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N
° 
2103

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 8 juillet 2014

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE
préalable au
débat d’orientation des finances publiques

ET PRÉSENTÉ

PAR Mme Valérie RABAULT

Rapporteure générale,

Députée

——

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. UNE POLITIQUE ÉCONOMIQUE REPOSANT SUR UN TRIPTYQUE : SOUTIEN AUX ENTREPRISES, MAINTIEN DU POUVOIR D'ACHAT DES MÉNAGES ET REDRESSEMENT DES COMPTES PUBLICS 7

A. UN SOUTIEN SANS PRÉCÉDENT À L’APPAREIL PRODUCTIF : LE PACTE DE RESPONSABILITÉ 7

B. DES MESURES EN FAVEUR DES MÉNAGES : LE PACTE DE SOLIDARITÉ 9

C. UN REDRESSEMENT DES COMPTES PUBLICS SANS PRÉCÉDENT 9

II. UNE EXÉCUTION POUR 2014 RENFORCÉE PAR LE PLFR 2014 10

A. UNE PRÉVISION DE CROISSANCE ÉCONOMIQUE ENCORE ATTEIGNABLE MALGRÉ UN PREMIER TRIMESTRE DE STAGNATION 11

B. UNE RÉVISION SENSIBLE DES RECETTES FISCALES À LA BAISSE 11

C. UN EFFORT SUPPLÉMENTAIRE EN DÉPENSE… 14

1. Les enseignements à tirer de l’exécution 2013 14

a. Des efforts en matière de maîtrise de la dépense ayant permis d’obtenir des résultats sans précédent sur le budget général, mais devant être renforcés sur la dépense des administrations publiques locales et de sécurité sociale 14

i. Les enseignements sur le budget général 14

ii. Les dépenses des administrations publiques locales 18

iii. Les dépenses des administrations publiques de sécurité sociale 18

b. Les difficultés d’appréciation de la croissance tendancielle de la dépense publique sur la dernière décennie 19

2. Des objectifs de baisse de la dépense publique ambitieux en 2014 qui devraient pouvoir être respectés grâce à l’adoption de mesures de correction dans le PLFR 2014 21

a. L’effort prévu sur les dépenses de l’État 21

b. La maîtrise de la dépense des autres sous–secteurs d’administration 25

c. Des mesures d’économies non législatives pour 1,3 milliard d’euros 27

d. Les prévisions de la dépense publique en 2014 27

D. … POUR CONTENIR LA HAUSSE DE LA PRÉVISION DE DÉFICIT 27

III. LES PERSPECTIVES POUR LES ANNÉES 2015-2017 : TOUT FAIRE POUR SOUTENIR LA CROISSANCE DANS L’ÉQUITÉ 28

A. LA POURSUITE DE L’EFFORT DE RÉDUCTION DU DÉFICIT 28

B. UNE BAISSE DE L’ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE PUBLIQUE DE 50 MILLIARDS D’EUROS ENTRE 2015 ET 2017, QUI NE DOIT PAS CASSER LA CROISSANCE ET CONSTITUE SANS DOUTE UN MAXIMUM À NE PAS DÉPASSER 30

a. La répartition de l’effort de baisse de la dépense entre les différents sous-secteurs d’administrations publiques 30

b. Présentation des premières informations transmises par le Gouvernement sur la mise en œuvre du plan d’économies. 31

C. EN PARALLÈLE, UN OBJECTIF DE RÉDUCTION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES POUR SOUTENIR LA COMPÉTITIVITÉ ET SURTOUT LE POUVOIR D’ACHAT, APRÈS UNE PHASE DE CROISSANCE MARQUÉE DES PRÉLÈVEMENTS EN PARTICULIER SUR LES MÉNAGES 33

ANNEXE N° 1 41

ANNEXE N° 2 : PRÉCISIONS SUR LE VOLET DÉPENSES DU BUDGET TRIENNAL 2015-2017 44

AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD, PREMIER PRÉSIDENT DE LA COUR DES COMPTES 49

EXAMEN PAR LA COMMISSION 69

INTRODUCTION

Intervenant à la suite de la présentation du programme de stabilité et de croissance, présenté en avril, qui décline à l’intention de nos partenaires européens les objectifs d’évolution des principaux agrégats macroéconomiques à moyen terme, et du dépôt du collectif budgétaire pour 2014, le débat d’orientation des finances publiques institué à l’article 48 de la LOLF (loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001) constitue une deuxième étape plus détaillée sur les perspectives des finances publiques et doit permettre de préparer la discussion budgétaire sur le projet de loi de finances pour 2015.

C’est l’occasion pour le Gouvernement de présenter au Parlement les différentes mesures qui impacteront, à la hausse ou à la baisse, les recettes et les dépenses ainsi que les réformes structurelles envisagées, soit l’ensemble des mesures qui permettront à la France de respecter les objectifs déclinés dans le Programme de stabilité.

Cet exercice est d’autant plus important qu’il constitue l’occasion d’un débat entre le Gouvernement et le Parlement, à la suite d’auditions et de travaux portant sur l’exécution 2013. Ce débat est par ailleurs éclairé par le rapport de la Cour des comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques, dont la commission des Finances a pu débattre à la mi-juin. L’ensemble constitue le fameux « chaînage vertueux » qu’ont voulu les promoteurs de la LOLF en 2000.

Les rendez-vous de l’automne – qui sera particulièrement chargé cette année puisque le Parlement sera appelé à se prononcer sur un projet de loi de programmation des finances publiques, sur le budget pour 2015 ainsi que sur le collectif de fin d’année pour 2014 – doivent absolument être préparés dès le printemps pour que le Parlement puisse exercer toutes ses prérogatives et que le travail se fasse dans un cadre temporel permettant la réflexion.

Or, alors que l’année dernière des informations précises avaient été transmises à la commission des Finances une semaine avant les débats en commission et en séance, soit à une date conforme à l’obligation légale prévue par la LOLF (qui fait référence au dernier jour ouvrable de juin), cette année, force est de constater que ce n’est pas le cas, bien que le Parlement ait disposé d’éléments de cadrage en amont du fait de l’examen du Programme de stabilité et du projet de loi de finances rectificative pour 2014.

Si le rapport du Gouvernement sur les orientations des finances publiques a bien été déposé sur le bureau des Assemblées le 30 juin, date limite fixée par la LOLF, les informations détaillant les grandes lignes de ce rapport ont toutes été renvoyées à des « tirés à part » dont nous n’avons pas eu connaissance au jour de la réunion de la Commission, mais seulement le matin du jour du débat en séance publique.

Cette difficulté est naturellement liée au caractère historique des efforts en dépense proposés par le Gouvernement et au soin que celui-ci met à négocier avec les différents ministères pour que les meilleurs choix soient opérés. Il est cependant regrettable que ce calendrier n’ait pas permis à la Commission d’exercer pleinement ses prérogatives et d’engager des débats éclairés sur les perspectives du PLF pour 2015.

I. UNE POLITIQUE ÉCONOMIQUE REPOSANT SUR UN TRIPTYQUE : SOUTIEN AUX ENTREPRISES, MAINTIEN DU POUVOIR D'ACHAT DES MÉNAGES ET REDRESSEMENT DES COMPTES PUBLICS

Jusqu’à récemment, la Commission européenne estimait qu’une réduction du déficit public devait permettre de soutenir la croissance économique, y compris à court terme. Force est néanmoins de constater que la croissance au sein de la zone euro a fortement ralenti en 2012 et en 2013 et que le chômage a augmenté, notamment dans les pays ayant engagé des efforts importants pour réduire leur déficit effectif.

En conséquence, la Commission européenne a décidé d’assouplir sa doctrine budgétaire pour éviter de plonger dans la récession les États membres de la zone euro qui, malgré d’importants efforts pour réduire leur déficit structurel, ne sont pas en mesure de réduire leur déficit effectif sous la barre des 3 % du PIB en raison de la dégradation de la conjoncture économique.

La France a, avec cinq autres pays, bénéficié d’un délai supplémentaire de deux années – de 2013 à 2015 – pour ramener son déficit public à 3 % du PIB.

Notre pays a ainsi retrouvé quelques marges de manœuvre budgétaire permettant, sans pour autant céder à la facilité budgétaire de la poursuite du déficit et d’une augmentation sans fin de la dette publique, de mettre en œuvre une politique économique plus équilibrée permettant de traiter les problèmes à la fois d’offre, reflétés par un déficit commercial historique de 75 milliards d’euros laissé par l’ancienne majorité, et de demande, avec une consommation interne en berne, qui se posent à l’économie française.

A. UN SOUTIEN SANS PRÉCÉDENT À L’APPAREIL PRODUCTIF : LE PACTE DE RESPONSABILITÉ

Les recommandations de la Commission européenne du 2 juin 2014 portant avis du Conseil sur le programme national de réforme de la France pour 2014 et le programme de stabilité de la France pour 2014 présentent l’analyse suivante de la politique française en faveur de la compétitivité des entreprises : « pour soutenir la compétitivité des coûts, le gouvernement français a pris un certain nombre d’initiatives pour réduire la charge fiscale sur le travail. Le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), qui équivaut à une réduction des coûts salariaux pour les salaires inférieurs à 2,5 fois le salaire minimum a été adopté en décembre 2012. Une réduction supplémentaire du coût du travail, de 10 milliards d’euros, a été annoncée dans le cadre du Pacte de responsabilité et de solidarité » et trouve sa traduction législative dans le PLFRSS pour 2014 actuellement en cours de discussion au Parlement.

En revanche, ces deux séries de mesures ne représenteront pas à terme « 30 milliards d’euros ou 1,5 % du PIB » mais 41 milliards d’euros, soit de l’ordre de 2 % du PIB, ce qui serait à terme supérieur de plus de 10 milliards d’euros à l’augmentation générale de la fiscalité sur les entreprises décidées entre 2011 (plans Fillon I et II) et 2013 pour réduire le déficit public.

Les recommandations de la Commission européenne soulignent cependant que : « les entreprises exportatrices, qui versent généralement des salaires élevés, bénéficieront moins du CICE que les entreprises non exportatrices, ce qui réduit d’autant l’incidence de cette mesure sur la compétitivité ». Le Pacte de responsabilité et de solidarité prévoit une réduction des coûts salariaux pour les bas salaires et une autre pour les salaires situés entre 1,6 et 3,5 fois le SMIC. Cette dernière mesure aurait une incidence plus centrée sur les entreprises exportatrices. Par ailleurs, les entreprises bénéficieront d’un certain nombre d’allégements de leur fiscalité retenus par le Gouvernement avec l’objectif de renforcer leur capacité à investir.

En effet, l’investissement est le véritable « chaînon manquant » entre l’innovation et l’emploi. Depuis le début 2000, le taux d’investissement des entreprises françaises, hors immobilier baisse. En effet les entreprises françaises affichent un taux d’investissement hors construction inférieur à celui de leurs homologues allemandes et italiennes, et qui a baissé depuis 2000. Dans la note de conjoncture de l’INSEE de décembre 2013, on constate qu’au cours de la décennie écoulée ce taux (investissement rapporté à la valeur ajoutée) a été inférieur de 1 à 1,5 point à celui de l’Allemagne.

En tout état de cause, la Rapporteure générale a développé dans son rapport n° 2049 sur le projet de loi de finances rectificative pour 2014 (1) une première analyse des effets attendus du Pacte de responsabilité et de solidarité. Ces effets pourraient évidemment être plus positifs encore si tous les acteurs « jouent le jeu ».

Par ailleurs, il est à noter que la Conférence des présidents de l’Assemblée nationale a décidé la création d’une mission d’information sur le CICE, qui devrait rendre prochainement ses conclusions. La Rapporteure générale ne manquera pas de les appuyer avec l’objectif de rendre le dispositif aussi efficace en termes de résultats, et efficient, en termes de résultats rapportés aux moyens mis en jeu, que possible.

B. DES MESURES EN FAVEUR DES MÉNAGES : LE PACTE DE SOLIDARITÉ

Le Pacte de responsabilité et de solidarité comprend également un volet de mesures favorables aux ménages pour 6,1 milliards d’euros en rythme de croisière, bénéficiant principalement aux ménages aux revenus les plus modestes.

Ce volet ménages que la Rapporteure générale a détaillé dans son rapport précité vient après une série de mesures adoptées depuis juillet 2012 : revalorisation de 25 % de l’allocation de rentrée scolaire, revalorisation du traitement des fonctionnaires de catégorie C, création de 150 000 emplois d’avenir permise par la loi n° 2012-1189 du 26 octobre 2012, mise en place des contrats de génération par la loi n° 2013-185 du 1er mars 2013.

C. UN REDRESSEMENT DES COMPTES PUBLICS SANS PRÉCÉDENT

La France mène une politique économique privilégiant une approche globale et équilibrée entre redressement des finances publiques, concentré sur le maintien d’importants efforts pour réduire le déficit structurel, et redynamisation de l’économie pour lutter contre le chômage et contre le risque de paupérisation des ménages les plus modestes.

La Commission européenne estime en effet que « si en raison d'une détérioration importante des perspectives économiques, la cible nominale n'est pas atteinte malgré le déploiement des efforts structurels requis, le délai pour corriger le déficit excessif peut être prolongé ». La réduction du déficit effectif devient donc un objectif second, l’important étant, pour les pays en situation de déficit excessif, de poursuivre activement la réduction de leur déficit structurel conformément à l’objectif fixé par le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance des finances publiques (TSCG).

Ce changement d’approche ne signifie donc pas qu’il faille abandonner toute responsabilité budgétaire. Le Gouvernement doit poursuivre ses efforts pour mettre en œuvre des réformes structurelles susceptibles d’améliorer la compétitivité des entreprises françaises et le fonctionnement du marché du travail, de soutenir les exportations, de lutter contre l’inflation normative…

Malgré un contexte économique défavorable – la croissance a été faible en 2013 comme en 2012, à hauteur de 0,3 % seulement – le déficit public a pu diminuer de 0,6 point de PIB entre 2012 et 2013, concrétisant ainsi un effort sans précédent en période de bas de cycle économique.

DÉFICIT ET ENDETTEMENT PUBLICS

(en milliards d’euros)

 

2009

2010

2011

2012

2013

Déficit public

– 141

– 136

– 103

– 99

– 88

Dette publique

1 499

1 602

1 725

1 841

1 925

Croissance du PIB (%)

– 3,1

1,7

2,1

0,3

0,3

Source : INSEE – Cour des comptes.

DÉFICIT ET ENDETTEMENT PUBLICS

(en % du PIB)

 

2009

2010

2011

2012

2013

Déficit public

– 7,5

– 7

– 5,2

– 4,9

– 4,3

Dette publique

79,5

82,7

86,5

90,9

94,1

Croissance du PIB (%)

– 3,1

1,7

2,1

0,3

0,3

Source : INSEE – Cour des comptes.

Malgré ces efforts considérables, la réduction des déficits publics demeure plus lente que prévue en raison de l’atonie des recettes que ne compense que partiellement la modération de la hausse des dépenses publiques.

En dépit de la baisse des dépenses de l’État pour la première fois, la part des dépenses publiques dans le PIB est passée de 56,9 % en 2012 à 57,4 % en 2013. Parallèlement, les prélèvements obligatoires ont augmenté de 1,1 point de PIB, passant de 45,1 % du PIB à 46,2 % du fait des mesures nouvelles.

La Rapporteure générale reviendra infra dans le présent rapport sur l’ensemble des mesures fiscales votées depuis juillet 2012.

DÉPENSES ET RECETTES PUBLIQUES

(en % du PIB)

 

2009

2010

2011

2012

2013

Dépenses publiques

56,8

56,6

56,1

56,9

57,4

Taux de PO

42,1

42,6

43,9

45,1

46,2

Source : INSEE – Cour des comptes.

II. UNE EXÉCUTION POUR 2014 RENFORCÉE PAR LE PLFR 2014

Le solde de l’État inscrit en LFI pour 2014 s’élevait à – 82,2 milliards d’euros, le déficit prévu par la LFSS pour le régime général à 9,6 milliards d’euros, celui des administrations publiques locales à 3,3 milliards d’euros et enfin, le solde des ODAC devait lui être proche de l’équilibre.

In fine, Le déficit public était ainsi prévu à 3,6 % du PIB. Ces prévisions reposaient sur un scénario macroéconomique caractérisé par une croissance du PIB de 0,9 % en volume.

La croissance économique a été révisée à 1 % dans le programme de stabilité d’avril 2014 et le PLFR 2014, mais la prévision de déficit public a été relevée à 3,8 % du PIB.

Ces prévisions demeurent soumises à quelques aléas.

A. UNE PRÉVISION DE CROISSANCE ÉCONOMIQUE ENCORE ATTEIGNABLE MALGRÉ UN PREMIER TRIMESTRE DE STAGNATION

Dans son avis du 5 juin 2014 relatif aux projets de lois de finances rectificative et de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 (2), le Haut conseil des finances publiques a constaté que « les aléas baissiers qui affectent la prévision de croissance de 1 % en 2014 se sont accrus depuis la présentation du programme de stabilité », et conclu que « sans être hors d’atteinte, la prévision de croissance du Gouvernement pour 2014 paraît désormais élevée ».

Le HCFP pointait principalement certaines faiblesses du scénario du Gouvernement caractérisé par l’hypothèse que les effets récessifs immédiats de la consolidation budgétaire, que les simulations réalisées par le Gouvernement et collectées par la Rapporteure générale avaient évalués à 0,7 % de PIB par an en moyenne, seraient rapidement atténués par les effets d’entraînement de sa politique d’offre qui permettrait aux entreprises de faire face à la demande mondiale adressée à la France.

Le Fonds monétaire international a également abaissé ses prévisions économiques pour la France. Il estime maintenant la prévision de croissance cette année à 0,7 %, contre 1 % lors de sa précédente prévision en avril.

La Rapporteure générale ne conteste pas les fragilités du scénario macroéconomique pointées par le HCFP et confirmées par le FMI, fragilités malheureusement encore renforcées par la croissance nulle enregistrée au premier trimestre 2014, mais elle rappelle qu’il existe également des aléas favorables :

– en premier lieu, l’abaissement du taux directeur de la Banque centrale européenne et les annonces de son président, M. Mario Draghi, liant pour la première fois croissance économique et politique de change. Cette nouvelle politique monétaire aura des effets certains sur la compétitivité-prix de l’industrie française ;

– en second lieu, la politique de soutien au pouvoir d’achat des ménages que la Rapporteure générale appelle à renforcer encore afin de soutenir la consommation interne, moteur principal de la croissance française.

B. UNE RÉVISION SENSIBLE DES RECETTES FISCALES À LA BAISSE

Dans son référé du 25 février 2014 sur les prévisions de recettes fiscales de l’État, la Cour des comptes (3) indiquait que : « les prévisions de recettes sont établies par l’administration en construisant un scénario macroéconomique, puis en estimant la croissance de chaque impôt ou contribution sociale, à législation constante, sur la base de ce scénario, enfin en ajoutant l’impact des mesures législatives nouvelles. À chacune de ces trois étapes sont associés des risques distincts qui doivent être identifiés et peuvent s’additionner ».

Ce référé montrait également que l’impact budgétaire résultant des écarts entre les élasticités des recettes fiscales au PIB prévues et constatées s’élève, en moyenne annuelle entre 2003 et 2012, à 4,5 milliards d'euros mais varie fortement (de – 21 milliards d’euros en 2009 à + 10 milliards d’euros en 2006). Selon le même référé, « ces écarts sur les élasticités jouent dans les deux sens : les recettes sont plutôt surestimées lorsque la croissance du PIB est faible, ce qui peut conduire à prévoir un déficit public trop faible ; elles sont plutôt sous-estimées lorsque la croissance du PIB est relativement forte, ce qui peut permettre d'éviter de réutiliser le surcroît de recettes attendues sous forme de dépenses supplémentaires ou de baisses d'impôts. Ces écarts se compensent en partie sur longue période et, sur les dix dernières années hors 2009, ils ont été quasiment nuls en moyenne. Le fait qu'ils se compensent sur longue période atteste de l'absence de biais systématique dans l'estimation des recettes mais ce constat n'enlève rien à l'importance des écarts qui, dans un sens ou dans 1'autre, affectent chacune des prévisions annuelles. ».

À la suite de ce référé, la commission des Finances de l’Assemblée nationale a auditionné en mai dernier les principales directions du ministère des finances concernées par la prévision de recettes : direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI), direction générale adjointe du trésor (DGT), direction générale des finances publiques (DGFiP) et direction du budget (DB), sur la méthodologie de prévisions de recettes fiscales de l’État. De nombreuses questions demeurent posées notamment sur la prise en compte de la fraude et de la dynamique des dépenses fiscales dans la prévision.

En tout état de cause, les recettes fiscales pour 2014 ont été revues de 5,3 milliards d’euros à la baisse dans le PLFR pour 2014 conformément au tableau suivant :

RECETTES FISCALES NETTES :
DE LA PRÉVISION EN LFI À LA PRÉVISION EN PLFR 2014

(en milliards d’euros)

Prévision de LFI

284,4

– IR

– 3,2

– IS

– 2,9

– TICPE

+ 0,2

– TVA

+ 0,5

Exécution

279

Source : PLFR 2014.

Cette évolution résulte de quatre facteurs principaux :

1. Les moins-values de recettes fiscales de 2013 ont été reprises en base, soit 3,6 milliards d’euros nets en 2013.

2. L’analyse de l’exécution 2013 des recettes a conduit également, au-delà de cette reprise en base, à réviser à la baisse la prévision d’évolution spontanée des recettes fiscales, conduisant à anticiper de moindres recettes à hauteur de 2 milliards d’euros.

3. Les décaissements effectués en 2014 au titre des contentieux fiscaux seraient plus faibles que prévu initialement, à hauteur de 1,6 milliard d’euros. Le principal contentieux concerne celui relatif aux OPCVM pour 1,3 milliard d’euros du fait de délais de traitement plus lents. En effet, à la complexité des dossiers, s’ajoute une centralisation au niveau du tribunal administratif de Montreuil qui ne contribue pas à accélérer les procédures. Les décaissements erratiques tout le long de l’année conduiront bien évidemment à une révision de la prévision, si nécessaire.

4. Enfin, le rendement total des mesures nouvelles est également modifié du fait notamment de la réduction d’impôt sur le revenu prévue à l’article 1er du projet de loi de finances rectificative pour 2014 en faveur des ménages aux revenus moyens et modestes. Cette mesure a un impact de 1,16 milliard d’euros à la baisse sur les recettes d’IR.

Elle est partiellement compensée par l’anticipation de recettes liées à la lutte contre la fraude plus importantes qu’initialement escompté au titre de l’activité du service de traitement des déclarations rectificatives (STDR). Il est en effet prévu un rendement de 1,85 milliard d’euros en 2014, soit 1 milliard d’euros de plus que la prévision initiale.

Concernant les recettes non fiscales, les prévisions ne sont pas sensiblement modifiées par rapport à la LFI, à 13,8 milliards d’euros contre 13,7 milliards d’euros. Il n’est pas à exclure cependant que ces recettes soient en définitive plus élevées du fait du versement de la Caisse des dépôts et consignations. Celui-ci, d’après la Cour des comptes, « [devrait] augmenter de près d’un milliard d’euros entre 2013 et 2014… Après deux années marquées par l’absence de prélèvement sur le fonds d’épargne, ce dernier pourrait effectuer un versement à l’État en 2014 au titre de 2013. De la même manière, le dividende de la CFC est prévu en hausse alors qu’il était nul en 2013 ». Par ailleurs, les dividendes perçus par l’État en provenance des entreprises cotées devraient lui aussi connaître une progression du fait de la bonne tenue de l’indice CAC 40.

Enfin, la dynamique des dépenses fiscales devrait être freinée. Les conférences fiscales, qui réunissent les services du ministère des finances et les ministères sectoriels, sont dédiées à l’examen des dépenses fiscales et des taxes affectées, ainsi qu’à l’expertise des propositions de suppression ou d’aménagement des dispositifs existants. Elles s’inscrivent dans le cadre fixé par la loi du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017, qui, outre la stabilisation en valeur (article 14 de la LPFP) du coût total des dépenses fiscales en deçà d’un plafond de près de 71 milliards d’euros (hors CICE), prévoit l’évaluation (article 18 de la même LPFP) par cinquième de l’ensemble des dispositifs existants entre 2012 et 2017, laquelle évaluation reste à engager de manière systématique, ainsi que la Cour des comptes l’a également observé. Si ce dispositif des conférences fiscales paraît de bon sens, son efficacité en termes de ralentissement du volume de l’ensemble des dépenses fiscales mérite d’être améliorée, et supposera un engagement ferme du Gouvernement.

La Rapporteure générale estime que, en l’état actuel des informations, s’il existe bien évidemment des aléas baissiers sur les prévisions de recettes liés principalement à l’hypothèse de croissance économique, il existe également des aléas haussiers du fait notamment de la dynamique du STDR qui impacte non seulement l’IR mais également l’ISF qui a enregistré une dynamique importante mais aussi des recettes non fiscales attendues. Elle considère donc qu’à ce stade, la prévision de recettes pour 2014 est réaliste.

C. UN EFFORT SUPPLÉMENTAIRE EN DÉPENSE…

1. Les enseignements à tirer de l’exécution 2013

a. Des efforts en matière de maîtrise de la dépense ayant permis d’obtenir des résultats sans précédent sur le budget général, mais devant être renforcés sur la dépense des administrations publiques locales et de sécurité sociale

i. Les enseignements sur le budget général

Une baisse historique des dépenses de l’État en 2013

Les dépenses nettes sur le budget de l’État en 2013 atteignent 301,09 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 298,65 milliards d’euros en crédits de paiement (CP).

La dépense de l’État a ainsi fortement diminué en 2013 par rapport à la prévision de la LFI 2013 (– 4 milliards d’euros).

Ce résultat représente également une baisse de 890 millions d’euros par rapport à l’exécution 2012, ce qui n’avait plus été constaté depuis 2008. Les efforts engagés en 2013 ont donc porté leurs fruits.

Les normes de dépenses ont également été respectées, comme en 2012. L’exécution a ainsi été inférieure aux plafonds fixés par les normes « zéro valeur » et « zéro volume » de, respectivement, – 0,14 milliard d’euros et – 3,45 milliards d’euros.

Cette bonne maîtrise de la dépense a reposé en partie sur des économies de constatation importantes (– 3,3 milliards d’euros par rapport à la LFI sur la charge de la dette et le CAS Pensions et – 1,41 milliard par rapport à l’exécution 2012 sur la charge de la dette) et sur une régulation infra-annuelle active consistant notamment en l’application d’une réserve de précaution, à laquelle s’est ajoutée une mesure de surgel de 2 milliards d’euros dès le début de l’année. Au total, les annulations de crédits se sont ainsi élevées à 4,39 milliards d’euros en CP, dont 3,15 milliards d’euros relevant de la réserve de précaution, contre 2,74 en 2012.

Des facteurs de fragilité à consolider pour les exercices à venir

Parmi les différents éléments qui ont pu fragiliser ces résultats, la Rapporteure générale souhaiterait insister sur deux d’entre eux : les dépenses liées aux opérateurs de l’État et celles liées à l’Union européenne.

Les dépenses liées aux opérateurs de l’État

Pour accomplir ses missions, l’État s’est appuyé en 2013 sur 556 opérateurs qui ont perçu 26,2 milliards d’euros de subventions pour charge de service public (catégorie 32), 13,3 milliards d’euros de dépenses de transfert leur permettant par ailleurs de financer, pour le compte de l’État, des dépenses d’intervention (titre 6), et 9,58 milliards d’euros de produit d’impositions ou taxes affectées.

Le budget triennal 2011-2013 a imposé aux opérateurs de consentir un effort collectif, analogue à celui de l’État, de baisse de 10 % de leurs dépenses de fonctionnement entre 2010 et 2013 (5 % en 2011, 2,5 % en 2012 et en 2013), sans que pour autant l’assiette de ces dépenses n’ait été précisément définie.

Le Programme de stabilité 2014-2017 présenté en avril 2014 prévoit la poursuite de la réduction des subventions et taxes affectées de 2 % en 2015, 4 % en 2016 et 6 % en 2017. Par ailleurs, ces mesures pourront être complétées par des prélèvements sur la trésorerie des opérateurs comme cela a déjà été prévu en 2013 et 2014.

La Rapporteure générale soutient ces mesures présentées par le Gouvernement afin de maîtriser davantage la dépense des opérateurs de l’État, mais remarque que la Cour des comptes ne relève « aucun progrès significatif » dans ce domaine dans son rapport sur le budget 2013, malgré les objectifs de baisse affichés.

À périmètre courant, entre 2012 et 2013, les dotations budgétaires ont a contrario ainsi progressé de 0,8 milliard d’euros, dont 0,5 milliard d’euros résultent d’un transfert de masse salariale de l’État aux universités. Cette progression nette de transferts de 0,3 milliard d’euros est à mettre en regard avec la baisse des dépenses du budget général de l’État d’un même montant entre 2012 et 2013.

LE FINANCEMENT DES OPÉRATEURS PAR L’ÉTAT

(en milliards d’euros)

 

Exec. 2010

Exec. 2011

Exec. 2012

LFI 2013

Exec. 2013

Dotations budgétaires

(Périmètre courant)

63,30

35,04

39,39

40,28

40,21

Ressources fiscales affectées

8,65

9,49

9,72

9,58

nd *

Source : direction du budget.

*nd : non disponible.

La Rapporteure générale a demandé au Gouvernement qu’un premier bilan lui soit adressé sur l’évolution des ressources des opérateurs, qui ne lui a pas été transmis à la date de publication de ce rapport.

Ce premier bilan est pourtant d’autant plus important que tous les opérateurs ne sont pas impactés de la même façon par les baisses de ressources prévues et qu’il semble nécessaire de coupler cet effort en dépense avec une réflexion plus globale sur l’évolution récente des agences et opérateurs de l’État et sur le rôle qu’ils peuvent remplir.

Les dépenses liées à l’Union européenne

L’impact de l’Union européenne sur le budget de l’État a été important au cours des dernières années et la Cour des comptes recommande dans son rapport sur le budget de l’État en 2013 de mai 2014 (4) de mieux l’intégrer dans la prévision de l’évolution de la dépense.

Le bilan qui peut être fait de l’année 2013 sur ce sujet devrait conduire à renforcer notre vigilance pour les années à venir. En effet, les mécanismes d’assistance financière ont eu un coût plus élevé que celui retenu par la prévision, tandis que l’augmentation en cours d’année du niveau des prélèvements sur recettes au profit de l’Union européenne n’a pas été anticipée.

Pour rappel, l’impact des mécanismes d’assistance financière de la zone euro s’est élevé à 6 milliards d’euros sur le solde budgétaire de 2013, après déduction de 1,1 milliard d’euros de recettes liées aux intérêts perçus par la Banque de France sur le prêt bilatéral à la Grèce (92 millions d’euros) et au reversement des revenus perçus par la Banque de France sur les obligations de cet État qu’elle détient au compte d’affectation spéciale Participation de la France au désendettement de la Grèce (1 006 millions d’euros).

SYNTHÈSE DE L’IMPACT SUR LE SOLDE

(en millions d’euros de crédits de paiement)

 

Exécution 2010

Exécution 2011

Exécution 2012

Exécution

2013

Précision 2014

Impact en dépenses

– 4 448

– 6 940

– 6 722

– 7 122

– 3 763

Impact en recettes

84

374

327

1 098

499

Impact sur le solde

– 4 364

– 6 566

– 6 395

– 6 024

– 3 264

Source : Cour des comptes.

Parmi les différents mécanismes dans lesquels la France est engagée (notamment le Fonds européen de stabilité financière – FESF et les versements à la Grèce via le CAS Participation de la France au désendettement de la Grèce), c’est sur le Mécanisme européen de stabilité (MES) que les dépenses sont les plus importantes. Elles ont ainsi représenté la totalité de l’impact en dépense en 2013 (7,1 milliards d’euros), soit 450 millions d’euros de plus qu’en LFI 2013 et 400 millions d’euros de plus qu’en 2012.

IMPACT EN DÉPENSES SUR LE SOLDE BUDGÉTAIRE

(en millions d’euros de crédits de paiement)

Mécanisme

Exéc.

2010

Exéc. 2011

Exéc.

2012

Prév.

2013

Exéc.

2013

Prév.

2014

Dotations en capital du MES

 

0

6 523

6 523

6 523

3 262

Appels en garantie FESF

 

0

0

0

0

0

Prêt bilatéral à la Grèce

4 448

6 940

0

0

0

0

Versement des revenus perçus par la Banque de France

 

0

199

149

599

501

Impact total sur le solde

4 448

6 940

6 722

6 672

7 122

3 763

Source : Cour des comptes.

À ces dépenses se sont ajoutées les différentes augmentations du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne intervenues en cours d’année pour un total de 2 milliards d’euros de plus que la prévision de la LFI 2013 et de 3,4 milliards d’euros supplémentaires par rapport à l’exécution 2012.

À ce titre, la Cour des comptes remarque qu’ « une augmentation du montant des crédits de paiement nécessaires à l’Union européenne était prévisible » et que « les plus prudents de nos partenaires se donnent, sans préjudice de leur position de négociation ultérieure, des marges afin de couvrir les risques (budgets rectificatifs, ajustements au titre d’années antérieures, etc.) ».

La Rapporteure générale soutient ainsi la recommandation de la Cour selon laquelle « il paraîtrait opportun de faire évoluer nos pratiques, afin d’éviter des tensions supplémentaires sur l’exécution budgétaire ».

Ainsi, bien que la prévision de l’impact de l’Union européenne sur le solde de 2014 soit moindre qu’au cours des années passées (3,26 milliards d’euros contre 6 en 2013), il convient donc de mieux anticiper les possibles variations à la hausse de ce poste de dépense.

ii. Les dépenses des administrations publiques locales

La dépense des administrations publiques locales (APUL) a fortement augmenté en 2013, pour moitié du fait d’une accélération de la dépense d’investissement (+5,2 % en valeur contre 3,8 % prévus en LFI 2013), ce qui est habituel pour une année préélectorale. Toutefois cette situation a conduit à détériorer significativement le solde des APUL.

LES COMPTES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES LOCALES

(en millions d’euros)

 

2010

2011

2012

2013

Recettes

228,1

234,7

240,1

242,8

Dépenses

229,8

235,3

243,8

252,0

Solde

– 1,7

– 0,7

– 3,7

– 9,2

Source : INSEE.

Par ailleurs, les dépenses de fonctionnement des APUL ont continué de croître à un rythme légèrement inférieur à 2012 (2,8 % contre 3,3 %), mais plus soutenu que les recettes de fonctionnement (1,6 %), ce qui est problématique, d’autant que cette hausse a résulté en premier lieu de l’augmentation des dépenses de personnel (+ 3,1 %).

iii. Les dépenses des administrations publiques de sécurité sociale

En 2013, les prestations sociales versées par les organismes de sécurité sociale auraient augmenté légèrement moins vite qu’en 2012 (+ 0,3 % en valeur contre + 3,3 %) du fait principalement de l’évolution des pensions de retraites impactées dans le sens d’un ralentissement à la fois par les mesures de la réforme des retraites et une inflation plus modérée qu’anticipé (+ 2,9 % contre + 4,1 % en 2012).

Les dépenses de l’assurance maladie ont également enregistré de bons résultats puisque les dépenses sous ONDAM ont été inférieures de 1,4 milliard d’euros à la prévision de la LFSS 2013.

Seules les prestations chômage ont continué d’augmenter à un rythme élevé (+ 5,7 % en 2013, soit un rythme identique à 2012), le nombre de chômeurs à la fin de l’année 2013 ayant atteint 2 317 800, soit 10 700 personnes de plus qu’à la fin de l’année 2012.

VARIATION DES DÉPENSES PAR SOUS-SECTEURS
DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES DE LA FRANCE
ENTRE 2001 ET 2013

(à champ constant, en point de PIB)

* Hors acte II de la décentralisation

Source : Cour des comptes, sur la base de données publiées par Eurostat et les comptes nationaux, base 2005 SEC 1995.

b. Les difficultés d’appréciation de la croissance tendancielle de la dépense publique sur la dernière décennie

Le bilan présenté par la Cour des comptes

La Cour des Comptes propose dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques de 2014 une analyse précise de la croissance tendancielle de la dépense publique sur la décennie pour tenter de mieux appréhender les prévisions du Gouvernement et l’effectivité des efforts en dépenses engagés depuis 2013.

Pour rappel, le Gouvernement a estimé dans le PLF 2014 la croissance tendancielle des dépenses à 3,3 % en valeur et 1,6 % en volume par an, sur la base d’une inflation moyenne de 1,7 %.

À ce propos, la Cour observe que si le « taux de 3,3 % en valeur correspond à peu près à la moyenne des années 1997 à 2012 », cette croissance « a nettement ralenti depuis pour se situer entre 2 % et 3 % ». Un ralentissement « moins net », mais « significatif » est également constaté en ce qui concerne la croissance des dépenses en volume, le taux étant passé « d’une fourchette de 2 à 3 % dans les années 2000 à une fourchette de 0,5 à 1,5 % depuis 2010 ».

Ces constats soulèvent la question, pour l’avenir, de la période de temps retenue pour le calcul de la croissance tendancielle et des modalités de révision de cette tendance.

Les difficultés méthodologiques

Plusieurs méthodes existent pour estimer la croissance tendancielle de la dépense. Elles présentent toute des fragilités, bien qu’elles permettent d’apporter des éléments d’appréciation nécessaires sur la maîtrise de la dépense en mesurant l’évolution réelle de la dépense par rapport à sa croissance spontanée.

Trois principales méthodes d’évaluation sont utilisées.

La plus commune, utilisée par le Gouvernement et la Commission européenne, consiste à calculer l’effort structurel en dépense, c’est-à-dire l’écart entre le niveau de dépense réel et le niveau qui serait constaté si les dépenses croissaient au rythme de la croissance potentielle du PIB en valeur.

Selon la LFI pour 2014, l’effort structurel en dépense a été de 0,2 point de PIB en 2013, soit 4 milliards d’euros. En 2014, il est porté à 0,7 point de PIB, soit 15 milliards d’euros (sur un effort total de réduction du déficit en recette et en dépense de 0,9 point de PIB, ce qui revient à faire reposer 80 % de l’effort structurel pour 2014 sur la dépense).

Si l’effort structurel permet de mesurer précisément un écart, la mesure de l’évolution du volume des dépenses par rapport à celle du PIB ne permet pas d’apprécier finement l’effort réel en dépense, ni la nature des postes sur lequel celui-ci repose.

D’autres méthodes existent également, notamment :

– la méthode déterministe, consistant à évaluer la croissance tendancielle des dépenses au regard de l’évolution de leurs déterminants socio-économiques ;

– la méthode historique, reposant sur la croissance moyenne des dépenses au cours d’une période donnée.

Ces méthodes sont généralement utilisées conjointement pour parvenir à une appréciation la plus juste possible de la croissance tendancielle.

Le Parlement ne dispose pas d’une présentation claire de la méthode retenue par le Gouvernement dans le projet de programme de stabilité qui lui est soumis en avril pour évaluer la croissance des dépenses.

Ce défaut d’information a alimenté des interrogations sur l’effort à réaliser pour respecter nos engagements en termes de réduction du déficit et a pu conduire à des surenchères peu sérieuses, alors même que les économies réalisées par le Gouvernement et sa majorité témoignent d’ores et déjà d’une détermination sans précédent à assainir nos finances publiques.

Pour cette raison, la Rapporteure générale souhaite reprendre à son compte la recommandation faite par la Cour des comptes selon laquelle « il serait souhaitable que le ministère des finances rende publiques, dans le rapport annexé à la prochaine loi de programmation, les hypothèses et méthodes qu’il utilise pour estimer la croissance tendancielle des dépenses publiques ainsi que les modalités de leur actualisation ».

2. Des objectifs de baisse de la dépense publique ambitieux en 2014 qui devraient pouvoir être respectés grâce à l’adoption de mesures de correction dans le PLFR 2014

a. L’effort prévu sur les dépenses de l’État

Les crédits ouverts pour le budget général par la LFI 2014 ont atteint 312,3 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 309,2 milliards d’euros en crédits de paiement, les objectifs de dépense inscrits dans la loi de finances initiale pour 2014 s’inscrivant dans la continuité des efforts engagés en 2012 et 2013.

Comparaison des prévisions de la LFI 2013 et de la LFI 2014 : un effort important de baisse des dépenses, hors dépenses exceptionnelles

La hausse constatée entre le niveau des crédits ouverts entre la LFI 2013 et la LFI 2014 s’explique principalement par le lancement du deuxième programme d’investissements d’avenir (PIA) qui représente 11 milliards d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.

CRÉDITS SUR LE BUDGET DE L’ÉTAT

(en milliards d’euros)

 

LFI 2013

Exécution
2013

LFI 2014

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Budget général

294,9

299,3

301,1

298,6

312,3

309,2

Budgets annexes

2,3

2,3

2,2

2,2

2,4

2,4

Comptes d'affectation spéciale

74,6

74,5

71,0

70,9

70,8

70,9

Comptes de concours financiers

115,0

114,9

111,2

110,9

124,3

124,2

Sources : lois de finances et de règlement.

Cour des comptes sur la base d’informations contenues dans les lois de finances 2013 et 2014 et la loi de règlement pour 2013.

Cette évolution ne doit toutefois pas occulter l’important effort prévu sur la dépense de l’État entrant dans le champ de la norme (soit hors dépenses exceptionnelles, comme celles relevant du PIA ou celles relatives à la contribution de la France au Mécanisme européen de stabilité – MES). En effet, la LFI 2014 prévoit, pour la première fois, une baisse des dépenses de l’État de 1,4 milliard d’euros en volume et en valeur par rapport à la LFI 2013, alors que la loi de programmation des finances publiques prévoyait une stabilité en valeur. Pour rappel, sous la précédente législature, ces dépenses ont progressé en moyenne de 4,7 milliards d’euros par an.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE L’ÉTAT SOUS PÉRIMÈTRE NORMÉ
ENTRE LA LOI DE FINANCES POUR 2013 ET LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2014

(en milliards d’euros)

 

LFI 2013

LFI 2013

(format 2014)

LFI 2014

Écart

Dépenses nettes du budget général (1), hors dette et pensions, y compris taxes affectées aux opérateurs et organismes divers chargés d’une mission de service public, plafonnées en vertu de l’article 46 de la loi de finances pour 2012.

204,1

204,5

203,9

– 0,6

Prélèvement sur recettes en faveur de l’Union européenne

19,6

19,6

20,1

+ 0,5

Prélèvement sur recettes en faveur des collectivités territoriales

55,7

55,7

54,3

– 1,5

Dépenses de l’État hors dette et pensions

279,4

279,8

278,4

– 1,5

Charge de la dette de l’État

46,9

46,9

46,7

– 0,2

Contribution CAS Pensions

45,2

45,2

45,4

+ 0,2

Dépenses nettes totales de l’État (hors MES et PIA 2)

371,5

371,9

370,5

– 1,4

(1) Dépenses du budget général de l’État hors crédits de la mission Remboursements et Dégrèvements.

Source : Commission des finances.

Comparaisons des prévisions de la LFI 2014 avec l’exécution 2013

L’évolution de la dépense comprise dans le périmètre de la norme de l’État témoigne de cet effort supplémentaire proposé pour l’année 2014, à la suite d’une exécution 2013 pour laquelle le niveau de la dépense sous la norme « 0 volume » avait déjà fortement reculé.

ÉVOLUTION ANNUELLE DES DÉPENSES DE L’ÉTAT
AU SEIN DU PÉRIMÈTRE NORMÉ DEPUIS 2007 (1)

(en milliards d’euros)

2007

2008

2009

2010

2011

2012

LFI 2013

2013

LFI 2014

+ 0,8

+ 10,9

+ 1,3

+ 5,3

+ 5,2

– 0,26

+ 1,7

– 3,45

– 1,4

(1) Dépenses nettes totales du budget général et des prélèvements sur recettes en faveur de l’Union européenne et des collectivités territoriales, hors dépenses exceptionnelles non comptabilisées dans la norme.

Source : rapports de la commission des Finances sur les projets de loi de règlement depuis 2007.

La Cour souligne sur ce point que l’effort de 1,4 milliard d’euros sur la dépense normée ayant été calculé sur la base de la prévision de la LFI 2013 (+ 1,7 milliard d’euros), contre – 3,45 milliards d’euros en exécution, le respect de la norme fixée par la LFI 2014 s’en trouve facilité. Une augmentation de 2 milliards d’euros de cet effort sur la dépense normée serait sans doute même possible.

DÉPENSES EXÉCUTÉES ET PRÉVUES SUR LE CHAMP DES NORMES (2013-2014)

(en milliards d’euros)

 

LFI 2013
(format
2014)

Exécution 2013 (format
2014)

LFI 2014

Variation LFI 2014/
LFI 2013

Variation
LFI 2014/
exécution 2013

Dépenses du budget général, hors
charges de la dette et pensions, y compris taxes affectées plafonnées

204,5

203,4

203,9

-0,6

+ 0,5

Prélèvement sur recettes au profit de
l'Union européenne

19,6

20,7

20,1

0,5

– 0,6

Prélèvement sur recettes au profit
des collectivités territoriales

55,7

55,6

54,3

– 1,4

– 1,3

Dépenses sur le champ de la norme
en valeur

279,8

279,7

278,4

– 1,4

– 1,2

Charge de la dette

46,9

44,9

46,7

– 0,2

+ 1,8

Contribution au CAS Pensions

45,2

43,9

45,4

0,2

+ 1,5

Dépenses sur le champ de la norme
en volume

371,9

368,5

370,5

– 1,4

+ 2,0

Source : Cour des comptes ; les dépenses sont exprimées en valeur, y compris sur le champ de la norme en volume.

Une révision à la hausse de l’effort en dépense, volontariste et responsable, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2014 en cours d’examen

Si la Cour constate comme chaque année des risques d’accroissement de la dépense de l’État du fait du dynamisme de certains postes, pour un montant total susceptible d’être compris en 2014 entre 1 et 3 milliards d’euros, elle souligne que ces aléas pourront être couverts par les annulations de crédits « gelés » sur la réserve de précaution.

RISQUES SUR LE PÉRIMÈTRE DE LA NORME EN VALEUR

(en milliards d’euros)

 

Risque estimé pour 2014

Hypothèse basse

Hypothèse haute

Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales

0,4

0,7

Défense

0,2

0,5

Écologie, développement et aménagement durables

0

0,2

Enseignement scolaire

0,2

0,4

Égalité des territoires, logement, ville

0,2

0,4

Immigration, asile et intégration

0,1

0,2

Travail et emploi

0,1

0,2

Santé

0,1

0,2

Solidarité, insertion et égalité des chances

0,3

0,5

Subvention CAS Véhicules propres

0

0,1

Autres missions

0

0,1

Total missions hors dette et pensions

1,6

3,5

Marge liée à la sous-consommation des crédits

– 0,6

– 0,6

Risques sur prélèvement sur recettes

0,1

0,3

Total norme en valeur après prise en compte de la marge de sous-consommation

1,1

3,2

Source : Cour des comptes.

Par ailleurs, de manière à commencer à corriger le décalage du solde structurel et du solde effectif par rapport à la trajectoire des finances publiques présentée dans la loi de programmation des finances publiques 2012-2017 et aux engagements que nous avons pris vis-à-vis de nos partenaires européens, des mesures complémentaires de baisse des dépenses publiques ont été annoncées à l’occasion de la présentation du programme de stabilité et ont été présentées au Parlement dans des lois de finances et de financement rectificatives, pour un montant total de 4 milliards d’euros.

Le budget de l’État serait concerné à hauteur de 1,6 milliard d’euros ce qui permettrait de maintenir le plafond des crédits dans le champ de la norme en valeur, soit les crédits pilotables hors charge de la dette et pensions, en les ramenant de 278,5 milliards d’euros prévus en LFI 2014 à 276,9 milliards d’euros.

Les annulations de crédits, présentées en détail dans le rapport de la Rapporteure générale sur le projet de loi de finances rectificative pour 2014 (5), seraient réparties entre les différents ministères conformément au tableau ci-après.

ANNULATIONS DE CRÉDITS SOUS NORME DU PLFR 2014 - RÉPARTITION PAR MINISTÈRES (CRÉDITS DE PAIEMENT HORS PENSIONS ET CHARGE DE LA DETTE)

(en millions d’euros)

Ministère

LFI 2014

Annulations sur crédits mis en réserve

Annulations hors réserve

Total des annulations

Affaires étrangères et développement international

4 566

39

– 51

– 90

Affaires sociales et santé

14 917

– 25

– 38

– 63

Agriculture, agroalimentaire et forêt

4 314

– 13

– 21

– 34

Culture et communication

3 164

– 35

– 34

– 69

Décentralisation, réforme de l'État et fonction publique

2 422

0

– 46

– 46

Défense

32 584

– 100

– 250

– 350

Droits des femmes, ville, jeunesse et sports

961

– 16

– 9

– 25

Écologie, développement durable et énergie

13 487

– 54

– 59

– 113

Économie, redressement productif et numérique

1 865

– 11

– 59

– 70

Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

68 003

– 77

– 112

– 189

Finances et comptes publics

13 948

– 59

– 91

– 150

Intérieur

15 472

– 79

– 16

– 94

Justice

6 270

– 30

– 43

– 73

Logement et égalité des territoires

7 398

– 28

– 31

– 59

Outre-mer

2 009

0

– 6

– 6

Services du Premier ministre

2 193

– 17

– 25

– 42

Travail, emploi et dialogue social

10 783

– 52

– 76

– 127

Total budget général

hors remboursements et dégrèvements, MES, BEI et PIA

204 355

– 635

– 1 600

Source : rapport DOFP.

À ces 4 milliards d’euros, s’ajoute une révision à la baisse de la charge de la dette à hauteur de 1,8 milliard d’euros sur les crédits de la mission Engagements financiers de l’État.

b. La maîtrise de la dépense des autres sous–secteurs d’administration

Les dépenses des administrations publiques locales

Selon le programme de stabilité, les dépenses des administrations publiques locales devraient progresser de 1,2 % en valeur et diminuer de 0,1 % en volume, ce qui représente un effort important reposant principalement sur la baisse de 1,5 milliard d’euros de la dotation globale de fonctionnement versée par l’État aux collectivités territoriales. Cet effort est important puisqu’en 2013, la dépense des APUL avait encore augmenté de 2,7 % en volume et de 3,4 % en valeur.

LES DÉPENSES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES LOCALES

(évolution en pourcentage)

Évolutions en 2013

Prévisions pour 2014

Dépenses totales

+ 3,4

+ 1,6

Masse salariale

+ 3,2

+ 3,0

Consommations intermédiaires

+ 3,6

+ 1,6

Prestations sociales et transferts sociaux

+ 6,3

+ 2,1

Investissements

+ 5,2

– 2,5

Source : Programme de stabilité et DG Trésor.

Les dépenses des administrations de sécurité sociale

Les sous-exécutions constatées sur les dépenses des administrations de sécurité sociale devraient quant à elle être consolidées, notamment s’agissant des économies constatées sur l’ONDAM. Selon le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale de juin 2014, les dépenses entrant dans le champ de l’ONDAM en 2013 ont ainsi atteint 174 milliards d’euros en 2013, soit une sous-exécution de 1,4 milliard d’euros par rapport à l’objectif fixé par la loi de financement de la sécurité sociale.

Les mesures de correction apportées par la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014

L’effort de réduction de la dépense des administrations de sécurité sociale prévu par le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 s’élève à 1,1 milliard d’euros. Cette économie se traduit principalement par la consolidation de la sous-exécution de l’ONDAM à hauteur de 800 millions d’euros et du gel de certaines prestations sociales pour un montant de 300 millions d’euros.

En ce qui concerne cette dernière mesure, la Rapporteure générale souhaite insister sur le caractère exceptionnel que doivent revêtir les mesures de gel impactant uniformément des dépenses de prestations parfois destinées à des publics modestes ou économiquement utiles et dont les incidences sur le pouvoir d’achat et la demande ne doivent pas être sous-estimées. Elle salue la position du Gouvernement en PLFR 2014 et en PLFRSS 2014 qui a conduit à ne pas geler ces allocations logement.

c. Des mesures d’économies non législatives pour 1,3 milliard d’euros

Le projet de loi de finances rectificative pour 2014 présente également l’annulation de crédits résultant de la sous-exécution de certaines dépenses au titre de l’année en cours, atteignant :

– 300 millions d’euros au titre du fonds national d’action sociale (FNAS) de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) au titre de la pérennisation en 2014 des économies d’un même montant constatées en 2013 ;

– 600 millions d’euros au titre de l’UNEDIC pour le même motif ;

– 400 millions d’euros au titre des investissements d’avenir, le rythme effectif de décaissement des crédits s’avérant moins rapide que prévu, selon le Commissariat général à l’investissement.

Ces mesures ne correspondent donc pas à des économies discrétionnaires sur les budgets concernés, mais à l’annulation anticipée de crédits qui n’auraient en tout état de cause pas été consommés au cours de l’exercice 2014.

d. Les prévisions de la dépense publique en 2014

La Cour des comptes constate dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques de juin 2014 que le programme de stabilité prévoit une baisse de la dépense publique de 7 milliards d’euros par rapport à la prévision de la loi de finances pour 2014, découlant à hauteur de :

– 3,5 milliards d’euros de la baisse des dépenses publiques constatées en 2013 par rapport aux prévisions associées au projet de loi de finances pour 2014 (et donc de l’effet base de l’année 2013 sur la dépense constatée en 2014) ;

– 3,5 milliards d’euros d’économies nouvelles portant principalement sur l’État à raison de 1,6 milliard d’euros d’annulation de crédits et de 1,8 milliard d’euros de baisse de la charge de la dette publique.

Les autres économies réalisées notamment dans la sphère sociale seraient quant à elles en grande partie compensées par la hausse des dépenses locales.

D. … POUR CONTENIR LA HAUSSE DE LA PRÉVISION DE DÉFICIT

En définitive, le Gouvernement a relevé sa prévision de déficit public de 3,6 % à 3,8 % du PIB entre la LFI et le PLFR pour 2014, soit un montant de 84,3 milliards d’euros au lieu des 82,6 milliards d’euros prévus. Ce relèvement limité ne saurait cependant être qualifié de « dérapage », car il faut rappeler que le déficit public s'établissait en 2013 encore à 4,3 % du PIB.

Cette révision résulte d'une rectification à la baisse de la prévision de recettes fiscales de 5,3 milliards d'euros à la suite des moins-values fiscales constatées en 2013. Pour compenser le Gouvernement a décidé de proposer un ajustement en dépenses de 4 milliards d'euros. En sus de l’ajustement structurel, il est attendu en 2014, 1,8 milliard d'euros de moindre dépense liée aux conditions d’emprunt très favorables, qui allège la charge de la dette.

La Cour des comptes continue à pointer, dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques de juin 2014 « un risque sur la nouvelle prévision de solde budgétaire » du fait notamment des incertitudes estimées à « 2 à 3 milliards d’euros portant sur les recettes fiscales nettes », soit 0,1 à 0,15 % du PIB. La Rapporteure générale a présenté supra son analyse de ce risque.

En revanche, pour la Cour des comptes, l’abaissement de la norme de dépenses en valeur de 1,6 milliard d’euros en PLFR 2014 « reste[n]t gérables ».

En revanche, la Cour des comptes précise que « le solde 2014 du régime général pourrait bénéficier d’un niveau moindre que prévu, en particulier sur l’ONDAM et sur les prestations extra-légales des branches familles et vieillesse… pour un total de 1,3 milliard d’euros », soit 0,07 % du PIB.

La prise en compte de l’ensemble des aléas baissiers et haussiers et la réaction du Gouvernement qui a proposé un ajustement supplémentaire avec le collectif budgétaire permet de considérer que la prévision de déficit public de 3,8 % du PIB en 2014 est atteignable.

III. LES PERSPECTIVES POUR LES ANNÉES 2015-2017 : TOUT FAIRE POUR SOUTENIR LA CROISSANCE DANS L’ÉQUITÉ

A. LA POURSUITE DE L’EFFORT DE RÉDUCTION DU DÉFICIT

Les objectifs de soldes effectif et structurel sont décalés dans le temps par rapport à ceux de la loi de programmation des finances publiques en vigueur, comme de la LFI pour 2014. L’écart constaté de 1,5 % du PIB dès 2013 sur le déficit structurel par rapport à la loi de programmation entraînera la mise en œuvre du mécanisme de correction prévu par l’article 23 de la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

La Rapporteure générale a eu l’occasion de rappeler les difficultés que pose la méthode de calcul du solde structurel, notamment du fait que le chiffre émanant de la direction générale du Trésor sur lequel se fonde le Gouvernement est différent de celui retenu par Eurostat – l’output gap (écart de production) se monte à – 3,1 % en 2015 dans le programme de stabilité, – 3,4 % selon l’OCDE, -2,4 % selon la commission européenne et – 2 % selon le FMI. Il y a donc un point sur lequel tous s’accordent, le déficit conjoncturel qui se calcule en divisant l’output gap par 2 et en conséquence, on définit le déficit structurel mais quid de l’output gap ?

Elle milite fermement pour que la définition exacte du solde structurel fasse à l’avenir l’objet d’un consensus entre le Gouvernement, les parlementaires et la Commission européenne.

En tout état de cause, le Gouvernement a annoncé qu’un nouveau projet de loi de programmation des finances publiques sera présenté au Parlement en septembre prochain. Il devrait intégrer la nouvelle trajectoire de réduction du déficit public comme le montre le tableau ci-dessous :

LES FINANCES PUBLIQUES DANS LE PROGRAMME DE STABILITÉ

(en % du PIB)

 

2013

2014

2015

2016

2017

Solde public

– 4,3

– 3,8

– 3,0

– 2,2

– 1,3

Solde structurel

– 2,9

– 2,1

– 1,2

– 0,8

– 0,25

Effort structurel

1,5

0,8

0,8

0,4

0,4

Source : Cour des comptes.

Le FMI dans ses prévisions du 3 juillet 2014 concernant la France (6) estime le déficit public de notre pays à 4 % du PIB en 2014 puis 3,4 % en 2015, 2,7 % en 2016 et 2,1 % en 2017 pour un équilibre budgétaire attendu en 2019.

En tout état de cause, si le déficit public devait se situer autour de 3,2 % en 2015 ou même si les prévisions du FMI devaient s’avérer exactes, l’écart serait dû exclusivement à une croissance économique plus faible que prévue. D’ailleurs, la Commission européenne attache une importance particulière à la variation du solde structurel corrigée des effets des fluctuations de l’élasticité des recettes, ce qui revient en fait à privilégier un concept très proche de l’effort structurel particulièrement important dans le cas de la France.

La Rapporteure générale rappelle à ce titre que la politique économique est un tout et qu’il ne s’agit pas de « fétichiser » l’objectif des 3 % de déficit public effectif en 2015, mais de redonner à notre économie du tonus et aux agents de la confiance, tout en réduisant autant que possible le déficit structurel – ce qui confirme l’importance de la transparence nécessaire quant à son mode de calcul et aux hypothèses qui le sous–tendent.

B. UNE BAISSE DE L’ÉVOLUTION DE LA DÉPENSE PUBLIQUE DE 50 MILLIARDS D’EUROS ENTRE 2015 ET 2017, QUI NE DOIT PAS CASSER LA CROISSANCE ET CONSTITUE SANS DOUTE UN MAXIMUM À NE PAS DÉPASSER

Le respect de l’objectif de croissance de la dépense publique prévue par le programme de stabilité pour 2014-2017 nécessite de réaliser 50 milliards d’euros d’économie sur la période 2015-2017 sur une croissance tendancielle estimée à 112 milliards d’euros selon les estimations de la Cour des comptes, soit une augmentation de la dépense publique ramenée à 62 milliards d’euros sur la période.

LA CROISSANCE DE LA DÉPENSE EN VOLUME
PRÉVUE PAR LE PROGRAMME DE STABILITÉ

 

2013

2014

2015

2016

2017

Croissance des dépenses en volume

1,3

0,3

– 0,3

0,3

0,2

Source : Programme de stabilité.

DÉPENSE PUBLIQUE PRÉVUE PAR LE RAPPORT ÉCONOMIQUE, SOCIAL ET FINANCIER DE SEPTEMBRE 2013 ET LE PROGRAMME DE STABILITÉ D’AVRIL 2014,
APRÈS RÉDUCTION DE 50 MILLIARDS D’EUROS

(en milliards d’euros)

Administrations publiques

2014

2017

Variation 2014/2017

Dépenses

RESF

1 200

1 270

+ 70

PStabilité

1 193

1 255

+ 62

Source : Cour des comptes.

L’écart de 8 milliards d’euros observé par la Cour résulterait selon elle d’une révision implicite à la baisse de la croissance tendancielle de la dépense par le Gouvernement entre la publication de ces deux documents. À nouveau, la présentation par le Gouvernement des modalités de calcul de la tendance retenue devrait permettre d’éviter toute interrogation sur le sujet.

a. La répartition de l’effort de baisse de la dépense entre les différents sous-secteurs d’administrations publiques

Le plan d’économie devrait être réparti entre les différents sous-secteurs d’administration publique selon les modalités présentées dans le tableau suivant.

PLAN D’ÉCONOMIES DE 50 MILLIARDS D’EUROS SUR LA PÉRIODE 2015-2017

(en milliards d’euros)

Économies réalisées par l’État

Maîtrise des dépenses de fonctionnement, Stabilisation de la valeur du point d’indice de la fonction publique, Baisse des dépenses de fonctionnement et d’intervention des agences de l’État

 

Sous-total État

18

Économies réalisées par les collectivités territoriales

Suppression de la clause de compétence générale des départements et des régions, Réforme de la dotation globale de fonctionnement, Mutualisation entre communes et intercommunalités dans le cadre de la prochaine loi de décentralisation (7)

 

Sous-total Collectivités territoriales

11

Économies réalisées sur l’Assurance-maladie

Limitation de la progression de l’ONDAM à 2 % en moyenne sur 3 ans grâce à :

 

Réorientation vers les soins ambulatoires

1,5

Baisse du prix des médicaments

3,5

Rationalisation des soins

2,5

Baisse des dépenses hospitalières

2

Lutte contre la fraude

0,5

Sous-total assurance-maladie

10

Économies réalisées sur les dépenses de protection sociale

Impact des réformes en cours de modernisation de la politique familiale, de réforme du système des retraites…

2,9

Modernisation des relations entre les caisses de sécurité sociale (dématérialisation)

1,2

Non revalorisation des pensions du régime de retraite de base + autres prestations sociales

1,9 *

Non revalorisation des retraites complémentaires sous condition d’un accord des partenaires sociaux

2

Nouvelle convention d’assurance-chômage

2

Poursuite de la modernisation de la politique familiale

0,8

Sous-total protection social

10,8

TOTAL

49,8

* Ce chiffrage issu du rapport sur l’évolution de l’économie nationale et les orientations des finances publiques ne tient pas compte des modifications apportées en première lecture à la loi de finances et à la loi de financement de la sécurité sociale rectificatives pour 2014.

Source : Commission des finances sur la base des informations transmises par le Gouvernement.

b. Présentation des premières informations transmises par le Gouvernement sur la mise en œuvre du plan d’économies.

Ce plan se traduirait par la réalisation d’une économie sur la dépense publique de 21 milliards d’euros en 2015, de 16 milliards d’euros en 2016 et de 14 milliards d’euros en 2017.

Par ailleurs, le Gouvernement a annoncé le 4 juin dernier que sur les 21 milliards d’euros de moindres dépenses prévues en 2015, 8 milliards d’euros seraient réalisés par l’État, tandis que la baisse des dotations aux collectivités territoriales serait répartie à parts égales sur la période, soit à hauteur de 3,7 milliards d’euros par ans jusqu’en 2017. Les économies réalisées dans la sphère sociale devraient donc atteindre 9,3 milliards d’euros.

La réalisation de ces économies, venant compléter un effort sans précédent réalisé en 2012 et 2013 sur la progression de la dépense publique, constitue la condition incontournable pour permettre à la fois le financement des mesures de compétitivité et de pouvoir d’achat présentées dans le Pacte de responsabilité et de solidarité et le respect de notre engagement de réduire le déficit public à 3 % en 2015.

Si la Rapporteure générale soutient le Gouvernement dans le choix qui a été fait d’améliorer nos comptes publics par le biais de la baisse des dépenses et non par celui de la hausse des impôts qui peut entraver le dynamisme des acteurs économiques dans un contexte de reprise progressive de l’économie, elle souhaite à nouveau insister à l’occasion du débat sur l’orientation des finances publiques sur la nécessité de bien articuler les mesures d’économies et les mesures de relance au cours des trois prochaines années de manière à garantir que les effets récessifs accompagnant toute baisse de dépense publique, soient suffisamment compensés pour ne pas hypothéquer la reprise économique.

Par ailleurs, elle souhaite souligner qu’un certain nombre d’incertitudes sur la nature des économies qui seront réalisées dans le cadre du plan annoncé perdurent en l’absence de la transmission d’informations essentielles documentant la déclinaison des efforts à venir. Ainsi, le renvoi systématique des informations précises à des « tirés à part », non transmis à la date de publication du présent rapport, rend malaisé le travail de présentation et d’explication auprès de l’Assemblée nationale dont la Rapporteure générale à la charge. Cette situation est d’autant plus regrettable que les efforts engagés par le Gouvernement et sa majorité sont sans précédent et justifient que le débat soit aussi éclairé que possible.

Dans l’attente de ces informations complémentaires, la Rapporteure générale souhaite enfin insister sur le caractère réaliste et mesuré des choix qui sont proposés par le Gouvernement, la Cour des comptes reconnaissant elle-même que « l’effort de réduction de la dépense publique visé dans le programme de stabilité, pour nouveau et important qu’il soit dans notre pays, peut être réalisé ». Cet effort impliquera toutes les administrations publiques et nécessitera de prendre des arbitrages difficiles. Elle espère donc que cet effort s’accompagnera d’une évaluation continue des effets engendrés par les mesures d’économies et d’une communication régulière au Parlement d’éléments de bilan afin de s’assurer que ces mesures restent toujours compatibles avec l’objectif de reprise économique qui conditionne in fine l’assainissement de nos comptes publics à moyen et long terme.

C. EN PARALLÈLE, UN OBJECTIF DE RÉDUCTION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES POUR SOUTENIR LA COMPÉTITIVITÉ ET SURTOUT LE POUVOIR D’ACHAT, APRÈS UNE PHASE DE CROISSANCE MARQUÉE DES PRÉLÈVEMENTS EN PARTICULIER SUR LES MÉNAGES

Le tableau ci-après montre l’impact des mesures nouvelles relatives aux prélèvements obligatoires depuis le début de la crise économique de 2008.

L’IMPACT TOTAL DES MESURES NOUVELLES
SUR LE MONTANT DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

– 10

– 2

– 7

18

22

29

1

– 6

– 5

– 3

Source : Cour des comptes.

Ce tableau fait apparaître trois périodes distinctes :

– l’année 2008 a été marquée par l’entrée en vigueur de la loi dite TEPA (loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat), qui s’est traduite par des baisses de prélèvements obligatoires de 10 milliards d’euros sans pour autant qu’aucun effort particulier en dépense n’ait été engagé, ce qui a conduit au creusement du déficit public et à un gonflement de la dette publique. Durant les années 2009 et 2010, les prélèvements obligatoires ont continué à baisser et en parallèle a été lancé un plan de relance de l’économie ;

– à compter de 2011 et à la suite de la crise des dettes souveraines qui a suivi la crise financière de 2008, les États membres de la zone euro se sont lancés ensemble dans un processus d’ajustement budgétaire qui a conduit à une stagnation généralisée à compter de 2012. La France a alors choisi de réaliser son ajustement presque exclusivement en recettes.

Après les plans « Fillon I » et « Fillon II », la nouvelle majorité issue des élections du printemps 2012 a également poursuivi cette politique d’ajustement par l’augmentation des prélèvements obligatoires. Ce sont ainsi 69 milliards d’euros supplémentaires qui ont été prélevés sur les ménages et les entreprises entre 2011 et 2013 ;

– enfin, à la suite du vote du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) en décembre 2012 et de l’annonce du Pacte de responsabilité et de solidarité en janvier 2014, le Gouvernement a décidé de faire porter désormais les efforts d’ajustement sur les dépenses et de commencer à baisser les prélèvements obligatoires en priorité sur les entreprises afin de stimuler l’investissement, selon une traditionnelle politique d’offre.

In fine, le taux de prélèvements obligatoires devrait atteindre un pic en 2013 avec 46,2 % du PIB, avant de connaître une décrue, comme le montre le tableau suivant. Il n’est cependant pas exclu que le taux de PO se révèle un peu supérieur aux prévisions si la croissance s’avère plus faible que prévu :

TAUX DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

(en % du PIB)

 

Exécution

Prévision PSTAB

 

2013

2014

2015

2016

2017

Taux de PO

46,2

45,9

45,6

45,4

45,3

Source : Cour des comptes.

Le tableau suivant constitue une tentative de synthèse des principales mesures fiscales et sociales adoptées depuis les élections du printemps 2012, et plus précisément depuis juin 2012, ventilées entre ménages et entreprises – en considérant notamment que les taxes sur les ventes, notamment la TVA, incombent in fine aux ménages.

Au titre des réserves méthodologiques, il convient de souligner que n’ont été retenues pour cet exercice que les mesures dont l’impact financier est supérieur à 500 millions d’euros, ainsi que par exception, quelques mesures d’un montant inférieur mais politiquement importantes, par exemple le maintien du bénéfice de l’exonération de taxe d’habitation et de contribution à l’audiovisuel public adopté par amendement parlementaire en première lecture du PLRF pour 2014.

Par ailleurs, les chiffrages proposés ne constituent que des estimations, voire des ordres de grandeur par année, calculée par rapport à une année de référence correspondant à celle antérieure à l’année de prise de chaque mesure. Une confirmation ou actualisation de ces estimations a été demandée à la direction de la législation fiscale. La méthodologie et les sources de chaque montant sont précisées dans un tableau figurant en annexe au présent rapport. Les montants résultent à ce stade des évaluations préalables annexées aux projets de loi à l’origine de la mesure, ainsi que des données transmises par le Gouvernement, Un effort de mise à jour et de prise en considération des montants effectivement constatés permettra de suivre ce bilan d’année en année en le rapprochant de la réalité.

Il ressort néanmoins de ces tableaux une croissance marquée et régulière des prélèvements supplémentaires sur les ménages, tandis que les prélèvements supplémentaires sur les entreprises, après une première phase de croissance en 2012 et 2013, devraient s’annuler en 2014 avant de diminuer sensiblement les années suivantes sous l’effet du CICE et du pacte de responsabilité.

Naturellement, ces montants bruts doivent être analysés également en fonction de la répartition des efforts demandés au sein des ménages et au sein des entreprises, la politique suivie depuis 2012 ayant mis plus particulièrement à contribution les ménages les plus aisés et les entreprises les plus importantes, tout en ciblant des mesures favorables au retour à l’emploi des personnes qui en sont aujourd’hui dépourvues.

MODIFICATION DES PRÉLÈVEMENTS SUR LES MÉNAGES ADOPTÉS DEPUIS JUILLET 2012

Loi à l'origine
de la mesure

Date d'entrée en vigueur de la mesure

Nature de la mesure

Estimation de l'impact de la mesure en année pleine sur les ménages
(en Md €)
+ défavorable
– favorable

2012

2013

2014

2015

2016

PLFR pour 2012

01/01/2014 (régime transitoire)

Relèvement de 19,6 à 20 % du taux normal de TVA

2,6

0

0

1,9

2,6

2,6

 

01/01/2014 (régime transitoire)

Relèvement de 7 à 10 % du taux intermédiaire de TVA

4,5

0

0

3,3

4,5

4,5

 

01/08/2012 et 01/09/2012

Suppression défiscalisation heures supplémentaires

1,4 en IR

(en 2012, 0,58)

et 2,58 en cotisations salariales

1,13

3,98

3,98

3,98

3,98

 

ISF
sur l'année 2012, versé en 2013

Contribution exceptionnelle ISF

2,3

(mais rattrape la baisse liée à la réforme de l'ISF pour 2012)

2,3

       
 

16.08.2012 et 01.01.2013

Réforme des droits de mutation à titre gratuit

1,2 (en 2013)

0,14

1,2

1,425

1,425

1,425

PLFSS pour 2013 et pour 2014

01/01/2013

Augmentation de 160 % du droit spécifique perçu sur les bières et taxation des boissons énergisantes

0,6

 

0,5

0,6

0,6

0,6

PLFR pour 2013 et PLF pour 2014

01/01/2014

Passage à 5,5 % du taux de TVA sur construction et rénovation de logements sociaux, les tickets de cinéma et les importations d'œuvres d'art

– 0,3

   

– 0,3

– 0,3

– 0,4

PLFR pour 2013

01/01/2014

Passage à 5,5 % du taux de TVA sur travaux amélioration qualité énergétique des logements et ceux qui leur sont indissociablement liés

– 0,7

   

– 0,7

– 0,7

– 0,7

PLF pour 2013

01/01/2013

Poursuite gel du barème IR

1,75 (en 2013)

 

1,75

1,75

1,75

1,75

PLF pour 2013

01/01/2013

Revalorisation décote et seuils

– 0,34

 

– 0,345

– 0,51

– 0,51

– 0,51

PLF pour 2013

01/01/2013

Baisse du plafond du quotient familial

0,5

 

0,5

0,5

0,5

0,5

PLF pour 2013

01/01/2013

Barémisation des revenus du patrimoine hors PVM

1 (estimation à préciser)

 

0

0

0

0

PLF pour 2013

01/01/2013

Réforme de l'ISF

1

 

1

1

1

1

PJL retraites

01/01/2014

Augmentation cotisation retraite

1,1 (en 2014)

   

1,1

2,3

2,8

PLF pour 2014

01/04/2014

Verdissement des taxes intérieures de consommation sur les produits énergétiques (ex– TIPP + TICGN)

2,7 (en 2016)

   

0,2

1,6

2,7

 

01/01/2014

Indexation du barème de l'impôt sur le revenu (pour mémoire, mais simple indexation sur l'inflation)

– 0,7

         
 

01/01/2014

Hausse de la décote

– 0,19

   

– 0,19

– 0,19

– 0,19

 

01/01/2014

Mesure relèvement de + 4 % du seuil de RFR déclenchant diverses exonérations

– 0,45

   

– 0,27

– 0,45

– 0,45

 

01/01/2014

Baisse du plafond du quotient familial

1,02

   

1,02

1,02

1,02

 

01/01/2014

Fiscalisation de la contribution employeur aux complémentaires santé

0,96

   

0,96

0,96

0,96

 

01/01/2014

Fiscalisation de la majoration de pension pour 3 enfants

1,2

   

1,2

1,2

1,2

 

01/01/2014

Réforme de l'imposition des PVM

– 0,35

   

– 0,35

– 0,35

– 0,35

 

01/01/2014

Réforme de l'imposition des PVI

0,53

(en 2013, 0,35)

 

– 0,26

– 0,53

– 0,47

– 0,47

 

01/03/2014

Déplafonnement des DMTO

0,8 (sur 2 ans)

   

0,6

0,8

0,2

PLFSS pour 2014

01/01/2014

Modification des taux de prélèvements sociaux pour les produits de placement

0,4 (avant censure partielle du CC –  estimation difficile post censure, 200 à 300 millions ?)

   

0,2

0,2

0,2

PLFSSR pour 2014

01/01/2015

Exonérations de cotisations salariales pour les bas salaires

– 2,5

     

– 2,5

– 2,6

PLFR pour 2014

01/01/2014

Maintien du bénéfice de l'exonération de TH/CAP 2014 vs 2013

     

– 0,175

   

PLFR pour 2014

01/01/2014

réduction d'impôt sur le revenu

– 1,16

   

– 1,16

   
   

Total

27,01

3,57

8,325

15,55

18,965

19,765

MODIFICATION DES PRÉLÈVEMENTS SUR LES ENTREPRISES ADOPTÉS DEPUIS JUILLET 2012

Loi à l'origine de la mesure

Date d'entrée en vigueur de la mesure

Nature de la mesure

Estimation de l'impact de la mesure en année pleine sur les ménages
(en Md €)
+ défavorable
– favorable

2012

2013

2014

2015

2016

PLFR août 2012

01/10/12

Contribution additionnelle à l'IS sur les montants distribués (taxe de 3 % sur les dividendes)

1

0,25

1

1

1

1

 

01/08/12

Taxe additionnelle à la taxe de risque systémique

0,55 (one shot)

0,55

 

 

 

 

 

01/10/12

Contribution exceptionnelle sur la valeur des stocks de produits pétroliers

0,55 (one shot)

0,55

 

 

 

 

 

01/09/12

Suppression des exonérations de cotisations patronales sur les heures supplémentaires pour les entreprises de plus de 20 salariés

0,2

0,05

0,2

0,2

0,2

0,2

 

01/07/12

« Paquet » de 5 mesures « anti– abus » pour les entreprises à l'IS

1,0

(200M€ par mesure)

1

1

1

1

1

PLFR décembre 2012

01/01/13

CICE

 

 

 

– 10

– 16

– 18

PLF 2013

01/01/12

Réforme de la « niche Copé » (élargissement de l'assiette et augmentation du taux de la quote– part de frais et charges)

1

 

2

1

1

1

 

01/01/12

Réintégration d'une fraction des charges financières au bénéfice soumis à l'IS

3

 

4

2,7

4,1

3,4

 

01/01/12

Durcissement des conditions du report en avant des déficits

1

 

1

0,5

0,5

0,5

 

01/01/13

Taxation des sommes placées en réserve de capitalisation par les sociétés d'assurance

0,8 (one shot : prélèvement exceptionnel)

 

0,8

 

 

 

 

01/01/13

Modification du régime des acomptes d'IS pour les plus grandes entreprises

(« 5ème acompte »)

1,0 (trésorerie)

 

1

1

1

1

 

01/01/13

Prorogation pour 2013 et 2014 de la contribution exceptionnelle sur l'IS

0,9 (2013 et 2014)

 

0,9

0,9

 

 

PLFSS 2013

01/01/13

Élargissement de l'assiette et renforcement de la progressivité de la taxe sur les salaires

0,47

 

0,47

0,47

0,47

0,47

PLF 2014

01/01/13

Augmentation du taux de la contribution exceptionnelle sur l'IS (en lieu et place de la taxe « EBE »)

2,7 (en tout)

 

 

2,5

0,2

 

 

01/03,/2014

Déplafonnement des DMTO

0,2 (sur 2 ans)

 

 

 0,15

 0,2

0,05

 

01/01/2014

Verdissement des taxes intérieures de consommation sur les produits énergétiques (ex– TIPP + TICGN)

1,4 (en 2016)

 

 

0,1

0,8

1,4

PLFSSR 2014

01/01/2015

Abattement de C3S

 

 

 

 

– 1

– 2

 

01/01/2015

« Zéro charge » au SMIC + allégement des cotisations familiales jusqu'à 1,6 SMIC

 

 

 

 

– 4,5

– 4,5

 

01/01/2016

Allégement des cotisations familiales jusqu'à 3,5 SMIC

 

 

 

 

 

– 4,5

 

01/01/2015

Allégement de cotisations familiales pour les indépendants

 

 

 

 

– 1

– 1

PLFR 2014

01/01/2015

Prorogation pour 2015 de la contribution exceptionnelle sur l'IS

2,6 (en tout)

 

 

 

2,1

0,5

   

TOTAL

 

2,4

12,37

1,37

– 10,13

– 19,48

Source : Calculs commission des Finances, données cf. annexes

Les tableaux précédents, résumés dans le tableau de synthèse ci-après par année, montrent bien que notre pays s’est engagé dans une politique de rééquilibrage de la composante de son PIB au profit de l’exportation et de l’investissement. En effet, à horizon 2016, ce seront près de 20 milliards d’euros qui seront transférés annuellement des ménages vers les entreprises.

RÉCAPITULATIF DE L’IMPACT SUR LES ENTREPRISES ET LES MÉNAGES
DES MESURES FISCALES PRISES DEPUIS JUILLET 2012

(en milliards d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016

Impact entreprises

2,4

12,37

1,37

– 10,13

– 19,48

Impact ménages

3,57

8,32

15,5

18,96

19,76

Source : calculs commission des Finances.

Dans le même temps, en adoptant enfin un salaire minimum, l’Allemagne revient sur cette politique qui a certes donné de bons résultats macroéconomiques et préservé les équilibres budgétaires, mais qui a également participé à une certaine paupérisation d’une partie des ménages allemands.

Cette politique qui permettra une forme de rééquilibrage du couple franco-allemand vise à permettre de mettre fin aux trajectoires divergentes du couple fondateur de l’Union européenne à l’œuvre depuis le début des années 2000 et à redonner à la France toute sa place au cœur de la construction européenne. Il convient cependant d’insister sur la nécessité de préserver les populations en évitant au maximum tout nouveau prélèvement sur les classes moyennes ou a fortiori modestes sous peine de miner une confiance sans laquelle aucun redressement, ni économique, ni budgétaire, n’est possible à long terme.

ANNEXE N° 1

1.– SOURCE DES DONNÉES DES PRÉLÈVEMENTS SUR LES MÉNAGES

   

Nature de la mesure

Remarques

Relèvement de 19,6 à 20 % du taux normal de TVA

Pour 2014, évaluation des voies et moyens annexée au PLF pour 2014 ; pour les années 2015 et 2016, estimations initiales du rapport AN n° 544 sur le PLFR pour 2012, complétées par les estimations du rapport AN n° 1619 sur le PLF pour 2014

Relèvement de 7 à 10 % du taux intermédiaire de TVA

Pour 2014, évaluation des voies et moyens annexée au PLF pour 2014 ; pour les années 2015 et 2016, estimations initiales du rapport AN n° 544 sur le PLFR pour 2012, complétées par les estimations du rapport AN n° 1619 sur le PLF pour 2014

Suppression défiscalisation heures supplémentaires

Rapport PLFR2012 du Sénat pour l'IR et questionnaire budgétaire PLFSS pour les cotisations salariales / en considérant que le volume d'heures supplémentaires et leur taxation restent constants au cours des années

Contribution exceptionnelle ISF

Rapport AN sur le PLFR 2012 /évaluation préalable

Réforme des droits de mutation à titre gratuit

Rapport AN sur le PLFR 2012 /évaluation préalable

Augmentation de 160 % du droit spécifique perçu sur les bières et taxation des boissons énergisantes

Évaluation des voies et moyens annexée au PLF pour 2014 et, pour la taxation des boissons énergisantes, rapport AN n° 1564 sur le PLFSS pour 2014

Passage à 5,5 % du taux de TVA sur construction et rénovation de logements sociaux, les tickets de cinéma et les importations d'œuvres d'art

Rapport AN n° 1619 sur le PLF pour 2014

Passage à 5,5 % du taux de TVA sur travaux amélioration qualité énergétique des logements et ceux qui leur sont indissociablement liés

Rapport AN n° 1619 sur le PLF pour 2014, pour les travaux indissociablement liés aux travaux de rénovation énergétique, estimation transmise en décembre 2013 par le Secrétariat d'État chargé du budget

Poursuite gel du barème IR

Rapport AN sur le PLF2013 (tome 2), à partir de l'évaluation préalable de la dernière LFR2011/en faisant abstraction du fait que la mesure gel du barème a un effet croissant avec le temps du fait de l'augmentation de la masse salariale

Revalorisation décote et seuils

Rapport Sénat sur le PLF2013 (tome 2)

Baisse du plafond du quotient familial

Rapport AN sur le PLF2013 (tome 2) /évaluation préalable

Barémisation des revenus du patrimoine hors PVM

Absence de données utilisables

Réforme de l'ISF

Rapport Sénat sur le PLF 2013 (tome 2)

Augmentation cotisation retraite

Direction de la sécurité sociale

Verdissement des taxes intérieures de consommation sur les produits énergétiques (ex–TIPP + TICGN)

Rapport AN n° 1428 sur le PLF pour 2014

Indexation du barème de l'impôt sur le revenu

(pour mémoire, mais simple indexation sur l'inflation)

La mesure n'est pas incluse compte tenu du fait que l'indexation est la norme et le gel l'exception.

Hausse de la décote

Rapport de l'AN sur le PLF 2014/évaluation préalable

Mesure relèvement de + 4 % du seuil de RFR déclenchant diverses exonérations

Rapport du Sénat sur le PLF 2014 (tome 2)/chiffrage par le Gouvernement de l’amendement des commissaires SRC

Baisse du plafond du quotient familial

Rapport de l'AN sur le PLF 2014/évaluation préalable

Fiscalisation

de la contribution employeur aux complémentaires santé

Rapport de l'AN sur le PLF 2014/évaluation préalable

Fiscalisation de la majoration de pension pour 3 enfants

Rapport de l'AN sur le PLF 2014/évaluation préalable

Réforme de l'imposition des PVM

Rapport de l'AN sur le PLF 2014 (tome 2)

Réforme de l'imposition des PVI

Rapport du Sénat sur le PLF 2014 (tome 2)

Déplafonnement des DMTO

90 départements sur 101 ont relevé les DMTO au 1er juin 2014, mais pas Paris : on retient 70 % du surcroît de recettes max (1,4 Md€), et 80 % du produit des DMTO acquittée par les ménages

Modification des taux de prélèvements sociaux pour les produits de placement

pour les 400 millions (au lieu de 600 millions initialement) : propos du rapporteur M. Bapt ; pour les 200 millions, estimation très approximative à partir de la décision du CC

Exonérations de cotisations salariales pour les bas salaires

Rapport de l'AN PLFSSR 2014 (évaluation préalable)

Maintien du bénéfice de l'exonération de TH/CAP 2014 vs 2013

données ministère des Finances présentées au moment de l'examen de l'amendement au PLFR

Réduction d'impôt sur le revenu

mesure sur le seul IR 2014 (hors mesure bas de barème attendue en PLF 2015)

2. SOURCE DES DONNÉES DES PRÉLÈVEMENTS SUR LES ENTREPRISES

   

Nature de la mesure

Remarques

Contribution additionnelle

à l'IS sur les montants distribués (taxe de 3 % sur les dividendes)

évaluation préalable

Taxe additionnelle à la taxe de risque systémique

one shot – évaluation préalable

Contribution exceptionnelle sur la valeur des stocks de produits pétroliers

one shot. : Secrétariat d'État chargé du budget, juin 2014

Suppression des exonérations de cotisations patronales sur les heures supplémentaires pour les entreprises de plus de 20 salariés

 

« Paquet » de 5 mesures « anti-abus » pour les entreprises à l'IS

évaluation préalable

CICE

rapport de la Rapporteure générale sur le PLFR 2014

Réforme de la « niche Copé » (élargissement de l'assiette et augmentation du taux de la quote-part de frais et charges)

évaluation préalable

Réintégration d'une fraction des charges financières au bénéfice soumis à l'IS

évaluation préalable, ne tenant pas compte de l'exception PPP, ni de celle portant sur la production de certains produits, ni de l'évolution de la discussion parlementaire

Durcissement des conditions du report en avant des déficits

évaluation préalable

Taxation des sommes placées en réserve de capitalisation par les sociétés d'assurance

one shot – évaluation préalable

Modification du régime des acomptes d'IS pour les plus grandes entreprises

(« 5ème acompte »)

mesure de trésorerie

Prorogation pour 2013 et 2014 de la contribution exceptionnelle sur l'IS

cf infra

Élargissement de l'assiette et renforcement de la progressivité de la taxe sur les salaires

étude d'impact

Augmentation du taux de
la contribution exceptionnelle sur l'IS (en lieu et place de la taxe « EBE »)

cf infra

Déplafonnement des DMTO

20 % du produit des DMTO acquittés par les entreprises

Verdissement des taxes intérieures de consommation sur les produits énergétiques (ex–TIPP + TICGN)

Rapport AN n° 1428 sur le PLF pour 2014

Abattement de C3S

L'impact en 2016 est théorique, car dépendant d'une mesure non encore prévue mais seulement annoncée, à savoir un abattement supplémentaire en 2016. – étude d'impact

« Zéro charge » au SMIC + allégement des cotisations familiales jusqu'à 1,6 SMIC

étude d'impact

Allégement des cotisations familiales jusqu'à 3,5 SMIC

Impact théorique : mesure annoncée, mais ne figurant pas dans le texte

Allégement de cotisations familiales pour les indépendants

étude d'impact

Prorogation pour 2015 de la contribution exceptionnelle sur l'IS

évaluation préalable

   

ANNEXE N° 2
PRÉCISIONS SUR LE VOLET DÉPENSES DU BUDGET TRIENNAL 2015-2017

La Rapporteure générale ayant reçu tardivement un « tiré à part » présentant les informations attendues sur le volet dépenses du PLF 2015 et plus généralement du budget triennal 2015-2017, la présentation suivante ne peut qu’en reprendre les grandes lignes.

L’effort en dépenses sur le budget de l’État pour la période 2015-2017

Au sein de la dépense de l’État, un effort important sera demandé aux ministères qui verront leurs ressources baisser d’ici à 2017 de 2,3 milliards d’euros par rapport à celles prévues par la LFI 2014. Cet effort complétera les mesures de baisse de la dépense de l’État adoptées en LFI pour 2014 (- 1,5 milliard d’euros en 2014), qui constituaient un effort inédit, et en PLFR pour 2014 (– 4 milliards d’euros) pour assurer la tenue de l’objectif de déficit pour cette même année à 3,8 % du PIB.

EFFORT EN DÉPENSES SUR LA PÉRIODE 2015-2017

(CP, millions d’euros, format constant LFI 2014)

 

LFI
2014

PLF
2015

LPFP 2016

LPFP 2017

Dépenses du budget général (hors dette, pensions et mission RCT)

196 340

195 605

195 392

194 866

Taxes affectées plafonnées

5 573

4 491

4 445

4 791

Total des dépenses des ministères et affectations de recettes plafonnées

201 913

200 095

199 836

199 656

Soit en écart à 2014

 

– 1 818

– 2 077

– 2 257

Prélèvements sur recettes au profit de l'Union européenne

20 224

21 042

22 801

21 481

Total des dépenses de l'État hors dette, pensions, dotations aux collectivités et prélèvements exceptionnels

222 137

221 137

222 637

221 137

Soit en écart à 2014

 

– 1 000

500

– 1 000

Transferts aux collectivités locales (PSR et mission RCT **)

56 807

53 141

49 474

45 807

Soit en écart à 2014

 

– 3 667

– 7 333

– 11 000

Prélèvements sur fonds de roulement prévus en loi de finances pour 2014

– 481

     

Total des dépenses de l'État hors charge de la dette et pensions

278 464

274 278

272 111

266 945

Soit en écart à 2014

 

– 4 185

-6 352

– 11 519

         

Charge de la dette*

46 654

47 027

51 059

53 434

Contributions au CAS Pensions*

45 441

45 487

45 730

47 708

dont contributions État *

40 040

40 079

40 283

42 018

dont contributions opérateurs **

5 401

5 408

5 447

5 690

Total des dépenses de l'État, hors dotation au mécanisme européen de stabilité et deuxième programme d'investissements d'avenir

370 559

366 792

368 901

368 087

* Montants évaluatifs, susceptibles d’évoluer d’ici le dépôt du PLF

NB : Le PLFR pour 2014 prévoit une annulation de 1 800 millions d’euros au titre de la charge de la dette en 2014 (44,9 milliards d’euros).

** Hors réserve parlementaire, intégrée aux dépenses du budget général.

Source : « tiré à part » sur le volet dépenses du budget triennal pour la période 2015-2017.

La dépense de l’État, hors charge de la dette et pensions, mais y compris les prélèvements sur recettes, baissera sur la période de 11,5 milliards d’euros d’ici à 2017.

La Rapporteure générale observe que l’effort de réduction de la dépense de l’État est modéré par l’impact du prélèvement au profit de l’Union européenne. En effet, en 2016, ce prélèvement connaîtra un ressaut exceptionnel (+1,8 milliard d’euros) du fait de la régularisation rétroactive de certains rabais forfaitaires que la France n’a pas acquittés en 2014 et 2015, l’adoption définitive de la décision relative aux ressources propres qui l’y contraint ne devant intervenir a priori qu’en 2016.

Pour rappel, la contribution de la France au budget de l’Union européenne devrait être de 21 milliards d’euros en 2015, de 22,8 milliards d’euros en 2016 et de 21,5 milliards d’euros en 2017.

Une baisse de 18 milliards d’euros des dépenses de l’État par rapport à leur croissance tendancielle

Le Gouvernement rappelle dans ce document annexé à son rapport sur les orientations des finances publiques les quatre choix stratégiques qui ont guidé les décisions sur les économies à réaliser pour la période 2015-2017 :

– la priorité donnée à la jeunesse avec la création des 60 000 postes programmés dans l’éducation nationale ;

– la création de 3 200 postes dans la justice, la police et la gendarmerie pour un total de 5 000 créations de postes au service de la sécurité des français sur la législature ;

– le maintien des dépenses en faveur de la recherche et de l’innovation

– la protection des plus démunis par la préservation des minimas sociaux.

Sous réserve de la réalisation de ces objectifs, l’effort à réaliser pour garantir la maîtrise de la dépense sera ajusté pour que chaque ministère puisse contribuer à hauteur de ces capacités.

(CP, millions d’euros, format constant LFI 2014)

 

LFI 2014

PLF 2015

LPFP 2016

LPFP 2017

LFI 2014/
LPFP 2017

Affaires étrangères et développement international

4 566

4 516

4 610

4 347

– 219

Affaires sociales et santé

14 917

15 118

15 395

15 596

+ 679

Agriculture, agroalimentaire et forêt

4 314

4 071

3 995

3 992

– 322

Culture et communication

3 315

3 233

3 136

3 057

– 258

dont crédits budgétaires hors audiovisuel

3 023

3 026

3 027

3 028

+ 5

dont crédits budgétaires audiovisuel

292

208

110

29

– 263

Décentralisation, réforme de l'État et fonction publique

206

204

203

202

– 4

Défense

32 584

31 941

32 345

32 759

+ 175

dont mission Défense

29 602

29 109

29 627

30 154

+ 552

Droits des femmes, ville. jeunesse et sports

961

914

931

956

– 5

Écologie, développement durable et énergie

13 487

13 033

13 027

13 083

– 404

Économie, redressement productif et numérique

1 865

1 708

1 684

1 683

– 182

Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

68 003

69 157

69 393

69 756

+ 1 753

Finances et comptes publics *

14 045

13 712

13 373

12 929

– 1 116

Intérieur

14 976

15 020

14 819

15 053

+ 77

Justice

6 270

6 369

6 312

6 346

+ 76

Logement et égalité des territoires

7 398

7 510

7 606

7 448

+ 50

Outre-mer

2 009

2 014

2 062

2 104

+ 95

Services du Premier ministre

2 043

2 057

2 050

2 037

– 6

Travail, emploi et dialogue social

10 783

10 437

9 897

9 207

– 1 576

Crédits des ministères sur le budget général hors contributions directes de l’État au CAS Pensions

* y compris réserve parlementaire

Source : « tiré à part » sur le volet dépenses du budget triennal pour la période 2015-2017.

Les principales annonces prévues pour chacun des ministères sont synthétisées dans le tableau ci-dessous :

Ministères

Réformes prévues pour la période 2015-2017

Ministère de l’Éducation nationale

– création de 29 644 emplois pour parvenir à 54 000 postes de plus dans l’enseignement scolaire sur le quinquennat dont en 2015 :

• la création de 9 421 emplois supplémentaires ;

• le financement de 69 000 contrats aidés ;

• 10 000 emplois d’avenir professeurs ;

• 48 000 emplois d’assistants d’éducation nationale ;

– création de 2 150 postes d’assistants d’éducation ;

– 3 000 emplois supplémentaires dans l’enseignement supérieur et la recherche dont 1 000 dès 2015 ;

– baisse des dépenses de fonctionnement

Ministère de l’Intérieur

– 405 emplois dès 2015 dans la Gendarmerie et la Police nationale ;

– réforme de l’asile

– baisse des dépenses de fonctionnement

Ministère de la Justice

– 1 834 ETP supplémentaires sur la période, dont notamment des créations de postes de conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation ;

– réduction des frais de justice (40 millions d’économies dès 2015 avec le lancement de la plateforme nationale d’interception judiciaire)

Ministère de la culture et de la communication

– augmentation hors audiovisuel public des moyens du ministère ;

– en 2017, financement des sociétés audiovisuelles par la seule contribution à l’audiovisuel public ;

– baisse des dépenses de fonctionnement

Ministère des affaires sociales et de la santé

– moyens en augmentation du fait de la hausse des prestations de solidarité (notamment du fait de la mise en œuvre du plan de lutte contre la pauvreté) ;

– des efforts sur le schéma d’emplois du ministère et des agences régionales de santé.

Ministère du Travail

– budget en diminution progressive du fait de l’effet attendu du Pacte de responsabilité et de solidarité (amélioration de la situation économique et création d’emplois).

Ministère des affaires étrangères

– rationalisation des ressources des opérateurs, baisse attendue des contributions internationales et baisse de 405 ETP d’ici à 2017 sur le réseau du ministère à l’étranger.

Ministère de l’agriculture

– baisse des dépenses de fonctionnement ;

– réforme du réseau des chambres d’agriculture

Ministère de la Défense

– application de la loi de programmation militaire ;

– 250 millions d’euros de crédits affectés aux investissements d’avenir mobilisés pour la Défense en PLF 2015 ;

– 500 millions de recettes exceptionnelles en 2014.

Ministère des finances

– Réduction de 7 % des moyens du ministère par rapport à 2014

– Dématérialisation, réduction des effectifs et baisse des dépenses de fonctionnement

Ministère de l’économie

– diminution par rapport à 2014 ;

– Priorité donnée à l’innovation et à l’enseignement supérieur

Ministère du logement

– augmentation des moyens compte tenu des mesures relatives au logement contenues dans le plan de lutte contre la pauvreté et de l’évolution spontanée des aides au logement.

Ministère de l’écologie

– mise en œuvre de la politique énergétique et du projet de loi relatif à la biodiversité ;

– péage de transit poids lourds introduit en PLFR 2014 qui permettra d’assurer les recettes de l’agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF)

Ministère de l’outre-mer

– augmentation du fait de la montée en charge des exonérations de charge adoptées en PLFRSS pour 2014 et de la majoration du CICE ;

– révision des aides directes aux entreprises

Schémas d'emploi ministériels en ETP

2015

Affaires étrangères et développement international

-220

Affaires sociales et santé

-150

Agriculture, agroalimentaire et forêt

-25

dont enseignement scolaire

140

Culture et communication

15

Défense

-7 500

Droits des femmes, ville, jeunesse et sports

-6

Écologie et logement

-834

dont écologie, développement durable et énergie

-515

dont logement et égalité des territoires

-319

Économie, redressement productif et numérique

-55

Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

9 421

Finances et comptes publics

-2 491

Intérieur

116

dont police et gendarmerie

405

Justice

600

Outre-mer

2

Services du Premier ministre

100

Travail, emploi et dialogue social

-150

Total

-1 177

L’effort en dépenses des opérateurs de l’État pour la période 2015-2017

La Rapporteure générale observe que peu d’information est apportée sur l’effort qui pèsera sur les opérateurs. Le Gouvernement indique seulement que la baisse des taxes affectées et des prélèvements sur fonds de roulement représente un effort total de 1,1 milliard d’euros entre 2014 et 2015.

Une baisse de 11 milliards d’euros des dépenses des collectivités territoriales par rapport à leur croissance tendancielle

Le Gouvernement confirme que la baisse des dépenses des administrations publiques locales de 3,7 milliards d’euros par an pour un total de 11 milliards d’euros d’ici à 2017 revient à faire ralentir le rythme de progression de la dépense locale au rythme de l’inflation.

Au-delà de ces éléments sur l’évolution de la dépense, la Rapporteure générale se félicite de l’engagement du Gouvernement de détailler la construction du tendanciel des dépenses dans les documents annexés au prochain projet de loi de finances pour 2015. Elle souhaite que cette présentation soit réalisée pour chacune des composantes de la dépense publique (centrale, locale et sociale) afin d’éclairer les débats qui porteront sur les trois sous-secteurs de l’administration publique.

AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD,
PREMIER PRÉSIDENT DE LA COUR DES COMPTES

Au cours de sa séance du mardi 17 juin 2014, la Commission procède à l’audition de M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, sur le rapport relatif à la situation et aux perspectives des finances publiques.

M. le président Gilles Carrez. La Cour des comptes a établi son rapport relatif à la situation et aux perspectives des finances publiques, comme chaque année, en application du 3° de l’article 58 de la loi organique relative aux lois de finances et en vue de notre prochain débat en séance publique sur les orientations des finances publiques, qui devrait se tenir durant la deuxième semaine de juillet.

Comme tous les rapports de la Cour, celui-ci est attendu avec impatience pour la pertinence de ses analyses. Ainsi, l’année dernière, vous aviez notamment attiré notre attention sur les risques de révision à la baisse des recettes tenant à l’évolution défavorable de l’élasticité par rapport au PIB.

M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes. Le rapport que je présente analyse de façon prospective et rétrospective la situation des finances publiques. Cinq messages s’en dégagent :

– tout d’abord, un effort d’ampleur a été engagé mais cet effort n’a conduit en 2013 qu’à une réduction limitée des déficits, très en deçà des objectifs fixés ;

– la situation actuelle des finances publiques demeure préoccupante, les déficits sont toujours importants, la dette continue d’augmenter, les comptes publics restent plus dégradés que ceux de la moyenne européenne ;

– la prévision de déficit pour 2014, déjà révisée à la hausse en mai, risque d’être dépassée ;

– pour respecter la nouvelle trajectoire des finances publiques tout en baissant les prélèvements obligatoires, un niveau élevé d’économies sur les dépenses devra être réalisé, tout particulièrement dès 2015 ;

– un tel effort ambitieux n’a rien d’inaccessible. D’autres pays comparables l’ont fait et des marges de manœuvre existent pour réduire le poids des dépenses publiques.

La Cour, dans son premier message, tient à souligner qu’un effort d’ampleur a été engagé mais n’a conduit en 2013 qu’à une réduction encore limitée des déficits, très en deçà des objectifs fixés. Les mesures prises depuis 2011 pour redresser les finances publiques ont produit des premiers résultats tangibles : de 7,5 % du PIB en 2009, le déficit s’est en effet réduit pour atteindre 4,3 % en 2013. Le déficit structurel, calculé indépendamment de la conjoncture, s’est lui aussi réduit, passant de 4,2 % à 3,1 % du PIB. Ces résultats sont réels mais décevants au regard de l’ampleur des mesures prises, qui ont représenté 1,5 % du PIB d’effort structurel. Certes, la croissance des dépenses publiques a été ralentie et les normes d’évolution des dépenses concernant le budget de l’État et l’assurance maladie, fixées à des niveaux plus exigeants qu’auparavant, ont été respectées. Le faible niveau de l’inflation et la baisse de la charge d’intérêts de la dette ont facilité une évolution modérée des dépenses.

La quasi-totalité de la réduction du déficit a résulté d’un effort en recettes, à hauteur de 1,4 % du PIB. Toutefois, les moins-values constatées sur l’impôt sur le revenu et sur l’impôt sur les sociétés soulèvent une nouvelle fois la question de la qualité, voire de la sincérité des prévisions de recettes fiscales.

À la différence de beaucoup d’autres pays, l’effort réalisé depuis 2011 a très majoritairement reposé sur une augmentation continue et forte des prélèvements obligatoires : 18 milliards d’euros en 2011, 22 milliards en 2012 et 29 milliards en 2013. L’affaiblissement sensible et mal expliqué, en 2013, du volume des impôts collectés illustre les limites de cette politique.

Le secteur public local n’a pas apporté la contribution attendue au redressement des comptes publics. Le déficit global des collectivités territoriales est passé de 3,7 milliards d’euros en 2012 à 9,2 milliards d’euros en 2013. La progression des dépenses de fonctionnement, soit + 2,8 %, reste soutenue.

Le déficit de la sécurité sociale ne se réduit quasiment plus depuis 2011 en raison du faible dynamisme des recettes. Alors que les comptes des branches vieillesse et accidents du travail du régime général se redressent, le déficit des branches maladie et famille s’est creusé. Ainsi la réduction du déficit en 2013 a-t-elle été sensiblement plus lente que prévu.

La Cour, dans son deuxième message, rappelle que la situation actuelle des finances publiques demeure préoccupante. La dette a progressé en 2013 de 84 milliards d’euros, soit 1 300 euros supplémentaires par habitant. Le fait que le niveau de la dette publique ne soit toujours pas stabilisé rend la situation préoccupante : elle atteignait 1 925 milliards d’euros fin 2013, soit 94,1 % du PIB. Près d’un mois de dépenses publiques est financé par l’emprunt. La faiblesse des taux d’intérêt contribue à rendre insensible à ce poison lent qu’est la dette puisque, alors même qu’elle progresse, son coût immédiat se réduit. La charge des intérêts est passée de 52,2 milliards à 46,7 milliards d’euros. Mais le retour de la croissance s’accompagnera tôt ou tard d’une remontée des taux d’intérêt.

Rompre la spirale de l’endettement est indispensable pour redonner au pays les marges de manœuvre nécessaires, stimuler la croissance et améliorer sa compétitivité. S’ajoute le constat que la dette, dans sa quasi-totalité, a servi à financer des dépenses courantes. Cela pose un problème d’équité entre les générations car ces dépenses n’auront pas servi à préparer l’avenir.

Ces raisons sont à elles seules suffisantes. S’y ajoutent d’autres arguments, notamment la nécessité de respecter les engagements pris par la France vis-à-vis de ses partenaires européens, le recul de sa situation par rapport à ses voisins européens et la nécessité de mieux asseoir la crédibilité de sa signature.

En effet, la France ne se situe plus sur la trajectoire qu’elle s’est fixée elle-même par la loi de programmation des finances publiques, adoptée il y a seulement un an et demi, fin 2012. Cette trajectoire constitue toujours la référence au regard du droit national et des obligations résultant du traité européen sur la stabilité, la coordination et la gouvernance. Elle prévoyait un déficit public réduit à 3 % en 2013. L’écart est donc de 1,3 point en termes de déficit effectif et de 1,5 point en termes de déficit structurel, c’est-à-dire mesuré hors effets de la conjoncture économique. Une telle situation a conduit le Haut Conseil des finances publiques à constater un écart important rendant nécessaire un mécanisme de correction, ainsi que le prévoit la loi organique du 17 décembre 2012 relative à programmation et à la gouvernance des finances publiques.

La situation des finances publiques, bien qu’en voie d’amélioration, demeure plus dégradée que dans les autres pays européens. Le déficit public, de 4,3 % du PIB en 2013, est supérieur à la moyenne de l’Union européenne – 3,3 % –, et à celle de la zone euro – 3 %. Avec un niveau de croissance légèrement supérieur à la moyenne de la zone euro, la France a réduit son déficit dans des proportions semblables à ses partenaires. La dette publique y a augmenté un peu plus vite que la moyenne. Pour la première fois, le niveau de dette français se situe au-dessus des deux moyennes de l’Union européenne et de la zone euro. Bien que ralenti, le rythme de croissance des dépenses publiques en France a été encore sensiblement plus rapide que chez ses voisins en 2013.

La lenteur du rééquilibrage ne doit pas faire douter de son bien-fondé ni de sa nécessité. On n’efface pas les conséquences de quarante années de gestion déséquilibrée des finances publiques en quatre années et au lendemain de la crise économique la plus grave qu’ait connue notre pays depuis l’entre-deux-guerres. Un effort de cette nature doit donc être poursuivi dans la durée.

Le troisième message concerne les risques entourant la réalisation des objectifs pour l’année en cours. Fixé à 3,6 %, l’objectif de déficit public a été révisé à la hausse à 3,8 % à l’occasion du programme de stabilité de mai.

La Cour a identifié des risques importants de moindres recettes. Des moins-values possibles peuvent être associées à une surestimation de l’élasticité des recettes publiques, c’est-à-dire de la manière dont elles réagissent à l’évolution du PIB. Déjà, l’importante surestimation de cette hypothèse en 2013, qui constitue un défaut récurrent dans la construction des budgets, a entraîné 8 milliards d’euros de moindres recettes pour l’ensemble des administrations publiques. Pour 2014, la Cour estime à 2 à 3 milliards d’euros au total les risques liés à ces hypothèses d’élasticité. Il existe aussi un risque tenant à une fragilisation de la prévision de croissance de 1 % sur laquelle reposent les prévisions de recettes. Le Haut Conseil des finances publiques, dans son avis du 5 juin dernier, a estimé que cette prévision apparaissait désormais élevée.

S’agissant des dépenses en 2014, la Cour a examiné en détail la situation budgétaire de l’État à mi-année. Elle a constaté que les risques de dépassement des crédits étaient un peu plus importants que les années précédentes. Ils concernent par exemple les ministères de la Défense et de l’Agriculture. Mais la Cour estime que les objectifs de dépenses pourraient être atteints, notamment grâce à l’annulation de crédits mis en réserve. Les objectifs de dépenses des régimes de sécurité sociale devraient également être tenus. Les prévisions concernant l’assurance chômage risquent en revanche d’être dépassées. Surtout, les dépenses des collectivités territoriales, même révisées à la hausse, paraissent encore sous-estimées.

Au total, le déficit des administrations publiques pourrait dépasser l’objectif de 3,8 % et être proche de 4 %, voire légèrement supérieur si la prévision de croissance du Gouvernement ne se réalisait pas. Dans ce cas, le respect de la trajectoire des finances publiques pour les années 2015 à 2017 s’en trouverait immédiatement fragilisé.

Le quatrième message concerne les perspectives des finances publiques pour les années à venir. Une nouvelle trajectoire, qui devrait être formalisée par le vote d’une nouvelle loi de programmation des finances publiques, a été fixée. Elle intègre les baisses de prélèvements obligatoires annoncées en faveur de la compétitivité des entreprises et du pouvoir d’achat des ménages. La Cour a estimé à 14 milliards d’euros le coût net de ces mesures. En effet, la montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi ainsi que les mesures du pacte de responsabilité et de solidarité représentent un allégement de 35 milliards d’euros. Mais le programme de stabilité prévoit parallèlement une augmentation d’autres prélèvements, pour 21 milliards d’euros. Ainsi, les prélèvements obligatoires devraient baisser de 14 milliards d’euros d’ici 2017, l’essentiel de cette baisse intervenant en 2015 et en 2016.

Pour tenir les objectifs de réduction des déficits, tout en finançant ces baisses d’impôts, l’évolution des dépenses publiques devra être davantage ralentie, de l’ordre de 0,1 % en plus de l’inflation, alors que ce taux était chaque année en moyenne de 2,3 % entre 2000 et 2008 et de 1,4 % entre 2009 et 2012.

Il est d’usage d’évoquer des niveaux d’« économies » à réaliser, que le Gouvernement chiffre à 50 milliards d’euros sur trois ans. Ce chiffrage repose sur une comparaison avec une tendance d’accroissement des dépenses publiques à politique constante. La fixation de cette tendance relève de conventions diverses et fragiles, notamment la prolongation de tendances historiques sur une période de référence. Si le Gouvernement a pu maintenir le chiffre de 50 milliards d’euros d’économies avant et après prise en compte des nouvelles baisses de prélèvements obligatoires décidées, cela signifie qu’il a révisé à la baisse, implicitement, son hypothèse de croissance spontanée des dépenses, qui passe de 1,6 % à 1,5 % en plus de l’inflation. Sans cette révision conventionnelle, le montant d’économies aurait représenté 58 milliards d’euros. Si de telles révisions ne sont pas illégitimes dans leur principe, pour tenir compte du ralentissement de la tendance que l’on peut constater depuis le début des années 2000, les conventions et méthodes utilisées devraient être explicitées et rendues publiques.

La Cour a examiné le contenu du programme de 50 milliards d’euros d’économies annoncées. Elle relève qu’une partie de celles-ci, représentant une vingtaine de milliards d’euros, correspond à des orientations déjà décidées, par exemple la poursuite du gel des traitements de base des fonctionnaires, ou constitue la prolongation d’efforts déjà réalisés, s’agissant par exemple des dépenses de santé. La réalisation des 30 milliards d’euros restants est encore incertaine car peu documentée.

Les économies identifiées dans le cadre de la Modernisation de l’action publique, de l’ordre de 5 à 7 milliards d’euros, ne sont pas à la hauteur de l’enjeu. Surtout, près de 15 milliards d’euros d’économies prévues reposent sur des administrations dont l’État ne maîtrise pas les dépenses : les régimes complémentaires de retraite pour 2 milliards d’euros, l’assurance chômage pour 1,5 milliard d’euros et les collectivités territoriales pour 11 milliards d’euros. Le Gouvernement anticipe un ralentissement marqué des dépenses de ces dernières sous l’effet du gel des dotations de l’État et d’un moindre effort d’investissement. Plus précisément, il anticipe qu’un euro de dotations en moins entraînera aussitôt un euro de moindres dépenses. Or, rien n’empêche certaines collectivités territoriales de relever la fiscalité locale ou de recourir à l’endettement pour accroître le niveau de leurs dépenses. L’expérience de 2013 ne peut, à cet égard, qu’attirer l’attention. Alors que les communes subissaient le gel des dotations de l’État, leurs dépenses de fonctionnement se sont accrues et leur déficit a progressé. En particulier, les dépenses de personnel ont progressé de 2,6 % dans les communes et de 7,2 % dans les intercommunalités.

Le choix d’un partage équilibré des efforts entre toutes les administrations publiques répond à une préconisation de la Cour. Mais pour assurer la réalisation de la trajectoire, un tel choix devrait se traduire simultanément par un renforcement des outils de programmation et de suivi des finances publiques. Les normes de dépenses concernant l’État et ses opérateurs pourraient être élargies. Les lois de finances et de financement votées par le Parlement ne concernent actuellement que l’État et la sécurité sociale. Leur champ pourrait être étendu à l’ensemble des régimes de protection sociale obligatoire, incluant les régimes d’assurance chômage et de retraite complémentaire. Des lois de finances locales pourraient aussi être instaurées. Elles fixeraient des objectifs d’évolution des dépenses et des recettes et prévoiraient les mesures permettant de les atteindre. L’effort demandé aux collectivités, dans le respect de leur libre administration, encadrée par les lois, serait précisé, avec des mécanismes de suivi en cours d’exécution. De son côté, l’État devrait clarifier ses engagements s’agissant de celles de ses décisions qui peuvent avoir un impact important sur les finances locales, notamment celles relevant de la politique salariale des fonctionnaires ou de l’édiction de normes diverses.

Les scénarios macro-économiques retenus restent fragiles, s’agissant particulièrement de l’évolution de la masse salariale et de la reprise de l’emploi. Le Haut Conseil des finances publiques considère à cet égard que l’hypothèse de croissance retenue pour 2015 – 1,7 % – n’est pas impossible à atteindre, mais qu’elle repose de manière optimiste sur la conjonction d’hypothèses favorables.

L’objectif de maîtrise des dépenses publiques apparaît ambitieux mais réalisable ; d’autres pays l’ont fait : les Pays-Bas ont réduit entre 1995 et 1999 de 10,3 % le niveau de leurs dépenses publiques et l’Allemagne est parvenue à un retour à l’équilibre structurel de ses comptes en agissant principalement sur ses dépenses. La part des dépenses publiques dans le PIB s’est réduite de 2,9 points de PIB entre 2001 et 2013 alors qu’elle a augmenté de 5,4 points en France, cette différence tenant à l’évolution des prestations sociales et des dépenses de fonctionnement. Un niveau de dépenses publiques élevé peut certes être considéré comme justifié et si ces dépenses sont financées dans la durée et que leur efficacité est garantie. Or, des marges de progrès importantes existent pour améliorer la performance des politiques publiques et des organismes publics, sans que soient remis en cause la qualité du service rendu et le modèle social français. Les résultats atteints par nombre de politiques publiques ne sont pas à la hauteur des moyens investis. Faire mieux est possible en dépensant moins, d’autant que des marges de manœuvre manquent à notre pays pour redresser sa compétitivité.

La Cour des comptes a retenu pour cette année trois champs de dépenses concernées par les économies à venir. Il s’agit d’objectifs réalisables qui supposent des arbitrages clairs et des décisions explicites. La maîtrise de la masse salariale publique est, en premier lieu, incontournable, puisqu’elle représente 23,2 % des dépenses publiques. Le programme de stabilité a prévu à cet égard que cette évolution définie par les pouvoirs publics devait désormais s’opérer à un rythme inférieur à l’inflation. Pour l’État, il importe de préserver des marges de manœuvre salariales et de retenir comme « leviers » une baisse des effectifs des administrations publiques porteuse d’économies durables ainsi qu’une hausse du temps de travail ; il serait particulièrement utile d’établir sur ce point un état des lieux de la durée effective de travail dans les trois fonctions publiques.

L’État a déjà consenti beaucoup plus d’efforts que les autres administrations publiques pour maîtriser sa masse salariale alors que les effectifs se sont accrus de 1,3 % par an en moyenne dans les collectivités territoriales. Les administrations autres que celles de l’État – collectivités territoriales, hôpitaux – doivent, dans l’avenir, mieux contribuer à la maîtrise de la masse salariale publique, en réduisant fortement leurs recrutements et en se réorganisant.

Le rapport de la Cour des comptes aborde également la situation des collectivités territoriales. Il indique qu’une grande partie des économies attendues porte sur les dépenses de fonctionnement des communes sur les dépenses d’intervention des régions et sur une plus grande sélectivité des investissements locaux.

L’assurance maladie est la principale source du déficit de la sécurité sociale. La Cour insiste sur la nécessité d’une mobilisation résolue des gisements importants d’économies existants, sans réduire la qualité de notre système de santé. Les dépenses de santé pourraient ainsi être rendues plus efficaces grâce à un certain nombre de mesures : le développement de la chirurgie ambulatoire, domaine pour lequel notre pays est très en retard par rapport à nos voisins, permettrait de réaliser des économies à hauteur de 5 milliards d’euros ; il faut également mentionner une politique suivie du médicament, fondée sur une baisse des prix et le développement des génériques, et des mesures spécifiques en matière de transport des patients, d’analyses médicales et d’indemnités journalières.

En conclusion, la Cour ouvre des pistes année après année, rapport après rapport. Elle rappelle régulièrement que notre situation en matière de finances publiques présente un caractère préoccupant mais aussi que des remèdes existent.

M. le président Gilles Carrez. Votre présentation paraît tout à fait lucide, mais elle est également très inquiétante. Vous indiquez explicitement que nous ne disposons plus de beaucoup de marges de manœuvre en matière de recettes, compte tenu de l’affaiblissement de leur rendement – phénomène sur lequel nous devons continuer à travailler. De ce fait, le volet « dépenses » devient crucial. Or, selon vous, de vrais risques de dépassement pèsent cette année sur les dépenses, contrairement à l’année dernière. Vous observez que les économies de constatation que nous avons pu réaliser sur les frais financiers nous ont beaucoup servi, depuis plusieurs années – en 2013, par exemple, elles nous ont permis de respecter la norme de dépenses. De même, le projet de loi de finances rectificative constate une économie de 1,8 milliard d’euros à ce titre, mais cette situation ne devrait pas durer et nous ne pourrons donc plus compter sur cette possibilité.

S’agissant des autres types de dépenses, je rappelle que les économies s’expliquent par les gels et surgels. Celles que comprend le projet de loi de finances rectificative, s’élevant à 1,6 milliard d’euros, portent sur des crédits gelés mais aussi sur des crédits « pilotables », avant tout des crédits d’investissement. La masse salariale, soit plus de 80 milliards d’euros pour le budget de l’État, ne figure pas dans cet ensemble : est-il concevable de la maîtriser celle-ci à effectifs constants ? En revanche, relèvent des crédits « pilotables » les dépenses d’intervention sociale, qui s’analysent le plus souvent comme le résultat de la multiplication d’un montant unitaire par un nombre de personnes éligibles. Or, le nombre des personnes éligibles n’est pas maîtrisé et les montants unitaires ont tendance à être réévalués, ce qui crée une dynamique de dépense très puissante sur des crédits qui représentent près de 40 milliards d’euros dans le budget de l’État. Quelle méthode permettrait de mieux les maîtriser ?

Je voudrais évoquer ensuite une autre question de méthode. Il nous avait été annoncé en janvier un programme d’économies de 50 milliards d’euros pour 2015, 2016 et 2017. Le plan présenté par le Premier ministre comportait ensuite 30 milliards d’euros de baisses d’impôts et programmait dans le même temps des hausses d’impôts. Le rapport de la Cour des comptes fait état d’un solde net de 14 milliards d’euros de diminution de recettes. Or, les 50 milliards d’euros sont restés 50 milliards d’euros. D’où la question de la Cour : cela ne traduit-il pas une révision implicite, presque clandestine, du taux d’évolution spontanée ? Pouvons-nous continuer à raisonner à partir d’évolutions spontanées à la discrétion du Gouvernement ? La question est cruciale, car la discussion des précédents projets de loi de finances a montré que l’évaluation de ces évolutions divergeait entre le ministère des Finances, le rapporteur général et la Cour des comptes. Cette présentation par rapport à une évolution tendancielle exerce en outre un effet anxiogène sur l’opinion publique : on déclare que les économies portent sur 50 milliards d’euros et on communique sur ce montant, alors que les dépenses publiques continuent en réalité d’augmenter. Notre problème avec les dépenses publiques est donc d’ordre pédagogique. Quelles seraient les propositions de la Cour pour mieux faire comprendre qu’il faut dépenser mieux en dépensant moins ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Le rapport de la Cour des comptes montre que l’évolution comparée avec l’Allemagne révèle un certain nombre de dérapages de nos dépenses publiques depuis 2001. Il constate que l’augmentation en volume des dépenses de l’État est la plus faible depuis 1998 et qu’elles sont même sous-exécutées, mais que la dette n’étant pas stabilisée, les efforts menés n’auraient que peu d’effets. Dès lors, a-t-on calculé le niveau de croissance nécessaire à une stabilisation de la dette, qui tiendrait compte des efforts d’ores et déjà entrepris ? La Cour demande par ailleurs un meilleur encadrement des dépenses fiscales. Quelles méthodes pratiques souhaiteriez-vous voir mises en œuvre pour assurer cet encadrement ? La mise en place, en septembre prochain, du nouveau système de comptabilité nationale – SEC 2010 – se traduira par une augmentation de près de 30 milliards des dépenses publiques. Ce montant correspond-il uniquement à une requalification des crédits d’impôts en dépenses budgétaires, imposée par les normes statistiques communautaires ?

M. Dominique Lefebvre. Votre excellent rapport éclaire le débat public à un moment opportun, puisque nous allons commencer demain, en commission des Finances, l’examen du projet de loi de finances rectificative et que nous poursuivrons avec le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale.

De telles auditions sont autant d’occasions utiles d’aborder les sujets qui fâchent, mais je voudrais aussi revenir sur les aspects positifs que le rapport met en évidence. Vous avez souligné que jamais un tel effort de maîtrise des dépenses publiques n’avait été accompli avant 2013. L’effort sera poursuivi en 2014 et j’insiste sur le fait que ce n’est pas parce que les objectifs initiaux n’ont pas été tenus que la réalité de l’importance de cet effort doit être minorée.

Je vous remercie également d’avoir inclus dans votre présentation un tableau comparant la France et l’Allemagne entre 2001 et 2013. Nos collègues de l’opposition ont ainsi pu constater que 2013, sous un gouvernement de gauche, est l’année au cours de laquelle les dépenses publiques ont le moins progressé en France. Cela devrait inciter certains de nos collègues à davantage de modération dans les leçons qu’ils donnent en matière de finances publiques.

Au sujet de l’exercice 2014, vous indiquez que les informations obtenues de la direction générale du Trésor et de la direction du Budget ont été un peu plus précises qu’en 2013 mais qu’elles restent insuffisantes pour apprécier les risques avec précision. Afin d’éviter les ambiguïtés et les procès d’intention, pourriez-vous développer et nous expliquer à quoi vous faites référence ? Quel type d’informations vous manque-t-il ?

Je souhaiterais également des précisions sur les raisons pour lesquelles vous estimez que le déficit public se situera plutôt autour de 4 % du PIB en 2014, et non pas à 3,8 %. Certes, votre rapport contient une démonstration qui examine la prévision de recettes et de dépenses. Vous indiquez qu’il existe un aléa d’environ 2 milliards d’euros quant au montant des recettes ; d’ici la fin de l’année, la situation peut évoluer mais il est assez probable que les recettes ne dépasseront pas les montants inscrits dans le collectif budgétaire. En revanche, je souhaiterais que vous précisiez votre analyse de l’évolution des dépenses. En effet, le Gouvernement a su tenir les objectifs de dépenses en 2012 comme en 2013. Nous allons voter des mesures d’économies, dont 600 millions d’euros par la voie de gels de crédits : qu’est-ce qui vous permet de penser que la procédure de gel et de mise en réserve de crédits – procédure qui, malgré ses imperfections, a permis en 2013 de maîtriser les dépenses – ne fonctionnerait pas en 2014 ?

J’en viens à la maîtrise des finances locales. J’ai été intéressé de voir dans votre rapport que le montant total des transferts aux collectivités locales – quoi qu’en dise – a augmenté – en dépit de l’effort sur les dotations – compte tenu de l’évolution dynamique de la fiscalité transférée.

À mon sens, il y a deux débats différents. La question est de savoir si le plan d’économies doit porter directement sur le niveau des dépenses locales ou s’il doit porter sur le montant des dotations que l’État verse aux collectivités territoriales. Selon mon interprétation du plan du Gouvernement, les 11 milliards d’économies relatives aux collectivités territoriales portent sur les dotations de l’État, et non pas sur les dépenses locales en tant que telles. Nos discussions avec le Gouvernement vont d’ailleurs dans ce sens, puisque nous étudions notamment les mesures de péréquation à mettre en œuvre. Vous semblez au contraire penser que les 11 milliards d’économies doivent aboutir à une baisse corrélative de la dépense locale.

Certes, ce débat est devant nous, notamment grâce au rapport de MM. Malvy et Lambert. Mais ce débat est compliqué car il faut tenir compte du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales et de la diversité des situations : il serait injuste que les collectivités territoriales qui ont su contenir leurs dépenses de fonctionnement tout en maintenant un effort significatif d’investissement et en n’ayant pas augmenté leur fiscalité depuis longtemps soient pénalisées par des règles générales de réduction des dépenses locales. Si les économies devaient porter sur la dépense locale et non sur les dotations, quels seraient, selon vous, les mécanismes qui permettraient de faire face à la diversité des situations des collectivités territoriales ?

M. Charles de Courson. En estimant que « les conventions et méthodes utilisées pour estimer et mesurer les économies nécessaires devraient néanmoins être explicitées et rendues publiques », vous être très critique sur le plan de 50 milliards d’économies annoncé par le Gouvernement.

Nous sommes confrontés à un problème de méthode puisqu’une bonne partie des mesures présentées comme des économies ne sont pas de réelles économies. Comme vous l’avez souligné, le gel du point d’indice est le simple maintien d’une politique antérieure. Il permet d’éviter une dépense de l’ordre de 4 milliards d’euros sur trois ans. Mais le maintien d’une politique antérieure n’est pas une vraie économie. Il en va de même pour l’objectif national des dépenses d’assurance maladie. Vous rappelez que la moyenne des augmentations des dépenses ces trois dernières années est de l’ordre de 2,4 % : en ramenant l’objectif de hausse à 2 %, on éviterait une augmentation des dépenses d’environ 2 milliards sur trois ans. Ici encore, il ne s’agit cependant pas d’une réelle économie mais d’une limitation de la hausse des dépenses. Avec ces deux seuls exemples, nous avons déjà 6 milliards d’euros qui ne sont pas véritablement des économies.

Vous soulevez un deuxième problème grave, relatif aux dépenses des collectivités territoriales. Vous soulignez à juste titre qu’une baisse des dotations de l’État n’entraîne pas automatiquement une baisse des dépenses locales. Mais, vous n’allez pas jusqu’au bout de votre raisonnement. Car il existe une solution pour que la baisse des dotations se traduise par une baisse des dépenses locales : il suffit de geler les taux d’imposition et de plafonner les emprunts pendant trois ans. Pouvez-vous nous expliciter votre pensée sur ce sujet ?

Vous avez aussi souligné avec raison qu’une partie des économies repose sur des administrations dont l’État ne maîtrise pas les dépenses : 3,5 milliards d’euros sont ainsi des économies au titre de l’assurance chômage et des régimes complémentaires, qui sont gérés par les partenaires sociaux. Dès lors, sur les 50 milliards d’euros annoncés par le Gouvernement, il ne doit rester qu’à peine 15 ou 20 milliards d’économies : sur ces 50 milliards, pouvez-vous nous indiquer quel est le montant des véritables économies, c’est-à-dire correspondant à des mesures supplémentaires ?

M. Hervé Mariton. Ma première question porte sur la méthodologie. Vous indiquez que vous ne disposez pas de la justification des économies annoncées par le Gouvernement. Cette observation résulte-t-elle d’un processus interactif avec le Gouvernement ? Lui avez-vous posé des questions complémentaires sur ce sujet ?

Ma seconde question porte sur l’appréciation des justifications que vous ont été apportées. Votre rapport établit une distinction entre les économies identifiées et les économies non documentées. Mais existe-il, pour la Cour, des pistes d’économies qui relèveraient d’une catégorie intermédiaire ? Autrement dit, certaines mesures – certes détaillées – seraient-elles néanmoins insuffisamment justifiées ?

M. Pascal Cherki. Je remercie la Cour des comptes pour la qualité de ses travaux et la subtilité de ses avis. Ce rapport livre beaucoup d’éléments à la réflexion des parlementaires. Il laisse le soin aux politiques de prendre des décisions et chacun pourra en faire son miel. Pour autant, il ne se contente pas d’un exercice descriptif et il comprend également des recommandations.

Le rapport insiste à juste titre sur le fait qu’au regard des importants efforts qui ont été engagés – hausse des prélèvements obligatoires et maîtrise des dépenses – la réduction du déficit public est beaucoup plus faible qu’on l’escomptait, en raison, selon vous, de l’absence de croissance de l’activité. Ne faudrait-il pas prendre le problème dans l’autre sens ? La montée en puissance des efforts pour respecter les objectifs budgétaires ne risque-t-elle pas d’affaiblir durablement le principal ressort de la réduction des déficits publics, à savoir la croissance ? Ne pensez-vous pas que nous nous trouvons dans un cercle vicieux dans lequel l’addition des efforts finit par casser le moteur de la croissance ?

Ma deuxième question porte sur les administrations de sécurité sociale. Vous soulignez à juste titre que le déficit ne se réduit plus depuis 2011, malgré le respect bienvenu des objectifs de dépenses, et que les recettes ont pâti de la faible croissance de l’activité et de l’emploi. En période de croissance faible, les réductions massives de cotisations sociales ne risquent-elles pas d’accroître leur déficit ?

Ma troisième question a trait à la comparaison que le rapport effectue avec l’Allemagne. Elle a engagé une consolidation budgétaire avant les autres pays européens. Dans ce contexte, a-t-elle bénéficié d’un avantage compétitif en profitant du soutien à la demande mis en œuvre par le reste de l’Europe ? À cet égard, que pensez-vous des déclarations récentes du vice-chancelier allemand, qui propose d’exclure du calcul des déficits publics certaines dépenses d’investissement, par exemple dans l’éducation ? Pensez-vous que cela permettrait de régler une partie des problèmes de déficit que nous rencontrons ?

M. Éric Alauzet. La baisse des recettes fiscales s’est élevée à 15 milliards d’euros en 2013. Vous indiquez qu’elle n’aurait été liée que pour un quart au ralentissement économique : disposez-vous d’éléments de mesure plus précis sur les trois quarts restants ? Pour 2014, la baisse est estimée à 5 milliards : quelle est la part de cette baisse imputable au ralentissement de l’activité économique ?

Vous indiquez que la contribution climat énergie devrait rapporter 2 milliards d’euros sur trois ans. Or, il était envisagé que le rendement de cette contribution s’élève à 4 milliards d’euros. Pouvez-vous donner des explications sur ce différentiel ?

Comme vous, je défends, et ce depuis vingt ans, l’idée selon laquelle il faut réduire les déficits. C’est indispensable à notre économie et à notre indépendance. Mais pourquoi faudrait-il faire porter l’effort uniquement sur les dépenses publiques, même si ce levier reste certes important ? Car le déficit a aussi d’autres causes. Les maigres gains apportés la croissance ont été captés essentiellement par les catégories aisées et, en particulier, par le capital. Ceux qui ont investi dans la dette ont également bénéficié de taux d’intérêt relativement élevés et l’optimisation fiscale agressive a largement contribué à l’endettement. Dans ce contexte, j’estime que nos discussions se concentrent trop sur le seul objectif de baisse des dépenses publiques. Vous avez souligné dans votre intervention que la Cour des comptes avait pour rôle de suggérer des pistes. Ne serait-il pas temps d’ouvrir d’autres champs de réflexion pour que la baisse des dépenses publiques, dont on mesure les limites et les risques, ne soit pas le seul levier d’action en vue de la réduction du déficit public ?

M. Philippe Vigier. Jugez-vous réalistes les évaluations de croissance retenues par le Gouvernement pour 2015, 2016 et 2017 ? Compte tenu de la faiblesse de la croissance, le respect de l’objectif de réduction de déficit public pour 2015 reste-t-il envisageable ?

Dans le cadre des 50 milliards d’euros du pacte de stabilité, quelles sont les pistes d’économies sur les dépenses des collectivités locales, puisqu’au-delà des effets du gel du point d’indice, 8,5 milliards d’euros d’économies doivent être réalisées, et ce, bien sûr, sans recourir à l’impôt ni à l’emprunt ?

Enfin, en ce qui concerne l’évolution de la masse salariale de la fonction publique d’État, la stabilisation de 2013 a été obtenue au prix d’une baisse des effectifs de 17 000 emplois : quelles sont les perspectives pour 2014 en l’absence de stabilisation des effectifs ?

M. Marc Goua. Vous avez indiqué que l’évolution des salaires dans la fonction publique territoriale a été moins vertueuse que dans la fonction publique d’État, mais il faut conserver à l’esprit les transferts de charge insidieux de l’État vers les collectivités territoriales, qui ont suppléé à son désengagement.

Vous avez souligné que la réduction des dépenses publiques passe par la réduction des charges de personnel : avez-vous identifié des ministères qui auraient effectivement procédé à de telles réductions ?

M. Olivier Carré. Les 11 milliards d’euros de diminution des dotations de l’État aux collectivités locales sont inclus dans les 13,4 milliards correspondant aux autres mesures d’économies à trouver pour l’État et les opérateurs. En même temps, cette diminution de 11 milliards se retrouve dans les comptes de l’État et, en moindres recettes, dans ceux des collectivités, même si, ensuite, il n’est pas certain que la baisse des dépenses des collectivités s’élève elle aussi à 11 milliards d’euros. En fin de compte, s’agit-il d’une économie de 11 milliards sur l’ensemble des dépenses publiques, ou bien d’une économie d’un montant supérieur, incluant les moindres dépenses des collectivités du fait de la baisse de leurs dotations ? Si tel était le cas, elles supporteraient 40 % de l’effort global d’économies.

Mme Karine Berger. Votre message principal est qu’il faut réduire les dépenses publiques, et non pas qu’il faudrait réduire le déficit ou la dette. Je m’en étonne, car nous menons actuellement une politique volontariste de réduction des dépenses publiques et, surtout, cette réduction a un impact négatif sur la croissance. Des éléments vont sans doute être prochainement publiés sur l’impact récessif attendu de la baisse des dépenses publiques prévue par le programme de stabilité et les premiers chiffres dont j’ai eu connaissance laissent à penser que les craintes sont fondées. Dans la mesure où si la réduction des dépenses publiques a un impact sur le PIB, elle a un impact bien moindre sur la réduction du déficit, avez-vous évalué l’impact négatif sur le PIB de votre recommandation de baisse des dépenses ?

M. le président Gilles Carrez. Il faut rappeler qu’en tout état de cause, ce n’est pas de réduction des dépenses publiques qu’il s’agit, mais de ralentissement de leur progression.

Mme Karine Berger. Il va de soi qu’une réduction de 50 milliards d’euros de cette tendance exerce un impact récessif sur l’activité. Je voudrais donc savoir quelle hypothèse la Cour des comptes retient sur les effets de sa recommandation de baisse supplémentaire des dépenses publiques : combien de points de PIB nous invite-t-elle à abandonner dans les prochaines années ?

M. Pierre Alain Muet. La question est pertinente, car on sait depuis longtemps que les réductions de dépenses ont un effet récessif plus rapide que d’autres dispositifs.

Quelle a été la réduction des dépenses par rapport à leur croissance tendancielle ? Ainsi, les 3 milliards de baisse constatés en 2013 traduisent-ils une réduction par rapport à la tendance ? D’où ce chiffre de 3 milliards vient-il et y a-t-il également eu une révision de l’augmentation tendancielle des dépenses ? Pour pouvoir éclairer nos débats, puisque l’effort sur la dépense publique est toujours mesuré par rapport à la tendance, nous devons faire preuve de précision et savoir exactement ce qu’est cette tendance.

M. Dominique Baert. Il semble que la réflexion évolue outre-Rhin : que pensez-vous des déclarations du vice-chancelier allemand, M. Sigmar Gabriel, selon lequel « les coûts occasionnés par toutes les mesures de réforme ne devraient pas être pris en compte dans les critères de déficit » ?

Mme Marie-Christine Dalloz. Nous continuons à avoir ce débat entre ceux qui considèrent qu’il faut vraiment s’attacher à réduire les dépenses et ceux qui estiment qu’on pourrait continuer à augmenter les recettes. Or, depuis quelques années, nous sommes arrivés à saturation pour ce qui est des recettes.

Votre rapport fait état d’une vraie difficulté : en raison des éléments qui ont affecté le calcul et le calendrier des acomptes et des soldes, il n’est pas possible de disposer d’une estimation précise des recettes fiscales, notamment d’impôt sur le revenu. Or, les bases ont peu évolué, de telle sorte qu’appliquer à ces bases la modélisation des modifications fiscales ne devrait pas être très compliqué et on devrait donc pouvoir disposer d’une tendance plus affinée pour l’impôt sur le revenu.

Vous avez attiré notre attention sur la situation de l’assurance chômage : auriez-vous des suggestions à formuler sur ce sujet, que d’autres pays auraient éventuellement mises en œuvre ?

M. Michel Piron. Je dois saluer les nuances dans l’expression de ce rapport, nuances qui vont parfois jusqu’à la litote. Incontestablement, s’agissant des déficits et de la dette, la vitesse à laquelle nous allons dans le mur a nettement été ralentie.

Lorsqu’on rapproche la diminution des dépenses des administrations centrales de 0,1 % avec l’augmentation de 2,8 % des celles des collectivités territoriales, ne prend-on pas le risque d’une grande ambiguïté, voire d’une erreur de diagnostic ? Peut-on en effet se satisfaire de ce recul des dépenses de l’État ? N’aurait-il pas dû être largement supérieur, au vu des coûts et des économies de transfert ? Par exemple, quand des compétences ont été transférées aux régions ou aux départements, chacun sait qu’un certain nombre de fonctions support n’ont pas été transférées de l’État vers les collectivités en question. Sans exonérer pour autant les collectivités des efforts qu’elles ont à accomplir, la Cour a-t-elle donc pu procéder à une analyse exhaustive des coûts de transfert et des coûts induits par le « non-transfert » ?

M. le Premier président de la Cour des comptes. Je suis parfois surpris par certaines questions posées, dès lors que les objectifs ne sont pas définis par la Cour mais votés par le Parlement. La Cour fait des constats par rapport à ces objectifs et je rappelle à Mme Berger que nous ne sommes pas en mesure de réaliser des simulations. Celles-ci sont faites par le ministère des Finances, qui doit vous les communiquer. La Cour raisonne par rapport à vos propres objectifs, des objectifs proposés par un Gouvernement et généralement approuvés par un Parlement, qui les vote – Madame Berger, vous avez voté le pacte de stabilité comme la loi de programmation. Lorsque je dis qu’il faut davantage mettre l’accent sur la réduction de la dépense publique, c’est ce que vous avez voté et pas une invention de la Cour. C’est également un engagement de la France vis-à-vis de ses partenaires européens.

Pourquoi ne pas demander au ministère des Finances une simulation des effets du non-respect par la France de ses engagements vis-à-vis de ses partenaires européens pour en mesurer les conséquences sur les marchés financiers et la dette française ? Vous disposeriez ainsi d’une vue objective de l’ensemble de la situation. Il ne suffit bien évidemment pas de demander des simulations sur les effets négatifs d’une réduction de la dépense, effets que personne ne nie. L’enjeu est de savoir quelle est la moins mauvaise des solutions et ce qui peut avoir le maximum de répercussions sur les comptes publics et leur analyse. Vous devriez également demander une simulation afin de savoir si la France peut se déconnecter totalement d’une politique européenne, sans conséquences sur l’appréciation des marchés financiers et sur sa dette, alors qu’elle dépend pour partie de ces marchés. Autant de questions intéressantes que peu posent. Vos questions sont toujours très intéressantes et pertinentes mais il faut les resituer dans un contexte plus général et imaginer d’autres scénarios.

Avec des dépenses publiques qui s’élèvent à 57,4 % du PIB, nous nous situons à un niveau parmi les plus élevés des pays de l’OCDE. S’il y avait un rapport entre l’augmentation de la dépense publique et le niveau de croissance, il est vraisemblable que la France atteindrait un niveau de croissance bien plus important qu’actuellement. Notre niveau de dépenses publiques et de prélèvements obligatoires est très élevé. Pourtant, la croissance est atone et nous avons un vrai problème de compétitivité par rapport à d’autres pays, de telle sorte que lorsqu’il y a redémarrage, les entreprises et les salariés français ne sont pas les premiers à en bénéficier. Ce sont autant de questions qui sont et doivent être dans le débat politique ; la Cour ne s’exprime pas sur ces sujets mais par rapport aux objectifs que vous définissez. Nous ne disons pas seulement qu’il faut réduire la dépense publique mais nous rappelons simplement les engagements que vous avez pris et le fait que la dette continue d’augmenter en France alors même qu’elle a tendance à diminuer ailleurs.

Mme Karine Berger. Pas au Royaume-Uni, ni en Italie ou en Espagne…

M. le Premier président de la Cour des comptes. Je parle en termes de moyenne européenne : la dette italienne est certes très élevée mais l’Italie est aujourd’hui à moins de 3 % et bénéficie de marges de manœuvre que n’a pas la France.

Concernant les 3,8 % de déficit public, j’indique à M. Lefebvre que ce n’est pas un pronostic que nous faisons, mais la conséquence d’un constat fait à partir d’interrogations, non pas sur le niveau de la dépense sur 2014 – même si nous en avons au sujet des collectivités territoriales et de l’UNEDIC – mais sur le niveau des recettes. On sait aussi que la croissance estimée à hauteur de 1 % est incertaine et que la prévision du niveau d’inflation paraît élevée. Sur la masse salariale et la question des créations d’emplois, les prévisions du Gouvernement sont également optimistes. Or, si l’on se réfère aux indicateurs de l’INSEE ou de la Banque de France, ceux-ci confortent le sentiment exprimé par la Cour. Le chiffre de 3,8 % nous semble donc très incertain et devrait être plus proche de 4 %, voire plus, ce qui aura des conséquences sur les exercices postérieurs.

Concernant l’évolution de la masse salariale, la Cour propose un certain nombre de pistes afin que vous soyez en mesure de respecter l’engagement de maîtrise des dépenses de personnel, inscrit dans les documents budgétaires. La Cour souligne que ces objectifs de maîtrise sont ambitieux – ils ont même été durcis, notamment dans le récent programme de stabilité. Mais même en restant dans le cadrage de 2013, l’évolution de la masse salariale de l’État ne devrait pas progresser de plus de 250 millions d’euros. Or, si l’on raisonne à politique constante, à savoir le gel du point d’indice et la réduction des mesures catégorielles, le compte n’y est pas.

Il faut donc prendre des mesures complémentaires pour respecter cet objectif. D’où nos propositions de réduction des effectifs, d’une autre politique d’avancement ou d’une autre programmation, ou bien d’actions sur la durée du travail, en partant du constat qu’il pourrait être intéressant de procéder à un bilan de la durée effective de travail dans les trois fonctions publiques, en faisant remonter l’information des chambres régionales. On voit que beaucoup de collectivités territoriales ne se situent pas au niveau de la durée légale et qu’il existe donc ici des marges de manœuvre. Nous préconisons également un meilleur ciblage de certaines mesures générales, et notamment des rémunérations accessoires. Ceci afin de permettre le respect de l’objectif fixé, sachant que l’État a accompli beaucoup d’efforts en matière de dépenses de personnel, efforts que l’on ne retrouve pas pour ce qui est des collectivités territoriales, en dépit de ce qu’a dit M. Goua, parce qu’un certain nombre de créations de postes ne sont pas liées aux transferts de compétences. Le même raisonnement peut être tenu pour ce qui est des hôpitaux.

Le Gouvernement peut afficher 50 milliards d’euros de réduction des dépenses parce qu’il a effectivement modifié ses hypothèses d’augmentation tendancielle de la dépense, passant de 1,6 % à 1,5 %. Tous les pays le font et ce n’est pas spécifique à la France. On peut concevoir que l’on puisse s’appuyer sur une augmentation tendancielle : la Cour ne rejette pas ce raisonnement mais constate que la dépense publique continuera d’augmenter, y compris dans les propositions du Gouvernement. 50 milliards d’euros de réduction de la dépense par rapport à l’augmentation tendancielle sont affichés, mais la dépense publique aura augmenté de 62 milliards sur la même période. L’augmentation tendancielle de la dépense aurait atteint 112 milliards d’euros sans ces 50 milliards d’économies prévues. La Cour souhaiterait que les gouvernements fassent preuve de davantage de transparence, qu’ils expliquent les conventions retenues pour calculer cette augmentation tendancielle, les rendent publiques et qu’un débat ait lieu, notamment en commission des Finances.

Sur la réduction de 50 milliards, en dépit de la procédure de contradiction avec le Gouvernement, nous ne sommes pas en mesure de vous en dire plus car pour une bonne partie – 30 milliards d’euros –, elle n’a pas été documentée. Le Gouvernement devra le faire dans les lois de finances initiales pour 2015 et 2016.

Sur la déclaration du ministre allemand de l’Économie, je ne ferai pas de commentaire, car cela relève des autorités politiques, dont vous êtes. Je peux seulement dire que ce n’est pas en cassant ou en changeant le thermomètre que l’on change la réalité. Ce type de proposition est d’ailleurs un sujet récurrent depuis de nombreuses années mais quels que soient les critères retenus, la situation demeure la même : la dette doit être financée pour partie sur les marchés financiers.

M. Raoul Briet, président de la première chambre de la Cour des comptes. Sur les recettes de 2014, une question a été posée sur la part tenant à la croissance et à l’élasticité dans la réestimation des recettes. Je rappelle que le Gouvernement a maintenu à 1 % sa prévision de croissance pour 2014 et qu’il a en revanche révisé à la baisse l’élasticité, en passant de 1, qui est l’élasticité médiane, à 0,9 dans le projet de loi de finances rectificative que vous allez examiner. Notre sentiment est que cette élasticité de 0,9, pour des raisons qui sont expliquées dans le rapport, reste probablement encore un peu élevée, d’où le risque que nous identifions, en particulier sur l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés. Outre ce risque sur l’élasticité, il faut ajouter les risques associés aux prévisions de croissance et au scénario économique en matière d’inflation et de masse salariale. S’agissant des recettes pour 2014, ce sont probablement des risques plus importants que celui lié à l’élasticité elle-même.

À la question de savoir si l’on peut tirer pour l’année entière, à partir des encaissements des trois ou quatre premiers mois, des données fiables sur l’encaissement de l’impôt sur le revenu et de l’impôt sur les sociétés, la réponse est malheureusement négative. Chacun des chiffres de chacune des années, et donc les chiffres au bout de trois ou quatre mois, est porteur de modifications : modifications de situation, modifications de gestion technique de l’impôt, modifications des circuits ou des calendriers d’encaissement. Ces chiffres sont donc à prendre avec beaucoup de précautions. On ne peut donc pas simplement, en partant des quatre premiers mois de l’année, tirer un trait et identifier quel sera le point de sortie en fin d’année 2014.

Nous considérons qu’il y a un risque de 200 à 300 millions d’euros sur le respect de l’objectif de masse salariale. 2014 ne bénéficie plus de l’effet report des baisses d’effectifs enregistré en 2013. La gestion va donc être très tendue au regard de l’objectif fixé par la loi de finances pour 2014.

Les dépenses en volume ont augmenté approximativement de 1,3 % en 2013. La croissance potentielle, à partir de laquelle l’effort structurel en dépenses est apprécié, était de 1,5 %. L’écart de 0,2 point traduit, compte tenu du poids des dépenses et de la « règle du pouce », une contribution de l’effort structurel en dépenses à l’effort structurel total de 0,1 point. Telle est l’explication de ce chiffre, qui suppose un point de passage par la croissance potentielle et une diminution par deux de cet écart.

Enfin, il a été demandé qui, de l’État ou des collectivités territoriales, supportera les 11 milliards d’euros d’économies. Il ne s’agit pas d’une simple baisse de 3,5 milliards chaque année mais d’une baisse de 3,5 milliards d’euros supplémentaires chaque année – autrement dit 3,5 milliards en 2015, puis 7 milliards en 2016 et 11 milliards en 2017, selon le schéma présenté dans le programme de stabilité. Comme il s’agit de dépenses de l’État et de recettes des administrations publiques, elles sont consolidées en administrations publiques. Dans le programme de stabilité, cette mesure d’économie est identifiée comme se traduisant par une moindre dépense des collectivités territoriales. L’hypothèse implicite est donc que les 3,5 milliards d’euros de baisse des dotations de l’État se traduiront, chaque année, à due concurrence et immédiatement, par une moindre dépense des collectivités locales au titre du même exercice. Les 11 milliards de baisse sont donc bien inscrits dans la rubrique des dépenses des collectivités territoriales, ce qui est techniquement justifié. Cela suppose donc des efforts considérables en dépenses et, vraisemblablement, une remise en question des dispositifs de répartition de ces dotations de l’État entre collectivités territoriales.

Mme Christine Pires Beaune. La masse salariale représente 23 % de la dépense publique et, de ce fait, sa maîtrise et son suivi sont incontournables. Si vous avez dit que pour l’État, la masse salariale semblait stabilisée, vous avez souligné le dérapage pour les administrations publiques locales. Votre rapport fournit des chiffres d’augmentation selon le type de collectivité, notamment plus de 7 % pour les intercommunalités. Pouvez-vous nous fournir le pourcentage d’évolution par catégorie d’intercommunalité – communautés de communes, métropoles, communautés urbaines, communautés d’agglomération ?

M. le Premier président de la Cour des comptes. Le ministère des Finances et la direction générale des collectivités locales ne nous ont communiqué qu’un chiffre global.

Mme Christine Pires Beaune. C’est dommage. Avez-vous croisé ces données avec le coefficient d’intégration afin de vérifier s’il existait un lien entre ces deux éléments ?

M. le Premier président de la Cour des comptes. Une fois de plus, c’est un chiffre global qui a été donné pour les intercommunalités, mais nous aurons l’occasion d’y revenir dans le rapport sur les finances locales que nous publierons en octobre prochain.

Enfin, en réponse à une question de Mme la rapporteure générale, la croissance nécessaire pour stabiliser la dette à son niveau actuel serait de 4 % en valeur et de l’ordre de 2,3 % en volume.

EXAMEN PAR LA COMMISSION

Au cours de sa séance du mardi 8 juillet 2014, la Commission en vient, sur le rapport de Mme Valérie Rabault, rapporteure générale, à l’examen du rapport d’information préparatoire au débat d’orientation des finances publiques.

M. Dominique Lefebvre, président. Le débat d’orientation des finances publiques aura lieu demain en séance publique, à l’issue de l’examen du projet de loi de règlement pour 2013. Conformément à l’article 48 de la loi organique relative aux lois de finances, le Gouvernement nous a transmis à la fin du mois dernier son rapport préparatoire à ce débat, le rapport « sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques ».

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Le débat d’orientation des finances publiques est l’occasion pour le Gouvernement de présenter au Parlement les différentes mesures susceptibles d’affecter recettes et dépenses, ainsi que les réformes structurelles envisagées pour l’année en cours, la suivante, et au-delà. Cependant, nous avons tout récemment débattu du programme de stabilité 2014-2017 et du projet de loi de règlement pour 2013, et nous venons de voter un collectif budgétaire pour 2014. En outre, la Cour des comptes nous a présenté le mois dernier son analyse de la situation et des perspectives des finances publiques. Il n’est donc pas anormal que le débat d’orientation et le rapport préparatoire du Gouvernement nous apportent moins d’informations nouvelles que ce n’a été le cas l’an dernier.

J’ajoute qu’à l’automne, nous aborderons à nouveau la question des finances publiques dans son ensemble puisque nous débattrons non seulement du projet de loi de finances pour 2015, mais aussi d’un projet de loi de programmation des finances publiques.

Cela étant, même si le débat sur le programme de stabilité et la discussion du collectif budgétaire nous ont permis de disposer d’informations que nous n’avions pas l’an dernier, je regrette que, cette fois, les « lettres plafonds » de dépenses et les « tirés à part » du rapport déposé par le Gouvernement le 30 juin dernier, ne nous aient pas été transmises avant la présente réunion. Toutefois, nous devrions en disposer à temps pour le débat de demain.

Je veux souligner ici trois points essentiels.

Le Gouvernement a choisi d’accroître le soutien aux entreprises grâce au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE – et au pacte de responsabilité et de solidarité, qui aboutiront ensemble, en 2017, à une baisse des prélèvements sur les entreprises de 41 milliards d’euros. C’est un effort inédit dans notre pays et nous serons bien évidemment attentifs aux conclusions de la conférence sociale, mais aussi, à travers la mission d’information récemment mise en place par l’Assemblée sur le CICE , aux résultats de ces mesures.

Un effort important a également été consenti en faveur des ménages : revalorisation de l’allocation de rentrée scolaire, hausse de la rémunération des fonctionnaires de catégorie C, création de 150 000 emplois d’avenir, mesures en faveur du pouvoir d’achat contenues dans le projet de loi de finances rectificative…

Nous devons redresser nos comptes publics. Le déficit public est passé de 5,2 % du PIB en 2011 à 4,9 % en 2012 et à 4,3 % en 2013 et il est prévu à 3,8 % en 2014. Nous avons obtenu de très bons résultats en 2012 et 2013, puisque l’effort structurel sur la dépense publique a été de 4 milliards d’euros l’an dernier. L’effort programmé porte sur un montant de 15 milliards d’euros pour 2014 et de 21 milliards pour 2015. Les économies se poursuivront donc à un rythme soutenu.

Nous aurons sur le sujet plus de précisions, demain, avec les « lettres plafonds » et les « tirés à part », puisque ce redressement de nos comptes repose essentiellement sur la maîtrise des dépenses publiques. Sur les 21 milliards d’euros d’économies prévues en 2015, 8 milliards devraient être le fait de l’État, 3,7 milliards celui des collectivités locales et donc probablement 9 milliards celui des administrations de sécurité sociale.

Vous trouverez dans mon rapport, comme annoncé, un tableau présentant, séparément pour les entreprises et pour les ménages, les effets sur la période 2014-2017 des mesures prises depuis juillet 2012 en matière de prélèvements obligatoires. Il en ressort que les ménages ont fourni une contribution importante et que les prélèvements supplémentaires sur les entreprises, après avoir crû en 2012 et 2013, devraient s’annuler en 2014 avant de diminuer sensiblement les trois années suivantes sous l’effet du CICE et du pacte de responsabilité – il s’agit en effet de mesures puissantes, destinées, non à améliorer un taux de marge qui, selon l’INSEE, est relativement stable depuis 1982, mais à relancer un investissement qui s’étiole depuis le début des années 2000.

Autre sujet auquel nous devrons être attentifs pour tenir nos objectifs : l’impact de l’Union européenne sur le budget de l’État. Il a été important dans la période récente : plus de 6 milliards d’euros chaque année depuis 2011, et la Cour des comptes nous a invités à une meilleure anticipation.

Enfin, la maîtrise de la dépense des opérateurs de l’État demeure insuffisante. La Cour des comptes a porté à cet égard un jugement sévère, écrivant qu’elle n’avait relevé « aucun progrès significatif ». Nous avons donc demandé au Gouvernement un premier bilan de l’évolution des ressources de ces opérateurs, bilan que nous espérons recevoir rapidement.

En résumé, la réduction des dépenses, engagée en 2012 et poursuivie jusqu’au projet de loi de finances rectificative que nous venons d’adopter, devrait atteindre en 2015 un niveau ambitieux : c’est la clé du redressement de nos finances publiques.

M. Dominique Lefebvre. Il n’y a effectivement rien de nouveau dans le rapport remis par le Gouvernement : depuis l’annonce au début de l’année, par le Président de la République, du pacte de responsabilité et de solidarité, puis avec le débat en avril sur le programme de stabilité avant sa transmission à la Commission européenne et, enfin, avec la discussion ces deux dernières semaines de deux lois – de finances et de financement de la sécurité sociale – rectificatives, nous disposions déjà de beaucoup de données sur une stratégie budgétaire qui demeure inchangée.

Cela étant, le contexte est un peu particulier. Tout d’abord, en raison de l’écart de 1,5 point de PIB entre le solde structurel constaté et celui que prévoyait la loi de programmation, le « mécanisme de correction » automatique a été enclenché. Mais nous en avons également largement débattu. Des ajustements sont déjà prévus : économies budgétaires importantes en 2014 et surtout en 2015, adoption à venir d’une nouvelle loi de programmation, sensiblement différente de la précédente – en effet, les trajectoires prévues en 2012 n’ayant pas été tenues en raison de l’évolution de la conjoncture, il nous faut repartir de la situation constatée, mais en poursuivant le même objectif de redressement.

Ensuite, ce travail de programmation, notamment, va être mené dans un nouveau contexte européen, celui de la présidence italienne et de la mise en place d’une nouvelle Commission, où l’on doit tout faire pour que les trajectoires budgétaires permettent le redémarrage de la croissance.

Se pose aussi la question du rythme et des modalités précises de la baisse des prélèvements obligatoires. Puisque vous préparez des éléments de prospective sur le sujet, madame la rapporteure générale, il me paraîtrait important que vous les mettiez en perspective en examinant l’évolution depuis 2007 et en entrant dans le détail de ce qui a été gagné et perdu tant par les ménages que par les entreprises. En effet, d’un point de vue macroéconomique, le solde des différents prélèvements sur ces deux ensembles de contribuables est certes intéressant, mais ce qu’ont payé les différentes catégories de ménages et d’entreprises l’est bien plus, surtout s’il s’agit d’analyser une politique fiscale sur moyenne période. Beaucoup de Français ont été touchés par l’augmentation de la fiscalité depuis 2007, mais c’est le détail de ce que chaque foyer et chaque entreprise ont payé qui doit nous retenir. Ainsi les effets de la barémisation de l’imposition des revenus du capital sont complexes : l’essentiel de l’effort a bien sûr été supporté par les plus hauts revenus, mais des gens ont été touchés dans tous les déciles de revenus. J’aimerais donc une clarification : qui a payé plus, qui a payé moins ? C’est ainsi que nous pourrons avoir une vraie lecture politique de l’action qui a été conduite.

Il aurait été intéressant de disposer, pour cette discussion, des plafonds budgétaires par mission pour 2015 – nous les aurons sans doute dans la soirée –, mais n’oublions pas que cette répartition des économies à venir est indissociable des réformes structurelles déjà engagées ou, comme la réforme territoriale, à venir.

M. Hervé Mariton. Ce rapport contient effectivement peu de nouveautés, mais il n’en est pas moins quelque peu surprenant. Il est étonnamment peu précis sur les économies. Considérez-vous que vous disposez d’informations suffisantes, madame la rapporteure générale, et que le contrôle parlementaire pourra s’exercer réellement à l’occasion du débat d’orientation ? Êtes-vous sûre que nos travaux de ces derniers mois nous assurent une connaissance satisfaisante des économies annoncées par le Gouvernement et comment appréciez-vous à cette aune la préparation du prochain projet de loi de finances ?

S’agissant du calcul de l’évolution tendancielle des dépenses, sujet récurrent de débat entre nous et avec le Gouvernement, considérez-vous que nous avons progressé de façon substantielle ? Nous avons déjà dit vouloir entrer dans la « boîte noire » de la définition de l’évolution tendancielle : y êtes-vous parvenue, ou bien le mystère demeure-t-il ?

M. Charles de Courson. Mme la rapporteure générale estime, si j’ai bien compris, que les documents qui nous ont été remis sont pauvres. C’est tout à fait exact. Nous avons là bien peu d’éléments pour le débat d’orientation qui nous attend ! D’où quelques questions.

Alors que l’objectif des 60 000 créations de postes pendant le quinquennat – soit 12 000 par an – est maintenu, les effectifs de l’État auraient, d’après le rapport du Gouvernement, continué de diminuer en 2013 : 15 000 à 17 000 postes auraient été supprimés selon les estimations – contre 30 000 par an sous la précédente législature.

M. Henri Emmanuelli. …cependant que l’emploi prospérait chez les opérateurs !

M. Charles de Courson. Plus à la fin de la législature précédente !

Quelle est vraiment l’évolution de l’emploi ?

S’agissant des collectivités locales, le rapport estime que la dépense devrait progresser « en ligne avec l’inflation », c’est-à-dire de presque rien. Comment est-il possible de faire une telle projection ? En effet, les dotations doivent diminuer dès l’an prochain de 3,7 milliards d’euros, mais les collectivités territoriales peuvent augmenter les impôts ou emprunter – aucune mesure, à ma connaissance, n’étant envisagée pour limiter le recours à ces deux instruments. Cette prévision vous paraît-elle réaliste, madame la rapporteure générale ?

Enfin, je m’interroge sur les économies prévues sur les dépenses sociales. Vous prévoyez de faire passer la progression de l’ONDAM de 2,6 % à 2 % en moyenne pendant trois ans, soit environ 0,6 point d’économie sur les dépenses de santé – autrement dit, un bon milliard puisque l’ONDAM est de l’ordre de 170 milliards d’euros. Mais quelles économies envisage-t-on de faire sur les retraites ?

Mme Karine Berger. Je félicite la rapporteure générale d’avoir réussi la prouesse de commenter un rapport aussi maigre. C’est la première fois que je prends connaissance d’un rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques qui ne propose aucune projection nouvelle de déficit ni de dépenses, se fondant simplement sur les chiffres que nous connaissons déjà.

Débattre de l’orientation budgétaire suppose à tout le moins de disposer d’hypothèses de croissance. Pouvez-vous, madame la rapporteure générale, nous confirmer celle qu’on trouve – très difficilement – dans le rapport : 1 % pour 2014, 1,7 % pour 2015 et 2,25 % pour 2016 comme pour 2017 ?

Si vous les confirmez, je m’étonnerai alors des estimations de l’output gap – de l’écart de production – telles qu’elles figurent à la page 15 du rapport :
– 3,1 % en 2015 selon le programme de stabilité, – 3,4 % selon l’OCDE, – 2,4 % selon la Commission européenne et – 2 % selon le FMI. En effet, il est un point sur lequel tous s’accordent : le déficit conjoncturel se calcule en divisant l’output gap par deux. On obtient ainsi – 1,5 % pour le programme de stabilité, – 1,7 % pour l’OCDE, – 1,2 % pour la Commission européenne et – 1 % pour le FMI, le tout en 2015, soit nettement plus dans l’ensemble que les 1 % prévus pour 2014. Comment concilier ces évaluations différentes ? Où en est donc l’output gap de la France, et à quel niveau est-il estimé pour la période 2014-2017 ?

Ensuite, le document prévoit quelque 145 000 créations d’emplois en 2014 et 130 000 nouveaux emplois marchands en 2015. C’est trois fois plus que les 50 000 nouveaux emplois que prévoit l’INSEE pour 2014 dans sa dernière note de conjoncture. Comment expliquer cet écart ? Et, puisque la précision ne nous est pas fournie, serait-il possible de connaître le nombre prévisionnel de nouveaux emplois non marchands, c’est-à-dire de contrats aidés, en 2015 ?

Nous trouvons également dans le rapport une projection des dépenses de sécurité sociale jusqu’en 2017, mais rien sur celles des autres administrations publiques – État et collectivités locales. C’est une première !

Enfin, à en croire le document, le taux de prélèvements obligatoires devrait baisser dès 2014, le recul s’accélérant « sur la période 2015-2017 (…) principalement sous l’effet de la montée en charge du CICE ». Comment expliquer cette affirmation alors qu’à partir du 15 septembre, ce crédit d’impôt ne sera plus considéré par l’INSEE comme une dépense fiscale, mais comme une dépense publique ?

M. Philippe Vigier. Je note tout d’abord comme mes collègues la pauvreté du document qui nous est présenté.

Madame la rapporteure générale, que répondre aux organismes qui, comme la Cour des comptes, se fondent désormais sur une croissance limitée à 0,7 % en 2014 ? Comment se fait-il que le document n’assortisse pas de la moindre réserve la prévision de croissance de 1 % alors que nous disposons depuis quelques jours de données contraires ?

Le rapport ne dit rien non plus de l’évolution de la fiscalité en 2015. Sera-t-elle gelée, ou augmentera-t-elle et si oui, de combien ? Nous venons d’adopter le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 : malgré un allégement fiscal de 1,1 milliard d’euros, ce ne sont pas moins de 12 à 13 milliards d’euros supplémentaires qui vont être ponctionnés sur les familles. Qu’en sera-t-il en 2015 ?

Quant au budget de l’État pour 2015, le rapport n’y consacre qu’une page sur plus de cinquante ! Ma question est simple : combien les réformes structurelles rapporteront-elles ? Sur les retraites, rien du tout puisqu’il faut déjà rogner, dans les conditions que l’on sait, pour boucler le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, ce qui a suscité un débat animé dans l’hémicycle. Les économies escomptées d’autre part de la réforme des collectivités territoriales ne pourront, elles, se faire sentir avant le 1er janvier 2017 – il faudra attendre les élections et l’installation des régions. De toute façon, des experts le disent, cette réforme ne générera pas d’économies à court terme.

Comme l’a très bien dit Charles de Courson, les masques tombent enfin s’agissant du maintien du cadre d’emploi : vous ouvrez des postes, ils ne sont pas pourvus. Pas vu, pas pris : la méthode est habile ! Dites-nous donc clairement quelles orientations seront retenues pour 2015.

S’agissant enfin du programme de stabilité de 50 milliards d’euros, mon groupe a, vous le savez, écouté le Premier ministre avec une bienveillante attention. Il est maintenant temps de passer aux actes. La Cour des comptes a identifié 20 milliards. Madame la rapporteure générale, de quels éléments disposez-vous pour documenter devant la représentation nationale les 30 milliards restants ? Seuls les 11 milliards d’économies en trois ans sur les collectivités locales sont arrêtés.

M. Éric Alauzet. Lorsqu’il a été prévu de réaliser 50 milliards d’économies, c’était afin de rembourser la dette. Là-dessus s’est greffé le pacte de responsabilité, qui devait être financé, non par une modification de l’effort de réduction de la dépense publique, mais par les 0,5 % de croissance supplémentaire apportés par le pacte lui-même d’ici à 2017. Les 1,7 % de croissance prévus pour 2015 se décomposent-ils donc en une croissance de 1,2 % en tendance, hors pacte de responsabilité, auxquels s’ajouteraient ces 0,5 % ?

Quant au respect de la trajectoire de redressement des comptes et de réduction des déficits publics, continue-t-on à prétendre l’assurer par la seule réduction des dépenses ? Je ne veux pas dire par là qu’il faut augmenter les impôts, mais appeler l’attention sur le problème que pose leur collecte, essentiellement du fait de l’évasion fiscale. La France a fait ce qu’il fallait pour lutter contre la fraude des particuliers ; s’agissant des entreprises, c’est une tout autre affaire. Comment articuler la politique française à la politique européenne pour réduire le déficit par l’élimination de l’évasion fiscale, plutôt que par des baisses de dépenses nuisibles à l’emploi public et à l’investissement, et qui commencent à inquiéter beaucoup les collectivités locales ?

Enfin, dans quelle mesure les investissements peuvent-ils être exclus du calcul des déficits publics ? À mes yeux, seuls peuvent l’être sans dégradation des comptes publics ceux dont le taux de retour est assuré et immédiat, c’est-à-dire qui génèrent des économies suffisantes pour payer les intérêts des emprunts qui les financent : les investissements dans les économies d’énergie. Ce sont ceux-là qu’il faut dynamiser, non seulement au nom de l’écologie, mais pour des raisons financières.

M. Éric Woerth. Les chiffres foisonnent, au point que l’on peine à s’y retrouver. Le CICE pèse 20 milliards d’euros. Est-il financé ou non ? Il est censé l’être par de la TVA, par des taxes écologiques dont on ne sait pas très bien ce qu’elles seront car on ne cesse de changer de pied, et par des économies – mais tout est financé par des économies ! Et encore faudrait-il dire lesquelles…

Nous sommes évidemment favorables à la baisse des charges et des impôts, mais le pacte de responsabilité coûte lui aussi de l’argent. Le coût du travail sera réduit par une baisse d’environ 10 milliards d’euros des cotisations patronales. Les mesures fiscales – suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), baisse du taux de l’impôt sur les sociétés, fin de la surtaxe exceptionnelle – représenteraient quelque 8 milliards. Pour les ménages, ce sont 5 ou 6 milliards qui seraient engagés d’ici à 2017. On en arrive au total à 30 à 35 milliards d’euros.

Face à ces dépenses, on trouve 50 milliards d’économies assez peu documentées. A-t-on mesuré l’effet de la ponction qui sera opérée sur les collectivités locales ? La vision optimiste des évolutions de l’ONDAM et de la masse salariale sur lesquelles on table est-elle bien réaliste ? Bref, les incertitudes sont nombreuses.

Il n’est dès lors pas étonnant que nous peinions à atteindre notre objectif de déficit, quelle que soit la manière dont on le calcule, et que nous devions le rectifier de jour en jour. Entre 2013 et 2014, le déficit est passé de 4,3 % du PIB à 3,8 % selon le Gouvernement, mais à 4 ou 4,1 % seulement selon la Cour des comptes et plusieurs économistes : la baisse ne dépasse pas 0,2 ou 0,3 point, ce qui est négligeable.

S’agissant des réformes structurelles, le texte est encore plus indigent. La réforme des collectivités locales est assurément structurelle, mais est-elle chiffrée ? La « stratégie nationale de santé » n’est rien d’autre que ce que l’on pratique depuis toujours : on lutte contre les radiologistes et les biologistes, ainsi que contre l’industrie pharmaceutique – au nom de la réduction de la dépense de médicaments –, et on développe l’ambulatoire. Ce n’est pas ce que j’appelle une réforme structurelle. Vient enfin la chasse aux opérateurs et aux taxes affectées : fort bien, mais c’est un peu léger pour fonder une stratégie de maîtrise des finances publiques.

Je me demande enfin si le Gouvernement a anticipé les effets sur la croissance du discours choc que M. Montebourg se prépare à prononcer…

Mme Marie-Christine Dalloz. Je me concentrerai pour ma part sur le tome 2 du rapport, qui présente les missions, les programmes, les objectifs et les indicateurs. Ces deux derniers éléments sont essentiels au contrôle parlementaire.

S’agissant de la mission Direction de l’action du Gouvernement, présentée page 37, les indicateurs sont chaque année moins pertinents et ne permettent aucun suivi. Si, au titre de l’objectif « Optimiser le coût et la gestion des fonctions support », l’indicateur « Ratio d’efficience bureautique (du point de vue du contribuable) » renvoie encore au nombre de mètres carrés par agent, c’est à désespérer ! Quant à la nouveauté qui consiste à ajouter, entre parenthèses, la mention « du point de vue du contribuable », je crains bien qu’il ne s’agisse là que d’affichage.

Et que penser, sous l’objectif « Éclairer la décision politique en offrant une expertise reconnue », de l’indicateur « Apport des travaux stratégiques et prospectifs pour éclairer l’action des pouvoirs publics et préparer les réformes (du point de vue de l’usager) » ? Signifie-t-il que nous aurons les études d’impact que nous demandons pour toute nouvelle mesure ?

Quoi qu’il en soit, en fait de jargon administratif, nous voilà servis !

Madame la rapporteure générale. Madame Dalloz, je ne peux vous donner tort au sujet de la variabilité des indicateurs, que vous aviez déjà signalée l’année dernière en commission élargie. Mais mon propre rapport ne couvrira que le tome 1 du rapport gouvernemental, le tome 2 étant du ressort des seuls rapporteurs spéciaux. Je suis convaincue que vous saurez faire valoir votre point de vue en tant que rapporteure spéciale de la mission Direction de l’action du Gouvernement !

Je confirme que les prévisions de croissance retenues par le Gouvernement sont de 1 % pour 2014, 1,7 % pour 2015 et 2,25 % pour 2016 comme pour 2017. Elles pourraient éventuellement être révisées dans le projet de loi de programmation pluriannuelle des finances publiques, en septembre.

En ce qui concerne les économies, je ne puis répondre à vos questions faute de disposer des « lettres plafonds », qui devraient me parvenir ce soir. Nous avons toutefois réussi à collecter quelques chiffres.

Ainsi, monsieur de Courson, le plafond d’emplois des ministères, qui devait baisser de 21 033 équivalents temps plein travaillés (ETPT) selon la LFI 2013, a diminué de 31 208 ETPT en 2013 et une diminution du même ordre de grandeur est programmée pour 2014. C’est mieux qu’auparavant ! Quant aux collectivités locales, rappelons qu’elles ne peuvent recourir à l’emprunt pour financer leurs dépenses de fonctionnement. Nous devrons reparler des impôts locaux dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015.

S’agissant de l’output gap et du solde conjoncturel, madame Berger, j’aurais aimé disposer d’une note de calcul. Je me suis tournée vers Eurostat, qui refait également son calcul. Je ne désespère pas d’avoir des détails. Sur la cohérence entre les chiffres émanant des différents instituts, je n’ai eu aucun élément de réponse ; je vous transmettrai comme toujours les informations à ma disposition, quelle que soit la manière dont je les obtiens.

En ce qui concerne les prévisions d’emploi, le CICE est créateur d’emplois ainsi que le pacte de responsabilité, même s’ils peuvent entraîner d’autres effets. Il faut toujours croire les modèles Mésange du ministère des finances ! Naturellement, en supprimant un doublon, on supprime mécaniquement un ou deux emplois. Voilà pourquoi il faut être très précis sur le sujet. Je vais étudier les chiffres de l’INSEE dont vous parlez et nous y reviendrons.

Monsieur Vigier, je répète que nous attendons les « lettres plafonds » en ce qui concerne les dépenses. Mon rapport montrera, en distinguant les ménages des entreprises, l’évolution de tous les prélèvements obligatoires qui résulte des mesures déjà votées et dont les conséquences se feront sentir jusqu’en 2017 – cela inclura les dispositions annoncées dans le cadre du pacte de stabilité. Vous disposerez ainsi d’une partie de la projection pour 2015 que vous appelez de vos vœux.

Monsieur Alauzet, le débat sur la comptabilisation des investissements dans les déficits peut avoir lieu au niveau européen – Matteo Renzi, dont le pays assume actuellement la présidence tournante de l’Union européenne, va dans votre sens –, mais aussi, peut-être, au sein de notre Commission.

La Commission autorise la publication du rapport d’information de la rapporteure générale en vue du débat d’orientation des finances publiques.

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1 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/rapports/r2049.pdf.

2 () http://www.hcfp.fr/Avis-et-publication/Actualites/Avis-du-Haut-Conseil-relatif-aux-projets-de-lois-de-finances-rectificative-et-de-financement-rectificative-de-la-securite-sociale-pour-2014.

3 () http://www.ccomptes.fr/Publications/Publications/Les-previsions-de-recettes-fiscales-de-l-Etat.

4 () http://www.ccomptes.fr/Publications/Publications/Le-budget-de-l-Etat-en-2013-resultats-et-gestion

5 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/rapports/r2049.asp

6 () http://www.imf.org/external/np/sec/pr/2014/pr14326.htm.

7 () Loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles


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