Accueil > Documents parlementaires > Les rapports d'information
Version PDF
Retour vers le dossier législatif


N° 4328

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 20 décembre 2016

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145-7 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

sur la mise en application de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt

ET PRÉSENTÉ PAR

MM. Antoine HERTH et Germinal PEIRO,

Députés.

——

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 9

PREMIÈRE PARTIE : PERFORMANCE ÉCONOMIQUE ET ENVIRONNEMENTALE DES FILIÈRES AGRICOLES ET AGROALIMENTAIRES 11

I. PRÉSENTATION DE LA LOI 11

A. INTENTION DU LÉGISLATEUR 11

B. DESCRIPTIF DES ARTICLES 13

II. APPLICATION DE LA LOI 17

A. LES GROUPEMENTS D’INTÉRÊT ÉCONOMIQUE ET ENVIRONNEMENTAL 19

1. Mise en œuvre des groupements d’intérêt économique et environnemental 20

2. Une forme de prolongement de l’agriculture de groupe ? 21

3. Un essor à encourager 21

B. UNE NOUVELLE DYNAMIQUE POUR LES GROUPEMENTS AGRICOLES D’EXPLOITATION EN COMMUN (GAEC) 22

C. L’AMÉLIORATION DU FONCTIONNEMENT ET DE LA TRANSPARENCE DES COOPÉRATIVES 24

1. Une meilleure « relation » entre l’associé coopérateur et sa coopérative agricole 25

2. La gestion du groupement coopératif 26

3. Le contentieux 27

D. L’ADAPTATION DU DROIT APPLICABLE AUX INTERPROFESSIONS 28

1. Une meilleure représentativité 28

2. Une extension des accords interprofessionnels parfois contestée 30

E. RÉGULER LES RELATIONS COMMERCIALES 31

1. Une contractualisation complexe 32

2. Des organisations de producteurs facilitées mais encore faibles 34

3. Le médiateur des relations commerciales agricoles 35

F. L’INAPPLICATION DE L’ARTICLE RELATIF À L’ALLOCATION D’ESPACES D’INFORMATION PÉRIODIQUES GRATUITS POUR LES INTERPROFESSIONS 36

G. LES GARANTIES DE L’ORIGINE ET DE LA QUALITÉ 37

1. Une mise en conformité au droit de l’Union européenne 37

2. Une meilleure protection des appellations d’origine et des indications géographiques 41

DEUXIÈME PARTIE : PROTECTION DES ESPACES NATURELS, AGRICOLES ET FORESTIERS ET RENOUVELLEMENT DES GÉNÉRATIONS 43

I. PRÉSENTATION DE LA LOI 43

A. INTENTION DU LÉGISLATEUR 43

B. DESCRIPTIF DES ARTICLES 44

II. APPLICATION DE LA LOI 47

A. LA PRÉSERVATION DES ESPACES AGRICOLES, NATURELS ET FORESTIERS 49

1. Un Observatoire des espaces naturels, agricoles et forestiers (OENAF) élargi 50

2. Les commissions départementales des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) 50

B. ÉVITER, RÉDUIRE, COMPENSER LES EFFETS DES INFRASTRUCTURES SUR L’ÉCONOMIE AGRICOLE : LE PRINCIPE DE COMPENSATION AGRICOLE 52

1. Une exigence limitée aux projets susceptibles de générer des impacts importants 53

2. Une portée de l’évaluation incertaine 54

C. L’AMÉLIORATION DE L’EFFICACITÉ DE L’INTERVENTION DES SOCIÉTÉS D’AMÉNAGEMENT FONCIER ET D’ÉTABLISSEMENT RURAL (SAFER) 55

1. Nouvelle gouvernance des SAFER 55

2. Une meilleure information des SAFER 57

3. L’élargissement du droit de préemption 58

a. Un droit devenu permanent 58

b. Un champ d’application étendu 58

c. La création d’un droit de préemption partiel 60

4. Le contrôle des structures et le schéma directeur régional des exploitations agricoles (SRDEA) 62

a. Nouveaux objectifs 62

b. Le schéma directeur régional des exploitations agricoles 62

D. FAVORISER L’INSTALLATION ET LA TRANSMISSION EN AGRICULTURE 64

1. L’installation 65

2. La transmission 67

E. L’INAPPLICATION DU REGISTRE DES ACTIFS AGRICOLES 68

1. Les personnes concernées par le registre 69

2. Les personnes exclues du registre 70

3. Tenue du registre 70

4. Quel usage ? 70

TROISIÈME PARTIE : POLITIQUE DE L’ALIMENTATION ET PERFORMANCE SANITAIRE 73

I. PRÉSENTATION DE LA LOI 73

A. INTENTION DU LÉGISLATEUR 73

B. DESCRIPTIF DES ARTICLES 74

II. APPLICATION DE LA LOI 77

A. LES PROGRAMMES ALIMENTAIRES TERRITORIAUX 84

1. Les programmes alimentaires territoriaux 84

2. Des projets emblématiques de l’enseignement agricole 84

3. Le rôle de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA) 85

B. LA LUTTE CONTRE L’ANTIBIORÉSISTANCE 86

1. L’objectif de diminution de la consommation des antibiotiques 86

2. Une mesure très controversée 88

a. Le sentiment de stigmatisation des vétérinaires 88

b. La délivrance du médicament vétérinaire 89

c. Le renouvellement des agréments des programmes sanitaires d’élevage (PSE) 91

d. L’évolution récente du code de déontologie 92

e. Le développement des alternatives 93

C. LA MAÎTRISE DES PRODUITS PHYTOSANITAIRES 94

1. L’arrêté sur les phytosanitaires en préparation 94

2. L’interdiction des néonicotinoïdes 98

3. Les certificats d’économie de produits phytosanitaires 99

D. L’ATTRIBUTION À L’AGENCE NATIONALE DE SÉCURITÉ SANITAIRE DE L’ALIMENTATION, DE L’ENVIRONNEMENT ET DU TRAVAIL (ANSES) DE L’AUTORISATION DE MISE SUR LE MARCHÉ 100

1. Les autorisations de mise sur le marché 100

2. Les trois zones de l’Union européenne 103

3. Des moyens insuffisants 105

4. Le dispositif de phytopharmacovigilance 107

5. Le pouvoir de contrôle des inspecteurs de l’ANSES 109

6. La transparence 110

E. LA SURVEILLANCE SANITAIRE 110

1. La reconnaissance du rôle des fédérations départementales des chasseurs en matière de surveillance sanitaire 110

2. La responsabilisation des chasseurs 111

3. Des conséquences négatives pour les chasseurs 111

4. La protection des éleveurs affectés par les attaques de loups 112

QUATRIÈME PARTIE : ENSEIGNEMENT, FORMATION, RECHERCHE ET DÉVELOPPEMENT AGRICOLES ET FORESTIERS 117

I. PRÉSENTATION DE LA LOI 117

A. INTENTION DU LÉGISLATEUR 117

B. DESCRIPTIF DES ARTICLES 118

II. APPLICATION DE LA LOI 120

A. LE PROJET STRATÉGIQUE POUR L’ENSEIGNEMENT AGRICOLE 122

B. L’ENSEIGNEMENT ET LE PROJET AGRO-ÉCOLOGIQUE 123

C. L’ACQUISITION DES DIPLÔMES ET LA PROMOTION SOCIALE 125

D. L’INNOVATION PÉDAGOGIQUE 127

E. LE MÉDIATEUR DE L’ENSEIGNEMENT AGRICOLE 129

F. L’INSTITUT AGRONOMIQUE, VÉTÉRINAIRE ET FORESTIER DE FRANCE 130

1. Un nouvel établissement 130

2. Des expertises à l’étranger 133

3. Développement d’une université numérique en agro-bio-sciences 133

4. Des progrès à réaliser 134

G. LA SPÉCIFICITÉ DE L’ENSEIGNEMENT PRIVÉ 135

CINQUIÈME PARTIE : DISPOSITIONS RELATIVES À LA FORÊT 141

I. PRÉSENTATION DE LA LOI 141

A. INTENTION DU LÉGISLATEUR 141

1. Un potentiel important 141

2. Des difficultés structurelles 142

3. De nouveaux déséquilibres 142

B. DESCRIPTIF DES ARTICLES 144

II. APPLICATION DE LA LOI 149

A. LES ENJEUX FORESTIERS ET UNE NOUVELLE GOUVERNANCE 151

B. LE PROGRAMME NATIONAL DE LA FORÊT ET DU BOIS 152

C. CRÉATION D’UN FONDS STRATÉGIQUE DE LA FORÊT ET DU BOIS. 154

D. FORÊT ET TERRITOIRES 157

1. Établir l’équilibre sylvo-cynégétique 157

2. Dispositions concernant la mobilisation du foncier et l’utilisation des sols 161

E. LA DYNAMISATION DE LA GESTION DURABLE 164

1. Les groupements d’intérêt économique et environnemental forestiers 164

2. Les autres dispositions relatives à la gestion durable 165

3. Les ressources génétiques forestières et les matériels forestiers de reproduction 169

F. LES MESURES SOCIALES 169

G. RÈGLEMENT SUR LE BOIS DE L’UNION EUROPÉENNE 169

SIXIÈME PARTIE : DISPOSITIONS RELATIVES À L’OUTRE-MER 171

I. PRÉSENTATION DE LA LOI 171

A. INTENTION DU LÉGISLATEUR 171

B. PRÉSENTATION DES ARTICLES DU TITRE VI 171

II. APPLICATION DE LA LOI 173

A. LA CRÉATION DES COMITÉS D’ORIENTATION STRATÉGIQUE ET DE DÉVELOPPEMENT AGRICOLE (COSDA), EN CHARGE DE LA DÉCLINAISON DE LA LOI D’AVENIR OUTRE-MER 175

B. LA FORÊT 176

SEPTIÈME PARTIE : DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET DIVERSES 179

EXAMEN EN COMMISSION 181

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 207

INTRODUCTION

À chaque législature sa loi agricole : à la fois loi cadre et loi de modernisation, la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, promulguée après plus d’un an de débats parlementaires est, comme son nom l’indique, une loi tournée vers la construction de l’avenir de l’agriculture : elle est le résultat de l’affirmation d’un modèle agricole.

Le Gouvernement n’entendait pas seulement prendre acte, dans la loi, de nouvelles pratiques agricoles mais il souhaitait donner le cadre législatif d’une nouvelle ambition pour les agriculteurs français, conformément à l’objectif affiché par le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, M. Stéphane Le Foll : atteindre la performance économique des exploitations en prévoyant de générer une performance environnementale, dans le respect d’une agriculture riche de sa diversité. L’introduction du concept d’agro-écologie remet la nature et les hommes au cœur de la performance économique des exploitations quand la France est entourée de pays où les seules évolutions se font dans le sens de l’industrialisation, au détriment de la richesse des territoires.

Si cette loi d’avenir a fait l’objet de vifs débats, elle a néanmoins recueilli l’approbation de nombre de députés de tous bords et l’accueil favorable des professionnels. Ces derniers, entendus par vos rapporteurs, ont confirmé leurs positions, deux ans après la promulgation de la loi et alors qu’une grande partie des décrets d’application ont été publiés.

Le projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt comportait, à son dépôt le 13 novembre 2013, 39 articles.

À l’Assemblée nationale en première lecture 1769 amendements furent déposés en séance publique en janvier 2014. Au Sénat, en première lecture, 861 amendements furent déposés en séance publique. De retour à l’Assemblée nationale en juin de la même année, en deuxième lecture, ce sont 1 340 amendements qui furent déposés. Enfin, 187 amendements furent déposés en séance publique en deuxième lecture au Sénat.

À l’issue d’une commission mixte paritaire, le texte fut définitivement adopté par l’Assemblée nationale le 11 septembre 2014. Après saisine du Conseil constitutionnel, le texte fut déclaré partiellement conforme à la Constitution. Le texte final comporte 96 articles, répartis en sept titres.

Ces 96 articles nécessitaient 103 mesures réglementaires d’application, dont 72 décrets simples et 31 décrets en Conseil d’État.

Au moment de la remise du présent rapport, 63 décrets avaient été publiés (dont près de 50 dans l’année suivant la promulgation de la loi), mettant ainsi en œuvre 70 mesures réglementaires prévues par la loi et 26 mesures réglementaires d’application non explicitement prévues par cette même loi.

25 mesures réglementaires d’application sont à ce jour encore en attente, à des stades d’élaboration divers.

Plusieurs décrets relevant du ministère des affaires sociales et de la santé, plus sensibles, manquent à l’appel. Vos rapporteurs relèvent néanmoins que les décrets d’application de la loi ont été publiés à hauteur de près de 75 %, sachant que les auditions qu’ils ont mené ont montré que, à l’exception notable du décret sur le registre des actifs agricoles, l’essentiel des décrets relevant du ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la pêche ont été publiés.

* * *

L’article L.1 du code rural et de la pêche maritime, figurant au sein du titre préliminaire « Objectifs de la politique en faveur de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche maritime et de la forêt », définit les principes généraux et les objectifs de la politique agricole, alimentaire, sylvicole et piscicole.

De portée normative limitée, cet article révèle le fil conducteur de la loi : la combinaison de la performance économique (compétitivité) et de la performance environnementale (agro-écologie) des exploitations.

Il pose des finalités qui sont la déclinaison de quatre grandes ambitions politiques – économique, sociale, territoriale et environnementale – qui doivent être combinées entre elles dans le but de promouvoir un modèle agricole diversifié. La politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation a ainsi 17 finalités auxquelles s’ajoutent les 6 objectifs de la politique d’installation et de transmission en agriculture. Il doit également être tenu compte des spécificités des outre-mer, des territoires de montagne et des zones humides.

Le présent rapport examinera, pour chacun des titres de la loi d’avenir (1), les mesures d’application de la loi qui ont été prises depuis sa promulgation, s’efforçant de présenter les décrets parus et un état des lieux de leur mise en œuvre – en dépit du caractère récent de nombre de mesures d’application.

PREMIÈRE PARTIE :
PERFORMANCE ÉCONOMIQUE ET ENVIRONNEMENTALE DES FILIÈRES AGRICOLES ET AGROALIMENTAIRES

I. PRÉSENTATION DE LA LOI

A. INTENTION DU LÉGISLATEUR

Le titre Ier de la loi est la traduction législative du fil conducteur de l’esprit de l’ensemble de la loi : la double performance économique et environnementale non seulement des exploitations agricoles mais de l’ensemble des entreprises agroalimentaires.

La performance économique est envisagée par le biais du développement des formes collectives de production. Les groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE) répondent à une problématique de territoire par la mise en œuvre d’un système de production agricole innovant associant plusieurs agriculteurs. Ils visent à valoriser et à accompagner des agriculteurs qui s’engagent à modifier collectivement leurs pratiques de production dans le sens de l’agro-écologie, et sur plusieurs années. La prise de risque est ainsi mutualisée et les aides publiques potentiellement augmentées du fait de la reconnaissance du GIEE.

Les groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC) et la coopération sont autant de formes d’association collectives anciennes mais dont le fonctionnement a été amélioré par la loi d’avenir afin d’inciter les exploitants agricoles à s’y engager.

L’idée des GAEC est que la force du collectif crée une dynamique territoriale et économique affranchissant les exploitants individuels des contraintes les rendant plus vulnérables aux aléas économiques de leur métier, sans pour autant qu’ils renoncent à leur indépendance. Le régime juridique des GAEC est la traduction juridique de l’entraide entre agriculteurs : le travail est mis en commun – totalement ou partiellement – comme il peut l’être dans une exploitation familiale.

La coopération est une forme d’agriculture de groupe basée sur la solidarité des agriculteurs pour assurer leurs approvisionnements, la transformation et la mise en marché de leurs produits. Il était nécessaire de remédier au manque d’information des associés coopérateurs sur la stratégie globale de leur coopérative et sur ses modalités d’organisation et de gouvernance ainsi que sur les engagements réciproques entre l’associé coopérateur et celle-ci.

Les interprofessions sont aussi un outil collectif transversal, promu au niveau européen dans le cadre de l’organisation commune des marchés (OCM). Cette organisation commune à diverses professions autour d’une même production agricole et alimentaire les rassemble dans l’intérêt d’une filière dans son ensemble. L’idée de la loi d’avenir est de renforcer ces interprofessions en améliorant la représentativité de leurs membres et en leur permettant d’étendre à l’ensemble d’un secteur des accords collectifs dans l’intérêt d’une production.

Les échanges commerciaux entre les différents maillons de la filière alimentaire aboutissent à un déséquilibre du pouvoir de marché en défaveur des producteurs de l’amont, dispersés face à des acheteurs et à des distributeurs de plus en plus concentrés. La contractualisation déjà ancienne n’ayant pas permis de rétablir l’équilibre, ses modalités sont renforcées dans le sens d’une plus grande sécurité juridique des maillons les plus vulnérables que sont les producteurs. Ceux-ci sont également incités à mieux s’organiser – en organisations de producteurs – pour pallier à leur dispersion et augmenter leur poids dans les négociations commerciales, dans les limites du droit européen.

Le renforcement des interprofessions et des organisations de producteurs participe d’une volonté réaffirmée aujourd’hui d’une meilleure répartition de la valeur ajoutée tout au long de la chaîne alimentaire.

Axe fort de la loi d’avenir, la performance environnementale, ou agro-écologie, s’appuie sur les écosystèmes pour concevoir de nouveaux systèmes de production. L’agro-écologie permet de développer des productions agricoles respectueuses de l’environnement sans sacrifier l’objectif de performance économique des exploitations. Plus précisément, l’idée est de développer des solutions alternatives à l’usage de produits phytosanitaires, de limiter les prélèvements des ressources naturelles ainsi que les émissions des gaz à effet de serre. L’agro-écologie n’est possible que par une attention particulière portée aux territoires.

À ce titre et dans le même esprit que la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) postérieure à la loi d’avenir, les régions sont renforcées dans plusieurs instances nationales et dans la définition de différents axes des politiques agricoles.

L’agro-écologie est également prise en compte dans le cadre des baux environnementaux intégrés aux baux ruraux et par le renforcement des déclarations relatives aux flux d’azote répandus dans les zones vulnérables.

Elle est indéniablement liée non seulement à la performance des exploitations mais également à la qualité et à la mise en valeur des productions agricoles. La transposition en droit français du « paquet qualité » européen (2) prévue dans la loi d’avenir améliore la reconnaissance des produits sous signes de la qualité et de l’origine et renforce les moyens de l’Institut national de l’origine et de la qualité pour les défendre.

B. DESCRIPTIF DES ARTICLES

L’article 2 modifie la composition et les missions du Conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire (CSO), ainsi que celles de FranceAgriMer, notamment pour donner un rôle accru aux régions dans la politique agricole. Cet article donne également compétence à FranceAgriMer pour gérer le Fonds national de cautionnement des achats des produits de la mer (FNCA) dans les criées.

L’article 3 donne un cadre juridique aux groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE). Il permet aux agriculteurs membres d’un GIEE de s’échanger directement des céréales, sans passer par un collecteur agréé. Il fait relever de l’entraide les activités de prolongement de l’activité agricole.

L’article 4 étend la possibilité pour les préfets d’imposer, dans les zones vulnérables, une déclaration des flux d’azote commercialisés à tous les acteurs de la chaîne, y compris les distributeurs et les transporteurs ; il permet également d’utiliser plus largement le bail environnemental et il modernise la définition du développement agricole pour y intégrer la démarche agro-écologique.

L’article 5 précise que le bailleur peut résilier le bail en cas de décès dans les six mois, non pas du décès du preneur, mais de la date à laquelle il en a connaissance.

L’article 6 donne un an au preneur sortant pour déposer sa demande d’indemnisation pour amélioration du fonds loué.

L’article 7 clarifie les conditions dans lesquelles sont évalués les travaux de transformation du sol effectués sur le fonds loué par le preneur sortant.

L’article 8 améliore la protection du preneur âgé, en permettant à ce preneur de demander le report de l’effet du congé pour reprise – droit que le statut du fermage attribue au propriétaire des terres – jusqu’à la fin de l’année culturale au cours de laquelle ce preneur aura atteint l’âge de la retraite à taux plein.

L’article 9 prévoit que les sommes indument perçues par un bailleur et devant être remboursées sont actualisées au taux d’intérêt légal majoré de trois points.

L’article 10 aligne la durée du renouvellement du bail cessible sur la durée de droit commun, soit neuf ans au lieu de cinq ans. La faiblesse de la durée minimum de renouvellement du bail cessible hors cadre familial, auparavant fixée à cinq ans, pouvant constituer un frein au développement de cet outil.

L’article 11 clarifie le statut des groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC) pour bénéficier du principe de transparence reconnu au niveau européen et simplifie leur procédure d’agrément, désormais placée sous la responsabilité de l’État. Les comités départementaux et régionaux et le comité national d’agrément des GAEC sont supprimés.

L’article 12 permet aux exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL) d’intégrer un groupement pastoral sous forme associative. Auparavant, les critères d’agrément des groupements pastoraux leur interdisaient de se constituer sous forme associative s’ils comportaient une EARL, ce qui constituait une anomalie juridique.

L’article 13 renforce la transparence au sein des coopératives agricoles et les avantages accordés aux organisations de producteurs. Cet article prévoit :

– de renforcer l’information des associés coopérateurs des coopératives agricoles ;

– de pouvoir prévoir l’accueil d’associés stagiaires, admis à titre provisoire au sein de la coopérative pendant une période probatoire d’un an maximum ;

– de moderniser la gouvernance des coopératives agricoles et la formation de leurs dirigeants dans le but d’une plus grande transparence et d’une meilleure efficacité de leur fonctionnement ;

– d’organiser le partage des risques économiques entre les associés et la coopérative en cas de variations des prix des matières premières mais en aménageant le principe de la clause-miroir. Il revient à l’organe chargé de l’administration   d’en déterminer les critères, de les porter à la connaissance des associés coopérateurs et, éventuellement, de les prendre en compte dans les prix payés à ces derniers ;

– de renforcer les exigences en matière de révision coopérative ;

– d’instaurer un médiateur de la coopération agricole ;

– de permettre aux organisations de producteurs de bénéficier d’aides publiques à l’investissement majorées ;

– d’étendre le champ des redevables des cotisations aux organisations interprofessionnelles à tous les opérateurs économiques, même non membres de ces organisations.

L’article 14 crée une sanction pour le non-respect des dispositions inscrites dans le code rural et de la pêche maritime sur les magasins de producteurs. Cet article précise le mode de constatation des infractions, qui sont effectuées par des agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ou de la direction générale de l’alimentation (DGAL) et dispose que les infractions à ce même article sont réprimées comme des pratiques commerciales trompeuses.

L’article 15 modifie le cadre contractuel applicable aux produits agricoles et alimentaires, en renforçant la protection des agriculteurs dans l’application des contrats passés avec les premiers metteurs en marché et en renforçant les prérogatives des organisations de producteurs (OP).

Il étend la durée des contrats de 5 à 7 ans pour les agriculteurs qui démarrent une production.

Il impose également le recours à la médiation en cas de litige portant sur l’exécution d’un contrat de vente de produits agricoles ou alimentaires et conforte la place du médiateur des relations commerciales agricoles.

Les OP sont autorisées à représenter leurs membres dans les procédures de médiation. Elles peuvent également jouer un rôle d’intermédiaire dans la contractualisation obligatoire concernant les produits agricoles : dans ce cas, un contrat cadre est proposé – sous peine de sanction – à l’organisation de producteurs chargée d’effectuer une négociation collective au nom de ses membres.

Des sanctions sont prévues en cas d’absence ou de mauvaise exécution de la clause de renégociation du prix permettant de prendre en compte les fluctuations des prix des matières premières agricoles et alimentaires.

Il élargit, enfin, l’interdiction des remises, rabais et ristournes aux produits alimentaires figurant sur une liste établie par décret.

L’article 16 prévoit qu’un syndicat professionnel agréé en tant qu’opérateur du service public d’enregistrement et de contrôle des performances des ruminants peut être transformé en association sans création d’une personne morale nouvelle. L’association ainsi créée bénéficie du transfert des agréments, habilitations, aides ou avantages financiers ainsi que des conventions en cours rattachés au syndicat. Il garantit la neutralité fiscale de la transformation. Il limite à six ans, la période pendant laquelle les syndicats peuvent se transformer en association en bénéficiant des conditions prévues à cet article.

L’article 17 adapte le droit national relatif aux interprofessions au nouveau cadre juridique défini par le règlement européen n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés (OCM) des produits agricoles. Il instaure une présomption de représentativité des syndicats de producteurs ayant atteint 70 % des voix aux élections professionnelles, obligeant ainsi les interprofessions à organiser en leur sein le pluralisme syndical et instaurant un mécanisme d’opposition à l’extension des accords interprofessionnels.

L’article 18 prévoit la mise à disposition d’espaces de diffusion sur les radios et télévisions publiques pour des campagnes collectives d’information sur les produits frais.

L’article 19 prévoit la coopération, en matière de sécurité et de protection de la santé, entre les employeurs et travailleurs indépendants qui interviennent sur un même lieu de travail. Il met en œuvre la convention n° 184 de l’Organisation internationale du travail (OIT) sur la sécurité et la santé des travailleurs dans l’agriculture.

L’article 20 rend facultative la création, au niveau départemental, d’un comité des activités sociales et culturelles.

L’article 21 habilite le Gouvernement à modifier par ordonnances, dans un délai d’un an à compter de la publication de la loi, les dispositions du code rural et de la pêche maritime et du code de la consommation, ainsi que certaines dispositions du code général des impôts, pour tirer les conséquences du « paquet qualité » de 2012 précité, harmoniser les procédures de reconnaissance des appellations d’origine et indications géographiques et modifier la gouvernance de l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO).

L’article 22 reconnait le vin, les cidres et poirés, les boissons spiritueuses et les bières issus des traditions locales et les terroirs viticoles dans le patrimoine culturel, gastronomique et paysager de la France.

L’article 23 crée un droit d’opposition en faveur de l’INAO au dépôt de marque à l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) ; l’INAO peut être actionné à cet effet par un organisme de défense et de gestion d’une appellation d’origine ou indication géographique. Diverses mesures assurent une meilleure protection des AOC et des IGP face aux atteintes qu’elles peuvent subir dans le cadre du droit des marques et prévoit des sanctions en cas de détournement de notoriété des produits sous signes de qualité.

I. APPLICATION DE LA LOI

LISTE DES DÉCRETS PUBLIÉS

Article

Base légale

Titre du décret publié

Objet

Article 2, I, 1°

Article L. 611-1 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-667 du 10 juin 2015 relatif à la composition du Conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentaire et à sa commission nationale technique

Précisions sur la façon dont les régions sont représentées au CSO

Article 2, I, 3°

Article L. 621-5 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-490 du 29 avril 2015 relatif à l’Établissement national des produits de l’agriculture et de la mer (FranceAgriMer)

Façon dont les régions sont représentées au conseil d’administration de FranceAgriMer

Article 2, II, 4°, a

Article L. 621-8 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-729 du 24 juin 2015 relatif aux informations de suivi économique dans le secteur du lait et des produits laitiers

Modalités de transmission à l’Établissement national des produits de l’agriculture et de la mer des informations nécessaires à la connaissance des productions, des marchés et des données du commerce extérieur ainsi qu’aux travaux de l’observatoire

Article 2, II, 4°, a

Article L. 621-8 du code rural et de la pêche maritime

Liste des informations nécessaires à la connaissance des productions, des marchés, des données du commerce extérieur à transmettre à l’Établissement national des produits de l’agriculture et de la mer

Article 3, 2°

Article L. 315-4 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2014-1173 du 13 octobre 2014 relatif au groupement d’intérêt économique et environnemental

Groupement d’intérêt économique et environnemental

Article 3, 2°

Article L. 315-4 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-467 du 23 avril 2015 relatif à la compétence et aux modalités d’intervention de la commission régionale de l’économie agricole et du monde rural sur les demandes de reconnaissance de groupements d’intérêt économique et environnemental

GIEE : délai de reconnaissance tacite de 4 mois

Article 3, 3°

Article L. 510-1 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2016-610 du 13 mai 2016 relatif au réseau des chambres d’agriculture

Contribution du réseau des chambres d’agriculture à l’amélioration de la performance économique, sociale et environnementale des exploitations agricoles et de leurs filières

Article 4, III

Article L. 411-27 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-591 du 1er juin 2015 relatif aux clauses visant au respect de pratiques environnementales pouvant être incluses dans les baux ruraux

Définitions de la notion de maintien des infrastructures environnementales et adaptation des articles R. 411-9-11-1 à R. 411-9-11-4

Article 4, V, A

Article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-228 du 27 février 2015 portant diverses mesures d’application de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt et clarification du droit

Cession du bail rural et sous-location : délai de saisine du tribunal paritaire lors d’un désaccord entre copreneurs du bail

Article 11, 2° et 3°

Article L. 323-11 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2014-1515 du 15 décembre 2014 relatif aux conditions d’accès des groupements agricoles d’exploitation en commun totaux aux aides de la politique agricole commune

Conditions d’accès des groupements agricoles d’exploitation en commun aux aides de la politique agricole commune

Article 11, 4°

Article L.323-13 du code rural et de la pêche maritime

Groupements agricoles d’exploitation en commun : conditions dans lesquelles ces associés , par leurs apports en nature, en numéraire ou en industrie, contribuent à renforcer la structure agricole du groupement

Article 11, 2° et 3°

Article L.323-12 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-215 du 25 février 2015 relatif aux conditions et modalités d’agrément des GAEC et portant diverses dispositions d’adaptation réglementaire.
Décret n° 2015-216 du 25 février 2015 relatif à l’agrément en tant que groupement agricole d’exploitation en commun

Conditions d’agrément, de réexamen et de retrait de l’agrément des groupements agricoles d’exploitation en commun

Article 13, II, 13°, b

Article L. 528-1 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-665 du 10 juin 2015 portant diverses dispositions d’application de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt et diverses mesures de clarification et de simplification

Conditions dans lesquelles le commissaire du Gouvernement désigné par le ministre chargé de l’agriculture, placé auprès du Haut Conseil de la coopération agricole, peut s’opposer à une délibération du Haut Conseil

Article 15, II, D

Article L.631-27 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-548 du 18 mai 2015 relatif au médiateur des relations commerciales agricoles

Toilettage partie réglementaire du code rural et de la pêche maritime (médiateur)

Article 19, 1°

Article L.717-10 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-756 du 24 juin 2015 relatif à la coopération en matière de sécurité et de protection de la santé instituée à l’article L. 717-10 du code rural et de la pêche maritime

Coopération employeurs/travailleurs indépendants sur un même lieu de travail, en matière de sécurité et de protection de la santé

LISTE DES MESURES EN ATTENTE DE DÉCRET

Article de la loi

Base légale

Objet du décret

Explication avancée par le cabinet du ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt

Article 15, II, A, 1°, e

Article L.631-24 du code rural et de la pêche maritime

Produits considérés comme relevant de la même production pour l’application des règles bénéficiant aux producteurs engagés dans une production depuis moins de 5 ans

Une saisine du Conseil d’État est prévue

Article 18, I

 

Campagnes d’information collectives et génériques sur les produits frais

Le Gouvernement souhaite abroger cet article

Article 23, II

Article L.643-3-2 du code rural et de la pêche maritime

Cahier des charges du dispositif unitaire permettant d’authentifier un vin

Une nouvelle consultation des professionnels est nécessaire

Article 25, I, 2°

Article L.112-1-1 du code rural et de la pêche maritime

Notion de réduction substantielle des surfaces affectées à des productions bénéficiant d’une appellation d’origine protégée et d’atteinte substantielle aux conditions de production de l’appellation résultant d’un projet d’élaboration, de modification ou de révision d’un plan local d’urbanisme, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale

Le projet serait rédigé.

A. LES GROUPEMENTS D’INTÉRÊT ÉCONOMIQUE ET ENVIRONNEMENTAL

Selon le ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, les groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE) « visent à développer ou à consolider des pratiques agro-écologiques dans une réflexion globale – systémique – à l’échelle des exploitations et des territoires » (3).

Ils ont été présentés comme une des pierres angulaires de la loi, le ministre de l’agriculture y est d’ailleurs personnellement très attaché. Le décret de création des GIEE a été publié le jour de la publication de la loi, signe de la mobilisation du ministère pour engager rapidement la dynamique dans les territoires. De ce fait, au moment du salon international de l’agriculture de 2015, qui suivit la publication de la loi, 11 GIEE étaient déjà officiellement reconnus.

1. Mise en œuvre des groupements d’intérêt économique et environnemental

On compte aujourd’hui 311 GIEE en France métropolitaine et en outre-mer, engageant plus de 4000 agriculteurs sur une surface agricole utile de plus 300 000 hectares.

NOMBRE DE GROUPEMENTS D’INTÉRÊT ÉCONOMIQUE ET ENVIRONNEMENTAL
PAR RÉGION

Région

Nombre de GIEE reconnus

Grand Est

30

Nouvelle-Aquitaine

61

Auvergne-Rhône-Alpes

23

Bourgogne Franche-Comté

31

Bretagne

26

Centre-Val de Loire

12

Corse

4

Hauts-de-France

10

Guadeloupe

1

Guyane

0

Île-de-France

1

La Réunion

0

Occitanie

51

Martinique

4

Mayotte

1

Normandie

18

Pays de la Loire

23

Provence-Alpes-Côte d’Azur

15

TOTAL

311

Source : Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt

L’objet des GIEE concerne principalement les cinq thématiques suivantes :

– systèmes autonomes et économes en intrants ;

– conservation des sols et couverts végétaux ;

– autonomie alimentaire des élevages ;

– autonomie en azote et développement des légumineuses ;

– diversification des assolements et allongement des rotations.

Les autres thématiques sont très diverses : méthanisation, agriculture biologique, commercialisation avec création de filières et de signes de qualité, mutualisation des outils de travail etc.

Tous ces projets, définis dans un cadre pluriannuel et à une échelle territoriale variable (de la commune à la région), correspondent aux objectifs de l’agro-écologie.

Outre les exploitants eux-mêmes, nombre d’acteurs de l’agriculture et du secteur alimentaire sont impliqués : coopératives d’utilisation de matériel agricole (CUMA), coopératives agricoles etc. On a même vu un boulanger s’associer avec des producteurs de céréales au sein d’un GIEE.

Le décret n° 2014-1173 du 13 octobre 2014 relatif au groupement d’intérêt économique et environnemental précise que la reconnaissance comme GIEE est accordée dans le cadre d’appels à projets organisés par le préfet de région, qui précisent les critères et les délais de la demande de reconnaissance, soumise pour avis à la commission régionale de l’économie agricole et du monde rural (COREAMR). C’est également le préfet, après avis du président du conseil régional, qui reconnait le GIEE et en assure le suivi. On voit ainsi que le cadre de la reconnaissance des GIEE est relativement souple.

2. Une forme de prolongement de l’agriculture de groupe ?

La recherche de performance à la fois économique, sociale et environnementale n’est pas sans rappeler les formes anciennes de l’agriculture de groupe (groupes de développement agricole, groupes d’études et de développement agricole). Pour les représentants de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) auditionnés par vos rapporteurs, « les GIEE ne constituent pas une révolution dans la manière d’aborder le développement agricole », y compris en matière d’innovation en agriculture.

Pour les représentants de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA), la dynamique permise aujourd’hui par les GIEE correspond à une méthode d’intervention ancienne des chambres d’agriculture. Ils n’hésitent pas à relativiser l’apport des GIEE.

3. Un essor à encourager

Deux syndicats agricoles entendus par vos rapporteurs, les Jeunes agriculteurs (JA) et le Mouvement de défense des exploitants familiaux (MODEF) reconnaissent quant à eux que le système des GIEE fonctionne bien mais plus dans certaines régions que dans d’autres (une majorité dans le sud-ouest). Pour les représentants de Coop de France, les GIEE sont clairement plus tournés vers l’amont des filières suivantes : élevage (60 %) et grandes cultures (25 %) et très souvent la polyculture et l’élevage à la fois. Le MODEF relève également que les GIEE participent efficacement de l’autonomie fourragère des groupements.

Le MODEF relève que le financement est bien présent mais qu’il intervient tardivement – au moment de l’animation du GIEE – alors que le besoin est plus fort au moment de la constitution des projets. À cette remarque, vos rapporteurs répondent que l’on ne saurait présumer de la reconnaissance d’un GIEE et des avantages induits avant même cette reconnaissance.

Les représentants de l’APCA, rejoints en cela par les Jeunes agriculteurs, regrettent que les appels à projets ne s’accompagnent pas de véritables moyens financiers. À cette réflexion, vos rapporteurs répondent que les actions du projet peuvent bénéficier d’une majoration dans l’attribution des aides ou d’une attribution préférentielle de celles-ci, selon les choix des exploitants. La reconnaissance des GIEE a également des conséquences fiscales en ce que les actions menées par leurs membres dans le cadre du projet sont présumées relever de l’entraide et, de ce fait, les prestations ne peuvent être fiscalisées. C’est également le cas des échanges de semences et de plants, lorsqu’ils ne sont pas protégés par un certificat d’obtention végétale (4).

Vos rapporteurs appellent de leurs vœux un développement de la communication sur les appels à projets des GIEE, notamment, comme le demande le MODEF, « les avantages à travailler collectivement, les économies réalisées par la mutualisation et par la réduction d’intrants ». Ils souhaitent également une plus grande périodicité de ceux-ci afin que les agriculteurs ne « ratent pas le coche » de l’appel à projets. Les appels à projets sont aujourd’hui biannuels, pourraient être moins nombreux mais plus fréquents.

A. UNE NOUVELLE DYNAMIQUE POUR LES GROUPEMENTS AGRICOLES D’EXPLOITATION EN COMMUN (GAEC)

Le régime juridique des GAEC a été revu s’agissant du périmètre des GAEC, totaux ou partiels, du bénéfice du principe de transparence économique et de la simplification de leur procédure d’agrément.

Le GAEC est une forme de société civile créée par la loi n° 62-917 du 8 août 1962 relative aux groupements agricoles d’exploitation en commun. Cette forme juridique particulière permet à des exploitants d’exercer leur métier en commun mais sur un pied d’égalité. Les exploitants se regroupent dans des conditions comparables aux exploitations de caractère familial.

L’objet d’un GAEC doit essentiellement être la poursuite d’une activité agricole au stade de la production mais cet objet peut être, depuis la loi d’avenir, total ou partiel. La définition du GAEC total ou partiel est importante car seuls les GAEC totaux peuvent, sous certaines conditions, bénéficier de la transparence.

Le principe de transparence permet aux associés de conserver les droits fiscaux, économiques et sociaux auxquels ils auraient pu prétendre s’ils étaient restés exploitants à titre individuel.

1. La sécurisation juridique des GAEC

Avant la loi d’avenir, la définition de l’objet du GAEC, l’activité agricole, avait été progressivement élargie pour intégrer des activités réputées agricoles par détermination de la loi (cultures marines, activités équestres, méthanisation) mais cette définition élargie du code rural et de la pêche maritime ne recoupait plus la définition communautaire limitée à la notion de production agricole, avec des conséquences directes sur l’accès aux aides de la politique agricole commune (PAC). Ainsi des GAEC partiels au sens du droit français pourraient prétendre à être totaux au sens du droit européen. La loi d’avenir sécurise le droit français : un GAEC est total lorsque ses associés mettent en commun « l’ensemble de leurs activités de production agricole ».

En outre, un GAEC qui exerçait une activité de méthanisation agricole externalisée ne pouvait être considéré comme un GAEC total. Désormais, si un GAEC total participe à la production ou à la commercialisation de produits de la méthanisation agricole, il ne perd pas sa qualité.

Enfin, la transparence économique s’applique aux seuls GAEC totaux dès lors que les associés ont contribué au renforcement de la structure agricole du groupement. Cette précision transpose dans le droit national un accord issu de la négociation de la réforme de la PAC après 2013. Les modalités de la contribution au renforcement du groupement ont été définies par le décret n° 2014-1515 du 15 décembre 2014, qui a précisé que le nombre de parts sociales détenues par chacun des associés est rapporté au nombre total de parts sociales composant le capital du groupement, afin de déterminer la contribution de chaque associé. Le pourcentage obtenu est appliqué aux éléments de la demande d’aide qui incluent notamment la surface et le cheptel, pour déterminer la part de ces éléments qui relève de chaque associé. Enfin, les seuils d’aides et plafonds des dispositifs de la PAC sont appliqués à chacune de ces parts.

2. Le succès des GAEC

La loi d’avenir modifie également les conditions d’agrément des GAEC, dont la procédure est fusionnée avec celle de leur reconnaissance en vue de bénéficier d’aides économiques, dans un souci de simplification. Afin d’assurer la compatibilité du dispositif national avec les règlements européens, la reconnaissance des GAEC est placée sous la responsabilité de l’État. Les comités départementaux, régionaux et national d’agrément des GAEC n’ayant dès lors plus lieu d’être sont supprimés. Il est toutefois ajouté un avis de la commission départementale d’orientation agricole (CDOA), préalable à la délivrance de l’agrément par l’autorité administrative.

Au moment de l’examen en première lecture du projet de loi d’avenir, on dénombrait 36 000 GAEC. On en dénombre aujourd’hui environ 45 000. La dynamique de création des GAEC est sans précédent et s’explique par l’intérêt de la formule qui permet de mettre en commun plusieurs exploitations et les contraintes qui leurs sont liées, tout en gardant les avantages de l’exploitant individuel. Le succès est particulièrement vrai dans le secteur de l’élevage où les contraintes sont fortes.

Ce succès est également dû à la transformation en GAEC de nombreuses entreprises agricoles à responsabilité limitée (EARL) préexistantes qui ne pouvaient bénéficier de la transparence pour l’attribution des aides PAC.

Le partage des tâches par la mutualisation, les échanges, l’entraide mais aussi la répartition des astreintes se font sur le principe de l’égalité des membres. Cette formule ne séduit pas seulement les couples et elle s’inscrit désormais dans une véritable stratégie collective de coresponsabilité et de dynamique d’investissement.

Vos rapporteurs considèrent que cette formule permet de répondre aux contraintes liées au nombre très important de petites exploitations agricoles sur le territoire français par rapport aux autres États membres de l’Union européenne, sans sacrifier l’indépendance des exploitants dans des exploitations toujours plus grandes.

A. L’AMÉLIORATION DU FONCTIONNEMENT ET DE LA TRANSPARENCE DES COOPÉRATIVES

Les coopératives agricoles sont basées sur la solidarité des producteurs pour assurer leurs approvisionnements, la transformation et la mise en marché de leurs productions. La loi est revenue sur la relation atypique, dans le monde du commerce, de ces coopératives avec leurs adhérents coopérateurs. Ces organismes assurent le prolongement de l’activité de leurs membres, pour lesquels ils agissent comme mandataires.

Afin de faire perdurer l’esprit et les idéaux du système coopératif, Coop de France avait, en 2010, diffusé une charte des valeurs du système coopératif : démocratie, solidarité, responsabilité, pérennité, transparence, proximité et service.

La vérification de conformité aux principes et idéaux est une originalité du modèle coopératif, renforcée par la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire. L’effectivité de ces valeurs était parfois critiquée par les associés coopérateurs. Le législateur souhaitait y remédier.

Il n’était pas question de mettre en cause le statut sui generis de la coopérative agricole mais de renouer le lien – qui n’est pas un lien contractuel – des adhérents coopérateurs avec la structure dont ils sont membres. Il était également nécessaire de clarifier le droit applicable et de le rendre conforme au droit européen.

1. Une meilleure « relation » entre l’associé coopérateur et sa coopérative agricole

La double qualité d’utilisateur de services et d’associé est indissociable. L’associé coopérateur n’est pas soumis à l’engagement traditionnel du contrat avec sa coopérative, l’engagement est désormais qualifié de « relation », qu’il s’agisse de l’adhésion à une coopérative de premier degré ou de l’entrée d’une société au sein d’union union coopérative.

La loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire précitée avait précisé les conditions d’adhésion, de retrait, de radiation et d’exclusion des associés. Avec la loi d’avenir, l’organe chargé de l’administration a l’obligation de mettre à la disposition de chaque coopérateur un document récapitulant son engagement tel qu’il résulte des statuts. Le règlement intérieur doit préciser les modalités de cette communication. Y figurent la durée d’engagement, le capital souscrit, les quantités et caractéristiques des produits à livrer, les modalités de détermination du prix et celles de paiement. Membre de la coopérative, l’associé coopérateur doit pouvoir disposer d’une information suffisante sur le lien qu’il entretien avec elle. Ses engagement doivent être parfaitement formalisés et transparents.

L’attractivité de la forme coopérative s’est vue renforcée par la possibilité, pour tout jeune agriculteur, d’opter pour cette forme d’engagement de façon réversible, à l’essai. Le nouveau coopérateur peut bénéficier d’une période probatoire d’un an maximum, autant de temps au cours duquel la coopérative pourra valoriser son projet auprès de lui. Pendant cette durée, les associés coopérateurs le sont pleinement et, à l’issue de celle-ci, les deux parties ont la faculté de mettre fin à l’engagement.

1. Une plus grande transparence

La loi d’avenir améliore le partage des risques entre les associés coopérateurs et la coopérative en impliquant les parties dans la prise en compte de la volatilité des prix des matières premières. Beaucoup d’associés coopérateurs avaient en effet le sentiment qu’ils n’étaient pas rémunérés à la hauteur du juste prix de leurs produits. L’organe chargé de l’administration de la société est chargé de définir les modalités de détermination et de paiement du prix, notamment les acomptes et compléments éventuels en fonction des fluctuations des prix des matières premières affectant significativement le coût de production des biens. En cas de changement significatif, le prix des apports est modifié. Le coopérateur étant précisément associé, il devrait pouvoir bénéficier d’une juste répartition des excédents annuels de sa coopérative : c’est à l’organe chargé de l’administration qu’en revient la décision.

L’organe chargé de l’administration voit ses attributions en matière de contractualisation de l’apport renforcées : assurer la gestion et le bon fonctionnement du groupement en disposant de pouvoirs plus étendus dans les limites de l’objet social de la coopérative, des pouvoirs de l’assemblée générale et, le cas échant,  des statuts. Pour l’exécution de ces missions, il peut procéder aux contrôles et vérifications qu’il juge opportuns. Une volonté de transparence globale des relations individuelles et sociétaires a conduit le législateur à compléter les informations présentées à l’assemblée générale. Le conseil d’administration et le directoire doivent rendre compte de l’activité et du résultat de l’ensemble de la société et des sociétés qu’elle contrôle, par branche d’activité. En cas de maniement d’instruments financiers à terme, l’organe chargé de l’administration doit indiquer les mesures prises pour éviter les mouvements de spéculation. De même, lorsque les matières premières que les sociétés regroupent sont concernées par de tels instruments financiers, le rapport doit inclure les informations pertinentes pour chaque catégorie de biens. Dans le même esprit, les informations concernant les adaptations de prix rendues nécessaires par l’évolution du coût des fournitures subie par les apporteurs doivent être transmises.

1. La gestion du groupement coopératif

Les administrateurs, membres du conseil de surveillance et le directoire ont une mission essentielle de diffusion de l’information. Le président ou le directeur de la société doit leur communiquer tous les documents et informations nécessaires à l’exercice de leurs missions. Leurs fonctions sont gratuites, ils ne perçoivent qu’un remboursement de leurs frais et, le cas échéant, le paiement d’une indemnité compensatrice du temps consacré à l’administration.

Le rapport présenté à l’assemblée générale précise l’utilisation de l’indemnité compensatrice et les missions exercées par les mandataires sociaux.

Ils bénéficient d’un droit à la formation lors de la première année de leur mandat. Il s’agit des formations nécessaires à l’exercice de leurs missions. Elles concernent la première année de chaque mandat. L’assemblée générale chargée de statuer sur les comptes de l’exercice vote le budget nécessaire.

Les opérations de révision sont effectuées conformément aux normes élaborées et publiées par le Haut Conseil de la coopération agricole (HCCA). Elles donnent lieu à un rapport et à un compte rendu au conseil d’administration ou au conseil de surveillance. Plusieurs étapes sont prévues lorsque le rapport fait apparaître une méconnaissance des règles :

– en premier lieu, le réviseur convient avec les mandataires sociaux des mesures correctives à prendre ; l’organe d’administration doit informer l’assemblée générale annuelle de la révision effectuée et des mesures prises ou à prendre ;

– en cas de carence ou de refus, le réviseur informe le HCCA et ce dernier notifie aux dirigeants les manquements constatés en leur donnant un délai pour y remédier ;

– lorsque les mesures correctives ne sont pas prises dans ce délai, le HCCA convoque une assemblée générale extraordinaire en lui enjoignant de prendre les mesures correctives requises ;

– enfin, lorsque le fonctionnement normal du groupement n’est pas rétabli dans les 6 mois de la tenue de cette assemblée, le HCCA peut prononcer le retrait de son agrément après avoir invité la coopérative à présenter ses observations.

Le HCCA veille à la bonne application des principes coopératifs et fait notamment respecter la compétence territoriale des coopératives, qui se livrent parfois à une forte concurrence.

Le HCCA peut être saisi par les coopératives ou, le plus souvent, par leurs adhérents qui les accusent d’agir comme des entreprises classiques, soumises aux marchés mondiaux. Sur ce point, les avis du HCCA confirment aux adhérents les contraintes concurrentielles qui sont celles des coopératives, ce qui les conforte dans cette logique.

2. Le contentieux

La loi d’avenir a instauré un médiateur de la coopération agricole. Il peut être saisi de tous litiges entre un associé et la coopérative à laquelle il adhère, entre coopératives agricoles, ou entre une coopérative et l’union à laquelle elle adhère. La médiation est une démarche opérationnelle à l’initiative de l’associé, du groupement ou du Haut Conseil de la coopération agricole (HCCA). Elle n’intervient qu’après épuisement des recours internes à la coopérative.

Depuis le 20 novembre 2014, c’est M. Hubert Grallet qui assure ces fonctions. Il favorise la résolution amiable des litiges et transmet annuellement au HCCA un bilan des médiations réalisées.

Depuis 2 ans, le médiateur n’a que peu été sollicité. Cette fonction étant nouvelle et méconnue, le médiateur a d’abord été formé au cours du premier trimestre 2015, il a ensuite consacré le reste de l’année à expliquer aux coopérateurs la fonction de médiateur et son utilité.

Il a efficacement évité la médiation pour plusieurs sollicitations, simplement en remettant en contact les protagonistes. Un cas de médiation a été refusé par la partie sollicitée qui a considéré que le sollicitant, retraité, n’était plus adhérent à la coopérative.

Le médiateur est intervenu dans deux cas. Le premier n’a pas abouti à la résolution du conflit puisque la justice a été saisie. Le second cas a été résolu par la médiation qui a permis le dialogue et des échanges constructifs entre les parties et a entraîné un changement de comportement de l’une des parties.

Trois médiations sont actuellement en cours. Le médiateur reconnait qu’il est saisi de peu de cas mais « qu’il est bon que les coopératives et leurs adhérents sachent que cet outil existe ».

A. L’ADAPTATION DU DROIT APPLICABLE AUX INTERPROFESSIONS

Le règlement européen du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés (OCM) des produits agricoles précité, en ses articles 157 et 158, a consacré le rôle des organisations interprofessionnelles agricoles en permettant l’extension des règles qu’elles décident à l’ensemble des opérateurs d’une filière, dans une circonscription économique donnée, dès lors que cette interprofession est représentative et en autorisant des dérogations limitées au droit de la concurrence.

1. Une meilleure représentativité

L’article 17 de la loi d’avenir revoit, en conséquence de la nouvelle OCM, le fonctionnement et la représentativité des interprofessions. Elle impose – sauf dans le secteur des produits sous signes d’identification de l’origine et de la qualité – le pluralisme syndical en leur sein.

L’OCM a laissé les États libres de définir les critères de représentativité au sein des interprofessions. Le législateur français a fait le choix de s’en tenir aux règles européennes : pour être reconnus en qualité d’organisation interprofessionnelle, les groupements constitués par les organisations professionnelles représentant la production agricole et, selon les cas, la transformation, la commercialisation et la distribution, doivent représenter « une part significative » de ces secteurs d’activité (article L. 632-1 du code rural et de la pêche maritime). Auparavant, l’expression retenue était celle des organisations professionnelles « les plus représentatives » d’une activité économique.

La représentativité est appréciée au regard de la structuration économique de chaque filière (article L. 632-4 du même code).

Règlement du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés

Article 158, paragraphe 1, point c) : « Les États membres peuvent reconnaître les organisations interprofessionnelles qui en font la demande, à condition qu'elles représentent une part significative des activités économiques visées à l'article 157, paragraphe 1, point a) ».

Article 157, paragraphe 1, point a) : « Les États membres peuvent, sur demande, reconnaître les organisations interprofessionnelles dans un secteur précis (...) qui sont constituées de représentants des activités économiques liées à la production et à au moins une des étapes suivantes de la chaîne d'approvisionnement : la transformation ou la commercialisation, y compris la distribution, des produits dans un ou plusieurs secteurs ».

Les organisations interprofessionnelles entendues par vos rapporteurs ont toutes affirmé être en conformité avec ces nouvelles règles de représentativité, même si plusieurs recours ont été déposés. Le législateur a en effet fait le choix de ne pas imposer le pluralisme et de ne pas avoir précisé les critères de représentativité.

Certaines interprofessions, comme Interbev, l’Association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes, avaient néanmoins ouvert leurs statuts aux syndicats professionnels minoritaires avant l’adoption de la loi : la représentativité est assurée pour chacune des productions animales représentées, même si la FNSEA dispose d’une large majorité des voix. En outre, avec le passage de 13 à 20 organisations membres, Interbev a adapté ses statuts et est passée d’un système de vote à l’unanimité des organisations à un vote à l’unanimité des collèges.

Pour le Centre national interprofessionnel de l’économie laitière (CNIEL), la loi a stabilisé juridiquement ses statuts, anciens, mais ne les a pas bouleversés. Les centres régionaux (CRIEL) sont en revanche mieux liés au CNIEL : ils ont un droit de regard sur les accords nationaux, les échanges d’informations sur ce qu’il est possible de faire sont meilleurs et les CRIEL participent au financement du CNIEL. Avec la réforme, le CNIEL a accueilli la coordination rurale et la confédération paysanne.

Interfel, l’interprofession des fruits et légumes frais, a également intégré ces deux syndicats dans le collège producteurs. En 2016, Interfel représente 12 organisations syndicales ou fédérations représentant 80 % en volume de production et 70 % en volume de commercialisation.

Une fois reconnues pour un groupe de produits définis, ces organisations interprofessionnelles peuvent créer en leur sein des sections spécialisées compétentes pour un ou plusieurs de ces produits. Ces sections ne peuvent être refusées si les groupements représentent au moins 70 % de la production d’un ou plusieurs produits.

2. Une extension des accords interprofessionnels parfois contestée

Une fois reconnue, l’organisation interprofessionnelle est en position de voter des accords destinés à être étendus, mais uniquement si elle est représentative. Ces critères de représentativité figurent à l’article 164 de l’OCM de 2013.

Article 164, paragraphe 3, point a) ii) : « Une organisation (...) est considérée comme représentative lorsque, dans la ou les circonscriptions économiques concernées d’un État membre, elle représente en proportion du volume de la production ou du commerce ou de la transformation du produit ou des produits concernés au moins deux tiers.

« Toutefois, lorsque, dans le cas des organisations interprofessionnelles, la détermination de la proportion du volume de la production ou du commerce ou de la transformation du produit ou des produits concernés pose des problèmes pratiques, un État membre peut fixer des règles nationales afin de déterminer le niveau précis de représentativité visé au premier alinéa, point a) ii) ».

L’article L. 632-4 du code rural et de la pêche maritime prévoit ainsi que pour pouvoir étendre un accord interprofessionnel, les critères de représentativité prévus à l’article 164 de l’OCM sont appréciés « en tenant compte de la structuration économique de chaque filière » c’est-à-dire que :

– les volumes pris en compte sont ceux produits, transformés ou commercialisés par les opérateurs professionnels auxquels sont susceptibles de s'appliquer les obligations prévues par les accords ;

– l’organisation interprofessionnelle doit rassembler les deux tiers des opérateurs et du chiffre d’affaires de l’activité économique considérée. Ce taux permet de surmonter des difficultés pratiques qui rendent impossible la démonstration de la représentativité des organisations membres ;

– pour la production agricole, ces deux premières conditions sont présumées remplies si l’organisation interprofessionnelle rassemble des organisations syndicales d’exploitants agricoles représentant au moins 70 % des voix aux élections des chambres d’agriculture, directement ou par l’intermédiaire d’associations spécialisées adhérentes à une organisation syndicale d’exploitants agricoles.

Pour tout secteur, la représentativité est présumée dès lors que l’accord destiné à être étendu ne fait pas l’objet de l’opposition d’une ou plusieurs organisations représentant plus du tiers des volumes du secteur d’activité concerné dans le délai d’un mois de sa publication.

Une fois étendus, les accords permettent à l’organisation interprofessionnelle reconnue de rendre obligatoires, pour l’ensemble des opérateurs, même non membres de l’organisation interprofessionnelle, les actions en faveur de la filière (promotion, recherche, contrôle de qualité, contrats, indicateurs de marché…) et, corrélativement, le financement nécessaire à la réalisation de ces actions (cotisations volontaires obligatoires). Plusieurs recours ont, depuis, été introduits devant le Conseil d’État (5).

Ces accords ont pour but d’améliorer les relations économiques : en 2015, au sein d’Interfel, 16 accords ont été passés (12 sur la qualité des produits, 2 spécifiques à l’export et 1 sur la fraicheur des produits) dont 7 ont été étendus par accord interprofessionnel.

De leur propre ressenti (témoignage du CNIEL), les interprofessions font souvent l’objet de fortes attentes des politiques mais elles se trouvent de fait souvent limitées dans leur mandat du fait de leur fonctionnement par consensus.

A. RÉGULER LES RELATIONS COMMERCIALES

La concentration de la grande distribution et, dans une moindre mesure, celle des industries agroalimentaires, face à des producteurs atomisés et par ailleurs soumis à de forts aléas de production fragilise ces derniers dans les relations commerciales qu’ils entretiennent avec l’aval de la filière agroalimentaire.

Ce déséquilibre entre l’amont et l’aval de la filière agroalimentaire s’est accru avec la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie (LME) qui a introduit une liberté de négocier entre vendeurs et acheteurs (quel que soit le secteur économique), dans les limites du respect de l’absence de déséquilibre significatif entre les parties.

La spécificité du secteur agroalimentaire a été prise en compte dans la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche (LMA) qui a encadré les relations contractuelles entre les premières maillons de la filière en prévoyant la possibilité de rendre obligatoire (par décret ou par accord interprofessionnel) la contractualisation écrite entre producteurs et premiers metteurs en marché (acheteurs). Ces propositions de contrats doivent contenir certaines clauses obligatoires (volumes, qualité, etc.) et rechercher un meilleur équilibre entre les cocontractants (durée minimale, préavis de rupture etc.).

La principale critique à l’encontre de la LMA et à laquelle la loi d’avenir a tenté de répondre est le fait que la contractualisation ait pu être rendue obligatoire avant même que les producteurs aient été véritablement incités à se regrouper – notamment dans le secteur laitier – pour peser dans les négociations contractuelles. La logique aurait voulu qu’on leur permette d’abord de s’organiser avant de les inciter à contractualiser pour que le déséquilibre commercial ne soit pas scellé dans une contractualisation obligatoire contraignante.

Il fallait remédier au déséquilibre de la faible concentration des producteurs, en dehors de ceux organisés en coopératives. Il était nécessaire, en outre, de prévoir les modalités de détermination des prix au regard de la volatilité des cours. La loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a prévu que, pour tout contrat de plus de 3 mois, une clause de renégociation du prix permette de prendre en compte les fluctuations de cours (à la hausse comme à la baisse) sous peine d’amende.

La loi d’avenir poursuit ce mouvement en prenant acte de l’adoption du règlement européen du 17 décembre 2013 précité, qui prévoit de plus larges possibilités en matière de contractualisation et d’organisations des producteurs.

1. Une contractualisation complexe

L’article 15 de la loi d’avenir améliore le cadre de la contractualisation et les relations commerciales.

À l’obligation de conclusion d’un contrat de vente écrit est ajoutée l’alternative de la proposition d’un contrat de vente écrit par l’acheteur.

La sécurité juridique des contrats est renforcée par l’ajout, dans les clauses obligatoires, de règles applicables aux cas de force majeure.

La durée d’un an minimale du contrat est supprimée afin de s’adapter aux marchés de tous types de produits ; la durée minimale est fixée par décret en Conseil d’État ou accord interprofessionnel mais sans qu’elle puisse excéder 5 ans. Le producteur peut néanmoins renoncer par écrit à la durée minimale du contrat.

La durée minimale des contrats dans les secteurs où ils sont obligatoires pour les agriculteurs débutant une nouvelle production est allongée de 5 à 7 ans. Les agriculteurs récemment installés sont mieux protégés : l’acheteur ne peut résilier le contrat avant le terme sauf inexécution ou cas de force majeure ; un préavis doit être prévu en cas de non-renouvellement du contrat par l’acheteur.

Le médiateur des relations commerciales agricoles a fait part à vos rapporteurs des difficultés de la contractualisation :

– il considère que le contrat n’est pas un outil de régulation, il traduit un engagement des co-contractants mais ne remédie pas aux déséquilibres ;

– sur l’obligation de proposition d’un contrat sous peine d’amende, il relève que n’importe quelle proposition libère l’entreprise acheteuse de cette obligation ;

– sur la durée des contrats rendus obligatoires, il considère que leur durée est trop longue dans le secteur du lait (5 ans) et également dans le secteur des fruits et légumes (3 ans), sentiment partagé par Interfel (interprofession des fruits et légumes frais). C’est d’ailleurs la durée la plus longue pour le secteur du lait dans l’Union européenne, où les contrats annuels sont plus fréquents ;

– il recommande que la durée de préavis pour dénoncer un contrat soit moins longue pour le producteur que pour l’acheteur.

Globalement, il appelle de ses vœux une plus grande souplesse dans la contractualisation.

Interfel est l’interprofession la plus critique à l’égard de la contractualisation obligatoire : la durée minimale de contrat de 3 ans est, selon cette organisation interprofessionnelle, beaucoup trop longue compte tenu de l’obligation d’indiquer des éléments de formation des prix et des volumes. Les fruits et légumes frais sont en effet l’un des secteurs les plus soumis aux aléas ; ce sont des denrées rapidement périssables qui nécessitent un marché souple. Interfel considère que la contractualisation obligatoire ne fonctionne pas et propose de la supprimer en considérant que les producteurs contractualiseront spontanément en fonction de leurs productions sans risque de déséquilibre significatif comme pour d’autres productions.

Également interrogé par vos rapporteurs, le CNIEL a quant à lui insisté sur le problème de calendrier lié à la mise en place de la contractualisation : « imposée par le législateur, la conclusion de contrats avant la constitution des organisations de producteurs a eu des répercussions importantes puisqu’elle a heurté les entreprises forcées de mettre une proposition de contrat sur la table dans un délai très court, tout en ne laissant pas le temps aux producteurs de s’organiser pour négocier le contenu de cette proposition ». La sortie des quotas laitiers n’a pas aidé à améliorer la situation de la filière qui vit une période transitoire particulièrement difficile.

Pour Interbev, la contractualisation dans le secteur ovin fonctionne bien, en particulier parce que des incitations financières à la contractualisation ont été mise en place. Au contraire, la contractualisation en viande bovine fonctionne difficilement compte tenu de la complexité en termes de qualité et de prix de ce secteur fortement concurrentiel.

Il semble que la loi d’avenir ne soit pas allée suffisamment loin dans le renforcement des pouvoirs des producteurs dans les relations commerciales avec l’aval de la filière.

La loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (dit « Sapin II ») tente d’y remédier. Elle prévoit notamment :

– l’obligation de la mention, dans les conditions générales de vente des produits agricoles contractualisés, du prix payé au producteur et, dans les contrats sous marque de distributeur, des critères et modalités de détermination du prix (article 100) ;

– l’élévation du plafond des sanctions et la limitation des pratiques restrictives de concurrence et des nouveaux instruments promotionnels (articles 101, 102, 106, 109, 110) ;

– l’amélioration des contrats donnant lieu à une convention écrite annuelle (contrats LME, y compris contrats de grossistes) qui pourra devenir pluriannuelle (jusqu’à 3 ans) avec, dans ce cas, la possibilité de prendre en compte des indicateurs reflétant les coûts de production (article 107) ;

– l’amélioration des contrats entre producteurs et premiers metteurs en marché (contrats LMA) par l’ajout d’une référence aux indicateurs publics des coûts de production et des prix des produits agricoles ou alimentaires et la création d’un contrat cadre écrit entre l’acheteur et l’organisation de producteurs (article 94) ;

– la création d’une conférence de filière annuelle sous l’égide de FranceAgriMer (article 104).

Cette loi a partiellement été déclarée non conforme à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2016-741 DC du 8 décembre 2016, mais l’ensemble des dispositions précitées a été validé.

2. Des organisations de producteurs facilitées mais encore faibles

L’article 15 oblige les acheteurs à proposer un contrat-cadre aux organisations de producteurs (OP) lorsque les producteurs sont ainsi regroupés. Ce contrat-cadre doit être prévu par un décret ou par un accord interprofessionnel. Ce contrat-cadre peut rendre obligatoire la transmission à l’OP par l’acheteur des informations lui permettant de suivre la bonne exécution des contrats individuels.

L’encouragement à la constitution d’OP recueille un large consensus national et européen. Les OP sont les premiers artisans de la contractualisation et le meilleur moyen pour les producteurs de se regrouper.

Les OP peuvent être commerciales lorsqu’elles comprennent un transfert de propriété ou non commerciales. Il semblerait que les bénéfices de l’organisation des producteurs n’atteignent pleinement leurs effets en termes de contractualisation que lorsque l’OP est commerciale. Celle-ci se substitue alors pleinement non seulement au pouvoir de négociation des clauses des contrats de vente pour le compte de ses adhérents et la mise en marché de la production de ses membres mais surtout elle vend, en tant que propriétaire, la production de ses membres.

La contractualisation a été rendue obligatoire par décret pour les fruits et légumes frais et pour le lait de vache (depuis 2011). Elle a été rendue obligatoire par accord interprofessionnel pour la production ovine (depuis 2010).

Le médiateur des relations commerciales agricoles appelle de ses vœux des OP plus grandes pour véritablement peser dans les relations commerciales. Il a pris l’exemple de Lactalis, entreprise unique à laquelle font face 13 OP se concurrençant entre elles et représentant 17 000 producteurs de lait.

C’est également probablement du fait de cette relative faiblesse des OP que la FNSEA, entendue par vos rapporteurs, considère que : « Lactalis entretient une relation moyenâgeuse avec ses producteurs ». Tout est dit.

3. Le médiateur des relations commerciales agricoles

Les relations commerciales sont également améliorées par la création du médiateur des relations commerciales agricoles, qui a compétence pour régler les litiges sur tous types de contrats de produits agricoles et alimentaires.

La LMA de 2010 précitée avait créé un médiateur dont les compétences devaient être définies par décret. Le décret du 5 avril 2011 prévoyait les conditions de la médiation.

La loi d’avenir élève au niveau législatif la définition des compétences du médiateur : il peut être toujours saisi de tout litige, il doit en favoriser la résolution amiable, il peut toujours émettre des recommandations et des avis, il peut se prononcer sur le partage équitable de la valeur ajoutée et saisir la commission d’examen des pratiques commerciales. Tout litige entre professionnels relatif à l’exécution d’un contrat ayant pour objet la vente de produits agricoles ou alimentaires doit faire l’objet d’une procédure de médiation préalablement à toute saisine du juge, sauf si le contrat en dispose autrement ou en cas de recours à l’arbitrage. Les compétences du médiateur sont donc étendues au-delà des litiges strictement contractuels.

M. Francis Amand est actuellement le médiateur. En application du décret n° 2015-548 du 18 mai 2015 relatif au médiateur des relations commerciales agricoles, il dispose de deux médiateurs délégués.

Il a, le 21 juillet 2015, remis un rapport sur les prix des produits agricoles, au cœur de la crise des filières d’élevage.

Il a fait part à vos rapporteurs des litiges sur lesquels il est intervenu : il intervient autant au moment de la passation des contrats que lors de leur exécution.

Il est également compétent pour intervenir auprès des coopératives mais celles-ci lui opposent souvent la nécessité d’une intervention du conseil d’administration de ladite coopérative pour entériner les accords. Le médiateur travaille sur les statuts des coopératives afin que les adhérents coopérateurs puissent mieux faire valoir leurs avis. Il considère que la démocratie coopérative est encore à améliorer.

Le CNIEL regrette, quant à lui, que le médiateur formule des recommandations d’ordre général à partir de situations particulières.

A. L’INAPPLICATION DE L’ARTICLE RELATIF À L’ALLOCATION D’ESPACES D’INFORMATION PÉRIODIQUES GRATUITS POUR LES INTERPROFESSIONS

L’article 18 de la loi prévoit que les sociétés publiques de radio et de télévision mettent à la disposition des organisations professionnelles ou interprofessionnelles agricoles (viandes fraîches, fruits et légumes frais, produits laitiers frais) des espaces d’information périodiques gratuits. L’objectif est de sensibiliser le consommateur pour stimuler la demande de ces produits sans que les organisations professionnelles ou les interprofessions prennent en charge le coût très élevé de campagnes publicitaires.

Cet article avait été introduit par le Sénat puis supprimé par l’Assemblée nationale avant être repris en commission mixte paritaire. Le rapporteur avait alors indiqué que le Gouvernement diffusait déjà des campagnes d’information nutrionnelle sur les composantes d’un régime alimentaire équilibré sans que ces campagnes modifient le comportement d’achat des consommateurs. En outre, des campagnes d’information et de promotion des produits frais existent déjà, bien qu’elles soient payantes.

Le rapporteur avait alors considéré que prévoir des espaces d’information gratuits n’était pas justifié. Le Gouvernement partageait cet avis, il n’avait alors pas levé le gage prévu au II de l’article et justifié par le fait que ces espaces gratuits diminueraient les recettes publicitaires des sociétés publiques.

Depuis l’adoption de la loi, il semble que le Gouvernement n’ait pas changé de position. Le décret précisant les modalités d’application de cet article n’a jamais été publié et, selon les informations transmises par le cabinet du ministre de l’agriculture, le Gouvernement souhaiterait abroger cette disposition.

Les interprofessions entendues par vos rapporteurs sont en attente de précisions et d’avancées sur cette disposition qui est de nature à favoriser la compétitivité des produits frais français. À ce titre, un doute subsiste sur la conformité au droit de l’Union européenne de cette disposition favorisant les produits français.

Le CNIEL bute sur la définition du produit frais, qui peut désigner des produits très divers en fonction du périmètre choisi, les produits présent au rayon frais des distributeurs ne nécessitant pas toujours de s’y trouver.

Interfel a, quant à elle, relevé que l’accès des interprofessions aux programmes courts ne posait pas de difficulté mais que l’accès aux espaces de promotion gratuits ne pouvait être mis en œuvre faute de décret. Interfel considère que cette gratuité ne générera pas de coût pour les sociétés publiques car l’espace de promotion se substituera à des programmes classiques et non à des programmes publicitaires.

Faute de décret, il est impossible à vos rapporteur de se prononcer sur l’application de cette mesure.

B. LES GARANTIES DE L’ORIGINE ET DE LA QUALITÉ

1. Une mise en conformité au droit de l’Union européenne

L’article 21 prévoit d’habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnances pour assurer l’adaptation au droit de l’Union européenne en matière de garanties de l’origine et de la qualité, améliorer son efficacité et simplifier les procédures.

Les ordonnances ont bien été prises dans un délai d’un an suivant la promulgation de la loi : une ordonnance en juin 2015 et quatre ordonnances en octobre 2015.

ORDONNANCES PUBLIÉES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 21 DE LA LOI D’AVENIR

Article

Objet de l’ordonnance

Ordonnance

Projet de loi de ratification de l’ordonnance

Article 21, I, 1°, b

Modifier ou compléter, dans la mesure nécessaire pour assurer le respect des dispositions de la partie législative du code rural et de la pêche maritime et du droit de l’Union européenne en matière agricole, les dispositions relatives à la recherche et à la constatation des manquements et infractions et, le cas échéant, instituer ou supprimer des sanctions

Ordonnance n° 2015-616 du 4 juin 2015 modifiant le code rural et de la pêche maritime en vue d’assurer la conformité de ses dispositions avec le droit de l’Union européenne et modifiant les dispositions relatives à la recherche et à la constatation des infractions aux dispositions de son livre II

Projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2015-616 du 4 juin 2015 modifiant le code rural et de la pêche maritime en vue d’assurer la conformité de ses dispositions avec le droit de l’Union européenne et modifiant les dispositions relatives à la recherche et à la constatation des infractions aux dispositions de son livre II (n° 666, Sénat)

Article 21, I, 1°, a

Assurer la conformité et la cohérence de la partie législative du code rural et de la pêche maritime avec le droit de l’Union européenne

Ordonnance n° 2015-1248 du 7 octobre 2015 portant adaptation du code rural et de la pêche maritime au droit de l’Union européenne et ordonnance n° 2015-1245 du 7 octobre 2015 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles des professions réglementées par le code rural et de la pêche maritime

Projet de loi ratifiant les ordonnances prises sur le fondement des articles 21 et 55 de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (n° 277, Sénat)

Article 21, I, 1°, c

Simplifier la procédure de reconnaissance des appellations d’origine protégées, indications géographiques protégées, labels et spécialités traditionnelles garanties ainsi que les conditions dans lesquelles sont définies les conditions de production et de contrôle communes à plusieurs d’entre eux et les conditions d’établissement des plans de contrôle

Ordonnance n° 2015-1246 du 7 octobre 2015 relative aux signes d’identification de l’origine et de la qualité

Article 21, I, 1°, d

Prévoir la représentation des personnels au sein du conseil permanent de l’Institut national de l’origine et de la qualité

Article 21, I, 1°, e

Rectifier des erreurs matérielles, notamment des références erronées ou obsolètes

Article 21, I, 2°

Modifier les dispositions législatives du code général des impôts et du code rural et de la pêche maritime applicables dans le domaine des alcools et le domaine vitivinicole, afin de les simplifier, de tirer les conséquences de l’évolution du droit de l’Union européenne et d’assurer la cohérence de leurs périmètres et des régimes de sanction qu’elles prévoient.

Ordonnance n° 2015-1247 du 7 octobre 2015 relative aux produits de la vigne

Deux projets de loi de ratification ont été déposés sur le bureau du Sénat dans les 3 mois qui ont suivi la publication de ces ordonnances.

Un projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2015-616 du 4 juin 2015 modifiant le code rural et de la pêche maritime en vue d’assurer la conformité de ses dispositions avec le droit de l’Union européenne et modifiant les dispositions relatives à la recherche et à la constatation des infractions aux dispositions de son livre II a été déposé sur le bureau du Sénat le 26 août 2015. L’ordonnance a notamment pour objet de mettre en cohérence les dispositions des titres Ier, II et III du code rural et de la pêche maritime avec les dispositions du règlement (CE) n° 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes et modifiant les directives 64/432/CEE et 93/119/CE et le règlement (CE) n° 1255/97, et avec les dispositions du règlement (CE) n° 1069/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux et produits dérivés non destinés à la consommation humaine et abrogeant le règlement (CE) n° 1774/2002 (règlement relatif aux sous-produits animaux).

Cette ordonnance complète le code rural et de la pêche maritime afin de pouvoir sanctionner, dans le secteur vitivinicole, le non-respect des obligations de destruction, notamment par distillation, des vins ou des sous-produits et les arrachages irréguliers de vigne comme l’exige l’OCM unique. Il s’agit également de supprimer la sanction applicable lorsqu’un contrat n’a pas été examiné par FranceAgriMer ou par l’interprofession concernée.

Un second projet de loi ratifiant les ordonnances prises sur le fondement des articles 21 et 55 de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt a été déposé sur le bureau du Sénat le 16 décembre 2015. Seuls ses articles 4 à 7 concernent les quatre ordonnances du 7 octobre 2015 précitées (cf. tableau).

L’article 4 ratifie l’ordonnance n° 2015-1245 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles des professions réglementées par le code rural et de la pêche maritime.

Cette ordonnance transpose, pour les professions agricoles, la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 modifiant la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles et le règlement (UE) n° 1024/2012 concernant la coopération administrative par l’intermédiaire du système d’information du marché intérieur, dont l’échéance est fixée au 18 janvier 2016. Elle regroupe, dans les dispositions transversales, l’ensemble des règles applicables à toutes les professions réglementées, c’est-à-dire les règles qui régissent l’exercice à titre temporaire et occasionnel d’une activité (article L. 204-1 du code rural et de la pêche maritime relatif à la libre prestation de services) et l’accès partiel à ces professions (nouvel article L. 204-2 du même code).

L’article 5 ratifie l’ordonnance n° 2015-1246 relative aux signes d’identification de l’origine et de la qualité.

Cette ordonnance introduit la mention de qualité facultative « produit de montagne », fait entrer dans le champ des indications géographiques les produits vinicoles aromatisés, simplifie la procédure relative aux contrôles et clarifie les compétences respectives du conseil des agréments et contrôles de l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) et de son directeur général, en confiant au conseil des agréments et contrôles la définition des principes généraux du contrôle et au directeur de l’INAO la détermination des dispositions de contrôle communes à plusieurs cahiers des charges ou à plusieurs organismes de contrôle et l’approbation des plans de contrôle et prévoit également la représentation des personnels de l’INAO au sein du conseil permanent de l’établissement.

L’article 6 ratifie l’ordonnance n° 2015-1247 relative aux produits de la vigne qui modifie différentes dispositions du code rural et de la pêche maritime et du code général des impôts applicables dans le domaine des alcools et le domaine vitivinicole, afin de tirer les conséquences de l’évolution du droit de l’Union européenne, en particulier en ce qui concerne la gestion du potentiel de production viticole, organise les contrôles et les sanctions de ce dispositif, dont les modalités de gestion seront prévues par voie réglementaire et remplace, par ailleurs, pour plusieurs infractions commises dans le domaine vitivinicole, notamment les plantations de vignes sans autorisation, les sanctions pénales par des sanctions fiscales et administratives plus adaptées.

L’article 7 ratifie l’ordonnance n° 2015-1248 portant adaptation du code rural et de la pêche maritime au droit de l’Union européenne. Comme son titre l’indique, elle a pour objet d’adapter les dispositions du code rural et de la pêche maritime au droit de l’Union européenne.

L’ordonnance modifie principalement les dispositions relatives aux organisations de producteurs, associations de producteurs et groupements de producteurs, à la contractualisation et aux organisations interprofessionnelles, garantissant ainsi une mise en conformité des dispositions nationales avec le règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles. Elle procède également à quelques modifications du livre IX du code rural et de la pêche maritime, afin de le mettre en conformité avec le règlement (UE) n° 1379/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013 portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits de la pêche et de l’aquaculture et avec le règlement (CE) n° 1224/2009 du Conseil du 20 novembre 2009 instituant un régime communautaire de contrôle afin d’assurer le respect des règles de la politique commune de la pêche. Sont par ailleurs abrogées certaines dispositions devenues incompatibles avec le droit de l’Union européenne.

2. Une meilleure protection des appellations d’origine et des indications géographiques

En application de l’article 23, le directeur de l’INAO dispose désormais d’un droit d’opposition à la demande d’enregistrement d’une marque auprès du directeur de l’INPI s’il y a risque d’atteinte au nom, à l’image, à la réputation ou à la notoriété d’une appellation d’origine ou d’une indication géographique.

En outre, le directeur de l’INAO peut être sollicité par tout organisme de protection d’une appellation d’origine (AO) ou d’une indication géographique (IG).

Il s’agit souvent de l’usurpation des termes de qualité (« origine », « qualité »), des labels ou des noms d’AO ou d’IG reconnus. Le représentant de l’INAO, entendu par vos rapporteurs, a indiqué que, bien que le conseil permanent de l’INAO ait validé les modalités de la mise en œuvre de ce dispositif le 14 septembre 2016, cette possibilité n’a pas encore été utilisée. Toutefois, l’INAO reçoit une trentaine de courriers par an pour l’utilisation abusive des termes appellation d’origine contrôlée, label etc. Ces cas se solutionneraient toujours à l’amiable.

Même si le décret prévu au deuxième alinéa de l’article L. 643-3-2 du code rural et de la pêche maritime n’a pas encore été publié, l’INAO considère que cet article rend plus rapide la décision d’apposition d’un dispositif permettant d’authentifier le produit commercialisé : le ministre peut le décider par simple arrêté, alors qu’auparavant un décret signé par plusieurs ministres était requis.

Les demandes de reconnaissance des signes de qualité sont constantes mais le volume des demandes est bien inférieur à l’afflux connu dans les années 1990. L’INAO est en revanche beaucoup sollicité sur des demandes de modification des cahiers des charges des signes de qualité dont la procédure est aussi lourde que pour une nouvelle reconnaissance.

DEUXIÈME PARTIE :
PROTECTION DES ESPACES NATURELS, AGRICOLES ET FORESTIERS ET RENOUVELLEMENT DES GÉNÉRATIONS

I. PRÉSENTATION DE LA LOI

A. INTENTION DU LÉGISLATEUR

La protection du foncier agricole a régulièrement été au centre des lois agricoles en France. Le législateur a en effet toujours considéré que la préservation du foncier concourait non seulement à la protection des exploitations agricole mais également au renouvellement des générations d’agriculteurs et à la conservation de nos paysages, couplée plus récemment à la préservation de l’environnement.

Cette protection des espaces agricoles s’est doublée d’une préoccupation de protection des espaces naturels et forestiers, autant menacés par l’artificialisation des terres.

La loi d’avenir contribue ainsi au ralentissement et à la compensation de la perte de foncier agricole et à la meilleure gestion de ce foncier.

Le législateur a souhaité renforcer les outils départementaux et nationaux de contrôle et de protection de ces espaces afin, avant tout, de contribuer à la prise de conscience globale de nécessaire préservation des espaces non artificialisés. Cette prise de conscience passe par une meilleure évaluation et une analyse des indicateurs de la déprise agricole.

Le législateur a également transposé au monde agricole le principe de la compensation environnementale : ce principe impose l’obligation d’éviter et, le cas échéant, impose de compenser la réduction des surfaces agricoles et des conséquences économiques qui lui sont liées.

La protection des espaces se double d’un objectif de renouvellement des générations d’agriculteurs à travers lesquelles l’avenir de l’agriculture se joue.

Le statut des agriculteurs est clarifié par la création d’un registre des actifs agricoles, longtemps demandé par la profession.

L’installation et la transmission en agriculture sont favorisées par des aides financières et la couverture sociale des futurs exploitants agricoles. La priorité donnée à leur installation prime sur les agrandissements et les concentrations d’exploitations et est notamment assurée par le contrôle des structures des exploitations et l’élargissement des pouvoirs des SAFER dont les prérogatives de puissance publique servent cet objectif prioritaire.

B. DESCRIPTIF DES ARTICLES

L’article 24 instaure une coresponsabilité de l’État (préfet) et de la région (président du conseil régional) sur le plan régional de l’agriculture durable (PRAD). L’objectif est que les régions puissent définir elles-mêmes leurs priorités, leurs stratégies ; cette liberté qui leur est laissée étant la contrepartie de la mise à contribution de leurs budgets au titre de ces mêmes politiques.

L’article 25 renforce l’arsenal de protection des terres non urbanisées face à la pression de l’urbanisation, en donnant un rôle accru à la commission départementale de la consommation des espaces agricoles (CDCEA), qui devient la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers » (CDPENAF), dont le champ d’intervention est élargi aux espaces naturels et forestiers. La préservation des espaces agricoles, naturels et forestiers dans les documents de planification de l’utilisation de l’espace est encouragée. Elle intègre des représentants de la profession forestière. L’article instaure une protection particulière des surfaces portant des productions bénéficiant d’un signe d’identification de la qualité et de l’origine.

Cet article conforte également l’Observatoire national de la consommation des espaces agricoles (ONCEA), qui devient l’Observatoire des espaces naturels, agricoles et forestiers (OENAF). Il est transformé en un outil d’observation de l’artificialisation des terres en s’intéressant aux changements d’usage non seulement des terres agricoles mais aussi des forêts et des espaces naturels. Il en homologue les indicateurs pertinents.

Cet article permet de mieux prendre en compte l’enjeu de protection du foncier naturel, agricole et forestier dans les documents d’urbanisme.

Il renforce les associations foncières pastorales (AFP) en apportant deux modifications au cadre législatif qui s’applique à elles :

– les terres appartenant à des propriétaires non retrouvés ne sont plus incluses dans le périmètre pour une durée limitée à 5 ans mais pour une durée illimitée, et peuvent être mises à la disposition des agriculteurs dans le cadre d’une convention pluriannuelle de pâturage mais aussi dans le cadre d’un bail rural classique ;

– la majorité renforcée exigée par l’article L. 135-5 du code rural et de la pêche maritime pour autoriser l’AFP à réaliser des équipements autres qu’agricoles et forestiers sur son périmètre, qui était des deux tiers des propriétaires représentant les deux tiers de la superficie gérée, est allégée.

L’article 26 réforme le régime de l’attribution des biens de sections de communes à vocation agricole ou pastorale. Il instaure une priorité pour les agriculteurs résidant sur le territoire de la section.

L’article 27 prévoit la participation du public à la définition de la nouvelle distribution parcellaire dans le cadre du remembrement, à la réglementation départementale des boisements ainsi qu’à l’établissement de servitudes de passage de canalisations d’eau, dans le souci de conformité du code rural et de la pêche maritime aux exigences posées par la Charte de l’environnement.

L’article 28, sur le modèle de la compensation écologique qui vise à recréer un potentiel environnemental pour des espèces remarquables dégradées par un projet de grande ampleur, la compensation agricole a pour but de permettre de recréer du potentiel de production agricole perdu à l’échelle d’un territoire pour les mêmes projets. La compensation est nécessairement collective, peut être financière et fait suite à une étude préalable analysant les effets du projet sur l’économie agricole du territoire concerné.

L’article 29 élargit les missions et conforte les prérogatives des SAFER. La gouvernance des SAFER est révisée, dans le sens d’un plus grand pluralisme. Les SAFER sont constituées à l’échelle régionale ou interrégionale. La transparence et le contrôle des SAFER sont renforcés par leur adhésion à une structure regroupant l’ensemble des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural agréées et leur participation au fonds de péréquation géré par cette structure.

Elles sont mieux informées des transactions par la création d’une obligation de notification, par le notaire ou le cédant, de toute cession de parts ou d’actions de sociétés.

Le champ d’application matériel du droit de préemption des SAFER est étendu à de nombreux biens. Ce droit de préemption peut également s’appliquer partiellement. Les possibilités d’acquisition amiable de droits sociaux sont également élargies.

L’article 30 prévoit que les SAFER transmettent chaque année une comptabilité analytique aux commissaires du Gouvernement, ces derniers assurant leur diffusion publique.

L’article 31 révise le cadre législatif de l’installation en agriculture :

– en confiant la mise en œuvre de la politique d’installation à l’échelon régional ;

– en créant une couverture sociale pour les nouveaux installés ;

– en créant un nouveau dispositif de contrat de génération-transmission ;

– en renforçant le rôle du répertoire à l’installation et en étendant l’éventail des mesures pouvant être financées par le produit de la taxe sur la cession de terrains agricoles devenus constructibles.

L’article 32 a pour but l’amélioration du contrôle des structures des exploitations agricoles dans l’objectif de maintien d’une agriculture diversifiée, riche en emploi et génératrice de valeur ajoutée en limitant les agrandissements excessifs et les concentrations des exploitations.

Il remplace le schéma départemental par un schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA), chargé de déterminer les orientations de la politique régionale des structures, en lien avec le plan régional de l’agriculture durable (PRAD), et en prenant en compte les enjeux économiques, sociaux et environnementaux que ce dernier définit.

L’article 33 modernise les conditions d’affiliation à la mutualité sociale agricole pour les chefs d’exploitations agricoles, en remplaçant le critère de la surface minimale d’installation par un nouveau critère : l’activité minimale d’assujettissement, évaluée à partir de la surface ou du temps de travail ou encore du revenu généré par l’exploitation agricole.

L’article 34 clarifie l’assujettissement des paysagistes au régime social des non-salariés agricoles.

L’article 35 crée un registre des actifs agricoles (y compris pluriactifs). L’inscription à ce registre pourra conditionner le bénéfice de certaines aides publiques. Il répond à une demande ancienne des organisations professionnelles agricoles : disposer d’un registre des agriculteurs, au même titre que les commerçants disposent d’un registre du commerce.

La gestion du registre est donnée à l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA). La base de données gérée par l’APCA sera alimentée par les informations détenues par la MSA, mais aussi par celles détenues par les centres de formalité des entreprises (CFE). Seuls les agriculteurs, chefs d’exploitation ou salariés ayant la maîtrise de l’exploitation peuvent être inscrits sur le registre.

L’article 36 prévoit les mesures d’adaptation nécessaires permettant aux assurés d’Alsace-Moselle de bénéficier du dispositif de retraite anticipée pour pénibilité. Il prévoit aussi que les partenaires sociaux négocient un accord collectif prévoyant les modalités selon lesquelles les bûcherons bénéficient à partir de cinquante-cinq ans d’une allocation de cessation anticipée d’activité.

L’article 37 crée le titre emploi-service agricole (TESA) dans un but de simplification. Il permettra aux très petites entreprises agricoles (jusqu’à 20 salariés, aux termes de l’ordonnance) d’établir leur déclaration sociale nominative (DSN) sans avoir à s’équiper d’un logiciel de paie ou sans recourir à un centre de gestion.

L’article 38 demande au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur l’affiliation au régime social agricole des personnes exerçant des activités d’accueil social ayant pour support l’exploitation agricole.

I. APPLICATION DE LA LOI

LISTE DES DÉCRETS PUBLIÉS

Article

Base légale

Titre du décret publié

Objet

Article 24, 4°

Article L.111-2-1 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-686 du 17 juin 2015 relatif au plan régional de l’agriculture durable

Conditions dans lesquelles le plan régional de l’agriculture durable est arrêté par le représentant de l’État dans la région

Article 25.I.1

Article D.112-1-12 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-779 du 29 juin 2015 relatif à l’observatoire des espaces naturels, agricoles et forestiers

Composition observatoire et adaptations articles D.112-1-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime

Article 25
(I-2°et 2° bis)

Article L.112-1-1 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-644 du 9 juin 2015 relatif aux commissions départementales et interdépartementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers en métropole

Composition de la CDPENEAF (et modalités de saisine) Toilettage des articles : D. 112-I-II et D. 112-1-11-1

Article 27, 5°

Article L.161-10-1 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-955 du 31 juillet 2015 relatif à l’enquête publique préalable à l’aliénation des chemins ruraux

Réalisation de l’enquête préalable à l’aliénation d’un chemin rural pour cause d’utilité publique

Article 28

Article L.112-1-3 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2016-1190 du 31 août 2016 relatif à l’étude préalable et aux mesures de compensation prévues à l’article L. 112-1-3 du code rural et de la pêche maritime

Projets de travaux, d’ouvrages ou d’aménagements publics et privés devant faire l’objet d’une étude préalable, et, le cas échéant, de compensation collective.

Article 29, 2°

Article L.141-1-1, I du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-954 du 31 juillet 2015 relatif aux sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural

Conditions d’ information des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural par le notaire ou, dans le cas d’une cession de parts ou d’actions de sociétés, par le cédant, de toute cession entre vifs conclue à titre onéreux ou gratuit portant sur des biens ou droits mobiliers ou immobiliers

Article 29, 3°

Article L.141-6, II, 2° du code rural et de la pêche maritime

Adhésion à une structure regroupant l’ensemble des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural agréées et participation au fonds de péréquation géré par cette structure

Article 31, I

Article L.330-2 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2016-78 du 29 janvier 2016 relatif au dispositif d’installation progressive en agriculture

Instauration d’un dispositif d’installation progressive mis en place sur une période maximale de cinq ans afin de faciliter l’accès aux responsabilités de chef d’exploitation

Article 31, I

Article L.330-3 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-972 du 31 juillet 2015 relatif au contrat de couverture sociale pour l’installation en agriculture

Conditions pour bénéficier d’un contrat de couverture sociale

Article 31, I

Article L.330-3 du code rural et de la pêche maritime

Contenu, durée maximale et les conditions de renouvellement du contrat de couverture sociale pour l’installation en agriculture

Article 31, I

Article L.330-4, III du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-777 du 29 juin 2015 relatif à l’aide aux exploitations agricoles employant un salarié ou un stagiaire dans la perspective de lui transmettre l’entreprise lorsque les engagements ne sont pas tenus

Durée, montant de l’aide dont bénéficie l’exploitation dans le
cadre du contrat de génération agricole et conditions dans lesquelles cette aide est remboursée

Article 31,I

Article L.330-5 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-665 du 10 juin 2015 portant diverses dispositions d’application de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt et diverses mesures de clarification et simplification

Désignation de l’autorité administrative qui reçoit l’information de cessation d’exploitation

Article 31, IV, 1, a

Article L.511-4 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-781 du 29 juin 2015 fixant les conditions de participation des chambres d’agriculture à la politique d’installation en agriculture

Modalités de la mission de service public liée à la politique d’installation assurée par les chambres d’agriculture

Article 32, I, 1°

Article L.312-1, V du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-713 du 22 juin 2015 relatif au schéma directeur régional des exploitations agricoles et au contrôle des structures des exploitations agricoles

Modalités d’élaboration et de révision du schéma directeur régional des exploitations agricoles

Article 32

Articles L.331-1 à L331-3 du code rural et de la pêche maritime

Modalités d’application du contrôle des structures

Article 32, III, 2°

Article L.331-3 du code rural et de la pêche maritime

Conditions dans lesquelles l’autorité administrative assure la publicité des demandes d’autorisation dont elle est saisie

Article 33, 1°

Article L.722-5, IV du code rural et de la pêche maritime

Décret n°2015-310 du 18 mars 2015 relatif aux conditions d’assujettissement au régime de protection sociale des non-salariés agricoles

Activité minimale d’assujettissement de l’exploitation ou de l’entreprise agricole pour qu’un dirigeant soit considéré comme chef d’exploitation ou d’entreprise agricole

Article 33, 3°

Article L.722-6 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-311 du 18 mars 2015 relatif aux conditions d’assujettissement au régime de protection sociale des non-salariés agricoles

Nouvelles modalités d’assujettissement au régime de protection sociale des non-salariés des professions agricoles

Article 36, I

Article L.761-22 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-227 du 27 février 2015 relatif aux modalités d’application dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle du dispositif de compensation de la pénibilité prévu par la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites

Retraite anticipée pour pénibilité des salariés et non salariés agricoles (Bas-Rhin, Haut-Rhin, Moselle)

LISTE DES MESURES EN ATTENTE DE DÉCRET

Article de la loi

Base légale

Objet du décret

Explication avancée par le cabinet du ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt

Article 25, I, 2°

Article L.112-1-1 du code rural et de la pêche maritime

Notion de réduction substantielle des surfaces affectées à des productions bénéficiant d’une appellation d’origine protégée et d’atteinte substantielle aux conditions de production de l’appellation résultant d’un projet d’élaboration, de modification ou de révision d’un plan local d’urbanisme, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale

Le projet serait rédigé.

Article 25, I - 4° et 5°

Code de l’urbanisme

Toilettage du code de l’urbanisme

Décret devenu inutile par la publication d’un autre décret modifiant le code de l’urbanisme

Article 35, I

Article L.311-2 du code rural et de la pêche maritime

Conditions de tenue du registre des actifs agricoles où est inscrit tout chef d’exploitation agricole

Ce décret est complexe à rédiger, la consultation des professionnels se poursuit mais les syndicats agricoles ont des visions divergentes.

Article 35, I

Article L.311-2, 2° du code rural et de la pêche maritime

Conditions d’application de l’article relatif au registre agricole

Ce décret est complexe à rédiger, la consultation des professionnels se poursuit.

Article 37

Article L.712-8 du code rural et de la pêche maritime

Date d’entrée en vigueur et modalités d’application du titre emploi-service agricole

La date d’entrée en vigueur de ce dispositif a été repoussée au 1er janvier 2017.

RAPPORT DÉPOSÉ EN APPLICATION DE LA LOI

25/04/2016

Rapport étudiant les possibilités et l’opportunité d’affilier au régime social agricole les personnes exerçant des activités d’accueil social ayant pour support l’exploitation (article 38)

A. LA PRÉSERVATION DES ESPACES AGRICOLES, NATURELS ET FORESTIERS

Entre 2006 et 2015, l’artificialisation des terres a gagné 490 000 hectares, environ 55 000 hectares par an dont près des deux tiers aux dépens des espaces agricoles. Les conséquences sont le mitage des terres agricoles, le recul des activités agricoles et l’imperméabilisation des sols aux conséquences écologiques et économiques extrêmement graves.

1. Un Observatoire des espaces naturels, agricoles et forestiers (OENAF) élargi

L’article 25 renforce les mesures permettant de limiter la consommation des espaces non urbains face à la pression de l’urbanisation.

L’article 25 a élargi les compétences de l’ancien Observatoire national de la consommation des espaces agricoles (ONCEA) aux surfaces forestières et naturelles. Il devient l’Observatoire des espaces naturels, agricoles et forestiers (OENAF). Il a pour missions :

– d’élaborer des outils pertinents pour mesurer le changement de destination des espaces naturels, forestiers et agricoles et homologuer des indicateurs d’évolution ;

– d’évaluer la consommation de ces espaces en coopération avec les observatoires régionaux des espaces naturels, agricoles et forestiers ;

– d’apporter un appui méthodologique aux collectivités territoriales et aux commissions départementales de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) pour l’analyse de leur consommation. L’observatoire s’appuie pour cela sur les travaux et les outils de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN).

Le décret n° 2015-779 du 29 juin 2015 relatif à l’observatoire des espaces naturels, agricoles et forestiers précise sa composition. En application de l’arrêté du 16 mars 2016 portant nomination à l’Observatoire des espaces naturels, agricoles et forestiers, il est actuellement présidé par la députée Fanny Dombre-Coste.

Il est trop tôt pour établir un bilan de l’OENAF mais son action poursuit celle engagée par l’ONCEA et il suit les recommandations du rapport remis au ministre de l’agriculture de l’agroalimentaire et de la forêt (6) en mai 2014.

2. Les commissions départementales des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF)

Pour cela, les commissions départementales de la consommation des espaces agricoles (CDCEA) deviennent les commissions départementales des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) au champ de compétences élargi. Elles sont placées sous la présidence du préfet ou de son représentant.

Cet élargissement correspond à la volonté de renforcer la protection des espaces naturels, agricoles et forestiers lorsqu’ils sont convoités par des projets publics ou privés consommateurs d’espace, ou lorsque les projets portent atteinte à des surfaces consacrées à des productions bénéficiant d’une appellation d’origine.

Les documents de planification de l’utilisation de l’espace tiennent désormais mieux compte de cet objectif de préservation, dans la continuité de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (dite loi « ALUR »).

Il est important de relever que le texte concerne explicitement les surfaces « à vocation » ou « à usage » agricole, ce qui couvre potentiellement une grande partie du territoire et non plus seulement les espaces agricoles au sens du code de l’urbanisme. Le législateur a relevé que bien d’autres espaces étaient soumis à une même pression urbanistique.

Cet article 25 prévoit notamment une protection renforcée des terres porteuses de signes d’identification de la qualité et de l’origine (SIQO). La protection peut désormais s’exercer sur des terrains qui pourraient, dans le futur, produire des SIQO.

Le décret n° 2015-644 du 9 juin 2015 sur les commissions départementales de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévoit que sont désormais membres des CDPENAF, avec voix consultative, un représentant des SAFER et le directeur de l’agence local de l’Office national des forêts.

Il précise également que sont nouveaux membres de plein droit les représentants, le cas échéant : des métropoles, de l’association des communes forestières, d’une association locale d’un organisme national à vocation agricole et rurale, du syndicat des propriétaires forestiers, de la fédération des chasseurs et de l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO).

L’INAO est en effet devenu membre de droit des CDPENAF avec voix délibérative. Auparavant, l’INAO ne pouvait être désigné que comme expert. Il y participe désormais dès lors qu’un dossier est susceptible d’avoir une incidence sur la surface d’un SIQO porté sur le territoire d’une commune. Le représentant de l’INAO a mis en avant le fait que le dispositif concernait l’ensemble des SIQO et non pas seulement les AOC viticoles, jusque-là déjà bien protégées. En novembre 2016, l’INAO avait participé à 480 commissions dans la quasi-totalité des départements métropolitains.

Manque aux mesures d’application de cet article le décret précisant les notions de réduction substantielle des surfaces affectées à des productions bénéficiant d’une appellation d’origine protégée et d’atteinte substantielle aux conditions de production de l’appellation résultant d’un projet d’élaboration, de modification ou de révision d’un plan local d’urbanisme, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale.

L’avis conforme de la CDPENAF est requis si le représentant de l’État considère que l’un de ces deux cas s’applique mais, sans mesure réglementaire d’application, les conditions d’application de cette saisine ne sont pas précisées. Conformément à l’étude d’impact jointe au projet de loi (note 17) : « le décret fixera des critères suffisamment précis (impact du projet sur le tonnage, nombre d’exploitations sous appellation d’origine protégée concernées, proportion de surfaces impactées notamment) pour permettre au représentant de l’État dans le département d’apprécier si un avis de la CDPENAF doit être favorable en métropole. L’objectif du décret sera de fournir un cadre d’analyse, commun à l’ensemble du territoire métropolitain, et opérationnel pour les directions départementales des territoires (et de la mer) (DDT[M]) afin de limiter l’emploi d’équivalents-temps-plein (ETP) à cette tâche ».

A. ÉVITER, RÉDUIRE, COMPENSER LES EFFETS DES INFRASTRUCTURES SUR L’ÉCONOMIE AGRICOLE : LE PRINCIPE DE COMPENSATION AGRICOLE

L’article 28 crée, sur le modèle de la compensation environnementale, le principe de compensation agricole pour dédommager le préjudice subi par la perte de foncier liée aux aménagements du territoire. À la différence de la compensation écologique, la compensation est ici économique et collective puisqu’elle peut non seulement compenser le nombre d’hectares affectés mais aussi la perte de richesse économique collective liée à un territoire et à une production, en termes de valeur ajoutée et d’emplois.

La nature de la compensation peut être diverse, en fonction des territoires : surface agricole, financement, par les aménageurs, d’un projet agricole local, financement d’un fonds de soutien au développement local etc.

Certains projets d’aménagements donnaient lieu à des indemnisations mais sans que soit compensée la perte de potentiel économique engendrée par la consommation de foncier agricole sur l’environnement économique (emploi, fournisseurs de matériel, activités de transformation agroalimentaire, etc.).

Cet article prévoit que les projets de travaux, d’ouvrages ou d’aménagements qui sont susceptibles d’avoir des conséquences négatives importantes sur l’économie agricole font l’objet d’une étude préalable qui comprend :

– l’étude des effets du projet ;

– les mesures envisagées pour éviter et réduire les effets négatifs du projet ;

– les mesures de compensation collective visant à consolider l’économie agricole du territoire.

Chronologiquement, les mesures envisagées doivent avant tout permettre d’éviter et de réduire les effets du projet et, le cas échéant, de prévoir des compensations.

Un décret devait déterminer les modalités d’application de cet article, en particulier les projets devant faire l’objet de cette étude préalable. Il a tardivement été pris puisque l’article 28 prévoyait que le nouvel article L. 112-1-3 du code rural et de la pêche maritime devait s’appliquer au plus tard le 1er janvier 2016 et le décret n’a été publié que le 31 août de cette même année.

1. Une exigence limitée aux projets susceptibles de générer des impacts importants

Les plans d’urbanisme et les plans d’aménagement sont exclus du dispositif. La nouvelle étude ne concerne que les projets d’une taille importante (voir infra).

Le décret n° 2016-1190 du 31 août 2016 relatif à l’étude préalable et aux mesures de compensation prévues à l’article L. 112-1-3 du code rural et de la pêche maritime précise que sont concernés les projets répondant à trois critères cumulatifs :

– les projets soumis à l’étude d’impact environnementale (article L. 122-1 du code de l’environnement). Vos rapporteurs relèvent que le nombre de projets soumis à étude d’impact environnementale a par ailleurs été réduit du fait d’un examen au cas par cas institué par un autre décret (7), pris en application de l’article 6 de l’ordonnance n° 2016-1058 du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l’évaluation environnementale des projets, plans et programmes prévue à l’article 106 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. Ainsi, un projet relevant de l’étude d’impact au cas par cas est dispensé d’étude préalable agricole, y compris s’il satisfait aux deux autres critères prévus par le décret du 31 août 2016 précité ;

– les projets situés en tout ou partie soit sur une zone agricole, forestière ou naturelle délimitée par un document d’urbanisme affectée à une activité agricole dans les 5 années précédant le projet, soit sur une zone à urbaniser affectée à une activité agricole dans les 3 années précédant le projet. À défaut de document d’urbanisme, sont également concernées les surfaces affectées à une zone agricole dans les 5 années précédant le projet. On remarque que ces zones sont restreintes à celles où l’activité agricole et effective ou a été récente, ce qui est en décalage avec le code de l’urbanisme qui fonde le classement en zone agricole sur le potentiel agronomique des parcelles et non sur leur exploitation effective. Les parcelles situées en zone urbaine mais classées en terrains cultivés par un plan local d’urbanisme sont également exclues du dispositif ;

– les projets dont la surface prélevée sur les zones citées à l’alinéa précédent est supérieure ou égale à 5 hectares. Le préfet peut déroger à ce seuil et appliquer le dispositif à des surfaces comprises entre 1 et 10 hectares en tenant compte de la valeur ajoutée et du type de production ; la CDPENAF peut moduler ce seuil. Notons que les parcelles ne sont soumises à l’évaluation agricole que si elles sont soumises à une étude d’impact environnemental, qui résulte, elle, souvent, du franchissement de seuils de superficie bien plus importants...

Ce décret précise également que l’étude préalable comprend :

1° Une description du projet et la délimitation du territoire concerné ;

2° Une analyse de l’état initial de l’économie agricole du territoire concerné (production agricole primaire, première transformation et commercialisation par les exploitants agricoles et justification du périmètre retenu par l’étude) ;

3° L’étude des effets positifs et négatifs du projet sur l’économie agricole de ce territoire : impact sur l’emploi, évaluation financière globale des impacts ;

4° Les mesures envisagées et retenues pour éviter et réduire les effets négatifs notables du projet. L’étude établit que ces mesures ont été correctement étudiées. Elle indique, le cas échéant, les raisons pour lesquelles elles n’ont pas été retenues ou sont jugées insuffisantes. L’étude tient compte des bénéfices, pour l’économie agricole du territoire concerné, qui pourront résulter des procédures d’aménagement foncier ;

5° Le cas échéant, les mesures de compensation collective envisagées pour consolider l’économie agricole du territoire concerné, l’évaluation de leur coût et les modalités de leur mise en œuvre.

2. Une portée de l’évaluation incertaine

L’évaluation réalisée par le maître d’ouvrage (à sa charge) doit être transmise au préfet mais sans que le décret ne précise à quel stade de la procédure d’instruction du projet.

La CDPENAF rend son avis dans les 2 mois. Le préfet rend son avis sur l’étude dans un délai de 4 mois. La CDPENAF et le préfet peuvent compléter les mesures de compensation collective nécessaires.

Un doute subsiste sur la teneur des mesures compensatoires à prendre : le maître d’ouvrage doit simplement informer le préfet sur leur mise en œuvre à « une périodicité adaptée à leur nature ».

Quelles seront les articulations de ces mécanismes de compensation avec ceux exigés en matière de compensation environnementale ?

Il est trop tôt pour véritablement évaluer les effets de cette mesure, applicable seulement depuis le 1er décembre 2016 aux projets dont l’étude d’impact est transmise à l’autorité environnementale après cette date.

L’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA), qui regrette la portée limitée des projets concernés, est néanmoins optimiste et considère que cette procédure est un outil puissant pour favoriser et améliorer le dialogue en amont des projets d’aménagement, y compris ceux situés en dehors du périmètre du décret. Ce dispositif permet de reconnaitre formellement la place de l’agriculture dans les territoires et sa contribution à leur dynamique économique.

B. L’AMÉLIORATION DE L’EFFICACITÉ DE L’INTERVENTION DES SOCIÉTÉS D’AMÉNAGEMENT FONCIER ET D’ÉTABLISSEMENT RURAL (SAFER)

Comme l’indique l’étude d’impact du projet de loi d’avenir, « les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) ont été créées en 1960 comme outil d’amélioration des structures des exploitations agricoles, en particulier pour l’installation, ainsi que de régulation et de maîtrise du marché foncier rural ». Au fil des lois agricoles et foncières, ces missions ont été élargies au développement rural, à la préservation de l’environnement, à la protection des ressources naturelles et à la diversité biologique, à la transparence du marché foncier. Pour assurer ces missions, les SAFER disposent d’un droit de préemption sur les aliénations de biens agricoles, qui constitue une importante prérogative de puissance publique.

1. Nouvelle gouvernance des SAFER

La gouvernance des SAFER est révisée, dans le sens d’un plus grand pluralisme.

L’obtention de l’agrément ministériel par une SAFER est désormais subordonnée à la condition que ses statuts prévoient la présence, dans son conseil d’administration, de trois collèges comportant des représentants :

– des organisations syndicales à vocation générale d’exploitants agricoles représentatives à l’échelle régionale, ainsi que des chambres régionales d’agriculture, auxquels peuvent s’ajouter, pour atteindre, le cas échéant, le nombre de membres requis pour ce collège, d’autres représentants professionnels agricoles proposés par les chambres régionales d’agriculture ;

– des collectivités territoriales de leur zone d’action et, le cas échéant, des établissements publics qui leur sont rattachés ;

– et d’autres personnes, dont l’État, des actionnaires de la société et des représentants des associations agréées de protection de l’environnement et des fédérations départementales, interdépartementales ou régionales des chasseurs.

Interrogée par vos rapporteurs, la Fédération nationale des SAFER (FNSAFER) considère que les SAFER ont peu de marges pour constituer les collèges, en particulier le troisième collège dans lequel peu de place est accordée aux actionnaires des SAFER. Nombre d’actionnaires, qui apportent pourtant des capitaux importants aux SAFER, ne sont pas membres de droit du conseil d’administration et, les places étant limitées, le nombre de demandes est bien supérieur au nombre de postes. Il arrive, par exemple, qu’une banque ou une collectivité territoriale soit un actionnaire important d’une SAFER sans qu’elle obtienne pour autant un poste d’administrateur et donc un droit de vote au conseil d’administration de celle-ci. La solution trouvée est de leur accorder un poste de censeur leur permettant d’assister aux réunions du conseil d’administration mais sans que cela s’accompagne d’un droit de vote.

Les trois collèges doivent rechercher une composition équilibrée pour les femmes et les hommes. La représentation minimale de chaque sexe est fixée à 30 % des membres.

Dans les faits, les SAFER sollicitent les organisations membres de leurs conseils d’administration sans qu’elles puissent savoir à l’avance si ces organisations désigneront une femme. La parité devra être établie lors du prochain renouvellement des collèges entre le 1er janvier et le 30 juin 2017.

Les statuts doivent également prévoir l’adhésion à une structure regroupant l’ensemble des SAFER agréées et la participation au fonds de péréquation géré par cette structure. Ce fonds de péréquation est destiné à remédier aux fortes inégalités de ressources qui existent entre les différentes SAFER et qui sont dues aux niveaux d’activité variables des marchés fonciers locaux. La Fédération nationale des SAFER est la structure regroupant l’ensemble des SAFER agréées et qui gère le fonds de péréquation.

Ces deux dispositions renforcent le rôle et les responsabilités de la tête de réseau des SAFER et vont dans le sens d’une plus grande affirmation de la place de la FNSAFER et du renforcement de la solidarité entre les SAFER. Le fonds de péréquation existait mais il n’était pas reconnu par la loi. À la date de publication du présent rapport la création du fonds était actée par la FNSAFER mais sa reconnaissance par le ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la pêche était encore en cours.

Le décret n° 2015-954 du 31 juillet 2015 relatif aux sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural précise les conditions d’adhésion à la structure regroupant l’ensemble des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural agréées (FNSAFER) et leur participation au fonds de péréquation géré par cette structure.

La loi d’avenir poursuit le mouvement déjà engagé de régionalisation des SAFER. Les SAFER sont désormais constituées à l’échelle régionale ou interrégionale. Leur zone d’action est, sans changement, définie dans la décision d’agrément des ministres chargés de l’agriculture et de l’économie.

Selon la FNSAFER, la régionalisation est en cours et sera achevée en juillet 2017 à l’exception de la SAFER Aquitaine qui dispose d’un délai supplémentaire jusqu’en 2019. Il résultera de la régionalisation en cours une plus grande hétérogénéité des SAFER en taille. Certaines SAFER auront des moyens importants et pourront financer plus facilement certaines actions, d’autres seront moins favorisées.

Dans son rapport annuel pour 2014, la Cour des comptes a critiqué le manque de contrôle et de transparence des SAFER, aussi la loi d’avenir impose-t-elle de nouvelles obligations comptables aux SAFER. Elles doivent désormais établir chaque année une comptabilité analytique, selon des règles et un plan comptable communs à toutes les SAFER. Les commissaires du Gouvernement sont destinataires des documents comptables produits.

2. Une meilleure information des SAFER

Les SAFER doivent être informées par le notaire ou, dans le cas d’une cession de parts ou d’actions de sociétés, par le cédant, de toute cession entre vifs conclue à titre onéreux ou gratuit portant sur des biens ou droits mobiliers ou immobiliers. Cette disposition n’est entrée en vigueur que le 1er mars 2016, en application du décret n° 2015-954 du 31 juillet 2015 relatif aux sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural.

Les sanctions applicables au cas de non-respect de l’obligation d’information diffèrent selon que la SAFER compétente était autorisée à exercer son droit de préemption ou non.

Si la SAFER disposait du droit de préemption sur une vente, elle peut saisir le tribunal de grande instance pour lui demander soit d’annuler la vente, soit de la déclarer acquéreur en lieu et place du tiers. Lorsqu’elle estime qu’une cession conclue à titre gratuit aurait dû lui être notifiée elle peut demander au tribunal de grande instance d’annuler la vente.

Si la SAFER ne disposait pas du droit de préemption, à sa demande ou d’office l’autorité administrative peut prononcer une amende administrative.

Vos rapporteurs n’ont que peu de recul sur ce dispositif, qui n’était pas applicable avant la publication du décret. La FNSAFER considère néanmoins qu’elle n’est pas informée de l’ensemble des transactions : les parts de ventes de certains groupements fonciers ne sont pas notifiées.

Aucune suite judiciaire ou administrative n’a pour l’instant été mise en place car c’est à la SAFER de prouver qu’elle n’a pas été informée de la cession et il faut pour cela qu’elle ait connaissance de la cession.

3. L’élargissement du droit de préemption

a. Un droit devenu permanent

Jusqu’à la loi d’avenir, le droit de préemption n’était pas un droit permanent. Les SAFER n’étaient habilitées à l’exercer que pour une période limitée, fixée par le décret attributif (5 ans en général). Le 9° de l’article 29 de la loi d’avenir revient sur cette règle afin de renforcer les moyens des SAFER.

Désormais, en vue de la définition des conditions d’exercice du droit de préemption mentionné à l’article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime, la SAFER saisit le préfet de région d’une demande indiquant les zones dans lesquelles elle estime nécessaire de pouvoir exercer ce droit et, le cas échéant, la superficie minimale des terrains auxquels il devrait s’appliquer. Le préfet de région doit alors recueillir l’avis des commissions départementales d’orientation de l’agriculture et des chambres d’agriculture compétentes dans la zone considérée et consulter le public dans des conditions permettant de recueillir ses observations. Au vu de ces avis et de la synthèse des résultats de la consultation du public, les conditions d’exercice du droit de préemption sont fixées par décret pour chaque SAFER, sans limite de durée.

À l’occasion du renouvellement du programme pluriannuel d’activité de la SAFER et sur demande motivée des commissaires du Gouvernement ou de cette société, il peut être procédé au réexamen des conditions d’exercice du droit de préemption.

b. Un champ d’application étendu

Les SAFER ont vocation à acheter des biens ruraux, des terres, des exploitations agricoles ou forestières librement mises en vente par leurs propriétaires pour les revendre. La législation autorise également ces sociétés à acquérir des parts de sociétés civiles à objet agricole donnant vocation « à l’attribution en propriété ou en jouissance de biens agricoles ou forestiers », voire l’intégralité des parts ou actions de sociétés dont l’objet principal est l’exploitation ou la propriété agricole, et notamment des parts de groupements fonciers agricoles (GFA) par dérogation à l’article L. 322-2 du code rural et de la pêche maritime qui fixe un plafond.

La loi d’avenir élargit ces possibilités d’acquisition amiable de droits sociaux. Elle prévoit ainsi que, pour la réalisation de leurs missions, les SAFER peuvent désormais acquérir des actions ou parts de sociétés ayant pour objet principal l’exploitation ou la propriété agricole, notamment, par dérogation à l’article L. 322-1 du même code, la totalité ou une partie des parts de GFA ou de groupement foncier rural (GFR).

L’acquisition amiable peut donc porter dorénavant, par exemple, sur tout ou partie du capital social d’une société civile d’exploitation (SCEA), d’une société à responsabilité limitée (SARL) agricole ou bien encore d’un GFA ou d’un GFR (mais dans la limite maintenue de 30 % en cas d’acquisition d’une partie seulement du capital de ces groupements).

Le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (Sapin II) prévoyait de supprimer cette limite de 30 % mais l’article a été déclaré contraire à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2016-741 DC du 8 décembre 2016.

Le champ d’application matériel du droit de préemption des SAFER est étendu à de nombreux biens.

Le droit de préemption de la SAFER continue de s’appliquer en cas d’aliénation à titre onéreux de biens immobiliers à usage agricole et de biens mobiliers qui leur sont attachés ou de terrains nus à vocation agricole, sous réserve, comme précédemment, que leur superficie atteigne ou dépasse le seuil de préemption fixé par le décret attributif. En revanche, les critères retenus pour caractériser les terrains nus à vocation agricole pouvant faire l’objet d’un droit de préemption sont modifiés et ce, afin de clarifier l’assiette foncière du droit de préemption de la SAFER. La vocation agricole des terrains nus résulte désormais des documents d’urbanisme applicables.

Lorsque l’aliénation à titre onéreux porte de façon conjointe sur des terrains à vocation agricole et des droits à paiement découplés créés au titre de la politique agricole commune, le droit de préemption de la SAFER peut désormais s’exercer globalement sur l’ensemble ainsi constitué aux seules fins d’une rétrocession conjointe des terrains et des droits ainsi acquis.

Le droit de préemption continue de pouvoir être exercé, comme auparavant, en cas d’aliénation à titre onéreux de bâtiments d’habitation faisant partie d’une exploitation agricole. Mais la SAFER peut désormais exercer également cette prérogative en cas d’aliénation à titre onéreux des bâtiments situés soit dans une zone agricole protégée, soit à l’intérieur d’un périmètre de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains, soit dans une zone agricole ou une zone naturelle et forestière délimitée par un document d’urbanisme ou, en l’absence de document d’urbanisme, dans les secteurs ou parties non encore urbanisés des communes, et qui ont été utilisés pour l’exercice d’une activité agricole au cours des cinq dernières années qui ont précédé l’aliénation, pour leur rendre un usage agricole.

Les SAFER peuvent exercer, sous certaines conditions, leur droit de préemption sur les droits démembrés de la propriété de biens ruraux. Toutefois, afin de garantir les droits du titulaire de l’autre élément du bien démembré, la loi prévoit que les acquisitions de la nue-propriété d’un bien par ses usufruitiers et celles de l’usufruit d’un bien par ses nus-propriétaires échappent au droit de préemption de la SAFER.

Principale modification apportée par la loi d’avenir, les SAFER peuvent désormais exercer le droit de préemption en cas d’aliénation à titre onéreux de la totalité des parts ou actions d’une société ayant pour objet principal l’exploitation ou la propriété agricole.

Cette innovation a toutefois été rapidement contournée par des montages sociétaires qui ont fait grand bruit au début de l’année 2016. Ces montages juridiques consistaient simplement en l’aliénation d’une partie des parts ou actions d’une société agricole. Dans ce cas et même si l’aliénation portait sur 99 % des parts, le droit de préemption de la SAFER ne pouvait s’appliquer. Dans le cas de la cession de terres agricoles à une société chinoise dans le Berry, celle-ci portait sur 99 % des parts.

Alertés par ces situations de contournement, les parlementaires ont intégré un volet foncier au projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (Sapin II). Ces dispositions ont également été déclarées contraires à la Constitution par la décision du 8 décembre 2016 précitée.

Les articles 87 à 91 renforçaient la protection foncière en permettant aux SAFER :

– d’utiliser leur droit de préemption pour acquérir la totalité des parts de groupements fonciers agricoles ou ruraux et pour intervenir en cas de cession partielle de parts pour les sociétés dédiées au portage de foncier et avec l’objectif d’installer un agriculteur ou de consolider les exploitations existantes ;

– de maintenir leur participation au capital d’une société de personnes (jusqu’à 5 ans) dans le but de rétrocéder les droits sociaux.

Pour garantir la transparence des sociétés qui acquièrent du foncier et éviter les montages juridiques aux finalités spéculatives, l’acquisition de foncier agricole aurait dû se faire par l’intermédiaire d’une société dont l’objet principal est la propriété agricole.

c. La création d’un droit de préemption partiel

La loi d’avenir a prévu de remédier au cas où des terres ou des bâtiments agricoles étaient mis en vente avec un ensemble immobilier résidentiel ou des biens bâtis qui ne seraient plus utilisés pour l’exercice d’une activité agricole. Le droit de préemption des SAFER était autrefois paralysé en raison de l’indivisibilité des biens aliénés et du principe d’interprétation stricte du droit de préemption. La loi autorise la préemption partielle.

La SAFER est désormais autorisée à exercer son droit de préemption sur une partie seulement des biens aliénés lorsque l’aliénation porte simultanément sur des terrains à usage agricole ou à vocation agricole et sur une ou plusieurs des catégories de biens suivantes :

– des bâtiments à usage agricole et les biens mobiliers qui leur sont attachés ;

– des bâtiments d’habitation faisant partie d’une exploitation agricole et/ou des bâtiments situés soit dans une zone agricole protégée, soit à l’intérieur d’un périmètre de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains, soit dans une zone agricole ou une zone naturelle et forestière délimitée par un document d’urbanisme ou, en l’absence de document d’urbanisme, de bâtiments situés dans les secteurs ou parties non encore urbanisés des communes, utilisés pour l’exercice d’une activité agricole au cours des cinq dernières années précédant l’aliénation ;

– des biens pour lesquels elle ne bénéficie pas d’un droit de préemption.

Pour la FNSAFER, le droit de préemption, y compris élargi, a toujours été un moyen d’entrer en négociation avec un exploitant plus qu’un outil coercitif. En ce qui concerne le nouveau droit de préemption partiel la logique consistant à donner la priorité à la négociation est également privilégiée. Lorsque le droit de préemption partiel est utilisé, le vendeur demande généralement à la SAFER d’acquérir l’ensemble de la propriété. En général, la procédure d’acquisition est abandonnée car l’acquéreur ne souhaite qu’une partie du bien vendu.

Activité des SAFER en 2015

Elles ont acquis 10 300 biens pour une surface totale de 83 900 hectares et pour une valeur de 1,04 milliard d’euros. Ces chiffres sont en hausse par rapport à 2014 de + 1,5 % en nombre, + 1 % en surface et + 1 % en valeur.

Elles ont exercé 1 260 préemptions (1 140 préemptions simples et 120 préemptions avec révision de prix) sur une surface de 6 000 hectares et pour une valeur de 54 millions d’euros.

Elles ont reçu 220 300 notifications de la part des notaires et ont procédé à 12 200 rétrocessions ce qui représente au total 232 500 informations de vente traitées, en hausse de 9 % en nombre, 6 % en surface et 20 % en valeur.

Le marché de l’espace rural a enregistré 232 000 transactions pour 570 000 hectares et pour une valeur de plus de 18 milliards d’euros. Les SAFER ont eu la possibilité d’intervenir par préemption sur 302 000 hectares (elles ne peuvent pas, par exemple, intervenir lors d’acquisitions par les fermiers en place et les terrains à bâtir faisant l’objet d’un engagement de construction). Cette surface accessible est en hausse de 8 % par rapport à 2014. Le taux de prise de marché diminue pour s’établir à 27,8 % des surfaces du marché accessibles.

Parmi les 12 180 rétrocessions des SAFER

– 10 618 actes représentant 90,7 % du total des rétrocessions ont été effectués en faveur du maintien et du développement d’une agriculture dynamique et durable, dont 36 % en faveur des installations ;

– 1 562 actes représentant 9,3 % du total des rétrocessions ont été effectués en faveur du développement local et de l’aménagement du territoire.

4. Le contrôle des structures et le schéma directeur régional des exploitations agricoles (SRDEA)

L’article 32 de la loi d’avenir vise à renforcer le contrôle des structures dans l’objectif de maintien d’une agriculture diversifiée, riche en emploi et génératrice de valeur ajoutée, en limitant les agrandissements excessifs et les concentrations des exploitations.

a. Nouveaux objectifs

La loi d’avenir redéfinit les objectifs du contrôle des structures en supprimant toute référence à un objectif d’agrandissement des exploitations. Au contraire, l’un des objectifs de la politique foncière agricole est de limiter les agrandissements et les concentrations. L’objectif « principal » (et non plus « prioritaire ») est de « favoriser l’installation d’agriculteurs, y compris ceux engagés dans une démarche d’installation progressive ».

La loi a également pour objectifs de « consolider ou maintenir les exploitations, afin de permettre à celles-ci d’atteindre ou de conserver une dimension économique viable au regard des critères du schéma directeur régional », « de promouvoir le développement des systèmes de production permettant de combiner performance économique et performance environnementale » et de « maintenir une agriculture diversifiée, riche en emplois et génératrice de valeur ajoutée ».

Selon les représentants de la FNSAFER la disparition de la notion d’agrandissement est regrettable car certaines exploitations doivent pourvoir s’agrandir pour rester viables économiquement. Selon les représentants de la FNSAFER, « il serait nécessaire d’améliorer le texte afin que les jeunes agriculteurs nouvellement installés, en début d’activité, puissent espérer une évolution de leur structure ».

b. Le schéma directeur régional des exploitations agricoles

Le schéma directeur départemental des structures agricoles est remplacé par un schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA). Ce schéma fixe les seuils (surface agricole utile [SAU] qui est la moyenne régionale au lieu du critère de l’unité de référence) au-delà desquels une autorisation d’exploiter est requise, les orientations et les priorités de la politique agricole en la matière ainsi que les critères économiques, environnementaux ou sociaux permettant d’apprécier la situation des exploitants concernés au regard des objectifs de contrôle des structures des exploitations agricoles.

La loi prévoyait que les SDREA devaient être publiés dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi. Le délai n’a pu être tenu, en raison notamment de la publication tardive du décret n° 2015-713 du 22 juin 2015 relatif au schéma directeur régional des exploitations agricoles et au contrôle des structures des exploitations agricoles. L’arrêté fixant le modèle-type national n’a été publié que le 20 juillet de la même année. En outre, l’obligation de solliciter l’avis du conseil régional, de la chambre régionale d’agriculture, de la commission régionale de l’économie agricole et du monde rural à quelques mois de l’entrée en vigueur de la réforme territoriale n’a pas facilité des choses.

Pour Mme Aurélie Lucas dans « Contrôle des structures : parution des SDREA » (Revue de droit rural, octobre 2016) : « (l’) homogénéité formelle (des SDREA) cache mal le maintien de profondes disparités territoriales que la régionalisation n’efface pas. La fixation de nouveaux seuils de distance mais surtout de déclenchement (…) et d’agrandissement excessif plus ou moins élevés, demeure la traduction de particularités locales et du positionnement syndical ».

À ce jour, il ne manque que deux SDREA : celui de la Corse et celui de la région Rhône-Alpes.

La régionalisation a pour objectif de réduire les disparités constatées entre départements voisins tout en faisant converger la politique des structures avec les objectifs régionaux du plan régional d’agriculture durable (PRAD).

La loi d’avenir accroît les opérations soumises à autorisation.

Le seuil de contrôle est compris entre le tiers et une fois la surface agricole utile régionale. En application du décret du 22 juin 2015 précité, la SAU « prend en compte soit la surface agricole utile moyenne toutes productions confondues, soit la surface agricole utile moyenne par classe d’orientation technico-économique des exploitations particulières ». Le seuil était jusqu’à présent compris entre un et deux unités de référence.

De nombreuses opérations qui relevaient jusqu’alors de la déclaration d’exploiter basculent dans le champ de l’autorisation d’exploiter. Aux trois conditions préexistantes pour bénéficier du régime de la déclaration préalable (satisfaire aux conditions de capacité ou d’expérience professionnelle, que les biens transmis soient libres de location et qu’ils aient été détenus par un parent ou allié depuis 9 ans au moins), la loi d’avenir en ajoute une quatrième, très restrictive : que les biens soient destinés à l’installation d’un nouvel agriculteur ou à la consolidation de l’exploitation du déclarant, dès lors que la surface totale de celle-ci après consolidation n’excède pas le seuil de surface fixé par le SDREA.

Jusqu’à présent les opérations d’installation, d’agrandissement et de réunion d’exploitations passant par la rétrocession de biens acquis par une SAFER relevaient, par principe et sauf exceptions, du régime de la déclaration préalable. Désormais, les opérations réalisées par cette intervention des SAFER sont soumises au droit commun du contrôle en ce qui concerne le champ d’application de celui-ci.

Pour répondre à un besoin de transparence et contrer le grief d’arbitraire parfois formulé à l’encontre des décisions de refus d’autorisation, la loi d’avenir instaure un nouvel article qui énumère les chefs de refus d’autorisation d’exploiter sur lesquels l’autorité devra désormais se fonder pour motiver sa décision. On peut donc penser que cette liste a un caractère limitatif.

A. FAVORISER L’INSTALLATION ET LA TRANSMISSION EN AGRICULTURE

Les objectifs de la politique d’installation et de transmission en agriculture sont énumérés au paragraphe IV du nouvel article L. 1 (du livre préliminaire) du code rural et de la pêche maritime. Il s’agit de :

– contribuer au renouvellement des générations en agriculture ;

– favoriser la création, l’adaptation et la transmission des exploitations agricoles dans un cadre familial et hors cadre familial ;

– promouvoir la diversité des systèmes de production sur les territoires, en particulier ceux générateurs d’emplois et de valeur ajoutée et ceux permettant de combiner performance économique, sociale, notamment à travers un haut niveau de protection sociale, environnementale et sanitaire, et notamment ceux relevant de l’agro-écologie ;

– maintenir sur l’ensemble des territoires un nombre d’exploitants agricoles permettant de répondre aux enjeux d’accessibilité, d’entretien des paysages, de biodiversité et de gestion foncière ;

– accompagner l’ensemble des projets d’installation ;

– encourager les formes d’installation progressive permettant d’accéder aux responsabilités de chef d’exploitation, tout en développant un projet d’exploitation, et de favoriser l’individualisation des parcours professionnels.

L’article 31 modernise la politique d’installation et de transmission en agriculture, en particulier pour les installations hors cadre familial, en progression. Le chapitre préliminaire nouvellement créé et intitulé « La politique d’installation et de transmission en agriculture » au sein du titre III du livre III du code rural et de la pêche maritime prévoit un dispositif d’installation progressive avec un statut, une couverture sociale et un volet concernant les jeunes ne disposant pas encore des diplômes requis ainsi qu’un dispositif de transmission progressive des exploitations, avec l’instauration d’un contrat de génération adapté à l’agriculture.

Article D.343-3 du code rural et de la pêche maritime

« I.- En vue de faciliter leur première installation, il peut être accordé aux jeunes agriculteurs qui prévoient d’exercer une activité agricole au sens de l’article L. 311-1, à l’exclusion des activités aquacoles, et qui satisfont aux conditions fixées par la présente section les aides suivantes :

« 1° Une dotation jeunes agriculteurs en capital ;

« 2° Des prêts bonifiés à moyen terme spéciaux, dont une partie des intérêts peut être prise en charge.

« II.- L’installation peut être réalisée sous trois formes :

« – l’installation à titre principal ;

« – l’installation à titre secondaire ;

« – l’installation progressive.

« Au sens du présent chapitre, on entend par date d’installation la date de début de mise en œuvre du plan d’entreprise mentionné à l’article D. 343-7. »

À noter que le projet de loi de finances pour 2017 prévoit la suppression des prêts bonifiés, compte tenu de la faiblesse des taux d’emprunt actuels. En contrepartie la dotation jeunes agriculteurs (DJA) en capital est revalorisée. Les crédits de la DJA sont dotés de 40 M€ dans la loi de finances pour 2017. Ils sont en hausse de 19,3 M€ par rapport aux crédits consommés et aux prêts bonifiés en 2015.

1. L’installation

Le nouvel article L. 330-1 du code rural et de la pêche maritime tient compte de la situation des jeunes ne disposant pas encore des diplômes requis pour leur installation. Pour bénéficier du dispositif d’aide à l’installation, les candidats ne doivent plus seulement justifier de leur capacité à réaliser un projet viable mais cette justification doit passer par la détention d’une capacité professionnelle.

Par ailleurs, conformément au projet agro-écologique porté par la loi d’avenir, le critère environnemental du projet global d’installation s’ajoute au critère économique.

Si l’aide à l’installation est réservée aux jeunes disposant d’une capacité professionnelle, un contrat de couverture sociale pour l’installation en agriculture, conclu avec l’État, est prévu pour les jeunes en formation ou en stage en vue de leur installation, s’ils ne relèvent pas déjà d’un régime de sécurité sociale. Ces personnes auront le statut de stagiaires de la formation professionnelle continue, sauf si elles effectuent un stage d’application en exploitation. L’accompagnement à l’installation est donc mieux anticipé.

Le décret n° 2015-972 du 31 juillet 2015 relatif au contrat de couverture sociale pour l’installation en agriculture précise les conditions à remplir, le contenu, la durée maximale et les conditions de renouvellement de ce contrat. Le contrat est conclu pour une durée d’un an. À la demande du bénéficiaire, il peut être renouvelé pour une durée maximale d’un an lorsque les actions prévues au plan de professionnalisation personnalisé n’ont pas été réalisées. En tout état de cause, il prend fin lorsque le plan de professionnalisation personnalisé est validé par le préfet ou lorsque son bénéficiaire atteint l’âge de 41 ans.

Le contrat organise les actions prescrites par le plan de professionnalisation personnalisé selon un calendrier prévisionnel défini avec le conseiller référent du centre d’élaboration du plan de professionnalisation personnalisé et indique les modalités d’accompagnement de ces actions par le conseiller référent.

Par ailleurs, le dispositif d’installation progressive est maintenu mais limité à une durée de 5 ans. Il permet de faciliter l’accès aux responsabilités de chef d’exploitation. Le décret n° 2016-78 du 29 janvier 2016 relatif au dispositif d’installation progressive en agriculture en précise les modalités. Ils peuvent prétendre au bénéfice des aides jeunes agriculteurs (article D. 343-3 du code rural et de la pêche maritime reproduit précédemment en encadré). Ils s’engagent alors à :

« 1° Ne plus relever, au terme de la quatrième année de réalisation du plan d’entreprise, du régime de protection sociale des personnes non salariées des professions agricoles à titre dérogatoire [...] ;

« 2° Disposer, au terme de la quatrième année de réalisation du plan d’entreprise, d’un revenu disponible agricole au moins égal à 50 % du revenu professionnel global ;

« 3° Atteindre, au terme de la deuxième année de réalisation du plan d’entreprise, un revenu disponible agricole supérieur ou égal à la moitié du salaire minimum interprofessionnel de croissance et, au terme de la quatrième année, un revenu disponible agricole supérieur ou égal au salaire minimum interprofessionnel de croissance. »

Les chambres départementales d’agriculture sont dotées d’une mission renforcée de service public liée à la politique d’installation, pour le compte de l’État. En Corse cette mission relève de l’office de développement agricole et rural de la Corse. Avant la loi d’avenir, elles ne faisaient qu’assurer une information collective et individuelle sur les questions d’installation.

Le décret n° 2015-781 du 29 juin 2015 fixant les conditions de participation des chambres d’agriculture à la politique d’installation en agriculture apporte des précisions en matière d’information des candidats à l’installation, de suivi et de tenue du répertoire de l’installation, et de pré-instruction des demandes d’aides.

L’APCA assure la gestion de l’Observatoire national de l’installation, chargé d’analyser les données relatives à l’installation et à la transmission. Cet observatoire est financé par le compte d’affectation spéciale « Développement agricole et rural » (CASDAR).

Cette nouvelle compétence dévolue aux chambres d’agriculture dynamise, au plus près des territoires, la politique nationale d’installation et de transmission.

2. La transmission

La loi d’avenir améliore également l’installation par une meilleure anticipation de la transmission des exploitations existantes.

Un contrat de génération adapté aux exploitations agricoles est créé : pour bénéficier de cette aide il faut être âgé d’au moins 57 ans et employer à temps plein et maintenir dans l’emploi pendant la durée de l’aide, dans la perspective de lui transmettre son entreprise, une personne (hors cadre familial) qui est soit un salarié âgé de 26 à 30 ans, soit un stagiaire de moins de 30 ans.

Le décret n° 2015-777 du 29 juin 2015 relatif à l’aide aux exploitations agricoles employant un salarié ou un stagiaire dans la perspective de lui transmettre l’entreprise précise la durée et le montant de l’aide dont peuvent bénéficier les exploitations employant un salarié ou un stagiaire dans la perspective de lui transmettre l’entreprise ainsi que les conditions dans lesquelles cette aide est remboursée lorsque les engagements ne sont pas tenus.

Cette aide s’élève à 4000 € pour un salarié et à 2000 € pour un stagiaire. Ce montant est proratisé en fonction de la durée hebdomadaire de travail ou de la durée du contrat. L’exploitation agricole bénéficie de l’aide pendant trois ans. Elle ne peut se cumuler qu’avec l’aide au contrat de professionnalisation.

Le décret n° 2015-665 du 10 juin 2015 portant diverses dispositions d’application de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt et diverses mesures de clarification et simplification désigne le préfet comme autorité administrative à laquelle doit être transmise l’information de cessation d’exploitation. Les agriculteurs sont en effet tenus d’informer l’administration de leur volonté de cesser leur activité 3 ans au moins avant leur départ à la retraite (contre 18 mois précédemment). Les services et organismes chargés de gérer les retraites doivent informer individuellement chaque exploitant agricole de cette obligation 4 ans (et non plus 2 ans) avant qu’il n’atteigne l’âge requis.

Il est un peu tôt pour établir un bilan de ces mesures mais la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) a fait état, le 3 novembre 2016, d’une augmentation des installations, en 2015, de 17 % par rapport à 2014 : 15 083 non-salariés agricoles ont rejoint la catégorie des chefs d’exploitation agricole en 2015.

Même si ce rebond est aussi lié au changement des conditions d’affiliation au régime social agricole, vos rapporteurs ne peuvent que saluer cette évolution.

Depuis 2009, le nombre d’installations plafonnait aux alentours de 13 000 par an.

Ce rapport fait également état d’un bon taux de maintien dans l’activité agricole : 80,8 % des installés en 2009 étaient toujours agriculteurs en 2015.

Tous les acteurs du monde agricole sont mobilisés pour faire de l’installation une priorité, en particulier l’APCA et la FNSAFER : elles ont signé, le 28 février 2016, au Salon international de l’agriculture, une convention nationale en faveur de l’installation. La FNSAFER contribuera à l’alimentation de l’Observatoire de l’installation, dont les chambres se sont vu confier la mission, un répertoire commun de porteurs de projet sera alimenté et les SAFER seront associées aux points accueil installation (PAI). Un dialogue constant sera établi entre les chambres et les SAFER pour mieux accompagner les candidats à l’installation.

Ces mesures s’accompagnent d’une aide financière supplémentaire : le produit de la taxe sur la cession à titre onéreux des terrains nus rendus constructibles, prévue à l’article 1605 nonies du code général des impôts, était jusqu’à présent affecté à un « fonds pour l’installation des jeunes agriculteurs » (jusqu’à un certain plafond). Ce fonds est débaptisé et ses missions sont élargies et précisées. Il est maintenant destiné à financer des mesures en faveur non seulement de l’installation mais également de la transmission en agriculture, et doit notamment permettre de soutenir des actions facilitant la transmission et l’accès au foncier, des actions d’animation, de communication et d’accompagnement, des projets innovants et des investissements collectifs ou individuels.

A. L’INAPPLICATION DU REGISTRE DES ACTIFS AGRICOLES

La loi n’a jamais défini l’agriculteur. Sa définition découle cependant de celle des activités agricoles. Le droit communautaire a, en revanche, posé une définition générale de l’agriculteur dans le cadre des différents régimes de soutien. La définition est reprise dans le règlement (UE) n° 1307/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 établissant les règles relatives aux paiements directs des agriculteurs. L’agriculteur peut être une personne physique ou morale ou un groupement de telles personnes dont l’exploitation se trouve sur le territoire de l’Union européenne et qui exerce une activité agricole.

Toutefois, dans l’objectif d’éviter que certaines aides soient attribuées à des personnes dont l’objectif n’est pas – ou de façon marginale – l’exercice d’une activité agricole mais aussi dans le but de garantir un meilleur ciblage de ces aides aux agriculteurs (y compris pluriactifs), les États membres doivent exclure certaines personnes et réserver les aides aux « agriculteurs actifs ». L’article 9 du règlement de 2013 précité établit une liste négative d’activités qui ne donnent pas accès aux aides. La France a fait le choix de ne pas compléter cette liste.

L’article 35 crée un registre des actifs agricoles dans le même esprit que celui du droit communautaire.

1. Les personnes concernées par le registre

Y sont inscrits les chefs d’exploitations répondant au critère des activités réputées agricoles sauf cultures marines et activités forestières. Il n’est pas tenu compte du statut social (salarié ou non) et du mode d’exercice de l’activité agricole (sociétaire ou individuelle).

Sont concernés, les chefs d’exploitation cotisant au régime de l’assurance contre les accidents du travail et des maladies professionnelles des non-salariés agricoles (ATEXA). Cette cotisation est due par tous les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole mettant en valeur une exploitation supérieure aux seuils d’assujettissement requis et exerçant leur activité à titre exclusif, principal ou à titre secondaire.

Sont ainsi concernés :

– les exploitants agricoles pluriactifs (relevant d’un régime de salarié ou de non salarié au titre de l’exercice d’une autre activité) ;

– les exploitants bénéficiant d’un avantage retraite auprès d’un autre régime et les cotisants solidaires dont l’activité est comprise entre un cinquième et la moitié de l’activité minimale d’assujettissement (ou entre 150 et 1200 heures) ;

– les personnes qui bénéficient du dispositif d’installation progressive, sous réserve d’atteindre l’activité minimale d’assujettissement (AMA) et de demander à être affiliés au régime de protection sociale des personnes non salariées des professions agricoles ;

– les agriculteurs sous statut social de salarié agricole n’ayant pas de lien de subordination au sein de la société d’exploitation agricole qui les emploie : dirigeants de sociétés anonymes (SA), sociétés par actions simplifiées (SAS) et gérants de SARL ne possédant pas plus de la moitié du capital social avec les membres de sa famille (conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité [PACS], enfants mineurs non émancipés) ;

– et, sous condition de maîtriser l’outil de production et de détenir, directement ou non, la majorité du capital social de la société qui les emploie, les dirigeants de SA, SAS et gérants de SARL majoritaires affiliés en qualité de non-salariés.

La définition de l’agriculteur actif est bien plus large que celle antérieure assimilant l’agriculteur à toute personne affiliée au régime des non-salariés agricoles. Cette nouvelle définition devrait embrasser tous les agriculteurs indépendants exerçant une activité professionnelle, même relativement faible en importance. Les nouveaux critères de l’AMA rendent de fait encore plus ouverte la définition de l’actif agricole.

2. Les personnes exclues du registre

Lors des auditions menées au moment de la discussion parlementaire de la loi, les organisations professionnelles agricoles avaint exprimé le souhait que les critères d’inscription au registre soient les plus larges possibles afin d’y inclure tous les agriculteurs professionnels.

Les sociétés et associations en tant que personnes morales, les ouvriers agricoles, permanents ou saisonniers et les entrepreneurs de travaux agricoles ne peuvent néanmoins figurer sur ce registre.

3. Tenue du registre

C’est à l’APCA que revient l’administration de la base de données regroupant les informations du registre.

Les informations de la base sont issues des données de la Mutualité sociale agricole et des centres de formalités des entreprises de chambres d’agriculture.

L’inscription au registre des personnes concernées est automatique. Aucune démarche particulière n’est requise.

4. Quel usage ?

À ce stade, même si la définition de l’actif agricole a été motivée par sa définition européenne, elle n’aura aucune incidence sur l’attribution des droits à paiement de base dans la mesure où la définition française n’est pas plus stricte que la définition européenne. Elle pourrait en revanche avoir des conséquences, à l’avenir, sur les aides du deuxième pilier de la PAC qui font plus jouer le principe de subsidiarité en faveur des États membres.

Les professionnels attendent donc un décret fixant les conditions d’application du dispositif, indispensable à sa mise en œuvre opérationnelle. D’après le ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, le travail de définition des données du registre, des conditions et des modalités de leur transmission ainsi que de l’utilisation du fichier se poursuit. Lorsque le projet de décret sera prêt, il devra être soumis pour avis à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).

Au moment de la publication du présent rapport l’APCA a indiqué avoir été associée à des groupes de travail sur le contenu du décret fixant les conditions d’application du dispositif. C’est ce qu’ont confirmé les responsables de la CCMSA entendus par vos rapporteurs, qui ont fait savoir que des réunions avaient été organisées par le ministère entre le 3 avril et le 10 juin 2015. Depuis, la CCMSA n’a plus du tout été sollicitée.

Il est à prévoir que le pouvoir réglementaire ne se privera pas des possibilités offertes par la loi : un décret en Conseil d’État peut en effet limiter le bénéfice de certaines aides publiques aux personnes physiques inscrites à ce registre ou aux personnes morales au sein desquelles de telles personnes exercent leur activité.

La seule information disponible à ce jour est contenue dans une réponse du ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt à une question écrite de Mme Brigitte Allain, le 16 décembre 2014 :

« En ce qui concerne la possibilité de lier l’octroi des aides aux agriculteurs à l’inscription au registre des actifs agricoles ou de limiter le bénéfice de certaines aides publiques aux personnes physiques inscrites sur le registre ou aux personnes morales au sein desquelles de telles personnes exercent leur activité, aucune mesure n’est pour le moment envisagée et ne pourra intervenir avant la mise en place effective du registre. En outre, toute mesure devra être prise en accord avec la réglementation existante, notamment celle de l’Union européenne pour les aides de la politique agricole commune, qui exclut toute possibilité de rajouter au niveau national des restrictions d’accès non prévues par la réglementation communautaire ».

TROISIÈME PARTIE :
POLITIQUE DE L’ALIMENTATION ET PERFORMANCE SANITAIRE

I. PRÉSENTATION DE LA LOI

A. INTENTION DU LÉGISLATEUR

L’ambition de promouvoir la double performance économique et environnementale caractérise également le titre III.

L’Europe s’est fixée, dès les débuts de sa construction, un objectif d’autosuffisance alimentaire, qu’elle a aujourd’hui atteint. Notre pays, qui en constitue la première puissance agricole, produit suffisamment pour faire face à ses besoins, et dégage même un chiffre d’affaires excédentaire qui l’inscrit au quatrième rang mondial en la matière et lui permet de contribuer à l’alimentation du « reste du monde ».

Croissance démographique mondiale et augmentation du pouvoir d’achat moyen : autant d’éléments qui vont contribuer à accroître la demande en produits agricoles et alimentaires. Mais développer la production ne suffit plus. Les concepts de sécurité et de souveraineté alimentaires seront demain plus que jamais d’actualité.

Produire plus ne doit pas être le seul impératif. L’objectif qui s’impose à nous est de produire au moins autant, voire davantage, tout en consommant moins d’intrants, afin de préserver l’environnement. Ce défi, produire plus avec moins, ne pourra être gagné qu’en se tournant progressivement vers une agriculture doublement performante, aux points de vue économique et environnemental.

Des progrès ont déjà été réalisés dans le cadre du plan Écophyto, mis en place à la suite du Grenelle de l’environnement par M. Michel Barnier, alors ministre de l’agriculture. La loi d’avenir vise à amplifier ce processus. Par ailleurs, elle prévoit différentes mesures destinées à limiter au strict nécessaire l’utilisation d’antibiotiques en médecine vétérinaire en vue de réduire l’antibiorésistance
– mesure de responsabilité collective.

L’objectif du titre III est donc de mettre l’accent sur quatre priorités afin de renforcer le modèle alimentaire français : la justice sociale, l’éducation alimentaire de la jeunesse, la lutte contre le gaspillage ; la loi redonne également toute leur place aux acteurs territoriaux.

En outre, le projet agro-écologique se traduit par des mesures sanitaires de fond, avec la maitrise des produits phytosanitaires, celle des antibiotiques et des médicaments vétérinaires, avec des mesures relatives au bien-être animal, à l’équilibre entre l’activité agricole et son environnement et grâce à la surveillance accrue de la chaîne alimentaire. La publication des résultats des contrôles sanitaires permettra de mieux informer les citoyens.

Plusieurs mesures ont pour objectif d’encourager un système plus vertueux : recours au biocontrôle via un conseil agricole renforcé, mise en place d’un suivi post-autorisation de mise sur le marché des produits phytosanitaires afin de mieux mesurer les effets indésirables sur l’homme, les animaux et l’environnement, et interdiction de la publicité pour les produits phytosanitaires destinés aux amateurs.

Outre le transfert à l’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), des missions relatives à la délivrance des autorisations de mise sur le marché (AMM) des produits phytopharmaceutiques et des matières fertilisantes, transfert qui permettra de clarifier la relation entre la direction générale de l’alimentation du ministère de l’agriculture et l’ANSES, le dispositif de suivi post-autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques participe également de la volonté de garantir une plus grande transparence.

B. DESCRIPTIF DES ARTICLES

L’article 39 donne une base légale aux projets alimentaires territoriaux, dont l’objectif est de structurer l’économie agricole à l’échelle territoriale et de mieux organiser le lien entre production, transformation et consommation, afin de favoriser les circuits courts. Les participants en sont l’État et ses établissements publics, les collectivités territoriales, les associations, les agriculteurs, les groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE) et tous les autres acteurs du territoire, qui concluent un contrat pour leur mise en œuvre. Les projets alimentaires territoriaux répondent aux objectifs définis dans le plan régional de l’agriculture durable.

L’article 40 prévoit qu’une information et une éducation à l’alimentation soient dispensées dans les écoles, cohérentes avec les orientations du programme national relatif à la nutrition et à la santé.

L’article 41 étend les mesures de police sanitaire à la faune sauvage, en donnant une responsabilité particulière aux fédérations de chasse. Il impose un volet sanitaire dans les schémas départementaux de gestion cynégétique et donne compétence aux agents de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) pour assurer la surveillance sanitaire de celle-ci. Il permet également au ministre de l’agriculture de désigner des centres nationaux de référence sur le bien-être animal.

Le schéma départemental de gestion cynégétique est approuvé, après avis de la commission départementale compétente en matière de chasse ou de faune sauvage, par le préfet, qui vérifie notamment la prise en compte du schéma régional de maîtrise des dangers sanitaires.

L’article 42 écarte l’application aux ventes et échanges d’animaux de l’article L. 211-7 du code de la consommation relatif au défaut de conformité apparaissant après la délivrance du bien. Il n’est pas justifié scientifiquement de considérer les éleveurs ou vendeurs d’animaux comme responsables de toute maladie ou affection qui pourrait subvenir dans un délai de deux ans après la cession, alors même que ceux-ci ne sont plus en mesure de s’assurer des soins délivrés aux animaux par les nouveaux propriétaires. Pour ces derniers, les dispositions du code rural et de la pêche maritime et du code civil prévoient un régime particulier de garantie des vices rédhibitoires.

L’article 43 permet de fixer un seuil inférieur au seuil minimum d’indemnisation des dégâts causés par le grand gibier pour les prairies. En effet, l’article L. 426-3 du code de l’environnement dispose que l’indemnisation des agriculteurs pour les dégâts causés aux cultures par le grand gibier n’est due que lorsque ces dégâts sont supérieurs à un seuil fixé par voie réglementaire. Un seuil inférieur à celui applicable aux grandes cultures a été créé par décret pour les dégâts causés dans les prairies. Cette possibilité relève désormais du domaine législatif.

L’article 44 renforce l’arsenal de protection des éleveurs affectés par les attaques de loups.

L’article 45 organise la transparence des résultats des contrôles sanitaires officiels sur les établissements de la chaîne alimentaire en prévoyant qu’ils soient rendus publics de plein droit et détaille la procédure applicable en cas de menace pour la santé publique. Il s’agit d’un durcissement de la législation en matière de sécurité sanitaire.

L’article 46 précise que les laboratoires départementaux d’analyse participent à la politique publique de sécurité sanitaire.

L’article 47 conforte le dispositif actuel des agents spécialisés en pathologies apicoles. Cependant, compte tenu du faible nombre de vétérinaires spécialisés en apiculture, cet article maintient un dispositif pour que des non-vétérinaires continuent à appuyer le réseau des vétérinaires apicoles.

L’article 48 vise à mieux encadrer l’utilisation des antibiotiques en médecine vétérinaire, en régulant les pratiques commerciales.

L’article 49 fixe un objectif de réduction de 25 % de l’utilisation des antibiotiques au 31 décembre 2016. Une évaluation devra être effectuée à cette date et un nouvel objectif de réduction proposé. Cet article prévoit, en outre, que l’ensemble des acteurs de la chaîne de soins des animaux de ferme doit être sensibilisé à la question de l’antibiorésistance.

L’article 50 encourage l’utilisation de techniques alternatives aux pesticides et notamment les produits de biocontrôle ou encore les préparations naturelles non préoccupantes dont il donne une nouvelle définition, plus large qu’aujourd’hui ; il encadre davantage la publicité sur les produits phytopharmaceutiques et met en place un dispositif de phytopharmacovigilance.

L’article 51 transfère à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) la délivrance des autorisations de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, matières fertilisantes et supports de culture, relevant actuellement de la compétence des ministres. Il met en place un comité de suivi des autorisations et impose à l’ANSES de rendre public un rapport rendant compte de son activité de gestion des risques en matière de produits phytopharmaceutiques.

L’article 52 crée un pouvoir de contrôle des inspecteurs de l’ANSES sur les opérateurs du marché des produits phytopharmaceutiques.

L’article 53 interdit l’utilisation de pesticides dans les lieux fréquentés par des publics sensibles et subordonne, dans d’autres lieux, les usages de ces produits à des mesures de protection et des distances d’épandage. Il renforce les sanctions en cas de manquements à la législation sur la mise sur le marché et la circulation des pesticides. Il dispense de certificats de produits phytopharmaceutiques (certiphyto) les applicateurs de produits de biocontrôle. Il renforce, d’une part, la traçabilité des pesticides à partir de leur commercialisation et, d’autre part, l’obligation de conseil des distributeurs.

L’article 54 repousse au 26 novembre 2015 la date limite de l’obligation pour les exploitants et salariés agricoles de détenir le certificat pour le certiphyto. La loi Grenelle II a mis en place à la fois l’agrément pour les activités de vente, d’application et de conseil en matière de produits phytopharmaceutiques et le certificat obligatoire pour les agriculteurs appelés à acheter et utiliser des produits phytopharmaceutiques, qui atteste de connaissances suffisantes pour manipuler ces produits en toute sécurité et réduire leur usage.

L’article 55 habilite le Gouvernement à prendre des mesures législatives par voie d’ordonnance sur 8 sujets.

L’article 56 ratifie l’ordonnance du 22 juillet 2011 relative à l’organisation de l’épidémiosurveillance, de la prévention et de la lutte contre les maladies animales et végétales.

L’article 57 exclut l’application de la protection du brevet dans le cas de présence fortuite ou accidentelle d’une information génétique brevetée dans des semences. Il vise notamment une situation de pollinisation croisée involontaire dans un champ.

L’article 58 exclut, par sécurisation de la situation des agriculteurs, l’extension aux produits de récolte du droit exclusif du titulaire d’un certificat d’obtention végétale, lorsque l’utilisation non autorisée du matériel de reproduction ou de multiplication est fortuite ou accidentelle.

L’article 59 précise que les règles relatives aux semences et matériels de multiplication des végétaux concernent le cas où ces semences et matériels sont destinés à la commercialisation.

II. APPLICATION DE LA LOI

LISTE DES DÉCRETS PUBLIÉS

Article

Base légale

Titre du décret publié

Objet

Article 41, I, 5°

Article L. 212-9 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2016-119 du 5 février 2016 relatif à l’identification des camélidés

Conditions d’identification des camélidés et de leur déclaration auprès de l’IFCE

Article 45, I, 1°

Article L. 231-1, II du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-189 du 18 février 2015 relatif à l’expérimentation de la mise en transparence des résultats des contrôles officiels en sécurité sanitaire des aliments dans le secteur de la restauration commerciale à Paris et Avignon

Modalités de publication des résultats des contrôles effectués en application du plan national de contrôles officiels pluriannuels

Article 45, I, 1°

Article L. 231-1, II du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2016-1750 du 15 décembre 2016 organisant la publication des résultats des contrôles officiels en matière de sécurité sanitaire des aliments

Modalités de publication des résultats des contrôles effectués en application du plan national de contrôles officiels pluriannuel

Article 45, I, 2°

Article L. 233-1 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-228 du 27 février 2015 portant diverses mesures d’application de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt et clarification du droit

Déterminer l’autorité compétente pour les fermetures d’établissement

Article 45, II

Article L. 231-1 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2016-1750 du 15 novembre 2016 organisant la publication des résultats des contrôles officiels en matière de sécurité sanitaire des aliments

Modalités de publication des résultats

Article 46

 

Décret n° 2015-1902 du 30 décembre 2015 relatif aux conditions d’exécution des missions de service public dont sont chargés les laboratoires départementaux d’analyses

Conditions d’exécution des missions de service public des laboratoires départementaux d’analyses des conseils départementaux

Article 48, I, 3°, b

18° du L. 5141-16 du code de la santé publique

Décret n° 2016-317 du 16 mars 2016 relatif à la prescription et à la délivrance des médicaments utilisés en médecine vétérinaire contenant une ou plusieurs substances antibiotiques d’importance critique

Restrictions apportées à la prescription et à la délivrance de certains médicaments compte-tenu des risques particuliers qu’ils présentent pour la santé publique

Article 50, I, 3, b

Article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-791 du 30 juin 2015 relatif aux conditions d’exercice par l’ANSES de ses missions concernant les autorisations préalables à la mise sur le marché et à l’expérimentation des produits phytopharmaceutiques et de leurs adjuvants

Décret n° 2015-228 du 27 février 2015 portant diverses mesures d’application de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt et clarification du droit

Décret n° 2015-890 du 21 juillet 2015 relatif à la mise sur le marché et à l’utilisation des matières fertilisantes, des adjuvants pour matières fertilisantes et des supports de culture

Délais d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des produits de biocontrôle

Article 50, I, 4°

Article L253-5 du code rural et de la pêche maritime

Autorité administrative compétente pour lister les produits de biocontrôle. Conditions de présentation des insertions publicitaires en faveur des produits mentionnés en l’article L.253.1 du code rural et de la pêche maritime

Article 51

L. 1313-1 du code de la santé publique

Mise en œuvre des dispositions confiant à l’ANSES la délivrance des AMM (articles R. 253-1 et R. 255-1 du code rural et de la pêche maritime)

Article 53, II

Article L. 253-7, 2° du code rural et de la pêche maritime

Déterminer les autorités compétentes pour lister les produits phytopharmaceutiques sans mesure de protection et définir une distance minimale adaptée en deça de laquelle il est interdit d’épandre des produits phytopharmaceutiques

Article 51, 5°

Article L. 1313-6-1 du code de la santé publique

Décret n° 2015-780 du 29 juin 2015 relatif à la composition du comité de suivi des autorisations de mise sur le marché mentionné à l’article L. 1313-6-1 du code de la santé publique

Composition du comité de suivi des autorisations de mise sur le marché

Article 53, V, 4°

L. 254-6-1 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-228 du 27 février 2015 portant diverses mesures d’application de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt et clarification du droit

Définition de l’autorité compétente bénéficiant de la mise à disposition des informations sur les quantités, numéros de lot et des dates de fabrication des produits phytopharmaceutiques mis sur le marché

Article 53, V, 7°

L. 245-7-1 (ex L. 254-10) du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-757 du 24 juin 2015 relatif aux conditions dans lesquelles les micro-distributeurs peuvent être dispensés de certaines obligations pour exercer l’activité de distribution de produits phytopharmaceutiques

Conditions dans lesquelles il est possible de dispenser les microdistributeurs des obligations prévues aux 2° et 3° de l’article L. 254-2 et à l’article L. 254-3 du même code

Article 52

L.253-8-1 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2016-1595 du 24 novembre 2016 relatif à la phytopharmacovigilance et modifiant diverses autres dispositions du code rural et de la pêche maritime relatives à la protection des végétaux

Modalités de désignation des organismes auxquels les informations sont adressées, obligations qui leurs incombent, modalités de transmission des informations et contenu de celles-ci (phytopharmacovigilance)

LISTE DES MESURES EN ATTENTE DE DÉCRET

Article de la loi

Base légale

Objet du décret

Explication avancée par le cabinet du ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt

Article 47

 

Compétences adaptées définies pour les techniciens sanitaires apicoles.

Décret prêt.

Article 48, I, 2° et Article 48, I, 2° et b du 3°

Article L. 5141-16, 17° du code de la santé publique

Désignation de l’autorité administrative compétente pour recevoir la déclaration de médicaments vétérinaires antibiotiques et le cas échéant, les données faisant l’objet de la déclaration mentionnée au même article, la périodicité et les modalités de leur transmission.

En concertation avec le MASS et les professionnels : problème technique mise au point logiciels de déclaration.

Article 50, I, 3°, a

Article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime

Procédure d’autorisation des substances naturelles à usage biostimulant.

Le décret sera prochainement notifié pour information à la commission européenne et publié dans le temps

Article 50, I, 6°

Article L. 253-8-1 du code rural et de la pêche maritime

Phytopharmacovigilance - Modalités de désignation des organismes auxquels les informations sont adressées, obligations qui leur incombent, modalités de transmission des informations et contenu de celles-ci

Avis juridique complémentaire rendu. Conseil d’État à saisir.

Article 53, II

L. 253-7-1, 2° du code rural et de la pêche maritime

Conditions d’application de l’article (mesures de protection personnes sensibles)

Publication éventuelle, la loi étant suffisamment précise, aucun nouveau décret n’est nécessaire (le MAAF a fait une instruction aux préfets)

Article 60, I, 4°

Article L811-2 du code rural et de la pêche maritime

Modalités d’acquisition progressive des diplômes et de délivrance d’une attestation validant les acquis (enseignement public).

Décrets distincts en fonction des diplômes concernés : CAPA décret du 23 novembre 2015 / BAC pro : décret signé

MESURES D’APPLICATION À PRENDRE
DONT LE PILOTE N’EST PAS LE MINISTÈRE DE L’AGRICULTURE

Article de la loi

Base légale

Objet

Article 48, I, 1°

Article L. 5141-13-1 du code de la santé publique

Modalités d’application de l’article L. 5141-13-1 du CSP et modalités de transmission des conventions prévoyant des avantages et délais impartis aux ordres compétents pour se prononcer

Article 48, I, 1°

Article L. 5141-13-2, III du code de la santé publique

Seuil au-delà duquel tous les avantages en nature ou en espèces sont rendus publics

Article 48, I, 2°

Article L. 5141-13-2, IV du code de la santé publique

Modalités d’application de l’article L. 5141-13-2 du CSP et nature des informations qui doivent être rendues publiques, objet et date des conventions conclues par les entreprises produisant ou commercialisant des médicaments vétérinaires ou assurant des prestations associées à ces produits

Article 48, I, 5°

Article L. 5142-6-1 du code de la santé publique

Conditions de qualification des personnes qui font de l’information par démarchage ou de la prospection pour des médicaments vétérinaires

Article 48, I, 5°

2° de l’article L. 5142-6-2 du code de la santé publique

Conditions de formation des personnes qui exerçaient des activités de délégués vétérinaires et autorité compétente

Article 48, I, 3°, a

6° de l’article L. 5141-16 du code de la santé publique

Règles applicables aux études portant sur des médicaments vétérinaires bénéficiant déjà d’une autorisation de mise sur le marché essais post-AMM

ORDONNANCES PUBLIÉES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 55
DE LA LOI D’AVENIR

Article

Objet

Délai

Projet de loi

Ordonnance

Article 55, 1

Mettre en place une expérimentation à l’appui du plan d’action ayant pour objet de réduire l’utilisation des produits phytopharmaceutiques, en définissant les personnes vendant des produits phytopharmaceutiques, autres que les produits de biocontrôle mentionnés au premier alinéa de l’article L. 253-5 du code rural et de la pêche maritime, qui sont tenues de mettre en œuvre des actions à cette fin, les conditions dans lesquelles ces personnes peuvent satisfaire à ces obligations et un dispositif de certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques qui sont délivrés aux personnes assujetties lorsqu’elles justifient avoir satisfait à leurs obligations à l’instar du précédent sur les certificats d’économies d’énergie.

 

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de cette ordonnance.

Ordonnance n° 2015-1244 du 7 octobre 2015 relative au dispositif expérimental de certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques

Article 55, 2

Moderniser et simplifier les règles applicables aux matières fertilisantes et supports de culture, en précisant leur définition, les conditions dans lesquelles leur importation, leur mise sur le marché, leur détention en vue de la mise sur le marché, leur vente ou distribution à titre gratuit et leur utilisation sont subordonnées à une autorisation administrative et les conditions dans lesquelles l’exercice de ces activités peut faire l’objet de mesures d’interdiction, de limitation ou de réglementation.

 

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de cette ordonnance.

Ordonnance n° 2015-615 du 4 juin 2015 relative à la mise sur le marché et à l’utilisation des matières fertilisantes, des adjuvants pour matières fertilisantes et des supports de culture

Article 55, 3

Compléter la liste des personnes habilitées à rechercher et à constater les infractions dans le domaine de la santé animale ou végétale, de la protection des animaux, de la sécurité sanitaire de l’alimentation et de la mise sur le marché, de la vente ou de la cession, de l’utilisation et du stockage des produits phytopharmaceutiques, en précisant le champ de leurs compétences et les pouvoirs dont elles disposent.

 

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de cette ordonnance.

Ordonnance n° 2015-616 du 4 juin 2015 modifiant le code rural et de la pêche maritime en vue d’assurer la conformité de ses dispositions avec le droit de l’Union européenne et modifiant les dispositions relatives à la recherche et à la constatation des infractions aux dispositions de son livre II

Article 55, 4

Modifier et simplifier le régime applicable aux groupements de défense contre les organismes nuisibles et à leurs fédérations, prévus aux articles L. 252-1 à L. 252-5 du code rural et de la pêche maritime.

 

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de cette ordonnance.

Ordonnance n° 2015-1242 du 7 octobre 2015 relative à l’organisation de la surveillance en matière de santé animale, de santé végétale et d’alimentation

Article 55, 5

Redéfinir et moderniser l’organisation et les missions de l’ordre des vétérinaires, en élargissant son champ d’action, en réformant l’organisation du système disciplinaire, notamment par la clarification de la gestion des missions administratives et disciplinaires de l’ordre, en définissant le statut de l’élu ordinal, son rôle, les modalités de son remplacement, ses devoirs et prérogatives et en recherchant l’amélioration du service rendu au public, grâce à la formation, à l’accréditation et au renforcement du contrôle ordinal.

Dans un délai de douze mois suivant la promulgation de la loi

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de cette ordonnance.

Ordonnance n° 2015-953 du 31 juillet 2015 relative à la réforme de l’ordre des vétérinaires

Article 55, 6

Renforcer les règles applicables au commerce des animaux de compagnie, notamment en redéfinissant le seuil de déclaration de l’activité d’élevage de chiens et de chats, en réglementant ou en interdisant certaines modalités de vente et de cession à titre gratuit de vertébrés, tout en préservant, d’une part, l’activité des éleveurs professionnels comme non professionnels qui garantissent la pérennité des races et des espèces et contribuent au maintien de la filière nationale de génétique collective et, d’autre part, la pérennité des ventes effectuées par des professionnels sur les foires et marchés, et renforcer la protection des animaux, en étendant, dans le code de procédure pénale, le pouvoir des associations de défense et de protection des animaux de se constituer partie civile pour tous les délits relevant du chapitre unique du titre II du livre V du code pénal.

Dans un délai de douze mois suivant la promulgation de la loi

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de cette ordonnance.

Ordonnance n° 2015-1243 du 7 octobre 2015 relative au commerce et à la protection des animaux de compagnie

Article 55, 7

Adapter au droit de l’Union européenne les dispositions relatives au transport des animaux vivants et aux sous-produits animaux, notamment en redéfinissant l’activité d’équarrissage, et en actualisant et en complétant la liste des sanctions mentionnées à l’article L. 228-5 du code rural et de la pêche maritime.

Dans un délai de huit mois suivant la promulgation de la loi

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de cette ordonnance.

Ordonnance n° 2015-616 du 4 juin 2015 modifiant le code rural et de la pêche maritime en vue d’assurer la conformité de ses dispositions avec le droit de l’Union européenne et modifiant les dispositions relatives à la recherche et à la constatation des infractions aux dispositions de son livre II

Article 55, 8

Organiser la surveillance en matière de santé animale, de santé végétale et d’alimentation, en définissant les missions et obligations respectives des principaux acteurs en matière de surveillance ainsi que les conditions dans lesquelles ils échangent des informations et coordonnent leur action en s’appuyant sur le maillage territorial des laboratoires d’analyses départementaux.

Dans un délai de douze mois suivant la promulgation de la loi

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de cette ordonnance.

Ordonnance n° 2015-1242 du 7 octobre 2015 relative à l’organisation de la surveillance en matière de santé animale, de santé végétale et d’alimentation

OBLIGATION DE DÉPÔT DE RAPPORT

Date limite de dépôt

Article de la loi

Objet

Observations

Annuel

51

Rapport annuel d’activité de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail

Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail au Parlement

A. LES PROGRAMMES ALIMENTAIRES TERRITORIAUX

Dans le domaine de la politique de l’alimentation, la loi a recentré le programme alimentaire national (PNA) sur 4 priorités : la lutte contre le gaspillage alimentaire, la justice sociale, l’éducation alimentaire, et l’ancrage territorial.

1. Les programmes alimentaires territoriaux

Les projets alimentaires territoriaux (PAT) répondent à l’enjeu d’ancrage territorial de l’alimentation et revêtent :

– une dimension économique : structuration et consolidation des filières dans les territoires et mise en adéquation de l’offre avec la demande locale ; contribution à l’installation d’agriculteurs et à la préservation des espaces agricoles sans lesquels la production n’est pas possible ;

– une dimension environnementale : développement de la consommation de produits issus de circuits de proximité ; valorisation d’un nouveau mode de production agro-écologique, dont la production biologique ;

– une dimension sociale : projet collectif, fondé sur la rencontre d’initiatives, regroupant tous les acteurs d’un territoire et contribuant à une identité et une culture du territoire permettant de valoriser les terroirs, afin de développer des initiatives qui rapprochent la production et la consommation locales.

Ils mettent en relation les différents partenaires d’un territoire : les acteurs de l’économie sociale et solidaire, les agriculteurs et producteurs, les organismes de développement et de recherche, les collectivités territoriales, les services de l’État, les financeurs, les entreprises et coopératives de distribution et de commercialisation.

Une soixantaine de PAT en cours a déjà été recensée en France: drive fermier (achat en ligne directement aux producteurs locaux), approvisionnement local des cantines scolaires, des restaurants d’entreprises ou même des festivals culturels, projets d’agriculture urbaine.

2. Des projets emblématiques de l’enseignement agricole

En février 2015, 19 projets emblématiques ont été sélectionnés dans le cadre de l’appel à projets PNA 2014.

Selon l’article L. 800-1 du code rural et de la pêche maritime, l’alimentation fait partie des missions de l’enseignement agricole : « Les établissements ou organismes d’enseignement, de formation professionnelle, de développement agricole et de recherche agronomique et vétérinaire, assurent l’acquisition et la diffusion de connaissances et de compétences permettant de répondre aux enjeux de performance économique, sociale, environnementale et sanitaire des activités de production, de transformation et de services liées à l’agriculture, à l’alimentation, aux territoires ou à la sylviculture, notamment par l’agro-écologie et par le modèle coopératif et d’économie sociale et solidaire ».

Plusieurs de ses formations diplômantes abordent des thèmes liés à l’alimentation à des niveaux différents (8).

Le ministère de l’agriculture a récemment créé un certificat de spécialisation « restauration collective » pour répondre à la demande de cette filière professionnelle. Ce certificat de spécialisation est accessible en formation continue et en apprentissage.

De manière plus générale, l’alimentation est un thème abordé dans le cadre des activités éducatives dans les établissements d’enseignement agricole, et ce au travers de différentes dimensions :

– l’agro écologie et, par exemple, les circuits courts ;

– la filière de l’agriculture biologique ;

– le développement durable et la lutte contre le gaspillage alimentaire.

Plusieurs établissements de l’enseignement agricole, techniques ou de l’enseignement supérieur, ont développé des actions très concrètes sur ce thème.

3. Le rôle de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA)

Soixante PAT ont déjà été recensés, cependant, les initiatives restent encore isolées.

L’APCA s’est donc proposé de jouer le rôle de « rassembleur » et de contribuer à ce que ces initiatives soient réunies autour « d’un projet national commun  », comme l’indiquait son vice-président, le 14 juin dernier, à l’occasion du lancement du réseau. Les chambres d’agriculture ont adopté à l’unanimité (lors de la session nationale des CA du 23 novembre 2015) une délibération engageant leur réseau dans le déploiement et l’accompagnement de ces projets.

Elles animent, aux côtés de l’association « Terres en Ville », le projet RnPAT (Réseau national pour des programmes alimentaires territoriaux coconstruits et partagés), visant à mettre en réseau tous les acteurs concernés dans lesquels les collectivités, porteuses du projet de territoire, sont fortement impliquées. Elles participent activement au groupe de concertation du ministère de l’agriculture sur le dispositif de reconnaissance et de labellisation de ces programmes.

Les chambres d’agriculture sont impliquées dans environ la moitié des départements et un tiers des projets.

Elles ambitionnent de mettre en place un PAT par département d’ici la fin de l’année 2017 et le ministère de l’agriculture, qui soutient cette démarche, espère en compter 500 à l’horizon 2020.

Sur le terrain, la première vague de labellisation est prévue au 1er semestre 2017 par le ministère ; les projets de PAT, dans leur majorité, en sont à leurs prémices avec la mise en place des instances de gouvernance et l’élaboration d’un diagnostic. Les élus locaux se sont approprié les enjeux. Un travail de pédagogie doit être poursuivi sur ces projets transversaux. La majorité des projets s’organisent sur un co-portage par plusieurs structures, ce qui induit des gouvernances complexes.

Les moteurs d’émergence de PAT sont multiples : soit le souhait de remettre de la valeur ajoutée dans les territoires, soit le souci de la santé des consommateurs, soit l’éthique et la reconnexion entre la population, son territoire et son agriculture. La plus-value en résultant sera la mise en cohérence des initiatives, le partage d’un projet collectif sur le territoire.

Des défis restent à relever, en particulier, le financement de l’animation, la participation des acteurs agroalimentaires et des acteurs de la distribution, la question du « juste prix » de l’alimentation, ainsi que les problèmes de logistique.

B. LA LUTTE CONTRE L’ANTIBIORÉSISTANCE

1. L’objectif de diminution de la consommation des antibiotiques

Dans un document de travail de 2009, la Commission européenne estime que, pour l’ensemble des États membres de l’Union, les infections causées par les micro-organismes résistants aux anti-microbiens sont responsables du décès d’environ 25 000 patients chaque année. En outre, les coûts directs et indirects ainsi que les pertes annuelles de productivité induits par ce phénomène sont évalués à 1,5 milliard d’euros. Dans les régions du monde les moins développées, l’antibiorésistance met également en péril des populations dont la survie dépend très largement de l’élevage.

Cet enjeu de santé publique au niveau mondial justifie une prise de conscience accrue et nécessite une action urgente. Compte tenu du nombre d’acteurs concernés et de la diversité des questions soulevées, une approche globale, prenant en compte à la fois le domaine vétérinaire et la médecine humaine, est devenue indispensable.

De plus en plus de souches de micro-organismes se montrent ainsi résistantes aux antibiotiques. Le plan national de réduction des risques d’antibiorésistance en médecine vétérinaire, lancé le 18 novembre 2011 par le ministère chargé de l’agriculture, vise justement à réduire ce risque et préserver l’efficacité des antibiotiques.

L’objectif du plan d’action est double. Il vise, d’une part, à diminuer la contribution des antibiotiques utilisés en médecine vétérinaire à la résistance bactérienne, et, d’autre part, à préserver sur le long terme les moyens thérapeutiques, d’autant plus que la perspective de développement de nouveaux antibiotiques, en médecine vétérinaire, est réduite. La consommation d’antibiotiques par les animaux a des conséquences sanitaires directes pour la santé humaine : l’utilisation d’antibiotiques dans l’élevage entraîne la présence de de gènes de résistance dans les aliments, qui peuvent se transmettre à l’homme par la chaîne alimentaire.

L’objectif chiffré défini à l’article 49 – qui reprend le plan de 2011 – est la réduction de 25 % de l’usage des antibiotiques en médecine vétérinaire en 5 ans, en développant les alternatives permettant de préserver la santé animale tout en évitant de recourir à certaines molécules. Mais au-delà de l’aspect quantitatif, le texte veut conduire à une nécessaire prise de conscience pour que chacun évolue de manière coordonnée dans ses pratiques et que l’ensemble des acteurs de la chaîne de soins des animaux de ferme soient sensibilisés à la question de l’antibiorésistance.

Vos rapporteurs soulignent qu’il faudrait empêcher la généralisation des antibiotiques préventivement, ou comme auxiliaire de croissance, toute en reconnaissant qu’il s’agit d’un processus complexe.

En France, plusieurs initiatives ont été mises en place depuis la fin 2010 pour limiter l’usage des antibiotiques. Le plan « Ecoantibio 2017 » a été mis en place pour la période 2012-2017 et des initiatives ont également été lancées pour chaque filière d’élevage : dans ce dernier cas, d’ailleurs, l’exposition des porcs à la céphalosporine de dernières générations a diminué de 51,8 % entre 2010 et 2011. Comme le souligne la Fédération nationale bovine (FNB), le plan Ecoantibio a notamment mis en place des visites sanitaires bovines obligatoires sur l’antibiorésistance (2016) et la biosécurité (2017), un encadrement de l’utilisation des antibiotiques d’importance critique (AIC) en élevage, le suivi des ventes de médicaments en France et de l’évolution de la résistance en élevage, des programmes de formation continue des éleveurs bovins et une réglementation encadrant les bonnes pratiques d’élevage en termes d’utilisation des antibiotiques en élevage. La filière vitelline s’est particulièrement mobilisée en déployant un plan d’action spécifique.

La Fédération nationale bovine (FNB) souligne, lors du colloque ANSES du 17 novembre 2016 que ces programmes d’action ont permis à la filière bovine de diminuer l’exposition des bovins aux antibiotiques de 9,1 % par rapport à 2011 (volume de ventes d’antibiotique en médecine vétérinaire). Les résultats sont encore plus significatifs sur les antibiotiques d’importance critique avec une baisse de l’exposition de 23,4 % aux fluoroquinolones et de 21,1 % aux céphalosporines.

Selon l’APCA, les chiffres montrent une diminution réelle, avec un recul de 20,1 % pour l’exposition des animaux à toutes les familles antibiotiques sur les quatre dernières années (2012 à 2015 inclus). Pour la suite du premier plan Ecoantibio, qui se termine à la fin de cette année, elle propose de fixer des objectifs par filière animale, les niveaux d’utilisation n’étant pas les mêmes suivant les filières.

Suivi des ventes d’antibiotiques 2014-2015

La surveillance des ventes d’antibiotiques est l’une des sources d’informations importantes utilisées pour l’évaluation et la gestion des risques en matière d’antibiorésistance. L’Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV) publie un suivi annuel.

La fin des remises, rabais et ristournes instaurée par la loi du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt à compter du 1er janvier 2015 a induit un effet de sur-stockage des médicaments par les acteurs de la distribution et/ou de la délivrance du médicament vétérinaire qui rend difficilement interprétables les différents indicateurs des ventes d’antibiotiques pour l’année 2014, mais aussi pour l’année 2015. Ainsi, les indicateurs de ventes et d’exposition qui ont été calculés dans le rapport publié ce jour prennent en compte les données moyennes des années 2014 et 2015.

Une baisse de l’exposition des animaux observée pour toutes les espèces

Sur les années 2014 et 2015, le volume total moyen des ventes est proche de 650 tonnes d’antibiotiques par an, soit une diminution de 28,4 % par rapport à 2011. Une baisse de l’exposition des animaux aux antibiotiques a été observée pour toutes les espèces par rapport à l’année 2011 (bovins - 9,5 %, porcs - 24,1 %, volailles - 22,1 %, lapins - 17,8 %, chats et chiens - 9,5 %).

Exposition aux fluoroquinolones et céphalosporines de dernières générations

Les céphalosporines de 3ème et 4ème générations et les fluoroquinolones sont considérées comme particulièrement importantes en médecine humaine car elles constituent l’une des seules alternatives pour le traitement de certaines maladies infectieuses chez l’homme.

Sur la base de l’année 2013, année prise pour référence dans la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, l’exposition aux fluoroquinolones et aux céphalosporines de dernières générations a diminué respectivement de 22,3 % et 21,3 %.

Source : ANSES

2. Une mesure très controversée

a. Le sentiment de stigmatisation des vétérinaires

Pour Coop de France, les vétérinaires avaient pris conscience au quotidien du problème du traitement préventif. Les plans antibiotiques ont permis de réfléchir ; des actions concertées et volontaires ont déjà été menées et on constate des inflexions dans les courbes retraçant la consommation des antibiotiques. La loi n’apportant pas de plus-value en termes de solutions, elle aurait eu un effet contre-productif. La mesure arriverait à contretemps : les acteurs concernés étaient déjà investis, et l’interdiction a résonné comme une sanction. Des analyses préalables auraient montré la faiblesse de la consommation d’antibiotiques. Cette mesure a paru être une attaque contre les plans sanitaires d’élevage (PSE) ; on les montre du doigt et on facilite ainsi le travail des acteurs qui veulent leur disparition.

La fédération des syndicats vétérinaires de France (FSVF) a renchéri : les vétérinaires avaient déjà pris la mesure de l’importance du sujet et avaient mis en place des mesures volontaires de réduction d’utilisation des antibiotiques, en particulier dans les filières sensibles. Les récents chiffres de l’ANSES ont démontré que la baisse de la consommation s’est confirmée (cf. infra), le début de cette baisse étant antérieur à la loi d’avenir et d’ajouter : « la stigmatisation des vétérinaires par le ministère de la santé a été particulièrement mal vécue. Ce sentiment a été renforcé par la différence de traitement entre les médecins (incités financièrement pour mieux prescrire sans contrainte réglementaire) et les vétérinaires (contraints réglementairement, menacés de sanctions, pénalisés économiquement) : ce que les acteurs ont appelé la politique de la carotte pour les médecins, la politique du bâton pour les vétérinaires. En effet, ce sont les vétérinaires et leurs clients qui ont financé ces efforts alors que les médecins peuvent percevoir chacun jusqu’à 15 000 euros d’argent public pour contrôler leurs prescriptions ».

Même si elle ne mentionne pas ce sentiment de stigmatisation, la Fédération nationale bovine (FNB) souligne que les éleveurs français se sont ainsi engagés dans un plan rigoureux de diminution de l’usage des antibiotiques et de réduction de l’antibiorésistance. Ces résultats ont été obtenus par un travail au sein de la filière bovine sur les nouvelles conduites d’élevage limitant l’utilisation des antibiotiques à un usage curatif comme la gestion des bâtiments et la gestion alimentaire.

Outre l’impression de stigmatisation, cette mesure pose plusieurs problèmes.

b. La délivrance du médicament vétérinaire

Le code de la santé publique identifie trois ayants droit pour la délivrance du médicament vétérinaire : le vétérinaire, le pharmacien et, à titre dérogatoire, les groupements de producteurs. La capacité de délivrance par les groupements de producteurs est restreinte à une liste positive approuvée par arrêté conjoint des ministères de la santé et de l’agriculture sur avis de l’ANSES. Cette liste est légitimée par les actions de préventions proposées et mises en œuvre dans le cadre des programmes sanitaires d’élevage (PSE). Dans 100 % des cas – et donc y compris dans le cadre des PSE – la délivrance de médicaments se fait uniquement après prescription par un vétérinaire, pour ceux qui en nécessitent une.

Coop de France craint le retrait des antibiotiques des PSE dans le cadre d’une interdiction de l’usage préventif, ce qui pourrait se traduire par un transfert de délivrance à un autre ayant droit sans finalement avoir d’impact sur une diminution d’utilisation d’antibiotiques. À ce titre, on peut citer l’exemple de l’utilisation de pommades intra-mammaires destinées à la prévention et au traitement des mammites chez la vache laitière. Ces pommades à base d’antibiotiques ne peuvent plus être délivrées par les groupements de producteurs, mais seulement par des vétérinaires ou des pharmaciens : il serait intéressant d’étudier si, de ce fait, les volumes délivrés ont été revus à la baisse depuis 2014. Ces traitements sont très couramment prescrits et utilisés et représentent une part de marché importante concernant les ventes d’antibiotiques, d’où l’intérêt qui leur est porté par les ayants droit.

La FSVF souligne que du fait de cette mesure, le modèle économique est modifié puisque les vétérinaires voient leur chiffre d’affaire diminuer : « sur le plan économique, la profession a particulièrement été impactée avec une perte estimée à 60 millions d’euros. Nous regrettons l’absence d’étude d’impact préalable, notamment sur le maillage territorial qui était déjà en train de se déliter. Ceci entraîne déjà un découragement vis-à-vis d’une implication, en particulier en productions animales, et on en observe les effets sur le maillage et la qualité des soins ».

Elle demande de « ne pas ajouter, via les derniers décrets d’application, de nouvelles contraintes aux vétérinaires alors que les résultats sont déjà au rendez-vous. Ce serait un très mauvais signal envoyé aux praticiens et une perte de confiance dans l’État. La baisse d’exposition des animaux aux antibiotiques critiques est déjà supérieure aux prévisions de l’objectif alors que le décret n’a été effectif qu’au 1er avril 2016. Toute nouvelle demande ou nouvel effort devra être financé par l’État, à l’instar de ce qui est prévu pour les autres professionnels de santé… On constate actuellement un abandon de l’activité mixte ou rurale, en raison du trop grand nombre de contraintes. La loi d’avenir est la goutte d’eau qui fait déborder le vase ».

Les médecins traitants bénéficient de la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP), qui vient compléter le paiement à l’acte et repose sur le suivi de 29 indicateurs (9). Les autorités font savoir qu’elle ne peut pas s’appliquer aux vétérinaires, puisque la sécurité sociale n’intervient pas dans le financement, et qu’on ne dispose donc pas d’assez de moyens financiers.

La FSVF indique également que l’industrie pharmaceutique a diminué les prix temporairement pour contourner l’interdiction des rabais, ce qui incite au stockage, puis à la délivrance des médicaments au fur et à mesure des besoins. Le danger de la loi serait que, si le prix des antibiotiques diminue à l’achat, le chef d’exploitation va prendre des risques en décidant de ne pas vacciner et d’attendre l’épidémie qui viendra au bout de quelques années : la prévention est négligée, ce qui est dommageable.

Quant au décret n° 2015-647 du 10 juin 2015 relatif à la publicité des médicaments vétérinaires, il serait contre-productif pour les vaccins : il ne faut pas les limiter ces derniers alors qu’ils permettent de réduire les antibiotiques. Dans la réponse à une question écrite (10), le Gouvernement a précisé que, dans la version proposée au Conseil d’État, le décret comportait « une disposition spécifique permettant la publicité en faveur des vaccins vers les détenteurs professionnels d’animaux appartenant à des espèces dont la chair ou les produits sont destinés à la consommation humaine. Le Conseil d’État n’a pas retenu cette disposition qu’il a jugée contraire au droit européen. Le droit européen en matière de médicaments vétérinaires est en cours de réforme. Pour autant, la proposition de règlement reprend à l’identique l’interdiction, fixée par la directive 2001/82/CE, en maintenant l’interdiction de publicité en faveur de médicaments vétérinaires disponibles sur ordonnance vétérinaire, à l’exception de la publicité vers les seules personnes autorisées à les prescrire ou à les délivrer. Cette exception n’inclut pas les éleveurs, le droit européen ne distinguant pas, en la matière, le public des détenteurs d’animaux de rente. Le Gouvernement français a porté auprès des instances européennes le souhait d’insérer dans le futur règlement une dérogation à cette interdiction pour permettre la publicité en faveur des vaccins à destination des éleveurs. Le Gouvernement français a appuyé sa demande en mettant en avant que la vaccination est une mesure préventive pour préserver la bonne santé des animaux permettant ainsi un moindre recours aux antibiotiques, la lutte contre l’antibiorésistance étant l’un des objectifs que la Commission européenne porte dans la proposition de règlement. En conclusion, aucune dérogation ou modification du décret du 10 juin 2015 n’est possible sans évolution du droit européen ».

c. Le renouvellement des agréments des programmes sanitaires d’élevage (PSE)

La possibilité pour des groupements de délivrer au détail certains médicaments vétérinaires à leurs adhérents est liée à un agrément octroyé par le préfet de région, sur proposition de la commission régionale de la pharmacie vétérinaire (composée des représentants des organisations professionnelles agricoles, des représentants d’organisations vétérinaires et des représentants de l’administration).

Cet agrément est subordonné à l’engagement de mettre en œuvre un programme sanitaire d’élevage (PSE) qui doit être soumis à l’avis préalable de la commission. Les médicaments soumis à prescription vétérinaire nécessaires à la réalisation de ce PSE figurent sur une liste limitative fixée par arrêté des ministres chargés de l’agriculture et de la santé, sur proposition de l’ANSES. Ces agréments font l’objet d’un renouvellement quinquennal, après avis des commissions régionales (art. L. 5143-6, L. 5143-7, L. 5143-8 et R. 5143-10 du code de la santé publique).

Selon Coop de France, les dossiers de renouvellement d’agrément (particulièrement pour les filières bovines) ont les pires difficultés à obtenir leur agrément, plusieurs suspensions ont même été prononcées. Des dossiers solides ayant déjà à plusieurs reprises obtenu un renouvellement ont fait l’objet de critiques qui laisseraient clairement penser qu’elles relèvent d’une stratégie globale.

Elle estime que deux objectifs sont visés : d’une part, condamner les PSE et récupérer ainsi des parts de marchés (les personnes siégeant dans ces commissions ne sont en effet pas exemptes de conflits d’intérêts : il s’agit par exemple des vétérinaires concurrents des groupements) ; d’autre part, déstabiliser et démobiliser les vétérinaires salariés de groupements de producteurs, notamment en exerçant un véritable harcèlement dans le cadre de l’exercice de la pharmacie vétérinaire.

Selon la FSVF, les productions d’élevage sont particulièrement exposées à ces refus d’agrément : elles concernent 300 vétérinaires.

d. L’évolution récente du code de déontologie

Selon Coop de France, l’évolution récente du code de déontologie (décret du 13 mars 2015) conduit au paradoxe suivant : un vétérinaire salarié par un groupement de producteurs ne peut exercer ni la médecine, ni la chirurgie des animaux pour le compte de ce groupement ou pour le compte de ses adhérents dès lors que ledit groupement n’est pas titulaire d’un PSE. Un groupement qui souhaiterait aujourd’hui salarier un vétérinaire pour ses compétences médicales et chirurgicales, mais qui n’envisagerait pas de délivrer de médicaments, et donc de faire une demande d’agrément de PSE, ne pourrait tout simplement pas recruter un vétérinaire. « Cela constitue un paradoxe au moment même où le ministère de l’agriculture conduit une réflexion pour assurer le maintien d’une compétence vétérinaire dans les territoires ruraux. Cela représente également un frein évident à la mise en œuvre de démarches de progrès s’appuyant sur un encadrement technique compétent au sein de coopératives et de groupements de producteurs qui souhaiteraient faire le choix de recruter ces compétences ».

Coop de France a dénoncé à maintes reprises cette mesure discriminatoire (unique en Europe) et a même été à l’initiative d’une demande de recours gracieux adressée au Premier ministre afin de corriger cette anomalie. Cette demande de recours a été appuyée par d’autres organisations professionnelles, la FNSEA et ALLICE (union de coopératives d’élevage qui fédère les entreprises de sélection et de reproduction animales).

e. Le développement des alternatives

On peut déplorer à ce sujet un manque de travaux, alors que cette problématique est importante, dans la mesure où on arrivera probablement à un « plateau » concernant la diminution de l’emploi des antibiotiques.

Il existe une frontière délicate entre la métaphylaxie (le traitement systématique de la totalité d’un groupe d’animaux au-delà d’un certain seuil d’incidence clinique) et la médecine préventive : il est malaisé de décider jusqu’où on doit attendre pour délivrer des antibiotiques.

Pour le porc, on peut utiliser de l’oxyde de zinc (ZnO), qui est très efficace contre les bactéries, mais dégrade l’environnement, comme le souligne l’ANSES. Certains pays européens l’autorisent déjà à des doses élevées dans l’alimentation des porcelets, sous forme de pré-mélange médicamenteux, à la période du sevrage. Une telle autorisation n’existe pas en France aujourd’hui.

Coop de France a souligné que les pays européens qui ont diminué la consommation d’antibiotiques ont utilisé des solutions alternatives. Les pistes relèvent de la recherche, qu’il faut renforcer, mais les coopératives estiment qu’elles ont un rôle à jouer : des marges intéressantes de progrès sont à explorer. Mais on se heurte à des freins économiques car il s’agit d’actions à moyen et long termes. Le même problème se pose pour le secteur végétal.

La Fédération nationale bovine (FNB) propose plusieurs leviers de lutte contre le développement de l’antibiorésistance et, notamment :

– rechercher de nouvelles molécules pour pallier la baisse d’efficacité des antibiotiques existants ;

– développer des alternatives thérapeutiques comme la vaccination, les pratiques homéopathiques, etc. ;

– adopter de nouvelles conduites d’élevage limitant l’utilisation des antibiotiques à un usage curatif, comme la gestion des bâtiments, la gestion alimentaire… ;

– rendre évolutive la liste des antibiotiques classés critiques : en cas de baisse de l’exposition significative de certaines molécules, elles pourraient sortir de la liste des AIC ;

– soutenir des projets de recherches et des études techniques visant à non seulement réduire le recours aux antibiotiques mais également à mieux cerner les causes de l’antibiorésistance avec l’identification fine des causes de celle-ci, la recherche de solutions alternatives et le développement de nouveaux antibiotiques ;

– adopter des mesures alternatives, notamment en développant la vaccination chez les naisseurs ;

– autoriser le recours aux auto-vaccins ;

– aider les éleveurs à financer les coûts supplémentaires dus à la réalisation d’examens complémentaires obligatoires à toute prescription AIC. L’enveloppe financière consacrée aux visites sanitaires bovines (environ 10 M€) pourrait être plutôt affectée à la mise en place d’une caisse de financement des surcoûts pour les éleveurs, via le Fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE) ;

– arrêter toute sur-transposition française de la réglementation européenne. Les États membres ne sont pas soumis aux mêmes contraintes d’usage des antibiotiques en élevage alors même que la France importe des volumes significatifs d’animaux vivants ou de viandes en provenance de nos partenaires européens. La filière bovine française subit ainsi des distorsions de concurrence importantes ;

– soutenir les éleveurs bovins pour moderniser leur bâtiment d’élevage notamment via les plans de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles (PCAE) ;

– mettre en place des groupes de travail réunissant les différentes familles professionnelles sur le sujet afin de favoriser la concertation entre les filières ;

– favoriser le développement de nouvelles relations commerciales entre les maillons des filières de naisseurs et d’engraisseurs afin de permettre le développement de la maîtrise de l’usage des antibiotiques en élevage ;

– impliquer l’ensemble des acteurs de la filière pour améliorer significativement l’impact des mesures menées en élevage, avec notamment, la mise en place de mesures sur la biosécurité et la limitation de l’usage des antibiotiques.

L’APCA suggère d’améliorer la prévention de l’utilisation d’antibiotiques en rénovant les bâtiments, mais cela entraîne des investissements coûteux.

Outre ces différentes propositions, le développement des alternatives suppose qu’une attention accrue soit portée à la recherche agronomique.

C. LA MAÎTRISE DES PRODUITS PHYTOSANITAIRES

1. L’arrêté sur les phytosanitaires en préparation

Vos rapporteurs ont entendu plusieurs réserves sur l’application de l’article 53 qui interdit l’utilisation de pesticides dans les lieux fréquentés par des publics sensibles et subordonne, dans d’autres lieux, les usages de ces produits à des mesures de protection et des distances d’épandage. Plus que l’article 53, c’est un arrêté en préparation qui suscite l’inquiétude.

Il convient tout d’abord de rappeler que cette interdiction fait suite à une série de mesures tendant à limiter l’usage des phytosanitaires. Après le plan interministériel de réduction des risques liés aux pesticides de 2006, puis, deux ans plus tard, l’interdiction des trente produits jugés les plus toxiques, l’instauration d’une taxe sur les phytosanitaires (11) et l’octroi de crédits d’impôts en faveur de l’agriculture biologique, la loi relative au Grenelle de l’environnement a prévu plusieurs dispositions : la réduction de moitié, en 10 ans, de l’emploi de pesticides de synthèse (il s’agit du plan « ECOPHYTO 2018 ») et le passage en agriculture biologique de 20 % de la surface agricole utile en 2020 (contre 6 % en 2010).

La loi n° 2014-110 du 6 février 2014 visant à mieux encadrer l’utilisation de produits phytosanitaires sur le territoire national fait interdiction à l’État, aux collectivités territoriales et aux établissements publics d’utiliser certains produits phytosanitaires à partir du 1er janvier 2020 (12) ; elle interdit également, à compter du 1er janvier 2022, la mise sur le marché, la délivrance, l’utilisation et la détention de produits phytosanitaires pour un usage non professionnel.

La loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, dans son article 68, anticipe au 1er janvier 2017 l’entrée en vigueur des interdictions de la loi précédemment citée, restreint les possibilités de pulvérisation aérienne au seul cas de « danger sanitaire grave qui ne peut être maîtrisé par d’autres moyens ».

L’Association nationale des pommes et des poires (ANPP) a entrepris de faire annuler par la justice l’arrêté du 12 septembre 2006, qu’elle estimait inapplicable. Il ne définissait des zones non traitées qu’aux abords des points d’eau. En juillet 2016, le Conseil d’État lui a donné gain de cause pour des raisons de forme : le texte n’avait pas été notifié comme il se doit à l’Union européenne. Le Gouvernement n’a donc d’autre choix que de prendre rapidement un nouvel arrêté, sous peine de se retrouver bientôt face à un vide juridique.

Un arrêté interministériel est actuellement en préparation et s’apprête à donner une définition juridique de la notion de « riverains », ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent. Il doit remettre à plat les conditions d’épandage de produits phytosanitaires : force du vent ; distances minimales par rapport à une habitation et à un cours d’eau ; délais minimaux à respecter avant que les travailleurs agricoles – les plus exposés aux effets des pesticides – puissent pénétrer à nouveau dans une parcelle ou une serre qui vient d’être traitée.

Depuis l’arrêté du 27 juin 2011 (13), la pulvérisation de pesticides aux abords des crèches, des maisons de retraite, des terrains de sport et des parcs publics doit obligatoirement respecter des distances minimales. Dans certains départements, des arrêtés préfectoraux renforcent ces précautions en interdisant par exemple de traiter des parcelles proches d’une école à l’heure de la récréation.

Mais c’est la première fois qu’il est envisagé de réglementer autour de toutes les habitations et des jardins des particuliers. Selon les syndicats, le projet de texte pourrait s’appliquer le long des fossés, forêts, bosquets, landes et de « zones non cultivées adjacentes » ; en outre les zones d’interdiction d’épandage pourraient être de 10 ou 20 mètres, voire 50 mètres.

Dès le 14 octobre 2016, la FNSEA appelait ses adhérents, dans un communiqué, à se mobiliser contre « l’arrêté phyto ». Le syndicat estime que ces nouvelles dispositions imposant des zones non traitées larges de 5 à 20 mètres entre les cultures et les habitations priveraient les exploitants d’un « énorme potentiel » de production : « nous avons calculé que cela va rogner au minimum quatre millions d’hectares de terres agricoles, soit 7 milliards d’euros de chiffre d’affaires par an », affirme le président de la commission environnement de la FNSEA. Il ajoute : « Multiplier les parapluies au nom du principe de précaution va créer des distorsions avec nos concurrents. La France peut-elle se payer ce luxe ? (14) ». La FNSEA craint que le nouveau texte ne prévoie des zones non traitées non seulement le long des cours d’eau, mais aussi en bordure des forêts, des fossés, des haies, des bosquets et des habitations. La FDSEA d’Île-de-France estime que ces mesures feraient perdre 70 000 hectares pour la production. L’Association générale des producteurs de blé (AGPB) souligne également que les dispositions du nouvel arrêté risqueront d’entraîner la suppression de milliers d’emplois agricoles.

La FNSEA veut aussi réduire les délais minimaux de retour dans une parcelle traitée avec des produits cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques. Elle demande un laps de temps de six ou huit heures au lieu des vingt-quatre heures à quarante-huit heures actuellement – ce qui est déjà inférieur à d’autres pays –, pour peu que le travailleur porte un équipement individuel de protection.

Selon Coop de France, les dispositions de la loi sont satisfaisantes pour les traitements des lieux fréquentés par les personnes sensibles. On constaterait toutefois un effet collatéral négatif : alors que les bonnes pratiques sont nécessaires, les arrêtés ont tendance à prendre des précautions extrêmes. La nécessité de protéger les populations, parfois exposées aux produits phytosanitaires, ne doit pas empêcher les agriculteurs de traiter leurs récoltes dans de bonnes conditions de protection.

La Coordination rurale craint également que le futur décret n’aille bien au-delà des dispositions de la loi. Par exemple, elle souhaiterait, dans le cas d’une haie, que soit précisé qui la traite, et ce qu’il en est des passages dans celle-ci. Il est interdit pour les particuliers d’utiliser des phytosanitaires et leur usage est limité pour les agriculteurs. Il est donc difficile d’envisager les traitements au quotidien et des problèmes se posent pour les parties de parcelle qu’on ne peut traiter. En plus, la définition des zones serait délicate : personne n’est invulnérable, si bien que des associations peuvent présenter des revendications supplémentaires. On risque une multiplication des contraintes, alors qu’il ne faut pas complexifier.

L’APCA considère que la loi est satisfaisante mais qu’il ne faut pas aller trop loin – ce que fait le projet d’arrêté – en oubliant les dimensions économiques.

Elle formule des constats sur la maîtrise des produits phytosanitaires à partir de ses missions au niveau national et sur le terrain. Pour les zones de non-traitement à proximité des lieux accueillant un public sensible, des instructions des ministères de l’agriculture et de l’écologie ont été envoyées au début de 2016 pour une prise rapide d’arrêtés préfectoraux départementaux. Des départements avaient anticipé ce besoin en prenant des arrêtés ou en initiant les discussions. Les acteurs professionnels se sont fortement mobilisés sur ce sujet : une quarantaine d’arrêtés ont été signés ou sont en cours, des discussions ont été engagées dans une vingtaine de départements.

L’APCA conclut que la loi répond aux enjeux de maîtrise des risques vis à vis des citoyens, que l’article 53 est pragmatique et que les arrêtés doivent être pris dans ce cadre pour être compris, appliqués et applicables. Elle se félicite de la concertation départementale qui est positive pour prendre en compte les contextes locaux et peut aboutir à des démarches de plus grande ampleur ; par exemple, le projet de charte régionale des Pays de la Loire « Bonnes pratiques pour la protection des lieux accueillant des publics sensibles » ; des projets semblables sont en cours d’élaboration dans d’autres régions.

Quant au renforcement de la traçabilité des pesticides à partir de leur commercialisation, Coop de France estime qu’il s’agit d’une disposition positive ; mais il faut qu’elle soit bien effectuée. Les coopératives travaillent actuellement sur un procédé de lecture optique qui s’avère positif, mais long et coûteux à mettre au point.

Enfin, Coop de France a indiqué que la disposition selon laquelle les distributeurs doivent apporter des conseils ou apporter la preuve qu’ils ont donné un conseil – à laquelle elle est favorable – s’applique effectivement.

2. L’interdiction des néonicotinoïdes

Leur usage a été interdit à compter du 1er septembre 2018, non par la loi d’avenir, mais par la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Des dérogations peuvent toutefois être accordées jusqu’au 1er juillet 2020 par arrêté conjoint des ministres chargés de l’agriculture, de l’environnement et de la santé, pris sur la base d’un bilan établi par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail qui compare les bénéfices et les risques liés aux usages de ces produits avec ceux liés à l’utilisation de produits de substitution ou aux méthodes alternatives disponibles. Ce bilan, qui porte sur les impacts sur l’environnement, notamment sur les pollinisateurs, sur la santé publique et sur l’activité agricole, est rendu public.

L’ANSES a été saisie dès mars 2016 par le ministre chargé de l’agriculture ; le traitement de la saisine a été confié à plusieurs comités d’experts spécialisés de l’ANSES et un groupe de travail dédié constitué.

L’ANSES a par ailleurs été saisie en avril 2016 par les ministres chargés de la santé et de l’environnement et la secrétaire d’État à la biodiversité, afin de « réaliser en complément une expertise approfondie concernant les effets sur la santé humaine de l’ensemble des substances néonicotinoïdes autorisées à ce jour au niveau national en tant que produit phytopharmaceutique ou biocide ». Les premiers résultats de ces travaux seront disponibles fin 2016.

Par ailleurs, l’ANSES a mis en consultation publique cet été deux projets de décision d’autorisation de mise sur le marché qui s’inscrivent dans le cadre législatif et réglementaire en vigueur jusqu’en 2018, date à laquelle le législateur a souhaité interdire l’usage des néonicotinoïdes. L’évaluation scientifique des deux demandes, déposées il y a plus de deux ans, a été finalisée en 2015. Le comité de suivi des AMM a été consulté sur la faisabilité des mesures de gestion des risques, et un projet de décision a été proposé en tenant compte des résultats favorables de l’évaluation, au regard du cadre réglementaire actuel.

Ces projets comportent des mesures de gestion des risques renforcées pour protéger les pollinisateurs. Les décisions ont été suspendues dans l’attente du vote de la loi relative à la biodiversité, et notamment de la date de l’interdiction des néonicotinoïdes. Elles s’inscrivent dans le nouveau cadre législatif en vigueur jusqu’en 2018. C’est dans ce contexte particulier, et dans une volonté de transparence et de prise en compte des contributions du public, que l’ANSES a organisé la consultation sur ces projets de décision.

L’agence analyse actuellement les contributions reçues et poursuit également sa veille scientifique sur les connaissances produites sur l’impact des néonicotinoïdes sur les pollinisateurs, l’environnement et la santé ; de nouvelles évaluations sont attendues à court terme au niveau européen.

3. Les certificats d’économie de produits phytosanitaires

Ces certificats (CEPP) ont été institués par ordonnance. Le décret est paru, ainsi que les arrêtés.

Pour Coop de France, ces textes permettent de diffuser les bonnes pratiques et de limiter l’usage des produits phytosanitaires. Mais c’est aussi « la chronique d’une pénalité annoncée », car les agriculteurs doivent adopter des dispositions très ambitieuses, qui risquent d’entraîner de nouvelles charges administratives. Toutefois, elle a salué le travail réalisé avec le ministère de l’agriculture.

Quant à la FNSEA, elle a souligné que la redevance pour pollution diffuse devait être versée aux agriculteurs.

La Coordination rurale fait remarquer qu’en application de l’article 58, un décret devait prévoir les modalités d’indemnisation des détenteurs de certificat d’obtention végétale (COV) ; rien n’est encore paru.

L’APCA s’est mobilisée pour « participer activement au dispositif » en prodiguant conseils et accompagnement aux agriculteurs. Elle fait remarquer que cette action doit s’inscrire en lien avec d’autres mises en place au sein du plan Ecophyto.

Sur la performance sanitaire en général, le MODEF constate une situation aberrante : alors que la réglementation française est une des plus contraignantes – ce qui est positif – la société française ne tient pas compte de ce qui se passe au-delà de nos frontières, et des distorsions existantes entre la France, d’une part et l’Europe et le monde, d’autre part.

Des produits sont ainsi importés alors qu’ils ont été traités avec des produits dangereux, dont parfois on ne trouve plus trace après un délai de quelques jours. Le consommateur soutient donc sans le savoir des filières qui emploient des produits interdits en France.

Le MODEF conclut donc qu’il faudrait parvenir à homogénéiser les règles européennes ou, tout au moins, faire respecter la réglementation française pour les produits consommés en France. Dans la situation actuelle, les premiers perdants sont les agriculteurs français, suivis par les consommateurs français.

Un premier progrès consisterait à mettre en place une vraie transparence, car, actuellement, le consommateur ne dispose pas de l’information suffisante sur les problématiques sanitaires ; indiquer la provenance du produit ne suffit pas.

Il est nécessaire d’effectuer des relevés sur les produits européens, puis de mettre en place au niveau de l’Union un cahier des charges contraignant. Les importations devront tenir compte de ce cahier des charges.

D. L’ATTRIBUTION À L’AGENCE NATIONALE DE SÉCURITÉ SANITAIRE DE L’ALIMENTATION, DE L’ENVIRONNEMENT ET DU TRAVAIL (ANSES) DE L’AUTORISATION DE MISE SUR LE MARCHÉ

1. Les autorisations de mise sur le marché

Comme l’a confirmé son directeur général, l’ANSES était réticente à ce transfert lorsqu’il a été inscrit dans le projet de loi, car elle souhaitait une séparation entre l’analyse et la décision. Mais l’agence a mobilisé les moyens nécessaires, et de plus, cette mesure a permis de désengorger les services de l’État.

En outre, la loi du 2 décembre 2015 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne (DDADUE) dans le domaine de la prévention des risques acte le transfert à l’ANSES de la responsabilité de la délivrance des autorisations de mise sur le marché des produits biocides. Le transfert effectif a été fixé au 1er juillet 2016.

L’évaluation des substances actives entrant dans la composition des préparations phytopharmaceutiques et des préparations elles-mêmes en vue de leur commercialisation est strictement encadrée et harmonisée au niveau européen par le règlement (CE) n° 1107/2009.

Chaque année, l’ANSES examine près de 2 000 dossiers au total, dont plus de 300 concernent une demande d’autorisation de mise sur le marché d’un nouveau produit ou son renouvellement après réexamen, pour 10 ans.

L’évaluation de ces demandes est réalisée à l’ANSES dans le cadre d’expertises collectives, pluridisciplinaires et contradictoires. Elle se traduit par l’élaboration de rapports d’évaluation et par la publication d’avis scientifiques. Ces rapports d’évaluation sont par ailleurs mis à la disposition des autres États membres dans le cadre de l’évaluation zonale.

Le décret n° 2015-1184 du 20 septembre 2015 a mis en place le comité de suivi des AMM (CSAMM) afin d’appuyer le directeur général. Il n’est pas composé d’experts, mais de praticiens, de professionnels qui sont sur le terrain ; il regroupe des professionnels de santé, des utilisateurs de produits, des agronomes, des spécialistes de l’environnement. Il s’est déjà réuni cinq fois. L’ANSES est par ailleurs dotée d’un comité d’experts.

Le comité de suivi examine si la décision est applicable, cohérente avec d’autres décisions et si elle permettra d’atteindre les objectifs voulus. Au sein de ce comité, les mesures examinées sont confrontées à la réalité pratique.

Les industriels déposent auprès de l’ANSES une demande d’autorisation de mise sur le marché comportant, notamment, tous les éléments scientifiques nécessaires pour mener l’évaluation des risques liés à l’usage des produits. La procédure d’autorisation consiste à vérifier que les produits sont composés de substances autorisées pour l’usage spécifié et que, dans les conditions normales d’utilisation, ils sont efficaces et n’exercent aucun effet inacceptable sur la santé humaine ou animale et sur l’environnement, selon les critères fixés par la réglementation. L’AMM n’est pas donnée à un produit qui n’a aucune action, aucun effet. Cette procédure inclut également des exigences concernant l’emballage et l’étiquetage.

Pour donner l’autorisation de mise sur le marché, l’ANSES se base sur les résultats des expérimentations des industriels, sur la littérature scientifique et sur les travaux européens. Ses effectifs ne comptent que des scientifiques. Quand le pétitionnaire dépose le dossier, il revendique un usage pour son produit, des doses, etc. Il apporte des données à l’appui de sa demande. Ce n’est pas l’agence qui reformule sa demande. Sur des saisies plus larges (par exemple les antibiotiques en général), l’agence fait des recommandations plus générales.

L’ANSES vérifie tout d’abord la validité scientifique des données fournies par les industriels et leur conformité aux exigences réglementaires.

Elle évalue ensuite l’efficacité des produits et les risques liés à leur utilisation et en fait la synthèse. L’évaluation des risques concerne la sécurité pour l’homme (applicateurs, travailleurs, personnes présentes près des lieux d’épandage, mais aussi les consommateurs au travers des résidus dans les aliments et l’eau), l’environnement (eaux de surface et eaux souterraines, air, sol), la faune et la flore. Globalement, chaque produit fait l’objet d’une évaluation approfondie des caractéristiques de son danger, tant sur le plan de la santé humaine que pour la faune, la flore et l’environnement. Sont pris en compte à la fois les effets de type aigu (mortalité liée à une exposition sur une courte période) et ceux de type chronique (effets sur le développement ou la reproduction par exemple, liés à une exposition sur le long terme).

Cette évaluation est menée sur la base d’études fournies par les pétitionnaires respectant des lignes directrices (définies au niveau européen) mais aussi de l’ensemble des données disponibles dans la littérature scientifique ou issues de remontées des systèmes de vigilance comme la phytopharmacovigilance.

Cette démarche fait intervenir  les équipes multidisciplinaires d’évaluateurs scientifiques de l’agence, ainsi que deux comités d’experts spécialisés composés de personnalités intervenant intuitu personae.

Les dossiers déposés par les industriels comportent, notamment, tous les éléments scientifiques nécessaires pour mener l’évaluation des risques liés à l’usage des produits et portent sur un nombre variable d’usages revendiqués. Chaque usage concerne une espèce végétale, un organisme nuisible cible et un mode de traitement ou une fonction. Il est assorti de conditions d’emploi telles que la dose utilisée, la période et la fréquence d’utilisation et les pratiques agricoles associées au traitement.

La procédure d’autorisation consiste à vérifier que les produits sont composés de substances autorisées pour l’usage spécifié et que, dans les conditions normales d’utilisation, ils sont efficaces et n’exercent aucun effet inacceptable sur la santé humaine ou animale, et sur l’environnement, selon les critères fixés par la réglementation. Cette procédure inclut également des exigences concernant l’emballage et l’étiquetage.

L’évaluation de ces demandes est réalisée à l’ANSES dans le cadre d’expertises collectives, pluridisciplinaires et contradictoires. Elle se traduit par l’élaboration de rapports d’évaluation et par la publication d’avis scientifiques.

Dans le cadre de son évaluation, les conclusions de l’agence sont précisées pour chaque usage et peuvent proposer des conditions d’emploi restrictives par rapport à la demande initiale du pétitionnaire.

Les conclusions de l’évaluation présentent ainsi une synthèse des risques identifiés au cours de l’évaluation et les intérêts agronomiques pour les usages revendiqués.

Elles permettent également de fixer des bonnes pratiques d’utilisation et, si nécessaire, d’introduire des restrictions d’usage en fonction des risques identifiés. Des recommandations peuvent également être formulées matière de suivi post-autorisation.

Ces rapports d’évaluation sont par ailleurs mis à disposition des autres États membres dans le cadre de l’évaluation zonale.

L’agence considère que l’avis est :

– favorable lorsque toute la demande du pétitionnaire est jugée conforme ;

– favorable avec restriction lorsque l’avis est favorable pour certains des usages demandés ou lorsque des conditions d’emploi restrictives par rapport à la demande sont recommandées ;

– défavorable lorsque l’agence recommande de rejeter tous les usages demandés.

Les décisions de mise sur le marché sont d’une durée de 10 ans, à l’issue de laquelle les pétitionnaires sont tenus de déposer une nouvelle demande d’autorisation. Les produits font par ailleurs l’objet d’un réexamen lorsque les conclusions de l’évaluation communautaire des substances actives qu’ils contiennent sont disponibles. L’ANSES réévalue l’ensemble du dossier et prend en compte l’ensemble des données de terrain ainsi que les dernières connaissances scientifiques disponibles sur l’impact éventuel sur l’homme et l’environnement du produit concerné.

Chaque année, l’ANSES traite un peu plus de 300 dossiers de demandes d’autorisation de nouveaux produits phytopharmaceutiques ou demandes de renouvellement après réexamen, qui font l’objet d’une évaluation approfondie. Sur la base des données 2010, les évaluations réalisées conduisent à un avis défavorable dans un quart des cas. Par ailleurs, les avis favorables sont très majoritairement assortis de restrictions d’usage par rapport à la demande initiale du pétitionnaire. Les avis rendus par l’agence, ainsi que l’ensemble de ses travaux, sont systématiquement rendus publics et sont consultables sur son site internet.

Le décret de 2015 a été suivi de 1000 décisions d’autorisation de mise sur le marché (AMM), puis de 30 autres en application de la loi n° 2015-1567 du 2 décembre 2015 pour les produits biocides.

Les autorisations de mise sur le marché en cours

L’ANSES a mis en consultation publique cet été deux projets de décision d’autorisation de mise sur le marché. Ces projets de décision s’inscrivent dans le cadre législatif réglementaire en vigueur jusqu’en 2018, date à laquelle le législateur a souhaité interdire l’usage des néonicotinoïdes.

L’évaluation scientifique des deux demandes, déposées il y a plus de deux ans, a été finalisée en 2015.

Le comité de suivi des AMM a été consulté sur la faisabilité des mesures de gestion des risques, et un projet de décision a été proposé en tenant compte des résultats favorables de l’évaluation, au regard du cadre réglementaire actuel.

Ces projets comportent des mesures de gestion des risques renforcées pour protéger les pollinisateurs.

Les décisions ont été suspendues dans l’attente du vote de la loi relative à la biodiversité, et notamment de la date de l’interdiction des néonicotinoïdes. Elles s’inscrivent dans le nouveau cadre législatif en vigueur jusqu’en 2018.

C’est dans ce contexte particulier, et dans une volonté de transparence et de prise en compte des contributions du public, que l’ANSES a organisé la consultation sur ces projets de décision, dont le processus d’instruction arrivait à son terme.

Le nombre de contributions enregistrées a montré l’intérêt de cette consultation et un certain nombre de contributeurs ont amené des éléments scientifiques et techniques qui sont actuellement en cours d’analyse.

L’agence n’est pas en mesure d’indiquer un délai d’échéance d’autant plus qu’elle est dans un processus d’analyse des contributions reçues, qu’elle poursuit également sa veille scientifique sur les connaissances produites sur l’impact des néonicotinoïdes sur les pollinisateurs l’environnement et la santé, et que de nouvelles évaluations, notamment de données confirmatives, sont attendues à court terme au niveau européen.

Source :ANSES

2. Les trois zones de l’Union européenne

Depuis juin 2011, l’évaluation des préparations phytopharmaceutiques est réalisée non plus par chaque État membre, mais par zone géographique (l’Union européenne est découpée en 3 zones). La France appartient à la zone Sud, ainsi que la Bulgarie, la Grèce, l’Espagne, l’Italie, Chypre, Malte et le Portugal. L’évaluation réalisée par l’État membre sollicité s’applique ensuite aux autres pays de la zone, sauf lorsqu’il existe des particularités locales.

Les demandeurs d’AMM ont le choix du pays dit « de référence » qui pilote l’évaluation, les autres États étant alors nommés « États concernés ». L’intervention en tant qu’État membre de référence est l’un des piliers donnant à la France un positionnement incontournable en Europe et une reconnaissance de son haut niveau d’expertise sanitaire. La présence des experts français au comité des médicaments vétérinaires (CVMP) et dans les groupes de travail de l’Agence européenne constitue un second pilier d’une reconnaissance internationale.

L’analyse des dossiers d’évaluation des préparations est réalisée au niveau d’un État membre rapporteur dans la zone où la préparation fait l’objet d’une demande d’autorisation portant sur un ou plusieurs usages précis. Les autres États membres de la zone ont la possibilité de commenter cette évaluation.

L’évaluation des produits phytopharmaceutiques avant mise sur le marché se fait dans le cadre du règlement européen (CE) n°1107/2009 dont les dispositions s’imposent aux États membres. Cette évaluation se décompose en deux étapes :

– la première étape, réalisée au niveau européen, porte sur l’évaluation des dangers et des risques liés aux substances actives entrant dans la composition des produits phytopharmaceutiques. Cette phase est coordonnée au niveau européen par l’Autorité européenne de sécurité alimentaire (EFSA) qui s’appuie sur l’évaluation collective réalisée par les États membres (l’ANSES pour la France) ;

– la seconde étape consiste à évaluer les intérêts et les risques liés aux préparations commerciales.

Après le Brexit, il est probable qu’une partie des dossiers traités par la Grande Bretagne revienne à la France. Or, celle-ci est très en retard dans le traitement des dossiers, qui prend deux ans. Coop de France déplore que l’ANSES ait à gérer de nombreux dossiers d’autres pays, si bien qu’il est difficile de résorber les retards, ce qui conduit à un engorgement, surtout pour les cultures orphelines. Elle préférerait que l’Europe ne forme qu’une seule zone.

Comme elle l’a rappelé à vos rapporteurs, la FNSEA s’était opposée au fait que les autorisations de mise sur le marché (AMM) soient transférées à l’ANSES. Elle estime que celle-ci reprend toutes les recommandations européennes, mais adopte une position maximaliste, ce qui induit plus de contraintes en France que dans les pays de la même zone (Sud) européenne et introduit une distorsion de concurrence. Par exemple, le diméthoate – un pesticide – a été interdit alors que d’autres pays l’autorisaient. Elle estime, en revanche, positif que la gestion des usages orphelins et mineurs soit restée au MAAF.

3. Des moyens insuffisants

L’ANSES a un problème de moyens : elle est très sollicitée avec des transferts de missions, mais des moyens en moins.

Depuis 2010, divers organismes ont été fusionnés au sein de l’ANSES, il a été procédé au transfert de la toxicovigilance et de l’ecophyto : son directeur a indiqué à vos rapporteurs qu’il fallait augmenter les moyens financiers, augmenter le barème et le plafond des taxes.

L’agence a bénéficié de 15 postes à titre exceptionnel pour résorber les stocks, alors que le plafond des ETP a été réduit de 7 postes ; par exemple, le transfert du biocide n’a pas donné lieu à la création d’emplois supplémentaires. Elle souffre d’un plafond des emplois, mais aussi de la masse salariale.

Le budget de L’ANSES dépend de 4 ministères contributeurs et sa gouvernance de 5 ministères de tutelle (ministères chargés de l’agriculture, de l’environnement, de la santé, de la consommation et du travail).

Les nouvelles missions qui lui ont été confiées ne s’accompagnent pas de transfert d’emplois : une augmentation des recettes ne peut se transformer en augmentation d’emplois.

Le budget (138 M€) est assis en partie sur 5 subventions pour charges de service public (environ 90M€), sur des revenus externes prévus par des conventions et, pour le reste, sur des ressources en provenance de redevances et de taxes affectées à l’ANSES.

Il est à noter que les taxes affectées au bénéfice de l’agence pour l’instruction des dossiers de produits réglementés sont plafonnées par la loi de finances pour 2017. L’ANSES aurait souhaité que les taxes versées au moment du dépôt d’un dossier d’autorisation de mise sur le marché d’un produit phytosanitaire ou d’un médicament vétérinaire soient exonérées de cette obligation de plafonnement : chaque dossier déposé constituant un surcroît de charge de travail, le plafonnement pour de telles taxes n’est pas pertinent.

L’activité de délivrance des autorisations de mise sur le marché est basée sur une expertise scientifique exigeante et complexe. Les flux d’entrée, et donc la charge de travail de l’agence dans ce domaine, dépendent de demandeurs privés (industriels fabriquant des produits ou du médicament vétérinaire) et ne peuvent être régulés. La taxe versée par les demandeurs devrait permettre à l’agence d’ajuster les moyens nécessaires à l’évaluation des dossiers déposés et ce d’autant plus que pèse sur l’ANSES l’obligation de respecter les délais réglementaires de délivrance des autorisations.

Or, l’ANSES souligne que les règles en matière de plafond d’emploi et de masse salariale qui lui sont applicables – comme aux autres établissements publics administratifs – rendent quasi impossible l’augmentation des effectifs parallèlement à la charge de travail, même quand celle-ci est intégralement financée. En effet, en tant qu’établissement public administratif, l’ANSES est contingentée tant sur le « sous plafond » que sur le « hors plafond ».

Ceci est d’autant plus problématique que des missions nouvelles sont parfois confiées à l’ANSES sans moyens humains supplémentaires.

Le périmètre des missions de l’ANSES a été étendu en 2015 aux autorisations de mise sur le marché des produits phytosanitaires (transfert de compétence du ministère chargé de l’agriculture) et à celles de biocides au 1er juillet 2016 (transfert du ministère chargé de l’écologie). De plus, depuis août 2016, l’ANSES est chargée d’une mission de contrôle et d’évaluation de la composition des produits du tabac et du vapotage. Cette mission est issue d’une directive européenne qui oblige les producteurs de tabac à faire une déclaration de la composition des produits.

La prise en charge des produits phytosanitaires a été accompagnée d’une augmentation temporaire du plafond d’emploi, qui prend fin en 2017. Cela n’a pas été le cas concernant les biocides et le tabac.

Pour faire face aux nouvelle missions sur le tabac en 2017, 7 à 10 ETPT sont nécessaires. Or, le plafond d’emploi de l’ANSES prévoit une réduction de 6 ETPT en 2017 par rapport à 2016. Cela parait d’autant plus inexplicable que la mission de l’agence en matière de produits du tabac et de vapotage est financée par des taxes, prévues dans la réglementation européenne, payées par les industriels notamment au moment de la déclaration de composition de leurs produits sur la base européenne.

On constate donc une montée en puissance des missions et des recettes, assises sur des taxes affectées ou des redevances, mais sans capacité de recrutement, le plafond d’emploi étant fixé par le ministère de l’agriculture (programme 206). Les recettes sont impossibles à transformer en emplois, car un tel mécanisme n’est pas prévu pour les établissements publics administratifs, ce qui pénalise fortement l’agence dans un contexte de forte concurrence européenne.

Il est donc indispensable de lever la pression sur le plafond d’emploi et le plafond de la masse salariale, pour l’activité d’évaluation de dossiers réglementaires, afin que l’agence puisse disposer de la flexibilité nécessaire pour s’adapter aux évolutions du nombre de dossiers à évaluer. Les enjeux sont en effet majeurs pour la santé publique et l’ANSES doit rendre ses avis dans les délais requis pour permettre la décision publique. Le respect des délais conditionne en partie l’attractivité de la France pour les entreprises concernées.

Il importe également d’ajuster le montant des droits perçus à la réalité du travail effectué. En matière de médicaments vétérinaires et produits biocides, la taxe couvre l’ensemble des coûts liés à l’activité de l’ANSES, comme le montre la comptabilité analytique de l’agence. Dans le cas des produits phytosanitaires, en revanche, elle ne couvre que 80 % des activités, les 20 % restants étant de fait financés par la subvention pour charges de service public versée par le ministère de l’agriculture.

Il est donc nécessaire, pour cette année, d’augmenter le barème des taxes en matière de produits phytopharmaceutiques.

Les droits versés par les industriels doivent correspondre au coût complet du travail effectué et permettre à l’agence de mettre en œuvre les moyens nécessaires à l’évaluation de ces dossiers dans les délais.

Il convient donc de transformer les taxes relatives aux dossiers phytosanitaires en redevances.

Certaines sommes sont perçues en échange d’un service réalisé, à savoir l’instruction scientifique et réglementaire des demandes relatives à la mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques, des médicaments vétérinaires et des biocides. Or il existe aujourd’hui un manque de cohérence car certaines de ces missions (médicaments vétérinaires, produits phytosanitaires) sont actuellement financées par une taxe, tandis que d’autres (biocides) le sont par une redevance.

La transformation des taxes en redevances pour l’évaluation et la délivrance d’AMM de produits phytosanitaires s’avère donc nécessaire, d’autant plus qu’elle permettrait de résoudre le problème du plafonnement des taxes qui implique qu’au-delà d’un montant défini, l’ANSES ne les perçoit plus quand bien même la quantité de travail continue à augmenter.

4. Le dispositif de phytopharmacovigilance

Dans le cadre de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, la mise en place d’un dispositif de phytopharmacovigilance a été confiée à l’ANSES. Ce dispositif a pour objet de surveiller les effets indésirables des produits phytopharmaceutiques disponibles sur le marché et couvre la contamination des milieux, l’exposition et les impacts sur les organismes vivants, dont la santé humaine, et les écosystèmes dans leur ensemble, ainsi que les phénomènes d’apparition de résistances.

Son objectif est de détecter au plus tôt les signaux qui peuvent amener à prendre des mesures de prévention ou de limitation des risques liés aux produits phytopharmaceutiques. L’agence se dote ainsi de moyens d’anticiper, de détecter, d’analyser et de prévenir les effets indésirables des produits phytopharmaceutiques.

La phytopharmacovigilance complète les missions assurées par l’ANSES d’évaluation a priori des risques liés aux produits phytopharmaceutiques ainsi que de délivrance et de retrait des décisions d’autorisations de mise sur le marché. Par ailleurs, ce dispositif s’inscrit dans l’axe 3 du plan Ecophyto (évaluer, maîtriser et réduire les risques et les impacts des produits phytopharmaceutiques sur la santé humaine et sur l’environnement).

L’agence recueille toute information sur l’effet nocif des produits, qui doit être déclaré par chaque industriel. Les limites de détection sont de plus en plus basses, si bien qu’on trouve de plus en plus de traces, mais cela ne signifie pas qu’un produit soit nocif.

Par exemple, L’ANSES a réalisé l’étude Pesti’home, qui a pour objectif de mieux connaître les utilisations domestiques des produits commercialisés destinés à éliminer les nuisibles dans la maison. Elle a également réalisé une étude sur l’alimentation des enfants de moins de 3 ans (sauf le lait). Elle essaie de déterminer les valeurs limite acceptables.

La phytopharmacovigilance repose sur trois modalités fondamentales et complémentaires de recueil de données et de production de connaissances :

– la collecte systématique et régulière d’informations produites par les organismes de surveillance et de vigilance déjà existants : effets indésirables des produits phytopharmaceutiques sur l’homme, les animaux d’élevage et sauvages (dont l’abeille domestique), les écosystèmes dans leur intégralité (biodiversité, cultures, faune, flore, air, eau, sol) mais aussi les aliments et l’apparition de phénomènes de résistance aux produits phytopharmaceutiques ;

– des études ad hoc sur les effets indésirables des produits phytopharmaceutiques lorsque les informations fournies par les organismes de surveillance et de vigilance sont identifiées comme méritant d’être précisées. Ces études sont financées par l’agence sur la base du produit d’une taxe sur les ventes des produits phytopharmaceutiques par les détenteurs d’autorisation de mise sur le marché ;

– les signalements des acteurs professionnels comme les titulaires d’autorisation de mise sur le marché, les fabricants, les importateurs, les distributeurs ou utilisateurs professionnels de produits phytopharmaceutiques, les conseillers et formateurs de ces utilisateurs. Ces déclarations sont essentielles pour la phytopharmacovigilance puisque ces acteurs sont directement au contact des professionnels du terrain.

La mutualisation des informations issues de ce dispositif permet à l’agence :

– d’adapter les conditions d’autorisation de mise sur le marché des produits aujourd’hui commercialisés (par exemple par la réduction des doses, l’adaptation des conditions d’application ou le retrait d’une autorisation de mise sur le marché) ;

– de définir des mesures de gestion transversale, par exemple pour la protection des personnes à proximité des zones traitées ;

– de contribuer à s’assurer du respect des interdictions d’usages de produits, notamment ceux dont les substances actives ne sont plus approuvées au niveau européen.

5. Le pouvoir de contrôle des inspecteurs de l’ANSES

La loi d’avenir pour l’agriculture a donné aux inspecteurs de l’ANSES un pouvoir de contrôle des activités de production, formulation, emballage et étiquetage des produits phytopharmaceutiques et des matières fertilisantes.

Deux inspecteurs ont été recrutés à la fin de 2015 et sont en cours de qualification (acquisition de compétences réglementaires et méthodologie d’inspection). Un protocole d’accord a été signé le 11 décembre 2015 avec la direction générale de l’alimentation (DGAL) et la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Des contrôles conjoints ont été réalisés avec la DGAL et brigade nationale d’enquêtes vétérinaires et phytosanitaires (BNEVP) et la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED).

Un plan de contrôle annuel a été proposé pour 2016 (plan de contrôle de type aléatoire, selon des critères de ciblage) sur des produits à base de 10 substances actives présentant un risque élevé pour l’opérateur, ainsi que sur l’étiquetage et le conditionnement, la conformité des éléments avec la décision d’AMM (usages, doses, zones non traitées, délai avant récolte. Ces contrôles ont été prévus dans des sites de distribution de produits phytopharmaceutiques, pour moitié pour les gammes professionnelles et pour moitié pour les gammes amateurs (jardineries).

Au milieu de l’année, 5 régions avaient été visitées, 20 établissements contrôlés, 4000 produits inspectés (200 par établissement). Un bilan de la campagne 2016 sera réalisé à la fin de cette même année.

Pour chaque inspection, un rapport d’inspection intermédiaire a été transmis, statuant, point par point sur la conformité réglementaire. À ce stade, compte tenu de la phase de qualification des agents, des suites administratives et des demandes d’informations avec copie aux détenteurs des AMM sont effectuées.

L’ANSES estime qu’elle doit être vigilante sur le maintien de la qualité de la concertation et de la coordination avec les autres services de contrôle, afin d’éviter les contrôles successifs de différents services dans un même établissement. Il lui faut également veiller au besoin d’acquisition de compétences par les inspecteurs, notamment en raison de la complexité du contrôle lié à la réglementation (évolution régulière, décisions successives prises sur un même produit, décalage lié au délai réglementaire pour la mise à jour des étiquettes…).

6. La transparence

Afin d’assurer la plus grande transparence possible, il est mis à la disposition du public sur le site internet de l’agence tous les documents relatifs aux modalités d’instruction des demandes (principes directeurs, comptes rendus des comités de suivi) ainsi que les décisions d’AMM.

Pour mener à bien ses missions, l’agence s’appuie sur des lignes directrices pour gagner en transparence, en lisibilité et en fluidité dans le processus de décision. Ces lignes directrices, qui ont fait l’objet d’une consultation publique avant leur adoption sont accessibles sur le site internet de l’agence. Elles visent à expliciter les critères permettant à l’agence d’exercer son pouvoir d’appréciation, sur la base de l’évaluation scientifique des dossiers de demande d’AMM, réalisée en application de la réglementation. Il s’agit de gagner en transparence, en explicitant les cas pouvant nécessiter, au-delà du travail d’évaluation des dossiers, un examen complémentaire, concernant notamment les mesures de gestion des risques intégrées aux décisions AMM.

Le catalogue des produits phytopharmaceutiques homologués en France et de leurs usages est répertorié dans une base de données gérée par l’ANSES (http://e-phy.anses.fr).

Enfin, pour préserver l’indépendance de l’agence, une charte des relations avec les porteurs d’intérêt vise à assurer une traçabilité des échanges avec les parties intéressées qui sont en relation avec l’agence, et à prévenir tout risque de remise en cause de son indépendance.

Le site internet Ephy (15) permet quant lui d’accéder à tous les produits phytopharmaceutiques, matières fertilisantes et supports de culture autorisés en France, ainsi qu’à leurs conditions d’utilisation.

E. LA SURVEILLANCE SANITAIRE

1. La reconnaissance du rôle des fédérations départementales des chasseurs en matière de surveillance sanitaire

Cette reconnaissance, qui fait l’objet de l’article 41 de la loi d’avenir, apparait comme légitime à la Fédération nationale des chasseurs (FNC), compte tenu de l’implication de ceux-ci, notamment dans le réseau SAGIR avec l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS).

Le réseau SAGIR (surveiller les maladies de la faune sauvage pour agir)

SAGIR est un réseau de surveillance épidémiologique des oiseaux et des mammifères sauvages terrestres en France. Cette surveillance, fondée sur un partenariat constant entre les fédérations des chasseurs et l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, s’exerce depuis 1955, s’est consolidée en 1972 et a pris sa dimension actuelle en 1986 sous le nom de SAGIR.

Ses objectifs sont essentiellement au nombre de quatre :

1° Détecter précocement l’apparition de maladies nouvelles pour la faune sauvage ;

2° Détecter les agents pathogènes transmissibles à l’homme et/ou partagés par la faune sauvage et les animaux domestiques ;

3° Surveiller les effets aigus non intentionnels de l’utilisation agricole des produits phytopharmaceutiques sur les oiseaux et mammifères sauvages ;

4° Caractériser dans le temps et dans l’espace les maladies des oiseaux et des mammifères sauvages à enjeu pour la santé des populations.

Source : ONCFS

2. La responsabilisation des chasseurs

D’autres dispositions lui paraissent négatives à la FNC. La responsabilisation des chasseurs résultant de l’article 41 semble à la fédération « profondément injuste », car « les chasseurs sont placés au même niveau que les propriétaires et éleveurs d’animaux res propria alors que les espèces d’animaux dont la chasse est autorisée sont res nullius. L’ensemble des détenteurs et titulaires de droit de chasse est visé, alors qu’en pratique, seule une minorité de territoires organise et maintient des concentrations excessives de gibiers susceptibles d’être à l’origine d’un éventuel problème sanitaire (les enclos). Le législateur vise les seuls chasseurs… et écarte les gestionnaires d’espaces naturels protégés ».

3. Des conséquences négatives pour les chasseurs

Il en résulte donc pour les chasseurs plusieurs conséquences dénoncées par la Fédération nationale :

– selon l’ordonnance n° 2015-1242, ratifiée par l’article 41 de la loi, l’autorité administrative pourra imposer aux chasseurs des mesures particulières de contrôle adaptées à ces dangers et au caractère sauvage des animaux ;

– le même article prévoit également l’obligation de supporter le coût des mesures de surveillance, de prévention ou de lutte prescrites par l’autorité administrative, y compris le coût du suivi de leur mise en œuvre, sans préjudice de l’attribution d’aides publiques ;

– les chasseurs sont tenus, pour ce qui concerne la faune sauvage ou les espèces de gibier dont la chasse est autorisée, de réaliser ou de faire réaliser les mesures destinées à la prévention, la surveillance et la lutte que la réglementation leur impose à l’égard des dangers sanitaires de première catégorie et des dangers sanitaires de deuxième catégorie faisant l’objet d’une réglementation. En cas de carence ou de refus, ces opérations peuvent être exécutées d’office, aux frais des intéressés, par l’autorité administrative ;

– après la constatation d’une maladie, le préfet statue sur les mesures à mettre en exécution. Cela peut notamment se traduire par les mesures suivantes :

● la limitation ou l’interdiction de la chasse, la modification des plans de chasse, de gestion cynégétique et de prélèvement maximal autorisé ou la destruction ou le prélèvement d’animaux de la faune sauvage ;

● la désinfection, l’aménagement ou la mise en œuvre de modalités particulières d’entretien du couvert végétal et des zones fréquentées par la faune sauvage sensible, sans préjudice de l’attribution d’aides publiques ;

● les fédérations contribuent, à la demande du préfet, à l’exécution des arrêtés préfectoraux autorisant des tirs de prélèvement. Elles agissent dans ce cadre en collaboration avec leurs adhérents.

La Fédération nationale juge ces dispositions inégalitaires : elles font supporter aux seuls chasseurs des charges auxquelles les autres propriétaires qui ne chassent pas ne sont pas soumis.

Elle s’élève également contre l’ordonnance n° 2015-1243 du 7 octobre 2015, prise en application de l’article 55 de la loi, et relative au commerce et à la protection des animaux de compagnies, qu’elle estime « extrêmement pénalisante » pour les particuliers chasseurs, puisqu’elle les oblige à s’immatriculer en temps qu’éleveur : dès qu’il envisage de vendre plus d’une portée par an, le chasseur doit effectuer une déclaration en préfecture, suivre une formation ou justifier d’une certification. Il doit en outre disposer d’installations répondant à certaines normes de conformité ; il est aussi instauré une différence de traitement entre propriétaires de chiens répertoriés au Livre des origines français (LOF), et les autres. Ce dispositif menace donc, selon la Fédération, les sélections cynégétiques d’animaux non LOF opérées depuis de nombreuses années, de même que certaines activités cynégétiques (telles que la chasse au chien courant) pour lesquelles les cessions à titre onéreux ont uniquement pour but de couvrir les frais d’élevage.

Lors de leur audition, les représentants de la Fédération nationale ont déclaré qu’ils acceptent d’exercer une surveillance, mais qu’ils n’étaient « ni responsables, ni coupables ».

4. La protection des éleveurs affectés par les attaques de loups

L’article 44 renforce l’arsenal de protection des éleveurs. Dès lors qu’une attaque avérée survient sur des animaux d’élevage, que celle-ci soit du fait d’un animal seul ou d’une meute, le préfet délivre sans délai à chaque éleveur ou berger concerné une autorisation de tir de prélèvement du loup valable pour une durée de six mois.

En outre, le prélèvement de loups est autorisé dans des zones de protection renforcée. Une zone de protection renforcée est délimitée, par arrêté préfectoral, pour une durée maximale d’un an lorsque des dommages importants causant une perturbation de grande ampleur aux élevages sont constatés, en dépit des mesures de protection susceptibles d’assurer un équilibre entre les intérêts économiques et sociaux et la protection de l’environnement.

Un plafond de destruction spécifique est déterminé pour chacune des zones de protection renforcée, dans le respect d’un plafond national.

Les zones de protection renforcée contre le loup ne peuvent nuire au maintien dans un état de conservation favorable de cette espèce sur le territoire national.

Des difficultés demeurent néanmoins.

La Terre compterait 350 000 loups, un nombre en progression dans tous les continents.

En France, on évalue la population de 214 à 370 loups (données ONCFS) avec une croissance de 20 % par an. Cet animal ne cesse de conquérir de nouveaux territoires hors des zones de hautes montagnes.

Le nombre d’attaques de loups augmente depuis les premiers cas constatés sur les troupeaux domestiques en 1993 : une trentaine de départements sont touchés, avec 2 000 attaques de troupeaux, tuant ainsi près de 9 000 animaux (source : ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie).

Les éleveurs ont pourtant massivement pris des mesures permettant de protéger les troupeaux (aides-berger, chiens, enclos), malgré les contraintes (logistiques et financières) et désagréments que celles-ci imposent :

– leur mise en place demande aux éleveurs un investissement en temps et aussi financier puisqu’elles ne sont pas prises en charge à 100 % ;

– elles peuvent avoir des conséquences négatives (allongement de la journée de travail des bergers et des distances parcourues par les animaux, conflits avec les autres usagers du territoire en raison des chiens de protection …).

Par ailleurs, ces mesures de protection sont difficiles à mettre en œuvre et leur efficacité est parfois relative. En effet, les prédateurs s’adaptent et parviennent à les contourner (85 % des attaques de loups par exemple ont lieu sur troupeaux protégés).

En 2013, 1 434 « contrats de protection » ont été engagés par des éleveurs, 1 610 en 2014 et 2 110 en 2015. Ces contrats sont financés en partie par l’État et l’Europe. Les éleveurs doivent assumer au moins 20 % des coûts engagés pour protéger leur troupeau.

Selon Interbev, le coût total de la prédation par le loup en 2015 s’élève à plus de 20 millions d’euros. Les deux plus gros postes de dépense concernent les moyens de protection (environ 18,6 M€) et l’indemnisation des victimes (environ 2,7 M€).

Au niveau international, le loup est protégé par les textes suivants :

– la convention de Berne du 19 septembre 1979 relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel en Europe ;

– la convention de Washington du 3 mars 1973 relative au contrôle du commerce international des espèces de flore et de faune menacées d’extinction ;

– la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages.

En France, l’espèce est protégée par :

– le code de l’environnement (articles L. 411-1 et 2 et R. 411-1 à R. 411-5) ;

– l’arrêté du 23 avril 2007 fixant la liste des espèces de mammifères protégés sur le territoire national (le loup fait partie de cette liste depuis l’arrêté ministériel du 10 octobre 1996) ;

– l’arrêté du 27 mai 2009 précisant que le loup n’est plus une espèce protégée menacée d’extinction en France. Mais il reste toujours soumis au principe de protection stricte.

Les actes de destruction, de capture, de détention, de perturbation intentionnelle ou de commerce des espèces lupines sont donc interdits. Le Plan national Loup encadre les possibilités de tir du loup. On distingue les tirs de défense (à proximité des troupeaux pour les protéger) et les tirs de prélèvements.

Un déclassement du loup en tant qu’espèce strictement protégée dans les textes demeure nécessaire pour assurer la survie de l’élevage français en plein air.

Les revendications syndicales sont donc les suivantes :

– Paiement en temps et en heure des mesures pour la protection des troupeaux : pour pouvoir rentrer dans le cadre du protocole loup et bénéficier des différents tirs (effarouchement, défense, défense renforcée, prélèvement, prélèvement renforcé), les éleveurs doivent mettre en place différents types de moyens de protection. L’éleveur doit avancer tous les frais et 80 % de ces frais sont pris en charge par le ministère de l’agriculture.

Tous les ans, on constate des retards importants dans le paiement de ces mesures. Par exemple, l’année 2015 n’est toujours par soldée. Ces frais peuvent être très importants pour certains éleveurs, notamment ceux qui emploient un berger pour le gardiennage des troupeaux ;

– Relèvement du plafond du nombre de loups dont la destruction est autorisée et mise en place d’une méthode de prélèvement plus efficace : la régulation des loups en France est définie dans le cadre du Plan Loup. Dans ce contexte, deux arrêtés cadre sont pris tous les ans pour définir le nombre maximal de loup pouvant être détruit sur la période en question et les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup.

Pour la période juillet 2015-juin 2016 et juillet 2016-juin 2017, le nombre maximal de loup est de 36. Bien que les prélèvements soient de plus en plus efficaces, ils sont insuffisants. Les différents tirs actuels ne permettent pas forcément de prélever les loups qui posent de réels problèmes. La Fédération nationale ovine (FNO) demande donc, en supplément des tirs décrits dans les arrêtés en cours, de pouvoir prélever des meutes entières sur les zones où la pression de prédation est la plus forte ;

– Refus d’une conditionnalité des indemnisations versées aux éleveurs en cas d’attaque de troupeau pour la mise en place des moyens de protection ;

– Déclassement du loup dans la directive européenne « Habitats, Faune, Flore » 92/43/CEE : il faut obtenir un changement d’annexe afin que le loup ne soit plus « strictement protégé » mais qu’il bénéficie uniquement d’une protection « simple » (déclassement de l’annexe IV à l’annexe V).

La Fédération nationale des chasseurs, interrogée par vos rapporteurs, a considéré qu’il fallait revoir la convention de Berne et les classements, en s’inspirant de pays qui, comme l’Espagne, varient leur réglementation selon les régions : plus de souplesse est souhaitable. Une négociation internationale est nécessaire. Toutefois, elle ne souhaite pas particulièrement que le loup soit chassable, car cela aurait un coût.

QUATRIÈME PARTIE :
ENSEIGNEMENT, FORMATION, RECHERCHE ET DÉVELOPPEMENT AGRICOLES ET FORESTIERS

I. PRÉSENTATION DE LA LOI

A. INTENTION DU LÉGISLATEUR

La transition agro-écologique ne sera possible et effective qu’avec l’appui d’un enseignement technique et supérieur dynamique, innovant et ouvert. Les missions de l’enseignement agricole reposent sur un socle solide, défini par les lois du 9 juillet 1984 portant rénovation de l’enseignement agricole public et du 31 décembre 1984 portant réforme des relations entre l’État et les établissements d’enseignement agricole privé.

L’enseignement technique agricole est le deuxième réseau éducatif du pays, avec des formations allant de la classe de 4e aux classes préparatoires aux grandes écoles, en passant par le BTS et le recours à l’alternance sous statut scolaire. L’apport de ces établissements est largement reconnu. L’agriculture propose des formations d’excellence et diversifiées, permettant un taux d’insertion professionnelle élevé avec près de 9 diplômés sur 10 trouvant un emploi dans les trois ans et ce dans un secteur se caractérisant par un réel dynamisme des offres d’emplois : chaque année, en moyenne, plus de 55 000 postes de salariés permanents sont pourvus dans l’agriculture et les services à l’agriculture. Quant à l’agroalimentaire, il s’agit de la première industrie française, avec environ 14 000 entreprises et plus de 400 000 salariés.

Les lois de 1984, qui gardent toute leur utilité n’avaient toutefois pas assigné de missions à l’enseignement agricole pris dans son ensemble et n’avaient pas pris en compte la nécessaire double performance de production et d’écologie. L’impératif est, en effet, désormais, de produire autant mais autrement. L’efficacité doit aller de pair avec la diversité des modes de production, y compris au sein d’une même exploitation. Les établissements d’enseignement technique sont déjà nombreux à développer des pratiques durables, mais la loi n’a pas encore pris en compte cette évolution.

Il est donc apparu nécessaire de repenser les missions de l’enseignement agricole : l’acquisition et la diffusion de connaissances et la contribution de l’outil de formation et de recherche aux politiques publiques. De nouvelles missions ont été définies pour cet enseignement et l’accent est mis sur sa contribution à l’éducation au développement durable, à l’attractivité du territoire national, sans oublier la promotion de la diversité des recrutements, ainsi que l’insertion sociale et professionnelle des étudiants.

La dimension internationale, qui était ignorée, a été pleinement reconnue par le législateur.

Malgré les qualités actuelles de l’enseignement agricole – taux de réussite aux diplômes, taux d’insertion professionnelle – cette filière est trop souvent méconnue, et l’enseignement agricole est le parent pauvre du système scolaire. Il faut donc veiller à ce que la procédure d’orientation scolaire soit revue et améliorée.

Les projets d’établissement devront être élaborés en liaison avec les missions de l’enseignement agricole. La performance doit être entendue au sens large : économique, sociale, écologique et sanitaire.

La loi met l’accent sur quatre priorités :

– l’agro-écologie au niveau central, régional et local, ce qui traduit en outre l’attention qui doit être portée aux territoires ;

– l’innovation pédagogique ;

– l’objectif de promotion sociale, qui est historiquement un point fort de l’enseignement agricole ;

– la synergie entre l’enseignement supérieur et la création de l’Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France (IAVFF).

B. DESCRIPTIF DES ARTICLES

L’article 60, très dense, contient de nombreuses dispositions :

– les établissements ou organismes d’enseignement assurent l’acquisition et la diffusion de connaissances et de compétences permettant de répondre aux enjeux de performance, économique, sociale, environnementale et sanitaire, notamment par l’agro-écologie et par le modèle coopératif et d’économie sociale et solidaire. Ils participent aux politiques d’éducation et de recherche. Ils élaborent et mettent en œuvre des projets communs ;

– un médiateur de l’enseignement agricole technique et supérieur est institué ;

– l’enseignement et la formation professionnelle publics doivent assurer la promotion de la diversité des systèmes de production agricole ;

– l’acquisition des diplômes peut être progressive et prendre la forme d’unités capitalisables ; une attestation valide les acquis de ceux ont suivi la formation correspondante ;

– l’orientation des élèves fait l’objet d’un plan d’action au sein du projet d’établissement ;

– il est institué un comité national d’expertise de l’innovation pédagogique, chargé d’accompagner innovations pédagogiques et expérimentations ;

– le montant des droits de scolarité et les conditions d’attribution d’aides à la mobilité internationale accordées aux élèves seront précisés par arrêtés. Un pourcentage minimal d’élèves titulaires d’un baccalauréat professionnel agricole pourra accéder aux préparations au brevet de technicien supérieur (BTS) agricole ;

– tout établissement public local d’enseignement et de formation professionnelle agricole regroupe un ou plusieurs ateliers technologiques ou exploitations agricoles. Des agents contractuels recrutés dans les centres de formation professionnelle peuvent être recrutés sur des emplois ouverts par le conseil d’administration de l’établissement ;

– chaque établissement public établit un projet d’établissement, dans le respect des orientations des politiques publiques ;

– les établissements publics peuvent s’associer en un groupement d’établissements ;

– le parallélisme entre enseignement public et privé est affirmé : l’enseignement et la formation professionnelle privés sous contrat contribuent également à la promotion de la diversité des systèmes de production agricole ; l’organisation des diplômes est la même, etc. Chaque établissement privé établit un projet d’établissement établi dans le respect des orientations des politiques publiques pour l’agriculture ;

– un comité consultatif ministériel compétent à propos des personnels enseignants et de documentation est chargé des effectifs, emplois et compétences ainsi que des statuts. Il comprend des représentants de l’administration et des représentants des personnels ;

– le schéma prévisionnel des formations d’enseignement agricole est établi en respectant le projet stratégique national, arrêté également pour une période de 5 ans après concertation ;

– dans les zones de montagne, les établissements d’enseignement doivent proposer une offre suffisamment diversifiée de formations bi-qualifiantes ;

– les établissements d’enseignement agricole bénéficient des dispositions spéciales applicables aux calamités publiques ;

– les chefs d’exploitation et d’entreprises agricoles bénéficient de la formation continue. Les centres de formation continue et de promotion agricoles publics et les centres privés contribuent à la formation continue à l’agro-écologie.

L’article 61 prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement, avant le 31 décembre 2015, d’un rapport étudiant l’harmonisation des statuts des personnels des établissements publics locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricole avec ceux des corps homologues de l’enseignement général, technologique et professionnel.

L’article 62 prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement, avant le 31 décembre 2014, d’un rapport sur le développement des formations bi-qualifiantes.

L’article 63 dispose que l’enseignement et la formation professionnelle publics aux métiers de l’agriculture, de la forêt, de la nature et des territoires participent au service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance.

L’article 64 :

– énumère les missions de l’enseignement supérieur agricole public ;

– crée des conditions particulières d’accès aux formations d’ingénieur au sein des établissements d’enseignement supérieurs publics, pour des élèves titulaires d’un baccalauréat professionnel agricole ayant suivi une classe préparatoire professionnelle. En cas d’échec, les élèves peuvent valider leurs acquis en vue de l’obtention d’un diplôme de l’enseignement supérieur court ou d’une autre certification ;

– prévoit, au sein des établissements d’enseignement supérieur agricole la mise en place de dispositifs d’accompagnement pédagogiques pour les étudiants en difficulté ;

– crée l’Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France, précise les modalités de sa gouvernance et précise ses missions ;

– traite de l’établissement de l’enseignement supérieur agricole public chargé de la formation des personnels enseignants et de son accréditation par les ministères chargés de l’agriculture et de l’enseignement supérieur.

L’article 65 traite de l’élection des représentants des enseignants-chercheurs, des autres personnels et des usagers.

II. APPLICATION DE LA LOI

LISTE DES DÉCRETS PUBLIÉS

Article

Base légale

Titre du décret publié

Objet

Article 60, I, 2°

Article L. 810-2 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-457 du 21 avril 2015 relatif au médiateur de l’enseignement agricole technique et supérieur

Conditions d’intervention du médiateur de l’enseignement agricole technique et supérieur

Article 60, I, 8°, a)

Article L. 811-8 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-1375 du 28 octobre 2015 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de droit public des établissements publics locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricole et des établissements d’enseignement supérieur agricole

Règles communes aux contractuels à temps supérieur à 70% dans les établissements d’enseignement agricole

Article 60, I, 8°, a)

Article L. 811-8 du code rural et de la pêche maritime

Règles communes aux contractuels à temps supérieur à 70% dans les établissements d’enseignement supérieur agricole

Article 60, I, 4°

Article L. 811-2 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-1519 du 23 novembre 2015 relatif à l’acquisition progressive du certificat d’aptitude professionnelle agricole

Modalités d’acquisition progressive des diplômes et de délivrance d’une attestation validant les acquis (enseignement public).

Article 60, I, 11°, a

Article L. 813-2 du code rural et de la pêche maritime

Modalités d’acquisition progressive des diplômes et de délivrance d’une attestation validant les acquis (enseignement privé).

Article 60, I, 9°

Article L. 811-12 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-730 du 24 juin 2015 relatif aux groupements d’établissements publics locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricoles constitués en application de l’article L. 811-12 du code rural et de la pêche maritime

Conditions dans lesquelles les établissements publics locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricoles peuvent s’associer en un groupement d’établissements

Article 60, I, 12°

Article L. 813-8-1 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2014-1218 du 21 octobre 2014 relatif au comité consultatif ministériel des personnels enseignants et de documentation mentionnés à l’article L. 813-8 du code rural et de la pêche maritime, institué auprès du ministre chargé de l’agriculture

Modalités relatives au comité consultatif ministériel compétent à l’égard des personnels enseignants et de documentation

Article 60, I, 12°

Article L. 813-8-2 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2014-1219 du 21 octobre 2014 relatif à la commission consultative mixte des personnels enseignants et de documentation mentionnés à l’article L. 813-8 du code rural et de la pêche maritime et modifiant le décret n° 89-406 du 20 juin 1989

Élection des représentants des personnels enseignants et de documentation siégeant à la commission consultative mixte, instituée auprès du ministre chargé de l’agriculture

Article 64, 5°

Article L. 812-9 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-365 du 30 mars 2015 relatif à l’organisation et au fonctionnement de l’Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France

Organisation et fonctionnement de l’IAVFF, compétences que celui-ci peut exercer par délégation de ses membres

LISTE DES MESURES EN ATTENTE DE DÉCRET

Article de la loi

Base légale

Objet du décret

Explication avancée par le cabinet du ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt

Article 60, I, 4°

Article L811-2, code rural et de la pêche maritime

Modalités d’acquisition progressive des diplômes et de délivrance d'une attestation validant les acquis (enseignement public).

Décrets distincts en fonction des diplômes concernés : CAPA décret du 23 novembre 2015 / BAC pro : décret signé

Article 60, I, 11°, a

Article L813-2, code rural et de la pêche maritime

Modalités d’acquisition progressive des diplômes et de délivrance d'une attestation validant les acquis (enseignement privé).

Décrets distincts en fonction des diplômes concernés : CAPA décret du 23 novembre 2015 / BAC pro : décret signé

RAPPORTS DÉPÔSÉS EN APPLICATION DE LA LOI

31/12/2015

Rapport qui étudie les conditions dans lesquelles les statuts des personnels des établissements mentionnés à l’article L. 811-8 du code rural et de la pêche maritime sont harmonisés (article 61)

31/12/2014

Rapport qui étudie les modalités de développement des formations bi-qualifiantes dans l’enseignement agricole, notamment en zones de montagne (article 62)

A. LE PROJET STRATÉGIQUE POUR L’ENSEIGNEMENT AGRICOLE

Dans son article 60, la loi a prévu la rédaction d’un projet stratégique national pour l’enseignement agricole, d’une durée de 5 ans, qui constitue l’un des fondements du schéma prévisionnel national des formations agricoles. Le premier projet stratégique a été adopté en décembre 2014.

Il rappelle les spécificités de l’enseignement agricole, qui lui confèrent des atouts reconnus sur lesquels il peut s’appuyer, à savoir sa diversité, son autonomie et la petite taille de la plupart des établissements, ainsi que son ouverture sur les professions et les territoires, avec une forme de gouvernance efficace.

Afin de fixer le cap, 11 priorités sont dégagées :

– renforcer la promotion sociale et la réussite scolaire ; favoriser l’accès à l’enseignement supérieur ;

– conforter les filières de l’apprentissage et de la formation professionnelle tout au long de la vie ;

– poursuivre la rénovation des diplômes ;

– relancer la pédagogie et les innovations, développer l’utilisation du numérique éducatif ;

– enseigner à produire autrement et renforcer la place des exploitations agricoles des établissements ;

– poursuivre l’ancrage territorial des établissements et les liens avec leurs partenaires, pour notamment, adapter au contexte local les démarches de formation au « produire autrement » ;

– renforcer l’ouverture internationale ;

– développer les actions éducatives, l’apprentissage du vivre ensemble et l’éducation à la citoyenneté ;

– développer la formation initiale et continue de la communauté éducative ;

– appuyer les établissements d’enseignement dans leurs projets, en repensant notamment un système national d’appui (SNA) à l’enseignement technique agricole ;

– mettre en œuvre ces priorités à travers un dialogue social renforcé.

Le 6e schéma prévisionnel national des formations (SPNF) pour 2016-2020 – établi en respectant le projet stratégique – a été approuvé par le Conseil national de l’enseignement agricole (CNEA) du 13 septembre 2016 et doit être arrêté par le ministre.

B. L’ENSEIGNEMENT ET LE PROJET AGRO-ÉCOLOGIQUE

Un plan spécial a été élaboré avant même le vote de la loi pour enseigner à produire autrement. Le projet agro-écologique pour la France « agricultures, produisons autrement », lancé le 18 décembre 2012, engage l’agriculture sur la voie de la triple performance sociale, économique et écologique, afin de faire de l’environnement un atout de sa compétitivité.

Le schéma stratégique insiste sur la nécessité de remettre « l’agronomie au poste de commande, de pratiquer la pluridisciplinarité et une approche globale élargie aux préoccupations sociales et environnementales, de tirer parti de la diversité des situations géographiques et des modes de production, de préparer à la maîtrise de l’incertitude…ainsi, les évolutions à venir des référentiels de diplôme, quel que soit leur niveau, dans le champ de l’agronomie, devront identifier un corps de savoirs « robustes » destinés à toutes les formations, pour pouvoir les appliquer avec intelligence aux situations concrètes… ». Produire autrement « suppose la mutualisation des savoirs et des expériences ».

La responsabilité de l’administration centrale a été d’ajuster les programmes pour poursuivre leur adaptation aux évolutions de l’agriculture et de l’agro-écologie, dès la rentrée 2014. Plusieurs référentiels ont été modifiés pour les adapter aux évolutions de l’agriculture et de l’agro-écologie : ceux du BTS, du CAP, du baccalauréat professionnel agricole, à la fois pour la filière scolaire et l’apprentissage

Les étudiants en BTS doivent être formés à tenir compte de l’environnement de la parcelle et à porter un jugement sur l’optimisation de la production. Cet objectif est propre aux BTS car la formation supérieure doit être adaptée à la prise en compte des incertitudes. La révision du BTS devait être entreprise dès 2012, mais a été décalée en raison de la réforme de la Politique agricole commune. Une évolution sémantique s’est produite : de « produire autrement », on passe à une approche agro-écologique.

Les élèves du certificat d’aptitude professionnelle (CAP) sont de futurs ouvriers qui ne seront pas amenés à prendre de décisions : ils doivent se focaliser sur l’analyse de la parcelle pour faire part des problèmes au chef d’exploitation ; ils ont un rôle de description et non de gestion.

Vos rapporteurs ont souligné, à propos du référentiel du CAP prévoyant la collecte par les élèves d’informations pour le chef de culture, que, désormais, cette collecte pouvait être réalisée par d’autres moyens, tels que les drones, les robots, etc… et se sont demandé si ces techniques étaient incluses dans la formation. La direction générale de l’enseignement et de la recherche (DGER) du ministère, lors de son audition, a fait valoir qu’il existait un lien entre la mission Agriculture-Innovation 2025 et l’agriculture numérique : la mission prévoit en effet l’organisation au niveau français de la collecte des données pour que la profession se les réapproprie ; elle a également pour objectifs la création de startups. Quant à la formation d’ingénieur, elle porte sur les big data et actualise un système plus classique.

Toutefois, tous ces outils, pour utiles qu’ils soient, ne remplacent pas le « tour de plaine ». La coexistence des deux types d’observations concerne davantage les étudiants du BTS. Pour la santé des animaux, l’approche technologique est moins pertinente. L’observation humaine est indispensable : dans un système agro-écologique, on pratique davantage le sur-mesure, l’observation de l’environnement est plus importante. Si l’agriculteur achète à une entreprise des données sur sa parcelle, il ne connaîtra rien sur la parcelle voisine.

Pour les élèves du baccalauréat professionnel, il s’agit de regrouper l’approche animale et végétale, alors qu’auparavant, les deux approches étaient séparées ; la gestion de la matière organique sera ainsi mieux appréhendée de manière globale.

L’objectif est de ne pas proposer de solutions toutes faites. Le ministère a consulté les professions, les enseignants pour mener une rénovation en profondeur. Le comité de l’innovation récemment crée (voir ci-dessous) a examiné les projets de référentiels du ministère.

Dans le cadre du CASDAR (16), il a été lancé un appel à projet ciblé agro-écologique. Tous les ans depuis trois ans, une quinzaine de projets ont été ainsi financés : les lycées concernés ont un rôle d’expérimentation important.

Les établissements doivent valoriser le rôle des exploitations qui leur sont atachées. Il faut, en premier lieu, que ce rôle soit en phase avec l’orientation agro-écologique de la loi. Les exploitations sont le lieu pour actualiser les connaissances et pour expérimenter. On recrée un lien entre les cours en salle et les exploitations.

L’accent est mis également sur la formation des directeurs des lycées et des exploitants (y compris en formation initiale) afin que les fondamentaux de l’agro-écologie progressent. La mise en œuvre du concept « produire autrement » impose une formation complémentaire et une qualification spécifique des personnels de la communauté éducative des établissements d’enseignement agricoles. Mais, comme le souligne le projet stratégique national, cette qualification spécifique n’exclut pas l’organisation de concours de recrutement commun avec le ministère de l’éducation nationale dans les disciplines générales.

La DGER du ministère de l’agriculture estime que toutes les parties prenantes ont adhéré à l’agro-écologie (le terrain, les syndicats d’enseignants, la FNSEA), soulignant qu’elle n’avait pas constaté de combat d’arrière-garde. Le message du ministère portait autrefois sur l’économie de moyens ; or, c’est plus motivant d’avoir un autre message, plus positif.

C. L’ACQUISITION DES DIPLÔMES ET LA PROMOTION SOCIALE

L’aide à la promotion sociale s’effectue par l’octroi de bourses : on compte plus de 30 % de boursiers dans le secondaire (plus dans le privé que le public) et 50 % pour les BTS (plus dans le public que dans le privé).

Les articles 60 et 64 de la loi prévoient la possibilité d’acquisition progressive des diplômes, facteur de promotion sociale.

Plusieurs diplômes de l’enseignement agricole (brevet professionnel, certificats de spécialisation, certificat d’aptitude professionnelle) étaient déjà accessibles par la voie de la formation continue en unités capitalisables. L’obtention d’une unité capitalisable donne lieu à une attestation valable 5 ans.

Le principal objectif de la loi a été d’étendre cette possibilité d’acquisition progressive à la voie scolaire. Cette extension a été réalisée par deux décrets :

– le décret n° 2015-1519 du 23 novembre 2015 relatif à l’acquisition progressive du certificat d’aptitude professionnelle agricole prévoit que les candidats ajournés à l’examen du CAP agricole, en voie scolaire ou apprentissage, peuvent choisir de représenter l’examen en étalant les épreuves sur une période de 5 ans. Ils peuvent obtenir une attestation des capacités acquises correspondant aux épreuves ;

– le décret n° 2016-782 du 10 juin 2016 relatif à l’acquisition progressive du baccalauréat professionnel pour les spécialités agricoles prévoit que les candidats ajournés, en voie scolaire, peuvent également présenter les unités non acquises sur une période de 5 ans. Une disposition du code de l’éducation prévoyait déjà la possibilité d’émettre des attestations de réussite des unités acquises (art D. 337-69 du code de l’éducation).

Un programme ambitieux a été mis en œuvre pour faciliter l’accès des élèves ayant un baccalauréat professionnel aux écoles d’ingénieurs. Un filet de rattrapage a été prévu : en cas d’échec, ils seront titulaires du BTS. Il s’agit d’un système expérimental pour lequel deux classes ont été constituées ; des élèves ayant ce type de baccalauréat sont recrutés, ils reçoivent une formation de BTS et une formation spéciale et ils bénéficient également d’un accompagnement avec des professeurs dédiés et d’heures de soutien.

Le programme commence à fonctionner : les résultats en seront connus dans trois ans. Il s’agit donc d’un test, pour un système qui n’est pas simple et ne permettra pas de travailler sur une population nombreuse. Mais il faut remédier à la situation actuelle, où le discours porte sur la valorisation du baccalauréat professionnel, alors que les statistiques montrent que la moitié d’entre eux échouent.

Pour accéder aux études d’ingénieurs, plusieurs voies sont possibles : les classes préparatoires traditionnelles, les classes préparatoires de la voie technologique, les classes préparatoires après un BTS ou un DUT, et la licence professionnelle. En outre, dans toutes les écoles d’ingénieurs, il existe une voie d’apprentissage, ce qui permet une vraie ouverture sociale, touchant un plus grand nombre. Cependant, des progrès restent à accomplir : le recrutement des étudiants possédant un BTS dans les écoles d’ingénieurs ne concerne pas un grand nombre de personnes.

Une autre action porte plus spécifiquement sur le baccalauréat technologique : le ministère a mené une analyse sur les épreuves discriminantes, en tête desquelles vient l’anglais, et a réduit d’un jour les oraux afin de réduire les obstacles.

Le schéma stratégique prévoit d’autres actions. Il se propose de construire un CAPA qui favorisera une bonne insertion scolaire et professionnelle et ouvrira la possibilité de poursuivre des études, de renforcer les passerelles entre les différentes voies de formation et de différencier les parcours pour l’accès au baccalauréat. Il a pour objectif également d’instaurer des dispositifs d’accompagnement des titulaires de baccalauréats professionnels pour les conduire à la réussite en BTSA. Il faudra en outre faire évoluer le dispositif des BTSA sur la base du bilan de l’expérimentation et conforter les licences professionnelles pour renforcer la présence de l’enseignement agricole dans le dispositif européen LMD.

D. L’INNOVATION PÉDAGOGIQUE

Historiquement, l’enseignement agricole avait une tradition d’innovation, qu’il faut relancer ; il faut en particulier animer les réseaux. Il est institué un Comité national d’expertise de l’innovation pédagogique, chargé d’accompagner innovations pédagogiques et expérimentations.

Comité national d’expertise de l’innovation pédagogique

Le Comité national d’expertise de l’innovation pédagogique, mis en place en septembre 2014, est chargé d’appuyer les établissements d’enseignement agricole dans leurs efforts d’innovation.

Les membres proviennent d’horizons très divers. Il comporte en majorité des représentants de l’éducation nationale mais aussi de l’enseignement agricole. Le président en est un professeur d’université.

La relance de la dynamique d’innovation pédagogique figure en effet parmi les 11 priorités du projet stratégique de l’enseignement agricole.

Le groupe d’experts a pour objectif de repérer les actions innovantes dans l’enseignement agricole, de les analyser et les expertiser, puis de proposer à l’administration des modalités de valorisation et de généralisation.

Le travail du comité comporte trois volets :

– aider à définir la politique d’appui pour l’innovation dans l’enseignement agricole ;

– encourager l’innovation pédagogique dans le cadre des réformes en cours, conforter ceux qui ont entrepris cette démarche ;

– accompagner et étudier des actions innovantes. Le comité se réunit tous les 4 mois et effectue des visites dans les établissements publics et privés.

Source : ChloroFil

Le schéma stratégique propose cinq actions pour relancer l’innovation :

– mettre en place un dispositif national de pilotage, d’accompagnement et d’évaluation pédagogique, pour toutes les voies de formation ;

– construire un système d’échange, de mutualisation et de valorisation des innovations locales ;

– mobiliser l’enseignement supérieur agricole au service de l’enseignement technique dans le domaine de l’innovation pédagogique et du transfert des savoirs ;

– développer l’ingénierie de formation dans les établissements publics pour renforcer le pilotage pédagogique ;

– conforter l’autonomie pédagogique et éducative des établissements, dans le cadre de projets d’établissement adaptés aux contextes et besoins locaux.

Le schéma stratégique met également l’accent sur le développement du numérique, vecteur important d’appui à la pédagogie différenciée et la pluridisciplinarité.

Plus généralement, parmi les objectifs du projet stratégique national, figurent la relance de la réflexion sur les modalités d’évaluation, la poursuite de l’adaptation des référentiels aux évolutions de l’agriculture et de l’agro-écologie, ainsi que la réflexion avec les milieux professionnels sur l’opportunité de créer de nouvelles formations en lien avec le développement durable et les bioénergies.

Au printemps 2015, un séminaire a porté sur la valorisation de l’innovation ; il en est résulté une note de service interne visant à décomplexer les équipes et incitant les établissements à prendre des initiatives. Le ministère a demandé une évaluation des mesures adoptées. D’autres journées se sont tenues à l’échelon régional.

L’innovation concerne les diplômes ; en effet, en cas d’échec au baccalauréat, soit l’élève redouble, soit il repasse certaines disciplines dans les années suivantes, ce qui suppose prévoir une organisation importante. Deux décrets sont parus : l’un sur le CAP, l’autre sur le Bac.

La « semestrialisation » a été introduite dans les enseignements du BTS dans le cadre du système LMD : il faudra d’abord tirer les conclusions de sa mise en œuvre.

Par ailleurs, l’innovation doit veiller à être en phase avec la production locale pour être crédible : or certaines exploitations fonctionnent toujours sur le mode de la production intensive.

Actuellement, 68 % des exploitations consacrent une partie de leur surface à l’agriculture biologique, soit 18 % (le double de la moyenne nationale), ce qui signifie, comme le soulignent vos rapporteurs, que 30 % d’entre elles n’ont aucune surface en culture biologique, et qu’il faut progresser. Les lycées d’ailleurs le souhaitent ; toutefois, il faut former les jeunes à tous les types d’agriculture, biologique on non. Chaque lycée a défini ses objectifs en termes d’agro-écologie, le suivi en a été effectué par les DRAF et la DGER. Les exploitations agricoles et les ateliers technologiques des établissements, à vocation pédagogique, constituent un levier majeur de l’apprentissage du « produire autrement ».

L’innovation est une dynamique forte, qui a touché les acteurs, les enseignants et les directeurs d’exploitation.

Le ministère va en préparer le bilan à mi-parcours.

Coop de France a apprécié que les coopératives entrent dans le champ de cet article, mais a fait remarquer que cela ne se traduisait pas encore dans les faits. Par exemple, dans d’autres pays, le principe de coopération est enseigné dans les écoles.

L’APCA a indiqué aux rapporteurs qu’elle avait entendait développer l’innovation : les chambres disposent de fermes, de stations expérimentales, qui souffrent d’un manque de financement, même si elles bénéficient de fonds CASDAR. L’APCA propose donc l’établissement d’un crédit d’impôt recherche et l’éligibilité de ces stations au CICE.

E. LE MÉDIATEUR DE L’ENSEIGNEMENT AGRICOLE

La loi d’avenir a institué un médiateur de l’enseignement agricole technique et supérieur.

De façon générale, la mission de ce médiateur est de favoriser le dialogue entre les agents, les usagers (apprenants et/ou parents) et l’administration de l’enseignement agricole et d’améliorer le fonctionnement du service public de l’enseignement agricole.

Le décret n° 2015-457 du 21 avril 2015 précise les missions et le mode de travail du médiateur, avec les principales caractéristiques :

– il conserve la continuité de la fonction du médiateur de l’enseignement agricole qui était, avant l’intervention du législateur, régie par la note de service du 25 octobre 2000 ;

– ses dispositions reprennent celles du décret n° 98-1082 du 1er décembre 1998 instituant des médiateurs de l’éducation nationale ;

– de façon complémentaire, il permet au médiateur de l’enseignement agricole technique et supérieur d’intervenir à titre préventif.

Ce texte a également reçu l’avis favorable du Conseil national de l’enseignement agricole, du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche agricole, agroalimentaire et vétérinaire et du comité technique national de l’enseignement agricole public.

Sur les bases de ce décret, un appel à candidatures a été publié fin 2015, et deux agents recrutés, l’un pour un poste de médiateur, placé sous l’autorité de la DGER, et l’autre pour un poste de médiateur adjoint.

Le médiateur et son adjoint ont pris leurs fonctions au 1er septembre 2016.

Depuis le 1er septembre 2016, les médiateurs ont traité les dossiers existants avant le 1er septembre et ceux qui s’y sont rajoutés, soit au total :

– 9 demandes en provenance du personnel d’établissements d’enseignement agricole, dont 5 traitées ;

– 13 saisines d’élèves, dont 12 réglées ;

– 11 recours co-traités avec le Défenseur des droits, dont 3 résolus.

À la demande de la DGER, trois interventions sont sollicitées dans des établissements d’enseignement agricole (EPLEFPA d’Antibes, l’ENSFEA de Toulouse, Vétagrosup Lyon).

Une demande d’adhésion au Club des médiateurs de services au public est en cours. Deux entretiens ont eu lieu avec le médiateur de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur et ses services, une rencontre s’est également tenue avec le médiateur de la police nationale. Enfin une première prise de contact a été réalisée avec le Défenseur des droits.

F. L’INSTITUT AGRONOMIQUE, VÉTÉRINAIRE ET FORESTIER DE FRANCE

1. Un nouvel établissement

La loi d’avenir a créé l’Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France, établissement public de coopération à caractère administratif. Placé sous la tutelle conjointe des ministres chargés de l’agriculture et de l’enseignement supérieur, il a pour mission l’élaboration et la mise en œuvre de stratégies de recherche et de formation communes aux établissements aux niveaux national, européen et international. Il est dirigé par un directeur et administré par un conseil d’administration qui fixe les orientations générales. Celui-ci est assisté d’un conseil d’orientation stratégique, à vocation prospective, constitué de personnalités extérieures et d’un conseil des membres.

Agreenium existait avant la loi d’avenir. Agreenium et l’IAVFF sont le même établissement, le deuxième ayant absorbé le premier. Mais c’est le nom d’Agreenium qui a été conservé pour capitaliser son début de notoriété internationale.

L’objectif principal de l’établissement est la présence française sur la scène internationale. Le dispositif français d’enseignement supérieur a perdu de son influence, peut être en raison de la langue, d’un repli sur soi-même, ce qui n’est pas normal étant donné ses compétences, et parce que, comme l’a souligné Mme Marion Guillou, présidente d’Agreenium, « nous ne savons pas chasser en meute et nous présenter à l’extérieur. L’important est d’être compréhensible ». Il fallait accroître la lisibilité, la visibilité, l’attractivité, l’efficacité et le rayonnement international du système français de recherche, de formation et d’innovation agronomique, vétérinaire et forestier.

En plus de son rôle essentiel à l’international – comprendre et anticiper les évolutions mondiales, participer aux grandes initiatives internationales en diffusant le modèle français, internationaliser le parcours des étudiants et enseignants, accompagner les acteurs dans le développement de leurs activités à l’étranger, répondre de manière coordonnée aux grands appels d’offres européens, développer des partenariats internationaux par représentation ou délégation des membres –, Agreenium vise d’autres objectifs.

Il se propose de développer une offre globale et cohérente de formation fondée sur la réponse aux besoins professionnels et sociétaux, sur l’articulation entre enseignement technique et enseignement supérieur, entre formation initiale et continue tout au long de la vie professionnelle. Il doit veiller en outre au développement d’une recherche appliquée, cognitive, systémique. Enfin, il doit inscrire formation et recherche dans une dynamique d’innovation en réponse aux attentes de la société.

Depuis le vote de la loi, l’action est plus facile, car les partenaires ont été regroupés, sans que les différentes écoles et établissements membres aient été dissous. Les membres sont au nombre de 18 ; actuellement, Agreenium refuse des candidats pour être plus efficace, mais l’accès n’est pas pour autant impossible à terme. Deux candidats peuvent déjà participer à ses travaux. Au Forum Campus France qui s’est tenu récemment, Agreenium a été très courtisé, car il a du sens.

L’Institut peut être accrédité par les ministres chargés de l’agriculture et de l’enseignement supérieur pour délivrer des diplômes nationaux dans les domaines correspondant aux compétences spécifiques de ses membres.

Il existait déjà un établissement avant la loi, le Consortium national pour l’agriculture, l’alimentation, la santé animale et l’environnement, créé en 2009, constitué sous la forme d’un établissement public de coopération scientifique (EPCS), mais le regroupement de ses membres était facultatif, alors que la loi d’avenir a rendu certaines adhésions obligatoires.

La loi a prévu 3 types de membres :

– ceux qui n’ont pas le choix et sont sous la tutelle des ministères de l’agriculture et de l’enseignement supérieur ;

– ceux qui entrent sur simple demande et sont obligatoirement acceptés : établissements sous tutelle du ministère de l’enseignement supérieur de la recherche (l’université de Lorraine, l’INP Toulouse, l’Anses, le CIRAD) ;

– pour les autres candidats publics ou privés, français ou étrangers, la loi n’est pas explicite ; ils sont concurrents (par exemple, LaSalle Beauvais-ESITPA qui ont fusionné pour créer UniLaSalle, l’École supérieure du bois de Nantes…).

Les membres qui ne le sont pas à part entière peuvent être associés, ou signer des conventions avec Agreenium.

Les 18 membres de l’IAVFF

– 14 établissements d’enseignement supérieur représentant 15 écoles (écoles vétérinaires, écoles d’agronomie, ENGEES, ENSP, ENSFEA) et universités (Université de Lorraine au titre de l’ENSTIB et de l’ENSAIA, INP de Toulouse au titre de l’ENSAT) ;

– 4 organismes de recherche (INRA,CIRAD, IRSTEA, ANSES).

Au total, l’Institut est représenté à travers ses membres dans plus de 50 pays, il dispose de 10 représentants permanents à l’étranger (INRA et CIRAD). C’est une communauté forte de :

• 16 800 personnels dont 6 700 chercheurs, enseignants chercheurs et ingénieurs de recherche,

• 10 000 étudiants,

• 412 unités de recherche qui accueillent 2 500 doctorants,

• 15 écoles doctorales,

• 150 masters.

Le premier conseil d’administration s’est tenu le 25 novembre 2015, le dispositif définitif ayant été mis en place après une période provisoire.

Agreenium est sous la tutelle du ministère de l’agriculture, mais quelques établissements sont sous celle du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Son budget pour 2016 s’élève à 820 000 € (hors projets) financés par :

– 248 000 € de subvention de la direction générale de l’enseignement et de la recherche (DGER),

– 489 000 € de contributions des membres,

– 84 000 € de compensation masse salariale par l’INRA.

L’activité « projets » a atteint 200 000 € en recettes et en dépenses en 2015.

Fin 2016, les effectifs d’agents permanents s’établissent à 19 ETP (sans compter les 11 représentants de l’INRA et du CIRAD à l’international qui y travaillent à temps partiel – 25 % de leur temps environ).

2. Des expertises à l’étranger

En matière de projets à l’international, l’établissement continue à porter ceux qui ont été initiés par l’ancien Agreenium (projet Haïti, Niger, USSEIN Sénégal, AskAsia, ADECEA, AsiFood). Le Sénégal se propose de fonder une université francophone agricole pour 30 000 étudiants. Il demande une expertise pour construire des cursus, avec 29 licences professionnelles et des recrutements sur toute la région d’Afrique de l’Ouest. Aucune des écoles françaises n’aurait pu répondre à cette demande séparément.

3. Développement d’une université numérique en agro-bio-sciences

Agreenium a constitué un début d’université numérique, avec l’objectif d’être une des premières formations en ligne au monde dans ce domaine. Tous les membres sont intéressés, car ils en constatent la valeur ajoutée. Actuellement, le travail consiste à accumuler les ressources documentaires, à constituer un réseau dans toutes les écoles. Ces enseignements pourront toucher même un public de professionnels en activité. L’université numérique permettra de massifier l’enseignement.

L’enseignement numérique est un axe essentiel pour le positionnement d’Agreenium : les membres gagnent à se rassembler pour produire des ressources numériques et à les valoriser à travers une plateforme commune de dimension nationale.

Concernant l’offre de formation numérique, Agreenium a déjà engagé différents projets de Massive Open Online Courses (17) (MOOC), soit un objectif d’une douzaine à l’échéance de la fin de 2017 ; la production de 14 modules correspond à environ 500 heures de formation, avec un financement du deuxième programme d’investissements d’avenir (PIA 2), s’inscrivant dans l’appel à projets « Initiatives d’excellence en formations innovantes numériques (IDEFI-N) » (projet AgreenCamp). Agreenium a posé sa candidature et a été retenu, ce qui lui a permis de disposer de 900 000 € à verser aux membres. Agreenium a également déposé un dossier pour l’appel à projets pour le développement de l’université numérique expérimentale.

Les membres sont en attente d’une capacité d’expertise pédagogique et technique et de portage de projets par Agreenium. Celui-ci a ainsi répondu à l’appel à projet DUNE « Développement d’universités numériques expérimentales » du PIA 2 lancé fin 2016.

Il est également prévu un MOOC agro-écologique dispensé par Montpellier Sup Agro à l’instigation d’Agreenium, pendant 10 semaines. On compte 12 000 inscrits dans le monde, c’est un enseignement gratuit, mais la certification est payante. On constate évidemment une perte : 3 000 : personnes suivent jusqu’à la fin et 1 000 obtiennent une certification, certains d’entre eux viendront probablement en France ensuite. L’effet vitrine devrait être considérable. La notion d’agro-écologie n’est pas encore universellement reconnue, donc Agreenium a un rôle à jouer.

Une équipe pédagogique supervise les corrections des travaux des étudiants ; même si certaines d’entre elles sont effectuées par un logiciel, il est prévu une présence humaine. Les forums s’auto-administrent. L’équipe pédagogique apprend également. Les cours sont en français, mais un développement est prévu en anglais et en espagnol. Agreenium a un correspondant en Chine et des accords ont été prévus pour accueillir des Chinois. On constitue ainsi un campus à l’international qui permet de recruter éventuellement ensuite dans une école ayant une existence physique. Une approche de protection intellectuelle a été adoptée contre les copies ; mais la simple copie des formations proposées par Agreenium ne suffirait pas car pour apprendre il faut un face à face et une pratique.

C’est grâce à Agreenium que ce nouveau champ est possible : à chaque fois, ce sont des membres différents qui interviennent et croisent leurs compétences ; ce ne serait pas viable au niveau d’une seule école. Le collectif comprend 6 700 enseignants chercheurs. L’ingénierie pédagogique vise à apporter ce qui fait défaut aux membres.

Les établissements de formation demandent eux aussi des MOOC.

4. Des progrès à réaliser

Agreenium doit avancer dans plusieurs domaines :

– il faut que les équipes et les politiques des établissements soient intégrées, ce qui est indispensable pour la reconnaissance internationale. C’est encore difficile, le rapprochement s’effectue peu à peu. C’est une des raisons pour lesquelles Agreenium estime qu’il ne doit pas grandir trop vite ;

– la loi prévoit une remise à plat du référentiel pour les formations vétérinaires. Le processus est en cours avec perspective d’aboutir à l’été 2017. La coopération entre les écoles vétérinaires est bien enclenchée, les écoles ne défendent pas leur projet seules. Toutefois, elle est moins avancée entre les écoles agronomiques et les écoles vétérinaires ;

– l’INRA n’a plus le droit de mettre des personnels à disposition : elle mettait à la disposition d’Agreenium 4 personnes, mais actuellement, elle lui paie la masse salariale correspondante ;

– le chantier de la coordination de l’offre de formation agricole est inscrit dans la loi. Il conviendra d’identifier l’ensemble de l’offre : ingénieurs, masters, etc. Ce travail n’a jamais été réalisé, alors que les formations foisonnent. L’offre va pouvoir être déclinée sur quatre grands identifiants, afin que chacun ne conserve pas sa terminologie propre. Les membres constateront peut-être des redondances pour certaines formations ou des manques pour d’autres : par exemple, pour l’agronomie de précision, il n’existe pas de format master. Les membres peuvent demander à Agreenium de les aider à développer certaines formations. Il n’existe pas encore de cartographie de l’offre de formation agricole en France (mais, par exemple, une plaquette sur la formation sur la vigne et le vin en France vient d’être élaborée). Pour les formations d’ingénieurs, une cartographie des formations, en voie de finalisation, pourra se prolonger par une réflexion avec les membres sur l’adéquation de l’offre existante avec les besoins ;

– un autre chantier prévu par la loi porte sur le lien entre l’enseignement agricole technique et supérieur. La formation des personnels enseignants de l’enseignement technique agricole en fait partie : la formation continue des enseignants pose parfois problème, les MOOC pourraient y remédier. Mais c’est la mission la moins bien définie. Selon vos rapporteurs, il faut qu’en retour, l’enseignement technique alimente la recherche ;

– un groupe de travail forêt–bois a été mis en place piloté par AgroParisTech, assisté d’Agreenium. L’objectif est de disposer d’une feuille de route d’ici la fin d’année 2016 incluant un projet pour le PIA 2 et articulant une démarche en connexion avec les autres groupements.

Il n’y a pas d’équivalent en France. Le modèle est Wageningen University and Research Centre (WUR) en Hollande avec qui Agreenium va ouvrir une université d’été en agro-écologie et en productions animales en 2017. La structuration de WUR est la même, les écoles le composant n’ont pas fusionné, mais la signature des articles scientifiques est commune, alors que cela n’est pas le cas pour Agreenium. Toutefois, la France joue un rôle important en termes de publications.

G. LA SPÉCIFICITÉ DE L’ENSEIGNEMENT PRIVÉ

La loi affirme le parallélisme entre enseignement public et privé : l’enseignement et la formation professionnelle privés sous contrat contribuent également à la promotion de la diversité des systèmes de production agricole et l’organisation des diplômes est la même. Chaque établissement privé établit un projet d’établissement dans le respect des orientations des politiques publiques pour l’agriculture.

Toutefois, si les dispositions applicables à l’enseignement public le sont aussi de façon similaire à l’enseignement privé, la spécificité de ce dernier en fait un acteur parfois différent, comme en témoignent les représentants de l’Union nationale des maisons familiales rurales d’éducation et d’orientation (UNMFREO) et celui du Centre national de l’enseignement agricole privé (CNEAP).

Les maisons familiales et rurales (MFR)

Ce sont :

– 430 établissements de formation ;

– 71 associations fédérales départementales ou régionales dont deux comités territoriaux pour la Nouvelle Calédonie et la Polynésie française ;

– un Centre national pédagogique et une Union nationale ;

– 70 000 jeunes et adultes en formation, dont :

• 51 000 élèves sous statut scolaire dépendant du ministère de l’agriculture,

• 12 000 apprentis inscrits dans des formations de l’éducation nationale ou de l’agriculture ;

• 2 000 stagiaires sont en contrat de professionnalisation ;

• 5 000 stagiaires en formation continue ou en validation des acquis de l’expérience (VAE) ;

– plus de 130 qualifications proposées, réparties dans 18 secteurs professionnels ;

– 8 000 salariés.

Le CNEAP

Le Conseil national de l’enseignement agricole privé (CNEAP) est un réseau d’établissements d’enseignement agricole privés et de centres de formation vers les métiers de la nature et du vivant, comptant :

– 51 000 élèves et étudiants ;

– 3 000 apprentis ;

– 4 500 élèves ingénieurs ;

– 11 000 stagiaires adultes.

Les lycées du CNEAP accueillent sur tout le territoire français, en externat, demi-pension et internat, les jeunes de la classe de 4ème à l’école d’ingénieur, en formation générale, professionnelle et technologique.

Pour l’UNMFREO, produire autrement n’est pas suffisant, il faut également consommer autrement et consommer localement, ce qui entraîne des coûts inférieurs. Elle a donc mené une grande action pour sensibiliser le réseau et décrire un cadre pour les MFR ; elle a formé 700 formateurs sur ce thème. La traçabilité est très importante, mais ce n’est pas encore au point : elle s’interroge donc sur l’éventuelle nécessité de légiférer.

Par ailleurs, elle était déjà consciente, avant le vote de la loi d’avenir, des problèmes causés par les certiphytosanitaires : le réseau a été informé afin d’accompagner les évolutions indispensables. Avant l’examen de la loi d’avenir, un travail important avait été effectué avec M. Henri Nallet, ancien ministre de l’agriculture et président de l’Observatoire de l’enseignement agricole, au cours de séminaires sur l’avenir de l’enseignement agricole.

L’UNMFREO rencontre une difficulté particulière dans la mesure où la loi a mis l’accent sur l’importance des exploitations agricoles dans l’enseignement. Or les MFR n’en disposent pas ; l’effort est donc axé sur les participations à des actions locales. Elle fait en sorte que ses équipes se sentent concernées malgré ce manque ; en particulier, elle organise des stages, grâce à un réseau de maîtres de stages et d’apprentissage bien formés. C’est positif pour les élèves qui peuvent voir les produits des maîtres de stage. Elle a en outre développé une plateforme numérique, appelée « Walter », pour diffuser et partager les ressources pédagogiques à l’usage des équipes et des jeunes

Elle entend développer son réseau de référents. La DGER a mis en place un programme pluriannuel de formation de référents régionaux publics et privés. Les référents nationaux et régionaux des MFR y ont participé. Ils diffusent l’information sur l’agro-écologie dans les établissements, animent localement les projets, coordonnent les informations des équipes pédagogiques sur les actions qu’elles ont menées, et les thèmes abordés en lien avec le projet. Des réunions entre référents de la région permettent d’échanger sur l’avancée des projets.

Elle approuve la rénovation des différentiels des diplômes, prévu par le plan d’action, ainsi que les dispositions concernant les effectifs, emplois et compétences et les statuts des personnels enseignants et de documentation.

Pour le CNEAP, au-delà de la rénovation des diplômes, il faudrait mettre en œuvre de nouveaux parcours de formation, inventer de nouveaux diplômes. L’agriculture écologique va générer de nouveaux métiers qui nécessiteront des formations différentes, des référentiels plus spécialisés. Ainsi, l’agriculture urbaine (par exemple, l’exploitation du vivant dans les husseries) peut être très porteuse. Il faudrait co-construire des diplômes avec le ministère de l’éducation. Toutes les collectivités territoriales urbaines ont besoin de nouvelles compétences. L’idée d’un continuum de formation tout au long de la vie aurait été intéressante, la mixité des publics – y compris générationnelle – doit être recherchée.

L’UNMFREO se félicite que l’enseignement agricole permette le brassage de la population et soit une éducation à la citoyenneté pour produire autrement ; actuellement, les élèves viennent davantage de milieux urbains : en 30 ans, les publics ont changé. La loi d’avenir a permis d’intégrer une dimension sociétale.

Depuis le vote de la loi, le CNEAP a accordé beaucoup d’importance aux services à la personne (en plus de la nécessité de produire autrement), à la façon d’initier les citoyens à avoir un comportement éco-responsable, en sensibilisant les directions régionales de l’agriculture et de la forêt (DRAF), ce que la loi n’abordait pas. Cette démarche ne peut pas relever que du monde agricole, elle touche aussi les acteurs du collectif social du territoire rural.

Pour les DOM, il manque dans la loi d’avenir un volet sur l’enseignement agricole en général, pas seulement privé, pour produire et consommer localement. Toutefois, le rapport de Mme Chantal Berthelot et de M. Hervé Gaymard (18) a formulé plusieurs propositions intéressantes :

– améliorer encore davantage la « culture du terrain » dans les programmes d’enseignement ;

– mieux coordonner les enseignements avec les particularités de l’agriculture locale de chaque DOM et de chaque COM ;

– ouvrir des plages horaires aux interventions des chercheurs issus des grands organismes de recherche, lorsque de tels établissements sont présents outre-mer, ainsi qu’aux interventions des acteurs des réseaux d’innovation et de transfert agricole (RITA) ;

– créer, dans les sections de techniciens supérieurs (STS), lorsqu’il n’existe qu’un seul brevet de technicien supérieur agricole (BTSA) offert aux étudiants, un éventail de choix plus large et donc plus attractif ;

– instituer, dans les centres de formation d’apprentis (CFA) et dans les organismes de formation professionnelle continue, des modules d’enseignements centrés sur les différentes questions qui touchent à l’installation.

À Mayotte, l’implantation des MFR est récente. L’UNMFREO a contractualisé en 2015 avec le ministère.

L’enseignement privé est très présent en Guyane. Une coopération exemplaire a pu être établie entre le lycée public, la MFR et le lycée privé près de Mana, qui est un pôle d’excellence, car un dialogue s’est instauré concernant un projet global sur un territoire vaste, mais où l’activité agricole est limitée en raison de la forêt. Tous les milieux professionnels ont été contactés.

Il s’avère intéressant de mettre en place la loi d’avenir, mais en l’adaptant au mieux, en la déclinant compte tenu du contexte. L’enseignement agricole doit faire un effort spécial sur les outre-mer ; la loi n’est pas allée assez loin sur ces régions où des possibilités de développement sont réelles. Il existe des ateliers-relais, caractérisés par un véritable élan. Mais les moyens manquent, ainsi que des orientations précises. Par exemple, la Guyane se caractérise par la juxtaposition de grandes exploitations et de très petites exploitations vivrières, qui ont besoin d’une formation initiale et continue : il faut adapter la législation en ce sens.

En conclusion, les interlocuteurs de vos rapporteurs ont souligné que, politiquement, ils s’étaient ralliés à la politique suivie sans état d’âme. La loi d’avenir a donné un cadre juridique à ce qui existait afin de répondre aux attentes de la société : produire mieux, manger mieux… mais ils ont déploré qu’il soit parfois difficile d’emboiter le pas aux travaux des DRAF car ils sont assez mal informés ou trop tardivement des actions de celles-ci. Le ministère travaille dans l’urgence et appréhende mal toutes les familles de l’enseignement agricole. Il faut mettre en place des constructions communes ; la mécanique d’ensemble doit être portée collectivement. Les MFR souhaiteraient que leurs élèves puissent aller sur les exploitations de l’enseignement agricole public, ce qui n’est pas le cas, car il s’agit d’un lieu réservé. Ils ont également regretté que, malgré la loi d’avenir, les crédits du programme 143 aient diminué dans les lois de finances pour 2015, pour 2016, et même pour 2017, sauf pour quelques actions.

Vos rapporteurs ont estimé qu’il fallait promouvoir un enseignement multidisciplinaire, afin de permettre aux agriculteurs de rester. Le CNEAP a considéré qu’il fallait sortir du noyau dur, la production, pour encourager d’autres activités, comme la vente dans un magasin de produits des lycées agricoles. La loi accélère cette évolution, en établissant un lien entre les lycées et la consommation. Il est intéressant que la formation mette du lien entre les acteurs. Il faut que les collectivités territoriales contribuent à cet effort.

CINQUIÈME PARTIE :
DISPOSITIONS RELATIVES À LA FORÊT

I. PRÉSENTATION DE LA LOI

A. INTENTION DU LÉGISLATEUR

La loi vise à répondre aux besoins d’évolution de la politique forestière et de développement de la filière bois, afin de lui rendre la place à laquelle elle peut prétendre en raison de l’importance et de la qualité du territoire forestier.

Deuxième forêt d’Europe, la forêt française couvre aujourd’hui environ 16 millions d’hectares, soit plus du quart du territoire métropolitain (auxquels s’ajoutent 18 millions d’hectares dans les départements et territoires d’outre-mer). Elle s’accroît d’environ 40 000 hectares par an : ainsi, chaque année, notre forêt produit 100 millions de m3 de biomasse bois, dont seulement 60 % sont récoltés.

1. Un potentiel important

– Un potentiel économique : pour la construction, l’énergie, la production de papier, pour la chimie, etc., la forêt fournit une matière première valorisée dans de nombreux secteurs industriels. La filière forêt-bois représente ainsi un chiffre d’affaire annuel de 60 milliards d’euros et emploie 425 000 personnes, allant de l’abattage et du sciage jusqu’à la mise en œuvre du matériau bois dans le bâtiment ;

– Un potentiel environnemental : elle séquestre chaque année 80 millions de tonnes de CO2 net, soit l’équivalent annuel de réduction des émissions de la France au titre du protocole de Kyoto. Elle permet ainsi de lutter directement et facilement contre le réchauffement climatique. Elle est également un lieu de développement privilégié de la biodiversité : elle abrite, par exemple, 40 % des zones Natura 2000. Sa multifonctionnalité contribue en outre au développement durable.

– S’y ajoute un potentiel social, puisqu’elle offre un environnement entièrement naturel, accessible sur l’ensemble du territoire et constitue un cadre de vie ou de loisirs très apprécié, accueillant ainsi plus de 500 millions de visiteurs chaque année.

Si le potentiel de la forêt française est exceptionnel, l’usage qui en est fait reste encore en-deçà de ce qu’il pourrait être. Cette situation tient à plusieurs facteurs d’ordre structurel.

2. Des difficultés structurelles

La forêt est très morcelée. Détenue aux trois-quarts par les particuliers, la forêt française est répartie en une multitude de petits propriétaires – 3,8 millions – dont les parcelles s’enchevêtrent. Seuls 200 000 en possèdent plus de 10 hectares, alors que 2,3 millions en possèdent moins d’un hectare. Cette dissémination pose problème pour ce qui est de la bonne gestion de la forêt, mais également de la mobilisation de la ressource bois.

La forêt publique, gérée par l’Office national des forêts (ONF), représente un quart de la forêt française. Plus de 11 500 collectivités sont propriétaires de 2,9 millions d’hectares (soit 15 % de la forêt). L’État possède 1,8 million d’hectares de forêts domaniales, (soit 10 %). La forêt publique représente à la fois un atout pour les collectivités, mais également une charge en termes d’entretien et d’administration, qui explique une attitude mesurée quant à son agrandissement.

Toutes les forêts d’une surface supérieure à 10 à 25 hectares – publiques ou privées – doivent présenter un document de gestion approuvé par l’État ; document d’aménagement et règlement type de gestion pour les forêts publiques ; plan simple de gestion, règlement type de gestion et code de bonnes pratiques sylvicoles pour les forêts privées.

L’existence de ces documents entraîne une vraie complexité administrative, qui est allée s’accroissant. Les innombrables documents stratégiques (orientations régionales forestières, schémas régionaux de gestion sylvicole, stratégies locales de développement forestier, chartes forestières de territoire, plans de développement de massif, programmes régionaux de la forêt et du bois ...) y participent également. Ce « trop plein » d’administration nuit à la lisibilité et à l’acceptabilité du dispositif d’encadrement des forêts, que ce soit par les élus comme par les particuliers et les professionnels.

Pour pallier ces difficultés, la loi d’avenir affirme l’intérêt général de la forêt et propose une réelle clarification, avec une gouvernance rénovée et plus efficiente.

La création des groupements d’intérêt économique et environnemental forestier (GIEEF) vise à encourager les démarches de gestion forestière en commun et à faciliter l’exploitation d’une propriété morcelée. La rénovation du droit de préférence poursuit le même but. La procédure des biens vacants et sans maître y concourt également.

3. De nouveaux déséquilibres

En outre, de nouveaux déséquilibres sont apparus, qui sont autant de défis pour la forêt française :

– le changement climatique ;

– la compétition sur la ressource : la nécessaire transition énergétique conduit à reconsidérer la forêt comme énergie renouvelable (ce qui porterait atteinte au caractère renouvelable de ladite forêt) ;

– les enjeux de la biodiversité ;

– la compétition sur l’usage des sols entre espaces urbains, agricoles et forestiers ;

– le déséquilibre de la balance commerciale « bois » de la France avec un déficit de près de 5 milliards d’euros.

Notre pays, qui possède la plus grande forêt de bois feuillu d’Europe et en produit des quantités importantes, valorise insuffisamment cette ressource, en France comme en Europe : il exporte des feuillus vers la Chine, principalement, qui reviennent transformés. De surcroît, il importe des résineux dont nous manquons pour la construction.

– Le renouvellement insuffisant de la forêt : la majeure partie de la forêt française a pour vocation de produire du bois d’œuvre de qualité, dans le cadre d’une gestion durable, visant la conservation de la diversité biologique et le maintien des potentialités des sols. Or, la valorisation des potentialités de la filière est aujourd’hui insuffisante car le renouvellement par plantation ou régénération naturelle des peuplements ne permet pas de répondre aux défis écologiques et économiques des prochaines décennies.

Pour pouvoir tirer pleinement profit de la forêt, il est nécessaire d’investir davantage. En amont, la gestion de la forêt et l’offre de bois se conçoivent dans le long terme : toute insuffisance ou tout recul aujourd’hui aura nécessairement des répercussions négatives d’ici quelques décennies. Il faut donc encourager dès à présent les travaux de plantation, d’entretien et d’exploitation du bois, qui sont indispensables pour conserver et développer une forêt durable et multifonctionnelle.

Pour assurer ce renouvellement et augmenter les récoltes, il faudrait également une véritable politique industrielle de filière sur les feuillus, afin de trouver de nouveaux débouchés au bois, que ce soit dans la construction, le mobilier, la chimie... Cela implique de lancer une stratégie délibérée d’investissement dans la filière aval, qui soit à même de soutenir les prix de la matière première, de redonner de la valeur ajoutée tout au long de la filière et in fine d’inverser la tendance déficitaire de notre balance extérieure.

Enfin, et cela constitue un aspect fondamental d’une politique forestière d’avenir, il faut investir de façon massive sur l’enseignement, la recherche et l’innovation dans la filière bois. Il manque des personnels convenablement formés, les connaissances techniques adéquates, les centres techniques qualifiés et les organismes de recherche appliquée au bois nécessaires.

C’est pourquoi la loi d’avenir propose plusieurs mesures, dont l’institution du fonds stratégique pour la forêt et le bois (FSFB), afin de financer l’amont de la filière ; sa création témoigne de la volonté de structurer la filière. La généralisation de la compensation au défrichement participe également d’une meilleure gestion de la forêt à terme.

Enfin, les récoltes illégales de bois, qui nuisent tant à la gestion durable des forêts qu’à leur exploitation, sont mieux sanctionnées.

La loi traduit la volonté de concilier performance économique et performance environnementale en mettant fin également à l’opposition présumée entre les deux.

B. DESCRIPTIF DES ARTICLES

L’article 66 ratifie l’ordonnance n° 2012-92 du 26 janvier 2012, prise par le Gouvernement en application de l’habilitation qu’il avait reçue du Parlement en application de l’article 69 de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche du 27 juillet 2010 pour refondre la partie législative du code forestier.

L’article 67 comporte de nombreuses dispositions :

– il réaffirme que les différentes fonctions de la forêt relèvent de l’intérêt général ;

– il précise la gouvernance de la forêt : le nouveau Conseil supérieur de la forêt et du bois (CSFB) est informé de tout projet d’implantation industrielle de transformation du bois et formule un avis s’il estime que ce projet implique une modification du programme national de la forêt et du bois ;

– la commission régionale de la forêt et du bois, chargée notamment d’élaborer les programmes régionaux de la forêt et du bois, comprend désormais les fédérations départementales ou interdépartementales des chasseurs ;

– rattaché à la commission régionale, un comité composé paritairement de représentants des propriétaires forestiers et des chasseurs dresse le bilan des dégâts de gibier de l’année écoulée. Il adopte un programme d’actions en vue d’établir un équilibre sylvo-cynégétique dans les zones les plus affectées. En l’absence de majorité des deux tiers, ce programme est élaboré et arrêté par le préfet de région. Il est ensuite transmis aux préfets de département avant l’établissement des schémas départementaux de gestion cynégétique ;

– la politique forestière favorise la recherche de contreparties pour les services rendus en matière environnementale et sociale par les bois et forêts présentant une garantie de gestion durable. L’État favorise les démarches territoriales et privilégie les initiatives des propriétaires forestiers en faveur d’une gestion durable et multifonctionnelle ;

– les documents de politique forestière traduisent les objectifs d’une gestion durable des bois et forêts ;

– l’article institue un programme national de la forêt et du bois (PNFB) qui précise les orientations de la politique forestière pour une durée maximale de dix ans ;

– un programme régional de la forêt et du bois (PNFB) décline les orientations et les objectifs du programme national dans un délai de deux ans. Il fixe les priorités et les traduit en objectifs, définit des critères de gestion durable et multifonctionnelle et des indicateurs associés. Il est élaboré par la commission régionale de la forêt et du bois, soumis à la participation du public et arrêté par le ministre chargé des forêts ;

– la commission régionale de la forêt et du bois établit un bilan de la mise en œuvre du programme régional et propose éventuellement des modifications ;

– les documents d’orientation régionaux, départementaux et locaux arrêtés par l’État ou par les collectivités publiques, ayant une incidence sur la forêt et la filière bois et figurant sur une liste établie par décret tiennent compte du programme régional. Les orientations régionales de gestion de la faune sauvage et de ses habitats et les schémas départementaux de gestion cynégétique sont compatibles avec le programme régional de la forêt et du bois ;

– toute occupation de bois et forêts par des ouvrages, infrastructures ou équipements implantés sous terre sans l’accord écrit des propriétaires ou hors de toute servitude d’utilité publique régulièrement déclarée donne lieu au paiement, au profit du propriétaire ou de l’ONF, d’une indemnité annuelle d’occupation ;

– l’accès aux ressources génétiques est règlementée, ainsi que le partage juste et équitable des bénéfices résultant de leur utilisation, conformément au protocole de Nagoya ;

– le département élabore chaque année, en concertation avec les communes et les établissements publics de coopération intercommunale, un schéma d’accès à la ressource forestière ;

– il est institué un fonds stratégique de la forêt et du bois afin de financer des projets d’investissements, ainsi que des actions de recherche, de développement et d’innovation, et afin d’améliorer la gestion durable et multifonctionnelle de la forêt ;

– l’article définit les travaux forestiers, en y ajoutant la production de bois et dérivés destinés à l’énergie ou à l’industrie ;

– l’Office national des forêts peut exercer les droits reconnus à la partie civile pour les faits portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts qu’ils a pour objet de défendre ;

– le schéma départemental de gestion cynégétique est élaboré par la fédération départementale ou interdépartementale des chasseurs, en concertation notamment avec la chambre d’agriculture, les représentants de la propriété privée rurale et les représentants des intérêts forestiers, en particulier lorsque le programme régional de la forêt et du bois fait état de dysfonctionnements au regard de l’équilibre sylvo-cynégétique. Il est compatible avec les programmes régionaux de la forêt et du bois ;

– l’équilibre sylvo-cynégétique tient compte des dispositions des programmes régionaux de la forêt et du bois ;

– le plan de chasse prend en compte les documents de gestion des forêts.

L’article 68 porte sur le document d’aménagement.

L’article 69 est également très fourni :

– les bois et forêts gérés conformément aux divers textes et documents cités présentent des garanties de gestion durable, sous réserve de la mise en œuvre effective du programme de coupes et travaux prévu ;

– aucune coupe ne peut être réalisée sur les dunes côtières fixées par des plantes aréneuses et des arbres épars sans autorisation préalable de l’autorité administrative compétente de l’État. Celle-ci peut être subordonnée à l’exécution de travaux de restauration. Le demandeur qui ne souhaite pas réaliser par lui-même les travaux mentionnés peut proposer de s’acquitter de ses obligations en cédant à l’État, à une collectivité territoriale ou à un établissement public des dunes ;

– l’ajournement des coupes fait l’objet d’une notification motivée à l’autorité administrative compétente de l’État, dans des conditions fixées par décret ;

– les collectivités territoriales et les personnes morales ne peuvent faire aucun défrichement dans leurs forêts sans l’autorisation de l’autorité administrative ;

– l’article fixe les conditions dans lesquelles toute commune classée en zone de montagne dont le taux de boisement dépasse 70 % de son territoire peut procéder à du défrichement pour des raisons paysagères ou agricoles ;

– il est institué un groupement d’intérêt économique et environnemental forestier (GIEEF), regroupement volontaire de propriétaires forestiers de bois et forêts, constituant un ensemble de gestion d’au moins 300 hectares ou, s’il rassemble au moins vingt propriétaires, d’au moins 100 hectares. En zone de montagne, le programme régional de la forêt et du bois peut fixer une surface minimale différente lorsque l’ensemble de gestion rassemble au moins vingt propriétaires. Un document de diagnostic justifie de la cohérence du territoire et expose les modalités de gestion retenues et les conditions de suivi de l’atteinte des objectifs.

Il est proposé aux propriétaires la mise en place d’un mandat de gestion avec un gestionnaire forestier et des projets de commercialisation de leurs bois. Les propriétaires membres du groupement sont tenus de mettre en œuvre le plan simple de gestion ou la partie de plan simple de gestion qui concerne leur propriété et restent personnellement responsables de la mise en œuvre de leur gestion. Ils peuvent bénéficier de majorations dans l’attribution des aides publiques ;

– le Centre national de la propriété forestière agrée les plans simples de gestion, approuve les règlements types de gestion, ainsi que les programmes des coupes et travaux des adhérents aux codes des bonnes pratiques sylvicoles ;

– en cas de vente d’une propriété classée et d’une superficie totale inférieure à 4 hectares, pour laquelle les propriétaires d’une parcelle boisée contiguë bénéficient d’un droit de préférence, le vendeur est tenu de leur notifier le prix et les conditions de la cession projetée ;

– l’article précise les dispositions relatives au droit de préférence de la commune en cas de vente d’une propriété d’une superficie inférieure à 4 hectares, ainsi que les dispositions relatives au droit de préemption de celle-ci. L’État bénéficie d’un droit de préemption si une forêt domaniale jouxte la parcelle en vente ;

– il modifie les conditions applicables au défrichement et les conditions dans lesquelles l’autorité administrative compétente de l’État donne son autorisation, notamment à l’exécution sur d’autres terrains de travaux de boisement ou de reboisement ou à la conservation sur le terrain de réserves boisées suffisamment importantes. Le demandeur peut s’acquitter de son obligation de boisement ou de reboisement en versant au Fonds stratégique de la forêt et du bois (FSFB) une indemnité dont le montant est déterminé par l’autorité administrative.

L’article 70 porte sur les groupements forestiers d’investissement. Il dispose que tout groupement forestier qui lève des capitaux auprès d’investisseurs en vue d’investir ces montants est un groupement forestier d’investissement, soumis au code monétaire et financier. Il définit les conditions dans lesquelles il offre au public ses parts sociales.

L’article 71 apporte une précision rédactionnelle au code général des impôts.

L’article 72 ouvre la procédure des biens vacants et sans maitre aux forêts pour lesquelles la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB) n’est pas réglée pendant 3 ans ; chaque année, les centres des impôts fonciers signalent au préfet du département la liste des immeubles concernés par commune, qui, lui-même, la transmet aux maires. Quand le propriétaire ne s’est pas fait connaître dans les 6 mois, l’immeuble est présumé sans maître. La commune peut alors, après délibération dans un délai de 6 mois, l’incorporer dans le domaine communal. À défaut, il est transféré dans le domaine de l’État.

L’article 73 définit les agents habilités à rechercher et constater les infractions forestières.

L’article 74 complète le contenu du contrat pluriannuel passé entre l’État et l’Office national des forêts, en ajoutant qu’il détermine les conditions dans lesquelles ce dernier contribue à la mise en œuvre des politiques publiques relatives à la gestion de la forêt et des milieux.

L’article 75 porte sur la compétence de la collectivité territoriale de Corse en matière de production et de multiplication de plants forestiers et autres végétaux.

L’article 76 précise que la mise sur le marché du bois et de produits dérivés du bois est soumise au règlement du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 et définit les agents chargés du contrôle et la surveillance de ces dispositions. En cas de manquement, l’autorité administrative met en demeure l’intéressé de prendre les mesures nécessaires pour y remédier. Si cette mise en demeure n’est pas suivie d’effets, l’autorité administrative peut suspendre le fonctionnement de l’entreprise ou l’exercice des activités. Des sanctions pénales sont également prévues.

L’article 77 prévoit, pour le Conseil national de l’expertise foncière agricole et forestière, la possibilité d’exercer devant toutes les juridictions tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession.

L’article 78 prévoit qu’un recouvrement triennal peut être organisé pour la taxe foncière sur les propriétés non bâties s’agissant des propriétés inscrites au cadastre en nature de bois et forêts et dont le montant total par article de rôle est inférieur à 12 €. Cet article a depuis été abrogé par la loi de finances rectificative pour 2015.

L’article 79 dispose que le document de gestion arrêté ou agréé à la demande des propriétaires de parcelles forestières constituant un ensemble d’une surface totale d’au moins 10 hectares situées sur le territoire d’une même commune ou de communes limitrophes est un plan concerté.

L’article 80 dispose que les planches de parquet vendues sur le marché français ne peuvent présenter des taux de composés organiques volatils supérieurs à des seuils fixés par décret. Cette disposition, insérée dans le code de la santé publique, devrait être prochainement abrogée (article 25 du projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne).

L’article 81 prévoit que dans les bois, forêts ou parcs situés sur le territoire de communes où l’établissement d’un plan local d’urbanisme a été prescrit, ainsi que dans tout espace boisé classé, les coupes et abattages d’arbres sont soumis à déclaration préalable sauf s’il est fait application d’un règlement type de gestion approuvé. Ces dispositions ont été modifiées par l’ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015.

L’article 82 précise que, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, le Gouvernement dépose sur le bureau des assemblées parlementaires un rapport sur les règles applicables aux exportations et aux importations de bois et de produits fabriqués en bois, indiquant notamment les mesures à prendre afin de renforcer ces règles. Il s’appuie sur l’analyse des données statistiques du commerce extérieur des produits bois des cinq dernières années.

II. APPLICATION DE LA LOI

LISTE DES DÉCRETS PUBLIÉS

Article

Base légale

Titre du décret publié

Objet

Article 67

Article L. 113-2 du code forestier

Décret n° 2015-778 du 29 juin 2015 relatif aux commissions régionales de la forêt et du bois

Décrets de cohérence avec certaines évolutions (CSFB, gouvernance)

Article 67, 6°

Article L. 121-2-2 du code forestier

Décret n° 2015-666 du 10 juin 2015 relatif au programme national de la forêt et du bois et aux programmes régionaux de la forêt et du bois

Modalités d’élaboration du projet de programme national de la forêt et du bois

Article 67, 7°

Article L. 121-2-2 du code forestier

Précisions sur la procédure d’élaboration du PRFB (notamment autorité administrative)

Article 67, 14°, c

Article L. 125-1 du code forestier

Décret n° 2015-228 du 27 février 2015 portant diverses mesures d'application de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt et clarification du droit

Montant de l’indemnité annuelle d’occupation de bois et forêts par des ouvrages, infrastructures ou équipements implantés sous terre

Article 67, 23°

Article L. 156-4 du code forestier

Décret n° 2015-776 du 29 juin 2015 relatif à la gouvernance du fonds stratégique de la forêt et du bois et aux règles d’éligibilité à son financement

Modalités de gestion du fonds stratégique de la forêt et du bois et règles d'éligibilité à son financement

Article 69, II, 4°

Article L. 214-5 du code forestier

Décret n° 2015-678 du 16 juin 2015 relatif aux conditions de mise en œuvre du troisième alinéa de l'article L. 214-5 du code forestier

Notification par une collectivité territoriale de l'ajournement des coupes à l’autorité administrative compétente de l’État lorsque l’état d’assiette est partiellement approuvé

Article 69, III, 3°

Article L. 332-7,  I, 2° du code forestier

Décret n° 2015-728 du 24 juin 2015 relatif au groupement d’intérêt économique et environnemental forestier

Groupement d’intérêt économique et environnemental forestier : contenu minimal du document diagnostic

Article 69, III, 3°

Article L. 332-7, IV du code forestier

Décret n° 2015-758 du 24 juin 2015 relatif à la commission consultative prévue à l’article L. 182-25 du code rural et de la pêche maritime et à l’autorité administrative compétente de l’État en matière de reconnaissance et de retrait de la qualité de groupement d’intérêt économique et environnemental forestier

Reconnaissance et retrait de la qualité de groupement d’intérêt économique et environnemental forestier

Article 69, III

Article L. 412-6 du code forestier

Décret n° 2015-656 du 10 juin 2015 modifiant certaines dispositions relatives aux autorisations de défrichement

Application de l'article en cas d'autorisation tacite de défrichement

Article 75, III

 

Décret n° 2015-388 du 3 avril 2015

Modalités relatives aux transferts de services à la collectivité territoriale de Corse (pépinières)

Article 76, II

 

Décret n° 2015-665 du 10 juin 2015 portant diverses dispositions d'application de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt et diverses mesures de clarification et simplification

Déterminer l'autorité administrative compétente pour prononcer mise en demeure et sanctions

LISTE DES MESURES EN ATTENTE DE DÉCRET

Article de la loi

Base légale

Objet du décret

Article 80

Article L. 5232-5 du code de la santé publique

Planches de parquet vendues sur le marché français : plafond des taux de composés organiques volatils

Article 78

Article 1396 du code général des impôts

Conditions de recours au recouvrement triennal

Article 94, I

 

Conditions dans lesquelles les experts forestiers, organisations de producteurs du secteur forestier et gestionnaires forestiers professionnels peuvent obtenir communication par voie électronique des données relatives aux propriétés inscrites en nature de bois et forêts situées dans le périmètre géographique pour lequel ils sont reconnus

OBLIGATION DE DÉPÔT DE RAPPORT

13/04/2015

Rapport sur les règles applicables aux exportations et aux importations de bois et de produits fabriqués en bois, précisant notamment les conditions phytosanitaires dans lesquelles elles se déroulent, évaluant les dispositifs de surveillance et de contrôle les concernant et indiquant les mesures à prendre afin de les renforcer.

A. LES ENJEUX FORESTIERS ET UNE NOUVELLE GOUVERNANCE

La loi reconnaît l’intérêt général pour la Nation de la protection et la mise en valeur des bois et forêts, de la conservation des ressources génétiques forestières, de la fixation de dioxyde de carbone et du stockage de carbone dans les produits du bois. Cette reconnaissance donne une base législative à la réglementation concernant les matériels forestiers de reproduction et l’accès aux ressources énergétiques forestières pour une utilisation en recherche-développement dans des conditions équitables, en conformité avec les engagements de la France dans le cadre du protocole de Nagoya.

Pour préciser la notion d’intérêt général, l’article 67 réaffirme les objectifs de la politique forestière : adaptation des forêts au changement climatique, équilibre sylvo-cynégétique, régularité à long terme de la disponibilité de bois, renforcement de la compétitive des filières d’utilisation du bois, et développement des territoires.

« D’ici 2025, nous devrons avoir renouvelé 500 000 hectares de forêt, ce qui correspond à seulement 3 % de la surface totale actuelle pour rattraper le retard déjà accumulé », indique Philippe Leroy, sénateur de la Moselle (19).

Pour la Fédération des forestiers privés de France (FFPF), il est positif de souligner le rôle d’intérêt général de la forêt pour la recherche de financements et l’encouragement du mécénat, FFPF a créé la Fondation Fransylva, abritée au sein de la Fondation du patrimoine, afin d’attirer des moyens complémentaires pour l’investissement, la recherche, l’emploi, ce qui a donné une image positive de la forêt dans le public. Le projet de reboisement pourrait créer de nombreux emplois, mais, comme l’ont fait remarquer les représentants de la Fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR), il faudrait le soutien de la puissance publique, car on plante en France 10 fois moins qu’en Allemagne.

Pour conforter l’intérêt général, l’Union de la coopération forestière française (UCFF) vient de créer un fonds de dotation « Plantons pour l’avenir » ; au bout de 6 mois, les premiers reboisements étaient en cours de réalisation et une deuxième vague a été lancée grâce au soutien d’une quinzaine d’entreprises mécènes, même extérieures à la forêt, comme Nestlé, ou des entreprises du CAC 40, ainsi que du Crédit agricole de France.

– Le « parlement » de la forêt, le Conseil supérieur de la forêt et du bois (CSFB) a été rénové et revu en lien avec le contrat stratégique de filière (décret n° 2015-778 du 8 octobre 2015). Il a été créé au sein du Conseil des comités spécifiques plus techniques : économie de filière, biodiversité, liens avec les territoires, formation-recherche, volets communautaires et internationaux. Ces comités donnent leur avis sur le programme national forêt-bois (prévu par la loi qui fixe les orientations de la politique de la forêt) et sur les projets d’implantation industrielle. Le programme a été soumis au conseil supérieur au printemps, avant le décret.

Les commissions régionales de la forêt et du bois (CRFB) se substituent aux commissions régionales de la forêt et des produits forestiers. Elles concourent à l’élaboration et à la mise en œuvre dans la région des orientations de la politique forestière, dans le respect des objectifs définis au code forestier. Présidées conjointement par le préfet de région et le président du conseil régional, elles ont intégré des représentants de l’aval de la filière (décret n° 2015-778 du 29 juin 2015). De plus, un comité composé paritairement de chasseurs et de forestiers a été rattaché aux commissions. Elles sont notamment chargées :

– d’élaborer le programme régional de la forêt et du bois et, le cas échéant, le contrat de la filière bois au niveau régional ;

– d’identifier les besoins et les contraintes de la filière forêt-bois afin notamment de faciliter l’approvisionnement en bois des industries de cette filière ;

– d’assurer la cohérence entre le programme régional de la forêt et du bois et les politiques publiques régionales, nationales ou communautaires ainsi que les programmes d’investissement et d’aides publiques ayant une incidence sur la forêt, ses produits et ses services ;

– de faire toute proposition visant à organiser le dialogue entre les acteurs intervenant dans le domaine de la forêt et du bois ;

– d’émettre un avis sur les projets de directives régionales d’aménagement des forêts et de schémas régionaux d’aménagement des forêts relevant du régime forestier, ainsi que sur les projets de schémas régionaux de gestion sylvicole des bois et forêts des particuliers ;

– d’assurer le suivi du programme régional de la forêt et du bois et d’en réaliser un bilan annuel qui est adressé au conseil supérieur de la forêt et du bois.

B. LE PROGRAMME NATIONAL DE LA FORÊT ET DU BOIS

Ce programme (PNFB) doit déterminer des objectifs économiques, environnementaux et sociaux fondés sur des indicateurs de gestion durable. Il définit également des territoires supra-régionaux qui justifient en raison de leurs caractéristiques une coordination des programmes régionaux. Il vise à redonner de la compétitivité à la filière forêt-bois.

Ses objectifs et ses engagements ont été validés en comité interministériel en tenant compte des engagements internationaux et communautaires. Le décret relatif à ce programme a été signé le 10 juin 2015 (n° 2015-666). Cinq groupes de travail se ont réunis tout au long de l’année 2015 et un projet de PNFB a été soumis à l’avis du CSFB le 8 mars, puis a été soumis à l’avis du public le 7 novembre dernier et doit être définitivement approuvé par décret.

La FFPF a souligné que le programme national prévoyait des actions concertées entre la forêt publique et la forêt privée, ce qui pourrait donner lieu à une gestion rénovée.

Ce programme devra être décliné au niveau régional par les programmes régionaux forêt-bois : les orientations régionales forestières et le plan pluriannuel régional de développement forestier seront fusionnés dans un document unique. Ces programmes comporteront des indicateurs de gestion durable.

Dans chaque région, des programmes régionaux de la forêt et du bois (PRFB), qui remplacent les anciennes orientations forestières déclineront le programme national. Ils identifieront les massifs à enjeux prioritaires pour la mobilisation du bois, préciseront les conditions du renouvellement des peuplements forestiers en veillant à l’équilibre sylvo-cynégétique. Ils indiqueront les actions à mettre en œuvre dans les régions et engloberont donc les anciens programmes pluriannuels régionaux, qui seront supprimés.

Chaque commission régionale fera annuellement le bilan de la mise en œuvre du PRFB, bilan qui sera transmis au ministre chargé des forêts. La synthèse en sera communiquée au CSFB (décret n° 2015-778 du 29 juin 2015). Les travaux d’élaboration des PRFB devront aboutir dans le courant de l’année 2017.

La FNCOFOR a déploré que tous les décrets sur les plans régionaux du bois et de la forêt n’aient pas été pris. 

L’APCA, qui a co-écrit le programme national avec l’ensemble des parties prenantes, a souhaité faire part à vos rapporteurs de « quelques critiques constructives » :

« – Ce document a perdu de vue la notion de multifonctionnalité des forêts, les multi-usages, les complémentarités entre l’agriculture et la forêt, notamment dans les surfaces de sylvo-pastoralisme très présentes dans le sud du pays ;

« – Il ne [traite] pas les arbres hors forêt (haie, bocage, agroforesterie, bosquets...). Les haies et arbres d’alignement représentent 2 millions d’hectares, accessibles, munis de dessertes et donc facilement mobilisables. Ces gisements pourront servir de complément pour l’approvisionnement d’une filière bois-énergie de plus en plus demandeuse et permettront de préserver certains autres peuplements pour les filières du sciage. Les arbres hors forêt sont loin d’être une ressource marginale en volume : il apparaît important de les considérer à leur juste valeur et de les rendre parties prenantes de cette stratégie de filière forêt-bois aval ambitieuse ;

« – La proposition de PNFB, très axée sur l’accompagnement des filières longues, pourrait mieux prendre en compte les filières territorialisées. L’économie repose sur la complémentarité des usages et des marchés (internationaux, nationaux et locaux) : les filières courtes (même si elles ne sont pas majoritaires), comme on les connaît dans les sociétés coopératives d’intérêt collectif Bois-Énergie ou autour de l’association « bois paysan », par exemple, sont absentes de ce plan ».

C. CRÉATION D’UN FONDS STRATÉGIQUE DE LA FORÊT ET DU BOIS.

Ce fonds (FSBF) a été créé par la loi de finances, mais doté par la loi d’avenir d’un comité de gouvernance. Il a vocation à financer des projets d’investissements et d’actions de recherche, de développement et d’innovation qui s’inscrivent dans le cadre, d’une part, des orientations stratégiques du programme national de la forêt et du bois et dans le cadre, d’autre part, des priorités arrêtées dans les programmes régionaux de la forêt et du bois. Le regroupement dans un fonds unique de l’ensemble des ressources financières donne une visibilité et une cohérence aux interventions financières de l’État, qui feront l’objet d’un suivi par le Conseil supérieur de la forêt et du bois. À l’inverse du fonds bois créé en 2009 et orienté vers la filière aval (construction, ameublement…), le fonds stratégique vise à renforcer la compétitivité de la filière en amont.

Le décret définissant les modalités de sa gestion et les règles d’éligibilité à ses financements a été publié le 30 juin 2015 (n° 2015-776). Une instruction technique du 17 décembre 2015 définit les conditions générales de financement de ces opérations d’investissements réalisées dans le cadre des programmes de développement rural régionaux (PDRR).

Ses ressources sont les suivantes :

– dotations budgétaires nationales (programme 149) : 28 M€ en 2017,

– compensations financières de défrichement : 1 M€ au 1er novembre et plafonnées à hauteur de 2 M€ pour 2017,

– contributions des chambres départementales d’agriculture : cotisation provenant de la taxe additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TATFNB) : 3,7 M€ ; jusqu’à présent, elles étaient affectées au financement d’animations prévues dans les plans pluriannuels régionaux de développement forestier, dont la majorité arrivera à terme au cours de l’année 2017.

Comme il avait eu l’occasion de le souligner lors d’un débat au Sénat en janvier, le ministre de l’agriculture entend recourir aux cofinanceurs pour parvenir à cette capacité de 100 millions d’euros. Les 18 millions d’euros supplémentaires sur le budget du ministère « doivent servir d’effet levier pour atteindre, avec les autres cofinanceurs (Europe, régions, fonds privés, BPI, BEI…) la cible de 100 millions d’euros », précise le ministère, dans un communiqué diffusé à l’issue de cette rencontre. Une « conférence des financeurs » doit arrêter les priorités de financement du fonds. Un appel à projet sera lancé avant la fin de l’année.

Le dispositif relatif aux conditions d’autorisation de défrichement a évolué. Jusqu’à la loi d’avenir, l’autorisation de défrichement pouvait être conditionnée à la réalisation de compensations, telles que, en particulier, des boisements compensateurs ou le versement d’une compensation financière.

La loi a généralisé les compensations aux défrichements : elles peuvent prendre la forme de boisements, de travaux d’amélioration sylvicole ou de versement d’une indemnité équivalente au FSBF – au 31 juillet 2016, le montant versé au FSFB s’élevait à 670 868 €. Ces règles ont fait l’objet du décret n° 2015-656 du 10 juin 2015. L’enjeu n’est plus l’accroissement de la surface forestière, mais la mise en œuvre d’une gestion forestière multifonctionnelle, répondant aux objectifs de séquestration de carbone et de résilience de la forêt face aux effets du changement climatique, ce qui nécessite des investissements forestiers.

La compensation défrichement est mise en œuvre par les préfets. Le ministère a fourni des idées directrices. Mais le ministère déplore que des décisions aient pu être prises en fonction du bénéficiaire (par exemple pour aider des jeunes, alors que ce n’est pas le propos) et souligne que le but est de protéger la forêt, et non le bénéficiaire.

Le bilan en apparait mitigé, en raison, en particulier de la réticence des agriculteurs à propos de la compensation défrichement. Il est vrai que, comme vos rapporteurs l’ont fait remarquer, la forêt progresse dans certaines parties du territoire, par exemple en Dordogne. La surface agricole utile (SAU) diminue d’un département tous les 7 ans.

Ce fonds a fait l’objet de plusieurs remarques pendant les auditions.

Selon l’UCFF et France Bois Forêt (FBF) et l’ensemble de l’interprofession, il faudrait créer un compte d’affectation spéciale afin que les ressources soient pérennes, car le temps de la forêt est très long. En outre, la taxe carbone est le cheval de bataille de la filière : la forêt capte 20 % des émissions de carbone, elle souhaite qu’un euro par tonne de CO2 lui soit affecté. La forêt participant de l’écologie et de la biodiversité, il est logique que ces montants reviennent aux forestiers, aux producteurs et aux planteurs. Il serait souhaitable que les crédits du fonds soient redirigés vers le reboisement et l’investissement. Ce « fléchage » est très cohérent : les émetteurs de carbone devraient payer des actions qui contribuent à capter et stocker ce carbone. Le compte d’affectation spéciale se justifierait en outre par le fait que l’innovation est un facteur d’expansion de la filière.

Pour la FNCOFOR, il est essentiel que le fonds contribue aux investissements et au reboisement, mais il est nécessaire de garder également des financements pour l’animation, car le public a tendance à se refermer sur une forêt sacralisée.

Les professionnels de la forêt estiment que les crédits de la TFNB sont mal utilisés par les chambres, car elles ne l’utilisent pas pour la forêt, alors que le but devrait être de faire remonter les crédits vers le fonds stratégique. Toutefois, comme l’a souligné le ministère, les sommes collectées sont renvoyées dans le département où elles ont été générées. L’agriculteur peut proposer de reboiser, chez un forestier ou chez lui ; des bourses aux travaux sont proposées. C’est un cercle vertueux.

L’APCA fait remarquer qu’une partie du FSFB est alimentée par la taxe pour frais de chambres d’agriculture (3,7 M€) pour des actions de développement et d’animation territoriale (dans le cadre du plan pluriannuel régional de développement forestier (PPRDF) instauré par la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche du 27 juillet 2010 et à partir de 2017, dans le cadre du programme régional de la forêt et du bois (PRFB) crée par la loi d’avenir). Il faudra s’assurer que ces fonds, qui proviennent des propriétaires, servent au développement de la forêt privée, en appui aux chambres d’agriculture et centre régionaux de la propriété forestière (CRPF). Aucune garantie n’a été donnée actuellement.

L’APCA s’insurge sur le traitement des centimes forestiers dans le cadre du PLF 2017 : Les centimes forestiers (4,8 M€) alimentent le fonds national forêt-bois pour financer des appels à projets au niveau régional par les directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF). Cette disposition ne lui parait pas acceptable, elle demande que ces fonds restent « fléchés » sur les actions des chambres d’agriculture, avec une gouvernance adaptée.

À ce sujet, un groupe de travail vient d’être créé, piloté par la direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises (DGPE).

Les Jeunes agriculteurs s’élèvent avec vigueur contre la compensation : « la loi d’avenir a rendu la situation pire que ce qu’elle était auparavant. Le régime de compensation en nature avec coefficient multiplicateur était injustifié. Désormais, malgré son maintien, a été ajoutée de manière optionnelle (mais dans les faits systématique) une conversion de la replantation en quasi-taxation ».

JA souhaite a minima que les jeunes agriculteurs soient exonérés de toute obligation de compensation et, idéalement, que les surfaces en reboisement « naturel » qui existent partout en France soient considérées comme compensant de facto les défrichements correspondants. Un travail conséquent doit être mené sur cette question pour apporter une réponse satisfaisante pour tous, et qui évite les conflits d’usage inutiles entre surfaces forestières et agricoles.

D. FORÊT ET TERRITOIRES

1. Établir l’équilibre sylvo-cynégétique

L’article 76 de la loi vise à établir l’équilibre sylvo-cynégétique.

La loi prévoit que les orientations régionales de gestion de la faune sauvage et de ses habitats (ORGFSH) et les schémas départementaux de gestion cynégétique devront être compatibles avec le programme régional de la forêt et du bois.

Un comité composé paritairement de forestiers et de chasseurs rattaché à la commission régionale a également été instauré ; il s’appuie toutefois sur les travaux des départements. Ce comité devra dresser un bilan des dégâts de gibier recensés au niveau régional et définir un programme d’action permettant de favoriser l’établissement d’un équilibre sylvo-cynégétique (décret n° 2015-778 du 29 juin 2015). Aucun comité ne s’est encore réuni.

Dans les régions, l’équilibre sylvo-cynégétique est au cours des débats. Vos rapporteurs estiment qu’il faudra parvenir à un vrai dialogue entre forestiers et chasseurs.

La FFPF a déploré que la Fédération nationale des chasseurs ait voté contre le décret relatif à la concertation sur la prévention des dégâts sylvicoles de grands gibiers. Ce décret est toutefois à la signature du ministre. La FFPF a regretté que la Fédération nationale des chasseurs remette en cause ce qui a été fait jusqu’à présent.

Les forestiers sont membres des associations communales de chasse agréées (ACCA), mais soulignent qu’ils ont, en fait, peu la parole dans ces instances.

La Fédération nationale de chasseurs porte un jugement mitigé sur la loi. Selon elle, l’équilibre sylvo-cynégétique est le volet le moins satisfaisant, qui va créer des problèmes avec les forestiers. Globalement, elle met l’accent sur « de nombreux aspects négatifs pour quelques points positifs ».

Ces derniers sont au nombre de deux. En premier lieu, la loi prévoit la possibilité pour les représentants des intérêts cynégétiques d’entrer au sein du conseil d’administration de l’Office national des forêts.

Par ailleurs, la Fédération a craint que les ACCA ne soient démantelées et se félicite que cela ne soit pas le cas : pour elle, « le risque était que les propriétaires forestiers utilisent le dispositif des GIEEF pour se regrouper et tenter de se soustraire à l’action des ACCA dont le territoire est constitué par les terrains des propriétaires inférieurs à certaines superficies. En se regroupant, les propriétaires forestiers auraient pu constituer des unités de surfaces supérieures à ces superficies et « s’extraire » des ACCA pour la gestion cynégétique. Il y avait un risque majeur de démantèlement des ACCA, qui est donc écarté ».

En outre, au titre II de la loi, il est créé une commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, présidée par le préfet, associant des représentants de l’État, des collectivités territoriales et de leurs groupements, des professions agricoles et forestières, des chambres d’agriculture et des organismes nationaux à vocation agricole et rurale, des propriétaires fonciers, des notaires, des associations agréées de protection de l’environnement et des fédérations départementales ou interdépartementales des chasseurs, ce dont ces dernières se félicitent.

Au même titre II, il est prévu à l’article 29 la possibilité pour les fédérations départementales, interdépartementales ou régionales des chasseurs de siéger dans les conseils d’administration des SAFER, autre point positif.

En revanche, les sujets de discorde sont nombreux. La Fédération nationale des chasseurs déplore qu’on développe la forêt au détriment de la chasse, alors que le poids de la chasse dans l’économie forestière n’est pas négligeable, qu’elle n’est pas une simple variable. Elle a estimé, lors de son audition, que les logiques des forestiers et des chasseurs étaient inconciliables sur plusieurs points :

– la représentation des chasseurs au sein de la commission régionale de la forêt et du bois, fixée par décret, est déséquilibrée au regard de la composition de la commission ;

– les fédérations départementales ou interdépartementales des chasseurs ne sont pas expressément mentionnées pour représenter les chasseurs au sein du comité paritaire de la commission régionale de la forêt et du bois. Ne sont mentionnés que les « représentants » des chasseurs. Ce défaut de précision pouvant entraîner des dérives dans les nominations par les préfets, il faudrait qu’une circulaire apporte des précisions ;

– la modification du rapport hiérarchique entre schéma départemental de gestion cynégétique (SDGC) et programme régional de la forêt et du bois (PRFB) suscite l’inquiétude : auparavant, les SDGC se devaient seulement de « prendre en compte » les PRFB. Désormais, ils doivent être « compatibles » avec eux. La loi promeut l’échelon régional mais, en fait, les problèmes abordés dans les programmes régionaux et des schémas départementaux sont différents ;

– la prise en compte des documents de gestion des forêts en matière de plan de chasse pose problème dans la mesure où les intérêts des forestiers étaient déjà pris en compte dans le cadre de la procédure de plan de chasse.

L’article L. 425-6 du code de l’environnement dispose : « Le plan de chasse détermine le nombre minimum et maximum d’animaux à prélever sur les territoires de chasse. Il tend à assurer le développement durable des populations de gibier et à préserver leurs habitats, en prenant en compte les documents de gestion des forêts mentionnés à l’article L. 122-3 du code forestier et en conciliant les intérêts agricoles, sylvicoles et cynégétiques ».

Et la Fédération d’ajouter : « dans la mesure où le texte en vigueur prévoyait déjà une conciliation des intérêts sylvicoles et cynégétiques, et où les propriétaires forestiers étaient déjà associés à l’élaboration des plans de chasse grand gibier, il n’apparaissait pas opportun à la Fédération nationale des chasseurs d’alourdir le dispositif en prévoyant une référence explicite aux documents de gestion des forêts. Le risque introduit par cette disposition est de mettre un pied dans la gestion cynégétique normative, qui consiste à fixer des objectifs chiffrés de densité de cervidés, par l’intermédiaire des documents de gestion des forêts. Ce type de démarche est toujours voué à l’échec. En effet, quand bien même cette démarche est intellectuellement rassurante, elle ne peut aboutir car il est techniquement impossible de vérifier si la norme définie est adaptée ou non, et surtout si l’objectif est atteint ou non ».

– quant au projet de décret pour la mise en place d’une concertation locale pour la prévention des dégâts sylvicoles de grand gibier, la Fédération estime qu’il est « à rejeter en totalité » compte tenu :

« du caractère excessif des dispositions prévues à l’encontre des ACCA et des outils juridiques déjà mis à la disposition des forestiers pour faire valoir leurs droits (chaque propriétaire forestier est déjà membre de droit des ACCA, peut formuler sa propre demande de plan de chasse et peut se constituer en association syndicale libre). Enfin, l’insuffisance de l’enquête transmise par les forestiers sur les disfonctionnements en matière de dégâts forestiers en ACCA ne milite pas en faveur de la publication d’un projet de décret (moins de 10 cas relevés en France) ».

« s’agissant des autres articles du décret, du fait que les propriétaires forestiers peuvent chasser et louer ou non la chasse… Les mesures proposées seront exclusivement à charge pour les chasseurs et uniquement au stade de la proposition pour les forestiers. Le projet de décret apparaît donc comme fortement déséquilibré ».

La Fédération nationale des chasseurs fait en outre valoir que l’indemnisation des dégâts s’élève annuellement à un montant de 25 à 35 M€, les frais d’expertise à 5 M€ environ, et les dépenses de prévention (hors valorisation du bénévolat des chasseurs) à près de 15 M€, ce qui fait au total approximativement un montant assez élevé de 50 M€. En effet, depuis la loi sur le développement des territoires ruraux de février 2005, le propriétaire forestier, victime de dégâts, peut obtenir réparation de la part du détenteur du droit de chasse concerné sous certaines conditions, en particulier s’il n’a pas réalisé le minimum du plan de chasse qui lui était attribué.

La FNCOFOR a rappelé que les forestiers, contrairement aux agriculteurs, ne percevaient pas d’indemnité pour des dégâts de gibier.

L’équilibre forêt-gibier est particulièrement difficile à trouver. C’est l’une des priorités du contrat d’objectifs et de performance (COP) pour la période 2016-2020 entre l’État, la FNCFOR et l’Office national des forêts (ONF).

L’ONF devra approfondir le partenariat avec l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) ; mettre en place des outils de diagnostics partagés pour le suivi des contrats sylvo-cynégétiques et les examiner en commission consultative territoriale de la chasse ; élaborer un plan d’action pour l’établissement à différentes échelles de cartes d’impacts et suivre les décisions prises sur les demandes de plan de chasse, y compris dans les cas de zones protégées.

Lors de l’audition, vos rapporteurs ont fait remarquer que la population des chasseurs vieillissait et que de ce fait, les plans de chasse n’étaient pas appliqués. Même si le nombre des candidats a commencé récemment à remonter, on constate des problèmes de déshérence dans le Centre de la France, les Pyrénées, le Var. Dans le Var, selon la Fédération nationale, la chasse au sanglier a lieu jusqu’à 4 à 5 jours par semaine et les difficultés se multiplient : les chasseurs sont trop pressurés – il faudrait arrêter de faire payer les bracelets de cerfs – et sont verbalisés en cas de non-réalisation du minimum du plan de chasse, ce qui advient étant donné leur nombre réduit. On constate également un très grand déséquilibre dans l’Est. Votre rapporteur estime qu’à moyen terme, les chasseurs ne pourront plus payer les dégâts.

Selon le ministère, les forestiers déclarent aux préfets qu’ils ne signent pas le programme national car celui-ci ne garantit pas la régénération si bien que la forêt se détruit. En outre, la faune sauvage va croissant : 650 000 sangliers ont été abattus en 2015, selon l’ONF. Les forestiers demandent la suppression du plan de chasse (20). Les Allemands ont ainsi mis 10 ans à réguler la profession de la faune et non deux comme ils le prévoyaient. En forêt, les chasseurs nient les dégâts causés par la faune sauvage, mais on parvient à démontrer qu’ils sont inexistants dans les enclos.

Vos rapporteurs estiment que valoriser économiquement les produits de la chasse pourrait intéresser les chasseurs. Or, comme l’a indiqué l’ONF, 90 % des produits de la venaison sont importés. Il faut des entrepreneurs pour mettre sur pied une industrie, vos rapporteurs suggérant l’organisation d’un concours avec de grands chefs cuisiniers.

2. Dispositions concernant la mobilisation du foncier et l’utilisation des sols

– L’article 78 prévoyait le recouvrement triennal de la taxe foncière sur les propriétés non bâties pour les propriétés en nature de bois et forêts pour lesquelles le montant est inférieur à 12€ (les petites surfaces) afin d’inciter les propriétaires à gérer ou mettre en vente les parcelles.

Cette disposition a été abrogée lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2015, comme le précise la réponse à la question écrite n° 91897 (XIV) de M. Alain Chrétien du 15 décembre 2015 : « L’objectif de mobilisation de la ressource forestière via une gestion durable constitue une priorité de la politique forestière nationale. Afin de contribuer à sensibiliser les propriétaires de petites parcelles forestières à la nécessité de gestion de leurs forêts, la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt du 13 octobre 2014 avait prévu la possibilité de mettre en place un recouvrement triennal de la taxe foncière sur les propriétés non bâties lorsque le montant annuel de celle-ci était inférieur au seuil de perception. Cependant, cette mesure a été supprimée par l’article 49 de la loi no 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015. En effet, aux termes du travail mené avec le ministère des finances sur l’application de cette disposition, il est apparu que sa mise en œuvre présentait des difficultés importantes en gestion au regard du paiement annuel de l’impôt. Le bilan coût-avantage a conduit le Gouvernement à privilégier la suppression de cette disposition afin d’éviter un processus administratif complexe et coûteux ».

Le Centre national de la propriété forestière (CNPF) a regretté que la perception triennale de la taxe foncière ait été abandonnée. Elle était fondée dans son principe : il faut en effet donner un signal aux petits propriétaires, qui doivent soit exploiter leur forêt, soit la vendre. La forêt doit être considérée comme un outil économique.

– La FFPF prône une modification du dispositif d’encouragement fiscal à l’investissement en forêt (DEFI), crée par la loi d’orientation en forêt du 9 juillet 2001 : il permet une réduction de l’impôt sur le revenu, sous réserve de certains plafonds, pour les contribuables domiciliés en France réalisant des investissements forestiers. C’est le seul dispositif permettant d’accompagner et d’orienter un propriétaire dans les travaux qu’il réalise. Or l’article 199 decies H du code général des impôts, qui demande au contribuable -pour pouvoir bénéficier de l’exonération ou du crédit d’impôt- de fournir un ensemble de documents contraignant, pourrait être simplifié.

En outre, il conviendrait de déplafonner le DEFI Forêt. Ceci est d’autant plus justifié que la mise en valeur des bois et forêts et le reboisement sont reconnus d’intérêt général. Le DEFI Forêt retrouvera alors sa pleine efficience.

– La loi d’avenir ouvre la procédure des biens vacants et sans maître aux propriétés en nature de bois et forêt pour lesquelles la TFNB n’est pas réglée pendant 3 ans. La direction des finances publiques établit une liste à partir du cadastre, qui est transmise à la préfecture, puis affichée en mairie. À l’issue d’un délai de six mois à compter de l’accomplissement des mesures de publicité, ces biens sont incorporés dans le domaine de la commune sur laquelle ils sont situés, ou, en cas de renoncement de la commune, la propriété est attribuée à l’État. La procédure dure de un à deux ans ; les bois et forêts acquis selon ces modalités sont soumis au régime forestier à l’expiration d’un délai de cinq ans. Les maires découvrent de ce fait l’importance du patrimoine de leur commune ; cela peut permettre de remédier à certains problèmes fonciers, dans des endroits spécifiques (par exemple, en zone de forte déprise agricole). Ces procédures sont actuellement lancées.

– Elle modifie les règles relatives au droit de préférence et au droit de préemption. Le droit de préférence est étendu aux communes, même lorsque celles-ci ne sont pas propriétaire de terrains boisées et un droit de préemption est créé au profit des communes et de l’État lorsque ceux-ci sont propriétaires de parcelles boisés contiguës relevant du régime forestier. Pour les droits de préférence et droits de préemption, on ne dispose pas de bilan. Les représentants de la forêt privée s’insurgent contre les communes et les notaires sont mécontents car ils doivent se renseigner sur les terrains aux alentours du bien.

Droit de préemption et droit de préférence

Le droit de préemption de l’État (art. L. 331-23 du code forestier)

Il va s’exercer en cas de vente d’une propriété boisée au cadastre d’une surface limitée de 4 ha. Il faut que l’État soit propriétaire d’une forêt domaniale et que celle-ci jouxte celle en vente. C’est au notaire qu’incombe la charge d’informer l’État de cette vente via le préfet. L’absence de réponse pendant trois mois équivaut à une renonciation.

Le droit de préemption de la commune (Art. L. 331-22 - al. 1er du code forestier)

Il s’agit d’un droit créé au profit de la commune sur laquelle se trouve la propriété à vendre, classée au cadastre en nature de bois et forêt et qui possède une parcelle boisée contiguë et soumise à un document de gestion mentionné au a du 1° de l’art. L. 122-3 du code forestier. La parcelle de la commune doit être joignante de la propriété à vendre. La surface de la propriété à vendre doit être inférieure à 4 hectares. La notification doit être adressée au maire qui a deux mois pour faire connaître au vendeur s’il entend exercer son droit. En cas de conflit entre la commune et la SAFER – toutes deux titulaires du droit de préemption – c’est le droit de la commune qui est prépondérant (art. L. 143-6, alinéa 1er du code rural et de la pêche maritime). Mais en cas de conflit entre l’État et la commune, c’est le droit de préemption de l’État qui est prioritaire (art. L. 331-23, al. 4 du code forestier).

Le droit de préférence de la commune (Art. L. 331-24 – al. 1er du code forestier)

Ce droit s’exercera en cas de vente d’une propriété située sur son territoire, classée « bois » au cadastre et d’une superficie limitée à moins de 4 hectares. Ce droit de préférence est identique à celui des propriétaires forestiers, mais avec quelques différences : il n’est pas subordonne a la condition de contiguïté en vigueur pour les propriétaires forestiers. Si la commune est propriétaire d’une parcelle boisée contigüe valorisée, elle bénéficie alors d’un droit de préemption. Son but n’est pas la restructuration, mais celui de conférer à la commune un rôle « d’aménageur » du territoire agricole et forestier. La loi prévoit que le maire doit être informé de la vente par le vendeur. La commune dispose ensuite de deux mois à compter de la notification. Il existe deux possibilités :

– aucun des propriétaires de parcelles contigües n’a exercé son droit de préférence, la vente doit être signée dans le délai de deux mois à compter de la réception de la déclaration d’exercice par la commune de son droit de préférence. Mais ce délai de réalisation est suspendu au droit de préemption de la SAFER. Si celle-ci n’exerce pas son droit de préemption, les bois ainsi acquis par la commune seront soumis au régime forestier de l’art. L. 211-1 du code forestier dans les cinq ans de leur incorporation au domaine communal : elle devra donc établir un "document d’aménagement" approuvé par le représentant de l’État ;

– un – ou plusieurs – propriétaires de parcelles contigües à la propriété à vendre se manifestent, le droit de préférence de la commune ne peut alors pas s’exercer. C’est alors le vendeur qui choisit son acquéreur.

Source : d’après CRFP Limousin

Selon la FNCOFOR, le droit de préemption de la commune devrait s’appliquer à la forêt sectionnale (propriété collecte gérée par l’ONF) dans les conditions prévues par la loi. La FFPF a, pour sa part, estimé que si une parcelle était à vendre et si le voisin disposait d’un document durable, il devrait avoir la priorité, ce qui permettrait de restructurer le foncier, bien que ce soit juridiquement compliqué. Pour la FNCOFOR, ce serait le moyen de remettre en gestion des surfaces qui ne sont pas exploitées.

– Dans le cadre d’un schéma communal approuvé par la CRFB, les communes de montagne boisées à plus de 70 % peuvent défricher jusqu’à un taux de couverture de 50 % pour des motifs paysagers ou agricoles.

– Le département élabore chaque année un schéma d’accès à la ressource forestière. Le PRFB devra en parallèle inclure un itinéraire de desserte des ressources forestières en s’appuyant sur les référentiels géographiques et forestiers de l’IGN. Le centre national de propriété forestière (CNPF) a déploré que les dispositions relatives aux dessertes et itinéraires soient restées lettre morte, faute d’action des départements.

E. LA DYNAMISATION DE LA GESTION DURABLE

1. Les groupements d’intérêt économique et environnemental forestiers

Les GIEEF visent à dynamiser la gestion durable des forêts privées. Il s’agit d’association de propriétaires forestiers privés sur une base volontaire, avec des formes juridiques diverses (organisation de producteurs, association syndicale, personne morale, groupement forestier, etc.). Il fournit un nouvel outil de gestion des forêts à l’échelle géographique du massif (plus de 300 ha ou plus de 20 propriétaires d’au moins 100 ha ou moins de 100 ha en zone de montagne).

Il permet de traiter toutes les questions de nature écologique (protection de la biodiversité), économique (desserte, équilibre des classes d’âge, commercialisation) et sociale (paysage, accueil du public).

Les propriétaires forestiers ainsi regroupés pourront faire appel à un gestionnaire commun. De même, ils pourront vendre leurs bois par voie de contractualisation : c’est un label pour les propriétaires qui s’engagent.

La reconnaissance est liée à la présentation d’un document de diagnostic, présentant les engagements, sur une surface suffisante, en termes de performances écologiques, économiques et de multifonctionnalité, correspondant aux orientations sylvicoles régionales. Le groupement doit également produire un plan simple de gestion concerté agrée par le centre régional de la propriété forestière (CRPF). Des mandats de gestion et des contrats d’approvisionnement seront proposés aux propriétaires.

Le GIEFF a été institué par les décrets n° 2015-728 et n° 2015-758 du 24 juin 2015, qui précisent le contenu du document de diagnostic. Le décret n° 2016-734 du 2 juin 2016 porte sur le contenu du plan simple de gestion (PSG) concerté et apporte aussi des indications sur la procédure de reconnaissance par l’État de la qualité d’un GIEEF.

Actuellement, un GIEEF a été validé dans le département de l’Ardèche et deux autres sont en cours.

La FFPF a fait remarquer que, sans PSG concerté, il n’était pas possible de constituer un GIEEF.

Pour l’Union de la coopération forestière française (UCFF), le GIEEF est un outil complémentaire intéressant. Avant même sa création, l’existence d’organisations de producteurs permettait d’inciter les propriétaires à améliorer la productivité, de rassembler les propriétaires pour le bon produit, pour le bon client, au bon moment, selon un modèle économique qui fonctionne bien. Le GIEEF permettra une avancée supplémentaire.

Toutefois, l’UCFF fait remarquer que si le GIEEF existe désormais et permet aux propriétaires de se regrouper de manière volontaire, d’autres dispositifs fonctionnent : les organisations de producteurs, qui non seulement regroupent également des propriétaires mais approvisionnent régulièrement, sans à-coups, l’industrie bois française à travers des contrats d’approvisionnement. En effet, près de 6,5 millions de m3 de bois sont commercialisés par des organisations de producteurs forestières, rassemblant près de 120 000 propriétaires. Ce lissage permet de sécuriser l’approvisionnement des scieries.

Il lui parait donc nécessaire d’inciter fiscalement :

– les propriétaires à rejoindre ces organisations de producteurs ;

– les scieurs à s’approvisionner en majorité auprès de ces organisations de producteurs.

Des aides, déjà prévues à l’article L. 553-4 du code rural et de la pêche maritime, pourraient être renforcées.

Par ailleurs, la loi a mis en place un groupement forestier d’investissement, destiné à lever des capitaux via les offres de parts publiques.

2. Les autres dispositions relatives à la gestion durable

– Au sein de l’interprofession de la forêt et du bois, la possibilité de créer une section par produit fait l’objet de débats, le comité interprofessionnel du pin maritime revendiquant la création d’une section spécialisée en s’appuyant sur le dernier alinéa de l’article L. 632-1 du code rural et de la pêche maritime, qui prévoit : « Les organisations interprofessionnelles reconnues pour un groupe de produits déterminés peuvent créer en leur sein des sections spécialisées compétentes pour un ou plusieurs de ces produits ».

L’UCFF et la FNCOFOR s’y opposent, arguant qu’il ne peut être constitué une section géographique ni par produit : si l’on cédait, on demanderait une section spéciale pour le Douglas, puis d’autres pour d’autres essences, etc, si bien qu’on risquerait l’éclatement de l’interprofession France Bois Forêt. Or, celle-ci a été réorganisée, ses statuts ont été revus, elle a élaboré une vraie stratégie de filière qu’il ne faut pas remettre en cause. En outre, L’UCFF et la FNCOFOR estiment que, si l’on disperse un montant de 8 M€, il n’est plus possible de financer aucune action.

Le législateur a souhaité éviter les risques de dislocation, c’est pourquoi l’article L. 632-1-2 précise : « Si elle est demandée par un groupement composé dans les conditions prévues au premier alinéa et représentant au moins 70 % de la production d’un ou plusieurs produits, la création d’une section spécialisée correspondant à ce groupement ne peut être refusée ». Le comité professionnel estime qu’il représente 87 % de la récolte de pin maritime bois d’œuvre, 89 à 90 % de la récolte de pin maritime de bois de trituration et de 82 à 85 % des sciages de pin maritime.

Une médiation confiée à M. Jean-Yves Caullet, président du conseil d’administration de l’ONF, a été mise en place.

– Le code des bonnes pratiques sylvicoles (CBPS) est maintenu jusqu’en 2022. Les nouveaux CBPS contractés sont assortis d’un programme de coupes et travaux agrée par le CRPF. Ils constituent toujours une présomption de garantie de gestion durable.

Le code des bonnes pratiques sylvicoles

Le code des bonnes pratiques sylvicoles (CBPS) est un document élaboré par le CRPF en conformité avec le schéma régional de gestion sylvicole. Il est approuvé par le préfet de région.

Le CBPS présente et fixe les recommandations générales et les bonnes pratiques sylvicoles qui permettent la gestion durable des peuplements forestiers.

Enfin, le CBPS identifie par zone naturelle les contraintes cynégétiques et précise les itinéraires et les pratiques sylvicoles les plus adaptés aux peuplements locaux dans leur contexte environnemental et social.

Depuis la loi d’avenir de 2014, il est possible de joindre à l’adhésion au CBPS un programme de coupes et de travaux indiquant ce que l’on souhaite réaliser dans ses bois, afin de disposer d’un réel outil de suivi de la gestion de ses peuplements.

Les parcelles, pour lesquelles l’adhésion au code des bonnes pratiques sylvicoles a été sollicitée, bénéficient de la présomption de garantie de gestion durable. Cette disposition permet d’assortir l’engagement souscrit par le propriétaire d’un avantage fiscal (réduction d’impôt sur la fortune…) quand la propriété boisée n’est pas soumise à PSG. Pour le cas particulier du dispositif d’encouragement fiscal à l’investissement en forêt (DEFI-Forêt), un PSG est exigé dès 10 ha. L’adhésion au CBPS permet de demander les aides publiques.

De plus, en espace boisé classé d’un PLU, si l’on présente à l’approbation du CRPF un programme de coupes et de travaux, il n’est pas nécessaire de déclarer ces interventions à la mairie.

Le code des bonnes pratiques sylvicoles s’adresse uniquement aux propriétaires de petites forêts sans obligation de PSG. L’adhésion est souscrite pour 10 ans pour une liste de parcelles clairement identifiées.

Source : Centre régional de la propriété forestière (CRPF) de Poitou-Charentes

Toutefois, dans la mesure où ces codes sont voués à une disparition proche (2022), on peut se demander s’il faut continuer à encourager, par des dépenses publiques et des indicateurs de performance, l’orientation de propriétaires vers ces documents de gestion.

– La garantie de gestion durable est conditionnée à la mise en œuvre effective du programme de coupes et travaux.

– les coupes prévues aux plans simples de gestion (PSG) peuvent être avancées ou reculées de 4 ans (contre 5 ans précédemment). Ce changement n’a pas suscité de réactions. Quand une commune refuse des coupes, elle doit le justifier auprès du préfet. La loi fait bouger les choses, même si aucune sanction n’est prévue. La FNCOFOR n’y est pas hostile, mais estime que cette mesure doit être appliquée avec discernement ;

– Le report des coupes inscrites à l’état d’assiette pour les forêts des collectivités doit faire l’objet d’une notification motivée.

Le plan simple de gestion

Le plan simple de gestion (PSG) est un outil pratique pour :

– mieux connaître son bois ou sa forêt ;

– définir des objectifs et faciliter les choix et décisions à prendre ;

– prévoir un programme précis de coupes et travaux ;

– établir un bilan périodique ;

– intéresser ses héritiers au patrimoine forestier familial.

Ce document constitue ainsi la « mémoire » de la forêt. Sa réalisation est aussi pour le propriétaire l’occasion d’échanger avec des professionnels de la forêt.

Un plan simple de gestion est « obligatoire » :

– pour toutes les forêts privées d’une surface supérieure ou égale à 25 ha d’un seul tenant ;

– pour tout ensemble de parcelles forestières appartenant à un même propriétaire, constituant au total une une surface surface supérieure ou égale à 25 ha, en prenant en compte tous les îlots de plus de 4 ha situés sur la commune de l’îlot le plus grand et sur les communes contigües à celle-ci ;

– lorsque ces propriétés ne disposent pas d’un plan simple de gestion agréé, elles sont soumises au régime spécial d’autorisation administrative : pour toute coupe, une autorisation préalable est à demander à la direction départementale des territoires.

Un PSG « facultatif » peut être réalisé pour les propriétés non soumises à PSG obligatoire :

– d’une surface totale d’au moins 10 ha ;

– d’un seul tenant ou non ;

– situées sur une même commune ou sur des communes contigües.

Enfin, il est possible de présenter un plan simple de gestion en commun, avec plusieurs propriétaires voisins.

La durée d’application du PSG est choisie par le propriétaire. Elle doit être comprise entre 10 et 20 ans.

Le document doit être composé des éléments suivants :

– renseignements administratifs (propriétaire, localisation, parcelles cadastrales...) ;

– facteurs de production, enjeux économiques et environnementaux ;

– carte de situation de la propriété ;

– plan de la forêt indiquant les types de peuplements ;

– description des peuplements ;

– objectifs de gestion et règles de sylviculture ;

– programme annuel des coupes et travaux.

Le plan simple de gestion peut être réalisé :

– par une coopérative forestière ;

– par un expert forestier agréé ;

– par le propriétaire lui-même.

Source : site de la forêt privée

– Les documents de gestion durable disposent de 5 ans pour prendre en compte les évolutions règlementaires.

– Les experts, organisations de producteurs et gestionnaires forestiers professionnels peuvent accéder aux données cadastrales pour informer les propriétaires sur la valorisation de leurs forêts. Le cadastre électronique apparaît comme positive aux forestiers, notamment à l’UCFF, car elle fait entrer la forêt et toute la filière correspondante dans l’ère de l’électronique. Le périmètre retenu – les opérateurs liés à la production – doit être maintenu, car cela permet d’éviter le pillage des forêts. Mais une amélioration serait souhaitable : aujourd’hui seules les natures de culture « forêt et bois » sont comprises dans le dispositif. Or, en raison du phénomène des accroissements des surfaces forestières qui concerne plusieurs centaines de milliers d’hectares, il serait pertinent de permettre à ces opérateurs d’avoir accès à d’autres natures de cultures (par exemple, les vergers, les vignes, les terres agricoles, les landes).

– Le groupement forestier d’investissement, destiné à lever des capitaux via des offres de parts publiques a été mis en place. Il s’agit d’un groupement forestier qui fait une offre au public pour collecter des capitaux. Il dispose d’un visa de l’Autorité des marchés financiers (AMF). L’objectif du législateur a été d’encourager l’investissement forestier, notamment afin de concentrer la propriété forestière dans ces groupements, et de permettre ainsi de mieux exploiter les forêts françaises. De cette manière, l’investissement dans la forêt est accessible pour des montants raisonnables ; cela démocratise l’investissement forestier. En effet, l’éclatement de la propriété forestière française nuit à l’exploitation de notre patrimoine forestier, et conduit les industriels du bois à importer du bois étranger. Ce dispositif doit permettre le développement de la filière bois en France. L’AMF devra préciser les conditions d’exercice de l’activité de gestion des groupements forestiers d’investissement.

– Les ouvrages implantés sous terre sans accord écrit, dans le but d’assurer le transport d’énergie, les télécommunications, le captage ou la distribution d’eau, donnent lieu au paiement, au profit du propriétaire, ou de l’ONF, d’une indemnité dans la limite de 20 €/m. Cette disposition s’applique également en forêt privée.

3. Les ressources génétiques forestières et les matériels forestiers de reproduction

La politique nationale de gestion des ressources génétiques forestières comprend l’inventaire, la conservation, la sélection, la commercialisation et l’utilisation durable de ces ressources. La réglementation concerne les matériels de reproduction des essences forestières, produits pour la commercialisation ou commercialisés en tant que plants ou parties de plantes, destinés à des fins forestières. Le décret n’est pas encore paru, car il dépendait du vote de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.

La garantie d’une gestion durable est mise en œuvre sur le terrain, mais les effectifs des directions départementales des territoires ne sont pas suffisants.

F. LES MESURES SOCIALES

La loi d’avenir a recréé au profit des ouvriers l’allocation pour cessation progressive d’activité (CPA) à 55 ans, par exemple pour les bûcherons et les sylviculteurs ; la loi prévoit des négociations au sein des branches professionnelles.

Un an après la publication de la loi, des discussions ont débouché sur l’accord du 26 avril 2016, qui sera mis en œuvre à partir du 1er janvier 2017 ; les bénéficiaires reçoivent une rente et l’ONF continue de cotiser pour leur retraite. On évalue à 1 100 le nombre de bénéficiaires potentiels, mais on ignore combien de personnes vont choisir la CPA : on estime que 15 % des personnes concernées sont intéressées.

G. RÈGLEMENT SUR LE BOIS DE L’UNION EUROPÉENNE

Le règlement (UE) n° 995/2010 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 établit les obligations des opérateurs qui mettent du bois ou des produits dérivés en marché ; adopté dans le cadre du plan d’action de l’Union européenne, contre l’exploitation illégale des forêts, il est entré en application en mars 2013. Il interdit la mise sur le marché de bois issu d’une récolte illégale ou de produits dérivés de ce bois, qu’il s’agisse de produits peu transformés ou de produits plus élaborés. Les opérateurs responsables de la première mise sur le marché de bois ou de produits dérivés doivent utiliser un ensemble de procédures appelé « système de diligence raisonnée » afin de s’assurer que le bois commercialisé n’est pas issu d’une récolte illégale : en cas de doute, il ne peut pas être mis sur le marché.

Les sanctions applicables doivent être définies par chaque État membre. L’article 76 de la loi d’avenir institue une sanction administrative prononcée par l’autorité administrative lorsqu’une mise en demeure de corriger les manquements n’a pas été suivi d’effets dans le délai prescrit ; il définit et habilite les agents chargés du contrôle ; ces contrôles sont réalisés par les services déconcentrés des ministères de l’agriculture, de l’environnement, de l’énergie et de la mer. L’article définit en outre les sanctions pénales applicables en cas de manquement aux obligations du système de diligence raisonnée, d’obstacle aux fonctions des agents de contrôle ou de non-respect des sanctions administratives.

La loi a prévu des sanctions pour la mise en marché de bois illégal ; on contrôle à la fois le bois importé et le bois produit.

SIXIÈME PARTIE :
DISPOSITIONS RELATIVES À L’OUTRE-MER

I. PRÉSENTATION DE LA LOI

A. INTENTION DU LÉGISLATEUR

Comme le relève le rapport de l’Assemblée nationale en première lecture, le titre VI de la loi d’avenir modifie peu le droit en vigueur et la plupart des apports concernent de nouveaux articles. En outre, de nombreuses dispositions adoptées sont une déclinaison ultra-marine de dispositions créées ou modifiées dans les premiers titres de la loi.

Comme pour l’ensemble de la loi, ce titre cherche à combiner performance économique, environnementale et sociale dans les départements et régions d’outre-mer.

Des GIEE peuvent être créés en outre-mer. Une même préoccupation en faveur de la préservation du foncier agricole et des espaces forestiers anime les acteurs de l’outre-mer.

Des défis sont également propres à ces territoires, en particulier ce qui concerne la nécessité d’une meilleure structuration des filières et d’une préservation du foncier agricole.

B. PRÉSENTATION DES ARTICLES DU TITRE VI

L’article 83 définit les finalités de la politique agricole en outre-mer, en cohérence avec l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime, créé par le titre préliminaire de la loi : elles concernent le développement agricole, les exportations, l’accès au foncier et à la transmission, les productions locales, la recherche et l’innovation et la mise en valeur des bois et forêts.

L’article 84 concerne le pilotage de la politique agricole et agroalimentaire outre-mer.

Deux plans régionaux définissent les principes d’une gouvernance territorialisée de la politique agricole dans les outre-mer. Le contenu du plan régional de l’agriculture durable (PRAD) est complété par des orientations prioritaires relatives au développement des filières, notamment de l’agriculture familiale.

Le plan régional d’enseignement, de formation, de recherche et de développement définit les orientations en faveur de développement agricole, agro-industriel, halio-industriel et rural en intégrant les réseaux d’innovation et de transfert agricole (RITA).

Cet article crée également un comité d’orientation stratégique et de développement agricole (COSDA), il coordonne l’action de l’État et des collectivités territoriales, notamment dans la mise en œuvre des programmes de l’Union européenne.

L’article renforce les obligations faites au bailleur en cas de reprise d’un terrain.

Il modifie la gouvernance des chambres d’agriculture ultramarines. Leurs missions sont clarifiées par des contrats d’objectifs et de performance.

L’article tire les conséquences de l’accès de Mayotte au statut de région ultrapériphérique de l’Union européenne.

Enfin, il étend aux produits de l’industrie agroalimentaire et halio-alimentaire l’obligation de prise en compte des performances en matière de développement des approvisionnements directs de produits de l’agriculture pour l’attribution des marchés publics de restauration collective.

L’article 85 modifie les règles de vote dans les indivisions pour donner à bail un bien agricole. La surface agricole utile (SAU) en outre-mer est fortement limitée du fait de l’importance des terres en indivision en situation d’inculture. Cet article facilite la continuité de l’exploitation des biens agricoles indivis :

– une nouvelle procédure autorise les deux tiers des indivisaires à donner à bail un bien agricole, les autres indivisaires pouvant y faire opposition devant le tribunal de grande instance, qui statue en référé ;

– sur l’initiative d’un propriétaire indivis d’un bien agricole souhaitant sortir de l’indivision à des fins d’exploitation, il peut être procédé à l’aliénation du bien à la majorité des deux tiers des indivisaires. Les droits des autres indivisaires sont totalement respectés en ce qui concerne les conditions d’information et d’indemnisation et l’encadrement de la procédure.

L’article 86 adapte les dispositions du code forestier aux outre-mer, en particulier le programme national de la forêt et du bois et les dispositions applicables à Mayotte, Saint-Barthélemy et Saint-Martin ainsi que les missions du Conseil national de la propriété forestière.

L’article 87 adapte aux outre-mer les dispositions adoptées aux titres Ier à IV de la loi d’avenir concernant la terminologie, les compétences et la gouvernance. Il procède également à l’homologation des peines d’emprisonnement prévues en Polynésie française.

L’article 88 habilite le Gouvernement à procéder par ordonnance à la refonte de la codification des dispositions relatives aux outre-mer au sein du code rural et de la pêche maritime.

II. APPLICATION DE LA LOI

LISTE DES DÉCRETS PUBLIÉS

Article

Base légale

Titre du décret publié

Objet

Article 84, II, 2°, b

Article L. 181-25 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-755 du 24 juin 2015 relatif au comité d’orientation stratégique et de développement agricole et au groupement d’intérêt économique et environnemental

Compétences, composition et règles de fonctionnement du comité d’orientation stratégique et de développement agricole en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, Saint-Martin et à Mayotte

Article 84, V, 1°

Article L. 511-14 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-924 du 27 juillet 2015 relatif au contrat d'objectifs et de performance des chambres d'agriculture de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique, de La Réunion et de la chambre de l'agriculture, de la pêche et de l'aquaculture de Mayotte

Périodicité, modalités d'élaboration et champ d'application des contrats d'objectifs et de performance établis entre la chambre d'agriculture, l'État, et la collectivité, en Guadeloupe, Guyane, Martinique et La Réunion

Article 84, V, 2°

Article L. 571-2 du code rural et de la pêche maritime

Périodicité, modalités d’élaboration et champ d’application du contrat d’objectifs et de performance établi entre la chambre de l’agriculture, de la pêche et de l’aquaculture de Mayotte, l’État et le Département de Mayotte

Article 85, 1°

Article L. 181-14-1, II du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-833 du 7 juillet 2015 relatif aux mesures en faveur de l'exploitation des biens agricoles en indivision dans les départements d'outre-mer

Terres en indivision outre-mer : appel à candidats au bail par la société d’aménagement foncier et d’établissement rural ou par l’opérateur foncier lorsque le bien n’est pas loué

Article 85, 1°

Article L. 181-14-1, II du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-833 du 7 juillet 2015 relatif aux mesures en faveur de l'exploitation des biens agricoles en indivision dans les départements d'outre-mer

Terres en indivision outre-mer : appel à candidats au bail par la société d’aménagement foncier et d’établissement rural ou par l’opérateur foncier lorsque le bien n’est pas loué

Article 85, 1°

Article L.181-14-1, III du code rural et de la pêche maritime

Outre-mer, exploitation du foncier agricole en statut d’indivision : publicité de renouvellement du bail des indivisaires lorsque l’identité ou l’adresse de l’un ou plusieurs d’entre eux n’est pas connue

Article 85, 1°

Article L.181-14-2, II du code rural et de la pêche maritime

Outre-mer, exploitation du foncier agricole en statut d’indivision : publicité de l'intention de vente d’une minorité d’ indivisaires lorsque l’identité ou l’adresse d’un des indivisaires est inconnue

Article 85, 1°

Article L.181-14-2, III du code rural et de la pêche maritime

Outre-mer, exploitation du foncier agricole en statut d’indivision : publicité d'un projet d'aliénation par une majorité d’indivisaires lorsque l’identité ou l’adresse de certains indivisaires est inconnue

Article 87, I, 6°, b

Article L.181-24 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-759 du 27 juin 2015 relatif à la commission consultative prévue à l’article L. 181-24 du code rural et de la pêche maritime

Outre-mer : composition de la commission consultée sur les missions confiées aux sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural

Article 87, I, 8°

Article L.182-25 du code rural et de la pêche maritime

Décret n° 2015-814 du 3 juillet 2015 relatif à la composition de la commission consultative prévue à l'article L. 182-25 du code rural et de la pêche maritime

Mayotte : composition de la commission consultée sur les missions confiées aux sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural

ORDONNANCE PUBLIÉE EN APPLICATION DE L’ARTICLE 88 DU TITRE VI

Article

Objet de l’habilitation

Ordonnance

Article 88, 1

Réorganisation et révision des dispositions de nature législative particulières à l'outre-mer au sein du code rural et de la pêche maritime : regrouper et ordonner ces dispositions de manière cohérente dans un titre spécifique au sein de chacun des livres dudit code

Ordonnance n° 2015-616 du 4 juin 2015 modifiant le code rural et de la pêche maritime en vue d'assurer la conformité de ses dispositions avec le droit de l'Union européenne et modifiant les dispositions relatives à la recherche et à la constatation des infractions aux dispositions de son livre II

Article 88, 2

Réorganisation et révision des dispositions de nature législative particulières à l'outre-mer au sein du code rural et de la pêche maritime : remédier aux éventuelles erreurs ou insuffisances de codification, en incluant les dispositions de nature législative qui n’auraient pas été codifiées et en adaptant le plan et la rédaction des dispositions codifiées

Article 88, 3

Réorganisation et révision des dispositions de nature législative particulières à l'outre-mer en vigueur à la date de publication de l'ordonnance, au sein du code rural et de la pêche maritime : abroger les dispositions obsolètes, inadaptées ou devenues sans objet

Article 88, 4

Réorganisation et révision des dispositions de nature législative particulières à l'outre-mer en vigueur à la date de publication de l'ordonnance, au sein du code rural et de la pêche maritime : assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes, harmoniser l’état du droit et l’adapter au droit de l’Union européenne ainsi qu’aux accords internationaux ratifiés

Article 88, 5

Adapter, le cas échéant, ces dispositions à l’évolution des caractéristiques et contraintes particulières aux collectivités régies par l’article 73 de la Constitution

Article 88, 6

Adapter les renvois faits, respectivement, à l’arrêté, au décret ou au décret en Conseil d’État à la nature des mesures d’application concernées

Article 88, 7

Étendre, le cas échéant, dans le respect des règles de partage des compétences prévues par la loi organique, l’application de ces dispositions, selon le cas, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna, avec les adaptations nécessaires, et procéder, si nécessaire, à l’adaptation des dispositions déjà applicables à ces collectivités

A. LA CRÉATION DES COMITÉS D’ORIENTATION STRATÉGIQUE ET DE DÉVELOPPEMENT AGRICOLE (COSDA), EN CHARGE DE LA DÉCLINAISON DE LA LOI D’AVENIR OUTRE-MER

Les comités d’orientation stratégique et de développement agricole (COSDA), mis en place dans les départements d’outre-mer sont chargés de définir une politique de développement agricole, notamment pour la mise en œuvre des aides des premiers et deuxième piliers de la PAC.

Les COSDA tiennent compte :

– des orientations du conseil d’administration ou des comités sectoriels de l’Office de développement de l’économie agricole d’outre-mer (ODEADOM) ;

– du plan régional de l’agriculture durable (PRAD) ;

– du plan régional d’enseignement, de formation, de recherche et de développement (PREFRD) défini pour les établissements concernés et les réseaux d’innovation et de transfert agricole (RITA).

Ils doivent émettre un avis sur les projets d’acte réglementaire et individuel en matière de structures agricoles, d’aides aux exploitants, aux exploitations, aux cultures et aux modes de production  et sur les demandes de subvention FEADER (fonds européen agricole pour le développement rural).

Les compétences, la composition et les règles de fonctionnement des COSDA ont été fixées par le décret n° 2015-755 du 24 juin 2015 relatif au comité d’orientation stratégique et de développement agricole et au groupement d’intérêt économique et environnemental.

Les préfets ont entamé un travail de concertation avec les collectivités territoriales mais il a fallu attendre les élections régionales de décembre 2015 et la mise en place des nouveaux exécutifs pour que les nouvelles instances de gouvernance s’installent.

COSDA PAR COLLECTIVITÉ TERRITORIALE

Collectivité territoriale

Création du COSDA

Réunions

Guadeloupe

Mai 2016

5 réunions depuis l’installation

Martinique

Non installé

 

Guyane

Juillet 2016

4 réunions depuis l’installation

La Réunion

Prévue en janvier 2017

 

Mayotte

Octobre 2016

1 réunion de constitution. 2 réunions sont prévues en décembre.

B. LA FORÊT

L’autorité administrative compétente de l'État en matière de reconnaissance et de retrait de la qualité de groupement d'intérêt économique et environnemental forestier (GIEFF) a été désignée par le décret n° 2015-758 du 24 juin 2015 relatif à la commission consultative prévue à l'article L. 182-25 du code rural et de la pêche maritime et à l'autorité administrative compétente de l'État en matière de reconnaissance et de retrait de la qualité de groupement d'intérêt économique et environnemental forestier.

Les missions confiées aux commissions départementales de la consommation des espaces agricoles (CDCEA) ont été élargies aux espaces naturels et forestiers par le décret n° 2015-1488 du 16 novembre 2015 relatif à la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion et à Mayotte.

Le plan régional de l’agriculture durable (PRAD) prend davantage en compte les espaces naturels et forestiers

La loi d’avenir a également élargi aux espaces naturels et forestiers les missions confiées aux commissions départementales de la consommation des espaces agricoles (CDCEA), qui deviennent les commissions départementales de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF). Le décret du 16 novembre 2015 précité tire les conséquences de ces modifications, simplifie les modalités de nomination du représentant des propriétaires agricoles et ajoute une représentation de l'Office national de la forêt avec voix consultative.

Quant à l'inventaire permanent des ressources forestières nationales, qui doit prendre en compte les particularités des bois et forêts situés outre-mer, l’objectif est de définir une solution pérenne pour le rapportage quinquennal auprès des instances internationales et de répondre aux grands enjeux des politiques publiques actuelles (défrichement, carbone, énergie, biodiversité). Pour ce faire, une étude est en cours par l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN), dont les résultats sont attendus pour janvier 2017.

Par ailleurs, les directions de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DAAF) rempliront, par voie d'instruction, le rôle des centres régionaux de la propriété forestière (CRPF).

SEPTIÈME PARTIE :
DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET DIVERSES

LISTE DES DÉCRETS PUBLIÉS

Article

Base légale

Titre du décret publié

Objet

Article 89, III, 2°

Article L. 514-3, du code rural et de la pêche maritime

Périodicité selon laquelle la Commission nationale de concertation et de proposition engage des négociations dans certains domaines pour favoriser l’adaptation et l’évolution du statut du personnel des chambres d’agriculture établi par la Commission nationale paritaire

Décret n° 2015-549 du 18 mai 2015 relatif à la Commission nationale de concertation et de proposition du réseau des chambres d'agriculture.

Article 95, I, 2°

Article L. 653-12, du code rural et de la pêche maritime

Conditions dans lesquelles l’Institut français du cheval et de l’équitation assure certaines missions lorsqu' aucun organisme de sélection n’est agréé pour une race d’équidés

Décret n° 2014-1728 du 30 décembre 2014 relatif aux conditions dans lesquelles l’Institut français du cheval et de l’équitation assure les missions d’organisme de sélection en application de l’article L. 653-12 du code rural et de la pêche maritime

Article 95, I, 3°

Article L. 653-13-1, du code rural et de la pêche maritime

Condition d'application du service universel à la distribution et à la mise en place de la semence des équins et asins.

Décret n° 2016-471 du 14 avril 2016 relatif à l'agrément et aux missions des organismes de sélection d'équidés, au contrôle des performances des équidés et portant adaptation aux équidés du service universel de distribution et de mise en place de la semence des ruminants

Article 95, I 4°

Article L. 653-13-2 du code rural et de la pêche maritime

Périmètre d’intervention du Haras national du Pin

Décret n° 2015-805 du 2 juillet 2015 relatif à l'établissement public Haras national du Pin

Article 95, I

Article L. 653-13-6, du code rural et de la pêche maritime

Conditions d’organisation et de fonctionnement du Haras national du Pin , son régime financier et comptable et modalités d’exercice de la tutelle de l’État

Article 94, I

 

Conditions dans lesquelles les experts forestiers, organisations de producteurs du secteur forestier et gestionnaires forestiers professionnels peuvent obtenir communication par voie électronique des données relatives aux propriétés inscrites en nature de bois et forêts situées dans le périmètre géographique pour lequel ils sont reconnus

Décret n° 2016-58 du 28 janvier 2016 pris pour application de l'article 94 de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du mardi 20 décembre 2016, la Commission des affaires économiques a examiné le rapport d’information de MM. Antoine Herth et Germinal Peiro sur la mise en application de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.

Mme la présidente Frédérique Massat. Nos collègues Germinal Peiro et Antoine Herth nous présentent ce matin leur rapport sur la mise en application de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt du 13 octobre 2014. Outre le grand nombre d’auditions qu’il a nécessité, ce rapport a représenté un travail considérable, à l’image de ce grand texte sur l’agriculture qu’est la loi de 2014, qui comporte 96 articles et a donné lieu à de nombreux décrets d’application. Hier encore, a été publié un décret relatif à la mise en transparence des résultats des contrôles de l’État dans le domaine de la sécurité sanitaire des aliments ; il renforce l’information des consommateurs et permettra la publication sur internet, voire dans les établissements concernés, des résultats des contrôles en matière de sécurité sanitaire réalisés à compter du 1er mars 2017.

Nous avions adopté, dans le cadre de la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite « Sapin II », d’autres mesures, mais certaines ont été annulées comme cavaliers législatifs par le Conseil constitutionnel. Ces dispositions, auxquelles avaient travaillé l’ensemble des députés de notre commission, vont être reprises dans la proposition de loi relative à la lutte contre l’accaparement des terres et au développement du biocontrôle, dont M. Dominique Potier vient d’être nommé rapporteur, et qui sera examinée à la rentrée.

La législature qui va s’achever dans quelques semaines a été en grande partie consacrée aux dossiers agricoles. Il serait intéressant, après que notre commission aura autorisé la publication du présent rapport, que nous ayons aussi le point de vue du ministre sur l’application de la loi.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Mon collègue et ami Antoine Herth et moi-même avons le plaisir de vous présenter, deux ans après la promulgation de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt du 13 octobre 2014, le rapport d’information sur sa mise en application.

Deux ans après la promulgation d’une loi, on attend du Gouvernement que l’ensemble des décrets nécessaires à son application aient été publiés, dans le respect de l’intention du législateur. Nous nous souvenons tous du parcours de ce projet de loi : déposé en 2013 et initialement composé de 39 articles, il est ressorti de la discussion fort de 96 articles, après qu’aient été adoptés 1 769 amendements en première lecture et 1 340 en deuxième lecture, et cela pour la seule Assemblée nationale. Ces 96 articles nécessitaient 103 mesures réglementaires d’application, dont 72 décrets simples et 31 décrets en Conseil d’État, dont la procédure d’adoption est plus longue. À ce jour, 62 décrets ont été publiés, mettant en œuvre 70 mesures réglementaires prévues par la loi et 26 mesures réglementaires d’application non explicitement prévues par cette même loi. La plupart de ces décrets ont été publiés dans l’année suivant la promulgation de la loi, certains l’étant le jour même de cette promulgation.

Les textes d’application de la loi ont été publiés à hauteur de près de 75 %, étant précisé qu’à l’exception notable de l’important décret sur le registre des actifs agricoles, l’essentiel des décrets relevant du ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la pêche a été publié. Plusieurs de ceux relevant du ministère des affaires sociales et de la santé manquent à l’appel.

Le rapport est organisé en sept parties, correspondant aux sept titres de la loi. Les trente et une auditions menées de juillet à novembre nous ont permis de cibler notre analyse sur trente-trois thématiques.

En ce qui concerne le titre Ier, relatif à la performance économique et environnementale des filières agricoles et agroalimentaires, sept thématiques sont explorées : les groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE), les groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC), les coopératives, les interprofessions, les relations commerciales, les espaces d’information périodique gratuite pour les interprofessions et les garanties de l’origine et de la qualité.

Ce titre est la traduction législative du fil conducteur de l’esprit de l’ensemble de la loi : la double performance économique et environnementale de la filière agricole et agroalimentaire. Cela passe par le développement des formes collectives d’agriculture, par l’attention à la qualité des productions et aux territoires auxquels elles se rattachent.

La loi prévoit l’adaptation des interprofessions et des rapports entre chacun des maillons de la filière en vue d’améliorer les relations commerciales et la répartition de la valeur ajoutée.

Nous vous renvoyons au rapport pour le détail des décrets publiés mais, pour ce titre, quatre décrets manquent. Le cabinet du ministre a donné le détail de l’avancement de ces mesures réglementaires. Pour trois d’entre elles, le processus est bien avancé. Pour la quatrième, concernant les campagnes d’information périodique gratuite à la radio et télévision publiques pour les interprofessions des produits frais, le Gouvernement a déclaré qu’il y était opposé, et n’a pas prévu de publier ce décret.

Nombre de mesures s’appliquent efficacement, en particulier lorsque les décrets ont été publiés rapidement.

Les GIEE sont un succès : on en compte 311, engageant plus de 4 000 agriculteurs sur une surface agricole utile de plus de 300 000 hectares. Le cadre de leur création est relativement souple et les thématiques retenues très larges. Un effort peut néanmoins être poursuivi sur la communication qui les accompagne et la fréquence des appels à projets régionaux.

Le cadre juridique des GAEC a été sécurisé et ils bénéficient désormais du principe de transparence économique, qui permet à leurs membres de conserver les droits auxquels ils auraient pu prétendre s’ils étaient restés exploitants individuels. On en dénombre 45 000, contre 36 000 lors du dépôt du projet de loi. Il s’agit d’une formule très pertinente qui permet de répondre aux contraintes liées au nombre important de petites exploitations, même s’il est indéniable que la hausse du nombre de GAEC est aussi le résultat de la transformation d’entreprises agricoles à responsabilité limitée (EARL), dont la formule juridique est devenue moins intéressante.

Les coopératives agricoles ont fait l’objet d’un grand nombre de critiques relatives au manque de transparence de leur fonctionnement et, de ce fait, à l’éloignement des associés coopérateurs des organes dirigeants de leur coopérative. Même si les conditions de rémunération des associés suscitent encore des critiques, la transparence s’est accrue. Le conseil d’administration et le directoire transmettent davantage d’informations et l’application des principes coopératifs – valeurs initiales des coopératives – est mieux contrôlée par le Haut Conseil de la coopération agricole et par la nomination d’un médiateur de la coopération agricole, encore peu sollicité toutefois.

Les interprofessions se sont mises en conformité avec le droit européen. Elles ont efficacement amélioré la représentativité de leurs structures, en particulier le pluralisme syndical. Même si quelques recours sont en cours, émanant souvent de la Coordination rurale et de la Confédération paysanne, l’extension obligatoire à l’ensemble d’un secteur des accords professionnels passés au sein de l’interprofession améliore l’ensemble d’une filière.

Plusieurs mesures se sont révélées constituer des progrès encore insuffisants : il en est ainsi des relations commerciales entre des producteurs atomisés face à la concentration de la grande distribution et la force de négociation des industriels de l’agroalimentaire. La contractualisation et les regroupements de producteurs se mettent en place, mais difficilement. Le médiateur des relations commerciales considère que les contrats ne remédient pas aux déséquilibres, en particulier lorsqu’ils sont très longs. Nombre de professionnels appellent de leurs vœux une plus grande souplesse dans la contractualisation. Le problème vient en fait aussi de la faible organisation des producteurs : souhaitée par tous, elle peine cependant à décoller dans certains secteurs. Le processus d’encouragement au regroupement doit se poursuivre et, d’ailleurs, la loi Sapin II, promulguée le 9 décembre dernier, devrait améliorer les relations contractuelles.

En ce qui concerne le titre II, relatif à la protection des espaces naturels, agricoles et forestiers et au renouvellement des générations, l’intention du législateur était non seulement de protéger les espaces agricoles, mais aussi d’étendre la protection aux espaces naturels et forestiers, tout autant menacés par l’artificialisation des terres. Le foncier agricole est mieux géré et protégé par la création d’une nouvelle obligation de compensation des réductions de surfaces agricoles et des externalités économiques qui leur sont liées. Le décret sur cet article n’a été pris que le 31 août de cette année. Il est vraiment trop tôt pour en évaluer les effets, mais on peut d’ores et déjà relever que le nombre de projets concernés sera réduit, puisque trois critères cumulatifs sont requis : les projets doivent être soumis à l’étude d’impact environnementale, ils doivent être situés dans une zone strictement définie et le projet, sous réserve d’une décision du préfet, doit représenter une surface supérieure à cinq hectares. En outre, la portée de l’évaluation est incertaine, en particulier sur la teneur des mesures compensatoires à prendre et leur contrôle.

L’Observatoire des espaces naturels, agricoles et forestiers (OENAF, anciennement ONCEA) renforce les mesures permettant de limiter la consommation des espaces non urbains face à la pression urbanistique. Au niveau local, les commissions départementales des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF, anciennement CDCEA) sont compétentes sur une plus grande partie du territoire et associent de très nombreux acteurs des territoires, notamment les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) et l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO), qui ne se privent pas de participer à ces commissions. Manque néanmoins l’important décret relatif aux notions de réduction substantielle des surfaces affectées à des productions bénéficiant d’une appellation d’origine protégée (AOP) et d’atteinte substantielle aux conditions de leur production.

Le renouvellement des générations d’agriculteurs est au cœur de la loi : la transmission et l’installation sont favorisées. Ces objectifs guident l’action renforcée des pouvoirs des SAFER et le contrôle des structures. Le droit de préemption des SAFER est étendu et le nouveau schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) devient l’alpha et l’oméga des orientations agricoles régionales, en particulier pour la détermination des seuils au-delà desquels une autorisation d’exploiter est requise. Le décret sur les SDREA a été tardivement publié, notamment du fait de la réforme territoriale concomitante. Cependant, seuls deux schémas manquent à l’appel à ce jour.

Il est à noter que les mesures prévues dans la loi d’avenir ont rapidement révélé des faiblesses par la facilité de leur contournement, comme on l’a vu avec des investissements chinois dans l’Indre. La loi Sapin II en tirait les conséquences en prévoyant d’empêcher les montages sociétaires purement spéculatifs – un coup d’épée dans l’eau, puisque le Conseil constitutionnel a censuré ces articles considérés comme des cavaliers législatifs. Cependant, tout n’est pas perdu, puisque le rapporteur Dominique Potier présentera prochainement une proposition de loi reprenant ces dispositifs.

Par ailleurs, les aides à l’installation et à la transmission sont appuyées par des contrats de génération et un parcours d’installation dynamisé, le tout avec l’appui des chambres d’agriculture. La principale source de préoccupation des personnes auditionnées concerne le registre des actifs agricoles qui est au point mort, faute de décret. Il doit permettre de mieux cibler les aides aux agriculteurs en les réservant aux agriculteurs actifs, mais la consultation des professionnels menée par le ministère révèle des divergences d’attentes, et surtout une grande méfiance sur les conséquences économiques et sociales du registre.

M. Antoine Herth, rapporteur. La troisième partie du rapport concerne la politique de l’alimentation et la performance sanitaire ; treize décrets ont été publiés et quatre sont en attente.

Les programmes alimentaires territoriaux (PAT) revêtent une dimension économique, environnementale et sociale, car il s’agit de projets collectifs regroupant tous les acteurs d’un territoire. Une soixantaine de PAT en cours ont été recensés. L’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA) a contribué à ce que ces initiatives soient réunies autour d’un projet national commun, en mettant en réseau tous les acteurs concernés. Le ministère de l’agriculture espère en compter 500 en 2020, avec une première vague de labellisation au 1er semestre 2017. Des défis restent à relever, dont le financement de l’animation, la participation des acteurs agro-alimentaires et de la distribution, et la question du « juste prix » de l’alimentation.

La lutte contre l’antibiorésistance est controversée. L’objectif chiffré défini à l’article 49 de la loi d’avenir est la réduction de 25 % de l’usage des antibiotiques en médecine vétérinaire en cinq ans. Les vétérinaires ont eu l’impression d’être stigmatisés, alors qu’ils s’étaient déjà investis dans cette diminution : selon l’Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV), la vente d’antibiotiques a diminué de 28 % depuis 2011. Pour Coop de France, cette mesure a également paru constituer une attaque contre les programmes sanitaires d’élevage (PSE). La Fédération des syndicats vétérinaires de France (FSVF) a déploré la perte par la profession de 60 millions d’euros et demandé que tout nouvel effort soit financé par l’État, comme c’est le cas pour les autres professions de santé.

Le décret du 10 juin 2015 relatif à la publicité des médicaments vétérinaires risque de limiter l’usage des vaccins, alors qu’ils permettent de réduire les antibiotiques. Je précise que le Gouvernement est intervenu auprès des instances européennes afin qu’il en soit tenu compte dans la rédaction du futur règlement.

Quant au développement des alternatives aux antibiotiques, il passe évidemment par le renforcement de la recherche. À plus court terme, plusieurs propositions nous ont été faites, parmi lesquelles le développement de la vaccination et des pratiques homéopathiques, une aide pour moderniser les bâtiments d’élevage, ainsi que le développement de la concertation entre les filières par des groupes de travail réunissant les différentes familles professionnelles.

Enfin, nos interlocuteurs ont insisté sur la nécessité d’arrêter toute sur-transposition française de la réglementation européenne, qui entraîne des distorsions de concurrence.

La maîtrise des produits phytosanitaires est prévue par l’article 53 de la loi d’avenir, qui interdit l’utilisation de pesticides dans les lieux fréquentés par des publics sensibles, et subordonne, dans d’autres lieux, l’usage de ces produits à des mesures de protection et des distances d’épandage. Mais c’est surtout un arrêté en préparation qui suscite l’inquiétude : pour la première fois, il est envisagé de réglementer autour des habitations et des jardins des particuliers. La FNSEA a appelé ses adhérents à se mobiliser contre « l’arrêté phyto », dont les dispositions priveraient les exploitants de 4 millions d’hectares de terres, soit 7 milliards d’euros de chiffre d’affaires par an. Coop de France et la Coordination rurale ont fait part des mêmes craintes. Quant à l’APCA, elle considère que l’arrêté va trop loin en oubliant les dimensions économiques du problème.

Les certificats d’économie de produits phytosanitaires (CEPP) ont été institués par ordonnance. Pour Coop de France, ces textes permettent de diffuser les bonnes pratiques, mais c’est aussi « la chronique d’une pénalité annoncée », car les agriculteurs doivent s’adapter à des dispositions très ambitieuses, entraînant de nouvelles charges administratives. Quant à la FNSEA, elle a demandé que la redevance pour pollution diffuse soit versée aux agriculteurs. Sur la performance sanitaire en général, le Mouvement de défense des exploitants familiaux (MODEF) constate une situation aberrante : alors que la réglementation française est une des plus contraignantes – ce qui est positif –, la société française ne tient pas compte de ce qui se passe au-delà de ses frontières et il s’ensuit des distorsions importantes. Un premier progrès consisterait à mettre en place une vraie transparence.

Dans le cadre du transfert des autorisations de mise sur le marché (AMM) à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), le décret du 20 septembre 2015 a mis en place un comité de suivi. Les industriels déposent auprès de l’ANSES une demande d’autorisation de mise sur le marché comportant tous les éléments scientifiques nécessaires à l’évaluation des risques liés à l’usage des produits. Le comité de suivi examine si les produits sont composés de substances autorisées au niveau européen, s’ils sont efficaces et n’exercent aucun effet inacceptable sur la santé ; il contrôle également si la décision est applicable, cohérente avec d’autres décisions et si elle permet d’atteindre les objectifs voulus. Au sein de ce comité, les mesures examinées sont confrontées à la réalité pratique. Cette démarche fait également intervenir les équipes multidisciplinaires d’évaluateurs scientifiques de l’Agence, ainsi que deux comités d’experts spécialisés. Les évaluations réalisées conduisent à un avis défavorable dans un quart des cas. Les avis favorables sont très majoritairement assortis de restrictions d’usage par rapport à la demande initiale du pétitionnaire. Les avis rendus par l’Agence sont publics.

Depuis 2011, L’Union européenne est découpée en trois zones géographiques, la France étant rattachée à la zone sud. L’évaluation réalisée par l’État membre sollicité s’applique aux autres pays de la zone, sauf en cas de particularités locales. Les demandeurs d’AMM ont le choix du pays dit « de référence », qui pilote l’évaluation. L’intervention en tant qu’État membre de référence est l’un des piliers donnant à la France un positionnement incontournable en Europe. Mais après le Brexit, il est probable qu’une partie des dossiers traités par le Royaume-Uni lui revienne. Or, l’ANSES est déjà très en retard dans le traitement des dossiers, qui prend actuellement deux ans. Chaque année, elle examine près de 2 000 dossiers, dont plus de 300 relatifs à une demande d’AMM. La FNSEA déplore que l’ANSES reprenne toutes les recommandations européennes, mais avec une position maximaliste, ce qui introduit une distorsion de concurrence.

L’ANSES est, par ailleurs, confrontée à un problème de moyens. Alors que des missions nouvelles lui ont été transférées, elle dispose de moyens en diminution. L’Agence a bénéficié de quinze postes à titre exceptionnel pour résorber le stock de dossiers, alors que le plafond des équivalents temps plein (ETP) a été réduit de sept postes. Le budget de 138 millions d’euros est assis sur des subventions pour charges de service public, sur des revenus externes prévus par des conventions et sur des redevances et taxes perçues pour l’instruction des dossiers de produits réglementés et affectées à l’ANSES. Ces taxes sont plafonnées par la loi de finances pour 2017. Or elles devraient permettre à l’Agence d’ajuster les moyens qui lui sont nécessaires. Les recettes sont impossibles à transformer en emplois, car un tel mécanisme n’est pas prévu pour les établissements publics administratifs, ce qui la pénalise fortement dans un contexte de forte concurrence européenne. Il est donc indispensable de lever la pression sur le plafond d’emploi et le plafond de masse salariale. Le respect des délais conditionne en partie l’attractivité de la France pour les entreprises concernées. Les droits versés par les industriels devraient correspondre au coût complet du travail effectué.

Afin d’assurer la plus grande transparence possible, il est mis à la disposition du public, sur le site internet de l’Agence, tous les documents relatifs aux modalités d’instruction des demandes, ainsi que les décisions d’autorisation de mise sur le marché.

La loi porte également sur la surveillance sanitaire : si la reconnaissance du rôle des fédérations départementales des chasseurs en la matière paraît légitime à la Fédération nationale des chasseurs (FNC), cette dernière s’insurge contre certaines dispositions de l’article 41, trop coûteuses – notamment les mesures de surveillance, de prévention ou de lutte prescrites par l’autorité administrative. En outre, elle estime « extrêmement pénalisante » l’ordonnance n° 2015-1243 du 7 octobre 2015, prise en application de l’article 55 de la loi et relative aux animaux de compagnie, qui oblige les chasseurs à s’immatriculer en tant qu’éleveurs.

L’article 44 renforce l’arsenal de protection des éleveurs contre les attaques de loups. Mais des difficultés demeurent, et le nombre d’attaques augmente : une trentaine de départements sont touchés, malgré les mesures massives prises par les éleveurs. En outre, celles-ci sont contraignantes, coûteuses et d’une efficacité relative. Même si l’arrêté du 27 mai 2009 précise que le loup n’est plus une espèce protégée menacée d’extinction en France, il reste toujours soumis au principe de protection stricte. Les organisations professionnelles réclament le paiement en temps et en heure des mesures à prendre pour la protection des troupeaux, sans conditionnalité des indemnisations versées en cas d’attaque, et le relèvement du plafond du nombre de loups dont la destruction est autorisée. Nous estimons qu’il faudrait s’inspirer de pays qui, comme l’Espagne, font varier leur réglementation selon les régions.

M. Germinal Peiro, rapporteur. La quatrième partie du rapport est relative à l’enseignement. Il s’agit de répondre à la nécessaire transition agro-écologique avec l’appui d’un enseignement technique et supérieur dynamique, innovant et ouvert. L’impératif est désormais de produire autant, mais autrement. Il est donc apparu nécessaire de repenser les missions de l’enseignement agricole. Dans ce domaine, neuf décrets ont été publiés et deux sont en attente.

Pour l’application du projet agro-écologique, l’objectif est de ne pas proposer de solutions toutes faites, mais de mener une rénovation en profondeur. Le comité de l’innovation, récemment créé, a examiné les projets de référentiels du ministère. Les référentiels du BTS, du CAP et du bac pro ont été modifiés pour les adapter aux évolutions de l’agro-écologie.

Les nouvelles techniques – drones, robots, et autres – sont incluses dans la formation, notamment pour l’observation de l’exploitation. La mission Agriculture-Innovation 2025 travaille en particulier sur l’agriculture numérique et la collecte des données au niveau national, pour que la profession se les réapproprie. Pour utiles qu’ils soient, ces outils numériques ne remplacent toutefois pas le « tour de plaine » et ne doivent pas s’y substituer.

Les établissements doivent valoriser le rôle des exploitations qui leur sont attachées. Il faut que ce rôle soit en phase avec l’orientation agro-écologique de la loi. L’accent est mis également sur la formation des directeurs des lycées et des exploitants afin que les fondamentaux de l’agro-écologie progressent. Selon la direction de l’enseignement du ministère de l’agriculture, toutes les parties prenantes ont adhéré à l’agro-écologie.

La loi prévoit la possibilité d’acquisition progressive des diplômes, facteur de promotion sociale. Plusieurs diplômes de l’enseignement agricole étaient déjà accessibles par la voie de la formation continue, en unités capitalisables. La loi étend cette possibilité : le décret du 23 novembre 2015 relatif à l’acquisition progressive du CAP agricole, et le décret du 10 juin 2016 relatif à l’acquisition progressive du bac pro prévoient un étalement des épreuves sur cinq ans. Par ailleurs, un programme ambitieux a été mis en œuvre pour faciliter l’accès des élèves ayant un bac pro aux écoles d’ingénieurs. Il s’agit d’un système expérimental, pour lequel deux classes ont été constituées ; les élèves recrutés reçoivent une formation de BTS, ainsi qu’une formation spéciale, tout en bénéficiant d’un accompagnement avec des professeurs dédiés et d’heures de soutien. En cas d’échec, ils seront titulaires du BTS. Le programme commence à fonctionner, et les résultats en seront connus dans trois ans. Il s’agit donc d’un test, pour un système qui n’est pas simple et ne permettra pas de travailler sur une population nombreuse.

L’innovation pédagogique n’est pas oubliée. Il faut, en particulier, animer les réseaux. Il est institué un Comité national d’expertise de l’innovation pédagogique, chargé d’accompagner innovations pédagogiques et expérimentations. Le schéma stratégique propose, en particulier, la construction d’un système de mutualisation des innovations locales, la mobilisation de l’enseignement supérieur au service de l’enseignement technique, le développement de l’autonomie pédagogique et celui du numérique. Par ailleurs, l’innovation doit veiller à être en phase avec la production locale pour être crédible. Or certaines exploitations fonctionnent toujours sur le mode de la production intensive. Il faut donc faire progresser l’agriculture biologique.

Le médiateur de l’enseignement agricole a été institué par le décret du 21 avril 2015. Depuis le 1er septembre 2016, il a traité au total neuf demandes en provenance du personnel d’établissements d’enseignement agricole et treize saisines d’élèves ; onze recours ont été co-traités avec le Défenseur des droits.

La loi d’avenir a créé l’Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France (IAVFF), qui a pour mission la mise en œuvre de stratégies de recherche et de formation communes aux établissements aux niveaux national, européen et international. Agreenium et l’IAVFF sont le même établissement ; le second a absorbé le premier, qui existait avant la loi d’avenir pour l’agriculture, mais le nom d’Agreenium a été conservé pour capitaliser son début de notoriété internationale. Cet établissement compte actuellement dix-huit membres. Son objectif principal est la présence française sur la scène internationale. Parmi les projets initiés à l’international, il travaille avec le Sénégal, qui se propose de fonder une université francophone agricole de 30 000 étudiants et demande une expertise afin de construire des cursus. Agreenium a, en outre, constitué un début d’université numérique, qui permettra de massifier l’enseignement. Il a déjà engagé différents projets de Massive Open Online Courses (MOOC), ce qui représente un objectif d’une douzaine à l’échéance de la fin de 2017, avec un financement du deuxième programme d’investissements d’avenir. Il se constitue ainsi un campus à l’international.

Agreenium a commencé à avancer sur plusieurs chantiers, inscrits dans la loi d’avenir : il faut intégrer les équipes et les politiques des établissements ; mettre à plat le référentiel des formations vétérinaires ; coordonner l’offre de formation agricole ; articuler enseignement technique et supérieur. Il conviendra également d’identifier l’ensemble de l’offre – ce travail n’a jamais été réalisé, alors que les formations foisonnent.

Quant à l’enseignement privé, la loi affirme le parallélisme entre enseignement public et privé. Nos interlocuteurs ont souligné qu’ils s’étaient ralliés à la politique suivie sans état d’âme.

M. Antoine Herth, rapporteur. Dans son titre V, consacré à la forêt, la loi vise à répondre aux besoins d’évolution de la politique forestière et de développement de la filière bois. Elle reconnaît l’intérêt général pour la Nation de la protection et de la mise en valeur des bois et forêts. Onze décrets sont parus et trois sont en attente.

Une nouvelle gouvernance a été mise en œuvre. Le Conseil supérieur de la forêt et du bois (CSFB) a été rénové. Un projet de programme national de la forêt et du bois (PNFB) a été soumis à son avis, puis à celui du public et doit être définitivement approuvé par décret. La fédération des forestiers privés de France (FFPF) s’est félicitée que le programme national prévoie des actions concertées entre la forêt publique et la forêt privée. Dans chaque région, des programmes régionaux de la forêt et du bois (PRFB) déclineront le programme national. Les commissions régionales de la forêt et du bois (CRFB) ont intégré des représentants de l’aval de la filière. De plus, un comité composé paritairement de chasseurs et de forestiers a été rattaché aux commissions. L’APCA nous a fait quelques critiques constructives : elle estime, en particulier, que la multifonctionnalité de la forêt a été négligée ; la proposition contenue dans le PNFB, très axée sur l’accompagnement des filières longues, pourrait mieux prendre en compte les filières territorialisées ; les filières courtes sont absentes de ce plan.

Le fonds stratégique de la forêt et du bois (FSFB) regroupe l’ensemble des ressources financières afin de donner une visibilité et une cohérence aux interventions financières de l’État. Le décret a été publié le 30 juin 2015. Ses ressources sont les dotations budgétaires du programme 149, les compensations financières de défrichement, les contributions des chambres départementales d’agriculture provenant de la taxe additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés non bâties.

La loi a généralisé les compensations aux défrichements. Le bilan en apparaît mitigé. Le ministère déplore que des décisions aient pu être prises en fonction du bénéficiaire, alors que le but est de protéger la forêt, et non le bénéficiaire. Les agriculteurs font part de leur réticence et le syndicat Jeunes agriculteurs, en particulier, s’élève avec vigueur contre ce principe de compensation.

Le fonds a fait l’objet de plusieurs remarques pendant les auditions. Il faudrait notamment créer un compte d’affectation spéciale afin que les ressources soient pérennes. À cet effet, il est souhaité qu’un euro par tonne de CO2 au titre de la taxe carbone soit affecté à la forêt. Il est nécessaire de garder également des financements pour l’animation, car le public a tendance à ne concevoir qu’une forêt sacralisée. L’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA) s’insurge sur le traitement des centimes forestiers dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017, et un groupe de travail vient d’être créé à ce sujet.

Dans les régions, l’équilibre sylvo-cynégétique est en cours de débat. Il est difficile de parvenir à un vrai dialogue entre forestiers et chasseurs. La FFPF a déploré que la Fédération nationale des chasseurs ait voté contre le décret relatif à la concertation sur la prévention des dégâts sylvicoles de grand gibier – ce décret est actuellement à la signature du ministre. La Fédération nationale de chasseurs estime, quant à elle, que l’équilibre sylvo-cynégétique défini par la loi va créer des problèmes avec les forestiers. Elle déplore le développement de la forêt au détriment de la chasse. Elle a souligné que la représentation des chasseurs en commission régionale de la forêt et du bois, fixée par décret, était déséquilibrée, que les fédérations départementales ou interdépartementales des chasseurs n’étaient pas expressément visées pour représenter les chasseurs au sein du comité paritaire de la commission régionale de la forêt et du bois. Elle craint l’instauration d’une « gestion cynégétique normative » consistant à fixer des objectifs chiffrés de densité de cervidés, par l’intermédiaire des documents de gestion des forêts. Quant au projet de décret relatif à la mise en place d’une concertation locale pour la prévention des dégâts sylvicoles de grand gibier, la Fédération le rejette en totalité. Elle fait, en outre, valoir que l’indemnisation des dégâts est très coûteuse.

M. Germinal Peiro, rapporteur. Force est de constater que la population des chasseurs vieillit et que, de ce fait, les plans de chasse ne sont pas appliqués. À moyen terme, les chasseurs ne pourront plus payer les dégâts. Vos rapporteurs estiment que valoriser économiquement les produits de la chasse pourrait intéresser les chasseurs, alors que 90 % des produits de la venaison sont importés.

S’agissant de la mobilisation du foncier et de l’utilisation des sols, l’article 78, qui prévoyait le recouvrement triennal de la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB) pour les propriétés en nature de bois et forêts pour lesquelles le montant d’imposition est inférieur à 12 euros, afin d’inciter les propriétaires à gérer ou à mettre en vente les parcelles, a été supprimé par la loi de finances rectificative, car jugé difficilement applicable. La FFPF prône une simplification et le déplafonnement du dispositif d’encouragement fiscal à l’investissement en forêt (DEFI), qui permet une réduction de l’impôt sur le revenu. La procédure des biens vacants et sans maître, applicable aux propriétés en nature de bois et forêts pour lesquelles la TFNB n’est pas réglée pendant trois ans, est actuellement lancée.

La loi modifie les règles relatives au droit de préférence et au droit de préemption de l’État et de la commune, afin de remédier au morcellement de la forêt. Selon la fédération nationale des communes forestières, le droit de préemption de la commune devrait s’appliquer à la forêt sectionale, propriété collective gérée par l’Office national des forêts (ONF). La FFPF a, pour sa part, estimé que si une parcelle était à vendre, le propriétaire voisin devrait avoir la priorité afin de restructurer le foncier.

Le département doit élaborer chaque année un schéma d’accès à la ressource forestière et, en parallèle, inclure un itinéraire de desserte des ressources forestières. Le Centre national de la propriété forestière (CNPF) a déploré que ces dispositions soient restées lettre morte.

Le groupement d’intérêt économique et environnemental forestier (GIEEF), institué par le décret du 24 juin 2015, vise à dynamiser la gestion durable des forêts privées. Le décret du 2 juin 2016 porte sur la reconnaissance par l’État de la qualité de GIEEF. Actuellement, un GIEEF a été validé dans le département de l’Ardèche et deux autres sont en cours. Le GIEEF est un outil complémentaire intéressant. Toutefois, d’autres dispositifs fonctionnent, telles les organisations de producteurs, qui approvisionnent régulièrement, sans à-coups, l’industrie française du bois à travers les contrats d’approvisionnement. Il paraît donc nécessaire, selon l’Union de la coopération forestière française (UCFF), d’inciter fiscalement les propriétaires à les rejoindre.

Pour ce qui est de l’outre-mer, tous les décrets et toutes les ordonnances prévus par les six articles du titre VI de la loi d’avenir ont été publiés. La déclinaison de la loi d’avenir s’y fait via les comités d’orientation stratégique et de développement agricole. Ces derniers n’ont pas tous été installés, en partie du fait des élections régionales de décembre 2015, qui ont retardé la procédure.

L’autorité administrative compétente de l’État en matière de reconnaissance et de retrait de la qualité de GIEEF a été désignée par le décret du 24 juin 2015. Les missions confiées aux commissions départementales de la consommation des espaces agricoles ont été élargies aux espaces naturels et forestiers par le décret du 16 novembre 2015.

L’inventaire permanent des ressources forestières nationales doit prendre en compte les particularités des bois et forêts situés outre-mer afin de définir une solution pérenne pour le rapport quinquennal auprès des instances internationales et de répondre aux grands enjeux des politiques publiques actuelles. Une étude est menée par l’Institut national de l’information géographique et forestière, dont les résultats sont attendus pour janvier 2017.

Mme Karine Daniel. Nous devons être fiers collectivement de l’adoption de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, par laquelle nous avons pris acte des évolutions à porter pour la pérennité de notre modèle agricole dans un monde en constante mutation.

À travers cette loi, nous avons affirmé le concept d’agro-écologie, qui remet la nature et les hommes au cœur de la performance économique dans le domaine agricole. L’agro-écologie est l’aménagement du modèle français au XXIsiècle, à travers la prise en compte d’une triple performance : économique, écologique et sociale. Rappelons que ce concept a été porté par M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture à la longévité inégalée, dont je ne saurais oublier de saluer l’action. Sans nier les difficultés qu’ont connues, ces dernières années, nos agriculteurs, et surtout nos éleveurs, reconnaissons que le Gouvernement a œuvré pour leur permettre de passer au mieux les crises. Si les choses peuvent toujours être améliorées, l’essentiel est que notre agriculture demeure reconnue pour sa qualité et sa capacité à être consommée dans le monde entier.

Permettez-moi de rappeler quelques-uns des éléments qui font de cette loi, avec ses 96 articles couvrant largement les secteurs agroalimentaires et sylvicoles, un véritable enjeu d’avenir, un vecteur de progression pour nos agriculteurs. Je soulignerai, d’abord, les groupements d’intérêt économique et environnemental, par lesquels les agriculteurs qui veulent avancer ensemble peuvent mutualiser les risques des modifications qu’ils mettent en œuvre dans leurs pratiques. Tout aussi intéressant est le développement des groupements agricoles d’exploitation en commun, qui permettent à des agriculteurs d’exploiter ensemble et de réduire l’exposition de chacun aux aléas économiques, tout en maintenant leur indépendance. C’est une forme d’entreprise d’avenir, encouragée par les accompagnements fiscaux qui ont pu être développés avec l’élargissement de la transparence, c’est-à-dire la possibilité de faire bénéficier les GAEC des dispositifs fiscaux en fonction de leur nombre réel d’adhérents.

Ces deux dispositifs me semblent caractéristiques de cette loi en visant la performance sociale et économique. Quant à la performance écologique, l’effort porte sur la limitation de l’épandage des pesticides, le renforcement des pouvoirs de l’ANSES ou la mise en avant des produits sous signes de qualité ou d’origine.

J’aimerais aussi souligner le travail mené sur le volet de l’enseignement agricole. L’agro-écologie et les nouvelles pratiques agricoles ne se feront pas sur le terrain sans une véritable implication des personnels et des établissements de l’enseignement agricole, publics et privés. Cet investissement, nous devons le faire aujourd’hui pour qu’il soit opérationnel demain.

Si nous ne devons jamais cesser d’être attentifs à la situation de nos agriculteurs et de nos agricultrices qui vivent une crise majeure, nous pouvons nous satisfaire de l’adoption de cette loi-cadre, qui a déjà marqué l’inscription durable de l’agriculture de notre pays dans une voie de développement efficace économiquement, socialement et écologiquement, et respectueuse des producteurs et des consommateurs.

M. Philippe Le Ray. Sans reprendre les chiffres cités dans le rapport, je salue la volonté du ministre de l’agriculture de faire appliquer rapidement les mesures de cette loi. Aujourd’hui, il s’agit d’un premier bilan ; il faudra attendre encore quelques années pour en voir vraiment les effets.

Nous n’avons pas voté ce texte, à l’époque, car nous considérions qu’un certain nombre de sujets n’avaient pas été abordés, comme l’abattage. Comment peut-on parler de circuits courts, de GIEE, d’économie circulaire, si l’on néglige le maillon de l’abattage ?

Le volet d’une modernisation de grande ampleur a été également oublié dans cette loi. Certes, il y a eu un plan de soutien de 100 millions d’euros, mais 100 millions divisés par 100 départements, cela fait 1 million par département, c’est-à-dire que cela n’a aucun effet. Or l’agriculture des grandes exploitations représente 80 % de notre paysage agricole.

Quant au volet fiscal, il est resté bloqué en rase campagne. Il n’est absolument pas adapté à la réalité économique d’aujourd’hui. On ne peut pas, d’un côté, déréguler les marchés et, de l’autre, conserver une fiscalité qui tient plus du colmatage que d’un réel pouvoir fiscal.

L’autre grand oublié de ce texte, qui est peut-être la première cause de suicide dans le monde agricole, c’est la protection du patrimoine privé. Quand les agriculteurs arrivent « dans le rouge », malheureusement, le poids de la dette, des agios, la pression révèlent, au-delà de l’absence de perspectives, toutes les limites de cette loi d’avenir.

En ce qui concerne les GIEE, le rapport est clair. Le ministre les avait présentés comme la pierre angulaire de cette loi. Aujourd’hui, on compte 311 GIEE. Personnellement, je n’en connais pas, ni personne autour de moi. Je pense que le GIEE n’est pas une mauvaise solution, mais j’aimerais avoir l’avis des rapporteurs sur la mise en œuvre du dispositif.

Concernant l’agro-écologie, dans le même esprit, comment sortir du conceptuel pour passer dans le monde réel ? Je sais que les universitaires sont attachés à cette approche, mais, entre la théorie et la pratique, il y a un écart.

Quant aux relations commerciales, aujourd’hui, rien n’est réglé. Les dernières négociations, en février et lors de la crise du lait cet été, ont montré l’ampleur des tensions qui existent entre les professionnels. Le vrai défi, c’est équilibrer les relations entre tous les acteurs de la chaîne. Dans la loi Sapin II, des dispositions ont été retenues, que notre groupe avait déjà présentées dans le cadre de la proposition de loi en faveur de la compétitivité de l’agriculture et de la filière agroalimentaire. Il s’agissait de mettre en place des indicateurs de prix et une conférence annuelle sur les prix au sein même des filières. D’autres mesures sont très opérationnelles puisqu’elles visent à sanctionner la grande distribution en cas d’abus.

À la lecture du rapport, on constate que la contractualisation est un outil qui mérite d’être amélioré. C’est un vrai sujet qui devrait tous nous réunir dans les années à venir.

Je tiens à dire également, au nom du groupe Les Républicains, que le Gouvernement a voulu rendre la loi de modernisation de l’économie (LME) du 4 août 2008 responsable de la crise agricole. Il aurait pourtant eu la possibilité de la modifier dans le cadre de la loi relative à la consommation dite « loi Hamon », de la loi d’avenir pour l’agriculture ou de la loi dite « Macron ». S’il ne l’a pas fait, c’est qu’elle n’était pas si mauvaise. Sans doute, faut-il simplement la faire évoluer.

Je salue le maintien, voire le renforcement des GAEC.

Les autorisations de mise sur le marché ayant été transférées à l’ANSES, je voudrais savoir pourquoi les moyens n’ont pas suivi pour mener à bien cette nouvelle mission.

Nous sommes tous d’accord que l’agriculture est un fleuron de notre pays. Mais la réalité, aujourd’hui, c’est un tiers des agriculteurs qui touche moins de 350 euros par mois, 3 % d’agriculteurs en moins chaque année, une baisse de 12 % des prix du lait par rapport à la moyenne des quatre dernières années, une baisse de 10 % des prix de la viande, et un taux de suicide record en 2016.

M. André Chassaigne. Je tiens à souligner le travail colossal que représente ce rapport. Il est vrai que la loi d’avenir comportait de nombreux articles. Une bonne trentaine d’auditions d’organisations syndicales et professionnelles, et d’institutions en illustrent, par des témoignages précis, la mise en œuvre.

Le rapport montre que nous avions peut-être sous-estimé l’intérêt de cette loi qui balaie des champs extrêmement larges, même si elle ne règle pas la question fondamentale des prix payés à la production. Certes, ce n’était pas sa vocation, mais elle comporte néanmoins des « accompagnements connexes » pour essayer d’améliorer les revenus des agriculteurs.

Les groupements d’intérêt économique et environnemental constituent l’un des points forts du texte. On en compte 311, qui concernent 4 000 agriculteurs. Vous avez dit qu’il y avait sans doute un problème de communication auprès des agriculteurs. Même si nous ne sommes qu’au début du processus, je pense qu’il serait intéressant d’évaluer la portée des GIEE qui ont été mis en œuvre

De la même façon, le rapport ne précise pas le nombre de GIEE forestiers ni sur quoi ils portent. Sans doute est-ce trop récent – le décret a été publié le 24 juin 2015.

En matière de protection des espaces naturels agricoles et forestiers, le rapport rend compte des vrais problèmes que le défrichement pose sur les territoires, dont on ne tient pas suffisamment compte des spécificités. Certaines communes ont été considérablement boisées du fait de l’exode rural, souvent avec des épicéas qui ne sont pas forcément des plantations de grande qualité. Or, il est quasiment impossible, ou alors cela coûte très cher, de récupérer des terres pour l’exploitation agricole. Le problème n’est pas réglé par la mise en application de la loi, qui n’est pas adaptée. Elle crée des conflits inutiles, et les jeunes agriculteurs qui ont besoin de terres sur un territoire n’en trouvent pas, alors que certaines communes proches sont sur-boisées.

Enfin, il serait intéressant d’avoir un tableau des rapports qui, bien que prévus par la loi – comme c’est le cas dans toutes les lois – n’ont pas été remis. Je m’inquiète, en particulier, du rapport, qui devait être rendu dans les six mois aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat, sur les retraites des salariés agricoles de la Guadeloupe, de la Martinique et de La Réunion. Mes collègues d’outre-mer l’ont réclamé à plusieurs reprises, en vain, alors qu’il y a un véritable problème pour les retraites agricoles dans les départements et territoires d’outre-mer.

M. Thierry Benoit. Je fais partie de ceux qui, au nom du groupe Union des démocrates et indépendants, ont soutenu et voté cette loi. L’orientation donnée à ce texte, qui s’inscrivait dans le prolongement de l’agriculture « écologiquement intensive » pratiquée par les agriculteurs dans nos régions, me paraissait positive, en particulier sur deux points : l’agro-écologie et la lutte contre l’antibiorésistance. De mon point de vue, la moindre utilisation de médicaments vétérinaires présente un réel intérêt.

Les groupements d’intérêt économique et environnemental viennent compléter ce qui existait déjà en termes de structuration du monde agricole. On compte un peu plus de 300 GIEE, organisés autour de diverses thématiques, comme les systèmes autonomes économes en intrants, la conservation des sols et couverts végétaux, l’autonomie alimentaire, l’autonomie en azote et le développement des légumineuses, la diversification des assolements et l’allongement des rotations. Deux ans après le vote de la loi, les GIEE ont-ils vraiment enclenché une dynamique territoriale agricole ?

Le cœur des difficultés que rencontrent aujourd’hui nos agriculteurs, que le ministre de l’agriculture lui-même n’a pas manqué de pointer depuis 2012, sont les relations commerciales. Le rapport indique, à la page 33 : « Il semble que la loi d’avenir ne soit pas allée suffisamment loin dans le renforcement des pouvoirs des producteurs dans les relations commerciales avec l’aval de la filière ». Le déséquilibre que l’on continue de pointer dans les discussions entre l’amont et l’aval, c’est-à-dire entre les producteurs et les distributeurs, renvoie donc à la question des organisations de producteurs et des associations d’organisations de producteurs. Depuis l’après-guerre, nos amis agriculteurs ont perdu en souveraineté. Les organisations de producteurs, résultant de la désignation démocratique de représentants pour discuter et négocier les relations commerciales, permettraient de leur redonner de cette souveraineté.

Le rapport indique que le médiateur des relations commerciales agricoles appelle de ses vœux des organisations de producteurs plus grandes pour véritablement peser dans les relations commerciales. Prenant l’exemple de Lactalis, il a montré la difficulté qu’avaient à faire face à une entreprise unique 17 000 producteurs de lait représentés par treize organisations de producteurs se concurrençant entre elles. C’était la réalité en 2012, ça l’était aussi en 2014 lorsque nous avons voté la loi, et je crains que cela ne soit encore le cas aujourd’hui.

La loi telle que nous l’avons votée a-t-elle permis une réelle répartition de la valeur ajoutée au profit de l’amont, c’est-à-dire des agriculteurs ? C’est là, avec le revenu agricole, la vraie question qui reste posée pour l’agriculture française. Depuis cinquante ans, les agriculteurs répondent à toutes les attentes de la France et de l’Europe, tant en matière de sécurité sanitaire, alimentaire et environnementale, que de qualité de la production. La loi d’avenir pour l’agriculture a-t-elle apporté les corrections qu’ils sont en droit d’attendre sur le partage de la valeur ajoutée qu’eux-mêmes créent ?

M. Hervé Pellois. Parmi les préconisations que les membres du Conseil économique, social et environnemental (CESE) ont faites dans leur rapport sur la transition agro-écologique, ils recommandent que soient mentionnés dans le code rural et de la pêche maritime le rôle des sols et l’importance de leur préservation. Ils veulent aussi réorienter les priorités de la recherche sur l’agro-écologie en privilégiant l’indépendance de la recherche publique face à la concentration croissante des acteurs de l’agrochimie, avec les rachats importants de Monsanto par Bayer, et de Syngenta par ChemChina.

Le CESE suggère également d’adapter tous les dispositifs de formation à l’agro-écologie, notamment en plaçant les lycées agricoles et leurs exploitations au centre des partenariats noués avec les acteurs locaux de l’agriculture. Les groupes d’agrochimie ne seraient plus les seuls à fournir des études de cas sur lesquels se forment les lycéens ou les élèves en formation continue.

Enfin, il propose que les agriculteurs soient accompagnés et encouragés à produire de manière agro-écologique. Il faut organiser les outils et les soutiens de la politique agricole commune en fonction de ces objectifs agro-écologiques.

Pensez-vous que la loi d’avenir permet de répondre à cette proposition ?

M. Guillaume Chevrollier. Selon les souhaits du ministre chargé de l’agriculture, la loi d’avenir visait la performance économique et environnementale des exploitations, dans le respect d’une agriculture riche de sa diversité. Aujourd’hui, l’ensemble des filières agricoles sont en crise, et nous avions déjà pointé, lors de l’examen de la loi, l’absence de vision économique, s’agissant notamment du volet compétitivité.

La contractualisation, initiée par le précédent Gouvernement, restait à parfaire et à finaliser avec les organisations de producteurs. Qu’en est-il réellement sur le terrain ?

Quel retour d’expérience a-t-on aujourd’hui s’agissant des groupements d’intérêt économique et environnemental ?

L’agro-écologie est un concept intéressant, certes, mais reste un concept. Dans la réalité, qu’en est-il concrètement ? Quelles sont les relations entre l’agro-écologie et l’agriculture raisonnée ?

Sur le terrain, nos agriculteurs réclament l’arrêt des sur-transpositions de normes européennes. La mise en application de cette loi se fait-elle en ce sens ?

Enfin, où est la simplification administrative, très attendue par les agriculteurs et par l’ensemble de nos concitoyens, dans la mise en œuvre de cette loi ?

Mme Brigitte Allain. Le rapport rend compte d’une appréciation plutôt positive de la loi d’avenir. Ce texte dense et travaillé, notamment grâce à de nombreux apports parlementaires, a permis de donner une orientation positive à l’agriculture française en se tournant vers l’agro-écologie, sur laquelle le ministre avait particulièrement insisté. La suite a néanmoins montré qu’une orientation plus franche, notamment par le fléchage de moyens suffisants, aurait permis d’aller au bout de la démarche, de prendre en compte l’environnement et de rétablir la valeur agronomique des sols comme une opportunité économique et sociale, un vrai défi plutôt qu’une charge.

La demande des agriculteurs d’intégrer une dimension sociale aurait mérité d’être mieux entendue, notamment par la prise en compte des coûts de production.

Les manifestations des derniers mois expriment un véritable désarroi du monde agricole, qui aurait besoin d’une orientation plus franche et affirmée, avec un meilleur soutien à la réduction des intrants et aux changements des pratiques agro-écologiques, un fléchage en ce sens des aides aux investissements matériels et immatériels, ainsi que de réelles mesures de contrôle des structures foncières.

Il semble encore trop tôt pour tirer tous les apports de ce texte qui, pour partie, a accompagné des évolutions déjà existantes, s’agissant notamment des antibiotiques. Mais on peut se satisfaire d’une meilleure prise en compte de la diversité des activités agricoles, en particulier en circuit court, qui se traduit par une hausse des installations.

Je suis plutôt satisfaite de voir les GIEE et, bien sûr, les projets alimentaires territoriaux se développer partout sur le territoire. Ils permettent de faire évoluer les pratiques, de retisser des liens entre les agriculteurs qui redécouvrent la notion d’entraide. Cela crée un nouveau contrat entre les agriculteurs et la société, qui favorisera l’agriculture biologique.

Le Réseau national pour un projet alimentaire territorial, porté par les chambres d’agriculture et l’association Terres en ville, est positif. De nombreux autres acteurs interviennent dans l’accompagnement de ces projets, ce qui permet une bonne appropriation par les citoyens.

Il ne me semble pas qu’il soit fait mention des préparations naturelles peu préoccupantes (PNPP). L’article 50 devait faciliter leur reconnaissance. Qu’en est-il ?

Mme Annick Le Loch. Nous avons appris, par un communiqué du ministère de l’économie et des finances, que le rapport d’audit et d’évaluation des effets de la loi de modernisation de l’économie venait de paraître. Ce sera peut-être l’occasion d’évoquer plus concrètement ses effets.

À mon tour, je veux féliciter nos deux rapporteurs pour ce rapport de qualité.

Le nombre d’exploitations dans notre pays ne cesse de diminuer depuis des années, et l’on prédit que ce phénomène va encore se poursuivre, quels que soient les outils mis en place. En Bretagne, par exemple, on attendrait une baisse de 22 % à l’horizon 2025. Le ministre de l’agriculture défend, à juste titre, notre modèle d’exploitation français, qui est plutôt familial. Comment les outils que sont les GAEC, les GIEE et les coopératives, qui ont été mis en place dans cette loi, pourront-ils inverser cette tendance ? L’agro-écologie pourra-t-elle jouer un rôle dans le nombre des exploitations ?

Malgré les promesses, le prix du lait payé aux producteurs peine à atteindre les 300 euros la tonne, et ceux-ci souffrent. On évoque souvent la nécessité d’améliorer le fonctionnement des relations au sein de la filière, au travers de l’interprofession, avec le renforcement des organisations de producteurs et les associations d’organisations de producteurs (AOP). Cet été, au cœur de la crise, les relations entre la première entreprise de France et les producteurs ont été qualifiées de moyenâgeuses. Comment inciter plus encore les producteurs à mieux s’organiser, à développer des AOP qui pourraient rééquilibrer les relations et les négociations commerciales ? La loi d’avenir a déjà fait beaucoup progresser les choses et la loi Sapin II permettra de poursuivre ce travail, mais il y a encore matière à travailler avec les acteurs.

M. Lionel Tardy. Il faut se réjouir du succès des GAEC. Le fait que la procédure d’agrément ait été confiée au préfet n’a pas ralenti leur création, ce qui est une bonne chose.

Lors des auditions auxquelles vous avez procédé, la nécessité de simplifier la procédure a-t-elle été évoquée ? Même si des avancées ont été obtenues avec les décrets d’application, d’autres sont peut-être encore possibles, comme la réduction des délais ou l’application du « silence vaut accord » pour les nouveaux agréments. Qu’en pensez-vous ?

L’échec des contrats de génération a été souligné par la Cour des comptes. La loi a cependant prévu l’instauration d’un contrat de génération adapté aux exploitations agricoles. Parmi l’ensemble des mesures dont vous notez qu’elles ont conduit à une hausse du nombre d’installations, peut-on dresser un bilan spécifique de ces contrats de génération, en nombre de contrats signés et d’aides versées ?

M. Dominique Potier. Bravo à nos deux rapporteurs qui sont passionnés et très engagés sur ce sujet ! En tant que responsable de mon groupe sur ce texte de loi, je garde un bon souvenir de l’examen du projet de loi, au cours duquel nous avons pu améliorer le dessein qui était porté par M. Stéphane Le Foll, dont on peut saluer la pugnacité.

Je tiens à réaffirmer ici que la sur-transposition par la France des directives européennes est largement légendaire et mythifiée. En réalité, notre pays les applique, sans en rajouter. Lorsqu’il le fait, c’est plutôt au bénéfice d’une excellence agricole qu’il veut porter haut et fort. C’est ce qui est affirmé dans cette loi. L’agro-écologie n’est pas le problème, c’est, au contraire, la solution pour nourrir demain toute la planète – avec la régulation, elle a encore été réaffirmée comme telle par des voix venues de tous horizons, lors d’un colloque récent. Le monde est bien l’échelle à envisager, car il n’y a pas de vision agricole française qui ne se situe dans une vision mondiale.

Un autre sujet que nous avons porté avec force est le conditionnement de l’installation et du renouvellement des générations et de la biodiversité à des politiques foncières. Le volet foncier de cette loi d’avenir a été inspiré par une proposition de loi de 2013, consécutive aux dérégulations foncières liées à la montée de l’individualisme paysan, aux failles normatives introduites lors des législatures précédentes ainsi qu’à l’arrivée des fonds spéculatifs. Pour faire obstacle aux importantes dérives constatées, nous avions fait un pas dans le cadre de la loi d’avenir, mais nous ne sommes pas allés aussi loin que nous le voulions. C’est grâce au scandale de l’Indre que nous avons pu, dans le cadre de la loi Sapin II, améliorer les mesures de la loi d’avenir en renforçant le contrôle foncier. Hélas ! le Conseil constitutionnel a considéré qu’il s’agissait d’un cavalier législatif. Pour que cette disposition puisse enfin être adoptée, je l’ai reprise dans une proposition de loi visant à lutter contre l’accaparement des terres, que j’ai déposée.

Finalement, la loi Sapin II et la loi d’avenir fonctionnent un peu comme des poupées gigognes, la première complétant et améliorant la seconde. Elles composent un ensemble législatif que nous devons porter avec beaucoup de fierté.

Monsieur Antoine Herth, je me souviens très bien d’un amendement qui levait le plafond de verre du volume budgétaire de l’ANSES. Vous évoquez à nouveau ce plafond de verre. Cet amendement est-il tombé à l’eau ? Le décret n’est-il pas paru ? C’est pour moi un mystère.

Mme Béatrice Santais. Vous avez indiqué qu’il manquait encore le décret relatif aux notions de réduction substantielle des surfaces affectées à des productions bénéficiant d’une AOP. En réalité, ce décret est prêt puisque nous l’avons examiné en Conseil national d’évaluation des normes (CNEN). Il fait état de seuils qui, à mon avis, sont bien bas. On parle en effet de plus de 1 % de l’aire géographique de cette appellation ou de plus de 2 % de l’aire comprise dans le périmètre communal de l’appellation. Les maires sont souvent les premiers à préserver les appellations d’origine contrôlée (AOC) sur leur territoire et il y a même parfois des secteurs qui sont en AOC mais qui ne sont pas vraiment exploités. Ces seuils particulièrement bas pourraient empêcher des projets et bouleverser des équilibres dans certaines communes lors de l’élaboration ou de la révision des plans locaux d’urbanisme (PLU).

Mme Marie-Lou Marcel. Je salue les avancées qui ont été obtenues sur la protection des appellations d’origine et des indications géographiques protégées, avec le droit d’opposition dont dispose désormais le directeur de l’INAO à la demande d’enregistrement d’une marque auprès de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI). Notre collègue Dino Cinieri et moi-même avions présenté un rapport sur les signes d’identification de la qualité et de l’origine (SIQO) et fait différentes propositions.

Dans votre rapport, vous faites le constat que les demandes de reconnaissance sont inférieures aux années précédentes. De fait, il y a actuellement beaucoup de demandes de modification du cahier des charges, procédure quasiment aussi lourde que celle de la demande de reconnaissance. Comment alléger cette procédure ?

M. Yves Daniel. Je considère ce rapport très intéressant comme un rapport d’étape, car l’agriculture est en perpétuelle évolution. Avec d’autres rapports sur des thématiques agricoles, telles les conséquences de la fin des quotas sur la filière laitière française et européenne ou l’agriculture biologique, il faut en faire un outil pédagogique et de vulgarisation à destination de tous les acteurs pour porter les missions de l’agriculture – nourrir, aménager, protéger notre santé et celle de la planète.

Je ne reviens pas sur le foncier, tout en précisant qu’il s’agit d’un point important.

Je veux insister sur l’importance de la pédagogie de l’alternance. Les maisons familiales rurales n’ont pas d’exploitations agricoles dédiées, mais un réseau de fermes. Cela va naturellement dans le sens de l’innovation, de l’adaptation de l’agriculture et de la formation des hommes, pas seulement des techniciens et des chefs d’entreprise, pour produire autrement.

Avec l’école vétérinaire telle qu’elle a évolué et le réseau des vétérinaires sur le terrain, nous disposons d’un modèle de santé pour les animaux que j’aimerais bien voir appliqué à la santé humaine. C’est formidable d’avoir des rendez-vous immédiatement quand on a besoin de soigner des animaux !

Mme la présidente Frédérique Massat. Le projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, dont la commission mixte paritaire s’est réunie hier et qui sera examiné demain en séance publique, contient des mesures relatives à l’agriculture, comme la reconnaissance de la régulation de la prédation imputable aux loups, et la reconnaissance de l’indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN). Ces dispositions accompagnent et complètent le travail qui a été mené pendant cinq ans, même s’il sera, il est vrai, toujours en perpétuelle évolution.

M. Germinal Peiro, rapporteur. M. Philippe Le Ray a abordé beaucoup de sujets, dont certains, malgré ses 96 articles, ne figurent pas dans la loi. Elle en embrasse pourtant de forts divers et multiples.

M. Stéphane Le Foll restera comme le ministre de l’agriculture qui s’est battu pour sauver – ce n’est pas rien ! – le budget de la politique agricole commune (PAC), et qui a obtenu 9 milliards d’euros pour notre pays. Il s’est battu également pour réorienter les aides de la PAC de façon plus juste, en « sur-primant » les 52 premiers hectares. C’est également celui qui a introduit la notion d’agro-écologie, la plaçant au cœur de la loi d’avenir.

Au début, je craignais que l’agro-écologie ne soit quelque peu « hors-sol », coupée de la réalité du monde agricole. Le ministre a d’ailleurs été rabroué, conspué, moqué sur le sujet dans certains congrès syndicaux. Pourtant, je suis surpris par la façon dont le monde agricole s’est emparé de la notion d’agro-écologie, ce que j’ai pu constater dans le très grand département agricole de la Dordogne. Passé le temps de l’opposition frontale politique et syndicale, les agriculteurs ont compris qu’il était dans leur intérêt direct de produire à la fois plus et mieux, que performance économique et performance environnementale sont intimement liées. Ils ont même dit combien ce thème faisait aujourd’hui partie de leur vie, lors de l’inauguration de Lascaux 4 au Centre international de l’art pariétal, à l’occasion de laquelle le Président de la République a reçu les présidents départementaux de la FNSEA, de la chambre d’agriculture et des Jeunes agriculteurs. Je crois qu’il n’y aura pas de retour en arrière, que l’agronomie des sols sortira de l’oubli et que l’idée qu’avec de l’eau et des engrais de synthèse, on pourrait tout faire pousser ad vitam aeternam sur n’importe quel support est révolue. Je le dis parce que je ne l’ai pas seulement constaté dans des régions de petites exploitations. Dans la Marne, où j’ai visité l’agropôle de Reims, le secteur du Champagne la pratique depuis plusieurs années.

S’agissant des GIEE, il faut les prendre comme un outil dont les agriculteurs peuvent se servir pour travailler en commun. Le monde agricole a beau avoir inventé la coopération, les coopératives d’utilisation du matériel agricole (CUMA) et les mutuelles, les agriculteurs restent très isolés. L’une des solutions à la déprise agricole réside aussi dans le regroupement et le travail en commun.

Un mot sur les relations commerciales et les prix. Entre 2002 et 2012, 26 % des exploitations agricoles ont disparu dans notre pays, et ce mouvement se poursuit, car, malgré les aides publiques et le soutien économique de l’Europe, de l’État, des régions et des départements, le prix n’est pas au rendez-vous. Si les exploitations continuent de disparaître, c’est parce que les agriculteurs travaillent souvent plus que les autres et gagnent moins. Leurs enfants ne reprennent pas l’exploitation parce qu’ils auront une vie meilleure comme salariés ou fonctionnaires. La loi d’avenir a essayé de faire progresser la contractualisation, comme d’ailleurs la loi de modernisation de l’agriculture, portée par M. Bruno Lemaire en 2010, mais elle n’a pas réglé le problème, lié à un double phénomène.

D’abord, le monde agricole est totalement atomisé par rapport aux acheteurs. Comme les interprofessions, que l’on a voulu renforcer, et les coopératives, que l’on a rendues plus transparentes pour leur donner plus de légitimité, les GIEE concourent à donner plus de poids aux producteurs. C’est un défi énorme.

Ensuite, le second défi, c’est celui du principe de la concurrence qui interdit à des gens de se mettre d’accord pour fixer le prix du lait, par exemple. Le ministre a organisé des tables rondes en indiquant le prix minimum auquel il fallait parvenir, mais cette indication est interdite. Le principe européen de la concurrence que l’on doit appliquer à tous les secteurs se retourne contre le monde agricole. Face à cinq acheteurs, des milliers d’agriculteurs sont totalement démunis. Si nous ne parvenons pas à revoir ce point avec l’Union européenne, les relations ne pourront pas être équilibrées.

Madame Brigitte Allain, je revendique d’avoir réglé la guerre du purin d’ortie avec les solutions que j’ai apportées en tant que rapporteur. Tant que les préparations naturelles peu préoccupantes étaient considérées comme des produits phytopharmaceutiques, on ne pouvait que se conformer à la réglementation européenne ou nationale. On a pu éviter cet écueil majeur en les classant comme biostimulants. C’est la législation espagnole qui m’a montré la voie. Une première liste des préparations naturelles peu préoccupantes a été publiée par le ministère, après qu’elles aient été préalablement testées, car on ne peut pas mettre n’importe quoi sur le marché. Je sais que d’autres demandes de validation de préparations naturelles ont été déposées.

M. Antoine Herth, rapporteur. S’agissant de la question de la valeur ajoutée, la loi s’est essentiellement concentrée sur les interprofessions. Nous les avons toutes rencontrées pour examiner leurs atouts en matière d’organisation et les étapes qui restent à franchir. Selon les types de production, ces interprofessions intègrent ou non la distribution, ont un dialogue serein ou non. L’interprofession laitière est probablement la plus en difficulté aujourd’hui, parce que la crise dans ce secteur est particulièrement aiguë.

La simplification administrative n’était pas vraiment le sujet de la loi. La meilleure façon de simplifier, c’est d’abroger des dispositions, mais nous n’étions pas dans ce cas de figure. Certaines parties du code rural et de la pêche maritime ont été complètement réécrites, mais sans volonté de réduire la masse des articles ou leur portée.

Lors de l’examen du projet de loi, j’ai été très critique sur le transfert à l’ANSES de la compétence d’examen des AMM des produits phytopharmaceutiques, au détriment de la direction générale de l’alimentation (DGAL). Aujourd’hui, je constate que le dispositif fonctionne ; il a fait ses preuves, à l’occasion de la chamaillerie interministérielle sur les néonicotinoïdes, et à la suite de certaines initiatives du Parlement. Finalement, c’est le Parlement qui a testé la solidité de l’ANSES. Reste, à notre sens, que davantage de moyens méritent d’être débloqués, l’expertise scientifique de l’ANSES étant sollicitée par l’agriculture, la santé, l’écologie chaque fois qu’un problème se pose, ce qui représente une charge de travail supplémentaire pour l’Agence.

En matière de foncier, le rôle des SAFER a été renforcé par la loi d’avenir puis, après le scandale de l’Indre, la loi Sapin II a encore tenté de consolider leur capacité d’intervention. J’ai bien compris que nous reviendrons sur ce sujet au mois de janvier prochain, à travers une proposition de loi. À titre personnel, je suis plus que sceptique sur la capacité des SAFER à régler tous les problèmes qui pourraient se présenter. Dans le rapport que nous vous présentons, un tableau fait état de l’activité des SAFER : chaque année, au niveau national, elles préemptent 6 000 hectares. Dans l’Indre, l’enjeu était de 1 700 hectares, soit près d’un quart d’activité supplémentaire. Aujourd’hui, les SAFER n’ont pas les moyens de faire ce travail. Si nous voulons leur confier des fonctions nouvelles, il faudra leur affecter des dotations financières supplémentaires, donc voir avec le ministère des finances si l’on peut trouver de l’argent, ce qui n’est pas vraiment dans l’air du temps.

Un groupement d’intérêt économique et environnemental forestier a été créé dans le département de l’Ardèche, et deux autres sont en cours de création.

Pour ma part, je trouve à l’agro-écologie cet intérêt qu’un agriculteur non labellisé bio peut enfin parler d’écologie. Il y a fort longtemps, j’ai été président de la Commission nationale de l’agriculture raisonnée. Lorsque l’on voulait ajouter une dimension environnementale dans l’acte de production agricole, on était soupçonné de vouloir s’occuper de choses que l’on ne comprenait pas et qui ne nous regardaient pas. Désormais, dans les salons parisiens, dans les endroits chics, on a le droit de dire que tous les agriculteurs se préoccupent aussi d’écologie dans leur travail.

Cette loi a un grand défaut, c’est d’être arrivée à un moment où l’agriculture française s’enfonçait dans une crise sans précédent. À travers ce texte, on cherche des solutions à des problèmes de court terme. Or il n’est pas là pour cela, mais pour fixer des orientations, même s’il ne porte pas le nom de loi d’orientation. C’est ce qui fait dire à certains que cette loi n’a pas réglé les problèmes – c’est vrai, en tout cas pour ceux de court terme.

M. Germinal Peiro, rapporteur. J’indique à M. André Chassaigne qu’il y a bien, dans notre rapport, des tableaux sur les rapports qui ont été prévus dans la loi.

Je veux revenir un instant sur le défrichement. En voulant étendre la protection des espaces naturels sensibles et boisés, je pense que nous nous sommes laissés emporter par notre élan généreux envers la forêt. Notre République devrait être plus avisée et peut-être adapter ses textes aux régions ou départements. Les forestiers qui demandent une compensation après la destruction d’une forêt pensent aux forêts de haute futaie du centre ou de l’est de la France, sans doute pas à un vulgaire taillis de châtaigniers de la Dordogne ou de l’Ardèche ou aux quelques chênes rabougris que l’on trouve sur les causses dans le sud. Lorsque des agriculteurs qui pratiquent la fraisiculture veulent défricher deux hectares de taillis de châtaigniers pour avoir un sol non seulement sablonneux et acide qui convient à la fraise, mais aussi neuf et nourri, ce n’est pas sérieux de leur demander de payer une taxe de défrichement hors de prix. Lorsqu’un castanéiculteur veut transformer un taillis de châtaigniers en verger de châtaigniers, il coupe les arbres et garde ceux qui sont alignés. En les recépant pour créer une châtaigneraie, il passe de la forêt au verger et se voit appliquer la taxe de défrichement, ce qu’il a bien des difficultés à admettre. M. André Chassaigne qui vit dans une zone montagneuse, à 1 000 mètres d’altitude, rencontre les mêmes difficultés. Il devrait être possible de classifier les forêts en fonction de leur intérêt et de leur potentiel en matière de production de bois.

Mme la présidente Frédérique Massat. Tout à fait ! Merci pour ce rapport et pour les réponses que vous avez apportées.

La Commission autorise, à l’unanimité, la publication du rapport d’information sur l’application de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

12 juillet 2016

Jeunes agriculteurs (JA) *

M. Jérémy Decerle, président

M. Aurélien Vaucelle, directeur

27 septembre 2016

Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA)

M. Henri Brichart, vice- président

M. Éric Thirouin, membre du bureau et président de la commission environnement

M. Jean-Louis Chandelier, directeur du département de l’entreprise et des territoires

M. Antoine Suau, directeur du département économie et développement durable

11 octobre 2016

Mouvement de défense des exploitants familiaux (MODEF)

M. Alexis Vanypre, animateur

Coop de France *

M. Vincent Magdelaine, directeur, « Métiers du grain »

M. Philippe Amar, docteur vétérinaire

Coordination rurale

M. François Lucas, premier vice-président

18 octobre 2016

Médiateur des relations commerciales agricoles

M. Francis Amand, inspecteur général de l'INSEE

M. Pierre Debrock, médiateur délégué

M. Robert Deville, médiateur délégué

19 octobre 2016

Association des régions de France (ARF)

M. Jean-Pierre Raynaud, président de la commission agriculture de Régions de France, vice-président du conseil régional Nouvelle Aquitaine chargé de l’agriculture

Mme Marie-Reine du Bourg, conseillère aux relations parlementaires

Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES)

M. Roger Genet, directeur général

Mme Françoise Weber, directrice générale adjointe en charge des produits réglementés

Mme Alima Marie, directrice de l’information, de la communication et du dialogue avec la société

26 octobre 2016

Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt – Direction générale de l’enseignement et de la recherche (DGER)

M. Philippe Schnäbele, directeur général adjoint, chef du service de l'enseignement technique

Mme Valérie Baduel, adjointe au directeur général, cheffe du service de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

9 novembre 2016

Association interprofessionnelle des fruits et légumes frais (INTERFEL)

M. Bruno Dupont, président

M. Daniel Sauvaitre, secrétaire général

M. Louis Orenga, directeur général

Intercéréales

M. Philippe Pinta, président

Mme Solenn Le Boudec, directrice adjointe

Centre national interprofessionnel de l'économie laitière (CNIEL)

Mme Caroline le Poultier, directrice générale

Mme Marie-Pierre Vernhes, directrice des affaires publiques

Fédération nationale des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (FNSAFER)

M. Emmanuel Hyest, président

M. Michel Heimann, directeur de la Safer Rhône-Alpes

Mme Sabine Agofroy, chargée des relations parlementaires

15 novembre 2016

Institut national de l’origine et de la qualité (INAO)

M. Gilles Flutet, responsable du service territoires et délimitation

Groupement national interprofessionnel des semences et plants (GNIS)

Mme Catherine Dagorn, directrice générale

Mme Delphine Guey, responsable des affaires publiques et presse

Institut agronomique et vétérinaire et forestier de France – Agreenium

Mme Marion Guillou, administratrice

M. Claude Bernhard, directeur

Assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA) *

M. Guy Vasseur, président

M. Régis Dubourg, directeur général

M. Justin Lallouet, chargé de mission affaires publiques

Fédération des syndicats vétérinaires de France

Dr Jean-Yves Gauchot, président de la FSVF et vice-président du Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL)

Dr Benoit Assemat, président honoraire de la FSVF et administrateur du Syndicat national des inspecteurs en santé publique vétérinaire (SNISPV)

Dr Eric Lejeau, vice-président du SNVEL et vice-président de la FSVF

Mme Anne Daumas, directrice du SNVEL

16 novembre 2016

Fédération nationale des chasseurs (FNC)

M. Claude Bussy, directeur

M. Thierry Coste, conseiller politique

Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) *

M. Pascal Cormery, président de la Caisse centrale de la MSA

M. Michel Brault, directeur général

Mme Isabelle Puret, responsable du service assujettissement et gestion des entreprises

M. Christophe Simon, chargé des relations parlementaires

Interprofession nationale porcine (Inaporc)

M. Guillaume Roué, président

M. Daniel Didier Delzescaux, directeur

Confédération paysanne

M. Mikel Hiribarren, secrétaire général

M. Jacques Bonati, juriste

22 novembre 2016

Table ronde sur l’enseignement privé :

Centre national de l’enseignement agricole privé (CNEAP)

M. Philippe Poussin, secrétaire général

Union nationale des maisons familiales rurales d'éducation et d'orientation (UNMFREO)

M. Xavier Michelin, président

M. Serge Cheval, directeur

Table ronde sur la forêt :

Office national des forêts (ONF)

M. Dubreuil, directeur général

M. Patrick Falcone, adjoint au directeur général

Conseil supérieur de la forêt et du bois (CSFB)

Mme Véronique Borzeix, représentant le ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt et la direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises (DGPE) au sein du CSFB

Association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes (INTERBEV) *

M. Dominique Langlois, président

M. Marc Pages, directeur général

Mme Marine Colli, responsable du service enjeux publics

Table ronde sur la forêt :

Fédération Forestiers privés de France (FFPF)

M. Luc Bouvarel, directeur général

Centre national de la propriété forestière (CNPF)

M. Thomas Formery, conseiller du président

Mme Claire Hubert, directrice générale

Union de la coopération forestière française (UCFF) et France Bois Forêt (FBF)

M. Cyril Le Picard, président de l’UCFF et de FBF

M. Julien Bluteau, secrétaire général de l’UCFF

Fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR)

M. Alain Lesturgez, directeur général

M. Yves Lessard, conseiller du président

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de l’Assemblée nationale, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

1 () C’est ainsi que nous la désignerons dans le présent rapport

2 () Règlement (UE) n° 1151/2012 du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires

3 () Colloque au ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt : « La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt en actes », le 11 février 2016

4 () À noter que l’article 12 de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages étend cette possibilité à tous les agriculteurs.

5 () Ce dernier a déjà rejeté, par un arrêt du 5 octobre 2016, un recours de la Confédération paysanne et de la Coordination rurale sur l’extension d’un accord la section plants de pomme de terre du Groupement national interprofessionnel des semences et plants (GNIS) du 19 mars 2014 relatif au renforcement des moyens de l’obtention végétale et au maintien d’une qualité sanitaire du territoire dans le domaine du plant de pomme de terre.

6 () Panorama de la quantification de l'évolution nationale des surfaces agricoles, mai 2014

7 () Décret n° 2016-1110 du 11 août 2016 relatif à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes

8 () • CAP « services aux personnes et vente en espace rural »;

• Baccalauréat professionnel « technicien conseil vente en alimentation » ;

• Baccalauréat professionnel « laboratoire contrôle qualité » ;

• Baccalauréat professionnel « services aux personnes et au territoire » ;

• BTS agricole « science et technologie des aliments ».

9 () Le dispositif de la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) fonctionne selon un système de points attribués, pour chaque indicateur, en fonction de la réalisation ou non de l’objectif fixé pour cet indicateur ou de la progression vers l’objectif. Chaque point vaut 7€.(site Ameli).

10 () N° 19298, réponse JO Sénat du 4 février 2016

11 () Art L.853-2 du code rural

12 () Art.L.253-7 du code rural

13 () L’arrêté du 27 juin 2011 concerne l’interdiction d’utilisation de certains produits dans les lieux fréquentés par le grand public ou des groupes vulnérables. Cet arrêté précise également les conditions d’emploi à respecter pour les produits qui peuvent être utilisés sur ces mêmes lieux. Il s’agit des lieux fréquentés par des enfants (cours d’école, établissements scolaires, crèches, centres de loisir, aires de jeux dans les parcs publics), par des personnes vulnérables (hôpitaux, maison de retraite, maison de santé), ainsi que les parcs et espaces verts ouverts au public et les terrains de sport et de loisirs publics.

14 () Le Monde du 18 octobre 2016

15 () www.ephy.anses.fr

16 () Le ministère chargé de l’agriculture contribue à son financement au moyen du compte d’affectation spéciale « Développement agricole et rural » (CASDAR), créé par la loi de finances pour 2006. Le CASDAR est alimenté par la taxe sur les exploitations agricoles. Il représente un levier important pour faire évoluer les pratiques des agriculteurs en vue de répondre aux enjeux liés à l’innovation et à la transition agro-écologique de l’agriculture française.

17 () Cours en ligne massifs et gratuits

18 () Rapport d’information de la délégation aux outre-mer sur les agricultures des outre-mer, n°1510, enregistré le 6 novembre 2013

19 () Le Figaro, 28 octobre 2016

20 () Un plan de chasse consiste à attribuer, pour un territoire donné, un quota maximal (et parfois aussi minimal) de spécimens d’une espèce à prélever, le plus souvent à tir mais aussi à courre, pour une ou plusieurs saisons de chasse. Des critères qualitatifs, tels que le sexe, l’âge ou le poids peuvent aussi être mis en place. Le plan de chasse est constitué principalement pour le cerf, le chevreuil, le mouflon, le daim, le chamois et l’isard, pour lesquels il est obligatoire. Il participe à une gestion équilibrée des animaux et des cultures agricoles ou forestières. (ONCFS).


© Assemblée nationale