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N° 3644

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 juillet 2011

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE

sur les décisions d’attribution des moyens budgétaires

(préparation du projet de loi de finances, appropriation de la LOLF par le Parlement)

ET PRÉSENTÉ

PAR MM. Michel BOUVARD, Jean-Pierre BRARD,

Thierry CARCENAC et Charles de COURSON

Députés.

——

INTRODUCTION 7

LISTE DES PROPOSITIONS DE LA MILOLF EN 2011 9

I.– MODERNISER LA PRÉPARATION DU BUDGET : UNE AMBITION CONTRARIÉE 13

A.– UN NOUVEAU PROCESSUS D’ALLOCATION DES MOYENS ADOSSÉ À UNE DÉMARCHE DE PERFORMANCE 13

1.– Une nouvelle architecture budgétaire pour une amélioration de la gestion publique 13

2.– Une rénovation du processus d’allocation des moyens et l’instauration d’un dispositif de performance au cœur de la préparation budgétaire 18

a) La révolution engagée par la LOLF 18

b) Un bilan acceptable mais perfectible 20

3.– Une tentative de rénovation du calendrier de préparation du budget 25

B.– DES CONTRAINTES BUDGÉTAIRES NOUVELLES 27

1.– Une trajectoire pluriannuelle de réduction des déficits devenue prédominante 27

a) Une contrainte budgétaire accentuée par la crise 27

b) Une modification sensible de la procédure de préparation du budget 28

c) Une contrainte budgétaire de nature à altérer l’ambition de la LOLF dans l’allocation des moyens 32

2.– Les conséquences de la RGPP sur l’allocation des moyens 33

a) Une réforme de l’administration sans véritable lien avec la LOLF 33

b) Des normes transversales et uniformes déconnectées de la logique de la performance 34

C.– LA PERSISTANCE DES VIEUX DÉMONS 35

1.– La pratique des arbitrages interministériels 35

a) Les améliorations liées à la LOLF 35

b) La persistance de pratiques anciennes 36

2.– Les « angles morts » de la LOLF 37

a) L’insuffisante intégration des opérateurs 38

b) La montée en puissance des dépenses fiscales 39

II.– RÉNOVER L’EXAMEN DES LOIS DE FINANCES : UNE DÉMARCHE PERFECTIBLE 41

A.– UN PARLEMENT MIEUX INFORMÉ ? 41

1.– La qualité perfectible des documents budgétaires 41

2.– Les questionnaires budgétaires 43

B.– DES PARLEMENTAIRES PLUS IMPLIQUÉS ? 44

1.– La LOLF : le pouvoir du Parlement renforcé ? 44

2.– La pratique et les limites des amendements de crédits 45

a) Éléments statistiques 45

b) Les amendements de crédits : un pouvoir parlementaire limité 48

3.– Très peu d’amendements ont modifié la nomenclature budgétaire 49

4.– La recevabilité financière des amendements au regard de l’article 40 de la Constitution 50

a) Une disposition constitutionnelle critiquée 50

b) Le contrôle de recevabilité exercé à l’Assemblée nationale 51

5.– Une organisation perfectible de l’examen des lois de finances 51

a) Le rôle des rapporteurs spéciaux et pour avis 51

b) Les débats en commissions élargies et en séance publique 52

III.– L’EXÉCUTION DES LOIS DE FINANCES : PROFESSIONNALISER LA GESTION, GÉNÉRALISER LA DÉMARCHE DE CONTRÔLE 55

A.– LA PROFESSIONNALISATION DU DIALOGUE DE GESTION POUR UNE ALLOCATION DES MOYENS MIEUX ÉCLAIRÉE DANS UN CONTEXTE BUDGÉTAIRE CONTRAINT 55

1.– Un dialogue de gestion de mieux en mieux structuré 55

2.– Quelle liberté de gestion face au mur du déficit ? 60

a) Une adaptation nécessaire de la gestion publique par la performance 60

b) L’évaporation de la fongibilité asymétrique 64

B.– LE CONTRÔLE PARLEMENTAIRE DE L’EXÉCUTION BUDGÉTAIRE : UN EXERCICE INSUFFISANT MALGRÉ DES POUVOIRS RENFORCÉS 65

1.– Les améliorations espérées 66

a) Des objectifs ambitieux 66

b) Des outils de contrôle renforcés 67

2.– Les difficultés rencontrées 74

a) Des mouvements de crédits réglementaires parfois contestables 74

b) Une implication aléatoire et insuffisante des parlementaires 74

c) Le rendez-vous manqué de la loi de règlement 77

3.– Les propositions 79

a) Inciter les parlementaires à exploiter tous les instruments à leur disposition en matière de contrôle et d’évaluation 79

b) Faire de la loi de règlement un rendez-vous incontournable 81

IV. CHORUS OU LE NON RETOUR SUR INVESTISSEMENT ? 85

1.– Chorus : un projet sensible, objet d’inquiétudes constantes 85

2.– Le mirage du retour sur investissement de Chorus ? 86

EXAMEN EN COMMISSION 89

ANNEXE : LISTE DES AUDITIONS DE LA MISSION 103

LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES DES PRÉSIDENTS DE COMMISSION DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE 104

LISTE DES ÉTUDES COMPARATIVES RELATIVES À DES PARLEMENTS ÉTRANGERS 105

INTRODUCTION

Parce que les mécanismes des finances publiques, et singulièrement la procédure budgétaire, reflètent fidèlement la nature des relations entre les pouvoirs publics, on a pu parler de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, la LOLF, comme de la nouvelle « Constitution financière de la France ».

L’un des principes fondateurs dont elle assure la mise en œuvre, le principe du consentement à l’impôt, consacré par l’article 14 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, traduit depuis l’origine la volonté du Parlement de s’affirmer face à l’exécutif.

Or, sous la Vème République, l’expression juridique du consentement à l’impôt, contenue à l’article 34 de la Constitution de 1958, a d’abord été précisée par l’ordonnance du 2 janvier 1959, qui constitue un pilier du parlementarisme rationalisé. Les prérogatives du Parlement ont ainsi été réduites en ce domaine pour remédier aux excès de la IVème République (1). En résultait un « sombre tableau dans lequel le Parlement se trouvait, désormais, dépossédé au profit de l’exécutif de la plus grande partie de ses pouvoirs et condamné à se reconvertir vers un contrôle budgétaire purement a posteriori à développer » (2).

Le processus d’élaboration de l’ordonnance de 1959 est en la traduction la plus évidente, puisque le Parlement n’y a jamais été associé tandis que le Conseil constitutionnel n’a pu se prononcer sur ce texte organique publié avant le début de son fonctionnement.

Plus encore, les résistances rencontrées pendant plus de 40 ans pour mettre en œuvre une réforme d’ensemble de la procédure budgétaire ont été telles que l’ordonnance de 1959 est devenue « un îlot juridique de stabilité » (3) ne connaissant que deux modifications mineures alors que, dans le même temps, la Constitution du 4 octobre 1958 subissait 15 révisions.

En bonne logique institutionnelle, lorsque les temps furent devenus favorable à la définition d’un nouvel équilibre, c’était au Parlement qu’il revenait d’engager la révolution culturelle en matière budgétaire et financière, tout en laissant à l’administration la responsabilité d’en assurer les travaux de mise en œuvre.

Pour faire aboutir la 36ème tentative de réforme de l’ordonnance organique de 1959, il aura fallu un environnement politique et des circonstances exceptionnellement favorables (4) : l’épisode de la « cagnotte budgétaire » à la fin de l’année 1999, illustrant les lacunes de l’ordonnance en matière de contrôle parlementaire, une détermination sans faille du Rapporteur général de l’Assemblée nationale, M. Didier Migaud, et du Président de la commission des Finances du Sénat, M. Alain Lambert, l’implication personnelle du Président de l’Assemblée nationale, devenu ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, M. Laurent Fabius, et enfin un consensus entre la majorité et l’opposition au Parlement sur la proposition de loi organique.

Révolution culturelle, mais aussi révolution tranquille, car la LOLF, adoptée sans révision de la Constitution, ne remet pas fondamentalement en cause en matière budgétaire et financière l’équilibre entre les pouvoirs établi en 1958 et 1962. La LOLF ne fait en effet que « desserrer » le « corset » du parlementarisme rationalisé (5) sans l’ôter. Si elle renforce les pouvoirs d’information et de contrôle du Parlement, la LOLF maintient le rôle prépondérant de l’exécutif en matière budgétaire dans un cadre nouveau. Ainsi modifie-t-elle « le sens de la dépense publique, en introduisant la performance au premier rang des critères de la gestion publique et en ouvrant aux ordonnateurs une large liberté d’action »(6).

L’exigence d’efficacité de la gestion publique voulue par la LOLF constitue désormais le moteur de la modernisation des relations entre les acteurs du débat budgétaire. Toutefois, l’acquisition de la culture du management, tout comme celle de la transparence et de la responsabilité, dépendent principalement de l’appropriation des outils de la LOLF, tant par le Parlement que par l’exécutif – Gouvernement et administrations.

À la veille du dixième anniversaire du vote de la LOLF, et cinq années après sa pleine entrée en vigueur, l’heure est venue de dresser un bilan critique de la façon dont les acteurs se sont saisis des opportunités qu’elle offre pour moderniser la préparation du budget, rénover l’examen des lois de finances et renforcer le contrôle budgétaire et financier dans le sens d’une plus grande efficacité de la dépense publique.

La mission d’information sur la mise en œuvre de la loi organique (MILOLF), constituée depuis le 15 janvier 2003 et composée d’un député représentant chacun des groupes de l’Assemblée nationale (7), souhaite ainsi en tirer des enseignements pour formuler des propositions qui pourront être utilement mises en œuvre dans le cadre de la prochaine législature, afin de faire vivre les grandes ambitions du législateur organique.

LISTE DES PROPOSITIONS DE LA MILOLF EN 2011

Proposition n° 1 : Comptabiliser les effectifs des opérateurs et des établissements à autonomie financière selon un niveau de fiabilité équivalent à celui des services de l’État et selon la même méthodologie (équivalents temps plein travaillés répartis par ministère).

Proposition n° 2 : Définir précisément la fonction des responsables de programmes par rapport aux autres acteurs de la programmation budgétaire. Encourager leur stabilité. Poursuivre l’harmonisation des indicateurs de gestion concernant les fonctions support.

Proposition n° 3 : Justifier systématiquement la hiérarchisation des indicateurs et notamment la présentation des « indicateurs de missions » dans les projets annuels de performances.

Proposition n° 4 : Fusionner les conférences de performance et les conférences de répartition au moment de la préparation du budget ou, à tout le moins, réunir les mêmes interlocuteurs aux deux types de conférences.

Proposition n° 5 : Procéder aux redéploiements de crédits au sein d’une mission, en cas de charge nouvelle, en tenant compte des résultats des gestionnaires au regard des objectifs de performance fixés dans les PAP. Justifier systématiquement ces mouvements de crédits devant les commissions des finances.

Proposition n° 6 : Adapter la programmation triennale avec les réformes structurelles.

Proposition n° 7 : Stabiliser la maquette budgétaire sur la période de la programmation pluriannuelle des crédits (budget triennal) au moment du vote de la loi de programmation.

Proposition n° 8 : Synchroniser les périodes visées dans les contrats de performance des opérateurs avec la programmation triennale.

Proposition n° 9 : Encadrer dans la loi l’octroi de garanties par des opérateurs.

Proposition n° 10 : Procéder à une évaluation systématique des dépenses fiscales chaque année de la législature par cinquième et procéder aux modifications législatives nécessaires dans le cadre de la plus prochaine loi de finances.

Proposition n° 11 : Évaluer et justifier dans les documents budgétaires la pertinence des cinq dépenses fiscales les plus importantes de chaque programme.

Proposition n° 12 : Instaurer un groupe de travail Parlement – ministère du Budget pour définir les éléments des documents budgétaires réellement pertinents.

Proposition n° 13 : Dématérialiser l’envoi des documents budgétaires au Parlement afin de réaliser des économies et de respecter les délais de transmission fixés par la LOLF.

Proposition n° 14 : Mettre en ligne les documents budgétaires et modifier l’alinéa 2 de l’article 39 de la LOLF pour qu’ils soient transmis impérativement huit jours avant l'examen, par l'Assemblée nationale, en première lecture, des recettes ou des crédits auxquels ils se rapportent.

Proposition n° 15 : Favoriser la coordination entre les rapporteurs pour avis et les rapporteurs spéciaux avant l’envoi des questionnaires parlementaires. Étudier la généralisation de l’envoi préalable au Parlement des réponses à un socle commun de questions préalablement défini avec les ministères.

Proposition n° 16 : Justifier, dans l’exposé des motifs des amendements de crédits, les modifications proposées au regard du dispositif de performance.

Proposition n° 17 : Harmoniser les règles de recevabilité financière des amendements entre l’Assemblée nationale et le Sénat.

Proposition n° 18 : Présenter un bilan de la mise en œuvre de l’article 40 à la fin de chaque législature.

Proposition n° 19 : Recenser et diffuser les « bonnes pratiques » ministérielles liées à la mise en œuvre de la démarche de performance et du contrôle de gestion.

Proposition n° 20 : Achever, dans les meilleurs délais, la révision du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique afin de décliner au niveau des BOP et des UO les outils de la LOLF et la programmation budgétaire pluriannuelle.

Proposition n° 21 : Rendre enfin opérationnelle et compréhensible la comptabilité d’analyse des coûts et bâtir un système de comptabilité analytique.

Proposition n° 22 : Poursuivre de façon raisonnée la réduction du nombre de BOP, en supprimant les BOP de taille trop réduite et en limitant le nombre de BOP centraux.

Proposition n° 23 : Prohiber, par une circulaire du Premier ministre, les pratiques de « fléchage des crédits » déconcentrés depuis le niveau central.

Proposition n° 24 : Formaliser au sein des chartes de gestion ministérielles les « bonnes pratiques » de délégation des crédits en début d’année et de re-programmation en cours d’exercice.

Proposition n° 25 : Systématiser l’envoi de lettres de mission à tous les responsables de programme lors de leur nomination et les transmettre simultanément aux rapporteurs spéciaux et rapporteurs pour avis.

Proposition n° 26 : Étendre les expérimentations, au sein des ministères volontaires, d’une contractualisation entre les responsables de programme et de BOP garantissant un « retour » vers les agents d’une partie des gains de productivité.

Proposition n° 27 : Généraliser la prime de fonctions et de résultats à l’ensemble des catégories d’agents et expérimenter un dispositif complémentaire de rémunération collective des agents en fonction de la performance des BOP.

Proposition n° 28 : Mettre à profit la révision du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 pour réanimer la fongibilité asymétrique dans une perspective pluriannuelle, en particulier en facilitant les reports des crédits économisés d’un exercice à l’autre.

Proposition n° 29 : Faire une plus large place aux députés non membres de la commission des Finances dans le cadre des travaux de la mission d’évaluation et de contrôle.

Proposition n° 30 : Veiller à une harmonisation entre les travaux de la mission d’évaluation de contrôle et ceux du Comité d’évaluation et de contrôle.

Proposition n° 31 : Valoriser de façon systématique les travaux de contrôle réalisés par les rapporteurs spéciaux et pour avis, notamment à travers une communication institutionnelle sur la conduite et les résultats de ces travaux.

Proposition n° 32 : Réserver une semaine dans l’ordre du jour du mois de juin à l’examen exclusif de la loi de règlement. Créer un groupe de travail en vue d’en définir les modalités d’examen en commissions et en séance.

Proposition n° 33 : Transmettre au Parlement les rapports annuels de performances, sinon au moment où ils sont adressés à la Cour des comptes, du moins dans le courant du mois de mai.

Proposition n° 34 : Améliorer le contenu des RAP en se concentrant sur la justification des écarts par rapport à la prévision, tant sur l’utilisation des crédits que sur la réalisation des objectifs de performance.

Proposition n° 35 : Présenter les écarts entre la consommation réelle des crédits en année n et celle des années n-1 et n-2.

Proposition n° 36 : Évaluer systématiquement les responsables de programme au regard des résultats de l’année précédente et transmettre ces évaluations aux rapporteurs spéciaux et pour avis avant l’examen de la loi de règlement.

Proposition n° 37 : Favoriser la présence des députés en réunions de commission et en séance lors de l’examen du projet de loi de règlement.

Proposition n° 38 : Systématiser l’audition des ministres responsables des missions ou des programmes lors de l’examen de la loi de règlement pour qu’ils justifient les écarts constatés en exécution.

*

* *

I.– MODERNISER LA PRÉPARATION DU BUDGET : UNE AMBITION CONTRARIÉE

Le 1er janvier 2006, la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 entrait pleinement en application et avec elle le nouveau mode d’allocation des moyens associé à une toute nouvelle démarche de performance.

Si la LOLF a ainsi révolutionné le processus d’élaboration du budget dans le sens de l’amélioration de la gestion publique (A), les contraintes budgétaires auxquelles la France est de plus en plus confrontée (B) semblent parfois altérer les avancées de la LOLF en faisant ressurgir certains « vieux démons » (C).

A.– UN NOUVEAU PROCESSUS D’ALLOCATION DES MOYENS ADOSSÉ À UNE DÉMARCHE DE PERFORMANCE

1.– Une nouvelle architecture budgétaire pour une amélioration de la gestion publique

Par opposition à la règle de spécialisation des crédits en chapitres, regroupés en sections, parties et titres présentant en pratique les dépenses principalement par nature (article 7 de l’ordonnance de 1959), l’article 7 de la LOLF définit un nouveau cadre budgétaire par lequel l’autorisation de dépenses est fondée sur une présentation des crédits, selon la destination des dépenses au sein de missions et de programmes.

Premier niveau de regroupement des crédits qui ne peut être créé que par une « disposition de loi de finances d’initiative gouvernementale », la mission relève « d’un ou plusieurs services d’un ou plusieurs ministères » et « comprend un ensemble de programmes concourant à une politique définie ».

Deuxième niveau de regroupement des crédits, le programme est l’unité budgétaire de base à laquelle s’applique le principe de spécialité déterminant le niveau limitatif des crédits. Il constitue le cadre opérationnel d’exécution du budget et est d’ailleurs décliné, pour l’exécution des lois de finances, en « budgets opérationnels de programme » (BOP), eux-mêmes subdivisés en « unités opérationnelles » (UO). À la différence des missions, les programmes ne peuvent relever que d’un seul ministère afin d’identifier un responsable unique de la gestion des crédits chargé de rendre compte de leur utilisation.

Troisième et dernier niveau, les actions précisent de façon indicative la destination des crédits de chaque programme.

Pour chacun de ces trois niveaux, et quelle que soit la nature des dépenses concernées, les crédits sont votés, à la fois en autorisations d’engagement (capacité d’engager juridiquement l’État) et en crédits de paiement (volume de fonds nécessaire dans l’année pour couvrir les engagements pris ou à prendre).

Cette distinction entre autorisations d’engagement (AE) et crédits de paiement (CP) favorise une vision pluriannuelle de la dépense et donne aux gestionnaires de programmes une nouvelle visibilité à moyen terme (couverture en CP d’engagements passés, ouverture d’AE ne donnant pas lieu à des paiements immédiats, etc.).

La mission, qui doit nécessairement être composée d’au moins deux programmes (8), constitue l’unité de vote au sein de laquelle est appréciée la notion de charge au sens de l’article 40 de la Constitution. Les parlementaires ont donc la possibilité de procéder à redéploiements de crédits entre les programmes d’une même mission mais ne peuvent le faire entre les missions (9).

Comprenant à l’origine 47 missions, 150 programmes et 8 dotations (10), la nomenclature budgétaire issue de la LOLF est donc largement simplifiée par rapport aux 850 chapitres de l’ordonnance de 1959. Elle a évolué au fil des années sans pourtant connaître de profonds bouleversements puisque dans la loi de finances initiale pour 2011, on dénombre 49 missions, 173 programmes dont 2 programmes de dotations (11).

Le principe de spécialité s’applique, on l’a dit, au niveau du programme, de sorte que, sous réserve des règles particulières relatives aux crédits de personnel (cf. infra), les responsables de programmes disposent d’une grande liberté de redéploiement de crédits au sein d’un programme. Ils peuvent ainsi affecter des moyens prévus pour telle action à telle autre action ou encore redéployer les crédits relatifs aux dépenses de fonctionnement à des opérations d’investissement et vice versa ce qui était totalement impossible sous le régime de l’ordonnance de 1959. Cette conception inédite de la fongibilité des crédits suppose que les dépenses communes de chaque ministère (rémunérations, dépenses de fonctionnement, entretien des locaux…) soient ventilées en fonction des objectifs assignés aux politiques menées. Ces modalités de gestion donnent ainsi à l’État une souplesse qui dépasse celle réservée aux collectivités territoriales, soumises à une séparation stricte entre la section de fonctionnement et la section d’investissement.

Plus encore, l’introduction d’un plafond d’autorisation d’emplois (PAE) rémunérés par l’État et la règle dite de « fongibilité asymétrique » introduite par le III de l’article 7 de la LOLF offrent aux gestionnaires de programmes de nouvelles perspectives tout en limitant la dérive des dépenses de personnel, qui compte tenu de leur inertie et leur poids dans le budget général (près d’un tiers des dépenses) engagent l’avenir des finances publiques sur plusieurs dizaines d’années.

La fongibilité asymétrique permet ainsi aux gestionnaires de programmes de procéder à des redéploiements de crédits, notamment de personnel, vers d’autres types de dépenses (fonctionnement, investissements, intervention…) mais interdit en revanche l’accroissement du plafond de dépenses de personnel défini pour chaque programme budgétaire en loi de finances.

Cette règle est complétée par l’instauration d’un plafond d’autorisation d’emplois par ministère, qui porte sur le stock des emplois, en réponse à la critique du dispositif de 1959 fondé sur une logique de flux. En effet, selon l’article 43 de l’ordonnance de 1959, le Parlement autorisait très précisément les dépenses de personnel (suppression ou créations de dépenses de personnel autorisé pour chaque chapitre, par catégories, corps et grades). Par conséquent, le Gouvernement ne pouvait que procéder, en cours de gestion, à des transformations d’emplois par décret, dans la limite des crédits ouverts. L’effet pratique a été une rigidité certaine, d’où une augmentation du nombre d’agents contractuels « sur crédits » et la pratique dite des « surnombres », gagés ou non par des vacances de postes. Ces contournements de l’autorisation parlementaire ont introduit un véritable décalage entre les emplois réels et les emplois budgétaires, ôtant ainsi au Parlement – mais aussi au Gouvernement – toute connaissance précise des effectifs de l’État.

L’instauration d’un plafond d’autorisation d’emplois spécialisé par ministère (et non par mission budgétaire), calculé en équivalent temps plein travaillé (ETPT), indépendamment des catégories d’emplois (A, B ou C), a permis de rétablir le sens de l’autorisation parlementaire en donnant une information précise sur les effectifs réels rémunérés par chaque ministère quel que soit le statut (titulaires ou contractuels). Il a également eu pour effet d’assouplir la gestion des effectifs en laissant à chaque ministre la liberté de procéder à des redéploiements au sein du plafond qui lui est attribué. Chacun peut désormais modifier en cours d’exercice ses prévisions d’emplois en changeant l’affectation (entre les différents services) ou la répartition statutaire (entre les catégories A, B et C).

Indispensable à la bonne information du Parlement, cette règle a été complétée, à l’initiative de la MILOLF, par l’article 64 de la loi de finances initiale pour 2008 qui introduit, à compter du 1er janvier 2009, un PAE global des opérateurs de l’État. Dans le même sens, l’article 76 de la loi de finances pour 2009 a introduit un plafond d’emploi des agents de droit local employés par les établissements à autonomie financière (EAF) (12).

Il convient toutefois de souligner trois différences majeures entre le PAE des opérateurs et des EAF par rapport à celui applicable aux ministères, ce qui rend les comparaisons difficiles et le contrôle du Parlement limité. D’abord, le PAE des opérateurs et des EAF est exprimé en équivalent temps plein (ETP) et non en ETP travaillés (13). D’autre part, le plafond des opérateurs et des EAF n’est pas décliné par ministère mais par mission et programme dans les documents budgétaires. Enfin et surtout, de nombreux emplois des opérateurs ne sont pas recensés sous le PAE compte tenu de la souplesse de gestion nécessaire aux opérateurs, en particulier aux établissements publics industriels et commerciaux, dont l’évolution de l’activité peut impliquer une adaptation temporaire des effectifs. Trois catégories d’emplois sont ici visées :

– des emplois correspondant à un contrat de travail limité dans le temps, à condition qu'ils soient intégralement financés par des ressources propres de l'opérateur ;

– des emplois correspondant à des contrats aidés, y compris lorsqu'ils sont financés grâce à des subventions de l'État ;

– de l'ensemble des emplois financés sur ressources propres des universités ayant opté pour le régime de « responsabilités et compétences élargies en matière budgétaire et de gestion des ressources humaines » (14). Ces dernières bénéficient d’ailleurs d'une plus grande souplesse de gestion encore que tous les opérateurs : tous les emplois « autofinancés », y compris ceux correspondant à des contrats à durée indéterminée, sont exclus du plafond applicable aux opérateurs de la mission Recherche et enseignement supérieur.

L’information du Parlement reste donc imparfaite et la maîtrise de l’évolution des dépenses de personnel des opérateurs compliquée (15).

À cela s’ajoutent deux difficultés : la liste des opérateurs évolue d’une année sur l’autre selon le bon vouloir du Gouvernement et les changements de périmètre, liés au processus de décentralisation, rendent ardue l’appréciation de l’évolution des emplois d’une année sur l’autre.

La MILOLF considère donc que le suivi des emplois des opérateurs (et dans une moindre mesure des EAF) est de plus en plus difficile alors même que, comme on le verra, le contexte budgétaire actuel appelle à une plus grande vigilance quant à l’évolution des dépenses publiques.

Par conséquent, la Mission réitère ses propositions relatives aux opérateurs (16) et notamment celle selon laquelle l’annexe « jaune » qui leur est consacrée présente de façon harmonisée l’ensemble des emplois des opérateurs (sous et hors plafond) exprimés en ETPT et déclinés par ministère. La même remarque vaudra pour la nouvelle annexe jaune et le plafond d’emplois consacrés aux autorités publiques indépendantes et aux autorités administratives indépendantes dont les effectifs ne sont pas compris dans un plafond d’emplois(17).

Proposition n° 1 : Comptabiliser les effectifs des opérateurs et des établissements à autonomie financière selon un niveau de fiabilité équivalent à celui des services de l’État et selon la même méthodologie (équivalents temps plein travaillés répartis par ministère).

Au-delà de ces remarques, la MILOLF rappelle que la nouvelle architecture budgétaire issue de la LOLF, fondée sur la globalisation des crédits au sein d’enveloppes fongibles, constitue l’un des principaux outils de la modernisation de la gestion publique. En effet, la liberté laissée aux gestionnaires de programmes s’est avérée essentielle depuis 2006 pour mettre en œuvre les différentes réformes de l’État, aussi bien en administration centrale, qu’au niveau territorial (voir infra).

Même si elle restreint sensiblement le degré de précision de l’autorisation de la dépense par le Parlement(18), elle n’a pas vocation à laisser le Parlement donner une sorte de « chèque en blanc » aux gestionnaires car la contrepartie de ce nouveau mode de gestion publique est le renforcement du contrôle de l’action de l’administration par le Parlement. Avec la LOLF, les responsables de programmes doivent justifier, a priori, de leurs demandes de crédits et s’engager sur des objectifs dans les « projets annuels de performances » (PAP) puis en rendre compte dans les « rapports annuels de performances » (RAP) annexé au projet de loi de règlement. C’est toute la logique de l’allocation des moyens et de la gestion par la performance.

2.– Une rénovation du processus d’allocation des moyens et l’instauration d’un dispositif de performance au cœur de la préparation budgétaire

L’ambition de la LOLF est de faire passer l’État d’une logique de moyens à une logique de résultats fondée sur la performance. Ce changement d’optique doit permettre une amélioration de la gestion publique en obligeant les services de l’administration à justifier leurs demandes de crédits en s’engageant dans une démarche de performance, abandonnant ainsi une vision purement quantitative de leurs moyens budgétaires.

a) La révolution engagée par la LOLF

Dans leur rapport sur la mise en œuvre de loi organique relative aux lois de finances présenté en septembre 2005, MM. Alain Lambert et Didier Migaud, rappelaient l’objectif initial de la LOLF et le chemin parcouru de la manière suivante : «Une réforme qui, née il y a cinq ans, d'un consensus politique, mobilise aujourd’hui sur le terrain l'ensemble des administrations autour d'un but unique : doter notre pays d'une nouvelle gestion publique plus efficace, plus performante» (19).

Avant la LOLF, les pouvoirs publics – Gouvernement et Parlement – s'intéressaient davantage au volume des moyens consacrés à une politique qu'aux résultats concrets obtenus grâce à ces moyens. Désormais, les discussions budgétaires sont plus politiques : elles portent non seulement sur les moyens, mais aussi sur l'efficacité des dépenses, par rapport à des objectifs définis pour chaque programme. En s’inscrivant dans une logique de pilotage par la performance – ou en d’autres termes, en cherchant à améliorer l'efficacité de la dépense publique en orientant la gestion vers des résultats prédéfinis – l’administration publique s’est engagée à réformer sa culture, ses modes de fonctionnement et ses méthodes de travail.

La LOLF a ainsi créé de nouveaux outils pour mesurer de façon objective la performance publique.

Dans les « projets annuels de performances » annexés au projet de loi de finances, à chaque programme, sont désormais associés des objectifs, définis au niveau national et déclinés en objectifs opérationnels pour les services et les opérateurs mettant en œuvre les politiques. Pour chaque objectif, des indicateurs mesurent les résultats des actions menées. Ces indicateurs sont accompagnés de valeurs cibles, sur lesquelles les responsables de programmes s’engagent pour accroître la performance de leurs actions. Afin de répondre aux attentes de tous
– citoyens, usagers et contribuables – l’administration publique s’est fixée trois types d’objectifs, répondant à des critères socio-économiques (bénéfice attendu de l’action de l’État pour le citoyen et la collectivité), de qualité de service (qualité attendue du service rendu à l’usager) et d’efficience de gestion (gains de productivité attendus dans l’utilisation des moyens employés par l’administration).

De plus, les crédits doivent désormais être présentés avec une « justification au premier euro » (JPE), qui est une explication des crédits demandés, par des déterminants physiques (nombre d’usagers, volume d’activité, etc.) et financiers (coûts unitaires, masse salariale, etc.). Cette approche en base zéro oblige à un dialogue enrichi entre les gestionnaires et leurs tutelles sur les priorités et les besoins budgétaires de l’année et intervient clairement en réaction contre l’ancienne pratique des « services votés » sous l’empire de l’ordonnance de 1959.

Pour certaines politiques interministérielles présentant de forts enjeux budgétaires et de pilotage par la performance, des documents de politique transversale (DPT) ont été conçus après la LOLF afin de présenter des objectifs coordonnés entre les programmes concourant à une politique transversale comme, par exemple, la sécurité routière. Dans la même logique, les annexes générales « jaunes » présentent une vision d’ensemble des politiques publiques, pouvant concerner plusieurs missions ou programmes comme l’annexe relative aux « opérateurs de l’État » ou à l’« effort financier de l’État en faveur des collectivités territoriales ».

Enfin, la LOLF a profondément modifié le cadre comptable de l’État en vue d’une plus grande transparence des comptes et d’une meilleure maîtrise des coûts. L’article 27 de la LOLF a ainsi introduit une comptabilité à trois dimensions pour l’État :

– la comptabilité budgétaire (article 28) constitue un système d’information relatif à l’exécution des opérations budgétaires. Ces dernières sont enregistrées selon un système dit de « caisse », c'est-à-dire selon une logique de trésorerie qui consiste à enregistrer les opérations au moment de leur encaissement ou décaissement ;

– la comptabilité générale de l’État, à l’image de celle des entreprises mais néanmoins adaptée pour tenir compte des spécificités de l’État (article 30) : il s’agit d’une comptabilité fondée sur la constatation des droits et obligations de l’État qui retrace les flux mais également son patrimoine (immobilisations, dettes et créances, stocks…) au sein d’un nouveau document intitulé « compte général de l’État » (CGE). Elle permet ainsi de dresser un bilan de l’État ainsi que son résultat tout en précisant ses engagements hors bilan. Cette comptabilité est dite d’exercice dans la mesure où les opérations sont prises en compte au titre de l’exercice auquel elles se rattachent, indépendamment de leur date d’encaissement ou de décaissement ;

– enfin, la comptabilité d’analyse des coûts (ou CAC) est censée apporter au Parlement une information complémentaire sur les ressources effectivement mobilisées par le programme pour atteindre ses objectifs (article 27 de la LOLF). Les dépenses des programmes et actions de soutien sont réparties par programme et action de politique publique. Il en est de même des actions concernant des services relevant de plusieurs programmes. À cette fin, un schéma de déversement indique les liens entre les actions du programme et d’autres programmes pour rendre la destination effective de ces dépenses plus lisible. À partir des dépenses directes, une première ventilation est opérée entre les actions du même programme. Une seconde ventilation s’effectue entre les programmes de la même mission ou de missions différentes. Ces ventilations doivent permettre de donner une évaluation des dépenses complètes concourant à la mise en œuvre des politiques publiques. Cette évaluation est présentée ex ante pour les crédits dans les projets annuels de performances et ex post dans les rapports annuels de performances pour la dépense exécutée. La notion de dépense étant toutefois insuffisante pour donner une image fidèle de la situation financière de l’État, les coûts complets (assis sur les données de charges de la comptabilité générale) sont ensuite évalués et analysés dans les RAP. Ils intègrent le rattachement des opérations comptables à l’exercice, les variations de stocks, les dotations aux provisions, etc.

La Mission constate néanmoins l’insuffisance du système d’information financière de l’Etat pour rendre compte de manière compréhensive et utile de la comptabilité d’analyse des coûts à ce jour.

b) Un bilan acceptable mais perfectible

L’un des succès les plus importants de la LOLF, après cinq ans de mise en œuvre opérationnelle, réside sans aucun doute dans la diffusion de la culture de la performance et du « management » au sein de l’administration grâce à la nouvelle chaîne de responsabilités qu’elle impose.

Maillon central de la nouvelle gestion publique, à la charnière entre responsabilité politique et responsabilité de gestion, le responsable de programme (RPROG) est placé sous l’autorité du ministre, et participe à l’élaboration des objectifs stratégiques du programme dont il a la charge : il est le garant de sa mise en œuvre opérationnelle et s’engage sur la réalisation des objectifs associés. Il délègue ensuite la gestion de son programme en constituant des budgets opérationnels de programme (BOP), placés sous l’autorité de responsables identifiés (RBOP). De la même manière, ces derniers gèrent une enveloppe globale de moyens (crédits et personnels) et s’engagent sur des objectifs opérationnels à atteindre puis répartissent les moyens dont il dispose entre les différentes unités opérationnelles (UO) qui mettent en œuvre les activités définies dans le BOP sur le terrain, au plus près des usagers.

Le succès de la démarche de performance repose donc très largement sur la volonté et la capacité d’implication du responsable de programme à une multitude de niveaux : développement d’une vision stratégique ; participation aux conférences de performance préparatoires à l’élaboration du projet de loi de finances ; animation du dialogue de gestion avec les responsables de BOP ; analyse des résultats et mise en place de plans d’action ; appropriation des documents budgétaires soumis au Parlement etc. À cet égard, les responsables de programmes auditionnés par la Mission semblent bien assumer ce rôle même s’il apparaît que nombre d’entre eux sont également secrétaires généraux du ministère et donc responsables des programmes supports, qui en tant que tels leur donnent des marges de manœuvre substantielles par rapport à un responsable de programme « isolé ».

Rappelons en effet que les responsables de programme peuvent parfois rencontrer des difficultés à trouver leur place entre les directeurs des ressources humaines (DRH), les directeurs des affaires financières (DAF) et les secrétaires généraux de ministère. Le secrétariat général assume les fonctions support, pivot de la gestion des directions d’administration centrale. Il est donc seul ordonnateur principal délégué du ministre, et à ce titre responsable de la comptabilité du ministère et des arbitrages budgétaires sous l'autorité du ministre. De plus, les DAF et les DRH dans chaque ministère préparent, en lien avec les responsables de programme, les décisions et arbitrages dans le domaine budgétaire. Ils pilotent, pour le premier, l’analyse des coûts, coordonnent et consolident les comptes rendus d’exécution des responsables de programme et organisent le contrôle interne et l’audit, et pour le second exerce un contrôle direct sur la gestion des emplois et des carrières des agents sous la responsabilité du RPROG. Ils sont aussi les interlocuteurs attitrés des autorités chargées du contrôle financier et du département comptable ministériel.

En pratique, on dénombre environ 80 responsables de programme pour le budget général de l’État : 94 % sont des directeurs d’administration centrale, secrétaires généraux ou chefs des services à compétence nationale (par exemple, le RPROG du programme Enseignement scolaire public du 1er degré et Vie de l’élève est le directeur général de l’enseignement scolaire – « DGESCO » – M. Jean-Michel Blanquer) et 55 % d’entre eux ont la responsabilité d’un seul programme (par exemple, le RPROG du programme Patrimoine est le directeur général des Patrimoines – M. Philippe Belaval).

La MILOLF constate à cet égard que l’expérience du RPROG, et par conséquent l’absence de « turn over » trop fréquent, est un atout majeur pour établir des relations de confiance tout au long de la chaîne de responsabilité lorsque le RPROG n’exerce aucune autre fonction de direction support. Elle facilite notamment l’instauration d’un véritable dialogue entre tous les acteurs de la performance, en amont de la négociation des crédits avec la direction du Budget, pour s’accorder sur les moyens budgétaires et les priorités qu’il conviendra de défendre dans les procédures d’arbitrage (voir infra).

La Mission estime au surplus que la fonction de responsable de programme doit être définie plus précisément, de manière en particulier à ce que soit précisée son articulation avec celle des autres acteurs de la programmation, du pilotage et du suivi budgétaires, notamment les secrétaires généraux des ministères.

Proposition n° 2 : Définir précisément la fonction des responsables de programmes par rapport aux autres acteurs de la programmation budgétaire. Encourager leur stabilité.

Enfin, la Mission regrette que certains RPROG ne puissent assumer le rôle qui leur est en principe dévolu par la LOLF, soit qu’ils n’exercent qu’une autorité purement formelle sur des crédits ne dépendant pas de leur champ de compétences (20), soit que la politique publique dont ils ont la responsabilité soit financée par des dispositifs extrabudgétaires (21), soit qu’ils ne disposent d’aucun levier pour parvenir aux objectifs affichés (22).

S’agissant de la mise en œuvre du dispositif de performance, la MILOLF constate que le nombre d’objectifs et d’indicateurs de performance a continûment et fortement diminué depuis 2006 – les moins pertinents ayant été opportunément supprimés.

ÉVOLUTION DU NOMBRE D’OBJECTIFS ET D’INDICATEURS DE PERFORMANCE
DU BUDGET GÉNÉRAL

 

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Objectifs

627

569

551

497

442

424

Indicateurs

1 284

1 173

1 151

1 057

929

894

Si la Mission ne peut que soutenir une telle démarche, elle insiste néanmoins pour la voir poursuivie avec discernement, en concertation avec le Parlement. En sens inverse, lorsque certains aspects de la dépense budgétaire sont mal évalués ou ignorés, la Mission juge souhaitable la création de nouveaux indicateurs. Les deux démarches ne sont d’ailleurs pas exclusives l’une de l’autre : un nombre pléthorique d’indicateurs associés à un programme n’est pas nécessairement la garantie d’une couverture de l’ensemble des crédits du programme (23). En tout état de cause, la mission réitère son souhait de favoriser les comparaisons entre indicateurs, démarche engagée par le ministère du Budget depuis les PAP 2010 à travers la standardisation des indicateurs relatifs à certaines fonctions support (24). Il convient donc de généraliser cette méthode à l’ensemble des fonctions support.

De la même manière, si la Mission ne peut que souhaiter une meilleure appropriation des objectifs et des indicateurs par les différents acteurs de la LOLF, elle constate que la démarche du Gouvernement, fondée sur la circulaire budgétaire du 23 avril 2009, consistant à mettre en avant, en les érigeant au niveau de la mission, des « indicateurs emblématiques de l’action de l’État » – choisis parmi les indicateurs existant – et « dont le suivi relève de l’autorité politique », n’est pas dénuée de risques. Elle peut conduire à un découplage regrettable au sein des indicateurs de performance : d’un côté, les ministres accapareraient les indicateurs les plus aisément susceptibles d’amélioration et se prêtant à une large communication (soit, le plus souvent, des indicateurs d’efficacité socio-économique) ; d’un autre côté, l’ensemble des autres indicateurs, dont seul le responsable de programme serait comptable, pourrait apparaître comme relégués au « second rang », au risque de rendre leur suivi moins prioritaire et de démotiver l’ensemble des parties prenantes alors que l’enjeu budgétaire serait sensiblement plus important.

L’exemple des trois indicateurs principaux choisis en 2010 pour la mission Écologie, développement et aménagement durables à cet égard frappant. S’ils portent sur des enjeux emblématiques comme la prévention des risques accidentels et des pollutions, la gestion des déchets, la santé publique, ou la protection des milieux, ils ne représentent qu’environ 2 % des dépenses de la mission !

Afin d’éviter un tel écueil, la Mission réaffirme son attachement au dispositif de performance propre à la LOLF qui, on l’a vu, consiste à couvrir l’ensemble des dépenses de l’État. De tels indicateurs « emblématiques » devraient donc être choisis avec soin par les ministères, sous le regard critique du Parlement.

Proposition n° 3 : Justifier systématiquement la hiérarchisation des indicateurs et notamment la présentation des « indicateurs de missions » dans les projets annuels de performances. Poursuivre l’harmonisation des indicateurs de gestion concernant les fonctions support.

S’agissant du respect de l’impératif de justification au premier euro des crédits, la MILOLF fait siennes les observations de la Cour des comptes portant sur la gestion budgétaire 2010 selon lesquelles : « La JPE sort difficilement d’une logique de reconduction – ou non – des dépenses de l’exercice précédent. Ce constat vaut par exemple pour la mission Action extérieure de l’État pour laquelle les dépenses d’intervention sont constituées par les contributions internationales obligatoires, ou encore pour la mission Sécurité. La difficulté à entrer dans l’approche de justification au premier euro se rencontre aussi lorsque les dépenses relèvent d’une évaluation imprécise tant leurs déterminants sont aléatoires : tel est le cas par exemple, pour la mission Justice, de l’aide juridictionnelle ou encore des frais de justice ; ou encore pour la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur des aides sociales aux étudiants, pour lesquelles la prévision du nombre de bourses sur critères sociaux (dispositif à guichet ouvert) reste délicate et dépendante de facteurs exogènes (situation économique) » (25).

S’agissant de l’articulation entre l’allocation des moyens et le dispositif de performance, la Mission regrette que malgré ses nombreuses recommandations(26), la performance ne soit quasiment jamais prise en considération pour « éclairer » les choix du Gouvernement dans l’allocation des dotations budgétaires au moment du projet de loi de finances, alors qu’elle l’est de plus en plus dans la déclinaison des moyens du RPROG vers les RBOP (voir infra).

Rappelons à cet égard que dénoncer l’insuffisante articulation entre les deux procédures ne consiste en aucun cas à plaider en faveur de l’établissement d’un lien « automatique » faisant dépendre le niveau des dotations budgétaires des résultats enregistrés par les indicateurs de performance. Une telle automaticité n’est pas concevable, ne serait-ce que parce qu’elle conduirait à méconnaître les futures activités à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs de l’année suivante. Elle n’est pas davantage souhaitable, l’absence de réalisation des objectifs pouvant justifier tout à la fois une diminution des moyens (gaspillage des crédits), leur augmentation (insuffisance des crédits) ou leur maintien (mesures correctrices à enveloppe constante). C’est la raison pour laquelle « Peu de pays pratiquent une budgétisation reposant directement sur les performances recherchées ou obtenues : le niveau de dépenses ne dépend pas des objectifs de production et de résultats pas plus que la performance ne constitue généralement un critère d’affectation des fonds. » (27)

Pour autant, entre cette illusoire automaticité et la quasi-totale déconnexion actuelle, une voie moyenne existe certainement, consistant en une simple prise en compte, au stade de la discussion et de la décision budgétaire, des performances constatées. En effet, dans de nombreux pays, « les données de performance sont aujourd’hui utilisées dans le processus de décision aboutissant aux projets de lois de finances (…) et la gestion par la performance est utilisée comme un outil de management. En ce qui concerne l’allocation des ressources fondée sur la gestion par la performance, elle est essentiellement appliquée aux agences. » (28)

Les auditions menées par la Mission cette année ont-elles mêmes confirmé l’importance d’une telle voie moyenne. Ainsi, Mme Véronique Malbec, responsable du programme Justice judiciaire et secrétaire générale du ministère de la Justice, estimait très justement que l’analyse de la performance pourrait servir de base à une plus juste répartition des moyens budgétaires. Ainsi, proposait-t-elle d’ajouter parmi les conditions d’octroi du budget annuel, l’atteinte de certains objectifs de performance tout en reconnaissant que les contraintes budgétaires actuelles, qui recentrent les discussions essentiellement autour des dépenses obligatoires, représentent un frein important au recours à la performance comme facteur prédominant dans la répartition des moyens budgétaires (voir infra).

L’ensemble des responsables de programmes comme les secrétaires généraux des ministères auditionnés ont par ailleurs tous relevé que la déconnexion entre la démarche de performance et l’allocation des moyens est aggravée par la séparation des conférences de répartition (procédant à l’allocation des moyens) d’une part et des conférences de performances (passant en revue les objectifs et les indicateurs figurant dans les PAP) d’autre part, à des moments différents du calendrier de préparation budgétaire. M. Guillaume Boudy, secrétaire général du ministère de la Culture, en concluait d’ailleurs que le lien entre le processus d’allocation des moyens dans le cadre de la préparation du budget et la performance est toujours « très ténu et insuffisant ». C’est la raison pour laquelle il a décidé que participeraient aux deux types de conférences, pour le ministère de la culture, les mêmes interlocuteurs.

La MILOLF ne peut donc que réitérer sa proposition de fusion des conférences de performance et des conférences de répartition, ou à tout le moins, inviter le Gouvernement à réunir les mêmes interlocuteurs aux deux conférences.

Proposition n° 4 : Fusionner les conférences de performance et les conférences de répartition au moment de la préparation du budget ou, à tout le moins, réunir les mêmes interlocuteurs aux deux types de conférences.

3.– Une tentative de rénovation du calendrier de préparation du budget

La préparation budgétaire a en pratique été améliorée par la circulaire du Premier ministre du 21 janvier 2005 relative à la préparation du projet de loi de finances pour 2006 dans le nouveau cadre de la LOLF (29). Cette circulaire accélère sensiblement le calendrier annuel de la préparation budgétaire et confère ainsi une plus grande prévisibilité aux services. Chaque étape de la procédure budgétaire est en effet avancée de près de trois mois par rapport au calendrier en vigueur sous l’empire de l’ordonnance de 1959.

Ainsi, dans le cadre de cette circulaire, la procédure s’articule ainsi autour de quatre grandes étapes :

– fin janvier : un séminaire gouvernemental est organisé pour présenter la stratégie d’ensemble des finances publiques et faire un point sur la situation des finances de l’État et des comptes sociaux. À l’issue de ce séminaire, le Premier ministre adresse aux ministres une lettre de cadrage fixant les orientations et les normes de maîtrise des dépenses publiques alors que celle-ci était, avant la LOLF, envoyée au cours du mois d’avril ;

– février-mars : organisation des conférences budgétaires qui réunissent le responsable de programme, son département du budget, le contrôleur budgétaire et comptable ministériel et la direction du Budget. Ces réunions ont pour objectif d’analyser et d’instruire conjointement les différentes demandes, en crédits et en emplois, effectuées par le programme au vu des principes de la lettre de cadrage tout en recherchant les économies structurelles des politiques publiques mises en œuvre. Or, cette phase se déroulait, avant la LOLF, en avril-mai ;

– avril : organisation des réunions de restitution ont lieu entre le Premier ministre et chacun des ministres pour examiner les économies structurelles à mettre en œuvre ainsi que les propositions budgétaires. À l’issue de ce cycle de réunions, le Premier ministre adresse aux ministres une lettre arrêtant les plafonds de chaque mission en crédits et en effectifs alors que celles-ci étaient, avant la LOLF, signées et communiquées en juin. À la suite de ces réunions, sont organisées des conférences de répartition visant à examiner et à arbitrer, avec la direction du Budget, les propositions de répartition des crédits pour chaque programme de la mission et au niveau le plus fin de la nomenclature budgétaire. Ces conférences intervenaient, avant la LOLF, au cours du mois de juillet ;

– juin-août : organisation des conférences de performance et finalisation des documents budgétaires à destination du Parlement. Il s’agit de finaliser la liste des objectifs et des indicateurs du projet de loi de finances et de fixer les valeurs cibles de résultats à atteindre.

Cette accélération du calendrier de préparation du budget était en cohérence avec les nouvelles exigences de la LOLF qui impliquaient notamment un travail rigoureux de justification des crédits dès le premier euro et l’intégration de la démarche de performance dans la préparation budgétaire, même si l’on peut regretter la déconnexion entre les deux exercices. Ambitieuse, cette accélération du calendrier n’a pas résisté aux contraintes budgétaires nouvelles rendant nécessaire l’instauration d’une trajectoire pluriannuelle de réduction des déficits qui a profondément perturbé la mise en œuvre de la LOLF depuis 2009.

B.– DES CONTRAINTES BUDGÉTAIRES NOUVELLES

1.– Une trajectoire pluriannuelle de réduction des déficits devenue prédominante

a) Une contrainte budgétaire accentuée par la crise

Comme l’ont rappelé MM. Champsaur et Cotis dans leur rapport sur la situation des finances publiques en mai 2010 (30), la France se trouve aujourd’hui confrontée à des déséquilibres macroéconomiques et budgétaires de grande ampleur, qui ne se résoudront que dans la durée et au prix d’une très grande continuité de nos politiques publiques.

La crise économique et financière que traverse notre pays depuis 2008 est certes une crise mondiale, mais elle affecte d’autant plus fortement nos finances publiques qu’elles étaient déjà fragilisées par plus de trente années de déficit ininterrompu et par une dette publique progressant à un rythme significativement plus élevé que celle de nos principaux partenaires.

L’encours de la dette publique française a ainsi été multiplié par 18 entre 1978 et 2008 ; sur la même période, sa part dans le produit intérieur brut (PIB) est passée de 21,1 % à 67,4 %. Les difficultés économiques rencontrées à partir de la crise financière de 2008 sont venues aggraver encore ces déséquilibres budgétaires, entraînant une situation de décroissance (– 2,6 % du PIB en 2009) à l’origine d’une aggravation du déficit public à hauteur de 7,5 % du PIB et de la dette publique qui a atteint 78,1 % du PIB fin 2009.

Par conséquent, en dix ans, la dette publique de la France a plus que doublé tandis que le déficit public a été multiplié par cinq.

Cette situation s’explique à la fois par la progression rapide des dépenses publiques (+ 2,3 % par an en moyenne sur la période 2000-2008) et par la dégradation considérable des recettes fiscales de l’État.

Si l’année 2010 marque le retour à la croissance (1,5 % du PIB) et à la réduction du déficit (– 7,1 % du PIB), la dette publique continue sa progression de façon très inquiétante puisqu’elle a atteint 1 591 milliards d’euros (soit 82,3 % du PIB). Elle devrait se situer, dans le meilleur des cas, autour de 1 800 milliards d’euros en 2012 (soit 86,9 % du PIB). Cela impose notamment le strict respect de la trajectoire de retour à l’équilibre des finances publiques présentée par le Gouvernement dans le programme de stabilité de la France notifié à la Commission européenne en avril 2011 (soit un déficit passant à 5,7 % en 2011, 4,6 % en 2012 et 3 % en 2013).

ÉVOLUTION ET PERSPECTIVE DE LA DETTE PUBLIQUE ET DU DÉFICIT PUBLIC

Source : Insee, comptes nationaux (base 2005) et programme de stabilité de la France 2011-2014.

Face à cette situation, et pour se donner une visibilité accrue en termes de pilotage de la dépense et d’évolution des recettes, les « pères de la LOLF », MM. Alain Lambert et Didier Migaud, avaient invité le Président de la République, à mettre en place une programmation pluriannuelle des finances publiques, à l’image de ce qui avait été fait avec succès dans certains pays européens pour retrouver la voie de l’équilibre budgétaire (31).

Cette proposition s’est concrétisée d’abord par la circulaire du ministre du Budget du 10 avril 2008 instaurant une procédure budgétaire pluriannuelle pour la période 2009-2011.

Elle a ensuite été validée par le Parlement par l’adoption d’une première loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2011, en date du 9 février 2009 (32), puis par l’adoption d’une seconde loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 (33).

b) Une modification sensible de la procédure de préparation du budget

La programmation pluriannuelle des finances publiques consiste à programmer, pour les trois prochaines années, des plafonds de dépenses par mission. Dès lors que cette programmation s’effectue à droit constant, ces plafonds ne sont juridiquement qu’indicatifs : le Parlement demeure naturellement libre de modifier, dans le respect de l’article 40 de la Constitution et de l’article 47 de la LOLF (voir infra), les crédits des missions et des programmes soumis à son vote dans les différents projets de loi de finances. Toutefois, d’un point de vue interne au Gouvernement, les plafonds triennaux retenus seront « regardés comme impératifs » selon les termes de la circulaire précitée du Premier ministre.

L’objectif est en effet de mieux maîtriser l’évolution d’ensemble des dépenses de l’État : le plafond global des dépenses, c’est-à-dire la somme des crédits prévus pour les trois années de la programmation, ne pouvant être revu, en principe, que dans la seule hypothèse d’une inflation supérieure aux prévisions. Cette démarche, aussi nécessaire soit elle, a donc profondément affecté la procédure de préparation du budget et, par tant, l’esprit de la LOLF, tant du point de vue des responsables de programmes que du point de vue du Parlement.

En premier lieu, le schéma pluriannuel a nécessité l’instauration d’une nouvelle procédure budgétaire, et par conséquent, d’un nouveau calendrier de préparation des projets de loi de finances annuels.

La préparation du projet de loi de finances suit désormais une procédure différente selon qu’il s’agit d’une année paire, année de préparation du budget triennal, et d’une année impaire, année au cours de laquelle la deuxième annuité du budget triennal fait l’objet d’une simple actualisation au niveau du programme dans le respect des plafonds fixés, pour la mission, par le budget triennal.

Ainsi, il ressort des auditions menées par la MILOLF qu’en année paire, la procédure budgétaire se trouve sensiblement alourdie par de nombreuses réunions budgétaires dans un calendrier relativement contraint, de sorte que les échéances sont retardées. Le nombre significatif des travaux demandés, et la fréquence élevée des rendez-vous budgétaires conduisent à minorer parfois les exigences de précision des travaux demandés aux services, ce d’autant plus que les outils de gestion budgétaire ont pu, parfois, jouer un rôle négatif en la matière. En revanche, en année impaire, la procédure est allégée et son calendrier est avancé comme le montre le tableau ci-après.

CALENDRIER DE LA PRÉPARATION DU PLF DANS LE CADRE
DE LA PROGRAMMATION TRIENNALE DES CRÉDITS

 

Année paire

(élaboration du budget triennal)

Année impaire

(actualisation au niveau des programmes)

Février

Conférence technique

Conférence technique

Mars

Conférence de performance,

Préparation des RAP

Conférence de performance,

Préparation des RAP

Fin avril

Envoi des lettres de cadrage

(grands principes du budget triennal)

 

Mai

Conférence de budgétisation

(analyse des demandes budgétaires)

 

Juin

Arbitrages

Envoi des lettres-plafonds

Conférence de répartition

Arbitrages

Envoi des lettres plafonds (34) (simple actualisation)

Juillet

Conférence de répartition

Arbitrages de répartition

 

Juillet - Août

Élaboration des documents

budgétaires destinés au Parlement

Élaboration des documents

budgétaires destinés au Parlement

Quelle que soit l’année, la procédure budgétaire débute donc en février, et non plus en janvier, par les conférences techniques. Ces conférences auxquelles la direction du Budget convie les directeurs des affaires financières des différents ministères ainsi que les responsables de programme et les contrôleurs budgétaires et comptables ministériels (CBCM), permettent :

– d’analyser les résultats de l’exécution du budget de l’année précédente (n–1) et de préparer à ce titre les rapports annuels de performances (RAP) qui seront annexés au projet de loi de règlement du budget de l’année (n–1) qui doit être déposé avant le 1er juin de l'année suivante (année n) ;

– d’analyser les premières prévisions d’exécution pour l’année en cours ;

– de réaliser les premiers travaux nécessaires à la préparation du projet de loi de finances présenté au Parlement à l’automne.

L’enjeu est de faire apparaître les marges de manœuvre en gestion des programmes, en fonction notamment de la part des dépenses inéluctables et obligatoires. L’envoi des lettres de cadrage, qui intervenait à l’issue de ces réunions fin janvier d’après la circulaire de 2005, est en revanche repoussé à la fin avril.

Entre-temps, les conférences de performance sont organisées au cours du mois de mars afin d’examiner les résultats de l’exercice précédent et de discuter des grandes lignes du projet annuel de performances de l’année suivante. Cette réunion a le mérite de se dérouler beaucoup plus tôt par rapport au calendrier fixé par la circulaire de 2005 même si l’exercice reste totalement déconnecté des conférences de budgétisation.

Au mois d’avril, le secrétaire général du ministère, lorsqu’il existe, reçoit chaque responsable de programme en réunion bilatérale afin de définir les termes de son mandat de négociation avec la direction du Budget sur la base des orientations politiques déterminées par le cabinet du ministre.

Les conférences de budgétisation sont donc repoussées au mois de mai alors qu’elles intervenaient en février-mars depuis la circulaire de 2005. Ces conférences doivent permettre d’évaluer les besoins et de déterminer les plafonds maximaux de dépenses pour chaque mission.

Toutefois, l’envoi des lettres plafonds puis les conférences de répartition des crédits et des effectifs entres les programmes et les opérateurs dans le respect des plafonds de dépenses par mission fixés dans le budget triennal, n’interviennent plus qu’au mois de juin – voire juillet selon les retards pris dans les arbitrages budgétaires – alors que la mise en œuvre de la LOLF avait permis d’avancer ce calendrier au mois d’avril et mai. En année impaire, la procédure est censée être allégée car les conférences budgétaires de mai sont à la fois des conférences de budgétisation et des conférences de répartition. Il n’en demeure pas moins, en pratique, que l’actualisation des lettres plafonds n’intervient qu’à la fin du mois de juin.

Enfin, la préparation des documents budgétaires se déroule entre juillet et septembre. Les projets annuels de performances (PAP) donnent lieu à un travail conjoint entre les différents ministères et la direction du Budget. Ils retracent, pour chaque programme, la stratégie pour les trois années du triennal, la justification au premier euro des crédits demandés au Parlement, les objectifs des politiques publiques, les indicateurs et les cibles à atteindre.

Finalement, la MILOLF constate que la mise en place d’un budget triennal a eu pour effet de revenir au calendrier en vigueur sous l’ordonnance de 1959 et limite la capacité des services de l’administration à fournir au Parlement des informations pertinentes en temps utile (voir infra).

Fort heureusement, la Mission observe que la programmation triennale des crédits offre, en revanche, une beaucoup plus grande visibilité aux gestionnaires (comme aux parlementaires) sur les moyens mis en œuvre, pour les trois prochaines années, dans le cadre de la politique publique considérée. Ainsi, depuis le projet de loi de finances pour 2009, les projets annuels de performances comportent une présentation stratégique de la mission, l’évolution des crédits par programme en année n, n+1 et n+2, ainsi qu’une présentation des principales réformes prévues au cours de la période. Désormais, les responsables de programme connaissent donc leur enveloppe budgétaire prévue pour les trois prochaines années. Quoique ces informations ne soient qu’indicatives pour l’année n+1 et n+2 et dépendantes du degré de fermeté que les ministres entendent leur conférer, elles ont permis d’améliorer les capacités de pilotage des programmes, tant dans la gestion budgétaire que dans la poursuite des objectifs définis dans les PAP. Elles doivent également permettre aux responsables de programmes de décliner, au moins dans leurs grandes masses, les enveloppes de crédits au niveau des budgets opérationnels de programme (BOP).

Encore faut-il que les ministres, responsable de la programmation triennale des enveloppes budgétaires par mission soient vigilants. Ils jouent désormais un rôle central de pilotage budgétaire puisque le principe dit d’« auto-assurance » doit les conduire à faire face aux priorités, contraintes et charges nouvelles sans remettre en cause le plafond de crédits de leur mission, soit par redéploiement de dépenses discrétionnaires, soit par la réalisation d’économies. Ces redéploiements ou économies doivent, en principe, être mis en œuvre prioritairement au sein du programme qui supporte les aléas ou les priorités nouvelles. À défaut, ils doivent être réalisés entre les programmes de la même mission. La mise en œuvre du budget triennal impose donc une coordination renforcée entre les ministres, responsables des missions, et les RPROG, en particulier en période de tensions budgétaires compte tenu des conséquences pratiques résultant du principe d’auto-assurance.

À cet égard, la MILOLF considère que les redéploiements de crédits au sein d’une mission pour faire face à une charge nouvelle devraient être éclairés par les résultats des RPROG au regard du dispositif de performance afin de « récompenser » autant que faire se peut les meilleurs gestionnaires.

Proposition n° 5 : Procéder aux redéploiements de crédits au sein d’une mission, en cas de charge nouvelle, en tenant compte des résultats des gestionnaires au regard des objectifs de performance fixés dans les PAP. Justifier systématiquement ces mouvements de crédits devant les commissions des finances.

c) Une contrainte budgétaire de nature à altérer l’ambition de la LOLF dans l’allocation des moyens

L’ensemble des gestionnaires auditionnés par la MILOLF ont fait observer que la contrainte budgétaire de la France réduisait considérablement les marges de manœuvre des ministres, mais plus encore celles des RPROG et des RBOP pour faire valoir leurs demandes, en crédits et en emplois, au stade de la préparation du budget notamment.

La démarche de performance semble quant à elle prise en considération, non pas pour motiver les services de l’administration qui auraient atteint leurs objectifs mais pour « mettre sous tension » ceux qui, au contraire, se révéleraient « moins bons élèves ».

Ainsi, Mme Véronique Malbec, responsable du programme Justice judiciaire au ministère de la Justice, indiquait-elle que « les fortes contraintes budgétaires qui pèsent depuis plusieurs exercices tant sur le fonctionnement des juridictions, les frais de justice ou les emplois conduisent notamment à une couverture imparfaite des besoins exprimés en matière de dépenses obligatoires ». Elle ajoutait que «Dans ce contexte, il est difficile, voire impossible, d’intégrer les résultats de la performance dans la détermination et la répartition des moyens budgétaires alloués aux budgets opérationnels de programme (BOP). Une telle démarche aurait ainsi pour effet de minorer, pour certains BOP locaux, la couverture déjà imparfaite de ces dépenses obligatoires ».

De la même manière, M. Jean-François Monteils, secrétaire général du ministère de l’Écologie, responsable du programme Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, a mis l’accent sur le fait que pour préparer dans de bonnes conditions un budget, encore faut-il avoir une bonne information sur la mise en œuvre opérationnelle du programme au plus près du terrain. Pour ce faire, les gestionnaires (les responsables d’UO, les RBOP, les RPROG et le secrétaire général) doivent réussir à instaurer une véritable relation de confiance entre eux. Or, il constate qu’une telle relation de confiance est beaucoup plus difficile à obtenir dans un contexte budgétaire tendu. En effet, vu la pression du ministère du Budget pour trouver des économies sur presque toutes les catégories de dépenses, les marges de manœuvre des gestionnaires de programme, et sur la fongibilité asymétrique en tout premier lieu, se réduisent comme une « peau de chagrin ». Il s’ensuit une certaine démotivation des gestionnaires par rapport aux espoirs qu’avait pu faire naître la LOLF à travers la démarche d’efficacité de la gestion publique par la performance.

En conséquence, le contexte budgétaire actuel a tendance à favoriser le retour d’anciennes pratiques budgétaires éloignées de l’esprit de la LOLF. Ainsi, les RBOP et les RPROG peuvent être amenés à demander systématiquement des crédits supplémentaires par rapport aux crédits ouverts l’année précédente afin d’essayer de contourner les contraintes budgétaires nouvelles résultant de l’application de normes transversales d’économies (voir infra).

Dans le même ordre d’idées, les gestionnaires peuvent être incités à consommer la totalité des crédits ouverts et des plafonds d’emplois autorisés pour une année afin de se prémunir d’une tentative de réduction de moyens l’année suivante.

De cette façon, les gestionnaires espèrent pouvoir conserver une marge de liberté dans la gestion des crédits et des emplois puisque les perspectives qu’offrait la LOLF semblent sensiblement remises en cause tant par le contexte budgétaire contraint que par la mise en œuvre de réformes transversales plus récentes.

2.– Les conséquences de la RGPP sur l’allocation des moyens

a) Une réforme de l’administration sans véritable lien avec la LOLF

L’entreprise de réforme et de modernisation de l’État associée à la LOLF s’est vue complétée à partir de 2007 par la mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques (RGPP).

Les conséquences de la RGPP sur la LOLF, notamment celles de la réforme de l’administration territoriale de l’État (RéATE), ont été le sujet d’étude de la Mission en 2010 : la simultanéité de ces réformes pose en effet la question de l’articulation des pratiques de gestion induites par la LOLF, avec celles découlant de la mise en place de nouvelles structures administratives dans les territoires.

En effet, lors de sa création, la LOLF n’a eu que peu d’incidence sur l’organisation administrative de l’État qu’elle n’avait d’ailleurs pas vocation à simplifier. La présentation mission-programme-action du budget de l’État et le périmètre des programmes souvent calé sur l’organisation des administrations centrales, ont rapidement mis en évidence une tension entre la logique horizontale – interministérielle – des besoins au niveau des territoires et la logique verticale
– ministérielle – de la LOLF.

La simplification territoriale de l’État voulue par la RGPP aurait pu être l’occasion de remédier à cette difficulté. Or si l’inventaire des politiques publiques effectué par la RGPP a été facilité par la structuration en missions et programmes de la LOLF, la RéATE n’a pas encore eu pour effet de simplifier réellement le processus d’allocation des moyens, même si les conséquences de la RGPP sur la maquette budgétaire sont indéniables : extension du périmètre des programmes de soutien, création du programme 333 Moyens mutualisés des administrations déconcentrées notamment.

b) Des normes transversales et uniformes déconnectées de la logique de la performance

Par ailleurs, la recherche d’efficacité et d’efficience de la dépense publique que manifeste la RGPP a trouvé sa traduction dans des dispositifs sans lien réel avec la notion de performance.

Compte tenu de la dérive des finances publiques françaises, la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2011 a notamment instauré une norme de progression des dépenses du budget de l’État (35) dite « zéro volume » aux termes de laquelle les dépenses ne peuvent progresser au-delà de l’inflation. Cette règle a été complétée, dans le cadre de la deuxième loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, par la norme dite « zéro valeur » selon laquelle les dépenses du budget de l’État – hors charge de la dette et des pensions – sont gelées pendant trois ans au niveau du montant constaté en 2010 (274,8 milliards d’euros).

Pour assurer le respect de cette double norme d’évolution des dépenses de l’État, le Gouvernement s’est donc engagé à réduire les dépenses de fonctionnement et d’intervention de l’État de 10 % sur trois ans ainsi qu’à stabiliser sa masse salariale, qui représente plus de 31 % des dépenses du budget général, sur la même période. La plus emblématique des mesures qui y est associée est évidemment le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.

Présentée parfois comme un accélérateur de la réforme de l’État, l’application de la règle du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite décidée dans le cadre de la RGPP, est par définition une norme qui s’applique unilatéralement dans tous les ministères (hors Enseignement supérieur et Justice). Elle laisse par conséquent peu de marge de manœuvre aux gestionnaires locaux, dont l’autonomie et la responsabilisation promues par la LOLF sont par conséquent fortement mises à mal (voir infra).

De la même manière, la norme de réduction des dépenses de fonctionnement et d’intervention traduit essentiellement une nécessaire recherche d’économies, que la situation critique de nos finances publiques justifie amplement. De fait, une telle décision est totalement déconnectée des dispositifs de mesure de la performance mis en œuvre par la LOLF et ne laisse que peu de choix aux gestionnaires sur la destination des crédits dont ils sont responsables.

C.– LA PERSISTANCE DES VIEUX DÉMONS

1.– La pratique des arbitrages interministériels

a) Les améliorations liées à la LOLF

Selon les responsables ministériels auditionnés par la Mission, la LOLF a incontestablement modifié la manière dont sont arrêtés les arbitrages budgétaires.

Tout d’abord, ces arbitrages s’effectuent désormais au regard de l’intégralité des crédits justifiés au premier euro, et non plus sur la base de la distinction entre services votés et mesures nouvelles, comme c’était le cas sous le régime de l’ordonnance organique de 1959.

La responsable du programme Justice judiciaire a par ailleurs souligné au cours de son audition les améliorations permises par la LOLF en phase d’exécution budgétaire :

– au regard des « errements antérieurs », la programmation de la dépense est dorénavant favorisée par la fixation en amont d’un taux de réserve de précaution (0,5 % des dépenses de personnel ; 5 % des autres dépenses). S’agissant du programme Justice judiciaire, la responsable de programme note que cette règle de gestion, particulièrement appréciable, a été systématiquement appliquée depuis 2006, et qu’aucun « surgel » n’est intervenu sur les crédits du programme depuis cette date ;

– la date limite du 31 mars fixée pour l’ouverture des crédits de report issus de la gestion précédente permet d’injecter ces crédits dans les dotations des BOP au cours du premier semestre de l’exercice budgétaire. Cette disposition permet d’améliorer la programmation de ces crédits, tant au niveau central qu’au niveau local.

La LOLF a également, dans une certaine mesure, redéfini les rôles des directeurs des affaires financières et secrétaires généraux des ministères en leur offrant de nouvelles marges de manœuvre.

D’une manière générale, le directeur des affaires financières a pour mission de préparer, en lien avec les responsables de programme, les décisions et arbitrages dans le domaine budgétaire. Il pilote l’analyse des coûts au sein des ministères, coordonne et consolide les comptes rendus d’exécution des responsables de programme et organise le contrôle interne et l’audit. Il exerce des fonctions de conseil, d’expertise et d’assistance. Il est l’interlocuteur attitré des autorités chargées du contrôle financier et du département comptable ministériel.

De son côté, le secrétaire général assure l’interface entre les responsables de programme et le cabinet : il coordonne la préparation budgétaire et prépare les arbitrages faisant remonter au cabinet les contraintes qui pèsent sur les services et transmettant aux responsables de programme les priorités du cabinet.

Ainsi par exemple, dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances pour 2011, le secrétaire général du ministère de l’Écologie, du développement durable des transports et du logement a proposé les schémas de suppression d’emplois compatibles avec les normes gouvernementales, supportables par les services et dans le respect des priorités du cabinet. Ainsi les opérateurs porteurs du Grenelle ont eu à subir une contrainte inférieure à ceux qui portaient des politiques jugées moins prioritaires par le ministre.

Il faut relever que certains responsables ministériels considèrent, pour s’en plaindre parfois, que la LOLF, en élargissant le droit d’amendement des parlementaires et en autorisant les redéploiements de crédits entre programmes d’une même mission sans en augmenter le montant total, a en quelque sorte confié au Parlement un véritable pouvoir d’arbitrage budgétaire. Cependant, ce pouvoir d’arbitrage, loin d’être illégitime répond à l’esprit même du droit d’amendement.

b) La persistance de pratiques anciennes

Cependant, pour l’essentiel, il semble bien que les pratiques antérieures perdurent.

En effet, les interlocuteurs de la Mission constatent que les arbitrages sont rendus comme précédemment par le Premier ministre ou son cabinet. Ils déplorent un manque certain de réunions interministérielles intermédiaires. Ils dénoncent également le fait que les réunions conjointes avec la direction du Budget se résument trop souvent à un constat de désaccords plutôt qu’à la recherche de consensus. Ces désaccords sont alors soumis par la suite à l’arbitrage du Premier ministre. De même, il semble que la définition des schémas d’emplois et des plafonds d'autorisation d'emplois « remonte » systématiquement au Premier ministre.

Par ailleurs, la contrainte budgétaire impose un processus d’élaboration du budget fondé sur une logique descendante : une fois définie la norme de dépense de l’État et évaluée la charge de la dette et de la masse salariale, il est demandé l’application de normes transversales d’économies comme par exemple la diminution de 10 % sur trois ans des dépenses de fonctionnement et d’intervention.

Il reste alors aux gestionnaires à analyser et à répartir mission par mission les crédits restants en fonction des priorités gouvernementales. Les discussions se concentrent alors uniquement au niveau des actions des programmes. Il s’agit là d’une remise en cause d’un acquis de la LOLF qui posait le principe d’une discussion au niveau de la mission pour laisser des marges de manœuvre aux responsables de programmes. Les priorités doivent donc de fait être financées par redéploiement alors même que la fongibilité des crédits est très encadrée par la direction du Budget.

Les responsables ministériels regrettent enfin que le calendrier de la mise en œuvre des réformes structurelles par le Gouvernement ne soit pas toujours synchrone avec la programmation triennale initiale. Ce décalage peut également provoquer des difficultés d’arbitrages.

Proposition n° 6 : Adapter la programmation triennale avec les réformes structurelles.

Il convient également de tenir compte de nouvelles échéances. Ainsi la mise en œuvre à partir de 2011 du « semestre européen » pousse à anticiper les arbitrages plus tôt, y compris en année impaire. Cette anticipation permettrait d’améliorer la qualité des documents budgétaires, de les transmettre plus tôt au Parlement et de faire progresser ainsi la qualité des débats.

Certaines circonstances politiques peuvent par ailleurs remettre en cause l’autonomie et la responsabilité des ministres et des gestionnaires, avec par voie de conséquence des interrogations sur leur capacité réelle d’arbitrage.

Ainsi, l’installation d’un nouveau Gouvernement en novembre 2010, au moment de l’examen du projet de loi de finances pour 2011, a fortement affecté la réalité de la maquette budgétaire présentée au Parlement. D’une manière générale, les changements de maquette budgétaire, ne peuvent que perturber les procédures d’arbitrages et d’allocation de moyens et la capacité de contrôle de l’action gouvernementale opérée par le Parlement. Il conviendrait que la stabilité de la maquette budgétaire soit garantie sur une durée suffisamment longue, qui sans atteindre forcément celle de la législature, pourrait être calée sur le calendrier de la programmation triennale.

Proposition n° 7 : Stabiliser la maquette budgétaire sur la période de la programmation pluriannuelle des crédits (budget triennal) au moment du vote de la loi de programmation.

Les membres de la Mission constatent par ailleurs, que les changements successifs du périmètre des portefeuilles ministériels nuisent également à la lisibilité quant à la responsabilité des acteurs : il est en effet assez difficile de vérifier à partir de la seule lecture des documents budgétaires que chaque ministre est bien véritablement chargé de la responsabilité politique d’un programme – et de l’utilisation des crédits qui s’y rapportent – pendant toute la durée de la programmation. Une réelle stabilité des périmètres ministériels serait en ce domaine la bienvenue.

2.– Les « angles morts » de la LOLF

La gestion par la performance, élément de base de la modernisation de l’État, est au cœur de la loi organique relative aux lois de finances. La Mission d’information sur la mise en œuvre de la LOLF veille depuis l’origine de ses travaux à ce que la performance, sa mesurabilité et les dispositifs qui y sont associés, soient au centre des pratiques des gestionnaires et permettent ainsi d’atteindre la plénitude des objectifs de modernisation de l’action de l’État dévolus à la LOLF.

Cependant, il faut encore aujourd’hui regretter que la performance des politiques publiques ne puisse pas toujours être analysée dans sa globalité. Deux éléments majeurs participent à cet état de fait : le contrôle de l’action des opérateurs de l’État et la pratique des dépenses fiscales.

En effet, il est encore aujourd’hui difficile d’avoir un regard complet sur l’action des opérateurs de l’État. Il est tout aussi compliqué d’analyser la pertinence et la performance des dépenses fiscales qui ont représenté 72,8 milliards d’euros en 2010, soit 20 % des dépenses du budget général.

a) L’insuffisante intégration des opérateurs

Les difficultés rencontrées dans l’analyse de la performance des opérateurs relèvent de plusieurs constats : une certaine carence dans la gouvernance du fait de la multiplicité des tutelles ; l’insuffisance, voire l’absence, des contrats d’objectifs et de performances signés avec l’État ; parfois, un manque d’adéquation entre la politique menée par l’opérateur et celle menée par l’État.

En 2008 (36), la Mission regrettait la tentation pour l'État d'utiliser les opérateurs de l’État pour contourner l’indispensable discipline budgétaire, notamment en ce qui concerne la norme de dépense, l’endettement, la gestion de leurs effectifs et de leur patrimoine immobilier. Les membres de la Mission plaidaient déjà pour une insertion pleine des opérateurs dans la démarche de performance instaurée par la LOLF et avaient émis une douzaine de propositions posant le principe d’une extension des principes de la LOLF aux opérateurs.

Trois ans après, force est de constater qu’en dépit de progrès réels (37), beaucoup reste encore à accomplir. Ainsi, la connaissance du patrimoine immobilier des opérateurs, bien qu’améliorée, est encore à l’origine d’une réserve substantielle de la Cour des comptes dans le cadre de la certification des comptes de l’État cette année. De même convient-il de regretter que le décompte des effectifs des opérateurs ne soit toujours pas effectué selon la même méthodologie que pour les effectifs de l’État (en équivalent temps plein travaillé – ETPT).

Les efforts doivent donc être poursuivis pour étendre les principes de la LOLF aux opérateurs, notamment en ce qui concerne la clarification de la tutelle exercée par l’État en évitant la multiplicité des acteurs, le décompte de leurs effectifs, la gestion de leur patrimoine et la généralisation des contrats d’objectifs, de moyens et de performance qui gagneraient à être calés sur la programmation triennale.

Proposition n° 8 : Synchroniser les périodes visées dans les contrats de performance des opérateurs avec la programmation triennale.

En ce qui concerne l’endettement des opérateurs, si la Mission se réjouit évidemment qu’une de ses propositions de 2008 ait été entendue – une évaluation de l’endettement des opérateurs est maintenant, depuis l’exercice 2011, annexée au projet de loi de finances –, il importe de maintenir la vigilance à ce sujet. Aussi conviendra-t-il de veiller au respect de l’article 11 de la loi de programmation des finances publiques 2011-2014 relatif à l’interdiction de l’endettement à plus d’un an de la plupart des organismes divers d’administration centrale (ODAC), même si leur champ ne recoupe qu’imparfaitement celui des opérateurs de l’État.

Enfin, s’agissant du contournement de la discipline budgétaire et de la norme de dépense, un événement récent a alerté la Mission. Il s’agit des garanties d’emprunt accordées indirectement par l’État via un opérateur, en l’occurrence Réseau ferré de France (RFF). Compte tenu des conséquences négatives potentielles pour le budget général de telles pratiques, il apparaît impératif à la Mission de soumettre à l’autorisation du Parlement les garanties octroyées par les opérateurs.

Proposition n° 9 : Encadrer dans la loi l’octroi de garanties par des opérateurs.

b) La montée en puissance des dépenses fiscales

Ainsi qu’il a été signalé précédemment, le poids relatif des dépenses fiscales par rapport aux dépenses budgétaires est considérable : bien qu’en diminution de près de 1,7 milliard d’euros entre 2009 et 2010, elles s’élèvent en 2010 à hauteur de 72,8 milliards d’euros pour 352,5 milliards de dépenses budgétaires (hors plan de relance de l’économie et hors investissements d’avenir). La Mission préconise évidemment la poursuite de l’effort de maîtrise de l’évolution de ces dépenses.

Malgré l’enjeu financier, l’arbitrage entre dépenses budgétaires et dépenses fiscales échappe pourtant largement aux responsables de programme dans le cadre du processus d’allocation des moyens, comme il échappe au Parlement au stade de la préparation du projet de loi de finances. Une coordination insuffisante entre le ministère du Budget et les autres ministères est aussi régulièrement dénoncée.

M. Philippe Josse, alors directeur du Budget, a ainsi déploré lors de son audition par la Mission, l’absence de lien entre les dépenses budgétaires, telles qu’elles sont prévues dans les projets de loi de finances, et les dépenses fiscales qui sont de fait véritablement connues ex post. Il a également souligné la difficulté à mettre en œuvre une véritable démarche de performance pour les dépenses fiscales s’appuyant sur des objectifs et des indicateurs.

Pour autant, la Mission considère impératif d’améliorer leur évaluation et de compléter ainsi l’information transmise au Parlement. Ce n’est que dans le cadre d’une évaluation systématique que la décision de « rebudgétiser » une dépense fiscale jugée peu efficace pourra être prise.

Proposition n° 10 : Procéder à une évaluation systématique des dépenses fiscales chaque année de la législature par cinquième et procéder aux modifications législatives nécessaires dans le cadre de la plus prochaine loi de finances.

Proposition n° 11 : Évaluer et justifier dans les documents budgétaires la pertinence des cinq dépenses fiscales les plus importantes de chaque programme.

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* *

II.– RÉNOVER L’EXAMEN DES LOIS DE FINANCES : UNE DÉMARCHE PERFECTIBLE

A.– UN PARLEMENT MIEUX INFORMÉ ?

1.– La qualité perfectible des documents budgétaires

Un des acquis incontestables de la LOLF est l’amélioration constante de la qualité des documents budgétaires et des informations transmises au Parlement. La déclinaison des politiques publiques en missions, programmes et actions au sein des projets et rapports annuels de performances (PAP et RAP) a rendu plus lisible et compréhensible l’action de l’État et les différentes lignes de son budget.

Les nombreuses informations contenues dans les PAP et RAP, les jaunes budgétaires, les documents de politique transversale annexés aux projets de loi de finances et projets de loi de règlement, la mise en œuvre d’une comptabilité d’analyse des coûts, les informations relatives aux dépenses fiscales sont autant d’éléments qui concourent à la possibilité offerte aux parlementaires de progresser réellement dans la compréhension d’une politique publique à coûts complets.

Cependant, si les progrès sont significatifs, des difficultés persistent.

Sont souvent dénoncés pêle-mêle : les trop nombreux changements de structure budgétaire qui compliquent les comparaisons ; le dépôt souvent tardif des documents de politique transversale ; des délais trop brefs pour permettre l’exploitation par le Parlement des informations contenues dans la masse documentaire fournie, de sorte que « trop d’information tue l’information » ; des indicateurs de performance pas toujours pertinents ou non renseignés ; une justification au premier euro parfois imprécise ; des difficultés de compréhension de la comptabilité d’analyse des coûts dans les projets annuels de performances ; une évaluation des dépenses fiscales et de leur efficacité encore trop limitée; des informations insuffisamment développées sur les procédures extrabudgétaires (plan Campus par exemple).

En ce qui concerne la masse documentaire transmise au Parlement (9 500 pages en PLF 2006 contre 14 000 pages en PLF 2011), la Mission, consciente de la nécessité d’une modération de son volume, plaide pour la mise en place d’un groupe de réflexion pour définir les documents réellement utiles.

Proposition n° 12 : Instaurer un groupe de travail Parlement – ministère du Budget pour définir les éléments réellement pertinents des documents budgétaires.

De la même manière, le coût de l’envoi de ces documents (2 millions d’euros par an) mérite la recherche de solutions techniques moins onéreuses et plus efficaces en termes de délais de transmission.

Proposition n° 13 : Dématérialiser l’envoi des documents budgétaires au Parlement afin de réaliser des économies et de respecter les délais de transmission fixés par la LOLF.

Pour permettre au Parlement d’exploiter réellement les informations contenues dans les projets de loi de finances, il importe de respecter impérativement les délais de transmission. À cet égard, la Commission des finances s’est efforcée d’améliorer l’information du Parlement en complétant les annexes générales au projet de loi de finances à l’instar du « jaune » relatif à l’effort financier de l’État en faveur des collectivités territoriales (38) et du prochain document de politique transversale intitulé Politique du Tourisme (39). Or, l’expérience montre que ces documents sont parfois transmis à l’Assemblée nationale dans des délais incompatibles avec l’examen des crédits des politiques publiques concernées. Le président de la commission des Lois, M. Jean-luc Warsmann fait ainsi remarquer que le DPT relatif à l’outre-mer est systématiquement transmis « à quelques jours de la discussion et à un moment où la rédaction de l’avis budgétaire est quasiment achevée ».

Proposition n° 14 : Mettre en ligne les documents budgétaires et modifier l’alinéa 2 de l’article 39 de la LOLF pour qu’ils soient transmis impérativement huit jours avant l'examen, par l'Assemblée nationale, en première lecture, des recettes ou des crédits auxquels ils se rapportent.

Enfin, le contenu des documents budgétaires est encore trop souvent de qualité inégale. Il conviendrait ainsi de renseigner 100 % des indicateurs ayant plus d’un an d’ancienneté dans les projets annuels de performances et, pour les nouveaux indicateurs, les renseigner au plus tard dans les rapports annuels de performances annexés à la loi de règlement.

Les raisons des suppressions d’indicateurs dans les PAP devraient être systématiquement indiquées (non pertinence, objectifs atteints, impossibilité de renseigner, …). Pour rendre véritablement exploitable la comptabilité d’analyse des coûts dans les projets annuels de performances, il faut encore en améliorer la présentation. Pour finir, les dépenses budgétaires et extrabudgétaires relevant d’une même politique se doivent de bénéficier d’une présentation consolidée dans les documents de politiques transversales.

2.– Les questionnaires budgétaires

De façon générale, le Parlement devrait trouver son intérêt à simplifier le travail des ministères. En ce qui concerne les questionnaires budgétaires transmis au Gouvernement pour préparer l’examen du projet de loi de finances, cela passe évidemment et avant tout par la réduction du nombre des questions. À ce titre, pour l’Assemblée nationale, le nombre des questions de la commission des Finances est passé de 4 258 dans le projet de loi de finances pour 2009 à 4 084 pour 2010 et 3 881 pour 2011. Cependant, la diminution du nombre de questions ne peut être qu’un indicateur partiel de la simplification des questionnaires budgétaires : il ne renseigne pas sur la longueur de chaque question, ni sur leur complexité.

Par ailleurs, la concertation en vue de questionnaires communs avec les commissions saisies pour avis et les commissions du Sénat gagnerait à être encouragée et développée.

Seule une partie des réponses aux questionnaires budgétaires sont reçues dans des délais satisfaisants (avant la date du 10 octobre fixé par la LOLF) ce qui permet une meilleure exploitation. Ce taux de retour dans les délais reste relativement constant. Ainsi 80 % des questions avaient obtenu une réponse avant la date limite du 10 octobre pour le projet de loi de finances 2011, le taux était de 74 % dans le projet de loi de finances 2010 et de 82 % pour le projet de loi de finances 2009. Certains ministères répondent systématiquement, de manière très partielle, aux questions des parlementaires dans le délai imparti (< 50 %) : la Défense sur le programme Préparation de l’avenir, les services du Premier ministre sur la mission Conseil et contrôle d’État, ou encore le MEDDTL sur les programmes relatifs à la recherche dans les domaines du développement durable.

Les parlementaires constatent par ailleurs que les réponses aux questionnaires parlementaires sont souvent partielles ou d’un intérêt limité et se ressemblent beaucoup d’une année sur l’autre.

Pour perfectionner ces échanges annuels entre Parlement et Gouvernement, il conviendrait sans doute de généraliser la pratique mise en œuvre par le ministère des Affaires étrangères ces dernières années : préalablement à l’envoi des questionnaires aux ministères dont la date limite est fixée au 10 juillet, les services du Quai d’Orsay transmettent sur support électronique les informations dont ils ont constaté qu’elles leurs étaient systématiquement demandées, après en avoir validé le contenu avec la commission des Finances de l’Assemblée nationale. La constitution de ce socle commun d’informations a pour conséquence une réduction significative du volume du questionnaire qui leur est adressé en complément.

Proposition n° 15 : Favoriser la coordination entre les rapporteurs pour avis et les rapporteurs spéciaux avant l’envoi des questionnaires parlementaires. Étudier la généralisation de l’envoi préalable au Parlement des réponses à un socle commun de questions préalablement défini avec les ministères.

B.– DES PARLEMENTAIRES PLUS IMPLIQUÉS ?

1.– La LOLF : le pouvoir du Parlement renforcé ?

La loi organique du 1er août 2001 s'inscrit dans le cadre défini par l'article 40 de la Constitution, mais en propose une interprétation nouvelle.

L'article 40 de la Constitution interdit aux parlementaires de déposer des amendements qui auraient pour conséquence « une diminution des ressources publiques » ou « la création ou l'aggravation d'une charge publique ». Sont ainsi irrecevables les amendements se traduisant par une charge publique nouvelle, quand bien même celle-ci serait compensée par la réduction d'une autre charge publique.

L'article 47 de la LOLF procède à l'interprétation de cet article, et notamment à la définition de la notion de « charge ». Il précise qu' « au sens des articles 34 et 40 de la Constitution, la charge s'entend, s'agissant des amendements s'appliquant aux crédits, de la mission ». Ainsi, l'article 47 institue un double régime de recevabilité des amendements :

– pour les amendements relatifs aux crédits – c'est-à-dire ceux qui ont pour effet de modifier la répartition des crédits entre programmes, sans qu'un autre texte soit nécessaire pour leur donner effet –, la recevabilité s'apprécie au niveau de la mission. Un parlementaire peut désormais déposer un amendement modifiant la répartition des crédits entre les programmes au sein d'une même mission, sans augmenter les crédits de celle-ci ;

– pour les autres amendements – par exemple, ceux modifiant un dispositif, créant une nouvelle obligation…–, la recevabilité continue de s'appliquer dans les conditions antérieures.

L'élargissement du droit d'amendement des parlementaires a été validé par le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001. Le Conseil a considéré que « ces dispositions offrent aux membres du Parlement la faculté nouvelle de présenter des amendements majorant les crédits d'un ou plusieurs programmes ou dotations inclus dans une mission, à la condition de ne pas augmenter les crédits de celle-ci ».

En outre, le Conseil constitutionnel a précisé les limites de ce nouveau droit d'amendement :

– il ne s'applique qu'aux seuls amendements relatifs aux crédits ;

– l'exigence posée par le deuxième alinéa de l'article 47 (« Tout amendement doit être motivé et accompagné des développements des moyens qui le justifient ») doit être respectée : ainsi, « dans le cadre des procédures d'examen de la recevabilité financière », la « réalité de la compensation financière » pourra être vérifiée. C’est pourquoi l’exposé des motifs de l’amendement de crédits est plus que jamais un élément de fond de sa recevabilité ;

– par ailleurs, en soulignant que l'article 47 rend irrecevables les amendements « non conformes à l'une ou l'autre des dispositions de la loi organique », le Conseil constitutionnel a implicitement exigé qu'un amendement créant un programme soit accompagné de la description des actions, des « objectifs précis, définis en fonction de finalités d'intérêt général, ainsi que des résultats attendus et faisant l'objet d'une évaluation », conformément à la définition des programmes donnée par l'article 7 de la loi organique. La création d'une mission ne peut, quant à elle, résulter que d'une disposition d'initiative gouvernementale.

En pratique, les possibilités nouvelles offertes par la LOLF offrent de nouveaux débouchés pour les propositions des missions d’information (cf : mission sur l’optimisation des finances publiques en 2009) et s’est d’abord traduit par une augmentation du nombre d’amendements déposés par rapport à la période antérieure.

2.– La pratique et les limites des amendements de crédits

a) Éléments statistiques

L’article 47 de la LOLF, qui a remplacé l’article 42 de l’ordonnance de 1959, fixe les conditions dans lesquelles doit s’exercer le droit d’amendement sur les projets de loi de finances : tout en maintenant l’exigence de motivation des amendements, il assouplit les conditions d’application de l’article 40 de la Constitution pour les seuls amendements portant sur les crédits et étend les motifs d’irrecevabilité à la méconnaissance de l’ensemble des règles organiques.

L’objet essentiel de l’article 47 est de préciser que, dans le cadre de la nouvelle nomenclature budgétaire mise en place par la LOLF, la « charge » dont l’article 40 de la Constitution interdit toute augmentation, s’entend de la mission.

Élément de la revalorisation du rôle du Parlement, cette disposition autorise les parlementaires à proposer des transferts de crédits entre les programmes d’une même mission, sans, bien entendu, que cela ait pour effet d’augmenter le total des crédits de la mission concernée.

Considéré comme la contrepartie principale de la fongibilité des crédits (article 7. II de la LOLF) qui accorde aux gestionnaires une très grande liberté d’action, cet élargissement limité (un amendement parlementaire ne peut pas créer une mission, ni proposer un transfert de crédits entre deux missions différentes) du droit d’amendement reste encore trop récent (il s’est appliqué pour la première fois au projet de loi de finances pour 2006) pour que l’on puisse pleinement en apprécier la portée.

On observera cependant que le nombre annuel moyen d’amendements portant sur les crédits déposés par les députés, qui était de 26 en moyenne sur les projets de loi de finances pour 1991 à 2005, a plus que triplé avec la mise en œuvre des dispositions plus libérales de la LOLF, passant à 90 en moyenne sur les projets de loi de finances pour 2006 à 2010.

Les éléments statistiques ci-dessous visent à évaluer comment les parlementaires (députés et sénateurs) ont utilisé cette possibilité depuis l’examen du projet de loi de finances pour 2006, selon les nouvelles règles.

Le recensement exhaustif de tous les amendements déposés et adoptés lors des examens des projets de loi de finances initiaux permet ainsi de suivre l’évolution comparée des amendements de crédits au regard de l’évolution globale du nombre d’amendements examinés. Seuls les amendements de crédits examinés en première délibération ont été recensés.

Les tableaux et graphiques suivants illustrent les activités respectives de l’Assemblée nationale et du Sénat (40).

● Statistiques sur la pratique de l’Assemblée nationale

 

Nombre total d'amendements

Amendements de crédits d'origine parlementaire

Total amendements de crédits déposés

déposés

adoptés

déposés

adoptés

2006

1 050

298

92

15

104

2007

556

198

55

7

69

2008

566

162

85

15

94

2009

898

266

121

12

126

2010

1 005

207

85

6

89

2011

1 269

483

85

24

94

● Statistiques sur la pratique du Sénat

 

Nombre total
d'amendements

Amendements de crédits
d'origine parlementaire

Total amendements de crédits déposés

déposés

adoptés

déposés

adoptés

2006

793

202

58

17

86

2007

627

169

68

20

74

2008

571

188

71

20

79

2009

711

270

58

15

83

2010

954

252

61

13

70

2011

1 060

298

80

14

90

Les courbes des deux graphiques présentent de réelles similarités, ce qui tend à montrer une pratique parallèle, dans les deux assemblées, de la faculté de redéployer des crédits au sein d’une mission. Il n’en demeure pas moins que depuis 2006, le nombre d’amendements de crédits d’initiative parlementaire est relativement stable, alors même que l’on constate depuis le PLF 2008 un fort accroissement du nombre total d’amendements examinés lors des projets de loi de finances.

b) Les amendements de crédits : un pouvoir parlementaire limité

Les auditions menées par la Mission montrent que les possibilités nouvelles d’amendement offertes par la LOLF sont paradoxalement source d’insatisfaction chez les députés.

Il est par ailleurs notable que les amendements de crédits ne sont presque jamais motivés par des considérations liées à la performance des gestionnaires.

Proposition n° 16 : Justifier, dans l’exposé des motifs des amendements de crédits, les modifications proposées au regard du dispositif de performance.

En ce qui concerne la pratique observée sur les amendements de crédits, la commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale constate, par la voix du président Serge Poignant, que l’encadrement du droit d'amendement sur les crédits est tel, que son exercice n'apparaît pas très utile. Les députés ne peuvent en effet augmenter un budget qu'aux dépens d'un autre. Dans certains secteurs, tel l’agriculture, il semble même que le nombre d’amendements recule.

De son côté, le président de la commission de la Défense, M. Guy Teissier, regrette que la charge s’entende au niveau de la mission. En effet, cette règle interdit de fait toute mise en commun des crédits de la Défense et des Anciens combattants alors même que les deux missions relèvent du même ministre. On pourrait objecter que cette remarque va directement à l’encontre de l’un des choix fondateurs et consensuels de la LOLF : bâtir l’architecture du budget en fonction du rôle de l’État, mais indépendamment des structures administratives, changeantes et héritées de l’histoire. Par ailleurs, il fait valoir que les modifications ne peuvent se faire qu’entre programmes, ce qui limite la portée pratique des modifications à la répartition indicative des crédits au sein d’un programme.

Ce régime est particulièrement contraignant lorsque les modifications de nomenclature conduisent à empêcher tout amendement. Faute de marges de manœuvre, les députés sont contraints de déposer des « amendements d’appel », invitant le Gouvernement à prendre ses responsabilités. Ainsi, en rattachant les actions relatives aux musées et à la communication à la mission Défense, le Gouvernement aurait empêché le Parlement de revaloriser la retraite du combattant, sauf à accepter de supprimer la journée d’appel et de préparation à la défense (JAPD). Les rapporteurs ont d’ailleurs indiqué en séance publique qu’il convenait de distinguer la possibilité théorique d’amendement de la capacité réelle à mettre en œuvre de pareilles dispositions. Au final, sur le projet de loi de finances pour 2011, le Gouvernement a dû demander une seconde délibération sur l’amendement adopté par l’Assemblée, car il conduisait à la suppression de la JAPD.

La faiblesse des marges de manœuvre limite également les capacités d’amendement sur la mission Défense. L’essentiel des dépenses d’investissement est retracé dans le programme Équipement des forces. Faute de pouvoir intervenir dans la répartition des crédits de titre 5 entre les actions, les députés en sont réduits à demander des engagements au Gouvernement, mais ne peuvent pas décider par eux-mêmes de privilégier un équipement sur un autre.

Certains parlementaires, notamment au sein des commissions de la Défense et des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale, souhaiteraient donc modifier l’article 47 de la LOLF afin d’examiner la charge au niveau des programmes (et donc des actions) et non pas de la mission ou entre les missions.

Cependant la Mission estime qu’il convient de relativiser les critiques. En effet, le dépôt d’amendement sert souvent à contraindre le Gouvernement à prendre position sur une question précise, à laquelle sinon il ne répondrait pas.

3.– Très peu d’amendements ont modifié la nomenclature budgétaire

À ce stade, il apparaît que l’influence des parlementaires sur la structure budgétaire au cours de l’examen du projet de loi de finances est assez limitée.

En effet depuis le projet de loi de finances pour 2006, moins d’une dizaine d’amendements d’initiative parlementaires modifiant la nomenclature du budget par la création ou la suppression de programmes, ont été adoptés. Cela est d’ailleurs cohérent avec le souhait des parlementaires de garantir la stabilité de la maquette budgétaire.

Ces amendements sont le plus souvent justifiés par la nécessité d’éviter que le Gouvernement ne contourne le droit d’amendement des parlementaires par des propositions de modification de la maquette en projet de loi de finances.

Par ailleurs, il convient de noter que depuis 2006, les parlementaires ont obtenu par amendement que quatre nouveaux documents de politique transversale (DPT) soient annexés au projet de loi de finances.

4.– La recevabilité financière des amendements au regard de l’article 40 de la Constitution

a) Une disposition constitutionnelle critiquée

Il est notoire que, depuis les débuts de la Vème République, l’article 40 de la Constitution suscite controverses et, pour le moins, des divergences d’interprétation entre les différentes commissions au sein des assemblées, voire entre l’Assemblée nationale et le Sénat : ressenti comme un dispositif d’autocensure par de nombreux parlementaires, il est régulièrement remis en question.

Des incidents de séance ont ainsi pu se produire entre les présidents successifs de la commission des Finances de l’Assemblée nationale et leurs collègues qui peuvent en avoir une vision moins stricte. En tout état de cause, il est peu compréhensible pour les parlementaires de constater qu’un même amendement jugé irrecevable à l’Assemblée nationale soit quelques semaines plus tard examiné au Sénat.

Ce fut le cas récent à l’occasion de l’examen en séance publique du projet de loi portant réforme des collectivités territoriales, le 25 mai 2010. Plusieurs députés ont contesté l’application de l’article 40 de la Constitution par le Président de la commission des Finances de l’Assemblée nationale, et regretté que l’article 40 soit appliqué plus strictement à l’Assemblée nationale qu’au Sénat. Le rapporteur pour avis de la commission du Développement durable a notamment estimé que cette application différenciée aboutissait à méconnaître la Constitution, qui donne à l’Assemblée nationale un pouvoir législatif au moins égal à celui du Sénat. De fait, concernant ce texte, des amendements déclarés irrecevables à l’Assemblée nationale ont été admis au Sénat.

Proposition n° 17 : Harmoniser les règles de recevabilité financière des amendements entre l’Assemblée nationale et le Sénat.

Lors de l’examen récent du projet de loi constitutionnelle relatif à l’équilibre des finances publiques, un seul amendement a été déposé en vue de réformer l’article de la Constitution. Son auteur, M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des Finances, proposait que la recevabilité soit appréciée à la demande du Gouvernement par le président de l’assemblée saisie de la proposition de loi ou de l’amendement parlementaire : son adoption aurait signé la fin du contrôle a priori par le Parlement.

b) Le contrôle de recevabilité exercé à l’Assemblée nationale

La Mission tient cependant à relativiser la critique sur le comportement réputé dépensier des parlementaires : les statistiques suivantes qui indiquent certes des données brutes, et ne renseignent pas sur le caractère plus ou moins coûteux des amendements déposés lors des projets de loi de finances initiales, traduisent malgré tout une volonté constante mais modérée des députés d’influer sur les charges et les ressources de l’État.

projet de loi de finances

Taux d'irrecevabilité

2006

12,15 %

2007

25,82 %

2008

15,30 %

2009

9,62 %

2010

12,78 %

2011

11,94 %

À l’exception notable du projet de loi de finances pour 2007, les statistiques de la commission des Finances de l’Assemblée nationale indiquent que les amendements jugés irrecevables sont compris dans une fourchette située entre 10 % et 15 % des amendements renvoyés en commission, et représentent en moyenne 12 % des amendements examinés.

Au regard du caractère fondamental de l’article 40 de la Constitution sur le pouvoir d’initiative parlementaire, la Mission juge toutefois opportun la publication systématique en fin de législature d’un bilan de son application.

Proposition n° 18 : Présenter un bilan de la mise en œuvre de l’article 40 à la fin de chaque législature.

5.– Une organisation perfectible de l’examen des lois de finances

a) Le rôle des rapporteurs spéciaux et pour avis

Pour les présidents des commissions auditionnées par la Mission, la LOLF n’a pas en soi modifié le regard que les parlementaires portent sur le projet de loi de finances. L’examen automnal du budget apparaît toujours comme le rendez-vous annuel majeur. La commission de la Défense précise ainsi que malgré l’institution des responsables de programme, la mise en œuvre de la LOLF n’a pas remis en cause l’importance des auditions budgétaires de la commission. Pour de nombreux responsables ministériels, il s’agit cependant d’une rare opportunité d’échange et d’écoute de la part des députés.

Les commissions ont évidemment dû s’adapter pour que les rapporteurs spéciaux et pour avis aient un périmètre d’intervention harmonisé avec la maquette budgétaire issue de la LOLF. Il est par ailleurs intéressant de constater que la LOLF autorise une certaine souplesse à ce sujet : la répartition des rapports spéciaux et des avis en fonction de l’évolution de la maquette est par exemple assez différente entre l’Assemblée nationale et le Sénat.

Certaines commissions désignent les rapporteurs pour avis assez tôt dans l’année civile afin de leur permettre de produire des rapports d’information avant l’examen du budget. À ce sujet, il n’est pas rare d’entendre les rapporteurs pour avis regretter que la LOLF, bien qu’ayant effectivement renforcé les pouvoirs du Parlement en matière de contrôle, ait réservé l’essentiel du bénéfice de ces dispositions à la seule commission des Finances.

La mission s’interroge cependant sur l’intérêt de caler, dans un souci de cohérence, la répartition des avis et rapports budgétaires en fonction de la maquette budgétaire définie en début de programmation pluriannuelle.

Pour le reste, il faut bien constater que la participation des commissaires aux réunions sur les avis budgétaires est variable selon les commissions. D’une manière générale, l’intérêt que marquent les commissaires pour les avis budgétaires est naturellement plus lié à l’opportunité de participer à un débat faisant le tour d’une question sectorielle, qu’à la problématique budgétaire proprement dite. De fait, lorsque l’avis budgétaire constitue le seul rapport de l’année du parlementaire, son implication est nettement plus importante.

b) Les débats en commissions élargies et en séance publique

Caractérisé par la longueur de ses débats, l’examen du projet de loi de finances a fait l’objet de nombreuses tentatives de réforme destinées à l’alléger et à le dynamiser.

À ce titre, une innovation majeure, non directement liée à la LOLF, de l’examen du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale est la procédure d’examen en « commission élargie » : initiée en 1999, cette procédure, réunion commune de la commission des Finances et de la ou des commissions saisies pour avis, élargie à l’ensemble des députés qui le souhaitent, a été inscrite en juin 2006 dans le Règlement de l’Assemblée nationale. L’article 120 de ce règlement prévoit que « la Conférence des Présidents peut décider que l’examen de certaines missions de la seconde partie du projet de loi de finances de l’année aura lieu, à titre principal et à l’exclusion des votes, au cours d’une réunion commune de la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire et de la ou des commissions saisies pour avis. La réunion est coprésidée par les présidents des commissions concernées et son compte rendu est publié au Journal officiel à la suite du compte rendu intégral de la séance au cours de laquelle la mission est discutée. »

Cependant, force est de constater que la procédure d’examen en commission élargie a été l’objet de diverses critiques ces dernières années, le président de la commission des Finances employant même le terme d’échec, lors de l’examen des crédits de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines, le 2 novembre 2010.

Parmi les griefs prononcés à l’encontre de cette procédure on peut notamment évoquer : la participation inégale des députés ; le rôle réduit, donc frustrant, des rapporteurs spéciaux et des rapporteurs pour avis, qui interviennent brièvement pour poser quelques questions ; le manque de spontanéité du débat, lié à ce que les ministres, le plus souvent informés par avance des questions des députés, sont munis de fiches dont ils se bornent parfois à donner lecture ; la faible organisation des débats avec la succession d’interventions incohérentes, une absence ressentie de structuration, la tenue de commission élargies pendant la tenue de débats en séance publique sur des sujets connexes, – situations il est vrai moins fréquentes qu’on ne pouvait le craindre, etc.

Par ailleurs, l’examen des articles rattachés à la mission est renvoyé aux réunions des commissions qui fait suite à la commission élargie proprement dite : il est alors souvent constaté que la discussion sur les amendements est « bâclée », du fait du très petit nombre de députés présents.

Conscient de ces difficultés, mais également de ces avantages en termes de délais, notamment la réduction observée d’une semaine de l’examen de la seconde partie de la loi de finances en séance publique, M. Bernard Accoyer, président de l’Assemblée nationale, a mis en place au début de 2011 un groupe de travail sur les commissions élargies.

Le 18 mai 2011, sur propositions du Président de l’Assemblée nationale, du Président de la commission des Finances et du Rapporteur général de la commission des Finances, un accord s’étant dégagé pour conserver le principe de cette procédure en l’aménageant, les décisions suivantes ont été rendues.

● Le choix des missions examinées en commission élargie sera, comme par le passé arrêté par la Conférence des présidents sur proposition de la commission des Finances, en évitant de retenir des missions faisant intervenir un trop grand nombre de rapporteurs ou revêtant une dimension symbolique, comme le budget relatif aux anciens combattants.

● Il sera demandé aux ministres de renoncer à toute intervention liminaire, ou de la limiter à un très bref propos, la présentation du budget se réduisant à l’envoi, avant la réunion, d’une note de présentation qui sera jointe au compte rendu.

● L’intervention du rapporteur sera limitée à 5 minutes, sous forme de questions, avant une séquence de questions-réponses chacune d’une durée de deux minutes, le droit de réplique étant autorisé ; un système de chronométrage sera installé salle Lamartine afin d’assurer le respect des temps de parole.

● Il sera fixé une durée globale au débat, pour permettre aux ministres de mieux s’organiser.

Pour finir, en ce qui concerne la procédure d’examen du projet de loi de finances, les membres de la Mission ne peuvent que déplorer que le Sénat procède à l’examen de la deuxième partie du projet de loi de finances avant sa transmission et son vote définitif par l’Assemblée nationale.

*

* *

III.– L’EXÉCUTION DES LOIS DE FINANCES : PROFESSIONNALISER LA GESTION, GÉNÉRALISER LA DÉMARCHE DE CONTRÔLE

Sous la Vème République, le monopole d’initiative du Gouvernement en matière de lois de finances, l’encadrement du débat budgétaire et les limitations apportées aux initiatives financières des parlementaires assurent l’emprise de l’exécutif sur le déroulement de la procédure budgétaire.

L’équilibre institutionnel ainsi défini, qui laisse néanmoins une marge de manœuvre aux assemblées, suppose que ces dernières assument pleinement leurs missions constitutionnelles de contrôle budgétaire. « Missions » au pluriel, conformément à la nouvelle rédaction de l’article 24 de la Constitution : le Parlement, outre son rôle de législateur, « contrôle l’action du Gouvernement. Il évalue les politiques publiques. » Des progrès notables ont été accomplis en ce sens depuis la LOLF, il convient néanmoins de regretter l’insuffisante appropriation par le Parlement du nouvel outil qu’est la loi de règlement pour contrôler la déclinaison opérationnelle des lois de finances par l’exécutif.

Dans ce cadre, la LOLF offre aux gestionnaires des outils au service d’une meilleure efficacité de la dépense publique autorisée par le Parlement. Après six années de mise en œuvre, il est certain que les méthodes de gestion publique ont évolué dans le bon sens : la professionnalisation du dialogue de gestion en vue d’une allocation optimale des ressources publiques en fonction des résultats de la performance est un succès.

Toutefois, les contraintes budgétaires et financières actuelles placent les gestionnaires dans une situation de gestion de la « pénurie » rendant toujours plus nécessaire l’approfondissement du contrôle de gestion d’une part (A) et du contrôle parlementaire d’autre part (B).

A.– LA PROFESSIONNALISATION DU DIALOGUE DE GESTION POUR UNE ALLOCATION DES MOYENS MIEUX ÉCLAIRÉE DANS UN CONTEXTE BUDGÉTAIRE CONTRAINT

1.– Un dialogue de gestion de mieux en mieux structuré

Dans son rapport de juillet 2008, la MILOLF avait déjà constaté que, dans la plupart des ministères, plusieurs initiatives avaient permis d’enrichir le dialogue de gestion (41) telles que :

– la création auprès des responsables de programme ou des secrétaires généraux des ministères de cellules d’animation du dialogue de gestion ;

– le développement du contrôle de gestion au niveau ministériel et auprès des responsables de programme et de BOP ;

– la diffusion de circulaires de cadrage visant à mieux structurer les échanges entre responsables de programmes et responsables de BOP ainsi que l’officialisation, par la circulaire budgétaire du 6 août 2007 sur la préparation des BOP pour 2008, de comptes rendus de gestion périodiques.

Toutefois, au-delà des structures et des procédures, le contenu du dialogue de gestion n’apparaissait pas encore satisfaisant, les chartes de gestion censées l’encadrer constituant plus un cadre formel qu’un véritable outil de dialogue.

● Trois ans après, la MILOLF a pu constater de nouveaux progrès démontrant une professionnalisation du dialogue de gestion entre les « RPROG », les « RBOP » et les « RUO ». Bien que progressive, cette professionnalisation du dialogue de gestion se traduit par l’instauration de nouvelles méthodes de travail et de nouveaux outils de contrôle de gestion pour renforcer la diffusion et le suivi de la performance.

Ainsi, au ministère de l’Éducation nationale, le secrétariat général a mis en place depuis septembre 2008 une application informatique « Mélusine », destinée à outiller le dialogue de gestion entre l’administration centrale et les académies (responsables de BOP). Cette application permet aux RBOP de définir leurs cibles académiques en référence aux cibles nationales figurant le projet annuel de performances, en tenant compte du contexte et des résultats académiques. Des indicateurs complémentaires de pilotage ont été insérés dans « Mélusine » au fil des ans pour mettre en regard les résultats et les leviers politiques éducatifs (par exemple l’aide personnalisée, les stages de remise à niveau en primaire, l’accompagnement éducatif au collège et dans les écoles de l’éducation prioritaire…).

L’intérêt majeur de ce dispositif, au-delà du dialogue entre le RPROG et les responsables de BOP, est de permettre des comparaisons entre responsables de BOP, puisque les informations sont totalement transparentes entre les académies. Il existe en outre un tableau de bord de synthèse des performances des responsables de BOP appelé « radars de performance » très utile pour déterminer les priorités des programmes. Depuis juillet 2010, la direction générale de l’Enseignement scolaire s’est également réorganisée pour créer un service du budget, de la performance et des établissements, composés d’une sous-direction de la gestion des programmes budgétaires pour suivre la mise en œuvre des trois programmes budgétaires de la mission Enseignement scolaire ainsi que d’une sous-direction de la performance et du dialogue avec les académies, pour suivre les stratégies et les performances des BOP et assurer un suivi des systèmes d’information.

Cette démarche de structuration du dialogue budgétaire sous l’impulsion de la LOLF se généralise progressivement à l’ensemble des missions.

M. Jean-François Monteils, secrétaire général du ministère de l’Environnement, du développement durable, des transports et du logement (MEDDTL), responsable du programme Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer a par exemple indiqué aux membres de la Mission que depuis 2008, le ministère a défini un socle méthodologique commun et harmonisé décrit dans un manuel ministériel du contrôle de gestion. De plus, un ensemble d'outils spécialisés a été mis en place, avec pour vocation de suivre les évolutions et de permettre d'en faire des analyses chiffrées notamment le DSR – document stratégique régional. Dans ce cadre, l'ensemble des BOP – les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) – ont été amenés à décliner les politiques publiques en région en s'appuyant sur la démarche de performance, notamment par la reprise des indicateurs nationaux et la définition d'indicateurs de pilotage local. Par ailleurs, la répartition des effectifs par service (RES) permet de piloter la mise en place des nouvelles organisations du ministère et informer les directions de programme de la répartition du plafond d'emplois par programme pour chacun des services, et permettre la comparaison avec les données réalisées en ETPT (outil SALSA). Il constitue la référence pour gérer les autorisations de publication des postes. Enfin, un référentiel de contrôle de gestion du ministère, fondé sur une cartographie de ses domaines d'intervention, permet de croiser des données en matière d'ETP, de crédits et des indicateurs de performance améliorant ainsi le contenu du dialogue de gestion.

M. Xavier Tarabeu, adjoint au responsable du programme Justice judiciaire, a pour sa part indiqué que le ministère de la Justice s’était doté d’un outil créant les conditions du dialogue entre les échelons locaux et l’échelon central : l’infocentre Pharos. Cet outil devrait ainsi permettre de répondre en partie à la critique du CIAP (42) puisqu’il analyse sur trois ans l’activité des juridictions en intégrant les principaux indicateurs du PAP. Il permet surtout une déclinaison locale des indicateurs par juridiction (RBOP), avec comparaison aux moyennes des groupes ou nationales, qu’il s’agisse d’indicateurs d’activité, de performance ou d’efficience. Ces documents partagés, et sur lesquels les juridictions ont préalablement fait valoir leurs observations, donnent ainsi une vision des points forts et faibles des juridictions d’un ressort, et pourront servir à centrer les analyses sur les points les plus délicats. Il n’en demeure pas moins nécessaire d’instaurer une charte de gestion ministérielle dans le cadre du programme 310 Conduite et pilotage de la politique de la justice.

Il faut aussi souligner les résultats de la gestion 2010 de la mission Aménagement du territoire (43) qui montrent que la structuration et la professionnalisation du dialogue de gestion jusqu’au niveau des correspondants locaux se sont considérablement renforcées. En effet, l’année 2010 a été marquée par la déclinaison locale de la charte de gestion ainsi que par l’utilisation de l’application informatique permettant un meilleur suivi des actions menées au sein de la mission, le logiciel Presage (44).

Cette démarche d’approfondissement du dialogue budgétaire entre RPROG et RBOP sur la base de la performance est parfois complétée par une démarche d’autoévaluation, telle celle mise en œuvre par le ministère des Affaires étrangères et européennes depuis 2006 pour apprécier l’efficacité de la conduite du changement dans le domaine des ressources humaines. Cette démarche, dénommée « évaluation annuelle à 360° », a été lancée à titre expérimental à l’égard des ambassadeurs et consuls généraux, puis étendue en 2008 aux directeurs de l’administration centrale et en 2009 aux chefs de service. Ce dispositif, validé par le secrétaire général du Gouvernement, est désormais reconnu en interne comme un instrument indispensable au service du dialogue de gestion.

D’une manière générale, ces diverses initiatives devraient favoriser l’appropriation de la démarche de performance et du contrôle de gestion à tous les niveaux de la chaîne de responsabilités. La diffusion de ces « bonnes pratiques » au sein de l’Administration pourrait d’ailleurs être utile pour dépasser les dernières réticences dans certains ministères.

Proposition n° 19 : Recenser et diffuser les « bonnes pratiques » ministérielles liées à la mise en œuvre de la démarche de performance et du contrôle de gestion.

● La MILOLF relève néanmoins des marges de progression encore substantielles pour renforcer le dialogue de gestion et décliner, au niveau des BOP et des UO, la pluriannualité afin de donner plus de visibilité aux gestionnaires locaux.

Ainsi considère-t-elle comme une initiative intéressante le projet du Gouvernement relatif à la gestion budgétaire et comptable publique tendant à réviser le règlement général sur la comptabilité publique de 1962. Ce projet de décret s’inscrit pleinement dans la mise en œuvre de la LOLF, en déclinant, au plus près du terrain, les notions de responsables de programme, de budget opérationnel de programme et d’unité opérationnelle, le lien entre ces rôles et la qualité d’ordonnateur, la programmation budgétaire avec ce qui l’accompagne : le contrôle interne et la maîtrise des risques. Il introduit également en son article 75, dans la partie II consacrée à la gestion budgétaire et comptable de l’État, les contraintes liées au déploiement complet de Chorus. La Mission ne peut donc que souhaiter la signature et la mise en œuvre la plus rapide de ce décret (45).

Proposition n° 20 : Achever, dans les meilleurs délais, la révision du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique afin de décliner au niveau des BOP et des UO les outils de la LOLF et la programmation budgétaire pluriannuelle.

La Mission estime par ailleurs que la comptabilité d’analyse des coûts, prévue à l’article 27 de la LOLF, est encore loin de tenir ses promesses, en particulier vis-à-vis des gestionnaires de « programmes supports ».

En effet, les dépenses et coûts complets présentés dans la dernière partie des RAP ne sont jamais rapprochés des résultats atteints et ne permettent donc pas de juger de l’efficience des politiques publiques. Comme l’a récemment souligné la Cour des comptes, la comptabilité d’analyse des coûts n’est pas pleinement efficace : « Les gestionnaires ministériels ont encore une vision partielle des coûts des actions qu’ils mettent en œuvre. Leur analyse est souvent limitée à la collecte de chiffres, en général très partiels, davantage vécue comme une contrainte que comme un outil d’aide à la décision ». Elle appelle donc le Gouvernement à « faire de la comptabilité d’analyse des coûts un élément de comparaison des résultats de gestion entre ministères, notamment pour renforcer la maîtrise du coût des fonctions support (46) ».

La comptabilité d’analyse des coûts n’est donc pas mise au service de la performance. Ces éléments seraient pourtant de nature à enrichir l’analyse des résultats des RBOP et des RPROG, en les replaçant dans leur contexte (par exemple le coût des fonctions support) et en les situant dans une perspective pluriannuelle (évolution de la situation patrimoniale, réduction des charges à payer…). Les gestionnaires pourraient ainsi en tirer des conclusions opérationnelles et managériales et le Parlement exercer son contrôle dans de meilleures conditions (voir infra).

Il conviendrait donc, avec le déploiement complet de Chorus au 1er janvier 2012, que des améliorations soient rapidement apportées dans ce domaine, afin que cet exercice comptable soit autre chose qu’une formalité sans utilité concrète effectuée ex post par les directions des affaires financières.

Proposition n° 21 : Rendre enfin opérationnelle et compréhensible la comptabilité d’analyse des coûts et bâtir un système de comptabilité analytique.

2.– Quelle liberté de gestion face au mur du déficit ?

a) Une adaptation nécessaire de la gestion publique par la performance

Les gestionnaires de programme auditionnés par la Mission ont tous mis en évidence le rétrécissement des marges de redéploiement de crédits offertes par la LOLF du fait de la contrainte budgétaire actuelle.

La Cour des comptes observe également que la globalisation des crédits n’a plus guère de sens alors que de nombreux cas de sous budgétisation sont recensés. La récurrence de l’ouverture de crédits en gestion suggère que l’administration est confrontée à une insuffisance de dotations initiales qui rend sans objet la capacité théorique d’adaptation des gestionnaires en cours d’exercice (47).

Comme le concédait le précédent directeur du Budget, M. Philippe Josse, le principal objectif des gestionnaires est désormais de réussir à concilier la couverture de leurs dépenses obligatoires et la mise en œuvre de réformes parfois votées à moyens constants alors même que des dérapages peuvent être constatés en cours de gestion sur les dépenses obligatoires et que de nouvelles priorités peuvent être définies par le ministre. Par conséquent, toute l’habileté des RPROG ou des RBOP réside aujourd’hui dans leur capacité à gérer, sous tension, les moyens mis à leur disposition (crédits et effectifs). La Mission constate d’ailleurs que l’application de normes transversales d’économies sur les dépenses, aussi indispensables soient-elles, rend l’exercice d’autant plus difficile.

Sur ce point, M. Xavier Tarabeu, adjoint à la directrice des Services judiciaires du ministère de la Justice, a indiqué au cours de son audition que « toutes les économies du ministère sont orientés depuis trois ans sur le financement des frais de justice qui ne cessent d’augmenter pour représenter 61 % des dépenses de fonctionnement du ministère en 2011». Il a cependant précisé que si la contrainte budgétaire est certaine, elle n’a pas pour effet de démobiliser les gestionnaires : les chefs de cour (RBOP) se mobilisent fortement pour mieux piloter ces dépenses d’autant que la mise en place de l’outil informatique Pharos leur permet de se positionner les uns par rapport aux autres selon une grille d’indicateurs de performances. Il en conclut à l’instauration d’une « logique de performance de répartition de la pénurie ».

Dans ces conditions, la Mission considère que le renforcement du contrôle de gestion et les résultats de la démarche de performance doivent permettre d’optimiser l’allocation des moyens entre les différents BOP, ou, en l’absence de moyens nouveaux, de réfléchir à la réaffectation la plus pertinente entre les BOP.

La contrainte budgétaire oblige également les responsables de programme à rationaliser la gestion, en évitant la dispersion des crédits sur un grand nombre de BOP en services déconcentrés, pour préférer une organisation avec quelques BOP centraux et des UO en nombre limité au niveau régional. Ainsi, pour la mission Travail et emploi, le mouvement de reconcentration des crédits s’est renforcée en 2010 sous l’impulsion à la fois de la RGPP et de la mise en place d’outils interministériels de gestion (Chorus).

Si la Mission est par principe favorable à la réduction du nombre de BOP lorsque ceux-ci représentent un volume budgétaire trop étroit et ne disposent pas de la « taille critique » offrant une réelle marge de manœuvre, elle s’oppose en revanche à la reconcentration des BOP au niveau central. Elle préconise donc la fusion de BOP au niveau interdépartemental ou interrégional plutôt que la reconcentration, laquelle s’apparente souvent à une technique de « fléchage » des crédits. En effet, dans la plupart des cas, les UO de BOP centraux sont alimentées par une procédure (NAPA) qui conduit à affecter les crédits sur un objet précis avant leur transmission au niveau opérationnel (48).

La Mission ne peut que donc que réitérer ses précédentes propositions destinées à offrir ou restaurer la liberté de gestion des RBOP au niveau déconcentré.

Proposition n° 22 : Poursuivre de façon raisonnée la réduction du nombre de BOP, en supprimant les BOP de taille trop réduite et en limitant le nombre de BOP centraux.

Proposition n° 23 : Prohiber, par une circulaire du Premier ministre, les pratiques de « fléchage des crédits » déconcentrés depuis le niveau central.

Dans le même sens, la Mission constate l’existence d’une autre pratique contestable – parfois à tort assimilée à une forme de « régulation budgétaire » – consistant pour le responsable de programme à ne déléguer au niveau déconcentré qu’une partie des crédits en début d’année. Les délégations tardives ou fractionnées de crédits réduisent la capacité d’anticipation des gestionnaires locaux et, partant, entravent d’autant leur liberté de gestion. Comme l’ont déjà souligné MM. Alain Lambert et Didier Migaud, « redonner corps à la notion de budget global par politique publique » supposent de déléguer la quasi-totalité des crédits (hors réserve de précaution) aux responsables de BOP en début d’année.

Pour y parvenir, la Mission recommande donc de formaliser au sein des chartes de gestion ministérielles les « bonnes pratiques » de délégation des crédits en début d’année et de re-programmation en cours d’exercice.

Proposition n° 24 : Formaliser au sein des chartes de gestion ministérielles les « bonnes pratiques » de délégation des crédits en début d’année et de re-programmation en cours d’exercice.

Enfin, compte tenu des contraintes budgétaires actuelles et de la mise en place de normes transversales d’économies sur les dépenses dans le cadre de la RGPP, la Mission estime indispensable d’accentuer la démarche de performance initiée par la LOLF de trois manières.

● La première modalité pourrait consister à systématiser l’envoi de lettres de mission par les ministres en charge des missions à tous les RPROG lors de leur nomination. Ces lettres seraient transmises simultanément aux rapporteurs spéciaux et aux rapporteurs pour avis. Elles permettraient de mieux cerner les contours du rôle confié au RPROG dès lors qu’il n’est pas forcément comptable de l’ensemble de la politique dont il a théoriquement la charge.

Proposition n° 25 : Systématiser l’envoi de lettres de mission à tous les responsables de programme lors de leur nomination et les transmettre simultanément aux rapporteurs spéciaux et rapporteurs pour avis.

● Une deuxième voie consisterait à instaurer un processus de contractualisation des BOP avec le RPOG, à l’image des contrats d’objectifs et de performance signés entre les opérateurs de l’État et leur ministère de tutelle. Il s’agirait de fixer des objectifs à atteindre, mesurés par des indicateurs issus des PAP mais ramenés à des valeurs locales et non plus nationales pour favoriser les comparaisons entre les BOP et entre les UO, tout en garantissant un « retour » vers les agents d’une partie des gains de productivité ainsi obtenus.

Cette démarche est à l’étude au ministère de l’Éducation nationale. Constatant l’absence de lien entre objectifs ou résultat de performance et allocation des moyens aux académies, M. Jean-Michel Blanquer, secrétaire général et RPROG, propose une contractualisation avec chaque académie, fondée sur les objectifs de performance figurant dans les PAP. En fonction des résultats des différentes académies, un partage des gains, liés par exemple à une diminution du redoublement, serait bénéfique tant pour les élèves que pour les services concernés.

Un tel processus de contractualisation pourrait donc redonner un nouveau souffle à l’allocation des moyens au regard de la performance, sous réserve d’une concertation approfondie entre les RPROG, les gestionnaires locaux et leurs services. Il s’agit en effet d’éviter qu’un tel processus soit ressenti, une fois de plus, comme une nouvelle contrainte unilatérale de l’administration centrale vers ses services déconcentrés, uniquement destinée à réduire le déficit de l’État. Une expérimentation, sur une base volontaire, pourrait donc être une voie à privilégier.

Proposition n° 26 : Étendre les expérimentations, au sein des ministères volontaires, d’une contractualisation entre les responsables de programme et de BOP garantissant un « retour » vers les agents d’une partie des gains de productivité.

● La troisième piste serait de renforcer le lien entre la performance des agents au regard des objectifs et indicateurs définis dans les PAP, et leur rémunération indemnitaire. La mise en place du décret n° 2009-1211 du 9 octobre 2009 relatif à la prime de fonctions et de résultats (PFR) des chefs de services, des directeurs adjoints, des sous-directeurs, des experts de haut niveau et des directeurs de projet, y contribue. Cette nouvelle prime, qui a vocation à se substituer aux régimes indemnitaires actuels de la filière administrative au plus tard en 2012, constitue en effet un outil pertinent pour décliner la démarche de performance sur le plan individuel.

Rappelons que la PFR est un dispositif indemnitaire qui comprend deux parts cumulables et modulables indépendamment l’une de l’autre par application de coefficients multiplicateurs à un taux de référence (exprimé en euros) : une part liée aux fonctions exercées, modulable de 1 à 6 pour tenir compte des responsabilités, du niveau d’expertise et des sujétions spéciales liées aux fonctions exercées ; une part liée aux résultats individuels, modulable de 0 à 6 pour tenir compte de la performance et de la manière de servir de l’agent. La modulation intègre, sur cette part, l’atteinte ou non par l’agent des objectifs qui lui ont été fixés. Si le montant de la part fonctionnelle a vocation à rester relativement stable dans le temps, le montant de la part liée aux résultats individuels attribué à un agent est révisable en fonction des mérites et des résultats.

La Mission ne peut qu’espérer que la PFR sera mise en œuvre au plus vite dans tous les ministères. Elle milite pour qu’elle soit étendue à tous les agents de l’administration, et pas seulement réservée à la catégorie A+, par le biais d’une déclinaison des indicateurs de performance adaptée aux autres catégories d’agents concernées. Un dispositif complémentaire de rémunération de la performance collective des services pourrait également être introduit afin de rassembler tous les agents autour de la démarche de performance.

Les auditions menées par la MILOLF montrent que la PFR est déjà mise en œuvre dans bon nombre de ministères et qu’à l’initiative des RPROG, elle peut être étendue à d’autres catégories d’agents que celles visées par le décret.

Par exemple, en 2011, le dispositif de la PFR a été mis en place au ministère de la Justice et des libertés pour les attachés d’administration. En 2012, ce dispositif devrait être étendu au corps des secrétaires administratifs concomitamment à l’intégration de ce corps de catégorie B dans le NES (nouvel espace statutaire). Une réflexion est en cours pour introduire un dispositif similaire pour les greffiers en chef dont le régime indemnitaire ne permet pas de différencier de manière suffisante les postes à responsabilité de certains directeurs de greffe.

De même, au ministère de l’Éducation nationale, la PFR a été ouverte à la catégorie A en 2009 et à la catégorie B en 2010 pour les personnels de la filière administrative. Une réflexion est en cours pour l’étendre aux personnels de direction d’établissement scolaire en 2011/2012.

Enfin, le MEEDTL, qui a lui aussi mis en œuvre le décret de 2009, réfléchit actuellement à la mise en place d’un dispositif de rémunération de la performance collective afin de rassembler les agents dans une démarche commune tournée vers l’amélioration des services rendus.

Proposition n° 27 : Généraliser la prime de fonctions et de résultats à l’ensemble des catégories d’agents et expérimenter un dispositif complémentaire de rémunération collective des agents en fonction de la performance des BOP.

b) L’évaporation de la fongibilité asymétrique

Depuis 2008, la fongibilité des crédits a été peu utilisée, notamment dans sa composante asymétrique entre les crédits de personnel et les autres catégories de crédits : chaque année, ce sont moins de 250 millions d’euros qui sont ainsi utilisés, ce qui représente environ 0,2 % des crédits initiaux du titre 2 (dépenses de personnel), à comparer à 385 millions d’euros en 2006.

Comme la Mission l’a déjà mentionné dans ses rapports précédents, le regroupement des dépenses de personnel sur des programmes ou actions supports, comme par exemple pour la mission Solidarité, insertion et égalité des chances, la mission Sécurité civile, la mission Justice ou encore pour la mission Culture, conduisent à limiter le recours à la fongibilité asymétrique par les RPROG qui ne sont pas, par ailleurs, secrétaires généraux.

À cette difficulté s’ajoute désormais une autre contrainte résultant de la mise en œuvre de la règle transversale de non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite(49). Les plafonds d’emplois ministériels et les dépenses de personnel des ministères sont donc de plus en plus contraints de telle sorte que la capacité des gestionnaires – RPROG ou RBOP – à mettre en œuvre la fongibilité asymétrique se réduit comme une « peau de chagrin ». Cette règle renforce d’ailleurs le poids des secrétaires généraux en obéissant à une exigence autre que celle de la performance, le pilotage central de la politique de diminution des effectifs.

Les auditions menées par la MILOLF en 2011 ont confirmé ce constat qui accentue les errements déjà dénoncés par la Mission dans ses précédents rapports :

– la contrainte budgétaire aurait ainsi renforcé les consignes nationales de « saturation » des plafonds d’autorisation d’emploi, qui visent à optimiser les moyens par une réduction des vacances de postes, et qui empêchent de dégager des marges de manœuvre ;

– lorsque des marges de manœuvre sur le titre 2 sont malgré tout dégagées, elles sont difficiles à « recycler » à d’autres fins, du fait des délais très contraints en fin de gestion, du rapatriement des crédits au niveau central ou encore des annulations de crédits, destinées à respecter la norme de dépense régissant l’ensemble du budget général ;

– la situation est encore moins favorable lorsque, au vu des crédits de titre 2 non consommés, les moyens en personnel et le plafond d’emploi pour l’année suivante étant réduits d’autant, ce qui s’apparente à une forme de « double peine ».

La Mission ne conteste nullement l’importance d’améliorer la maîtrise de la masse salariale et des effectifs de l’État mais considère que cet objectif ne doit pas annihiler la fongibilité asymétrique, conçue à l’origine comme l’une des innovations essentielles de la LOLF.

Afin de « protéger » cette innovation, elle recommande donc d’inscrire la fongibilité asymétrique dans une perspective pluriannuelle, les crédits non consommés devant pouvoir bénéficier de davantage de souplesse dans les reports vers l’exercice suivant. En effet, ce n’est généralement qu’en fin d’année, au moment de la pré-liquidation de la paye de décembre, que les responsables ont réellement connaissance des reliquats de crédits de personnel. Faciliter leur report permettrait d’« intéresser » les gestionnaires aux économies réalisées, tout en leur évitant d’agir dans la précipitation.

La révision du décret de 1962, précédemment mentionné, pourrait être l’occasion de faire vivre la fongibilité asymétrique dans cette perspective en facilitant les reports des crédits économisés d’un exercice à l’autre.

Proposition n° 28 : Mettre à profit la révision du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 pour réanimer la fongibilité asymétrique dans une perspective pluriannuelle, en particulier en facilitant les reports des crédits économisés d’un exercice à l’autre.

B.– LE CONTRÔLE PARLEMENTAIRE DE L’EXÉCUTION BUDGÉTAIRE : UN EXERCICE INSUFFISANT MALGRÉ DES POUVOIRS RENFORCÉS

Contrepartie indispensable de la globalisation des crédits au sein d’enveloppes fongibles, le renforcement du contrôle parlementaire sur l’exécution des lois de finances, et plus particulièrement sur les résultats de la performance, constituait un des éléments fondamentaux de l’appropriation de la LOLF par les parlementaires.

L’ambition de la LOLF était donc de redonner toute sa portée aux principes énoncés aux articles XIV et XV de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui proclament que « tous les citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi (...) » et que « la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ».

Force est de constater, six ans après la mise en œuvre de la LOLF, que l’essai n’est pas totalement transformé, l’examen du projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion, apparaissant comme le « rendez-vous » manqué des parlementaires.

1.– Les améliorations espérées

a) Des objectifs ambitieux

Le renforcement du contrôle parlementaire en matière budgétaire issu de la LOLF repose sur le triptyque : « objectifs, résultats, contrôle ». Chaque gestionnaire disposant, a priori, d'une enveloppe globale de crédits en grande partie fongibles, les contrôles du Parlement doivent être essentiellement exercés lors de l'examen du projet de loi de règlement, qui devait acquérir ainsi une importance considérable dans le nouvel « édifice budgétaire » proposé par la réforme (50).

La LOLF a donc instauré plusieurs mesures destinées à renforcer les pouvoirs de contrôle des parlementaires et le rôle de l'examen de la loi de règlement devenue « loi de règlement des comptes et rapport de gestion ». L’encadrement de la régulation budgétaire par voie réglementaire ainsi que le développement sensible des informations jointes au projet de loi de règlement et l'obligation pour les ministères de rendre compte des résultats obtenus sur chacun de leurs programmes participent de cette volonté.

La revalorisation du projet de loi de règlement participe également d'un second objectif : celui d'éclairer l'examen du prochain projet de loi de finances à la lumière des enseignements tirés de l'exécution du dernier budget clos. Les informations associées au projet de loi de règlement ont donc été conçues dans cette perspective, afin de faciliter une évaluation de la performance des programmes ministériels susceptible de déboucher sur une réallocation des crédits budgétaires par le Parlement. Cet exercice est rendu possible compte tenu de la réduction du délai de dépôt du projet de loi de règlement par rapport à la procédure en vigueur sous l’empire de l’ordonnance de 1959 ainsi que par la consécration organique de la pratique du débat d’orientation budgétaire. Il ne s’agit pas d’associer le Parlement à la préparation du budget mais de prévoir une information et une consultation renforcée de manière à éclairer ses choix de réallocations éventuelles de crédits lors de l’examen du projet de loi de finances.

b) Des outils de contrôle renforcés

● L’encadrement des mouvements de crédits réglementaires

Même si la LOLF, comme avant elle l’ordonnance organique de 1959 et les textes qui l’ont précédée, repose toujours sur les grands principes du droit budgétaire classique (annualité, universalité, unité, spécialité), elle n’en met pas moins à la disposition du pouvoir exécutif une panoplie de techniques peu ou prou dérogatoires, toutes destinées à assurer une gestion plus souple, capable de s’adapter rapidement aux inévitables à-coups conjoncturels et aux besoins imprévisibles ou mal prévus (crédits évaluatifs, rétablissement de crédits, rattachement de fonds de concours, répartition de crédits globaux, transferts de crédits, virements, reports de crédits, ouverture de crédits par décret d’avance en cas d’urgence, gel de crédits, annulations de crédits) (51).

Il en résulte que l’utilisation des crédits peut s’éloigner plus ou moins sensiblement de l’autorisation de dépense fixée par le Parlement en lois de finances. La tentation est forte de voir dans le Parlement un pouvoir d’autant plus affaibli que l’exécution budgétaire lui échappe en grande partie, et cela même s’il dispose de nombreux et multiformes moyens de contrôle (cf. infra).

La situation dégradée des finances de l’État, en conduisant à un recours quasi systématique à la pratique dite de la « régulation budgétaire », a sans conteste accentué cette impression. Pour autant, la LOLF encadre désormais plus strictement qu’auparavant l’usage de ces techniques dérogatoires, montrant ainsi que les nécessités d’une gestion moderne des finances de l’État ne supposent pas nécessairement un affaiblissement de la portée de l’autorisation parlementaire.

En premier lieu, elle prévoit des modalités renforcées d’information des commissions des Finances : avant sa publication, tout projet de décret d’annulation leur est transmis, ainsi qu’aux « autres commissions concernées », seul le contenu des annulations étant susceptible d’éclairer la notion de « commission concernée ». Le Président et le Rapporteur général sont destinataires d’un courrier du ministre du Budget ; le Président en informe les commissaires et met le projet de décret à leur disposition ; le Rapporteur général analyse le contenu du projet et, le cas échéant, sollicite les services du ministère des Finances pour obtenir les précisions qu’il juge nécessaires. Par ailleurs, les gels doivent aussi faire l’objet d’une information officielle de la Commission, l’article 14-III de la LOLF prévoyant que « tout acte, quelle qu’en soit la nature, ayant pour objet ou pour effet de rendre des crédits indisponibles, est communiqué aux commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances ».

En deuxième lieu, le calendrier de la régulation a été fortement avancé, grâce à une disposition introduite dans l’article 51 de la LOLF par la loi organique du 12 juillet 2005. Elle prévoit qu’est joint au projet de loi de finances de l’année « une présentation des mesures envisagées pour assurer en exécution le respect du plafond global des dépenses du budget général voté par le Parlement, indiquant en particulier, pour les programmes dotés de crédits limitatifs, le taux de mise en réserve prévu pour les crédits ouverts sur le titre des dépenses de personnel et celui prévu pour les crédits ouverts sur les autres titres ». Si la régulation est ainsi annoncée dès le dépôt du projet de loi de finances, le dispositif prévu n’en reste pas moins indicatif, le Gouvernement restant libre de s’écarter des informations données au Parlement ou de laisser aux ministères une certaine capacité à ajuster la répartition de l’effort entre les programmes. Cependant, la régulation est désormais intégrée de plein droit dans le champ du débat parlementaire. En pratique, les « mesures envisagées » par le Gouvernement font l’objet d’un développement en fin de l’exposé des motifs du projet de loi de finances. Y sont précisés, non seulement le volume de la « réserve de précaution », mais aussi les taux de mise en réserve appliqués respectivement aux crédits de personnel et aux autres crédits.

Enfin, jusqu’à l’entrée en vigueur en 2002 de l’article 14 de la LOLF, le Gouvernement, soucieux de rester le seul maître de l’exécution budgétaire, ne procédait que très rarement – et pour des montants limités – à des annulations de crédits par voie législative. L’examen des collectifs budgétaires reflétait alors une situation curieuse : l’arrêté d’annulation de crédits associé au projet de loi de finances rectificative afin de « gager » tout ou partie des ouvertures de crédits supplémentaires demandées au Parlement était publié au Journal officiel peu après le dépôt du projet de loi. Le législateur, n’ayant à se prononcer par un vote que sur les ouvertures de crédits et sur le nouvel équilibre résultant du collectif, se trouvait ainsi privé de choix véritable et ne pouvait qu’accepter ou rejeter en bloc les ajustements opérés. En effet, une fois intervenu l’arrêté d’annulation, la base de référence pour l’application de l’article 40 de la Constitution est constituée par la dotation initiale ainsi minorée ; les amendements d’origine parlementaire tendant à revenir sur une annulation sont inévitablement entachés d’irrecevabilité. On comprend bien pourquoi le Gouvernement s’est toujours gardé, sauf rares exceptions, de s’engager sur une voie a priori périlleuse, d’autant que le montant des annulations a parfois atteint des niveaux très élevés : 2,8 % des crédits initiaux nets du budget général en 1984, 2,7 % en 1993, avec une moyenne annuelle de 1,6 % de 1981 à 1999 et de 0,5 % de 1999 à 2006.

En plafonnant à 1,5 % des crédits initiaux le montant cumulé des crédits susceptibles d’être annulés par décret, la LOLF a conduit à faire basculer de facto dans le champ de la loi de finances rectificative de fin d’année les annulations prises en compte dans l’équilibre du collectif. Depuis 2002, le collectif de fin d’année procède donc à la fois à l’ouverture de crédits complémentaires et aux annulations nécessaires pour définir un nouvel équilibre budgétaire. De ce fait, le Parlement est mis à même de débattre de l’ensemble des ajustements proposés par le Gouvernement, de les amender le cas échéant, enfin de les approuver par son vote.

● Le renforcement des pouvoirs de contrôle des parlementaires

– La multiplication des « collectifs budgétaires »

L’article 35 de la LOLF prévoit que « seules les lois de finances rectificatives peuvent, en cours d’année, modifier [certaines] dispositions des lois de finances ». Le Gouvernement doit donc déposer un projet de loi de finances rectificative lorsqu’il souhaite apporter des modifications aux dispositions de la loi de finances de l’année qui appartiennent au domaine exclusif des lois de finances (ouvertures de crédits supplémentaires ou nouveaux, révision des évaluations des ressources du budget de l’État, modification des données générales de l’équilibre, modification des plafonds des autorisations d’emplois, affectations de recettes à d’autres personnes morales ou au sein du budget de l’État). De plus, l’article 13 de la LOLF prévoit le dépôt immédiat (ou à l’ouverture de la session du Parlement) d’un projet de loi de finances portant ratification des crédits ouverts par décret d’avance.

Entre 1976 et 1987, on dénombre 24 collectifs budgétaires, 1981 étant la seule année marquée par le dépôt de 4 collectifs. Entre 1988 et 2008, la fréquence des collectifs budgétaires a fortement diminué puisque le Gouvernement n’en a déposé que 16, et ce malgré l’entrée en vigueur de la LOLF limitant à 1,5 % des crédits initiaux le montant cumulé des crédits susceptibles d’être annulés par décret.

En revanche, cette pratique s’est considérablement développée depuis la crise économique et financière de 2008 afin de permettre au Gouvernement de réagir dans les meilleurs délais compte tenu des montants en jeu. L’on compte ainsi deux lois de finances rectificatives en 2008, l’une pour prendre en urgence des mesures exceptionnelles en faveur du secteur financier, l’autre pour procéder aux ajustements de fin d’année ; trois en 2009 dont deux pour mettre en œuvre le plan de relance de l’économie française ; et quatre en 2010 pour lancer le programme des investissements d’avenir (LFR 1), apporter un soutien financier à la Grèce (LFR 2), participer au mécanisme européen de stabilisation financière (LFR 3) et procéder aux ajustements de fin de gestion (LFR 4).

Bien qu’examinés le plus souvent en urgence dans des délais très brefs, les « collectifs budgétaires » sont l’occasion pour le Parlement d’infléchir en cours d’exercice la politique budgétaire du Gouvernement et, à tout le moins, un moment privilégié du contrôle parlementaire sur l’exercice en cours.

– L’amélioration du contrôle parlementaire en cours d’exécution

Avec l’article 57 de la LOLF, sont désormais consacrés au niveau organique les compétences des commissions des Finances pour suivre et contrôler l’exécution des lois de finances mais également, ce qui est une innovation majeure, pour évaluer « toute question relative aux finances publiques ». Pour ce faire, le champ du pouvoir de communication des rapporteurs spéciaux, composante essentielle des pouvoirs de contrôle, est élargi à « tous les renseignement financier et administratif qu’ils demandent », sans qu’il ne soit plus mentionné que ces documents doivent être de nature à faciliter leur mission. En pratique, cela leur permet notamment d’avoir communication des rapports des inspections générales des finances, des affaires sociales, de l’administration, etc.

De plus, les auditions organisées par les commissions permanentes, et notamment par la commission des Finances, ont pris une dimension nouvelle avec la LOLF en permettant des échanges plus approfondis avec l’administration sur l’exécution en cours. En effet, en faisant des responsables du programme, hauts fonctionnaires des ministères, les interlocuteurs naturels du Parlement à côté des ministres, elle a ouvert la voie à une multiplication d’auditions à caractère technique autant que politique. Ainsi, tous les présidents de commissions auditionnés par la Mission ont confirmé l’organisation régulière d’auditions avec les RPROG, soit au niveau de l’ensemble de la Commission, soit par le biais d’auditions bilatérales avec les rapporteurs spéciaux ou les rapporteurs pour avis. L’article 57 précité permet en outre aux rapporteurs spéciaux de convoquer une audition contraignante avec l’accord conjoint du Rapporteur général et du Président de la commission des Finances.

Les commissions peuvent également charger certains de leurs membres de constituer une mission d’information ou désigner un rapporteur d’information sur tel ou tel sujet de son choix. L’article 57 de la LOLF, dans sa rédaction issue de la loi organique du 12 juillet 2005, a d’ailleurs étendu les pouvoirs des rapporteurs spéciaux à un ou plusieurs membres des commissions chargées des finances désignés chaque année par elles à cet effet. Expressément conçu pour développer les droits de l’opposition, ce dispositif, qui voit sa mise en œuvre rester soumise à une décision expresse de la Commission – donc de la majorité parlementaire –, est encadré dans son objet et sa durée. Cette précision ne vaut en pratique qu’à l’Assemblée nationale puisqu’au Sénat tous les commissaires aux finances - hormis le Rapporteur général – sont rapporteurs spéciaux. La commission des Finances en a fait application pour la première fois lors de sa réunion du 6 juin 2006, en confiant deux rapports d’information à des membres de l’opposition sur le fondement de l’article 57. En pratique, l’usage consistant à confier systématiquement les rapports d’information à deux parlementaires, l’un de la majorité, l’autre de l’opposition, explique que cette disposition soit peu utilisée en tant que telle.

De plus, depuis 2003, la commission de la Défense de l’Assemblée nationale a créé une mission d’information sur le contrôle de l’exécution des crédits de la défense chargée de contrôler la consommation effective des crédits de la défense. Depuis cette date, les membres de la mission peuvent ainsi vérifier si l’autorisation budgétaire annuelle ainsi que les objectifs de la programmation militaire sont bien respectés. La mission rencontre chaque trimestre les responsables de la défense et ceux de la direction du Budget. Ces échanges permettent, d’une part, de rapprocher les analyses parfois divergentes entre les deux ministères et, d’autre part, d’identifier les problèmes dès leur apparition. Les difficultés du progiciel Chorus sont par exemple apparues dès le premier trimestre de l’année 2010. En réponse aux demandes des parlementaires, le ministère a alors constitué une équipe dédiée et mis en place des procédures dérogatoires de paiement.

Enfin, des missions d’information communes à plusieurs commissions permanentes peuvent également être mises en place. Moins encadrée que celle des commissions d’enquête, la conduite des travaux de ces différents organes est très libre, leur durée étant notamment variable selon les circonstances. Ces missions communes peuvent constituer une réponse utile à certaines critiques des parlementaires qui ne sont pas commissaires aux finances : ainsi, le président de la commission de la Défense précisait à la Mission qu’il regrettait que « la LOLF différencie les pouvoirs d’investigation des députés et réserve aux seuls membres de la commission des Finances certaines prérogatives. Il ne s’agit nullement d’affaiblir les compétences de la commission des Finances ; au contraire l’action coordonnée de plusieurs commissions pourrait renforcer le poids du Parlement et inciter le Gouvernement à mieux rendre compte de l’usage des deniers publics ».

L’ensemble des travaux ainsi réalisés relève autant de l’évaluation des actions ou politiques conduites dans tel ou tel secteur par la puissance publique que du contrôle budgétaire classique. On assiste, en effet, depuis quelques années, au développement de la fonction d’évaluation des politiques publiques, qui a connu un nouvel essor grâce à la création en février 1999 d’une mission d’évaluation et de contrôle au sein de la commission des Finances. L’article 57 de la LOLF a consacré ce mouvement en confiant à la commission des Finances le soin de procéder à « l’évaluation de toute question relative aux finances publiques ».

Or l’article 58 de la LOLF a considérablement favorisé l’essor du contrôle de l’évaluation des politiques publiques en formalisant les différents aspects de la mission d’assistance des commissions des Finances du Parlement dans le cadre leur mission d’évaluation et de contrôle, confiée à la Cour des comptes.

Outre le traditionnel rapport annuel de la Cour des comptes, la LOLF prévoit désormais le dépôt d’un rapport préalable à l’examen de la loi de règlement relatif aux résultats de l’exécution de l’exercice antérieur, le dépôt du rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques préalables au débat d’orientation budgétaire (devenu débat d’orientation des finances publiques), ainsi que le dépôt d’un rapport conjoint au dépôt de tout projet de loi de finances sur les mouvements de crédits. S’ajoute à cela la transmission aux commissions des Finances des rapports sur la certification des comptes de l’État et de la Sécurité sociale, des référés adressés aux ministres et des rapports d’observations définitives sur les services ou organismes que la Cour contrôle. L’ensemble de ces informations constitue donc une source essentielle d’informations des parlementaires sur l’exécution budgétaire et comptable, indépendante du pouvoir exécutif.

Plus encore, le 2° de l’article 58 de la LOLF autorise désormais les commissions des Finances du Parlement à demander à la Cour des comptes « toute enquête (…) sur la gestion des services ou organismes qu’elle contrôle ». Cette assistance constitue souvent le point de départ d’une enquête qui, si elle aboutit à démontrer des anomalies sur le plan budgétaire, est relayée par les travaux de la mission d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale. Auditionnés par la Mission, les représentants de la Cour des comptes se sont félicités de cette « coopération renforcée » avec le Parlement qui se traduit concrètement par la réalisation d’une douzaine de rapports par an réalisés dans un délai maximum de 8 mois et – dans la mesure où l’ordre du jour parlementaire le permet – par des auditions en commissions lors de la présentation de ces rapports.

Le mouvement de coopération entre la Cour des comptes et le Parlement, largement renforcé par la LOLF par rapport à la pratique antérieure, n’a cessé de s’amplifier au fil des ans. Ainsi, la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008 a-t-elle étendu la mission d’assistance de la Cour à l’ensemble du Parlement – et non plus seulement aux commissions des Finances. De même, la proposition de loi déposée par M. Bernard Accoyer, Président de l’Assemblée nationale, visant à renforcer les moyens du Parlement en matière de contrôle de l’action du Gouvernement et d’évaluation des politiques publiques, adopté le 3 février 2011, organise les modalités d’assistance de la Cour des comptes à l’ensemble des commissions permanentes et au Comité d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale (52).

● La revalorisation du projet de loi de règlement

Considéré par les pères de la LOLF comme le rendez-vous incontournable des parlementaires, le projet de loi de règlement repensé, devait être l’occasion de juger de l’action du Gouvernement par rapport aux objectifs fixés dans les projets annuels de performances annexés au projet de loi de finances et conférer au Parlement un regard nouveau sur l’évolution de la situation financière de l’État grâce au compte général de l’État.

Les rapports annuels de performances, devaient ainsi, « considérablement bouleverser les conditions d’examen du projet de loi de règlement » en ouvrant « la faculté au Parlement de se lancer dans un véritable examen de la performance des programmes et donc de la dépense publique » (53) : les objectifs du ministre étaient-ils pertinents ? Ont-ils été atteints ? Comment s’expliquent les écarts ? Quels choix les responsables de programme ont-ils effectué ?

Pour ce faire, les RAP sont regroupés dans des fascicules par mission, qui présentent :

– pour l’ensemble de la mission : un tableau comparant, par programme, les crédits ouverts et les crédits consommés (en autorisations d’engagement et en crédits de paiement) ; deux tableaux comparant les consommations de l’année et celles de l’année précédente, déclinées respectivement par programme et action et par programme et titre ;

– pour chaque programme, le rapport annuel de performances proprement dit et les informations relevant des annexes explicatives développant « le montant définitif des crédits ouverts et des dépenses constatées » et les résultats de la comptabilité d’analyse des coûts. Afin de présenter une vision synthétique des politiques publiques, les RAP ont été enrichis, à l’occasion du projet de loi de règlement pour 2009, par une analyse de la première année de la programmation pluriannuelle 2009-2011, composée d’un bilan stratégique et d’un bilan des réformes intervenues ou engagées en 2009. Sont également présentées les dépenses fiscales rattachées à chaque programme, ainsi que les réalisations effectives des principaux opérateurs concourant à chaque programme et les emplois rémunérés par eux.

Les RAP vont ainsi beaucoup plus loin, en termes de richesse d’information, que les comptes rendus de gestion établis par chaque ministre à partir du projet de loi de règlement pour 1999 et qui, d’ailleurs, à compter de l’adoption de la LOLF en 2001, sont peu à peu tombés en désuétude.

Avec la LOLF, l’État dispose aussi, on l’a vu, en plus de la traditionnelle comptabilité budgétaire, d’une comptabilité générale. Cette innovation vise tant à améliorer le contrôle parlementaire qu’à professionnaliser la gestion publique.

Comme sous l’ordonnance 1959, la loi de règlement continue donc de constater les montants définitifs des dépenses et des recettes budgétaires et des ressources et des charges de trésorerie, mais elle va désormais au-delà : elle « approuve le compte de résultat de l’exercice, établi à partir des ressources et des charges constatées (…). Elle affecte au bilan le résultat comptable de l’exercice et approuve le bilan après affectation ainsi que ses annexes » (III de l’article 37 de la LOLF). Le projet de loi de règlement est ainsi accompagné du Compte général de l’État (CGE), qui comporte la balance générale des comptes, le compte de résultat, le bilan et ses annexes (notamment le « hors bilan »), ainsi que de la certification par la Cour des comptes.

La LOLF a donc renforcé très largement les outils à disposition des parlementaires pour exercer un véritable contrôle de l’exécution budgétaire et la situation financière de l’État. Force est de constater que l’objectif n’est que partiellement atteint.

2.– Les difficultés rencontrées

a) Des mouvements de crédits réglementaires parfois contestables

L’incidence des mouvements de crédits réglementaires sur la portée de l’autorisation parlementaire en lois de finances peut encore susciter des critiques de la part des parlementaires.

La transmission d’un décret d’avance, peu de temps avant, voire simultanément à un projet de loi de finances rectificative, est contestable. Il faut rappeler que les commissions des Finances sont consultées pour avis avant la promulgation de ces décrets. Or, l’examen de ces avis, tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, dénote des réticences des parlementaires à l’égard de cette procédure d’urgence, notamment lorsqu’elle démontre une sous budgétisation chronique de certaines missions à l’occasion de la loi de finances initiale(54). La commission des Finances du Sénat n’hésite d’ailleurs pas émettre un « avis négatif » sur l’ensemble du décret qui lui est soumis. Celle de l’Assemblée nationale a quant à elle déjà obtenu du Gouvernement qu’il retire son projet de décret d’avance pour procéder aux modifications de crédits envisagées dans le cadre d’une loi de finances rectificative dont le dépôt était imminent (55).

S’agissant de la régulation budgétaire en cours d’exécution, la mise en œuvre de l’article 14-III de la LOLF montre également quelques difficultés. Tel est le cas par exemple quand le Gouvernement adopte un dispositif de régulation portant sur un montant total de crédits gelés réparti entre les ministères, ceux-ci restant libres de définir précisément dans quels domaines ils font porter l’effort qui leur est demandé ; de même, la commission des Finances est généralement assez mal informée des redéploiements de gels et des « dégels » éventuels. De plus, les rapports annuels de performance qui devaient devenir un « lieu » privilégié d’information sur les effets en gestion de la régulation sont souvent muets ou très elliptiques sur les justifications des mouvements de crédits intervenus en cours d’année.

b) Une implication aléatoire et insuffisante des parlementaires

La Mission ne peut que constater que l’exercice de contrôle et d’évaluation des politiques publiques par les parlementaires est très aléatoire. Il ressort des auditions des présidents de commissions de l’Assemblée nationale et du président de la commission des Finances du Sénat que cette situation tient à deux phénomènes : les difficultés rencontrées par nos collègues, qui s’impliquant activement dans la démarche de contrôle, n’obtiennent pas de réponse satisfaisante du Gouvernement, et le manque d’appropriation des sujets budgétaires par de nombreux parlementaires.

– Les difficultés rencontrées par les parlementaires dans leur démarche de contrôle

D’une manière générale, les rapporteurs pour avis, et dans une moindre mesure certains rapporteurs spéciaux de l’Assemblée nationale, se plaignent du délai tardif dans lequel les documents budgétaires leur sont transmis. Ainsi, le président de la commission des Affaires étrangères, M. Axel Poniatowski, résume le mécontentement de ses collègues : « Il faut surtout souligner le problème de leur date de mise à la disposition des parlementaires : il arrive qu’un rapporteur attende quinze jours après le dépôt du PLF pour disposer du « bleu » budgétaire, ce qui complique l’organisation des auditions ; surtout, les annexes « jaunes » (annexes informatives présentant une vision d’ensemble des politiques publiques) et « oranges » (documents de politique transversale, DPT) sont mises en distribution très peu de temps avant l’examen des crédits correspondants » (56).

D’autres difficultés sont recensées par le président de la commission de la Défense, M. Guy Tessier, qui constate que : « Ce travail rigoureux [de contrôle et d’évaluation des politiques publiques] se heurte parfois à des résistances administratives, voire politiques. Les rapporteurs de la défense ne disposant pas des pouvoirs conférés par la LOLF à la commission des Finances ou aux rapporteurs spéciaux, ils peuvent se voir refuser l’accès à des données pourtant indispensables à leur travail de contrôle. Les rapporteurs de la mission de suivi de la réforme n’ont ainsi pas pu avoir connaissance du contenu de l’étude préalable au contrat de partenariat pour le regroupement des administrations centrales à Balard » (57). Le président de la commission du Développement durable, M. Serge Grouard, affirme, dans le même sens, que « la commission éprouve des difficultés à suivre l’évolution fiscale par exemple dans le domaine environnemental, parfois en contradiction avec les dispositions votées » (58).

Le président de la commission des Lois, M. Jean-Luc Warsmann, ajoute que : « Les éléments d’information fournis dans le cadre de la LOLF présentent un intérêt inégal pour les missions d’information, en raison de l’objet même et des problématiques des missions sur lesquelles la commission des Lois est susceptible de travailler (…) Et quand la matière s’y prête, les indicateurs contenus dans les documents gouvernementaux se révèlent parfois non pertinents ou insuffisamment précis pour étayer un rapport d’information. Il en va ainsi, par exemple, dans le cadre de la mission en vue d’améliorer l’accès à la justice et au droit, de l’utilisation des crédits du ministère de la Justice affectés aux conseils départementaux de l’accès au droit ou aux maisons de la justice et du droit. » (59)

– La mobilisation variable des parlementaires en matière de contrôle budgétaire et financier

Le président de la commission des Finances de l’Assemblée nationale, M. Jérôme Cahuzac, n’hésite pas à constater des difficultés «qui tiennent à la fois à une appropriation encore insuffisante des innovations introduites par la LOLF dans la forme de la discussion budgétaire et au risque de dispersion des initiatives en matière de contrôle et d’évaluation » (60).

Son homologue de la commission des Affaires économiques, M. Serge Poignant, ne mâche pas non plus ses mots sur le sujet. Ainsi déclare-t-il que dans le cadre des missions d’information réalisées par les commissaires, les enjeux relatifs à la démarche de la performance introduite par la LOLF ne sont que « très rarement » abordés. « Quant aux rapporteurs budgétaires – à l’exception des rapporteurs d’opposition qui voient dans les avis budgétaires un outil politique mis à la disposition de leurs critiques de l’action gouvernementale – ils exercent rarement leurs prérogatives de contrôle, souvent par manque de temps (…) Certains rapporteurs pour avis ne font aucune recommandation ; d’autres contrôlent la mise en œuvre de leurs recommandations d’une loi de finances à une autre ; d’autres enfin font des recommandations qui relèvent de politique publique plus que d'exécution budgétaire stricto sensu (exemples : sur le photovoltaïque ou sur le crédit d'impôt recherche » (61). Ce constat est également partagé par le président de la commission des Affaires sociales, M. Pierre Méhaignerie, qui met essentiellement en avant « le manque de temps des commissaires, compte tenu de la diversité des activités de la commission [notamment au regard du nombre de propositions de lois examinées], pour se lancer dans l’aventure de l’évaluation » (62).

L’appréciation rejoint celle de notre collègue sénateur, Jean Arthuis, président de la commission des Finances du Sénat qui a déclaré à la Mission, s’agissant de la rénovation du contrôle des lois de finances par LOLF que : «Il y a d’incontestables progrès mais nous sommes loin d’avoir « saturé » le champ de nos prérogatives » (63).

La Mission ne peut que confirmer le fait que les parlementaires, et même les rapporteurs spéciaux, n’utilisent pas tous les outils à leur disposition pour exercer leurs prérogatives en matière budgétaire. Le faible nombre de contrôle sur pièces et sur place réalisés chaque année en est l’une des manifestations.

Quelles en sont les raisons principales ? La MILOLF en voit au moins trois : d’abord, le manque d’habitude des parlementaires de s’investir dans les domaines réputés techniques : l’évaluation et la matière budgétaire en général.

Ensuite, le fait que les résultats de l’évaluation et du contrôle de l’exécution budgétaire sont souvent confrontés à des obstacles dans leur réception par le Gouvernement – ce dernier n’étant pas toujours enclin à répercuter les conclusions du contrôle parlementaire, notamment lorsqu’elles portent sur le fonctionnement de l’administration ou lorsqu’elles s’écartent de la stratégie politique gouvernementale ; en témoignent les débats houleux sur la réforme du crédit d’impôt recherche, lors de l’examen de la loi de finances pour 2011.

Enfin, l’implication inégale des parlementaires peut s’expliquer par la faible attention des médias, plus préoccupés d’événementiel que d’un travail de longue haleine, et plus profondément, par la difficulté de valoriser les activités de contrôle auprès de nos concitoyens.

Le Parlement doit poursuivre le travail de pédagogie pour faire comprendre à l’opinion publique l’utilité réelle du contrôle démocratique sur la mise en œuvre des politiques publiques.

c) Le rendez-vous manqué de la loi de règlement

Six ans après la mise en œuvre de la LOLF, force est de constater que le principal espoir déçu réside dans l’incapacité des parlementaires à se consacrer à l’examen du projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion, pour vérifier si les engagements pris lors du vote de la loi de finances ont été tenus, qu’il s’agisse du niveau des dépenses ou de la qualité de la performance.

Les critiques des parlementaires, eux-mêmes, ne manquent pas. Ainsi, le président de la commission des Finances du Sénat, M. Jean Arthuis concède-t-il que « les promoteurs de la LOLF avaient l’ambition de faire de la loi de règlement un moment privilégié de reddition des comptes et d’évaluation de la performance publique, un temps fort du débat parlementaire au moins aussi important, si ce n’est plus, que le vote du budget lui-même. Nous n’y sommes pas encore parvenus » (64).

En pratique, l’Assemblée nationale, qui dispose constitutionnellement de 40 jours pour examiner en première lecture le projet de loi de finances initiale, n’a que trois à quatre semaines pour procéder à l’examen de la loi de règlement. Mais la disproportion des durées de débat va bien au-delà de cet écart. Ainsi, la durée totale consacrée, en commission, à l’examen des crédits et aux résultats de la performance du projet de loi de règlement est deux à trois fois plus brève que celle consacrée à l’examen des crédits du projet de loi de finances.

DURÉE TOTALE DE L’EXAMEN DES CRÉDITS EN COMMISSION

 

2006

2007

2008

2009

2010

Examen du PLF

17h50

15h

32h05

43h15

54h

Examen du PLR

4h

18h30

14h30

14h30

5h15 (65)

Plus encore, la durée totale consacrée, en séance, à l’examen des crédits du projet de loi de règlement et aux résultats de la performance est quinze à vingt-cinq fois moins importante que celle consacrée à l’examen des crédits du projet de loi de finances.

DURÉE TOTALE DE L’EXAMEN DES CRÉDITS EN SÉANCE

 

2006

2007

2008

2009

2010

Examen du PLF

97h50

92h20

77h59

62h12

53h31

Examen du PLR

3h36

4h29

3h21

3h28

3h37

En outre, la présence en réunion de commission ou en séance lors de l’examen du projet de loi de règlement est dérisoire : ainsi, l’on recense entre 4 et 15 députés présents en commission ou en commissions élargies chaque année, tandis qu’en séance, la participation de parlementaires non commissaires des finances se compte souvent sur les doigts d’une main.

Enfin, le nombre d’amendements est toujours faible : on en recense au maximum 16 en 1981 ! On ne saurait cependant en faire grief aux députés. Il est difficile d’« amender » un projet de loi qui n’est pas modifiable par nature. Le Conseil constitutionnel a, dans trois décisions (66), confirmé la faiblesse de la marge de manœuvre du Parlement en posant un principe essentiel : le législateur ne peut qu’accepter ou refuser en bloc le projet de loi. Aussi les amendements déposés portent-ils presque exclusivement sur le contrôle des finances publiques.

Parmi ceux adoptés, la MILOLF se félicite d’être à l’origine d’un amendement visant à améliorer l’information du Parlement sur des sujets jugés particulièrement sensibles dans le cadre budgétaire défini par la LOLF, comme la gestion des « opérateurs de l’État » : ainsi, l’article 14 de la loi de règlement du budget 2005 prévoit que « le Gouvernement dépose, chaque année, sous forme d’une annexe générale au projet de loi de finances de l’année, un rapport, pour la deuxième année dont l’exécution est définitivement connue, l’année en cours et l’année suivante, récapitulant, par mission et programme, l’ensemble des opérateurs de l’État ou catégories d’opérateurs et les crédits ou les impositions affectées qui leur sont destinés, et présentant, à titre indicatif, le total des emplois rémunérés par eux ou mis à leur disposition par des tiers ». De même, l’article 12 de la loi de règlement pour 2008 prévoit-il une nouvelle annexe au projet de loi de finances « récapitulant les dispositions relatives aux règles concernant l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature, adoptées depuis le dépôt du projet de loi de finances de l’année précédente », ainsi qu’une annexe au projet de loi de financement de la sécurité sociale présentant les mesures affectant les recettes concourant au financement de la protection sociale, intervenues depuis le dépôt du projet de loi de financement de l’année précédente.

Le mois de juin, dernier mois de la session ordinaire, n’est pas, faute de véritable volonté politique, une période propice pour dégager du temps de discussion parlementaire sur la loi de règlement car l’ordre du jour est toujours chargé par ailleurs. En pratique, la Conférence des présidents cantonne la discussion du projet de loi de règlement et le débat d’orientation des finances publiques dans deux séances, usuellement repoussées un lundi de la fin du mois de juin.

Il découle de tous ces éléments que la loi de règlement n’est certes pas devenue le rendez-vous politiquement significatif tant espéré à l’origine. Comme le souligne le président de la commission des Finances du Sénat, «force est néanmoins de constater que le calendrier d’examen du projet de loi de règlement ne favorise guère la mobilisation des parlementaires. Ce qui devrait être le « moment de vérité budgétaire » se trouve ainsi banalisé ou noyé dans l’ordre du jour pléthorique qui caractérise traditionnellement les fins de sessions ordinaires » (67).

La MILOLF ne peut néanmoins se résigner à cette situation qui conduit à deux déficiences majeures :

– le « chaînage vertueux » auquel nous invite la LOLF à travers l’examen des résultats de l’année précédente pour en tirer des conclusions sur l’allocation des moyens dans la prochaine loi de finances reste encore, le plus souvent, un horizon. Chaque rapporteur spécial chemine dans sa direction, de façon assez solitaire, dans ses observations figurant au tome II du rapport général sur la loi de règlement ;

– plus encore, la faible implication des parlementaires conduit à relativiser très largement l’effectivité du principe de responsabilisation des responsables de programmes et des ministres vis-à-vis du Parlement, contrepartie pourtant nécessaire à la restriction sensible de l’autorisation de dépense du Parlement compte tenu de la globalisation des crédits au sein d’enveloppes fongibles.

C’est pourquoi elle entend formuler des propositions qui, elle l’espère, pourront servir à améliorer la situation au cours de la prochaine législature.

3.– Les propositions

a) Inciter les parlementaires à exploiter tous les instruments à leur disposition en matière de contrôle et d’évaluation

Afin de répondre en priorité aux difficultés exprimées par les parlementaires rencontrant des difficultés pour obtenir des informations de la part de l’administration, faute de disposer des pouvoirs équivalents à ceux des rapporteurs spéciaux, la Mission recommande de développer la coopération entre les commissions.

Ainsi, à l’Assemblée nationale, la création en 1999 de la mission d’évaluation et de contrôle (MEC) au sein de la commission des Finances constitue depuis lors un cadre de travail privilégié en confiant notamment les rapports à deux ou trois rapporteurs issus à la fois de la majorité et de l’opposition ainsi que des différentes commissions permanentes intéressées par le sujet traité (par exemple, les commissions des Affaires culturelles et des Affaires étrangères pour la MEC sur l’enseignement français à l’étranger constituée en 2010). De cette façon, l’ensemble des rapporteurs profite collectivement des pouvoirs de contrôle propres au rapporteur spécial participant.

Le président de la commission de la Défense, M. Guy Tessier estime à cet égard : « La coopération qui existe dans le cadre des missions d’évaluation et de contrôle (MEC) pourrait servir d’exemple. À ce stade, il s’agit d’associer un membre de la commission de la défense aux travaux de la commission des Finances. Ont été ainsi abordées les questions relatives au financement des matériels militaires navals, au coût des opérations extérieures sous mandat international ou aux recettes exceptionnelles. Partant de ce modèle, les deux commissions pourraient constituer de véritables missions conjointes pour unir leurs compétences et savoir faire » (68).

La Mission souligne également que la création du Comité d’évaluation et de contrôle, permise par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 et la réforme de notre Règlement le 27 mai 2009, offre à l’ensemble des députés une nouvelle opportunité de bénéficier de pouvoirs de contrôle équivalents à ceux des rapporteurs spéciaux. L’objet du Comité est de procéder à des évaluations portant sur des domaines communs à plusieurs commissions.

Rappelons que le CEC comprend en premier lieu dix-sept membres de droit représentant les principales instances de l’Assemblée : le Président de l’Assemblée, qui le préside, les présidents des huit commissions permanentes et celui de la commission des Affaires européennes ; le rapporteur général de la commission des Finances, le président ou le premier vice-président de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques ; le président de la Délégation parlementaire aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes ; les présidents des groupes. Il comprend également quinze députés désignés par les groupes, de façon à ce que la composition d’ensemble reproduise la configuration politique de l’Assemblée : compte tenu de la prédominance de la majorité parmi les membres de droit, ces quinze députés émanent pour dix d’entre eux de l’opposition, et pour cinq de la majorité.

En pratique, la Mission relève toutefois que ce sont très souvent les mêmes députés qui participent aux travaux de la MEC.

Proposition n° 29 : Faire une plus large place aux députés non membres de la commission des Finances dans le cadre des travaux de la mission d’évaluation et de contrôle.

En tout état de cause, et pour répondre à la crainte tenant au risque de dispersion en matière de contrôle et d’évaluation des politiques publiques, convient-il de veiller à une bonne harmonisation entre le programme de travail annuel de ces deux instances de l’Assemblée nationale et à tout le moins éviter d’éventuels doublons.

Proposition n° 30 : Veiller à une harmonisation entre les travaux de la mission d’évaluation de contrôle et ceux du Comité d’évaluation et de contrôle.

Enfin, la Mission considère qu’il pourrait être opportun de développer la communication institutionnelle sur les travaux d’évaluation et de contrôle réalisés par les rapporteurs spéciaux et les rapporteurs pour avis de façon plus systématique de façon à inciter les médias à relayer l’intérêt de ces travaux.

Proposition n° 31 : Valoriser de façon systématique les travaux de contrôle réalisés par les rapporteurs spéciaux et pour avis, notamment à travers une communication institutionnelle sur la conduite et les résultats de ces travaux.

b) Faire de la loi de règlement un rendez-vous incontournable

La Mission considère qu’il est urgent de redonner toute sa place à la loi de règlement en rétablissant l’équilibre entre le temps passé à l’examen du projet de loi de finances – duquel, on l’a vu, le Gouvernement peut sensiblement s’écarter en cours d’année – et celui consacré à l’examen de la loi de règlement.

Le contrôle de l’exécution du budget et de l’action du Gouvernement est d’autant plus nécessaire en cette période difficile de redressement des comptes publics et suppose une volonté commune du Gouvernement et du Parlement.

● Les propositions destinées au Gouvernement

Le Gouvernement restant maître de la majeure partie de l’ordre du jour des assemblées, il lui appartient de prendre la responsabilité de laisser le temps aux parlementaires de procéder à l’examen de la loi de règlement dans des délais plus convenables qu’actuellement, en évitant notamment de surcharger la fin de la session ordinaire.

Proposition n° 32 : Réserver une semaine dans l’ordre du jour du mois de juin à l’examen exclusif de la loi de règlement. Créer un groupe de travail en vue d’en définir les modalités d’examen en commissions et en séance.

La revalorisation de la loi de règlement passe également par une amélioration des conditions de travail des rapporteurs spéciaux et des rapporteurs pour avis en particulier. Ainsi pourrait-il être utile de transmettre au Parlement les rapports annuels de performances sans attendre la date butoir du 1er juin fixé par l’article 46 de la LOLF. Il convient de rappeler que, grâce à la date plus précoce de clôture de l’exercice depuis quelques années, les projets de rapports annuels de performances sont adressés à la Cour des comptes dès le mois d’avril.

Proposition n° 33 : Transmettre au Parlement les rapports annuels de performances, sinon au moment où ils sont adressés à la Cour des comptes, du moins dans le courant du mois de mai.

En outre, compte tenu des critiques relatives au contenu des rapports annuels de performances, et sans vouloir en augmenter le volume, la Mission considère que l’administration devrait se concentrer sur la justification des écarts par rapport au projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances s’agissant de l’analyse des résultats de la performance. En effet, 5 % des indicateurs ne sont toujours pas renseignés dans le cadre des RAP 2010 et, lorsqu’ils le sont, les explications sur les écarts à la prévision sont absentes ou lapidaires.

Proposition n° 34 : Améliorer le contenu des RAP en se concentrant sur la justification des écarts par rapport à la prévision, tant sur l’utilisation des crédits que sur la réalisation des objectifs de performance.

De plus, compte tenu de la mise en œuvre de la pluriannualité, il devient particulièrement nécessaire de préciser, systématiquement, au niveau de chaque mission et de chaque programme, les écarts entre la consommation réelle des crédits de l’année n et celle des années n-1 et n-2.

Proposition n° 35 : Présenter les écarts entre la consommation réelle des crédits en année n et celle des années n-1 et n-2.

Enfin, la Mission considère qu’il appartient au ministre de procéder à l’évaluation annuelle des RPROG au regard des résultats de l’année précédente et qu’il conviendrait de transmettre systématiquement cette évaluation aux rapporteurs spéciaux et aux rapporteurs pour avis.

Proposition n° 36 : Évaluer systématiquement les responsables de programme au regard des résultats de l’année précédente et transmettre ces évaluations aux rapporteurs spéciaux et pour avis avant l’examen de la loi de règlement.

● Les propositions destinées au Parlement

Les parlementaires doivent prendre la mesure de l’enjeu politique de la loi de règlement et s’impliquer davantage dans le suivi de l’exécution budgétaire et comptable de l’État.

La présence en réunion de commission des Finances lors de la présentation du projet de loi de règlement par le ministre doit donc être favorisée de même qu’en séance publique.

Proposition n° 37 : Favoriser la présence des députés en réunions de commission et en séance lors de l’examen du projet de loi de règlement.

De plus, le Parlement est seul juge de la responsabilité politique des ministres chargés des missions budgétaires. Or, force est de constater que les auditions de ministres ne sont pas systématiques, se heurtent à des difficultés parfois insurmontables tenant à l’agenda de certains ministres et ne donnent pas toujours lieu à un débat intéressant tant l’implication de certains ministres peut être faible. Cette situation ne devrait pas être admissible, d’autant que la commission des Finances de l’Assemblée nationale ne programme chaque année qu’une dizaine d’auditions dans ce cadre.

La Mission propose donc de rendre plus systématique l’audition des ministres responsables des missions lors de l’examen du projet de loi de règlement pour qu’ils justifient les écarts en exécution par rapport à la loi de finances initiale et par rapport à l’exécution des années précédentes. Il est vrai que certains sujets se prêtent davantage à l’audition des responsables de programme. Mais il doit être possible sans obstacle majeur de procéder à une vingtaine d’auditions sur l’exécution budgétaire, en commençant le cycle durant la deuxième quinzaine du mois de mai.

Cela suppose en conséquence de revoir le calendrier de réunions au sein des deux assemblées.

Proposition n° 38 : Systématiser l’audition des ministres responsables des missions ou des programmes lors de l’examen de la loi de règlement pour qu’ils justifient les écarts constatés en exécution.

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IV. CHORUS OU LE NON RETOUR SUR INVESTISSEMENT ?

Le système d’information budgétaire, financière et comptable de l’État Chorus, a pour principal objectif et nécessaire ambition la pleine et entière mise en œuvre de la LOLF, tant au niveau central que dans les services déconcentrés. Ce projet, initié en 2005, a fait l’objet de plusieurs marchés publics notifiés au cours des années 2006 à 2008 : le marché Éditeur a été attribué à la société SAP en mars 2006 ; le marché Intégrateur, composé de quatre lots (système « cœur », infocentre, système d’échange et architecture) a été notifié en avril 2007 ; le déploiement a enfin fait l’objet d’un marché spécifique en 2008.

L’année 2011 est celle du plein déploiement de Chorus : la totalité des programmes ministériels est gérée dans le progiciel depuis le 1er janvier. Au 1er janvier 2012, la comptabilité générale de l’État sera tenue sous Chorus.

1.– Chorus : un projet sensible, objet d’inquiétudes constantes

Dès 2008 la Mission s’est intéressée au projet. Elle préconisait ainsi, dans le cadre de son rapport d’information « Les acteurs de la LOLF : autonomie, responsabilité et contrôle des services déconcentrés et des opérateurs de l’État », d’associer l’ensemble des acteurs de la LOLF, en particulier les responsables de BOP, à la préparation du déploiement de Chorus.

En 2009, pas moins de deux rapports d’information de la Mission étaient également consacrés à Chorus. Ainsi, le rapport d’information « Chorus au cœur de la LOLF » publié en juillet 2009, présentait 21 propositions afin de renforcer la gouvernance de Chorus, en maîtriser les fonctionnalités, en actualiser les coûts et tenir son calendrier de déploiement, alors prévu pour le début 2011.

En 2010, en évaluant l’impact de la réforme administrative territoriale de l’État (RéATE) sur la mise en œuvre de la LOLF, la Mission a pu constater sur le terrain les nombreuses et importantes difficultés rencontrées dans le déploiement de Chorus. Le constat alarmant effectué à l’époque a amené la Mission à renouveler et à renforcer ses recommandations, en particulier en ce qui concerne la formation des utilisateurs de Chorus et la fiabilité des données traitées dans le progiciel.

Sans mésestimer ces difficultés, le Gouvernement indique qu’au regard de l’ampleur du projet et des bouleversements organisationnels induits, elles sont inévitables et que la plupart sont résolues ou en cours de résolution. Les services témoins de la dernière vague de déploiement de Chorus en début d’année 2011 ont bénéficié de fait de l’expérience accumulée et se sont mieux approprié le progiciel, selon les interlocuteurs que la Mission a eu l’occasion d’auditionner cette année, même si des problèmes de formation des utilisateurs ont encore été constatés.

De son côté, la Cour des comptes constate chaque année depuis 2006, à l’occasion de la certification des comptes de l’État, les dommages dus au retard dans la mise à jour des systèmes d’information financière de l’État.

Cette année encore, ce sujet est la première des sept réserves substantielles formulées par le Cour des comptes sur la certification des comptes de l’exercice 2010. Pour les magistrats de la rue Cambon, à l’instar des services gestionnaires déconcentrés, le déploiement du système Chorus rencontre effectivement de nombreuses difficultés. La Cour déplore notamment « les conditions dans lesquelles de nombreux programmes budgétaires ont été basculés dans Chorus et la sous-utilisation de ses fonctionnalités comptables en 2010 » qui « font peser un risque majeur sur sa capacité à tenir la comptabilité générale de l’État en 2012. »

Il convient d’ajouter les réserves émises sur la fiabilité et la cohérence des données gérées dans le module immobilier du progiciel (Chorus RE-FX) qui sont à l’origine de la septième réserve substantielle de la Cour des comptes dans le cadre de la certification des comptes de l’État : la valorisation du patrimoine immobilier de l’État, deux ans après le basculement sur Chorus, fait encore l’objet de réelles incertitudes.

Au-delà des difficultés rencontrées dans le déploiement de Chorus, tant au niveau opérationnel que fonctionnel, la Mission s’interroge constamment à propos du coût budgétaire et du retour sur investissement de ce projet d’envergure.

2.– Le mirage du retour sur investissement de Chorus ?

Le retour sur investissement du projet Chorus est pour la commission des Finances un sujet de vigilance permanente tant le coût total du projet est élevé et l’enjeu pour les finances publiques important.

Cette préoccupation rejoint celle exprimée par la Cour des comptes dans le cadre de son rapport public annuel de février 2011, qui relève un manque de transparence et de maîtrise des coûts du projet : « si les coûts directs du projet sont évalués à 1 milliard d’euros sur 10 ans par le ministère chargé du Budget, ce chiffrage repose sur des bases fragiles, les scénarii prévisionnels sur lesquels il s’appuie devant être actualisés ; par ailleurs, des charges, de l’ordre de 500 millions d'euros, doivent être ajoutées à ce chiffrage, notamment pour ce qui concerne l’adaptation à Chorus des systèmes ministériels ou l’environnement de Chorus. Le coût total du projet pourrait atteindre 1,5 milliard d’euros sur la période 2006-2015. »

La mission confirme les critiques de la Cour des comptes sur le défaut de visibilité concernant l’évaluation financière du projet. S’appuyant sur les données transmises au Parlement à l’occasion des projets de loi de finances, la Mission a pu établir le tableau ci-après, qui montre combien le coût budgétaire estimé pour la période 2006–2013 de Chorus a évolué depuis octobre 2007, date à laquelle la construction et le déploiement du progiciel faisaient l’objet d’une première estimation à hauteur de 412 millions d'euros dans le projet annuel de performances pour 2008.

Le tableau fait ainsi formellement apparaître une augmentation forte, de plus de 30 % du coût budgétaire de Chorus en autorisations d’engagement, entre l’estimation figurant au rapport annuel de performances de 2007 et celle du rapport annuel de performances de 2010. Si l’on compare le rapport annuel de performances de 2007 et le projet annuel de performances de 2011 elle est même de 46,6 % (69).

TABLEAU SYNTHÉTIQUE DES DONNÉES BUDGÉTAIRES DU PROJET CHORUS DE 2006 À 2013

(en millions d’euros)

Date

Document

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Investissement

Maintenance

Fonctionnement

Total

Investissement

Maintenance

Fonctionnement

Total

Juin 2008

RAP 2007

Non renseigné

Non renseigné

Non renseigné

551,56

Non renseigné

Non renseigné

Non renseigné

551,56

Octobre 2008

PAP 2009

435,35

116,21

Non renseigné

551,56

435,35

116,21

Non renseigné

551,56

Juin 2009

RAP 2008

438,65

117,51

Non renseigné

556,16

438,65

117,51

Non renseigné

556,16

Octobre 2009

PAP 2010

438,65

117,51

49,9

606,06

438,65

117,51

49,9

606,06

Juin 2010

RAP 2009

499,6

231,4

Non renseigné

731,39

Non renseigné

Non renseigné

Non renseigné

711,55

Octobre 2010

PAP 2011

499,6

231,4

77,15

808,54

Non renseigné

Non renseigné

77,15

711,55

Juin 2011

RAP 2010

472

249,4

Non renseigné

720,54

Non renseigné

Non renseigné

Non renseigné

711,38

Sources : rapports annuels de performances (RAP) et projets annuels de performances (PAP) de 2007 à 2011.

Ces évolutions sont imputables pour partie au périmètre variable des dépenses d’un document et d’une année à l’autre : ainsi, les dépenses de fonctionnement de l’Agence pour l’informatique financière de l’État (AIFE) ne sont pas toujours prises en compte. Pour le reste, les documents budgétaires ne permettent pas d’identifier aisément les raisons de cette apparente dérive des coûts, notamment en raison du caractère incomplet et évolutif des informations transmises. On peut simplement signaler que d’une année sur l’autre, la répartition des dépenses entre investissement et maintenance évolue, sans que, selon le Gouvernement, l’équilibre global du projet en soit profondément bouleversé.

À ce titre, il convient en effet de signaler que conformément à l’engagement pris par le ministre du Budget le 13 janvier 2009 devant la commission des Finances l'Assemblée nationale, ces informations budgétaires sont complétées, depuis le rapport annuel de performances 2010, des éléments d'actualisation du retour sur investissement de Chorus sur 10 ans.

Alors que le scénario retenu initialement fixait le coût total de Chorus sur la période 2006-2015 à 1 110,4 millions d'euros avec une valeur actuelle nette (VAN) de 866 millions d'euros et un gain annuel récurrent estimé à 465 millions d'euros, il est indiqué dans le dernier document budgétaire transmis au Parlement qu’en mars 2011, le coût total du projet pour la sphère publique est de 1 027 millions d’euros, la VAN est estimée à 702 millions d'euros et le gain annuel récurrent est valorisé à 427 millions d'euros.

Pour parvenir à un coût proche du milliard d’euros prévu initialement, le Gouvernement ajoute au coût budgétaire, les dépenses de maintenance pour les années 2014 et 2015 (environ 140 millions d'euros) et des dépenses de personnel pour près de 84 millions d'euros.

Cependant, au vu des constatations effectuées lors de ses déplacements antérieurs, la Mission s’interroge notamment sur la réalité des gains de productivité associés à la mise en œuvre de Chorus. Il conviendrait à tout le moins de rendre plus clairement compte des dépenses liées à ce projet, en y intégrant la totalité des dépenses induites dans les ministères, comme le suggère la Cour des comptes. Il conviendrait également de faire apparaître plus nettement les gains supposés en dépenses de personnel, au regard de la nouvelle organisation administrative qui découle du projet, notamment dans les nouveaux centres de services partagés et les services facturiers.

Ne pas transmettre l’intégralité de ces informations au Parlement en entretenant le flou observé ces dernières années dans les documents budgétaires laisserait le champ libre à toutes les interprétations quant au coût réel du projet Chorus.

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EXAMEN EN COMMISSION

La Commission examine le rapport de la mission d’information sur la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances (MILOLF) (MM. Michel Bouvard, Jean-Pierre Brard, Thierry Carcenac et Charles de Courson, rapporteurs).

M. Yves Censi, président. Votre rapport, cette année, est consacré à l’effet de la LOLF sur les décisions d’attribution des moyens budgétaires – soit à la fois la préparation du projet de loi de finances et l’appropriation de la LOLF par le Parlement. Pour ce qui sera certainement votre dernier rapport de la législature, vous avez donc choisi, messieurs les rapporteurs, un thème qui a valeur de bilan d’une loi organique adoptée il y a tout juste dix ans, et entrée totalement en application depuis cinq ans.

M. Michel Bouvard, rapporteur. Ce bilan d’étape précédera l’évaluation de la Cour des comptes, pour laquelle M. Alain Pichon et la formation inter-chambres qu’il préside nous ont d’ailleurs auditionnés tous les quatre. Que la Cour ait décidé d’effectuer ce travail n’étonnera pas ceux qui connaissent son Premier président…

Nous avons choisi, en ce qui nous concerne, de nous intéresser à la prise en compte des acquis de la LOLF par le Gouvernement et à l’appropriation de cette même loi organique par le Parlement, ce dans l’optique de produire un document utile pour la prochaine législature. Nous avons ainsi tenté de dresser un bilan critique de la manière dont le Gouvernement, le Parlement et les services gestionnaires se sont saisis des outils offerts par ce texte pour moderniser la préparation du budget, pour rénover l’examen des lois de finances et pour renforcer le contrôle budgétaire et financier, en vue d’une plus grande efficacité de la dépense publique.

Notre rapport d’information est composé de trois grandes parties, auxquelles s’ajoute une brève analyse du déploiement du système d’information financière Chorus, outil essentiel au fonctionnement même de la loi organique, notamment en raison de l’apport qu’on en attend pour une comptabilité analytique, mais outil pour lequel le retour sur investissement nous apparaît de plus en plus aléatoire.

Comme les années précédentes et avec l’accord de nos deux co-rapporteurs, Thierry Carcenac et moi-même nous partagerons la présentation de nos trente-huit propositions, dont le texte vous a été distribué.

M. Thierry Carcenac, rapporteur. Nous avons en effet souhaité laisser une sorte de vade-mecum pour les prochains rapporteurs spéciaux de la commission des Finances.

La première partie de ce rapport, intitulée « Moderniser la préparation du budget : une ambition contrariée », a pour objet d’étudier les modifications apportées par la LOLF dans le processus d’allocation des moyens, afin d’améliorer la gestion publique. La nouvelle architecture budgétaire, avec la répartition des crédits entre missions, programmes et actions, rompt en effet avec la logique de la loi organique de 1959, centrée sur des budgets ministériels divisés en chapitres, et qui distinguait entre services votés et mesures nouvelles, cependant que le nouveau rôle dévolu aux gestionnaires et l’introduction d’un dispositif de performance au cœur de la préparation budgétaire ont transformé les pratiques des différents acteurs.

Cependant, au terme de cinq ans d’application, la mise en œuvre de la LOLF apparaît perfectible. Ainsi, le lien entre le dispositif de performance et le processus d’allocation des moyens est trop ténu et les responsables de programmes – dont les secrétaires généraux des ministères – auditionnés par la Mission ont tous relevé une déconnexion entre le calendrier des conférences de répartition et celui des conférences de performance, conférences que la Mission propose donc de fusionner au moment de la préparation du budget.

M. Henri Emmanuelli. Du point de vue chronologique, la chose est loin d’être évidente.

M. Thierry Carcenac, rapporteur. Répartition des moyens et conférences de performance se succèdent en effet, mais nous proposons, à tout le moins, de réunir les mêmes interlocuteurs dans les deux cas ; c’est l’objet de la proposition n° 4.

D’autre part, la Mission considère qu’il convient de justifier systématiquement la hiérarchisation des indicateurs de performance, qui sont passés de 1 284 en 2006 à 894 aujourd’hui. Leur standardisation, également, serait utile afin de comparer les performances entre les différents ministères, alors qu’aujourd’hui chacun de ceux-ci s’en sert surtout pour démontrer à bon compte qu’il a atteint ses objectifs. Ce point fait l’objet de la proposition n° 3.

De même, la mesure et les résultats de la performance sont trop rarement exploités pour justifier les redéploiements de crédits au sein des missions. Les ministres doivent mieux assumer leur mission de pilotage budgétaire, sans en rester à la présentation d’objectifs dictés parfois par un souci de simple communication.

La MILOLF suggère aussi – c’est sa proposition n° 2 – de définir plus précisément la fonction des responsables de programme par rapport aux autres acteurs de la programmation budgétaire, et de favoriser une plus grande stabilité dans cette fonction.

Nos auditions ont permis de constater les contraintes auxquelles la LOLF a dû s’adapter : contraintes budgétaires liées à l’état de nos finances publiques ; nouveau calendrier issu de la programmation triennale ; influence de réformes telles que la révision générale des politiques publiques, la RGPP, ou la RéATE, la réforme de l’administration territoriale de l’État. La prise en compte de tous ces éléments au cours de l’élaboration du budget fait que de trop nombreux arbitrages sont rendus, comme précédemment, par le Premier ministre ou par son cabinet. Les gestionnaires entendus par la Mission ont ainsi déploré que leurs réunions avec la direction du Budget se résument plus souvent à un constat de désaccord qu’elles ne sont consacrées à la recherche d’un consensus, ce qui limite leur autonomie.

Ce constat nous amène à proposer une synchronisation de la programmation triennale et des réformes structurelles, ainsi que la stabilisation de la maquette budgétaire sur la période du budget triennal au moment du vote de la loi de finances.

Les propositions n°s 1, 8 et 9 visent à améliorer le suivi des opérateurs, dont la Mission considère qu’ils sont encore insuffisamment soumis à la LOLF et à la recherche d’une performance globale de l’État. Si des progrès ont été réalisés en ce qui concerne l’immobilier, les opérateurs doivent se voir appliquer les mêmes critères que ceux qui s’imposent aux services de l’État, s’agissant tant des effectifs que des gains de productivité demandés. Nous souhaitons que soit généralisé le recours aux contrats d’objectifs, de moyens et de performance.

Enfin, nous avons abordé deux sujets qui nous semblent être les « angles morts » de la LOLF : d’une part, la réforme de l’administration induite à la fois par la RGPP et par la RéATE ; de l’autre, l’augmentation des dépenses fiscales, dont nous nous sommes préoccupés lors du débat d’orientation budgétaire et à l’occasion du projet de loi de règlement. Les propositions 10 et 11 visent donc à imposer une évaluation systématique de ces « niches » et de leur pertinence.

M. Michel Bouvard, rapporteur. Dans la deuxième partie du rapport, nous nous efforçons de dresser le bilan de l’appropriation de la LOLF par le Parlement, qu’il s’agisse de son information ou de son rôle lors de l’examen du projet de loi de finances.

Nul ne peut contester que la LOLF a permis d’améliorer la qualité des documents budgétaires et des informations transmises au Parlement, et cela vaut notamment pour les projets annuels de performances – les nouveaux « bleus budgétaires ». Cependant, du point de vue quantitatif, on atteint des niveaux préoccupants, en masse – 14 000 pages pour le dernier projet de loi de finances – comme en coût – 2 millions d’euros par an. La Mission préconise donc, d’une part, la création d’un groupe de travail associant le Parlement et le ministère du Budget afin de déterminer les documents réellement et directement utiles à la discussion budgétaire – ce qui ne signifie pas, au demeurant, que les autres soient inutiles – et, d’autre part, la dématérialisation de leur transmission au Parlement – ce sont nos propositions 12 et 13. Cela permettrait d’améliorer les délais de leur analyse par le Parlement – puisque les ministères attendent qu’ils soient complets pour les lui transmettre –, comme y tend la proposition n° 14.

La proposition n° 15 a pour objet de favoriser, s’agissant de la préparation du projet de loi de finances, la coordination entre les rapporteurs pour avis et les rapporteurs spéciaux avant l’envoi des questionnaires parlementaires. L’objectif, là encore, est d’obtenir plus rapidement les informations demandées, par des questionnaires plus brefs et plus cohérents.

Enfin, la Mission s’est intéressée aux changements liés à la LOLF quant au pouvoir d’initiative des parlementaires, notamment en analysant la pratique des amendements de crédits. Les statistiques présentées page 50 du projet de rapport montrent que ceux-ci ne représentent qu’une faible part des amendements aux projets de loi de finances – 85 sur près de 1 300 déposés, et 24 sur environ 480 adoptés. Paradoxalement, les nouvelles possibilités offertes aux parlementaires en la matière sont une source d’insatisfaction ; d’ailleurs, le nombre de ces amendements est resté à peu près stable depuis 2006, alors que, depuis le projet de loi de finances débattu en 2008, le nombre global des amendements examinés a sensiblement augmenté.

Reconnaissons aussi que ces amendements de crédits, qu’ils soient d’origine parlementaire ou gouvernementale, ne sont presque jamais motivés par le souci d’améliorer la performance des gestionnaires. Nous souhaiterions qu’ils reposent davantage sur une réelle analyse budgétaire et de performance que sur une logique de redéploiement ; c’est le sens de la proposition n° 16.

La Mission s’est également intéressée à la recevabilité des amendements d’origine parlementaire – en d’autres termes, au vieux débat sur l’article 40. La proposition n° 17 tend à harmoniser sur ce point les règles entre l’Assemblée nationale et le Sénat ; avec la proposition n° 18, nous suggérons que soit établi un bilan de la mise en œuvre de l’article 40 à la fin de chaque législature. Ce sujet a suscité beaucoup de débats chez nos collègues !

S’agissant de l’exécution des lois de finances, la LOLF a permis de professionnaliser le dialogue de gestion au sein de l’exécutif, en vue d’une allocation optimale des moyens dans un contexte budgétaire de plus en plus contraint. En revanche, malgré le renforcement de nos pouvoirs de contrôle et d’évaluation des politiques publiques, force est de reconnaître que l’implication de certains de nos collègues en ces matières reste insuffisante. Le projet de loi de règlement est, à cet égard, le « rendez-vous manqué » de la mise en œuvre de la loi organique.

Sur la professionnalisation de la gestion, les auditions ont montré que des progrès considérables ont été réalisés pour améliorer et structurer le dialogue de gestion entre responsables de programmes, de budgets opérationnels de programme (BOP) et d’unités opérationnelles (UO). De nouveaux outils de contrôle de gestion se mettent en place dans les différents ministères, et la révision prochaine du décret de 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique permettra de décliner, au niveau des BOP et des UO, les outils de la LOLF et la programmation pluriannuelle. Cette démarche doit être encouragée, comme le préconisent les propositions nos 19 à 21.

Nos auditions ont également montré que, face au mur du déficit, la gestion publique par la performance doit s’adapter : nous souhaitons que les responsables de programme – qui, désormais, doivent davantage gérer la pénurie que développer de nouveaux projets – disposent de nouvelles marges de manœuvre opérationnelle, notamment à travers la pluriannualité. Pour ce faire, la MILOLF préconise de réduire le nombre de BOP – qui sont de taille trop réduite – tout en limitant le nombre de BOP centraux, et de prohiber, par circulaire du Premier ministre, la pratique du « fléchage » des crédits déconcentrés depuis le niveau central – propositions nos 22 à 24. Les responsables de la cour d’appel de Chambéry m’ont ainsi indiqué hier que la réfection de la toiture de l’un des tribunaux faisait l’objet d’un fléchage de crédits depuis l’administration centrale du ministère ! Dans ces conditions, parler de l’autonomie de gestion des responsables de programme n’a aucun sens.

En outre, compte tenu des contraintes budgétaires actuelles, la Mission estime indispensable d’accentuer la démarche de performance engagée grâce à la LOLF, et ce de plusieurs manières : en systématisant l’envoi de lettres de mission à tous les responsables de programme lors de leur nomination – et en assurant la communication de ces lettres aux rapporteurs spéciaux – ; en permettant d’expérimenter entre les responsables de programme et de BOP une contractualisation garantissant un « retour » vers les agents d’une partie des gains de productivité ; en étendant à toutes les catégories d’agents la prime de fonctions et de résultat, quitte à expérimenter un dispositif complémentaire de rémunération collective en fonction de la performance du BOP ; enfin, en réactivant la fongibilité asymétrique dans une perspective pluriannuelle, afin de faciliter les reports de crédits économisés d’un exercice sur l’autre – propositions nos 25 à 28.

Le rapport recense tous les outils qu’offre la LOLF pour encadrer les mouvements de crédits réglementaires, pour renforcer les pouvoirs de contrôle et pour revaloriser le projet de loi de règlement. Les auditions des présidents de commission de l’Assemblée nationale et du Sénat ont montré que les parlementaires qui souhaitent s’impliquer dans le contrôle de l’exécution se heurtent toujours à des difficultés : retard dans le dépôt des documents demandés, refus d’informer ceux d’entre eux qui ne sont pas rapporteurs spéciaux… Mais il ressort surtout de ces auditions une implication insuffisante et aléatoire de nos collègues dans le contrôle budgétaire et financier. Trois raisons peuvent l’expliquer : l’insuffisante familiarité avec des domaines réputés techniques ; l’absence de prise en compte, par le Gouvernement, des conclusions de l’évaluation et du contrôle ; enfin, la trop faible attention des médias à ce type de travaux parlementaires.

Il est patent, au surplus, que la discussion du projet de loi de règlement n’est pas devenue le temps fort du débat budgétaire : en commission, cet examen dure en moyenne trois fois moins longtemps que celui du projet de loi de finances et, en séance publique, de quinze à vingt-cinq fois moins. En outre, il a lieu à la fin du mois de juin, en général un lundi après-midi, et il précède parfois l’audition des responsables de programmes. Nous suggérons donc de réserver une semaine dans l’ordre du jour à l’examen exclusif de ce projet, de créer un groupe de travail en vue de redéfinir les modalités de cet examen, de favoriser la participation des députés et de systématiser l’audition des ministres responsables des missions ou programmes. Nous demandons que les rapports annuels de performances soient transmis au Parlement, sinon en même temps qu’à la Cour des comptes, du moins dans le courant du mois de mai. Nous souhaitons une amélioration du contenu de ces rapports, qui doivent avant tout justifier les écarts par rapport à la prévision. Les écarts entre la consommation réelle des crédits en année n et celle des années n-1 et n-2 devraient également y figurer. Il conviendrait aussi d’évaluer systématiquement les responsables de programme en fonction des résultats de l’année précédente et de transmettre ces évaluations aux rapporteurs spéciaux. C’est la matière des propositions nos 29 à 38, le but étant de donner à la discussion de cette loi de règlement la place qui lui revient, en sorte que la répartition des crédits dans la loi de finances suivante soit assise sur une évaluation sérieuse de la performance budgétaire.

S’agissant de Chorus, nous nous inquiétons, je l’ai dit, du retour sur investissement : manquent toujours des outils comptables d’analyse des coûts, sans parler des problèmes de fonctionnement des plateformes et de formation. Des progrès restent également à réaliser en matière de transparence : ainsi les dépenses de fonctionnement de l’Agence pour l’informatique financière de l’État ne sont pas prises en compte dans le coût budgétaire de ce programme.

M. Yves Censi, président. Votre rapport contient des propositions qui pourraient être mises en œuvre dès le débat budgétaire de cet automne, mais d’autres désignent des voies à explorer au cours de la prochaine législature : est-ce à dire que, pour vous, la mission d’information devrait être maintenue sous la XIVème législature ?

M. Jean-Pierre Brard, rapporteur. Sans aucun doute, monsieur le président, car la LOLF est en danger, du fait de la RGPP. Pour ne prendre que cet exemple, la pratique des fléchages de crédits, évoquée par M. Bouvard, est contraire à l’esprit de la loi organique et suffirait à elle seule à justifier le maintien de la mission sous la prochaine législature. En décider autrement serait renoncer à l’exercice de notre pouvoir de contrôle sur la gestion du Gouvernement.

Je suis d’accord avec MM. Thierry Carcenac et Michel Bouvard : nous souffrons toujours des mêmes dysfonctionnements, en particulier des délais de transmission de l’information, qui entravent l’analyse du budget par le Parlement. De plus, la logique des amendements de crédits qui veut que, pour augmenter un budget, on en diminue un autre, nous prive de toute marge de manœuvre. Le jeu des modifications de nomenclature empêche tout amendement. Ainsi, naguère, pour revaloriser les pensions des anciens combattants, il aurait fallu renoncer à la journée d’appel et de préparation à la défense ! Dès lors, que reste-t-il de l’élargissement des pouvoirs du Parlement, qu’on invoque pourtant à tout bout de champ ?

S’agissant précisément de l’exercice de nos compétences, l’audition de la nouvelle responsable du Service d’information du Gouvernement et celle du secrétaire général du Gouvernement montrent que notre travail commence peut-être à porter des fruits – à moins que ce ne soit l’effet de la campagne médiatique de l’année dernière visant le SIG, mais nos débats ont pu y contribuer.

En ce qui concerne Chorus, il faudra bien, à un moment donné, marquer notre impatience, car on ne cesse depuis des années de nous raconter des salades : les hauts fonctionnaires concernés font preuve d’une insupportable irresponsabilité. Alors que ce programme est en pleine dérive financière sans donner encore de résultat, l’opacité est totale : comme le souligne en termes choisis le rapport à la page 91, « les documents budgétaires ne permettent pas d’identifier aisément les raisons de cette apparente dérive des coûts, notamment en raison du caractère incomplet et évolutif des informations transmises ». Pour qui prend-on les parlementaires ? Faudra-t-il un jour que nous créions une commission d’enquête pour procéder aux investigations permettant d’y voir clair dans des dysfonctionnements qui désorganisent l’appareil d’État et aggravent les coûts, bien au-delà d’ailleurs de l’augmentation de 46,6 %, mentionnée dans le rapport, entre le rapport annuel de performances de 2007 et le projet annuel de performances de 2011 ? À Lyon, un responsable local de la police nous a expliqué que, pour faire face, il avait fallu porter le nombre de fonctionnaires de gestion de trois à plus de cinquante ! Comme nous sommes en fin de législature, j’entends déjà les soupirs de soulagement des hauts fonctionnaires qui nous mènent en bateau depuis plusieurs années mais, au cours de la prochaine législature, il faudra nous montrer plus agressifs sur le sujet.

M. Patrice Martin-Lalande. Les modalités d’examen de nos budgets en commission élargie aboutissent à dévaloriser le travail fourni par les rapporteurs, notamment par les rapporteurs spéciaux, pendant toute une année. Ne disposer que de cinq minutes pour poser des questions noyées dans le flot de la discussion est insuffisant. Il faut trouver une solution pour que ce travail soit exploité et mis en valeur comme il convient.

En tant que rapporteur spécial de la mission Médias, je tiens également à signaler que le taux de réponse dans les délais au questionnaire budgétaire est insuffisant : il dépasse rarement les 80 %. Il nous manque donc un cinquième des réponses huit à dix jours avant l’examen des crédits en commission, voire en séance publique ! J’ai bien noté la suggestion qui nous est faite de nous concerter avec les rapporteurs pour avis en vue d’élaborer un questionnaire commun et, même si les questions financières les intéressent moins que nous, je n’y suis pas opposé si cela peut contribuer à réduire les temps de réponse.

Toujours à propos des questionnaires budgétaires, j’ai pris l’habitude, en ce qui me concerne, d’y faire figurer une question sur la suite donnée aux préconisations de la Cour des comptes et de publier les réponses dans mon rapport spécial. C’est éventuellement un moyen de remettre en pleine lumière les manquements constatés par la Cour.

Nous avons obtenu que les contrats d’objectifs et de moyens relatifs aux organismes de l’audiovisuel soient soumis pour avis aux commissions des Affaires culturelles et des Finances. Auditionné sur l’exécution du contrat liant l’État et France Télévisions, le ministre de la Culture et de la communication nous avait promis que le suivant nous serait soumis au début de juillet. Or les négociations sont seulement en cours d’achèvement. J’ignore d’où sont venus les grippages, toujours est-il que je ne pourrai présenter ni aujourd'hui ni demain le projet d’avis que je prévoyais de soumettre à notre Commission. Or il en va de deux milliards d’euros par an pendant cinq ans ! Je souhaiterais donc que nous demandions au Gouvernement que ce contrat ne soit pas signé avant que les commissions concernées du Parlement, notamment les commissions des Finances, aient reçu les documents, je l’espère au début du mois de septembre. En dépend l’efficacité de notre contrôle, a priori ou a posteriori.

M. Alain Rodet. MM. Brard et Martin-Lalande ont raison, mais il ne dépend que de nous d’améliorer la situation sur certains points. Ainsi, ne conviendrait-il pas de procéder à des auditions plus incisives, et de retourner vraiment sur le gril les personnalités que nous entendons ? Les deux auditions récentes du directeur général des Finances publiques m’ont mis mal à l’aise. Les prolégomènes ont été trop longs. Le président et le rapporteur général ont certes un rôle éminent mais il faudrait moins d’exposés généraux et plus d’études de cas pour pousser ceux que nous recevons dans leurs retranchements.

M. Patrick Lebreton. Si la LOLF est source de réels progrès dans le pilotage des finances publiques et facteur d’une plus grande transparence du budget, les élus ultramarins restent un peu sur leur faim ! Nous nous réjouissions que le budget de l’outre-mer fasse l’objet d’une mission propre, regroupant l’ensemble des politiques publiques qui intéressent nos territoires. Les spécificités de ceux-ci le justifiaient pleinement. Or l’examen de cette mission donne souvent lieu à d’âpres débats entre le ministre de tutelle et les parlementaires parce qu’elle ne couvre en fait qu’une petite part des moyens que l’État consacre à ces territoires ultramarins – 2 milliards sur un ensemble de 16 milliards, dépenses fiscales et budgétaires confondues. Et si, l’an dernier, un document de politique transversale a été publié par Mme la ministre chargée de l’outre-mer, il n’a donné lieu à aucun débat ni en commission ni en séance publique…

Nous souhaitons appréhender dans leur intégralité les moyens attribués à l’outre-mer, mais la discussion, le contrôle et l’évaluation des politiques ultramarines sont partiels, voire tronqués. Ne pensez-vous pas que ce morcellement des politiques publiques entre différentes missions est contraire à l’esprit de la LOLF et nuisible à ces politiques mêmes ? Dans quelques années, il pourrait très bien se faire que nous conservions une mission à 2 milliards tandis que le total des dépenses serait tombé de 16 à 13 milliards, par exemple...

M. Henri Emmanuelli. Alors que la LOLF avait été conçue pour améliorer le contrôle du budget et en faciliter l’analyse, comme sa création a coïncidé avec la réduction des crédits, elle est utilisée non sans cynisme par les gouvernements successifs pour mener à bien la révision générale des politiques publiques, à laquelle elle finit par être identifiée. Dans les préfectures, on va jusqu’à vous répondre que les postes sont supprimés en raison de la LOLF, alors que cela n’a aucun rapport.

Que le Gouvernement ait choisi de ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux résulte d’un choix politique : on ne saurait en rendre la LOLF responsable. Le fait que la LOLF soit devenue synonyme de RGPP a semé la confusion chez nos compatriotes et fait peser une ambiguïté sur l’application de cette loi organique.

Je partage le point de vue de M. Martin-Lalande sur les commissions élargies : il ne faut pas maintenir leur existence si elles nuisent au contrôle parlementaire. Les rapporteurs peuvent à peine s’y exprimer !

J’observe que, quelle que soit la couleur politique du Gouvernement, chaque fois que l’État se lance dans une aventure informatique, celle-ci tourne au fiasco. En quelque vingt ans, combien de milliards d’euros sont-ils ainsi partis en fumée ? Alors que nos hauts fonctionnaires reçoivent une formation de qualité, d’où leur vient cette inaptitude à manier l’informatique ? La mise au point du programme Copernic du ministère des Finances, qui devait prendre deux ans, en a demandé huit à dix ! Ne conviendrait-il pas de se pencher sur la question, par exemple dans le cadre d’une mission installée auprès du Premier ministre ? Ces programmes informatiques de l’État paraissent en tout cas constituer une véritable aubaine pour les sociétés de services informatiques.

Les indicateurs de performance sont-ils tous pertinents et doit-on essayer de les homogénéiser alors qu’il n’y a pas d’homogénéité entre les tâches des ministères ? Je me méfie, du reste, du transfert de la culture de l’entreprise privée au fonctionnement de l’État, car cela débouche le plus souvent sur de la « bureaucrassouille ». Les critères sur lesquels reposent les statistiques ne sont pas fiables, comme nous pouvons aujourd'hui le constater en matière de sécurité. Dans le département des Landes, il semble qu’on n’arrête plus aucun voleur : en revanche, le nombre des contrôles routiers explose, surtout là où ils peuvent rapporter ! La statistique bureaucratique n’est pas le contrôle de performance. Les indicateurs de performance sont-ils toujours adaptés ? J’en doute, car ce qu’on attend du ministère de la Culture n’est pas forcément ce qu’on attend du ministère de l’Éducation nationale ou de celui de la Justice.

Je suis, moi aussi, choqué de la façon dont les hauts fonctionnaires répondent aux commissions parlementaires. Trois fois sur quatre, et cela n’est pas propre à la période récente, nous en apprenons plus en lisant les journaux que par ces auditions ! Un ministre ou un haut fonctionnaire entendu par une commission parlementaire se sent dégagé de tout devoir. Ou il biaise ou il ment par omission. Le Parlement devra mettre un jour les choses au point. Conviendrait-il de sanctionner le fonctionnaire, détenteur d’une information, qui ne l’a pas communiquée alors qu’il était interrogé sur le sujet ? Je l’ignore, mais c’est un fait que l’audition du directeur général des Finances publiques ne nous a rien appris. Il s’est contenté de phrases évasives et de généralités ; il ne savait pas, il n’avait pas tous les éléments… Nous avons eu le sentiment de perdre notre temps, et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres. Il faudrait songer à une charte des auditions devant les commissions parlementaires.

Enfin, j’ai lu hier dans Le Monde que la mesure de la RGPP sur le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux, loin de conduire à des économies, allait peut-être coûter au budget de l’État, cependant que les mêmes règles n’étaient pas appliquées d’un ministère à l’autre – ici on redistribue 70 % des économies réalisées et là 38 % seulement. À l’arrivée, on évoque une économie de 250 millions d’euros ! Supprimer, pour un si médiocre résultat, 100 000 emplois dans la fonction publique me semble contre-productif. Il en résulte en effet un démantèlement des services extérieurs de l’État : dans la région Aquitaine, comme il n’y a plus que deux fonctionnaires pour instruire les dossiers de police de l’eau, il faut six mois d’attente, ce qui bloque, par exemple, des investissements de 30 à 40 millions d’euros dans les infrastructures routières.

Il conviendrait donc de mener un travail, un peu plus approfondi que celui du Monde, sur les résultats de la politique de non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux.

M. Yves Censi, président. À titre d’information, le 18 mai dernier, le groupe de travail présidé par le président de l’Assemblée nationale a décidé, sur proposition, du président de notre Commission et du rapporteur général un aménagement de la procédure des commissions élargies, consistant notamment à limiter à cinq minutes l’intervention, sous forme de questions, de chaque rapporteur, avant une séquence de questions de deux minutes suivies de réponses. Il faudra évidemment regarder cela de près.

M. Patrice Martin-Lalande. On ne peut comparer une séance de la commission des Finances au cours de laquelle le rapporteur spécial présente son rapport pendant une demi-heure ou plus, signale les points qui méritent attention et répond aux questions de ses collègues, et une réunion où il s’exprime cinq minutes devant des collègues qui sont là plus ou moins par hasard. De plus, généralement, seul le ministre répond aux différentes questions. Ne pas pouvoir rendre compte du travail passablement ingrat que nous prenons la peine de faire constitue une véritable régression, et ne donne pas envie de continuer à être rapporteur spécial !

M. Yves Censi, président. Il est vrai que la qualité des réponses du Gouvernement dépend de celle des questions et de la possibilité qu’ont ou non les rapporteurs spéciaux d’intervenir.

M. Patrice Martin-Lalande. Le problème des commissions élargies vient, non de ce qu’elles remplacent la séance publique, mais de ce qu’elles se sont substituées à la réunion de la commission des Finances au cours de laquelle les rapporteurs spéciaux pouvaient présenter le fruit de leur travail et répondre aux questions de leurs collègues. En fait, ce sont des commissions rétrécies !

Par ailleurs, je voulais porter une information à la connaissance de la Commission. Selon la loi, le contrat d’objectifs et de moyens de tous les organismes de l’audiovisuel doit obligatoirement être transmis pour avis au Parlement. Puisque France Télévisions ne l’a pas fait pendant la session, au moment où nous pouvions l’examiner, nous devons lui demander d’attendre que nous l’ayons fait. Ce n’est pas parce que ses responsables nous transmettent un document hors session, au-delà des délais prévus, qu’ils sont dispensés de recueillir notre avis.

M. Michel Bouvard, rapporteur. Les commissions élargies ont été créées dans un double but. D’une part, il fallait sortir de l’académisme de la séance, autrement dit éviter les tirades et les questions focalisées sur les seuls problèmes locaux. Or on a finalement substitué un académisme à un autre, sans améliorer la réactivité mais en privant le rapporteur spécial de la possibilité de présenter une analyse au fond. D’autre part, il s’agissait d’en finir avec la discussion des missions interministérielles, où nous nous retrouvions noyés sous des vagues de monologues qui se succédaient sans nous laisser le temps de poser des questions.

La pratique de Patrice Martin-Lalande pour s’assurer des suites données aux travaux de la Cour des comptes me semble plus efficace qu’une saisine par chaque parlementaire, qui risquerait de provoquer un encombrement de la Cour sans rien améliorer.

Aucun des opérateurs n’est dans le périmètre de la LOLF. Au fil des années, nous avons tenté, par voie d’amendements, de récupérer des informations les concernant et d’obtenir de l’État qu’il les encadre. Nous avons déjà demandé à être destinataires des contrats d’objectifs et de moyens, mais nous pourrions compléter notre proposition en réclamant un vote – pour avis, car il ne faut pas porter atteinte à l’autonomie de l’opérateur ni au rôle du conseil d’administration – sur les contrats conclus par les principaux opérateurs ou par ceux d’entre eux qui bénéficient de recettes affectées. En tout cas, le sujet mérite d’être approfondi. En ce qui concerne la méthodologie des auditions, je partage l’avis d’Alain Rodet.

Monsieur Lebreton, votre préoccupation a été la nôtre dès l’origine. Quand nous avons élaboré la première maquette budgétaire, nous voulions mettre toutes les dépenses pertinentes dans la mission Outre-mer, mais nous nous sommes heurtés à la fois à l’État et aux élus locaux qui craignaient de perdre leur lien avec les autres ministères. C’est pourquoi une forme de statu quo a prévalu, opérant un compromis entre la logique horizontale – crédits par ministère – et la logique verticale – crédits centralisés. Ensuite est venue l’affaire du document de politique transversale. Sans doute ce document doit-il servir de support à la discussion budgétaire, mais le problème remonte à l’origine. En tout état de cause, il faut obtenir l’accord des élus ultramarins avant de consolider tous les crédits dans la mission Outre-mer.

Je partage assez largement les propos d’Henri Emmanuelli. Non, la LOLF n’est pas la RGPP. Oui, l’informatique est un vrai sujet de préoccupation, et un sujet qui dépasse le cadre de la MILOLF. La commission des Finances devrait s’en saisir parce que, depuis une vingtaine d’années, tout programme informatique donne lieu à dérive dans le temps comme dans les coûts.

En ce qui concerne les indicateurs, la tentation bureaucratique existe et il ne faut pas que le seul but de l’action publique soit de les perfectionner, mais nous en avons besoin, à condition qu’ils s’appuient sur une véritable comptabilité d’analyse des coûts. Certes, la spécificité de chaque ministère mérite d’être prise en compte mais, dès lors qu’il s’agit de cerner des activités comparables, il faut arriver à des indicateurs cohérents entre eux, comme nous l’avons fait par exemple en harmonisant ceux de la police et de la gendarmerie, ce qui a permis une vision consolidée de la politique de sécurité.

S’agissant des économies dégagées par la RGPP, la MEC y travaille dans le cadre de son rapport sur la soutenabilité de la masse salariale. Nous l’exploiterons une fois qu’il aura été publié, en septembre prochain.

M. Thierry Carcenac, rapporteur. Les membres du Parlement, en particulier les rapporteurs spéciaux, partagent le même avis sur les commissions élargies, qui devraient se calquer sur ce qu’aurait dû être la séance publique. Il faudrait arriver à ce que le ministre ne monopolise pas la parole. Peut-être le rapport du rapporteur spécial pourrait-il faire l’objet d’un débat spécifique en commission, même en l’absence du ministre. En tout état de cause, les questions brèves devraient donner lieu à des réponses également brèves du ministre. La mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines, qui regroupe cinq programmes, a été examinée cette année dans des conditions catastrophiques.

Pour en venir aux systèmes d’information, il me semble que, sous prétexte qu’il s’agit d’un sujet technique, plus personne ne s’en préoccupe, ni les ministres, ni les secrétaires généraux, et on laisse les informaticiens décider. Peut-être faudrait-il s’y prendre autrement. Ainsi, au Canada, il existe un ministère, ou du moins un secrétariat d’État, placé auprès du Premier ministre, qui est chargé des systèmes d’information et de l’informatique et peut avoir une vision globale. Chez nous, chacun en est réduit à se débrouiller. Henri Emmanuelli a raison : quels que soient les programmes, les crédits dérapent. Il suffit de se souvenir de l’audition, l’année dernière, du directeur de l’Agence pour l’informatique financière de l’État…

Pour avoir de bons indicateurs, nous devons nous poser des questions sur ceux qui nous sont proposés par les ministères. En matière de contrôle fiscal par exemple, il n’y a aucun critère d’efficacité, alors qu’il y en a sur le respect des délais de restitution de la TVA. Ce cas de figure existe dans de nombreux ministères. Il y a ceux qui savent choisir leurs indicateurs, qui enregistrent de très bons résultats et sont bien classés… et les autres.

La Commission autorise la publication du rapport d’information.

ANNEXE
LISTE DES AUDITIONS DE LA MISSION

● Les effets de la LOLF sur l’allocation des moyens du point de vue des responsables de programmes et des directeurs des affaires financières (9 mars 2011)

– M. Jean-Michel Blanquer, responsable des programmes Enseignement scolaire public du 1er et second degré et Vie de l’élève

– M. Stéphane Romatet, directeur général administratif et financier et M. Laurent Garnier, directeur des affaires financières du ministère des Affaires étrangères

● L’appropriation de la LOLF par l’Assemblée nationale (9 mars 2011)

– M. Serge Grouard, président de la commission du Développement durable et de l’aménagement du territoire

● L’appropriation de la LOLF par le Sénat (9 mars 2011)

– M. Jean Arthuis, président de la commission des Finances du Sénat

● Les effets de la LOLF sur l’allocation des moyens du point de vue du ministère du Budget (15 mars 2011)

– M. Philippe Josse, ancien directeur du Budget

● Les effets de la LOLF sur l’allocation des moyens du point de vue des secrétaires généraux (16 mars 2011)

– M. Jean-François Monteils, secrétaire général du MEDDTL et Mme Béatrice Leconte, directrice des affaires financières

● Les effets de la LOLF sur l’allocation des moyens du point de vue des secrétaires généraux (5 avril 2011)

– M. Guillaume Boudy, secrétaire général du ministère de la Culture

● Les effets de la LOLF sur l’allocation des moyens du point de vue des responsables de programmes (12 avril 2011)

– Mme Véronique Malbec, responsable du programme Justice judiciaire, directrice des services judiciaires au ministère de la Justice, représentée par son adjoint M. Xavier Tarabeu

● L’appropriation de la LOLF par l’Assemblée nationale (12 avril 2011)

– M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des Affaires Sociales

– M. Serge Poignant, président de la commission des Affaires économiques

● Les effets de la LOLF sur l’allocation des moyens du point de vue du ministère du Budget (suite) (10 mai 2011)

– M. Julien Dubertret, directeur du Budget

– Mme Marie-Christine Lepetit, directrice de la Législation fiscale

● Le rôle de la LOLF dans les arbitrages interministériels et les contraintes du débat parlementaire (11 mai 2011)

– M. Alain Pichon et des représentants de la Cour des comptes

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LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES DES PRÉSIDENTS DE COMMISSION DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE

– M. Axel Poniatowski, président de la commission des Affaires étrangères

– M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission des Lois

– M. Guy Teissier, président de la commission de la Défense nationale et des forces armées

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* *

LISTE DES ÉTUDES COMPARATIVES RELATIVES
À DES PARLEMENTS ÉTRANGERS

– Allemagne

– Grande-Bretagne

– Italie

– Suède

1 () Même si le texte de l’ordonnance organique est fortement ancré dans celui du décret du 19 juin 1956, rédigé au terme d’un long processus de concertation avec le Parlement.

2 () Paul Amselek, « Le budget de l’État et le Parlement sous la Ve République », RDP, n°5/6, 1998, p. 1448.

3 () Jean-Pierre Camby et Gérald Sutter, Introduction à l’ouvrage collectif intitulé : « La réforme du budget de l’État », LGDJ, 3e édition, p. 3.

4 () Voir l’exposé général de la proposition de loi organique relative aux lois de finances déposée par Didier Migaud, rapport n° 2908, 5 février 2001.

5 () Daniel Hochedez, « La genèse de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances : un processus parlementaire exemplaire », RFFP n° 76, 2001, p. 51.

6 () Jean-Pierre Camby et Gérald Sutter, Introduction à l’ouvrage collectif intitulé : « La réforme du budget de l’État », op. cit. p. 5.

7 () Les membres de la mission sont depuis l’origine MM. Michel Bouvard, Charles de Courson et Jean-Pierre Brard tandis que M. Didier Migaud, a été remplacé par M. Thierry Carcenac en 2008.

8 () Comme l’a constaté le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2005-530 du 29 décembre 2005 censurant la pratique des missions « monoprogrammes ».

9 () Voir infra II.B. 1 : l’exercice limité du droit d’amendement.

10 () Les dotations sont des unités budgétaires dérogatoires affranchies des contraintes de performance et exclues des modalités de gestion prévues pour les programmes (elles ne peuvent faire l’objet de report, virement, transfert ni de répartition de crédits pour dépenses accidentelles et imprévisibles).

11 () Il s’agit des programmes de la mission Provisions : dépenses accidentelles et imprévisibles et Provisions relatives aux rémunérations publiques.

12 () À l’initiative des sénateurs MM. Michel Charasse et Adrien Gouteyron, la loi de finances pour 2009 comporte une nouvelle disposition selon laquelle, à compter de l’exercice 2010, la loi de finances de l’année fixera le plafond d’emploi des établissements à autonomie financière visés par l’article 66 de la loi nº 73-1150 du 27 décembre 1973 de finances pour 1974. Il s’agit des centres culturels, des instituts culturels et des centres de recherche situés à l’étranger.

13 () L’ETPT est l’unité de décompte dans laquelle sont exprimés à la fois les plafonds d’emplois et les consommations de ces plafonds (= effectifs physiques x quotité de temps de travail x période d’activité dans l’année). L’ETP prend en compte la quotité de travail mais pas la période d’activité dans l’année (=effectifs physiques x quotité de temps de travail) : ainsi, un agent à temps partiel à 60 % présent la moitié de l’année correspond à 0,6 ETP mais à 0,6x6/12 ETPT soit 0,3 ETPT.

14 () Au sens des articles L. 712-8 et suivants du code de l'éducation, résultant de la loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités.

15 () D'après l'annexe générale « jaune » consacrée aux opérateurs de l'État jointe au projet de loi de finances pour 2011, les emplois des opérateurs non soumis au respect du plafond d’emploi sont estimés à environ 37 853 ETP en 2011, soit en augmentation de 3 272 ETP par rapport à 2010 (+ 9 %). Cette hausse est essentiellement imputable aux emplois financés, sur leurs ressources propres, par les universités et par d'autres établissements d'enseignement supérieur (en 2011, 71 % des emplois hors plafonds s'inscrivent dans le cadre de la mission Recherche et enseignement supérieur).

16 () Voir le rapport d’information n° 1058 : Les acteurs de la LOLF : autonomie, responsabilité et contrôle des services déconcentrés et des opérateurs de l’État, Michel Bouvard, Jean-Pierre Brard, Thierry Carcenac et Charles de Courson.

17 () Articles 71 et 72 de la loi de finances rectificative pour 2011, adoptée au Sénat le 6 juillet 2011, TA n°161.

18 () Voir sur ce point, les critiques de certaines commissions au II. B ci-après.

19 () Voir le rapport de MM. Alain Lambert et Didier Migaud, « La mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances - Réussir la LOLF, clé d'une gestion publique responsable et efficace » (septembre 2005).

20 () Tel est le cas pour le programme 305 Stratégie économique et fiscale de la mission Économie, le directeur général du Trésor étant responsable des crédits de personnel pour les rémunérations des agents de la DLF, inscrits dans la troisième action Élaboration de la législation fiscale alors que ces crédits sont concrètement gérés par deux directions générales hors du périmètre du programme (DGFiP et DPAEP).

21 () Comme par exemple, les dispositifs des investissements d’avenir et du plan Campus.

22 () Sur la mission Action extérieure de l’État, l’objectif 1 du programme 105 Construire l’Europe ou l’objectif 1 du programme 185 Relever les défis de la mondialisation sont des objectifs ambitieux mais qui ne relèvent pas directement ou exclusivement des responsables de programme, voire de la France. Ils sont en outre associés à des indicateurs qui n’ont qu’un lien indirect avec l’objectif qu’ils sont tenus de mesurer.

23 () Par exemple, le programme Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires comporte 12 indicateurs, qui ne couvrent que 49 % de ses crédits.

24 ()Depuis le PAP 2010, sont systématiquement présentés trois indicateurs relatifs aux fonctions ressources humaines (indicateur rapportant les effectifs gérants aux effectifs gérés), immobilier (indicateur d’efficience de la gestion immobilière) et bureautique (ratio d’efficience bureautique rapportant les dépenses bureautiques au nombre de postes fonctionnels équipés).

25 () Voir le rapport de la Cour des comptes sur les résultats et la gestion budgétaire de l’Etat, exercice 2010, p. 197-198.

26 () Voir les rapports d’information n° 1058 p. 31 et n° 1780 p. 21, précités.

27 () Hugues Bied-Charreton, « La démarche de performance dans le cadre des lois de finances », Les notes bleues de Bercy, n° 305, mars 2006.

28 () Xavier Inglebert, Manager avec la LOLF, Groupe Revue fiduciaire, 2005, p. 60). Pour davantage de détails, voir Bernard Abate, La nouvelle gestion publique, LGDJ, 2000, p. 76-79.

29 () JO n° 20 du 25 janvier 2005 page 1320.

30 () Rapport de M. Paul Champsaur, président de l'Autorité de la statistique publique, et de M. Jean-Philippe Cotis, directeur général de l'Institut de la statistique et des études économiques (Insee), sur la situation des finances publiques de la France, mai 2010.

31 () Voir le rapport de MM. Alain Lambert et Didier Migaud, « La mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances - Réussir la LOLF, clé d'une gestion publique responsable et efficace » (septembre 2005).

32 () Loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

33 () Loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014.

34 () Elles permettent de préciser, au niveau de chaque programme, le plafond des crédits, qui n’était fixé que de manière indicative dans la programmation triennale. Ces montants par programme s’inscrivent dans le respect des plafonds de chaque mission, qui sont en revanche déterminés de manière ferme dans le budget triennal.

35 () Sont prises en compte dans le périmètre de la norme les dépenses de l’État ainsi que les prélèvements sur recettes et les nouvelles affectations de ressources à des opérateurs de l’État dont le montant s’élève en loi de finances initiale pour 2011 à 356,3 milliards d’euros.

36 () Rapport d’information n° 1058 « Les acteurs de la LOLF : autonomie, responsabilité et contrôle des services déconcentrés et des opérateurs de l’État » déposé le 16 juillet 2008, Rapporteurs : Michel Bouvard, Jean-Pierre Brard, Thierry Carcenac et Charles de Courson.

37 () La circulaire du Premier ministre du 26 mars 2010 relative au pilotage stratégique des opérateurs, prévoyant notamment des gains de productivité de 1,5 % par an, une réduction de leurs dépenses de fonctionnement au même niveau que celui de l’État et la poursuite de la signature de contrats d’objectifs et de performance, est indéniablement une preuve des efforts accomplis pour intégrer les opérateurs à la démarche de performance globale de l’État.

38 () Article 108 de la loi n° 2007-1824 de finances rectificative pour 2007.

39 () Article 159 de la loi n° 2011-1657 de finances pour 2011.

40 () Ces statistiques sont issues des données accessibles par les moteurs de recherche des sites Internet de l’Assemblée nationale et du Sénat. Ces données ont été consolidées par la MILOLF.

41 () Voir le rapport d’information n° 1058, « Les acteurs de la LOLF : autonomie, responsabilité et contrôle des services déconcentrés et des opérateurs de l’État », juillet 2008.

42 () Le Comité interministériel d’audit des programmes, a notamment observé dans son 7e rapport d’activité (octobre 2009 à septembre 2010) que « Comme les programmes 155 et 215, le programme 310 « Conduite et pilotage de la politique de la justice » constitue un programme support dont le rôle n’est pas précisé par une charte de gestion ministérielle. Il n’existe d’ailleurs pas non plus de charte de gestion propre au programme 310. Au terme d’une analyse détaillée des différentes activités, l’audit a fait le constat d’une déclinaison insuffisante du dispositif de performance dans les structures opérationnelles. Il a ainsi suggéré la mise en place d’indicateurs de gestion, inspirés des dispositifs figurant dans d'autres programmes support, permettant de favoriser le pilotage du programme ».

43 () Voir le tome 2 du rapport n° 3544 sur le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2010, commentaire du RAP de la mission Aménagement du territoire, par M. Jean-Claude Flory.

44 () Le logiciel Presage est l’outil informatique de suivi et de gestion des programmes européens et des contrats de projets État-régions. Il est également utilisé pour le suivi des pôles d’excellence rurale et des budgets opérationnels de plusieurs ministères. Depuis 2009, son utilisation a été étendue aux suivis du programme d’action territoriale pour la restructuration des armées et du plan de relance de l’économie.

45 () Ce projet est actuellement en cours de validation.

46 () Voir le Rapport de la Cour des comptes sur les résultats et la gestion budgétaire 2010, p. 193.

47 () Voir le Rapport de la Cour des comptes sur les résultats et la gestion budgétaire 2010, p. 196-197.

48 () Les crédits des BOP centraux sont délégués selon deux procédures : une partie des crédits est déléguée aux BOP régionaux au moyen d’une délégation d’autorisation de programme globale (DAPG) ; l’autre partie est déléguée aux UO au moyen d’une notification d’autorisation de programme affectée (NAPA), sans passer par les BOP régionaux.

49 () Rappelons que seul le ministère de la Recherche et de l’enseignement supérieur est exonéré de cette règle.

50 () Voir le rapport de M. Didier Migaud sur la proposition de loi organique relative aux lois de finances, n° 2908, 5 février 2001, p. 249.

51 () Voir l’ouvrage Connaître l’Assemblée ; Les lois de finances et de financement à l’Assemblée nationale, 4e édition, septembre 2010, p. 165 à 182.

52 () Loi n° 2011-140 du 3 février 2011 tendant à renforcer les moyens du Parlement en matière de contrôle de l'action du Gouvernement et d'évaluation des politiques publiques.

53 () Voir le rapport de M. Didier Migaud sur la proposition de loi organique relative aux lois de finances, n°2908, 5 février 2001, p. 250.

54 () L’on peut citer par exemple les ouvertures récurrentes de crédits par décret d’avance sur la mission Défense pour le financement des OPEX, sur la mission Immigration, asile et intégration pour le financement de l’hébergement d’urgence…

55 () Un décret d’avance notifié à la commission des Finances de l’Assemblée nationale le 19 avril 2010 a finalement été retiré, le Gouvernement ayant procédé aux mouvements de crédits envisagés dans le cadre du projet de loi de finances rectificative déposé le 21 avril 2010.

56 () Réponse au questionnaire adressé aux présidents de commissions par la MILOLF.

57 () Idem.

58 () Idem.

59 () Idem.

60 ()M. Jérôme Cahuzac, Mieux organiser le travail pour plus d’efficacité, Revue française de finances publiques n° 113, février 2011, p. 8.

61 () Réponse au questionnaire adressé aux présidents de commissions par la MILOLF.

62 () Audition de M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des Affaires sociales, par la MILOLF le 12 avril 2011.

63 () Le point de vue de M. Jean Arthuis, Revue française de finances publiques n° 113, février 2011, p. 18.

64 () Le point de vue de M. Jean Arthuis, Revue française de finances publiques n° 113, février 2011, p. 19.

65 () Étant précisé qu’une réunion de commission est prévue en septembre 2011 pour auditionner le DGESCO sur les résultats 2010 et les perspectives du PLF pour 2012.

66 () Décisions n° 85-202 DC du 16 janvier 1986 et surtout n° 91-300 DC du 20 novembre 1991, confirmées par la décision n° 2006-538 DC du 13 juillet 2006 (cf. notamment le considérant 7).

67 () Le point de vue de M. Jean Arthuis,Revue française de finances publiques n° 113, février 2011, p. 19.

68 () Réponse au questionnaire adressé aux présidents de commissions par la MILOLF.

69 () Encore la comparaison est-elle minorée et affectée d’une incertitude, le coût de fonctionnement n’étant plus renseigné en 2011.


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