ».

Il ajoutait que « ces augmentations [de crédits] pourtant largement supérieures au rythme d’évolution des autres budgets publics, n’ont cependant pas pu suivre l’accroissement mécanique des dépenses, et la multiplication des lieux aidés et des équipes. C’est ce qui explique le sentiment d’asphyxie budgétaire parfois dénoncé. (…) Les perspectives des années à venir vont sans doute conforter cet effet de ciseaux, entre le dynamisme de la dépense, et la stabilisation des financements publics. Le cadrage du budget de l’État s’établit en effet globalement à 0 % dans le contexte de la révision générale des politiques publiques. Des choix seront inéluctables ».

Le chiffre de 640 M€ montre que les propos du DMDTS visaient l’ensemble des crédits de l’action 1 du programme 131 « Création », y compris ceux correspondant aux subventions pour charges de service public accordées aux opérateurs nationaux – qui ont très fortement progressé au cours de la période, passant de 201 M€ en 2000 à 287 M€ en 2008 (+ 42,8 %).

Il reste que les crédits d’intervention de cette même action n° 1 ont significativement augmenté au cours de la même période, passant de 300 M€ en 2000 à 356 M€ en 2008 (+ 18,7 %).

Le mécanisme de formation de l’offre trouve sa source en dehors du financement par l’État du programme 131

Une étude conduite par l’agence régionale du spectacle vivant en Poitou-Charentes17 met en évidence que l’accès des artistes au « statut professionnel » s’effectue souvent par la voie de la création d’activité c'est-à-dire essentiellement la création d’une compagnie, d’un groupe ou d’une structure sous forme de gestion associative. La création d’activité, indique cette étude, vise le plus souvent à ouvrir droit au CDD d’usage et par conséquent, dès lors que les seuils sont atteints, au régime de l’intermittence, mais vise aussi, plus simplement, à obtenir des ressources pour le projet artistique.

Dans ce cadre, la recherche de financement s’effectue par paliers, de l’échelon communal jusqu’à l’État, l’octroi d’une subvention par ce dernier étant perçu comme une reconnaissance, voire une consécration.

C’est ainsi l’existence du régime de l’intermittence et la faculté de mobiliser des ressources publiques à l’échelon local qui constituent le terreau de la croissance de l’offre.

La croissance de l’emploi dans les professions du spectacle

« En effet, la croissance de l’emploi dans les professions du spectacle progresse plus rapidement que celle des autres professions.

Par ailleurs, l’analyse des données de la Caisse des congés spectacles permet de mesurer la croissance de l’emploi intermittent depuis 1986. Elle confirme que ce dernier est le vecteur principal de la progression de l’emploi.

- Le déséquilibre entre l’offre et la demande d’emploi se confirme pour les salariés intermittents.

Le volume de travail n’augmente pas dans les mêmes proportions que les effectifs de salariés intermittents, ce qui fragilise des situations individuelles.

- Le nombre d’entreprises du spectacle continue d’augmenter.

- Une profession avec un profil socio-démographique spécifique.

En effet, il existe au sein des professions du spectacle une surreprésentation des hommes, des diplômés, des jeunes et une forte concentration de l’emploi en Ile-de-France. On note cependant deux observations nouvelles : une tendance au vieillissement et une répartition de l’emploi moins concentrée en Ile-de-France.»

Agence régionale du spectacle vivant, Les conditions économiques et d'emploi des salariés du spectacle vivant en Poitou-Charentes, 2007.

À l’occasion des entretiens de Valois, la directrice des affaires culturelles de la Ville de Paris a d’ailleurs souligné qu’un jeune artiste a plus de facilité à monter son propre spectacle qu’à trouver du travail et que le résultat des politiques publiques d’encouragement à la création est ainsi la surproduction et le foisonnement des compagnies et des lieux.

Au cours de la période 2005-2008, l’État a recentré ses objectifs

La structuration professionnelle du secteur est désormais prioritaire

La directive nationale d’orientation (DNO) pour 2005 impose prioritairement de « favoriser l’emploi et le développement de la professionnalisation », en particulier dans le domaine du spectacle vivant. Il incombe notamment à l’instance régionale instaurée dans le cadre du plan national en faveur de l’emploi dans le secteur du spectacle vivant (la commission régionale des professions du spectacle), de « travailler dans un premier temps sur l’économie des compagnies et des ensembles subventionnés (...), dans la perspective d’une meilleure prise en compte de l’emploi artistique (notamment par une utilisation appropriée du régime de l’intermittence), mais aussi des emplois administratifs et techniques de ces structures ». La DNO pour 2006 insiste encore sur la participation de l’emploi culturel à la politique de soutien à l’emploi et à la formation professionnelle, les financements publics devant être « davantage liés aux conditions d’emploi des artistes et techniciens ». Cette orientation a été reconduite pour les années 2007 et 2008.

Le recentrage des aides de l’État sur le soutien à la professionnalisation se traduit logiquement dans les projets annuels de performance (PAP) et les rapports annuels de performance (RAP) annexés au projet de loi de finances à partir de 2006. Ainsi, en 2006, le soutien à l’emploi culturel apparaissait comme l’un des six objectifs du PAP relatif au programme 131 « Création », l’enjeu étant de « maintenir et développer la qualité de l’environnement de travail des artistes exposés à une précarité due à un environnement économique et social qui ne peut intégrer les particularités de fonctionnement de ces métiers ».

En 2005, aucun indicateur ne traduisait, dans les documents budgétaires, la structuration professionnelle du spectacle vivant. De tels indicateurs sont apparus en 2006 (taux d’entrée et de sortie des compagnies et des ensembles dans les dispositifs d’aide, place de la rémunération des artistes dans les structures subventionnées). À partir de 2008, l’indicateur mesurant la place de la rémunération des artistes dans les structures subventionnées est calculé sur trois années, de manière à prendre en compte l’objectif d’allongement de la durée d’embauche des artistes interprètes.

Le renforcement de la diffusion : un objectif affiché dont la traduction budgétaire est cependant incertaine

La volonté de soutenir prioritairement la diffusion est manifeste dans les directives nationales d’orientation

La diffusion apparaît comme un objectif persistant des directives nationales d’orientation (DNO) entre 2005 et 2008. Le renforcement de cet objectif répond au constat du faible nombre de représentations de chaque spectacle dont la création est aidée, phénomène défavorable aux efforts de structuration du secteur. Le rapport Latarjet relève ainsi qu’un spectacle est représenté en moyenne sept fois dans un centre dramatique national et à peine trois fois dans une scène nationale. La DMDTS confirme dans sa réponse à la Cour l’insuffisante diffusion des spectacles aidés par l’Etat en précisant toutefois que la diffusion moyenne des spectacles des compagnies de théâtre, d’arts du cirque et d’arts de la rue est évaluée à 34,5 représentations, ce y compris les représentations données en dehors du réseau subventionné (interventions en milieu scolaire, représentations dans des théâtres de ville non subventionnés…).

La DNO pour 2005 rassemblait au sein d’un même objectif une action en faveur de la circulation des œuvres et une réflexion « sur l’évolution du spectacle vivant en région et sur la pertinence des labels, certains principes fondamentaux comme l’accessibilité de tous aux œuvres d’art et du patrimoine devant être à cette occasion réaffirmés ». Diffusion, aménagement du territoire et démocratisation culturelle étaient ainsi rassemblés sous un objectif commun : « concevoir l’art dans l’espace public comme point d’appui d’une politique prospective de développement culturel ».

La DNO pour 2007 réaffirme la nécessaire « ouverture des lieux et [le] décloisonnement notamment dans le domaine du spectacle vivant ». L’enjeu de la diffusion transparaît également dans les objectifs énoncés par la DNO au titre de la cohésion sociale : « favoriser l’accès de tous aux équipements culturels par une mise en réseau des institutions de référence et des structures culturelles de proximité », « ouvrir à la diversité des cultures et des modes d’expression le réseau des équipements investis d’une mission de service public ».

Dans un contexte de restriction budgétaire, la DNO pour 2008 stabilise le financement des lieux considérés en première approche comme des lieux de diffusion. Ainsi, « en matière de diffusion pluridisciplinaire, l’ensemble des scènes nationales constitue une armature essentielle sur le territoire (…). Les moyens consacrés à ces réseaux sont globalement préservés ».

Les traductions budgétaires de cette évolution sont moins claires

La volonté affichée par le ministère de la culture d’aider la diffusion des œuvres n’est pas corroborée par l’évolution des crédits accordés aux structures et lieux de diffusion (-0,6 %). Néanmoins, cette évolution peut être trompeuse, la distinction entre lieux de création-production et lieux de diffusion n’étant pas dépourvue d’ambigüité (cf. infra).

Dans ces conditions, l’analyse quantitative des crédits budgétaires ne permet pas, à elle seule, de déterminer si l’effort de diffusion revendiqué par le ministère est effectif.

Dépenses d’intervention alloués par l’ensemble des DRAC aux structures et équipes artistiques, hors investissement (2005-2008, en €).

 

2005

2006

2007

2008

2008 / 2005

 

Montant

Montant

Montant

Montant

Structures de création-production

120 377 000

123 150 000

122 290 000

123 850 000

2,9 %

Opéras

25 093 000

26 150 000

26 270 000

26 840 000

7,0 %

Orchestres

22 104 000

23 260 000

23 400 000

22 590 000

2,2 %

CDN et CDR

57 161 000

57 780 000

56 420 000

57 340 000

0,3 %

CCN

13 465 000

12 780 000

12 740 000

14 060 000

4,4 %

Centres de création musicale

2 554 000

3 180 000

3 460 000

3 020 000

18,2 %

Structures et lieux de diffusion

79 075 000

80 040 000

77 960 000

78 600 000

-0,6 %

Scènes nationales

48 671 000

51 220 000

49 760 000

50 360 000

3,5 %

Scènes conventionnées

10 206 000

9 900 000

9 680 000

9 810 000

-3,9 %

SMAC

8 353 000

8 230 000

8 550 000

8 990 000

7,6 %

Festivals

11 845 000

10 690 000

9 970 000

9 440 000

-20,3 %

Autres lieux de production et de diffusion

17 559 000

20 600 000

21 630 000

23 310 000

32,8 %

Equipes artistiques

45 284 000

45 970 000

46 450 000

44 210 000

-2,4 %

Total

262 295 000

269 760 000

268 330 000

269 970 000

2,9 %

Source : loi de règlement 2005, RAP 2006, 2007, 2008 du programme 131

L’AIDE DE L’ÉTAT AU SPECTACLE VIVANT REPOSE SUR UN DISPOSITIF COMPLEXE

Pour atteindre ses objectifs, l’État intervient aux différentes étapes-clés du processus qui régit tout spectacle vivant : conception de l’œuvre, création par une équipe artistique, indépendante ou hébergée dans un lieu de création, et diffusion dans les lieux adaptés.

L’État s’appuie à cet effet sur un dispositif d’aides majoritairement orienté vers les lieux artistiques (près de 70 % des crédits d’intervention au spectacle vivant en 2008) et, secondairement, vers les équipes artistiques (30 % des crédits d’intervention au spectacle vivant en 2008). Cette action s’inscrit à deux niveaux :

- au niveau central : la DMDTS aide directement certaines équipes artistiques ;

- au niveau déconcentré : les DRAC assurent la gestion de la majorité des aides de l’État, en direction des lieux de création et de diffusion et des équipes artistiques.

En marge de ce dispositif, l’action menée par l’office national de diffusion artistique (ONDA) mérite d’être soulignée. Association subventionnée par l’État à hauteur de 3,4 millions d’euros en 2008 (dont 3,2 millions d’euros portés par le programme 131 création), l’ONDA relaie la politique de soutien à la diffusion du spectacle vivant en accordant des garanties financières aux lieux artistiques qui achètent des spectacles pour les diffuser. L’ONDA a consacré 2,5 millions d’euros à cette activité en 2008 (61 % de son budget) en intervenant auprès de 326 structures de diffusion et en contribuant ainsi à la diffusion de 767 spectacles pour un total de 2 544 représentations.

La nature des aides versées par l’ONDA – des garanties financières en cas de pertes d’exploitation et non pas des aides directes – ainsi que le périmètre des bénéficiaires – une partie non négligeable des lieux artistiques sont aidés pour permettre la diffusion de spectacles étrangers – excluent toutefois cet organisme du champ de la présente étude.

Les structures subventionnées par l’État ont souvent une double mission de création et de diffusion

Sur le plan budgétaire, l’aide aux structures est prépondérante et absorbe près de 70 % des crédits d’intervention. Les aides accordées s’inscrivent essentiellement dans le cadre de dix labels définis par l’État (cf. tableau n° 6 ci-dessous et annexe 5 pour une présentation détaillée des labels) et du programme des scènes conventionnées.

L’octroi d’un label par l’État détermine un cahier des charges des missions et obligations pesant sur les organismes bénéficiaires des subventions. Chaque label se voit dans ce cadre attribuer une mission principale et des missions associées.

Labels du spectacle vivant : missions, nombre de structures et montants alloués.

Labels

Mission principale

Missions associées

Nombre de structures

Montant alloué en 2008 (M €)

Théâtre, arts de la rue, cirque

Centres dramatiques

Création et production dans le domaine dramatique.

Diffusion, action régionale, initiation au théâtre.

39

57,3

Centres nationaux des arts de la rue

Soutien à la création.

Rencontre entre démarches artistiques, populations et territoires.

Collecte de ressources, formation et sensibilisation.

10

3,3

Pôles nationaux des arts du cirque

Soutien à la création.

Accompagnement et structuration de la profession.

Élargissement de la diffusion des arts du cirque.

Sensibilisation des publics.

12

1,5

Musique

Maisons d’opéras

Production de spectacles lyriques.

Pour les opéras nationaux : insertion professionnelle des jeunes artistes, diffusion en région, sensibilisation.

12

26,8

Orchestres permanents

Permettre l’accès à la connaissance des œuvres musicales pour le plus grand nombre.

Missions lyriques en lien avec les maisons d’opéras des villes sièges.

22

22,6

Centres nationaux de création musicale

Création et diffusion d’œuvres musicales nouvelles

Sensibilisation au répertoire contemporain.

Action en milieu pédagogique.

Recherche en informatique musicale.

7

3

Scènes de musiques actuelles

Diffusion.

Production.

Accueil des publics.

Création.

Formation.

Action culturelle.

134

9

Danse

Centres chorégraphiques nationaux

Création et production de spectacles chorégraphiques.

Pour tous les CCN :

- soutien à la production de compagnies indépendantes,

- actions en milieu pédagogique, sensibilisation à la danse,

- formation professionnelle.

Pour 11 CCN : diffusion.

19

14

Centres de développement chorégraphique

Relations avec les publics / action culturelle et éducative.

Création.

Diffusion.

Connaissance, recherche.

9 8

1,5

Scènes pluridisciplinaires

Scènes nationales

Diffusion et confrontation des formes artistiques en privilégiant la création contemporaine.

Production artistique de référence nationale dans les divers domaines de la culture contemporaine.

Développement culturel.

70

50,36

Source : données DMDTS, RAP 2008

À ces labels s’ajoute le programme des scènes conventionnées, structures aidées par l’État non pas au titre de leur fonctionnement mais sur des projets ponctuels. On dénombre actuellement 111 scènes conventionnées pour un montant global d’aides de 9,8 millions d’euros. Les aides accordées par l’État aux scènes conventionnées poursuivent principalement les objectifs d’aménagement culturel, de diffusion des œuvres et des disciplines insuffisamment valorisées, de soutien aux compagnies indépendantes et de sensibilisation des publics.

L’encadrement réglementaire des aides aux structures est limité, du fait de la rareté des textes généraux : 7 labels sur 10 ne sont encadrés par aucun texte spécifique (cf. annexe 9). Seuls les centres dramatiques, les scènes nationales, les scènes conventionnées et les scènes de musiques actuelles sont encadrés par des textes spécifiques. Parmi ces structures, seuls les centres dramatiques sont régis par un décret.

Aucune répartition précise n’est opérée entre les missions de création et de diffusion, qui correspondent pourtant à deux objectifs distincts de l’État en matière de spectacle vivant. À titre d’exemple :

- les structures et lieux dits de diffusion ont une action qui dépasse en réalité la seule diffusion ; il apparaît qu’une part significative de l’activité des scènes nationales, des scènes conventionnées et des festivals est consacrée à la production et à la création (cf. annexes 5 et 8), par le biais de résidences d’artistes, de coproductions ou de préachats ;

- la plupart des scènes de musiques actuelles (SMAC) ont, en plus de leur mission première de diffusion, une activité de production significative (cf. annexe 8) ;

- la diffusion des spectacles est également assurée par les structures de création-production, dont les crédits sont stables sur la période ; ainsi, les centres dramatiques sont tenus d’accueillir, en l’espace d’une saison, au moins cinq spectacles produits par des compagnies indépendantes ou des scènes nationales. D’autres structures répertoriées comme des lieux de création encouragent également la diffusion, comme les CCN ou les maisons d’opéra (cf. annexe 8) ;

- la catégorie des « autres lieux de production et de diffusion » comprend un ensemble hétérogène de structures, dont l’activité mêle création et diffusion, à l’image des pôles cirque et des centres nationaux des arts de la rue (cf. annexe 8)18.

Les textes, lorsqu’ils existent, sont peu contraignants. Seuls les textes réglementaires relatifs aux centres dramatiques19 contiennent par exemple des obligations chiffrées : l’arrêté du 23 février 1995 fixant le contrat-type de décentralisation dramatique impose aux centres dramatiques la production ou la coproduction majoritaire d’au moins deux spectacles par an, un nombre minimum (en général 240) de représentations dans la zone d’implantation sur la durée du contrat, l’accueil d’au moins cinq spectacles par saison produits par des compagnies indépendantes ou des scènes nationales.

L’État dispose cependant de moyens de contrôle de l’activité des lieux subventionnés. Pour chaque label, les structures sont en principe liées avec l’État par une démarche de contractualisation. Depuis 2007, les documents budgétaires annexés aux lois de finance comportent d’ailleurs un indicateur relatif au taux de conventionnement des structures bénéficiant d’une subvention de fonctionnement.

Concernant le financement des structures, les crédits sont fortement déconcentrés en DRAC, avec un taux de déconcentration de près de 90 % en 2008.

Crédits centraux et déconcentrés attribués aux lieux et structures du spectacle vivant en M€.

 

RAP 2008

PAP 2009

Crédits centraux, fonctionnement des structures

23,19

23,57

dont lieux théâtraux

14,46

14,4

dont festivals

8,73

9,17

Crédits centraux, investissement

6,63

3,10

Total crédits centraux aux structures

29,82

26,67

Crédits déconcentrés, fonctionnement

225,76

276,11

Crédits déconcentrés, investissement

28,48

25,90

Total crédits déconcentrés aux structures

254,24

302,01

Taux de déconcentration des aides aux lieux artistiques (en %)

89,50

91,89

Source : PLF 2008 et LFR 2009

Les equipes artistiques beneficient d’aides à différents stades de leur DÉVELOPPEMENT

Les aides de l’État aux équipes artistiques prennent la forme de subventions versées à des compagnies ou à des ensembles qui, n’étant pas liés aux structures aidées, sont qualifiés d’indépendants (cf. annexes 6 à 8). Ces subventions poursuivent différents objectifs :

- rendre possible la réalisation d’une création ;

- structurer le développement professionnel d’une équipe artistique ;

- accompagner une compagnie pour un ensemble de projets et pour une durée limitée.

Le montant global des aides attribuées aux équipes artistiques atteint 54 millions d’euros en 2008, dont 18 % sont directement attribués par l’administration centrale.

L’objet des aides accordées par l’administration centrale diffère de celui des aides allouées par les DRAC.

Les aides aux équipes artistiques en administration centrale

La DMDTS gère chaque année un cinquième du montant total des aides accordées par l’État aux équipes artistiques. Les masses budgétaires en jeu (de l’ordre de dix millions d’euros) sont comparables au budget d’une DRAC.

Les aides attribuées aux équipes artistiques par la DMDTS se répartissent en deux catégories : les aides directement versées aux équipes indépendantes et les aides attribuées après consultation de commissions nationales.

Les modalités d’attribution de ces aides étant analysées dans les annexes 6 et 7, il n’en est ici effectué qu’une présentation succincte.

Les aides aux équipes indépendantes

Les aides aux équipes indépendantes concernent les compagnies dramatiques, chorégraphiques et les ensembles musicaux dont l’excellence artistique et la réputation sont telles que l’État soutient leur activité sur le long terme (cf. annexe 6). L’objet de ces aides ne réside pas tant dans le renouvellement de la création, ni dans la structuration économique du spectacle vivant, mais plutôt dans la volonté de donner à des artistes d’excellence les moyens de créer et de diffuser leurs œuvres. Ce dispositif est fortement concentré : il concerne 45 bénéficiaires en 2008 pour un montant global de 7,8 millions d’euros.

Les aides attribuées après consultation de commissions nationales

Les aides aux équipes attribuées après consultation de commissions nationales spécifiques sont versées, dans les domaines du théâtre, de la danse et de la musique, à des artistes n’ayant pas vocation à être aidés en DRAC, soit parce que le coût des projets est trop important, soit parce que le vivier des bénéficiaires n’est pas équitablement réparti sur le territoire (cf. annexe 7). Ce dispositif regroupe un grand nombre d’aides, dont le montant moyen est faible. Il en résulte une forte dispersion : en 2008, les aides attribuées par l’administration centrale après consultation de commissions nationales concernaient 125 bénéficiaires pour un montant global de 2,74 millions d’euros.

Les aides aux équipes artistiques en services déconcentrés

Le montant global des aides aux équipes artistiques attribuées par les services déconcentrés atteint 44,2 millions d’euros en 2008, pour 1164 équipes aidées. L’organisation de ces aides diffère selon la discipline considérée.

Dans le domaine de la musique et de la danse, les aides déconcentrées reposent sur trois niveaux d’action : des aides au projet accordées ponctuellement et spécifiquement pour la création ou la reprise d’un spectacle, des aides structurantes (« aides à la structuration » dans le domaine musical, « aides à la compagnie » dans le domaine chorégraphique), accordées à des compagnies dont le travail est remarqué et dont les capacités de création et de diffusion se développent, et des aides au conventionnement (« aides à la compagnies conventionnée » dans le domaine de la danse), accordées pour plusieurs années aux compagnies d’envergure nationale.



Dans le domaine du théâtre, l’aide structurante de niveau intermédiaire (appelée « aide annuelle ») a été supprimée à la faveur de la réforme des aides aux compagnies dramatiques en 1999. Seules l’aide au projet (appelée « aide à la production dramatique ») et l’aide au conventionnement existent aujourd’hui.

L’architecture du dispositif déconcentré d’aides aux équipes artistiques traduit directement les objectifs de l’État.

L’objectif de soutien à la création et à l’innovation se manifeste au premier étage du dispositif : dans toutes les disciplines concernées, les aides au projet concernent indifféremment les jeunes compagnies et les équipes confirmées et bénéficiant déjà d’un certain renom.

L’objectif de structuration professionnelle se traduit, dans le cas de la danse, par un chaînage entre les trois étages du dispositif d’aides : l’aide à la compagnie conventionnée est réservée aux compagnies ayant déjà bénéficié de l’aide à la compagnie, elle-même n’étant accordée qu’aux équipes ayant déjà reçu une aide au projet. Ce processus de chaînage, qui n’apparaît que dans les textes encadrant les aides à la danse, est présent dans les faits pour les ensembles musicaux.

L’objectif de diffusion apparaît dans les deux étages supérieurs du dispositif. En effet, l’aide au projet, par son montant et son objet, n’est pas utilisée par les équipes artistiques à des fins de diffusion (même si les perspectives de diffusion font partie des critères d’attribution). C’est le caractère pluriannuel de la subvention, au niveau de la structuration et du conventionnement, qui permet de soutenir la diffusion des compagnies aidées.

La DMDTS envisage de réformer le dispositif d’aides déconcentrées aux équipes artistiques, en harmonisant l’ensemble des disciplines sur le modèle de dispositif en vigueur pour le théâtre. Deux niveaux d’aides seraient ainsi distingués :

- l’aide au projet, ponctuelle, attribuée soit à une nouvelle production, soit pour prolonger la présentation au public d'une production déjà créée,

- l’aide pluriannuelle, destinée à accompagner la structuration et le développement de compagnies et ensembles professionnels. Cette aide serait accordée pour au moins deux années consécutives dans le cadre d’un conventionnement avec la DRAC.

L’ATTRIBUTION DES AIDES : UN DISPOSITIF ENCADRE MAIS PERFECTIBLE

L’attribution des aides de l’État au spectacle vivant repose sur un dispositif formalisé, au niveau central comme au niveau déconcentré. L’analyse de l’action conduite par l’État à ces deux niveaux appelle des observations différenciées. Au niveau central, le dispositif souffre d’un manque de lisibilité traduisant un suivi approximatif des aides. Au niveau déconcentré, c’est davantage la diversité des situations locales qui limite le suivi du dispositif. Aux deux niveaux d’action, la sélection opérée dans l’attribution des aides est réelle mais repose sur des critères peu objectivables.

L’ATTRIBUTION DES AIDES PAR L’ADMINISTRATION CENTRALE

Même si les crédits d’intervention attribués par l’État au spectacle vivant sont fortement déconcentrés, la DMDTS gère chaque année un cinquième du montant total des aides accordées aux équipes artistiques, soit un montant global de l’ordre de 10 M€ (cf. supra). Si l’existence d’un dispositif centralisé est justifiée soit par le volume des aides versées (trop importantes pour être gérées en DRAC), soit par le périmètre des bénéficiaires (trop restreint et trop inégalement réparti sur le territoire pour être géré en DRAC), les aides attribuées par la DMDTS présentent un certain nombre d’imperfections, tant au en ce qui concerne les critères de sélection qu’en ce qui concerne leur suivi par l’administration centrale et les restitutions présentées au Parlement. L’évaluation globale du dispositif, conduite par la DMDTS en 2008, est à l’origine de projets de réforme substantiels mais qui n’ont pas encore été mis en œuvre.

Des critères de sélection peu clairs, voire inexistants  

Le ministère de la Culture a distingué deux régimes d’aides centrales aux équipes artistiques : les aides dont la sélection n’est pas objectivée, celles-ci étant directement versées aux équipes (dites « indépendantes »), et les aides dont l’attribution est objectivée par l’existence de commissions d’experts nationales.

Les aides aux équipes indépendantes

Les critères de sélection des aides aux équipes indépendantes ne sont explicités dans aucun texte. Ce constat s’explique par l’objet-même de ces aides :

- les subventions attribuées aux anciens directeurs d’institutions dramatiques et chorégraphiques (4,8 M€ en 2008) sont systématiquement versées à chaque ancien directeur. La logique d’attribution de ces aides est étrangère à toute forme de sélection ;

- les subventions accordées par le ministère de la culture à certains artistes dans le domaine du théâtre répondent à une logique discrétionnaire, assumée comme telle par la DMDTS qui indique toutefois que le recours à ce type d’aides tend à devenir exceptionnel, la règle étant le passage par les procédures déconcentrées.

L’absence de critères de sélection apparaît également dans le projet de réforme des aides aux compagnies dramatiques de la DMDTS (cf. infra). Les artistes bénéficiaires sont ainsi répartis en trois catégories, dont une seule relèverait encore à l’avenir d’aides pérennes versées par la DMDTS. Les critères de distinction entre les différentes catégories ne sont pas explicités dans les notes internes de la DMDTS. Seule l’appartenance au cercle des « metteurs en scène dont l’aventure artistique et la notoriété sont une référence nationale incontestable » est avancée pour justifier le rattachement à la première catégorie, relevant d’aides centrales pérennes.

En dépit de l’inexistence de critères de sélection, la revue des compagnies bénéficiant des aides aux équipes indépendantes met en évidence des convergences qui préservent le dispositif de l’accusation d’arbitraire : les artistes aidés ont tous derrière eux une carrière artistique d’excellence, saluée par un public nombreux et fidèle ; ils disposent par ailleurs d’une capacité de rayonnement nationale, voire internationale.

Les aides versées après consultation de commissions nationales

À l'instar des aides attribuées en DRAC, les aides nationales attribuées après consultation de commissions nationales font intervenir une sélection qui repose essentiellement sur la qualité artistique. De fait, les aides versées par la DMDTS sont sélectives, comme le montre le tableau n° 8.

Dossiers présentés et sélectionnés pour les aides à la création d’œuvres dramatiques et les commandes musicales, de 2006 à 2008

   

2006

2007

2008

Aides à la création d'œuvres dramatiques

Dossiers présentés à la commission

507

592

280

Dossiers retenus

109

82

32

Commandes musicales

Dossiers présentés à la commission

182

128

NC

Dossiers retenus

61

58

NC

Dossiers aidés hors commission

28

22

33

Source : DMDTS

Néanmoins, les arrêtés portant création des commissions consultatives sont lacunaires et aucun texte ne précise les critères qui doivent être retenus par les commissions consultatives pour éclairer l’administration dans ses choix.

Le dispositif de commande musicale se distingue, dans la mesure où une partie des aides (environ un quart) est attribuée par la DMDTS en dehors du cadre des commissions nationales (cf. tableau n° 8). Ces commandes « hors commission » sont de deux types :

- une grande majorité d’entre elles (20 dossiers sur 22 en 2007 ; 29 sur 33 en 2008) correspond à des commandes directement passées par des centres nationaux de création musicale (CNCM), dans le cadre de leurs activités de création et de diffusion. Financées sur la même ligne budgétaire que les commandes en commission, sur la base d’une dotation annuelle globale de 112 000 euros, ces aides visent à conférer aux CNCM des moyens d’action tout en leur garantissant des marges de manœuvre ;

- certaines aides, peu nombreuses (deux dossiers en 2007 ; quatre en 2008) correspondent à des commandes ministérielles, accordées à titre exceptionnel pour des événements particuliers ou pour rendre hommage à des compositeurs à un moment de leur carrière. À titre d'exemple, quatre commandes ministérielles ont été accordées en 2008, pour un montant total de 44 000 euros.

Enfin, les garanties formelles d’indépendance des commissions consultatives nationales ne sont pas toujours réunies. Ainsi,

- la commission nationale consultative d’aide à la notation chorégraphique pour l’élaboration de partitions ne repose sur aucun texte institutif ;

- les membres de la commission nationale consultative d’aide aux écritures chorégraphiques ne sont pas nommés par arrêté mais recrutés sur simple échange de courrier avec le DMDTS.

Le suivi des aides manque de transparence

L’information budgétaire relative aux aides centrales aux équipes artistiques est insuffisante. Les documents budgétaires ne permettent pas au Parlement d’obtenir une vision d’ensemble du dispositif. Ce constat traduit la grande imprécision du suivi du dispositif par la DMDTS, celle-ci n’étant pas aisément en mesure d’identifier les écarts entre les données présentées dans les documents budgétaires et celles qui figurent dans les réponses aux questions parlementaires.

Une information budgétaire imparfaite

Les documents budgétaires ne fournissent qu’une information partielle sur le niveau des aides aux équipes artistiques directement attribuées par l’administration centrale. En effet, si les rubriques « équipes indépendantes » et « aides à la création et à la diffusion (commissions) » retracent l’essentiel des aides versées par la DMDTS aux équipes artistiques, ces données ne sont pas exhaustives. D’autres aides centrales aux équipes figurent, confondues parmi d’autres données, dans les rubriques « transferts aux ménages » (commandes artistiques), « autres institutions d’aides à la création et à la diffusion » (aide à la création d’œuvres dramatiques, transférée en 2007 au CNT), « structures et fonds de création / diffusion » (dispositif de création multimédia)…

Crédits attribués aux équipes artistiques – données fournies par les documents budgétaires (en €).

 

RAP 2006

RAP 2007

RAP 2008

PAP 2009

Aides déconcentrées aux équipes artistiques

45 980 000

46 450 000

44 210 000

45 405 790

Théâtre

21 900 000

23 120 000

22 120 000

22 832 120

Danse

7 750 000

7 460 000

6 980 000

7 205 490

Musique

10 870 000

11 020 000

10 770 000

11 013 980

Arts de la rue

2 970 000

2 380 000

2 150 000

2 151 800

Cirque

2 490 000

2 470 000

2 190 000

2 202 400

Aides centrales aux équipes artistiques

11 133 584

11 940 000

9 860 000

9 350 000

Équipes indépendantes

6 982 884

7 530 000

7 100 000

7 000 000

Aides à la création / diffusion (commissions nationales)

4 150 700

4 410 000

2 760 000

2 350 000

Taux de déconcentration des aides aux équipes artistiques

81%

80%

82%

83%

Ratio aides centrales / aides totales

19%

20%

18%

17%

Source : RAP 2006 à 2008, PLF 2009

De surcroît, au sein même de ces différentes catégories, aucune présentation exhaustive des dispositifs d’aide centralisés ne permet d’en assurer le suivi d’une année sur l’autre. Les différentes aides sont au contraire regroupées au sein d’agrégats (« commandes artistiques », « aides à la création et à la diffusion »), dont le périmètre change d’une année sur l’autre (parfois même au cours d’un exercice budgétaire). Le croisement des données figurant dans les documents budgétaires avec les réponses formulées par la DMDTS aux questions parlementaires laisse à cet égard subsister un nombre significatif d’incohérences chiffrées, dont la source tient sans doute au manque de lisibilité des agrégats figurant dans les PAP et les RAP.

Crédits centraux et déconcentrés attribués aux équipes artistiques (en €)

 

RAP 2006

RAP 2007

RAP 2008

Aides déconcentrées aux équipes artistiques

45 980 000

46 450 000

44 210 000

Théâtre

21 900 000

23 120 000

22 120 000

Danse

7 750 000

7 460 000

6 980 000

Musique

10 870 000

11 020 000

10 770 000

Arts de la rue

2 970 000

2 380 000

2 150 000

Cirque

2 490 000

2 470 000

2 190 000

Aides centrales aux équipes artistiques

11 133 584

11 554 489

10 619 713

Équipes indépendantes

6 982 884

7 347 419

7 882 283

Aides pérennes théâtre et danse

4 542 000

4 050 550

4 800 000

Ensembles musicaux

2 337 000

3 101 369

3 007 783

Ensembles de jazz

103 884

195 500

74 500

Aides à la création / diffusion (commissions nationales)

4 150 700

4 207 070

2 737 430

Théâtre

778 700

661 100

496 580

Commandes aux auteurs dramatiques20

87 700

67 100

61 000

Aides à la création d'œuvres dramatiques

241 000

204 000

180 000

Maquette et compagnonnage

450 000

390 000

255 580

Musique

743 000

705 000

632 600

Commandes musicales

743 000

705 000

632 600

Danse

116 000

111 470

90 000

Aide aux écritures chorégraphiques

116 000

111 470

90 000

Arts de la rue

480 000

560 000

464 300

Aide à la résidence

450 000

500 000

416 300

Soutien à l'écriture

30 000

60 000

48 000

Année des arts de la rue

1 042 000

1 057 000

64 000

Cirque

854 000

970 000

920 000

Aide à l'itinérance

232 000

232 000

284 500

Aide à la création

410 000

443 000

358 500

Aide à la résidence

167 000

250 000

232 000

Jeunes talents de cirque

45 000

45 000

45 000

Autres

137 000

142 500

133 950

Dispositif pour la création artistique multimédia (DICREAM)

137 000

142 500

133 950

Taux de déconcentration des aides aux équipes artistiques

80,5%

80,1%

80,6%

Source : Cour des comptes, données reconstituées à partir de données DMDTS

Ces différents constats conduisent à nuancer la présentation retenue par les documents budgétaires (tableau n° 9) qui indique une évolution significative du dispositif dans le sens d’une déconcentration accrue (avec un taux de déconcentration de 83 % en 2008).

En réalité, comme le montre le tableau n° 10, le taux de déconcentration des aides aux équipes artistiques apparaît quasi-constant sur les trois dernières années (+ 0,1 %). Ce constat s’explique principalement par le fait que la DMDTS a externalisé certains dispositifs d’aides aux équipes artistiques vers des opérateurs, soustrayant les crédits budgétaires correspondants, versés à ces opérateurs, de la catégorie des aides centrales.

À titre d’exemple, le dispositif d’aide à la création dramatique, dont la gestion a été transférée au centre national du théâtre (CNT) en 2007, n’est plus comptabilisé comme une aide centrale aux équipes artistiques, alors que la DMDTS verse chaque année au CNT une subvention équivalente au montant de ladite aide. Sur le même modèle, la DMDTS envisage en 2010 de transférer les aides à la création chorégraphique au centre national de la danse (CND).

Les aides aux équipes indépendantes

Le suivi des aides attribuées par la DMDTS aux équipes indépendantes manque de transparence. Ainsi, les documents budgétaires font apparaître un montant global d’aides aux équipes indépendantes atteignant 7,1 millions d’euros en 2008. Outre le fait que ce montant global ne permet pas de discerner les aides accordées aux anciens directeurs d’institutions des aides accordées à titre pérenne et discrétionnaire ni des aides attribuées aux ensembles musicaux, le montant de 7,1 millions d’euros ne recouvre pas la réalité budgétaire de ces aides, qui atteignent en fait 7,9 millions d’euros en 2008 (cf. tableau10) :

- 4,8 millions d’euros pour les aides aux compagnies dramatiques et chorégraphiques ;

- 3 millions d’euros pour les aides aux ensembles musicaux ;

- 75 000 euros pour les aides aux ensembles de jazz.

Une partie substantielle des aides attribuées par la DMDTS aux équipes indépendantes (700 000 euros, soit près de 10 % du dispositif en volume budgétaire) n’est donc pas répertoriée dans cette catégorie par les documents budgétaires.

Par ailleurs, l’information budgétaire communiquée au Parlement est particulièrement limitée en ce qui concerne l’identité des bénéficiaires des aides aux équipes indépendantes. Les anciens directeurs d’institutions, les artistes aidés à titre pérenne ne sont nommés ni dans les documents budgétaires, ni dans les réponses fournies par la DMDTS aux questions parlementaires. Concernant les ensembles musicaux, les PAP mentionnent trois bénéficiaires (Les Arts Florissants, l’orchestre des Champs-Élysées et la Chambre philharmonique) alors que les réponses fournies par la DMDTS aux questions parlementaires mentionnent six ensembles aidés, en ajoutant aux trois bénéficiaires figurant dans les PAP les Talents lyriques, l’Orchestre national de jazz et les Dissonances. Cette différence s’expliquerait par la spécificité des trois derniers ensembles :

- les Talents lyriques sont un ensemble musical dont la déconcentration (résidence auprès de l’Opéra national de Montpellier) touche à sa fin et qui n’a pas retrouvé d’attache pérenne en région ;

- les Dissonances sont un ensemble aidé ponctuellement par la DMDTS dans l’attente d’un transfert en région ;

- l’Orchestre national de jazz est un ensemble atypique (direction artistique tournante entraînant une évolution de la composition du groupe de musiciens), ce qui explique, selon les termes de la DMDTS, que l’orchestre ne soit « pas toujours classé dans la rubrique des ensembles musicaux ».

Les aides attribuées après consultation de commissions nationales

Le manque de lisibilité est également manifeste en ce qui concerne les aides versées par la DMDTS après consultation de commissions nationales. Le changement annuel de nomenclature, certes compréhensible dans le cadre de la mise en œuvre de la LOLF, s’ajoute aux refontes fréquentes des dispositifs (à l’instar du compagnonnage21) et à l’externalisation de certaines aides (aide à la création dramatique), rendant impossible toute appréciation globale du système.

Deux exemples apparaissent significatifs :

- le premier concerne l’année des arts de la rue. En 2006 et en 2007, la DMDTS a fait figurer les crédits correspondant à l’année des arts de la rue dans la catégorie des aides à la création et à la diffusion (commissions), alors que ces aides « ne concernaient pas des aides directes aux équipes artistiques par l’intermédiaire de commissions mais pour l'essentiel des aides à des lieux de fabrication » ; ce défaut d’imputation a été corrigé en 2008 à la faveur de la déconcentration des crédits correspondants ;

- le second concerne les aides à la création d’œuvres dramatiques. Ces aides se composent d’une partie forfaitaire, versée dès l’obtention de l’aide, et d’une partie conditionnelle, versée dans un délai de trois ans après notification de l’aide en fonction d’une création et d’une diffusion avérées. La complexité de la gestion financière des décisions de la commission nationale consultative d’aide à la création d’œuvres dramatiques (en particulier, la validité des subventions sur trois ans, qui se révèle difficilement compatible avec le principe d’annualité budgétaire) ainsi que les changements intervenus dans le portage financier du dispositif (SACD, CNT, transition assurée par la DMDTS) ont conduit la DMDTS à passer une convention avec la société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) pour porter le financement de ce dispositif. En 2007, il a été décidé de transférer ce dispositif au centre national du théâtre (CNT). Les différents changements intervenus ont fortement perturbé la lecture du dispositif dans les budgets de la DMDTS, d’autant que les montants versés au CNT sont incorporés dans sa subvention de fonctionnement, laquelle est comptabilisée dans le RAP au titre des « autres institutions d’aides à la création ». Dans l’état actuel des documents budgétaires et des réponses aux questions parlementaires, il est impossible d’évaluer le coût en année pleine du dispositif.

Des marges d’amélioration certaines, identifiées par la DMDTS

L’efficience et l’efficacité des aides centrales aux équipes artistiques sont parfois contestables. Consciente des limites du dispositif, la DMDTS a élaboré un projet de réforme qui corrige certaines faiblesses mentionnées plus haut, mais qui n’a pas encore été mis en œuvre à la date de rédaction du présent rapport.

Les aides aux équipes indépendantes

En 2008, la DMDTS a procédé à une évaluation interne du dispositif d’aides aux équipes indépendantes, orientée plus particulièrement sur l’aide aux compagnies dramatiques. Selon cette évaluation :

- l’enveloppe budgétaire dévolue à l’aide aux compagnies dramatiques est structurellement croissante à dispositif inchangé, en raison de la prise en charge de nouveaux bénéficiaires ; en outre, le nombre d’artistes en sortie d’institution connaît actuellement une croissance significative du fait de l’évolution de la structure démographique (au cours de l’année 2010, cinq nouveaux artistes devront être pris en charge par le dispositif d’aides aux anciens directeurs) ;

- la politique de conventionnement des compagnies dramatiques aidées par l’administration centrale n’est pas satisfaisante. La DMDTS relève à ce sujet « la quasi-automaticité du montant attribué qui n’est pas suffisamment relié à un projet artistique et la difficulté à limiter l’aide dans le temps ».

S’appuyant sur le modèle du dispositif d’aides aux anciens directeurs de centres chorégraphiques nationaux, la DMDTS envisage ainsi de réformer les aides versées par l’administration centrale aux compagnies dramatiques (cf. infra). La réforme poursuit trois objectifs : diminuer les crédits budgétaires attribués à l’ensemble du dispositif, déconcentrer la majeure partie de ces aides et faire entrer progressivement les bénéficiaires dans le circuit déconcentré des aides au spectacle vivant.

À ce stade, le projet de réforme des aides centrales aux compagnies dramatiques ne prévoit aucune mesure spécifique pour favoriser l’implantation territoriale des compagnies précédemment aidées en administration centrale ou des futurs directeurs en sortie d’institution. Or, cet aspect semble être un facteur-clé de succès pour la réforme ; Les analyses en région soulignent en effet la difficulté d’implantation territoriale des compagnies aidées par des crédits DMDTS. À titre d’exemple, la compagnie dramatique « L’Illustre théâtre », financée sur des crédits DMDTS, a cherché à s’implanter en région Poitou-Charentes en 2004. Les crédits correspondants (229 000 euros) ont été transférés en DRAC. L’expérience a duré deux ans, la compagnie quittant la région en 2006 et la DMDTS assurant à nouveau la gestion des crédits correspondants.

La réforme des aides centrales aux compagnies dramatiques

La réforme envisagée par la DMDTS prévoit de distinguer, à partir de 2010, trois catégories de bénéficiaires :

- les compagnies permanentes aidées en administration centrale : cette catégorie concerne les metteurs en scène dont l’œuvre et la notoriété sont une référence nationale, voire internationale. Selon le projet artistique, la compagnie reçoit entre 50 000 et 300 000 euros par an dans le cadre d’une convention triennale. Douze bénéficiaires potentiels ont été identifiés en janvier 2009 ;

- les compagnies en accueil : cette catégorie concerne les compagnies aidées en centrale jusqu’en 2009 et en DRAC à partir de 2010. Un apport moyen de 140 000 euros par an est envisagé, dans le cadre de conventions triennales. À l'issue de ces trois ans, les compagnies aidées seraient soumises aux procédures habituelles de renouvellement après avis du comité d’experts. Dix compagnies relevant de ce dispositif ont été identifiées en janvier 2009 ;

- les compagnies aidées au projet : cette catégorie concerne les artistes qui ne souhaitent pas constituer une compagnie mais poursuivent des projets spécifiques. La DMDTS apporterait une aide au projet modulée en fonction des coûts de réalisation, pour un montant compris entre 15 000 et 100 000 euros. Six bénéficiaires potentiels ont été identifiés en janvier 2009.

Par ailleurs, à partir de 2010, les directeurs sortant d’institutions seraient encadrés par un nouveau dispositif d’aide. L’année de la sortie, chaque directeur sortant :

- serait embauché dans le CDN en contrat à durée déterminée, en tant que metteur en scène, pendant les six premiers mois suivant sa sortie ; à ce titre, il devra réaliser une création prise en charge par le CDN dans le cadre de coproductions contractuelles ;

- bénéficierait d’un apport forfaitaire de 100 000 euros prélevé sur le budget du centre dramatique (ou du théâtre national), afin de permettre le montage et l’exploitation de cette première production et d’assurer sa rémunération dans le cadre de son activité artistique.

À la suite de cette période transitoire de six mois, une convention triennale serait signée avec une DRAC, sur la base d’un projet artistique d’implantation territoriale, pour un montant moyen de 150 000 euros. Cette convention serait susceptible d’être renouvelée dans le cadre des procédures d’aides aux équipes artistiques indépendantes.

Les aides attribuées après consultation de commissions nationales

Le nombre élevé des dispositifs (douze) et de commissions ad hoc (six) et le montant modeste des aides unitaires invitent à s’interroger sur l’efficience et l’efficacité d’un tel système. La DMDTS fait toutefois valoir que les caractéristiques de ces aides (en particulier leurs montants globaux assez faibles qui traduisent l’étroitesse du vivier des bénéficiaires potentiels) s’opposent le plus souvent à leur déconcentration territoriale. Le maintien en administration centrale de dispositifs d’aides pour les disciplines « fragiles », telles le cirque et les arts de la rue, illustre la volonté de pérenniser les financements accordés à ces disciplines en les soustrayant aux arbitrages budgétaires des DRAC.

La spécificité des aides attribuées par l’administration centrale n’est pas toujours avérée : dans le cas des aides attribuées au cirque et aux arts de la rue, une part significative des compagnies bénéficiaires ont été aidées, pour un même projet, par une DRAC et par la DMDTS, ce qui traduit un effet de doublon contestable. Inversement, certaines compagnies de cirque et d’arts de la rue dont les dossiers ont été refusés en DRAC ont reçu une aide au projet de la DMDTS.

Crédits centraux attribués aux équipes artistiques (en €).

 

Conventionnement

Aide au projet

2005

 

2006

 
     

nombre

montant

nombre

montant

Arts du cirque

Compagnie conventionnée en DRAC

Aide au projet en centrale

7

193 000

4

130 000

 

Compagnie non conventionnée en DRAC

Aide au projet en centrale

7

80 000

5

94 000

   

+ aide au projet en DRAC

 

113 400

 

77 000

   

Aide au projet en centrale

11

185 000

14

204 000

 

Total des aides

 

25

458 000

23

428 000

Arts de la rue

Compagnie conventionnée en DRAC

Aide au projet en centrale

7

265 000

7

284 000

 

Compagnie non conventionnée en DRAC

Aide au projet en centrale

12

67 000

2

30 000

   

+ aide au projet en DRAC

 

73 000

 

33 000

   

Aide au projet en centrale

5

188 000

9

136 000

 

Total des aides

 

24

520 000

22

450 000

Source : Données DMDTS

Consciente des limites du dispositif actuel, la DMDTS a engagé en 2008 un projet de réforme des commissions consultatives nationales.

Ce projet, dont la mise en œuvre est prévue en 2010, est susceptible d’apporter un certain nombre d’améliorations :

- en termes de garanties formelles d’indépendance : la composition et le fonctionnement de toutes les commissions seraient alignés sur les règles prévues par le décret du 8 juin 2006 relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de commissions administratives à caractère consultatif ;

- en termes d’efficience : le projet de réforme prévoit la réduction du nombre de commissions, de six à quatre, par le regroupement des commissions d’aides chorégraphiques d’une part, des commissions d’aides au cirque et aux arts de la rue d’autre part ;

- en termes d’efficacité : les aides au cirque et aux arts de la rue sont redéfinies de manière à supprimer les doublons et à harmoniser l’action de l’État aux niveaux central et déconcentré. Les aides attribuées en DRAC seraient recentrées sur le conventionnement. Les aides aux projets ne seraient attribuées par les DRAC que pour les projets de niveau régional (en termes d’objectifs de diffusion et de coûts de production).

Le projet de réforme des commissions consultatives nationales prévoit également d’externaliser la gestion des aides chorégraphiques en la confiant au centre national de la danse, sur le modèle du transfert déjà opéré au centre national du théâtre pour les aides à la création d’œuvres dramatiques.

L’ATTRIBUTION DES AIDES À L’ÉCHELON DÉCONCENTRÉ

Même si la déconcentration de l’allocation des subventions n’est pas pleinement achevée, les DRAC sont à ce jour les principales entités octroyant des aides aux structures, aux équipes artistiques et aux festivals (cf. annexe 2). Elles s’appuient à cet égard sur le travail de conseillers sectoriels, chevilles ouvrières du dispositif.

La sélection des structures et projets artistiques aidés doit répondre aux objectifs nationaux fixés par le ministère de la culture et de la communication. Toutefois, la démarche des DRAC tient également compte des opportunités et des contraintes locales, mais aussi de l’équilibre d’un secteur économiquement précaire.

La procédure d’octroi des aides aux équipes artistiques suit un schéma commun à toutes les disciplines du spectacle vivant : l’instruction du dossier de demande d’aide est assurée par les conseillers sectoriels de la DRAC, le dossier est ensuite transmis à un comité d’experts qui donne un avis sur la qualité artistique du projet. La décision d’accorder ou de refuser l’octroi de l’aide est élaborée par la DRAC et arrêtée par le préfet de région.

L’évaluation des politiques de subventionnement menées régionalement reste limitée : les critères d’allocation des aides et les objectifs assignés aux bénéficiaires ne sont pas toujours précisément énoncés, le suivi du bon usage des fonds publics reste peu structuré.

L’allocation des subventions : une approche unitaire reposant principalement sur les conseillers sectoriels

En apportant son aide à des lieux de création-production, à des lieux de diffusion et à des équipes artistiques, la stratégie suivie par l'État relève d'un équilibre subtil, visant à maintenir une tension économique au sein d’un secteur dont les subventions publiques constituent la principale source de financement. Les réalités locales, prises en compte par les DRAC dans leurs choix stratégiques et budgétaires, viennent enrichir un édifice complexe.

Un paysage modelé par des spécificités régionales

Le poids de l’histoire

Le développement du spectacle vivant au cours des dernières décennies correspond dans chaque région à une histoire propre. Les politiques culturelles forgées localement, souvent sous l’impulsion de l’État et des collectivités territoriales, ont conféré à chaque région sa spécificité. Les collectivités territoriales de la région Nord Pas-de-Calais ont, par exemple, investi le domaine du spectacle vivant au milieu des années 1980, en en faisant un élément d’attractivité territoriale. De nombreux centres d’action culturelle, devenus en 1992 des scènes nationales, y ont émergé, façonnant l’offre en la matière. La région compte aujourd’hui sept scènes nationales (contre cinq en Rhône-Alpes par exemple), alors qu’il n’existe qu’une seule scène conventionnée (contre dix en Rhône-Alpes).

Ces spécificités régionales peuvent porter sur un genre artistique particulier et orienter l’action culturelle de l’État. Les choix stratégiques et arbitrages budgétaires effectués au niveau régional doivent être analysés à l’aune de ces particularités.

La création de labels régionaux

L’édification d’un schéma national reposant sur des structures labellisées à plusieurs niveaux n’embrasse pas parfaitement les réalités locales.

Certaines DRAC ont choisi de dépasser ce cadre. C’est le cas de la DRAC Bretagne qui a choisi d’allouer, depuis 2007, des crédits à des petites structures, en créant, sur la base de dispositifs existants (aides à la résidence, aides aux lieux artistiques) un label de « scène de territoire ». Ce terme, qui résulte d’un choix sémantique local, désigne une catégorie de lieux qui ont été créés, à l’initiative de communes de moins de 15 000 habitants, dans le contexte de périurbanisation. Dans le cadre de ce dispositif, la DRAC aide une vingtaine de lieux pluridisciplinaires à hauteur de 10 à 15 000 € par an pour une composante spécifique de leur projet. Les objectifs poursuivis visent à :

- distinguer certaines scènes qui constituent un pôle de dimension locale et ayant développé une action de mise en valeur de la création contemporaine, de diffusion, d'action culturelle ;

- conforter, par un partenariat État-département, le projet de ces lieux dans la double dimension de présence artistique et de développement de l'action culturelle ;

- proposer des points d'appui pour les établissements scolaires, via le système de résidences, en conformité avec la politique gouvernementale de développement de l’éducation artistique.

Des aides liées au contexte local et qui ne sont pas toujours visibles au niveau national

L’approche originale de la DRAC Bretagne est un des exemples des particularités rencontrées dans de nombreuses régions. Ces spécificités n’apparaissent pas dans l’outil statistique consolidé par la DMDTS et les interprétations des données nationales sont dès lors délicates.

D’autres subventions de DRAC, apparemment plus classiques, mais pour lesquelles la DMDTS et la DRAC ont une interprétation divergente, n’apparaissent pas dans les données consolidées par la DMDTS. Tel est le cas de La Grande écurie et la chambre du Roy, ensemble musical rattaché à l’atelier lyrique de Tourcoing. La DRAC Nord Pas-de-Calais accorde, depuis 2005, une aide de 144 827 € par an à cet ensemble. Si la DRAC l’assimile à un orchestre permanent, la DMDTS estime que cette catégorisation ne traduit pas la plasticité de l'ensemble musical, et qu’il convient de classer les aides qui lui sont accordées dans la catégorie des aides aux équipes artistiques. En raison de cette divergence d’interprétation, la subvention accordée par la DRAC à l’ensemble musical n’a pas été répertoriée par la DMDTS en 2007.

Il en va de même pour les aides accordées à certaines structures non labellisées. La DRAC Poitou-Charentes a ainsi aidé en 2008 six théâtres de ville. Cinq des subventions correspondantes (La Rochelle, Rouillac, Ruffec, Bressuire et La Couarde sur Mer) n’ont pas été agrégées par la DMDTS (pour un montant total de 181 800 €).

Une autre illustration du décalage entre le cadre national classifiant les structures aidées et les réalités régionales concerne le nouveau Théâtre Auditorium de Poitiers. Les trois orchestres non permanents, associés à cette scène depuis sa création (orchestre symphonique de Poitou-Charentes, Ars Nova, orchestre des Champs-Élysées), relèvent de trois catégories d’aides différentes22. La DRAC, qui revendique une « diversité des types de soutien », reconnaît pourtant que les modes de gestion de ces trois ensembles sont similaires, tout comme les objectifs qu’ils poursuivent, dans des genres musicaux complémentaires.

Au total, ces inadéquations entre certaines réalités régionales et les catégorisations nationales nuisent à l’analyse des données consolidées. L’audit de modernisation réalisé en 2006 par l’inspection générale des finances et l’inspection générale des affaires culturelles avait d’ailleurs relevé l’absence de concordance entre des données recueillies en administration centrale et en DRAC. Depuis, la DMDTS a mis en œuvre plusieurs actions concrètes visant à améliorer la qualité de l’information consolidée. Ainsi, des travaux ont été conduits, dans le cadre des entretiens de Valois, pour préciser le périmètre des orchestres nationaux et mieux distinguer les missions qui leur sont confiées des missions affectées aux ensembles non permanents. Par ailleurs, en 2009, la DMDTS a diligenté auprès des DRAC une enquête spécifique portant sur les lieux de création et de diffusion non encore pris en compte dans leur totalité, parmi lesquels figurent notamment les théâtres de ville. Enfin, de nouvelles directives ont été données aux DRAC pour intégrer l’ensemble de leurs interventions consacrées au spectacle vivant dans les données qu’elles transmettent à l’administration centrale, en complément des collectes annuelles d’informations sur les principaux réseaux. Si elles engagent l’administration sur la voie d’une clarification salutaire, ces actions de consolidation statistique, récentes, ne peuvent pas encore être évaluées et n’atténuent en rien la complexité du panorama actuel.

Des stratégies de subventions croisées

L’irrigation du secteur du spectacle vivant s’opère par de multiples entrées, en amont via les aides aux équipes artistiques pour la création, les aides à l’écriture et les lieux conçus pour la création, et en aval via les lieux de diffusion.

Par exemple, en subventionnant une maison d'opéra, l'État lui apporte la capacité d’acheter des spectacles à des compagnies qui peuvent elles-mêmes être aidées par l’État pour leurs créations. Tel est le cas de l’Opéra de Lille, subventionné par l’État à hauteur de 1 M€ en 2007 (et à hauteur de 9,4 M€ par les collectivités territoriales), qui a acquis cette année là des spectacles auprès de l'ensemble musical Le Concert d’Astrée pour un montant 325 805 €23, cet ensemble lyrique ayant reçu en parallèle une subvention de 200 000 € de la part de la DRAC (et de 5 000 € de la part des collectivités territoriales) au titre des ensembles musicaux conventionnés.

Cette démarche de double subventionnement de l'État, directement d’une part auprès des compagnies et indirectement d’autre part via les lieux qui achètent leurs spectacles peut de prime abord surprendre. La DRAC Nord Pas-de-Calais estime toutefois qu’à travers cette démarche, l’Opéra et l’ensemble musical sont dans une relation contractuelle équilibrée. Réduire la subvention de l’Opéra pour abonder celle de l’ensemble pénaliserait le directeur du lieu dans son autonomie de programmation. A contrario, accroître la subvention des scènes en diminuant celle des équipes artistiques empêcherait ces dernières de maîtriser l’offre artistique qu’elles entendent apporter.

Toutefois, avec un niveau de subventionnement public modeste, les équipes artistiques se trouvent face à l’alternative de réaliser des spectacles peu coûteux qu’ils pourront diffuser à un prix raisonnable - tendance qui semble être suivie par de plus en plus de compagnies dramatiques - ou de créer des œuvres plus ambitieuses et plus chères. Dans ce dernier cas, seules des scènes disposant d’un budget conséquent peuvent programmer de telles œuvres, ce qui limite la capacité de circulation de ces dernières à un nombre restreint de scènes.

La circulaire du 12 mai 1999 incite les DRAC à favoriser l’accès des compagnies à des lieux de travail, et en particulier, aux CDN, aux scènes nationales et aux scènes conventionnées. Si l’impératif de diffusion est affiché, il est limité aux principales scènes et ne peut s’envisager, dans le système actuel, de manière plus dynamique ou diversifiée.

Les conseillers sectoriels, chevilles ouvrières du processus de subvention

Les conseillers sectoriels du spectacle vivant, au nombre de deux ou trois par DRAC, interviennent dans les domaines du théâtre, de la musique et de la danse. Ils sont soit des fonctionnaires recrutés par concours dans le corps des inspecteurs-conseillers de la création, des enseignements artistiques et de l’action culturelle, soit des agents contractuels.

En novembre 2008, la DMDTS a organisé une concertation avec les conseillers et leurs associations représentatives24 afin de préciser les rôles et missions attachés à la fonction.

Les conseillers ont trois rôles principaux :

- suivre l’ensemble des activités des structures de création, de production et de diffusion du spectacle vivant dans la région, en s’appuyant sur leur expertise artistique. Ils instruisent les dossiers soumis à la DRAC et rédigent des avis sur les demandes de subvention ;

- assurer l’interface, d’une part avec les artistes et les établissements dans le domaine du spectacle vivant en leur apportant conseils et informations, d’autre part avec les collectivités territoriales ;

- évaluer les dispositifs et conventions, à travers notamment une participation aux conseils d’administration et comités de suivi des structures aidées.

Dans le champ artistique, le jugement professionnel du conseiller est un élément majeur du dispositif de subventionnement de l'État. Le document établi par la DMDTS les qualifie « d’experts artistiques ». Une part importante de leur temps de travail consiste à approfondir leur connaissance des secteurs dont ils ont la charge : suivre la programmation des lieux, analyser les propositions des équipes artistiques et assister aux représentations dans les différents lieux de diffusion de la région.

Certains conseillers ont, grâce notamment à leur ancienneté, une connaissance très pointue des enjeux régionaux du secteur dont ils ont la charge. Cette expérience est alors un atout. Toutefois, certains conseillers rencontrés en DRAC sont en poste depuis une vingtaine d’années25, et cette ancienneté peut se révéler embarrassante pour l'image d'impartialité de l'État dès lors que des relations personnelles se sont naturellement tissées au fil des ans avec les équipes artistiques. Aucune règle relative à la mobilité n’existe à ce jour pour encadrer la durée des postes des conseillers sectoriels et favoriser leur mobilité.

S’ils sont recrutés pour leur compétence dans le domaine qu’ils couvrent, les conseillers sont moins attentifs aux questions de gestion. Les bilans des subventions accordées aux structures et compagnies ne sont pas tous rigoureusement tenus et les données communiquées à la Cour par les DRAC, tant sur le nombre de compagnies aidées que sur le montant des subventions accordées par types de structures, sont de qualité variable.

Pour apporter un regard pluriel et complémentaire à l’expertise des conseillers, le ministère de la culture a institué des comités d’experts qui donnent un avis consultatif pour l’attribution de subventions aux équipes indépendantes, qu’elles fassent l’objet d’une aide au projet, d’une aide à la structuration ou d’un conventionnement.

Les comités d’experts

La composition des comités varie selon les disciplines et les régions

La désignation des groupes d’experts est variable selon les disciplines : comités d’experts pour le théâtre, commissions consultatives pour la musique et pour la danse26. Les comités théâtraux et musicaux ont un ressort régional ; les commissions chorégraphiques sont interrégionales (on compte six commissions consultatives pour l’ensemble de la France).

Les comités d’experts doivent être composés d’au moins huit membres en matière théâtrale, et vingt membres dans le champ chorégraphique. Les membres des comités sont nommés par arrêté du préfet de région auprès duquel ils sont constitués, sur proposition du directeur des affaires culturelles, pour une durée allant d’un an (chorégraphie) à trois ans (musique).

La circulaire relative à l’aide à la création chorégraphique identifie notamment parmi les professionnels susceptibles d’être sollicités pour être experts : des chorégraphes, danseurs, professeurs de danse, analystes fonctionnels du corps, historiens de la danse, critiques de danse, directeurs ou responsables de la programmation d’établissements de diffusion. De tels professionnels apportent au comité leur connaissance pointue du métier et de ses tendances. Avec des comités interrégionaux dans le domaine de la danse, la moindre connaissance que les experts peuvent avoir des compagnies issues des autres régions couvertes est compensée par la pratique des « plateaux-danse » où les équipes demandeuses de subventions peuvent présenter leur travail.

La composition de ces divers comités peut grandement varier d’une région à l’autre. En Poitou-Charentes, le comité théâtre est très homogène : dix-sept des dix-neuf membres sont directeurs ou secrétaires généraux de scènes. En Rhône-Alpes, les origines sont plus variées, avec douze directeurs de théâtres sur trente membres.

Les cas d’incompatibilité pour siéger au sein des comités varient selon le genre artistique. Ainsi, ne peuvent faire partie des comités théâtre les élus, les fonctionnaires en situation de responsabilité directe dans le secteur théâtral et les représentants de compagnies théâtrales susceptibles d’être juges et parties.

Cette liste est moins large dans le champ chorégraphique. L’arrêté du 25 novembre 2003 relatif à la procédure d’aide à la création chorégraphique dispose que « ne peuvent être membres les personnes concourant à titre consultatif ou décisionnel à une autre procédure d'aide publique à la création chorégraphique applicable dans le même ressort géographique ». Il peut donc arriver que des compagnies chorégraphiques, sollicitant ou non une aide de l'État, soient représentées au comité d’experts27.

Un jugement entre pairs

Les conseillers sectoriels organisent les réunions des comités et proposent à l’examen de leurs membres les projets artistiques des ensembles ou compagnies ayant déposé une demande de subvention. Dans les faits, les conseillers réalisent un important travail préparatoire avec les demandeurs potentiels, et peuvent être amenés à en dissuader certains de présenter une demande qui leur semble n’avoir aucune chance d’être soutenue par le comité.

Le comité se prononce sur le principe d’une aide et non sur son montant. Après une délibération interne, les membres votent et le nombre d’avis favorables, défavorables et d’abstentions est ensuite décompté.

La circulaire du 19 mai 1999 relative à l’aide apportée par l’État aux compagnies dramatiques indique que « le principe d’une aide est arrêté en fonction de l’avis du comité d’experts […]. Elle est confirmée et accordée par la DRAC dès lors que des perspectives avérées de partenariats en matière de production et de diffusion et, plus généralement, la fiabilité économique de l’ensemble sont acquises ».

La DRAC suit la plupart du temps l’avis du comité. Elle peut toutefois s’en affranchir et outrepasser un avis défavorable ou au contraire déclasser une aide proposée par le comité. Ainsi, en concertation avec l’inspection musique, la DRAC Rhône-Alpes a choisi en 2008 de conventionner l’ensemble Calliope, chœur de femmes aidé à la structuration depuis 2005, dont la demande de conventionnement a été rejetée par le comité d’experts. Certes la subvention allouée n’a pas augmenté par rapport à ce dont la compagnie bénéficiait au titre de l’aide à la structuration, mais la stabilité financière de la compagnie a été par là même confortée pour les trois exercices suivants. La DRAC Poitou-Charentes a au contraire choisi en 2008 d’aider au projet la compagnie chorégraphique Toufik OI, en faveur de laquelle la commission d’experts avait recommandé une option plus favorable, l’aide à la compagnie. La DRAC a considéré, au vu du dossier et du projet d’activités de la compagnie, qu’elle ne remplissait pas les conditions pour bénéficier de cette aide.

La liberté d’expression régit le fonctionnement des comités d’experts, les propos et débats demeurant confidentiels. Les conseillers sectoriels sont censés rédiger le procès verbal des avis des membres de la commission, sans personnaliser les avis rendus. Toutefois, cette démarche relève de leur initiative individuelle : au sein d’une même DRAC, certains conseillers produisent des comptes-rendus complets, et d’autres d’indigents. Au total, rares sont ceux qui font état, de manière détaillée, de la teneur des échanges. Par ailleurs, les conseillers ne rendent pas tous officiellement compte aux compagnies des échanges que leur demande a suscités.

Le principe jusqu’ici retenu pour la composition des comités est celui du jugement entre pairs. Seuls des professionnels appartenant à un cercle restreint sont choisis. Les spectateurs ne sont dès lors jamais représentés au sein des comités. Les DRAC interrogées sur ce point ont fait part de la difficulté que constituerait selon elles la désignation de représentants d’une population aussi hétérogène. L’expression des attentes du public semble pourtant nécessaire pour former un jugement complet sur le projet d’une compagnie. Il est aujourd’hui parfois exprimé à travers les interventions des directeurs de scènes. Toutefois, alors qu’on pourrait s’attendre à ce que les perspectives de fréquentation des représentations soient un des piliers majeurs de la réflexion de ces derniers, cet argument n’apparaît quasiment jamais dans les comptes-rendus des comités.

La DMDTS poursuit actuellement un projet de réforme des comités d’experts, reposant sur une harmonisation entre disciplines (constitution des commissions pour une durée de cinq ans, composition comprise entre 12 et 30 membres), une modification du ressort territorial des commissions (dont certaines, déterminées par arrêté ministériel, deviendraient interrégionales), un renouvellement plus élevé des membres des commissions (élus pour un mandat d’un an renouvelable deux fois) et l’élargissement de leur composition au public. Par ailleurs, la réforme en cours vise à préciser et à uniformiser les règles d’incompatibilité et de retrait des délibérations lorsqu’un des membres du comité est concerné par une demande d’aide.

Les subventions accordées par les DRAC répondent à une exigence artistique forte mais peu objectivée

Dans leur démarche de subventionnement, les DRAC veillent à respecter les objectifs nationaux assignés en matière de spectacle vivant, en favorisant la création, la diffusion et la structuration professionnelle.

Tableau n° 4 : Critères pour l’attribution d’aides aux équipes artistiques

 

Création et innovation

Diffusion

Structuration professionnelle

Théâtre

Aide à la production dramatique

Qualité artistique.

Prise de risque (pour les jeunes compagnies) ou ambition (pour les équipes confirmées).

Perspectives avérées en matière de diffusion.

Spectacle remarqué (pour une aide à la reprise) avec garanties de tournée.

Qualités professionnelles de l’équipe artistique et technique.

Aide au conventionnement

Qualité artistique.

Compagnies présentant des garanties en termes de recherche et de création.

Rayonnement national.

Compagnies présentant des garanties de diffusion.

Compagnies présentant des garanties en termes de régularité professionnelle.

Musique

Aide au projet

Qualité artistique.

Innovation.

Originalité de la démarche.

Effort de diffusion sur les projets précédemment aidés (pour une nouvelle aide).

Priorité donnée aux ensembles qui embrassent tout le processus de production.

Aide à la structuration

Qualité artistique.

Ensemble ayant vocation à réunir les conditions d’un fonctionnement stable.

 

Aide au conventionnement

Qualité artistique.

Recherche d’un équilibre entre nouveaux programmes et reprise d’œuvres antérieurement présentées.

Rayonnement et activité régulière.

Rapport au public construit, (programme de diffusion ou partenariat institutionnel).

Partenariat avec les collectivités territoriales.

Stabilisation des moyens artistiques, des emplois techniques et administratifs.

Danse

Aide au projet

Singularité du propos artistique.

Évolution de l’écriture chorégraphique.

Effort de diffusion sur les projets précédemment aidés (pour une nouvelle aide).

 

Aide à la compagnie

Solidité du propos artistique.

Capacité de l’équipe à atteindre une envergure nationale ou internationale.

Capacité de l’équipe à se structurer professionnellement.

Chaînage avec l’aide au projet.

Aide à la compagnie conventionnée

Vitalité du projet artistique.

Implantation territoriale solide.

Capacité à diversifier et fidéliser les partenaires de production.

Solidité professionnelle de l’équipe.

Capacité de l’équipe à se projeter sur le long terme.

Chaînage avec l’aide à la compagnie.

Source : Cour des comptes à partir des circulaires encadrant les aides aux équipes artistiques.

Les aides aux équipes artistiques sont encadrées par des circulaires sectorielles spécifiques qui font apparaître une convergence dans les critères d’éligibilité entre les différents genres artistiques et les types d’aides. 

Dans les régions étudiées par la Cour, deux critères sont privilégiés dans les décisions de subventionnement des structures et compagnies du spectacle vivant : la qualité artistique et la diffusion.

Des critères exigeants mais parfois imprécis de subventionnement pour l’État

La qualité artistique et la diffusion des œuvres sont les deux principaux critères mis en avant par les comités d’experts et les DRAC pour rendre leurs avis et décisions.

Les formes et la fréquence de la présentation au public des œuvres témoignent du professionnalisme des équipes artistiques. L’exigence de diffusion peut donc relever d’engagements chiffrés. Ainsi, une compagnie conventionnée doit-elle s’engager à assurer 120 représentations au cours des trois années de la convention. Toutefois, cet argument de la diffusion n’apparaît que secondairement dans les comptes-rendus des réunions des comités d’experts.

Le premier critère retenu par les comités d’experts et les DRAC est en effet artistique. Est ainsi valorisée la démarche artistique du lieu ou de la compagnie, déconnectée théoriquement du jugement personnel des conseillers ou des experts sur l’esthétique des œuvres. À travers la priorité donnée au critère artistique, les DRAC estiment se distinguer des autres financeurs publics que sont les collectivités territoriales, lesquelles s’appuieraient principalement sur d’autres considérations (aménagement du territoire, développement de l’économie locale, animation culturelle…).

Afin de concrétiser le niveau de cette exigence artistique, la formalisation des échanges entre experts au sein des comités mériterait d’être envisagée, d’autant que certains comptes-rendus détaillés montrent que les arguments échangés par les membres des comités sont élaborés et objectifs, restant circonscrits au travail spécifique de chaque compagnie28. D’autres comptes-rendus témoignent de jugements plus personnels et subjectifs29, qu’une plus grande transparence inciterait sans doute à plus de rigueur. Une transparence accrue serait dès lors le gage d'une meilleure visibilité des axes sous-tendant la politique culturelle de l'État. La DMDTS reconnaît d’ailleurs que la communication d’un « avis artistique global et synthétisé » par la DRAC est une piste d’évolution envisageable.

Plus fondamentalement, il apparaît que les comités d’experts rendent un avis en fonction de l’étude au cas par cas des dossiers, manifestement sans grille d’analyse formelle. Les critères énoncés dans les circulaires (« qualité artistique », « capacité de rayonnement », « régularité professionnelle », « prise de risque », …) peuvent faire l’objet d’interprétations différentes selon les comités. Les fondements sur lesquels repose la décision des comités ne sont ni clairement énoncés ni communiqués aux demandeurs. Selon la DRAC Rhône-Alpes, la nécessaire part importante de subjectivité « est relativisée par le dégagement, après débat, d’un avis collectif majoritaire exprimé par le comité d’experts ».

En réponse aux observations provisoires de la Cour, la DMDTS rappelle dans un premier temps que « la décision d’attribution des aides par la DRAC s’appuie sur les données totalement objectives que les membres des commissions ont à leur disposition quand ils siègent : le montage des productions, les lieux qui ont fait des pré-achats, les lieux de diffusion annoncés… ». L’administration centrale estime par ailleurs que « l’appréciation de la « solidité artistique » ne relève pas que de l’intuition subjective. Elle s’apprécie au regard d’un certain nombre de critères examinés par les experts, notamment pour la danse et le théâtre : choix des répertoires, partis pris de mise en scène ou de mise en espace, décors et costumes, choix des lumières, etc. ». Il lui semble toutefois difficile d’aller plus loin qu’aujourd’hui dans la définition de critères sans restreindre exagérément le pouvoir d’appréciation des membres des commissions.

En revanche, la DMDTS reconnaît que le vote des experts pourrait être objectivé par l’attribution de notes unitaires sur différentes composantes de l’évaluation : la qualité artistique de la proposition, le professionnalisme de son concepteur, les conditions de la diffusion du projet.

Enfin, à ce jour, l’avis du comité d’experts a pour seule finalité d’éclairer les services de l'État dans leur décision de subventionnement. Cet avis, rendu par des personnalités reconnues dans leur domaine artistique, n’emporte pas de reconnaissance spécifique pour les compagnies lorsque l'État décide de ne pas suivre l’avis favorable d’un comité d’experts. Les compagnies, soutenues par les comités d’experts, ne peuvent donc se prévaloir d’une certaine reconnaissance artistique qui pourrait pourtant peser dans les choix des autres financeurs publics ou privés.

La DMDTS considère comme une piste intéressante la notion d’avis labellisant, déconnectée du financement éventuel « compte tenu du caractère limité des enveloppes budgétaires disponibles et de la nécessité de renouveler les artistes aidés financièrement en accompagnant l’émergence ». La reconnaissance d’une démarche artistique par la commission serait une garantie de distinction auprès des réseaux de diffusion et des autres financeurs, publics ou privés.

Une démarche de subventionnement sélective

Au regard des pratiques culturelles foisonnantes sur les territoires, les DRAC font preuve de sélectivité dans le choix des structures et des compagnies aidées. Ce constat, auquel la contrainte budgétaire n’est pas étrangère, tranche avec le sentiment de saupoudrage que les corps de contrôle ont régulièrement critiqué.

Concernant les lieux de création et de diffusion, seul le « premier cercle » est aidé par les DRAC. Bien que sa définition soit fluctuante, ce noyau est constitué des centres dramatiques et chorégraphiques nationaux, des opéras et orchestres nationaux, des centres nationaux de création musicale, des scènes nationales, des centres de développement chorégraphique et des principales scènes conventionnées. Un « deuxième cercle » est constitué de scènes conventionnées de taille plus réduite et de théâtres de villes, tandis qu'un « troisième cercle » regroupe des lieux plus modestes comme les maisons de quartier. Ces deux derniers cercles, ciblant un public différent des scènes du premier cercle, sont ignorés des DRAC dans leur démarche de subventionnement30.

La démarche de la DRAC Bretagne visant à subventionner des théâtres de petites villes sous le label « scènes de territoires » détonne dans ce paysage. Elle questionne la logique d'intervention traditionnelle de l'État. En effet, par des subventions d'un montant modeste, l’État irrigue aussi la diffusion du spectacle vivant sur l’ensemble du territoire en déclinant ses exigences artistiques. Avec des crédits mineurs, l’effet de levier de l’intervention de l’État apparaît élevé et l’objectif de démocratisation culturelle qu’il promeut semble plus tangible. Cette démarche permet en outre une mise en réseau de lieux souvent isolés. Toutefois, avec des crédits budgétaires contraints, la multiplication de petites subventions rend moins lisible la logique d’intervention de l’État. Elle peut fragiliser des structures historiquement aidées mais dont la situation économique reste précaire. Une évaluation de la démarche entreprise en Bretagne est indispensable pour en apprécier les effets réels au regard des objectifs propres de l’État.

La sélectivité de l’intervention de l’État apparaît également au niveau des subventions qu’il accorde aux équipes artistiques. La mesure de cette sélectivité connaît des limites : la DMDTS a reconnu son incapacité à quantifier le taux d’équipes artistiques subventionnées par le ministère de la culture et de la communication, du fait de l’absence de données fiables relatives au nombre de compagnies professionnelles sur le territoire. Les seules données disponibles en DRAC sont relatives aux taux de sélection des aides aux équipes artistiques. Toutefois, le rôle de filtre joué en amont par les conseillers sectoriels, dissuadant les compagnies les moins susceptibles d’obtenir un avis favorable de déposer une demande de subvention, afin de ne pas engorger le travail des comités d’experts, a pour conséquence un taux d’acceptation des dossiers qui est apparemment élevé, de l’ordre de 50 %.

Certaines données sont agrégées par les observatoires des agences régionales du spectacle vivant, mais ne sont pas consolidées au niveau national. Les données parcellaires collectées par la Cour dans les régions visitées au cours de l’instruction tendent à accréditer l’idée d’une sélectivité certaine de l’État dans sa démarche de subventionnement.

Ainsi, en Rhône-Alpes, l’agence régionale La Nacre a identifié 650 compagnies professionnelles dans le champ de la danse, du théâtre ou de la musique et 300 lieux de diffusion. La DRAC aide 101 compagnies et 45 lieux, soit 15 % de l’ensemble des lieux ou compagnies professionnelles répertoriés. En Poitou-Charentes, l'agence régionale a identifié 550 artistes professionnels ou en voie de professionnalisation dans le domaine du spectacle vivant. La DRAC a subventionné 32 équipes artistiques en 2006, soit moins de 6 % des équipes. Le Conseil régional apportait son soutien à 82 compagnies (près de 15 %). Seules sept compagnies avaient signé une convention avec la DRAC, contre 41 avec le Conseil régional.

L’analyse des montants unitaires alloués aux structures et aux équipes artistiques dans les régions étudiées par la Cour corrobore cette appréciation de sélectivité dans les choix de l’État - qui va de pair avec une réduction des crédits alloués aux équipes. Le nombre de compagnies conventionnées progresse (71 en 2006, 84 en 2008), tandis que celui des aides au projet diminue (de 139 à 124). L’exigence de l’État se combine avec l’évolution naturelle des équipes à progresser des aides les plus élémentaires vers le conventionnement, tendance que les DRAC peuvent difficilement freiner.

Tableau n° 5 : Montant moyen des aides de l’État au spectacle vivant dans les quatre DRAC étudiées (en €)

 

2006

2007

2008

2008 / 2006

 

Nb

Montant moyen

Nb

Montant moyen

Nb

Montant moyen

Aide mini

Aide maxi

 

Structures de création-production

29

1 212 185

30

1 229 290

29

1 270 213

   

4,8%

Opéra

2

3 186 767

2

3 294 134

2

3 349 964

1 005 263

5 694 665

5,1%

Orchestre

7

1 051 939

7

1 066 789

7

1 066 681

222 576

1 880 000

1,4%

CDN et CDR

10

1 657 656

10

1 678 156

10

1 692 186

562 600

3 760 000

2,1%

CCN

5

671 610

5

658 214

5

665 534

559 100

648 700

-0,9%

Centres de création musicale

5

296 328

6

262 163

5

238 549

56 000

677 200

-19,5%

Structures et lieux de diffusion

118

197 102

114

206 201

116

200 826

   

1,9%

Scènes nationales

19

810 065

19

820 916

19

833 405

330 000

2 338 110

2,9%

Scènes conventionnées

23

137 666

23

145 629

25

132 669

32 000

575 000

-3,6%

SMAC et lieux assimilés

26

80 441

27

81 351

28

75 350

5 000

350 633

-6,3%

Festivals

50

52 180

45

52 523

44

46 240

9 100

344 895

-11,4%

Autres lieux de production et diffusion

8

286 728

22

112 753

28

92 693

10 000

773 633

-67,7%

Équipes artistiques

229

39 568

227

39 476

225

38 657

   

-2,3%

Compagnies dramatiques

122

47 394

119

47 653

124

44 634

   

-5,8%

Conventions

53

83 928

59

77 843

63

73 780

15 000

462 100

 

Aides à la production

69

19 331

60

17 967

61

14 533

3 000

39 000

 

Comp. chorégraphiques

53

26 657

52

26 994

54

24 012

   

-9,9%

Conventions

8

84 525

8

87 513

7

82 286

42 000

164 000

 

Aides à la compagnie

10

33 760

10

39 360

7

43 429

20 000

114 000

 

Aides au projet

35

11 400

34

9 118

40

10 417

2 000

29 660

 

Ensembles musicaux

54

34 560

56

33 691

47

39 713

   

14,9%

Conventions

10

127 550

10

135 350

14

105 250

25 000

240 000

 

Aides à la structuration

9

26 969

10

24 100

10

21 000

10 000

24 500

 

Aides au projet

35

9 943

36

8 116

23

7 957

3 000

23 000

 

Total

384

181 683

393

179 771

398

176 377

   

-2,9%

Source : Cour des comptes à partir des données DMDTS, en neutralisant la subvention atypique à l'Opéra de Rennes.

Un conventionnement des structures inégalement répandu, variable dans sa portée et peu évalué

D’un point de vue quantitatif, l’effort de conventionnement est inégal selon les labels et selon les disciplines (cf. annexe 9). En tout état de cause, l’effort de conventionnement n’est pas corrélé à l’existence d’un texte réglementaire : ainsi, 100 % des maisons d’opéras sont conventionnées en l’absence de tout texte réglementaire, alors que les scènes nationales, pourtant encadrées par une circulaire spécifique31, affichent un taux de couverture par un contrat d’objectif de 25,7 %.

Un effort de conventionnement qualitativement inégal

Des conventions aux contours et à la portée variables

Qu’un cadre réglementaire spécifique existe ou non, les conventions signées entre l’État et les labels sont très variables dans leur portée (cf. annexe 10). D’une manière générale, la politique de conventionnement conduite par l’État se traduit par la fixation d’objectifs qui se veulent adaptés à la spécificité de chaque structure.

Certaines structures ont conclu des conventions précises, comportant des objectifs chiffrés pour l’ensemble de leur activité, en l’absence de tout cadre réglementaire. C’est le cas des maisons d’opéras (Lyon) ou de certains orchestres permanents (Pays de Savoie) qui se fixent, par exemple, des objectifs en matière de répertoire interprété sur la durée du conventionnement ou un nombre minimum de concerts par saison.

En contrepartie, la DRAC peut s’engager sur une évolution des financements qui seront accordés à la structure. Bien que ce type d’engagement reste rare, certaines conventions avec des structures encadrent de manière pluriannuelle le financement alloué par l'État. C’est le cas de la convention signée avec l’Opéra de Lyon pour les années 2006-2010 qui prévoit une progression de la subvention de l'État de 2 % par an, auquel la DRAC s’est jusqu’ici tenue.

Il arrive que les structures soient encadrées par des conventions présentant un niveau d’exigence plus élevé que celui qui est contenu dans les textes réglementaires encadrant leur activité. C’est notamment le cas des scènes nationales, dont certaines ont introduit dans leur contrat d’objectifs des données chiffrées en matière d’accueil d’artistes associés (Brest), d’action territoriale (Saint-Brieuc) ou de principes de gestion (Saint-Brieuc), alors que la circulaire du 30 avril 1997 relative aux scènes nationales et aux contrats d’objectifs n’impose pas un tel degré de précision.

À l’inverse, les conventions restent peu contraignantes, dans leur contenu et dans leur portée, lorsque l’intervention de l’État est récente (c’est le cas des arts de la rue et du cirque, notamment) ou lorsque la dimension et l’activité économique des structures ne le justifient pas (scènes de musiques actuelles).

L’objectif de diffusion ne transparaît pas de l’analyse des conventions

L’examen des conventions successives passées entre l’État et les structures de création-production ou de diffusion ne permet pas de déceler une priorité accordée à la diffusion, contrairement à l’objectif retenu par le ministère (cf. supra).

Ainsi, les conventions passées entre l’État et les directeurs de CDN se fondent, depuis une quinzaine d’années, sur le contrat-type défini par un arrêté du 23 février 1995. Pour le Théâtre du Nord, l’État n’a pas jugé utile de fixer des objectifs de diffusion plus ambitieux que ceux figurant dans le contrat-type : le contrat 2005-2007 reprend les mêmes cibles que le contrat 2002-2004 en la matière (240 représentations sur trois ans).

Pour des structures dont les conventions ne sont pas encadrées par des modèles-types, les objectifs de diffusion peuvent même être réduits. À titre d’exemple, la convention 2001-2004 liant l'État à l’Orchestre national de Lille prévoyait 110 à 120 prestations en moyenne par saison, tandis que la convention 2009-2011 fixe un objectif de 100 manifestations par saison. Plus encore, la convention liant l'État au Théâtre de l'Instant, compagnie conventionnée à Brest, prévoyait pour la période 2003-2005 un minimum de 120 représentations pour la durée de la convention. Cette disposition n’est plus mentionnée dans la convention pluriannuelle d'objectifs 2006-2008 : si le projet artistique est précisé, aucune indication ne concerne le nombre de représentations.

Selon la DRAC Nord Pas-de-Calais, l’augmentation de la masse salariale des structures ne permet pas à l’Etat, dont la subvention ne progresse pas, de leur imposer des objectifs plus ambitieux.

L’évaluation des conventions reste limitée

L’évaluation des équipes artistiques est inégale

Les aides au projet font l’objet d’une évaluation a minima par les DRAC. Un bilan des projets précédemment aidés est dressé, en termes de qualité artistique et de diffusion, lors de chaque nouvelle demande d’aide formulée par une équipe artistique. Le dispositif d’aides chorégraphiques est le plus formalisé, la circulaire du 12 mars 2004 précisant que « les demandeurs qui ont déjà bénéficié d’une aide à la création doivent fournir à l’appui d’une nouvelle demande tous les documents permettant d’apprécier les conditions de réalisation effective de ou des projets sur lesquels portait l’aide précédente et la diffusion à laquelle ils ont donné lieu ».

Dans l’état actuel du droit, l’évaluation des aides à la structuration est inégale selon la discipline concernée. Si aucune obligation d’évaluation ne pèse, en droit, sur les aides à la structuration accordées aux ensembles musicaux, l’attribution d’une aide à la compagnie chorégraphique fait l’objet d’un contrat entre l’État et le bénéficiaire qui précise notamment les obligations qui découlent de l’aide32.

Les aides aux équipes conventionnées, enfin, donnent lieu à une évaluation plus poussée. Au cours de la dernière année d’exécution de la convention (au plus tard six mois avant dans le domaine de la musique), un bilan contradictoire doit être établi, portant sur :

- l’atteinte par la compagnie des objectifs exposés dans la convention,

- les évolutions éventuelles envisagées pour les années à venir,

- le volume d’activité de la compagnie, l’audience recueillie par ses productions,

- le professionnalisme de son fonctionnement, la rigueur de sa gestion.

La sanction d’une évaluation insatisfaisante peut se traduire, en théorie, par le non-renouvellement de la convention (cf. infra).

Les données issues des conventions sont peu exploitées

Les propositions pour le spectacle vivant élaborées en 2004 par le ministère de la culture indiquaient que « les différents partenaires (État, collectivités territoriales, organisations professionnelles, société civile) manquent (…) d’un système d’observation cohérent d’informations non contestables sur le spectacle vivant, facilitant l’exercice des responsabilités de chacun, la réflexion partagée, l’élaboration des politiques et l’analyse prospective ».

Ce même document relevait qu’il était nécessaire d’« évaluer sur le terrain l’impact des politiques engagées et pouvoir ainsi les corriger ou les amender pour être au plus près de ses objectifs, inspecter les structures aidées pour les connaître dans leur fonctionnement réel et être à même de leur fournir des orientations à la fois fortes et réalistes ». Ces propositions confirmaient le constat d’insuffisance des moyens d’observation, d’évaluation et de contrôle des partenaires publics.

Les conventions qui lient l’État aux équipes artistiques et aux lieux du spectacle vivant devraient pouvoir permettre de disposer de cette information. La DMDTS fait à cet égard valoir dans sa réponse que les conventions comportent de plus en plus d’objectifs chiffrés en matière d’activité, d’emploi et de gestion.

Il apparaît toutefois que les données recueillies dans les DRAC dans le cadre du suivi de l’exécution des contrats demeurent hétérogènes, faiblement utiles et souvent inexploitées33. Ce constat n’est guère surprenant dès lors que les contrats sont souvent bilatéraux entre la structure aidée et l’État, mais aussi entre celle-ci et chacune des collectivités territoriales contribuant à son financement, de sorte que chaque convention fixe ses exigences en termes de restitution et de calendrier. Face à ces contraintes multiples, les bénéficiaires tendent à ne faire qu’un seul compte rendu d’activité qui ne comporte pas toujours les données exigées par l’État. De surcroît, ces comptes-rendus portent principalement sur le volet artistique qui concentre l’attention tant des structures concernées que de la DRAC, au détriment des données quantitatives qui permettraient de nourrir une base de données. Le développement de conventions pluri-partenariales permet certes de rendre cohérents les approches et les critères d’évaluation des différentes collectivités publiques. Mais ces conventions ne sont pas encore généralisées.

L’État ne cherche pas à disposer d’une vision agrégée de son action

Par la méthode mise en œuvre, l’évaluation, quand elle est formalisée, reste cantonnée à une approche structure par structure, compagnie par compagnie. Alors que la stratégie de l’État relève d’une alchimie complexe, allouant des aides à des lieux de création, de diffusion et à des équipes artistiques, les DRAC ne formalisent pas d’évaluation de leur action dans une logique globale de projet.

Par ailleurs, si la DMDTS a développé d’importants projets en matière de systèmes d’information, la situation actuelle reste perfectible : la base de données OPUS34 est inégalement renseignée par les DRAC, tandis que les projets statistiques élaborés à la suite des audits de modernisation n’ont pas encore totalement abouti. Ainsi, en réponse à l’audit de modernisation mené en 2006, le ministère de la culture avait dit partager le souhait d’un établissement de comptes agrégés par projets. La réflexion conduisant à l’élaboration d’une telle approche a depuis été régulièrement repoussée. La DMDTS reconnaît que la mise en œuvre d’une approche en coûts complets par projets sera étudiée « après avoir travaillé sur une meilleure connaissance de la structuration des budgets des institutions ».

La difficulté de changer les équipes dirigeantes et de déconventionner

La longévité des directeurs de centres nationaux

L’État dispose de la compétence, souvent partagée avec les collectivités territoriales, de nommer le directeur de la structure pour la plupart des labels (cf. annexe 7). Cependant, l’exercice de cette compétence est limité dans les faits, comme en témoigne la longévité des directeurs dans certaines structures.

Les dispositions juridiques encadrant la durée du mandat des directeurs de centres dramatiques ne sont pas toujours respectées. L’application conjointe des dispositions du décret du 2 octobre 1972 (limitation à trois ans de la durée d’un contrat), de l’arrêté du 23 février 1995 fixant le contrat type de décentralisation dramatique et de la charte des missions de service public pour le spectacle vivant (limitation à deux occurrences du renouvellement des contrats), limite à neuf ans la durée totale du mandat d’un artiste à la tête d’un centre dramatique.

Or, cette durée d’activité est fréquemment dépassée par les directeurs, plusieurs cas de mandats de très longue durée étant ainsi recensés depuis la création du réseau des centres dramatiques. Le tableau suivant mentionne les cas les plus récents.

L’encadrement de la durée du mandat des directeurs de structures

La charte des missions de service public pour le spectacle vivant précise que le mandat du directeur des structures subventionnées « s’exerce sur la durée déterminée par le contrat d’objectifs. En règle générale, ce contrat peut être renouvelé après évaluation à deux reprises au plus ».

Concernant les centres dramatiques, le décret du 2 octobre 1972 dispose que les contrats de décentralisation dramatique « portent sur une période maximum de trois ans. (…) À leur terme ils peuvent être prolongés d’un an dans les mêmes conditions. Ils sont renouvelables ».

Dans l’état actuel du droit, le mandat des directeurs de centres chorégraphiques nationaux n’est soumis à aucune limitation de durée. Même lorsque le mandat est limité dans le temps, le contrat du directeur obéit aux règles du droit du travail du secteur privé, aux termes desquelles le contrat à durée indéterminée est la norme.

Aux termes du cahier des charges du 11 octobre 2005, les directeurs des centres nationaux de création musicale sont nommés pour une durée de six ans, ce mandat étant renouvelable deux fois par période de trois ans (soit un maximum de douze ans).

Le mandat des directeurs des scènes nationales n’est pas limité par les textes. La circulaire du 30 avril 1997 relative aux contrats d’objectifs précise que la durée du projet artistique est de quatre saisons, la convention étant renouvelable après évaluation. Le directeur des scènes nationales est titulaire d’un contrat à durée indéterminée de droit privé.

L’encadrement du mandat des directeurs de scènes conventionnées est très souple. La circulaire du 5 mai 1999 limite en effet les conventions à une période de trois ans, mais ne contient aucune disposition relative au mandat, ni même à la désignation des directeurs.

Lorsque les structures sont des établissements publics, ce sont les statuts qui fixent la durée du mandat du directeur, conformément à la loi du 4 janvier 2002. La durée du mandat est alors comprise entre trois et cinq ans ; ce mandat est renouvelable par période de trois ans. Le directeur bénéficie d'un contrat à durée déterminée d'une durée égale à son mandat.

Tableau n° 6 : CDN et lieux assimilés35 – Exemples de mandats de longue durée.

Structure

Date de prise de fonctions du directeur

Terme du mandat

Théâtre Jeune Public – CDN Strasbourg

1997

4ème mandat en cours (2012)

Théâtre Ouvert

1987

Mandat en cours

NTA – CDN Angers

1986

2006

La Manufacture – CDN Nancy

1992

6ème mandat en cours (2010)

CDN Lorient

1996

5ème mandat en cours (2011)

Théâtre de la Commune – CDN Aubervilliers

1997

4ème mandat en cours (2009)

Théâtre du Nord – CDN Lille

1998

4ème mandat en cours (2009)

Source : données DMDTS (en gris, les mandats achevés).

En l’absence de texte spécifique, l’encadrement de la durée du mandat des directeurs de centres chorégraphiques nationaux n’est pas conforme, dans les faits, aux recommandations issues de la charte des missions de service public pour le spectacle vivant. En effet, plusieurs mandats excèdent le cadre de trois conventions. Le tableau ci-dessous mentionne les cas les plus récents.

Tableau n° 7 : CCN – exemples de mandats de longue durée.

Structure

Date de prise de fonctions du directeur

Terme du mandat (de la convention en cours)

CCN Grenoble

1984

Mandat en cours (2009)

CCN La Rochelle

1986

2008

CCN Belfort

1990

2008

CCN Nantes

1992

Mandat en cours (2009)

CCN Montpellier

1994

Mandat en cours (2009)

CCN Rennes

1994

2008

Source : données DMDTS (en gris, les mandats achevés).

Le cas du CCN de La Rochelle illustre la difficulté de remplacer le directeur d’un centre national et les conséquences de son maintien. Après que la DRAC eut considéré le CCN comme défaillant à sa mission d’accueil des compagnies, une mission d’inspection conduite en 2003 a mis en évidence les insuffisances du projet de la directrice en ce domaine. Il a fallu près de cinq ans pour qu’une solution soit mise en œuvre. Un travail conduit par la DRAC, en lien avec la DMDTS et les collectivités territoriales a permis de redéfinir les bases d’un nouveau projet et de parvenir à un renouvellement de la direction artistique du CCN. Pendant cette période, la DRAC a subventionné le festival Les Éclats chorégraphiques, créé en 2004, fondé sur le principe de petites scènes ouvertes à des compagnies régionales. L’augmentation de la subvention d’un festival est ainsi venue compenser en partie la carence d’un CCN dans la réalisation de sa mission.

Les sorties de convention avec les équipes artistiques restent difficiles à réaliser

Le déconventionnement d’équipes artistiques représente une difficulté liée à la fragilité économique d’un secteur financé principalement par des ressources publiques. Les compagnies conventionnées se structurent, recrutent, investissent dans des projets artistiques dont l’échéance est parfois longue. Or, le calendrier artistique ne coïncide pas avec l’annualité budgétaire : les saisons de spectacles vont du mois de septembre de l'année n au mois de juin de l'année n+1, et sont préparées au début de l’année civile n-1, parfois n-2 pour des productions lyriques nécessitant des moyens importants. La dénonciation d’une convention quelques semaines avant son échéance ne cadre pas avec la réalité de ce calendrier. Dans ce cas, la DRAC peut maintenir le montant de l’aide financière pendant une ou deux années, le temps pour l’équipe artistique de repenser son activité.

Tel a été le cas de la compagnie chorégraphique Les Clandestins, basée à Poitiers. Après un avis défavorable du comité d'experts au renouvellement de sa convention en 2008, au motif que la compagnie n’avait pas respecté les exigences de diffusion auxquelles elle s'était engagée, la convention triennale n’a pas été renouvelée. Néanmoins, la compagnie a été subventionnée au titre de « l'aide à la compagnie », à hauteur de l’aide financière accordée jusque là (110 000 euros36), l’équipe étant investie sur un projet majeur.

La fragilité du secteur peut être également constatée dans le mécanisme d’attribution et de renouvellement des aides au projet. Bien que n'étant pas censées être accordées deux années de suite, ces dernières sont parfois reconduites afin de ne pas mettre en péril l’activité artistique de l’équipe. Certaines compagnies voient ainsi leurs demandes acceptées d’une année sur l’autre : Gang Peng (La Rochelle) a été aidée chaque année de 2003 à 2007, Pic la Poule (Buxerolles) a été aidée au projet chaque année de 2003 à 2006 puis en 2008, au titre des aides complémentaires.

UNE ATTENTION INSUFFISANTE PORTÉE AUX AUTRES RESSOURCES

Une des contraintes qui limitent les marges de manœuvre de l’État dans le subventionnement des structures est la fragilité économique du secteur du spectacle vivant. Alors que les DRAC intègrent dans leurs décisions une analyse fine des réalités locales, quasiment aucune attention n’est portée aux autres sources de financement des structures pourtant majoritaires : subventions des collectivités territoriales, ressources propres. Avec une politique qu’il souhaite originale et empreinte d’exigence artistique, l’État poursuit une démarche souvent autonome, sans réelle prise en compte des autres financeurs.

DES LIENS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES PEU FORMALISÉS

Une connaissance partielle des subventions des collectivités territoriales au spectacle vivant

Le ministère de la culture, en administration centrale comme en DRAC, n’a pas de vision précise des dépenses des collectivités territoriales en matière de spectacle vivant. Les données qu’il collecte sont partielles, en raison notamment de difficultés structurelles (par exemple, la nomenclature budgétaro-comptable des collectivités locales ne permet pas d’isoler les dépenses entrant dans le périmètre de l’action 1 du programme 131).

La DMDTS publie à un rythme bisannuel une cartographie nationale du spectacle vivant, retraçant les « subventions publiques aux réseaux » et détaillant, par type de structures, les financements apportés par le ministère de la culture et par chaque type de collectivité territoriale (régions, départements, communes et leurs groupements). L’audit de modernisation mené en 2006 s’est fondé sur la cartographie de 2004 pour comparer l’engagement de l’État et des collectivités territoriales en la matière.

Toutefois, les données qui y sont présentées sont partielles et ne couvrent pas l’ensemble des subventions allouées par les collectivités territoriales. En effet, ne sont recensées que les structures au financement desquelles participent les DRAC, ces dernières étant à la source des informations collectées. Autrement dit, un théâtre de ville ou une équipe artistique subventionnés par les collectivités territoriales mais non par l’État ne figurent pas dans le périmètre de la cartographie. Une structure financée par la DMDTS (et non par la DRAC) et par les collectivités territoriales n’y apparaît pas non plus (c’est par exemple le cas de l’Orchestre des Champs Elysées).

Selon le périmètre restreint de la cartographie, les subventions allouées par la région Poitou-Charentes au spectacle vivant en 2006 auraient été d’un montant de 6,41 M€ en 2006. Pourtant, selon l’agence régionale du spectacle vivant de Poitou-Charentes, le budget alloué au spectacle vivant par le conseil régional en 2006 était de 10,3 M€, soit 61 % de plus.

Pour pallier ces difficultés et renforcer ses moyens d’analyse, la DMDTS s’attache actuellement à mettre en place, en lien avec les DRAC, une remontée d'informations statistiques par questionnaires d'enquête spécifiques concernant les politiques et les dépenses culturelles menées dans le domaine du spectacle vivant par les régions.

D’autres données consolidées par le ministère de la culture ont un périmètre différent. En mars 2009, le département des études, de la prospective et des statistiques du ministère de la culture a publié une étude portant sur « les dépenses culturelles des collectivités locales en 2006 ». Y sont analysés près de 7 milliards d’euros dépensés pour la culture par les collectivités territoriales (communes de plus de 10 000 habitants et leurs groupements, départements et régions).

La méthodologie retenue par l’étude témoigne de deux limites. D’une part, le périmètre de l’enquête est restrictif puisqu’en sont exclues les communes de moins de 10 000 habitants. D’autre part, la présentation des dépenses se fait selon les nomenclatures comptables en vigueur - respectivement les normes M14, M52 et M71 - qui ne permettent pas d’identifier spécifiquement les dépenses allouées au « spectacle vivant », selon la terminologie de l’action n°1 du programme Création.

Le périmètre le plus fidèle aux dépenses en faveur du spectacle vivant regroupe :

- pour les communes de plus de 10 000 habitants et leurs groupements, les dépenses relatives à l’expression musicale, lyrique et chorégraphique, aux théâtres et aux autres salles de spectacles (dont cinémas) et à l’action culturelle ;

- pour les départements, les dépenses d’activités artistiques et d’action culturelle ;

- pour les régions, les dépenses d’activités culturelles et artistiques.

Le périmètre des données comptables des nomenclatures M52 et M71

Les nomenclatures M52 et M71, respectivement applicables aux départements et aux régions, comportent une rubrique intitulée « activités artistiques et action culturelle » qui comprend des dépenses relevant du périmètre du « spectacle vivant » :

- le fonctionnement des formations permanentes (orchestres, chœurs, corps de ballet, etc.),

- les actions en faveur des activités musicale, lyrique ou chorégraphique (conservatoires, écoles de musique, programmation de spectacles, etc.),

- les théâtres : subventionnement des salles de spectacles et des scènes nationales, fonctionnement des formations permanentes (troupes de théâtre), actions en faveur de la pratique des activités théâtrales (y compris les aides aux troupes d’amateurs).

D’autres dépenses sont hors de ce périmètre :

- les actions en faveur de la pratique des arts plastiques et des autres disciplines artistiques,

- l’organisation d’expositions ;

- l’aide à la création artistique (régions uniquement : part régionale consacrée à l’investissement à l’insertion d’œuvres d’art, d’œuvres cinématographiques,…),

D’autres enfin le recoupent partiellement :

- les actions concernant les cinémas et autres salles de spectacles,

- l’action culturelle (activités d’animation culturelle dans lesquelles la production ou l’enseignement artistique est secondaire : maisons de la culture, organisation de festivals, salles des fêtes et salles polyvalentes, centres d’animation culturelle).

Dans ce périmètre, les subventions de fonctionnement versées par les régions et les départements aux opérateurs du spectacle vivant se seraient élevées en 2006 respectivement à 263,1 M€ et 243,2 M€ alors que la cartographie éditée par la DMDTS, limitées aux structures par ailleurs financées par les DRAC, indique 148,4 M€37 et 130,8 M€.38

Dépenses de fonctionnement et subventions versées en faveur du spectacle vivant par les principales collectivités territoriales en 2006 (M€)

   

Dépenses de fonctionnement

dont subventions versées (*)

Communes de plus de 10 000 habitants

1 856,3

562,9

 

Expression musicale, lyrique et chorégraphique

781,0

100,0

 

Théâtres

277,6

115,9

 

Autres salles de spectacles (dont cinémas)

156,3

59,9

 

Action culturelle

641,4

287,2

EPCI à fiscalité propre

311,7

79,8

 

Expression musicale, lyrique et chorégraphique

169,6

10,1

 

Théâtres

44,9

29,9

 

Autres salles de spectacles (dont cinémas)

13,1

5,0

 

Action culturelle

84,1

34,9

Départements

413,7

243,2

 

Activités artistiques et action culturelle

413,7

243,2

Régions

358,6

263,1

 

Activités culturelles et artistiques

358,6

263,1

Total

2 940,3

1 149,0

Source : Cour des comptes à partir de l’étude DEPS, mars 2009. Les communes de moins de 10 000 habitants, regroupant pourtant plus de la moitié de la population, ne sont pas recensées par l’étude

(*) Les subventions versées excluent celles au profit d’autres collectivités locales

La fragmentation des approches

La part de l’État dans l’ensemble des subventions publiques au spectacle vivant est minoritaire. En s’en tenant aux données de la cartographie nationale du spectacle vivant, il s’avère que, sur le périmètre des structures financées par les DRAC en 2006, l’État contribuait à hauteur de 31,5 % au subventionnement des structures qu’il finançait. Ce taux est relativement stable au cours des dernières années, bien qu’en légère diminution, puisqu’il était de 32,6 % en 2003 et de 32,3 % en 2004.

Part des financements apportés par l’État et les collectivités territoriales dans les structures bénéficiant d’une subvention DRAC en 2006

   

DRAC

Collectivités territoriales

 

Nb

Total

%

Ville

Dépt

Région

Autres

Total

%

Structures de création-production

                 

Centres dramatiques nationaux

40

61,0

55,9%

29,7

7,5

10,9

 

48,1

44,1%

Centres chorégraphiques nationaux

19

14,7

47,7%

8,5

1,6

6,0

 

16,2

52,3%

Centres de création musicale

7

2,6

62,5%

0,6

0,3

0,6

 

1,5

37,5%

Opéras

13

27,0

15,2%

129,4

4,9

15,6

 

149,9

84,8%

Orchestres permanents

24

33,4

30,4%

43,9

4,2

28,6

 

76,6

69,6%

Pôles cirque

9

1,2

24,4%

2,0

0,9

0,9

 

3,8

75,6%

Arts de la rue

10

3,0

42,1%

2,2

0,7

1,3

 

4,1

57,9%

Sous-total

122

142,9

32,2%

216,3

20,0

63,8

0,0

300,2

67,8%

Structures et lieux de diffusion

                 

Scènes nationales-SN

70

51,0

32,3%

74,4

18,5

14,0

 

106,9

67,7%

Scènes conventionnées

91

9,5

12,1%

50,3

11,3

7,8

 

69,4

87,9%

Scènes de musiques actuelles

136

8,0

20,2%

18,0

3,7

5,0

4,9

31,7

79,8%

Festivals

306

20,9

24,5%

30,9

17,2

16,4

 

64,5

75,5%

Sous-total

603

89,4

24,7%

173,6

50,7

43,2

4,9

272,5

75,3%

Equipes artistiques

                 

Compagnies dramatiques

246

7,1

51,0%

2,1

1,9

2,9

 

6,8

49,0%

Compagnies chorégraphiques

663

33,8

52,1%

9,8

8,2

13,0

 

31,0

47,9%

Ensembles musicaux et vocaux

296

13,2

50,2%

4,3

3,0

5,8

 

13,1

49,8%

Sous-total

1205

54,1

51,5%

16,2

13,1

21,7

0,0

51,0

48,5%

Total

 

286,4

31,5%

406,1

83,8

128,8

4,9

623,6

68,5%

Source : cartographie nationale du spectacle vivant 2006, DMDTS

En dépit du constat faisant de l’État un financeur minoritaire du secteur, les aides allouées par les collectivités territoriales ne sont que rarement prises en compte par les DRAC dans leur démarche de subventionnement. Même si les subventions publiques s’inscrivent dans les faits dans un continuum d’aides de l’échelon local au niveau national, peu d’échanges sont constatés entre les DRAC et les collectivités territoriales.

La circulaire relative à l’aide à la création chorégraphique dispose qu’« un ancrage territorial ou l’aide des collectivités territoriales peuvent constituer des éléments utiles d’appréciation pour l’octroi de [l’aide à la compagnie] et encore plus pour son renouvellement ». Toutefois, dans les faits, l'aide de l'État intervient souvent avant la décision de subvention des collectivités territoriales.

Part des compagnies aidées par l’État qui sont également aidées par une collectivité territoriale en 2006 dans les quatre DRAC étudiées

 

Région

Département

Commune

Compagnies dramatiques

94 %

72 %

62 %

Compagnies chorégraphiques

74 %

58 %

60 %

Ensembles musicaux et vocaux

83 %

57 %

48 %

Source : DMDTS

Il existe en fait une certaine proximité entre les services des DRAC et ceux des conseils régionaux. Dans la plupart des régions, les représentants des services culturels des conseils régionaux assistent aux comités d’experts en qualité d’observateurs. Réciproquement, lorsque des commissions d’attribution d’aides sont instituées par les conseils régionaux, comme c’est le cas en Poitou-Charentes, les conseillers sectoriels des DRAC y assistent. Par ailleurs, ces fonctionnaires de l’État et des régions se rencontrent régulièrement aux conseils d’administration des structures aidées ou aux comités de suivi des conventions pluripartites. La proximité est bien moindre entre les services de l’État et ceux des conseils généraux ou des communes.

Il est aussi intéressant de constater qu’une compagnie chorégraphique sur quatre aidées par l’État ne reçoit pas d’aide de la région, quatre sur dix aucune aide du département, ou qu’un ensemble musical sur deux aidés par l’État n’est pas soutenu par une collectivité départementale ou communale. Le rôle propre de l’État financeur n’est donc pas marginal, et l’État n’est pas que l’un des membres du tour de table.

Aussi, la logique d’intervention de chaque collectivité publique répond-elle à des objectifs spécifiques.

En ce qui concerne les aides allouées au spectacle vivant, celles qui sont attribuées par les collectivités territoriales sont, en général, d’un montant plus élevé que les aides de l’État. Les aides aux équipes artistiques font exception, l’État et les collectivités territoriales intervenant à parité (cf. tableau n°17).

Pour ce qui est des objectifs assignés aux structures d’autre part, les conventions peuvent, après l’énoncé des bases de l’engagement commun, décliner les attentes spécifiques de chacune des parties. Par exemple, la convention pluripartite liant l’Orchestre national de Lyon, l’État, la région Rhône-Alpes et la ville de Lyon, stipule-t-elle que :

- l’État vise à favoriser la démocratisation culturelle ;

- la région souhaite encourager le développement de la pratique musicale, la professionnalisation et l’insertion des jeunes musiciens, l’accès des jeunes à la culture ;

- la ville entend mettre l’orchestre au service du développement de la ville et de son rayonnement international.

Par la suite, les comptes-rendus rédigés par les structures restent succincts. L’État et les collectivités territoriales n’ont pas cherché à mutualiser leurs compétences pour mener une évaluation partagée plus poussée de la réalisation des conventions.

Les conférences du spectacle vivant en régions doivent en principe permettre de clarifier les spécificités de chaque collectivité. Toutefois, l’articulation entre les politiques menées par les régions d’une part et l’État d’autre part semble à ce jour fonctionner sur la base de coopérations administratives et informelles efficaces. Une discussion formelle, à la portée politique, peut ne pas avoir une telle portée opérationnelle comme en témoigne l’échec de la conférence régionale organisée en 2004 en Bretagne.

UNE FAIBLE ATTENTION AUX RESSOURCES PROPRES

Les conventions établies entre l’État et les principales scènes fixent de manière indicative le montant des ressources propres à atteindre par le lieu pour chaque exercice. Cette information se trouve généralement en annexe, dans les budgets prévisionnels de la structure.

Les contrats de décentralisation dramatique prévoient que le taux de ressources propres des structures doit être supérieur à 20 %. Toutefois, ce taux est rarement atteint sans que cela emporte de conséquences sur la vie du contrat : alors que le taux de ressources propres du Théâtre du Nord est inférieur à 10 %, les financeurs publics n’en tirent pas de conséquence opérationnelle et n’en font pas mention lors des comités de suivi39.

Les contrats de décentralisation dramatique constituent une exception formelle en la matière, le corps des autres contrats étant rarement contraignant. Ainsi, la convention 2006-2010 relative à l’Opéra national de Lyon précise que devra être annuellement produit le ratio recettes de billetterie / dépenses de production artistique, mais n’indique pas de valeurs cibles à atteindre sur la période. Selon la DRAC Rhône-Alpes, « ce ratio ne constitue pas principalement un objectif de performance mais représente simplement un outil de gestion ».

Une cible de fréquentation sur la durée de la convention peut, il est vrai, être inscrite dans le corps du contrat. Toutefois, si, de prime abord, un tel objectif s’apparente aux produits d’exploitation de la structure, les conventions ne distinguent pas les fréquentations payantes des autres.

Cette moindre préoccupation des DRAC vis-à-vis des ressources propres peut se manifester dès la constitution des dossiers de subvention. Si certaines DRAC (Rhône-Alpes par exemple) demandent explicitement aux organismes sollicitant une subvention supérieure à 23 000 euros de fournir des informations sur leurs ressources propres40, d’autres (Poitou-Charentes, par exemple) ne demandent pas de documents spécifiques en la matière, se limitant au compte de résultat de la structure pour l’année n-1.

En réponse aux observations provisoires de la Cour, la DMDTS indique que « des instructions et des rappels pourront être communiqués aux DRAC, notamment dans la directive nationale d’orientation, compte tenu notamment de la présence d’un indicateur dans la LOLF sur la part des ressources propres ». Pour ce qui concerne les équipes artistiques conventionnées, la DMDTS envisagerait « de modéliser dans les dossiers de demande d’aide une demande d’information sur leurs ressources propres ».

UNE POLITIQUE AUX RESULTATS INCERTAINS

L’efficacité et l’efficience de l’action de l’État, et plus particulièrement celles des DRAC, en soutien du spectacle vivant doivent se mesurer à l’aune des différents objectifs figurant dans les rapports annuels de performance. Les insuffisances de l’appareil statistique évoquées précédemment et les caractéristiques des indicateurs nationaux limitent toutefois la portée d’une telle démarche.

Difficilement mesurables en DRAC, ces objectifs sont par ailleurs en partie contradictoires, ce qui peut conduire les DRAC à opérer des choix affectant l’efficience de l’action de l’État au regard de certains objectifs et traduire en réalité la recherche d’une optimisation globale de l’action publique.

LES INSUFFISANCES DU DISPOSITIF DE PILOTAGE 

Le dialogue de gestion ne donne pas satisfaction aux drac

Le dialogue de gestion entre l’administration centrale et les DRAC a été ouvertement critiqué par celles-ci à l’occasion de l’exercice 2008.

Les DRAC demeurent en effet circonspectes sur la portée du dialogue de gestion dans le contexte budgétaire actuel. Les notes d’analyse rédigées par les inspecteurs généraux de l'administration des affaires culturelles sur la stratégie mise en œuvre par chaque DRAC pour répondre aux objectifs prioritaires fixés pour l’année 2008 identifient trois sources d’insatisfaction.

La première tient aux défauts prêtés à la directive nationale d’orientation (DNO). Le rapport relatif à la DRAC Languedoc Roussillon indique ainsi « au regard de l’expérience de 2008, la DRAC souhaiterait que le budget 2009, s’il devait être en diminution, s’accompagne d’orientations stratégiques claires compréhensibles par l’ensemble des partenaires ». En DRAC PACA est même plus directement évoqué « le manque de réalisme des orientations initiales données par l'administration centrale pour la construction du BOP 131 ».

La deuxième insatisfaction est étroitement liée aux incertitudes budgétaires et à la gestion de la réserve de précaution. Les conditions de l’exécution budgétaire 2008 sont à cet égard symptomatiques. Le budget avait en effet initialement été construit sur la base d’une forte contraction des crédits obligeant les DRAC à opérer des choix explicites et suscitant en retour le mécontentement des professionnels et des partenaires publics régionaux. Or, un important dégel de crédits étant intervenu en début d’exercice, les choix opérés ont été gommés, affectant la crédibilité des responsables régionaux vis-à-vis de leurs interlocuteurs et accentuant encore le manque de lisibilité de l’action de l’État. Les crédits débloqués étant en outre « fléchés » vers des cibles désignées par l’administration centrale, les DRAC ont souvent exprimé aux inspecteurs leur désaccord face à une démarche qu’ils assimilent à une recentralisation de la déclinaison locale des choix politiques. Ils estiment en outre que leur crédit et leur autorité ont été sapés par cette succession de revirements. S’agissant de la DRAC PACA, par exemple, l’inspecteur indique que « la multiplication des notifications de crédits complémentaires s'est apparentée à une recentralisation de la gestion par l'administration centrale, au mépris du dialogue que la DRAC devait avoir avec les collectivités locales et avec les organismes et les professionnels culturels. »

Enfin, les DRAC ont fait état des difficultés liées à la réorganisation en cours de l’administration centrale qui a conduit à des « impulsions contradictoires résultant d’une compétition entre les différents secteurs au niveau central », comme cela a été indiqué notamment en PACA.

Le rapport relatif à la DRAC Nord-Pas-de-Calais résume l’exécution budgétaire 2008 en ces termes : « mis en œuvre au fil de l'eau, le budget 2008 a été construit par vagues successives, selon les orientations ministérielles et le travail avec les secrétaires de programmes dans un dialogue de gestion qui a fini par ressembler à un pilotage de la centrale ».

Face à ces critiques, le ministère de la culture a cependant modifié son approche pour 2009, laissant les DRAC, à l’occasion de l’annonce du dégel des crédits, opérer librement leurs choix, sous réserve d’en rendre compte et de faire face sous enveloppe à leurs éventuels aléas de gestion.

Les moyens statistiques sont insuffisants

Les pouvoirs publics et les professionnels s’accordent à considérer que l’appareil statistique de suivi et d’analyse du spectacle vivant est insuffisant. Ce constat est paradoxal car les sources sont multiples (INSEE, DARES, UNEDIC, etc.) et les observateurs publics et privés sont nombreux. Faute de coordination, cette profusion aboutit à une mauvaise couverture de l’information, juxtaposant lacunes et redondances. Dès lors, cette dispersion de la collecte et du traitement des données afférentes au spectacle vivant ne permet pas de disposer d’une vision globale du secteur, d’aboutir à des constats partagés entre les parties prenantes, et a fortiori d’évaluer les effets des politiques publiques conduites.

Pour remédier à cette situation, à l’issue des entretiens de Valois, une plate-forme de préfiguration d’un dispositif national d’observation a été mise en place, destinée à élaborer un tableau de bord partagé de la situation du spectacle vivant en France. Les premières données issues de ces travaux ne seront toutefois pas disponibles avant plusieurs mois.

En juin 2008, des cartographies régionales du spectacle vivant ont été diffusées par la DMDTS. Chaque cartographie présente le financement public accordé aux principales structures du spectacle vivant dans la région. Ces données sont assorties d’indications socio-économiques et de diagrammes illustrant la part respective des différentes personnes publiques dans le financement de chacune de ces structures.

L’intérêt de cette cartographie mérite d’être souligné en dépit de ses délais d’élaboration qui altèrent sa pertinence dans le cadre du pilotage (les données portent sur l’année 2006) et de son périmètre trop restrictif (supra). La DMDTS confirme dans sa réponse que cette cartographie offre une présentation structurelle du spectacle vivant qui se révèle très utile dans les prises de décision au niveau central. Elle indique cependant que l’élaboration d’un tel recueil ne peut être envisagée annuellement.

La publication régulière de cet atlas devrait dans l’avenir contribuer à renforcer la transparence de l’action de l’État en région et renforcer la lisibilité de l’action de chaque DRAC. La DMDTS a pour sa part souligné la nécessité de développer « un suivi plus approfondi et régulier des pratiques culturelles des publics en termes de spectacle vivant et de l’évolution de l’offre artistique et économique qui peut y répondre. »

Pour l’heure, l’importante fragmentation des interventions de l’État conjuguée à la faiblesse des instruments d’analyse et d’évaluation restreint considérablement les possibilités pour la Cour de conduire une analyse objective et détaillée de la performance des DRAC dans le domaine du spectacle vivant.

Les indicateurs de performance propres aux drac ne sont pas isolés dans les rapports annuels de performance du programme 131

La lecture des objectifs et indicateurs relatifs au spectacle vivant figurant dans le rapport annuel de performance du programme 131 ne permet pas d’en dégager la performance des DRAC : les données relatives aux grands opérateurs nationaux y occupent une place importante et les données portant sur les réseaux nationaux pilotés à l’échelon déconcentré sont partielles.

Ainsi, à l’exception de l’indicateur 1.2 portant sur le renouvellement des équipes artistiques aidées (conventionnement et aides à projet), et qui concerne exclusivement des compagnies aidées par les DRAC, les autres indicateurs agrègent des données nationales et régionales et, pour les données régionales, se concentrent sur les centres dramatiques et sur les centres chorégraphiques nationaux, s’étendent plus rarement aux scènes nationales et négligent systématiquement les opéras, les scènes conventionnées et les scènes de musiques actuelles. En outre, agréger les fréquentations de la Comédie Française et de la scène nationale de Loos-en-Gohelle dans le Pas-de-Calais n’a, à l’évidence, guère de sens.

En définitive, sur les 14 indicateurs du programme, 8 seulement comportent des données partiellement représentatives de l’activité des DRAC dans le domaine du spectacle vivant.

Ce constat n’est toutefois pas surprenant dès lors que les documents d’analyse de la performance sont conçus pour appréhender globalement l’action de l’État, et non pour mesurer la performance propre de tel ou tel de ses organes. Il n’en demeure pas moins qu’au regard du thème ici analysé, ces indicateurs ne fournissent pas d’élément d’évaluation de la performance utilement exploitable.

Les indicateurs relatifs au spectacle vivant sont dans leur grande majorité alimentés par des données collectées par la DMDTS au terme d’enquêtes menées directement auprès des bénéficiaires des subventions de l’État, y compris les CDN et les SN. Cette organisation n’est guère responsabilisante pour les DRAC qui ne recueillent donc pas à la source, auprès des bénéficiaires de leurs subventions, l’information qui leur est nécessaire dans le cadre de leur pilotage, et dépendent à cet égard de leur administration centrale. C’est ce qui explique que la DRAC Bretagne ne disposait pas à la fin de 2008 d’informations sur la place de la création dans la programmation des structures de production qu’elle subventionne (CDN et SN), sur la part de la masse salariale dans le budget de ces structures, sur la fréquentation du public.

En réponse, la DMDTS a souligné que cette centralisation était le gage d’un traitement et d’un contrôle homogènes des données produites en vue de renforcer la fiabilité des données transmises aux parlementaires et que cette démarche ne prive pas les DRAC de la faculté de recueillir à leur niveau les informations dont elles peuvent avoir besoin pour alimenter leur propre outil de pilotage.

Tableau n° 8 : Objectifs du programme 131 – liste des indicateurs comportant des données représentatives de l’action des DRAC

Objectif

Indicateur DRAC

Indicateur PAP/RAP

Responsable de la production des données

1 - Inciter à l’innovation et à la diversité de la création

Taux d’entrée des compagnies et des ensembles dans les dispositifs d’aides (conventionnements et aides à projets)

1.2 Renouvellement des équipes artistiques aidées (conventionnement et aides à projet)

DRAC

Place de la création dans la programmation des structures de production subventionnées

1.3 Place de la création dans la programmation des structures de production subventionnées

Adm. Centrale

2 - Donner des bases économiques et professionnelles solides à la création

Place de la rémunération des artistes dans les structures subventionnées du spectacle vivant (CDN/CCN)

2.2 Garantie de l’emploi artistique

Adm. Centrale

Proportion des structures subventionnées faisant l’objet d’une convention dans le domaine du spectacle vivant

2.3 Effort de conventionnement avec les structures subventionnées

DRAC

3 - Augmenter la fréquentation du public dans les lieux culturels sur l’ensemble du territoire

Fréquentation des lieux du spectacle vivant subventionnés (fréquentation payante au siège) CDN/SN

3.1 Fréquentation des lieux subventionnés

Adm. Centrale

Taux des places vendues par rapport à la jauge mise en vente

3.2 Niveau de fréquentation payante des lieux subventionnés

Adm. Centrale

Part du public scolaire dans la fréquentation des structures du spectacle vivant (CDN/SN)

3.3 Fréquentation des lieux subventionnés par le public scolaire

Adm. Centrale

4 - Diffuser davantage les œuvres et les productions culturelles en France et à l’étranger

Taux de représentations offertes hors ville-siège par les structures de production et de diffusion (CDN/CCN)

4.1 Effort de diffusion territoriale

Adm. Centrale

Source : rapport d’analyse de performance – documents de suivi des BOP 131 en DRAC.

Il convient en outre de souligner que la mise à disposition de ces informations intervient simultanément en administration centrale et en DRAC, via le système d’information partagé OPUS. Dans la mesure où la DMDTS n’en disposait pas encore elle-même, le projet de BOP a été élaboré dans l’ignorance de ces informations.

Les indicateurs de performance des drac doivent être analyses avec prudence

Le dispositif de suivi et d’analyse de la performance n’est pas encore parfaitement stabilisé : certains des huit indicateurs précités sont modifiés d’une année sur l’autre ; le recul manque encore (deux années de réalisation) et certaines données sont difficilement accessibles. Les données retracées par ces indicateurs ne portent pas sur l’ensemble des structures et compagnies soutenues par les DRAC : un indicateur ne porte que sur les CDN, deux autres sur les CDN et CCN ; deux autres enfin sur les CDN et les scènes nationales. La DMDTS a indiqué que les autres réseaux (scènes de musiques actuelles ; opéras) auraient vocation à être inclus dans ce suivi mais qu’elle ne disposait pas de données les concernant. L’analyse de ces indicateurs doit par conséquent s’effectuer avec prudence.

À l’occasion de la contradiction du présent rapport, la DMDTS a en outre relevé de très nombreux écarts entre les données transmises par les DRAC à la Cour et celles saisies par ces mêmes DRAC et la DMDTS dans le système d’information partagé de suivi de la performance : les écarts relevés ont porté sur la moitié des données. La DMDTS y trouve la justification de la centralisation de la collecte des données et des mesures prises visant à en renforcer la fiabilité.

Certains indicateurs de performance des DRAC (tels qu’ils apparaissent après prise en compte des corrections apportées par la DMDTS) mettent en évidence des variations importantes et irrégulières d’une année sur l’autre (ainsi en est-il de l’évolution du taux d’entrée des compagnies et ensembles, de la place de la création dans la programmation des structures subventionnées ou du taux des représentations hors ville siège). Ces variations s’expliquent par des phénomènes conjoncturels et résultent en particulier des choix (place de la création dans la programmation) et succès artistiques (représentations hors villes-siège) des structures concernées. Pour renforcer la pertinence de ces indicateurs et limiter les biais statistiques, la DMDTS a décidé de calculer ces indicateurs en moyenne triennale. Au demeurant, les tendances nationales correspondant à ces trois indicateurs sont négatives en 2007 par rapport à 2006, même si les estimations pour 2008 sont plus optimistes. Mais ces données sont très partielles dans la mesure où elles ne portent que sur les 39 CDN et CCN.

L’indicateur portant sur la place de la rémunération des artistes dans les structures subventionnées est très incomplet (nombreux résultats non disponibles) et ne peut guère fonder d’analyse.

Les quatre autres indicateurs sont plus aisément exploitables. Le premier concerne le taux de conventionnement. Rattaché quelque peu artificiellement à l’objectif visant à « donner des bases économiques et professionnelles solides à la création », cet indicateur témoigne des progrès accomplis dans l’encadrement conventionnel des structures subventionnées. Le résultat national, stable à 60 % entre 2006 et 2007, masque toutefois une baisse du taux de conventionnement dans deux des quatre DRAC visitées (Nord Pas-de-Calais et Rhône-Alpes). Cette situation résulte de l’arrivée à échéance d’un grand nombre de conventions et révèle les difficultés rencontrées par les DRAC pour conclure des conventions multipartites.

Tableau n° 9 : Indicateurs de performance 2006-2008 des quatre DRAC de l’échantillon dans le domaine du spectacle vivant

Objectif

Indicateur DRAC

Région

2006

2007

2008

1 - Inciter à l’innovation et à la diversité de la création

Taux d’entrée des compagnies et des ensembles dans les dispositifs d’aides (conventionnements et aides à projets)

Bret.

18,9 %

52,5 %

40,4 %

NPC

26,0 %

29,1 %

31,5 %

PC

32,1 %

33,3 %

35,0 %

RA

25,3 %

21,9 %

27,0 %

National

34,5 %

31,4 %

33,0 %

Place de la création dans la programmation des structures de production subventionnées (CDN)

Bret.

27,1 %

37,6 %

31,6 %

NPC

29,5 %

40,3 %

40,0 %

PC

100 %

100 %

75 %

RA

30,9 %

52,8 %

Nd

National

48,65 %

42,6 %

45 %

2 - Donner des bases économiques et professionnelles solides à la création

Place de la rémunération des artistes dans les structures subventionnées du spectacle vivant (CDN/CCN)

Bret.

18,5 %

nd

Nd

NPC

11,7 %

nd

Nd

PC

nd

nd

Nd

RA

20,6 %

nd

nd

National

28,1 %

25,8 %

>27 %

Proportion des structures subventionnées faisant l’objet d’une convention dans le domaine du spectacle vivant

Bret.

75,0 %

76,9 %

84,6 %

NPC

33,3 %

26,7 %

25 %

PC

44,0 %

50,0 %

36 %

RA

69,0 %

53,3 %

45 %

National

59,49 %

60 %

68 %

3 - Augmenter la fréquentation du public dans les lieux culturels sur l’ensemble du territoire

Fréquentation des lieux du spectacle vivant subventionnés (fréquentation payante au siège) CDN/SN

Bret.

239 183

239 811

244 092

NPC

188 961

201 267

197 000

PC

184 625

206 063

207 000

RA

335 523

350 900

Nd

National

3 115 046

2 948 957

3 035 000

Taux des places vendues par rapport à la jauge mise en vente

Bret.

77,5 %

81,7 %

80,5 %

NPC

74,5 %

79,4 %

79,5 %

PC

77,5 %

77,1 %

80 %

RA

70,9 %

74,5 %

Nd

National

71 %

72,23 %

74,41 %

Part du public scolaire dans la fréquentation des structures du spectacle vivant (CDN/SN)

Bret.

16,6 %

19,5 %

16,9 %

NPC

18,5 %

18,7 %

20 %

PC

13,3 %

16,8 %

12 %

RA

17,5 %

13,1 %

Nd

National

21 %

21 %

21 %

4 - Diffuser davantage les œuvres et les productions culturelles en France et à l’étranger

Taux de représentations offertes hors ville-siège par les structures de production et de diffusion (CDN/CCN)

Bret.

34 %

57 %

35,1 %

NPC

33 %

48 %

Nd

PC

82 %

80 %

62 %

RA

45 %

42 %

Nd

National

38,95 %

43,43 %

>40 %

Source : DMDTS - Données réalisées pour 2006 et 2007, prévues par les DRAC pour 2008.

Les trois derniers indicateurs ont trait à la fréquentation. Celle-ci est en baisse de 5 % en 2007 par rapport à 2006 mais les prévisions sont optimistes pour 2008 et les DRAC visitées échappent à cette baisse de la fréquentation. Le recul manque cependant encore pour porter une appréciation à partir de ces indicateurs, seule une analyse tendancielle de moyen terme étant pertinente pour apprécier l’évolution de la fréquentation (infra).

La DMDTS a indiqué dans sa réponse à la Cour que les trois indicateurs de performance prioritaires pour les DRAC dans le domaine du spectacle vivant sont : le renouvellement des équipes aidées, la proportion de structures subventionnées faisant l’objet d’une convention et la part du public scolaire dans la fréquentation des CDN et des SN. Ces indicateurs figurent au premier plan de la directive nationale d’orientation triennale 2009-2011.

LA DIFFICILE CONCILIATION DES OBJECTIFS POURSUIVIS PAR L’ETAT CONDUIT À S’INTERROGER SUR L’EFFICACITÉ DE SON INTERVENTION

La difficile conciliation des objectifs de l’État

L’objectif d’incitation à la qualité de la création peut pénaliser l’effort de diffusion et de structuration

Le premier objectif du programme 131 est d’« inciter à l’innovation et à la diversité de la création ». Cet objectif conduit en particulier l’État à mieux structurer les aides au projet (adoption en cours de décrets réformant ce dispositif - supra) et à chercher à éviter les phénomènes de « rente », ce dernier aspect se traduisant dans un indicateur de renouvellement des équipes artistiques bénéficiaires d’aides au projet et d’aides au conventionnement.

Cet objectif est difficilement compatible avec l’effort de structuration qui requiert des financements durables et fonde la demande, exprimée dans le cadre des entretiens de Valois, d’allongement de la durée des conventions.

Par ailleurs, 84 % des crédits des DRAC vont actuellement aux structures et le maintien à niveau des capacités de ces dernières (le besoin de financement de « l’ordre de marche » des théâtres) implique une croissance continue des ressources qui leur sont allouées, même si celles-ci peuvent indirectement bénéficier aux équipes artistiques par le biais de commandes.

Dans ces conditions, pour agir plus directement sur les équipes artistiques, l’État pourrait être conduit à abonder les crédits alloués aux aides aux projets en réduisant le nombre des structures aidées ou le volume d’aide attribué par structure. Dans cette dernière hypothèse, l’efficience de son intervention pourrait même s’en révéler accrue par une amélioration apparente de l’effet de levier.

Cependant, la recherche en gestion41 a démontré que, chez un opérateur du spectacle vivant, le désengagement financier d’un bailleur de fonds se répercutait prioritairement sur l’enveloppe consacrée à la production artistique (création et diffusion), en raison de l’inélasticité des frais structurels de ces organisations.

Il apparaît donc que toute réduction de l’aide aux structures conduit à dégrader l’efficience globale des subventions publiques (sauf dans l’hypothèse où les autres collectivités publiques compensent la réduction opérée). En effet, cette diminution entraîne tendanciellement une sous-activité qui renchérit le coût unitaire des œuvres créées et diffusées.

L’objectif de structuration est nécessaire mais coûteux et conduit à la sélectivité

L’objectif n° 2 du programme 131 vise à donner des bases économiques et professionnelles solides à la profession. Le seul indicateur de performance relatif à cet objectif et impliquant les DRAC est très partiel dans la mesure où il ne porte que sur le taux de conventionnement avec les structures subventionnées.

Il apparaît toutefois que la poursuite de cet objectif conduit les DRAC à pérenniser leurs aides afin d’offrir aux compagnies comme aux structures qui le méritent la faculté d’approfondir et de développer leur travail dans la durée. L’augmentation du nombre de compagnies conventionnées entre 2006 et 2008 dans le ressort des quatre DRAC étudiées témoigne de cette tendance.

Prise globalement, cette volonté d’aider durablement les structures et les compagnies contribue cependant à concentrer les efforts financiers sur un nombre limité de bénéficiaires et souvent à augmenter la part prise par l’État dans leur budget. À crédits constants, cet objectif conduira l’État à retirer son soutien à certaines structures dont le coût budgétaire paraîtra trop élevé au regard de l’apport artistique. La contrainte budgétaire en 2008 a d’ailleurs amené de nombreuses DRAC à privilégier le « cœur de réseau » en supprimant les aides à d’autres bénéficiaires, en particulier certains festivals, dont la mission est pourtant liée à l’objectif de diffusion qui constitue un objectif majeur de la politique de l’État. La DMDTS confirme pour sa part « l’analyse de la Cour sur l’articulation délicate des objectifs de l’État : souplesse et renouvellement pour les aides à la création d’une part, (…) structuration du secteur (…) d’autre part, l’ensemble ayant lieu dans un contexte budgétaire difficile. La politique du spectacle vivant menée en France repose pourtant sur ces deux objectifs qui correspondent à une ambition culturelle globale. La légitimité de cette démarche publique s’appuie sur la recherche d’un optimum de qualité global ».

Les DRAC ont quant à elles souvent fait état de leur grande difficulté à articuler une politique devant tout à la fois, par exemple pour les scènes nationales « préserver globalement les moyens alloués à ce réseau», ainsi que l’exigeait la directive nationale d’orientation pour 2008 et, pour autant, opérer des choix pour dégager des marges de manœuvre dans un contexte d’insuffisance des crédits disponibles.

Sous l’angle de l’analyse de la performance, ce contexte pourrait conduire à réduire le nombre de lieux labellisés et, partant, à dégrader les indicateurs de performance portant sur la fréquentation du public et pénaliser l’effort de diffusion qui s’appuie en particulier sur les conventions conclues avec des structures labellisées (présence de clauses de diffusion dans les conventions).

L’objectif de fréquentation du public : l’efficience tendanciellement décroissante de l’intervention des DRAC

L’augmentation de la fréquentation du public dans les lieux culturels constitue l’objectif n° 3 du projet annuel de performance.

Or, en ce qui concerne les centres dramatiques et les scènes nationales subventionnés par les DRAC, cette augmentation est faible sur les dix dernières années. Certes, le nombre d’opérateurs a varié au cours de la période, ce qui perturbe la lecture de l’évolution du niveau de fréquentation entre les CDN et les SN. Il n’en demeure pas moins que sur le plan quantitatif, la fréquentation totale des structures concernées n’a progressé que de 1 % sur 10 ans.

Tableau n° 10 : Fréquentation des lieux du spectacle vivant
subventionnés par les DRAC
(nombre de billets vendus, y compris les sorties scolaires)

Fréquentation payante

1997-1998

(1)

2001-2002

(2)

2006-2007

(3)

Var (3) / (1)

Var (3) / (2)

Centres dramatiques

1 729 514

1 377 336

1 526 000

-12%

11%

Nombre de centres

45

40

39

-13%

-3%

Scènes nationales

1 735 970

1 873 798

1 963 052

13%

5%

Nombre de scènes

65

69

70

8%

1%

Fréquentation totale

3 465 529

3 251 174

3 489 091

1%

7%

Source : annexes du rapport Latarjet et les chiffres clés 2009 MCC

Au regard de l’augmentation des budgets publics sur la même période, l’efficience de l’action des DRAC s’est par conséquent dégradée ces dix dernières années, ce qui se traduit par un « coût au fauteuil » croissant.

Pour autant, différents éléments conduisent à nuancer cette appréciation. Sur le plan méthodologique, il subsiste des incertitudes sur la fiabilité des données et leur comparabilité dans le temps. Plus encore, si un creux de fréquentation est constaté en 2001-2002, une progression soutenue (7 %) caractérise au contraire les cinq dernières années. Pour sa part, la DMDTS souligne que « sur la période 2002-2006, au cours de laquelle l’effectif des deux réseaux est plus comparable, et qui a été analysée récemment dans une publication de la DMDTS, cette dégradation supposée ne se vérifie pas. Sur ces cinq années, la Cour pointe une augmentation de fréquentation de 11 % pour les centres dramatiques et de 5 % pour les scènes nationales. Or dans le même temps, les crédits n’ont respectivement progressé que de 4 % et 5 % en euros constants. L’efficience au regard de la fréquentation se maintient donc pour les scènes nationales, et progresse sensiblement pour les CDN entre 2002 et 2006 ».

Enfin, ces données concernent uniquement les CDN/CDR et les scènes nationales, ce qui se conçoit dans la mesure où elles absorbent une part importante des crédits et retiennent l’essentiel de l’attention. Ces statistiques laissent toutefois dans l’ombre la fréquentation des autres structures du spectacle vivant, en particulier les opéras, les centres chorégraphiques nationaux ou encore les festivals.

L’objectif de démocratisation culturelle, c'est-à-dire de diversification du public, dépend de la capacité des créateurs à attirer de nouveaux spectateurs. Les outils manquent une nouvelle fois pour apprécier l’atteinte de cet objectif et en particulier évaluer si le soutien à de nouvelles disciplines, ou à des formes profondément renouvelées de disciplines anciennes (cirque ; arts de la rue), conduit à attirer des spectateurs pour une part d’entre eux nouveaux, ce qui tendrait à indiquer que l’objectif de démocratisation culturelle résulte aussi de la capacité de l’État à soutenir, sur le fondement de critères d’excellence, la création dans toutes ses formes.

Mais là encore apparaît une difficulté d’articulation des objectifs car l’extension du périmètre des secteurs aidés ne peut être rendue compatible avec la stabilité budgétaire qu’au prix d’un éparpillement accru des subventions.

La labellisation est cohérente avec l’objectif de diffusion mais contribue à la dispersion des subventions

En dépit de l’importance qu’il occupe désormais dans la stratégie du ministère de la culture dans le cadre du programme 131, l’objectif de diffusion n’est mesuré dans le rapport annuel de performance qu’en ce qui concerne les CDN et CCN, pour apprécier l’effort de diffusion opéré par les structures de production. Cette situation est paradoxale dans la mesure où, d’une part, la diffusion n’est qu’une mission secondaire de ces structures et, d’autre part, l’action de diffusion des scènes nationales n’est pas mesurée alors qu’il s’agit en principe de leur mission première et que l’État a justement pour ambition de les recentrer sur cette mission. La création d’un indicateur spécifique pour ces dernières mériterait par conséquent d’être étudiée.

En DRAC, l’objectif de diffusion doit en principe être inclus dans les conventions de subvention qui exigent un effort en ce domaine, tant de la part des structures bénéficiaires que de la part des compagnies ou ensembles aidés (supra).

La diffusion apparaît donc comme une contrepartie de l’aide financière accordée par l’État et du label qu’il confère. À cet égard, les témoignages sont unanimes pour considérer que l’attribution d’un label par l’État induit des avantages significatifs, indépendamment de la subvention accordée. Les critères de labellisation sont en effet reconnus comme permettant de distinguer l’action professionnelle artistique et de garantir le respect des exigences des collectivités publiques. Le label permet ainsi à son bénéficiaire de solliciter davantage de ressources de ses autres financeurs. Autrement dit, le label crée à lui seul de la valeur au profit des structures et compagnies bénéficiaires.

À l’extrême, ce constat pourrait conduire l’État à considérer que son rôle essentiel réside dans cette labellisation en ce qu’elle correspond à sa mission d’identification des structures et compagnies relevant de « l’excellence artistique ».

La labellisation des « scènes de territoire » par la DRAC Bretagne (supra) s’inscrit dans cette logique et illustre les contradictions d’objectifs auxquelles sont soumises les DRAC. Si l’effort de diffusion que traduit cette initiative correspond clairement à un objectif de performance de l’État et si la modicité des montants de subvention accordés à chaque scène rend cette démarche efficiente, il n’en demeure pas moins que cette labellisation ne s’inscrit guère dans l’objectif de structuration du secteur tel qu’il se traduit dans l’action conduite dans les autres DRAC visitées et qu’elle renforce encore la dispersion des subventions de l’État. Dans la réponse adressée à la Cour, la DRAC Bretagne a souligné que le programme des scènes de territoire s’inscrivait selon elle dans l’objectif de structuration du secteur en relevant d’une démarche plus vaste visant, notamment via le développement de la fréquentation du public scolaire, à favoriser la démocratisation culturelle.

L’efficacité propre de l’intervention de l’État dans le cadre des aides accordées au spectacle vivant n’est pas avérée

Au total, l’efficacité propre de l’intervention de l’État au regard de l’objectif de développement de la création énoncé dans le décret fixant les attributions du ministre de la Culture n’est plus identifiable et le niveau de l’offre de spectacles légitime la réorientation depuis 2005 par l’État de son action vers les objectifs de diffusion et de structuration professionnelle du secteur.

Implicitement, cette réorientation implique la nécessité de maîtriser la croissance de l’offre et d’en piloter le maintien à un niveau qualitatif satisfaisant. Cette visée s’exprime notamment dans l’énoncé, essentiellement qualitatif, du premier objectif du programme 131 : « inciter à l’innovation et à la diversité de la création ». À l’occasion du discours prononcé à Nîmes le 13 janvier 2009, le Président de la République a, quant à lui, souligné la nécessité de « recentrer les aides sur l’excellence artistique ».

Cependant le rapport annuel de performance du programme 131 mentionne toujours comme premier axe stratégique « encourager la création » et l’État n’a pas encore réellement modifié ses modalités d’intervention qui demeurent largement conçues en soutien du développement de l’offre via l’attribution de subventions éparpillées entre des bénéficiaires relevant de différents labels.

L’organisation en place, caractérisée par le cofinancement des différents acteurs publics, demeure source de lourdeur et de complexité, voire d’inefficacité pour chacun des financeurs. Les entretiens de Valois ont toutefois conclu à la nécessité du « maintien de l’intervention de tous les niveaux de collectivités territoriales qui permet de construire les projets en partenariat ».

Les entretiens de Valois : des conclusions générales et de portée modeste, qui ne sont que partiellement reprises par le ministère

À l’issue de la deuxième phase des entretiens de Valois, le 30 janvier 2009, trois axes de proposition ont été retenus par les participants :

- une rénovation de la gouvernance des politiques culturelles ;

- un effort de clarification et d’efficacité des dispositifs d'aides publiques ;

- une meilleure circulation des artistes et des œuvres.

Ces trois axes ont été déclinés en propositions assez générales qui n’ont pas toutes été reprises par le ministère de la Culture.

À l’occasion de son discours de clôture de cette deuxième phase, la ministre a toutefois entériné trois aspects principaux :

- conformément aux souhaits exprimés par les participants, les réseaux et labels ne seront pas refondus mais les structures qui en relèvent devront se recentrer sur leur mission principale (la création pour les CDN ; la diffusion pour les SN…). Il est ainsi envisagé de définir clairement le périmètre des labels, étant précisé que 10 labels sont envisagés à ce stade de la réflexion ;

- des conférences du spectacle vivant seront organisées dans chaque région, afin de favoriser le dialogue et la concertation entre l'État, les collectivités et les structures culturelles, y compris dans le domaine de l’attribution des crédits ;

- un dispositif national d’observation du spectacle vivant sera mis à l’étude.

Les travaux se sont poursuivis au premier semestre 2009 pour approfondir les orientations retenues et aboutir à des propositions concrètes. Les résultats de ces travaux, rendus publics début juillet, s’articulent autour de quatre axes :

- clarifier les textes régissant l’attribution des aides et ceux régissant le fonctionnement des commissions chargées de donner un avis sur lesdites demandes ;

- organiser un dialogue partenarial avec les collectivités locales et les professionnels au moyen :

o de la réactivation au plan national du conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel ;

o de l’organisation à l’échelon régional de conférences du spectacle vivant qui rassembleront les DRAC, les collectivités territoriales et les professionnels.

- au titre de la structuration, ouvrir la possibilité de faire « porter » les projets de création par une structure existante, dans le cadre d’une production déléguée, pour éviter la création systématique d’une association ;

- renforcer la diffusion en faisant de cet aspect un critère essentiel d’attribution des aides de l’État et en appuyant cette politique sur un fonds d’aide à la diffusion.

Les conséquences pour les DRAC

Pour les DRAC, l’évolution principale tient à l’organisation des conférences du spectacle vivant. Si ces instances de concertation peuvent incontestablement favoriser le dialogue, c’est toutefois avec scepticisme qu’elles sont pour l’heure appréhendées à l’échelon déconcentré. Plusieurs éléments incitent en effet à la prudence : la complexité du sujet qui couvre tous les stades du processus de création et tous les secteurs du spectacle vivant ; la multiplicité des intervenants qui résulte de l’étendue même du sujet ; le risque de voir cette enceinte devenir principalement le lieu d’expression des critiques formulées contre l’État.

Cependant, une meilleure articulation de l’action de l’État et des collectivités territoriales renforcerait incontestablement la cohérence et donc l’efficience globale du financement public du spectacle vivant. À tout le moins, la connaissance par l’État des crédits alloués par les collectivités territoriales au spectacle vivant constituerait-elle une avancée.

À cet égard, la Cour avait, au terme d’un précédent contrôle42, souligné que l’effort poursuivi par le ministère de la culture pour organiser un partenariat cohérent et efficace avec les collectivités territoriales se heurtait à « trois difficultés majeures : l’empilement des relations contractuelles les rend de moins en moins intelligibles et gérables ; les moyens humains et financiers des services territoriaux ne paraissent pas compatibles avec le montage et le suivi effectif de ce foisonnement de contrats ; le décalage se révèle significatif entre les engagements généraux adoptés et les conséquences pratiques qu’en tirent les partenaires locaux. »

Ce constat demeure d’actualité et les constatations qui précèdent conduisent à considérer que l’articulation de l’action des différentes collectivités publiques exige au préalable que l’État se fixe des objectifs propres dans le cadre d’une politique du spectacle vivant élaborée en partenariat avec les autres financeurs publics.

Le DMDTS suggérait en introduction des entretiens de Valois que l’État pourrait progressivement clarifier son action en se concentrant sur ses opérateurs nationaux et agir localement en faveur de l’action interrégionale et internationale tout en conservant son rôle en faveur de l’émergence artistique. Il indiquait que cette démarche ne pouvait toutefois être conduite que très progressivement, aucune modification brutale des soutiens accordés n’étant raisonnablement envisageable.

Cette perspective, qui demande à être confirmée, permettrait de concentrer l’effort financier de l’État sur des objectifs qui lui seraient propres, afin que l’empilement des subventions conduise non pas à la superposition des objectifs mais à leur complémentarité.

Cette clarification est déjà mise en œuvre en ce qui concerne l’objectif de soutien à la création, dont le contenu a évolué dans un sens qualitatif davantage ciblé sur l’innovation et la diversité.

Une clarification similaire pourrait être opérée pour les autres objectifs. L’État doit-il ainsi poursuivre un objectif visant à accroître la « fréquentation du public dans les lieux culturels sur l’ensemble du territoire », cet enjeu relevant davantage de l’action et du financement des collectivités territoriales que de l’État, sauf pour ce qui concerne les opérateurs nationaux ?

En matière de diffusion, la valeur ajoutée propre de l’action de l’État ne tient-elle pas à la diffusion interrégionale des créations, l’action territoriale au sein d’une région incombant prioritairement aux conseils régionaux ? La diffusion internationale du spectacle vivant ne fait quant à elle l’objet d’aucun indicateur alors que seul l’État semble apte à promouvoir un tel objectif.

En matière de structuration, l’action de l’État n’est réellement spécifique que lorsqu’il agit sur le cadre normatif et institutionnel en pesant, via la définition des labels et les critères qui les caractérisent, sur les comportements des responsables des structures qui en relèvent.

Interrogée sur ces éléments et en particulier sur la pertinence des clarifications esquissées en ouverture des entretiens de Valois, la DMDTS a estimé que « les clarifications du rôle de l’État opérées par les entretiens de Valois demeurent pertinentes :

1- Elles permettent de préciser les trois axes d’intervention de l’État pour le spectacle vivant :

1. opérateurs nationaux ;

2. labels, dont les missions, les modalités d’entrée, de sortie et de suivi sont définis ;

3. programmes (scènes conventionnées et aides aux équipes artistiques).

2- Elles permettent de définir clairement le périmètre des catégories de labels : 10 labels sont proposés à ce stade, ce qui permet :

1. d’ouvrir une réflexion sur les SMAC, constituées d’établissements très hétérogènes ;

2. de préciser les missions et les critères de définition concernant les centres de développement chorégraphique (CDC), les pôles nationaux pour les arts du cirque (PNAC) et les Centres nationaux pour les arts de la rue (CNAR) ;

3. d’ouvrir un chantier sur les lieux aidés mais non labellisés (d’autres lieux).

3- Elles permettent de mettre en œuvre sur des bases homogènes et précises les contrats d’objectifs à conclure avec tous les établissements labellisés d’ici fin 2010. Ces contrats d’objectifs répondront aux remarques de la Cour et permettront un suivi rigoureux sur quatre ans concernant notamment :

1. la place de la production et de la diffusion en fonction des missions des différents labels ;

2. les objectifs en termes d’élargissement des publics, d’éducation artistique ;

3. la part de recettes propres par rapport au budget de l’établissement ;

4. le ratio dépenses de fonctionnement /dépenses d’activités ;

4- Enfin, elles constituent la base de la mise en cohérence de la cartographie nationale des labels, en mettant en place, région par région et en interrégional, une réflexion sur les fusions / regroupements, délabellisation ou changement de catégorie.

Ces orientations sont en cours de mise en œuvre : un texte général sur les missions et modalités communes aux établissements labellisés, ainsi qu’un texte par label ont été élaborés.

La réflexion sur la mise en œuvre de la cartographie est avancée. Elle sera développée dans le cadre des conférences du spectacle vivant en région. »

Sur le plan institutionnel, le ministère de la culture a indiqué dans sa réponse à la Cour qu’il pourrait être envisagé de créer une structure reprenant les missions de différents organismes existants à l’échelon national dans le domaine de la diffusion des œuvres et de l’attribution des aides. L’objectif de ce nouvel organisme, dont le périmètre financier resterait circonscrit aux aides attribuées en administration centrale (10,6 M€ en 2008), serait de « mieux articuler les aides distribuées selon des critères économiques et sociaux, en appui aux critères artistiques, de créer des réseaux plus efficaces de coproduction et de diffusion, et de regrouper toutes les données collectées par ces établissements relatives à l’observation du secteur ». Conformément aux préconisations issues des entretiens de Valois, cet organisme viserait à renforcer la cohérence de l’action conduite dans les différents axes d’intervention de l’État, et en particulier :

- faire en sorte que les établissements nationaux aient une diffusion plus visible en région, en coproduction et co-diffusion avec les réseaux subventionnés ;

- mettre en œuvre des obligations d’accompagnement des équipes artistiques pour les établissements labellisés, dans chaque catégorie ;

- développer la diffusion internationale, en particulier dans le cadre de réseaux européens.

CONCLUSION

Financeur public minoritaire du spectacle vivant, l’État demeure aujourd’hui la clé de voûte d’un dispositif qu’il a progressivement constitué et que les collectivités territoriales ont depuis relayé en y occupant une place croissante. Il en résulte un enchevêtrement de compétences, de financements et de coopérations dont l’efficacité et l’efficience sont difficilement mesurables, et dont la lisibilité et la transparence ne sont pas suffisantes.

Différents rapports successivement rédigés au cours de ces cinq dernières années ont à cet égard dessiné un état des lieux en définitive assez consensuel du spectacle vivant. Les différentes parties prenantes s’accordent à considérer que, si la politique culturelle de l’État, relayée depuis 25 ans par les collectivités territoriales, a eu des résultats indéniables en ce qui concerne le développement de la création et l’accès élargi aux spectacles sur tout le territoire, cette politique a atteint ses limites et doit être restructurée. Le rapport Latarjet concluait à la nécessité d’une « nouvelle politique du spectacle vivant » exprimée sous la forme d’une loi d’orientation. Les entretiens de Valois ont abouti à la même conclusion.

En dépit de ce constat partagé, aucune modification significative du dispositif n’est intervenue. Certes, l’audit de modernisation et les entretiens de Valois ont récemment amené le ministère à opérer des ajustements notables (refonte des textes relatifs aux commissions d’experts ; déconcentration des crédits correspondant à de petites subventions attribuées par l’administration centrale ; limitation dans le temps de certaines subventions jusqu’alors systématiquement reconduites), mais leur portée demeure néanmoins limitée.

La Cour constate quant à elle que l’État n’a toujours pas renoncé à intervenir à tous les stades du processus de création et de production, dans tous les secteurs artistiques et sur tout le territoire. C’est pourtant cette démarche omnidirectionnelle qui conduit à l’étouffement budgétaire, à l’engorgement administratif des DRAC et à la perte de lisibilité de l’action de l’État, sans même que son efficacité propre puisse être identifiée. À cet égard, il apparaît indispensable que l’État clarifie davantage le rôle qu’il entend assumer et redéploye en conséquence les ressources budgétaires qu’il consacre au spectacle vivant.

La DMDTS affirme œuvrer dans cette perspective et escompte de la mise en place des conférences du spectacle vivant en région la clarification, zone par zone et discipline par discipline, du rôle respectif de l’État et des autres financeurs publics, dans le cadre d’un dialogue ouvert associant les professionnels concernés. Le contexte économique et ses répercussions sur les budgets publics, y compris désormais sur ceux des collectivités territoriales, favorise selon la DMDTS une prise de conscience partagée de la nécessité d’opérer des choix clairs.

À l’occasion de leur audition par la Cour, le DMDTS et les DRAC ont souhaité élargir leur propos au-delà du champ de la présente étude en soulignant que le nécessaire renforcement de l’efficacité du dispositif de subventionnement du spectacle vivant par l’État ne devait pas occulter les conséquences qu’entraîne l’insuffisance de régulation dans l’accès à l’emploi artistique et au régime spécifique d’assurance chômage, laquelle se traduit par un développement de l’offre de spectacle et un besoin de financement croissant, ce secteur n’étant structurellement pas en mesure de susciter des ressources propres à un niveau suffisant. L’action à conduire pour rationaliser les procédures d’octroi des financements devrait donc être assortie d’orientations visant à permettre une régulation progressive, selon des critères adaptés, des voies d’accès au statut d’artiste professionnel.

ANNEXES

Annexe 1 - Lettre de mission

Annexe 2 - Répartition des crédits d’intervention du spectacle vivant

Annexe 3 - Répartition des crédits déconcentrés en faveur du spectacle vivant entre 2005 et 2007

Annexe 4 - Le régime de l’intermittence

Annexe 5 - Les labels du spectacle vivant

Annexe 6 - Les aides attribuées par la DMDTS aux équipes indépendantes

Annexe 7 - Les aides attribuées par la DMDTS après la consultation de commissions nationales

Annexe 8 - Les aides déconcentrées aux équipes artistiques

Annexe 9 - Encadrement des structures de création et de diffusion du spectacle vivant

Annexe 10 - Contenu des conventions observées sur l’échantillon d’étude

Annexe 1 – Lettre de mission

LE PREMIER PRÉSIDENT

Paris, le

Monsieur le Président,

Je fais suite à l’entretien qui s’est tenu le 4 février 2009 entre MM. Jean PICQ, Président de la Troisième chambre de la Cour des comptes, et Richard DELL’AGNOLA, rapporteur spécial, membre de la commission des finances, au sujet de la demande que vous avez formulée en application de l’article 58 2° de la loi organique n°2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, visant à ce que la Cour mène une enquête portant sur « les subventions du budget de l’État au spectacle vivant ».

Cet entretien a été l’occasion de préciser le périmètre de votre demande, qui concerne les dépenses d’intervention du ministère de la culture et de la communication au titre de l’action n°1 « Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant » du programme n°131 « Création » du budget de l’État.

Le rapporteur spécial nous a indiqué souhaiter être en mesure de porter un jugement sur l’efficacité et l’efficience des actions menées par le ministère de la culture dans le domaine du spectacle vivant. Il aspire pour cela à identifier les critères d’allocation des subventions, aussi bien par l’administration centrale que les services déconcentrés, et comprendre les modalités de suivi et d’évaluation des politiques ainsi réalisées. En outre, alors que l’État n’est pas le principal financeur du spectacle vivant, il souhaite pouvoir apprécier si, dans sa politique d’attribution de subventions, le ministère de la culture tient compte des actions des collectivités territoriales en la matière.

Les diligences de la Cour des comptes porteront notamment sur un échantillon de trois directions régionales des affaires culturelles. Les régions Rhône-Alpes, Nord-Pas de Calais et Bretagne (ou Poitou-Charentes) ont été identifiées d’un commun accord comme représentatives non seulement de la diversité des montants des crédits alloués au spectacle vivant en régions, mais également des répartitions entre engagements de l’État et des collectivités territoriales.

L’entretien a permis de préciser que les actions des autres départements ministériels (éducation nationale et affaires étrangères notamment) n’entrent pas dans votre questionnement, tout comme les enjeux de l’emploi dans le domaine du spectacle vivant.

La Cour rendra la commission des finances destinataire de ses conclusions en septembre 2009, le délai de huit mois courant à compter du 1er février 2009, comme il en a été convenu. MM. Thomas LESUEUR, conseiller référendaire, et Emmanuel MARCOVITCH, auditeur, sont chargés de cette enquête. Mme Anne FROMENT-MEURICE, conseillère-maître, en assurera le contre-rapport.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de ma haute considération.

Philippe SÉGUIN

M. Didier MIGAUD

Président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan

Assemblée nationale

126 rue de l'Université

75355 Paris 07 SP

Annexe 2 – Répartition des crédits d’intervention en faveur du spectacle vivant.


Source : RAP 2008

Annexe 3 - Répartition des crédits déconcentrés en faveur du spectacle vivant entre 2005 et 2007 en €.

Discipline

Crédits déconcentrés 2005

Crédits déconcentrés 2006

Crédits déconcentrés 2007

2007/2005

Théâtre

81 198 000

81 370 000

81 020 000

-0,2%

Centres dramatiques

57 161 000

57 780 000

56 420 000

-1,3%

Compagnies dramatiques

22 473 000

21 900 000

23 120 000

2,9%

Festivals théâtre

1 564 000

1 690 000

1 480 000

-5,4%

Musique

75 111 000

77 820 000

78 730 000

4,8%

Opéras

25 093 000

26 150 000

26 270 000

4,7%

Orchestres permanents

22 104 000

23 260 000

23 400 000

5,9%

Centres nationaux de création musicale

2 554 000

3 180 000

3 460 000

35,5%

Ensembles musicaux et vocaux

9 921 000

10 870 000

11 020 000

11,1%

Festivals de musique

7 086 000

6 130 000

6 030 000

-14,9%

Scènes de musiques actuelles

8 353 000

8 230 000

8 550 000

2,4%

Danse

22 166 000

21 830 000

21 870 000

-1,3%

Centres chorégraphiques nationaux

13 465 000

12 780 000

12 740 000

-5,4%

Centres de développement chorégraphique

 

630 000

-

Compagnies chorégraphiques

6 862 000

7 750 000

7 460 000

8,7%

Festivals de danse

1 839 000

1 300 000

1 040 000

-43,4%

Arts de la rue

5 400 000

6 370 000

6 420 000

18,9%

Lieux de fabrication arts de la rue

1 636 000

2 240 000

3 050 000

86,4%

Compagnies arts de la rue

3 112 000

2 970 000

2 380 000

-23,5%

Festivals arts de la rue

652 000

1 160 000

990 000

51,8%

Cirque

4 328 000

3 780 000

4 120 000

-4,8%

Pôles régionaux de cirque

1 302 000

1 170 000

1 520 000

16,7%

Compagnies cirque

2 916 000

2 490 000

2 470 000

-15,3%

Festivals cirque

110 000

120 000

130 000

18,2%

Interdisciplinaire

74 092 000

78 590 000

76 170 000

2,8%

Scènes nationales

48 671 000

51 220 000

49 760 000

2,2%

Scènes conventionnées

10 206 000

9 900 000

9 680 000

-5,2%

Autres lieux de création et de diffusion

14 621 000

17 190 000

16 430 000

12,4%

Autres festivals

594 000

280 000

300 000

-49,5%

Total des crédits déconcentrés

262 295 000

269 760 000

268 330 000

2,3%

Source : loi de règlement 2005, RAP 2006 à 2008

Annexe 4 – Le régime de l’intermittence.

1/ La notion d’intermittents

Sont désignées par le terme d’« intermittents » les personnes ayant travaillé sur un emploi salarié non permanent dans le champ du spectacle vivant ou enregistré. On distinguera ici deux sous-groupes :

- les intermittents non indemnisés au titre des annexes VIII et X de l’assurance chômage, c’est-à-dire ayant travaillé moins de 507 heures sur la période de référence ;

- les intermittents indemnisés au titre des annexes VIII et X, c’est-à-dire les allocataires ayant justifié d’au moins 507 heures travaillées dans le secteur pour pouvoir ouvrir leurs droits.

2/ Les règles d’indemnisation du chômage des intermittents depuis les deux dernières réformes des annexes VIII et X


3/ Les intermittents indemnisés

La population des intermittents indemnisés peut être étudiée à travers trois approches statistiques :

- le nombre de mandatés, c’est-à-dire le nombre de personnes ayant été indemnisées au titre d’au moins une journée sur la période de référence. Il s’agit de la catégorie statistique la plus large 6 ;

- le nombre de bénéficiaires en fin d’année, c’est-à-dire le nombre de personnes qui, au 31 décembre de l’année considérée, sont indemnisées au sein des annexes VIII ou X ; cette donnée renseigne en instantané la situation des intermittents à un moment donné ;

- le nombre d’entrées dans les annexes VIII et X, c’est-à-dire le nombre de personnes ayant réalisé une ouverture de droits sur une année ; cette donnée renseigne a contrario le dynamisme des ouvertures de droit.

4/ Le contrat à durée déterminée d’usage (CDDU)

Prévu par l’article L. 1242-2 du code du travail, le contrat à durée déterminée d’usage est un contrat à durée déterminée qui ne peut être conclu que « pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire », dans les secteurs d’activité où « il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois. »

Le CDDU déroge sur plusieurs points au contrat à durée déterminée de droit commun : pas d’obligation de fixer un terme précis au contrat au moment de sa signature, ni de le limiter à 18 mois ; pas de délai de carence à l’expiration du CDDU pour le pouvoir par un autre CDDU ; possibilité de conclure des CDDU successifs avec un même salarié ; pas d’obligation pour l’employeur de verser l’indemnité de fin de contrat de 10 %.

Source : Rapport conjoint IGF/IGAS/IGAC sur le bilan du plan de professionnalisation et de structuration du secteur du spectacle vivant et enregistré – novembre 2008.

Annexe 5 - Les labels du spectacle vivant.

1. Le théâtre :

Les 39 centres dramatiques (33 centres dramatiques nationaux et assimilés, 6 centres dramatiques régionaux) sont investis d’une mission principale de création et de production dans le domaine dramatique. Constitués à une grande majorité sous la forme de sociétés commerciales, ils sont placés sous la direction d’un artiste. La participation des collectivités territoriales est variable selon les centres dramatiques et prend généralement trois formes : participation financière (quasi-systématique), mise à disposition des locaux et des équipements (très fréquente), cosignature du contrat de décentralisation dramatique (plus rare). En 2008, les DRAC ont versé 57,3 millions d’euros aux centres dramatiques.

2. La musique :

Les 12 maisons d’opéras subventionnés par l’État sont investies d’une mission principale de production de spectacles lyriques. Le réseau des théâtres lyriques présente une forte hétérogénéité de statuts. Deux labels doivent être distingués parmi les théâtres lyriques en Région :

- les opéras en Région, au nombre de 8, pour lesquels la participation financière de l’État est minoritaire et sur lesquels l’État a peu de marges de manœuvre ;

- les opéras nationaux en Région, au nombre de 5, pour lesquels la participation de l’État est plus importante et qui doivent répondre à une convention d’objectifs, conclue pour 5 ans. Cette convention fixe des objectifs chiffrés à la structure. En 2008, les DRAC ont versé 26,8 millions d’euros aux maisons d’opéra.

Les 22 orchestres permanents subventionnés par l’État sont investis d’une mission principale de création musicale. La plupart de ces formations sont liées aux maisons d’opéras des villes sièges. Les orchestres permanents sont constitués, pour les deux tiers d’entre eux, sous forme associative ; le tiers restant étant géré en régie municipale ou en syndicat mixte. Le pouvoir d’encadrement de l’État varie en fonction de la nature de la convention signée avec la structure : quasi-nul dans le cas d’une convention financière annuelle, l’encadrement est plus fort dans le cas d’une convention pluriannuelle. En 2008, les DRAC ont versé 22,6 millions d’euros aux orchestres permanents.

Initié en 1996 dans la continuité du programme Café-Musiques, le dispositif de soutien aux 134 scènes de musiques actuelles (SMAC) est encadré à partir de 199843. L’objectif poursuivi par l’État est ici de pérenniser des structures fragiles du point de vue économique, mais qui s’affirment comme des lieux dynamiques, permettant de découvrir de nouveaux talents musicaux et d’assurer une diffusion de proximité aux artistes. En 2008, les DRAC ont versé 9 millions d’euros aux SMAC.

Les 7 centres nationaux de création musicale (CNCM) sont investis d’une mission principale de création et de diffusion des œuvres musicales nouvelles, ainsi que de missions associées, dont la sensibilisation au répertoire contemporain, l’action en milieu pédagogique et la recherche en informatique musicale. Constitués sous forme associative, les CNCM sont des entités juridiques indépendantes placées sous la direction d’un artiste. En 2008, les DRAC ont versé 3 millions d’euros aux CNCM.

3. La danse :

Les 19 centres chorégraphiques nationaux (CCN) sont investis d’une mission principale de création et de production de spectacles et de missions associées (diffusion chorégraphique pour 11 CCN, soutien à la production de compagnies indépendantes, action en milieu pédagogique, sensibilisation à la danse et formation professionnelle). En règle générale, les CCN ne disposant pas d’installations leur permettant de représenter leurs spectacles à grande échelle, ils constituent au premier chef des structures de création et vendent leurs productions à des structures de diffusion. Cinq CCN sont constitués en ballets et disposent d’artistes permanents.

Constitués à une grande majorité sous la forme associative, les centres chorégraphiques nationaux sont des entités juridiques indépendantes, placées sous la direction d’un artiste. En 2008, les DRAC ont versé 14 millions d’euros aux CCN.

Structures d’initiative privées, les centres de développement chorégraphique (CDC) sont constitués sous forme associative. L’État a récemment développé une politique de contractualisation avec ces centres dans le but de soutenir l’activité de diffusion chorégraphique, dans les salles propres des CDC ou auprès de diffuseurs (scènes nationales, conventionnées, festivals). En 2008, les DRAC ont versé 650 000 euros aux CDC.

4. Les arts de la rue :

Récent, le réseau des centres nationaux pour les arts de la rue (CNAR) est en pleine structuration. En 2008, il compte 10 structures. Ces lieux ont été subventionnés par les DRAC à hauteur de 2,8 millions d’euros en 2008.

Le réseau des CNAR n’est défini et encadré que par un texte-cadre, qui vise à préciser les missions de ce réseau et les critères d’éligibilité.

5. Le cirque :

Les 10 pôles régionaux dédiés aux arts du cirque ont été identifiés en 2001, à la faveur de l’année des arts du cirque. Ils recouvrent une grande diversité de situation (établissements publics spécifiquement orientés sur le cirque, scènes conventionnées, scènes nationales voire centres dramatiques nationaux…). Engagés par des conventions pluriannuelles avec l’État et les collectivités territoriales, ces structures poursuivent quatre grands objectifs : soutenir la création par des résidences et des coproductions, élargir la diffusion des spectacles par des programmations régulières, sensibiliser les publics par des actions concertées avec les milieux scolaire et associatif local et accompagner la structuration de la profession. En 2008, les DRAC ont subventionné les pôles cirque à hauteur de 1,5 million d’euros.

6. Les scènes pluridisciplinaires :

Le label des scènes nationales est apparu en 1992, pour regrouper en un même ensemble les maisons de la culture (créées en 1962), les centres d’action culturelle (créés en 1971) et les centres de développement culturel (créés en 1982). Ces structures sont constituées, pour une grande majorité d’entre elles (64), sous forme associative. Les scènes nationales, au nombre de 70 depuis le 1er janvier 2006, ont une vocation pluridisciplinaire. Leurs missions sont triples : « s’affirmer comme un lieu de production artistique de référence nationale, dans les domaines de la culture contemporaine, organiser la diffusion et la confrontation des formes artistiques en privilégiant la création contemporaine et participer dans [leur] aire d’implantation à une action de développement culturel favorisant de nouveaux comportements à l’égard de la création artistique et une meilleure insertion sociale de celle-ci ». En 2008, les DRAC ont subventionné les scènes nationales pour un montant de 50,36 millions d’euros.

Le label des scènes conventionnées est apparu en 1999, pour regrouper en un même ensemble les théâtres missionnés, les plateaux pour la danse et les contrats « musiques nouvelles ». Le dispositif de conventionnement de scènes pluridisciplinaires est orienté sur des actions spécifiques : « le soutien apporté par le ministère de la culture et le conventionnement afférant concernent dans tous les cas un programme d’actions précis. Il ne constitue donc pas une aide au fonctionnement de la structure mais un soutien à des activités identifiées, sur une base triennale44 ».

Les objectifs poursuivis par l’État par l’intermédiaire du label des scènes conventionnées sont explicitement liés à la diffusion. Ce dispositif vise en effet à :

- poursuivre l’effort d’aménagement culturel du territoire et proposer aux publics les plus larges et les plus variés une diffusion artistique de qualité,

- promouvoir des démarches d’action culturelle actives et inventives,

- contribuer à une meilleure diffusion des formes et disciplines souvent insuffisamment valorisées, comme la danse, les arts de rue, les arts de la piste, les spectacles jeune public et de manière générique les écritures contemporaines,

- contribuer au soutien des compagnies indépendantes et des ensembles musicaux et vocaux, en provoquant des opportunités de diffusion, de coproduction et de résidences.

Initialement conçu pour 150 lieux, ce programme ne concerne en 2008 que 111 structures. Les scènes conventionnées sont majoritairement des associations. En 2008, les DRAC ont subventionné ces structures à hauteur de 9,8 millions d’euros.

Labels

Crédits 2008 en €

Part dans les crédits

de fonctionnement aux structures

Centres dramatiques

57 340 000

26,6%

Centres chorégraphiques nationaux

14 060 000

6,2%

Centres de développement chorégraphique

650 000

0,3%

Maisons d'opéras

26 840 000

11,7%

Orchestres permanents

22 590 000

9,9%

Centres nationaux de création musicale

3 020 000

1,3%

Scènes de musiques actuelles

8 990 000

3,9%

Scènes nationales

50 360 000

22,0%

Scènes conventionnées

9 810 000

4,3%

Centres nationaux des arts de la rue

3 300 000

1,4%

Pôles cirque

1 500 000

0,7%

Festivals

9 440 000

4,1%

Autres lieux de production et de diffusion

18 510 000

8,1%

Annexe 6 – les aides attribuées par la dmdts aux Équipes indépendantes

Les aides aux équipes indépendantes concernent les compagnies dramatiques, chorégraphiques et les ensembles musicaux.

Les compagnies dramatiques aidées par la DMDTS sont, pour la grande majorité d’entre elles, dirigées par d’anciens directeurs d’institutions (théâtres nationaux et centres dramatiques). À leur sortie d’institution, les artistes bénéficiaires reçoivent une aide à la création comprise entre 50 000 et 300 000 euros par an, dans le cadre de conventions triennales, jusqu’à la fin de leur vie professionnelle. Ce dispositif d’aide poursuit deux objectifs indifférenciés :

- permettre aux anciens directeurs de retrouver la couverture sociale des intermittents du spectacle (en tant que gérants d’institutions, les artistes sortent du régime de l’intermittence) ;

- permettre aux bénéficiaires, artistes confirmés et dont le rayonnement atteint au moins l’échelle nationale, de créer et de diffuser régulièrement de nouveaux spectacles.

Certaines compagnies de cirque reçoivent de la DMDTS une aide à l’itinérance. Cette aide est attribuée après étude du dossier, sans passage devant une commission consultative. L’aide à l’itinérance a pour but de soutenir les compagnies du cirque qui choisissent le chapiteau comme outil de diffusion en couvrant une partie des frais de transport, de montage/ démontage et des frais de maintien qui restent à la charge des compagnies, une fois déduits les éventuels remboursements des programmateurs, lorsque les spectacles sont achetés. L’aide à l’itinérance est attribuée sur une saison calculée sur une durée de 12 mois maximum, pour une ou plusieurs tournées dans plusieurs villes ou étapes, pour un minimum de 30 représentations d’un ou plusieurs spectacles de cirque présentés sous chapiteau. En 2008, ce dispositif a concerné 18 compagnies pour un montant total de 284 500 €.

Les aides centrales aux compagnies chorégraphiques concernent exclusivement d’anciens directeurs de centres chorégraphiques nationaux (CCN) et poursuivent les mêmes objectifs que les aides centrales aux compagnies dramatiques : elles permettent aux anciens directeurs de reprendre leur parcours artistique hors de l’institution et de retrouver la couverture sociale des intermittents du spectacle. L’aide aux compagnies chorégraphiques prend la forme de subventions versées dans le cadre d’une convention classique de compagnie conventionnée, pour un montant annuel compris entre 80 000 et 150 000 euros. Une première convention est signée entre la compagnie et l’État, représenté par la DMDTS, pour une durée de trois ans. Au terme de cette première convention, le suivi de la compagnie est ensuite décentralisé : une deuxième convention pluriannuelle est signée entre la compagnie et l’État, représenté par une DRAC. Au terme de cette seconde convention, la compagnie conventionnée rejoint le « droit commun » des aides chorégraphiques accordées par les DRAC (aide au projet, aide à la structuration, aide à la compagnie conventionnée).

La DMDTS accorde enfin des aides aux ensembles musicaux distingués pour la qualité artistique de leur travail et l’ampleur de leur rayonnement. Ces aides sont attribuées :

- à des ensembles aidés par le ministère de la Culture sur le long terme, dont la prise en charge a toujours été assurée par l’administration centrale ;

- ponctuellement, à des ensembles dont l’implantation territoriale touche à sa fin ou s’avère infructueuse.

En 2008, ce dispositif concerne six ensembles musicaux pour un montant global de 3 millions d’euros.

Annexe 7 – les aides attribuées par la dmdts après consultation de commissions nationales

Ces aides centrales suivent une procédure similaire aux aides accordées en DRAC : instruction par les services du ministère de la Culture (en l’espèce, les conseillers sectoriels de la DMDTS), consultation d’une commission composée d’experts, chargée de donner un avis sur la qualité artistique du dossier et pouvoir de décision appartenant in fine au représentant de l’État (en l’espèce, le Ministre de la Culture).

Le théâtre

Jusqu’en 2008, la DMDTS a effectué des commandes aux auteurs dramatiques en s’appuyant sur le dispositif d’aide aux structures. Sur la base d’un projet de travail avec un lieu subventionné, un auteur pouvait recevoir une aide forfaitaire de 3 050 euros pour une adaptation et de 6 100 euros pour un texte original. En 2007, 11 projets ont été retenus pour un montant global de 67 100 euros. En 2008, la commande aux auteurs dramatiques a été supprimée, l’aide aux auteurs étant intégrée au dispositif d’aide au compagnonnage d’auteur.

Les compagnies ont bénéficié, en 2006 et 2007, de la mise en œuvre, à titre expérimental, de nouvelles aides à la création, gérées sur crédits centraux, complétant les aides gérées par les DRAC. Ces aides étaient destinées à renforcer les modes d'expérimentation et de production entre les artistes et les lieux. Elles se composaient :

- d’une aide à la maquette, d’un montant forfaitaire de 5 000 euros, consistant à favoriser une phase de recherche et d’essai d’un projet d’écriture scénique ;

- d’une aide au compagnonnage, d’un montant moyen de 20 000 euros, consistant à permettre à des compagnies conventionnées disposant d’une équipe expérimentée et de locaux adaptés d’accompagner un « jeune » artiste.

24 projets de maquette et 14 projets de compagnonnage ont été retenus en 2007 par la commission ad hoc, pour un montant de 390 000 euros.

Mis en œuvre en 2008, le nouveau dispositif d’aide au compagnonnage s’est substitué à l’aide à la maquette et à l’aide au compagnonnage. Le nouveau dispositif comporte deux volets :

- le compagnonnage d’auteur. Sur la base d’un projet de travail avec un auteur, une compagnie conventionnée ou ayant bénéficié d’une aide à la production dans les trois années précédant sa demande peut désormais obtenir une aide au compagnonnage, d’un montant plafond de 15 000 euros, dès lors qu’elle reverse un montant plancher de 7 000 € à l’auteur ;

- l’aide à la professionnalisation d’artistes en début de parcours professionnel a pour objectif de permettre un accès à l’assistanat à la mise en scène / dramaturgie. Sur la base d’un engagement de partage de l’outil de production avec un jeune artiste, une compagnie conventionnée peut désormais obtenir une aide, d’un montant maximal de 20 000 euros, la moitié de cette somme devant être affectée à la rémunération d’un temps de travail accompli par le jeune artiste au sein la compagnie. Ce dispositif, d’une durée maximale de 18 mois, doit se traduire par l’élaboration d’une maquette faisant l’objet d’une présentation professionnelle.

Ce nouveau dispositif de compagnonnage représente en 2008 un montant global de 130 000 euros.

Enfin, le dispositif d’aide à la création d’œuvres dramatiques vise à permettre l’émergence de projets contemporains d’écriture et de traduction. Ces aides se composent :

- d’aides forfaitaires, versées dès la décision d’attribution aux auteurs ayant obtenu une aide au montage ;

- d’aides conditionnelles au montage, versées aux compagnies après création et diffusion avérée d’au moins 20 dates minimum dans un délai de 3 ans après notification de l’aide.

Le montant global des aides à la création dramatique attribuées en 2007 atteint 804 000 euros (dont 204 000 euros d’aides forfaitaires, effectivement versées en 2007). À compter de 2007, la gestion de cette aide est transférée au centre national du théâtre (CNT), la DMDTS versant au CNT une subvention correspondant aux montants alloués dans le cadre de ce dispositif.

La musique

En marge des aides aux ensembles musicaux, le dispositif de commande musicale vise à proposer aux compositeurs une reconnaissance par l’État de leur métier et de leur travail.

Entre 70 et 90 commandes sont accordées chaque année, dont une partie (les ¾) au terme d’une sélection opérée par une commission nationale. En 2007, le montant global de ce dispositif atteignait 705 000 €.

La danse

Encadré par la circulaire du 21 février 2002, le dispositif d’aide aux écritures chorégraphiques a pour objectif de soutenir la recherche en matière chorégraphique en dehors de toute nécessité de production. De fait, les chorégraphes confirmés destinataires de cette aide ne sont pas tenus de présenter une création mais doivent participer à un rendu d’expérience au moyen d’une courte présentation ou d’un écrit. En 2008, 90 000 euros ont été versés à six chorégraphes au titre de l’aide à la création chorégraphique.

Les arts de la rue

Le dispositif centralisé d’aide aux arts de la rue repose sur deux types d’aides :

- l’aide à la résidence de production, destinée aux projets impliquant un travail dans les lieux de création ou de diffusion du spectacle vivant ;

- l’aide à la résidence d’artistes, destinée aux projets impliquant la collaboration de personnes extérieures à la compagnie (plasticiens, chorégraphes…).

En 2008, le montant global du dispositif atteint 416 300 euros.

Par ailleurs, le dispositif « écrire pour la rue » vise à favoriser le développement de l’écriture spécifique des spectacles de rue. Il repose sur un fonds commun DMDTS / SACD. La participation de la DMDTS atteint 48 000 euros en 2008.

Les arts du cirque

Ponctuelle, l’aide à la création pour le cirque fonctionne sur le modèle de l’aide au projet. Elle est attribuée par la DMDTS après consultation d’une commission nationale spécifique. En 2008, elle concerne 17 projets pour un montant global de 358 500 euros.

Mise en place en 2001-2002, l’aide à la résidence pour le cirque soutient les lieux qui accueillent et coproduisent des créations de compagnies de cirque. L’enjeu de ce dispositif est de soutenir une plus large présence du cirque dans les établissements généralistes. En 2008, 14 projets ont été retenus pour un montant de 232 000 euros.

Enfin, 45 000 euros sont attribués chaque année pour la manifestation « Jeunes talents de cirque ».

L’aide multimédia

Le dispositif pour la création artistique multimédia (DICREAM) a été instauré en 2001.

Il vise à favoriser la création et la diffusion de spectacles présentant une approche pluridisciplinaire, faisant appel simultanément à l’image, au son, au texte, aux arts plastiques, à l’architecture et employant des techniques numériques interactives.

Le dispositif repose sur un fonds commun, géré par le CNC, auquel la DMDTS accorde chaque année des crédits budgétaires.

Le DICREAM accorde deux types d’aides :

- une aide à la maquette, forfaitaire, se traduisant par une résidence de création ; montant moyen en 2007 de 6 000 € et en 2008 de 7 500 € ;

- une aide à la production, variable, destinée à consolider les projets de diffusion ; montant moyen en 2007 et en 2008 de 8 000 €.

La participation de la DMDTS au DICREAM a atteint 142 500 € en 2007 et 133 950 € en 2008.

annexe 8 - Les aides déconcentrées aux équipes artistiques.

En règle générale, une équipe artistique ne peut bénéficier d’une aide déconcentrée dans plus d’une Région. À titre exceptionnel et si les activités le justifient, dans le domaine de la musique, un même ensemble peut cependant solliciter des aides au projet dans plus d’une Région au cours de la même année.

1. Le théâtre :

Réformé en 1999, le dispositif d’aides de l’État aux compagnies dramatiques est encadré par la circulaire du 12 mai 1999 relative à l’aide apportée par l’État aux compagnies dramatiques professionnelles pour leurs activités de création et de diffusion. Ce dispositif repose sur deux catégories d’aides :

- l’aide à la production dramatique, ponctuelle, est attribuée à une compagnie dans le but de soutenir un projet de création spécifique. Cette aide répond à trois objectifs : accompagner une prise de risque de la part d’une jeune compagnie, accorder à un artiste ou à une équipe confirmés des moyens pour mener à son terme une production particulièrement ambitieuse ou importante, faciliter la reprise d’un spectacle après une longue interruption d’exploitation. La circulaire du 12 mai 1999 invite les DRAC à ne pas reconduire l’aide deux années de suite à une même équipe pour des projets différents ;

- l’aide au conventionnement vise à accompagner les compagnies dont le rayonnement national, la régularité professionnelle et les capacités de recherche, de création et de diffusion sont soulignées. Conclues pour une durée de trois ans, ces aides impliquent la signature d’une convention entre l’État et la compagnie, précisant le projet artistique et déterminant des objectifs en termes de nombre de créations et de représentations. L’aide au conventionnement est au moins égale à 150 000 euros sur trois ans. La compagnie conventionnée doit s’engager à assurer un minimum de deux créations et 120 représentations sur la période de conventionnement.

L’ensemble de ces dispositifs a atteint un montant de 28,1 millions d’euros en 2005, 27,7 millions d’euros en 2006 et 28,9 millions d’euros en 2007.

2. La musique :

Le dispositif d’aides de l’État aux ensembles musicaux est encadré par la circulaire du 9 décembre 2005 relative à la procédure d’aide aux ensembles de musique professionnels porteurs de création et d’innovation. Ce dispositif repose sur trois catégories d’aides :

- l’aide au projet, ponctuelle, est accordée à un ensemble musical qui conduit un projet global (de la recherche et de l’écriture à la représentation publique). Le montant minimum recommandé par la circulaire s’élève à 9000 euros ;

- l’aide à la structuration est attribuée pour un an à un ensemble musical au titre de son activité globale (et non spécifiquement pour un projet artistique). Elle ne peut être reconduite plus de trois fois consécutives pour un même ensemble. Cette aide répond à deux objectifs : soutenir le développement d’une équipe artistique susceptible de « réunir progressivement les conditions d’un fonctionnement stable45 » ou aider un ensemble qui, sortant du dispositif de conventionnement, est confronté à une perte brutale de revenus. Le montant minimum recommandé par la circulaire est de 23 000 euros annuels ;

- l’aide au conventionnement est attribuée pour trois ans à un ensemble musical « dont le rayonnement national, la régularité professionnelle et les capacités de recherche, d’innovation, de création et de diffusion46 » sont distingués. Cette aide implique la signature d’une convention entre l’État et l’équipe artistique, précisant le projet artistique et déterminant des objectifs en termes de nombre de créations et de représentations.

L’ensemble de ces dispositifs a atteint un montant de 9,4 millions d’euros en 2006 et de 9,74 millions d’euros en 2007.

3. La danse :

Le dispositif d’aides de l’État aux compagnies chorégraphiques est encadré par l’arrêté du 25 novembre 2003 et par la circulaire du 12 mars 2004 relatifs à la procédure d’aide à la création chorégraphique. Ce dispositif repose sur trois catégories d’aides :

- l’aide au projet est attribuée ponctuellement à une compagnie pour soutenir un projet de création spécifique. L’aide au projet se décompose en trois sous-catégories. D’abord, la première aide au projet, destinée aux créations. Ensuite, l’aide au projet portant sur la reprise d’une pièce, attribuée à une compagnie souhaitant reprendre un spectacle déjà produit et joué, dès lors que la création est intervenue au moins trois ans avant la date prévue pour la reprise. Enfin, un dispositif d’aide complémentaire au projet complète celui de l’aide au projet dans un objectif de soutien à la diffusion. Dans un délai de deux ans après la création, une compagnie qui a obtenu une aide au projet peut en effet obtenir une aide complémentaire au projet si elle se heurte à des difficultés sérieuses au cours de la phase de diffusion du spectacle ;

- l’aide à la compagnie est attribuée pour deux années consécutives, à un montant au moins constant sous réserve de disponibilité des crédits budgétaires. Cette aide est attribuée aux compagnies « dont les capacités de diffusion se développent sur le plan national47 ». Seules les compagnies ayant bénéficié au moins deux fois de l’aide au projet au cours des quatre années qui précèdent la demande peuvent se voir attribuer un soutien au titre de l’aide à la compagnie. L’aide à la compagnie peut être renouvelée ;

- l’aide à la compagnie conventionnée est attribuée pour trois années consécutives, à un montant au moins constant sous réserve de disponibilité des crédits budgétaires. Cette aide vise à accompagner dans leur démarche les compagnies chorégraphiques d’envergure ayant démontré leurs capacités de création et de diffusion. Seules les compagnies ayant bénéficié de l’aide à la compagnie durant les deux années qui précèdent la demande peuvent se voir attribuer un soutien au titre de l’aide à la compagnie conventionnée. La compagnie conventionnée doit s’engager à produire au moins deux nouvelles créations et assurer 75 représentations sur la période de conventionnement. En outre, elle est tenue de développer des actions spécifiques en direction des publics ou des actions d’animation du territoire sur lequel elles développent leur activité. Dans le domaine de la danse, le montant minimum recommandé par les textes en vigueur est de 150 000 euros sur trois ans, l’aide attribuée la première année étant au moins égale à 50 000 euros.

L’ensemble de ce dispositif a atteint un montant de 6 520 000 euros en 2006 (dont 200 000 euros transférés par la DMDTS), 6 723 000 euros en 2007 (dont 120 000 euros d’aides DMDTS) et 6 491 000 euros en 2008 (dont 135 000 euros d’aides DMDTS).

Annexe 9 - Encadrement des structures de création et de diffusion du spectacle vivant.

 

Texte réglementaire / circulaire

Désignation du directeur

Modélisation du conventionnement

Durée du conventionnement

Taux de conventionnement

Centres dramatiques

Décret n° 72-904 du 2 octobre 1972.

Nomination par arrêté du Ministre de la culture et de la communication.

Arrêté du 23 février 1995 fixant le contrat-type de décentralisation dramatique.

3 ans, renouvelable.

97 %

Centres chorégraphiques nationaux

Non.

Nomination conjointe MCC / collectivités locales, à l’issue d’un appel à candidatures.

Non.

5 ans.

47 %

Centres de développement chorégraphique

Non.

Nomination conjointe MCC / collectivités locales, à l’issue d’un appel à candidature.

Non. Projet de charte commune en cours d’élaboration.

Durée variable.

38 %

Opéras en Région

Non.

Nomination conjointe MCC / collectivités locales, à l’issue d’un appel à candidatures.

Non. 

5 ans.

100 %

Orchestres permanents

Non.

Nomination par le maire de la ville siège, parmi les candidats figurant sur une liste ayant reçu l’agrément du ministère de la culture.

Non.

3 ans.

50 %

Centres nationaux de création musicale

Non.

Nomination conjointe MCC / collectivités locales, à l’issue d’un appel à candidatures.

Cahier des charges du 11 octobre 2005 définissant les missions des centres nationaux de création musicale.

6 ans, renouvelable par période de 3 ans.

85 %

Scènes nationales

Circulaire du 30 avril 1997 relative aux scènes nationales et aux contrats d’objectifs.

Nomination conjointe MCC / collectivités locales, à l’issue d’un appel à candidatures.

Circulaire du 30 avril 1997.

Circulaire du 8 janvier 1998 sur les contrats d’objectifs des scènes nationales.

4 ans.

25,7 %

Scènes conventionnées

Circulaire du 5 mai 1999.

Pas d’intervention de l’État.

Circulaire du 5 mai 1999.

Modélisation souple.

Durée variable.

58 %

Scènes de musiques actuelles

Circulaire du 18 août 1998.

Pas d’intervention de l’État.

Circulaire du 18 août 1998.

Modélisation souple.

Durée variable.

50 %

Centres nationaux des arts de la rue

Non.

Pas d’intervention de l’État.

Texte-cadre des CNAR, dépourvu de portée contraignante.

3 ans.

-

Pôles cirque

Non.

Dépend du statut du pôle cirque. Le plus souvent : désignation conjointe État / collectivités locales.

Texte-cadre en cours de rédaction.

Durée variable.

-

Annexe 10 – Contenu des conventions observées sur l’échantillon d’étude.

 

Création

Diffusion

Structuration économique

Action régionale

Sensibilisation et pédagogie

Principes de gestion

Contrats de décentralisation dramatique

Dispositions réglementaires (arrêté du 23 février 1995)

Dispositions supplémentaires contenues dans les conventions

Production ou coproduction majoritaire d’au moins deux spectacles par an.

Accueil d’au moins 5 spectacles par saison produits par des compagnies indépendantes ou des scènes nationales.

Si possible embauche de comédiens sur une durée de six mois minimum ; 1/3 de la masse salariale affectée aux artistes.

Nombre minimum de représentations dans la zone d’implantation (en général 240) sur la durée du contrat.

Action en matière d’initiation au théâtre : milieu scolaire et universitaire, amateurs.

Charges administratives ≤ 50 % des charges administratives et techniques.

Taux de recettes propres ≥ 20 % du total des produits.

Valence : au moins 3 créations sur 3 ans, auxquelles s’ajoutent au moins 3 créations itinérantes par an.

Saint-Étienne : 3 créations par an + 2 spectacles des élèves de l’école associée, 3 coproductions.

Saint-Étienne : 8 spectacles accueillis par saison.

Rennes : engament du CDN à coproduire et diffuser une partie des spectacles du CCN.

Valence : embauche d’une troupe permanente (12 comédiens dont 4 sortent d’école).

Saint-Étienne : 2 spectacles des élèves de l’école associée.

Théâtre du Nord :

- 240 représentations ;

- au moins 30 représentations sur 3 ans dans les communes petites et moyennes de la zone d’exploitation, en dehors de la ville siège.

Théâtre du Nord : « ateliers de formation du spectateur ».

-

Conventions d’objectifs des centres chorégraphiques nationaux

Rennes : production d’au moins deux nouveaux spectacles par période de trois ans.

Rennes : au moins 90 représentations sur la période de conventionnement.

Rennes : engament du CDN à coproduire et diffuser une partie des spectacles du CCN.

Soutien aux compagnies indépendantes :

- procédure spécifique de l’accueil studio ;

- coproduction de compagnies voire diffusion.

Rennes : mise en œuvre de formations destinées aux danseurs amateurs et professionnels.

Grenoble : nombre minimum de représentations dans la zone d’exploitation, déterminé en fonction des infrastructures de diffusion existantes.

Roubaix : pilotage d’un réseau de création et de diffusion en vue de la constitution d’un projet transfrontalier franco-britannique.

Grenoble, La Rochelle, Rillieux-la-Pape, Rennes : actions menées en concertation avec les établissements publics d’enseignement du territoire régional.

Rennes : Charges de structure ≤ 50 % du budget ;

Taux de recettes propres ≥ 20 %.

 

Création

Diffusion

Structuration économique

Action régionale

Sensibilisation et pédagogie

Principes de gestion

Conventions d’objectifs des opéras nationaux en Région

Opéra national de Lyon : la programmation doit couvrir l’ensemble du répertoire.

Nombre minimum de nouvelles créations contemporaines.

Opéra de Lille : accueil d’un chorégraphe en résidence.

Opéra de Lille : augmentation du nombre de représentations d’un opéra par saison. Retransmission en direct d’un opéra sur grand écran.

Opéra national de Lyon : entretien de masses artistiques permanentes.

Formation et insertion professionnelle de jeunes musiciens.

Opéra national de Lyon : objectif quantitatif de représentations en Région, hors ville-siège.

Opéra de Lille : opération « Opéra de quartier » (rencontre des publics, représentations d’opéras et lectures dans des quartiers populaires).

Opéra de Lille : opération « Opéra de quartier » (rencontre des publics, représentations d’opéras et lectures dans des quartiers populaires).

-

Conventions pluriannuelles d’objectifs des orchestres permanents

Orchestre national de Lyon : exigence de répertoire, variable selon les orchestres.

Musiciens du Louvre : nombre minimum de concerts par genre musical.

Nombre minimum de concerts annuels (une centaine en règle générale).

Orchestre national de Lyon, orchestre des pays de Savoie : dispositif de compositeur associé pour deux ans.

Orchestre national de Lille, de Lyon, Musiciens du Louvre : entretien de masses artistiques permanentes.

Formation et insertion professionnelle de jeunes musiciens.

Orchestre national Lille : engagement d’un chef assistant choisi parmi de jeunes chefs d’orchestre par le directeur artistique en relation avec les partenaires publics.

Orchestre national de Lille : objectif de 100 manifestations par saison, ventilées sur le territoire (30 % à Lille, 30 % dans le Nord et le Pas de Calais, 40 % dans le reste de la France).

Orchestre de Bretagne : objectif quantifié de concerts à caractère pédagogique.

Orchestre des pays de Savoie : objectifs quantifiés de concerts jeune public

-

Conventions d’objectifs des centres nationaux de création musicale

Lyon : résidences de compositeurs de longue durée (4 par an en moyenne).

Accueils de courte durée. Mise à disposition d’une assistance technico-musicale.

Lyon :

Concerts en saison.

Répétitions publiques, concerts-rencontres, petites formes.

Festivals.

Lyon :

Encouragement à constituer une équipe artistique, technique et administrative permanente.

-

Lyon : studios à caractère pédagogique.

Lyon : actions menées en concertation avec les établissements publics d’enseignement général et spécialisé sur le territoire régional.

-

Contrats d’objectifs des scènes nationales

Brest : accords d’association avec 7 compagnies sur une période minimale de 3 ans.

Chaque compagnie doit créer au moins un spectacle par saison.

Chambéry : lien étroit et régulier avec deux à trois équipes artistiques

Chambéry : objectif (non chiffré) de pluridisciplinarité.

Nombre minimum de représentations, par discipline.

Brest : encadrement du nombre de spectacles présentés par saison.

Dunkerque : mise à disposition de la salle de répétition et de moyens techniques pour des équipes de la région ou de jeunes équipes professionnelles en phase de structuration.

Formations administratives ou techniques aux jeunes compagnies, sous-traitance ponctuelle de leur gestion.

Dunkerque : programmation internationale à hauteur de 30 %, liée au développement d’une identité européenne.

Une saison hors les murs, comportant de 30 à 40 représentations en format léger.

Saint-Brieuc : animation d’ateliers à destination du public scolaire et du public amateur, représentation de spectacles réalisés par un public scolaire.

Sénart : objectifs chiffrés de fréquentation et de nombre d’abonnements.

Saint-Brieuc : engagement pluriannuel (charges de structures proches de 60 % des charges, charges artistiques proches de 40 % des charges, taux de recette propres proche de 20 % des produits).

Conventions cadres des scènes conventionnées

Brest : objectifs précis et quantifiés de création.

Thonon-Evian : objectifs précis de résidences de création.

Brest : accueil ponctuel d’une compagnie étrangère.

Bourg-en-Bresse : objectifs quantifiés de spectacles diffusés, ventilés par répertoire.

Brest : atelier de formation en alternance destiné aux jeunes professionnels.

Thouars : accueil en compagnonnage de deux compagnies pendant trois ans (apport financier, apport en industrie et soutien administratif).

Thouars : signature d’une convention de développement territorial avec les collectivités territoriales comportant l’organisation de trois opérations partenariales thématiques par an.

Saint-Martin d’Hères : constitution d’un réseau régional de diffusion dans des lieux non théâtraux.

Brest : liste précise des interventions en milieu scolaire, en milieu hospitalier et en milieu universitaire.

Albertville : création d’une école du spectateur en partenariat avec la médiathèque municipale et un cinéma.

Brest : plan de financement prévisionnel pluriannuel (pas de portée contraignante).

Conventions des scènes de musiques actuelles

Tourcoing : une résidence d’artiste par an.

Annecy : nombre minimum de concerts par an.

Tourcoing : nombre minimum d’événements.

Tourcoing : dispositif d’aide au développement de carrière (programmation de premières parties, mise à disposition de salles de répétition, répétitions accompagnées, soutien administratif).

Tourcoing : nombre minimum d’événements hors les murs.

Tourcoing : accompagnement de pratiques amateurs, actions de sensibilisation en milieu scolaire.

Tourcoing : objectifs de fréquentation (pas de portée contraignante).

Centre national des arts de la rue

-

Brest : participation aux saisons des arts de la rue. Résidences de diffusion.  

-

-

-

Brest : plan de financement prévisionnel pluriannuel.

L’effort de soutien à la création (résidence + soutien financier direct aux compagnies) doit représenter plus de la moitié des charges de la structure.

Centres de développement chorégraphique

Grenoble : coproduction de 1 à 3 compagnies par an.

Grenoble : mise à disposition des locaux pour 8 à 15 compagnies par an.

Grenoble : cours technique pour danseurs professionnels.

-

Grenoble : cours réguliers tous publics, représentations pédagogiques.

-

Pôles cirque

Bourg-Saint-Andéol : résidences de création.

Elbeuf : au moins 3 compagnies par saison en résidence. Au moins 4 coproductions dont 1 majoritaire par saison.

Elbeuf : au moins 40 représentations au moins et 10 titres différents par saison.

Bourg-Saint-Andéol : lieu d’accueil de la licence professionnelle des arts du clown mise en œuvre par l’Université Lyon 2

Bourg-Saint-Andéol : mise en réseau du lieu avec les structures de diffusion du territoire.

Elbeuf : au moins 5 représentations scolaires par saison.

-

Source : conventions des structures subventionnées par l’État.

1 () Mission d’audit de modernisation ; Rapport sur les modalités d’attribution des crédits d’intervention en faveur du spectacle vivant, Inspection générale des finances et Inspection générale de l’administration des affaires culturelles, janvier 2007.

2 () Pour un débat national sur l’avenir du spectacle vivant, rapport au ministre de la Culture et de la communication, avril 2004.

3 () Rapport annuel de performances du projet de loi de règlement pour 2008.

4 Les effectifs de l’État 1980-2008. Un état des lieux. Rapport public thématique, La documentation française, décembre 2009.

5 Pour un débat national sur l’avenir du spectacle vivant, rapport au Ministre de la culture et de la communication, avril 2004.

6 Ces subventions représentaient 287 millions d’euros en 2008, le total des crédits de l’action 1 – soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant – s’élevant à 655 millions d’euros en 2008.

7 La France ne comptait que 941 communes de plus de 10 000 habitants au 1er janvier 2006, regroupant 29,1 millions d'habitants soit moins de la moitié de la population. La dimension partielle de l’échantillon retenu doit cependant être nuancée par le fait que les communes de plus de 10 000 habitants portent la majeure partie des dépenses culturelles communales et intercommunales.

8 Ici encore, les chiffres disponibles doivent être analysés avec précaution, dans la mesure où les données fournies par l’étude conduisent à majorer les dépenses d’intervention des collectivités locales (en y incluant certaines formes d’enseignement artistique) et à minorer les dépenses d’intervention de l’État (en excluant certains ministères qui participent indirectement au financement du spectacle vivant). Quoiqu’il en soit, cette limite méthodologique n’affaiblit en rien le constat selon lequel les dépenses d’intervention des collectivités territoriales en faveur du spectacle vivant sont nettement plus importantes que celles de l’État.

9 Dans la suite du présent rapport, le terme « structuration » fait référence à l’objectif 2 du programme 131 « Création » : « Donner des bases économiques et professionnelles solides à la création ».

10 Décret du 25 mai 2007 n° 2007-994 relatif aux attributions du Ministre de la culture et de la communication.

11 Circulaire du 12 mai 1999 relative à l’aide apportée par l’État aux compagnies dramatiques professionnelles.

12 Circulaire du 9 décembre 2005 relative à la procédure d’aide aux ensembles de musique professionnels porteurs de création et d’innovation.

13 Circulaire du 12 mars 2004 relative à l’aide à la création chorégraphique.

14 Réponse à la question parlementaire QP 131-224-39.

15 Ce montant agrège les ressources allouées aux opérateurs nationaux et les autres crédits d’intervention de l’Etat dans le spectacle vivant.

16 Intervention de Jean de Saint Guilhem le 9 avril 2008 – rapport des entretiens de Valois.

17 Agence régionale du spectacle vivant, Les conditions économiques et d'emploi des salariés du spectacle vivant en Poitou-Charentes, 2007.

18 En 2009, la DMDTS conduit une enquête auprès des DRAC afin d’affiner la typologie des « autres lieux de création et de production ». Une première clarification pourrait intervenir en 2010.

19 Décret n° 72-904 du 2 octobre 1972, arrêté du 23 février 1995 fixant le contrat-type de décentralisation dramatique.

20 Avant son transfert au CNT en 2007, la commande aux auteurs dramatiques était intégralement versée aux auteurs – et non aux équipes artistiques.

21 Mis en place en 2006 à titre expérimental, le dispositif de compagnonnage a été refondu en 2008 en deux catégories d’aides (une aide à l’écriture et une aide à l’insertion professionnelle des jeunes artistes). Entre 2006 et 2008, l’imputation budgétaire de ce dispositif a changé dans les projets annuels de performance et le montant global des crédits a été divisé par trois (cf. annexe 7).

22 L’Orchestre symphonique de Poitou-Charentes, orchestre non permanent, est aidé par la DRAC sous la classification d’orchestre permanent ; l’ensemble Ars Nova, orchestre non permanent, est aidé par la DRAC sous la classification d’ensemble musical conventionné ; l’Orchestre des Champs-Elysées, orchestre non permanent, est historiquement subventionné directement par la DMDTS aux cotés des collectivités territoriales picto-charentaises au titre de l’aide aux compagnies musicales.

23 Rapport d'observations définitives sur la régie personnalisée de l'Opéra de Lille, Chambre régionale des comptes de Nord Pas-de-Calais, mars 2009.

24 Association nationale des conseillers théâtre et action culturelle et association nationale des conseillers pour la musique et la danse.

25 Sur les neuf conseillers rencontrés, deux avaient près de vingt ans d’ancienneté dans ce poste. Trois avaient moins d’un an d’ancienneté mais remplaçaient des conseillers qui étaient restés plus de dix ans en poste.

26 Par convention, on parlera de « comités d’experts » pour l’ensemble de ces groupes.

27 Tel a par exemple été le cas au sein de la commission interrégionale Aquitaine, Limousin, Midi-Pyrénées, Poitou-Charentes où a siégé, de 2005 à 2007, un chorégraphe bénéficiant déjà d’une « aide aux compagnies ». Cette aide a été prorogée en 2005, alors que le chorégraphe - qui n'a pas pris part aux délibérations le concernant -  était membre de la commission. Il faut toutefois noter qu’il sollicitait alors un conventionnement : en l’espèce, en n'approuvant que la reconduction de son aide passée, les membres de la commission n’ont pas fait preuve de complaisance à son égard.

28 Extrait du compte-rendu de la réunion du comité d’experts théâtre en Nord-Pas-de-Calais pour 2008 : « [L’artiste] affirme son parcours artistique et poursuit de manière intelligente sa formation, en se confrontant à d’autres esthétiques et d’autres modes de production […] Elle a mené au cours des dernières années plusieurs projets personnels avec professionnalisme (justesse de travail de sensibilisation avec les publics scolaires […], qualité de direction d’acteurs et regard assumé de mise en scène) […]. Le projet est riche et [l’artiste] tente une forme à la fois populaire et élaborée […]. Malgré quelques réserves (crainte de l’éparpillement du propos scénique au bénéfice de quelques artifices de mise en scène), les experts souhaitent voir le travail aboutir ».

29 Extrait du compte-rendu de la réunion du comité d’experts théâtre en Rhône-Alpes pour l’année 2007 : « Bonne diffusion, subventionné par le conseil régional. [L’artiste] a fait une création affligeante (un très bon comédien et un très mauvais), d’autres créations très bien, capable du meilleur comme du pire. Irrégulière. Il semble qu’il continue sur le même répertoire que la création [xx] qui était très mauvais - Avis négatif ».

30 Ces lieux, dont les charges de fonctionnement sont couvertes par les subventions des collectivités territoriales, peuvent toutefois faire l’objet d’aides ciblées de l’Etat en fonction de leur projet artistique.

31 Circulaire du 30 avril 1997 relative aux scènes nationales et aux contrats d’objectifs.

32 Arrêté du 25 novembre 2003.

33 La réponse de la DMDTS, qui rappelle que les contrôles de l’IGAAC visent à prendre en considération la réalisation des objectifs fixés et à proposer la fixation de nouveaux objectifs lors des renouvellements éventuels des conventions, témoigne en creux de l’inexploitation de ces éléments par les DRAC.

34 Développée en 2004 sur la base du projet de tableau de bord des DRAC, l’application OPUS vise à faciliter la collecte des données et la consultation des indicateurs suivis par le ministère, c’est-à-dire les indicateurs des PAP, des BOP, de gestion interne et d’évaluation des actions et de suivi des politiques culturelles.

35 Assimilé à un centre dramatique, le Théâtre Ouvert n’est pas un CDN stricto sensu. Il n’est donc pas soumis au contrat type de décentralisation dramatique.

36 Par comparaison, les deux autres compagnies bénéficiant d’une « aide à la compagnie » en Poitou-Charentes ont touché 15 000 et 25 000 euros en 2008.

37 Dont 128,8 M€ aux structures de création-production, de diffusion et aux équipes artistiques, les 18,6 M€ restants étant dédiés aux établissements d’enseignement et de formation et aux associations régionales et départementales (programme 224) ;

38 Dont 83,8 M€ aux structures de création-production, de diffusion et aux équipes artistiques.

39 Comité de suivi du 2 juin 2006 faisant le bilan de la saison 2004 / 2005.

40 La circulaire du 24 décembre 2002 relative aux subventions de l’État aux associations indique que l'examen de la situation financière de l'association par les services gestionnaires intervient notamment à partir de l'étude des « ressources propres de l'association (montant des cotisations et nombre de cotisants, dons, rémunérations des services rendus avec indication des tarifs pratiqués) ».

41 Quel avenir pour les théâtres lyriques ? par Maria BONNAFOUS-BOUCHER, Stéphanie CHATELAIN-PONROY, Yves EVRARD et Frédéric MAZALLON Lavoisier | Revue française de gestion 2003/1 - n° 142.

42 Référé du 7 avril 2003 sur l’organisation et la gestion des DRAC et des SDAP du ministère de la Culture.

43 Circulaire du 18 août 1998 sur les scènes de musiques actuelles.

44 Circulaire du 5 mai 1999.

45 Circulaire du 9 décembre 2005 relative à la procédure d’aide aux ensembles de musique professionnels porteurs de création et d’innovation.

46 Ibid.

47 Arrêté du 25 novembre 2003 relatif à la procédure d’aide à la création chorégraphique.


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