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OFFICE PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION

DES CHOIX SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES

 

RAPPORT

sur

« L’évaluation et la prévention du risque du tsunami sur les côtes françaises en métropole et outre-mer »

par

M. Roland COURTEAU, sénateur

           
   

Déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale

par M. Claude BIRRAUX

Premier Vice-président de l'Office

Déposé sur le Bureau du Sénat

par M. Henri REVOL

Président de l'Office

Sommaire

Page

INTRODUCTION 4

I. QU’EST-CE QU’UN TSUNAMI ? 7

A. DE L’ALÉA TSUNAMI… 7

1. Un phénomène d’origine géologique 7

a) Les différentes sources 7

(1) Les séismes sous-marins 7

(2) Les glissements de terrain 9

(3) Les explosions volcaniques 11

b) La description du phénomène de tsunami 11

c) Des manifestations variables 12

2. Un phénomène inégalement réparti sur la terre 14

a) Une fréquence plus grande dans le Pacifique 15

b) Aucun bassin n’est à l’abri d’un tsunami 17

B. … AU RISQUE DE TSUNAMI 18

1. Les composantes du risque 18

a) L’aléa 18

b) Les enjeux 18

c) La vulnérabilité 19

2. La gestion du risque 20

a) Une meilleure connaissance de l’aléa 21

b) Le rôle des systèmes d’alerte opérationnels 23

II. UNE GESTION DU RISQUE DE TSUNAMI CONTRASTEE SELON LES BASSINS 27

A. UN RISQUE PRIS EN COMPTE DEPUIS PLUSIEURS DÉCENNIES DANS LE PACIFIQUE 27

1. L’existence d’un système d’alerte international… 27

a) L’historique 27

b) La situation actuelle 28

(1) Le rôle du centre pacifique d’alerte aux tsunamis (PTWC) 30

(2) Les actions du centre international d’information sur les tsunamis (CIIT) 35

2. … Qui s’appuie sur des systèmes nationaux performants 36

a) Le modèle des Etat-Unis 37

(1) L’existence de deux centres d’alerte 37

(2) Un plan national pour limiter les effets des tsunamis 38

(3) Une politique de prévention permanente 42

b) Le modèle japonais 43

(1) Un système particulièrement bien adapté aux tsunamis locaux 43

(2) Une bonne préparation de la population 47

(3) Des moyens considérables engagés dans la construction d’ouvrages d’art et dans l’amélioration du dispositif d’alerte 48

c) Le modèle français de Polynésie 50

(1) Le CEA au cœur du dispositif d’alerte en Polynésie 50

(2) Un dispositif d’alerte basé sur une connaissance approfondie de l’aléa 53

(3) Un type d’alerte adapté aux caractéristiques de la Polynésie française 57

B. UN RISQUE QUI A COMMENCÉ À ÊTRE PRIS EN COMPTE DANS LES AUTRES BASSINS APRÈS LE TSUNAMI DU 26 DÉCEMBRE 2004 59

1. Le « choc » de Sumatra 60

a) La prise de conscience de la vulnérabilité de tous les bassins 60

b) La mise en lumière des insuffisances du système de prévention du risque de tsunami 60

2. L’aspiration à un dispositif d’alerte et de prévention des tsunamis efficace et couvrant tous les bassins 61

a) La création de trois nouveaux groupes intergouvernementaux 61

b) Une forte augmentation des crédits de recherche concernant les tsunamis 67

3. Des résultats inégaux 71

a) L’océan Indien : une mobilisation internationale qui porte ses fruits 71

b) Les Caraïbes : de nombreux obstacles à la mise en place d’un système d’alerte efficace 75

c) L’Atlantique nord-est et la Méditerranée : l’attentisme des Etats 77

III. LA POSITION DE LA FRANCE : UN ATTENTISME INACCEPTABLE COMPTE TENU DE LA GRAVITÉ DES ENJEUX 81

A. UNE FORTE VULNÉRABILITÉ AUX TSUNAMIS QUI DEVRAIT CONDUIRE À UN ENGAGEMENT IMPORTANT DE LA FRANCE 82

1. Des enjeux de sécurité importants 82

a) Une exposition au risque particulièrement grande compte tenu de sa géographie 82

b) Des littoraux fortement peuplés 85

2. Des atouts non négligeables 85

a) Le précédent polynésien 85

b) Des organismes de référence en géosciences et en océanographie de qualité 86

3. Une forte mobilisation après le tsunami de Sumatra 89

a) La création de la Délégation Interministérielle Post Tsunami 90

b) L’engagement du ministère de l’écologie 93

(1) La constitution d’une base de données sur les tsunamis 94

(2) La réalisation d’une étude sur l’exposition des côtes françaises 95

(3) La mise en place d’un dispositif d’alerte 102

(4) La sensibilisation et l’éducation de la population 103

c) Au niveau local, une réelle sensibilisation aux risques de tsunami 104

d) Le lancement d’un système d’alerte en Nouvelle Calédonie et à Wallis et Futuna 106

B. UNE DYNAMIQUE QUI S’ESSOUFFLE FAUTE DE VISION STRATÉGIQUE ET DE MOYENS FINANCIERS ADÉQUATS 107

1. Les blocages observés 108

a) Dans l’océan Indien 108

b) Dans les Caraïbes 110

c) Dans la Méditerranée 112

d) Dans le Pacifique 118

2. Les raisons de ces blocages 121

a) L’absence de vision d’ensemble 121

b) L’absence de crédits 122

3. Une évolution de la politique française ? 123

IV. LES RECOMMANDATIONS : POUR UNE VISION STRATÉGIQUE DE LA GESTION DU RISQUE TSUNAMI 123

A. DES ENJEUX CONSIDÉRABLES 123

1. Les enjeux de sécurité 123

2. Les enjeux économiques 124

3. Les enjeux géostratégiques 124

4. Les enjeux scientifiques 126

B. LES RECOMMANDATIONS 126

1. Deux remarques préalables 126

2. Les recommandations structurelles 127

a) La définition d’un système d’alerte cohérent 127

(1) Désigner un coordinateur général 127

(2) Disposer des outils de mesure adaptés 129

(3) S’appuyer sur une connaissance approfondie de l’aléa 131

(4) Répondre de manière adaptée en cas d’occurrence de l’aléa 133

(5) Sensibiliser et éduquer la population 134

b) La mise à disposition d’un budget pluriannuel pérenne 135

c) L’intégration du risque de tsunami dans une logique multirisque ? 135

d) Des expérimentations sur la base du volontariat pour la gestion de l’alerte aux tsunamis locaux 136

3. Les propositions par bassin 138

a) En Méditerranée/Atlantique Nord-Est 138

b) Dans les Caraïbes 139

c) Dans l’océan Indien 140

d) Dans le Pacifique 141

RÉSUMÉ DES PROPOSITIONS 142

CONCLUSION 147

ANNEXE - LISTE DES ABRÉVIATIONS 150

INTRODUCTION

L’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques a déjà eu l’occasion d’examiner la question des risques naturels et de leur prévention, grâce aux travaux de notre collègue M. Christian Kert, député, auteur de deux rapports de référence consacrés, pour le premier1, aux séismes et mouvements de terrain et, pour le second2, aux autres risques : aléa météorologique, avalanches, inondations, sécheresse, incendies de forêts, volcanisme, effondrements miniers et de cavités souterraines.

Par ailleurs, après le dramatique tsunami indonésien du 26 décembre 2004, notre collègue M. Christian Kert a organisé des auditions publiques à l’Assemblée nationale, le 17 février 2005. Ces auditions se sont poursuivies le 18 mars 2005 à Port-la-Nouvelle (Aude), en coopération avec votre rapporteur et notre collègue Jacques Bascou, député. Ces travaux ont mis en évidence l’existence d’un risque qui était jusque là peu pris en compte en France. Ces auditions ont également permis de faire un point sur l’état de la recherche en matière de détection ainsi que sur la coopération internationale dans le domaine de la prévention et de l’alerte.

Le 22 mars 2005, l’Office a été saisi par le Bureau du Sénat, en application de l’article 6 ter de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958, sur les risques sismiques et de raz-de-marée en Méditerranée. Votre rapporteur a alors été chargé de réaliser cette étude dont l’intitulé a été modifié à la suite de l’étude de faisabilité.

Après la présentation de l’étude de faisabilité, l’intitulé de l’étude a été modifié.

D’une part, le terme de raz-de-marée est apparu inadapté car il renvoie à un phénomène météorologique alors que le tsunami a toujours une origine sismique.

D’autre part, l’analyse du risque de tsunami en Méditerranée uniquement s’est avérée trop limitative dans la mesure où tous les bassins sont exposés au risque de tsunami et que la France, à travers ses départements et territoires Outre-mer, est présente dans tous les océans.

Le rapport final porte donc sur l’évaluation et la prévention du risque de tsunami dans les côtes françaises, en métropole et en Outre-mer.

Votre rapporteur a d’abord examiné en détail les caractéristiques de cet aléa et a constaté que la diminution de la vulnérabilité des sociétés au risque de tsunami dépendait de l’instauration d’un système d’alerte perfectionné.

En effet, les tsunamis sont des phénomènes relativement rares comparativement à d’autres aléas naturels comme les tempêtes ou les inondations, mais leur impact sur les populations du littoral est souvent dévastateur. En conséquence, leur prévention (ou tout au moins la limitation de leurs effets) exige un réseau dense d’instruments de mesure des tremblements de terre et du niveau de la mer, un système de transmission des données rapide et fiable et un schéma préétabli et opérationnel pour alerter la population. En dernier ressort, l’efficacité du système d’alerte dépend de l’information et de la sensibilisation de la population qui doit être capable d’adopter les bons réflexes.

Ces importantes contraintes à la fois budgétaires et logistiques associées à une concentration des tsunamis dans la zone pacifique ont conduit à une gestion de ce risque très variée selon les bassins : si un dispositif d’alerte international a été mis en place par les Etats du Pacifique dès la deuxième moitié du XXème siècle, la gestion du risque de tsunami dans les autres bassins est beaucoup plus récente et est directement lié au choc provoqué par le tsunami du 26 décembre 2004.

D’une part, il a fait prendre conscience de la vulnérabilité de tous les bassins. Statistiquement, l’océan Indien est considéré comme le bassin le plus sûr au regard du risque de tsunami puisqu’il ne comptabilise que 4 % des tsunamis générés au XXème siècle. Pourtant, le tsunami de 2004 a fait plus de victimes que l’ensemble des tsunamis connus depuis l’Antiquité.

D’autre part, il a fait comprendre aux gouvernements que même en cas de risque rare, l’opinion publique n’accepte plus de ne pas être protégée lorsqu’un dispositif d’alerte peut être instauré et sauver des vies humaines.

Sous l’égide de l’Organisation des Nations Unies, il a donc été décidé en 2005 de créer un système d’alerte aux tsunamis dans l’océan Indien, dans les Caraïbes et dans la zone Méditerranée/Atlantique nord est.

Les résultats atteints deux ans après sont inégaux : si le bilan est globalement positif dans l’océan Indien, la mise en place d’un dispositif d’alerte aux tsunamis dans les Caraïbes et dans la zone Méditerranée/Atlantique nord est a pris beaucoup de retard en raison de l’attentisme des Etats impliqués.

En raison de son éparpillement territorial, la France est particulièrement sensible au risque de tsunami. Elle a d’ailleurs mis en place le dispositif d’alerte aux tsunamis en Polynésie française dès les années 60. Après le tsunami de Sumatra, elle s’est fortement mobilisée pour l’instauration d’un système d’alerte aux tsunamis dans les trois autres bassins, et en particulier dans l’océan Indien.

Néanmoins, force est de constater que l’émotion passée, cette dynamique s’est rapidement essoufflée faute de volonté politique et de moyens financiers adéquats. Si la dernière réunion consacrée à la mise en place d’un dispositif d’alerte en Méditerranée et dans l’Atlantique nord a constitué une rupture par rapport à l’attentisme dans lequel la France s’était réfugiée depuis plus d’un an, aucune décision concrète n’a encore été prise et de nombreuses interrogations planent sur l’architecture du système national d’alerte aux tsunamis, sa couverture géographique et surtout les moyens qui lui seront attribués.

Votre rapporteur fera donc des propositions structurelles concernant les quatre bassins ainsi que des recommandations par bassin afin que la France instaure rapidement un centre national chargé de l’alerte aux tsunamis en Méditerranée, dans les Caraïbes et dans l’océan Indien.

I. QU’EST-CE QU’UN TSUNAMI ?

Au préalable, votre rapporteur souhaite examiner en détail ce qu’est un tsunami, comment il peut être généré, quelles sont ses manifestations et pourquoi cet événement naturel peut devenir un risque majeur pour les populations du littoral.

A. DE L’ALÉA TSUNAMI…

Le tsunami est un phénomène d’origine géologique dont l’occurrence est inégalement répartie sur la terre.

1. Un phénomène d’origine géologique

Si l’on exclut les cas très particuliers de tsunamis qui seraient générés par une explosion d’origine humaine ou par l’impact d’une météorite, on peut dire que les tsunamis ont toujours une origine géologique. Ils sont provoqués par la pénétration ou la disparition (en ce qui concerne les séismes, on évoque plutôt le soulèvement ou/et affaissement) dans les fonds marins d’une quantité importante de matériel géologique, entraînant le déplacement d’une grande masse d’eau.

a) Les différentes sources

Trois types d’événement sont susceptibles d’engendrer un tsunami : les séismes sous-marins ou côtiers, les glissements de terrain et les explosions volcaniques.

(1) Les séismes sous-marins

Un séisme se traduit en surface par des vibrations du sol. Il provient de la fracturation des roches en profondeur. Cette fracturation est due à une grande accumulation d'énergie qui se libère, en créant ou en faisant rejouer des failles3, au moment où le seuil de rupture mécanique des roches est atteint.

La partie superficielle du globe terrestre est constituée de plusieurs grandes plaques lithosphériques qui évoluent les unes par rapport aux autres. Alors que les plaques se déplacent régulièrement de quelques millimètres à quelques centimètres par an, dans les régions de frontière entre deux plaques, ce mouvement est discontinu. Les failles peuvent rester bloquées durant de longues périodes, tandis que le mouvement régulier des plaques (convergence, divergence ou décrochement) se poursuit. Ce blocage est à l’origine de déformations locales ou régionales des plaques, par exemple du bombement des plaques de chaque côté de la fosse océanique.

Schématiquement le scénario est le suivant : la région de la faille bloquée se déforme progressivement (déformation élastique lente) en accumulant de l'énergie, jusqu'à céder brutalement ; c'est la rupture sismique, les contraintes tectoniques se relâchent, la faille est à nouveau bloquée et le cycle sismique recommence.

Il existe trois sortes de faille :

- les failles normales : la composante horizontale du glissement correspond à un écartement (E) qui s'accompagne de l'affaissement d'un des blocs par rapport à l'autre ;

Figure 1a : Failles Normales : 

La composante horizontale du glissement correspond à un écartement (E) qui s'accompagne de l'affaissement d'un des blocs par rapport à l'autre.



Ces failles se rencontrent dans les régions étirées et amincies comme les dorsales médio-océaniques et les rifts continentaux.

- les failles inverses : La composante horizontale du glissement correspond à un rapprochement (R) qui s'accompagne du chevauchement d'un des blocs sur l'autre.

Figure 2a : Failles inverses. La composante horizontale du glissement correspond à un rapprochement (R) qui s'accompagne du chevauchement d'un des blocs sur l'autre.



Ces failles se rencontrent dans les régions raccourcies et épaissies comme au front des chaînes de montagne.

- les failles coulissantes (ou décrochantes) : ce troisième type de faille correspond à un plan vertical sur lequel se produit un glissement horizontal.

Figure 3a : Failles décrochantes.

Source : IPGP

Pour qu’un séisme sous-marin génère un tsunami, il faut qu’il entraîne le mouvement vertical du fond de la mer. L’hypocentre doit donc se situer à moins de 100 km de profondeur. Par ailleurs, il doit avoir une magnitude minimale de 6,5.

Les séismes de subduction (ou de faille inverse) sont particulièrement dangereux parce que les failles en jeu sont souvent très longues et que la magnitude est proportionnelle à cette longueur ainsi qu’au glissement du séisme sur la faille. Ainsi, le tsunami qui a ravagé l’Indonésie le 26 décembre 2004 a été provoqué par un séisme de magnitude 9,2 au large de la pointe Nord-Ouest de l’île de Sumatra. A cet endroit, la plaque indo-australienne s’enfonce sous la plaque eurasienne. La faille s’est rompue sur une longueur de 1.200 km. La rupture a duré 9 minutes et a occasionné des déplacements d’eau atteignant 15 à 25 mètres. Avec une vitesse de convergence des plaques dans cette région de l’ordre de 6 cm/ an, le laps de temps écoulé depuis le précédent séisme majeur est compris entre 400 et 600 ans.

Les séismes de faille normale concernent des failles de taille beaucoup plus réduite (200 à 300 km de long au maximum) et par conséquent de magnitude plus faible. Toutefois, les pentes sont généralement plus fortes (30 à 40 degrés contre 10 à 20 degrés pour les séismes de subduction), les risques de tsunami ne sont donc pas négligeables. Ainsi, le séisme sous-marin de magnitude 6,3 du 21 Novembre 2004, à une dizaine de kilomètres au sud des Îles des Saintes a provoqué un tsunami qui a touché la Guadeloupe et la Martinique.

On pourrait imaginer que les séismes de faille coulissante ne provoquent aucun tsunami puisque le glissement opéré est horizontal. En réalité, si le risque de tsunami est faible, il n’est pas toujours nul selon l’inclinaison de la faille sous-marine. Le séisme d’Izmit en Turquie en est une illustration, qui a induit un tsunami local.

(2) Les glissements de terrain

Si l’on reprend la définition du glissement de terrain par le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM), il s’agit du déplacement d'une masse de terrains meubles ou rocheux le long d'une surface de rupture par cisaillement qui correspond souvent à une discontinuité préexistante. L'apparition d'un glissement de terrain est le résultat de la conjonction de plusieurs facteurs qui peuvent être :

- soit permanents, c'est-à-dire peu ou pas variables dans le temps (nature et propriétés mécaniques des matériaux, présence de plans de rupture préférentiels, pente des terrains, etc.),

- soit semi-permanents, c'est-à-dire évolutifs dans le temps (teneur en eau des matériaux, érosion en bas de pente, action anthropique, secousse sismique, effondrement d’un volcan etc.).

Les glissements de terrain sont à l’origine de nombreux tsunamis.

Le 16 octobre 1979, une partie de la plate-forme de remblaiement de l’aéroport de Nice disparaissait dans la mer. Quelques minutes plus tard, après une baisse relative du niveau de la mer, un tsunami submergeait le littoral et une vague estimée entre 2,5 et 3,5 m de haut déferlait sur la plage de la Salis à Antibes.

Les origines de ce tsunami restent très contestées. Deux thèses s’affrontent, mettant en cause soit les travaux réalisés dans le cadre de l’extension de l’aéroport de Nice, soit l’instabilité géologique naturelle de la côte aggravée par de fortes pluies qui s'étaient abattues sur la région quelques jours auparavant.

Les études les plus récentes évoquent deux glissements de terrain : un premier glissement de terrain (d’un volume de 10 millions de m3) serait intervenu sur le talus de l’aéroport tandis qu’un deuxième, beaucoup plus important (150 millions de m3) se serait produit au large de Nice.

Par ailleurs, le 13 septembre 1999, l’éboulement d’un pan de falaise basaltique (entre 2 et 5 millions de m3) sur l’île Fatu Hiva aux Marquises provoquait un tsunami sur le village d’Omoa.

Les glissements de terrain peuvent également résulter de l’effondrement d’un volcan : le 30 décembre 2002, deux glissements de terrain de plusieurs millions de m3 de blocs et de cendres se produisirent au Stromboli qui emportèrent la coulée émise depuis le 28 décembre. Après un retrait de la mer, des vagues de plusieurs mètres de haut blessèrent 6 personnes sur l’île tout en provoquant des dégâts matériels.

Les tsunamis résultant de glissements de terrain peuvent être très destructeurs, mais ils sont limités géographiquement. En effet, si la déformation verticale peut dépasser quelques dizaines de mètres, les dimensions horizontales impliquées (de quelques centaines de mètres en général) excèdent rarement la dizaine de kilomètres, et de ce fait les vagues du tsunami sont relativement de courte longueur d’onde.

(3) Les explosions volcaniques

Les explosions volcaniques sont également responsables du développement de tsunami puisqu’elles provoquent l’entrée brutale dans la mer de volumes immenses de roches.

L’explosion volcanique à Santorin vers 1650 avant Jésus-Christ a ainsi provoqué un tsunami dévastateur qui aurait conduit à l’extinction de la civilisation minoenne. Il aurait balayé les côtes de la Méditerranée orientale avec de vagues estimées à une quarantaine de mètres au voisinage de l’île.

De même, l’explosion volcanique de Krakatoa en Indonésie le 27 août 1883 a créé des vagues de 41 mètres de haut qui ont détruit des villages situés le long du détroit de Sunda entre l'île de Java et l'île de Sumatra et causé la mort de quelque 36.000 personnes.

b) La description du phénomène de tsunami

Suite à un séisme, un glissement de terrain ou une éruption volcanique, la couche océanique est ébranlée, avec un soulèvement, et parfois un affaissement qui peut avoir plusieurs mètres. La surface de l’eau commence à osciller sous l’action des forces de gravité et les vagues se propagent dans toutes les directions à partir de la source.

La propagation d’un tsunami

Source : CEA

En eau profonde, le tsunami se propage très rapidement (entre 700 et 900 km/h lorsque les fonds marins sont compris entre 4.000 et 7.000 mètres), avec une longueur d’onde4 très importante (de 100 à plus de 200 km). Soulignons à titre comparatif qu'une vague générée par le vent a une période de 10 secondes environ et une longueur d'onde de 150 m.

L'énergie des vagues de tsunami va de la surface au fond de la mer, même dans les eaux les plus profondes. Cette énergie correspond à l'énergie mécanique (ou énergie totale) qui est la somme de l'énergie cinétique (de vitesse) et de l'énergie potentielle (liée à la hauteur des vagues).

En haute mer, la vitesse est très importante, donc l'énergie cinétique est très grande et l'énergie potentielle très faible. De ce fait et parce que la période des vagues est très longue (entre quelques minutes et plusieurs dizaines de minutes), les vagues de tsunami ne sont pas détectées par les bateaux au large.

A l'approche des côtes, les vagues sont ralenties par les effets de fond et il se produit un échange entre l'énergie cinétique et l'énergie potentielle. L'énergie cinétique diminue (la vitesse de propagation descend jusqu’à 36km/h) et en contrepartie l'énergie potentielle augmente, les hauteurs de vague s’amplifient pour finalement provoquer une remontée rapide de la mer dans les ports et les baies ou un débordement de la mer sur le littoral : le tsunami.

c) Des manifestations variables

Lorsqu’il atteint le littoral, le tsunami peut avoir des manifestations variables en fonction des sources mises en jeu. Ainsi, plus le volume d’eau déplacé est grand, plus la distance parcourue par les tsunamis sera longue, plus le nombre de pays concernés sera élevé et plus les dégâts risquent d’être importants. Les scientifiques distinguent trois types de tsunamis :

- les tsunamis locaux qui ne sont pas observables au-delà d’une centaine de kilomètres : ils sont généralement provoquées par des séismes de magnitude comprises entre 6,5 et 7,5, des glissements de terrain ou des éruptions volcaniques ;

- les tsunamis régionaux qui se propagent sur une distance comprise entre 100 et 1000 km et sont générés presque uniquement par des séismes de subduction (à l’exception de l’explosion du volcan Santorin en 1650 avant Jésus-Christ);

- les tsunamis capables de détruire les côtes à des milliers de kilomètres de la source, appelés télétsunamis et également provoqués presque uniquement par des séismes de subduction (à l’exception du volcan Krakatoa en 1883) : le plus récent a touché l’océan Indien le 26 décembre 2004, mais on peut également citer le tsunami du 1er novembre 1755 après le tremblement de terre au large de Lisbonne qui traversa l’océan Atlantique, ou encore le tsunami du 22 mai 1960 lié à un séisme au Chili qui parcourut tout l’océan Pacifique et provoqua des vagues de 5 mètres au Japon 24 heures après.

Les tsunamis dépendent en outre du relief des côtes. Alors que les pentes fortes réfléchissent les vagues, dans les pentes douces, l’amplitude des vagues augmente. De même, un îlot sera protégé par la barrière de corail qui « casse » les vagues. Ces « effets de site » expliquent pourquoi les îles de Tuamotu sont bien protégées alors que les îles Marquises sont particulièrement vulnérables ou encore pourquoi les effets d’un tsunami sont amplifiés dans les ports et les embouchures de rivière.

Quelles sont les manifestations concrètes d’un tsunami ?

Tout d’abord, un tsunami peut se caractériser par un retrait de la mer loin de la côte puis par sa remontée très rapide qui engendre des courants violents et destructeurs. Quand l’eau se retire, l’effet du reflux est aussi très dommageable aussi bien pour les installations légères que pour les personnes qui se trouvent « aspirées ».

Selon le relief du littoral, l’effet de la vague est amplifié. C’est le cas dans les rivières qui s'enfoncent à l'intérieur des terres en formant un goulet étroit dans lequel l’eau va s’engouffrer et créer un mascaret.

De même, dans les ports et les baies qui constituent un espace fermé, les vagues vont se succéder les unes après les autres à un intervalle de 10 à 20 minutes, générant un effet de vidage-remplissage successif, avec des courants importants et des tourbillons.

La vulnérabilité particulière des ports explique que plusieurs bateaux ont été endommagés dans certains ports sur la côte d’Azur après le séisme de Boumerdes en Algérie le 21 janvier 2003, alors que les médias avaient communiqué sur l’absence d’impact de ce tsunami sur les côtes françaises. Dans le port de Théoule-sur-Mer par exemple, il a été observé une montée rapide et importante du niveau de l'eau avec ensuite un retrait provoquant par "effet de pompe" un assèchement partiel du port. Dans le port de la Figueirette, le niveau de l'eau est descendu d'environ 150 m dans l'ensemble des bassins, avec de très forts courants entrants et sortants.

Enfin, dans les situations extrêmes, le tsunami se manifeste par une série de vagues géantes pouvant atteindre plusieurs dizaines de mètres de haut. Leur espacement dans le temps (entre 20 et 40 minutes) les rend particulièrement dangereuses car les populations qui ont échappé à la première vague pensent souvent que la catastrophe est terminée et se rendent près des rivages pour constater les dégâts et porter secours.

En outre, la plus grosse vague est rarement la première, mais plutôt l’une des vagues suivantes qui, outre sa propre énergie potentielle, récupère l’énergie d’une vague qui s’est déjà brisée et retourne vers la mer. Ainsi, à Banda Aceh, lors du tsunami de Sumatra en 2004, la première vague a mesuré entre 1,5 et 2 mètres tandis que la deuxième a atteint une hauteur de l’ordre de plus de 30 mètres en certains endroits de la côte.

Dans la conscience collective, les tsunamis sont dangereux parce qu’ils sont assimilés à des vagues de plusieurs mètres de hauteur s’abattant sur le littoral en détruisant tout sur leur passage. En réalité, la force destructrice d’un tsunami est moins directement corrélée à la hauteur de la vague (ou des vagues) qu’à la vitesse (30 à 40 km/h) et la quantité d’eau qu'il transporte et qui lui permet de déferler jusqu’à plusieurs centaines de mètres à l'intérieur des terres si le relief est plat et sans obstacles naturels (jusqu’à 5 km à Banda Aceh). Alors qu’une vague classique, d'une période d'au plus une minute, n'élève pas le niveau de l'eau suffisamment longtemps pour qu'elle pénètre profondément, une vague de tsunami entraîne une augmentation du niveau des eaux pendant 5 à 30 minutes.

C’est donc la quantité d’eau qui déterminera l’étendue de l’inondation des terres et la hauteur de « run-up » c’est-à-dire le niveau de montée des eaux par rapport au niveau de la mer.

Propagation des tsunamis sur le littoral

Source : CEA

2. Un phénomène inégalement réparti sur la terre

Les zones les plus dangereuses sont les zones de forte sismicité, c’est-à-dire les zones de convergence des plaques tectoniques, par subduction (plongée d’une plaque sous une autre) ou par collision.

Carte des plaques tectoniques

Source : CEA

Depuis le début du XXème siècle, 911 tsunamis ont été répertoriés dans le monde, soit 9 événements par an. 98 tsunamis se caractérisent par une hauteur de vague comprise entre 1 et 5 mètres, soit 1 événement par an. 6 télétsunamis se sont produits avec des hauteurs de vague de plus de 5 mètres et ayant parcouru une distance supérieure à 5.000 km.

a) Une fréquence plus grande dans le Pacifique

D’après les informations fournies à votre rapporteur lors de ses auditions, sur les 2180 tsunamis répertoriés dans le monde entre – 1650 (date supposée de l’éruption du volcan Théra de Santorin) et 2005, 59 % ont eu lieu dans le Pacifique, 25 % en mer Méditerranée, 12 % dans l’océan Atlantique et 4 % dans l’océan Indien.

Toutefois, la distribution géographique des tsunamis répertoriés sur une longue période n’est pas forcément une donnée pertinente, dans la mesure où les données historiques ne sont pas homogènes selon les régions. La connaissance des événements passés est bien meilleure en Méditerranée que dans les Antilles ou dans le Pacifique.

Il convient donc de regarder la distribution des événements au XXème siècle, même si cette période de temps est trop courte pour en tirer des conclusions définitives.

Il apparaît alors que 77% des tsunamis ont été générés dans le Pacifique contre 9 % en Méditerranée, 10 % dans l’océan Atlantique et 4 % dans l’océan Indien.

Par ailleurs, les 5 télétsunamis les plus importants du XXème siècle ont eu lieu dans le Pacifique :

- le 1er avril 1946, un tremblement de terre de magnitude 8,6 dans les îles Aléoutiennes (Alaska) a provoqué un tsunami qui a tué 165 personnes et a fait plus de 26 millions de dollars (de 1946) de dommages ;

- le 4 novembre 1952, un tremblement de terre de magnitude 9,0 au large de la péninsule du Kamchatka (Russie) a déclenché un tsunami qui n’a pas causé de pertes humaines ;

- le 9 mars 1957, un séisme de magnitude 9,1 dans les îles Aléoutiennes a provoqué un tsunami qui a fait 5 morts à Hawaï, pourtant situé à 3.600 km ;

- le 22 mai 1960, un séisme de magnitude 9,3 au large du Chili a déclenché un tsunami qui a fait 2.000 victimes ;

- enfin, le 28 mars 1964, un tremblement de terre de magnitude 8.4 dans le Prince William Sound de l'Alaska a entraîné un tsunami qui a tué 122 personnes et provoqué des dégâts estimés à plus de 106 millions de dollars.

Les tsunamis se produisent surtout dans l’océan Pacifique à cause de la sismicité intense de la croûte terrestre dans cette région du monde. Comme l’indique le schéma ci-dessous, c’est sur la « ceinture de feu », chaînes de volcans dont l’origine est directement due aux plaques plongeantes dans les zones de subduction, qu’on observe les séismes de magnitude élevée ainsi que les éruptions volcaniques les plus actives.

Sources des tsunamis dans le Monde

(2 180 événements de 1628 AC à 2005)

Source : International Tsunami Data Base (Unesco)

Pour autant, les autres bassins ne sont pas à l’abri.

b) Aucun bassin n’est à l’abri d’un tsunami

La collision des plaques africaine et eurasiatique fait de la Méditerranée une région particulièrement marquée par les risques de séisme et de tsunami. Les grands tsunamis historiques y sont relativement bien connus (cf. tableau ci-dessous). Il apparaît que la source historiquement la plus destructrice fut celle de la subduction sous l’arc hellénique (Crête en 365 et Rhodes en 1303). Actuellement, la Méditerranée orientale est encore considérée comme la zone la plus dangereuse.

Les principaux tsunamis historiques en Méditerranée

Date

Lieu d’origine

Observations

Vers - 1650

Santorin

Tsunami généré suite à une éruption du volcan Théra, vague estimée à 40 m de haut

365

Crête

Tsunami généré suite à un séisme de magnitude environ 8,5, vague estimée à 10 m

373

Helike

Tsunami généré suite à un séisme de magnitude environ 7, vague estimée à 10 m

1303

Rhodes

Tsunami généré suite à un séisme de magnitude 8 environ

1365

Alger

Tsunami généré suite à un séisme de magnitude 7 environ

1755

Lisbonne

Tsunami généré suite à un séisme de magnitude 8 environ, vague estimée à 4 m

1908

Messine

Tsunami généré suite à un séisme de magnitude 7 environ, vague de 8 m

L’océan Atlantique Nord-Est semble moins concerné par les tsunamis même si celui du 1er novembre 1755 au large de Lisbonne a été l’un des plus destructeurs au monde, avec des vagues de 5 mètres déferlant sur le port et causant la mort de 20 000 personnes.

Le risque de tsunami existe également aux Antilles qui se caractérisent par une activité volcanique et sismique importante. Les Antilles sont concernées par des tsunamis générés soit dans la Caraïbe, soit dans l’Atlantique (séisme de subduction ou télétsunami).

Selon une étude de Narcisse Zahibo et Efim Pelinovsky de 2001, il y a eu environ 24 tsunamis répertoriés depuis 400 ans aux Petites Antilles5.

Enfin, l’océan Indien n’est pas à l’abri des tsunamis. Certes, statistiquement, il ne concentre que 4 % des tsunamis recencés. Pour autant, après la catastrophe de Sumatra, le risque de tsunami dans cette région ne peut plus être ignoré. D’ailleurs, 3 tsunamis importants ont depuis été induits par des forts séismes le 28 mars 2005, le 17 juillet 2007 et le 12 septembre 2007.

B. … AU RISQUE DE TSUNAMI

Le risque de tsunami se distingue de l’aléa. Le risque est un danger potentiel qui, lorsqu’il survient, peut provoquer une catastrophe.

1. Les composantes du risque

Selon le dictionnaire de l’environnement, le risque est la « possibilité de survenance d’un événement susceptible de porter atteinte à l’équilibre naturel ». Le risque résulte de la conjonction d’un aléa, d’enjeux et d’une vulnérabilité à l’aléa.

a) L’aléa

L’aléa correspond à la source du danger. Pour évaluer le risque, il faut déterminer le potentiel de l’aléa à se produire, son intensité et sa fréquence. Le risque ne se résume toutefois pas à l’aléa. Ainsi, un tsunami générant une vague de trois mètres sur une île déserte présente un risque faible. La même vague qui s’abat sur les plages d’Antibes un 14 juillet serait dramatique. La notion de risque est donc associée à la notion d’enjeux.

b) Les enjeux

Les enjeux sont les personnes, les biens, les équipements et l’environnement menacés par l’aléa et susceptibles de subir des dommages et des préjudices. On distingue cinq catégories d’enjeux :

- les enjeux humains ;

- les enjeux économiques et financiers qui concernent les activités commerciales, artisanales, industrielles, agricoles, touristiques ;

- les enjeux sociaux, qui regroupent tout ce qui touche à la cohésion sociale et au fonctionnement de la société ;

- les enjeux environnementaux, qui recouvrent les dégâts possibles aux écosystèmes, à la biodiversité ;

- les enjeux patrimoniaux, qui concernent les monuments historiques, culturels, l’image de marque d’une région.

Les enjeux peuvent subir des dommages variables selon l’intensité de l’aléa :

- dommages corporels touchant les personnes ;

- dommages structurels affectant le tissu urbain, les biens immobiliers et mobiliers, les réseaux ;

- dommages fonctionnels perturbant les activités traditionnelles (coupures de téléphone, de gaz, d’électricité, rupture des réseaux de communication moderne comme internet) ;

- dommages environnementaux sur l’écosystème ;

- dommages patrimoniaux.

c) La vulnérabilité

L’aléa peut avoir des conséquences plus ou moins dommageables sur les enjeux en fonction de leur vulnérabilité. Face à un tsunami, quelques gestes simples peuvent sauver la vie : la terre qui tremble fortement et le retrait rapide de la mer sont des signes avant-coureurs de tsunami et doivent inciter les gens à s’éloigner du rivage et à aller chercher refuge dans un bâtiment au-delà du troisième étage.

L’exemple du tsunami de Sumatra le 26 décembre 2004 est révélateur : de nombreuses vies humaines auraient été épargnées si les populations avaient eu quelques notions sur cet aléa. On aurait pu éviter ces images terribles sur lesquelles on voit que la mer s’est retirée, les grosses vagues se profilent déjà au loin et de nombreux touristes sont en train de ramasser des coquillages ou d’observer les vagues qui se rapprochent d’eux… Dans l’exemple cité, la population était d’autant plus vulnérable qu’elle n’était pas informée.

Être vulnérable, c’est être physiquement exposé à un aléa et présenter une certaine fragilité face au sinistre qui pourrait survenir. La vulnérabilité peut varier dans le temps car elle dépend principalement de l’activité humaine. Aujourd’hui, la population mondiale est particulièrement vulnérable face à un tsunami en raison de la forte pression démographique observée sur les littoraux.

En effet, la révolution des transports et la mondialisation de l'économie ont suscité une forte augmentation des flux internationaux et une littoralisation accrue des activités industrielles. Des façades maritimes se sont constituées, se traduisant par la croissance des trafics portuaires et la mise en place de vastes zones industrialo-portuaires. De même, les littoraux sont les espaces les plus marqués par le développement du tourisme et des loisirs. L'essor de ces activités a induit une urbanisation massive des espaces côtiers concernés.

Les chiffres suivants permettent de quantifier cette littoralisation.

Près de la moitié de la population européenne vit aujourd’hui à moins de 50 kilomètres des 70 000 kilomètres de côtes que compte l’Europe (près de 40 % à moins de 100 kilomètres des côtes à l’échelle mondiale). La densité moyenne de la population française est légèrement supérieure à 100 habitants par kilomètre carré, alors qu’elle est supérieure à 250 dans les communes littorales et supérieure à 600 pour la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur.

Par ailleurs, le relief des îles volcaniques aussi bien dans l’océan Pacifique que dans l’océan Indien et les Caraïbes conduit à une concentration de la population sur les littoraux.

Il ne faut pas sous-estimer la composante subjective de la vulnérabilité liée à la perception du danger. Il n’y a risque que parce que le groupe social ou l’individu se perçoit comme fragile face à un événement naturel. Face à un même événement, certains groupes humains ne ressentent pas de danger, d’autres l’acceptent dans leur quotidien et d’autres encore le refusent totalement.

Ainsi, les sociétés développées seraient passées de la notion de risque comme fatalité divine, contre laquelle la protection humaine est de peu de poids, à celle d’un risque maîtrisé qui aurait pour corollaire le droit à la sécurité.

On pourrait penser que dans le cas des risques naturels aucune responsabilité n'est identifiable. L'évolution récente de la notion de risque, associée à celle de responsabilité montre qu'il n'en est rien et on recherche de plus en plus à se prémunir contre les risques "naturels". La mise en place de structures juridiques et institutionnelles comme les agences de prévention des risques et de politiques de prévention (code de construction parasismique par exemple) illustre la volonté de l’Etat à la fois de protéger ses concitoyens et de limiter sa responsabilité en cas de catastrophe.

2. La gestion du risque

Comme il a été indiqué précédemment, il n’y a risque que lorsque l’aléa naturel rencontre une vulnérabilité. La gestion du risque doit donc passer par une meilleure connaissance de l’aléa et une réduction de la vulnérabilité des sociétés vis-à-vis dudit aléa à travers la mise en place d’un système d’alerte opérationnel.

a) Une meilleure connaissance de l’aléa

A défaut de pouvoir réduire la fréquence de l’aléa tsunami, on cherchera à en diminuer les effets possibles par la connaissance des processus qui l’engendrent ainsi que de ses mécanismes de propagation, puis par la mise en place d’un système de protection adapté.

Ainsi, mieux connaître l’aléa signifie non seulement être capable de comprendre le phénomène (à savoir son mode d’intervention, sa fréquence, son intensité ainsi que la surface qu’il affecte), mais également pouvoir le prévoir, c’est-à-dire à la fois le localiser et préciser dans quelle limite de temps est faite la prévision.

Comme nous allons le constater, connaître l’aléa pour envisager le risque nécessite de faire appel à diverses disciplines scientifiques comme la sismologie, la géographie, l’océanographie, la géologie ou encore la biologie.

La collecte de données permettant de connaître les caractéristiques de l’aléa s’avère essentielle. Elle s’appuie sur des témoignages, des photographies, mais aussi des relevés hydrauliques et géographiques pour connaître le run-up (hauteur d’inondation) et les surfaces inondées. C’est la raison pour laquelle les campagnes de prospection post-événement sont si importantes car elles offrent une vision fine de la réalité de l’aléa, notamment dans les régions peu peuplées.

Ainsi, les cartes d’aléa tsunami en Polynésie française reposent en grande partie sur les observations minutieusement rassemblées par les scientifiques après le passage d’un tsunami.

Une bonne connaissance de l’aléa tsunami passe également par l’appréhension correcte du fait générateur, qu’il s’agisse d’un séisme, d’un glissement de terrain ou d’un volcan. Les informations à récupérer sont doubles :

- d’une part les données liées directement à un événement particulier (localisation et magnitude d’un séisme « tsunamigène », localisation d’un glissement de terrain et volume de roches mis en mouvement, localisation d’un volcan, volume de roches soit expulsé, soit mis en mouvement suite à l’effondrement du volcan : ces informations permettent de mieux comprendre le phénomène) ;

- d’autre part, une connaissance plus générale des sources de tsunami et de leur localisation à travers l’étude des failles, des instabilités rocheuses en bordure de mer et sous-marines et des volcans actifs. Par exemple, l’étude de la directivité des tsunamis permet de mieux appréhender les zones touchées. En effet, si le tsunami se propage dans toutes les directions, une grande partie de son énergie se propagera dans une direction perpendiculaire à la zone de faille. En conséquence, plus la zone de rupture du séisme est longue, plus les zones concernées seront nombreuses. En outre, une zone décalée par rapport à l’angle d’énergie maximale du tsunami sera relativement épargnée, même si elle est située près de la source, alors qu’une zone dans l’angle d’énergie maximale sera touchée de plein fouet, même si elle est située à des milliers de kilomètres. Ces données ont donc vocation à faciliter la prévision des tsunamis et à établir les cartes d’aléa.

Dans la mesure où l’aléa se définit par son intensité et sa fréquence, il importe de disposer de séries longues de données, de reconstituer les événements passés et d’en saisir l’ampleur. Dans cet objectif, plusieurs catalogues historiques ont été élaborés :

- un catalogue américain, de portée globale, établi par le National geophysical data center, qui dépend de la National oceanic and atmospheric administration (NOAA6) du département américain au commerce ;

- deux catalogues russes, l’un portant sur le Pacifique et l’autre sur la Méditerranée, établi par l’Académie des sciences russe ;

- un catalogue européen, financé par la Commission européenne dans le cadre du cinquième programme cadre de recherche, dénommé Genesis and impact of tsunamis on European coasts (2001) ;

- un catalogue italien ;

- des travaux concernant les Antilles réalisés par O’Loughlin et Lander (2003), Lander et al. (2002), Zahibo et Pelinovsky (2001).

Il convient de souligner la difficulté de la tâche dans la mesure où, pour les événements anciens (et même parfois récents), il existe peu de données directes et l’événement doit être reconstitué à partir de divers documents (textes écrits, témoignages, photographies ou dessins). Ce travail d’historien s’avère très délicat et exige à la fois la critique des sources et la vérification de la cohérence des informations afin d’utiliser les données avec le maximum de pertinence et de fiabilité. En outre, ce travail n’est jamais achevé puisque les avancées technologiques et la découverte de nouvelles sources sont susceptibles d’apporter des informations complémentaires.

C’est dans ce contexte que les simulations numériques jouent un rôle considérable.

D’une part, elles permettent d’infirmer ou de valider les hypothèses retenues sur le déclenchement et la propagation des tsunamis.

L’exemple du tsunami de Nice le 16 octobre 1979 est révélateur : parce que les simulations montraient que le glissement de terrain observé dans la zone d’extension de l’aéroport était insuffisant pour expliquer l’ampleur des vagues observées, les scientifiques ont orienté leur recherche vers un deuxième glissement de terrain d’un volume beaucoup plus grand, thèse qui a été confirmée par des observations sous-marines.

De même, les simulations permettent de compléter les observations in situ et d’affiner les cartes d’aléa. Ainsi, en Polynésie française, plusieurs simulations ont été réalisées dans des baies particulièrement vulnérables, dans certains ports ou encore au niveau de l’aéroport afin de délimiter au plus près les aires géographiques concernées par les tsunamis. Compte tenu de la densité de la population près des côtes, les autorités polynésiennes peuvent difficilement instaurer une réglementation stricte en matière de construction et optent plutôt pour une délimitation précise des zones d’évacuation.

D’autre part, les simulations permettent de « tester » l’aléa tsunami dans des zones pour lesquelles il n’existe pas d’observation fiable, mais qui sont reconnues comme vulnérables. Ces simulations permettent ainsi d’anticiper un éventuel tsunami, de connaître son intensité potentielle et de prendre des mesures de précaution. Ces simulations ont également l’avantage de pouvoir prendre des décisions en cas de risque de tsunami sans avoir à attendre la confirmation du risque. L’intérêt d’une telle simulation est d’autant plus grand que l’on a affaire à un tsunami en champ proche et que le temps de réaction est donc très court.

L’exemple suivant permettra d’illustrer nos propos. Supposons qu’un séisme de magnitude 7,5 se déclenche au large du Japon. Compte tenu de sa magnitude et de sa localisation en mer, il y a de fortes chances qu’il déclenche un tsunami. Toutefois, pour connaître l’amplitude de ce dernier et la hauteur des vagues qui s’abattront sur le littoral, il faut disposer d’instruments de mesure du niveau de la mer (tsunamimètres) au large. Si ces derniers ne sont pas en nombre suffisant ou si le séisme est trop rapproché des côtes pour que les informations fournies par les tsunamimètres puissent être utilisées en temps utile, les populations ne pourront pas être protégées. En revanche, si les autorités responsables de la sécurité civile disposent à l’avance de scénarios proches de l’événement en cours, elles pourront prendre les mesures nécessaires7. Nous verrons que c’est la solution retenue par le Japon pour limiter les effets des tsunamis sur la population.

Il convient de remarquer que la qualité des simulations dépend fortement de la fiabilité des informations intégrées dans les équations. En particulier, une très bonne connaissance de la bathymétrie et de la topographie côtière est indispensable pour analyser correctement le phénomène de propagation du tsunami et son amplification lorsqu’il atteint les côtes.

b) Le rôle des systèmes d’alerte opérationnels

Les systèmes d’alerte aux tsunamis ont pour but de réduire la vulnérabilité des populations face à cet aléa. Pour être efficaces, trois conditions doivent être remplies :

- le système d’alerte est opérationnel, rapide et fiable ;

- le dispositif de protection de la population fait l’objet d’un plan préétabli ;

- la population est informée sur le risque de tsunami.

Il s’agit maintenant d’examiner chacune de ces conditions en détail.

Pour être opérationnel, le dispositif d’alerte doit être capable de détecter au plus tôt un tsunami, de prévoir sa propagation, son heure d’arrivée, la hauteur des vagues attendues le long des côtes menacées, ainsi que de transmettre ces informations aux autorités chargées de la protection civile.

La détection du tsunami s’effectue à travers des instruments de mesure. Le réseau de sismomètres permet de localiser l’épicentre et le foyer d’un tremblement de terre et de mesurer sa magnitude afin de déterminer si ce dernier peut provoquer un tsunami8. Dans l’affirmative, les données des tsunamimètres et des marégraphes permettent de valider ou d’infirmer la présence d’un tsunami et d’affiner les informations concernant son amplitude. La détection rapide d’un tsunami exige donc non seulement des réseaux d’instruments de mesure en nombre suffisant, mais également des réseaux dotés de moyens de communication perfectionnés qui autorisent la transmission des données en temps réel. Quant au centre d’alerte, il doit avoir accès à ces données, mais aussi être capable de les traiter et de les analyser, ce qui implique une veille 24h sur 24, 7 jours sur 7.

Le rôle des tsunamimètres et des marégraphes

Un tsunamimètre est un capteur de pression installé au large qui est capable de détecter des vagues de très faible amplitude (quelques centimètres). En effet, lorsqu’une vague passe, la pression augmente en raison de l’augmentation du volume d’eau au-dessus du capteur. L’intérêt des tsunamimètres est d’enregistrer le tsunami et de prévoir le développement et l’impact des tsunamis régionaux ou lointains. Deux types de tsunamimètre coexistent :

- soit le capteur est relié à un câble sous-marin et la transmission des données se fait par le câble. L’avantage d’un tel dispositif est que les coûts d’entretien et les risques de dégradation sont faibles. Ce système se heurte toutefois à deux limites : d’une part, le tsunamimètre ne peut pas être installé très loin de la côte (150 km maximum) et, d’autre part, un séisme violent peut rompre le câble. Les tsunamimètres reliés par câble sont principalement utilisés par les Japonais ;

- soit le capteur est placé au fond de la mer, il transmet par un lien acoustique les données enregistrées à une bouée en surface qui répercute ces informations par satellite. Ce dispositif a été développé par les Américains à partir de 1997 sous le nom de bouées « DART » (Deep-Ocean Assessment and Reporting of Tsunamis) dans le cadre du programme national de limitation des effets de l’aléa tsunami. Ces capteurs sont d’une précision impressionnante puisqu’ils sont capables de détecter des vagues d’un centimètre par 6.000 mètres de profondeur. En outre, ils peuvent être installés au milieu de l’océan et permettent donc une réelle anticipation du phénomène. En revanche, les coûts d’installation et de maintenance sont très élevés : selon les informations obtenues par votre rapporteur, l’appareillage coûte entre 70.000 et 200.000 euros, l’installation 100.000 euros et il faut prévoir une visite annuelle de 50.000 à 70.000 euros, tout en sachant que le dispositif doit être changé tous les 5 à 10 ans.

Un marégraphe est un instrument qui mesure le niveau de la mer à un point donné. Généralement, il est situé dans un port, parfois associé à une station GPS. Cet instrument est utilisé essentiellement pour la mesure des marées. Aussi, ses données sont rarement transmises en temps réel, mais stockées et récupérées une fois par jour ou par mois. Dans la mesure où ils sont localisés sur le rivage, ils ne peuvent pas servir à l’anticipation d’un tsunami dans la zone où ils sont localisés. Pour autant, leur utilité est double. D’une part, ils font partie du dispositif d’alerte en fournissant de précieuses informations pour les pays limitrophes ou les régions/îles voisines, ainsi qu’aux services de sécurité civile qui peuvent déclencher immédiatement les secours en cas de détection de fortes vagues. D’autre part, les données mesurées (ampleur des vagues, nombre de vagues, heure d’arrivée) sont utilisées dans la reconstitution du phénomène et dans les modèles de simulation. Pour autant, leur intégration dans le dispositif d’alerte implique qu’ils soient capables de transmettre leurs données en temps réel.

Lorsque le risque de tsunami est avéré, l’information doit être rapidement transmise aux autorités en charge de la sécurité civile afin qu’elles prennent les dispositions nécessaires.

Compte tenu de la brièveté des délais (entre quelques minutes et quelques heures), la chaîne de commandement et le dispositif de protection de la population ne peuvent être improvisés.

Les autorités récipiendaires du message doivent être clairement identifiées. C’est la raison pour laquelle dans le dispositif d’alerte coordonné par la commission océanographique internationale (COI), chaque Etat doit désigner un « point focal », à savoir un organisme chargé de recevoir les messages d’alerte. Pour que la transmission d’information soit efficace, il faut que ledit organisme assure également une veille 24h sur 24, 7 jours sur 7. En cas d’alerte, il lui reviendra de prévenir les services de la sécurité civile.

Par ailleurs, les plans de secours doivent être établis et testés au préalable et les fonctions de chacun clairement définies. Généralement, ces plans s’appuient sur des cartes d’évacuation définies à partir de l’observation des tsunamis passés et des cartes d’inondation fournies par les simulations.

La population sera donc amenée à jouer un rôle actif pour se protéger des effets du tsunami : selon l’ampleur de ce dernier, elle devra quitter les plages, voire évacuer certaines zones pour se réfugier soit sur les hauteurs, soit dans un bâtiment suffisamment haut et robuste pour assurer la sécurité de cette dernière. Elle sera parfois obligée d’attendre plusieurs heures avant de pouvoir regagner la côte. Par ailleurs, si elle ressent un tremblement de terre ou entend une sirène, il lui faudra être capable de prendre les bonnes décisions. Le dispositif d’alerte ne peut donc être efficace que si la population est informée sur l’aléa tsunami et sensibilisée. Une politique de prévention est donc indispensable qui repose sur deux axes :

- l’éducation des enfants à l’école avec un volet théorique (connaissances sur l’aléa, rencontre de témoins) et un volet pratique (exercices d’évacuation) ;

- une communication régulière sur le risque de tsunami à travers l’édition de brochures, de livres, la tenue de conférences, l’inauguration d’une signalisation spécifique ou encore l’organisation d’exercices simulant l’arrivée d’un tsunami et l’évacuation d’une zone.

La plupart des interlocuteurs de votre rapporteur ont signalé que cette politique de sensibilisation au risque de tsunami constitue souvent le maillon faible dans les systèmes d’alerte. Non seulement elle doit être sans arrêt répétée pour rester efficace, mais la population y est plus ou moins réceptive selon sa perception du danger et ses comportements culturels et sociaux. Or, un tsunami est un phénomène relativement rare, qui pèse donc peu dans la mémoire collective, surtout chez les jeunes. En revanche, les mesures de prévention, à savoir l’évacuation, sont lourdes de conséquence puisqu’elles peuvent entraîner la paralysie économique de toute une région pendant plusieurs heures. De nombreux systèmes d’alerte ont donc été conçus à la fois pour protéger la population et éviter les fausses alertes jugées catastrophiques sur le plan économique et financier, mais aussi pour la politique visant à limiter les effets d’un tsunami qui se trouve décrédibilisée.

Il apparaît ainsi que les politiques de gestion du risque ne peuvent pas être uniformes : pour être acceptables, adaptées et durables, elles doivent tenir compte des comportements, parfois profondément ancrés dans la culture, la tradition, les pratiques sociales et déterminer ce qui peut être acceptable pour la collectivité concernée.

II. UNE GESTION DU RISQUE DE TSUNAMI CONTRASTEE SELON LES BASSINS

Alors que le système d’alerte aux tsunamis dans l’océan Pacifique a été mis en place depuis plus de quarante ans, il a fallu attendre le tsunami de Sumatra en 2004 pour que la communauté internationale décide de doter les autres bassins d’un système équivalent.

A. UN RISQUE PRIS EN COMPTE DEPUIS PLUSIEURS DÉCENNIES DANS LE PACIFIQUE

Comme il a été indiqué précédemment, l’océan Pacifique est la région touchée le plus fréquemment par les tsunamis. C’est donc logiquement dans ce bassin que le premier système d’alerte a été mis en place.

1. L’existence d’un système d’alerte international…

a) L’historique

La mise en place d’un système international d’alerte aux tsunamis dans l’océan Pacifique est la conséquence directe de la multiplication des télétsunamis dans cette zone entre 1946 et 1964 : en vingt ans, pas moins de 5 télétsunamis ont traversé le Pacifique, faisant plusieurs milliers de victimes et des dégâts considérables.

Après le tsunami du 1er avril 1946 en provenance des îles aléoutiennes qui dévasta l’île Hilo, les Etats-Unis décidèrent la création d’un centre d’alerte national au tsunami (Tsunami Warning Center) sur le site de l’observatoire géomagnétique de Honolulu.

Après le tsunami du 4 novembre 1952 au large de la péninsule de Kamchatka, le Japon créa son propre centre d’alerte national dont la responsabilité fut confiée à l’agence météorologique JMA (Japanese Meteorological Agency). Une coopération entre les deux centres d’alerte japonais et américain s’instaura sous la forme d’échanges de données sismiques.

Le 22 mai 1960, un télétsunami dévasta le Chili et plusieurs îles du Pacifique. Quelque mois plus tard, l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) créait en son sein la commission océanographique internationale (COI) chargée de développer la coopération entre les Etats dans le cadre des recherches sur l’océan. Dès sa création, la COI se fixa comme mission la prévention des risques liés à l’océan, dont les risques de tsunami.

Le tsunami du 28 mars 1964 en provenance d’Alaska accéléra la mise en place du système d’alerte aux tsunamis dans le Pacifique : dès 1965, un groupe international de coordination du système d’alerte aux tsunamis dans le Pacifique (surnommé GIC/Pacifique)9 fut créé.

La COI accepta l’offre des Etats-Unis d’Amérique d’élargir les services de leur centre national d’alerte aux tsunamis à Hawai qui fut désormais utilisé comme centre d’alerte opérationnel pour tous les Etats du Pacifique.

Parallèlement fut créé le centre international d’information sur les tsunamis (CITT), dont le mandat initial consistait à prévenir les effets des tsunamis en :

- aidant les Etats membres du GIC/Pacifique à développer et améliorer leurs politiques de prévention des tsunamis ;

- améliorant le système d’alerte aux tsunamis dans le Pacifique ;

- stimulant la recherche sur les tsunamis ;

- informant les Etats non membres de l’existence dudit système d’alerte et en encourageant leur adhésion ;

- conduisant des enquêtes post-tsunami à des fins de documentation et de meilleure compréhension des désastres.

En 1968, l’observatoire d’Honolulu devint officiellement le centre pacifique d’alerte aux tsunamis (PTWC, Pacific Tsunami Warning Center).

b) La situation actuelle

Aujourd’hui, le groupe intergouvernemental de coordination du système d’alerte et d’atténuation des effets des tsunamis du Pacifique regroupe 30 pays : le Canada, le Chili, l’Equateur, le Salvador, les îles Fidji, la France, le Guatemala, l’Indonésie, le Japon, la Malaisie, le Mexique, la Nouvelle Zélande, le Nicaragua, la Papouasie – Nouvelle Guinée, le Pérou, les Philippines, la Corée du Sud, la Russie, Samoa, Singapour, la Thaïlande, Tonga, les Etats-Unis et le Vietnam.

Le premier Plan Directeur (Master Plan) a été publié en 1989. La version actuelle date de 1999. Elle décrit la situation du système d’alerte à cette date, signale les insuffisances et propose des pistes pour y remédier. La stratégie du système d’alerte y est décrite et comprend quatre composantes principales :

- l’évaluation de l’aléa et des risques (données historiques, enquête sur le terrain, modélisation numérique) ;

- l’alerte (centres d’alerte, réseaux de surveillance, transmission) ;

- la prévention (éducation, évacuation, aménagement du territoire) ;

- la recherche.

Concernant les aspects liés à l’évaluation de l’aléa et à la recherche, le GIC/Pacifique maintient depuis les années 90 une coopération étroite avec la commission « tsunami » de l’International Union of Geodesy and Geophysic (IUGG) avec lequel il a organisé 6 ateliers internationaux sur le thème tsunami. Le GIC/Pacifique a financé la réalisation d’une base de données recensant les tsunamis ayant eu lieu dans le Pacifique et les autres régions du monde ainsi que la création d’un logiciel de modélisation des tsunamis mis à la disposition de tous les états membres de l’Unesco.

Trois centres d’alerte internationaux sont actuellement en place : le PTWC à Hawaii, le centre d’alerte aux tsunamis en Alaska pour la côte ouest des Etats-Unis et l’Alaska (WC-ATWC) et le centre international d’avis pour le Pacifique Nord-Ouest (NWPTAC) géré par JMA10. Ces trois centres ont chacun leur zone de responsabilité, comme l’indique la carte ci-après.

Source : CIIT

(1) Le rôle du centre pacifique d’alerte aux tsunamis (PTWC)

Le PTWC, qui dépend administrativement et financièrement de l’administration nationale océanographique et atmosphérique des Etats-Unis (NOAA, National Oceanic and Atmospheric Administration) sert de centre opérationnel pour le système d’alerte aux tsunamis dans le Pacifique. Actuellement, 12 personnes y travaillent et une permanence est assurée 24h sur 24, 7 jours sur 7. Le PTWC a un accès direct et en temps réel à plus de 150 stations sismiques réparties dans le monde entier qui l’informent lorsque la magnitude d’un séisme dépasse 5,5. Il a également accès aux données de près de 100 marégraphes et 26 tsunamimètres installés dans le Pacifique qui vérifient si un tsunami a été généré et estiment son ampleur.

L’installation de tsunamimètres depuis 1997 a considérablement amélioré l’efficacité du système en réduisant de façon significative le nombre des fausses alertes. En effet, jusqu’à cette date, l’évaluation du risque de tsunami reposait essentiellement sur les stations sismiques : dès qu’un séisme dépassait 7,5 de magnitude, l’alerte était donnée. Certes, les stations marégraphiques près de l’épicentre étaient requises pour vérifier si un tsunami avait été généré, mais pour ces zones, l’information arrivait en même temps que le tsunami. Il fallait donc évacuer ces dernières par précaution. Or, tous les séismes, même de forte magnitude, ne génèrent pas des tsunamis. En outre, le nombre de pays potentiellement concernés va dépendre de la formation du tsunami et de sa propagation, information que les données sismiques sont actuellement incapables de fournir avec suffisamment de précision. Les tsunamimètres permettent donc d’affiner l’analyse, de suivre la progression du tsunami et de déclencher ou d’annuler l’alerte auprès de la population au dernier moment.

Actuellement, trois sortes de bulletin sont émis par le PTWC, l’ATWC ou le NWPTAC. Le contenu de ces messages est revu régulièrement et une réflexion est en cours pour en revoir le contenu afin de les rendre plus précis.

Si la magnitude est comprise entre 6,5 et 7,5, un message d’information est envoyé à toutes les autorités civiles qui précise l’heure à laquelle est survenu le séisme, sa localisation et le fait qu’aucun tsunami n’a été généré.

Exemple de message d’information

PACIFIC TSUNAMI WARNING CENTER/NOAA/NWS

TSUNAMI BULLETIN NUMBER 001

ISSUED AT 2117Z 16 OCT 2007

THIS BULLETIN APPLIES TO AREAS WITHIN AND BORDERING THE PACIFIC

OCEAN AND ADJACENT SEAS...EXCEPT ALASKA...BRITISH COLUMBIA...

WASHINGTON...OREGON AND CALIFORNIA.

... TSUNAMI INFORMATION BULLETIN ...

THIS BULLETIN IS FOR INFORMATION ONLY.

THIS BULLETIN IS ISSUED AS ADVICE TO GOVERNMENT AGENCIES. ONLY

NATIONAL AND LOCAL GOVERNMENT AGENCIES HAVE THE AUTHORITY TO MAKE

DECISIONS REGARDING THE OFFICIAL STATE OF ALERT IN THEIR AREA AND

ANY ACTIONS TO BE TAKEN IN RESPONSE.

AN EARTHQUAKE HAS OCCURRED WITH THESE PRELIMINARY PARAMETERS

ORIGIN TIME - 2106Z 16 OCT 2007

COORDINATES - 25.5 SOUTH 179.6 EAST

DEPTH - 411 KM

LOCATION - SOUTH OF FIJI ISLANDS

MAGNITUDE - 6.6

EVALUATION

A DESTRUCTIVE TSUNAMI WAS NOT GENERATED BASED ON EARTHQUAKE AND

HISTORICAL TSUNAMI DATA.

THIS WILL BE THE ONLY BULLETIN ISSUED FOR THIS EVENT UNLESS

ADDITIONAL INFORMATION BECOMES AVAILABLE.

THE WEST COAST/ALASKA TSUNAMI WARNING CENTER WILL ISSUE PRODUCTS

FOR ALASKA...BRITISH COLUMBIA...WASHINGTON...OREGON...CALIFORNIA.

Source : PTWC

Les temps de réaction du PTWC sont très courts, toujours inférieurs à 20 minutes : dans l’exemple précédent, le séisme a eu lieu à 21h06 et le message d’information a été délivré à 21h17.

Si la magnitude du séisme est comprise entre 7,5 et 7,9, il y a risque d’un tsunami regional. En fonction de la direction supposée prise par le tsunami et, par conséquent, du risque couru par les pays, seront émis un bulletin d’alerte (pour les pays jugés les plus à risque) et un bulletin de veille (pour les pays pour lesquels le risque de tsunami est jugé moins fort). L’alerte sera annulée si les données des marégraphes ou des tsunamimètres constatent l’absence de tsunami. Dans le cas contraire, de nouveaux bulletins d’alerte pourront être émis complétant les informations diffusées dans le premier bulletin.

Exemple de bulletin d’alerte/de veille

WEPA40 PHEB 081908

TSUPAC

TSUNAMI BULLETIN NUMBER 001

PACIFIC TSUNAMI WARNING CENTER/NOAA/NWS

ISSUED AT 1908Z 08 MAY 2007

THIS BULLETIN IS FOR AREAS WITHIN AND BORDERING THE PACIFIC

OCEAN AND ADJACENT SEAS...EXCEPT ALASKA...BRITISH COLUMBIA...

WASHINGTON...OREGON AND CALIFORNIA.

... A TSUNAMI WARNING AND WATCH ARE IN EFFECT ...

A TSUNAMI WARNING IS IN EFFECT FOR

JAPAN / RUSSIA / MARCUS IS. / N. MARIANAS

A TSUNAMI WATCH IS IN EFFECT FOR

GUAM / WAKE IS. / TAIWAN / YAP / PHILIPPINES / MARSHALL IS. /

CHUUK / POHNPEI / BELAU / MIDWAY IS. / KOSRAE / INDONESIA /

PAPUA NEW GUINEA / NAURU / KIRIBATI / JOHNSTON IS. / HAWAII

FOR ALL OTHER AREAS COVERED BY THIS BULLETIN, IT IS FOR

INFORMATION ONLY AT THIS TIME.

THIS BULLETIN IS ISSUED AS ADVICE. ONLY NATIONAL OR LOCAL

GOVERNMENT AGENCIES HAVE THE AUTHORITY TO MAKE DECISIONS

REGARDING THE OFFICIAL STATUS IN EACH AREA AND ANY ACTIONS TO

BE TAKEN IN RESPONSE.

AN EARTHQUAKE HAS OCCURRED WITH THESE PRELIMINARY PARAMETERS

ORIGIN TIME - 1848Z 08 MAY 2007

COORDINATES - 38.2 NORTH 143.1 EAST

DEPTH - 47 KM

LOCATION - OFF EAST COAST OF HONSHU JAPAN

MAGNITUDE - 8.2

EVALUATION

IT IS NOT KNOWN THAT A TSUNAMI WAS GENERATED. THIS WARNING IS

BASED ONLY ON THE EARTHQUAKE EVALUATION. AN EARTHQUAKE OF THIS

SIZE HAS THE POTENTIAL TO GENERATE A DESTRUCTIVE TSUNAMI THAT CAN

STRIKE COASTLINES NEAR THE EPICENTER WITHIN MINUTES AND MORE

DISTANT COASTLINES WITHIN HOURS. AUTHORITIES SHOULD TAKE

APPROPRIATE ACTION IN RESPONSE TO THIS POSSIBILITY. THIS CENTER

WILL MONITOR SEA LEVEL DATA FROM GAUGES NEAR THE EARTHQUAKE TO

DETERMINE IF A TSUNAMI WAS GENERATED AND ESTIMATE THE SEVERITY OF

THE THREAT.

ESTIMATED INITIAL TSUNAMI WAVE ARRIVAL TIMES. ACTUAL ARRIVAL TIMES

MAY DIFFER AND THE INITIAL WAVE MAY NOT BE THE LARGEST. THE TIME

BETWEEN SUCCESSIVE TSUNAMI WAVES CAN BE FIVE MINUTES TO ONE HOUR.

LOCATION COORDINATES ARRIVAL TIME

-------------------------------- ------------ ------------

JAPAN HACHINOHE 40.5N 142.0E 1932Z 08 MAY

KUSHIRO 42.5N 144.5E 1933Z 08 MAY

KATSUURA 35.1N 140.3E 1934Z 08 MAY

SHIMIZU 32.5N 133.0E 2047Z 08 MAY

OKINAWA 26.2N 127.8E 2148Z 08 MAY

RUSSIA URUP IS 46.1N 150.5E 2016Z 08 MAY

PETROPAVLOVSK K 53.2N 159.6E 2123Z 08 MAY

SEVERO KURILSK 50.8N 156.1E 2130Z 08 MAY

UST KAMCHATSK 56.1N 162.6E 2148Z 08 MAY

MEDNNY IS 54.7N 167.4E 2150Z 08 MAY

MARCUS IS. MARCUS IS. 24.3N 154.0E 2055Z 08 MAY

N. MARIANAS SAIPAN 15.3N 145.8E 2159Z 08 MAY

GUAM GUAM 13.4N 144.7E 2216Z 08 MAY

WAKE IS. WAKE IS. 19.3N 166.6E 2223Z 08 MAY

TAIWAN HUALIEN 24.0N 122.0E 2234Z 08 MAY

YAP YAP IS. 9.5N 138.1E 2252Z 08 MAY

PHILIPPINES PALANAN 17.1N 122.6E 2253Z 08 MAY

LEGASPI 13.5N 124.0E 2312Z 08 MAY

DAVAO 6.5N 126.0E 2339Z 08 MAY

MARSHALL IS. ENIWETOK 11.4N 162.3E 2256Z 08 MAY

KWAJALEIN 8.7N 167.7E 2341Z 08 MAY

MAJURO 7.1N 171.4E 0010Z 09 MAY

CHUUK CHUUK IS. 7.4N 151.8E 2258Z 08 MAY

POHNPEI POHNPEI IS. 7.0N 158.2E 2312Z 08 MAY

BELAU MALAKAL 7.3N 134.5E 2316Z 08 MAY

MIDWAY IS. MIDWAY IS. 28.2N 177.4W 2325Z 08 MAY

KOSRAE KOSRAE IS. 5.5N 163.0E 2340Z 08 MAY

INDONESIA GEME 4.6N 126.8E 2346Z 08 MAY

BEREBERE 2.5N 129.0E 2356Z 08 MAY

PATANI 0.4N 128.8E 0022Z 09 MAY

WARSA 0.6S 135.8E 0022Z 09 MAY

MANOKWARI 1.0S 134.5E 0032Z 09 MAY

JAYAPURA 2.4S 140.8E 0042Z 09 MAY

SORONG 0.8S 131.1E 0045Z 09 MAY

PAPUA NEW GUINE KAVIENG 2.5S 150.7E 0025Z 09 MAY

MANUS IS. 2.0S 147.5E 0029Z 09 MAY

VANIMO 2.6S 141.3E 0040Z 09 MAY

RABAUL 4.2S 152.3E 0044Z 09 MAY

WEWAK 3.5S 144.0E 0053Z 09 MAY

AMUN 6.0S 154.7E 0109Z 09 MAY

KIETA 6.1S 155.6E 0112Z 09 MAY

MADANG 5.2S 145.8E 0112Z 09 MAY

LAE 6.8S 147.0E 0150Z 09 MAY

PORT MORESBY 9.3S 146.9E 0308Z 09 MAY

NAURU NAURU 0.5S 166.9E 0043Z 09 MAY

KIRIBATI TARAWA IS. 1.5N 173.0E 0056Z 09 MAY

KANTON IS. 2.8S 171.7W 0224Z 09 MAY

CHRISTMAS IS. 2.0N 157.5W 0337Z 09 MAY

MALDEN IS. 3.9S 154.9W 0412Z 09 MAY

FLINT IS. 11.4S 151.8W 0506Z 09 MAY

JOHNSTON IS. JOHNSTON IS. 16.7N 169.5W 0059Z 09 MAY

HAWAII NAWILIWILI 22.0N 159.4W 0153Z 09 MAY

HONOLULU 21.3N 157.9W 0207Z 09 MAY

HILO 20.0N 155.0W 0228Z 09 MAY

BULLETINS WILL BE ISSUED HOURLY OR SOONER IF CONDITIONS WARRANT.

THE TSUNAMI WARNING AND WATCH WILL REMAIN IN EFFECT UNTIL

FURTHER NOTICE.

THE JAPAN METEOROLOGICAL AGENCY MAY ALSO ISSUE TSUNAMI MESSAGES

FOR THIS EVENT TO COUNTRIES IN THE NORTHWEST PACIFIC AND SOUTH

CHINA SEA REGION. IN CASE OF CONFLICTING INFORMATION... THE

MORE CONSERVATIVE INFORMATION SHOULD BE USED FOR SAFETY.

THE WEST COAST/ALASKA TSUNAMI WARNING CENTER WILL ISSUE BULLETINS

FOR ALASKA - BRITISH COLUMBIA - WASHINGTON - OREGON - CALIFORNIA.

Source : PTWC

Lorsque le séisme est d’une magnitude supérieure à 7,9, il y a alors risque de tsunami traversant tout le Pacifique. Pour la zone pacifique, le PTWC envoie ses bulletins dans plus de 100 endroits différents.

A ce stade, il apparaît clairement que le dispositif ne peut être efficace sans une bonne coordination internationale. Certes les Etats-Unis disposent de leurs propres stations sismiques et marégraphiques et de la plupart des tsunamimètres, mais les données recueillies proviennent également des appareils de mesure d’autres pays. Il est donc indispensable que toutes les données puissent être échangées rapidement et librement. Le PTWC est donc amené à travailler en étroite collaboration avec d’autres centres internationaux régionaux et nationaux qui disposent de leurs propres données et les mettent à sa disposition. Notamment, le WC-ATWC11 est sensé suppléer le PTWC en cas de souci technique.

Par ailleurs, l’amélioration du dispositif est tributaire de l’équipement de chaque sous-zone en marégraphes et en tsunamimètres en nombre suffisant.

La carte ci-dessous montre par exemple les efforts à faire dans le Pacifique Sud qui apparaît sous-équipé, aussi bien au large des côtes chiliennes qu’autour des îles Tonga.

Source : centre international d’information sur les tsunamis

(2) Les actions du centre international d’information sur les tsunamis (CIIT)

Le centre international d’information sur les tsunamis (CIIT) continue à jouer un rôle fondamental dans le système d’alerte aux tsunamis : en tant que secrétaire du groupe intergouvernemental de coordination du système d’alerte aux tsunamis du Pacifique, il coordonne les activités liées aux actions de prévention et préconise les améliorations nécessaires dans le domaine de l’acquisition et de la dissémination des données. Il a organisé 3 réunions du GIC/Pacifique depuis 2004, ainsi que le premier exercice d’alerte globale de l’océan Pacifique qui s’est tenu les 16 et 17 mai 2006, dont il a publié le bilan.

Il aide également les Etats membres à mettre en place des systèmes nationaux et régionaux d’alerte aux tsunamis.

Le rôle des systèmes nationaux et régionaux

D’une part, ils ont vocation à mieux protéger les populations de certaines zones mal couvertes par le système d’alerte aux tsunamis dans le Pacifique. En effet, le centre d’alerte d’Honolulu a comme mission, à l’origine, de protéger Hawaï des télétsunamis. Or, les simulations numériques ont montré que les zones sismiques susceptibles de déclencher un tsunami menaçant Hawaï sont le Pacifique Nord (Alaska et Russie), le large du Chili et les Mariannes. Les îles Salomon, les îles Loyautés et les îles Tonga ne présentent pas de danger pour Hawaï. Par conséquent, les Etats-Unis n’ont pas déployé de bouées DART dans ces deux régions. Or, d’autres simulations numériques ont démontré qu’un tsunami déclenché par un séisme dans les îles Salomon ou les îles Loyautés pourrait affecter l’Australie, la Nouvelle Calédonie et la Polynésie française. Ces territoires ont donc intérêt à instaurer un centre régional d’alerte aux tsunamis qui prendra en compte leurs spécificités géographiques.

D’autre part, les centres nationaux et régionaux complètent le dispositif international et le rendent plus efficace en multipliant le nombre d’instruments de mesure et de données à sa disposition, ainsi que les capacités d’analyse et d’expertise.

Le CIIT publie également un bulletin d’information et des brochures éducatives, dont « Les Grandes vagues » et le « Glossaire sur les tsunamis » réalisés et publiés en France. Il mène des campagnes de sensibilisation auprès des populations et a même développé, en coopération avec le Chili, des programmes éducatifs pour les enfants qui sont intégrés dans les programmes scolaires. Il organise également chaque année à Hawaii ou dans un autre pays des cours de formation pour le personnel amené à gérer les centres d’alerte nationaux des Etats membres.

Enfin, ses missions ont été élargies depuis le tsunami de Sumatra en 2004 puisqu’il est désormais chargé d’aider les pays dans les autres bassins à développer leur propre système d’alerte. Le CIIT est particulièrement impliqué dans l’océan Indien où il joue un rôle de conseil en matière de communication des informations, d’interopérabilité des réseaux sismiques et marégraphiques ou encore de méthodes de prévision des tsunamis. Il organise également des visites d’évaluation12, des cours de formation, des symposiums ainsi que les réunions des groupes de travail.

Globalement, le système d’alerte dans le Pacifique fonctionne bien et représente le dispositif le plus sophistiqué et le plus opérationnel. C’est pour cette raison que le PTWC a été chargé d’assurer l’alerte pour la zone de l’océan Indien en attendant la mise en place d’un dispositif similaire dans ce bassin.

De même, il assure l’intérim dans les Caraïbes et pour les pays autour de la mer de Chine du Sud (Chine, Macao, Hong-Kong, Taiwan, Philippines, Malaisie, Brunei, Indonésie, Singapour, Thaïlande, Cambodge et Vietnam)13.

Pour autant, certaines améliorations sont souhaitables pour renforcer l’efficacité du dispositif dans le Pacifique. Ainsi, plusieurs centres d’alerte régionaux mériteraient de voir le jour afin de mieux tenir compte des risques représentés par les tsunamis régionaux. Les régions concernées sont le Pacifique Sud Ouest, l’Amérique centrale, l’Amérique du Sud et la Mer de Chine.

Par ailleurs, l’absence de tsunami transpacifique dévastateur depuis plus de 40 ans peut entraîner des difficultés de financement à long terme du dispositif. Comme il a été indiqué précédemment, la maintenance des bouées DART est particulièrement coûteuse et les Etats-Unis sont les principaux contributeurs au dispositif d’alerte. Les décisions prises au Congrès américain sont donc suivies avec attention par tous les pays membres du groupe de coordination intergouvernemental.

Les dernières réunions du GIC/Pacifique ont mis en avant deux priorités :

- améliorer les messages d’alerte afin que ces derniers comportent une information sur l’amplitude attendue des tsunamis le long des côtes du Pacifique ;

- Adapter le dispositif d’alerte pour le rendre opérationnel en cas de tsunamis locaux.

2. … Qui s’appuie sur des systèmes nationaux performants

Les trois systèmes nationaux qui vont être présentés constituent les modèles les plus aboutis de dispositifs d’alerte. S’ils ne sont pas exempts de tout défaut, ils s’efforcent de respecter les trois conditions nécessaires à la mise en place d’un dispositif d’alerte efficace : un centre d’alerte opérationnel, un plan d’action en cas de crise défini au préalable et testé sur le terrain, enfin une population sensibilisée.

a) Le modèle des Etat-Unis

(1) L’existence de deux centres d’alerte

Sans revenir sur l’historique du centre d’Hawaï, déjà abordé précédemment, il faut insister sur le fait que ce dernier a conservé sa mission d’alerte pour les Etats-Unis. Ainsi, en tant que centre national d’alerte aux tsunamis (US National Tsunami Warning Center), il émet des bulletins d’alerte en cas de télétsunami pour Hawaï, Guam, les Samoa américaines, l’île de Wake, l’île de Johnston, les îles Mariannes du Nord et pour tous les intérêts des Etats-Unis dans le Pacifique non couverts par le centre d’alerte de l’Alaska.

Par ailleurs, en tant que centre régional d’alerte aux tsunamis pour Hawaï, le PTWC émet rapidement des bulletins d’alerte en cas de tsunami local généré dans les eaux hawaïennes.

Selon les informations obtenues par votre rapporteur, il existe 70 stations sismiques à Hawaï. Il faut 10 secondes au PTWC pour détecter un tremblement de terre, 15 secondes de plus pour connaître sa localisation et une minute et demi pour déterminer sa magnitude. Toutefois, compte tenu des délais très courts entre la génération du tsunami et son arrivée sur les côtes (10 minutes pour le tsunami local du 29 novembre 1975), la formation de la population aux bons réflexes reste la prévention la plus efficace : si quelqu’un ressent une forte secousse et se trouve près du rivage, il doit s’éloigner immédiatement, sans attendre l’alerte officielle.

Outre le PTWC, les Etats-Unis ont créé un deuxième centre d’alerte pour l’Alaska en 1967 après le télétsunami du 27 mars 1964 en provenance de cette région14.

En 1982, la zone géographique pour laquelle le centre émet des bulletins d’alerte a été étendue aux Etats de la Californie, de l’Oregon, de Washington et de la Colombie britannique en cas de séismes tsunamigènes ayant lieu dans leurs zones côtières.

En 1996, le centre d’Alaska a encore vu ses missions élargies puisqu’il est désormais chargé d’alerter les quatre Etats mentionnés précédemment en cas de tsunami provenant de tout point du Pacifique.

Après le tsunami dévastateur de Sumatra le 24 décembre 2004, le WC/ATWC est également susceptible d’alerter la côte atlantique des Etat-Unis ainsi que la région du Golfe du Mexique, Porto Rico, les îles Vierges et la côte atlantique du Canada.

Les Etats-Unis disposent donc de deux centres d’alerte aux tsunamis qui assurent la protection de leurs côtes et qui peuvent se suppléer en cas de besoin, soit parce qu’un centre connaîtrait des difficultés techniques qui l’empêcheraient de fonctionner correctement, soit parce que plusieurs tsunamis seraient générés à différents endroits au même moment.

L’aléa tsunami sur les côtes des Etats-Unis : tsunami local ou tsunami transocéanique ?

Les zones les plus menacées par des tsunamis locaux et transocéaniques sont les îles Hawaï ainsi que les côtes pacifiques de la Californie, de l’Oregon et de Washington. L’Alaska et les îles des Caraïbes (Porto Rico et les îles Vierges) sont surtout menacés par des tsunamis locaux.

(2) Un plan national pour limiter les effets des tsunamis

Si les risques courus par Hawaï en cas de tsunami sont connus depuis longtemps, la prise de conscience de la vulnérabilité des Etats de Washington, d’Oregon et de la Californie est assez récente.

Le déclenchement d’un tremblement de terre dans la zone de subduction de Cascades15 en avril 1992, qui provoqua un tsunami dans le Nord de la Californie, souligna les lacunes du dispositif d’alerte aux tsunamis. Le 4 octobre 1994, une alerte au tsunami au niveau du Pacifique fut émise après un fort tremblement de terre tsunamigène aux Kouriles. Cet événement provoqua au Etats-Unis d’énormes confusions entre les responsables des secours et l’évacuation coûteuse d’Hawaii qui en résulta suscita de sévères critiques car elle s’avéra infondée.

Pour remédier à cette situation, le Congrès décida de lancer en 1995 un programme national de limitation des effets de l’aléa de tsunami (NTHMP : National Tsunami Hazard Mitigation Program) piloté par la NOAA et impliquant les Etats côtiers ainsi que les îles rattachées aux Etats-Unis.

Ce programme repose sur trois axes :

- l’évaluation de l’aléa : une meilleure connaissance des tsunamis historiques doit permettre de produire des cartes d’inondation plus fines basées sur les prévisions de tsunami à long terme ;

- la qualité du système d’alerte à travers l’amélioration de l’acquisition et du traitement des données sismiques, le déploiement d’un réseau de bouées de détection des tsunamis et une meilleure transmission des informations concernant l’alerte aux autorités compétentes ;

- les politiques de prévention à travers l’élaboration en amont de plans de prévention et d’évacuation ainsi que le développement de matériel éducatif pour sensibiliser la population.

Compte tenu des règles de subsidiarité liées au fédéralisme, un partenariat étroit a été développé entre les administrations fédérales, étatiques et locales.

Par ailleurs, la NOAA a lancé un programme intitulé « TsunamiReady 16» : il s’agit d’encourager les collectivités et les Etats concernés par l’aléa tsunami à adopter les mesures nécessaires pour une prévention efficace.

Basé sur le principe du volontariat, ce programme fixe les critères qui doivent être respectés pour pouvoir prétendre à cette dénomination tels que :

- disposer d’un point d’alerte 24h sur 24 et d’un centre des opérations d’urgence ;

- pouvoir recevoir les messages d’alerte et les transmettre au public à travers au moins deux canaux différents ;

- sensibiliser la population par la distribution d’informations et l’éducation des citoyens ;

- développer un plan formel de prévention des tsunamis comprenant des exercices d’entraînement périodiques.

A ce jour, 47 sites17 (villes, comtés, plages, ports) ont reçu ce label dans 10 Etats différents. Hawaï est le seul Etat à avoir été distingué comme « prêt à affronter un tsunami ».

Par ailleurs, après le tsunami dévastateur de Sumatra, le Président des Etats-Unis a proposé une enveloppe de 37,5 millions de dollars pour améliorer les systèmes d’alerte nationaux. En mai 2005 fut voté le « Emergency Supplemental Appropriations Act18 » qui accorda 17,24 millions de dollars supplémentaires à la NOAA afin d’étendre et d’améliorer ses capacités de détection des tsunamis, de rendre les centres d’alerte plus performants, de produire des cartes d’inondation et d’étendre la participation au programme « TsunamiReady » à tous les états côtiers. Une nouvelle loi fut votée en août 2006 pour faire passer les crédits de la NOAA de 25 millions de dollars en 2008 à 29 millions de dollars en 2012.

Le programme national de limitation des effets de l’aléa tsunami19 : un bilan mitigé dressé par le Government Accountability Office (GAO)

Le GAO est une agence non partisane et indépendante qui travaille pour le Congrès américain. Avec 3260 employés, un budget de 484,7 millions de dollars et 11 bureaux répartis dans tous les Etats-Unis, elle a vocation à contrôler l’utilisation des fonds publics et à évaluer les programmes et les politiques lancés au niveau fédéral. Entre avril 2005 et mars 2006, le GAO s’est intéressé au programme national de limitation des effets de l’aléa tsunami (NTHMP) et a dressé un bilan plutôt mitigé de ses actions.

1. Une évaluation des risques très partielle

Le GAO a constaté que dans les Etats et territoires à risque (Alaska, Washington, Oregon, Californie, Hawaï pour le Pacifique ainsi que Puerto Rico et les îles Vierges pour la Caraïbe), de nombreuses régions soit n’ont pas établi de cartes d’inondation, soit disposent de documents qui ne sont pas fiables, alors même que le NTHMP prévoyait la réalisation desdites cartes pour toutes les communautés à risque d’ici 1999. Le GAO a également regretté l’absence de prévision fine concernant les pertes humaines et les dégâts touchant les infrastructures, les administrations ainsi que les équipements vitaux (centrales électriques, hôpitaux, réseaux de télécommunications…). Il a fait remarquer que des logiciels permettant de quantifier les dommages existaient pour d’autres aléas (inondations, tornades, tremblements de terre) et a exhorté la NOAA à en développer un pour l’aléa tsunami.

2. Un dispositif d’alerte mal calibré

Par ailleurs, le GAO a critiqué le nombre de fausses alertes émises par les centres d’Hawaï et d’Alaska. Tout en se félicitant de la réduction des délais d’émission des bulletins d’alerte, il a constaté que depuis 1982, les 16 alertes annonçant un tsunami destructeur sur les côtes des Etats-Unis s’étaient révélées erronées. Or, ces fausses alertes décrédibilisent le dispositif et s’avère très coûteuse : l’évacuation des côtes hawaïennes en 1994 aurait coûté 58,2 millions de dollars (en dollars courants). Il a également estimé que la liste des régions destinataires du message d’alerte initial était trop large et ne tenait pas compte de l’éloignement géographique qui permet d’affiner les prévisions au fur et à mesure de la propagation du tsunami.

3. Des lacunes dans le système de transmission de l’alerte

Le GAO a relevé des dysfonctionnements techniques dans la transmission des messages. Il a rappelé que les centres d’alerte transmettent les messages aux services de prévision de l’agence météo fédérale (National Weather Service) qui les diffuse à travers la radio météo de la NOAA et le « système d’alerte d’urgence ». La radio météo de la NOAA est un réseau de radios sur tout le territoire diffusant en continu et 24h sur 24 des informations météorologiques, dont les alertes liées aux risques naturels. Quant au système d’alerte d’urgence, il s’agit d’un moyen de communication à l’origine réservé au Président des Etats-Unis afin d’entrer directement en contact avec la population en cas d’urgence. Ce système peut en outre décoder et retransmettre les messages d’alerte diffusés sur la radio météo de la NOAA à travers le réseau de radios et télévisions et par câble. Or, le GAO a constaté que certaines villes côtières n’étaient pas en mesure de recevoir les informations de la radio météo de la NOAA ou/et du système d’alerte d’urgence. Il a donc recommandé d’effectuer des tests permettant de contrôler l’ensemble de la chaîne de transmission des informations.

4. Des failles dans le dispositif de prévention des tsunamis

La GAO s’est interrogé sur l’effectivité des dispositifs de prévention dépendant du réseau téléphonique tels que les sirènes sans transmission satellitaire et les messages d’alerte basés sur internet. En cas de forts séismes, ces infrastructures seront hors d’usage. L’expérience montre qu’elles seront de toute façon saturées dès le premier message d’alerte, ce qui peut compromettre les communications entre les différents services chargés de la sécurité civile s’ils ne disposent pas de téléphones par satellite. En outre, le GAO a insisté sur la nécessité de réaliser des exercices d’entraînement pour déceler les faiblesses du dispositif en citant en exemple la sous-évaluation régulièrement constatée des temps d’évacuation et des difficultés afférentes à la gestion du trafic (certains voies d’accès pouvant être inondées et donc inutilisables).

5. Une information contrastée de la population

Le GAO a constaté que peu de régions à risque s’étaient assurées que la population ait eu connaissance de l’existence de plans d’évacuation à travers soit leur distribution généralisée, soit leur insertion dans l’annuaire. De même, la sensibilisation des écoliers et l’organisation d’exercices d’évacuation est très variable d’un Etat à l’autre.

6. Des plans d’aménagement urbains négligeant l’aléa tsunami

LE GAO a regretté l’absence de prise en compte de l’aléa tsunami dans l’aménagement urbain des régions à risque. L’Oregon serait le seul Etat à avoir adopté des limitations en matière de construction de structures à forte occupation dans les zones inondables.

7. Une extension du champ d’application du programme national de prévention des effets de l’aléa tsunami contesté

Le GAO s’est interrogé sur l’utilité d’étendre ledit programme de prévention à des régions peu ou pas concernées par l’aléa tsunami telles que la côte atlantique et le Golfe du Mexique et a craint un saupoudrage des crédits aux dépens des zones réellement à risque. Après avoir constaté que les tsunamis locaux constituaient les risques les plus forts pour la plupart des régions aux Etats-Unis, il s’est montré dubitatif sur la stratégie de la NOAA visant à étendre le réseau des bouées DART et à améliorer les performances des centres d’alerte alors que la sensibilisation de la population aux bons réflexes (comme aller chercher refuge dans une zone surélevée en cas de fort séisme) devrait être une priorité.

En conclusion, le GAO a regretté que l’efficacité dudit programme n’ait jamais été évaluée avant d’en décider son extension. Ainsi, aucune étude n’a été réalisée sur l’efficacité des programmes d’éducation et de sensibilisation du public et aucun bilan n’a été dressé sur les forces et les faiblesses du dispositif.

Source : Government Accountability Office

(3) Une politique de prévention permanente

L’Etat de Hawaï est certainement le plus avancé dans la politique de limitation des effets des tsunamis. Lors de son déplacement à Hawaï, votre rapporteur a pu constater la mobilisation des acteurs impliqués à tous les niveaux dans la protection des populations en cas d’alerte aux tsunamis. Ainsi, l’île d’Hilo, particulièrement touchée par les tsunamis de 1946, de 1960 et de 1975, s’est dotée d’un dispositif d’alerte très complet sous l’impulsion de son maire.

D’abord, les plans d’alerte son arrêtés à l’avance : les cartes d’évacuation sont déjà préparées et distribuées à toutes les administrations. Elles figurent également dans l’annuaire. Il existe un seul donneur d’ordre (le maire) et les missions de chacun sont clairement définies.

Ensuite, pour s’assurer que tous les agents donnent la même information, les messages à diffuser sont réalisés à partir de textes pré-imprimés dans lesquels il suffit de remplir les cases manquantes (date de l’événement, heure et localisation du séisme, date prévue d’arrivée du tsunami, heure limite pour l’évacuation des zones à risque).

Pour une diffusion rapide de l’information, un accord a été passé avec les radios qui interrompent leurs programmes et lisent les messages transmis par les services de la protection civile.

Par ailleurs, un réseau de sirènes a été installé afin de prévenir la population en cas d’alerte aux tsunamis.

En outre, sous l’autorité du maire, les leçons des précédents tsunamis ont été retenues en matière d’urbanisme : après le tsunami de 1946, une grande partie de la zone inondée avait été convertie en parc. Après le tsunami de 1960, la zone « tampon » fut élargie et les décombres furent utilisés pour établir une barrière naturelle entre le littoral et l’intérieur des terres. En outre, la construction d’hôpitaux, d’écoles et de maisons de retraite a été interdite dans les zones inondables tandis que les structures en bord de mer sont soumises à d’importantes normes de sécurité (édifice capable de résister à un tsunami, interdiction d’aménager des chambres au rez-de chaussée).

Enfin, en souvenir du tsunami dévastateur du 1er avril 1946, le mois d’avril est utilisé comme mois de la sensibilisation au risque de tsunami. Un exercice d’entraînement simulant l’arrivée d’un tsunami est réalisé dans tout l’Etat d’Hawaï auquel participent le PTWC, les autorités civiles de l’Etat, les ministères de l’éducation et des transports, les autorités portuaires et des associations d’hôtels. Il est procédé à des évacuations en grandeur nature dans certaines écoles implantées dans des zones à risque.

Toutes les personnes entendues par votre rapporteur ont insisté sur la nécessité de nouer des contacts étroits et durables avec les médias, à la fois pour éviter la diffusion d’informations partielles, voire erronées en cas de tsunami et pour sensibiliser la population à cet aléa et aux gestes qui sauvent.

b) Le modèle japonais

(1) Un système particulièrement bien adapté aux tsunamis locaux

Avec 2000 tremblements de terre par an susceptibles d’être ressentis par la population (soit près de 5 par jour), le Japon est le pays le plus sismique au monde. Beaucoup de ces séismes se produisent en mer, ce qui explique que le Japon est également le pays au monde le plus touché par des tsunamis. Le tableau suivant dresse une liste des tsunamis historiques les plus destructeurs depuis le début du siècle.

Liste des tsunamis au Japon

depuis le début du XXème siècle

Année

Localisation de l’épicentre

Profondeur (km)

Magnitude

Amplitude maximale du tsunami mesurée par un marégraphe

Dommages (selon la classification japonaise)

(*)

1933

Off Sanriku

0

8.1

143

6

1944

Off Kii peninsula

40

7.9

115

5

1946

Off Kii peninsula

24

8.0

280

5

1952

Off Kushiro (Hokkaido)

54

8.2

100

1

1960

Near coast of northern Pen

0

8.5/9.5

305

4

1964

Off Nigata pref.

34

7.5

140

2

1968

Off east of Kyushu

30

7.5

116

2

 

Off Sanriku

0

7.9

295

2

1969

Off east of Hokkaido

30

7.8

130

2

1973

Off SE of Nemuro (Hokkai)

40

7.4

>280

2

1983

Off Akita pref.

14

7.7

194

4

1993

Off SW Hokkaido

35

7.8

>175

5

1994

Off east of Hokkaido

28

8.2

168

2

1996

Near Irian Jaya (Indonesia)

33

8.1

104

1

2003

Off Kushiro (Hokkaido)

45

8.0

255

3

2004

Off Kii peninsula

38

7.1

66

1

 

Off Kii peninsula

44

7.4

101

(*)

Classification des dommages (au Japon)

1.

Dégâts légers observés sur des bateaux et des fermes d’élevage

2.

Dégâts légers observés sur des maisons et des routes

3.

Victimes/destructions de maisons (moins que la classe 4)

4.

Victimes (moins de 20) ou destructions de maisons (moins de 1 000)

5.

Plus de 200 victimes ou plus de 10 000 destructions de maisons

6.

Plus de 2 000 victimes ou plus de 100 000 destructions de maisons

7.

Plus de 20 000 victimes ou plus de 1 000 000 destructions de maisons

Source : Japanese Meteorological Agency

En outre, si le Japon est concerné par les télétsunamis transpacifiques, il doit surtout affronter des tsunamis locaux souvent dévastateurs. Aussi, ce pays a mis en place un système capable d’alerter la population en quelques minutes.

L’agence météorologique japonaise (JMA), sous la tutelle du ministère des infrastructures et des transports, constitue le centre d’alerte multirisque au niveau national. C’est elle qui collecte les données sur les phénomènes naturels et déclenche l’alerte auprès des autorités et de la population en cas de nécessité.

Dans la mesure où les tsunamis locaux ne laissent que peu de temps pour réagir, le dispositif d’alerte japonais privilégie l’émission rapide d’un message d’alerte, quitte à ce que celui-ci s’avère infondé. Dans les trois minutes suivant la détection d’un séisme, la JMA émet un message sur l’heure prévisible d’arrivée du tsunami, les côtes concernées et la hauteur de vague estimée.

Les messages de prévision des tsunamis locaux sont de deux types : les messages d’alerte (la hauteur de la vague doit être supérieure à un mètre) et les messages d’information lorsque la hauteur de la vague est inférieure ou égale à 50 centimètres.

Les messages d’alerte sont eux-mêmes divisés en deux catégories : les messages en cas de tsunami pouvant atteindre deux mètres de haut et les messages pour les tsunamis majeurs de trois mètres et plus.

Prévision de tsunami et information

Prévision de Tsunami

Réalisée dans les 3-5 minutes après le tremblement de terre

Répartie selon la hauteur du tsunami

Catégorie

Hauteur du tsunami mentionnée dans le message de prévision

Alerte au tsunami

Tsunami important

« 3 m », « 4 m », « 6 m », « 8 m », « 10 m ou plus haut »

Tsunami

« 1m », « 2m »

Avis de Tsunami

Tsunami

« 0.5m »

Information sur l’heure d’arrivée prévisionnelle et la hauteur du tsunami pour chaque région côtière

Information sur les heures d’arrivée prévisionnelles de la marée et du tsunami sur les côtes

Information sur l’heure réelle d’arrivée et la hauteur du tsunami

Source : Japanese Meteorological Agency

Par ailleurs, la JMA a divisé les côtes japonaises en 66 régions qui sont récipiendaires des messages d’alerte et d’information lorsqu’elles sont concernées.

Répartition des côtes japonaises en 66 régions

Source : Japanese meteorological agency

La JMA dispose d’un réseau très dense de stations sismiques (182) et de marégraphes (80) dont les données sont complétées par celles en provenance des instruments de mesure des gouvernements locaux, du NIED20 ou encore des garde côtes. Ces informations sont transmises par voie satellitaire en temps réel à la JMA où elles sont traitées par ordinateur afin de déterminer au plus vite l’hypocentre et la magnitude du séisme et d’évaluer si un tsunami a été déclenché.

Pour autant, le délai extrêmement bref imposé à la JMA pour émettre un éventuel message d’alerte (3 minutes) ne permet pas de vérifier si le séisme détecté a véritablement provoqué un tsunami (le réseau de stations de mesure du niveau de la mer n’est pas suffisamment dense pour enregistrer un tsunami dans les 3 minutes). En réalité, la JMA utilise des simulations de tsunami déjà réalisées à partir de 100.000 tremblements de terre tsunamigènes potentiels et utilisent le scénario dans lequel les caractéristiques du séisme simulé sont les plus proches de celles du séisme détecté. Parallèlement, une fois les informations sur le tremblement de terre observé connues, une simulation est lancée pour affiner les informations données sur le tsunami potentiel.

Les messages d’alerte font l’objet d’une diffusion très large.

D’une part, ils sont envoyés aux gouvernements locaux et aux agences chargées de la gestion des désastres.

D’autre part, la JMA a passé un accord de coopération avec la télévision publique NHK pour la dissémination des messages d’alerte. NHK gère 10 chaînes de télévision et 3 radios qui sont mobilisées en cas de risque de tsunami. Lorsqu’une alerte est déclenchée, les émissions sont interrompues et un message est diffusé, accompagné d’une carte du Japon avec les zones côtières à risque coloriées en jaune, orange ou rouge selon l’amplitude du tsunami prévu.

Lors du tremblement de terre de Kobbé le 17 janvier 1995, de graves dysfonctionnements avaient été constatés, notamment en raison du manque de diffusion des informations sur le séisme. C’est pourquoi le dispositif d’alerte aux tsunamis privilégie désormais la multiplication des canaux d’information et des récipiendaires capables de prendre des décisions. Ainsi, dans la préfecture de Wakayama, au moins trois organismes différents reçoivent les messages de la JMA et sont susceptibles de déclencher les sirènes pour avertir la population du danger.

(2) Une bonne préparation de la population

Les tsunamis locaux exigent des délais de réaction très brefs. Dans les zones à risque, les collectivités locales ont mis en place des plans d’évacuation précisant les routes à utiliser, les bâtiments pouvant servir de refuge et les zones à atteindre pour être en sécurité. Une attention particulière a été portée à la signalétique et plusieurs types de panneaux ont été créés :

- des panneaux indiquant la direction à suivre pour rejoindre les zones sécurisées et les distances à parcourir ;

- des panneaux avertissant que la présente zone est susceptible d’être inondée en cas de tsunami ;

- des panneaux mentionnant les zones « sûres » car hors de portée du tsunami ainsi que les bâtiments « refuges ».

L’utilisation quasi exclusive de dessins permet une compréhension desdits panneaux par tous.

Des sirènes ont également été installées le long des côtes d’une portée de 1 à 2 kilomètres afin de prévenir les personnes sur les plages et en bordure du littoral.

Par ailleurs, de nombreuses mesures sont prises pour informer et sensibiliser la population. Par exemple, l’agence de la gestion des catastrophes et des incendies placée auprès du ministre des affaires intérieures et des communications a développé un CD Rom à l’attention des habitants du bord de mer. Ce dernier explique le mécanisme du tsunami et sa propagation jusqu’aux rivages puis décrit les mesures à prendre en cas de déclenchement des sirènes ou de perception d’un fort tremblement de terre.

Dans certaines communes, les habitants sont impliqués dans l’élaboration des plans d’évacuation. L’objectif est à la fois de les informer sur les dommages engendrés par les tsunamis précédents, de les convaincre de l’utilité desdits plans et d’utiliser leurs connaissances des lieux pour sélectionner les meilleurs itinéraires.

Des exercices d’entraînement sont également réalisés pour tester les voies choisies et remédier aux éventuelles insuffisances constatées. Votre rapporteur a ainsi appris qu’une association de résidents s’était mobilisée pendant deux ans pour la construction, à l’aide de rails de chemin de fer, d’une route de secours permettant d’atteindre rapidement une zone située à 10 mètres au-dessus du niveau de la mer.

Pour autant, le Japon n’est pas à l’abri d’une démobilisation de sa population face à un aléa dont l’occurrence est rare. Plusieurs interlocuteurs se sont inquiétés que lors des dernières alertes de novembre 2006 et du 13 janvier 2007, la plupart des résidents étaient restés chez eux malgré les consignes d’évacuation. L’une des explications, outre l’évolution de la société japonaise, réside dans le fait que l’émission de nombreuses fausses alertes réduit la crédibilité du système.

(3) Des moyens considérables engagés dans la construction d’ouvrages d’art et dans l’amélioration du dispositif d’alerte

Le Japon est le seul pays à multiplier la construction d’ouvrages d’art pour lutter contre les tsunamis21. Ainsi, la municipalité de Tokyo chargée de la sécurité des îles au large de la métropole a cherché à réduire la vulnérabilité de certaines côtes en installant des tétrapodes et des récifs artificiels.

Selon les informations recueillies par votre rapporteur, plus de 15.000 km de digues ont été construits le long des côtes japonaises.

Lorsqu’il n’existe pas de bâtiment de refuge à proximité et que le relief ne permet pas de rejoindre rapidement une zone située à plusieurs mètres de hauteur par rapport au niveau de la mer, les Japonais ont construit des plafeformes en acier reliées au sol par un escalier. Ces plateformes répondent aux normes parasismiques et sont capables de résister aux vagues d’un tsunami. Elles peuvent accueillir entre 70 et 100 personnes et sont parfois équipées d’une sirène.

De même, des « murs ou digues terrestres » en béton sont parfois installés dans les ports menacés par les tsunamis. Ces murs, dont la hauteur peut être modulée en fonction de l’amplitude prévue du tsunami, ont pour but de « casser » les vagues et de limiter les zones inondées.

Par ailleurs, le Japon continue d’investir massivement dans l’amélioration de son dispositif d’alerte. Ainsi, la JAMSTEC22 a lancé un programme nommé DONET23 qui a pour but d’équiper la zone de Tonankai d’un réseau de 20 sismomètres reliés par câble faisant également capteurs de pression afin de repérer plus rapidement les séismes et les tsunamis en provenance de cette région. Il faut dire que l’étude des séismes historiques montre que la zone comprise entre la baie de Suroga et l’île de Shikoku est touchée par un tremblement de terre d’une magnitude égale ou supérieure à 8 tous les 100-150 ans à trois endroits différents : dans les régions de Tokai, Tonankai et Nankai.

Les forts séismes susceptibles de toucher
les régions Tokai, Tonankai et Nankai

Source : Japanese meteorological agency

En outre, il est déjà arrivé que dans cette zone, deux séismes de forte amplitude se produisent soit au même moment, soit à un ou deux jours d’intervalle. Un tel événement produirait d’énormes dégâts. C’est la raison pour laquelle cette zone est sous haute surveillance.

Le Japon est enfin largement impliqué dans l’amélioration globale des dispositifs d’alerte grâce à une politique de coopération très active, notamment en direction des pays d’Asie et du Pacifique.

Ainsi, depuis 1960, l’IISEE24 organise une formation d’une année pour une dizaine d’ingénieurs de pays en voie de développement sur la sismologie et les techniques de prévention et de limitation des effets des tremblements de terre. Jusqu’en 1972, cette formation constituait un projet commun entre le Japon et l’UNESCO. A partir de 1973, le Japon, à travers la JICA25 a poursuivi seule ce programme en le transformant en 2005 en « master » de prévention des catastrophes naturelles. En 2006, un module sur les tsunamis a été introduit qui, lorsque votre rapporteur s’est rendu au Japon en janvier 2007, était suivi par 5 étudiants, soit la moitié des participants à cette formation.

Par ailleurs, le NIED et la JICA se sont engagés dans la mise en place d’un réseau sismique en Indonésie (projet JISNET) : 23 stations sismiques « large bande » ont été installées.

Dans le Sud Ouest Pacifique, la JICA a financé un programme de mise à niveau des réseaux sismiques des îles Fidji et Tonga (projet SPANET26) : South Pacific broadband seismic NETwork). 6 stations sismiques « large bande » ont ainsi été installées.

c) Le modèle français de Polynésie

(1) Le CEA au cœur du dispositif d’alerte en Polynésie

L’instauration d’un centre national d’alerte aux tsunamis en Polynésie est directement liée aux activités nucléaires de la France dans le Pacifique.

Implanté par le CEA au début des années soixante, le laboratoire de géophysique (LDG) de Tahiti a été dès 1964 chargé de fournir des informations sur les tsunamis susceptibles d’affecter les côtes de la Polynésie française. Il a pour cela mis en place le réseau sismique polynésien et développé des méthodes de plus en plus perfectionnées pour évaluer le potentiel tsunamigène des séismes.

Aujourd’hui, les activités du laboratoire de géophysique de Pamatai sont triples.

D’abord, dans le cadre du traité d’interdiction complète des essais nucléaires, le LDG/Pamatai participe au système de surveillance international des explosions nucléaires.

Ensuite, le réseau sismique polynésien du LGD/Pamatai est chargé de surveiller 24h sur 24 la sismicité de la Polynésie française : sont visés les séismes, mais également les volcans sous-marins, les éboulements ou encore les ondes de tempête. Dans ce cadre, le LGD/Pamatai exploite depuis 1962 9 stations sismiques réparties sur Tahiti, Rangiroa, Tubuai et Rikitea.

Enfin, le LGD/Pamatai gère le centre polynésien de prévention des tsunamis qui assure l’alerte opérationnelle aux tsunamis 24h sur 24 dans le Pacifique en relation avec le PTWC.

Le traité d’interdiction complète des essais nucléaires

Ce traité, adopté le 10 septembre 1996 et signé par 71 membres, dont les 5 puissances nucléaires officielles, le 24 septembre 1996, interdit les essais nucléaires. Il complète le traité du 5 novembre 1963 qui avait prohibé les essais nucléaires sous l’eau, dans l’espace et dans l’atmosphère en étendant l’interdiction aux essais sous-terrains.

Ce traité instaure un système de surveillance international de l’air, de l’eau et des océans à travers des stations réparties dans le monde entier.

Des stations de détection des radionucléides (éléments radioactifs contenus dans l’air) et des infrasons sont utilisées pour l’atmosphère.

La détection des ondes sismiques générées par les tremblements de terre ou les explosions souterraines est faite à l’aide de sismomètres. Ces capteurs permettent également de surveiller le milieu marin en détectant et identifiant les ondes hydroacoustiques (ondes T) qui s’y propagent.

Le DASE27, dont dépend le LDG/Pamatai, est responsable de la contribution française à l’exploitation du système de surveillance international (SSI) dans les différentes technologies (sismologique, radionucléides, infrason et hydroacoustique).

Le réseau géophysique polynésien comprend des stations du SSI dont les données sont envoyées au DASE et au centre international des données à Vienne.

La station sismique de Tahiti, du fait de sa situation centrale dans le Pacifique, est un site primordial pour la détection sismique et hydroacoustique. La station d’analyse des radionucléides est installée sur le site de Pamatai. Deux stations infrason sont installées à Taravao, dans la presqu’île de Tahiti, et dans l’archipel des Marquises.

Source : DASE

Lorsque le LGD/Pamatai détecte un séisme dont le foyer sous-marin est à moins de 60 km de profondeur et dont la magnitude est égale ou supérieure à 7, il en informe le Haut-Commissariat et le service de la protection civile.

A cet égard, il convient de mentionner que le LDG/Pamatai a développé un système automatique de détection et de localisation en temps réel des séismes tsunamigènes très performant appelé TREMORS®28 (Tsunami Risk Evaluation through seismic Moment from a Realtime System).

La magnitude d'un tremblement de terre mesure l'énergie libérée lors d'un séisme. Plus la magnitude est élevée, plus le séisme a libéré d'énergie. Il s'agit d'une échelle logarithmique, c'est-à-dire qu'un accroissement de magnitude de 1 correspond à une multiplication par 30de l'énergie. Si l’échelle de Richter (Ms) est la plus connue, elle a l’inconvénient de saturer en cas de fort séisme : la magnitude rencontre un plafond qu’elle a du mal à dépasser alors que l’énergie des séismes continue de croître. Pour remédier à cet effet de saturation, une échelle d’énergie, nommée Mw, a été développée dans les années 80. Cette échelle, calée sur Ms, en est son prolongement pour les forts séismes afin d’éviter l’effet de saturation. Par exemple, le séisme du 22 mai 1960 du Chili avait une magnitude de 8,4 sur l’échelle de Richter et de 9,5 en magnitude Mw. Il était donc 30 fois plus puissant que ce que les instruments de mesure annonçaient.

Si l’échelle de Richter est utilisée en cas de fort séisme, les prévisions concernant les tsunamis provoqués peuvent se révéler très sous-évaluées. C’est la raison pour laquelle une connaissance précise de la magnitude du séisme est primordiale. Toutefois, selon les informations obtenues par votre rapporteur, la magnitude Mw exige de nombreuses stations sismiques et des moyens de calcul considérables.

Pour pallier ces difficultés, le LDG/Pamatai a introduit une nouvelle échelle de magnitude Mm (magnitude de manteau) qui évite l’effet de saturation connu de l’échelle de Richter et n’exige qu’une station sismique pour son utilisation. Au-delà d’un certain seuil de magnitude (fixé actuellement à 7), une alarme est émise par téléphone GMS au géophysicien de service.

Source : CEA/DASE/LDG-Pamatai

Le LDG/Pamatai exploite en outre quatre marégraphes installés à Papeete (1), aux îles Gambier (1) et aux îles Marquises (2). Une seule de ces stations a été financée par la France via un projet FIDES (Fonds d’investissement pour le développement économique et social). Il reçoit également les données d’une vingtaine de marégraphes installés essentiellement dans le Pacifique Sud sur des îles situées entre les zones tsunamigènes et la Polynésie française.

Ces activités sont complétées par des études et simulations destinées à mieux évaluer l’aléa tsunami en Polynésie (cf. supra).

Aussi n’est-il pas étonnant que le CEA soit le représentant de la France au groupe intergouvernemental de coordination du système d’alerte aux tsunamis dans le Pacifique (GIC/Pacifique) dont il a assuré la vice-présidence puis la présidence et qu’il ait participé activement à la mise en place du plan de secours spécialisé en cas de tsunami (PSS) pour la Polynésie française29.

(2) Un dispositif d’alerte basé sur une connaissance approfondie de l’aléa

Comme il a été constaté précédemment, l’efficacité de tout dispositif d’alerte dépend d’une bonne connaissance préalable de l’aléa. C’est la raison pour laquelle plusieurs études ont été confiées au CEA afin d’établir une carte de l’aléa tsunami.

L’analyse des séismes historiques dans le Pacifique entre 1837 et 2005 laisse penser qu’au moins 15 tsunamis ont touché les côtes polynésiennes dont 11 ont fait des dommages et 2 des victimes.

Le risque tsunami en Polynésie française

Source : CEA/DASE

Le danger qu’un séisme génère un grand tsunami transpacifique avec un risque pour l’ensemble de la Polynésie n’intervient que pour les séismes de subduction de magnitude exceptionnellement forte (magnitude Mm supérieure à 9). Les principales zones de subduction capables de produire de tels séismes sont celles de la côte Sud-Américaine (Chili, Pérou), celle de l’arc des Aléoutiennes et celle du Pacifique Nord-Ouest (l’arc des Kouriles – Japon – Kamchatka). En ce qui concerne cette dernière zone, le risque semble toutefois moins grand dans la mesure où la Polynésie n’est pas dans la zone géographique où le tsunami a son rayonnement maximal.

Trois zones sismiques susceptibles de générer les tsunamis les plus dévastateurs sont donc retenues :

- la zone de la côte Sud-Américaine (Chili, Pérou). Il convient de noter qu’il existe une lacune sismique au Nord du Chili : dans les 20/30 années prochaines, il est attendu un séisme d’une magnitude 9 dans cette zone qui générera un tsunami particulièrement dévastateur dans les îles Marquises puisque les simulations tablent sur une vague de 11 mètres avec des pénétrations jusqu’à 1000 mètres dans l’île d’Hiva Oa ;

- la zone de l’arc des Aléoutiennes;

- la zone Tonga-Kermadec à l’Ouest. La sismicité historique de cette région est mal connue et ce sont les simulations numériques qui laissent penser qu’un tsunami dévastateur en provenance des Tonga pourrait toucher la Polynésie française. En outre, une zone de lacune sismique a été observée aux Kermadec, qui suggère qu’un fort séisme est à attendre dans cette zone.

Par ailleurs, les observations sur le terrain ainsi que les simulations révèlent une forte variation de l’aléa en fonction des îles comme le montre la carte ci-après élaborée par le CEA.

Carte des niveaux d’exposition à l’aléa tsunami de la Polynésie française

Source : CEA/DASE

Ainsi, les Marquises apparaissent particulièrement exposées aux tsunamis puisqu’elles peuvent être affectées par des tsunamis majeurs plus de 4 fois par siècle. En outre, elles font l’objet d’amplifications importantes pour les séismes en provenance de la côte Sud-Américaine. Lors du séisme de magnitude 7,3 au large du Pérou le 21 février 1996, un tsunami de 2 à 3 mètres a été observé dans les îles Marquises contre moins de 10 cm à Papeete. Cet effet d’amplification est lié à la bathymétrie locale : ces îles ont des relief en pente douce et ne sont pas protégées par un récif corallien.

Dans les îles Australes, l’île de Rurutu est également susceptible d’être touchée deux fois par siècle par des tsunamis. Les autres îles sont protégées par la barrière récifale, les conséquences des tsunamis sont donc moindres.

En ce qui concerne Tahiti, celle-ci est relativement protégée par son récif corallien sauf pour la côte Nord et Nord-est.

La carte des zones susceptibles de générer les tsunamis les plus dévastateurs pour la Polynésie française et la carte des niveaux d’exposition à l’aléa tsunami ont servi de référence pour la mise en place du dispositif d’alerte.

Tout comme aux Etats-Unis et au Japon, l’alerte est graduée en fonction du risque. Trois codes couleur ont été définis, en fonction de la gravité du danger.

L’alerte de niveau 2 (de couleur jaune) est déclenchée lorsque la magnitude Mm du séisme détecté est supérieure à 8 et que l’arrivée prévisible du tsunami sur les côtes polynésiennes n’est pas annoncée avant 9 heures. Le LDG/Pamatai prévient alors la protection civile et le Haut-Commissaire.

L’alerte de niveau 3 (de couleur orange) est déclenchée lorsque la magnitude Mm du séisme détecté est comprise entre 8,7 et 9 et que l’arrivée prévisible du tsunami sur les côtes polynésiennes n’est pas annoncée avant 6 heures. Dans ce cas, le danger de tsunami est confirmé et toutes les autorités locales sont informées.

Enfin, l’alerte de niveau 4 (de couleur rouge) est déclenchée soit lorsque la magnitude Mm du séisme détecté est supérieure à 9, soit lorsque l’arrivée du tsunami sur les côtes polynésiennes est annoncée dans un délai de moins de 3 heures. Concrètement, cela signifie qu’un séisme de magnitude supérieure à 8 dans la zone des îles Tonga entraîne automatiquement une alerte maximale. L’alerte générale est alors donnée afin d’évacuer la population le long des côtes, de faire sortir les bateaux des ports et d’évacuer l’aéroport. En effet, une étude de site a montré que l’aéroport de Faa sur Papeete serait alors inondé et rendu inutilisable.

Les niveaux d’alerte

Origine

Tonga

Amérique du Sud

Toutes les zones sauf Tonga

Magnitude

Mm > 8

(Mw > 7,9)

Mm > 7

(Mw > 7,2)

8 < Mm < 8,7

(7,9< Mw < 8,3)

8,7 < Mm < 9 (8,3 < Mw < 8,7)

Mm > 9

(Mw>8,7)

Archipel

Polynésie française

Marquises

Polynésie française

9 h

 

2

2

2

3

6 h

 

2

2

3

4

3 h

4

4

4

4

4

Annulation

1

1

1

1

1

           
           

Niveau 1

Situation normale

       

Niveau 2

Alerte autorités

Hautes autorités (Etat et Territoire)

   

Niveau 3

Alerte autorités locales

Communes et municipalités (Maire)

   

Niveau 4

Alerte globale

Evacuation de la population

     

Compte tenu de la forte exposition des îles Marquises à l’aléa tsunami, une alerte de niveau 2 est déclenchée en cas de séisme au large de l’Amérique du Sud et d’une magnitude supérieure à 7.

(3) Un type d’alerte adapté aux caractéristiques de la Polynésie française

Comme il a été indiqué à plusieurs reprises, un dispositif d’alerte n’est efficace que s’il touche la population et que cette dernière réagit en connaissance de cause. Or, les particularités de la Polynésie française rendent la mise en place d’un dispositif d’alerte difficile.

D’une part, ce territoire a une superficie de 4 200 km² éparpillés sur 5 millions de km² pour 256.000 habitants répartis sur des dizaines d’îles. Certes, 80 % de la population se concentrent sur Tahiti et Moorea, mais 8000 personnes peuplent les 5 îles des Marquises et 5000 habitants vivent sur les 44 îles des Tuamotu. L’alerte doit donc toucher une population très éparpillée en peu de temps.

D’autre part, les interlocuteurs sont multiples. Ainsi, la sécurité civile est une compétence partagée entre l’Etat français, chargé de l’organisation des secours, et l’Assemblée de la Polynésie française responsable de la prévention. En outre, les communes n’ont pas de ressources propres et les maires sensés prendre le relais en cas d’alerte ne sont pas toujours joignables ni même présents dans leurs communes, beaucoup parmi eux résidant à Tahiti.

Compte tenu de ces contraintes, il a été décidé d’instaurer un système d’alerte centralisé et automatique.

D’ici la fin de l’année, 144 sirènes auront été installées en Polynésie française qui pourront être déclenchées à distance par les services du Haut-Commissariat ou localement. Afin de ne pas être tributaires du réseau téléphonique ou internet local ou international30, chaque sirène est équipée d’un déclencheur par satellite « mini-C » du réseau Inmarsat.

Le réseau Inmarsat

Le réseau Inmarsat est le premier réseau satellitaire pour terminaux fixes ou mobiles à couverture mondiale. Il est utilisé par tous les navires du monde pour la transmission de message de détresse, d’urgence ou pour les communications commerciales.

Il est constitué pour la zone Pacifique d’un satellite géostationnaire et de deux satellites de secours. En cas de nécessité, Inmarsat peut passer du satellite en exploitation à un des deux satellites de secours sans nécessité de reconfiguration ou de repointage des terminaux Inmarsat-C. Cette opération est donc transparente pour l’utilisateur et quasiment instantanée.

Par ailleurs, l’émission et la réception des terminaux fixes ou mobiles ne sont pas perturbées par les événements météorologiques tels que les cyclones.

Enfin, les antennes incorporées aux terminaux Inmarsat C ne nécessitent aucun pointage, elles reçoivent sur 360° depuis la verticale jusqu’à 5° en dessous de l’horizontale.

Les sirènes peuvent être déclenchées individuellement, mais aussi par groupe (île, archipel, totalité des sirènes de Polynésie française). L’envoi du message pour déclencher les sirènes se fait dans les deux minutes et le message de confirmation arrive dans les 4 minutes (cf. schéma ci-après).

Description du système de déclenchement manuel

Source : Assystem

Par ailleurs, les municipalités disposent d’un téléphone portable satellitaire (également Inmarsat) permettant de joindre les services du Haut-Commissariat même en cas de coupure des liaisons téléphoniques locales.

Les services de la protection civile ont également passé une convention avec RFO (Réseau France Outremer) : en cas d’alerte au tsunami, un message est diffusé à la télévision.

Si la prévention revient théoriquement à l’Assemblée de la Polynésie française, le Haut-commissariat est également impliqué. Ainsi, au moment où votre rapporteur s’est rendu à Tahiti, une brochure d’information sur « l’alerte au tsunami en Polynésie française » venait d’être éditée. Enfin, dans les îles Marquises et les îles Australes, des exercices d’entraînement en grandeur nature sont organisés, accompagnés de l’évacuation et du déplacement de la population.

B. UN RISQUE QUI A COMMENCÉ À ÊTRE PRIS EN COMPTE DANS LES AUTRES BASSINS APRÈS LE TSUNAMI DU 26 DÉCEMBRE 2004

Si la communauté scientifique et certaines organisations internationales31, n’ont pas attendu la catastrophe de Sumatra pour s’intéresser au phénomène des tsunamis, il faut reconnaître que l’opinion publique a découvert cet aléa ce jour là.

1. Le « choc » de Sumatra

Plusieurs facteurs expliquent que le tsunami qui a ravagé l’océan Indien le 26 décembre 2004 ait provoqué un véritable choc dans la communauté internationale :

- son caractère exceptionnel, à la fois par son ampleur et par le nombre de victimes. Avec une magnitude de 9,3, le séisme à l’origine du tsunami est le deuxième plus violent tremblement de terre jamais enregistré avec une zone de fracture de 1200 kilomètres. En outre, il a entraîné la mort de près de 250.000 personnes et contraint le déplacement de plus d’un million et demi de personnes réparties sur les côtes de douze pays ;

- la date à laquelle cet événement s’est produit et son immense médiatisation : la période de Noël est considérée comme festive et joyeuse. Cette catastrophe naturelle a donc particulièrement marqué les populations qui ont réagi à travers un élan de générosité sans précédent : plus d’1,5 milliard d’euros ont été versés aux organisations humanitaires par des particuliers. Les médias ont certainement influencé cette générosité en diffusant quelques heures seulement après le tsunami des films pour la plupart réalisés par des particuliers sur leur appareil photo numérique ou sur leur portable dans lesquels on pouvait voir les images de cette vague submergeant les plages et les stations balnéaires. Cet événement a donc pris rapidement une dimension planétaire, d’autant plus qu’un nombre non négligeable de touristes occidentaux ont fait partie des victimes.

En outre, le fait que l’océan Indien était considéré comme une zone à faible risque tsunami a réveillé les consciences.

a) La prise de conscience de la vulnérabilité de tous les bassins

Statistiquement, l’océan Indien est considéré comme le bassin le plus sûr au regard du risque de tsunami puisqu’il ne comptabilise que 4 % des tsunamis générés au XXème siècle. Pourtant, le tsunami du 26 décembre 2004 a fait plus de victimes que l’ensemble des tsunamis connus depuis l’Antiquité.

En outre, il a été l’occasion de rappeler que certaines régions qui n’ont pas connu de tsunami de mémoire d’homme, ont été complètement dévastées dans un passé lointain : l’exemple de l’explosion volcanique à Santorin est révélateur.

b) La mise en lumière des insuffisances du système de prévention du risque de tsunami

Le tsunami de Sumatra a surtout mis en lumière les énormes insuffisances en matière de prévention du risque de tsunami.

D’abord, les images diffusées montrant les touristes jouant dans les zones où la mer s’était retirée ont révélé une ignorance complète de l’aléa et de ses manifestations par la population.

Ensuite, la violence du séisme ayant provoqué le tsunami a surpris les scientifiques et force a été de constater qu’à l’exception de la zone Pacifique, l’aléa tsunami était mal connu en l’absence de programmes de recherche suffisants dans ce domaine. Par exemple peu de catalogues des tsunamis historiques par bassin ont été publiés et les sources potentielles de tsunami n’ont pas été répertoriées de manière systématique et encore moins analysées pour pouvoir établir des cartes d’exposition à l’aléa.

Enfin, de nombreuses voix se sont élevées pour constater que si un système d’alerte avait existé, des milliers de vies humaines auraient été épargnées. La communauté internationale, sous l’égide de l’Unesco, a donc décidé de se mobiliser pour compléter le dispositif d’alerte aux tsunamis existant et l’étendre à tous les bassins.

2. L’aspiration à un dispositif d’alerte et de prévention des tsunamis efficace et couvrant tous les bassins

La communauté internationale a estimé que la mise en place d’un dispositif d’alerte efficace dans l’océan Indien, dans les Caraïbes et dans la Méditerranée nécessitait d’une part la création de groupes intergouvernementaux par bassin, à l’instar du GIC/Pacifique et, d’autre part, une relance des recherches scientifiques pour mieux connaître l’aléa tsunami dans ces régions.

a) La création de trois nouveaux groupes intergouvernementaux

Après le tsunami du 26 décembre 2004, la coopération internationale s’est considérablement renforcée dans l’objectif d’établir un système global d’alerte et de prévention des tsunamis. L’impulsion fut donnée lors de la 3ème conférence mondiale sur la prévention des catastrophes naturelles, qui s’est déroulée à Kobé (Japon) en janvier 2005 : une séance plénière a été consacrée à la création d'un mécanisme d'alerte contre les tsunamis dans l’océan Indien.

Compte tenu de son expérience dans le Pacifique, l’Unesco a été mandaté pour coordonner la mise en place du système d’alerte aux tsunamis dans l’océan Indien. La COI a organisé deux réunions au niveau ministériel en février et en mars 2005 auxquelles la plupart des Etats de l’océan Indien ont participé.

Par ailleurs, une « unité tsunami » a été mise en place au sein de la COI dès janvier 2005, destinée à soutenir les actions des groupes intergouvernementaux de coordination nouvellement créés. Elle a notamment organisé les premières réunions préparatoires ainsi que les visites d’évaluation dans plus de 18 pays de l’océan Indien.

En juin 2005, la 23ème assemblée générale de la commission océanographique internationale adopta trois résolutions visant à créer trois groupes régionaux de coordination :

- le groupe intergouvernemental de coordination du système d’alerte aux tsunamis de l’océan Indien (GIC/SATOI) qui regroupe 28 Etats, dont la France présente dans ce bassin à travers La Réunion et Mayotte ;

- le groupe intergouvernemental de coordination du système d’alerte aux tsunamis, de l’Atlantique nord-est et de la Méditerranée (GIC/SATANEM) composé de 64 Etats dont la France;

- le groupe intergouvernemental de coordination du système d’alerte dans les Caraïbes et les mers adjacentes (GIC/Caraïbes), formé de 27 Etats dont la France présente dans ce bassin à travers la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane et Saint-Martin.

L’architecture retenue pour ces trois systèmes d’alerte devrait être identique et s’inspire largement du dispositif d’alerte dans le Pacifique.

L’architecture du système d’alerte aux tsunamis


Source : COI

Chaque Etat est responsable de la collecte et du traitement des données nationales en provenance des stations sismiques et des marégraphes. Chaque Etat doit également s’assurer que ces données sont accessibles en temps réel pour tous les membres du système d’alerte. En outre, Les Etats sont chargés de réaliser toutes les simulations numériques nécessaires pour mieux connaître l’aléa, pour établir les zones d’exposition ainsi que les cartes d’aléa et d’inondation.

Les données ainsi collectées sont transmises en temps réel soit directement, soit par les Etats à un ou plusieurs centres régionaux d’avis des tsunamis32. Ces derniers sont chargés de l’analyse des données sur les séismes (localisation du tremblement de terre et estimation de sa profondeur, magnitude, date et heure du séisme) pour déterminer si un tsunami risque d’avoir été généré. Dans l’affirmative, les centres régionaux enverront un message d’alerte précisant l’heure d’arrivée et les zones concernées aux points focaux des Etats membres. Les centres régionaux se serviront également des données relatives au niveau de la mer pour confirmer le tsunami et affiner leurs prévisions ou, au contraire, pour annuler l’alerte.

Point focal et point de contact national dans le système d’alerte coordonné par la commission océanographique internationale

• Point focal du groupe intergouvernemental de coopération pour l’alerte aux tsunamis

Le point focal est la personne à contacter, joignable 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24 et désignée par le gouvernement d’un Etat membre du GIC pour recevoir et diffuser rapidement les informations relatives aux tsunamis. Le COI conseille la nomination d’un ou plusieurs organismes plutôt que de personnes. Le point focal reçoit les bulletins et alertes envoyés par les centres d’alerte régionaux et les notifie aux autorités chargées de faire face aux situations d’urgence (en règle générale les services de la protection civile). En ce qui concerne la France, Météo France sert de point focal dans les Caraïbes et dans l’océan Indien et le LDG/Pamatai assure cette responsabilité dans le Pacifique. En revanche, elle n’a pas de point focal officiel en Méditerranée même si le CEA a vocation naturelle à occuper ce rôle.

• Point de contact national du GIC pour les tsunamis

Le point de contact national du GIC pour les tsunamis est la personne désignée par le gouvernement d’un Etat membre du GIC pour représenter son pays au niveau de la coordination des activités internationales d’alerte aux tsunamis et de prévention. Cette personne est un des acteurs principaux du programme du système national d’alerte. Il peut s’agir du point focal pour l’alerte aux tsunamis ou d’une autre personne appartenant à l’organisme national chargé de la gestion des catastrophes, d’un membre d’une institution technique ou scientifique ou de tout autre entité ayant des responsabilités en matière d’alerte aux tsunamis. Dans l’océan Indien, dans les Caraïbes et dans le Pacifique, cette responsabilité est assurée respectivement par un représentant de Météo France, un représentant de l’Institut de Physique du Globe de Paris (IPGP) et un représentant du CEA. En Méditerranée, la France n’a plus de contact national depuis juin 2007.

Source : UNESCO/COI

Enfin, les points focaux sont chargés de la transmission du ou des bulletins d’alerte des centres régionaux aux autorités nationales afin que ces dernières prennent les mesures nécessaires : mise en œuvre du plan de secours spécialisé en cas de tsunami (cf. infra l’analyse du dispositif d’alerte en Polynésie française) qui mobilise tous les acteurs susceptibles d’intervenir dans la prévention du tsunami et la gestion de crise de l’après-tsunami ; alerte de la population ; évacuation des plages et des bords de mer.

A ce stade, votre rapporteur souhaite attirer l’attention sur le fait que ce dispositif ne sera réellement efficace que si les services nationaux de la protection civile disposent d’informations précises sur les effets à attendre du tsunami annoncé. Comme il a été expliqué précédemment, ces derniers sont très difficiles à prévoir dans la mesure où ils dépendent de nombreux facteurs : la position de la source, la directivité du tsunami, la bathymétrie à l’approche des côtes, la topographie du littoral. Par conséquent, le message du centre régional sera général et devra être affiné par une instance nationale. Cela suppose donc qu’un organisme en France soit capable d’analyser les bulletins émis et de comparer l’événement en cours avec des scénarios de simulation déjà réalisés afin de préciser quelles zones sont réellement exposées. Sinon, les autorités nationales seront confrontées à deux types de risque : la fausse alerte ; la sous-évaluation du risque si les effets d’amplification du tsunami dans certaines zones ne sont pas pris en compte (cf. la forte exposition des îles Marquises comparativement à celles de la Société dont Tahiti).

Par ailleurs, les tsunamis susceptibles d’affecter les côtes françaises en Méditerranée et dans les Caraïbes sont des tsunamis locaux ou régionaux : les délais pour réagir seront très brefs (entre quelques minutes et une demi-heure). Il est donc indispensable que l’organisme scientifique chargé de conseiller les autorités publiques sur le niveau de danger et sa localisation assure une permanence 24h sur 24, 7 jours sur 7 et ait accès en temps réel aux données sismiques et de mesure du niveau de la mer.

Les trois groupes intergouvernementaux de coordination se sont engagés à établir les bases du système d’alerte d’ici la fin 2007 (nomination des points focaux et des contacts dans tous les Etats membres, désignation des centres régionaux et nationaux d’alerte). D’ici 2010, les systèmes d’alerte devraient être opérationnels et tous les bassins devraient être couverts.

Chaque groupe intergouvernemental a établi un plan d’action et créé des groupes de travail chargés d’une problématique particulière censés se rencontrer régulièrement. Par exemple, le GIC/Caraïbes a créé les quatre groupes suivants :

- connaissance de l’aléa ;

- surveillance et système de détection. Ce groupe est divisé en deux sous-groupes spécialisés en sismologie et marégraphie ;

- alerte et communication ;

- secours et formation.

Suivant les régions, une réunion est organisée annuellement ou semestriellement, pour constater les progrès accomplis par les Etats membres et par les groupes de travail ainsi que pour définir les actions à mener.

D’autres initiatives de la communauté internationale devraient renforcer l’efficacité des systèmes d’alerte et de prévention des tsunamis.

Ces derniers devraient s’appuyer à moyen terme sur la mise en commun des moyens d’observation de la terre : le 3ème sommet de l’observation de la terre de février 2005 a consacré ainsi l’adoption du plan d’action décennal du système de systèmes mondiaux d’observation de la terre (GEOSS33).

Au niveau européen, ledit système pourra s’appuyer sur l’initiative GMES (Global monitoring of environment and security).

Initiative GMES

Initiateur

Agence spatiale européenne, Union européenne

Participants

Agence spatiale européenne, Union européenne (Commission et Etats membres)

Statut

En cours de développement

Objectifs

Créer une capacité européenne autonome de surveillance à différentes échelles (locales, régionales, globales) pour l’environnement et la sécurité, en support des politiques européennes (environnement, agriculture etc.) et des engagements internationaux de l’Union.

Mise en place des premiers services

2008

Source : CNES

Selon les informations obtenues par votre rapporteur, la dernière assemblée générale de la COI en juin 2007 a consacré l’idée de coopération entre les quatre systèmes régionaux d’alerte aux tsunamis et la nécessité d’inclure le système d’alerte aux tsunamis dans un dispositif plus global qui engloberait l’alerte et la prévention de tous les risques liées à l’océan (tempêtes, houles cycloniques, typhons, cyclones, élévation du niveau de l’océan).

Par ailleurs, la politique de sensibilisation et d’éducation des populations au risque tsunami a vocation à être menée dans le cadre de la Stratégie internationale de prévention des catastrophes naturelles (SIPC).

Stratégie internationale de prévention des catastrophes naturelles (SICP)

Cette action, soutenue par l’Organisation des Nations Unies (ONU), a pour objet d’aider les communautés à mieux résister aux catastrophes naturelles en considérant la réduction des risques comme une composante essentielle du développement durable. Quatre axes d’action sont privilégiés :

- attirer l’attention des populations sur les notions de risque, de vulnérabilité et de réduction des catastrophes naturelles ;

- inciter les décideurs à tous les niveaux à prendre des mesures visant à prévenir et limiter les effets des catastrophes naturelles ;

- encourager les partenariats interdisciplinaires et intersectoriels à travers le monde pour une meilleure connaissance des risques et des actions à envisager ;

- faire progresser les connaissances scientifiques pour réduire les risques

Pour mener son action, la SIPC s’appuie sur deux organismes.

L’équipe spéciale est l’organe de la SIPC qui tient le premier rôle dans l’élaboration des politiques de prévention des catastrophes. Cette équipe, dirigée par le secrétaire général adjoint de l’ONU aux affaires humanitaires, rassemble 25 organismes de l'ONU, des organisations internationales et régionales et des organisations de la société civile. Elle débat deux fois par an à Genève des problèmes d’intérêt commun et mondial liés à la prévention des catastrophes (variabilité climatique, systèmes d’alerte rapide, analyse des vulnérabilités et des risques, incendies en milieu sauvage, sécheresse, etc.).

Le secrétariat « interorganisations » sert de centre international d’échange d’informations sur la prévention des catastrophes, il organise des campagnes de sensibilisation et publie des articles, revues et autres outils « "promotionnels sur la prévention » des catastrophes naturelles.

Source : ONU

Enfin, la transmission de données rapides et fiables dans le cadre des systèmes d’alerte aux tsunamis exige une coopération étroite avec l’organisation météorologique mondiale (OMM). Institution des Nations Unies spécialisée dans la météorologie, elle gère le système mondial de télécommunications (SMT), destiné à assurer rapidement la collecte, l'échange et la diffusion des données d'observation météorologique. Le SMT est utilisé pour la transmission des données marégrahiques et des messages d’alerte34 .

b) Une forte augmentation des crédits de recherche concernant les tsunamis

Aussi bien au niveau national qu’au niveau de la commission européenne, le tsunami de Sumatra a entraîné le financement de nombreux projets de recherche touchant l’aléa tsunami.

En 2005, l’agence nationale pour la recherche (ANR) a lancé le programme CATTELL (Catastrophes Telluriques et Tsunamis) afin de développer les recherches fondamentales sur les phénomènes à l’origine des grandes catastrophes telluriques. Quatre axes ont été retenus :

- les risques sismo-tectoniques : il s’agit de promouvoir des recherches sur l’étude des failles actives continentales et sous-marines, de décrypter l’histoire des zones sismogènes, de modéliser la propagation des ondes sismiques, les systèmes d’alerte sismique précoce, ainsi que la vulnérabilité sismique des constructions ;

- les risques liés aux tsunamis : les projets sélectionnés doivent étudier les processus à l’origine des tsunamis et les recherches technologiques sur les dispositifs d’alerte aux tsunamis ;

- les risques gravitaires : il s’agit d’étudier les processus de glissements de terrains terrestres ou sous-marins, les phénomènes physiques des écoulements et les technologies associées aux dispositifs de surveillance de ces phénomènes ;

- un axe transversal : cet axe vise à soutenir la recherche technologique et méthodologique sur ces risques naturels et développer la dimension sociale et économique des systèmes d’alerte précoce.

En 2005, 17 projets ont été sélectionnés pour un budget de 5,17 millions d’euros. 61 % des projets ont porté sur l’étude du risque sismique, mais les risques liés aux tsunamis ont constitué le deuxième thème financé avec 17 % des projets financés.

En 2006, 4,2 millions d’euros ont été attribués au programme CATTELL. 14 projets ont été sélectionnés, 69 % des financements ont été affectés au thème « séisme », mais aucune étude sur les tsunamis n’a été retenue.

La commission européenne a également financé de nombreux programmes de recherche après le tsunami de Sumatra du 26 décembre 2004.

Certains projets avaient déjà été réalisés avant ce tsunami dévastateur. Ainsi, GITEC (Genesis and Impact to Tsunamis in the European Community) et GITEC TWO (pour Tsunami Warning and Observations) ont permis l’élaboration d’un catalogue des tsunamis européens (228 événements ont été recensés de -6000 à 2003) et l’amélioration des techniques de simulation. En outre, plusieurs systèmes expérimentaux d’alerte aux tsunamis ont été testés au large du Portugal, dans la mer Ionienne et dans le Péloponnèse.

De même, le projet BIGSETS (Big Sources of Earthquake and Tsunami in South West Iberia) a amélioré les connaissances sur les sources du tsunami de 1755 qui a dévasté Lisbonne.

Dans le sixième programme cadre de recherche (2002-2006), 48 millions d’euros sont consacrés aux catastrophes naturelles, dont 7,45 millions d’euros pour les tsunamis dans le cadre de trois projets : TRANSFER, NEAREST et SEAHELLARC.

Le projet TRANSFER (Tsunami Risk and Strategies For the European Region) est doté de 3,3 millions d’euros et associe 29 partenaires. Commencé le 1er octobre 2006, il s’achèvera en avril 2009. Ce projet a pour but d’améliorer les connaissances sur la propagation des tsunamis en Méditerranée et de contribuer à la mise en place d’un système précoce d’alerte aux tsunamis dans cette zone. 9 groupes de travail ont été constitués, travaillant sur les problématiques suivantes :

- l’amélioration et l’actualisation du catalogue des tsunamis européens ainsi que son intégration dans un catalogue mondial des tsunamis ;

- l’identification et la caractérisation des sources tsunamigènes sismiques et non sismiques dans la zone Euro-Méditerranéenne ;

- l’analyse des systèmes actuels d’observation sismique et marégraphique et de traitement des données ainsi que l’identification des ajustements nécessaires pour la mise en place d’un dispositif d’alerte aux tsunamis efficace ;

- l’amélioration des modèles de simulation de tsunami afin que soient mieux pris en compte la propagation du tsunami et son impact sur les côtes.

Par ailleurs, sept zones géographiques ont été retenues auxquelles seront appliquées des scénarios de tsunami. Des cartes d’inondation seront dressées et des plans d’alerte et de prévention seront établis.

Le projet NEAREST (Integrated observation from near shores sources of tsunami) est doté de 2,8 millions d’euros et associe 11 partenaires. Il a pour but d’identifier et de caractériser les sources susceptibles de générer des tsunamis locaux dans le Golfe de Cadiz. Un observatoire sous-marin équipé de capteurs sismiques et de pression a vocation à être installé, servant de prototype à un système d’alerte précoce aux tsunamis. De nouvelles simulations seront réalisées dans la zone de l’Algarve, fortement touchée par le tsunami de 1755 et de nouvelles cartes d’inondation seront tracées.

De même, le projet SEAHELLARC (SEismic risk Assessment and mitigation scenarios in western HELLenic ARC)35 prévoit le développement d’un réseau de capteurs sur terre et en mer pour mieux observer la séismicité dans l’Arc hellénique et les éventuels tsunamis. La bathymétrie de cette zone fera l’objet d’un relevé précis afin d’identifier les failles et les aires susceptibles de subir des glissements de terrain. L’objectif recherché est d’identifier toutes les sources tsunamigènes. En outre, une étude de vulnérabilité aux tsunamis sera réalisée sur la ville de Pylos qui servira de base à la mise en place d’un plan de prévention et d’alerte aux tsunamis.

Par ailleurs, d’autres projets financés par la commission européenne participent indirectement à la mise en place d’un dispositif efficace d’alerte aux tsunamis.

Ainsi, le projet SAFER36 vise le développement d’outils pour la protection civile permettant une alerte précoce, surtout dans les zones densément peuplées. Il s’agit notamment de créer de nouveaux algorithmes pour une détermination rapide de la localisation du séisme, mais aussi des caractéristiques de la faille. En outre, de nouveaux outils seront développés pour produire des cartes d’alerte en temps réel ainsi que des simulations des dégâts causés par le séisme.

Actuellement, les séismes qui se produisent dans la région euro-méditerranéenne sont enregistrés par 100 systèmes d’observation différents gérés par 46 pays. Le projet NERIES (Network of Earthquake Research Institutes for Earthquake Seismology) a vocation à mettre en réseau ces multiples systèmes de surveillance, à améliorer l’accès aux données et à harmoniser la distribution et l’archivage des données.

Par ailleurs, le projet ESONET (European Seas Observatory Network of Excellence) propose d'établir les bases d’une composante marine de GMES (Global Monitoring for Environment and Security) comprenant un réseau d’observatoires permanents au fond de la mer, pluri-disciplinaires et implantés dans des zones clefs des marges continentales européennes, permettant une surveillance continue sur les plans géophysique, biogéochimique, océanographique et biologique. ESONET s’intéressera particulièrement aux marges océaniques au-delà de la limite du plateau continental et jusqu’aux profondeurs de 4 000 mètres, zone bien moins connue que le plateau continental lui-même et non couverte par les systèmes de recueil de données océaniques existants. Le domaine des marges océaniques européennes s’étend approximativement sur 15 000 km de long, de l'océan Arctique à la Mer Noire, couvrant une superficie d'à peu près 3 millions de km². Le projet EMSO (European Multidisciplinary Seas Observation) est responsable du déploiement des observatoires au fond de la mer. 5 sites (avec pour chacun un thème de recherche spécifique) ont été retenus, dont un en mer Ligure qui a vocation à fixer ses instruments de mesure sur le câble du projet ANTARES37. Cet observatoire sera chargé d’étudier les risques géophysiques près de zones très peuplées et de tester des instruments soit déposés au fond des mers, soit utilisant des forages.

Enfin, le sixième programme cadre de recherche finance à hauteur de 4 millions d’euros le projet DEWS (Distant Early Warning System) soutenu par la Direction générale « Information de la société et média » de la commission européenne. Il vise à compléter le dispositif d’alerte en train d’être mis en place par les Allemands en Indonésie38 en utilisant les technologies de l’information pour rendre les réseaux de capteurs plus performants, pour raccourcir les durées de diffusion des messages d’alerte et pour améliorer la coopération non seulement entre les pays, mais également entre les autorités responsables.

3. Des résultats inégaux

a) L’océan Indien : une mobilisation internationale qui porte ses fruits

A la suite du tsunami de Sumatra, les pays de l’océan Indien touchés par cette catastrophe naturelle ont fait l’objet d’un élan de solidarité sans précédent. Ainsi, les dons versés par les Etats-Unis s’élèvent à 1,95 milliard d’euros, dont 714 millions d’euros en provenance du gouvernement et 1,2 milliard de dons privés. L’Allemagne a été le deuxième plus gros contributeur, avec 536 millions d’euros en provenance du gouvernement allemand et 553 millions d’euros de dons privés. Outre les sommes versées pour l’aide humanitaire et la reconstruction des zones sinistrées, de nombreux pays ont souhaité coopérer à la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis dans l’océan Indien. Comme il a été indiqué précédemment, l’Allemagne a engagé 45 millions d’euros pour l’instauration d’un système d’alerte en Indonésie. De même, le Japon a installé 23 stations sismiques « large bande » dans ce pays.

En attendant que le système d’alerte aux tsunamis dans l’océan Indien devienne opérationnel, les centres d’alerte de Hawaï (PTWC) et du Japon assurent l’intérim à travers la diffusion de messages d’information39.

Le groupe intergouvernemental de coordination pour l’alerte aux tsunamis dans l’océan Indien s’est déjà réuni à quatre reprises. Lors de la dernière session au Kenya en février-mars 2007, d’importants progrès ont été constatés.

Les visites d’évaluation des capacités des pays pour mettre en place un dispositif d’alerte effectuées entre juin et septembre 2005 grâce à des financements de pays donateurs ont été très efficaces. Elles ont, grâce à la présence d’experts envoyés par les institutions onusiennes (Unesco, l’OMM et la SICP), contribué à sensibiliser les Etats qui ont, par la suite, soutenu activement la mise en place du système d’alerte.

Par exemple, la plupart des pays sont engagés dans l’installation des instruments de mesure nécessaires à l’analyse de l’aléa et dans la transmission des données en temps réel. Ainsi, l’Inde est en train de moderniser son réseau de stations sismiques et prévoit l’installation de 50 marégraphes et de 12 capteurs de pression (tsunamimètres). En Indonésie, 67 des 160 stations sismiques prévues transmettent déjà leurs données en temps réel ; 25 tsunamimètres et 80 marégraphes devraient compléter le dispositif.

Certains pays ont également déjà pris des mesures pour alerter la population. En Malaisie, des sirènes devraient être installées dans les zones fortement peuplées. En Thaïlande, le centre national d’alerte aux catastrophes naturelles pourra interrompre les programmes de 14 stations de télévision et de nombreuses radios pour diffuser ses messages.

En outre, des sessions de formation ont été organisées à Dubaï sur l’évaluation des risques et à Perth sur l’élaboration des cartes d’inondation. Chaque groupe de travail a défini un programme d’action précis et les échanges d’informations entre les participants de chaque groupe sont nombreux. A cet égard, le soutien logistique apporté par l’Australie qui finance notamment le secrétariat du groupe est un atout non négligeable.

Enfin, un centre d’information aux tsunamis sur le modèle de celui existant déjà à Hawaï devrait être créé à Jakarta, financé par le Canada.

Pour autant, certaines lacunes persistent auxquelles les pays du GIC/SATOI devront remédier.

D’abord, un test mené par le centre d’alerte aux tsunamis à Hawaï en février 2007 a révélé certains dysfonctionnements dans la réception des messages d’alerte par les points focaux nationaux. Ainsi, tous les Etats n’ont pas confirmé avoir bien reçu le message d’alerte. En outre, ce test a montré l’inégalité des performances des trois outils de communication utilisés selon les Etats : alors que la transmission du message à l’aide du système mondial de télécommunications a nécessité entre 1 à 5 minutes, il a fallu entre 10 à 15 minutes par fax et entre 1 à 59 minutes par email pour que le message soit reçu.

Ensuite, l’évaluation correcte de l’aléa tsunami en cas de séisme dans la région se heurte à plusieurs difficultés : le nombre des instruments de mesure à terre comme en mer fournissant des données en temps réel reste insuffisant ; il n’existe pas de données bathymétriques et topographiques de haute résolution près des côtes ; aucune étude des paléotsunamis n’a été entreprise pour mieux comprendre les anciens événements.

Par ailleurs, l’intégration des réseaux nationaux dans un système régional d’alerte peine à se mettre en place. Les échanges des données sismiques et marégraphiques entre les Etats du GIC/SATOI restent encore très partiels tandis que l’architecture prévue à l’origine (à savoir un ou plusieurs centres régionaux qui diffuseraient les messages d’alerte à des centres nationaux) a été récusée. En effet, les Etats ne souhaitent pas être tributaires d’un centre particulier pour l’émission de l’alerte pour une zone géographique précise et privilégient plutôt la multiplication des sources d’informations. Le système d’alerte ne serait donc pas composé de « centres régionaux d’alerte aux tsunamis », mais de « fournisseurs régionaux d’avis de tsunami »40 avec lesquels chaque Etat passerait un accord pour recevoir les bulletins émis.

Enfin, d’importants progrès restent à accomplir dans la diffusion de l’alerte auprès de la population. Selon les informations obtenues par votre rapporteur, peu d’Etats ont mis en place un plan de secours au niveau national et local définissant les responsabilités et les missions de tous les intervenants en cas d’alerte aux tsunamis. L’événement du 17 juillet 2006 qui a fait plus de 500 victimes en Indonésie a révélé les défaillances du dispositif d’alerte : le PTWC a bien transmis un bulletin d’information aux autorités indonésiennes, mais celles ci ont été incapables de protéger la population en diffusant rapidement une information précise des zones côtières menacées.

En dépit de ces insuffisances, le bilan des actions menées par le GIC/SATOI est plutôt positif. Il ne faut pas oublier que cette initiative a été créée il y a seulement deux ans et qu’il a fallu près de 40 ans au système d’alerte aux tsunamis dans le Pacifique pour être véritablement efficace. L’instauration du système d’alerte aux tsunamis dans l’océan Indien a profité d’une manne financière sans précédent de la part de nombreux pays donateurs. Elle a pu également s’appuyer dès avril 2005 sur les messages fournis par les centres du Pacifique et sur l’expérience accumulée par le GIC/Pacifique et profité des avancées technologiques récentes (tsunamimètres, modèles de simulation toujours plus performants, etc.). Toutefois, un certain nombre d’années sera nécessaire non seulement pour mettre en place un système d’alerte international et national efficace, mais aussi pour créer des relations de confiance entre les Etats et développer un dispositif régional basé sur la coopération et l’échange de données.

Il convient de remarquer que l’architecture des réseaux de surveillance dans l’océan Indien est beaucoup plus simple que dans les autres bassins comme en témoigne la carte ci-après.

Les différents types de tsunamis susceptibles
de toucher les pays de l’océan Indien


- les zones entourées en rouge sont soumises à des tsunamis locaux

- les zones en tirets orange sont soumises à des événements régionaux

- les zones en jaune sont soumises à des tsunamis lointains

Source : CEA/DASE

En effet, contrairement aux autres régions où les Etats sont exposés au risque à la fois de tsunamis locaux, régionaux et parfois lointains, tous les pays de l’océan Indien à l’exception de la Birmanie et de l’Inde sont exposés à un seul type de tsunami :

- la Birmanie, les îles Andaman et Nicobar, le Timor, l’Iran et le Pakistan peuvent être touchés par des tsunamis locaux. Pour que le dispositif d’alerte soit efficace, ces pays doivent donc être équipés de réseaux denses de surveillance et de centres d’alerte très réactifs, avec des permanences 24h sur 24 7 jours sur 7 ;

- la Birmanie, la Thaïlande, la Malaisie, Singapour, Sri Lanka, l’Inde, l’Australie et Oman sont menacés par des tsunamis régionaux : les délais de réaction en cas d’alerte sont donc plus grands ;

- enfin, les 16 pays situés dans le cercle jaune sont exposés à des télétsunamis : leurs réseaux de surveillance peuvent donc être moins denses et une simple astreinte est suffisante dans les centres d’alerte.

En conséquence, les coûts globaux d’investissement et de fonctionnement sont, proportionnellement aux dimensions de l’océan Indien, 3 à 5 fois plus faibles que dans les autres bassins où les Etats doivent être équipés contre tous les types de tsunami.

En contrepartie, ce relatif cloisonnement des dispositifs d’alerte expliquerait les difficultés rencontrées pour l’intégration des réseaux nationaux dans un dispositif régional d’alerte.

b) Les Caraïbes : de nombreux obstacles à la mise en place d’un système d’alerte efficace

Depuis la création du groupe intergouvernemental de coordination du système d’alerte aux tsunamis dans les Caraïbes, seulement deux réunions se sont tenues à Barbade en 2006 et au Venezuela en 2007 et les progrès réalisés sont limités.

D’abord, la zone des Caraïbes cumule plusieurs handicaps : c’est une région « multirisque » (cyclones, tremblements de terre, éruptions volcaniques, tsunamis) composée de nombreuses petites îles et pays disposant de ressources financières et logistiques faibles.

Comme le risque de tsunami a longtemps été ignoré, elle est mal équipée en instruments de mesure capables de détecter un tsunami et d’élaborer un message d’alerte fiable. Compte tenu du risque sismique important dans cette zone, plusieurs réseaux sismologiques existent, même si certaines régions comme le Mexique et Cuba restent mal couvertes. A terme, il faudrait que chaque île dispose d’une station sismique afin de détecter très rapidement les tremblements de terre.

En ce qui concerne les marégraphes, il a été constaté lors de la dernière réunion que 60 % d’entre eux sont hors service et que très peu parmi ceux qui fonctionnent transmettent leurs données en temps réel.

Source : Porto Rico seismic network

En outre, c’est une région dans laquelle les délais de réaction doivent être très brefs. Ainsi, un tsunami généré dans les îles Vierges arrivera en 1h15 en Guadeloupe, mais en 10 minutes seulement s’il a été généré à Montserrat. Les principes de l’alerte appliqués dans la région du Pacifique où les distances à parcourir sont beaucoup plus longues ne sont donc pas pertinents pour la zone Caraïbes. Or, la dernière conférence a révélé que la moitié des pays de la zone n’avaient pas encore nommé leur point focal.

L’absence de moyens financiers ralentit considérablement l’avancée des travaux du groupe. Le GIC/Caraïbes dispose à Cartagène (Colombie) du secrétariat de la COI section Caraïbes. Toutefois, et contrairement GIC/SATOI, il n’a pas de personnel chargé de gérer spécifiquement ses actions et, en particulier, d’organiser les réunions de travail localement : à la dernière session de 2007, il est apparu que trois groupes de travail sur quatre ne s’étaient pas réunis depuis un an, faute de financement.

Enfin, il faut souligner les difficultés liées aux relations parfois difficiles entre les Etats de la zone qui constituent des obstacles non négligeables à la mise en place d’un dispositif d’alerte fondé sur le partage des données. Ainsi, lors de la réunion au Venezuela, l’institut vénézuélien chargé des études sismiques41 a annoncé qu’il ne souhaitait pas contribuer au système de surveillance international des tsunamis à travers l’échange des données sismiques.

Les Caraïbes disposent cependant d’un atout : la présence dans la zone de territoires américains (Porto Rico et les îles Vierges) et la proximité de la Floride. Dans le cadre du programme national d’alerte et de limitation des effets du tsunami, les Etats-Unis ont pris plusieurs mesures destinées à l’origine à protéger leurs côtes mais qui bénéficient à l’ensemble des Etats de la région.

D’abord, dès 2006, il a été acté que les deux centres d’alerte aux tsunamis PTWC et WC-ATWC assureraient l’intérim en attendant la mise en place d’un système d’alerte régional.

Par ailleurs, Porto Rico est vite apparu comme le pays le plus avancé en matière d’alerte aux tsunamis. Après avoir lancé avec l’aide du GIC/Pacifique un programme d’alerte et de réduction des effets des tsunamis en 2000, un système d’alerte aux tsunamis a été établi en 2003. La détection des séismes susceptibles de générer un tsunami a été confiée au réseau sismique de Porto Rico, en collaboration avec le PTWC.

Ce système est peu à peu amélioré. En 2006, l’US Geogical Survey a installé 9 stations sismologiques reliées par communication satellitaire au réseau sismique de Porto Rico pour compléter la couverture des réseaux. Par ailleurs, une bouée DART a été installée dans la mer des Caraïbes, une autre dans le golfe du Mexique et deux au Nord de Porto Rico.

En conséquence, même si le réseau sismique de Porto Rico ne remplit pas actuellement toutes les conditions d’un centre d’alerte42, en pratique, il a été reconnu comme tel par la plupart des Etats de la région. Ainsi, plus de 50 stations sismologiques large bande de la zone Caraïbes lui transmettent leurs données en temps réel. Lors de la dernière réunion, le réseau sismique de Porto Rico a d’ailleurs distribué à tous les participants une demande de financement de 815 000 euros adressée au Congrès américain visant à assurer les frais de fonctionnement du futur centre d’alerte pour la période 2007-2010.

c) L’Atlantique nord-est et la Méditerranée : l’attentisme des Etats

Le groupe intergouvernemental de coordination pour la Méditerranée et l’Atlantique nord-est s’est déjà réuni 4 fois : à Rome en novembre 2005, à Nice en mai 2006, à Bonn en février 2007 et à Lisbonne fin novembre 2007. Pourtant, la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis dans cette zone apparaît laborieuse.

La couverture sismique des pays du pourtour Méditerranéen est loin d’être homogène aussi bien en ce qui concerne le nombre de stations sismiques que le type de sismomètre installé. En outre, de nombreux pays, en particulier les pays d’Afrique du Nord, refusent l’accès à leurs données. Or, la détection rapide d’un séisme et la détermination de manière fiable de son épicentre, de sa profondeur et de sa magnitude reposent sur un maillage dense de sismomètres dont les données sont accessibles par tous. Dans la mesure où les sources susceptibles de déclencher un tsunami à l’échelle du bassin méditerranéen sont situées sur les failles au large de l’Afrique du Nord, l’attitude fermée des pays de cette région constitue un obstacle majeur.

Par ailleurs, très peu de stations marégraphiques transmettent leurs données en temps réel, ce qui ne permet pas de les utiliser dans le cadre d’une alerte aux tsunamis et de vérifier si un tsunami a été induit. Pour les stations marégraphiques les plus modernes (ainsi que pour de nombreuses stations sismiques), la transmission des données ne se fait pas par satellite mais par internet, alors même qu’il s’agit d’un moyen de télécommunication vulnérable en cas de séisme.

Le groupe de travail sur les instruments de mesure du niveau de la mer a sélectionné une trentaine de marégraphes particulièrement stratégiques et exhorté les Etats chargés de la gestion et du traitement des données de ces marégraphes à les rendre opérationnels pour la détection d’un tsunami43 d’ici la fin de 2007. La réussite de cette action dépend cependant de la bonne volonté des Etats puisqu’aucun financement spécifique n’est prévu. Ce programme risque donc de prendre du retard compte tenu de la difficulté rencontrée par les organismes responsables des marégraphes pour obtenir des crédits pour l’amélioration de leurs instruments de mesure. Ainsi le SHOM (service hydrographique et océanographique de la marine) chargé d’améliorer les performances des marégraphes situés sur les côtes françaises a déjà fait savoir que faute de crédits, seules les données du marégraphe du Conquet seront transmises en temps réel en 2007.

Liste des marégraphes jugés prioritaires pour la mise en place
d’un système d’alerte aux tsunamis dans la Méditerranée


Source : COI

En outre, tout comme pour les données sismiques, la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis efficace se heurte au refus de nombreux pays d’Afrique du Nord de transmettre leurs données marégraphiques.

De même, l’installation de capteurs de pression au large est rendue difficile à la fois par le manque de crédits.

Au-delà de la détection, il semble qu’aucun Etat ne se soit engagé dans l’élaboration d’un plan d’alerte définissant les mesures à prendre par tous les acteurs chargés de la protection de la population. Aucune zone d’inondation n’a été définie, aucun plan d’évacuation n’est opérationnel. Les modalités de l’alerte n’ont pas été définies (sirènes, messages radio) et aucune action de sensibilisation et d’éducation de la population n’a été entreprise.

Votre rapporteur a constaté que l’Union européenne par le biais de la commission n’était pas impliquée dans la mise en place du système d’alerte aux tsunamis dans la zone Méditerranée/Atlantique nord-est. Cette absence est surprenante à plusieurs égards.

D’abord, ce projet est par nature européen : tous les pays européens sont concernés, les uns parce qu’ils bordent la Méditerranée, les autres parce qu’une proportion non négligeable de leur population se rend en villégiature sur les côtes des pays méditerranéens.

En outre, ce projet nécessite l’installation d’infrastructures (stations sismiques, marégraphes, tsunamimètres) utiles à tous les pays mais dont le financement incombe jusqu’à présent aux Etats nationaux. La prise en charge d’une partie de l’instrumentation à travers des programmes européens apparaît donc légitime et accélèrerait certainement la mise en place du dispositif d’alerte.

Enfin, ce projet ne deviendra opérationnel que si les pays d’Afrique du Nord acceptent de coopérer. L’Union européenne peut les y inciter dans le cadre de sa politique euro-méditerranéenne.

D’après votre rapporteur, l’élaboration d’une stratégie claire en matière d’alerte aux tsunamis au niveau de la zone Méditerranée/Atlantique du nord-est est brouillée par deux autres problématiques : la diversité des sources tsunamigènes et l’aspiration à une alerte multirisque.

Les systèmes d’alerte en train d’être instauré dans l’océan Indien, dans les Caraïbes et en Méditerranée/Atlantique nord-est ont vocation à gérer des tsunamis régionaux et des télétsunamis, c’est-à-dire des tsunamis dont la source est dans la majorité des cas sismique et située à une distance telle que le délai entre l’occurrence du séisme et l’arrivée du tsunami sur les côtes est compris entre 20 minutes et plusieurs heures. Pour les côtes touchées plus rapidement (notamment celles situées près de la source), le dispositif d’alerte tel qu’il est prévu actuellement n’est pas opérationnel car les délais sont trop courts et aucun Etat n’a pris position sur une automatisation de l’alerte par le biais de sirènes.

Or, l’étude des sources tsunamigènes en Méditerranée montre que le danger n’est pas simplement d’origine sismique, mais également lié aux instabilités gravitaires et aux volcans actifs. Le risque de tsunamis locaux n’est donc pas négligeable alors même qu’il ne peut pas être géré convenablement par le dispositif proposé. Certains pays sont donc en train de remettre en question le bien-fondé du système parce qu’il ne propose rien pour les tsunamis locaux.

Selon votre rapporteur, cette attitude n’est guère justifiée : compte tenu des difficultés déjà rencontrées pour l’instauration d’un système d’alerte aux tsunamis régionaux, il serait illusoire de vouloir le rendre à ce stade opérationnel pour les tsunamis locaux. En effet, ces derniers exigent une instrumentalisation très dense et une surveillance permanente des zones d’instabilité gravitaire et des volcans qui ne peuvent être prises en charge que par les Etats nationaux concernés. Il convient de rappeler que dans le dispositif pour le Pacifique, le PTWC sert également de centre d’alerte local pour Hawaï. Les Etats de la Méditerranée/Atlantique Nord particulièrement exposés aux tsunamis locaux seront donc amenés à développer un système d’alerte national, voire local. L’Italie a ainsi installé une surveillance permanente du Stromboli après le tsunami du 30 décembre 2002.

Par ailleurs, la zone géographique retenue (Méditerranée/Atlantique Nord-est) n’est pas exposée de manière uniforme aux aléas tsunamis. L’Europe du Nord est moins concernée par les tsunamis et doit plutôt lutter contre les ondes de tempête. Ces pays n’ont donc accepté de participer à la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis qu’à condition que l’alerte soit étendue à l’ensemble des risques d’origine marine.

Les défenseurs de cette approche multirisque estime que le financement des instruments de mesure du niveau de la mer devrait en être facilité puisqu’ils serviront à la détection de plusieurs risques. Pour autant, l’élargissement du système d’alerte à plusieurs risques peut également freiner sa mise en place. En effet, les connaissances scientifiques exigées ne sont pas les mêmes : la détection d’un tsunami s’appuie sur un réseau sismologique, les tempêtes sont du ressort des services météorologiques. De même, les plans de prévention sont distincts dans la mesure où les délais de réaction sont très variables. Alors que l’instauration d’un dispositif pour un seul risque s’avère relativement laborieuse, nécessitant l’organisation de multiples réunions pour dégager un consensus, le processus de décision risque d’être encore ralenti si d’autres aléas doivent être pris en compte.

***

Depuis le tsunami de Sumatra, la communauté internationale a pris conscience que le risque de tsunami n’était pas limité au Pacifique, mais concernait tous les océans. Chaque bassin a donc entrepris la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis.

Les résultats observés sont inégaux : les pays de l’océan Indien, encore très marqués par la catastrophe du 26 décembre 2004 et les trois autres tsunamis générés depuis44, restent fortement impliqués. Aux Caraïbes et dans la zone de la Méditerranée/Atlantique Nord-est, une fois l’émotion passée, la plupart des Etats dont la France semblent désormais réticents à investir dans un système d’alerte pérenne compte tenu de la rareté de l’aléa.

III. LA POSITION DE LA FRANCE : UN ATTENTISME INACCEPTABLE COMPTE TENU DE LA GRAVITÉ DES ENJEUX

La France à travers ses départements et territoires Outre-mer est présente dans tous les océans, ce qui devrait la pousser à jouer un rôle moteur dans l’instauration des systèmes d’alerte aux tsunamis. En réalité, une fois l’émotion liée à la catastrophe de Sumatra passée, la volonté politique s’est émoussée, laissant les services techniques assumer seuls et sans moyens les engagements pris par la France il y a à peine deux ans.

A. UNE FORTE VULNÉRABILITÉ AUX TSUNAMIS QUI DEVRAIT CONDUIRE À UN ENGAGEMENT IMPORTANT DE LA FRANCE

Les côtes françaises sont toutes concernées par l’aléa tsunami, la France a donc intérêt au développement d’un système d’alerte au niveau international.

1. Des enjeux de sécurité importants

a) Une exposition au risque particulièrement grande compte tenu de sa géographie

Les zones économiques exclusives (ZEE) françaises couvrent plus de 10 millions de km² dans l’océan Atlantique, l’océan Indien et l’océan Pacifique. La France se situe ainsi au deuxième rang mondial après les États-Unis.

A contrario, cela signifie qu’elle est particulièrement exposée au risque de tsunami.

La France compte 5.800 km de côte en métropole. S’agissant de la côte française en Méditerranée, les événements suivants ont été répertoriés :

- Le 20 juillet 1564, un séisme a entraîné une inondation à Antibes et des dégâts à Nice ;

- le 4 février 1808, un flux / reflux fut observé à Marseille après un séisme ;

- le 9 décembre 1818, un séisme a entraîné de violentes vagues à Antibes ;

- le 23 février 1887, un séisme en mer Ligure a provoqué un retrait de la mer suivie de vagues qui sont montées jusqu’à 2 m d’altitude à Cannes et à Antibes, inondant les plages et causant des destructions matérielles ;

- le 16 octobre 1979, l’effondrement d’une partie de l’aéroport de Nice a entraîné des vagues de 3 m de haut sur Antibes ;

- le 21 mai 2003, le tsunami généré par le séisme de Boumerdès (Algérie), de magnitude 6,8 sur l’échelle de Richter, a causé des dégâts dans certains ports français.

Ces deux derniers événements sont symptomatiques des événements qui pourraient affecter, à l’avenir, la côte d’Azur.

D’une part, un effondrement de terrain est susceptible d’engendrer un tsunami local, dont le délai de propagation serait très court. Dans le cas de l’aéroport de Nice, les travaux et l’instabilité de la zone se sont sans doute conjugués pour provoquer l’accident. De façon générale, en mer Ligure (de Fréjus à Menton pour la France), la côte est jugée instable et profonde, ce qui crée des conditions maximales de risque.

D’autre part, le contexte géodynamique de la côte méditerranéenne en fait une zone de danger. Un tremblement de terre provoquant un effondrement de terrain ou un séisme sous-marin pourrait générer un tsunami qui aggraverait l’événement. Un tel séisme pourrait se produire en mer Ligure, où il existe des failles actives. Il pourrait également avoir lieu en Algérie. Ainsi, le séisme de Boumerdès s'est produit à la zone frontière entre la plaque tectonique eurasienne et la plaque africaine, dans une région où la plaque africaine bouge vers le nord-ouest, contre la plaque eurasienne, à une vitesse de quelques millimètres par an. Le déplacement relatif de la plaque crée un environnement tectonique propice à des tremblements de terre de magnitudes élevées potentiellement générateurs de tsunamis de plusieurs mètres de haut, avec des délais d’alerte très courts (maximum une heure).

La France compte également plus de 12.000 km de côtes Outre-mer, dans tous les océans du globe. Le risque de tsunami existe particulièrement à La Réunion, dans le Pacifique et aux Antilles.

Environ 7 heures après le séisme du 26 décembre 2004 au large de Sumatra, le tsunami a atteint les côtes de La Réunion avec des vagues d’une hauteur maximale de 2,50 m, qui ont provoqué près de 500 000 euros de dégâts matériels.

Dans le Pacifique, le risque de tsunami est bien pris en compte en Polynésie française mais ne fait jusqu’à présent l’objet d’aucune surveillance à Wallis et Futuna et en Nouvelle Calédonie. Pourtant, plusieurs événements témoignent de la réalité de ce risque dans ces deux régions.

Tsunamis observés en Nouvelle Calédonie

Date

Origine

Observations

28-03-1875

Séisme 8

Vanuatu

Tsunami destructeur à Lifou

4-10-1931

Séisme 7.9

Salomons

Tsunami 1.5m à Hienghene, bateaux renversés

19-7-1934

Séisme 7.8

Est Salomons

Tsunami 1.3m à Hienghene, Touho

21-7-1934

Séisme 7

Est Salomons

Tsunami à Hienghene, Touho, Thio

1951

Origine et date exactes inconnues

Tsunami au nord d’Ouvéa

1993

Séisme 6,3

Futuna

Tsunami local qui n’a pas causé de dégât

1er avril 2007

Séisme 8,7

Salomons

Tsunami à Hienghene, Bindinmié et Touho

Source : CEA, COI

Aux Antilles, l’histoire des tsunamis reste encore mal connue, mais l’on sait que le tremblement de terre de Lisbonne (1755) y causa des vagues de 3 à 6 m de haut. La sismicité de cette région est dominée par des ruptures du contact entre la plaque Nord-Atlantique et la plaque Caraïbe, la première plongeant sous la seconde de 2 cm/an. Cette région est également fortement volcanique.

La dernière décennie fut marquée par plusieurs événements :

• Un séisme a eu lieu le 21 novembre 2004 au large de la Guadeloupe, à une dizaine de kilomètres au sud des îles des Saintes. Sa magnitude 6,3 en a fait le plus gros séisme ayant touché l'archipel depuis 1897. Un « creux » s’est formé au fond de l’océan, induisant des mouvements d'eau qui ont généré un tsunami voyageant à une centaine de km/h. L’eau s’est retirée d’environ 80 m. Les mesures faites par des géologues quelques semaines après sur les côtes voisines ont montré, par les débris déposés, que la mer était montée de plusieurs mètres en certains endroits de la côte sud des Saintes. Les dégâts ne furent heureusement que matériels.

• Les effondrements successifs du dôme du volcan de l’île voisine de Montserrat ont entraîné des tsunamis sur les côtes de Guadeloupe en 2003 (d’une hauteur de 8 m à Montserrat et de 70 cm à la Guadeloupe) et en 2006 (avec des vagues atteignant 1 m à la Guadeloupe).

Les effondrements du volcan de Montserrat ont entraîné l’entrée en mer de 200 millions de m3 de matériel volcanique depuis 1997. Or il a été montré que d’autres volcans des Antilles ont provoqué, dans le passé, des glissements beaucoup plus importants. Ainsi, la Montagne pelée (Martinique) a rejeté dans la mer plusieurs km3 de roche il y a 100.000, 25.000 puis 9.000 ans. Une simulation a montré qu’un nouvel effondrement de ce volcan, à hauteur d’1 km3, pourrait entraîner une vague de 10 à 20 m de haut dans la région. Quant à la Soufrière de la Guadeloupe, elle s’est effondrée environ tous les 1000 ans depuis 8000 ans, et pour la dernière fois il y a 400 ans.

Enfin, il existe un volcan sous-marin actif près de la Grenade, dénommé le « kick’em Jenny », qui pourrait, lui aussi, avoir des effets ravageurs. Ce volcan est actuellement situé à 180 m sous la surface de la mer. Il devrait, à terme, conduire à l’apparition d’une nouvelle île.

b) Des littoraux fortement peuplés

En outre, la forte densité de la population sur les côtes françaises à travers une importante urbanisation et l’industrialisation poussée des côtes rend ces dernières très vulnérables. Les exemples suivants sont révélateurs.

En 1999, la densité de la population sur le littoral communal métropolitain était de 272 habitants par km² contre une moyenne nationale de 108 habitants par km². Localement, ces chiffres peuvent atteindre 2500 habitants par km² sur le littoral des Alpes maritimes. Ce département45 accueille près de 10 millions de touristes par an, avec des pics de 750.000 touristes par jour en été.

En ce qui concerne Tahiti, 30.000 personnes sont sur les routes le long de la mer pour rejoindre ou quitter Papeete entre 6h30 et 8h30. Les parcs de carburants sont sur les ports, l’aéroport est au bord de la mer, de même que le central de l’Office des Postes et des Communications.

2. Des atouts non négligeables

La France peut s’appuyer sur le précédent polynésien et sur des organismes de référence en géosciences et en océanographie pour contribuer à la mise en place de systèmes internationaux d’alerte aux tsunamis.

a) Le précédent polynésien

La France a acquis une expérience précieuse en Polynésie française à travers la gestion du centre polynésien de prévention des tsunamis. Elle a su mettre en place un dispositif national d’alerte opérationnel et autonome capable de gérer toute la chaîne de l’alerte de la détection du séisme à l’évacuation de la population. Ce dispositif a été peu à peu perfectionné pour tenir compte des insuffisances observées lors de la survenue de tsunamis et des avancées de la science.

Cette expérience pourrait donc être mise à profit pour l’instauration de systèmes d’alertes dans les autres bassins. Ainsi, les matrices de décision46 et les plans de secours spécialisés sont deux outils fondamentaux qui pourraient être repris en étant adaptés aux caractéristiques de chaque bassin et de chaque Etat membre.

b) Des organismes de référence en géosciences et en océanographie de qualité

Par ailleurs, la France dispose d’organismes d’excellente qualité qui peuvent contribuer activement à l’efficacité des systèmes d’alerte aux tsunamis, à condition de leur en donner les moyens.

Votre rapporteur se gardera d’essayer de dresser une liste exhaustive des instituts de recherche et des universités sur lesquels la France peut s’appuyer, mais il s’arrêtera sur cinq organismes qui lui paraissent fondamentaux pour la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis : le CEA, l’IPGP, le SHOM, l’IFREMER (Institut français de recherche pour l’exploration de la mer) et le BRGM.

Le CEA à travers le département, analyse, surveillance et environnement (DASE) joue déjà un rôle central dans la prévention des tsunamis en Polynésie française et a vocation à devenir le centre national d’alerte aux tsunamis dans le cadre des systèmes d’alerte aux tsunamis dans la Méditerranée/Atlantique Nord, dans l’océan Indien et dans les Caraïbes.

Outre la gestion de 6 stations sismiques dans le cadre du traité d’interdiction complète des essais nucléaires, Le CEA assure une surveillance sismique nationale et doit informer la protection civile dès qu’un séisme d’une magnitude supérieure ou égale à 4 est détecté sur le territoire national. Pour remplir cette mission, le CEA dispose d’un réseau sismique numérique, constitué de 40 stations dont les données sont transmises en temps réel au centre national de données de Bruyères-le-Châtel. Ce réseau fait l'objet d'une surveillance automatique susceptible de diffuser des alertes techniques en cas de défaillance des logiciels ou du système de transmission. Le CEA a également à sa disposition une équipe d'ingénieurs d'astreinte 24h/24, 365 jours/an composé d’une douzaine de sismologues, de trois ingénieurs informaticiens et d’une dizaine d'ingénieurs chargés du suivi et de la maintenance des réseaux. Ces personnels disposent de tous les moyens nécessaires à la maintenance des réseaux et au traitement des données (ordinateurs portables, liaisons télématiques numériques, véhicules, etc.).

Le CEA abrite également dans ses locaux le centre sismique euro-méditerranéen (CSEM). Ce dernier collecte en temps réel les bulletins sismiques en provenance de 59 organismes et réseaux différents utilisant des données de 1700 stations, les archive et les diffuse aussitôt sur son site internet. Sont accessibles non seulement la liste des séismes avec leur localisation, leur profondeur et leur magnitude, mais également des cartes permettant de visualiser la localisation des séismes. En outre, selon la magnitude observée, le CSEM est chargé de la diffusion de messages d’alerte en direction du Conseil de l’Europe et de centres de protection civile dont la liste est prédéfinie.

Par ailleurs, le CEA s’est spécialisé dans la modélisation des tsunamis et a réalisé de nombreuses études pour le compte de la Polynésie française, dont l’élaboration de la carte des zones d’exposition aux tsunamis et une étude historique sur les tsunamis survenus en Polynésie française de 1837 à nos jours.

Enfin, le CEA compte parmi ses salariés l’un des rares experts en tsunamis reconnus internationalement. Ce dernier a participé pendant plusieurs années à l’amélioration du système d’alerte aux tsunamis dans le Pacifique, notamment en tant que président du GIC/Pacifique et participe actuellement en tant qu’expert à la mise en place des systèmes d’alerte dans les trois autres bassins.

L’IPGP est également un interlocuteur incontournable pour la mise en place d’un système d’alerte dans les Caraïbes et dans l’océan Indien47 car il y est chargé de l’observation de deux types de source tsunamigène : les volcans et les séismes.

D’abord, l’IPGP par le biais de ses observatoires, est responsable de la surveillance de l’activité volcanique de la Soufrière en Guadeloupe, de la Montagne pelée en Martinique et du Piton de la fournaise à La Réunion.

Dans les Antilles, l’IPGP a également pour mission la surveillance de la sismicité régionale (Martinique, Guadeloupe et leurs îles proches) liée à l’activité tectonique de l’arc des Petites Antilles par le biais de l’enregistrement continu de la sismicité. Les buts recherchés sont d’une part, avertir les autorités des caractéristiques d’un séisme ressenti et des répliques qui peuvent y être associées et, d’autre part, établir sur des longues durées les caractéristiques spatio-temporelles de la sismicité régionale et locale pour contribuer à l’élaboration de cartes de l’aléa sismique. 

Par ailleurs, l’IPGP est responsable du programme GEOSCOPE, à savoir la composante française des réseaux de mesure sismique dite « large bande ». GEOSCOPE est composé de 28 stations opérationnelles48 dont 13 transmettent leurs données en temps réel49 (notamment une à La Réunion, une en Martinique, une à Hawaï, une à Djibouti50, une à l’île de Kerguelen, une en Algérie, une en Australie et une dans les îles Marquises). Les données de la station sismique en Nouvelle Calédonie sont transmises en moins de deux heures. Ce réseau participe à la localisation des séismes sur le globe entier. En outre, compte tenu de la qualité de ses stations et de leur distribution géographique, il est étroitement associé à la mise en place des systèmes internationaux d’alerte aux tsunamis, notamment dans l’océan Indien et dans les Antilles.

L’IFREMER est également un institut essentiel dans la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis. Etablissement public à caractère industriel et commercial créé en 1984, l'Ifremer contribue, par ses travaux et ses expertises, à la connaissance des océans et de leurs ressources, à la surveillance du milieu marin et littoral et au développement durable des activités maritimes.

A ces fins, il conçoit et met en oeuvre des outils d'observation, d'expérimentation et de surveillance, et gère la flotte océanographique française pour l'ensemble de la communauté scientifique. En conséquence, il est étroitement associé à tous les projets ayant un lien avec la mer et nécessitant une instrumentation spécifique comme par exemple le projet ANTARES (fixation d’un millier de photodétecteurs dont les données sont transmises par câble), l’installation d’un sismomètre au fond de la mer en collaboration avec Géo-Azur ou encore les campagnes de bathymétrie.

Ses compétences sont d’ailleurs reconnues internationalement. Ainsi, il a été chargé de tester les tsunamimètres développés par les Allemands pour le système d’alerte en Indonésie.

Son expertise en matière de risques géophysiques alliée à ses capacités d’exploration en fait un partenaire incontournable pour la mise en place des systèmes d’alerte aux tsunamis en Méditerranée, dans les Caraïbes et dans l’océan Indien.

LE SHOM, transformé en établissement public en mai dernier, a également un rôle fondamental à jouer dans le cadre de sa mission de soutien aux politiques publiques maritimes. Son réseau de marégraphes, ses données en matière de cartographie et de bathymétrie sont autant d’outils indispensables pour l’instauration d’un dispositif d’alerte aux tsunamis efficace.

Enfin, le BRGM constitue un partenaire important. Établissement public à caractère industriel et commercial placé sous la tutelle du ministère délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche et du ministère de l'environnement, du développement et de l'aménagement durables, ses activités en matière de risques naturels portent sur la connaissance des phénomènes et leur modélisation, l’évaluation des dangers correspondants, la surveillance, l’étude de la vulnérabilité des sites exposés, l’évaluation du risque et sa prévention, la préparation aux crises, les actions d’information et de formation. A travers les études de synthèse qu’il réalise, le BRGM fournit donc aux autorités nationales et locales les outils nécessaires à la prévention des risques naturels et à l’aménagement en conséquence du territoire.

3. Une forte mobilisation après le tsunami de Sumatra

Suite au tsunami qui a dévasté l’océan Indien le 26 décembre 2006, la France a pris plusieurs initiatives pour protéger ses côtes d’un éventuel tsunami.

a) La création de la Délégation Interministérielle Post Tsunami

Le tsunami de Sumatra a suscité une mobilisation importante en France, aussi bien au niveau de la population et des organisations non gouvernementales (312 millions d’euros ont été récoltés sous forme de dons) que des autorités publiques (ministères et collectivités territoriales).

Une structure interministérielle a été mise en place dès la mi-janvier 2005 pour la phase de réhabilitation et de reconstruction : la délégation interministérielle post tsunami (DIPT), devenue à partir de juillet 2005, la coordination post tsunami (CPT). S’appuyant sur le ministère des affaires étrangères, la DIPT a assuré la coordination des initiatives interministérielles, la coordination avec les collectivités locales et les ONG, ainsi que l’attribution des fonds publics aux différents projets de reconstruction.

Le rôle de la Délégation Interministérielle post-tsunami (DIPT)

Créée le 19 janvier pour coordonner les actions de la France, cette institution fait suite à d’autres tentatives institutionnelles type « Mission Fauroux » pour les Balkans. Physiquement logée au sein des locaux du ministère des affaires étrangères, la Délégation interministérielle était une structure interministérielle directement reliée au Premier ministre. Le dispositif mobilisé pour créer la DIPT a eu un poids politique important et une efficacité réelle. Elle a fonctionné avec une équipe comportant à la fois des diplomates et des représentants des divers ministères concernés autour d’une architecture fortement soutenue par la DGCID (direction générale de la coopération internationale et du développement). Les procédures de consultations interministérielles se sont très vite mises en place afin d’assurer la qualité des avis et la transparence des processus.

L’information sur la mise en place de la DIPT et du système « guichet unique » a été diffusée rapidement à travers le système de réunions interministérielles régulières autour du secrétaire d’Etat aux affaires étrangères.

Trois concepts importants ont présidé au fonctionnement stratégique de la DIPT :

- les budgets sont alloués sur une année budgétaire ; c’est le concept du «one shot » ;

- les budgets doivent être dépensés rapidement pour avoir un effet visible et important pour les populations pendant que les lourdes mécaniques bilatérales et multilatérales sont encore an cours de mobilisation ;

- les budgets alloués doivent avoir un effet levier en permettant d’accéder à d’autres financements (européens, onusiens).

L’étape de décision sur les projets à retenir a fortement bénéficié tant en rapidité qu’en qualité de la mise en place de cette dynamique interministérielle assez innovante.

Une série de critères arbitrés de façon interministérielle a été retenue après les premières missions interministérielles :

- les critères géographiques qui ont mis l’accent sur l’Indonésie et le Sri Lanka, mais sans exclusivité (des programmes ont aussi été financés en Inde et aux Maldives) ;

- Les critères thématiques : les thématiques d’intervention initiales (enfance et éducation, santé, eau et assainissement, prévention des risques et gestion des crises) ont aussi été revues avec un accent mis sur les aspects de relance économique.

Six types d’acteurs ont été mobilisés :

- les ONG françaises avec lesquelles des réunions de coordination ont eu lieu en moyenne toutes les trois semaines ainsi qu’avant et après chaque mission de terrain ;

- les institutions françaises de recherche ou de santé ;

- des structures publiques nationales et locales des pays touchés ;

- les ONG locales (via des processus d’appels à proposition pour des micro-projets en Indonésie et Sri Lanka) ;

- les Nations Unies, notamment les agences d’urgence de l’ONU ;

- le Comité International de la Croix Rouge dans la phase d’extrême urgence.

Chaque institution qui souhaitait proposer un projet a pu le faire via cinq « portes d’entrée » à savoir la délégation à l’action humanitaire du ministère des affaires étrangères, la direction générale de la coopération internationale et du développement, les ministères impliqués, les ambassades sur place et la DIPT. Les projets ont systématiquement été remontés à la DIPT puis redistribués pour évaluation (avis à rendre sous 8 jours) aux personnes compétentes sur le sujet concerné. Ce système à flux tendu a permis de ne pas perdre de temps sur l’allocation des ressources. Sur un total de 200 propositions de projets, près d’une centaine ont été retenues par la DIPT. Le délai d’analyse et de révision éventuelle des projets a duré de trois à quatre semaines. Les ONG rencontrées semblent ensuite avoir attendu entre un et quatre mois avant de recevoir les fonds, ce qui est assez rapide.

Pour ce qui est du suivi des programmes, la DIPT s’est appuyée principalement sur les services de coopération et d’action culturelle (SCAC) des ambassades dans les pays concernés. Ce suivi s’est opéré sous différentes formes :

- un suivi quotidien à travers les SCAC. Ces derniers ont eu à travailler dans les conditions difficiles en terme de personnel disponible et de logistique ;

- des échanges réguliers avec la fondation de France et les acteurs internationaux tels que les Nations Unies , qui font leur propre suivi ;

- des missions de la DIPT sur le terrain afin de mieux comprendre les problèmes, les réalités du terrain…..

La DIPT a été dissoute en juillet et remplacée par la Coordination post-tsunami (CPT), instance ad hoc qui a elle-même disparu à la fin de l’année 2005. Le suivi des dossiers post-tsunami est alors revenu aux services de coopération et d’action culturelle et à la coopération internationale.

Source : direction générale de la coopération internationale et du développement

En outre, la DIPT a permis de définir et de financer la contribution française au système d’alerte en construction dans l’océan Indien. Après les réunions de la commission océanographique internationale sur la définition d’un système d’alerte dans l’océan Indien à Paris en mars 2005 et à l’île Maurice en avril 2005, l’architecture dudit système avait été arrêté sous la forme d’un réseau coordonné de centres nationaux et la France s’était engagée à créer un centre à la Réunion.

Sous l’impulsion de la DIPT, plusieurs rencontres ont été organisées entre les partenaires de ce projet51 afin de définir les actions à réaliser et le montant des crédits nécessaires. Le projet initial arrêté était ambitieux puisqu’il prévoyait la mise en place d’un centre d’alerte national à vocation multirisque (tsunami, cyclone, vague atypique) capable de gérer les alertes aux tsunamis locaux et lointains.

Dans ce cadre, 1,59 million d’euros avait été attribué pour financer les priorités suivantes :

- l’équipement du centre de Météo France à La Réunion pour le rendre opérationnel dans le cadre de l’alerte aux tsunamis lointains (20.000 euros). Météo France est le seul organisme français dans cette région disposant d’une permanence 24h sur 24, 7 jours sur 7, il a donc été désigné comme point focal : il reçoit les messages du PTWC et de la JAM et alerte le cas échéant l’Etat major de zone et de protection civile de l’océan Indien et le sous-préfet de permanence. Dans le projet initial, le centre Météo France avait vocation à générer ses propres alertes au tsunami à travers l’installation d’un système TREMORS et une étroite collaboration avec l’IPGP qui aurait analysé les données sismiques et aurait fourni une expertise scientifique ;

- la mise à niveau des stations sismologiques du réseau GEOSCOPE et la transmission des données en temps réel à Djibouti, Canberra, Hyberabad, La Réunion, Kerguelen, Dumont d’Urville et sur l’île d’Amsterdam et l’installation d’une nouvelle station à Madagascar (511 000 euros) ;

- la mise à niveau des marégraphes français à La Réunion et dans l’île de Kerguelen ainsi que le déploiement de deux marégraphes neufs à Mayotte et à Madagascar (91.000 euros) ;

- la réalisation par le CEA/DASE d’une étude d’exposition au risque de tsunami pour les régions situées le long des côtes de Madagascar et du Sri Lanka ainsi que pour certains petits états insulaires de la région (50 000 euros) ;

- la réédition de la brochure « Tsunami, les grandes vagues » initialement produite pour le Pacifique, adaptée aux besoins de la région de l’océan Indien (20 000 euros) ;

- l’équipement par Météo France de Madagascar, du Kenya et de la Tanzanie en systèmes météorologiques52 (157 000 euros), l’installation d’une station météorologique à Madagascar (40 000 euros) et la réalisation d’une mission d’expertise au Yémen, en Somalie et à Djibouti pour évaluer les besoins de ces pays en terme de mise à niveau des moyens de télécommunications liés au système mondial de télécommunication (SMT) (40 000 euros).

Ces dernières mesures s’inscrivent dans une approche multirisque. Leur objectif immédiat est d’améliorer les performances des services météorologiques de ces pays en les dotant de systèmes de communication et en systèmes de prévision météorologique. Toutefois, dans la mesure où ces systèmes météorologiques sont connectés au réseau mondial de l’Organisation Météorologique Mondiale désigné pour véhiculer les alertes aux tsunamis, les services météorologiques qui seront équipés desdits systèmes seront capables de recevoir les alertes en temps réel.

De même, la station météorologique installée à Toamasina, capitale provinciale de l’Est de Madagascar régulièrement touchée par les cyclones tropicaux, a également vocation de servir de centre d’alerte aux tsunamis. Ce centre est ainsi équipé d’un système Retim-Transmet-Synergie, d’une station d’observation météorologique et d’un marégraphe.

Par ailleurs, 420 000 euros ont été directement versés au CEA/DASE pour la numérisation des données des stations analogiques indonésiennes, l’installation de 3 systèmes TREMORS adaptés aux stations indonésiennes, la formation du personnel des centres d’alerte régionaux, la mise à niveau d’une station sismique en large bande et la simulation des performances du réseau indonésien.

24 000 euros ont également servi à financer la formation de Thaïlandais aux systèmes d’alerte par le LGD/Pamatai.

Enfin, 50 000 euros ont été attribués au comité français de la COI pour financer des missions d’experts français dans l’océan Indien, des missions de techniciens locaux venant se former à La Réunion ou en métropole ainsi que la participation de scientifiques locaux à des campagnes scientifiques.

b) L’engagement du ministère de l’écologie

En décembre 2004, Madame Nelly Olin, alors ministre de l’écologie et du développement durable avait présenté en conseil des ministres les grands axes du programme national de prévention du risque sismique (ou « plan séisme »). Après le tsunami de Sumatra, un quatrième chantier avait été ajouté, consacré à la prévention du risque de tsunami (chantier n° 4) après avoir constaté que le littoral français était soumis au risque de tsunami « en plusieurs de ses points, en particulier sur les côtes antillaises et méditerranéennes ».

Initié en 2005 et confié à la direction de la prévention des pollutions et des risques (DPPR), ce programme d’action s’étend jusqu’en 2011 et repose sur trois axes : l’évaluation de l’aléa ; la mise en place d’un système d’alerte et la sensibilisation de la population.

Afin de mieux connaître l’aléa tsunami sur les côtes françaises, la DPPR a confié deux études au BRGM.

(1) La constitution d’une base de données sur les tsunamis

Le BRGM a été chargé constituer une base de données informatique destinée au recensement des tsunamis survenus au cours des temps sur les côtes des départements français (métropole, Guadeloupe, Martinique, La Réunion53). Ce catalogue est consultable sur internet et comprend pour chaque tsunami les informations suivantes :

- la date et l’heure du phénomène ;

- sa situation géographique ;

- la cause à l’origine du déclenchement du phénomène : 8 catégories ont été retenues : sismique, explosion, météorite, glissement de terrain, volcanique, météorologique, inconnu. Le critère météorologique a été retenu pour pouvoir distinguer les « vrais » tsunamis des raz-de-marée dus à des surcôtes marines ou des houles cycloniques dont les causes sont d’ordre météorologique sans donner l’impression d’avoir omis un événement ;

- ses conséquences : la sévérité des dommages est exprimée en 5 catégories ;

- son amplitude sur l’échelle internationale des tsunamis de Sieberg et Ambraseys qui comporte 6 degrés, d’inconnu à désastreux ;

- le domaine marin concerné (Méditerranée, Atlantique, etc).

Une fenêtre de gestion de l’observation du tsunami permet d’indiquer le lieu où ses effets ont été constatés et de caractériser ses effets dynamiques (nombre et hauteur des vagues, distance et hauteur du retrait, distance et hauteur de l’inondation, hauteur du run up).

Une autre fenêtre indique les caractéristiques épicentrales du séisme à l’origine du tsunami. Ces informations sont reprises des bases de données de la sismicité historique de la France que gère le BRGM.

Enfin, une fenêtre de la gestion de la bibliographie a été insérée précisant le type de source utilisé, son nom, sa date de publication, son titre, son auteur, le lieu d’édition ainsi que la page faisant référence au tsunami.

A la fin de 2006, 21 événements avaient été intégrés dans la base de données. Ce catalogue a vocation à contribuer à l’évaluation et la fréquence et de l’intensité de l’aléa tsunami sur les côtes françaises.

(2) La réalisation d’une étude sur l’exposition des côtes françaises

Le BRGM a également réalisé pour le compte de la DPPR une étude préliminaire de l’aléa tsunami en Méditerranée et dans les Antilles (Martinique et Guadeloupe) basée sur trois axes :

- rechercher les zones tsunamigènes a priori les plus dangereuses pour les côtes méditerranéennes et antillaises françaises ;

- simuler des événements qui pourraient être à l’origine de tsunamis en sachant que les événements choisis sont extrêmes mais possibles ;

- localiser les zones les plus exposées aux tsunamis au niveau du littoral français.

Deux types de source ont été retenus : les séismes et les mouvements de terrain.

Pour le bassin méditerranéen occidental, 59 zones sismiques ont été distinguées, chaque zone étant supposée homogène en matière de déformation tectonique et de potentiel sismogène. Ensuite, un séisme maximal de référence54 a été défini pour chaque zone. De même, un zonage des mouvements de terrain sous marins a été réalisé au niveau du plateau et du talus continental au large des côtes méditerranéennes françaises (prestation confiée à l’IFREMER) ; 20 zones sont identifiées et caractérisées par des volumes déstabilisables maximum.

Sur la base des zonages sismiques et des mouvements de terrain, 6 scénarios a priori les plus forts plausibles en termes de potentiel tsunamigénique et de source sismique ou de mouvement de terrain ont été retenus. Ils comprennent :

- 3 scénarios de séismes

• Un séisme situé en Mer Ligure, avec un épicentre placé à une cinquantaine de kilomètres au large de la côte d’Azur, de magnitude 6,8

• Un séisme localisé dans le golfe du Lion, à une centaine de kilomètres de Perpignan, de magnitude 6,7

• Un séisme de magnitude 7,8, placé à 25 km au Nord de la côte algérienne.

- 3 scénarios de mouvements de terrain sous-marins

• Glissement localisé à une vingtaine de kilomètres de la côte Corse nord-occidentale, le volume déstabilisé est estimé à 0,75 km3 ;

• Glissement placé à une cinquantaine de kilomètres du littoral perpignanais, au niveau du canyon sous-marin de Lacaze-Hérault, caractérisé par un volume en mouvement de 0,055 km3 ;

• Glissement supposé à près de vingt-cinq kilomètres au sud-est de Nice, avec 1 km3 de matériel déstabilisé.

Les simulations des 6 scénarios précités indiquent :

Scénario

Magnitude ou volume

Amplitude maximale des vagues au rivage

Temps d’arrivée

Secteur côtier français concerné

(amplitude > 0,5 m)

Séisme Nord Ligure

M = 6 ,8

2 m à Antibes

10’ à 15’

St Tropez à Nice

Séisme marge nord algérienne

M = 7,8

4 m à St-Tropez, Cannes

3 m à La Ciotat, Nice, Villefranche

95’ à 100’

Marseille à Menton

Séisme golfe du Lion

M = 6,7

0,6 m à Agde, Port-la-Nouvelle

60’ à 80’

Entre Perpignan et Béziers

Glissement marge occidentale corse

V = 0,75 km3

5 m à 6 m au nord de Porto

5’ à 15’

Moitié sud-ouest du littoral entre Porto et Bastia

Glissement canyon Lacaze-Hérault

V =0,055 km3

1,5 m à Perpignan

1 m à Frontignan et Beauduc (Capelude)

45’ à 80’

Perpignan à Beauduc

Glissement marge Nice-Vintimille

V = 1 km3

4 m à Antibes

3 m à Nice

10’ à 20’

St-Tropez à Menton (jusqu’à San Remo en Italie)

La synthèse de ces 6 scénarios conduit à un découpage du littoral méditerranéen français en fonction du niveau d’exposition estimé. Ce découpage tient compte de l’élévation maximale du plan d’eau calculée près du rivage et de la hauteur d’inondation pouvant a priori être atteinte à terre, et cela indépendamment de la source initiale (sismique ou mouvements de terrain). Il s’agit d’une première évaluation du niveau d’exposition des côtes françaises aux tsunamis.

Vu les caractéristiques des 6 scénarios catastrophiques pris en référence, et vu les résultats des autres scénarios réalisés en complément, on peut supposer que cette carte de synthèse reflète assez bien le niveau d’exposition régional attendu sur cette partie du littoral français.

Cette évaluation préliminaire régionale s’appuie sur les résultats des calculs qui ont au mieux une précision cartographique de l’ordre du 1/100 000ème (calculs sur des grilles de 83mx83 m de résolution spatiale).

Elle ne peut donc pas être utilisée dans le cadre de planification du risque tsunami aux échelles locales (telle que celle des plans de prévention des risques). En effet, des études plus précises restent indispensables pour une cartographie détaillée de l’aléa tsunami à l’échelle locale en fonction de la hauteur, de la profondeur et de la durée de l’inondation ainsi que du nombre des vagues et de la vitesse des courants.

Carte d'exposition aux tsunamis du littoral
des régions Languedoc-Roussillon et Provence-Alpes-Côte d'Azur

Source : BRMG

Carte d'exposition aux tsunamis du littoral de la région Corse

Source : BRMG

Concernant les Antilles françaises, le zonage sismique réalisé au niveau de la plaque Caraïbe distingue 32 zones sismiques caractérisées par un séisme maximal. Cinq scénarios de source sismique ont été retenus. Par ailleurs, à partir d’une analyse des connaissances actuelles sur les événements tsunamigènes d’origine gravitaire et volcanique, 3 scénarios ont été choisis.

Au total, 8 scénarios catastrophiques de référence ont donc été modélisés :

Les 5 scénarios de séismes retenus sont les suivants :

• Séisme localisé au niveau du système de failles normales du graben de Marie-Galante, et de magnitude 7,5

• Séisme situé dans le prisme de Barbuda, c’est-à-dire au niveau de la zone de subduction de la plaque Nord Amérique sous la plaque Caraïbe, et de magnitude 8,3

• Séisme de magnitude 7,5, attribué au jeu normal d’une faille qui structure le graben d’Anegada

• Séisme attribué à un jeu senestro-inverse d’une faille de la ride de Sainte-Lucie, et de magnitude 7,6

• Séisme localisé dans le prisme d’accrétion de la Barbade, généré par le mouvement inverse de failles parallèles au front de subduction de la plaque Sud Amérique sous la plaque Caraïbe, et de magnitude de 7,1.

3 scénarios de mouvements de terrain sub-aériens d’origine volcanique ont également été retenus :

• Événement 2003 de Soufrière-Hills (Montserrat), correspondant à l’effondrement du dôme volcanique. La fraction de volume de débris entrant dans la mer est estimée à 16 millions de m3

• Événement 1902 de la Montagne Pelée (Martinique), associé à la pénétration en mer d’un lahar d’un volume d’environ 5 millions de m3

• Paléo-événement de la Soufrière (Guadeloupe) relatif à la déstabilisation de flanc du volcan de la Soufrière vers 3100 avant Jésus Christ. Le matériau entrant en mer est estimé à 70 millions de m3.

Les résultats des 8 simulations sont présentés dans le tableau suivant.

scénario

Magnitude ou volume

Amplitude maximale des vagues au rivage

Temps d’arrivée

Secteur côtier français concerné

(amplitude > 0,5 m)

Séisme Graben de Marie-Galante

M = 7,5

> 3,5 m à Sainte-Marie, en MTQ

10’ à 15’

Nord-Est Martinique

Sud La Désirade

Sud Grande-Terre, GPE

~ 5 m La Désirade

13’ à 15 ‘

~ 3 m Sainte Anne, en GPE

± 15’

Séisme de Barbuda

M = 8,3

≥ 8 m à Le Moule, Anse-Bertrand, Clugny, en GPE

20’ à 40’

Toute la côte de Grande-Terre et côte Nord de Basse Terre, GPE

Ouest de la Désirade

Côtes Nord-Est de MTQ

6 m au Marigot, en MTQ

4 m à La Trinité, en MTQ

35’ à 45’

Séisme du Passage d’Anegada

M = 7,5

> 1 m à Deshaies, en GPE

60’

Nord-Ouest de Basse-Terre, en GPE

Séisme de la ride de Sainte-Lucie

M = 7,6

~1 m à Grande-Terre, Sud-Est de Basse Terre, et Marie-Galante

20’ à 30 ‘

Côte Sud et Est de Grande-Terre, Sud-Est de Basse-Terre, Marie-Galante

> 2 m à la Désirade

20’

Côte Sud de la Désirade

> 3 m au Marigot et la Trinité, en MTQ

15’ à 30‘

Côte Est de MTQ

Séisme du prisme de la Barbade

M = 7,1

< 0,5 Le François

15’ à 20’

Côte sud Martinique

Événement 2003 de Soufrière-Hills, Montserrat

Avalanche de débris, v=0,016 km3

> 0,5 m à Deshaies et Malendure

12’ à 15’

Côte Nord et Ouest Basse-Terre, GPE

Événement de 1902, Montagne Pelée, Martinique

Lahars,

v= 0,005 km3

> 3 m Saint-Pierre

< 2’

Côte Nord-Ouest de Martinique

Événement de La-Soufrière, Guadeloupe

Avalanche de débris,

v=0,07 km3

> 3 m à Trois Rivières et Basse-Terre

< 5’

Côte Sud et Ouest de Basse-Terre, Les Saintes, côte Ouest Marie-Galante

Sous réserve des remarques déjà faites sur les cartes d’exposition aux tsunamis pour la Méditerranée, il en ressort une exposition élevée à très élevée sur la quasi-totalité de Grande-Terre (Guadeloupe), l’Est de Basse-Terre (Guadeloupe), la Désirade, les Saintes, Marie-Galante (sauf dans sa côte Sud) et la côte Est de la Martinique.

Carte d’exposition au tsunami du littoral de la Martinique

Source : BRMG

Carte d’exposition aux tsunamis de l’archipel de Guadeloupe

Source : BRMG

(3) La mise en place d’un dispositif d’alerte

Outre une meilleure connaissance de l’aléa, le chantier consacré à la prévention du risque de tsunami prévoit la mise en place de systèmes de détection des tsunamis et de transmission de l’alerte dans l’océan Indien, en Méditerranée et dans les Antilles.

Le document de présentation du « plan séisme » de novembre 2005 rappelle que « dans le prolongement de la position présentée par la France lors de la conférence de Kobé et de la Commission Océanographique Intergouvernementale, il a été décidé la création d’un centre national de prévention multirisque à La Réunion.».

De même, ce document indique que « le bassin méditerranéen et les Caraïbes sont particulièrement soumis à des séismes pouvant déclencher des tsunamis […]. Au-delà des coopérations bilatérales, la France proposera, avec les pays européens intéressés (Italie notamment pour la Méditerranée, Royaume-Uni, Pays-Bas pour les Antilles) et en relation avec les pays riverains de ces bassins, des initiatives au plan européen en matière de détection des phénomènes et de transmission de l’alerte. ».

Après la mise en place des groupes intergouvernementaux de coopération dans l’océan Indien, dans la Méditerranée et dans les Caraïbes, un groupe national de coordination a été instauré pour préparer les réunions périodiques dans les différents bassins et arrêter la position de la France. Copiloté par la DPPR et la DDSC (direction de la défense et de la sécurité civiles), cette structure informelle regroupe tous les acteurs français impliqués plus ou moins directement dans la mise en place d’un dispositif d’alerte, que ce soit des organismes scientifiques et techniques (CEA, IFREMER, IPGP, Météo France, BRGM, SHOM, CNRS, IRD) ou encore des ministères (ministère de l’écologie, du développement et de l’aménagement durable, ministère de l’intérieur, de l’Outre-mer et des collectivités territoriales, ministère des affaires étrangères).

(4) La sensibilisation et l’éducation de la population

Enfin, le chantier consacré à la prévention du risque de tsunami a comme objectif de sensibiliser la population dans les zones géographiques les plus exposées.

Une attention particulière est donnée à la sensibilisation des élèves et à la formation des enseignants. Certaines actions sont déjà engagées. Ainsi, les programmes scolaires abordent déjà la question des risques naturels majeurs à l’école, au collège et au lycée. De plus, le tsunami du 26 décembre 2004 a suscité de nombreuses initiatives pédagogiques au sein des établissements, notamment dans les Antilles, à La Réunion et dans le bassin méditerranéen, en s’inspirant notamment de projets existants comme par exemple le projet « sismo des écoles » conduit dans l’académie de Nice et des Antilles.

De « sismo des écoles » à « sismos à l’école »

Le principe du projet « sismos à l’école » est de mettre en réseau des établissements scolaires équipés de sismomètres à vocation éducative. Des élèves de 13 à 18 ans (du collège au lycée) sont chargés d’installer, dans leur établissement, un capteur sismique. Les signaux dus à l’activité sismique alimentent une base de données en ligne, véritable centre de ressources sismiques, et point de départ d’activités éducatives et scientifiques utilisant les nouvelles technologies de l’information et de la communication.

Compte tenu des orientations du projet (donnant une grande place aux technologies nouvelles de communication), de sa dimension éducative (sensibilisation au risque sismique), de son contenu scientifique (instrumentation, géophysique, sciences de la terre) et de son importance à l’échelle régionale voire nationale (mise en réseau d’établissements scolaires), de nombreuses pistes peuvent être exploitées par les équipes pédagogiques des établissements scolaires.

Les objectifs visés sont les suivants :

- favoriser le développement des sciences expérimentales et technologiques à l’école (collège et lycée) par un projet autour de la mesure d’un paramètre environnemental ;

- sensibiliser les enfants aux risques naturels et de contribuer ainsi à la responsabilisation des futurs citoyens ;

- inciter les élèves à devenir « ambassadeurs » de la prévention des catastrophes naturelles auprès de leur communauté ;

Initié en 1996 au centre international de Valbonne, le programme « Sismo des Ecoles » s’est rapidement développé dans les Alpes Maritimes avec le concours de l’académie de Nice, du conseil général des Alpes maritimes et du laboratoire Géosciences Azur.

Actuellement, 20 établissements font partie du réseau national dont 13 en France métropolitaine, 3 dans les départements d’Outre-Mer et 4 dans les lycées français à l’étranger.

En outre, il est prévu d’inscrire des actions spécifiques de formation en direction des enseignants des académies concernées par le risque de tsunami et d’élaborer des outils pédagogiques consacrés à cette thématique.

Par ailleurs, la sensibilisation de la population et l’appropriation par celle-ci de l’information demandent une identification des différentes catégories de population exposées (habitants, touristes, groupements professionnels etc), l’adaptation des messages et le repérage des outils de transmission les plus adéquats.

c) Au niveau local, une réelle sensibilisation aux risques de tsunami

Au cours de cette étude, votre rapporteur a constaté une sensibilisation des hommes politiques aux risques naturels proportionnelle à leur proximité avec la population. Au-delà des effets d’annonce, la prévention du risque de tsunami n’apparaît guère comme une priorité nationale comme en témoignent les tergiversations observées depuis près de deux ans pour arrêter la position officielle de la France. En revanche, elle fait l’objet d’une réelle implication politique au niveau local, notamment parce qu’elle obéit à une demande sociale forte.

Les exemples des politiques conduites par les conseils généraux des Alpes maritimes et de la Martinique illustrent la volonté des collectivités territoriales de se prémunir contre les risques naturels.

Le département des Alpes maritimes est soumis à la plupart des risques naturels, depuis les feux de forêt jusqu’aux avalanches en passant par les glissements de terrain, la sécheresse, les tremblements de terre, les tsunamis et les inondations. Sous l’impulsion de son président, M. Christian Estrosi, le conseil général a lancé une stratégie de prévention des risques naturels et notamment des risques géophysiques avec la volonté d’en faire un pôle de compétence du département, utilisant une situation géologique à risques comme un moteur de développement économique.

Dans ce cadre, une convention a été signée en 2003 entre le conseil général des Alpes maritimes et le Groupement d’Intérêt Scientifique « Centre Universitaire de Réflexion pour une Agence des Risques Environnementaux (dit GIS CURARE)55. Ce dernier a pour objet de montrer qu’il est pertinent de regrouper les compétences scientifiques et techniques dans le domaine de l’environnement et des risques naturels pour analyser et comprendre les phénomènes environnementaux et répondre aux sollicitations sociales et à la commande publique. Cette démonstration qui se termine en décembre 2007 doit faciliter l’émergence d’un pôle de compétence « risques naturels » dans les Alpes maritimes puis en région PACA (Provence-Alpes-Côte d’Azur) et préfigure la future agence des risques environnementaux qui devrait être créée en 2008 et qui a vocation à être sollicitée par les entreprises devant faire des expertises dans cette région et plus généralement sur l’ensemble de l’Arc latin. En effet, la région Languedoc-Roussillon est également concernée par la création de ladite agence et les relations déjà développées avec les agences pour les risques environnementaux italienne et espagnole permettent d’envisager l’essor d’une expertise reconnue en matière de risques géologiques autour de la Méditerranée.

Depuis son lancement, le GIS CURARE a focalisé son action sur trois problématiques, dont celle concernant les tsunamis et les instabilités gravitaires en mer56. L’objectif recherché était de localiser précisément les failles actives en milieu sous-marin et les zones propices aux glissements sédimentaires. Il s’agissait de quantifier les volumes susceptibles de glisser et modéliser l’ampleur des tsunamis locaux attendus en cas d’effondrement sous-marin. Ces études financées pour moitié par le conseil général ont donc contribué à une meilleure connaissance de l’aléa dans une zone particulièrement concernée par les tsunamis locaux liés à un glissement de terrain.

Par ailleurs, après le tsunami de Sumatra, le président du conseil général des Alpes maritimes a demandé au GIS CURARE d’organiser pour la fin février 2005 un colloque international sur le thème : « Pour un réseau d’alerte tsunami en Méditerranée occidentale ». A cette occasion, M. Christian Estrosi a insisté sur la nécessité de mettre en place un réseau d’alerte en Méditerranée. Après ce colloque et compte tenu de l’implication du GIS CURARE dans les travaux organisés par la délégation française pour préparer les réunions du GIC/SATANEM, le directeur du GIS CURARE avait été nommé contact national pour la zone Méditerranée/Atlantique Nord-Est par le président du comité national de la commission océanographique internationale.

Enfin, l’organisation par la France de la deuxième session du GIC/SATANEM en mai 2006 démontrait la volonté politique de notre pays d’aboutir rapidement à la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis en Méditerranée. Le fait que cette réunion se soit tenue à Nice s’explique cependant par l’engagement fort du président du conseil général, alors ministre délégué à l’aménagement du territoire, en faveur d’un tel dispositif.

Lors de son déplacement en Martinique, votre rapporteur a constaté que le conseil général de ce département, présidé par notre collègue Claude Lise était également très actif en matière de prévention des risques naturels.

D’abord, le conseil général a soutenu la création du système d’information géographique de la Martinique. Il s’agit d’un ensemble d’informations géographiques issues de cartes numérisées, de photos scannées, de mesures de tous types réalisées en temps réel, de levés de terrain, de renseignements socio-économiques, urbanistiques etc ayant vocation à aider la prise de décision en matière de gestion des risques et d’aménagement du territoire. Cet outil peut ainsi servir à cartographier le risque de submersion du littoral pour une commune précise en cas de tsunami en superposant la carte d’inondation et la carte cadastrale57.

Ensuite, le conseil général de la Martinique a lancé une campagne de sensibilisation aux risques naturels auprès de la population à travers un outil pédagogique innovant : la caravane de la prévention aux risques majeurs. Cette caravane composée de trois chapiteaux de 25m² chacun abrite des expositions, des films pédagogiques sur les risques majeurs, un quiz multimédia et un jeu multimédia pour les enfants de 6 à 12 ans. En ce qui concerne l’information sur les tsunamis, l’un des films présente le séisme du 26 décembre 2004 et le tsunami qui l’a suivi à partir de témoignages et de documents scientifiques. Les visiteurs peuvent également visionner une modélisation numérique développée par le CEA.

Enfin, le conseil général déploie un important réseau d’instruments de mesure (houlographes, stations météorologiques, accéléromètres) pour améliorer la connaissance et la surveillance des risques naturels. Il a également mis en place un marégraphe au prêcheur qui a vocation à servir pour la surveillance des tsunamis, même si sa mission principale est la meilleure connaissance des surcotes marines lors des marées de tempête. Une autre station devrait être installée sur la côte atlantique dans la commune du François.

d) Le lancement d’un système d’alerte en Nouvelle Calédonie et à Wallis et Futuna

Si la Polynésie française bénéficie d’un système d’alerte performant, le dispositif en Nouvelle Calédonie et à Wallis et Futuna n’en est qu’à ses débuts. En raison de l’isolement de ces territoires et de la faible densité de la population, les observations constatées relatives à un tsunami sont très partielles. Pourtant, plusieurs tsunamis ont été recensés aux 19ème et 20ème siècles, provoqués par un séisme situé près des îles Salomon, des îles Vanuatu ou des Loyautés.

Récemment, deux événements ont rappelé la vulnérabilité de ces territoires.

Le 3 mai 2006, après un séisme de 7,8 dans les îles Tonga, le PTWC a déclenché une alerte pour les îles Tonga, Niue, les Samoa, Wallis et Futuna et les îles Fidji.

Le 1er avril dernier, un séisme de magnitude 8,1 sur la zone de subduction des îles Salomons a généré un tsunami local dévastateur. En Nouvelle Calédonie, les autorités ont été alertées par le PTWC et le Haut Commissaire de la République a décidé d’évacuer par précaution les îles Loyauté et les communes de la côte est.

Le tsunami de Sumatra, combiné à l’arrivée en Nouvelle Calédonie de l’ancien Haut-Commissaire de la Polynésie française (qui avait impulsé l’installation de sirènes sur ce territoire) et à la sensibilisation du ministère de l’Outre-mer (devenu entre-temps secrétariat d’Etat à l’Outre-mer) et des communes au risque de tsunami en Nouvelle Calédonie et à Wallis et Futuna ont permis d’envisager la mise en place d’un dispositif d’alerte dans ces deux territoires.

En mai dernier, le secrétariat d’Etat à l’Outre-mer a délégué 22.000 euros pour se doter d’une station de gestion des alertes. Des sirènes sont également en cours d’acquisition en Nouvelle Calédonie pour les communes d’Ouvéa (3 sirènes), de Lifou (8 sirènes) et de Maré (3 sirènes). Leur financement est pris en charge principalement par le fonds intercommunal de péréquation et, dans une moindre mesure, par la dotation globale d’équipement. Le secrétariat d’Etat à l’Outre-mer a par ailleurs financé l’acquisition de sirènes à Wallis et Futuna.

***

Pourtant, globalement, près de trois ans après le tsunami de Sumatra, la mobilisation initiale française s’est émoussée, faute de vision stratégique et de moyens financiers adéquats.

B. UNE DYNAMIQUE QUI S’ESSOUFFLE FAUTE DE VISION STRATÉGIQUE ET DE MOYENS FINANCIERS ADÉQUATS

Le contraste est frappant entre les ambitions affichées par le gouvernement français en 2005 en matière de mise en place de système d’alerte dans les différents bassins et les résultats plus que limités atteints deux ans plus tard.

1. Les blocages observés

En réalité, l’engagement initial de la France s’est transformé en un attentisme révélateur des blocages internes.

a) Dans l’océan Indien

L’océan Indien est le seul bassin pour lequel la contribution française a fait l’objet d’un plan d’action détaillé et bénéficiant d’une subvention de plus de 2 millions d’euros58. Néanmoins, deux ans après le lancement de ce programme, les résultats ne sont pas à la hauteur des engagements pris.

Le dispositif initial prévoyait la mise en place d’un centre national d’alerte aux tsunamis capable de gérer aussi bien les tsunamis régionaux que locaux. En raison de ses compétences en matière volcanologique et sismique, l’IPGP devait être étroitement associé au centre de Météo France pour assurer l’alerte. Toutefois, ce projet ambitieux s’est vite heurté à une difficulté financière. En effet, la subvention accordée pour financer la participation française au système d’alerte aux tsunamis dans l’océan Indien ne comporte que des crédits d’équipement. Or, le système d’alerte proposé initialement exige une permanence 24h sur 24, 7 jours sur 7 non seulement de la part de Météo France, mais également de l’IPGP, ce que son budget de fonctionnement ne permet pas de financer.

En outre, Météo France a émis des doutes quant à la pertinence de l’extension des capacités du centre d’alerte national à produire des alertes en cas de tsunamis locaux, estimant qu’une étude sur le sujet devrait être lancée au préalable pour en confirmer l’opportunité. Toutefois, ni le CEA ni l’IPGP n’a été chargé de ladite étude et il semble que le projet ait été abandonné.

A l’heure actuelle et comme dans les Antilles, Météo France reçoit les messages d’alerte en provenance du PTWC et de JMA et les transmet au préfet. En conséquence, les 305 000 euros destinés à développer les capacités du centre d’alerte national afin qu’il soit également opérationnel en cas de tsunami local restent inutilisés sans que leur réaffectation n’ait été jusqu’à présent évoquée.

Par ailleurs, la contribution de la France a pris beaucoup de retard dans la mise à niveau et l’installation des marégraphes confiées au SHOM. Dans un document de travail du comité national de la COI sur le financement de la contribution française au système d’alerte aux tsunamis dans l’océan Indien (SATOI) du 29 juin 2005, cette action était qualifiée d’« une des plus importantes du programme de la COI, tant en terme de symbole que de crédibilité pour le SATOI ». Pourtant, et alors même que les crédits d’investissement sont disponibles, seul un marégraphe en temps réel a été installé en octobre 2007 à La Réunion.

Ni le marégraphe en temps réel prévu à Mayotte, ni celui de Madagascar n’a été installé. Selon les informations obtenues par votre rapporteur auprès du SHOM, celui de Mayotte devrait être opérationnel en 2008. En revanche, aucune date n’a été fixée pour celui de Madagascar car il ne fait pas partie des priorités arrêtées par le SHOM.

En ce qui concerne le marégraphe de Kerguelem géré par le LEGOS il a été mis à niveau en même temps que la station sismique GEOSCOPE gérée par l’EOST de Strasbourg.

La mise à niveau des stations sismiques du réseau GEOSCOPE a également pris du retard puisque seulement 2 stations59 sur les 5 initialement prévues transmettent leurs données en temps réel. Ainsi, l’IPGP n’a pas encore installé d’antenne VSAT sur la station de Djibouti pour pouvoir avoir les données en temps réel. Selon les informations obtenues par votre rapporteur, l’IPGP en outre a été confronté au refus de l’Inde de transmettre les données de la station sismique d’Hyberabad en temps réel. La mise à niveau de cette station a donc été abandonnée au profit de l’installation d’une station à Rodrigues. Les crédits à accorder à l’IPGP ont donc dû être augmentés pour tenir compte de cette nouvelle mission. Il semblerait que la station sismique de Madagascar devrait être installée au mois de mars 2008. Le site est prêt et le matériel a été envoyé, mais les travaux ne pourront commencer qu’à la fin de la saison des pluies. En ce qui concerne l’installation d’une station sismique sur Rodrigues, les travaux sont moins avancés.

Lors de l’audition du directeur de l’IPGP, M. Vincent Courtillot, celui-ci avait estimé que la mise à niveau des 3 anciennes stations et l’installation des 2 nouvelles impliquaient l’embauche sur trois ans de deux ingénieurs. Il avait regretté que ces coûts aient dû être supportés par l’IPGP faute de subvention de fonctionnement prévue. Il s’était également inquiété des coûts budgétaires qui impliquaient le financement des transmissions par VSAT.

Le bilan de l’affectation des sommes dépensées par le ministère des affaires étrangères pour la création d’un centre national d’alerte aux tsunamis conduit aux conclusions suivantes :

- sur les 1,5 million d’euros versés, 305 000 euros restent inutilisés faute d’étude préalable sur l’exposition de La Réunion à des tsunamis locaux ;

- sur les 1,1 million d’euros réellement engagés, la moitié a été affectée à Météo France Internationale pour améliorer les systèmes météorologiques des pays voisins. Si cette action permettra également à ces derniers de recevoir les messages d’alerte, votre rapporteur estime toutefois qu’il s’agit de mesures qui n’ont qu’un rapport indirect avec la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis. Compte tenu de la rareté des crédits accordés par la France jusqu’à présent pour la prévention des tsunamis, cette somme aurait pu avoir une affectation plus pertinente. Finalement, le rôle de Météo France dans la région, notamment dans le cadre de l’alerte cyclonique a été renforcé, mais ni le réseau sismique ni le réseau marégraphe, pourtant piliers du dispositif d’alerte aux tsunamis, n’est complètement opérationnel.

b) Dans les Caraïbes

Dans les Caraïbes, l’engagement de la France au système d’alerte se heurte à de nombreux obstacles : non seulement la prise de conscience du risque tsunami est relativement récente, mais les instruments de mesure existants ne sont pas adaptés à la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis efficace. En outre, faute de volonté politique au niveau national et d’un budget spécifique pour financer leurs actions, la marge de manœuvre des organismes scientifiques chargés de représenter la France dans le GIC/Caraïbes est très réduite.

La prise en compte du risque de tsunami par les autorités de la protection civile est très récente. Certes, il s’agit d’un risque connu, mais compte tenu des difficultés déjà rencontrées pour gérer les risques les plus présents dans la conscience collective (cyclones, séismes, volcans), l’aléa tsunami n’était pas considéré jusqu’à présent comme une priorité.

Lors de son déplacement en Martinique, votre rapporteur a été frappé par la mauvaise préparation de ce département aux risques naturels géophysiques60. Ainsi, alors que la Martinique est exposée à un risque fort en matière de séisme, la plupart des bâtiments ne respectent pas les normes sismiques tandis que la population est peu réceptive aux politiques d’information et de sensibilisation. Par exemple, votre rapporteur a appris qu’en cas de séisme61 d’une magnitude comparable à celui de 1839, la préfecture, la plupart des casernes de pompiers ainsi que les hôpitaux seraient les premiers bâtiments à être détruits, entravant fortement la gestion des secours. De même, les observatoires volcanologiques et sismologiques de la Martinique et de la Guadeloupe ne sont pas aux normes.

La participation active de la France au GIC/Caraïbes est également entravée par le fait que les instruments de mesure ne sont pas adaptés aux exigences techniques d’un système d’alerte aux tsunamis.

La Martinique est équipée de deux marégraphes, l’un à Fort de France appartenant au SHOM et le second installé par le conseil général au Prêcheur. Ce dernier devrait en installer un autre sur la côte atlantique.

En Guadeloupe, il existe 5 marégraphes dont l’un appartient au SHOM et 4 sont gérés par l’observatoire volcanologique et sismologique de la Guadeloupe (OVSG)62. Le conseil régional devrait en financer un qui serait vraisemblablement installé aux Saintes.

Néanmoins, aucun des marégraphes ne transmet de données en temps réel et ni le SHOM ni l’IPGP n’a les crédits nécessaires pour réaliser cette mise à niveau et prendre en charge le coût des transmissions. Le SHOM n’a d’ailleurs pas d’antenne locale dans les Antilles. En conséquence, aucun spécialiste du SHOM n’assiste aux réunions du sous-groupe de travail relatif aux instruments de mesure du niveau de la mer dans le cadre du GIC/Caraïbes.

L’IPGP, par le biais de ses deux observatoires, est responsable de la surveillance de la sismicité dans les Antilles françaises. Toutefois, son réseau sismique mériterait d’être rénové, notamment en ce qui concerne la transmission des données qui s’effectue par radio, ce qui est incompatible avec les exigences d’un système d’alerte aux tsunamis efficace.

La directrice de l’observatoire vulcanologique et sismologique de la Martinique (OVSM) a été nommée point de contact national pour le GIC/Caraïbes compte tenu du rôle fondamental que le réseau sismique est censé jouer dans le cadre de l’alerte aux tsunamis. Néanmoins, en l’absence d’une permanence 24h sur 24, 7 jours sur 7 à l’OVSM, c’est le centre de Météo France en Martinique qui est chargé de réceptionner les messages d’alerte en provenance du PTWC et de les transmettre au préfet.

Lorsque votre rapporteur s’était rendu en Martinique pour évaluer la participation française à la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis dans les Caraïbes, il avait été choqué de voir l’Etat français se défausser de ses responsabilités internationales sur des organismes scientifiques qui, faute de directives précises arrêtées au niveau ministériel, non seulement peuvent difficilement prendre des initiatives, mais également n’ont aucune légitimité pour parler au nom de la France.

Actuellement, le silence du gouvernement français oblige l’IPGP à définir seul l’orientation de la contribution française au dispositif d’alerte par le biais de l’observatoire vulcanologique et sismologique de Martinique. Compte tenu de l’absence de soutien politique et de moyens mis à sa disposition, l’OVSM, partant du principe que l’université de Porto Rico sera désignée comme le centre d’alerte régional, a opté pour une participation française qui se limite au partage des données marégraphiques et sismologiques avec les autres pays membres du GIC/Caraïbes.

Dans cet objectif, l’OVSM a mobilisé le réseau GEOSCOPE et noué des contacts avec le SHOM. En outre, l’action de l’OVSM a permis une réelle sensibilisation des autorités publiques et des intervenants locaux à la problématique tsunami, désormais intégrée dans le groupe de travail « club risques Antilles-Guyane » qui réunit les différents partenaires impliqués dans la surveillance et la gestion des risques naturels.

Néanmoins, votre rapporteur estime que seul l’Etat est légitime pour arrêter la position de la France. En outre, lui seul dispose (ou devrait disposer) d’une vue d’ensemble sur les négociations en cours dans les quatre bassins qui lui permette de prendre les décisions les plus pertinentes. Ainsi, votre rapporteur rappelle que la France pourrait devenir centre régional d’alerte aux tsunamis dans les Caraïbes si le CEA assumait cette responsabilité en Méditerranée.

Lors de son déplacement en Martinique, votre rapporteur a été informé que le ministre de l’Outre-mer de l’époque avait chargé le préfet de mettre en place un plan de secours spécialisé sur le modèle de celui élaboré en Polynésie française. Votre rapporteur reconnaît qu’un plan définissant l’organisation des secours en aval de l’alerte est indispensable pour assurer la protection de la population. Toutefois, cette demande ne pourra pas être satisfaite sans l’obtention au préalable des informations nécessaires pour l’élaboration d’un tel plan.

En effet, l’organisation des secours variera en fonction des délais de réaction à la disposition des services de la protection civile que seule une connaissance approfondie des zones susceptibles de provoquer un tsunami permet de fournir.

En outre, les actions à entreprendre dépendront de l’exposition des côtes au risque de tsunami. Votre rapporteur rappelle que le BRGM a été chargé d’une telle étude par le ministère de l’écologie. Toutefois, en l’absence d’une bathymétrie précise à l’approche des côtes, les résultats obtenus ne sont pas assez fiables pour pouvoir être utilisés pour l’élaboration d’un plan de secours spécialisé.

c) Dans la Méditerranée

En Méditerranée, la France est exposée à la fois au risque de tsunamis régionaux en provenance de l’Algérie et au risque de tsunamis locaux liés à un séisme en mer Ligure ou à un glissement de terrain dans la zone comprise entre Nice et Vintimille. Confrontées à des délais de réaction courts, le centre national d’alerte aux tsunamis, pour être efficace, a intérêt à être géré par un organisme scientifique capable d’affiner en moins de 15 minutes le message d’alerte régional6324h sur 24, 7 jour sur 7 et de le transmettre au centre opérationnel de gestion interministérielle des crises (COGIC) et aux autorités de protection civile régionales et locales, le cas échéant.

Le CEA a vocation à se charger de cette mission puisqu’il assure déjà l’alerte auprès des autorités françaises en cas de séisme de magnitude supérieur à 4 sur le territoire national, qu’il héberge le centre sismique euro-méditerranéen et qu’il constitue un organisme de référence en matière de simulation de tsunami, d’évaluation de l’aléa et de gestion de l’alerte aux tsunamis en Polynésie française. Comme les côtes françaises sont soumises au risque de tsunami dans plusieurs bassins, on pourrait imaginer que le futur centre national d’alerte gère à la fois les alertes en Méditerranée, dans les Caraïbes64 et dans l’océan Indien.

Par ailleurs, puisqu’il devra être destinataire de toutes les données en provenance des stations sismiques et des stations de mesure du niveau de la mer (marégraphes et tsunamimètres), il pourrait assumer le rôle de centre régional d’alerte aux tsunamis, sachant que la responsabilité ultime de déclencher l’alerte revient aux autorités nationales.

Lors du colloque international organisé à Nice en février 2005, le ministre de l’écologie de l’époque, M. Serge Lepeltier avait estimé que le centre sismologique euroméditerranéen constituait « une structure prédisposée pour jouer un rôle majeur dans l’élaboration et la mise en œuvre d’un système d’alerte sur le bassin méditerranéen. ».

En avril 2006, le ministre de l’intérieur de l’époque, M. Nicolas Sarkosy, avait demandé à l’administrateur général du CEA si ce dernier pourrait assumer la fonction de centre régional d’avis au tsunami pour la Méditerranée. Le CEA avait alors donné son accord de principe65, à condition de disposer des moyens humains et financiers adéquats.

Concrètement, la proposition du CEA faisait référence à deux types de dépense :

- les frais d’investissement initiaux (2,7 millions d’euros pour le CEA) : il s’agit essentiellement de l’adaptation de certaines stations sismiques du CEA, de l’acquisition d’un système de réception SMT ; du développement de logiciels sismiques très rapides (2 à 6 minutes) ; de l’intégration des logiciels de réception des données et des messages du SMT ainsi que de l’intégration des logiciels de visualisation en temps réel des données marégraphiques ; du développement des logiciels d’acquisition des données des stations sismiques hors CEA. Cette somme ne comprend pas les équipements sismiques des stations existantes à l’étranger à l’exception du coût des antennes VSAT, la mise à niveau de la station de Madères avec l’université de Lisbonne et la création d’une station sismique aux Acores. Les coûts liés à l’installation de 20 marégraphes et de 6 tsunamimètres sont évalués à 2,4 millions d’euros66 ;

- les frais de fonctionnement (3,5 millions d’euros) : ils correspondent en grande partie aux dépenses supplémentaires en personnel liées à la mise en place d’une équipe de permanence 24 h sur 24 ; sont également compris le coût des transmissions par VSAT et de l’entretien des équipements correspondants, la maintenance et l’évolution des moyens de traitement et de diffusion de l’alerte, le stockage des bases de données, la mise à jour des modélisations de scénarios et les coûts engendrés par la participation aux réunions du GIC/SATANEM. Le coût de la maintenance des marégraphes et des tsunamimètres est évalué à 310 000 euros par an.

Or, depuis l’envoi officiel de la proposition technique du CEA aux ministères concernés67 en novembre 2006, aucune négociation concrète n’a débuté. Certes, plusieurs réunions se sont tenues au niveau des services techniques, mais elles n’ont pas pu aboutir. En effet, jusqu’à la session de Lisbonne du 20-23 novembre 2007, aucune décision politique n’avait été prise sur la nature de la contribution française au système d’alerte aux tsunamis et sur les crédits à y consacrer, laissant sans réponse des questions aussi essentielles que :

- est-ce que la France, par le biais du CEA/CSEM, sera centre régional d’alerte aux tsunamis dans la Méditerranée et, dans l’affirmative, pour quelle zone géographique68 ?

- si la France ne souhaite pas devenir centre régional, créera-t-elle quand même un centre national d’alerte aux tsunamis et quelle sera sa configuration ?

- dans quelle mesure la France souhaite participer à la mise à niveau des marégraphes existants sur son territoire et à l’installation de marégraphes et de tsunamimètres au large de l’Algérie pour protéger ses côtes ?

Or, les incertitudes pesant sur la contribution réelle de la France au système d’alerte aux tsunamis en Méditerranée placent la délégation française dans une position particulièrement inconfortable : faute de directive ministérielle précise et en l’absence de crédits dédiés à la prévention du risque de tsunami, la délégation française ne peut faire aucune proposition qui engagerait la France financièrement.

Les représentants des administrations et des organismes de référence qui la composent ont ainsi atteint les limites de leurs compétences : ils ont pu accomplir correctement leurs missions tant que les réunions du GIC/SATANEM consistaient d’une part à dresser la liste des travaux scientifiques réalisés dans le domaine de l’évaluation de l’aléa et, d’autre part, à faire le bilan quantitatif et qualitatif des instruments de mesure sismiques et marégraphiques dans chaque Etat.

Toutefois, depuis la session à Bonn, le projet de système d’alerte aux tsunamis dans la Méditerranée est passé en phase de réalisation, chaque nouvelle réunion donnant lieu à la présentation par les Etats de leurs réalisations concrètes. Ainsi, l’Italie a annoncé à Bonn qu’elle assurerait la collecte et le traitement permanent des données sismiques en provenance des mers situées autour de l’Europe. Les bulletins d’information sur les tsunamis seraient diffusés par l’INGV (Instituto Nazionale di Geofisica et Vulcanologia).

En revanche, les organismes scientifiques français refusent de s’engager en l’absence d’engagement financier de la part du gouvernement et d’instruction officielle. La question de la mise à niveau des marégraphes est révélatrice. Le SHOM gère 23 marégraphes en métropole, dont 5 en Méditerranée, mais seul celui du Conquet transmet ses données en temps réel. Dans la mesure où le passage en temps réel ne constitue pas une priorité pour ce service et qu’aucun moyen complémentaire ne lui a été accordé pour accélérer la mise à niveau des marégraphes et assurer leur maintien en condition opérationnelle, la plupart des données des marégraphes français ne seront pas exploitables en 2010, date à laquelle le système d’alerte aux tsunamis en Méditerranée devrait être opérationnel.

Le fait que depuis la démission de l’ancien directeur du laboratoire Géoscience-Azur comme contact national en juin dernier, la France n’ait pas été capable de le remplacer témoigne également du blocage de la situation : officieusement, les membres de la délégation française sont unanimes pour affirmer que cette mission devrait incomber au CEA. Néanmoins, ce dernier refuse d’en assumer le financement sur ses fonds propres et attend donc un engagement du gouvernement pour accepter cette charge.

Votre rapporteur constate donc que jusqu’à la session de Lisbonne, la France a été incapable non seulement de préciser son rôle dans la future architecture du dispositif d’alerte aux tsunamis en Méditerranée, mais aussi de désigner son point focal (chargé de transmettre le message d’alerte aux services de la protection civile) et son point de contact national (chargé de représenter la France aux réunions du GIC/SATANEM). Quant à la contribution française à la mise à niveau des instruments de mesure du niveau de la mer, elle est mal engagée faute de crédits pour la financer.

Votre rapporteur se félicite néanmoins de l’évolution de la position française lors de la session de Lisbonne qui s’est tenue deux semaines seulement avant l’adoption de cette étude par l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.

La quatrième réunion du GIC/SATANEM du 21-23 novembre 2007 apparaissait de nouveau très mal engagée pour la France puisqu’un jour avant le commencement de cette session, la délégation n’avait toujours pas d’instruction de la part du gouvernement et s’apprêtait donc à faire profil bas.

Le chef de la délégation a cependant reçu des « éléments de langage » de la part du cabinet du Premier ministre traduisant une évolution favorable de la politique de la France et sa volonté de s’engager dans la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis.

Concrètement, la délégation française a fait part de l’intérêt de la France pour héberger un centre régional d’alerte aux tsunamis qui gèrerait l’alerte pour les pays de la Méditerranée occidentale et de l’Atlantique Nord Est en coopération avec le centre régional chargé de la Méditerranée orientale.

Il a alors été décidé de créer une « équipe spéciale »69 chargée de se réunir en janvier prochain pour définir l’architecture du système d’alerte en Méditerranée et dans l’Atlantique Nord-Est, les partenaires impliqués, le calendrier de mise en œuvre ainsi que la détermination du budget nécessaire et les sources de financement.

Eléments de langage

« La France rappelle que, lors de la conférence de Kobé, elle s’est engagée à participer à la conception et à la mise en œuvre d’un dispositif de surveillance et d’alerte multirisque océanique dans le cadre d’une démarche internationale pilotée par la COI.

La question de la prévention des risques par la surveillance des aléas notamment marins qu’ils soient d’origine géophysique ou météorologique est aujourd’hui l’un des sujets majeurs de préoccupation de la France compte tenu de l’importance du linéaire côtier réparti sur les principaux bassins maritimes de la planète où elle est présente. En effet, les perspectives annoncées par le monde scientifique en matière de réchauffement climatique, se traduisant notamment par l’élévation du niveau de la mer et par la survenue de phénomènes météorologiques plus intenses, nécessitent dès à présent une véritable mobilisation des Etats à l’échelle des différents bassins dans un cadre collégial.

La France considère donc qu’il importe aujourd’hui d’engager un processus incrémental qui réponde au calendrier international proposé par la COI, qui s’appuie sur ce qui est aujourd’hui disponible où le sera à court terme (à 3 – 4 ans) et qui traite en particulier des submersions marines causées par des phénomènes océaniques issus de sources lointaines.

Plus particulièrement, sur le bassin méditerranéen et sur l’atlantique nord-est, la France ne sous estime pas le rôle déterminant qu’elle doit tenir eu égard, d’une part à l’importance et à la diversité de son linéaire côtier ainsi qu’à la variété des aléas qui peuvent s’y manifester et, d’autre part, aux accords de coopération, notamment en matière de secours qu’elle a passés avec plusieurs Etats riverains. Elle dispose, en outre, de compétences en matière sismique, géophysique et météorologique.

Ce rôle, la France ne peut le jouer seule mais bien en partenariat avec d’autres Etats, parties prenantes comme elle à ce problème. Il s’agit en effet d’un projet euroméditerranéen qui, par sa complexité et les coûts engendrés, demande un regroupement des forces et des moyens dans lequel l’Union européenne doit également prendre toute sa part, notamment dans le cadre de ses programmes relatifs à l’environnement et à la sécurité.

C’est dans ce contexte que la France manifeste son intérêt pour héberger un centre régional de surveillance pour les tsunamis, notamment pour la partie méditerranée occidentale et atlantique nord-est, comme contribution au SATANEM. Ce centre travaillerait en lien avec le centre agissant sur la méditerranée orientale de façon à créer un binôme pour l’ensemble du bassin. En contact permanent, ces centres auront vocation à se suppléer en cas de besoin ; ils émettront leurs avis directement auprès des autorités nationales en charge de la dissémination de l’alerte.

Pour faire aboutir cette démarche partenariale et disposer d’un projet global euro méditerranéen pour la fin du premier semestre 2008, la France propose de réunir dès le mois de janvier (date à fixer à Lisbonne) une équipe spéciale. Celle ci associerait à la dimension scientifique et technique un volet politique. Elle aura pour mission :

- de définir l’architecture, les moyens, les partenaires du centre de surveillance pour la région méditerranée occidentale et atlantique nord-est générale de celui ci ;

- d’établir un calendrier prévisionnel de mise en place et de passage en mode opérationnel ;

- d’évaluer le coût des différentes tranches du projet et d’examiner les contributions envisageables ;

- de prendre en compte les apports possibles et probables à terme des systèmes d’observation et de veille existants et en cours de développement.

Cette équipe spéciale présentera le résultat de son travail lors de la prochaine réunion du GIC SATANEM en identifiant notamment les premiers financements nécessaires à la constitution d’un « noyau dur » de surveillance et d’alerte répondant aux préoccupations euroméditerranéennes et internationales en matière de risques côtiers d’origine océanique.

Enfin, la France suggère que cette équipe spéciale soit animée par le CEA, compte tenu de son expérience dans l’océan Pacifique et du fait qu’il est la structure d’accueil du centre sismique euro méditerranéen. »

d) Dans le Pacifique

Comme il a été indiqué précédemment, la prise de conscience de la vulnérabilité de la Nouvelle Calédonie et de Wallis et Futuna a conduit l’Etat français et les autorités locales à entamer l’installation de sirènes sur ces territoires. Toutefois, pour que cette démarche soit efficace, elle doit s’accompagner de la mise en place d’un système d’alerte fiable et accordant aux autorités chargées de déclencher les sirènes un temps minimal de réaction.

Actuellement, il existe un seul marégraphe en Nouvelle Calédonie (Nouméa) et quatre marégraphes (Vanuatu Centre, Fidji, Nord Samoa et Tonga Centre) mal positionnés pour protéger efficacement les territoires français du Sud-Ouest pacifique.

Une étude financée en partie par le secrétariat d’Etat à l’Outre-mer a été réalisée en juillet dernier pour évaluer les besoins en marégraphes et en tsunamimètres dont les conclusions ont été les suivantes.

6 zones sismiques ont été distinguées comme pouvant entraîner un tsunami en Nouvelle Calédonie et à Wallis et Futuna ainsi que l’indique la carte suivante : les îles Salomon, les îles Vanuatu, les îles Loyauté, les îles Fidji, les îles Tonga et les îles Kermadec :

Les zones sismiques tsunamigènes qui menacent
la Nouvelle Calédonie et Wallis et Futuna

Source : CEA/DASE

- à l’Ouest et au Sud des îles Salomon ainsi qu’au Nord des îles Vanuatu (zone 2 sur la carte) : 4 stations de mesure du niveau de la mer sont nécessaires pour détecter les tsunamis induits dans cette région, à savoir 3 marégraphes respectivement au Nord-Ouest d’Esperitu Santo (qui fait partie des îles Vanuatu), au Sud de Santa Catalina et à l’Est de Renell Island (ces deux îles font partie des îles Salomon) ainsi qu’un tsunamimètre au Nord entre les îles Salomon et la Grande Terre (que les Australiens prévoient d’installer) ;

- au Sud des îles Vanuatu et au niveau des îles Loyautés (zone 3) : un séisme d’une magnitude supérieure à 7,1 dans cette zone générerait un tsunami local avec un délai de réaction très court pour les îles Loyautés70. Toutefois, l’installation d’un marégraphe à Lifou et d’un marégraphe à Maré permettrait de confirmer une alerte 20 minutes avant l’arrivée de la première vague sur Grande Terre et 2h30 avant l’arrivée du tsunami à Futuna ;

- au Nord des îles Tonga71 (zone 5): deux marégraphes l’un à Wallis et l’autre à Futuna afin que, si l’une de ces îles est touchée par le tsunami, l’autre île puisse être avertie (le délai de réaction est évalué à 20 minutes au plus). Ces deux marégraphes serviraient également à confirmer une alerte 2h30 avant l’arrivée du tsunami aux îles Loyautés et en Nouvelle Calédonie. En outre, 2 autres stations de mesure du niveau de la mer sont nécessaires pour confirmer ou infirmer au plus vite (10 à 30 minutes plus tôt) les tsunamis induits dans cette région : un marégraphe au sud dans les îles Samoa et un à l’extrême nord des îles Tonga. Un tsunamimètre à l’Est des îles Tonga (que les Américains devraient installer) permettra de confirmer plus tard l’importance du tsunami.

En ce qui concerne les zones 1 (à l’Ouest des îles Salomon) et 6 (au Sud des îles Tonga/au niveau des îles de Kermadec), elles seront surveillées par le marégraphe prévu à l’Est de Renell Island et par les instruments de mesure que l’Australie devrait installer72.

En résumé, le réseau de surveillance du niveau de la mer de cette région doit comprendre :

- 7 marégraphes dans les Territoires français (3 en Nouvelle Calédonie, 1 à Lifou, 1 à Maré, 1 à Wallis et 1 à Futuna) : les stations de Wallis et Futuna contribuant à l’alerte pour la Nouvelle Calédonie et les îles Loyauté pour des tsunamis venant des Tonga et ceux des îles Loyautés et de la Nouvelle Calédonie servant d’alerte régionale pour les tsunamis venant des îles de Vanuatu/îles Loyautés ;

- 6 stations de mesure du niveau de la mer dans d’autres îles pour détecter au plus tôt les tsunamis se dirigeant vers les territoires français (2 dans les îles Salomon, 1 dans les îles Vanuatu, 1 dans les îles Samoa, 2 dans les îles Tonga) ;

- 1 tsunamimètre installé par les Australiens au Nord de la Nouvelle Calédonie.

Dans un deuxième temps et pour finaliser le dispositif, deux marégraphes à Ouvéa et à Ouinné ainsi qu’un tsunamimètre entre les îles Tonga et Fidji sont à prévoir.

Comme il a été indiqué précédemment, le secrétariat d’Etat à l’Outre-mer est conscient des enjeux et contribue financièrement à la mise en place d’un dispositif d’alerte dans le Pacifique Sud-Ouest. Néanmoins, il ne dispose pas des crédits suffisants. Un arbitrage politique est donc indispensable pour arrêter l’architecture du système d’alerte en Nouvelle Calédonie et à Wallis et Futuna et prévoir un budget correspondant.

2. Les raisons de ces blocages

Les blocages observés pour la participation de la France à la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis dans les différents bassins ont tous la même origine : faute de volonté politique, la contribution française ne fait l’objet d’aucun plan d’action d’ensemble et est confiée à la bonne volonté des services techniques des ministères et des organismes scientifiques. Comme ces derniers ne disposent pas des crédits nécessaires en l’absence d’un budget spécifique dédié à la mise en place des systèmes d’alerte aux tsunamis, les progrès sont très lents.

a) L’absence de vision d’ensemble

La France est le seul pays à siéger dans les quatre groupes intergouvernementaux de coordination pour la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis. En outre, la conception et l’instauration d’un dispositif de surveillance impliquent un grand nombre de partenaires aussi bien au niveau des ministères qu’au niveau des administrations publiques, des organismes scientifiques et des collectivités territoriales.

Malheureusement, une fois l’accord de principe donné sur une contribution de la France aux systèmes d’alerte au tsunami en 2005, aucune réflexion stratégique n’a été menée par les gouvernements successifs afin de définir une ligne politique claire, fixer les responsabilités de chacun et nommer un coordinateur au niveau national.

Certes, le ministère de l’écologie (à travers la direction de la prévention des pollutions et des risques) et le ministère de l’intérieur (à travers la direction de la défense et de la sécurité civiles) ont mis en place au printemps 2006 un groupe technique national de coordination. Néanmoins, son efficacité est limitée dans la mesure où, faute d’instructions politiques précises, elle dépend de la bonne volonté de ses membres.

Cette absence de coordination des actions aboutit à des non sens. Ainsi, le projet français initial dans l’océan Indien prévoyait la mise en place d’un centre national d’alerte aux tsunamis à La Réunion disposant de ses propres capacités d’expertise sans réflexion préalable sur les besoins des autres bassins et sur les moyens d’expertise déjà existants. Ce projet n’a pas été réalisé par manque de crédits, mais également parce qu’il est apparu que Météo France n’était pas l’organisme le mieux adapté pour assurer cette mission.

De même, l’achat et la mise à niveau des marégraphes existant dans les quatre bassins n’ont fait l’objet ni d’un plan global d’équipement ni d’une analyse préalable pour arrêter la solution la plus avantageuse en matière de rapidité d’installation et de coût de la maintenance. Officieusement, le SHOM a été reconnu comme chargé de cette tâche sans que cette mission ait fait l’objet d’une instruction précise de son conseil d’administration, ce qui aboutit aux retards constatés.

b) L’absence de crédits

La contribution française aux systèmes d’alerte aux tsunamis se heurte également à l’absence de crédits disponibles pour financer les actions nécessaires. En effet, jusqu’à présent, seule la mise en place du centre d’alerte national dans l’océan Indien s’est accompagnée d’un budget correspondant censé prendre en compte tous les aspects financiers de cette action, même si in fine votre rapporteur estime que les crédits débloqués à l’époque n’ont pas forcément financé les mesures prioritaires.

En outre, ce budget comportait uniquement des crédits d’équipement. Or, de nombreuses actions exigent également des crédits de fonctionnement. Ainsi, l’installation rapide de nouveaux instruments de mesure (stations sismiques et marégraphes) et la mise à niveau de ceux déjà existant exigent de consacrer un ou plusieurs ingénieurs à cette mission pendant plusieurs mois. Lorsque le matériel est installé, se pose alors la question des coûts de transmission. Les données sismiques par exemple doivent être transmises par satellite VSAT, ce qui s’avère très coûteux. Or, non seulement les organismes censés assurer ces tâches doivent souvent le faire sur leurs fonds propres, mais ils n’ont signé aucune convention avec leurs organismes de tutelle précisant leurs nouvelles missions en matière de surveillance des tsunamis. Leur budget ne comprend donc aucune ligne renvoyant à un programme « tsunami ». En conséquence, il leur est très difficile de consacrer de l’argent et du personnel pour des missions qu’ils n’ont pas à remplir officiellement et pour lesquelles ils n’ont pas de crédit.

Certains ministères ont financé quelques actions. Ainsi, comme il a été indiqué précédemment, le ministère de l’écologie a chargé le BRGM d’une étude sur l’exposition des côtes françaises en Méditerranée et aux Antilles au risque de tsunami ainsi que de l’élaboration d’une base de données récapitulant l’ensemble des tsunamis historiques ayant touché la France métropolitaine et les Antilles.

De même, le secrétariat d’Etat à l’Outre-mer a financé plusieurs équipements dans les DOM-TOM, notamment 4 marégraphes en Guadeloupe, des sirènes à Wallis et Futuna et en Nouvelle Calédonie et une station de gestion des alertes aux tsunamis.

Néanmoins, faute de vision stratégique globale et de plan d’action élaboré entre tous les partenaires impliqués dans l’alerte aux tsunamis, les sommes investies restent limitées et le risque n’est pas négligeable de voir la multiplication de petits projets sans lien avec les autres et dont la pérennité n’est pas garantie.

3. Une évolution de la politique française ?

La réunion à Lisbonne du GIC/SATANEM a été marquée par une évolution positive de la France qui a manifesté officiellement son intérêt pour héberger un centre d’alerte régional.

En outre, selon les informations obtenues par votre rapporteur, le Premier ministre français aurait donné son accord de principe pour l’instauration d’un centre national de veille et d’alerte aux submersions côtières d’origine marine73 qui gèrerait également le risque de tsunamis. Le secrétariat général de la mer serait chargé de piloter la définition et la mise en place dudit centre national.

Votre rapporteur ne peut qu’encourager ce retour du politique même s’il est encore trop tôt pour pouvoir se prononcer sur les mesures concrètes que prendra le gouvernement français. En effet, l’attentisme observé jusqu’à présent témoigne d’une profonde méconnaissance des véritables enjeux qui se cachent derrière la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis.

IV. LES RECOMMANDATIONS : POUR UNE VISION STRATÉGIQUE DE LA GESTION DU RISQUE TSUNAMI

A. DES ENJEUX CONSIDÉRABLES

Si la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis a pour principal objectif d’assurer la sécurité des populations en bord de littoral, d’autres enjeux économiques, géostratégiques et scientifiques importants sont associés à la participation française au dispositif d’alerte.

1. Les enjeux de sécurité

Ces enjeux ayant été déjà évoqués précédemment, votre rapporteur se contentera donc de rappeler que la France se glorifie de ses 10 millions de km² de zone économique exclusive répartis dans tous les océans, mais que cet essaimage territorial souligne sa vulnérabilité au risque de tsunami. La mise en place, au niveau international, de systèmes d’alerte aux tsunamis constitue donc une chance pour la France puisqu’elle permet d’assurer l’efficacité du dispositif en multipliant le nombre de données sismiques et marégraphiques à la disposition des Etats et de mutualiser les investissements en instrument de mesure.

Toutefois, compte tenu des enjeux de sécurité nationaux, elle a intérêt à jouer un rôle moteur au sein des groupes intergouvernementaux de coordination afin que les dispositifs d’alerte soient rapidement opérationnels et adaptés à ses contraintes de sécurité.

En outre, elle ne peut pas s’affranchir d’une réflexion au niveau national visant à définir l’architecture la plus adaptée pour protéger de manière efficace et à un coût acceptable l’ensemble de son littoral. Si, comme le souhaite votre rapporteur, la France créait un centre d’alerte aux tsunamis en Méditerranée, il faudrait s’assurer qu’il soit également en charge de la surveillance des côtes françaises dans l’océan Indien et dans les Caraïbes.

2. Les enjeux économiques

Les enjeux économiques ne doivent pas non plus être sous-estimés : le tourisme constitue une ressource fondamentale pour notre pays. Un tsunami dévastateur dont il apparaîtrait ultérieurement que les conséquences auraient pu être limitées en présence d’un système d’alerte opérationnel aurait un impact catastrophique sur la renommée de nos côtes.

A cet égard, votre rapporteur est persuadé que l’aversion au risque dans les sociétés développées ne fera que s’accroître, notamment en raison de leur confiance dans la science pour les protéger contre les catastrophes naturelles. Il faut donc cesser de croire que le fait de communiquer sur les risques entrave le développement économique mais, au contraire, replacer la notion d’aléa dans un cadre plus général et positif de politique de prévention des risques naturels.

Sous l’influence des médias avides d’images fortes et prompts à rechercher des responsables, la pression sociale sur les autorités publiques se ne fera qu’augmenter pour le développement d’une politique efficace de prévention des risques.

3. Les enjeux géostratégiques

La mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis ne peut être réellement efficace que si elle est coordonnée au niveau international. En effet, la détermination rapide et fiable des tremblements de terre ainsi que la vérification de la génération d’un tsunami exigent à la fois l’installation d’un nombre important d’instruments de mesure sur les territoires nationaux, mais aussi dans les Etats voisins et dans les zones « sources » des séismes ainsi que l’accès et l’échange des données sismiques et marégraphiques.

L’implication plus ou moins forte de la France dans l’instauration d’un système d’alerte opérationnel a donc des répercussions inévitables sur son rayonnement international et ses relations avec les autres pays.

Lors de ses déplacements dans les Antilles et en Polynésie française, votre rapporteur a pris conscience du rôle stratégique mais largement méconnu en métropole de nos départements et territoires Outre-mer dans les relations entre la France et les pays voisins dans ces zones.

Ainsi, le GIC/Caraïbes rassemble les Etats-Unis (concernés par le risque de tsunami au niveau de la Floride), les Etats de la Caraïbe, mais aussi tous les Etats de l’Amérique du Sud et de l’Amérique centrale ayant une façade dans l’océan atlantique ou dans la mer des Caraïbes.

De même, à travers le GIC/Pacifique, la France est en contact permanent avec le Japon, les Etats-Unis, l’Australie et les Etats d’Amérique du Sud et d’Amérique centrale ayant une façade pacifique.

Or, de nombreux pays sont demandeurs d’une coopération plus poussée avec la France.

Dans le Pacifique, la France (essentiellement à travers le LGD/Pamatai et les services de la protection civile) travaille en étroite relation avec l’Australie pour le développement d’un système d’alerte aux tsunamis dans le Pacifique Sud-Ouest. Elle a également noué de très bons contacts avec le Chili qui a été le premier pays dont le centre d’alerte s’est équipé d’un système TREMORS. Parce qu’elle a mis en place un dispositif d’alerte aux tsunamis performant en Polynésie française, elle est souvent sollicitée par les îles voisines, mais également par le centre international d’information sur les tsunamis de Hawaï pour aider à la mise en place de dispositifs similaires dans les pays voisins et intervenir dans des conférences internationales.

Toutefois, faute de crédits suffisants, les actions de coopération de la France restent limitées et ponctuelles.

Dans la zone Caraïbe, la France pourrait utiliser les tensions entre les Etats-Unis et le Venezuela pour renforcer son influence en jouant le rôle de médiateur et de contrepoids aux Etats-Unis. En effet, à l’exception de ce pays, la plupart des Etats membres du GIC/Caraïbe n’ont pas les moyens financiers nécessaires pour contribuer de manière efficace à la mise en place d’un système d’alerte. Si la France s’engageait à devenir un centre d’alerte régional en complément de celui de Porto Rico, elle accroîtrait considérablement son rayonnement dans cette zone.

Par ailleurs, la mise en place d’un système d’alerte en Méditerranée implique une forte coopération entre les pays de l’Union européenne d’une part, et entre les pays autour de la Méditerranée d’autre part. La présidence française de l’Union européenne à partir de juillet 2008 ainsi que les relations privilégiées que la France entretient avec les pays du Maghreb devraient conduire notre pays à jouer un rôle majeur.

Votre rapporteur tient à souligner que la position de la France se base jusqu’à présent sur un calcul erroné, à savoir qu’en ne s’impliquant pas dans la mise en place des systèmes d’alerte, la France n’aura pas à en subir les conséquences financières. En réalité, elle sera quand même mise à contribution mais sans pouvoir en tirer profit. Or, les exemples précédents montrent combien une participation active à la mise en place des systèmes d’alerte aux tsunamis peut constituer un instrument diplomatique non négligeable.

4. Les enjeux scientifiques

La France peut s’appuyer sur des organismes de référence performants pour le développement d’un système d’alerte aux tsunamis. Pour autant, la compétition internationale n’épargne pas les organismes scientifiques qui doivent constamment justifier l’utilisation des crédits qui leur sont attribués. Il est évident que si la France devait jouer un rôle moteur en Méditerranée dans la construction d’un dispositif d’alerte, les organismes scientifiques et assimilés nationaux comme le CEA, l’IFREMER, le SHOM, le BRGM, Météo France etc seraient étroitement associés à ce projet, confortant ainsi leur crédibilité au niveau international.

Le rôle du centre sismique euro-méditerranéen (qui est abrité par le CEA) pourrait également être renforcé considérablement s’il hébergeait le centre d’alerte régional, le CEA en assurant la gestion.

B. LES RECOMMANDATIONS

Compte tenu de ce qui a été dit précédemment, votre rapporteur souhaite faire deux types de recommandation : des recommandations structurelles, qui visent tous les bassins et constituent autant de conditions sine qua non pour une contribution française efficace à l’instauration d’un système d’alerte aux tsunamis; des recommandations par bassin pour tenir compte des spécificités de chaque zone et de l’exposition variable des côtes françaises au risque de tsunami.

1. Deux remarques préalables

Au préalable, votre rapporteur souhaite faire deux remarques que le gouvernement devra non seulement garder à l’esprit dans sa réflexion sur l’architecture souhaitable pour un système d’alerte aux tsunamis, mais sur lesquelles il lui faudra également communiquer.

La première remarque concerne les spécifités de l’aléa de tsunami et ses conséquences en matière de gestion du risque.

Les tsunamis sont des phénomènes rares et qui exigent des instruments de détection sophistiqués et des dispositifs d’alerte très réactifs compte tenu de la brièveté des délais de réaction et des risques de fausse alerte. Les choix qui seront pris pour arrêter l’architecture du système d’alerte dépendront d’un arbitrage entre les coûts d’un dispositif d’alerte au regard de la fréquence de l’aléa. Cet arbitrage devra être arrêté de manière transparente et figurer dans tous les plans d’organisation des secours en aval.

La deuxième remarque souligne les limites d’un dispositif d’alerte.

Contrairement à une opinion souvent répandue chez nos concitoyens, le risque « zéro » n’existe pas : même si un système d’alerte aux tsunamis performant est mis en place, il n’empêchera pas dans tous les cas la perte de vies humaines. En effet, si les effets néfastes des tsunamis régionaux et lointains peuvent être fortement réduits, les moyens de prévention sont plus limités à l’encontre d’un tsunami local qui déferle sur la côte en quelques minutes. Dans ce cas là, seule une sensibilisation préalable de la population aux bons réflexes peut s’avérer efficace. Ce message devra donc être passé pour éviter tout malentendu entre les autorités chargées de la protection civile et la population.

2. Les recommandations structurelles

Elles s’articulent autour de quatre axes : la définition d’un système d’alerte cohérent; la mise à disposition d’un budget pluriannuel pérenne; l’intégration du risque tsunami dans une logique multirisque pour l’acquisition des instruments de mesure du niveau de la mer et l’expérimentation sur la base du volontariat de la gestion de l’alerte aux tsunamis locaux.

a) La définition d’un système d’alerte cohérent

Cinq conditions doivent être remplies pour mettre en place un système d’alerte cohérent : désigner un coordinateur général; disposer des outils de mesure adaptés; s’appuyer sur une connaissance approfondie de l’aléa; répondre de manière adaptée en cas d’occurrence de l’aléa; sensibiliser et éduquer la population.

(1) Désigner un coordinateur général

La conception d’un système d’alerte aux tsunamis implique un grand nombre de partenaires dont les structures de fonctionnement, les intérêts et la conception qu’ils peuvent avoir d’un système d’alerte aux tsunamis sont très variés et parfois contradictoires. Un coordinateur général est donc doublement nécessaire.

D’une part, il a vocation, en coopération avec les organismes associés au projet, à définir les grandes lignes directives de ce dernier pour en assurer la cohérence interne. Il lui faudra ainsi arrêter le contenu et la coordination des contributions françaises dans les quatre bassins. Il devra également s’assurer en collaboration avec le comité national de la Commission océanographique internationale que la France participe aux réunions des 4 groupes intergouvernementaux de coordination et qu’elle est représentée dans chaque groupe de travail. Le comité national doit donc disposer des crédits nécessaires pour financer la participation des délégués français à ces réunions et assurer la fonction de secrétariat.

D’autre part, il lui revient de fixer les responsabilités et les missions de chacun et de définir un calendrier prévisionnel pour la réalisation du projet.

Deux pistes de réflexion sont envisageables :

- la création d’une délégation interministérielle sur le modèle de la délégation interministérielle post-tsunami : cette structure s’était montrée efficace pour réaliser un projet concret sur une période déterminée impliquant un grand nombre de partenaires;

- l’attribution de ce rôle de pilotage au secrétariat général à la mer : plusieurs arguments peuvent être avancés en faveur de cette solution. D’abord, cette administration est placée directement sous l’autorité du Premier ministre. Cette position privilégiée lui donne une autorité incontestable sur les autres partenaires et lui permet d’accélérer les arbitrages nécessaires en cas de désaccord. Ensuite, c’est une administration qui est habituée à travailler avec plusieurs organismes concernés par la mise en place d’un système d’alerte (SHOM, IFREMER) et qui connaît donc bien leur fonctionnement interne. Enfin, le succès d’Extraplac74 coordonné par le secrétariat général à la mer témoigne de sa capacité à gérer un projet équivalent. Il semblerait que le gouvernement privilégierait cette solution.

S’il ne revient pas à votre rapporteur d’arrêter tous les détails de l’architecture du futur système d’alerte français aux tsunamis, il estime que ce dernier doit comporter la création d’un centre d’alerte national géré par le CEA et dont le champ d’intervention à court terme concernerait l’alerte en Méditerranée/Atlantique Nord-Est, dans les Caraïbes et dans l’océan Indien en cas de tsunamis dont l’arrivée sur le littoral est prévue plus de 15 minutes après la détection de l’événement générateur du tsunami. Une fois ce dispositif en place et rodé, une deuxième étape pourrait être envisagée pour l’extension des missions du centre national d’alerte à l’alerte en cas de tsunamis locaux dans des zones définies au préalable et équipées des instruments de mesure et de diffusion de l’alerte nécessaires.

Par ailleurs, il reviendra à ce centre national d’alerte d’assumer également les fonctions de centre d’alerte régional pour la Méditerranée occidentale, pour les Caraïbes et pour la zone ouest de l’océan Indien, en collaboration avec les autres centres régionaux.

(2) Disposer des outils de mesure adaptés

Tout dispositif d’alerte efficace s’appuie sur des stations sismiques, sur des marégraphes et sur des tsunamimètres qui transmettent leurs données en temps réel. Par ailleurs, la prise en compte du risque de tsunami lié aux glissements de terrain implique l’installation de capteurs tels que des hydrophones.

En ce qui concerne les marégraphes, il existe plusieurs réseaux. Le SHOM gère 30 marégraphes à travers le réseau RONIM75 répartis en métropole, mais aussi aux Antilles, dans l’océan Indien et dans le Pacifique. Le LEGOS76 est responsable du réseau ROSAME77 regroupant 4 marégraphes à Dumont D’Urville, à l’île d’Amsterdam, au Crozet et à Kerguelen. Par ailleurs, les directions départementales de l’équipement, les ports autonomes ainsi que certaines collectivités territoriales gèrent également des marégraphes. Enfin, dans le cadre de l’alerte aux tsunamis, l’observatoire vulcanologique et sismologique de la Guadeloupe crée son propre réseau en Guadeloupe et le CEA propose de faire installer des marégraphes dans le Pacifique pour mettre en place un système d’alerte aux tsunamis qui protégerait la Nouvelle Calédonie et Wallis et Futuna.

De nombreux marégraphes en Outre-mer sont ou seront rapidement capables de transmettre leurs données en temps réel. En revanche, parmi les marégraphes gérés par le SHOM en métropole, seul celui du Conquet répond à ce critère. Pourtant, selon les informations obtenue par votre rapporteur, 13 marégraphes appartenant au SHON (dont 11 en métropole) seraient susceptibles techniquement de passer rapidement en temps réel car ils disposent des sorties nécessaires. Le coût estimé est de 2.500 euros en équipement et une journée de travail par marégraphe. Il est donc urgent que le SHOM reçoive de la part de son conseil d’administration les moyens nécessaires pour adapter rapidement les marégraphes en question.

Seulement 2 marégraphes dont les données pourraient être rapidement transmises en temps réel sont situés en Méditerranée : celui de Port-Vendres et de Sète. Il est donc indispensable d’accélérer le remplacement prévu à moyen terme par le SHOM des stations de mesure du niveau de la mer à Ajaccio, à Toulon, à Marseille et à Nice pour qu’elles puissent être intégrées dans le dispositif d’alerte avant la fin de 2008.

Par ailleurs, votre rapporteur insiste sur le fait que la transmission des données peut être gratuite si l’équipement des marégraphes permet l’envoi direct des données sur le système mondial de télécommunication. Il suffit alors d’acquérir un système de réception pour recevoir les données de tous les marégraphes utilisant ce moyen de transmission. Ce système, dont l’alimentation en énergie et les transmissions sont autonomes, est particulièrement recommandé dans les îles et le long des côtes retirées, ce qui est le cas de nombreux sites des DOM-TOM et de pays étrangers.

Devant la multitude des réseaux marégraphiques, il est particulièrement important de créer un guichet unique en désignant un organisme chargé de centraliser, archiver et mettre les données à la disposition de tous les utilisateurs intéressés. En outre, ce dernier pourrait conseiller tous les organismes désireux d’installer des instruments de mesure de la mer afin de s’assurer que les instruments prévus répondent aux critères définis par le programme mondial d’observation du niveau de la mer (GLOSS) et servent ainsi pour le plus grand nombre d’applications possibles.

Votre rapporteur rappelle que le SHOM est responsable de la sécurité de la navigation dans les zones françaises à travers l’établissement des cartes marines et de l’annuaire des marées. Toute information relative à la bathymétrie et à la marée devrait donc lui être transmise, ce qui n’est pas réalisé systématiquement par les organismes. Ainsi, le SHOM a pris connaissance du réseau géré par l’Observatoire vulcanologique et sismologique de la Guadeloupe seulement lorsque ces marégraphes ont été endommagés par le cyclone Dean.

Pour pallier cette difficulté, le représentant national au programme mondial d’observation du niveau de la mer78 s’est chargé de cette mission. Pour autant, cette solution n’est pas optimale car elle repose sur la bonne volonté d’un individu, ce qui rend l’initiative très vulnérable dans le temps.

Il convient donc que le SHOM soit officiellement mandaté pour coordonner les activités de mesure de hauteur d’eau en France par son conseil d’administration et que les moyens financiers et humains lui soient donnés pour accomplir cette tâche.

A cet égard, votre rapporteur rappelle que le conseil d’administration est en train de négocier le contrat objectifs-moyens du SHOM pour les cinq années à venir. Il serait donc opportun de prendre en compte les besoins en matière de coordination nationale des activités marégraphiques et le passage rapide du réseau en temps réel. La présence d’un représentant du ministère de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables et d’un représentant du ministère de l’intérieur, de l’Outre-mer et des collectivités territoriales au sein du conseil d’administration du SHOM devrait permettre de sensibiliser ledit conseil sur le rôle fondamental que le SHOM est amené à jouer pour rendre le dispositif d’alerte aux tsunamis efficace.

En ce qui concerne les stations sismiques, le réseau français large bande devrait être installé dans les prochaines années en métropole. Il devrait couvrir correctement notre territoire tandis que les communications basculeront sur satellite. Néanmoins, les coûts de transmission des données sont très importants et devront être répercutés dans les frais de fonctionnement des organismes chargés de la gestion des stations sismiques.

Enfin, le littoral français en Méditerranée ne sera bien protégé que si au moins deux tsunamimètres sont installés au large des côtes algériennes. D’autres tsunamimètres seront nécessaires dans le bassin méditerranéen, dont un entre la Corse et le continent et un autre dans l’Atlantique Nord Est. Compte tenu des coûts importants que ces instruments de mesure occasionnent en équipement, en installation et en maintenance, leur prise en charge devra être mutualisée au moins en partie au niveau européen.

(3) S’appuyer sur une connaissance approfondie de l’aléa

Pour être efficace, un système d’alerte doit s’appuyer sur une connaissance précise de l’aléa. Plusieurs études ont déjà été réalisées par le passé et de nombreux modèles de simulation ont été développés, mais ces travaux ont été confiés à de nombreux instituts de recherche sans coordination d’ensemble. Il convient donc de recenser les projets de recherche effectués et en cours et d’arrêter une ligne directrice sur les besoins existants.

Plusieurs pistes devraient être privilégiées.

D’abord, la connaissance des sources doit être approfondie. L’étude du BRGM sur l’exposition des côtes françaises en Méditerranée et aux Antilles constitue un premier pas. Toutefois, selon les informations obtenues par votre rapporteur, les zones retenues et les séismes qui y ont été associés ne recueillent pas l’unanimité dans la communauté scientifique. Les travaux de recherche visant à préciser les zones exposées au risque de tsunami doivent donc être poursuivis.

En ce qui concerne les glissements de terrain, les études sont plus lacunaires même si des travaux remarquables ont été menés tels que ceux du GIS/CURARE dans le cirque Marcel. Il faut donc poursuivre ce travail de longue haleine.

La constitution d’une base de données sur les tsunamis, entamée par le BRGM, doit également être complétée. Néanmoins, le cahier des charges mériterait d’être modifié. Jusqu’à présent, le BRGM utilise seulement des documents écrits mentionnant un événement dont les caractéristiques ressemblent à celles d’un tsunami. Or, cette approche est trop réductrice pour pouvoir recenser les tsunamis très anciens ou ayant touché des zones isolées. L’exemple du tsunami des Salomons en avril 2007 est révélateur. A la lecture de la presse locale, il n’a quasiment pas affecté la Nouvelle Calédonie. Or, une mission destinée à recueillir des témoignages sur cet événement a révélé plusieurs phénomènes caractéristiques d’un tsunami (retraits de la mer, mascarets, tourbillons dans les ports) que personne n’avait jugé bon de rapporter dans la mesure où ils n’avaient provoqué ni dégâts matériels ni victimes. Les enquêtes sur place et les études post-tsunamis sont donc essentielles pour une meilleure appréhension de cet aléa.

Dans la perspective d’un système d’alerte, les modélisations sont également indispensables pour bien connaître l’impact d’un tsunami sur une côte. Toutefois, elles ne sont efficaces que si la bathymétrie à l’approche des côtes est suffisamment précise pour tenir compte des effets de site. Or, la cartographie marine à l’approche des côtes est incomplète. Ainsi, en 1998, une campagne en mer de l’IPGP sur un navire de l’IFREMER avait été menée pour cartographier les reliefs sous-marins autour de la Martinique et de la Guadeloupe. Hélas, en raison d’une grève des dockers, le sondeur multifaisceau n’avait pas pu être livré à temps et la zone entre 0 et -200 m n’avait pas pu être cartographiée. Une mission de 24 jours de temps bateau serait nécessaire pour compléter la couverture bathymétrique actuelle, en sachant que le coût journalier d’un bateau s’élève entre 10.000 et 20.000 euros.

Actuellement, il existe plusieurs programmes nationaux, essentiellement dédiés aux eaux territoriales (12 milles) :

- le projet Litto 3 D lancé en partenariat entre le SHOM et l’IGN (Institut Géographique National) pour la partie – 10m/+ 10m autour du trait de côte;

- le projet REBENT d’IFREMER pour des zones pilotes dans la bande allant du niveau de la mer à -20m ;

- les actions ponctuelles à travers des campagnes scientifiques ou les campagnes réalisées souvent avec le soutien des conseils régionaux pour la cartographie des formations superficielles.

Le programme Litto 3 D vise à établir une cartographie précise de la bande côtière comprise entre 10 mètres d’altitude pour la partie terrestre et 6 milles marin pour la partie marine. Les levés sont réalisés à partir d’un système aéroporté (lidar bathymétrique) et par vedette hydrographique équipée d’un sondeur multifaisceau, ce qui permet d’atteindre une précision inégalée jusqu’à présent et indispensable pour les modélisations.

Les données bathymétriques et altimétriques détenues par les deux instituts ont été recensées, adaptées pour être présentées « sans couture »79 et mises à disposition sur le serveur Géoportail. En outre, deux campagnes de levés bathymétriques ont été réalisées dans le Golfe du Morbihan et à Toulon afin de montrer la qualité des cartes obtenues avec l’utilisation de ces instruments de mesure modernes.

Votre rapporteur soutient ce projet qui a le double avantage d’une part, d’avoir recensé l’existant pour éviter les redondances et, d’autre part, permet une précision dans les levés indispensable pour une prévention et une gestion fine des risques de submersion côtière d’origine marine. A moyen terme, les levés bathymétriques devront être complétés pour couvrir la zone de 0 à -200m.

En outre, compte tenu du rôle croissant des collectivités territoriales dans la collecte de données bathymétriques, il faudrait éviter que ces dernières ne financent l’acquisition de données qui pourraient ne pas répondre aux standards mis en place par le SHOM et l’IGN.

(4) Répondre de manière adaptée en cas d’occurrence de l’aléa

La mise en place d’un centre d’alerte capable d’émettre un message 24h sur 24, 7 jours sur 7 indiquant la survenue d’un séisme susceptible d’avoir généré un tsunami ne constitue que la première brique dans l’architecture d’un dispositif d’alerte efficace. Il faut également que ledit message parvienne aux autorités compétentes chargées de l’organisation des secours et que ces dernières sachent parfaitement ce qu’elles ont à faire à tous les échelons à l’image des plans ORSEC. Compte tenu des délais de réaction très courts et du nombre important d’organismes impliqués80, aucune place ne peut être donnée à l’improvisation.

La conception de cartes d’inondation et d’évacuation doit être encouragée car elles permettent notamment d’évaluer à l’avance l’étendue des dégâts et de repérer les voies utilisables pour l’acheminement des secours. Les ports principaux et les zones côtières fortement habitées doivent être couverts en priorité.

Par ailleurs, des exercices d’entraînement sont indispensables pour repérer les dysfonctionnements et améliorer l’efficacité du dispositif.

La question de l’installation de sirène pour prévenir la population doit également être posée. Votre rapporteur est conscient qu’il s’agit d’un sujet très sensible pour les élus locaux. Néanmoins, il tient à rappeler leur efficacité. Ainsi, lorsque la population est très dispersée sur le territoire, il est impossible pour les services de la protection civile de prévenir à temps toutes les personnes menacées. La sirène est alors indispensable. En outre, il ne faut pas oublier que souvent, le réseau de communications traditionnel devient inutilisable, soit parce que le séisme générateur du tsunami est suffisamment proche des côtes pour affecter le réseau téléphonique ou/et le réseau électrique, soit parce qu’il est saturé dès que les premiers messages d’alerte sont diffusés. Par conséquent, l’installation de sirènes devra être étudiée lors de la définition de la future architecture du dispositif d’alerte national par le comité de pilotage coordonné par le secrétaire général à la mer.

Enfin, les plans de secours spécialisés doivent être définis dans les Antilles françaises, en Méditerranée/Atlantique Nord Est, en Nouvelle Calédonie et à Wallis et Futuna.

(5) Sensibiliser et éduquer la population

Cette question a déjà été abordée mais elle reste cruciale dans la mesure où elle représente clairement le maillon faible de la chaîne de l’alerte.

Votre rapporteur a déjà fait état des politiques de sensibilisation menées au niveau national (essentiellement pour sensibiliser les jeunes au risque de séisme), mais également des initiatives au niveau local. Il tire de ces expériences la conclusion suivante : si une meilleure sensibilisation au risque est nécessaire au niveau national, visant l’ensemble de la population française, il est indispensable de la compléter par une information ciblée des populations les plus exposées au risque, à savoir les habitants du littoral, qu’ils soient résidents permanents ou touristes.

Il n’appartient pas à votre rapporteur de définir le contenu des campagnes de sensibilisation, mais il estime que pour être efficaces, elles doivent être répétées et utiliser plusieurs vecteurs de communication afin de toucher un public varié (expositions, reportages, émissions scientifiques, colloques).

Au niveau local, l’efficacité des campagnes de sensibilisation dépendra fortement de l’implication des acteurs locaux (collectivités territoriales, chambres du commerce et de l’industrie, offices du tourisme, hôtels, autorités portuaires, surveillants de plage etc). Votre rapporteur est conscient de la réticence des élus locaux et des professions du tourisme à communiquer sur le risque de tsunami sous prétexte que le fait d’aborder ce sujet ferait fuir les touristes.

Votre rapporteur récuse cet argument : tous les hôtels affichent un plan d’évacuation en cas d’incendie dans les chambres. Personne n’a constaté que cela retenait les touristes d’aller à l’hôtel alors qu’il s’agit, comme dans le cas des tsunamis, d’un risque faible mais qui peut avoir des conséquences dramatiques.

En réalité, une communication bien pensée, qui caractérise l’aléa81, en explique sobrement les mécanismes et indique les mesures simples à prendre pour s’en protéger ne peut avoir qu’un effet positif sur la collectivité diffusant l’information car cela témoigne de son souci d’assurer la sécurité de ses habitants. Cette information peut faire l’objet de dépliants et d’affiches en français et en anglais; elle peut également être incluse dans les magazines présentant les activités des collectivités locales. En outre, un partenariat avec la presse doit être développé afin que toute mesure prise par ces dernières pour protéger la population du risque de tsunami fasse l’objet d’une couverture médiatique.

Enfin, l’éducation aux risques des enfants et des adolescents doit être une priorité. Dans les zones littorales particulièrement exposées aux tsunamis, les outils pédagogiques doivent se référer à des phénomènes réels passés et inciter aux bons réflexes sous forme ludique.

Pour les écoles situées dans les zones susceptibles d’être inondées, les exercices d’évacuation constituent le meilleur moyen d’éduquer les enfants.

b) La mise à disposition d’un budget pluriannuel pérenne

Un système d’alerte aux tsunamis ne peut pas être mis en place et fonctionner correctement dans la durée s’il ne dispose pas d’un budget pérenne prenant en compte à la fois les frais d’équipement initiaux, mais également les frais de fonctionnement (salaires, frais de mission, entretien du matériel, coût des télécommunications, mise à jour des logiciels…).

Ces crédits doivent être définis précisément en accord avec les organismes impliqués dans la mise en place du dispositif qui devront parallèlement être mandatés officiellement pour remplir leurs nouvelles missions liées à la surveillance et à l’alerte du risque de tsunami.

En outre, l’Etat devra clairement s’engager sur les sommes qu’il est prêt à dépenser à long terme pour un système d’alerte aux tsunamis afin d’éviter que ce dernier soit remis en cause quelques années après sa création.

c) L’intégration du risque de tsunami dans une logique multirisque ?

Comme faisait remarquer le chef du DASE au CEA, le futur centre national d’alerte aux tsunamis sera soumis aux mêmes contraintes que le centre national de surveillance des explosions nucléaires : l’événement se produit rarement, mais le jour où il arrive, les informations le concernant doivent être fournies rapidement et de manière fiable, ce qui exige des équipements performants et parfois redondants pour sécuriser le dispositif.

L’idée d’étendre les missions du système d’alerte aux tsunamis à la surveillance et à la prévention d’autres risques de submersion côtière d’origine marine vise donc à rentabiliser les investissements importants que requiert l’instauration d’un dispositif d’alerte aux tsunamis et à assurer la pérennité de l’engagement financier de l’Etat en renforçant la légitimité du centre d’alerte par la multiplication de ses missions.

Cette idée s’appuie également sur le constat que les risques d’inondation côtière utilisent tous des marégraphes pour vérifier et quantifier le risque. La prise en compte des multiples applications des instruments de mesure du niveau de la mer devrait donc contribuer à en justifier l’acquisition et la mise à niveau. De même, une cartographie précise des zones littorales (englobant bathymétrie et altimétrie) sert pour la prévision et la gestion de tous les risques d’inondation côtière d’origine marine.

Votre rapporteur reconnaît la pertinence de ces arguments. Néanmoins, il reste persuadé que les modalités d’intégration d’un système d’alerte aux tsunamis dans un système d’alerte multirisque sont beaucoup plus difficiles que ce que pensent les défenseurs de cette approche dans la mesure où l’organisme « compétent » pour analyser l’aléa et diffuser l’alerte auprès des services de la protection civile diffère selon la nature du risque.

La plupart des tsunamis pour lesquels une alerte efficace est envisageable sont provoqués par un séisme. Le système d’alerte a donc vocation à être déclenché par un organisme spécialisé dans la surveillance et l’évaluation des tremblements de terre tel que le CEA pour la France ou encore l’INGV pour l’Italie.

Les autres risques d’inondation côtière d’origine marine (marées de tempête, houles cycloniques, élévation du niveau de la mer) ont tous une origine météorologique et doivent donc être gérés par les services météorologiques tels que Météo France en ce qui concerne notre pays.

Comment s’articulerait cette répartition des compétences dans le cadre d’un système multirisque en France? Un organisme aurait-t-il vocation à en absorber un autre?

Votre rapporteur rappelle qu’au Japon, les services météorologiques sont chargés de la gestion de tous les aléas naturels et comprennent en conséquence un département sismique. Néanmoins, cette architecture n’a pas été retenue par la France et les obstacles auxquels une telle réforme se heurterait doivent être mis en balance avec les avantages qui pourraient en être retirés. A cet égard, votre rapporteur souhaite rappeler l’échec de la mise en place d’un centre national d’alerte multirisque à La Réunion qui devait s’appuyer sur Météo France. Certes, ce dernier émet bien, outre ses messages d’alerte cyclonique, des messages d’alerte aux tsunamis. En réalité, il est un point focal qui se contente de retransmettre les bulletins diffusés par le PTWC ou JMA faute d’expertise en interne dans le domaine sismique.

En conséquence, votre rapporteur estime qu’à court terme, l’approche « multirisque » doit essentiellement viser d’une part, l’acquisition d’un réseau d’instruments de mesure « multiapplications » dont les données doivent être accessibles à tous les organismes responsables de la gestion d’un risque et, d’autre part, la mutualisation des moyens de transmission.

d) Des expérimentations sur la base du volontariat pour la gestion de l’alerte aux tsunamis locaux

Tout au long de cette étude, votre rapporteur a insisté sur le fait que les conséquences des tsunamis locaux étaient particulièrement difficiles à prévenir : compte tenu de la brièveté des délais de réaction, les centres d’alerte sont réticents à assumer cette responsabilité dans la mesure où ils courent le risque de voir leurs messages arriver après le déferlement de la vague sur le littoral.

Lors de la dernière session du GIC/SATANEM à Lisbonne, les Etats membres ont convenu que les centres régionaux d’alerte ne traiteront que des tsunamis dont les délais entre l’occurrence du séisme et l’arrivée de la vague dépassent 15 minutes. En-decà de cette durée, la responsabilité de lancer l’alerte incombera aux centres nationaux. En effet, les chances de succès d’une alerte lorsque le délai de réaction est inférieur à 15 minutes exigent alors un réseau beaucoup plus dense de capteurs que celui nécessaire en cas de tsunami régional et une automatisation de la diffusion de l’alerte par le biais de sirènes. Il s’agit donc d’un investissement considérable qui doit être rapporté à la fréquence attendue de l’aléa. En outre, le succès de l’alerte n’est pas garanti et dépend plus que jamais de la réaction de la population et donc de sa bonne sensibilisation au risque de tsunami.

En conséquence, il serait irréaliste de vouloir généraliser un dispositif d’alerte aux tsunamis locaux sur tout le littoral français. En revanche, votre rapporteur estime que dans certaines zones cumulant à la fois un risque important de tsunami local, une vulnérabilité particulièrement élevée et une sensibilisation forte de la part des élus locaux, un système d’alerte adapté à la problématique des tsunamis locaux pourrait être expérimenté.

En métropole, la communauté d’agglomération de Nice pourrait être intéressée par cette expérimentation : l’aléa de tsunami local est réel comme en a témoigné le tsunami du 16 avril 1979; c’est une zone particulièrement vulnérable compte tenu de la densité forte de la population sur son littoral tout au long de l’année, avec des pics en été; la connaissance de l’aléa est bonne grâce aux nombreuses études géophysiques qui ont déjà été réalisées dans le cirque de Marcel sur les instabilité gravitaires; enfin, c’est une région qui peut être considérée comme pilote en matière de sensibilisation des élus locaux aux risques.

Une expérimentation pourrait donc être développée, associant étroitement les services de l’Etat et en particulier la protection civile, les organismes scientifiques de référence en matière de tsunami, les collectivités territoriales, les autorités portuaires mais également les industriels susceptibles de concevoir un système de transmission des données performant. En cas de succès, ce dispositif pourrait être étendu à d’autres régions côtières en métropole et en Outre-mer.

A cet égard, votre rapporteur souhaite évoquer le projet élaboré par des partenaires du pôle de compétitivité « mer » et du pôle de compétitivité « risques et vulnérabilités des territoires » de la région PACA visant à mettre en place un Réseau d’Alerte aux Tsunamis et CÔtiers en Méditerranée (RATCOM). Ce projet a pour objectif la mise en place d’un système d’alerte automatisé en cas de tsunamis locaux.

Le système proposé s’articule autour de deux composantes fonctionnelles majeures :

- une composante descendante, qui vise à proposer des moyens de communication performants et fiables permettant de transmettre l’alerte en réseau local, puis en diffusion de masse;

- Une composante montante chargée de délivrer, à partir de traitements automatiques sur les mesures collectées en mer et à terre, une information qualifiée et coordonnée d’alerte au risque tsunami minimisant en particulier le taux de fausse alarme. En complément du traitement de ces données en temps réel, des outils d’aide à la décision basés sur la modélisation et la simulation devront être élaborés et mis à la disposition des organismes chargés de gérer les crises et de déclencher les interventions.

3. Les propositions par bassin

a) En Méditerranée/Atlantique Nord-Est

Il faudrait charger le CEA d’assurer les rôles de responsable national pour le GIC/SATANEM et de centre national et régional d’alerte aux tsunamis. Actuellement, pas moins de 7 Etats méditerranéens82 ont manifesté officiellement leur volonté de devenir centre régional d’alerte (sans en avoir forcément les moyens financiers et humains), alors que 2 à 3 centres régionaux semblent suffisants. En conséquence, la France aurait donc peut-être intérêt à proposer une solution qui ménagerait les susceptibilités nationales. Elle consisterait à utiliser une structure à vocation européenne telle que le centre sismique euro-méditerranéen situé sur le site du CEA à Bruyères- le Châtel pour héberger le centre régional d’alerte que la France créerait. Ce dernier serait néanmoins géré par le CEA/DASE.

Par ailleurs, il est urgent de transmettre en temps réel les données des 11 marégraphes en métropole disposant déjà d’une sortie adaptée et de terminer la modernisation des marégraphes restants gérés par le SHOM d’ici la prochaine réunion du GIC/SATANEM en octobre 2008. Ce réseau devra être complété par deux stations en Corse (Bonifacio et Porto Vecchio). Il convient de rappeler que, pour protéger les côtes françaises, le centre national d’alerte devra disposer des données en temps réel d’une vingtaine de marégraphes répartis en Espagne, au Portugal, en Sardaigne, au Maroc, en Tunisie et en Algérie. La France devra donc s’assurer qu’ils soient mis à niveau s’ils existent déjà ou, le cas échéant, proposer leur installation.

A court terme, la France devra s’assurer de l’installation de deux tsunamimètres au Nord de l’Algérie pour protéger efficacement ses côtes. Afin que cette proposition aboutisse rapidement, il faudrait que la France se déclare prête à assumer le financement de l’équipement et de l’installation et négocie avec les autres Etats membres du GIC/SATANEM une mutualisation des frais de maintenance.

A moyen terme, il conviendra de trancher sur l’opportunité de mettre en place un dispositif d’alerte aux tsunamis locaux dans des zones bien déterminées et, le cas échéant, de lancer une étude de faisabilité sur la gestion automatisée de ce type d’alerte.

En outre, la mise en place d’un dispositif d’alerte aux tsunamis doit faire partie des priorités de la présidence française de l’Union européenne à partir de juillet 2008 et mobiliser tous les Etats membres et les directions générales concernées de la commission européenne afin de définir et de financer un plan de modernisation des marégraphes nationaux et d’équipement en tsunamimètres.

Afin de surmonter les difficultés rencontrées auprès des pays d’Afrique du Nord pour l’échange des données sismiques, une initiative diplomatique impliquant le ministère des affaires étrangères et la présidence de la République apparaît indispensable. A cette occasion, une coopération bilatérale, voire européenne pourrait être proposée afin d’accélérer l’équipement des côtes nord-africaines en marégraphes et en tsunamimètres.

Enfin, le plan de secours spécialisé en cas de tsunami doit être arrêté pour le littoral métropolitain par les autorités de la protection civile, en collaboration avec le CEA pour l’expertise scientifique.

b) Dans les Caraïbes

Votre rapporteur estime que la France doit s’impliquer davantage dans les travaux du GIC/Caraïbes. Il faut donc qu’elle participe à chaque session et qu’elle soit représentée physiquement dans chaque groupe de travail.

Votre rapporteur soutient également l’initiative lancée par la délégation française lors de la session au Venezuela d’accueillir la session du GIC/Caraïbes en 2009. Cette date pourrait servir de date butoir pour la définition de la stratégie française en matière d’alerte aux tsunamis régionaux dans les Antilles ainsi que l’installation et la mise à niveau des stations sismiques et des marégraphes nécessaires pour la protection des Antilles françaises. Votre rapporteur rappelle que les 3 marégraphes gérés par le SHOM doivent rapidement être mis à niveau pour transmettre leurs données en temps réel83 et que 3 marégraphes supplémentaires devront être installés à l’Est de la Désirade, au Sud de la Martinique et au Nord de la Guadeloupe.

Il faudra par ailleurs vérifier que le réseau marégraphique en train d’être installé par l’observatoire vulcanologique et sismologique de la Guadeloupe pourra être utilisé pour d’autres applications et, par conséquent, répond aux critères arrêtés par le GLOSS dans son manuel sur les instruments de mesure du niveau de la mer. Les données de ces marégraphes devront également être transmises au SHOM afin que ce dernier puisse en assurer l’archivage.

Par ailleurs, il faudra s’assurer que le centre national d’alerte aux tsunamis qui a vocation à être créé gèrera l’alerte aux tsunamis dans les Caraïbes pour les tsunamis dont l’arrivée sur le littoral est prévue au moins 15 minutes après sa génération par un séisme. A cette occasion, une clarification des tâches respectives de l’IPGP chargé de la surveillance sismique dans les Antilles et du CEA responsable de l’alerte aux tsunamis sera certainement nécessaire.

Lorsque le dispositif sera opérationnel, il conviendra de charger le CEA d’une étude de faisabilité sur l’élargissement de ses missions pour devenir centre régional d’alerte aux tsunamis pour la zone Caraïbes en coopération avec Porto Rico, le PTWC et l'ATWC.

A moyen terme, il faudra étudier la possibilité d’instaurer une gestion automatisée de l’alerte aux tsunamis locaux dans certaines zones du littoral restant à définir et, le cas échéant, procéder à une expérimentation en collaboration avec les collectivités territoriales intéressées.

Enfin, lors de la dernière session du GIC/Caraïbes, il est apparu que l’attention de la France s’était focalisée sur la Martinique et la Guadeloupe sans se préoccuper de La Guyane et de Saint Martin. Il convient donc de clarifier cette situation en lançant une étude sur l’exposition de ces zones au risque de tsunami et, le cas échéant, en les intégrant dans la stratégie nationale d’alerte aux tsunamis dans les Antilles (installation d’instruments de mesure du niveau de la mer et de stations sismiques, définition d’un plan de secours spécialisé, sensibilisation de la population etc).

c) Dans l’océan Indien

Votre rapporteur a constaté que 305 000 euros versés à Météo France pour créer un centre national d’alerte aux tsunamis dans l’océan Indien restent inutilisés en raison de la modification du projet initial. Il faut donc récupérer cet argent et le verser au budget à consacrer à la mise en place d’un système national d’alerte cohérent et pérenne. Une partie de cette somme pourrait également être consacrée à l’installation (prévue initialement mais non réalisée) d’un marégraphe à Madagascar et d’une deuxième station à La Réunion.

Votre rapporteur regrette que la France ait de facto cessé de participer aux sessions du GIC/SATOI et prône une relance de son implication dans les travaux du GIC/Caraïbes et des groupes de travail que ce dernier a constitués.

Par ailleurs, votre rapporteur souhaite que les missions du centre national d’alerte aux tsunamis qui devrait être créé englobent également la gestion de l’alerte aux tsunamis dans les territoires français de l’océan Indien.

En outre, lorsque le dispositif sera opérationnel, il conviendra de charger le CEA d’une étude de faisabilité sur l’élargissement de ses missions pour devenir un « fournisseur régional d’alerte » pour les pays de l’Ouest de l’océan Indien en collaboration avec d’autres « fournisseurs régionaux d’alerte ».

d) Dans le Pacifique

Afin de parfaire le dispositif d’alerte déjà existant et protéger efficacement la Nouvelle Calédonie et Wallis et Futuna, votre rapporteur est favorable à la mise en place du dispositif d’alerte dans le Pacifique Sud-Ouest présenté précédemment qui exige l’installation de 15 marégraphes et d’un tsunamimètre si celui prévu par l’Australie s’avère finalement inutile pour la protection de la Nouvelle Calédonie.

Votre rapporteur rappelle qu’il faudra définir le nombre de sirènes nécessaires et arrêter un plan d’équipement des îles en partenariat avec le Haut-commissaire de Nouvelle Calédonie, le ministère de l’Outre-mer et les élus locaux des territoires français dans cette zone.

En outre, les autorités de la protection civile devront arrêter le plan de secours spécialisé pour la Nouvelle Calédonie et pour Wallis et Futuna.

Le dispositif de la Polynésie française devra également être complété par l’installation de 3 marégraphes transmettant leurs données en temps réel aux extrémités de la Polynésie.

Enfin, votre rapporteur estime qu’il est dans l’intérêt de la France de répondre aux sollicitations des Etats de la zone Pacifique en matière de coopération. Il propose donc de mandater officiellement le CEA afin que le LDG/Pamatai puisse assumer une mission de coopération en matière d’alerte aux tsunamis et dispose des crédits nécessaires pour réaliser plusieurs missions d’expertise et de formation dans l’année.

RÉSUMÉ DES PROPOSITIONS

1. Les propositions valables pour les quatre bassins :

- confier au CEA la mission de centre national d’alerte aux tsunamis pour la Méditerranée/Atlantique Nord Est, les Antilles et l’océan Indien et le charger de mettre au point une méthode de prévision des tsunamis régionaux et lointains;

- faire en sorte que le futur centre national puisse également assumer les fonctions de centre régional d’alerte en Méditerranée occidentale/Atlantique Nord Est, dans les Antilles et pour les pays de l’Ouest de l’océan Indien en collaboration avec d’autres centres régionaux dans chaque bassin;

- créer un comité de pilotage coordonné par le secrétariat général à la mer chargé de mettre en place un système national d’alerte aux tsunamis et composé de représentants :

• des ministères impliqués par la gestion du risque de tsunami (ministère de l’environnement, du développement et de l’aménagement durable, ministère de l’intérieur, de l’Outre-mer et des collectivités territoriales, ministère des affaires étrangères, ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, ministère de l’éducation nationale),

• des organismes compétents dans ce domaine (CEA, Météo-France, SHOM, Ifremer, BRGM, CNRS, CETMEF84, IPGP, ANR, Conservatoire du littoral etc…),

• des collectivités territoriales exposées au risque de tsunami ;

- mettre à la disposition du secrétariat général à la mer un budget pluriannuel pour financer la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis (équipement en marégraphes, stations sismiques et tsunamimètres capables de transmettre leurs données en temps réel, financement des campagnes de levés bathymétriques jugées indispensables, équipement en réseaux géodésiques de type GPS afin de caractériser très précisément les forts séismes) ;

- renforcer les moyens du comité national de la commission océanographique internationale afin qu’il coordonne la position de la France aux sessions des quatre groupes intergouvernementaux de coordination pour la mise en place d’un système d’alerte aux tsunamis et qu’il veille à ce que la France soit représentée dans chaque groupe de travail ;

- compléter les contrats d’objectifs des organismes impliqués dans l’alerte aux tsunamis afin que cette mission apparaisse officiellement et que son coût soit financé par une ligne de crédits spécifique ;

- mandater le SHOM pour coordonner les activités de mesure de hauteur d’eau en France et adapter son réseau de marégraphes afin que les données soient transmises en temps réel;

- compléter les levés bathymétriques pour couvrir la zone de 0 à – 200 m en métropole et en Outre-mer;

- améliorer le dispositif d’observation par satellite des tsunamis en embarquant systématiquement dans les satellites sur orbite basse dont le lancement est programmé dans les années à venir un mécanisme d’observation dédié aux tsunamis;

- prévoir la mise à jour régulière de la base de données sur les tsunamis confiée au BRGM et tenir compte des enquêtes de terrain réalisées au fur et à mesure;

- inciter l’agence nationale de la recherche à favoriser des travaux de recherche sur les aléas géologiques et côtiers, en particulier sur l’évaluation et la prévision des événements déclencheurs de tsunami (séismes, glissements sous-marins, effondrements de falaise);

- financer après chaque tsunami des missions d’enquête sur place post-tsunami en métropole et en Outre-mer;

- réaliser des exercices d’entraînement pour tester l’efficacité du dispositif d’alerte d’un bout à l’autre de la chaîne de décision et déceler les éventuels dysfonctionnements;

- élaborer des cartes d’inondation et d’évacuation pour les ports principaux et les zones côtières fortement habitées qui serviront d’outils à la décision dans le cadre de la gestion des secours et de l’aménagement urbain;

- évaluer la nécessité d’installer des sirènes pour alerter la population dans chaque bassin;

- sensibiliser régulièrement la population aux risques naturels à travers des expositions, des reportages, des émissions scientifiques, des conférences, etc;

- impliquer les élus locaux, les autorités portuaires et les professionnels du tourisme pour la mise en place de campagnes de sensibilisation dans les ports et les zones côtières;

- intégrer l’éducation aux risques naturels dans les programmes scolaires ;

- expérimenter la gestion de l’alerte à certains tsunamis locaux en coopération avec les collectivités territoriales intéressées.

2. Les propositions spécifiques à chaque bassin

Dans la zone Méditerranée/ Atlantique Nord Est 

- mettre en temps réel les 11 marégraphes disposant déjà d’une sortie adaptée, achever la modernisation des marégraphes de Toulon, Marseille, Nice et Ajaccio et compléter le dispositif par l’installation de deux nouveaux marégraphes en Corse (Bonifacio et Porto Vecchio) d’ici la prochaine session du GIC/SATANEM en octobre 2008;

- installer 2 tsunamimètres au Nord de l’Algérie;

- arrêter le plan de secours spécialisé en cas de tsunami pour le littoral métropolitain en s’appuyant sur l’expertise scientifique du CEA;

- faire de la mise en place d’un dispositif d’alerter aux tsunamis l’une des priorités de la présidence française de l’Union européenne à partir de juillet 2008 et mobiliser tous les Etats membres et les directions générales concernées de la commission européenne afin de définir et financer un plan de modernisation des marégraphes nationaux et d’équipement en tsunamimètres;

- impliquer notre diplomatie afin d’inciter les pays d’Afrique du Nord à échanger leurs données sismiques et marégraphiques;

- envisager une coopération bilatérale, voire européenne pour accélérer l’équipement des côtes nord-africaines en marégraphes et en tsunamimètres.

- lancer une étude de faisabilité sur la gestion automatisée de l’alerte aux tsunamis locaux dans certaines zones particulièrement vulnérables en collaboration avec les services de la protection civile, les collectivités territoriales, les autorités portuaires concernés et les industriels susceptibles d’être impliqué et, le cas échéant, procéder à une expérimentation.

Dans les Caraïbes

- mettre à niveau les 3 marégraphes gérés par le SHOM, intégrer le réseau de marégraphes géré par l’observatoire vulcanologique et sismologique de la Guadeloupe et par les collectivités territoriales dans le dispositif d’alerte et financer 3 marégraphes complémentaires à l’Est de la Désirade, au Sud de la Martinique et au Nord de la Guadeloupe;

- évaluer la nécessité d’installer des sirènes pour alerter la population;

- arrêter le plan de secours spécialisé en cas de tsunami pour les Antilles en s’appuyant sur l’expertise scientifique du CEA;

- clarifier par convention les tâches respectives de l’IPGP chargé de la surveillance sismique dans les Antilles et du CEA responsable de l’alerte aux tsunamis;

- lancer une étude de faisabilité sur la gestion automatisée de l’alerte aux tsunamis locaux dans certaines zones particulièrement vulnérables en collaboration avec les services de la protection civile, les collectivités territoriales, les autorités portuaires concernés et les industriels susceptibles d’être impliqué et, le cas échéant, procéder à une expérimentation ;

- clarifier la situation de La Guyane et de Saint Martin par une étude sur l’exposition de ces zones au risque de tsunami et, le cas échéant, les intégrer dans la stratégie nationale d’alerte aux tsunamis dans les Antilles (installation d’instruments de mesure du niveau de la mer et de stations sismiques, définition d’un plan de secours spécialisé, sensibilisation de la population etc);

- au niveau international, s’assurer que la France est représentée dans les groupes de travail du GIC/Caraïbes à chaque session surtout si elle a vocation à devenir un des centres régionaux d’alerte aux tsunamis;

- accueillir la réunion du GIC/Caraïbes en 2009.

Dans L’océan Indien

- affecter les 305.000 euros versés à Météo France dans le cadre de la création du centre national d’alerte pour l’océan Indien et qui n’ont pas vocation à être utilisés compte tenu de la modification du projet initial au budget à consacrer à la mise en place d’un système national d’alerte cohérent et pérenne;

- s’assurer de l’installation par le SHOM du marégraphe à Mayotte et à Madagascar prévue dans la convention signée entre le ministère des affaires étrangères et Météo France et compléter le dispositif par l’installation d’un deuxième marégraphe à La Réunion;

- au niveau international, s’assurer que la France est représentée dans les groupes de travail du GIC/SATOI à chaque session, surtout si elle a vocation à devenir un des centres régionaux d’alerte aux tsunamis.

Dans le Pacifique

- mettre en place le dispositif d’alerte dans le Pacifique Sud-Ouest présenté précédemment qui exige l’installation de 15 marégraphes et d’un tsunamimètre;

- recenser le nombre de sirènes nécessaires et arrêter un plan d’équipement des îles en partenariat avec le Haut-commissaire de Nouvelle Calédonie, le ministère de l’Outre-mer et les élus locaux des territoires français dans cette zone;

- finaliser le plan de secours spécialisé en cas de tsunami de la Nouvelle Calédonie et de Wallis et Futuna;

- rajouter 3 marégraphes transmettant leurs données en temps réel aux extrémités de la Polynésie française pour parfaire le dispositif d’alerte dans cette zone;

- mandater officiellement le CEA afin que le LDG/Pamatai puisse assumer une mission de coopération en matière d’alerte aux tsunamis pour la région pacifique et lui accorder les crédits lui permettant de réaliser plusieurs missions d’expertise et de formation dans l’année.

CONCLUSION

Juste après le tsunami de Sumatra, la France s’était engagée à contribuer à l’instauration d’un système d’alerte aux tsunamis dans l’océan Indien, dans la zone Méditerranée/atlantique nord est et dans les Caraïbes.

Le bilan trois ans après est très mitigé : dans la mesure où La Réunion est principalement menacée par des tsunamis régionaux ou lointains, qui autorisent des délais de réaction relativement longs, le système d’alerte mis en place remplit globalement son rôle. Actuellement, Météo France reçoit les messages du PTWC ou de la JMA et les transmet tels quels à la préfecture. Toutefois, contrairement aux objectifs affichés lors de la définition des missions du centre d’alerte national aux tsunamis dans l’océan Indien en 2005, aucun organisme scientifique n’effectue d’expertise complémentaire. Par ailleurs, les données transmises par la France aux centres internationaux chargés de l’alerte sont limitées en raison du retard pris dans l’installation et la mise à niveau des marégraphes et des stations sismiques.

En Méditerranée et dans les Caraïbes, la situation est préoccupante puisqu’actuellement, la France reste totalement démunie face au risque de tsunami : elle ne dispose pas des instruments de mesure pour les détecter, aucun plan de secours spécialisé n’a été arrêté par les services de la protection civile et faute de sensibilisation, il y a fort à parier que la population se saurait pas réagir correctement.

Pourtant, un tsunami peut survenir demain sur les côtes françaises.

Certes, c’est un phénomène rare puisque pour la Méditerranée par exemple, la fréquence d’un tsunami dévastateur est estimée à un siècle, le dernier ayant eu lieu dans le détroit de Messine en 1908, causant 35.000 victimes. Doit-on donc instaurer un système d’alerte aux tsunamis alors que le risque qu’un tel événement se produise est relativement faible ?

Après le tsunami de Sumatra, la communauté internationale, dont la France, a répondu positivement à cette question. En effet, aucun Etat n’a estimé pouvoir rester inactif alors qu’il est aujourd’hui possible de limiter les conséquences dramatiques d’un tsunami sur la population du littoral. Il convient désormais de respecter les engagements pris et de mettre en place les dispositifs d’alerte aux tsunamis annoncés dans tous les bassins.

L’éparpillement géographique de la France et l’exposition de chacune de ses côtes dans les quatre bassins devraient la conduire à jouer un rôle moteur dans l’élaboration desdits systèmes d’alerte. En effet, la France doit mettre en place son propre dispositif national d’alerte pour réduire la vulnérabilité de son littoral au tsunami. L’instauration de dispositifs d’alerte au niveau international doit donc être considérée comme une chance puisque l’efficacité de l’alerte devrait être renforcée grâce à la multiplication des données sismiques et marégraphiques tandis que certains frais d’investissement et de fonctionnement devraient pouvoir être mutualisés entre les Etats intéressés par un système d’alerte.

Après deux ans d’attentisme, la France semble enfin prête à assumer ses responsabilités. Lors de la réunion à Lisbonne du GIC/SATANEM à la fin du mois de novembre 2007, elle a pour la première fois manifesté son intérêt à héberger un centre régional d’alerte et a lancé la création d’une « équipe spéciale » chargée d’arrêter l’architecture et les moyens de ce futur centre, d’établir un calendrier prévisionnel pour sa mise en place et d’évaluer son coût financier. Les résultats de ces travaux seront présentés lors de la prochaine réunion du GIC/SATANEM en Grèce en octobre 2008.

Parallèlement à cette initiative, le gouvernement a décidé de créer un comité national coordonné par le secrétaire général à la mer afin de mettre en place un système national de veille et d’alerte aux submersions côtières d’origine océanique.

Votre rapporteur se félicite de voir le gouvernement prendre enfin conscience de la nécessité pour la France de limiter l’exposition de ses côtes au risque de tsunami par l’instauration d’un système national d’alerte. En outre, l’attribution de ce projet au secrétaire général à la mer devrait favoriser la définition d’une architecture prenant en compte les besoins dans chaque bassin et la détermination des responsabilités de chaque partenaire.

Votre rapporteur s’interroge néanmoins sur les moyens financiers que le gouvernement est prêt à consacrer à ces deux actions.

L’absence d’engagement financier dans la proposition faite à Lisbonne peut être interprétée comme la volonté, pour le gouvernement, d’interroger les autres Etats sur leurs éventuelles contributions avant de faire ses propres propositions. Il convient toutefois de rappeler que les retards pris par la mise en place d’un système d’alerte en Méditerranée proviennent justement de la réticence des Etats à s’engager financièrement. Si la France estime que la sécurité de ses côtes exige l’instauration d’un tel système, il lui faudra accepter de le financer au moins dans sa version initiale sans attendre l’engagement des autres Etats.

Par ailleurs, votre rapporteur renouvelle ses craintes concernant l’inclusion de l’alerte aux tsunamis dans une problématique multirisque qui risque d’enliser le projet.

Enfin, votre rapporteur rappelle que la mise en place d’un système d’alerte dans les Antilles doit être accélérée compte tenu de l’exposition de ces départements français au risque de tsunami. Le projet de système national de surveillance et d’alerte devra donc couvrir non seulement la métropole, mais également les départements d’Outre-mer.

La nouvelle mobilisation de la France en faveur d’un système national d’alerte aux tsunamis devrait conduire à son instauration rapide. Certes, le système initial ne sera peut-être pas parfait puisqu’il dépendra des informations transmises par les Etats tiers. Ainsi, tant que les données sismiques et marégraphiques des Etats du Maghreb ne seront pas librement accessibles, l’efficacité du système d’alerte restera imparfaite.

Afin de s’assurer des progrès réalisés dans l’instauration d’un système d’alerte aux tsunamis, votre rapporteur propose d’effectuer un suivi de ce projet. Juste avant la prochaine réunion du GIC/SATANEM en octobre 2008, l’Office organisera des auditions publiques qui permettront d’évaluer l’état d’avancement non seulement du système d’alerte national, mais également des dispositifs d’alerte dans la zone Méditerranée/Atlantique nord est, dans les Caraïbes et dans l’océan Indien.

ANNEXE

LISTE DES ABRÉVIATIONS

ANR

Agence nationale de la recherche

BIGSETS

Big sources of earthquake and tsunami in South West Iberia

BRGM

Bureau de recherches géologiques et minières

CEA

Centre de l’énergie atomique

CETMEF

Centre d’études maritimes et fluviales

CIIT

Centre international d’information sur les tsunamis

CNRS

Centre national de la recherche scientifique

COGIC

Centre opérationnel de gestion interministérielle des crises

COI

Commission océanographique internationale

CSEM

Centre sismique euro-méditerranéen

DART

Deep-ocean assessment and reporting of tsunamis

DASE

Département analyse, surveillance, environnement

DDSC

Direction de la défense et de la sécurité civiles

DEWS

Distant early warning system

DGCID

Direction générale de la coopération internationale et du développement

DONET

Dense oceanfloor network system for earthquakes and tsunamis

DPPR

Direction de la prévention des pollutions et des risques

EMSO

European multidisciplinary seas observation

EOST

Ecole et observatoire des sciences de la terre

ESA

European space agency

ESONET

European seas observatory network of excellence

FIDES

Fonds d’investissement pour le développement économique et social

FUNVISIS

Fundación Venezolana de investigaciones sismologicas

GAO

Government accountability office

GEOSS

Global earth observation system of systems

GIS CURARE

Groupement d’intérêt scientifique « Centre universitaire de réflexion pour une agence des risques environnementaux »

GITEC

Genesis and impact of tsunamis on European coasts

GITEWS

German-Indonesian tsunami early warning system

GLOOS

Global ocean observing system

GLOSS

Global sea level observing system

GMES

Global monitoring of environment and security

GPRS

General pocket radio service

ICG / ITSU

International coordination group for Pacific Tsunami

IFREMER

Institut français de recherche pour l’exploration de la mer

IGN

Institut géographique national

IISEE

International institute of seismology and earthquake engineering

INGN

Istituto nazionale di geofisica et vulcanologia

INPI

Institut national de la propriété intellectuelle

IPGP

Institut de physique du globe de Paris

IRD

Institut de recherche pour le développement

IUGG

International union of geodesy and geophysic

JAMSTEC

Japan agency for marine-earth science and technology

JICA

Japon international cooperation agency

JMA

Japanese meteorological agency

LDG

Laboratoire de géophysique

LEGOS

Laboratoire d’études en géophysique et océanographie spatiales

NEAREST

Integrated observation from near shores sources of tsunami

NERIES

Network of earthquake research institutes for earthquake seismology

NIED

National research institute for earth science and disaster prevention

NOAA

National oceanic and atmospheric administration

NTHMP

National tsunami hazard mitigation program

NWPTAC

North West Pacific tsunami advisory center

OMM

Organisation météorologique mondiale

ONU

Organisation des Nations-Unies

OVSG

Observatoire vulcanologique et sismologique de la Guadeloupe

OVSM

Observatoire vulcanologique et sismologique de la Martinique

PSS

Plan de secours spécialisé

PTWC

Pacific tsunami warning center

RATCOM

Réseau d’alerte aux tsunamis et côtiers en Méditerranée

RFO

Réseau France Outremer

RONIM

Réseau d’observatoires du niveau des mers

ROSAME

Réseau d’observation subantarctique et antarctique du niveau de la mer

SAFER

Seismic early warning for Europe

SEAHELLARC

Seismic risk assessment and mitigation scenarios in Western Hellenic Arc

SHOM

Service hydrographique et océanographique de la marine

SIPC

Stratégie internationale de prévention des catastrophes naturelles

SMT

Système mondial de télécommunications

SPANET

South Pacific broadband seismic network

SSI

Système de surveillance international

TICEN

Traité d’interdiction complète des essais nucléaires

TRANSFER

Tsunami risk and strategies for the European Region

TREMORS

Tsunami risk evaluation through seismic moment from a realtime system

TWO

Tsunami warning and observations

UNESCO

Organisation des Nations-Unies pour l’éducation, la science et la culture

VSAT

Very small operture telecommunications

WC-ATWC

West coast – Alaska tsunami warning center

1 « Les techniques de prévision et de prévention des risques naturels : séismes et mouvements de terrain », rapport n° 261 (Sénat) et n° 2017 (Assemblée nationale) de M. Christian Kert, député, au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (1995).

2 « Les techniques de prévision et de prévention des risques naturels en France », rapport n° 312 (Sénat) et n° 1540 (Assemblée nationale) de M. Christian Kert, député, au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (1999).

3 C'est une discontinuité ou fracture affectant l'écorce terrestre montrant un mouvement relatif des deux blocs séparés par la faille.

4 La longueur d’onde est la distance séparant deux crêtes successives d’une onde périodique

5 Les petites Antilles sont constituées d'un chapelet de petites îles d'origine volcanique ou calcaire qui s'étendent en arc de cercle depuis les îles Vierges à l'Est de Porto Rico jusqu'à la Grenade au sud.

6 La NOAA est une agence fédérale américaine, qui dépend du département au commerce. Son activité porte sur toutes les questions relatives à l’état des océans et de l’atmosphère. Elle est notamment en charge de l’évaluation et de la prévention du risque de tsunami.

7 Dans ce cas, le”seul” risque couru est celui de la fausse alerte.

8 Les sismomètres peuvent également servir à détecter les éruptions volcaniques et les glissements de terrain.

9 Depuis cette date, ce groupe est chargé dapporter des recommandations sur les programmes de prévention contre les tsunamis mis en place par les Etats-membres dont les côtes sont menacées par des tsunamis et den assurer la coordination. Pour atteindre ces objectifs, le groupe se réunit à peu près tous les 2 ans, invité par lun des Etats-membres. Le Groupe dresse le bilan des mesures prises et des insuffisances constatées et établit un programme d’action pour y remédier. Des groupes de travail sont créés le cas échéant.

10 Le WC-ATWC et le NWPTAC seront étudiés dans le détail dans les parties consacrées respectivement au modèle américain et au modèle japonais.

11 Le centre d’alerte aux tsunamis en Alaska pour la côte ouest ( WC/ATWC :West Coast/ Alaska Tsunami Warning Center).

12 Il s’agit de dresser un bilan sur les capacités d’un Etat à mettre en place un système d’alerte aux tsunamis.

13 Pour cette zone, le PTWC partage cette responsabilité avec la JMA.

14 C’est le centre d’alerte aux tsunamis en Alaska pour la côte ouest (WC/ATWC :West Coast/ Alaska Tsunami Warning Center).

15 Cette zone est située au large des Etats de Washington, Oregon et Californie.

16 Il pourrait être traduit « prêt à affronter un tsunami ».

17 500 sites sont potentiellement concernés.

18 Loi de dotations supplémentaires d’urgence

19 NTHMP : national tsunami hazard mitigation program

20 National Research Institute for Earth Science and Disaster Prevention (Institut national de recherche pour les sciences de la terre et la prévention des catastrophes).

21 La plupart des ouvrages ont un objectif multirisque puisque le Japon doit également lutter contre les houles cycloniques et les typhons.

22 JAMSTEC : Japan Agency for Marine-Earth Science and Technology, qui correspond à l’IFREMER en France.

23 DONET signifie Dense Oceanfloor Network System for Earthquakes and Tsunamis, et correspond à un système de réseaux denses au fond de la mer pour les séismes et les tsunamis.

24 IISEE : International Institute of Seismology and Earthquake Engineering

25 Japon International Cooperation Agency, à savoir l’agence japonaise de coopération internationale.

26 South Pacific Broadband Seismic Network

27 Département Analyse, Surveillance, Environnement du CEA (centre de l’énergie atomique).

28 Cette marque a été déposée à l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) en 1994 et a été renouvelée en 2004 pour 10 ans.

29 Ce plan définit les missions et les responsabilités de tous les services concernés en cas d’alerte aux tsunamis et arrête les mesures à prendre pour, le cas échéant, évacuer la population.

30 L’expérience montre que dès qu’un sinistre est annoncé, le réseau téléphonique est saturé. En outre, l’Office des Postes et Télécommunication de Papeete est situé en bord de mer : en cas de vagues de 1,5 mètre, il serait hors d’usage et les communications téléphoniques seraient interrompues.

31 C’est le cas notamment de l’Unesco à travers la COI.

32 La terminologie utilisée par les trois nouveaux groupes intergouvernementaux peut porter à confusion : dans l’océan indien, il s’agit de « fournisseurs régionaux d’avis de tsunami ». La zone Caraïbes a jusqu’à présent repris la terminologie utilisée par le GIC/Pacifique, à savoir « centres régionaux d’alerte aux tsunamis ». Selon les informations obtenues par votre rapporteur, au-delà de ces divergences formelles, les centres régionaux sont censés remplir les mêmes missions dans chaque zone géographique : fournir un message indiquant le fait générateur, l’éventualité d’un tsunami et, dans l’affirmative, les temps de trajet et les régions susceptibles d’être touchées. L’alerte (au sens information et protection de la population) reste toujours une responsabilité des Etats.

33 Global earth observation system of systems, ou réseau mondial des systèmes d’observation de la Terre, qui doit fédérer toutes les ressources d’observation afin d’aider à mieux comprendre le climat et l’environnement et de prévenir les catastrophes naturelles. Sa composante marine est le GLOSS (Global sea level observing system).

34 Dans la mesure où elles sont encombrantes, les données sismiques sont transmises par un autre système (en général VAT – Very Small Operture Telecommunication qui utilise des satellites géostationnaires et le plus robuste VAST – le General Pocket Radio Service (GPRS) et Internet peuvent être utilisés en secours dans la mesure où elles sont très « encombrantes ».

35 Ce projet est doté de 1,3 million d’euros et associe 7 partenaires.

36 Ce projet est doté de 3,6 millions d’euros et associe 29 partenaires.

37 L’objectif du projet Antares est de détecter et d'étudier les neutrinos cosmiques de très haute énergie en Méditerranée. Les neutrinos cosmiques sont des particules élémentaires qui interagissent faiblement avec la matière et peuvent ainsi parcourir de longues distances dans l'Univers sans être absorbées par les milieux intergalactiques. Ils constituent un moyen privilégié pour sonder l'univers lointain, de manière complémentaire au rayonnement électromagnétique. Ils pourraient également nous informer de façon indirecte sur la nature de la masse cachée de l'univers. Étant donné leur très faible taux d'interaction avec la matière, il faut utiliser, pour les détecter, des cibles de grande masse qui doivent être blindées contre le rayonnement cosmique. En effet, ce dernier bombarde constamment tout site terrestre et représente un bruit de fond important. C'est ainsi que les fonds marins qui offrent un blindage naturel de par leur profondeur constituent un environnement idéal pour la détection des neutrinos. Dans l'expérience Antares, un millier de photodétecteurs sont immergés en Méditerranée, sur un site choisi, au sud de l'île de Porquerolles (Var), pour la qualité de ses eaux, à une profondeur de 2 400 m. Ces photodétecteurs sensibles et orientés vers le sol vont capter la lumière émise par les produits des neutrinos qui ont traversé la Terre et interagir avec elle au voisinage du fond marin. Cette disposition va leur permettre d'étudier le ciel de l'hémisphère sud qui inclut le centre galactique, lieu de plusieurs phénomènes énergétiques intenses. Ces grands dispositifs peuvent ainsi être appelés "télescopes à neutrinos".

38 Suite au tsunami du 26 décembre 2004, l’Allemagne a très vite manifesté son désir de venir en aide aux pays dévastés par le tsunami et a décidé le 13 janvier 2005 la mise en place d’un système germano- indonésien d’alerte précoce aux tsunamis (GITEWS : German Indonesian Tsunami Early Warning System). Ce projet, dirigé par le ministère fédéral de l’enseignement et de la recherche et doté de 45 millions d’euros, doit permettre le déclenchement d’une alerte rapide et fiable et s’appuie sur un réseau d’observations au sol (mesures sismiques et géodésiques) et en mer (marégraphes et capteurs de pression au large), une bathymétrie précise des régions à protéger, des simulations numériques et un centre d’alerte chargé de recevoir les données, de les traiter et, le cas échéant, de diffuser le message d’alerte. Ce centre régional d’alerte aux tsunamis doit s’intégrer dans le dispositif d’alerte de l’océan Indien coordonné par la COI. Les ingénieurs allemands ont ainsi développé un logiciel capable de déterminer la localisation, la magnitude et la profondeur d’un séisme fort dans les 4 minutes suivant le déclenchement du tremblement de terre.

39 Il ne s’agit pas de message d’alerte car les données à la disposition de ces deux centres ne sont pas suffisantes pour pouvoir émettre un bulletin d’alerte fiable. Actuellement, ces derniers fondent leur analyse sur les données transmises par 30 stations sismiques, 41 marégraphes et une bouée DART installée au large de la Thaïlande.

40 Regional Tsunami Watch Providers. Comme il a été indiqué précédemment la terminologie utilisée témoigne souvent des spécificités régionales. Dans le cas de l’océan Indien, elle vise à respecter les susceptibilités nationales en maintenant un équilibre entre les Etats membres du GIC.

41 La Fundación Venezolana de Investigaciones Sismológicas (FUNVISIS)

42 Ainsi, il ne fonctionne pas 24h sur 24 ni 7 jours sur 7.

43 Initialement, ces marégraphes doivent être capables d’envoyer des signaux toutes les minutes lorsqu’ils se trouvent à plus d’une heure (ou 100 km) d’une source tsunamigène, avec à terme un message toutes les 15 secondes.

44 Les trois tsunamis générés depuis celui du 26 décembre 2004 sont les tsunamis du 28 mars 2005, du 17 juillet 2006 et du 12 septembre 2007, qui ont fait des victimes à chaque fois. Le caractère « exceptionnel » du tsunami de Sumatra avancé par certains pour justifier l’absence de système d’alerte dans cette région a donc dû être relativisé.

45 En tenant compte également de la principauté de Monaco.

46 Il s’agit des critères définis à l’avance pour déclencher une alarme. En Polynésie, 4 niveaux d’alarme ont été retenus en fonction de la magnitude du séisme, de l’éloignement de la source et des zones susceptibles d’être touchées en distinguant les îles Marquises du reste de la Polynésie française.

47 L’IPGP participe également au système d’alerte aux tsunamis dans le Pacifique et en Méditerranée par le biais des stations GEOSCOPE installées dans ces régions.

48 Parmi les 28 stations sismiques, 18 relèvent de la responsabilité de L’IPGP, 6 sont sous la responsabilité de l’EOST (Ecole et Observatoire des Sciences de la Terre de Strasbourg), 2 sont sous la responsabilité du CEA/DASE et 2 sont gérées en partenariat avec l’USGS (United States Geological Survey). Le maintien des stations se fait également en collaboration avec plusieurs instituts (l’EOST, l’IRD (Institut de Recherche et de Développement), le CEA/DASE, le CTBTO (Comprehensive Test-Ban Treaty Organization), le CNES (Centre national d’Etudes Spatiales), l’USGS et les universités locales qui abritent les stations).

49 Le délai de transmission des données est de moins d’une minute.

50 La station de Djibouti a été mise en temps réel dans le cadre du traité d’interdiction complète des essais nucléaires. Toutefois, les données ne sont pas transmises directement à l’IPGP mais au centre international des données à Vienne.

51 Ont ainsi participé à ce projet Météo France, l’IPGP, l’EOST, le SHOM, la Direction Départementale de l’Equipement de Mayotte, le CNRS/INSU/LEGOS, le CEA/DASE, l’Institut Paul Emile Victor, l’Administration des Terres Australes et Antarctiques Françaises, le Comité national de la COI

52 Concrètement, il s’agit du commutateur de message « Transmet », du système de diffusion par satellites de données météorologiques « Retim » et du système de prévision météorologique « Synergie ».

53 La Polynésie française est exclue du champ de l’étude.

54 Il s’agit d’un séisme d’une magnitude maximale historiquement connue à laquelle on ajoute 0,5 degré de magnitude pour couvrir l’incertitude sur les connaissances de la sismicité.

55 Le GIS CURARE regroupait à l’origine 5 partenaires : l’université de Nice-Sophia Antipolis, l’Université Pierre et Marie Curie, le CNRS, l’Institut de Recherche et Développement et la société ACRI ST. Se sont ensuite greffés à cette initiative le BRGM et l’IFREMER ainsi que le SHOM et le conservatoire national des arts et métiers.

56 Les deux autres problématiques concernaient les glissements et les instabilités gravitaires dans la Haute-Vallée de la Tinée et l’estimation des mouvements forts lors de séismes majeurs sur le littoral.

57 Votre rapporteur tient cependant à faire remarquer qu’aucune carte des zones inondables fiable ne peut être actuellement produite pour les Antilles dans la mesure où les modélisations de tsunami se heurtent à l’absence de bathymétrie précise pour la zone allant de 0 à 200 mètres tout autour des Antilles françaises.

58 Météo France a reçu de la direction générale de la coopération internationale et du développement 1,472 million d’euros à répartir entre les différents partenaires; le CEA a reçu directement 444 000 euros pour ses actions de mise à niveau des stations sismiques en Indonésie. Enfin, le comité national de la COI a également reçu directement 50 000 euros.

59 Il s’agit de celles de La Réunion et de Canberra.

60 Les départements Outre-mer sont exposés à une multitude de risques naturels autres que géophysiques tels que les cyclones ou encore les risques attachés aux fortes pluies comme les glissements de terrain et les inondations. Toutefois, compte tenu de l’objet de son étude, votre rapporteur s’est concentré sur les aléas naturels susceptibles de générer un tsunami, à savoir les tremblements de terre et l’effondrement d’un volcan.

61 Le dernier séisme ravageur en Martinique date de 1839 et les statistiques sur la fréquence des séismes laissent penser que le prochain tremblement de terre est imminent.

62 Le tsunami du 13 juillet 2003 engendré par l’écroulement du dôme du volcan de Montserrat a entraîné quelques dégâts en Guadeloupe et a rappelé que cette île était exposée au risque de tsunami. En 2004, le ministère de l’Outre-mer a alors financé l’installation de 4 marégraphes enregistrant les variations de hauteur de la mer en continu afin d’analyser les effets de site et les temps de propagation d’un prochain tsunami sur les côtes en Guadeloupe.

63 Comme il a été indiqué précédemment, le message d’alerte au niveau régional s’appuiera sur une matrice de décision qui peut néanmoins se révéler partiellement inadaptée au niveau local. Ainsi, Antibes est une zone plus vulnérable aux tsunamis que Nice en raison de son relief et de sa bathymétrie. De même, les ports sont plus sensibles aux tsunamis en raison des courants et des tourbillons que ces derniers génèrent.

64 Au moins pour les tsunamis régionaux et les éventuels télétsunamis. En cas de tsunamis locaux, l’alerte doit être automatisée par le biais de sirènes déclenchées automatiquement.

65 Pour l’alerte aux tsunamis régionaux, c’est-à-dire avec un délai de réaction d’une demi-heure au minimum.

66 Ces coûts pourraient être en partie mutualisés dans le cadre d’un financement européen à définir.

67 Il s’agit du ministère de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables, du ministère de l’intérieur, de l’Outre-mer et des collectivités territoriales et du ministère des affaires étrangères.

68 Il semblerait qu’au moins trois centres soient amenés à coexister, l’un pour les alertes aux tsunamis en provenance de l’Atlantique, un autre pour les alertes aux tsunamis en provenance de la Méditerranée orientale et un troisième pour les alertes aux tsunamis en provenance de la Méditerranée occidentale.

69 Elle sera composée par tous les Etats intéressés par cette proposition, le comité directeur du GIC/SATANEM et les présidents des 4 groupes de travail ainsi que des représentants d’autres organisations comme la commission européenne, l’organisation météorologique mondiale, le centre sismique euro-méditerranéen. Cette équipe spéciale sera co-présidée par la France et le Royaume-Uni.

70 Le système d’alerte aux îles Loyauté reposera dans ce cas sur l’éducation de la population qui devra avoir intériorisé qu’elle doit s’éloigner du bord de la côte et rejoindre les hauteurs en cas de perception d’un fort tremblement de terre.

71 Cette zone inclut également l’île de Futuna au niveau de laquelle un séisme tsunamigène pourrait se déclencher. Toutefois, comme dans le cas d’un tremblement de terre tsunamigène au niveau des îles Loyauté, la perception de ce dernier constituera la seule alerte pour la population de l’île de Futuna compte tenu de la quasi-concomitance entre le séisme et l’arrivée du tsunami.

72 L’Australie prévoit d’installer un marégraphe sur l’île de Tagia ainsi qu’un tsunamimètre au Nord de la Nouvelle Calédonie pour surveiller les tsunamis en provenance de la zone 1. Pour l’alerte aux tsunamis en provenance de la zone 6, le marégraphe déjà existant à Nukualofa et les deux nouveaux marégraphes prévus par l’Australie à Raoul Island et Norfolk seront suffisants. Enfin la zone 4 (sud Fidji) est moins dangereuse du fait de l’orientation de la zone de faille.

73 Les submersions côtières d’origine marine comprennent les marées de tempête, les houles, la montée du niveau de la mer et les tsunamis.

74 Extraplac est le programme français d’extension du plateau continental. La convention des Nations Unies sur le droit de la mer traite des espaces maritimes, de leur exploitation, de la navigation, de leur prospection et du régime minier des fonds marins. Cette convention autorise sous certaines conditions les Etats côtiers à étendre les zones maritimes sous leur juridiction au-delà des limites de la zone économique exclusive. Les dossiers de revendications seront examinés par une commission spécialisée des Nations Unies avant le 13 mai 2009. La France a donc décidé, à travers le projet Extraplac, de préparer les dossiers pour toutes les zones d’extension potentielle.

75 Réseau d’observation du niveau de la mer.

76 Laboratoire d’études en géophysique et océanographie.

77 Réseau d’observation subantarctique et antarctique du niveau de la mer.

78 Par ailleurs enseignant-chercheur à l’université de la Rochelle.

79 C'est-à-dire référencées par rapport à un même référentiel d’altitude.

80 Dans le plan de secours spécialisé de La Réunion, près de 60 administrations et collectivités territoriales sont impliquées.

81 En insistant sur son occurrence relativement rare mais sur les conséquences graves qu’il peut avoir pour la population en bord de littoral

82 Les pays candidats sont l’Italie, le Royaume-Uni, le Portugal, la Grèce, la Turquie, l’Espagne et la France.

83 Selon les informations obtenues par votre rapporteur, ceux de Fort de France et de Pointe à Pitre sont déjà équipés des sorties nécessaires à la transmission des données en temps réel.

84 Centre d’études maritimes et fluviales.


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