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N° 4033

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 7 décembre 2011.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

en conclusion des travaux de la mission
sur
la formation initiale et les modalités de recrutement des enseignants

ET PRÉSENTÉ

par M. Jacques Grosperrin,

Député.

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INTRODUCTION 7

I.- LE BILAN CONTRASTÉ DE LA MASTÉRISATION DE LA FORMATION ET DU RECRUTEMENT DES ENSEIGNANTS INTERVENUE EN 2010 11

A. L’ORIGINE DE LA RÉFORME : UN SYSTÈME DE FORMATION ET DE RECRUTEMENT INADAPTÉ 11

1. Un dispositif en voie d’épuisement 11

a) Une formation excessivement académique 12

b) Un système de formation isolé en Europe et aux résultats insatisfaisants 15

2. Des instituts universitaires de formation des maîtres peu appréciés 17

a) Des résultats mitigés mais qui ne doivent pas être caricaturés 17

b) Des jugements sévères de la part des jeunes professeurs 19

B. UNE RÉFORME LARGEMENT CRITIQUÉE 20

1. Un double objectif qualitatif 22

a) Des enseignants plus qualifiés 22

b) Des enseignants mieux rémunérés 25

2. Une réforme à visée également économique 26

3. Des masters « Enseignement et formation » problématiques 27

a) Une élaboration conflictuelle des maquettes de formation 27

b) Une offre de diplômes protéiforme 28

c) Une professionnalisation de la formation qui reste à démontrer 31

d) Des parcours de formation incohérents 34

4. Un allongement de la durée des études discriminant sur le plan social 35

5. Un recrutement disciplinaire paradoxalement accentué 37

a) Le choix des dates d’épreuves ou le « scénario du pire » 38

b) Des épreuves contredisant l’objectif de professionnalisation 39

6. Une année 2010-2011 fortement anxiogène pour les enseignants stagiaires 42

a) Le tableau d’ensemble des conditions d’affectation des enseignants stagiaires, des démissions et des congés maladie 43

b) Une situation plus tendue pour les professeurs stagiaires du second degré 49

c) Des temps de formation professionnelle insatisfaisants 55

d) Des difficultés provisoires ? 60

e) Une innovation dont l’efficacité est soumise à condition : le tutorat 62

7. Une chute inquiétante du nombre de candidats aux concours 65

a) Un phénomène conjoncturel ou une tendance lourde ? 65

b) L’assèchement du vivier des professeurs de lycée professionnel 68

II.- UNE URGENCE : PRÉSERVER L’ATTRACTIVITÉ DU MÉTIER D’ENSEIGNANT ET GARANTIR LA QUALITÉ DES RECRUTEMENTS 71

A. ENGAGER SANS TARDER UNE RÉFLEXION GLOBALE SUR LA FORMATION DES ENSEIGNANTS 71

1. Un enjeu décisif pour l’avenir de notre système éducatif 72

2. De récentes mesures ministérielles bienvenues qu’il conviendrait d’amplifier 74

a) Des enseignants stagiaires presque tous affectés sur des postes fixes à la rentrée 2011 74

b) Des expérimentations prometteuses de formation par alternance 75

c) Deux mesures ponctuelles d’amélioration à adopter rapidement 79

B. MIEUX ARTICULER LE CONCOURS ET LA FORMATION ET RÉDUIRE LE POIDS DES ÉPREUVES DISCIPLINAIRES 80

1. Écarter les fausses solutions 80

2. Organiser les épreuves d’admissibilité en fin de licence et d’admission en fin de master 85

a) Un dispositif comportant plusieurs points forts 85

b) Un master en alternance succédant à une licence comportant des éléments de préprofessionnalisation 87

c) Un mémoire de recherche recentré 91

d) Des épreuves à caractère académique pour l’admissibilité et professionnel pour l’admission 92

e) Des certifications en langue vivante et informatique devant être supprimées 93

f) Une agrégation repositionnée comme un concours interne de promotion professionnelle 94

3. Prévoir pour les étudiants admissibles des stages obligatoires, plus longs et rémunérés en master 96

a) Un temps de formation professionnelle obligatoire et significatif 96

b) Un tiers temps de formation continuée pour les enseignants stagiaires devenu inutile 98

4. Publier des référentiels de formation et spécialiser les masters par « métier » d’enseignant 99

a) Un référentiel des compétences professionnelles des enseignants retravaillé 99

b) Un cahier des charges de la formation conclu entre l’État et les universités 100

c) Des masters spécialisés par types de métiers dont un master de « l’École du socle commun » 101

5. Définir un plan de recrutement pluriannuel des enseignants 104

C. DIVERSIFIER LES RECRUTEMENTS ET LES MODES D’ACCÈS AU MÉTIER 105

1. Renforcer l’accompagnement social des étudiants inscrits en master « Enseignement » 105

2. Attribuer des bourses aux bacheliers issus des quartiers défavorisés s’engageant à passer le concours 107

3. Développer le recrutement sur la base de la validation des acquis de l’expérience 107

4. Recourir davantage aux professeurs associés 108

D. MIEUX ACCOMPAGNER LES ÉTUDIANTS-STAGIAIRES ET LES ENSEIGNANTS DÉBUTANTS 109

1. Développer le soutien par les enseignants expérimentés auprès des étudiants stagiaires et des enseignants débutants 109

a) Consolider et développer le rôle des tuteurs et des maîtres formateurs 109

b) Confier des audits pédagogiques aux corps d’inspection 113

2. Élaborer un corpus de « références pédagogiques opposables » 113

3. Encadrer davantage l’affectation des jeunes enseignants 114

4. Enrichir la formation continue et déconcentrer sa gestion 114

E. FAIRE ÉVOLUER LE STATUT DES INSTITUTS UNIVERSITAIRES DE FORMATION DES MAÎTRES 115

F. MENER UNE RÉFLEXION SUR LES OBLIGATIONS DE SERVICE DES ENSEIGNANTS ET L’AVENIR DU CONCOURS 116

1. Adapter le service des enseignants à la diversité de leurs missions 117

2. Remplacer le concours par le master d’ici dix à quinze ans 117

LISTE DES 18 PROPOSITIONS DE LA MISSION 119

TRAVAUX DE LA COMMISSION 121

CONTRIBUTIONS 139

ANNEXES 151

ANNEXE 1 : COMPOSITION DE LA MISSION D’INFORMATION 151

ANNEXE 2 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA MISSION 153

INTRODUCTION

Créée le 16 février 2011 par la commission des affaires culturelles et de l’éducation (1), la mission d’information sur la formation initiale et les modalités de recrutement des enseignants a souhaité dresser un premier bilan de la mise en œuvre de la réforme dite de la mastérisation.

Décidée en 2008 et devenue effective à la rentrée 2010, cette réforme a porté le niveau de recrutement des enseignants du premier et du second degré de la licence (bac + 3 années d’études supérieures) ou de la maîtrise (bac + 4 pour le concours de l’agrégation) au niveau du master (bac + 5), des décrets ayant modifié les conditions de titre pour chaque corps (professeurs des écoles, professeurs certifiés, professeurs de lycée professionnel et professeurs d’éducation physique et sportive) (2).

Cette réforme étant récente et relevant très clairement du domaine réglementaire, il peut paraître surprenant qu’une commission ait décidé, moins d’un an après sa mise en application, d’en examiner les modalités. Mais comment le Parlement aurait-il pu, en réalité, ignorer les débats passionnels qu’elle suscite ?

Certes, aucune réforme n’est consensuelle à l’Éducation nationale. Mais rares sont celles qui, comme ici, sont présentées comme étant sans équivalent au regard de celles engagées depuis trente ans, et les critiques exprimées ont été cette fois plus nombreuses qu’à l’accoutumée au point que le président du comité de suivi du master, M. Jean-Michel Jolion, a estimé que si le nouveau dispositif de formation et de recrutement ne s’est pas « effondré » lors de sa première année d’application, c’est uniquement grâce à la détermination des professeurs stagiaires et des étudiants se destinant au métier d’enseignant (3).

Les jugements exprimés dans les rapports officiels ont été eux aussi – le fait est exceptionnel – réservés, voire sévères. Outre le rapport d’étape remis à la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche par M. Jean-Michel Jolion (4), on peut citer celui remis au ministre de l’éducation nationale par M. Éric Debarbieux, président de l’Observatoire international de la violence à l’école, qui constate, s’agissant de la formation des enseignants, que « les besoins ne forment pas désormais en France un simple consensus mais une véritable clameur. (…) Il ne s’agit donc pas de revenir sur cette mastérisation mais d’en éviter les effets pervers. Le haut niveau disciplinaire acquis par les enseignants est certainement une bonne chose, mais la réalité est qu’en université la formation professionnelle n’est au mieux pas assurée, au pire totalement dénigrée, la pédagogie, voire la psychologie, n’étant pas considérées comme choses sérieuses » (5). Le dernier avis adopté par le Conseil économique, social et environnemental sur l’école est encore plus critique puisqu’il estime qu’« au moment où l’ensemble du système éducatif devrait être mobilisé autour de l’objectif de la réussite de tous les élèves, la formation des nouveaux enseignants apparaît plus désorganisée que jamais. La formation professionnelle proprement dite semble disparaître ou du moins se trouve considérablement amoindrie alors que sa modernisation et son relèvement auraient dû constituer une priorité de la réforme » (6).

La vivacité et la quasi-unanimité des critiques entendues par la mission sont liées au fait que cette réforme, loin de porter sur un aspect « technique » du fonctionnement de notre système éducatif, affecte son premier paramètre d’efficacité.

La qualité d’un système scolaire dépend en effet de sa capacité à former et recruter les personnes les plus qualifiées pour exercer le métier d’enseignant. Ainsi que le souligne le cabinet de conseil McKinsey&Company, les systèmes scolaires les plus performants veillent « systématiquement » à inciter « les personnes les plus compétentes à devenir des enseignants – car la qualité d’un système scolaire ne peut excéder celle de son corps enseignant » et à fournir à ces personnes « une formation adaptée pour en faire des enseignants qualifiés – car seule l’amélioration de l’enseignement dans les salles de classe produit des résultats » (7).

Il est clair que, compte tenu de ces enjeux, stratégiques, le Parlement ne peut se désintéresser d’un tel sujet d’autant qu’il a fixé dans la loi du 23 avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école une obligation de résultats au système scolaire qui détermine, chaque année, ses moyens budgétaires.

Afin d’effectuer son travail d’évaluation et de proposition, la mission a donc procédé à quarante-deux auditions et tables rondes, entendant au total quatre-vingt-douze personnes (quatre d’entre elles ayant été entendues à deux reprises), dont naturellement le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, M. Luc Chatel, et la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme Valérie Pécresse.

Sur la base de ce travail d’investigation, le présent rapport se propose, dans un premier temps, d’établir un bilan de la mastérisation, puis, dans un deuxième temps, d’esquisser des voies d’amélioration du système de formation initiale et de recrutement des enseignants.

*

* *

Le 29 juin 2011, la mission a adopté un premier projet de rapport présenté par votre rapporteur. Sa publication n’ayant pas été autorisée par la commission des affaires culturelles et de l’éducation lors de sa réunion du 6 juillet dernier, votre rapporteur, compte tenu des débats de votre commission, des auditions complémentaires menées le 20 et le 25 octobre et de la transmission de statistiques actualisées, a décidé de présenter un nouveau rapport. Il a été adopté par la mission d’information le 30 novembre 2011.

I.- LE BILAN CONTRASTÉ DE LA MASTÉRISATION DE LA FORMATION ET DU RECRUTEMENT DES ENSEIGNANTS INTERVENUE EN 2010

Le principe d’une élévation du niveau de formation des enseignants n’a pas été contesté devant la mission. L’objectif poursuivi par la réforme – améliorer la formation initiale des futurs enseignants et leur faire acquérir une plus grande qualification universitaire et professionnelle – est d’ailleurs consensuel, d’autant que le bilan mitigé des instituts universitaires de formation des maîtres rendait nécessaire une évolution du dispositif existant.

Pour autant, le système de formation initiale et de recrutement mis en place en 2010 ne convainc pas. Force est de suivre, sur ce sujet, le jugement rendu par M. Marcel Pochard, conseiller d’État, président de la commission sur la condition enseignante (2007-2008) : si l’orientation de la réforme est bonne, en revanche, « l’improvisation » à laquelle elle a donné lieu est très critiquable (8).

A. L’ORIGINE DE LA RÉFORME : UN SYSTÈME DE FORMATION ET DE RECRUTEMENT INADAPTÉ

Chacun le sait, notre système scolaire conduit à beaucoup trop d’échecs. Cette situation ne pourra être surmontée qu’en s’appuyant sur un corps de professionnels qualifiés, capables d’individualiser leur enseignement pour prendre en compte la diversité des élèves. Or, pendant très longtemps, l’Éducation nationale n’a pas sélectionné les futurs professeurs en fonction de leurs compétences professionnelles. Au contraire, conformément à la tradition éducative française, elle le faisait sur la base de leurs seuls mérites académiques. Ainsi, la préparation au métier n’était organisée qu’après le recrutement, ce qui rattachait la France à un modèle de formation minoritaire en Europe.

1. Un dispositif en voie d’épuisement

Académique, le système antérieur de formation initiale et de recrutement des professeurs l’était à un double titre : ces derniers étaient titulaires d’un diplôme universitaire et devaient réussir un concours exigeant qui, tous deux, attestaient leur maîtrise de la ou des disciplines qu’ils enseigneraient. La part réservée, dans ce dispositif, à la formation professionnelle étant, de ce fait, résiduelle, elle ne pouvait préparer les enseignants à « faire classe ».

a) Une formation excessivement académique

Ce sont les réformes menées en 1989-1991 par le ministre de l’éducation nationale de l’époque, M. Lionel Jospin, qui ont unifié le niveau de recrutement des enseignants à la licence (l’agrégation nécessitant la maîtrise) et le dispositif de formation pour tous les niveaux d’enseignement, primaire, secondaire et professionnel. Les écoles normales, les écoles normales nationales d’apprentissage et les centres pédagogiques régionaux ont alors disparu au profit des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM), créés par l’article 17 de la loi du 10 juillet 1989 d’orientation sur l’éducation.

De 1991 jusqu’à 2010, le dispositif de formation et de recrutement des enseignants du premier et du second degré a donc été le suivant : un cursus universitaire conduisant à la licence ou à la maîtrise, les études étant essentiellement disciplinaires, suivi d’une première année de formation, au cours de laquelle les étudiants, à l’IUFM, puis en université après la loi du 23 avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école, ou bien comme candidats libres, préparaient le concours. Ce n’est qu’après la réussite au concours et leur recrutement, lors d’une seconde année d’IUFM organisée en alternance, que les professeurs stagiaires abordaient les problèmes professionnels concrets : ils exerçaient en pratique accompagnée (premier degré) ou en responsabilité dans une ou plusieurs classes (second degré), suivaient, parallèlement, à l’institut, des séquences de formation et devaient produire un mémoire professionnel.

La formation au métier n’était donc assurée qu’en fin de parcours, c’est-à-dire pendant l’année de stage suivant le recrutement. Ainsi que le rappelle le Livre vert sur l’évolution du métier d’enseignant de la commission sur la condition enseignante, « pour le premier degré, 80 % des candidats n’[avaient] pas préparé le concours en IUFM et, depuis le début des années 1990, plus de 40 % des reçus [l’étaient] régulièrement comme candidats libres. La formation en alternance ne [pouvait] donc concerner l’ensemble des futurs professeurs des écoles que durant leur année de stage, après la réussite au concours. Pour le second degré, la plupart des candidats aux concours [étaient] inscrits dans les IUFM, mais cette inscription [était] largement formelle, ne [supposait] qu’un minimum d’alternance professionnelle, et la préparation effective [avait] lieu dans les universités. La formation pratique n’[avait] donc lieu que durant l’année de stage, après la réussite au concours » (9).

En outre, comme l’ont observé plusieurs interlocuteurs de la mission, la formation dispensée, à l’IUFM comme à l’université, était « pilotée » par le concours, qui ne visait que l’« excellence disciplinaire », le concours, dans l’imaginaire collectif, conférant à son lauréat une distinction universitaire, l’agrégation et le certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré étant d’ailleurs souvent confondus, à tort, avec un grade délivré par l’université. C’est la raison pour laquelle, selon M. Gilles Baillat, président de la Conférence des directeurs d’IUFM, on ne dira pas, en France, d’un « professeur de mathématiques », un titre revendiqué dans d’autres pays, qu’il est un enseignant de cette discipline, mais qu’il est un « mathématicien » (10).

Cette approche très particulière du recrutement se nourrissait d’une conception tout aussi particulière du métier d’enseignant. Comme l’a indiqué le Syndicat général de l’éducation nationale-CFDT, en France, le métier était perçu comme étant « essentiellement à base académique », la formation professionnelle n’étant assurée qu’après le recrutement. À l’opposé de cette conception, on trouve celle qui considère que le métier d’enseignant a, indiscutablement, un fondement académique, mais qu’il implique aussi des compétences pédagogiques. Les pays qui retiennent cette approche s’en remettent aux universités pour former les enseignants, le concours étant, lui, destiné à évaluer des savoirs professionnels (11).

Ce contexte explique pourquoi la formation initiale des enseignants, qui est un sujet essentiel pour de nombreux pays développés, ait pu être, d’après M. Éric Charbonnier, analyste à la division des indicateurs de l’Organisation de coopération et de développement économiques, « un peu oubliée en France » (12).

De plus, l’opposition – par définition stérile, mais complaisamment entretenue par certains essayistes et les médias – entre « les savoirs » et « la pédagogie » qui sous-tendait une telle conception du métier d’enseignant conduisait le système de formation à méconnaître ses vrais enjeux.

En effet, les seules questions que devraient se poser les enseignants ont trait à la didactique de leur discipline : que devraient-ils enseigner, par exemple, à des élèves de Sixième ou de Cinquième et, dans ce but, comment pourraient-ils « transposer » des connaissances universitaires en cours ? Or, selon M. Alain Boissinot, recteur de l’académie de Versailles, rien ne préparait les étudiants, dans leur formation, à comprendre l’importance de cette problématique (13), un constat établi dès 1905 par Émile Durkheim.

« L’évolution pédagogique en France » – extrait du cours prononcé par Émile Durkheim pour les candidats à l’agrégation (1904-1905)

« En vérité, on se demande comment, par cela seul que le jeune étudiant sait critiquer les textes anciens, ou parce qu’il est rompu aux finesses des langues mortes ou vivantes, ou parce qu’il possède une érudition d’historien, il se trouverait, par cela seul, au courant des opérations nécessaires pour transmettre aux enfants l’enseignement qu’il a reçu. »

Ainsi, d’après M. Alain Boissinot, ceux qui enseignent les langues vivantes – dont on sait qu’elles ne constituent pas un point fort de notre système scolaire – avaient, au cours de leur cursus universitaire, étudié minutieusement les lettres et la culture d’un pays, mais n’avaient pas été sensibilisés au fait que leurs élèves devaient apprendre, avant tout, à communiquer correctement en anglais ou en allemand. De même, de savantes analyses littéraires de l’usage de la métaphore chez Céline ne pouvaient aider les enseignants à répondre à cette question essentielle : comment apprendre, concrètement, le français aux élèves scolarisés dans les établissements relevant de l’éducation prioritaire ? La formation académique contribuait ainsi à creuser un fossé « dramatique » entre la représentation des disciplines qui se forgeait au cours des études et les besoins des élèves (14).

Ce décalage a été également mis en évidence par M. Sylvain Grandserre, maître d’école. D’après lui, en effet, le défi que devait relever le système de formation n’était certainement pas celui du niveau de maîtrise, par les jeunes enseignants, de leurs disciplines – lequel ne posait pas de problème –, mais bien celui de l’efficacité de l’enseignement, c’est-à-dire de « la mise au travail des élèves et de la gestion de groupes d’élèves » (15).

D’une manière générale, comme l’a souligné M. Philippe Claus, doyen du groupe de l’enseignement primaire de l’inspection générale de l’éducation nationale, « plus on s’adresse à de jeunes élèves, plus la professionnalité de l’enseignant doit être grande » (16).

L’enseignement aurait donc dû être considéré comme un métier à part entière. Or ce n’est qu’en 2006 qu’une instance officielle, le Haut conseil de l’éducation, a recommandé que le professeur soit un « professionnel de l’enseignement de sa ou de ses disciplines à des groupes élèves » (17) et qu’un arrêté a défini les dix compétences professionnelles devant être prises en compte dans la formation de tou60s les maîtres (18).

Cette évolution fut certes tardive, mais elle était d’autant plus bienvenue que les récentes réformes du système éducatif conduisaient, toutes, à souligner le caractère multiforme du métier d’enseignant, en accentuant encore sa « professionnalité ». La mise en place du socle commun de connaissances et de compétences, qui présuppose le recours, dans la classe, à une pédagogie différenciée, et la réforme des lycées, qui met en œuvre une orientation plus active des élèves vers les filières universitaires et les métiers, engagent en effet une nouvelle vision de l’école, selon laquelle l’enseignement ne saurait se limiter à la conduite de cours magistraux.

b) Un système de formation isolé en Europe et aux résultats insatisfaisants

Il existe en Europe deux modèles de formation des enseignants : la formation « simultanée » – les formations disciplinaire et professionnelle ayant lieu dans le même temps par alternance – et la formation « consécutive » – la formation professionnelle succédant à la formation disciplinaire. Le recrutement par concours a traditionnellement lié la France au système de la formation « consécutive », un modèle minoritaire en Europe, comme l’illustrent, de façon éloquente, les cartes ci-après.

Organisation de la formation initiale des enseignants de l’enseignement préprimaire, primaire et secondaire général (2006/2007)

Source : Chiffres clés de l’éducation en Europe, Commission européenne et Eurydice (juillet 2009) ;

En outre, la particularité de la formation initiale dispensée en France, par rapport à celle mise en œuvre dans les autres pays développés, était d’être, selon M. Éric Charbonnier, analyste à la division des indicateurs de l’Organisation de coopération et de développement économiques, « beaucoup trop académique ». Cette singularité ne pouvait qu’être accentuée par le fait que les réformes éducatives menées par nos partenaires s’accompagnent généralement de la mise en place d’un système de formation des enseignants qui accorde plus de place à l’acquisition des compétences pédagogiques (19).

De ce point de vue, on peut considérer que notre système de formation et de recrutement des enseignants était en train de « décrocher » par rapport à celui de nos voisins. On ne peut donc que se féliciter de l’impulsion donnée par l’Union européenne en faveur de l’adoption de politiques renforçant le volet pédagogique et professionnel de la formation des enseignants. Les États-membres sont en effet convenus, le 15 novembre 2007, à la suite d’une communication de la Commission européenne du 3 août 2007, de veiller à ce que les enseignants « possèdent un diplôme d’enseignement supérieur qui maintient un équilibre adéquat entre les études fondées sur la recherche, d’une part, et la pratique de l’enseignement, d’autre part » et de promouvoir, au cours de leur formation initiale, « l’acquisition de compétences permettant […] d’enseigner efficacement dans des classes hétérogènes composées d’élèves issus de différents milieux socioculturels avec un large éventail de capacités et de besoins » (20).

Une réforme s’imposait d’autant plus que le « décrochage » du système de formation expliquait, en partie, les mauvais résultats des élèves français. Il suffit ici de rappeler quelques données.

En ce qui concerne les évaluations nationales, on constatait que :

– 15 % des élèves en fin d’école étaient, en 2008, s’agissant de la maîtrise des objectifs fixés par les programmes en mathématiques, en difficulté ;

– la proportion d’élèves en difficulté de lecture à l’entrée en Sixième était passée, entre 1997 et 2007, de 14,9 % à 19 % ;

– la proportion d’élèves de fin de Troisième maîtrisant les compétences de base en français était, en 2010, d’environ 77 % et tombait à 46,5 % chez les élèves des établissements « ambition réussite » de l’éducation prioritaire (21).

En ce qui concerne les résultats de nos élèves aux évaluations de l’Organisation de coopération et de développement économiques, outre le fait que notre pays était passé, pour la compétence « compréhension de l’écrit », de la treizième à la vingt-deuxième place entre 2000 et 2009, la proportion des élèves les moins performants avait augmenté de 5 % au cours de cette période, passant de 15 % à 20 % (22).

2. Des instituts universitaires de formation des maîtres peu appréciés

Les critiques les plus vives du système antérieur de formation portaient traditionnellement sur les instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM).

Comme l’a rappelé M. Jean-Michel Blanquer, directeur général de l’enseignement scolaire, la loi du 10 juillet 1989 d’orientation sur l’éducation, qui les a créés, prévoyait de structurer la formation en trois grands pôles, au sein d’un système d’alternance : les connaissances disciplinaires, la gestion des apprentissages et la connaissance du système éducatif (23).

Sans doute l’objectif consistant à demander aux instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) de former les étudiants à toutes les formes de professorats était-il trop ambitieux, et ce d’autant qu’ils ont pris corps dans une culture scolaire longtemps marquée par une « bipartition » entre deux types de filières de formation et d’enseignants : « l’école communale et monde des instituteurs » d’un côté ; « l’élite et les professeurs » de l’autre, fréquentant les bancs du lycée et de l’université (24).

Toujours est-il que de nombreux rapports et études (25) avaient pointé, et ce dès leur mise en place, en 1991, les faiblesses des IUFM, notamment le caractère infantilisant des formations, l’insuffisance des contenus disciplinaires, l’emploi d’une terminologie jargonnante, le décalage entre les contenus théoriques et l’exercice pratique de l’enseignement et l’absence de lien avec la recherche.

Cependant, autant les critiques résumées ici pouvaient être fondées, autant les IUFM ne méritaient pas les excès d’indignité auxquels ils ont régulièrement eu droit. Il convient en particulier de rappeler qu’ils ont formé, depuis 1991, plus de 500 000 enseignants, aujourd’hui en poste : leur bilan « quantitatif » est, à cet égard, remarquable.

a) Des résultats mitigés mais qui ne doivent pas être caricaturés

Les IUFM auraient dû être des pôles d’excellence pédagogique. Il n’en a rien été, sauf exception, pour des raisons qui doivent être analysées sans a priori.

Institués comme établissements publics administratifs par la loi du 10 juillet 1989 d’orientation sur l’éducation, les IUFM ne bénéficiaient pas du statut des universités et des autres établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel. En particulier, ils n’étaient pas habilités à délivrer des diplômes et les recteurs d’académie présidaient leur conseil d’administration. Leur « universitarisation » – qui aurait dû être un gage d’efficacité – était donc limitée. Or, selon le Syndicat général de l’éducation nationale-CFDT, cette limitation répondait à un objectif précis, la « reconversion », au sein de ces instituts, des écoles normales et de leurs personnels (26).

Par ailleurs, la formation dispensée en institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) était souvent dénoncée comme étant inefficace au motif qu’elle serait « dominée » par les sciences de l’éducation. Ainsi, pour la Confédération syndicale de l’éducation nationale, les IUFM auraient privilégié le « pédagogisme » plutôt que la didactique des disciplines (1).

Cette critique, relayée par certains essayistes, doit être relativisée. En particulier, pour le président de la Conférence des directeurs d’IUFM, M. Gilles Baillat, les rapports et études sur les premiers pas de ces nouveaux venus dans le paysage universitaire ont en quelque sorte « cristallisé » des dérives, certes réelles, mais qui en réalité ne concernaient que les premières années de fonctionnement. Depuis lors et surtout à partir de 1995, les IUFM ont su rénover leur formation. Quant à la mainmise supposée des sciences de l’éducation, il convient de rappeler que les enseignants-chercheurs de cette discipline, à qui l’on prête trop souvent une forme de magistère au sein de notre système éducatif, ne représentent que 18 % du corps enseignant en IUFM (27).

La loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école du 23 avril 2005 a marqué une nouvelle étape, décisive, dans l’histoire des IUFM puisqu’elle les a intégrés aux universités. Sur le plan statutaire, les instituts ont cessé d’être des établissements publics administratifs pour devenir des écoles internes, c’est-à-dire une composante de l’université, disposant d’une autonomie de fonctionnement, au sens de l’article L. 713-9 du code de l’éducation (28). Ainsi que l’indiquait le rapport sur le processus d’intégration de M. Guy Goeffroy, alors parlementaire en mission, l’étape suivante aurait dû être celle de « l’enracinement du dispositif de formation des enseignants des premier et second degrés dans la capacité propre de chaque Université à produire de la valeur ajoutée formation-recherche » (29).

Pourtant, le bilan tiré par les enseignants formés au sein des IUFM « universitarisés » a continué à demeurer plutôt négatif, d’après le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer : si, au total, on a pu relever quelques réussites, « beaucoup d’IUFM n’ont pas donné satisfaction » (30).

Cependant, ces reproches, aussi valables soient-ils, devaient être adressés à d’autres acteurs que les IUFM. En effet, pouvait-on les accuser de ne pas préparer les futurs professeurs à enseigner devant des classes hétérogènes lorsque le concours évaluait, pour l’essentiel, des connaissances académiques ?

En réalité, les instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) ne constituaient pas le principal problème auquel était confronté le système de formation des enseignants – le défaut d’articulation entre ses volets théorique et pratique.

Ils étaient plutôt l’expression de ce problème qui se traduisait, au niveau de la formation, par la césure, aux effets « dissonants » selon le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer (31), séparant la première année – vouée à la préparation au concours – de la deuxième année, consacrée au volet professionnel. Aussi cette deuxième année était-elle menée, comme l’a souligné M. Olivier Grandserre, maître d’école, « dans l’urgence », puisqu’il fallait rédiger un mémoire professionnel, effectuer des stages et rattraper les matières non préparées pour le passage du concours (32). Cette analyse rejoint celle qui a été développée par M. Gilles Baillat, le président de la Conférence des directeurs d’IUFM : ce qui a principalement joué contre les instituts, c’est la dichotomie constatée entre le « bachotage » de la première année de formation et le « surmenage » de la deuxième année, dont les sept mois de stage « cassaient » brutalement la représentation du métier (33).

L’échec des IUFM était donc programmé, car ils étaient « piégés », selon le terme employé par le recteur de l’académie de Versailles, M. Alain Boissinot, par une année de formation professionnelle arrivant beaucoup trop tard (34).

b) Des jugements sévères de la part des jeunes professeurs

La situation décrite plus haut explique très largement le haut degré d’insatisfaction manifesté par les jeunes enseignants à l’égard des IUFM.

Ainsi, une enquête du ministère de l’éducation nationale, publiée en 2001 et portant sur 900 enseignants du second degré en lettres, mathématiques et histoire-géographie ayant un ou deux ans d’ancienneté, indiquait que trois-quarts des débutants en lettres classiques attribuaient, sur une échelle comprise entre 1 à 7, des notes allant de 1 à 3 à la formation en gestion de la classe. Pour la formation en connaissances en sciences humaines, 42 % des professeurs de lettres classiques attribuaient la note de 1, suivis par 38 % de leurs collègues en histoire-géographie. En outre, neuf enseignants sur dix considéraient, qu’ils soient affectés ou non en éducation prioritaire, que la formation dispensée en IUFM était inadaptée à l’enseignement dans un établissement relevant de l’éducation prioritaire (35).

Six ans plus tard, les appréciations portées par les enseignants stagiaires étaient tout aussi négatives. Selon une enquête effectuée par la Société des agrégés de l’université, la formation dite générale (pédagogie, psychologie de l’enfant ou de l’adolescent) était jugée « insuffisante » ou « médiocre » pour 87,1 % des agrégés stagiaires adhérents de cette association : « selon nos sociétaires, cette formation est le lieu de tous les excès : elle favorise, par son contenu comme par son organisation, caricature et dogmatisme, débouchant parfois sur la triste mise en scène de l’incompétence quand les formateurs avouent sans fard être en charge d’un cours pour lequel ils n’ont ni les connaissances ni l’expérience requises » (36).

Communiqué à la mission, le point d’étape de l’enquête sur la situation des agrégés stagiaires en 2010-2011 menée par cette association indique que l’intégration des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) dans les universités a entraîné peu de changement dans la formation : les modules et enseignements proposés sont les mêmes et sont jugés « aussi inefficaces et peu pratiques dans leur organisation et leur contenu » (37).

Bref, les étudiants des IUFM ont eu et ont encore souvent le sentiment d’y perdre leur temps. Plus grave encore, à l’issue de leur formation, au moment de la prise de fonction, les jeunes enseignants pouvaient être, selon le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer, « révoltés » par le décalage constaté entre la réalité du métier et le discours que tient l’institution scolaire sur celui-ci, tout à la fois « injonctif, abstrait et contre-intuitif » (38).

B. UNE RÉFORME LARGEMENT CRITIQUÉE

Indiscutablement, le système de formation initiale et de recrutement des enseignants devait évoluer. Mais fallait-il le faire selon les modalités élaborées et arrêtées en 2008-2010 pour qu’au final, la réforme puisse être considérée comme inachevée et insatisfaisante, car ne réglant pas les principaux problèmes rencontrés par le modèle antérieur ?

Ce résultat, certainement non voulu, résulte de la mauvaise préparation cette réforme, qui tient à trois facteurs.

Le premier est lié à l’effet de surprise liée à l’annonce, par le président de la République, le 2 juin 2008, de la mastérisation de formation et du recrutement, à compter de la session 2010 du concours. Plusieurs syndicats d’enseignants ont ainsi indiqué à la mission que les services des ministres en charge de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur ne semblaient pas être, dans les semaines suivantes, en mesure de préciser les modalités de mise en œuvre d’une réforme de cette ampleur. D’ailleurs, selon M. Christian Forestier, administrateur général du Conservatoire national des arts et métiers, la commission sur la condition enseignante (2007-2008), à laquelle il avait participé, avait été volontairement prudente sur une telle évolution, en considérant qu’elle ne constituait pas une priorité, au regard des incidences financières d’une élévation du niveau diplôme requis pour le recrutement (39).

La phase transitoire n’a pas permis d’atténuer les effets du caractère précipité de la réforme : au cours de la seule année universitaire 2009-2010, pouvaient se présenter aux concours externes de la session 2010 (40) les étudiants déjà titulaires d’un master ou inscrits en deuxième année de master à la rentrée universitaire 2009. En outre, à titre exceptionnel, pour la seule session 2010, étaient également autorisés à se présenter aux concours les étudiants présents aux épreuves d’admissibilité de la session 2009 et les étudiants inscrits en première année de master à la rentrée 2009. Enfin, par dérogation, les lauréats au concours titulaires de la seule première année de master ont été recrutés comme fonctionnaires stagiaires à la rentrée universitaire 2010. Depuis l’année universitaire 2010-2011, tout étudiant inscrit en deuxième année de master ou ayant déjà validé ce diplôme peut se présenter au concours, dont les épreuves d’admissibilité et d’admission se déroulent durant la deuxième année de master. Pour pouvoir être recrutés, à titre définitif, à l’issue des concours de recrutement, les enseignants devront justifier désormais de l’obtention d’un diplôme de master.

Le deuxième facteur explicatif des résultats de la réforme est dû au respect de la règle du « non renouvellement d’un poste de fonctionnaire sur deux », qui a conduit le ministre de l’éducation nationale de l’époque, M. Xavier Darcos, à faire le choix, pour le budget 2010, de supprimer les postes d’enseignants stagiaires effectuant leur année de formation en institut universitaire de formation des maîtres.

Le dernier facteur explicatif des difficultés rencontrées est dû aux tensions, rapportées par plusieurs interlocuteurs de la mission, entre les ministres, et leurs cabinets respectifs, en charge de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur en 2008-2009. Or ce « dialogue de sourds », selon le Syndicat des enseignants-UNSA, entre le ministère « formateur » et le ministère « employeur », a débouché sur des choix contradictoires, comme le montre le maintien d’un concours déconnecté du nouveau modèle de formation (41).

Les développements qui suivent visent à mettre en lumière le bilan contrasté de la mastérisation : si celle-ci comporte des points positifs, elle pose de nombreux problèmes, six au total, qui ont trait à la traduction budgétaire de la réforme, à la mise en place d’une offre de formation insatisfaisante, à l’accès des étudiants d’origine modeste au master, à la déconnection du diplôme et du concours, à la désorganisation relative de l’année de stage des professeurs recrutés et à l’affaiblissement du vivier des candidats.

1. Un double objectif qualitatif

Avant d’aborder les points négatifs de la réforme, il convient de souligner que la mastérisation constitue une avancée à un double titre : elle accroît le niveau de qualification des enseignants, en achevant d’« universitariser » leur formation, et permet d’améliorer, de manière substantielle, leur rémunération.

a) Des enseignants plus qualifiés

La mastérisation constitue – il convient de le rappeler – une chance pour les enseignants et les élèves.

Ÿ Une reconnaissance plus affirmée du métier d’enseignant

La mastérisation répond à l’élévation du niveau général d’études de la population. Il est en effet souhaitable qu’au regard de son rôle, le professeur fasse partie des membres les plus qualifiés de la Cité. Les effets de la mastérisation, en termes de reconnaissance de la dignité et de la complexité du métier d’enseignant, sont donc incontestables.

Elle constitue de plus une reconnaissance institutionnelle de la réalité de la formation des enseignants, qui depuis, 1991, était égale à bac + 5. Rappelons en effet qu’avant la réforme, les enseignants, formés de facto à bac + 5, n’étaient titulaires que d’un diplôme à bac + 3, la licence, car les deux années de formation en IUFM ne débouchaient sur aucune validation universitaire.

Enfin, l’inscription de ces cinq années d’études dans le cadre réglementaire du master place la France au diapason des pays européens, nombre d’entre eux recrutant leurs enseignants après avoir obtenu un master. Elle favorise ainsi la mobilité des enseignants français au sein de « l’espace européen de l’enseignement supérieur », lequel est structuré autour des grades de la licence, du master et du doctorat (article D. 123-13 du code de l’éducation).

Ÿ Une « universitarisation » de la formation enfin achevée

Le master permet d’organiser une formation universitaire complète, tant théorique que pratique, des enseignants. En effet, l’article 6 de l’arrêté du 25 avril 2002 relatif au diplôme national de master précise que : « La formation dispensée comprend des enseignements théoriques, méthodologiques et appliqués et, lorsqu’elle l’exige, un ou plusieurs stages. Elle comprend également une initiation à la recherche et, notamment, la rédaction d’un mémoire ou d’autres travaux d’études personnels ».

Par ailleurs, la mastérisation permet à la France de rompre avec le modèle traditionnel de recrutement de la fonction publique selon lequel l’État employeur organise des concours pour recruter et former à ses métiers des diplômés, eux-mêmes formés, par l’université, à des disciplines intellectuelles. Avant la loi du 23 avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école, les instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) étaient, ainsi que l’a rappelé M. Marcel Pochard, conseiller d’État, des écoles administratives, tout à fait comparables au soixante que compte notre pays (42).

Ainsi, alors qu’auparavant l’État se chargeait, sans réel succès, comme on l’a vu, d’assurer la formation professionnelle des enseignants au cours de l’année de stage – la deuxième année d’IUFM – précédant leur titularisation, cette tâche est désormais confiée à l’université. Ce choix marque non seulement l’aboutissement de la politique initiée par la loi du 10 juillet 1989 d’orientation sur l’éducation, mais il est également conforme à la mission d’orientation et d’insertion professionnelle des étudiants attribuée par la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités au service public de l’enseignement supérieur (article L. 123-3 du code de l’éducation).

Cette évolution inscrit la France au sein d’un mouvement général d’« universitarisation » de la formation des enseignants commencé il y a trente ans et qui a concerné, notamment, la Suède, le Québec, la suppression des écoles normales de la « belle province » ayant ouvert ce processus dès 1969, l’Angleterre et, enfin, la Finlande, qui exige que ses professeurs soient titulaires d’une formation de niveau master depuis 1971 (43).

Selon le recteur de l’académie de Versailles, M. Alain Boissinot, cette évolution est « essentielle », car l’université est le seul lieu de formation qui, grâce à son expertise, soit en mesure de sensibiliser les futurs enseignants aux enjeux de l’organisation didactique de leurs disciplines, dont la méconnaissance a, comme cela a déjà été souligné, des effets dramatiques (44).

Ÿ Une formation professionnelle adossée à la recherche

Un autre effet positif de la réforme est d’adosser la formation des enseignants à la recherche. En effet, on peut supposer qu’en se confrontant à la production d’un mémoire, les futurs enseignants pourront engager un travail de réflexion sur leur pratique professionnelle. Ils pourront ainsi développer leur capacité à analyser les situations d’enseignement et valider leurs hypothèses concernant les méthodes pédagogiques. Ainsi que l’ont observé les présidents d’associations de didactique (45) entendus par la mission, MM. Bertrand Daunay et Yves Matheron, ce travail devrait avoir un effet sur la vie professionnelle des enseignants, car ils sauront « s’appuyer, quand c’est possible, sur les ressources que constituent les recherches, pour améliorer leurs enseignements » (46). C’est aussi le souhait de M. Yann Diraison, délégué général pour les ressources humaines du secrétariat général de l’enseignement catholique, selon qui « nous recrutons les enseignants des années 2015 à 2060, comment ne pas recruter des enseignants capables de recherche, d’interrogation incessante sur leur pratique professionnelle, d’innovation ? » (47).

Ÿ Une occasion de dépasser les oppositions et les cloisonnements qui réduisent l’efficacité de notre système scolaire

Les cinq années d’études conduisant au master constituent une chance unique de dépasser les oppositions et les cloisonnements qui pèsent sur l’efficacité de notre système scolaire :

– d’une part, la mastérisation devrait permettre de s’affranchir du débat, aussi éternel qu’inutile, entre les savoirs et la pédagogie, le vrai enjeu se situant dans l’articulation de ces deux pans de la formation ;

– d’autre part, dans un système scolaire connaissant de multiples cloisonnements (entre degrés d’enseignement, disciplines, statuts et programmes), c’est en permettant aux futurs enseignants, de tous ordres et de toutes disciplines, de se former, ensemble, qu’ils pourront ensuite, selon M. Yann Diraison, délégué général pour les ressources humaines du secrétariat général de l’enseignement catholique, « travailler ensemble et considérer que leur mission est unique et identique » (2).

b) Des enseignants mieux rémunérés

La mastérisation s’est traduite par une amélioration de la rémunération en début de carrière des jeunes enseignants, qu’ils soient professeurs agrégés, professeurs certifiés, professeurs de lycée professionnel ou professeurs des écoles, ainsi que des conseillers principaux d’éducation.

Le Gouvernement a ainsi tenu les engagements qu’il avait pris en matière de revalorisation des débuts de carrière.

Les décrets n° 2010-1006 et n° 2010-1007 du 26 août 2010 ont augmenté, à cet effet, au 1er septembre 2010, l’indice des échelons 3 à 5 de la classe normale des personnels enseignants des premier et second degrés. Les modalités de cette amélioration des débuts de carrière ont donc consisté en une augmentation des indices des 3ème, 4ème et 5ème échelons du premier grade de la grille indiciaire applicable au corps des professeurs certifiés et assimilés de respectivement 15, 15 et 14 points d’indice majoré. S’agissant des professeurs agrégés, leur grille indiciaire a été majorée de 11 points d’indice majoré pour le 3ème échelon, de 8 points d’indice majoré pour le 4ème échelon et de 7 points d’indice majoré pour le 5ème échelon.

Concrètement, selon le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, M. Luc Chatel, ces mesures ont correspondu, pour les enseignants stagiaires recrutés en septembre 2010, à un gain mensuel :

– de 157 euros nets pour les professeurs des écoles et les professeurs certifiés ;

– de 259 euros nets pour les professeurs agrégés (48).

Cet effort s’est étendu également aux professeurs en début de carrière ayant jusqu’à sept années d’ancienneté et qui sont présents dans les échelons revalorisés. Selon le ministère de l’éducation nationale, il s’est traduit, pour les professeurs certifiés, par exemple, par un gain annuel égal en moyenne à 672 euros.

190 000 enseignants stagiaires et en début de carrière, soit près d’un quart des enseignants, ont bénéficié de ces mesures de revalorisation.

Cette revalorisation a toutefois été relativisée par certains interlocuteurs de la mission. Ainsi, le Syndicat CFTC de l’éducation nationale, de la recherche et des affaires culturelles a observé que les professeurs certifiés ne sont pas rémunérés, faute de création d’une nouvelle grille indiciaire, sur des grilles de niveau dites « A+ », qui bénéficient normalement aux titulaires d’un master. Ces derniers ne bénéficient en effet que de la grille dite « A », moins rémunératrice, applicable aux titulaires d’une licence (49).

2. Une réforme à visée également économique

Incontestablement, la réforme de la mastérisation a permis au ministère de l’éducation nationale d’apporter sa « contribution », au titre du budget de l’année 2010, à la politique de rationalisation de l’emploi public engagée depuis plus de quatre ans.

La loi de finances pour 2010 a ainsi supprimé les emplois d’enseignants stagiaires suivant une formation en alternance (9 182 dans le premier degré, 7 144 dans le second degré et 1 876 dans l’enseignement privé) et a conduit à affecter directement, le 1er septembre 2010, dans les écoles et les établissements, les lauréats de la session 2010 du concours.

Les emplois supprimés dans le cadre de cette opération ont permis, d’après le ministère de l’éducation nationale, de dégager une économie de 204 millions d’euros.

Qualifiée de « fusil à un coup », puisqu’elle ne peut être renouvelée, par M. Christian Forestier, administrateur général du Conservatoire national des arts et métiers (50), cette mesure budgétaire ne peut pourtant qu’alimenter le discours critique sur la réforme. M. Daniel Filâtre, président de l’université Toulouse 2-Le Mirail, a ainsi considéré qu’il s’agissait d’une « erreur, la pire de toutes » parmi celles ayant accompagné la réforme, car elle a pesé sur ses conditions de mise en œuvre (51).

Une telle initiative n’a pas à être jugée dans le cadre du présent rapport, d’autant qu’elle s’inscrit dans une stratégie, nécessaire, de redressement de nos finances publiques.

Toutefois, c’est précisément parce qu’elle a été amorcée – aussi – pour des raisons budgétaires, que la mastérisation aurait dû, s’agissant des deux volets essentiels que sont le contenu de la formation et son articulation avec le concours, conduire à des choix irréprochables. Cela n’a malheureusement pas été le cas.

3. Des masters « Enseignement et formation » problématiques

L’année en alternance effectuée en institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) ayant été supprimée, le caractère opérationnel du nouveau système de formation repose désormais sur la qualité de la préparation au métier assurée par les masters. Pour reprendre l’analyse du recteur de l’académie de Versailles, M. Alain Boissinot, c’est en effet ce diplôme qui doit garantir « l’employabilité » de l’enseignant recruté par l’Éducation nationale (52).

À l’aune de ce critère, quel jugement peut-on porter aujourd’hui sur les masters « Enseignement et formation » ? Ceux-ci sont récents : les maquettes de formation ont été approuvées l’été dernier par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et les premiers étudiants inscrits dans ces nouvelles formations ont commencé leurs cursus en septembre dernier. Ainsi, fin avril 2011, le directeur général de l’enseignement supérieur, M. Patrick Hetzel, rappelait que la mastérisation de la formation n’en était qu’à ses débuts, puisqu’elle n’avait, alors, que huit mois d’existence (53).

Pour autant, si cette donnée doit être prise en compte, l’offre de formation nouvellement habilitée par l’État, dont l’élaboration a été conflictuelle, n’est pas exempte de critiques qui touchent à son périmètre, d’une part, et à son degré de professionnalisation, d’autre part.

a) Une élaboration conflictuelle des maquettes de formation

Seulement deux années se sont écoulées entre l’annonce, en juin 2008, par le Président de la République, de la réforme de la mastérisation, et l’approbation, par le ministère de l’enseignement supérieur, des masters « Enseignement et formation », intervenue l’été dernier.

Cette rapidité dans la conception et la mise en place des nouveaux diplômes a constitué, indéniablement, une forme d’exploit au regard du défi que constituait la construction d’une offre de formation destinée à des dizaines de milliers d’étudiants. Toutefois, il n’est pas sûr que celle-ci y ait gagné en légitimité et crédibilité.

Les tensions ayant entouré l’élaboration des masters « Enseignement et formation »

● 2 juillet 2008 : M. Xavier Darcos, ministre de l’éducation nationale, et Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, présentent une communication au Conseil des ministres sur les modalités de la réforme de la mastérisation.

● Octobre 2008 : la Conférence des présidents d’université (CPU) et la Conférence des directeurs d’IUFM dénoncent l’urgence dans laquelle risque d’intervenir cette réforme, alors que les équipes de formateurs et d’enseignants-chercheurs se sont engagées dans le travail, considérable, de construction des masters.

● 20 mars 2009 : un report d’une année de la réforme est acté, à la suite d’un arbitrage rendu par le Premier ministre. Une Commission nationale de concertation sur les conditions de la mastérisation pour l’année universitaire 2010-2011, coprésidée par le président de l’Université de Toulouse 2-le Mirail, M. Daniel Filâtre, et le recteur de l’académie de Bordeaux, M. William Marois, est mise en place.

● 9 avril 2009 : l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES), l’autorité administrative indépendante chargée d’évaluer les formations et les diplômes d’enseignement supérieur, refuse d’évaluer les premières maquettes qui lui sont présentées, au motif que cet échantillon est trop peu pertinent.

 Juin 2009 : le bureau de la Conférence des présidents d’université et M. Daniel Filâtre suspendent leur participation à la commission nationale de concertation, afin de protester contre la mise en circulation, pour consultation, de projets de décrets modifiant les statuts des enseignants dont les dispositions anticipent sur ses conclusions (54).

 Juin 2010 : la quasi-totalité des organisations syndicales représentées au Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), un organisme consultatif placé auprès du ministre en charge de l’enseignement supérieur, quittent la séance au cours de laquelle les maquettes des formations sont présentées.

Depuis lors, selon l’analyse du directeur général de l’enseignement supérieur, M. Patrick Hetzel, les tensions de l’année 2009 se sont résorbées, comme l’a montré « l’appétence » des universités pour la construction des maquettes de diplôme. 80 établissements, dont 76 universités et 4 écoles (55), se sont en effet engagés dans le processus de mastérisation, 5 autres établissements étant associés à des masters par co-habilitation (56). Dans ce cadre, 59 mentions et 555 spécialités de master ont été créées (57).

Aussi l’offre de formation a-t-elle pu être mise en place rapidement. Mais à quel prix ?

b) Une offre de diplômes protéiforme

La mise en place des masters ouverts aux étudiants se destinant aux métiers de l’enseignement a fait l’objet d’une circulaire du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche en date du 23 décembre 2009. Toujours en vigueur, elle fixe les principes généraux d’organisation des cursus :

– les formations proposées doivent permettre une progressivité dans la spécialisation tout au long des quatre semestres du master et offrir ainsi à chaque étudiant la possibilité d’adapter son cursus ;

– une initiation à la recherche doit être offerte à chaque étudiant, qui doit se traduire par la réalisation d’un travail de recherche individuel ou collectif ;

– les masters doivent intégrer une forte composante de formation professionnelle, point qui sera développé plus loin.

Plusieurs architectures de formation, guidées par le souci permanent d’assurer la réorientation des étudiants, peuvent leur être ainsi proposées : « masters disciplinaires aménagés avec spécialités ou/et parcours orientés vers l’enseignement, masters disciplinaires ou pluridisciplinaires poursuivant une finalité professionnelle large, masters plus spécialisés mais permettant, grâce à une diversification des cursus, des débouchés variés et des possibilités de réorientation en cours de cursus ».

Cette ouverture de la formation vers d’autres horizons professionnels que celui de l’Éducation nationale correspond à un choix délibéré, ainsi explicité par le directeur général de l’enseignement supérieur, M. Patrick Hetzel : les parcours proposés ne doivent pas être « tubulaires », afin d’élargir, le plus largement possible, l’horizon professionnel des diplômés. C’est la raison pour laquelle le ministère de l’enseignement supérieur n’a habilité que des masters orientés « Métiers de l’enseignement et de la formation » et refusé de prendre en compte les maquettes se limitant strictement à l’enseignement. Ce choix devrait permettre aux titulaires de ces diplômes ayant échoué au concours d’envisager de travailler en centre de formation d’apprentis, dans les groupements d’établissements publics d’enseignement (Greta), chargés d’organiser des formations pour adultes, ou auprès des structures de formation continue du privé (58).

De même, le « portefeuille des compétences », en cours d’expérimentation et qui vise à conjuguer les acquis de la formation initiale et continue, devrait permettre de faciliter les réorientations vers des métiers autres que ceux de l’enseignement en milieu scolaire. Les instituts universitaires de formation des maîtres de Franche-Comté, Nord-Pas-de-Calais et Créteil, notamment, proposent des modules de formation visant à l’élaboration de ce portefeuille, qui comportent généralement un stage en dehors de l’Éducation nationale afin d’élargir les compétences professionnelles des étudiants.

Aux yeux de M. Patrick Hetzel, directeur général de l’enseignement supérieur, ces dispositifs sont « particulièrement intéressants » pour les étudiants ayant un parcours « atypique » et pour ceux qui ne seraient pas admis aux concours, afin qu’ils soient susceptibles d’envisager une réorientation ou une insertion professionnelle immédiate, en adéquation avec leur diplôme (59).

En ouvrant ainsi l’éventail des débouchés aux diplômés des masters « Enseignement et formation », le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche a pris en compte une vérité arithmétique et sociale. Ainsi que l’a rappelé le président du comité de suivi du master, M. Jean-Michel Jolion, dès lors que sur cent étudiants passant le concours, quatre-vingt ne seront pas admissibles et seuls dix seront admis, le sort des quatre-vingt-dix étudiants ayant échoué ne peut laisser indifférentes la puissance publique… et les familles (60).

Cette offre de formation suscite toutefois des inquiétudes, car elle refléterait, selon plusieurs interlocuteurs de la mission, une absence de cadrage national des diplômes préparant au métier d’enseignant. Pour le directeur général de l’enseignement supérieur, M. Patrick Hetzel, celle-ci n’a rien de choquant dans la mesure où un cadrage détaillé serait contraire à l’autonomie pédagogique dont jouissent les établissements d’enseignement supérieur (61).

En outre, selon cet interlocuteur, on peut estimer que le cadrage de la formation peut se faire par d’autres voies. D’une part, le référentiel du métier d’enseignant, publié en mai 2010, qui décline les compétences professionnelles à acquérir par les professeurs (62), ne saurait être ignoré par les universités. On peut donc considérer qu’il aura pour effet de « réguler » les formations qu’elles proposeront aux étudiants se destinant à l’enseignement. D’autre part, le dialogue qui devrait, en toute logique, s’instaurer entre le recruteur – l’Éducation nationale et ses académies – et les formateurs – les universités – devrait avoir pour mission principale de déterminer les attentes des uns et des autres et de définir les moyens qui permettraient d’y répondre.

C’est d’ailleurs l’existence de « partenariats structurés » entre les universités et les académies qui, selon le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer, doit déterminer dans une large mesure, la réussite du nouveau dispositif de formation (63).

Que faut-il penser, en fin de compte, de ce choix en faveur de masters « Enseignement et de la formation » ? Les arguments présentés pour le justifier sont incontestablement valables.

Mais ils ont un goût amer, au vrai sens du terme : cette architecture de formation semble avoir été pensée exclusivement en fonction de la nécessité de réorienter les diplômés échouant au concours. Comme l’a observé le président de la Fédération des conseils de parents d’élèves des écoles publiques, M. Jean-Jacques Hazan, « les masters ont été “ calés ” en s’intéressant à ceux qui rateraient le concours » (64).

C’est l’un des grands paradoxes de cette réforme : en se préoccupant, pour des raisons au demeurant compréhensibles, du sort des étudiants ayant échoué au concours, elle a été contrainte de réduire son ambition première, qui est de former de véritables professionnels de l’enseignement scolaire. Comme on le verra dans la deuxième partie du présent rapport, cet arbitrage en faveur de masters « larges » ne se justifierait plus si la formation et le concours étaient mieux articulés.

c) Une professionnalisation de la formation qui reste à démontrer

Organisée pendant les cinq années d’études qui conduisent au master, la formation des futurs enseignants devrait être en mesure d’accorder une place importante à la professionnalisation. C’est d’ailleurs le meilleur argument qui puisse être opposé à ceux qui considèrent que la suppression opérée par la réforme de la deuxième année de formation en IUFM a créé un vide que rien ne saurait combler.

L’enjeu étant essentiel, peut-on considérer que la professionnalisation des masters « Enseignement et formation » est aujourd’hui acquise ? On est en droit d’en douter.

● Un référentiel « métier » trop récent pour avoir été approprié

L’arrêté du 12 mai 2010 définissant les compétences professionnelles à acquérir par les professeurs devait, ainsi que cela a déjà été souligné, servir de cadre de référence à la formation dispensée par les universités.

Celui-ci est d’ailleurs très précis, puisque, reprenant à son compte une approche mise au point au cours de l’élaboration du socle commun de connaissances et de compétences, il décline chaque compétence en connaissances, capacités et attitudes.

Les dix compétences professionnelles à acquérir par les professeurs
(Extraits de l’arrêté du 12 mai 2010)

1. Agir en fonctionnaire de l’État et de façon éthique et responsable

2. Maîtriser la langue française pour enseigner et communiquer

3. Maîtriser les disciplines et avoir une bonne culture générale

4. Concevoir et mettre en œuvre son enseignement (exemples de capacités incluses dans cette compétence : mettre en œuvre une progression différenciée selon les niveaux des élèves et s’appuyer sur ses connaissances des processus d’apprentissage des élèves et de la psychologie de l’enfant, de l’adolescent et du jeune adulte)

5. Organiser le travail de la classe

6. Prendre en compte la diversité des élèves (exemple de capacité : adapter son enseignement à la diversité des élèves)

7. Évaluer les élèves

8. Maîtriser les technologies de l’information et de la communication

9. Travailler en équipe et coopérer avec les parents et les partenaires de l’école

10. Se former et innover

Force est de constater, cependant, que la plupart de ces compétences ne sont pas travaillées à l’université. En l’état actuel des choses, selon le Syndicat CFTC de l’éducation nationale, de la recherche et des affaires culturelles, elles ne sont « croisées par les étudiants qu’occasionnellement, ici ou là » (65).

● Des stages pouvant devenir virtuels

La circulaire précitée du ministère de l’enseignement supérieur du 23 décembre 2009 relative à la mise en place des masters « Enseignement et formation » a mis en avant le volet « professionnalisation » de ces diplômes, en précisant qu’ils devront intégrer « une composante forte de formation professionnelle, de plus en plus importante dans le cursus, pour devenir majoritaire en deuxième année de master ».

Aux termes de la circulaire du 13 juillet 2010 du ministère de l’éducation nationale (66), deux types de stages, d’une durée totale de 216 heures, sont organisés pour les étudiants se destinant aux métiers de l’enseignement (en première année de master ou M1 et en deuxième année ou M2) :

– des stages d’observation et de pratique accompagnée, destinés aux étudiants inscrits en M1 ou en M2. Les étudiants sont présents par binôme dans la classe d’un enseignant titulaire du second degré, d’un maître d’accueil temporaire ou d’un maître formateur du premier degré. Ces stages, groupés (effectués sur une semaine) ou filés (effectués sur une journée), doivent être organisés sur une durée inférieure à 40 jours et dans la limite de six semaines, soit l’équivalent de 108 heures. Les périodes d’observation confrontent les étudiants aux situations professionnelles rencontrées par les professeurs, tandis que les périodes de pratique accompagnée donnent lieu à une ou plusieurs mises en pratique concrètes (préparation et conduite d’un cours ou d’une séquence d’enseignement, suivi d’un projet de classe, préparation et conduite d’une évaluation, etc.) ;

– les stages en responsabilité sont destinés aux étudiants inscrits en M2 ou à ceux qui, déjà titulaires d’un master, sont inscrits à une préparation à l’un des concours de professeur. Toutefois, ils sont prioritairement ouverts aux candidats admissibles auxdits concours. Dans ce cadre, l’étudiant prend la responsabilité d’une classe d’école, de collège ou de lycée. La durée maximale de ces stages est également de six semaines, soit 108 heures, et ils sont rémunérés sur la base d’un montant hebdomadaire brut de 617,40 euros.

La direction générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale précise qu’en ce qui concerne la gratification des stagiaires, 130 millions d’euros ont été inscrits au budget 2011, correspondant à 30 000 stages en responsabilité (enseignement privé compris), d’une durée maximale de six semaines dans le second degré et de quatre semaines dans le premier degré (67).

Cependant, malgré ces éléments de professionnalisation, celle-ci est loin d’être achevée, pour trois raisons essentielles.

La première raison est que la « forte composante de formation professionnelle » préconisée par la circulaire du 23 décembre 2009, qui devait, selon ce texte, devenir majoritaire en deuxième année de master, est, en réalité, égale, au maximum, à six semaines de stage, et encore seulement en deuxième année de master. En effet, ainsi que l’a précisé Mme Marie Mégard, inspectrice générale de l’éducation nationale, on ne compte, en réalité, en première année de master, que quatre semaines de stage d’observation et de pratique accompagnée et, en deuxième année de master, que deux semaines de stages d’observation et de pratique accompagnée, suivies de quatre semaines de stage en responsabilité (68). On est donc loin du compte en matière de professionnalisation.

En outre, le volume effectif des stages se heurte aux capacités d’accueil des établissements. À cet égard, le président de la Conférence des directeurs d’IUFM, M. Gilles Baillat, a indiqué que, malgré les promesses et les assurances données, les universités n’ont pu obtenir tous les stages demandés pour leurs étudiants (69). Interrogé sur ce sujet, le ministère de l’éducation nationale se dit dans l’incapacité de pouvoir même indiquer le nombre d’étudiants en stage d’observation et de pratique accompagnée, ces derniers n’étant ni gérés ni payés par ses soins. Quant au nombre d’étudiants en stage de responsabilité, la seule donnée disponible est celle de la dépense liée à leur rémunération : à la fin du mois de mai, elle s’élevait à 17,65 millions d’euros hors charges depuis janvier 2011, ce qui représenterait 28 600 semaines de stages en responsabilité à temps plein. Or, selon les services du ministère, ce chiffre est difficile à convertir en nombre de stagiaires en l’absence d’information détaillée sur la durée moyenne réelle des stages effectués.

La deuxième raison a trait aux a priori susceptibles de freiner le développement des stages aussi bien en licence (pour les stages d’observation) qu’en master (pour les stages de pratique accompagnée et en responsabilité). Selon M. Gilles Baillat, le président de la Conférence des directeurs d’IUFM, en effet, le secteur des lettres et sciences humaines (lettres, philosophie et histoire-géographie) pourrait opposer une véritable « résistance » en la matière : en l’absence de tout cadrage national fort sur le sujet, les unités de formation et de recherche concernées « ne bougeraient pas » (2).

La troisième raison, qui recèle le plus de dangers, tient au fait que les stages ne sont pas obligatoires et peuvent perturber les étudiants dans leur préparation des épreuves du concours, ce point capital étant abordé plus loin.

On ne peut que déplorer que le nouveau système de formation et de recrutement soit organisé de telle façon qu’il tend à écourter la durée de vie du volet « professionnalisation ». La contradiction a conduit un professeur des écoles, M. Olivier Grandserre, à considérer que la France pourrait disposer désormais des enseignants les plus diplômés et … les moins formés du monde (70).

d) Des parcours de formation incohérents

La réforme a créé une certaine confusion dans l’esprit des étudiants en raison du manque de lisibilité des parcours de formation proposés, qui résulte de deux facteurs.

● Une dichotomie entre formation disciplinaire et formation professionnelle

Les modalités concrètes de mise en œuvre de la mastérisation ont recréé la dichotomie, qui caractérisait les instituts universitaires de formation des maîtres, entre la formation disciplinaire et la formation professionnelle.

En effet, selon les didacticiens entendus par la mission, MM. Bertrand Daunay et Yves Matheron, plusieurs maquettes de formation, en particulier celles concernant les enseignants du second degré, n’ont fait que juxtaposer un enseignement très académique, fondé sur la recherche, et un enseignement pratique, « plus ou moins articulé aux stages ». Une faible place est ainsi accordée aux formations réellement alternées, voire « intégrées », dans lesquelles les enseignements universitaires s’appuient sur les pratiques effectives et celles-ci sur les savoirs théoriques (71). Ainsi, les didactiques des différentes disciplines, qui permettent cet aller-retour entre les savoirs et les enseignements scolaires, sont faiblement représentées dans la formation, alors que l’un des enjeux de la réforme, ainsi que cela a déjà été souligné, était, précisément, de sensibiliser les étudiants à cette problématique.

Cette dichotomie dans la formation conduit à décourager les étudiants qui, souhaitant préparer les concours de recrutement de l’enseignement secondaire, se voient proposer un master « recherche » pointu dans telle ou telle discipline. À titre d’illustration, selon le directeur de l’institut universitaire de formation des maîtres de Franche-Comté, M. Pierre Statius, des étudiants désireux d’enseigner la philosophie ont abandonné le master de recherche de l’université de Grenoble correspondant à cette discipline, celui-ci leur paraissant déconnecté de leurs besoins (2).

● Une dichotomie entre les filières préparant au professorat du premier et du second degré

La réforme se serait traduite, selon le président de la Conférence des doyens et directeurs d’unités de formation et de recherche de lettres, langues, arts et sciences humaines et sociales, M. Yves Jean, par une « césure » entre la formation des futurs professeurs des écoles, d’une part, et celle des professeurs de lycée et de collège, d’autre part. Les instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) auraient « gardé la main » sur la formation des premiers, tandis que celle des seconds serait dispensée au sein des unités de formation et de recherche des universités, une observation partagée par la Conférence des directeurs d’IUFM (72).

Ce constat n’a cependant rien d’étonnant dans la mesure où la réforme a moins institué cette césure qu’elle ne l’a perpétuée. En effet, les IUFM ne sont jamais parvenus, dans l’organisation de la formation, à créer les éléments d’une culture professionnelle commune entre les futurs enseignants des premier et second degrés.

Il semblerait donc que la réforme de la mastérisation n’ait pas permis – non pas d’unifier la formation de tous les enseignants, ce qui serait absurde – mais de faciliter des rapprochements pourtant bénéfiques pour les élèves. Les didacticiens entendus par la mission, MM. Bertrand Daunay et Yves Matheron, ont notamment relevé une « perte des transversalités entre filières ou niveaux d’enseignement » : rares sont les maquettes de formation qui permettent des rapprochements, et ce alors même qu’enseigner les mathématiques ou le français en Cours moyen deuxième année et en Sixième n’est pas, à certains égards, fondamentalement différent. C’est d’autant plus regrettable que la connaissance des continuités et des spécificités des formes d’enseignement selon les niveaux et les filières, comme celle des élèves concernés, est, selon ces interlocuteurs, un « moyen sûr de mieux programmer un enseignement de qualité et efficace » (73).

On peut craindre que, dans ces conditions, les enseignants ne puissent être sensibilisés à la nécessaire continuité des apprentissages du primaire et du collège, pourtant postulée par le socle commun de connaissances et de compétences.

4. Un allongement de la durée des études discriminant sur le plan social

Une à deux années d’études supplémentaires étant nécessaires, par rapport au système antérieur, pour obtenir le diplôme qui conditionne le recrutement, la réforme de la mastérisation pourrait entraîner ce que plusieurs interlocuteurs de la mission ont appelé une « fermeture » du concours aux milieux modestes, et ce malgré le dispositif d’accompagnement social adopté en 2009.

Les aides aux étudiants se destinant au métier d’enseignant

Mis en place en 2009 et reconduit pour l’année universitaire 2010-2011, le dispositif d’accompagnement social visant à garantir la démocratisation et l’attractivité du recrutement des enseignants vient en complément des bourses sur critères sociaux (BCS) et des aides au mérite accordées par le ministère de l’enseignement supérieur. Le budget prévu pour l’année 2010 est d’un peu plus de 25 millions d’euros.

Les bénéficiaires doivent remplir plusieurs conditions cumulatives : réunir les conditions pour être recruté comme fonctionnaire enseignant, se destiner au métier d’enseignant (une attestation sur l’honneur est exigée), être inscrit en deuxième année de master et suivre une formation permettant de se préparer aux concours de recrutement d’enseignants.

Le dispositif comporte deux volets, qui peuvent être cumulés :

● Un complément versé aux étudiants attributaires d’une bourse échelon «0 » (étudiants exonérés des droits d’inscription à l’université et de cotisation au régime étudiant de la sécurité sociale). Ils reçoivent une aide correspondant au montant de la bourse sur critères sociaux échelon « 1 » (1 525 euros). En mai 2011, selon l’état transmis par le Centre national des œuvres universitaires et scolaires, 976 étudiants en ont bénéficié pour un coût de 1,48 million d’euros.

● Une aide sur critères universitaires visant à attirer vers le métier d’enseignant les étudiants dont le parcours est excellent. Le nombre d’aides attribuables a été fixé pour l’année 2010-2011 à 10 400 par une circulaire du 30 septembre 2010.

Le montant de l’aide est déterminé de la façon suivante :

– étudiant bénéficiant d’une bourse sur critères sociaux et ne bénéficiant pas d’une aide au mérite de l’enseignement supérieur : 2 500 euros ;

– étudiant bénéficiaire d’une aide au mérite de l’enseignement supérieur : 700 euros ;

– étudiant ni bénéficiaire d’une bourse sur critères sociaux ni d’une aide au mérite et dont les revenus de la famille sont inférieurs à 60 000 euros : 1 250 euros.

En mai 2011, selon l’état transmis par le Centre national des œuvres universitaires et scolaires, 7 822 étudiants en ont bénéficié pour un coût de 15,137 millions d’euros.

Les deux aides prévues par le dispositif sont versées selon le même calendrier que les bourses sur critères sociaux, dont le paiement est échelonné sur les dix mois de l’année universitaire.

Source : direction générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale, 25 mai 2011.

Ainsi, pour le Syndicat national des personnels de direction de l’éducation nationale, les « écarts sociaux » entre les enseignants et les élèves, qui tendent à s’accroître, ne ferait que s’accentuer avec l’exigence du master (74). Ce constat est partagé par le Syndicat des enseignants-UNSA : alors que le concours, a joué, historiquement, un rôle d’ascenseur social, à terme, il pourrait conduire à ne recruter que des « filles de cadres moyens », ce qui ne manquerait de provoquer, dans les établissements, de véritables « chocs culturels » (75). Sur le terrain, le président de la Conférence des directeurs d’IUFM, M. Gilles Baillat, a d’ores et déjà observé à Créteil, comme dans d’autres académies, que certains étudiants paraissaient découragés par la perspective d’accomplir une année supplémentaire d’études non rémunérée pour se présenter au concours, au vu de la baisse du nombre d’inscriptions en master (76).

L’annonce de la rupture sociale semble loin d’être infondée, puisque l’accès des couches les moins favorisées aux études et au diplôme de master est aujourd’hui réduit. Les étudiants issus de milieux modestes étant souvent bousiers, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme Valérie Pécresse, a rappelé que le pourcentage de boursiers en master n’est que 20 % à 25 %, contre 35 % dans le premier cycle de l’enseignement supérieur (77). En outre, les enfants de cadres, d’indépendants et d’intermédiaires réussissent trois à quatre fois plus fréquemment que ceux d’ouvriers ou d’employés des études longues en université (master ou doctorat) (78).

Les responsables administratifs des ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur sont conscients du risque. En particulier, le directeur général de l’enseignement supérieur, M. Patrick Hetzel, a jugé que l’égalité des chances, en matière de recrutement des enseignants, constitue aujourd’hui un « vrai sujet », qui justifierait l’adoption de nouveaux dispositifs d’aides (79). De son côté, le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer, a estimé que l’Éducation nationale devait veiller à ce que le « risque social encouru » n’aille pas à « contresens » de la tradition républicaine d’ascension sociale par le biais du concours (80).

5. Un recrutement disciplinaire paradoxalement accentué

La mastérisation est, en quelque sorte, « stérilisée » par les modalités d’organisation du concours, qualifiées de « côte mal taillée » par le recteur de l’académie de Versailles, M. Alain Boissinot (81). Les dates des épreuves et leur contenu ont été jugés, par la très grande majorité des interlocuteurs de la mission, comme allant à l’encontre de l’objectif de professionnalisation de la formation.

a) Le choix des dates d’épreuves ou le « scénario du pire »

L’articulation de la formation avec la date du concours est évidemment une question stratégique. Or, de ce point de vue, les choix du ministère de l’éducation nationale n’ont guère été pertinents. Le Syndicat national des personnels de direction de l’éducation nationale, habituellement modéré dans son expression, les a même qualifiés de « scénario du pire » (82). Le directeur général de l’enseignement supérieur, M. Patrick Hetzel, a pourtant estimé que le calendrier actuel des concours était un effet collatéral de la mise en œuvre rapide de la réforme, puisqu’il fallait bien arrêter des dates pour faire avancer le processus… (83)

Ainsi, le positionnement des épreuves dans la deuxième année de master fait se « télescoper » concours et diplôme. En effet, au cours d’une même année universitaire, les étudiants doivent :

– passer les écrits du concours à l’automne (fin septembre pour le concours de recrutement de professeurs des écoles et courant novembre pour le certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré, le CAPES) ;

– effectuer, en principe, six semaines de stages, celui en responsabilité étant généralement organisé en février-mars, soit après la publication des résultats de l’admissibilité aux épreuves du certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré (CAPES) ;

– valider les unités d’enseignement nécessaires à l’obtention du diplôme ;

– rédiger un mémoire de recherche ;

– passer, pour les plus chanceux d’entre eux, les épreuves d’admission durant le mois de juin (mai pour le concours de recrutement de professeur des écoles), leurs dates variant selon les académies.

Jamais l’expression de « parcours du combattant » n’aura été aussi adaptée que pour décrire cette accumulation d’obstacles à franchir. Le schéma ci-dessous, qui concerne le cas des étudiants préparant le CAPES, permet de l’illustrer.

Schéma du déroulement théorique de la deuxième année de master d’un étudiant préparant le concours du CAPES

Septembre – octobre – novembre – décembre – janvier – février – mars – avril – mai – juin

Cours
6 semaines

Épreuves
d’admis-sibilité

Cours
3 semaines

Cours
6 semaines

Stage
en respon-sabilité
4 semaines

Cours
6 semaines

Épreu-ves
d’admis-sion

Les inconvénients de la concomitance du concours et de l’année qui conduit au diplôme de master sont de trois ordres.

D’abord, la conjonction « master-concours » fonctionne comme un multiplicateur de fatigue et de stress. Ainsi que le souligne le rapport d’étape remis par M. Jean-Michel Jolion, président du comité du suivi du master, à la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, « le système actuel met les étudiants en situation d’échec par accumulation de contraintes au lieu de les mettre en situation de réussite » (84).

En outre, l’organisation des épreuves d’admissibilité du concours du CAPES, en novembre, conduit à pénaliser les étudiants qui doivent travailler l’été pour financer leurs études. Comme l’a observé M. Jean-Michel Jolion, ce choix introduit une « marche supplémentaire » à gravir pour les étudiants d’origine modeste qui souhaitent embrasser la carrière d’enseignant (85). De plus, s’ils choisissent, malgré tout, de travailler l’été, le temps de préparation effectif des écrits se réduit, de fait, à deux mois (septembre et octobre).

Enfin, les résultats des écrits du CAPES étant connus en janvier, c’est-à-dire en même temps ou un peu avant le début du deuxième semestre de la dernière année de master, les étudiants qui ont échoué à ces épreuves ne disposent d’aucune possibilité de se réorienter. « Pris dans la nasse », selon l’expression de l’ancien président de la Conférence des doyens et directeurs d’unités de formation et de recherche scientifiques, M. Alain Trouillet (86), ils peuvent avoir le sentiment qu’ils ont effectué cinq années d’études pour rien.

Ces observations conduisent à considérer, aux côtés M. Marcel Pochard, conseiller d’État, que l’articulation du concours et du diplôme n’a été « ni pensée ni réfléchie » (87).

b) Des épreuves contredisant l’objectif de professionnalisation

Non seulement le calendrier du concours perturbe la deuxième année de master, mais ses épreuves sont devenues, selon plusieurs interlocuteurs de la mission, encore plus académiques qu’elles ne l’étaient. Celles-ci dévalorisent de fait le master, et tout particulièrement le volet professionnel de la formation. C’est ce qui a conduit M. Claude Thélot, conseiller maître honoraire à la Cour des comptes, à considérer que la réforme entraînait une « sous-professionalisation de la formation » (88).

● Un concours plus académique

La mastérisation s’est accompagnée d’une réduction du nombre d’épreuves du concours, agrégation exceptée, à quatre épreuves seulement, contre cinq à huit précédemment.

L’admissibilité comporte désormais deux épreuves écrites, qui varient selon qu’il s’agit du concours de professeur des écoles ou de l’une des sections du certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré (CAPES), et prennent la forme d’une ou deux compositions, de réponses à des questions ou d’une étude de textes.

Ces épreuves revêtent un caractère disciplinaire marqué. Or, ainsi que le note M. Jean-Michel Jolion, président du comité du suivi du master, au sujet des épreuves d’admissibilité du concours de recrutement de professeurs des écoles – cette observation valant aussi pour les écrits du CAPES –, « l’admissibilité, très fortement théorique et disciplinaire, reste un passage peu compréhensible pour les étudiants qui doivent par ailleurs valider ce type de requis disciplinaires dans le cadre de leurs études » (89). Le jugement des didacticiens entendus par la mission, MM. Bertrand Daunay et Yves Matheron, sur les épreuves écrites du concours de professeur des écoles, est encore plus sévère, puisqu’elles constituent, d’après eux, une « régression » par rapport à la situation antérieure. En effet, alors qu’elles comportaient auparavant une analyse de travaux d’élèves, qui permettait d’évaluer les compétences didactiques des candidats, elles se limitent aujourd’hui à un contrôle des connaissances, de surcroît du niveau des programmes de Troisième et de Seconde (90).

L’admission, quant à elle, comporte deux épreuves :

– pour le concours de recrutement de professeurs des écoles, une présentation d’une séquence d’enseignement en mathématiques et une interrogation, au choix du candidat, sur les arts visuels, la musique ou l’éducation physique et sportive, suivie d’une présentation d’une séquence d’enseignement en français et d’une interrogation sur la compétence « Agir en fonctionnaire de l’État et de manière éthique et responsable » ;

– pour le certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré, une leçon et une épreuve sur dossier. Celle-ci comporte deux parties : une étude de documents, une explication ou des exercices, puis une interrogation sur la compétence « Agir en fonctionnaire de l’État et de manière éthique et responsable ».

On pourrait penser que les épreuves d’admission, à l’inverse des écrits, permettraient d’évaluer les compétences professionnelles des candidats. En réalité, celles-ci conservent un important volet « disciplinaire ». C’est naturellement le cas de la leçon – qui est avant tout un bel exercice oratoire selon le Syndicat général de l’éducation nationale-CFDT – (91), mais aussi de l’épreuve sur dossier. À titre d’illustration, celle en lettres modernes, doit permettre au candidat de montrer « sa connaissance des contenus d’enseignement et de la discipline concernée » (92). Pour M. Patrick Le Pivert, inspecteur d’académie-inspecteur pédagogique régional, cet exercice n’évalue pas la pratique professionnelle du candidat, mais se limite à une étude de texte, accompagnée d’un « petit développement pédagogique » (93). Les deux didacticiens entendus par la mission, MM. Bertrand Daunay et Yves Matheron, ont dressé le même constat : dans cette épreuve, rien ne dit explicitement que les compétences didactiques et pédagogiques des candidats seront évaluées alors qu’elles sont explicitement mentionnées par l’arrêté du 12 mai 2010 définissant les compétences professionnelles à acquérir par les professeurs (94).

La seule épreuve d’admission pouvant être affichée comme étant « professionnelle » est celle qui porte sur la compétence « Agir en fonctionnaire de l’État et de façon éthique et responsable », la première recensée par l’arrêté précité du 12 mai 2010. À cette occasion, le candidat répond, pendant dix minutes, à une question à partir d’un document qui a lui a été transmis, tous deux portant sur des thématiques regroupées autour des connaissances, des capacités et des attitudes désignées pour cette compétence par l’arrêté. Cependant, ainsi que l’a rappelé M. Jean-Michel Jolion, président du comité du suivi du master, les exemples de sujets fournis par le ministère de l’éducation nationale ont été préparés par des équipes disciplinaires, ce qui augure mal d’une épreuve qui devrait avoir pour finalité d’évaluer la réflexion du candidat sur les questions transversales relatives au métier et à l’école (95).

● Un concours entièrement déconnecté du master

Les principes de la réforme n’ont pas été déclinés dans le concours. En effet, celui-ci ne tient absolument pas compte du fait que les professeurs doivent désormais être titulaires non plus d’une licence, mais d’un master. D’une part, le concours, en restant très disciplinaire, revérifie des connaissances validées au cours des cinq années d’études ayant conduit au master. D’autre part, ses épreuves ne valorisent pas les stages effectués en première comme en deuxième année de master.

Par conséquent, au lieu de s’appuyer sur l’obtention d’un diplôme de haut niveau, ce qui aurait été le choix de la raison, le concours forme avec le master deux voies d’entrée dans le métier, parallèles et autonomes, aucune n’ayant prise sur l’autre.

Cette situation, incompréhensible pour les étudiants, pourrait avoir deux conséquences corrélées et extrêmement préjudiciables à la qualité de leur formation :

– d’une part, les candidats au concours pourraient n’avoir aucun intérêt à s’investir dans les formations les plus utiles à l’amélioration des pratiques enseignantes, celles relatives aux didactiques des disciplines ou aux sciences cognitives. En effet, comme l’a indiqué l’ancien président de la Conférence des doyens et directeurs d’unités de formation et de recherche scientifiques, M. Alain Trouillet, « dès lors que ce n’est pas au programme du concours, on parle à des murs » (96;

– d’autre part, puisqu’il n’est pas nécessaire d’avoir vu des élèves pendant la formation – les stages proposés en master n’étant pas obligatoires, rappelons-le – et que les épreuves ne donnent pas de « prime » aux étudiants qui en ont effectué, ceux-ci pourraient se détourner du volet professionnel de la formation, voire même des masters « Enseignement et formation ». Dans ces conditions, le nombre de candidatures libres – c’est-à-dire de candidats diplômés d’un master mais n’étant pas passés par les filières préparant au métier d’enseignant – pourrait augmenter, ce qui conduirait l’Éducation nationale à recruter, comme enseignants, des jeunes dépourvus de toute formation et expérience professionnelle spécifiques.

Une telle évolution ne manquerait pas de placer les universités en situation de concurrence, leur intérêt étant d’attirer le plus d’étudiants dans leurs unités de formation et de recherche « disciplinaires » en affichant un bon taux de réussite au concours. Or les perdants d’une telle compétition ne pourraient qu’être les instituts universitaires de formation des maîtres, paradoxalement punis pour avoir continué de jouer la carte de la professionnalisation.

6. Une année 2010-2011 fortement anxiogène pour les enseignants stagiaires

Sur le terrain, l’un des effets les plus visibles de la réforme a été l’affectation, le 1er septembre dernier, en académie, des lauréats du concours 2010 pour le stage précédant leur titularisation. Beaucoup d’enseignants stagiaires, dont le désarroi a été abondamment commenté, ont donc eu le sentiment d’être jetés « dans le grand bain ». Les médias se sont fait également l’écho des protestations portées par des « collectifs » de parents d’élèves contre l’affectation de ces jeunes professeurs, à leurs yeux inexpérimentés, dans les classes.

On peut considérer qu’au total, le processus d’entrée des enseignants stagiaires dans le métier aura été, au cours de l’année scolaire 2010-2011, « improvisé, boiteux et un peu hasardeux » pour reprendre le jugement du président de la commission sur la condition enseignante (2007-2008), M. Marcel Pochard (97).

Après avoir évoqué les données ayant affecté la situation d’ensemble des enseignants stagiaires, on analysera les différences constatées entre le premier degré et le second degré, les problèmes posés par l’organisation de la formation dite continuée des enseignants nouvellement recrutés et le caractère conjoncturel ou non des difficultés rencontrées au cours de cette année transitoire.

a) Le tableau d’ensemble des conditions d’affectation des enseignants stagiaires, des démissions et des congés maladie

L’affectation directe des enseignants stagiaires en académie a été, sans aucun doute, l’aspect le plus décrié de la réforme.

En effet, ces enseignants débutants n’ont pas été formés dans le cadre des masters « Enseignement et formation », puisque ces diplômes n’ont été approuvés qu’au cours de l’été 2010. Ils ont donc été nommés en poste sans avoir effectué les stages d’observation, de pratique accompagnée et en responsabilité proposés au cours des deux années d’études conduisant à ces diplômes. Certains ne sont même pas allés jusqu’au bout du master, en raison des conditions plus souples prévues pour la session 2010 du concours (98: selon Mme Josette Théophile, directrice générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale, ce fût généralement le cas pour les candidats au concours du certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré (99).

Mme Josette Théophile a cependant considéré que le choix d’une affectation immédiate avait été en réalité « prudent »  (3), semblant signifier, qu’aux yeux du ministère, toute autre décision aurait conduit à un enlisement de la réforme. Mais les syndicats d’enseignants ne partagent pas cette analyse. Au contraire, ils dénoncent une politique qui, selon l’un d’entre eux, le Syndicat CFTC de l’éducation nationale, de la recherche et des affaires culturelles, a mis les professeurs stagiaires affectés à la rentrée 2010 « en situation d’apprentissage par l’échec partiel » (100).

Qu’en est-il en réalité ? La situation a été sans doute moins catastrophique qu’on pouvait le craindre – à titre d’illustration, M. William Marois, le recteur de l’académie de Créteil, généralement réputée comme étant la plus difficile, a indiqué qu’à sa surprise, sur les 900 professeurs stagiaires affectés la rentrée dernière, 475 d’entre eux ont demandé, à l’occasion du mouvement de mutations annuelles, à y rester (3).

Les développements qui suivent visent à présenter un tableau d’ensemble de la situation des enseignants stagiaires en présentant les données qui ont pu être recueillies sur leur affectation, ainsi que sur les démissions, les congés maladie et les signalements de difficulté.

● L’affectation des enseignants stagiaires dans des classes difficiles : principes et réalités

Au 1er octobre 2010, on dénombrait 7 159 professeurs stagiaires dans le premier degré (32 % en école maternelle et 68 % en école élémentaire), représentant 2,1% de l’effectif total des enseignants du premier degré, et 8 064 enseignants stagiaires et conseillers principaux d’éducation stagiaires, représentant 2,3 % de l’effectif total des enseignants du second degré (101).

Le dispositif d’accueil, d’accompagnement et de formation de ces enseignants a été précisé par une circulaire du 25 février 2010 (102). S’agissant de leur affectation, ce texte comporte plusieurs recommandations, qui allaient de soi :

– pour les stagiaires du premier degré, les « écoles difficiles », celles appartenant, par exemple, à un réseau ambition réussite de l’éducation prioritaire, devaient être évitées, de même que l’attribution des classes les plus délicates, comme celles du Cours préparatoire – première année de l’école élémentaire – et du Cours moyen deuxième année – qui précède la Sixième ;

– pour les stagiaires du second degré, il était recommandé d’éviter « autant que faire se peut » les établissements les plus difficiles, notamment ceux situés en réseau ambition réussite, et, « dans toute la mesure du possible », de s’assurer que l’emploi du temps du professeur stagiaire corresponde à deux niveaux d’enseignement au maximum, sauf dans les disciplines à horaires réduits (arts, musique, etc.).

Les recteurs ont donc été invités à repérer, pour ces enseignants, des postes qualifiés de « berceaux » par l’Éducation nationale.

On observera toutefois que cette circulaire est assez peu prescriptive – aucune consigne n’ayant été donnée, par exemple, en ce qui concerne le nombre maximal de classes prises en charge ou l’évitement systématique des postes en éducation prioritaire. Sur ce dernier point, la directrice générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale, Mme Josette Théophile, a considéré qu’un tel objectif n’aurait pas été nécessairement pertinent, dans la mesure où « l’éducation prioritaire » recouvre des situations – et donc des difficultés – très différentes (103).

Cet argument n’est toutefois pas entièrement recevable au vu de la situation exceptionnelle de ces jeunes enseignants qui, pour la plupart d’entre eux, n’ont bénéficié d’aucune formation professionnelle approfondie avant leur prise de poste. Ainsi, le fait que ces débutants aient connu une année « transitoire » ne devait pas conduire, pour autant, l’Éducation nationale à minimiser les difficultés qu’ils pouvaient rencontrer, mais aurait dû l’inciter à faire preuve d’une plus grande attention quant aux choix ayant guidé les affectations.

De ce point de vue, toutes les précautions ne semblent pas avoir été prises pour créer les conditions de premier exercice du métier les plus favorables.

● Selon une enquête menée par le Syndicat national unifié des instituteurs, des professeurs des écoles et professeurs d’enseignement général de collège auprès de 1 267 professeurs des écoles stagiaires, les recommandations de la circulaire du 25 février 2010 concernant les affectations en écoles difficiles ou sur des classes de type Cours préparatoire (CP) ou Cours moyen deuxième année (CM2) n’auraient souvent pas été respectées : 34 % des professeurs déclarent avoir exercé en éducation prioritaire, 32 % auraient enseigné en CP et 36 % en CM2 (104).

● Selon l’enquête « Stagiaires 2010-2011 » du Syndicat national des lycées et collèges, menée auprès de plus 550 professeurs de l’enseignement secondaire, près d’un tiers des stagiaires, soit 32,8 % des personnes interrogées, seraient en charge de classes d’examen (Troisième, Première et Terminale), réputées plus difficiles en raison du temps accru de préparation des cours qu’elles imposent (105).

● Parmi les exemples qualifiés de « bizutage » par les syndicats d’enseignants, on peut citer les cas, constatés dans l’enseignement secondaire, de stagiaires prenant en charge cinq à six classes ou assurant la fonction de professeur principal (2,2 % des stagiaires interrogés par le Syndicat national des lycées et collèges (2).

L’encadré ci-après présente les données fournies de son côté par le ministère de l’éducation nationale sur les affectations « difficiles ».

Les affectations d’enseignants stagiaires sur des postes difficiles

● Les affectations en éducation prioritaire

Dans le premier degré, 13,5 % des stagiaires ont été affectés dans les écoles relevant de l’éducation prioritaire (ce pourcentage est égal à 16 % pour l’ensemble des enseignants du premier degré). Dans l’académie de Créteil, réputée la plus difficile, ces pourcentages sont de respectivement 16,4 % et 28,4 %. La part des stagiaires en éducation prioritaire est supérieure à celle des titulaires dans un quart des académies (Aix-Marseille, Amiens, Besançon, Caen, Guyane, Martinique et Montpellier).

Dans le second degré, 13,8 % des stagiaires ont été affectés dans des établissements relevant de l’éducation prioritaire (ce pourcentage est égal 18,3 % pour l’ensemble des enseignants titulaires du second degré). Dans l’académie de Créteil, ces pourcentages sont de respectivement 48,3 % et 52,9 %. La part des stagiaires en éducation prioritaire est supérieure à celle des titulaires dans deux académies seulement (Corse et Martinique).

● Le nombre de classes et de niveaux pris en charge

Dans le premier degré, 26 % des professeurs des écoles stagiaires sont affectés sur plusieurs niveaux d’enseignement. Généralement, deux niveaux sont enseignés, cependant, dans les écoles rurales, des cycles complets peuvent aussi être dispensés par les enseignants stagiaires (13% des stagiaires sont sur trois niveaux). Par ailleurs, les classes de CP et de CM2 ont été évitées, sauf pour soixante-quatorze stagiaires couvrant un cycle complet, plus un stagiaire en CP en Martinique et seize stagiaires en CM1/CM2 ou CM2 toujours en Martinique.

Dans le second degré, 70 % des stagiaires ont été affectés sur un ou deux niveaux, ainsi que le préconisait la circulaire du 25 février 2010. Les disciplines des enseignants stagiaires affectés sur trois niveaux et plus correspondent à des matières qui, selon le ministère de l’éducation nationale, permettent plus difficilement une affectation sur deux niveaux, notamment en raison de leur faible quotité horaire par élève (une heure par semaine par élève) – cas des arts plastiques et de l’éducation musicale –, de la spécialisation souhaitée par l’enseignant (natation, athlétisme pour les professeurs d’éducation physique et sportive), de la faible diffusion de la discipline (occitan par exemple). Par ailleurs, 86 % des enseignants ont au plus six classes, les remarques concernant les stagiaires affectés sur plus de six classes étant analogues à celles indiquées pour les stagiaires affectés sur trois niveaux ou plus.

Source : direction générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale, 25 mai 2011.

Pour l’année scolaire 2011-2012, la circulaire du 31 mars 2011 relative au dispositif d’accueil, d’accompagnement et de formation des enseignants stagiaires est encore moins claire que celle du 25 février 2010 en matière d’affectation (106). Pour le premier degré, il est simplement indiqué que les écoles les plus difficiles « seront évitées, de même que l’attribution des classes délicates » – en ne donnant comme exemple que le Cours préparatoire sans se référer au Cours moyen deuxième année. Dans le second degré, la circulaire est muette sur les affectations dans les établissements difficiles et ne recommande que de limiter l’emploi du temps des stagiaires à deux niveaux d’enseignement au maximum.

Les affectations à la rentrée 2011 se sont présentées de la manière suivante :

– dans le premier degré, sur les 3 351 enseignants stagiaires affectés, 615 l’ont été en zone d’éducation prioritaire (soit 18,4% des stagiaires contre 20,4% de l’ensemble des titulaires exerçant en zone d’éducation prioritaire). Plus d’un tiers de ces stagiaires ont été affectés dans des écoles relevant du dispositif « écoles, collèges et lycées pour l’ambition, l’innovation et la réussite » (ÉCLAIR) – qui a succédé aux réseaux Ambition réussite regroupant les écoles et les établissements concentrant le plus de difficultés. Quelques académies seulement sont parvenues à n’affecter aucun stagiaire en zone d’éducation prioritaire (Caen, Guadeloupe, Limoges et Nice), alors que d’autres y ont eu recours plus largement, notamment en Guyane, en Martinique et à La Réunion.

– dans le second degré, sur les 7 856 enseignants stagiaires affectés, 1 036 l’ont été en zone d’éducation prioritaire (soit 13,2 % des stagiaires contre 18 % de l’ensemble des titulaires exerçant en zone d’éducation prioritaire). Moins de 8 % des stagiaires ont été affectés dans des établissements ECLAIR et deux académies sont parvenues à n’affecter aucun stagiaire en éducation prioritaire (Caen et Limoges) (107).

● Des données rassurantes sur les démissions, les congés maladie et les enseignants signalés en difficulté mais qui masquent des situations de souffrance

Dès le mois de novembre 2010, le ministère de l’éducation nationale rendait publiques les données sur le nombre de congés maladie, de démissions et de stagiaires signalés en difficulté afin de contester, sur la base d’éléments jugés objectifs, l’opinion selon laquelle la situation des enseignants affectés le 1er septembre 2010 aurait été marquée par une plus grande pénibilité par rapport à celle de leurs prédécesseurs (108).

Les dernières données disponibles communiquées à la mission permettent de confirmer cet état des lieux globalement rassurant, à l’exception du nombre total de démissions intervenues dans le second degré, nettement plus élevé que celui constaté en 2009-2010 :

– pour la période septembre-décembre 2010, le nombre moyen de jours pris par les enseignants stagiaires du premier degré en congé maladie n’est pas supérieur à celui des nouveaux titulaires de l’année précédente. Par ailleurs, le taux d’absence moyen en congé maladie ordinaire des professeurs des écoles stagiaires constaté en décembre 2010 est légèrement moins élevé que celui des professeurs titulaires pour la même période : 9,9 % pour les titulaires, contre 7,8 % pour les stagiaires. Pour le second degré, ces pourcentages sont respectivement de 10,2 % et 10,3 %, tandis que le nombre moyen de jours pris par les enseignants stagiaires en congé maladie n’est pas, pour la période septembre-décembre 2010, exception faite du mois d’octobre (109), supérieur à celui des nouveaux titulaires de l’année précédente ;

– au total, au cours de l’année scolaire 2010-2011, seulement 91 professeurs des écoles stagiaires ont démissionné contre 117 démissions de stagiaires IUFM l’année scolaire précédente, principalement dans les académies de Créteil et de Versailles (36% des démissions). En revanche, pour le second degré, 130 enseignants stagiaires ont démissionné, contre 98 l’année précédente, principalement dans les académies de Créteil, de Lille, de Lyon et de Versailles (43% des démissions) ;

– en ce qui concerne les signalements d’enseignants « en difficulté », les données sont difficiles à exploiter dans la mesure où la définition est variable d’une académie et d’un département à l’autre. Durant les deux premiers mois de l’année scolaire 2010-2011, 69 signalements de stagiaires en difficulté ont été indiqués dans le premier degré (soit 0,96 % des stagiaires) et 82 dans le second degré (soit 0,95 % des stagiaires). Selon les inspecteurs généraux entendus par la mission, dans l’académie de Créteil, seulement 7 % des stagiaires ont été signalés comme étant en grande difficulté (110).

Pour autant, le tableau esquissé par ces données n’est pas aussi idyllique qu’il pourrait le laisser croire. Elles ne permettent pas en effet d’appréhender les situations de « grande souffrance » rapportées à la mission par le collectif Stagiaire Impossible, fondé en octobre 2010 après que le recteur de l’académie de Créteil a qualifié de « normale » l’année scolaire en cours (111). Les données concernant les démissions n’ont en outre aucun sens – car, comme l’a souligné l’un de ses membres : « On n’arrête pas un métier qui est une vocation ! ». Le collectif a d’ailleurs jugé plus pertinent de recueillir les témoignages de stagiaires, toutes disciplines, tous niveaux et toutes académies confondus – soit plus de 165 à ce jour. Consignés dans un Livre Noir d’une rentrée à plein temps, qui a été remis à la mission (112), ils se font l’écho des difficultés physiques liées aux 18 heures d’enseignement assurés par les stagiaires du second degré, qui se sont traduites par des maladies liées au stress, des pertes de poids rapides – dix kilos en deux mois dans un cas –, des malaises, voire des évanouissements, ou ont débouché sur la consommation d’anxiolytiques.

Deux impressions ressortent, fortement, de ces témoignages : le sentiment, permanent semble-t-il, chez ces enseignants débutants, qu’ils atteignent leurs limites en matière d’endurance et leur frustration de ne pas être en mesure, malgré toute leur bonne volonté, d’assurer un enseignement de qualité, faute d’une formation suffisante – « Nous n’avons tout simplement pas le temps de rentrer correctement dans le métier » comme l’indique un courriel adressé au collectif (113).

b) Une situation plus tendue pour les professeurs stagiaires du second degré

Les conditions d’exercice de l’année de stage ont été très différentes d’une académie à l’autre. Mais, d’une manière générale, on peut considérer que la situation des professeurs stagiaires des écoles a été, dans l’ensemble, plus favorable que celle des professeurs stagiaires des collèges et lycées. Ainsi, pour le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer, autant le bilan peut être considéré comme « assez nettement positif » dans le premier degré, autant celui du second degré est « contrasté », ce niveau d’enseignement ayant connu des « maldonnes » (114).

● Des professeurs stagiaires progressivement responsabilisés dans le premier degré

L’entrée des professeurs des écoles stagiaires dans le métier ayant été progressive, leur situation est considérée, par le ministère de l’éducation nationale, comme étant globalement plus favorable que celle de leurs collègues du second degré.

Le volume important d’enseignants en surnombre à la rentrée scolaire 2010, c’est-à-dire ne prenant pas en charge des classes en raison du non-départ à la retraite de leurs collègues âgés, a en effet offert des souplesses d’organisation.

Ces « surnombres budgétaires », pour reprendre le jargon employé par le ministère, ont ainsi permis d’affecter les stagiaires, à la rentrée 2010, en compagnonnage auprès d’un maître expérimenté jusqu’aux vacances de la Toussaint. Durant cette période, les stagiaires ont donc accompli leurs premiers pas de professionnels « en tandem » avec des enseignants titulaires. Aussi cette période d’observation et de pratique accompagnée a-t-elle certainement permis à ceux d’entre eux qui n’avaient pas effectué une année d’alternance dans un institut universitaire de formation des maîtres de s’approprier les éléments du métier.

À l’issue de cette période, les stagiaires ont été affectés, schématiquement, sur deux types de postes, les choix en la matière différant d’une académie, voire d’un département à l’autre :

– soit ils ont été affectés sur des postes fixes, réservés pour eux à l’année, qui avaient été jusqu’ici occupés par des remplaçants et le sont à nouveau lorsque les stagiaires partent en formation continue ;

– soit ils ont été affectés – c’est le cas dans la majorité des académies – sur des brigades de remplacement, ce qui leur a permis de prendre en charge, au fur et à mesure de l’année, des classes libérées par le départ du professeur titulaire en congé maternité ou maladie ou en formation.

Aux yeux des inspecteurs généraux entendus par la mission, chacune de ces deux formules semble présenter des avantages et des inconvénients. Selon Mme Marie Mégard, inspectrice générale de l’éducation nationale, l’affectation sur poste fixe est intéressante dès lors que le stagiaire est accueilli dans une école où l’équipe « fonctionne bien » et que les classes difficiles – cours préparatoire et CM2 – sont évitées : les conditions – dont on voit bien qu’elles sont cumulatives – sont alors optimales. Les affectations sur des compléments de service offrent également des conditions intéressantes dans la mesure où le stagiaire peut échanger avec le titulaire de la classe et perfectionner ainsi sa pratique enseignante.

En revanche, selon cette interlocutrice, les affectations sur des postes dits « fractionnés » sur deux écoles sont « moins favorables », tandis que celles sur des postes en remplacement sont jugées « plus ou moins favorables ». Ainsi, lorsque l’enseignant stagiaire est affecté pour un remplacement « à la demande », par exemple à la suite d’un congé maladie, il est difficile d’anticiper le moment où survient le besoin de remplacement et la durée de celui-ci. Si Mme Marie Mégard n’est pas allée jusqu’à considérer que ce mode d’affectation entraîne des prises de classe discontinues, qui rendent plus difficile l’entrée dans le métier, elle a néanmoins reconnu son caractère problématique. À l’inverse, les affectations sur des brigades de remplacement pour formation continue permettent, les départs en formation et leur durée étant connus à l’avance, de « calibrer » l’affectation : l’enseignant stagiaire peut alors se familiariser avec les différents niveaux d’enseignement.

Par ailleurs, la qualité de l’enseignement dispensé par les stagiaires peut être, selon Mme Mégard, contrôlée dans deux cas de figure. Ainsi, lorsque le professeur stagiaire est affecté à l’année, sur un poste fixe, les conseillers pédagogiques de circonscription, qui assistent les inspecteurs de l’éducation nationale, sont en mesure de visiter les classes, à des intervalles réguliers. De même, lorsque le stagiaire est affecté sur un complément de service, le professeur titulaire de la classe peut veiller à la continuité et à la qualité de l’enseignement dispensé (115).

Cela signifie qu’à l’inverse, cette fonction de « surveillance pédagogique » ne peut être assurée de manière aussi optimale auprès des enseignants affectés sur des brigades de remplacement.

Le regard porté par les professeurs des écoles stagiaires sur cette première année d’exercice est évidemment beaucoup plus critique. Selon une enquête menée par le syndicat majoritaire, le Syndicat national unifié des instituteurs, des professeurs des écoles et des professeurs d’enseignement général de collège, sur 1 267 stagiaires interrogés, les principaux reproches concernent la charge de travail (57,8 %) et le manque de préparation aux différents niveaux (37,4 %) (116).

● Des enseignants du second degré mis sous tension

À la différence de leurs collègues du premier degré, les stagiaires du second degré ont souvent pris un service d’enseignement complet, et ce dès la rentrée. Tous n’ont pas bénéficié en effet des allègements de service qui ont pu être mis en œuvre localement, ceux-ci ayant été variables d’une académie à l’autre. Un certain nombre d’entre eux ont même été contraints d’effectuer des heures supplémentaires.

Le tableau d’ensemble : une charge de travail éprouvante

Le second degré ne bénéficiant pas, comme l’a rappelé Mme Josette Théophile, directrice générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale, de surnombres budgétaires (117), l’entrée dans le métier des professeurs de lycée et de collège stagiaires s’est déroulée dans des conditions très différentes de celles observées dans le premier degré. Les lauréats des concours ont en effet été placés sur des postes « en responsabilité », avec des obligations de service correspondant à leurs corps, c’est-à-dire dix-huit heures pour les certifiés et les professeurs de lycée professionnel et quinze heures pour les agrégés.

Dans ces conditions, pour reprendre les termes utilisés par M. Jean-Pierre Hédoin, inspecteur général de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche, la prise de fonction a été, pour la plupart des enseignants, « exigeante, rude et difficile ». Aussi ces enseignants ont-ils connu une situation de « tension physique et intellectuelle ». Cependant, six ou sept mois après la rentrée, les inspections générales ont constaté que le métier était « rentré » et que ces jeunes professeurs avaient appris à « faire face » (118).

Outre le fait que les professeurs stagiaires auraient pris, selon les inspections générales, leurs marques, le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer, a considéré, pour sa part, que leur présence au sein des équipes pédagogiques avait permis de favoriser l’innovation et de bousculer les habitudes méthodologiques, grâce à leur envie de bien faire et leur appétence pour l’usage du numérique (119).

Il serait toutefois imprudent d’affirmer que les enseignants stagiaires disposent, désormais, des outils et de l’assurance nécessaires pour « faire face ».

Ainsi que cela a déjà été souligné, ce qui ressort des propos tenus par le collectif Stagiaire Impossible, c’est bien plutôt le sentiment – permanent et frustrant – chez ces jeunes professeurs d’être dans l’incapacité d’accomplir les tâches les plus quotidiennes, comme la préparation des cours.

En outre, leur manque de formation, qui ne leur permet pas d’appréhender, selon l’exemple donné par l’un d’entre eux, ce que sont les besoins d’un élève de Cinquième et les méthodes pour le mettre au travail, est, à leurs yeux, difficilement rattrapable. Ainsi, un des membres de ce collectif ne s’apercevait pas que le travail qu’il demandait pouvait créer des difficultés artificielles avant qu’une inspectrice ne lui donne, en janvier dernier, quelques conseils sur ce que doit être la « mise en activité » d’un élève. De plus, certains outils indispensables au travail en classe sont, parfois, arrivés bien tard – dans le cas de l’académie de Créteil, en décembre 2010 pour la séance de formation continue consacrée aux corrections et en janvier 2011 pour les manuels d’histoire-géographie(120).

Les variations académiques concernant l’affectation à service complet

Selon M. Jean-Pierre Hédoin, inspecteur général de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche, sur les trente académies que compte notre pays, une moitié seulement a tenté d’aménager le service des stagiaires, soit par une diminution hebdomadaire, de deux à trois heures, de l’obligation réglementaire de service, soit par un allégement intervenant en début d’année, obtenu en mobilisant le volant des enseignants remplaçants disponibles, celui-ci étant plus fréquemment sollicité à l’approche de l’hiver (121).

La majorité des enseignants stagiaires a donc été affectée à temps complet – 57 % d’après la directrice générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale, Mme Josette Théophile, les 43 % restants totalisant à la fois ceux qui bénéficient d’une décharge et ceux qui sont sur des services à temps incomplet (122).

Le tableau ci-après présente la très grande diversité des situations selon les académies au cours de l’année scolaire 2010-2011. Celle-ci est éminemment critiquable en tant qu’elle a créé des situations d’inégalités entre fonctionnaires appartenant à un même corps.

Les affectations de stagiaires en service complet et incomplet

Le service des enseignants stagiaires est souvent conforme à l’obligation réglementaire de service des corps d’appartenance du stagiaire dans 20 académies.

Par ailleurs, 7 académies ont accordé des décharges ou des allégements de service aux stagiaires sur toute l’année. C’est le cas des académies de :

– Bordeaux : décharge de 3 heures pour les certifiés et professeurs d’éducation physique et sportive ;

– Clermont-Ferrand : décharge de 2 heures (certifiés, agrégés, professeurs d’éducation physique et sportive) et de 4 heures (documentalistes, conseillers principaux d’éducation) ;

– Créteil : décharge de 2 heures par semaine ;

– Martinique : placement en « indisponibles par affectation pour ordre en zone de remplacement » pour 3,3 heures en moyenne. Il s’agit de stagiaires affectés sur des services d’enseignement à temps incomplet du fait de la faiblesse de « l’offre » des disciplines concernées. Ainsi, ces stagiaires, affectés « pour ordre » sur des zones de remplacement, ne sont pas appelés pour effectuer des remplacements ;

– Paris : décharge de 2 heures par semaine ;

– Réunion : décharge de 3 heures ;

– Versailles : décharge de 2 heures.

Enfin, 3 académies ont fait varier l’obligation réglementaire de service, notamment selon l’expérience des stagiaires :

– Amiens : affectation partielle en zone de remplacement accordée aux stagiaires ayant une expérience inférieure à un an (3 heures de décharge pour les agrégés, certifiés, professeurs de lycée professionnel, 4 heures pour les professeurs d’éducation physique et sportive) ;

– Poitiers : affectation partielle pour ordre en zone de remplacement : 2 heures pour les certifiés et agrégés, 4 h pour les agrégés ;

– Corse : sur 18 stagiaires, 7 stagiaires ont un service complet, 11 stagiaires ont une affectation partielle pour ordre en zone de remplacement.

Source : direction générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale, 25 mai 2011.

La présente année scolaire se caractérise par une meilleure homogénéité des situations, les stagiaires ayant été, globalement, affectés à temps plein à la rentrée 2011. On note toutefois 2 heures de décharge accordées à tous les stagiaires dans l’académie de Créteil, tandis que les académies de Besançon et de La Réunion ont quasiment systématiquement affecté pour partie de leur service (2 ou 3 heures) les stagiaires en zone de remplacement afin d’alléger celui-ci (123).

La question des heures supplémentaires

Plusieurs syndicats d’enseignants ont indiqué à la mission que les enseignants stagiaires du second degré effectuaient des heures supplémentaires (124), au-delà de leur obligation réglementaire de service, ce qui a été qualifié par le Syndicat général de l’éducation nationale - CFDT de « scandale absolu ».

Cependant, selon le ministère de l’éducation nationale, seul un faible nombre d’enseignants stagiaires, un millier environ, affectés dans les académies importantes, comme Créteil et Versailles, en effectueraient, avec une moyenne de 1,5 heure par enseignant stagiaire. Sa directrice générale des ressources humaines, Mme Josette Théophile, a ainsi précisé que, dans l’académie de Créteil, elles prennent la forme de deux « heures supplémentaire année », lesquelles sont rémunérées et sont attribuées ainsi aux enseignants stagiaires certifiés pour « compenser », en quelque sorte, le temps passé en formation continue, en sus de leurs 18 heures d’enseignement (125).

● Le caractère protecteur des conditions de titularisation

Le caractère, à tous égards, exceptionnel de l’année 2010-2011 a laissé craindre à certains interlocuteurs de la mission qu’un nombre important de d’enseignants, qui n’auraient pas su faire face à leur charge de travail, ne soient pas titularisés à l’issue de leur année de stage.

Cette crainte paraît excessive dans la mesure où les modalités encadrant la titularisation devraient permettre d’éviter des décisions abruptes de non intégration dans les corps.

Certes, l’évaluation du stage par le jury de titularisation se fonde sur le référentiel de compétences professionnelles établi par l’arrêté du 12 mai 2010, alors même que l’enseignant stagiaire affecté le 1er septembre 2010 n’a pu y être formé pendant ses études.

Toutefois, l’évaluation a lieu après l’avis de l’inspecteur de l’éducation nationale (pour le premier degré) ou de l’inspecteur d’académie-inspecteur pédagogique régional de discipline et du chef d’établissement (pour le second degré). Ce même avis est établi après consultation du rapport du tuteur auprès duquel le stagiaire a effectué son stage. En outre, les tuteurs, comme les présidents de jury, connaissent les conditions dans lesquelles s’est déroulée l’année de stage pour cette première année d’application de la réforme : on peut donc penser qu’ils sont à même de les prendre en considération lors de l’évaluation de l’enseignant stagiaire. Par ailleurs, les académies, conscientes du caractère particulier de cette année, ont mis en place des dispositifs d’alerte qui devraient leur permettre d’anticiper les difficultés majeures des stagiaires.

Pour l’année scolaire 2010-2011, on constate 219 renouvellements de stages dans le premier degré, le taux de renouvellement s’élevant à 3,1 % des stagiaires (contre 6,6 % à la rentrée 2010). Par ailleurs, 305 renouvellements de stages ont été prononcés dans le second degré (contre 353 pour l’année scolaire 2009-2010), soit une stabilité par rapport à l’année passée (3,5 % des stagiaires contre 3,4 % à la rentrée 2010) (126).

c) Des temps de formation professionnelle insatisfaisants

N’ayant pas suivi la formation dispensée dans le cadre des masters « Enseignement et formation », les enseignants stagiaires affectés le 1er septembre 2010 ont néanmoins fait l’objet d’un dispositif spécifique « d’accueil, d’accompagnement et de formation » dans le métier, défini par la circulaire précitée du 25 février 2010.

Ce texte a prévu trois temps de formation professionnelle : une période d’accueil et d’intégration, une ou des périodes de formation dite continuée, c’est-à-dire de formation continue spécifiquement dispensée aux enseignants pendant leur année de stage, et un temps d’accompagnement, assuré par un tuteur.

Le dispositif a été étendu, par la circulaire précitée du 31 mars 2011 et la circulaire de préparation de la rentrée scolaire du 2 mai 2011 (127), à l’année scolaire 2011-2012. Il comporte pourtant des faiblesses, en particulier en ce qui concerne l’organisation – très problématique – de la formation continuée. Considéré par le ministère de l’éducation nationale comme l’une des clefs essentielles de réussite de la réforme, le tutorat fera l’objet d’une analyse séparée.

● La formation « de rentrée » : les journées d’accueil et d’intégration

Cette année scolaire, la première prise de contact des enseignants stagiaires avec leur environnement professionnel a eu lieu très peu de jours après leur affectation. Dans l’académie de Créteil, par exemple, ceux-ci n’ont en effet connu leur affectation que le 20 août 2010. Or la circulaire précitée du 25 février 2010 précisait que leur accueil pouvait être mis en place « dans les jours précédant la rentrée scolaire » (fixée au 1er septembre pour les enseignants) et, « au plus tard » le 30 août, le dernier jour de ce mois étant le 31. Dans l’hypothèse où l’accueil avait lieu à la date butoir, sa durée n’était donc que de deux jours…

Aux termes la circulaire du 25 février 2010, à l’issue d’une première réception, au cours de laquelle des informations utiles sur l’académie d’affectation étaient fournies, deux regroupements – le deuxième ayant lieu après la prise de la classe – supervisés par des équipes comprenant les corps d’inspection territoriaux, les personnels de direction et les tuteurs, pouvaient être organisés, notamment afin que les enseignants stagiaires puissent faire connaître leurs besoins de formation.

À titre d’illustration, selon le collectif Stagiaire Impossible, les stagiaires de l’académie de Créteil ont été accueillis, par le recteur, le 25 août 2010, la journée suivante ayant été consacrée aux problèmes de logement rencontrés par les lauréats des départements d’outre-mer. Ils ont été ensuite accueillis en établissement – cet accueil pouvant se limiter à un court entretien avec le chef d’établissement. L’initiation au contenu du métier n’a donc eu lieu qu’au cours des deux journées de formations dites « disciplinaires », l’une avec les inspecteurs, qui ont présenté les programmes, l’autre avec les formateurs. Celles-ci ont pourtant été jugées trop générales pour être opérationnelles (128).

À cet égard, la circulaire du 31 mars 2011, qui consolide, ainsi que cela a déjà été souligné, le dispositif d’accueil, d’accompagnement et de formation des stagiaires, marque un progrès. Elle indique que la durée de la période d’accueil doit être égale « de préférence » à cinq jours et que celui-ci comporte quatre temps successifs :

– un accueil institutionnel, au cours duquel un livret du stagiaire, reprenant tous les éléments d’information utiles, est remis ;

– des regroupements permettant de faire connaître les besoins de formation ;

– des formations théoriques à la tenue de classe, lesquelles doivent être complétées par au moins trois jours de formation pratique au cours de l’année de stage, une nouveauté introduite par la circulaire du 22 décembre 2010 (129) ;

– un accueil dans l’école ou l’établissement, consacré à la présentation de la structure.

Le recteur de l’académie de Créteil, M. William Marois, en a détaillé le calendrier pour la prochaine rentrée scolaire : l’accueil institutionnel aura lieu le 25 août, puis la journée du 26 août sera consacrée à la question du logement, et les trois jours suivants – contre deux la rentrée dernière – seront dédiés à l’enseignement des disciplines et à la formation à la tenue de classe (130).

● La formation continuée : une organisation et un contenu insatisfaisants

Aux termes de la circulaire du 25 février 2010, le dispositif de formation continuée comprend des périodes de formation groupées (dites aussi « massées ») ou « filées », c’est-à-dire organisées sur une journée ou une demi-journée par semaine, ainsi qu’un accompagnement assuré par des tuteurs.

Le volume de formation et d’accompagnement dispensé est équivalent à un tiers de l’obligation réglementaire de service du corps auquel appartient le stagiaire, un principe repris pour l’année scolaire 2011-2012 par la circulaire précitée du 31 mars 2011.

S’agissant de l’organisation des journées de formation continuée, on ne constate pas, dans le premier degré, de difficulté notoire concernant le remplacement des professeurs des écoles stagiaires en bénéficiant puisque ceux-ci sont en surnombre.

Au moins vingt-cinq académies sur trente ont prévu des aménagements d’emplois du temps des enseignants stagiaires dans le second degré pour faciliter l’organisation des formations, une demi-journée ou une journée par semaine étant libérée à cet effet (131). Dans ce cas de figure, le temps de formation étant « banalisé », il n’y a pas lieu de prévoir de remplacement des stagiaires. En revanche, lorsque des formations longues sont prévues, les enseignants stagiaires doivent être remplacés. Ils le sont alors par les titulaires de zones de remplacement, c’est-à-dire par des enseignants affectés au dispositif de remplacement de l’Éducation nationale, des enseignants contractuels et, plus rarement, par des étudiants en deuxième année de master. Des exemples concernant ce dernier mode de remplacement ont été communiqués à la mission par le collectif Stagiaire Impossible. L’académie de Lyon aurait notamment assuré des remplacements par deux étudiants en master « Enseignement », mais aussi par des étudiants en master « Marketing » pour les cours de mathématiques. L’académie de Grenoble l’aurait organisé en février-mars 2011, période traditionnellement réservée par les masters pour effectuer le stage en responsabilité. L’académie de Montpellier avait prévu un tel échange en janvier 2011, mais le faible nombre d’étudiants disponibles aurait conduit les enseignants stagiaires à renoncer à leur formation (132).

De son côté, le ministère de l’éducation nationale a constaté, rapidement, que l’organisation des formations groupées pouvait avoir des répercussions négatives sur l’enseignement, car l’absence prolongée des enseignants, durant ces formations, ne permet pas d’assurer la continuité pédagogique de la classe. C’est pourquoi le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer, après avoir indiqué que certaines académies abandonnaient ce dispositif, a considéré que les formations filées devraient être privilégiées par rapport aux formations groupées (133).

Par ailleurs, le remplacement des stagiaires par des étudiants en deuxième année de master, idée théoriquement séduisante car permettant des échanges pédagogiques fructueux entre des jeunes ayant quasiment le même âge, s’est avéré, comme c’était prévisible, insatisfaisant. En particulier, la Conférence des doyens et directeurs d’unités de formation et de recherche scientifiques a jugé cette organisation « catastrophique » pour les établissements, car elle remet en cause la prise en charge de la classe par l’enseignant stagiaire (134). Ce constat est corroboré par le fait que le stage en responsabilité de la deuxième année de master est effectué par l’étudiant en février-mars, au moment même où le professeur stagiaire a pris ses marques en classe. Le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer, en a conclu que les étudiants en deuxième année de master ne devaient pas être un recours pour effectuer les remplacements (135).

Or, force est de constater que sur l’organisation des formations et le remplacement des stagiaires, la circulaire du 31 mars 2011 consolidant le dispositif d’accueil et de formation continuée des enseignants fait preuve d’une timidité certaine. Sur le premier point, si elle indique que les formations filées doivent être privilégiées dans le second degré, elle précise par ailleurs que « la formation des fonctionnaires stagiaires du second degré comprendra des stages filés et groupés d’une à deux semaines ». Quant au remplacement assuré par des étudiants, elle n’écarte pas cette option, puisqu’elle ne dit rien sur le sujet.

Enfin, la diversité des répartitions proposées entre enseignement et formation, illustrée par le tableau ci-dessous, a suscité de nombreuses critiques, car elle introduit des inégalités flagrantes entre enseignants stagiaires.

Exemples de répartitions proposées entre enseignement et formation (année 2010/2011)

Temps plein, formation massée sur plusieurs semaines

2 heures décharge / un jour libéré pour formation

2 heures décharge / 2 semaines de formation / 14 demi-journées

1 journée par semaine toute l’année

13 heures par semaine + 2 heures supplémentaires année + 24 jours de formation

13 h par semaine, formation sur deux semaines, puis perlée

Service complet + formation massée de trois semaines + formation un jeudi sur deux

Temps plein ou 2 heures de décharge, parfois heures supplémentaires, 2 heures par semaine formation

Temps plein avec journée de formation toutes les deux semaines

20 journées réparties sur l’année

2 heures décharge + une journée de formation une semaine sur deux

2 heures supplémentaires année + une journée par mois

15 heures de cours quel que soit le stagiaire + vendredi réservé à la formation

15 heures 30 de cours + 2 heures 30 de formation

4 semaines de formation groupée

Source : Société des agrégés de l’université, janvier 2011

Cette extravagante diversité s’explique en partie par les différentes solutions retenues par les académies en matière de décharge de service d’enseignement accordée aux stagiaires, celles-ci pouvant de surcroît évoluer d’une année sur l’autre. Pour ne prendre que l’exemple de l’académie de Besançon, son recteur, M. Éric Martin a indiqué que, contrairement à la présente année scolaire, le temps de formation des enseignants stagiaires serait inclus, à partir de la rentrée prochaine, dans leur service d’enseignement, et ce afin d’alléger leur charge de travail (136).

Ces disparités sont pourtant une source de tensions entre l’administration de l’Éducation nationale, d’une part, et les enseignants et leurs syndicats, d’autre part. Elles se nourrissent, selon la directrice générale des ressources humaines, Mme Josette Théophile, des interprétations divergentes données par les uns et les autres de la circulaire précitée du 25 février 2010 sur le dispositif de formation continuée des enseignants stagiaires. D’après cette interlocutrice, l’exigence que cette formation représente, en volume horaire, l’équivalent à un tiers de l’obligation réglementaire de service ne signifie pas que la première soit incluse dans la seconde (137). Le ministère de l’éducation nationale a en effet choisi d’exclure ce temps de formation du service d’enseignement, le texte de la circulaire ne souffrant d’aucune ambiguïté en la matière (138). Cependant, plusieurs syndicats d’enseignants s’estiment « floués » par ce choix, car il contredirait des promesses qui leur auraient été faites. Le Syndicat général de l’éducation nationale-CFDT l’a notamment qualifié « d’escroquerie » au regard des engagements pris par le précédent ministre de l’éducation nationale, M. Xavier Darcos (139).

S’agissant du contenu de la formation continuée, il ne répond, par ailleurs, pas toujours aux attentes des enseignants stagiaires.

Une enquête du Syndicat national unifié des instituteurs, professeurs des écoles et professeurs d’enseignement général de collège, indique que, sur 1 267 professeurs des écoles, 45,8 % jugent les formations groupées insuffisantes et 32,9 % les jugent « tout à fait insuffisantes » (140).

Ce résultat n’est guère étonnant s’agissant des enseignants stagiaires recrutés au cours de l’année transitoire, car ainsi que l’a souligné, très justement, une enseignante du collectif Stagiaire Impossible, « cette formation au métier est la seule dont on bénéficiera durant toute notre vie de professeur » (1).

Les inspecteurs généraux entendus par la mission ont eux aussi relevé la « très forte exigence » des enseignants stagiaires en la matière, qui se traduit avant tout par une demande de pragmatisme. Les formations centrées sur la pédagogie et la didactique de leurs disciplines sont donc, logiquement, plébiscitées (141).

d) Des difficultés provisoires ?

Les motifs d’insatisfaction concernant les conditions d’entrée dans le métier sont donc nombreux. Pour les ministères de l’enseignement supérieur et de l’éducation nationale, ils sont, pour l’essentiel, liés au caractère particulier de l’année 2010-2011, la seule qui aura été marquée par l’arrivée dans le métier d’enseignants stagiaires n’ayant pas été spécifiquement formés au cours de leurs études. Les difficultés rencontrées seraient donc, aux yeux du directeur général de l’enseignement supérieur, M. Patrick Hetzel, « contingentes » (142).

Cette appréciation optimiste est-elle pour autant justifiée ? Répondre à cette question revient à s’interroger sur trois points.

● La situation est-elle provisoire ?

On peut estimer que ce qui est éminemment critiquable aujourd’hui – une entrée dans le métier effectuée dans des conditions relativement hasardeuses – ne devrait plus se vérifier les prochaines années. Le nouveau système de formation initiale et de recrutement des enseignants offrira en effet trois années de pratique professionnelle aux futurs enseignants, soit, selon la directrice générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale, Mme Josette Théophile, la première année de master, avec ses stages d’observation et de pratique accompagnée, la deuxième année de master, avec son stage en responsabilité et, enfin, la formation continuée et le tutorat organisés pendant l’année de stage précédant la titularisation (143).

Cette analyse optimiste peut être toutefois contestée au vu de la faiblesse de la « professionnalisation » durant le master : ainsi que cela a été déjà souligné, les stages en master ne sont pas obligatoires et sont en pratique écartés au profit de la préparation au concours. De plus, l’organisation de la formation continuée demeure problématique.

● Quelles sont les menaces de dégradation des conditions d’entrée dans le métier ?

Elles sont de deux ordres.

La première concerne les enseignants stagiaires du premier degré, dont on a vu qu’ils ont bénéficié d’une responsabilisation progressive, ayant d’abord été affectés en « binôme » de la rentrée 2010 jusqu’aux vacances de la Toussaint. Ce contexte très favorable est aussi très particulier, puisqu’il est lié aux postes en surnombre existant dans le premier degré. Aussi un rapport de l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche s’est attaché à souligner, dès l’été 2010, le « caractère conjoncturel » des dispositifs mis en place dans le primaire, afin que les « inévitables évolutions n’apparaissent pas comme des régressions » (144).

Interrogée sur ce point, Mme Marie Mégard, inspectrice générale de l’éducation nationale, a estimé que la question d’une disparition éventuelle de l’effet « surnombre » ne devrait pas se poser dans l’immédiat, car l’on comptera, au cours de l’année scolaire 2011-2012, deux fois moins de professeurs des écoles stagiaires, en raison de la chute du nombre de postes ouverts. Moins de moyens devront donc être mobilisés pour faciliter leur entrée dans le métier (145).

La deuxième inquiétude concerne les tensions liées à la diminution du nombre de postes offerts au mouvement des mutations annuelles qu’induit l’affectation des stagiaires. Les académies ayant eu pour consigne – comme on l’a vu – de les affecter, dans la mesure du possible, sur des postes moins exposés, ceux-ci ne pouvaient plus être demandés par les autres enseignants. Plusieurs syndicats ont critiqué ce facteur de « blocage ». Ses effets seraient, cependant, limités selon le ministère de l’éducation nationale. Sa direction générale des ressources humaines a précisé en effet que, dans le premier degré, la fluidité du mouvement interdépartemental des titulaires a été conservée par le placement des professeurs des écoles sur des postes de remplacement. En ce qui concerne le second degré, les conséquences auraient été faibles : on note dans certaines académies une baisse de l’ordre de 5 % du taux de satisfaction des demandes, l’impact étant toutefois plus important dans certaines disciplines professionnelles du fait de la faiblesse du nombre de postes offerts au mouvement (146).

● Enfin, est-il opportun de maintenir le dispositif de formation continuée ?

On l’aura compris : la formation continuée dispensée au cours de l’année de stage est un « correctif » apporté aux carences constatées dans la formation initiale des enseignants stagiaires affectés le 1er septembre 2010.

Pour les uns, ce correctif est insuffisant. Le collectif Stagiaire Impossible a notamment estimé que le temps de présence, devant les élèves, des enseignants stagiaires du second degré ne devrait pas être supérieur à six heures, le reste de l’obligation réglementaire de service devant être consacré à la formation (147).

De même, le Syndicat national des collèges et des lycées a proposé, au cours de l’année de stage, un service d’enseignement hebdomadaire compris entre neuf et douze heures et une formation professionnelle comprise entre six et neuf heures, puis, au cours de la première année de titulaire, un service d’enseignement égal à quinze heures, couplé à trois heures de formation professionnelle (148).

Pour le ministère de l’éducation nationale, le volume actuel de formation continuée n’a pas vocation à être augmenté, au contraire. Outre que toute décharge accordée de manière systématique à un enseignant comporte un coût budgétaire, le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer, a fait valoir que le partage entre le temps de pratique en responsabilité et les temps d’accompagnement et de formation devrait être, dans l’idéal, adapté aux besoins de chaque professeur. En la matière, le « sur mesure » devrait être la règle, en s’appuyant essentiellement sur le tutorat pour ne recourir aux mesures de décharge, destinées faciliter les départs en formation, que lorsque leur nécessité est avérée (149).

Le ministère semble donc placer beaucoup d’espoirs dans l’extinction progressive du dispositif…

S’il devait perdurer, ne constituerait-il pas en effet une forme de « piège » pour reprendre le terme utilisé par le recteur de l’académie de Versailles, M. Alain Boissinot (150) ? Conserver le principe d’une formation dispensée au cours de la sixième année qui suit le baccalauréat reviendrait à admettre que les enseignants n’ont pas été formés pendant les cinq années précédentes, à reconnaître, implicitement, que la Nation s’est trompée en portant leur qualification universitaire au diplôme de master et à encourager les demandes de décharge de service au cours des premières années d’exercice, ce qui n’est guère satisfaisant.

S’il devait être maintenu, il faudrait prendre la mesure du poids de la complexité de l’organisation qu’il faudrait conserver.

Toutefois, l’abandon de la formation continuée, qui devrait être logique, ne pourrait avoir lieu que si de nouveaux masters et un nouveau concours étaient mis en place.

e) Une innovation dont l’efficacité est soumise à condition : le tutorat

● Le cadre d’organisation du tutorat

Partie intégrante de la formation et décomptée dans le tiers temps, le tutorat ou l’accompagnement est présenté par la circulaire précitée du 25 février 2010 comme un « temps de compagnonnage et de formation assuré par des personnels d’enseignement et d’éducation expérimentés ».

Dans le premier degré, les tuteurs, qui bénéficient à ce titre d’une indemnité de fonctions d’un montant de 929 euros bruts, peuvent être des enseignants, des conseillers pédagogiques de circonscription ou des personnels spécialisés.

Les personnels spécialisés se répartissent en deux catégories :

– les professeurs des écoles maîtres formateurs, au nombre de 4 000 environ. Titulaires du certificat d’aptitude aux fonctions d’instituteur ou de professeur des écoles maître formateur, ces enseignants chevronnés n’assurent que dix-huit des vingt-quatre d’enseignement prévues par leur statut, car ils bénéficient d’une décharge pour leur permettre de participer aux actions de formation des instituts universitaires de formation des maîtres. Sur ces six heures de décharge, trois ont été généralement dégagées pour qu’ils puissent exercer leur fonction de tuteur. Outre l’indemnité de fonctions de 929 euros bruts par mois, les maîtres formateurs assurant la fonction de tuteur bénéficient cumulativement, au titre de leur spécialisation, d’une indemnité de fonctions particulières d’un montant de 834 euros ;

– les maîtres d’accueil temporaires, au nombre de 2 000 environ. Il est traditionnellement fait appel à ces enseignants volontaires pour accueillir, à titre temporaire, dans leur classe, des étudiants et des stagiaires. Ils ne bénéficient pas, à la différence des maîtres formateurs, d’une décharge spécifique pour exercer leur fonction (151).

Dans le second degré, la fonction de tuteur peut être exercée par des enseignants, des conseillers pédagogiques et des conseillers principaux d’éducation. Les professeurs ou personnels qui l’exercent bénéficient de l’indemnité prévue par un décret du 24 août 2010, dont le plafond annuel a été fixé à 2 000 euros.

● Une mise en place difficile mais effective

La désignation des tuteurs s’est heurtée, à la rentrée 2010, aux consignes de refus données par le syndicat majoritaire – la Fédération syndicale unitaire – en signe de protestation contre la réforme. Depuis lors, selon M. Jean-Pierre Hédoin, inspecteur général de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche, la solidarité professionnelle entre les stagiaires et les personnels titulaires, qui s’est construite au fil des mois, a permis de lever cet obstacle (152).

Ainsi, dans le premier degré, 3 932 tuteurs ont été désignés. Chaque tuteur a, en moyenne nationale, deux stagiaires, mais les situations sont contrastées selon les académies. 63 % des tuteurs ont la charge d’un seul stagiaire, 26 % de deux stagiaires et 11 % ont trois, quatre à cinq stagiaires à encadrer.

Dans le second degré, 8 911 tuteurs ont été désignés pour assurer l’encadrement des professeurs et conseillers principaux d’éducation stagiaires. Généralement, chaque tuteur a un seul stagiaire, mais douze académies ont un tuteur pour plusieurs stagiaires. Cependant, ce cas de figure est peu répandu : 86 tuteurs sont concernés, soit 0,9 % de l’ensemble des tuteurs, et seules des disciplines à faible diffusion connaissent cette situation. À l’inverse, une dizaine d’académies ont précisé que 257 stagiaires bénéficiaient de plusieurs tuteurs, ce qui a permis d’apporter de la souplesse dans les emplois du temps et de lever certains refus (cas de l’académie de Nantes par exemple) (153).

● Une aide appréciée mais dont l’efficacité n’est pas toujours acquise

En dehors des positions syndicales ayant conduit à contester la désignation des tuteurs, le principe même du compagnonnage a pu être critiqué pour des raisons de fond. En particulier, le Syndicat national des personnels de direction de l’éducation nationale a estimé que ce modèle de formation, qui s’appuie sur « le mimétisme et la reproduction », peut inciter les futurs enseignants titulaires à considérer tout progrès pédagogique comme une dégradation (154).

Toutefois, le tutorat a été généralement perçu comme un dispositif « nouveau et intéressant » pour reprendre les termes utilisés par les inspections générales (155).

Le lien entre le tuteur et le stagiaire permet en effet de lutter contre l’individualisme qui caractérise parfois le corps enseignant et qui, dans le cas des professeurs débutants, peut les conduire à se sentir isolés.

En outre, en attirant des enseignants passionnés par les questions de pédagogie, la fonction de tuteur valorise ces problématiques, encore trop souvent critiquées par les partisans des savoirs disciplinaires.

Enfin, d’après le directeur le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer, les tuteurs peuvent jouer un rôle de relais au sein du système scolaire, l’absence d’intermédiaires entre les personnels de direction et les enseignants constituant l’une de ses principales faiblesses (156).

L’arrivée des tuteurs doit donc être saluée. Mais ils ne peuvent avoir des échanges structurants avec leurs collègues débutants qu’à certaines conditions.

D’une part, les emplois du temps des tuteurs et des stagiaires devraient leur permettre de se rencontrer. Or il semblerait que l’on soit très loin du compte dans toutes les écoles et tous les établissements. C’est particulièrement vrai dans le second degré, le « kaléidoscope » des emplois du temps constituant un obstacle de taille, même si l’on peut toujours se téléphoner ou s’échanger des courriels…

D’autre part, même lorsqu’il a lieu, le contact entre le tuteur et le stagiaire ne suffit pas à régler tous les problèmes rencontrés par ce dernier. En réalité, le compagnonnage ne produit tous ses effets que dans un certain contexte, dans lequel les directeurs d’école et chefs d’établissement jouent un rôle déterminant. Ce point a été mis en évidence par le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer : pour que le « duo » puisse fonctionner, les problèmes rencontrés au cours de la semaine par les enseignants stagiaires doivent être abordés par l’ensemble des professeurs et des tuteurs (3). Cela suppose, bien entendu, de combattre les mauvais réflexes qu’alimente une liberté pédagogique mal comprise.

● Un vivier de tuteurs menacé dans le premier degré ?

L’attention de la mission a été attirée sur le fait que le vivier de tuteurs constitué par les professeurs des écoles maîtres formateurs pourrait être remis en cause par les restrictions budgétaires. Pour limiter les effets des réductions de personnels, les recteurs seraient en effet tentés, d’après le Syndicat national unifié des instituteurs, professeurs des écoles et professeurs d’enseignement général de collège, de « récupérer » des postes d’enseignants en supprimant les supports budgétaires sur lesquels sont affectés les maîtres formateurs (157). Si tel était le cas, cela serait particulièrement regrettable tant le tutorat constitue une ressource précieuse pour la formation des enseignants.

7. Une chute inquiétante du nombre de candidats aux concours

La mise en œuvre de la mastérisation s’est accompagnée d’une baisse substantielle du nombre de candidats au concours. L’interprétation de ce phénomène est malaisée, mais M. Jean-Michel Blanquer, directeur général de l’enseignement scolaire, l’a quand même qualifié de « point négatif » de la réforme (158). Dans l’enseignement professionnel, la mastérisation risquerait même se traduire par un effondrement du vivier de recrutement.

a) Un phénomène conjoncturel ou une tendance lourde ?

Le nombre de candidats présents aux épreuves écrites des concours externes de la session 2011 a connu, par rapport à la session précédente, une baisse importante : - 52 % au concours de recrutement de professeurs des écoles,   - 43% au concours du certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré (CAPES) et - 20 % à l’agrégation.

Le tableau ci-après retrace cette évolution préoccupante, étant précisé que seules quelques disciplines du CAPES et de l’agrégation y figurent.

Évolution des candidats présents aux concours externes publics - sessions 2010/2011

 

2010

2011

Évolution
2010/2011

Concours externe de professeur des écoles

34 952

16 323

- 53,30 %

       

Agrégation externe

     

Histoire

1 154

558

- 51,65 %

Lettres modernes

644

491

- 23,76 %

Total Agrégation externe

9 358

7 416

- 20,75 %

       

Certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement secondaire (CAPES) externe

     

Histoire-géographie

3 484

2 179

- 37,46 %

Lettres classiques

299

119

- 60,20 %

Anglais

2 947

1 679

- 43,03%

Lettres modernes

2 648

1 523

- 42,48 %

Mathématiques

2 771

1 319

- 52,40 %

Physique-Chimie

1 641

814

- 50,40 %

Philosophie

712

479

- 32,72 %

Sciences de la vie et de la terre

1 789

987

- 44,83 %

Total CAPES Externe

22 074

12 491

- 43,41 %

       

Certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement technique (CAPET) externe

1 898

1 038

- 45,41 %

       

Concours de professeur de lycée professionnel

7 793

4 314

- 44,64 %

Source : ministère de l’éducation nationale, direction générale des ressources humaines, mai 2011.

Le nombre d’étudiants inscrits dans les filières préparant au métier d’enseignant baisse également. Même si, selon le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, il est difficile de distinguer, à ce jour, parmi les étudiants en master, ceux qui se destinent à l’enseignement puisque beaucoup suivent des parcours de formation à l’intérieur de masters non dédiés, on peut, en revanche, « isoler » le nombre d’inscriptions en institut universitaire de formation des maîtres, qui est, lui, en chute libre : alors qu’en 2009/2010, on comptabilisait 58 518 étudiants inscrits, ce nombre est tombé à 23 039 en 2010-2011. En outre, d’après la vice-présidente de la Conférence des présidents d’université, Mme Anne Fraïsse, on dénombre, cette année, moitié moins d’étudiants en première année de master qu’en deuxième année (159), ce qui pourrait signifier que l’effet « repoussoir » de la réforme serait durable.

Pour la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme Valérie Pécresse, aucun enseignement ne peut être tiré de ces évolutions, car elles sont liées à la phase de transition entre les deux systèmes de formation et de recrutement. En outre, la relation de cause à effet entre la baisse du nombre de postes ouverts au concours et celle du nombre de candidats constitue une « évidence » qui ne doit pas être oubliée (160).

S’agit-il donc d’un simple « trou d’air » ? Rien ne permet, aujourd’hui, de l’affirmer. Ainsi, pour le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer, « il y a manifestement une importante désaffection » due à plusieurs facteurs :

– une année 2010 qui aura vu se succéder deux concours, à quelques mois d’écart (épreuves d’admissibilité pour le concours de recrutement de professeurs des écoles et le certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré fixées respectivement en avril et mars 2010 pour la session 2010 et en septembre et novembre 2010 pour la session 2011), ce qui a eu un effet perturbateur ;

– les difficultés de la prolongation d’études en raison de leur coût ;

– le fait que les étudiants qui décrochent un master peuvent espérer des débouchés plus attractifs que ceux que leur propose l’Éducation nationale ;

– la baisse des places offertes aux concours, surtout dans le premier degré. Rappelons qu’à ce niveau, le nombre de postes offerts au concours externe est passé de 9 332 en 2008 à 2 914 en 2011 ;

– le manque d’attractivité de certaines disciplines (mathématiques et sciences physiques en particulier) pour lesquelles le nombre de postes à pourvoir a peu varié ;

– l’image, véhiculée par les médias, d’un métier de plus en plus difficile, ainsi que la propagation de celle d’une entrée dans le métier particulièrement dure car n’étant précédée d’aucune formation professionnelle (161).

De son côté, le recteur de l’académie de Versailles, M. Alain Boissinot a considéré que la baisse du nombre de candidats, qui n’a pas été suffisamment anticipée par les initiateurs de la réforme, est « mécanique », le vivier de recrutement étant, dès le départ, plus restreint que dans l’ancien système : il y a en effet deux fois moins d’étudiants en master qu’en licence (162).

De toute évidence, certains de ces facteurs ne sont pas voués à disparaître dans l’immédiat. Ce contexte n’est pas étranger au lancement, par le ministère de l’éducation nationale, le 1er juin 2011, d’une grande campagne de communication pour le recrutement des personnels enseignants. Malgré cet effort médiatique, le nombre de présents aux épreuves écrites d’admissibilité du concours externe de recrutement de professeurs des écoles, organisées les 28 et 29 septembre dernier, était égal à 17 517, soit seulement 7,31 % de plus que celui de l’an dernier (163).

b) L’assèchement du vivier des professeurs de lycée professionnel

Plusieurs interlocuteurs de la mission ont attiré son attention sur les effets préoccupants que pourrait avoir la mastérisation sur le vivier de recrutement des professeurs de lycée professionnel.

Celui-ci pourrait être en effet rapidement « asséché » par la nouvelle condition de diplôme exigée, le master n’existant pas dans de nombreuses disciplines professionnelles (comme la carrosserie ou l’orfèvrerie). « Mastériser » l’enseignement professionnel reviendrait, selon le Syndicat national de l’enseignement technique, action, autonome, à remettre en cause l’enseignement des « petites disciplines » auxquelles sont formés de nombreux salariés des services et de l’industrie (164).

Certes, la réforme tient compte de cette situation particulière en conservant des modalités spécifiques d’accès au concours de professeur de lycée professionnel pour les candidats disposant d’un diplôme de niveau moins élevé, mais d’une expérience professionnelle solide.

Le décret n° 2009-918 du 28 juillet 2009 distingue à cet effet trois catégories principales de candidats au concours :

– les enseignants des disciplines dites générales (français, histoire-géographie, mathématiques, par exemple) ou des spécialités professionnelles pour lesquelles il existe un diplôme de niveau I, c’est-à-dire un master, qui doivent justifier de la détention d’un master ou d’un diplôme équivalent ;

– les enseignants des spécialités professionnelles pour lesquelles il n’existe qu’un diplôme de niveau III (diplôme universitaire de technologie ou brevet de technicien supérieur par exemple), qui doivent justifier, outre la possession de ce diplôme, de cinq années de pratique professionnelle ou d’enseignement de cette pratique ;

– les enseignants des spécialités professionnelles pour lesquelles il n’existe pas de diplôme supérieur au niveau IV (baccalauréat, brevet professionnel, brevet de technicien par exemple), qui doivent justifier, outre la possession d’un diplôme de niveau IV, de sept années de pratique professionnelle ou d’enseignement de cette pratique.

Mais contrairement à la situation antérieure, le concours externe ne sera plus ouvert dans les spécialités professionnelles aux candidats justifiant de huit ans de pratique professionnelle ou d’enseignement et d’un diplôme de niveau V (certificat d’aptitude professionnelle et brevet d’études professionnelles).

En outre, la réforme ne tient pas compte d’un autre vivier, celui constitué par les professionnels qui sont titulaires d’un diplôme de niveau III et IV, mais qui n’ont pas cinq ou sept années de pratique professionnelle ou d’enseignement de cette pratique, ce point ayant été mis en avant par l’Union nationale de l’enseignement technique privé (165).

L’Éducation nationale se prive ainsi, comme l’a souligné notre collègue Françoise Guégot, dans un récent avis budgétaire (166), des compétences de professionnels « reconnus et motivés pour transmettre leurs savoirs ».

II.- UNE URGENCE : PRÉSERVER L’ATTRACTIVITÉ DU MÉTIER D’ENSEIGNANT ET GARANTIR LA QUALITÉ DES RECRUTEMENTS

Les faiblesses du nouveau système de formation initiale et de recrutement ayant été mises en lumière – une formation professionnelle insuffisante, un concours organisé « contre » le diplôme, un risque de fermeture du recrutement aux milieux modestes – faut-il aménager celui-ci ou remettre l’ouvrage sur le métier ? Les enjeux sont trop importants pour se contenter d’améliorations apportées à la marge. Ainsi que l’a reconnu le Président de la République, en janvier dernier, « il ne faut pas avoir peur de reconnaître que l’on doit améliorer en permanence notre système » (167).

La « réforme de la réforme » s’impose donc. Pour M. Daniel Filâtre, président de l’université de Toulouse 2 - Le Mirail, il s’agit d’une obligation, car l’échec d’une réforme qui conduit à mal former les enseignants va sourdre, peu à peu, au point de provoquer une réaction des familles (168).

Par ailleurs, il a été estimé qu’entre 2008 et 2012, près de 135 000 enseignants pourraient partir à la retraite, ce qui devrait conduire les pouvoirs publics à mettre en place un système attractif de formation initiale et de recrutement, permettant à l’Éducation nationale de mettre en adéquation ses besoins et des ressources (169).

S’il convient de repartir sur d’autres bases, celles-ci devront s’insérer dans le cadre du master. Un recrutement des enseignants maintenu à bac + 5 constitue en effet une chance pour l’École, qui doit ne doit pas être gâchée. Les propositions présentées dans cette deuxième partie du présent rapport n’ont pas d’autre but que de faire aboutir la mastérisation de la formation et du recrutement, en rendant ses modalités cohérentes. Elles visent également à diversifier les recrutements et les modes d’accès au métier, tout en renforçant l’accompagnement des étudiants stagiaires et des enseignants débutants.

A. ENGAGER SANS TARDER UNE RÉFLEXION GLOBALE SUR LA FORMATION DES ENSEIGNANTS

Un nouveau système de formation et de recrutement des enseignants ne pourrait trouver à s’appliquer qu’après les prochaines échéances politiques, vraisemblablement à partir de l’année 2013. Mais cela n’interdit pas de réfléchir, dès maintenant, à un nouveau modèle de formation, qui rende effective l’articulation entre ses volets universitaire et professionnel, comme nous y invitent d’ailleurs les récentes mesures ministérielles prises pour améliorer le dispositif existant.

1. Un enjeu décisif pour l’avenir de notre système éducatif

La réforme la plus importante de notre système éducatif – celle qui le dotera d’enseignants excellemment formés – est encore à venir. C’est en tout cas la conclusion de l’étude publiée en 2010 par le cabinet McKinsey&Company, Les clés de l’amélioration continue de systèmes scolaires et présentée à la mission par M. Marc Champain, directeur de projet. À partir de l’identification du niveau de performance initial – défini comme la capacité à transmettre les savoirs fondamentaux à une tranche d’âge donnée (170) – de vingt systèmes scolaires dans le monde, cette enquête identifie des leviers des progrès spécifiques pour chacun d’entre eux. Pour la France, le premier des leviers qui lui permettrait de passer du « bon » niveau, qui est le sien, à un « très bon » niveau est la formation initiale des enseignants (171).

Cette analyse est partagée par M. Éric Charbonnier, analyste à la division des indicateurs de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui a jugé toutefois encore plus sévèrement le niveau de performance du système scolaire français : celui-ci ne serait pas « bon » mais « moyen ». Cet expert a d’ailleurs observé que la formation initiale des enseignants est devenu un « sujet central » pour de nombreux pays – en Europe, au Portugal ou en Pologne par exemple, comme ailleurs, au Brésil, au Chili ou en Corée. Les mesures prises en ce domaine par ces pays membres de l’OCDE visent toutes à renforcer le volet pédagogique de la formation afin que les enseignants soient en mesure d’adapter leur enseignement aux besoins des élèves. La Corée du Sud, en particulier, à la suite du choc qu’a constitué, pour ce pays, la première évaluation du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) organisée en 2000 et qui indiquait que la proportion de son élite scolaire était plus faible que celle de la moyenne de l’OCDE, a réformé son système de formation initiale des enseignants pour accroître la capacité d’adaptation des méthodes pédagogiques des professeurs (2).

Pour parvenir à ce résultat, la conception française du métier d’enseignant – et donc de la formation et du recrutement des professeurs – devrait évoluer profondément. En effet, il ne faudrait plus former et recruter, si l’on reprend ici la distinction utilisée par M. Olivier Granserre, maître d’école, des « professeurs qui discourent », mais des « apprentisseurs », capables de créer des situations d’apprentissage (172).

C’est très précisément cette compétence qui devrait être développée si la France veut réduire durablement les inégalités scolaires et le « noyau dur » d’élèves en situation d’échec scolaire. Cette analyse est également celle du responsable du programme expérimental de lutte contre l’illettrisme et l’échec scolaire des enfants défavorisés « Parler Apprendre Réfléchir Lire Ensemble pour Réussir » (PARLER), M. Michel Zorman. La réduction souhaitable de 20 % à 5 % du pourcentage de jeunes dont les résultats aux tests de la journée d’appel de préparation à la défense (173) indiquent qu’ils ne maîtrisent pas les compétences leur permettant de participer activement à la vie de la Cité implique de recourir à un enseignement individualisé ou dispensé en petits groupes, adapté aux élèves. Par conséquent, les professeurs doivent être dotés d’une « boîte à outils » les rendant capables d’analyser ce que fait l’élève et ses besoins (174).

Or tout ceci s’apprend, à condition de penser la formation académique et pratique comme un tout, comme c’est le cas en Finlande. Selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les résultats obtenus par les élèves finlandais aux évaluations internationales s’expliquent en effet par la qualité « exceptionnelle » de l’enseignement, qui résulte de l’accent mis, au cours de la formation initiale des professeurs, sur quatre aspects : la recherche – le mémoire de master préparé par les étudiants se destinant à enseigner dans les écoles fondamentales (élèves de sept à seize ans) porte souvent sur des situations d’enseignement précises –, la pédagogie et la didactique, la détection des troubles d’apprentissage et ce qu’une chercheuse américaine en sciences de l’éducation, Mme Linda Darlig-Hammond, appelle « la composante clinique de la préparation au métier ». Ce dernier aspect est abordé dans le cadre des « écoles d’application » rattachées aux facultés d’éducation des universités. Une formation professionnelle d’au moins une année y est dispensée et permet aux étudiants de participer à des « groupes de résolution des problèmes rencontrés » qui définissent, à partir d’une problématique donnée, un cycle d’apprentissage en trois séquences : la préparation de l’enseignement, l’enseignement en classe et l’évaluation/réflexion (175).

On observera qu’avant la réforme, M. Philippe Meirieu avait également vanté, en évoquant la situation des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM), les mérites d’une formation théorique et pratique « alternée » ou « intégrée », en prenant comme exemple l’internat de médecine : « La deuxième année d’IUFM me paraît devoir évoluer vers la forme de l’internat de médecine : il s’agit de mettre des personnes dans des situations de responsabilité de plus en plus complexes, où les enseignements théoriques sont dispensés à l’occasion de problèmes rencontrés. Cela ne signifie nullement le renoncement aux savoirs théoriques. Personne, en médecine, ne conteste la position du professeur, mais dans la partie proprement professionnelle de la formation, l’essentiel de ce qu’il enseigne aux étudiants, il le fait à l’occasion d’analyses de cas, à partir des questions que pose la pratique » (176).

Récemment, M. Gonzalez Rubalcaba, ministre de l’intérieur et vice-président du gouvernement espagnol, candidat désigné du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) pour les prochaines élections, a également proposé, le 18 juin dernier, d’appliquer au système de formation et de recrutement des enseignants le modèle de l’internat de médecine (système du médico interno residente). Dans ce schéma, après une première sélection effectuée par un examen national, les étudiants suivraient une année de formation pratique avant de passer un examen professionnel devant un jury (177).

2. De récentes mesures ministérielles bienvenues qu’il conviendrait d’amplifier

Les faiblesses du nouveau système de formation initiale et de recrutement des enseignants ont conduit les ministres en charge de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur à annoncer, le 23 mai 2011, des mesures visant à améliorer celui-ci, en particulier par l’expérimentation de masters en alternance.

Ces évolutions sont bienvenues, mais elles n’auront de sens que si elles constituent le point de départ d’une transformation plus profonde des modalités de formation et de recrutement. Dans l’immédiat, elles devraient être complétées par l’adoption de mesures, plus ponctuelles, concernant l’affectation des enseignants stagiaires et l’enrichissement de la formation continuée qui leur est proposée.

a) Des enseignants stagiaires presque tous affectés sur des postes fixes à la rentrée 2011

Les problèmes posés par l’affectation des enseignants stagiaires sur des postes de remplacement devraient être réglés puisque le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, M. Luc Chatel, a indiqué que l’ensemble des professeurs stagiaires seraient affectés, à la rentrée scolaire 2011, sur des postes fixes (178). On observera toutefois que la circulaire précitée relative à l’accueil et à la formation des enseignants stagiaires du 31 mars 2011 est, en la matière, moins directive, puisqu’elle se contente de préciser que « les fonctionnaires stagiaires seront affectés, dans toute la mesure du possible, sur des postes complets devant élèves ».

Au total, à la rentrée 2011, 80 % des stagiaires du premier degré ont été affectés en écoles. Certaines académies ont toutefois placé, au 1er septembre 2011, une part importante de leurs stagiaires (Dijon et Rennes) ou la totalité de leurs stagiaires (Bordeaux, Guadeloupe, Lille et Rouen) en brigade de remplacement. Dans le second degré, 593 stagiaires, sur un total de plus de 7 800, ont été placés en zone de remplacement pour une partie de leur service, ces affectations concernant essentiellement des enseignants qui n’ont pu, compte tenu de leur discipline, bénéficier d’un service complet (179).

b) Des expérimentations prometteuses de formation par alternance

Des expérimentations de formations par alternance vont être lancées, à partir de la prochaine rentrée scolaire, dans plusieurs académies, quatorze au total, dont par exemple Paris, Nancy-Metz, Versailles, Bordeaux, Grenoble, Lille et Strasbourg (180). Le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche envisage même, dans ce cadre, d’expérimenter, à partir de 2012, le recours à l’apprentissage.

● Le dispositif des masters en alternance

Visant à préserver l’attractivité des filières de formation au métier d’enseignant et à favoriser la professionnalisation, le dispositif des masters en alternance devrait avoir pour effet de modifier les conditions régissant actuellement les étudiants engagés dans les masters concernés.

Il devrait se traduire en particulier par :

– un déplafonnement du volume du stage de 108 heures aujourd’hui à 216 heures ;

– un recrutement possible sur la base d’un contrat de droit public en deuxième année de master, qui devrait être étendu à la première année pour les stages effectués dans le premier degré exclusivement ;

– une augmentation de l’indemnité des tuteurs, portée de 200 euros à 400 euros pour 216 heures de stage ;

– des bourses accordées, dès la première année de master, aux étudiants engagés dans un master en alternance, la règle aujourd’hui étant d’attribuer ces bourses aux étudiants inscrits en deuxième année satisfaisant certains critères.

En présentant ce dispositif, le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, M. Luc Chatel, en a souligné la « portée sociale », illustrée par le fait que les contrats d’enseignement signés, dans ce cadre, donneraient lieu, dès la première année de master, à une rémunération annuelle de 3 000 à 6 000 euros bruts. La ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme Valérie Pécresse, a précisé que, cette rémunération pouvant se cumuler avec le dispositif d’accompagnant social de la mastérisation, un étudiant pourrait se voir verser 4 370 euros au titre d’une bourse sur critères sociaux (montant correspondant au dernier échelon de ces bourses), 2 700 euros au titre des aides sociales et 6 000 euros au titre de la rémunération du stage, ce qui représenterait environ 1 000 euros de revenus par mois (181).

L’encadré ci-après permet de préciser le cadre pédagogique et juridique des masters en alternance.

Organisation pédagogique, statut juridique et rémunération des masters en alternance

● Une entrée progressive dans le métier

Dans le cadre de leur intervention en établissement scolaire ou en école, les étudiants engagés dans un master en alternance pourront, dès la première année de master, offrir un soutien scolaire à des groupes restreints d’élèves, sous la conduite des enseignants responsables de la classe. Ils effectueront également des missions de surveillance, se familiariseront avec les enjeux de la vie scolaire et seront amenés progressivement à prendre une classe en responsabilité.

En deuxième année de master, ils assureront des tâches d’enseignement dans le cadre de blocs horaires n’excédant pas 6 heures dans le second degré et une journée et demie dans le premier degré.

Les étudiants suivront par ailleurs un cursus universitaire dont certains modules, avec l’accord de l’université, seront validés par la prise en compte de leur activité professionnelle.

● Deux voies d’entrée dans le dispositif

– Un contrat d’enseignement

Les étudiants préparant les concours du second degré effectueront sous contrat une activité d’enseignement de 3 à 6 heures par semaine ; les candidats au professorat des écoles interviendront un jour par semaine sur l’ensemble de l’année scolaire.

Le volume d’intervention représente 216 heures sur l’année, soit 36 jours en responsabilité.

– Un contrat d’assistant d’éducation à mi-temps, complété par un contrat d’enseignement

Les étudiants garderont la possibilité d’intervenir sur la base d’un contrat d’assistant pédagogique à mi-temps, complété par une activité d’enseignement. Dans ce cas, un second contrat d’enseignement ou contrat de stage en responsabilité sera établi. Différentes possibilités pourront alors être adoptées : stage en responsabilité de moindre durée que les 108 heures, petit contrat d’enseignement, ou encore annualisation du temps de travail d’assistant pédagogique.

● Une rémunération avantageuse

Les étudiants en alternance seront des contractuels de droit public au sens de l’article 6, alinéa 2, du statut général de la fonction publique, qui bénéficieront d’un contrat « destiné à couvrir un besoin saisonnier ».

Les contrats d’enseignement seront établis sur la base de l’indice 321, qui équivaut à 1191 euros nets mensuels à temps plein, soit 397 euros nets pour un tiers de temps dans le second degré et un quart de temps dans le premier degré.

Le contrat d’assistant d’éducation à mi-temps s’élèvera, quant à lui, à 563 euros nets mensuels.

Par ailleurs, un contingent de 2 000 bourses sera réservé sur les 13 000 bourses dédiées aux « aides spécifiques aux étudiants se destinant aux métiers de l’enseignement » (circulaire 2010-102 du 13 juillet 2010). Étendues au M1, elles seront accordées de façon systématique aux étudiants engagés dans un master par alternance, dans la limite du droit commun et représentent une valeur moyenne de 327 euros mensuels.

Source : direction générale de l’enseignement scolaire du ministère de l’éducation nationale, 26 mai 2011.

● Un recours envisagé à l’apprentissage

La voie de l’apprentissage permettrait également de répondre au souci de professionnalisation accrue et d’ouverture sociale de la formation aux métiers de l’enseignement. Ainsi, pour le directeur général de l’enseignement supérieur, M. Patrick Hetzel, selon le niveau d’études de « l’étudiant-apprenti » (licence ou supérieur), la durée du cursus pourrait être de deux ou de trois ans et le public ciblé pourrait être celui des assistants d’éducation, lesquels sont recrutés par contrat pour exercer des tâches de surveillance dans les établissements et participer à l’accueil des élèves handicapés.

Cette formule présenterait plusieurs avantages :

– les enseignants qui bénéficieraient de l’apprentissage auraient plus certainement un discours favorable en la matière au moment des phases d’orientation de leurs futurs élèves ;

– l’apprentissage obéissant à une réglementation précise, relevant du code du travail, il offrirait un cadre de fonctionnement sécurisé ;

– en matière d’ingénierie pédagogique, les centres de formation d’apprentis pourraient proposer un projet pédagogique associant les enseignants qu’ils solliciteraient et largement pluridisciplinaire.

En ce qui concerne les formations susceptibles d’être expérimentées selon ce modèle, les modalités de l’alternance devraient prévoir, selon M. Patrick Hetzel, des périodes d’apprentissage adaptées aux différentes missions de l’apprenti et à la progressivité de son cursus, tout en respectant les temps dévolus à la formation théorique ainsi qu’à la préparation des cours, des examens et du concours. Les étudiants en apprentissage devraient ainsi assurer des activités d’enseignement, ce qui suppose, s’agissant des assistants d’éducation, une modification de leur statut, celui-ci ne leur permettant pas d’assurer une telle mission (182).

On observera que le recours à l’apprentissage impliquerait de solliciter le ministère du travail, de l’emploi et de la santé pour permettre de réserver une part du Fonds national de développement et de modernisation de l’apprentissage (FNDMA) aux régions qui souhaitent soutenir la formation d’enseignants par apprentissage, dans le cadre des mesures en faveur du développement de l’apprentissage annoncées le 1er mars 2011 par le Président de la République. À cet égard, M. Laurent Hénart, dans son rapport sur l’apprentissage public, avait établi que le financement du développement de l’apprentissage public pouvait être pris en charge par ce fonds. Cependant, les administrations n’étant pas soumises au versement de la taxe d’apprentissage et ne contribuant pas au financement direct des centres de formation des apprentis, il proposait d’abonder le FNDMA pour financer l’apprentissage public via la répartition annuelle du fonds aux régions, en transférant une part des sommes collectées hors-quota (183).

● Une alternance nécessairement marginale

Les formules précédentes ne peuvent évidemment concerner qu’un faible nombre d’étudiants, environ un millier à la rentrée 2011 selon la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme Valérie Pécresse(184).

Universités et effectifs étudiants participant aux masters en alternance

Le nombre d’universités susceptibles d’intégrer cette expérimentation est d’une trentaine à ce stade au sein de 9 académies. Ci-dessous, on trouvera, à titre d’illustration, quelques éléments sur les effectifs d’étudiants concernés par les masters en alternance :

– Académie d’Aix-Marseille/Université d’Aix-Marseille : 100 places pour des étudiants préparant les concours de recrutement du premier et du second degré ;

– Académie de Créteil/Université Paris Est-Créteil : 144 places pour des étudiants se préparant au concours de recrutement du premier degré ;

– Académie de Versailles/Universités de Cergy et de Versailles-Saint-Quentin : entre 150 et 200 étudiants préparant le concours du premier degré et quelques dizaines d’étudiants préparant les concours du second degré devraient être concernés ;

– Académie de Lyon/Universités Lyon 1, Lyon 2, Lyon 3 et Saint-Étienne : un parcours aménagé pour des étudiants en deuxième année de master, préparant le concours du premier degré, devrait accueillir deux groupes d’étudiants dans le Rhône et l’Ain et un groupe de vingt étudiants dans la Loire (université Lyon 1 et université Jean Monnet de Saint Etienne). Un parcours en deuxième année de master devrait être également aménagé pour des étudiants préparant les concours du second degré, toutes les universités pouvant être concernées dans le cadre d’un diplôme co-habilité entre Lyon 1 et les trois autres universités.

Source : ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, 8 juin 2010.

Le démarrage s’avère véritablement modeste. Cela s’explique par le fait que la formule est neuve, ses modalités ayant été pensées au début de cette année et définies au cours du printemps.

Il tend à confirmer cette impression d’improvisation générale et permanente qui semble caractériser la réforme de la mastérisation – et qui n’est que le reflet de la difficulté qu’il y a à corriger les défauts d’un processus inabouti.

● Une alternance potentiellement sacrifiée sur l’autel du concours ?

Outre qu’elle démarre modestement, l’expérimentation des masters en alternance pourrait être fragilisée par les modalités actuelles d’organisation du concours. Il convient en effet de souligner que les étudiants de deuxième année de master qui assureront, à compter du 5 septembre 2011, date de la prochaine rentrée scolaire, des heures d’enseignement devront se présenter aux écrits du concours en septembre pour celui de professeur des écoles et en novembre pour celui du certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré. Or, compte tenu de leur situation très particulière, quelle sera leur légitimité à enseigner devant des classes ? On peut estimer, avec le président du comité de suivi du master, M. Jean-Michel Jolion, que celle-ci risque d’être faible. Cette analyse confirme, s’il en était besoin, la place « sclérosante » du concours dans la formation, selon le mot employé par cet interlocuteur de la mission (185).

c) Deux mesures ponctuelles d’amélioration à adopter rapidement

Avant de présenter les grandes lignes d’un système de formation initiale et de recrutement des enseignants qui ne reposerait pas, contrairement à celui mis en place en 2010, sur des contradictions insurmontables, deux mesures, qui permettraient d’améliorer les conditions d’entrée dans le métier des enseignants stagiaires, devraient être adoptées rapidement, au plus tard d’ici la rentrée scolaire 2012.

La première mesure concernerait l’avancement de la date d’affectation des enseignants stagiaires, celle-ci étant trop tardive. Comme l’a précisé M. William Marois, recteur de l’académie de Créteil, elle a d’ores est déjà été avancée, cette année, au début du mois d’août (au lieu de la fin août l’an dernier). Il conviendrait de faire un effort supplémentaire et de la fixer à la fin du mois de juin, après que le mouvement des professeurs titulaires a eu lieu. À ce moment, les enseignants stagiaires devraient connaître leur académie, leur établissement, le niveau des classes qui leur seront confiées et les manuels qu’ils devront utiliser. Ils disposeraient ainsi du temps nécessaire pour rencontrer leur futur directeur d’école ou chef d’établissement et se familiariser avec leurs outils et leur environnement de travail, ce qui faciliterait leur prise de fonctions (1).

La deuxième mesure viserait à enrichir et à personnaliser le contenu de la formation continuée des enseignants stagiaires. Outre un volet obligatoire, celle-ci pourrait comprendre plusieurs journées spécifiques, formant ainsi un « menu », dont les éléments seraient laissés au libre choix du stagiaire. L’académie de Créteil devrait par exemple proposer, à partir de la rentrée 2011, plusieurs journées thématiques de formation, consacrées, notamment, à l’approfondissement du socle commun de connaissances et de compétences, au développement d’une approche pluridisciplinaire pour l’enseignement des sciences, à la connaissance des différents niveaux d’enseignement ou à l’orientation scolaire et professionnelle des élèves. C’est la bonne voie.

B. MIEUX ARTICULER LE CONCOURS ET LA FORMATION ET RÉDUIRE LE POIDS DES ÉPREUVES DISCIPLINAIRES

Une fois les fausses solutions écartées, le choix d’un concours organisé « autour » du master, avec des épreuves d’admissibilité et d’admission placées respectivement en fin de licence et de deuxième année de master devrait s’imposer si l’on veut donner une vraie place à l’alternance, ainsi qu’aux enseignements susceptibles d’améliorer les pratiques en classe. Par ailleurs, le recrutement devrait s’appuyer sur d’authentiques masters « Enseignement », spécialisés par type de métier, qui ne soient pas conçus dans le but de réorienter les étudiants échouant au concours, et s’inscrire dans le cadre de plans pluriannuels.

1. Écarter les fausses solutions

Avant de présenter la nouvelle articulation proposée du master et du concours, on évoquera ici les solutions alternatives qui devraient être écartées.

● Les solutions a minima

Certains scénarios d’évolution présentées à la mission peuvent être qualifiés de solutions a minima, en ce qu’ils consistent à déplacer de quelques mois la date des écrits afin de mieux organiser la deuxième année de master.

Ainsi, pour la Confédération syndicale de l’éducation nationale, des épreuves d’admissibilité placées entre la fin du troisième semestre et le début du quatrième semestre permettraient de respecter l’organisation semestrielle de l’année universitaire et la période traditionnellement consacrée aux échanges internationaux entre établissements (186).

Cette solution comporte toutefois des points faibles, relevés par le groupe de travail animé par M. Daniel Filâtre, président de l’Université de Toulouse 2-Le Mirail : outre que la préparation de l’admissibilité deviendrait l’enjeu majeur du troisième semestre et que, compte tenu des délais de correction, la première moitié du quatrième semestre serait transformée en situation d’attente, aucune réorientation ne serait possible après la publication des résultats. De plus, les étudiants non admissibles seraient peu motivés pour terminer leur master  (187).

La Société des agrégés de l’université a, quant à elle, préconisé que les épreuves écrites du certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré aient lieu en mars ou avril, les épreuves d’admission se situant en juin-juillet, afin que le concours, « primordial pour une acquisition large et approfondie des savoirs disciplinaires » selon son président, M. Jean-Michel Léost, soit suffisamment préparé (188). Cependant, cette solution transformerait, de fait, la deuxième année de master en « classe prépa » au concours, ce qui ne serait guère conforme à l’objectif de la professionnalisation.

Ayant écarté des solutions plus ambitieuses, au motif que l’Éducation nationale a besoin de sérénité pour laisser s’installer la réforme, M. Yann Diraison, au nom du secrétariat général de l’enseignement catholique, s’est prononcé en faveur de deux mesures, à ses yeux plus opérationnelles. D’une part, les épreuves d’amissibilité devraient être placées après les vacances universitaires, ce qui permettrait aux étudiants de mettre à profit cette période pour préparer le concours. D’autre part, les dates des écrits des concours du second degré devraient être rapprochées de celles du concours de recrutement de professeurs des écoles – on rappellera que les premières ont lieu en septembre et les secondes en novembre. Les résultats de l’admissibilité étant ainsi connus plus tôt, la deuxième année de master serait rallongée et faciliterait la réorientation des étudiants ayant échoué aux épreuves (189).

Mais outre qu’elle pourrait pénaliser les étudiants qui travaillent l’été, en les obligeant à renoncer à ce complément de revenu, cette proposition comporte plusieurs points faibles. Elle pourrait retarder le démarrage de la seconde année de master et l’organisation des stages par rapport au calendrier scolaire. En effet, comme le fait observer le rapport du groupe de travail animé par M. Daniel Filâtre, si le principe d’une inscription en deuxième année de master pour pouvoir s’inscrire au concours était maintenu, les épreuves ne pouvant commencer avant septembre, la formation en master et les stages ne pourraient commencer avant octobre. En outre, cette solution rendrait impossibles, les résultats pouvant « tomber » fin octobre compte tenu des délais de correction, les réorientations en cours de semestre (190).

● La solution coûteuse du prérecrutement

Le rapport de la Commission du débat national sur l’avenir de l’école présidée par M. Claude Thélot proposait d’organiser le recrutement en deux temps distincts. Un concours organisé en fin de licence permettait ainsi d’accéder à une formation professionnelle rémunérée d’une durée de deux années, la titularisation étant prononcée après l’obtention d’un certificat d’aptitude professionnelle délivré par un jury (191).

Cette solution a été qualifiée d’« idéale » par quelques-uns des interlocuteurs, syndicaux ou autres, de la mission, comme par exemple M. Olivier Grandserre, professeur des écoles, ou le Syndicat général de l’éducation nationale-CFDT (192).

Dans le même esprit, M. Christian Forestier, administrateur général du Conservatoire national des arts et métiers, a estimé indispensable de prévoir une année de stage supplémentaire, l’admission devant se faire sur la base d’épreuves professionnelles (193).

Cette solution pose toutefois la question de son inscription dans le master. À quel moment organise-t-on en effet le prérecrutement ? En fin de première année de master ? Cette solution ferait cohabiter, au sein de la deuxième année de master, les étudiants ayant validé leur première année, mais échoué aux concours, et ceux ayant le statut d’enseignants stagiaires. Les universités devraient alors mettre en place deux circuits de formation pour ces différents publics, sauf à effectuer une sélection à l’entrée de la deuxième année de master, au demeurant possible, puisque seul l’accès à la première année de master est de droit pour les titulaires d’une licence du même domaine (194). Mais est-il vraiment souhaitable de permettre à des étudiants de s’engager, dans ces conditions, aussi loin dans une voie de formation, c’est-à-dire jusqu’à bac + 4 ?

En outre, la solution du prérecrutement est coûteuse. Le coût budgétaire, en année pleine, de la rémunération des enseignants stagiaires du public et du privé effectuant leur année de stage en alternance avec la formation dispensée en institut universitaire de formation des maîtres était en effet égal, en 2010, à 707 millions d’euros. Les stagiaires du premier degré effectuaient alors 13,5 semaines en responsabilité sur les 36 que comporte une année scolaire, tandis que ceux du second degré effectuaient un service hebdomadaire de huit heures (195).

Ainsi que l’a demandé M. Claude Thélot, conseiller maître honoraire à la Cour des comptes, avons-nous les moyens de cette politique au vu du contexte budgétaire actuel (196) ?

● Les avantages et les inconvénients de la solution consistant à déplacer l’admissibilité en fin de première année de master

Bénéficiant d’un assez large soutien et évoquée comme une piste possible d’évolution par le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, M. Luc Chatel (197), la solution, souvent jugée comme étant « la moins mauvaise », qui consisterait à positionner les épreuves d’admissibilité en fin de première année de master et d’admission en fin de deuxième année, présente d’incontestables atouts. Pour reprendre ceux qui ont été mis en avant par le rapport du groupe de travail animé par M. Daniel Filâtre, président de l’Université de Toulouse 2-Le Mirail, cette solution permettrait :

« – de ne pas surcharger le programme pédagogique de l’année de M2 par rapport au concours et à la place des stages ;

« – une réorientation vers d’autres voies ou parcours en M2 en cas d’échec à l’admissibilité et de réussite au M1 ;

« – de mieux gérer les flux étudiants en M2 et notamment d’opérer un ajustement du nombre d’admissibles et donc d’étudiants de M2 par rapport au nombre de postes au concours » (198).

Cette solution a pu aussi être présentée comme étant celle qui défend le mieux la professionnalisation de la formation au niveau du master. Selon M. Claude Thélot, conseiller maître honoraire à la Cour des comptes, avec ce schéma, « la professionnalisation ne serait plus facultative », comme c’est le cas aujourd’hui (199). De même, pour le président de la Conférence des directeurs d’IUFM, M. Gilles Baillat, ce dispositif aurait le mérite de « libérer » la deuxième année de master du carcan que constitue aujourd’hui le concours (200). Cette analyse est également partagée par plusieurs organisations syndicales, comme le Syndicat général de l’éducation nationale-CFDT ou le Syndicat national des personnels de direction de l’éducation nationale, ainsi que par l’Union nationale des étudiants de France (201).

Enfin, ainsi que l’a observé M. Jean-Michel Blanquer, directeur général de l’enseignement scolaire, l’organisation pédagogique des masters en alternance qui devrait être expérimentée à partir de la rentrée 2011 « gagnerait en lisibilité et en cohérence » avec une admissibilité en M1 (2).

Cette solution souffre toutefois d’un vice de construction majeur : elle coupe – littéralement – le master en deux, en risquant ainsi de « disciplinariser » à outrance sa première année. De fait, elle ne permet pas de construire, sur les quatre semestres du cursus, une alternance réelle entre les deux volets – universitaire et pratique – de la formation. Comme l’a observé très justement le secrétariat général de l’enseignement catholique, en réalité, cette solution « porte en elle deux défauts, très voisins et rédhibitoires : la distinction entre la formation disciplinaire et la formation professionnelle et la réduction, en fait, de celle-ci au profit de la première. En effet, placer les épreuves d’admissibilité en fin de M1 raccourcira, de fait, le temps de préparation à ces épreuves et reviendra à faire de l’année de M1 une année de bachotage disciplinaire de préparation aux épreuves d’admissibilité. La formation professionnelle disparaîtra de cette année de M1 et n’apparaîtra, dans le cursus de formation, qu’en M2, soit en dernière année de formation. En outre, au motif, souvent avancé par les promoteurs de ce déplacement de calendrier, de désengorger l’année de M2, on chargera celle de M1 … Quel intérêt ? » (202).

Outre qu’elle rendrait impossible la construction d’un cursus équilibré, cette solution « réduirait à néant », selon le syndicat AutonomeSup, l’initiation à la recherche qui caractérise la formation de niveau master (203). Or, dans l’intérêt même des futurs enseignants, qui doivent mener un travail de réflexion sur le métier et acquérir des compétences pédagogiques et didactiques, la réalisation d’un travail de recherche ne devrait pas être sacrifiée au bénéfice des stages.

Enfin, si cette solution devait être malgré tout retenue, elle devrait s’accompagner d’une disposition permettant à tout étudiant admissible en fin de première année de master de bénéficier de cette admissibilité pendant plusieurs années, afin de ne pas l’obliger à renoncer, dès son premier échec aux épreuves du concours, à sa vocation. Pour le président du comité de suivi du master, M. Jean-Michel Jolion, celle-ci pourrait être conservée pendant trois ans, ce qui permettrait d’inscrire l’étudiant dans une perspective d’études « réaliste », sans pour autant l’enfermer dans une voie sans issue en cas d’échecs répétés au concours (204).

Il y a lieu de noter qu’un tel avantage ne pourrait être accordé qu’en modifiant la loi. Selon le directeur général de l’enseignement scolaire du ministère de l’éducation nationale, M. Jean-Michel Blanquer, il ne peut y avoir, aujourd’hui, de report de résultats d’admissibilité d’une session sur l’autre, car les candidats, en vertu du principe de l’unicité du jury et de la liste de classement, ne peuvent être admis à l’issue des opérations que par un seul et même jury et après avoir participé aux épreuves d’une même session. L’article 20 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d’État, qui précise que chaque concours donne lieu à l’établissement d’une liste classant, par ordre de mérite, les candidats déclarés aptes par le jury, fonde ce principe, en postulant que cette liste est unique (205).

Mais si l’intention qui inspirerait cette mesure est louable, son opportunité serait fort contestable. En effet, une admissibilité conservée aussi longtemps signifierait que l’étudiant qui aurait échoué à trois reprises le concours ne se préoccuperait de sa reconversion qu’à bac + 6, tout en ayant en poche un diplôme « Enseignement et formation ». Sa réorientation universitaire ou sa reconversion professionnelle pourrait donc être difficile.

2. Organiser les épreuves d’admissibilité en fin de licence et d’admission en fin de master

La formation dispensée dans le cadre du master doit garantir la qualité des recrutements. Elle doit être de haut niveau et articuler de manière optimale ses deux volets – théorique et pratique. Pour y parvenir, les deux années du master devraient être protégées de l’effet « bachotage disciplinaire » du concours. Les épreuves d’admissibilité devraient donc être organisées en fin de licence et celles d’admission en fin de master et leur nature devrait être repensée. Ce schéma impliquerait de repenser également le travail de recherche demandé aux étudiants ainsi que le rôle de l’agrégation.

a) Un dispositif comportant plusieurs points forts

Le dispositif proposé s’inscrirait dans une évolution jugée inéluctable par certains interlocuteurs de la mission. Ainsi, pour le recteur de l’académie de Versailles, M. Alain Boissinot, le développement des masters en alternance aura nécessairement un impact sur le positionnement du concours, qui devra être « remonté » dans l’organisation de la formation. Or, plus on professionnalisera la formation par le recours à l’alternance, « plus l’entrée dans le master équivaudra à une forme de prérecrutement », car elle marquera une nouvelle étape dans la formation du futur enseignant, différente de celle dispensée dans le cadre de la licence (206).

En outre, la solution proposée comporterait cinq points forts.

En premier lieu, ainsi que l’a souligné M. Éric Charbonnier, analyste à la division des indicateurs de l’Organisation de coopération et de développement économiques, cette solution s’inscrirait parfaitement dans l’organisation tripartite de l’enseignement supérieur européen, en étant articulée autour des deux diplômes que sont la licence et le master (207).

En deuxième lieu, cette solution faciliterait la réorientation des étudiants, car celle-ci interviendrait au bon moment. En effet, ceux qui échoueraient aux épreuves d’admissibilité seraient titulaires d’une licence et ne se seraient pas encore engagés dans un cursus de master. À la différence de la solution organisant les épreuves d’admissibilité en fin de première année de master, ils pourraient, sans avoir perdu une année d’études après la licence, changer « à temps » de projet professionnel.

On objectera à cet argument que tout étudiant titulaire d’une licence pourrait, comme c’est son droit, s’inscrire dans un master « Enseignement ». Mais quel serait son intérêt de suivre « en touriste » cette formation alors que le concours et ses épreuves d’admissibilité en constituent un passage obligé ?

Toutefois, pour écarter le risque de voir des places de master prises par des étudiants non admissibles au concours, l’instauration d’un numerus clausus destiné à réguler l’accès à la première année devrait être envisagée, à l’instar de celui pratiqué pour les études de médecine. Le nombre de places pourrait être ainsi calibré par rapport au nombre de postes ouverts au concours, par exemple en prenant comme point de départ ce dernier chiffre, augmenté de X % pour tenir compte de la sélection opérée par les épreuves d’admission.

En troisième lieu, cette solution permettrait de distinguer deux grands temps dans la formation. Comme l’a indiqué, M. Éric Charbonnier, analyste à la division des indicateurs de l’Organisation de coopération et de développement économiques, la formation en licence pourrait avoir comme objectif l’acquisition de compétences académiques solides, tandis que les deux années de master seraient plus « techniques », une place importante devant être accordée aux stages effectués sur le terrain (208).

Ce schéma « trois années de formation académiques et deux années de professionnalisation » ne conduirait pas pour autant à dévaloriser les compétences disciplinaires des futurs enseignants. Au contraire : celles-ci pourraient être approfondies au cours du master, en y intégrant une réflexion sur leur organisation didactique. La maîtrise de la discipline ne serait donc pas oubliée, mais enrichie par l’apport des savoirs permettant de la transférer dans l’activité professionnelle, ces connaissances étant acquises à l’université, mais validées « sur le terrain ». Ces savoirs deviendraient alors le gage d’un enseignement disciplinaire « réussi », c’est-à-dire effectivement acquis par les élèves.

En outre, l’articulation proposée entre le diplôme et le concours, en dégageant l’horizon des deux années de master, permettrait, selon M. Jean-Michel Jolion, président du comité du suivi du master, non seulement d’organiser de « vrais allers et retours » entre la formation théorique et la formation pratique, mais aussi de donner plus de place aux enseignements relatifs à la maîtrise des langues étrangères et des technologies de l’information et de la communication (209).

En quatrième lieu, comme on le verra plus loin, le volet professionnel de la formation devenant obligatoire et donnant lieu à rémunération, les masters deviendraient socialement attractifs. La solution défendue ici permettrait en effet d’écarter le risque social, évoqué dans la première partie du présent rapport, de « fermeture » du concours aux milieux modestes.

En dernier lieu, l’organisation des épreuves du concours sur trois années devrait être juridiquement possible. En la matière, le seul principe à respecter serait celui de l’unicité du jury, qui implique que ce soit le même jury qui siège à toutes les étapes d’un recrutement, quel que soit, selon la direction générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale, le temps qui sépare les épreuves entre elles (210). On rappellera en outre que le ministère de l’éducation nationale, de son côté, n’exclut pas d’organiser, à terme, le concours sur deux années, avec des épreuves ayant lieu respectivement en fin de première et de deuxième année de master.

On observera que le président du comité de suivi du master, M. Jean-Michel Jolion, se réfère à ce schéma d’organisation du concours dans son rapport final sur la mastérisation. En effet, dans le cas où le concours ouvre sur une vraie formation professionnelle, « cela peut tout à fait se faire dans le cadre d’une formation diplômante (donc intégrant aussi comme objectif de valider le diplôme de master) mais cela nécessite du temps. Très clairement, cela revient à proposer un concours initial de recrutement (admissibilité) en amont du cursus de master, c’est-à-dire en fin de licence », la troisième année de licence « proposant des modules de découverte du métier d’enseignant et du système éducatif ». Quant aux quatre semestres de formation au sein du cursus de master, ils devraient permettre « tout à la fois de préparer la diplômation et l’insertion professionnelle » (211).

b) Un master en alternance succédant à une licence comportant des éléments de préprofessionnalisation

Il a déjà été souligné à quel point la professionnalisation de la formation des enseignants tend à nourrir un dialogue de sourds entre les partisans des savoirs purs et ceux de la pédagogie. Le seul vrai enjeu en la matière, ainsi que l’a rappelé M. Alain Boissinot, recteur de l’académie de Versailles, est celui de la construction d’une représentation exacte de la discipline, qui ne sépare pas artificiellement ses volets théorique et pratique. Pour y parvenir, il faut passer d’un modèle de formation successif – dans lequel la formation pratique succède à des études académiques – à une formation simultanée, la plus pratiquée en Europe et qui favorise une interaction fructueuse entre le temps passé à l’université et celui des stages (212).

C’est la raison pour laquelle les étudiants se destinant au métier d’enseignant devraient suivre des formations organisées dans le cadre de masters en alternance, après avoir obtenu une licence comportant des éléments de préprofessionalisation.

● Une licence disciplinaire permettant de construire ou de valider un projet professionnel

La licence, constituant le premier pallier de la formation et du concours, devrait faire du titulaire de ce diplôme un spécialiste de la ou des disciplines qu’il souhaite enseigner.

Toutefois, cette formation devrait également prévoir, à côté des enseignements disciplinaires, des modules liés aux évolutions du métier. Deux types de modules paraissent devoir s’imposer à cet égard : les uns concernant le socle commun de connaissances et de compétences, les autres les technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement.

L’initiation au socle commun devrait avoir lieu en effet dès la licence, sans en faire pour autant l’objet d’un nombre excessif de modules. Ainsi que l’a souligné le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer, le socle devrait être un « souci constant dans le cadre de l’acquisition de la discipline », tout comme l’évaluation par compétences (213). Sur le premier point, on rappellera que la connaissance « des composantes du socle commun de connaissances et de compétences, les repères annuels de sa mise en œuvre, ses paliers et ses modalités d’évaluation » fait partie de la troisième compétence professionnelle à acquérir par les professeurs définie par l’arrêté du 12 mai 2010, « Maîtriser les disciplines et avoir une bonne culture générale ». Sur le second point, le futur enseignant devrait être d’autant plus formé, en amont, à l’évaluation par compétences que la rentrée scolaire 2010 a vu la généralisation du livret personnel de compétences et que le diplôme national du brevet prend en compte, depuis la session 2011, toutes les compétences du socle.

Quant à la formation aux technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement, elle est imposée par la validation du certificat informatique et internet niveau 2 « enseignant » demandée aux lauréats du concours – point qui sera commenté plus loin – et la mise en œuvre du Plan de développement des usages du numérique à l’école du 25 novembre 2010. Le ministère de l’éducation nationale a enclenché en effet la généralisation du cahier de textes numérique depuis la rentrée 2010, ainsi que celle des espaces numériques de travail, avec l’appui des régions et des départements.

Enfin, des stages devraient être organisés dès la licence au profit des étudiants se destinant au métier d’enseignant.

L’intérêt d’un premier aperçu des réalités professionnelles que recouvre ce métier a été souligné par plusieurs interlocuteurs de la mission : plus elle aura lieu en amont, plus cette « confrontation » permettra à certains étudiants de changer ou d’affiner leur projet professionnel. C’est d’ailleurs l’usage dans l’enseignement privé qui, ainsi que l’a rappelé le délégué général aux ressources humaines du secrétariat général de l’enseignement catholique, M. Yann Diraison, a une « longue tradition » d’accueil des étudiants en licence dans ses établissements (214).

Ces stages, comme le préconise le rapport précité du groupe de travail animé par M. Daniel Filâtre, président de l’Université de Toulouse 2-Le Mirail, devraient être « de découverte, d’observation, de construction et/ou de validation d’un projet professionnel », car ces dimensions ne devraient plus, sauf exception, être des objectifs pour les stages du master (215).

À quel moment organiser ces stages ? Certains interlocuteurs de la mission sont partisans de les instaurer dès la deuxième année de licence. D’autres, comme l’ancien président de la Conférence des doyens et directeurs d’unités de formation et de recherche scientifiques, M. Alain Trouillet, estiment que cette découverte ne pourrait intervenir avant la troisième année, la deuxième année constituant un « carrefour de réorientation » (216).

La solution consisterait peut-être à prévoir des stages en deuxième et en troisième de licence, de deux à trois semaines, qui permettent d’appréhender le métier de professeur des écoles, puis celui de professeur de lycée et de collège. Bien entendu, ce temps d’observation, ainsi que l’a souligné le Syndicat national unifié des instituteurs, professeurs des écoles et professeurs d’enseignement général de collège, ne devrait pas être « sauvage », mais encadré, c’est-à-dire préparé et exploité (217). Ainsi, dans la droite ligne des recommandations du rapport « Filâtre », l’accompagnement pendant le stage gagnerait à être doublement assuré, « par un professionnel sur le lieu de stage, ayant fonction d’accueil, et par un enseignant de l’université ayant fonction d’aide à l’analyse des pratiques professionnelles » (218).

● Un master en alternance permettant de conjuguer formation universitaire de haut niveau et pratique professionnelle

La formation dispensée dans le cadre du master devrait être construite autour d’une authentique alternance entre sa composante universitaire et sa composante professionnelle.

Celle-ci devrait permettre de renforcer les quatre « blocs de compétences » identifiés par le rapport précité du groupe de travail animé par M. Daniel Filâtre, président de l’Université de Toulouse 2-Le Mirail et que ce dernier a rappelés à la mission :

– le premier bloc de compétences vise la maîtrise des savoirs, connaissances et savoirs faire spécifiques nécessaires à l’enseignement de la discipline ;

– le second, qui renvoie aux savoirs didactiques, vise à la maîtrise des éléments (principes, méthodes, outils) intervenant dans leur transmission ;

– le troisième a trait au volet recherche du master et concerne la maîtrise des compétences disciplinaires et méthodologiques nécessaires à l’amélioration de la pratique enseignante ;

– le quatrième vise les connaissances et les compétences nécessaires à une bonne perception de l’environnement institutionnel et social dans lequel exerce l’enseignant (219).

Quant au contenu concret de la formation, le volet « stages » faisant l’objet d’un commentaire distinct, on se bornera à indiquer ici, sur ce sujet, que le temps de formation professionnelle devrait être à la fois obligatoire et significatif.

Quant au volet « enseignements », il serait réparti sur les quatre semestres du master et devrait être organisé entre quatre domaines, articulés aux stages :

– l’approfondissement de la discipline ou des disciplines qui seront enseignées par le futur professeur. Il devrait être également possible d’acquérir de nouvelles connaissances disciplinaires afin de développer la polyvalence des enseignants du second degré – point qui sera abordé plus loin ;

– les éléments de pédagogie ;

– la formation aux didactiques de la ou des disciplines choisies, indispensable pour acquérir la quatrième compétence retenue par l’arrêté du 12 mai 2010 relatif à la définition des compétences professionnelles à acquérir par le professeur, « Concevoir et mettre en œuvre son enseignement ». Cette compétence implique que l’enseignant soit capable d’assurer « l’apprentissage effectif des élèves », en particulier grâce à sa « maîtrise de la didactique de sa ou de ses disciplines ». Pour cela, la formation devrait accorder, comme l’ont souligné les présidents d’associations de didactique entendus par la mission, MM. Bertrand Daunay et Yves Matheron, une place importante à l’analyse des pratiques, étayée théoriquement et méthodologiquement, et donner lieu à des séances filmées (220;

– une formation aux problématiques transversales du métier, qui recouvrent, notamment, la gestion de l’hétérogénéité des classes, le travail en équipe pédagogique, la tenue de classe, l’accueil des élèves handicapés et la connaissance de l’enfant et de l’adolescent. Ce dernier point, mentionné par l’arrêté précité du 12 mai 2010 qui se réfère à la connaissance, par le professeur, des « éléments de psychologie lui permettant de tenir compte, dans le cadre de son enseignement, de la diversité des élèves », ne devrait pas se réduire à un enseignement relatif à la psychologie, mais initier l’étudiant aux sciences cognitives permettant de comprendre les mécanismes d’apprentissage.

Ces différents domaines devraient recevoir une coloration particulière selon que le master prépare à l’enseignement primaire ou secondaire, général ou professionnel, tout en donnant lieu à des formations communes, afin de rapprocher les cultures professionnelles des différents professeurs.

c) Un mémoire de recherche recentré

Le travail de recherche qu’implique une formation de niveau master ne devrait pas déboucher sur une production purement universitaire. Au contraire, sa réalisation devrait permettre à l’étudiant de mener un travail de réflexion sur le métier d’enseignant. Dans ce but, comme l’a observé M. Jean-Michel Jolion, président du comité du suivi du master, le mémoire devrait se présenter sous la forme d’un « rapport d’activité » sur les stages effectués, étant précisé que ceux-ci serviraient de point de départ à une recherche et à une réflexion sur la pratique de l’enseignement (221). La recherche pourrait être ainsi effectuée en didactique, comme l’ont préconisé deux professeurs, MM. Bertrand Daunay et Robert Matheron, pour permettre à l’étudiant de se pencher, avec les ressources et les outils pertinents, sur la question de la transmission des savoirs et de leur appropriation par les élèves (222).

De nature hybride, étant à la fois un rapport de stage et un travail de recherche, le mémoire pourrait donc être élaboré selon les modalités évoquées par le rapport précité du groupe de travail animé par M. Daniel Filâtre, président de l’Université de Toulouse 2-Le Mirail. Une partie du travail serait validée en première année de master (évaluation du projet à la fin du premier semestre, validation de la recherche thématique à la fin de la première année de master, s’intégrant à la validation de la première année de master), la deuxième année de master donnant lieu à l’achèvement du mémoire. Ce modèle pourrait impliquer, en ce qui concerne l’évaluation du travail effectué, des jurys distincts en fin de première et de deuxième année de master, comprenant les différents acteurs concernés : universitaires et professionnels (dont les « tuteurs »), selon une démarche qui s’apparente à celle des jurys de masters professionnels (223).

d) Des épreuves à caractère académique pour l’admissibilité et professionnel pour l’admission

Une nouvelle articulation de la formation et du concours impliquerait de revoir le contenu des épreuves d’admission.

Avant d’aborder ce point, on soulignera que le nombre actuel de concours externes de l’enseignement du premier et du second degré devrait être maintenu, un sort particulier devant être réservé à l’agrégation, comme on le verra plus loin.

Au total, cinq concours externes seraient organisés : le concours de recrutement de professeur des écoles, celui du certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré, celui du certificat d’aptitude au professorat d’éducation physique et sportive, celui du certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement technique et celui du certificat d’aptitude au professorat de lycée professionnel.

Toutefois, en ce qui concerne les deux derniers concours, leur regroupement pourrait être envisagé, ainsi que l’a suggéré l’Union nationale de l’enseignement technique privé (224). Ce syndicat a repris à cette occasion une proposition qui figure dans le Livre vert sur l’évolution du métier d’enseignant de la Commission sur la condition enseignante présidée par M. Marcel Pochard, selon lequel « le maintien des deux voies de recrutement technologique et professionnel peut s’expliquer : les formations données aux élèves sont différentes ; les élèves sont eux aussi différents dans les deux voies. Mais, si les savoir-faire des professeurs se différencient après quelques années de pratique en lycée technique ou en lycée professionnel, les viviers de professeurs sont les mêmes au niveau de la licence. La différenciation pourrait ne pas se situer au moment du concours, mais se faire durant le temps de la formation professionnelle. On pourrait donc envisager d’organiser des concours plus indifférenciés (plus polytechniques), qui faciliteraient les passages d’un enseignement à un autre après des périodes de formation d’adaptation » (225).

Quant à la nature des épreuves, l’admissibilité, pour les différents concours de recrutement, organisée en fin de licence et ayant pour finalité de contrôler l’excellence disciplinaire, pourrait conserver le caractère académique qui est aujourd’hui le sien. Pour le concours de recrutement de professeurs des écoles, toutefois, cet aspect académique ne devrait pas être excessif et conduire à évaluer des connaissances ne figurant pas aux programmes de l’école primaire.

À l’inverse, les épreuves d’admission devraient revêtir un caractère professionnel. Celles-ci se dérouleraient en deux temps et pourraient se présenter, formellement, soit comme les deux parties d’une même épreuve, soit comme deux épreuves distinctes.

Seraient ainsi évaluées :

– d’une part, les compétences didactiques des candidats dans les disciplines qu’ils ont choisies. Il leur serait demandé, à partir d’un dossier, comprenant plusieurs documents, dont la nature varierait selon la discipline, d’expliquer comment ils construiraient un projet d’enseignement destiné aux élèves de tel ou tel niveau. Modelée d’après le concours interne du certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré, cette épreuve permettrait, selon M. Alain Boissinot, recteur de l’académie de Versailles, d’évaluer la capacité du candidat à enseigner, par exemple, les sciences expérimentales dans un collège (226). Une variante de cette proposition, évoquée par M. Daniel Filâtre, président de l’université Toulouse 2-le Mirail, consisterait à s’appuyer sur le « mémoire-rapport de stage » préparé par l’étudiant pour conduire l’entretien avec le jury (227) ;

– la compétence « Agir en fonctionnaire de l’État et de façon éthique et responsable ». La capacité du candidat à prendre du recul sur son futur métier, à se représenter la place qu’il sera amené à occuper dans le système éducatif et à réfléchir sur les problématiques transversales de l’École devrait être appréciée à cette occasion.

e) Des certifications en langue vivante et informatique devant être supprimées

Le décret du 28 mai 2010 a introduit deux pré-requis que devront justifier les candidats au concours à partir de la session 2012, échéance initialement fixée à 2011 mais reportée d’un an par un décret du 26 août 2010.

Il s’agit :

– de la certification de compétences en langues de l’enseignement supérieur de deuxième degré, dite CLES 2. Accréditée par le ministère de l’éducation nationale, cette certification est adossée au Cadre européen commun de référence pour les langues et permet d’évaluer les compétences opérationnelles de communication des étudiants en langue vivante étrangère, le niveau 2 étant celui de « l’utilisateur expérimenté ». ;

– du certificat informatique et internet de l’enseignement supérieur de niveau 2, « enseignant ». Crée en 2004 pour répondre au besoin d’acquisition des compétences professionnelles liées aux technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement, ce certificat a été en principe généralisé en formation initiale en 2007.

Ces certifications seront exigibles au 1er septembre 2012 pour les lauréats des concours externes et au moment de la titularisation pour les lauréats des concours internes.

De nombreux interlocuteurs de la mission ont estimé que, même reportée d’une année, l’échéance envisagée est irréaliste, les universités n’étant pas toutes en mesure, faute de moyens, de dispenser les formations permettant d’acquérir les compétences correspondant à ces deux certifications. En ce qui concerne la certification en langue étrangère, M. Jean-Michel Jolion, président du comité de suivi du master, indique que l’année prochaine, selon une estimation du ministère de l’éducation nationale, 38 % des candidats reçus au concours ne l’auront pas (228).

Dans son rapport final sur la mastérisation, ce dernier est allé plus loin en estimant nécessaire la suppression de « la contrainte sur les certifications », au motif qu’il est « impossible de cautionner la démarche de l’Éducation nationale de certifications obligatoires en plus de la validation du diplôme et de la réussite au concours » (229). C’est ce que le ministère de l’éducation nationale semble avoir fait récemment, au moins pour la certification en langue étrangère, en indiquant, sur le site dédié aux concours de la session 2012, que lorsque « les candidats, titulaires d’un master, présentent un relevé de notes qui atteste de la validation de crédits dans une langue vivante étrangère, ils n’ont pas à justifier du certificat de compétences en langues de l’enseignement supérieur de deuxième degré », ces crédits de langue vivante étrangère ne devant toutefois pas avoir été obtenus par compensation (230).

f) Une agrégation repositionnée comme un concours interne de promotion professionnelle

Quelle est l’utilité du concours de l’agrégation, auparavant réservé aux titulaires d’une maîtrise, à l’heure du recrutement généralisé des enseignants, certifiés comme agrégés, à bac + 5 ?

Cette question ne constitue pas une simple provocation. Elle a été posée par M. Christian Forestier, ancien recteur (231), par M. Jean-Michel Jolion, président du comité de suivi du master (1), le président du Haut conseil de l’éducation, M. Bruno Racine (232), comme par le représentant du secrétariat général de l’enseignement catholique, M. Yann Diraison – « Nous nous interrogeons sur la pertinence du maintien, dans le contexte de la mastérisation, d’un concours externe de l’agrégation. En outre ce concours, comme tous les concours, coûte cher » (233). Il convient en effet de préciser que ce coût s’élevait, selon le ministère de l’éducation nationale, à 5 075 490 euros pour la session 2010 et les 1 232 postes proposés, somme qui inclut les charges en personnels de surveillance et de location des locaux d’épreuves, les charges de fonctionnement, le traitement des copies, les indemnités des jurys et leurs frais de déplacement et d’hébergement.

De fait, ainsi que l’a observé le président de la Conférence des directeurs d’IUFM, M. Gilles Baillat, ce concours n’est plus adapté au nouveau système de formation et de recrutement (234).

En outre, sa spécificité, s’agissant du public des candidats, a été réduite comme une peau de chagrin par la mastérisation. En effet, le concours de l’agrégation est désormais ouvert aux candidats justifiant d’un diplôme de master, tandis que celui de professeur des écoles ou du certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré est ouvert soit aux titulaires d’un master soit aux étudiants inscrits en deuxième année de master.

Autrement dit, les candidats ne doivent pas nécessairement posséder le master à la date exigée par les statuts des différents corps de professeurs, c’est-à-dire la date de publication des résultats d’admissibilité, pour se présenter au concours, sauf pour l’agrégation.

La distinction entre les candidats à l’agrégation et aux autres concours se réduit donc aux quelques mois séparant la date d’inscription en deuxième année de master et la date d’obtention du diplôme.

Pour toutes ces raisons soulignant que le maintien d’une seconde voie d’entrée dans le métier ne se justifie plus, votre rapporteur considère que l’agrégation devrait être exclusivement conçue comme un concours de promotion professionnelle, dans le cadre des concours internes. Ainsi que l’a affirmé M. Christian Forestier, administrateur général du Conservatoire national des arts et métiers, le concours interne, ouvert aux professeurs certifiés ayant cinq ans d’ancienneté, garderait, dans ce schéma, toute sa pertinence (235). Cette proposition impliquerait d’abandonner la condition d’exigence du diplôme de master qui jouera à partir de 2017 pour pouvoir se présenter au concours interne.

Une fois admis le repositionnement de l’agrégation dans le système de recrutement, quel devrait être le rôle des lauréats de ce concours dans l’enseignement ?

Pour le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer, il faut d’autant plus se poser cette question qu’il n’y a théoriquement pas de distinction dans les affectations entre les agrégés et les certifiés et qu’une très forte proportion d’agrégés quittent l’enseignement scolaire dès leur titularisation, notamment pour rejoindre l’enseignement supérieur (236). Sur le premier point, M. Claude Thélot, conseiller maître honoraire à la Cour des comptes, a rappelé « l’absurdité » que constitue le fait, au vu des compétences disciplinaires nécessaires à la réussite du concours, qu’un agrégé sur cinq, souvent en raison du mouvement des mutations annuelles fondé sur le barème, enseigne en collège (237).

Le périmètre d’intervention des agrégés devrait donc être redéfini. Étant donné leur expertise disciplinaire, ils devraient enseigner exclusivement au niveau des formations « bac - 3 » et « bac + 3 », couvrant ainsi le second cycle de l’enseignement secondaire et le premier cycle de l’enseignement supérieur (correspondant à la licence), filières dites « courtes » incluses, soit les sections de technicien supérieur et les classes préparatoires aux grandes écoles.

Cela reviendrait à appliquer, dans les faits, le décret du 4 juillet 1972 relatif au statut particulier des professeurs agrégés de l’enseignement du second degré selon lesquels ces derniers « assurent leur service dans les classes préparatoires aux grandes écoles, dans les classes de collège, dans des établissements de formation et, exceptionnellement, dans les classes de collège […]. Ils peuvent également être affectés dans les établissements d’enseignement supérieur ». Cependant, pour éviter que le mot : « exceptionnellement » employé dans ce décret ne justifie le maintien de professeurs agrégés dans les collèges, il gagnerait à être supprimé.

3. Prévoir pour les étudiants admissibles des stages obligatoires, plus longs et rémunérés en master

La professionnalisation de la formation ne deviendra effective qu’en rendant obligatoires les stages organisés au cours du master. En outre, ceux-ci devraient être plus longs et être rémunérés afin de garantir l’attractivité sociale de cette filière d’études. Enfin, une telle évolution conduirait à supprimer la formation continuée prévue pour les enseignants stagiaires.

a) Un temps de formation professionnelle obligatoire et significatif

Sur le plan réglementaire, l’article 6 de l’arrêté du 25 avril 2002 relatif au diplôme national de master précisant que « la formation dispensée comprend des enseignements théoriques, méthodologiques et appliqués et, lorsqu’elle l’exige, un ou plusieurs stages », il n’y a pas de contrainte particulière, pour les universités et les responsables de formation de niveau master, relative aux volumes horaires d’enseignements théoriques et de stage, ces points relevant de l’autonomie pédagogique des établissements.

Il serait donc tout à fait envisageable que les masters préparant au métier d’enseignant prévoient qu’au cours des quatre semestres de formation, l’étudiant aille en stage, chaque semaine, en école ou en établissement. Dans ce cas de figure, chaque semestre pouvant comporter jusqu’à quatorze semaines de formation, le volet « professionnalisation » pourrait prendre une réelle ampleur et devenir ainsi un élément structurant du cursus.

Ces stages ne devraient pas être effectués « en bloc », c’est-à-dire occuper tout un semestre. Ils devraient être organisés de manière à ne mobiliser que quelques heures ou une journée chaque semaine, afin de permettre des allers-retours fructueux entre formation théorique et pratique.

Par conséquent, les tâches d’enseignement effectuées par les étudiants en master ne devraient pas excéder, comme ce devrait être le cas pour les masters en alternance expérimentés à compter de la rentrée prochaine, six heures par semaine dans le second degré et une journée dans le premier degré.

Ces limites rejoindraient celles préconisées par le rapport précité du groupe de travail animé par M. Daniel Filâtre, président de l’Université de Toulouse 2-Le Mirail, d’après lequel la durée hebdomadaire du stage en première comme en deuxième année de master devrait être équivalente à un tiers de l’obligation réglementaire de service et ce sur la durée d’un semestre universitaire (238). Selon M. Daniel Filâtre, l’objectif de cette proposition serait de coupler deux temporalités :

– celle du collège, du lycée ou de l’école, en prévoyant que la durée du stage équivaudrait à un tiers du temps d’enseignement ;

– celle de l’université, en prévoyant, chaque semaine, un stage filé en situation, dont la durée serait limitée, le reste du temps étant consacré à la préparation et à l’accompagnement, ainsi qu’au suivi en milieu universitaire et aux cours (239).

En outre, la nature du stage ne devrait pas être la même entre la première et la deuxième année du master, afin de permettre une préparation progressive au métier.

La première année devrait être consacrée à la pratique accompagnée, l’étudiant passant de la préparation à la conduite d’une séquence d’enseignement devant un petit groupe d’élèves, puis devant deux groupes d’élèves, avant d’enseigner devant la classe toute entière, toujours en présence d’un tuteur – enseignant ou maître formateur.

Au cours de la deuxième année, les étudiants effectueraient des stages en responsabilité selon des modalités à définir afin de garantir un enseignement de qualité dans les classes temporairement prises en charge. On pourrait ainsi concevoir qu’une classe de la maternelle ou de l’enseignement élémentaire soit confiée à deux étudiants préparant le concours de recrutement de professeurs des écoles et qu’une classe du secondaire soit confiée à un étudiant se destinant au professorat dans les collèges et lycées. Dans ce dernier cas de figure, le service d’enseignement pourrait être assuré dans les classes du tuteur de l’étudiant qui serait ainsi partiellement déchargé.

Quelle que soit la solution retenue, les tâches d’enseignement assurées par les étudiants stagiaires devraient être formalisées dans le cadre d’un contrat, sur le modèle des contrats d’enseignement qui devraient être signés dans le cadre des masters en alternance expérimentés à la prochaine rentrée scolaire. Ces étudiants seraient ainsi des contractuels de droit public, le contrat étant destiné « à couvrir un besoin saisonnier » ainsi que le prévoit l’article 6 du statut général de la fonction publique de l’État (240).

Par ailleurs, les stages devraient répondre à un cahier des charges conclu entre chaque « formateur » – les universités – et chaque « employeur », – les académies, responsables de l’accueil des étudiants dans les écoles et les établissements. Ce cadre conventionnel devrait notamment définir, selon le chef du service de l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche, M. Thierry Bossard, les attentes de l’Éducation nationale concernant les compétences devant être acquises par les étudiants au cours des stages et prévoir une évaluation qualitative des effets de cette formation (241).

Enfin, ces stages devraient être rémunérés afin d’écarter le biais social qui affecte les études de master et de garantir ainsi l’accès de cette filière de formation aux milieux modestes, souvent obligés d’exercer une activité professionnelle durant leurs études. Quant au montant de la rémunération, il pourrait être calqué sur celui prévu pour les masters en alternance expérimentaux (soit 397 euros nets mensuels pour un tiers de temps dans le second degré et un quart de temps dans le premier degré au titre d’un contrat d’enseignement).

b) Un tiers temps de formation continuée pour les enseignants stagiaires devenu inutile

En devenant obligatoire, le volet professionnel des masters rendrait obsolète l’organisation d’une formation continuée pour les professeurs stagiaires équivalente à un tiers de leur obligation réglementaire de service. Dans ces conditions, en effet, ce facteur de complexité de la gestion des établissements et de fragilisation de la formation initiale – celle-ci paraissant si insuffisante qu’elle doit être complétée à l’issue du recrutement – pourrait disparaître, au grand soulagement de l’Éducation nationale serait-on tenté d’ajouter…

4. Publier des référentiels de formation et spécialiser les masters par « métier » d’enseignant

L’arrêté du 12 mai 2010 relatif à la définition des compétences à acquérir par les professeurs constitue le référentiel du métier d’enseignant. Celui-ci devrait être pourtant retravaillé, afin de le rendre plus opérationnel. En outre, les universités devraient se l’approprier. Il conviendrait de mettre en place à cette fin un cadrage national des formations plus affirmé, respectueux toutefois de l’autonomie pédagogique des établissements.

Par ailleurs, l’enseignement n’étant pas exactement le même en maternelle et au lycée, la spécificité de ses différents métiers devrait être reconnue par l’élaboration de masters spécialisés, qui remplaceraient ainsi les actuels masters « Enseignement et formation ».

a) Un référentiel des compétences professionnelles des enseignants retravaillé

S’il a marqué un progrès indéniable en ce qu’il reconnaît la professionnalité du métier d’enseignant, le référentiel défini par l’arrêté précité du 12 mai 2010 n’est pas pour autant exempt de critiques sur des points fondamentaux, mis en évidence par M. Claude Thélot, conseiller maître honoraire à la Cour des comptes.

D’une part, ce texte « oublie » le socle commun. La connaissance de ses composantes est certes incluse dans la compétence concernant la maîtrise des disciplines, mais l’arrêté ne s’appuie pas vraiment sur cet outil alors qu’il a été conçu pour transformer l’enseignement et l’évaluation.

D’autre part, les compétences professionnelles sont définies comme étant celles qui permettent de transmettre des savoirs aux élèves et non comme celles qui favorisent l’acquisition des connaissances par ces derniers. Or, pour être pleinement opérationnelles, ces compétences devraient se référer à celles qui permettent aux élèves de progresser dans leurs acquis au cours de leur scolarité (242).

Le référentiel devrait donc être retravaillé dans ces deux directions. Ainsi enrichi, il permettrait d’établir ce que l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) appelle un « profil de compétences de la profession », qui définirait les différents niveaux de résultats correspondant aux enseignants débutants, aux enseignants expérimentés et aux enseignants assumant de plus grandes responsabilités (243).

b) Un cahier des charges de la formation conclu entre l’État et les universités

La formation initiale des enseignants devrait faire l’objet d’un cadrage national plus appuyé, la circulaire précitée du 23 décembre 2009 du ministère de l’enseignement supérieur relative à la mise en place des masters « Formation et enseignement » se contentant, comme on l’a vu, de n’affirmer que quelques grands principes concernant l’architecture de la formation.

Or il serait paradoxal, alors qu’il existe un référentiel du métier d’enseignant, qui identifie les compétences requises au niveau de l’exercice professionnel, que l’État ne dise rien sur les conditions permettant de construire ces compétences.

Il y a lieu de noter, à cet égard, que le Cahier des charges de la formation des maîtres en institut universitaire de formation des maîtres (IUFM), défini par un arrêté du 19 décembre 2006, a été supprimé par l’arrêté précité du 12 mai 2010. Ce fût une décision d’autant plus regrettable que l’article L. 625-1 du code de l’éducation, introduit par la loi du 23 avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école, disposait que la formation dispensée dans les IUFM « répond à un cahier des charges fié par les ministres chargés de l’enseignement supérieur et de l’éducation nationale après avis du haut conseil de l’éducation ».

On peut supposer que l’abrogation de l’arrêté de 2006 était motivée par le renforcement de l’autonomie des universités résultant de la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités. Mais pourquoi un tel excès de zèle alors que le même législateur n’avait pas jugé utile d’abroger la disposition relative au cahier des charges de la formation ?

Ces errements laissent penser à nouveau que la conception et l’organisation de la formation des enseignants ne sont pas pensées dans leur globalité. On a d’ailleurs parfois le sentiment, comme le relève l’Association française pour le développement de l’enseignement technique, que les analyses et les prises de décisions semblent « éclatées » entre les deux ministères compétents, « sans que les besoins de l’employeur paraissent déterminants dans la mise en place des formations » (244).

Certes, l’autonomie pédagogique des universités constitue un principe intangible, dont le respect implique, comme l’ont souligné les conférences de doyens et directeurs d’unités de formation et de recherche en lettres, langues, arts et sciences, de ne pas élaborer des « maquettes de formations nationales », par le biais desquelles le ministère de l’enseignement supérieur imposerait, heure par heure, le contenu de la formation dispensée dans les masters (245).

Mais rien n’interdit la recherche d’un point d’équilibre entre le principe d’autonomie des universités et le souhait légitime de l’État employeur de voir prises en compte les priorités de son référentiel de formation. Pour reprendre à ce sujet l’analyse de M. Marcel Pochard, conseiller d’État, la « feuille de route » de l’État en matière de formation initiale des enseignants mériterait d’être clarifée (246).

Il faut donc se féliciter de l’annonce, le 23 mai 2011, par la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme Valérie Pécresse, de l’élaboration de référentiels de formation, en partenariat avec le ministère de l’éducation de l’éducation. Selon la ministre, ces documents, qui devraient préciser aux candidats au concours les connaissances et les compétences requises, pourraient être mis en œuvre à la rentrée universitaire 2012 (247).

La déclinaison de ces référentiels dans les masters devrait s’effectuer sur la base d’un cahier des charges de la formation aux différents métiers d’enseignant conclu entre l’État et les universités.

c) Des masters spécialisés par types de métiers dont un master de « l’École du socle commun »

Dès lors que les épreuves d’admissibilité du concours seraient positionnées plus tôt dans la formation et que l’admission des étudiants en première année de master serait régulée, le maintien de masters « Enseignement et formation » ouvrant le plus largement possible le champ des débouchés professionnels, ne se justifierait plus. Dans ces conditions, en effet, la réorientation des étudiants non admis à un concours, aujourd’hui organisé au cours de la deuxième année de master, ne constituerait plus un sujet de préoccupation.

La formation dispensée dans le cadre des masters pourrait donc être réellement professionnalisée, en spécialisant les parcours empruntés par les étudiants pour se préparer à l’un ou l’autre des professorats.

● Spécialiser la formation par type de métier

Il est clair que les métiers de l’enseignement, tout en ayant naturellement des points communs, ne sont pas les mêmes en école élémentaire et au lycée. Même s’il est partagé, ce constat ne conduit pas, toutefois, à un consensus sur la mise en place de masters spécialisés.

Ainsi, pour M. William Marois, recteur de l’académie de Créteil, cette spécialisation s’opposerait à la tradition de mobilité qui existe entre les enseignants de maternelle et de l’école élémentaire, d’une part, et ceux de collège et de lycée, d’autre part (248). De son côté, M. Jean-Michel Blanquer, directeur général de l’enseignement scolaire, a estimé qu’il n’est pas certain que des masters par niveau résoudraient les problèmes de liaisons entre les cycles d’enseignement qui rendent difficile la mise en place de parcours de formation progressifs pour les élèves. De plus, si les différences entre les niveaux d’enseignement, sous l’angle didactique notamment, doivent être mieux prises en compte dans les contenus de formation, il ne serait pas souhaitable de les segmenter excessivement, car ceci pourrait freiner le développement de la polyvalence des professeurs (249).

Ces arguments plaident en faveur, selon M. Thierry Bossard, chef du service de l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche, de « masters professionnalisés et non pas spécialisés » (250).

Or il y a là une véritable contradiction entre, d’une part, la volonté de professionnaliser la formation et de développer les compétences pédagogiques et didactiques des enseignants et, de l’autre, le fait de ne pas admettre que leurs compétences professionnelles s’exercent dans des environnements scolaires très différents les uns des autres, et soumis à des contraintes spécifiques, un collège n’étant pas un lycée professionnel par exemple. Pour ne prendre qu’un seul exemple, comment recruter un professionnel de l’enseignement à l’école primaire s’il n’a pas bénéficié auparavant d’une formation théorique et pratique qui le prépare à exercer ce type de métier ?

Plusieurs pays ont d’ailleurs spécialisé les formations et les diplômes universitaires qui préparent aux différents métiers de l’enseignement. Ainsi, le gouvernement suédois a présenté en février 2011 un projet de réforme de la formation initiale des enseignants qui repose sur quatre diplômes : un diplôme de l’enseignement en cycle préscolaire, un diplôme de l’enseignement en primaire, un diplôme de l’enseignement disciplinaire et un diplôme de l’enseignement professionnel (251).

Étant pour sa part un partisan de l’instauration de masters spécialisés en France, M. Christian Forestier, administrateur général du Conservatoire national des arts et métiers, a évoqué, à titre d’exemple, les formations mises en œuvre par le Québec. Les futurs enseignants de cette province sont en effet formés, pendant cinq ans, dans le cadre de masters professionnels visant l’école maternelle, l’école élémentaire, le cycle dit « intermédiaire », qui correspond à notre collège, et le lycée (252).

L’élaboration de masters spécialisés devrait donc aller de soi si l’on admet, aux côtés de M. Marcel Pochard, conseiller d’État, que la formation devrait être « calée sur les besoins des élèves qui ne sont pas les mêmes » (2). De même, pour le doyen du groupe de l’enseignement primaire de l’inspection générale de l’éducation nationale, M. Philippe Claus, l’université devrait former à trois métiers bien différents : l’enseignement en école maternelle, puis en école élémentaire-collège, et, enfin, au lycée (253).

À partir de ce principe, plusieurs masters spécialisés pourraient être mis en place, dont les enseignements – en particulier ceux concernant la pédagogie et la didactique – devraient être conçus en fonction des différents professorats auxquels ils préparent :

– un master « École maternelle » et un master « École élémentaire », qui tous deux permettraient de se présenter au concours de recrutement de professeurs des écoles, mais dont le premier reconnaîtrait la spécificité de l’école maternelle où s’effectue l’entrée dans le langage ;

– un master « Collège et lycée général » ;

– un master « Enseignement technique » ;

– un master « Enseignement professionnel » et un master structuré autour de « l’École du socle commun », ces deux formations méritant des commentaires distincts.

Bien entendu, les stages organisés dans le cadre de ces masters devraient être eux aussi spécialisés. Pour autant, ceux-ci ne devraient pas être entièrement cloisonnés : comme l’a observé le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer, ils pourraient sensibiliser l’étudiant aux liaisons entre les cycles d’enseignement, un professeur de français au collège devant pouvoir savoir comment les élèves ont appris à lire, de même qu’un professeur de mathématiques devrait savoir comment les élèves ont appris la multiplication (254).

● Construire une offre de masters pour certaines spécialités professionnelles

Comme cela déjà été souligné dans la première partie du présent rapport, la formation de niveau master n’existe pas pour un certain nombre de spécialités professionnelles. S’il faut recourir, comme on le verra plus loin, à la validation des acquis de l’expérience pour ne pas se priver des compétences de personnes qualifiées qui, aujourd’hui, ne peuvent enseigner en lycée professionnel, une formation en alternance, organisée, le cas échéant, dans le cadre de la formation continue, pourrait leur être également proposée pour les amener au niveau de diplôme requis.

Selon le schéma proposé par l’Union nationale de l’enseignement technique privé, ces professionnels des métiers pourraient, après que leurs compétences et savoirs ont été établis par la constitution d’un dossier de valorisation des acquis professionnels, suivre cette formation pendant trois ans, avec une évolution, année par année, du nombre hebdomadaire d’heures respectivement consacrées à la formation théorique et à la pratique. L’entrée dans ce dispositif et dans les établissements « formateurs » serait validée par le chef d’établissement et l’inspection académique (255).

● Prévoir un master structuré autour de l’« École du socle commun »

La polyvalence des enseignants et la continuité des apprentissages entre le primaire et le secondaire, toutes deux postulées par le socle commun, sont freinées par l’organisation « hyperdisciplinaire » de l’enseignement secondaire.

Dans ces conditions, pourquoi ne pas proposer des masters formant à l’enseignement de champs disciplinaires larges – par exemple les mathématiques, la physique-chimie et les sciences de la vie et de la terre ? Ces formations permettraient à ceux qui les ont suivies d’enseigner ces matières en fin d’école primaire et en début de collège, c’est-à-dire en Cours moyen deuxième année, en Sixième et en Cinquième. Dispensées dans le cadre de « masters du socle commun », elles pourraient êtres organisées, selon M. Jean-Michel Jolion, président du comité de suivi du master, autour d’une discipline « majeure » et de « complémentaires » (256).

La mise en place de ces formations ne conduirait pas, bien entendu, à remettre en cause la spécificité des concours de recrutement de professeurs des écoles et du certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré – l’épreuve d’admission sur dossier évaluant les compétences didactiques des candidats diplômés de ces masters pourrait concerner toutefois aussi bien les programmes de la fin du primaire que du début du collège – ni celle des corps correspondants.

5. Définir un plan de recrutement pluriannuel des enseignants

La nouvelle articulation proposée du concours et du master et le calibrage des places en master qu’elle induit impliqueraient de donner de la visibilité et de la stabilité à la politique de recrutement de l’Éducation nationale. Il serait en effet souhaitable d’indiquer aux jeunes qui s’apprêtent à suivre cinq années d’études le nombre prévisionnel de postes ouverts durant cette période. Cela reviendrait à appliquer une disposition du code de l’éducation, introduite par la loi du 10 juillet 1989 d’orientation sur l’éducation et anormalement oubliée, selon laquelle « un plan de recrutement des personnels est publié, chaque année, par le ministre chargé de l’éducation », étant précisé qu’il « couvre une période de cinq ans et est révisable annuellement » (article L. 911-2).

C. DIVERSIFIER LES RECRUTEMENTS ET LES MODES D’ACCÈS AU MÉTIER

Ainsi que cela a été souligné dans la première partie du présent rapport, l’élévation du niveau de recrutement est susceptible de rendre plus difficile l’accès au métier d’enseignant pour les étudiants les plus modestes et certains professionnels. Des mesures devraient être prises pour se prémunir contre de tels risques. L’une d’entre elles – déjà évoquée – consisterait à prévoir des stages plus longs et rémunérés au cours des deux années de master. Par ailleurs, le concours ne devrait plus être une voie d’accès « oligopolistique » au métier.

1. Renforcer l’accompagnement social des étudiants inscrits en master « Enseignement »

Il est indispensable de renforcer l’accompagnement social des étudiants se préparant au métier d’enseignant afin d’éviter que l’allongement de la durée de leur formation initiale ne pénalise les moins favorisés d’entre eux, et ce selon les axes suivants :

● Appliquer le dispositif d’aides mis en place en 2009 à la première année de master

Ce dispositif d’aides, présenté dans la première partie du présent rapport, ne bénéficie aujourd’hui qu’aux étudiants inscrits en deuxième année de master, considérée comme étant plus exigeante car elle cumule le concours et les volets pratique et théorique de la formation.

Or, dès lors qu’une nouvelle articulation du concours et de la formation serait prévue, pourquoi faudrait-il leur réserver ce traitement plus favorable alors que leurs camarades de première année auraient fait leurs preuves en passant, avec succès, des épreuves d’amissibilité organisées en fin de licence ?

L’équité devrait donc conduire à appliquer ce dispositif dès la première année de master. On rappellera, à cet égard, qu’un contingent de 2 000 bourses, sur les 13 000 dédiées à ces aides spécifiques devrait être réservé aux étudiants engagés dans les masters par alternance expérimentés à partir de la rentrée 2011.

En outre, ce dispositif mériterait d’être complété par des aides spécifiques – par exemple des aides au logement –, cette piste ayant été notamment évoquée par le Syndicat CFTC de l’éducation nationale, de la recherche et des affaires culturelles (257).

● Étendre les « Cordées de la réussite » aux formations préparant au métier d’enseignement

Créé en 2008 pour promouvoir l’égalité des chances, notamment dans les quartiers populaires, ce dispositif institue un ensemble de partenariats entre un ou plusieurs établissements d’enseignement supérieur (grandes écoles et universités), des lycées à classe préparatoire et des lycées. Prenant la forme d’actions multiples, telles que le tutorat ou l’internat, ces partenariats, pourraient bénéficier, selon des modalités à définir, ainsi que l’a suggéré M. Patrick Hetzel, directeur général de l’enseignement supérieur, aux lycéens ayant la motivation et les capacités de devenir enseignants (258).

● Maintenir le droit à bourse des « reçus-collés »

Le devenir des « reçus collés », c’est-à-dire des étudiants non admis au concours mais qui valident leur diplôme de master, pose problème. Pour certains syndicats, ces jeunes diplômés gonflent les effectifs des personnels contractuels de l’Éducation nationale, car le ministère leur propose un statut d’assistant d’éducation, pour leur permettre d’exercer des fonctions de surveillance dans les établissements. Or, ces contrats ont pour caractéristique principale, d’après ces interlocuteurs, de fabriquer des « précaires ».

L’analyse paraît infondée, car le lien entre l’échec au concours et la signature, par le titulaire d’un master, d’un contrat d’assistant d’éducation n’a rien – on le concédera – d’automatique.

En outre, comme l’a observé le directeur général de l’enseignement supérieur, M. Patrick Hetzel, la situation des reçus-collés n’est pas née de la mastérisation, d’autres candidats titulaires d’un diplôme bac + 5 échouant aux différents concours de la fonction publique. De plus, dans l’ancien système, dès l’échec aux épreuves d’admissibilité, le candidat titulaire d’une licence quittait l’institut universitaire de formation des maîtres, le plus souvent courant mars, après les résultats, le redoublement n’ayant jamais été un droit (1).

Pour autant, la situation des reçus-collés pouvant devenir un sujet d’inquiétude avec la réforme ici proposée, il conviendrait de favoriser les parcours permettant à ces diplômés de conserver leur statut d’étudiant, et par conséquent leur droit à bourse, mais seulement pendant une durée limitée, afin de ne pas les enfermer dans la seule voie du concours. Le président du comité du suivi du master, M. Jean-Michel Jolion, a mentionné à titre d’exemple la spécialité créée par l’Université Lyon 1, au sein de son offre de formation « Métiers de la formation », spécifiquement destinée aux étudiants déjà titulaires d’un master et limitée à un an. Ce type de formation pourrait être développé à condition « de s’assurer que cette spécialité n’est pas une simple préparation au concours ou un simple redoublement mais qu’elle permet bien de valoriser les acquis de chaque étudiant et lui propose une ouverture sur les métiers de la formation au-delà du concours » (259).

2. Attribuer des bourses aux bacheliers issus des quartiers défavorisés s’engageant à passer le concours

Un dispositif d’aides devrait bénéficier spécifiquement aux candidats issus des quartiers les plus défavorisés, afin de s’assurer que le métier d’enseignant reste accessible à tous.

Certains interlocuteurs ont suggéré de réactiver à cet effet les instituts de préparation à l’enseignement secondaire – les IPES – supprimés en 1972 : leur accès se faisait par concours, une aide substantielle était versée dès la deuxième année universitaire, l’élève accueilli bénéficiait d’un statut d’élève-professeur pendant deux à quatre ans et était dispensé de passer l’écrit du concours. En contrepartie, les bénéficiaires s’engageaient à servir l’État pendant dix ans.

Le retour de ce dispositif, qui n’affichait pas un taux de réussite au concours satisfaisant, paraît toutefois peu réaliste. Aux yeux de M. Marcel Pochard, conseiller d’État, il serait plus judicieux de mettre en place des bourses, qui pourraient être financées par des entreprises, afin de les verser, pendant les cinq années d’études conduisant au master, à des bacheliers méritants, issus de ces quartiers et qui s’engageraient à passer le concours et à venir enseigner dans leur académie d’origine pendant plusieurs années (260).

3. Développer le recrutement sur la base de la validation des acquis de l’expérience

La mastérisation ne devrait pas constituer un obstacle à la diversification du vivier de recrutement des enseignants. La validation des acquis de l’expérience devrait être utilisée à cet effet non seulement pour les filières de l’enseignement professionnel – ce qui constitue une évidence – mais aussi pour celles de l’enseignement général.

On rappellera au préalable que la validation des acquis de l’expérience ou VAE permet à toute personne d’obtenir, en partie ou en totalité, après présentation d’un dossier devant un jury, un diplôme, un titre ou un certificat de qualification professionnelle inscrit au Répertoire national des certifications professionnelles, à condition toutefois d’avoir exercé une activité d’une durée de trois ans au minimum en rapport avec le contenu du diplôme visé.

● Cas de l’enseignement professionnel

Ainsi que cela a déjà été souligné dans la première partie du présent rapport, la mise en œuvre de la mastérisation tend à réduire l’accès de certains professionnels, qui ne peuvent satisfaire la nouvelle condition de diplôme, à la filière de l’enseignement professionnel.

Pour parer à l’assèchement prévisible du vivier de recrutement des professeurs de lycée professionnel, les personnes disposant de quatre ou cinq années d’expérience professionnelle devraient pouvoir, selon le Syndicat national de l’enseignement technique action autonome, grâce au recours à la validation des acquis de l’expérience (VAE), se présenter au concours soit en bénéficiant d’une voie réservée, soit en ne passant que des examens professionnels (261).

Par ailleurs, l’Éducation nationale devrait reconnaître, par le biais de la VAE, des certifications et des titres bénéficiant d’une légitimité institutionnelle – comme celui de meilleur ouvrier de France, décerné par un jury national et publié au Journal officiel. Ainsi, leur titulaire pourrait intégrer, selon des modalités à définir, la filière de l’enseignement professionnel.

● Cas de l’enseignement général

Le dispositif de la validation des acquis de l’expérience (VAE) devrait être également mobilisé pour élargir le vivier de recrutement des enseignants des disciplines générales. Pour M. Claude Thélot, conseiller maître honoraire à la Cour des comptes, cette voie devrait permettre à des salariés des secteurs industriel et tertiaire d’accéder à la qualité de professeur des écoles ou de certifié (262). Le recours à la VAE pour recruter un professeur de mathématiques en lycée serait également tout à fait envisageable pour le Syndicat national des personnels d’inspection-FSU (263).

4. Recourir davantage aux professeurs associés

Selon M. Claude Thélot, conseiller maître honoraire à la Cour des comptes, le nombre de professeurs associés devrait être augmenté de manière significative, car cela permettrait à l’Éducation nationale de recruter non seulement des cadres et des techniciens supérieurs, mais aussi des ouvriers qualifiés, dont le parcours et les compétences permettraient d’enrichir l’horizon professionnel des élèves… et des enseignants des disciplines « générales » (2).

Le statut des professeurs associés des établissements publics locaux d’enseignement est défini par le décret n° 2007-322 du 8 mars 2007 qui précise qu’ils sont engagés pour assurer des enseignements complémentaires faisant appel à des connaissances spécifiques que les enseignants des autres filières ne peuvent assumer. Il permet de recruter, par contrat d’une durée maximale de trois ans, renouvelable dans la limite de six ans, des personnes justifiant d’une expérience professionnelle d’au moins cinq ans en rapport avec la discipline enseignée, aucune condition de diplôme n’étant demandée depuis 2007.

Outre sa très grande souplesse, le statut de professeur associé se caractérise par l’attractivité de sa rémunération, l’indice de rémunération prévu par le contrat de recrutement pouvant être égal à l’indice terminal de la grille des professeurs agrégés (correspondant à un traitement net d’environ 3 721 euros par mois). Hélas, il n’est qu’une coquille vide, car les académies l’ignorent : selon le ministère de l’éducation nationale, les professeurs associés représentaient en effet que trente-sept personnes en avril 2011.

D. MIEUX ACCOMPAGNER LES ÉTUDIANTS-STAGIAIRES ET LES ENSEIGNANTS DÉBUTANTS

La qualité de la préparation au métier d’enseignant et de l’entrée dans celui-ci repose, dans une large mesure, sur celle de l’accompagnement – assuré par des enseignants chevronnés – des étudiants stagiaires et des enseignants effectuant leur année de stage ou récemment titularisés. Le tutorat devrait être consolidé et développé à cet effet. Dans le même but, les enseignants débutants pourraient appuyer leur pratique professionnelle sur un corpus de méthodes pédagogiques scientifiquement étayées et disposer de garanties en matière d’affectation et de formation continue.

1. Développer le soutien par les enseignants expérimentés auprès des étudiants stagiaires et des enseignants débutants

Le tutorat des étudiants effectuant les stages organisés en master et des enseignants débutants – entendus ici comme étant ceux qui effectuent leur année de stage ou qui ne sont titulaires que depuis deux ans – devrait être généralisé, cette fonction pouvant être assumée par des enseignants volontaires, comme par des professeurs des écoles maîtres formateurs, des maîtres d’accueil temporaire, des conseillers pédagogiques ou des conseillers principaux d’éducation. Parallèlement, la mission des corps d’inspection devrait évoluer pour leur permettre de mieux encadrer les enseignants débutants.

a) Consolider et développer le rôle des tuteurs et des maîtres formateurs

Le rôle des tuteurs et celui des maîtres formateurs devraient être confortés pour épauler les futurs enseignants et les enseignants débutants.

L’essentiel est de garantir à l’étudiant stagiaire et à l’enseignant débutant qu’ils pourront solliciter, à tout moment, un conseil et de l’aide auprès d’une personne expérimentée. Ils auraient ainsi la certitude d’entrer, en préparant le concours et après l’avoir réussi, dans une profession caractérisée par son esprit de solidarité et non par son individualisme. La fatalité qui semble peser sur les écoles et établissements – relevée dès 1899 par un rapport de la commission de l’éducation de la Chambre des députés, alors présidée par Alexandre Ribot, et décrite en ces termes : « Les professeurs (…) viennent, surtout dans les hautes classes, comme dans un cours de faculté, donner à leurs élèves un certain nombre d’heures par semaine, et leurs cours faits, ils s’en vont… », les équipes éducatives étant « des assemblées mortes » – pourrait être, dans ces conditions, brisée (264).

● Un rôle clef accordé au tutorat dans certains systèmes scolaires

Selon M. Marc Champain, directeur de projet chez McKinsey&Company, si l’amélioration de la formation initiale des enseignants, constitue, pour la France, le premier des leviers qui lui permettrait de hisser le niveau de son système scolaire de « bon » à « très bon », le deuxième est celui du tutorat et de la collaboration entre professeurs.

Les systèmes scolaires les plus performants ont en effet pris en compte l’utilité d’un accompagnement individualisé pour accroître le niveau de compétence des enseignants. Des enseignants spécialisés peuvent ainsi soutenir leurs collègues en leur offrant, après avoir observé leurs méthodes, des conseils, des observations et des recommandations, et en les aidant à prendre du recul. Cette fonction tend d’ailleurs à se développer : par exemple, l’Angleterre dispose, pour 25 000 écoles, de 4 300 Advanced Skills Teachers qui consacrent 20 % de leur temps au tutorat et à la diffusion des bonnes pratiques pédagogiques ; la ville de Boston aux États-Unis et ses 145 écoles, de 80 « coachs » en compréhension de l’écrit et de 100 autres dans les autres matières et l’État de Victoria, en Australie, de 200 tuteurs, pour 1 600 écoles, spécialisés dans l’enseignement comme dans l’apprentissage (265).

● Consolider la fonction des tuteurs

La fonction des tuteurs devrait être consolidée selon trois axes principaux.

Le premier axe est celui de leur formation. Pour la Société des agrégés de l’université, une courte formation, assurée par les corps d’inspection, rappelant ce qui est attendu d’un tuteur, devrait suffire. À l’inverse, une formation spécifique pourrait conduire les tuteurs à se faire les relais d’une conception préétablie de l’enseignement et de la pédagogie (266).

Cependant, si l’écueil du mimétisme doit être évité, la formation des tuteurs apparaît nécessaire, ainsi que l’a souligné M. Jean-Michel Blanquer, directeur général de l’enseignement scolaire, au moins pour les nouveaux tuteurs : ceux-ci doivent avoir une position de formateur, de guide dans un premier temps, tout en étant capables d’identifier les difficultés en vue d’y apporter des réponses dans une perspective de développement des compétences professionnelles (267).

La nouvelle circulaire sur l’accueil et l’accompagnement des enseignants stagiaires du 31 mars 2011 va dans ce sens puisqu’elle demande aux recteurs de veiller, dans le cadre des plans académiques de formation continue, au renforcement de l’offre de formation proposée aux tuteurs afin de « tendre à leur professionnalisation ».

Il faudrait aller plus loin et envisager d’assurer à tous les tuteurs, y compris à ceux qui encadrent les étudiants effectuant des stages, une formation didactique de haut niveau ainsi que l’ont préconisé les professeurs Bertrand Daunay et Yves Matheron (268).

En deuxième lieu, sur le modèle du document mis en place par l’inspection académique du Val d’Oise, que les professeurs des écoles stagiaires doivent remettre chaque semaine au professeur des écoles maître formateur, un « cahier de stage », comportant des axes précis d’observation de leur pratique professionnelle, devrait être renseigné par les étudiants et les enseignants stagiaires et transmis à leurs tuteurs. Ce cahier recenserait les observations, les analyses et les questions suscitées par les différentes séquences d’enseignement, le soutien scolaire, l’organisation de la classe, les relations avec les élèves et leurs parents, etc. De manière parallèle, un portefeuille de compétences, se référant aux dix compétences professionnelles à acquérir par les professeurs (269), renseigné au cours des visites du tuteur, permettrait de suivre les progrès effectués en la matière par les étudiants stagiaires et des enseignants débutants.

En dernier lieu, des décharges de service pourraient être accordées à des enseignants dont la compétence pédagogique est reconnue et pour qui, l’âge de la retraite étant proche, les heures de cours sont lourdes, afin de leur permettre d’exercer la fonction de tuteur. Pour le Syndicat CFTC de l’éducation nationale, de la recherche et des affaires culturelles, la moitié de leur obligation réglementaire de service pourrait être ainsi consacrée au tutorat des enseignants débutants (270).

● Développer le rôle des maîtres formateurs

Ainsi que cela a déjà été souligné dans la première partie du présent rapport, les professeurs des écoles maîtres formateurs du premier degré sont les seuls enseignants qui disposent d’une décharge – de six heures – et d’une qualification spécifique – le certificat d’aptitude aux fonctions d’instituteur ou de professeur des écoles maître formateur – pour exercer leur mission de formateur.

Leurs compétences devraient être utilisées par les universités, notamment pour qu’ils organisent, au niveau des formations du master, des échanges didactiques sur le métier d’enseignant. Afin qu’ils puissent y enseigner, leur qualification devrait être relevée à cet effet, par le recours à la validation des acquis de l’expérience. En outre, leur décharge de service ne devrait pas être entièrement mobilisée par le tutorat, ce qui impliquerait que leurs heures d’enseignement à l’université soient contractualisées, afin de leur permettre d’y enseigner une demi-journée par semaine.

Par ailleurs, la fonction de maître formateur pourrait être créée dans le second degré, ainsi que l’ont préconisé plusieurs interlocuteurs de la mission. Le directeur général de l’enseignement scolaire, M. Jean-Michel Blanquer a estimé, pour sa part, que ce rôle est en partie assuré par les conseillers pédagogiques, qui interviennent, dans le cadre des missions définies par une circulaire du 13 juillet 2010 (271), auprès des étudiants effectuant des stages en responsabilité dans les établissements scolaires. Il faudrait donc plutôt consolider leur position, en reconnaissant leur rôle, en professionnalisant leur fonction, afin de faire émerger une forme de « hiérarchie intermédiaire » dans le domaine pédagogique : le conseiller pédagogique jouerait alors le rôle d’un « référent, étant un point d’appui et un formateur », à la fois auprès des étudiants stagiaires, des professeurs récemment titularisés et des professeurs plus avancés dans leur carrière (272).

Il faudrait aller plus loin, car les conseillers pédagogiques, à la différence des professeurs des écoles maîtres formateurs, ne bénéficient pas d’une décharge de service pour exercer leur action de formation. Elle devrait donc leur être accordée, sans être pour autant équivalente à celle des maîtres formateurs du premier degré (égale à six heures), car elle devrait être proportionnée à l’obligation réglementaire de service des enseignants du second degré. Pour le Syndicat des enseignants-UNSA, elle pourrait être ainsi égale à trois heures, ce qui, sur une obligation réglementaire de service de quinze ou dix-huit heures, ne devrait pas représenter un coût excessif (273).

● Faciliter la diffusion des cours conçus par des collectifs d’enseignants

Les didacticiens entendus par la mission, MM. Bertrand Daunay et Yves Matheron, ont attiré son attention sur l’utilité des cours élaborés par les collectifs d’enseignants et mis à disposition de leurs collègues via internet (274). Fruits d’un travail de déchiffrage des programmes qui permettent d’en dégager l’essentiel, ces cours peuvent servir de support à des séquences d’enseignement dont l’efficacité auprès des élèves a déjà été « testée ». Dès lors que leur « plus-value pédagogique » est démontrée, ils mériteraient d’être diffusés auprès des étudiants stagiaires et des enseignants débutants, sous le couvert du ministère de l’éducation nationale, après un contrôle de la qualité de leurs contenus par les corps d’inspection.

b) Confier des audits pédagogiques aux corps d’inspection

L’encadrement des enseignants débutants pourrait être assuré non seulement par les tuteurs mais aussi par les corps d’inspection – inspecteurs de l’éducation nationale dans le premier degré et inspecteurs académiques-inspecteurs pédagogiques régionaux dans le second degré. Dans ce but, l’évaluation des enseignants ne devrait plus être individuelle, car elle ne fait que renforcer, selon le Syndicat national des personnels de direction de l’éducation nationale, l’individualisme qui caractérise la profession (275). Les corps d’inspection devraient donc procéder à des audits des équipes pédagogiques, sur la base d’objectifs fixés par discipline. À cette occasion, les difficultés constatées pourraient faire l’objet d’une analyse collective, qui serait à même d’aider les enseignants débutants à améliorer leurs pratiques pédagogiques.

2. Élaborer un corpus de « références pédagogiques opposables »

Si l’on veut améliorer les conditions d’enseignement et d’apprentissage, la formation des enseignants gagnerait à s’appuyer, ainsi que cela a été souligné dans la première partie du présent rapport, sur la recherche. Dans ses recommandations pour la formation des maîtres d’octobre 2006, le Haut conseil de l’éducation vise spécifiquement la recherche « dans les sciences et les disciplines qui concourent à l’efficacité des pratiques didactiques et pédagogiques et à la réussite des élèves ».

Une fois entrés dans la carrière, les enseignants débutants ne devraient pas perdre de vue cette dimension « recherche », essentielle pour l’amélioration de leur pratique professionnelle. En particulier, ils devraient rester attentifs aux apports des sciences cognitives qui, en permettant de décrypter les comportements en situation d’apprentissage, peuvent les aider à repérer les difficultés de leurs élèves et à définir les méthodes pédagogiques permettant de les surmonter.

Or, selon le responsable du programme expérimental de lutte contre l’illettrisme et l’échec scolaire « Parler Apprendre Réfléchir Lire Ensemble pour réussir » (PARLER), M. Michel Zorman, il existe un « état des connaissances, scientifiquement étayées, sur les processus d’apprentissage » qui devrait être relayé auprès des enseignants, afin qu’ils sachent, avec certitude, quels gestes professionnels doivent être évités en classe et quels sont, au contraire, les plus efficaces d’entre eux. Deux mesures complémentaires devraient être adoptées à cet effet :

– une « haute autorité » devrait être créée pour définir des « références pédagogiques opposables », sur le modèle des références médicales opposables (276) ;

– des financements devraient être accordés – sous la forme par exemple de bourses de thèse – aux recherches menées en ce domaine, afin d’enrichir le corpus des connaissances mis à la disposition des enseignants (277).

De manière parallèle, ainsi que l’ont recommandé les présidents des associations de didactiques entendus par la mission, MM. Bertrand Daunay et Yves Matheron, des recherches de grande ampleur devraient être menées, et sur un long terme, pour évaluer les effets des pratiques enseignantes novatrices et de la formation initiale dispensée aux professeurs (278).

3. Encadrer davantage l’affectation des jeunes enseignants

Dès lors qu’ils occupent un poste, les enseignants participent à ce qu’on appelle « le mouvement », c’est-à-dire au processus des mutations annuelles du personnel de l’Éducation nationale, dont les règles obéissent à un barème fondé sur l’ancienneté et avantagent de ce fait les enseignants âgés (279).

Selon M. Marcel Pochard, conseiller d’État, l’application de ce principe tend à déstabiliser les enseignants nouvellement titularisés alors qu’ils ont réussi, au cours de leur année de stage, à prendre leurs marques dans leur établissement. Ces enseignants devraient donc être soustraits du mouvement.

Par ailleurs, le mouvement conduisant à faire assurer les vacances d’emploi dans les établissements difficiles par les jeunes enseignants, ceux-ci devraient, au moment de leur affectation sur ce type de poste, signer un contrat avec leur employeur, qui préciserait, selon M. Marcel Pochard, leurs conditions de travail (classes et niveaux pris en charge), ainsi que le complément de rémunération et les actions de tutorat et de formation continue auxquels ils auraient droit. Au bout de cinq années, ils bénéficieraient d’une « prime à l’affectation », leur permettant de revenir dans l’académie où ils ont passé le concours (280).

4. Enrichir la formation continue et déconcentrer sa gestion

Les contenus de formation continue proposés aux enseignants devraient être redéfinis par les inspections générales, car ceux-ci accordent une part trop importante aux séances de présentation des réformes récemment engagées à l’Éducation nationale.

En outre, il serait souhaitable que les besoins des enseignants en la matière soient identifiés en se référant aux compétences professionnelles exigées par le ministère de l’éducation nationale et énumérées dans l’arrêté précité du 12 mai 2010. Cette approche a inspiré le référentiel élaboré par l’inspection académique du Val d’Oise pour évaluer le degré de maîtrise de chacune des dix compétences professionnelles à acquérir par les professeurs des écoles stagiaires selon trois niveaux : « compétence bien engagée », « compétence défaillante » et « compétence très défaillante ».

Aussi, ce portefeuille de compétences, dont il a déjà été proposé qu’il « suive » chaque étudiant stagiaire et enseignant débutant, devrait-il servir de point d’appui à la définition des actions de formation continue dont les enseignants titulaires devraient bénéficier pendant leurs premières années d’exercice.

Enfin, la formation continue des enseignants est, tout comme le mouvement, « barèmée », c’est-à-dire lié au barème. Par conséquent, moins l’enseignant est expérimenté, moins il a droit à une formation continue. Ce constat a conduit M. Marcel Pochard, conseiller d’État, à préconiser que les chefs d’établissement puissent eux-mêmes décider quels sont les enseignants qui devraient bénéficier des actions de formation continue (281).

E. FAIRE ÉVOLUER LE STATUT DES INSTITUTS UNIVERSITAIRES DE FORMATION DES MAÎTRES

Depuis la mise en œuvre de la réforme, la position – opérationnelle et statutaire – des 32 instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) est devenue ambiguë.

Comme l’a indiqué le recteur de l’académie de Besançon, M. Éric Martin, ils se situent à mi-chemin entre la composante interne de l’université – leur statut actuel –, dont le « cœur de métier » reste la maîtrise d’ouvrage de la formation des futurs professeurs des écoles, et le « centre de ressources » pour les masters « disciplinaires » des unités de formation et de recherche assurant la formation des futurs professeurs de lycée et de collège. Leur mal-être actuel, selon M. Éric Martin, tient au fait que ce rôle de « centre transdisciplinaire », disposant d’une expertise et de formateurs dans le domaine de la pédagogie, qu’ils devraient pouvoir assumer n’est pas toujours reconnu par les autres composantes des universités (282).

Il y a pire selon M. Gilles Baillat, le président de la Conférence des directeurs d’IUFM : cette structure, qui est parfois la seule, en raison de son rôle « d’antenne délocalisée » des universités, à pouvoir garantir une formation universitaire de proximité, peut être perçue, par certaines d’entre elles, comme une charge (283).

La ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme Valérie Pécresse, a estimé, pour sa part, que malgré le « recentrage » de la formation initiale des enseignants sur les universités, qui deviennent de fait plus attractives pour les étudiants préparant le concours, les IUFM, dans la très grande majorité cas, pourront continuer à jouer leur rôle de « pôle universitaire de proximité », indispensable au dynamisme des villes moyennes. Pour autant, la situation des instituts éloignés des grands centres urbains pouvant devenir problématique, leur ancrage devrait être consolidé par les futurs « schémas territoriaux de formation », en cours d’élaboration, qui auront pour objectif de développer les synergies et les passerelles entre les différents établissements d’enseignement supérieur d’une même zone géographique : universités, « classes prépas », sections de technicien supérieur, etc (284).

Toutefois, les incertitudes quant à l’avenir des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) restant fortes, la question de leur statut devrait être posée. Pour M. Jean-Michel Jolion, président du comité de suivi du master, plusieurs options seraient ainsi possibles :

– le statut quo ;

– l’intégration à une université sous la forme d’une unité de formation et de recherche – c’est le cas de l’IUFM de l’Université de Toulouse 2-Le Mirail, que son président, M. Daniel Filâtre, souhaiterait transformer en école universitaire professionnelle ;

– la transformation en composante académique interuniversitaire, cette solution semblant plus adaptée aux académies dans lesquelles il existe plusieurs universités mais un seul IUFM (285).

Une solution plus ambitieuse consisterait, selon M. Gilles Baillat, le président de la Conférence des directeurs d’IUFM, à faire assurer la formation de l’ensemble des enseignants par une structure spécifique et à créer à cet effet des écoles supérieures des métiers de l’éducation et de la formation, dont le financement serait partagé, selon des modalités à définir, entre l’université de rattachement et les collectivités territoriales concernées (286).

F. MENER UNE RÉFLEXION SUR LES OBLIGATIONS DE SERVICE DES ENSEIGNANTS ET L’AVENIR DU CONCOURS

La réforme de la formation initiale et des modalités de recrutement des enseignants que la mission propose de mettre en œuvre à partir de 2013 devrait être précédée par une réflexion sur les obligations de service des enseignants et l’avenir du concours.

1. Adapter le service des enseignants à la diversité de leurs missions

Plusieurs rapports ont récemment mis en lumière le caractère inadapté du service des enseignants du second degré. Leur statut, pratiquement inchangé depuis 1950, définit ce service exclusivement en heures d’enseignement et ignore, de ce fait, le soutien aux élèves en difficulté, le travail en équipe pédagogique et l’orientation des élèves, soit, pour reprendre l’analyse de la Cour des comptes, « toutes les activités qui rendent possibles la transmission des connaissances à un public hétérogène d’élèves » (287).

C’est la raison pour laquelle, à service inchangé, il est, selon M. Claude Thélot, conseiller maître honoraire à la Cour des comptes, matériellement impossible aux enseignants de mettre en pratique les compétences professionnelles demandées par le ministère de l’éducation nationale (288). Le sentiment perpétuel de décalage avec la réalité du métier qui en résulte conduit à ce que « le statut apporte plus de souffrance que de réconfort » d’après le Syndicat national des personnels de direction de l’éducation nationale (289).

Ces éléments plaident en faveur d’une nouvelle définition, faisant suite naturellement à une large concertation, du service des enseignants du second degré, deux rapports parlementaires ayant proposé qu’il se réfère à leur temps de présence dans l’établissement (290). On observera qu’un rapport récent de la fondation Terra Nova, auquel le sociologue François Dubet a participé, propose de « disjoindre le temps de présence dans l’établissement et la présence en classe » la mise en place « d’un volant d’heures hors classe, lié au travail de prévention et de lutte contre l’échec scolaire et de construction de projets pédagogiques » constituant un levier puissant pour « travailler autrement » (291).

2. Remplacer le concours par le master d’ici dix à quinze ans

Une réforme pleinement aboutie de la formation initiale des enseignants devrait conduire à opérer une transformation plus radicale de leurs modalités de recrutement. Cette transformation ne pourrait avoir lieu, toutefois, que si la Nation avait la garantie que les titulaires des différents masters « Enseignement » ont acquis, au cours de leur formation universitaire, les compétences professionnelles nécessaires à l’exercice du métier. À cette condition, en effet, le concours, tel qu’il est pratiqué en France, pourrait devenir, selon M. Marcel Pochard, conseiller d’État, ancien directeur général de la fonction publique, obsolète (292).

Ce dernier a estimé qu’une telle réforme permettrait d’établir les liaisons manquantes entre la formation, le recrutement et la première affectation – ces trois volets étant aujourd’hui mal gérés par l’Éducation nationale. En effet, une fois admis le principe selon lequel la certification des compétences académiques et professionnelles est délivrée par l’université, la procédure de recrutement pourrait évoluer pour tenir compte – enfin – des besoins très diversifiés des établissements. Sur le modèle de la fonction publique territoriale, des jurys pourraient ainsi établir, sur la base d’épreuves, d’entretiens ou de tests, des listes d’aptitude dans lesquelles pourraient « puiser » les académies ou les établissements. Dans le dernier cas de figure, la responsabilité du recrutement serait confiée aux établissements, les enseignants stagiaires bénéficiant, la première année, d’une formation complémentaire, organisée dans la structure où ils seraient appelés à exercer leurs fonctions (293).

Cette perspective d’évolution a été également défendue par le recteur de l’académie de Versailles, M. Alain Boissinot pour qui, « de même que “ la bonne monnaie doit chasser la mauvaise ”, le master devrait remplacer le concours », ce diplôme devant suffire à certifier l’employabilité de son titulaire. Le recrutement des enseignants pourrait alors s’effectuer au niveau local, par les autorités académiques ou les établissements, sur la base d’un entretien professionnel, sur le modèle des procédures utilisées au Québec et dans plusieurs pays européens (294). Bien entendu, un tel schéma impliquerait l’adoption de mesures – telles que aides au logement, primes spécifiques ou allègements de service – destinées à renforcer l’attractivité des zones les moins favorisées (295).

Surtout, – ce point étant fondamental – ce recrutement « nouvelle manière » devrait être organisé dans le respect des principes fondamentaux d’accès à la fonction publique, c’est-à-dire sur la base des seuls mérites et aptitudes.

Ce scénario d’évolution, le plus cohérent du point de vue des objectifs de la mastérisation, a les préférences de votre rapporteur. Cependant, il ne pourrait être appliqué avant dix ou quinze ans, le temps de construire le nécessaire consensus social et politique autour d’une telle évolution, nombreux étant encore ceux qui sont attachés au modèle traditionnel du concours.

LISTE DES 18 PROPOSITIONS DE LA MISSION

Proposition n° 1 : Engager dès maintenant une réflexion sur un nouveau système de formation initiale et de recrutement des enseignants à mettre en œuvre à partir de 2013.

Proposition n° 2 : Inclure dans la licence des modules relatifs au socle commun de connaissances et de compétences et aux technologies de l’information et de communication pour l’enseignement et organiser, dès la deuxième année d’études, des stages d’observation en milieu scolaire, préparés et encadrés.

Proposition n° 3 : Mieux articuler le concours et le master en organisant des épreuves d’admissibilité, à caractère académique, en fin de licence et des épreuves d’admission, à caractère professionnel, en fin de master, celles-ci devant évaluer les compétences didactiques des candidats et leur capacité à appréhender les problématiques transversales du métier et de l’école.

Proposition n° 4 : Fixer le nombre de places en première année de master « Enseignement » en fonction du nombre de postes ouverts par le concours, augmenté de X %.

Proposition n° 5 : Publier, chaque année, un plan de recrutement des personnels enseignants couvrant une période de cinq ans.

Proposition n° 6 : Construire le master sur le principe d’une véritable alternance entre la pratique professionnelle et les enseignements concernant les savoirs disciplinaires et didactiques, la pédagogie et les problématiques transversales du métier (travail en équipe pédagogique, sciences cognitives, tenue de classe, etc.).

Proposition n° 7 : Prévoir des stages, obligatoires et rémunérés, de pratique accompagnée en première année de master et en responsabilité en deuxième année, d’une durée égale à un tiers du service d’enseignement, et supprimer la formation continuée des enseignants stagiaires.

Proposition n° 8 : Centrer le mémoire de recherche sur les stages effectués par l’étudiant.

Proposition n° 9 : Cadrer le contenu des masters par la publication d’un cahier des charges de la formation aux différents métiers d’enseignant conclu entre l’État et les universités.

Proposition n° 10 : Bâtir des masters spécialisés par types de métier d’enseignant et mettre en place un « master de l’École du socle commun » destiné à favoriser l’enseignement de grands champs disciplinaires en fin de primaire et en début de collège.

Proposition n° 11 : Renforcer le dispositif d’aides aux étudiants se destinant à l’enseignement et l’appliquer dès la première année de master.

Proposition n° 12 : Créer un dispositif de bourses pour financer les études de bacheliers méritants issus de territoires défavorisés s’engageant à passer le concours et à enseigner dans leur académie d’origine.

Proposition n° 13 : Développer le recrutement des enseignants sur la base de la validation des acquis de l’expérience, en particulier pour les spécialités professionnelles pour lesquelles il n’y pas de diplôme de master.

Proposition n° 14 : Assurer le tutorat de chaque étudiant stagiaire et enseignant débutant en le confiant à des enseignants formés à cet effet.

Proposition n° 15 : Élaborer un portefeuille de compétences, renseigné par le tuteur, permettant de suivre les progrès des étudiants stagiaires et des enseignants débutants dans l’acquisition des savoirs professionnels.

Proposition n° 16 : Mieux encadrer la pratique professionnelle des enseignants débutants :

– en instituant des maîtres formateurs dans le second degré et en leur accordant une décharge ;

– en confiant une mission d’audit des équipes pédagogiques, sur la base d’objectifs fixés par discipline, aux corps d’inspection ;

– en créant une haute autorité en charge de la définition de « références pédagogiques opposables » et en finançant des recherches pour évaluer les effets des pratiques enseignantes novatrices et de la formation initiale dispensée aux professeurs.

Proposition n° 17 : Mieux encadrer l’affectation des enseignants débutants :

– en soustrayant les enseignants stagiaires des mutations annuelles liées au mouvement des personnels ;

– en faisant signer aux enseignants stagiaires et aux nouveaux titulaires affectés en éducation prioritaire un contrat précisant leurs conditions de travail et en leur attribuant une « prime à l’affectation » leur permettant de revenir, au bout de cinq ans, dans l’académie où ils ont passé le concours.

Proposition n° 18 : Engager une réflexion sur l’avenir et le statut des instituts universitaires de formation des maîtres afin qu’ils conservent leur rôle de pôles universitaires de proximité.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission des affaires culturelles et de l’éducation, se réunit le mercredi 7 décembre 2011, sous la présidence de Mme Michèle Tabarot, présidente, pour examiner le rapport d’information de M. Jacques Grosperrin, président-rapporteur.

M. Yves Durand. Madame la présidente, mes chers collègues, je sais qu’il n’est pas de coutume de formuler expressément un rappel au règlement en ouverture d’une réunion de commission, mais notre séance de ce matin est quelque peu particulière puisque nous voyons revenir devant nous, après la période estivale, un rapport dont notre commission avait refusé la publication. Cela me semble poser la question de la nature du document qui nous est soumis aujourd’hui. Je rappelle que le 6 juillet dernier, nous avions refusé sa publication et qu’en septembre, au détour d’un compte rendu de réunion de notre commission, nous avions appris, par hasard, qu’il serait de nouveau examiné après quelques nouvelles auditions de personnalités au demeurant déjà entendues.

Ou bien ce rapport est différent du premier et, dans ce cas, il aurait fallu mettre en place une autre mission d’information et conduire d’autres auditions ; ou bien il s’agit du même rapport comportant de simples modifications de forme. Je crains que nous nous trouvions dans ce dernier cas de figure et pareille méthode m’apparaît difficilement acceptable. Je souhaiterais soulever d’emblée les problèmes de forme qu’elle induit ; je laisserai en effet à mes collègues le soin de soulever les objections de fond relatifs au contenu du rapport.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Mes chers collègues, suite au vote de notre commission en juillet dernier sur la publication du document initialement adopté par la mission d’information sur la formation initiale et le recrutement des enseignants, j’ai souhaité que la mission d’information poursuive ses travaux en conduisant quelques auditions complémentaires. Les comptes rendus de nos réunions de commission attestent de cette démarche parfaitement transparente.

Observant que la tenue des réunions de cette mission d’information avait été quelque peu « boycottée » par le groupe SRC, il m’avait en effet paru opportun, avec le président-rapporteur de la mission, de permettre aux membres de l’opposition d’entendre les personnes auditionnées en leur absence de manière à mieux éclairer la nature des travaux menés. Au total, quelque quatre-vingt-douze personnes auront ainsi été auditionnées.

De nombreux parlementaires se sont impliqués dans ce travail avec assiduité. Je pense donc sincèrement qu’il serait regrettable que le rapport qui en découle ne puisse être porté à la connaissance du public, d’autant que chaque groupe politique a été en mesure de transmettre des contributions détaillant son point de vue sur le fond et les propositions formulées.

Il appartient à présent à notre commission de se prononcer sur la publication d’un nouveau rapport, celui qui a été adopté par la mission d’information la semaine dernière. Je laisse donc au président-rapporteur de la mission le soin de présenter ses nouvelles conclusions, en indiquant les modifications qui ont été apportées pour tenir compte de nos débats du 6 juillet dernier. Ensuite, à l’issue de nos échanges, notre commission devra naturellement procéder à un vote pour déterminer si le rapport doit ou non être publié.

M. Jacques Grosperrin, président-rapporteur de la mission d’information. Comme vient de le dire la présidente de notre commission, je vous soumets un nouveau rapport sur la formation des maîtres pour des raisons de fond et de forme.

Le 6 juillet dernier, la Commission n’a pas autorisé la publication d’un premier rapport, pourtant adopté par la mission le 29 juin. J’ai donc pris le temps de la réflexion, tout en procédant à quelques auditions supplémentaires au cours du mois d’octobre.

Cette démarche a été contestée par certains d’entre vous, qui y ont vu la volonté de recueillir des arguments destinés à revenir sur le sens du vote de rejet de la publication du rapport. J’ai voulu prendre, au contraire, un peu de hauteur par rapport à cet épisode pour décider, fin novembre, de ne pas soumettre au vote de la mission de propositions relatives à la suppression des concours. J’ai pris conscience que, dans une société attachée à la reconnaissance républicaine des mérites, et fragilisée aujourd’hui par la crise, de telles préconisations, faites au nom d’une mission parlementaire, pourraient ne pas être comprises.

Un nouveau rapport a donc été adopté, le 30 novembre dernier, par la mission. Les propositions approuvées à cette occasion visent, pour l’essentiel, à « réformer la réforme », afin de préserver l’attractivité du métier d’enseignant et la qualité des recrutements.

Dans ce but, le master devrait être protégé des effets délétères du concours. Les épreuves d’admissibilité devraient donc être organisées en fin de licence afin que les deux années de master dispensent une formation théorique et pratique alternée qui accorde toute sa place à la didactique des disciplines, aux sciences cognitives et aux stages.

Les étudiants admissibles suivraient ainsi des stages de pratique accompagnée et en responsabilité, organisés respectivement en première et en deuxième année de master. Ces stages seraient limités à un tiers du service de référence, donneraient lieu à rémunération et seraient formalisés dans le cadre d’un contrat d’enseignement.

L’admission, qui reposerait sur des épreuves professionnelles, serait donc organisée en fin de master, les flux d’entrée en première année devant être régulés en calibrant le nombre de places offertes aux étudiants.

Quant aux masters, ils devraient être spécialisés par métier d’enseignement, même si un master de l’école du socle commun devrait être mis en place pour permettre à ses titulaires d’enseigner des champs disciplinaires en fin d’école primaire et en début de collège.

Enfin, le tutorat et l’accompagnement pédagogique des étudiants stagiaires et des enseignants débutants devraient être renforcés, ce qui impliquerait de créer des maîtres formateurs dans le second degré et de mieux encadrer la procédure d’affectation des professeurs stagiaires.

J’en viens aux raisons de forme qui me conduisent à présenter ce nouveau rapport. La mission a entendu près de cent personnes et le rapport accorde une large place aux critiques qu’elles ont formulées à l’encontre du dispositif de formation et de recrutement mis en place en 2010.

Il serait dommage d’avoir invité tant de personnalités pour ne laisser ensuite aucune trace de leur propos.

En outre, le Parlement n’a pas produit, à ce jour, de rapport sur la mastérisation alors que plusieurs experts l’on fait, tout comme le Conseil économique, social et environnemental. Je pense pourtant que nous avons notre mot à dire sur une réforme aussi importante.

Enfin, un rapport d’information est un document collectif, qui retrace toutes les opinions : celles du rapporteur bien entendu mais aussi celles des autres membres de la mission, par le biais de leurs contributions, et celles de la Commission, grâce au compte rendu de la réunion, annexé au rapport.

Sa publication est à mes yeux indispensable pour assurer une expression démocratique des parlementaires sur un sujet capital.

Mme Martine Faure. Lors de l’examen du rapport de la mission d’information sur la formation initiale et le recrutement des enseignants en juillet dernier, j’avais déjà déploré les modalités dans lesquelles s’étaient déroulés nos travaux. Il semble désormais que la procédure accélérée s’applique également aux travaux des missions d’information et cela nous apparaît regrettable, comme M. Yves Durand vient de le souligner.

Le rythme frénétique imposé par le président-rapporteur – une centaine d’auditions ont été conduites dans un laps de temps très court – nous a privé d’une véritable concertation et de l’analyse approfondie que méritait ce sujet d’importance. Le résultat de cette précipitation a été le vote de notre commission, refusant la publication du rapport, le 6 juillet dernier. Contre toute attente, la mission d’information a néanmoins été réactivée, sans concertation ni information préalables, ses membres étant simplement avisés par une convocation du 14 octobre qu’une série d’auditions aurait lieu le 20 octobre suivant. La reprise des cadences folles et l’engrenage habituel de la procédure ont conduit à une communication du projet de rapport aux membres de la mission d’information la veille de son adoption mercredi dernier.

Nos désaccords subsistent pourtant sur trois points : suppression du concours externe de l’agrégation, remplacement du concours par le master, recrutement des enseignants par les établissements sur la base d’un entretien professionnel.

L’agrégation a encore toute sa pertinence à la charnière du lycée et de l’enseignement supérieur. Elle certifie un haut niveau disciplinaire et, en cas de suppression du concours externe, plus aucune régulation n’interviendrait a priori. Les difficultés de recrutement, notamment dans les zones défavorisées, s’aggraveraient, les meilleurs enseignants se trouvant aspirés dans les établissements les plus cotés des académies les plus demandées.

Le master, quant à lui, ne permettra pas de garantir le même niveau de formation professionnelle des enseignants sur tout le territoire et dans toutes les académies car les universités, nous le savons bien, ne sont pas égales entre elles et aussi parce que d’un master à l’autre les différences peuvent être très importantes. Or, les concours nationaux ont précisément pour but de garantir l’égal accès de tous aux charges et emplois publics. Leur suppression n’empêchera pas la nécessaire sélection des candidats au métier d’enseignant : elle la rendra plus opaque et beaucoup plus injuste, avec le risque de renforcer les inégalités territoriales.

Certes, la nouvelle rédaction du rapport escamote dans le rappel final des préconisations les deux propositions les plus contestables présentées en juillet. Elles n’en sont pas moins maintenues et abondamment développées dans le corps du rapport par le président-rapporteur, qui « récidive » en affichant nettement sa préférence pour la suppression du concours externe de l’agrégation, le remplacement du concours par le master d’ici dix-quinze ans et le recrutement des enseignants par les établissements ; autrement dit, tout ce que nous avions rejeté en juillet dernier.

Nous ne contestons pas que le système puisse et doive être amélioré. Si nous approuvons en grande partie l’orientation des propositions relatives à la formation des enseignants, les positions du président-rapporteur en faveur d’un recrutement nouvelle manière qui ne respecte pas les principes fondamentaux de l’accès à la fonction publique ne nous apparaissent pas recevables. C’est de l’avenir de nos enfants, des enseignants et de tout notre système éducatif qu’il s’agit !

Dans ces conditions, quoi qu’il lui en coûte – car ses membres appartenant à la mission d’information ont aussi beaucoup travaillé –, le groupe SRC s’opposera à la publication de ce rapport en l’état. Nous invitons d’ailleurs nos collègues de la majorité à faire de même.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Je rappelle que la mission d’information a débuté ses travaux au début du mois d’avril 2011. Son premier rapport a été présenté en juillet dernier : adopté par la mission d’information, notre commission n’a pas souhaité qu’il soit publié en l’état.

Mais c’est lors d’une réunion de notre commission que j’ai précisé que la mission d’information devait en conséquence reprendre ses travaux, en menant de nouvelles auditions. Je peux comprendre que vous restiez en désaccord avec le président-rapporteur, mais il n’en demeure pas moins qu’un important travail a été conduit depuis avril et que la mission d’information en a validé par deux fois les conclusions. Et aujourd’hui, notre commission n’a pas à se prononcer sur le fond du rapport mais simplement sur sa publication.

Mme Marie-Hélène Amiable. En tant que membre de la mission d’information sur la formation initiale et les modalités de recrutement des enseignants, j’ai eu l’occasion d’exprimer à plusieurs reprises le point de vue des député-e-s communistes et républicains, citoyens et du parti de gauche sur le rapport dont il est question aujourd’hui. Je ne pourrai naturellement donner un avis différent de celui que j’avais déjà formulé le 6 juillet dernier lors de la présentation par le président-rapporteur de la mission d’information du rapport « n° 1 », si je puis dire.

En effet, comme nous l’avons souligné dans notre contribution au rapport qui nous est soumis aujourd’hui, le nouveau texte présenté par la mission n’a visiblement été modifié qu’à la marge, ce qui maintient toute leur pertinence aux remarques que nous avions d’ores et déjà formulées. Comment en serait-il autrement ?

Après les trente-sept auditions et tables rondes réalisées, qui auront permis d’entendre, dans un premier temps, quelque quatre-vingt-six personnes, la mission décidait d’organiser, au mois d’octobre et en pleine session budgétaire, cinq malheureuses auditions supplémentaires de personnes déjà entendues ! Au final, les quelques modifications émaillant les 120 pages du nouveau rapport sont pour l’essentiel mineures et n’en modifient absolument pas l’économie.

Deux propositions qui avaient cristallisé l’opposition de notre commission semblent avoir disparu de la synthèse finale. Il s’agit là d’un faux-semblant puisqu’elles figurent toujours dans le corps du rapport.

À la page 95, le rapporteur continue ainsi de considérer « que l’agrégation devrait être exclusivement conçue comme un concours de promotion professionnelle, dans le cadre de concours internes », c'est-à-dire qu’il s’agirait en réalité de supprimer le concours externe de l’agrégation alors même que M. Jean-Michel Jolion, président du comité de suivi du master, a fini par trouver des raisons à son existence dans son rapport définitif publié en octobre 2011.

À la page 117, le rapporteur continue de vouloir « remplacer le concours par le master d’ici dix à quinze ans », en confiant à des jurys le soin « d’établir, sur la base d’épreuves, d’entretiens ou de tests, des listes d’aptitude dans lesquelles pourraient puiser les académies ou les établissements » : cette proposition inacceptable remettrait en cause le statut de la fonction publique et l’égalité de traitement des candidats sur tout le territoire.

Ceci dit, je ne conteste pas la cohérence du rapporteur avec les positions de son parti politique, exposées dans une récente convention consacrée au projet éducatif du Président-candidat pour 2012.

Vous entendez aussi renforcer « l’autonomie » des établissements scolaires avec la possibilité pour le principal et le proviseur, « mais aussi, à terme, le directeur d’école », de « recruter librement son équipe enseignante et d’administration » et, par là, de renforcer inévitablement les inégalités territoriales.

Le reste est à l’avenant. Si le rapport liste les problèmes résultant de la mastérisation improvisée en juin 2008 (traduction budgétaire délicate, mise en place d’une offre de formation insatisfaisante, accès diminué des étudiants d’origine modeste au master, déconnexion du diplôme et du concours, désorganisation de l’année de stage des professeurs recrutés et affaiblissement du vivier des candidats, démissions en nombre plus élevé dans le second degré, etc.), il n’apporte toujours pas de solutions pertinentes.

Nous avions pourtant identifié les propositions, très nombreuses, de tous ceux qui avaient mis quelques espoirs dans les conclusions de cette mission d’information, et notamment l’organisation d’un prérecrutement visant à garantir la démocratisation dans l’accès au métier d’enseignant, la conservation des concours de haut niveau disciplinaire, l’organisation d’une véritable formation alternée avec des allers-retours entre l’université et des stages pratiques, accompagnée et en responsabilité, ou encore la relance des programmes de recherche pour évaluer les effets des pratiques et des formations.

Dans ces conditions, je ne vois pas bien ce qui pourrait conduire la commission à adopter aujourd’hui un rapport qui a été repoussé en juillet dernier. Et ce, d’autant qu’une telle éventualité friserait le ridicule à l’aune de la récente décision du Conseil d’État en date du 28 novembre dernier qui annule, d’une part, en partie, l’arrêté du 12 mai 2010 fixant les compétences à acquérir par les enseignants et les conseillers principaux d’éducation stagiaires et, d’autre part, les modalités d’évaluation et de titularisation des professeurs agrégés telles qu’elles apparaissaient dans un second arrêté de la même date.

Les député-e-s communistes et républicains, citoyens et du parti de gauche repousseront donc une nouvelle fois les conclusions de cette mission d’information. Non seulement il s’agit d’une nouvelle remise en cause du service public de l’éducation, mais le rapport est désormais en décalage total avec les exigences du terrain.

M. Xavier Breton. Le seul point qui doit nous préoccuper ce matin est le suivant : les conditions à la publication de ce rapport sont-elles réunies ou non ?

Pour y répondre, plusieurs questions sont à soulever. Premièrement, ce rapport est-il opportun ? Nous nous accordons tous sur le caractère prioritaire du sujet de la formation et du recrutement des enseignants. Il s’agit du paramètre qui conditionne le plus l’efficacité de notre système éducatif. Il était donc important que notre commission apprécie les nouvelles modalités du recrutement et de la formation des enseignants, d’autant que, sans parler des 60 000 postes que certains proposent de rétablir, l’Éducation nationale est un recruteur de premier plan. Je rappelle que les personnes recrutées aujourd’hui resteront en poste jusqu’aux années 2060.

De plus, comme la réforme qui est actuellement mise en place a suscité des inquiétudes et polémiques, il était de la mission de l’Assemblée nationale d’apporter l’éclairage des élus et de sortir la réflexion des seuls couloirs du ministère de l’Éducation nationale.

Par ailleurs, ce rapport nous aurait été très utile à plusieurs reprises depuis juillet 2011 : au moment de la discussion budgétaire, lorsque nous avons abordé la question de la formation des enseignants, et même hier, lors de l’audition par le groupe de travail sur les manuels scolaires de différents éditeurs. Pour l’ensemble de ces raisons, il est opportun de publier de rapport.

La deuxième question concerne les modalités de la préparation de ce rapport. Dans cette mission d’information, comme dans toutes les autres, le rythme soutenu des auditions a mis le président-rapporteur en première ligne, tandis que les autres membres on fait de leur mieux pour y assister. Je salue, d’ailleurs, le travail de la mission d’information qui a entendu plus de quatre-vingt-dix personnes dans un climat serein et constructif. Depuis la rentrée, la deuxième série d’auditions de la mission d’information a permis d’actualiser le rapport. Je regrette toutefois que nos collègues de l’opposition l’aient boycottée. Ils ont préféré la crispation plutôt qu’une démarche constructive.

Troisième point, le contenu du rapport est-il honnête intellectuellement ? Il me semble que c’est le cas. En effet, ce rapport ne défend pas la réforme à tout prix et ne rassemble pas non plus des arguments la contestant. Il formule plutôt un bilan contrasté et objectif. Il formule à l’encontre du nouveau dispositif des réserves qui ne sont pas minces : le manque de professionnalisation du master, l’organisation très lourde de la deuxième année du master, qualifiée par le président-rapporteur de « course d’obstacles », la connexion problématique entre le master et le concours, et enfin le caractère discriminant de l’accès au concours au détriment des plus modestes en raison du rallongement de la durée des études. Le rapport a également le mérite de proposer plusieurs améliorations.

Certains points avaient cristallisé en juillet dernier les interrogations, tels la place de l’agrégation dans notre système éducatif et le remplacement du concours par un master. Des réserves avaient été émises sur tous les bancs, ce qui reflète la capacité de notre commission à exprimer des opinions différentes. Si ce rapport avait laissé indifférent, il n’aurait été d’aucune utilité. Il me semble au contraire qu’il sera un outil utile pour le ministère tout comme pour notre commission.

Le rapport a fait l’objet d’une nouvelle rédaction. Elle reprend les préférences du rapporteur, ce qui est compréhensible, sans qu’elles apparaissent pour autant toutes dans les propositions de la mission. L’intégration au rapport des contributions et du compte rendu des débats d’aujourd’hui permettra aux différentes sensibilités de notre commission de s’exprimer.

Le rapport permet au rapporteur d’alimenter la réflexion, sans céder à la pensée unique, tout en tenant compte des points de crispation relatifs à reconnaissance républicaine des mérites. En effet, dans un souci d’apaisement, les deux propositions qui avaient fait débat en juillet dernier ont été retirées.

Ce n’est pas parce que nous sommes favorables à pour la publication de ce rapport que nous sommes favorables à la suppression de l’agrégation, par exemple. S’inscrivant dans la réflexion en cours, ce rapport, à la suite de ceux qui ont été précédemment publiés par notre commission, apporte une pierre à l’édifice. Le groupe UMP votera par conséquent en faveur de sa publication.

M. Jacques Grosperrin, président-rapporteur. Premièrement, un rapport d’information retrace toutes les opinions : celles des membres de la mission, dans les contributions, celles des membres de la commission dans le compte rendu annexé, et naturellement les points de vue des nombreuses personnes auditionnées.

Deuxièmement, pour lever toute ambiguïté, nous ne proposons ici ni la suppression de l’agrégation, car il faut conserver ce concours d’excellence, ni celle des concours nationaux, par attachement au respect des principes fondamentaux d’accès à la fonction publique, tel le caractère national de la procédure de qualification et l’existence de jurys. Certains éléments ont certes été conservés par respect envers les personnes auditionnées. Néanmoins, les deux propositions qui avaient suscité des polémiques ont été retirées, qu’il s’agisse de l’ancienne proposition n° 5 de suppression de l’agrégation ou de la proposition n° 20 de donner aux concours, d’ici dix ou quinze ans, un caractère plus professionnel et moins académique. Elles ont été retirées dans une volonté d’apaisement mais également par souci de défendre la reconnaissance républicaine des mérites. Les dix-huit autres propositions illustrent le formidable travail de la mission d’information. Il serait donc dommage de ne pas publier ce rapport.

M. Alain Marc. Être favorable à la publication du rapport ne signifie pas nécessairement approuver son contenu. Or, la question qui nous est posée est bien d’autoriser ou non la publication du rapport. Nous nous torturons donc l’esprit pour rien.

Je me réjouis de la disparition de la proposition de supprimer le concours de l’agrégation. La proposition liminaire du rapporteur en faveur d’un « prérecrutement » est proche d’une proposition soutenue il y a deux ans sur tous les bancs de cette commission. En effet, la formation délivrée sur le terrain fait aujourd’hui l’objet de beaucoup de critiques. Un tel « prérecrutement » serait souhaitable. Je souhaite également que les deux dernières années de la formation laissent davantage la place à la professionnalisation, les stages faisant aujourd’hui largement défaut.

M. Yves Durand. Je ne conteste pas l’honnêteté du travail des membres de la commission et du président-rapporteur. Rappelez-vous néanmoins pourquoi nous nous étions opposés en juillet dernier à la publication de ce rapport : en raison notamment de la proposition n° 20, qui prévoyait le remplacement du concours par un recrutement effectué par l’autorité académique ou le chef d’établissement parmi les titulaires d’un master. Il m’est difficile de qualifier le rapport qui nous est soumis aujourd’hui de « nouveau », car j’y lis quasiment les mêmes formulations. Si des propositions en ont été retirées, les éléments correspondant dans le rapport ont été maintenus. Autoriser la publication de ce rapport reviendrait donc à autoriser la publication de celui que qui nous a été soumis le 6 juillet dernier.

La proposition n° 20 était loin d’être sans importance, puisqu’elle mettait en question le socle même du recrutement tel qu’il est organisé dans la fonction publique, ce qui donne aux enseignants leur caractère de fonctionnaires de l’État. Il s’agit d’un élément du socle républicain. Le remettre en cause revient à remettre en cause ce que l’Éducation nationale a de « national ».

Certes certaines dispositions du rapport sont très intéressantes et méritent d’être publiées. Toutefois, le rapport ne tire pas les conséquences des désaccords du 6 juillet dernier. Il n’affirme pas clairement que le concours doit rester le seul mode de recrutement possible pour l’Éducation nationale. Même si le rapporteur a défendu cette idée tout à l’heure oralement, elle ne figure pas au rapport. Il ne s’agit donc pas pour moi d’un nouveau rapport. En conséquence, notre groupe votera contre sa publication.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Monsieur Yves Durand, je pense que ce débat est disproportionné. Je rappellerai deux points. Vous aviez tout à fait la possibilité d’intervenir sur le fond en tant que membre de la mission, et les uns et les autres pourront transmettre des contributions ou préciser leurs positions, puisque certains sont très investis sur le sujet. Mais notre commission doit se prononcer aujourd’hui sur la publication du rapport, et vous vous livrez sur le sujet à un jeu qui ne me paraît pas acceptable. En effet, si nous suivions votre logique, le fait majoritaire empêcherait toute publication des avis budgétaires présentés par les députés de l’opposition. Or, cela ne correspond pas à l’esprit du travail parlementaire.

Je comprends parfaitement que l’on prenne position pour ou contre les propositions du président-rapporteur. Mais une fois que l’on a exprimé son point de vue, éventuellement par une contribution, il convient de prendre en compte le travail qui a été fait et les quarante-deux auditions qui ont été menées, sauf à mettre à bas le travail effectué, ce que je trouverais regrettable.

M. Patrick Bloche. Il vaudrait mieux vider l’abcès en reconnaissant le ridicule de cette situation. Depuis quatorze ans que je suis député, c’est la première fois que je constate une volonté délibérée de faire adopter un rapport coûte que coûte. C’est du « jamais vu » ! Ce que nous essayons de montrer à nos camarades – à nos collègues – de la majorité…

Mme la présidente Michèle Tabarot. Je vous rappelle, M. Patrick Bloche, qu’on ne vous demande pas d’adopter le rapport mais d’en autoriser la publication ! Cette distinction ne peut pas échapper à un parlementaire aussi expérimenté que vous.

M. Patrick Bloche. ...c’est le ridicule de la situation ! C’est grotesque !

M. Bernard Debré. Au mois de juillet dernier, j’avais été heurté, comme nombre de mes collègues du groupe UMP, par la proposition n° 20 et nous avions demandé que le rapport soit revu. Mais nous aurions très bien pu autoriser sa publication à ce moment-là ! Un nouveau travail a été effectué. Au total quatre-vingt-douze personnes ont été entendues ; il serait tout à fait normal que le rapport fasse état de leur audition.

Ce n’est pas par dogmatisme que nous avons demandé que la proposition n° 20 soit retirée du rapport, mais afin qu’elle puisse faire l’objet de réflexions de la part des enseignants et des universitaires. À présent, on nous demande de publier le rapport adopté par la mission. Nous le ferons car il semble important de reconnaître le travail des uns et des autres ; c’est également une question de respect à l’égard de toutes les personnes auditionnées. Et je rappelle qu’il nous est arrivé d’autoriser la publication de rapports dont nous n’approuvions pas le contenu au plan politique. C’est cela, la démocratie !

M. Régis Juanico. Pourtant le groupe UMP s’est opposé à la publication du rapport d’enquête de M. Nicolas Perruchot sur les mécanismes de financement des organisations syndicales d’employeurs et de salariés !

M. Pascal Deguilhem. S’agissant de l’assiduité aux réunions de la mission, je souhaiterais que soit relevée la présence des groupes SRC et GRD lors des auditions. Nous avons effectivement boycotté les réunions au départ, mais, lorsque par la suite nous avons accepté de participer aux travaux, nous avons été très présents.

Et ce n’est pas tant les analyses des personnes auditionnées que l’avis du rapporteur que nous ne souhaitons pas publier. Nous portons le même regard sur la réforme de la formation des maîtres et la mastérisation.

Il faut replacer cette réforme dans le contexte actuel qui est celui d’une dégradation de l’école et de la situation des enseignants – baisse régulière et inquiétante des recrutements et formation pédagogique réduite à néant ; les jeunes enseignants sont devant les élèves pendant leur temps de formation, nous le constatons tous sur le terrain. Le tutorat est quasiment impossible à mettre en place ; les propositions, certes louables, que formule le rapporteur, soulignent sa nécessité, mais le tutorat n’existera pas tant qu’il n’y aura pas de recrutements. L’absence de mixité sociale nous interpelle également ; et les établissements formateurs sont aujourd’hui complètement désorientés.

Ce sont des points que depuis le mois de juillet le Conseil économique, social et environnemental a largement soulevés, et nous aurions pu reprendre in extenso dans ce nouveau rapport les propositions du conseil. Cela n’aurait été dégradant pour personne.

Je souhaiterais indiquer enfin que ce qui nous heurte, c’est la disparition du concours, qui porte en germe celle du statut de la fonction publique. Ce qui me choque, c’est qu’en regard du commentaire du recteur Alain Boissinot selon lequel comme « la bonne monnaie doit chasser la mauvaise » le master doit chasser le concours, l’avis du rapporteur est que cette évolution semble le scénario le plus cohérent. C’est pourquoi nous ne souhaitons pas la publication de ce rapport.

M. Dominique Le Mèner. Je souhaiterais remercier le président- rapporteur pour le travail accompli. On pouvait s’interroger en effet sur l’utilité de faire un rapport peu de temps après la réforme, mais cela a permis d’entendre un certain nombre de personnes qui se sont exprimées de manière objective et je suis pour ma part assez surpris, bien que je me sois abstenu lors de la réunion du 6 juillet, de l’attitude qui consiste à contester le droit de publier leurs avis. Et ce, d’autant qu’ont été retirées les propositions qui faisaient débat. Je pense qu’au contraire, c’est faire œuvre utile que de présenter ce rapport.

Je voudrais souligner – et je sais que le président partage ce point de vue – que les instituts universitaires de formation des maîtres ont besoin d’évoluer, notamment dans la mise en œuvre d’un nouveau statut, et je souhaiterais que l’on évoque cette question.

M. René Couanau. Il ne faut pas se laisser égarer loin du cœur du problème par deux débats. Celui concernant la publication du rapport a été ouvert par un premier débat provoqué par le rapporteur et concernant la suppression des concours. À partir de là tout est faussé !

Le fond de la question est que le système de formation des maîtres et des professeurs est catastrophique. Chacun le sait ; or aucune mesure n’est prise pour le redresser.

Rappelons que la réalité de la réforme est la suppression de dix-huit mille postes. Vous l’évacuez en une demi-page dans votre rapport en disant que vous n’avez pas à vous prononcer sur cette question qui relève de la stratégie économique et financière. Or, c’est le fond du problème : si nous reprenons un système de formation professionnalisé, il nous faut des postes !

La réforme devait, par ailleurs, régler le compte des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM). Elle ne l’a pas fait, les IUFM subsistent et leur rôle n’est toujours pas défini.

Elle visait enfin à améliorer la formation des maîtres. Or que se passe-t-il actuellement ? Il n’y a aucune formation des maîtres ! Nous sommes revenus quarante ans en arrière, avec l’idée folle que la masterisation et le haut niveau de formation universitaire peuvent remplacer la formation professionnelle que nous avions mise en place. C’est cela, la réalité ! De ce point de vue, le rapport dit fort bien – j’ai relevé les mots – que c’est une réforme qui a été improvisée, qu’elle n’est pas cadrée et qu’elle conduit à une fausse professionnalisation.

S’agissant du point qui a fait débat, c’est-à-dire la suppression des concours, nous ne pouvons pas douter de l’honnêteté intellectuelle du rapporteur. Mais il est obstiné ! Certes, il supprime in fine la vingtième proposition, mais il la maintient dans le corps du rapport. C’est son avis. Ce n’est pas le nôtre !

Sur le fond, nous ne pouvons pas nous prononcer en faveur de ce rapport. Si vous le publiez, le ministre entendra peut-être quelque chose… Mais je ne voterai pas la publication car je pense qu’elle donnera l’impression que nous approuvons le contenu de ce rapport.

Nous n’approuvons pas l’idée que vous avez exprimée et que vous avez tue momentanément mais dont nous savons qu’elle subsiste dans les milieux gouvernementaux et majoritaire, qui est de supprimer les concours de la fonction publique et de revenir à un recrutement local. Cette position fait fi de toutes les lois républicaines que des générations ont réussi à établir dans ce pays. Il faut le dire ! En ce qui me concerne, je n’approuve pas le rapport et donc je n’approuverai pas sa publication.

M. Jean-Pierre Giran. Je voterai en faveur de la publication du rapport, car autorisation de publication ne vaut pas approbation sur le fond. S’agissant de l’agrégation, je me suis élevé, lors d’un précédent débat, contre la proposition de suppression de ce concours en droit et sciences économiques. Je pense qu’il est en effet extrêmement dangereux de supprimer les « barreaux de l’échelle », sans lesquels on ne peut monter au sommet. J’aurais donc préféré que le rapport affirme que si l’agrégation n’est pas la voie unique d’accès à l’enseignement, elle en demeure la voie d’excellence. Elle ne doit pas devenir l’exception. J’estime en outre que nous devons lutter contre la tendance à une « secondarisation » de l’université et à une « primarisation » de l’enseignement secondaire. La dimension nationale des concours et l’excellence des enseignements auraient pu tout autant être affirmés que la proposition de « dissoudre », à terme, l’agrégation dans je ne sais quel master. En effet, à l’université, les masters n’ont pas toujours la qualité que l’on veut leur prêter.

Mme Monique Boulestin. Je souhaite revenir sur trois points qui méritent toute notre attention et doivent être débattus. J’évoquerai tout d’abord, évidemment, la suppression du concours externe. On ne peut pas, s’agissant d’un concours de ce niveau, dire comme cela est écrit, pages 94 et 95 du rapport, que le concours externe de l’agrégation coûte cher. Si l’éducation a un coût, ce n’est pas celui-là. Comme la santé, l’éducation a certes un coût, mais elle n’a pas de prix. Ce sont en effet des générations d’adolescents et d’étudiants qui bénéficient de la haute qualité des enseignements qui leur sont dispensés.

J’en viens au remplacement du concours par un master. Comme nous l’avons déjà dit, les masters diffèrent d’une académie à une autre. Nous souhaitons, pour notre part, maintenir une égalité républicaine, dans le respect du statut de la fonction publique, s’agissant des compétences requises en tout point de notre territoire pour devenir enseignant.

Enfin, monsieur le rapporteur, vous évoquez dans votre rapport l’évolution nécessaire des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) sans mener la réflexion à son terme. Ces instituts doivent redevenir de véritables lieux de formation des enseignants et de véritables écoles professionnelles, comme il en existe pour d’autres professions – je pense notamment à l’École nationale de la magistrature. Nous ne trouvons pas une telle ambition dans votre rapport.

M. Michel Herbillon. Notre débat porte sur deux points totalement différents. Le premier est lié à une polémique sur la forme, lancée par nos collègues de l’opposition qui considèrent, depuis le départ, que c’est à tort que la majorité de notre commission s’est saisie du sujet très important de la formation des enseignants, qu’ils considèrent comme étant leur « chasse gardée ». Excusez-nous de déranger : ce sujet essentiel – celui de l’éducation de nos enfants – concerne tout le monde !

Je remercie M. Pascal Deguilhem d’avoir rappelé l’intermittence de l’assiduité de l’opposition aux travaux de la mission d’information – même si c’est son droit le plus strict : sa volonté initiale de « boycotter » ses travaux, puis son revirement. Un débat a ensuite traversé tous les rangs de notre commission sur la question de la publication du rapport de la mission. Nous ne pouvons que rendre hommage à Mme la présidente et au président-rapporteur d’avoir proposé une poursuite des auditions pour approfondir la réflexion.

Arrêtons donc cette polémique sur une question de forme qui n’a rien d’essentiel. Si j’ai bien compris, l’opposition propose d’instaurer une censure en interdisant la publication du rapport. Cela serait tout à fait inédit, alors qu’un travail de fond a été mené tant par le président-rapporteur que par l’ensemble des membres de la mission pendant plusieurs mois.

J’en viens au fond. Un débat anime tous les rangs de notre commission, y compris ceux de sa majorité, à propos de la suppression du concours de l’agrégation et de son remplacement par des masters. J’y suis pour ma part opposé, de même qu’un certain nombre de commissaires de la majorité et de l’opposition. Ce débat justifiait que de nouvelles auditions aient été menées. M. Jacques Grosperrin, président-rapporteur de la mission, a indiqué clairement qu’à l’issue de ces auditions, il avait supprimé ses propositions initiales n° 5 et n° 20 – je l’invite d’ailleurs à le préciser de nouveau si nécessaire. Dans ces conditions, je suis personnellement favorable à la publication du rapport, qui fait suite à de très nombreuses auditions. Attaché à la reconnaissance républicaine des mérites, j’estime en effet que les concours nationaux, en reposant sur le mérite, permettent l’ascension sociale : tout jeune Français peut, en tout point du territoire, tenter d’aboutir à l’excellence.

Si, comme certains le soutiennent, des termes utilisés dans le rapport semblent se référer aux précédentes propositions qu’il contenait avant qu’elles n’en soient supprimées, j’invite le rapporteur à nous dire très clairement ce qu’il en est. Ces termes peuvent en effet traduire sa position personnelle. Nous sommes à l’Assemblée nationale, il est normal qu’il y ait débat. En tout état de cause, j’autoriserai la publication du rapport.

Mme Colette Langlade. Je pense que le sujet est trop grave pour qu’il y ait matière à polémique. Le rapport suggère que les étudiants stagiaires pourraient être encadrés par des enseignants « chevronnés » : selon quels critères ? Il propose également un encadrement par des enseignants « volontaires », avec une liste « à la Prévert » : professeurs des écoles, maîtres d’accueil temporaire, conseillers pédagogiques ou encore corps d’inspection. Ce rapport n’évoque jamais les moyens financiers nécessaires à l’accompagnement des nouveaux enseignants ; en revanche, il évoque encore et toujours un accroissement de la charge de travail.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Je propose aux membres de la commission qui le souhaiteraient de transmettre, d’ici vendredi 9 décembre, leur contribution écrite, soit individuelle, soit de groupe, afin que celle-ci figure en annexe du rapport. Je vous rappelle que notre réunion de commission donnera en outre lieu à l’établissement d’un compte rendu qui figurera, lui aussi, dans le rapport. Celui-ci fera donc état de tous les avis exprimés sur les questions évoquées.

M. Patrick Bloche. Permettez-moi de rappeler certains faits, car certains intervenants semblent avoir oublié combien cette mission d’information avait mal commencé – ce qui peut, du reste, expliquer qu’elle s’achève également mal. Nous avions demandé que la présidence de cette mission soit assurée par un membre de l’opposition, la fonction de rapporteur devant logiquement revenir à un membre de la majorité, comme cela se pratique pour des missions créées par d’autres commissions. Cela nous a été refusé et, après de trop longues discussions, un petit geste nous a été consenti : Mme Martine Faure a été désignée vice-présidente. Ceci explique pourquoi les membres du groupe SRC ont fini par participer aux travaux de la mission d’information.

Où en est-on aujourd’hui ? Nous ne pratiquons aucune obstruction. Comme tout le monde l’a bien compris, les jeux étaient déjà faits avant que nous ne débutions cette séance : la publication du rapport sera autorisée, la majorité étant, ce matin, fort heureusement, majoritaire. En revanche, nous souhaitons rappeler notre opposition sur le fond et éviter que nous ne nous ridiculisions collectivement. Chers collègues de la majorité, vous l’avez bien compris : la mission a réentendu des personnes qu’elle avait déjà auditionnées, qui ont évidemment tenu les mêmes propos qu’au printemps car elles n’avaient pas changé d’avis en six mois. Ces nouvelles auditions ont donc donné lieu à un travail « cosmétique » sur le rapport dont on constate, en étudiant sa chair, qu’il contient toujours le même venin. Les propositions qui avaient conduit la commission à refuser majoritairement la publication du rapport figurent toujours dans le cœur de celui-ci. C’est donc en toute camaraderie que j’alerte les commissaires de la majorité : vous êtes amenés à voter exactement le même rapport que celui qui vous avait précédemment été soumis. Il sera publié, puisque tel est votre choix. Comptez sur nous, en tant que députés de l’opposition, pour assurer sa publicité ! C’est un vrai brûlot dont vous verrez qu’il vous brûlera les doigts.

Mme Martine Martinel. Je suis gênée par les propos de M. Michel Herbillon qui parle de polémique et évoque une « chasse gardée » de l’opposition. J’estime que l’éducation doit être la « chasse gardée », au sens positif du terme, de tous les députés. Je m’étonne aussi qu’une personne aussi sagace que M. Michel Herbillon sépare la forme du fond. Il ne s’agit évidemment pas de contester l’honnêteté et la rigueur des personnes, aux éminentes qualités, citées par le rapport, comme MM. François Dubet et Alain Boissinot, mais je déplore que les propos qui leur sont prêtés aient été sortis de leur contexte. Je m’interroge ainsi lorsque je constate que M. Alain Boissinot en viendrait à critiquer les concours, lui qui a été inspecteur général de l’éducation nationale et membre éminent d’un grand nombre de jurys de concours. Je suis également gênée lorsque je lis, à la toute fin du rapport, que « nombreux [sont] encore ceux qui sont attachés au modèle traditionnel du concours ». Qu’est-ce donc que ce « modèle traditionnel » ? Serait-ce un modèle « ringard » ? Je préfère, pour ma part, le « modèle traditionnel » du concours qui privilégie l’excellence républicaine au recrutement de personnes dépourvues de compétences et de formation par Pôle Emploi, comme cela est actuellement le cas dans l’académie de Toulouse en lettres classiques.

Mme Marie-Hélène Amiable. Monsieur Michel Herbillon, nous ne voulons censurer personne ! C’est vous qui voulez, à tout prix, que nous approuvions ce rapport ! Vos propos concernant la présence de membres de l’opposition aux réunions de la mission s’apparentent en outre à de la provocation. Nous n’avons pas de leçons à recevoir : si l’opposition n’avait pas été présente lors de ces réunions, M. Jacques Grosperrin aurait été bien seul… Je tiens d’ailleurs à le remercier car j’avais proposé que soient entendues certaines personnes, et il a donné suite à mes demandes. Ne nous faites donc pas de mauvais procès.

Il convient de remettre sur le métier la formation des maîtres. La situation est aujourd’hui catastrophique en raison de la réforme et de la précipitation dans laquelle celle-ci a été conduite, comme l’ont très bien montré les auditions que nous avons menées. Dans un souci d’économies nouvelles et une volonté de mise en cause, sur le fond, de la fonction publique, vous proposez, d’ici quinze à vingt ans, une suppression des concours. Nous ne pouvons pas l’accepter car nous estimons que ceux-ci sont sources d’égalité républicaine et d’égalité de traitement sur le territoire national. En outre, vous ne traitez pas le cœur du problème que nous rencontrons avec la formation des maîtres.

Enfin, un élément nouveau, et non des moindres, doit être pris en compte, à savoir la décision du Conseil d’État du 28 novembre 2011 qui vient d’annuler l’arrêté du 12 mai 2010 portant définition des compétences à acquérir par les professeurs, documentalistes et conseillers principaux d’éducation pour l’exercice de leur métier. Cette situation devrait vous conduire, monsieur le rapporteur, à formuler de nouvelles propositions.

M. Jacques Grosperrin, président-rapporteur. Nous sommes aujourd’hui amenés à nous prononcer sur la publication d’un nouveau rapport qui porte, comme vous l’avez tous souligné, sur un sujet important, celui de l’éducation. Il fait débat, comme le démontre votre présence aujourd’hui.

Je ne m’attarderai pas sur la question du taux de présence aux réunions de la mission. Tous ont été très présents, mais il est vrai que le « boycott » initial des travaux a pu créer des difficultés : certains membres de l’opposition n’ont ainsi assisté qu’à la moitié des auditions – ce qui n’a pas été le cas de Mme Marie-Hélène Amiable qui a assisté à l’ensemble d’entre elles. Je comprends cette posture, mais elle a pu conduire à des difficultés de compréhension du rapport.

Le corps du rapport fait état, en toute sincérité, de l’avis de spécialistes de grande renommée. Pour que les choses soient bien claires, je précise que je suis attaché au concours de l’agrégation qui sanctionne un niveau d’excellence. La proposition initiale n° 5 qui faisait polémique a donc été retirée du rapport, comme vous le souhaitiez au mois de juin dernier. La proposition initiale n° 20 a également été supprimée, car nous sommes attachés à la reconnaissance des mérites par les concours de la fonction publique d’État. Vous devriez en être satisfaits.

Comme vous l’a proposé Madame la présidente, vous avez la possibilité de transmettre des contributions écrites qui seront annexées au rapport ; le compte rendu de notre actuelle réunion figurera également dans ce dernier.

Je tiens, en conclusion, à remercier les commissaires membres du groupe UMP de leur soutien en faveur de la publication du rapport. Celui-ci aborde un sujet qui fait débat et qui sera sans aucun doute discuté dans le cadre de la campagne présidentielle.

M. Michel Ménard. Comme l’a rappelé M. René Couanau, la question de fond est tout de même la situation dramatique de la formation des enseignants. Alors que l’État recrute, pour l’instant toujours par concours, des personnels pour trente ou quarante ans, il ne s’assure pas de leurs capacités pédagogiques. Il ne prend en compte que les connaissances. Or pour que des enseignants puissent transmettre des savoirs, il faut non seulement qu’ils les possèdent solidement, mais aussi qu’ils disposent de la formation pédagogique nécessaire. À défaut, ces collègues enseignants se trouvent en difficulté.

L’inquiétude est grande dans les instituts de formation des maîtres (IUFM). Je suis membre du conseil d’école de l’IUFM des Pays de la Loire, qui ne sait plus quelles sont ses perspectives. Des tensions existent avec les universités. Le statut même des IUFM est des plus flous, s’il existe encore.

La clarification de cette situation passe donc par la possibilité pour les futurs enseignants de disposer d’une formation pédagogique extrêmement solide.

Sur la forme maintenant : approuver la publication du rapport me semble, pour le moins, donner le sentiment qu’une majorité des députés valide les propositions qui y figurent. Autoriser la publication, c’est valider le contenu du rapport. Si les propositions 5 et 20 du rapport initial ont bien été retirées, elles figurent cependant toujours dans le corps du rapport, où il est noté que l’on pourrait remplacer le concours par le master d’ici à dix ans.

Mme la présidente Michèle Tabarot. Je vous rappelle que le compte rendu de la réunion d’aujourd’hui sera intégré au rapport ; vos interventions y figureront donc. En outre, vous pourrez transmettre des contributions écrites jusqu’à vendredi midi. Elles seront annexées au rapport. Il me semble que c’est faire montre d’un réel esprit d’ouverture…

Je mets maintenant aux voix l’autorisation de la publication du rapport d’information.

*

* *

La Commission autorise, en application de l’article 145 du Règlement, le dépôt du rapport d’information en vue de sa publication.

CONTRIBUTIONS

CONTRIBUTION DE MME MARTINE FAURE ET DES DÉPUTÉ(S)
DU GROUPE SOCIALISTE, RADICAL, CITOYEN ET DIVERS GAUCHE

Le but de la mission est de faire le point sur la mise en application, depuis la rentrée 2010, de la réforme de la mastérisation et d’entamer une réflexion sur l’amélioration des modalités de formation initiale et de recrutement des enseignants. Les travaux de la mission ont commencé le 6 avril 2011 dans la perspective d’une remise des conclusions fin juin. Trois mois, c’est peu pour un sujet d’une telle importance. Cela implique un rythme extrêmement soutenu, avec des auditions en rafale et un calendrier si serré qu’il n’a permis aucun véritable échange avec les nombreux – et passionnants – intervenants qui ont dû se contenter d’exposer le plus brièvement possible leurs différentes analyses. De plus, le rapport n’a été transmis aux membres de la mission qu’à la veille du vote.

Au fil des auditions, nous avons pu constater que cette réforme, telle qu’elle a été engagée par le Gouvernement, faisait l’objet de critiques très sévères aussi bien de la part des instances officielles que des syndicats d’enseignants et d’étudiants ou des associations de parents d’élèves. À la quasi unanimité, elle est jugée désastreuse : mal pensée, mal conduite, à la hâte et sur fond de suppression de postes et de restrictions budgétaires, elle ne répond pas aux vrais problèmes et aggrave la crise du recrutement des futurs professeurs.

1er point : Recrutement des enseignants

Le professeur est un fonctionnaire de l’État (cf. arrêté du 12 mai 2010). Son recrutement doit impérativement s’effectuer de manière transparente, dans le souci de maintenir l’égalité républicaine sur tout le territoire, et ceci à court, moyen et long terme. L’éducation doit rester nationale, ce qui implique un recrutement des enseignants, fonctionnaires d’État, par concours. Nous nous opposons donc à la proposition n° 20.

Certains intervenants ont mis l’accent sur l’uniformisation progressive du corps enseignant. Les jeunes professeurs, issus de milieux favorisés, sont peu familiarisés avec les codes et les modes de fonctionnement des élèves qu’ils doivent prendre en charge, d’où l’incompréhension réciproque. Permettre aux bacheliers de tous les milieux sociaux l’accès au métier d’enseignant est un facteur essentiel de maintien de la diversité. Dès lors, un soutien financier associé à un plan de pré-recrutement est indispensable. Dans tous les cas, cette aide devra intervenir le plus tôt possible.

2e point : Nature et place du concours

Il s’agit de vérifier le niveau de connaissances mais aussi les compétences et les aptitudes à exercer le métier d’enseignant pour éviter aux étudiants de s’enfermer dans des choix dangereux pouvant aboutir à des impasses.

Plusieurs intervenants ont souhaité placer le concours en fin de L3. Ensuite, le cursus se déroulerait ainsi :

Ø stages d’observation et de pratique en M1 et M2,

Ø validation professionnelle en fin de M2,

Ø poste d’enseignant stagiaire avec tutorat pendant un an.

À partir de la septième année, l’étudiant acquiert le statut de professeur autonome.

3e point : Contenu de la formation

Mastérisation et professionnalisation : il faut dépasser l’opposition entre « savoirs académiques » et « compétences professionnelles ». Une formation à la fois universitaire et professionnelle est indispensable avant de se retrouver en situation d’enseigner. Il faut le dire et le répéter, enseigner est un métier et un métier qui s’apprend. Au-delà de l’indispensable engagement financier de l’État, une réforme courageuse et efficace nécessite la recherche et la mise en place de méthodes pédagogiques innovantes adaptées à la diversité des situations sociale, familiale, individuelle que le futur enseignant est amené à rencontrer.

L’accent doit être mis sur la formation en langues, en matières scientifiques et sur la maîtrise des nouvelles technologies.

Il conviendrait d’orienter la formation par rapport au choix de l’étudiant et de créer des binômes prenant en compte les spécificités réelles en fonction des niveaux :

– maternelle-primaire

– primaire-collège

– collège-lycée

– lycée-université.

Les passerelles entre les différents niveaux assureraient la continuité pédagogique, évitant ainsi les risques de rupture et les difficultés qui en découlent.

4e point : Lieux de formation

Comme les présidents d’université, nous pensons qu’une structure identifiée, une « Maison des métiers de l’enseignement », est indispensable. L’Université étant le lieu de l’acquisition des connaissances, il faut créer en son sein, au coeur même de l’institution, un pôle universitaire de professionnalisation qui garantirait :

– l’homogénéité des contenus et des niveaux de la formation initiale,

– le lien constant avec la recherche pédagogique,

– la formation continue.

Le 31 août 2010, Luc Chatel annonçait : « Mon ambition, c’est d’accompagner les enseignants de notre pays, de leur donner les moyens d’accomplir pleinement la mission que nous leur confions. Voilà pourquoi j’ai choisi de revaloriser leur condition, en leur proposant un nouveau pacte de carrière ». Les enseignants stagiaires, qui ont dû affronter lors de la rentrée 2010 les situations catastrophiques générées par la réforme, ont jugé l’expérience éprouvante et décevante. Un gain mensuel de 157 euros ne suffira pas à les rassurer sur la valeur du métier qu’ils ont choisi. Les professeurs font trop souvent figure de boucs émissaires : dénigrés, méprisés, malmenés, ils n’attendent pas seulement des augmentations de salaires. Ils souhaitent de meilleures conditions de travail et la reconnaissance du rôle essentiel qu’ils jouent dans la construction de l’École du futur dont ils sont la clef de voûte.

Au-delà des promesses, il y a une réalité incontournable et de plus en plus inquiétante. La politique de fermeture de classes, de suppression de postes et de restrictions budgétaires que le ministre conduit avec une obstination confinant à l’aveuglement nous promet une rentrée particulièrement difficile. Il faut mettre en place de toute urgence un autre projet éducatif.

ANNEXE

Le 6 juillet 2011, la commission des affaires culturelles et de l’éducation a rejeté le rapport d’information sur la formation initiale et les modalités de recrutement des enseignants.

La mission a été réactivée en octobre, sans la moindre concertation, dans le but évident de publier ce rapport coûte que coûte.

Le 30 novembre dernier, le président-rapporteur de la mission proposait une nouvelle version de son rapport.

Les quelques modifications introduites à l’issue d’auditions complémentaires organisées furtivement pourraient laisser croire que l’année 2010-2011 s’est déroulée dans de meilleures conditions, que les affectations à la rentrée 2011 sont satisfaisantes et que les données recueillies sur les démissions, les congés maladies et les enseignants en difficultés sont rassurantes.

Il n’en est rien. Sur le terrain, la situation est toujours alarmante : les suppressions de poste entraînent mécaniquement l’augmentation du nombre d’élèves par classe, accroissant les difficultés d’enseignants stagiaires peu ou pas formés.

La mise en place du tutorat alourdit la charge de travail des enseignants-tuteurs qui ont souvent plusieurs stagiaires en responsabilité.

La chute du nombre de candidats au concours, l’assèchement du vivier des enseignants de lycées professionnels sont autant de problèmes récurrents auxquels nulle solution n’a été apportée.

Il est annoncé que 34 universités « devraient expérimenter des masters en alternance permettant de conjuguer formation universitaire de haut niveau et pratique professionnelle ». Pour séduisant qu’il soit, le projet est pourtant condamné à l’avance faute de moyens.

Les articles 5 et 20 ont été retirés de la liste des propositions du rapporteur mais ils sont bel et bien maintenus dans le corps du texte. Il suffit de se reporter à la page 95, où l’agrégation est clairement définie comme « un concours de promotion professionnelle, dans le cadre des concours internes », et aux pages 117 et 118 où l’art et la manière de « remplacer le concours par le master d’ici dix à quinze ans » sont complaisamment détaillés.

Le doute n’est plus permis quand le rapporteur met en avant la nécessité d’une transformation radicale des modalités de recrutement : remplacer le concours par le master et confier la responsabilité du recrutement aux établissements sont les axes majeurs de la réforme qu’il préconise.

Malgré les apparences, la position du rapporteur n’a pas évolué, la nôtre non plus : nous restons opposés à ce recrutement « nouvelle manière » qui ne respecte pas les principes fondamentaux d’accès à la fonction publique.

CONTRIBUTION DE MME MARIE-HÉLÈNE AMIABLE ET DES DÉPUTÉ(S)
DU GROUPE GAUCHE DÉMOCRATE ET RÉPUBLICAINE

Les motifs qui ont abouti à la création, le 16 février 2011, sous l’égide de la commission des affaires culturelles et l’éducation de l’Assemblée nationale, d’une mission d’information sur la formation initiale et les modalités de recrutement des enseignant-e-s ne peuvent valablement être considérés indépendamment des nombreuses critiques, propositions et actions qui ont été menées depuis trois ans contre les conditions de la réforme dite de la masterisation.

Constituée le 29 mars dernier, avec pour ambition de « faire le point sur la mise en application de [cette] réforme et [d’]entamer une réflexion sur l’amélioration des modalités de formation initiale et de recrutement des enseignants des premier et second degrés » (296), cette mission a dans un premier temps mené des travaux importants qu’il convient de saluer, compte tenu du nombre des auditions et tables rondes réalisées (37 soit 86 personnes entendues) dans les délais qu’elle s’était fixée (3 mois). Nous pouvons également souligner le climat apaisé, dans l’ensemble, et plutôt constructif, du moins en apparence, dans lequel ces rencontres se sont déroulées, d’autant qu’il a été fait assez bon accueil à l’époque à nos propositions (297) d’auditions complémentaires.

Nous nous étions toutefois interrogés sur la nécessité, manifestement encouragée dans l’actuelle législature, d’avoir ainsi mené tambour battant ces travaux destinés à assurer « l’information de l’Assemblée pour lui permettre d’exercer son contrôle sur la politique du Gouvernement » (298), alors que les député-e-s auraient souvent bien plus intérêt à prendre le temps du recul et de l’analyse et que le sujet abordé constituait un tel enjeu d’avenir.

Preuve que la précipitation et les contraintes de l’agenda politique l’auront sans doute encore une fois emporté sur la réflexion, le rapport présenté à l’issue de ces travaux était rejeté le 6 juillet 2011, dans un mouvement tout à fait exceptionnel dans l’histoire de l’Assemblée nationale, par une majorité de membres de la commission des affaires culturelles et de l’éducation qui ont apparemment jugé ses propositions inadaptées aux défis qui se posent pour le recrutement et la formation de nos enseignant-e-s.

Trois mois plus tard, semblant refuser cette sanction démocratique, le président-rapporteur décidait de convoquer à nouveau la mission pour mener des auditions complémentaires, en fait pour partie des personnalités déjà entendues par ses membres, ce qui motivait la décision des député-e-s communistes, républicains, du Parti de gauche de ne plus participer aux travaux (299).

De fait, le nouveau rapport présenté par la mission n’a visiblement été modifié qu’à la marge, ce qui maintient toute leur pertinence aux remarques que nous avions d’ores et déjà apportées.

***

Au terme des auditions de notre mission, seulement deux motifs de consensus se sont fait jour.

Il est d’abord pris acte que la réforme dite de la masterisation, annoncée le 2 juin 2008 par le président de la République dans une « improvisation » (300)manifeste, est un échec confirmé par plusieurs rapports officiels (301)mais aussi par « la vivacité et la quasi-unanimité des critiques entendues par la mission » (302).

On notera avec intérêt que le rapport reconnaît qu’un des facteurs explicatifs de cet échec « est dû au respect de la règle du non renouvellement d’un poste de fonctionnaire sur deux qui a conduit le ministre de l’éducation de l’époque, M. Xavier Darcos, à faire le choix, pour le budget 2010, de supprimer les postes d’enseignants stagiaires effectuant leur année de formation en institut universitaire de formation des maîtres » (303), ce que les député-e-s communistes, républicains, citoyens, du Parti de gauche n’avaient pas manqué de dénoncer dès le départ, tout comme ils avaient fortement critiqué l’inadmissible affectation directe des enseignant-e-s stagiaires en académie le 1er septembre 2010, telle que décrite par le rapport. « Ils ont donc été nommés en poste sans avoir effectué les stages d’observation, de pratique accompagnée et en responsabilité proposés au cours des deux années d’études conduisant à ces diplômes » (304)tout en « n’ayant pas été spécifiquement formés au cours de leurs études »  (305). Ces aberrations vont donc non seulement peser sur toute une génération d’élèves mais ont aussi conduit à des situations de « grande souffrance » (306)dont 165 témoignages ont notamment été consignés dans un Livre Noir remis par le collectif Stagiaire Impossible à la mission. En allègue également « le nombre total de démissions intervenues dans le second degré, nettement plus élevé que celui constaté en 2009-2010 » (307).

Le second consensus réside dans le fait que s’impose effectivement une nécessaire « réforme de la réforme » (308)dont le rapport liste utilement les problèmes qu’elle pose et « qui ont trait à [sa] traduction budgétaire, à la mise en place d’une offre de formation insatisfaisante, à l’accès des étudiants d’origine modeste au master, à la déconnection du diplôme et du concours, à la désorganisation relative de l’année de stage des professeurs recrutés et à l’affaiblissement du vivier des candidats » (309).

Mais derrière ce constat partagé, c’est un immense gouffre qui sépare ceux qui préconisent une nouvelle ambition pour la formation des enseignant-e-s, et même au-delà pour l’éducation, et les autres qui semblent avoir pour seul horizon le parachèvement de l’entreprise libérale d’affaiblissement de l’école publique qui a pris un tournant décisif avec l’arrivée à la présidence de la République de Nicolas Sarkozy.

***

Le président-rapporteur de cette mission propose ainsi notamment de :

– « Mettre en place un master de l’École du socle commun » (310)et « inclure dans la licence des modules relatifs au socle commun de connaissances et de compétences » (311) : nous réfutons cette organisation nationale de l’école du socle commun, concept issu de la loi Fillon de 2005 sur l’École, qui se réfère à un « minimum » à acquérir alors nous reconnaissons « à chaque enfant les capacités d’acquérir un haut niveau de qualifications dès lors que la Nation s’en fixe l’ambition et que l’État s’en donne les moyens » (312).

– « Fixer le nombre de places en première année de master […] en fonction du nombre de postes ouverts au concours » (313) : alors que les difficultés ont été soulignées pour l’accès au master, cette proposition introduit l’idée d’une sélection supplémentaire qui n’est pas acceptable.

– « Organiser des épreuves d’admissibilité, à caractère académique, en fin de licence et des épreuves d’admission, à caractère professionnel en fin de master » (314) : cette proposition enferme a priori les étudiants dans un cursus duquel ils ne pourront plus sortir et entretient la fracture, pourtant décriée, entre formation académique et formation professionnelle.

– « Des enseignants mieux rémunérés » (315) ne peut se concevoir dans les seules limites auto-satisfaites présentées dans le rapport qui se félicite que « le Gouvernement a ainsi tenu les engagements qu’il avait pris en matière de revalorisation des débuts de carrière ». En effet, cela « n’empêche pas les salaires de stagner après quinze ans d’exercice, très en dessous de la moyenne de l’OCDE, et par exemple très loin de ceux versés à leurs homologues anglais, allemands ou portugais » (316).

– « Créer une haute autorité en charge de la définition de références pédagogiques opposables » (317)inquiète quant au risque de limiter la liberté pédagogique.

– Concevoir l’agrégation « comme un concours de promotion professionnelle, dans le cadre des concours internes » (318), c’est-à-dire supprimer le concours externe de l’agrégation, « remplacer le concours par le master d’ici dix à quinze ans » (319),en confiant à des jurys le soin « d’établir, sur la base d’épreuves, d’entretiens, ou de tests, des listes d’aptitude dans lesquelles pourraient puiser les académies ou les établissements » (320) et en permettant donc le recrutement de personnels non formés par « la validation des acquis de l’expérience » (321) : ce type de propositions est irrecevable car il « remet en cause le statut de la fonction publique et l’égalité de traitement des candidats sur tout le territoire » (322). Même le précédent ministre de l’Éducation nationale fervent défenseur de la masterisation avait défendu le maintien des concours en ces termes : « en dehors du prestige et des vertus de l’égalité républicaine qui s’attache aux concours, je ne vois pas comment une organisation qui recrute chaque année près de 15 000 personnes pourrait procéder sans avoir recours à un système aussi juste, efficace et transparent que celui des concours tels que nous les connaissons. Ceux qui prétendent l’inverse tentent de semer volontairement la confusion » (323).

***

La révélation de ces propositions, qui continuent de motiver la position résolument défavorable des député-e-s communistes, républicains, citoyens, du Parti de gauche à l’égard de ce rapport, n’a pas manqué de provoquer à l’époque un tollé (324)chez tous les partisans de l’école de la République, l’école de l’égalité de tou-te-s, l’école publique gratuite, laïque et obligatoire qui fait la fierté de la France depuis l’adoption des lois Ferry en 1881-1882.

Comment juger, par ailleurs, l’information selon laquelle ce rapport parlementaire aurait en fait été « commandé par Luc Chatel à la demande de Nicolas Sarkozy » (325) ? Au-delà de ce qui constituerait une scandaleuse, et sans doute invraisemblable, confusion des pouvoirs, ne faut-il pas tout de même déceler, dans cet épisode, une façon de détourner les moyens mis à disposition des député-e-s pour rédiger un document qui reste parfaitement idéologique sur un thème que la majorité souhaite visiblement porter dans le cadre de la prochaine campagne présidentielle ?

Un grand nombre de personnes auditionnées ont ainsi fait part de leur sentiment de gâchis et la méfiance du monde éducatif, déjà grande à l’égard de la majorité, est renforcée par l’impression que le premier rapport avait vocation à n’être discrètement adopté qu’une fois l’année scolaire terminée. C’était bien là le choix d’une majorité qui semble vouloir éviter le débat à tout prix tout en se ménageant la possibilité de donner le poids de l’expertise à des décisions futures.

Mais pour preuve de son décalage avec la réalité, voici comme l’UMP a évoqué la réforme de la masterisation, le 8 novembre 2011, lors de sa convention sur l’éducation : « Pour les enseignants, la réforme de la formation et du recrutement des enseignants est entrée pleinement en application à la rentrée 2011. Les professeurs stagiaires ont ainsi bénéficié d’une formation préalable à l’université. Pendant leur année de stage, ils sont accompagnés par des professeurs tuteurs chevronnés et complètent leur formation didactique et pédagogique. À l’issue de leur année de stage, 87% des professeurs stagiaires de la 1ère promotion issue de la réforme, dressent un bilan positif de leur première année d’enseignement » (326).

La sanction aura pourtant été grande, le 28 novembre 2011, suite au recours déposé par le SNES et d’autres organisations, lorsque le Conseil d’État a annulé en partie l’arrêté du 12 mai 2010 fixant les compétences à acquérir par les enseignants et CPE stagiaires, ce qui conduit à faire revivre l’arrêté du 19 décembre 2006 fixant en particulier le temps de service en responsabilité des stagiaires à 8 heures par semaine et imposant une formation dans le cadre des IUFM. La Haute Juridiction a en outre annulé les modalités d’évaluation et de titularisation des professeurs agrégés, telles qu’elles apparaissaient dans un second arrêté du 12 mai 2010, ce qui impose une inévitable prise de décision du ministère pour que les conditions de service et de formation des stagiaires puisse revenir dès à présent à la situation antérieure.

***

Dans une perspective de réforme plus profonde, les pistes qui suivent reviennent à tous ces enseignant-e-s, ces parents d’élèves, ces formateurs et ces chercheur-e-s qui ont été auditionnés et dont les député-e-s communistes, républicains, citoyens, du Parti de gauche ont souhaité retranscrire ici, au moins en partie, la réflexion.

Espérant porter leur voix d’une manière objective, ils ont sélectionné ces propositions qui rejoignent, à leur sens, ce qui pourrait être à la base d’un projet porteur d’égalité, d’émancipation et de progrès pour les jeunes de notre pays grâce à tous ceux et toutes celles qui les accompagnent avec la conviction que leurs pratiques éducatives ont un impact structurant sur leur développement et, partant, sur la construction voire la transformation de la société dans son ensemble :

– organiser un pré-recrutement visant à garantir la démocratisation dans l’accès au métier d’enseignant-e, en avançant en première année de master les épreuves d’admissibilité, aujourd’hui organisées en début de master 2 ;

– conserver des concours de haut-niveau disciplinaire qui garantissent que la profession d’enseignant-e relève de la fonction publique d’État ;

– créer des structures dédiées aux métiers de l’enseignement dans les universités ;

– introduire la qualification par un master pour les lauréats des concours ;

– intégrer à la formation les certifications diverses actuellement demandées en marge du concours (en langues, en informatique, en sauvetage et premiers secours...) ;

– organiser une véritable formation « alternée » avec des aller-retour entre l’université et des stages en pratique accompagnée et en responsabilité ;

– former les enseignant-e-s à la recherche et à l’historicisation de la construction des savoirs ;

– introduire un cadrage national des diplômes préparant actuellement au métier d’enseignant-e sous la forme d’un cahier des charges arrêté par le ministère de l’Éducation nationale, avec des masters disciplinaires didactiques et professionnels ;

– développer et maintenir les maîtres-formateurs dans le 1er degré et instituer un corps de formateurs en donnant un statut aux maîtres de stage dans le 2nd degré ;

– maintenir une formation continuée pour les stagiaires ;

– relancer des programmes de recherche pour évaluer les effets des pratiques et des formations.

CONTRIBUTION DE M. DANIEL SPAGNOU (UMP)

M. le député Daniel Spagnou, membre de la commission des affaires culturelles, est favorable à la publication du rapport d'information sur la formation initiale et le recrutement des enseignants, remis par M. le député Jacques Grosperrin.

En effet, M. Spagnou a voté la publication du rapport, car les propositions 5 (« Supprimer le concours externe de l'agrégation et limiter le champ d'intervention des agrégés aux niveaux "bac – et + 3'' ») et 20 (« À terme, remplacer le concours par le master et confier aux autorités académiques ou aux établissements le soin de recruter, sur la base d'un entretien professionnel, les enseignants ») ne sont plus dans le document remis le 7 décembre.

M. Daniel Spagnou reste farouchement opposé à la suppression de l’agrégation externe, d’abord parce que l’acceptation de la masterisation dans l’opinion publique est trop récente pour remodifier de manière si profonde le système de recrutement, mais également parce que l’agrégation représente encore un symbole particulièrement fort de réussite d’un concours républicain.

Au-delà, c’est un point pratique et pédagogique : cela conduirait comme le soulignait M. Jean-Yves Mérindol, directeur de l’Ėcole normale supérieure de Cachan, dans le cas où les étudiants passeraient directement du master à la thèse, à leur retirer « une vision synthétique d’un large champ disciplinaire, via la préparation à l’agrégation ».

CONTRIBUTION DE MME MURIEL MARLAND-MILITELLO (UMP)

Je suis soulagée que ce rapport d’information ait abandonné la préconisation, un temps envisagée, de supprimer les concours de recrutement des enseignants, ce qui aurait porté en germe un dangereux affaiblissement de notre système éducatif.

La mastérisation est une excellente mesure mais elle ne doit pas aboutir à la suppression des concours qui constituent l'un des socles de notre modèle républicain. En effet, s’il est bien deux valeurs cardinales inhérentes aux concours, ce sont l'égalité et le mérite.

Le concours permet à notre pays de développer des voies d’excellence. Que ce soit pour le recrutement dans les écoles d’ingénieurs, des médecins ou des fonctionnaires, les concours sont l’unique moyen de sélectionner sur des bases liées au mérite.

Réformer les concours pour instaurer davantage d’épreuves orientées vers les métiers me semble une évolution souhaitable mais la suppression des concours serait une hérésie qui ouvrirait la porte à l'arbitraire des choix.

Dans cette contribution, je veux aussi exprimer mon souhait profond de voir davantage développée la formation artistique et culturelle des enseignants.

L’enjeu est double : une telle formation donnerait une ouverture d’esprit supplémentaire aux professeurs mais elle serait également très utile pour préparer les enseignants à délivrer les enseignements transversaux obligatoires en histoire des arts, mis en place de l’école au lycée depuis 2008 par notre majorité. Une telle formation serait également à même de susciter plus de volontariat au sein du corps enseignant pour organiser les activités artistiques et culturelles proposées dans le cadre de l'accompagnement éducatif, en particulier dans les ateliers artistiques.

Outre les actions de formation continue proposées dans le plan national de formation, je suggère deux pistes qui, quant à elles, concernent la formation initiale :

– instaurer une unité d'enseignement obligatoire en art et culture dans tous les masters « Métiers de l'enseignement et de la formation » ;

– mettre en place un prérequis supplémentaire qui attesterait d’un niveau minimal de formation artistique et culturelle qui viendrait compléter les deux prérequis exigés des candidats, à savoir la certification de compétences en langues de l’enseignement supérieur de deuxième degré (CLES 2) et la certification en informatique et Internet (C2i2E).

L’école doit plus que jamais être le lieu de la transmission des savoirs mais aussi de nos valeurs républicaines et de la formation de l’esprit critique, le lieu de l’épanouissement citoyen et culturel. Le maintien des concours de recrutement et la formation artistique et culturelle des enseignants sont deux clés majeures de l’école du XXIème siècle.

ANNEXE 1

COMPOSITION DE LA MISSION D’INFORMATION

(15 membres)

——

 

Groupe politique

M. Jacques Grosperrin, président-rapporteur

UMP

Mme Martine Faure, vice-présidente

SRC

M. Marc Bernier

UMP

M. Xavier Breton

UMP

Mme Marianne Dubois (jusqu’au 1er juillet 2011)

UMP

Mme Claude Greff (jusqu’au 29 juin 2011)

UMP

M. Dominique Le Mèner

UMP

M. Alain Marc

UMP

M. Frédéric Reiss

UMP

Mme Marie-Hélène Thoraval

UMP

M. Pascal Deguilhem

SRC

Mme Marietta Karamanli (jusqu’au 5 mai 2011)

SRC

Mme Monique Boulestin (à partir du 25 mai 2011)

SRC

M. Yves Durand

SRC

Mme Marie-Hélène Amiable

GDR

Non désigné

NC

Groupe UMP : groupe de l’Union pour un mouvement populaire

Groupe SRC : groupe socialiste, citoyen et divers gauche

Groupe GDR : groupe de la Gauche démocrate et républicaine

Groupe NC : groupe du Nouveau centre

ANNEXE 2

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA MISSION

(par ordre chronologique)

Ø Syndicat général de l’Éducation nationale CFDT (SGEN-CFDT) – M. Thierry Cadart, secrétaire général

Ø Syndicat national de l’éducation physique de l’enseignement public-FSU (SNEP-FSU) – M. Serge Chabrol, secrétaire général, et Mme Claire Pontais, secrétaire nationale

Ø Confédération syndicale de l’éducation nationale

• Syndical national des écoles (SNE) – M. Philippe Charbonnel, secrétaire général

• Syndicat national des lycées et collèges (SNALC) – Mme Béatrice Barennes, membre du bureau national

• Autonome Sup – M. Michel Gay, secrétaire général

Ø Fédération autonome de l’éducation nationale

• Syndicat national des collèges et des lycées (SNCL-FAEN) –  Mme Lydia Popov, secrétaire nationale, et Mlle Stéphanie Deloy, responsable du secteur formation

• Syndicat national des écoles publiques (SNEP-FAEN) – Mlle Céline Vivier, co-secrétaire générale

Ø M.  Sylvain Grandserre, professeur des écoles, auteur de la Lettre ouverte au ministre de l’Éducation nationale (2010) 

Ø Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) – M. Éric Charbonnier, analyste à la division des indicateurs de la direction de l’éducation

Ø McKinsey & Company (France) – M. Vincent Champain, directeur de projet, et Mme Aurélie Barnay, consultante

Ø Syndicat national des personnels de direction de l’éducation nationale (SNPDEN-UNSA) – Mme Catherine Petitot, secrétaire générale adjointe

Ø Syndicat national unitaire des instituteurs, des professeurs des écoles et PEGC (SNUipp- FSU) – M. Sébastien Sihr, secrétaire général, Mme Marianne Baby, secrétaire générale adjointe, et Mme Judith Fouillard, secrétaire générale adjointe

Ø Syndicat national des enseignements du second degré (SNES-FSU) – M. Daniel Robin, co-secrétaire général, et M. Emmanuel Mercier, secrétaire national en charge de la formation des maîtres

Ø Syndicat des enseignants de l’Union nationale des syndicats autonomes (SE-UNSA) – M. Christian Chevalier, secrétaire général, et M. Joël Péhau, secrétaire national en charge du dossier formation

Ø M. Patrick Hetzel, directeur général de l’enseignement supérieur au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche

Ø Table ronde de représentants de l’enseignement privé réunissant :

• Formation et enseignement privé CFDT (FEP-CFDT) – M. René Gardan, secrétaire national

• Syndicat professionnel de l’enseignement catholique (SPELC) – M. Luc Viehé, secrétaire général

• Union nationale de l’enseignement technique privé (UNETP) – M. Alexis Bordet, secrétaire général, et M. Patrice Hauchard, directeur

• Secrétariat général de l’enseignement catholique – M. Yann Diraison, délégué général aux ressources humaines

Ø Syndicat national des directeurs, instituteurs et professeurs des écoles de l’enseignement public (SNUDI-FO) M. Norbert Trichard, secrétaire général

Ø  Syndicat national Force Ouvrière des lycées et collèges (SNFOLC) – M. Jacques Paris, secrétaire général

Ø Société des agrégés de l’Université – M. Jean-Michel Léost, président, et M. Stéphane Cardini, secrétaire général

Ø Syndicat national des personnels de la recherche et de l’enseignement supérieur (SNPREES-FO) – M. Bernard Rety, secrétaire général

Ø  Syndicat national de l’enseignement supérieur (SNESUP)M. Stéphane Tassel, secrétaire général, et M. Marc Champesne, responsable du secteur formation supérieur

Ø I. D. Indépendance et direction – M. Patrick Fournié, secrétaire national, et M. Bruno Hannecart, secrétaire général adjoint

Ø Syndicat CFTC de l’éducation nationale, de la recherche et des affaires culturelles (SCENRAC) – Mme Pascale Massicot, secrétaire des enseignants, et M. Alain Rei, membre du conseil

Ø Fédération de l’éducation, de la recherche et de la culture CGT (FERC-CGT) – M. Daniel Van de Vyvere, membre du bureau

Ø  Union nationale des syndicats de l’éducation nationale CGT (UNSEN EDUC’ACTION-CGT) – M. Patrick Désiré, co-secrétaire général, et M. Philippe Péchoux, membre du bureau Éducation

Ø M. Christian Forestier, administrateur général du Conservatoire national des arts et métiers, ancien recteur

Ø M. Michel Zorman, médecin de santé publique, responsable du programme P.A.R.L.E.R. (Parler Apprendre Réfléchir Lire Ensemble pour Réussir)

Ø M. Yves Jean, président de la Conférence des doyens et directeurs d’unités de formation et de recherche en lettres, langues, arts et sciences humaines et sociales

M Alain Trouillet, membre, ancien président de la Conférence des doyens et directeurs d’unités de formation et de recherche scientifiques

Ø Syndicat national de l’enseignement technique, action, autonome (SNETAA) – M. Christian Lage, secrétaire général

Ø Direction générale de l’enseignement scolaire du ministère de l’éducation nationale –M. Jean-Michel Blanquer, directeur général, et M. Xavier Turion, chef du service de l’instruction publique et des ressources pédagogiques

Ø M. Claude Thélot, conseiller maître honoraire à la Cour des comptes, président de la Commission du débat national sur l’avenir de l’école (2003-2004)

Ø Table ronde avec les associations de parents d’élèves réunissant :

• Union nationale des associations autonomes de parents d’élèves (UNAAPE) – Mme Béatrice Chesnel, présidente, et Mme Sophie Fontaine, chargée de mission

• Fédération des conseils de parents d’élèves des écoles publiques (FCPE) – M. Jean-Jacques Hazan, président

• Association des parents d’élèves de l’enseignement libre (APEL) – Mme Béatrice Barraud, présidente, et M. Christophe Abraham, chargé des relations extérieures

• Fédération des parents d’élèves de l’enseignement public (PEEP) – Mme Claudine Caux, présidente

Ø Inspection générale de l’éducation nationale – M. Érick Roser, doyen, et Mme Marie Mégard, inspectrice générale

Ø  Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche – Thierry Bossard, chef du service, et M. Jean-Pierre Hédoin, inspecteur général

Ø Conférence des directeurs d’IUFM (CDIUFM) – M. Gilles Baillat, président de l’IUFM de Champagne Ardenne, président, M. Michel Heichette, directeur de l’IUFM des Pays de la Loire, et M. Pierre Statius, directeur de l’IUFM de Franche-Comté, vice-présidents

Ø Association internationale pour la recherche en didactique du français (AIRDF) – M. Bertrand Daunay, président

Ø  Association pour la recherche en didactique des mathématiques (AIRDM) – M. Yves Matheron, président

Ø M. Éric Martin, recteur de l’Académie Besançon

Ø Collectif Stagiaire Impossible – M. Thibaut Grenier, Mlle Julie Marquet, Mlle Lise Teurlay et M. Pascal Vaysse

Ø M. Jean-Michel Jolion, délégué général du pôle de recherche et d’enseignement supérieur de Lyon, président du comité de suivi du master

Ø Mme Josette Théophile, secrétaire générale adjointe et directrice générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale, et Mme Mireille Emaer, sous-directrice des études de gestion prévisionnelle et statutaires à la direction générale des ressources humaines

Ø Table ronde réunissant les syndicats de personnels d’inspection :

• Syndicat national des personnels d’inspection-FSU (SNPI-FSU) – M. Michel Gonnet, secrétaire général, et Mme Évelyne Collin, conseiller du recteur de l’académie de Versailles

• Syndicat de l’inspection de l’éducation nationale (SIEN – UNSA éducation) – M. Patrick Roumagnac, secrétaire général

• Syndicat national des inspecteurs d’académie-inspecteurs pédagogiques régionaux (SNIA-IPR) – Mme Laurence Cousin-Picheau, membre du bureau national

Ø M. Alain Boissinot, recteur de l’académie de Versailles

Ø Table ronde réunissant les organisations étudiantes :

• Union nationale des étudiants de France (UNEF) – Mlle Maria Cotora, responsable des questions universitaires

• Union nationale interuniversitaire (UNI) – M. Rémi Martial, président du Mouvement des étudiants

• Promotion et défense des étudiants (PDE) – M. Mathieu Bach, délégué général

• Confédération étudiante (CÉ) – Mme Enora Hamon, secrétaire générale

• Fédération des associations générales étudiantes (FAGE) – Mme Marie-Laure Ripoll, vice-présidente en charge des questions d’enseignement supérieur

Ø M. Daniel Filâtre, président de l’université Toulouse II – Le Mirail, et Mme Anne Fraïsse, présidente de l’université Paul Valéry – Montpellier III, vice-présidente de la Conférence des présidents d’université (CPU)

Ø Mme Valérie Pécresse, ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche

Ø M. Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

Ø M. Alain Boissinot, recteur de l’Académie de Versailles

Ø M. Bruno Racine, président du Haut Conseil de l’éducation

Ø M. Marcel Pochard, conseiller d’État, président de la Commission sur la condition enseignante (2007-2008)

Ø M. Jean-Michel Blanquer, directeur général de l’enseignement scolaire au ministère de l’éducation nationale, et M. Xavier Turion, chef du service de l’instruction publique et de l’action pédagogique

Ø M.  Philippe Claus, Doyen du groupe enseignement primaire de l’lnspection générale de l’éducation nationale

1 () Voir composition en annexe.

2 () Décrets du 28 juillet 2009. Les conditions de titre ont été également modifiées pour le corps des conseillers principaux d’éducation et celui des conseillers d’orientation-psychologues.

3 () Audition du 25 mai 2011.

4 () « Rapport d’étape sur la mastérisation initiale de la formation des enseignants », remis le 8 avril 2011.

5 () « Refuser l’oppression quotidienne : la prévention du harcèlement à l’École », rapport remis le 12 avril 2011.

6 () « Les inégalités à l’école », avis adopté le 13 septembre 2011 sur le rapport présenté par M. Xavier Nau.

7 () « Les clés du succès des systèmes scolaires les plus performants », Michael Barber et Mona Mourshed, septembre 2007.

8 () Audition du 11 mai 2011.

9 () Rapport au ministre de l’éducation nationale de la commission sur la condition enseignante présidée par M. Marcel Pochard, février 2008.

10 () Audition du 12 mai 2011.

11 () Audition du 7 avril 2011.

12 () Audition du 13 avril 2011.

13 () Audition du 26 mai 2011.

14 () Audition du 26 mai 2011.

15 () Audition du 13 avril 2011.

16 () Audition du 25 octobre 2011.

17 () Recommandations pour la formation des maîtres, 31 octobre 2006.

18 () Arrêté du 12 décembre 2006 portant cahier des charges de la formation des maîtres en institut universitaire de formation des maîtres, Bulletin officiel de l’éducation nationale n° 1 du 4 janvier 2007. Pour être tout à fait exact, la première tentative, qui n’est guère ancienne, d’explicitation des attentes de l’institution scolaire en ce domaine est une circulaire du 23 mai 1997 définissant la « Mission du professeur exerçant en collège, en lycée d’enseignement général et technologique ou en lycée professionnel ».

19 () Audition du 13 avril 2011.

20 () Conclusions du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres réunis au sein du Conseil du 15 novembre 2007 sur l’amélioration de la qualité des études et de la formation des enseignants.

21 () « L’état de l’École », ministère de l’éducation nationale, novembre 2010.

22 () Treizième sur quarante-trois pays en 2000 et vingt-deuxième sur soixante-cinq pays en 2009. OCDE, Note de présentation des résultats PISA 2009, décembre 2010.

23 () Audition du 10 mai 2011.

24 () « Regards sur la formation des maîtres en France », Emmanuel Fraisse, Revue internationale d’éducation - Sèvres, n° 55, décembre 2010.

25 () Émanant d’horizons très divers : parlementaire (rapport d’information n° 23 de la Commission des affaires culturelles du Sénat sur la mise en place et le fonctionnement des IUFM présenté par M. André Gouteryon, 1992), universitaires (Kaspi - 1993, Brihaut et Cornu – 2000, Bornancin - 2001, Caspar – 2002) et de l’inspection générale (Septour – 2003), ainsi que du Comité national d’évaluation des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel (2001).

26 () Audition du 7 avril 2011.

27 () Audition du 12 mai 2011.

28 () En particulier, les instituts et écoles « faisant partie des universités » sont « administrés par un conseil élu et dirigés par un directeur ».

29 () « L’intégration des instituts universitaires de formation des maîtres aux universités », rapport aux ministres de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur et de la recherche, 31 octobre 2007.

30 () Audition du 10 mai 2011.

31 () Audition du 10 mai 2011.

32 () Audition du 13 avril 2011.

33 () Audition du 12 mai 2011.

34 () Audition du 26 mai 2011.

35 () « De l’IUFM à la classe », note d’information n° 01.56, ministère de l’éducation nationale, décembre 2001.

36 () « Les agrégés stagiaires à l’IUFM, enquête auprès de nos adhérents agrégés stagiaires », M. Jean-Michel Léost et Mme Blanche Lochmann, 2007.

37 () Point d’étape sur les questionnaires retournés à la Société des agrégés de l’université à la date du 7 janvier 2011.

38 () Audition du 10 mai 2011.

39 () Audition du 28 avril 2011.

40 () Les épreuves d’admissibilité étaient fixées en mars et avril 2010.

41 () Audition du 27 avril 2011.

42 () Audition du 11 mai 2011.

43 () Cf. le dossier « Former des enseignants » de la Revue internationale d’éducation – Sèvres, n° 55, décembre 2010.

44 () Audition du 26 mai 2011.

45 () La didactique est l’étude de la théorie et des méthodes d’enseignement, en particulier des questions soulevées par l’acquisition effective des connaissances par les élèves dans les différentes disciplines scolaires.

46 () Audition du 12 mai 2011.

47 () Table ronde avec l’enseignement privé du 27 avril 2011.

48 () Audition du 9 juin 2011. Le gain annuel est de 1 896 euros nets pour les professeurs des écoles et les professeurs certifiés et de 3 120 euros nets pour les professeurs agrégés.

49 () Audition du 28 avril 2011. Le 28 novembre 2011, le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, M. Luc Chatel, a annoncé que, dans le cadre des mesures de revalorisation pour l’année 2012, tout jeune enseignant à plein temps percevrait, à compter du 1er février prochain, un salaire d’au moins 2 000 euros bruts.

50 () Audition du 28 avril 2011.

51 () Audition du 8 juin 2011.

52 () Audition du 26 mai 2011.

53 () Audition du 27 avril 2011.

54 () Deux rapports sur la réforme de la formation et du recrutement des enseignants ont donc été remis, en juillet 2009, aux ministres en charge du dossier, l’un par M. William Marois et plusieurs responsables administratifs du ministère de l’éducation nationale, l’autre par M. Daniel Filâtre et plusieurs universitaires.

55 () École nationale de formation agronomique de Toulouse, École normale supérieure de Cachan, Institut national des langues et civilisations orientales et Institut national polytechnique de Lorraine.

56 () Le co-habilitation permet à des établissements partenaires de délivrer un seul et même diplôme.

57 () Audition du 27 avril 2011. Les masters se répartissent en domaines (Arts et lettres, Droit, économie et gestion, Sciences humaines et sociales, Sciences, technologies et santé), structurés en mentions (« Philosophie » par exemple), subdivisées en spécialités.

58 () Audition du 28 avril 2011.

59 () Audition du 27 avril 2011.

60 () Audition du 25 mai 2011.

61 () Audition du 27 avril 2011.

62 () Arrêté du 12 mai 2010 relatif à la définition des compétences à acquérir par les professeurs, documentalistes et conseillers principaux d’éducation pour l’exercice de leur métier.

63 () Audition du 10 mai 2011.

64 () Table ronde avec les associations de parents d’élèves du 11 mai 2011.

65 () Audition du 28 avril 2011.

66 () Bulletin officiel du ministère de l’éducation nationale n° 29 du 22 juillet 2010.

67 () Données communiquées le 25 mai 2011.

68 () Audition du 11 mai 2011.

69 () Audition du 12 mai 2011.

70 () Audition du 13 avril 2011.

71 () Audition du 12 mai 2011.

72 () Respectivement auditions du 4 et du 12 mai 2011.

73 () Audition du 12 mai 2011.

74 () Audition du 14 avril 2011.

75 () Audition 27 avril 2011. En ce qui concerne la féminisation du métier, on compte aujourd’hui quatre femmes pour cinq enseignants (81,5 %) dans le premier degré et moins de trois sur cinq (57,6 %) dans le second degré (« Repères et références statistiques sur les enseignements, la formation et la recherche 2010 », ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur et de la recherche).

76 () Audition du 12 mai 2011.

77 () Audition du 9 juin 2011.

78 () « L’état de l’enseignement supérieur et de la recherche en France », ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, décembre 2010.

79 () Audition du 27 avril 2011.

80 () Audition du 10 mai 2011.

81 () Audition du 20 octobre 2011.

82 () Audition du 14 avril 2011.

83 () Audition du 27 avril 2011.

84 () Rapport d’étape précité sur la mastérisation de la formation initiale.

85 () Audition du 25 mai 2011.

86 () Audition du 5 mai 2011.

87 () Audition du 11 mai 2011.

88 () Audition du 10 mai 2011.

89 () Rapport d’étape précité sur la mastérisation de la formation initiale des enseignants.

90 () Audition du 12 mai 2011.

91 () Audition du 7 avril 2011.

92 () Arrêté du 28 décembre 2009.

93 () Audition du 25 mai 2011.

94 () Audition du 12 mai 2011.

95 () Rapport d’étape précité sur la mastérisation de la formation initiale des enseignants. Parmi les exemples de sujets « zéro » de cette épreuve fournis par le ministère de l’éducation nationale, citons celui du thème « handicap et éducation physique et sportive ».

96 () Audition du 5 mai 2011.

97 () Audition du 11 mai 2011.

98 () Rappelons que pour la session 2010, étaient autorisés à se présenter, non seulement les étudiants inscrits en deuxième année de master, mais aussi, à titre exceptionnel, les étudiants inscrits en première année de master à la rentrée 2009 et que, par dérogation, les lauréats des concours titulaires de la seule première année de master ont été recrutés comme fonctionnaires stagiaires à la rentrée 2010.

99 () Audition du 25 mai 2011.

100 () Audition du 28 avril 2011.

101 () Données communiquées le 25 mai 2011 par la direction générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale.

102 () Bulletin officiel du ministère de l’éducation nationale n° 13 du 1er avril 2010.

103 () Audition du 25 mai 2011.

104 () Audition du 14 avril 2011.

105 () Audition du 7 avril 2011.

106 () Bulletin officiel n° 20 du ministère de l’éducation nationale, 19 mai 2011.

107 () Données communiquées par la direction générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale.

108 () « Étude relative au dispositif d’accueil, d’accompagnement et de formation des enseignants stagiaires des premier et second degrés », direction générale des ressources humaines, novembre 2010.

109 () 8,9 jours de congés de maladie pour les stagiaires affectés en 2010, contre 8,6 pour les nouveaux titulaires affectés en 2009.

110 () Audition du 10 mai 2011.

111 () Audition du 24 mai 2011.

112 () Il a été remis au ministre de l’éducation nationale en avril dernier.

113 () Audition du 24 mai 2011.

114 () Audition du 10 mai 2011.

115 () Audition du 11 mai 2011.

116 () « Enquête professeur-e-s des écoles stagiaires, deuxième partie », enquête précitée (avril 2011).

117 () Audition du 25 mai 2011.

118 () Audition du 11 mai 2011.

119 () Audition du 10 mai 2011.

120 () Audition du 24 mai 2011.

121 () Audition du 11 mai 2011.

122 () Audition du 25 mai 2011.

123 () Données communiquées par la direction générale des ressources humaines.

124 () Conformément à leur statut, les professeurs des écoles n’effectuent pas d’heures supplémentaires.

125 () Audition du 25 mai 2011. Les « heures supplémentaires année » rémunèrent forfaitairement la part du service des enseignants excédant de manière permanente, sur l’ensemble de l’année scolaire, leur maximum hebdomadaire de service.

126 () Données communiquées par la direction générale des ressources humaines.

127 () Bulletin officiel du ministère de l’éducation nationale n° 18 du 5 mai 2011.

128 () Audition du 24 mai 2011.

129 () Bulletin officiel du ministère de l’éducation nationale n° 2 du 13 janvier 2011.

130 () Audition du 25 mai 2010.

131 () Données communiquées par la direction générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale le 25 mai 2011.

132 () Audition du 24 mai 2011.

133 () Audition du 10 mai 2011.

134 () Audition du 5 mai 2011.

135 () Audition du 10 mai 2011.

136 () Audition du 24 mai 2011.

137 () Audition du 25 mai 2011.

138 () « Chaque stagiaire bénéficiera d’un accompagnement et de périodes de formation organisées au cours de l’année scolaire. Le volume de formation et d’accompagnement dispensé sera équivalent à un tiers de l’obligation réglementaire de service (ORS) du corps auquel appartient le stagiaire ».

139 () Audition du 7 avril 2011.

140 () Enquête précitée du 5 avril 2011.

141 () Audition du 11 mai 2011.

142 () Audition du 27 avril 2011.

143 () Audition du 25 mai 2011.

144 () « Synthèse des notes des correspondants académiques de l’IGAENR relatives à la préparation de la rentrée scolaire 2010 », rapport n° 2010-095, juillet 2010.

145 () Audition du 11 mai 2011.

146 () Données communiquées le 25 mai 2011.

147 () Audition du 24 mai 2011.

148 () Audition du 7 avril 2011.

149 () Audition du 10 mai 2011.

150 () Audition du 26 mai 2011.

151 () Ils bénéficient par ailleurs d’une indemnité de 200 euros pour encadrer deux étudiants en stage d’observation ou de pratique accompagnée ou un étudiant stagiaire en responsabilité.

152 () Audition du 11 mai 2011.

153 () Données communiquées par la direction générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale le 25 mai 2011.

154 () Audition du 14 avril 2011.

155 () Audition du 11 mai 2011.

156 () Audition du 10 mai 2011.

157 () Audition du 14 avril 2011.

158 () Audition du 10 mai 2011.

159 () Audition du 8 juin 2011.

160 () Audition du 9 juin 2011.

161 () Audition du 10 mai 2011.

162 () Audition du 20 octobre 2011.

163 () Selon les premières « remontées » académiques, 12 084 candidats étaient présents à la session 2012 du concours externe du CAPES, soit 2,51 % de plus qu’à la session 2011.

164 () Audition du 5 mai 2011.

165 () Table ronde avec l’enseignement privé du 27 avril 2011.

166 () Avis n° 2859 présenté au nom de la Commission des affaires culturelles et de l’éducation sur le projet de loi de finances pour 2011, 14 octobre 2011.

167 () Vœux au monde de la connaissance et de la culture, 19 janvier 2011.

168 () Audition du 8 juin 2011.

169 () Cette estimation figure dans le Livre vert sur la condition enseignante (2008). On observera qu’en Espagne, selon le ministère en charge de l’éducation de ce pays, environ 200 000 nouveaux enseignants, ce qui représenterait 30 % des effectifs en place, devraient être recrutés dans les prochaines années pour faire face aux départs en retraite (El País, 19 juin 2011).

170 () Pour mesurer cette performance, l’étude s’est appuyée sur les résultats des classements du Programme international pour le suivi des élèves de l’OCDE, de l’évaluation Trends in International Mathematics and Science Study de l’Association internationale pour l’évaluation de l’efficacité dans le système scolaire, du National Assessment of Educational Progress des États-Unis et sur des évaluations locales qui ont été ensuite normalisées pour les comparer entre eux.

171 () Audition du 12 avril 2011.

172 () Audition du 13 avril 2011.

173 () Devenue « journée défense et citoyenneté » en 2010. En 2009, seulement 79,6 % des jeunes Français d’environ dix-sept ans sont des lecteurs efficaces. Par ailleurs, la proportion de jeunes éprouvant des difficultés de lecture s’établit à 10,6 % dont la moitié est quasi-analphabète.

174 () Audition du 5 mai 2011.

175 () « Finland: Slow and Steady Reform for Consistently High Results », in « Strong Performers and Successful Reformers in Education: Lessons from PISA for the United States », OCDE, 2010.

176 () « La machine école », Philippe Meirieu, Stéphanie Le Bars, 2001.

177 () « Rubalcaba propone un MIR para seleccionar a profesores y maestros », El País, 19 juin 2011.

178 () Audition du 9 juin 2011.

179 () Données communiquées par la direction générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale.

180 () Au total, 34 universités devraient expérimenter des masters en alternance au cours de la présente année scolaire (La lettre de l’éducation du Monde, n° 713, 26 septembre 2011).

181 () Audition du 9 juin 2011.

182 () Audition du 27 avril 2011.

183 () « Développer les formations en alternance dans le secteur public », rapport remis au Premier ministre le 13 octobre 2009.

184 () Audition du 9 juin 2011.

185 () Audition du 25 mai 2011.

186 () Audition du 7 avril 2011.

187 () « Principes et recommandations pour une réforme réussie de la formation des enseignants », rapport du groupe « inter-conférences universitaires » remis à la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche et au ministre de l’éducation nationale, 17 juillet 2009.

188 () Audition du 27 avril 2011.

189 () Table ronde avec l’enseignement privé du 27 avril 2011.

190 () « Principes et recommandations pour une réforme réussie de la formation des enseignants », rapport précité.

191 () « Pour la réussite de tous les élèves », rapport de la Commission du débat national sur l’avenir de l’école, 2004.

192 () Respectivement auditions du 7 et du 13 avril 2011.

193 () Audition du 28 avril 2011.

194 () « L’admission dans les formations du deuxième cycle est ouverte à tous les titulaires des diplômes sanctionnant les études de premier cycle » (article L. 612-6 du code de l’éducation).

195 () Données communiquées par la direction générale des ressources humaines du ministère de l’éducation nationale, 25 mai 2011.

196 () Audition du 10 mai 2011.

197 () Audition du 9 juin 2011.

198 () « Principes et recommandations pour une réforme réussie de la formation des enseignants », rapport précité.

199 () Audition du 10 mai 2011.

200 () Audition du 12 mai 2011.

201 () Respectivement auditions du 7 et du 14 avril 2011 et table ronde avec les associations d’étudiants du 26 mai 2011.

202 () Contribution remise à l’issue de la table ronde avec l’enseignement privé du 27 avril 2011.

203 () Audition du 7 avril 2011.

204 () Audition du 25 mai 2011.

205 () Audition du 10 mai 2011.

206 () Audition du 25 mai 2011.

207 () Audition du 13 avril 2001.

208 () Audition du 13 avril 2011.

209 () Audition du 25 mai 2011.

210 () Réponse fournie par la direction générale des ressources humaines le 25 mai 2011. L’exigence que le jury soit au complet pendant toutes les phases du concours pourrait se heurter à des difficultés imprévues, mais cette règle admet des exceptions en cas de motif légitime. La cour administrative d’appel de Bordeaux a ainsi validé un concours à la suite de l’absence d’un membre du jury victime d’un malaise cardiaque (arrêt du 17 février 2004, Min.éduc.nat. c/X).

211 () « Mastérisation de la formation initiale des enseignants. Enjeux et bilan », rapport remis au ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche le 10 octobre 2011.

212 () Audition du 26 mai 2011.

213 () Audition du 10 mai 2011.

214 () Table ronde avec l’enseignement privé du 27 avril 2011.

215 () « Principes et recommandations pour une réforme réussie de la formation des enseignants », rapport précité.

216 () Audition du 5 mai 2011.

217 () Audition du 14 avril 2011.

218 () « Principes et recommandations pour une réforme réussie de la formation des enseignants », rapport précité.

219 () Audition du 8 juin 2011.

220 () Audition du 12 mai 2011.

221 () Audition du 25 mai 2011.

222 () Audition du 12 mai 2011.

223 () « Principes et recommandations pour une réforme réussie de la formation des enseignants », rapport précité.

224 () Table ronde du 27 avril 2011.

225 () Rapport au ministre de l’éducation nationale précité.

226 () Audition du 26 mai 2011.

227 () Audition du 8 juin 2011.

228 () Audition du 25 mai 2011.

229 () « Mastérisation de la formation initiale des enseignants », rapport précité du 10 octobre 2011.

230 () Information parue au début du mois de novembre 2011 sur ce cite.

231 () Audition du 28 avril 2011.

232 () Audition du 20 octobre 2011.

233 () Table ronde avec l’enseignement privé du 27 avril 2011.

234 () Audition du 12 mai 2011.

235 () Audition du 28 avril 2010.

236 () Audition du 10 mai 2011.

237 () Audition du 10 mai 2011. Principalement fondé sur l’ancienneté, le barème affecte d’un certain nombre de points la situation d’un enseignant pour déterminer un ordre de priorité entre candidats, certifiés ou agrégés, à un même mouvement.

238 () « Principes et recommandations pour une réforme réussie de la formation des enseignants », rapport précité.

239 () Audition du 8 juin 2011.

240 () Aux termes de l’article 6, alinéa 2, de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d’État, les « fonctions qui, correspondant à un besoin permanent, impliquent un service à temps incomplet d’une durée n’excédant pas 70 % d’un service à temps complet, sont assurées par des agents contractuels ».

241 () Audition du 11 mai 2011.

242 () Audition du 10 mai 2011.

243 () « Le rôle crucial des enseignants : attirer, former et retenir des enseignants de qualité », OCDE, 2004.

244 () Contribution écrite adressée le 6 juin 2011.

245 () Audition du 5 mai 2011.

246 () Audition du 11 mai 2011.

247 () Audition du 9 juin 2011.

248 () Audition du 25 mai 2011.

249 () Audition du 10 mai 2011.

250 () Audition du 11 mai 2011.

251 () « Une formation centralisée dans un système universitaire décentralisé. Le cas des enseignants suédois », Per Klingbjer, Revue internationale d’éducation de Sèvres n° 5, décembre 2010.

252 () Audition du 28 avril 2010.

253 () Audition du 25 octobre 2011.

254 () Audition du 10 mai 2011.

255 () Table ronde avec l’enseignement privé du 27 avril 2011.

256 () Audition du 25 mai 2011.

257 () Audition du 28 avril 2011.

258 () Audition du 27 avril 2011.

259 () Rapport d’étape précité sur la mastérisation de la formation initiale des enseignants.

260 () Audition du 11 mai 2011.

261 () Audition du 4 mai 2011.

262 () Audition du 10 mai 2011.

263 () Table ronde avec les syndicats des corps d’inspection du 26 mai 2011.

264 () Extraits du rapport « Ribot » repris dans le Livre vert précité sur l’évolution du métier d’enseignant.

265 () Audition du 13 avril 2011.

266 () Audition du 27 avril 2011.

267 () Audition du 10 mai 2011.

268 () Audition du 12 mai 2011.

269 () Cf. l’arrêté précité du 12 mai 2010.

270 () Audition du 28 avril 2011.

271 () Bulletin officiel du ministère de l’éducation nationale n° 29 du 22 juillet 2010.

272 () Audition du 10 mai 2011.

273 () Audition du 27 avril 2011.

274 () Audition du 12 mai 2011.

275 () Audition du 14 avril 2011.

276 () Les références médicales opposables sont des critères scientifiques reconnus qui définissent les soins et les prescriptions médicalement inutiles, redondants, voire dangereux.

277 () Audition du 5 mai 2011.

278 () Audition du 12 mai 2011.

279 () Le barème affecte d’un certain nombre de points la situation d’un enseignant pour déterminer un ordre de priorité entre candidats à un même mouvement. Ainsi, chaque candidat bénéficie d’un nombre de points qui est fonction de son ancienneté, de son affectation actuelle et de sa situation personnelle et familiale.

280 () Audition du 11 mai 2011.

281 () Audition du 11 mai 2011.

282 () Audition du 24 mai 2011.

283 () Audition du 12 mai 2011.

284 () Audition du 9 juin 2011.

285 () Audition du 25 mai 2011.

286 () Audition du 12 mai 2011.

287 () « L’Éducation nationale face à l’objectif de la réussite de tous les élèves », rapport public thématique, mai 2010.

288 () Audition du 10 mai 2011.

289 () Audition du 14 avril 2011.

290 () « Un socle pour consolider le collège unique », rapport d’information n° 2446 présenté le 7 avril 2010 par votre rapporteur, et « Quels rythmes pour l’École ? », rapport d’information n° 3028 présenté le 8 décembre 2010 par MM. Xavier Breton et Yves Durand.

291 () « École 2012 : faire réussir tous les élèves », MM. François Dubet et Ismaël Ferhat, rapporteurs, projet 2012-contribution n° 14, 8 septembre 2011.

292 () Audition du 11 mai 2011.

293 () Audition du 20 octobre 2011.

294 () Audition du 25 mai 2011.

295 () Audition du 20 octobre 2011.

296 () Communiqué de la mission, 6 avril 2011

297 () Le Syndicat national de l'enseignement supérieur (SNESUP-FSU) ; les syndicats d'inspecteurs SIEN-UNSA et SNPI-FSU ; Claude Lelièvre, historien de l'éducation, professeur à l’université Paris Descartes ; Patrick Rayou, professeur en sciences de l'éducation à l'université Paris-VIII ; Bertrand Daunay, président de l'Association Internationale de Recherche en Didactique du Français (AIRDF) ; Yves Matheron, président de l'Association de Recherche en Didactique des Mathématiques ; le Collectif Stagiaire Impossible

298 () Règlement de l'Assemblée nationale, article 145, alinéa 1

299 () Courrier de Marie-Hélène Amiable à Michèle Tabarot, présidente de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, 19 octobre 2011

300 () Marcel Pochard, conseiller d'État, président de la commission sur la condition enseignante (2007-2008), audition du 11 mai 2011

301 () « Rapport d'étape sur la masterisation initiale de la formation des enseignants » remis le 8 avril 2011 par Jean-Michel Jolion à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche et « Refuser l'oppression quotidienne : la prévention du harcèlement à l'Ecole », remis le 12 avril 2011 par Eric Debarbieux, président de l'Observatoire international de la violence à l'école, au ministre de l'éducation nationale, notamment

302 () Cf. p. 8

303 () Cf. p. 21

304 () Cf. p. 43

305 () Cf. p. 60

306 () Cf. p. 48

307 () Cf. p. 47

308 () Cf. p. 71

309 ()Cf. p. 22

310 () Cf. p. 119 : Proposition n°10

311 () Cf. p. 119 : Proposition n°2

312 () Contribution de Brigitte Gonthier-Maurin, au Rapport d'information De la Pyramide aux réseaux : une nouvelle architecture pour l'école, Tome I, p. 135, déposé par Jean-Claude Carle au Sénat le 21/06/2011

313 () Cf. p. 119 : Proposition n°4

314 () Cf. p. 119 : Proposition n°3

315 () Cf. p. 25 et 26

316 () Marie-Hélène Amiable, Question au gouvernement à l'Assemblée nationale, Première séance du 1er juin 2011

317 () Cf. p. 120 : Proposition n°16

318 () Cf. p. 95

319 Cf. p. 117

320 () Cf. p. 118

321 () Cf. p. 120 : Proposition n°13

322 () Marie-Hélène Amiable, Des députés UMP proposent la fin des concours enseignants, Les Échos, 1er juillet 2011

323 () Concours d’enseignement : Xavier Darcos s’insurge contre les « scénarios délirants », http://education.blog.lemonde.fr, 23 avril 2009

324 () Recrutement des enseignants : l'éducation doit rester nationale !, Communiqué Unsa Éducation, 30 juin 2011 ; Supprimer les concours de recrutement ? L'Éducation doit rester un service public de l'État, Communiqué du SNES-FSU, 30 juin 2011 ; Non à la suppression des concours !, Communiqué de la société des agrégés de l'Université, 30 juin 2011 ; Mission Grosperrin : des propositions inacceptables..., Communiqué du SNESUP-FSU, 30 juin 2011 ; Il ne faut pas supprimer le concours d'enseignant, Gilles Baillat, président de la Conférence des directeurs d'IUFM, Acteurs publics, 1er juillet 2011 ; Le rapport Grosperrin. ou comment en finir avec l’éducation nationale, de l’école à l’université, Communiqué de Sauvons l’Université, 1er juillet 2011

325 () Enseignement : la fin du Capes ?, http://www.lefigaro.fr, 30 juin 2011

326 () Dossier Du savoir pour tous à la réussite de chacun, Convention UMP sur l'éducation, p. 5, 8 novembre 2011


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