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N° 4019

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le  1er décembre 2011

RAPPORT D’INFORMATION

déposé

en application de l’article 146-3, alinéa 8, du Règlement

Par le COMITÉ D’ÉVALUATION ET DE CONTRÔLE
DES POLITIQUES PUBLIQUES

sur l’évaluation de la révision générale des politiques publiques (RGPP)

et présenté

par M. François CORNUT-GENTILLE et M. Christian ECKERT

Députés.

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INTRODUCTION 13

PRINCIPAUX CONSTATS ET RECOMMANDATIONS 19

I.– LA MÉTHODE DE LA RGPP 19

II.– LES MESURES DE LA RGPP 22

III.– LES IMPACTS FINANCIERS DE LA RGPP 23

PRINCIPAUX TABLEAUX DU RAPPORT 25

PREMIÈRE PARTIE : LA MÉTHODE DE LA RGPP 29

I.– LE LANCEMENT DE LA RGPP : DU TRAVAIL INITIAL DES ÉQUIPES MIXTES D’AUDIT AUX DÉCISIONS DES CMPP 30

A.– LE RÔLE ET LE CADRE DE TRAVAIL DES ÉQUIPES MIXTES D’AUDIT 30

1.– Un rôle d’analyse et de préparation à la décision publique 30

2.– les thèmes abordés 30

3.– Le cadre de la participation des consultants privés aux audits 31

4.– Le secret persistant sur les travaux des équipes mixtes d’audit témoigne d’un lancement de la RGPP sans consultation des agents publics et de l’administration dans son ensemble 32

B.– DES TRAVAUX DES ÉQUIPES MIXTES D’AUDIT AUX DÉCISIONS DES CMPP : L’« EXEMPLE » DE L’ÉDUCATION NATIONALE 33

1.– le contenu des documents de travail transmis à vos rapporteurs 33

2.– Un rôle relativement discret des cabinets privés d’audit ? 39

3.– Un travail axé sur la recherche de gains d’efficience sur les effectifs 40

4.– Des mesures officielles de la RGPP finalement très différentes des voies explorées par l’équipe d’audit 41

II.– LA GOUVERNANCE, LA MISE EN œUVRE ET LE SUIVI DE LA RGPP 44

A.– LA MISE EN PLACE DES INSTANCES POLITIQUES, ADMINISTRATIVES ET DE SUIVI DE LA RGPP 44

1.– Prendre les mesures au plus haut niveau de l’exécutif : la composition du Conseil de modernisation des politiques publiques (CMPP) et des Comités de suivi 44

2.– Mettre en œuvre les mesures dans les ministères : la circulaire du Premier ministre du 18 mars 2008 45

3.– La procédure et les outils de suivi des mesures de la RGPP 47

B.– DES COMITÉS DE SUIVI ET CMPP DE 2007-2008 À LA MISE EN œUVRE DES MESURES : LA GOUVERNANCE DE LA RGPP 48

1.– Le paradoxe de la RGPP : présence et absence du niveau politique 48

a) La banalisation, voire l’effacement, des CMPP 48

b) L’absence du Parlement dans la phase de prise de décision des mesures 49

c) L’action et l’information limitées du Parlement dans la phase de mise en œuvre des décisions de la RGPP 51

2.– Les ministères se sont mobilisés au service de la mise en œuvre de la RGPP 53

a) Le rôle et l’implication des secrétaires généraux des ministères et des cadres des directions d’administration centrale 53

b) L’exemple du ministère de la Défense 54

c) L’exemple du ministère de la Culture 56

d) Un rôle de concepteur des décisions dans la phase 2 de la RGPP 56

3.– Le rôle de la direction générale de la modernisation de l’État (DGME) 57

a) Les missions et activités de la DGME 57

b) L’évolution des moyens financiers globaux de la DGME 58

c) Les moyens humains de la DGME 59

d) L’achat de prestations externes dans le cadre de la RGPP 60

e) L’action concrète et la fonction achat de la DGME appréciées par les ministères 65

f) Le positionnement de la DGME auprès du ministère chargé du budget demeure-t-il pertinent ? 66

C.– DES ÉVOLUTIONS DANS LA GOUVERNANCE DE LA RGPP PAR UNE DÉCONCENTRATION ACCRUE ? LE CAS DE L’ÉDUCATION NATIONALE 68

1.– Le lancement de la RGPP : une administration déconcentrée tenue à l’écart du processus décisionnel et mobilisée autour d’instruments classiques pour mettre en œuvre les mesures 68

a) Les états-majors des rectorats « spectateurs » de la phase de travail de l’équipe mixte d’audit 68

b) La mise en œuvre des mesures proprement dites de la RGPP par les services déconcentrés de l’éducation nationale 70

2.– La déconcentration progressive de certains choix de gestion rendue nécessaire par la mise en œuvre de la règle du « un sur deux » 71

a) Origines du dialogue de gestion entre l’administration centrale et les rectorats 71

b) Modalités du dialogue de gestion 72

c) Avantages et limites de l’usage du dialogue de gestion pour la gestion des personnels enseignants 73

d) Le dialogue de gestion, source d’innovations pour l’organisation des services administratifs 74

e) Des enseignements pour l’administration préfectorale ? 75

D.– LE SUIVI DE LA RGPP 77

1.– Les faiblesses des rapports publics relatifs à la RGPP 77

a) Un usage particulièrement malaisé 77

b) Un contenu techniquement insuffisant et faisant la part belle au marketing politique 78

2.- Comment sont jugés l’avancement et l’impact des mesures de la RGPP ? 79

a) Le système des feux tricolores : une réelle simplicité ? 79

b) Au-delà des feux tricolores, des commentaires souvent trop laconiques sur l’avancement des mesures 82

c) Les échanges administratifs en amont des CMPP, « boîte noire » de la RGPP ? 83

d) Le suivi des impacts des mesures de la RGPP n’est pas assuré par les rapports publics sur la RGPP 86

e) le passeport biométrique et le certificat d’immatriculation des véhicules (CIV) : une vérité « à rebours » des éléments officiels de présentation ? 88

III.– LA RGPP ET LES AGENTS PUBLICS 91

A.– LA MÉTHODOLOGIE DE LA RGPP À L’ÉGARD DES PERSONNELS DE LA FONCTION PUBLIQUE D’ÉTAT 91

1.- La RGPP conçue comme condition du succès de la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » 91

2.– La RGPP conçue comme vecteur de valorisation du travail par le retour catégoriel et l’accroissement de l’intérêt des tâches 91

3.- L’accompagnement des changements induits par la RGPP 92

B.– LA LOI N° 2009-972 DU 3 AOÛT 2009, OUTIL D’ACCOMPAGNEMENT DE LA RGPP 93

1.- Un projet de loi adopté dans des délais moins rapides qu’envisagés 93

2.- La loi porte de nombreuses mesures qui ne modifient pas les fondements du droit de la fonction publique 94

a) Les dispositions relatives aux conditions de la mobilité 94

b) Les dispositions relatives au recrutement, à l’appréciation de la performance, aux rémunérations 95

c) Des dispositions à la hauteur des enjeux ? L’exemple de la question de la mobilité 95

d) Une loi accompagnée et suivie d’autres dispositions qui en partagent l’esprit notamment en matière de mobilité 96

C.– LA RGPP SEMBLE MAINTENANT S'ACCOMPAGNER D'UN DIALOGUE SOCIAL PLUS INTERMINISTÉRIEL 98

D.– RÉALITÉS ET PERSPECTIVES DE LA RÉMUNÉRATION AU MÉRITE 100

1.- L’instauration de la prime de fonctions et de résultats (PFR) 101

2.- L’instauration d’une prime d’intéressement collective 103

3.- Quelle évaluation de la rémunération au mérite ? 103

E.– LA RGPP ET LES AGENTS PUBLICS : DU MALAISE AU REJET 104

1.- Le leitmotiv officiel de la nécessité de l’association des agents publics 104

2.- L’association des agents publics s’est bornée à leur information, dans le cadre d’un discours général parfois ambiguë sur la portée de la RGPP 105

2. La RGPP, « repoussoir » pour les agents publics ? 107

a) Les résultats d’une enquête de l’institut Ifop de novembre 2010 107

b) Les résultats d’une enquête de l’institut Ifop d’avril 2011 109

c) La position unanime des syndicats de la fonction publique lors de la table ronde du 27 septembre 2011 110

DEUXIÈME PARTIE : LES MESURES DE LA RGPP 115

I.– L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL INITIAL DE LA RGPP : ÉVALUER LA PERTINENCE DES MISSIONS EXERCÉES PAR L’ÉTAT, ACCROÎTRE L’EFFICIENCE DE SON FONCTIONNEMENT ET RÉALISER DES ÉCONOMIES BUDGÉTAIRES 115

A.– LE DISCOURS DU PREMIER MINISTRE DU 10 JUILLET 2007 115

B.– LE RAPPORT RENDU PUBLIC À L’OCCASION DU CMPP DU 12 DÉCEMBRE 2007 117

II.– LA RGPP A CONDUIT À DES CHANGEMENTS SUBSTANTIELS DE L’ORGANISATION ADMINISTRATIVE DE L’ÉTAT SANS MODIFICATION EN PROFONDEUR DE SES MISSIONS 120

A.– LA MODESTIE DES MODIFICATIONS APPORTÉES AUX MISSIONS ET INTERVENTIONS DE L’ÉTAT 120

1.– L’abandon rapide d’une réelle revue générale portant sur les politiques publiques 120

2.–  Très peu de décisions de la RGPP ont correspondu à une modification des missions de l’État 120

a) L’exception de la suppression progressive de l’ingénierie concurrentielle 120

b) Le recentrage de l’action de la protection judiciaire de la jeunesse sur la prise en charge des mineurs délinquants 123

3.– Des mesures modifient dans certains domaines les modalités et l’ampleur des interventions de l’État 124

a) Trois mesures sont relatives aux dépenses fiscales et niches sociales 124

b) Trois mesures de la RGPP ont modifié l’ampleur et les modalités de régimes d’aides publiques aux entreprises 125

c) Deux mesures achevées ont concerné l’ampleur et les modalités de certains dispositifs d’intervention en matière agricole 126

B.– LA MAJEURE PARTIE DES MESURES DE LA RGPP CONCERNENT LA RATIONALISATION DE L’ORGANISATION ET DE L’ACTION ADMINISTRATIVES 126

1.– Constats préalables sur le nombre, la diversité et l’état d’avancement des mesures de la RGPP 126

2.– Les mesures les plus importantes et les plus emblématiques de la RGPP concernent les structures des administrations centrales et déconcentrées 132

a) La réforme de l’administration territoriale de l’État (Réate) 132

b) La création de la direction générale des finances publiques (DGFip) et la fusion des réseaux de la comptabilité publique et des impôts 134

c) La création des agences régionales de santé (ARS) 136

d) La réforme de la carte judiciaire 138

e) La création des bases de défense 138

3.– La RGPP a concerné l’organisation des administrations centrales de tous les ministères 139

a) Les mesures de la RGPP touchant les administrations centrales des ministères 139

b) L’installation sur le site de l’Arche de la Défense du ministère de l’Écologie 141

c) Le regroupement des sites parisiens du ministère de la Défense à Balard 142

4.– Les « mots d’ordre » de la grande majorité des mesures de la RGPP : optimiser, rationaliser, mutualiser, fusionner, moderniser 144

a) D’importantes mesures de la RGPP concernent les fonctions supports de l’État en matière notamment immobilière, d’achats et de paye des agents 144

b) De très nombreuses autres mesures de la RGPP tendent à des actions d’optimisation, rationalisation, mutualisation, modernisation et fusion pour de multiples services et fonctions administratives 146

III.– PERSPECTIVES SUR LES MESURES DE LA RGPP 149

A.– EST-IL ENCORE LONGTEMPS POSSIBLE « DE FAIRE MIEUX AVEC MOINS » ? 149

1.– Un abandon, constaté ou à venir, de certaines missions induit par la contrainte du « faire mieux avec moins » ? 149

2.– Le cas de l’Éducation nationale : les rectorats considèrent que la RGPP dans son principe actuel a atteint ses limites 150

3.– Dans certains ministères : un retour à la question des missions ? 152

B.– UNE PHASE 2 DE LA RGPP TOURNÉE DE FAÇON ACCRUE VERS DES MESURES DE SIMPLIFICATION ADMINISTRATIVE 153

1.– Un objectif réel dès la première phase de la RGPP 153

2.– Les CMPP des 30 juin 2010 et 9 mars 2011 : une RGPP tournée plus résolument vers les questions concernant le service rendu à l’usager 156

a) Les orientations du CMPP du 30 juin 2010 156

b) Un « nouveau » programme de 100 mesures de simplification 156

c) La création du baromètre de la qualité des services publics 158

TROISIÈME PARTIE : LES IMPACTS FINANCIERS DE LA RGPP 163

I.– LES PROGRAMMATIONS ET CONSTATS DU GOUVERNEMENT SUR LES IMPACTS BUDGÉTAIRES DE LA RGPP 163

A.– LES PROGRAMMATIONS INITIALES ET ACTUALISÉES POUR LES PÉRIODES TRIENNALES 2009-2011 ET 2011-2013 163

1. La période triennale 2009-2011 (phase 1 de la RGPP) 163

a) La programmation ex ante 163

b) La programmation actualisée 164

2. La période triennale 2011-2013 (phases 1 et 2 de la RGPP) 165

a) La présentation initiale du Gouvernement 165

b) Les précisions apportées par le Gouvernement 166

B.– LES ÉCONOMIES CONSTATÉES AU TITRE DE LA PREMIÈRE PHASE DE LA RGPP SELON LE GOUVERNEMENT 167

1. Les constatations du Gouvernement et de la Cour des comptes pour 2009 et 2010 167

2. L’actualisation et la portée des programmations et constatations du Gouvernement 169

a) L’évaluation actualisée des économies budgétaires induites par la RGPP selon le Gouvernement 169

b) La portée des évaluations actualisées 170

C.– DES INFORMATIONS PUBLIQUES INSUFFISANTES POUR VÉRIFIER LES INFORMATIONS GLOBALES DU GOUVERNEMENT 172

1. L’annexe au projet de loi de règlement des comptes portant sur les mesures finies de la RGPP 172

2. Quels enseignements en tirer ? 173

3. Un consensus sur l’insuffisance des informations disponibles 175

II.– ÉLÉMENTS SUR LES IMPACTS FINANCIERS DE LA RGPP EN FONCTIONNEMENT ET EN INTERVENTION 177

A.– LE PANORAMA DRESSÉ PAR LE GOUVERNEMENT DES GAINS EN INTERVENTION ET EN FONCTIONNEMENT PAR MESURE DE LA RGPP 177

1. Les éléments émanant de la direction du budget 177

a) Présentation du tableau transmis par la direction du budget 177

b) Le lien entre certaines des économies programmées et la RGPP proprement dite n’est pas clairement établi 185

c) Le tableau inspire les prévisions globales du Gouvernement 188

d) D’autres économies liées à la RGPP sont attendues par le Gouvernement 192

2. Une forte concentration des impacts financiers sur un très petit nombre de mesures dont la portée de certaines économies associées pose question 194

a) La moitié des gains attendus de la RGPP sur 2009-2013 est concentrée sur 10 mesures 194

b) Encadrer et maîtriser les dépenses fiscales et les niches sociales : 1 175 millions d’euros en intervention 196

c) Optimiser la politique d’achats de l’État : 1 000 millions d’euros d’économies en fonctionnement 198

d) Rénover le 1 % logement et sa gouvernance en vue de réorienter l'utilisation des crédits et de limiter les coûts de gestion : 800 millions d’euros d’économies en intervention 199

e) Dynamiser la politique immobilière de l’État : 415 millions d’euros en fonctionnement 201

f) Économie sur le coût environné (hors l’immobilier) liée aux suppressions d’effectifs dans les ministères : 399 millions d’euros notamment en fonctionnement 202

g) Améliorer la gouvernance du marché du logement social en mutualisant les ressources financières entre organismes HLM, en généralisant le conventionnement global : 340 millions d’euros d’économie en intervention 203

B.– LES INFORMATIONS FOURNIES PAR LE GOUVERNEMENT NE SONT PAS TOUJOURS COHÉRENTES 204

1. La comparaison du tableau détaillé fourni par la direction du budget et des annexes aux projets de loi de règlement des comptes 2009 et 2010 204

2. Le informations fournies par le ministère de l’Écologie, du développement durable, des transports et du logement 207

a) Les constats et programmations des économies issues de la RGPP établis par le secrétariat général du ministère 207

b) D’importants dissensus issus des comparaisons des économies en intervention respectivement programmées par le ministère de l’Écologie et la direction du budget 208

c) Quelles économies associées à la révision des dépenses fiscales environnementales ? 211

3. Les informations fournies par le ministère de la Culture et de la communication 213

a) Les constats et programmations des économies issues de la RGPP établis par le secrétariat général du ministère 213

b) Le ministère chargé de la culture ne prend pas en compte certaines des économies indiquées par le ministère du Budget 215

4. Les informations fournies par le ministère de la Défense 216

a) Le projet d’un suivi précis des impacts financiers de la RGPP 216

b) Les évaluations actuelles des économies engendrées par la RGPP par le ministère de la Défense 217

5. Les informations fournies par le secrétariat général des ministères sociaux 218

a) Les économies de fonctionnement 218

b) Contrairement à le direction du budget, le secrétariat général des ministères sociaux n’évoque pas d’économies en intervention le concernant 219

C.– LA QUESTION DE LA DISTINCTION DES COÛTS BRUTS ET NETS 220

1. Pour la direction du budget, les économies brutes seraient équivalentes aux économies nettes 220

2. Dans certains cas, l’équivalence des gains nets et bruts ne semble pas vérifiée 221

a) Les mesures d’accompagnement du changement au sein du ministère de la Défense 221

b) Les coûts de la mesure portant sur le passeport biométrique 221

c) Les coûts de la mesure portant sur le certificat d’immatriculation des véhicules (CIV) 223

III.– ÉLÉMENTS SUR LES IMPACTS FINANCIERS DE LA RGPP EN DÉPENSES DE PERSONNEL 225

A.– LA MISE EN œUVRE DES SCHÉMAS D’EMPLOIS ET DES BAISSES D’EFFECTIFS ASSOCIÉES A ÉTÉ EFFECTIVE 225

1. La mise en œuvre des schémas d’emploi ministériels depuis 2008 225

a) Récapitulatif des schémas d’emplois programmés et mis en œuvre depuis 2008 225

b) Les schémas d’emplois sont différenciés selon les ministères 227

2. L’application des schémas d’emplois correspond-elle à la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » dans les ministères ? 227

a) L’évolution du taux de remplacement des départs à la retraite au niveau du budget de l’État 227

b) L’évolution du taux de remplacement des départs à la retraite dans les ministères 228

3. Quelques légères incertitudes subsistent sur des détails de la mise en œuvre des schémas d’emplois 231

a) L’« ajustement technique » du PLF 2011 pour le ministère de l’Éducation nationale 231

b) Comparaisons des schémas d’emplois exécutés et du nombre des départs en retraite selon certains ministères et la direction du budget 232

4. La « règle du un sur deux » a conduit à une baisse accrue des effectifs les moins qualifiés de la fonction publique, notamment les personnels de catégorie C 233

B.– DES SCHÉMAS D’EMPLOIS AUX ÉCONOMIES NETTES 236

1. Quels gains bruts liés aux suppressions d’effectifs ? 236

a) Quelle est l’économie induite par la suppression d’un emploi de l’État ? 236

b) Les gains bruts évalués par certains ministères au titre de la mise en œuvre de leurs schémas d’emplois 237

2. Définition du retour catégoriel au regard des instruments et concepts de la politique salariale de l’État 239

a) Le retour catégoriel n’est pas le GVT 239

b) Les mesures catégorielles sont distinctes des mesures ponctuelles concernant les rémunérations 240

c) Les mesures catégorielles ne sont pas la rémunération des heures supplémentaires 241

3. Quel poids du retour catégoriel en regard des économies brutes des schémas d’emplois ? 243

a) Pour 2009, des évaluations proches pour la direction du budget et la Cour des comptes 243

b) Comment distinguer les mesures catégorielles selon qu’elles relèvent ou non du retour catégoriel lié à la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » ? 243

4. Une répartition inégale du retour catégoriel ? 245

a) Les réponses fournies par les ministères 245

b) Une approche par le tableau fourni par la direction du budget 248

5. Le poids des mesures catégorielles a-t-il augmenté depuis 2007 ? 250

6. Une partie du coût des heures supplémentaires effectuées par les enseignants est-elle à prendre en compte dans le calcul des gains nets de la RGPP en personnel ? 250

a) L’augmentation substantielle des heures supplémentaires effectuées dans l’Éducation nationale depuis 2007 250

b) L’État a incité les enseignants à faire des heures supplémentaires, parfois pour pallier les baisses d’effectifs 253

RÉUNION DU CEC DU 5 MAI 2011 : PRÉSENTATION PAR LES RAPPORTEURS DES ORIENTATIONS DE LEUR MISSION 259

RÉUNION DU CEC DU 1er DÉCEMBRE 2011 : EXAMEN DU PROJET DE RAPPORT D’INFORMATION 267

ANNEXES 277

ANNEXE 1 : compte rendu de la table ronde du 27 septembre 2011 avec les organisations syndicales représentatives des agents de la fonction publique 279

ANNEXE 2 : liste par ministère des mesures de la RGPP portant optimisation, rationalisation, mutualisation, fusion et modernisation 305

ANNEXE 3 : lettre de M. Bernard Accoyer, Président de l’Assemblée nationale, à M. Luc Chatel, ministre de l’Éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative 312

ANNEXE 4 : lettre en réponse de M. Luc Chatel, ministre de l’Éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative à M. Bernard Accoyer, Président de l’Assemblée nationale 314

ANNEXE 5 : liste des personnes auditionnées par les rapporteurs 317

ANNEXE 6 : rapport d’Ernst & Young sur les mesures de la RGPP concernant la modification des modalités de délivrance du passeport et du certificat d’immatriculation des véhicules 319

INTRODUCTION

À l’initiative du groupe SRC (1), et en application des dispositions de l’alinéa 2 de l’article 146-3 du Règlement de l’Assemblée nationale, le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée nationale (CEC) a inscrit à son programme de travail pour la session 2010-2011 l’évaluation de la « révision générale des politiques publiques », plus connue sous son acronyme RGPP.

Conformément aux dispositions de l’alinéa 3 de l’article 146-3 du Règlement, sept des huit commissions permanentes de l’Assemblée nationale – en l’espèce toutes sauf la commission des Affaires étrangères – ont désigné des binômes de membres, issus respectivement de la majorité et de l’opposition, pour participer aux travaux à mener. Dans l’ordre alphabétique des commissions, ces membres sont les suivants :

– Affaires culturelles et éducation : MM. Dominique Le Mèner (2) (UMP) et Pascal Deguilhem (SRC),

– Affaires économiques : MM. Bernard Gérard (UMP) et Michel Lefait (SRC),

– Affaires sociales : Mmes Valérie Boyer (UMP) et Martine Pinville (SRC),

– Défense nationale et forces armées : MM. François Cornut-Gentille (3) (UMP) et Bernard Cazeneuve (4) (SRC) (5),

– Développement durable et aménagement du territoire : MM. Jacques Le Nay  (6)(UMP) et Christophe Caresche (SRC),

– Finances : MM. Olivier Carré (7) (UMP) et Christian Eckert (8) (SRC),

– Lois constitutionnelles, législation et administration générale de la République : MM. Guy Geoffroy (9) (UMP) et Bernard Derosier (10) (SRC).

À ces 14 membres, s’ajoute M. Marcel Rogemont (11), membre de la commission des Affaires culturelles et de l’éducation, participant aux travaux en tant que membre du Comité.

Parmi ces 15 députés, le 28 octobre 2010, le Comité a désigné deux rapporteurs, M. François Cornut-Gentille (UMP) pour la majorité et M. Christian Eckert (SRC) pour l’opposition.

Ce sujet présentait la double caractéristique paradoxale à la fois de porter sur un objet administratif au périmètre bien délimité – puisque visant une procédure « administrative » identifiée – et de concerner la totalité des ministères et potentiellement l’ensemble de la fonction publique de l’État, au titre d’un nombre considérable de mesures différentes.

La RGPP s’est en l’espèce inscrite dans la logique de la modernisation et de la réforme de l’État qui, gouvernement après gouvernement, a fait l’objet de diverses procédures, confiées à des structures variées, dont cependant aucune n’a réellement réussi à atteindre l’objectif ambitieux et pourtant indispensable qui lui était assigné : à savoir optimiser durablement et en profondeur le fonctionnement de l’État, qui, faut-il le rappeler, emploie en France deux millions de personnes, et affronte un contexte budgétaire et international particulièrement tendu.

Avec une première application en 2006, la Lolf avait ouvert la voie en posant la règle d’un réexamen au premier euro de l’ensemble des dépenses de l’État, dans le cadre de la procédure budgétaire annuelle. Outre la réponse à une exigence de maîtrise des dépenses publiques, la réforme de l’État constituait également une attente des usagers, comme des agents publics : un sondage réalisé en décembre 2010 (12) mettait ainsi en évidence que 64 % des agents de l’État estimait cette réforme « indispensable » (13).

Compte tenu de l’importance de ces enjeux, les rapporteurs ont souhaité mener une démarche d’évaluation la plus large et la plus rigoureuse possible, dans la limite du temps et des moyens à leur disposition, tout en évitant cependant d’engager des travaux sur les nombreux aspects déjà traités dans le cadre d’autres travaux, en particulier parlementaires.

*

* *

Dans cette perspective, il convient en premier lieu de citer les travaux de la commission des Finances de l’Assemblée nationale, qui a notamment consacré en 2011 une étude de sa Mission d’évaluation et de contrôle à la soutenabilité de l’évolution de la masse salariale de la fonction publique(14), dans le prolongement des travaux de la Cour des comptes demandés par la commission des Finances de l’Assemblée nationale en application de l’article 58-2° de la Lolf (15), et remis en octobre 2010. La commission de la Défense nationale et des forces armées a consacré déjà deux rapports d’information en 2009 et 2010 à la mise en œuvre et au suivi de la réorganisation du ministère de la Défense, présenté  par M. Bernard Cazeneuve, membre du présent groupe de travail, et par l’un des deux rapporteurs de la présente étude (M. François Cornut-Gentille)(16).

Le Sénat, de son côté, a souhaité analyser les conséquences de la RGPP pour les collectivités territoriales et les services publics locaux, dans un rapport d’information (17) – avec des positions divergentes de certains des groupes du Sénat –, ainsi que le thème de la RGPP dans les préfectures (18).

Enfin, la Cour des comptes s’est récemment intéressée aux liens entre la Lolf et la RGPP, à l’occasion de son rapport publié en novembre 2011 intitulé « La mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) : un bilan pour de nouvelles perspectives » et le Conseil économique, social et environnemental (CESE) vient, encore plus récemment, d’adopter un avis, critique, rapporté par Mme Jacqueline Donnedu au nom de la Section de l'aménagement durable des territoires, sur les missions et l’organisation de l’État dans les territoires, lors de sa séance du 22 novembre 2011.

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* *

Vos rapporteurs ont souhaité présenter leur démarche au Comité dans le cadre d’un point d’étape, le 5 mai 2011. Celui-ci l’a validée et a pris acte que l’ampleur de la mission confiée aux rapporteurs justifiait que le terme de celle-ci soit repoussé en tant que de besoin. Ce terme n’aura dépassé que légèrement, in fine, la durée initialement prévue de douze mois.

Dans cette perspective, les rapporteurs ont entendu les représentants des administrations principalement concernées par le sujet, notamment la direction du budget et la direction générale de la modernisation de l’État pour ce qui concerne les services financiers, ainsi que les secrétaires généraux des principaux ministères concernés. Ces auditions ont été complétées par de multiples questionnaires écrits.

Les rapporteurs ont également sollicité des représentants de cabinets d’études intervenus à la demande de l’État dans le cadre de la RGPP.

Souhaitant entendre les représentants des agents, les rapporteurs ont naturellement invité à s’exprimer des représentants de l’ensemble des organisations syndicales de la fonction publique, dans le cadre d’une table ronde organisée en fin de parcours.

Enfin, ils ont souhaité pouvoir analyser en profondeur les modes de réalisation et les impacts d’un échantillon limité de mesures, présentant des incidences réelles sur la perception par les usagers de la réforme de l’État visée par la RGPP. Dans cette perspective, ils ont cherché à analyser deux familles de mesures :

– les diverses mesures mises en œuvre au sein de l’Éducation nationale, au niveau déconcentré, par les rectorats. Pour ce faire, les rapporteurs ont réalisé une enquête par questionnaire écrit auprès des 25 rectorats ;

– deux mesures de transformation de procédures administratives connues de plusieurs millions d’usagers chaque année : la délivrance des passeports et la délivrance des certificats d’immatriculation des véhicules, plus communément dénommées « cartes grises ». Pour disposer d’une analyse des impacts directs et indirects de ces deux mesures, mises en œuvre à l’échelon national par le ministère de l’Intérieur, et au niveau départemental par les préfectures avec le concours d’une agence nationale créée à cet effet, les rapporteurs ont pu, conformément aux dispositions de l’alinéa 4 de l’article 146-3 du Règlement, bénéficier du concours d’un prestataire extérieur, retenu dans le cadre d’un appel d’offres lancé au titre de l’accord-cadre dont s’est doté le CEC pour les évaluations de politique publique qu’il commande.

Pour ces deux investigations de nature et d’objet différents, les rapporteurs remercient le Président Bernard Accoyer, qui a soutenu leur démarche auprès des deux ministres de l’Éducation nationale et de l’Intérieur, ainsi que ces deux ministres, qui ont permis que les investigations soient menées de manière approfondie.

*

* *

Le présent rapport s’attachera à présenter :

– la méthode de la RGPP (première partie),

– les mesures résultant de cette méthode (deuxième partie),

– et, enfin, ses impacts financiers (troisième partie).

PRINCIPAUX CONSTATS ET RECOMMANDATIONS

Justifiée selon le Gouvernement par la nécessité de réformer l’État et la relative inefficacité des méthodes précédemment mises en œuvre dans cet objectif, la RGPP s’est caractérisée, dès son lancement puis dans sa mise en œuvre, par un portage politique inédit au plus haut niveau, ainsi qu'un périmètre élargi, mais sans une véritable implication et consultation des agents et des usagers du service public. En outre, le Parlement lui-même n’a pas été associé à la démarche et, de son côté, n’a pas véritablement cherché à s’en saisir

De ces choix découlent le succès et les limites – ou échecs – de la RGPP. Ainsi la RGPP marque un indéniable tournant vers une plus grande efficacité du fonctionnement de l’État. Mais, dans le même temps, ses modalités d’applications ont suscité de telles réactions des agents et des usagers que, sans évolution, le processus est intenable à terme.

I.– LA MÉTHODE DE LA RGPP

A.– CONSTATS

Le lancement de la RGPP a été marqué par une commande hiérarchique ignorant agents publics et usagers du service public.

Le Parlement n’a été informé qu’au travers d’une vision comptable, essentiellement lors des sessions budgétaires. Un débat sur les missions que l’État se doit de conserver, d’externaliser ou de déléguer, aurait permis de légitimer et de clarifier les objectifs et les moyens.

Le fort portage politique de la RGPP a largement contribué à la rapidité de sa mise en œuvre, ainsi qu’à son caractère général, durable et opérationnel.

Ce portage politique de la RGPP a cependant souffert de n’être relayé que par des rapports publics « anonymes », incapables d’engendrer un réel débat public, a fortiori au-delà du périmètre de l’administration.

La RGPP a mis en mouvement de façon inédite l’état-major des ministères au service d’une réflexion organisationnelle pourvoyeuse de résultats non négligeables.

Le rôle d’accompagnateur des réformes tenu par la direction générale de la modernisation de l’État (DGME) a globalement été apprécié par les ministères.

En outre, la DGME a mis en place et fait vivre des méthodes de consultations des usagers, certes perfectibles, sur l’image et l’évaluation du service public.

Quoique initialement strictement confinée et descendante, la RGPP a pu néanmoins conduire, dans certains secteurs, à une responsabilisation accrue et opportune d’états-majors administratifs déconcentrés dans les choix de gestion.

La communication officielle sur la RGPP (notamment les rapports publics accompagnant les CMPP et d’étape) est caractérisée par une forme d’ « hagiographie » peu crédible, un simplisme de la présentation et une ergonomie de lecture déficiente.

Le suivi de la RGPP a été fortement axé sur le respect des agendas et des jalons temporels, négligeant ne serait-ce qu’un début d’évaluation réelle des impacts des mesures.

La RGPP a accru le recours à des cabinets privés d’audit pour accompagner la réforme de l’État, systématisant l’approche par des audits de modernisation, alternative aux initiatives antérieurement fondés sur des rapports administratifs.

Le lancement de la RGPP n’a pas incarné et n’a pas porté un projet mobilisateur pour les agents publics en matière de définition de service public.

À l’exception notable du secteur de la défense, elle n’a en outre que très rarement été l’objet de mesures d’accompagnement des personnels, que ce soit en terme de mobilité, de formation ou de conditions financières

À tort ou à raison, elle correspond aujourd’hui et de manière durable, pour un grand nombre d’agents publics et toutes les organisations syndicales, à un « repoussoir » ou à ce qu’il ne faut pas faire, malgré un consensus désormais acquis sur la nécessité de réformer l’État.

La mise en œuvre de la RGPP a négligé la réflexion sur la conduite du changement, sur les missions à exercer et les conditions de leur exercice.

B.– RECOMMANDATIONS

La réforme de l’État pourrait utilement continuer à s’appuyer sur un portage politique au plus haut niveau de l’exécutif, garant de l’efficacité de la prise des décisions et de leur mise en œuvre.

Les décisions en matière de réforme de l’État doivent opérer un retour à une décision publique réellement motivée, s’appuyant sur une concertation impliquant les usagers et les agents publics.

Les principales orientations et décisions de la réforme de l’État doivent faire l’objet d’un débat public, notamment, au Parlement.

La réforme de l’État doit demain s’appuyer sur les acquis de la RGPP que sont l’implication et le dynamisme des états-majors des administrations centrales et déconcentrées.

La réforme de l’État doit également s’appuyer sur la responsabilisation des échelons plus déconcentrés d’encadrement dans les choix de gestion (le « comment pouvons-nous faire » ?), mais en veillant à na pas transférer à ce niveau la définition des missions du service public (le « que devons-nous faire » ?).

L’implication des personnels, sous la forme d’un « pilotage en mode projet » aurait pu faire gagner à la fois en efficacité et en acceptabilité. L’usager ressentirait mieux l’évolution des services publics ainsi directement portée par les agents.

Une réflexion doit être menée sur l’opportunité de placer la DGME auprès du Secrétariat général du Gouvernement, pour renforcer encore l’interministérialité de la réforme de l’État et mieux identifier ses dimensions fonctionnelle et budgétaire.

La DGME doit encourager les ministères à progresser davantage dans la prise en compte des attentes des usagers du service public.

Le suivi de la réforme de l’État doit conserver un caractère général, via un suivi commun, accessible dans un seul document, pour toutes les réformes mises en œuvre.

Le suivi de la réforme de l’État doit, de façon plus précise qu’aujourd’hui, relater les impacts des réformes achevées et reposer sur une documentation lisible, complète et accessible au grand public.

La réforme de l’État doit retrouver un équilibre dans la conduite du changement entre l’instruction adressée aux personnels et leur implication dans sa mise en œuvre.

II.– LES MESURES DE LA RGPP

A.– CONSTATS

La RGPP n’a pas conduit à la revue et la réflexion, d’ensemble et de détail, pourtant annoncées à son lancement, sur l’opportunité des missions de l’État.

La RGPP a constitué une réelle mise en œuvre dans l’administration de l’État du « faire mieux avec moins », qui la définissait en partie lors de son lancement.

La RGPP a constitué une révision générale substantielle de l’organisation des services centraux et déconcentrés de l’État, au demeurant partiellement masquée par l’incarnation de la RGPP comme processus de réalisation d’économies.

La RGPP a permis le lancement effectif de nombreuses réformes administratives parfois bloquées depuis plusieurs années.

L’adossement de la RGPP à une baisse des moyens a, à la fois, contraint à des choix rapides et, pour une part, pertinents en termes d’efficience, mais conduit à l’assimilation, peut-être durable, de la réforme de l’État à une simple recherche d’économies.

B.– RECOMMANDATIONS

La réforme de l’État doit impérativement reprendre la question de la définition des missions de l’État, le « faire mieux avec moins » à missions quasi inchangées ayant désormais sans doute atteint ses limites.

Afin d’ouvrir une période de stabilité, y compris pour les agents publics, il serait opportun de stabiliser à moyen terme les nouvelles organisations de l’administration centrale et déconcentrée de l’État issues de la RGPP, nonobstant d’éventuels ajustements ponctuels.

III.– LES IMPACTS FINANCIERS DE LA RGPP

A.– CONSTATS

Le bilan budgétaire de la RGPP (personnel, intervention et fonctionnement) demeure dans l’ensemble une énigme, tant les informations, difficiles à obtenir sur ce sujet, semblent discutables et parcellaires.

La sincérité du bilan budgétaire de la RGPP est parasitée par une volonté de justifier les chiffres globaux initialement affichés et d’éluder les coûts associés aux réformes.

Il est néanmoins incontestable, – mais malheureusement difficilement évaluable avec précision – que la RGPP a contribué à la maîtrise de la masse salariale de l’État et conduit, pour la première fois, dans le PLF 2012 à une inflexion correspondant à une légère baisse de son montant en valeur.

Le bilan budgétaire de la RGPP ne s’appuie pas sur une méthode de suivi homogène des impacts financiers de chacune des ses mesures.

Les suppressions d’effectifs correspondant à la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » ont été effectives et constantes depuis le lancement de la RGPP (par rapport à 2008, baisse des effectifs de la fonction publique de l’État de 4,1 % en 2011 et, en programmation, de 5,6 % en 2012).

Le retour catégoriel des économies issues de la « règle du un sur deux » a été mal maîtrisé (car sans nul doute supérieur à 50 % de ces économies) et mal réparti entre fonctionnaires. Ce « retour » a très souvent servi à honorer des engagements catégoriels indépendants voire antérieurs à la RGPP. Il prétend aussi compenser le gel du point d’indice mis en œuvre de façon prolongée.

La baisse des effectifs enseignants a été partiellement compensée par l’augmentation du nombre des heures supplémentaires effectuées, pour un coût important dont la détermination sur les court et long termes prête à discussion entre les rapporteurs : pour Christian Eckert, ce coût est probablement élevé, et à court terme pour l’État supérieur à leur conversion en postes, eu égard à la majoration et à la défiscalisation de ces heures supplémentaires ; pour François Cornut-Gentille, ce coût à court terme au bénéfice des agents doit être mis en perspective avec les économies opérées par l’État sur le long terme sur la masse salariale et les pensions.

B.– RECOMMANDATIONS

Le suivi budgétaire global de la réforme de l’État doit s’appuyer sur la mesure méthodique de l’efficience de chacune des mesures mises en œuvre.

Il doit évidemment prendre en compte la dépense fiscale engendrée par l’augmentation des heures supplémentaires.

Une réflexion doit être menée sur l’opportunité et la réelle faisabilité d’associer à la réforme de l’État des objectifs macro-budgétaires pluriannuels.

Le retour catégoriel, ou toute autre forme de « récompenses » salariales, ne constituent pas des éléments suffisants pour un dialogue social à la hauteur des enjeux de la réforme de l’État ; ce dialogue doit porter sur la définition des objectifs du service public, des obligations de service et des conditions de travail.

La réforme de l’État et le contrôle parlementaire qui doit lui être associé gagneraient à s’appuyer sur les outils de la LOLF (indicateurs de résultats et objectifs définis pour chaque programme budgétaire, correspondant aux différentes politiques de l’État).

PRINCIPAUX TABLEAUX DU RAPPORT

NOMBRE DES MESURES DE LA RGPP

 

Phase 1 de la RGPP

Phase 2 de la RGPP

 

CMPP du 12 décembre 2007

CMPP du 4 avril 2008

CMPP du 11 juin 2008

CMPP du 30 juin 2010

CMPP du 9 mars 2011

Nombre des mesures

97

166

69

141

44

Total par phase

332

185

Total pour la RGPP

517

NOMBRE DES MESURES DE LA RGPP PAR MINISTÈRE
SELON LA CATÉGORIE D’ACTION QU’ELLES PRÉVOIENT

 

Optimiser - optimisation

Rationaliser - rationalisation

Mutualiser - mutualisation

Fusionner - fusion

Moderniser - modernisation

Services
du Premier ministre

0

2

5

0

1

Affaires étrangères et européennes

3

1

1

1

0

Défense et anciens combattants

17

4

1

1

3

Écologie, développement durable, transports et logement

4

1

1

0

1

Justice et libertés

2

4

3

1

2

Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

5

8

7

1

2

Économie, finances et industrie

3

7

1

2

0

Travail, emploi et santé

1

3

2

2

0

Éducation nationale, jeunesse et vie associative

3

4

2

1

0

Budget, comptes publics, fonction publique et Réforme de l’État

2

3

0

1

3

Enseignement supérieur et recherche

2

5

0

0

0

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

1

8

2

0

0

Culture et communication

0

3

1

0

3

Solidarité et cohésion sociale

0

1

1

0

0

Ville

0

0

0

0

0

Sports

1

0

1

0

0

Total (151 mesures)

44

54

28

10

15

HISTORIQUE DES SIGNIFICATIONS SUCCESSIVES
DES COULEURS DE FEU ATTRIBUÉES AUX MESURES DE LA RGPP

 

Feu vert

Feu orange

Feu rouge

Rapport d’étape du 3 décembre 2008

La mesure concernée remplit toutes les conditions d’un avancement satisfaisant

Des travaux sont encore nécessaires pour définir un plan d’action détaillé et des indicateurs opérationnels, alors que la cible générale a bien été définie 

La mesure est encore dans une phase antérieure à la mise en œuvre, car sa cible n’est pas encore assez définie

Rapport d’étape du 13 mai 2009

Projet de réforme pour lequel toutes les conditions sont réunies pour atteindre les résultats escomptés dans les délais prévus

Projet de réforme en cours d’exécution, mais dont le calendrier n’est pas totalement respecté, ou dont la mise en œuvre présente des difficultés techniques, qui appellent des décisions correctrices

Projet de réforme dont la phase de mise en œuvre n’a pas encore été engagée

Rapport d’étape du 16 février 2010

Toutes les conditions sont réunies pour atteindre les résultats escomptés dans les délais prévus

Projet de réforme en retard ou présentant des difficultés techniques qui appellent des mesures spécifiques

La réussite d’une mesure est compromise et appelle aussi des mesures correctrices.

Rapport accompagnant les CMPP des 30 juin 2010 et 9 mars 2011

La réforme progresse au rythme prévu

La réforme satisfait la plupart des exigences mais nécessite des actions correctrices*

La réforme connaît un retard important et doit faire l’objet d’actions correctrices à mettre en œuvre rapidement.

* La signification que le rapport accompagnant le CMPP du 30 juin 2010 associe à la couleur orange est plus précisément la suivante : « la réforme satisfait la plupart des exigences mais nécessite des actions correctrices pour être menée à bien. »

CONSTATS ET PROGRAMMATIONS ACTUALISÉS
DES IMPACTS BUDGÉTAIRES DE LA RGPP SELON LE GOUVERNEMENT

(en milliards d’euros)

Source : direction du budget

SUPPRESSIONS D’EMPLOIS PAR MINISTÈRE DEPUIS 2008

Ministères

Schémas d’emplois

2008

2009

2010

2011

Évolution des effectifs 2008/2011

2012

Évolution des effectifs 2008/2012

Plafond des autorisations d’emplois 2008

Loi de finances initiale

Rapport annuel
de performances

Loi de finances initiale

Rapport annuel
de performances

Loi de finances initiale

Projet de loi de finances

en ETPT

en %

en ETPT

en %

Affaires étrangères et européennes

16 056

–190

–392

–255

–271

–160

–823

–5,1 %

–140

–963

–6 %

Alimentation, agriculture et pêche

35 430

–650

–804

–730

–683

–650

–2 137

–6 %

–653

–2 790

–7,9 %

Budget

151 006

–2 812

–2 101

–3 020

–3 249

–3 127

–8 477

–5,6 %

–2 870

–11 347

–7,5 %

Culture et communication

11 755

–103

–108

–125

–71

–93

–272

–2,3 %

–93

–365

–3,2 %

Défense

326 705

–8 250

–6 700

–8 250

–8 368

–8 250

–23 318

–7,1 %

–7 462

–30 780

–9,4 %

Écologie, énergie, développement durable

70 569

–1 400

–344

–1 294

–1 322

–1 287

–2 953

–4,2 %

–1 309

–4 262

–6 %

Économie, industrie et emploi

16 089

–287

–162

–324

–335

–273

–770

–4,8 %

–245

–1 015

–6,3 %

Éducation nationale

991 363

–13 500

–9 989

–16 000

–14 551

–16 000

–40 540

–4,1 %

–14 000

–54 540

–5,5 %

Enseignement supérieur et recherche

115 959

–450

–217

0

0

0

–217

–0,2 %

0

–217

–0,2 %

Immigration

616

–3

–38

–13

–4

 

–42

–6,8 %

 

nd

nd

Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales

289 794

–2 953

–4 564

–3 450

–2 368

–1 597

–8 529

–2,9 %

–3 621

–12 150

–4,2 %

Justice et libertés

72 237

+512

+926

+400

+1 103

+400

+2 429

+3,4 %

+515

+2 944

+4,1 %

Services du Premier ministre (dont Conseil et contrôle de l’État, AAI, SGDSN)

7 856

+40

+319

+69

+35

+54

+408

+5,2 %

+49

+457

+5,8 %

Travail, relations sociales, famille, solidarité et ville, santé et sport

34 956

–483

–568

–501

–930

–443

–1 941

–5,6 %

–429

–2 370

–6,8 %

Total (Budget général)

2 110 810

–30 529

–24 742

–33 493

–31 014

–31 426

–87 182

–4,1 %

–30 258

–117 440

–5,6 %

Total schémas d’emplois 2008-2012 (5 exercices) par rapport à 2007 (compte tenu d’un schéma d’emploi de – 28 000 ETPT en 2008 par rapport en 2007 non détaillé ci-dessu) : –145 440 ETPT
Total schémas d’emplois 2009-2012 (4 exercices) par rapport à 2008 : – 117 440 ETPT
Total schémas d’emplois 2009-2011 (3 exercices) par rapport à 2008 : – 87 182 ETPT

SCHÉMAS D’EMPLOIS, DÉPARTS À LA RETRAITE ET TAUX DE REMPLACEMENT
DANS CERTAINS MINISTÈRES PAR CATÉGORIES A, B ET C D’AGENTS PUBLICS*

   

Administrations financières
(2008-2012)

Défense
(2008-2011)

Écologie
(2008-2013)

Ministères sociaux
(2009-2013)

Catégorie A

Schémas d’emplois

– 357

+ 1 572

– 972

– 882

Nombre de départs à la retraite

– 4 615

– 787

– 2471

– 1 869

Taux de remplacement

92,3 %

100 %

60,7 %

52,8 %

Catégorie B

Schémas d’emplois

– 1 640

– 1 303

– 3 351

– 665

Nombre de départs à la retraite

– 7 339

– 1 041

– 4 587

– 1 062

Taux de remplacement

77,6 %

0 %

26,9 %

37,4 %

Catégorie C

Schémas d’emplois

– 10 446

– 3186

– 3654

– 1 130

Nombre de départs à la retraite

– 7 529

– 2 261

– 5 336

– 1 284

Taux de remplacement

0 %

0 %

31,5 %

12 %

*Par construction, quand le nombre de suppressions d’ETPT est supérieur à celui des départs à la retraite, le taux de remplacement est de 0 % ; quand le schéma d’emplois correspond à une augmentation des effectifs, le taux de remplacement est de 100  %.

Source : ministères concernés.

PREMIÈRE PARTIE : LA MÉTHODE DE LA RGPP

Lors du Conseil des ministres du 20 juin 2007, le premier après le second tour des élections législatives, le Premier ministre M. François Fillon a présenté une communication sur le lancement de la « revue générale des politiques publiques ».

Plusieurs des éléments de méthode et de gouvernance, ainsi que certaines des décisions, qui structureront par la suite la « révision générale des politiques publiques » – RGPP – ont été actés dans cette communication ((19) :

– la création d’un conseil de modernisation des politiques publiques (CMPP) « qui réunira autour du Président de la République l’ensemble des ministères. Le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique en sera le rapporteur général » ;

– tous les ministères seront concernés par « un travail […] d’investigation et de documentation des réformes […] conduit par une équipe d’auditeurs, composée de spécialistes des secteurs public et privé » ;

– « en matière d’effectifs, la révision devra donner un mode d’emploi pour mettre en œuvre de manière appropriée l’engagement d’embaucher un fonctionnaire pour deux partant à la retraite » ;

– « mandatés par le Président de la République et le Premier ministre, le secrétaire général de la présidence de la République et le directeur de cabinet du Premier ministre co-présideront deux fois par mois un comité de suivi de la révision générale des politiques publiques » ;

– Outre la précision que les résultats de la RGPP seront utilisés pour la construction des budgets une fois les mesures de la RGPP définies – cette échéance était programmée en mars 2008 à l’époque – , la communication du Premier ministre annonçait l’ouverture de « quatre chantiers concrets », accompagnant et s’intégrant au « chantier général de révision [:] la fusion de la direction générale des impôts et de la direction générale de la comptabilité publique, la fusion des services de renseignement, la carte judiciaire [et] la réduction de la charge administrative sur les entreprises et les collectivités locales (“l’impôt papier”) ».

La présente partie a pour objet de présenter, en les commentant, la méthode et la gouvernance de la RGPP, dans le prolongement de ces éléments « originels », en s’appuyant sur les décisions prises et les travaux réalisés dans le cadre de la RGPP postérieurement au Conseil des ministres du 20 juin 2007. Sera également abordée la question des modalités choisies pour associer les personnels de l’État à la RGPP et pour les accompagner dans les réformes auxquelles elle a correspondu.

I.– LE LANCEMENT DE LA RGPP : DU TRAVAIL INITIAL DES ÉQUIPES MIXTES D’AUDIT AUX DÉCISIONS DES CMPP

A.– LE RÔLE ET LE CADRE DE TRAVAIL DES ÉQUIPES MIXTES D’AUDIT

1.– Un rôle d’analyse et de préparation à la décision publique

La RGPP a fait l’objet d’un séminaire de lancement au Centre de conférences internationales de Lyon le 10 juillet 2007, ponctué notamment par des discours de M. François Fillon, Premier ministre, et de M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État.

Dans son discours adressé notamment aux préfets, aux secrétaires généraux des ministères et aux directeurs des administrations de l’État, le Premier ministre annonçait, s’agissant du lancement opérationnel de la RGPP, que « les équipes mixtes d'audit que nous allons mettre en place auront pour mission [d’] aider à identifier et à instruire différentes voies d'évolution ».

Dans son discours, le ministre chargé du budget indiquait que « dès cette semaine, des équipes d’audit associant des membres des corps de contrôle de tous les ministères et des consultants seront chargés d’analyser en profondeur les politiques publiques ». Suite à ce travail, « les équipes d’audit seront en mesure de tracer des “scénarios stratégiques” pour [les] ministères  […]. Ce qui est demandé à ces équipes, ce n’est pas de trancher, ce n’est pas de choisir, c’est de documenter des perspectives d’évolution, de réfléchir aux actions à entreprendre pour les années qui viennent. »

2.– Les thèmes abordés

Le rapport rendu public à l’occasion du CMPP du 12 décembre 2007 a précisé que « vingt-six équipes d’auditeurs, composées de fonctionnaires issus de corps d’inspections et de consultants privés, soit plus de 200 (20) personnes, sont mobilisées » pour passer au crible les actions menées par l’État, selon une méthode de questionnement sur laquelle les rapporteurs reviendront dans la deuxième partie du présent rapport. Dans son discours du 10 juillet 2007, M. Éric Woerth avait précisé que cette démarche interrogative serait jalonnée par les questions suivantes :

– À quoi sert la politique passée au crible ?

– Répond-elle aux besoins des usagers ?

– Pourrions-nous la conduire différemment ?

– Avec moins de moyens ?

– En la ciblant plus ?

Le rapport du 12 décembre 2007, a énuméré la liste des sujets sur lesquels ces équipes ont travaillé (encadré suivant).

LISTE DES ÉQUIPES D’AUDIT OU DES GROUPES DE TRAVAIL DE 2007

Action extérieure de l’État ; Administration pénitentiaire ; Agriculture ; Aide publique au développement ; Assurance maladie ; Culture et communication ; Défense ; Développement des entreprises ; Écologie, développement et aménagement durables ; Éducation nationale ; Emploi et formation professionnelle ; Enseignement supérieur et recherche ; Famille ; Gestion publique ; GRH ; Immigration et intégration ; Intérieur (hors sécurité) ; Justice ; Organisation de l’État au niveau local ; Outre-mer ; Relations État-collectivités territoriales ; Réseaux financiers ; Santé, jeunesse et sports ; Sécurité ; Services du Premier Ministre ; Solidarités ; Ville et logement.

Source : rapport rendu public à l’occasion du CMPP du 12 décembre 2007.

La méthode, revendiquée par l’exécutif comme une innovation majeure en 2007, a ainsi consisté à confier des travaux thématiques à des équipes mixtes d’audit, chacune composée à la fois de membres d’inspections ministérielles et interministérielles – l’un d’entre eux assurant la présidence de l’équipe – et de consultants de cabinets privés d’audit.

3.– Le cadre de la participation des consultants privés aux audits

En amont du travail de ces équipes mixtes d’audit, pour la phase de cadrage général de la RGPP qui a conduit à l’élaboration de la démarche interrogative évoquée supra ayant vocation à être appliquée à toutes les politiques publiques, le Gouvernement avait fait appel au printemps 2007 à la société Capgemini, sur la base d’éléments contractuels de marchés passés au titre des audits de modernisation menés antérieurement au printemps 2007 (21).

Ces éléments contractuels ont été prolongés par avenant jusqu’à la fin de l’année 2007 et ont donc permis à certains cabinets privés d’audit de participer aux travaux des équipes mixtes en amont du premier CMPP du 12 décembre 2007.

S’est ensuite substitué à ces éléments contractuels prolongés par avenant, un nouveau marché intitulé « Assistance à la mise en œuvre opérationnelle du programme de révision générale des politiques publiques », suite à une procédure d’appel d’offres ouvert lancée durant l’été 2007. Les trois lots de ce marché à bons de commande sans minimum et sans maximum ont été notifiés fin novembre 2007, conclus pour une durée d’un an puis reconduits pour deux périodes complémentaires d’un an jusqu’en novembre 2010. Ces trois lots ont été intitulés et attribués selon les modalités suivantes :

– le lot n° 1 « Assistance à maîtrise d’ouvrage, appui à la révision générale des politiques publiques et à la mise en œuvre des actions de transformation » a été attribué au groupement solidaire McKinsey-Accenture ;

– le lot n° 2 « Appui à la révision générale des politiques publiques et à la mise en œuvre des actions de transformation » a été attribué au groupement solidaire Capgemini-BCG ;

– le lot n° 3 « Missions d’audit et de modernisation » a été attribué à la société Ernst and Young.

Ce nouveau marché a contribué, dans des conditions financières exposées infra par vos rapporteurs, à la poursuite des travaux des équipes mixtes d’audit en amont des CMPP des 4 avril et 11 juin 2008, puis à l’accompagnement de la mise en œuvre de certaines mesures de la RGPP.

4.– Le secret persistant sur les travaux des équipes mixtes d’audit témoigne d’un lancement de la RGPP sans consultation des agents publics et de l’administration dans son ensemble

Les rapporteurs constatent l’opacité persistante concernant les travaux menés par les équipes mixtes d’audit en 2007 et 2008 lors du lancement de la RGPP.

Les travaux de ces équipes mixtes n’ont jamais été publiés et n’ont donc donné lieu à aucun débat public ; les préconisations issues de ces travaux ont donné lieu aux arbitrages successifs du Comité de suivi de la RGPP, placé sous l’autorité du secrétaire général de l’Élysée et du directeur de cabinet du Premier ministre, puis du Conseil de modernisation des politiques publiques (CMPP) présidé par le Président de la République.

Certes, ces travaux n’avaient qu’un statut de documents préparatoires à la décision. Leurs utilisateurs n’étaient donc en rien tenus de les rendre publics. Ceux-ci ont pu considérer qu’une telle publication – ou la perspective d’une publication – aurait conduit à entraver le processus de décision ou à brider ex ante l’imagination des membres de ces équipes, dans un exercice censé envisager, sans tabou, toutes solutions ou mesures utiles.

Il est en tout état de cause certain que ce choix a lourdement contribué à renforcer une image de la RGPP élitaire et verticale, laissant la quasi-totalité des agents publics dans l’ignorance des fondements et motivations des décisions prises, ainsi que des solutions alternatives envisagées.

Ce secret est encore aujourd’hui maintenu. Ainsi, lorsque les rapporteurs ont demandé à la direction générale de la modernisation de l’État (DGME) de bien vouloir leur transmettre les réflexions de l’équipe mixte d’audit en place en 2007-2008 sur les réformes des modalités de délivrance des passeports et des certificats d’immatriculation des véhicules (CIV), sur lesquelles le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée nationale a décidé, sur proposition des rapporteurs, de faire réaliser une étude dans le cadre du présent rapport, la DGME a répondu à vos rapporteurs que « seule l'autorité signataire de la lettre de mission, en l’occurrence le Premier ministre, peut décider de la transmission des rapports d'audit » (22).

Ce secret persistant en réponse à une demande parlementaire sur des travaux accomplis il y a quatre ans, concernant, pour le passeport et le CIV, des réformes dont les tenants et aboutissants étaient au demeurant fixés avant 2007, ne paraît pas justifié, dans le contexte d’un travail d’évaluation et de contrôle décidé par un organe de l’Assemblée nationale en application de sa mission constitutionnelle d’évaluation des politiques publiques.

B.– DES TRAVAUX DES ÉQUIPES MIXTES D’AUDIT AUX DÉCISIONS DES CMPP : L’« EXEMPLE » DE L’ÉDUCATION NATIONALE

Les rapporteurs ont souhaité analyser de manière plus approfondie la procédure de la RGPP appliquée au cas d’un ministère à fort effectif : l’éducation nationale. Ce regard plus précis, qui porte à différents endroits du présent rapport sur divers points relatifs à la RGPP, concerne ici la phase initiale de cette dernière, marquée par les travaux des équipes mixtes d’audit.

1.– le contenu des documents de travail transmis à vos rapporteurs

Le ministère de l’Éducation nationale a en revanche bien voulu transmettre aux rapporteurs un ensemble de documents datant du second semestre de l’année 2007 et illustrant au moins en partie la méthodologie générale mise en œuvre par les équipes mixtes d’audit au titre de la RGPP via les travaux concrètement effectués par l’équipe mixte chargée d’auditer ce ministère.

Le premier document date du 24 juillet 2007. Il énumère les thèmes et sous-thèmes à traiter, ainsi que les questions à examiner pour chaque sous-thème. Les quatre thèmes retenus étaient les suivants : l’offre éducative et de formation, la régulation des politiques éducatives, le métier de l’enseignant et la modernisation de l’organisation et du fonctionnement des services (23).

Le tableau suivant précise pour chacun de ces thèmes les questions que le document de travail proposait d’aborder.

Thèmes

1. L’offre éducative et de formation

3. Le métier de l’enseignant

Offre scolaire en lycée d’enseignement général et technologique (LEGT) et lycées professionnels et agricoles

Conditions d’exercice du métier de l’enseignant

Offre scolaire collège

Obligations de service

Offre enseignement agricole

Décharges

Offre de l’enseignement primaire

Formation

Offre de l’enseignement privé

Rémunérations

Publics particuliers

Carrière

Offre de formation continue

Sécurité

Politique de l’orientation

 

Les politiques interministérielles confiées à l’éducation nationale

 

2. Régulation des politiques éducatives

4. Modernisation de l’organisation et du fonctionnement des services

Organisation et pilotage

Réorganisation des services

Autonomie des établissements

Structuration des réseaux des établissements et des écoles

Rôle des collectivités

Révision des processus de certification

Carte scolaire

Optimisation des processus de gestion des ressources humaines

L’organisation de l’année scolaire

Simplification administrative et dématérialisation

La gestion du potentiel enseignant et administratif

 

Le document du 24 juillet 2007, propre au ministère, indique que deux instances étaient appelées à collaborer pour le traitement de chaque question :

– un « pôle d’audit », constitué d’inspecteurs généraux de l’éducation nationale (IGEN), de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAEN et IGAENR), de l’administration (IGA), des finances (IGF), d’une personnalités compétentes sur les questions éducatives ainsi que de consultants. Ce pôle a été dirigé par M. Pierre Lepetit, inspecteur général des finances. Il constituait l’équipe mixte d’audit, proprement dite, de la RGPP. On constate qu’à la date du 24 juillet 2007, le caractère mixte de l’équipe était relatif, puisqu’il était prévu qu’elle compte 15 inspecteurs d’inspections générales pour 3 consultants ;

– un « comité de pilotage », constitué notamment de certains hauts fonctionnaires de l’éducation nationale, eux-mêmes accompagnés d’autres membres du personnel du ministère, tels des chefs de service, des membres de la cellule des consultants internes ou des collaborateurs du secrétariat général. Ce comité était l’interlocuteur ministériel de l’équipe mixte d’audit.

Le ministère a transmis à vos rapporteurs une note du 29 août 2007 émanant de M. Pierre Lepetit, visiblement adressée aux membres du pôle d’audit qu’il dirige. Il y précise que « l’objectif est de réaliser un examen stratégique de l’ensemble des dépenses budgétaires et fiscales de l’État et de ses opérateurs pour “proposer des stratégies documentées conduisant à une prise des décisions sur des réformes ambitieuses” », citant ainsi, selon la note, un « extrait de la lettre de mission adressée aux chefs de pôle par le Premier ministre le 24 juillet [2007]. »

M. Pierre Lepetit invite ensuite son équipe à se situer à la fois dans la ligne des demandes faites à chaque pôle d’audit – la présentation de scénarios aux instances décisionnelles de la RGPP – et dans le respect de l’objectif primordial des suppressions d’effectifs : « si, dans l’enseignement scolaire, la réduction des effectifs sera la conséquence logique des scénarios de réforme de l’offre et des modalités de régulation du système éducatif, l’objectif final ne doit pas être perdu de vue dans l’organisation du travail qui conduira à la construction des trois scénarios qui seront présentés à la première réunion du comité de suivi consacré à l’enseignement scolaire (24) ». Il ajoute que « le travail sur les effectifs […] pour la mission enseignement scolaire […] est l’objectif essentiel. »

La note du 29 août 2007 précise ensuite le calendrier de travail du pôle d’audit, qui doit conduire à la première réunion du Comité de suivi prévue le 10 décembre 2007. La note trace le contenu des premiers travaux, tendant à établir :

– la nomenclature des missions exercées par le ministère ;

– la quantification des moyens existants pour les exercer ;

– les « mesures de transformation (les leviers d’action) déjà identifiées », étant entendu que la note précise que « les sources d’augmentation de la productivité et de l’efficacité du système éducatif sont assez largement identifiées grâce aux multiples travaux qui ont été effectués ces dernières années. La difficulté sera de bâtir des scénarios qui permettent de réaliser les changements attendus » ;

– la « quantification de chaque levier d’action sur la productivité » ;

– les modalités de mise en œuvre des mesures permettant d’actionner ces leviers d’action. La note ajoute qu’il s’agit d’identifier « les contraintes et les obstacles techniques à la mise en œuvre et en proposant les mesures adéquates pour que les mesures donnent le rendement estimé en ETP ».

Le ministère de l’Éducation nationale a transmis à vos rapporteurs un document résumant le résultat des travaux du pôle d’audit dirigé par M. Pierre Lepetit en application de la note du 29 août 2007. Il s’agit d’une présentation réalisée par ce pôle d’audit à l’attention des membres du comité de pilotage du ministère (cf. infra) dans le cadre d’une réunion tenue le 18 octobre 2007, en amont donc de la réunion du Comité de suivi envisagé pour décembre 2007.

Cette présentation s’ouvre par un rappel des « principaux constats issus des audits de modernisation et des rapports des IG [inspections générales] ». Ce point illustre le constat d’une RGPP comme mobilisation et catalyseur des travaux existants. Le tableau suivant reprend les principaux constats ainsi repris par cette présentation.

RGPP ENSEIGNEMENT SCOLAIRE
RÉUNION DU PÔLE AUDIT AVEC LE COMITÉ DE PILOTAGE DU MINISTÈRE
JEUDI 18 OCTOBRE 2007

Les principaux constats

1er degré :

Les coûts ont augmenté fortement sans amélioration de la performance scolaire.

Des marges de manœuvre existent sur le potentiel enseignant par redéploiement et mobilisation effective des enseignants devant la classe.

L’assiduité des élèves au pré-élémentaire est faible ; l’intérêt scolaire de l’accueil des 2 ans est controversé.

2nd degré :

Les moyens ont été considérablement accrus depuis 1990 pour atteindre une dépense de 10 000 € par lycéen et 1 enseignant pour 12 élèves.

L’investissement massif dans le volume d’enseignement depuis 1990 n’a pas amélioré les performances : 150 000 élèves sortent sans qualifications chaque année, les élèves manquent de méthode et d’esprit d’initiative à l’issue du secondaire, le système ne réduit pas voire aggrave les inégalités sociales.

Une demi-année d’enseignement au lycée est perdue pour cause d’examens.

Pilotage :

Un pilotage par les moyens et non par les résultats.

Les structures administratives peuvent être rationalisées.

La présentation se poursuit par des éléments de définition de « la cible réelle en ETP » issue de la mise en œuvre de la « règle du un sur deux ». Cette cible s’élèverait sur les cinq exercices 2008 à 2012 à une baisse des effectifs d’environ 90 000 ETP, dont 79 400 pour les enseignants et 10 000 à 12 500 dans les services administratifs du ministère.

La présentation énumère ensuite un certain nombre de mesures envisageables respectivement pour le premier degré, le second degré, ainsi que pour le pilotage et la gestion. À chaque mesure est associée une programmation d’économies en ETPT. Chaque mesure et chacun des gains associés en effectifs figurant dans la présentation du 18 octobre 2007 sont repris dans le tableau suivant.

RGPP ENSEIGNEMENT SCOLAIRE
RÉUNION DU PÔLE AUDIT AVEC LE COMITÉ DE PILOTAGE DU MINISTÈRE
JEUDI 18 OCTOBRE 2007

En ETP estimés

Principales mesures envisageables et économies associées en effectifs

1er degré

Calculer le taux d’encadrement par département et aligner les écoles sur le plus efficient

3 000

Suppression – redéploiement des RASED et des moyens ZEP

8 700

Abaisser le taux de redoublement de 7 % à 2 %

1 800 (au bout de 5 ans)

Limiter la scolarisation des 2 ans

1 000 (à affiner)

Dissocier temps d’accueil et temps d’enseignement

Par expérimentation avec les collectivités territoriales – Gains non chiffrés

Regrouper les écoles

Gains sur les directions d’école – non chiffrés

2nd degré

Aligner les établissements les mieux dotés sur le taux nombre d’heures sur nombre d’élève (H/E) médian

15 000

Plafonner les horaires élèves au lycée

25 000 au lycée d’enseignement général et technologique (LEGT)*

non chiffré pour le lycée professionnel (LP)

Réorganiser l’enseignement professionnel (bac en 3 ans)

non chiffré

Réorganiser le temps de travail des enseignants :

 

– alignement sur la fonction publique (1 607 heures annuelles)

26 000 en LEGT et LP

– annualisation de l’obligation réglementaire de service (ORS) (hypothèse à 34 semaines)

10 000 en LEGT et LP

– remplacement des décharges horaires par des primes

16 000

– passer l’ORS des agrégés à 18 heures

8 000

Optimiser le remplacement 

2 000

Doubler en 5 ans le nombre d’agrégés dans le supérieur (+ 10 000) et ne plus affecter les agrégés externes dans le secondaire

16 000 (si non remplacés par des certifiés)

Rendre obligatoire une 2e heure supplémentaire

17 000 (application aux certifiés)

Limiter le redoublement

2 200 (classe de seconde)

Pilotage et gestion

Réorganiser l’administration centrale

< 100

Réorganiser l’administration déconcentrée

1 000 à 2 000

Mutualiser les ressources enseignantes entre établissements

non chiffré

Mutualiser les ressources d’encadrement et de gestion entre établissements

non chiffré

*La présentation du 18 octobre 2007 précise qu’une économie supplémentaire de 20 % peut être attendue du plafonnement des horaires élèves au lycée dans l’enseignement privé.

Cette présentation précise en conclusion que « le cumul des principales mesures aboutit à un total de l’ordre de 100 000 ETP bruts », soit dans la ligne de la « cible réelle » définie précédemment. Elle précise que les gains ainsi envisagés « sont maximaux. Ils devront être corrigés du rendement réel des réformes. »

Enfin, le ministère de l’Éducation nationale a transmis aux rapporteurs un document de travail daté du 9 novembre 2007 contenant les analyses du cabinet d’audit Roland Berger sur les statistiques des flux d’enseignants et d’élèves dans le système éducatif jusqu’à l’année 2012. Roland Berger était l’un des deux cabinets avec le cabinet Deloitte, participant aux travaux du pôle d’audit dirigé par M. Pierre Lepetit.

Ce document de travail s’ouvre sur deux synthèses respectivement relatives à l’enseignement primaire et à l’enseignement secondaire.

Ces synthèses s’appuient sur l’objectif de la baisse du nombre des postes d’enseignant jusqu’en 2012, fixé ici à environ 27 000 dans le primaire et 41 000 dans le secondaire. Les synthèses indiquent :

– pour le primaire, que des « contraintes démographiques fortes […] font peser un risque important d’augmentation des effectifs enseignants ». La poursuite de la croissance des effectifs des élèves en primaire jusqu’en 2016 est évoquée, ainsi que la « prolongation du pic des naissances jusqu’en 2010 puis [un] tassement probable sans effondrement net » ;

– pour le secondaire, que des « contraintes fortes et multiples pourraient […] empêcher l’atteinte des objectifs RGPP ». La « reprise forte et durable de l’augmentation des effectifs d’élèves » est évoquée, ainsi que « le grand nombre de champs disciplinaires et l’influence de certains groupes de pression qui les soutiennent ».

Le tableau suivant retrace les préconisations émises dans ces deux synthèses pour pallier ces contraintes.

PISTES DE RÉFORME ISSUES DES ANALYSES DE LA SOCIÉTÉ ROLAND BERGER
DOCUMENT DE TRAVAIL DU 9 OCTOBRE 2007

Synthèse primaire public

Synthèse secondaire public

Afin d’écarter le risque de recrutements massifs, certaines pistes de réforme doivent donc être investiguées en priorité :

– la faisabilité d’un accroissement du taux d’encadrement et d’une diminution des taux de redoublement ;

– la mise en place de mécanismes permettant une gestion plus souple et fluide du potentiel enseignant :

• instauration d’une porosité du statutaire entre les enseignants du premier degré et du collège ;

• permettre le suivi par un même enseignant d’une cohorte d’élèves tout au long de son parcours au primaire ;

• recrutement de contractuels.

– l’étude approfondie de la faisabilité et du potentiel issu de mutualisations inter-écoles.

Pour faire face au mieux à ces contraintes et écarter le risque de recrutements massifs, certaines pistes de réforme ciblées doivent donc être investiguées en priorité :

– la faisabilité d’un accroissement du taux d’encadrement et d’une diminution des taux de redoublement ;

– la focalisation des travaux sur l’offre sur les 6 à 16 disciplines qui concentrent la quasi-totalité du potentiel de départs définitifs d’enseignants de 2008 à 2012 (50 % à 80 % du total) ;

– une réflexion approfondie sur la sur-pondération des moyens accordés aux ZEP, RAR,… sans que l’efficacité de cette démarche soit avérée.

2.– Un rôle relativement discret des cabinets privés d’audit ?

Les documents transmis aux rapporteurs par le ministère de l’Éducation nationale sur les travaux de l’équipe mixte d’audit dirigée par M. Pierre Lepetit apportent des enseignements qu’il serait hasardeux de considérer comme valant pour l’ensemble des 25 autres équipes répertoriées par le rapport accompagnant le CMPP du 12 décembre 2007. Ne serait-ce que parce qu’il n’a pas été possible de prendre connaissance de leurs travaux.

L’éclairage apporté par le ministère de l’Éducation nationale est néanmoins intéressant sur plusieurs points.

Comme les rapporteurs l’ont évoqué supra, le poids des consultants privés dans le pôle d’audit dirigé par M. Pierre Lepetit semble avoir été numériquement assez faible. Le ministère de l’Éducation nationale fait écho à cette observation sur la relative discrétion des cabinets privés d’audit concernés, en précisant à vos rapporteurs que « le seul document transmis au service de l’action administrative et de la modernisation du ministère (SAAM) » par les cabinets Deloitte et Roland Berger « porte sur les éléments statistiques relatifs aux flux d’enseignants et d’élèves. » ; il s’agit du document de travail du 9 octobre 2007 dont les synthèses sont présentées supra.

Les recommandations de ce document de travail du 9 octobre 2007 ne figurent d’ailleurs pas in extenso dans la présentation faite par le pôle d’audit au comité de pilotage du ministère le 18 octobre de la même année ; n’y sont pas mentionnés les recommandations portant sur la « porosité statutaire » entre le primaire et le secondaire, le suivi d’une cohorte d’élèves par un enseignant du primaire, le recrutement de contractuels, la rationalisation de l’offre concernant certaines disciplines dans le secondaire.

Ce constat éclaire une réponse faite par la DGME aux rapporteurs sur les conditions dans lesquelles les cabinets privés d’audit ont participé aux équipes mixtes constituées en 2007 dans le cadre du lancement de la RGPP. La DGME a précisé en effet que le recours aux consultants privés s’est fait « en tant que de besoin exprimé par les chefs d’équipes d’audit pour compléter les équipes de fonctionnaires et/ou d’inspections pour préparer le CMPP de décembre [2007] ». D’où il ressort que ces fonctionnaires et membres des inspections ont constitué la substance principale des équipes « mixtes » et que les consultants privés y furent adjoints à titre complémentaire et sans nécessairement atteindre une parité dans la composition de ces équipes.

3.– Un travail axé sur la recherche de gains d’efficience sur les effectifs

Si la note de M. Pierre Lepetit datée du 29 août 2007 indique que l’équipe du pôle d’audit doit parvenir à dessiner trois scénarios de réforme pour l’ensemble du système éducatif, « l’objectif essentiel » y est déjà « le travail sur les effectifs ». Le constat d’une réflexion portant avant tout sur les moyens de parvenir à la suppression d’un certain nombre d’ETPT fixé ex ante est renforcé à la lecture de la présentation du 18 octobre 2011 faite par le pôle d’audit à l’attention du comité de pilotage du ministère.

Pour résumer, cette présentation part du constat d’un système éducatif devenu plus inefficient : son coût a augmenté sans amélioration de ses performances. La présentation passe ensuite aux mesures susceptibles d’abaisser ce coût, par la baisse des effectifs. Sans considération, dans les documents mis à la disposition des rapporteurs, de mesures portant sur la performance.

Autrement dit, les travaux du pôle d’audit, sans s’interroger sur le bien-fondé des missions exercées par le système éducatif, envisagent l’amélioration de l’efficience uniquement par la baisse des coûts. Il ne s’agit pas de « faire mieux avec moins », mais de « faire avec moins », en considérant, toutes choses égales par ailleurs, que cela pourrait in fine signifier « faire relativement mieux ».

Ce faisant, des missions assumées par le système éducatif sont ainsi évoquées comme devant être au moins partiellement remises en cause. Sur la base de la présentation du 18 octobre 2007, on peut citer :

– la suppression ou le redéploiement des politiques spécifiques mises en œuvre dans les zones de l’éducation prioritaire ou via les réseaux d’aide spécialisée aux élèves en difficulté (Rased) ;

– la limitation de la scolarisation des enfants de deux ans.

4.– Des mesures officielles de la RGPP finalement très différentes des voies explorées par l’équipe d’audit

Il est désormais connu et reconnu que l’enseignement scolaire a fait l’objet d’un traitement spécifique eu égard à la RGPP, après son placement « off shore » accepté par les coprésidents du Comité de suivi, à la demande du ministère de l’Éducation nationale. Ont ainsi été écartées du label RGPP les propositions évoquées par l’équipe d’audit s’adossant de façon peut-être trop ostensible à des réductions d’effectifs.

L’objectif d’une stricte application de la « règle du un sur deux » a été maintenu, mais les mesures officielles de la RGPP n’ont plus eu vocation à l’atteindre. Le ministère de l’Éducation nationale fut ainsi « libre », dans les limites de l’autorité « de droit commun » exercée par le Président de la République et le Premier ministre, de procéder à certaines réformes sous son propre label ; et de mobiliser les voies et moyens pour parvenir à mettre en œuvre le « un sur deux ».

Le rapport associé au CMPP du 4 avril 2008, reprend, en réponse à la question « pourquoi changer ? », l’essentiel des principaux constats de la présentation faite par le pôle d’audit du 18 octobre 2007. Ce rapport indique ainsi qu’« alors même que le budget de l’Éducation nationale a fortement progressé depuis quinze ans, des études récentes, nationales ou internationales, ont mis en lumière la dégradation des performances du système éducatif français. […] L’augmentation continue des moyens et des horaires n’a pas été une réponse adaptée. De fait, la France consacre des moyens supérieurs à la moyenne des pays de l’OCDE à sa politique éducative. […] Ces résultats sont préoccupants et impliquent d’engager des réformes d’ampleur pour inverser la tendance de ces dernières années et ramener la France vers le modèle qu’elle doit incarner. »

S’agissant des orientations de la réforme du système éducatif, le rapport du 4 avril 2008 s’éloigne assez sensiblement de l’esprit des mesures évoquées dans la présentation du 18 octobre 2007 de l’équipe mixte d’audit. La « refonte du système éducatif » passait ainsi, selon le rapport du 4 avril 2008, par :

– « un recentrage de l’école sur les apprentissages fondamentaux » ;

– « une plus grande différenciation des parcours qui permet d’offrir un soutien et accompagnement personnalisé à ceux qui rencontrent des difficultés » ;

– « l’engagement des enseignants qui sont à l’origine de la réussite des élèves. La rénovation de leurs conditions de travail et la diversification de leurs missions permettra l’augmentation de leur pouvoir d’achat » ;

– « l’autonomie des établissements ».

Le rapport associé au CMPP du 11 juin 2008, s’appuyant sur le même diagnostic que celui issu du rapport du 4 avril 2008 concernant la performance du système éducatif, poursuit la définition d’une action du ministère de l’Éducation nationale au titre de la RGPP autour d’objectifs « pédagogiques » et très peu « financiers ». Sont ainsi évoqués comme objectifs « concrets » le fait de parvenir à « diviser par trois le nombre d’élèves en situation d’échec lourd à la sortie de l’école primaire, limiter le redoublement, notamment en classe de seconde, réduire le nombre de sorties sans qualification, mieux articuler l’enseignement scolaire avec l’enseignement supérieur [et] mieux prendre en compte le temps d’enseignement. »

Une première formulation précise des mesures officielles de la RGPP pour le ministère de l’Éducation nationale sera ensuite rendue publique dans le rapport d’étape de la RGPP du 3 décembre 2008. Le tableau suivant énumère ces mesures, par souci de lisibilité, dans leur formulation la plus récente issue du rapport associé au CMPP du 9 mars 2011, en distinguant à cette date les mesures achevées et en cours (25).

MESURES OFFICIELLES DE LA RGPP RELATIVES À L’ENSEIGNEMENT SCOLAIRE

Les mesures « finies »

– nouvelle organisation du temps scolaire au primaire ;

– mise en place de nouveaux programmes à l'école primaire ;

– mise en place d’une évaluation en CE1 et CM2 ;

– mise en œuvre du droit à l'accueil ;

– mise en œuvre du droit à l’accompagnement éducatif ;

– reconquête du mois de juin.

Les mesures « en cours » :

a) Axe n° 1 « Réformer l’école primaire afin de réduire l’échec scolaire » :

– renforcer le soutien scolaire dans le premier degré ;

– optimiser l’organisation scolaire du premier degré (mise en place d’établissements publics d’enseignement notamment).

b) Axe n° 2 « Réorganiser l’offre dans le second degré pour réduire les sorties sans qualification et mieux préparer les élèves à la poursuite des études dans l’enseignement supérieur » :

– poursuivre la réforme du lycée général et technologique en rationalisant l’offre scolaire ;

– poursuivre la rénovation de la voie professionnelle en rationalisant la carte des formations ;

– renforcer l’autonomie des établissements ;

– améliorer l’organisation scolaire du second degré en optimisant le réseau des établissements et leur gestion.

c) Axe n° 3 « Améliorer la gestion des enseignants » :

– améliorer les conditions de recrutement et de début de carrière des enseignants ;

– améliorer la disponibilité de la ressource enseignante ;

– optimiser l’enseignement des langues dans le premier degré ;

– renforcer l’efficacité du remplacement dans le premier et le second degré.

d) Axe n° 4 « Rationaliser l’action administrative et optimiser la qualité du service offert aux familles » :

– permettre aux élèves handicapés de suivre une scolarité en milieu ordinaire ;

– optimiser la qualité de l’accueil et du service rendu aux familles et faciliter leurs démarches ;

– renforcer l’efficience des services administratifs de l’éducation nationale ;

– supprimer les redondances de pièces justificatives lors de l’inscription scolaire.

Source : rapport rendu public à l’occasion du CMPP du 9 mars 2011.

Ce tableau confirme la « tonalité » pédagogique donnée aux mesures officielles de la RGPP propres à l’enseignement scolaire. Au demeurant, la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » s’est appuyée sur d’autres leviers, examinés infra, qui ont été mis en œuvre dans le cadre d’une déconcentration des décisions de gestion au sein du ministère de l’Éducation nationale.

II.– LA GOUVERNANCE, LA MISE EN œUVRE
ET LE SUIVI DE LA RGPP

A.– LA MISE EN PLACE DES INSTANCES POLITIQUES, ADMINISTRATIVES ET DE SUIVI DE LA RGPP

1.– Prendre les mesures au plus haut niveau de l’exécutif : la composition du Conseil de modernisation des politiques publiques (CMPP) et des Comités de suivi

Conformément à la communication du Premier ministre présentée devant le Conseil des ministres du 20 juin 2007, le Conseil de modernisation des politiques publiques (CMPP), organe ad hoc qui décide la mise en œuvre de chaque mesure de la RGPP, rassemble :

– le Président de la République et le Premier ministre. Leur prééminence n’est en rien symbolique puisqu’ils sont directement représentés par le secrétaire général de l’Élysée et le directeur de cabinet du Premier ministre dans les comités de suivi ; ils préparent ainsi, en très grande partie, par la coprésidence qu’ils assurent de cette instance, le contenu, et de facto les décisions, des réunions du CMPP (26) ;

– le ministre chargé du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, qui assure la fonction de rapporteur du CMPP ; parce qu’il est, au titre de ses attributions et de l’autorité qu’il exerce sur les services centraux compétents, le coordinateur, l’observateur et l’accompagnateur de l’action de chaque ministère en matière de réforme de l’État. Il est d’ailleurs membre permanent des Comités de suivi de la RGPP ;

– tous les ministres, parce qu’ils sont comptables de l’exécution des décisions prises. Étant entendu que chaque ministre participe, en amont des CMPP, aux réunions du Comité de suivi qui le concernent ; le Comité de suivi constitue donc une instance à « composition variable » selon les thèmes inscrits à son ordre du jour.

Le rapport rendu public à l’occasion du CMPP du 12 décembre 2007 précise que participent aux réunions du CMPP, parce qu’ils sont membres permanents des Comités de suivi, « les deux rapporteurs des commissions des finances des Assemblées – Gilles Carrez et Philippe Marini – ainsi que Michel Pébereau, président du conseil d’administration de BNP-Paribas (27) et Philippe Parini, receveur général des finances. »

Ces membres permanents (28) des Comités de suivi et, conséquemment, du CMPP ont sans doute apporté un regard financier et budgétaire sur les questions à trancher afin d’élaborer et choisir les mesures de la RGPP :

– la participation de nos collègues MM. Gilles Carrez et Philippe Marini a, à tout le moins, permis une certaine implication du Parlement dans la phase décisionnelle de la RGPP, étant entendu qu’ils y ont travaillé ès qualités mais aussi intuitu personae et ont donc été tenus, dans l’exercice de leurs activités et fonctions parlementaires, au respect des règles de confidentialité qui structurent les travaux des Comités de suivi et CMPP ;

– M. Michel Pébereau avait vocation à porter les constats et recommandations du rapport rendu public le 14 décembre 2005 issu des travaux de la commission qu’il a présidée, et qui portaient sur les conditions de la constitution de la dette publique française et sur les orientations et mesures susceptibles d’assurer le redressement des finances publiques (29) ;

– M. Philippe Parini a supervisé et dirigé, à compter du mois d’octobre 2007, la création de la future direction générale des finances publiques (DGFip – créée par décret du Premier ministre du 3 avril 2008), par la fusion des directions générales de la comptabilité publique et des impôts. M. Philippe Parini a ensuite été nommé directeur de la DGFip par décret du Président de la République du 10 avril 2008.

Si le rapport rendu public à l’occasion du CMPP du 4 avril 2008 mentionne encore la présence et l’activité de ces membres permanents du Comité de suivi, et, à ce titre, du CMPP, les rapports publics postérieurs n’ont pas précisé dans quelle mesure tout ou partie d’entre eux ont participé aux comités de suivi et aux CMPP après celui du 4 avril 2008.

2.– Mettre en œuvre les mesures dans les ministères : la circulaire du Premier ministre du 18 mars 2008

La circulaire du Premier ministre n° 5284/SGG du 18 mars 2008 (30) précisait l’organisation de la mise en œuvre et du suivi de la RGPP à l’attention des ministres ; elle présentait ainsi un « dispositif de pilotage structuré au niveau interministériel » animé par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Cette circulaire informait les ministres que la gouvernance politique « initiale » de la RGPP demeurait opérationnelle, qu’ils seraient dans ce contexte responsables à titre personnel de la mise en œuvre de la RGPP et qu’ils resteraient des interlocuteurs directs des instances de cette gouvernance :

– « chacun des membres du Gouvernement est pleinement responsable de la réussite des réformes qui relèvent de ses attributions » ;

– les CMPP et Comité de suivi « continueront à se réunir régulièrement pour assurer que les réformes décidées lors des CMPP entrent bien dans les faits et produisent les résultats attendus dans les délais prévus » ;

– « les ministres seront invités à présenter au Comité de suivi l’avancement de la mise en œuvre de la réforme. »

Ce « maintien sous tension » politique de la RGPP opéré par le Premier ministre était accompagné de la présentation de certaines modalités de suivi des réformes mises en œuvre au titre de la RGPP ; il était ainsi prévu que le CMPP soit renseigné notamment via un « tableau de bord interministériel RGPP » compilant des tableaux ministériels établis selon un rythme mensuel. La synthèse du suivi des réformes devait être réalisée par une équipe d’appui interministérielle rassemblant la direction du budget, la direction générale de la modernisation de l’État (DGME) et la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP).

Le Premier ministre invitait aussi chaque ministre à respecter certaines modalités d’organisation interne à son ministère pour assurer la mise en œuvre et le suivi des mesures de la RGPP :

– le secrétaire général du ministère serait « l’interlocuteur de “l’équipe d’appui interministérielle”. Il devra donc être en situation d’assurer, sur […] délégation [du ministre], le pilotage de la mise en œuvre des réformes et de veiller à la cohérence des différents chantiers de modernisation » ;

– chaque mesure entrant dans le portefeuille du ministère devrait faire l’objet, dans les deux mois suivant le CMPP qui l’a décidée, d’une « feuille de route » précisant l’identité de son chef de projet, son calendrier de mise en œuvre « ambitieux et réaliste », ses indicateurs d’avancement et d’impact et, le cas échéant, les modalités nécessaires à la cohérence interministérielle de sa mise en œuvre ;

– le ministère devait se doter d’un « Comité de pilotage RGPP » devant se réunir « au moins toutes les six semaines », dont la composition et le mode de fonctionnement devaient être validés par le Premier ministre étant précisé qu’il devait compter en tout état de cause des membres de l’équipe d’appui interministérielle de la RGPP.

Le rapport rendu public à l’occasion du CMPP du 4 avril 2008 estimait ainsi que ces modalités de suivi « se fondent sur les meilleures pratiques de gestion de projet ».

3.– La procédure et les outils de suivi des mesures de la RGPP

La circulaire du Premier ministre du 18 mars 2008 précisait que les formats des tableaux de bord ministériels (supports du tableau de bord interministériel de la RGPP par lequel le CMPP serait informé de l’avancement des mesures qu’il a décidées) seraient mis à la disposition de tous les ministères par la DGME. Cette direction générale a en effet plus particulièrement, au sein de l’équipe d’appui interministérielle, procédé à l’élaboration des modalités de suivi de la RGPP et a contribué à mettre celui-ci en œuvre auprès des ministères.

En la matière, le premier rapport de suivi de la RGPP du 3 décembre 2008, rendu public à l’issue d’une présentation en Conseil des ministres le même jour, par M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, précise qu’au-delà des mesures proprement dites et des objectifs d’économies qui leur sont associées, « la nouveauté majeure [de la RGPP] tient surtout au suivi de la mise en œuvre de ces décisions : loin d’être des annonces sans lendemain comme cela a trop souvent été le cas en matière de réforme de l’État, les décisions de la RGPP font l’objet d’une évaluation permanente de leur application effective. »

Le Gouvernement a rendu spécifiquement compte de la mise en œuvre de la RGPP et de son suivi dans plusieurs documents, dont le tableau ci-dessous précise les dates de publication et la portée.

DATES ET CONTENU DES RAPPORTS PUBLICS DE LA RGPP

Date des rapports

Présentation des mesures décidées en CMPP

Suivi des mesures décidées lors des CMPP précédents

Tenue
d’un CMPP

12 décembre 2007

Oui

-

Oui

4 avril 2008

Oui

-*

Oui

11 juin 2008

Oui

-*

Oui

3 décembre 2008

-

Oui

 

13 mai 2009

-

Oui

 

16 février 2010

-

Oui

 

30 juin 2010

Oui

Oui

Oui

9 mars 2011

Oui

Oui

Oui

* Les rapports rendus publics à l’occasion des CMPP des 4 avril et 11 juin 2008 contiennent quelques développements sur l’avancement des mesures décidées lors des CMPP précédents.

Les deux derniers rapports rendus publics à l’occasion des CMPP des 30 juin 2010 et 9 mars 2011 ont constitué aussi des rapports d’étape de la RGPP, au sens où les mesures décidées antérieurement y font l’objet d’une présentation de leur état d’avancement, selon les mêmes modalités que celles utilisées dans les rapports d’étape proprement dit. Ces modalités s’appuient sur l’attribution d’une notation publique, ou scoring, pour juger de l’avancement de chacune des mesures de la RGPP, par un système simplifié dit de « feu tricolore » (vert, orange ou rouge).

B.– DES COMITÉS DE SUIVI ET CMPP DE 2007-2008 À LA MISE EN œUVRE DES MESURES : LA GOUVERNANCE DE LA RGPP

1.– Le paradoxe de la RGPP : présence et absence du niveau politique

a) La banalisation, voire l’effacement, des CMPP

Le CMPP du 12 décembre 2007, le premier, a constitué un événement en soi, organisé au Palais de l’Élysée mais distinct du Conseil des ministres du même jour, et qui a donné lieu à une allocution du Président de la République devant les ministres concernés (31). Le Président de la République précisait à cette occasion que « cette première réunion du Conseil de modernisation en appelle […] beaucoup d’autres. […] Tout ne pouvait pas être traité en six mois et il y aura donc bien d’autres chantiers qui seront ouverts. »

Le deuxième CMPP du vendredi 4 avril 2008 a lui aussi constitué une réunion distincte d’un Conseil des ministres. L’après-midi de ce jour, le Président de la République, à l’occasion de l’installation de la DGFip créée la veille par décret, présentait dans les locaux du ministère du Budget, des comptes publics et de la réforme de l’État les principales décisions prises à l’occasion du CMPP tenu le matin. Dans son allocution, le Président de la République précisait d’ailleurs que « dès le mois de mai [2008], un nouveau Conseil de modernisation viendra compléter [les] mesures » prises lors du CMPP du 4 avril 2008.

Le troisième CMPP a eu lieu le mercredi 11 juin 2008. Il n’a pas consisté en une réunion distincte de celle du Conseil des ministres du même jour, même s’il n’en a pas constitué un des points de son ordre du jour. Cette assimilation est admise par M. Éric Woerth lors de son audition le 17 juin 2008 par la commission des Finances de l’Assemblée nationale en ces termes (32) : « le troisième conseil de modernisation des politiques publiques – CMPP –, ou plutôt, mais cela revient un peu au même, le conseil des ministres du 11 juin dernier, a marqué la fin de la première étape de la révision générale des politiques publiques. »

Le CMPP du mercredi 30 juin 2010 constitue en fait un point de l’ordre du jour du Conseil des ministres du même jour. Le communiqué relatif à la communication correspondante du ministre chargé du budget au Conseil des ministres n’évoque d’ailleurs pas de réunion du CMPP ; outre des propos relatifs au bilan des mesures mises en œuvre au titre des trois premiers CMPP, ce communiqué indique ainsi qu’« il a […] été décidé de mettre en œuvre, d’ici 2013, 150 nouvelles mesures. »

L’« effacement » du CMPP a été confirmé à l’occasion de celui censé avoir eu lieu le mercredi 9 mars 2011. Il constitue, lui aussi, un point de l’ordre du jour du Conseil des ministres réuni le même jour. Le communiqué rendant compte de la communication du ministre chargé du budget devant le Conseil des ministres est d’ailleurs peu précis sur l’existence, pourtant réelle, de mesures nouvelles prises à cette occasion, puisqu’il se borne à préciser que l’« effort se poursuivra avec l’adoption des nouvelles mesures […] ».

b) L’absence du Parlement dans la phase de prise de décision des mesures

Ont été évoquées supra les participations, en tant que membres permanents, de nos collègues MM. Gilles Carrez et Philippe Marini aux Comités de suivi et aux CMPP, au moins durant une partie de la phase 1 de la RGPP ; et ce à titre personnel et en tant que rapporteurs généraux des commissions des Finances des assemblées parlementaires. Il ne s’agissait donc pas d’une association du Parlement en tant que tel aux travaux de la RGPP.

À l’initiative du groupe UMP de l’Assemblée nationale, la RGPP a fait l’objet d’un débat en séance publique le 17 avril 2008. Intervenant peu après le CMPP du 4 avril de la même année, ce débat avait vocation à évoquer les décisions prises à cette occasion ; il fut au demeurant l’objet d’un échange sur l’implication et le rôle du Parlement dans la RGPP, un grand nombre de députés de groupes de la majorité et de l’opposition souhaitant que les parlementaires soient associés aux travaux de la RGPP, en amont des CMPP ; et ce à un moment où la plupart des décisions de la phase 1 de la RGPP avaient été prises.

Parmi les interventions de nos collègues députés à l’occasion de ce débat, on peut relever les propos suivants :

– M. Jean-François Copé, président du groupe UMP, proposait ainsi d’« élargir les prochaines réunions [des Comités de suivi] en impliquant à chaque fois un député spécialiste de la politique publique qui sera alors passée en revue » (33;

– M. Charles de Courson indiquait souhaiter, dans le même débat, « que les propositions formulées dans le cadre de la RGPP soient soumises à l’avis d’un comité de parlementaires représentatifs de la diversité politique française » (34;

– M. Didier Migaud, alors président de la commission des Finances de l’Assemblée nationale, estimait que « les commissions des Finances de chacune des assemblées et les rapporteurs spéciaux ou les rapporteurs pour avis [devaient] être associés à tout [le] travail d’évaluation » préalable aux décisions des CMPP (35) ;

– M. Gilles Carrez, rapporteur général du budget et membre permanent des Comités de suivi et du CMPP, indiquait qu’« il était nécessaire de passer par une étape centralisée pour harmoniser les positions. Désormais, notamment s’agissant des interventions publiques, l’heure est à l’association pleine et entière des parlementaires » (36) ;

– M. Hervé Mariton indiquait qu’« il convient de renforcer, ou plus exactement de créer, car il est nul aujourd’hui, le rôle des rapporteurs spéciaux dans la préparation de la révision générale de politiques publiques, d’autant que notre connaissance toujours plus approfondie des domaines visés par la RGPP nous permet d’enrichir celle-ci de propositions toujours plus nombreuses. […] Vous vous êtes engagé devant la commission des Finances à nous communiquer l’évaluation de chacune des propositions : elle sera la bienvenue. » (37).

– M. Jean-Claude Viollet, évoquant les travaux d’évaluation à mener en amont des décisions prises en matière de réforme de l’État notamment dans le domaine de la défense, indiquait qu’« il s’agit d’un travail auquel le Parlement devrait être largement associé, notamment à travers ses commissions spécialisées, car les choix à venir engageront durablement la nation et ne sauraient être faits sans avoir été débattus et tranchés par la représentation démocratiquement élue. » (38) ;

– M. Michel Bouvard indiquait que « s’il appartient bien à l’exécutif de faire les choix, il est souhaitable que le Parlement soit mieux associé à leur mise en œuvre. Je pense notamment aux rapporteurs spéciaux de la commission des Finances, aux rapporteurs pour avis budgétaire des autres commissions, […]. (39) » .

En réponse à l’ensemble de ces interventions, M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique a répondu à ces propos de la façon suivante : « que les parlementaires puissent rencontrer les équipes d’audit qui travaillent sur la RGPP, non pour discuter des orientations politiques, qui relèvent du pouvoir exécutif, mais pour tenter de partager une vision synthétique de l’ensemble des politiques, soumises aujourd’hui au filtre de la RGPP, est une bonne chose. Pourquoi ne pas associer les rapporteurs spéciaux du budget aux travaux ex ante de la RGPP dans des conditions à déterminer ? (40) »

En préambule de l’audition évoquée supra de M. Éric Woerth par la commission des Finances de l’Assemblée nationale, son président M. Didier Migaud précisait qu’il souhaitait « faire en sorte que les vingt-six équipes d’auditeurs rencontrent nos rapporteurs spéciaux et [essayer], avec Gilles Carrez, de cibler quelques grands sujets sur lesquels certaines de ces équipes pourraient être auditionnées par l’ensemble de la commission des Finances. »

Il ne semble pas que de tels travaux d’ensemble, contribuant à l’amélioration de l’information des parlementaires, aient pu être organisés à la suite de cette audition, qui clôturait la période de prise de décisions de la phase 1 de la RGPP.

Ce constat doit être apprécié en regard de l’attente forte exprimée par les partenaires sociaux quant à l’implication du Parlement dans le processus des décisions en matière de réforme de l’État. Lors de la table ronde consacrée à la RGPP rassemblant le 27 septembre 2011, à l’invitation des rapporteurs, les organisations syndicales représentatives du personnel de la fonction publique, aucune d’entre elles n’a omis de souligner ce souhait.

c) L’action et l’information limitées du Parlement dans la phase de mise en œuvre des décisions de la RGPP

Le rôle du Parlement dans la mise en œuvre des mesures de la RGPP a consisté, en premier lieu, en l’examen des projets de loi de finances et des projets de loi portant règlement des comptes ; il s’est ainsi agi d’approuver les schémas d’emplois ministériels portant les modalités de mise en œuvre de la « règle du un sur deux ». Les projets de loi de finances ou de règlement des comptes ont été au demeurant accompagnés des programmes et rapports annuels de performance faisant référence à certaines mesures de la RGPP, voire, dans le meilleur des cas, établissant un lien entre certaines d’entre elles et les développements et dispositions législatives relatives aux crédits.

L’examen de ces crédits a donc pu constituer un acte législatif en rapport avec la RGPP, étant entendu qu’il n’est cependant pas pour autant possible d’y voir l’exercice d’un pouvoir à part entière d’approbation précise des mesures de la RGPP. L’examen et le vote des crédits d’une mission, même s’ils s’appuient sur la présentation par le Gouvernement d’une justification au premier euro (dans le projet annuel de performance correspondant), ne peuvent qu’être difficilement assimilés à l’adoption distincte de chacune des mesures de dépenses ou d’économies qui justifient ces crédits (41).

D’autres textes législatifs ont directement permis la mise en œuvre de certaines mesures de la RGPP ou ont constitué un accompagnement de son déroulement ; à titre illustratif et non exhaustif, on peut évoquer les lois suivantes :

– la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) a prévu la création des agences régionales de santé (ARS) ;

– les lois de financement de la sécurité sociale portent chaque année un certain nombre de dispositions relatives à la fraude sociale, se rapportant à la mesure de la RGPP « Renforcer la lutte contre la fraude à la sécurité sociale » ;

– la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique a été conçue, ainsi qu’il sera précisé infra, comme une adaptation du droit de la fonction publique à la mise en œuvre de la RGPP.

Cette « participation » du Parlement doit être nuancée. Il ne s’est pas agi d’une saisine générale concernant la RGPP, sa méthode, ses objectifs ou son évaluation, mais de textes ponctuels rendus nécessaires par le fait que la mise en œuvre d’une mesure de la RGPP relevait du domaine législatif ; étant entendu que beaucoup des mesures de la RGPP relèvent de l’organisation administrative de l’État et ne nécessitent pas de support législatif pour leur mise en œuvre.

Au demeurant, un examen exhaustif des débats législatifs et des exposés des motifs des projets correspondants ne ferait sans doute apparaître que peu de références faites à la RGPP. Il est d’ailleurs légitime que le ministère compétent et les parlementaires aient appréhendé, par exemple, la création des ARS comme une réforme, à débattre et enrichir, des structures de l’organisation sanitaire et non pas comme découlant ex abrupto de la RGPP.

L’information du Parlement a été enrichie, tardivement, par l’adoption, à l’initiative du Sénat (42), de l’article 122 de la loi de finances pour 2010, qui prévoit que « le Gouvernement joint au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion une annexe présentant, pour l'année, un bilan des mesures décidées en conseil de modernisation des politiques publiques depuis 2007 et arrivées à leur terme. Cette présentation fait apparaître et justifie, pour chaque mesure, la date de réalisation effective ou les délais d'exécution prévus, en indiquant les échéances initialement fixées, et les économies nettes constatées ou attendues en conséquence, en précisant le montant initialement prévu et après révision éventuelle. »

Les rapporteurs reviendront infra sur le contenu de cette annexe, présentée à ce jour deux fois avec les projets de loi de règlement des comptes respectivement pour les années 2009 et 2010. Le dispositif est au demeurant le résultat d’un compromis, puisque le Gouvernement a souhaité et obtenu, par l’adoption d’un sous-amendement, que le champ de l’annexe se borne aux mesures de la RGPP arrivées à leur terme ; M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, indiquait ainsi, au cours du débat, que « les économies sont souvent dues à un ensemble de mesures. Estimer avec exactitude laquelle permet de réaliser ces économies est parfois très difficile, d’autant que celles-ci ne sont pas toujours immédiates. En la matière, les exemples sont multiples. Le fait de pouvoir tirer des enseignements annuels des mesures qui sont mises en œuvre concrètement et de dire quel niveau d’économie celles-ci peuvent atteindre serait utile au Parlement dans le cadre de sa mission de contrôle. »

L’argumentation du ministre s’appuyait sur la difficulté supposée d’évaluer les économies induites par les mesures en cours de la RGPP. Sans juger à ce stade de la pertinence de cette argumentation (cf. infra la troisième partie sur les impacts budgétaires de la RGPP), on observe que le sous-amendement a techniquement évité au Gouvernement la charge d’élaborer un document annuel à l’intention du Parlement sur l’avancement de chacune des mesures de la RGPP, achevées ou en cours (43) ; lui permettant ainsi de s’en tenir à la périodicité et aux méthodes des rapports publics accompagnant les CMPP et des rapports d’étape de la RGPP.

Plus récemment, la volonté du Parlement d’examiner la mise en œuvre de la RGPP s’est traduite par un certain nombre de travaux, dont certains sont énumérés supra dans l’introduction du présent rapport. On note par ailleurs la tenue d’un débat en séance publique le 18 mai 2011 sur la mise en œuvre de la RGPP, à l’initiative du groupe GDR (44) (45).

2.– Les ministères se sont mobilisés au service de la mise en œuvre de la RGPP

a) Le rôle et l’implication des secrétaires généraux des ministères et des cadres des directions d’administration centrale

La RGPP aurait pu souffrir d’un certain affaiblissement de son partage politique, marqué par un effacement progressif de l’exécutif concernant sa promotion et le maintien dans un rôle secondaire du Parlement pour sa mise en œuvre et le contrôle de son exécution.

La mise en œuvre a pu s’appuyer sur l’organisation administrative prévue par la circulaire du Premier ministre n° 5284/SGG du 18 mars 2008.

L’un des points fondamentaux de cette organisation est, au sein de chaque ministère, le rôle et la responsabilité attribués au secrétaire général du ministère. La circulaire du 18 mars 2008 précise ainsi que le secrétaire général doit être « en situation d’assurer […] le pilotage de la mise en œuvre des réformes et de veiller à la cohérence des différents chantiers de modernisation. Les résultats obtenus devront être un des éléments d’évaluation des secrétaires généraux et des responsables de programme de votre ministère ».

Les auditions des secrétaires généraux de certains ministères, organisées par le groupe de travail du Comité, ont nettement illustré leur implication déterminée dans le pilotage et la mise en œuvre des mesures de la RGPP. Il n’est pas exagéré de constater qu’ils considèrent celle-ci bien fondée, notamment parce qu’elle a eu le mérite de placer la question des réformes administratives à un niveau sans précédent dans l’agenda des ministères. Contraints par des décisions prises au plus niveau de l’exécutif, placés sous l’observation d’une équipe administrative interministérielle dite d’appui, les secrétaires généraux ont par là même acquis une visibilité, une responsabilité et une influence nouvelles pour mettre en œuvre un portefeuille clairement défini de mesures.

Au-delà du rôle clé du secrétaire général, les administrations centrales des ministères, à tout le moins leurs cadres dirigeants, semblent impliqués dans la mise en œuvre de la RGPP.

Ce constat est vérifié dans les cas où le nombre, les attributions et l’organisation des directions d’administration centrale d’un ministère résultent de la RGPP, comme dans les cas du ministère de la Culture et de la communication, ainsi que de l’Écologie, du développement durable, des transports et du logement. Les directions en charge des fonctions support, de la gestion administrative et des ressources humaines, ou des systèmes d’information ont par ailleurs été naturellement « mises en responsabilité » par les nombreuses mesures de la RGPP portant sur leurs compétences.

b) L’exemple du ministère de la Défense

Sans prétendre qu’il s’agisse d’un cas représentatif de l’ensemble du Gouvernement, l’organisation choisie par le ministère de la Défense pour mettre en œuvre la RGPP prouve la mobilisation et l’adaptation des états-majors administratifs aux problématiques de la RGPP.

Le ministère de la Défense a précisé à vos rapporteurs que « chaque projet de réforme RGPP particulier avait été conçu dans sa logique propre lors [de] l’audit [mixte] RGPP et [qu’]il convenait de corriger cette démarche en silos, et de mettre en place ces projets en veillant à leur mise en cohérence d’ensemble, car bon nombre d’entre eux avaient des liens forts, comme, pour l’illustrer, la réforme des achats avec la réorganisation financière, […] etc.

« Mais il fallait également s’assurer que cette organisation projets puisse s’appuyer sur l’organisation des responsabilités, afin de ne pas créer de tensions inutiles à la bonne mise en œuvre de la réforme.

« Il en est résulté un découpage de la RGPP en 37 projets, avec pour chacun d’entre eux la désignation d’un chef de projet ayant reçu une lettre personnelle du ministre, définissant les objectifs à atteindre, les jalons à respecter, et précisant les moyens disponibles.

« Chaque chef de projet est rattaché à un des trois grands subordonnés (46) du ministre, afin de favoriser la responsabilisation et préserver la capacité à agir, ainsi que la légitimité. Chaque équipe projet rassemble toutefois l’ensemble des représentants de toutes les entités concernées par la conduite de celui-ci, et la gouvernance de chaque projet associe également toutes celles-ci.

« Enfin, la cohérence d’ensemble, la maîtrise du rythme et de l’atteinte des résultats, l’assistance ou les orientations nécessaires repose sur un pilotage quotidien de la réforme par un Comité ad hoc resserré, le Comité pour la modernisation du ministère (C2M) présidé par le SGA [secrétaire général à l’administration], assisté d’une Mission pour la coordination de la réforme (MCR), le Comex (47) présidé par le ministre étant le comité directeur et d’arbitrage final, si nécessaire. »

Le ministère de la Défense considère que la responsabilisation des chefs de projet des mesures RGPP a notamment permis l’efficacité de l’action d’ensemble, un décloisonnement des composantes administratives et militaires du ministère, ainsi qu’une réelle coopération entre elles. Il résume ce constat en évoquant comme « ligne de force première » de l’organisation mise en place par la ministère « la mise en synergie transverse et coopérative tournée vers des résultats à atteindre. »

Pour le ministère de la Défense, la mise en œuvre de la RGPP correspond à une évolution marquée de la culture du ministère ; selon lui, la RGPP « se caractérise par un mouvement très significatif de mutualisation à l’échelle ministérielle, d’interarmisation et plus largement de “ministérialisation” avec la dissociation organique du soutien et du métier, conduisant à mettre en place des chaînes de soutien spécialisées et des centres de service partagés au service de toutes les unités soutenues, dont l’élément emblématique et de mise en cohérence est la base de défense.

« Cette réforme conduit à un fonctionnement où les acteurs du ministère sont de plus en plus dans des situations de dépendance réciproque pour fonctionner, et doivent en conséquence apprendre à développer des relations coopératives et des actions communes. Il s’agit de passer d’une logique traditionnelle s’appuyant sur le triptyque “un chef, une mission, des moyens”, à une logique de spécialisation et de relations dépendantes, de logique quasi contractuelle. »

c) L’exemple du ministère de la Culture

À l’instar du ministère de la Défense, le ministère de la Culture témoigne qu’au-delà de la mise en œuvre et de l’appropriation des outils prévus par la circulaire du Premier ministre du 18 mars 2007, la RGPP a été l’occasion d’une profonde modification du fonctionnement de « l’état-major » du ministère ; et ce, dans le sens d’une prise en compte des « questions portant sur la réforme » au plus haut niveau et sur un champ dépassant in fine celui de la RGPP et de ses mesures.

Le ministère de la Culture indique ainsi que son comité de pilotage RGPP s’est réuni trimestriellement sous la présidence de son secrétaire général, avec la participation de la direction générale de la modernisation de l’État (DGME) et de la direction du budget. Le « secrétariat général a par ailleurs mis en place un comité de modernisation, amené à compléter les comités de pilotage RGPP, devenant progressivement indépendant du calendrier RGPP ». La première réunion de ce comité de modernisation a eu lieu le 13 avril 2011. Selon le ministère, sa triple vocation consiste à s’appuyer sur la RGPP pour la prolonger, la transcender et pérenniser l’acquis qu’elle représente en termes de réflexion, d’organisation et de mise en œuvre opérationnelle, avec les objectifs suivants :

« – mettre en place une instance de revue et d'orientation de haut niveau des projets de modernisation du ministère ;

« – mettre en cohérence les différents projets de modernisation (y compris lien entre mesures RGPP et mesures MCC [ministère de la Culture et de la communication]) ;

« – identifier des pistes de modernisation au sein du MCC. »

d) Un rôle de concepteur des décisions dans la phase 2 de la RGPP

La méthode de préparation des 150 mesures nouvelles décidées lors du CMPP du 30 juin 2010 constitue sans doute l’un des résultats de l’appropriation des mesures de la RGPP par les ministères, qui a conduit certains d’entre eux à mettre en œuvre une organisation et une méthode internes pour traiter des questions relatives à la réforme et au changement. Dans son éditorial introduisant le rapport rendu public à l’occasion du CMPP du 30 juin 2010, M. François Baroin, ministre du Budget, des comptes publics et de la réforme de l’État précisait ainsi que « ces [150] mesures ont été, pour la plupart, proposées par les ministères eux-mêmes puis expertisées et chiffrées par des équipes d’audit. La RGPP a donc franchi un cap : les ministères se sont approprié la démarche. »

Cette évolution correspond aussi à une modification du rôle des cabinets privés d’audit dans la conception de ces mesures nouvelles. Le non renouvellement de l’expérience des équipes mixtes d’audit n’a pas pour autant correspondu à la disparition de ces cabinets du paysage de la RGPP, comme en témoignent les développements ci-après relatifs à la direction générale de la modernisation de l’État (DGME).

3.– Le rôle de la direction générale de la modernisation de l’État (DGME)

a) Les missions et activités de la DGME

La DGME est une direction d’administration centrale créée, selon les termes du décret n° 2005-1792 du 30 décembre 2005 dans sa version modifiée par le décret n° 2010-445 du 30 avril 2010, « au ministère du Budget, des comptes publics et de la réforme de l'État ». La DGME s’est ainsi substituée à direction de la réforme budgétaire, à la délégation aux usagers et aux simplifications administratives, à la délégation à la modernisation de la gestion publique et des structures de l'État et à l’agence pour le développement de l'administration électronique.

L’article 2 du décret du 30 décembre 2005 précise que la DGME « a pour mission de coordonner, d'aider et d'inciter, au niveau interministériel, les administrations en vue de moderniser les modes de fonctionnement et de gestion de l'État pour améliorer le service rendu aux usagers, contribuer à une utilisation plus performante des deniers publics et mobiliser les agents publics. Elle est également chargée de l'animation et de la coordination de l'évaluation des politiques publiques (48). »

L’article 3 du décret du 30 décembre 2005 indique que la DGME « coordonne les travaux d'amélioration de la qualité de l'action des administrations au profit des usagers [,] favorise le développement de l'administration électronique [et] coordonne et anime, en liaison avec les administrations de l'État, les actions de communication et de formation dans le domaine de la modernisation de l'État ».

Très précisément en lien avec la RGPP et avec l’action des ministères chargés de mettre en œuvre les mesures qui la composent, le même article 3 précise que la DGME « anime les travaux de modernisation de la gestion publique ». À ce titre, entre autres, elle :

– « assiste les ministères dans l'élaboration de leur stratégie de modernisation. Elle en suit et en évalue la mise en œuvre. Elle coordonne des audits de modernisation conduits dans les administrations de l'État […] » ;

– « concourt à l'adaptation de l'organisation des administrations de l'État pour tenir compte de l'évolution de leurs missions et de leurs modes de gestion. »

Les directeurs généraux successifs de la DGME ont été M. Frank Mordacq de janvier 2006 à novembre 2007, puis M. François-Daniel Migeon depuis cette date. La DGME, outre des services transversaux concernant les fonctions support, la coopération internationale et la communication, est composée des trois entités suivantes :

– un service « innovation » en charge, selon la DGME, d’« analyser les attentes des usagers et [de] s’inspirer des meilleures pratiques pour améliorer le service rendu » ;

– un service « conseil », appréhendé comme un « cabinet de conseil » interne de l’administration, afin d’accompagner les ministères. Il s’agit du service plus précisément en charge de l’accompagnement des ministères dans la mise en œuvre des mesures de la RGPP qui les concernent ;

– un service « projets », qui a directement en charge le développement du site internet « mon.service-public.fr », sur lequel chaque usager peut créer un compte personnel pour gérer un certain nombre de démarches administratives. Ce service gère d’autres sites en ligne à vocation interministérielle ou intéressant plusieurs administrations.

b) L’évolution des moyens financiers globaux de la DGME

Le tableau suivant retrace de 2006 à 2012 les crédits programmés et consommés par la DGME au titre des dépenses de personnel, fonctionnement, intervention et investissement (en autorisations d’engagement – AE et crédits de paiement – CP).

CRÉDITS PROGRAMMÉS ET CONSOMMÉS PAR LA DGME

(en millions d’euros)

 

2006

2007

2008

LFI

RAP(**)

LFI

RAP

LFI

RAP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dépenses de fonctionnement

72,7

54,0

58,2

28,8

54,2

49,7

40,1

38,5

48,2

45,8

49,7

53,3

Dépenses d’investissement

nd*

nd

21,7

9,4

nd

nd

7,2

9,3

2,3

5,2

7,7

11,8

Dépenses d’intervention

0,05

0,05

0,1

0,1

nd

nd

0,2

0,2

0,1

0,1

0,1

0,1

Total dépenses hors titre 2

72,73

54,01

80,0

38,3

54,2

49,7

47,5

48,0

50,6

51,1

57,5

65,2

Dépenses de personnel

13,5

13,5

11,6

11,6

14,5

14,5

12,1

12,1

14,4

14,4

11,7

11,7

Montant global

86,2

67,5

91,7

50,0

68,7

64,2

59,6

60,1

65,0

65,5

69,2

76,8

* Les crédits de l’action 04 relatifs aux dépenses d’investissement ne sont pas précisés dans la LFI de 2006 et celle de 2007. De même, les dépenses d’intervention ne sont pas inscrites dans la LFI de 2007. Enfin, les prévisions détaillées d’exécution en fonctionnement, investissement et intervention ne sont pas connues pour 2011

 

2009

2010

2011

2012

 

LFI

RAP(**)

LFI

RAP

LFI

Prévision
d’exécution

PAP

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dépenses de fonctionnement

44,1

39,9

38,7

40,0

39,6

41,7

34,7

41,4

35,1

38,1

nd

nd

41,7

36,7

Dépenses d’investissement

4,4

3,0

5,5

4,8

4,0

4,0

5,3

6,6

6

6

nd

nd

6

6

Dépenses d’intervention

0,2

0,2

0,1

0,1

0,1

0,1

0,1

0,1

0,1

0,1

nd

nd

0,1

0,1

Total dépenses hors titre 2

48,7

43,1

44,3

44,9

43,7

45,7

40,2

48,1

41,2

44,2

41,2

44,2

47,8

47,8

Dépenses de personnel

12,6

12,6

10,4

10,4

12,3

12,3

11,9

11,9

12,3

12,3

12,3

12,3

11,3

11,3

Montant global

61,3

55,7

54,7

55,3

56,0

58,0

52,1

60,0

53,5

56,5

53,5

56,5

59,1

54,1

Source : LFI/RAP/PAP/DGME

(**) RAP : rapport annuel de performance, décrivant les réalisations budgétaires par mission

Les dépenses de personnel et de fonctionnement font l’objet de développements infra. S’agissant des dépenses d’investissement, les crédits correspondent au développement du site « mon.service-public.fr » et d’un autre site aujourd’hui en phase de développement, qui devrait prochainement proposer l’accomplissement de démarches administratives en ligne présentées du point de vue des usagers confrontés à un « évènement de vie ». Les dépenses d’investissement ont aussi pour objet le développement du projet « plateforme d’échanges et de confiance » (PEC) qui doit permettre l’échange sécurisé d’informations administratives entre les usagers et l’administration et entre administrations.

Les faibles dépenses d’intervention de la DGME ont, selon le PAP de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » annexé au PLF 2012, « pour objectif de mettre en place un partenariat avec les acteurs de la qualité et de l’innovation publique (études, sondages, etc.) »

c) Les moyens humains de la DGME

Les deux tableaux suivant retracent, pour 2006 à 2012, les évolutions a) des plafonds d’emplois de la DGME, le nombre des ETPT consommés, ainsi que la répartition de ces ETPT entre titulaires de la fonction publique et contractuels ; et b) des crédits de personnel de la direction générale, en prévision et en consommation.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DE LA DGME

DGME

Plafond d’emploi (ETPT)

ETPT consommés sur plafond d’emploi au 31 décembre
(y compris vacataires et stagiaires contractuels)

   

Total

% titulaires

% contractuels

2006

161

145,30

49,8 %

50,2 %

2007

160

142,27

59,9 %

40,2 %

2008

153

129,65

52,8 %

47,2 %

2009

143

123,40

47,2 %

52,8 %

2010

145

130,71

35,4 %

64,6 %

2011*

142

122,07

36,1 %

63,9 %

2012**

140

-

-

-

* Prévision de la DGME

** PAP 2012

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE PERSONNEL DE LA DGME

(en millions d’euros)

 

2006

2007

2008

LFI

RAP

LFI

RAP

LFI

RAP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dépenses de personnel

13,5

13,5

11,6

11,6

14,5

14,5

12,1

12,1

14,4

14,4

11,7

11,7

 

2009

2010

2011

2012

LFI

RAP

LFI

RAP

LFI

Prévision d’exécution

PAP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Dépenses de personnel

12,6

12,6

10,4

10,4

12,3

12,3

11,9

11,9

12,3

12,3

12,3

12,3

11,3

11,3

Source : LFI/RAP/PAP/DGME

La DGME observe, dans ses réponses aux rapporteurs, que « les dépenses de personnel […] sont relativement stables entre 2006 et 2010 » ; le second des deux tableaux ci-dessus montre que ce constat est valable pour l’ensemble de la période 2006-2012. Sur la même période, les effectifs de la DGME ont en revanche diminué d’une proportion se situant entre 13 % (49) et 16 % (50).

La « parité » entre agents titulaires et agents contractuels observée en 2006 a évolué vers une nette prépondérance de ces derniers, qui représentent ainsi, selon la DGME, environ deux tiers des effectifs de la direction générale en 2011. Ces éléments illustrent la vocation de la DGME à constituer un moyen de transmission de la culture privée de gestion des organisations au sein de l’administration de l’État, par l’embauche de personnels contractuels qualifiés ayant, pour un certain nombre d’entre eux, une expérience professionnelle dans les entreprises d’audit privées.

La question pourrait se poser, à terme, de la permanence à ce niveau d’un volant d’agents contractuels au sein de la DGME (jusqu’aux plus hauts niveaux de son organisation), au regard de l’avancement de la RGPP et des acquis désormais constatés en matière d’usage par l’administration d’outils « du privé » dans l’analyse des organisations, la conception des réformes, leur mise en œuvre et leur accompagnement. À tout le moins, un équilibre dans la mixité de la composition du personnel de la DGME doit être recherché et maintenu, au regard des objectifs légitimes tendant, de l’intérieur de l’administration, à organiser la transmission de ces savoir-faire.

d) L’achat de prestations externes dans le cadre de la RGPP

Les dépenses de fonctionnement de la DGME témoignent aussi de la volonté des promoteurs de la réforme de l’État depuis la création de la direction générale, à l’occasion des audits de modernisation puis de la RGPP, de bénéficier au sein de l’administration de l’État des compétences et des savoir-faire des cabinets d’audit privés. Ces dépenses de fonctionnement sont en effet en partie composées d’achats de prestations réalisées par ces cabinets dans le cadre de marchés publics.

Vos rapporteurs ont évoqués supra dans quelles conditions l’élaboration de la méthodologie générale de la RGPP par le Gouvernement s’était accompagnée d’un travail de la société Capgemini, sur la base d’éléments contractuels dont elle était titulaire au titre de certains lots d’un marché public passé en 2006 au titre des audits de modernisation. Ces mêmes éléments contractuels, prolongés par avenant, ont aussi permis, semble-t-il, la participation des consultants d’autres cabinets privés d’audit aux équipes mixtes qui on accompli le travail préparatoire aux décisions prises lors des trois CMPP des 12 décembre 2007, 4 avril 2008 et 11 juin 2008.

Un autre marché, pour l’assistance à la mise en œuvre opérationnelle de la RGPP, comportant trois lots, a été notifié en novembre 2007 pour un an, puis renouvelé deux fois pour un an jusqu’en novembre 2010. À cette date, un nouveau marché d’assistance à la mise en œuvre opérationnelle de la RGPP a été notifié, comportant quatre lots.

Le tableau suivant synthétise le montant des crédits consommés par la DGME au titre de ces trois marchés successifs (en distinguant les différents lots des marchés et en précisant la société titulaire de chaque lot pour les marchés d’assistance à la mise en œuvre opérationnelle de la RGPP).

CONSOMMATION DE CRÉDITS SUR LES MARCHÉS AUDITS ET ÉTUDES DE MODERNISATION ET SUR LES MARCHÉS RGPP ENTRE 2006 ET 2011

(en millions d’euros)

Marchés

2006

2007

2008

2009

2010

2011 (prévision)

Total

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Assistance à la conduite d’audits et d’études de modernisation et à la re-ingénierie de processus (marché notifié
en 2006 – lot 1, 1bis, 2 et 3)

15,57

9,33

13,99

13,06

0

5,97

0

1,20

0

0

-

-

29,56

29,56

Lot 1 RGPP (marché public notifié en novembre 2007 – groupement solidaire McKinsey-Accenture)

 

2,50

0

15,37

14,52

9,09

10,34

12,03

11,30

0

2,82

38,99


38,99

Lot 2 RGPP (marché public notifié en novembre 2007 – groupement solidaire Capgemini-BCG)

 

2,50

0

2,77

4,37

5,16

4,04

4,67

5,24

0

1,45

15,10

15,10

Lot 3 RGPP (marché public notifié
en novembre 2007 – Ernst & Young)

 

1,22

0

2,78

3,41

6,65

5,69

4,51

5,08

0

0,97

15,16

15,16

Lot 1 RGPP (marché public notifié
en janvier 2011 - groupement solidaire McKinsey-Accenture)

 

6,49

5,08

6,49

5,08

Lot 2 RGPP (marché public notifié
en janvier 2011 – groupement solidaire Roland Berger-Ineum)

 

5,20

3,40

5,20

3,40

Lot 3 RGPP (marché public notifié
en janvier 2011 – groupement solidaire Capgemini-BCG-Mazars)

 

5,00

3,50

5,00

3,50

Lot 4 RGPP (marché public notifié
en janvier 2011 – Bain et compagnie)

 

1,07

0,86

1,07

0,86

Total

15,57

9,33

20,20

13,06

20,91

28,28

20,90

21,27

21,22

21,62

17,76

18,08

116,56

111,64

Source : Concorde (2006, 2007, 2008, 2009), Chorus (2010), DGME.

Le passage du premier marché notifié au titre des audits de modernisation au marché, notifié en novembre 2007, d’assistance à la mise en œuvre opérationnelle du programme de RGPP correspond à un relèvement significatif de l’effort public consenti pour l’achat auprès de cabinets privés d’audit de prestations de services. Les crédits de paiement consommés au titre du premier se sont élevés à 9,45 millions d’euros par an en moyenne sur les exercices 2006 à 2008. S’agissant du marché notifié en novembre 2007, la moyenne annuelle des crédits consommés pour la période 2008 et 2010 s’élève à 21,3 millions d’euros.

Le marché passé en novembre 2010 pourrait correspondre à un reflux de ce poste de dépenses finançant des prestations de cabinets privés d’audit. Ce marché à bons de commande (comme celui passé en novembre 2007) est encadré par des minimum et maximum propres à chaque lot. Le tableau suivant, présente pour chacun des lots de ce marché, le minimum et le maximum annuels.

MINIMUMS ET MAXIMUMS DU MARCHÉ RGPP NOTIFIÉ EN NOVEMBRE 2010

(en millions d’euros hors taxes)

 

Montant minimum annuel

Montant maximum annuel

Lot 1

2

6

Lot 2

2

6

Lot 3

1,5

5

Lot 4

0,5

1,5

Total

6

18,5

Source : DGME.

Ce tableau montre que la « fourchette » globale annuelle qui résulte des minimums et maximums situerait à l’avenir le montant annuel moyen dépensé à un niveau inférieur au montant moyen consommé au titre du marché notifié en novembre 2007 sur la période 2008-2010 ; étant néanmoins précisé que ces minimums et maximums, et la « fourchette » qui en résulte, sont fixés hors taxes, alors que les crédits de paiement sont consommés toutes taxes comprises. Un usage du marché notifié en novembre 2010 près de la borne haute de cette fourchette conduirait à un montant de crédits consommés toutes taxes comprises proche de celui constaté en moyenne sur la période 2008-2010 (18,5 millions d’euros auxquels s’applique un taux de taxe sur la valeur ajoutée à 19,6 % correspondent à un montant de 22,13 millions d’euros).

Le marché d’assistance à la mise en œuvre opérationnelle de la RGPP notifié en novembre 2010 correspond aussi à une évolution qualitative de la demande de l’État adressée aux cabinets privés d’audit. Comme le marché précédent notifié en novembre 2007, il prévoit la faculté d’achat de prestations en matière d’assistance à maîtrise d’ouvrage et d’assistance à la mise en œuvre des mesures de la RGPP auprès des ministères. Les intitulés comparés des lots des deux marchés témoignent néanmoins de la définition de besoins nouveaux, liés à l’évolution des compétences de la DGME et du profil des mesures de la RGPP :

– les trois premiers lots du marché notifié en novembre 2010 prévoient des prestations en matière d’évaluation des politiques publiques et d’audit, dans le contexte de l’attribution à la DGME d’une compétence nouvelle en matière d’évaluation des politiques publiques depuis le décret n° 2010-445 du 30 avril 2010 (cf. supra). Certaines mesures nouvelles du CMPP du 9 mars 2011 constituent au demeurant la programmation d’évaluations et d’audits portant sur certaines politiques publiques ou organisations ;

– les deux premiers lots du même marché prévoient des facultés d’achat de prestations pour l’accompagnement des réformes interministérielles transversales. Les deuxième et troisième parties du présent rapport montreront l’importance en matières d’organisation et d’impacts financiers de certaines réformes – parfois encore à venir – interministérielles (mise en place d’un opérateur national de paie, par exemple) ;

– le quatrième lot du même marché est consacré à la définition de mesures d’amélioration des services aux usagers ; la deuxième partie du présent rapport montrera que les CMPP du 30 juin 2010 et, de façon plus appuyée, du 9 mars 2011 témoignent d’une modification du profil des mesures nouvelles de la RGPP, tourné de façon accrue vers l’amélioration du service rendu à l’usager et la simplification de ses démarches administratives.

e) L’action concrète et la fonction achat de la DGME appréciées par les ministères

Globalement, les secrétaires généraux des ministères entendus par les rapporteurs se sont déclarés satisfaits de l’appui de la DGME, notamment via les prestations confiées aux cabinets privés d’audit, pour la mise en œuvre des mesures de la RGPP.

Invité par les rapporteurs à dresser un bilan de l’apport des cabinets d’audit qui ont accompagné ponctuellement le secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales pour la mise en œuvre d’une ou plusieurs mesures de la RGPP, celui-ci a choisi de répondre par un exemple, concernant les agences régionales de santé (ARS) – qui n’a pas uniquement impliqué la DGME et les marchés dont elle assure la gestion – mais qui illustre en tout état de cause l’intérêt que peut trouver l’administration à disposer des services d’un prestataire privé en matière d’accompagnement au changement.

Le secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales précise ainsi qu’« une expérience significative a […] été conduite directement par les ministères sociaux pour accompagner la création et la mise en place des agences régionales de santé (ARS). Le cabinet Capgemini Consulting a été retenu, par la DGME puis les ministères sociaux pour un ensemble de missions conduites depuis mai 2008. Ces missions ont été les suivantes :

« – assistance à la maîtrise d’ouvrage pour la création des ARS (organisation du pilotage national, création et installation des ARS, accompagnement sur place de la phase de préfiguration) (mai 2008, juillet 2010) ;

« – assistance à la maîtrise d’ouvrage pour l’accompagnement des ARS (depuis septembre 2010).

« Le bilan de cet accompagnement est tout à fait positif. L’accompagnement [de] consultant[s] a permis la création dans des délais extrêmement contraints des agences régionales de santé, sans interruption de service et sans tensions sociales. Leur aide à la conduite du changement et à la conduite de projet a été indispensable tant pour les administrations centrales que pour les agences (nouveaux établissements publics issus de la réunion de sept structures de statuts différents publics et privés).

« La mise en œuvre de compétences très spécifiques en termes d’organisation et d’ingénierie de procédure a répondu à un besoin que les ressources internes n’auraient pu satisfaire. Cet apport s’est également traduit par une diffusion de méthodes et de pratiques ayant vocation à irriguer durablement la mise en œuvre de leurs missions par les ARS et l’appui qui leur est donné via le pilotage national. »

Le secrétariat général du ministère de l’intérieur a évoqué devant le groupe de travail l’apport significatif du lean management pour améliorer certaines procédures administratives mises en œuvre en préfecture, cette méthode ayant été, en l’espèce, proposée et mise en place par un prestataire privé au titre d’un des lots du marché géré par la DGME au titre de la mise en œuvre opérationnelle de la RGPP. Cette méthode vise, en s’appuyant sur l’expérience des personnels directement concernés, à réduire la durée des cycles de production, diminuer les stocks, augmenter la productivité et optimiser la qualité.

f) Le positionnement de la DGME auprès du ministère chargé du budget demeure-t-il pertinent ?

Il est patent qu’au lancement puis lors de la mise en œuvre de la RGPP, le placement de l’ensemble de l’équipe interministérielle d’appui – la direction du budget, la DGME et la DGAFP – auprès du ministère chargé du budget, des comptes publics et de la fonction publique a assuré la cohérence et l’efficacité de l’action administrative tendant à rendre effective la volonté politique exprimée lors des Comités de suivi et des CMPP (dont le rapporteur est précisément le ministre qui a autorité sur l’ensemble de cette équipe).

Au demeurant, la création de la DGME au début de l’année 2006 a reposé sur le constat de l’échec du placement institutionnel auprès du Premier ministre de délégations et agence chargés, chacun d’eux, de certains aspects de la réforme de l’État. Le décret du 30 décembre 2005 créant la DGME abroge ainsi le décret n° 2003-141 du 21 février 2003 portant création de services interministériels pour la réforme de l’État.

Ces services interministériels – la délégation à la modernisation de la gestion publique et des structures de l'État, la délégation aux usagers et aux simplifications administratives et l’agence pour le développement de l'administration électronique – étaient placés auprès du Premier ministre et mis à la disposition du ministre chargé de la réforme de l’État. La création de la DGME a donc permis de mettre fin à un émiettement des instances administratives en charge de la réforme de l’État. Son placement auprès du ministère chargé du budget lui a permis d’acquérir une visibilité et une « aura » administratives nouvelles, de surcroît dans le contexte du lancement de la RGPP.

Ainsi, dans « l’histoire administrative » de la réforme de l’État, le placement auprès du Premier ministre des administrations compétentes n’a pas été, jusqu’à la mise en œuvre de la RGPP, un gage d’efficacité. Le déroulement et le « point d’arrivée » actuel de la RGPP peuvent néanmoins justifier que la question du rattachement de la DGME au Premier ministre se pose de nouveau, mais dans des termes sensiblement différents.

La réforme de l’administration territoriale de l’État (Réate), présentée dans la deuxième partie du présent rapport, témoigne de l’intérêt, pour les cas de réforme les plus complexes et structurants, de placer la responsabilité du changement auprès du Premier ministre, sous la responsabilité du Secrétariat général du Gouvernement (SGG). Le rapport accompagnant le premier CMPP du 12 décembre 2007 constatait que la Réate, malgré un diagnostic circonstancié sur l’organisation alors en vigueur, nécessitait un peu de temps pour être conçue et renvoyait en conséquence au printemps 2008 la définition des schémas régionaux et départementaux d’organisation territoriale.

Le même rapport prévoyait « qu’une équipe projet interministérielle, rassemblée autour du Secrétaire général du Gouvernement, du ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, du ministère du Budget, des comptes publics et de la fonction publique, [serait] chargée de préparer le nouveau mode de fonctionnement de l’État déconcentré ». La « remontée » du sujet au niveau du SGG s’explique aussi par la solution envisagée, à tout le moins esquissée par ce rapport (51), puis choisie, de constituer des directions départementales interministérielles (DDI) placées sous l’autorité du Premier ministre (52).

L’évocation et la gestion de certaines réformes par le Premier ministre et ses services se sont poursuivies, de façon plus anecdotique mais illustrative, lors de la création de la direction interministérielle des systèmes d'information et de communication de l'État (Disic), placée sous l'autorité du Premier ministre et rattachée au secrétaire général du Gouvernement par le décret n° 2011-193 du 21 février 2011 ; la création de la Disic constitue d’ailleurs en soi une mesure de la RGPP. Le directeur de la Disic est M. Jérôme Filippini, adjoint au secrétaire général du Gouvernement, qui a été auditionné par le groupe de travail du Comité ; il est par ailleurs en charge au sein du SGG d’autres attributions relatives à la réforme de l’État et plus particulièrement à la Réate. Outre la réduction des attributions de la DGME en matière de maîtrise d’ouvrage des services interministériels opérationnels d'interconnexion et de partage des ressources, on observe que le décret du 21 février 2011 créant la Disic a retiré à la DGME certaines de ses attributions :

– l’animation, avec la direction du budget, la DGFip et la DGAFP, des travaux relatifs à la refonte des processus de gestion et la participation à la définition des fonctionnalités interministérielles qui doivent être assurées par les systèmes d'information de l'État dans les domaines budgétaires, financiers et comptables ainsi que dans le domaine des ressources humaines ;

– la faculté, dans le domaine de l’administration électronique, de proposer les mesures tendant à l'interopérabilité des systèmes d'information.

Ces éléments n’invalident pas le choix qui s’est avéré efficace, d’avoir rattaché la DGME au ministère chargé du budget et des comptes publics pour la mise en œuvre de la RGPP. Ils témoignent néanmoins d’une tendance à l’évocation par le Premier ministre de certains aspects de la réforme de l’État, divers – comme l’organisation territoriale de l’État et les systèmes d’information – mais fondamentaux. Ils justifient de s’interroger de nouveau sur la question du rattachement ministériel de la DGME, dans la perspective d’un format renouvelé de réforme de l’État.

C.– DES ÉVOLUTIONS DANS LA GOUVERNANCE DE LA RGPP PAR UNE DÉCONCENTRATION ACCRUE ? LE CAS DE L’ÉDUCATION NATIONALE

S’il est vrai que le ministère de l’Éducation nationale s’est différencié des autres ministères en manière de gouvernance dans le cadre de la RGPP, l’étude de son cas, au regard de son poids dans la fonction publique d’État, est néanmoins riche d’enseignements pour l’ensemble de l’État.

1.– Le lancement de la RGPP : une administration déconcentrée tenue à l’écart du processus décisionnel et mobilisée autour d’instruments classiques pour mettre en œuvre les mesures

a) Les états-majors des rectorats « spectateurs » de la phase de travail de l’équipe mixte d’audit

Les rapporteurs ont tenté de décrire infra, sur la base de certaines informations recueillies auprès du ministère de l’Éducation nationale, le cheminement de l’élaboration des mesures de la RGPP propres à ce ministère, en partant des travaux du pôle mixte d’audit dirigé par M. Pierre Lepetit jusqu’à la formulation de ces mesures. Il apparaît que cette élaboration a été marquée, à l’instar des autres ministères, par le confinement des lieux de réflexion et de décisions ; il demeure difficile aujourd’hui de retracer les termes des débats et les fondements des décisions. En tout état de cause, l’administration rectorale et ses agents ont pour l’essentiel été tenus à l’écart de ce processus.

Les rectorats, qui ont tous été interrogés par les rapporteurs sur leur rôle dans la période de lancement de la RGPP, constatent que celui-ci fut très limité. La plupart des rectorats déclarent avoir été informés du déroulement de la mission d’audit et de ses résultats dans le cadre des réunions des recteurs et des secrétaires généraux d’académie organisés par le ministère, au cours desquelles certains d’entre eux considèrent avoir pu faire part de leurs analyses ; ils estiment néanmoins ne pas avoir été associés directement aux travaux.

Certaines réponses indiquent que la mission d’audit avait défini un échantillon de rectorats pour lui servir de base d’investigation. Dès lors, l’un d’entre eux estime que le fait de ne pas avoir été associé aux travaux « n’est pas choquant lorsque d’autres académies (sur la base d’un panel représentatif des diversités économiques, sociologiques et territoriales) [étaient] associées le plus en amont possible ». Un recteur précise qu’il a été auditionné dans ce cadre par des membres de l’équipe d’audit.

Les avis des rectorats, quand ils en donnent, concernant la méthode employée sont contrastés. Pour l’un d’entre eux, « le fait de procéder initialement par un état des lieux prospectifs par des corps experts est une bonne méthode » ; pour un autre, une plus grande association des rectorats aurait permis de « sensibiliser utilement les services déconcentrés sur les intentions et préoccupations générales [du niveau central]. »

Les rapporteurs observent que ces éléments ne coïncident pas avec la vision de cette période initiale de la RGPP, telle que dessinée par M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et des comptes publics, lors du discours qu’il tint le 10 juillet 2007 à l’occasion de son lancement. S’adressant à certains des plus hauts fonctionnaires de l’État déconcentré, il les appelait à s’impliquer « personnellement dans l’exercice. Ne craignez pas de vous exprimer. Vivez cette période comme un moyen de faire passer tous les messages que vous n’avez pas réussi à faire passer jusqu’ici, que ce soit comme manager, comme gestionnaire, comme responsable de programme ou comme membre d’un corps d’inspection.

« N’hésitez pas à faire part de toutes les réglementations, les procédures que vous jugez obsolètes, et qui entravent ou retardent votre action.

« Travaillez très étroitement avec les équipes des corps de contrôle, qui ont l’expérience de l’analyse des processus administratifs, et avec les consultants, qui ont celle de la rationalisation des activités productives et de la conduite du changement. »

b) La mise en œuvre des mesures proprement dites de la RGPP par les services déconcentrés de l’éducation nationale

Les rectorats n’ont pas créé en leur sein d’instances nouvelles, dédiées à la mise en œuvre des mesures de la RGPP. Le circuit hiérarchique traditionnel a été privilégié. Le pilotage relève dans tous les rectorats de l’« équipe de direction », généralement composée du recteur, du secrétaire général d’académie et des inspecteurs d'académie – directeurs des services départementaux de l'éducation nationale (IA – DSDEN). Chaque service compétent est ensuite chargé de conduire la mise en œuvre des mesures relevant de ses attributions.

Quand certaines instances dédiées ont été créées, il s’agissait de mettre en œuvre les mesures proprement administratives, s’appliquant en interne aux services académiques. Ainsi, un rectorat a prévu la mise en place au début de l’année scolaire 2011-2012, d’un poste de chef de mission « modernisation des services » « afin de coordonner et développer toutes les actions de modernisation des services selon une approche très globale (GRH (53), temps de travail, mode d’organisation du travail, systèmes d’information,…). »

Un autre rectorat a mis en place une « cellule modernisation », « déclinant différents aspects de rationalisation des services académiques au travers de groupes de travail sur les différents thèmes amenant à la mutualisation des services, à l’amélioration de l’accueil, l’évolution des métiers, l’administration exemplaire… »

Les rectorats témoignent que les personnels d'inspection et les chefs d'établissements (pour le second degré), ont constitué le relais sur le terrain du déploiement des mesures de la RGPP.

Le recours aux corps d’inspection semble avoir été crucial dans certaines académies. Un rectorat précise ainsi que « les corps d'inspection ont été amenés à se mobiliser de façon importante sur l'ensemble des chantiers en cours. Cette mobilisation a fait l'objet d'une réécriture de leur programme de travail académique (PTA) et d'une restructuration de la lettre de mission de chacun d'entre eux. Ils ont ainsi développé un pilotage pédagogique partagé en faisant profiter leurs interlocuteurs de leur conseil et leur expertise. Ils ont piloté des formations au plus proche du terrain pour accompagner le déploiement de ces réformes. En aval, ils ont analysé l'évolution des situations, rédigé des rapports d'études et procédé à des audits. »

Les rectorats témoignent que les outils utilisés pour observer la mise en œuvre et les impacts des mesures officielles de la RGPP ne sont pas a priori spécifiques à cette démarche. Les académies mobilisent en effet des outils classiques comme l’observation des échanges avec les instances paritaires de représentation du personnel, l’analyse de l’évolution des redoublements ou les rapports d’inspection.

Les rectorats indiquent s’appuyer aussi sur des enquêtes, menées à l’initiative de certaines administration centrales (la direction générale de l’enseignement scolaire – Dgesco ou la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance – DEPP) ou académiques, et réalisées auprès des établissements. Ces enquêtes, selon un rectorat,  « permettent de disposer à échéances régulières d’un bilan, principalement quantitatif, de mise en œuvre des différentes réformes ». De plus, les académies ont à leur disposition les indicateurs nationaux de performance qui figurent dans les projets et rapports annuels de performance, puisqu’elles sont chargées de procéder au renseignement de leur déclinaison académique.

2.– La déconcentration progressive de certains choix de gestion rendue nécessaire par la mise en œuvre de la règle du « un sur deux »

a) Origines du dialogue de gestion entre l’administration centrale et les rectorats

Comme les rapporteurs l’ont évoqué supra, le choix des CMPP des 4 avril et 11 juin 2008, préparés par les Comités de suivi concernant l’éducation nationale, a consisté, à la demande du ministère de l’Éducation nationale, à écarter du « label RGPP » les mesures de « rendement » initialement envisagées, susceptibles de conduire à la mise en œuvre de la « règle du un sur deux ». Ont en revanche été choisies des mesures de la RGPP principalement relatives aux aspects pédagogiques de l’enseignement scolaire.

Dans ce contexte, la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » devait se fonder sur d’autres modalités. La « mastérisation » a constitué en 2009 une mesure de réforme substantielle, hors la RGPP, de la formation initiale des enseignants. Cette réforme a consisté à substituer à une logique séquentielle (les enseignants sont d’abord recrutés par concours puis sont formés à l’Institut universitaire de formation des maîtres – IUFM – durant une année de stage) une logique de simultanéité (les élèves à l’université en master 1 et 2 se destinant à l’enseignement se voient offerts des stages de formation et sont le cas échéant recrutés à l’issue de leur master 2 par concours).

La « mastérisation » a conduit à la suppression des emplois d’enseignants stagiaires lauréats du concours, sans pour autant amoindrir l’offre scolaire, puisque les heures d’enseignement assurées par les enseignants stagiaires sont désormais effectuées par les étudiants en master. La mastérisation a donc constitué une précieuse mesure de rendement au titre de l’année 2010, permettant une économie de 18 000 ETPT, sans, en principe, amputer l’offre scolaire.

Au-delà de cette mesure, importante en termes d’économies affichées mais valables une seule année, la réforme du lycée d’enseignement général et technologique (LEGT), qui devrait entrer en vigueur à la rentrée de l’année scolaire 2008-2009, constituait la pierre angulaire de la stratégie d’économies du ministère. Elle était conçue pour conduire à terme à une économie de 20 000 ETPT. Cette réforme fut abandonnée et il y fut substitué une réforme du LEGT sans économies en termes d’ETPT.

Dans ce contexte, il a été décidé que la détermination des voies et moyens à mobiliser pour mettre en œuvre la « règle du un sur deux » dans le ministère de l’Éducation nationale s’appuierait sur un dialogue de gestion déconcentré. Cette orientation a été d’ailleurs rendue publique par le rapport accompagnant le CMPP du 30 juin 2010, qui précisait, s’agissant de l’enseignement scolaire, que « la réforme se poursuivra sur la base d’un véritable dialogue de gestion avec les recteurs d’académie, afin de mobiliser les gisements d’efficience, visant à respecter la contrainte budgétaire sans dégrader les performances attendues par les usagers de l’école. »

b) Modalités du dialogue de gestion

Le dialogue de gestion a consisté pour l’administration centrale à suggérer (à partir de mai 2010 pour préparer l’exercice budgétaire 2011) aux rectorats l’usage d’un ensemble de leviers d’économies en effectifs. Eu égard aux objectifs fixés au niveau central en matière de baisse du nombre des ETPT, chaque rectorat a eu l’initiative de proposer quels leviers il envisageait d’utiliser et dans quelle mesure ; et ce, en inscrivant ces propositions dans un cadre triennal. Le dialogue de gestion entre le rectorat et l’administration centrale a précisément consisté à discuter ces propositions, notamment au regard des indicateurs de performance pédagogiques et des réalités socio-éducatives de l’académie. Ce dialogue a conduit ensuite à des décisions prises par chaque rectorat, inscrites, là aussi, dans un cadre triennal.

Le tableau suivant retrace les leviers suggérés par le ministère aux rectorats pour la mise en œuvre de la « règle du un sur deux ».

LEVIERS « MIS À DISPOSITION » DES RECTORATS AU TITRE DU DIALOGUE DE GESTION

– augmentation de la taille des classes dans le 1er degré ;

– réduction du besoin de remplacement dans le 1er degré ;

– baisse de la scolarisation des enfants âgés de deux ans ;

– sédentarisation des enseignants « hors la classe » ;

– intervenants extérieurs en langue vivante et assistants étrangers dans le premier degré ;

– évolution de la taille des classes au collège ;

– évolution du réseau des établissements ;

– réduction du volume des décharges dans le 2nd degré ;

– optimisation du remplacement dans le 2nd degré ;

– lycée d’enseignement général et technologique : rationalisation de l’offre scolaire ;

– lycée professionnel : rationalisation de la carte des formations ;

– itinéraires de découverte : état des lieux ;

– renforcement de l’efficience des emplois administratifs dans les services déconcentrés et dans les EPLE (établissements publics locaux d’enseignement).

Sans surprise, on observe qu’un certain nombre de ces leviers sont analogues aux mesures que le pôle d’audit dirigé par M. Pierre Lepetit avait envisagées de proposer au Comité de suivi concernant l’enseignement scolaire (cf. infra la présentation de ces travaux le 18 octobre 2007 par ce pôle à l’attention du comité de pilotage du ministère).

Concrètement, selon un rectorat, le dialogue de gestion est structuré par une réunion de préparation pour l’exercice budgétaire de l’année n+1 entre le rectorat et l’administration centrale du ministère, dès le mois de mai ou de juin de l’année n « au lieu d’être comme auparavant concentré en novembre ou décembre » ; étant entendu que la réunion traditionnelle de fin d’année demeure le moment de prise des décisions, le délai entre les deux réunions étant « mis à profit pour identifier les leviers d’efficience et les spécificités de l’académie » (54).

Il est patent que les rectorats apprécient cette méthode nouvelle, notamment parce qu’elle s’appuie sur la prise en compte des particularités locales. Les témoignages de deux rectorats résument ce constat général :

– « la méthode de mise en œuvre du dialogue de gestion qui consiste à partir des contraintes spécifiques des académies, dans l’utilisation des leviers de rationalisation, est appréciée de l’académie » ;

– le dialogue de gestion fait à la fois place à « une plus grande place à la responsabilisation des acteurs locaux, et à une meilleure appropriation des mesures mises en œuvre. »

Certains rectorats évoquent l’éventualité de conforter la logique du dialogue de gestion par la mise en œuvre d’une procédure de type « contrats d’objectifs et de moyens » ; l’un d’entre eux précise que le diagnostic académique réalisé localement pour la préparation du dialogue de gestion « devient peu à peu la référence commune dans des contextes et bilans partagés et dans la perspective possible d’une contractualisation. »

c) Avantages et limites de l’usage du dialogue de gestion pour la gestion des personnels enseignants

Le dialogue de gestion permet aux rectorats de sélectionner ou d’écarter les leviers plus ou moins pertinents au regard de la situation locale. Un rectorat indique ainsi avoir écarté le recours au levier du taux de scolarisation des enfants de 2 ans, qui n’était que de 2,9 % dans l’académie.

L’usage des leviers s’appuie aussi sur les caractéristiques démographiques des académies. Ainsi, un rectorat déclare avoir choisi de s’assurer que le solde « création-suppression » de postes reste supérieur à zéro dans le premier degré, du fait d’une augmentation attendue du nombre d’élèves.

D’autres leviers sont utilisés par une grande partie des académies. C’est le cas, pour le premier degré, de la diminution du nombre d’enseignants hors la classe (ce qui passe notamment par la suppression des postes des réseaux d’aide spécialisée aux élèves en difficulté – Rased) ou du nombre d’intervenants en langue.

Les rectorats peuvent aussi faire un usage des leviers en rapport avec des priorités pédagogiques établies pour l’académie. Un rectorat francilien a ainsi choisi de « préserver les moyens consacrés aux réseaux ambition réussite et aux collèges CLAIR (55) sous réserve des évolutions d’effectifs » et de « préserver l’offre de formation en lycée professionnel lorsqu’elle répond à de vrais besoins avec un effort particulier sur le CAP [certificat d’aptitude professionnelle]. »

Au vu des réponses des rectorats, les rapporteurs relèvent néanmoins que l’augmentation de la taille des classes, par les suppressions de postes d’enseignants devant les élèves, constitue un levier in fine difficilement contournable pour la mise en œuvre de la « règle du un sur deux », dans un contexte où l’offre scolaire est restée globalement inchangée et où les obligations réglementaires de service des enseignants n’ont pas été modifiées.

d) Le dialogue de gestion, source d’innovations pour l’organisation des services administratifs

Les rectorats ont usé du dernier levier présenté dans le tableau précédent (qui évoque le renforcement de l’efficience des emplois administratifs) en opérant des réformes de leurs services administratifs (56). Un rectorat résume les réflexions et réalisations en cours en indiquant que « trois types d’organisation ont été étudiées : les activités administratives relevant des inspections académiques qui peuvent être mutualisées dans une seule inspection académique, celles qui peuvent être centralisées au rectorat et celles, relevant des inspections académiques et du rectorat, qui peuvent être centralisées dans une inspection académique. »

Le même rectorat précise que le traitement par une des inspections académiques de tâches relevant de l’ensemble du rectorat pourrait concerner à l’avenir, dans son ressort, les gestions des personnels enseignants du premier degré dans le public et dans le privé, des frais de déplacement et des accidents du travail. La centralisation des tâches au sein du seul rectorat pour le compte de l’ensemble des inspections académiques pourrait concerner, entre autres, la répartition des dotations globales horaires des collèges, le contrôle de légalité des actes des établissements scolaires, la gestion administrative de l’action sociale et l’achat public.

Un autre rectorat indique que dès la rentrée 2009, la gestion des frais de déplacement, des bourses du second degré, des concours de recrutement et des examens professionnels dans le premier degré, ainsi que des examens des élèves relevaient d’une seule inspection académique pour le compte de l’ensemble de l’académie. Le rectorat s’acquitte depuis la même date, pour le compte de toutes les inspections académiques, de l’animation de la cellule achat, de la gestion administrative et financière des personnels enseignants du premier degré et de la mise en œuvre de l’action sociale.

e) Des enseignements pour l’administration préfectorale ?

L’idée que des gains d’efficience sont possibles via l’exercice d’une tâche par une unité territoriale déconcentrée pour le compte d’autres unités pourrait, le cas échéant, trouver à s’appliquer pour les préfectures de département d’une région.

Les rapporteurs ont interrogé le secrétariat général d’un ministère sur les réflexions actuelles, au sein de ce ministère, concernant d’éventuelles modifications, restructurations ou abandons de missions et sur le partage de ces réflexions avec l’équipe d’appui de la RGPP. Sans répondre directement à cette question portant sur la cartographie des missions du ministère, le secrétariat général a évoqué des travaux interministériels de réflexion relatifs à la recherche de gains d’efficience s’appuyant sur l’organisation des services préfectoraux régionaux et départementaux. Il indique ainsi que « la réorganisation de l’administration territoriale de l’État appelle des prolongements dont toutes les suites n’ont pas encore été données. Les réflexions en cours, pilotées par le Secrétariat général du gouvernement (SGG) (57) avec l'ensemble des ministères, des représentants des services déconcentrés concernés, ainsi que des préfets de région et de département, conduiront à des ajustements, voire des regroupements de missions.

Ces travaux ont fait l'objet d'une synthèse diffusée par le SGG le 17 juin 2011, qui évoque notamment la question de l'articulation entre les niveaux régional et départemental :

La région est ainsi le niveau de pilotage de droit commun des politiques publiques, mises en œuvre par le département. Il peut également être un niveau de mutualisation adapté pour l’exercice de certaines missions ou la mise en commun de certaines expertises.

“La répartition générale des missions entre directions départementales et directions régionales ne fait pas obstacle à ce que le niveau régional puisse mettre en œuvre, par exception, des compétences de niveau départemental lorsque celles-ci exigent des compétences rares et spécialisées qu'il n'est pas possible de mettre à disposition dans chaque département. L’intervention du niveau régional s’inscrit alors dans le cadre de la compétence générale du préfet de département dans la mise en œuvre des politiques publiques.

“Dans ce cadre, les logiques de « front office » (accueil – information – orientation), de « back office » (instruction des dossiers), de lieu d’expertise indépendant du lieu d’exercice, de subsidiarité, sont à rechercher, en prenant toutefois garde à ne pas provoquer ou créer, dans l’exercice des missions, de “doublons”entre les échelons départementaux et régionaux.

“Eu égard à la complexité tant technique et économique que juridique de certaines missions, et compte tenu de la diversité des territoires, il s'agit de mieux mobiliser les expertises rares, sur des problématiques qui ne sont pas rencontrées avec la même intensité dans tous les départements d'une même région. Cela peut se traduire, selon les cas, par une meilleure articulation de l’exercice des missions entre directions régionales et directions départementales ou par des mutualisations interdépartementales (c'est-à-dire entre DDI sans remontée de la compétence au niveau des directions régionales) permettant de développer le travail en réseau.

“La bonne articulation entre échelon régional et échelon départemental ne doit, en tout état de cause, pas conduire à “dévitaliser” les DDI ni à revenir sur la répartition des compétences préfet de département / préfet de région.” »

Ces réflexions témoignent que la RGPP entraîne en tout état de cause des réflexions régulières et renouvelées sur l’efficience de l’organisation administrative de l’État. Elles font au demeurant écho à une des préconisations émises par la société Ernst and Young dans son rapport au Comité sur l’évaluation de la modification des modalités de délivrance du passeport et du certificat d’immatriculation des véhicules. La synthèse de ce rapport relative au passeport biométrique précise ainsi que « la régionalisation de l’instruction des demandes de passeport est un levier d’évolution à étudier ». En effet, dans le dispositif actuel, les dossiers de demande de passeport recueillis dans les mairies équipées pour accueillir les demandeurs sont instruits par les services préfectoraux départementaux.

De façon plus détaillée, le rapport propose « une expérimentation de la procédure d’instruction-validation des passeports biométriques à l’échelle de la région […] ce qui pourrait permettre d’atteindre une masse critique de titres et donc de dégager des gains de productivité. Si cette idée se confronte à une difficulté juridique compte tenu du fait que la compétence d’instruction relève de l’autorité du préfet de département, il serait intéressant d’étudier la possibilité de considérer l’instruction comme une prestation de services pouvant être réalisée par un centre de service partagé régional exerçant pour le compte des préfets de département.

« Le [ministère de l’intérieur] envisageait de lancer en 2011 une étude de faisabilité d’une régionalisation de l’instruction des passeports poursuivie par la mise en place d’un site pilote en 2012 et d’un déploiement à partir de 2013 sous réserve de validation du pilote. »

D.– LE SUIVI DE LA RGPP

1.– Les faiblesses des rapports publics relatifs à la RGPP

a) Un usage particulièrement malaisé

Qui veut disposer d’une vision publique d’ensemble de l’avancée de la RGPP doit se référer aux rapports rendus publics à l’occasion des cinq CMPP et aux trois rapports d’étape de 2008 et 2009 relatifs à la phase 1 de la RGPP.

Les rapporteurs doivent cependant constater les difficultés sérieuses auxquelles le lecteur de ces rapports est confronté.

Aucun de ces rapports n’a fait l’objet d’une numérotation de ses pages. Leur sommaire, notamment constitué de la liste des ministères, est donc inutilisable. Si le lecteur souhaite, par exemple, consulter les mesures propres au ministère de la justice, au mieux peut-il « jauger » la place à laquelle les développements correspondants pourraient se trouver dans l’épaisseur du volume au regard du placement de ce ministère dans le sommaire.

Il peut aussi tenter de retenir, au vu de ce sommaire, quels sont les ministères se trouvant avant et après le ministère de la justice. Car s’il se déplace par exemple à l’écran, « au jugé », dans l’ensemble du volume, le lecteur peut ne pas tomber directement sur le ministère de la justice. Pour écourter la recherche, il peut alors tenter d’identifier le ministère traité par la page où il se trouve pour à tout le moins identifier s’il doit poursuivre sa recherche « plus haut » ou « plus bas » pour trouver le ministère de la justice.

Si le lecteur n’est pas un spécialiste des mesures de la RGPP et des compétences attribués à chaque ministère, il peut avoir certaines difficultés à identifier, par une simple consultation rapide, le ministère concerné par la page où il se trouve. Les rapporteurs ont constaté que cette mention figure en pied de chaque page car il existe une numérotation des pages, par ministère, et non pour l’ensemble du rapport. Cette numérotation n’est pas complètement inutile, puisqu’elle permet de juger du nombre des pages qu’il est nécessaire de « passer » pour parvenir aux pages du ministère suivant ; qui n’est peut-être pas (encore) le ministère de la justice. L’ensemble de l’exercice, qui peut demander un certain temps, doit donc être répété jusqu’à parvenir au ministère souhaité.

Cette situation invite bien entendu à procéder à la recherche du ministère visé par l’usage des outils classiques de recherche par mots clés dans les rapports, disponibles en ligne sous format PDF. Ces outils ne manquent pas d’efficacité, notamment pour les premiers rapports accompagnant les CMPP et les rapports d’étape de la RGPP. Cependant, ce constat est désormais moins vrai, puisque le temps avançant, les rapports s’ouvrent sur des développements généraux de plus en plus longs, dans lesquels sont mentionnés un certain nombre de fois l’intitulé du ministère recherché ; autant de fois qu’il faut passer en revue par l’usage de l’outil de recherche automatique, avant d’arriver à la page souhaitée.

À titre d’exemple, l’intitulé « ministère de la justice et des libertés » tel qu’il se trouve dans le sommaire du rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011 figure à 10 reprises en amont de la page qui ouvre la partie dédiée à ce ministère dans ce rapport. Les rapporteurs conseillent au lecteur, qui n’aurait pas une idée très précise de l’évolution dans le temps de l’intitulé des ministères, de se référer scrupuleusement au libellé figurant dans le sommaire du rapport dans lequel il cherche le passage qu’il souhaite consulter. Pour n’évoquer que les rapports accompagnant les CMPP, il faut ainsi chercher « modernisation de la justice » dans le rapport du 12 décembre 2007, « ministère de la justice » dans les rapports des 4 avril et 11 juin 2008, « ministère de la justice et des libertés » dans les rapports des 30 juin 2010 et 9 mars 2011.

Étant précisé que les rapports publics officiels relatifs à la RGPP ne sont pas accessibles ou vendus sous format papier, le lecteur équipé en conséquence (à la fois d’une imprimante et d’une quantité suffisante de papier) peut choisir d’imprimer un ou plusieurs de ces rapports. Il pourra dans ce cas préparer un usage durable de son exemplaire « papier » en numérotant lui-même les pages et en complétant le sommaire en conséquence.

L’un des intérêts de ces rapports étant la constatation de la « notation » de l’avancement des mesures par un système de feux tricolores, les rapporteurs conseillent vivement au lecteur équipé d’une imprimante de procéder à un réglage efficace du contraste pour l’impression, s’il n’est équipé d’une imprimante « couleur ».

b) Un contenu techniquement insuffisant et faisant la part belle au marketing politique

Il est légitime que le Gouvernement procède de façon régulière à un bilan de l’avancement des mesures de la RGPP, présentée à son lancement dans son discours du 10 juillet 2007 par le Premier ministre comme « l’une des grandes ambitions du quinquennat [qui] bénéficiera d'un degré de priorité inédit en France ». Pour illustrer le poids politique de la RGPP, il indiquait qu’« il fallait un coup d'accélérateur décisif permettant d'achever la réforme de l'État. Ce choc politique, c'est la révision générale de nos politiques publiques. De quoi s'agit-il ? De rien de moins qu'une véritable révolution dans la réforme de l'État. […] je veux faire de cet examen critique la clé de voûte de la modernisation de l'État. »

Les rapports publics officiels relatifs à la RGPP constituent un vecteur de l’affirmation et de la constance de cette volonté politique ; il n’est pas anormal, dès lors, que le ton employé soit à l’optimisme quant à l’avancement et aux réalisations, réelles au demeurant dans certains domaines parfois importants (cf. la deuxième partie du présent rapport sur les mesures de la RGPP). Il constitue aussi un moyen pour le Gouvernement d’apporter le contrepoint qu’il juge utile à des commentaires extérieurs concernant la RGPP issus d’origines diverses (politiques, syndicales, scientifiques ou encore médiatiques), dans l’ensemble beaucoup plus contrastés.

La difficulté est que ces rapports se veulent de surcroît « techniquement » suffisants pour justifier ce ton résolument positif, optimiste et satisfait. L’effort est au demeurant réel, malgré les difficultés de lecture de ces documents présentées ci-dessus ; les 200 pages du rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011 ne constituent pas uniquement une opération de communication politique. Les exercices techniques et politiques gagneraient cependant à être mieux distingués.

La présentation technique de l’avancement des mesures de la RGPP souffre peut-être du « format rapport », à la périodicité irrégulière et dont le rythme est peu intense ; le site en ligne www.rgpp.modernisation.gouv.fr ne constitue pas au demeurant une présentation publique, mise à jour dès que nécessaire, de l’avancement de chacune des mesures. Il constitue un lieu de centralisation d’un certain nombre de documents publics relatifs à la RGPP ; sa valeur, réelle, s’appuie ainsi sur une fonction d’archivage, plus que d’informations « d’actualité » au fil de l’avancement de la RGPP.

Au-delà des questions relatives au « bon » format de cette présentation technique, les développements ci-après sont consacrés à certaines lacunes et imprécisions de contenu même des informations qu’elle porte.

2.- Comment sont jugés l’avancement et l’impact des mesures de la RGPP ?

a) Le système des feux tricolores : une réelle simplicité ?

Le système de notation (ou scoring) par les feux tricolores vert, orange ou rouge, permettant d’apprécier l’avancement de chacune des mesures de la RGPP, présenterait, selon la DGME, certains avantages qui expliqueraient, malgré le regard parfois sceptique dont il est l’objet, qu’il n’a pas été abandonné. Ce système aurait notamment pour vertu de constituer un aiguillon efficace à l’attention des ministères chargés de la mise en œuvre des mesures de la RGPP. Aucun d’entre eux ne souhaite se voir publiquement associé à un feu rouge au titre d’une mesure à l’avancement insuffisant ; chacun d’entre eux a le souhait de pouvoir se prévaloir du plus grand nombre possible de feux verts.

À l’occasion de l’audition des secrétaires généraux de certains ministères, les rapporteurs ont constaté que ce rôle d’aiguillon était une réalité, parce que le système des feux tricolores constitue la traduction dans un langage clair d’un jugement public. On note à cet égard que l’instance de jugement, c’est-à-dire le CMPP, placé sous l’autorité du Président de la République et du Premier ministre, n’est pas un observatoire indépendant de l’avancement des mesures de la RGPP. L’exécutif dans son ensemble a aussi un intérêt à constater et faire constater publiquement que beaucoup d’entre elles sont associées à un feu vert. En la matière, on assiste à une certaine confusion des rôles entre « le juge et les parties », qui est susceptible d’induire un biais structurellement favorable à ce que des feux verts soient décernés.

Une autre qualité du système des feux tricolores serait qu’il ferait directement sens, puisque chacun serait en mesure de comprendre la signification associée à chaque couleur de feu. Il est vrai que ce dispositif s’appuie sur un certain consensus intuitif sur la signification de la notation attribuée à chaque mesure (58).

L’« autorité de jugement » ne pouvait cependant pas se dispenser de définir publiquement le sens associé à chacune des couleurs vert, orange et rouge. Le tableau suivant retrace l’évolution des significations de ces couleurs structurant en principe le système de notation publique des mesures prises dans le cadre de la RGPP dans les différents documents officiels rendus publics au titre de la mise en œuvre de la RGPP, à compter du rapport d’étape du 3 décembre 2008.

HISTORIQUE DES SIGNIFICATIONS SUCCESSIVES
DES COULEURS DE FEU ATTRIBUÉES AUX MESURES DE LA RGPP

 

Feu vert

Feu orange

Feu rouge

Rapport d’étape du 3 décembre 2008

La mesure concernée remplit toutes les conditions d’un avancement satisfaisant

Des travaux sont encore nécessaires pour définir un plan d’action détaillé et des indicateurs opérationnels, alors que la cible générale a bien été définie 

La mesure est encore dans une phase antérieure à la mise en œuvre, car sa cible n’est pas encore assez définie

Rapport d’étape du 13 mai 2009

Projet de réforme pour lequel toutes les conditions sont réunies pour atteindre les résultats escomptés dans les délais prévus

Projet de réforme en cours d’exécution, mais dont le calendrier n’est pas totalement respecté, ou dont la mise en œuvre présente des difficultés techniques, qui appellent des décisions correctrices

Projet de réforme dont la phase de mise en œuvre n’a pas encore été engagée

Rapport d’étape du 16 février 2010

Toutes les conditions sont réunies pour atteindre les résultats escomptés dans les délais prévus

Projet de réforme en retard ou présentant des difficultés techniques qui appellent des mesures spécifiques

La réussite d’une mesure est compromise et appelle aussi des mesures correctrices.

Rapport accompagnant les CMPP des 30 juin 2010 et 9 mars 2011

La réforme progresse au rythme prévu

La réforme satisfait la plupart des exigences mais nécessite des actions correctrices*

La réforme connaît un retard important et doit faire l’objet d’actions correctrices à mettre en œuvre rapidement.

* La signification que le rapport accompagnant le CMPP du 30 juin 2010 associe à la couleur orange est plus précisément la suivante : « la réforme satisfait la plupart des exigences mais nécessite des actions correctrices pour être menée à bien. »

Ce tableau illustre une difficulté de la lecture des rapports publics qui ont jalonné la mise en œuvre de la RGPP. Il n’est en effet pas simple de saisir, à la seule lecture de ces définitions successives, la signification et la portée des changements réguliers qui leur ont été apportés ; changements qui, de facto, complexifient un dispositif dont la simplicité de lecture (par l’usage des feux tricolores) devait compenser un certain manque de finesse.

Les rapports publics contiennent quelques éléments justifiant ces modifications ; le rapport d’étape du 13 mai 2009 précise que « près d’un an après le dernier conseil de modernisation des politiques publiques, les réformes doivent être entrées dans une phase de mise en œuvre plus poussée. […] Les exigences ont été renforcées. Elles reposent désormais, outre la qualité de la conduite du projet, sur son stade de réalisation effective et sur ses premiers résultats. »

Il était effectivement pertinent qu’avec le temps, les critères de jugement aient pris en compte de façon accrue, outre la question du lancement de la mesure concernée, des éléments relatifs à sa réalisation et à ses résultats. Les rapports accompagnant les CMPP des 30 juin 2010 et 9 mars 2011 ont précisé, comme celui du 13 mai 2009, que les « les critères d’évaluation sont plus exigeants à chaque nouveau rapport ». Pourtant, il semble que les énoncés successifs de la signification de la couleur verte entre le rapport d’étape du 16 février 2010 et les rapports des 30 juin 2010 et 9 mars 2011 dessinent un assouplissement des conditions pour obtenir cette couleur de feu (passage de « toutes les conditions sont réunies pour atteindre les résultats escomptés dans les délais prévus » au critère « la réforme progresse au rythme prévu »).

Au demeurant, ni la prise en compte de critères d’avancement effectif et de résultats, ni une exigence accrue au fil du temps pour juger de l’avancement des mesures, ne semblent réellement justifier l’ensemble des modifications successives apportées aux significations des couleurs du système de feux tricolores.

L’impression que quelque chose « échappe » au lecteur est renforcée, par exemple, par l’assertion selon laquelle, aux termes du rapport accompagnant le CMPP du 30 juin 2010, « la couleur du feu est fonction d’une étude préalable approfondie de l’avancement des réformes selon des critères précis comme la structuration du projet, le respect du calendrier ou l’atteinte des résultats attendus » (59). Or le lecteur n’est pas en mesure de consulter ces critères qui ne sont pas publics, et donc d’en juger par lui-même.

Le constat est le même s’agissant des formules suivantes, communes aux rapports accompagnant les deux CMPP des 30 juin 2010 et 9 mars 2011 : « l’état d’avancement de chaque mesure est évalué sur la base d’objectifs et d’indicateurs précis » ; aucun de ces objectifs et indicateurs n’est en pratique accessible aux lecteurs. Il est ainsi difficile de vérifier, à tout le moins d’apprécier, le caractère transparent et rigoureux du suivi de la RGPP revendiqué par ces mêmes rapports.

b) Au-delà des feux tricolores, des commentaires souvent trop laconiques sur l’avancement des mesures

Si l’on parvient à contourner les difficultés portant sur l’ergonomie de la lecture des rapports publics sur la RGPP décrites supra, le laconisme et l’imprécision du suivi propre à certaines mesures laissent perplexe.

Ce constat peut être illustré par le cas d’une mesure décidée en avril 2008 consistant, parmi d’autres tendant à renforcer les dispositifs de pilotage de la politique de la ville, à procéder au « Réexamen du rôle de l’Établissement public d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (Épareca) dans les projets de rénovation urbaine ».

La rénovation urbaine, lancée en 2003, s’appuie sur des opérations de démolition, reconstruction, rénovation et résidentialisation des logements sociaux dans certains quartiers prioritaires de la politique de la ville, sur la base de projets portés notamment par les élus locaux concernés. L’opérateur principal de la rénovation urbaine est l’Agence nationale de la rénovation urbaine (Anru), qui aide à la préparation de ces projets et les finance en partie, notamment au titre des fonds qu’elle reçoit d’Action Logement (anciennement 1 % Logement) qui bénéficie de la collecte de la participation des employeurs à l’effort de construction assise sur la masse salariale des entreprises.

Dans ce contexte d’une politique publique de grande ampleur, douze milliards d’euros de subventions publiques étant programmés pour les travaux de rénovation urbaine sur environ quinze ans pour le financement de l’ensemble du Plan national de rénovation urbaine (PNRU), il était effectivement opportun de s’interroger sur le rôle de l’Épareca ; cet établissement public, créé antérieurement au lancement du PNRU, a vocation à mener des opérations de rénovation de centres commerciaux dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Sans se chevaucher avec l’objet des projets de rénovation urbaine portant sur le patrimoine des bailleurs sociaux, l’action de l’Épareca, dont le nombre et l’ampleur des réalisations sont relativement modestes, devait pouvoir s’inscrire dans les enjeux de la rénovation urbaine.

Le rapport d’étape de la RGPP du 3 décembre 2008 associe un feu rouge à la mesure concernant l’Épareca. Le feu rouge est maintenu dans le rapport d’étape du 13 mai 2009 ; il précise qu’« une étude sera produite avant l’été sur l’activité de l’Épareca, ses perspectives stratégiques par rapport à l’exercice de ses missions, ainsi que d’éventuelles propositions d’évolution ». Le rapport d’étape du 16 février 2010 associe ensuite un feu orange à la mesure ; aucune explication n’est fournie, ni pour justifier cette évolution, ni sur les travaux et réflexions en cours pour la mise en œuvre de la mesure. Puis dans le rapport associé au CMPP du 30 juin 2006, la mesure est considérée comme achevée, sans plus de précisions.

Les annexes au projet de loi de règlement des comptes, portant précisément, en application de l’article 122 de la loi de finances pour 2010, sur l’énumération et la présentation des impacts des mesures achevées de la RGPP, n’apportent aucun renseignement supplémentaire. Dans le rapport annuel de performance de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » pour l’année 2009, l’annexe ne mentionne pas l’achèvement de la mesure relative à l’Épareca.

On peut certes comprendre qu’une mesure encore difficilement mise en œuvre en février 2010 (feu orange) mais achevée en juin de la même année n’ait pas pu être intégrée parmi celles énumérés dans un document rendu public au cours de ce même mois de juin 2010. La mesure achevée concernant l’Épareca devait donc être logiquement analysée dans l’annexe au projet de loi de règlement des comptes 2010 (déposé à l’Assemblée nationale le 1er juin 2011). Or, cette annexe n’en fait pas mention, ce qui constitue d’ailleurs un manquement aux obligations du Gouvernement, définies par la loi, en matière d’information du Parlement.

Au total, s’agissant d’une mesure menée à son terme et qui consistait en un « réexamen », il apparaît impossible d’en connaître, même sommairement, le contenu ; a fortiori de prendre connaissance de la façon dont ce réexamen a pu impacter les missions et l’activité de l’Épareca dans le contexte de la rénovation urbaine.

Ces constats sont surprenants car les rapporteurs ont eu connaissance du fait qu’une mission de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) a recommandé, à la fin de l’année 2009, que le feu rouge associé à la mesure concernant l’Épareca dans les rapports d’étape des 3 décembre 2008 et 13 mai 2009 soit remplacé par un feu vert ; et ce, eu égard aux efforts, que la mission de l’Igas appelait à poursuivre, engagés par l’établissement public pour rendre cohérente son action avec celle de l’Anru.

Le réexamen du rôle de l’Épareca avait donc, à tout le moins, été engagé. Que l’avis de l’Igas n’ait pas été totalement suivi (la mesure passant, sans aucune explication publique au demeurant, en feu orange dans le rapport d’étape du 16 février 2010) n’empêchait en rien une information publique sur les options envisagées et, a fortiori, la présentation des arguments susceptibles de justifier que la mesure fût, à un moment donné, considérée comme achevée.

c) Les échanges administratifs en amont des CMPP, « boîte noire » de la RGPP ?

Il n’est pas rare que la couleur du feu associée à une mesure de la RGPP dans un rapport public constitue de facto la seule information publiquement disponible sur son avancement.

Cependant, même dans les cas où cette notation est accompagnée d’une explication rédigée, il est souvent difficile de comprendre précisément quel est concrètement son état d’avancement et quels sont ses éventuels impacts.

Les échanges administratifs qui précèdent les CMPP entre les ministères concernés et la DGME (qui a pour rôle de préparer la décision du CMPP pour l’attribution des couleurs de feu) semblent pourtant substantiels. Dans le cadre des investigations spécifiques menées par les rapporteurs sur les mesures concernant l’éducation nationale, le ministère a ainsi bien voulu transmettre aux rapporteurs un document de travail qu’il avait remis à la DGME le 23 décembre 2010 en amont et pour la préparation du CMPP du 9 mars 2011.

Ce document est composé, selon le ministère de l’Éducation nationale, « des fiches descriptives des mesures, établies selon le format-type de la DGME, et de compléments rédigés par les services déconcentrés du ministère ». Ainsi, on constate que la DGME demande à chaque ministère, via ce format-type de fiche, pour chaque mesure de la RGPP :

– le détail de la réforme, en précisant son périmètre et ses « mesures phares » ;

– les bénéfices attendus, le cas échéant en distinguant les bénéfices en qualité de service, les « gains » et les externalités ;

– les points qu’il est encore nécessaire de préciser et les propositions d’action pour la mise en œuvre ;

– les indicateurs à suivre pour constater l’avancement et les impacts de la mesure, ainsi que les conditions de sa réussite ;

– le calendrier de sa mise en œuvre ;

– le signalement d’un ou de « risques » associés à la mesure, en distinguant les enjeux budgétaire, de communication ou technique.

Au-delà de l’exercice qui consiste pour le ministère à fournir à la DGME, dans un format standard qu’elle a fixé, ces renseignements pour chacune des mesures de son portefeuille, sont associés à certaines fiches des développements du ministère, parfois très détaillés, sur la mise en œuvre des mesures correspondantes.

À titre d’exemple, la mesure « Permettre aux élèves handicapés de suivre une scolarité en milieu ordinaire » est détaillée dans un document de 8 pages recensant les actions réalisées, les moyens humains et financiers mobilisés au titre de la scolarisation des élèves handicapés, les actions de communication réalisées et un calendrier prévisionnel. Ce document, s’il n’indique pas la cible quantitative à atteindre s’agissant du nombre des élèves handicapés suivant une scolarité en milieu ordinaire, illustre de façon chiffrée que ce nombre a régulièrement augmenté entre 2006 et 2010.

Le rapport associé au CMPP du 9 mars 2011 relaie publiquement cette documentation riche par quatre à cinq lignes où est notamment mentionnée l’augmentation en 2010 du nombre des ETPT d’auxiliaires de vie scolaire, des classes pour l’inclusion scolaire (Clis) et des unités localisées pour l’inclusion scolaire (Ulis). C’est peu par rapport au document préparé par le ministère de l’Éducation nationale, et cependant meilleur au regard de la qualité et de la quantité des précisions que beaucoup d’autres mesures de la RGPP du même rapport.

Au total, on constate que ne sont pas rendues publiques des informations qui pourraient être utiles pour l’appréciation de l’avancement de la RGPP, pourtant existantes et ne semblant pas de nature confidentielle. Celles-ci sont traduites dans les rapports publics concernant la RGPP au mieux par quelques développements nécessairement réducteurs, toujours aménagés de façon positive, et par la notation par une couleur de feu. Plus généralement, les rapports publics officiels sur la RGPP se situent toujours « quelque part » entre l’analyse technique et la communication politique, au risque de n’être ni l’une ni l’autre de façon satisfaisante ; et de prêter le flanc à l’accusation d’être avant tout une communication que l’on aurait habillée d’un semblant d’analyse.

*

* *

Une seconde illustration de la difficulté d’apprécier l’état d’avancement d’une mesure à la simple lecture de la couleur du « feu » supposée la caractériser, peut s’appuyer sur l’une des mesures portées par le ministère de l’Éducation nationale.

Considérant ainsi le document du 23 décembre 2010 transmis par le ministère de l’Éducation nationale à la DGME, on note que le rapport du 9 mars 2011 associe un feu vert à la mesure « Optimiser l’organisation scolaire du premier degré (mise en place d’établissements publics d’enseignement notamment) » ; ce qui signifie qu’elle « progresse au rythme prévu » (cf. le tableau infra sur la signification du feu vert dans le rapport du 9 mars 2011). La lecture de la fiche rédigée par le ministère de l’Éducation nationale sur cette mesure laisse perplexe quant au bien-fondé de cette notation.

Cette fiche évoque une difficulté initiale, antérieure à la RGPP : « [l’article 86 de] la loi du 13 août 2004 [relative aux libertés et responsabilités locales] donne la possibilité d’expérimentation des EPEP [établissements publics d’enseignement primaire] pour une durée maximale de cinq ans. Le décret en Conseil d’État, devant déterminer les règles d’organisation et de fonctionnement des EPEP n’a pas été pris à ce jour. »

La mesure de la RGPP concernant les EPEP, décidée au printemps 2008, aurait pu s’appuyer sur la proposition de loi de M. Benoist Apparu, déposée à l’Assemblée nationale le 15 octobre 2008 et relative à la création des établissements publics d'enseignement primaire (60). Si la commission des Affaires culturelles et de l’éducation a nommé notre collègue M. Frédéric Reiss (61) rapporteur de cette proposition de loi, son examen par cette commission n’a pas eu lieu. Dans son rapport de mission remis au Premier ministre le 29 septembre 2010 (62) intitulé « Quelle direction pour l’école du XXIe siècle ? », M. Frédéric Reiss souhaitait toujours la mise en œuvre de l’expérimentation prévue par la loi du 13 août 2004.

Dans ce document du 23 décembre 2010, le ministère de l’Éducation nationale précise dans la fiche qu’il consacre à cette mesure que le rapport de M. Frédéric Reiss est « à l’étude et les pistes qui en seront dégagées constitueront les axes de cette mesure » qui concernait au printemps 2008 les seuls EPEP et qui a été élargie à la question d’ensemble de l’organisation scolaire dans le premier degré. Il apparaît que la mise à l’étude du rapport de mission de notre collègue précité ait suffi à justifier le passage d’un feu orange dans le rapport associé au CMPP du 30 juin 2010 à un feu vert dans le rapport associé au CMPP du 9 mars 2011. Sans mentionner les axes effectifs possibles de cette mesure, ce rapport se borne à préciser que « le rapport Reiss sur la gouvernance et l’organisation de l'école a été remis en septembre 2010 au ministre de l’Éducation Nationale. Il propose un pacte éducatif entre les services de l'État et les collectivités territoriales, dans lequel chaque école mettrait en œuvre un contrat éducatif porté par un directeur d’école mieux reconnu, et dont le projet pédagogique serait la clé de voûte. »

Le rapport de notre collègue Frédéric Reiss constitue certes une contribution importante dans la réflexion préparant la mise en œuvre éventuelle de cette mesure, mais au vu de son « histoire » déjà longue, le feu vert qui lui est associé semble à tout le moins optimiste. Il n’est pas certain au demeurant qu’un feu orange (« la réforme satisfait la plupart des exigences mais nécessite des actions correctrices ») aurait été plus adapté pour qualifier son avancement qu’un feu rouge (« La réforme connaît un retard important et doit faire l’objet d’actions correctrices à mettre en œuvre rapidement »).

d) Le suivi des impacts des mesures de la RGPP n’est pas assuré par les rapports publics sur la RGPP

Le document transmis le 23 décembre 2010 par le ministère de l’Éducation nationale à la DGME montre que la notation d’une mesure par l’attribution d’une couleur de feu juge avant tout le respect des jalons (définis ex ante) qui structure son avancement programmé.

Le libellé des significations associées aux couleurs des feux (cf. le tableau supra) illustrait au demeurant l’absence de prise en compte de l’évaluation des impacts des mesures de la RGPP. Les nouvelles attributions de la DGME en matière d’évaluation des politiques publiques (cf. supra) et le fait que le marché notifié en novembre 2010 dont elle assure la gestion prévoit la commande d’évaluations de politiques publiques justifierait de procéder ou faire procéder à de telles évaluations à l’avenir.

Ces questions sont fondamentales, désormais sans doute plus que la constatation du respect des jalons d’avancement des mesures encore en cours de la RGPP.

À titre d’exemple, les rapporteurs ont interrogé les rectorats sur les liens éventuels qu’ils observent ou établissent entre chacune des mesures de la RGPP (si tant est qu’elles s’y prêtent) et l’évolution des résultats scolaires des élèves. Ces résultats semblent globalement en amélioration, au vu des réponses des rectorats. Une académie note ainsi qu’entre 2009 et 2011 le pourcentage d’élèves de CE1 ne disposant pas des acquis suffisants en français est passé de 5,37 % à 4,41 % ; ce ratio est passé de 8,9 % à 6,6 % pour les mathématiques s’agissant des élèves de CM2. Une autre académie relève que la proportion d’élèves entrant en troisième avec au moins un an de retard est passé de 28 % à 26,7 % entre 2009 et 2010.

Les rectorats ne quantifient pas, bien entendu, l’impact de chaque mesure de la RGPP sur l’amélioration des résultats quand elle existe. Certains d’entre eux apparaissent néanmoins convaincus de l’influence positive de la démarche RGPP sur l’évolution de ces résultats. Un rectorat déclare ainsi que « les premiers résultats de ces réformes commencent à se faire sentir » sur le niveau scolaire des élèves. Un autre rectorat estime que l’on peut citer, au titre des mesures concourant à l’amélioration des résultats, l’aide personnalisée, les nouveaux programmes dans le primaire, les évaluations de CE1 et de CM2, ainsi que l’accompagnement éducatif.

La plupart des académies ont d’ailleurs l’intuition, sans pouvoir la vérifier quantitativement à ce stade, que si certaines mesures issues de la RGPP concourent à l’amélioration des résultats, il s’agit avant tout de l’aide personnalisée et de l’accompagnement éducatif. Un rectorat illustre ce constat en indiquant que « dans [une] perspective spéculative, on peut néanmoins supposer que compte tenu du déterminisme social très prégnant dans l’académie […] qui pèse sur les choix d’orientation et le niveau des élèves, les quelques progrès enregistrés peuvent avoir été soutenus par l’accompagnement éducatif en collège et personnalisé en écoles. »

Au demeurant, sans même évoquer les résultats scolaires, les académies reconnaissent beaucoup d’autres impacts positifs à ces deux dispositifs, qui permettraient selon un rectorat « une meilleure intégration des élèves dans leur établissement », « l’affirmation de leur personnalité par la culture, le sport » pour un autre ou des progrès en matière de comportement pour un troisième.

Ces éléments de témoignage montrent qu’un important travail d’évaluation des mesures de la RGPP, en cours et peut-être plus encore une fois achevées, reste à faire. Les administrations de l’État semblent disposer à apporter leurs concours à de tels travaux, qui doivent être bien entendu menés dans un souci d’objectivité qui nécessite que leur maître d’œuvre soit indépendant des administrations concernées, voire des promoteurs des mesures, et en prenant notamment en compte la question de l’efficience des mesures étudiées.

e) le passeport biométrique et le certificat d’immatriculation des véhicules (CIV) : une vérité « à rebours » des éléments officiels de présentation ?

Selon les termes du rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011, un feu rouge et un feu orange sont respectivement associés aux mesures « Faciliter et sécuriser la délivrance du passeport et de la carte nationale d’identité [CNIe] » et « Faciliter et sécuriser la délivrance des certificats d’immatriculation pour les citoyens ».

Dans le contexte de l’étude annexée, réalisée à la demande du CEC concernant ces deux mesures, la DGME a retracé l’évolution des notations associées à chacune de ces deux mesures. La DGME précise ainsi aux rapporteurs que « la mesure sur le passeport biométrique et la CNIe a porté un feu orange, du premier au quatrième rapport, puis rouge dans le cinquième rapport. Alors que le projet de passeport biométrique suivait son cours conformément aux jalons initialement prévus (déploiement à compter d’octobre 2008 et généralisation en juin 2009), le projet de CNIe était à plusieurs reprises retardé (déploiement initialement prévu en décembre 2009 et aujourd’hui à l’automne 2012). Les feux orange des quatre premiers rapports caractérisaient une moyenne entre les deux projets, passeport biométrie et CNIe. Le feu rouge du cinquième caractérisait le seul retard du projet CNIe, le volet sur le passeport biométrique étant considéré comme achevé. »

On observe que le rapport du 9 mars 2011 n’évoque pas le fait que le feu rouge concerne uniquement la partie CNIe de la mesure. Pour éviter de « lester » sa partie concernant le passeport biométrique d’une appréciation portant uniquement sur sa partie CNIe, le rapport de l’étude commandée par le CEC indique qu’« une identification spécifique de la réforme concernant le passeport biométrique semblerait nécessaire afin d’identifier la réussite qui la caractérise. »

Il ajoute qu’« en tout état de cause, le suivi des mandats de réforme par la DGME apparaît avant tout sous un angle “ gestion de projet / suivi d’avancement de jalon ”, indépendamment d’une mesure de la performance et d’une appréciation des gains générés. »

Le commentaire de la DGME quant au feu vert associé au déploiement de la mesure portant sur le CIV confirme que le critère de jugement du Gouvernement relève du respect des jalons d’avancement ; elle indique ainsi que « la couleur du feu de la mesure sur le SIV est restée verte, du deuxième (première apparition de la mesure dans un rapport) au cinquième rapport. Le SIV est entré en production le 15 avril 2009, soit un mois avant la sortie du deuxième rapport, et n’a cessé de se développer depuis. »

Le rapport du cabinet Ernst and Young considère que le feu vert associé à la mesure concernant le CIV « ne permet pas de qualifier les critères précis du déploiement de la réforme, comme la structuration du projet, le respect du calendrier ou l’attente des objectifs attendus en termes de gains d’efficience et de sécurisation du titre ». Le rapport a en effet identifié plusieurs difficultés dont la couleur du feu vert, maintenu dans chaque rapport public sur la RGPP, n’a pas rendu compte et qu’aucun rapport public n’a jamais évoquées. Parmi ces difficultés, non négligeables, relevées par le rapport remis au CEC, on peut citer le fait que :

– « le déploiement du nouveau système de délivrance des certificats d’immatriculation s’est heurté à plusieurs difficultés, notamment techniques […] ayant conduit à des allongements spectaculaires des délais voire à des fermetures des préfectures [à la fin de l’année 2009] » ;

– « les économies réalisées par l’État, notamment les gains d’ETP, n’atteignent pas la cible escomptée et sont relativement faibles par rapport au surcoût supporté par l’usager » ;

– « [le] système de contrôle, réduit par rapport aux enjeux, peut laisser craindre un renforcement de la fraude documentaire. »

Ces éléments doivent bien entendu être appréciés relativement à d’autres, plus favorables, parmi lesquels il est important de relever une satisfaction des usagers et des professionnels de l’automobile impliqués dans le nouveau dispositif, aux termes de l’enquête menée par la société Ipsos dans le cadre de l’étude demandée par le CEC.

Au total, les rapporteurs estiment que cette étude illustre l’insuffisance des informations présentées par les rapports publics officiels relatifs à la RGPP, jusqu’à « dépeindre » une situation dans des termes qui semblent ne pas refléter la réalité.

III.– LA RGPP ET LES AGENTS PUBLICS

A.– LA MÉTHODOLOGIE DE LA RGPP À L’ÉGARD DES PERSONNELS DE LA FONCTION PUBLIQUE D’ÉTAT

1.- La RGPP conçue comme condition du succès de la mise en œuvre de la « règle du un sur deux »

La règle du non remplacement d’un fonctionnaire de l’État sur deux partant à la retraite était, dès le lancement de la RGPP, considérée comme une donnée exogène, qui s’imposait à cette révision : il s’agissait d’un choix politique que la RGPP devait intégrer et dont, au surplus, elle devait permettre l’efficience.

Le Premier ministre précisait ainsi, dans son discours du 10 juillet 2007, que « le non-remplacement sans réforme des structures, ce serait une erreur. Mais le non-remplacement, accompagné d’une refonte de notre organisation et de nos méthodes de travail à tous les niveaux, ce sera un succès. […] Si nous nous bornons à remplacer un fonctionnaire sur deux comme nous l'avons promis, si nous nous bornons à une réforme comptable et arithmétique sans voir au-delà, nous risquons de désorganiser nos services publics et accroître le mal-être de nos fonctionnaires. »

2.– La RGPP conçue comme vecteur de valorisation du travail par le retour catégoriel et l’accroissement de l’intérêt des tâches

Dans le rapport rendu public à l’occasion du CMPP du 12 décembre 2007, il est précisé qu’en plus de l’amélioration du service rendu aux usagers et de la perspective d’économies budgétaires, la RGPP a pour objectif « une meilleure valorisation du travail des fonctionnaires […] en adaptant la nature de leurs tâches à l’évolution des besoins des citoyens et en payant mieux des fonctionnaires moins nombreux ». La valorisation devait donc être double, portant à la fois sur l’intérêt des tâches confiées aux agents publics et sur leur rémunération en contrepartie d’une baisse des effectifs.

Du point de vue du relèvement des rémunérations, le Premier ministre avait, dès le 10 juillet 2007, indiqué souhaiter que les fonctionnaires bénéficient d’« un partage équitable des gains de productivité. Ils seront gagnants en termes financiers au travers du retour à leur profit de 50 % des économies d'emplois qui seront réalisées ». Cette disposition de politique salariale par retour catégoriel de la moitié des économies issues de la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » constituait ainsi la contrepartie de l’effort double que la RGPP impliquait pour les fonctionnaires, à savoir travailler : a) dans un environnement administratif modifié, voire bouleversé, par les mesures de la RGPP, b) dans un cadre général de baisse des effectifs.

3.- L’accompagnement des changements induits par la RGPP

Le rapport du 12 décembre 2007 évoque quatre axes de simplification de « la vie des agents et [du] fonctionnement des administrations en matière de gestion des ressources humaines », afin de mettre les fonctionnaires en situation à la fois d’absorber la baisse des effectifs et la mise en œuvre des mesures de réorganisation administrative de la RGPP. Il s’agissait « grâce à des mesures incitatives, [de créer] un droit effectif à la mobilité », de mieux les accompagner « dans le déroulement de leur parcours professionnel », de les « [rémunérer] à la performance et [les intéresser] aux gains de productivité » et de promouvoir une « fonction publique […] plus ouverte et plus diverse ».

Ces quatre axes sont repris et détaillées dans le même rapport au travers de trois catégories de mesures :

« – dynamiser les parcours professionnels et créer, pour chaque fonctionnaire, un droit effectif à la mobilité : impossibilité pour l’administration de s’opposer au départ d’un agent vers un autre emploi (sous réserve d’un préavis), suppression des entraves liées au statut du fonctionnaire pour exercer des missions de niveau comparable, mise en place de primes encourageant la mobilité ou accompagnant la réorganisation des services, création d’une indemnité de départ volontaire ;

« – développer la culture du résultat au sein de l’administration et le suivi individualisé des agents : substitution progressive d’un entretien d’évaluation à la notation, extension aux cadres de la rémunération en fonction des résultats, mise en place d’entretiens et de bilans de carrière, généralisation des cellules de conseil en carrière ;

« – ouvrir et diversifier le recrutement dans la fonction publique : professionnalisation du contenu des concours dès 2008, accroissement des échanges public-privé (possibilité de mise à disposition de salariés du privé dans l’administration), suppression des limites d’âge subsistant encore pour l’accès à la fonction publique, suppression des barrières liées aux critères physiques, mise en place d’un plan en faveur de la diversité des effectifs dans toutes les écoles de la fonction publique. »

On note aussi, toujours dans le même rapport du 12 décembre 2007, une référence au secteur privé comme inspiration des réformes à mener dans la fonction publique de l’État : « l’État partage avec les entreprises des exigences d’efficacité et de qualité de la gestion. Il doit apprendre de leur expérience, notamment dans la modernisation de la [gestion des ressources humaines] et des procédures internes. Celles-ci sont encore trop largement marquées par une culture procédurale, reflétant une défiance envers les managers publics et préjudiciable à l’efficacité de la gestion. »

Le rapport accompagnant le CMPP du 4 avril 2008 synthétisait l'ensemble de ces éléments en annonçant un texte législatif pour les mettre en œuvre. Il était précisé que ce CMPP avait décidé de « veiller à ce que chaque fonctionnaire réalise le travail le plus utile pour la collectivité et le plus valorisant, dans le respect des valeurs du service public. C’est grâce à ces réformes que l’objectif de réduction des effectifs de fonctionnaires de l’État annoncé par le président de la République lors de sa campagne sera tenu non seulement en préservant la qualité de service, mais en l’améliorant. Ces réformes […] seront rendues possibles par l’adoption d’outils favorisant la mobilité des fonctionnaires qui seront prochainement proposés au Parlement. »

Les rapporteurs préciseront ci-après le contenu de la loi du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique, qui a constitué le point d’arrivée de l’initiative législative ainsi annoncée.

B.– LA LOI N° 2009-972 DU 3 AOÛT 2009, OUTIL D’ACCOMPAGNEMENT DE LA RGPP

1.- Un projet de loi adopté dans des délais moins rapides qu’envisagés

Le projet de loi du Gouvernement relatif à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique, déposé le 9 avril 2008 – moins d’une semaine après le CMPP du 4 avril 2008 – avait vocation à traiter dans des délais rapides au moins certaines des questions identifiées dans les rapports cités supra en matière de droit de la fonction publique, notamment la création d’un droit à la mobilité et l’accompagnement dans les parcours professionnels. Le Gouvernement a déclaré l’urgence sur ce projet de loi concomitamment à son dépôt.

Adopté par le Sénat dès le 29 avril 2008, le projet de loi a été adopté par la commission des Lois de l’Assemblée nationale le 3 juin 2008, pour un examen en séance publique programmé le 11 juin 2008. L’examen du projet de loi a finalement été inscrit plus d’un an plus tard à l’ordre du jour de la séance publique de l’Assemblée nationale les 2 et 7 juillet 2009. En conséquence, la commission des Lois de l’Assemblée nationale a procédé le 17 juin 2009 à un second examen du texte, cette fois dans les conditions constitutionnelles nouvelles qui impliquaient ensuite l’examen par l’Assemblée nationale du texte de la commission des Lois.

La commission mixte paritaire (CMP) ayant conclu le 8 juillet 2009 à un texte commun entre l’Assemblée nationale et le Sénat sur les dispositions restant en discussion, puis les assemblées parlementaires ayant adopté ce texte dans les mêmes termes le 23 juillet 2009, la loi a été promulguée le 3 août 2009, soit près de deux ans après le lancement de la RGPP.

2.- La loi porte de nombreuses mesures qui ne modifient pas les fondements du droit de la fonction publique

Les dispositions, modestes dans l’ensemble et parfois très techniques, de la loi du 3 août 2009 apportent quelques modifications et aménagements au droit de la fonction publique, sans le bouleverser.

Les développements ci-après précisent certaines de ces dispositions, parmi les plus susceptibles d’avoir été utiles dans le cadre des modifications des organisations administratives prévues par les mesures de la RGPP.

a) Les dispositions relatives aux conditions de la mobilité

Le chapitre Ier de la loi du 3 août 2009 concerne le développement de la mobilité des fonctionnaires de l’État. Parmi les dispositions qui le composent, est ainsi notamment prévu, par la modification de l’article 13 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, le principe selon lequel « tous les corps et cadres d'emplois sont accessibles aux fonctionnaires civils […] par la voie du détachement suivi, le cas échéant, d'une intégration, ou par la voie de l'intégration directe […] le détachement ou l'intégration directe s'effectuant entre corps et cadres d'emplois appartenant à la même catégorie et de niveau comparable, apprécié au regard des conditions de recrutement ou de la nature des missions ». Au demeurant, la loi du 3 août 2009 a prévu que tout détachement autorisé au-delà de cinq ans donne lieu à une proposition d’intégration dans le corps ou cadre d’emploi de destination.

Le principe de l’accessibilité par voie de détachement ou d’intégration aux corps et cadres d’emplois civils est étendu aux militaires. Inversement, les fonctionnaires civils ont accès, dans les mêmes conditions, aux corps militaires.

La loi du 3 août 2009 prévoit en outre que seules les nécessités du service, appréciées le cas échéant par le juge administratif, constituent des motifs valables pour l’administration pour s’opposer au souhait d’un agent public d’être détaché, mis en disponibilité ou placé en position hors cadres dans un service, une administration ou un organisme public ou privé souhaitant bénéficier des services de cet agent au titre d’une de ces positions statutaires.

La même loi prévoit par ailleurs, parmi plusieurs dispositions relatives au reclassement des fonctionnaires sans emploi, des garanties financières pour les fonctionnaires de l’État affectés à un nouveau poste dans une des fonctions publiques suite à la restructuration d'une administration de l'État ou de l’un de ses établissements publics administratifs (création d’une indemnité d’accompagnement à la mobilité). Dans le cas d’une telle restructuration, le fonctionnaire peut être placé en situation de « réorientation professionnelle », au titre de laquelle il peut bénéficier de certaines prestations individualisées de suivi de sa situation jusqu’à ce qu’il soit affecté dans un nouvel emploi.

La loi du 3 août 2009 prévoit, enfin, des expérimentations permettant à un fonctionnaire de cumuler plusieurs emplois à temps partiel dans des fonctions publiques différentes.

b) Les dispositions relatives au recrutement, à l’appréciation de la performance, aux rémunérations

Le chapitre II de la loi du 3 août 2009 est relatif au recrutement dans la fonction publique. Il prévoit, entre autres, des facultés nouvelles, soumises à conditions, de recrutement d’agents non titulaires dans la fonction publique d’État en remplacement d’agents titulaires et de recours aux entreprises d’intérim dans les fonctions publiques. Est par ailleurs précisé le sort des contrats de droit public des agents non titulaires d’un organisme de droit public selon que son activité est reprise par un organisme de droit public ou privé.

Le chapitre III de la loi du 3 août 2009 contient diverses dispositions de simplification, parmi lesquelles :

– la faculté de gérer le dossier d’un fonctionnaire sur support électronique ;

– les modalités de l’expérimentation tendant à la faculté d’appréciation par les administrations de la valeur professionnelle d’un fonctionnaire suite à un entretien professionnel (et non plus en fonction d’une note) afin de statuer sur les avancements d’échelon et de grade ;

– l’élargissement des facultés de cumul d’un emploi public à temps partiel et d’une activité associative ou privée lucrative ;

– la création d’une indemnité dite de garantie individuelle du pouvoir d’achat (Gipa) au bénéfice des fonctionnaires et de certains agents publics, lorsque leur traitement indiciaire brut a progressé moins vite que l'inflation ;

– les conditions de la mise à disposition des agents publics servant au titre d’une activité du ministère de la Défense confiée par contrat à une personne privée.

c) Des dispositions à la hauteur des enjeux ? L’exemple de la question de la mobilité

Il est difficile de déterminer dans quelle mesure les facultés ouvertes par la loi du 3 août 2009 en matière de mobilité, de recrutement et de cumul d’emplois ont été utilisés par les agents publics et par l’administration de l’État.

À cet égard, M. Michel Moreau, président de la Confédération française des travailleurs chrétiens des fonctionnaires et agents de l’État (CFTC), au cours de la table ronde du 27 septembre 2011 réunissant les organisations syndicales représentatives de la fonction publique à l’invitation des rapporteurs, a porté une appréciation plutôt positive sur cette loi, tout en notant que la RGPP avait parallèlement accru les besoins en matière de mobilité professionnelle : « S’agissant de la gestion des carrières, la RGPP a plutôt complexifié les parcours professionnels avec pour conséquence de moindres mobilités fonctionnelles ou hiérarchiques compte tenu de la réduction des effectifs – en tout cas, mobilités fonctionnelles et/ou géographiques sont moins choisies que subies, même si la loi relative à la mobilité et aux parcours professionnels comporte des éléments positifs en permettant aux agents de construire des parcours professionnels valorisants. »

Lors de la même table ronde, M. Bernard Van Craeynest, président de la Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC) a considéré que le traitement de la question de la mobilité nécessitait des réformes d’une autre envergure que celles de la loi du 3 août 2009 : « si nous voulons encourager la mobilité entre les fonctions publiques, il faut se diriger, […] vers la constitution d’une vraie fonction publique de métiers, une et indivisible, qui seule favorisera la lisibilité et la cohérence dans la gestion des carrières. »

Pour sa part, M. Emmanuel Paillusson, secrétaire général de Solidaires Concurrence, consommation, répression des fraudes (Solidaires CCRF), a émis une opinion analogue en la reliant à la question de la formation initiale, en précisant qu’« il n’existe pas trois fonctions publiques mais une seule qui se décline en trois pans. De plus en plus de concours sont d’ailleurs aujourd’hui ouverts à l’ensemble des agents, et c’est heureux. Néanmoins, tout le monde n’est pas capable de tout faire, si séduisante que soit cette idée, même si certains métiers peuvent être exercés dans plusieurs administrations, services ou ministères. Toutefois, pour que les personnels puissent effectivement emprunter les passerelles offertes et profiter de la mobilité, ils doivent bénéficier d’une formation initiale et continue de haut niveau. »

d) Une loi accompagnée et suivie d’autres dispositions qui en partagent l’esprit notamment en matière de mobilité

En amont de l’entrée en vigueur de la loi du 3 août 2009, quatre décrets du 17 avril 2008 ont constitué, selon les termes du Gouvernement, une « boîte à outil indemnitaire » d’accompagnement à la mobilité. Leurs principales dispositions sont les suivantes :

– le décret n° 2008-366 institue une prime de restructuration de service et une allocation d'aide à la mobilité du conjoint : la prime concerne l’agent muté ou déplacé dans le cadre d’une restructuration. D’un montant maximum de 15 000 euros, elle peut être complétée par une allocation d’aide à la mobilité du conjoint ou du partenaire d’un pacte civil de solidarité, d’un montant forfaitaire de 6 100 euros, cette allocation visant à indemniser la cessation d’activité professionnelle du conjoint du fonctionnaire ;

– le décret n° 2008-367 institue un complément indemnitaire en faveur de certains fonctionnaires de l'État à l'occasion d'opérations de restructuration : ce complément concerne les fonctionnaires de l’État qui, à l’occasion d’opérations de restructuration, réintègrent leurs corps d’origine à l’issue de l’occupation, pendant au moins quatre ans, d’emplois à la décision du Gouvernement ou d’emplois à responsabilités particulières relevant de statuts d’emploi. Le complément indemnitaire, versé de façon dégressive sur une durée maximale de deux ans, a pour objectif de compenser, en partie, la perte de rémunération qui peut résulter de la réintégration ;

– le décret n° 2008-368 institue une indemnité de départ volontaire : cette indemnité peut être attribuée aux agents de l’État titulaires et non titulaires de droit public recrutés pour une durée indéterminée, quittant définitivement l’administration à la suite d’une démission régulièrement acceptée. Le montant de l’indemnité de départ volontaire est fixé individuellement par référence à la rémunération de l’agent, et ne peut excéder une somme équivalente à 24 mois de la rémunération annuelle brute perçue par l’agent au cours de l’année civile précédant celle du dépôt de la demande de démission ;

– le décret n° 2008-369 créé une indemnité temporaire de mobilité : cette indemnité, d’un montant maximum de 10 000 euros, peut être versée aux agents de l’État titulaires et non titulaires de droit public recrutés pour une durée indéterminée, qui acceptent une mobilité sur un poste pour lequel existe une difficulté particulière de recrutement.

Toujours dans l’optique de faciliter la mobilité des agents, les plates-formes régionales d’appui interministériel à la gestion des ressources humaines, créés par le décret n° 2009-587 du 25 mai 2009 et dont la DGAFP assure l’animation du réseau qui les rassemble, ont pour objet de contribuer à la mise en œuvre de certaines des mesures que la loi du 3 août 2009 prévoit. Ces plates-formes, instituées dans chaque région depuis le 1er janvier 2010, sont constituées d’un responsable – directeur – , de trois conseillers (en a) formation, b) action sociale et c) gestion prévisionnelle, mobilité et carrière) et d’un assistant ou webmestre ; elles sont placées auprès du secrétaire général pour les affaires régionales (SGAR).

Ces plates-formes ont, entre autres, pour mission, dans une optique régionale et interministérielle :

– de centraliser et de présenter au niveau régional l’offre de formation en direction des agents publics ;

– de recenser l’ensemble des métiers et compétences disponibles dans les services déconcentrés, en précisant les effectifs disponibles correspondants ;

– d’animer les réseaux régionaux de conseillers en mobilité et carrière ;

– de gérer une bourse régionale interministérielle de l’emploi public (BRIEP).

D’autres outils permettant aux agents publics d’envisager leur mobilité en s’appuyant sur la connaissance et la valorisation de leurs métiers et compétences ont été développés. Le répertoire interministériel des métiers (RIME) a fait l’objet d’une récente actualisation et comprend désormais 261 emplois répartis en 26 domaines fonctionnels. Selon le Gouvernement, un projet supplémentaire « en cours de réalisation, est de mettre en corrélation les nomenclatures des répertoires [des 3 fonctions publiques] pour avoir une visibilité des métiers identiques ou proches dans les 3 fonctions publiques et faciliter ainsi les mobilités au sein de la fonction publique. »

En outre, selon le rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011, « un dictionnaire interministériel des compétences de l’État sera prochainement disponible. Construit à partir des indications mentionnées dans le répertoire, il définit les compétences en trois catégories : les connaissances (30 rubriques), les savoir-faire (210) et les savoir-être (20). Le dictionnaire sera accompagné d’un outil d’exploitation permettant de repérer les proximités d’emplois et de procéder à des recherches, soit par l’entrée de la compétence, soit par l’entrée de l’emploi-référence du RIME. »

Ces efforts informatifs pour ouvrir, y compris dans les esprits, les perspectives de mobilité complètent les dispositions tendant à fusionner des corps de fonctionnaires, qui élargissent en principe les facultés de mobilité au sein d’un même corps. Le rapport du 9 mars 2011 précise que « les passerelles au sein de la fonction publique continuent à s’étendre. Pour cela, un nouveau programme de fusion des corps a été mis en place pour en réduire le nombre de 150 de 2010 à 2015 (passant ainsi de 380 à environ 230 corps). Au total, 292 corps auront été fusionnés entre 2007 et 2011 (en 2005, on en comptait encore 685). »

C.– LA RGPP SEMBLE MAINTENANT S’ACCOMPAGNER D’UN DIALOGUE SOCIAL PLUS INTERMINISTÉRIEL

Pour le ministère chargé du budget, interrogé par les rapporteurs au titre de l’autorité qu’il exerce sur l’équipe interministériel d’appui de la RGPP (63), « sur le plan de la méthode, l’accompagnement RH de la RGPP a donné lieu à une répartition des rôles entre le SGG qui assure le pilotage du dialogue social et la DGAFP qui assure l’animation du travail interministériel de convergence et d’harmonisation des processus RH. »

Le SGG est plus précisément intervenu dans le cadre de l’accompagnement de la Réate ; ainsi, la mise en place des directions départementales interministérielles (DDI) a conduit le Gouvernement à engager des travaux de convergence et d’harmonisation des modalités de gestion des ressources humaines des personnels concernés.

Ces travaux ont conduit à la circulaire n° 5436/SG du 5 janvier 2010 du Premier ministre qui porte une charte de gestion des DDI (créées le 1er janvier 2010 dans le cadre de la Réate). Le Premier ministre y précise que la charte de gestion a pour objet de :

– donner aux préfets, aux directeurs des DDI et aux agents « une visibilité globale sur les règles qui seront applicables en matière de gestion des ressources humaines » ;

– concilier le fonctionnement des nouvelles directions « avec une gestion statutaire qui continue à relever des départements ministériels » ;

– « identifier les actes de gestion pour lesquels un travail d’harmonisation est engagé à compter de 2010 ou le sera à plus long terme ».

Le Premier ministre évoque dans la circulaire du 5 janvier 2010 les conditions de la création de directions interministérielles déconcentrées rassemblant des agents relevant de nombreux ministères en précisant que « l’harmonisation des règles applicables au niveau territorial doit rester compatible, pour chaque ministère, avec ses processus de gestion pour l’ensemble des agents relevant des mêmes corps que ceux affectés dans les directions départementales interministérielles. »

La charte de gestion portée par la circulaire du Premier ministre du 5 janvier 2010 « résume » la situation qu’il s’agit de traiter par les éléments suivants : sans modifications statutaires pour les agents et sans modifications des programmes budgétaires, « compte tenu de la complexité inhérente au périmètre couvert (plus de 50 000 agents relevant de cinq ministères et d’environ 70 corps), qui nécessite une attention particulière quant à l’accompagnement des personnels et de formation des gestionnaires, la gestion des DDI doit, pour être exemplaire, reposer sur trois grands principes :

« 1. Une répartition précise des responsabilités ;

« 2. Une coordination pérenne des ministères sous l’autorité du Premier ministre ;

« 3. Un dialogue social à tous les niveaux avec les organisations syndicales. »

Sur cette base, des travaux pilotés par le SGG et animés par la DGAFP, ont porté depuis, selon les informations transmises aux rapporteurs, sur :

– le dialogue social, les comités techniques paritaires des DDI ayant été élus le 19 octobre 2010 ;

– le temps de travail, s’agissant de son organisation et des astreintes ;

– l’harmonisation des cycles d’évaluation, de mutation et de promotion ;

– la doctrine de publication des postes sur la bourse interministérielle de l’emploi public (BIEP) et les bourses régionales (BRIEP) ;

– l’action sociale, par l’« identification de la gamme des prestations ministérielles applicables à chaque catégorie d’agents des DDI [et via des] propositions de rapprochement des textes et des processus relatifs aux prestations d’action sociale en matière de restauration collective et de séjours d’enfants. »

Les projets de texte qui portent sur ces sujets ont vocation à être examinés en comité technique paritaire des DDI, placé auprès du Premier ministre, et dont la première réunion a eu lieu le 3 février 2011.

Les rapporteurs notent qu’à l’instar de la DGME (cf. supra), la DGAFP est amenée, dans le prolongement de la RGPP et plus particulièrement de la Réate, à se placer « au service » du SGG ; ce qui conforte la légitimité de la question du positionnement administratif et institutionnel optimal, pour l’avenir, des administrations qui portent la réforme de l’État.

Ce point a d’ailleurs été évoqué par M. Patrick Hallinger, secrétaire national à l’Union générale des fédérations de fonctionnaires de la Confédération générale du travail (UGFF-CGT), lors de la table ronde organisée par les rapporteurs le 27 septembre 2011 ; il notait « que le Secrétariat général du Gouvernement, qui joue un rôle important dans la cohérences des politiques interministérielles, la DGAFP et la DGME interviennent sur les mêmes thèmes. S’agissant plus précisément des missions et des emplois, le Secrétariat général du Gouvernement accomplit un travail positif avec les organisations présentes au sein du Comité technique paritaire (CTP) central ». Ce constat conduit au demeurant M. Patrick Hallinger, à l’instar des rapporteurs (cf. supra), à s’interroger sur l’organisation institutionnelle et administrative de la réforme de l’État en ces termes : « La direction générale de la modernisation de l’État (DGME), elle aussi dépendante de Bercy, ne devrait-elle pas […] être rattachée directement aux services du Premier ministre ? »

D.– RÉALITÉS ET PERSPECTIVES DE LA RÉMUNÉRATION AU MÉRITE

La rémunération au mérite a constitué, au lancement de la RGPP, l’un des axes d’accompagnement et d’implication des agents publics au regard de sa mise en œuvre. L’article 38 de la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique a inséré à l’article 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires une disposition prévoyant que « les indemnités peuvent tenir compte des fonctions et des résultats professionnels des agents ainsi que de la performance collective des services. »

La création de la prime de fonctions et de résultats (PFR), d’ailleurs antérieure à la loi du 5 juillet 2010, et celle de la prime d’intéressement à la performance collective constituent à ce jour les principales déclinaisons de cette orientation.

1.- L’instauration de la prime de fonctions et de résultats (PFR)

La PFR a en premier lieu été instituée par le décret n° 2008-1533 du 22 décembre 2008 en faveur « des fonctionnaires appartenant à des corps de la filière administrative ou détachés sur un emploi fonctionnel de cette filière » (cf. l’article 1er du décret du 22 décembre 2008). La « filière administrative » correspond aux métiers les plus classiques de la fonction publique de l’État, exercés notamment par les adjoints et secrétaires administratifs, ainsi que par les attachés d’administration (64). L’article 2 du même décret prévoit que la PFR comprend deux parts :

– une part « fonctionnelle », « tenant compte des responsabilités, du niveau d’expertise et des sujétions spéciales liées aux fonctions exercées ». Au regard d’un montant annuel de référence (65), cette part fonctionnelle peut varier dans un rapport de 1 à 6 ;

– une part « tenant compte des résultats de la procédure d’évaluation individuelle par la réglementation en vigueur et de la manière de servir ». Au regard d’un montant annuel de référence (66), cette part « au mérite » peut varier dans un rapport de 0 à 6.

Le décret n° 2009-1211 du 9 octobre 2009 institue, à compter du 1er janvier 2010, la faculté d’instaurer la PFR pour les emplois a) de chefs de service, directeurs adjoints et sous-directeurs des administrations centrales de l’État, et b) d’experts de haut niveau et de directeurs de projets des administrations de l’État et de ses établissements publics.

Les « bornes » entre lesquelles les parts fonctionnelle et « au mérite » peuvent varier sont les mêmes que celles fixées par le décret du 22 décembre 2008. La principale adaptation du décret du 9 octobre 2009 par rapport à celui du 22 décembre 2008 est la substitution, pour définir la part « au mérite » de la PFR, de la « réalisation des objectifs quantitatifs et qualitatifs » aux « résultats de la procédure d’évaluation individuelle par la réglementation en vigueur ».

Le décret du 9 octobre 2009 prévoit, pour les agents qu’il vise, une procédure de consultation d’un comité d’attribution de la PFR pour la fixation du montant de prime versé à chaque agent. Ce comité, dont la composition est définie par arrêté du ministre intéressé, comprend de droit le secrétaire général de ce ministère, ainsi que le directeur d’administration centrale ou le chef de service de l’agent concerné.

Le comité est consulté par ce directeur d’administration centrale ou ce chef de service (lui-même membre du comité) sur le montant qu’il est envisagé de verser à l’agent au titre de chacune des deux parts fonctionnelle et « au mérite ». L’article 6 du décret du 9 octobre 2009 précise qu’« en particulier, le comité d'attribution de la prime de fonctions et de résultats rend un avis sur la manière dont chaque fonctionnaire a atteint les objectifs qui lui ont été assignés et propose le montant de l'indemnité qui lui paraît correspondre à cette évaluation. »

Le décret n° 2010-258 du 12 mars 2010 instaure la PFR, à compter du 1er janvier 2010, en faveur des fonctionnaires nommés dans un emploi de direction de l’administration territoriale de l’État. Il s’agit, aux termes de l’article 1er de ce décret, des « fonctionnaires occupant un emploi de directeur régional, de directeur régional adjoint, de secrétaire général pour les affaires régionales, d'adjoint au secrétaire général pour les affaires régionales, de directeur départemental et de directeur départemental adjoint. »

Les écarts possibles de variation des parts fonctionnelle (de 1 à 6) et « au mérite » (0 à 6) sont les mêmes que dans les deux décrets précédents. Selon l’article 2 du décret du 12 mars 2010, cette seconde part tient « compte des résultats obtenus au regard de la réalisation des objectifs quantitatifs et qualitatifs fixés annuellement ainsi que de la manière de servir. »

L’article 7 du décret du 12 mars 2010 précise qu’« il est institué auprès du secrétaire général du Gouvernement un comité d'harmonisation de la prime de fonctions et de résultats des emplois de direction de l'administration territoriale de l'État », qui se réunit au moins une fois par an et dont la composition est fixée par arrêté du Premier ministre. Ce comité émet un avis préalable :

– sur la détermination des parts fonctionnelles « la première année de la mise en œuvre de la prime de fonctions et de résultats et, en tant que de besoin, les années suivantes » ;

– « sur la cohérence des montants susceptibles d'être attribués pour la part tenant compte des résultats […] ; à cet effet, le comité examine pour chaque type d'emploi […] la répartition et les niveaux des montants servis, ainsi que leur évolution dans le temps ; il peut examiner des situations individuelles. »

Le décret n° 2010-1206 du 12 octobre 2010 instaure la PFR pour les membres des corps des inspections générales de l’administration et des affaires sociales, ainsi que pour les agents détachés pour exercer les fonctions d’inspection correspondantes.

Les écarts de variation de chacune des deux parts sont les mêmes que dans les décrets évoqués ci-dessus. L’article 2 du décret du 12 octobre 2010 précise que :

– la part fonctionnelle tient « compte des responsabilités, de l'expérience, du niveau d'expertise et des sujétions liées aux fonctions exercées » ;

– la part « au mérite » tient « compte des résultats de la procédure d'évaluation individuelle prévue par la réglementation en vigueur ainsi que de la manière de servir », à l’instar du décret du 22 décembre 2008 pour les fonctionnaires de l’État de la filière administrative.

Selon le rapport associé au CMPP du 9 mars 2011, la PFR devait ainsi concerner « près de 150 000 agents fin 2011 », contre 54 500 agents au 1er janvier de la même année.

2.- L’instauration d’une prime d’intéressement collective

Le décret n° 2011-1038 du 29 août 2011 prévoit un cadre d’instauration de primes d’intéressement à la performance collective des services dans les administrations de l’État, ses établissements publics, ainsi que dans les juridictions.

Selon l’article 2 de ce décret, « le ministre intéressé […] définit, par arrêté, pour les services de son administration et pour ceux des établissements publics placés sous sa tutelle, les différents dispositifs d'intéressement à la performance collective, et il détermine les services auxquels s'appliquent ces dispositifs ». Le même article précise que définir un dispositif d’intéressement à la performance collective signifie, pour le ministre intéressé, lui assigner « des objectifs, des indicateurs et des résultats à atteindre sur une période de douze mois consécutifs […] des modalités de certification des résultats obtenus [et] des modalités d'attribution de la prime. »

La publication récente du décret, l’exigence de cette période de douze mois au terme de laquelle est évaluée la performance d’un service potentiellement bénéficiaire et le fait que la mise en œuvre de l’intéressement à la performance collective soit concrètement tributaire de la création d’un dispositif ad hoc par le ministre intéressé expliquent qu’il n’est pas encore réellement mis en œuvre à ce jour.

3.- Quelle évaluation de la rémunération au mérite ?

Il est difficile à ce stade d’établir un bilan de ces modalités de rémunération « au mérite », tant la PFR est encore récente et la prime d’intéressement collective au stade du « cadrage » général.

Certaines des organisations syndicales représentatives des agents de la fonction publique qui ont participé, à l’invitation des rapporteurs, à la table ronde sur la RGPP le 27 septembre 2011 ont exprimé à cette occasion des positions contrastées, tendant néanmoins vers un certain scepticisme sur les principes mêmes de la rémunération au mérite.

M. Vincent Hacquin, président de la Fédération des fonctions publiques de la Confédération française de l'encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC) précise que « la CGC est plutôt favorable aux systèmes qui permettent de reconnaître les mérites des agents, à condition qu’ils soient fondés sur des critères aussi objectifs que possible. Ainsi, le système de PFR devrait reposer sur des critères transparents – ce qui suppose un dialogue social. »

Pour Mme Anne Feray, secrétaire nationale de la Fédération syndicale unitaire (FSU), la rémunération au mérite s’inscrit plus largement dans l’approche de la RGPP par rapport à la fonction publique, soit : « le glissement de la gestion des personnels au fameux “ management ”, autrement dit l’individualisation de la gestion et de la rémunération. C’est oublier que les règles collectives créent des solidarités et permettent aux personnels d’accepter certaines décisions. Les logiques aujourd’hui à l’œuvre minent au contraire le travail d’équipe au sein de la fonction publique ». Elle met ainsi en doute l’atteinte de l’objectif même de la rémunération au mérite, soit la création de conditions permettant l’amélioration de la performance individuelle et collective des agents.

M. Emmanuel Paillusson, secrétaire général de Solidaires Concurrence, consommation, répression des fraudes (Solidaires CCRF), s’interroge « sur la prime de fonctions et de résultats (PFR) : un coefficient étant appliqué, si j’ose dire, en fonction des fonctions – c’est la partie “ F ” –, cela signifie-t-il que certaines d’entre elles sont plus nobles que d’autres ? À mon sens, non, car nous sommes tous au service des publics. À cela s’ajoute le fait qu’au sein de certains ministères ou administrations, les agents ne choisissent pas toujours leur poste, le directeur procédant aux affectations à partir des postes vacants dont il dispose. S’agissant de la partie “ R ”, nous considérons que le travail administratif est collectif et que nous en sommes hélas arrivé aujourd’hui à un véritable “ comptage de bâtons ” ». Sa position, sceptique, concerne ainsi tout autant la partie « fonctionnelle » que la partie « au mérite » de la PFR.

E.– LA RGPP ET LES AGENTS PUBLICS : DU MALAISE AU REJET

1.- Le leitmotiv officiel de la nécessité de l’association des agents publics

Le credo de lancement de la RGPP a toujours été renouvelé depuis : cette nouvelle modalité de réforme de l’État ne pourrait réussir qu’appuyée sur la mobilisation et l’adhésion des agents publics.

Avant même ce lancement, le rapport de décembre 2005 intitulé « des finances publiques au service de notre avenir », rendu public par la commission présidée par M. Michel Pébereau – rapport qui a inspiré la RGPP y compris dans son volet « ressources humaines » en faveur de l’accroissement des perspectives de mobilité et de la mise en œuvre de la rémunération au mérite – précisait qu’« aucune organisation de grande taille n’est capable de bouleverser son mode de fonctionnement et son organisation du jour au lendemain. Ce qui importe, c’est la constance dans le changement, la continuité du dialogue avec les partenaires sociaux et la qualité du management des équipes. »

Dans son discours du 10 juillet 2007, le Premier ministre M. François Fillon a longuement abordé les questions relatives à la gestion des ressources humaines, présentant le cadre de nombreux dispositifs évoqués ci-dessus en la matière. Il précisait qu’« il n'est plus possible de décréter la réforme. Il nous faut, pour la réussir, un mouvement d'adhésion et de confiance. Au service de l'État, peut-être plus que partout ailleurs, cette adhésion doit être recherchée et stimulée, même si l'autorité politique doit assumer ses choix stratégiques ». Il évoquait dans le même discours une forme de participation des agents publics à la conception des réformes, en notant qu’« ils sont nombreux ces fonctionnaires qui ont des idées sur la façon d'améliorer l'efficacité de leur travail et de leur service. Ces idées, elles doivent remonter aux instances de décision. Elles ne doivent pas rester lettre morte. »

Dans le rapport associé au CMPP du 4 avril 2008, M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, précisait que « la réforme de l’État ne peut s’accomplir que si les fonctionnaires trouvent dans le processus de changement une nouvelle source de fierté professionnelle et de motivation. L’exercice de révision des politiques publiques doit en effet être l’occasion, pour tous les agents publics, de se mobiliser pour un État moderne et des politiques publiques performantes. Le dialogue est mené par chaque ministre, mais aussi au niveau de la fonction publique dans son ensemble. »

2.- L’association des agents publics s’est bornée à leur information, dans le cadre d’un discours général parfois ambigu sur la portée de la RGPP

Les rapporteurs ont indiqué supra, s’appuyant entre autres sur le cas de l’éducation nationale, que les états-majors des administrations déconcentrées de l’État n’avaient pas été associés à la phase d’élaboration des mesures de la RGPP ; il n’est pas certain au demeurant que les administrations centrales elles-mêmes aient été associées à la démarche des équipes mixtes d’audit.

A fortiori, il est patent que les agents publics dans leur ensemble n’ont pas participé à cette phase et n’en ont pas été informés. Interrogés à ce sujet par les rapporteurs, les rectorats confirment pleinement ce constat. Ils évoquent aussi les modalités utilisées pour l’information des agents, une fois les décisions prises. Pour ce faire, beaucoup de rectorats ont transmis des informations à l’occasion des échanges ayant eu lieu dans le cadre des instances paritaires statutaires de consultation des personnels (conseil académique de l'Éducation nationale – CAEN – , comités techniques paritaires académiques – CTPA – et comités techniques paritaires spéciaux – CTPS).

Une consultation des personnels ou de leurs représentants a parfois été organisée pour présenter et préparer la mise en œuvre de certaines mesures ; des temps d’échanges spécifiques ont été ainsi mis en place par certains rectorats, à différents échelons, afin d’informer des finalités des réformes nationales et d’engager un dialogue sur les modalités de leur déclinaison sur le territoire académique.

Un rectorat évoque également l’organisation de réunions par les services d’inspection à destination des enseignants exerçant dans leur ressort territorial, ainsi que la réalisation de présentations par les chefs d’établissements, devant les conseils d’enseignement, le conseil pédagogique et certaines instances délibératives des établissements scolaires (commission permanente et conseil d’administration).

Les rectorats observent que le placement « off shore » de l’enseignement scolaire par rapport à la RGPP, encouragé par le ministère, a conduit à ne pas présenter au personnel les mesures pourtant officiellement « labellisées » RGPP comme en découlant. Le ministère a ainsi présenté ces réformes des « mesures de modernisation et d’amélioration de l’action éducative ».

Cette « stratégie » d’évitement du label RGPP a sans doute contribué a contrario à l’assimilation pure et simple de la RGPP à la seule « règle du un sur deux » pour les agents d’un ministère de surcroît fortement contributeur en matière de baisses d’effectifs ; elle a pu empêcher ces agents de pondérer leur vision de la RGPP, issue de cette seule règle, par les effets, parfois considérés comme positifs par ces agents, des mesures de nature pédagogique portées par le ministère au titre de la RGPP (comme la généralisation de l’accompagnement éducatif dans les collèges et son extension à certaines écoles primaires).

Au-delà de ce ministère, l’absence d’information, à défaut d’association, des agents publics lors de la phase de lancement de la RGPP a, plus généralement, amoindri la visibilité des mesures proprement dites de la RGPP, en regard d’une règle simple et opérationnelle de baisse des effectifs. La « chronologie » – qui a d’abord vu posée la « règle du un sur deux » puis lancée la définition, en secret, des mesures – ne pouvait conduire qu’au soupçon que celles-ci n’avaient pas d’autre objet que le « service » de cette règle, sans considération de la qualité du service rendu.

Le Gouvernement a pourtant tenté d’accompagner la RGPP par une réflexion d’ensemble, et concertée, concernant la fonction publique. Il a ainsi lancé le 1er octobre 2007 une conférence nationale sur les valeurs, les missions et les métiers de la fonction publique. Cette conférence s’est achevée au début du mois de mars 2008 et a conduit à la publication d’une synthèse des contributions produites à l’occasion de cette conférence, portant 100 propositions recoupant certains éléments relatifs aux ressources humaines accompagnant la RGPP, sans que cette synthèse fasse d’ailleurs explicitement référence à celle-ci.

Cette synthèse avait vocation à inspirer les travaux de M. Jean-Ludovic Silicani, conseiller d’État, désigné rapporteur général d’une mission tendant à l’élaboration d’un livre blanc « sur l’avenir de la fonction publique et le service public de demain », aux termes d’une lettre de mission que lui ont adressée M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique et M. André Santini, secrétaire d’État à la fonction publique, dès le 20 septembre 2007 en amont de la conférence nationale.

Le livre blanc sur l'avenir de la fonction publique – « faire des services publics et de la fonction publique des atouts pour la France » – a été remis par M. Jean-Ludovic Silicani le 17 avril 2008 aux ministres qui l’avaient chargé de cette mission, soit après le dépôt au Sénat, le 9 avril 2008, du projet de loi relatif à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique. Les 40 propositions de ce livre blanc, à l’instar de la synthèse qui l’a inspiré, « se situent » dans l’esprit des dispositions relatives à la fonction publique qui ont accompagné la RGPP, sans, dans le cas du livre blanc non plus, l’évoquer expressément.

Le communiqué rapportant la communication de M. Éric Woerth faite devant le Conseil des ministres le 16 avril 2008, soit la veille de la remise officielle du livre blanc, précise, prudemment, qu’« à partir des recommandations qui y seront formulées et avant d'indiquer la suite qu'ils entendent leur donner, les ministres chargés de la fonction publique engageront, avant l'été, des discussions avec l'ensemble des parties prenantes, en particulier avec les parlementaires, les partis politiques représentés au Parlement et les partenaires sociaux, confédérations syndicales comme fédérations de fonctionnaires. »

Différentes enquêtes d’opinion et les témoignages syndicaux recueillis par les rapporteurs lors de la table ronde qu’ils ont organisée le 27 septembre 2011 témoignent que cette discussion et cette concertation n’ont pas convaincu les représentants des agents publics du bien-fondé des réformes liées à la RGPP.

2. La RGPP, « repoussoir » pour les agents publics ?

a) Les résultats d’une enquête de l’institut Ifop de novembre 2010

Dans ses réponses à vos rapporteurs, le Gouvernement, constatant qu’« il n’y pas d’indicateurs spécifiques qui aient été mis en place afin de mesurer l’appropriation par les agents des mesures RH de la RGPP », évoque une étude réalisée par l’institut Ifop (67) – pour Accenture/Les Échos Conférences – réalisée en novembre 2010. Le Gouvernement présente certains des résultats de cette étude en précisant qu’elle « montrait […] que 64 % des agents de la fonction publique considéraient que la réforme de l’État telle qu’elle est menée actuellement est indispensable. Ce même sondage précisait que, pour les agents ayant vécu une réorganisation de leur service, 60 % d’entre eux affirmaient avoir été informés sur les causes et les objectifs de cette réorganisation (soit 8 % de plus qu’en 2009), montrant ainsi les efforts fournis par l’encadrement. »

Cette même étude présente d’autres résultats plus contrastés. Ainsi :

– 79  % des agents interrogés s’estiment mal informés sur « la vaste réforme de l’État et de la fonction publique en cours », ce taux étant néanmoins en légère baisse par rapport à novembre 2008 (81 %) et novembre 2009 (83 %) ;

– 53 % des agents interrogés ne considèrent pas que cette réforme est utile, les fonctionnaires la trouvant utile étant néanmoins majoritaires chez les agents des catégories A et B ;

– 69 % et 76 % des agents interrogés ne trouvent pas cette réforme respectivement acceptable et juste ;

– malgré une très légère progression des opinions positives, 67 % des agents interrogés se déclarent tout à fait ou plutôt opposés à cette réforme, dont 61 %, 58 % et 72 % des agents respectivement des catégories A, B et C ;

– 46 % des agents interrogés considèrent que la réforme simplifie les démarches administratives pour les citoyens. Les agents partageant cette opinion étaient majoritaires aux mois de novembre 2007 à 2009 ;

– 37 % des agents interrogés considèrent que la réforme de l’État aura un impact positif sur l’image de la fonction publique auprès des Français, ce taux étant en baisse constante depuis novembre 2007 où il s’établissait à 50 % ;

– 27 % des agents interrogés considèrent que la réforme offre de nouvelles perspectives d’évolution professionnelles, ce taux étant en baisse constante depuis novembre 2007 où il s’établissait à 43 % ;

– 21 % des agents interrogés estiment que les agents de la fonction publique sont bien associés à la réforme, ce taux ayant varié de 22 % à 16 % de novembre 2007 à novembre 2009 ;

– à la question de savoir si la réforme aura des effets positifs sur certains thèmes, une majorité ne se dégage – 51 % – que pour la qualité du service rendu aux citoyens. Pour tous les autres items – l’autonomie dans le travail, son intérêt, les rapports avec le responsable hiérarchique, les responsabilités, les horaires de travail, les possibilités d’évolution, la rémunération et la charge de travail – il est majoritairement jugé que la réforme aura des effets négatifs ; pour chacun de ces items, les taux des « avis positifs » sont inférieurs à ceux constatés en novembre 2007 ;

– 63 % des agents interrogés sont au mieux « plutôt pessimistes » pour leur avenir professionnel et 74 % au mieux « plutôt pessimistes » pour l’avenir de la fonction publique.

b) Les résultats d’une enquête de l’institut Ifop d’avril 2011

Une enquête réalisée par l’institut Ifop et publiée par la revue Acteurs publics le 29 avril 2011 analyse l’opinion d’un certain nombre d’agents de catégorie A concernant la RGPP (68).

Pour l’Ifop(69), cette étude montre que « si la RGPP n’est pas rejetée en bloc, c’est sa mise en œuvre aujourd’hui qui convient très peu aux hauts fonctionnaires, toutes fonctions publiques confondues. Dans la perspective du prochain quinquennat, rares sont ceux qui souhaitent la voir reconduire en l’état (4 %). Plus de deux agents sur trois (68 %) souhaitent qu’elle soit modifiée et un quart d’entre eux [25 %] partage même un ressenti plus extrême en appelant de ses vœux [sa] suppression ». Ce dernier taux est supérieur – 29 % – pour la partie des agents interrogés, plus directement concernés, exerçant dans la fonction publique d’État.

S’agissant des impacts de la RGPP, le jugement porté par le panel interrogé est très sévère :

– 80 % des agents considèrent que les réformes en cours dans le service public correspondent à une détérioration de leurs conditions de travail ;

– 78 % de ces mêmes agents estiment que ces réformes conduisent à une détérioration du service rendu aux usagers.

L’analyse de l’Ifop tend à montrer que la « règle du un sur deux » pèse substantiellement sur cette appréciation portée sur la RGPP ; l’institut constate que « S’agissant [de cette règle], les jugements sont tranchés et s’inscrivent en adéquation avec ce que l’Ifop a régulièrement mesuré auprès du grand public : huit agents sur dix ne souhaitent pas que cette mesure soit reconduite et près d’un sur deux (49 %) ne le souhaite même pas du tout. »

Ces éléments concernant l’opinion des agents publics sur la RGPP sont d’autant plus éloquents que ceux-ci sont des agents de catégorie A, peut-être plus susceptibles de porter ab initio un regard favorable sur les réformes, puisqu’ils ont vocation à développer une vision de la qualité et de la performance des organisations existantes et qu’ils sont responsables de préparer et d’organiser la mise en œuvre des changements.

c) La position unanime des syndicats de la fonction publique lors de la table ronde du 27 septembre 2011

Les organisations syndicales représentatives des agents de la fonction publique qui ont participé, à l’invitation des rapporteurs, à la table ronde sur la RGPP le 27 septembre 2011 ont confirmé, unanimement, que la RGPP constitue désormais, aux yeux de très nombreux agents publics, l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire en matière de conduite du changement.

Le constat de l’absence d’association des personnels à l’élaboration des décisions est général et a été, à de très nombreuses reprises, évoqué durant cette table ronde. M. Bernard Van Craeynest, président de la Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC) le souligne, tout en précisant que la situation syndicale française aurait dû précisément permettre d’envisager une telle association : « les restructurations, les adaptations, la modernisation, tous vocables agréables à l’oreille, doivent être anticipées, préparées et accompagnées. La forte représentation du personnel et la forte diversité syndicale qui existent dans le secteur public français donnent la possibilité d’un dialogue social soutenu et nourri qui devrait logiquement permettre la recherche efficace d’un accord sur la manière de conduire le changement. Mais cette approche a toujours été difficile à concrétiser en France, ce qui conduit à s’interroger sur la nature et la qualité de notre dialogue social ». A contrario, il constate, en évoquant le rôle crucial qu’aurait pu jouer l’encadrement intermédiaire, qu’« un fossé se creuse entre les orientations décidées au sommet et les moyens alloués à leur traduction pratique. Ce hiatus doit faire l’objet de la plus grande attention, car même si les troupes marchent d’un seul pas, encore faut-il que la hiérarchie ait compris le sens de la manœuvre... »

Mme Laurence Laigo, secrétaire nationale de la Confédération française démocratique du travail (CFDT), considère, point sur lequel les rapporteurs reviendront dans la deuxième partie du présent rapport, que « la RGPP a consisté en une réforme des administrations et non des politiques publiques, dont la nature n’a pas changé ». Mme Laurence Laigo estime que « c’est [ce] en quoi beaucoup d’agents se sont sentis floués ; leurs attentes ont été trompées et une forte déception s’en est suivie […]. Face à une réforme de cette envergure, à une question d’intérêt général aussi forte, on ne peut que s’étonner de l’absence […] de dialogue social au sens large, notamment au niveau local ». Mme Laurence Laigo ajoute que les pouvoirs publics se sont « livré[s] à une opération qui tient de la restructuration, sans aucun dialogue social sur le terrain et sans accompagnement des salariés – ce qui n’arrive jamais dans le secteur privé – alors que des milliers d’emplois étaient en jeu. Cette méthode a suscité énormément d’interrogations et entraîné une incompréhension persistante ». Elle constate, comme l’illustre l’enquête d’opinion évoquée ci-dessus, que « les cadres, plutôt ouverts à l’idée d’une réforme de l’État, ont fini par “décrocher” ».

M. Michel Moreau, président de la Confédération française des travailleurs chrétiens des fonctionnaires et agents de l’État (CFTC) confirme certains résultats de l’enquête d’opinion évoquée supra, en soulignant que « tel est le tableau d’ensemble : une dégradation du service rendu et des agents inquiets pour leurs missions, qu’ils souffrent de ne pas avoir les moyens de remplir correctement. […]. À cela s’ajoute la dégradation des conditions de travail des personnels, qui entraîne parfois les conséquences dramatiques que l’on sait ». Il constate, lui aussi, que « ce que les personnels demandent le plus, c’est d’être associés, par le biais du dialogue social, à la mise en œuvre de réformes dont ils ne comprennent pas le sens. Or le manque d’informations et d’explications est criant. »

M. Emmanuel Paillusson, secrétaire général de Solidaires Concurrence, consommation, répression des fraudes (Solidaires CCRF) considère, en évoquant la question de l’association des usagers des services publics en plus de celles des agents eux-mêmes, que « la méthode adoptée pour mettre en œuvre la RGPP […] s’est caractérisée par une absence complète de concertation, à tous les niveaux. […] ni les organisations syndicales, ni les associations d’usagers n’y ont été associés ». M. Emmanuel Paillusson décrit une évolution inquiétante de l’état d’esprit des agents publics dans le contexte de la RGPP : « le stress et le mal-être au travail s’accroissent de plus en plus, démotivant ainsi les personnels. […] Je n’ai jamais reçu autant d’appels d’agents en détresse et en pleurs en raison d’un déplacement ou parce que, responsables de service, ils se sont pourtant vu imposer un supérieur malgré les bons résultats qu’ils ont obtenus. C’est phénoménal ! »

M. Emmanuel Paillusson estime au demeurant que la Gouvernement ne peut se prévaloir d’avoir mis à l’ordre du jour d’une instance paritaire le libellé d’une réforme pour pouvoir considérer avoir mené une concertation en bonne et due forme : « vous nous demandez ce que nous pensons de la concertation – locale ou nationale – qui a été menée. Tout dépend de ce qu’on met derrière les mots. S’il ne s’agit que de réunir des instances paritaires pour discuter de tel ou tel sujet, on sait faire. Encore faut-il savoir quel contenu on donne à ces réunions ; or il s’avère que c’est à peu près le néant ». Cette position est relayée par Mme Isabelle Sargeni-Chetaud, secrétaire nationale de la Fédération syndicale unitaire (FSU), qui indique que « ces dernières années, les comités techniques et les commissions paritaires statutaires ont parfois été vidés de leur sens au nom de leur caractère consultatif et les avis qu’ils ont formulés – il est vrai souvent négatifs – n’ont jamais été suivis par le Gouvernement. »

M. Patrick Hallinger, secrétaire national à l’Union générale des fédérations de fonctionnaires de la Confédération générale du travail (UGFF-CGT), évoque pour sa part les effets de la méthode choisie pour le lancement de la RGPP sur l’encadrement de haut niveau de l’administration : « le processus de décision a été confiné à un cercle étroit réuni autour du Président de la République, en recourant largement à des cabinets anglo-saxons qui ont importé des pratiques en usage dans d’autres pays. Ce faisant, on a marginalisé tout l’encadrement supérieur de la fonction publique, prié d’appliquer brutalement des décisions prises sans que jamais leur avis ait été pris. ». Il considère que cette méthode, choisie pour son efficacité supposée, a nécessairement conduit à assimiler le dialogue à un obstacle à la réforme : « on considérait d’évidence que cette manière de faire permettrait une réforme rapide, prendre le temps de la concertation étant perçu comme un enlisement. »

S’agissant plus précisément de l’accompagnement au quotidien des agents au cours de la mise en œuvre des réformes et du rôle en la matière de l’encadrement, M. Vincent Hacquin, président de la Fédération des fonctions publiques de la Confédération française de l’encadrement – Confédération générale des cadres (CFE-CGC) constate que « lorsqu’un service doit être restructuré, l’annonce en est faite à l’avance, dans des délais précis ; les agents sont accompagnés, même si les moyens sont aujourd’hui réduits. […] Écarter l’encadrement du processus de mise en place des réformes n’est pas sans conséquences : lorsqu’il est incapable de répondre aux questions de ses subordonnés, il perd en effet sa légitimité. Il faudrait donc définir une méthode de mise en œuvre de la RGPP […] Toutes les entreprises qui fonctionnent bien ont un projet d’entreprise et le modifient lorsqu’elles se réorientent. Rien de tel dans l’administration ! ». À l’instar des propos de Mme Laurence Laigo repris ci-dessus, M. Hacquin note ainsi que la RGPP n’a pas su reprendre ce que le secteur privé sait parfois mettre en œuvre dans la conduite du changement.

Mme Laurence Laigo (CFDT) observe aussi le déficit de la RGPP en matière d’accompagnement des agents au changement : « les mesures qui ont été prises ont entraîné mécaniquement la suppression de postes sans donner lieu pour autant à un accompagnement durant la réorganisation des services non plus qu’à la mise en place de parcours professionnels dignes de ce nom ». Mme Laurence Laigo souligne par ailleurs le rôle que pourraient jouer les organisations syndicales pour envisager un tel accompagnement « s’agissant des personnels, le Gouvernement a demandé aux partenaires sociaux d’engager une négociation. Un accord a été signé sur la représentativité et la modernisation du dialogue social, mais on ne peut demander aux différents acteurs d’accroître leur légitimité et de travailler à la rénovation des règles – ce qui est en effet nécessaire – sans que cela se traduise jamais sur le terrain. Les syndicats et l’ensemble des personnels doivent donc être associés à de telles restructurations. Un certain nombre d’outils pourraient d’ailleurs être mis en place afin de limiter les dégâts et de favoriser l’accompagnement social. »

Certains intervenants lors de cette table ronde ont émis le souhait d’un processus de réforme de l’État plus soucieux à l’avenir d’associer les personnels et, le cas échéant, les usagers du service public à la conception et l’accompagnement des réformes.

Mme Isabelle Sargeni-Chetaud, secrétaire nationale de la Fédération syndicale unitaire (FSU) a souhaité « qu’un véritable dialogue social s’instaure au sein duquel le paritarisme jouerait tout son rôle ».

M. Michel Moreau (CFTC) souligne que « le manque d’information, d’association, d’appropriation et de dialogue social est patent […] un vrai débat doit être organisé sur les missions de l’État et sur l’organisation des services publics en y associant certes les personnels – dont chacun a souligné combien ils ont le sens du service public et combien ils sont prêts à formuler des propositions – mais également les usagers, l’État et les collectivités territoriales. Il convient également de donner “du sens et de la reconnaissance” : parce que le manque de formation et d’explication est patent s’agissant des réformes engagées et que les agents sont inquiets quant à leur avenir et à celui de leurs missions, il importe de rétablir la confiance. »

Sur ces sujets, M. Patrick Hallinger (CGT) a estimé qu’« un nouveau dialogue social doit voir le jour […]. Il doit être l’occasion d’inaugurer de nouvelles démarches pour gérer les services, tant sur le plan national que départemental ou local, et rassembler les personnels, l’administration, les élus et les usagers – pour lesquels la fonction publique est faite. Parce que les commissions départementales des services publics se réunissent très peu, il importe de créer de nouveaux espaces d’écoute où il serait possible de synthétiser l’ensemble des apports. »

On observe au demeurant que la nécessité de réformer l’État constitue une orientation partagée par un grand nombre de responsables syndicaux. Mme Laurence Laigo (CFDT) a souligné ainsi qu’« au regard des mutations de la société française, […] une réforme de l’État est nécessaire si l’on veut que l’intervention publique demeure un des piliers du pacte social, garant de la cohésion économique, sociale et territoriale du pays. Oui, l’amélioration du fonctionnement de l’État est un impératif de justice pour tous ». Des propos semblables ont été tenus par M. Michel Moreau (CFTC) : « l’État étant le garant de l’intérêt général et de l’égalité des citoyens sur tout le territoire, nous ne contestons pas que ses missions et son organisation doivent changer pour qu’il s’adapte à l’évolution des besoins de la population et continue de jouer son rôle, irremplaçable, pour assurer la compétitivité de notre économie et la cohésion sociale ». M. Patrick Hallinger (CGT) a établi un lien entre les changements sociétaux constatés et le débat à mettre en œuvre sur les réformes administratives : « un débat permanent sur les missions publiques est […] indispensable, chacun convenant que la situation de la France n’a rien à voir avec celle de 1945 : technologies, environnement mondial, qualifications, attentes de la population, tout a évolué. »

Ce souhait de l’examen des missions de la puissance publique et de l’organisation des services publics s’accompagne parfois d’une certaine audace dans les réformes envisagées. Pour ne prendre qu’un seul exemple, la perspective d’une unification des fonctions publiques, M. Bernard Van Craeynest a précisé que si le souhait partagé est d’« encourager la mobilité entre les fonctions publiques, il faut se diriger […] vers la constitution d’une vraie fonction publique de métiers, une et indivisible, qui seule favorisera la lisibilité et la cohérence dans la gestion des carrières : c’est ainsi que notre cohésion sociale et nos institutions y gagneront ». M. Emmanuel Paillusson (Solidaires CCRF) a souligné pour sa part qu’« il n’existe pas trois fonctions publiques mais une seule qui se décline en trois pans ». Enfin, M. Patrick Hallinger (UGFF-CGT) a ainsi précisé sa pensée sur ce sujet : « parce que la fonction publique est en effet une, nous sommes favorables à un statut unifié de manière à organiser la mobilité de la manière la plus optimale possible. »

DEUXIÈME PARTIE : LES MESURES DE LA RGPP

I.– L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL INITIAL DE LA RGPP :
ÉVALUER LA PERTINENCE DES MISSIONS EXERCÉES PAR L’ÉTAT, ACCROÎTRE L’EFFICIENCE DE SON FONCTIONNEMENT ET RÉALISER DES ÉCONOMIES BUDGÉTAIRES

A.– LE DISCOURS DU PREMIER MINISTRE DU 10 JUILLET 2007

Pour mémoire, le rapport rendu public en décembre 2005 établi par la commission évoquée supra présidée par M. Michel Pébereau (70) avait émis, dans le contexte d’un travail concernant la maîtrise des finances publiques et de la dette publique, les deux préconisations suivantes :

– « mettre en place sous l’autorité du Premier ministre un dispositif de réexamen de l’ensemble des dépenses de l’État afin de les avoir très largement réorientées dans les trois ans » (préconisation n° 12) ;

– « simplifier l’organisation administrative et faire disparaître toutes les structures redondantes » (préconisation n° 14).

Lors de son lancement – annoncé à l’occasion du Conseil des ministres du 20 juin 2007 puis le 10 juillet 2007 par le Premier ministre (cf. la première partie du présent rapport) – trois principes semblaient devoir caractériser la RGPP :

– elle était un questionnement sur ce que doit faire l’État, sur la définition de ses missions ;

– elle devait permettre à la fois d’identifier des gisements d’efficience dans l’organisation de l’État et de mettre en œuvre des réformes susceptibles de tirer bénéfice de ces gisements ;

– elle était adossée à des objectifs budgétaires, en rendant possible le non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite et diverses économies en fonctionnement et en intervention.

Le Premier ministre dans son discours du 10 juillet 2007, a indiqué qu’il s’agissait, après les stratégies ministérielles de réforme menées en 2003 et les audits de modernisation de l’État de 2005 et 2006 (71), de « dépasser la logique des moyens et [de s’] interroger sur les fins de toute action publique […]. Pour la première fois, nous allons nous poser la question de la légitimité de toutes nos dépenses publiques, y compris les dépenses d’intervention, de leur raison d’être, de leurs résultats. »

Cette logique de « passage en revue » des politiques publiques s’appuyait pour le Premier ministre sur un constat de désorganisation et d’inefficience administratives : « nous avons, au cours des deux dernières décennies, multiplié les programmes, les structures, les compétences nouvelles, souvent redondantes pour ne pas dire concurrentes, sans clarifier les frontières entre les acteurs et sans se demander si on ne pouvait pas faire avec l’existant. Ce mille-feuille administratif conduit à rendre nombre de politiques publiques à la fois coûteuses, inadaptées, parfois obsolètes, voire contre-productives. Si certaines actions ont pu être légitimes à un moment donné de notre histoire, leur pertinence doit être appréciée à la lumière des attentes actuelles des citoyens et du mode de fonctionnement de l’administration d’aujourd’hui. »

Le passage en revue tendait ainsi à diriger la réforme de l’État vers des mesures de suppression des politiques publiques jugées inutiles, obsolètes, inefficaces ou redondantes ; et non pas, ou à tout le moins pas explicitement, au terme d’un questionnement sans a priori sur les missions de l’État vers la création, le cas échéant, de politiques publiques nouvelles identifiées comme pertinentes.

Dans ces propos, il est intéressant de noter qu’une certaine inefficience des administrations est précisément expliquée par le fardeau des politiques publiques sans objet, superfétatoires ou se chevauchant. À l’inverse, la clarification des missions de l’État – comme point de départ de la RGPP – devait permettre à l’administration de travailler de façon plus efficiente.

Ce sens général donné de la RGPP – une déflation des missions suite à un examen de leur opportunité et de leur efficacité –  s’appuyait sur le constat d’une difficulté française en matière de dépenses publiques ; pour le Premier ministre, les démarches de réforme de l’État qui ont précédé la RGPP « n’ont pas empêché la montée inexorable des dépenses publiques (72), un taux de prélèvement obligatoire supérieur de 4 points à la moyenne européenne, l’enchevêtrement des structures. »

Au total, la RGPP a certes été conçue comme un exercice relativement ouvert dans son principe, et donc dans ses résultats potentiels, de définition de la « carte » des missions de l’État ; avec cependant, en arrière-fond, un pré-diagnostic sur la nécessité de supprimer certaines missions inutiles, non pertinentes ou redondantes, de l’État ; et ce, afin de traiter de deux autres constats sur l’inefficience partielle de l’administration et le coût trop élevé de l’action publique.

La RGPP était ainsi à la fois une méthode de travail ouverte et un cap politique s’appuyant sur des constats d’inefficience au moins partielle de l’action publique ; elle était conçue comme un exercice tendant à traiter de la question « que doit faire l’État ? » tout en se plaçant dans le contexte de « faire mieux avec moins », selon les termes du Premier ministre le 10 juillet 2007.

B.– LE RAPPORT RENDU PUBLIC À L’OCCASION DU CMPP DU 12 DÉCEMBRE 2007

Dans sa partie relative à la démarche de la RGPP, le rapport accompagnant le premier des CMPP, qui s’est tenu le 12 décembre 2007, confirme les principes établis par le Premier ministre dans son discours du 10 juillet 2007.

Ce rapport modélise la démarche du questionnement auquel devait être soumise chaque politique publique dans le cadre de la RGPP par le schéma reproduit ci-après (sans doute largement inspiré de travaux initiaux réalisés par un cabinet d’audit au mois de juin 2007 et relatifs à la méthodologie générale de la RGPP).

La logique demeurait donc de questionner, ou « passer au crible », l’ensemble des politiques publiques nationales. Le rapport du 12 décembre 2007 rappelait d’ailleurs le champ et la méthodologie de la RGPP en ces termes : « il ne s’agit donc pas en premier lieu de réfléchir en termes de structures, mais en termes d’objectifs de politiques publiques. »

Le schéma ci-après est conforme à ce principe, dans le sens où il n’interdit pas d’envisager, dans ses étapes 1 et 2, l’identification de besoins et attentes collectives nouvelles, ainsi qu’une réflexion sur les moyens nécessaires pour les satisfaire.

Toutefois, là encore, l’« arrière-plan » du schéma correspondait à la recherche d’efficience, et à l’identification de gisements de productivité et de suppression de certaines actions inutiles, superfétatoires ou mieux mises en œuvre par d’autres acteurs que l’État (cf. ses étapes 4 à 7). La logique d’ensemble du schéma était donc composite ; si rien ne semblait joué d’avance, les travaux étaient dirigés.

Le rapport du 12 décembre 2007 justifiait lui aussi la RGPP par un constat national liant le poids des finances publiques et la prospérité du pays : « la France se distingue en Europe et dans le Monde par le niveau très élevé de ses dépenses publiques – environ 54 % du PIB, ce qui se traduit à la fois par un taux de prélèvements obligatoires très élevé, qui pèse sur la croissance et le pouvoir d’achat et par un déficit qui continue à alimenter une dette qui a triplé de volume en 30 ans ». Ce rapport précisait au demeurant que la mise en œuvre de la RGPP aurait un volet budgétaire : « le chiffrage des réformes sera réalisé lorsque celles-ci seront précisément définies, y compris dans leurs modalités ».

Enfin, on note que le même rapport reprenait et précisait la formule du Premier ministre dans son discours du 10 juillet 2007, décrivant la RGPP comme consistant à « faire mieux avec moins », en soulignant que le Canada et la Suède « ont fait la preuve qu’une révision ordonnée de l’existant permettait à la fois de réduire le niveau des dépenses publiques et d’améliorer la qualité du service public. »

II.– LA RGPP A CONDUIT À DES CHANGEMENTS SUBSTANTIELS DE L’ORGANISATION ADMINISTRATIVE DE L’ÉTAT SANS MODIFICATION EN PROFONDEUR DE SES MISSIONS

A.– LA MODESTIE DES MODIFICATIONS APPORTÉES AUX MISSIONS ET INTERVENTIONS DE L’ÉTAT

1.– L’abandon rapide d’une réelle revue générale portant sur les politiques publiques

Les étapes et questions structurant la revue des politiques publiques telles qu’envisagées par le schéma présenté supra ont progressivement disparu en 2007 et 2008 des rapports publics officiels sur la RGPP.

Ce schéma, présenté comme la méthode de travail des équipes mixtes d’audit, figurait dans le rapport accompagnant le CMPP du 4 avril 2008.

Ce questionnement était encore évoqué, dans une version visuellement plus discrète et isolée, dans le rapport accompagnant le CMPP du 11 juin 2008.

Il a ensuite disparu de la communication officielle de la RGPP, notamment dans le premier rapport d’étape de la RGPP du 3 décembre 2008, ce rapport mettant l’accent sur le dispositif de suivi des mesures mises en œuvre.

2.–  Très peu de décisions de la RGPP ont correspondu à une modification des missions de l’État

Seules deux mesures de la RGPP peuvent être considérées essentiellement comme des suppressions de missions de l’État : la suppression de l’ingénierie concurrentielle et le recentrage de l’action de la protection judiciaire de la jeunesse sur la prise en charge de mineurs délinquants

a) L’exception de la suppression progressive de l’ingénierie concurrentielle

La suppression progressive de l’ingénierie concurrentielle proposée par l’État au service des collectivités territoriales, décidée par le CMPP du 4 avril 2008, constitue un abandon net d’une mission de l’État au titre de la RGPP. Le rapport associé à ce CMPP indique, sans autre justification, qu’il s’agit d’un domaine dans lequel « l’intervention de l’État ne se justifie plus […], l’État n’ayant pas vocation à concurrencer l’offre privée. »

Notre collègue Dominique de Legge, sénateur, a précisément analysé la suppression progressive de l’ingénierie concurrentielle dans son rapport du 22 juin 2011 (73) sur la RGPP et les services publics locaux ; il y indique que « la RGPP semble confirmer, voire accélérer, mais non générer, une évolution entamée depuis plus de dix ans », du fait notamment de critiques récurrentes de la Cour des comptes et du Conseil d’État faites à l’encontre de cette activité exercée par l’État déconcentré, et émises du point de vue des règles de la bonne gestion publique et du droit communautaire et national de la concurrence (74).

Les rapporteurs, suite à l’audition à laquelle ils ont procédé le 7 juin 2011 de M. Jean-François Monteils, secrétaire général du ministère de l’Écologie, du développement durable, des transports et du logement, lui ont demandé de préciser concrètement et par écrit ses propos relatifs à l’éviction de l’ingénierie privée par l’ingénierie publique, notamment en Corse.

Il a notamment répondu que : « la présence d’une ingénierie publique concurrentielle dans les départements ou cantons à faible densité démographique a pu avoir un effet d’éviction géographique des bureaux d’études privés.

« Dans ces zones, les communes sont très petites, sans compétences techniques propres ni moyens financiers et doivent réaliser des aménagements pour répondre aux exigences réglementaires et aux besoins de la population. L’offre d’ingénierie publique, avec son implantation de proximité et la pluralité de ses services, ne facilitait pas les propositions compétitives par des bureaux d’études privés, souvent beaucoup plus éloignés et devant faire face à ces charges d’éloignement.

« C’est le cas notamment en Corse où les bureaux d’ingénierie du continent n’ont pas souhaité s’investir jusqu’à une période récente. Les opérations demandées par les communes rurales, le plus souvent de faibles envergures, ne généraient pas une rémunération suffisante compte tenu des difficultés de déplacement dans l’île, en particulier pour la surveillance des travaux.

« Depuis l’arrêt de l’ingénierie publique, plusieurs bureaux d’études se sont créés en Corse. Cependant, le tissu est aujourd’hui encore jeune, peu doté en moyens et mal organisé. Il génère ainsi des dysfonctionnements et des surcoûts dont se plaignent fréquemment les communes. Par exemple, les prix pratiqués par l’ingénierie privée, encore trop élevés au regard de ceux du continent, pénalisent les communes pour les aides financières, les assiettes éligibles aux subventions étant souvent très inférieures aux montants des devis de travaux. Il faut également noter que de nombreuses consultations sont infructueuses faute de soumission.

« L’arrêt total en 2011 de l’ingénierie publique laisse ainsi toute latitude au secteur privé pour mieux s’organiser dans ce domaine, notamment en Corse. »

Cette réponse tend à montrer que l’ingénierie privée se substitue désormais, dans une certaine mesure, à l’ingénierie publique ; ce qui peut signifier que celle-ci « évinçait » effectivement la première. Alors que les collectivités territoriales n’ont pas moins besoin qu’avant d’une offre en la matière, cette réponse n’élude pas le fait que l’ingénierie privée semble être, au moins en Corse, moins adaptée à ce stade que l’offre publique à laquelle elle a succédé, en termes de proximité, d’organisation et de prix, a fortiori pour les communes les plus petites et donc les moins susceptibles d’influer sur un rapport de marché. Sans dire que le panorama ainsi décrit pourrait constituer un argumentaire de qualité pour (re)créer une offre publique en matière d’ingénierie, il faut espérer, comme le fait cette réponse, pouvoir constater à l’avenir que l’installation dans le temps de la réforme correspondra à un progrès de l’offre de services à disposition des collectivités territoriales.

En tout état de cause, si la suppression progressive de l’ingénierie concurrentielle est « isolée » tant elle constitue le seul abandon assumé d’une mission antérieurement prise en charge par l’État, elle apporte une contribution non négligeable à la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » pour le ministère de l’Écologie : 3 300 ETPT auraient ainsi été supprimés sur la période 2009-2011 en application de cette seule mesure, selon les propos de M. Jean-François Monteils, corroboré par le rapport précité de notre collègue sénateur (75).

Ce chiffrage paraît toutefois optimiste, eu égard à certaines informations recueillies par ailleurs par vos rapporteurs :

– le cumul des schémas d’emplois permettant de comparer les effectifs en 2011 par rapport à 2008 pour l’ensemble du ministère (cf. la troisième partie du présent rapport) correspond à une baisse des effectifs de 2 953 ETPT ;

– les suppressions d’effectifs cumulées de 2009 à 2011 pour le ministère s’élèvent, selon les informations du secrétariat général du ministère, à 3 148 ETPT.

Ce chiffrage témoigne en tout état de cause de l’importance de la mesure de suppression progressive de l’ingénierie concurrentielle dans l’équilibre comptable de la RGPP pour ce qui concerne le ministère de l’Écologie. Du point de vue des effectifs du budget général, la mesure n’est pas non plus quantité négligeable ; un gain de 3 300 ETPT représente près de 4 % des suppressions d’effectifs constatées tous ministères confondus en 2011 par rapport à 2008.

Toujours selon le secrétariat général du ministère de l’Écologie, la suppression progressive des activités d’ingénierie publique concurrentielle de l’État correspond à une économie de 22 millions d’euros en fonctionnement sur la période 2009-2011, soit plus des deux tiers des économies de fonctionnement identifiées pour cette période au titre de l’ensemble des mesures de la RGPP portées par ce ministère. Selon le secrétariat général, ces gains s’imputent sur les « coût environnés » en fonctionnement associés à l’exercice de leurs activités par les agents publics ; les « coûts environnés » sont corrélés aux effectifs (cf. troisième partie du présent rapport).

b) Le recentrage de l’action de la protection judiciaire de la jeunesse sur la prise en charge des mineurs délinquants

L’un des volets de la mesure « Recentrer la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) sur son cœur de métier », portée par le ministère de la Justice, a consisté, selon le rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011, en une « réorganisation [de la PJJ] afin de tenir compte de son recentrage sur le pénal. Les conseils généraux assurant la protection de l’enfance en danger, la PJJ se désengage donc du civil afin de mieux concentrer son action sur les mineurs délinquants. »

Autrement dit, il s’agit pour l’État de ne plus participer aux partenariats avec les conseils généraux principalement compétents en matière d’aide sociale à l’enfance en application du code de l’action sociale et des familles pour les actions concernant l’enfance en danger sans rapport avec une mesure pénale et aux actions concernant les jeunes majeurs en difficulté.

Un rapport d’étape de juillet 2009, fait pour le Comité d’enquête sur le coût et le rendement des services publics placé auprès de la Cour de la comptes, relatif à la réorganisation territoriale de la protection judiciaire de la jeunesse ((76) précise que ce « recentrage au pénal […] recouvre en réalité deux mouvements depuis longtemps engagés :

« – une spécialisation, qui doit être complète en 2011, de la DPJJ [direction d’administration centrale compétente pour la protection judiciaire de la jeunesse] comme opératrice directe de mesures judiciaires, sur les investigations préalables aux décisions civiles comme pénales, devant éclairer le magistrat avant que celui-ci n’ordonne une éventuelle prise en charge, et sur les prises en charge pénales à l’exclusion de toute mesure d’assistance éducative ;

« – la suppression de la mesure judiciaire dite “protection jeune majeur”, mesure civile pour les 18-21 ans, qui dérogeait aux mécanismes de droit commun d’insertion des jeunes majeurs en difficulté sociale, relevant du champ des compétences des conseils généraux. »

Alors que cette dernière mesure était financée jusqu’en 2007 à hauteur de 100 millions d’euros sur le budget de l’État, 7 millions d’euros ont été inscrits pour la financer en 2011, dans l’optique de l’arrêt à court terme de l’intervention de l’État. Ces crédits ont cependant été en partie redéployés au sein du budget du ministère de la Justice sur des actions de prise en charge des mineurs délinquants.

3.– Des mesures modifient dans certains domaines les modalités et l’ampleur des interventions de l’État

a) Trois mesures sont relatives aux dépenses fiscales et niches sociales

Les dépenses fiscales et les niches sociales constituent également des modalités d’intervention publique de l’État ; elles ont pour objet de favoriser l’activité de certains secteurs d’activité ou la modification des comportements de certains acteurs économiques.

Ces mesures dérogatoires fiscales et sociales avaient a priori vocation à être passées au crible d’une revue générale des politiques publiques, parce qu’elles en sont une modalité de mise en œuvre, comme les crédits budgétaires en sont une autre. Trois mesures de la RGPP visent des dépenses fiscales ou des niches sociales.

Cette modestie est une nouvelle illustration de ce que la RGPP n’a pas consisté en une réelle revue des politiques publiques. La nature des dépenses fiscales et des niches sociales, qui associent une intervention et une norme dérogatoire que l’autorité politique peut décider de modifier ou supprimer rendait, il est vrai, peu pertinent leur « traitement » dans le cadre d’une démarche de projet.

Les trois mesures de la RGPP qui évoquent des dispositifs dérogatoires fiscaux ou sociaux sont les suivantes :

– la mesure « Encadrer et maîtriser les dépenses fiscales et les niches sociales », portée par le ministère du Budget, consistait à l’origine à prévoir une régulation de la création et de la gestion du « stock » en vigueur des dispositions fiscales et sociales dérogatoires, ainsi qu’à promouvoir leur évaluation. Des mesures d’économies portant sur certaines niches sociales sont associées à cette mesure ;

– la mesure « Réviser les dépenses fiscales environnementales » est portée par le ministère de l’Écologie. Si ce ministère lui associe d’importants montants d’économies au titre de modifications apportées à certaines dépenses fiscales, la direction du budget ne les prend cependant pas en compte dans le calcul des économies globales qu’il programme au titre de la RGPP ;

– la mesure « Réexamen du dispositif d’exonération des charges sociales sur la rémunération du droit à l’image collective des sportifs professionnels » a consisté en la suppression, par l’article 22 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, de cette niche sociale à compter du 1er juillet 2010. Celle-ci consistait en la faculté pour l’employeur de rémunérer, en exonération de charges sociales, ses salariés sportifs professionnels par l’intermédiaire d’une société exploitant l’image collective de l’équipe à laquelle ils appartiennent. Il s’agissait surtout de permettre aux clubs de mieux rémunérer leurs joueurs professionnels, dans le cadre d’un marché international très concurrentiel.

La troisième partie du présent rapport détaille le contenu des deux premières de ces trois mesures, eu égard aux montants substantiels d’économies que leur ministère porteur lui associe au titre des gains programmés pour l’ensemble de la RGPP.

b) Trois mesures de la RGPP ont modifié l’ampleur et les modalités de régimes d’aides publiques aux entreprises

Trois mesures (achevées selon le rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011), portées par le ministère de l’Économie, ont modifié les régimes de certaines aides aux entreprises :

La mesure « Réviser et harmoniser les taux d’aide à l’innovation » a consisté, selon l’annexe au projet de loi de règlement des comptes pour 2010 (77) prévue par l’article 122 de la loi de finances pour 2010, à établir « un référentiel commun pour les taux d’aide, abaissés, en lien avec l’augmentation du crédit d’impôt recherche (CIR), sur différents dispositifs : Fonds de compétitivité des entreprises (FCE) [géré par la direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services – DGCIS], programme innovation stratégique industrielle (ISI) d’Oséo, Agence nationale de la recherche (ANR) ». La troisième partie du présent rapport illustre l’importance de l’impact financier attendu de cette mesure, soit une économie en intervention de 211 millions d’euros.

La mesure « Concentrer l’action régionale de l’État sur les actions interrégionale et les priorités nationale » a consisté, selon l’annexe précitée au projet de loi de règlement des comptes pour 2010 (78), en la « suppression des aides individuelles aux profits d’actions collectives afin que l’ensemble des crédits [déconcentrés d’intervention délégués par la DGCIS] soit concentré sur des actions collectives relevant de priorités nationales fixées annuellement par une circulaire de la [DGCIS] ». La suppression des aides individuelles aurait conduit à constater une économie de 17 millions d’euros en intervention ; le reste des aides, portant sur des projets collectifs, a été réparti à 85 % sur 4 priorités nationales : le soutien à l’innovation et à la technologie, le renforcement de la compétitivité des filières industrielles, le développement de la coopération entre les entreprises et l’accompagnement des mutations économiques.

Le rapport du 9 mars 2011 précise, s’agissant de la mesure « Concentrer les aides à l’innovation sur les entreprises de moins de 5 000 salariés » que « les aides à l’innovation d’Oséo sont désormais concentrées à plus de 99 %, contre 50 % en 2008, sur les entreprises qui en ont le plus besoin pour favoriser leur développement c’est-à-dire celles qui comptent moins de 5 000 salariés ». Ce recentrage des aides accordées au titre des programmes d’aide à l’innovation (AI) et aux projets d’innovation stratégique industrielle (ISI) gérés par Oséo aurait correspondu à une économie de 20 millions d’euros en intervention selon l’annexe précitée au projet de loi de règlement des comptes pour 2010 (79).

c) Deux mesures achevées ont concerné l’ampleur et les modalités de certains dispositifs d’intervention en matière agricole

Ces deux mesures achevées, portées par le ministère de l’Agriculture, sont les suivantes :

– la mesure « Adapter le dispositif de financement des contrôles sanitaires à la nouvelle législation européenne » a conduit à la suppression d’aides de l’État – résiduelles selon l’annexe au projet de loi de règlement des comptes pour 2010 (80) – en matière d’aménagement rural. Le montant des économies correspondantes devrait s’élever à terme à 7,1 millions d’euros ;

– la mesure « Rationalisation des aides à la cessation d’activité par la suppression du congé formation, de la compétence des régions, et du dispositif de préretraite des agriculteurs, en cohérence avec la politique du gouvernement en matière d’emploi des seniors » a conduit à la suppression des interventions de l’État en direction des agriculteurs pour la préretraite et le congé formation, pour un montant d’économies évalué, à terme, à 10,1 millions d’euros (81).

B.– LA MAJEURE PARTIE DES MESURES DE LA RGPP CONCERNENT LA RATIONALISATION DE L’ORGANISATION ET DE L’ACTION ADMINISTRATIVES

1.– Constats préalables sur le nombre, la diversité et l’état d’avancement des mesures de la RGPP

Le tableau suivant retrace le nombre des mesures de la RGPP décidées pour chacun des CMPP et par phase de la RGPP (étant entendu que les phases 1 et 2 de la RGPP comprennent respectivement les trois CMPP des 12 décembre 2007, 4 avril 2008 et 11 juin 2008 et les deux CMPP des 30 juin 2010 et 9 mars 2011).

NOMBRE DES MESURES DE LA RGPP

 

Phase 1 de la RGPP

Phase 2 de la RGPP

 

CMPP du 12 décembre 2007

CMPP du 4 avril 2008

CMPP du 11 juin 2008

CMPP du 30 juin 2010

CMPP du 9 mars 2011

Nombre
des mesures

97

166

69

141

44

Total
par phase

332

185

Total pour la RGPP

517

Ce tableau, issu des rapports accompagnant les CMPP et d’étape de la RGPP, donne des ordres de grandeur et doit être apprécié avec précaution. Certaines des mesures de la RGPP décidées au cours de sa phase 1 ont été fusionnées à l’occasion du CMPP du 30 juin 2010. Le « portefeuille » actualisé des mesures de la RGPP contient donc sans doute un peu moins de 517 mesures. La difficulté à réduire cette incertitude illustre d’ailleurs l’insuffisance des documents publics rendant compte de l’avancement de la RGPP (cf. la première partie du présent rapport).

Le nombre des mesures de la RGPP doit aussi s’apprécier au regard de la forte hétérogénéité de leur portée. Le communiqué du Conseil des ministres du 3 décembre 2008 qui a introduit le rapport d’étape de la RGPP du même jour, précisait que la RGPP « concerne […] de nombreuses réformes majeures, qui vont profondément transformer l’organisation de plusieurs ministères, comme les bases de défense, les agences régionales de santé, la mise en œuvre de l’autonomie des universités, le transfert de la gendarmerie nationale sous l’autorité du ministère de l’Intérieur ou la constitution de la direction générale des finances publiques. Cela concerne également la restructuration complète des administrations centrales de la quasi-totalité des ministères et la mise en place des nouvelles directions déconcentrées, moins nombreuses et plus opérationnelles. »

Si l’on ajoute à ce panorama la réforme de la carte judiciaire, sont ainsi effectivement énumérées les principales réformes structurelles, à tout le moins les plus emblématiques de la RGPP, certaines d’entre elles étant présentées infra de manière plus détaillée. Cela signifie aussi qu’il existe plusieurs centaines de mesures de la RGPP dont la visibilité est plus réduite, voire, parfois, modeste.

Afin d’illustrer cette diversité et le fait que la RGPP concerne effectivement tous les ministères, le tableau suivant fait le choix de citer une mesure achevée et une mesure en cours (dotée d’un feu vert) par ministère, parmi les moins connues, selon les éléments figurant dans le rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011.

Pour chaque ministère, le même tableau indique le nombre des mesures achevées, et en cours, en indiquant pour ces dernières combien sont associées à chacune des couleurs verte, orange et rouge qui structurent le système de notation décrit supra.

MESURES DE LA RGPP ACHEVÉES ET EN COURS PAR MINISTÈRE

 

Exemples de mesures

Nombre total de mesures

dont : mesures finies

dont : mesures en cours

Mesures en cours

dont feu vert

dont feu orange

dont feu rouge

dont mesures nouvelles

Services
du Premier ministre

Une mesure en cours : Mettre en œuvre une charte ergonomique partagée par l’ensemble des sites publics.

22

10

12

9

0

0

3

Une mesure finie : Supprimer le Haut Conseil de la Coopération Internationale.

Affaires étrangères et européennes

Une mesure en cours : Étudier la possibilité d’une simplification des règles et pratiques de la comptabilité publique à l’étranger.

32

7

25

16

5

4

0

Une mesure finie : Développement de la formule des postes mixtes consulats et missions économiques.

Défense et anciens combattants

Une mesure en cours : Rationaliser le soutien pétrolier apporté au profit des forces armées et des services communs.

37

4

33

27

6

0

0

Une mesure finie : Mettre en place une commission d’harmonisation juridique pour mettre à jour les textes d’organisation du ministère et simplifier les réglementations.

Écologie, développement durable, transports et logement

Une mesure en cours : Dématérialiser la déclaration d’intention d’aliéner.

36

9

27

23

1

0

3

Une mesure finie : Lancement d’une mission de réflexion sur les missions et les carrières des ingénieurs publics.

Justice et libertés

Une mesure en cours : Renforcer la maîtrise du ministère de la Justice sur ses projets informatiques.

33

9

24

17

4

3

0

Une mesure finie : Fédérer les trois inspections du ministère au sein d’une inspection générale.

Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

Une mesure en cours : Mettre fin à l’obligation de tenue et de transmission par les communes d’outre-mer de triplicatas des actes d’état civil.

70

13

57

44

4

3

6

Une mesure finie : Coordination et rationalisation des contrôles dans le secteur des hôtels-cafés-restaurants.

Économie, finances et industrie

Une mesure en cours : Permettre le transfert du siège social d’une entreprise en une seule démarche.

41

16

25

19

3

0

3

Une mesure finie : Suppression de l’Inspection générale du tourisme.

Travail, emploi et santé

Une mesure en cours : Mutualiser les bureaux des cabinets des ministères sociaux.

42

9

33

21

4

1

7

Une mesure finie : Mettre en place un nouveau dispositif d’accompagnement à la création et à la reprise d’entreprise (NACRE).

Éducation nationale, jeunesse et vie associative

Une mesure en cours : Rationaliser la répartition géographique des inspecteurs de la jeunesse et des sports.

33

8

25

22

0

2

1

Une mesure finie : Réorganiser et rationaliser l’Institut National de la Jeunesse et de l’Éducation Populaire.

Budget, comptes publics, fonction publique et Réforme de l’État

Une mesure en cours : Développer les échanges dématérialisés avec les notaires.

58

7

51

43

2

1

5

Une mesure finie : Permettre aux entreprises retenues dans le cadre d’un marché public d’obtenir une attestation fiscale dématérialisée.

Enseignement supérieur et recherche

Une mesure en cours : Offrir aux chercheurs un accès à l’information technique et scientifique au meilleur coût.

25

4

21

15

4

0

2

Une mesure finie : Réforme du Haut conseil de la science et la technologie (HCST) dans sa composition et dans son fonctionnement, pour en faire l’organe interministériel de référence dans la définition d’une stratégie de recherche.

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Une mesure en cours : Développer la télédéclaration des demandes d’aide.

17

5

12

11

1

0

0

Une mesure finie : Après apurement des dettes et respect des engagements, transfert des biens des Sociétés d’aménagement régional aux régions, et arrêt du financement des travaux d’hydraulique par le ministère.

Culture et communication

Une mesure en cours : Moderniser la gestion du Centre Pompidou.

18

2

16

11

5

1

0

Une mesure finie : Regrouper le Palais de la découverte et la Cité des sciences.

Solidarité et cohésion sociale

Une mesure en cours : Alléger le processus de certification des formations dans les champs des ministères sociaux.

14

4

10

8

0

2

0

Une mesure finie : Fusion de deux administrations centrales chargées de fonctions support et mutualisation des fonctions supports.

Ville

Une mesure en cours : Rénover les modalités de soutien et de développement des quartiers prioritaires.

6

4

2

2

0

0

0

Une mesure finie : Encouragement du recours à des outils de type « opération d’intérêt national ».

Sports

Une mesure en cours : Optimiser l’aide de l’État en faveur du sport (fédérations sportives, associations, collectivités locales).

11

2

9

8

0

1

0

Une mesure finie : Fusion de deux administrations centrales chargées de fonctions support et mutualisation des fonctions supports.

Réforme de l’administration territoriale de l’État

Une mesure en cours : Rapprocher chaque fois que possible des services de l’État les services d’opérateurs dont le mode d’intervention et les missions sont proches.

16

11

5

5

0

0

0

Une mesure finie : Les préfets de région et de département seront les délégués des agences nationales lorsque celles-ci exercent leurs attributions sur le territoire.

Ce tableau doit être lu avec précaution. Ayant pour objet de donner à voir et de présenter ce que sont les mesures proprement dites de la RGPP, le choix des mesures en cours et finies citées dans le tableau est arbitraire. Les énoncés des mesures ainsi sélectionnées sont caractérisés par leur relative clarté ; ont donc été écartés dans cette présentation, les libellés plus obscurs, parce que souvent généraux. Le choix a été fait aussi de cantonner la sélection des mesures en cours parmi celles d’entre elles qui bénéficient d’un feu vert au titre du rapport du 9 mars 2011, afin de ne pas conduire à une discrimination entre les ministères quant à cette présentation.

Les totaux « interministériels » du nombre des mesures n’apparaissent pas dans ce tableau, car ils seraient inexacts. En effet, une même mesure de la RGPP est parfois référencée deux fois, voire trois, au titre de deux ou plusieurs ministères qui assument conjointement la responsabilité de sa mise en œuvre. À titre d’exemple :

– sur les 14 mesures finies ou en cours relevant du ministère de la Solidarité et de la cohésion sociale, 10 d’entre elles sont partagées avec au moins un autre de ces trois ministères : a) Travail, emploi et santé, b) Éducation nationale, jeunesse et vie associative et c) Sports ;

– la mesure finie « Fusion de deux administrations centrales chargées de fonctions supports et mutualisation des fonctions supports », citée dans le tableau précédent au titre du ministère de la Solidarité et de la cohésion sociale, est associée à deux autres ministères : a) Travail, emploi et santé et b) Sports.

2.– Les mesures les plus importantes et les plus emblématiques de la RGPP concernent les structures des administrations centrales et déconcentrées

a) La réforme de l’administration territoriale de l’État (Réate)

La Réate constitue sans doute la réorganisation administrative la plus profonde associée à la RGPP, puisqu’elle concerne toute l’administration déconcentrée de l’État ; c’est-à-dire, hors l’éducation nationale et la justice, une partie importante des agents publics de l’État et des services publics locaux déconcentrés. Constituée de 16 mesures dans le rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011 (dont 11 sont achevées) et largement analysée par notre collègue sénateur Dominique de Legge dans son rapport d’information relatif à la RGPP de juin 2011 ((82), elle peut être ainsi résumée :

– le décret n° 2010-146 du 16 février 2010 (83) prévoit une prééminence de droit commun du préfet de région sur les préfets de département, se substituant aux dispositions précédentes prévoyant pour le préfet de région un rôle de coordination, d’animation et de garant de la cohérence de l’action des préfets de département. Ceux-ci agissent désormais conformément aux instructions du préfet de région. Celui-ci peut, sous certaines conditions, agir en lieu en place des préfets de département par évocation de tout ou partie de l’une de leurs compétences ;

– dans les régions métropolitaines hors l’Île-de-France, les services de l’État, sont regroupés depuis le 1er janvier 2010 dans huit services au lieu d’une vingtaine auparavant (84). Ces services sont les directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF), les directions régionales des affaires culturelles (DRAC), les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte), les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), les directions régionales des finances publiques (DRFP), les directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS), les rectorats et l’Agence régionale de la santé (ARS). Chaque direction régionale est placée sous l’autorité du préfet de région et constitue un service déconcentré du ou des ministères chargés des compétences correspondant aux missions de la direction considérée ;

– dans les départements métropolitains hors l’Île-de-France, les services de l’État sont regroupés depuis le 1er janvier 2010 en deux ou trois directions interministérielles(85). Il s’agit des directions départementales des territoires (DDT), de la cohésion sociale (DDCS) et de la protection des populations (DDPP) dans les départements dont la population est supérieure à 400 000 habitants. Dans les départements où la population n’atteint pas ce seuil, la cohésion sociale et la protection des populations relèvent d’une même direction départementale (DDCSPP). Les directions départementales sont des services déconcentrés de l’État relevant du Premier ministre et placés sous l’autorité du préfet de département.

Ces réorganisations institutionnelles et administratives sont adossées à des objectifs substantiels de réduction du nombre des ETPT en préfectures et donc d’économies en termes de dépenses de personnel et de fonctionnement. Notre collègue sénatrice Michèle André a évalué le montant de ces économies potentielles, dans un rapport d’information publié en octobre 2010 (86), à 122 millions d’euros sur les trois exercices 2009 à 2011, plus précisément dans les domaines de la délivrance des titres sécurisés notamment d’identité, du contrôle de légalité et des fonctions support.

Pour ces trois domaines, 2 107 ETPT devraient être supprimés sur la période triennale 2009-2011, pour un effectif initial de 18 000 ETPT, soit, in fine, une baisse de 11,7 % des effectifs. Ces suppressions d’effectifs sont « valorisées » à 104 millions d’euros d’économies sur la période, auxquels s’ajouteraient 18 millions d’euros d’économies en fonctionnement.

b) La création de la direction générale des finances publiques (DGFip) et la fusion des réseaux de la comptabilité publique et des impôts

La création de la direction générale des finances publiques (DGFip) par la fusion des directions générales de la comptabilité publique (DGCP) et des impôts (DGI) – et de leurs réseaux – a été décidée en amont du travail des équipes mixtes d’audit qui ont préparé les décisions prises à l’occasion des CMPP de 2007 et 2008. Dans son discours du 10 juillet 2007 lançant la phase opérationnelle de la RGPP, le Premier ministre annonçait ainsi que cette décision était prise ((87).

Évoquée par le rapport accompagnant le CMPP du 12 décembre 2007 au titre de la réorganisation de l’État déconcentré, elle est présentée dans le rapport accompagnant le CMPP du 4 avril 2008, alors que la DGFip a été créée le jour précédent, par le décret du 3 avril 2008 (88). Cette création clôturait d’ailleurs une période de « préfiguration » confiée à M. Philippe Parini, qui est devenu le directeur général de la DGFip par décret du 9 avril 2008.

Cette réforme, envisagée au moins depuis l’année 2000 (89), tend à l’intégration administrative des fonctions d’établissement et de recouvrement des impositions ; selon le secrétariat général des ministères économiques et financiers, elle a aussi pour objectifs la « mise en place d’un guichet fiscal unique des particuliers, [l’]enrichissement du service rendu aux élus locaux, [le] renforcement de l’efficacité de l’État, à travers notamment la lutte contre la fraude fiscale, [l’] amélioration des perspectives professionnelles des agents au sein de cet ensemble élargi. »

La réforme, qui concernait en 2007 125 000 agents, est aujourd’hui quasiment achevée, y compris dans ses détails opérationnels. Plusieurs décrets du 26 août 2010 ont organisé, à compter du 1er septembre 2011, la fusion des corps des agents des deux anciennes directions générales par la création de corps de fonctionnaires propres à la DGFip. Le rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011 précise par ailleurs qu’à la fin de l’année 2011, « la totalité des 100 directions locales uniques et des 750 guichets fiscaux uniques seront en place. »

Dans une communication adressée à la commission des Finances du Sénat en octobre 2011 (90), la Cour des comptes observe que « ces processus lourds et complexes ont été conduits de manière maîtrisée, en respectant les délais. La fusion, dans le périmètre qui lui a été fixé, sera pratiquement achevée fin 2011 sous l’angle juridique et en matière d’organisation. »

La Cour des comptes établit au demeurant un certain nombre de diagnostics sur l’ensemble des aspects de cette fusion. Plusieurs d’entre eux recoupent certaines des remarques faites par les rapporteurs dans le présent rapport pour l’ensemble de la RGPP, par exemple l’effectivité et l’efficacité de certaines transformations issues des mesures de la RGPP mais aussi la difficulté d’établir un bilan financier exhaustif des réformes engagées tant en dépenses de personnel qu’en dépenses de fonctionnement. On note aussi la tonalité positive relative au dialogue social et à l’accompagnement des personnels, la création de la DGFip semblant ainsi constituer une exception au regard de l’appréciation portée en la matière par les représentants syndicaux des agents de l’État sur la RGPP (cf. la première partie du présent rapport) :

– « pendant la fusion, la DGFip a dû assurer le déploiement de Chorus, la création du SRE (service des retraites de l’État) et de l’ONP (office national de paie), et faire face à des tâches conjoncturelles liées à la gestion de la crise et du plan de relance. Elle a su y faire face alors qu’elle était en phase de constitution. » ;

– « il n’est […] pas possible de démontrer que la fusion, à ce stade, a permis de réaliser des gains de productivité supplémentaires par rapport à la période antérieure. » ;

– « des avantages ont été accordés aux agents (notamment les primes pérennisées, les plans de requalification, l’anticipation du nouvel espace statutaire, les améliorations contenues dans les statuts des corps unifiés). Ils ont été présentés comme une contrepartie de la fusion. Le surcoût de ces mesures contribue à hauteur de 209,1 millions d’euros à l’augmentation de la masse salariale entre 2007 et 2012. » ;

– « le taux de rétrocession aux agents de la moitié des économies réalisées grâce aux réductions d’effectifs a dépassé les 50 % sur les trois premières années de la fusion (2009-2011), mais selon l’administration cette norme commune de la RGPP devrait être approximativement respectée sur la période 2008-2012. » ;

– « la fusion a entraîné d’autres coûts, la plupart liés aux investissements immobiliers, légèrement supérieurs à 200 millions d’euros […]. Cependant ces coûts ont été partiellement compensés dès la période 2008-2012 par une fraction des gains réalisés en matière immobilière (cessions, abandon de locations) ainsi que par des économies de gestion (en matière d’informatique et de dépenses de fonctionnement). Il est toutefois difficile d’établir un bilan financier exhaustif et la DGFIP elle-même ne s’y est pas attachée. » ;

– « la direction a conduit une action d’information, de consultation et de communication étendue. Le fonctionnement des instances institutionnelles du dialogue social a été enrichi par des initiatives visant à associer les agents aux transformations (ateliers, groupes métiers,…). […] La fusion est largement considérée par les agents, surtout par les cadres, comme un fait acquis et un atout pour l’avenir. »

c) La création des agences régionales de santé (ARS)

Le rapport accompagnant le CMPP du 4 avril 2008 précisait qu’« une réforme ambitieuse de l’administration régionale de la santé sera conduite, en regroupant au sein d’agences régionales de santé (ARS) les services déconcentrés actuels de l’État (la partie “santé” des DDASS et des DRASS), les agences régionales de l’hospitalisation – ARH – , les unions régionales des caisses d’assurance maladie – URCAM – , les MRS (91), les groupements régionaux de santé publique – GRSP – , et une partie des services régionaux des trois régimes de l’Assurance maladie (92). Le périmètre de compétence des ARS sera large, incluant la prévention et l’éducation à la santé, les soins de ville, les soins hospitaliers et le médico-social. »

La création effective des ARS a été actée par la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST). L’article L. 1431-2 du code de la sécurité sociale précise que les ARS ont notamment pour mission « de mettre en œuvre au niveau régional la politique de santé publique [et] de réguler, d’orienter et d’organiser, notamment en concertation avec les professionnels de santé, l’offre de services de santé, de manière à répondre aux besoins en matière de soins et de services médico-sociaux, et à garantir l’efficacité du système de santé ». L’article L. 1432-1 du code de la santé publique précise que les ARS sont des établissements publics administratifs de l’État placés sous « la tutelle des ministres chargés de la santé, de l’assurance maladie, des personnes âgées et des personnes handicapées ». Elles sont dotées d’un conseil de surveillance et sont dirigées par un directeur général. Selon le secrétariat général des ministères sociaux, chaque ARS est désormais liée à ses autorités de tutelle par un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens signé pour la période 2010-2013.

Vingt-six ARS ont été créées le 1er avril 2010, après une phase de préfi-guration de septembre 2009 à mars 2010. Les 26 responsables « préfigurateurs », désignés à l’occasion du Conseil des ministres du 30 septembre 2009, sont devenus les directeurs généraux des ARS.

Selon le secrétariat général des ministères sociaux, la mise en œuvre de la loi du 21 juillet 2009 dite HPST devrait se poursuivre par l’adoption par chacune des ARS au cours de l’hiver 2011-2012 du plan régional de santé (PRS), prévu par l’article L. 1434-1 du code de la santé publique, qui doit définir « les objectifs pluriannuels des actions que mène l’agence régionale de santé dans ses domaines de compétences, ainsi que les mesures tendant à les atteindre ». Le PRS a vocation à assurer la déclinaison dans chaque région, eu égard à ses caractéristiques et à ses besoins, des décisions nationales en matière, entre autres, de politique hospitalière, de relation avec les médecins libéraux, de veille et de sécurité sanitaires, de politique médico-sociale (notamment par les relations avec les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes – Ehpad) ou encore de gestion du risque (93).

Selon le rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011, la création des ARS a en retour rendu nécessaire, à tout le moins souhaitable, une réforme de l’administration centrale du ministère chargé de la santé ; il précise ainsi que « la création de la direction générale de l’offre de soins (DGOS), issue de la direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS) a recentré le pôle santé du ministère du Travail en l’inscrivant pleinement dans la nouvelle gouvernance du système de santé, rendue possible par la création des ARS. Une approche globale de l’offre de soins est ainsi appréhendée, intégrant aussi bien la ville que l’hôpital. Dans ce cadre, la DGOS passe d’une logique d’expertise à une logique de pilotage stratégique, de contrôle, d’évaluation et d’animation. »

Le ministère du Budget a précisé à vos rapporteurs que les « gains en emplois liés à la création des ARS sont estimés à 141 ETP sur la période 2009-2010. » Cette mesure est donc plus une réforme profonde de l’État qu’une mesure de réduction des effectifs.

d) La réforme de la carte judiciaire

La réforme de la carte judiciaire a été décidée en amont du lancement opérationnel de la RGPP. Elle constitue, selon les termes du communiqué du Conseil des ministres du 20 juin 2007, l’un des « quatre chantiers concrets […] lancés […] en même temps que le chantier général de révision, pour montrer l’ambition des réformes ».

La réforme de la carte judiciaire a été menée sur trois ans et achevée le 31 décembre 2010, le nombre des juridictions passant durant cette période de 1 206 à 819, soit une baisse d’environ 30 %. Selon le Gouvernement, en réponse aux rapporteurs, « 401 juridictions […] ont été fusionnées avec une juridiction voisine connaissant un niveau d’activité inférieur à la moyenne ». Parmi ces 401 juridictions, on compte 178 tribunaux d’instance, 21 tribunaux de grande instance, 55 tribunaux de commerce, 62 conseils des prud’hommes et 85 greffes détachés de tribunaux d’instance. Cette réforme a conduit par ailleurs à la création de sept tribunaux d’instance, six tribunaux de commerce et d’un conseil de prud’hommes.

Le Gouvernement a précisé à vos rapporteurs que les « 1 800 agents concernés par la réforme ont bénéficié d’un plan d’accompagnement social. » Cette réforme a également été accompagnée financièrement par les professionnels privés du droit concernés (avocats du ressort des juridictions supprimées, notamment) (94).

e) La création des bases de défense

Le rapport accompagnant le CMPP du 4 avril 2008 précisait qu’était décidée la création d’« un réseau de l’ordre de 90 bases de défense dotées d’un commandement propre et dont la vocation est de soutenir les unités relevant de leur secteur géographique ». Cette mesure est une composante d’une réforme plus large du soutien aux armées que le même rapport justifiait en ces termes : « le moment est venu d’optimiser les soutiens qui représentent aujourd’hui plus de 50 % des effectifs. De fait, le modèle conçu pour une armée de conscription doit être adapté à une armée professionnelle, et le soutien doit s’adapter à des générations de matériels moins nombreux mais plus complexes. Tout particulièrement, l’existence de chaînes de soutien par armée ne se justifie plus systématiquement, ni le nombre parfois important d’échelons hiérarchiques ni la dispersion et la taille insuffisante de nombreuses entités locales. Une démarche systématique d’efficience mérite donc d’être engagée. Elle doit être considérée comme le parachèvement de la professionnalisation. »

Le déploiement des bases de défense a été généralisé le 1er janvier 2011, après des phases d’expérimentation en 2009 et 2010 portant sur 18 bases de défense ; la réussite de ces expérimentations a permis d’anticiper la généralisation de ce déploiement initialement prévue en 2014. Les bases de défense sont finalement au nombre de 60, dont 51 en métropole et 9 dans les départements et collectivités d’outre-mer et à l’étranger.

Le libellé même de la mesure, telle qu’elle apparaît dans le rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011 précise que chaque base de défense est dotée « d’un commandement propre soutenant les unités dans [son] secteur géographique » et devient la seule formation administrative au niveau local. Le rapport du 9 mars 2011 indique qu’« une base de défense est une aire géographique à l’intérieur de laquelle les fonctions support de toutes les implantations de la défense sont mutualisées afin de dégager des économies d’échelle et d’expertise ». Le soutien aux forces armées, servi par les bases de défense, concerne la restauration, l’hébergement, l’administration des ressources humaines, les problématiques budgétaires, le transport et, dans des domaines plus spécialisées et tournées vers l’activité de défense, les systèmes d’information, la santé et certaines infrastructures.

À ce stade, un échelon intermédiaire, les états-majors de soutien défense placés entre l’état-major des armées et les bases de défense, a été autorisé par le ministre de la défense jusqu’à fin 2012. Ainsi, selon le ministère de la Défense en réponse aux rapporteurs, le dispositif « s’écarte […] de la cible accessible à terme ». Il s’agit de prendre « en compte des besoins de pilotage de la transition et de consolidation de la réforme […] tout particulièrement au profit de l’armée de terre ». À la fin de cette période transitoire, le ministre de la défense décidera définitivement de l’opportunité de maintenir ou non cet échelon intermédiaire.

Le ministère de la Défense précise que « même si le projet axé sur les [bases de défense] n’est pas associé à un objectif d’économies de personnels, puisqu’il bénéficie des rationalisations entreprises dans chaque chantier RGPP, les gains résultant des mutualisations qu’autorise le regroupement géographique des différents acteurs sont estimés à quelque 10 000 emplois. »

3.– La RGPP a concerné l’organisation des administrations centrales de tous les ministères

a) Les mesures de la RGPP touchant les administrations centrales des ministères

Outre la création de la DGFip, présentée supra, par la fusion des directions générales de la comptabilité publique et des impôts, les administrations centrales de nombreux ministères ont été profondément impactées par certaines mesures de la RGPP.

Le tableau suivant énumère, sur la base des informations issues du rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011, les mesures en cours ou finies, associées à chaque ministère, les plus structurantes du point de vue des administrations centrales, qu’il s’agisse de création, de suppression, de fusion, de déménagement ou, plus généralement, de rationalisation de l’action ou de l’organisation. Un nota bene permet de préciser dans certains cas le libellé des mesures, afin d’apprécier plus précisément en quoi elles concernent une ou des administrations centrales.

PRINCIPALES MESURES DE LA RGPP RELATIVES À L’ORGANISATION DE L’ADMINISTRATION CENTRALE DES MINISTÈRES

Ministères

Mesures

Services du Premier ministre

Créer la direction de l’information légale et administrative. Moderniser la mission d’édition, de diffusion et d’information du public assurée par la Documentation française et la direction des Journaux officiels.

Affaires étrangères et européennes

Réorganiser l’administration centrale du ministère afin de renforcer sa capacité à définir la stratégie et à exercer la tutelle de ses opérateurs.

Défense et anciens combattants

Regrouper l’administration centrale du ministère dans un format resserré sur le site de Balard.

Écologie, développement durable,
transports et logement

Nouvel organigramme du ministère, centré sur les enjeux fondamentaux, qui permet le passage de 35 directions d’administration centrale à 5 grandes directions métier et un secrétariat général.

Justice et libertés

1.– Optimisation des fonctions transversales en administration centrale, secrétariat général rénové.

2.- Rationaliser l’administration centrale du ministère Nota bene : le rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011 précise que « les travaux interministériels devront être conduits afin d’arrêter définitivement le choix du futur site unique de l’administration centrale du ministère (hors Vendôme), les modalités de financement et le calendrier du déménagement) ».

Intérieur, outre-mer,
collectivités territoriales et immigration

1.– Transférer la GN sous l’autorité du Ministre de l’Intérieur.

2.– Transformer l’administration centrale de l’outre-mer en délégation centrée sur les tâches à forte valeur ajoutée.

Économie, finances et industrie

1.– Rationaliser les fonctions supports de la DG Trésor (administration centrale et réseau extérieur) (Nota bene : le rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011 précise que « la direction générale du Trésor poursuit la rationalisation de ses fonctions supports : la fonction comptabilité du réseau extérieur a d’ores et déjà été mutualisée avec les services du ministère des Affaires étrangères et européennes dans le cadre de la création des services communs de gestion. Le ministère de l’Économie, des finances et de l’industrie a ainsi transféré 23 agents vers celui des Affaires étrangères et européennes. »

2.– Renforcement de la coordination entre les administrations centrales (DGCCRF et DGAL) en matière de contrôle de l’hygiène alimentaire.

Travail, emploi et santé

1.– Recentrer les directions du pôle « santé » sur leur cœur de métier.

2.– Fusion de deux administrations centrales chargées de fonctions support (DAGPB et DRHACG) et mutualisation des fonctions supports (Nota bene : mesure portée par ailleurs par le ministère des Solidarités et de la cohésion sociale et par le ministère chargé des sports).

Éducation nationale, jeunesse et vie associative

Fusion de la direction de la vie associative avec celle de la jeunesse et de l’éducation populaire.

Budget, comptes publics, fonction publique et Réforme de l’État

1.– Création d’une nouvelle administration centrale, la direction générale des finances publiques, en mettant en commun les métiers proches et permettant une diminution de son format.

2.– Transfert de la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) au ministère du Budget, des Comptes publics et de la Réforme de l’État.

3.– Créer la direction interministérielle des systèmes d’information et de communication (DISIC).

Enseignement supérieur et recherche

Redéfinition des rôles et organisations des administrations centrales pour accompagner les mutations de la politique publique.

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

1.– Mutualiser et rationaliser les fonctions support en administration centrale, adapter l’organisation des organismes de contrôle.

2.– Regroupement de la direction générale de la forêt et des affaires rurales et de la direction générale des politiques économiques, européennes et internationales, qui traitent toutes deux de la politique agricole, dans une direction générale des politiques agricoles, agroalimentaires et des territoires.

Culture et communication

Poursuivre la rationalisation et la mutualisation des fonctions support en administration centrale et dans les services déconcentrés.

Solidarité et cohésion sociale

Recentrer la direction du pôle « cohésion sociale » de l’administration centrale sur son cœur de métier.

Ville

Réviser la mission et le périmètre de la délégation interministérielle à la ville (DIV) pour la recentrer sur le Secrétariat général du comité interministériel des villes (SG–CIV) et sur le pilotage des opérateurs.

Le rapport du 9 mars 2011 résume et illustre l’avancement « quantitatif » de l’ensemble des réformes liées à la RGPP concernant les administrations centrales en précisant qu’« au global, 10 % des postes de directeurs ont déjà été supprimés. Ceci a nécessité des réorganisations importantes (au ministère de la Culture et de la communication, où le nombre de directions d’administration centrale a été réduit de dix à quatre, et au ministère de l’Écologie, du développement durable, des transports et du logement où le nombre de postes de directeurs a été réduit de moitié) […] »

b) L’installation sur le site de l’Arche de la Défense du ministère de l’Écologie

Pour le ministère de l’Écologie, la modification en profondeur de son organisation administrative – illustrée par les développements précédents et la mesure qui réduit le nombre de ses directions de 35 à 5 (95) – s’est accompagnée d’un regroupement de son administration centrale sur le site de l’Arche de la Défense.

Le ministère de l’Écologie, répondant à vos rapporteurs, établit un lien d’efficacité entre la restructuration administrative et le regroupement des agents sur ce site. Il indique ainsi que « la création du ministère […], issu du regroupement de trois pôles ministériels (Équipement, Écologie, Énergie) s’est traduite par une refondation des anciennes administrations centrales de ces ministères. Une organisation transversale a été mise en place autour d’un nombre restreint de directions : le secrétariat général, le commissariat général au développement durable, cinq directions générales et deux délégations.

« Pour permettre la mise en œuvre effective des synergies entre ces directions, l’ensemble de l’administration centrale, à l’exception de la direction générale de l’aviation civile, a été regroupé sur le site de la Défense, conformément au schéma pluriannuel de stratégie immobilière de l’administration centrale actualisé en 2008 et validé par le ministre du Budget. »

Le ministère considère que les volets administratifs et immobiliers de la réorganisation du ministère conduisent à des impacts sur la qualité du travail des agents. Il précise que « le regroupement des services sur le site de la Défense n’a pas été un simple rapprochement géographique des trois structures d’origine. […] La proximité entre agents des différents services était indispensable pour créer une culture commune et fédérer ce nouveau ministère. C’est aujourd’hui un facteur d’efficience et d’efficacité, facilitant les échanges formels et informels, aux différents niveaux de l’administration, limitant les déplacements aussi bien internes à l’administration centrale que pour les représentants des services déconcentrés. »

c) Le regroupement des sites parisiens du ministère de la Défense à Balard

Le même résultat d’efficience administrative doit pouvoir être attendu pour le ministère de la Défense au titre de la mesure « Regrouper l’administration centrale du ministère dans un format resserré sur le site de Balard » décidée par le CMPP du 12 décembre 2007 (96).

Répondant à vos rapporteurs lors de son audition le 24 mai 2011, M. Christian Piotre, secrétaire général de l’administration du ministère de la Défense, précisait que le choix de réaliser cette opération par un contrat de partenariat n’avait pas été précédé d’une réflexion sur les avantages et inconvénients comparés d’autres méthodes et avait relevé d’une décision de principe de l’exécutif.

Le contrat de partenariat est, aux termes de l’article 1er de l’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat, « un contrat administratif par lequel l'État ou un établissement public de l'État confie à un tiers, pour une période déterminée en fonction de la durée d'amortissement des investissements ou des modalités de financement retenues, une mission globale ayant pour objet la construction ou la transformation, l'entretien, la maintenance, l'exploitation ou la gestion d'ouvrages, d'équipements ou de biens immatériels nécessaires au service public, ainsi que tout ou partie de leur financement à l'exception de toute participation au capital.

« Il peut également avoir pour objet tout ou partie de la conception de ces ouvrages, équipements ou biens immatériels ainsi que des prestations de services concourant à l'exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée. »

Au terme d’une procédure de dialogue compétitif, le ministère de la Défense a passé un contrat de partenariat, le 30 mai 2011, avec la société Opale, entité créée à cette occasion par le groupe Bouygues associé aux sociétés Thalès, Dalkia et Sodexo. Le chantier principal portant sur l’implantation de l’administration centrale à Balard doit débuter en février 2012, pour un achèvement prévu en juillet 2014.

Le contrat de partenariat consiste à confier à un opérateur privé les travaux immobiliers (le coût de la construction étant assumé par cet opérateur), ainsi qu’une partie de la gestion fonctionnelle du ou des bâtiments, pendant une durée au cours de laquelle il reçoit une redevance annuelle de la part du ministère et au terme de laquelle celui-ci « récupère » en pleine propriété le ou les bâtiments. Le montant de cette redevance serait aujourd’hui évalué à 154 millions d’euros versés chaque année de 2014 à 2041.

Une fois l’« option Balard » choisie, il est certain que le contrat de partenariat présentait des avantages pour le ministère de la Défense, eu égard à la complexité juridique, fonctionnelle et financière du dossier ; et ce par rapport à d’autres solutions comme les marchés séparés (marchés de maîtrise d’ouvrage de droit commun), et pour les modes opératoires sous maîtrise d’ouvrage privée, la convention de délégation de service public ou l’autorisation d’occupation du domaine public assortie d’une convention de location avec option d’achat (AOT/LOA).

Au demeurant, dans le contexte d’une activité publique cruciale, le contrat de partenariat signé par le ministère de la Défense repose sur une équation financière complexe dont il sera nécessaire de vérifier qu’elle demeurera équilibrée à l’avenir, s’agissant notamment des gains attendus des cessions des sites actuels du ministère à Paris en région parisienne et de la valorisation au bénéfice de l’État d’une partie du site de Balard (« corne ouest ») au titre d’activités privées.

Il aurait en tout état de cause été souhaitable de procéder au préalable à une comparaison, présentée publiquement, des avantages et inconvénients de chacune des solutions envisageables.

4.– Les « mots d’ordre » de la grande majorité des mesures de la RGPP : optimiser, rationaliser, mutualiser, fusionner, moderniser

a) D’importantes mesures de la RGPP concernent les fonctions supports de l’État en matière notamment immobilière, d’achats et de paye des agents

Le ministère du Budget porte deux mesures substantielles sur les fonctions supports de l’État, dont les principes et le contenu sont analysés dans la troisième partie du présent rapport, eu égard aux économies substantielles en fonctionnement qui, selon la programmation du Gouvernement, leur sont attachées. Il s’agit des mesures suivantes :

– « Dynamiser la politique immobilière de l’État et de ses opérateurs » ; 415 millions d’euros d’économies sont attendus en 2013 de cette mesure, qui repose au demeurant pour une partie importante sur des principes et modalités antérieurs à la RGPP ;

– « Optimiser la politique d’achats de l’État », pour 1 000 millions d’euros d’économies programmés en 2013.

Une autre mesure portée par le ministère du Budget concerne, pour l’ensemble du Gouvernement, la fonction transverse de la paye des agents de l’État.

Selon le rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011, qui lui attribue un feu orange, la mesure « Mettre en place l’Opérateur national de paye » (ONP) a pris du retard, du fait de difficultés portant sur son chantier informatique. Le rapport du 9 mars 2011 précise qu’« un audit a été diligenté pour s’assurer de la solidité du nouveau calendrier et avancer le cas échéant des propositions en matière de maîtrise des risques. »

L’ONP a été créé par le décret n° 2007-903 du 15 mai 2007, soit antérieurement au lancement de la RGPP. Il s’agit d’un service à compétence nationale rattaché à la DGFip et à la DGAFP. L’article 3 du décret du 15 mai 2007 précise que l’ONP « assure la paie des traitements, salaires et accessoires servis par les ordonnateurs principaux et secondaires aux fonctionnaires et agents de l’État ». Pour exercer effectivement cette fonction de gestion, l’article 4 du même décret prévoit que l’ONP doit au préalable concevoir et mettre en œuvre deux systèmes d’information respectivement pour la mise en œuvre opérationnelle du versement de la paye des agents de l’État (« SI Paye » ci-après) et destiné à favoriser notamment l’analyse de la paye et des ressources humaines.

S’agissant du premier de ces systèmes d’information, le PAP annexé au PLF 2012 de la mission interministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » précise que, « L’ONP a […] entrepris, avec l’aide d’un groupement de prestataires (éditeur, intégrateur) retenu à l’issue d’un dialogue compétitif, la conception et le développement d’un nouveau système d’information paye (SI Paye) élaboré à partir d’un progiciel du marché.

« L’objectif “Améliorer et fiabiliser le processus de la paye des agents de l’État” retrace dans son indicateur l’avancement de la réalisation du pilote du SI Paye, qui permettra d’éditer les premières payes des agents de l’État en 2013. » (97)

Pour mesurer cet avancement, l’indicateur s’appuie sur une liste d’étapes successives à accomplir pour parvenir à la réalisation du pilote, un pourcentage de temps de réalisation de l’ensemble du processus étant associé à chacun de ces éléments (98). Le PAP 2012 de la mission interministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » indique que l’achèvement en 2011 de l’étape « développement et paramétrage », portant presque le tiers du temps programmé pour l’ensemble du processus, devrait faire passer l’indicateur portant sur son stade d’avancement de 43,8 % en 2010 à 75 % en 2011. La livraison du pilote SI paye demeure envisagée pour 2013.

Les « risques » évoqués par le rapport du 9 mars 2011 sont liés, selon le PAP 2012 de la mission interministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » (99) :

– « à l’envergure sans équivalent du projet, à sa haute complexité technique et fonctionnelle et à son caractère interministériel ;

– « à l’évolution de la règlementation en matière de gestion administrative et de paye ;

– « à la sécurité, dans la mesure où les systèmes d’informations traitent les données personnelles et de paye de l’ensemble des agents de l’État ;

– « au déploiement et à l’acceptation du projet, décisive pour son succès. »

En réponse aux questions de vos rapporteurs, le ministère du Budget a précisé que le retard pris par la mesure correspond à un report de 15 mois du raccordement des premiers ministères au « SI paye », en répercussion d’un retard important dans l’achèvement de la conception détaillée du progiciel. Selon le ministère du Budget, l’audit évoqué par le rapport du 9 mars 2011 « n’a pas remis en cause le calendrier des étapes ultérieures, tout en soulignant qu’il devait être sécurisé par des actions à conduire tant par l’ONP que par ses partenaires. La mission souligne enfin l’adhésion des ministères et maîtrises d’ouvrages interministérielles rencontrées au projet SI Paye et leur soutien au souci de qualité porté par l’ONP. »

La même annexe au PLF 2012 précise les économies attendues à terme de la mesure tendant à la mise en place de l’ONP (100) :

« – la réorganisation de la chaîne paye permettra un gain de 3 000 ETP sur le segment ministériel ;

« – un gain de 800 ETP est attendu au sein du périmètre DGFip. »

b) De très nombreuses autres mesures de la RGPP tendent à des actions d’optimisation, rationalisation, mutualisation, modernisation et fusion pour de multiples services et fonctions administratives

Le tableau suivant s’appuie sur l’analyse du libellé des mesures de la RGPP, achevées ou en cours, dans les termes du rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011. Il présente, par ministère, le nombre des mesures portant sur le fonctionnement des services et fonctions administratives pour chacune des cinq catégories d’action suivantes : « optimiser/optimisation », « rationaliser/rationalisation », « mutualiser/mutualisation », « fusionner/fusion » et « moderniser/modernisation ».

NOMBRE DES MESURES DE LA RGPP PAR MINISTÈRE
SELON LA CATÉGORIE D’ACTION QU’ELLES PRÉVOIENT

 

Optimiser - optimisation

Rationaliser - rationalisation

Mutualiser - mutualisation

Fusionner - fusion

Moderniser - modernisation

Services
du Premier ministre

0

2

5

0

1

Affaires étrangères et européennes

3

1

1

1

0

Défense et anciens combattants

17

4

1

1

3

Écologie, développement durable, transports et logement

4

1

1

0

1

Justice et libertés

2

4

3

1

2

Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

5

8

7

1

2

Économie, finances et industrie

3

7

1

2

0

Travail, emploi et santé

1

3

2

2

0

Éducation nationale, jeunesse et vie associative

3

4

2

1

0

Budget, comptes publics, fonction publique et Réforme de l’État

2

3

0

1

3

Enseignement supérieur et recherche

2

5

0

0

0

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

1

8

2

0

0

Culture et communication

0

3

1

0

3

Solidarité et cohésion sociale

0

1

1

0

0

Ville

0

0

0

0

0

Sports

1

0

1

0

0

Total (151 mesures)

44

54

28

10

15

Cent cinquante et une mesures de la RGPP relèvent ainsi explicitement d’au moins une des cinq catégories d’action prises en compte dans ce tableau. Au demeurant, un très grand nombre d’autres mesures consistent à opérer une de ces actions, sans que leur libellé le précise explicitement.

L’objet des mesures prises en compte dans le tableau précédent figure dans une annexe au présent rapport ; elles y sont classées par catégorie d’action et par ministère. Les principaux services ou fonctions dont ces mesures prévoient l’optimisation, la rationalisation, la mutualisation, la fusion ou la modernisation sont :

– les services ou fonctions administratives supports, en administrations centrales et déconcentrées, ou de certains opérateurs : c’est-à-dire l’immobilier, les implantations territoriales, les ressources humaines, les achats, les systèmes d’information, la paye et toutes autres catégories de services logistiques. Les nombreuses mesures concernant ces services et fonctions, peu connues et peu médiatisées, sont au cœur du « faire mieux avec moins », qui constitue un des objectifs majeurs de la RGPP. Ce sont en effet ces mesures qui apparentent la RGPP à une revue générale de l’efficience des organisations administratives, devant en principe conduire à la fois à un meilleur service et à la création des « marges » c’est-à-dire des gains de productivité permettant d’accompagner les baisses d’effectifs induites par la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » ;

– certains services « métiers » des ministères ou d’opérateurs de l’État. On peut, entre autres et à titre d’exemple, citer le soutien pétrolier, les munitions pour le ministère de la Défense ; le traitement des frais de justice, les dispositifs d’interceptions judiciaires pour le ministère de la Justice ; l’organisation des concours et des formations pour le ministère de l’Éducation nationale.

III.– PERSPECTIVES SUR LES MESURES DE LA RGPP

A.– EST-IL ENCORE LONGTEMPS POSSIBLE « DE FAIRE MIEUX AVEC MOINS » ?

1.– Un abandon, constaté ou à venir, de certaines missions induit par la contrainte du « faire mieux avec moins » ?

Faisant écho à l’analyse de certains usagers des services publics, les représentants des syndicats représentatifs des agents de l’État, réunis à l’invitation des rapporteurs le 27 septembre 2011, ont exprimé, à cette occasion, la crainte que le « faire mieux avec moins » n’ait été ou ne soit à l’avenir rendu possible par l’abandon de fait de certaines missions de l’État, notamment au niveau déconcentré.

M. Michel Moreau, président de la Confédération française des travailleurs chrétiens des fonctionnaires et agents de l’État (CFTC), a formulé et illustré ce propos en soulignant que « formellement, aucune mission n’est abandonnée : c’est le décalage entre les objectifs fixés et les moyens alloués qui conduit de fait à abandonner certaines missions. Je pense notamment aux fonctions d’écoute ou à celles de contrôle et de sécurisation. »

M. Emmanuel Paillusson, secrétaire général de Solidaires Concurrence, consommation, répression des fraudes (Solidaires CCRF) a présenté ce même constat en indiquant que : « de fait, ce sont la RGPP et la règle du “un sur deux” qui commandent que telle mission soit exécutée et que telle autre ne le soit pas. »

M. Patrick Hallinger, secrétaire national à l’Union générale des fédérations de fonctionnaires de la Confédération générale du travail (UGFF-CGT) a pris « l’exemple de la direction départementale des territoires (DDT) de Seine-et-Marne. En 2008, elle comptait 570 équivalents temps plein ; on est passé à 380 en janvier 2011, et il faut en supprimer cent de plus pour parvenir à l’objectif fixé par le ministère pour fin 2013. Mais comment procède-t-on ? Le ministère n’ayant donné aucune consigne claire pour les redéploiements, on laisse les directions demander à l’encadrement local de définir les priorités de l’organisation ; de décider quelles missions de l’État abandonner et comment inciter les EPCI à prendre en charge les compétences que la direction départementale ne veut plus assumer. »

M. Vincent Hacquin, président de la Fédération des fonctions publiques de la Confédération française de l’encadrement – Confédération générale des cadres (CFE-CGC) confirme le poids de la responsabilité qui serait ainsi donnée à l’encadrement déconcentré, en précisant que « derrière les décisions prises, il y a en effet des oukases sur les effectifs, à charge pour les services de se débrouiller avec ce qu’ils ont. On demande aux personnels d’encadrement de deuxième et de troisième niveau de définir les missions que doit exécuter l’administration ! »

Pour Mme Isabelle Sargeni-Chetaud, secrétaire nationale de la Fédération syndicale unitaire (FSU), le renoncement à l’exercice de certaines missions passe par « le transfert d’une partie des missions de l’État aux collectivités territoriales. Les petites communes et les départements ruraux insistent tous – plus encore dans la période récente – sur les incidences qu’a eues ce transfert sur leurs structures et sur leurs capacités à répondre aux besoins des usagers. Il ne semble pas que des instructions aient été données pour renoncer à certaines missions. On est plutôt, comme cela vient d’être dit, en “mode dégradé” : ce qui ne peut être fait ne l’est pas ; d’autres s’en chargeront si c’est possible. »

Ces témoignages montrent que la question de la définition des missions du service public risque de revenir « sur le terrain » quand elle a été initialement écartée pour laisser place à un processus continu de recherche d’efficience. Lors de leur audition, les syndicats ont unanimement appelé à « remettre à l’endroit » la réforme de l’État, par la prise en charge de la question des missions de l’État à un niveau politique et national – notamment au Parlement –  en précisant que son traitement est un préalable nécessaire et logique à la définition subséquente des moyens utiles à leur exercice.

2.– Le cas de l’Éducation nationale : les rectorats considèrent que la RGPP dans son principe actuel a atteint ses limites

En réponse aux rapporteurs, de nombreux rectorats ont indiqué qu’à missions de l’Éducation nationale et des enseignants inchangées, il deviendrait rapidement difficile de mettre en œuvre les schémas d’emplois programmés pour le ministère jusqu’en 2013.

Un rectorat indique ainsi que « la méthode RGPP […] atteint aujourd’hui ses limites. Les réformes ont beaucoup porté sur les méthodes et l’organisation des services pour l’accomplissement des missions. Il est nécessaire que la modernisation porte sur les contours des missions confiées. »

Un autre rectorat, partant du même constat, précise que la RGPP a de surcroît correspondu, dans certains domaines, à un alourdissement des missions de l’Éducation nationale : « La méthode “RGPP” n’a pas débouché sur une révision de la politique éducative sur le champ de l’enseignement scolaire qui reste très encadré dans des normes anciennes (ex. : décret de 1950 sur les obligations de service des enseignants). Paradoxalement, certaines mesures ont élargi le périmètre d’intervention de Éducation nationale (ex. : accompagnement éducatif, stages de remise à niveau) et créé des coûts supplémentaires alors que les marges d’efficience identifiées pour l’application de la règle du un sur deux se réduisent. »

Un rectorat évoque cet « effet ciseau » de la RGPP dans l’Éducation nationale dans ces termes : « s’agissant des réformes pédagogiques, la poursuite de la RGPP dans les classes se heurte aujourd’hui à une contradiction entre la volonté affichée de responsabiliser les établissements en développant leur autonomie, et la réduction importante de leurs marges de souplesse dans l’organisation des enseignements. Si des moyens importants en personnels enseignants ont pu être retirés pour être redéployés de manière plus pertinente et efficiente dans les établissements publics d’enseignements […] ces dernières années, les marges sont à ce jour réduites. »

Pour faire face à cette situation, unanimement observée, et se plaçant dans la perspective inscrite dans le budget triennal 2011-2013 d’une poursuite de la baisse des effectifs, les rectorats sont nombreux à évoquer deux catégories de mesures pour maintenir la capacité du système éducatif à répondre aux missions qui lui sont confiées :

– la modification des obligations de service des enseignants ;

– l’allègement de l’offre scolaire.

Les témoignages des rectorats montrent que l’usage de ces deux « leviers » est souvent envisagé de façon concomitante :

– un rectorat précise qu’il lui semble, dans les conditions d’une poursuite de la baisse des effectifs, nécessaire d’« ajuster les textes réglementaires pour permettre une plus grande souplesse (exemple : obligation de service des enseignants – décret de 1950). Les économies d’emplois ne peuvent se concevoir dans la durée que par une modification en profondeur de l’architecture du système éducatif (exemple : carte des formations, contenus des enseignements, annualisation des services des enseignants) » ;

– un autre rectorat constate que « jusqu’à présent l’accent a été mis sur la recherche d’une meilleure efficience dans le cadre de la gestion des moyens alloués. Pour aller au-delà, il faudra probablement passer par une approche plus “structurelle” visant à réduire le coût de l’enseignement en touchant aux horaires des enseignants et aux grilles horaires des élèves » ;

– un troisième rectorat précise qu’« aujourd’hui, il paraît important de travailler sur l’offre et la demande pour réaliser un équilibre viable : les horaires des enseignants et les grilles horaires des élèves » ;

– plaçant visiblement ses propos hors même l’hypothèse de la poursuite de la baisse des effectifs, un rectorat précise qu’« au-delà de la volonté de réduire le nombre de fonctionnaires, il reste à s’interroger sur les missions des enseignants (plus spécifiquement du second degré), le niveau de qualification ayant été relevé. Une réflexion sur les obligations de service (temps de travail et bivalence) de ces derniers devient urgente ainsi qu’une simplification des réglementations des régimes indemnitaires afférents. Une simplification de la répartition du temps de travail par discipline dans les lycées et collèges pour les élèves peut être également un facteur de lisibilité pour les familles, et source certaine d’économies budgétaires. »

L’exposé des propos de ces rectorats par les rapporteurs ne constitue pas une approbation des solutions envisagées. Il s’agit de montrer que des administrations déconcentrées de l’État sont conduites à évoquer, après plusieurs années de baisse des effectifs, des mesures nouvelles, touchant à la quantité de travail des agents ou à l’adaptation de l’offre scolaire, c’est-à-dire, dans ce dernier cas, à la modification des missions actuelles de l’enseignement scolaire.

3.– Dans certains ministères : un retour à la question des missions ?

À missions inchangées, certains ministères interrogés par les rapporteurs s’interrogent sur les voies et moyens permettant la poursuite du processus du « faire mieux avec moins ». Les rapporteurs ont évoqué supra la réflexion en cours au sein du Gouvernement, pilotée par le Secrétariat général du Gouvernement (SGG), sur la mutualisation régionale de certaines des compétences des directions départementales interministérielles, dans le but d’optimiser l’organisation de l’État déconcentré issue de la Réate et, sans doute, d’identifier pour l’avenir certains gisements d’efficience – notamment en personnel – , et ce sans modifier la nouvelle architecture institutionnelle et administrative des échelons déconcentrés.

Le secrétariat général des ministères sociaux a précisé aux rapporteurs avoir mené plus précisément une réflexion sur l’exercice des missions respectives des directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS) et des directions départementales de la cohésion sociale (DDCS, ou DDCSPP quand elles exercent aussi, dans les départements les moins peuplés, les missions relatives à la protection des populations – cf. supra les développements relatifs à la Réate).

Cet exercice, effectué sous l’égide du SGG, a en partie consisté en une « hiérarchisation des priorités » des services déconcentrés. Le secrétariat général indique que « cette priorisation des missions a principalement concerné les DDCS(PP), dont le caractère interministériel est de droit, et qui appelaient à une remise à plat de certaines de leurs missions. »

Si ce travail a permis « de réaffirmer le cœur de mission des directions départementales interministérielles, “les directions du lien social”, et leurs champs d’intervention prioritaires », il a aussi consisté en l’apport d’« adaptations nécessaires dans la nature et l’exercice de certaines missions [notamment le projet de] transférer, le cas échéant, certaines missions à l’échelon le plus approprié ». Concrètement, il s’agirait de procéder à « la “régionalisation” » de certaines missions.

S’il est légitime et pertinent de chercher l’optimisation du fonctionnement de la nouvelle architecture de l’État déconcentré, ces travaux de réflexion sur la hiérarchisation et la « priorisation » des missions témoignent aussi de la difficulté pour l’échelon départemental d’assumer les missions qui lui incombent dans le contexte de la poursuite de la réduction des effectifs.

Le ministère de la Culture, répondant aux rapporteurs à la question de savoir quelles étaient les réflexions actuelles au sein du ministère concernant d’éventuelles modifications, restructurations ou abandons de missions à l’avenir, illustre ce en quoi la RGPP a consisté depuis son lancement et quelles sont les difficultés auxquelles sa poursuite confronterait l’État à court terme pour exercer ses missions : « la non-reconduction d'un départ sur deux à la retraite n'a […] pas donné lieu à l'abandon de missions. En revanche, cette règle s'est présentée comme un défi rendant indispensable la mise en place d'un certain nombre de réformes visant notamment l'amélioration du fonctionnement des services. […] la poursuite de l'effort lié à la non-reconduction d'un départ sur deux à la retraite ne semble plus pouvoir être menée sans poser la question des missions. La contrainte est devenue telle qu'un arbitrage entre ces dernières s'impose. »

Le ministère de la Culture indique au demeurant que ce constat « fait l'objet de discussions avec l'équipe d'appui RGPP [la direction du budget, la DGME et la DGAFP] mais n'entre pas pour l'instant dans le cadre du pilotage des mesures liées aux deux premières phases de la RGPP.»

B.– UNE PHASE 2 DE LA RGPP TOURNÉE DE FAÇON ACCRUE VERS DES MESURES DE SIMPLIFICATION ADMINISTRATIVE

1.– Un objectif réel dès la première phase de la RGPP

Le rapport accompagnant le CMPP du 12 décembre 2007 précisait que « la simplification administrative et la modernisation des procédures constituent également une source de qualité et d’économies, que ce soit pour l’État ou pour les entreprises. »

Plusieurs projets ou mesures étaient associés à ce constat, portant, entre autres, sur les éléments suivants :

– la « rationalisation du processus de délivrance des titres et [le] rapprochement des guichets de délivrance des citoyens » ;

– « un plan de réduction drastique des charges administratives pesant sur les entreprises », en écho au projet de réduction de l’« impôt papier » dont le principe avait été acté dès le Conseil des ministres du 20 juin 2007 qui a annoncé le lancement de la RGPP.

Le tableau suivant, sur la base du rapport d’étape de la RGPP du 16 février 2010 (notamment pour le libellé des ministères et des mesures), mentionne les mesures de la phase 1 de la RGPP en rapport avec ces orientations concernant les démarches administratives et l’accueil des usagers des services publics de l’État.

MESURES DE LA PHASE 1 DE LA RGPP
RELATIVES AUX DÉMARCHES ADMINISTRATIVES ET À L’ACCUEIL DES USAGERS

Ministères

Réformes

Services du Premier ministre

– Réforme de l’information délivrée par téléphone aux usagers

– Renforcement de l’administration électronique – charte ergonomique

Écologie, énergie, développement durable et mer

– Modernisation de l’organisation de l’examen du permis de conduire, afin de réduire les délais et d’améliorer le taux de réussite et de la sécurité routière, notamment des conducteurs novices

– Dématérialisation de la déclaration d’intention d’aliéner (DIA)

Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales

– Modernisation des cartes nationales d’identité (CNI) et des passeports : rationalisation du processus de délivrance des titres (mairies), mise en place des passeports biométriques, développement de nouveaux services pour la CNI sécurisée

– Création d’un système d’immatriculation à vie des véhicules

– Mise en œuvre de la dématérialisation de la procédure de cession de véhicules entre particuliers (via internet)

– Dématérialisation et sécurisation du titre du permis de conduire

– Faire sa demande d’inscription sur les listes électorales en ligne

– Effectuer en une seule fois la déclaration de perte et la demande de renouvellement de ses papiers

Affaires étrangères et européennes

– Regroupement du traitement des visas et des dossiers de nationalité sur un site unique dans chaque pays

– Mise à l'étude de la création d'une « préfecture des Français de l'étranger » à Nantes, qui aurait vocation à centraliser les fonctions d'état civil des Français de l'étranger

– Mise en place d'un numéro vert unique et accessible en permanence sur les sujets d'état civil des Français de l'étranger

Économie, industrie et emploi

– Création d'un dossier unique dématérialisé du créateur ou du repreneur d'entreprise

– Permettre de réaliser le transfert du siège social d’une entreprise en une seule démarche

– Simplifier la vie de l’entrepreneur, de la création aux premiers mois d’exercice de l’activité

Immigration, intégration, identité nationale et développement solidaire

– Délivrance de visas : instruction et délivrance du titre de séjour concomitante pour les demandeurs d’un visa de long séjour qui ouvre droit à une autorisation de séjour

– Demandes de naturalisation : suppression de la double instruction par les préfectures et par la direction de l’accueil, de l’intégration et de la citoyenneté

– Automatisation des contrôles aux frontières par l’installation de sas automatiques de contrôle dans les grands aéroports

Justice et libertés

– Suppression des demandes de copie ou d’extrait d’acte d’état civil

Travail, relations sociales, famille,
solidarité et ville

– Simplifier les demandes de droits pour les personnes handicapées

Santé et sports

– Lors d’un décès, décharger le proche des démarches d’information des organismes

Budget, comptes publics,
fonction publique et réforme de l’État

– Généralisation progressive de la déclaration et du paiement dématérialisés (virement, prélèvement, paiement en ligne) de l'impôt sur le revenu, puis de la taxe d'habitation et de la taxe foncière

– Recensement de l’ensemble des obligations administratives imposées aux entreprises et identification des possibilités de rationalisation

– Mesure des charges administratives pour les obligations jugées prioritaires par les entreprises et les services instruisant les dossiers

– Mise en œuvre de plans de simplification pour les 1 000 procédures les plus lourdes ou jugées les plus « irritantes » avec un objectif de réduction des charges de 25%

– Extension des garanties données au public sur la qualité de l’accueil : application systématique des 18 engagements de service et de suivi de l’accueil à toutes les administrations d’État (référentiel Marianne)

– Amélioration de l’accueil physique des administrations : élargissement des horaires d’ouverture des guichets en fonction des attentes locales des usagers et mise en place de plages horaires de rendez-vous pour tous les services accueillant du public afin de réduire les temps d’attente aux guichets

– Amélioration de l’efficacité de l’accueil téléphonique des administrations : stratégie de mise en place dans chaque ministère d’un accueil téléphonique de qualité et élargissement des horaires d’ouverture du centre d’appel généraliste « 39-39 » (8h00 à 20h00 du lundi au vendredi et services offerts par le 39-39)

– Amélioration de l’efficacité de l’accueil téléphonique des administrations : limitation du coût d’appel vers les administrations au coût d’un appel local

– L’accueil physique et téléphonique de chacun des ministères fera l’objet d’une évaluation extérieure par un tiers, qui sera publiée annuellement

– Renforcement de l’administration électronique : mise en place de l’accusé de réception électronique à toute demande formulée par courriel

– Renforcement de l’administration électronique : création d’un portail internet unique de renseignement administratif et d’accès aux téléprocédures

– Améliorer le traitement des réclamations des usagers

– Donner en une seule fois à l’administration les informations de base sur l’activité de l’entreprise

– Permettre aux entreprises retenues dans le cadre d’un marché public d’obtenir une attestation fiscale dématérialisée

– Simplifier la déclaration préalable à l’embauche

Ainsi, sans être le premier objet de la RGPP dans sa phase 1, 38 de ses 322 mesures (12 % en nombre) concernaient la simplification et l’amélioration des démarches administratives et de l’accueil des usagers.

2.– Les CMPP des 30 juin 2010 et 9 mars 2011 : une RGPP tournée plus résolument vers les questions concernant le service rendu à l’usager

a) Les orientations du CMPP du 30 juin 2010

Le rapport accompagnant le CMPP du 30 juin 2010 exposait plusieurs orientations confirmées – par rapport à la phase 1 de la RGPP –  ou privilégiées par ce CMPP concernant l’amélioration de la qualité des services publics (« l’accueil, le traitement des demandes et la gestion des réclamations ») :

– « la généralisation du référentiel Marianne (101) à l’ensemble des services de l’État » à l’échéance de la fin de l’année 2011. On note qu’il s’agissait d’une mesure de la phase 1 de la RGPP ;

– « l’optimisation de l’accueil téléphonique des organismes publics concentrant les enjeux les plus importants sur ce canal sera effective d’ici à fin 2011 ». Une mesure de la phase 1 de la RGPP concernait aussi la qualité de l’accueil téléphonique par le « 39-39 » ;

– « le développement de mon.service-public.fr », par l’intégration à ce site d’un plus grand nombre de démarches en ligne. La création du site mon.service-public.fr a relevé d’une mesure de la phase 1 de la RGPP sur la mise en place d’un portail unique des renseignements administratifs et d’accès aux téléprocédures ;

– le lancement d’« expérimentations visant la réduction des délais de traitement au sein des principales administrations à réseau ». Là encore, une mesure de la phase 1 de la RGPP concernait le sujet de l’amélioration du traitement des demandes des usagers ;

– « la généralisation du dispositif d’amélioration du traitement des réclamations débutera dès septembre 2010 […] Le raccordement des services de l’État au service en ligne “@-réclamations” sera réalisé au fur et à mesure du déploiement du dispositif. »

b) Un « nouveau » programme de 100 mesures de simplification

Le rapport du 30 juin 2010 indique que « le Conseil de modernisation des politiques publiques [CMPP – tenu le même jour] a décidé le lancement d’un programme cohérent de 100 simplifications pour répondre aux besoins prioritaires des Français par vague semestrielle d’une quinzaine de mesures (en moyenne une par ministère par semestre), incluant […] quinze mesures déjà lancées [le 19 octobre 2009] ». Concrètement, le CMPP du 30 juin 2010 a lancé 15 mesures supplémentaires en plus des 15 mesures décidées le 19 octobre 2009.

Au total, à ce jour, suite à ces décisions et aux 20 nouvelles mesures actées par le CMPP du 9 mars 2011, les 50 mesures suivantes de simplification ont été lancées :

MESURES DE SIMPLIFICATION DÉJÀ ENGAGÉES

Mesures du 16 octobre 2009

1. Pouvoir s’inscrire sur les listes électorales par internet.

2. Une seule démarche pour faire renouveler ses papiers en cas de perte.

3. Un service en ligne pour les jeunes devant se faire recenser.

4. Simplifier les demandes de droit pour les personnes handicapées.

5. Lors d’un décès, décharger le proche des démarches d’information des organismes.

6. Simplifier la vie de l’entrepreneur, de la création au premier mois d’exercice de son activité.

7. Un dossier plus simple et une procédure en ligne pour effectuer un transfert de siège social.

8. Réduire les informations demandées lors de la déclaration préalable à l’embauche et expérimenter la déclaration simplifiée par téléphone.

Simplifier la vie des usagers de l’administration – page 3/10

9. Permettre aux entreprises retenues dans le cadre d’un marché public d’obtenir une attestation fiscale dématérialisée.

10. Donner une seule fois à l’administration les informations de base sur l’activité de l’entreprise (chiffre d’affaires, effectif…).

11. Supprimer les demandes de copie ou d’extrait d’acte d’état civil.

12. Des déclarations d’intention d’aliéner par internet pour simplifier les démarches lors des transactions immobilières.

13. Éviter aux associations d’avoir à fournir plusieurs fois les mêmes informations à chaque demande d’agrément.

14. Généraliser la demande de subvention en ligne.

15. Améliorer le traitement des réclamations.

Mesures du 30 juin 2010

16. Permettre d’informer simultanément plusieurs services publics d’un changement de coordonnées (coordonnées bancaires, courriel, numéro de téléphone fixe et mobile, adresse postale…).

17. Permettre de payer en ligne ses frais de santé.

18. Lors d’un décès, simplifier la déclaration aux impôts.

19. Permettre le suivi par internet des grandes étapes du traitement de sa plainte (de son dépôt à son traitement par le tribunal).

20. Permettre la demande en ligne d’aide au logement.

21. Simplifier les procédures liées au changement d’école suite à un déménagement.

22. Permettre de déclarer en ligne l’avancement de ses travaux (procédures d’urbanisme).

23. Permettre de transmettre par internet les données lors du recensement.

24. Simplifier le recrutement d’un apprenti.

25. Proposer aux TPE-PME un compte en ligne personnalisé permettant d’effectuer l’ensemble de leurs démarches administratives.

26. Améliorer la lisibilité et la cohérence lors du franchissement des seuils de salariés.

27. Simplifier les démarches liées à l’exportation.

28. Regrouper toutes les déclarations sociales des entreprises en une déclaration unique dématérialisée avec la mise en place d’une déclaration sociale nominative (DSN).

29. Permettre de créer, de modifier et de dissoudre son association par internet.

30. Simplifier et fiabiliser le dépôt des bilans d’exécution dans le cadre des financements accordés au titre du Fonds social européen (FSE).

Mesures du 9 mars 2011

Pour les particuliers

31. Informer en ligne en une seule fois les organismes publics de la reprise d’un emploi.

32. Déclarer en ligne la cession de véhicules de particulier à particulier.

33. Permettre l’utilisation des factures électroniques grâce à l’insertion d’un code barre 2D à l’appui de l’ensemble des démarches administratives nécessitant ces justificatifs.

34. Offrir un service en ligne d’information et de conseil en matière d’orientation.

35. Supprimer les redondances de pièces justificatives lors de l’inscription scolaire.

36. Permettre de consulter et de télécharger ses attestations de paiement et de suivre en ligne le paiement de ses indemnités journalières.

37. Dispenser l’héritier direct de fournir, suite à un décès, un certificat d’hérédité ou un acte de notoriété pour la réalisation des démarches les plus courantes.

Pour les entreprises

38. Créer un guide interactif des déclarations sociales.

39. Proposer un simulateur permettant de calculer le montant de la réduction de charge sur les bas salaires « dite réduction Fillon ».

40. Améliorer la lisibilité du bulletin de salaire.

41. Créer un service en ligne de référence des aides disponibles à la création d’entreprises.

42. Améliorer le déroulement des procédures relatives aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE).

43. Simplifier les démarches liées à la construction des établissements recevant du public (ERP).

44. Simplifier les marques fiscales des produits viticoles.

45. Améliorer le service aux employeurs dans le cadre de l’utilisation du titre emploi service entreprise (TESE).

Pour les associations

46. Proposer aux associations un accès cohérent à l’information administrative et aux démarches en ligne.

47. Faciliter l’immatriculation des associations au répertoire Sirene de l’INSEE.

Pour les collectivités territoriales

48. Simplifier la transmission des listes électorales communales en préfectures.

49. Simplifier la procédure de reconnaissance d’état de catastrophe naturelle.

50. Harmoniser les modes d’échanges dématérialisés entre l’État et les collectivités territoriales.

On relève qu’un certain nombre de ces mesures avaient été décidées lors de la phase 1 de la RGPP.

c) La création du baromètre de la qualité des services publics

Le rapport accompagnant le CMPP du 30 juin 2010 a annoncé la création d’un baromètre de la qualité des services publics, préconisée par le rapport remis au Gouvernement en mars 2010 par l’un des deux rapporteurs de la présente étude (M. François Cornut-Gentille) sur la mesure de la qualité des services publics (102).

Le rapport du 30 juin 2010 précisait, s’agissant de son installation et de sa gouvernance, que « le baromètre de la qualité des services publics doit s’inscrire durablement dans le paysage administratif afin de rendre compte régulièrement aux usagers des évolutions de la qualité du service rendu. Un comité de pilotage composé de personnalités qualifiées et de représentants d’organismes de contrôle en lien avec le médiateur de la République sera mis en place d’ici à décembre 2010 pour assurer la gouvernance de ce baromètre, en toute indépendance. Une structure opérationnelle à déterminer sera chargée notamment d’assurer la mesure régulière des indicateurs, de proposer des évolutions et de le rendre public au moins une fois tous les six mois. »

Les premiers résultats du baromètre publiés en juillet 2010 portaient sur un nombre limité d’indicateurs. C’est pourquoi le tableau suivant concerne les résultats pour les enquêtes publiés en mars et juillet 2011.

BAROMÈTRE DE LA QUALITÉ DES SERVICES PUBLICS

 

Mars 2011

Juillet 2011

Indice de la qualité de l’accueil dans les services de l’État

54 %

57 %

– pourcentage de courriers bénéficiant d’une réponse en moins de 15 jours ouvrés

52 %

53 %

– pourcentage de courriels bénéficiant d’une réponse en moins de 5 jours ouvrés

60 %

49 %

– pourcentage d’appels téléphoniques ayant abouti en moins de 5 sonneries

80 %

77 %

– pourcentage d’usagers orientés vers le bon service et pris en charge

69 %

62 %

– pourcentage d’usagers bénéficiant d’un accueil courtois par des agents identifiables

78 %

78 %

Traitement des démarches

   

– je me rends aux urgences : pourcentage de patients pris en charge en moins de 4 heures

77 %

77 %

– je me suis fait agresser : délai moyen d’intervention des forces de l’ordre

13 minutes.

13 minutes

– je renouvelle mes papiers d’identité : pourcentage d’usagers ayant eu leur passeport à disposition en mairie en moins de 2 semaines

90 %

91 %

– je conduis un véhicule : délai moyen entre la première et la deuxième présentation à l’examen pratique du permis de conduire

Pas de mesure

72 jours

– je perds mon emploi :

– pourcentage d’inscriptions réalisées en moins de 5 jours ouvrés après le premier contact avec Pôle emploi 

– pourcentage de décisions sur les dossiers d’indemnisation prises en moins de 15 jours

93 %

86 %

93,5 %

95,5 %

– je prépare ma retraite :

– pourcentage de personnes ayant reçu un relevé de carrière jugé « complet »

– pourcentage de personnes ayant reçu un relevé de carrière jugé « juste »

71 %

85 %

71 %

85 %

– je déclare et paie mes impôts : pourcentage de demandes de rectification sur les déclaration et sur les paiements traitées en moins de 30 jours (pour l’impôt sur le revenu et la taxe d’habitation)

95 %

95 %

– je demande une aide (logement, familiale, solidarité) : pourcentage de demandes de prestations (logement, rentrée scolaire, allocation familiale, etc.) traitées en 15 jours ou moins

82 %

83 %

– je scolarise mon enfant : pourcentage de remplacement des enseignants au premier jours d’absence pour le 1er degré

91 %

92 %

– je m’oriente à l’université : pourcentage de premiers vœux satisfaits lors de la demande d’inscription à l’université

44 %

61 %

– je poursuis des études supérieures : pourcentage d’étudiants ayant accès à une bibliothèque universitaire ouverte plus de 60 heures par semaine

63 %

63 %

– je prends soin de ma santé :

– délai moyen de remboursement d’une feuille de soins électronique

– délai moyen de remboursement d’une feuille de soin papier

3,3 jours

10 jours

3,3 jours

10 jours

Possibilité de réclamer

   

– pourcentage d’organismes ayant mis en place un dispositif dédié de traitement des réclamations

30 %

30  %

L’existence du baromètre de la qualité des services publics constitue un progrès pour une réforme de l’État tournée de façon accrue vers la satisfaction des usagers. La méthode utilisée à ce stade fait toutefois apparaître certaines questions et marges de progression :

– l’indépendance de la gouvernance du baromètre, annoncée par le rapport du 30 juin 2010, n’a semble-t-il pas été réellement mise en œuvre depuis cette date. La présentation officielle de ses résultats révèle au demeurant les mêmes caractéristiques – parfois les mêmes travers – que la présentation du suivi de la RGPP : seuls les résultats jugés satisfaisants sont réellement commentés et l’expression est toujours résolument positive ; alors même, par exemple, s’agissant des indices relatifs à l’accueil, que trois indicateurs sur cinq sont en retrait, parfois substantiel, en juillet 2011 par rapport à mars 2011. L’indice [synthétique] de la qualité de l’accueil dans les services de l’État, dont la structure et la portée demeurent obscures, est en revanche systématiquement mis en avant dans les présentations officielles des résultats de juillet 2011 ; il était alors en progression de trois points par rapport à mars 2011 ;

– le baromètre ne semble pas relever d’une vision extérieure sur le fonctionnement de l’administration. Peut-être s’agit-il d’une collecte d’informations basées sur l’usage d’outils de « contrôle qualité ». Sa méthodologie n’est, en tout état de cause, pas explicitée ;

– les résultats des indicateurs du baromètre pour le mois de mars 2011 étaient accompagnés d’une enquête, distincte, de satisfaction des usagers. Cette enquête, basée sur un échantillon représentatif de la population (103), constituait un « miroir » des indicateurs de qualité. Elle était un complément fondamental pour apprécier la perception de la qualité de service rendu par les services de l’État ; ses résultats étaient certes moins positifs que ceux des indices de qualité. La réalisation de l’enquête auprès des usagers n’a malheureusement pas été reconduite en juillet 2011 ;

– les critères qui structurent les indicateurs de qualité devraient être explicités et dûment justifiés. Ainsi, l’indicateur concernant les passeports s’appuie sur un délai de délivrance de deux semaines, alors que la cible effective pour la mesure de la RGPP portant modification des modalités de délivrance du passeport a été fixée à une semaine pour les services en charge du traitement des demandes. Dans ce cas, d’ailleurs, devrait se poser la question de la prise en compte du délai éventuel entre la date de la sollicitation par le demandeur d’un rendez-vous en mairie et le moment effectif de confection du dossier de demande du titre dans les locaux municipaux. Aujourd’hui, ce laps de temps, parfois non négligeable, n’est pas pris en compte. De façon générale, le choix d’indicateurs conduisant systématiquement à des résultats numériquement favorables risquent de conduire à des divergences avec le « ressenti » de la qualité du service, ce qui peut réduire à terme la crédibilité et, in fine, l’intérêt du baromètre.

La Cour des comptes, pour sa part, dans son rapport de novembre 2011 sur la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances « Un bilan pour de nouvelles perspectives » (104), concluait, s’agissant du baromètre des dix indicateurs emblématiques de la qualité de service pour les usagers, à la nécessité de faire plus converger ces indicateurs et les 854 indicateurs de performance suivis, au titre de la Lolf, par la direction du budget.

TROISIÈME PARTIE : LES IMPACTS FINANCIERS
DE LA RGPP

I.– LES PROGRAMMATIONS ET CONSTATS DU GOUVERNEMENT SUR LES IMPACTS BUDGÉTAIRES DE LA RGPP

A.– LES PROGRAMMATIONS INITIALES ET ACTUALISÉES POUR LES PÉRIODES TRIENNALES 2009-2011 ET 2011-2013

1. La période triennale 2009-2011 (phase 1 de la RGPP)

a) La programmation ex ante

Lors de son audition par la commission des Finances de l’Assemblée nationale le 17 juin 2008, M. Éric Woerth, alors ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique, précisait, dans la foulée du CMPP du 11 juin 2008 qui clôturait les décisions prises au titre de la phase 1 de la RGPP, les éléments suivants (105) :

« Les économies décidées au cours des trois CMPP [des 12 décembre 2007, 4 avril 2008 et 11 juin 2008] se détaillent ainsi :

« – 3,5 milliards d’euros sur la masse salariale […]  en brut, c'est-à-dire avant retour de 50 % des économies salariales aux fonctionnaires en poste ;

« – 2 milliards d’euros sur les interventions et 1'investissement […] ;

« – 2,2 milliards d’euros environ, sur le fonctionnement, y compris les opérateurs, […]. »

Le premier rapport d’étape de la RGPP rendu public le 13 décembre 2008 confirme l’évaluation du total de ces montants, en précisant que : « les mesures de la RGPP permettent ainsi de réaliser 7,7 milliards d’euros d’économies ». Ce total a par la suite souvent été repris, par exemple, par la Cour des comptes dans son rapport public 2010  (106) : « l’évaluation finale des économies attendues [de la RGPP] est […] de 7,7 milliards d’euros, ramenés à 6 milliards d’euros après rétrocessions aux fonctionnaires d’une partie de ces gains, […] ».

Ces évaluations ex ante n’ont jamais été détaillées, par ministère ou par mesure de la RGPP, au-delà de la distinction des dépenses de personnel, d’intervention et de fonctionnement. En juin 2009, la Cour des comptes précisait que ce « chiffrage global des économies escomptées […] a été élaboré à partir des travaux des équipes d’audit » (107) qui ont préparé et, au moins pour certaines d’entre elles (108), chiffré les économies susceptibles d’être attendues des mesures de la RGPP au cours du second semestre 2007 et du premier semestre 2008, en amont des décisions prises lors des trois CMPP de 2007 et 2008.

b) La programmation actualisée

Le Gouvernement a, deux ans plus tard, évoqué un montant d’économie un peu inférieur et, par ailleurs, globalisé au titre de la première phase de la RGPP, dans le rapport rendu public à l’occasion du CMPP du 30 juin 2010 : « en juin 2008, la première phase de la RGPP a permis d’afficher des économies de l’ordre de 7 milliards d’euros. »

Dans son éditorial introduisant le dernier rapport d’étape de la RGPP rendu public à l’occasion du CMPP du 9 mars 2011, M. François Baroin, alors ministre du Budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, confirmait ce montant un peu minoré, en considérant des réalisations « en ligne avec [l’] objectif d’économies de 7 milliards annoncées au titre de la RGPP pour la période 2009-2011 ». Cette évaluation a ensuite été confirmée par le Gouvernement dans le rapport annuel de performance (RAP) de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » annexé au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour 2010 : « conformément aux objectifs initiaux, les économies permises par cette première vague sont d’environ 7 milliards d’euros sur la seule période 2009-2011. » (109)

Au demeurant, la période 2009-2011 constitue depuis le lancement de la RGPP la référence au titre de laquelle les économies prévues ex ante devaient être constatées.

Ainsi, le rapport annexé à loi du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 avait prévu un lien entre la RGPP et le montant des économies envisagées pour la période 2009 à 2011 ; ce rapport précise que « le budget pluriannuel 2009-2011 fait apparaître un effort d'économies de 9 milliards d’euros par rapport à la tendance antérieure, principalement grâce à la révision générale des politiques publiques, […] ». Ainsi, la prévision d’une économie globale de 9 milliards d’euros inscrite dans la programmation pluriannuelle 2009-2011 avait pour fondement, à titre principal, la RGPP (ce qui est d’ailleurs cohérent avec les prévisions d’économies en lien direct avec la RGPP de juin 2008 ou postérieures –  comprises, comme évoqué supra, entre 7 et 7,7 milliards d’euros – qui sont d’un montant globalement un peu inférieur à 9 milliards d’euros).

2. La période triennale 2011-2013 (phases 1 et 2 de la RGPP)

a) La présentation initiale du Gouvernement

Dans le rapport accompagnant le CMPP du 30 juin 2010, il est précisé que les 150 nouvelles mesures de la deuxième phase de la RGPP ont pour « objectif […] d’économiser 10 milliards d’euros d’ici à 2013 ».

Le même rapport détaille ainsi les enjeux relatifs aux crédits et aux effectifs de la deuxième phase de la RGPP : « les nouvelles mesures permettront, sans affecter les missions prioritaires de l’État, de poursuivre le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, ce qui correspond au non remplacement de 100 000 départs entre 2011 et 2013 et permet une économie de l’ordre de 3 milliards d’euros. L’objectif est également de réduire de 10 % les dépenses de fonctionnement de l’État et des opérateurs soit une économie d’environ 2 milliards d’euros d’ici à 2013. À cela viendra s’ajouter une économie de 10 % sur les dépenses d’intervention, soit environ 5 milliards d’euros. »

À l’instar de la phase 1 de la RGPP, un lien a été établi entre les montants d’économies programmés au titre de la phase 2 de la RGPP et la programmation pluriannuelle des finances publiques.

Ainsi, l’annexe à la loi du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 précise, pour la période 2011-2013 que « la construction du budget triennal s’est appuyée sur les règles transversales d’économies fixées par le Premier ministre :

« – remplacement d’un départ à la retraite sur deux et diminution de 1,5 % chaque année des emplois des opérateurs, soit un effort comparable à celui de l’État ;

« – effort collectif de baisse de 10 % des dépenses de fonctionnement, en commençant par 5 % dès 2011, au sein de l’État comme de ses opérateurs ;

« – réexamen systématique des dispositifs d’intervention, avec pour objectif le même effort de 10 % à horizon 2013 que sur le fonctionnement. »

On constate que les résultats attendus au titre de la mise en œuvre de ces règles transversales gouvernementales correspondent, aux termes du rapport rendu public à l’occasion du CMPP du 30 juin 2010, très précisément aux économies attendues, pour chaque catégorie de dépenses, au titre des 150 mesures nouvelles décidées par ce CMPP.

Cette correspondance des économies programmées au titre à la fois de la phase 2 de la RGPP et des règles transversales d’économies pour la période 2011-2013 est présentée dans des termes un peu moins catégoriques dans le rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011 ; ce rapport précise que les mesures de la RGPP « ont permis d’accompagner la réalisation des trajectoires budgétaires prévues par les deux budgets triennaux, 2009-2011 et 2011-2013, en fournissant des pistes d’économies structurelles. Ce sont ainsi 10 milliards d’euros de gains qui sont programmés par le budget 2011-2013, dont 3 milliards d’euros pour la masse salariale, 2 milliards d’euros sur les dépenses de fonctionnement et environ 5 milliards d’euros sur les dépenses d’intervention. »

Le Gouvernement semble ainsi se borner à considérer que la RGPP contribuerait pour la période 2011 à 2013, sans préciser dans quelle mesure, à l’atteinte d’objectifs d’économies – pour un montant total de 10 milliards d’euros – en personnel, fonctionnement et intervention programmées dans le cadre de la politique budgétaire pluriannuelle définie par la loi de programmation des finances publiques.

b) Les précisions apportées par le Gouvernement

Interrogé par les rapporteurs sur la programmation des impacts financiers de la RGPP sur la période 2011-2013, le Gouvernement a fourni le tableau suivant.

ESTIMATION DES GAINS BUDGÉTAIRES POUR LE BUDGET DE L’ÉTAT SUR 2011-2013 : DEUXIÈME PHASE DE LA RGPP ET MONTÉE EN CHARGE DE LA PHASE 1 DE LA RGPP

En milliards d’euros

Source : direction du budget.

Pour 2011, ce tableau ne prévoit pas de gains en dépenses de personnel. En effet, les gains bruts et nets programmés en la matière sont rattachés à la phase 1 de la RGPP et ne sauraient être ainsi pris en compte une deuxième fois au titre de la phase 2 de la RGPP.

Le Gouvernement indique par ailleurs que ce tableau « retrace les économies du budget triennal 2011-2013 rattachables à la deuxième phase de la RGPP ainsi que, sur la période 2012-2013, celles correspondant à la montée en charge de mesures de la phase 1 de la RGPP ». Le tableau s’appuie donc sur les effets de la phase 2 de la RGPP pour 2011 et des phases 1 et 2 pour 2012 et 2013.

Le montant d’économies brutes pour la période 2011-2013 indiqué par le tableau s’élève à 8,3 milliards d’euros et comprend donc une partie imputable à la phase 1 de la RGPP (en 2011 pour les dépenses de fonctionnement et d’intervention). Est ainsi approchée, sans être totalement précisée, la contribution – telle que programmée par le Gouvernement à ce stade – de la phase 2 de la RGPP aux 10 milliards d’euros d’économies inscrit dans le budget triennal 2011-2013 par la loi de programmation du 28 décembre 2010.

Enfin, on note que le rapport du 9 mars 2011 ne présente pas d’économies supplémentaires programmées au titre des mesures nouvelles décidées dans le cadre du CMPP tenu le même jour.

B.– LES ÉCONOMIES CONSTATÉES AU TITRE DE LA PREMIÈRE PHASE DE LA RGPP SELON LE GOUVERNEMENT

Alors que la période 2009-2011 arrive à « échéance », au regard des programmations ex ante et actualisées du Gouvernement, plusieurs interrogations peuvent être émises :

– dispose-t-on de constats ex post au titre des exercices échus de la période de référence (2009 et 2010) sur les économies budgétaires imputables à la mise en œuvre de la RGPP ?

– au regard de ces constats ex post, quelles sont les prévisions actualisées en la matière pour l’ensemble des périodes 2009-2011 et 2009-2013 ?

– quels sont les fondements, les déterminants, les détails de ces économies globales prévues ou constatées au niveau du budget de l’État, respectivement pour les dépenses de personnel, de fonctionnement et d’intervention ?

1. Les constatations du Gouvernement et de la Cour des comptes pour 2009 et 2010

Les rapports annuels de performance de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » annexés aux projets de loi de règlement (PLR) pour 2009 et 2010 (110)présentent certains éléments ex post sur les économies induites par la mise en œuvre de la RGPP.

Ces éléments figurent plus précisément dans l’annexe prévu par l’article 122 de la loi de finances pour 2010 – déjà évoquée supra par les rapporteurs – qui précise que, jointe au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion, elle présente « pour l'année, un bilan des mesures décidées en conseil de modernisation des politiques publiques depuis 2007 et arrivées à leur terme. Cette présentation fait apparaître et justifie, pour chaque mesure, la date de réalisation effective ou les délais d'exécution prévus, en indiquant les échéances initialement fixées, et les économies nettes constatées ou attendues en conséquence, en précisant le montant initialement prévu et après révision éventuelle. »

Cette annexe aborde les réalisations de la RGPP sous un angle plus large que la lettre de l’article 122 de la loi de finances pour 2010 ne l’impose ; en préalable de l’énumération des mesures « arrivées à leur terme », y figurent des éléments plus généraux relatifs aux réalisations de l’exercice échu en matière de RGPP, dont certains ordres de grandeur en matière d’économies budgétaires.

Dans l’annexe au PLR pour l’année 2009, ces ordres de grandeur sont les suivants :

– en matière de dépenses de personnel, « pour la seule année 2009, l’économie brute inscrite au budget de l’État est de l’ordre de 0,9 milliard d’euros » (111) ; l’économie nette correspondante, soit environ 0,4 milliard d’euros, se déduit du montant de la restitution aux agents qu’il convient de retrancher de l’économie brute : selon le Gouvernement, « 0,5 milliard d’euros ont été versés en 2009 »  (112) à ce titre à ces agents ;

– en matière de dépenses de fonctionnement, l’évaluation porte, curieusement pour un document relatif à l’exercice 2009, sur les crédits « votés, en loi de finances initiale 2010, en […] baisse […] de 1 % sur le périmètre des dépenses de fonctionnement de l’État par rapport à la loi de finances initiale pour 2009. Par rapport à l’évolution constatée sur les dernières années, cet infléchissement représente un gain de l’ordre de 500 millions d’euros » (113). Le Gouvernement, répondant aux rapporteurs, a confirmé et complété ces éléments de la façon suivante : « si le gain lié aux économies brutes de fonctionnement entre 2009 et 2010 s’élève à un peu plus de 0,4 milliard d’euros, il convient de souligner que ces économies s’ajoutent à un gain de 0,4 milliard d’euros sur l’exercice 2009 et qui n’avaient pas encore été pris en compte dans cette annexe. Au total, les économies brutes sur les dépenses de fonctionnement [au titre de la RGPP] à fin 2010 s’élèvent donc à 0,8 milliard d’euros » ;

– en matière de dépenses d’intervention, « l’économie est de l’ordre d’un milliard d’euros » (114), sans qu’il soit explicitement précisé si ce montant vaut uniquement pour 2009.

Dans l’annexe au PLR pour l’année 2010, le Gouvernement se borne à fournir un ordre de grandeur concernant les seules dépenses de personnel, en précisant que « pour la seule année 2010, l’économie brute est de 0,8 milliard d’euros » (115).Ce document, se situant ainsi en retrait dans la précision par rapport à sa version de l’année précédente annexée au compte de l’année 2009, ne contient pas d’autre information globale sur les économies budgétaires induites par la RGPP (116).

2. L’actualisation et la portée des programmations et constatations du Gouvernement

a) L’évaluation actualisée des économies budgétaires induites par la RGPP selon le Gouvernement

La direction du budget a transmis aux rapporteurs le tableau suivant, actualisant respectivement pour les dépenses de personnel, d’intervention et de fonctionnement les programmations et constatations du Gouvernement en matière d’économies induites par la RGPP pour la période 2009-2011.

Source :direction du budget

Le Gouvernement considère ainsi que le total attendu du montant des économies brutes au titre de la période 2009-2011 s’élève à 6,8 milliards d’euros, soit des résultats constatés (pour 2009 et 2010) et attendus (pour 2011) « en ligne avec l’objectif global affiché lors de la présentation du premier budget triennal 2009-2011 », c’est-à-dire environ 7 milliards d’euros.

Le montant de 6,8 milliards d’euros est en retrait d’environ 12 % par rapport à la première évaluation réalisée en juin 2008 après le troisième CMPP du 11 juin 2008 qui s’élevait à 7,7 milliards d’euros. La minoration a posteriori du montant des économies est due pour l’essentiel à un évaluation initiale optimiste – 3,5 milliards d’euros – des gains issus de la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » sur la période de référence 2009-2011.

Ce montant – 6,8 milliards d’euros – correspond à des économies « brutes », auxquelles il faut, à tout le moins, retrancher le coût des mesures du retour catégoriel liées à la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » pour constater l’impact budgétaire pluriannuel net réel de la mise en œuvre de la RGPP. Pour la période 2009-2011, ces mesures catégorielles s’élevant selon le Gouvernement à 1,3 milliard d’euros, cet impact global net s’élève donc à 5,5 milliards d’euros (117).

En considérant l’ensemble de la période 2009-2013, le tableau suivant retrace l’actualisation à ce stade des constats et programmations du Gouvernement.

Source : direction du budget

b) La portée des évaluations actualisées

Le montant des économies induites par la RGPP constitue l’un des éléments, parmi d’autres parfois plus significatifs, permettant l’analyse de la politique budgétaire et de l’évolution du solde du budget de l’État. Afin d’illustrer la place des économies induites par la RGPP dans « le niveau de crédits (en construction) ou de dépense (en exécution) », La direction du budget indique qu’« en simplifiant », peuvent être considérées « trois familles de facteurs :

« – des facteurs tendanciels (à la hausse en général, mais aussi parfois à la baisse) ;

« – des économies ;

« – et des moyens nouveaux.

« Les économies [constatées sur la période récente] se rattachent pour l’essentiel à des réformes de la RGPP. Quant aux moyens nouveaux, la situation de nos finances publiques fait qu’ils ont été concentrés sur les priorités politiques du Gouvernement. Outre le retour catégoriel de 50 % aux fonctionnaires déjà mentionné, peuvent être cités sur cette période : la revalorisation de l’allocation pour adultes handicapés (poursuivie sur 2011-2013), l’octroi de moyens à l’enseignement supérieur et à la recherche et l’élargissement des compétences des universités, les mesures du Grenelle de l’environnement, l’effort réalisé sur le budget de l’emploi pour faire face à la crise, la construction de prisons, … »

La Cour des comptes a, à sa manière, elle aussi constaté le poids relatif de la RGPP dans l’ensemble de la politique budgétaire de l’État, en précisant que « les économies escomptées de la RGPP se chiffrent en milliards d’euros alors que les efforts nécessaires pour redresser les comptes publics se chiffrent en dizaine de milliards d’euros » ((118).

Afin d’apprécier ces ordres de grandeur, le tableau suivant met en regard pour les années 2009 à 2011 les dépenses et recettes, ainsi que le solde, du budget général, et les économies constatées ou programmées par le Gouvernement au titre de la RGPP.

SOLDE DU BUDGET GÉNÉRAL, ENCOURS DE LA DETTE
ET ÉCONOMIES ISSUES DE LA RGPP

(en milliards d’euros)

 

2009

2010

2011

2012

Dépenses

291

323

288

375

Recettes

161

172

196

299

Solde

- 130

- 151

- 92

- 76

Encours de
dette publique

1 492,7

1 590,7

1 708,7

1 800, 0

Dette en pourcentage du PIB

79 %

82,3 %

85,5 %

87,4 %

Économies nettes cumulées engendrées par la RGPP

2,1

3,4

8,4

10,5

Ce tableau est élaboré pour les informations relatives au budget général sur la base des lois de règlement des comptes (2009 et 2010) et de la loi de finances initiale pour 2011 corrigée des deux lois de finances rectificative pour 2011 des 29 juillet et 19 septembre 2011 et des deux projets de loi de finances rectificative pour 2011 actuellement examinés par le Parlement ; ce tableau prend en compte les constatations et programmations, évoquées supra, telles que présentées par le Gouvernement pour les économies induites par la mise en œuvre de la RGPP.

On observe que les économies cumulées, constatées et programmées par le Gouvernement au titre de la RGPP, représentent des montants qui ne sont pas comparables aux enjeux des finances publiques auxquels est confronté l’État. La contribution de la RGPP à la réduction du déficit budgétaire ne serait néanmoins pas négligeable à compter de 2011. En conséquence, il est théoriquement possible de procéder au calcul des dépenses évitées en intérêts de la dette du fait des économies engendrées par la RGPP, en considérant les montants du PIB et de l’encours de la dette indiquée par le tableau précédent.

La direction du budget, comme évoqué infra, propose d’ailleurs une estimation en la matière. Les rapporteurs considèrent qu’un tel calcul est à ce stade difficilement envisageable, eu égard au trop grand nombre de questions, abordées aussi infra, sur l’effectivité de certaines des économies que le Gouvernement constate et programme au titre de la RGPP.

C.– DES INFORMATIONS PUBLIQUES INSUFFISANTES POUR VÉRIFIER LES INFORMATIONS GLOBALES DU GOUVERNEMENT

Les informations gouvernementales sur les économies induites par la mise en œuvre de la RGPP, présentent des montants globaux (119), parfois affinés en catégories de dépenses de personnel, de fonctionnement et d’intervention.

Ces informations n’établissent pas de liens entre les mesures proprement dites de la RGPP, telles qu’elles ont été décidées par les CMPP successifs, et ces montants globaux d’économies. Or, il doit exister des justifications s’appuyant sur l’impact de ces mesures pour fonder les évaluations du Gouvernement en la matière. Il n’est néanmoins pas aisé d’identifier clairement et précisément, au vu des informations rendues publiques, quels peuvent être les liens chiffrés permettant de passer des gains associés aux mesures aux économies globales.

1. L’annexe au projet de loi de règlement des comptes portant sur les mesures finies de la RGPP

L’annexe au projet de règlement des comptes et rapport de gestion (évoquée supra, établie en application de l’article 122 de la loi de finances pour 2010) présente, au titre de l’année concernée par le projet de loi, les mesures de la RGPP arrivées à leur terme ou « finies » (une mesure étant considérée comme « finie » « si sa mise en œuvre est effective, si tous ses objectifs opérationnels ont été atteints et si les résultats obtenus ont fait l’objet d’une analyse contradictoire au niveau interministériel, notamment sur la qualité des effets attendus » (120)).

Cette présentation est constituée, pour chaque mesure finie, de développements concernant les principaux objectifs de la mesure, l’exécution du calendrier de sa mise en œuvre, l’évaluation de ses résultats opérationnels et, le cas échéant, son impact budgétaire.

Comme le montre le tableau suivant, les impacts budgétaires des mesures finies de la RGPP ne sont mentionnés que pour un nombre limité d’entre elles ; ce tableau procède par ailleurs à la somme de ces impacts budgétaires tels qu’ils sont évoqués dans les deux annexes – publiées à ce jour – aux projets de loi de règlement des comptes pour les années 2009 et 2010.

LES MESURES « FINIES » DE LA RGPP

 

2008

2009

2010

Total

Nombre des mesures finies

8

50

61

119

Qui font l’objet d’une évaluation des gains associés

-

7

22

29

Gains associés

– en ETPT

– en millions d’euros (fonctionnement et intervention)

-

-

388

98

1 240

376

1 628

474

Ce tableau est établi à partir des informations explicites des deux annexes associées aux projets de loi de règlement des comptes pour 2009 et 2010. Les quelques éléments qu’elles évoquent quant aux économies programmées en 2011 et les années postérieures ne sont pas pris en compte.

Le tableau montre qu’au 31 décembre 2010, 23 % (119 sur environ 517) des mesures de la RGPP étaient considérées comme achevées. À 29 de ces 119 mesures achevées – soit 24 % d’entre elles – est associée une évaluation pour 2009 et 2010 de leur impact budgétaire en terme de gain d’ETPT ou de gains budgétaires sur les dépenses de fonctionnement ou d’intervention (121).

2. Quels enseignements en tirer ?

L’annexe au projet de loi de règlement des comptes établie en application de l’article 122 de la loi de finances pour 2010 prouve que le Gouvernement est en possession d’évaluation ex post des gains budgétaires des mesures de la RGPP quand celles-ci sont de nature à engendrer de telles économies. Les rapporteurs reviendront infra sur ce point, tant il apparaît que le Gouvernement devrait procéder à la publication large de ces éléments, y compris d’ailleurs pour les mesures de la RGPP qui ne sont pas « finies ».

Une autre question est de déterminer si les éléments du tableau ci-dessus sont « en ligne » avec les constatations et programmations du Gouvernement globales en matière d’économies budgétaires induites par la RGPP.

Les gains en matière d’ETPT, tels qu’ils apparaissent dans le tableau ci-dessus, ne constituent sans doute pas un repère valable ; si certaines mesures de la RGPP conduisent à des gains directs en ETPT, la RGPP a été envisagée dès l’origine (cf. supra la première partie du présent rapport) comme le moyen de parvenir à une mise en œuvre réussie de la « règle du un sur deux ». Les mesures de la RGPP sont ainsi censées créer un contexte favorable à la baisse – entreprise de façon exogène et dépendamment de la RGPP – des effectifs des agents de l’État. Il n’est donc pas étonnant de constater le très faible nombre des gains d’ETPT directement associés à la mise en œuvre de mesures de la RGPP (1 628 pour les 119 mesures finies au 31 décembre 2010, alors que sur 2009 à 2010, les schémas d’emplois pour le budget de l’État ont conduit à une baisse des effectifs de 56 000 ETPT environ).

Dans cette optique, c’est le fait de mettre au crédit de la RGPP tous les gains issus de la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » dont l’opportunité pourrait être en toute rigueur discutée.

Le constat est différent s’agissant des gains de la RGPP en matière de dépenses de fonctionnement et d’intervention, puisque les mesures de la RGPP doivent en être directement à l’origine.

Au total, le tableau ci-dessus montre qu’au titre des mesures de la RGPP finies au 31 décembre 2010, 474 millions d’euros ont été économisés sur le budget de l’État hors titre 2 (122).

Ce montant est à comparer aux 2,5 milliards d’euros d’économies constatées par le Gouvernement au titre de la phase 1 de la RGPP pour les dépenses de fonctionnement et d’intervention en 2009 et 2010. Ainsi, pour ces deux exercices, 36 % des mesures associées à la phase 1 de la RGPP (119 mesures achevées sur les 330 mesures décidées par les CMPP des 12 décembre 2007, 4 avril 2008 et 11 juin 2008) ont conduit à des économies représentant 18,5 % du montant des gains attendus au titre de l’ensemble des mesures.

Des explications structurelles peuvent justifier cet écart, significatif, entre le nombre des mesures finies au 31 décembre 2010 et leurs impacts financiers. Par définition, les mesures achevées les plus rapidement étaient les plus simples à mettre en œuvre et donc, peut-être, parmi les moins susceptibles d’aboutir à des gains en termes d’effectifs ou de crédits. Par ailleurs, certaines mesures en cours de réalisation induisent sans doute d’ores et déjà des gains, que l’annexe prévue par l’article 122 de la loi de finances pour 2010 n’a pas vocation à quantifier, puisqu’elle se borne à en faire une présentation uniquement pour les mesures achevées.

L’accès à ces informations relatives aux mesures « finies » révèle aussi une forte concentration des économies constatées au titre de la RGPP (en matière de fonctionnement et d’intervention) sur un petit nombre de mesures. La mesure « Réviser et harmoniser les taux d’aide à l’innovation » a consisté à baisser et rapprocher les taux d’aides publiques accordées en la matière par certains opérateurs (123). Cette mesure aurait conduit « à des économies budgétaires [en intervention] à hauteur de 211 millions d’euros par an » (124), soit, à elle seule, 45 % des 464 millions d’économies constatées au titre des 119 mesures finies en 2009 et 2010 pour la phase 1 de la RGPP. Les économies associées en 2010 à la mesure « Extinction progressive du dispositif des surpensions versées aux fonctionnaires allant s’installer outre-mer pour leur retraite » se sont élevées à 47 millions d’euros en intervention, soit un peu plus de 10 % de ce montant global.

Ces deux exemples illustrent aussi le fait que les dépenses d’intervention ont été et sont mises à contribution pour réaliser des économies, non négligeables voire substantielles, au titre de la RGPP ; ce qui nuance le propos selon lequel elle est restée cantonnée à la mise en œuvre de réorganisations administratives.

Au demeurant, la « mise à contribution » des dépenses d’intervention plus forte qu’initialement prévue, est confirmée par la comparaison des évaluations ex ante et ex post du Gouvernement s’agissant des économies d’intervention et de fonctionnement au titre de la phase 1 de la RGPP : initialement les économies sur les dépenses de fonctionnement devaient être supérieures à celles associées aux dépenses d’intervention (2,2 milliards d’euros contre 2 milliards d’euros) ; la « tendance » se serait inversée en exécution selon le Gouvernement (1,6 milliard d’euros contre 2,6 milliards d’euros).

À un stade où les rapporteurs ne disposaient pas encore, de la part de la direction du budget, d’un tableau recensant les économies en fonctionnement et en intervention associées à certaines mesures de la RGPP, son directeur, auditionné par les rapporteurs, avait d’ailleurs spontanément évoqué des dépenses d’intervention pour illustrer les économies jugées les plus substantielles induites par des mesures de la RGPP : la réforme du 1 % logement, la réforme des aides à l’innovation (évoquée supra), la réforme des exonérations de charges sociales dans les zones franches urbaines (ZFU).

3. Un consensus sur l’insuffisance des informations disponibles

Au total, l’information publique, transmise au Parlement, sur le détail des économies attendues et issues des mesures de la RGPP est très parcellaire : pour une mesure « finie » au cours d’une année n, le montant des économies associées à cette mesure est présenté dans l’annexe au projet de loi de règlement des comptes, rendue publique au mois de juin de l’année n+1.

La Cour des comptes a souligné la difficulté de la « conversion » des mesures de la RGPP en gains calculés en ETPT et en crédits : « la “traçabilité” des décisions mises en œuvre, notamment de leurs effets budgétaires, est […] insuffisante. […] À la lecture des documents budgétaires, il est difficile d’appréhender l’impact de la RGPP, notamment budgétaire, ou d’en suivre la mise en œuvre. Il est, de fait, difficile avec les documents transmis à la Cour, d’établir un lien clair entre le budget triennal et la RGPP, supposée refonder la dépense publique » ((125).

Ce constat a conduit la Cour à formuler une recommandation sur le sujet, qui illustre, en creux, les lacunes actuelles en matière d’informations budgétaires et relative aux effectifs : « la lecture des documents budgétaires doit permettre d’appréhender les économies, pour chaque mesure ou groupe de mesures [de la RGPP], tant en crédits qu’en ETPT […], en précisant l’horizon temporel envisagé de ces économies […]. »

Le Gouvernement lui-même semble regretter cette situation ; dans l’annexe jointe au projet de règlement des comptes pour l’année 2010 (126), en préambule de la présentation des mesures finies au cours de cet exercice, le Gouvernement précise que « la présentation des mesures finies et de leurs résultats ne doit pas occulter le fait que la RGPP doit être comprise dans son ensemble et jusqu’à son terme. Ainsi de nombreuses mesures ont déjà produit des effets significatifs qui ne sont pas recensés ici car les réformes en question s’inscrivent dans un calendrier plus long. […] L’ensemble de ces éléments doit être pris en considération pour comprendre les résultats présentés concernant les mesures finies et anticiper les prochaines échéances. »

Les rapporteurs partagent ce souhait que puisse être publiquement pris en considération l’ensemble des impacts budgétaires imputables aux mesures de la RGPP, que celles-ci soient ou non achevées. Ils notent au demeurant, comme évoqué supra dans la première partie du présent rapport, que c’est à l’initiative du Gouvernement que le Parlement a choisi de limiter le contenu de l’annexe prévue à l’article 122 de la loi de finances pour 2010 aux seules mesures achevées de la RGPP. Si le Gouvernement regrette désormais de ne pas pouvoir informer plus largement le Parlement et les citoyens, notamment s’agissant des impacts financiers de la RGPP – mesures en cours « comprises » – rien ne lui interdit d’établir cette annexe au-delà des obligations fixées par la loi.

Et ce d’autant plus qu’il détient effectivement des informations en la matière, comme l’illustrent les développements ci-après, qui tentent de procéder à une vérification et une analyse plus approfondie – respectivement pour les dépenses d’intervention et de fonctionnement (partie II) et de personnel (partie III) – des impacts financiers de la RGPP. Les rapporteurs ont en effet invité à plusieurs reprises le Gouvernement à leur fournir des éléments plus précis et complets sur les impacts financiers de la RGPP, étant entendu qu’ils partagent le souhait du Gouvernement qu’elle soit jugée sur le fondement du recensement de tous ses effets constatés et anticipés.

II.– ÉLÉMENTS SUR LES IMPACTS FINANCIERS DE LA RGPP EN FONCTIONNEMENT ET EN INTERVENTION

A.– LE PANORAMA DRESSÉ PAR LE GOUVERNEMENT DES GAINS EN INTERVENTION ET EN FONCTIONNEMENT PAR MESURE DE LA RGPP

1. Les éléments émanant de la direction du budget

a) Présentation du tableau transmis par la direction du budget

La direction du budget a fourni aux rapporteurs un tableau recensant les mesures de la RGPP qui induisent des économies en intervention et en fonctionnement présentées par ministère, dans leur ordre alphabétique, en énumérant d’abord pour chaque ministère les mesures d’économies de dépenses d’intervention, puis de fonctionnement, et à l’intérieur de chacune de ces deux catégories en listant les mesures dans l’ordre de leur numéro de mesure RGPP lorsqu’il existe. Le tableau associe à chacune des ces mesures un montant d’économies pour chaque année de 2009 à 2013. Le chiffrage des économies y est actualisé au 31 juillet 2011.

ÉVALUATION PAR MESURE DE LA RGPP DES ÉCONOMIES EN FONCTIONNEMENT ET EN INTERVENTION

(en millions d’euros)

N° de mesure

Ministère

Libellé de la mesure

Nature de dépense

2009

2010

2011

2012

2013

69

Affaires étrangères et européennes

Fusionner sous label unique les services de coopération culturelle des ambassades et les centres culturels au sein d’un seul établissement disposant de l’autonomie financière, afin d’accroître la visibilité du réseau culturel et d’éviter les redondances.

Intervention

-

27

30

30

30

75

Affaires étrangères et européennes

Réexaminer et prioriser les contributions de la France aux organisations internationales et renforcer l’évaluation de leur efficacité.

Intervention

1

32

32

32

32

77

Affaires étrangères et européennes

Développer les financements innovants en faveur du développement.

Intervention

-

-

60

60

60

 

Affaires étrangères et européennes

Adaptation des modalités de prise en charge de la scolarité à l'étranger.

Intervention

-

-

-

25

62

58

Affaires étrangères et européennes

Adapter la taille des ambassades et des représentations permanentes aux missions qui leur sont confiées.

Fonctionnement

4

9

12

12

12

62

Affaires étrangères et européennes

Regrouper et mutualiser les fonctions support de l’ensemble des services de l’État à l’étranger au sein de services communs de gestion et externaliser ce qui peut l’être. Augmenter le recours aux agents de droit local (ADL) pour les postes à forte valeur ajoutée.

Fonctionnement

-

8

17

17

17

74

Affaires étrangères et européennes

Adapter le réseau consulaire afin d’atteindre la vision cible du réseau en 2013, satisfaisant à un service consulaire de qualité et s’appuyant sur les possibilités de rapprochement avec les partenaires européens.

Fonctionnement

-

6

10

10

10

280

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Renforcer la dynamique régionale du réseau des chambres d’agriculture.

Intervention

-

3

9

15

17

287

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Adapter le dispositif de financement des contrôles sanitaires à la nouvelle législation européenne.

Intervention

8

8

8

8

8

 

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Suppression de l'exonération salariale des moins de 26 ans en travailleur occasionnel demandeur d’emploi (TO/DE).

Intervention

-

-

2

2

2

307

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Limitation des interventions nationales et déconcentrées au bénéfice des associations en faveur du monde rural aux obligations communautaires en la matière.

Intervention

6

7

7

7

7

308

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Après apurement des dettes et respect des engagements, transfert des biens des sociétés d'aménagement régional aux régions, et arrêt du financement des travaux hydrauliques.

Intervention

9

14

20

20

20

309

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Rationalisation des aides à la cessation d'activité, la suppression du congé formation de la compétence des régions, et du dispositif de préretraite des agriculteurs, en cohérence avec la politique du gouvernement en matière d'emploi des seniors.

Intervention

4

6

10

10

10

278

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Créer et rationaliser l’organisation de l’Agence de services et de paiement (ASP).

Fonctionnement

-

-

23

27

31

284

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Recentrer les missions de l’État en matière de politique du cheval.

Fonctionnement

3

7

9

12

12

285

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Regrouper et rationaliser les moyens de soutien à la gestion de la forêt privée au sein du Centre national de la propriété forestière (CNPF).

Fonctionnement

-

-

5

3

3

303

Culture et communication

Clarifier les modalités de l'intervention de l'État en faveur du spectacle vivant.

Intervention

-

-

9

10

18

298

Culture et communication

Rénover le statut du Centre national du cinéma (CNC).

Intervention

-

-

34

47

49

 

Culture et communication

Réforme du financement du Centre des monuments nationaux (CMN).

Intervention

-

-

10

10

10

 

Culture et communication

Optimisation des dépenses d'intervention du ministère de la Culture et de la communication (maintien de la publicité en journée sur France Télévisions, soutien à la presse).

Intervention

-

-

102

193

284

296

Culture et communication

Développer la performance et l'efficience des opérateurs.

Fonctionnement

-

-

21

30

31

204

Défense

Optimiser la fonction de maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres.

Fonctionnement

-

-

137

124

271

221

Défense

Moderniser la fonction habillement au sein des forces armées.

Fonctionnement

nd

nd

nd

-

70

28

Écologie, développement durable, transports et logement

Rénover le 1% logement et sa gouvernance en vue de réorienter l'utilisation des crédits et de limiter les coûts de gestion.

Intervention

850

850

850

800

800

29

Écologie, développement durable, transports et logement

Améliorer la gouvernance du marché du logement social en mutualisant les ressources financières entre organismes HLM, en généralisant le conventionnement global.

Intervention

-

10

340

340

340

31

Écologie, développement durable, transports et logement

Faire évoluer le rôle de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) en tant qu’opérateur de la transition environnementale.

Intervention

-

-

90

90

90

33

Écologie, développement durable, transports et logement

Orienter les tarifs ferroviaires sur les coûts d’infrastructure de Réseau ferré de France (RFF).

Intervention

75

200

341

367

378

 

Écologie, développement durable, transports et logement

Reconstitution d'un Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM) centré sur la seule priorité "changement climatique".

Intervention

-

-

9

9

9

 

Écologie, développement durable, transports et logement

Optimisation du financement de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU).

Intervention

-

-

247

252

256

 

Écologie, développement durable, transports et logement

Harmonisation entre employeurs des modalités de calcul de leur contribution aux aides personnelles au logement (APL).

Intervention

-

-

86

86

86

 

Écologie, développement durable, transports et logement

Révision des conditions d'ouverture de droit aux aides au logement.

Intervention

-

-

120

100

80

 

Écologie, développement durable, transports et logement

Réforme du soutien au transport combiné.

Intervention

-

-

-

10

10

 

Écologie, développement durable, transports et logement

Convergence tarifaire dans les centres d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), l’hébergement d’urgence et les maisons relais / aide à la gestion locative sociale (AGLS).

Intervention

-

-

17

58

62

22

Écologie, développement durable, transports et logement

Réformer l’organisation territoriale de Météo France.

Fonctionnement

3

5

9

12

12

88

Économie, finances et industrie

Rationaliser l’organisation administrative des réseaux des chambres de commerce et des métiers.

Intervention

-

36

78

120

120

89

Économie, finances et industrie

Concentrer les aides à l'innovation sur les entreprises de moins de 5 000 salariés.

Intervention

20

20

80

80

80

90

Économie, finances et industrie

Réviser et harmoniser les taux d'aides à l'innovation.

Intervention

211

211

211

211

211

91

Économie, finances et industrie

Concentrer l'action régionale de l'État sur les actions interrégionales et les priorités nationales.

Intervention

17

17

17

17

17

97

Économie, finances et industrie

Améliorer la performance des centres techniques industriels (CTI) et des comités professionnels de développement économique (CPDE).

Intervention

-

-

5

12

12

 

Économie, finances et industrie

Recentrage des aides aux entreprises.

Intervention

-

-

13

115

202

105

Économie, finances et industrie

Rationaliser l’organisation d’Oséo.

Fonctionnement

-

-

84

188

274

106

Économie, finances et industrie

Recentrer l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) sur son cœur de métier.

Fonctionnement

-

-

-

2

4

107

Économie, finances et industrie

Mettre en place un pilotage stratégique des opérateurs relevant du ministère.

Fonctionnement

-

-

20

25

25

 

Éducation nationale, jeunesse et vie associative

Optimisation des dépenses d'intervention du ministère de l’Éducation nationale, de la jeunesse et la vie associative.

Intervention

-

-

33

82

112

 

Éducation nationale, jeunesse et vie associative

Optimisation du service civique volontaire.

Intervention

-

-

45

109

165

240

Éducation nationale, jeunesse et vie associative

Réorganiser et rationaliser les missions, notamment celles d’information, des acteurs et « opérateurs» jeunesse (Centre d’information et de documentation jeunesse – CIDJ – Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire – INJEP – Conseil national de la jeunesse - CNJ) et renforcer leur pilotage stratégique.

Fonctionnement

-

-

-

-

19

 

Enseignement supérieur et recherche

Recentrage de dispositifs d'interventions de l'enseignement supérieur.

Intervention

-

-

13

13

13

180

Enseignement supérieur et recherche

Rationaliser et professionnaliser les fonctions support et soutien des organismes de recherche.

Fonctionnement

-

-

114

137

169

189

Enseignement supérieur et recherche

Améliorer le pilotage et la tarification des très grandes infrastructures de recherche (TGIR).

Fonctionnement

-

-

4

7

10

514 M

Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

En lien avec le Conseil d’État et le ministère de la Justice, participer à la définition d’un plan d’action permettant de réduire le délai de traitement des contentieux devant la Cour nationale du droit d'asile.

Intervention

-

-

-

40

141

133

Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

Réexaminer les éléments particuliers de la fonction publique d’outre-mer.

Intervention

-

47

95

95

95

315

Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

Supprimer les unités de la police aux frontières dans les départements dans lesquels son activité est faible.

Fonctionnement

0,3

0,4

0,4

-

-

319

Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

Transférer la garde des centres de rétention administrative à la police aux frontières.

Fonctionnement

-

5

9

9

9

108

Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

Transférer la gendarmerie nationale sous l’autorité du ministre de l’Intérieur.

Fonctionnement

25

25

25

25

25

57

Justice et libertés

Adapter l’organisation de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) à son recentrage sur le pénal.

Intervention

16

87

87

87

87

37

Justice et libertés

Réformer la carte judiciaire.

Fonctionnement

-

11

11

11

11

48

Justice et libertés

Mutualiser les fonctions support des services déconcentrés.

Fonctionnement

-

45

45

45

45

53

Justice et libertés

Développer la politique d’alternative à l’incarcération.

Fonctionnement

91

116

221

268

268

253

Budget, comptes publics et réforme de l'État

Encadrer et maîtriser les dépenses fiscales et les niches sociales.

Intervention

79

130

840

1 114

1 175

243

Budget, comptes publics et réforme de l'État

Dynamiser la politique immobilière de l’État et de ses opérateurs.

Fonctionnement

117

190

265

340

415

244

Budget, comptes publics et réforme de l'État

Optimiser la politique d’achats de l’État.

Fonctionnement

25

185

485

750

1 000

258

Budget, comptes publics et réforme de l'État

Achever l’unification des réseaux des directions générales des impôts (DGI) et de la comptabilité publique (DGCP).

Fonctionnement

10

20

74

111

126

270

Budget, comptes publics et réforme de l'État

Poursuivre la dématérialisation des formalités gérées par la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI).

Fonctionnement

1

1

1

1

1

248

Budget, comptes publics et réforme de l'État

Installer un directeur chargé de coordonner les dépenses informatiques de l’État.

Fonctionnement

-

-

-

80

160

 

Budget, comptes publics et réforme de l'État

Optimiser la fonction logistique de l'État.

Fonctionnement

-

-

67

133

200

175

Travail, emploi et santé

Réexamen du dispositif d'exonération des charges sociales sur la rémunération du droit à l'image collective des sportifs professionnels.

Intervention

-

-

40

40

40

 

Travail, emploi et santé

Rationalisation du service public de l'emploi.

Intervention

-

-

200

200

200

 

Travail, emploi et santé

Optimisation des dépenses d'intervention du ministère du travail, de l'emploi et de la santé.

Intervention

-

-

532

584

635

 

Travail, emploi et santé

Harmonisation du mécanisme d'intéressement de l'allocation de solidarité spécifique (ASS) sur celui du revenu de solidarité active (RSA).

Intervention

-

-

48

50

52

 

Travail, emploi et santé

Participation des bénéficiaires de l'aide médicale d'État (AME) au financement du dispositif.

Intervention

-

-

5

5

5

 

Travail, emploi et santé

Réforme de la tarification des séjours hospitaliers au titre de l'AME.

Intervention

-

-

-

53

100

 

Solidarités et cohésion sociale

Optimisation des dépenses d'intervention du ministère des solidarités et de la cohésion sociale.

Intervention

-

-

56

129

220

   

Ajustement des crédits aux besoins des contrats de programmation État-régions.

Intervention

-

-

70

113

148

   

Contribution des institutions relevant de la mission « Pouvoirs publics » au gel en valeur des dépenses de l'État.

Intervention

-

-

15

33

52

 

Mesure RGPP transverse

Suppression d'emplois dans les opérateurs.

Fonctionnement

-

-

49

82

139

 

Mesure RGPP transverse

Économie sur le coût environné (hors immobilier) liée aux suppressions d'effectifs dans les opérateurs de l'État.

Fonctionnement

-

-

10

16

28

 

Mesure RGPP transverse

Économie sur le coût environné (hors immobilier) liée aux suppressions d'effectifs ministère.

Fonctionnement

75

156

237

318

399

La direction du budget précise que :

– les économies indiquées dans ce tableau sont entendues hors dépenses de personnel et correspondent à des gains bruts cumulés par rapport à une situation sans réforme ;

– l'année de référence « sans réforme », 2008 ou 2010 sauf exception, précède celle des premiers effets de la mesure.

b) Le lien entre certaines des économies programmées et la RGPP proprement dite n’est pas clairement établi

Ce tableau, dont l’analyse appuie les développements ci-après, montre que les économies attendues de la RGPP en intervention et en fonctionnement s’appuient sur un total de 77 mesures :

– 72 d’entre elles sont des mesures rattachées à un ministère ;

– 2 autres sont des mesures non rattachées à un ministère mais ne constituent pas pour autant des mesures interministérielles. Il s’agit des mesures relatives aux crédits des contrats de plan État-régions et à la contribution des pouvoirs publics au gel de l’évolution de dépenses de l’État ;

– 3 sont des mesures dites « transverses » ou interministérielles, permettant de comptabiliser des économies en fonctionnement induites par les suppressions d’emplois au niveau de l’État et de ses opérateurs.

Pour la lecture de ce tableau, la direction du budget indique que « parmi les économies touchant des dispositifs d’intervention, beaucoup se rattachent à des mesures RGPP déjà formalisées. Les autres économies sur les interventions programmées dans le budget triennal 2011-2013, si elles ont pour la plupart été expertisées dans le cadre de la revue des politiques publiques menée au cours de la première phase de la RGPP, n’ont pas, ou pas encore pour certaines, donné lieu à des mesures formalisées. En effet, des mesures portant sur des dispositifs d’interventions n’ont été formellement créées sous le label RGPP que lorsque leur mise en œuvre et leur suivi nécessitaient de s’inscrire dans une démarche de projet. A contrario, la concrétisation d’une économie sur un dispositif de guichet peut ne passer que par la modification d’un texte juridique, ce qui emporte immédiatement l’effet escompté ; créer une mesure RGPP serait alors inutile et n’aurait d’autre effet que d’alourdir le portefeuille des mesures, déjà particulièrement important. »

Ces propos semblent signifier que :

– une partie des économies en intervention rattachées à la RGPP au titre de la période 2011-2013 sont induites par des mesures qui ne sont pas des mesures proprement dites de la RGPP dûment décidées lors des réunions des cinq CMPP ayant eu lieu à ce stade ;

– ces mesures d’économies en intervention, au statut incertain du point de vue de la RGPP, sont censées avoir été, pour la plupart d’entre elles, étudiées et envisagées lors de la phase 1 de la RGPP. Cette assertion est bien entendu difficile à vérifier dans la mesure où les informations rendues publiques en matière de RGPP par le Gouvernement ne révèlent pas la teneur des expertises conduites lors de la phase 1 de la RGPP en amont des Comités de suivi (cf. supra la première partie du présent rapport sur la méthode de la RGPP). Dans de premières réponses aux rapporteurs, la direction du budget avait indiqué que « les travaux d’analyse engagés dès 2008 dans le cadre de la RGPP sur plusieurs grandes politiques, notamment d’intervention, ont permis de passer en revue et de remettre en question de manière systématique plusieurs champs de l’action publique et de constituer un vivier de réformes qui alimente progressivement les économies structurelles sous-tendant la programmation budgétaire » ;

– ces mesures d’économies en intervention au statut incertain pourraient donner lieu à l’adoption à l’avenir de mesures proprement dites de la RGPP. Cette mise en conformité avec la procédure classique de la RGPP ne serait cependant envisagée que pour les dispositifs qui nécessitent un processus de projet, ce qui n’est pas le cas, selon la direction du budget, des économies en intervention s’appuyant simplement sur la modification de la norme régissant l’intervention concernée.

Quelles sont les mesures du tableau ci-dessus portant des économies d’intervention rattachées à la RGPP mais ne constituant pas des mesures proprement dites de la RGPP ?

La comparaison avec les mesures proprement dites répertoriées dans le rapport du CMPP du 9 mars 2011 montre qu’il s’agit des mesures du tableau fourni par la direction du budget qui ne sont pas associées à un numéro de mesure dans sa première colonne.

Le tableau ci-dessous les énumère en associant à chacune d’elles le montant des économies qui en est attendu en 2013.

SÉLECTION DES MESURES PORTANT DES ÉCONOMIES D’INTERVENTION
SANS RATTACHEMENT À UNE MESURE PROPREMENT DITE DE LA RGPP

(en millions d’euros)

Ministère

Libellé de la mesure

Économies
2011-2013

Affaires étrangères et européennes

Adaptation des modalités de prise en charge de la scolarité à l'étranger.

62

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Suppression de l'exonération salariale des moins de 26 ans en travailleur occasionnel demandeur d’emploi (TO/DE).

2

Culture et communication

Réforme du financement du Centre des monuments nationaux (CMN).

10

Culture et communication

Optimisation des dépenses d'intervention du ministère de la Culture et de la communication (maintien de la publicité en journée sur France Télévisions, soutien à la presse).

284

Écologie, développement durable, transports et logement

Reconstitution d'un Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM) centré sur la seule priorité "changement climatique".

9

Écologie, développement durable, transports et logement

Optimisation du financement de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU).

256

Écologie, développement durable, transports et logement

Harmonisation entre employeurs des modalités de calcul de leur contribution aux aides personnelles au logement (APL).

86

Écologie, développement durable, transports et logement

Révision des conditions d'ouverture de droit aux aides au logement.

80

Écologie, développement durable, transports et logement

Réforme du soutien au transport combiné.

10

Écologie, développement durable, transports et logement

Convergence tarifaire dans les centres d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), l'hébergement d’urgence et les maisons relais / aide à la gestion locative sociale (AGLS).

62

Économie, finances et industrie

Recentrage des aides aux entreprises.

202

Éducation nationale, jeunesse et vie associative

Optimisation des dépenses d'intervention du ministère de l’Éducation nationale, de la jeunesse et la vie associative.

112

Éducation nationale, jeunesse et vie associative

Optimisation du service civique volontaire.

165

Enseignement supérieur et recherche

Recentrage de dispositifs d'interventions de l'enseignement supérieur.

13

Travail, emploi et santé

Rationalisation du service public de l'emploi.

200

Travail, emploi et santé

Optimisation des dépenses d'intervention du ministère du travail, de l'emploi et de la santé.

635

Travail, emploi et santé

Harmonisation du mécanisme d'intéressement de l'allocation de solidarité spécifique (ASS) sur celui du revenu de solidarité active (RSA).

52

Travail, emploi et santé

Participation des bénéficiaires de l'aide médicale d'État (AME) au financement du dispositif.

5

Travail, emploi et santé

Réforme de la tarification des séjours hospitaliers au titre de l'AME.

100

Solidarités et cohésion sociale

Optimisation des dépenses d'intervention du ministère des solidarités et de la cohésion sociale.

220

 

Ajustement des crédits aux besoins des contrats de programmation État-régions.

148

 

Contribution des institutions relevant de la mission "Pouvoirs publics" au gel en valeur des dépenses de l'État.

52

Total

2 765

Ce tableau montre qu’il existe trois catégories distinctes de ces mesures au statut incertain du point de vue de la RGPP :

– des mesures d’« optimisation » visant a priori l’ensemble des dépenses d’intervention de certains ministères, sans autre précision quant à leur contenu. Les cinq ministères concernés sont ceux chargés de la Culture et de la communication, de l’Éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, de l’Enseignement supérieur et de la recherche (pour lequel il s’agirait d’un « recentrage » et non d’une « optimisation »), du Travail, de l’emploi et de la santé, ainsi que des Solidarités et de la cohésion sociale ;

– des mesures rattachées à certains ministères dont les libellés permettent d’identifier les interventions que ces mesures concernent. Les deux ministères les plus concernés sont ceux de l’Écologie, du développement durable, des transports et du logement, ainsi que du Travail, de l’emploi et de la santé. Quatre autres ministères sont concernés par une mesure de cette catégorie répertoriée par ce tableau ; il s’agit des ministères des Affaires étrangères et européennes, de l’Agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire, de l’Économie, des finances et de l’industrie, ainsi que de l’Éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative ;

– deux mesures ne sont pas rattachées à un ministère. Il s’agit de celles relatives aux crédits des contrats de programmation États-régions et de la contribution des pouvoirs publics au gel en valeur des dépenses de l’État.

Ces 22 mesures au statut incertain au regard de la RGPP constituent en nombre presque le tiers des 77 mesures – portant à la fois sur les dépenses de fonctionnement et d’intervention – du tableau d’ensemble fourni par la direction du budget ; ces 22 mesures représentent presque la moitié des mesures portant uniquement des gains en intervention. Les économies portées par ces 22 mesures pour la période 2011-2013 approchent 2,8 milliards d’euros, soit environ 42 % du total des économies en intervention envisagées par ce même tableau pour la même période (soit un total de 6,6 milliards d’euros d’économies, cf. infra).

La mise en œuvre de ces mesures au statut incertain au regard de la RGPP apparaît ainsi indispensable pour l’atteinte des objectifs d’économies programmés par le Gouvernement au titre de la RGPP.

Or, le rattachement opéré par le Gouvernement de ces 22 mesures à la RGPP peut laisser perplexe. Comme l’évoque la direction du budget elle-même, elles ne correspondent pas à la démarche de projet qui caractérise la RGPP ; leur mise en œuvre ne nécessite a priori pas de préparation mais implique une simple modification de la norme correspondante. Par ailleurs, malgré les nombreuses limites des informations publiques disponibles s’agissant des mesures proprement dites de la RGPP (cf. la première partie du présent rapport), ces mesures au statut incertain ne font l’objet d’aucune présentation publique. Cette difficulté est accrue quand leur libellé est allusif, notamment pour celles d’entre elles qui consistent en « l’optimisation » des dépenses d’intervention de l’ensemble d’un ministère.

c) Le tableau inspire les prévisions globales du Gouvernement

Selon la direction du budget, le tableau d’ensemble – regroupant les 77 mesures ayant un impact en intervention ou fonctionnement au titre de la RGPP – qu’elle a fourni aux rapporteurs présente des « gains bruts cumulés par rapport à une situation sans réforme. L’année de référence (2008 ou 2010 sauf exception) précède celle des premiers effets de la réforme ».

Ainsi, pour une même mesure, deux gains constatés en 2010 et 2011 ne doivent pas faire l’objet d’une addition car ils sont tous deux calculés par rapport à 2008 (127). L’économie constatée en 2011 prend en compte, en cumulé, les gains constatés les années précédentes.

Ce qui signifie aussi que la somme des variations observées de 2009 à 2013 est logiquement égale aux montants d’économies inscrits dans la colonne 2013.

Ceci étant précisé, le tableau suivant retrace pour les années 2009 à 2013 :

– les montants totaux des économies telles qu’elles sont présentées par mesure dans le tableau d’ensemble fourni par la direction du budget à vos rapporteurs ;

– l’évolution d’une année sur l’autre de ces montants d’économies.

IMPACTS FINANCIERS DE LA RGPP EN INTERVENTION ET FONCTIONNEMENT :
MONTANTS GLOBAUX D’ÉCONOMIES EN CUMUL ANNUEL
ET ÉVOLUTIONS D’UNE ANNÉE SUR L’AUTRE

(en millions d’euros)

 

2009

2010

2011

2012

2013

Total

Montants globaux d’économies en cumul annuel

fonctionnement

354

919

1 964

2 975

3 796

 

intervention

1 217

1 705

4 916

5 883

6 614

 

Total

1 571

2 624

6 880

8 678

10 410

 

Évolution d’une année sur l’autre

fonctionnement

+354,3

+565,1

+1 045

+830,6

+1 001

+3 796

intervention

+1 217

+488

+3 211

+967

+731

+6 614

Total

+1 571,3

+1 053,1

+4 256

+1 797,6

+1 732

+10 410

Les éléments de la ligne du tableau précédent concernant l’évolution d’une année sur l’autre des montants d’économies en intervention et en fonctionnement peuvent être comparées aux constats et programmations du Gouvernement en la matière ; ces constats et programmations, présentés supra, constituent des évolutions constatées d’une année sur l’autre, dont la somme permet d’établir le montant global pluriannuel des économies constatées et attendues.

Le tableau suivant présente cette comparaison, étant précisé que les évolutions d’une année sur l’autre issues du tableau immédiatement précédent sont présentées dans le tableau suivant en milliards d’euros et arrondies à la centaine de millions d’euros la plus proche.

ÉCONOMIES DE LA RGPP EN INTERVENTION ET FONCTIONNEMENT :
COMPARAISON DES PROGRAMMATIONS ET CONSTATS GLOBAUX ET DES INFORMATIONS ISSUES DU TABLEAU DÉTAILLÉ PAR MESURE

(en milliards d’euros)

 

2009

2010

2011

2012

2013

Total

 

Tableau détaillé de la direction du budget

Program-mations et constats globaux du Gouver-nement

Tableau détaillé de la direction du budget

Program-mations et constats globaux du Gouver-nement

Tableau détaillé de la direction du budget

Program-mations et constats globaux du Gouver-nement

Tableau détaillé de la direction du budget

Program-mations et constats globaux du Gouver-nement

Tableau détaillé de la direction du budget

Program-mations et constats globaux du Gouver-nement

Tableau détaillé de la direction du budget

Program-mations et constats globaux du Gouver-nement

Fonctionnement

0,4

0,4

0,6

0,4

1

1,1

0,8

0,8

1

0,9

3,8

3,6

Intervention

1,2

1,3

0,5

0,4

3,2

3,6

1

0,8

0,7

0,8

6,6

6,9

Total

1,6

1,7

1,1

0,8

4,2

4,7

1,8

1,6

1,7

1,7

10,4

10,5

Dans trois cas seulement est constatée une différence dépassant la centaine de millions d’euros entre les sommes issues du tableau détaillé par mesure (direction du budget) et les montants globaux présentés par le Gouvernement. Il s’agit des économies programmées en fonctionnement pour l’année 2010 et en intervention pour les années 2011 et 2012.

S’agissant des totaux sur la période 2009-2013, les économies en fonctionnement seraient, sur la base du tableau détaillé, de 200 millions d’euros supérieures – 3,8 milliards d’euros contre 3,6 milliards d’euros – à celles présentées dans la programmation globale du Gouvernement, soit une différence de l’ordre de 5 % du montant le plus élevé. Pour les économies en intervention, la programmation globale semble plus optimiste de 300 millions d’euros - 6,9 milliards d’euros contre 6,6 milliards d’euros – , pour une différence de l’ordre de 4 % du montant le plus important.

Si l’on considère le total du fonctionnement et de l’intervention pour la période 2009 à 2013, ces deux différences s’annulent presque totalement, pour laisser une « épaisseur du trait » d’environ 100 millions d’euros pour un montant global d’économies compris entre 10,4 et 10,5 milliards d’euros.

Le tableau fourni par la direction du budget à vos rapporteurs, détaillant par mesure les économies constatées ou attendues en fonctionnement ou intervention, correspond ainsi largement à la présentation des économies globales constatées et programmées par le Gouvernement pour la période 2009-2013.

Dans ces conditions, on peut se demander pourquoi le Gouvernement n’a pas jugé utile jusqu’à aujourd’hui de rendre public ce tableau détaillé (le cas échéant en le mettant à jour quand cela aurait été jugé nécessaire) ? Il constitue en effet une source cruciale d’informations, qui permet, à tout le moins, de dissiper le doute, légitime au regard du peu d’informations publiques existantes, qu’aient été élaborées des constatations et programmations s’appuyant sur la volonté de justifier ex post des montant d’économies globaux qu’aucun élément concret, rattaché aux mesures de la RGPP, ne viendrait étayer. Ce tableau ne soulève pas moins de nouvelles questions :

– sur le rattachement à la RGPP de mesures d’économies en intervention ne constituant pas des mesures proprement dites de la RGPP (cf. supra) ;

– sur le fait qu’il n’est que partiellement corroboré par d’autres informations publiques ou à la disposition de vos rapporteurs (cf. infra).

Le tableau précédent permet aussi de constater l’importance de l’exercice budgétaire 2011 pour l’accomplissement des économies induites par les mesures de la RGPP : 40 % (soit 4,2 milliards d’euros sur 10,4 milliards d’euros) des économies constatées ou programmées pour 2009-2013 par rapport à 2008 étaient attendues en 2011. Ce taux ne s’élève qu’à 15 % pour 2009, 11 % pour 2010, 17 % pour 2012 et 16 % pour 2013. Au total, l’impact budgétaire de la RGPP, au regard de la programmation gouvernementale, doit donc être constaté à 73 % par les résultats observés sur la période 2011-2013, dont 40 % pour la seule année 2011.

d) D’autres économies liées à la RGPP sont attendues par le Gouvernement

La direction du budget considère que le chiffrage issu du tableau détaillant les économies en fonctionnement et intervention par mesure de la RGPP « est un minorant » des impacts sur les finances publiques de la mise en œuvre de la RGPP.

Elle invite en premier lieu à considérer, du point de vue des dépenses de l’État, « l’impact des économies sur la charge de la dette (que d’autres pays valorisent dans leur plan de consolidation) ; cet impact peut être estimé à plusieurs centaines de millions d’euros en 2011, et à plus d’1 milliard d’euros en 2013 ». Les rapporteurs ont évoqué supra leur interrogation sur la possibilité de procéder à une évaluation fiable à ce stade de l’économie en intérêts de la dette induite par les économies cumulées de la RGPP. L’opportunité du principe d’une telle économie n’est pas en cause ; les présents développements montrent cependant que beaucoup de questions demeurent en suspens sur l’effectivité des économies engendrées par la RGPP, dont le montant doit être précisément établi pour procéder au calcul de sa contribution à la limitation du montant de la dette et donc des intérêts associés. Il paraît donc justifié que la direction du budget maintienne à ce stade l’estimation qu’elle présente hors du bilan consolidé des économies induites par la RGPP.

Par ailleurs, selon la direction du budget, « toutes les économies rattachables à la RGPP ne sont pas valorisées dans [dans le tableau détaillant les économies en fonctionnement et intervention par mesure de la RGPP], qui est centré uniquement sur les économies attendues en dépenses de l’État ». La direction du budget évoque à ce titre trois mesures susceptibles d’engendrer des économies pour d’autres catégories de dépenses publiques que les dépenses de l’État.

En premier lieu, la mesure « Renforcer la lutte contre la fraude à la sécurité sociale » contribue à des économies en faveur des organismes de sécurité sociale. Interrogé par les rapporteurs, le secrétariat général des ministères sociaux évalue le gain correspondant à 450 millions d’euros en 2010 (128). Le rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011 évoque, pour illustrer le contenu de cette mesure, « plusieurs dispositifs [ayant] renforcé la lutte contre la fraude : échanges d’information avec l’administration fiscale dans le but de diminuer les fraudes liées au logement fictif et aux résidents fiscaux à l’étranger, réformes des pénalités financières appliquées aux fraudeurs. »

Le secrétariat général des ministères sociaux précise en outre que d’autres économies futures s’imputant sur les comptes de la sécurité sociale, devraient découler de la mise en œuvre de la mesure « Examiner avec les organismes de sécurité sociale la mise en œuvre, dans le cadre des conventions d’objectifs et de gestion, de normes de réduction des dépenses de fonctionnement, d’immobilier et de masse salariale prévues pour les opérateurs de l’État et travailler à la présentation d’un plan de réforme des SI [systèmes d’information] » (129).

En deuxième lieu, la direction du budget considère que la mesure « Créer une agence technique d’appui à la performance hospitalière et médico-sociale chargée notamment de réaliser annuellement au moins 50 projets de performance d’établissement de santé » « devrait se traduire par des économies de plusieurs centaines de millions d’euros ».

Cette mesure, à laquelle est associé un feu orange dans le rapport officiel du 9 mars 2011, ne semble pas correspondre, en tout état de cause, à des économies d’ores et déjà constatées. Le même rapport précise que « dans 30 établissements de santé, l’agence nationale d’appui à la performance hospitalière [ANAP] a réalisé un diagnostic de la performance de l’établissement et établi une feuille de route. Les 30 projets de performance qui en découlent sont en cours de signature : fin janvier 2011, 16 d’entre eux sont signés. Ils visent l’amélioration de la prise en charge des patients tout en optimisant les moyens des établissements. 20 projets de performance des établissements de santé supplémentaires sont prévus pour 2011. Ils sont en cours de définition et leur financement pourrait être assuré par l’ANAP en ce qui concerne le diagnostic et par le fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés, au côté des hôpitaux, en ce qui concerne la transformation ». Ce dernier point semble signifier que ces projets de performance correspondront à un coût, lié à leur élaboration mais aussi à la mise en œuvre de leur contenu.

En troisième lieu, la direction du budget évoque « l’impact des suppressions d’emplois d’enseignants et des mesures d’adaptation de l’offre scolaire sur les dépenses de fonctionnement et d’investissement supportées par les collectivités locales ». La direction du budget transpose ainsi aux collectivités territoriales la méthode des « coûts environnés », c’est-à-dire des économies de fonctionnement, d’intervention et d’investissement induites par les suppressions d’effectifs ; la direction du budget a d’ailleurs précisé aux rapporteurs que le calcul des « coûts environnés » pour l’État prend en compte les baisses d’effectifs applicables au budget de l’État « à l’exception de la totalité des suppressions d’emplois du ministère de l’Éducation nationale (les dépenses de fonctions “ supports ” les concernant étant minoritairement prises en charge par l’État). »

Il resterait à déterminer dans quelle mesure l’allègement correspondant en fonctionnement pour les collectivités territoriales est, le cas échéant, au moins partiellement compensé par la disponibilité temporelle accrue de certains établissements scolaires en application d’autres mesures de la RGPP ; ainsi, la « Mise en œuvre du droit à l’accompagnement éducatif » conduit certains établissements à être utilisés, à demeurer accessibles et à accueillir des élèves plus tard le soir que l’heure classique de fin des enseignements scolaires obligatoires.

2. Une forte concentration des impacts financiers sur un très petit nombre de mesures dont la portée de certaines économies associées pose question

a) La moitié des gains attendus de la RGPP sur 2009-2013 est concentrée sur 10 mesures

Sur l’ensemble des 514 mesures de la RGPP adoptées au cours d’un des cinq CMPP, 52 d’entre elles, soit environ 10 %, sont considérées par le Gouvernement comme ayant engendré ou devant engendrer des économies en fonctionnement ou en intervention. Comme évoqué supra, le tableau détaillé fourni par la direction du budget prend en outre en compte l’impact financier de :

– 22 mesures au statut incertain au regard de la RGPP, puisqu’elles n’en sont pas des mesures proprement dites mais lui sont de facto associées ;

– 3 mesures transverses, prenant en compte les économies de fonctionnement induites pour l’État par la baisse des effectifs de l’État et de ses opérateurs ;

Ainsi, 77 mesures, « tous statuts confondus » au regard de la RGPP, contribuent aux économies constatées et programmées en fonctionnement et intervention, soit 10,4 milliards d’euros sur la période 2009-2013.

Ce constat ne rend pas entièrement compte de la concentration de ces économies sur un nombre très limité de mesures ; ainsi, deux mesures – « Encadrer et maîtriser les dépenses fiscales et les niches sociales » et « Optimiser la politique d’achats de l’État » – devraient apporter, selon le Gouvernement, 2,175 milliards d’euros d’économies en 2013 par rapport à 2008, soit 21 % des économies en fonctionnement et intervention programmées pour l’ensemble de la RGPP sur la période.

Les 10 mesures les plus « rémunératrices » pour l’État au titre des dépenses de fonctionnement et d’intervention portent environ 50 % – 5,7 milliards d’euros sur 10,4 milliards d’euros – des économies attendues. Ces dix mesures sont énumérées dans le tableau suivant :

LISTE DES DIX MESURES LES PLUS POURVOYEUSES DE GAINS AU TITRE DE LA RGPP,
PAR MONTANT DÉCROISSANT

(en millions d’euros)

N° de mesure

Ministère

Libellé de la mesure

Nature de dépense

2009-2013

253

Budget, comptes publics et réforme de l'État

Encadrer et maîtriser les dépenses fiscales et les niches sociales.

Intervention

1 175

244

Budget, comptes publics et réforme de l'État

Optimiser la politique d’achats de l’État.

Fonctionnement

1 000

28

Écologie, développement durable, transports et logement

Rénover le 1% logement et sa gouvernance en vue de réorienter l'utilisation des crédits et de limiter les coûts de gestion.

Intervention

800

 

Travail, emploi et santé

Optimisation des dépenses d'intervention du ministère du Travail, de l'emploi et de la santé.

Intervention

635

243

Budget, comptes publics et réforme de l'État

Dynamiser la politique immobilière de l’État et de ses opérateurs.

Fonctionnement

415

 

Mesure RGPP transverse

Économie sur le coût environné (hors immobilier) liée aux suppressions d'effectifs des ministères.

Fonctionnement

399

33

Écologie, développement durable, transports et logement

Orienter les tarifs ferroviaires sur les coûts d’infrastructure de Réseau ferré de France (RFF).

Intervention

378

29

Écologie, développement durable, transports et logement

Améliorer la gouvernance du marché du logement social en mutualisant les ressources financières entre organismes HLM, en généralisant le conventionnement global.

Intervention

340

 

Culture et communication

Optimisation des dépenses d'intervention du ministère de la Culture et de la communication (maintien de la publicité en journée sur France Télévisions, soutien à la presse).

Intervention

284

105

Économie, finances et industrie

Rationaliser l’organisation d’Oséo.

Fonctionnement

274

Total

5 700

Parmi ces dix mesures, deux d’entre elles ont un « statut incertain », pour reprendre la terminologie précédente, puisqu’elles ne constituent pas des mesures proprement dites de la RGPP ; les économies qui leur sont associées sont néanmoins prises en compte dans les impacts financiers de la RGPP. Il s’agit de l’optimisation des dépenses d’intervention des ministères de la Culture et de la communication, et du Travail, de l’emploi et de la santé. Comme évoqué supra par les rapporteurs, il n’est pas possible à ce stade d’en éclairer le contenu.

Les développements suivants sont consacrés à six de ces dix mesures, constituant des mesures proprement dites de la RGPP (130) (131).

Ces développements montrent qu’il n’est parfois pas évident d’évaluer et de qualifier précisément les économies programmées par le Gouvernement ; dans certains cas, il apparaît contestable de considérer ces économies comme de réelles baisses des dépenses publiques.

b) Encadrer et maîtriser les dépenses fiscales et les niches sociales : 1 175 millions d’euros en intervention

Il s’agit de la mesure de la RGPP – décidée lors du CMPP du 12 décembre 2007 – qui doit être, au regard de la programmation gouvernementale, la plus « rémunératrice » sur 2009-2013 ; à elle seule, elle doit engendrer 11 % des économies attendues en fonctionnement et en intervention pour l’ensemble de la RGPP sur la période.

Le tableau détaillé fourni par la direction du budget indique que 60 % (710 millions d’euros sur 1175 millions d’euros) de son impact financier doit être observé au titre de l’exercice 2011 par rapport à 2010.

Le libellé original de cette mesure, dans le premier rapport d’étape de la RGPP du 3 décembre 2008 qui lui associe un feu vert, est le suivant : « définition de règles d’adoption plus strictes pour les dépenses fiscales, les mesures d’exonérations de cotisations sociales et les dispositifs affectant l’assiette des cotisations et contributions de sécurité sociale : limitation dans le temps de ces mesures, obligation de réaliser une étude d’impact préalable et examen périodique de leur efficacité socio-économique ». Le même rapport d’étape mentionne que le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2011 prévoit des dispositions devant permettre la mise en œuvre de la mesure RGPP.

Le rapport rendu public à l’occasion du CMPP du 30 juin 2010 se borne à indiquer, outre le feu vert qu’il associe à la mesure, que « depuis le début de la RGPP, le ministère a engagé des actions afin de maîtriser les dépenses fiscales, de réduire les niches sociales et d’améliorer le dispositif de contrôle interne budgétaire ».

Le rapport rendu public à l’occasion du CMPP du 9 mars 2011, en lui associant un feu vert, indique que, « concernant l’encadrement et la maîtrise des dépenses fiscales et des niches sociales, le principe de l’évaluation périodique de leur coût et de leur efficacité est inscrit à l’article 13 de la [loi du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014] : pour les mesures en vigueur au 1er janvier 2009, cette évaluation sera présentée au plus tard le 30 juin 2011 [sous la forme d’un rapport du Gouvernement au Parlement]. »

Pour mettre en œuvre cette disposition, le Gouvernement s’est appuyé sur un rapport que lui a remis en juin 2010 le Comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, présidé par M. Henri Guillaume, inspecteur général des finances honoraire. L’exercice d’évaluation réalisé par ce comité a porté sur 538 mesures dérogatoires fiscales et sociales correspondant à 104 milliards d’euros de « dépenses » ; ce comité administratif, mis en place par le Gouvernement, n’avait toutefois pas vocation à indiquer un programme de modification ou de suppression de certaines de ces mesures dérogatoires dans la perspective de satisfaire les économies programmées au titre de la mesure correspondante de la RGPP, mais d’évaluer leur efficacité, voire leur efficience.

Selon les informations recueillies auprès du secrétariat général des ministères financiers et de la direction du budget, seraient notamment pris en compte au titre de la mesure « Encadrer et maîtriser les dépenses fiscales et les niches sociales » les économies engendrées par les dispositions suivantes :

– la réduction, prévue par l’article 190 de la loi de finances pour 2009, de l’exonération de charges sociales applicables dans les zones franches urbaines (ZFU) ;

– certains éléments fiscaux de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer (LODEOM) ;

D’autres mesures semblent également prises en compte au titre de la RGPP pour la période 2011 à 2013, dans les domaines des services à la personne, des aides au secteur des cafés-hôtels-restaurants et des allègements de charge sur les bas salaires pour les apprentis.

La direction du budget a précisé, pour sa part, que ne sont prises en compte au titre des économies engendrées par cette mesure que des niches sociales, qui, contrairement aux dépenses fiscales qui s’imputent sur le solde du budget de l’État en réduisant les ressources, donnent lieu de la part de l’État à un remboursement sur ses crédits aux organismes de sécurité sociale en application de l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale (132).

Il serait utile de déterminer si viennent s’imputer sur les gains pris en compte pour le calcul des économies associées à cette mesure d’éventuelles nouvelles mesures de dérogation fiscale et sociale adoptées depuis 2009.

c) Optimiser la politique d’achats de l’État : 1 000 millions d’euros d’économies en fonctionnement

Cette mesure a été décidée par le CMPP du 12 décembre 2007 et est rattachée au ministère chargé du budget. Elle a donné lieu à la création du service des achats de l’État (SAE) par le décret n° 2009-300 du 17 mars 2009 placé auprès de ce ministère et chargé, aux termes de l’article 2 de ce décret, de la définition et de la mise en œuvre de « la politique des achats courants de l'État. Les établissements publics peuvent participer à la mise en œuvre de cette politique, sur décision de leur conseil d'administration. »

Selon la direction du budget, les économies prises en compte au titre de cette mesure sont les « moindres dépenses générées à la fois par une baisse du volume global d’achats liée à la mutualisation des commandes et par une baisse du prix d’achat unitaire, puisque les volumes par commande augmentent. »

S’agissant des mesures ayant conduit à constater des économies, la direction du budget indique que le SAE « a mis en place un programme dénommé “ calypso ”, découpé en quatre vagues successives lancées sur 2009, 2010 et 2011. Il vise à identifier les principales opportunités de gains. Ce programme est structuré en segments d’achats (impression, logiciels, formation, gardiennage et surveillance, assurances,…).

« Les vagues sont elles-mêmes déclinées en objectifs ministériels.

« À titre d’exemples, les principales mesures du plan d’action achat 2010 ont été : accord-cadre solutions d’impression, actions d’optimisation interministérielles concernant l’affranchissement (rationalisation du parc de machines à affranchir, meilleure utilisation des produits postaux,…), accord-cadre stockage, carte achat DGFIP, accord-cadre fournitures bureau (ministère de la justice), contrôles réglementaires, mise à disposition de marchés régionaux à bons de commande UGAP [Union des groupements d’achat public], maintenance des ascenseurs.

« Le plan d’action 2011 se décline selon les mesures suivantes :

« – déploiement des actions d’optimisation des solutions d’impression,

« – accord cadre téléphonie mobile,

« – voyages (renouvellement accords SNCF/Thalys),

« – […] cités administratives, accompagnement du renouvellement des marchés de Lille et Mulhouse. »

S’agissant des opérateurs de l’État, qui peuvent participer à la politique des achats de l’État sur décision de leur conseil d’administration en application du décret du 17 mars 2009, la direction du budget indique qu’ils « sont invités à recourir au service des achats de l’État qui doit les aider à professionnaliser leurs achats. Les principaux enjeux de cette professionnalisation sont de faire connaître le potentiel de gains économiques aux dirigeants des opérateurs (particulièrement les 70 plus importants), d’accélérer le partage de bonnes pratiques entre les structures achats des opérateurs d’une part, et celles de l’État d’autre part. Lorsque la massification est un levier de gains, elle sera mise en œuvre par des groupements d’achats ou des marchés UGAP ». La direction du budget indique qu’aucun gain n’est pris en compte à ce stade pour la politique des achats de l’État au titre de la participation à celle-ci de certains de ses opérateurs.

d) Rénover le 1 % logement et sa gouvernance en vue de réorienter l'utilisation des crédits et de limiter les coûts de gestion : 800 millions d’euros d’économies en intervention

Le 1 % Logement, désormais « Action logement », est géré par l’Union des entreprises et des salariés pour le logement (UESL), société anonyme à directoire et conseil de surveillance – dans lequel l’État est représenté – qui rassemble les organismes collecteurs de la contribution des entreprises à l’effort de construction et les syndicats nationaux représentatifs des salariés et des employeurs. Son objet est de mettre en œuvre des actions en matière de logement en faveur des salariés, financées par cette contribution obligatoire versée par les entreprises.

Le rapport public associé au CMPP du 4 avril 2008 avait posé les principes de la mesure de la RGPP dans ces termes : « le dispositif du 1 % logement et sa gouvernance seront profondément rénovés afin de réorienter l’utilisation des crédits et de limiter les coûts de gestion, aujourd’hui disproportionnés. Un objectif quantitatif d’économies sera déterminé afin de placer les gestionnaires du 1% logement sous contrainte et de dégager des marges de manœuvre sur le budget de l’État pour financer les priorités de la politique gouvernementale en matière de logement ». Il était ainsi précisé que la rénovation du 1 % logement concernait sa gouvernance et ses coûts de gestion dans l’optique de réaliser des économies susceptibles de se substituer à des crédits du budget de l’État pour le financement de certaines politiques publiques relatives au logement ; le montant des économies issues de cette mesure de la RGPP constituerait ainsi autant de « dépenses évitées » pour le budget de l’État.

Cette mesure a été confirmée par le rapport public associé au CMPP du 11 juin 2008 en ces termes : « la préparation d’une rénovation profonde du 1 % logement est engagée. Il s’agira, d’une part, de réformer sa gouvernance pour la rendre plus transparente et, d’autre part, de rationaliser ses coûts de gestion actuellement trop élevés et de recentrer les moyens sur les priorités nationales en matière de logement. Outre sa contribution à la rénovation urbaine, le 1 % contribuera ainsi notamment à la rénovation des centres anciens dégradés dans les villes ». La destination des dépenses évitées pour le budget de l’État semblait donc être le financement du Programme national de rénovation urbaine (PNRU) et, entre autres, le Programme national de rénovation des quartiers anciens dégradés (PNRQAD). S’y est ajouté le financement par l’UESL de l’Agence nationale de l’habitat (Anah).

La loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion (dite loi Molle) a prévu une réforme de la gouvernance d’Action Logement et de l’emploi de la participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC). L’article L. 313-3 du code de la construction et de l’habitation (CCH) précise désormais que « pour chaque catégorie d’emplois [de la PEEC], la nature des emplois correspondants et leurs règles d’utilisation sont fixées par décret en Conseil d’État, pris après concertation avec les représentants des organisations syndicales et patronales membres de l’Union d’économie sociale du logement. La répartition des ressources de la participation des employeurs à l’effort de construction entre chacune des catégories d’emplois mentionnées au présent article est fixée par un document de programmation établi pour une durée de trois ans par les ministres chargés du logement et du budget après concertation avec les représentants des organisations syndicales et patronales membres de l’Union d’économie sociale du logement ».

En application de cette disposition, l’article 1er du décret n° 2009-747 du 22 juin 2009 a prévu, pour chaque catégorie d’emploi prévu par l’article L. 313-3 du CCH, une enveloppe minimale et maximale versée par l’UESL sur le produit de la collecte de la PEEC. Ainsi, ce décret a prévu un financement du PNRU par la participation des employeurs à l’effort de construction à hauteur de 770 millions d’euros pour chaque année 2009 à 2011. Pour le PNRQAD, le financement s’élève à 10, 45 et 95 millions d’euros pour chacune de ces années. Pour l’Anah, le financement de l’UESL s’élève à 480 millions d’euros pour chaque année 2009 à 2011.

Ces montants ne sont pas pris en compte dans leur intégralité pour le calcul de l’économie induite par la mesure RGPP. Ce calcul s’appuie sur la constatation des dépenses évitées en 2009 et les années suivantes au regard des dépenses constatées en 2008 au titre du budget de l’État. Le montant des gains présenté par le Gouvernement s’établit à 800 millions d’euros sur la période 2009-2013.

On observe que le Gouvernement prend ainsi en compte dans les économies issues de la RGPP des « dépenses évitées » au titre du budget général, suite au fléchage de ressources qui ne relèvent pas à l’origine du budget de l’État - en l’espèce la PEEC - et à leur affectation à des politiques publiques que celui-ci met en œuvre.

Ce raisonnement n’est pas sans fondement : le Parlement a voté, par la loi Molle, la substitution de la PEEC aux ressources du budget de l’État pour le financement de certaines politiques publiques dans le domaine du logement. Au demeurant, les économies faites sur le budget de l’État sont en principe gagées par une amélioration de la gestion d’Action Logement. Toutefois, eu égard à la destination de la PEEC en l’espèce – le financement de politiques publiques nationales – et à sa nature de prélèvement obligatoire, il est difficile de considérer que les dépenses publiques ont baissé suite à la mise en œuvre de cette mesure de la RGPP.

e) Dynamiser la politique immobilière de l’État : 415 millions d’euros en fonctionnement

Cette mesure, pilotée par le ministère chargé du budget, s’est appuyée sur le recensement du patrimoine immobilier public. Selon la direction du budget, « le patrimoine immobilier de l’État, contrôlé par les administrations, s’élevait à 67,8 milliards d’euros au 31 décembre 2009 ; celui contrôlé par ses opérateurs s’établit à 42 milliards d’euros. » (133)

Cette opération de recensement a permis « la mise en place de schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) dans les administrations centrales puis dans les services déconcentrés (134), soumis à France domaine et examinés par le conseil de l’immobilier de l’État [et] permet d’assurer la conformité de la programmation à 5 ans des décisions immobilières » notamment avec les objectifs suivants :

– une norme de surface occupée fixée à 12 m² par agent ;

– un plafond de 400 euros par mètre carré et par an « pour les locaux loués à Paris. La déclinaison de ce critère pour les principales implantations en province a été réalisée, un loyer maximum étant désormais applicable pour les principales villes et zones urbaines de 17 départements de France. »

Sur ces bases et en application de ces règles, toujours selon la direction du budget, « depuis 2010, les renégociations de baux ont permis une économie annuelle de l’ordre de 30 millions d’euros.

« Entre 2007 et 2010, les surfaces occupées par les administrations ont diminué de 330 000 mètres carrés, soit près de 3 % des surfaces de bureaux occupées par l’État (12 millions de mètres carrés au total) ce qui représente une économie en année pleine de l’ordre de 160 millions d’euros, et 190 millions en y ajoutant l’effet des renégociations de baux.

« Dans le cadre de la Réate, cette politique s’étend aux administrations déconcentrées. La mutualisation des implantations immobilières sous l’autorité des préfets a permis d’identifier dans le cadre des SPSI déconcentrés une diminution de 500 000 mètres carrés des surfaces occupées sur 2011-2013 ». La programmation de ces gains déconcentrés justifie une part substantielle de l’augmentation continue de l’impact financier de cette mesure jusqu’en 2013.

f) Économie sur le coût environné (hors l’immobilier) liée aux suppressions d’effectifs dans les ministères : 399 millions d’euros notamment en fonctionnement

Pour la direction du budget, la mise en œuvre dans les ministères de la « règle du un sur deux » a « des effets sur leurs besoins de fonctionnement et d’investissement [notamment les] fonctions dites “supports” […] (logistique, gestion des ressources humaines, systèmes d’information et communication, finances, immobilier, achats). La dépense moyenne ainsi rattachée à chaque agent peut être qualifiée de “coût environné” par ETP. »

Le principe de l’existence de tels coûts environnés associés à l’exercice professionnel de chaque agent étant posé, la direction du budget admet l’impossibilité de constater précisément ces coûts et, en conséquence, doit s’appuyer sur un « forfait » pour les évaluer : « la connaissance fine de ces coûts environnés ne peut reposer que sur une comptabilité analytique propre à chaque ministère. Ils sont en effet très variables selon les agents, en fonction de leurs corps, métier, site d’affectation, etc. Aussi le ministère du Budget s’appuie-t-il sur un coût interministériel par ETP moyen pour en produire une évaluation. Afin d’éviter un double compte avec les gains de la politique immobilière […], ce coût environné est évalué hors immobilier, à 6 000 euros par ETP ». Selon la direction du budget, ce forfait a été calculé sur la base des réponses à un questionnaire adressé à certains ministères. Les coûts qu’il prend en compte sont notamment relatifs à la logistique et aux systèmes d’information et de communication.

S’agissant du champ de la mesure d’économies, ce forfait, toujours selon la direction du budget, « est appliqué globalement aux schémas d’emplois de l’ensemble des ministères et des opérateurs, à l’exception de la totalité des suppressions d’emplois du ministère de l’Éducation nationale (les dépenses de fonctions “supports” les concernant étant minoritairement prises en charge par l’État (135)) et de celles rattachées à la mesure “achever l’unification des réseaux DGI et DGCP” [création de la DGFip et de son réseau] (pour éviter un double compte, l’économie s’y rattachant intégrant déjà la part “coûts environnés”). »

Le montant de l’économie pris en compte au titre de cette mesure s’élève à 80 millions d’euros supplémentaires par an pour chacune des cinq années de la période 2009-2013. Sur la base du forfait fixé à 6 000 euros, on constate que le nombre des suppressions d’emplois auquel s’applique le forfait chaque année s’élève à environ 13 300 ETP. Ce résultat est en ligne avec les schémas d’emplois appliqués ou programmés sur cette période ; comme précisé infra, ils correspondent à des baisses d’effectifs compris 30 000 à 32 000 ETPT (136), dont, chaque année, une moitié environ au titre du ministère de l’Éducation nationale et environ 2 500 ETPT dans les services de la DGFip.

Selon le ministère de la Culture en réponse à vos rapporteurs, les économies relatives aux « coûts environnés » ne font cependant pas l’objet d’une diminution à due concurrence des crédits de fonctionnement du ministère. La direction du budget précise que le calcul de ces économies fait partie des éléments structurant les conférences budgétaires de préparation à l’élaboration du PLF, d’autres éléments d’économies, tendanciels ou relatifs à des mesures nouvelles contribuant à définir une proposition de montants de crédits de fonctionnement pour le ministère considéré.

g) Améliorer la gouvernance du marché du logement social en mutualisant les ressources financières entre organismes HLM, en généralisant le conventionnement global : 340 millions d’euros d’économie en intervention

Les gains induits par cette mesure correspondent aux montants prélevés sur les fonds propres et le potentiel financier des bailleurs sociaux en application de l’article L. 423-14 du CCH dans ses versions successives (137) depuis 2009. Ces montants d’imposition peuvent être considérés comme péréquateurs puisqu’ils ont notamment vocation, via la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), à financer le PNRU et donc à valoriser le patrimoine des bailleurs sociaux situé dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Il s’agit donc, à l’instar de la mesure relative au 1 % logement, d’éviter certaines dépenses au titre du budget de l’État, en mobilisant d’autres ressources publiques, en l’espèce en créant un prélèvement obligatoire.

On peut considérer que ces dépenses « évitées » pour l’État sont gagées par une gestion plus équitable de l’ensemble des ressources des bailleurs sociaux. Toutefois, considérer les mêmes montants comme des économies du budget de l’État peut laisser perplexe ; le raisonnement suivi pourrait conduire à considérer in fine comme des économies, par l’évitement de dépenses de l’État sur ses crédits budgétaires, tout financement par des prélèvements obligatoires nouveaux, aussi justifiés et équitables soient-ils dans leurs modalités, d’une politique publique nouvelle aussi opportune et coûteuse soit-elle.

Au demeurant, il est en l’espèce difficile d’identifier une baisse réelle des dépenses publiques associée à la péréquation, via la création de prélèvements obligatoires, des ressources des bailleurs sociaux. Les fonds correspondants, gérés par la CGLLS, constituent d’ailleurs des dépenses publiques, qui n’existaient pas avant la création des prélèvements correspondants.

B.– LES INFORMATIONS FOURNIES PAR LE GOUVERNEMENT NE SONT PAS TOUJOURS COHÉRENTES

1. La comparaison du tableau détaillé fourni par la direction du budget et des annexes aux projets de loi de règlement des comptes 2009 et 2010

Certaines des mesures figurant dans le tableau détaillé fourni à vos rapporteurs par la direction du budget – recensant les mesures pour lesquelles sont programmées des économies rattachées à la RGPP en intervention et en fonctionnement – sont achevées. À ce titre, elles sont mentionnées et décrites par l’une des deux annexes aux projets de loi de règlement des comptes pour les années 2009 ou 2010 établies en application de l’article 122 de la loi de finances pour 2010.

Pour ces mesures achevées, le tableau suivant compare les gains indiqués respectivement par :

– la direction du budget dans son tableau ;

– les deux annexes aux projets de loi de règlement des comptes pour les années 2009 et 2010.

COMPARAISON DES GAINS CONSTATÉS OU PROGRAMMÉS
POUR CERTAINES MESURES ACHEVÉES DE LA RGPP

(en millions d’euros)

N° de mesure

Ministère

Libellé de la mesure

Constatation / Programmation détaillée de la direction du budget

Annexes aux projets de loi de règlement des comptes (PLR) 2009 ou 2010

307

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Limitation des interventions nationales et déconcentrées au bénéfice des associations en faveur du monde rural aux obligations communautaires en la matière.

6 millions d’euros en 2009, puis 7 millions d’euros pour chaque année de 2010 à 2013

5,6 millions d’euros en 2009, puis impact final évalué à 7,1 millions d’euros (PLR 2009).

308

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Après apurement des dettes et respect des engagements, transfert des biens des sociétés d'aménagement régional aux régions, et arrêt du financement des travaux hydrauliques.

9 millions d’euros en 2009, 14 millions d’euros en 2010, puis 20 millions d’euros chaque année de 2011 à 2013

9,3 millions d’euros en 2009, puis impact final évalué à 19,6 millions d’euros (PLR 2009).

309

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

Rationalisation des aides à la cessation d'activité, la suppression du congé formation de la compétence des régions, et du dispositif de préretraite des agriculteurs, en cohérence avec la politique du gouvernement en matière d'emploi des seniors.

4 millions d’euros en 2009, 6 millions d’euros en 2010, puis 10 millions d‘euros chaque année de 2011 à 2013.

3,5 millions d’euros en 2009, puis impact final évalué à 10,1 millions d’euros (PLR 2009).

298

Culture et communication

Rénover le statut du Centre national du cinéma (CNC).

34 millions d’euros en 2011, puis 47 et 49 millions d’euros en 2012 et 2013.

Pas d’indication d’économies (PLR 2010)

29

Écologie, développement durable, transports et logement

Améliorer la gouvernance du marché du logement social en mutualisant les ressources financières entre les organismes HLM, en généralisant le conventionnement global.

10 millions d’euros en 2010, puis 340 millions d’euros pour chaque année 2011 à 2013.

Informations identiques (PLR 2010).

89

Économie, finances et industrie

Concentrer les aides à l'innovation sur les entreprises de moins de 5 000 salariés.

20 millions d’euros en 2009 et 2010, puis 80 millions d’euros pour chaque année 2011 à 2013

20 millions d’euros sans autres précisions (PLR 2010).

90

Économie, finances et industrie

Réviser et harmoniser les taux d’aides à l’innovation.

211 millions d’euros sur la période 2009 à 2013.

Informations identiques (PLR 2010).

91

Économie, finances et industrie

Concentrer l'action régionale de l'État sur les actions interrégionales et les priorités nationales.

17 millions d’euros sur la période 2009 à 2013.

Informations identiques (PLR 2010).

240

Éducation nationale, jeunesse et vie associative

Réorganiser et rationaliser les missions, notamment celles d’information, des acteurs et « opérateurs» jeunesse (Centre d’information et de documentation jeunesse – CIDJ – Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire – INJEP – Conseil national de la jeunesse - CNJ) et renforcer leur pilotage stratégique.

19 millions d’euros en 2013.

0,85 million d’euros à partir de 2010 (PLR 2010).

133

Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

Réexaminer les éléments particuliers de la fonction publique d’outre-mer.

47 millions d’euros en 2010, puis 95 millions d’euros chaque année de 2011 à 2013.

47 millions d’euros en 2010, sans autres précisions (PLR 2010).

315

Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

Supprimer les unités de la police aux frontières dans les départements dans lesquels son activité est faible.

0,3 million d’euros en 2009, puis 0,4 million d’euros en 2010 et 2011.

Pas d’indication d’économies (PLR 2010).

108

Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

Transférer la gendarmerie nationale sous l’autorité du ministre de l’Intérieur.

25 millions d’euros sur la période 2009 à 2013.

Pas d’indication d’économies (PLR 2010).

175

Travail, emploi et santé

Réexamen du dispositif d'exonération des charges sociales sur la rémunération du droit à l'image collective des sportifs professionnels.

40 millions d’euros sur la période 2009 à 2013.

Informations identiques (PLR 2010).

Source : direction du budget.

Les informations sont identiques ou analogues dans le tableau détaillé fourni par la direction du budget et dans les annexes au projets de loi de règlement des comptes (PLR) pour les années 2009 ou 2010 pour 7 mesures sur 13. Parmi ces 7 mesures, figurent deux mesures achevées pour lesquelles les montants d’économies constatées ou programmés sont substantiels : 340 millions d’euros pour la mutualisation des ressources des organismes HLM (avec néanmoins toutes les réserves portées par les rapporteurs supra sur le principe de l’assimilation de ce montant à de réelles économies) et 211 millions d’euros pour la révision et l’harmonisation des taux d’aide à l’innovation.

Pour 3 mesures achevées sur 13, le tableau de comparaison indique une évaluation des économies supérieure dans le tableau fourni par la direction du budget par rapport aux informations publiques disponibles dans les annexes aux projets de loi de règlement des comptes. Dans 2 de ces 3 cas, les deux sources livrent des évaluations d’économies identiques la première année, puis le tableau détaillé fourni par la direction du budget prévoit une augmentation, parfois graduelle, des gains jusqu’en 2013.

Le Gouvernement a pourtant la faculté, dans les informations publiques annexées au PLR, de valoriser au mieux les évaluations des économies telles qu’il les anticipe. Le Gouvernement prend soin de préciser au demeurant, dans l’annexe au PLR pour 2009, qu’une mesure est achevée « si sa mise en œuvre est effective, si tous ses objectifs opérationnels ont été atteints et si les résultats obtenus ont fait l’objet d’une analyse contradictoire au niveau interministériel, notamment sur la qualité des effets attendus. Déclarer une mesure “finie” a pour conséquence de la sortir du dispositif de suivi et de compte rendu régulier qui caractérise la RGPP. Il a donc été décidé de retenir une définition stricte de la mesure finie et d’exclure de ce périmètre les réformes qui bien qu’ayant produit leurs principaux effets n’ont pas encore atteint l’intégralité de leurs objectifs. »

Ce point illustre en tout état de cause l’insuffisance de l’annexe aux PLR prévue par l’article 122 de la loi de finances pour 2010 : n’y référencer que les mesures achevées, et ce une fois pour toutes, empêche sans doute des « retours » permettant, par exemple, l’actualisation des économies programmées au titre de l’une d’entre elles (sans parler de la présentation des résultats concrets de cette mesure une fois mise en œuvre dans la durée).

Le tableau ci-dessus indique enfin que pour 3 mesures achevées sur 13, l’annexe au PLR n’indique pas d’économies associées.

Ce constat confirme le sentiment que le tableau détaillé fourni à vos rapporteurs par la direction du budget est caractérisé par un certain volontarisme dans l’évaluation des économies engendrées par la RGPP en fonctionnement et en intervention.

2. Le informations fournies par le ministère de l’Écologie, du développement durable, des transports et du logement

a) Les constats et programmations des économies issues de la RGPP établis par le secrétariat général du ministère

Le tableau suivant synthétise les informations concernant les économies constatées ou programmées transmises par le secrétariat général du ministère de l’Écologie, du développement durable, des transports et du logement au titre des mesures de la RGPP de son portefeuille.

ÉCONOMIES HORS TITRE 2 LIÉES À LA MISE EN œUVRE DE LA RGPP AU MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT (MEDDTL)

(en millions d’euros)

Mesures RGPP

Nature de
la mesure

2009

2010

2011 (prévi-sionnel)

2012 (prévi-sionnel)

2013 (prévi-sionnel)

Optimisation de l’efficience des fonctions support dans les services déconcentrés

Fonctionnement

1,2

1,8

5,0

7,1

8,9

Optimiser l’efficience de l’administration centrale

Fonctionnement

0

0

0

0,3

1,0

Suppression progressive de l’ingénierie concurrentielle dans les services déconcentrés

Fonctionnement

3,3

4,9

13,8

19,2

22,5

Réorientation des activités des centres d’études techniques de l’équipement (CETE)

Fonctionnement

0,3

0,5

1,4

2,1

2,7

Rationaliser l’organisation de Voies navigables de France

Fonctionnement

0,2

0

0,8

1,4

2,1

Rénovation du 1 % logement

Intervention

850

850

850

750

650

Amélioration de la gouvernance du marché du logement social

Intervention

0

10

245

245

245

Révision des dépenses fiscales environnementales

Intervention

244

730

730

nd

nd

Orientation des tarifs ferroviaires sur les coûts d’infrastructure de Réseau ferré de France (RFF)

Intervention

75

200

341

367

378

Réorganiser les services d’ingénierie routière

Fonctionnement

0

0

0,1

0,4

0,9

Réformer le secrétariat des commissions consultatives départementales de sécurité et d’accessibilité (CCDSA)

Fonctionnement

0

0

0

0,3

0,5

Simplification de la réglementation relative aux réseaux publics d’électricité

Fonctionnement

0

0

0

0,3

0,5

Poursuite de la réforme du numéro unique de demande de logement social

Fonctionnement

0

0

0

0

0,1

Modernisation de l’application du droit des sols

Fonctionnement

0

0

0

0,7

2,4

Améliorer la performance de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC)

Fonctionnement

0

0

0,6

1,3

2,3

Source : secrétariat général du ministère chargé de l’écologie.

On observe en premier lieu que le ministère de l’Écologie présente des économies en fonctionnement pour de nombreuses mesures de la RGPP (pour des montants relativement limités), ces économies ne figurant pas dans le tableau détaillé transmis par la direction du budget.

Il s’agit d’économies associées à la baisse des « coûts environnés » liée aux suppressions d’emplois rattachées à ces mesures. À titre d’exemple, pour la mesure relative à la suppression de l’ingénierie concurrentielle, 22,5 millions d’euros d’économies en 2013 (138) calculés sur la base du forfait fixé par la direction du budget à 6 000 euros par ETPT correspondraient à la suppression de 3 750 ETPT ; comme évoqué supra dans la deuxième partie du présent rapport, l’ordre de grandeur du nombre des suppressions de poste associées à cette mesure se situe entre 3000 et 3500 ETPT pour la période 2008-2011.

A contrario, toujours en fonctionnement, le tableau détaillé fourni par la direction du budget prévoit une économie de 12 millions d’euros sur la période 2009-2013 au titre de la mesure « Réformer l’organisation territoriale de Météo France » qui n’apparaît pas dans le tableau rassemblant les informations transmises par le ministère de l’Écologie.

b) D’importants dissensus issus des comparaisons des économies en intervention respectivement programmées par le ministère de l’Écologie et la direction du budget

Le tableau suivant compare les économies en intervention pour les mesures de la RGPP mises en œuvre par le ministère de l’Écologie en comparant les évaluations de ce ministère et celles de la direction du budget.

COMPARAISON DES ÉCONOMIES CONSTATÉES ET PROGRAMMÉS
EN INTERVENTION PAR LE MINISTÈRE CHARGÉ DE L’ÉCOLOGIE
ET LA DIRECTION DU BUDGET

(en millions d’euros)

Libellé de la mesure

Source

Montants d’économies programmées

2009

2010

2011

2012

2013

Rénover le 1% logement et sa gouvernance en vue de réorienter l'utilisation des crédits et de limiter les coûts de gestion.

Direction du budget

850

850

850

800

800

Ministère de l’Écologie

850

850

850

750

650

Améliorer la gouvernance du marché du logement social en mutualisant les ressources financières entre organismes HLM, en généralisant le conventionnement global.

Direction du budget

-

10

340

340

340

Ministère de l’Écologie

-

10

245

245

245

Faire évoluer le rôle de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) en tant qu’opérateur de la transition environnementale.

Direction du budget

-

-

90

90

90

Ministère de l’Écologie

-

-

nd

nd

nd

Orienter les tarifs ferroviaires sur les coûts d’infrastructure de Réseau ferré de France (RFF).

Direction du budget

75

200

341

367

378

Ministère de l’Écologie

75

200

341

367

378

Reconstitution d'un Fond français pour l’environnement mondial (FFEM) centré sur la seule priorité « changement climatique ».

Direction du budget

-

-

9

9

9

Ministère de l’Écologie

-

-

nd

nd

nd

Optimisation du financement de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru).

Direction du budget

-

-

247

252

256

Ministère de l’Écologie

-

-

nd

nd

nd

Harmonisation entre employeurs des modalités de calcul de leur contribution aux APL.

Direction du budget

-

-

86

86

86

Ministère de l’Écologie

-

-

nd

nd

nd

Révision des conditions d'ouverture de droit aux aides au logement.

Direction du budget

-

-

120

100

80

Ministère de l’Écologie

-

-

nd

nd

nd

Réforme du soutien au transport combiné.

Direction du budget

-

-

-

10

10

Ministère de l’Écologie

-

-

 

nd

nd

Convergence tarifaire dans les Centre d’hébergement et de réinsertion sociale, l’hébergement d’urgence et les maisons relais / aide à la gestion locative sociale (AGLS).

Direction du budget

-

-

17

58

62

Ministère de l’Écologie

-

-

nd

nd

nd

Révision des dépenses fiscales environnementales

Direction du budget

nd

nd

nd

nd

nd

Ministère de l’Écologie

244

730

730

nd

nd

Pour les 11 mesures associées à des économies en intervention figurant dans ce tableau, seules les économies portant sur trois d’entre elles sont comparables au regard des évaluations du ministère chargé de l’écologie et de la direction du budget.

Il s’agit en premier lieu de la rénovation du 1 % logement et de sa gouvernance, étant précisé que les rapporteurs ont commenté supra cette mesure, en exprimant une certaine réserve quant à sa prise en compte au titre d’économies pour les dépenses publiques en général. Le tableau précédent fait apparaître un dissensus entre les deux sources sur son impact financier après 2011. La programmation en la matière à compter de 2012 dépend au demeurant de décisions publiques qui doivent être prises s’agissant des emplois de la participation des employeurs à l’effort de construction.

En deuxième lieu, est évoquée par le ministère de l’Écologie et la direction du budget l’amélioration de la gouvernance du marché du logement social (étant là aussi précisé que les rapporteurs ont commenté supra cette mesure, en exprimant leur réserve quant à l’existence de gains réels pour les finances publiques en la matière). Comme pour la mesure relative au 1 % logement, la direction du budget est plus optimiste que le ministère : dès 2011, elle considère que l’économie correspondante sera supérieure de 95 millions d’euros à celle présentée par le ministère chargé de l’écologie.

Il est possible que le ministère ait considéré qu’une partie des 340 millions d’euros programmés par la direction du budget ne correspondent pas à la définition de cette mesure ; en effet, si l’article 210 de la loi de finances pour 2011 a prévu que ce montant puisse être versé à l’Anru (et donc, indirectement, aux bailleurs sociaux dont le patrimoine se situe dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville), une partie seulement est prélevée sur les ressources des bailleurs sociaux et peut donc relever, en conséquence, de la mutualisation des ressources de ces bailleurs (qui est l’objet de la mesure RGPP). La partie des 340 millions d’euros ne relevant pas de cette mutualisation est constituée d’un versement de la Société du Grand Paris à l’Anru, pour un montant fixé précisément à 95 millions d’euros.

En troisième lieu, les programmations du ministère de l’Écologie et de la direction du budget sont identiques s’agissant de l’orientation des tarifs proposés par Réseau Ferré de France (RFF) vers les coûts réels des infrastructures que cet établissement public gère.

La tableau précédent illustre d’autres différences de programmation entre les deux sources mobilisées : ainsi, pour la mesure proprement dite de la RGPP relative à l’évolution du rôle de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) en tant qu’opérateur de la transition environnementale, la direction du budget indique une économie en intervention de 90 millions d’euros à compter de 2011, qui n’est pas programmée par le ministère chargé de l’écologie.

Par ailleurs, comme évoqué supra par les rapporteurs, la direction du budget associe à ce ministère six mesures au statut incertain au titre de la RGPP ; elles ne constituent pas des mesures décidées par les CMPP, mais la direction du budget considère que les économies qui leur sont rattachées sont associées à la RGPP. Au demeurant, la connaissance de leur contenu ne va pas au-delà de leur libellé. Ces mesures ne sont en tout état de cause pas évoquées par le ministère chargé de l’écologie.

Cette différence d’appréciation est d’autant plus curieuse que le ministère et la direction du budget ont concomitamment répondu aux rapporteurs sur les économies induites par la RGPP en fonctionnement et en intervention. Il ne s’agit pas d’un détail financier ; pour ce ministère, les économies programmées par la direction du budget au titre de ces 6 mesures au statut incertain s’élèvent à 503 millions d’euros en 2013, soit presque le quart des économies envisagées par elle en intervention pour ce ministère au terme de la même année.

Enfin, le tableau de comparaison fait apparaître un dernier dissensus, a contrario de la tendance à un certain optimisme de la direction du budget illustrée par les développements précédents : le ministère chargé de l’écologie évoque une économie substantielle en intervention associée à la mesure « Réviser les dépenses fiscales environnementales ». Cette économie n’est pas mentionnée par la direction du budget.

Les développements suivants sont consacrés aux réponses apportées par le ministère chargé de l’écologie quant à l’évaluation et au contenu de cette économie programmée.

c) Quelles économies associées à la révision des dépenses fiscales environnementales ?

La mesure « Réviser les dépenses fiscales environnementales » conduirait, selon le ministère chargé de l’écologie, à des économies d’un montant de 730 millions d’euros en 2011.

Le dossier de présentation du premier CMPP du 12 décembre 2007 précisait que cette mesure a pour objet de passer les dépenses fiscales « au crible dans le cadre du chantier de révision générale des prélèvements obligatoires, dans le souci de revenir sur des dépenses fiscales ayant un impact environnemental négatif ou insuffisant ». Cette mesure a été assortie d’un feu vert dans le rapport d’étape de la RGPP du 4 décembre 2008, sans précision supplémentaire sur son contenu (139).

L’avancement de cette mesure est ensuite passé à l’orange dans le rapport d’étape du 13 mai 2009, ce document justifiant cette « dégradation » de la notation en ces termes : « un bilan des mesures fiscales du Grenelle sera réalisé. Un groupe interministériel sera chargé de recenser d’autres dépenses fiscales existantes défavorables à l’environnement et de faire de nouvelles propositions de suppression ou d’aménagement. »

Sans plus de précisions, ni de justifications, le feu est ensuite repassé au vert dans le rapport d’étape de la RGPP de février 2010, les dossiers de présentation des CMPP des 30 juin 2010 et 9 mars 2011 se bornant à confirmer cette couleur, sans autres commentaires.

Au total, cette mesure substantielle quant à l’apport aux économies induites par la RGPP pour le ministère chargé de écologie n’a donné lieu à la publication d’aucune information sérieuse quant à son état d’avancement et, en l’espèce, quant aux dépenses fiscales qu’elle a concernées.

Compte tenu des informations recueillies auprès du ministère chargé de l’écologie, les rapporteurs ont pu néanmoins reconstituer le détail des mesures fiscales prises en compte dans le calcul opéré par ce ministère et des gains associés. Ces informations figurent dans le tableau suivant.

DÉTAIL DES GAINS DE LA MESURE
« RÉVISER LES DÉPENSES FISCALES ENVIRONNEMENTALES »

(en milliers d’euros)

 

2009

2010

2011

Réduction progressive de l’avantage fiscal en matière de taxe intérieure de consommation pour les biocarburants

Art. 16 de la LFI pour 2009

244

430

430

Fin de l’exonération de taxe intérieure de consommation en faveur des produits pétroliers utilisés par le ministère de la Défense à compter du 1er janvier 2009

Art. 5 de la LFR pour 2006

-

10

10

Suppression du dégrèvement de taxe professionnelle au bénéfice des entreprises disposant de certains véhicules routiers ou bateaux

Art. 2 de la LFI pour 2009

-

290

290

Total

244

730

730

Ce tableau laisse plusieurs questions en suspens :

– la réduction de l’avantage fiscal en matière de taxe intérieure de consommation (anciennement TIPP) sur les biocarburants a été progressivement mise en œuvre de 2009 à 2011. Il aurait été logique d’observer une accentuation du gain en 2011 par rapport à 2010, ce que les chiffres fournis par le ministère chargé de l’écologie ne font pas apparaître ;

– l’avantage fiscal en faveur du ministère de la Défense a expiré dès le 1er janvier 2009, ce que les informations recueillies par les rapporteurs ne semblent pas prendre en compte ;

– l’avantage fiscal en faveur du ministère de la Défense et, peut-être surtout, la suppression de l’avantage fiscal en matière de taxe professionnelle en faveur des entreprises disposant de certains véhicules routiers ou bateaux peuvent difficilement être assimilés à des dépenses fiscales environnementales qui auraient fait l’objet d’une « révision ». Tout au plus peut-on considérer que leur suppression a pu avoir un objectif environnemental.

Au total, cette mesure de la RGPP semble être composée d’un nombre limité de révisions de dépenses fiscales environnementales, avec toutefois un rendement élevé en termes d’économies ; la portée « environnementale » des dépenses ainsi révisées mériterait d’être précisée.

Le choix opéré par la direction du budget de ne pas prendre en compte les économies correspondantes au titre de la RGPP – motivé avant tout par le principe de comptabiliser uniquement des gains s’imputant sur les crédits du budget de l’État et non sur son solde – ne paraît pas, dans ces conditions, inopportun.

3. Les informations fournies par le ministère de la Culture et de la communication

a) Les constats et programmations des économies issues de la RGPP établis par le secrétariat général du ministère

Le ministère de la Culture et de la communication a adressé aux rapporteurs des informations permettant de retracer l’évolution des économies de fonctionnement et d’intervention au titre de la mise en œuvre de la RGPP pour les mesures de son portefeuille.

ÉCONOMIES DE FONCTIONNEMENT ET D’INTERVENTION
AU MINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION*

(en milliers d’euros)

 

2009

2010

2011

2012

2013

Dépenses de fonctionnement

         

Mesures « opérateurs »

– 9 910

15 711

– 19 809

– 6 717

1 990

Cumul pluriannuel pour les mesures « opérateurs »

– 9 910

5 801

– 14 008

– 20 725

– 18 735

« Coûts environnés »

– 648

– 426

– 558

– 558

– 744

Cumul pluriannuel pour les « coûts environnés »

– 648

–1 074

– 1 632

– 2 190

– 2 934

Cumul pluriannuel économies de fonctionnement

– 10 558

4 727

– 15 640

– 22 915

– 21 669

Dépenses d’intervention

         

Mesure Spectacle vivant

– 1 023

– 717

– 7 417

– 4 516

– 4 584

Cumul pluriannuel économies d’intervention

– 1 023

– 1 740

– 9 157

– 13 673

– 18 257

*Les économies apparaissent après le signe « – ». Quand un montant n’est pas précédé de ce signe, cela correspond donc à une dépense supplémentaire.

Source : ministère de la Culture.

Selon le ministère chargé de la culture, les « mesures opérateurs » rassemblent trois mesures de la RGPP : « Renforcer la gouvernance des opérateurs » (décidée par le CMPP du 12 décembre 2007) (140), « Développer les ressources propres des établissements publics » (CMPP du 11 juin 2008) et « Développer la performance et l’efficience des opérateurs » (CMPP du 30 juin 2010).

Les économies constatées en fonctionnement au titre de la mise en œuvre des « mesures opérateurs » retracent les évolutions d’année en année des subventions versées par le ministère de la Culture et de la communication aux opérateurs financés sur son budget. Ainsi le ministère précise que les « mesures opérateurs » « conduisent à des évolutions des subventions de fonctionnement aux établissements publics du ministère de la Culture et de la communication. Ce sont les évolutions de ces subventions aux opérateurs […] qui constituent donc des économies nettes ».

Sur la ligne « mesures opérateurs » du tableau précédent, on constate ainsi une économie de 14 millions d’euros sur 2009-2011 et de 18,7 millions sur 2009-2013. Ces montants sont inférieurs à ceux inscrits dans le tableau détaillé fourni par la direction du budget au titre de la mesure relative au développement de la performance et de l’efficience des opérateurs du ministère. La direction du budget anticipe en effet une économie de 21 millions d’euros en 2011 et de 31 millions d’euros en 2013 pour cette seule mesure.

Au demeurant, le ministère chargé de la Culture tempère l’ampleur des économies induites par les « mesures opérateurs » en précisant, qu’à périmètre constant, celles-ci ne tiennent pas compte des surcoûts induits par la mise en œuvre de la gratuité de l’accès à certains musées (qui fait l’objet d’un abondement de crédits de la part de l’État aux opérateurs concernés), ni des coûts issus de la création de nouveaux opérateurs ou établissements publics (141).

Le ministère chargé de la culture prévoit par ailleurs une économie en fonctionnement enregistrée eu égard à la baisse des « coûts environnés » liée aux suppressions d’effectifs induites par la mise en œuvre de la « règle du un sur deux ».

En matière de dépenses d’intervention, les économies présentées par le ministère chargé de la Culture sont issues de la mesure « Clarifier les modalités de l'intervention de l'État en faveur du spectacle vivant » décidée par le CMPP du 11 juin 2008 ; le dossier de présentation de ce CMPP présentait cette mesure de la façon suivante : « la redéfinition des modalités d’intervention de l’État en faveur du spectacle vivant sera recherchée en concertation avec les collectivités territoriales qui assurent aujourd’hui une part prépondérante du financement des structures en région. Lancés le 11 février 2008, les “Entretiens de Valois”, instance commune de réflexion sur le spectacle vivant rassemblant l’État, les collectivités territoriales et les professionnels du secteur, serviront de base aux décisions qui seront arrêtées avant la fin de l’année. » (142)

Pour cette mesure, l’économie est calculée chaque année depuis 2009, compte tenu de l’évolution des crédits gérés par les directions régionales de l’action culturelle (DRAC) au regard de l’évolution tendancielle constatée pour ces mêmes crédits sur la période 2003-2008 ; selon le ministère chargé de la culture, cette évolution tendancielle a été « soutenue : 10,5 %, soit une augmentation moyenne de 1,61 % par an », l’essentiel de cette augmentation ayant été constaté sur les années 2003 à 2006. À l’issue des entretiens de Valois, il a été décidé, afin d’accompagner le lancement de la réforme proprement dite des modalités de financement du spectacle vivant par l’État via les DRAC, que l’essentiel des économies seraient constatées à compter de 2011.

Le ministère chargé de la culture a donc, pour cette mesure relative au financement du spectacle vivant, privilégié une modalité atypique de calcul. Il s’appuie sur un tendanciel qu’il a élaboré, et non sur une comparaison des crédits « exécutés » d’une année sur l’autre. Le ministère constate ainsi des économies au regard d’un référentiel d’évolution « soutenue », selon ses termes, des dépenses. Au total, si ces « économies » étaient calculées sur le modèle classique de la comparaison des montants de dépenses d’une année sur l’autre, seraient constatés des gains substantiellement moins élevés, voire, le cas échéant, une augmentation des dépenses.

Ces prévisions d’économies en intervention sont comparables à celles de la direction du budget dans son tableau détaillé, soit 9 millions d’euros en 2011 et 18 millions d’euros en 2013. La direction du budget ne précise pas si elle a utilisé la méthode de calcul du ministère chargé de la culture.

b) Le ministère chargé de la culture ne prend pas en compte certaines des économies indiquées par le ministère du Budget

En premier lieu, à l’instar de l’annexe au PLR 2010 prévue par l’article 122 de la loi de finances pour 2010, le ministère chargé de la culture n’associe pas d’économies à la mesure, achevée, portant sur la rénovation du statut du Centre national du cinéma (CNC). Le tableau détaillé de la direction du budget évalue des économies au titre de cette mesure à 34 millions d’euros en 2011, 47 millions d’euros en 2012 et 49 millions d’euros en 2013.

Ce tableau de la direction du budget associe par ailleurs deux mesures au statut incertain au regard de la RGPP au ministère chargé de la culture :

– la réforme du financement du Centre des monuments nationaux (CMN), pour une économie de 10 millions d’euros sur 2011-2013 ;

– l’« optimisation » des dépenses d’intervention du ministère, cette mesure semblant en lien, non déterminé, selon son libellé tel qu’il figure dans ce tableau, avec le soutien à la presse et le maintien de la publicité en journée sur France Télévisions. Les montants d’économies correspondants sont considérables, soit 102 millions d’euros dès 2011 et 284 millions d’euros en 2013. Eu égard à ces montants, il est étonnant que le ministère chargé de la culture ne les mentionne pas dans ses réponses aux rapporteurs.

4. Les informations fournies par le ministère de la Défense

a) Le projet d’un suivi précis des impacts financiers de la RGPP

Le ministère de la Défense s’estime à ce stade dans l’incapacité technique d’associer un montant d’économie en fonctionnement ou intervention à chacune des mesures de la RGPP. Il précise qu’« en l’absence de comptabilité analytique permettant d’en mesurer facilement l’impact financier, le ministère a donc jusqu’à présent estimé le montant des économies de fonctionnement engendré par sa réforme de manière globale, sur la base d’un modèle estimatif. […] Le ministère n’est pas en mesure, à ce stade, d’associer aux économies ainsi présentées une liste précise de mesures mises en œuvre ».

Au demeurant, le ministère de la Défense précise qu’il élabore une méthode devant lui permettre, à terme, de constater ces informations, dans des conditions de fiabilité substantielles : « pour affiner son appréciation de l’ensemble des conséquences financières, ponctuelles et récurrentes, des réformes conduites, le ministère s’est engagé en 2010 dans la mise en place d'un suivi individualisé de l’impact hors titre 2 [c’est-à-dire hors dépenses de personnel] des différents projets. Cette nouvelle approche […] a bénéficié du soutien d’équipes de la DGME qui ont été pleinement associées à ces travaux. Dans ce cadre, l’ensemble des projets porteurs de déflations d’effectifs sont décomposés de manière très fine en une liste exhaustive de mesures physiques qui font ensuite l’objet d’un chiffrage individuel, sur la base des données financières disponibles dans les systèmes d’information du ministère ou, à défaut, d’une valorisation sur la base d’unités d’œuvre et de coûts unitaires. Ces travaux […] sont actuellement en cours et devraient donner de premiers résultats à la fin de l’année 2011. »

Eu égard à l’absence de méthodologie efficace, du point de vue du ministère de la Défense, pour l’évaluation des gains en fonctionnement et en intervention issus de la RGPP, le ministère n’évoque pas les économies qui lui sont pourtant rattachées figurant dans le tableau d’ensemble fourni par la direction du budget. Ces économies portent sur :

– l’optimisation de la fonction de maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres pour une économie de 274 millions d’euros sur 2011-2013 ;

– la modernisation de la fonction habillement au sein des forces armées, pour un gain de 70 millions d’euros sur la seule année 2013.

b) Les évaluations actuelles des économies engendrées par la RGPP par le ministère de la Défense

Malgré une méthodologie qu’il ne juge que très partiellement satisfaisante à ce stade, le ministère de la Défense a fourni aux rapporteurs des éléments portant sur les économies en fonctionnement et en intervention qu’il rattache à la RGPP et, sans doute plus largement, à la réforme du ministère dans son ensemble.

En effet, comme l’illustre le dossier de présentation du CMPP du 11 juin 2008, le ministère de la Défense considère ainsi mener une seule et même réforme globale interne, qui s’appuie à la fois sur :

– le livre blanc sur la défense, qui porte sur « les missions de l’outil de défense » ;

– la RGPP, qui a conduit à la mise en œuvre de décisions « sur les fonctions de soutien et d’administration générale, à contrats opérationnels constants ».

Le tableau suivant retrace donc des économies en intervention et en fonctionnement portant sur l’ensemble de la mission budgétaire « Défense ».

ÉCONOMIES NETTES POUR LA MISSION DÉFENSE SUR LA PÉRIODE 2008-2011 *

   

2009

2010

2011

 

Économies nettes en fonctionnement

– 49,29

– 94,57

– 170,42

Titres 5 et 6

Coûts de restructuration-infrastructure

43,51

117,90

287,00

Accompagnement économique
des restructurations

4,11

3,89

23,42

Produits de cession

– 65,00

– 102,00

– 179,00

Gains nets en intervention

– 17,38

19,79

131,42

* Les économies apparaissent après le signe « – ». Quand un montant n’est pas précédé de ce signe, cela correspond donc à une dépense supplémentaire.

Source : ministère de la Défense.

Le ministère de la Défense indique, pour les dépenses de fonctionnement, que :

– eu égard à certaines difficultés liées à la mise en œuvre de Chorus, l’économie en 2010 « correspond à la baisse des dépenses de fonctionnement observée entre l’exécution 2009 et l’exécution 2010 » sur un périmètre tenant compte des profonds changements de nomenclature budgétaire entre ces deux exercices ;

– à compter de 2011, l’économie est évaluée en considérant que « l'ensemble des crédits liés à l'homme [évolue] proportionnellement aux effectifs » et que « sur les autres crédits (liés à l'activité et à la structure), il est considéré que ceux-ci évoluent en fonction, selon les cas, des effectifs totaux de la mission “Défense” ou des seuls effectifs militaires de celle-ci (pour les carburants opérationnels par exemple), de manière strictement proportionnelle ou avec un décalage d’un à deux ans. »

Pour les dépenses d’intervention (titre 6), mais aussi d’investissement (titre 5), sont pris en compte, selon le ministère de la Défense :

– les coûts de restructuration et d’infrastructure ;

– les investissements réalisés au titre du Fonds de restructuration de la défense (Fred) pour accompagner les fermetures et aménagements des sites de défense réalisés au titre de la réforme du ministère telle qu’elle est envisagée par le Livre blanc et la RGPP. Les versements sont réalisés dans le cadre de contrats de redynamisation de sites de défense (CRSD) et de plans locaux de redynamisation (PLR) ;

– les produits de cession.

Au total, le ministère constate pour les titres 5 et 6 des dépenses supplémentaires nettes en 2010 et 2011. Ce constat paradoxal sera évoqué infra par les rapporteurs pour discuter le point de vue de la direction du budget qui considère qu’en matière d’économies de fonctionnement et d’intervention au titre des mesures de la RGPP, les gains nets sont assimilables aux gains bruts.

5. Les informations fournies par le secrétariat général des ministères sociaux

a) Les économies de fonctionnement

En réponse aux rapporteurs, le secrétariat général des ministères sociaux indique des économies de fonctionnement liées à la RGPP pour le programme 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative », Le tableau suivant présente le montant de ces économies.

ÉCONOMIES DE FONCTIONNEMENT AU TITRE DU PROGRAMME 124

(en millions d’euros)

2009 (ex post)

2010 (ex post)

2011 (ex ante)

5,14

9,83

5,38

Le secrétariat général précise que ces « gains significatifs ont pu être réalisés dans le cadre des mesures transverses, notamment sur les politiques d’achats, la logistique et les coûts dits “environnés” ». Ils s’intègrent donc, au moins en grande partie, aux mesures du tableau fourni par la direction du budget concernant la politique des achats de l’État et les économies sur les « coûts environnés » (hors immobilier) liées aux suppressions d’effectifs.

b) Contrairement à le direction du budget, le secrétariat général des ministères sociaux n’évoque pas d’économies en intervention le concernant

Pour les dépenses d’intervention, le secrétariat général considère, comme il l’indique dans un tableau remis aux rapporteurs, la demande d’évaluation des économies « sans objet ».

En premier lieu, le secrétariat général, dans des termes très proches de propos de la direction du budget repris supra, souligne que « les mesures donnant lieu à un suivi RGPP formel, ne portent que peu sur ce volet [c’est-à-dire l’intervention]. En effet, la concrétisation d’économies sur les dispositifs discrétionnaires ou de guichet peut ne passer que par la modification d’un texte juridique qui emporte immédiatement l’effet escompté. Créer une mesure RGPP est apparu dans bien des cas inutile […] Peut être citée l’économie consécutive à l’harmonisation du mécanisme d’intéressement de l’allocation de solidarité spécifique (ASS) sur celui du revenu de solidarité active (RSA). »

Cette mesure est précisément l’une de celles « au statut incertain » que la direction du budget associe au ministère du Travail, de l’emploi et de la santé dans son tableau détaillé fourni aux rapporteurs (pour une économie de 52 millions d’euros en 2013) ; cette mesure ne constitue pas une mesure proprement dite de la RGPP décidée par un CMPP. Le secrétariat général considère inopportun de la labelliser « RGPP », en raison de l’absence de processus de projet qui accompagnerait sa mise en œuvre. Il en déduit logiquement qu’il n’y a pas lieu d’associer les économies qu’elle induit à la démarche de la RGPP.

Le secrétariat général n’évoque pas plus les cinq autres mesures au statut incertain que lui associe la direction du budget. On rappelle que ces mesures, auxquelles sont associées les économies programmées par la direction du budget en 2013, sont les suivantes :

– la rationalisation du service public de l'emploi, pour un montant d’économies de 200 millions d’euros ;

– la participation des bénéficiaires de l'aide médicale de l'État (AME) au financement du dispositif pour 5 millions d’euros d’économies ;

– la réforme de la tarification des séjours hospitaliers au titre de l'AME, devant conduire à 100 millions d’euros d’économies (143) ;

– l’optimisation des dépenses d’intervention du ministère du Travail, de l’emploi et de la santé, pour un gain de 635 millions d’euros ;

– l’optimisation des dépenses d’intervention du ministère des Solidarités et de la cohésion sociale, pour un gain de 220 millions d’euros.

C.– LA QUESTION DE LA DISTINCTION DES COÛTS BRUTS ET NETS

1. Pour la direction du budget, les économies brutes seraient équivalentes aux économies nettes

En réponse à un premier questionnaire des rapporteurs, la direction du budget a apporté des précisions sur la question posée par les rapporteurs portant sur la distinction entre économies brutes et nettes au titre des dépenses d’intervention et de fonctionnement, eu égard aux coûts initiaux éventuels associés aux mesures de la RGPP.

La direction du budget considère qu’une telle distinction est sans réel objet dans les termes suivants : « dans une acception stricte, le passage des économies brutes aux économies nettes supposerait l’identification des surcoûts induits par la mise en œuvre des réformes. Or ces surcoûts ne sont pas suivis individuellement et sont pris en compte dans la budgétisation globale des crédits […]. Surtout, ces surcoûts correspondent globalement à des montants non seulement faibles par rapport aux économies, mais également ponctuels et non pérennes, en général (par exemple : investissements informatiques, immobiliers). Dans cette acception, les économies brutes peuvent largement être assimilées aux économies nettes. »

Ainsi, selon la direction du budget :

– les montants globaux d’économies présentés par le Gouvernement ne sont pas des montants nets ; mais il serait impossible de calculer ceux-ci car les surcoûts associés à la mise en œuvre des mesures de la RGPP ne sont pas identifiés et suivis en tant que tels ;

– cette lacune méthodologique n’avait cependant pas d’impact sur l’exactitude des constats portant sur les montants d’économies. Les coûts issus de la mise en œuvre de la RGPP seraient faibles, ponctuels et non pérennes et donc, in fine, négligeables.

Il est difficile d’apprécier ces propos, sinon qu’il paraît curieux de qualifier si précisément des surcoûts – faibles, ponctuels, non pérennes – que l’on admet ne pas suivre individuellement.

Les développements ci-après évoquent certains cas pour lesquels les gains bruts et nets en fonctionnement et intervention au titre de la RGPP ne sont précisément pas assimilables.

2. Dans certains cas, l’équivalence des gains nets et bruts ne semble pas vérifiée

a) Les mesures d’accompagnement du changement au sein du ministère de la Défense

Dans les réponses qu’il a fournies aux rapporteurs, il est patent que le ministère de la Défense considère que les réformes qu’il met en œuvre dans un contexte marqué par la RGPP conduisent à constater des coûts supplémentaires, notamment d’intervention ; le ministère est en effet conduit à accompagner la restructuration de la carte de ses sites et implantations par des actions locales relevant de l’aménagement du territoire.

Comme évoqué supra, le ministère de la Défense procède à des investissements réalisés au titre du Fonds de restructuration de la défense (Fred) pour accompagner les fermetures et aménagements des sites de défense réalisés au titre de la réforme du ministère telle qu’elle est envisagée par le Livre blanc et la RGPP. Les versements sont réalisés dans le cadre de contrats de redynamisation de sites de défense (CRSD) et de plans locaux de redynamisation (PLR).

Le ministère de la Défense précise que « durant la période 2009 à fin mai 2011, 11 CRSD et 6 PLR ont été signés […], dont 3 CRSD et 4 PLR en 2011. La totalité des CRSD devrait être signée sur l'année 2011, ne resteraient plus à signer que 5 PLR sur l'année 2012. […] Le coût total du Fred sur la période 2008-2015 [s’élèverait] à 214 millions d’euros ». S’ajoute à ce montant celui des coûts de restructuration des infrastructures, évalué sur la même période par le ministère de la Défense à 1 491 millions d’euros.

Ces montants ne sont pas négligeables et correspondent à des caractéristiques différentes de ceux évoqués par la direction du budget : ils sont suivis individuellement par le ministère de la Défense, leurs montants ne sont pas faibles et s’ils ne sont pas stricto sensu pérennes, ils seront constatés pendant presque 10 ans.

b) Les coûts de la mesure portant sur le passeport biométrique

L’étude annexée au présent rapport demandée, à l’initiative des rapporteurs, par le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC) et confiée après appel d’offres à la société Ernst and Young illustre le fait que les modifications des modalités de délivrance des passeports, permettant désormais la délivrance de titres biométriques, ont engendré des surcoûts non négligeables, seulement partiellement compensées par des gains d’efficience, pour les collectivités territoriales et l’État.

En premier lieu, pour les 2 079 communes dont les locaux municipaux offrent la faculté de procéder à une demande de passeport dans le nouveau dispositif, les surcoûts identifiés par l’étude ont pour origine l’allongement de la durée de constitution du dossier de demande de passeport, ensuite adressé aux services instructeurs en préfecture. L’étude annexée au présent rapport estime cette surcharge à 23,1 millions d’euros par an pour les communes concernées. Cette surcharge ne serait que partiellement compensée par la dotation relative à l’enregistrement des demandes et au retrait des titres sécurisés, versée par l’État aux communes concernées, dont le montant global annuel s’élève à 17,7 millions d’euros. Cette dotation, créée par l’article 136 de la loi de finances pour 2009, s’établit forfaitairement en 2011 à 5 030 euros pour chacune des 3 521 stations d’enregistrement des demandes de passeport se situant dans les locaux des communes concernées (une même commune pouvant gérer l’usage de plusieurs de ces équipements).

En second lieu, pour l’État – c’est-à-dire les crédits du budget de l’État y compris quand ils sont gérés par les préfectures et les crédits gérés par l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS), établissement public administratif de l’État – le bilan financier établi par l’étude commandée par l’Assemblée nationale identifie les charges nouvelles suivantes :

– le paiement de la dotation évoquée ci-dessus aux communes équipées pour accueillir les demandes de passeport, à hauteur de 17,1 millions d’euros pour 2011 ;

– le financement de l’activité de l’ANTS pour 60 millions d’euros, dont 10 millions d’euros pour l’entretien des 3 521 dispositifs de recueil des demandes de passeport déployés dans les communes, 48,3 millions d’euros pour la gestion de l’activité relative aux passeports et 1,73 million d’euros pour les dépenses de personnel.

Ces charges sont nouvelles pour l’État et son établissement public l’ANTS, d’ailleurs créé dans le cadre du déploiement du passeport biométrique. Elles sont pérennes et non ponctuelles, eu égard au caractère a priori durable des modalités décentralisées de recueil des demandes de passeport et à l’activité de l’ANTS. Au demeurant, elles ne sont que partiellement couvertes par des économies ; les coûts supplémentaires du dispositif sont, de façon prépondérante, financés par les ressources du budget de l’État, notamment via le relèvement des droits de timbre à la charge des demandeurs de passeport :

– conformément à la programmation initiale, la modification des modalités de délivrance des passeports a permis un gain de 250 ETPT dans les préfectures, soit une économie valorisé par l’étude précitée à 10,2 millions d’euros (144;

– les autres coûts supplémentaires supportés par l’État et l’ANTS sont couverts par les droits de timbre acquittés pour l’obtention des passeports. Sur un total de 107,5 millions d’euros de droits affectés à l’ANTS, l’étude précitée estime que 50,3 millions d’euros sont issus du relèvement des droits mis en œuvre dans le contexte du déploiement du passeport biométrique. Pour les demandeurs de passeport, les droits de timbre à acquitter concomitamment à la demande d’un passeport ont ainsi augmenté de 20 euros en moyenne.

Au total, on observe que l’ANTS serait « surdotée » en droits de timbre au titre de son activité concernant la délivrance des passeports à hauteur d’environ 47 millions d’euros (elle bénéficie de 107,5 millions d’euros de droits pour le financement de 60 millions d’euros de charges environ). Ce qui conduit l’étude précitée à envisager l’examen d’une baisse des droits de timbre pour les demandeurs de passeport si les charges de l’ANTS n’augmentent pas à une échéance prévisible notamment avec la délivrance de la carte nationale d’identité électronique (CNIe) (145).

La mesure de la RGPP concernant la modification des modalités de délivrance des passeports a donc correspondu à des charges nouvelles et pérennes pour l’État et son établissement public l’ANTS, financées en partie par des gains d’efficience de l’État et surtout par une hausse – d’ailleurs sans doute « surcalibrée » à ce stade – des droits de timbre acquittés au titre des demandes de passeport. La baisse des effectifs dans les préfectures affectés au traitement des demandes de passeport, loin de correspondre à soi seul au bilan budgétaire de la mesure, ne compense que partiellement les coûts pérennes qu’elle a générés. Au demeurant, la charge correspondante, en termes de mobilisation de personnels pour gérer les demandes, a été transférée aux communes.

c) Les coûts de la mesure portant sur le certificat d’immatriculation des véhicules (CIV)

L’étude évoquée ci-dessus précise qu’à l’instar du cas du passeport biométrique, la mesure de la RGPP relative à la réforme des modalités de délivrance du certificat d’immatriculation des véhicules (CIV) a conduit pour ses parties prenantes, publiques et privées, à la constatation de charges nouvelles.

Pour l’État, les charges supplémentaires sont celles de son établissement public l’ANTS au titre de son activité relative au CIV, pour un montant estimé à 43 millions d’euros. Ce montant est directement financé par les acquéreurs de véhicule, qui acquittent en effet une taxe nouvelle pour la gestion des certificats d’immatriculation des véhicules d’un montant de 4 euros affectés à l’ANTS, pour un total annuel de 43 millions d’euros.

Au demeurant, les gains pour l’État au titre de la mise en œuvre du CIV auraient été insuffisants pour couvrir cette charge nouvelle :

– les gains d’efficience en préfectures, suite au transfert partiel de l’instruction des dossiers préalables à l’obtention du CIV aux professionnels de la vente d’automobiles, s’élèveraient à 247 ETPT valorisés par l’étude à 10 millions d’euros ;

– les recettes de TVA – recouvrées au titre de la facturation aux acquéreurs de véhicule par les professionnels de l’automobile de la prestation correspondant à l’instruction des dossiers préalables à l’obtention du CIV – sont estimées par la même étude à 6,8 millions d’euros.

Les acquéreurs de véhicule acquittent ainsi une nouvelle taxe dont le produit dépasse les coûts nets de l’État (en l’espèce de l’ANTS), compte tenu de ces gains d’efficience et fiscal identifiés en faveur de l’État. De surcroît, la réforme entraîne d’autres coûts pour les acquéreurs de véhicule, les montants correspondants bénéficiant à des personnes distinctes de l’État :

– l’acheminement du CIV au domicile de l’acquéreur d’un véhicule par lettre suivie est pris en charge par celui-ci, via le paiement d’une taxe nouvelle ad hoc d’un montant unitaire de 2,5 euros. Le produit annuel de cette taxe s’élève à environ 26 millions d’euros ; il est versé à l’ANTS, mais bénéficie in fine à La Poste, qui tarifie à l’ANTS l’usage de la lettre suivie pour procéder à cet acheminement ;

– l’étude précitée évalue – en hypothèse basse –  à 42 millions d’euros par an le coût pour l’usager de la facturation auprès des professionnels de la vente d’automobiles du service de confection du dossier d’obtention du CIV.

Au total, comme pour le passeport, les coûts supplémentaires pour l’État issus de la réforme sont non négligeables et pérennes. Ils ne sont que partiellement financés par les gains d’efficience et fiscal identifiés en faveur de l’État ; un prélèvement nouveau, acquitté par l’acquéreur d’un véhicule, assure au demeurant le financement de l’ANTS.

III.– ÉLÉMENTS SUR LES IMPACTS FINANCIERS DE LA RGPP
EN DÉPENSES DE PERSONNEL

A.– LA MISE EN œUVRE DES SCHÉMAS D’EMPLOIS ET DES BAISSES D’EFFECTIFS ASSOCIÉES A ÉTÉ EFFECTIVE

1. La mise en œuvre des schémas d’emploi ministériels depuis 2008

a) Récapitulatif des schémas d’emplois programmés et mis en œuvre depuis 2008

Le tableau suivant, figurant dans le rapport présenté par nos collègues MM. Bernard Derosier, Marc Francina et Charles de La Verpillière pour la mission d’évaluation et de contrôle de la commission des Finances de l’Assemblée nationale sur la soutenabilité de l’évolution de la masse salariale de la fonction publique, illustre la programmation et la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » dans l’ensemble des ministères pour la période 2008 à 2012 (146).

Si on considère l’évolution des effectifs tels qu’ils sont prévus dans le PLF 2012 par rapport aux plafonds d’emplois applicables pour l’exercice 2008, on observe, en pourcentage, une baisse de 5,6 % des effectifs sur les quatre exercices 2008 à 2012 ; soit un taux presqu’« en ligne » avec le taux de 1,5 % de baisse annuelle des effectifs que le rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011 considère correspondre « aux gains de productivité connus dans le secteur des services. »

Le même rapport souligne qu’« entre 2007 et 2010, près de 100 000 postes auront été supprimés, dont environ 30 000 sur l’année 2009 ». En fait, environ 84 000 ETPT semblent avoir été effectivement supprimés de 2008 à 2010, dont 24 742 ETPT en 2009. On observe ainsi un certain volontarisme du Gouvernement dans la présentation des suppressions d’effectifs ; il est néanmoins patent que celles-ci sont constatées depuis l’exercice 2008 à des niveaux sans précédent et et de façon continue depuis.

SUPPRESSIONS D’EMPLOIS PAR MINISTÈRE DEPUIS 2008

Ministères

Schémas d’emplois

2008

2009

2010

2011

Évolution des effectifs 2008/2011

2012

Évolution des effectifs 2008/2012

Plafond des autorisations d’emplois 2008

Loi de finances initiale

Rapport annuel
de performances

Loi de finances initiale

Rapport annuel
de performances

Loi de finances initiale

Projet de loi de finances

en ETPT

en %

en ETPT

en %

Affaires étrangères et européennes

16 056

–190

–392

–255

–271

–160

–823

–5,1 %

–140

–963

–6 %

Alimentation, agriculture et pêche

35 430

–650

–804

–730

–683

–650

–2 137

–6 %

–653

–2 790

–7,9 %

Budget

151 006

–2 812

–2 101

–3 020

–3 249

–3 127

–8 477

–5,6 %

–2 870

–11 347

–7,5 %

Culture et communication

11 755

–103

–108

–125

–71

–93

–272

–2,3 %

–93

–365

–3,2 %

Défense

326 705

–8 250

–6 700

–8 250

–8 368

–8 250

–23 318

–7,1 %

–7 462

–30 780

–9,4 %

Écologie, énergie, développement durable

70 569

–1 400

–344

–1 294

–1 322

–1 287

–2 953

–4,2 %

–1 309

–4 262

–6 %

Économie, industrie et emploi

16 089

–287

–162

–324

–335

–273

–770

–4,8 %

–245

–1 015

–6,3 %

Éducation nationale

991 363

–13 500

–9 989

–16 000

–14 551

–16 000

–40 540

–4,1 %

–14 000

–54 540

–5,5 %

Enseignement supérieur et recherche

115 959

–450

–217

0

0

0

–217

–0,2 %

0

–217

–0,2 %

Immigration

616

–3

–38

–13

–4

 

–42

–6,8 %

 

nd

nd

Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales

289 794

–2 953

–4 564

–3 450

–2 368

–1 597

–8 529

–2,9 %

–3 621

–12 150

–4,2 %

Justice et libertés

72 237

+512

+926

+400

+1 103

+400

+2 429

+3,4 %

+515

+2 944

+4,1 %

Services du Premier ministre (dont Conseil et contrôle de l’État, AAI, SGDSN)

7 856

+40

+319

+69

+35

+54

+408

+5,2 %

+49

+457

+5,8 %

Travail, relations sociales, famille, solidarité et ville, santé et sport

34 956

–483

–568

–501

–930

–443

–1 941

–5,6 %

–429

–2 370

–6,8 %

Total (Budget général)

2 110 810

–30 529

–24 742

–33 493

–31 014

–31 426

–87 182

–4,1 %

–30 258

–117 440

–5,6 %

Total schémas d’emplois 2008-2012 (5 exercices) par rapport à 2007 (compte tenu d’un schéma d’emploi de – 28 000 ETPT en 2008 par rapport en 2007 non détaillé ci-dessus) : –145 440 ETPT
Total schémas d’emplois 2009-2012 (4 exercices) par rapport à 2008 : – 117 440 ETPT
Total schémas d’emplois 2009-2011 (3 exercices) par rapport à 2008 : – 87 182 ETPT

b) Les schémas d’emplois sont différenciés selon les ministères

Toujours au regard des pourcentages des baisses d’effectifs en 2012 (au regard du PLF 2012) par rapport aux plafonds d’emplois en 2008, on observe des évolutions différenciées selon les ministères :

– le ministère de l’Éducation nationale donne le « la » avec un taux de baisse des effectifs très proche de la moyenne du budget de l’État (– 5,5 % pour le ministère par rapport à – 5,6 % pour l’ensemble des ministères), qu’il influe au demeurant fortement compte tenu de l’importance de ses effectifs : la somme des schémas d’emplois de ce ministère en ETPT sur la période 2008-2012 correspond à 46 % des schémas d’emplois cumulés pour l’ensemble du budget de l’État ;

– de nombreux ministères ont appliqué des schémas d’emplois plus sévères en suppression d’effectifs que la moyenne du budget de l’État : il s’agit des ministères chargés des affaires étrangères, de l’agriculture, du budget, de la défense et de l’économie, ainsi que les ministères sociaux ;

– à quelques ministères correspondent des schémas d’emplois cumulés tendant à des suppressions d’effectifs moins intenses que la moyenne observée pour le budget de l’État. Il s’agit des ministères chargés de la culture, de l’intérieur et de l’enseignement supérieur. Pour ce dernier, aucune suppression d’emploi n’a eu lieu en 2010 et 2011 et aucune n’est programmée dans le PLF 2012 ;

– deux ministères ont vu leur nombre d’emplois progresser sur cette période : il s’agit du ministère de la Justice, notamment au titre des emplois dans les services de l’administration pénitentiaire ; et des services du Premier ministre (147).

2. L’application des schémas d’emplois correspond-elle à la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » dans les ministères ?

a) L’évolution du taux de remplacement des départs à la retraite au niveau du budget de l’État

Le tableau suivant présente le taux de remplacement des départs à la retraite, en exécution pour 2008 et 2009 et en programmation pour 2010 à 2011.

TAUX DE REMPLACEMENT DES DÉPARTS À LA RETRAITE

en ETPT

 

2008

2009

2010

2011

Schémas d’emplois

– 28 000
(RAP)

– 24 742
(RAP)

– 31 104
(RAP)

– 31 426
(LFI)

Départs en retraite

71 329
(RAP)

59 831
(RAP)

67 594
(LFI)

62 894
(LFI)

Taux de remplacement des départs à la retraite

61 %

59 %

54 %
(prévisionnel)

50 %
(prévisionnel)

Le taux de remplacement des départs à la retraite, d’abord proche de 60 % en 2008 et en 2009, semble converger en 2010 et 2011 vers une stricte mise en œuvre d’un remplacement pour deux départs à la retraite au niveau du budget de l’État.

Au demeurant, le taux 2010 de remplacement des départs à la retraite a pu être moins élevé, en exécution, que l’évaluation figurant dans ce tableau qui repose sur le nombre des départs en retraite programmés dans le projet de loi de finances initiale pour 2010 :

– le ministère de l’Éducation nationale indique que le nombre des départs en retraite constaté pour ses personnels s’est élevé à 34 462, pour une prévision initiale s’élevant à 37 012 ;

– le ministère de la Défense indique que le nombre des départs à la retraite constatés s’est élevé à 8 483, alors qu’il était évalué ex ante à 9 291 ;

– le ministère de l’Écologie indique un nombre de départs à la retraite constatés de 1 979, pour 2 134 départs prévus initialement ;

– le ministère du Budget précise que le nombre des départs en retraite s’est élevé à 4 525, pour une programmation initiale de 4 718.

Toutes choses égales par ailleurs (c’est-à-dire sans autres modifications apportées aux départs en retraite programmés en LFI pour les autres ministères), la prise en compte de ces éléments d’exécution dans le calcul conduirait à un taux de remplacement des départs à la retraite pour le budget général d’environ 51,6 % en 2010, au lieu de 54 %.

b) L’évolution du taux de remplacement des départs à la retraite dans les ministères

Le tableau suivant constitue une déclinaison par ministère du tableau précédent relatif à l’évolution de l’exécution (2009) et de la programmation (2010 et 2011) du niveau de remplacement des départs en retraite (148).

Ce tableau permet de constater de façon précise les différences de situation des ministères au titre des suppressions d’effectifs mises en œuvre au titre de la RGPP ; étant précisé qu’un même ministère peut voir son taux de remplacement varier fortement d’une année sur l’autre.

Au demeurant, des enseignements analogues à ceux issus du tableau supra retraçant l’évolution des effectifs au regard des schémas d’emplois peuvent être tirés. Parmi ceux les plus significatifs, on peut évoquer les éléments suivants :

– les services du Premier ministre et les ministères de l’Enseignement supérieur et de la Justice ne sont pas concernés par la politique tendant à baisser les effectifs des ministères par le non remplacement partiel des départs à la retraite ;

– le ministère de la Défense est particulièrement mis à contribution ; le taux de remplacement des départs à la retraite y est inférieur à 20 % pour chacune des trois années 2009 à 2011 ;

– les taux de remplacement observés dans certains autres ministères à effectifs moindres ont été faibles en moyenne sur les trois exercices 2009 à 2011 : on peut citer le ministère de l’Agriculture et le ministère des Affaires étrangères ;

– les taux de remplacement observés pour le ministère de l’Éducation nationale sont similaires à ceux observés en moyenne pour l’ensemble des ministères, en se situant toutefois chaque année légèrement au-dessus de cette moyenne.


TAUX DE REMPLACEMENT DES DÉPARTS EN RETRAITE PAR MINISTÈRE*

 

2009

2010

2011

 

schéma d’emplois (RAP)

départs en retraite (RAP)

taux de remplacement

schéma d’emplois (RAP)

départs en retraite

taux de remplacement

schéma d’emplois (LFI)

départs en retraite
(LFI)

taux de remplacement
(prévisionnel)

Affaires étrangères et européennes

–392

223

0 %

–271

287 (LFI)

5,6 %

–160

282

43,3 %

Alimentation, agriculture et pêche

–804

805

0 %

–683

980 (LFI)

30,3 %

–650

982

33,8 %

Budget

–2 101

4 543

53,7 %

–3 249

4 525 (RAP)

28,2 %

–3 127

5 053

38,1 %

Culture et communication

–108

268

60,3 %

–71

306 (LFI)

76,8 %

–93

286

67,5 %

Défense

–6 700

8 223

18,6 %

–8 368

8 483 (RAP)

1,4 %

–8 250

9 178

10,1 %

Écologie, énergie, développement durable

–344

1 758

80,4 %

–1 322

1 979 (RAP)

33,2 %

–1 287

2 104

38,9 %

Économie, industrie et emploi

–162

518

68,7 %

–335

550 (RAP)

39,1 %

–273

560

51,2 %

Éducation nationale

–9 989

31 237

68 %

–14 551

34 462 (RAP)

57,8 %

–16 000

32 738

51,1 %

Enseignement supérieur et recherche

–217

3 626

94 %

0

3 237 (LFI)

100 %

0

1 684

100 %

Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales (dont immigration)

–4 602

6 315

27,1 %

–2 372

6 029 (LFI)

60,6 %

–1 597

7 026

77,3 %

Justice et libertés

+926

1 345

100 %

+1 103

1 951(LFI)

100 %

+400

2 125

100 %

Services du Premier ministre (dont Conseil et contrôle de l’État, AAI, SGDSN)

+319

123

100 %

+35

111 (LFI)

100 %

+54

102

100 %

Travail, relations sociales, famille, solidarité et ville, santé et sport

–568

847

32,9 %

–930

982(LFI)

5,3 %

–443

764

42,0 %

Total (Budget général)

–24 742

59 831

58,6 %

–31 014

63 881

51,6 %

–31 426

62 884

50,0 %

Par construction, quand le nombre de suppressions d’ETPT est supérieur à celui des départs à la retraite, le taux de remplacement est de 0 % ; quand le schéma d’emplois correspond à une augmentation des effectifs, le taux de remplacement est de 100  %.

Source : direction du budget et certains ministères pour l’exécution (RAP) des départs en retraite 2010.

3. Quelques légères incertitudes subsistent sur des détails de la mise en œuvre des schémas d’emplois

a) L’« ajustement technique » du PLF 2011 pour le ministère de l’Éducation nationale

Les développements supra montrent que les schémas d’emplois pour l’ensemble du budget de l’État reposent chaque année presque pour moitié sur des suppressions d’effectifs au ministère de l’Éducation nationale (soit approximativement le poids de celui-ci dans les effectifs de l’État). Or l’ajustement technique opéré dans le cadre du PLF 2011 sur le nombre des emplois de ce ministère, par son ampleur, a optiquement plus que compensé la mise en œuvre du schéma d’emplois pour 2010.

Ainsi, la présentation du PLF 2011 a tenu compte d’une « mise à niveau » du plafond d’emplois, correspondant à 20 359 ETPT supplémentaires par rapport à ce qu’il était légitime d’attendre eu égard aux effectifs programmés pour 2010 en application du schéma d’emplois portant sur cet exercice. Ces effectifs « nouveaux » ou « retrouvés » ont ainsi été justifiés :

– 5 600 ETPT supplémentaires correspondaient à un nombre de départs en retraite inférieur aux prévisions en 2009 et 2010 ;

– 5 833 ETPT étaient pris en compte au titre de certains stages d’étudiants en master se destinant aux métiers de l’enseignement, dans le contexte de la mise en œuvre de la suppression de l’année de stage des lauréats à certains concours d’enseignants ;

– 2 900 ETPT provenaient de la prise en compte de vacataires, jusqu’à présent comptabilisés uniquement au titre des crédits budgétaires ;

– 4 726 ETPT permettaient d’ajuster à la réalité le plafond d’emplois propre à l’enseignement privé, réparation, selon le ministère, d’une « erreur de calibrage » ;

– 1 300 ETPT, dont 1 233 enseignants, ont été « retrouvés » à l’occasion de l’utilisation du fichier Chorus.

Au total, compte tenu de cette « remise à niveau », le schéma d’emplois du ministère de l’Éducation nationale examiné dans le cadre du PLF 2011 prévoit une augmentation de 4 359 ETPT par rapport à 2010, tout en prenant en compte la suppression de 16 000 ETPT au titre du schéma d’emplois.

Cette situation illustre aussi la difficulté de programmer ex ante un taux de remplacement des départs à la retraite. Car, si mettre en œuvre un schéma d’emplois relève de décisions – notamment de recrutement – maîtrisables par les ministères, le moment du départ en retraite peut relever dans une certaine mesure du choix de l’agent concerné. La programmation budgétaire peut en être substantiellement impactée en conséquence.

La direction du budget a indiqué à vos rapporteurs que le dérapage constaté en fin d’année 2010 sur les dépenses de personnel – qui a donné lieu à un décret d’avance pour payer les rémunérations des agents publics de certains ministères – avait en grande partie pour origine un nombre de départs à la retraite en 2009 et 2010 plus faible que programmé : « l’impact de l’évolution des départs à la retraite [dans l’ensemble du dérapage a été] évalué à environ 310 millions d’euros (149) (l’effet des moindres départs en 2009 sur l’année 2010 pour 210 millions, l’évolution des départs en retraite au cours de l’année 2010 induisant un coût supplémentaire d’environ 100 millions). […] Pour mémoire, 69 000 départs étaient prévus en 2009 pour 60 000 départs finalement exécutés, et 68 000 prévus en 2010 pour 64 000 constatés. […] Une part importante du dérapage résulte des écarts constatés sur les prévisions de départs à la retraite, particulièrement difficiles à établir dans le contexte de discussion du projet de loi de réforme sur les retraites, et surtout des incertitudes sur les comportements des agents dans une situation économique qui restait incertaine. »

b) Comparaisons des schémas d’emplois exécutés et du nombre des départs en retraite selon certains ministères et la direction du budget

Pour le ministère de l’Éducation nationale, ainsi que pour le ministère de la Culture, les informations fournies par la direction du budget en termes de réalisation des schémas d’emplois sont quasiment identiques (150) à celles fournies par le ministère.

Pour la Défense, les informations fournies par le ministère sont identiques à celles de la direction du budget pour le nombre des départs en retraite en 2008 et en 2009. Les chiffres fournis divergent toutefois s’agissant des schémas d’emplois exécutés, dans les proportions retracées par le tableau suivant.

COMPARAISON DES SCHÉMAS D’EMPLOIS EXÉCUTÉS
POUR LE MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

en ETPT

Source

2009

2010

Direction du budget

- 6 700

- 8 368

Ministère de la Défense

- 7 436

- 7 539

Ces différences semblent trouver leur origine dans des modifications apportées – postérieurement à la publication des RAP concernant 2009 et 2010 –aux données d’exécution, considérées par le ministère de la Défense, dans ses réponses aux rapporteurs, comme « désormais stabilisées et définitives ». Conformément aux écarts présentés par le tableau précédent, le ministère évoque ainsi une sur-exécution du schéma d’emplois en 2009 et une sous-exécution du schéma d’emplois en 2010 de 620 ETPT (ce qui ne correspond pas toutefois à la différence apparente dans ce même tableau, qui s’élève à 829 ETPT).

Pour le ministère de l’Écologie, les informations ministérielles fournies par la direction du budget divergent aussi sur l’exécution des schémas d’emplois (151). Le tableau suivant retrace ces différences de constatation.

COMPARAISON DES SCHÉMAS D’EMPLOIS EXÉCUTÉS
POUR LE MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE

en ETPT

Source

2009

2010

Direction du budget

- 344

- 1 322

Ministère de l’Écologie

- 433

- 1 418

Les rapporteurs ne disposent pas d’informations expliquant ou justifiant ces différences (qui ne portent cependant pas sur des nombres d’ETPT très significatifs). Il est là aussi possible qu’il ait été procédé à des ajustements des constatations après la publication des informations associées aux projets de loi de règlement des comptes pour 2009 et 2010.

4. La « règle du un sur deux » a conduit à une baisse accrue des effectifs les moins qualifiés de la fonction publique, notamment les personnels de catégorie C

Le tableau suivant retrace les schémas d’emplois, départs à la retraite et taux de remplacement de ces départs par catégorie A, B et C de fonctionnaires et agents dans certains ministères.

Pour la lecture de ce tableau, on note que :

– la colonne « administration financière » correspond au programme 156 « Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local », qui concerne certaines administrations financières de l’État, notamment la DGFip (152;

– La colonne « défense » concerne l’ensemble du ministère. Le situation des ouvriers de l’État rattachés à ce ministère fait l’objet de développements spécifiques infra ;

– la colonne « écologie » correspond à l’ensemble des personnels du ministère de l’Écologie, du développement durable, des transports et du logement ;

– la colonne « ministères sociaux » concerne les champs ministériels de la solidarité, de la cohésion sociale, des sports, de la jeunesse, de la santé, de la ville, du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle ;

– les périodes concernées sont indiquées dans le titre de chaque colonne. Les chiffres pour les années 2008 à 2010 sont des constats ex post des ministères concernés. Pour les exercices 2011 à 2013, il s’agit de programmations.

Il a paru pertinent de présenter des évolutions pour les périodes les plus longues possibles. Pour une même catégorie d’agents dans un même ministère, on observe en effet parfois d’une année sur l’autre des évolutions très différenciées, peu à même d’illustrer une tendance observable sur la durée de la RGPP.

SCHÉMAS D’EMPLOIS, DÉPARTS À LA RETRAITE ET TAUX DE REMPLACEMENT
DANS CERTAINS MINISTÈRES PAR CATÉGORIES A, B ET C D’AGENTS PUBLICS*

   

Administrations financières
(2008-2012)

Défense
(2008-2011)

Écologie
(2008-2013)

Ministères sociaux
(2009-2013)

Catégorie A

Schémas d’emplois

– 357

+ 1 572

– 972

– 882

Nombre de départs à la retraite

– 4 615

– 787

– 2471

– 1 869

Taux de remplacement

92,3 %

100 %

60,7 %

52,8 %

Catégorie B

Schémas d’emplois

– 1 640

– 1 303

– 3 351

– 665

Nombre de départs à la retraite

– 7 339

– 1 041

– 4 587

– 1 062

Taux de remplacement

77,6 %

0 %

26,9 %

37,4 %

Catégorie C

Schémas d’emplois

– 10 446

– 3186

– 3654

– 1 130

Nombre de départs à la retraite

– 7 529

– 2 261

– 5 336

– 1 284

Taux de remplacement

0 %

0 %

31,5 %

12 %

*Par construction, quand le nombre de suppressions d’ETPT est supérieur à celui des départs à la retraite, le taux de remplacement est de 0 % ; quand le schéma d’emplois

correspond à une augmentation des effectifs, le taux de remplacement est de 100  %.

Source : ministères concernés.

Dans le contexte d’une réforme emblématique de la RGPP – la fusion des deux directions générales des impôts et de la comptabilité publique au sein de la DGFip – il est patent que l’essentiel des suppressions d’effectifs concerne les agents de catégorie C. La forte concentration des baisses d’effectifs pour cette catégorie d’agents est également constatée au ministère de la Défense et, dans une moindre mesure, dans les ministères sociaux. Le seul ministère où les agents de catégorie C ne sont pas les moins remplacés est celui de l’Écologie ; les agents de catégorie B partant à la retraite y sont et y seront un peu moins remplacés que leurs collègues de catégorie C.

Cette tendance est clairement établie pour le ministère de la Défense ; plus précisément, celui-ci indique que la baisse des effectifs des ouvriers de l’État qui lui sont rattachés se situe chaque année à un niveau double de celui des départs à la retraite. Le non remplacement des départs à la retraite est notamment complété par des départs volontaires donnant lieu à indemnité.

Le ministère de la Défense précise qu’« entre le 1er janvier 2008 et le 31 juillet 2011, l’effectif des ouvriers de l'État en fonction au sein [notamment] du ministère de la Défense […] a diminué de 24 %, soit près de 6 700 ETP (de 29 241 ETP à 22 471 ETP). »

Pour tous les ministères étudiés, les agents de catégorie A partant à la retraite sont les plus remplacés. Sur les périodes étudiées, leur nombre devrait augmenter au ministère de la Défense et demeurer presque stable au sein des administrations financières.

Ce tableau ne constitue pas un « échantillon représentatif » de l’ensemble des ministères ; il ne concerne pas les enseignants, qui sont tous des agents de catégorie A, pour lesquels le taux de remplacement est plus faible que pour les agents de la même catégorie pris en compte dans le tableau. Ce tableau illustre cependant sans doute une tendance forte concernant les modalités de la mise en œuvre de la « règle du un sur deux », qui conduit et permet aux ministères, libres des recrutements qu’ils opèrent dans le respect de leur schéma d’emplois et du plafonnement voté par le Parlement pour les crédits de personnels, d’augmenter le niveau relatif de qualification de leurs personnels.

B.– DES SCHÉMAS D’EMPLOIS AUX ÉCONOMIES NETTES

1. Quels gains bruts liés aux suppressions d’effectifs ?

a) Quelle est l’économie induite par la suppression d’un emploi de l’État ?

En réponse à vos rapporteurs, la direction du budget précise qu’« en ce qui concerne l’année 2009, […] l’impact [brut] du schéma d’emplois a été d’environ 860 millions d’euros [d’économies] »; ce montant rapporté à la réalisation du schéma d’emplois de la même année – soit la suppression de 24 742 ETPT – , on pouvait considérer qu’un ETPT correspond à une économie annuelle d’environ 34 800 euros.

Cette valeur moyenne cependant n’est pas corroborée par un calcul analogue en 2010. En effet, cette économie appliquée au schéma d’emplois exécuté en 2010 – soit la suppression de 31 104 ETPT – , les gains pour l’année 2010 devraient s’élever à 1 082 millions d’euros. Or, le Gouvernement a évalué cette économie brute en 2010 à 800 millions d’euros.

Le fait que le schéma d’emplois d’une année n ne produit son plein impact financier qu’au cours de l’année n+1 – puisque les départs à la retraite s’étalent tout au long de l’année – constitue sans doute une explication de ce constat. Le gain brut constaté en 2010 a pâti de la sous-exécution du schéma d’emplois de l’année 2009. Selon les informations transmises par le ministère de l’Éducation nationale, pour la période 2008-2009, l’économie brute constatée au titre d’une année n dépend :

– à hauteur de 60 % à 70 %, de l’extension en année pleine du schéma d’emplois de l’année n–1 ;

– pour la part – minoritaire – restante, du début de la mise en œuvre du schéma d’emplois de l’année n.

Afin de tenter de lisser cet effet sur deux années consécutives, en considérant les deux schémas d’emplois exécutés en 2009 et 2010 – soit une baisse d’effectifs de 55 846 ETPT – et les gains bruts associés – 1 700 millions d’euros – le gain par ETPT s’élèverait à environ 30 500 euros.

Une autre approche est proposée par la direction du budget et la DGME pour estimer le gain issu de la suppression d’un ETPT. Il s’agit de prendre en compte toutes les rémunérations et pensions dont le paiement est évité du fait de cette suppression. La direction du budget précise que cette « économie de long terme [est] évaluée en moyenne à 1,5 million d’euros par emploi supprimé ». C’est en suivant ce même raisonnement et en évaluant cette économie de long terme à 1,3 millions d’euros par ETPT supprimé, que M. François-Daniel Migeon, directeur général de la DGME, déclarait le 17 octobre 2011 que les 150 000 suppressions de poste programmées pour la période 2007-2012 correspondraient à une économie cumulée de long terme d’environ 200 milliards d’euros.

b) Les gains bruts évalués par certains ministères au titre de la mise en œuvre de leurs schémas d’emplois

Le tableau suivant présente pour certains ministères et pour les administrations financières du programme 156, notamment la DGFip, les schémas d’emplois – en ETPT – constatés (2008 à 2010) et programmés (2011 à 2013) et les économies brutes – en millions d’euros – correspondantes ; ce tableau comprend aussi, pour la période pluriannuelle renseignée, le rapport entre ces économies brutes et les schémas d’emplois constatés et programmés, afin de tenter d’évaluer la valorisation de l’ETPT supprimée pour chacun des ministères concernés.

ÉLÉMENTS PLURIANNUELS SUR LES SCHÉMAS D’EMPLOIS ET LES ÉCONOMIES BRUTES CORRESPONDANTES

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Éducation nationale

Schémas d’emplois (1)

nd

- 9 989

- 14 551

- 16 000

nd

nd

Économies brutes (2)

nd

396

319

379

nd

nd

Économie brute par ETPT supprimé (2009-2011) (3)

 

26 985

   

Écologie

Schémas d’emplois

- 2 307

- 443

- 1 418

- 1 287

- 1 309

- 1 213

Économies brutes

49

38

23

39

44

44

Économie brute par ETPT supprimé (2008-2013)

29 522

Ministères sociaux

Schémas d’emplois

nd

- 568

- 432

- 443

- 429

- 447

Économies brutes

nd

18

26

18

18

18

Économie brute par ETPT supprimé (2009-2013)

 

41 819

Administration financière

Schémas d’emplois

- 2 694

- 2 170

- 2 419

- 2 630

- 2 530

nd

Économies brutes

126

105

110

122

125

nd

Économie brute par ETPT supprimé (2008-2012)

47 239

 

Défense

Schémas d’emplois

- 6 656

- 7 346

- 7 539

- 8 676

- 7 885

- 7 520

Économies brutes

167

189

195

244

231

230

Économie brute par ETPT supprimé (2008-2013)

27 530

Culture

Schémas d’emplois

nd

- 108

- 71

- 93

- 93

- 124

Économies brutes

nd

7

2

5

2

5

Économie brute par ETPT supprimé (2009-2013)

 

40 900

(1) en ETPT (2) en millions d’euros (3) en euros

La valorisation de l’ETPT supprimée est proche de celle constatée supra pour l’ensemble des ministères (30 500 euros pour la période 2009 et 2010) s’agissant du ministère de l’Écologie. Elle est inférieure pour les ministères de l’Éducation nationale et de la Défense. Elle est nettement supérieure dans le champ des ministères sociaux, du ministère de la Culture et pour les administrations financières du programme 156.

Ce constat n’est pas anecdotique ; à taux de retour catégoriel égal par rapport aux économies brutes, les montants retournés sont relativement plus élevés si la « valeur unitaire » de l’ETPT supprimé qui a permis d’établir le montant de ces économies brutes dans un ministère est elle-même élevée. Les rapporteurs évoquent plus précisément infra la question de la répartition entre ministères du retour catégoriel.

2. Définition du retour catégoriel au regard des instruments et concepts de la politique salariale de l’État

Si les schémas d’emplois conduisent à constater des économies brutes, les économies nettes sont calculées en retranchant de ces économies brutes le montant des mesures de retour catégoriel spécifiquement liées à la RGPP, étant entendu que le principe évoqué supra a été initialement posé de fixer ce montant à 50 % des économies brutes.

Aux termes d’une circulaire du 22 février 2010 signée par le directeur du budget pour le ministre du Budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État ((153), les mesures catégorielles « comprennent les transformations d’emplois, le rééchelonnement indiciaire, la transformation ou création de nouveaux corps ou grade, les réformes statutaires, les mesures de revalorisation indemnitaires etc. ». En conséquence, la direction du budget considère que les mesures catégorielles sont distinctes à la fois du glissement vieillesse technicité (GVT), des mesures ponctuelles – accompagnant notamment les restructurations – et des rémunérations associées aux heures supplémentaires effectuées.

a) Le retour catégoriel n’est pas le GVT

Pour la direction du budget, le GVT, contrairement aux mesures catégorielles dont la mise en œuvre relève d’une décision ad hoc, « est en grande partie automatique (car lié aux progressions de carrière à l’ancienneté). »

À ce titre, la direction du budget cite la circulaire du 22 février 2010 pour présenter la définition technique du GVT qui précise expressément que les mesures catégorielles s’en distinguent :

« Le GVT est une notion de variation de la masse salariale à effectif constant.

« Le GVT positif correspond à l’augmentation de la rémunération individuelle d’un fonctionnaire découlant :

« – d’un avancement quasi-automatique sur sa grille indiciaire (composante “Vieillesse”) ;

« – d’un changement de grade ou de corps par le biais d’un concours ou d’une promotion au choix dans un corps ou grade (composante “Technicité”).

« Ne sont pas à prendre en compte dans le calcul du GVT tous les autres facteurs d’évolution de la masse salariale :

« – la variation du point fonction publique ;

« – la distribution de points uniformes ou différenciés ;

« – les mesures catégorielles statutaires (rééchelonnement indiciaire, transformation ou création de nouveaux corps ou grade, toute autre réforme de grilles…) et indemnitaires. […]

« Le GVT négatif (ou effet de noria) mesure le tassement de la masse salariale dû au départ d’une population dont le salaire est généralement supérieur à celui des remplaçants (effet entrées / sorties).

« Le GVT solde correspond à la somme de ces effets de structure. »

On note que les définitions portées par la circulaire du 22 février 2010 ont un intérêt plus que théorique au regard des pratiques des ministères ; évoquant les économies brutes issues de la mise en œuvre des schémas d’emplois pour 2009 – évaluées, comme évoqué supra, à 860 millions d’euros – , la direction du budget précise que « les conventions de calculs retenues par certains ministères pour évaluer l’incidence en exécution du schéma d’emplois et du GVT négatif ne correspondent pas aux conventions de calculs recommandées par la direction lors de la budgétisation initiale ; ainsi, par exemple, un ministère a choisi d’utiliser des coûts moyens pour évaluer l’incidence du schéma d’emplois et non pas les coûts des entrants ce qui conduit à majorer l’économie issue du schéma d’emplois et à minorer celle induite par le GVT négatif. »

b) Les mesures catégorielles sont distinctes des mesures ponctuelles concernant les rémunérations

Selon la direction du budget, la pérennité des effets des mesures catégorielles rend pertinente leur intégration dans le calcul des économies nettes en personnel de la RGPP, issues d’économies brutes assises sur des suppressions d’effectifs dont les impacts financiers sont eux aussi durables. Inversement, les mesures d’accompagnement, y compris des réformes de la RGPP, sont précisément ponctuelles dans leurs effets : « les mesures catégorielles sont généralement de nature pérenne et les crédits catégoriels d’une année sont reconduits en base l’année suivante : il n’en va pas de même des mesures de restructuration qui sont des mesures non reconductibles (un seul versement en général pour les agents concernés) et sont liées à des opérations ponctuelles de restructuration des services. Ces mesures ne sont pas des mesures catégorielles.

« En effet, alors que les mesures catégorielles, du fait de leur pérennité, participent d’un renchérissement durable de la masse salariale de l’État, et qu’elles doivent ainsi être mises sur le même plan que les suppressions de postes liées à la RGPP, qui procurent des économies durables, les mesures d’accompagnement des restructurations ne constituent pas une augmentation durable de la masse salariale. Il s’agit de dépenses à caractère exceptionnel associées à la mise en œuvre de réformes particulières, définies et limitées dans le temps. »

Ainsi, les mesures financières d’accompagnement instituées par les quatre décrets du 17 avril 2008 prévoyant des primes et indemnités versées dans le cadre des restructurations des services ou des mobilités que celles-ci peuvent induire – mesures évoquées dans la première partie du présent rapport – ne sont pas de nature, selon la direction du budget, à être intégrées dans le calcul des économies nettes des retours catégoriels, du fait de leur caractère ponctuel. Le constat est sans doute analogue s’agissant de la prime de fonctions et de résultats (PFR), mise en œuvre dans le cadre de la RGPP, à tout le moins de sa partie « résultats ».

Les rapporteurs ne discutent pas les justifications apportées à un débat, assez théorique au demeurant, sur la nature budgétaire ou financière de tel ou tel élément de rémunération. Ils constatent qu’en suivant le raisonnement de la direction du budget, des primes et indemnités accordées en lien étroit avec la RGPP ne sont pas prises en compte dans son bilan financier, parce qu’elles ne sont pas des mesures catégorielles au sens strict, ni des dépenses d’intervention ou de fonctionnement.

Pour la seule année 2009, la Cour des comptes a évalué un coût supplémentaire substantiel de « 160 millions d’euros pour les primes de mobilité, indemnités de départ volontaire… liées aux restructurations de services menées dans le cadre de la RGPP. » (154)

c) Les mesures catégorielles ne sont pas la rémunération des heures supplémentaires

Pour la direction du budget, les coûts associés à la rémunération des heures supplémentaires effectuées par les agents publics ne constituent pas des mesures de retour catégoriel : en effet, « en tant que telle l’heure supplémentaire traduit la rémunération d’un travail supplémentaire effectué et non pas une mesure de revalorisation des rémunérations.

« En ce sens, l’augmentation du volume d’heures supplémentaires réalisées n’est pas une mesure catégorielle. Contrairement aux mesures catégorielles, il convient de noter que les heures supplémentaires ne sont pas des mesures pérennes.

« L’augmentation du nombre d’heures supplémentaires, à l’Éducation nationale, correspond à une politique gouvernementale se traduisant par des dédoublements de classe et une amélioration du suivi individualisé des élèves. Elle ne peut légitimement être mise en rapport avec une quelconque mesure catégorielle. »

On observe cependant que certains des éléments de cette « politique gouvernementale » sont précisément associés à des mesures de la RGPP. Ainsi, la mesure de la RGPP portée par le ministère de l’Éducation nationale « Mise en œuvre du droit à l’accompagnement éducatif » a notamment consisté, en faveur d’élèves volontaires scolarisés en sixième, en la mise en place de séquences d’aide aux devoirs et aux leçons après les cours dans tous les collèges publics et dans certaines écoles primaires (155).

Ces séquences sont souvent encadrées et animées par des enseignants, rémunérés pour ces tâches au titre d’heures supplémentaires. La direction du budget a fourni aux rapporteurs un tableau des principaux dispositifs d’heures supplémentaires payées dans l’administration de l’État. Les heures effectives d’enseignement pour l’accompagnement éducatif dans les établissements du second degré ont donné lieu en 2010 à des rémunérations d’un montant global de 44 millions d’euros.

Les rapporteurs relèvent que, là aussi, des principes budgétaires théoriques, aussi pertinents soient-ils, conduisent à écarter du calcul du gain net en personnel de la RGPP un élément de rémunération qui lui est fondamentalement lié.

En complément du cas de l’accompagnement éducatif, la question des heures supplémentaires sera abordée infra par vos rapporteurs, sous l’angle, dans l’enseignement scolaire, du lien éventuel entre la réduction des effectifs et le relèvement du nombre d’heures supplémentaires effectuées, et ce dans le contexte des exonérations fiscale et sociale applicables aux rémunérations qui leur sont associées.

3. Quel poids du retour catégoriel en regard des économies brutes des schémas d’emplois ?

La direction du budget invite à écarter du calcul des gains nets des schémas d’emplois du budget de l’État toute prise en compte des primes et indemnités ponctuelles ainsi que la rémunération des heures supplémentaires.

Sans que cette méthode soit toujours justifiée du point de vue des rapporteurs – pour les raisons évoquées ci-avant – les développements suivants sont consacrés aux mesures catégorielles proprement dites.

a) Pour 2009, des évaluations proches pour la direction du budget et la Cour des comptes

La direction du budget considère qu’en 2009, le montant du « retour » catégoriel – fraction associée à la RGPP de l’ensemble des mesures catégorielles mises en œuvre – s’est élevé très précisément à 50 % des économies brutes constatées en application du schéma d’emplois. La direction du budget observe ainsi, pour 2009, que « l’impact du schéma d’emplois a été d’environ - 860 millions d’euros, les mesures catégorielles sont évaluées à 547 millions d’euros. Il est estimé que le retour catégoriel attribué aux agents au titre du non remplacement des départs en retraite est de l’ordre de 430 millions d’euros. L’écart est dû aux mesures catégorielles antérieurement accordées. »

La Cour des comptes livre les mêmes ordres de grandeur pour 2009, pour l’impact global du schéma d’emplois. Elle précise que « l’impact des mesures catégorielles a été de + 550 millions d’euros, dont 430 millions d’euros résultent de la rétrocession aux agents de la moitié des gains permis par le non remplacement d’un départ à la retraite sur deux, le solde résultant de réformes statutaires généralement plus anciennes que la mise en œuvre de cette règle (par exemple, réforme des corps et carrières des personnels actifs de la police nationale ou rénovation de la grille des personnels militaires). » ((156)

b) Comment distinguer les mesures catégorielles selon qu’elles relèvent ou non du retour catégoriel lié à la mise en œuvre de la « règle du un sur deux » ?

La direction du budget et la Cour des comptes distinguent ainsi, selon les mêmes modalités – à tout le moins pour les mêmes montants – , les mesures catégorielles relevant a) du retour aux agents en exercice d’une part des économies brutes induites par le schéma d’emplois et b) d’autres dispositifs catégoriels, notamment quand ceux-ci ont été lancés antérieurement à la RGPP.

En l’absence, regrettable, de réponses du ministère de l’Intérieur aux questions de vos rapporteurs, il n’est pas possible de vérifier qu’il distingue, comme l’évoque la Cour des comptes, entre les mesures catégorielles liées au « retour » d’une partie des économies induites par le schéma d’emplois et celles portant, par exemple « réforme des corps et carrières des personnels actifs de la police nationale. »

Les réponses, très circonstanciées, du ministère de la Défense adressées à vos rapporteurs ne mentionnent pas qu’il mette en œuvre à la fois des mesures catégorielles en retour du schéma d’emplois et d’autres – comme la « rénovation de la grille des personnels militaires » – sans lien avec la RGPP. Toutes les mesures catégorielles répertoriées et présentées par le ministère de la Défense dans ses réponses sont prises en compte pour le calcul du gain net induit par le schéma d’emplois. Au demeurant, parmi ces mesures catégorielles, figurent deux mesures importantes en montant, dont les libellés se rapprochent des termes utilisés par la Cour des comptes :

– une « revalorisation de la grille indiciaire des militaires du rang », pour un coût de 34,3 millions d’euros en 2008. En 2008, le total des mesures catégorielles s’est élevé pour les personnels civils et militaires du ministère à 45,1 millions d’euros ;

– une « revalorisation de la grille indiciaire des militaires », pour des coûts respectivement en 2009, 2010 et 2011 s’élevant à 62,9 millions d’euros, 81,9 millions d’euros et 31 millions d’euros. Soit, pour chacune de ces trois années, 75 %, 82 % et 40 % de l’ensemble des mesures catégorielles mises en œuvre dans ce ministère pour ses personnels civils et militaires.

Le ministère de la Défense admet d’ailleurs que la présentation des plans catégoriels annuels faite aux rapporteurs ne fait « pas la distinction entre les mesures qui découlent du “retour catégoriel” décidé en 2007 et celles qui auraient été mises en œuvre indépendamment de cet objectif gouvernemental de restitution d’une partie des économies issues de l’application de la règle du non remplacement d’un agent sur deux partant à la retraite ».

La direction du budget a précisé à vos rapporteurs, sans évoquer précisément le ministère de la Défense, que « certains […] plans catégoriels, décidés antérieurement à la mise en œuvre du non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux, ont encore un effet budgétaire, c’est le cas par exemple du protocole “corps et carrière” dans la police nationale. En outre, certaines de ces mesures catégorielles n’ont pas de lien direct avec la RGPP, comme la fin du plan de transformation des emplois d’instituteurs en professeurs des écoles. »

Au demeurant, les informations fournies par le ministère de l’Éducation nationale ne permettent pas de vérifier ces propos de la direction du budget le concernant. En réponse à vos rapporteurs, ce ministère, en évoquant les « mesures catégorielles mises en œuvre hors principe de rétrocession des économies réalisées sur les schémas d’emplois », énumère les indemnités de départ volontaire, la garantie individuelle du pouvoir d’achat, les comptes épargne temps et l’exonération de cotisations sociales au titre des heures supplémentaires ((157).

Beaucoup des ministères interrogés par les rapporteurs retranchent, comme le ministère de la Défense, toutes les mesures catégorielles qu’ils répertorient aux économies brutes induites par leur schéma d’emplois pour le calcul des gains nets (le ministère de la Culture, les ministères financiers et les ministères sociaux).

Au total, seul le ministère de l’Écologie opère une telle distinction. En réponse à vos rapporteurs, il précise que « dans un contexte de mise en place du nouveau ministère, compte tenu des écarts de rémunération indemnitaire constatés entre les agents issus d’origines ministérielles différentes (Équipement, Agriculture et Industrie/Finances) et exerçant leurs fonctions dans les mêmes collectifs de travail voire sur des fonctions analogues, [a été mise en œuvre] une mesure spécifique de budgétisation catégorielle, indépendante du retour sur les économies d’emplois ». Cette mesure, d’un montant de 8,6 millions d’euros en 2010, n’est effectivement pas prise en compte par le ministère dans le calcul des gains nets issus de la mise en œuvre de son schéma d’emplois.

4. Une répartition inégale du retour catégoriel ?

a) Les réponses fournies par les ministères

Le tableau suivant retrace pour un certain nombre de ministères, sur une période pluriannuelle de référence associée à chacun d’entre eux, les gains bruts et nets des schémas d’emplois et les montants et taux des retours catégoriels. Il rappelle aussi les résultats présentés supra de la « valorisation » par ministère d’un ETPT supprimé sur cette période ; ainsi que le taux de baisse des effectifs en 2012 par rapport à 2008.

GAINS BRUTS ET NETS DES SCHÉMAS D’EMPLOIS, TAUX DE RETOUR CATÉGORIEL ET BAISSE DES EFFECTIFS DANS CERTAINS MINISTÈRES

 

Éducation nationale (2008-2011)

Écologie
2008-2013)

Ministères sociaux (2009-2013)

Ministères financiers (2008-2011)

Défense
(2008-2013)

Culture
(2009-2013)

Gains bruts du schéma d’emplois (en millions d’euros)

1 456

235

97

565

1 256

18

Montants du retour catégoriel (en millions d’euros)

603

107

54

336

524

11

Taux du retour catégoriel

41,4 %

45,6 %

56 %

60 %

41,8 %

60 %

Gains nets du schéma d’emplois (en millions d’euros)

853

128

43

229

732

7

« Valeur » de l’ETPT supprimé au titre du un sur deux (en euros)

26 985

29 522

41 819

47 725

27 530

40 900

Pourcentage de baisse des effectifs prévue en 2012 par rapport à 2008

- 5,5 %

- 6 %

- 6,8 %

- 7,4 %

- 9,4 %

- 3,2 %

Source : ministères.

Ce tableau contient des indications portant sur trois des éléments qui déterminent comment les personnels d’un ministère sont « traités » au regard du retour catégoriel :

– le premier élément est la première composante de l’« assiette » des gains bruts issus du schéma d’emplois : il s’agit du pourcentage de baisse des effectifs en 2012 par rapport à 2008. Plus il est élevé, moins le nombre des agents en poste susceptibles de bénéficier du retour catégoriel est élevé ; et plus la « part » dont chacun d’entre eux bénéficie en principe est importante. On retrouve au demeurant la logique initiale de la RGPP pour le retour catégoriel : le niveau d’« intéressement » des agents est d’autant plus élevé que les suppressions d’effectifs sont fortes ;

– l’autre composante de l’« assiette » des gains bruts issus du schéma d’emplois est la « valeur » de l’ETPT supprimé au titre de la mise en œuvre de la « règle du un sur deux ». Cette « valeur » ne constitue pas un indice des réalités salariales des ministères mais résulte uniquement du rapport entre les gains bruts en euros et les schémas d’emplois en ETPT présentés par les ministères. Sans être ainsi un critère de jugement, l’information portée pas cette « valeur » est la suivante : plus elle est élevée, plus les agents en poste dans le ministère considéré sont avantagés à taux de retour catégoriel égal ;

– le dernier élément est précisément ce taux du retour catégoriel. Plus il est élevé, plus les agents en poste sont avantagés à la mise en œuvre de ce retour.

On observe que la situation des agents de l’Éducation nationale est la moins avantageuse du point de vue du retour catégoriel. La baisse des effectifs n’y est pas supérieure à celle observée en moyenne pour l’ensemble des ministères répertoriés par ce tableau. En revanche, la « valeur » de l’ETPT supprimé et le taux du retour catégoriel y sont plus faibles que dans les autres ministères figurant dans ce tableau. Cette situation s’apparente à celle des agents du ministère de la Défense, où les effectifs ont toutefois nettement plus baissé que dans l’Éducation nationale, ce qui bénéficie aux agents en place au regard du retour catégoriel.

La situation catégorielle la plus favorable semble être celle des agents des ministères financiers. On y observe le cumul d’une forte baisse des effectifs, d’une forte « valeur » de l’ETPT supprimé et d’un taux de retour catégoriel élevé. Les situations catégorielles des agents des ministères sociaux et du ministère de la Culture et de la communication semblent elles aussi favorables, bien que dans une moindre mesure.

Ces développements doivent bien entendu s’apprécier compte tenu des politiques catégorielles réellement mises en œuvre par chaque ministère au titre de l’enveloppe catégorielle dont il dispose ; sans que soit remis en cause l’intérêt des comparaisons faites par les rapporteurs, il convient de garder à l’esprit que les agents d’un même ministère ne sont pas traités de façon identique par ces politiques catégorielles, en fonction de leurs corps, fonctions,…

b) Une approche par le tableau fourni par la direction du budget

Le tableau suivant, issu d’informations fournies par la direction du budget, retrace le montant des mesures catégorielles exécutées, par ministère, de 2008 à 2010. Ces montants prennent en compte les mesures catégorielles se situant hors le retour induit par la mise en œuvre des schémas d’emplois (pour mémoire, comme évoqué supra, le retour catégoriel d’une partie des économies brutes issues de la mise en œuvre du schéma d’emplois s’élève en 2009 – pour la direction du budget et la Cour des comptes – à 430 millions d’euros).

Ce tableau contient enfin un « indicateur approché » des politiques catégorielles ministérielles comparées, en rapportant la somme des mesures catégorielles mises en œuvre de 2008 à 2010 au plafond d’emplois de chaque ministère inscrits dans le PLF 2011. Pour faciliter la lecture de cet indicateur rapproché, il a été fixé à la valeur « 100 » pour le rapport entre le montant des mesures catégorielles pour l’ensemble des ministères de 2008 à 2010 et le plafond d’emplois inscrit dans le PLF 2011 pour le budget général.

MONTANTS ET RÉPARTITION DES MESURES CATÉGORIELLES PAR MINISTÈRE

 

Mesures catégorielles

   

2008

2009

2010

Cumul 2008-2010

Plafond d’emplois (en ETPT) PLF 2011

Indice de répartition des mesures catégorielles

Affaires étrangères et européennes

3,6

4,5

6,4

14,5

15 402

122

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

5,0

7,9

10,3

23,2

32 435

93

Budget, comptes publics et réforme de l’État

73,1

64,6

79,8

217,5

142 466

198

Culture et communication

2,7

4,8

1,3

8,8

11 132

102

Défense

99,9

80,8

100,2

280,9

301 341

121

Écologie, développement durable, transports et logement

18,9

26,0

24,7

69,6

62 371

144

Économie, finances et industrie

10,8

9,3

9,6

29,7

14 344

268

Éducation nationale, jeunesse et
vie associative

123,5

137,6

119,2

380,3

986 194

50

Enseignement supérieur et recherche

11,3

16,3

13,7

41,3

24 485

219

Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales et immigration

62,3

163,4

149,1

374,8

283 367

171

Justice et libertés

16,3

14,2

9,2

39,7

75 825

68

Services du Premier ministre

4,3

4,1

4,1

12,5

3 529

459

Travail, emploi, santé, solidarités,
cohésion sociale, sports et ville

3,3

13,7

16,3

33,3

22 430

192

Total (Budget général)

435,1

547,4

544,0

1 526,5

1 975 023

100

Source : direction du budget et PLF 2011.

La situation peu favorable des personnels de l’Éducation nationale est confirmée par ce tableau. Seuls deux autres ministères se situent en dessous de la moyenne des ministères (il s’agit des ministères de l’Agriculture et de la Justice). Dans le cas du ministère de la Justice, le « retour catégoriel » n’avait au demeurant pas lieu d’être puisque ses effectifs ont augmenté sur la période. On observe toutefois que d’autres ministères dont les effectifs ont augmenté depuis 2007 ont appliqué une politique catégorielle, dont l’ampleur se situe au demeurant au-dessus de la moyenne de l’indice, voire très substantiellement au-delà de celle-ci.

5. Le poids des mesures catégorielles a-t-il augmenté depuis 2007 ?

Le retour catégoriel a-t-il modifié la politique salariale mise en œuvre par l’État ? Pour la direction du budget, la réponse est négative ; en réponse à vos rapporteurs, elle précise que « sur la période 1999-2008 couvrant les dix années précédant 2009, année du premier budget triennal 2009-2011, les enveloppes catégorielles se sont en moyenne élevées, en euros courants (sans tenir compte de l’inflation sur cette période), à environ 0,5 milliard d’euros. Ce résultat est donc comparable aux enveloppes catégorielles accordées en exécution en 2009 et 2010 […], et est à peine inférieur au montant inscrit en LFI 2011 (605 millions d’euros).

« Au total, il convient de souligner que le niveau des mesures catégorielles n’a pas réellement augmenté, en moyenne et sur longue période, depuis la mise en œuvre de la RGPP, alors que des suppressions d’emplois sans équivalent ont été mises en œuvre. »

Le « dérapage » des dépenses de personnel de l’État – qui a contraint le Gouvernement à « ouvrir par décret d’avance 760 millions d’euros nets, soit 0,6 % de la masse salariale totale de l’État, pour mettre à disposition des ministères les crédits nécessaires à la couverture de la paye des agents publics de l’État au mois de décembre 2010 » – n’a pas été causé, selon la direction du budget, par les mesures catégorielles : « la sur-exécution de la masse salariale n’est pas liée aux mesures catégorielles. Il convient de noter que l’exécution des mesures catégorielles prises dans leur ensemble a été inférieure aux prévisions de la loi de finances initiale d’environ une centaine de millions d’euros. »

6. Une partie du coût des heures supplémentaires effectuées par les enseignants est-elle à prendre en compte dans le calcul des gains nets de la RGPP en personnel ?

a) L’augmentation substantielle des heures supplémentaires effectuées dans l’Éducation nationale depuis 2007

Les rapporteurs ont montré supra le contexte catégoriel défavorable qui caractérise le ministère de l’Éducation nationale et la situation salariale de ses agents. Il est patent, en revanche, que le nombre des heures supplémentaires effectuées par les enseignants, notamment dans le secondaire, a considérablement augmenté depuis 2007.

Le ministère de l’Éducation nationale indique que l’ensemble des ratios illustrant la pratique des heures supplémentaires par les enseignants est « en progression depuis l’année scolaire 2006/2007 ». Les informations transmises par les rectorats aux rapporteurs confirment ce constat.

Selon le ministère de l’Éducation nationale, les heures supplémentaires année (HSA) « rémunèrent forfaitairement la part du service des enseignants excédant de manière permanente sur l’ensemble de l’année scolaire leur maximum hebdomadaire de service ». Effectuer une HSA signifie ainsi effectuer une heure supplémentaire chaque semaine d’enseignement de l’année scolaire - soit en principe 36 semaines sur 52 – , en plus des 15 heures et 18 heures hebdomadaires dues respectivement par un enseignant agrégé et un enseignant certifié.

Le tableau suivant retrace, pour les 19 rectorats qui ont répondu aux rapporteurs sur la question du nombre moyen de l’évolution d’HSA effectuées par enseignant dans l’académie, les évolutions constatées au titre des années scolaires 2007/2008 à 2010/2011.

NOMBRE MOYEN D’HSA EFFECTUÉES EN MOYENNE PAR ENSEIGNANT

Académie

Années scolaires

Évolution sur
la période renseignée

En pourcentage

En nombre d’HSA

2007/2008

2008/2009

2009/2010

2010/2011

Limoges

1,6

1,78

2,04

1,98

+ 23,75 %

+ 0,38

Nice

2,05

2,16

2,23

 

+ 8,78 %

+ 0,18

Aix Marseille

 

2,1

2,18

2,38

+ 13,33 %

+ 0,28

Dijon

 

1,99

2,18

2,23

+ 12,06 %

+ 0,24

La Réunion

1,95

1,96

2,1

2,25

+ 15,38 %

+ 0,3

Rouen

2,19

2,27

2,29

2,25

+ 2,74 %

+ 0,06

Bordeaux

1,4

1,3

1,4

 

0 %

0

Poitiers

1,21

1,33

1,79

1,78

+ 47,11 %

+ 0,57

Grenoble

1,27

1,28

1,5

 

+ 18,11 %

+ 0,23

Paris

2,6

2,5

2,5

2,6

 

0

Corse

1,39

1,45

1,59

1,56

+ 12,23 %

+ 0,17

Montpellier

2,24

2,27

2,29

 

+ 2,23 %

+ 0,05

Amiens

2,09

2,18

2,17

 

+ 3,83 %

+ 0,08

Clermont-Ferrand

1,44

1,45

1,46

1,5

+ 4,17 %

+ 0,06

Nancy Metz

0,78

0,95

0,99

1,05

+ 34,62 %

+ 0,27

Lyon

1,93

2,03

2,13

2,22

+ 15,03 %

+ 0,29

Lille

1,18

1,20

1,28

 

+ 8,58 %

+ 0,10

Reims

1,7

1,93

2,12

2,2

+ 29,41 %

+ 0,5

Besançon

2,42

1,93

1,91

 

– 21,07 %

- 0,51

Source : Rectorats

Ce tableau illustre des tendances propres à chacune des académies. Les chiffres que celles-ci fournissent ne permettent de les comparer entre elles. En effet, certaines d’entre elles ont présenté des taux valant pour les enseignants effectuant des HSA ; d’autres ont indiqué des ratios s’appuyant sur l’ensemble des effectifs enseignants, y compris ceux qui n’effectuent pas d’HSA.

En tout état de cause, sur les 19 rectorats référencés dans le tableau précédent, 16 d’entre eux indiquent une augmentation, parfois considérable, de la pratique de cette catégorie d’heures supplémentaires, 2 autres constatent une stabilisation du nombre d’HSA effectuées et un seul indique une baisse en la matière. Les périodes de constatation sont, selon les rectorats, longues de trois ou quatre ans, encadrées par les rentrées scolaires 2007-2008 à 2010-2011.

Ce constat confirme les propos de M. Pierre-Yves Duwoye, alors secrétaire général des ministères de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur, tenus lors de son audition par le groupe de travail le 29 mars 2011. Il précisait à cette occasion que le nombre des heures supplémentaires effectuées par les agents du ministère de l’Éducation nationale est passé ces dernières années de 1,1 à 1,5 par semaine.

Le nombre des enseignants bénéficiant de la prime, d’un montant de 500 euros, instituée par le décret n° 2008-927 du 12 septembre 2008 (instituant une prime spéciale au bénéfice des enseignants qui assurent au moins trois heures supplémentaires année – HSA – d'enseignement dans l'enseignement secondaire) a augmenté durant cette période. Les 16 rectorats ayant renseigné cette information sur trois ou quatre années dans la période encadrée par les rentrées scolaires 2007-2008 à 2010-2011 constatent une croissance du nombre des enseignants bénéficiaires de cette prime. Pour 12 d’entre ces rectorats, la progression du nombre de ces bénéficiaires s’observe chaque année par rapport à la précédentes sur trois ou quatre ans.

b) L’État a incité les enseignants à faire des heures supplémentaires, parfois pour pallier les baisses d’effectifs

La pratique des heures supplémentaires par les enseignants a été encouragée depuis 2007 par plusieurs leviers.

Parmi les leviers financiers, le décret n° 2007-1430 du 4 octobre 2007 a étendu le bénéfice de la loi Tepa en matière d’exonérations d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales aux heures supplémentaires effectuées par les enseignants. Cette mesure concerne tout autant les HSA que les heures supplémentaires d’enseignement (HSE) qui, selon le ministère de l’Éducation nationale, « sont versées dès lors que le service supplémentaire ne s’inscrit pas dans un horaire régulier. Il peut s’agir notamment des heures faites pour assurer le remplacement d’un enseignant absent pour une courte durée ». Le ministère de l’Éducation nationale indique que l’application de la loi TEPA « a représenté un gain financier de 310 millions d’euros pour les enseignants à la rentrée 2009. »

Deux autres mesures, prises au cours de la même période, ont rendu plus attractif le fait d’effectuer des heures supplémentaires :

– le décret n° 2008-199 du 27 février 2008 a relevé le taux de majoration des HSE. Elles sont rétribuées à raison d’un trente-sixième de la valeur d’une HSA plus une majoration que le décret du 27 février 2008 a relevé de 15 % à 25 % ;

– la création de la prime de 500 euros évoquée supra pour l’exercice de trois HSA (158).

À ces leviers financiers se sont ajoutées des augmentations du nombre des HSA et HSE proposées aux enseignants, pour des raisons parfois en lien direct avec la RGPP :

– avant son lancement, à la rentrée 2007, ont été notifiées 58 500 HSA nouvelles pour pallier l’absence de mise en œuvre d’une réforme, antérieurement programmée, tendant à alléger certaines décharges de service, dans le contexte de la suppression de 3 700 ETPT actée par la loi de finances initiale pour 2007. Cet exemple illustre, s’il en était besoin, que la baisse des effectifs a pu être gagée dans l’Éducation nationale par la création d’heures supplémentaires. Le ministère de l’Éducation nationale évalue le coût de cette mesure à 81 millions d’euros chaque année ;

– au demeurant, la même logique de substitution d’heures supplémentaires à des ETPT a conduit, selon le ministère, à la mobilisation de 75 600 HSA « pour permettre le non renouvellement de 4 200 emplois d’enseignants du second degré dans le public et le privé à la rentrée 2008 ». Le ministère évalue le coût de cette mesure à 107,5 millions d’euros ;

– des montants d’environ 100 millions d’euros au total en 2008 et 2009 ont été inscrits pour le financement des heures supplémentaires nécessaires à la mise en œuvre du droit à l’accompagnement éducatif, mesure proprement dite de la RGPP.

Le ministère constate qu’« entre l’année scolaire 2006/2007 et l’année scolaire 2009/2010, la dépense au titre des heures supplémentaires [hors charges] a progressé de 328 millions d’euros soit + 35 % dont […] 251,2 millions d’euros au titre des trois catégories de mesures ci-dessus présentées »

Au demeurant, les rectorats ont indiqué à vos rapporteurs une augmentation constante des HSA attribuées par le ministère durant la période encadrée par les quatre années scolaires 2007-2008 à 2010-2011, alors même que le nombre d’« heures postes » attribuées baissait souvent concomitamment en application directe du schéma d’emplois et des suppressions d’effectifs. Le tableau suivant illustre cette tendance.

HSA AFFECTÉES AU RECTORAT

 

Évolution 2007/2008 à 2010/2011 du nombre des HSA affectées au rectorat

Proportion d’HSA dans la dotation horaire de l’année

Évolution 2007/2008 à 2010/2011 de la proportion d’HSA dans la dotation horaire

2007/2008

2008/2009

2009/2010

2010/2011

Limoges

+ 25,85 %

5,7

6,5

7,4

7,4

+ 29,82 %

Nice

+ 26,68 %

7,02

7,46

7,9

8,83

+ 25,78 %

Aix Marseille

+ 11,03 %

7,52

8,57

8,58

8,75

+ 15,28 %

Dijon

+ 45,78 %

6,47

7,72

9,01

9,43

+ 45,75 %

La Réunion

+ 39,18 %

5

8

9

9

+ 80,00 %

Rouen

- 1,57 %

11,64

11,9

11,91

11,93

+ 2,49 %

Bordeaux

- 7,18 %

9,6

9,4

10

8,8

- 8,33 %

Martinique

+ 6,67 %

nc*

nc*

nc*

nc*

nc*

Poitiers

+ 42,65 %

6,83

7,39

9,87

9,68

+ 41,73 %

Grenoble

+ 50,62 %

6,61

6,69

7,77

9,82

+ 48,56 %

Paris

nc*

8,1

8,9

9,7

9,8

+ 20,99 %

Toulouse

+ 18,07 %

7,37

7,73

8,27

8,55

+ 16,01 %

Caen

+ 4,,84 %

8,71

8,73

8,87

9,41

+ 8,04 %

Corse

- 2,74 %

7,23

7,51

8,19

8,07

+ 11,62 %

Montpellier

+ 5,58 %

7,9

8

8,2

8,3

+ 5,06 %

Amiens

0,00 %

8,63

8,75

8,76

8,9

+ 3,13 %

Clermont-Ferrand

+ 2,34 %

7,56

7,62

7,7

7,85

+ 3,84 %

Nancy Metz

+ 5,34 %

9,69

9,77

10,16

10,86

+ 12,07 %

Lyon

+ 20,29 %

6,01

6,51

7,05

7,41

+ 23,29 %

Lille

+ 7,04 %

8,5

8,82

9,22

9,5

+ 11,76 %

Reims

+ 15,98 %

10

11,6

12

12,3

+ 23,00 %

Besançon

+ 8,97 %

3,6

3,9

4

4,1

+ 13,89 %

Total

+ 10,70 %

 

+ 18,10 %

*nc : non communiqué

Source : non communiqué

Sur 21 rectorats ayant renseigné ces informations :

– 18 indiquent que le nombre d’HSA disponibles était plus élevé pour l’année scolaire 2010-2011 que pour l’année scolaire 2007-2008 ;

– 10 précisent quelle progression du nombre des HSA mises à leur disposition a été constatée chaque année par rapport à l’année précédente ;

– 20 constatent que la proportion d’HSA dans la dotation horaire globale dont ils bénéficient – qui comprend à la fois les HSA et les heures postes correspondant aux heures d’enseignement assurées dans le cadre des obligations de service de droit commun – a augmenté.

Ce dernier point est important : il montre que la baisse des effectifs a été accompagnée depuis 2007 dans tous les rectorats (sauf un) d’une augmentation (dans la majorité des cas) ou d’une moindre baisse (dans quelques cas) de la dotation en HSA. Cela indique que des HSA supplémentaires ont sans doute été proposées en compensation des baisses d’effectifs : en effet, rien n’empêchait de faire varier la dotation en HSA comme la dotation en heures postes, si l’objectif avait été de stabiliser le nombre des heures supplémentaires effectuées par chaque enseignant en poste.

Au total, il est difficile de préciser quelle part de l’augmentation du coût depuis 2007 des heures supplémentaires effectuées par les enseignants pourrait être prise en compte dans un bilan financier de la RGPP. Il est probable qu’une part non négligeable de cette augmentation – 328 millions d’euros en 2010 par rapport à 2007, cf. supra – est induite par la baisse des effectifs issue des schémas d’emplois. S’ajouterait à cette part son « coût » au titre de la loi Tepa ((159), ce qui pourrait conduire à renchérir son montant d’environ 25 % (selon le ministère de l’Éducation nationale, la loi Tepa a constitué en 2010 un gain financier de 310 millions d’euros pour un montant de rémunérations en heures supplémentaires de 1 274 millions d’euros au titre de l’année scolaire 2009-2010). Le tableau suivant retrace ces enjeux.

ÉVALUATION DU COÛT DES HEURES SUPPLÉMENTAIRES DANS L’ÉDUCATION NATIONALE

 

Année scolaire

Évolution 2009/2010 par rapport à 2006/2007

Part de l’évolution dans le coût total 2009/2010

2006/2007

2009/2010

en euros

en %

Coût des rémunérations pour tous types d’heures supplémentaires

946 millions d’euros

1 274 millions d’euros


+ 328 millions d’euros

(a)


+ 34,7 %


25,8 %


(b)

Gains issus de la loi Tepa pour l’ensemble des heures supplémentaires effectuées par les enseignants

 

310 millions d’euros en 2010

(c)

 

Coût total des heures supplémentaires effectuées en plus depuis 2006/2007

a + c x b = 328,4 + 80 = 428 millions d’euros

100

Source : chiffres du ministère de l’Éducation nationale.

Il resterait donc à déterminer quelle part, sans doute non négligeable, des 428 millions d’euros – soit l’évaluation approchée du coût total des heures supplémentaires « supplémentaires » effectuées par les enseignants sur la période considérée – est imputable à la RGPP pour la prendre en compte dans son bilan financier.

RÉUNION DU CEC DU 5 MAI 2011 :
PRÉSENTATION PAR LES RAPPORTEURS
DES ORIENTATIONS DE LEUR MISSION

M. le Président Bernard Accoyer. Notre ordre du jour appelle en premier lieu la présentation d’un point d’étape sur l’évaluation de la révision générale des politiques publiques, la RGPP. Ce sujet a été proposé par le groupe SRC, au titre de son « droit de tirage » pour la session en cours. C’est un sujet large mais, j’en suis persuadé, à la mesure du talent de nos deux rapporteurs, MM. François Cornut-Gentille pour la majorité et Christian Eckert pour l’opposition. Au reste, ceux-ci sont assistés par douze de nos collègues, désignés par six commissions, soit toutes moins celles des affaires étrangères et des affaires culturelles.

M. Christian Eckert, rapporteur. Le sujet est vaste en effet, comme vous avez pu le constater à la lecture de la note d’étape que nous vous avons fait tenir. Je voudrais avant tout remercier tous ceux qui ont collaboré à nos travaux, en particulier les services du CEC, qui ont toujours fait preuve d’une grande disponibilité.

Nous nous sommes d’abord efforcés de cerner les contours de la RGPP : il s’agit d’un ensemble de mesures visant à rendre plus efficace l’action de l’État, mais, à ce premier objectif, le Gouvernement en a associé un second, consistant à réduire les dépenses de ce même État. D’autre part, la RGPP est aussi une méthode gouvernant l’élaboration et l’application de ces mesures.

Elle en englobe désormais 522 : 361 en cours d’exécution, 124 considérées comme exécutées et 37 mesures nouvelles. Étant donné l’ampleur de la réforme, il serait illusoire de prétendre balayer l’ensemble des thématiques, et c’est pourquoi nous avons fait le choix de concentrer notre étude sur certaines.

Le dispositif de la réforme est complexe, du fait non seulement de l’hétérogénéité de ces mesures, mais également de la difficulté d’évaluer la réalisation des objectifs. Les chiffres dont nous disposons à cet effet proviennent de sources diverses – Cour des comptes, ministère des Finances et autres ministères, dont la direction générale de la modernisation de l’État – et ne se recoupent pas toujours.

En principe, la RGPP est évaluée selon un système simple de feux tricolores : le feu vert signifie que « la réforme progresse au rythme prévu » ; le feu orange qu’elle « satisfait la plupart des exigences mais nécessite des actions correctrices » et le feu rouge qu’elle « connaît un retard important et doit faire l’objet d’actions correctrices à mettre en œuvre rapidement. » On peut s’interroger sur la pertinence de ce système d’évaluation, d’autant que les objectifs ne sont pas toujours précisément définis.

Certaines mesures, telles que la réforme de la carte judiciaire, la fusion des réseaux des directions générales des impôts et de la comptabilité publique ou la création des agences régionales de santé, sont particulièrement emblématiques. D’autres, bien que substantielles, ont moins retenu l’attention : je pense notamment à la réorganisation de notre réseau diplomatique et consulaire, à la réforme du 1 % logement, ou encore à la réorganisation des modalités de délivrance des titres officiels. D’autres enfin, encore moins connues, relèvent de l’organisation ou de la gestion administratives de l’État.

Bien souvent, l’objectif de réduction des crédits ou des effectifs semble avoir pris le pas sur toute autre considération, ce qui a conduit à la réduction, voire à l’abandon plus ou moins assumé de certaines missions de l’État plutôt qu’à un réexamen des politiques publiques. Il eût été préférable de dire d’emblée quelles étaient les missions que l’État n’entendait plus remplir. On mesure seulement maintenant les conséquences sur le terrain de l’abandon, au demeurant assumé, par les directions départementales de l’équipement de la mission d’ingénierie territoriale qu’ils assumaient jusqu’alors.

Quant aux objectifs d’économies budgétaires escomptées de la RGPP, les chiffres que vous trouverez dans la note d’étape sont ceux du Gouvernement, mais en réalité il est extrêmement difficile d’y voir clair. On doit ainsi distinguer entre coûts bruts et coûts nets, notamment s’agissant de l’évaluation de la fameuse règle de non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, sur laquelle je voudrais m’arrêter un instant. Si cette règle d’« un sur deux » ne constitue pas à proprement parler une mesure de la RGPP, puisqu’il s’agit d’une décision politique arrêtée antérieurement, elle est un élément substantiel du contexte de mise en œuvre de la réforme. Or son application systématique dans l’éducation nationale, par exemple, a été probablement au moins partiellement compensée par une augmentation du nombre des heures supplémentaires. Dans ces conditions, il est très difficile d’évaluer le montant des économies effectivement réalisées. La Cour des comptes l’a estimé en 2009 à cent millions d’euros, alors que le Gouvernement avance le chiffre de 500 millions d’euros !

L’évaluation doit également porter sur la méthode d’élaboration des mesures, qui a varié au fil du temps. Dans sa première phase, la réforme s’est souvent inspirée d’audits réalisés par des sociétés privées, au détriment peut-être de la prise en compte de considérations qualitatives. Cependant, dès l’origine, la RGPP s’est appuyée aussi sur toute une organisation politique et administrative : le Conseil de modernisation des politiques publiques, le CMPP, qui prend les décisions et s’est réuni cinq fois depuis 2007 ; un comité de suivi, qui s’est réuni, lui, à soixante-quinze reprises pour préparer les décisions du CMPP en amont, et une équipe d’appui entretenant des contacts fréquents et réguliers avec les secrétaires généraux des ministères – que nous avons nous-mêmes commencé d’entendre.

Il semble que, dans une deuxième phase, les administrations centrales de certains ministères se soient approprié la méthode, au point de formuler aujourd’hui des propositions que l’on peut donc qualifier d’« endogènes ». On ne peut que regretter en revanche que le Parlement soit insuffisamment associé à ce dispositif, eu égard aux conséquences de la réforme pour les missions de service public, ainsi qu’à ses incidences financières.

Nous envisageons de recueillir les avis des représentants syndicaux des agents publics concernés par cette deuxième phase de la réforme, dont vous n’ignorez pas qu’elle a suscité chez eux beaucoup d’interrogations, comme le montre le baromètre Acteurs publics du 29 avril 2011. Pour ma part, et à la différence de M. Cornut-Gentille, je doute que l’objectif initial de « faire mieux avec moins » ait été atteint. Je crains même qu’il ne soit remplacé par un mot d’ordre qui consiste à « faire moins », et que l’application de la RGGP n’ait ainsi nui à l’exécution des missions de service public, quand elle n’aura pas mis en péril l’existence même de certaines.

M. François Cornut-Gentille, rapporteur. Je me félicite de l’excellente entente qui a marqué notre collaboration à tous deux, en dépit de nos différences d’appréciation.

On ne peut pas dresser un bilan de la RGPP sans avoir au préalable délimité ses contours, ce qui ne va pas sans difficulté. En effet, la RGPP n’est pas seulement un ensemble de mesures strictement définies : elle est aussi ce que chaque ministère fait d’elles. Or, suivant qu’on considère la RGPP stricto sensu ou qu’on évalue la réforme de l’État au sens le plus large, les résultats ne seront évidemment pas les mêmes. Ces deux approches sont également légitimes pourvu seulement qu’on dise de quoi on parle, mais, alors qu’on ne peut nier la réalité des économies réalisées si on se limite aux mesures RGPP stricto sensu, le compte n’y est plus si on prend en compte d’autres mesures, notamment catégorielles.

On peut aussi avoir une vision rigide de la réforme comme un ensemble de mesures contraignantes, ou la considérer de façon dynamique, ces mesures prenant un sens nouveau à mesure que les ministères se les approprient – ce que certains considèrent comme une malheureuse imprévision devient alors pour d’autres une souplesse féconde. Cette évolution, particulièrement frappante à l’éducation nationale, est perceptible aussi au ministère de l’Intérieur.

Il faut également souligner que le contrôle, qu’il s’agisse de celui de la Cour des comptes ou de celui du Parlement, peut aboutir à des résultats très variables selon le moment auquel il s’exerce. Il est normal que des administrations qui n’ont pas bougé pendant des années tâtonnent au moment où les règles changent : c’est ce qui explique la sévérité du premier bilan, dressé par la Cour des comptes, de la création des bases de défense. La nécessité du contrôle n’est cependant pas contestable, d’autant qu’il permet parfois aux services d’élaborer, sous la pression de la RGPP, des solutions tout à fait neuves.

Au bénéfice de ces quelques remarques, nous vous proposons deux axes de travail.

Nous souhaitons d’abord établir un bilan global de la réforme afin de jeter les bases d’un débat politique sain, où chacun sait de quoi on parle, ce qui n’est pas encore le cas aujourd’hui. Nous avons dans ce but adressé un questionnaire très complet à Bercy, qui, il est vrai, tarde un peu à nous répondre. Nous confronterons ces réponses avec les chiffres recueillis auprès des autres ministères.

Deuxièmement, nous compléterons cette approche globale et quantitative par l’étude de thèmes spécifiques, nous limitant à deux, afin de ne pas « doublonner » avec d’autres travaux parlementaires. Le premier sera la mise en œuvre de la RGPP dans l’Éducation nationale. La réussite de la réforme dans ce ministère est en effet un enjeu majeur, tant sur le plan quantitatif puisqu’il s’agit du premier employeur public, que qualitatif, étant donné son importance pour l’avenir de notre pays. Nous sommes donc décidés à mener une enquête approfondie auprès des rectorats et sur le terrain, le CEC ayant en principe les moyens de conduire une telle investigation sans recourir à des prestataires externes.

Notre seconde étude thématique portera sur la réforme des modalités de demande, de retrait et de production de certains titres officiels. Cette étude, beaucoup plus « basique », nous permettra d’analyser les modalités les plus concrètes des relations entre l’État et les citoyens. Les rapporteurs demandent au CEC l’autorisation de la mener avec l’aide de prestataires externes, en s’appuyant sur l’accord-cadre mis en place à cet effet.

M. René Dosière. Les rapporteurs ont raison de distinguer nettement les économies affichées et celles qui ont été effectivement réalisées : comme dans la défunte URSS, les prévisions valent trop souvent réalisations pour le Gouvernement !

J’approuve également votre projet, mes chers collègues, de consacrer une étude thématique à l’Éducation nationale. J’ai en effet le sentiment que le dogme de la diminution des effectifs s’y concilie fort mal avec la mise en place du système Chorus, et je vous recommande donc de vous rendre sur le terrain, et notamment dans les inspections d’académie, pour mesurer les difficultés provoquées par cet entrechoquement. J’ai moi-même, dans l’Aisne, pu m’en faire une idée qui suscite l’interrogation.

Je terminerai par une question qui est de l’ordre du détail : est-il exact que les ambassades se font rembourser par l’Assemblée nationale les frais qu’elles ont engagés pour traiter les parlementaires en mission à l’étranger ?

M. le Président Bernard Accoyer. Je peux vous rassurer sur ce point, monsieur Dosière : à ma connaissance, ce n’est pas le cas !

M. Jean Mallot. Ces deux études thématiques nous permettront de mesurer la distance entre les objectifs affichés de la RGPP et la situation sur le terrain. En effet, si on ne peut qu’être favorable à une amélioration du service public, je crains que cet objectif n’ait cédé la priorité à celui qui consiste à réduire les dépenses : il suffit pour s’en convaincre de voir l’état de désorganisation des services de l’État dans les départements et les régions. Je constate par ailleurs, monsieur le Président, que pour ce sujet comme pour d’autres, une fois encore, des rapporteurs parlementaires ont des difficultés à obtenir des réponses de Bercy.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des Affaires sociales. Ce premier bilan mitigé m’inspire trois questions.

Aux yeux des administrations locales, la RGPP reste trop centralisée, au détriment des structures de terrain. Ainsi, si la création d’agences régionales de santé est une excellente initiative, beaucoup d’entre elles se plaignent d’être totalement sous l’emprise de l’administration centrale et de ne jouir d’aucune autonomie. Qu’en est-il ?

Deuxièmement, je déplore comme M. Eckert l’abandon par les services de la DDE de leur mission d’ingénierie publique, qui était particulièrement utile aux communes dépourvues de personnels qualifiés dans les domaines de l’urbanisme ou de l’environnement. Ces services n’ont-ils pas aujourd’hui tendance à se transformer en contrôleurs excessivement tatillons du respect de la réglementation, au point d’empêcher de faire au lieu de faire ?

Ma troisième question concerne l’Éducation nationale. Ne doit-on pas exclure la maternelle et le premier degré de l’effort, légitime, de réduction des effectifs de ce ministère pour le concentrer sur le secondaire ? En effet, le coût de la scolarisation d’un enfant dans le premier degré français est dans la moyenne européenne, alors que celui d’un élève de notre secondaire est 15 à 20 % plus élevé du fait du grand nombre d’heures d’enseignement ! On connaît en outre le rôle crucial de la maternelle et du premier degré dans la réduction des inégalités.

M. Jean-Jacques Urvoas. Même si, au ministère de l’intérieur, la RGPP a permis une réduction des effectifs, il n’en résulte aucune économie, la masse salariale ayant augmenté du fait de mesures catégorielles. Il semblerait d’autre part que la réorganisation de l’administration territoriale de l’État, la REATE, a surtout concerné les sous-préfectures, peut-être aussi les préfectures, mais beaucoup moins les services centraux, dont les effectifs n’ont pas décru. Quant à la préfecture de police de Paris, elle semble avoir été totalement épargnée par les réductions d’effectifs. Nous vous saurions donc gré si vous pouviez faire la lumière sur tous ces points à l’issue de vos travaux.

M. Christian Eckert, rapporteur. En raison de leur hétérogénéité, les mesures de la RGPP se laissent malaisément évaluer par le système des feux tricolores : s’il peut convenir à celle qui consiste à « installer un directeur chargé de coordonner les projets informatiques de l’État », sur quels critères attribuer un feu vert, orange ou rouge à celle qui est libellée « améliorer la disponibilité de la ressource enseignante » ?

Du point de vue budgétaire, les économies obtenues de la réduction du nombre d’équivalents temps plein seront appréciées de façon très variable selon que l’on tient ou non compte de l’incidence des mesures catégorielles – qui ne sont pas toujours elles-mêmes clairement identifiables – et des heures supplémentaires, ou selon que l’on considère les coûts bruts ou les coûts nets : certains évaluent l’économie tirée de la suppression d’un poste de fonctionnaire en y intégrant le montant de la pension de retraite qui ne sera pas versée de ce fait.

S’il est très difficile de savoir comment la règle du « un sur deux » a été appliquée en fonction des catégories de fonctionnaires, il semble qu’elle ait surtout affecté le recrutement des agents de catégorie C, donc surtout les services déconcentrés.

En ce qui concerne l’Éducation nationale, le Gouvernement semble avoir envisagé des mesures assez radicales, telles que la fin de la scolarisation des enfants de deux ans, avant de reculer par crainte des conséquences politiques.

Il est vrai que certains services d’ingénierie de l’État dans les régions n’exercent plus qu’une fonction de contrôle et ont perdu leur fonction de soutien aux collectivités locales, dont les plus fragiles se retrouvent complètement démunies.

M. François Cornut-Gentille, rapporteur. Je connais bien le logiciel Chorus pour avoir, avec Bernard Cazeneuve, suivi sa mise en place au ministère de la Défense : j’ai pu constater qu’après six ou huit mois d’affolement général, les personnels parvenaient à s’adapter et à le faire fonctionner. Il semble que ce soit le prix du changement, quand des administrations sont confrontées à des réformes aussi radicales, et cela confirme que le choix du moment auquel effectuer le contrôle est crucial. J’ai été choqué en revanche de l’absence d’accompagnement de personnels confrontés à des mutations aussi traumatisantes.

L’absence de réduction des effectifs des « états-majors » des ministères est un vrai problème, d’autant que l’objectif de la réforme était à l’inverse de limiter les effectifs des administrations centrales et d’accroître le nombre d’agents sur le terrain. C’est que la réforme est gérée par les structures centrales, qui se protègent et résistent au changement. Dans de tels cas, les contrôles sont particulièrement utiles.

M. Serge Poignant, président de la commission des Affaires économiques. Vous avez donné, monsieur Eckert, une première évaluation de la réduction des effectifs selon les différentes catégories de fonctionnaires, s’agissant de la RÉATE. Pouvez-vous fournir des chiffres selon les fonctions précédemment exercées ?

M. Christian Eckert, rapporteur. Nous nous sommes posé la question mais comme elle fait déjà l’objet de travaux de nos collègues du Sénat, nous avons voulu éviter de « doublonner » ces études.

M. François Cornut-Gentille, rapporteur. Je demande, monsieur le Président, que, compte tenu de l’ampleur de la tâche, le Comité nous autorise à repousser le terme de notre mission.

Le Comité valide la démarche présentée par ses rapporteurs ainsi que leur demande d’étude sur l’évaluation des mesures de transfert de l’émission de certains titres d’identité, issue de la RGPP. Cette demande sera transmise aux questeurs pour engager une consultation des entreprises retenues pour l’accord-cadre mis en place pour le CEC.

Le Comité prend également acte que l’ampleur de la mission confiée aux rapporteurs justifie que son terme soit repoussé en tant que de besoin.

RÉUNION DU CEC DU 1er DÉCEMBRE 2011 :
EXAMEN DU PROJET DE RAPPORT D’INFORMATION

M. le Président Bernard Accoyer. L’ordre du jour appelle la présentation du rapport sur l’évaluation de la Révision générale des politiques publiques, dite « RGPP ». Je rappelle que ce sujet a été inscrit au programme des travaux du Comité d’évaluation et de contrôle (CEC) au titre du droit de tirage annuel du groupe SRC.

Il s’agit d’un sujet d’actualité : le Conseil économique, social et environnemental et la Cour des comptes se sont récemment saisis de la question de la RGPP, qui a ainsi été évoquée lors du colloque sur le bilan de dix années de mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) récemment organisé à l’Hôtel de Lassay. En outre, les commissions permanentes des deux assemblées ont multiplié les travaux sur ce thème.

Nos deux rapporteurs, François Cornut-Gentille et Christian Eckert, ont été pour l’occasion assistés par un groupe de travail particulièrement nombreux, ce qui atteste du caractère totalement transversal du sujet, au cœur des attributions du CEC.

Le projet de rapport vous a été transmis au début de la semaine. Il est complété par une étude réalisée à la demande des rapporteurs, qui porte sur les nouvelles modalités de délivrance respectivement du passeport – dans les locaux des communes équipées – et du certificat d’immatriculation des véhicules (CIV), c’est-à-dire l’ex-« carte grise », parfois chez les professionnels de l’automobile. L’étude a été réalisée par le cabinet Ernst & Young, sur appel d’offres, au titre de l’accord-cadre dont bénéficie le CEC.

Avant de donner la parole à nos rapporteurs, je souhaite évoquer les informations parues dans la presse hier. Ces fuites sont d’autant plus regrettables que le Comité a pour mission d’autoriser ou non la publication du rapport. Ce manque de respect des règles résulte probablement d’une forte pression médiatique, mais il conviendrait qu’à l’avenir, cela ne se reproduise pas.

M. François Cornut-Gentille, rapporteur. En ce qui concerne notre méthode de travail, je me permets d’ajouter, monsieur le Président, – outre l’étude que vous avez évoquée sur le passeport et le CIV – que nous avons interrogé tous les rectorats au titre des mesures mises en œuvre au sein de l’Éducation nationale.

Nous avons au total procédé à de très nombreuses auditions, notamment des responsables de la direction du budget et de la direction générale de la modernisation de l’État (DGME). Nous avons également auditionné beaucoup des secrétaires généraux des ministères, et nous avons organisé une table ronde avec les représentants des organisations syndicales. Les auditions ont été complétées par des questionnaires écrits.

S’agissant des « fuites » dans les médias, je rappelle que le Gouvernement a fait mardi une communication sur la RGPP, à la suite de laquelle nous avons été fortement sollicités par la presse. Nous n’avons pas communiqué le rapport ici soumis au CEC ; nous avons répondu à des questions et transmis quelques tableaux et autres éléments d’information. Ensuite, les journalistes ont fait leur travail et certains on jugé opportun d’évoquer le rapport. Ce qui s’est passé semblait difficilement évitable compte tenu de l’actualité. Christian Eckert et moi avons tous deux cherché à en limiter les conséquences.

Notre rapport comporte trois parties : la première porte sur la méthode de la RGPP, la deuxième décrit les mesures prises, la troisième en étudie les impacts financiers.

La première partie est essentiellement factuelle. Nous y retraçons les différentes étapes de la RGPP, depuis ses prémices que sont les audits de modernisation commandés par Jean-François Copé lorsqu’il était ministre du Budget. Les choses se sont ensuite accélérées, notamment avec la mise en place, dès le début de l’été 2007, des « équipes mixtes d’audit », auxquelles ont participé des membres des corps d’inspection et des auditeurs de cabinets privés ; leurs travaux ont nourri les débats et les décisions du Conseil de modernisation des politiques publiques (CMPP), présidé par le Président de la République. Ce processus, portant sur des questions essentiellement techniques, a été conduit sans consultations, ni des usagers ni des agents, et sans y associer le Parlement – reconnaissons qu’il n’a pas beaucoup cherché à l’être.

La mise en œuvre des décisions prises s’est faite par le haut. Les comités de suivi de la RGPP coprésidés par le secrétaire général de l’Élysée et par le directeur de cabinet du Premier ministre, se sont réunis très régulièrement, ce qui a permis d’assurer l’efficacité du dispositif. Les états-majors des ministères ont été fortement mobilisés. La DGME a d’abord vérifié l’implication des ministères, puis a joué un rôle d’accompagnement et de conseil, tout en commençant – de son côté – à prendre en compte les attentes des usagers. Au demeurant, la qualité discutable de l’information publique sur la RGPP a eu pour origine des modalités de communication elles aussi discutables ; le suivi technique par la DGME des mesures mises en œuvre par les ministères a eu lieu.

Avant de céder la parole à Christian Eckert pour présenter les deux autres parties du rapport, je souhaiterais faire quelques commentaires personnels.

Tout d’abord, la RGPP marque indéniablement un tournant : on va vers plus de réactivité et d’efficacité des services de l’État. Il y avait bien eu auparavant des tentatives pour faire bouger les choses, mais elles avaient été parcellaires ; on trouvait toujours de bonnes raisons pour repousser les réformes. La RGPP, c’est 517 mesures faisant participer tous les ministères : c’est inédit ! On peut débattre sur un certain nombre de points, mais il est indéniable qu’une dynamique impliquant tous les ministère a été enclenchée.

Un secrétaire général a été nommé dans chaque ministère. Les auditions l’ont montré, on est passé, en l’espèce, d’une fonction essentiellement administrative, dans un contexte de directions extrêmement cloisonnées, à un rôle de pilotage opérationnel de l’ensemble de la gestion du ministère. Cela me semble un acquis important de la RGPP, bien qu’il ne soit pas quantifiable.

Comme je l’ai dit, beaucoup de réformes restaient dans les cartons des ministères. Le principe du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite – le « un sur deux » – et l’impératif de recherche d’économies ont joué un rôle moteur, dans la mesure où ils ont mis fin aux atermoiements et ont enclenché une dynamique de réforme, notamment dans le domaine de l’administration de l’administration, si l’on peut dire, c’est-à-dire les fonctions de support. On a réellement réussi, en la matière, à « faire plus avec moins ».

Quant au débat sur le bilan budgétaire de la RGPP, il peut se poursuivre indéfiniment ; tout dépend du périmètre et de la durée considérés. Intègre-t-on l’ensemble des réformes porté par un ministère ou s’en tient-on strictement aux mesures proprement dites de la RGPP ? Considère-t-on les économies brutes ou intègre-t-on a posteriori les mesures catégorielles ? Mesure-t-on les économies réalisées entre 2008 et 2010 ou entre 2009 et 2013 ? Tous les éclairages sont possibles, et il paraît hors de portée de se mettre d’accord sur un seul « bon » chiffre. Les données communiquées par le Gouvernement, qui se fondent sur la période 2009-2013, sont, de fait, des projections.

Il est en revanche un fait acquis : grâce au « un sur deux », la RGPP a permis de maîtriser et de commencer à rectifier la trajectoire de la masse salariale de l’État. Pour la première fois, on note dans le projet de loi de finances pour 2012 une inversion de la tendance haussière antérieure.

Il serait par ailleurs dommage de se focaliser sur une querelle de chiffres – qui, par nature, sont discutables –, quand le vrai acquis de la RGPP est l’évolution en profondeur des administrations et la révolution culturelle qu’elle a permise. Les auditions des secrétaires généraux des ministères l’ont confirmé : pendant les dix-huit premiers mois de la RGPP, les décisions ont été imposées, de manière quelque peu coercitive, par le haut ; puis les ministères sont devenus des forces de proposition. Les réorganisations n’ont plus été subies, mais mises en œuvre par les ministères eux-mêmes. C’est inédit.

Par ailleurs, on a procédé à un changement considérable dans la gestion administrative de l’État sans que cela donne lieu à des mouvements sociaux d’envergure, ce qui montre que ce processus a été relativement bien accepté par les agents via peut-être le retour catégoriel. Au début, les choses se sont faites par la voie hiérarchique, mais, en fin de parcours, dans nombre de secteurs, y compris l’Éducation nationale, on a commencé à travailler autrement, sans doute de façon plus collégiale dans les états-majors administratifs déconcentrés.

Enfin, la table ronde avec les syndicats a certes donné lieu à des propos peu aimables à l’égard de la RGPP, mais bien des participants reconnaissent la nécessité de moderniser l’État. Je ne suis pas sûr qu’un tel consensus existait en 2007 ou en 2008. Certains syndicats nous ont même indiqué qu’ils n’étaient pas fermés à une forme de statut unique de la fonction publique permettant de passer d’un ministère à l’autre ou de la fonction publique de l’État aux fonctions publiques territoriale ou hospitalière.

Tel est le paradoxe de la RGPP : le mot est dénigré, mais, grâce à elle, la fonction publique est désormais en marche, capable de se livrer à une réflexion sur ses missions, tant au niveaux interministériel que territorial, et prête à une modernisation encore plus poussée. Selon moi, la RGPP était une étape indispensable de ce processus.

M. Christian Eckert, rapporteur. Avant de présenter les deux autres parties du rapport, je tiens à souligner que la collaboration des deux co-rapporteurs a été excellente, sur un sujet qui aurait pu être clivant. Nous avons travaillé en commun et, hormis sur un point ou deux, nous sommes parvenus à une rédaction commune – même si cela n’a pas toujours été sans difficulté.

Je voudrais en outre remercier l’ensemble des services qui ont travaillé, pendant plus d’un an, sur ce dossier, pour lequel nous avons procédé à de nombreuses auditions. Un grand merci donc au secrétariat du CEC, ainsi qu’à nos deux assistants.

J’en viens maintenant à la deuxième partie du rapport, qui présente les mesures de la RGPP. Notre principal constat, c’est que la RGPP n’a pas conduit à une revue et à une réflexion, d’ensemble et de détail, sur l’opportunité des missions de l’État. Les mesures qui modifient le périmètre des missions sont peu nombreuses ; la suppression de l’ingénierie concurrentielle en constitue l’un des rares exemples. Quelques autres mesures ont modifié l’ampleur de certaines interventions de l’État, en matière d’aides agricoles, d’aides aux entreprises ou de dépenses fiscales ; cela reste marginal.

En revanche, la RGPP a constitué une mise en œuvre du « faire mieux avec moins ». Beaucoup de fonctions support des ministères et des opérateurs de l’État, ainsi que certaines fonctions métier, ont été réformées ou sont en voie de l’être. Plusieurs mesures ont consisté à optimiser, rationaliser, mutualiser, fusionner, moderniser ces fonctions. En la matière, force est de constater que l’adossement de la RGPP à une baisse des moyens a contraint à des choix rapides, parfois discutables en termes d’efficience.

De nombreux acteurs s’interrogent sur la possibilité de poursuivre, à missions de l’État quasi inchangées, un processus de réforme qui conduit à supprimer des effectifs par l’intermédiaire de réorganisations administratives. Beaucoup ont souligné que cela menait d’ores et déjà à l’abandon de certaines missions sur le terrain, à charge parfois pour l’encadrement déconcentré de définir celles qui devaient rester prioritaires pour l’État. Certains ministères, notamment celui de l’Éducation nationale, se montrent sceptiques quant à leur capacité à court terme à poursuivre ce processus ; un grand nombre de rectorats nous ont notamment fait part de leurs inquiétudes.

Enfin, l’objectif d’amélioration de la qualité du service rendu, même s’il a été renforcé depuis 2010, a été au moins initialement secondaire. Des méthodes de mesure de la satisfaction des usagers ont été élaborées, mais il reste à faire en la matière.

Nous considérons que le « faire mieux avec moins » a sans doute atteint ses limites et qu’il serait opportun de stabiliser les nouvelles organisations administratives issues de la RGPP, de manière à s’assurer un temps d’analyse et d’évaluation.

S’agissant de l’étude réalisée par Ernst & Young sur les modalités de délivrance des passeports et des certifications d’immatriculation des véhicules (CIV), elle aboutit à la conclusion qu’il y a eu initialement des difficultés de mise en œuvre, mais qu’aujourd’hui les choses fonctionnent. Le bilan financier global est toutefois plus contrasté. On constate certes des gains d’efficience dans les préfectures, notamment pour ce qui concerne la délivrance du passeport biométrique, mais ceux-ci ne viennent que partiellement compenser les charges nouvelles supportées par l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) pour réaliser le déploiement du passeport biométrique et du CIV, charges qui sont largement financées par l’usager, via notamment l’augmentation des droits de timbre. L’étude recommande également de renforcer la lutte contre la fraude, notamment en matière de délivrance des CIV.

J’en viens à la partie concernant les impacts financiers de la RGPP. Malgré tous nos efforts, le bilan budgétaire de la RGPP reste une énigme. Certaines informations furent particulièrement difficiles à obtenir ; nous avons par ailleurs constaté des différences notables entre les chiffres avancés par Bercy et ceux communiqués directement par les ministères. S’agissant des dépenses de personnel, il convient de souligner les différences de traitement d’une catégorie de fonctionnaires à l’autre en matière de « un sur deux » : les suppressions de postes ont davantage concerné les personnels de catégorie C que ceux des catégories A et B, ce qui a probablement contribué à renforcer la mauvaise perception de la RGPP par les usagers, qui sont, sur le terrain, plus souvent en contact avec des agents de catégorie C.

S’agissant du retour catégoriel, nous avons constaté de fortes inégalités entre les ministères. Globalement, il est affiché à 50 % du montant des économies brutes issues de la baisse des effectifs. Il est probable que l’on a inclus dans le retour catégoriel des mesures qui avaient été décidées avant la mise en œuvre de la RGPP et que l’on a financées par cette voie.

S’agissant de l’Éducation nationale, le non-remplacement d’un enseignant sur deux a été partiellement compensé par l’augmentation considérable du nombre des heures supplémentaires effectuées : en moyenne, environ une demi-heure supplémentaire par enseignant dans le second degré. Or – c’est le sujet sur lequel il existe une divergence entre nous –, le coût de ces heures supplémentaires est très élevé, en raison de la majoration de salaire et de la défiscalisation auxquelles elles ouvrent droit. Notons à ce propos que la dépense fiscale est rarement intégrée dans le calcul des économies, brutes ou nettes, réalisées grâce au « un sur deux ».

Globalement, le problème, c’est que le Gouvernement a décidé d’évaluer a priori l’économie dégagée par la RGPP à 15 milliards d’euros sur 2009-2013. Tout est fait ensuite pour justifier ce montant, y compris en incluant désormais dans le périmètre la RGPP un certain nombre de mesures qui, initialement, n’y étaient pas.

Aujourd’hui, la pratique budgétaire est de s’engager par des lois de financement pluriannuelles. Son effet pervers, c’est que, lorsque le périmètre d’une politique est flou - c’est le cas de la RGPP –, la tentation est forte de le modifier pour atteindre les objectifs affichés en matière d’économie.

Quelles sont nos recommandations ?

D’abord, le suivi budgétaire de la réforme de l’État doit s’appuyer sur une mesure méthodique de l’efficience de chacune des mesures mises en œuvre.

Ensuite, le suivi budgétaire global doit tenir compte de la dépense fiscale.

Enfin, il n’est pas opportun de comptabiliser au titre des économies issues de la RGPP un certain nombre de gains en intervention, qui relèvent davantage de choix politiques ponctuels.

Je considère que sur ces questions – comme sur les autres – notre rapport est demeuré plutôt factuel et s’est essentiellement appuyé sur des analyses et des auditions.

Je terminerai moi aussi par quelques réflexions personnelles.

Le point qui me paraît essentiel, c’est que toute réforme de l’État doit procéder d’une réflexion sur les missions de l’État et sur la manière dont il doit les exercer. Doit-il utiliser ses moyens propres, transférer certaines missions aux collectivités territoriales, les faire exercer par des opérateurs publics ou les externaliser ? Toutes les solutions sont possibles, à condition que l’on ait mené une analyse préalable et que l’on ait pris une décision politique.

Pour prendre un exemple polémique, lorsque nous avons auditionné le secrétaire général du ministère de la Défense, celui-ci nous a annoncé qu’un partenariat public-privé (PPP) allait être signé pour le regroupement des services parisiens du ministère à Balard et qu’en termes de gestion, cela ne coûterait pas plus cher qu’avant. Lorsque nous lui avons demandé si l’on avait comparé le coût d’un PPP avec celui d’une procédure traditionnelle, avec maîtrise d’ouvrage par l’État, sa réponse fut négative : la commande était de faire un PPP.

On voit là les limites d’un exercice décisionnel ex abrupto et la nécessité d’une réflexion préalable aux décisions. On me rétorquera que, dans ces conditions, on ne ferait jamais rien, et qu’une telle opération permet de mettre l’administration « sous tension ». Certes, mais gare au court-circuit ! On a l’impression que, dans bien des domaines, notamment pour les missions de l’État qui sont territorialisées, la RGPP a conduit à de tels courts-circuits, par absence d’examen des choix possibles en amont de la décision politique.

Quoi qu’il en soit, il me semble sain d’ouvrir un débat sur le sujet, à la veille d’échéances électorales qui nous amèneront à discuter du rôle de l’État et des moyens d’exercice de ses missions. Nous apportons notre contribution sous la forme de ce rapport, auquel nous proposons de donner un titre simple, correspondant à son plan : « Une évaluation de la RGPP : méthode, contenus, impacts financiers ».

M. Jean Mallot. Je remercie et je félicite les deux rapporteurs de ce travail considérable sur un sujet qui ne l’est pas moins. Ces explications et cette évaluation sont indispensables à l’exercice de notre pouvoir de contrôle et d’évaluation, mais aussi de notre mission de législateur. Vous vous êtes, mes chers collègues, particulièrement concentrés sur deux domaines en particulier, ce qui est bien compréhensible sur un sujet d’une telle ampleur. Nous pourrons en tirer des leçons pour redresser la barre, ce qui est manifestement nécessaire. Sur l’essentiel, vous posez le même diagnostic – bien que vous ayez eu l’honnêteté d’expliciter ici vos divergences, et de préciser dans le rapport vos points de vue respectifs sur un constat. Ce diagnostic partagé devra fonder nos réflexions à venir. Il faudra en effet, plus encore qu’à d’autres, donner une suite à ce rapport qui intéresse toutes les commissions et pourra nourrir la discussion budgétaire, même s’il est un peu tard pour cela cette année.

Quant au fond, le rapport confirme que la RGPP est venue d’en haut, dominée par une vision budgétaire et comptable telle que le « faire mieux avec moins » est vite devenu « faire – tant bien que mal – avec moins ». D’ordinaire, réformer les outils des politiques publiques demande du temps, et ceux qui conduisent les réformes ne sont pas toujours ceux qui en voient les conséquences. Ici, on a privilégié le court terme parce qu’on a voulu obtenir des résultats très vite, non sans faire preuve de cécité, comme en témoigne l’application du « un sur deux ». Sur le terrain, les administrations déconcentrées sont affaiblies : restructurées certes, mais de manière illisible, y compris pour les agents qui y travaillent, sans parler du public. L’administration de l’équipement en fournit un exemple patent.

Même si le bilan budgétaire de la RGPP reste « énigmatique » – pour reprendre les termes du rapport –, les éléments dont nous disposons ici suffisent à nourrir le débat et contribuent à nous indiquer comment remettre la RGPP sur ses pieds. Les deux rapporteurs l’ont dit, chacun à sa manière : le service public devant répondre aux besoins, c’est des besoins que nous devons partir et c’est pour les satisfaire que nous devons rendre les outils du service public plus efficients, cela dût-il être long, douloureux et parfois décevant.

M. Pierre Méhaignerie, président de la Commission des affaires sociales. Les faiblesses de la RGPP m’évoquent celles du Parlement. Nous sommes peu nombreux à écouter ici les débats ; nous faisons des propositions de loi sans cesse mais nous nous intéressons moins à la mission parlementaire d’évaluation. Les travaux du CEC ne passionnent pas suffisamment les présidents de commission. Combien de personnes liront le rapport, qui est une mine d’informations ?

M. le Président Bernard Accoyer. Vous avez tout à fait raison.

M. Pierre Méhaignerie, président de la Commission des affaires sociales. Quant à la RGPP, l’idée était bonne, elle a permis de mettre des mécanismes en marche ; mais ses faiblesses sont grandes, du point de vue des agents, pour qui tout est venu d’en haut, comme des élus locaux, qui sont complètement perdus face à des structures nouvelles où l’on ne comprend pas qui fait quoi. Et qu’en est-il des questions que nous avons posées à l’origine du dispositif et que vient de reprendre Christian Eckert : telle ou telle mission est-elle accomplie par l’État ? À quel coût ? Pourrait-elle être assumée par d’autres administrations ou par le secteur privé, au vu des expériences internationales ?

Dans certaines administrations, le progrès est perceptible. Ainsi de la réunion des services fiscaux et de la trésorerie, qui forment désormais une unité et ont pu être regroupés physiquement. En revanche, dans bien d’autres domaines, généralement plus techniques, c’est encore très désorganisé ! On peut citer l’exemple de la fusion des directions départementales de l’équipement et des directions départementales de l’agriculture et de la forêt. Je partage donc le jugement mesuré des rapporteurs et m’interroge : « peut-on infléchir la démarche ? que corriger ? »

M. Pascal Brindeau. Je remercie à mon tour les deux rapporteurs de ce travail utile à long terme – sinon à court terme, notamment peut-être pour les débats budgétaires en cours.

Vos commentaires personnels témoignent d’une forme de complémentarité. Selon François Cornut-Gentille, la RGPP a pour principal mérite d’avoir donné l’impulsion du changement à un domaine caractérisé par un certain conservatisme. Quant à Christian Eckert, il a insisté, comme Pierre Méhaignerie après lui, sur la nécessité de donner un sens à la RGPP afin que celle-ci, mieux comprise de nos concitoyens et des agents, devienne plus efficace. Dans les réflexions qui prolongeront ce rapport, nous devrions distinguer l’aspect financier de la dimension structurelle et opérationnelle des réformes. Le gain financier n’est sans doute pas l’intérêt essentiel de ce processus un peu rude et ne devrait pas être l’objectif principal des décideurs publics que nous sommes.

M. Daniel Goldberg. Les rapports du CEC, que j’ai rejoint après sa création, sont excellents, plus encore sans doute que ceux des autres commissions ; plus volumineux, ils traitent de sujets transversaux, irréductibles aux clivages partisans. Comment exercer notre mission d’évaluation de la manière la plus efficiente possible ? Il faudra y réfléchir lors de la prochaine législature. La contribution de la Cour des comptes à notre travail d’évaluation, par exemple sur la médecine scolaire, pourrait nous fournir une piste pour améliorer notre pratique. Le Président Accoyer avait envisagé ici que le CEC étudie prochainement les travaux d’évaluation à l’Assemblée nationale, et leurs suites. De fait, pourquoi nombre de nos rapports, pourtant très intéressants, connaissent-ils une destinée si éphémère ?

L’efficience de la dépense publique est essentielle dans une période où l’argent public se fait rare. Qui peut s’opposer à une révision générale des politiques publiques ? Le problème réside plutôt dans la manière dont elle a été menée et dans le bilan que l’on peut en dresser aujourd’hui. Nous en avons fait l’expérience comme élus locaux, la révision des politiques publiques permet de dépasser certains blocages, certains conservatismes. Au niveau national, elle pose le problème de la place de l’État, de son rôle et de ses moyens. Ce sera l’un des enjeux de l’élection présidentielle, voire des élections législatives.

D’où la question suivante : si les politiques publiques peuvent être menées par des opérateurs privés, quels moyens l’État conserve-t-il pour vérifier que ces opérateurs suivent l’orientation voulue et que leur intervention permette de réduire les coûts ? La Cour des comptes a montré que le recours au partenariat public-privé pour la construction, dans ma commune de La Courneuve, du magnifique centre des archives diplomatiques du ministère des affaires étrangères est bien plus coûteux que ne l’aurait été une maîtrise d’ouvrage publique. Les PPP pourraient constituer un sujet de réflexion en soi. Comment venir en aide aux collectivités et aux élus de plus en plus confrontés à des opérateurs privés dont les moyens techniques et l’expertise financière sont très supérieurs aux leurs ?

M. le Président Bernard Accoyer. Je m’associe aux remerciements et aux félicitations adressés aux deux rapporteurs et aux services de l’Assemblée. Nous sommes au cœur de la mission du CEC avec ce sujet transversal, d’une portée considérable et qui n’a pas fini de faire parler de lui. En effet, il restera d’actualité quelle que soit la future majorité, car une réalité s’impose à tous : celle des chiffres. Or l’évolution du coût des services de l’État rejaillit sur celle de la dépense collective – de vieillesse, de solidarité, de maladie.

L’étude jointe au rapport, relative aux modalités de délivrance du passeport et du CIV, montre que l’on a gagné en efficience, notamment en temps. Au demeurant, le passeport biométrique est également beaucoup plus sûr que les documents qui l’ont précédé.

Notre mission d’évaluation et de contrôle progresse. Mais pour faire mieux encore, il nous faudra renoncer ici à ce qui est la marque de fabrique de l’Assemblée nationale : la politisation de notre travail. Car notre mission comporte deux aspects : d’une part, nous devons contrôler l’action des pouvoirs publics, conformément à la responsabilité que les Français nous ont confiée ; d’autre part, nous légiférons et nous accompagnons ou combattons telle ou telle politique. Un tel rapport nous fournit, si j’ose dire, une matière première qui devrait être de plus en plus consensuelle.

Un autre sujet qui me tient à cœur, comme à Pierre Méhaignerie, est la multiplication de nos initiatives, sous forme de rapports ou, plus récemment, de propositions de loi. Certes, faire de la politique, c’est communiquer. Pendant plusieurs décennies, nous avons publié des montagnes de rapports, qui n’ont pas débouché sur grand-chose. Que de temps perdu, pour les élus comme pour les fonctionnaires qui travaillent – remarquablement – avec nous ! Ces rapports sont des trésors, mais les suites qui leur sont données ne sont guère satisfaisantes. Nous devons lutter contre cette inflation. On ne peut pas, pour faire plaisir aux auteurs ou à leur formation politique, ouvrir quantité de chantiers qui ne serviront à rien. Le CEC doit veiller à la suite que les pouvoirs publics donnent à ses travaux, sans limite de temps, par-delà même les changements de législature.

Je vous suggère donc que nous consacrions un moment d’une séance, avant la fin de la législature, à notre méthode de travail et à la discipline dont nous devons faire preuve en la matière. Pierre Méhaignerie disait il y a peu que sa commission débordait de propositions de loi ; quel sens ont-elles sans étude d’impact, alors qu’une résolution ou une initiative politique suffirait ?

Conformément aux dispositions de l’article 146-3 du Règlement, le Comité autorise la publication du rapport, auquel l’étude d’Ernst & Young sera annexée.

Le rapport sera distribué et mis en ligne sur le site internet de l’Assemblée nationale. Il sera transmis au Gouvernement.

ANNEXES

Annexe n° 1 : Compte rendu de la table ronde du 27 septembre 2011 avec les organisations syndicales représentatives des agents de la fonction publique

Annexe n° 2 : liste par ministère des mesures de la RGPP portant optimisation, rationalisation, mutualisation, fusion et modernisation

Annexe n° 3 : lettre de M. Bernard Accoyer, Président de l’Assemblée nationale, à M. Luc Chatel, ministre de l’Éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

Annexe n° 4 : lettre en réponse de M. Luc Chatel, ministre de l’Éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative à M. Bernard Accoyer, Président de l’Assemblée nationale

Annexe n° 6 : liste des personnes auditionnées par les rapporteurs

Annexe n° 5 : rapport d’Ernst & Young sur les mesures de la RGPP concernant la modification des modalités de délivrance du passeport et du certificat d’immatriculation des véhicules

ANNEXE 1

COMPTE RENDU DE LA TABLE RONDE DU 27 SEPTEMBRE 2011 AVEC LES ORGANISATIONS SYNDICALES REPRÉSENTATIVES
DES AGENTS DE LA FONCTION PUBLIQUE

Participants : Mmes Isabelle Sargeni-Chetaud et Anne Feray, secrétaires nationales de la Fédération syndicale unitaire (FSU), M. Emmanuel Paillusson, secrétaire général de Solidaires Concurrence, consommation, répression des fraudes (Solidaires CCRF), M. Michel Moreau, président de la Confédération française des travailleurs chrétiens des fonctionnaires et agents de l’État (CFTC), M. Patrick Hallinger, secrétaire national à l’Union générale des fédérations de fonctionnaires de la Confédération générale du travail (UGFF-CGT), M. Bernard Van Craeynest, président de la Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC), M. Vincent Hacquin, président de la Fédération des fonctions publiques de la Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC), M. Michel Robert, membre du Bureau fédéral des fonctions publiques de la CFE-CGC et président du syndicat de La Poste des fonctions publiques de la CFE-CGC, et Mme Laurence Laigo, secrétaire nationale de la Confédération française démocratique du travail (CFDT).

M. Francois Cornut-Gentille, rapporteur. Je vous remercie d’être venus nous faire part de votre perception de la révision générale des politiques publiques (RGPP). Notre mission d’évaluation est co-présidée par un député de la majorité et par un député de l’opposition, ce qui est gage d’un travail approfondi. Le questionnaire que nous vous avons transmis en vue de cette table ronde doit être compris comme un canevas indicatif, et nous vous entendrons avec un égal intérêt aborder tout sujet connexe qui vous semblerait important. Les auditions que nous avons déjà conduites nous permettent d’appréhender ce qui pose problème et ce qui aurait pu être fait autrement ; aussi, il nous serait utile de savoir comment vous auriez conçu la réforme de l’État et ce que, selon vous, il conviendrait de faire différemment. Sachez enfin que cette réunion fera l’objet d’un compte rendu qui sera annexé au rapport.

M. Christian Eckert, rapporteur. Le sujet est si vaste que nous ne pourrons le traiter de manière exhaustive ; aussi avons-nous décidé de sélectionner quelques thèmes. Sinon en matière budgétaire, le Parlement n’a guère été associé à la réforme : ni à sa méthode, ni à la définition des objectifs visés. Enfin, on résume souvent la RGPP au non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux, mais cet aspect de la réforme, aussi important soit-il, n’est pas le seul. J’aimerais donc connaître votre sentiment non seulement sur les effets mécaniques de cette mesure – la perte de moyens – mais aussi sur ses conséquences en termes de rémunérations, et savoir en particulier si le recours aux heures supplémentaires, singulièrement à l’Éducation nationale, n’a pas en réalité considérablement amoindri l’économie affichée.

Mme Isabelle Sargeni-Chetaud, secrétaire nationale de la Fédération syndicale unitaire (FSU). Au moment de traiter de la nature de la RGPP et de sa mise en œuvre, j’observe que certaines des questions que vous nous avez posées sur les effets de cette réforme trouvent leur réponse aujourd’hui même dans la rue, où les manifestants contestent les suppressions annoncées de 14 000 postes à l’Éducation nationale dans le projet de budget pour 2012, ce qui portera à 80 000 le nombre de ces postes supprimés depuis le début du quinquennat. La critique de la mise en œuvre de la réforme n’est pas portée par les seuls syndicalistes : usagers des services publics et personnels expriment la même réprobation.

Les objectifs annoncés de la RGPP étaient au nombre de trois. Le premier était de réorganiser et d’améliorer le fonctionnement de l’État. L’idée d’un État se modernisant pour mieux assurer le service à la population et le bien public, sur la base de décisions prises démocratiquement, nous paraît tout à fait positive. Le deuxième objectif était de simplifier les démarches des usagers, autre approche intéressante. Le troisième objectif était de réduire la dépense publique, et c’est sur ce troisième volet que porte l’essentiel des désaccords, car c’est celui qui a été le plus mis en œuvre depuis 2007, et de la manière la plus brutale, par l’application du dogme du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Nous sommes préoccupés par une réduction de la dépense publique devenue aussi celle du périmètre d’action de l’État.

La réduction des coûts est devenue l’unique priorité, le Gouvernement se donnant pour objectif de faire revenir en 2012 le nombre de fonctionnaires de l’État à son niveau des années 1990. Cela représente 150 000 postes en moins sur la durée du quinquennat, alors que la population a augmenté et que les besoins de services publics se sont accrus, en matière de logement par exemple.

Plus qu’une méthode, la RGPP est devenue l’outil principal de cette forme particulière de modernisation qui, articulée avec d’autres réformes qui ont modifié les territoires - celles de la carte hospitalière, de la carte judiciaire, de la carte militaire… – et avec la réforme des collectivités territoriales (RéATE), a conduit à réduire le périmètre d’intervention de l’État.

La FSU et d’autres syndicats ont plusieurs fois dénoncé ces aspects. En avril encore, les organisations syndicales ont, dans une déclaration unitaire, demandé à la Commission de modernisation des services publics l’abandon de la RGPP. Au cours du dernier semestre, différents sondages et rapports ont mis en évidence de grandes difficultés. Le directeur général de l’administration et de la fonction publique lui-même a tiré la sonnette d’alarme en indiquant au Sénat que « si l’État veut continuer à assumer ses missions régaliennes, on ne peut pas aller plus loin en matière de non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite dans certains services ». Les inquiétudes portent aussi sur la situation des opérateurs de l’État, Météo France et Pôle emploi par exemple.

La RéATE, déclinaison territoriale de la RGPP, a une forte incidence sur les territoires et les personnels. Des restructurations menées de manière extrêmement rapide et accompagnées de nouveaux modes de gestion très inspirés du modèle privé entrepreneurial ont déstabilisé les personnels et désorganisé de nombreux services. Les consignes récentes données aux directions départementales interministérielles (DDI) les poussent à déléguer de plus nombreuses missions encore au niveau régional, ce qui accroîtra la désorganisation et les difficultés.

Dans les territoires, à quoi a-t-on assisté ? Fermetures de casernes, fermetures de classes, menaces sur l’avenir des sous-préfectures, retrait de l’ingénierie publique, remise en cause de la centralisation du contrôle de légalité en préfecture, menaces sur les services vétérinaires, en tout cas sur leurs possibilités d’intervention dans les abattoirs pour prévenir les crises sanitaires. Les missions auxquelles l’État doit faire face, singulièrement en ces temps de crise économique, n’ont pas diminué. En revanche, les effectifs ont baissé et pour tout ce qui relève des actions interministérielles regroupées au sein des directions départementales ou régionales, de considérables problèmes de gestion rendent les choses très difficiles ; dans bien d’autres administrations que je n’ai pas citées, on constate une réelle dégradation du service rendu. Il est particulièrement préoccupant que certains territoires se considèrent maintenant comme quasiment abandonnés par l’État. Il reste à trancher si la responsabilité de cette situation incombe à la RGPP seule, à des questions budgétaires ou à la mise en œuvre de la réforme par les différents ministères. Quoi qu’il en soit, ces préoccupations recoupent celles qu’ont exprimées de nombreux élus lors de l’élaboration de la réforme des collectivités territoriales.

M. Bernard Van Craeynest, président de la Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC). Je ne suis pas fonctionnaire, mais j’ai commencé ma carrière, il y a 32 ans, à la SNECMA, belle entreprise du secteur aéronautique, à l’époque société nationale, qui réalisait 85 % de son chiffre d’affaires dans le domaine militaire et dépendait des contrats de l’État. En quelques années, l’entreprise s’est adaptée à un marché civil, qui représente maintenant plus de 85 % de son activité. Cet exemple, et d’autres, montrent qu’une restructuration peut être plus ou moins bien gérée.

J’observe que la volonté de faire des économies, expliquée par l’endettement de notre pays et le déficit budgétaire, ne porte que sur une partie de nos fonctions publiques ; en particulier, la fonction publique territoriale, qui a substantiellement contribué à l’accroissement des effectifs depuis une vingtaine d’années, n’est pas directement touchée par la réforme.

Certaines réformes engagées, avec plus ou moins de succès, au cours des années antérieures, ont abouti depuis quatre ans : la création de Pôle emploi et, au sein de la direction du Trésor, le regroupement des services d’assiette et de recouvrement. Mais, on l’a vu pour Pôle emploi, cela s’est fait à l’image de ce que nous avons connu des désengagements successifs de l’État dans le domaine militaire et paramilitaire, qu’il s’agisse de l’ancienne direction des constructions terrestres devenue GIAT Industries puis Nexter ou de l’ancienne direction des constructions navales devenue DCN puis DCNS. À chaque fois, le pouvoir politique fait preuve de pusillanimité : on veut conduire une évolution devenue nécessaire mais l’on se met d’accord pour ne pas susciter une révolution sociale. À cet effet, on accorde certains avantages dans le cadre d’un système transitoire – aux ouvriers d’État par exemple, et à d’autres. Cela peut se concevoir, mais cela a un coût. Et passer d’une entreprise – GIAT Industries – qui comptait 16 000 salariés à une autre – Nexter – qui en emploie 2 000 traduit des pertes de marché, des pertes d’emplois et finalement une perte d’efficacité d’un secteur industriel dont l’importance n’est pas négligeable pour notre pays.

Tout cela signifie que les restructurations, les adaptations, la modernisation, tous vocables agréables à l’oreille, doivent être anticipées, préparées et accompagnées. La forte représentation du personnel et la forte diversité syndicale qui existent dans le secteur public français donnent la possibilité d’un dialogue social soutenu et nourri qui devrait logiquement permettre la recherche efficace d’un accord sur la manière de conduire le changement. Mais cette approche a toujours été difficile à concrétiser en France, ce qui conduit à s’interroger sur la nature et la qualité de notre dialogue social.

Dans certains cas, parler de simplification administrative, c’est parler, en filigrane, de guichets uniques – on l’a vu pour Pôle emploi comme pour d’autres services publics. C’est en effet un objectif déterminant si l’on veut rendre l’administration plus accessible, plus compréhensible et plus efficace. Pour autant, on sait les difficultés éprouvées pour mener à bien certains projets informatiques, qu’il s’agisse de Chorus ou d’autres logiciels. Par ailleurs, on ne peut occulter le risque réel de fracture numérique dans notre pays. Il est bon de vouloir progresser à vitesse accélérée en ce domaine, mais gardons-nous d’oublier que tous nos concitoyens n’ont un égal accès ni à l’informatique ni à la formation à l’informatique, et qu’ils n’ont pas non plus la même capacité d’adaptation.

La RGPP est un acte politique que nous n’avons pas à juger – ce n’est pas notre rôle. Une orientation a été donnée. Notre préoccupation est de savoir si nos concitoyens le comprennent et peuvent s’y adapter, et si nos collègues fonctionnaires perçoivent clairement cette orientation et s’ils disposent des outils et de la formation nécessaires pour accompagner ces évolutions.

Or, en notre qualité de représentants de l’encadrement, nous constatons qu’à l’instar de ce que constate malheureusement dans certaines grandes entreprises, un fossé se creuse entre les orientations décidées au sommet et les moyens alloués à leur traduction pratique. Ce hiatus doit faire l’objet de la plus grande attention, car même si les troupes marchent d’un seul pas, encore faut-il que la hiérarchie ait compris le sens de la manœuvre... Je n’épiloguerai pas sur certaines évolutions intervenues ces dernières années dans le secteur des télécommunications, en particulier à France Télécom.

Une volonté se manifeste, qui a le mérite d’exister ; encore doit-elle être comprise sur le terrain au risque, sinon, d’effets catastrophiques sur le moral des troupes et, bien sûr, sur le fonctionnement de notre pays et par ricochet sur sa compétitivité.

Mme Laurence Laigo, secrétaire nationale de la Confédération française démocratique du travail (CFDT). Au regard des mutations de la société française, la CFDT considère qu’une réforme de l’État est nécessaire si l’on veut que l’intervention publique demeure un des piliers du pacte social, garant de la cohésion économique, sociale et territoriale du pays. Oui, l’amélioration du fonctionnement de l’État est un impératif de justice pour tous. Mais ce chantier suppose d’adopter une méthode lisible de dialogue social au lieu de mener des politiques successives qui, outre qu’elles ne sont ni articulées ni évaluées, donnent beaucoup à penser sur leur efficacité. Ce questionnement n’est pas propre aux organisations syndicales : les auteurs de nombreux rapports s’interrogent sur la conduite des missions de services publics et sur l’adéquation entre ces missions et les moyens en hommes qui leur sont alloués.

La nécessaire rénovation de l’intervention publique aurait dû s’engager sur la base d’un état des lieux et de priorités définies au terme d’un débat public. Parce que c’est de l’intérêt général qu’il s’agit, il aurait fallu anticiper, et inscrire les objectifs de l’action publique choisis dans la durée sans omettre de les exposer clairement aux citoyens contribuables. L’approche strictement comptable n’était pas la bonne ; il aurait fallu, aussi, définir l’utilité des missions à poursuivre et des prestations à servir. Le contexte incite à la maîtrise des déficits publics et nous avons le sens des responsabilités, mais nous considérons que ces deux pistes de réflexions ne sont pas antinomiques.

La RGPP a consisté en une réforme des administrations et non des politiques publiques, dont la nature n’a pas changé. C’est en quoi beaucoup d’agents se sont sentis floués ; leurs attentes ont été trompées et une forte déception s’en est suivie.

Face à une réforme de cette envergure, à une question d’intérêt général aussi forte, on ne peut que s’étonner de l’absence de débat public, de l’absence d’implication du Parlement, de l’absence de dialogue social au sens large, notamment au niveau local.

L’enjeu de l’intervention publique, ce sont à la fois le maintien de son objectif premier – assurer la cohésion économique, sociale et territoriale – et l’adaptation à la diversité territoriale. Si l’on veut véritablement permettre des interventions publiques différenciées et des solutions collectives adaptées à un territoire donné et à ses données démographiques et géographiques propres, il est indispensable d’articuler dialogue social territorial et dialogue national. La grande lacune de la RGPP, c’est le manque d’articulation entre le national et le local par le biais du débat public. Comment peut-on concevoir une réforme à la définition de laquelle les collectivités territoriales, qui la mettront en œuvre, n’ont pas été associées ? Si l’on persiste dans ces errements, la dérive se prolongera. Cela se fera au détriment de l’intérêt général, avec la poursuite de bricolages sans lisibilité, aux coûts réels bien supérieurs à ceux qui sont annoncés, et qui ne sont pas de nature à rassurer le citoyen contribuable, au lieu que l’on définisse des politiques et des interventions publiques à la hauteur de ce qu’elles doivent être dans la société française du XXIe siècle. Les lois de décentralisation, par un transfert massif de compétences, ont donné une place centrale aux collectivités territoriales pour les questions d’emploi, de formation, de santé, de développement économique et de prestations sociales, mais la mise en œuvre de ces compétences est difficile ; il faut parvenir à articuler niveau local et vision nationale.

Cet état des lieux n’ayant pas été fait, l’intérêt général n’a pas été défini et l’on s’est livré à une opération qui tient de la restructuration, sans aucun dialogue social sur le terrain et sans accompagnement des salariés – ce qui n’arrive jamais dans le secteur privé – alors que des milliers d’emplois étaient en jeu. Cette méthode a suscité énormément d’interrogations et entraîné une incompréhension persistante. Un état des lieux rigoureux est indispensable pour évaluer ce qui a été fait au regard des besoins réels en services publics.

M. Michel Moreau, président de la Confédération française des travailleurs chrétiens des fonctionnaires et agents de l’État (CFTC). L’État étant le garant de l’intérêt général et de l’égalité des citoyens sur tout le territoire, nous ne contestons pas que ses missions et son organisation doivent changer pour qu’il s’adapte à l’évolution des besoins de la population et continue de jouer son rôle, irremplaçable, pour assurer la compétitivité de notre économie et la cohésion sociale.

M. Christian Eckert a souligné que la RGPP ne se limite pas au non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ; il est révélateur qu’elle soit souvent perçue comme n’étant que cela. De fait, ce ne sont pas les politiques publiques qui sont rénovées mais les administrations, à cela près que certaines externalisations peuvent être considérées sinon comme l’abandon du moins comme un désengagement de certaines de ses missions par l’État. La réduction des effectifs semble devenue le seul but, non avoué, de la RGPP. Pour avoir accompagné le secrétaire d’État dans certaines de ses visites dans les régions, je puis témoigner avoir entendu dire, partout, « l’État veut faire des économies ».

Nous considérons quant à nous que pour réformer il faut partir des missions que l’État veut accomplir. Des priorités doivent être définies et le Parlement doit être associé à cette définition ; ensuite seulement, il faut déterminer les moyens nécessaires à leur mise en œuvre. Or, on a fait l’inverse, en voulant adapter les missions aux moyens. Le débat sur les missions que la CFTC avait demandé n’a pas eu lieu et l’on en reste à une vision qui paraît uniquement comptable et budgétaire. Or la règle du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite a été critiquée par la Cour des comptes, qui n’a pas estimé cette mesure particulièrement pertinente. Par ailleurs, la réorganisation de l’administration territoriale a entraîné, et continue d’entraîner, une grande confusion. Les agents travaillant désormais dans des directions interministérielles, nul ne sait plus très bien qui fait quoi et les personnels dont les régimes, les statuts et les rémunérations diffèrent, ne comprennent pas toujours quel est leur cadre de travail exact. Tout cela conduit à la dégradation du service rendu à la population.

Tel est le tableau d’ensemble : une dégradation du service rendu et des agents inquiets pour leurs missions, qu’ils souffrent de ne pas avoir les moyens de remplir correctement. C’est particulièrement grave en période de crise, qui appelle une présence renforcée de l’État auprès des plus défavorisés. À cela s’ajoute la dégradation des conditions de travail des personnels, qui entraîne parfois les conséquences dramatiques que l’on sait.

Il avait été dit que les nouvelles technologies feraient évoluer l’organisation du travail. Nul ne nie leur utilité, mais l’administration électronique ne peut entièrement remplacer l’homme. Ainsi, on ne saurait concevoir l’enseignement uniquement à distance, par le biais d’Internet ; il faut un contact direct entre le pédagogue et l’étudiant ou l’élève. Il avait été dit, aussi, que l’utilisation des nouvelles technologies permettrait de dégager du temps pour porter plus d’attention aux usagers des services publics ; ce n’est pas le cas.

La RGPP est souvent comprise comme étant uniquement une réduction des effectifs pour faire des économies. Ce que les personnels demandent le plus, c’est d’être associés, par le biais du dialogue social, à la mise en œuvre de réformes dont ils ne comprennent pas le sens. Or le manque d’informations et d’explications est criant.

M. Emmanuel Paillusson, secrétaire général de Solidaires Concurrence, consommation, répression des fraudes (Solidaires CCRF). Outre mes responsabilités syndicales au plan national, je suis responsable d’une organisation syndicale au sein d’une administration qui a été percutée de plein fouet par la RGPP, qui, pour Solidaires, n’est qu’une réforme comptable. Le débat sur les missions de l’État et sur l’adéquation entre ces missions et l’emploi n’a jamais eu lieu ; en revanche, nous avons constaté la suppression d’un poste de fonctionnaire sur deux partant à la retraite, dans toutes les administrations et tous les secteurs. Nous constatons également que le Parlement n’a pas été associé à la conception de la RGPP et qu’il ne l’est pas suffisamment à la mise en œuvre de la réforme de l’administration territoriale.

La simplification des administrations s’est traduite par leur explosion, parfois par l’externalisation de certaines missions, parfois par le rattachement à un ministère cependant que la gestion demeure dans le ministère d’origine, ce qui entraîne une complexité effroyable – elle se reflète dans l’organisation des élections professionnelles dans la fonction publique, qui se tiendront le 20 octobre.

Quels repères ont maintenant les citoyens ? Auparavant, un agriculteur trouvait aux différents étages d’une même direction tous les interlocuteurs auxquels il devait s’adresser ; pour accomplir les mêmes démarches, il doit maintenant se rendre dans quatre directions différentes au moins. Où est la simplification ?

Autre exemple, celui de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Après que la loi LME a entraîné le reversement d’une première vague de 20 à 30 enquêteurs à l’Autorité de la concurrence, la RGPP a eu pour effet qu’une partie des personnels a été transférée dans les directions départementales interministérielles (DDI), une autre dans les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE), la troisième restant affectée à la direction générale, au niveau national. Cette rupture a fait que les liens entre ces différents services sont maintenant presque inexistants, d’autant que les logiciels qui, auparavant, étaient les mêmes pour tous, quelle que soit l’administration d’origine, ne le sont plus. Autant dire que les administrations auront le plus grand mal à rendre compte au Parlement du respect des indicateurs de la LOLF – cela suscitera des difficultés extrêmes, ou des doublons quand les même chiffres auront été compilés par deux directions.

La méthode adoptée pour mettre en œuvre la RGPP a été trop rapide, et elle s’est caractérisée par une absence complète de concertation, à tous les niveaux. Les décisions ont été prises par le Premier ministre, pour application immédiate. Ni le Parlement, ni les organisations syndicales, ni les associations d’usagers n’y ont été associés. Quant à l’amélioration censément attendue, on la cherche encore. En réalité, la RGPP s’est traduite par le renforcement des fonctions « support » auxquelles la priorité a été donnée au détriment de l’exécution des missions, les agents étant laissés se débrouiller comme ils peuvent s’ils ne sont plus assez nombreux.

Quant au logiciel Chorus, quelle formidable avancée ! Si, dans certaines administrations, il fonctionne à peu près, il crée ailleurs une pagaille telle que certaines entreprises refusent désormais de travailler avec les administrations faute de parvenir à se faire payer dans les délais réglementaires – ce qui signifie incidemment que des pénalités de retard s’appliqueront et que des indemnités devront leur être versées.

Enfin, la RGPP a accéléré la désertification des zones rurales par les regroupements successifs des services publics, engagés à La Poste il y a quelques années et qui se poursuivent maintenant à l’Éducation nationale et dans d’autres administrations.

M. Patrick Hallinger, secrétaire national à l’Union générale des fédérations de fonctionnaires de la Confédération générale du travail (UGFF-CGT). M. Christian Eckert a dit que le Parlement n’avait pas joué tout son rôle au moment de l’adoption de la RGPP ; cependant, les lois de finances qui ont permis d’enclencher la réforme ont été votées en ces murs. Un regard neuf s’impose, et il est important que le Comité d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale procède à une évaluation à tous égards indispensable.

Un débat public sur la définition des besoins et sur les méthodes en vigueur aurait dû être le point de départ de la RGPP, la base d’une véritable réforme. Un débat permanent sur les missions publiques est en effet indispensable, chacun convenant que la situation de la France n’a rien à voir avec celle de 1945 : technologies, environnement mondial, qualifications, attentes de la population, tout a évolué. Cependant, en l’espèce, ce nécessaire questionnement a été biaisé, aussi bien sur les objectifs que sur la méthode.

L’objectif de la réforme a été énoncé par le Gouvernement : des mesures classiquement adoptées lorsque l’on veut réduire le budget – comprimer la dépense en rognant çà et là –, on est passé à une rupture en s’attaquant au champ du service public et au statut général des fonctionnaires pour instituer un « new public management » dans le droit-fil du dogme ultralibéral qui prévalait alors. Avec la crise, je constate que l’on revient un peu sur celui-ci, si considérables sont les enjeux sociaux. Mais, à l’époque, le ministre Éric Woerth s’inspirait du Canada, où l’on avait réduit brutalement de 15 % l’effectif des fonctionnaires fédéraux, supprimé les pré-retraites, privatisé les transports ferroviaires et les services du contrôle de la navigation aérienne, réduit les subventions au transport de marchandises. À chaque fois, on a recherché les exemples étrangers qui tendaient à réduire le champ de l’intervention publique, au motif que cela permettrait l’essor économique au bénéfice de l’emploi. Le président de la CFE-CGC a montré que ce n’est pas ainsi que les choses se passent ; j’en donnerai d’autres exemples.

Pour ce qui est de la méthode, le processus de décision a été confiné à un cercle étroit réuni autour du Président de la République, en recourant largement à des cabinets anglo-saxons qui ont importé des pratiques en usage dans d’autres pays. Ce faisant, on a marginalisé tout l’encadrement supérieur de la fonction publique, prié d’appliquer brutalement des décisions prises sans que jamais leur avis ait été pris.

Tout cela provoque un immense gâchis social, éthique et financier, les décisions prises de manière autoritaire étant appliquées brutalement, l’indicateur principal étant la réduction des dépenses et des emplois. On considérait d’évidence que cette manière de faire permettrait une réforme rapide, prendre le temps de la concertation étant perçu comme un enlisement. Or, le bilan de la RGPP montre que ce n’est pas si simple.

Ainsi, le directeur nouvellement nommé de la Direction interministérielle des systèmes d’information et de communication expliquait le 13 avril 2011 dans la revue Acteurs publics que l’objectif est de réduire de 10 % les dépenses informatiques de l’État. Il indiquait y travailler depuis deux ans dans une grande concertation et affirmait que cet objectif n’ayant suscité « aucun climat de défiance dans les services informatiques ministériels pour l’instant »... si ce n’est que la concertation s’est limitée à un petit cercle de hauts fonctionnaires gambergeant entre soi. Au terme de ces cogitations et sans que l’avis des organisations syndicales et des personnels ait été requis, les décisions prises ont été mises en œuvre. C’est alors que le réel a fait irruption : les protestations fusant de toutes parts et les agents refusant de s’inscrire dans une démarche qui remet en cause et leurs qualifications et leur statut, le même directeur a dû, le 23 septembre, envoyer un courrier aux préfets, avec copie aux secrétaires généraux des ministères, annonçant que l’application de la mesure faisait l’objet d’un moratoire pour laisser le temps à la concertation et à la négociation.

Parlons maintenant de Breuil-le-Sec. Le ministère de l’équipement a jugé nécessaire, par souci de modernisation, de faire l’acquisition pour 2,8 millions d’euros, dans le cadre d’un partenariat public-privé (PPP) prévu pour durer trente ans – au terme duquel le coût total sera de 9 millions d’euros –, d’un terrain situé à équidistance de Compiègne et de Beauvais, destiné à un centre d’exploitation. Fort bien, si ce n’est que ce terrain est situé sous une ligne à très haute tension, en dessous de laquelle le nouveau bâtiment a été construit, alors même que Mme la ministre de l’écologie a recommandé que l’on ne délivre plus de permis de construire pour des bâtiments ainsi situés, tout comme l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. Les salariés qui ne veulent pas travailler en un lieu qui présente un danger manifeste pour leur santé ont demandé à exercer leur droit de retrait – sachant que d’autres centres d’exploitation existent à Compiègne, où il faudra dans tous les cas maintenir une équipe permanente car une déviation vient d’être inaugurée qu’il faudra entretenir. Mais, parce qu’il s’agit d’un PPP, l’État est lié pour trente ans. On sait la rigidité de ces partenariats – qui n’a en tête le cas de l’hôpital sud-francilien ? Qui ne se souvient que lorsque le président de l’Établissement public du Château de Versailles a voulu rompre le PPP de dix ans qui le liait à la société Logica, celle-ci a demandé 30 millions de dommages et intérêts ?

Troisième exemple, celui de l’ingénierie publique. Elle devait, en gros, s’effacer pour laisser la place au secteur concurrentiel. Elle a effectivement laissé la place… au vide. Depuis le début de l’année, la presse se fait abondamment l’écho de cette situation. Le magazine Hydro Plus rappelle que « l’ingénierie publique permettait aux petites collectivités d’affirmer véritablement leur rôle d’autorités organisatrices des services publics». Le Moniteur donne la parole à M. François Amblard, président de la chambre de l’ingénierie et du conseil de France, selon lequel « avec le retrait de l’ingénierie publique d’État, les petites communes sont désemparées ». Dans La Gazette, tel député-maire de Lozère s’alarme des conséquences pour les communes rurales du non remplacement d’un agent sur deux partant à la retraite et de la fermeture des services publics locaux. Les ingénieurs territoriaux de France soulignent dans le même journal que le retrait de l’État laisse les petites collectivités « en difficulté ». On y lit en mai que les petites communes « payent les pots cassés de la RGPP » et que la perte des effectifs a été trop rapide – « On a atteint l’os » dit M. Daniel Canepa, président de l’Association du corps préfectoral. Et en juillet, on lit dans Le Moniteur : « Les petites collectivités manquent de l’assistance à la maîtrise d’ouvrage que les DDE procuraient auparavant à faible coût ».

Une fois encore, une décision précipitée a conduit à supprimer des services entiers sans se préoccuper de ce qui se substituerait à eux.

Dans le même temps, que se passe-t-il dans les services de l’État ? Je prendrai l’exemple de la direction départementale des territoires (DDT) de Seine-et-Marne. En 2008, elle comptait 570 équivalents temps plein ; on est passé à 380 en janvier 2011, et il faut en supprimer cent de plus pour parvenir à l’objectif fixé par le ministère pour fin 2013. Mais comment procède-t-on ? Le ministère n’ayant donné aucune consigne claire pour les redéploiements, on laisse les directions demander à l’encadrement local de définir les priorités de l’organisation ; de décider quelles missions de l’État abandonner et comment inciter les EPCI à prendre en charge les compétences que la direction départementale ne veut plus assumer ; de déterminer comment les y aider ; de préparer l’arrêt des missions que l’on aura définies comme « non prioritaires ». On leur demande encore si des mutations d’office au sein de la DDT sont envisageables – les départs en retraite n’étant pas suffisants au regard des objectifs de suppressions d’emplois – et donc de gérer la mobilité forcée. Les cadres de la DDT se sont attelés à la tâche ; mais, parce qu’ils sont attachés au service public, ils n’ont pas joué le jeu. Aussi, lors de la réunion de restitution, le directeur, estimant que le résultat n’était pas tout à fait à la hauteur de ce qu’il attendait, les a appelés à « assumer leurs responsabilités » de cadres.

Franchement ! Le temps n’est-il pas venu de dire que c’est au politique qu’il revient de mener le débat public avec les organisations syndicales et les citoyens sur le rôle de l’État et sur ses missions, au lieu de laisser le service public, que l’on gère « en mode dégradé », aller à vau-l’eau ? Au lieu de viser un objectif précis, on dit : « Cette année, j’ai cent emplois, je supprime certaines missions et l’an prochain je n’en aurai plus que 90 » ! Il n’y a plus d’ambition, ni donc de sens, et une perte d’efficacité. Quel gâchis !

M. Christian Eckert, rapporteur. Pour que notre rapport ait une certaine valeur, nous avons besoin d’exemples concrets. Ce sont eux qui nous permettront de nous prononcer sur la question centrale, qui peut faire l’objet d’un choix politique. Dites-nous par exemple quelles missions ne sont plus assurées à cause des réductions d’effectifs. Nous avons ainsi entendu que si le déneigement avait été particulièrement difficile à assurer l’hiver dernier, c’était parce que la RGPP était passée par là. J’ai mon point de vue – que je ne donnerai pas. Mais quel est le vôtre ? Bref, ce dont nous avons besoin, c’est de nourrir les argumentaires qui viendront à l’appui du bilan, voire des recommandations que nous présenterons au terme de notre mission. Dans le même ordre d’idées, et compte tenu des chiffres contradictoires qui nous parviennent, nous nous demandons si la RGPP a davantage pesé sur les cadres que sur les personnels de terrain. Là aussi, les exemples que vous pourrez nous donner seront les bienvenus.

Nous savons que le dialogue territorial n’a pas été bien conduit. Ressentez-vous néanmoins un changement par rapport aux débuts de la RGPP ? Les comportements, le dialogue social, la concertation se sont-ils améliorés ? Les ministères nous disent que c’est le cas ; nous aimerions connaître votre point de vue.

M. François Cornut-Gentille, rapporteur. Nous avons le sentiment que le processus de la RGPP a été entamé de manière assez brutale, mais que les difficultés sont aujourd’hui identifiées. Avez-vous constaté pour votre part des évolutions dans la gestion, l’appréhension ou l’anticipation des problèmes ?

S’il fallait dresser un « hit-parade » des ministères, où le processus s’est-il le mieux déroulé ? À quel ministère décerneriez-vous au contraire le « bonnet d’âne » ?

Selon M. Paillusson, on a trop souvent assisté à un renforcement des fonctions de support au détriment des agents de terrain. Ce sentiment est-il partagé par les autres intervenants ? Et dans quels ministères cette dérive vous paraît-elle particulièrement nette ?

Mme Isabelle Sargeni-Chetaud, secrétaire nationale de la Fédération syndicale unitaire (FSU). Permettez-moi de revenir sur la question des coûts réels et induits. Je voudrais insister sur un aspect qui a été souligné par plusieurs rapports et fait naître l’inquiétude dans de nombreuses collectivités : le transfert d’une partie des missions de l’État aux collectivités territoriales. Les petites communes et les départements ruraux insistent tous – plus encore dans la période récente – sur les incidences qu’a eues ce transfert sur leurs structures et sur leurs capacités à répondre aux besoins des usagers. Il ne semble pas que des instructions aient été données pour renoncer à certaines missions. On est plutôt, comme cela vient d’être dit, en « mode dégradé » : ce qui ne peut être fait ne l’est pas ; d’autres s’en chargeront si c’est possible. En tout cas, les collectivités locales qui ont créé des emplois à l’heure de la RGPP ont été rappelées à l’ordre.

À ce transfert s’en ajoute un autre, que M. Paillusson a évoqué : l’État devient davantage un « organisateur », voire un « vérificateur », qui délègue au maximum la mise en œuvre, si possible à moindre ou à bas coût, même s’il faut pour cela recourir à des emplois aidés. On l’a notamment constaté dans l’éducation nationale, où la précarité s’est accrue. Les cadres et les échelons intermédiaires ont nettement ressenti une pression en ce sens.

Permettez-moi de vous donner quelques exemples – j’en ai deux pages, que je tiens à votre disposition.

M. Christian Eckert, rapporteur. Les contributions écrites peuvent en effet utilement compléter vos propos à tous.

Mme Isabelle Sargeni-Chetaud, secrétaire nationale de la Fédération syndicale unitaire (FSU). Nos collègues des préfectures tirent la sonnette d’alarme. J’ai évoqué tout à l’heure le contrôle de légalité de l’État. J’aurais aussi bien pu parler de la délégation des fonctions de guichet aux mairies pour les passeports et les cartes nationales d’identité, de l’immatriculation à vie des véhicules, qui peut désormais être effectuée par des garagistes ou des buralistes, ou encore de la justice. S’agissant des services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP), doit-on parler d’abandon des missions, ou d’un rétrécissement des capacités d’intervention des personnels qui aboutit de fait à une diminution du nombre des suivis, que dénoncent depuis des mois les personnels concernés ?

Il en va de même dans le domaine de la sécurité publique, avec la suppression de postes dans les effectifs de la police nationale, la redéfinition des missions de cette dernière – retrait des quartiers, abandon de la police de proximité –, qui implique elle-même un transfert vers les collectivités locales, donc une augmentation des effectifs des polices municipales.

Je ne reviens pas sur l’ingéniérie publique, qui a déjà été évoquée.

Les services administratifs de l’éducation nationale et les informaticiens – qui ont menacé, l’an dernier encore, de ne pas assurer la diffusion des résultats aux examens faute de moyens – sont dans le même cas : les personnels de terrain et ceux qui assurent le service immédiat au public ne peuvent plus faire. Le triste exemple de Pôle emploi en atteste, avec 1800 postes supprimés en 2011 et en 2012, alors même que le chômage a augmenté et que l’État confie de nouvelles missions à l’établissement public.

Ce sont des problèmes du même ordre que rencontrent les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).

Mme Laurence Laigo, secrétaire nationale de la Confédération française démocratique du travail (CFDT). Nous connaissons tous ces exemples. La question de la RGPP doit être replacée dans un contexte global. Il y a d’abord eu la politique du « un sur deux », décidée par une loi de finances, qui s’applique aux fonctions publiques, mais aussi aux opérateurs publics. Puis il y a eu la mise en place de la rémunération au mérite, qui a donné lieu à des interrogations, dans la mesure où elle peut conduire à une réorientation de certaines priorités. Ajoutez-y la loi « Hôpital, patients, santé et territoires », la réforme de la justice, celle de la garde à vue, puis de l’hospitalisation sans consentement, ou encore de la formation des enseignants… Au final, on aboutit à un manque total de lisibilité.

Je crois donc indispensable de définir un processus clair, à partir de l’évaluation et des missions de service public. La situation actuelle est en effet particulièrement difficile à vivre pour les salariés. Les cadres, plutôt ouverts à l’idée d’une réforme de l’État, ont fini par « décrocher », las de se trouver pris entre des injonctions contradictoires – car ce mouvement permanent de réformes ne conduit pas à une refonte des missions, mais à la multiplication d’injonctions venues de différents niveaux. On aboutit finalement à une perte de sens et de lisibilité, y compris pour nos concitoyens.

Le contexte global est celui d’une réforme permanente des missions et de l’intervention des personnels. Pour prendre un exemple, la loi du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge est entrée en vigueur dès le 1er août en raison de plusieurs incidents qui avaient défrayé la chronique. Les personnels ont dû s’adapter en un mois. Or la loi modifie radicalement le périmètre d’intervention des juges et des personnels de santé, deux catégories déjà soumises à des réformes d’ampleur. Rien n’est dit sur l’abandon de telle ou telle mission. On assiste soit au glissement d’un certain nombre de tâches vers d’autres personnels, avec tous les risques que cela comporte non seulement pour eux, mais aussi pour les usagers, soit à leur disparition de fait. Il est donc urgent de procéder à une évaluation et de redéfinir des éléments de méthode.

M. Vincent Hacquin, président de la Fédération des fonctions publiques de la Confédération française de l’encadrement – Confédération générale des cadres (CFE-CGC) Nous l’avons tous dit, le processus de la RGPP ne fonctionne pas bien. Derrière les décisions prises, il y a en effet des oukases sur les effectifs, à charge pour les services de se débrouiller avec ce qu’ils ont. On demande aux personnels d’encadrement de deuxième et de troisième niveau de définir les missions que doit exécuter l’administration ! Bref, on marche sur la tête. Il appartient au politique de définir les missions et les buts à atteindre. À partir de là, il faut mettre en place des projets de service – discutés avec les partenaires sociaux et les personnels – puis les organigrammes qui en découlent, les effectifs et les moyens, et enfin les plans d’accompagnement des restructurations. Dans mon ministère d’origine, celui de la défense, qui est touché, depuis 1993 et la réforme de la professionnalisation, par des réformes successives, il existe depuis 2007 un Plan d’accompagnement des restructurations (PARE) qui fait l’admiration de mes collègues des autres ministères… Lorsqu’un service doit être restructuré, l’annonce en est faite à l’avance, dans des délais précis ; les agents sont accompagnés, même si les moyens sont aujourd’hui réduits. C’est je crois une méthode que l’on peut donner en exemple.

Il est un point dans la RGPP qui contrarie grandement la CGC : on oublie complètement la dimension humaine. Les fonctionnaires ne sont pas des unités de comptes mais des êtres humains !

De plus, supprimer tant de postes à l’occasion des départs à la retraite n’est pas un gage d’efficacité. La fonction publique joue en effet un rôle d’ascenseur social – on commence en bas pour terminer bien plus haut. Or il y a, en proportion, plus d’ingénieurs et de personnels de catégorie A qui partent à la retraite que de personnels d’application. En l’absence de projets de service et d’organigrammes cohérents, on aboutit à des déséquilibres qui peuvent être source de contre-performances criantes.

D’autre part, diviser par deux les effectifs ou le nombre de directions – donc de directeurs, de sous-directeurs et de chefs de service – ne permet pas nécessairement de faire des économies si les personnels sont toujours là. Pour transformer une décision politique en décision opérationnelle, il faut en effet des étapes intermédiaires.

Écarter l’encadrement du processus de mise en place des réformes n’est pas sans conséquences : lorsqu’il est incapable de répondre aux questions de ses subordonnés, il perd en effet sa légitimité.

Il faudrait donc définir une méthode de mise en œuvre de la RGPP.

J’ai appartenu dans une vie antérieure au service de la qualité de la Délégation générale pour l’armement (DGA). J’étais chargé d’expliquer aux entreprises travaillant pour le ministère comment bien travailler. Mais il faut reconnaître que l’administration ne s’applique pas ses instructions à elle-même… Toutes les entreprises qui fonctionnent bien ont un projet d’entreprise et le modifient lorsqu’elles se réorientent. Rien de tel dans l’administration !

M. Michel Moreau, président de la Confédération française des travailleurs chrétiens des fonctionnaires et agents de l’État (CFTC). Je partage le sentiment de mes collègues. Formellement, aucune mission n’est abandonnée : c’est le décalage entre les objectifs fixés et les moyens alloués qui conduit de fait à abandonner certaines missions. Je pense notamment aux fonctions d’écoute ou à celles de contrôle et de sécurisation – ce qui ne va pas sans poser des problèmes.

M. Emmanuel Paillusson, secrétaire général de Solidaires Concurrence, consommation, répression des fraudes (Solidaires CCRF). Il faut comprendre que les administrations nationales ou les ministères n’ont plus la main sur les administrations locales ; les ordres qu’ils donnent sont donc plus ou moins suivis. Depuis la mise en place des nouveaux directeurs dans les directions départementales interministérielles (DDI), tout dépend des priorités du DDI et du préfet. Or celles-ci varient elles-mêmes selon l’origine de ce DDI. Pour prendre un exemple qui m’a été rapporté ce matin, un DDI a donné instruction aux agents spécialisés de ne plus contrôler l’affichage des prix, faute de temps et de moyens. Or cet affichage est le premier moyen d’assurer la défense du consommateur. Je le répète, il ne s’agit pas d’une volonté délibérée mais d’un problème de moyens.

Les cadres n’ont pas subi la RGPP de la même manière que les agents. Nous sommes passés de huit ou dix administrations locales à quatre. Il a fallu « recaser » – et replacer dans le positionnement hiérarchique – bon nombre de cadres. Ils ont dû aller se « vendre » auprès des préfets, ce qui constituait pour eux une vraie nouveauté. De fait, on est dans une administration de fonction, et non plus de grade. Des agents qui ont passé des concours difficiles se retrouvent sous l’autorité d’agents qui en ont passé moins, voire de contractuels.

Il appartient normalement au Parlement de définir les missions qui doivent être exécutées par les administrations et les ministères. Or, de fait, ce sont la RGPP et la règle du « un sur deux » qui commandent que telle mission soit exécutée et que telle autre ne le soit pas. C’est un point qui nous heurte depuis l’origine.

Vous nous demandez ce que nous pensons de la concertation – locale ou nationale – qui a été menée. Tout dépend de ce qu’on met derrière les mots. S’il ne s’agit que de réunir des instances paritaires pour discuter de tel ou tel sujet, on sait faire. Encore faut-il savoir quel contenu on donne à ces réunions ; or il s’avère que c’est à peu près le néant – un exemple a été donné précédemment.

Quant au nombre des agents dans les fonctions de support, il n’est plus du ressort des administrations ou des ministères d’origine, mais dépend des priorités du DDI et du préfet.

J’observe enfin que les consommateurs et les citoyens ont perdu leurs repères. Ils connaissaient les directions départementales de l’agriculture et de la forêt (DDAF), les directions départementales des affaires maritimes (DDAM), les directions des services vétérinaires (DSV), ou les directions départementales de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DDCCRF). On leur parle désormais de directions départementales des territoires (DDT) ou de directions départementales des territoires et de la mer (DDTM), de direction départementale de la protection des populations (DDPP) ou de direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSP)… Ils peinent à s’y retrouver.

M. Christian Eckert, rapporteur. Les élus aussi.

M. Patrick Hallinger, secrétaire national à l’Union générale des fédérations de fonctionnaires de la Confédération générale du travail (UGFF-CGT). Les exemples étant légion, nous sommes en mesure de dresser un bilan. Je pense pour ma part – je ne suis sans doute pas le seul – qu’il convient de tourner la page pour repartir sur de nouvelles bases.

On trouve cependant un aspect positif dans tout cela : nous avons obtenu l’organisation d’un cycle de réunions les 12 et 13 septembre dernier sur les missions et les emplois avec le Secrétariat général du Gouvernement. Ce dernier a conclu les premières réunions sur la nécessité de stabiliser la situation dans les DDI. C’est un point important, car les restructurations ont été brutales. Bien entendu, nous devrons reparler de la question de l’emploi. Ainsi, on a beaucoup « sabré » dans les services de proximité. Il est temps de savoir ce que nous voulons, et donc d’avoir un débat sur le rôle de l’État. Car les services de proximité, c’est aussi la présence humaine et le lien social. Par exemple, les directions départementales de la cohésion sociale, les DDCS, ont la particularité d’assumer presque autant de missions – qu’il s’agisse des handicapés, des droits des femmes, du logement d’urgence ou de la politique de la ville – qu’elles emploient d’agents. On ne peut en supprimer aucune !

De même, voyez ce qui se passe au ministère de l’écologie avec les permis de construire : compte tenu des textes qui sont publiés, supprimer en deux ans 600 à 700 emplois départementaux de proximité est problématique.

Toute réforme, quelle qu’elle soit, nécessite une phase d’adaptation pour être mise en œuvre. Celle de la fiscalité de l’urbanisme va exiger du travail supplémentaire des services de l’État. Pour reprendre l’expression du secrétaire général du Gouvernement, je dirais qu’un certain nombre de choses sont à revoir. Bref, il faut rétablir la confiance des personnels et redonner toute sa place au débat social.

M. Christian Eckert, rapporteur. Voilà qui nous amène au second thème de cette réunion, la relation entre les fonctionnaires de l’État et la RGPP.

Les économies annoncées chaque année à grands coups de clairon sont considérables. Mais à bien y regarder, les écarts sont très importants entre les chiffres de la Cour des comptes, ceux du Gouvernement et enfin ceux du rapporteur général du budget, pourtant peu suspect de connivence avec l’opposition. Par exemple, la règle de la restitution de la moitié de l’économie réalisée aux fonctionnaires, dépassée dans certains ministères de l’aveu même du Gouvernement et mal appliquée dans d’autres, a servi dans certains cas à financer des mesures catégorielles qui étaient déjà négociées et annoncées. Quel est votre sentiment sur ce point ?

Autre point délicat, le recours aux heures supplémentaires. Il semble que dans certains ministères, notamment celui de l’intérieur, les heures supplémentaires ne soient jamais payées – mais récupérées. À l’éducation nationale, on constate une sérieuse augmentation du nombre des heures supplémentaires, dont on peut penser qu’elle est liée à la réduction du nombre des postes à temps plein.

Permettez-moi d’être provocateur : cela pose tout de même la question de la rémunération des personnels. On me dit par exemple qu’avec la défiscalisation des heures supplémentaires, c’est le « jackpot » pour les professeurs de classes préparatoires aux grandes écoles – qui bénéficiaient déjà de très nombreuses heures supplémentaires. Certes, le dispositif profite à certains personnels – ce qui contribue à rendre la critique délicate, y compris pour les organisations syndicales. Mais, d’un autre côté, on gèle le point d’indice, qui est le même pour tout le monde, et on peine à faire le tri entre ce qui est vraiment restitué au titre du « un sur deux » et ce qui aurait dû être fait de toute façon. Le Gouvernement va même jusqu’à déclarer que cela finance le glissement vieillesse technicité (GVT) et que, compte tenu de cette restitution, on peut se permettre de ne pas augmenter le point d’indice.

Mme Anne Feray, secrétaire nationale de la Fédération syndicale unitaire (FSU). Les chiffres que je vais citer sont extraits du rapport annuel sur la fonction publique – celui de 2009 et le projet de rapport pour 2010, qui vient de nous être transmis. Le premier constat qui s’impose est celui d’un recul global des rémunérations d’activité pour la fonction publique de l’État, à la fois en valeur absolue – moins 2,3% entre 2009 et 2010 – et en proportion du budget de l’État. Dans ce cadre, on note une progression des indemnités et des heures supplémentaires en coût. Le recul des traitements bruts est important : - 2,5% en 2009 et - 3,4% en 2010.

En outre, on note peu de transparence sur le retour catégoriel. Nous pensons par exemple qu’à l’éducation nationale, les heures supplémentaires ont constitué l’essentiel de ce retour catégoriel jusqu’en 2009, mais le ministère est muet sur ce point, et les lois de finances et les rapports d’exécution ne sont guère plus diserts.

M. Christian Eckert, rapporteur. Cela intègre-t-il l’augmentation des rémunérations des enseignants débutants, comme le ministre l’a affirmé tout à l’heure lors des questions au Gouvernement ?

Mme Anne Feray, secrétaire nationale de la Fédération syndicale unitaire (FSU). Oui, mais elle n’est intervenue qu’au 1er septembre 2010. Nous n’en verrons donc l’effet en année pleine qu’à partir de 2011. Les statistiques sur lesquelles nous avons travaillé sont antérieures. Le ministère de l’Éducation nationale n’en donnant aucune aux organisations syndicales, nous utilisons celles de la fonction publique, qui sont publiées avec retard. C’est pourquoi je vous ai dit que nous pensions que les heures supplémentaires constituaient l’essentiel du retour catégoriel jusqu’en 2009. En 2010, on trouvera également dans les statistiques les mesures indiciaires qui concernent les jeunes enseignants – à savoir les huit premières années de la carrière.

Cette faible transparence sur le retour catégoriel est pour nous une difficulté. Dans les documents qui nous ont été remis pour les négociations salariales, nous observons une répartition très inégale de ce retour catégoriel entre les ministères. Celui de l’éducation nationale, qui représente 47 % des emplois et la moitié des suppressions d’emploi, reçoit ainsi un peu moins d’un tiers du retour catégoriel global de la fonction publique de l’État.

On note également une nette prédominance de l’indemnitaire, sauf au ministère de la Défense, et le développement de l’individualisation et de la rémunération à la performance, avec la fameuse prime de fonction et de résultats (PFR). J’évoquerai plus tard les problèmes que nous pose cette rémunération à la performance.

Cette politique salariale est favorable aux hommes, aux cadres et aux plus âgés. Elle est liée à la dévalorisation de la grille indiciaire au détriment des plus jeunes. C’est moins flagrant pour la catégorie C, puisque le Gouvernement est obligé de revaloriser les traitements pour suivre l’évolution du SMIC. Cela dit, dans la catégorie A, le pouvoir d’achat d’un agent recruté aujourd’hui est inférieur de 15% à ce qu’était celui de son aîné recruté il y a quinze ans. Qu’est-ce qui justifie cette différence entre les générations ? Si c’est un choix, qu’il soit au moins débattu. Pour notre part, nous n’en voyons pas la justification.

Le choix de l’indemnitaire renforce cet effet, puisque les primes sont plus élevées à mesure qu’on progresse dans la hiérarchie.

Pour donner un exemple des écarts entre hommes et femmes, un professeur certifié reçoit en moyenne annuelle au titre des heures supplémentaires 828 euros s’il est une femme et 1668 euros – soit plus du double – s’il est un homme. Autrement dit, le « travailler plus pour gagner plus » creuse les écarts de rémunération entre les hommes et les femmes. De même, le taux de primes global dans la fonction publique s’établit à 17% pour les femmes et à 32% pour les hommes. Les politiques fondées sur l’indemnitaire risquent de renforcer ces écarts. Or il y a peu d’espace pour en débattre dans les instances de dialogue social.

Par ailleurs, nous sommes en désaccord avec le ministre de l’éducation nationale, qui fait valoir ces heures supplémentaires comme un élément de rémunération alors que pour nous, c’est la rémunération d’un travail supplémentaire. C’est d’ailleurs le cas de la plupart des indemnités que touchent les enseignants, qui rémunèrent des fonctions – professeur principal, préfet des études…

Les heures supplémentaires sont-elles coûteuses ? La réponse est complexe. Sur le plan fiscal, il y a un manque à gagner pour l’État – qui n’apparaît pas dans les données salariales. Pour sa part, la FSU souhaite revenir sur les dispositifs de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat (TEPA). N’oublions pas qu’au-delà de ce manque à gagner, l’État paye les cotisations sociales en lieu et place de l’agent – ce qui apparaît dans le budget du ministère. S’il y a de l’argent, autant l’employer à revaloriser le taux horaire de l’heure supplémentaire, qui reste dans la plupart des cas inférieur à la rémunération horaire.

Pénalisant pour l’emploi, le recours aux heures supplémentaires est aussi source de désordres. Tout d’abord, elles constituent en grande partie un effet d’aubaine. Les professeurs de classes préparatoires, qui en bénéficiaient bien avant la loi TEPA, n’effectuent pas nécessairement plus d’heures supplémentaires qu’avant, mais ils ont directement profité de l’exonération des cotisations. À l’origine, les heures d’interrogation - dites de « colle » – ne devaient pas entrer dans le cadre de la loi TEPA ; au final, elles sont défiscalisées pour les enseignants de classes préparatoires, mais pas pour les enseignants du second degré ou les « thésards » qui peuvent être appelés à les suppléer !

Cela induit aussi des désordres dans le fonctionnement des établissements. Certains cours ne sont pas assurés dans des établissements du second degré, parce que le rectorat a prévu de les faire assurer par des heures supplémentaires, mais que les enseignants disponibles dans l’établissement ne sont pas volontaires. Dans d’autres établissements, des enseignements sont assurés en heures supplémentaires, tandis que des enseignants de la même discipline sont en « sous service », c’est-à-dire appelés à compléter leur service dans un autre établissement. On « casse » finalement les équipes pédagogiques.

Je rappelle enfin que cette politique ne concerne qu’une partie des personnels. Non seulement les enseignants du premier degré n’en bénéficient pas, ou très peu, mais l’accès à des heures supplémentaires dépend aussi des opportunités qui se présentent.

Si nous contestons la rémunération moyenne des personnes en place (RMPP) comme mesure de l’évolution des traitements, elle apporte tout de même des informations. Je note ainsi que celle des enseignants progresse moins vite que la RMPP globale de la fonction publique – 3,2% en 2009, contre 3,6% pour l’ensemble de la fonction publique.

S’agissant des effets de la RGPP sur la gestion des carrières, nous avons déjà évoqué la perte de sens du travail et la souffrance liée à l’évolution des missions. Sur le plan statutaire, je note que le nombre de contractuels enseignants à l’éducation nationale a augmenté de 25% entre 2007 et 2011. On peut donc parler de précarisation.

Il y a un volet « personnel » dans la RGPP : c’est le glissement de la gestion des personnels au fameux « management », autrement dit l’individualisation de la gestion et de la rémunération. C’est oublier que les règles collectives créent des solidarités et permettent aux personnels d’accepter certaines décisions. Les logiques aujourd’hui à l’œuvre minent au contraire le travail d’équipe au sein de la fonction publique.

M. Vincent Hacquin, président de la Fédération des fonctions publiques de la Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC). Dans nombre d’administrations, le retour catégoriel et le « un sur deux » servent un peu à tout. Elles sont « vendues » avec plus ou moins d’habileté suivant les DRH. Les montants globaux s’élèvent certes à plusieurs centaines de millions d’euros, mais rapportés au nombre d’années d’application et à celui des agents concernés, ils sont loin d’être mirifiques.

Établir une relation entre le recours aux heures supplémentaires et les réductions d’effectifs ne nous paraît guère pertinent. En effet, les agents terminent généralement leur carrière à un niveau supérieur à celui où ils ont débuté. Ainsi, le départ à la retraite des ingénieurs n’aura aucune influence sur le niveau des heures supplémentaires des plombiers ou des électriciens du bâtiment si, par ailleurs, on renonce aux travaux de rénovation prévus par mesure d’économie.

S’agissant de l’éducation nationale, les enseignants ne sont pas les seuls à être touchés par les réductions d’effectifs. Dans le premier degré, il n’y a pratiquement pas d’heures supplémentaires : lorsque les effectifs diminuent, les classes sont plus nombreuses. C’est plus complexe dans le second degré. Lorsqu’un professeur d’une spécialité part et n’est pas remplacé, il ne peut l’être par un enseignant d’une autre spécialité. Cela brouille un peu les cartes. Par ailleurs, le coût d’une heure de professeur certifié comprend non seulement ce qui lui est payé, mais aussi ce que l’on appelle les charges 22 et 23, alors que l’heure supplémentaire est exempte de toutes ces charges. Bref, l’heure supplémentaire coûte moins cher en gestion, d’où un certain nombre de perversions dans la gestion des effectifs : on préfère payer beaucoup d’heures supplémentaires plutôt que d’embaucher. C’est une dérive délétère. Comment un professeur qui cumule les heures supplémentaires peut-il préparer ses cours et assurer les corrections ?

J’en viens aux effets de la RGPP sur la gestion des carrières. Pour l’encadrement, le haut de la pyramide est le premier touché : moins il y a de postes au sommet, moins il y a de débouchés de carrière. C’est ainsi que des personnels de catégorie supérieure occupent des postes déclassés, ce qui se répercute sur l’ensemble de la catégorie. En effet, la progression d’échelon ou de grade ne permet pas seulement de gagner plus, mais aussi d’occuper des postes plus intéressants. La RGPP a donc brouillé les cartes.

La CGC est plutôt favorable aux systèmes qui permettent de reconnaître les mérites des agents, à condition qu’ils soient fondés sur des critères aussi objectifs que possible. Ainsi, le système de PFR devrait reposer sur des critères transparents – ce qui suppose un dialogue social.

Mme Laurence Laigo, secrétaire nationale de la Confédération française démocratique du travail (CFDT). Je rejoins mes collègues sur l’absence de visibilité s’agissant des retours catégoriels des économies réalisées. Par ailleurs, les budgets qui devaient y être affectés ont été estimés à partir d’hypothèses de départs en retraite qui se sont révélées trop ambitieuses – il y a eu moins de départs que prévu, notamment du fait de la réforme des retraites. Le financement du retour catégoriel, mais aussi de réformes d’ampleur telles que la masterisation dans l’éducation nationale, a ainsi été basé sur des prévisions de départs à la retraite qui ne se réaliseront peut-être pas. On s’est donc engagé à mettre en place des réformes sans savoir vraiment si on disposerait des moyens de les financer. Cela laisse présager des difficultés.

Par ailleurs, il est délicat d’expliquer à des agents qu’ils vont être mieux payés grâce à des suppressions d’emplois. En tout cas, cela ne saurait constituer une politique de rémunérations : la progression de la rémunération va normalement de pair avec une redéfinition du poste, de l’organisation du travail, ou l’acquisition de qualifications supplémentaires. Ici, on demande aux agents de dégrader leurs conditions de travail pour pouvoir espérer bénéficier de ces retours catégoriels. Il y a véritablement une perte de sens : une politique de rémunérations doit sanctionner le travail du salarié et être lisible et durable. C’est pourquoi nous avons refusé cette approche. Il en irait évidemment autrement si l’on choisissait de revoir l’organisation des services avant d’adapter les politiques de rémunération.

La règle du « un sur deux » est une règle mathématique qui s’applique à l’ensemble des fonctions publiques et des opérateurs publics, sans prendre en compte l’évolution des missions et des besoins. Là-dessus arrivent les heures supplémentaires. Il existait déjà des dotations d’heures supplémentaires – et je crois que nul n’est opposé à ce qu’il y ait un volant raisonnable d’heures supplémentaires. Mais il s’opère ici un véritable basculement, avec l’octroi d’avantages financiers notoires. Nous étions d’ailleurs opposés à la loi TEPA, dans le secteur privé comme dans le secteur public. Il ne s’agit en effet pas de politiques durables. Comme cela a été dit, les heures supplémentaires ne sont pas un élément de rémunération ; elles ne sauraient donc constituer en soi une politique.

Se pose enfin le problème des contractuels. On supprime des emplois pour augmenter le volume des heures supplémentaires – sans nécessairement le répartir en fonction des besoins – et faire appel à des contractuels. Certes, ce n’est pas une nouveauté, mais la durée des contrats est de plus en plus courte. Bien sûr, je me félicite qu’un accord sur les contractuels soit intervenu, mais j’observe qu’il contribue à introduire de la flexibilité. Nous devons donc rester attentifs.

S’agissant des heures supplémentaires, la police ainsi que la fonction publique hospitalière sont extrêmement touchées par le dispositif qui a été mis en place, lequel, d’ailleurs, ne peut absolument pas tenir lieu d’une politique de rémunération. Les volumes horaires sont considérables et, au-delà des besoins de flexibilité, se substituent à de véritables emplois – ce qui ne devrait évidemment pas être le cas dans de telles proportions, leur coût étant quant à lui élevé pour la collectivité.

En ce qui concerne la gestion des carrières des fonctionnaires de l’État, les mesures qui ont été prises ont entraîné mécaniquement la suppression de postes sans donner lieu pour autant à un accompagnement durant la réorganisation des services non plus qu’à la mise en place de parcours professionnels dignes de ce nom : suppressions de postes, heures supplémentaires, contractuels dont la situation est délicate, mises en cause des missions de service public pour les usagers, absence de reconnaissance, telles sont les inquiétudes principales des salariés. En la matière, rien n’est finalement lisible, contrairement aux objectifs de la RGPP. La CFDT avait demandé la mise en place d’un agenda social incluant les questions de la sécurisation des parcours et de l’égalité professionnelle, mais elle n’a pas été entendue.

M. Michel Moreau, président de la Confédération française des travailleurs chrétiens des fonctionnaires et agents de l’État (CFTC). En ce qui concerne le retour des économies réalisées à la suite du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux, le moins que l’on puisse dire est qu’il y a peu de transparence – la situation est d’ailleurs différente en fonction des ministères et elle est très délicate à évaluer comme en atteste le PLF de 2011. Or, faute de lisibilité, comment les personnels pourraient-ils être motivés ?

Nous considérons que les mesures catégorielles, le retour catégoriel et les heures supplémentaires ne peuvent tenir lieu de politique salariale, même si nous avons signé un certain nombre d’accords quant à la révision des grilles. De plus, outre que tout le monde ne bénéficie pas du dispositif des heures supplémentaires, ce n’est pas l’agent mais l’employeur qui décide de leur utilisation. Enfin, comme l’a souligné Mme Laigo, leur volume dans la police et la fonction publique hospitalière est considérable alors qu’il est parfois difficile de les faire valider, voire d’en obtenir le paiement.

S’agissant de la gestion des carrières, la RGPP a plutôt complexifié les parcours professionnels avec pour conséquence de moindres mobilités fonctionnelles ou hiérarchiques compte tenu de la réduction des effectifs – en tout cas, mobilités fonctionnelles et/ou géographiques sont moins choisies que subies, même si la loi relative à la mobilité et aux parcours professionnels comporte des éléments positifs en permettant aux agents de construire des parcours professionnels valorisants.

Enfin, il est nécessaire que les agents bénéficient d’une véritable reconnaissance professionnelle et que la part qu’ils ont prise dans l’application des réformes soit reconnue à travers la politique de rémunération et lesdits parcours.

M. Emmanuel Paillusson, secrétaire général de Solidaires Concurrence, consommation, répression des fraudes (Solidaires CCRF). Il est encore un peu tôt pour mesurer le retour du « un sur deux » – c’est d’ailleurs d’autant plus difficile que la présentation budgétaire, dans nombre d’administrations et de ministères, repose sur la comparaison des différentes lois de finances initiales et que nous ne disposons pas des informations relatives aux régulations intermédiaires ainsi qu’aux réalisations finales.

Par ailleurs, nous sommes plus favorables aux mesures collectives qu’individuelles – nous souhaitons, par exemple, que le huitième échelon du C administratif s’applique à tous et une amélioration en matière de statut.

S’il est également encore un peu tôt pour se prononcer sur les effets positifs ou négatifs de la RGPP sur la gestion des carrières, nous notons cependant que la déconcentration de tous les actes de gestion a été beaucoup plus forte sur le plan local.

Nous nous interrogeons aussi sur la prime de fonctions et de résultats (PFR) : un coefficient étant appliqué, si j’ose dire, en fonction des fonctions – c’est la partie « F » –, cela signifie-t-il que certaines d’entre elles sont plus nobles que d’autres ? À mon sens, non, car nous sommes tous au service des publics. À cela s’ajoute le fait qu’au sein de certains ministères ou administrations, les agents ne choisissent pas toujours leur poste, le directeur procédant aux affectations à partir des postes vacants dont il dispose. S’agissant de la partie « R », nous considérons que le travail administratif est collectif et que nous en sommes hélas arrivé aujourd’hui à un véritable « comptage de bâtons ».

Dans une lettre qu’il a récemment envoyée à M. Michel Sappin, le Premier ministre évoque le regroupement des écoles de formation initiale de nombre d’administrations et de ministères, ce qui ne manquera pas d’entraîner des suppressions effectives. Outre que ces écoles visent à qualifier les personnels, elles permettent de diffuser et d’interpréter les textes ministériels. Or, compte tenu de la multiplication des structures – DDI, DIRRECTE, DREAL –, les agents occupent différentes fonctions au mépris des textes qui les habilitent et sans disposer des formations de base, lesquelles finiront par disparaître jusqu’à ce que la fonction publique ne soit plus que l’ombre d’elle-même.

Par ailleurs, la suite de la RGPP, et contrairement à ce que l’on prétend, le coût des déménagements en cascades que subissent les DDI et les DIRRECTE sera faramineux et ne sera jamais compensé. Ainsi, à Lyon, les locaux où était affectée une centaine de personnes coûtait-il naguère 900 000 euros ; suite à la RGPP, des personnels ont changé d’affectation et une partie des locaux a été libérée mais le loyer, lui, n’a pas bougé tandis que des agents ont été logés dans une autre tour où le manque de place a conduit à transférer ailleurs une partie des services qui y étaient installés.

N’étant pas spécialiste de la question des heures supplémentaires et n’ayant pas pu contacter mes collègues pour qu’ils me fassent part de leurs réflexions, je ne ferai pas de remarques particulières à ce propos.

M. Patrick Hallinger, secrétaire national à l’Union générale des fédérations de fonctionnaires de la Confédération générale du travail (UGFF-CGT). Je partage les points de vue qui viennent d’être exprimés, en particulier par les deux derniers intervenants.

Nous avons évalué les pertes de pouvoir d’achat depuis 2000 pour les différentes catégories de fonctionnaires : elles s’élèvent à 2 400 euros pour les fonctionnaires de catégorie C, 3 400 euros pour ceux de la catégorie B – en incluant la nouvelle réforme indiciaire –, 4 800 euros pour les attachés et 6 000 euros pour les administrateurs en milieu de carrière. Ces chiffres sont considérables, les pertes n’ayant pas été compensées par les diverses primes (PFR, retour catégoriel, intéressement,…). Compte tenu du gel du point d’indice pour une période qui s’annonce assez longue, de la baisse de la partie fixe des rémunérations et du tassement consécutif de la grille indiciaire, l’aspect pervers des nouveaux mécanismes qui ont été mis en place saute aux yeux. À cela s’ajoutent les conséquences financières sur les régimes sociaux – la défiscalisation des heures supplémentaires et la comptabilité des primes impliquent une moins-value fiscale – et sur les retraites des agents.

Chacun connaît les chiffres de la RGPP : les 7 milliards d’économies réalisées et la loi TEPA devaient contribuer à réduire les dépenses publiques. Or, non seulement la dette a explosé mais, de plus, le non remplacement d’un fonctionnaire sur deux n’entraînerait une économie que de 550 millions seulement.

De surcroît, les conséquences de la RGPP sont souvent négatives en matière de mobilité puisqu’une gestion en termes de plafond d’effectifs complique le passage d’un secteur à l’autre.

Plus globalement, la RGPP devait avoir des effets bénéfiques pour les usagers, les contribuables et les fonctionnaires ; or, c’est le contraire qui s’est produit puisque le déficit s’est accru, que les impôts ont augmenté et que la rémunération des fonctionnaires n’a cessé de se dégrader. Le dialogue social, certes, s’est développé – on passe en effet plus de temps pour expliquer la raison d’être des suppressions d’emplois et combien la PFR et l’intéressement accroîtront la reconnaissance du travail accompli –, mais la plaie demeure béante. Pourtant, les fonctionnaires ont besoin d’être reconnus car ils demeurent attachés à leur boulot malgré les politiques menées et ils assument les réformes voulues par le pouvoir politique.

Enfin, alors que les fonctionnaires sont de plus en plus qualifiés, ils sont de plus en plus maltraités, le Gouvernement jouant à plein sur la crise actuelle. Une telle politique ne pouvant perdurer, il importe de réviser le mode de gestion des personnels induit par la révision générale des politiques publiques – je rappelle notamment à ce propos le discours du Président de la République à l’Institut régional d’administration (IRA) de Nantes au mois de septembre 2007 – et il faut remettre sur la table les questions liées à la gestion de l’emploi public et au statut.

M. François Cornut-Gentille, rapporteur. Quel regard portez-vous sur la gestion des carrières ? Quid de la fusion de certains corps et des passerelles entre les différentes fonctions publiques ? Est-ce souhaitable ou envisageable ?

Je considère, par ailleurs, que la majorité et l’opposition ont raté la décentralisation : les problèmes territoriaux que vous avez évoqués s’expliquent en effet parce que nous n’avons pas su réorganiser l’articulation des échelons national et local.

M. Christian Eckert, rapporteur. Cela fait tout de même dix ans que nous ne sommes plus aux affaires mais nous n’allons pas polémiquer pour savoir à qui décerner la palme du ratage ! Gardons notre sérieux et préservons l’esprit constructif qui nous anime…

Mme Isabelle Sargeni-Chetaud, secrétaire nationale de la Fédération syndicale unitaire (FSU). La réforme de l’État, mais pour quoi faire ? C’est bien parce que nous ne sommes pas d’accord avec la manière dont la RGPP a répondu à cette question que nous souhaitons faire part de nos propositions.

La réforme de l’État ne doit tendre qu’à rendre effective – et pas seulement incantatoire – la mise en place de meilleurs services publics à la population en assurant partout et pour tous les mêmes droits ; or, ce n’est pas le cas dans un certain nombre de territoires qui se sentent abandonnés, notamment dans les domaines de la santé et de l’éducation, mais aussi, plus globalement, de tous les services publics. De fait, nous devons être animés par un souci d’équilibre sans jamais laisser quiconque au bord du chemin – ce qui n’est actuellement pas du tout le cas.

Nous tenons à souligner trois points.

Premier point : une réforme de l’État ne peut se faire sous pression budgétaire intense et avec le seul objectif de « réduire les dépenses publiques ». Alors que s’ouvre le débat concernant le PLFR, nous considérons que la fonction publique a été particulièrement « impactée » par les choix qui ont été réalisés ces dernières années sur un plan économique et qu’une politique qui se fait au détriment du service rendu aux usagers ne peut être validée ou acceptée par l’opinion et, a fortiori, par les personnels.

S’agissant des déficits publics et de la dette, la FSU considère qu’il importe de trouver des recettes supplémentaires comme le Gouvernement semble d’ailleurs s’en aviser un peu tardivement. La logique visant à diminuer les dépenses est mauvaise si l’on tient à sortir de la situation que nous connaissons : elle entraînera en effet une baisse de l’activité et des recettes fiscales, elle contribuera à aggraver les inégalités et elle nécessitera donc in fine de nouvelles interventions de l’État et des services publics. Si tel ne devait pas être le cas, un transfert de charges encore plus important ne manquerait pas de se produire pour les collectivités territoriales à moins que certaines missions ne soient carrément abandonnées.

Deuxième point : une réforme ne peut se faire sans contrôle démocratique ; or, nous avons assisté à l’inverse tant en ce qui concerne l’application de la RGPP que les restructurations territoriales comme nombre d’élus et d’usagers l’ont d’ailleurs déploré – le Parlement a pourtant un rôle essentiel à jouer en la matière.

S’agissant des indicateurs de qualité du service public, nous avons contesté la façon dont le conseil de modernisation des politiques publiques s’est emparé des feux rouge, orange et vert lors de la dernière commission. Miraculeusement, le vert domine : prise en charge de la difficulté scolaire dans le premier degré – alors que les postes d’aide ont été massivement supprimés et que personnels et parents, aujourd’hui même, se mobilisent –, remplacement des enseignants… Il suffit que le dispositif existe pour qu’il soit considéré comme effectif, les remontées des différents ministères étant d’ailleurs plus ou moins fiables. Il serait selon nous pertinent de réveiller ou de créer des organismes indépendants associant usagers et personnels afin de définir des indicateurs permanents par rapport aux missions et aux attentes du public.

Troisième point, enfin : une réforme ne peut se faire sans les personnels ou contre eux, à tous les niveaux. Les cadres de la fonction publique se sont montrés extrêmement critiques quant aux fusions de services et des résistances se sont fait jour afin de sauver ce qui peut l’être. De plus, le mal-être des agents est patent : dans un certain nombre de secteurs, ils ont perdu confiance en l’État employeur. Par ailleurs, s’il importe d’accroître le travail interministériel, la mobilité forcée est évidemment contre-productive, notamment au sein des DDI. J’ajoute que la mise en concurrence ou la « placardisation » des personnels sur certains postes ou missions ont considérablement aggravé la situation.

La FSU souhaite qu’un véritable dialogue social s’instaure au sein duquel le paritarisme jouerait tout son rôle. Ces dernières années, les comités techniques et les commissions paritaires statutaires ont parfois été vidés de leur sens au nom de leur caractère consultatif et les avis qu’ils ont formulés – il est vrai souvent négatifs – n’ont jamais été suivis par le Gouvernement.

M. Bernard Van Craeynest, président de la Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC). Les comparaisons avec l’Allemagne fleurissent de toute part mais elles sont infondées s’agissant des missions régaliennes et de la fonction publique. Pays plus vaste et plus peuplé que le nôtre – même si son évolution démographique diffère de la nôtre –, l’Allemagne ne compte pas 26 régions, 101 départements, 36 500 communes, des intercommunalités etc. Elle ne supporte dès lors pas les mêmes coûts ni les mêmes charges. Si, le 4 mars prochain, nous fêterons le trentième anniversaire de la première loi de décentralisation dite loi Defferre, le moins que l’on puisse dire est que l’on n’a pas encore défini la répartition des tâches, des rôles et des moyens qui y sont afférents, laquelle demeure donc une priorité.

Si, par ailleurs, nous nous félicitons de disposer du deuxième réseau diplomatique au monde – l’Allemagne est en cinquième position –, nous avons assisté à une réorganisation subreptice des ambassades en trois classes : à l’heure où nous aurions besoin d’accroître notre influence, en particulier commerciale, nous ne nous donnons manifestement pas les moyens de rayonner partout comme il le faudrait en portant nos technologies et nos savoir-faire. De la même manière, l’augmentation de la délinquance implique de rénover ou de construire des prisons et je ne vois pas comment cette mission régalienne pourrait faire l’objet d’une délégation de service public – plus de places, c’est aussi plus de personnels, ce qui suppose un suivi budgétaire précis.

S’agissant de la gestion des personnels, dont j’ai eu l’occasion de discuter avec le ministre Sauvadet, on ne peut que se féliciter de la transposition, le 7 septembre, de l’accord sur les travailleurs précaires mais il y a loin de la coupe aux lèvres, depuis l’égalité salariale jusqu’à la mobilité entre les fonctions publiques. De surcroît, le ministère « des » fonctions publiques est censé débattre des conditions d’emploi et du déroulement des carrières de l’ensemble des agents alors que ces derniers relèvent de ministères dont l’histoire est singulière, chacun d’entre eux étant tributaire d’accords spécifiques – nous savons tous combien les disparités sont grandes, en particulier en ce qui concerne les primes alors que dans le secteur privé les statuts du personnel font l’objet d’une harmonisation lors des restructurations liées aux fusions et aux acquisitions. Si nous voulons encourager la mobilité entre les fonctions publiques, il faut se diriger, comme la CFE-CGC le prône depuis de nombreuses années, vers la constitution d’une vraie fonction publique de métiers, une et indivisible, qui seule favorisera la lisibilité et la cohérence dans la gestion des carrières : c’est ainsi que notre cohésion sociale et nos institutions y gagneront.

Mme Laurence Laigo, secrétaire nationale de la Confédération française démocratique du travail (CFDT). Je suis sensible à la remarque que vous avez formulée s’agissant de la décentralisation qui, au lieu de s’accroître, reflue : nous assistons en effet, à certains égards, à une forte recentralisation.

En amont de la gestion des personnels se posent les questions de la gouvernance – missions de service public et interventions de l’État ou des collectivités territoriales – et de la répartition plus lisible des compétences. Si nous sommes tous d’accord pour moderniser la fonction publique, comment organiser une discussion publique intégrant l’ensemble des échelons, mais également le Parlement, afin d’accroître la transparence et de favoriser un véritable suivi ? Un rapport sur l’emploi public serait sans doute opportun.

Il est difficile, monsieur Cornut-Gentille, de donner des exemples de gestion de carrières tant les situations diffèrent d’un territoire à l’autre. Nous avons besoin, certes, d’un cadre national fixant les grands objectifs, mais le problème est de savoir comment les appliquer au service de nos concitoyens – qui sont aussi contribuables – tout en laissant des marges de manœuvre, non pour faire n’importe quoi mais pour permettre une adaptation à toutes les situations spécifiques, seul moyen pour que la confiance revienne.

Le dialogue social territorial ou la démocratie sociale territoriale ne sont certes pas une panacée mais les conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (CESER), dont les compétences pourraient être renforcées, constituent un bon observatoire pour examiner l’évolution des services publics et donner un avis quant à l’adéquation des missions de service public et la prise en compte de la spécificité des territoires avec les moyens déployés et les besoins constatés. Nous demandons donc toujours un passage en revue approfondi de l’action publique à partir des évaluations qui sont réalisées.

S’agissant des personnels, le Gouvernement a demandé aux partenaires sociaux d’engager une négociation. Un accord a été signé sur la représentativité et la modernisation du dialogue social, mais on ne peut demander aux différents acteurs d’accroître leur légitimité et de travailler à la rénovation des règles – ce qui est en effet nécessaire – sans que cela se traduise jamais sur le terrain. Les syndicats et l’ensemble des personnels doivent donc être associés à de telles restructurations. Un certain nombre d’outils pourraient d’ailleurs être mis en place afin de limiter les dégâts et de favoriser l’accompagnement social – je pense, par exemple, à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.

Le dogme du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux, quant à lui, doit être supprimé, et la gestion de l’emploi devrait être aussi adaptée que possible, la visibilité étant la condition sine qua non de la mobilité. Il faut favoriser les parcours professionnels évolutifs, y compris à travers un changement de métier, l’approche liée aux compétences n’étant en rien antinomique avec le fonctionnement actuel des fonctions publiques. De ce point de vue-là, la constitution d’un agenda social s’impose.

Pour ce qui est, enfin, des conditions de travail, si des CHSCT ont été mis en place au sein des fonctions publiques, il importe également que des lieux décentralisés de dialogue voient le jour au plus près des salariés afin de déterminer les conditions d’amélioration de leur quotidien.

M. Michel Moreau, président de la Confédération française des travailleurs chrétiens des fonctionnaires et agents de l’État (CFTC). Le manque d’information, d’association, d’appropriation et de dialogue social est patent. Selon la CFTC, un vrai débat doit être organisé sur les missions de l’État et sur l’organisation des services publics en y associant certes les personnels – dont chacun a souligné combien ils ont le sens du service public et combien ils sont prêts à formuler des propositions – mais également les usagers, l’État et les collectivités territoriales.

Il convient également de donner « du sens et de la reconnaissance » : parce que le manque de formation et d’explication est patent s’agissant des réformes engagées et que les agents sont inquiets quant à leur avenir et à celui de leurs missions, il importe de rétablir la confiance. De plus, les équipes constituées ne doivent pas éclater au profit d’une gestion de plus en plus individualisée des carrières et des rémunérations. Confiance et motivation résulteront en effet d’une plus grande visibilité du sens des réformes et de l’organisation des services ainsi que d’une plus grande équité dans la gestion des carrières et des rémunérations.

Nous avons toujours été favorables à la mobilité à condition, bien entendu, qu’elle soit choisie. Les fusions de corps peuvent la faciliter, de même qu’elles permettent d’avoir des parcours professionnels plus valorisants. Effectuer une mobilité choisie au sein de la fonction publique d’État et en fonction des priorités gouvernementales me semble également une démarche très positive. Enfin, la mobilité entre les fonctions publiques est décisive, notamment dans un contexte de réduction des effectifs afin d’éviter des mobilités géographiques non souhaitées. Toutefois, la réduction des effectifs, l’absence d’harmonisation des régimes indemnitaires, le contexte budgétaire sont des obstacles à la mise en œuvre de cette politique.

Enfin, il y a un paradoxe à relever le manque de dialogue social – lequel est pourtant essentiel – après le vote de la loi du 5 juillet sur la rénovation du dialogue social. Il est vrai qu’il ne se décrète pas, pas plus que les réalités auxquelles nous sommes confrontés.

M. Emmanuel Paillusson, secrétaire général de Solidaires Concurrence, consommation, répression des fraudes (Solidaires CCRF). Selon nous, il n’existe pas trois fonctions publiques mais une seule qui se décline en trois pans. De plus en plus de concours sont d’ailleurs aujourd’hui ouverts à l’ensemble des agents, et c’est heureux. Néanmoins, tout le monde n’est pas capable de tout faire, si séduisante que soit cette idée, même si certains métiers peuvent être exercés dans plusieurs administrations, services ou ministères. Toutefois, pour que les personnels puissent effectivement emprunter les passerelles offertes et profiter de la mobilité, ils doivent bénéficier d’une formation initiale et continue de haut niveau. Or, compte tenu de la baisse des budgets et de la diminution des effectifs, c’est le tutorat qui tend de plus en plus à la remplacer quand il ne devrait que la conforter.

De plus, un directeur émettra toujours un avis positif quant à la mobilité éventuelle d’un agent, mais celle-ci n’en sera pas moins conditionnée par son remplacement, lequel, compte tenu des suppressions d’emplois, sera difficile.

La RGPP vise, en fait, à fusionner des services et des administrations. Or, comme j’ai pu le constater moi-même lors de la fusion, au milieu des années 80, des services de la direction de la consommation et de la répression des fraudes et de ceux de la direction des services de la concurrence et des prix, il faudra des années pour que les agents se sentent pleinement membres de la structure dans laquelle ils travaillent. À cela s’ajoute le fait que, statutairement, ces derniers demeurent liés à leur administration ou à leur ministère d’origine.

Par ailleurs, le stress et le mal-être au travail s’accroissent de plus en plus, démotivant ainsi les personnels. Bien que secrétaire général de Solidaires depuis des années, je n’ai jamais reçu autant d’appels d’agents en détresse et en pleurs en raison d’un déplacement ou parce que, responsables de service, ils se sont pourtant vu imposer un supérieur malgré les bons résultats qu’ils ont obtenus. C’est phénoménal !

Nous avons donc besoin d’un véritable dialogue social avec des contenus et des moyens que la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP), hélas, s’emploie à réduire : peut-on donc prétendre promouvoir un tel dialogue et devoir financer les réunions avec l’administration grâce aux droits syndicaux ?

M. Patrick Hallinger, secrétaire national à l’Union générale des fédérations de fonctionnaires de la Confédération générale du travail (UGFF-CGT). À la différence des rapports d’étape sur la RGPP concoctés dans la tour d’ivoire de Bercy, notamment celui élaboré en pleine crise financière, à la fin de 2008, et qui pourrait être résumé d’un « Tout va bien, on continue » – si ce n’est pas de l’autisme social, cela ! –, nous considérons que la RGPP a du plomb dans l’aile et qu’il est temps de tourner la page.

Des réformes sont certes nécessaires. Elles n’impliquent pas, comme celles engagées depuis 2007, de réduire les effectifs et d’abandonner la place au secteur privé – dans le cadre, qui plus est, d’une démarche exclusivement verticale où l’on apprend parfois dans la presse les décisions qui ont été prises. Il est temps de partir sur de nouvelles bases en mettant en place de nouveaux projets pour la fonction publique fondés sur l’intérêt général, le droit et l’égalité de traitement. En dix ans, la situation de l’Éducation nationale, par exemple, s’est particulièrement dégradée au point qu’elle en est devenue inquiétante. Il en est de même de l’emploi, du logement ou de la santé. Les clivages que nous connaissons mettent en danger notre cohésion sociale alors que, dans le contexte actuel, le débat public devrait permettre de mettre en évidence le caractère complémentaire des trois pans de la fonction publique.

Parce que la fonction publique est en effet une, nous sommes favorables à un statut unifié de manière à organiser la mobilité de la manière la plus optimale possible. Cela implique la création de nouveaux lieux de dialogue social au sein des territoires car il ne s’agit pas simplement de donner un CV à un chef de service ou à un élu. À cet égard, peut-être serait-il opportun de créer dans les régions des observatoires de la mobilité de l’emploi.

Précisément, un nouveau dialogue social doit voir le jour à partir des accords de Bercy, qui constituent pour ce faire une bonne base. Il doit être l’occasion d’inaugurer de nouvelles démarches pour gérer les services, tant sur le plan national que départemental ou local, et rassembler les personnels, l’administration, les élus et les usagers – pour lesquels la fonction publique est faite.

Parce que les commissions départementales des services publics se réunissent très peu, il importe de créer de nouveaux espaces d’écoute où il serait possible de synthétiser l’ensemble des apports, y compris d’ailleurs sur un plan régional – même si je n’ignore pas les CESER. Il doit en être de même s’agissant de la LOLF – entre le plan de performance et le rapport final, il devrait être possible d’intervenir – ou de l’évaluation d’un service. Cela est d’autant plus important que les compétences des collectivités territoriales se sont accrues, de même, d’ailleurs, que celles du préfet de région, représentant de l’État.

Certes, la commission de modernisation de la fonction publique, rattachée à Bercy, constitue le seul lieu rassemblant les syndicats, les élus et les usagers mais elle aussi se réunit peu et est trop cloisonnée.

La Direction générale de la modernisation de l’État (DGME), elle aussi dépendante de Bercy, ne devrait-elle pas quant à elle être rattachée directement aux services du Premier ministre ?

Je note, également, que le secrétariat général du Gouvernement, qui joue un rôle important dans la cohérence des politiques interministérielles, la DGAFP et la DGME interviennent sur les mêmes thèmes. S’agissant plus précisément des missions et des emplois, le secrétariat général du Gouvernement accomplit un travail positif avec les organisations présentes au sein du comité technique paritaire (CTP) central. Suite aux réunions des 12 et 13 septembre, en prenant en compte un contexte dégradé, celui-ci s’est prononcé pour un statu quo et pour établir avec les ministères un état des lieux des situations.

Il convient de mettre fin aux hémorragies d’emplois au sein des directions départementales – avec une baisse annuelle d’environ 8 % des effectifs ces trois dernières années –, hémorragies qui non seulement sont brutales mais qui, de plus, excèdent très largement le principe du « un sur deux ».

M. François Cornut-Gentille, rapporteur. Mesdames, messieurs, je vous remercie pour ces interventions mais n’hésitez pas, comme l’a rappelé M. Eckert, à nous communiquer des informations complémentaires par écrit.

M. Christian Eckert, rapporteur. Je note que notre débat sur la RGPP a peu à peu glissé sur la décentralisation, ce qui d’ailleurs se comprend. L’échec de certains à réorganiser les collectivités territoriales résulte de la non définition des compétences et des missions. Nous avons donc besoin de déterminer ce qui relève des secteurs public et privé, d’identifier ensuite les prérogatives de l’État, des collectivités territoriales, des opérateurs de l’État ou des partenariats, sachant que nous devons, enfin, tenir compte du contexte européen dans lequel nous évoluons. Dès lors, il devrait être possible de décliner les moyens nécessaires, de promouvoir un dialogue social décentralisé – ou non – et de créer les lieux de concertation adéquats.

ANNEXE 2

LISTE PAR MINISTÈRE DES MESURES DE LA RGPP PORTANT OPTIMISATION, RATIONALISATION, MUTUALISATION,
FUSION ET MODERNISATION

OPTIMISER / OPTIMISATION

Affaires étrangères et européennes

- gestion du patrimoine immobilier de l’État à l’étranger

- processus métiers consulaires

- processus ressources humaines

Défense et anciens combattants

- fonction communication

- organisation des structures et espaces d’entraînement et de soutien

- soutien des sites parisiens de l’administration centrale

- fonction maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres

- fonction maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques

- fonction protection des installations de la Défense

- organisation et fonctionnement des transports de surface des forces armées

- fonction « munitions »

- organisation du service de santé des armées

- organisation des structures de formation du personnel

- services de recrutement

- organisation de gestion des ressources humaines

- fonction « payes » et « droits individuels »

- processus de liquidation des pensions de retraite

- fonction infrastructure

- fonction « finance »

- organisation de la chaîne « service national »

Écologie, développement durable,
transports et logement

- fonctions support

- efficience de l’administration centrale

- gestion, financement et gouvernance de l’Institut français du pétrole (IFP) Énergies nouvelles – avec Économie, finances et industrie

- processus de délivrance des titres de navigation maritime

Justice et libertés

- principaux processus des services judiciaires

- fonctions transversales en administration centrale

Intérieur, outre-mer,
collectivités territoriales et immigration

- fonction ressources humaines

- fonction immobilière

- fonction achats

- organisation et fonctionnement de la sécurité civile

- gestion administrative de la Police nationale

- programme de contrôle de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRP)

- organisation et études de l’Insee

- gestion et programmation des activités du Commissariat à l’énergie atomique (CEA)

Travail, emploi et santé

- moyens des Agences régionales de santé (ARS) – avec Solidarité et cohésion sociale

Éducation nationale, jeunesse
et vie associative

-organisation scolaire du 1er degré

- réseau des établissements du second degré

- qualité de l’accueil et du service rendu aux familles

Budget, comptes publics, fonction publique et Réforme de l’État

- procédures de recouvrement

- la politique d’achats de l’État

Enseignement supérieur et recherche

- allocation des moyens des universités

- allocation des moyens des organismes de recherche

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

- pilotage national des actions en matière d’hygiène alimentaire

Sports

- aide de l’État en faveur du sport

RATIONALISER / RATIONALISATION

Services du Premier ministre

- gestion des systèmes d’informations

- services logistiques et immobiliers

Affaires étrangères et européennes

- services généraux

Défense et anciens combattants

- soutien pétrolier

- administration des anciens combattants

- dispositif d’accompagnement de la reconversion des personnels

- soutien des systèmes d’information et de communication

Écologie, développement durable,
transports et logement

- organisation de Voies navigables de France (VNF)

Justice et libertés

- aide juridictionnelle

- administration centrale

- implantations immobilières parisiennes

- traitement des frais de justice

Intérieur, outre-mer,
collectivités territoriales et immigration

- implantation des bases opérationnelles de la sécurité civile et de la gendarmerie nationale

- structures de formation initiale

- lisibilité des outils de la police technique et scientifique

- infrastructures et support des systèmes d’information et de communication

- systèmes d’information et leur pilotage

- fonctions support de la gendarmerie

- contrôles dans le secteur des hôtels-cafés-restaurants

- gestion des centres d’accueil des demandeurs d’asile

Économie, finances et industrie

- fonctions supports de la direction générale du Trésor

- organisation administrative des réseaux des chambres de commerce et de métiers

- fonctions supports des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) – avec Travail, emploi et santé

- systèmes d’information des Direccte

- fonctions support et le secrétariat de la direction générale de l’industrie, de la compétitivité et des services (DGCIS)

- organisation d’Oséo

- périmètres et coordination des services statistiques ministériels

Travail, emploi et santé

- processus métiers des Direccte

- fonctions supports de l’Inspection du travail

- démarches administratives du champ Emploi des Direccte

Éducation nationale, jeunesse
et vie associative

- Institut de la jeunesse et de l’Éducation populaire (INJEP)

- missions d’information des acteurs et « opérateurs » jeunesse

- les subventions des associations dans le secteur jeunesse et éducation populaire

- répartition des inspecteurs de la jeunesse et des sports – avec Sports

Budget, comptes publics, fonction publique et Réforme de l’État

- fonctions support de la DGFip

- réseau des conservateurs des hypothèques

- fonctions support de la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI)

Enseignement supérieur et recherche

- fonctions support des universités

- fonctions soutien des universités

- fonctions support et soutien des organismes de recherche

- dispositifs d’incitation à l’innovation et valorisation de la recherche

- organisation des acteurs de la recherche

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

- fonctions support en administration centrale

- fonctions support en services déconcentrés

- organisation de France AgriMer

- processus de gestion des aides

- moyens de soutien à la gestion de la forêt privée

- organisation de l’Office national des forêts (ONF)

- intervention des organismes qui garantissent la sécurité de la chaîne alimentaire

Culture et communication

- organisation des services en charge de la définition et du pilotage de la politique culturelle

- fonctions supports en administrations centrales et déconcentrées

- réseau des écoles du ministère

Solidarité et cohésion sociale

- fonctions support des services déconcentrés – avec Sports

MUTUALISER / MUTUALISATION

Services du Premier ministre

- fonctions ressources humaines

- systèmes d’informations

- services financiers

- documentation

- secrétariat

Affaires étrangères et européennes

- fonction support à l’étranger

Défense et anciens combattants

- dispositif d’accompagnement à la reconversion des personnels

Écologie, développement durable, transports et logement

- effectifs police de l’eau et de la nature

- moyens Agence de l’eau et de l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques

Justice et libertés

- fonctions supports des services déconcentrés

- dispositif d’interceptions judiciaires

Intérieur, outre-mer,
collectivités territoriales et immigration

- maintenance des moyens aériens sécurité civile / gendarmerie nationale

- formations spécialisées police nationale / gendarmerie nationale

- structures de coopération internationale police nationale / gendarmerie nationale

- gestion administrative déconcentrée

- fonctions supports Préfecture de police de Paris

- fonctions support de la gendarmerie

- moyens affectés à la représentation de l’État

Économie, finances et industrie

- fonctions supports des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) – avec Travail, emploi et santé

Travail, emploi et santé

- cabinets des ministères sociaux – avec Solidarité et cohésion sociale et Sports

- fonctions supports des administrations centrales - avec Solidarité et cohésion sociale et Sports

Éducation nationale, jeunesse
et vie associative

- organisation de certains concours

- certaines formations

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

- fonctions supports des administrations centrales

- fonctions supports en services déconcentrés

Culture et communication

- fonctions supports des administrations centrales et déconcentrées

Solidarité et cohésion sociale

- fonctions supports des administrations déconcentrées – avec Éducation nationale, jeunesse et vie associative et Sports

Sports

- expertise disciplinaire des personnels techniques et pédagogiques

FUSION / FUSIONNER

Affaires étrangères et européennes

- services de coopération culturelle des ambassades et centres culturels

Défense et anciens combattants

- services de soutien du secrétariat général administratif (SGA) et de la direction générale de l’armement (DGA)

Écologie, développement durable, transports et logement

- corps des ingénieurs des ponts et chaussées et des eaux et forêts

Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

- directions d’administration centrale

Économie, finances et industrie

- corps des mines et des télécommunications

- service statistique du ministère de l’Industrie avec l’Insee

Travail, emploi et santé

- des administrations centrales supports - avec Solidarité et cohésion sociale et Sports

Éducation nationale, jeunesse et vie associative

- directions de la vie associative et de la jeunesse et de l’éducation populaire

Budget, comptes publics, fonction publique et Réforme de l’État

- corps de la fonction publique d’État

MODERNISER / MODERNISATION

Services du Premier ministre

- gestion de l’information délivrée par téléphone aux usagers

- mission d’édition, de diffusion et d’information du public

Défense et anciens combattants

- fonction armement

- fonction habillement au sein des forces armées

- fonction restauration-hôtellerie-loisirs

Écologie, développement durable, transports et logement

- application du droit des sols

Justice et libertés

- fonctionnement du casier judiciaire

- fonctionnement des greffes pénitentiaires

Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

- la délivrance des permis de conduire

- les fonctions comptables de l’office français de l’immigration et de d’intégration (OFII)

Budget, comptes publics, fonction publique et Réforme de l’État

- chaîne de traitement des produits budgétaires des collectivités et organismes locaux

- gestion du parc automobile de l’État

- organisation de la chaîne de la dépense sur les volets ordonnateurs et comptables

Culture et communication

- gestion du centre Pompidou

- gestion de la Réunion des monuments nationaux (RMN)

- gestion des archives de l’État

ANNEXE 3

LETTRE DE M. BERNARD ACCOYER, PRÉSIDENT DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE, À M. LUC CHATEL, MINISTRE DE L’ÉDUCATION NATIONALE, DE LA JEUNESSE ET DE LA VIE ASSOCIATIVE

ANNEXE 4

LETTRE EN RÉPONSE DE M. LUC CHATEL, MINISTRE DE L’ÉDUCATION NATIONALE, DE LA JEUNESSE ET DE LA VIE ASSOCIATIVE À M. BERNARD ACCOYER, PRÉSIDENT DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE

ANNEXE 5

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURS

– M. Pierre-Yves Duwoye, secrétaire général des ministères de l’Éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, et de l’Enseignement supérieur et de la recherche (29 mars 2011) ;

– M. François-Daniel Migeon, directeur général, direction générale de la modernisation de l’État (12 avril 2011) ;

– M. Henri-Michel Comet, secrétaire général du ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration (12 avril 2011) ;

– M. Christian Piotre, secrétaire général pour l’administration de la défense (24 mai 2011) ;

– M. Emmanuel Rébeillé-Borgella, secrétaire général du ministère de la Justice et des libertés (31 mai 2011) ;

– M. Gilles Pedini, associé responsable du secteur public de la société Deloitte (7 juin 2011) ;

– M. Jean-François Monteils, secrétaire général du ministère de l’Écologie, du développement durable, des transports et du logement, Mme Corinne Etaix, directrice du service du pilotage et de l'évolution des services, et M. Benoît Piguet, conseiller du secrétaire général (7 juin 2011) ;

– M. Guillaume Boudy, secrétaire général du ministère de la Culture et de la communication, Mme Noami Peres, directrice de cabinet, et M. Pierre Mainguy, correspondant modernisation au département de la stratégie et de la modernisation, ministère de la Culture et de la communication (21 juin 2011) ;

– Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire générale des ministères chargés des affaires sociales, Mme Hélène Furnon-Petrescu, chargée de mission modernisation-RGPP auprès de Mme Emmanuelle Wargon (21 juin 2011) ;

– M. Julien Dubertret, directeur du Budget, ministère du Budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, Mme Amélie Verdier, sous-directrice, et M. Alexandre Grosse, chef du bureau de la politique budgétaire, ministère du Budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État (28 juin 2011) ;

– M. Dominique Lamiot, secrétaire général des ministères économique et financier, au ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie, et M. Philippe Levêque, chef de service, délégué à la modernisation, au ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie (5 juillet 2011) ;

– M. Jean-Paul Delevoye, ancien Médiateur de la République, Président du Conseil économique, social et environnemental, et M. Christian Le Roux, directeur du cabinet du Président Delevoye (20 septembre 2011) ;

– Mmes Isabelle Sargeni-Chetaud et Anne Feray, secrétaires nationales de la Fédération syndicale unitaire (FSU), M. Emmanuel Paillusson, secrétaire général de Solidaires Concurrence, consommation, répression des fraudes (Solidaires CCRF), M. Michel Moreau, président de la Confédération française des travailleurs chrétiens des fonctionnaires et agents de l’État (CFTC), M. Patrick Hallinger, secrétaire national à l’Union générale des fédérations de fonctionnaires de la Confédération générale du travail (UGFF-CGT), M. Bernard Van Craeynest, président de la Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC), M. Vincent Hacquin, président de la Fédération des fonctions publiques de la Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres (CFE-CGC), M. Michel Robert, membre du Bureau fédéral des fonctions publiques de la (CFE-CGC) et président du syndicat de la Poste des fonctions publiques de la CFE-CGC, et Mme Laurence Laigo, secrétaire nationale de la Confédération française démocratique du travail (CFDT) (27 septembre 2011) ;

– M. Jérôme Filippini, directeur, adjoint au secrétaire général du Gouvernement, directeur interministériel des systèmes d’information et de communication (Disic) (4 octobre 2011) ;

– Mme Marie-Pierre Luigi, secrétaire générale de l’académie de Versailles, M. Philippe-Pierre Cabourdin, recteur de l’académie de Reims, et Mme Catherine Vieillard, secrétaire générale de l’académie de Reims (18 octobre 2011).

ANNEXE 6

RAPPORT D’ERNST & YOUNG SUR LES MESURES DE LA RGPP CONCERNANT LA MODIFICATION DES MODALITÉS
DE DÉLIVRANCE DU PASSEPORT ET DU CERTIFICAT D’IMMATRICULATION DES VÉHICULES

Ce rapport est accessible en pdf, grâce au lien suivant :

http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rap-info/i4019.pdf

1 () Socialiste, radical, citoyen.

2 () Rapporteur budgétaire pour avis sur les crédits de la mission Enseignement scolaire : Enseignement professionnel pour le projet de loi de finances pour 2012 et de la mission Enseignement scolaire pour le projet de loi de finances pour 2010.

3 () Rapporteur budgétaire pour avis depuis cinq ans sur les crédits de la mission : Défense : Équipement des forces – Dissuasion.

4 () M. Bernard Cazeneuve est également membre, désigné par son groupe, du Comité.

5 () Tous deux co-rapporteurs d’une mission d’information sur la mise en œuvre et le suivi de la réorganisation du ministère de la Défense (rapports d’information n° 1446 du 11 février 2009, et n° 2437 du 7 avril 2010).

6 () Rapporteur budgétaire pour avis depuis cinq ans sur les crédits de la mission Politiques des territoires.

7 () Co-président de la Mission d’évaluation et de contrôle de la commission des Finances et rapporteur spécial des crédits de la mission Ville et logement : Ville, du projet de loi de finances pour 2009.

8 () Rapporteur spécial des crédits de la mission Travail et emploi : Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi ; Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage des projets de loi de finances pour 2010, 2011 et 2012.

9 () Rapporteur budgétaire pour avis depuis cinq ans sur les crédits de la mission Sécurité.

10 () Rapporteur budgétaire pour avis depuis cinq ans sur les crédits de la mission Fonction publique et co-rapporteur de la mission d’évaluation et de contrôle de la commission des Finances sur la soutenabilité de l’évolution de la masse salariale de la fonction publique (rapport d’information n° 3797 du 12 octobre 2011).

11 () Rapporteur budgétaire pour avis sur les crédits de la mission Culture : Création ; Transmission des savoirs et démocratisation de la culture, pour les projets de loi de finances pour 2009 et 2010.

12 () Étude Ifop pour Accenture et Les Échos.

13 () À cet égard, en matière de gestion des ressources humaines, la RGPP s’inscrivait dans le fil d’orientations antérieures, appuyées sur différents volets, dont la dynamisation des parcours professionnels, le développement d’une culture du résultat ou encore la diversification du recrutement dans la fonction publique ; cf. Révision générale des politiques publiques et gestion des ressources humaines, par Jacques Chevallier, Revue française d’administration publique, n° 136, 2010.

14 () Rapport d’information n° 3797 du 12 octobre 2011, présenté par MM. Bernard Derosier, Marc Francina et Charles de La Verpillière.

15 () Rapport d’enquête présenté en annexe du tome I du rapport général n° 2857 de M. Gilles Carrez sur le projet de loi de finances pour 2011.

16 () Rapports d’information précités n° 1446 du 11 février 2009, et n° 2437 du 7 avril 2010.

17 () Rapport d’information n° 666 du 22 juin 2011 au nom de la mission d’information commune du Sénat, présenté par M. Dominique de Legge, sénateur. Cette mission était présidée par M. François Patriat.

18 () Rapport d’information n° 35 (2010-2011) du 13 octobre 2010, présenté au nom de la commission des Finances du Sénat par Mme Michèle André, sénatrice.

(19 ) Cf. Le communiqué relatant cette communication sur la revue générale des politiques publiques.

20 () Ce nombre est estimé à 300 dans les rapports rendus publics à l’occasion des CMPP des 4 avril et 11 juin 2008.

21 () Les marchés relatifs aux audits de modernisation étaient constitués de 4 lots 1, 1 bis, 2 et 3, rassemblés sous la dénomination « Assistance à la conduite d’audits et d’études de modernisation et à la ré-ingénierie de processus ». Les lots qui ont été utilisés pour couvrir la toute première phase de la RGPP étaient les lots n° 1 et 1 bis relatifs à des audits dans le domaine de la modernisation.

22 () Les rapporteurs relèvent que leur demande ne semble pas avoir été à cette occasion transmise, pour la traiter, par la DGME aux services ou au cabinet du Premier ministre. À moins que ceux-ci n’y aient répondu négativement, sans que les rapporteurs en aient été informés.

23 () S’ajoutaient à ces quatre thèmes deux sujets respectivement relatifs aux aides à la scolarité et aux opérateurs.

24 () Cette référence aux « trois scénarios » apparaît dans un autre document transmis par le ministère de l’Éducation nationale, notice généraliste intitulée « présentation pour le premier comité de suivi », qui semble s’adresser à toutes les équipes ou pôles d’audit et qui les invite effectivement à présenter devant le premier Comité de suivi deux ou trois scénarios « stratégiques ». Les rapporteurs reviendront sur cette notice dans la deuxième partie du présent rapport concernant les mesures de la RGPP.

25 () Toutes les mesures en cours bénéficiaient d’un feu vert à cette date.

26 () Le rapport rendu public à l’occasion du CMPP du 12 décembre 2007 assimile les comités de suivi à des instances décisionnelles de la RGPP, ses décisions étant, au terme de ce rapport, « soumises à l’approbation au Conseil de modernisation des politiques publiques. »

27 () M. Michel Pébereau a annoncé son départ de ce poste à compter du 1er décembre 2011.

28 () Hors le Président de la République, le Premier ministre et le ministre chargé du budget.

29 () M. Michel Pébereau avait été chargé de cette mission par une lettre de mission du 8 juillet 2005 de M. Thierry Breton, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

30 () Circulaire du Premier ministre n° 5284/SGG du Premier ministre du 18 mars 2008 relative à la RGPP - mise en œuvre des décisions du CMPP –  adressée à Monsieur le Ministre d’État, Mesdames et Messieurs les ministres, Mesdames et Messieurs les secrétaires d’État et Monsieur le Haut-commissaire

31 () Ce CMPP a abouti à des décisions pour certains domaines des politiques publiques, seuls les ministres concernés y assistant ; les domaines traités par ce CMPP étaient, dans les termes du rapport public du même jour, la création du ministère de l’Écologie, du développement et de l’aménagement durables et la modernisation de ses politiques, la modernisation du ministère de l’Agriculture et de la pêche, la création du ministère de l’Immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du co-développement et la modernisation de ses politiques, la modernisation du ministère de l’Intérieur (préfectures), la modernisation de la justice, la modernisation des services du Premier ministre, la modernisation du ministère de la Culture et de la communication, la modernisation de la politique de sécurité et la modernisation du ministère de la Défense.

32 () Compte-rendu n° 94 de la commission des Finances, de l’économie générale et du plan, audition de M. Éric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique, sur la révision générale des politiques publiques, mardi 17 juin 2008, séance de 12 h 15.

33 () Journal officiel des débats : compte-rendu intégral de la séance du jeudi 17 avril 2008, page 1702.

34 () Cf. le même compte rendu, page 1711.

35 () Cf. le même compte rendu, page 1714.

36 () Cf. le même compte rendu, page 1716.

37 () Cf. le même compte rendu, page 1720.

38 () Cf. le même compte rendu, page 1723.

39 () Cf. le même compte rendu, page 1724.

40 () Cf. le même compte rendu, page 1732.

41 () Et ce, sans même évoquer les règles de recevabilité des amendements portant sur les crédits proposés par les lois de finances, qui contraignent la façon dont un sujet peut plus particulièrement être débattu par les parlementaires.

42 () Le dispositif est issu d’un amendement adopté par la commission des Finances du Sénat lors de l’examen des crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » dans le cadre du PLF 2010 et a été présenté en séance publique par le rapporteur spécial de ces crédits, notre collègue sénateur Bernard Angels.

43 () Ce qui constituait bien l’intention initiale de notre collègue sénateur Bernard Angels.

44 () Gauche démocrate et républicaine.

45 () L’un des rapporteurs du présent rapport, M. François Cornut-Gentille, a participé à ce débat en séance publique.

46 () Ces trois grands subordonnés sont le chef d’état-major des armées, le délégué général pour l’armement et le secrétaire général pour l’administration.

47 () Le Comex est le Comité exécutif, présidé par le ministre de la défense, et dont les autres membres permanents sont ses trois grands subordonnés.

48 () Cette dernière phrase portant sur l’évaluation des politiques publiques a été ajoutée par le décret n° 2010-445 du 30 avril 2010. Le même décret précise qu’à ce titre, la DGME « réalise, de manière autonome ou en associant d’autres directions ou ministères, des travaux d’évaluation des politiques publiques destinés à mesurer l’efficacité et l’efficience de ces politiques en veillant à comparer leurs résultats aux objectifs poursuivis et aux moyens mis en œuvre et à dégager des voies d’amélioration. Son programme de travail est validé trimestriellement par un comité de programmation » composé à titre permanent du directeur du budget, du directeur général de la modernisation de l’État et du directeur général de l’administration et de la fonction publique ; « à titre occasionnel, en fonction des sujets traités, des représentants d’autres directions ou ministères » participent à ce comité de programmation.

49 () En s’appuyant sur l’évolution des plafonds d’emplois entre 2006 et 2012.

50 () En s’appuyant sur l’évolution des ETPT consommés entre 2006 et 2011.

51 () Le rapport du 12 décembre 2007 évoque le fait que « les agents des services, […], à l’issue de la réforme, travailleront dans des directions départementales qui ne seront plus directement rattachées à telle ou telle administration centrale. »

52 () Celui-ci nomme aux emplois de directeur des DDI, par arrêté, après avis du préfet de département intéressé. Cf. article 12 du décret n° 2009-360 du 31 mars 2009 relatif aux emplois de direction de l’administration territoriale de l’État.

53 () Gestion des ressources humaines.

54 () Si ce dispositif reposant sur deux réunions semble désormais être la procédure « de droit commun » propre au dialogue de gestion, certaines académies font état d’un nombre de réunions s’élevant à trois ou quatre par an.

55 () Il s’agit du programme intitulé « collèges et lycées pour l’innovation, l’ambition et la réussite », expérimenté à la rentrée 2010, puis étendu à la rentrée 2011, qui concerne les établissements concentrant le plus de difficultés en matière de climat scolaire et de violence. Le programme prévoit la mise en œuvre d’innovations dans les domaines de la pédagogie, de la vie scolaire, des ressources humaines, ainsi que des mesures spécifiques dans le domaine de la sécurité.

56 () Le ministère a donné pour instruction aux rectorats de ne pas réduire les effectifs des personnels administratifs exerçant dans les établissements scolaires.

57 () Le groupe de travail piloté par le SGG aborde des questions relatives aux suites de la réforme de l’administration territoriale de l’État (Réate). Il est donc légitime qu’il en soit le chef de file, puisque le pilotage de la Réate lui revient. Le caractère transverse des questions abordées, ainsi que leur importance, renforcent l’idée développée supra par les rapporteurs du rôle croissant du SGG et, partant, du Premier ministre dans la mise en œuvre de la RGPP.

58 () Encore que le feu rouge en matière de circulation impose au conducteur de s’arrêter ; il ne traduit pas le fait que le trafic est arrêté en raison d’une insuffisance du conducteur. Le parallélisme avec la RGPP n’est donc pas total.

59 () On observe que le rapport accompagnant le CMPP du 9 mars 2011, reprenant la même formule, ne précise plus que l’étude est « préalable » et « approfondie ».

60 () Cf. la proposition de loi n° 1188 renvoyée à la commission des affaires culturelles.

61 () M. Frédéric Reiss est le troisième signataire de cette proposition de loi.

62 () Ce rapport a été remis concrètement à cette date à M. Luc Chatel, ministre de l’Éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.

63 () Pour mémoire, cette équipe est composée de la direction du budget, de la DGME et de la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP).

64 () L’article 1er du décret du 22 décembre 2008 précise que les corps et emplois concernés sont fixés par arrêté interministériel des ministres chargés de la fonction publique et du budget, ainsi que du ministre intéressé.

65 () L’article 4 du décret du 22 décembre 2008 précise que ce montant annuel de référence est fixé, pour chaque grade ou emploi, par arrêté interministériel des ministres chargés de la fonction publique et du budget, ainsi que du ministre intéressé.

66 () L’article 4 du décret du 22 décembre 2008 précise que ce montant annuel de référence est fixé dans les mêmes conditions que celui concernant la part fonctionnelle.

67 () Étude réalisée par l’Ifop pour Accenture/Les Échos Conférences sur un échantillon de 803 fonctionnaires, représentatif des agents des fonctions publiques d’État et territoriale avec application de la méthode des quotas (sexe, âge, niveau hiérarchique et type de fonction publique). Les interviews ont eu lieu par questionnaire auto-administré en ligne (CAWI - Computer Assisted Web Interviewing) du 15 au 18 novembre 2010.

68 () Il s’agit d’un sondage réalisé par l’institut Ifop pour la revue Acteurs publics auprès d’un échantillon de 234 agents de la fonction publique de catégorie A. Cet échantillon a été extrait du panel d’acteurs publics de l’Observatoire des politiques publiques mis en place par Acteurs publics et l’Ifop. Les interviews ont eu lieu par questionnaire auto-administré en ligne (CAWI - Computer Assisted Web Interviewing) du 11 au 14 avril 2011.

69 () Les propos repris ci-après sont issus de l’analyse, publiée par la revue Acteurs publics, de M. Yves-Marie Cann et Mme Adeline Merceron, respectivement directeur d’études et cheffe de groupe au département « Opinion » de l’Ifop.

70 () Rapport « Des finances publiques au service de notre avenir – rompre avec la facilité de la dette publique pour renforcer notre croissance économique et notre cohésion sociale » de la commission présidée par M. Michel Pébereau. Cf. ce rapport, page 11, version « Notes bleues » en ligne.

71 () Le Premier ministre précisait dans le même discours que ces démarches ont « eu le mérite d’acclimater l’administration à la nécessité de se réformer. Pour les plus réussies d’entre elles, elles ont permis – je pense en particulier à la Lolf – de présenter les missions de l’État avec plus de clarté, d’accroître la liberté de gestion, et d’introduire la culture du résultat. »

72 () Un peu plus loin dans le même discours, le Premier ministre évoquait « l’inflation incontrôlée des dépenses ».

73 () Rapport d’information fait au nom de la mission commune d’information sur les conséquences de la révision générale des politiques publiques pour les collectivités territoriales et les services locaux par M. Dominique de Legge, n° 666, session ordinaire de 2010-2011, enregistré à la présidence du Sénat le 22 juin 2011. Cf. le tome I, pages 156 à 175.

74 () Il convient de préciser que la suppression des activités d’ingénierie concurrentielle est accompagnée du maintien de l’assistance technique fournie par l’État pour des raisons de solidarité et d’aménagement du territoire (Atesat), créée par la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes à caractère économique et financier. L’Atesat est proposée aux communes et groupements de communes ne dépassant pas respectivement 10 000 et 15 000 habitants et dont le potentiel fiscal est inférieur à certains plafonds. Le service rendu peut concerner la voirie, l’aménagement et l’habitat.

75 () Cf. son rapport n° 666 (2010-2011), page 166. Il ajoute que la même mesure a conduit à un gain de 1 200 ETPT pour le ministère chargé de l’agriculture sur la période 2009-2011.

(76 ) Rapport sur la réorganisation territoriale de la protection judiciaire de la jeunesse, présenté notamment par M. Vincent Léna, conseiller référendaire à la Cour des comptes, secrétaire général du Comité d’enquête sur le coût et le rendement des services publics (CECRSP), juillet 2009, page 8. Selon les auteurs de ce rapport d’étape, celui-ci « exprime l’opinion des rapporteurs et n’engage pas la responsabilité du Comité qui adoptera, ultérieurement, des conclusions dans lesquelles il fera connaître sa position, et fera l’objet d’un document distinct. »

77 () Cf. cette annexe dans le RAP 2010 de la mission ministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », page 421.

78 () Cf. cette annexe dans le RAP 2010 de la mission ministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », page 421.

79 () Cf. cette annexe dans le RAP 2010 de la mission ministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », page 420.

80 () Cf. cette annexe dans le RAP 2009 de la mission ministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », page 355.

81 () Cf. cette annexe dans le RAP 2009 de la mission ministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », page 357.

(82 ) Rapport d’information fait au nom de la mission commune d’information sur les conséquences de la révision générale des politiques publiques pour les collectivités territoriales et les services locaux par M. Dominique de Legge, n° 666, session ordinaire de 2010-2011, enregistré à la présidence du Sénat le 22 juin 2011. Cf. le tome I, pages 67 à 101.

83 () Ce décret modifie substantiellement le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l’organisation et à l’action des services de l’État dans les régions et départements. La mise en œuvre du décret du 16 février 2010 a fait l’objet d’une circulaire du Premier ministre du 13 décembre 2010 n° 5506/SG.

84 () La réforme est entrée en vigueur respectivement le 1er juillet 2010 en Île-de-France et le 1er janvier 2011 dans les régions d’outre-mer, dans un format adapté aux spécificités de ces région.

85 () La réforme est entrée en vigueur respectivement le 1er juillet 2010 en Île-de-France et le 1er janvier 2011 dans les départements d’outre-mer dans un format adapté aux ensembles régionaux concernés. Cf. le décret n° 2009-1484 du 3 décembre 2009 relatif aux directions départementales interministérielles.

86 () Rapport d’information fait au nom de la commission des Finances du Sénat sur la mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques (RGPP) dans les préfectures par Mme Michèle André, n° 35, session ordinaire de 2010-2011, 13 octobre 2010.

(87 ) À l’instar de trois autres décisions, comme en témoigne le communiqué relatif au Conseil des ministres du 20 juin 2010 : la fusion des services de renseignement, la réforme de la carte judiciaire et « la réduction de la charge administrative sur les entreprises et les collectivités locales (“l’impôt papier”). »

88 () Cf. le décret n° 2008-310 relative à la direction générale des finances publiques.

89 () Notamment par M. Christian Sautter, alors ministre des Finances, qui a finalement démissionné avant d’avoir pu engager la réforme.

90 () Communication de la Cour des comptes à la commission des finances du Sénat en application de l’article 58-2° de la LOLF et L. 132-4 du code des juridictions financières, « la fusion de la direction générale de la comptabilité publique et de la direction générale des impôts : un premier bilan », octobre 2011. Cf. la synthèse de cette communication, pages 9 à 15.

91 () Les missions régionales de santé.

92 () S’agissant du régime général, les ARS se sont ainsi substituées aux caisses régionales d’assurance maladie (CRAM) et ont repris une partie des moyens et effectifs des directions du service médical de l’assurance maladie. Les ARS ont par ailleurs repris une partie des moyens et effectifs du régime de la mutualité sociale agricole (MSA) et du régime social des indépendants.

93 () Selon un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), « appliqué à l’assurance maladie obligatoire, le “risque” correspond aux dépenses remboursées par l’assureur public, et sa “gestion” désigne les actions mises en œuvre pour maîtriser leur évolution et améliorer leur efficience (contrôle de l’exactitude de la prise en charge, lutte contre les fraudes et les gaspillages, promotion des techniques et des organisations présentant le meilleur rapport coût/qualité) ». Cf. le rapport relatif à la « mission gestion du risque » établi par Pierre-Yves Bocquet et Michel Peltier, Inspection générale des affaires sociales RM2010-163P, décembre 2010, page 8, point 23.

94 () Une évaluation de cette réforme avait été demandée au CEC par le groupe SRC en octobre 2009, à un période où elle n’était qu’à peine engagée. Compte tenu de l’ensemble de ses impacts sur le tissu local, cette réforme pourrait justifier une telle évaluation approfondie à l’avenir. Le lecteur est renvoyé, pour de plus amples analyses, aux rapports d’information successifs présentés, au nom de la commission de la Défense, par M. Bernard Cazeneuve, membre du CEC et du présent groupe de travail, et par l’un de vos rapporteurs (François Cornut-Gentille), rapports portant sur la mise en œuvre et le suivi de la réorganisation du ministère de la Défense (n° 1446 du 11 février 2009 et n° 2437 du 7 avril 2010).

95 () Eu égard aux développements précédents, la baisse du nombre des directions a été plus marquée que celle du nombre des directeurs.

96 () Le choix du regroupement des sites parisiens du ministère de la Défense a marqué l’abandon d’un projet précédent – le Pôle stratégique pour Paris (PSP) envisagé antérieurement à 2007 par l’ancien ministre de la Défense Mme Michèle Alliot-Marie –  privilégiant l’aménagement en profondeur du site de l’îlot Saint-Germain.

97 () Cf. le projet annuel de performance de la mission interministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » annexé au projet de loi de finances pour 2012, page 118.

98 () Selon le PAP 2012 de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », page 125, les « étapes du programme ont été présentées au sein d’un échéancier et validées par les instances de gouvernance de l’ONP […] le 13 décembre 2007. »

99 () Cf. le projet annuel de performance de la mission interministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » annexé au projet de loi de finances pour 2012, page 138.

100 () Cf. le projet annuel de performance de la mission interministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » annexé au projet de loi de finances pour 2012, page 139.

101 () Le référentiel Marianne est, à ce jour, constitué de 19 engagements de service relatifs à la disponibilité des services, aux modalités d’accueil du public, aux délais de traitement des demandes, à la prise en compte des suggestions et réclamations, à la qualité de l’écoute et à l’adaptabilité des organisations et modalités de travail des services.

102 () Rapport intitulé « Modernisation de l’État, qualité des services publics et indicateurs » de M. François Cornut-Gentille, député de Haute-Marne, parlementaire en mission auprès de M. Éric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, mars 2010. Cf. notamment les deux premières des principales recommandations, page 3.

103 () Selon le rapport du 9 mars 2011, « cette évaluation a été conduite par l’institut BVA à partir d’un échantillon représentatif de la population française. Des usagers ont été recrutés à partir d’un échantillon de 6.046 Français représentatifs de la population des résidents en France âgés de 15 ans et plus […]. La représentativité de l’échantillon a été assurée selon la méthode des quotas en termes de sexe, âge, profession du chef de famille, après stratification par région et catégorie d’agglomération. »

104 () Ce rapport a été présenté publiquement à l’occasion du colloque organisé conjointement par M. Bernard Accoyer, Président de l’Assemblée nationale, Président du CEC, et M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, les 9 et 10 novembre 2011, à l’Hôtel de Lassay.

105 () Compte-rendu n° 94 de la commission des Finances, de l’économie générale et du plan, audition de M. Éric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique, sur la révision générale des politiques publiques, mardi 17 juin 2008, séance de 12h15. M. Éric Woerth a présenté des chiffres identiques à la commission des Finances du Sénat le 18 juin 2008.

106 () Rapport public annuel 2010, Cour des comptes, page 19.

107 () Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, juin 2009, Cour des comptes, page 80.

108 () Cf. la première partie du présent rapport et les travaux de l’équipe d’audit dirigée par M. Pierre Lepetit pour l’Éducation nationale.

109 () Annexe au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2009, mission ministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », page 396.

110 () Annexes au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion, mission ministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » :

– pour 2009, pages 343 à 389 ;

– pour 2010, pages 395 à 461.

111 () Annexe au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2009, mission ministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », page 344.

112 () Cf. le même document, page 346.

113 () Cf. le même document, page 345.

114 () Cf. le même document, page 346.

115 () Annexe au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2010, mission ministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », page 396.

116 () hormis celle, évoquée supra, relative au 7 milliards d’euros d’économie pour l’ensemble de la RGPP au titre de la période 2009-2011.

117 () Cet impact pluriannuel net s’élevait à 6 milliards d’euros dans la prévision initiale du Gouvernement présentée après le troisième CMPP du 11 juin 2008.

(118 ) Cour des comptes, rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, juin 2010, pages 90 et 91.

119 () Soit, comme évoqué supra, pour la phase 1 de la RGPP, 7,7 milliards d’euros d’économies brutes en juin 2008, ramenées à compter de 2010 à 7 milliards d’euros. Puis à 6,8 milliards d’euros dans les réponses faites aux rapporteurs par la direction du budget.

120 ( Annexe au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour 2009, mission ministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », page 351. L’annexe au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour 2010 n’a pas modifié cette définition.

121 () Dans quelques cas peu nombreux, une mesure est associée à un impact budgétaire mesuré en termes à la fois d’ETPT et de baisse des dépenses de fonctionnement et d’intervention.

122 () Le titre 2 correspond aux dépenses de personnel dans la nomenclature budgétaire issu de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).

123 () La direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services (DGCIS) au sein du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie, OSEO et l’Agence nationale de la recherche (ANR).

124 () Annexe au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2010, mission ministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », page 421.

(125 ) Rapport public annuel 2010, Cour des comptes, pages 19 et 20.

126 () Annexe au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2010, mission ministérielle « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », page 406.

127 () Autrement dit, pour calculer l’évolution d’une économie en 2011 par rapport à 2010, il faut retrancher au gain constaté en 2011 le gain constaté en 2010.

128 () L’économie s’élèverait à 1,6 milliard d’euros depuis 2006 ; dans la mesure où, bien que « labellisée » à compter de 2008 dans le cadre de la RGPP, cette réforme a repris un objet et des résultats qui lui étaient antérieurs.

129 () Cette mesure a été décidée par le CMPP du 30 juin 2010. Le rapport rendu public à l’occasion de ce CMPP précise que « l’examen et la transposition de normes de réduction des dépenses de fonctionnement seront mis en œuvre dans le cadre des conventions d’objectifs et de gestion signées avec les organismes de sécurité sociale ; un plan de réforme des systèmes d’information (convergence, interopérabilité) sera engagé et une stratégie immobilière sera mise en place, sur la base des critères appliqués par l’État. »

130 () Les gains sur les « coûts environnés » ne constituent pas stricto sensu une mesure de la RGPP mais lui sont étroitement liés, puisqu’ils découlent de la mise en œuvre de la « règle du un sur deux ».

131 () Les 2  mesures parmi les 10 qui ne font pas l’objet de développements spécifiques sont les suivantes :

– la mesure relative à Réseau ferré de France (RFF), décidée par le CMPP du 4 avril 2008, consiste, via la programmation d’un contrat de performance liant cet établissement public à l’État signé le 3 novembre 2008, à modifier les tarifs d’utilisation des infrastructures qu’il gère pour les rapprocher de leurs coûts d’exploitation. D’où une économie attendue sur la subvention versée par l’État à RFF ;

– la mesure relative à la rationalisation de l’organisation d’Oséo a été décidée par le CMPP du 30 juin 2010. Son contenu précis n’a pas été détaillé à ce stade.

132 () Cet article dispose notamment que « toute mesure de réduction ou d’exonération de cotisations de sécurité sociale, instituée à compter de la date d’entrée en vigueur de la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale, donne lieu à compensation intégrale aux régimes concernés par le budget de l’Etat pendant toute la durée de son application. »

133 () La direction du budget précise que la même opération de recensement « a été finalisée en 2011 pour les 41 autorités administratives indépendantes. Ce travail est également engagé pour les biens de l’État à l’étranger. » Il est à noter que la démarche concernant l’immobilier des AAI a été engagée à la suite des travaux du CEC sur ces autorités, présentés dans le rapport d’information n° 2925 de MM. René Dosière et Christian Vanneste du 21 octobre 2010 (recommandation n° 21, page 143.

134 () Ainsi que, à l’été 2011, pour « la très grande majorité des opérateurs de l’État (hors universités) » selon la direction du budget.

135 () Les collectivités territoriales assurent le financement de la plus grande partie des fonctions supports « environnant » l’activité des enseignants.

136 () Un peu moins de 25 000 ETPT toutefois pour 2009.

137 () Issues des articles 22 de la loi n° 2009-431 du 20 avril 2009 de finances rectificative pour 2009 et 210 de la loi de finances pour 2011.

138 () Soit les deux tiers de l’ensemble des économies de fonctionnement pour la période 2009-2013 référencées dans le tableau précédent.

139 () Le dossier de présentation du 2e CMPP du 4 avril 2008, qui établissait un bilan des mesures décidées lors du 1er CMPP du 12 décembre 2007, n’a pas non plus apporté de précisions sur le contenu de cette mesure. Il en va de même du dossier de présentation du CMPP du 11 juin 2008, qui se borne à préciser que des mesures de révision des dépenses fiscales seront présentées lors des PLF 2009 à 2011.

140 () La formulation initiale de cette mesure était la suivante : « Généralisation des contrats pluriannuels de performance et des lettres de missions aux dirigeants des opérateurs ».

141 () Le ministère de la Culture évoque la création des établissements publics du château de Fontainebleau, du musée national Picasso et de Sèvres–Musée de la céramique.

142 () La mesure est assortie d’un feu orange dans le dernier rapport public associé au CMPP du 9 mars 2011. Ce rapport indique qu’une circulaire du ministre de la Culture du 31 août 2010 « précise en effet les missions et les charges qui s’attachent aux labels attribués aujourd’hui par l’État ainsi qu’aux réseaux nationaux qu’il accompagne [et] définit les modalités de contractualisation et d’évaluation ainsi que les règles d’attribution ou de retrait d’un label ». Le rapport note cependant qu’il reste à mettre en œuvre d’ici la fin de l’année 2011 un « plan pluriannuel de réallocation des ressources » susceptible de « préserver les marges artistiques tout en permettant un rééquilibrage entre les régions, dans un contexte de stabilité des crédits d’intervention. »

143 () Cette mesure a été mise en œuvre, mais de manière progressive, sur plusieurs années à compter de 2012, par la loi de finances rectificative de juin 2011, par un amendement du Gouvernement reprenant une recommandation du rapport n° 3524 du 9 juin 2011 du CEC sur l’AME présenté par MM. Claude Goasguen et Christophe Sirugue.

144 () On note que cet objectif a été atteint sur le seul déploiement du passeport biométrique, alors qu’il avait été calibré eu égard au déploiement de la carte nationale d’identité électronique (CNIe) qui n’a pas eu lieu à ce stade. L’effort de productivité de l’administration a donc, sur ce point, été supérieur aux prévisions.

145 () La proposition de loi relative à la protection de l’identité, support législatif dont l’adoption est nécessaire au lancement du déploiement de la CNIe, a été adopté en deuxième lecture par le Sénat le 3 novembre 2011. Seul son article 5, relatif au fichier des données à caractère personnel devant préserver l’intégrité des données requises pour la délivrance du passeport français, demeure à ce stade en discussion.

146 () Vos rapporteurs ont complété ce tableau par les plafonds d’emplois associés par ministère au PLF 2008 et par une évaluation en pourcentage de l’évolution des effectifs des ministères de 2008 à 2011 (en loi de finances pour 2011) et de 2008 à 2012 (en PLF 2012)

147 () Ce dernier point montre que la place croissante des services du Premier ministre au fil de l’avancement de la RGPP ne constitue pas uniquement un choix institutionnel (que les rapporteurs ont évoqué supra) ; une augmentation des moyens humains accompagne cette évolution.

148 () Pour l’année 2008, la déclinaison par ministère des départs en retraite n’est pas disponible.

149 () Le décret d’avance a ouvert des crédit pour un montant de 760 millions d’euros nets.

150 () La direction du budget indique 37 320 départs en retraite constatés en 2008 pour l’Éducation nationale ; le ministère en a constaté 37 884.

151 () Des divergences existent aussi sur le nombre des départs en retraite constatés ; dans une bien moindre mesure toutefois, c’est-à-dire pour moins d’une dizaine de départs chaque année.

152 () Pour des effectifs beaucoup moins importants que la DGFip, le programme 156 concerne aussi le service des retraites de l’État (SRE).

(153 ) Circulaire n° DF-2BPSS-10-3139, outil de budgétisation pluriannuelle des dépenses de personnel (version actualisée) adressée à l’attention de Mmes et MM. les directeurs des affaires financières et directeurs des ressources humaines.

154 () Communication de la Cour des comptes à la commission des Finances de l’Assemblée nationale faite en application de l’article 58-2° de la LOLF sur les conditions d’une stabilisation en valeur de la masse salariale de l’État, présentée à la commission des Finances le 5 octobre 2010. Cf. le compte-rendu n° 2 de la commission des Finances, du même jour, session ordinaire 2010-2011, auquel est annexée cette communication, page 25.

155 () L’accompagnement éducatif a concerné initialement les collèges de l’éducation prioritaire. La mesure RGPP a correspondu à sa généralisation dans tous les collèges et à son extension aux écoles primaires de l’éducation prioritaire.

(156 ) Communication de la Cour des comptes à la commission des Finances de l’Assemblée nationale faite en application de l’article 58-2° de la LOLF sur les conditions d’une stabilisation en valeur de la masse salariale de l’État, présentée à la commission des Finances le 5 octobre 2010. Cf. le compte-rendu n° 2 de la commission des Finances, session ordinaire 2010-2011, du même jour, auquel est annexée cette communication, page 25.

(157 ) On observe qu’en application de la doctrine de la direction du budget évoquée supra, aucune de ces mesures ne devrait constituer une mesure catégorielle.

158 () On note que le nombre des bénéficiaires de cette prime s’élève à 19 321 au titre de l’année scolaire 2009-2010 dans les 16 rectorats qui ont renseigné cette question en réponse à vos rapporteurs ; soit une dépense pour l’État de presque 10 millions d’euros pour ces seuls 16 rectorats.

(159 ) Non assujettissement à l’impôt sur le revenu et aux cotisations sociales salariales.


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