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N° 3629

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 6 juillet 2011.

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l'article 145-7, alinéa 1, du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

sur la mise en application de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites,

ET PRÉSENTÉ

PAR MM. Michel ISSINDOU et Denis JACQUAT,

Députés.

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INTRODUCTION 7

I. PILOTAGE DES RÉGIMES DE RETRAITE 9

1. LA MISE EN PLACE DU COMITÉ DE PILOTAGE DES RÉGIMES DE RETRAITE 9

2. LE DROIT À L'INFORMATION 12

A) L'INFORMATION GÉNÉRALE SUR LE SYSTÈME DE RETRAITE 12

B) L'ENTRETIEN PERSONNALISÉ À PARTIR DE 45 ANS ET LA SIMULATION DU MONTANT POTENTIEL DE LA RETRAITE 13

C) LA POSSIBILITÉ D'OBTENIR LE RELEVÉ DE SITUATION INDIVIDUELLE PAR VOIE ÉLECTRONIQUE 14

D) CONSÉQUENCES DE LA LOI DU 9 NOVEMBRE 2010 SUR L'ENVOI DES ESTIMATIONS INDICATIVES GLOBALES (EIG) AUX ASSURÉS 15

3. DISPOSITIONS DIVERSES 15

A) PÉRIMÈTRE DU RÉPERTOIRE NATIONAL COMMUN DE LA PROTECTION SOCIALE 15

B) ÉCHANGES D'INFORMATION INTER RÉGIMES 16

C) RÉPERTOIRE DE GESTION DES CARRIÈRES UNIQUE 16

D) MENSUALISATION DES PENSIONS 16

II. LE DÉCALAGE DES BORNES D'ÂGE 18

A. LE DÉCALAGE DE 60 À 62 ANS DE L'ÂGE LÉGAL DE DÉPART À LA RETRAITE 18

B. LES DÉROGATIONS À L'ÂGE LÉGAL : LES DÉPARTS POUR CARRIÈRE LONGUE 19

C. LE DÉCALAGE DE 65 À 67 ANS DE L'ÂGE DU TAUX PLEIN ET LES EXCEPTIONS 22

1. LE DROIT COMMUN : LE DÉCALAGE DE 65 À 67 ANS 22

2. LES AIDANTS FAMILIAUX 23

3. LES ASSURÉS HANDICAPÉS 23

4. LES PARENTS D'ENFANTS HANDICAPÉS 23

5. LES PARENTS DE TROIS ENFANTS 24

D. L'ÉVOLUTION DE LA DURÉE D'ASSURANCE NÉCESSAIRE POUR LE TAUX PLEIN 24

III. LES DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES À LA FONCTION PUBLIQUE 26

1. L'ÉVOLUTION DU TAUX DE COTISATION DES FONCTIONNAIRES 26

2. LA RÉFORME DU MINIMUM GARANTI 27

3. LE DÉPART ANTICIPÉ DES MÈRES DE TROIS ENFANTS 29

4. LA « CONDITION DE FIDÉLITÉ » POUR L'OUVERTURE DU DROIT À PENSION 30

5. LA RÉFORME DES MODALITÉS DE CALCUL DE LA SURCOTE 31

6. L'EXTINCTION DE LA CESSATION PROGRESSIVE D'ACTIVITÉ 31

7. L'APPLICATION DE LA RÉFORME AUX RÉGIMES SPÉCIAUX 32

IV. PÉNIBILITÉ DU PARCOURS PROFESSIONNEL 33

1. LE SUIVI DES SALARIÉS EXPOSÉS À DES RISQUES 33

2. LES ACCORDS PÉNIBILITÉ 34

3. LA RETRAITE ANTICIPÉE POUR PÉNIBILITÉ 36

4. LA MISE EN PLACE D'UN FONDS NATIONAL DE SOUTIEN RELATIF À LA PÉNIBILITÉ 38

V. LES DISPOSITIFS DE SOLIDARITÉ 39

1. L'EXTENSION DU RÉGIME COMPLÉMENTAIRE OBLIGATOIRE AUX CONJOINTS AGRICOLES 39

2. L'EXCLUSION DE LA RÉCUPÉRATION SUR SUCCESSION DE CERTAINS ÉLÉMENTS DU CAPITAL AGRICOLE 39

3. LE RÉTABLISSEMENT DE L'ASSURANCE VEUVAGE 39

VI. MESURES RELATIVES À L'ÉGALITÉ ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES 41

1. LA PRISE EN COMPTE DES INDEMNITÉS JOURNALIÈRES DE MATERNITÉ DANS LE CALCUL DE LA PENSION 41

2. L'OBLIGATION DE NÉGOCIATION SUR L'ÉGALITÉ HOMMES-FEMMES 41

A) L'AMÉLIORATION DES OUTILS D'ÉVALUATION DES INÉGALITÉS PROFESSIONNELLES 41

B) LA PUBLICITÉ DES EFFORTS ACCOMPLIS PAR CHAQUE ENTREPRISE 42

C) LA CRÉATION D'UNE SANCTION FINANCIÈRE EN CAS DE NON RESPECT PAR L'ENTREPRISE DE SES OBLIGATIONS LÉGALES 43

VII. LES MESURES RELATIVES À L'EMPLOI DES SENIORS 45

1. L'AIDE À L'EMBAUCHE DES SENIORS 45

2. L'AIDE AU TUTORAT 45

3. LA PÉRENNISATION DE LA RETRAITE PROGRESSIVE 46

VIII. LES MESURES RELATIVES À L'ÉPARGNE-RETRAITE 47

1. LES DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES AU PLAN D'ÉPARGNE POUR LA RETRAITE COLLECTIF (PERCO) 47

2. LES DISPOSITIONS RELATIVES AUX CONTRATS D'ASSURANCE 49

TRAVAUX DE LA COMMISSION 51

ANNEXES 71

ANNEXE 1 : TABLEAU DE SUIVI DES TEXTES RETRAITES PUBLIÉS ET RESTANT À PUBLIER EN 2011 LOI DU 9 NOVEMBRE 2010 PORTANT RÉFORME DES RETRAITES 71

ANNEXE 2 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS 77

INTRODUCTION

La loi du n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a été promulguée il y a maintenant plus de six mois.

Conformément à l'article 145-7 du Règlement de l'Assemblée nationale, « à l'issue d'un délai de six mois suivant l'entrée en vigueur d'une loi dont la mise en œuvre nécessite la publication de textes de nature réglementaire, deux députés, dont l'un appartient à un groupe d'opposition et parmi lesquels figure de droit le député qui en a été le rapporteur, présentent à la commission compétente un rapport sur la mise en application de cette loi. Ce rapport fait état des textes réglementaires publiés et des circulaires édictées pour la mise en œuvre de ladite loi, ainsi que de ses dispositions qui n'auraient pas fait l'objet des textes d'application nécessaires. »

Tel est l'objet du présent rapport : il recense et présente les différentes mesures réglementaires qui ont été prises pour l'application de la loi et répertorie les mesures qui n'ont pas encore été publiées.

Compte tenu des divergences d'opinion des deux rapporteurs sur le fond de la réforme, le présent rapport se contente donc, pour l'essentiel, d'une présentation neutre et technique du contenu des décrets déjà publiés.

Comme l'illustre le tableau figurant en annexe 2, la quasi-totalité des décrets nécessaires à l'entrée en vigueur de la loi a été publiée dans les temps. Certaines mesures réglementaires sont encore en attente mais elles concernent des dispositions législatives dont la date d'entrée en vigueur est plus lointaine.

I. PILOTAGE DES RÉGIMES DE RETRAITE

Le chapitre Ier du Titre Ier de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites est consacré au pilotage des régimes de retraite. Les principales mesures concernent la mise en place d'un Comité de pilotage des régimes de retraite et le développement du droit à l'information.

1. La mise en place du comité de pilotage des régimes de retraite

L'article 2 de la loi du 10 novembre 2010 crée un comité de pilotage des régimes de retraite, dit « COPILOR», à l'article L. 114-4-2 du code de la sécurité sociale. Le COPILOR a pour mission de veiller « au respect des objectifs du système de retraite par répartition définis au dernier alinéa de l'article
L. 161-17 A
 ».

La loi prévoit que le COPILOR doit rendre un avis chaque année avant le 1er juin « sur la situation financière des régimes de retraite, sur les conditions dans lesquelles s'effectue le retour à l'équilibre du système de retraite à l'horizon 2018 et sur les perspectives financières au-delà de cette date ».

Le décret n° 2011-594 relatif à l'organisation et à la composition du COPILOR n'a été signé que le 27 mai 2011. Il était applicable dès le lendemain de sa publication, permettant une réunion d'installation du COPILOR in extremis le 31 mai 2011, sous présidence du ministre du Travail, de l'emploi et de la santé. Les rapporteurs regrettent la précipitation dans laquelle cette réunion a été organisée, les convocations ayant été envoyées seulement trois jours avant.

L'article L. 114-4-3 du code de la sécurité sociale, issu de la loi du 10 novembre 2010, dispose que le COPILOR est composé « de représentants de l'État, des députés et des sénateurs membres du Conseil d'orientation des retraites, de représentants des régimes de retraite légalement obligatoires, de représentants des organisations d'employeurs les plus représentatives au plan national, de représentants des organisations syndicales de salariés représentatives au plan national interprofessionnel et de personnalités qualifiées. Un décret définit la composition et les modalités d'organisation de ce comité. Il précise les conditions dans lesquelles sont représentés les régimes de retraite dont le nombre de cotisants est inférieur à un seuil qu'il détermine ».

Le décret précise que le COPILOR est présidé par le ministre chargé de la sécurité sociale ou son représentant ; les autres membres du Gouvernement présents ou représentés sont le ministre chargé du budget, le ministre chargé de la fonction publique et le ministre chargé de l'agriculture.

En outre, le COPILOR est composé de 45 membres, dont la liste figure dans l'encadré ci-après.

Les 45 membres du COPILOR

Le décret n° 2011-594 relatif à l'organisation et à la composition du COPILOR dispose qu'outre les ministres concernés, le COPILOR est composé des 45 membres suivants :

« 1° Les quatre députés et les quatre sénateurs membres du Conseil d'orientation des retraites ;

« 2° Le président du Conseil d'orientation des retraites ;

« 3° Trois autres personnalités choisies à raison de leur compétence et de leur expérience dans les domaines relevant des attributions du comité ;

« 4° Seize représentants des organisations professionnelles et syndicales :

« a) Deux représentants désignés par la Confédération générale du travail (CGT) ;

« b) Deux représentants désignés par la Confédération française démocratique du travail (CFDT) ;

« c) Deux représentants désignés par la Confédération générale du travail-Force ouvrière (CGT-FO) ;

« d) Un représentant désigné par la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) ;

« e) Un représentant désigné par la Confédération française de l'encadrement -Confédération générale des cadres (CFE-CGC) ;

« f) Deux représentants désignés par le Mouvement des entreprises de France (MEDEF) ;

« g) Un représentant désigné par la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) ;

« h) Un représentant désigné par l'Union professionnelle artisanale (UPA) ;

« i) Un représentant désigné par la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) ;

« j) Un représentant désigné par l'Union nationale des professions libérales (UNAPL) ;

« k) Un représentant désigné par la Fédération syndicale unitaire (FSU) ;

« l) Un représentant désigné par l'Union des fédérations de fonctionnaires (UNSA) ;

« 5° Huit représentants des régimes de retraite légalement obligatoires :

« a) Le directeur de la Caisse nationale d'assurance vieillesse ;

« b) Le directeur général de la Caisse nationale du régime social des indépendants ;

« c) Le directeur général de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole ;

« d) Le directeur général de l'Association générale des institutions de retraite des cadres et de l'Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés ;

« e) Le directeur de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales ;

« f) Le directeur du service des retraites de l'État ;

« g) Le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, au titre de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales et de l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques ;

« h) Un directeur d'une caisse ou d'un organisme gestionnaire d'un des régimes de retraite dont le nombre de cotisants, mentionné dans le dernier rapport adopté par la commission des comptes de la sécurité sociale lors de la réunion mentionnée au troisième alinéa de l'article D. 114-3, est inférieur à 500 000 ;

« 6° Neuf représentants de l'État :

« a) Le directeur de la sécurité sociale ;

« b) Le directeur du budget ;

« c) Le délégué général à l'emploi et à la formation professionnelle ;

« d) Le directeur général de l'administration et de la fonction publique ;

« e) Le directeur général du travail ;

« f) Le directeur général du Trésor ;

« g) Le directeur du service des affaires financières, sociales et logistiques ;

« h) Le directeur de l'animation de la recherche, des études et des statistiques ;

« i) Le directeur de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques ; »

La loi prévoit que ce décret « précise les conditions dans lesquelles sont représentés les régimes de retraite dont le nombre de cotisants est inférieur à un seuil qu'il détermine ». Ainsi, le décret indique que ces régimes sont représentés au COPILOR par le directeur de la caisse de l'un d'entre eux (h du 5° de l'article D. 114-4-0-14).

Le décret précise que « les membres du comité de pilotage des régimes de retraite mentionnés au 3°, au 4° et au h du 5° sont nommés par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale pour une durée de trois ans. » Il s'agit des trois personnalités qualifiées, des seize représentants des organisations professionnelles et syndicales ainsi que du représentant des régimes de moins de 500 000 cotisants, nommées par l'arrêté du ministre du Travail, de l'emploi et de la santé du 30 mai 2011 portant nomination au comité de pilotage des régimes de retraite (1).

Le décret prévoit que certains membres du COPILOR perçoivent une indemnité de présence. Il s'agit des membres mentionnés aux 3° et 4° de l'article D. 114-4-0-14, c'est-à-dire des trois personnalités qualifiées et des seize représentants des organisations professionnelles et syndicales. Cette indemnité est fixée par arrêté conjoint du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget. Cet arrêté n'est pas encore publié.

Le décret indique aussi que le secrétariat du comité est assuré par la direction de la sécurité sociale, qui prépare les réunions en lien avec le Conseil d'orientation des retraites (COR). Cela est cohérent avec le fait que l'article 2 de la loi du 10 novembre 2010 prévoit que « le comité s'appuie sur les travaux du Conseil d'orientation des retraites ».

Le comité suit la réalisation des objectifs de l'assurance vieillesse mentionnés à l'article L. 161-17 A « au moyen d'indicateurs qu'il définit ».

Le COPILOR remplace la conférence nationale tripartite, créée par la loi du 21 août 2003, qui ne s'était jamais réunie. Ainsi, l'article 2 du décret abroge les articles relatifs à la conférence, c'est-à-dire les articles D. 161-2-23, D. 161-2-24 et D. 161-2-25 du code de la sécurité sociale.

2. Le droit à l'information

L'article 6 de la loi a enrichi le droit à l'information des assurés, mis en place en 2003, sur leurs droits à retraite. Les trois principales innovations concernent l'envoi d'une information générale dès la constitution des premiers droits à la retraite, la mise en place d'un entretien personnalisé à partir de 45 ans, et la mise en ligne et l'envoi par courrier électronique du relevé de situation individuelle. L'article prévoit l'entrée en vigueur de ces mesures au 1er janvier 2012. Les décrets d'application devraient être publiés en septembre.

a) L'information générale sur le système de retraite

L'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale prévoit désormais que suivant la première année au cours de laquelle il a validé au moins une période d'assurance dans un des régimes de retraite obligatoires, l'assuré bénéficie d'une information générale sur le système de retraite par répartition, notamment sur les règles d'acquisition de droits à pension et l'incidence, sur ces derniers, des événements susceptibles d'affecter sa carrière. Il faut noter que cette information devra comporter des éléments relatifs à la possibilité de surcotisation en cas de temps partiel afin de sensibiliser les femmes à l'impact du déroulement de leur carrière sur leur retraite.

Un projet de décret, dont la publication est prévue en septembre, fixe les modalités d'application de cette mesure. Il prévoit que le document d'information générale sera délivré par l'organisme de retraite dont le bénéficiaire a relevé au cours de l'année civile précédant son envoi. Il comporte :

- une présentation générale du système de retraite par répartition, des règles d'acquisition des droits à pension et du mode de calcul des pensions, ainsi que des mécanismes de solidarité existants ;

- une information sur l'impact sur la constitution des droits à retraite d'une activité professionnelle réduite, exercée à temps partiel ou donnant lieu à versement de cotisations forfaitaires ;

- une information sur les modalités de prise en compte des activités professionnelles accomplies dans l'Union européenne et/ou dans un État tiers pour autant qu'il ait conclu une convention bilatérale de sécurité sociale avec la France.

Un document synthétique de quatre pages a d'ores et déjà été mis au point par le GIP Info retraite. Il sera envoyé à tous les assurés qui ont validé au moins deux trimestres dans un des régimes de retraite légalement obligatoires au cours de l'année 2011 et des années suivantes.

b) L'entretien personnalisé à partir de 45 ans et la simulation du montant potentiel de la retraite

L'article 6 prévoit que tout assuré bénéficie à sa demande, dès 45 ans, qu'il vive en France ou à l'étranger, d'un entretien sur les droits qu'il a constitués dans les régimes de retraite légalement obligatoires et sur les perspectives d'évolution de ces droits, ainsi que sur les dispositifs lui permettant d'améliorer le montant futur de sa pension de retraite. Ce dernier point avait posé problème lors de la discussion du projet de loi : s'agissait-il d'entrer dans une logique de conseil, intégrant par exemple les dispositions relatives à l'épargne retraite ou les possibilités de rachat des périodes d'études, ou de s'en tenir à une simple information relative aux régimes légalement obligatoires ?

Le projet de décret transmis au rapporteur s'en tient à la deuxième interprétation. Il prévoit que l'entretien individuel, qui sera réalisé par l'un des régimes de retraite légalement obligatoires dont relève l'assuré dans les six mois qui suivent sa demande, aura pour objet :

- d'informer l'assuré sur les possibilités ouvertes dans les régimes de retraite légalement ou réglementairement obligatoires : de surcotiser en cas d'emploi à temps partiel ; de compléter la durée d'assurance au titre de certaines périodes, telles que les années d'études supérieures ou les périodes d'activité exercées hors de France ; de liquider une pension de retraite à titre provisoire en cas de travail à temps partiel ; de majorer la pension de retraite et d'exercer une activité professionnelle après la liquidation de la pension. Un document mis au point par le GIP Info retraite sera remis à l'ensemble des régimes en charge de l'entretien « Info retraite », afin d'harmoniser les pratiques ;

- d'inviter l'assuré à vérifier la complétude des données figurant dans son relevé de situation personnelle ;

- de répondre aux questions de l'assuré relatives aux droits qu'il s'est constitué et aux perspectives d'évolution de ces droits en fonction de ses aléas de carrière ;

- de communiquer à l'assuré des simulations du montant potentiel de sa future pension, en prenant l'hypothèse d'une liquidation des droits à l'âge d'ouverture des droits à retraite et à l'âge auquel s'annule le coefficient de minoration. Le projet de décret prévoit également qu'une simulation sera calculée selon d'autres hypothèses à la demande de l'assuré.

L'entretien individuel et la simulation représentent des avancées majeures pour l'information des assurés dont la mise en place requiert néanmoins de lourds investissements pour les régimes de retraite.

Ainsi, il conviendra de former le personnel des régimes et d'allouer des moyens conséquents à l'organisation des entretiens, même si la majorité des assurés obtiennent aujourd'hui une réponse grâce aux informations disponibles sur le site de leur régime de retraite ou grâce à un appel téléphonique. Par ailleurs, certains régimes sont privés de réseau. Le projet de décret prévoit dans un premier temps que l'entretien pourra avoir lieu par téléphone. Compte tenu de ces difficultés marginales, l'entretien individuel ne sera pleinement mis en œuvre qu'à compter du 1er janvier 2013.

La simulation du montant prévisionnel de la retraite de chaque assuré sera quant à elle opérationnelle au 1er juillet 2014. Le projet de décret prévoit que cette simulation est réalisée à législation constante et en fonction de prévisions économiques fixées chaque année par le GIP Info retraite. Un outil de simulation, rendu accessible en ligne aux assurés, est également en cours de construction.

Enfin, une difficulté particulière dans l'application de la loi a été soulevée par les responsables du GIP Info retraite lors de leur audition par vos rapporteurs. L'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale prévoit désormais que toute personne engagée dans une procédure de divorce peut demander une estimation globale du montant prévisionnel de sa retraite. Or, lorsque le divorce intervient bien avant l'âge légal de départ en retraite, il est impossible pour les régimes de procéder à un calcul fiable. Les régimes de retraite craignent d'engager leur responsabilité en communiquant un montant prévisionnel de retraite interférant dans le règlement du divorce, en servant par exemple de base au calcul d'une prestation compensatoire.

c) La possibilité d'obtenir le relevé de situation individuelle par voie électronique

L'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale dispose désormais qu'à la demande de l'assuré, les régimes de retraite lui communiquent à tout moment un relevé de situation individuelle par voie électronique (RIS/e). Il s'agit ainsi de s'adapter à l'évolution de l'environnement culturel et technologique des assurés.

Selon les responsables du GIP Info retraite, chargés de superviser la mise en œuvre de cette mesure, sa montée en charge sera progressive pour une ouverture au public fin juin 2011. Les régimes participants au RIS/e seront : la Caisse nationale de l'assurance vieillesse (CNAV), la majorité des institutions de l'Association générale des institutions de retraite complémentaire des cadres et l'Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés (AGIRC-ARRCO), la Mutualité sociale agricole (MSA), la Caisse des Dépôts, le régime social des indépendants (RSI), le Service des retraites de l'État, la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques, le régime des mines et la retraite additionnelle de la fonction publique. Si l'un des régimes de l'assuré ne peut fournir ce service sur son site internet, le relevé de situation individuelle lui sera envoyé par mail dans un délai moyen de deux semaines.

Le projet de décret communiqué à vos rapporteurs prévoit que la mise en place de la communication annuelle du relevé de situation individuelle par voie électronique sera opérationnelle au 1er janvier 2012. En revanche, l'accessibilité du relevé en ligne à tout moment sera mise en œuvre au 1er janvier 2013.

d) Conséquences de la loi du 9 novembre 2010 sur l'envoi des estimations indicatives globales (EIG) aux assurés

Depuis 2003, la loi prévoit la fourniture à chaque assuré, à partir de 55 ans, d'une estimation indicative globale (IEG) du montant de la pension. Après 55 ans, ce document lui est envoyé tous les cinq ans. Il s'agit d'un véritable document de « préliquidation », très complet, dont le contenu est fixé par l'article D. 161-2-1-7 du code de la sécurité sociale. Or, l'examen de la loi du 9 novembre 2010 a interféré dans le calendrier d'envoi des estimations indicatives globales.

C'est pourquoi un décret, dont la publication est prévue pour septembre, prévoit deux mesures d'adaptation liées à l'adoption de la loi de 2010 :

- les assurés des générations 1954 et 1955, qui auraient dû recevoir en 2010 une estimation indicative globale, le recevront en juillet 2011, afin de tenir compte de la réforme ;

- les assurés dont la pension est liquidable avant l'âge légal de départ à la retraite devraient également recevoir une estimation indicative globale du montant de leur retraite, en vertu de la loi du 21 août 2003. Compte tenu de la complexité technique de l'élaboration de ce document, son envoi est reporté au 1er janvier 2013.

3. Dispositions diverses

Au cours de son examen parlementaire, le texte initial s'est enrichi d'un certain nombre d'articles relatifs au pilotage des régimes. Pour ces dispositions dont l'entrée en vigueur est différée, les décrets d'application n'ont pas encore été pris.

a) Périmètre du répertoire national commun de la protection sociale

Le répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS) a été créé par l'article 138 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 : ce répertoire est commun aux organismes chargés d'un régime obligatoire de base, aux caisses de congés payés et à Pôle emploi. Les données qu'il contient sont en outre accessibles aux organismes de la branche recouvrement, ainsi qu'aux collectivités territoriales dans le cadre de l'aide sociale.

L'article 7 de la loi ouvre le répertoire national commun d'une part aux organismes chargés de la gestion d'un régime de retraite complémentaire ou additionnel obligatoire et, d'autre part, au Centre de liaisons européennes et internationales de sécurité sociale (CLEISS). Il s'agit de sécuriser davantage l'échange de données, d'améliorer leur qualité et de lutter contre les fraudes.

Les consultations préalables à la rédaction du décret sont en cours et le décret devrait être publié à l'automne 2011.

b) Échanges d'information inter régimes

L'article 8 de la loi modifie l'article 161-1-6 du code de la sécurité sociale qui a institué un système d'échange d'informations inter régimes de retraite de base et complémentaires pour faciliter la détermination, par les caisses, du droit aux prestations de retraite, en particulier pour celles soumises à conditions de ressources, comme le minimum contributif ou la pension de réversion.

L'article 8 étend le champ des informations échangées à la pension de réversion, à l'allocation solidarité aux personnes âgées et à l'allocation supplémentaire d'invalidité. Devront également être communiquées les informations relatives au maintien des droits.

Le décret nécessaire doit faire l'objet d'une consultation de l'ensemble des contributeurs au RNCPS et sa publication est prévue au mois de décembre 2011.

c) Répertoire de gestion des carrières unique

L'article 9 de la loi crée un répertoire de gestion des carrières unique, confié à la CNAV. Pour gérer ce répertoire, cette dernière recevra régulièrement des régimes de retraite de base légalement obligatoires ainsi que des services de l'État l'ensemble des informations concernant la carrière de leurs assurés.

La loi crée ainsi un outil de traçabilité des carrières des assurés, commun à tous les régimes de retraite. Cette mesure participe à l'amélioration du droit à l'information des assurés et devrait faciliter la liquidation des pensions des assurés, en particulier celle des polypensionnés.

Un décret en Conseil d'État doit préciser les modalités d'application de cet article. Un groupe technique doit être mis en place associant le GIP Info retraite, la direction de la sécurité sociale et la CNAV pour une publication du décret mi-2012.

d) Mensualisation des pensions

Dans certains régimes de retraite (régimes complémentaires AGIRC-ARRCO, régime des industries électriques et gazières, régime de la SNCF), les prestations sont payées trimestriellement. Ce mode de paiement occasionne parfois aux retraités des difficultés financières, puisque les diverses échéances auxquelles ils doivent faire tombent, elles, au début de chaque mois.

L'article 10 de la loi ouvre donc la possibilité, à compter du 1er janvier 2013, pour tout assuré de demander à percevoir sa pension mensuellement, demande qui ne peut être refusée et qui est irrévocable.

Un décret doit prévoir les modalités d'information des assurés.

Si cette disposition répond à une vraie difficulté pour les assurés, le caractère optionnel de ce passage du paiement trimestriel au paiement mensuel risque de provoquer une grande difficulté de gestion pour les organismes concernés. Peut-être serait-il plus simple d'opter pour un passage automatique et généralisé.

II. LE DÉCALAGE DES BORNES D'ÂGE

La principale mesure, en tout cas la plus symbolique, de la loi portant réforme des retraites a été le décalage de deux ans de l'âge légal de départ à la retraite et de l'âge du taux plein, qui passeront respectivement à 62 et 67 ans.

Un certain nombre d'exceptions ont néanmoins été prévues pour ce décalage : maintien et extension du dispositif « carrière longue » et possibilités de départs à 65 ans sans décote pour certaines catégories d'assurés.

L'ensemble des décrets nécessaires à la mise en œuvre de ce volet de la loi du 9 novembre 2010 ont été pris dans les temps pour permettre une application au 1er juillet 2011.

A. LE DÉCALAGE DE 60 À 62 ANS DE L'ÂGE LÉGAL DE DÉPART À LA RETRAITE

L'âge légal d'ouverture du droit à la retraite a été fixé à 62 ans pour les assurés nés à compter du 1er janvier 1956 par l'article 18 de la loi, qui a inséré à cet effet un article L. 161-17-2 dans le code de la sécurité sociale parmi les dispositions du code communes aux régimes de base.

Le décret n° 2010-1734 du 30 décembre 2010 établit le calendrier suivant lequel l'âge de départ va progressivement augmenter de 60 ans aujourd'hui jusqu'à 62 ans pour les assurés du régime général et des régimes alignés dont les pensions prendront effet à compter du 1er juillet 2011. Ce calendrier avait été rendu public dès la présentation de la réforme en juin 2010.

Cet âge est ainsi fixé à :

- 60 ans pour les assurés nés avant le 1er juillet 1951 ;

- 60 ans et quatre mois pour les assurés nés entre le 1er juillet 1951 et le 31 décembre 1951 inclus ;

- 60 ans et huit mois pour les assurés nés en 1952 ;

- 61 ans pour les assurés nés en 1953 ;

- 61 ans et quatre mois pour les assurés nés en 1954 ;

- 61 ans et huit mois pour les assurés nés en 1955 ;

- 62 ans pour les assurés nés à compter du 1er janvier 1956.

Pour les fonctionnaires, un décret spécifique, le décret n° 2011-754 du 28 juin 2011 portant relèvement des bornes d'âge de la retraite des fonctionnaires, des militaires et des ouvriers des établissements industriels de l'État, vient d'être publié en prévoyant un relèvement analogue mais adapté aux spécificités de la fonction publique.

Ce relèvement de l'âge légal aurait, selon les dernières projections de la CNAV, un effet immédiat sur le nombre de départ en 2011 : ces départs s'élèveraient à 642 000 en 2011 soit une baisse de 10 % par rapport à l'année précédente. Ce serait ainsi près de 200 000 personnes qui décaleraient leur départ dès 2011.

À plus long terme, toujours selon la CNAV, les effets du relèvement de l'âge légal de 60 à 62 ans seraient toujours très rapides. À peine trois ans après l'entrée en vigueur de la réforme, plus de la moitié des assurés devraient décaler leur départ. L'effet du relèvement de l'âge du taux plein de 65 à 67 ans serait, quant à lui, décalé dans le temps, la première génération concernée par la réforme n'atteignant 65 ans qu'en 2016. Stable en 2014-2015, le taux de « décalants » augmenterait donc à nouveau rapidement à partir de 2016 sous l'effet de ce relèvement. À partir de 2018, conséquence de la réforme 2010, 75 % des assurés liquideraient leur retraite plus tard.

La durée des décalages des départs devrait également être progressive. D'environ trois trimestres en 2013, le décalage moyen se stabiliserait à 6,6 trimestres à partir de 2023, année de fin de montée en charge des mesures de relèvement de l'âge de la retraite.

B. LES DÉROGATIONS À L'ÂGE LÉGAL : LES DÉPARTS POUR CARRIÈRE LONGUE

L'âge de départ en retraite anticipée pour carrière longue, jusqu'à présent fixé avant 60 ans, est touché par le recul progressif de 60 à 62 ans de l'âge légal de départ à la retraite, pour les assurés nés à compter du 1er juillet 1951 et pour les pensions prenant effet à partir du 1er juillet 2011.

Avec la réforme, cet âge de départ en retraite anticipée variera, pendant une période transitoire, à la fois en fonction de la génération de l'assuré et de ses durées d'assurance totale et cotisée.

À la fin de cette période (assurés nés à compter de 1960), cet âge sera finalement porté à 58 ans pour un début d'activité avant 16 ans, sachant qu'un assuré pourra partir à compter de 60 ans s'il a commencé à travailler avant 18 ans.

Le décret n° 2010-1734 précité, commenté par une circulaire CNAV n° 2011-16 du 7 février 2011, est venu préciser ce dispositif indiscutablement complexe. Le tableau ci-dessous illustre aussi clairement que possible les différents cas de figure :

Dur validée ≥ tx plein +8

Dur validée ≥ tx plein +8

Dur validée ≥ tx plein +8

Dur validée ≥ tx plein +8

Dur cotisée ≥ tx plein +8

Dur cotisée ≥ tx plein +4

Dur cotisée ≥ tx plein

Dur cotisée ≥ tx plein

Déb activité avant 16 ans

Déb activité avant 16 ans

Déb activité avant 17 ans

Déb activité avant 18 ans

Départ antérieur au 31/12/2010

 

 

1951

1er semestre

1951 2eme semestre

1952

1953

1954

1955

1956

1957

1958

1959

1960

                       

56 ans

         

Départ Impossible

Départ Impossible

Départ Impossible

Départ Impossible

Départ Impossible

Départ Impossible

56 ans 4 mois

           

56 ans 8 mois

             

57 ans

               

57 ans 4 mois

                 

57 ans 8 mois

                   

58 ans

                     

58 ans 4 mois

                     

58 ans 8 mois

                     

59 ans

                     

59 ans 4 mois

                     

59 ans 8 mois

                     

60 ans

Départ Normal

                   

60 ans 4 mois

Départ Normal

                 

60 ans 8 mois

Départ Normal

               

61 ans

Départ Normal

             

61 ans 4 mois

Départ Normal

           

61 ans 8 mois

Départ Normal

         

62 ans

Départ Normal

Départ Normal

Départ Normal

Départ Normal

Départ Normal

62 ans 4 mois

62 ans 8 mois

Statistiquement, la CNAV anticipe une remontée du nombre de départs anticipés pour carrière longue. Ceux-ci, après avoir fortement baissé en 2009, ont légèrement rebondi en 2010 pour atteindre 45 010 départs, nombre néanmoins encore très inférieur aux départs enregistrés jusqu'en 2008 qui dépassaient annuellement la centaine de milliers.

Départs anticipés

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Hommes

89 920

92 270

17 420

34 050

28 600

37 210

46 480

47 260

57 310

Femmes

25 860

28 650

7 390

10 960

11 210

16 370

19 540

19 090

22 450

Ensemble

115 780

120 920

24 810

45 010

39 810

53 580

66 020

66 350

79 760

Source : CNAV

Après un léger recul attendu en 2011, le nombre de retraites anticipées devrait augmenter suite aux modifications apportées au dispositif par la réforme, et notamment l'ouverture aux assurés ayant débuté leur activité avant 18 ans. En 2015, près de 80 000 personnes pourraient bénéficier d'un départ avant l'âge légal, qui sera alors de 61 ans et huit mois pour les assurés nés en 1955.

Financièrement, les masses de prestations servies aux retraités bénéficiant de retraites anticipées sont de l'ordre de 2,1 milliards d'euros en 2009, soit une légère baisse par rapport à l'année précédente où elles ont atteint un maximum de près de 2,5 milliards d'euros. Sur l'année 2010, la baisse s'est accentuée : le coût des retraites anticipées est évalué à 1,5 milliard d'euros. Entre 2011 et 2013, le coût devrait continuer de diminuer sur un rythme assez rapide, pour atteindre 700 millions d'euros en 2013. À partir de 2014, le coût augmenterait à nouveau sous l'effet de l'élargissement du dispositif prévu par la réforme de 2010.

Masses de pensions versées aux retraités n'ayant pas atteint l'âge légal

(en millions d'euros 2010)

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Hommes

1 828

2 010

1 730

1 281

908

613

546

648

807

Femmes

372

442

395

292

209

162

167

203

247

Ensemble

2 200

2 452

2 126

1 572

1 117

775

713

850

1 054

Source : CNAV

Rappelons également que la loi portant réforme des retraites a étendu le bénéfice du départ anticipé à la retraite pour handicap aux personnes reconnues comme « travailleurs handicapés » au sens du code du travail. L'article 4 du décret n° 2010-1734 précité modifie donc l'article D. 351-1-5 du code de la sécurité sociale pour permettre aux intéressés de bénéficier d'une pension de vieillesse, au taux plein, avant l'âge légal de départ à la retraite (et au plus tôt à 55 ans) sans avoir à justifier d'un taux d'incapacité permanente d'au moins 80 %. En revanche, comme les bénéficiaires actuels, ils n'accéderont au dispositif que s'ils remplissent simultanément deux conditions : une durée d'assurance validée et une durée d'assurance cotisée, toutes deux dépendant de l'année de naissance de l'assuré.

Il est, en revanche, regrettable que cette extension bienvenue ne concerne pas également les fonctionnaires handicapés qui doivent toujours justifier d'un taux d'incapacité de 80 % pour bénéficier d'une retraite anticipée.

C. LE DÉCALAGE DE 65 À 67 ANS DE L'ÂGE DU TAUX PLEIN ET LES EXCEPTIONS

1. Le droit commun : le décalage de 65 à 67 ans

L'article 20 de la loi modifie l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale afin de relever, selon le même principe que pour l'âge légal, l'âge auquel les assurés peuvent prétendre à une pension déterminée sur la base du taux plein quelle que soit leur durée d'assurance.

Le premier alinéa non modifié de l'article L. 351-8 permettait aux assurés atteignant « un âge déterminé » de bénéficier d'une pension à taux plein quelle que soit leur durée d'assurance, l'article R. 351-27 précisant cet âge (65 ans).

L'article 20 supprime cette référence à « un âge déterminé » et la remplace par un renvoi au nouvel article L. 161-17-2. Le 1° de l'article du code de la sécurité sociale prévoit désormais que bénéficient du taux plein les assurés qui atteignent l'âge légal majoré de cinq ans. L'âge d'ouverture des droits à taux plein est ainsi relevé selon le même principe générationnel que l'âge légal.

Il est donc de :

- 65 ans pour les assurés nés avant le 1er juillet 1951 ;

- 65 ans et quatre mois pour les assurés nés entre le 1er juillet 1951 et le 31 décembre 1951 inclus ;

- 65 ans et huit mois pour les assurés nés en 1952 ;

- 66 ans pour les assurés nés en 1953 ;

- 66 ans et quatre mois pour les assurés nés en 1954 ;

- 66 ans et huit mois pour les assurés nés en 1955 ;

- 67 ans pour les assurés nés à compter du 1er janvier 1956.

Si les effets les plus directs de ce décalage ne se feront sentir qu'à compter de 2016, cela peut néanmoins avoir un impact, dès le 1er juillet 2011, pour le calcul de la décote de personnes partant sans disposer du nombre de trimestres nécessaires.

Au-delà des catégories traditionnelles, mais marginales, pouvant bénéficier d'un départ à taux plein avant d'en atteindre l'âge (assurés reconnus inaptes au travail ; anciens déportés ou internés ; mères de famille ouvrières ; anciens combattants ou prisonniers de guerre), l'article 20 de la loi de 2010 a complété l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale pour insérer la possibilité de bénéficier d'une retraite à taux plein à l'âge de 65 ans pour :

- les assurés ayant interrompu leur activité professionnelle en raison de leur qualité d'aidant familial ;

- les assurés handicapés ;

- les assurés qui bénéficient d'un nombre minimum de trimestres fixé par décret au titre de la majoration de durée d'assurance pour enfant handicapé ;

- les assurés qui, pendant une durée et dans des conditions fixées par décret, ont apporté une aide effective à leur enfant bénéficiaire de l'élément de la prestation de compensation du handicap lié à un besoin d'aides humaines.

Une dernière exception concerne les assurés parents de trois enfants nés entre le 1er juillet 1951 et le 31 décembre 1955 inclus, sous certaines conditions.

Le décret n° 2011-620 est venu préciser les conditions de ces départs à 65 ans.

2. Les aidants familiaux

L'article 1 du décret n° 2011-620 introduit un nouvel article R. 351-24-2 dans le code de la sécurité sociale. Pour bénéficier d'un départ au taux plein à 65 ans, l'aidant familial devra avoir interrompu son activité pendant trente mois consécutifs. Par ailleurs, le décret assimile à l'aidant familial la personne faisant fonction de tierce personne après d'une personne handicapée bénéficiaire de l'allocation compensatrice pour tierce personne au taux de 80 %. Sont donc exclus les aidants familiaux de personnes âgées dépendantes ou atteintes de maladies chroniques.

3. Les assurés handicapés

Le décret précité introduit également un article R. 351-24-3, afin de mettre en œuvre le maintien de la possibilité de départ à 65 ans pour les assurés handicapés.

Seront considérés comme handicapés, les assurés dont l'incapacité permanente est supérieure au pourcentage prévu pour l'application de l'article L. 821-2 du code de la sécurité sociale qui concerne l'allocation pour adulte handicapé (AAH), soit un taux de 50 % d'incapacité.

4. Les parents d'enfants handicapés

L'âge du taux plein automatique est maintenu à 65 ans pour les enfants de parents d'un enfant handicapé, à condition, précise l'article 7 du décret
n° 2010-1734 :

- soit d'être bénéficiaire d'au moins un trimestre au titre de la majoration de durée d'assurance pour enfant handicapé ;

- soit d'établir d'avoir été salarié ou aidant familial, pendant une durée d'au moins trente mois, de leur enfant, bénéficiaire de l'élément de la prestation de compensation du handicap lié à des besoins d'aides humaines, auquel ils ont apporté une aide effective.

5. Les parents de trois enfants

Le IV de l'article 20 prévoit de maintenir à 65 ans l'âge du taux plein pour les assurés nés entre le 1er juillet 1951 et le 31 décembre 1955 inclus, s'ils remplissent les conditions cumulatives suivantes :

- avoir eu ou élevé au moins trois enfants,

- avoir interrompu ou réduit leur activité professionnelle après la naissance ou l'adoption d'au moins un de leurs enfants pour se consacrer à l'éducation de cet ou de ces enfants,

- et justifier d'une durée d'assurance minimale avant cette interruption ou réduction d'activité dans un régime de retraite légalement obligatoire français ou d'un État membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse.

L'article 2 du décret n° 2011-620 précise que les assurées souhaitant bénéficier du dispositif devront avoir validé au moins huit trimestres au cours des deux années précédant la naissance ou l'adoption de l'enfant.

Après la naissance, ou l'adoption, les assurés devront avoir interrompu leur activité pendant au moins un an pour bénéficier du dispositif.

Selon la CNAV, environ 21 000 hommes et 43 000 femmes bénéficieraient de cette mesure en ce qui concerne leur date de départ et 15 000 assurés partant avant 65 ans avec une décote bénéficieraient également de la mesure en ne subissant plus une augmentation de leur décote calculée par rapport à l'âge du taux plein.

D. L'ÉVOLUTION DE LA DURÉE D'ASSURANCE NÉCESSAIRE POUR LE TAUX PLEIN

Parallèlement au décalage des bornes d'âges, la loi a conservé le principe de l'allongement de la durée de cotisation en fonction de l'espérance de vie posé par la réforme de 2003.

L'article 17 de la loi a néanmoins modifié la procédure selon laquelle est fixée la durée d'assurance applicable à chaque génération et adapte le fonctionnement du principe de garantie générationnelle.

Aux rendez-vous quadriennaux prévus par la loi de 2003 se substitue un dispositif glissant permettant une information plus précoce des assurés. Ainsi, à compter de la génération née en 1955, la durée d'assurance requise pour bénéficier du taux plein sera fixée chaque année par décret, pris après avis technique du Conseil d'orientation des retraites, quatre ans avant que la génération concernée n'atteigne 60 ans (soit avant la fin de la 56ème année). Ce nouveau dispositif s'appliquera donc pour la première fois en 2011 pour déterminer la durée de référence applicable aux assurés nés après le 1er janvier 1955, qui atteindront 60 ans en 2015.

À titre transitoire, les durées d'assurance des générations nées en 1953 et en 1954 devaient être fixées par décret publié avant la fin de l'année 2010. C'est ce qu'a donc fait l'article 9 du décret n° 2010-1734 du 30 décembre 2010 qui a fixé à 165 trimestres la durée d'assurance nécessaire, soit un trimestre de plus que la génération née en 1952.

III. LES DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES À LA FONCTION PUBLIQUE

Conformément au mouvement de convergence entamé par la réforme de 2003, le décalage des bornes d'âge à 62 et 67 ans est également applicable à la fonction publique. Il en va de même pour le passage à 165 trimestres pour les générations nées en 1953 et en 1954. Les catégories actives, spécificité de la fonction publique, sont préservées mais tout autant concernées par le décalage de deux ans inscrit dans la loi : les différents âges d'ouvertures des droits et les limites d'âge seront progressivement relevés de deux ans, au rythme de quatre mois par génération ; de même la durée minimale de services effectifs exigée pour bénéficier de la catégorie active (de quinze ans avant la réforme dans la plupart des cas) sera fixée à dix-sept ans.

Par ailleurs, les fonctionnaires bénéficieront également des nouvelles possibilités de départ anticipé créées par la loi ainsi que de l'extension du dispositif carrière longue.

Notons qu'avant même la mise en œuvre de la réforme de 2010, la réforme de 2003 continue d'influer sur les comportements de départs à la retraite des fonctionnaires. Ces départs sont de plus en plus tardifs et, dans la fonction publique d'État, l'âge moyen de départ a atteint 59 ans et neuf mois en 2010. Le nombre de départs d'agents a par ailleurs de nouveau été inférieur aux prévisions (64 000 au lieu de 68 000). L'âge moyen reste néanmoins encore inférieur à celui du secteur privé où il atteint 61 ans et cinq mois, différence qui s'explique en grande partie par l'existence des catégories actives de la fonction publique.

Au-delà de ces évolutions communes aux agents publics et aux salariés du secteur privé, la loi contient un certain nombre de dispositions spécifiques à la fonction publique, avec l'objectif de rapprocher les deux systèmes.

1. L'évolution du taux de cotisation des fonctionnaires

L'article 42 de la loi modifie le code des pensions civiles et militaires de retraite pour prévoir le rapprochement des taux de cotisation entre le public et le privé. Il est prévu que, pour le calcul du taux de cotisation salariale dans la fonction publique, seront pris en considération les taux de cotisation à la charge des assurés sociaux relevant de la CNAV et des institutions de retraite complémentaire pour la partie de leur rémunération inférieure au plafond de la sécurité sociale.

Le décret n° 2010-1749 du 30 décembre 2010 portant relèvement du taux de cotisation des fonctionnaires, des militaires et des ouvriers des établissements industriels de l'État est venu détailler le rythme de relèvement de ce taux :

Ce relèvement concerne également les fonctions publiques hospitalière et territoriale, puisque l'article 1er du décret vise également le I de l'article 3 du décret n° 2007-173 du 7 février 2007 relatif à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL).

2. La réforme du minimum garanti

L'article 45 de la loi a procédé à une profonde réforme du dispositif de minimum garanti, afin de le rapprocher du minimum contributif en vigueur dans le régime général.

Cette réforme subordonne l'attribution du minimum garanti lors de la liquidation d'une pension aux mêmes conditions que celles prévues par le minimum contributif du régime général soit :

- l'égalité du nombre de trimestres de durée d'assurance, du nombre de trimestres nécessaires pour obtenir le pourcentage maximum de pension
(c'est-à-dire atteindre le nombre de trimestres nécessaires pour le taux plein) ;

- ou l'atteinte de l'âge ou de la durée de services auquel s'annule le coefficient de minoration (décote) par l'intéressé.

Le montant du minimum garanti et son barème de calcul, plus favorables que ceux du minimum contributif, n'ont pas été remis en cause.

La réforme préserve également les situations des agents partant pour des motifs d'invalidité ou de handicap :

- les agents placés en retraite au titre de l'invalidité conservent le bénéfice du minimum garanti quel que soit leur âge et leur durée de service ;

- les parents d'un enfant invalide bénéficiant d'un départ anticipé de même que les fonctionnaires dont le conjoint est atteint d'une infirmité et les fonctionnaires handicapés à 80 %, ne se voient imposer aucune condition.

Enfin, la réforme est mise en œuvre de manière progressive. Des dispositions transitoires sont mises en place afin de relever progressivement l'âge d'entrée dans le dispositif par le décret n° 2010-1744 du 30 décembre 2010 relatif aux conditions d'attribution du minimum garanti dans les régimes de retraite des fonctionnaires et des ouvriers d'État. Pour un fonctionnaire appartenant à une catégorie sédentaire, l'âge à compter duquel pourra être servi le minimum garanti, si la durée d'assurance est inférieure à celle nécessaire pour le taux plein, évoluera dans les conditions suivantes :

La mesure ne s'applique pas aux fonctionnaires ayant au 1er janvier 2011 poursuivi leur activité au-delà de l'âge minimum de départ à la retraite, soit l'âge de 60 ans pour les catégories sédentaires. Les militaires non officiers, qui à la même date ont effectué au moins quinze années de services effectifs, conservent également leur droit au minimum garanti.

Enfin, les parents de trois enfants ayant quinze années de services effectifs et bénéficiant d'un départ anticipé conservent le droit au bénéfice du minimum garanti dans les conditions suivantes :

- les dossiers déposés avant le 1er janvier 2011 pour un départ au plus tard le 1er juillet 2011 bénéficieront de la règle de calcul antérieure à la réforme ;

- les fonctionnaires à moins de cinq ans de l'âge d'ouverture du droit applicable avant l'entrée en vigueur de la loi (soit les fonctionnaires sédentaires ayant plus de 55 ans) et les militaires à moins de cinq ans des âges mentionnés à l'article L. 4139-16 du code de la défense conservent les règles de calcul antérieures.

Enfin, notons que la loi portant réforme des retraites crée un mécanisme de coordination avec le minimum contributif versé par le régime général. Cette réforme s'appliquera aux pensions liquidées à compter du 1er juillet 2012.

Le minimum garanti sera versé au fonctionnaire sous réserve que le montant mensuel total de ses pensions, attribuées au titre d'un ou plusieurs régimes, portées le cas échéant au minimum de pension, n'excède pas un montant fixé par décret. En cas de dépassement de ce montant, le minimum garanti sera réduit à due concurrence du dépassement, sans pouvoir être inférieur au montant de la pension civile ou militaire que l'agent percevra sans application du minimum garanti.

Un décret en Conseil d'État fixera les modalités d'application de ces dispositions.

3. Le départ anticipé des mères de trois enfants

Ce dispositif spécifique au secteur public permettait aux parents de trois enfants ayant quinze années de services effectifs de partir à la retraite à l'âge de leur choix. Les règles de calcul des droits étaient figées à la date à laquelle la personne remplissait les deux conditions (quinze ans de services et trois enfants), dès lors qu'ils pouvaient justifier d'une interruption de leur activité de deux mois minimum à l'arrivée de l'enfant. Cette année de référence déterminait les critères à retenir pour le calcul de la pension, hors de tout principe générationnel lié à l'augmentation de la durée d'assurance.

Le décret n° 2010-1741 du 30 décembre 2010 prévoit l'extinction progressive du dispositif de la manière suivante :

- les fonctionnaires et les militaires qui réunissent avant le 1er janvier 2012 les trois conditions précitées (quinze ans de services effectifs, être parent de trois enfants et interruption de l'activité) conservent la possibilité de bénéficier de ce dispositif, même si leur départ à la retraite intervient au-delà de cette date ;

- les règles de calcul des droits à retraite (durée d'assurance, condition du taux plein, taux de décote) sont alors alignées sur celles, générationnelles, du droit commun (et non plus celles de l'année à laquelle ils ont atteint la condition des quinze ans de services et trois enfants), afin que les assurés nés la même année se voient appliquer les mêmes règles. L'année de référence prise en compte sera celle au cours de laquelle ils atteignent l'âge légal de départ à la retraite (celui des catégories sédentaires ou celui des actifs) ;

Compte tenu de la mise en extinction de ce dispositif, un certain nombre de mesures transitoires ont été retenues, afin de tenir compte des choix de vie des agents de la fonction publique :

- les dossiers déposés avant le 1er janvier 2011 pour un départ au plus tard le 1er juillet 2011 bénéficieront de la règle de calcul antérieure à la réforme ;

- les fonctionnaires à moins de cinq ans de l'âge d'ouverture des droits à la retraite au plus tard le 1er janvier 2011 (par exemple, 55 ans ou plus pour les fonctionnaires sédentaires) et les militaires à moins de cinq ans de l'âge mentionné à l'article L. 4139-16 du code de la défense conservent les règles de calcul antérieures à la réforme.

La loi maintient l'obligation d'avoir interrompu son activité pour chacun des enfants pour prétendre au départ anticipé, mais ouvre également le dispositif aux parents qui auraient réduit leur activité.

Pourront ainsi prétendre au départ anticipé les parents de trois enfants ayant quinze années de services effectifs au 1er janvier 2012 et qui auront, pendant la première année de chacun des enfants soit :

- interrompu pendant deux mois au moins leur activité dans le cadre d'un congé maternité, d'un congé paternité, d'un congé d'adoption, d'un congé parental, d'un congé de présence parentale, d'une disponibilité pour élever un enfant ;

- réduit leur activité dans le cadre d'un temps partiel de droit pour raison familiale accordé à l'occasion de la naissance d'un enfant pris pendant une période d'au moins quatre mois pour une quotité de temps de travail de 50 %, d'au moins cinq mois pour une quotité de 60 % et d'au moins sept mois pour une quotité de 70 %.

La CNRACL a récemment communiqué les chiffres concernant les départs anticipés de fonctionnaires territoriaux et hospitaliers, parents de trois enfants et ayant quinze années de service : 18 803 départs ont été enregistrés au cours du premier semestre 2011, soit deux fois plus que l'année précédente ; en ce qui concerne la fonction publique d'État, on enregistre à peu près 10 000 départs anticipés, soit également un doublement par rapport aux années précédentes.

4. La « condition de fidélité » pour l'ouverture du droit à pension

La « condition de fidélité » pour l'ouverture du droit à une pension du régime des fonctionnaires relève désormais, conformément à l'article 53 de la loi, qui a modifié l'article 4 du code des pensions civiles et militaires de retraite, du domaine réglementaire.

L'article 1er du décret n° 2010-1740 du 30 décembre 2010 fixe cette durée à deux années à partir du 1er janvier 2011, pour les fonctionnaires civils uniquement, conformément à ce qui avait été annoncé lors des débats parlementaires. Elle correspond à la durée minimale de services effectifs nécessaire pour qu'un fonctionnaire puisse bénéficier d'une retraite au sein de la fonction publique (aussi appelée « clause de stage »).

Le dispositif antérieur à la réforme de 2010 prévoyait la validation des services effectués en tant que non titulaire dans les deux ans suivant la date de notification de la titularisation. Les services validés étaient pris en compte en constitution du droit, en liquidation et en durée d'assurance.

Désormais, à l'issue d'une période transitoire, les périodes de services auxiliaires avant la titularisation ne seront plus prises en compte et la validation au titre du régime de retraites des fonctionnaires des périodes effectuées avant la titularisation, en qualité d'agent non titulaire, est fermée à compter de 2015.

À titre transitoire, les services auxiliaires déjà validés ne sont pas remis en cause, et les fonctionnaires dont la titularisation intervient avant le 1er janvier 2013 peuvent demander à valider ces services (retenus en liquidation et en durée d'assurance, mais pas en constitution du droit) dans les deux années suivant leur titularisation.

5. La réforme des modalités de calcul de la surcote

L'article 50 de la loi modifie les modalités de calcul de la surcote : désormais, les bonifications de durée de services et majorations de durée d'assurance, sauf celles accordées au titre des enfants et du handicap, quel que soit le régime de retraite de base au titre duquel elles ont été acquises, seront exclues du calcul de la durée d'assurance permettant de bénéficier de la surcote.

L'article 7 du décret n° 2010-1740 précité est venu préciser la liste précise des bonifications et majorations de durée exclues du décompte.

En contrepartie, le plafond de vingt trimestres de surcote est supprimé, permettant au fonctionnaire de majorer sa pension sans limitation de durée (comme dans le régime général). Ce « déplafonnement » devrait néanmoins concerner un nombre limité de personnes, à savoir les fonctionnaires qui, par dérogation (enfants à charge, parents de trois enfants…), poursuivent leur activité au-delà de la limite d'âge de leur corps.

6. L'extinction de la cessation progressive d'activité

L'article 54 de la loi prévoit la suppression de cette forme particulière de travail à temps partiel qu'était la cessation progressive d'activité à compter du 1er janvier 2011. Toutefois, les bénéficiaires de ce dispositif avant le 1er janvier 2011 en conservent le bénéfice, mais en se voyant appliquer les mesures de relèvement de l'âge d'ouverture du droit à pension selon leur génération. Ils pourront donc renoncer au dispositif à tout moment, sous réserve d'un délai de prévenance de trois mois, pour reprendre une activité à temps plein.

Une circulaire du ministre du Budget daté du 6 décembre 2010 est venue expliciter le mécanisme d'extinction du dispositif et l'article 14 du décret
n° 2010-1740 précité est venu étendre cette suppression aux ouvriers des établissements industriels de l'État.

7. L'application de la réforme aux régimes spéciaux

Le Gouvernement avait, dès la présentation du projet en juin 2010, annoncé son intention d'étendre les principales dispositions de la réforme aux régimes spéciaux. Bien que prévue pour le 1er janvier 2017 seulement, pour tenir compte de la montée en charge de la réforme de 2008, les conditions d'application de la réforme de 2010 aux principaux régimes spéciaux ont été définies par cinq décrets du 18 mars 2011.

Ainsi, le régime spécial de la SNCF a été modifié par les décrets
n° 2011-291 et 2011-288 ; le régime de la RATP par les décrets n° 2011-292 et 2011-288 ; et le régime spécial des industries électriques et gazières par les décrets n° 2011-289 et 2011-290.

Ces décrets appliquent, pour l'essentiel, les mêmes mesures que celles retenues pour les régimes spéciaux de retraite des fonctionnaires, notamment le recul progressif de deux ans des âges d'ouverture du droit à pension et des durées de services afférentes, l'alignement du taux de cotisation salariale sur celui applicable dans le secteur privé, le maintien provisoire du dispositif de départ anticipé des parents de trois enfants et la refonte du minimum garanti.

Reste aujourd'hui à appliquer la réforme de 2010 aux trois derniers régimes spéciaux, les plus petits : l'Opéra national de Paris, la Comédie française et les clercs et employés de notaire. Les caisses de ces régimes ont été saisies de projets de décret qui devraient donc être publiés rapidement. Pour le régime spécial de la Banque de France, des négociations sont en cours.

IV. PÉNIBILITÉ DU PARCOURS PROFESSIONNEL

Le titre IV de la loi du 9 novembre 2010 est consacré à la pénibilité du parcours professionnel et comprend deux chapitres, l'un consacré à la prévention, l'autre à la compensation de la pénibilité.

Un certain nombre de mesures réglementaires était nécessaire pour la mise en œuvre de ce titre : une partie a déjà été publiée mais certaines dispositions sont en attente de publication, en particulier les dispositifs relatifs aux accords pénibilité, au fonds national de soutien à la pénibilité ou encore aux fiches individuelles d'exposition aux facteurs de pénibilité.

1. Le suivi des salariés exposés à des risques

Outre l'élévation au niveau législatif du dossier médical en santé au travail, l'article 60 de la loi insère dans le code du travail un nouvel article L. 4121-3-1 créant l'obligation pour l'employeur d'établir une fiche individuelle de suivi de l'exposition du salarié à des risques professionnels pour pénibilité. Cet article définit la notion de pénibilité comme lié à « un ou plusieurs facteurs de risques professionnels » eux-mêmes liés « à des contraintes physiques marquées, à un environnement physique agressif ou à certains rythmes de travail », « susceptibles de laisser des traces durables identifiables et irréversibles sur la santé » du travailleur.

Cette fiche, dont le modèle doit être fixé par arrêté pris après avis du Conseil d'orientation sur les conditions de travail (COCT), devra donc retracer :

- les conditions de pénibilité auxquelles le travailleur est exposé ;

- la période au cours de laquelle cette exposition est intervenue ;

- les mesures de prévention mises en œuvre par l'employeur pour faire disparaître ou réduire ces facteurs de risque durant cette période.

Cet arrêté n'a pas encore été publié, mais devrait l'être d'ici la fin de l'année.

Par ailleurs, l'article 88 de la loi prévoyait la constitution, avant le 31 mars 2011, d'un comité scientifique chargé « d'évaluer les conséquences de l'exposition aux facteurs de pénibilité sur l'espérance de vie avec et sans incapacité des travailleurs ». La composition de ce comité devrait être fixée par décret qui malheureusement n'est toujours pas publié.

2. Les accords pénibilité

L'article 77 de la loi instaure, à compter du 1er janvier 2012, une obligation de négociation sur la « pénibilité au travail », à l'instar de ce qui existe pour l'emploi des seniors.

Les entreprises d'au moins cinquante salariés ou appartenant à un groupe d'au moins cinquante salariés seront désormais tenues de négocier sur la prévention de la pénibilité au travail, sous peine de sanctions financières. Toutefois, cette pénalité ne concerne que les entreprises qui emploient une proportion minimale, fixée par décret, de salariés exposés aux risques professionnels liés à la pénibilité.

Les entreprises concernées doivent être couvertes par un accord ou un plan d'action relatif à la prévention de la pénibilité d'une durée maximale de trois ans. L'accord doit comporter des thèmes obligatoires dont la liste est fixée par décret.

La pénalité sera égale au maximum à 1 % des sommes versées aux travailleurs concernées par la pénibilité, ce montant pouvant être modulé par l'autorité administrative (dans des conditions fixées par décret) en fonction des efforts constatés dans l'entreprise.

Deux projets de décret, en cours de signature, apportent les précisions nécessaires. Le premier précise le contenu de l'accord ou du plan d'action ; le second fixe les modalités de calcul de la pénalité.

L'obligation de négocier un accord ou d'établir un plan d'actions sur la prévention de la pénibilité pèse sur les entreprises d'au moins cinquante salariés ou appartenant à un groupe de cette taille et employant une proportion minimale de salariés exposés aux facteurs de risques professionnels liés à la pénibilité.

Selon le projet de décret, cette proportion serait fixée à 50 % de l'effectif calculé à l'article D. 138-25 du code de la sécurité sociale (mode de calcul de l'effectif prévu en matière d'accords « seniors »). Il appartiendrait à l'employeur de déterminer la proportion de salariés exposés et de l'actualiser « à chaque fois que de besoin », notamment après une modification du document unique d'évaluation des risques.

Avant d'engager la négociation ou d'élaborer un plan d'action, l'employeur devra établir un diagnostic des situations de pénibilité dans l'entreprise, diagnostic dont découleraient les mesures de prévention prévues par l'accord ou le plan. Ces derniers devraient comporter au moins l'un des thèmes suivants :

- la réduction des poly-expositions aux facteurs de risques professionnels ;

- l'adaptation et l'aménagement du poste de travail ;

Ils devraient également aborder au moins deux des quatre thèmes suivants :

- l'amélioration des conditions de travail, notamment d'ordre organisationnel ;

- le développement des compétences et des qualifications et l'accès à la formation ;

- l'aménagement des fins de carrière ;

- le maintien dans l'emploi et la prévention de la désinsertion professionnelle des salariés exposés aux facteurs de risques.

Chaque thème retenu devrait être assorti d'objectifs chiffrés, dont la réalisation serait mesurée au moyen d'indicateurs. Au moins une fois par an, l'employeur devrait communiquer ces indicateurs aux membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ou, à défaut, aux délégués du personnel.

L'inspecteur du travail qui constate qu'une entreprise est en infraction (absence ou insuffisance de l'accord ou du plan) mettrait en demeure l'employeur de remédier à cette situation. Celui-ci aurait un délai de six mois pour lui adresser, par lettre recommandée avec accusé de réception, l'accord ou le plan mis en place modifié ou, le cas échéant, pour justifier des motifs de sa défaillance. Cela est très important, dans la mesure où, selon le projet de décret, « aucune pénalité n'est due lorsque l'entreprise justifie de sa défaillance ».

La décision d'infliger ou non la pénalité appartiendrait au directeur régional des entreprises, de la concurrence et de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte), qui en fixerait le taux en tenant compte :

- du respect par l'entreprise de son obligation en matière de négociation sur la prévention de la pénibilité ;

- pour les entreprises de 50 à 300 salariés, de l'état de la négociation collective sur la pénibilité dans les branches ;

- des motifs de la défaillance de l'entreprise (difficultés économiques, restructurations, franchissement du seuil d'effectifs, etc.).

La pénalité serait due pour chaque mois entier au cours duquel l'entreprise ne respecte pas les obligations à compter de la réception de la mise en demeure de l'inspection du travail et jusqu'à la réception, par celle-ci, de la réponse de l'employeur (accord, plan ou justificatifs de la défaillance), ou à la fin du délai de six mois (en cas de silence de l'employeur). Dans tous les cas, cette période prise en compte ne pourrait être inférieure à un mois.

Le Direccte notifierait à l'employeur le taux de la pénalité dans un délai quoi pourrait être fixé à un mois à compter de la date de réception de la réponse de l'employeur, et au plus tard de la date d'expiration de la mise en demeure.

L'employeur devrait alors fournir à l'administration une déclaration précisant l'assiette des cotisations sociales des salariés exposés à des facteurs de pénibilité. Une fois ces données transmises à la Direccte, celui-ci calculerait le montant de la pénalité et la notifierait à l'employeur. Cette pénalité serait déclarée et versée par l'employeur à l'Urssaf (ou à la MSA), à la date d'échéance de ses cotisations et contributions sociales suivant la date de la réception de la notification de la pénalité.

3. La retraite anticipée pour pénibilité

La loi du 9 novembre 2010 a ouvert un droit à la retraite anticipée pour les personnes atteintes dans leur état de santé pour des raisons imputables au travail. Les trois décrets et l'arrêté nécessaires à la mise en œuvre de ce départ anticipé au titre de la pénibilité du travail ont été publiés au Journal officiel du 31 mars 2011.

Ce nouveau cas de départ anticipé est applicable aux pensions prenant effet à compter du 1er juillet 2011. À compter de cette date, les assurés âgés d'au moins 60 ans pourront faire liquider une retraite à taux plein, quelle que soit la durée d'assurance effectivement accomplie. À noter que la retraite à raison de la pénibilité ne concerne que les salariés du régime général, les salariés du régime agricole et les travailleurs non-salariés des professions agricoles. Les assurés relevant du régime social des indépendants en sont exclus.

Le droit à retraite à taux plein dès 60 ans est réservé aux assurés justifiant d'un taux d'incapacité permanente reconnu au titre d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail « ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle ». La liste de référence de ces lésions consécutives à un accident du travail et identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle est fixée par un arrêté du 30 mars 2011. Pour les personnes victimes d'un accident du travail, l'identité des lésions doit être vérifiée par l'échelon régional du service médical.

Le fait de justifier d'un taux d'incapacité permanente au moins égal à 20 % au titre d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail « ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle » ouvre droit, sans autres conditions, à retraite à raison de la pénibilité.

Le droit à retraite anticipée est également ouvert à l'assuré présentant un taux d'incapacité permanente au moins égal à 10 % mais inférieur à 20 %. Mais dans ce cas, le bénéfice de la retraite est subordonné :

- au fait que l'assuré puisse apporter la preuve qu'il a été exposé pendant au moins dix-sept ans à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels relevant de trois domaines : « des contraintes physiques marquées », un « environnement agressif » ou des « contraintes liées à certains rythmes de travail » ;

- l'avis favorable d'une commission pluridisciplinaire chargée d'apprécier la validité des modes de preuve et l'efficacité du lien entre incapacité permanente et exposition des risques. À ce titre, constituent des modes de preuve « tout document à caractère individuel remis à l'assuré dans le cadre de son activité professionnelle et attestant de son activité (bulletins de paie, contrats de travail, fiche d'exposition, etc.) ».

Notons qu'une circulaire n° 2011-151 de la direction de la sécurité sociale est venue quelque peu assouplir l'exigence d'exposition pendant une durée de dix-sept ans : cette durée ne sera exigée et vérifié par la commission que pour les accidents du travail ; pour les maladies professionnelles, elle sera présumée remplie, une instruction en la matière ayant déjà été faite au moment de la reconnaissance de la maladie professionnelle , au travers des tableaux de maladie professionnelle ou via les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles.

Autre précision importante : une possibilité de cumul de taux d'incapacité au titre de plusieurs sinistres professionnels est possible pour atteindre le taux de 20 %, si au moins un taux de 10 % est atteint au titre d'une même maladie professionnelle ou d'un même accident du travail. En revanche, le cumul de taux n'est pas ouvert si l'assuré a un taux d'incapacité compris entre 10 % et 20 %.

La caisse chargée de liquider la pension de retraite de l'assuré est chargée de recueillir la demande de retraite anticipée pour « pénibilité ». La caisse saisit, si l'incapacité permanente est reconnue suite à un accident du travail, l'échelon régional du service médical. L'identité des lésions avec celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle est alors appréciée par le médecin-conseil du service médical.

Trois cas de figure peuvent alors se présenter :

- le médecin-conseil ne reconnaît pas l'identité des lésions et rejette la demande ;

- le médecin-conseil reconnaît l'identité des lésions, le taux d'incapacité est au moins égal à 20 %, le droit à retraite anticipée pour pénibilité est ouvert ;

- le médecin-conseil reconnaît l'identité des lésions, le taux d'incapacité est compris entre 10 % et 20 %, la caisse saisit alors la commission pluridisciplinaire.

Le silence gardé par la caisse pendant plus de quatre mois vaut décision de rejet.

Une commission pluridisciplinaire est placée auprès de chaque caisse de retraite. Elle est chargée d'examiner les dossiers des assurés présentant un taux d'incapacité compris entre 10 % et 20 % au titre d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail. La commission comprend cinq membres : le directeur de la caisse de retraite, le médecin-conseil régional, l'ingénieur-conseil de la Caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT), un praticien hospitalier, et la Direccte. Les partenaires sociaux ne sont pas représentés.

En tant que de besoin, la commission peut recueillir l'avis du médecin inspecteur régional du travail ou, à défaut, du médecin du travail désigné par le directeur régional des entreprises. En outre, l'assuré peut être (à son initiative ou celle de la commission) entendu par la commission. Il peut se faire assister par la personne de son choix. La commission est tenue de rendre son avis au vu de la notification de la rente et des modes de preuve apportés par l'assuré pour justifier de son état.

Le financement de la retraite pour pénibilité est assuré par la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP). Elle est chargée de verser à la branche vieillesse une somme équivalente à celles des dépenses occasionnées par les départs anticipés pour « pénibilité ». À ce titre, il est institué une quatrième majoration de cotisation AT-MP. Ce dispositif sera applicable pour la première fois à compter de la tarification pour 2012.

4. La mise en place d'un fonds national de soutien relatif à la pénibilité

Outre la possibilité, à titre expérimental et jusqu'au 31 décembre 2013, pour un accord collectif de branche de créer un dispositif d'allégement ou de compensation de la charge de travail des salariés occupés à des emplois pénibles, l'article 86 de la loi crée un fonds national de soutien relatif à la pénibilité.

Ce fonds est destiné à contribuer aux actions mises en œuvre par les entreprises couvertes par un accord collectif de branche ou par des entreprises couverts par un accord collectif d'entreprise ayant le même objet.

Les recettes de ce fonds placé auprès de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) sont constituées par une dotation de l'État et une dotation de la branche accidents du travail et maladies professionnelles. Pour 2011, ces dotations sont de 10 millions d'euros, pour un budget total de 20 millions d'euros.

Un décret en Conseil d'État doit venir préciser les modalités de fonctionnement de ce fonds. Une publication rapide de ce décret est souhaitable faute de quoi les 20 millions d'euros budgétés ne pourront être consommés en 2011. Toutes les entreprises doivent être concernées et si ce fonds peut servir à financer des actions d'expertise ou de promotion de mesures préventives, son objet premier est bien l'accompagnement de mesures de réparation de la pénibilité, en particulier les actions de tutorat.

V. LES DISPOSITIFS DE SOLIDARITÉ

Le titre V de la loi est intitulé « Mesures de solidarité » et contient, pour l'essentiel, des dispositions relatives aux retraites agricoles et au rétablissement de l'assurance-veuvage. Les décrets nécessaires à la mise en œuvre de ces mesures ont déjà été publiés.

1. L'extension du régime complémentaire obligatoire aux conjoints agricoles

L'article 90 de la loi rend obligatoire l'affiliation des aides familiaux et conjoints collaborateurs de chefs d'exploitation ou d'entreprises agricoles au régime de retraite complémentaire des exploitants agricoles (RCO).

Cette affiliation sera obligatoire pour les seules personnes ayant, à compter du 1er janvier 2011 et après cette date, la qualité d'aide familial ou de conjoint collaborateur. Les modalités d'application de cet article ont été précisées par le décret n° 2010-1782 du 31 décembre 2010.

Par ailleurs, le décret n° 2010-1757 du 30 décembre 2010 fixe le montant forfaitaire de l'assiette de cotisations à 1 200 fois le montant horaire du salaire minimum de croissance (SMIC), soit la somme des assiettes minimales retenues pour la retraite de base par les collaborateurs et les aides familiaux. Ce décret fixe également à 66 le nombre de points de RCO acquis en contrepartie de cette cotisation forfaitaire.

2. L'exclusion de la récupération sur succession de certains éléments du capital agricole

L'article 92 de la loi est venu restreindre les actifs récupérables lors de la succession d'une personne ayant bénéficié de l'allocation de solidarité aux personnes âgées : lorsque la succession du bénéficiaire comprend un capital d'exploitation agricole, ce dernier, ainsi que les bâtiments qui en sont indissociables sont désormais exclus de l'assiette des éléments constitutifs de l'actif successoral.

Un décret est nécessaire afin de préciser, en particulier, la notion de « bâtiments indissociables », mais il n'a pas encore été publié.

3. Le rétablissement de l'assurance veuvage

L'article 93 de la loi a rétabli l'assurance veuvage qui est versée aux conjoints survivants qui ne remplissent pas la condition d'âge pour prétendre à une pension de réversion. Cette allocation avait dans un premier temps été supprimée du fait de la suppression de la condition d'âge pour bénéficier d'une pension de réversion inscrite dans la réforme de 2003. Mais, la réintroduction d'une condition d'âge par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 avait rendu le rétablissement de l'assurance veuvage inéluctable.

Le décret n° 2010-1778 du 31 décembre 2010 est venu préciser les conditions de ce rétablissement, en particulier les conditions de durée d'assurance, d'âge, de résidence en France ou encore de ressources. Le décret fixe également à 570 euros le montant de l'allocation sous réserve que les ressources de l'allocataire ne dépassent pas 2 138,28 euros par trimestre.

Le rétablissement de ce dispositif n'épuise néanmoins pas le sujet du veuvage précoce et la loi prévoit le dépôt, avant la fin 2011, d'un rapport du Gouvernement sur les voies d'amélioration des conditions d'attribution et de financement de l'allocation veuvage.

VI. MESURES RELATIVES À L'ÉGALITÉ ENTRE LES HOMMES
ET LES FEMMES

Le titre VI de la loi du 9 novembre 2010 porte sur l'égalité entre les hommes et les femmes et contient, pour l'essentiel deux dispositions : l'intégration des indemnités journalières de maternité dans le salaire annuel moyen et l'obligation pour les entreprises de négocier sur l'égalité hommes-femmes.

1. La prise en compte des indemnités journalières de maternité dans le calcul de la pension

L'article 98 de la loi prévoit que les indemnités journalières perçues par les assurés du régime général et du régime des salariés agricoles seront, à partir de 2012, prises en compte dans le salaire de l'année de leur congé maternité. Un décret n° 2011-408 du 15 avril 2011 retient ainsi les indemnisés journalières d'assurance maternité pour la détermination du salaire annuel de base servant au calcul des pensions de retraite. Assimilées à un salaire, les indemnités journalières de maternité seront retenues hauteur de 125 % de leur montant. Notons néanmoins que cette prise en compte ne portera que sur les indemnités versées dans le cadre des congés de maternité débutant à compter du 1er janvier 2012.

Le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) est chargé d'assurer le financement de cette mesure dans des conditions fixées par le décret n° 2011-370 du 4 avril 2011.

2. L'obligation de négociation sur l'égalité hommes-femmes

L'article 99 vise à améliorer les outils existants en faveur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, partant du constat que la réduction des écarts entre les pensions passe par une réduction des inégalités professionnelles.

Pour cela, il est prévu une amélioration des outils d'évaluation des écarts professionnels entre les femmes et les hommes ; la publicité des données relatives à l'action de chaque entreprise en faveur de l'égalité professionnelle et la création d'une sanction financière pour les entreprises ne respectant pas leurs obligations légales.

Pour mémoire, l'article 99 prévoit une entrée en vigueur de ces dispositions au 1er janvier 2012. Dans les entreprises couvertes par un accord ou un plan d'action, cette date est fixée à l'échéance de ces derniers.

a) L'amélioration des outils d'évaluation des inégalités professionnelles

L'article 99 modifie le contenu du rapport unique prévu à l'article L. 2323-47 du code du travail, remis annuellement par l'employeur au comité d'entreprise dans les entreprises de moins de 300 salariés, pour le rapprocher de celui du rapport de situation comparée, prévu à l'article L. 2323-57 du même code, applicable aux entreprises de plus de 300 salariés.

Le rapport unique doit désormais comporter une analyse permettant d'apprécier la situation comparée des femmes et des hommes en matière d'embauche, de formation, de promotion professionnelle, de qualification, de classification, de conditions de travail, de rémunération effective et d'articulation entre l'activité professionnelle et l'exercice de la responsabilité familiale.

En outre, les deux rapports doivent désormais comprendre un plan d'action qui recense, en fonction de critères clairs, précis et opérationnels, les objectifs de progression et les mesures prises en vue d'assurer l'égalité professionnelle au sein de l'entreprise, la définition qualitative et quantitative permettant de les atteindre ainsi que l'évaluation de leur coût. Les entreprises auront donc la possibilité soit de rédiger un plan d'action, soit de négocier annuellement sur l'égalité professionnelle.

Le projet de décret transmis à vos rapporteurs intègre le plan d'action au contenu du rapport annuel et du rapport de situation comparée et précise le contenu de l'accord collectif ou du plan d'action qui doivent être mis en place par l'entreprise.

Ils devront porter sur deux (pour les entreprises de moins de 300 salariés) ou trois (pour les entreprises de plus de 300 salariés) domaines listés par l'article L. 2242-5 du code du travail portant sur la négociation annuelle relative à l'égalité professionnelle, soit : les conditions d'accès à l'emploi, la formation professionnelle et la promotion professionnelle, les conditions de travail et d'emploi et en particulier celles des salariés à temps partiel, et l'articulation entre la vie professionnelle et les responsabilités familiales. Ces objectifs doivent être accompagnés d'indicateurs chiffrés.

Selon le directeur général du travail auditionné par vos rapporteurs, il serait plus efficace d'inciter les entreprises à se concentrer sur un nombre restreint de domaines d'action, plutôt qu'à survoler l'ensemble des sujets relatifs à l'égalité professionnelle sans obligation de résultat.

On peut cependant formuler deux remarques. Tout d'abord, la rédaction du projet de décret ne doit pas laisser penser que le champ des négociations annuelles relatives à l'égalité professionnelle se trouve réduit aux quelques items choisis par le plan d'action et dont le non-respect serait sanctionné par une pénalité financière. Par ailleurs, il eût été plus ambitieux de porter à trois et quatre le nombre de sujets devant faire l'objet d'un plan d'action ou d'un accord collectif au sein de l'entreprise.

b) La publicité des efforts accomplis par chaque entreprise

L'article 99 prévoit que toutes les entreprises de plus de 50 salariés doivent élaborer une synthèse du plan d'action relatif à l'égalité professionnelle, qui devra comprendre au minimum des indicateurs et objectifs de progression définis par décret.

La synthèse sera portée à la connaissance des salariés par l'employeur, par voie d'affichage sur les lieux de travail et, éventuellement, par tout autre moyen adapté aux conditions d'exercice de l'activité de l'entreprise. Cette synthèse est également tenue à la disposition de toute personne qui la demande et publiée sur le site internet de l'entreprise lorsqu'il en existe un.

Le projet de décret précise le contenu de cette synthèse, qui devra comprendre au minimum des indicateurs portant sur la situation respective des hommes et des femmes par rapport :

- au salaire médian ou au salaire moyen ;

- à la durée moyenne entre deux promotions ;

- à l'exercice des fonctions d'encadrement ou décisionnelles.

La synthèse devra également comporter les objectifs de progression et les actions menées par l'entreprise, accompagnées d'indicateurs chiffrés contenus dans l'accord ou le plan d'action prévus aux articles L. 2242-5 et 2242-5-1 du code du travail.

Il paraît judicieux d'avoir défini un nombre limité de domaines à l'aune desquels toutes les entreprises pourront être comparées en termes d'égalité entre hommes et femmes. Cependant, la limitation des thèmes choisis pour la synthèse du plan d'action pourrait avoir un effet pervers : marginaliser les domaines non listés par le projet de décret, à savoir les actions en faveur de l'articulation entre la vie professionnelle et les responsabilités familiales, les conditions d'accès à l'emploi, la formation professionnelle ou encore le travail à temps partiel.

Dans ces conditions, il aurait été souhaitable d'augmenter le nombre de thèmes figurant obligatoirement dans le plan d'action et sa synthèse.

c) La création d'une sanction financière en cas de non respect par l'entreprise de ses obligations légales

L'article 99 prévoit la création d'une pénalité financière pour toutes les entreprises de plus de 50 salariés qui n'auraient ni inclus de plan d'action relatif à l'égalité professionnelle dans le rapport annuel au comité d'entreprise, ni conclu d'accord relatif à l'égalité professionnelle.

Cette pénalité, égale au maximum à 1 % de la masse salariale nette, est fixée par l'autorité administrative en fonction des efforts constatés dans l'entreprise en matière d'égalité entre les hommes et les femmes et vient alimenter le Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

Le projet de décret transmis à vos rapporteurs vient préciser les conditions d'application de cette pénalité.

Il est prévu que lorsque l'inspecteur ou le contrôleur du travail constate qu'une entreprise n'est pas couverte par un accord collectif, ou à défaut, un plan d'action prévu à l'article L. 2242-5-1 du code du travail, il met en demeure l'employeur de remédier à la situation dans un délai de six mois. L'employeur justifie alors les motifs de sa défaillance et peut être entendu par l'administration, dans le cadre d'une procédure contradictoire.

À l'expiration de ce délai, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) décide s'il y a lieu ou non d'appliquer la pénalité à l'entreprise.

Le projet de décret prévoit que la pénalité pourra être minorée, voire annulée dans les cas suivants :

- bonne foi et mesures prises par l'entreprise ;

- défaillance de l'entreprise, notamment la survenance de difficultés économiques ; restructurations ou fusions en cours ; l'existence d'une procédure collective en cours et le franchissement du seuil d'effectif au cours des douze mois précédant l'envoi d'une mise en demeure pour non respect de la législation relative à l'égalité entre femmes et hommes.

La volonté de ne pas accabler financièrement les entreprises justifie une certaine prudence dans la mise en œuvre de la nouvelle pénalité. De plus, l'application de la loi doit tenir compte des moyens de contrôle de l'inspection du travail, qui demeurent limités.

On pourra cependant, à juste titre, s'interroger d'une part sur l'imprécision des termes permettant à l'autorité administrative d'annuler le cas échéant la pénalité, qui fait courir le risque d'une inégalité d'application de la pénalité sur le territoire, et d'autre part sur la multiplication des dérogations qui limitent le caractère dissuasif de la pénalité et par conséquent l'effet des mesures adoptées par le législateur, dont certaines - telle l'obligation annuelle de négociation relative à l'égalité professionnelle, ont été mises en place depuis dix ans.

À ce titre, lors des réunions du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, le 3 mai 2011 et de la Commission nationale de la négociation collective, le 6 mai 2011, les organisations syndicales se sont prononcées contre le projet de décret, considérant qu'il fallait limiter les possibilités de modulation de la pénalité et réduire le délai de six mois accordé à l'employeur défaillant. Les organisations patronales se sont déclarées favorables au projet de décret, tout en considérant que le délai laissé aux entreprises était resserré, compte tenu de la date de publication du décret.

VII. LES MESURES RELATIVES À L'EMPLOI DES SENIORS

Le titre VII de la loi comprend des mesures relatives à l'emploi des seniors : aide à l'embauche des seniors, aide au tutorat et pérennisation de la retraite progressive. Pour ce titre, le bilan réglementaire est inégal : seuls des décrets relatifs à la retraite progressive ont été pris.

1. L'aide à l'embauche des seniors

Pour favoriser l'emploi des seniors, l'article 103 de la loi prévoyait la création d'une aide à l'embauche des demandeurs d'emploi de 55 ans et plus. Pour bénéficier de cette embauche, l'entreprise devait remplir les conditions suivantes :

- entrer dans le champ d'éligibilité à la réduction générale de cotisations patronales dit « allégements Fillon » ;

- ne pas avoir procédé, dans les six mois précédents, à un licenciement économique sur le poste à pourvoir ;

- être à jour des obligations déclaratives et de paiement des cotisations sociales.

L'aide de l'État devait être versée pendant une durée limitée et prendre la forme d'une fraction du salaire versé au salarié. Selon l'étude d'impact, l'aide devait être versé pendant douze mois et son montant égal à 14 % du salaire.

Un décret devait venir préciser les modalités d'application de cette aide mais le Gouvernement a annoncé le 24 mars dernier que ce dispositif ne serait pas mis en œuvre. Il doit être remplacé par une aide de 2 000 euros versés à toute entreprise qui embauchera un demandeur d'emploi de 45 ans et plus en contrat de professionnalisation. Si vos rapporteurs comprennent les critiques formulées à l'encontre du dispositif de l'article 103, en particulier le risque d'effet d'aubaine, ils s'étonnent que le Gouvernement s'en rende compte après la promulgation de la loi, alors même que le dispositif figurait dans le projet de loi déposé par le Gouvernement.

2. L'aide au tutorat

En dehors des versements obligatoires, l'employeur peut s'acquitter de sa participation au développement de la formation professionnelle continue en finançant certaines formations de ses salariés.

L'article 104 de la loi propose, dans ce cadre, de favoriser le tutorat : les dépenses correspondant à une part de la rémunération des salariés de 55 ans et plus assurant la fonction de tuteur de jeunes de moins de 26 ans embauchés sous contrat de professionnalisation pourront être financés au titre de la participation des employeurs au développement continue dans le cadre du plan de formation.

Le décret nécessaire à la mise en œuvre de ce dispositif n'a pas encore été publié.

3. La pérennisation de la retraite progressive

L'article 105 de la loi pérennise le dispositif de retraite progressive et la condition tenant à la durée d'assurance (150 trimestres) est fixée, non plus par décret, mais par la loi.

Ainsi, l'assuré qui exerce une activité à temps partiel peut demander la liquidation de sa pension de vieillesse et le service d'une fraction de cette pension à condition d'avoir atteint l'âge légal de départ à la retraite et de justifier d'une durée d'assurance fixée à 150 trimestres.

La pension de retraite est alors liquidée à titre provisoire. La pension sera recalculée lors du départ définitif en retraite.

Deux décrets du 30 décembre 2010, les n° 2010-1730 et 2010-1739, sont venus modifier en ce sens les décrets de 2006 relatifs à la retraite progressive.

VIII. LES MESURES RELATIVES À L'ÉPARGNE-RETRAITE

Le titre VIII de la loi du 9 novembre 2010 est consacré aux « mesures relatives à l'épargne retraite ». Il comprend les articles 107 à 117. Ces articles, qui ne figuraient pas dans le projet de loi initial du Gouvernement, sont essentiellement issus d'amendements parlementaires.

1. Les dispositions spécifiques au plan d'épargne pour la retraite collectif (PERCO)

Les articles 108, 109 et 110 de la loi visent spécifiquement l'alimentation et la gestion du PERCO. Les mesures d'application de ces trois articles figurent dans un même projet de décret en Conseil d'État portant sur l'alimentation et la gestion du PERCO et l'information des bénéficiaires. Ce décret en cours de finalisation devrait être examiné par le Conseil d'État au début du mois de juillet 2011.

Par ailleurs, l'article 110 donne aussi lieu à un décret simple.

L'article 108 permet aux salariés, en l'absence de compte épargne temps (CET) dans leur entreprise, de verser à un PERCO ou à un régime de retraite supplémentaire collectif et obligatoire les sommes correspondant à des jours de repos non pris, dans la limite de cinq jours par an.

Cet article ne renvoie pas à un décret d'application, mais il est apparu nécessaire au Gouvernement, à la suite d'interrogations de la part d'entreprises, d'organisations professionnelles et de gestionnaires de fonds, de sécuriser la méthode de conversion en valeur monétaire des jours de repos. Selon le projet de décret en Conseil d'État, les jours de repos non pris sont investis dans le PERCO « pour la valeur de l'indemnité correspondante » à la date de la demande du salarié, formulation se retrouvant fréquemment dans les accords de CET.

L'article 109 prévoit l'obligation pour les entreprises qui proposent un PERCO de proposer une « gestion pilotée », c'est-à-dire adaptée à l'horizon de départ en retraite du bénéficiaire, le risque devant être réduit progressivement, dans des conditions fixées par décret.

D'ores et déjà, un PERCO doit comporter au moins trois organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) de profils différents.

Le projet de décret en Conseil d'État (article R. 3334-2-1 du code du travail) précise que cette gestion pilotée doit conduire, à l'approche de l'horizon de placement retenu ou, à défaut, de l'âge d'ouverture des droits à la retraite, à une augmentation progressive de la part des sommes investies dans un ou des OPCVM présentant un profil d'investissement à faible risque. De plus, cet investissement ne pourrait pas être inférieur à 50 % de l'épargne du salarié deux ans avant l'âge d'ouverture des droits à la retraite. Le décret prévoit ainsi une proportion qui correspond déjà à la pratique des gestionnaires. Le pouvoir réglementaire a souhaité ne pas contraindre les plans d'épargne à une rentabilité faible ou nulle.

Cette allocation ferait l'objet d'une information spécifique de la part de la société de gestion à compter du 45ème anniversaire de chaque bénéficiaire.

L'article 110 de la loi a institué un versement automatique sur un PERCO de la moitié de la participation allouée à chaque salarié, lorsque celui-ci ne fait pas connaître son choix de percevoir ou de placer les sommes en cause.

Depuis la loi du 3 décembre 2008 en faveur des revenus du travail, le salarié a le choix de percevoir sa participation dans un délai de quinze jours après la date à laquelle il a été informé des sommes qui lui sont allouées. En l'absence de réponse du salarié, les sommes servies au titre de la participation sont bloquées pendant cinq ans. Désormais, en l'absence de réponse, la moitié de ces sommes seront versées automatiquement sur un PERCO.

Les conditions dans lesquelles les bénéficiaires doivent être informés de cette affectation sont définies par deux décrets, un décret simple sur la participation et le décret en Conseil d'État sur le PERCO mentionné précédemment. Selon les projets de texte, cette information se déroulerait en trois étapes :

- l'information serait en premier lieu remise au salarié au moment de la signature de son contrat de travail avec le livret d'épargne salariale (qui devrait donc être complété) ;

- elle serait répétée sur la fiche (distincte du bulletin de paie) qui est remise à tout salarié bénéficiaire lors de chaque répartition de la participation ;

- elle figurerait également sur le relevé annuel délivré au bénéficiaire portant sur les sommes attribuées et la disponibilité de ses droits ; dès la réception de ce relevé, le salarié disposera d'un délai de quinze jours pour revenir au blocage quinquennal, en transférant les sommes investies par défaut dans le PERCO dans un plan d'épargne d'entreprise, de groupe ou interentreprises.

Le projet de décret portant sur l'information des bénéficiaires de la participation financière et la sécurité de leurs avoirs précise la première étape de l'information. Ce décret rectifie aussi des erreurs de codification dans les articles réglementaires du code du travail relatifs à la participation des salariés.

Les deux autres étapes de l'information sont prévues dans un décret en Conseil d'État portant sur l'alimentation et la gestion du PERCO et l'information des bénéficiaires.

L'exposé des motifs des projets de décrets précise que « l'information devra préciser les conséquences de cet investissement par défaut, qui peuvent être lourdes », car « les sommes investies seront indisponibles jusqu'au départ à la retraite du bénéficiaire ». Leur versement avant échéance ne pourra intervenir que dans les cas de déblocage anticipé prévus pour le PERCO (2).

Le projet de décret en Conseil d'État précise, en outre, qu'à défaut de stipulation conventionnelle, les sommes seraient affectées à l'organisme de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) présentant le profil d'investissement le moins risqué dans le PERCO de l'entreprise ou, à défaut, dans le PERCO du groupe. En l'absence de l'un et de l'autre de ces plans, les sommes seraient affectées dans le PERCO interentreprises, lorsqu'il a été mis en place.

Enfin, le projet de décret tire les conséquences de l'investissement par défaut de la participation en supprimant la précision « à l'initiative des participants » à l'article R. 3332-9 du code du travail, et de la possibilité d'instituer dans l'entreprise un PERCO à l'initiative de l'employeur, en supprimant à l'article R. 3334-3 la référence à l'accord collectif.

2. Les dispositions relatives aux contrats d'assurance

L'article 112 ajoute la communication de deux informations pour les contrats d'assurance liés à la cessation d'activité professionnelle : l'estimation du montant de la rente viagère et la possibilité de demander le transfert du contrat auprès d'un autre gestionnaire.

Un arrêté sur l'information annuelle dans le cas des contrats à sortie en rentes devrait être pris prochainement en application de cet article. Il sera soumis à l'avis du comité consultatif de la législation et de la réglementation financières (CCLRF) en juillet, au terme d'une longue phase d'échanges entre la direction générale du trésor, la direction de la sécurité sociale, les assureurs et l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP).

Concernant l'estimation du montant de la rente viagère, le projet d'arrêté indique que l'assureur pourrait présenter distinctement les estimations issues des droits exprimés en euros et des droits exprimés en unités de compte. Ces estimations seraient établies en fonction de la provision mathématique constituée à la fin de l'exercice considéré et en prenant pour hypothèse que la rente serait versée à l'adhérent dès qu'il aurait atteint l'âge d'ouverture du droit à pension de retraite.

L'enjeu consiste à délivrer une information qui n'apparaisse pas comme une garantie donnée à l'assuré, le contrat comportant un risque. Il est donc précisé que les estimations données seraient de nature indicative, les informations n'engageant ni la responsabilité de l'entreprise d'assurance en charge de les délivrer, ni celle de l'association souscriptrice.

L'article 116 de la loi rend déductibles du revenu net imposable les cotisations versées au titre des contrats dits « article 83 », c'est-à-dire les contrats à cotisations définies mentionnés à l'article 83 du code général des impôts. Un projet de décret est en cours d'examen au Conseil d'État.

Ce même projet de décret procède, par ailleurs, à la codification des dispositions du décret du 21 avril 2004 relatives au plan d'épargne pour la retraite populaire (PERP) et celles de l'arrêté du 22 avril 2004 dans le code des assurances, en tenant compte des évolutions normatives intervenues depuis cette date.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission des affaires sociales entend, en audition ouverte à la presse, M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi, et de la santé, sur la mise en œuvre de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites (MM. Michel Issindou, et Denis Jacquat, rapporteurs).

M. le président Pierre Méhaignerie. Monsieur le ministre, merci pour votre présence. Après les interventions de M. Denis Jacquat et de M. Michel Issindou, auteurs du rapport d'information sur la mise en application de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, nous vous entendrons sur cette mise en œuvre.

M. Denis Jacquat, rapporteur. Il ne s'agit pas de refaire le débat. Conformément, mes chers collègues, à l'article 145-7 de notre Règlement, l'objet du rapport que nous vous soumettons, Michel Issindou et moi-même, est de faire « état des textes réglementaires publiés et des circulaires édictées pour la mise en œuvre de la loi, ainsi que de ses dispositions qui n'auraient pas fait l'objet des textes d'application nécessaires ». Je tiens néanmoins à répéter que la réforme des retraites que nous avons portée avec le Gouvernement - et je tiens ici, monsieur le ministre, à saluer l'action de votre prédécesseur - et avec cette majorité constitue une réforme responsable, juste et efficace dont nous pouvons être fiers. Toutes les retraites ont été payées au jour et au montant prévus, ce qui n'a pas été le cas dans de nombreux pays.

Vos services, monsieur le ministre, ont publié dans un délai très bref l'intégralité des textes nécessaires à la mise en œuvre de cette réforme d'envergure. Il convient de les en féliciter.

Ainsi, les textes concernant les bornes d'âge, le dispositif « carrières longues », le rétablissement de l'assurance veuvage, l'extinction progressive du départ anticipé pour les parents de trois enfants ou encore le taux de cotisation et le minimum garanti dans la fonction publique ont tous été publiés avant la fin de l'année 2010. Les décrets nécessaires à l'extension de la réforme aux régimes spéciaux l'ont été dès le mois de mars 2011, de même que ceux mettant en œuvre la réforme anticipée pour pénibilité. Seul le décret relatif au Comité de pilotage de la réforme des retraites (COPILOR) a fait l'objet d'une publication un peu tardive.

En revanche, deux dispositions, qui concernent la pénibilité, manquent à l'appel : l'arrêté relatif aux fiches individuelles d'exposition à des conditions de travail pénibles et le décret devant fixer la composition du comité scientifique chargé « d'évaluer les conséquences de l'exposition aux facteurs de pénibilité sur l'espérance de vie avec et sans incapacité des travailleurs ». Je le regrette. D'autres décrets doivent encore être publiés, mais ils concernent des dispositions dont la date d'entrée en vigueur est plus éloignée - je pense en particulier au droit à l'information.

Au-delà de ce satisfecit global, j'aurais quelques questions un peu plus précises à vous poser.

Premièrement, pourriez-vous revenir quelques instants sur la question de l'allongement de la durée de cotisation, afin de poursuivre l'indispensable travail de pédagogie ? Le processus était déjà inscrit dans la loi Fillon, seules les modalités de fixation ayant évolué avec la réforme qui nous occupe aujourd'hui.

Deuxièmement, s'agissant de l'égalité hommes-femmes, le projet de décret a pu susciter certaines inquiétudes. Nous éclaireriez-vous sur ce point ?

Troisièmement, où en est le décret concernant la prise en compte accrue des périodes de chômage non indemnisées ? S'agissant de l'allocation équivalent retraite (AER), nous nous étions heurtés à des problèmes de stock et de flux. Nous avions réglé celui du stock ; pour résoudre celui du flux, nous avions envisagé, à l'époque, des dispositions spécifiques.

Quatrièmement, l'article 9 de la loi crée un répertoire de gestion des carrières unique, confié à la CNAV. Un groupe de travail a été mis en place. En savez-vous davantage ?

Enfin, l'article 13 prévoyait le dépôt d'un rapport sur les conditions d'un versement des pensions dès le 1er du mois. Nous savons, monsieur le ministre, que ce sujet vous tient à cœur. Où en êtes-vous de votre réflexion ?

M. Michel Issindou, rapporteur. Monsieur le ministre, vous vous en doutez, mon appréciation est un petit peu moins positive que celle de mon estimé collègue. Même s'il ne s'agit pas de refaire le débat sur les retraites, je voudrais très brièvement rappeler pourquoi nous nous sommes opposés à cette réforme et pourquoi nous reviendrons dessus au plus vite, si nous sommes en situation de le faire.

Cette réforme est injuste et inefficace.

Elle est injuste car elle fait porter l'essentiel du poids des déficits issus de la crise économique sur les personnes qui sont déjà les plus touchées, c'est-à-dire les salariés ayant commencé à travailler tôt. Les seuls qui ne seront pas touchés par le relèvement des bornes d'âge sont ceux ayant fait de longues études et ayant commencé à travailler tard et qui, pour disposer de l'ensemble des annuités nécessaires, partent déjà après soixante-deux ans. Ma première question sera d'ailleurs la suivante : combien de personnes seront obligées, en 2011, de décaler leur départ en retraite ? En attendant, quelle est leur situation ?

Cette réforme est également inefficace car, sans changement significatif du taux d'emploi des seniors - aujourd'hui, d'environ 38 % pour les 55-64 ans -, elle se traduira inévitablement par un transfert des déficits de l'assurance vieillesse vers l'assurance chômage, l'assurance maladie ou les minima sociaux.

Concernant les différents décrets d'application, celui relatif à l'allocation équivalent retraite (AER) se fait toujours attendre. Certes, la loi prévoit de prolonger cette dernière pour les personnes qui en bénéficient déjà au 31 décembre 2010, mais rien n'est prévu pour celles qui auraient dû en bénéficier depuis ; c'est d'autant plus dommageable que ce nombre augmentera au fur et à mesure du décalage des âges. En septembre 2010, le Premier ministre lui-même avait pris l'engagement que le Gouvernement mettrait en place « un système équivalent à l'AER, pérenne, pour les travailleurs les plus âgés ». Le Gouvernement entend-il honorer cette promesse ?

Pour l'essentiel, les mesures réglementaires prises en application de la loi ont été publiées, ce qui est indiscutablement une bonne chose. Mais il me semble que l'option la plus restrictive a été quasi systématiquement retenue.

S'agissant de la pénibilité, pourquoi avoir retenu une durée d'exposition de dix-sept ans pour bénéficier d'une retraite anticipée, à soixante ans, en cas d'incapacité comprise entre 10 et 20 % ?

Concernant l'obligation de négociation sur la pénibilité, pourquoi est-il envisagé de retenir une proportion de 50 % de salariés exposés aux facteurs de risques professionnels liés à la pénibilité ? Sur quels critères ce chiffre a-t-il été retenu ? Combien d'entreprises seront-elles concernées ?

Pour ce qui est de la possibilité pour les parents de trois enfants de partir à soixante-cinq ans sans décote, les conditions d'interruption d'activité après la naissance des enfants me semblent excessivement restrictives. Quel a été votre raisonnement et quel est le nombre d'assurés susceptibles d'en bénéficier ?

Quant aux aidants familiaux, pourquoi avoir restreint le dispositif aux aidants de personnes handicapées, à l'exclusion des personnes dépendantes ? Là encore, combien de personnes seront-elles concernées ?

Enfin, s'agissant de l'égalité hommes/femmes, les belles intentions de la loi n'ont trouvé qu'une maigre traduction dans les décrets d'application.

Au-delà de ces remarques et de ces interrogations, je tiens à préciser en quoi notre approche du sujet diffère de la vôtre.

On le sait, l'équilibre des régimes de retraite est une question de paramètres. Vous avez choisi de n'apporter aucune ressource nouvelle dans le dispositif et de jouer, en conséquence, sur un seul de ces paramètres : le recul des bornes d'âges. Pour nous, ce n'était pas le seul choix possible.

À l'automne dernier, nous avons défendu avec conviction une solution plus équilibrée et plus durable, passant par une taxation du capital et une augmentation progressive des cotisations. Cela nous aurait permis d'être plus généreux sur l'âge de départ, plus humain sur la façon de prendre en compte la pénibilité et plus efficaces pour l'emploi des seniors.

Dans ces conditions et contrairement à ce que vous affirmez, la retraite à soixante ans restait possible. Cette solution, à nos yeux plus juste, aurait convenu à ceux dont l'espérance de vie est plus courte, en raison de leur métier ; à ceux qui ont commencé à travailler tôt et dont le nombre d'annuités est suffisant ; enfin, à ceux qui souhaitent s'engager, dès cet âge, dans une autre étape de leur vie. La solution que vous avez choisie se traduit, à l'inverse, par des décisions très dures : report de la barrière d'âge et, depuis hier, augmentation anticipée de la durée de cotisations à 41,5 annuités - 166 trimestres.

En outre, votre réforme n'est qu'un sauvetage de très court terme. Comme vous l'avez dit vous-même, l'équilibre financier n'est assuré que jusqu'en 2018. Et encore devrez-vous recourir, plus tôt que prévu, au Fonds de réserve des retraites (FRR). Dès 2013, il faudra reprendre votre travail pour asseoir enfin les régimes de retraite sur des bases solides, de nature à redonner confiance aux générations futures.

M. le président Pierre Méhaignerie. Monsieur le ministre, je confirme les propos de Denis Jacquat : cette réforme a été responsable, courageuse et globalement juste.

Je me souviens des années précédentes, notamment entre 1980 et 1983. Ceux qui font des promesses aujourd'hui doivent savoir qu'ils pourraient avoir à les tenir demain, et que le risque est grand, pour eux, d'être sanctionnés.

La France est par ailleurs le seul pays d'Europe dont les dépenses sociales, qui ont atteint cette année le montant record de 610 milliards d'euros, progressent à un rythme supérieur à 3 % par an. Nous devons donc veiller à ce qu'elles n'asphyxient pas l'emploi et l'économie.

Nous devons également rester dans la ligne de la réforme des retraites conduite en 2003 par le Premier ministre, qui nous a conduits à mettre l'accent sur ceux qui ont exercé les métiers les plus pénibles. N'oublions pas que 140 000 personnes pourront prendre leur retraite à soixante ans. Il s'agit, notamment, de celles qui ont commencé à travailler avant dix-sept ans. Cela dit, nous avons besoin d'entendre parler de cas concrets, pour répondre aux questions qui nous sont posées sur le terrain - par exemple sur l'abaissement à 10 % du taux d'incapacité et sur le Fonds de mutualisation.

Enfin, je m'inquiète du développement des ruptures conventionnelles et des conséquences qu'auront celles-ci, notamment lorsque le salarié approchera de 58 ans. L'UNEDIC devra-t-elle prendre le relais ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé. Je ne pense pas avoir besoin de refaire le débat, même après avoir entendu les propos de M. Issindou. En revanche, il me semble raisonnable de poursuivre cette réforme, tout en essayant de mener un débat dépassionné sur la question

Certains veulent nous faire croire que la « boîte à promesses » peut encore fonctionner. Mais les Français ne s'y laisseront pas prendre. Ils lisent les journaux, regardent les informations télévisées et savent ce qui se passe à l'étranger : les socialistes espagnols et allemands ont voté des réformes qui vont bien au-delà de ce que l'on fait chez nous, parce que c'était nécessaire. Dans la mesure où nous vivons plus longtemps dans nos sociétés européennes, il faut accepter de travailler plus longtemps. Les Français font preuve d'une grande maturité sur toutes ces questions.

Monsieur Issindou, vous avez parlé des paramètres, que nous connaissons tous : le niveau des cotisations, l'indemnisation et la durée de cotisation. Quoi qu'on fasse, tout le reste est secondaire. Nos concitoyens le savent : en matière de retraite, la pédagogie a été faite depuis bien longtemps.

Ainsi, ils n'accepteraient pas que l'on touche à l'indemnisation : la tradition, en France, à la différence de l'Allemagne, n'a pas été depuis plusieurs décennies - en particulier dans l'industrie - à des salaires élevés - et je ne parle pas de ceux des femmes, qui sont encore plus faibles que ceux des hommes, du fait notamment de carrières fractionnées et, bien souvent, d'une absence de déclaration de leur statut. Or qui dit petits salaires dit petites pensions. Voilà pourquoi, aujourd'hui, il est impensable de toucher au niveau des pensions.

Quant aux cotisations, certains en parlent avec beaucoup d'aise. Sauf que différents enjeux liés au vieillissement seront à résoudre dans les années qui viennent. Il faut prendre pour la retraite, dit-on. Mais pour les autres sujets - la santé, la dépendance - les mêmes disent aussi qu'il faut des cotisations. Or, selon moi, le niveau de prélèvements est arrivé à un point tel dans notre pays que l'on ne peut aller au-delà sans risquer de compromettre définitivement la compétitivité française. Voilà pourquoi les réformes ont été engagées - quel dommage d'ailleurs qu'elles ne l'aient pas été avant 1993 ! - en prenant tout simplement en compte l'évolution de l'espérance de vie et la durée de la période d'activité. Rien de plus, rien de moins. C'est ce qui nous a conduit à adopter une démarche équilibrée qui nous a permis d'aller moins loin - 62 ans en 2018 - que dans d'autres pays. Même si ailleurs les deux mêmes curseurs existent comme en Allemagne, ils jouent de façon alternative et non cumulative - 67 ans et 45 années de cotisation. Je ne fais pas tous ces rappels par esprit polémique, mais pour situer les enjeux.

Dès 2003, notre majorité - je m'en souviens bien pour avoir été rapporteur pour avis de la loi, aux côtés de Bernard Accoyer, rapporteur de la commission des affaires sociales, et de François Fillon, alors ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité - a mis en place le dispositif « carrières longues ». Ceux qui considèrent aujourd'hui comme insupportable de faire passer la durée de cotisation de 41 ans à 41,5 ans devraient d'ailleurs se souvenir que, lorsqu'ils étaient au pouvoir, ils avaient opposé une fin de non-recevoir aux demandes légitimes formulées par les députés communistes - membres de leur majorité - en faveur de certains salariés : cotiser pendant 46 ans, cela ne les gênait pas à l'époque ! Ce dispositif, qui a bénéficié à plus d'un demi-million de nos concitoyens, c'est donc bien, je le répète, notre majorité qui l'a mis en place après 2003. Il a un prix, mais c'était une question de justice.

Je ne suis pas sûr d'ailleurs que l'on ait besoin de toujours se donner des leçons. Il conviendrait même de changer d'autant plus de ton sur le sujet que cela rassure nos concitoyens de voir qu'il y a des points sur lesquels on est capable de ne pas se déchirer. On verra bien à quel moment les Français choisiront le changement de majorité. Mais ils savent pertinemment que, sur ce sujet, il n'y aura pas de retour en arrière. Même si certains en avaient sincèrement envie, ils n'en auraient pas les moyens. C'est aussi simple que cela. Suivant les équations en effet, ce sont entre 9 et 20 milliards d'euros par an qui, sinon, manqueraient alors même que les besoins de financement liés au vieillissement seront importants.

Vous avez soulevé, monsieur Jacquat, la question de l'allongement de la durée de cotisation. Je pourrais vous dire que le processus est automatique, et c'est d'ailleurs ce qui s'est passé depuis 2003. Mais ma conception de la politique m'amène à me projeter au-delà. En fin d'année dernière, des chiffres communiqués par l'INSEE nous ont montré que, passé 60 ans, les Français avaient 24,5 ans d'espérance de vie - je ne distingue pas entre les hommes et les femmes bien que l'espérance de vie, même si les choses se rapprochent, soit encore différente. Il faudra en tirer les conclusions, à partir du ratio déterminé en 2003, à savoir deux tiers de l'augmentation de la durée de vie pour le temps de travail et un tiers pour le temps de retraite. Je prendrai un décret dans les semaines qui viennent en fonction de l'avis qu'aura rendu le Conseil d'orientation des retraites (COR) - cet avis vient d'ailleurs d'être adopté sans vote, ce qui n'est pas en soi une surprise. Je sais bien que l'on veut en faire un sujet polémique, mais c'est alors depuis 2003 que l'on aurait pu, tous les ans, en faire un !

Je ne reproche d'ailleurs pas aux syndicats leur position en la matière. Ils s'étaient déjà opposés au passage de 40 à 41 ans : je ne vais pas leur demander aujourd'hui de changer leur attitude. C'est leur choix, et je le respecte. Simplement, ce n'est pas ma conception des choses car agir en matière de durée de cotisation, est non seulement nécessaire mais également indispensable. Il convient cependant de dépassionner le débat. On nous parle en effet avec cette hausse de la durée de cotisation, combinée au relèvement progressif de l'âge légal, d'une « double peine » qui arrive par surprise. Non, c'est là l'esprit de la loi de 2003. Il est vrai que lorsque l'on est passé de 40 à 41 ans, les mêmes débats quasiment ont eu lieu.

Vous avez par ailleurs évoqué la pénibilité, dont nous avons longuement débattu. Je rappelle que c'est la première fois que nous mettons en place un dispositif la prenant en compte. Malgré son coût, un tel dispositif se justifie pour des raisons de justice. Dès 2003, j'avais déposé des amendements incitant les partenaires sociaux à négocier en ce sens. Certains y avaient vu - à tort - un effet de mode. En définitive, le Gouvernement a été conduit à prendre ses responsabilités.

Cela étant, les dispositions adoptées en 2003 sur les carrières longues ont permis de traiter différemment - pas aussi bien peut-être d'un point de vue médical - la question de la pénibilité. À l'époque en effet, le dispositif a été élargi à ceux qui avaient commencé à travailler à 16 ans, suite à l'action de Pierre Méhaignerie, dans les métiers parmi les plus pénibles - déterminés sur la base de critères pas très objectifs, je le concède.

Aujourd'hui, nous prévoyons que 30 000 personnes par an pourront bénéficier du nouveau dispositif. Certes, au 30 juin 2011, très peu d'attestations ont été délivrées. Cela s'explique par le fait que ce dispositif n'étant pas encore entré en vigueur, les intéressés attendent, ne sachant peut-être même pas à qui s'adresser. Le même phénomène s'était d'ailleurs produit avec la retraite anticipée pour carrières longues puisqu'on n'avait enregistré, au cours des deux mois précédant son ouverture, en novembre et décembre 2003, que 2 287 attributions. En revanche, sur l'année 2004, on en enregistra 100 000, une fois le dispositif devenu opérationnel. Sans vouloir établir de corrélation, si aujourd'hui, on ne compte que 300 ou 400 attestations, cela ne signifie pas pour autant que le dispositif ne va pas fonctionner - avant l'heure, ce n'est pas l'heure, dirais-je.

Cela me conduit d'ailleurs à revenir sur l'une de vos questions, monsieur Jacquat. S'il était important que le COR se réunisse et que je publie rapidement le décret concernant l'allongement de la durée de cotisation, c'était simplement pour que les caisses de retraite puissent informer les assurés sociaux de la génération 1955. Si l'on n'apporte pas de réponse, ils ne sauront pas comment s'organiser. C'est en particulier la raison pour laquelle j'avais notamment soutenu à l'époque, en 2003, le droit à l'information.

Monsieur Issindou, la durée de dix-sept ans qui est imposée aux assurés dont le taux d'incapacité n'atteint pas 20 % n'a pas été choisie par hasard. Elle correspond à la durée qui sera à l'avenir nécessaire pour bénéficier d'une retraite de la fonction publique lorsque l'on fait partie des catégories dites « actives ». Comme il faut arrêter avec ces disparités, que personne ne sait expliquer, entre le public et le privé, il est logique que la même référence soit appliquée pour le privé. Ces catégories, ce sont celles qui sont exposées à des conditions de travail caractérisées par une relative pénibilité. On ne part donc pas de rien : on prend en compte le dispositif qui existe dans le public. Une durée de dix-sept ans va permettre vraiment de juger de la pénibilité d'une carrière. Je rappelle néanmoins que selon la circulaire du 18 avril 2011, cette condition de durée d'exposition n'est pas applicable aux salariés victimes d'une maladie professionnelle ; dans ce cas, c'est-à-dire si l'on a une maladie professionnelle, il n'est pas besoin d'atteindre les dix-sept ans d'exposition. La maladie professionnelle l'emporte sur la durée d'exposition ; pour ceux qui en ont une, le système sera donc plus favorable, ce qui est normal.

Vous m'avez interrogé, monsieur Jacquat, sur le décret relatif aux périodes de chômage non indemnisées en début de carrière. Je l'ai signé et il a été publié au début du mois de juin : il porte de 4 à 6 trimestres, comme nous nous y étions engagés, la période prise en compte pour le calcul de la retraite. Le système ainsi mis en place est donc plus favorable.

Vous avez l'un et l'autre évoqué la question de la retraite des femmes. La réforme apporte plusieurs améliorations, dont celle qui permet la prise en compte des congés de maternité pour le calcul de la pension. Les indemnités journalières perçues à cette occasion seront désormais prises en compte pour la retraite. Le décret en ce sens a d'ores et déjà été publié au Journal officiel.

Malgré tout, certains s'inquiètent, s'agissant de l'égalité salariale entre les hommes et les femmes : les décrets ne risquent-ils pas de revenir en arrière ou d'alléger les contraintes existantes ? Mme Marie-Jo Zimmermann a d'ailleurs publié hier de nouvelles recommandations sur le sujet. Entendons-nous bien : voilà trente ans que le principe « à travail égal, salaire égal » est inscrit dans la loi. Il n'est pas question pour nous de revenir dessus. Il n'est pas question de recul.

Le paiement des retraites le 1er du mois est un sujet qui me tient à cœur. Lors du débat sur les retraites, l'amendement en ce sens avait d'ailleurs été voté à l'unanimité - ce qui n'a pas été le cas pour beaucoup d'entre eux !

J'avais demandé un rapport car, du fait de l'article 40 de la Constitution, j'étais incapable de présenter un amendement qui eût été recevable. Je suis effaré d'ailleurs du nombre de difficultés que l'on dresse en la matière. Au-delà du coût de la mesure, qui s'élèvera non pas à 15 milliards d'euros tous les mois, comme il m'a été indiqué initialement, mais à beaucoup moins, les difficultés ont été de plusieurs ordres.

Actuellement, les retraites sont mises en paiement le 9 et arrivent sur les comptes le 11 ou le 12. Leur versement en début de mois implique donc - pour ne pas imposer une charge de trésorerie supplémentaire aux entreprises - que l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) emprunte. Or emprunter pour dix jours tous les mois comme je l'imaginais, serait, me dit-on, compliqué et certainement coûteux. Il faudrait donc, m'explique-t-on, emprunter davantage sur l'année, ce qui coûterait encore plus cher. Mais si l'ACOSS emprunte davantage, soit entre 10 et 15 milliards d'euros, ne pourra-t-elle pas non seulement avancer le paiement des retraites, mais aussi, sur les vingt jours restants, placer l'argent ? In fine, la facture serait donc moins élevée. J'étudie la question.

Autre difficulté avancée : le versement des retraites en début de mois impliquerait le changement des logiciels de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) - selon un écho publié dans l'Express ce matin, cette dernière estimerait même un tel changement impossible ! Le problème c'est que moi, je ne peux imaginer que cela ne puisse se faire. J'irai jusqu'au bout. On prétend que cela prendrait plus de deux ans ! Il ne faut quand même pas plaisanter !

Bref, je ne renoncerai pas sur ce sujet. Nous lèverons les embûches les unes après les autres, et nous réussirons à avancer la date de versement des retraites dans ce pays. On me dit que ce n'est pas grave, que les gens finissent par être payés. Mais il s'agit quasiment d'un symbole, celui de montrer notre capacité, s'agissant d'une idée simple appuyée sur une volonté politique partagée, à lever les unes après les autres les difficultés techniques et technocratiques qui n'auront pas manqué pas de se dresser sur notre route. C'est un sujet dont on ne parle pas trop à Paris dans les cabinets ministériels, mais sur le terrain, il concerne les gens un peu plus qu'on ne l'imagine.

Le taux d'emploi des seniors s'améliore, monsieur Issindou - ne faisons pas de misérabilisme. On a confondu pendant trop longtemps le taux d'emploi des 55-65 ans avec ceux des 55-60 d'une part et des 60-65 d'autre part. Comme, en outre, l'âge légal de départ à la retraite était de soixante ans, les chiffres ne pouvaient qu'être mauvais s'agissant des 60-65 et faire baisser la moyenne pour les 55-65. Du fait des règles relatives au cumul emploi retraite ou parce qu'elles avaient commencé à travailler très tard, les personnes qui partaient à la retraite après soixante ans étaient très peu nombreuses - moins de 20 000. Aujourd'hui, le taux d'emploi des 55-60 ans se situe dans une bonne moyenne européenne et continue de progresser. La libéralisation du cumul emploi retraite et le relèvement de la surcote permettent d'ores et déjà d'anticiper le relèvement de l'âge de la retraite.

Les gouvernements, de droite comme de gauche, les employeurs, les salariés et les syndicats ont fermé les yeux sur le système des préretraites, qui a coûté très cher au pays en termes financier, économique, mais surtout sociétal car permettre à des gens expérimentés et qui ont dépassé un certain âge de partir à la retraite est un véritable gâchis. La transmission des savoirs dans l'entreprise posait un vrai problème. Nous avons porté le coût de grâce aux préretraites dans les projets de loi de financement de la sécurité sociale successifs, ce que j'assume.

Vous avez donc entièrement raison de dire que l'augmentation du taux d'emploi des seniors est une nécessité. Nous agissons en ce sens. Mais ce n'est pas l'argent de la pénalité dont doivent s'acquitter les entreprises non couvertes par un plan seniors qui m'intéresse, c'est le changement des comportements.

Le Premier ministre François Fillon a très clairement déclaré qu'il demandait aux partenaires sociaux, dans le cadre de la renégociation de l'assurance chômage, de se pencher sur l'allocation équivalent retraite (AER). Les partenaires sociaux qui ont mis en place la filière senior sur l'indemnisation après cinquante ans, n'ont pas traité la question. Vous le savez, l'AER a été prolongée jusqu'en 2010, et Éric Woerth a souhaité qu'elle soit sanctuarisée jusqu'au bout. Aujourd'hui, j'ai besoin de connaître le nombre de personnes concernées, c'est-à-dire qui auraient pu bénéficier du dispositif au moment du vote de la réforme - elles seraient entre 30 000 et 40 000 -, et leur statut. Nous devons en effet savoir, au regard du plan spécifique pour le retour vers l'emploi des chômeurs seniors de longue durée, si elle a eu un impact, voire un impact plus important que l'allocation de solidarité spécifique (ASS).

J'aborderai donc ce sujet avec les partenaires sociaux, sachant qu'il ne faut pas, selon moi, abdiquer face à la nécessité de ramener vers l'emploi ceux qui pourraient être bénéficiaires de l'AER et qui sont aujourd'hui sans activité.

Monsieur Issindou, le nombre de personnes obligées en 2011 de reporter la date de leur départ à la retraite s'élève à environ 200 000.

Enfin, monsieur Jacquat, la traçabilité des expositions est une des missions de la médecine du travail, qui a besoin d'un cadre réformé pour la mener à bien. Nous y travaillons.

M. Arnaud Robinet. Je remercie le ministre et les deux rapporteurs de nous avoir, une fois de plus, apporté la preuve que cette réforme des retraites est à la fois responsable et juste.

Responsable puisqu'elle vise à sauvegarder notre système de retraite grâce à un retour à l'équilibre à l'horizon 2018 - avec l'objectif principal de garantir le versement des pensions aux Français - et parce qu'elle apporte une solution au vieillissement de la population, avec le recul de l'âge de départ à la retraite, comme l'ont fait la plupart de nos voisins européens.

Juste car elle met à contribution les salariés, mais aussi les revenus du capital à hauteur de 3,7 milliards d'euros. Elle est la première, au niveau européen, à prendre en compte la pénibilité. Elle amplifie le processus des carrières longues, qui avait été mis en place lors de la réforme de 2003. Elle comporte enfin des mesures relatives à l'égalité entre les hommes et les femmes.

Depuis quarante-huit heures, le discours démagogique de l'opposition, porteur d'angoisse pour nos concitoyens, se focalise sur la proposition du COR d'allonger à nouveau la durée de cotisations. Or, que je sache, la réforme de 2010 ne remettait pas en cause la réforme Fillon de 2003, laquelle n'est pas non plus remise en cause dans le programme du parti socialiste, qui préconise, pour permettre l'équilibre entre le temps de travail et le temps passé à la retraite, une augmentation de la durée de cotisation de six mois pour un gain d'un an d'espérance de vie. D'ailleurs, la logique impose d'allonger la durée de cotisation de quarante ans à quarante et un ans et demi puisque, comme le montrent les données de l'INSEE, nous avons gagné un an d'espérance de vie depuis quatre ans.

Je suis persuadé que les Français nous sauront gré de cette réforme, car ils attendent non pas un discours démagogique sur le rétablissement de la retraite à soixante ans, mais un discours de vérité. À cet égard, le Président de la République et le Gouvernement ne font que prendre leurs responsabilités pour garantir la protection sociale de nos concitoyens.

Monsieur le ministre, d'autres réflexions seront-elles menées avant 2018, notamment sur le passage à un système de retraite par points et à un régime unique pour l'ensemble des salariés, du secteur privé comme du secteur public ?

Mme Marisol Touraine. Certes, monsieur le ministre, nous ne sommes pas obligés de nous déchirer. Néanmoins, si nous sommes d'accord sur la nécessité de mesures vigoureuses pour pérenniser nos régimes de retraite, nous ne sommes pas dispensés d'exprimer des divergences politiques réelles.

En indiquant que vous ne savez pas quand les Français choisiront le changement de majorité, c'est donc que vous admettez que ce changement est d'ores et déjà programmé. À cet égard, les positions que nous exprimons aujourd'hui sont responsables, c'est-à-dire susceptibles de s'inscrire dans le cadre d'une politique gouvernementale.

La sauvegarde de nos régimes de protection sociale passe évidemment par l'augmentation du temps travaillé, globalement et collectivement, mais n'implique pas nécessairement une augmentation du temps de travail personnel de tous les individus. Elle exige également d'engager des politiques de réduction du chômage, dont le taux avoisine désormais 10 %.

Certes, à l'avenir, des hommes et des femmes pourront travailler plus longtemps car leur métier n'aura pas été difficile ou parce qu'ils auront été gratifiés dans leur activité professionnelle, mais d'autres ne le pourront pas, voire ne le devront pas au regard de leur parcours professionnel et de la pénibilité de leur métier. Voilà pourquoi l'allongement du temps de travail ne doit pas s'appliquer à tout le monde.

Ce qui est porteur d'angoisse pour les Français, monsieur le ministre, c'est le changement permanent des règles. À la fin de l'année dernière, le Gouvernement a clairement indiqué qu'il s'engageait dans la voie du relèvement de l'âge légal de départ en retraite, tout en maintenant une perspective d'allongement de la durée de cotisations à l'horizon 2020 - et non 2012 ! Il a également expliqué que le système était totalement financé jusqu'en 2018-2020 et que le parti socialiste affolait la population. Or quelques jours seulement après l'entrée en vigueur de la loi, vous remettez en cause les paramètres !

La loi de 2003 reposait sur un allongement de la durée de cotisation, sans modification de l'âge légal de départ à la retraite. Or, en 2010, vous avez indiqué qu'il fallait modifier l'âge légal. Si je comprends bien votre logique, dans six mois vous nous expliquerez que l'âge légal de soixante-deux ans doit être reporté à soixante-deux ans et demi ! En réalité, ces deux ensembles législatifs vous permettent de durcir ad libitum les conditions de départ à la retraite.

Cette situation s'explique par votre refus d'envisager la recherche de nouvelles ressources. Pourtant, dans la mesure où le coût du travail ne peut être éternellement alourdi si nous voulons garantir la compétitivité de notre économie, il nous faut rechercher un élargissement de la base des prélèvements, en particulier mettre à contribution les revenus du capital. Votre prédécesseur avait reconnu explicitement que les prélèvements sur les revenus du capital permettraient de faire face aux chocs de court terme et de ne pas relever l'âge légal de départ de retraite, mais que cela n'était pas le choix du gouvernement. Vous confirmez ce choix, alors qu'une remise à plat du financement s'impose.

La durée de cotisation est un critère plus juste que le relèvement de l'âge légal, à condition d'être modulée pour tenir compte des conditions de travail et de la pénibilité. Or votre loi prend en compte non pas la pénibilité, mais simplement l'invalidité qu'elle aménage légèrement. Pour le parti socialiste, l'important est de faire en sorte que l'ensemble des paramètres qui caractérisent une vie professionnelle soit effectivement pris en compte au moment du départ en retraite, et non d'appliquer la même règle à tout le monde comme vous le faites.

Enfin, outre qu'elle est injuste et inefficace sur le plan financier, puisque vous êtes contraint de trouver de nouvelles ressources quelques jours après l'entrée en vigueur de la loi, votre politique est également totalement abstraite dans la mesure où elle est menée dans un contexte de chômage de masse, notamment des plus de cinquante-cinq ans. Vous indiquez que le relèvement de l'âge légal permettra mécaniquement aux gens de cinquante-cinq ans de rester en activité. Or depuis le début de l'année, tous les employeurs savent que l'âge légal sera relevé et, malgré une légère amélioration de l'emploi ces derniers mois, le chômage des plus de cinquante-cinq ans n'a pas baissé.

Au total, la combinaison des critères que vous imposez rendra extrêmement difficile un départ à la retraite à taux plein pour un nombre croissant de gens. À court terme, nous assisterons au retour de la pauvreté pour certains retraités - votre objectif étant, j'en suis certaine, la baisse des pensions.

M. le ministre. Madame Touraine, il est effectivement préférable que ce débat soit dépassionné.

Ce n'est pas le plein-emploi qui apporte la réponse au problème des retraites. Le plein emploi accroît la masse salariale. Mais les personnes au chômage voient leurs périodes de chômage validées et comptabilisées pour la retraite.

Contrairement à ce que vous dites, le système est totalement encadré par la loi. En prenant le décret, je ne fais qu'appliquer la loi.

L'augmentation de la durée de cotisation de trois mois, qui trouve sa justification dans l'augmentation de la durée de vie, permettra aux gens de bénéficier du même niveau de retraite. Il s'agit simplement d'équilibrer les retraites en vertu du calcul deux tiers/un tiers.

Je relève tout de même une contradiction chez le parti socialiste. Considérant que toucher à l'âge légal était injuste, il avait proposé l'allongement de la durée de cotisations. Or aujourd'hui, vous êtes contre le passage de la durée de cotisations de quarante et un an et un trimestre à quarante et un an et demi ! Il faut assumer vos choix, madame Touraine !

En outre, les règles doivent être définies à l'avance. L'information et la publication du décret - dont j'assume la signature et qui était prévu par la loi - permettront aux personnes qui atteignent aujourd'hui cinquante-six ans de pouvoir s'organiser le plus tôt possible.

M. Robinet est l'un de ceux qui connaît le mieux le sujet des retraites. Il a raison de rappeler que cette réforme est responsable. Je vais plus loin en disant que la question des retraites touche vraiment à la place que l'on accorde au travail dans une société. En général, tout le monde est d'accord sur les mesures généreuses, mais il y a moins de candidats sur les mesures courageuses…

Monsieur le président Méhaignerie, le fonds destiné à soutenir les initiatives des branches et des entreprises, auquel vous tenez, est aujourd'hui en cours de création au sein de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP). Je prends l'engagement que nous ne fixerons pas de seuil d'effectifs pour les entreprises concernées. Par ailleurs, nous élargirons les missions de ce fonds de façon à intégrer tous les outils pour les fins de carrière - je pense en particulier à la question du contrat. Nous vous communiquerons très bientôt une nouvelle version du décret.

Nous avons atteint le chiffre de 600 000 ruptures conventionnelles. Contrairement à ce qui a pu être dit ou écrit, les salariés âgés ne sont pas surreprésentés par rapport aux salariés licenciés du même âge : le rapport est à peu près identique.

J'ajoute pour finir, madame Touraine, que les chômeurs d'un certain âge sont avant tout des chômeurs de longue durée, pour lesquels le retour sur le marché du travail est rendu encore plus difficile par la crise. Si les trois quarts de ces personnes ont été reçues par les agents de Pôle emploi, elles ne reviendront pas rapidement sur le marché du travail dans la mesure où elles ont besoin d'être prises en charge, en particulier de bénéficier d'une formation ou d'un contrat aidé. Vous avez raison : même si le chômage global baisse depuis le début de l'année, en particulier celui des jeunes, la tendance ne s'est pas encore inversée pour les chômeurs de longue durée.

M. Dominique Dord. Sur le plan politique, je suis étonné, pour ne pas dire scandalisé, des propos de Michel Issindou et de Marisol Touraine concernant l'allongement de la durée de cotisation - disposition que j'estime d'ailleurs plus juste que celle portant sur le recul de l'âge légal. Alors que le parti socialiste et les syndicats ont souhaité que l'on travaille plutôt sur la durée de cotisation que sur l'âge légal, voilà que nos collègues font comme s'ils n'avaient jamais plaidé pour la première solution voilà un an ! Il faudrait tout de même assumer ses convictions !

Sur le plan technique, il nous est fait part, dans nos circonscriptions, de petits dysfonctionnements - mais aux importantes conséquences pour ceux concernés - liés à la mise en œuvre de la réforme des retraites, s'agissant notamment du versement des retraites complémentaires. Présenterez-vous dans le cadre du PLFSS quelques amendements qui, sans remettre bien sûr en cause l'équilibre général de la réforme, permettront de corriger certains de ces dysfonctionnements - que l'on fait d'ailleurs très régulièrement remonter à votre cabinet ?

M. le ministre. Encore faut-il que je sache de quoi il s'agit pour pouvoir intervenir très vite auprès des organismes concernés, comme dans le cas du dysfonctionnement dans le versement des retraites complémentaires que vous citez.

Je sais que de nombreuses questions se posent. Hervé Gaymard m'a fait ainsi part tout dernièrement de certains questionnements - souvent dus d'ailleurs au seul fait que des changements importants sont intervenus.

Si des problèmes, que le réseau n'est pas à même de résoudre, existent, je dois le savoir afin de les régler avant le projet de loi de financement de la sécurité sociale et, en tout cas, avant le début de l'année. Je suis donc preneur de toute remarque que votre Commission - sans vouloir interférer dans son fonctionnement - serait à même de collecter.

M. le président Pierre Méhaignerie. Dominique Tian voulait évoquer les retraites-chapeau ; il est vrai que la Commission elle-même les avaient réduites très fortement pour les cadres moyens. 

M. Dominique Tian.  De nombreux cadres qui bénéficient de retraites-chapeau se plaignent de la dureté du nouveau système. Le Gouvernement devrait peut-être nous apporter des précisions avant même le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Mme Catherine Lemorton. Notre collègue Arnaud Robinet faisait remarquer que notre message était anxiogène pour les Français : que faut-il alors penser de votre politique, monsieur le ministre, qui aboutit à ce que 76 % de nos concitoyens estiment que leurs enfants connaîtront une période de précarité, que le taux de suicide dans notre pays est l'un des plus importants à la fois chez les personnes âgées et chez les jeunes et que 30 à 40 % de nos concitoyens renoncent à des soins ?

Quant à la maturité que vous croyez déceler chez les Français concernant l'acceptation de la réforme de retraites, j'appellerai plutôt cela de la résignation. Ils savent qu'avant 25 ans ils sont un quart à ne pas avoir de travail et qu'après 50 ans ils sont trop vieux pour travailler. Comme le montrent des reportages réalisés aux États-Unis, ils se voient avec un balai en main à 75 ans pour essayer de survivre !

Par ailleurs, l'article 94 de la loi du 9 novembre 2010 prévoyait le dépôt de deux rapports du Gouvernement : l'un, « déposé au Parlement, avant le 30 juin 2011, sur les conditions d'introduction dans l'assiette des cotisations sociales de la gratification dont font l'objet les stages en entreprise mentionnés à l'article 9 de la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances, et sur les conditions de prise en compte de ces périodes de stage comme périodes assimilées pour la détermination du droit à pension ou rente » ; l'autre, remis « au plus tard le 30 juin 2011 aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat, sur l'assimilation des périodes de travail en détention à des périodes de cotisations à part entière. » Qu'en est-il de ces deux rapports puisque nous sommes déjà le 6 juillet ?

Mme Edwige Antier. Je vous remercie de vos propos concernant l'emploi des seniors car trop de personnes sont poussées vers la sortie beaucoup trop tôt.

Par ailleurs, puisque vous avez souligné l'importance de l'information, la CAF ne pourrait-elle pas, au moyen d'Internet ou de ses publications, prévenir les mères de famille - ou les jeunes parents -, au moment de la naissance d'un enfant, de l'impact qu'aurait pour elles le fait de s'arrêter de travailler ? Trop de mères quittent leur emploi, parfois un peu poussées par l'entreprise qui en profite pour les licencier avec une petite indemnité, sans se rendre compte des conséquences ultérieures.

M. le ministre. Il conviendrait même que cette information leur parvienne dès la déclaration de la grossesse à la CAF. C'est une question à étudier.

Mme Edwige Antier. Les pères eux-mêmes pourraient être concernés par des cotisations compensatoires.

Dans le cadre de la délégation aux droits des femmes, nous avons proposé avec Marie-Jo Zimmermann la création d'un compte épargne-temps familial. Les jeunes parents demandent en effet une flexibilité de leur calendrier jusqu'à la retraite. L'établissement d'un tel compte leur permettrait de moduler leur carrière et de prendre leur retraite à temps choisi : certaines mères de famille, qui ont arrêté plusieurs fois leur carrière pour élever des enfants, seraient très contentes de pouvoir travailler un peu plus tard et d'améliorer ainsi leur retraite.

Mme Gisèle Biémouret. Le groupe SRC a déposé début 2010 une proposition de loi relative à l'extension du régime de retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux de l'agriculture, prévoyant notamment une mesure rétroactive pour les personnes déjà retraitées, dont le financement coûterait 137 millions d'euros.

Sachant que les conjoints survivants d'exploitants agricoles sont souvent des femmes et que ce sont elles qui ont les plus petites retraites - 250 euros par mois -, je regrette que cette extension, qui aurait été une vraie mesure de solidarité envers ces retraités, n'ait pas été décidée.

Mme Michèle Delaunay. Étant rappelé que nous sommes tous animés du même sens de la responsabilité, je reviendrai sur les trois paramètres dont vous faites toujours état en matière de retraite : la durée de cotisation, le montant des pensions et le niveau des cotisations. Or il en existe d'autres - c'est d'ailleurs le grand grief que nous avons à l'encontre de votre réforme : celui de ne pas prendre en compte tous ces paramètres.

Parmi ces autres paramètres, Marisol Touraine a cité l'assiette des cotisations.

M. le ministre. C'est un même paramètre : celui des cotisations.

Mme Michèle Delaunay. Sauf que nous élargissons le champ.

Je citerai pour ma part un autre paramètre, qui fait d'ailleurs équilibre entre les trois premiers : la durée du temps pendant lequel on touche sa retraite. Certes, il y a une logique à s'appuyer sur le fait que, globalement, on va vivre plus vieux. Mais le temps pendant lequel on touche sa pension n'est pas le même pour tous. Est-il normal que des gens qui ne vont pas vivre aussi longtemps que la moyenne, pour des raisons qui sont connues, doivent partir à la retraite aussi tard que les autres ?

M. le ministre. Ce n'est pas vrai.

Mme Michèle Delaunay. Bien sûr que si ! Vous nous parlez de 30 000 personnes qui vont bénéficier de mesures moins sévères. La réalité est tout autre. Nombreux devraient être ceux, dans des métiers que nous pouvons pointer, qui devraient bénéficier de cette mesure.

Mme Pascale Gruny. J'apporte mon entier soutien aux mesures prises par le Gouvernement, ne serait-ce que du fait de la réalité démographique. Il nous faut à la fois parvenir à l'équilibre de nos comptes - il ne me viendrait pas à l'esprit de laisser les charges à nos enfants - et préserver un niveau correct des pensions de retraite.

Sur un plan plus général, nous devons travailler à une convergence progressive des systèmes de retraite en Europe. Par exemple, la stratégie Europe 2020 recommande d'améliorer l'emploi des seniors - les 55-65 ans aujourd'hui. De même, si nous avons choisi, concernant l'âge légal d'ouverture du droit à la retraite, l'âge de 62 ans, nous aurions pu aller plus loin. En Allemagne, au Danemark, et en Espagne cet âge est de 65 ans et bientôt 67. Pourquoi n'en ferions-nous pas autant alors que cette décision a été prise par des socialistes comme Gerhard Schroeder ou José Luiz Rodriguez Zapatero ? Quant à la durée de cotisation, soit 41,5 ans, elle est en Allemagne de 45 ans, en Irlande de 48 ans et au Pays Basque de 50 ans.

On le sait, le poids de nos décisions pèse sur les finances publiques et tout problème en la matière peut, à l'exemple de la Grèce, perturber l'Eurogroupe.

S'agissant enfin de la pénibilité, il ne faut pas y penser seulement pour la fin de la vie active, mais lancer des actions de prévention dès le début. À 20 ans, les jeunes employés à des travaux physiques ne savent pas se préserver des troubles musculo-squelettiques (TMS), notamment le mal de dos.

Mme Monique Iborra. Vous nous avez à nouveau parlé de réforme courageuse et de consensus.

Le vrai courage aurait été, à la faveur de cette réforme, de tenter de réduire les inégalités que vous creusez au fur et à mesure des mois qui s'écoulent, en taxant les revenus du capital beaucoup plus que vous ne l'avez fait, c'est-à-dire d'une manière homéopathique et sous la pression de l'opposition et de l'opinion.

Quant à parler de consensus comme s'il s'agissait en la matière d'une simple réforme technique, c'est oublier que celle-ci est d'abord très politique. J'en veux pour preuve l'enthousiasme du Medef à la soutenir. Vous avez comme nous votre propre identité. Il faut avoir le courage de la défendre.

M. Pierre Méhaignerie. On n'est pas en campagne électorale !

Mme Monique Iborra. Avec cette réforme, qui n'est pas courageuse et qui ne peut être consensuelle, les Français voient bien que la droite et la gauche, ce n'est pas la même chose. Ils auront le choix.

M. Pierre Méhaignerie. Bonne chance !

Mme Monique Iborra. Quant à parler enfin d'insécurité, n'est-ce pas plutôt le Gouvernement qui met en place l'insécurité sociale ? Jamais une politique n'aura eu une répercussion aussi anxiogène sur les Français !

Vous avez, monsieur le ministre, un vrai talent qui se voudrait persuasif, mais qui est surtout manipulateur.

M. le président Pierre Méhaignerie. Comme tout est en nuance dans vos propos, madame Iborra, puis-je vous demander, dans la répartition de la valeur ajoutée entre le travail et le capital, quand donc a fortement augmenté la seconde au détriment de la première ?

Mme Monique Iborra.  Ce qui est étonnant avec vous, monsieur le président, c'est que l'on n'est jamais surpris par vos interventions.

M. le président Pierre Méhaignerie. Quand on donne des leçons,...

Mme Monique Iborra.  En l'occurrence, c'est plutôt M. le ministre qui donne des leçons.

M. Pierre Méhaignerie.... encore faut-il connaître l'histoire : entre 1982 et 1986, c'est la valeur ajoutée du travail qui a fortement baissé - de 7 points !

M. le ministre. L'alternance, dont l'opposition a beaucoup parlé, rime, certes, avec bonne chance, mais aussi avec arrogance, comme bien souvent en ce moment !

Madame Delaunay, si les métiers sont en effet différents, pourquoi n'avez-vous pas parlé du dispositif dit « carrières longues » qui est maintenu ? Une présentation exhaustive donne toujours de la crédibilité à ses propos. À force de dire que tout est noir, les gens n'écoutent plus. En tout cas, c'est bien parce que les métiers sont différents que nous avons pris en compte les carrières longues, mais également la pénibilité.

De même, s'agissant des conjoints collaborateurs agricoles, il n'a pas été dit que nous leur avions étendu le régime de retraite complémentaire. Quant à parler d'effet rétroactif, c'est-à-dire de droits garantis payés par l'État, comment faire vis-à-vis des autres assurés ? Même s'il s'agissait avant tout de garantir l'équilibre, nous avons voulu des avancées sociales. Tel est le cas avec l'extension du régime de retraite complémentaire aux conjoints collaborateurs agricoles, mais également avec l'évolution à la hausse des plus petites retraites agricoles depuis quelques années, cela afin de répondre à un impératif de justice.

Mme Edwige Antier évoquait la question des femmes. Une mère qui veut s'arrêter de travailler peut avoir des trimestres de retraite validés grâce au dispositif de l'assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF), qui représente un effort de 4,5 milliards d'euros par an et qui bénéficie chaque année à 2 millions de personnes.

Quant aux retraites-chapeau, sur lesquelles M. Dominique Tian a appelé l'attention, il faut veiller, en fonction des seuils qui sont appliqués, à ce que cela ne taxe pas les cadres qui ne sont pas directement visés, mais ceux dont on parle le plus, c'est-à-dire qui ont des retraites- chapeaux - de même que des rémunérations - extravagantes.

Mme Pascale Gruny a raison de s'intéresser aux comparaisons internationales. La question du benchmark - en bon patois picard - est en effet essentielle. Les politiques ne le pratiquent certainement pas assez, alors que nos concitoyens s'y livrent systématiquement. Quand on voit que, face au même vieillissement de la population, les pays d'Europe qui ont dépassé l'âge légal de 60 ans depuis longtemps n'ont pas les mêmes déficits, cela montre bien la voie à suivre.

Le benchmark permet en outre de dépassionner les débats en montrant qu'il n'y a pas qu'une seule voie en la matière : si certains ne sont pas dans les mêmes familles politiques que d'autres, c'est parce que chacun a ses choix. Concernant, par exemple, la réforme des retraites, des voies différentes existent. À nous de les expliquer avant que les Français décident paisiblement. En revanche, contester tout du début à la fin, c'est entraîner une perte de confiance envers l'ensemble de la classe politique.

Concernant enfin les deux rapports auxquels Mme Lemorton a fait allusion, ils sont en voie finalisation. Ils vous seront transmis, même s'il y a un décalage dans les délais, avant le vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale. J'en prends l'engagement.

M. le président Pierre Méhaignerie. Merci à tous.

ANNEXES

ANNEXE 1 : TABLEAU DE SUIVI DES TEXTES RETRAITES PUBLIÉS ET RESTANT À PUBLIER EN 2011
LOI DU 9 NOVEMBRE 2010 PORTANT RÉFORME DES RETRAITES

BASE LÉGALE de la loi portant réforme des retraites

OBJET

Numéro des textes

ÉCHÉANCE - COMMENTAIRES

Textes d'application publiés (3)

Art. 2 de la loi retraites

D composition et rôle du Copilor

D 2011-594 du 27 mai 2011

Applicable au lendemain de sa publication. Réunion d'installation du Copilor par le ministre du Travail le 31 mai.

Art. 2 de la loi retraites

Arrêté de nomination des membres du COPILOR.

Arrêté du 30 mai 2011.

Art. 15 de la loi retraites

DCE assurance volontaire

DCE 2010-1776 du 31 déc. 2010

 

Art. 15 de la loi retraites

D assurance volontaire

DS 2010-1738 du 30 déc. 2010

 

Art. 17, 20 et 21 de la loi retraites

D âge

DS 2010-1734 du 30 déc. 2010

Applicable aux pensions prenant effet à compter du 1er janvier 2011.

Art. 20 de la loi retraites

DCE âge du taux plein

DCE 2011-620 du 31 mai 2011.

Applicable aux pensions prenant effet à compter du 1er juillet 2016 ; mais joue dans le calcul de la décote donc dès le 1er juillet 2011.

Art. 20, 49 de la loi retraites

DCE diverses dispositions (clause de stage, validations de services, bonifications, décote, surcote, CPA, etc.)

DCE n° 2010-1740 du 30 décembre 2010

 

Art. 22, 23, 28, 29, 31, 33, 35, 38 de la loi retraites

D Relèvement âges d'ouverture du droit à pension et durées de services, limites d'âge des fonctionnaires et militaires

D n° 2011-754 du 28 juin 2011

Applicable au 1er juillet 2011.

Art. 42 de la loi retraites

D Taux de cotisation des fonctionnaires

D n° 2010-1749 du 30 décembre 2010 et n° 2011-192 du 18 février 2011

 

Art. 43 de la loi retraites

D Retraite anticipée carrières longue FP

DS n° 2010-1748 du 30 décembre 2010

 

Art. 44 et 52 de la loi retraites

DCE Retraite anticipée des parents de 3 enfants et bonification pour enfant

DCE n° 2010-1741 du 30 décembre 2010

 

Art. 45 de la loi retraites

DCE Minimum garanti (conditions d'âge et de durée)

DCE n° 2010-1744 du 30 décembre 2010

 

Art. 58 de la loi retraites

D - Cotisation sur un revenu estimé

D n° 2011-62 du 14 janvier 2011 modifiant le régime d'assurance vieillesse de base des professions libérales

 

Art. 59 de la loi retraites

D - Rachat des professions libérales exonérées

D n° 2010-1678 du 29 décembre 2010

 

Art. 79 de la loi retraites

DCE, D et arrêté retraite anticipée pénibilité et D facteurs de risques professionnels

DCE 2011-352 du 30 mars 2011 et DS 2011-353 du 30 mars 2011 retraite anticipée pénibilité

D 2011-354 du 30 mars 2011 facteurs de risques professionnels

Arrêté du 30 mars 2011 sur les lésions identiques

Circulaire du 18 avril 2011.

Applicable aux pensions prenant effet à compter du 1er juillet 2011.

Art. 90 de la loi retraites

D - extension RCO aux conjoints agricoles

D n° 2010-1782 du 31 décembre 2010 et DS n° 2010-1757 du 30 décembre 2010

 

Art. 93 de la loi retraites

D assurance veuvage

D 2010-1778 du 31 déc. 2010

Applicable aux demandes d'allocation de veuvage déposées à compter du 1er janvier 2011.

Art. 98 de la loi retraites

DCE IJ maternité dans le salaire annuel moyen

DCE 2011-408 du 15 avril 2011 IJ maternité dans le salaire annuel moyen

Applicable aux congés maternité débutant à compter du 1er janvier 2012.

Art. 98 de la loi retraites

DCE financement par le FSV des périodes assimilées IJ et du congé maternité dans le salaire annuel moyen

DCE 2011-370 du 4 avril 2011 Financement FSV - PA IJ et maternité dans le salaire annuel moyen

Financement à partir du 1er juillet 2010 pour les PA IJ et à partir du 1er janvier 2012 pour la prise en compte des IJ maternité dans le salaire annuel moyen.

 

D rachat Fillon

D 2010-1737 du 30 déc. 2010

Tarif abaissé, en conséquence du relèvement de l'âge de la retraite

 

DCE retraite progressive

DCE 2010-1730 du 30 déc. 2010

Pérennisation de la retraite progressive

 

D retraite progressive

D 2010-1739 du 30 déc. 2010

Pérennisation de la retraite progressive

 

D Régime spécial SNCF

D n° 2011-291 du 18 mars 2011

 
 

D Régime spécial RATP

D n° 2011-292 du 18 mars 2011

 
 

DCE Limite d'âge SNCF et RATP

DCE n° 2011-288 du 18 mars 2011

 
 

D Régime spécial IEG

D n° 2011-290 du 18 mars 2011

 
 

D Limite d'âge IEG

D n° 2011-289 du 18 mars 2011

 

Textes d'application pour lesquels la phase de signature est engagée

Art. 6 de la loi retraites

DCE et D nouveau droit à l'information retraite

Caisses saisies le 21 juin

Applicable au 1er janvier 2012. Consultation de la CNIL.

Art. 56 de la loi retraites

D Base légale de l'IRCEC (Art 56)

Examen en CA de la caisse le 23 juin

 

Art. 77 de la loi retraites

D pénalité accord pénibilité

Section sociale du Conseil d'État le 31 mai.

Applicable au 1er janvier 2012.

Art. 96 de la loi retraites

DCE AVPF charge d'un handicapé et travail à temps partiel

NOR : SCCSS1107555D

Mise au contreseing le 9 juin.

Applicable au 1er janvier 2012.

Art. 99 de la loi retraites

DCE et D pénalité accord égalité hommes-femmes

Section sociale du Conseil d'État le 31 mai.

Applicable au 1er janvier 2012.

 

DCE périodes assimilées chômage non indemnisé

NOR : ETSS 1110565D

Mise au contreseing le 11 juin.

Applicable aux périodes de chômage postérieures au 31 déc. 2010.

 

DCE RS Opéra national de Paris

Saisine de la caisse pour avis

 
 

DCE Limites d'âge Opéra national de Paris

Saisine de la caisse pour avis

 
 

DCE RS Comédie française

Saisine de la caisse pour avis

 
 

D Taux de cotisations Opéra national de Paris et Comédie française

Saisine de la caisse pour avis

 
 

DCE RS CRPCEN

Saisine CA de la CRPCEN le 22 juin

 

Textes d'application en cours de rédaction

Art. 7 de la loi retraites

RNCPS : extension aux complémentaires et au CLEISS

Publication envisagée en octobre 2011.

Sont à consulter : AGIRC/ARRCO et ensemble des contributeurs RNCPS.

Art. 8 de la loi retraites

EEIR : extension au contrôle du total des pensions des bénéficiaires du minimum vieillesse et de pensions de réversion

Publication envisagée en décembre 2011

Sont à consulter : AGIRC - ARRCO et ensemble des contributeurs RNCPS.

Art. 9 de la loi retraites

SNGC : les régimes adressent à la CNAV l'ensemble des informations concernant la carrière de leurs assurés

Groupe technique métier à constituer associant SD4, 3A, la CNAV et le GIP Info retraite. Projet de décret mi-2012.

 

Art. 10 de la loi retraites

D Versement à périodicité mensuelle de la pension

 

Entrée en vigueur 1er janvier 2013

Art. 45 de la loi retraites

DCE Minimum garanti (écrêtement)

   

Art. 45 de la loi retraites

D Minimum garanti (coordination écrêtement)

   

Art. 46 de la loi retraites

DCE diverses dispositions (dont traitement continué) CNRACL et FSPOEIE

   

Art. 50 de la loi retraite

DCE modifiant les règles de surcote dans la FP

Le Conseil d'État, lors de l'examen du DCE a invité le Gouvernement à clarifier la loi sur ce point, avant que les mesures réglementaires d'application ne soient publiées

Modification de la base légale nécessaire

Art. 53 de la loi retraites

D Autres mesures fonction publique (versement en capital des pensions FP)

   

Art. 57 de la loi retraites

DCE + D - Fusion RCO du RSI

En attente décisions RSI

 

Art. 60 de la loi retraites

D + arrêté Fiche individuelle de suivi pénibilité

   

Art. 86 de la loi retraites

DCE accords de branche et fonds national de soutien

 

Dispositif expérimental jusqu'au 31 décembre 2013.

Art. 88

D Comité scientifique pénibilité

 

Constitué avant le 31 mars 2011

Art. 92

D bâtiment indissociable du capital d'exploitation agricole pour le recours sur succession du minimum vieillesse

   

Art. 103 de la loi retraites

Aide embauche chômeurs seniors

 

Art. 104 de la loi retraites

Tutorat jeune-senior sur fonds formation professionnelle

 

Art. 109 de la loi retraites

DCE - Gestion pilotée PERCO

En cours de finalisation.

Art. 109 loi retraites (DSS associée)

 

D RS Banque de France

 

Publication prévue au début du 2e semestre. L'employeur a souhaité négocier avec les OS sur des mesures de contrepartie.

 

DCE Limites d'âge Banque de France

 

Publication prévue au début du 2e semestre. L'employeur a souhaité négocier avec les OS sur des mesures de contrepartie.

Source : Direction de la sécurité sociale

ANNEXE 2 :

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS

Ø Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) - Mme Pascale Coton, secrétaire générale adjointe, et M. Jean-Marie Blin, membre du conseil d'administration ARRCO

Ø Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) - M. François Joliclerc, secrétaire national, et M. Jean-Louis Besnard, conseiller national chargé des retraites

Ø Confédération générale du travail (CGT) - Mme Mijo Isabey, conseillère confédérale, responsable du dossier retraite, et M. Gilles Oberrieder, responsable retraites de la fonction publique

Ø FSU -  Mme Anne Féray, secrétaire nationale

Ø Confédération générale du travail - Force ouvrière (CGT-FO) - M. Philippe Pihet, secrétaire confédéral en charge des retraites, et M. Gérard Rivière, conseiller technique

Ø Association générale des institutions de retraite des cadres - Association des régimes de retraite complémentaire (AGIRC-ARRCO) - M. Gérard Ménéroud, président de l'ARRCO

Ø Groupement d'intérêt public Info Retraite - M.Gérard Ménéroud, président du conseil d'administration, et M. Jean-Marie Palach, directeur

Ø Direction de la sécurité sociale - M. Dominique Libault, directeur et M. Jean-Luc Izard, sous-directeur des retraites et des institutions de protection sociale complémentaire

Ø Fonds de réserve des retraites (FRR) - M. Yves Chevalier, membre du directoire

Ø Direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) : M. Nicolas de Saussure, chef du bureau des rémunérations des pensions et du temps de travail et Mme Sophie Lebret, adjointe au chef de bureau

Ø Direction générale du Trésor (DGT) - Mme Maya Atig, sous-directeur assurances, et M. Ivan Amosse, adjoint au chef de bureau - Bureau Marchés et produits d'assurance, sous-direction Assurances - Service du Financement de l'Économie

Ø Confédération française démocratique du travail (CFDT) - M. Yves Canevet, secrétaire confédéral chargé du dossier retraites et M. Philippe Le Clezion, secrétaire confédéral

Ø Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) - M. Pierre Mayeur, directeur, Mme Annie Rosès, directrice de la retraite et du contentieux, et M. Vincent Poubelle, directeur des statistiques et de la prospective

Ø Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) - M. Bertrand Martinot, directeur

Ø Direction générale du travail (DGT) M. Jean-Denis Combrexelle, directeur général, et M. Jean-Henri Pyronnet Adjoint à la Sous-directrice des Relations Individuelles et collectives du Travail.


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