N° 1116

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 8 octobre 1998.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES (1) SUR LE PROJET DE loi de finances pour 1999 (n° 1078),

TOME XIII
ÉQUIPEMENT, TRANSPORTS et LOGEMENT
TRANSPORTS AÉRIENS

PAR M. FRANÇOIS ASENSI,

Député.

——

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Voir le numéro : 1111 (annexe 29)

Lois de finances.

La commission de la production et des échanges est composée de : M. André Lajoinie, président ; MM. Jean-Paul Charié, Jean-Pierre Defontaine, Pierre Ducout, Jean Proriol, vice-présidents ; MM. Léonce Deprez, Christian Jacob, Daniel Paul, Patrick Rimbert, secrétaires ; MM. Jean-Pierre Abelin, Jean-Claude Abrioux, Stéphane Alaize, Damien Alary, André Angot, François Asensi, Jean-Marie Aubron, Pierre Aubry, Jean Auclair, Jean-Pierre Balduyck, Jacques Bascou, Mme Sylvia Bassot, MM. Christian Bataille, Jean Besson, Gilbert Biessy, Claude Billard, Claude Birraux, Jean-Pierre Blazy, Serge Blisko, Jean-Claude Bois, Daniel Boisserie, Franck Borotra, Christian Bourquin, Mme Danièle Bousquet, MM. François Brottes, Marcel Cabiddu, Alain Cacheux, Dominique Caillaud, André Capet, Laurent Cathala, Jean-Paul Chanteguet, Jean Charroppin, Philippe Chaulet, Jean-Claude Chazal, Daniel Chevallier, Pierre Cohen, Alain Cousin, Yves Coussain, Jean-Michel Couve, Jean-Claude Daniel, Marc-Philippe Daubresse, Philippe Decaudin, Jacques Desallangre, Eric Doligé, François Dosé, Jean-Pierre Dufau, Marc Dumoulin, Dominique Dupilet, Philippe Duron, Jean-Claude Etienne, Laurent Fabius, Alain Fabre-Pujol, Albert Facon, Alain Ferry, Jean-Jacques Filleul, Jacques Fleury, Nicolas Forissier, Roland Francisci, Claude Gaillard, Robert Galley, Claude Gatignol, André Godin, Alain Gouriou, Joël Goyheneix, Michel Grégoire, Gérard Grignon, Hubert Grimault, Lucien Guichon, Gérard Hamel, Patrick Herr, Claude Hoarau, Robert Honde, Claude Jacquot, Mme Janine Jambu, MM. Aimé Kergueris, Jean Launay, Thierry Lazaro, Patrick Lemasle, Jean-Claude Lemoine, Jacques Le Nay, Jean-Claude Lenoir, Arnaud Lepercq, René Leroux, Roger Lestas, Alain Le Vern, Félix Leyzour, Michel Liebgott, Lionnel Luca, Jean-Michel Marchand, Daniel Marcovitch, Alfred Marie-Jeanne, Alain Marleix, Daniel Marsin, Philippe Martin, Jacques Masdeu-Arus, Roger Meï, Roland Metzinger, Pierre Micaux, Yvon Montané, Gabriel Montcharmont, Jean-Marie Morisset, Bernard Nayral, Jean-Paul Nunzi, Patrick Ollier, Joseph Parrenin, Paul Patriarche, François Patriat, Germinal Peiro, Jacques Pélissard, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Annette Peulvast-Bergeal, MM. Serge Poignant, Bernard Pons, Jacques Rebillard, Jean-Luc Reitzer, Gérard Revol, Mme Marie-Line Reynaud, M. Jean Rigaud, Mme Michèle Rivasi, MM. Jean Roatta, André Santini, Joël Sarlot, Mme Odile Saugues, MM. François Sauvadet, Bernard Schreiner, Jean-Claude Thomas, Léon Vachet, Daniel Vachez, François Vannson, Michel Vaxès, Michel Vergnier, Alain Veyret, Gérard Voisin, Roland Vuillaume.

INTRODUCTION 5

CHAPITRE Ier : LA RECOMPOSITION DU SECTEUR DES TRANSPORTS AÉRIENS 9

I.— UNE CROISSANCE CONTINUE QUOIQUE RALENTIE PAR LA CRISE ASIATIQUE 10

II.— UN SECTEUR EN MUTATION 11

A.— LE NOUVEAU PAYSAGE MONDIAL 11

1. Les accords bilatéraux entre les pays européens et les Etats-Unis 12

a) La stratégie américaine 12

b) L’accord franco-américain du 18 juin 1998 13

c) Pérennité des accords bilatéraux 14

2. L’ère des grandes alliances 15

B.— LES CONSÉQUENCES DE LA LIBÉRALISATION DU TRANSPORT AÉRIEN DANS L’UNION EUROPÉENNE 16

1. Des effets économiques contrastés 17

2. Des effets sociaux préoccupants 18

III.— LA PLACE D’AIR FRANCE DANS LA NOUVELLE DONNE AÉRIENNE 19

A.— UN REDRESSEMENT ENCORE INCERTAIN 19

1. L’exercice 1997-1998 : le retour aux bénéfices 19

2. L’exercice 1998-1999 : une zone de turbulences 22

B. QUELLE STRATÉGIE D’ALLIANCES POUR AIR FRANCE ? 24

C. POUR UNE OUVERTURE MAÎTRISÉE ET LIMITÉE DU CAPITAL 26

CHAPITRE II : LA POLITIQUE AÉROPORTUAIRE 29

I.— L’ÉVOLUTION DU TRAFIC 30

II.— UNE EXTENSION LIMITÉE DES CAPACITÉS DE LA PLATE-FORME
AÉROPORTUAIRE DE PARIS
31

A.— LES PISTES 31

B.— LES AÉROGARES PASSAGERS 33

III.— LA LUTTE CONTRE LES NUISANCES SONORES 34

A.— LES MODIFICATIONS DU CODE D’EXPLOITATION 34

B.— LA MISE EN ŒUVRE DE LA CHARTE DE QUALITÉ DE L’ENVIRONNEMENT SONORE 35

C.— L’ÉVOLUTION DE LA TAXE D’ATTÉNUATION DES NUISANCES SONORES 35

D.— LA CRÉATION D’UNE AUTORITÉ DE CONTRÔLE TECHNIQUE DE L’ENVIRONNEMENT SONORE AÉROPORTUAIRE 37

CHAPITRE III : LA CONSTRUCTION AÉRONAUTIQUE 39

I.— UNE DEMANDE SOUTENUE 39

A. UN EXERCICE 1997 PLUTÔT PROFITABLE AUX CONSTRUCTEURS FRANÇAIS 39

B.— DES PERSPECTIVES ENCOURAGEANTES DE PROGRESSION DES MARCHÉS 41

II.— LES GRANDES MANŒUVRES DU SECTEUR DE LA CONSTRUCTION AÉRONAUTIQUE EUROPÉENNE 43

A.— VERS L’ÉMERGENCE D’UN GÉANT EUROPÉEN DE L’AÉRONAUTIQUE 43

B.— LA MÉTAMORPHOSE D’AIRBUS 43

C. LE RAPPROCHEMENT AÉROSPATIALE–MATRA 44

CHAPITRE IV : LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1999 47

I.— LE BUDGET ANNEXE DE L’AVIATION CIVILE 47

II.— LE SOUTIEN BUDGÉTAIRE DESTINÉ À LA CONSTRUCTION AÉRONAUTIQUE CIVILE 51

III.— LE FONDS DE PÉRÉQUATION DES TRANSPORTS AÉRIENS 53

EXAMEN EN COMMISSION 55

MESDAMES, MESSIEURS,

La crise financière internationale qui déstabilise actuellement les places boursières laisse peser des incertitudes sur les perspectives de croissance des économies. Le secteur des transports aériens, largement déréglementé depuis plus de dix ans, n'est pas à l'abri de ces secousses, même si les compagnies membres de l'Association Internationale des Transporteurs Aériens (AITA) ont enregistré un profit net global pour 1998 de 3,9 milliards de dollars sur les lignes régulières internationales.

Dans un contexte particulièrement agité, l'ensemble des compagnies aériennes n'hésite plus à constituer de grandes familles de réseaux, pour répondre à la concurrence internationale.

Afin d'accompagner ce mouvement de libéralisation, certains Etats européens continuent de signer des accords de “ciel ouvert” avec les Etats-Unis qui permettent aux compagnies américaines de s'implanter sur les marchés domestiques. Cette stratégie au cas par cas contredit toute volonté de mettre en place une politique européenne des transports aériens.

La France refuse un tel choix qui affecterait brutalement la place des compagnies françaises sur le marché de l'Atlantique Nord. Elle a signé en juin dernier un accord bilatéral avec les Etats-Unis par lequel les relations entre les deux pays seront encadrées par des augmentations graduelles de capacités réciproques. Ces garanties sont assurées pour une période transitoire de cinq ans jusqu'à une libéralisation complète du marché. Cette période représente un sursis important mais aussi une contrainte de temps pour le redressement d'Air France.

Le gouvernement a-t-il prévu suffisamment de garde-fous, avec ses partenaires européens, pour éviter une hégémonie prévisible des compagnies américaines sur le marché communautaire ?

Comme les compagnies aériennes, les entreprises de construction aéronautique sont aussi confrontées à la concurrence des groupes américains et cherchent à fédérer leurs forces pour constituer un pôle européen puissant. Sous la pression des partenaires britanniques et allemands, le gouvernement a décidé, à la surprise générale et sans débat public, de fusionner Matra et Aérospatiale en ne gardant qu'une part minoritaire du capital du futur groupe. Cette privatisation pose la question de la maîtrise publique d'une véritable politique industrielle française et européenne.

La politique de la concurrence menée sous l'égide de la Commission de Bruxelles conduit à la remise en cause des services publics et des acquis sociaux en France et en Europe, à des privatisations, avec de lourds sacrifices pour les salariés des entreprises concernées. Dans les transports aériens, cette politique n'a même pas permis des baisses significatives de tarifs au profit des usagers.

Après des années de pertes records, Air France a renoué avec la croissance de son activité en dégageant, pour la première fois depuis 1993, un bénéfice d'exploitation de 1,87 milliard de francs. Néanmoins, ses besoins d'investissements, notamment pour le renouvellement de sa flotte, sont évalués à 40 milliards de francs d'ici 2002. Sa politique d'alliances est encore à définir, ce qui lui confère un relatif isolement en Europe.

Malgré ces incertitudes, le Gouvernement a décidé, pour satisfaire les besoins de financement de la compagnie, l'ouverture du capital d'Air France en février 1998, tout en réaffirmant la nécessité de maintenir son appartenance au secteur public. Votre rapporteur prend acte de cette nouvelle donne qui démontre que la mixité du capital peut être utile pour la croissance à venir de l’entreprise.

Le conflit qui a opposé les pilotes d'Air France et la direction, en mai-juin 1998, a surtout montré l'importance d'aboutir, par la négociation, à un nouveau type de relations sociales dans l'entreprise.

L’entreprise publique renoue cette année avec la croissance en dégageant pour la première fois depuis 1993 un bénéfice net d’exploitation de 1,8 milliard de francs. Evoluant dans un contexte fortement concurrentiel, Air France dont le maintien dans le secteur public ne constitue pas un obstacle à la conclusion d’alliances, doit pouvoir développer des coopérations avec d’autres partenaires.

La participation des salariés (et pas seulement des pilotes) à l'actionnariat de l'entreprise en échange d'un gel des salaires est la voie choisie par le Gouvernement. Elle ne sera pas sans susciter quelques problèmes. En effet, les rémunérations en fonction des résultats de l'entreprise sont très aléatoires. Aux Etats-Unis, les salariés ont ainsi perdu beaucoup de pouvoir d'achat. Plus généralement, une réflexion pourrait être menée sur la conquête de droits de contrôle et d'intervention dans la gestion stratégique de l'entreprise par les salariés. La mise en place d'un comité de groupe européen cette année va dans le bon sens même si les compétences de ces comités restent consultatives.

Le maintien d'un secteur public des transports aériens reste encore le meilleur moyen d'assurer le respect des normes sociales et des missions de service public dont il conviendrait d'assurer une meilleure coordination européenne.

Pour contrer les effets de la déréglementation, la définition d'un cadre juridique et social européen s'avère d'autant plus indispensable que le ciel sera complètement ouvert notamment sur l'Atlantique Nord.

L'aménagement du territoire, la gestion des aéroports, la sécurité aérienne, la préservation de l'environnement sont autant de domaines dans lesquels l'Etat peut affirmer ses missions.

Pour l'environnement, des avancées sont à noter cette année : Charte de qualité de l'environnement sonore, code de bonne conduite environnementale de la circulation aérienne autour de l'aéroport Charles-de-Gaulle, création par une prochaine loi d'une autorité indépendante de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires.

Le secteur du transport aérien et l'ensemble de la filière aéronautique ont été parmi les premiers à expérimenter la politique européenne de libéralisation. Les coûts sociaux et économiques de cette politique, ses contraintes, peuvent servir d'avertissements pour d'autres secteurs qui, comme l’énergie, seront bientôt concernés par l'ouverture à la concurrence, souvent préalable aux privatisations.

Chapitre Ier

LA RECOMPOSITION DU SECTEUR
DES TRANSPORTS AÉRIENS

L’achèvement le 1er avril 1997 du processus de libéralisation du ciel européen a bouleversé la donne économique du secteur sur le Vieux Continent.

Soutenues par un trafic en progression constante, dopées par des profits conséquents, les compagnies se sont livrées à une concurrence commerciale acharnée, souvent dévastatrice au plan social. Les limites de cette guerre économique sont vite apparues et ont contraint les compagnies à s’orienter vers une politique d’alliances, dessinant ainsi les contours d’un nouveau paysage du transport aérien.

Dans ce contexte, Air France a poursuivi son redressement malgré les secousses liées à la grève des pilotes du printemps dernier. Aujourd’hui, la compagnie nationale encore convalescente doit relever un double défi :

– ouvrir son capital sans tomber dans le piège d’une privatisation rampante ;

– développer une stratégie d’alliances qui maintiennent la compagnie dans le peloton de tête des transporteurs aériens mondiaux.

I.— UNE CROISSANCE CONTINUE QUOIQUE RALENTIE
PAR LA CRISE ASIATIQUE

ÉVOLUTION DU TRAFIC AÉRIEN MONDIAL

TRAFIC

(en milliards)

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

Total mondial du trafic international et intérieur

         

Passagers-km

1 894

1 845

1 929

1 949

2 100

2 248

2 426

2 571

variation annuelle en %

+ 6,8

– 2,6

+ 4,6

+ 1,0

+ 7,7

+ 7,0

+ 7,9

+ 6,0

Tonnes-km de fret

58,8

58,6

62,6

68,5

77,2

83,1

89,2

99,8

variation annuelle en %

+ 2,9

– 0,3

+ 6,8

+ 9,4

+12,7

+ 7,6

+ 7,3

11,9

Total TKT*

235,2

230,7

242,1

250,6

273,4

293,9

313,7

341,1

variation annuelle en %

+ 5,5

– 1,9

+ 4,9

+ 3,5

+ 9,1

+ 7,5

+ 6,7

+8,7

Trafic intérieur

               

Passagers-km

1 000

983

947

902

957

999

1 049

1 093

variation annuelle en %

+ 5,3

– 1,7

– 3,7

– 4,8

+ 6,1

+ 4,4

+ 5,0

+ 4,2

Tonnes-km de fret

12,5

12,2

11,8

12,4

12,5

12,8

13,7

14,8

variation annuelle en %

+ 2,3

– 2,4

– 3,3

+ 5,1

+ 0,8

+ 2,4

+ 7,0

+ 8,0

Total TKT*

104,5

102,4

98,5

95,1

100,3

104,5

107,2

115,2

variation annuelle en %

+ 4,5

– 2,0

– 3,8

– 3,5

+ 5,5

+ 4,2

+ 2,6

+ 7,5

International

               

Passagers-Km

894

862

982

1 047

1 143

1 249

1 377

1 478

variation annuelle en %

+ 8,5

– 3,6

+ 13,9

+ 6,6

+ 9,2

+ 9,3

+10,2

+ 7,3

Tonnes-km de fret

46,3

46,4

50,8

56,1

64,7

70,3

75,5

85,0

variation annuelle en %

+ 3,1

+ 0,2

+ 9,5

+10,4

+15,3

+ 8,7

+ 7,4

12,6

Total TKT*

130,7

128,3

143,6

155,5

173,1

189,4

206,5

225,9

variation annuelle en %

+ 6,2

– 1,8

+ 11,9

+ 8,3

+11,3

+ 9,4

+ 9,0

+ 9,4

* Tonnes-kilomètres-transportés

Source : OACI

Les dernières statistiques publiées reprennent les données de l’année 1997. Elles n’annoncent pas de ralentissement proche de l’activité. Le trafic mondial continue à connaître une croissance soutenue (+ 8,7 % contre + 6,7 % en 1996) principalement nourrie par le fort développement du trafic international (+ 9,4 %) et par l’essor rapide du trafic intérieur (+ 7,5 % contre 2,6 % l’année précédente).

Les résultats portant sur les quatre premiers mois de 1998 incitent moins à l’optimisme puisque les conséquences de la crise asiatique commencent à se faire sentir. En effet, selon les données fournies par l’Airport Council international (ACI), le trafic dans la région Asie-Pacifique décroît de près de 10 % pour les transports de passagers et de 2 % pour le fret. Les plates-formes européennes sont relativement peu affectées par la crise (+ 5 % du trafic passager et du fret) alors que le trafic enregistré en Amérique du Nord se ralentit sensiblement (+ 0,5 % pour les passagers et + 4 % pour le fret).

Enfin, selon l’OACI, pour l’ensemble des services aériens réguliers de transport de passagers (internationaux et intérieurs), le trafic total des compagnies aériennes des Etats membres (en termes de nombre de passagers) devrait croître de + 5,4 % l’an jusqu’à 2001. Cette prévision qui était précédemment de + 6,6 % l’an a été révisée à la baisse pour tenir compte des événements économiques survenus dans la région Asie-Pacifique.

En termes de transport de fret, la prévision s’établit après révision à + 6,1 % l’an jusqu’en 2001 (elle était de + 7,5 % l’an pour la période 1998-2001).

II.— UN SECTEUR EN MUTATION

Initiée aux Etats-Unis en 1978, la déréglementation du transport aérien a touché le continent européen une quinzaine d’années plus tard. A la différence des Etats-Unis qui ont procédé à une ouverture brutale de leur marché, l’Europe a progressivement libéralisé le secteur du transport aérien. Depuis le 1er avril 1997, ce processus est arrivé à son terme sur le Vieux Continent. En moins de vingt ans, le paysage mondial des transports aériens a ainsi été totalement bouleversé : les acteurs ont changé, les pratiques économiques et commerciales ont évolué, la situation des salariés de nombreuses compagnies s’est dégradée.

A.— LE NOUVEAU PAYSAGE MONDIAL

La marche vers la libéralisation a eu, au plan mondial, une double conséquence. En changeant la règle du jeu économique applicable aux deux marchés les plus porteurs – l’Amérique du Nord et l’Europe –, elle a conduit les Etats-Unis et de nombreux pays européens à conclure des accords bilatéraux ; en renforçant la compétition, elle a incité les compagnies à fédérer leurs forces commerciales au sein de grandes alliances.

1. Les accords bilatéraux entre les pays européens et les Etats-Unis

a) La stratégie américaine

Depuis le début des années 1990, les États-Unis tentent de promouvoir une politique de “ ciel ouvert ” par laquelle toute compagnie pourrait exploiter n’importe quelle route aérienne sans limitation de capacité et sans contrainte tarifaire, les seules restrictions portant sur le cabotage intérieur aux Etats-Unis et sur la possibilité de détenir plus de 49 % du capital d’une compagnie américaine.

En raison de l’étroitesse de leur marché intérieur et poussés par KLM qui détenait une part importante du capital de Northwest, les Pays-Bas ont, en septembre 1992, signé le premier accord de ciel ouvert avec les Etats-Unis.

En juin 1995, huit autres Etats signaient un accord du même type : le Luxembourg, la Finlande, l’Islande, l’Autriche, la Suède, le Danemark, la Norvège et la Suisse.

Enfin, en février 1996, c’était au tour de l’Allemagne de parapher un accord open skies qui, en échange de l’ouverture du ciel allemand, accordait à Lufthansa 25 points d’entrée aux Etats-Unis, des possibilités importantes en matière de partage de code et surtout l’approbation de l’alliance avec United Airlines par l’administration américaine.

Outre la France, trois pays européens importants – l’Italie, l’Espagne et le Royaume-Uni – n’ont donc pas accepté l’ouverture des cieux proposée par les Américains.

Pour les deux pays d’Europe du Sud, la situation pourrait rapidement évoluer. Le récent rapprochement KLM-Alitalia, d’une part, et la perspective pour Iberia d’obtenir l’immunité anti-trust lui permettant de rejoindre l’alliance “ One World ”, d’autre part, peuvent favoriser l’ouverture des espaces aériens italien et espagnol.

Quant au Royaume-Uni, il demeure très attaché à un accord de 1977, dit “ Bermudes II ” ; cet accord, très protecteur pour les compagnies britanniques, a efficacement fonctionné, empêchant en particulier le déferlement des compagnies américaines Outre-Manche.

Des négociations bilatérales ont été engagées depuis 1990 mais, face à des Britanniques découvrant soudain les dangers de l’ultra-libéralisme et attachés au statu quo, les Américains n’ont pu obtenir que quelques “ micro-concessions ”.

L’encombrement aéroportuaire d’Heathrow complique un peu plus le problème car les Anglais ne peuvent, en tout état de cause, garantir aux compagnies américaines un accès élargi à cette plate-forme. Seule aujourd’hui, la mise en œuvre de l’alliance American Airlines-British Airways peut conduire les Britanniques à reconsidérer leur opposition à un accord de ciel ouvert.

b) L’accord franco-américain du 18 juin 1998

Refusant l’alternative “ ciel ouvert ou rien ”, la France a cherché à négocier avec les Américains une ouverture progressive et réciproque des marchés.

Après avoir dénoncé en 1992, les termes de l’ancien accord de 1946, la France a entamé des discussions avec les autorités américaines en 1997 et a abouti à un accord le 18 juin dernier.

Cet accord, qui n’est pas un accord de ciel ouvert, prévoit en particulier :

– une libéralisation progressive, étalée sur une période de cinq ans, des services entre les deux pays (63 nouvelles fréquences ainsi réparties : 21 en 1998, 7 en 1999, 14 en 2000, 7 en 2001 et 14 en 2002) ;

– la possibilité d’opérer des services en partages de code entre compagnies françaises et américaines et la levée des restrictions applicables en la matière dans les relations avec les compagnies de pays tiers ;

– en matière de fret, les transporteurs des deux pays peuvent désormais définir librement les capacités qu’ils souhaitent mettre en œuvre entre la France et les Etats-Unis.

En revanche, à l’exception des destinations de Tel Aviv et du Caire, les droits de trafic, dits de 5ème liberté, n’ont pas été concédés aux compagnies américaines.

Enfin, la France a encouragé la mise en place de règles de concurrence équitables et a, à cette fin, obtenu la possibilité d’appliquer des clauses de sauvegarde en cas d’émergence de situations inacceptables pour l’une ou l’autre des parties. Elle souhaite ainsi prévenir l’apparition sur le marché de tarifs prédateurs, de surcapacités, d’abus de position dominante et pouvoir, le cas échéant, intervenir rapidement. Un mécanisme de résolution rapide des conflits a ainsi été mis en place permettant de prendre dans des délais raisonnables, d’éventuelles mesures conservatoires si les intérêts d’une des parties se trouvaient gravement menacés.

La conclusion du nouvel accord a d’ores et déjà permis à Air France d’ouvrir deux nouveaux vols quotidiens, l’un à destination d’Atlanta et l’autre de Boston. Côté américain, la compagnie United Airlines propose depuis le 10 juin un deuxième service hebdomadaire sur Washington et la compagnie US Airways devrait offrir, à partir du mois d’octobre 1998, un nouveau service quotidien entre Pittsburgh et Paris.

De plus, la compagnie Air France a pu mettre en œuvre l’intégralité des accords conclus avec Delta et Continental et notamment desservir, dans le cadre des accords de partage de code, une trentaine de nouveaux points aux Etats-Unis.

c) Pérennité des accords bilatéraux

Avec la libéralisation du marché européen, les accords bilatéraux conclus entre les États membres de l’Union européenne et les États-Unis risquent de devenir caducs, certaines de leurs dispositions allant à l’encontre des principes de libéralisation et pouvant introduire des distorsions de concurrence entre compagnies européennes.

C’est pourquoi la Commission essaie de reprendre la main dans la discussion avec les autorités américaines en demandant au Conseil de lui accorder un mandat lui permettant de négocier sur les bases suivantes :

– affirmation du principe de libre accès réciproque aux compagnies européennes et américaines, incluant le cabotage et les droits de trafic de 5ème liberté au-delà des Etats-Unis et de l’Union européenne ;

– définition de critères communs pour éviter les pratiques déloyales et favoriser les systèmes de réservation, le partage de code, l’attribution des créneaux horaires ; définition de critères communs sur les conditions d’octroi et le montant des aides étatiques ainsi que sur les normes anti-trust ;

– reconnaissance de la règle de propriété limitée à 49 % des capitaux étrangers ;

– mise en place d’un mécanisme de règlement des conflits.

Pour des raisons parfois diamétralement opposées (si les pays ayant des accords de “ ciel ouvert ” ne voient pas ce qu’une telle négociation peut leur apporter de plus, les pays du Sud de l’Europe plaident pour une période de transition longue), les Etats membres demeurent réservés sur les suites à donner à cette demande de mandat. A la suite des rejets successifs de ses propositions devant le Conseil, la Commission semble prête à croiser le fer avec les pays ayant signé des accords bilatéraux. Aussi convient-il d’être prudent sur tout pronostic relatif à la pérennité des accords récemment conclus.

2. L’ère des grandes alliances

La coopération commerciale entre les grandes compagnies aériennes peut prendre deux aspects.

Elle peut faire l’objet d’accords commerciaux limités à une partie du réseau, voire à une seule ligne ; ces accords, qui n’interdisent d’ailleurs pas la signature en parallèle d’accords intégrant les compagnies intéressées à des alliances, portent le plus souvent sur le partage de code (pratique consistant à commercialiser sous son propre code des sièges sur des vols assurés par un autre transporteur et permettant ainsi, par cette forme de mise en commun du réseau, d’attirer du trafic sur le hub des compagnies parties à l’accord).

Il existe par ailleurs des accords de franchise permettant à un transporteur, souvent de petite taille, de voler moyennant redevance sous les couleurs d’une grande compagnie tout en pouvant utiliser des éléments d’identification commerciale, des accords de fidélisation (ou FFP : Frequent Flyer Program) et des coopérations dans des secteurs aussi divers que la maintenance ou la formation du personnel.

Ce type d’accords qui, bien que limités, contribue à la globalisation de l’offre de transports aériens et permet de réduire les coûts d’exploitation, a tendance à se multiplier aujourd’hui comme en atteste la liste non exhaustive de ceux conclus par Air France que votre rapporteur présente dans les pages suivantes.

Mais l’évolution la plus marquante de la coopération entre compagnies est l’émergence depuis le début des années 1990 de vastes alliances regroupant des compagnies importantes. Ces alliances portent sur la majorité ou la totalité des réseaux ; en les fédérant, elles leur confère une dimension planétaire. Elles incluent également diverses mesures de coopération souvent poussées aux limites permises par les législations anti-trust.

Le dénominateur commun de ces alliances est qu’elles rassemblent toutes au minimum une compagnie européenne et une américaine. En fait, il est probable que si des barrières réglementaires, des deux côtés de l’Atlantique, ne limitaient pas les prises de participations capitalistiques de source étrangère, des fusions et des intégrations plus poussées se seraient sans doute déjà produites.

On dénombre aujourd’hui quatre alliances “ intégrées ” :

– la plus ancienne date de 1993 et rassemble Northwest, KLM et ses filiales et, depuis fin 1997, Alitalia qui a préféré rejoindre cette alliance plutôt que d’opérer un rapprochement avec Air France ; elle couvre environ 11,3 % du trafic mondial ;

– “ Star Alliance ”, constituée à l’origine autour de United, Lufthansa et SAS, a vu, au fil des ans, son réseau se densifier avec l’arrivée de Varig, Air Canada, Thaï, Ansett Australia et Air New Zealand. De plus, Singapore Airlines, South African Airways et All Nippon Airways sont aujourd’hui considérées comme “ proches ” de “ Star Alliance ” qui couvrait au 31 décembre 1997, 17,2 % du trafic aérien ;

– en 1996, Delta a noué une alliance avec Swissair, Sabena et Austrian. Couvrant 11 % du trafic mondial, cette alliance doit surmonter une difficulté liée à la concurrence qui s’exerce autour du hub de Charles de Gaulle, entre les alliés européens de Delta et Air France qui est lié par un accord commercial avec cette compagnie américaine ;

– enfin, “ One World”, alliance née à la fin de l’été 1998 et qui, en représentant 18,8 % du trafic aérien de la planète, se place en tête des “ grandes familles ”. Regroupant American Airlines, British Airways et ses filiales, Cathay Pacific, Qantas et Canadian, elle “ pèse ” 71,5 milliards de dollars de chiffre d’affaires et transporte annuellement 272 millions de passagers.

B.— LES CONSÉQUENCES DE LA LIBÉRALISATION DU TRANSPORT AÉRIEN DANS L’UNION EUROPÉENNE

L’Union européenne a procédé à la libéralisation du transport aérien selon des modalités radicalement différentes de celles suivies aux Etats-Unis. Si l’ouverture du marché américain avait été brutale, s’opérant quasiment du jour au lendemain, l’Europe au contraire a adopté une démarche progressive entamée en 1987 et achevée le 1er avril 1997. Les trois “ paquets ” (c’est-à-dire les trois séries de règlements communautaires organisant la libéralisation du transport aérien) ont marqué les trois phases du processus. Depuis le troisième paquet, entré en vigueur au 1er janvier 1993, la mise en œuvre de l’ouverture du marché s’est poursuivie avec l’ouverture à la concurrence des compagnies communautaires de l’ensemble des liaisons intra-communautaires internationales (1er janvier 1993), l’expiration des contrats d’exclusivité (31 décembre 1995) et l’accès des lignes intracommunautaires à toutes les compagnies quelle que soit leur nationalité (1er avril 1997).

Cette progressivité du processus a, sur le plan économique, eu des effets moins dévastateurs que ceux constatés aux Etats-Unis : aucune compagnie majeure n’a disparu, l’ouverture à la concurrence n’a pas déclenché la guerre attendue sur les tarifs. En revanche, sur le plan social, les perspectives de la libéralisation du marché du transport aérien sont préoccupantes et l’on peut craindre, ainsi que le relève M. Bernard Derosier dans son rapport fait au nom de la délégation de l’Assemblée nationale pour l’Union européenne sur le transport aérien à l’heure européenne, que les compagnies optent pour une politique du “ moins-disant ” social.

1. Des effets économiques contrastés

Contrairement aux prévisions des Cassandre du début de la décennie, il n’y a pas eu en Europe un vaste mouvement de concentration du secteur marqué par une multiplication des opérations de fusions-acquisitions. Les compagnies ont gardé leur autonomie et leur personnalité, se contentant de nouer des alliances à caractère purement commercial.

De même, les opérations de cabotage ou celles liées aux possibilités offertes par les 5ème libertés ont été relativement limitées.

Enfin, les tentatives d’implantation de compagnies d’un Etat membre dans un autre Etat membre sont restées rares, à l’exception notable de l’introduction de British Airways sur le marché domestique français par le contrôle d’Air Liberté et de TAT.

A ces différents égards, le paysage européen a donc relativement peu changé. Est-ce à dire pour autant qu’il est resté figé et que les conséquences de l’ouverture du marché ont été de faible portée ? Evidemment non.

Sur plusieurs points, la donne économique est désormais radicalement différente :

– le poids des compagnies nationales que de nombreux Etats abandonnent progressivement au secteur privé, s’est réduit ; à titre d’exemple, elles ne couvrent dorénavant que 60 % du trafic sur les lignes domestiques ;

– la rationalisation du réseau des compagnies autour des hubs s’est renforcée, aggravant ainsi la saturation des plates-formes aéroportuaires et limitant de ce fait les nouvelles entrées sur le marché européen ;

– le nombre de concurrents par route aérienne à l’intérieur de l’Union européenne a sensiblement augmenté : il y a au moins trois compagnies sur le quart des liaisons internationales et le nombre des liaisons domestiques avec deux concurrents au moins a doublé en cinq ans ;

– si une guerre des tarifs “ à l’américaine ” n’a pas eu lieu, on a assisté en revanche à une multiplication des tarifs réduits ou promotionnels attirant un nombre croissant de passagers ;

– enfin, sont apparues des compagnies à coûts très bas et à bas tarifs basées sur des aéroports peu saturés et moins chers ; (Ryanair, Virgin Express, Debonair, Easyjet). Les grandes compagnies se préparent à riposter à ces nouveaux concurrents sur leur propre terrain : British Airways vient de lancer “ Go ”, sa filiale “ bas tarifs ” et Lufthansa réfléchit à l’opportunité de créer une société répondant également à ce type de demande.

2. Des effets sociaux préoccupants

En matière sociale, la libéralisation du transport aérien présente des risques de dérives dangereux.

Même l’OCDE admet que le transport aérien peut connaître une évolution analogue à celle rencontrée dans le transport maritime. Pour l’OCDE, l’apparition de pavillons de complaisance dans ce secteur n’est plus une hypothèse d’école. Dans un rapport publié en 1997 et intitulé “ L’avenir du transport aérien international. Quelle politique face aux mutations mondiales ? ”, elle affirme :

“ En principe, les transporteurs choisiront de s’enregistrer dans les Etats où la fiscalité sera légère et où ils pourront se procurer leur main d’œuvre ainsi que d’autres facteurs de production au meilleur coût. De plus, l’apparition de marchés de la location d’aéronefs avec équipage donne beaucoup de souplesse aux transporteurs qui veulent utiliser un pavillon de complaisance. ”

Par ailleurs, les risques de délocalisation (en particulier à l’intérieur même de l’Union européenne), d’externalisation, de sous-traitance, de filialisation d’activités demeurent réels.

Aveuglée par son idéologie libérale, l’Europe n’a pas voulu doter le transport aérien d’un volet social pourtant indispensable dans des professions soumises à des contraintes de travail particulières. Ce volet aurait dû logiquement être le complément des mesures de libéralisation. Celles-ci prônent une concurrence équitable et loyale. Mais la concurrence peut-elle encore être ainsi qualifiée lorsqu’au sein même de l’Union européenne coexistent des systèmes de rémunérations, des durées du travail, des exigences en matière de conditions de travail, de qualification et de formation des personnels aussi disparates ? Ainsi que le souligne Bernard Derosier dans son rapport précédemment cité “ il est plus facile de déréglementer que d’harmoniser et lorsque l’on a abrogé les entraves à la libre concurrence, il n’existe plus d’incitation poussant nos partenaires, souvent plus libéraux, à faire des concessions dans le domaine social ”.

Comme on pouvait le craindre, la libéralisation du marché semble pour l’instant avoir apporté plus de bienfaits aux compagnies qu’à leurs salariés.

Les profits ont augmenté. Quant à la baisse des tarifs que les autorités communautaires mettent systématiquement en avant pour justifier leur philosophie libérale, elle n’a été que limitée et ne saurait, en tout état de cause, légitimer le gel des salaires, les suppressions de postes et la précarisation des statuts.

III.— LA PLACE D’AIR FRANCE DANS LA NOUVELLE
DONNE AÉRIENNE

A.— UN REDRESSEMENT ENCORE INCERTAIN

1. L’exercice 1997-1998 : le retour aux bénéfices

La fusion mise en œuvre le 12 septembre 1997 entre la Compagnie nationale Air France, la compagnie Air France Europe et la maison mère Groupe Air France SA obligent à privilégier une comparaison fondée sur les comptes consolidés des trois derniers exercices.

Malgré un tassement de la progression du trafic (+ 4,9 % pour les transports de personnes contre + 10 % en 1996 et + 0,9 % pour le fret contre + 2 %), le chiffre d’affaires consolidé du groupe s’établit à 60,7 milliards de francs pour l’exercice clos le 31 mars 1998, soit une progression de 9,2 % par rapport à l’exercice précédent.

ÉVOLUTION ET STRUCTURE DU CHIFFRE D’AFFAIRES
DU GROUPE AIR FRANCE

(en millions de francs et en variation en %)

 

1995-1996

1996-1997

Evolution
en %

1997-1998

Evolution
en %

Passage régulier (1)

35 520

38 167

7,5

41 696

9,2

en % du chiffre d’affaires

67,2

68,6

 

68,7

 

Fret

6 739

6 780

0,6

7 616

12,3

en % du chiffre d’affaires

12,8

12,2

 

12,5

 

Autres activités aériennes (2)

1 991

2 049

2,9

2 370

15,7

en % du chiffre d’affaires

3,8

3,7

 

3,9

 

Total aérien

44 250

46 996

6,2

51 681

10,0

en % du chiffre d’affaires

83,8

84,5

 

85,1

 

Maintenance

2 429

2 320

- 4,5

2 494

7,5

en % du chiffre d’affaires

4,6

4,2

 

4,1

 

Catering

1 667

1 555

6,7

1 629

4,8

en % du chiffre d’affaires

3,1

2,8

 

2,7

 

Autres

4 483

4 731

5,5

4 911

3,8

en % du chiffre d’affaires

8,5

8,5

 

8,1

 

Total non-aérien

8 579

8 606

0,3

9 034

5,0

en % du chiffre d’affaires

16,2

15,5

 

14,9

 

Total général

52 829

55 602

5,3

60 716

9,2

(1) Transport de passagers sur vols réguliers

(2) dont frètement et charter

Source : Ministère de l’équipement, des transports et du logement.

Les activités aériennes continuent à voir leur part dans le chiffre d’affaires de la compagnie augmenter, (elles représentaient 83,8 % du chiffre d’affaires en 1996, 84,5 % l’an dernier et atteignent 85,1 % en avril 1998).

Au sein de ces activités, le transport de passagers connaît un essor important : le chiffre d’affaires lié à cette activité progresse de plus de 9 %, l’offre de la compagnie s’élève à plus de 95 milliards de sièges-kilomètres (+ 3,4 %) et le trafic augmente de 5,1 % pour atteindre 71,5 milliards de passagers-kilomètres transportés. Cette croissance plus rapide du trafic permet à Air France d’atteindre un coefficient de remplissage record (75,2 % contre 73,9 % en 1997) grâce en particulier à l’activité du réseau domestique de la compagnie.

S’agissant du transport de fret, le chiffre d’affaires du groupe pour le dernier exercice s’élève à 7,6 milliards de francs contre 6,7 milliards en 1997, soit une progression de 12,3 %. Grâce à l’introduction d’un nouvel avion cargo gros porteur, l’offre de la compagnie s’inscrit en hausse de plus de 6 %. Quant à la recette à la tonne-kilomètre, elle enregistre une progression du même ordre.

Les activités de maintenance et de “ catering ” progressent également respectivement de 7,5 % et 4,8 %. Toutefois, l’activité “ catering ” devrait connaître un léger repli dans les prochains exercices, Servair s’étant désengagé de la restauration ferroviaire au profit de la compagnie internationale des wagons-lits.

Enfin, Air France poursuit son recentrage sur son métier principal de transporteur et continue ainsi à se désengager dans diverses activités non aériennes. C’est ainsi qu’ont été cédés le 5 mai dernier les 98,7 % du capital que la compagnie détenait dans Jet Tours, les 57 % détenus dans Estelle et les 29 % du capital d’Amadeus France.

Au total, la compagnie affiche un résultat courant positif avant impôts de 1,3 milliard de francs, à comparer aux pertes de 870 millions de francs et de 2,2 milliards de francs relevées sur les comptes des deux exercices précédents.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DE PERSONNEL
DU GROUPE AIR FRANCE

(en effectifs moyens pondérés en équivalent temps plein)

 

1996-1997

1997-1998

Evolution en %

Personnel au sol France

38 933

37 642

– 3,3

en % de l’effectif total

70,4

69,3

 

Personnel au sol étranger

4 511

4 654

3,2

en % de l’effectif total

8,2

3,2

 

Total personnel au sol

43 444

42 296

 2,6

en % de l’effectif total

78,6

77,9

 

Personnel navigant commercial

8 402

8 595

2,3

en % de l’effectif total

15,2

15,8

 

Personnel navigant technique

3 423

3 434

0,3

en % de l’effectif total

6,2

6,3

 

Total personnel navigant

11 825

12 029

1,7

en % de l’effectif total

21,4

22,1

 

TOTAL

55 269

54 325

 1,7

2. L’exercice 1998-1999 : une zone de turbulences

Air France a connu au printemps dernier un des conflits les plus longs et les plus durs de son histoire. Le “ bras de fer ” entre les pilotes et la direction de la compagnie, commencé au premier semestre 1997, portait principalement sur la mise en place d’une double échelle des salaires, permettant à la compagnie d’embaucher des jeunes pilotes à un salaire inférieur à celui appliqué lors de l’entrée de leurs aînés dans la compagnie et selon un rythme de progression différent.

L’accord cadre signé le 10 juin dernier comporte plusieurs points :

– à l’occasion de l’ouverture du capital, les pilotes procèderont à un échange volontaire salaire-actions durant une période limitée à sept ans ;

– la grille de rémunération des personnels navigants techniques sera maintenue en francs courants pendant sept ans et pourra être ajustée durant cette période par la négociation ;

– la double échelle de rémunération des pilotes sera supprimée et remplacée par une filière spécifique (pilotes cadets) pour les jeunes pilotes formés par l’entreprise et qui constitueront la majorité des embauches. La notion de pilotes cadets avancée par le Syndicat national des pilotes de lignes, s’inspire de l’exemple de British Airways. Reste toutefois à régler la question du financement de la formation des pilotes cadets ;

Il est aujourd’hui difficile de dire si cet accord permettra à Air France d’atteindre l’objectif annuel de 500 millions de francs d’économies que la compagnie s’est assignée. Tout dépendra du succès de l’opération d’échange salaires-actions. Si les pilotes y adhèrent et dans l’hypothèse d’une inflation annuelle moyenne de 1 à 2 % pendant 7 ans, l’entreprise pourrait enregistrer à cette échéance une économie de l’ordre de 11 à 14 % sur la masse salariale du personnel navigant technique. Celle-ci étant de 3,8 milliards de francs, le maintien de la grille de rémunérations actuelles en francs courants génère une économie comprise entre 400 et 500 millions de francs. Enfin, la mesure concernant les pilotes cadets dégagera d’autres économies pouvant permettre d’atteindre l’objectif de 500 millions de francs que s’est fixé Air France.

Cette grève a eu des conséquences lourdes pour la compagnie qui se traduiront nécessairement dans les prochains comptes d’Air France ; le trafic passager a été inférieur de 27 % à celui réalisé en juin 1997 et de 34 % au trafic prévisionnel ; le coefficient d’occupation a subi un recul de 4,7 points ; la recette unitaire (calculée au siège-kilomètre offert) a chuté de 14 % par rapport à l’année dernière ; le trafic fret a baissé de 44,6 % par rapport à juin 1997 ; la perte directe due à la grève est estimée dans l’activité fret à 210 millions de francs.

Ces difficultés conjoncturelles n’empêchent toutefois pas Air France -8ème compagnie aérienne mondiale- de poursuivre sa stratégie de développement.

En effet, son offre de siège a augmenté de 11,5 % depuis avril dernier en particulier grâce à l’ouverture de nouvelles routes sur l’Amérique du Nord (Boston et Atlanta) consécutive aux alliances nouées avec Delta et Continental. Par ailleurs, Air France compte relancer sa politique d’embauche de pilotes. 270 ont déjà été embauchés entre juin 1997 et juillet 1998 et les besoins de la compagnie d’ici 2002 peuvent être estimés à plus de 800 pilotes.

B. QUELLE STRATÉGIE D’ALLIANCES POUR AIR FRANCE ?

Dans un ciel où les rapprochements entre grandes compagnies se multiplient, Air France a adopté une politique à la fois pragmatique, vigilante et prudente.

Elle a pour l’instant privilégié une double alliance avec deux partenaires nord-américains : Continental et Delta. Ces deux alliances de nature purement commerciales, devraient être transitoires et déboucher à terme sur un partenariat unique avec l’un et/ou l’autre des partenaires américains auxquels s’ajouteraient des tiers. La rumeur d’une alliance regroupant Continental, Northwest, Alitalia, KLM et Air France accrédite cette dernière thèse alors que la direction de la compagnie française continue d’affirmer qu’elle ne souhaite pas choisir pour l’instant entre ses deux alliés américains.

Quelque fondées que puissent être ces rumeurs, Air France poursuit la mise en oeuvre de ses alliances nord-américaines.

Dans un premier temps, ces accords ont abouti au regroupement des vols transatlantiques des compagnies américaines sur le hub d’Air France à Paris-Charles de Gaulle. Grâce à la conclusion du nouvel accord bilatéral franco-américain, la compagnie française a opéré dès le 19 juin dernier le partage de code avec Continental et Delta.

Cet accord permet à Air France et à ses deux partenaires américains d’exploiter en partage de code la quasi totalité de leurs vols entre la France et les États-Unis : les passagers sont ainsi transportés par Air France ou ses partenaires sur les parcours transatlantiques, et par Delta ou Continental Airlines sur les tronçons situés au-delà de leurs hubs respectifs ; ces vols portent le code Air France, en plus de celui de la compagnie américaine qui opère.

Air France offre désormais à ses clients au départ de Roissy des vols à destination d’Atlanta et de Boston en moyens propres, ainsi que vers Cincinnati en partage de code avec Delta. Au-delà de ces “ points d’entrée ”, les accords portent dans un premier temps sur 26 destinations intérieures aux États-Unis en correspondance des plates-formes d’Atlanta, de Cincinnati, de New-York et de Houston.

Par ailleurs, l’accord conclu avec Delta prévoit également l’exploitation en partage de code de la ligne Nice-New-York.

En affichant ainsi son code sur le réseau de ses alliés, Air France vise un fort développement de son offre commerciale sur les États-Unis : l’augmentation du nombre des destinations qu’elle commercialise lui permet une présence plus importante dans les systèmes de réservation, gage d’un meilleur remplissage de ses avions sur les vols transatlantiques.

Cet accord ne donnera son plein effet qu’à partir de la saison d’hiver 1998-1999.

Outre la double alliance américaine, Air France poursuit sa recherche de partenariat sur les autres continents. Citons en particulier :

– sur le continent américain 

· le partenariat avec Aeromexico datant de 1993 mais qui va s’intensifier à compter de 1999 grâce à un nouvel accord permettant le partage de code, se traduisant par la mise en oeuvre de deux vols quotidiens Paris-Mexico ;

· les accords avec TAM, deuxième compagnie aérienne brésilienne après Varig.

– En Europe

Outre un éventuel rapprochement déjà évoqué avec Alitalia et KLM par le biais de leurs alliés américains, Air France envisage d’étendre à l’Est son dispositif sur le Vieux Continent. Une alliance avec Aeroflot, compagnie qui veut bâtir un hub à Moscou et reconstituer le réseau intérieur russe, est amenée à se développer.

– En Asie

Air France dispose avec Japan Airlines (JAL) d’une coopération étendue reposant sur quelques points forts : le hub de Charles de Gaulle 2, les quotes-parts et la réussite des vols en code sharing sur Paris-Osaka. Par ailleurs, Air France a signé un accord de partage de code avec Korean Air, mis en oeuvre sur la ligne Paris-Séoul depuis le 1er septembre 1998.

L’alliance avec Air India et Indian Airlines conclue en 1997, ainsi que le transfert d’Air India à Charles de Gaulle 2 le 1er novembre 1997, a permis la mise en oeuvre d’accords de Frequent Flyer Program et de partage de code d’Air India sur Air France.

En Chine, Air France a conclu un accord avec China Eastern Airlines, compagnie basée sur le hub de Shanghaï qui sera, à terme, le plus important de la Chine continentale. Pour des raisons d’équilibre, la compagnie nationale a également maintenu ses relations avec Air China et garde des contacts avec les compagnies susceptibles de se développer, et qui pourraient, à terme, faciliter la desserte d’autres points en Chine (China Southern à Canton notamment).

En Asie du Sud-Est, Air France recherche activement un partenariat permettant de mettre en oeuvre des accords de partage de code et d’organiser des correspondances dans la zone. Singapore Airlines a été approchée sans que cette compagnie donne une suite positive à la demande d’Air France. Air France a également pris contact avec Thaï International, dans le but de passer un accord commercial sur Paris-Bangkok et sur divers points domestiques des deux pays. Celui-ci serait mis en oeuvre à compter de l’été 1999.

– En Afrique, dans l’Océan indien et au Proche-Orient

Air France s’efforce de moderniser les relations qu’elle a nouées avec les compagnies nationales de pays liés par une histoire commune avec la France tels les compagnies des pays du Maghreb, Air Gabon, Cameroon Airlines et Air Afrique ; elle tente également de se rapprocher d’autres compagnies (cf. l’accord de coopération avec la compagnie angolaise TAAG et les négociations ouvertes avec le transporteur libanais Middle East Airlines.)

C. Pour une ouverture maîtrisée et limitée du capital

“ L’ouverture du capital doit donner de l’oxygène à l’entreprise publique Air France ”. Cette formule de M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l’équipement, des transports et du logement résume à elle seule le paradoxe et la difficulté auxquels est confrontée l’entreprise.

Il faut en effet ouvrir le capital de la compagnie aérienne française sans pour autant lui faire renier son appartenance au secteur public.

Au fil des ans, avec la libéralisation des transports aériens et les manoeuvres de rapprochement auxquelles se livrent les grandes compagnies mondiales, l’ouverture du capital d’Air France était devenue inévitable. Une telle ouverture pourrait la placer dans une position plus claire vis-à-vis de ses partenaires commerciaux connus ou potentiels et lui permettre de financer un programme d’investissements lourds à court et moyen termes.

En effet, Air France a lancé une politique d’investissements ambitieuse de 40 milliards de francs, l’essentiel de cette somme étant destiné au renouvellement du parc d’avions.

Il est clair qu’aujourd’hui, pour reprendre un point de vue exprimé par un syndicaliste, “ l’argument selon lequel l’État devrait rester actionnaire unique parce qu’Air France est investi d’une mission de service public n’est pas pertinent. Les liaisons soumises à une obligation de service public sont effectuées par des compagnies privées. L’ouverture du capital est vitale. La participation des salariés au capital appelle des nouveaux droits de contrôle et d’intervention dans la gestion de l’entreprise, un droit de regard et d’intervention sur les options stratégiques - filiales, externalisations, croissance externe, ... ”.

Le 23 février 1998, les pouvoirs publics ont fait connaître les modalités d’ouverture du capital d’Air France :

·   une part du capital pouvant aller jusqu’à 20 % sera mise sur le marché dans un premier temps;

·   la part du capital réservée aux salariés s’élèvera à 15 % des titres mis sur le marché ;

·   pour contribuer à améliorer la compétitivité de l’entreprise face à ses concurrents, le principe d’un échange salaire-actions a été arrêté pour le personnel navigant technique ;

·   l’émission de bons de souscription d’actions (BSA) pour un montant de 1,5 milliard de francs permettra au groupe d’accroître ses capacités de financement.

Rapidement, la part détenue par l’Etat sera ramenée à 66 % (elle est actuellement de 94,3 %) et celle des salariés pourra atteindre 10 % (actuellement 2,2 %).

A l’issue de l’ensemble de ces opérations, la part de l’Etat dans le capital d’Air France devrait s’élever à 53 % et celle des salariés du groupe pourrait atteindre 20 %.

Une participation de l’État passant à un rythme accéléré de 94 % à 53 % ne va pas sans poser des problèmes, ni soulever des interrogations. On peut craindre qu’en détenant légèrement plus que la moitié du capital, un processus de privatisation puisse être rapidement enclenché à l’instar de la récente privatisation d’Aérospatiale décidée par le Gouvernement.

Des problèmes ne manqueront pas de se poser aux salariés actionnaires. D’abord une partie de leur rémunération est désormais liée aux résultats du groupe et prend donc un caractère aléatoire. Ensuite, les salariés actionnaires sont moins revendicatifs et donc plus enclins à accepter une remise en question des acquis sociaux.

Votre rapporteur tient donc à rappeler sa ferme opposition à toute privatisation d’Air France, quelles qu’en soient les modalités. Air France est une entreprise publique qui doit rester dans le secteur public.

Chapitre II

LA POLITIQUE AÉROPORTUAIRE

Mettre en œuvre une politique aéroportuaire équilibrée est aujourd’hui un exercice difficile puisque les pouvoirs publics doivent s’efforcer de concilier des exigences souvent contradictoires : faire face au développement du trafic, ouvrir l’accès au ciel français à des nouveaux acteurs attirés par la libéralisation du marché européen, permettre à la place aéroportuaire de Paris de se renforcer face à la concurrence des autres plates-formes européennes (aujourd’hui Paris est au 8ème rang mondial et au 2ème rang européen), insérer les plates-formes dans leur environnement en réduisant au maximum les nuisances sonores.

Pour résoudre cette difficile équation, il importe de rééquilibrer nos activités aéroportuaires en s’efforçant prioritairement de maîtriser le développement de Paris-Charles-de-Gaulle.

I.— L’ÉVOLUTION DU TRAFIC

ÉVOLUTION DU TRAFIC DES AÉROPORTS DE PARIS

 

1997

 
 

Résultats

Variation 1997/1996

Variation

(1er sem.1998/1er sem. 1997)

Mouvements commerciaux
(en milliers)

632,6

+ 4,4 %

+ 5,3 %

trafic intérieur

221,9

+ 5,6 %

+ 9,5 %

trafic international

410,7

+ 3,8 %

+ 3,1 %

Tonnage atterri commercial
(en milliers de tonnes)

27 510

+ 0,5%

+ 4,0%

trafic intérieur

6 223

– 5,8 %

+ 5,1 %

trafic international

21 287

+ 2,6 %

+ 3,7 %

Passagers commerciaux
(en milliers)

60 350

+2,1 %

+ 4,9%

trafic intérieur

19 119

– 2,0%

+2,3 %

trafic international

41 006

+ 4,5 %

+ 6,3 %

transit direct

225

– 31,7 %

– 25,0 %

Fret commercial et poste
(en milliers de tonnes)

1 309,5

+ 5,5 %

 

trafic intérieur

163,5

– 2,7 %

 

trafic international

1 146

+ 6,8 %

 

Avec 60,3 millions de passagers commerciaux accueillis en 1997, la place aéroportuaire de Paris a connu une hausse d’activité de 2,1 % par rapport à l’exercice précédent. Cette croissance modérée du trafic intervient après une progression soutenue (+ 7,4 %) enregistrée en 1996. La croissance moyenne sur les cinq dernières années a été de 3,9 %.

Le résultat de 1997 s’explique par des variations opposées entre les faisceaux nationaux et internationaux. Ainsi, le trafic intérieur –affecté notamment par la multiplication des conflits sociaux au sein des compagnies françaises durant le premier semestre– a connu une baisse de 2 %. A l’inverse le trafic international progresse de 4,5 % (+ 2 % pour le trafic intracomunautaire et + 6,5 % pour le trafic extracommunautaire).

Toutefois, l’exercice 1998 devrait voir une reprise marquée du trafic comme en témoigne la progression enregistrée sur les six premiers mois (+ 4,9 % pour le trafic passager malgré la grève des pilotes). Sur l’ensemble de l’année en cours, Aéroports de Paris prévoit même une progression du nombre de passagers avoisinant les 6,5 % et une hausse des mouvements commerciaux de 5,7 %.

Depuis 1996, la répartition du trafic entre les deux aéroports parisiens s’effectue au bénéfice de Roissy-Charles-de-Gaulle, qui, “ tiré ” par le hub d’Air France et la bonne tenue du trafic long courrier, a progressé en 1997 de 11 % à 35 millions de passagers. Dans le même temps, l’activité d’Orly fléchissait de 8,5 % et s’établissait à 25 millions de passagers.

II.— UNE EXTENSION LIMITÉE DES CAPACITÉS
DE LA PLATE-FORME AÉROPORTUAIRE DE PARIS

A.— LES PISTES

Actuellement, l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle est doté de deux pistes longues de 3600 mètres chacune et espacées de 3000 mètres. De ce fait, elles sont considérées comme indépendantes du point de vue des approches aux instruments et pour les atterrissages par mauvaise visibilité.

Dès le début des années 1990, les prévisions d’accroissement du trafic laissaient supposer un rapide engorgement de la plate-forme, d’où l’avant-projet de plan de masse élaboré en 1993 par les pouvoirs publics après une concertation des plus symboliques avec les populations avoisinantes.

Contesté de toute part, cet avant-projet qui comportait la construction de deux doublets et d’une cinquième piste a fait long feu. En 1995, le rapport d’étude de la mission confiée à M. Jacques Douffiagues prônait la construction de deux pistes supplémentaires seulement, longues de 2700 mètres et uniquement destinées à l’atterrissage.

Les enquêtes publiques préalables à la réalisation des deux pistes supplémentaires se sont déroulées du 3 juin au 18 juillet 1996 sur le territoire de 67 communes situées dans les départements du Val d’Oise, de la Seine-et-Marne et de la Seine-Saint-Denis. La commission d’enquête a remis son rapport le 14 novembre 1996 et a émis un avis favorable au projet, assorti de plusieurs conditions visant à limiter les nuisances sonores.

Le décret déclarant d’utilité publique les travaux et acquisitions nécessaires à l’aménagement des infrastructures de l’aéroport de Roissy a été signé le 27 mars 1997.

L’aéroport comportera donc quatre pistes réparties en deux doublets, l’un au Nord et l’autre au Sud, comprenant chacun, une des pistes existantes.

Comme le proposait le rapport Douffiagues, les deux nouvelles pistes seront destinées aux seuls atterrissages et auront une longueur de 2700 mètres. Leur seuil Ouest est décalé de 900 mètres vers l’Est par rapport à celui des pistes existantes.

Enfin, compte tenu de la position décalée du nouveau seuil d’atterrissage et pour éviter les dangers dus aux turbulences de sillage, les décollages vers l’Est sur les pistes existantes seront décalés de 600 mètres vers l’Est, impliquant un prolongement d’égale longueur de ces pistes vers l’Est.

Quant à l’échéancier des travaux, il se présente ainsi :

– Pour le doublet Sud :

L’allongement de 600 mètres vers l’Est de la piste 2 a été réalisé du 4 avril au 2 septembre 1997.

Les travaux de la piste 4 (piste nouvelle) ont été interrompus à la demande du ministre de l’équipement, des transports et du logement pendant l’été 1997. Ils sont maintenant sur le point d’être achevés, ainsi que les travaux d’équipement électrique et notamment le balisage.

Les essais devant aboutir à l’homologation de la nouvelle piste sont prévus du 1er octobre au 15 novembre 1998, date à laquelle devrait avoir lieu la mise en service. La piste 2 sera alors fermée pour permettre de réaliser les voies de raccordement situées dans ses servitudes.

La réouverture de la piste 2 et la mise en service du doublet Sud, sont prévues le 1er mars 1999.

– Pour le doublet Nord :

Le projet d’origine comporte, outre la réalisation de la piste 3 et de ses voies de circulation, l’allongement de 600 mètres vers l’Est de la piste 1. Cet allongement nécessite la construction d’un pont sur la ligne TGV. La piste 3, quant à elle, comporte un ouvrage d’art pour le franchissement de l’autoroute A1 sur une longueur de 230 mètres.

C’est le délai de construction de cet ouvrage qui conditionne le délai global. Le début des travaux est prévu en novembre 1998 et leur fin en juillet 2000.

Pendant ce temps, les travaux de terrassement, de réseaux et de chaussées seront effectués. La construction du pont sur la ligne TGV sera avancée.

La mise en service de la piste 3 après essais et homologation est prévue le 1er septembre 2000. A cette date, la piste 1 sera fermée pour permettre la réalisation des voies de raccordement situées dans ses servitudes. La mise en service du doublet réduit interviendra le 1er novembre 2000. En effet, cette mise en service est désormais envisagée en configuration “ réduite ” (allongement de la piste 1 limité à 280 mètres, sans pont au dessus de la ligne TGV). Quant à la mise en service du doublet définitif, après achèvement du pont, avec un allongement de la piste 1 de 600 mètres, elle est prévue le 1er septembre 2001.

En tenant compte de la piste du Bourget, la capacité actuelle des deux pistes de Roissy est de 84 mouvements par heure en pointe. Cette capacité passera à 100 mouvements par heure après l’ouverture du doublet Sud et sera portée à 120 après la mise en service du doublet Nord.

Les coûts de réalisation des deux doublets sont estimés à 760 millions de francs pour le doublet Sud et à 1010 millions de francs pour le doublet Nord.

Ces coûts comprennent les acquisitions foncières nécessaires, l’allongement des pistes existantes, les nouvelles pistes et les équipements associés (balisage, équipements de navigation aérienne...) et pour le doublet Nord, les ouvrages de franchissement de l’autoroute et du TGV.

Ces dépenses d’investissements sont financées en partie par autofinancement (55 %) et en partie par emprunt (45 %).

B.— LES AÉROGARES PASSAGERS

Compte tenu d’une prévision de croissance du trafic passager de 4,5 % par an sur moyenne période, les aéroports parisiens devraient accueillir annuellement 15 millions de passagers supplémentaires d’ici l’an 2002.

Les installations existantes et les réalisations en cours devraient permettre de faire face aux besoins jusqu’en 2000-2001, à condition que l’aéroport d’Orly puisse recevoir un trafic proche de sa capacité nominale d’accueil.

Au-delà, le besoin d’une nouvelle aérogare se fera fortement sentir à partir de 2002.

Cette nouvelle aérogare, l’aérogare 2E, a été étudiée par Aéroports de Paris dans l’optique d’une mise en service progressive en 2003 au plus tôt. Elle doit constituer à terme, avec l’aérogare 2F, actuellement en cours de réalisation, l’aérogare de correspondance de la compagnie Air France. Elle nécessite un système de tri bagages performant et un grand nombre d’aires au contact de l’aérogare pour permettre à la compagnie de respecter un temps maximum de correspondance de 45 minutes.

III.— LA LUTTE CONTRE LES NUISANCES SONORES

Dès sa mise en place, le Gouvernement soutenu par la majorité plurielle, a clairement fait de la lutte contre les nuisances autour des aéroports, une priorité de sa politique des transports aériens. Plusieurs décisions et projets sont là pour en témoigner.

A.— LES MODIFICATIONS DU CODE D’EXPLOITATION

L’ensemble des mesures destinées à atténuer les nuisances aux abords des aéroports est rassemblé dans un texte dénommé “ Code d’exploitation ”.

Ce code d’exploitation contient :

– des restrictions d’utilisation d’aérodrome (modalités d’utilisation des pistes, essais moteurs, restriction d’utilisation de nuit) ;

– des restrictions d’utilisation des aéronefs (procédures opérationnelles de décollage, procédures d’atterrissage) ;

– des restrictions en matière de circulation aérienne : utilisation de certaines trajectoires de départ et obligation de suivi de certaines trajectoires pour certains appareils.

L’arrêté du 17 décembre 1997 a sensiblement modifié ce code. Les principales mesures nouvelles portent sur :

– l’interdiction d’atterrir et de décoller faite aux avions classés “ chapitre 2 ” aux heures de nuit ;

– l’obligation de suivi des procédures de moindre bruit de nuit pour les avions classés “ chapitre 3 ” munis de silencieux ;

– les essais moteurs, aucun essai ne pouvant désormais être effectué entre 22 heures et 6 heures.

Depuis le 1er janvier 1998, 232 procès-verbaux d’infraction au code d’exploitation ont été dressés à Roissy dont plus de 90 % sanctionnent des vols d’avions de chapitre 2 de nuit.

B.— LA MISE EN ŒUVRE DE LA CHARTE DE QUALITÉ DE L’ENVIRONNEMENT SONORE

Les différents acteurs intéressés à l’exploitation des plates-formes aéroportuaires (Etat, aéroport de Paris, compagnies aériennes, collectivités locales, associations de riverains) ont souscrit le 9 juillet 1998 une charte de qualité de l’environnement sonore. Celle-ci vise à promouvoir toutes les actions susceptibles de limiter à la source les nuisances sonores.

Pour y parvenir, un “ code de bonne conduite ” a été établi en concertation par les professionnels du transport aérien et les services de l’Etat. Ce code porte sur les procédures de départ, de décollage et d’approche, sur l’interception des axes d’approches, sur les consignes d’exploitation et sur la formation. Trois dossiers font l’objet d’une étude approfondie : les départs des aéronefs à hélices de Roissy-Charles-de-Gaulle en direction du Nord, la séparation des flux de trafic entre Roissy et le Bourget dans certaines configurations et l’interception de divers axes d’approches.

C.— L’ÉVOLUTION DE LA TAXE D’ATTÉNUATION DES NUISANCES SONORES

Créée par la loi n° 92-1444 du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit, cette taxe est due par les exploitants d’aéronefs à l’occasion de tout mouvement d’aéronefs de masse maximale au décollage de deux tonnes. Corrélée aux nuisances générées par les appareils concernés, elle est affectée à l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME).

Cette taxe a été augmentée de 50 % en 1998 et le sera de 33 % en 1999. Son produit (69 millions de francs en 1998 et 92 millions de francs en 1999) est redistribué sous forme d’aide aux travaux d’insonorisation.

A la fin 1997, le produit de la taxe depuis sa création en 1993 s’élevait à environ 200 millions de francs. Plus des 4/5 de cette somme ont été reversés aux ayants droits.

RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DES DOSSIERS ACCEPTÉS
PAR LES COMMISSIONS CONSULTATIVES D’AIDE AUX RIVERAINS

 


Nombre de dossiers acceptés

Nombre de logements concernés

Montant total estimé
des travaux

(en millions de francs)

Aéroports parisiens

1 699

4 310

150,4

Toulouse

170

170

11,9

Marseille

87

100

0,4

Nice

14

145

2,2

Lyon

4

22

0,6

Total

1 974

4 765

165,4

Source : ADP

TYPE DE LOGEMENTS AIDÉS

 

Logements individuels

Logements collectifs

Total

Aéroports parisiens

1 733

2 577

4 310

Toulouse

166

4

170

Marseille

82

18

100

Nice

0

145

145

Lyon

0

22

22

Source : ADP

En outre, sur les 1 974 dossiers acceptés par les commissions consultatives d’aide aux riverains, 18 concernent des bâtiments d’enseignement ou à caractère sanitaire ou social, pour une aide globale estimée à 16,8 millions de francs.

Deux réunions des commissions consultatives d’aide aux riverains d’Orly et de Roissy-Charles de Gaulle se sont tenues en septembre dernier et ont examiné des demandes portant sur 444 logements et 3 établissements d’enseignement. Quant aux dossiers qui devront être traités en priorité dans les prochains mois, signalons que figure celui portant sur les travaux du centre hospitalier de Gonesse.

D.— LA CRÉATION D’UNE AUTORITÉ DE CONTRÔLE TECHNIQUE DE L’ENVIRONNEMENT SONORE AÉROPORTUAIRE

Cet arsenal de lutte contre les nuisances sonores se trouvera complété avant la fin de l’année avec l’adoption d’un projet de loi mettant en place une autorité indépendante compétente pour tous les problèmes relatifs au bruit généré par les aéroports.

Composée de sept membres nommés pour six ans et dotée d’un budget propre, l’autorité de contrôle technique de l’environnement sonore aéroportuaire aura compétence sur les principaux sites aéroportuaires du pays (Paris-Charles de Gaulle, Paris-Orly, Nice, Marseille, Toulouse, Lyon-Satolas, Mulhouse, Bordeaux, Strasbourg).

Sa mission consistera à définir les prescriptions techniques applicables aux stations de mesure du bruit, à recueillir et à diffuser les informations sur le bruit dû au transport aérien et à donner son avis sur les projets de plan d’exposition au bruit, de plan de gêne sonore et sur les projets d’élaboration et de modification des procédures de décollage, d’atterrissage, d’attente et d’approche.

Dans le même temps, les commissions consultatives de l’environnement (commissions composées d’élus, d’associations de riverains, de représentants des compagnies aériennes et de leur personnel) présentes sur chaque aéroport verront leur rôle renforcé puisque ce sont elles qui devront élaborer et assurer l’application des chartes de qualité de l’environnement sonore.

Chapitre III

LA CONSTRUCTION AÉRONAUTIQUE

Après la fusion Boeing-Mc-Donnell Douglas, il était clair que les constructeurs européens allaient chercher à fédérer leurs forces afin de ne pas laisser aux Américains le champ libre sur un marché aux perspectives de croissance prometteuse.

Avant les premiers rapprochements européens, le chiffre d’affaires du nouveau géant américain représentait près du quadruple de celui de leader européen British Aerospace et était cinq fois supérieur à celui de l’Aérospatiale et de Dasa.

L’année 1998 – marquée par une croissance soutenue malgré la crise asiatique – aura donc été celle des “ grandes manoeuvres ” sur le vieux continent. On peut certes estimer que de ces alliances – réalisées ou potentielles – dépend la survie de l’industrie aéronautique européenne, mais on ne peut, dans le même temps, que s’inquiéter de la mise à l’écart des salariés de ces entreprises dans ces multiples négociations. Tous ces projets, hautement stratégiques, sont développés en dehors de tout débat public. Les décisions sont prises par les gouvernements et les industriels et la question de l’emploi ne semble pas constituer la préoccupation principale de ceux-ci. C’est pourquoi, votre rapporteur souhaite que la restructuration du secteur de la construction aéronautique fasse l’objet d’un débat devant le Parlement.

I.— UNE DEMANDE SOUTENUE

A. UN EXERCICE 1997 PLUTÔT PROFITABLE AUX CONSTRUCTEURS FRANÇAIS

La reprise du transport aérien en 1997 a eu une répercussion directe sur les chiffres d’affaires des constructeurs aéronautiques.

ÉVOLUTION DU CHIFFRE D’AFFAIRES ET DES EFFECTIFS

DE L’INDUSTRIE AÉROSPATIALE

 

Chiffres d’affaires 1997
(en milliards de francs)

1997/1996
(%)

Effectifs directs
(en milliers)

1996/1995
(%)

Industrie aérospatiale américaine
dont aéronautique civile

752

224

27 %

64 %

869

274

8 %

11 %

Industrie aérospatiale européenne
dont aéronautique civile

367

188

17 %

nd

377

nd

+ 1 %

nd

Industrie aérospatiale française
dont aéronautique civile

106

50

18 %

33 %

95

40/45

– 1 %

nd

Source : ministère de l’équipement, du logement et des transports

Dans leur ensemble, les constructeurs européens ont mieux profité de cette conjoncture favorable que Boeing :

– les commandes fermes d’Airbus industrie ont augmenté en quantité (460 contre 326, soit + 41 %) et en valeur (178 milliards de francs contre 120, soit + 48 %). En termes de commandes nettes, Airbus a enregistré 64 commandes de moins que Boeing (438 contre 502) alors que l’écart était de 258 unités un an plus tôt. Sur les six premiers mois de 1998, les commandes d’Airbus sont, pour la première fois supérieures à celles de Boeing (287 contre 279).

Par ailleurs, Airbus industrie a livré 182 avions, représentant 170 milliards de francs en 1997, contre 126 en 1996, représentant 46 mil-liards de francs.

Au 1er janvier 1998, le carnet de commandes d’Airbus s’établissait à 1 009 appareils (contre 753 en 1996) à comparer au 1 744 avions commandés à Boeing. La faible progression des commandes de Boeing (+ 7 % contre + 34 % à Airbus) traduit les difficultés actuelles de l’avionneur américain.

En effet, pour la première fois depuis 50 ans, l’avionneur a affiché une perte comptable de près de 180 millions de dollars, en dépit d’une hausse de 29 % du chiffre d’affaires à 49,8 milliards de francs qui résulte, pour partie, de la fusion opérée avec Mc Donnell Douglas.

Ce résultat déficitaire est dû aux provisions importantes, (d’un montant global de 3 milliards de dollars) qui sont destinées à couvrir des ajustements de stocks liés à l’acquisition de Mc Donnell Douglas et à l’accélération mal maîtrisée des cadences de production.

Pour mettre fin à cette situation, l’avionneur de Seattle s’est, d’ores et déjà, engagé dans un vaste plan de restructuration qui doit aboutir notamment à l’arrêt de plusieurs programmes et à la diminution, au cours des deux ans à venir, de 8,5 % de l’effectif total de Boeing (238 000 personnes).

Il n’est pas évident que l’année 1998 marque un retour à l’équilibre pour Boeing car la crise asiatique a plus durement frappé ce constructeur que ses concurrents européens (les commandes des compagnies asiatiques représentent 15,9 % du carnet de Boeing contre 9,8 % pour Airbus).

– Dassault aviation a enregistré 97 commandes de sa gamme Falcon en 1997 (41 en 1996) confortant ainsi sa place de leader mondial des jets d’affaires haut de gamme ; ce constructeur a, dans le même temps, livré 53 appareils, plaçant les livraisons à leur plus haut niveau depuis dix ans.

– Eurocopter demeure le premier constructeur d’hélicoptères mondial, tant en termes de chiffre d’affaires (10,1 milliards de francs, en hausse de 6 %), que de parts de marché ; 276 commandes fermes ont été enregistrées en 1997 (contre 202 l’année précédente).

– SNECMA a vu son chiffre d’affaires progresser de 23 % (23 milliards de francs). 700 Moteurs lui ont été commandés (contre 607 en 1996).

– Seul ATR voit, sur le marché des avions régionaux, sa position fragilisée. En effet, l’offre de turbo-propulseurs est, pour ce type d’appareils, désormais largement devancée par celle des jets régionaux ; les concurrents directs d’ATR, comme Bombardier ou Embraer, vendent environ 150 avions de ce genre par an, alors que les livraisons d’ATR s’élèvent à 37 appareils, soit à un niveau largement en-deçà du point d’équilibre du programme fixé entre 45 et 50 avions par an.

B.— DES PERSPECTIVES ENCOURAGEANTES DE PROGRESSION DES MARCHÉS

Les études, récemment publiées par Boeing et Airbus, inclinent à l’optimisme. Fondées sur une hausse moyenne du trafic passagers de l’ordre de 5 % et sur une sensible amélioration de la situation financière des compagnies aériennes, leurs estimations sont relativement proches, quant au nombre d’appareils livrés.

 

Nombre total d’appareils nouveaux
(1998–2107)

dont
croissance
du trafic

dont renouvellement
des flottes

Etude Boeing

17 650

13 250 (est.)

4 400 (est.)

Etude Airbus

> 16 700

8 200

8 500

Source : Boeing et Airbus

En revanche, les prévisions des deux constructeurs diffèrent sensiblement quant à l’évolution de la structure du marché.

Ainsi, la différence d’appréciation concernant les très gros porteurs, tient à la volonté de Boeing, qui dispose aujourd’hui d’un monopole très lucratif sur ce segment du marché, de décourager Airbus de lancer l’A3XX (appareil pouvant transporter 450 à 550 passagers et qui pourrait être mis en service en 2004 ; le coût du programme de développement de cet avion est de 11 milliards de dollars, des industriels étrangers au consortium Airbus, tel le Hollandais Fokker Aircraft, le Belge Bel Airbus ou l’italien Aliena pouvant y être associés.)

 

Appareils à couloir unique

Gros porteurs

Très gros porteurs
> 400 sièges

 

Nombre d’appareils

Part relative en valeur (%)

Nombre d’appareils

Part relative en valeur (%)

Nombre d’appareils

Part relative en valeur (%)

Etude Boeing

12 260
(70 %)

42 %

4 360
(24 %)

43 %

1 030
(6 %)

15 %

Etude Airbus

9 410
(54 %)

nd

6 027
(36 %)

nd

1 332
(8 %)

nd

Sources : Boeing et Airbus

II.— LES GRANDES MANŒUVRES DU SECTEUR DE LA CONSTRUCTION AÉRONAUTIQUE EUROPÉENNE

A.— VERS L’ÉMERGENCE D’UN GÉANT EUROPÉEN DE L’AÉRONAUTIQUE

Le 9 décembre 1997, la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni ont, par une déclaration conjointe, invité leurs industriels à unir leurs capacités au sein d’une grande société d’aéronautique et de défense. Ces industriels ont remis en mars 1998 un rapport présentant leurs vues sur la façon d’opérer les rapprochements. De nouvelles propositions devraient être formulées prochainement, les réflexions associant désormais également l’Italie et la Suède.

Se dessine ainsi l’émergence d’un futur pôle européen que certains appellent déjà EADC (European Aerospace and Defense Company) qui pourrait regrouper British Aerospace, Dasa et le groupe Aerospatiale-Matra.

Si les parties à la négociation étaient d’accord sur l’objectif, des divergences sont apparues sur les modalités de constitution du futur groupe ; les Français semblaient priviligier un scénario en deux actes avec un regroupement des forces par métier précédant la fusion des sociétés concernées, en revanche, Allemands et Britanniques plaidaient pour une privatisation rapide et préfèraient la création rapide d’une société globale, coiffant l’ensemble des branches d’activités indépendantes.

L’annonce récente du rapprochement British Aerospace-Dasa traduit cette impatience anglo-allemande. Aujourd’hui, il est encore trop tôt pour dire si, après cette fusion annoncée, l’EADC est devenu un projet mort-né ; il est également prématuré d’en tirer des conclusions sur l’avenir d’Aérospatiale et la pérennité d’Airbus. Si le rapprochement de Bristish Aerospace et Dasa peut bouleverser à terme l’équilibre d’Airbus, il ne devrait toutefois pas remettre en cause les projets liés à la réforme de son statut.

B.— LA MÉTAMORPHOSE D’AIRBUS

Airbus est actuellement un groupement d’intérêt économique regroupant quatre constructeurs européens : Aérospatiale (37,9 % du capital) , Dasa (37,9 %), British Aerospace (20 %) et CASA (4,2 %).

Ces quatre industriels ont signé en janvier 1997 un accord par lequel ils reconnaissent la nécessité de faire évoluer la structure juridique du groupement. Ils se sont fixés pour objectif d’avoir transformé le GIE Airbus en société anonyme en 1999.

Pour y parvenir ils ont mis en place deux groupes de travail :

– Un premier groupe a pour mandat de traiter les problèmes de nature industrielle, sociale et fiscale.

Selon ses premiers travaux, il semble acquis que le futur groupe Airbus aura sous son contrôle l’ensemble des ressources industrielles et humaines participant à l’activité du GIE chez les divers partenaires. Cela signifie que les établissements industriels d’Aérospatiale ainsi que le bureau d’études de la branche aéronautique seront directement rattachés à la future société Airbus.

Il semble également admis que la structure Airbus s’articulera en une société de tête qui reprendra les activités directement gérées par le GIE et des filiales nationales détenues à 100 %, regroupant les moyens des partenaires.

– Un deuxième groupe est chargé de l’évaluation des biens apportés par chaque industriel à la société Airbus. C’est à partir de ce chiffrage que sera déterminée la valeur des actifs.

Les industriels se sont donnés jusqu’à la fin de l’année pour parvenir à un accord sur ce point.

Il est certain que ces perspectives suscitent une légitime inquiétude parmi le personnel d’Aérospatiale qui craint un éclatement du groupe et qui pense que le statut de GIE n’est pas étranger au succès d’Airbus. De fait, ce statut n’avait pas constitué un obstacle à la pénétration du marché, Airbus ayant en 25 ans conquis 35 % du marché mondial des avions de plus de 100 places.

Par ailleurs, la demande des Italiens d’Alenia d’entrer dans le capital de la future société est à considérer avec prudence en raison des liens industriels anciens unissant ce constructeur à Boeing.

C. LE RAPPROCHEMENT AÉROSPATIALE–MATRA

Le Gouvernement a, dans le secteur des industries de défense et de la construction aérautique la volonté de créer deux grands pôles :

– un pôle spécialisé dans l’électronique de défense (communications militaires, système de contrôle du trafic aérien, radars, électronique de vol) constitué autour de Thomson, Alcatel et Dassault Industrie ;

– un pôle spécialisé dans la construction aéronautique dont l’Aérospatiale serait le centre. Le rapprochement avec Matra entre dans cette logique de même que l’émergence à terme de la méga-société européenne intégrant l’aéronautique civile et militaire et dont le coeur serait la nouvelle société Airbus.

Le Gouvernement a confirmé le rôle de pivot qu’il entendait voir jouer à Aérospatiale dans ce secteur. Il a ainsi autorisé le transfert des parts que l’État détenait dans le capital de Dassault Aviation et a approuvé la cession de Matra Hautes technologies à Aérospatiale, cession permettant au groupe Lagardère de devenir l’actionnaire de référence de la nouvelle entité économique.

En effet, à la suite de ce rapprochement, la part de l’Etat dans le capital d’Aérospatiale est tombée à moins de 50 %. Une partie importante du capital du nouveau groupe sera introduite en bourse. Même si les salariés se verront proposer d’acquérir des actions et même si les parts de capital détenues par l’État et le personnel seront majoritaires, il n’empêche que, cette opération faite après une concertation minimale du personnel, apparaît aux yeux de votre rapporteur comme un abandon par l’Etat de sa possibilité de contrôler une activité hautement stratégique et ce, afin de faciliter la constitution de grandes concentrations industrielles privées.

L’emprise de la puissance publique sur un secteur essentiel pour notre économie et pour notre indépendance nationale est ainsi en train de se déliter.

Chapitre IV

LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1999

Les crédits affectés aux transports aériens et aux aéroports sont depuis 1992 inscrits pour leur quasi-totalité au budget annexe de l’aviation civile.

Seuls les crédits soutenant la construction aéronautique et la subvention de l’Etat au budget annexe de l’aviation civile (chapitre 36-25 de la section Transports), figurent au budget général.

Enfin, depuis 1995, les crédits du fonds de péréquation des transports aériens sont inscrits au compte d’affectation spéciale n° 902-25.

I.— LE BUDGET ANNEXE DE L’AVIATION CIVILE

PROJET DE BUDGET ANNEXE DE L’AVIATION CIVILE POUR 1999

(en millions de francs)

Recettes

Dépenses

Répartition

Montant

1998

Montant

1999

Évolution

en %

Répartition

Montant

1998

Montant

1999

Répartition

en %

Recettes propres

7 187,16

7 518,39

+ 4,6 %

Dépenses d’exploitation

6 231,75

6 584,40

+ 5,65 %

Subvention de l’Etat

215

215

-

       

Emprunt

1 042,52

830

- 20,38 %

Dépenses en capital (CP)

2 237,71

2 129,76

+ 4.82 %

Autres recettes

24,78

25,77

+ 3,99 %

       

TOTAL

8 469,46

8 714,16

+ 2,88 %

TOTAL

8 469,46

8 714,16

+ 2,88 %

Ce budget annexe est destiné à financer les missions incombant à l’Etat dans le secteur des transports aériens, à savoir une mission de réglementation et de sûreté, d’une part, et une activité de prestataire de services aux compagnies aériennes, d’autre part.

S’élevant à 8,71 milliards de francs, le budget annexe présenté dans le projet de loi de finances pour 1999 affiche une hausse de 2,8 % par rapport à celui de l’exercice précédent.

Pour la troisième année consécutive, la subvention du budget général est reconduite à 215 millions de francs, confirmant aussi la volonté du Gouvernement de refuser la logique du désengagement de l’Etat dans le secteur du transport aérien.

Toutefois, si la baisse est enrayée en valeur absolue, la part représentée par la subvention de l’Etat dans l’ensemble du budget annexe ne cesse de décroître, comme le montre le tableau ci-après :

ÉVOLUTION DE LA SUBVENTION DE L’ÉTAT AU B.A.A.C.

L.F.I.

Montant

Part de la subvention de l’Etat dans le B.A.A.C.

1993

304,9

4,6 %

1994

265

3,7 %

1995

260,6

3,6 %

1996

260

3,4 %

1997

215

2,7 %

1998

215

2,5 %

1999

215

2,4 %

Aujourd’hui, l’essentiel des recettes du budget annexe provient donc des diverses taxes et redevances acquittées par les compagnies aériennes, à savoir :

– les redevances de routes que doit payer tout avion qui survole notre espace aérien sans atterrir en France ; celles-ci s’élèvent dans le budget pour 1999 à 4,98 milliards de francs(+ 4,6 % par rapport à 1998) ;

– les redevances pour services terminaux de la circulation aérienne que doivent les compagnies dont les vols atterrissent sur notre territoire (1,12 milliard de francs inscrit en 1999 soit une hausse de 0,6 %) ;

– la taxe de sécurité et de sûreté (1,27 milliard de francs en 1999 correspondant à une progression de 7,6 %).

Le produit de ces trois taxes et redevances s’élève à 7,39 milliards de francs et représente 84 % des recettes totales et 95 % des recettes d’exploitation du budget annexe de l’aviation civile. S’appuyant sur une progression du trafic aérien, leur produit total progresse de 4,4 % par rapport à 1998, hausse d’autant plus remarquable que les taux unitaires de deux redevances sont en baisse.

Mais cette baisse annoncée par le ministère de l’équipement, du logement et des transports est difficile à interpréter. En effet, en raison de l’annulation par un arrêt du Conseil d’Etat du 20 mai dernier, de l’article 4 de l’arrêté du 21 février 1996 et de l’article 2 de l’arrêté du 16 avril 1996 fixant les taux de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne, le Gouvernement va réformer la fiscalité assise sur les compagnies aériennes et les aéroports.

L’article R. 134-4 du code de l’aviation civile prévoit que “ les services rendus par l’Etat pour la sécurité de la circulation aérienne et pour la rapidité de ses mouvements à l’arrivée et au départ des aérodromes dont l’activité dépasse un certain seuil donnent lieu à rémunération sous forme d’une redevance pour services rendus dite redevance pour services terminaux de la circulation aérienne ”.

Le Conseil d’Etat a rappelé que les coûts des missions d’intérêt général n’avaient pas à être inclus dans l’assiette de la redevance mais devaient être financés par l’impôt. Dans cet esprit, il a jugé que les coûts afférents au service de sécurité d’incendie et de sauvetage, au balisage lumineux des pistes, aux installations affectées à la gendarmerie et au fonctionnement de l’école nationale de l’aviation civile, n’avaient pas à être pris en compte dans le calcul de la redevance.

Dans ces conditions, on comprendra qu’il est difficile pour votre rapporteur de se faire une idée précise de la réalité du budget annexe de l’aviation civile, une part importante de ses recettes devant faire instamment l’objet d’une réforme profonde.

S’agissant des dépenses inscrites au budget annexe, il convient d’apporter plusieurs remarques :

– les dépenses de fonctionnement voient leur baisse enrayée (+ 1,9 % après - 0,5 % en 1998, - 5,4 % en 1997 et - 3,2 % en 1996) ;

– en revanche, les dépenses d’investissement enregistrent un repli préoccupant (- 11,1 % en autorisations de programme et - 12,7 % en crédits de paiement). En effet, ces dotations doivent permettre en particulier de moderniser les centres de contrôle et de développer des simulateurs de trafic aérien destinés à la formation des contrôleurs ;

– les moyens de paiement destinés aux bases aériennes progressent de 4,2 % (368 millions de francs contre 353 en loi de finances initiale pour 1998) ;

– le financement prévu pour la sûreté (190 millions de francs en crédits de paiement et 202 millions de francs en autorisations de programme) permettra de renforcer la sécurité de l’accès aux zones réservées des 35 plus grands aéroports commerciaux avant l’an 2000 et d’améliorer l’équipement des aérogares en contrôle des bagages de soute avant la fin 2002 ;

– les montants consacrés aux infrastructures (148,5 millions de francs d’autorisations de programme et 173,3 millions de francs de crédits de paiement) traduisent le ralentissement de certains programmes d’équipement de métropole et d’outre-mer, la stabilisation du remboursement d’une partie des avances faites dans le cadre des règlements de fin de concession aéroportuaire ; ils incluent également la part de génie civil prise en charge par la direction générale de l’aviation civile dans la construction du nouvel aéroport de Wallis ;

– enfin, les dépenses de personnel progressent de 5,2 % permettant la création de 227 emplois. Ces créations s’inscrivent partiellement dans le cadre du protocole signé le 3 novembre 1997 entre le ministère de l’équipement, du logement et des transports et les organisations syndicales. Selon les termes de cet accord, 270 contrôleurs et 90 électroniciens devraient être recrutés au cours de la période 1998-2000 pour compenser les départs en retraite.

II.— LE SOUTIEN BUDGÉTAIRE DESTINÉ À LA CONSTRUCTION AÉRONAUTIQUE CIVILE

(en millions de francs)

 

LFI 1998

PLF 1999

Evolution en %

 

AP

CP

AP

CP

AP

CP

Sécurité des aéronefs

6

1

6

4

-

+ 300

Soutien à la recherche amont

680

450

720

473

+ 5,8

+ 5,1

Avances remboursables :

1 137

966,5

1 106

930

- 2,7

- 3,7

dont avions commerciaux

725

642,5

755

664

+ 4,1

+ 3,3

moteurs

89

40

20

10

- 77,5

- 75

hélicoptères

103

94

81

86

- 21,3

- 8,5

équipements de bord

220

190

250

170

+ 13,6

- 10,5

Aviation légère

6

6

4

4

- 33,3

- 33,3

Programme d’investissement de l’ONERA et divers

27

27

20

20

- 35

- 35

Total

1 856

1 450,5

1 856

1 431

-

- 1,3

Ces crédits qui s’inscrivent tous dans le budget civil de recherche et développement, sont pratiquement stables. En effet, les autorisations de programme inscrites en loi de finances initiales pour 1998 ont été intégralement reconduites (1,856 milliard de francs) et les crédits de paiement sont en très légère baisse (1,431 milliards de francs soit - 1,3 % par rapport au budget initial de 1998).

Les deux tiers des crédits sont constitués d’avances remboursables permettant aux constructeurs aéronautiques de lancer et de suivre des programmes de recherche ayant des retours sur investissements particulièrement longs.

Si les crédits destinés aux avances remboursables diminuent légèrement (- 2,7 % en autorisations de programme et - 3,7 % en crédits de paiement), ils subissent surtout de profondes réorientations intérieures. La priorité est clairement donnée à certains programmes : Airbus A 340-500/600, équipements électroniques de bord (+ 13,6 % en autorisations de programme), hélicoptère EC 165.

Ces crédits ne négligent pas les programmes à plus long terme comme en témoigne la progression de plus de 5 % des enveloppes allouées à la recherche amont. Celles-ci doivent en particulier permettre de soutenir le programme de recherche portant sur un avion de très grande capacité.

Ce soutien à notre industrie aéronautique s’inscrit pleinement dans le cadre des limitations imposées par l’accord euro-américain de juillet 1992. Rappelons que cet accord tolère un montant d’aide limité à 3 % du chiffre d’affaires pour les programmes portant sur les avions de plus de 100 places. Or, la Commission européenne estime que l’industrie aéronautique américaine à été soutenue à hauteur de 7,1 % en 1996 et de 12,8 % en 1997 !

C’est pourquoi l’Union européenne continue de dénoncer depuis cinq ans le manque de transparence dont font preuve les autorités américaines dans l’application de l’accord bilatéral de juillet 1992 relatif aux soutiens accordés à l’industrie aéronautique.

Le 25 mars 1997, Sir Leon Brittan, Commissaire européen en charge de ce dossier, a écrit, après accord des Etats-Membres, aux autorités américaines pour dénoncer l’application déséquilibrée de l’accord et demander, au nom de l’Union, un réexamen de ces dispositions.

Depuis, trois réunions se sont tenues dans le cadre de l’application de l’accord, en juillet 1997, janvier et juillet 1998. La dernière rencontre a permis de constater un total désaccord entre les deux délégations sur l’application de l’accord et sur les améliorations pouvant y être apportées. Les autorités américaines mettent en cause, désormais, la fiabilité des informations fournies par l’Europe, essentiellement au titre des avances remboursables nouvellement accordées à l’A330-200 et à l’A340-500/600.

Cette situation reflète un net durcissement de la position américaine qui préfigure une attitude offensive lors du lancement par Airbus du programme d’avion très gros porteur (A3XX).

D’après les informations fournies à votre rapporteur, l’industrie aéronautique américaine serait financée :

– par la NASA à hauteur de 1,3 milliard de dollars (soit près de 10 % du budget total de l’Agence) ;

– par le Department of Defense à hauteur d’une somme variant entre 7,5 et 9 milliards de dollars, soit 20 à 25 % de son budget consacré à la recherche-développement ;

– par la Federal Aviation Administration (FAA) qui dispose annuellement d’un budget de 2 milliards de dollars pour la recherche-développement.

Elle bénéficie par ailleurs d’avantages fiscaux, représentant sur la période 1995-1997 un manque à gagner de 376 millions de dollars pour le Trésor américain.

III.— LE FONDS DE PÉRÉQUATION DES
TRANSPORTS AÉRIENS

L’entrée en vigueur, le 1er janvier 1993, du troisième paquet de libéralisation du transport aérien communautaire a rendu nécessaire l’évolution du dispositif d’aménagement du territoire appliqué au transport aérien intérieur français. Ce dispositif était fondé sur l’exclusivité d’exploitation et la péréquation interne de la compagnie Air Inter d’une part, et sur l’exploitation par des transporteurs régionaux d’un certain nombre de liaisons Paris-province ou province-province d’autre part. Une partie importante de ce réseau complémentaire faisait l’objet de subventions accordées par les collectivités territoriales et d’autres personnes publiques intéressées dans le cadre de conventions conclues avec chaque transporteur.

C’est pour adapter ce dispositif que le législateur a instauré en 1995 un fonds de péréquation des transports aériens.

Les liaisons aériennes pour lesquelles les collectivités territoriales ou les personnes publiques concernées, sollicitent une compensation financière du fonds de péréquation, font l’objet d’un examen par le comité de gestion du fonds de péréquation des transports aériens. A l’issue de cet examen, le ministre chargé de l’aviation civile fixe la liste des liaisons éligibles au fonds de péréquation.

Au 15 septembre 1997, 20 conventions avaient été signées entre l’Etat, les collectivités locales et les transporteurs aériens. Ces conventions concernent dix-neuf lignes métropolitaines ainsi que la ligne Réunion-Mayotte-Nairobi et sont exploitées au total par onze compagnies.

A la même date sept appels d’offre étaient en cours dont trois portant sur des liaisons intraguyanaises au départ de Cayenne.

Pour 1999, les recettes et les dépenses du fonds de péréquation des transports aériens sont estimées à 51 millions de francs affichant ainsi une progression supérieure à 5 % par rapport à l’exercice précédent.

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du mardi 13 octobre 1998, la commission a entendu M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l’équipement, des transports et du logement, sur les crédits de son département pour 1999.

M. Jean-Claude Gayssot a indiqué en préambule que le projet de budget pour 1999 consolidait les premières inflexions amorcées dans le budget de 1998 pour traduire les priorités nouvelles du Gouvernement.

En ce qui concerne plus précisément le budget du transport aérien, il a indiqué que, s’agissant des moyens en personnel, 227 emplois seront créés dans le secteur de la navigation aérienne et de l’aviation civile.

Il a ensuite présenté l’évolution à la hausse des crédits destinés aux investissements de sécurité en insistant sur la généralisation avant l’an 2000 de la mise en sécurité de l’accès aux zones réservées des 35 premiers aéroports commerciaux et sur l’équipement des aérogares en contrôle des bagages de soute à la fin de 2002.

Le ministre a également évoqué la nécessité de tirer les conséquences de l’annulation par le Conseil d’Etat des arrêtés fixant les taux de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne, l’une des deux redevances qui alimentent le budget annexe de l’aviation civile, au motif que certaines dépenses, financées par cette recette, présentaient un caractère d’intérêt général, impliquant leur financement par l’impôt. Il a fait part de l’existence d’autres contentieux en cours concernant les redevances versées par les compagnies aériennes aux gestionnaires d’aéroports et relatives aux dépenses de sûreté.

Compte tenu de l’importance des enjeux (1 milliard de francs environ pour les gestionnaires d’aéroports, une centaine de millions de francs pour l’Etat), le Gouvernement a décidé de substituer un financement par l’impôt aux redevances perçues par les gestionnaires d’aéroports ou par l’Etat au titre du budget annexe. Des mesures d’urgence s’imposent car, sans service d’incendie, les plates-formes aéroportuaires seraient paralysées et le service de transport aérien interrompu.

Le dispositif proposé par le Gouvernement comprend deux volets : de nouvelles dispositions fiscales introduites par voie d’amendements du Gouvernement au projet de loi de finances pour 1999 et un projet de loi relatif à l’organisation de certains services au transport aérien adopté en Conseil des ministres le 7 octobre dernier, déposé au Sénat, en vue de préciser notamment les compétences d’intérêt général des aéroports et d’apurer le passé par la validation des dispositions faisant l’objet de contentieux. Cette solution a été retenue, eu égard aux sommes en cause, tant pour les gestionnaires d’aéroports, c’est-à-dire le plus souvent les chambres de commerce et d’industrie (2,3 milliards de francs dans l’hypothèse la moins défavorable) que pour l’Etat (5 milliards de francs).

En conclusion, le ministre a souligné que le projet de budget ménageait des transitions tenant compte de plusieurs éléments importants qui marqueront l’année prochaine tels la préparation des schémas de services de transport, destinés à dessiner les déplacements et le cadre de vie de nos concitoyens à l’horizon 2020 et la négociation des futurs contrats de plan.

M. François Asensi, rapporteur pour avis des crédits des transports aériens, s’est réjoui de voir le Gouvernement refuser la logique de désengagement de l’État dans ce secteur, soulignant que le budget annexe de l’aviation civile affichait pour 1999 une hausse de 2,8 % par rapport à l’exercice précédent. Il a relevé que la subvention du budget général était reconduite à 215 millions de francs et que les crédits affectés à la construction aéronautique civile étaient stables, l’effort, portant désormais sur la recherche amont, traduisant ainsi la volonté de l’État de préparer l’avenir de notre industrie aéronautique.

Puis il a interrogé le ministre sur les points suivants :

– les décisions à prendre en matière de politique aéroportuaire si le trafic aérien continuait à progresser à un rythme supérieur aux prévisions de croissance les plus élevées ;

– le financement de la formation des pilotes-cadets et l’état des discussions engagées entre Air France et les pilotes ;

– l’éventualité d’une prochaine alliance commerciale entre Air France, Continental, KLM et Alitalia ;

– la baisse des crédits alloués aux programmes de recherche affectés à la mise au point d’hélicoptères et de moteurs d’avions ;

– l’état de la négociation euro-américaine sur les aides à la recherche aéronautique ;

– la création envisagée d’un grand pôle aéronautique européen.

En réponse au rapporteur pour avis, M. Jean-Claude Gayssot a apporté les précisions suivantes :

– la négociation entre la direction d’Air France et le syndicat national des pilotes de ligne se poursuit ; un accord est souhaitable tant pour le personnel que pour la compagnie car il pourrait avoir des conséquences positives en matière d’emploi et pour l’évaluation de la compagnie au moment de l’ouverture partielle de son capital ;

– l’accord franco-américain sur l’ouverture du transport aérien offre à Air France des perspectives d’alliances nouvelles ;

– le chiffre d’affaires d’Air France devrait progresser de 10 % lors de l’exercice 1998-1999 plaçant ainsi la compagnie dans une position favorable au moment où son capital va s’ouvrir ;

– l’avenir des plates-formes aéroportuaires sera abordé dans le cadre des schémas de services de transport ; la progression du trafic à Roissy doit inciter les pouvoirs publics à prendre des décisions rapides sur le développement des aéroports de province et à poursuivre leur réflexion sur l’opportunité de la création d’un troisième aéroport ;

– la mise au point de l’Airbus A3XX doit permettre de répondre aux exigences liées à l’augmentation du trafic et à la demande des compagnies en avions très gros porteurs ;

– les crédits de recherche portant sur les hélicoptères et les moteurs d’avions ont été calculés dans le projet de loi de finances pour 1999 conformément aux prévisions des constructeurs.

Conformément aux conclusions de M. François Asensi, rapporteur pour avis, la commission a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de l’équipement, des transports et du logement (transport aérien) et au budget annexe de l’aviation civile pour 1999.

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