ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

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R A P P O R T D' I N F O R M A T I O N

Présenté à la suite de la mission effectuée en Amérique centrale

du 5 au 12 juin 2001

par une délégation des

GROUPES D'AMITIÉ FRANCE-EL SALVADOR,

FRANCE-NICARAGUA ET FRANCE-HONDURAS(1)

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(1) Cette délégation était composée de M. Jean-Jacques Filleul, Président du groupe d'amitié France-Amérique centrale et Caraïbes et du groupe d'amitié France-El Salvador, M. François Asensi, Président du groupe d'amitié France-Nicaragua, M. Michel Meylan, Président du groupe d'amitié France-Honduras, et MM. Jean Besson, Alain Cousin et Jacques Guyard.

SOMMAIRE

INTRODUCTION 7

I.- L'AMERIQUE CENTRALE 9

A.- PRESENTATION HISTORIQUE ET GEOGRAPHIQUE 9

B.- LA FRANCE EN AMERIQUE CENTRALE 11

II. - LE SALVADOR, UN PAYS ATYPIQUE 14

A.- UNE HISTOIRE FORT MOUVEMENTEE. 14

1. DES INDIENS PIPIL A LA COLONISATION ESPAGNOLE 14

2. DE L'UNION CENTRAMERICAINE A L'INDEPENDANCE 15

3. LA FIN D'UNE LONGUE GUERRE CIVILE 17

B.- UNE VOIE TRACEE VERS LA NORMALISATION POLITIQUE 18

1. DES ELECTIONS GENERALES APRES 70 ANS DE DICTATURE 18

2. LE FMLN GAGNE DU TERRAIN LORS DES ELECTIONS DE 1997 21

3. L'ARENA REMPORTE L'ELECTION PRESIDENTIELLE DE 1999 22

4. LE FMLN PREMIER PARTI DE L'ASSEMBLEE LEGISLATIVE EN 2000 22

C.- LA DOLLARISATION DE L'ECONOMIE 23

D.- LES RELATIONS EXTERIEURES 25

E.- ENTRETIENS DE LA DELEGATION FRANCAISE AU SALVADOR 27

1. M. WALTER ARAUJO, PRÉSIDENT DU PARTI ARENA 27

2. M. WALTER ARAUJO, PRÉSIDENT DE L'ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE ET LES MEMBRES DU BUREAU 29

3. MME MILENA CALDERON DE ESCALON, PRÉSIDENTE DE LA COMMISSION DES RELATIONS EXTÉRIEURES ET LES MEMBRES DE LA COMMISSION 32

4. MEMBRES DU PARTI DE CONCILIATION NATIONALE (PCN) 34

5. M. HECTOR GONZALEZ URRUTIA, VICE-MINISTRE DES RELATIONS EXTÉRIEURES 36

6. MEMBRES DU FRONT FARABUNDO MARTI DE LIBÉRATION NATIONALE (FMLN) 38

7. DIRIGEANTS DE L'ASSOCIATION NATIONALE DE L'ENTREPRISE PRIVÉE (ANEP) 40

8. M. OSCAR ORTIZ, MAIRE DE SANTA TECLA 48

9. M. HECTOR SILVA, MAIRE DE SAN SALVADOR ET M. FACUNDO GUARDADO, MAIRE-ADJOINT 51

III.- LE NICARAGUA, PAYS PAUVRE DE L'AMERIQUE CENTRALE 57

A.- RAPPEL HISTORIQUE 58

1. PERIODE PRECOLOMBIENNE ET EPOQUE COLONIALE 58

2. LUTTES INTERIEURES ET INTERVENTIONS ETRANGERES 59

B.- UNE FORTE PRESENCE AMERICAINE 61

1. LA PERIODE SOMOZISTE 61

2. LE FRONT SANDINISTE DE LIBERATION NATIONALE 62

3. LA LONGUE MARCHE VERS LA PAIX 64

4. LE SUCCES ELECTORAL DE VIOLETA CHAMORRO 65

5. LA VOIE ETROITE DE LA RECONCILIATION 66

C.- LA TOURMENTE CYCLONIQUE ENTRE LES DERNIERES ELECTIONS 67

1. LES ELECTIONS GENERALES DE 1996 67

2. LE NICARAGUA DANS L'_IL DU CYCLONE 69

3. LES ELECTIONS MUNICIPALES DE 2000 70

D.- 2001: UNE ANNEE D'ECHEANCES ELECTORALES 71

E.- UNE ECONOMIE DEPENDANTE DE L'AIDE INTERNATIONALE 73

1. UNE AGRICULTURE EN DIFFICULTE 73

2. UNE INDUSTRIE PEU DEVELOPPEE 74

3. UN DEFICIT COMMERCIAL TRES ELEVE 75

4. VERS UNE DOLLARISATION ? 76

5. LES CATASTROPHES NATURELLES A L'ASSAUT DE L'ECONOMIE 77

6. L'IMPERATIF D'UN CHANGEMENT EN PROFONDEUR 78

F.- ENTRETIENS DE LA DELEGATION FRANCAISE AU NICARAGUA 79

1. M. OSCAR MONCADA, PRÉSIDENT DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE 79

2. M. ARNOLDO ALEMAN, PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE 82

3. MME BERTHA MARINA ARGUELLO, VICE-MINISTRE DES RELATIONS EXTÉRIEURES 85

4. M. HERTY LEWITES, MAIRE DE MANAGUA 87

5. MEMBRES DU GROUPE D'AMITIÉ NICARAGUA-FRANCE 89

6. MEMBRES DU FRONT SANDINISTE DE LIBÉRATION NATIONALE (FSLN) 90

7. MEMBRES DU PARTI LIBÉRAL CONSTITUTIONNALISTE (PLC) 94

8. DIRECTEUR DU COLLÈGE FRANCO-NICARAGUAYEN DE MANAGUA 95

IV.- LE HONDURAS 97

A.- GENERALITES 97

B.- RAPPEL HISTORIQUE 99

1. DE L'EMPIRE MAYA A LA COLONISATION ESPAGNOLE 99

2. L'INDEPENDANCE 100

3. LES TENTATIVES D'UNION 101

4. LA MONTEE DES MILITAIRES 102

5. UNE POLITIQUE REFORMISTE, PUIS D'ENDETTEMENT 103

6. L'AGGRAVATION DU SOUS-DEVELOPPEMENT 104

7. UNE POLITIQUE D'EXTREME DROITE 105

8. LE RETOUR DES CIVILS AU POUVOIR 106

C.- DEUX PARTIS DE DROITE DOMINENT LA VIE POLITIQUE 107

1. LES ELECTIONS DU 30 NOVEMBRE 1997 107

2. LES ECHEANCES ELECTORALES DE 2001 109

D.- LE CYCLONE "MITCH" AU HONDURAS 109

E.- ENTRETIENS DE LA DELEGATION FRANCAISE AU HONDURAS 113

1. ENSEIGNANTS DU LYCÉE FRANCO-HONDURIEN DE TEGUCIGALPA 113

2. MEMBRES DU CONGRÈS 118

3. M. ROBERTO FLORES BERMUDEZ, MINISTRE DES RELATIONS EXTÉRIEURES 120

ANNEXES 129

1. LE MARCHE COMMUN CENTRE-AMERICAIN 131

2. LA DOCTRINE DE MONROE 137

3. MONSEIGNEUR ROMERO 139

4. JOSE NAPOLEON DUARTE 141

5. LE CYCLONE " MITCH " 143

6. LES TREMBLEMENTS DE TERRE AU SALVADOR 151

7. LES MAQUILAS 155

8. LA CECA 159

9. LE FRONT SANDINISTE DE LIBERATION NATIONALE 165

10. MONSEIGNEUR OBANDO Y BRAVO 169

11. EDEN PASTORA 171

12. DANIEL ORTEGA 173

13. L'OEA 175

14. L'ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS A MANAGUA 179

15. MINES ANTIPERSONNEL EN AMERIQUE CENTRALE 181

16. L'INITIATIVE PPTE 203

17. LE PLAN PUEBLA PANAMA 207

PROGRAMME DE LA MISSION 211

CARTES 217

CARTE DU SALVADOR 219

CARTE DU NICARAGUA 221

CARTE DU HONDURAS 223

CONCLUSION 225

INTRODUCTION

Une délégation des groupes d'amitié France-El Salvador, France-Nicaragua et France-Honduras, conduite par M. Jean-Jacques Filleul (S), Président du groupe d'amitié France-Amérique centrale et Caraïbes et du groupe d'amitié France-El Salvador, et composée de MM.  François Asensi (C), Président du groupe d'amitié France-Nicaragua, Michel Meylan (DL), Président du groupe d'amitié France-Honduras, Jean Besson (RPR), Alain Cousin (RPR) et Jacques Guyard (S), s'est rendue en Amérique centrale du 5 au 12 juin 2001.

Tant au Salvador qu'au Nicaragua et au Honduras, la délégation a pu s'entretenir avec des membres du Parlement, du pouvoir exécutif, des principaux partis politiques et des milieux d'affaires afin de compléter leurs informations sur la situation tant politique qu'économique des trois pays.

L'ensemble de la délégation s'est réjouie de la grande liberté de ton et de l'atmosphère amicale qui ont régné lors des entretiens dans les pays visités.

Les députés français ont été extrêmement sensibles à la qualité de l'accueil qu'ils ont reçu durant l'ensemble de leur séjour. Ils tiennent à remercier Mme Lydie Gazarian, Ambassadrice de France au Salvador, M. Michel Vandepoorter, Ambassadeur de France au Nicaragua et M. Michel Avignon, Ambassadeur de France au Honduras, ainsi que l'ensemble de leurs collaborateurs pour leur disponibilité et leur efficacité.

Grâce à cette mission, les groupes d'amitié sont mieux à même aujourd'hui d'appréhender ces pays si complexes et par là même de réfléchir aux moyens de renforcer avec eux une coopération efficace.

I.- L'AMERIQUE CENTRALE

A.- PRESENTATION HISTORIQUE ET GEOGRAPHIQUE

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Zone sinistrée de la planète, située à la charnière des Amériques du nord et du sud, cette langue de terre de 540 000 km2 initialement composée du Guatemala, du Salvador, du Honduras, du Nicaragua et du Costa Rica, auxquels sont venus se joindre, du fait des vicissitudes de l'histoire, le Panama et le Belize (ex-Honduras britannique), comptait, en 1950, 8 millions d'habitants et en totalise 38 millions cinquante ans après.

L'histoire et la géographie pèsent d'un poids considérable sur la situation actuelle de l'Amérique centrale. Dès le IIIème siècle de l'ère chrétienne, l'isthme centre-américain est le siège d'une des plus brillantes civilisations précolombiennes, celle des Mayas. En 1502, Christophe Colomb prend possession de l'embouchure du rio San Juan au Nicaragua et débarque à Punta Caxinas au Honduras. En 1523, Pedro de Alvarado s'impose en maître absolu. Durant les trois siècles de colonisation espagnole, l'isthme d'Amérique centrale, à l'exception du Panama, forme un seul ensemble administratif : la capitainerie générale du Guatemala.

Proclamée une première fois le 21 octobre 1821, l'indépendance est mise à mal par les appétits de l'empereur mexicain Iturbide. Celui-ci renversé en 1823, le premier acte politique des autorités de l'Amérique centrale indépendante est la constitution d'une fédération des provinces unies. En 1838, celle-ci éclatera en cinq républiques : Costa Rica, Guatemala, Honduras, Salvador et Nicaragua. Idéal réaffirmé à diverses reprises au XXème siècle, et en particulier au début des années 60 lorsque sera créé le marché commun centre-américain (MCCA),1 l'unité régionale donnera lieu à vingt-quatre projets de confédérations et d'associations : sans résultat.

L'économie de l'Amérique centrale a toujours été orientée vers l'extérieur à travers la culture d'une série de denrées, cacao, indigo, sucre, café, coton et surtout banane suivant les époques, dévoreuses de terres, graduellement développées au détriment des cultures de subsistance. La demande de réforme agraire constitue une revendication constante des paysans et a suscité les insurrections qui ont jalonné l'histoire de ces pays. Ces convulsions répétées ont de tout temps entraîné la réaction, voire l'intervention, des États-Unis qui, sous toutes sortes de prétextes, ont contribué à favoriser la permanence de régimes autoritaires.

La doctrine de Monroe,2 qui octroie depuis 1823 une souveraineté implicite aux États-Unis sur la région, ne constitue en rien un mythe. Interventions militaires et occupations se sont succédé au Nicaragua, au Honduras, au Costa Rica, au Panama, avant de prendre, dans les années 80, une tournure plus discrète, et souvent indirecte. Un certain nombre de multinationales nord-américaines, comme United Fruit en Amérique centrale, ont indubitablement pris une part active, en liaison avec le Pentagone et la Maison Blanche, dans l'échec des réformes agraires, la résistance à tout changement, la déstabilisation et la chute de gouvernements élus.

S'il est vrai que les intérêts économiques nord-américains dans la région sont relativement mineurs, il n'y a cependant pas au monde de zone qui n'ait été plus étroitement intégrée au système politique, économique et géostratégique des États-Unis. 3 4

Un îlot rocheux inconnu, quasiment désertique, situé à des milliers de kilomètres de San Salvador, Tegucigalpa, Managua et Ciudad Guatemala, va paradoxalement jouer un rôle d'une importance capitale dans l'histoire à venir de l'Amérique centrale, provoquer sur le continent un séisme dont les États-Unis éprouveront les plus grandes difficultés à se relever, empêchant sans doute leur intervention militaire dans l'isthme. Le soutien de Washington à l'Angleterre dans la guerre des Malouines, outre la réprobation quasi unanime de toutes les nations latino-américaines, fait perdre aux États-Unis deux appuis fondamentaux : le Venezuela et l'Argentine.

La crise centre-américaine échappe à partir de là à la seule problématique Est-Ouest, à l'unique volonté de l'administration nord-américaine. La maison Blanche va désormais devoir compter avec un comportement plus autonome des Latino-Américains. S'ajouteront à celui-ci la compétition croissante entre les États-Unis et l'Europe - spectaculairement marquée par le communiqué franco-mexicain de 1981 qui reconnaît la représentativité des mouvements révolutionnaires salvadoriens - et les clivages entre démocratie chrétienne et social-démocratie.

B.- LA FRANCE EN AMERIQUE CENTRALE

Langue française, idées politiques, sociales, philosophiques, littérature, sont connues et appréciées des élites locales. Mais l'intérêt de Paris pour l'Afrique et l'Asie lui a, pendant très longtemps, fait négliger tout le continent latino-américain même si les départements de la Martinique et de la Guadeloupe ne sont guère éloignés.

Une politique active de la France en Amérique centrale est fortement souhaitée par les Centraméricains qui recherchent une diversification de leurs partenaires étrangers.

Durant ces vingt dernières années, la politique de la France a connu deux périodes distinctes : elle a tout d'abord assuré une présence avant tout politique symbolisée par la déclaration franco-mexicaine du 28 août 1981. François Mitterrand, dont certains des ministres et des conseillers sont marqués par la ferveur révolutionnaire des années 60, aborde l'Amérique latine en tiers-mondiste. La déclaration franco-mexicaine, reconnaissait les fronts d'opposition à la junte au pouvoir au Salvador comme « une force politique représentative ». Elle a dans les faits permis de légitimer la lutte des mouvements insurrectionnels.

Cette approche tiers-mondiste a toutefois contribué à l'ouverture d'un dialogue permanent entre les États de la Communauté économique européenne (CEE) et les États de l'Amérique centrale, ainsi que ceux du groupe de Contadora (Colombie, Mexique, Panama et Venezuela).

Mais François Mitterrand prend très vite conscience de la susceptibilité extrême des États-Unis, qui n'acceptent aucune ingérence dans leur chasse gardée, et de la perception négative de cette déclaration par bon nombre de pays latino-américains. François Mitterrand revient alors à une ligne plus prudente (en particulier, vis-à-vis du Nicaragua sandiniste en minimisant la fourniture d'armes).

La disparition des antagonismes Est-Ouest permet alors à la France de se concentrer sur l'appui aux processus démocratiques. Toutefois, si la France _uvre au profit de la paix, de l'intégration économique régionale et de la démocratie, l'Amérique latine continue d'être, pour elle, une préoccupation secondaire.

En cette fin de XXème siècle, le rêve français demeure bien insaisissable. Beaucoup de facteurs se combinent dans ce sens : poids des États-Unis et, au-delà, du monde anglo-américain ; retour - certes limité - des anciennes puissances coloniales, Espagne et Portugal (en juillet 1991, premier sommet ibéro-américain) ; et surtout émancipation de l'Amérique latine, les États de ce continent, après s'être ignorés ou même fait la guerre, se découvrent, s'ouvrent les uns aux autres.

En définitive, au-delà des échanges économiques non négligeables, la France ne peut être présente politiquement dans cette partie du monde qu'à travers l'Union européenne. Dans ce contexte, elle y est active et fournit 25% du total de l'aide au développement apportée à l'Amérique centrale.

Mais, en dépit d'avancées significatives, le « vieux continent » demeure un acteur marginal. La politique latino-américaine de l'Union européenne reste à inventer.

II.- LE SALVADOR, UN PAYS ATYPIQUE

Plus de 6,3 millions d'habitants pour un territoire minuscule de 21 040 km2 font du Salvador, limité à l'ouest par le Guatemala, au nord et à l'est par le Honduras, au sud par l'océan Pacifique, un pays dont la densité est sept fois supérieure à la moyenne centre-américaine.

graphique

A.- UNE HISTOIRE FORT MOUVEMENTÉE

1. DES INDIENS PIPIL A LA COLONISATION ESPAGNOLE

Cette étroite bande côtière qui s'étend le long du Pacifique s'élève vers un plateau fertile entouré de volcans. A l'origine, El Salvador (« le Rédempteur ») était peuplé d'Indiens Pipil, un sous groupe nomade des peuples Nahua qui avaient émigré en Amérique centrale vers 3000 avant notre ère. La civilisation Pipil, pour sa part, avait été fondée vers le XIème siècle avant notre ère. Elle avait établi une série de principautés fédérées en deux grands états. Les Pipils développèrent vite de grands centres urbains comme Ahuachapan. Ensuite, les Pipils furent intégrés par l'empire Maya qui domina la Mésoamérique jusqu'à son déclin.

Lorsque Pedro de Alvarado, lieutenant de Cortès, entre au Salvador qui s'appelait alors le « Cuscatlan », en 1524, il se heurte à une forte résistance de la part des Pipils, conduits par leur chef Atlacatl. Vaincus à plusieurs reprises, les Espagnols durent se retirer au Guatemala. Il leur fallut organiser deux autres expéditions dont une en 1528, pour juguler les Pipils.

Les Espagnols étaient venus au Salvador dans l'espoir d'y trouver de l'or en abondance. Ils déchantèrent bien vite car les méthodes de production requéraient une main d'oeuvre considérable pour un résultat bien en deçà des espérances. El Salvador ne fut désormais pour les conquistadores qu'un ``trou perdu'' tout juste bon pour l'exploitation foncière. Il fut placé sous la juridiction de la Capitainerie Générale du Guatemala (1542). C'est ainsi que l'Espagne mit en place le système des « encomiendas », soit l'attribution de vastes terres aux colons. Ces derniers avaient le pouvoir de prélever un tribut sur les autochtones établis sur leurs juridictions. Ce système abusif fut remplacé dès la fin du XVIème siècle par celui du « repartimiento » dans lequel les représentants de la couronne espagnole étaient chargés de réglementer l'attribution aux travailleurs Indiens, de petits lopins de terre à cultiver, instaurant ainsi un système un peu plus équitable de « production pour l'exportation contre culture de subsistance ».

Dans la pratique, le système fut vite gangrené, en raison de l'éloignement de l'Espagne et de la corruption qui s'instaura rapidement parmi les officiers de la couronne. C'est ainsi que, rapidement, la classe des « peninsulares », c'est à dire des colons nés en Espagne, constitua l'élite qui méprisait royalement les « criollos », les métisses ; tout cela, au grand détriment des Indiens dont les conditions de vie ne cessaient de se dégrader. Les gros propriétaires formeront une véritable oligarchie (encore présente au XXème siècle : celle des 14 familles) lorsqu'ils exploiteront les cultures d'exportation comme le cacao dès la seconde moitié du XVIème siècle, puis l'indigo, dont la production fut florissante au XVIIIème siècle. Grâce à cette dernière production, San Salvador finit même par devenir la seconde ville, en importance, de la Capitainerie Générale du Guatemala.

2. DE L'UNION CENTRAMÉRICAINE À L'INDÉPENDANCE

À partir de 1821, El Salvador secoue le joug espagnol et intègre, en juillet 1823, les Provinces Unies d'Amérique centrale. Mais cette union n'est pas aussi fédératrice que l'auraient souhaité ses instigateurs et le gouvernement repasse de main en main (tantôt libéral, tantôt conservateur). En 1830, la présidence de l'Union échoue au libéral Hondurien Francisco Morazan qui fera d'El Salvador son dernier rempart contre la montée des conservateurs, partisans du Guatemaltèque Rafael Carrera. La violence répétée finira par avoir raison des efforts d'union des cinq pays d'Amérique centrale. Chacun des cinq états finira par se déclarer entité indépendante et souveraine (1841).

Des tensions ont lieu au XXème siècle avec le voisin hondurien, notamment à cause de l'émigration de Salvadoriens au Honduras, à deux reprises les deux pays seront en conflit (1965 et 1969 après la défaite du Honduras par El Salvador en match de qualification pour la coupe du monde de football).

La situation interne fut encore troublée entre 1977 et 1979 sous le régime répressif du Général Carlos Humberto Romero durant lequel, la guérilla de gauche manifesta son opposition s'en prenant également aux diplomates étrangers sur le territoire (attentats, kidnapping et assassinats). Romero fut déposé en 1979 et une junte prit le pouvoir sans pour autant ramener le calme. En 1980 a été créé le Front Farabundo Marti de libération nationale (FMLN) rassemblant cinq mouvements de guérilla.5 La guerre civile débuta en janvier 1981. Le FMLN, recevant un appui du Front sandiniste de libération nationale du Nicaragua et, indirectement, du régime castriste, s'engage alors pleinement dans un conflit armé, lui permettant notamment de contrôler certaines régions comme le Morazan et d'alimenter une guérilla urbaine. Pour avoir défendu la cause du peuple, l'archevêque de San Salvador Monseigneur Oscar Romero,6 proposé pour le prix Nobel de la Paix, est assassiné par les Escadrons de la mort.

Après deux années de présidence intérimaire, les élections portèrent au pouvoir, le 6 mai 1984, un candidat chrétien démocrate soutenu par les Etats-Unis : José Napoleon Duarte.7 La victoire de la démocratie chrétienne lors des élections législatives du 31 mars 1985 suscite l'espoir mais la violence politique continue et la guerre civile s'intensifie.

Un peu plus de deux ans plus tard, le 7 août 1987, les cinq chefs d'États d'Amérique centrale, réunis au Guatemala, signent le traité d'Esquipulas qui allait être suivi de la mise sur pied d'une commission de réconciliation nationale et de la reprise du dialogue avec l'opposition armée. Le chemin du retour à la paix commence à se dessiner. Toutefois, le gouvernement démocrate chrétien en place à San Salvador, enlisé dans des affaires de corruption et incapable de résoudre totalement ce conflit idéologique, allait peu à peu perdre toute crédibilité auprès de la population.

Ce conflit, qui a coûté la vie à plus de 75 000 Salvadoriens a connu un tournant essentiel après l'offensive générale du FMLN, en novembre 1989. Son échec a démontré que la guérilla n'avait pas les moyens de l'emporter sur le terrain. L'armée s'est discréditée aux yeux de la communauté internationale en se fourvoyant, durant l'offensive de 1989, dans des actions répréhensibles. La voie d'une véritable négociation, qui ne pouvait plus être que politique, était ouverte.

Du côté des urnes, l'Arena (droite libérale ayant l'appui des secteurs industriels) allait remporter l'élection présidentielle de 1989 avec Alfredo Cristiani grâce à un discours nationaliste prônant le retour à une vie politique plus saine, puis avec Armando Calderon Sol en 1994 et Francisco Florès en mars 1999.

3. LA FIN D'UNE LONGUE GUERRE CIVILE

Après l'élection du Président Alfredo Cristiani et l'installation, en juillet 1991, de la mission d'observation des Nations Unies pour le Salvador (ONUSAL) et de la commission nationale pour la consolidation de la paix (COPAZ), El Salvador s'engage sur le chemin de la paix. Le 31 décembre 1991 est signé à l'ONU l'Acte de New York qui met fin à douze années de guerre civile.

Les accords de Chapultepec sont signés le 16 janvier 1992 au Mexique entre le gouvernement et le FMLN, sous l'égide de l'ONU. L'impensable est devenu, du jour au lendemain, réalité quotidienne, avec la fin négociée de la guerre civile. Tous les combattants du FMLN sont démobilisés et doivent rendre leurs armes ; l'armée est obligée de dissoudre certaines de ses unités et perd la responsabilité de la sécurité publique qui revient à une nouvelle police, la police nationale civile (PNC). D'un côté comme de l'autre, tous ces hommes rendus à la vie civile se sont vus proposer par l'État un lopin de terre ou une formation technique afin de faciliter leur réinsertion dans la société après douze années de guerre. En même temps, une "commission de la vérité" prépare un rapport sur les assassinats et les massacres les plus notoires de toute la guerre civile, cependant qu'une autre commission purge l'armée de ses officiers les moins présentables. Un procureur pour les droits de l'homme est nommé par le gouvernement. Le Parlement vote une loi d'amnistie générale en mars 1993 et le FMLN devient un parti politique légal afin de participer aux futures élections.

Une mission des Nations Unies pour l'accompagnement des accords de paix au Salvador (Minusal) est venue remplacer, en 1995, l'Onusal, présente sur les lieux depuis 1991.

C'est depuis, dans un climat de paix retrouvée, qu'ont lieu les élections présidentielles, législatives et municipales.

B.- UNE VOIE TRACÉE VERS LA NORMALISATION POLITIQUE DANS UN CLIMAT DE PAIX

1. DES ÉLECTIONS GÉNÉRALES APRÈS 70 ANS DE DICTATURE

Depuis les accords de paix, les autorités ont amélioré le recensement, ce qui a permis d'augmenter régulièrement le nombre de personnes inscrites sur les listes électorales.

L'action du gouvernement a donné des résultats satisfaisants pour l'application des accord de paix. Toutefois, des difficultés persistent ; on note des réticences de la partie la plus conservatrice de l'Arena à la démocratisation du régime, un mécontentement social en raison d'une pauvreté en hausse et d'une insécurité très importante, une déficience des mécanismes administratifs et une réforme électorale qui tarde à se mettre en place. Malgré ces difficultés, le Salvador s'est résolument engagé sur la voie de la normalisation politique et du développement économique.

Un des résultats les plus tangibles du retour à la paix a sans doute été l'apparition d'un véritable choix entre deux projets de société : celui du parti Arena, prônant l'instauration d'une économie libérale, et celui des partis de gauche proposant un retour à une certaine étatisation censée fournir les moyens de lutter contre les difficultés sociales que connaît le pays.

Le grand défi de la démocratisation promise au pays était la tenue, en mars-avril 1994, des premières élections générales libres qui devaient enfin permettre à la population de choisir ses gouvernants après soixante-dix ans de dictature militaire.

Ces élections municipales, législatives (mandats de trois ans) et présidentielle (mandat de cinq ans) ont surtout montré le long chemin restant à parcourir pour définir un projet de société viable, mobilisateur et pertinent pour un petit pays dont 60% des habitants ne font que survivre dans une grande misère. Une misère qui tourne en dérision l'idée même de démocratie. Séduire ces « sans-voix » - dont parlait Mgr Romero, l'archevêque de San Salvador, assassiné en mars 1980 -, cette moitié indécise, misérable et analphabète de la population, une fois apaisés le bruit des bombes et les échos des discours triomphalistes des deux partis en compétition, n'était certes pas une tâche aisée.

La droite avait choisi un candidat « dur », M. Armando Calderon Sol, ancien maire de la capitale et ancien secrétaire particulier du commandant d'Aubuisson (fondateur des escadrons de la mort, décédé en février 1992), en rupture avec l'image moderne et modérée du président sortant M. Alfredo Cristiani. Utilisant sans vergogne, et en toute impunité, la manne des fonds publics, l'Arena réalisa une campagne où l'argent coula à flots, reposant sur deux slogans-chocs : « Avec Calderon Sol, nous allons tous vivre mieux. » et « Patrie oui, communisme non, El Salvador sera la tombe des rouges. ».

Cette campagne fut caractérisée par la distribution d'innombrables objets publicitaires, la diffamation anonyme, les menaces de mort, voire les assassinats, et, pour compléter le tout, par un dispositif de fraude dont l'élément central fut la non-inscription sur les listes électorales de 400 000 personnes soupçonnées d'être tentées de donner leurs voix au FMLN.

Le parti Arena a remporté ces élections en profitant à la fois d'un climat de défiance à l'égard des partis de gauche, et principalement du FMLN, qui se voyaient toujours taxés de sectarisme, mais aussi de la paix et du développement économique.

À gauche, l'inexpérience électorale se conjuguait à la nécessité d'une transformation complexe et accélérée des structures militaires en parti démocratique, au manque de ressources financières et à une délicate définition d'alliances, le tout dans le cadre d'un monde désormais unipolaire.

Face au projet d'alliance avec une partie de la Démocratie chrétienne, souhaitée principalement par l'Expression rénovée du peuple (ERP-FMLN), prévalut finalement une formule de compromis proposée par les Forces populaires de libération (FPL-FMLN).8

Les élections, sous haute surveillance internationale, laissèrent indifférente la moitié de la population. Il faut dire que les difficultés multiples pour s'inscrire sur les listes électorales et la notable réduction des transports publics le jour du scrutin n'étaient pas de nature à provoquer une participation massive. Aussi, 50% des électeurs préférèrent aller travailler le dimanche 20 mars et 55% le 24 avril. Pour une raison simple : « Quel que soit le vainqueur, si je ne travaille pas, je ne mange pas ». C'est sur cet arrière-plan qu'il faut évaluer les résultats qui ont porté M. Calderon Sol à la présidence avec officiellement 68% des suffrages exprimés.

Désormais, le panorama politique laisse pratiquement seuls en lice l'Arena et le FMLN. Sur le plan municipal, en raison d'un système électoral qui lui était particulièrement défavorable (scrutin majoritaire à un seul tour) et de la perte, à quelques dizaines de voix, d'un grand nombre de mairies, le FMLN n'a pas réussi à obtenir le pouvoir local massif sur lequel il comptait. Il s'adjuge tout juste 16 municipalités. L'Arena en remporte 206, sur un total de 272, y compris dans les anciennes « zones de contrôle » du FMLN, comme Chalatenago et Morazan. Malgré la percée du FMLN, qui compte 21 députés, l'Arena conserve la majorité à l'Assemblée, avec 39 sièges auxquels s'ajoutent les élus de son allié traditionnel, le Parti de conciliation nationale (PCN).

En dépit de ses rodomontades, la Démocratie chrétienne, abandonnée par les États-Unis, perd 8 sièges et passe au rang de troisième force, avec 18 élus. Sa direction, largement discréditée par des primaires truquées (qui avaient désigné comme candidat M. Fidel Chavez Mena) et par son attitude ambiguë entre les deux tours (certains secteurs appuyant l'Arena, d'autres la coalition, alors que le parti ne donnait aucune consigne), a été contrainte de démissionner. Les autres partis sont laminés.9

Même si l'ampleur de l'abstention relativise les 68% obtenus par M. Calderon Sol, l'Arena se trouve désormais à la tête des trois pouvoirs (local, législatif et exécutif). L'Arena se consolide ainsi comme la principale expression de la droite.

2. LE FMLN GAGNE DU TERRAIN LORS DES ÉLECTIONS DE 1997

À l'occasion des élections municipales et législatives de 1997, on note une forte poussée du FMLN qui arrive à conquérir de très nombreuses villes, parmi lesquelles San Salvador (ce que la guerre ne permit pas à l'opposition alors armée, la paix va le lui donner), et un groupe politique à l'Assemblée législative, qui fait jeu quasi égal avec l'Arena, obligeant ce dernier à gouverner avec une majorité relative. L'Arena a du composer10 avec le PCN (Parti de conciliation nationale) et le PDC (Parti démocrate-chrétien).11

3. L'ARENA REMPORTE L'ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE POUR LA TROISIÈME FOIS

Deux ans plus tard, en mars 1999, les électeurs retournaient voter pour choisir leur nouveau Président de la République. De l'avis des observateurs, les élections se sont déroulées de manière satisfaisante. Le parti Arena parvenait à cette occasion à stopper l'érosion de voix notée dans les années précédentes en mettant un terme à ses dissensions internes. Ses candidats aux postes de président et de vice-président, Francisco Florès et Carlos Quintanilla devançant largement ceux du FMLN, Facundo Guardado et Nidia Diaz.12 Le choix de deux commandants de la guérilla lors des années de conflit comme candidats alors même que le discours de chacun des grands partis rappelait l'exigence d'une politique moderne tournée vers l'avenir explique en partie la défaite du FMLN. Ce dernier ne put lutter efficacement contre une fuite de ses électeurs fatigués des querelles de personnes et déçus que le maire de San Salvador, Hector Silva, représentant l'aile réformatrice et modérée du parti, n'ait pas été désigné comme candidat à la présidence de la République.

4. LE FMLN, PREMIER PARTI DE L'ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE

Le 12 mars 2000 se sont tenues les élections législatives13 et municipales qui ont vu la victoire du FMLN, désormais premier parti à l'Assemblée législative avec 31 sièges sur 84. Malgré le bon résultat de la CDU (Centre démocratique uni), créée seulement quelques mois auparavant et qui peut s'expliquer par la personnalité de son candidat, Ruben Zamora, ancien candidat du FMLN lors de l'élection présidentielle de 1994, le FMLN a pu s'appuyer sur son unité et sur les résultats de sa gestion des municipalités conquises trois ans auparavant (Hector Silva, le maire de la capitale, a, par exemple, été réélu avec plus de 56% des voix) tout en développant des programmes de formation des élus afin de se préparer à gouverner. Si le FMLN est le parti le plus important à l'Assemblée législative, il n'a toutefois pas pu empêcher que l'Arena fasse des alliances de circonstances afin que la majorité reste à droite.

C.- LA « DOLLARISATION » DE L'ÉCONOMIE

Le Salvador a profondément changé depuis la signature des accords de paix. La dernière preuve de cette mutation est sans nul doute la « dollarisation » de son économie intervenue le 1er janvier 2001. Elle s'appuie sur une situation macro-économique dans son ensemble satisfaisante : la faiblesse de la dette, la bonne réputation du Salvador sur les marchés internationaux, une croissance soutenue et qui reste la plus prometteuse de la région, bien que ralentie depuis 1998, une inflation maîtrisée, autant d'éléments qui ont pesé en faveur de l'officialisation de « l'accrochage » du colon, monnaie nationale, au dollar américain.

Dans la réalité, c'était le cas depuis plusieurs années : le taux fixe de change du colon par rapport au dollar était de 8,75 depuis 1998. Toutes les opérations financières internationales étaient effectuées en dollars. Enfin et surtout, la communauté salvadorienne établie aux États-Unis réalise des transferts financiers pour un montant qui atteint, chaque année, 1,5 milliard de dollars, ce qui permet au Salvador de contrôler le déficit du compte courant et de contenir le déficit public tout en préservant une faible pression fiscale.

La « dollarisation » doit par ailleurs contribuer à favoriser la reprise des investissements étrangers au service d'un développement économique dont le but est de réduire les inégalités sociales. On connaît le rôle du Guatemala et du Salvador en faveur de l'intégration centraméricaine, le Sica (Système d'intégration centraméricain) qui a son siège à San Salvador, a pour objectif d'_uvrer en faveur d'une intégration commerciale, douanière et politique en Amérique centrale. Le Salvador est à l'origine de toutes les initiatives en faveur de l'intégration : zone de libre-échange du « triangle nord » en 1992 (avec le Guatemala et le Honduras), union douanière en 1996 (avec le Guatemala), unification militaire et union politique en 1997 (avec le Honduras), renforcement de l'intégration, ouverture des frontières aériennes et constitution du couloir interocéanique de transport multimodal en 2000 (avec le Guatemala et le Nicaragua).

Toutefois, la décision du Congrès d'adopter le dollar comme monnaie nationale a suscité des mouvements de colère de la rue. Il faut dire que la mesure a été adoptée à la va-vite par une courte majorité de députés présents, sans véritable discussion. Les députés issus du FMLN ont demandé un référendum sur la question.

La Fondation d'études pour l'application des droits (FESPAD) et le Centre démocratique uni (CDU), parti d'opposition, ont déposé des recours devant la Cour Suprême. Ils contestent la façon quasi secrète dont la loi a été adoptée, sans aucune possibilité pour les citoyens de remettre en cause la disposition législative.

Selon une enquête menée par une université privée, 47,4% de la population se disait opposée à la dollarisation, 52% estimait qu'elle ne « profiterait qu'aux riches » et 14,9% qu'aux entrepreneurs. Seulement 1,9% de la population interrogée pensait que cela pourrait favoriser les plus démunis. C'est aussi ce que dénoncent les organisations syndicales et ouvrières d'opposition qui pointent aussi l'inflation galopante (à 96,8%) et qui craignent que le pays devienne une plaque tournante du blanchiment de l'argent sale (les narco-dollars). Pour le moment, colon et dollar coexistent au Salvador. Le Président Francisco Flores se dit déjà très satisfait de la dollarisation, qui aurait fait baisser les taux d'intérêt et devrait susciter des investissements au Salvador.

La paix est désormais réelle, inscrite dans la conscience collective salvadorienne. La reconstruction fait partie de la culture : depuis les années 80, le Salvador a dû panser les plaies de la guerre, les destructions du cyclone « Mitch »14 en 1998 et celles causées par l'activité sismique de 2001.15 C'est aussi cette exigence de reconstruction permanente qui permet au Salvador de corriger ses défauts et ses faiblesses structurelles. Le défi de ce début de siècle est de réussir l'ancrage du développement au service de la justice sociale.

Le coût de la guerre civile (1,5 Md $), celui de la reconstruction post-Mitch et celui des tremblements de terre des 13 janvier et 13 février 2001 ont pesé et pèseront sur la balance commerciale et les comptes publics, mais les réformes structurelles et la forte volonté des Salvadoriens ont permis de passer ce cap et de stabiliser l'économie du pays. Le gouvernement privilégie la stabilité macro-économique à la croissance et à l'emploi.

Les tremblements de terre16 ont mis en évidence les progrès de ce pays depuis les années 90, mais aussi certaines faiblesses. Une politique d'aménagement du territoire, la prise en compte de l'environnement dans un schéma de développement constituent désormais de nouvelles priorités nationales, au même titre que la lutte contre la délinquance qui reste le problème politique immédiat.

La balance commerciale connaît un déficit imputable aux exportations de matières premières et semi-produits non disponibles localement. Depuis 1995, le Salvador a développé sa capacité d'exportation de produits non traditionnels mais l'ancrage fixe du colon au dollar est un handicap pour la compétitivité.

Le compte courant n'est que peu déficitaire grâce aux transferts des émigrés (remesas des États-Unis). Le déficit public est contenu mais, avec une pression fiscale faible (11% du PIB), les augmentations salariales dans la fonction publique et le coût de la réforme des retraites, l'État est obligé d'effectuer des coupes dans les investissements publics. L'indispensable réforme sociale et éducative ne pourra être financée qu'avec l'accroissement fiscal prévu dans le Plan de gouvernement.

La dette extérieure publique reste faible (21,5% du PIB). Le Salvador n'a d'ailleurs pas souhaité d'aménagement de sa dette après le passage du cyclone « Mitch », contrairement aux autres pays touchés.

D.- LES RELATIONS EXTÉRIEURES

La politique étrangère du Salvador a pour objectif prioritaire le développement économique du pays en attirant les investisseurs étrangers. Elle s'articule autour de trois axes : l'intégration centraméricaine, l'ouverture au monde et la prise en compte de la communauté émigrée, notamment aux États-Unis. Le Salvador diversifie ses relations avec d'autres régions du monde : avec l'Asie, en particulier avec le Japon, la Corée du Sud et Taïwan ; avec l'Union européenne, qui a vu depuis 1984 ses relations avec l'Amérique centrale structurées dans le cadre des accords de San José. La coopération avec l'Union européenne porte sur l'appui à la démocratie et à l'intégration régionale, sur la consolidation de l'état de droit et sur la modernisation des administrations publiques. Le Salvador a accès au marché européen en franchise de droit pour tous les produits couverts par le « schéma de préférences généralisées communautaires », destiné à encourager la lutte contre la production et le trafic de stupéfiants.

Les relations avec les États-Unis restent étroites. Les Américains ont contribué au Plan de reconstruction nationale à hauteur de 600 millions de dollars et demeurent le principal partenaire économique (60% de part de marché).

Le conflit frontalier qui opposait le Salvador au Honduras a été conclu par un jugement de la Cour Internationale de Justice du 11 septembre 1992 attribuant au Honduras les deux tiers des territoires en litige. Ces zones frontalières particulièrement pauvres font l'objet d'un projet de développement commun avec l'Union européenne. Subsiste le litige sur la délimitation du golfe de Fonseca et l'île du Conejo.

Les relations diplomatiques avec Cuba sont gelées alors que les échanges sont intenses dans le commerce, la coopération et le tourisme. La Havane reprochant à San Salvador d'héberger des terroristes anti-castristes, ce qui a donné lieu à des accrochages verbaux entre les deux chefs d'État lors du sommet Ibéro-américain de novembre 2000.

Les relations économiques et commerciales avec l'Asie se sont intensifiées au cours de ces dernières années. Le Japon a financé plusieurs projets, la Corée du Sud a apporté 57 millions de dollars pour encourager la petite industrie et Taïwan à signé plusieurs accords.

Les relations avec l'Union européenne s'inscrivent dans le cadre institutionnel du processus de San Jose engagé en 1984 au Costa Rica pour promouvoir le dialogue politique entre l'Europe et l'Amérique centrale, et étendu en 1985 à la coopération économique par l'accord de Luxembourg. Un nouvel accord-cadre a été signé en 1993 à San Salvador. Les axes prioritaires de cette coopération sont les droits de l'Homme et la démocratie, la consolidation de l'État de Droit, la modernisation des administrations publiques, l'appui aux politiques sociales et au processus d'intégration. Le Salvador est un bénéficiaire relativement modeste de l'aide communautaire en Amérique centrale.17 Cette aide représente, depuis 1992, environ 200 millions d'euros auxquels s'ajoute 1/6ème de l'ensemble des projets régionaux (plus de 50 millions d'euros), en particulier à travers les ONG. En 1999, le Salvador a bénéficié d'un programme de 4 millions d'euros en faveur des populations bénéficiaires de transferts de terres.

Les échanges entre le Salvador et l'Union européenne sont faibles et leur solde est en faveur de ce pays (36 millions d'euros). Il a désormais accès au marché européen, en franchise de droit, pour tous les produits couverts par le « SPG drogue » (schéma de préférences généralisées communautaires destiné à encourager la lutte contre la production et le trafic de stupéfiants).

E.- ENTRETIENS DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE LORS DE SON SÉJOUR AU SALVADOR

1. M. WALTER ARAUJO, PRÉSIDENT DU PARTI ARENA

Le Président Araujo souhaite une chaleureuse bienvenue à la délégation du groupe d'amitié France-Amérique centrale après avoir rappelé qu'il était depuis un mois à la tête du parti Arena et ce pour une durée d'un an.

Le parti Arena a été fondé en 1981 par le commandant d'Aubuisson. Il est né au mileu du conflit armé et a augmenté son audience dans la population lorsque le Président Duarte n'a pas pu trouver de solution pour mettre un terme à la guerre ou inverser le déclin économique du pays. En 1988, l'Arena est devenu le premier parti de l'Assemblée et, un an plus tard, permettait à son candidat, M. Alfredo Cristiani, de remporter l'élection présidentielle.

M. Araujo souligne que c'est sous la présidence de l'Arena que les accords de paix ont pu être signés et qu'ensuite un véritable programme économique a pu être présenté au pays. Les élections présidentielles suivantes, également remportées par les candidats de l'Arena (MM. Armando Calderon Sol et Francisco Florès), ont permis de poursuivre le programme de privatisations entrepris (banques, télécommunications, électricité, etc.).

L'Arena vit un processus d'ouverture en souhaitant mettre de côté les dissensions du passé. Le parti, au travers d'un processus totalement transparent et du respect total des résultats électoraux, souhaite apparaître aux yeux de tous comme un parti moderne, résolument tourné vers l'avenir et soucieux de se donner une nouvelle image. Il multiplie également les contacts à l'étranger afin de se rapprocher de partis qui ont des références communes.

M. Jean-Jacques Filleul, président du groupe d'amitié France-Amérique centrale et Caraïbes et du groupe d'amitié France-El Salvador rappelle que la France est très attentive à la démocratie dans le monde. Il souhaite savoir, d'une part, si l'Arena serait prête à laisser le pouvoir en cas de défaite électorale et, d'autre part, s'il existe au sein de ce parti différents courants.

M. Araujo estime qu'il doit exister une alternance politique et que ceux, dans son propre parti, qui ne l'admettent pas, ont une vision restreinte de la réalité salvadorienne. Il existe effectivement des personnes, en nombre limité, qui ne suivent pas l'évolution de l'Arena souhaitée par le Président Florès. Ces personnes, représentant la ligne conservatrice du parti, sont là depuis très longtemps et n'ont pas compris qu'autour d'eux le monde a changé. Elles ne mettront toutefois pas en danger l'évolution entreprise par l'Arena.

A la demande de M. Jacques Guyard, le Président Araujo apporte des précisions sur l'enracinement social de l'Arena : le parti a créé un réseau national bien implanté dans les 14 départements ; sept secteurs (« entreprise », « femme », « jeunesse », « magistrature », « pays », « professionnel » et « ouvrier ») y sont représentés ; c'est pourquoi la majorité des villes détenues par l'Arena (126) se trouvent dans les zones rurales. Les contacts sont importants et réguliers avec les organisations paysannes. Le Salvador a beaucoup changé sa politique sociale, et, même s'il reste beaucoup à faire,18 le gouvernement souhaite donner des priorités au développement humain et faire baisser, par exemple, le taux d'analphabétisme.19

M. Jean Besson souhaite savoir si, dans le projet de développement économique mis en avant par la politique du Président Florès et soutenu par l'Arena, une priorité est donnée aux entreprises qui créent des emplois, permettant ainsi d'élargir la classe moyenne.

M. Ajauro confirme que la priorité des trois prochaines années du mandat présidentiel sera la création d'emplois nouveaux, principalement dans les « maquilas ». Les maquilas sont installées dans des zones franches.20

Une zone libre (ou de libre-échange) est par définition une zone non résidentielle désignée par le gouvernement où les sociétés bénéficient d'une situation privilégiée. Depuis la loi de 1989 qui permet l'ouverture de zones libres privées, le nombre de zones libres a rapidement augmenté. La loi s'applique pour les compagnies situées dans une zone libre et qui exportent 100% de leur production en dehors de la région d'Amérique Centrale. Tout propriétaire, que ce soit un individu ou une société, national ou étranger, qui remplit les critères, peut recevoir les bénéfices suivants :

· Exemption des tarifs d'importation sur les biens manufacturés exportés ;

· Exemption des tarifs d'importation sur la machinerie, les outils et pièces de rechange utilisés dans la zone libre ;

· Entrée libre de matières premières, pièces de rechange dans ladite zone ;

· Dix années d'exemption de l'impôt sur la fortune. Cette exemption peut être renouvelée pour une seconde période de dix ans ;

· Dix années d'exemption d'impôts municipaux sur les capitaux provenant de biens et propriétés associés à l'activité d'exportation ;

· Exemption de la Taxe sur la Valeur Ajoutée pour les biens exportés.

2. M. WALTER ARAUJO, PRÉSIDENT DE L'ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE ET LES MEMBRES DU BUREAU

Walter Rene Araujo Morales est président du parti Arena, mais aussi président de l'Assemblée législative. Né en 1964, après des études au Salvador, en Espagne et au Nicaragua, il intégrera le personnel de l'Assemblée législative avant de travailler à la présidence de la République, auprès d'Alfredo Cristiani. Élu député en 1994, puis membre du bureau, Président de la Commission des Lois, vice-président de l'assemblée en mai 2000 et enfin président de cette même Assemblée législative depuis mai 2001.

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Le Président, entouré de membres du Bureau de l'Assemblée législative a reçu la délégation française. Le Bureau est ainsi constitué :

- M. Walter Rene Araujo Morales, président, élu sur la liste nationale, membre de l'Arena ;

- M. Ciro Cruz Zepeda Pena, vice-président, élu du département de Cabanas, membre du PCN ;

- M. Julio Antonio Gamero Quintanilla, vice-président, élu du département de San Salvador, membre de l'Arena ;

- Mme Carmen Calderon de Escalon, secrétaire, élue sur la liste nationale, membre de l'Arena ;

- M. José Rafael Machuca Zelaya, secrétaire, élu du département de Usulutan, membre du PCN ;

- M. Alfonso Aristides Alvarenga, secrétaire, élu sur la liste nationale, membre du PDC ;

- M. William Rizziery Pichinte, secrétaire, élu du département de Cuscatlan, membre de l'Arena ;

- M. Ruben Orellana, secrétaire, élu du département de La Paz, membre du PCN ;

- M. Agustin Diaz Saravia, élu du département de San Salvador, membre du PDC.

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Les 14 départements salvadoriens dirigés par un gouverneur

Des 84 députés qui composent l'Assemblée législative, 64 représentent les 14 départements du pays21 et sont élus au sein de chacune de ces divisions politiques. Les 20 autres sont issus de listes nationales et élus à la proportionnelle en fonction des résultats obtenus par les différents partis.

M. Araujo précise que le FMLN n'a pas accepté les postes qui lui étaient proposés au Bureau. De ce fait, ce dernier est actuellement composé de membres de l'Arena, du PCN (parti de conciliation nationale) et du PDC (parti démocrate chrétien).

Les députés se répartissent au sein de 18 commissions (le nombre élevé de commissions s'expliquant plus par la volonté de donner à tous les partis des responsabilités politiques que par réelle nécessité). Les commissions, dans lesquelles toutes les forces politiques sont représentées, sont les suivantes :

- législation et lois constitutionnelles ;

- relations extérieures et intégration centraméricaine ;

- justice et droits de l'homme ;

- culture et éducation ;

- travaux publics ;

- affaires municipales ;

- économie et agriculture ;

- budget ;

- défense ;

- sécurité publique ;

- protection de l'environnement et de la santé publique ;

- famille, femme et enfant ;

- travail et prévisions sociales ;

- réformes électorales et constitutionnelles ;

- finances ;

- développement de la concurrence ;

- modernisation ;

- jeunesse, sports et loisirs.

Les députés salvadoriens évoquent ensuite l'importance de changer les fichiers d'électeurs actuels. Un projet de réforme est en cours d'étude, visant à supprimer les listes actuelles qui sont établies par ordre alphabétique et à les remplacer par de nouvelles qui prendront en compte comme premier critère d'inscription dans un bureau de vote, le lieu d'habitation. Il convient également de mettre régulièrement à jour ces fichiers de façon à ce que les personnes décédées ne restent pas, des années après leur mort, inscrites à tort. L'ensemble des partis est d'accord sur ce projet qui permettrait de resserrer les liens avec la population.

M. Araujo insiste enfin sur le souhait de l'Assemblée législative de multiplier les contacts avec les parlements étrangers, tant au niveau régional qu'au niveau mondial.

3. MME MILENA CALDERON DE ESCALON, PRÉSIDENTE DE LA COMMISSION DES RELATIONS EXTÉRIEURES ET LES MEMBRES DE LA COMMISSION

Les députés français ont pu s'entretenir avec Mme Calderon de Escalon, secrétaire du Bureau de l'Assemblée législative, présidente de la Commission des relations extérieures et avec les membres de la commission. La présidente a longuement évoqué le soutien de la France lors du conflit armé, mais aussi à la suite des catastrophes naturelles qui ont touché le Salvador.

Elle a parlé de la réactivation du processus d'intégration centraméricain au travers de la Communauté économique de l'isthme centraméricain22 et du fort désir de rapprochement avec tous les autres pays de l'Amérique centrale. Le Marché commun centraméricain (MCCA) est au c_ur des relations commerciales régionales d'El Salvador, qui s'est spécialement attaché à le redynamiser. Dans ce contexte, un processus d'unification du tarif extérieur négocié en 1993 a été amorcé, et il existe d'ores et déjà une législation commune dans plusieurs domaines, notamment l'évaluation en douane, la propriété intellectuelle, les mesures antidumping et compensatoires.

De concert avec le Guatemala et le Honduras, El Salvador a négocié un accord de libre-échange avec le Mexique ; il participe également aux négociations en vue de la création d'une zone de libre-échange des Amériques et a signé avec plusieurs pays des accords bilatéraux portant sur les investissements.

Mme Calderon de Escalon déplore que le Costa Rica, de loin le pays le plus actif de la région, ne soit pas membre du parlement centraméricain, qu'il fasse cavalier seul et signe des ententes commerciales séparées. Elle demande aux députés français d'user de leur influence pour convaincre le Costa Rica de rejoindre le Parlacen.

Les députés salvadoriens ont ensuite abordé le sujet du commerce extérieur. Les principaux partenaires commerciaux de leur pays sont les États-Unis, essentiellement pour les produits agricoles et les vêtements (ceux-ci étant généralement assemblés dans les zones franches) ; l'Union européenne, également pour les produits agricoles ; et enfin, les pays d'Amérique centrale, pour les biens industriels. Trois facteurs peuvent expliquer la concentration des échanges. Premièrement, El Salvador bénéficie d'un régime de franchise de droits aux États-Unis, en vertu de l'Initiative concernant le Bassin des Caraïbes et également au sein de l'Union européenne, au titre du Système généralisé de préférences. Deuxièmement, les zones franches se sont spécialisées dans l'assemblage des vêtements destinés au marché américain dans le cadre du Programme d'assemblage à l'étranger qui constitue un autre régime préférentiel. Troisièmement, le commerce intrarégional est important en raison de l'existence du Marché commun centraméricain (MCCA).

Le manque de diversification des exportations est un sujet de préoccupation. Si le régime américain de contingents préférentiels pour le sucre et l'assemblage à l'étranger procure des avantages à El Salvador, il entrave également la diversification de la production et des échanges ; en effet, des ressources qui pourraient être consacrées à d'autres usages sont allouées à la production de sucre et à l'assemblage de vêtements dans les zones franches. Par ailleurs, l'appréciation réelle de la monnaie depuis quelques années a également nui à l'élargissement de la gamme des produits d'exportation en raison de la perte de compétitivité des exportations salvadoriennes.

Les objectifs de la politique commerciale sont notamment d'instaurer graduellement un régime d'échanges davantage axé sur l'extérieur, de renforcer et d'accroître l'accès aux marchés étrangers pour les produits nationaux et d'intégrer davantage le pays à l'économie mondiale. El Salvador a poursuivi ces objectifs dans son programme unilatéral de réformes ainsi qu'à la faveur de négociations régionales, bilatérales et multilatérales sur le commerce et les investissements. Les négociations commerciales régionales avec le reste de l'Amérique centrale et dans le cadre de la Zone de libre-échange des Amériques sont jugées très importantes, mais El Salvador a également intensifié sa participation au niveau multilatéral par l'entremise de l'OMC. El Salvador a accédé au GATT en 1991.

Mme Calderon de Escalon a enfin évoqué le cas des 1,5 million de Salvadoriens qui travaillent aux États-Unis. Depuis la fin de la guerre civile, des Salvadoriens ont émigré aux États-Unis, et on estime qu'ils envoient chaque année à leurs familles plus d'1,5 milliard de dollars, c'est-à-dire davantage que les recettes d'exportation du café et du sucre. L'impact politique, social et culturel de cette émigration est également très important. Les envois de fonds des émigrés résidant aux États-Unis sont devenus une soupape de sécurité pour la population. Pour un petit pays, mal assuré de son identité, le prix culturel de cette influence américaine risque d'être élevé, mais il a ses côtés positifs : les Salvadoriens sont devenus politiquement plus sophistiqués et plus exigeants à l'égard de ceux qui les gouvernent.

4. MEMBRES DU PARTI DE CONCILIATION NATIONALE (PCN)

Le PCN a actuellement 14 députés élus à l'Assemblée législative. Il déclare souhaiter se différencier de l'Arena en mettant en valeur l'humanisme, le nationalisme et la démocratie.

Il se présente comme la 3ème force politique du pays. Une force qui se réclame ouvertement de droite, tout en étant dans l'opposition car ne partageant pas toutes les idées du parti Arena.

Le PCN, sociologiquement implanté dans les campagnes, insiste sur la nécessité de traiter en priorité les problèmes sociaux. Il veut lutter contre la corruption et la délinquance.

Étant donné la répartition actuelle des sièges à l'Assemblée législative, et notamment en ce qui concerne les trois premiers partis (FMLN : 31, Arena : 29, PCN : 14), des accords sont nécessaires pour obtenir une majorité (43) permettant l'adoption des lois. Le PCN se déclare prêt à jouer le rôle de « parti charnière » et de voter avec l'Arena ou même avec le FMLN s'il estime que le texte en discussion pourrait profiter au plus grand nombre et non pas à quelques privilégiés.

Répondant à des questions de MM. Jacques Guyard et Jean Besson sur la dollarisation, les députés du PCN ont déclaré être en accord avec la loi d'intégration monétaire qui a officialisé « l'accrochage » du colon au dollar. Ils soulignent que cela a permis de baisser les taux d'intérêt à court terme pour favoriser la relance de la demande interne et conduire les entreprises à des gains de productivité destinés à maintenir leur compétitivité.

M. Jean-Jacques Filleul a souhaité connaître les propositions du PCN face à la montée de la délinquance dans le pays.

Les membres du PCN reconnaissent que le fort taux de délinquance est un grave problème qui est en grande partie dû au chômage et au passage rapide de la guerre à la paix. Des deux côtés, la plupart des protagonistes n'ont pas rendu leurs armes, facilitant ainsi toutes les dérives. De plus, une certaine habitude à ne pas travailler, durant toutes ces années de conflit, s'est installée chez certains. Le PCN considère que des pays comme la Suisse ou la Suède qui sont, à l'époque, venus aider le Salvador, ont essayé d'implanter des lois qui ne convenaient pas à un pays qui sortait d'un long conflit armé. Ces lois, trop libérales, « protégeaient » les délinquants. Le Salvador a besoin de durcir sa législation afin de lutter contre ceux qui transgressent la loi. Dans les effectifs actuels de la police, outre 40% de personnel nouveau, se retrouvent environ 30% d'anciens membres des forces armées et 30% d'anciens membres de la guérilla (les chiffres donnés par le FMLN sont respectivement de 60%, 20% et 20%).

M. Michel Meylan s'est étonné du faible niveau du salaire minimum salvadorien.

Le salaire minimum n'est pas en adéquation avec le coût réel de la vie au Salvador. Jusqu'à présent, toute proposition d'augmentation de ce salaire minimum a été rejetée par le gouvernement, trop lié avec les milieux industriels du pays. De plus, il existe deux salaires minimum (celui des entreprises privées et celui, deux fois moindre, des travailleurs agricoles). Afin de créer de nouveaux emplois, mieux rémunérés, il est indispensable que des pays amis investissent au Salvador.

Enfin, le PCN estime que le gouvernement délaisse totalement le secteur agricole.

5. M. HECTOR GONZALEZ URRUTIA, VICE-MINISTRE DES RELATIONS EXTÉRIEURES

M. Héctor González Urrutia souhaite la bienvenue aux députés français. Il remercie la France de son appui lorsqu'il s'agissait de chercher une solution au conflit armé et de son soutien après les tremblements de terre du début de l'année. Il souligne les excellents rapports avec l'Ambassade de France.

M. le ministre pense que la coopération avec la France pourrait se renforcer grâce à l'investissement d'entreprises privées au Salvador. Le gouvernement est bien conscient qu'il ne peut pas, seul, faire mieux que le secteur privé. Il a donc décidé de lancer, très prochainement, un processus de concessions dans des domaines où les entreprises françaises sont bien placées (transports urbains et ferroviaires, ports et aéroports, routes, eau, production d'électricité).

M. Héctor González Urrutia estime primordial de multiplier les échanges entre l'Assemblée législative salvadorienne, l'Assemblée nationale française et l'Ambassade de France à San Salvador afin de promouvoir un rapprochement des entreprises des deux pays.

M. le ministre souligne le caractère exemplaire du processus de démocratisation. Des progrès très importants ont été effectués, au niveau politique, depuis les accords de paix. Il est significatif de voir que ceux qui se sont combattus hier, se retrouvent aujourd'hui membres du même Parlement.

M. Jean-Jacques Filleul propose, afin d'accélérer la coopération, que chaque député français présent informe les entreprises susceptibles d'être intéressées par le nouveau régime de concessions. Il prendra personnellement des contacts au niveau des transports.

Jean Besson rappelle l'importance des États-Unis dans cette région. Il indique que même si les entreprises françaises sont intéressées et que les entreprises salvadoriennes sont d'accord, l'élément clef reste la volonté politique du gouvernement salvadorien. Il ne faut pas ignorer l'importance du grand voisin américain qui emporte bien souvent la décision finale. Les États-Unis sont des voisins puissants qui ont, comme tous les marchands, l'amitié intéressée. Dans ces conditions, M. Besson s'interroge sur le réel degré d'indépendance du Salvador.

M. Héctor González Urrutia appréciant ce dialogue franc et direct, ne nie pas la proximité avec les États-Unis mais estime important de diversifier les échanges économiques de son pays avec l'étranger. La France n'est pas placée après les États-Unis et l'Espagne mais à égalité avec eux.

Répondant à une question de M. Filleul sur la coopération dans le domaine de l'éducation, M. le ministre s'est déclaré intéressé par le système d'universités gratuites dont dispose la France. Dès l'an prochain, le gouvernement salvadorien financera un programme de bourses pour que de jeunes salvadoriens puissent aller poursuivre leurs études à l'étranger, et notamment au sein de l'Union européenne. Une fois les étudiants sélectionnés, ils suivront des cours à l'Alliance française. A cette fin, un accord pourrait être conclu avec le ministère de l'éducation.

M. Héctor González Urrutia, rappelle enfin qu'il a signé avec M. Luis Martí, vice-président de la BEI23 - l'institution de financement à long terme de l'Union européenne - chargé plus particulièrement des opérations de la Banque en Amérique latine, un accord-cadre en vertu duquel la Banque a pu commencer à réaliser des opérations de prêt en faveur d'investissements au Salvador, dans le cadre de la politique de coopération suivie par l'Union européenne à l'égard des pays tiers.

6. MEMBRES DU FRONT FARABUNDO MARTI DE LIBÉRATION NATIONALE (FMLN)

Les députés français ont été reçus au siège de l'Institut des sciences politiques et administratives « Farabundo Marti » qui assure la formation des militants et des cadres pour l'administration locale. Les membres de la commission politique ont exposé les projets du FMLN et ont répondu aux diverses interrogations de la délégation française.

Le Directeur de la commission politique, répondant à une question de M. Jean-Jacques Filleul, est revenu sur les résultats des dernières élections, avant de souligner que le FMLN avait comme souci permanent d'être un parti jeune. Ce parti s'est fixé différentes règles imposant un quart de personnes de moins de 30 ans parmi ses dirigeants, ainsi qu'un minimum de 35% de femmes.

Son but est de construire une démocratie pour tout le pays. Depuis la convention nationale de décembre 2000, un point novateur est à souligner, à savoir l'élection à bulletins secrets par les militants des divers responsables politiques. 2001 devrait conduire à de nouvelles réformes. Ce parti doit se préparer à cette étape qui verra les représentants départementaux être désignés.

Pour la direction du FMLN, la période qui a suivi la signature des accords de paix présente un solde clairement positif. Il fallait en finir avec la guerre, créer un espace public démocratique et consolider une légitimité politico-institutionnelle construite dans les longues années de la lutte insurrectionnelle.

Le FMLN est aujourd'hui la première force politique du pays. Pourtant ses dirigeants estiment qu'il ne dispose pas d'un rapport de forces suffisant au Parlement (31 députés sur 84) pour pouvoir y promouvoir des lois de réformes économiques et sociales. À ce jour, se pose la question des alliances. La logique et le bon sens poussent à construire une alliance, y compris avec l'Arena. Les responsables du FMLN se veulent réalistes et souhaitent gouverner convenablement le pays en recherchant les points de convergence. Ils sont désireux de s'entendre avec le gouvernement, mais affirment que ce dernier semble vouloir tout résoudre tout seul et reprochent l'arrogance de M. Florès qui, en 2000, pour le premier anniversaire de son investiture, avait annoncé qu'il travaillerait avec l'opposition ; ce qui ne fut qu'une man_uvre lui permettant d'obtenir l'approbation des prêts de la BID. Par ailleurs, le gouvernement se sent plus fort depuis l'élection du président Bush aux États-Unis. La concertation nationale est indispensable pour pouvoir gouverner le Salvador.

D'après ses dirigeants, l'unité actuelle du FMLN s'est réalisée autour d'un "programme viable" établi pour le Salvador. Dans ce pays qui connaît d'incroyables inégalités sociales, un taux inédit de concentration de la terre et des services publics en pleine déliquescence, les revendications et les luttes sociales se multiplient.

Le but du FMLN est de dépasser une certaine culture centralisatrice, héritée de nombreuses années de dictatures militaires, en faveur de la décentralisation. Elle permettrait de transférer le pouvoir de décision aux municipalités. Après 12 ans de guerre, le pays a une structure économique faible ; un des objectifs du FMLN est de sortir le peuple du sous-développement. A cet effet, tout devait s'organiser autour de la reconstruction. Mais les besoins sont sans commune mesure avec les moyens disponibles. C'est pourquoi la question de la fiscalité sera discutée lors du projet de budget pour 2002 et des alliances seront recherchées à l'Assemblée législative. Il faut s'interroger sur la façon de créer des emplois, de la richesse et de distribuer équitablement cette dernière. L'État a un rôle à jouer, notamment dans les services. La formation est un élément clé pour permettre au pays de disposer de la main d'_uvre qualifiée nécessaire.

Au travers des municipalités tenues par le FMLN, le parti gouverne environ 60% de la population salvadorienne. Le parti essaie d'améliorer les fichiers de ses adhérents. Depuis que le FMLN s'est restructuré en parti politique, environ 120 000 personnes ont été affiliées mais du fait des déplacements de population, il était devenu extrêmement difficile de les localiser. Les tremblements de terre n'ont évidemment pas facilité les recherches ; le FMLN souhaite établir les registres définitifs 4 mois avant la future désignation des responsables.

Il existe actuellement un document unique servant de bulletin lors des élections. Ce document est onéreux (environ 10 $) et il serait souhaitable que le coût soit pris en charge par le gouvernement. L'abstention est importante. Le système des partis qui ont utilisé le clientélisme à l'assemblée a été discrédité, notamment à cause des problèmes de corruption, d'impunité et de pauvreté (80% de la population est en état de pauvreté dont 23% en état d'extrême pauvreté).

M. Jacques Guyard souhaite savoir pourquoi le FMLN refuse certains postes à responsabilité, et ne fait, par exemple, pas partie du Bureau de l'Assemblée législative.

Il est de tradition que le Président de l'Assemblée législative soit choisi dans le parti le plus important de la chambre. Or, du fait des alliances à droite, ce n'est pas le cas et c'est un membre de l'Arena, M. Walter Araujo, qui détient la présidence. Le FMLN, ne voulant pas cautionner ces méthodes, ne participe pas au Bureau.

Concernant la future élection présidentielle, les membres du FMLN estiment qu'il ne faut pas « diaboliser » leur parti. Une éventuelle victoire de leur candidat ne provoquerait pas une guerre civile dans le pays. La génération qui a participé au conflit armé ne reprendra pas les armes car tout le monde a parié sur la victoire de la démocratie dans le pays. Seule une minorité de l'Arena n'accepte pas l'idée de perdre le pouvoir et agite l'épouvantail du communisme et de l'expropriation.

La crainte d'un risque de confrontation provenant de l'arrivée à la tête de l'Arena et du FMLN des secteurs les plus radicaux n'est pas fondée, car le FMLN est un parti « pluriel » qui favorise une réelle concurrence et non des monopoles.

7. DIRIGEANTS DE L'ASSOCIATION NATIONALE DE L'ENTREPRISE PRIVÉE (ANEP)

Après avoir souhaité la bienvenue à la délégation française, les dirigeants de l'ANEP leur ont présenté l'économie salvadorienne, avant de répondre à quelques questions.

L'économie sociale de marché a vu un rebondissement dans les années 90. Ceci se reflète dans une croissance économique annuelle de plus de 6% durant la période 1992-1995. Cette croissance se développa dans un environnement de stabilité des taux de change, de finances publiques saines et de réduction du niveau d'inflation, établissant ainsi un climat macro-économique très stable. Le président Calderón, élu en 1994, accéléra le programme de réformes sous une nouvelle impulsion de globalisation. De 1996 à 2000, la croissance moyenne du PIB a été plus faible, avoisinant les 3%.24

Le Salvador fut le théâtre d'un incroyable effort de reconstruction durant ces années. Ces efforts prennent toute leur valeur quand on considère que la guerre civile qui ravageait le pays prit fin il n'y a que neuf années. Le pays s'est fortement stabilisé depuis la signature des accords de paix en 1992. Le gouvernement lança un programme de globalisation afin d'accélérer la croissance du secteur privé et d'accroître le degré de compétitivité de l'économie.

Parmi les mesures économiques initiées pour assurer la stabilité macro-économique et la croissance économique, les dirigeants de l'ANEP citent la réduction du niveau des tarifs, l'accroissement du niveau de liberté économique, la modernisation du gouvernement, la privatisation des banques et des institutions publiques, le taux d'intérêt et de change flottant, la création de l'Office National des Investissements et la promotion des exportations. Ils précisent que le gouvernement a éliminé les restrictions sur l'acquisition ou le rapatriement des fonds par des personnes ou sociétés étrangères.

El Salvador est ensuite entré dans une seconde phase de son programme de privatisations. Cette nouvelle vague de privatisations a eu pour objectif d'insuffler au sein des entreprises étatiques le savoir-faire de la gestion privée et le capital nécessaire pour garantir une infrastructure économique concurrentielle à des niveaux de prix compétitifs. Parmi les secteurs privatisés, on compte les banques commerciales, les institutions d'épargne, les entreprises de production sucrière, et ANTEL, la société étatique de télécommunications.

En février 1996, l'Index de Liberté Économique de la Fondation Héritage plaça El Salvador en 30ème position parmi 140 pays dans le monde (surpassant par exemple au niveau mondial la Norvège, la Suède et le Portugal). El Salvador, au même rang que le Chili, fut classé le deuxième pays d'Amérique latine en matière de liberté économique. L'indice de Liberté Économique publié par cette fondation pour l'année 2000 place El Salvador en 11ème place sur 161 pays. En 1999, le pays occupait la 22ème place, ce qui démontre les efforts d'El Salvador pour poursuivre son internationalisation et conserver sa prudente manipulation macroéconomique.

Indice de liberté économique - Année 2000

PAYS

POSITION

 

HONG KONG

1

 

ETATS UNIS

4

 

IRLANDE

7

 

ROYAUME UNI

8

 

CANADA

11

 

CHILI

11

 

EL SALVADOR

11

 

TAIWAN

11

 

ARGENTINE

17

 

JAPON

19

 

BAHAMAS

22

 

ALLEMAGNE

22

 

FRANCE

39

 

Source: Héritage Fondation

Cet indice évalue l'accomplissement du pays en fonction des facteurs suivants : politique commerciale, participation du gouvernement dans l'économie, poids fiscal du gouvernement, politique monétaire, flux de capitaux et investissements étrangers, système bancaire, salaires et prix ; droits sur les biens intellectuels, régulation interne et marché noir.

L'inflation a considérablement baissé. Elle s'élevait, en moyenne, à 12,9% durant les années 1992-1995 pour s'établir à moins de 4% durant les cinq années suivantes, avec un minimum de 0,6% pour l'année 1999.25

La dette extérieure publique, qui était d'environ 40% du PIB en 1992, reste désormais faible (21,5% en 2000) et son service ne représente que 9% des exportations.

Le chemin de la réussite économique est néanmoins encore parsemé de nombreux obstacles qui décideront du succès du programme gouvernemental de globalisation. Pour maintenir un taux de croissance économique élevé, le pays devra élargir la gamme de production dirigée aux exportations tout en améliorant la productivité des entreprises. Aussi, le gouvernement devra canaliser vers des investissements de long terme les capitaux provenant de Salvadoriens travaillant à l'étranger.

La croissance, importante durant les années qui ont suivi la signature des accords de paix, s'est tassée depuis 1997 et n'a pas dépassé 2% en 2000. La demande intérieure est pénalisée par des taux d'intérêts, qui, bien qu'ayant diminué, restent élevés (1991-1995 : 27,8% ; 1996-2000 : 15,4%).

Si certains facteurs sont actuellement favorables à la croissance de l'économie du pays (baisse des taux d'intérêt aux États-Unis, baisse des taux d'intérêt locaux, augmentation de l'investissement public, mise en _uvre du traité de libre-échange avec le Mexique, etc.), d'autres concourent à la pénaliser lourdement (baisse des résultats économiques aux États-Unis, chute des prix du café, augmentation des prix du pétrole, déficit public croissant, insécurité récurrente, etc.). Les dirigeants de l'ANEP estiment primordial la réduction des coûts de production dans le pays.

En réponse à différentes questions de MM. Jean-Jacques Filleul, Jacques Guyard et Michel Meylan sur les infrastructures du pays, sur la fiscalité, sur les investissements étrangers au Salvador, sur la dollarisation et sur la formation professionnelle, le vice-président de l'ANEP a apporté les précisions suivantes :

● El Salvador possède un réseau de 9 800 km de routes pavées, les deux routes principales étant la Pan American Highway et la Carretera del Litoral (qui est parallèle à la côte). Ces deux routes traversent le pays d'est en ouest. Le système ferroviaire comporte 603 km de voies ferrées reliant San Salvador au ports principaux d'Acajutla et de Cutuco, ainsi qu'aux villes de Santa Ana, San Miguel et Sonsonate.

L'aéroport international d'El Salvador est un des plus modernes en Amérique Latine. Il bénéficie d'excellentes conditions climatologiques 365 jours par an et sa position géographique privilégiée permet une exploitation optimale de celui-ci. Le plan d'agrandissement et de modernisation entrepris par le gouvernement en 1998 a permis une augmentation de 30% des services offerts. Actuellement, le trafic de l'aéroport est de 1 200 000 passagers et de plus de 25 000 vols commerciaux par an.

Dans un effort de compétitivité dans les marchés internationaux, le gouvernement salvadorien soutient une politique d'ouverture en matière aérienne qui se base sur la réciprocité, la non-discrimination, la concurrence et la promotion des relations du pays avec la communauté internationale. Les politiques cherchent à améliorer le transport aérien en offrant un meilleur choix, des prix peu élevés et une qualité du service qui bénéficieront aux usagers du transport et qui permettront de promouvoir le commerce, le tourisme et l'investissement.26

El Salvador possède deux ports principaux : Acajutla et Cutuco. Acajutla se situe dans la partie ouest du pays à proximité de la frontière du Guatemala. Le port d'Acajutla possède l'infrastructure la plus développée et moderne de la région. En outre, c'est le port sur l'océan Pacifique le plus important d'Amérique centrale. Cutuco se trouve dans le golfe de Fonseca, dans la partie est du pays.

● Le Salvador ne possède pas un système de collecte d'impôts réellement performant (moins de 15% des travailleurs paient effectivement un impôt sur le revenu, l'évasion fiscale de certaines entreprises n'est pas négligeable et le salaire minimum mensuel est d'environ 160 $).

- Impôt sur les revenus : tout individu, société ou corporation, domicilié ou non au Salvador, qui reçoit des revenus provenant d'activités situées au Salvador, doit payer un impôt sur les revenus. Il existe quatre taux d'imposition (pour les personnes nationales et étrangères) en fonction de l'importance des revenus perçus.27

- Impôt sur les sociétés : les sociétés nationales et étrangères doivent payer un impôt de 25% sur tout revenu de plus de 75 000 colons (8 600 $). Les dividendes rapatriés à l'étranger, une fois cet impôt payé, ne sont pas soumis à d'autre impôt.

Dans les cas de "trusts" et successions, pour les personnes non domiciliées au Salvador, un impôt de 25% est perçu sur les revenus.

Les paiements effectués par des personnes nationales à des étrangers, nationaux ou sociétés non domiciliés dans le pays sont sujets à un impôt de 20%. Ce pourcentage peut être réduit par une justification antérieure et après que des garanties ont été procurées aux instances fiscales.

Les sociétés étrangères non domiciliées appartenant à la catégorie devant payer des impôts, doivent élire un représentant ou agent auprès du département fiscal.

Les sociétés dont les activités se déroulent à l'intérieur d'une zone libre jouissent de certaines exemptions en matière d'impôts.

- Taxe sur la Valeur Ajoutée (Impuesto al Valor Agregado ou IVA) : le gouvernement d'El Salvador perçoit une Taxe sur la Valeur Ajoutée de 13% sur la vente et le transfert de toute marchandise, avec certaines exceptions pour les biens élémentaires comme le riz, les légumes et les médicaments. Le paiement de cette taxe s'effectue mensuellement et une amende élevée est infligée pour les paiements en retard. Les compagnies situées dans les zones libres et qui exportent leurs produits ne sont pas soumis à la taxe.

- Taxe d'Importation : les taxes de douanes sont calculées suivant les tarifs d'Amérique centrale (Central American Tariff Schedule) qui est identique pour tous les pays de la région. Le gouvernement ne perçoit pas de taxes d'exportation.

Les revenus fiscaux proviennent en grande partie de ces trois taxes principales : la taxe sur la valeur ajoutée (43%), l'impôt sur les revenus (25%) et la taxe sur les importations (16%). Comme dans la majorité des pays d'Amérique centrale, l'évasion fiscale reste un problème important. Récemment, des efforts furent entrepris afin d'améliorer l'efficacité du procédé de collection.

● Le gouvernement d'El Salvador, en adoptant des lois très libérales et peu contraignantes, veut encourager les investissements étrangers. Deux lois principales régissent les investissements : la loi de 1990 sur la réactivation des exportations (Export Reactivation Law) et la loi de 1988 sur la promotion et la garantie des investissements étrangers (Foreign Investment - Promotion and Guarantee Law). Un certain nombre d'organisations peuvent aider à établir un commerce au Salvador.

Les ressortissants étrangers peuvent être propriétaires à 100% de sociétés au Salvador (quelques exceptions existent pour les petites entreprises). Il existe différentes options :

- Propriété personnelle ;

- Associations (de personnes ou capitaux) ;

- Incorporations ;

- Joint Ventures.

En tant que membre du Système d'Intégration de l'Amérique Centrale, El Salvador permet l'accès à un marché régional de plus de 40 milliards de dollars de produit intérieur brut et de plus de 30 millions d'habitants, ce qui fait d'El Salvador une plate-forme compétitive pour les investissements et autres opérations à un niveau mondial.

Il y a très peu de limitations sur les importations de biens et services. Il existe une petite liste de marchandises dont l'importation est soumise à l'autorisation par les institutions du Gouvernement, entre autre l'essence, le kérosène, le fuel oil, l'asphalte, le propane, le butane, les sacs de tissu, le sucre et les mélasses. Les barrières à l'importation non douanières sont presque toutes éliminées.

Le Système douanier d'Amérique centrale (SAC), basé sur le Système harmonisé de désignation et codification des marchandises, est entré en vigueur en 1993. Le SAC cherche à établir un plafond douanier d'un maximum de 15% et un plancher de 0%, à l'exception de quelques marchandises (automobiles, café, sucre, pétrole et dérivés et alcool éthylique).

Le programme salvadorien de réduction des droits de douane prévoit une diminution progressive de tous les droits de douane de 5 points, échelonnés en réductions semestrielles de un point au début de chaque semestre jusqu'à atteindre les 15%. Selon ce programme, les droits de douane sont maintenant fixés à :

- 0% pour les biens de capitaux et matières premières ;

- 7% pour les biens intermédiaires non produits en El Salvador ;

- 12% pour les autres biens intermédiaires ;

- 17% pour les biens finis.

Il existe aussi une liste de biens soumis à des droits de douane qui varient entre 30 et 45%, entre autres, les automobiles, les textiles, les armes à feu et certains articles de luxe. Les exportateurs de produits non traditionnels en dehors du territoire d'Amérique centrale peuvent obtenir une restitution équivalente à 6% de la valeur FOB des exportations.

● Les entrepreneurs d'Amérique centrale estiment que la dollarisation permet d'attirer les investissements étrangers. Même si les raisons qui poussent les pays d'Amérique latine à dollariser leurs économies ne sont pas identiques, elles reposent toutes sur une obsession commune : en finir avec l'instabilité et ne pas retomber dans les cauchemars de l'hyperinflation. Le Panama a adopté le dollar en 1904, mais son économie, liée à la rente du canal, renseigne assez peu sur les effets d'une telle décision. L'Équateur a choisi d'abandonner le sucre pour le billet vert en janvier 2000, pour tenter de sortir d'une crise abyssale. Le choix du Salvador de dollariser son économie, en janvier 2001, résulte plus d'un processus général d'assainissement, ce qui explique son relatif succès.

Les négociations en cours pour créer sur le continent américain (à l'exception de Cuba) une zone de libre-échange (ALCA) de 800 millions d'habitants expliquent en grande partie ce mouvement.

Même s'il est prématuré de parler d'une vague de dollarisation, les économies engagées dans le processus présentent toutes les mêmes caractéristiques : marché restreint, intégration régionale perpétuellement retardée, ouverture commerciale réelle et grande pauvreté.

Les réformes monétaires décidées par le Salvador exercent une forte pression sur les autres pays centraméricains. Réunis à San José, au Costa Rica, en février 2001, les principaux responsables des entreprises de la région se sont prononcés en faveur d'une dollarisation de leurs économies pour garantir la stabilité et attirer les investissements étrangers, indispensables pour financer leur croissance.

A cette occasion, le président de la banque centrale du Salvador, Rafael Barraza, a fait remarquer que, un mois après la décision d'intégration monétaire décidée par son pays, les taux d'intérêt étaient passés de 20% à 11,5%. L'ensemble des participants se sont accordés pour reconnaître qu'avec la dollarisation de son économie, le Salvador était devenu le pays le plus compétitif pour attirer les investisseurs étrangers. "La dollarisation des économies de la région va s'accentuer jusqu'en 2005", assure l'économiste guatémaltèque Pablo Rodas. Il ajoute qu'à cette date elle sera "une réalité de fait".

● Le secteur privé a financé l'Institut salvadorien de formation professionnelle. Cet institut est basé dans la capitale et ne possède pas, pour l'instant, d'équivalent dans les zones rurales. Il forme à tous les niveaux.

8. M. OSCAR ORTIZ, MAIRE DE SANTA TECLA

La zone la plus gravement sinistrée, lors du tremblement de terre du 13 janvier 2001, est celle de Santa Tecla, dans la banlieue de la capitale San Salvador, où une colline s'est effondrée sur des maisons du quartier Las Colinas. Après ce glissement de terrain, des centaines de maisons ont disparu sous une couche sableuse de plusieurs mètres d'épaisseur. Les députés français se sont rendus sur place en compagnie de M. Oscar Ortiz, maire de Santa Tecla.

M. Ortiz était dirigeant d'un mouvement de lycéens, entre 1978 et 1981, puis responsable du « Frente Paracentral », commandant de la zone Victoria au sein de la guérilla, entre 1981 et 1992. Il a été élu député du FMLN en 1994 et 1997.

M. Ortiz rappelle que, pendant des années, des mouvements écologistes et des responsables locaux se sont battus contre le déboisement de la Cordillera del Balsamo et contre le lotissement des terrains, situés au pied de la colline. Le conseil municipal avait entamé une procédure juridique contre les promoteurs immobiliers, sans résultat. Un ministre en fonction avait même délivré un permis à sa propre firme pour la construction d'une série de nouvelles maisons. Un tremblement de terre est, avant tout, un phénomène naturel, mais les conséquences dramatiques de ce désastre sont dues à l'activité humaine, aux décisions politiques, à la pauvreté et à l'injustice.

Des militants écologistes ont déclaré que la déforestation anarchique et l'absence de contrôle de l'urbanisation ont contribué à donner cette amplitude à la catastrophe.28 Ils ont indiqué avoir demandé en vain au Congrès et à la Cour suprême de stopper les constructions sur les flancs de la colline qui s'est effondrée à la suite du séisme.

Selon eux, le Congrès n'a jamais répondu, la Cour suprême a rejeté la demande et les constructions se sont poursuivies. « De nombreux projets d'urbanisation ont été autorisés... et vous avez le résultat, des centaines de morts ! », a déclaré un militant écologiste, Ricardo Navarro, en dénonçant la négligence des membres du Congrès et du gouvernement.

D'autres quartiers ont été évacués devant le danger de nouveaux glissements de terrain. Les collines sont entièrement crevassées et de nouvelles secousses peuvent provoquer une nouvelle catastrophe.

M. Ortiz dénonce les promoteurs immobiliers qui profitent au maximum de la mondialisation de l'économie et la politique « à deux vitesses » appliquée actuellement au Salvador. Les entrepreneurs rassemblés dans l'ANEP (Association nationale de l'entreprise privée), la haute bourgeoisie et l'Arena sont, d'après lui, le même club de privilégiés. Le gouvernement fait appel au secteur privé pour affronter l'état d'urgence ; il mène une politique cohérente mais ultra libérale. Le profit est la seule motivation pour les promoteurs immobiliers qui se chargent de la reconstruction. Partout, des voix s'élèvent pour exiger des mesures contre la spéculation.

De plus, le Salvador est devenu un des pays les plus violents de l'Amérique latine et même l'aide aux populations victimes du séisme souffre de cette situation ; les convois de dons sont régulièrement attaqués.

M. Ortiz rappelle que les centaines de répliques qui ont suivi le séisme ont gêné les opérations de secours. Il a évoqué le cas d'un jeune homme qui a passé plus de trente heures sous les décombres de sa maison de Las Colinas, et appelé à l'aide grâce à son téléphone portable.

Les autorités ont enterré beaucoup de victimes dans des fosses communes. Environ la moitié des corps retrouvés n'ont pas été identifiés. Trois mille cercueils ont été demandés à la Colombie voisine.

De leur côté, le Mexique, les États-Unis, l'Union européenne, l'Allemagne, la France, la Grande-Bretagne, l'Espagne, la Norvège, le Panama, Taïwan et le Guatemala, où le tremblement de terre a fait six morts, ont offert leur aide. Des ONG sont également de la partie, parmi lesquelles la Croix-Rouge française, le Secours catholique ou encore Médecins du monde. Les hôpitaux de San Salvador ont été saturés par l'afflux de blessés, provenant de Santa Tecla ou amenés des provinces par des hélicoptères.

Santa Tecla étant la ville la plus touchée du pays, M. Oscar Ortiz indique qu'il a été amené à discuter très régulièrement avec le gouvernement. Ce dernier veut centraliser la reconstruction alors que le FMLN préfère la décentraliser et permettre la création d'emplois nouveaux. A Santa Tecla, 5 400 maisons ont été touchées et 257 ont été complètement enterrées, 3 cantons ont totalement disparu, 60% du centre historique a été détruit, un centre d'hébergement pour 8 000 personnes a été installé et 2 400 familles sont hébergées provisoirement.

Le maire a également souligné l'importance de la coopération internationale et de la solidarité salvadorienne, souhaitant qu'elles se matérialisent par des résultats concrets. Pour cela, des critères précis ont été retenus permettant une reconstruction plus solide et donc plus durable de la ville.

Les députés, après avoir visité les locaux de la mairie provisoire, puis l'ancienne mairie très largement détruite, se sont rendus dans le quartier Las Colinas. Ils ont ensuite rencontré des salvadoriens temporairement hébergés dans des camps de sinistrés construits grâce à l'aide internationale. Ces habitations, si elles permettent d'abriter quelque peu de la pluie les sinistrés, ne protègent ni du froid, la nuit, ni du chaud, le jour. Le maire de Santa Tecla a ensuite montré à la délégation un modèle de maison retenu pour reloger définitivement toutes ces personnes.

M. Jean-Jacques Filleul a proposé à M. Ortiz de se rendre en France, en novembre 2001, lors de la prochaine assemblée générale des maires de France.29

9. M. HECTOR SILVA, MAIRE DE SAN SALVADOR ET M. FACUNDO GUARDADO, MAIRE-ADJOINT

Depuis le 16 mars 1997, le Front Farabundo Marti pour la libération nationale (FMLN) dirige San Salvador, la capitale, ainsi que de nombreuses autres grandes villes du pays. Au total, le FMLN l'a emporté dans 54 mairies et participe dans quatre autres villes à des coalitions. Quant à Hector Silva, le jeune médecin gynécologue du FMLN, élu dans la capitale, il a fixé plusieurs priorités à son action : la santé, l'éducation, l'habitat, le transport, l'enfance et la jeunesse. Les résultats législatifs et municipaux ont été les meilleurs que le Front ait obtenus depuis qu'il s'est transformé en parti politique en 1992. Comme pendant la campagne électorale, ses objectifs demeurent la lutte contre le néolibéralisme, contre les privatisations et le chômage, contre la délinquance qui ravage le Salvador d'aujourd'hui, au point de devenir un des problèmes majeurs de la société salvadorienne. Le Salvador est devenu le premier pays en Amérique latine pour ce fléau. Le nombre de crimes a ainsi triplé en trois ans.

Les députés français ont été reçus par Facundo Guardado (adjoint au maire de San Salvador, mais également ancien commandant de la guérilla et ancien candidat à l'élection présidentielle de mars 1999) et par Hector Silva (maire de la capitale). Les deux élus représentent en fait les deux courants du FMLN ("orthodoxes" et "rénovateurs"). Le débat au sein du parti semble actuellement tourner en faveur d'une gauche « moderne » et Hector Silva fait d'ores et déjà figure de candidat potentiel pour les prochaines élections présidentielles.

M. Guardado rappelle que San Salvador compte environ 500 000 habitants, mais que si l'on prend en compte San Salvador et sa banlieue, c'est alors 1 800 000 habitants qui sont dénombrés, répartis sur 14 communes réunies au sein du « conseil des maires de l'aire métropolitaine de San Salvador », dont le président est M. Silva.

La mairie de dispose pas de ressources propres, ce qui limite toute politique sociale de portée générale. Plus de 90% des impôts reviennent à l'État.

Hector Silva considère que le budget participatif n'est pas une panacée, mais simplement un outil pour faire face aux immenses défis qui se posent aux villes en Amérique latine sur le plan fiscal. Il semble futile pour les citoyens de participer à des assemblées et de dresser une liste de leurs desiderata pour les travaux publics à mener si la mairie n'en a pas les moyens. « Pour trouver de l'argent », affirme-t-il, « nous devons réformer les finances municipales. ». À cette fin, Hector Silva a fait adopter des mesures qui visent à optimiser et à accroître la perception des impôts. Il a d'abord mis sur pied un groupe de travail chargé de recouvrer 267 millions de dollars de dettes envers la ville. « Nous avons pu en percevoir à peu près la moitié. », dit-il, « Les autres dettes étaient celles d'entreprises qui n'existent plus ou de personnes qui sont décédées. ». L'étape suivante a consisté à moderniser le cadastre de la ville, ou le registre des propriétés foncières, à l'aide de moyens techniques comme les photos aériennes pour recenser les bâtiments soumis à l'impôt. Enfin, la ville a privatisé certains services publics et accordé un certain nombre de concessions ou confié à d'autres des projets de construction, d'exploitation et de transfert.

Les recettes ont certes augmenté de 30 %, mais les objectifs du maire sont loin d'être atteints. Le problème c'est à la fois que la réglementation fiscale est un dédale et que certains revenus échappent à l'impôt. La mairie ne perçoit, par exemple, pas d'impôts fonciers, ni de droits pour ses espaces qui servent aux services publics ou à d'autres entreprises qui ont une mission d'intérêt public. Le maire, avec d'autres, a proposé la refonte de la fiscalité par l'assemblée législative nationale, mais en vain. Aucune réforme en matière de fiscalité municipale n'a pu aboutir. Si un impôt foncier était instauré, précise M. Guardado, le budget de la ville progresserait de 50%.

Malgré ces contraintes, l'expérience faite par San Salvador en matière de budget participatif, a amené des changements importants. Dans le passé, il était interdit à la presse d'assister aux séances du Conseil municipal et les procès-verbaux n'étaient pas publiés, de sorte qu'il était difficile pour les citoyens de savoir quels choix budgétaires étaient envisagés. Mais le budget participatif a dévoilé des priorités nouvelles en matière de dépenses locales, qui avaient été négligées. La première priorité consiste à aménager des murs de soutènement. Les plus démunis vivent généralement à flanc de colline, le long des rivières, ce qui les expose régulièrement aux risques d'inondation et d'éboulement. Deuxième priorité : les « espaces communs » où les gens peuvent se rencontrer. Troisième priorité : la prévention de la délinquance, surtout chez les jeunes. La BID apporte son concours financier à cet égard.

Le budget de la capitale s'élève à 40 millions de dollars, or, moins de 1,2 million de dollars provient des transferts du gouvernement central. La plupart des revenus de la ville proviennent de différentes taxes pour services (électricité, ramassage des ordures, etc.). Le programme de traitement des ordures ménagères est montré en exemple dans toute l'Amérique centrale.

Répondant à une question de M. Jean-Jacques Filleul sur le grave problème de l'insécurité dans la capitale, M. Guardado confirme que la population du Salvador est confrontée à de nouvelles formes de violence dans la famille et dans la société. La liste en est longue : accroissement de la délinquance, alimentée par la toxicomanie et le trafic de drogue ; chômage et sous-emploi ; commerce d'armes individuelles florissant ; désintégration de la famille ; violence au foyer et violence sexuelle, en particulier contre les femmes ; multiplication des viols ; exploitation des enfants ; absence de protection de la jeunesse ; détérioration des normes sanitaires et réduction de l'accès aux soins médicaux ; affaiblissement et privatisation du système éducatif ; accroissement de l'analphabétisme30 ; perte des valeurs traditionnelles et de la responsabilité éthique ; impunité des tortionnaires et autres auteurs de crimes contre l'humanité durant la guerre civile, même s'ils ont été identifiés ; montée d'un conservatisme religieux qui tend à ignorer les problèmes sociaux ; expansion urbaine désordonnée menée dans le seul souci du profit, avec pour conséquence la surpopulation ; détérioration drastique de l'environnement ; corruption parmi les fonctionnaires gouvernementaux et frustrations à l'égard de la « classe politique ».

Cette nouvelle violence a deux causes principales : premièrement, elle est la terrible séquelle d'une guerre civile et d'une répression brutales. Le nombre impressionnant de gardes privés - anciens soldats ou combattants du FMLN au chômage engagés pour protéger des maisons, des magasins ou des usines - en témoigne, comme il témoigne aussi de la pénurie d'emplois. Aussi nombreuses, même si elles font moins de bruit, sont les familles qui, partout au Salvador, sont plongées dans l'angoisse par la disparition d'êtres chers, confrontées au drame de la mort et à la perte de l'espérance.

La seconde cause est la lutte historique des paysans salvadoriens pour la terre ; un conflit fondamental qui a débuté en 1882 entre l'élite terrienne ou industrielle et la masse populaire rurale et urbaine. Ce conflit n'est pas encore totalement résolu. Les accords de 1992 sur la redistribution des terres, parrainés par les Nations Unies, n'ont pas été appliqués. L'inégalité et l'injustice socio-économiques dominent. La pauvreté augmente. Le chômage s'accroît et beaucoup d'hommes émigrent au Mexique ou aux États-Unis en quête de travail.

La mairie développe un programme spécial de prévention des crimes. Elle crée des espaces de jeux pour les jeunes dés_uvrés. Elle offre des services sociaux pour les plus démunis. L'enjeu et le défi principal pour le FMLN est au niveau municipal, où il peut mettre en _uvre son programme. Cependant, la direction des grandes municipalités, ne permet pas d'agir frontalement contre la pauvreté et son corollaire, l'augmentation de la violence. Le FMLN s'efforce de diriger les nouvelles municipalités en associant le plus possible la population comme c'est déjà le cas dans les villes qu'il dirige depuis 1992, mais cela s'avère plus difficile dans les grandes villes.

Nombreux sont les citoyens qui participent aux assemblées populaires, mais Hector Silva s'inquiète parce que ce ne sont pas tous les groupes qui y prennent part. Le défi, dit-il, c'est de faire en sorte que les réunions soient « beaucoup plus qu'une convocation par le parti au pouvoir » et « favorisent la participation des classes moyennes ». Il est très difficile d'amener les classes moyennes à s'impliquer car généralement elles n'aiment guère le vacarme des grandes assemblées et souvent elles ne sont pas à l'aise lorsqu'elles côtoient les plus démunis. Le maire s'est attelé à ce problème : il a organisé des réunions plus conviviales qui traitent de thèmes précis.

Les sujets qui exercent un pouvoir d'attraction sur les classes moyennes - et cela s'est vérifié - sont les espaces verts et les loisirs. De plus, la municipalité dispose d'une émission radiophonique hebdomadaire qui permet aux citoyens de parler en public de leurs problèmes pratiques. Le programme permet aussi à la municipalité de faire part à la population de ses actions et de l'informer des événements culturels de la semaine suivante. L'exercice de la citoyenneté devient ainsi accessible à une couche populaire socialement marginalisée.

La municipalité a bien compris la difficulté, particulièrement pour les femmes, d'accéder à des formations professionnelles. C'est pourquoi un centre de formation des femmes (Centro de formacion de la mujer) offre à celles-ci la possibilité de se familiariser avec des métiers traditionnellement exercés par les hommes. Ce centre porte plus spécifiquement assistance aux personnes en situation précaire et fonctionne en partenariat avec des organisations communales.

En matière de sécurité, la mairie collabore avec le « conseil national de sécurité publique » pour la prévention de la criminalité par la réhabilitation d'espaces publics pouvant servir d'espaces de loisirs pour les jeunes. Mais le problème du financement est crucial : même si la mairie pouvait s'endetter pour apporter des services dans les quartiers marginaux (installés bien souvent dans des zones « à risques »), de telles actions n'offrent aucun retour et obligent à trouver d'autres ressources pour les remboursements. Un programme de réhabilitation de ces quartiers défavorisés est à l'étude.

L'un des projets les plus ambitieux est celui de la récupération du centre historique, avec l'aide des entreprises privées. Il est notamment prévu de déplacer tous les « commerces mobiles » qui ont élu domicile sur les trottoirs de cette partie de la capitale. Contre l'insécurité, il faut effectuer un travail d'éducation dans les quartiers, plutôt qu'un recours à des solutions policières. Pour améliorer le commerce de rue dans le centre de San Salvador, le recours au dialogue et la concertation est mis en avant. Ce programme est à l'opposé de ce qui a été fait jusqu'à maintenant par l'Arena.

Il est également envisagé de réorganiser les transports urbains. Toutefois, ce problème des transports ne peut, pour l'instant, pas être réglé car aucune décision n'est prise par le gouvernement afin de ne pas permettre à M. Hector Silva, s'il était candidat à la présidence de la République, en 2004, d'en tirer un « profit électoral ». Par ailleurs, le syndicat des transporteurs routiers est corrompu et allié au gouvernement. En échange de diesel subventionné, les chauffeurs participent au transport gratuit des électeurs en période électorale.

Le réseau des eaux usées est quasi totalement détruit. 80 millions de dollars sont nécessaires pour le réhabiliter. La mairie de San Salvador n'ignore pas l'alternative que pourrait constituer la concession de ce service au secteur privé, mais la question du financement n'est pas réglée par le gouvernement.

M. Guardado sait que le FMLN n'a rien à attendre du gouvernement, si ce n'est des obstacles. Si le FMLN arrive à améliorer la situation dans les grandes villes, il se trouvera en très bonne position pour les prochaines élections présidentielles.

L'un des points les plus controversés, au sein même de la municipalité, touche les privatisations. Hector Silva considère qu'elles ne sont « ni mauvaises, ni bonnes » et, en tout état de cause, des « instruments d'une politique économique et financière ». A la mairie de San Salvador, « nous avons opéré plus d'une fois des privatisations partielles avec succès, qui nous ont permis de résoudre de façon efficace beaucoup de services municipaux ». Mais il a aussi souligné que de nombreux services « devaient impérativement rester du ressort de l'État ».

Hector Silva, qui a toujours mis en avant son indépendance politique, s'est avéré être le politicien le plus crédible aux yeux des électeurs salvadoriens. Beaucoup croient que sa prochaine étape politique sera l'élection présidentielle, en 2004.

III.- LE NICARAGUA, PAYS PAUVRE DE L'AMERIQUE CENTRALE

D'un point de vue géographique, la République du Nicaragua est limitée au nord par le Honduras, au sud par le Costa Rica, à l'est par l'océan Atlantique, et à l'ouest par l'océan Pacifique.

Le Nicaragua est un pays tropical dont la superficie est d'environ 130 000 km2. C'est la plus grande république d'Amérique centrale. L'extension territoriale du Nicaragua est semblable à celle de la Bulgarie, de Cuba, de l'État de New York, ou encore de la Grèce. Les 7% de la superficie du pays sont occupés par les lacs de Managua (Xolotlan), de 1 042 km2, et du Nicaragua (Cocibolca), de 8 264 km2. Ce dernier constitue l'une des plus grandes réserves d'eau douce au monde.

Tropical dans les plaines, le climat est plus frais dans les montagnes. Le pays est exposé aux tremblements de terre, aux éruptions volcaniques, aux glissements de terrain et à des ouragans périodiques.

graphique

La position isthmique du pays, et de l'Amérique centrale en général, limitée entre deux mers et deux continents, représente une valeur stratégique pour le développement du commerce, de l'économie et des relations géopolitiques de l'hémisphère.

A.- RAPPEL HISTORIQUE

1. PÉRIODE PRÉCOLOMBIENNE ET ÉPOQUE COLONIALE

À l'arrivée des Européens, le Nicaragua comportait deux grands groupes linguistiques : l'un d'origine nahualt (régions pacifique et centrale), l'autre d'origine macrochibcha (côte atlantique). Les Miskitos, Sumus et Ramas d'aujourd'hui sont les descendants des anciens groupes macrochibchas venus du Mexique. D'autres migrations, toujours en provenance du Mexique, amenèrent vers le Xème siècle des éléments du groupe nahualt sur le territoire actuel du Nicaragua. Les premiers, semi-nomades, vivaient principalement de la chasse et de la pêche ; les groupes nahualts étaient surtout des agriculteurs.

Christophe Colomb apparut sur la côte atlantique dès 1502, mais c'est vers 1519 que les conquérants espagnols, dont le plus connu, en ce qui concerne le Nicaragua, est Gil González Dávila, commencèrent à s'installer sur les plaines fertiles de la région pacifique. Ils fondèrent Granada en 1524 et León en 1525, qui sera la capitale de la colonie espagnole jusqu'à ce que celle-ci passe sous l'autorité du Guatemala en 1570. Pedrarias Dávila fut le premier gouverneur du Nicaragua (1527-1531). Les premiers esclaves noirs furent introduits dans le pays dès 1542.

Quant à la côte atlantique, les premiers Européens qui eurent réellement des contacts avec ses habitants furent les boucaniers français et anglais. Dès le début du XVIIème siècle, la mer des Antilles constitua le théâtre des rivalités entre l'Espagne, la France et l'Angleterre. La domination espagnole se cantonna dans la région pacifique, tandis que la côte atlantique restait contrôlée par les Anglais à partir de 1655. Ces derniers surent habilement s'attirer la faveur des Miskitos, qui ont toujours farouchement résisté à la colonisation espagnole. Un royaume miskito fut même proclamé en 1687 avec le soutien de la Couronne britannique. Pendant ce temps, d'autres populations noires envoyées par les Anglais s'installaient sur la côte, notamment à Bluefields. De nombreux Noirs s'intégrèrent aux groupes ethniques indiens.

Au début du XIXème siècle, des insurrections populaires éclatent à León, Masaya, Granada, Rivas. La côte atlantique, tournée vers le monde anglo-saxon, reste en dehors des luttes menées contre la Couronne espagnole, tout comme elle restera en dehors de la révolution. Cette histoire différenciée entre la région pacifique et la côte atlantique est fondamentale pour comprendre la personnalité actuelle de ces deux parties du pays.

Le Nicaragua tire son nom de celui d'un cacique de tribu. En langue nahuatl qui fut aussi celle des Aztèques, celui-ci s'appelait « Nicarao-Cali ».

2. LUTTES INTÉRIEURES ET INTERVENTIONS ÉTRANGÈRES

Le 15 septembre 1821, l'Amérique centrale se déclare indépendante et se réunit au Mexique le 5 janvier 1822. Du 15 septembre 1821 au 5 janvier 1822, le gouvernement fut confié à une « junta » sous la présidence de Gavino Gainza. Le 1er juillet 1823, elle s'en sépara pour former une République Fédérative Indépendante portant le nom de : « Estados Federados de Centro América » et se composant des États du Guatemala, du Honduras, du Nicaragua, d'El Salvador et du Costa Rica. L'union fut dissoute le 1er février 1839. Elle fut signée de nouveau, le 7 octobre 1842, entre tous les états sauf le Costa Rica. Cette nouvelle union ne se réalisa cependant pas et, malgré la réunion ultérieure de quelques États, ces confédérations ne furent que de très courte durée. Chacun de ces États forma dès lors une république distincte.

En 1823, deux des actuelles provinces du Nicaragua font cession. Celle de León (libérale) et celle de Granada (conservatrice) qui se disputent le contrôle du pays au travers d'une guerre civile dans laquelle s'impliquent les États-Unis (conquête par le flibustier William Walker de 1855 à 1857, débarquements des marines en 1853, 1909, 1912 et 1926). La réunion territoriale du Nicaragua se réalise entre 1824 et 1825. Le Nicaragua devient totalement indépendant en 1839, en même temps que les autres pays de l'Amérique centrale.

La paix ne revient pas pour autant. Si la rivalité entre León et Granada est partiellement tempérée par le transfert, en 1852, de la capitale à mi-chemin, à Managua, les haines entre « libéraux » et « conservateurs » n'ont rien perdu de leur virulence, les caudillos n'hésitant d'ailleurs pas à faire intervenir les États voisins dans leurs querelles. Et surtout le désarroi du pays facilite l'intervention des grandes puissances en pleine expansion impérialiste.

Les États-Unis avaient tourné leurs regards vers la région ; la découverte de mines d'or en Californie attirait des foules qui rejoignaient la côte pacifique en traversant l'isthme. Mais la guerre civile éclate en 1854 entre le président Fruto Chamorro et le général Máximo Jerez. La faction de ce dernier - qui se qualifie de « démocrate » tandis que les partisans de Chamorro s'affirment « légitimistes » - fait appel à des mercenaires conduits par l'aventurier américain William Walker. Ce dernier entend profiter de l'occasion pour établir à son profit un État esclavagiste en Amérique centrale ; s'étant emparé de Granada, il se fait proclamer président. Mais ses excès mêmes réalisent l'union contre lui. Légitimistes et démocrates, ainsi que les autres républiques centraméricaines, conscients du danger, s'allient : c'est la « Campagne nationale » qui se termine par l'expulsion de Walker, en mai 1857.

Cette équipée laissait le pays dans un état lamentable. Le « régime des Trente ans » (en fait de 1858 à 1893), avec la succession relativement pacifique de présidents « conservateurs », apporte un certain apaisement. Mais en 1893 une révolution met fin au règne paternaliste des conservateurs et porte au pouvoir le général « libéral » José Santos Zelaya. La réincorporation définitive de la Mosquitie lui confère du prestige, mais ses méthodes de plus en plus dictatoriales lui aliènent l'opinion, tandis que ses velléités « unionistes » dressent contre lui les autres États centraméricains. Et surtout, son antiaméricanisme ne connaît plus de limites lorsque les États-Unis décident d'abandonner le projet de canal nicaraguayen en faveur de Panama. Or, pour les États-Unis, l'isthme devient désormais « chasse gardée ».

Une révolte « conservatrice » éclate contre Zelaya en 1909, qui finit par démissionner. Son départ ne met pas fin aux troubles ; les forces conservatrices d'Emiliano Chamorro et d'Adolfo Díaz triompheront.

Dès 1910, un commissaire américain, Dawson, est venu leur dicter la politique que Washington entend leur voir mener ; bien plus, de nouveaux troubles ayant éclaté en 1912, les marines débarquent pour consolider le pouvoir de Díaz ; ils resteront jusqu'en 1925, en même temps qu'un rigoureux contrôle financier est imposé au pays. Les États-Unis entendent en effet conserver une option sur la voie du San Juan.

Chamorro, l'homme fort des conservateurs, signe avec eux le traité Bryan-Chamorro qui leur concède à perpétuité tous les droits pour établir le canal par cette voie « ou par toute autre route sur le territoire du Nicaragua », ainsi que la souveraineté absolue, pour une période de quatre-vingt-dix-neuf ans renouvelable, sur deux îles de la côte atlantique, et le droit d'exploiter une base navale dans le golfe de Fonseca.

Ce traité provoque une véritable levée de boucliers en Amérique centrale. Le sentiment national est ulcéré et, de plus, le Nicaragua a compromis unilatéralement ses voisins : ni le Costa Rica, co-riverain du San Juan, ni le Honduras, ni le Salvador, co-riverains du golfe de Fonseca, n'ont été consultés. Les marines s'en vont en 1925, et Chamorro reprend alors le pouvoir par un coup de force qui ouvre une nouvelle période de guerre civile et entraîne, en 1929, leur retour. Cette fois, la haine antiaméricaine se cristallise en une véritable guérilla dont le chef, César Augusto Sandino,31 devient un héros national.

Jusqu'au départ des marines, en 1933, Sandino et ses hommes, retranchés dans les montagnes de Las Segovias, tiennent en échec les soldats américains et la Garde nationale entraînée par des conseillers américains. Ayant alors déposé les armes, Sandino est assassiné sur l'ordre du jeune chef de la garde nationale, le général Anastasio Somoza.

B.- UNE FORTE PRESENCE AMERICAINE

1. LA PÉRIODE SOMOZISTE

C'est une véritable dynastie Somoza qui s'installe avec le soutien des États-Unis à partir de 1936, et qui s'appuiera jusqu'à sa chute, en 1979, sur son redoutable bras armé, la Garde nationale. Anastasio Somoza (« Tacho ») se maintient au pouvoir jusqu'à son assassinat en 1956. Ses fils, Luis et Anastasio (« Tachito »), lui succèdent, respectivement de 1957 à 1963, et à partir de 1967 pour ce dernier après un bref intermède où la présidence est occupée par René Schick (1963-1967), un protégé du clan Somoza.

Grâce à divers stratagèmes allant de l'amendement constitutionnel à l'abrogation pure et simple de la Constitution (comme ce fut le cas en 1971), mais aussi à la répression d'une opposition faible et divisée, la stabilité politique était garantie pour les Somoza. Cette stabilité leur permit d'édifier un véritable empire économique dans le pays (ils possédaient le tiers des terres cultivables et les principales industries), empiétant sur les intérêts traditionnels de larges secteurs des classes moyennes et supérieures, lesquels allaient basculer petit à petit dans l'opposition. Anticommunistes convaincus, les Somoza firent du Nicaragua le « gendarme » de l'Amérique centrale. Membre du Conseil de défense centraméricain (Condeca) créé en 1963 avec le Guatemala, le Honduras et le Salvador, le pays était le garant des intérêts nord-américains dans la région.

2. LE FRONT SANDINISTE DE LIBERATION NATIONALE

L'opposition commença à se manifester de manière significative après le tremblement de terre de 1972. Mais déjà, dans la foulée de la révolution cubaine, Carlos Fonseca Amador avait créé en 1962 le Front sandiniste de libération nationale32 (FSLN). L'église catholique, de son côté, s'élevait contre les multiples exactions, tortures et assassinats commis par la Garde nationale tandis que l'archevêque de Managua, Monseigneur Obando y Bravo33, exigeait le départ de Somoza et la formation d'un gouvernement transitoire.

Ce mécontentement se constitua en opposition modérée autour de Pedro Joaquín Chamorro, directeur du journal anti-somoziste La Prensa. Mais, le 10 janvier 1978, il était assassiné. Ensuite, ce fut l'escalade : regroupement de toute l'opposition antidictatoriale, puis offensive générale du FSLN en septembre. Le 22 août, les sandinistes dirigés par Edén Pastora34 prenaient d'assaut le palais national. Le 9 septembre 1978, le FSLN appelle à l'insurrection. Un soulèvement populaire a lieu dans de nombreuses villes. Une terrible répression s'abat sur les insurgés et les populations civiles. Des villages entiers sont passés par les armes, la ville d'Esteli (1 500 morts) est littéralement rasée. L'insurrection se solde globalement par 6 000 victimes.

En février 1979, devant l'ampleur de la répression et forts du constat que l'opposition interne au régime de Somoza semble irréversible, les États-Unis suspendent leur aide militaire. Le 29 mai, le FSLN lance l'offensive finale qui jouit de l'appui d'une très large majorité de la population.

Les États-Unis tentèrent vainement une solution de médiation avant d'abandonner Somoza à sa défaite. L'offensive finale du FSLN fut lancée en juin 1979. En juillet, Somoza s'enfuit à Miami (il sera assassiné au Paraguay en septembre 1980), consacrant la victoire des révolutionnaires. Cette guerre avait fait 35 000 morts.

Le gouvernement de reconstruction nationale s'installa à Managua le 20 juillet 1979 et prolongea dans un premier temps l'union entre les sandinistes et la bourgeoisie. Mais des divergences apparurent rapidement, qui débouchèrent notamment sur la démission de Violeta Chamorro (veuve du directeur de La Prensa assassiné) et Alfonso Robelo. Cette rupture marquait le début d'une radicalisation des sandinistes, qui se retrouvèrent petit à petit seuls à exercer le pouvoir, tous les éléments non sandinistes abandonnant le pays les uns après les autres (comme Edén Pastora, le populaire « commandant Zéro »). Par ailleurs, depuis le début de la révolution, les somozistes s'étaient retranchés au Honduras d'où ils menaient une lutte armée.

C'est au milieu de ces agressions que le gouvernement sandiniste tenta de changer la société nicaraguayenne. Réforme agraire, campagne d'alphabétisation, améliorations dans les domaines de la santé, de l'enseignement, de la production agro-industrielle, reconstruction, etc., toutes ces mesures s'inscrivaient en théorie dans un cadre d'économie mixte et de pluralisme, selon les principes initiaux de la révolution.

Mais la réalité fut différente : affrontements avec la presse, avec le secteur privé, quadrillage du pays par les organisations de masse et les comités de défense sandiniste (CDS), confusion entre l'État et le FSLN, militarisation de la côte atlantique et affrontements avec les Indiens Miskitos, heurts continuels avec l'Église. Celle-ci était divisée entre les chrétiens se réclamant de l'« Église populaire » (inconditionnelle du processus révolutionnaire et représentée par des prêtres au gouvernement, comme le père Ernesto Cardenal, poète devenu ministre de la Culture) et ceux qui restaient fidèles à la hiérarchie ecclésiastique derrière le cardinal Miguel Obando y Bravo.

Les sandinistes entreprirent un processus d'institutionnalisation de la révolution. Tout d'abord, ils organisèrent des élections générales le 4 novembre 1984, d'où le commandant sandiniste Daniel Ortega35 sortit vainqueur, pour six ans, avec 67% des voix. Le parti conservateur arrivait en deuxième position avec 13,5% des suffrages. Le 9 janvier 1987, la promulgation de la nouvelle Constitution, en ne se référant ni au socialisme, ni au marxisme-léninisme, rassurait les plus inquiets.

L'accord de paix d'Esquipulas II fut signé par les cinq présidents centraméricains (Costa Rica, Guatemala, Salvador, Honduras, Nicaragua) le 7 août 1987. Le Nicaragua mit un point d'honneur à l'appliquer avant ses voisins : réouverture de La Prensa et de Radio Católica, qui avaient été censurées, levée de l'état d'urgence en vigueur depuis 1982 et, surtout, ouverture d'un dialogue avec la Contra.

La crise nicaraguayenne ajoutée à celle du Salvador voisin firent de l'Amérique centrale l'un des points chauds du globe pendant les années 1980. Des acteurs extrarégionaux effectuèrent un travail diplomatique intense pour la recherche de la paix, tels que le groupe de Contadora, constitué en 1983 par le Mexique, le Venezuela, la Colombie et le Panama, et son groupe de soutien formé de l'Argentine, de l'Uruguay, du Brésil et du Pérou.

3. LA LONGUE MARCHE VERS LA PAIX

À la fin des années 1980, le bras de fer entre le pouvoir sandiniste et l'administration américaine prend les allures d'une guerre d'usure. Outre le soutien à la Contra (les rebelles armés) qui oblige le gouvernement sandiniste à consacrer plus de 40% de son budget aux dépenses militaires, les hôtes successifs de la Maison-Blanche tablent sur les pressions économiques pour amener Managua à résipiscence. L'embargo commercial total, décrété le 1er mai 1985 par Ronald Reagan, est reconduit par son successeur, George Bush, en avril 1989.

Cette stratégie d'asphyxie entretient notamment le mécontentement des ménagères. La nourriture de base (riz, haricots rouges) ne fait pas défaut, mais les pénuries des autres produits alimentaires (viande, huile, etc.) sont fréquentes. Des queues se forment devant les supermarchés et les tiendas (épiceries) de Managua dont les étals sont dégarnis. Seuls les plus fortunés peuvent recourir au marché noir, dont le temple est le Mercado oriental.

La dégradation de la situation économique accentue aussi les divergences entre comandantes sandinistes. Les radicaux sont tentés par la fuite en avant, les modérés enclins aux concessions. La valse-hésitation politique des années 1988 et 1989 reflète ces contradictions. Ainsi, des contacts directs entre Humberto Ortega, ministre de la Défense, et Adolfo Calero, l'un des chefs de la Contra, aboutissent, le 24 mars 1988, à un accord de cessez-le-feu. Les deux parties posent même les jalons d'un accord global.

À l'occasion d'une réunion des chefs d'État d'Amérique centrale à San Salvador (14 février 1989), le président nicaraguayen, Daniel Ortega, se prononce, pour peu que la Contra soit démobilisée, en faveur de la démocratisation du pays : élections générales avancées de novembre 1990 au 25 février 1990, liberté d'expression sans restriction, etc.

Le processus de paix est désormais bien engagé. Le 17 mars 1989, mille neuf cents détenus politiques, pour la plupart anciens gardes nationaux somozistes, sont libérés par le gouvernement de Managua. Le 16 mai, le Washington Post révèle que Mikhaïl Gorbatchev a indiqué par lettre au président Bush que les livraisons d'armes soviétiques au Nicaragua sont interrompues depuis le début de l'année. Les cérémonies commémoratives du dixième anniversaire de la révolution sandiniste (17 juillet) se déroulent dans une atmosphère morose, tandis que les contras, hier élevés au rang de « combattants de la liberté » par Ronald Reagan, se voient offrir par les États-Unis une aide destinée à favoriser leur réinsertion.

4. LE SUCCÈS ÉLECTORAL DE VIOLETA CHAMORRO

Amers lendemains de scrutins pour les sandinistes. Les élections générales du 25 février 1990 se soldent par une victoire surprise de Violeta Chamorro. La porte-parole de l'UNO (Union nationale de l'opposition), un cartel de quatorze formations politiques, obtient 54,7% des suffrages, contre 41,5% à Daniel Ortega, le président sortant. Les votes législatifs et municipaux confirment la défaite des sandinistes, qui respectent le verdict des urnes. L'adhésion populaire dont bénéficiaient ces derniers s'est effritée (crise, impopularité grandissante du service militaire obligatoire). L'opposition avait axé toute sa campagne sur les thèmes de la paix et de la concorde nationale.

Rien ne prédisposait Violeta Chamorro à l'exercice des plus hautes responsabilités. Jusqu'au 10 janvier 1978. Ce jour-là, les sbires de Somoza assassinent son mari, Pedro Joaquim. Elle décide alors d'entrer en politique et d'assurer la direction du quotidien La Prensa. En guise de programme, Violeta Chamorro, la « Veuve courage », répète : « Nous voulons réunir toutes les familles divisées ! ». La sienne est très concernée. Deux de ses enfants sont des cadres du régime sandiniste, deux autres militent à ses côtés. L'avènement de Violeta Chamorro à la magistrature suprême semble en tout cas mettre un terme au conflit armé interne, qui en l'espace d'une décennie s'était transformé en crise régionale aiguë.

5. LA VOIE ÉTROITE DE LA RÉCONCILIATION

Le nouveau régime s'attelle à la reconstruction du pays saigné à blanc. Un an après son intronisation, le bilan est loin d'être négligeable. La paix civile est une réalité, quelque vingt-deux mille contras ont été désarmés, et les effectifs des troupes régulières réduits de quatre-vingt mille à vingt-cinq mille hommes. Pour ce faire, Violeta Chamorro s'est résolue à la cohabitation avec les adversaires d'hier.

Les campagnes connaissent des poussées de fièvre, au rythme des litiges sur la possession de la terre, alimentés par le retour des soldats démobilisés des deux camps. La tension monte encore d'un cran, avec l'assassinat le 23 novembre 1992 d'Arges Sequeira, animateur d'un mouvement de lutte pour la récupération des biens confisqués entre 1979 et 1990. Le meurtre est revendiqué par les FPI (Forces punitives de gauche), nouveaux gardiens de la révolution. Des affrontements opposent bien recontras (anciens membres de la Contra) et recompas (ex-militaires sandinistes), mais ils demeurent localisés.

Entre-temps, la pression des extrémistes a déjà soumis le gouvernement à rude épreuve. Des dignitaires du régime, comme le vice-président de la République, Virgilio Godoy, ou le président de l'Assemblée nationale, Alfredo Cesar, critiquent à voix haute la « désandinisation » des institutions, jugée par eux trop timorée. Le 11 janvier 1993, la rupture est consommée entre Violeta Chamorro et la coalition qui l'a fait élire. La présidente opère un renversement d'alliance, et se constitue une nouvelle majorité parlementaire, grâce aux trente-neuf députés du FSLN alliés à neuf dissidents de l'UNO.

Washington s'inquiète de la dérive, prend prétexte de la découverte d'une cache d'armes à Managua pour accuser le pays d'être « un refuge pour les terroristes » et menacer de couper les aides financières. Le 2 septembre 1993, « doña Violeta » donne satisfaction aux puissants parrains. Elle annonce la relève du commandant en chef des armées, le général Humberto Ortega, frère de l'ancien président Ortega, en 1994.

Autant dire que la formule du cogouvernement vole en éclats. Le secrétaire d'État américain, Warren Christopher, salue immédiatement « les décisions audacieuses prises par la présidente, tendant à assurer le contrôle civil sur les militaires et les services de renseignements ». Ceux-ci échappent bientôt à la tutelle de l'armée (15 octobre 1993), avant que Humberto Ortega entérine son départ, moyennant report de l'échéance au 25 février 1995. Ironie de l'histoire, le symbole de la présence sandiniste au pouvoir devait disparaître, le jour du centième anniversaire de la naissance d'Augusto Sandino, le héros de la résistance nationale à l'occupation américaine entre les deux guerres mondiales.

C.- LA TOURMENTE CYCLONIQUE ENTRE LES DERNIERES ELECTIONS

1. LES ELECTIONS GENERALES DE 1996

L'horizon ne semble plus borné que par une échéance électorale, le scrutin présidentiel de 1996. Antonio Lacayo, homme fort du gouvernement et gendre de Violeta Chamorro, affiche déjà ses ambitions, tout comme Arnoldo Aleman, maître de Managua, soutenu par les milieux antisandinistes de l'UNO. 36

Si le déficit fiscal est fortement réduit et l'inflation terrassée, le bilan social du gouvernement Chamorro, conjugué aux affaires de corruption qui touchent des ministres et des dirigeants du FSLN, entraîne la défaite de l'UNO aux élections de 1996.

Les élections générales du 20 octobre 1996 ont largement dominé l'année politique. Cela pour deux raisons. D'une part, le mode de scrutin avait été réformé en décembre 1995 (afin que le processus ne souffre aucune contestation, un second tour était prévu au cas où aucun candidat n'obtiendrait 45% des voix), de l'autre, parce que ce scrutin marquait le retour sur la scène politique du chef sandiniste Daniel Ortega.

Le début de la campagne aura été marqué par la violence et par un climat d'insécurité, une série d'attentats mystérieux ayant pris pour cibles les églises, tandis que le candidat du Parti libéral constitutionnaliste (PLC, conservateur), Arnoldo Aleman, favori des sondages, avait failli perdre la vie au cours d'une agression. Il aura fallu trois semaines pour que le Conseil suprême électoral du Nicaragua confirme la victoire d'Arnoldo Aleman, qui, avec 51,02% des voix, a donc réussi à devancer son adversaire sandiniste (37,75%). Un résultat qui a immédiatement été contesté par Daniel Ortega, qui dirigea le Nicaragua entre 1979 et 1990, après le renversement de la dictature de la famille Somoza.

La plupart des observateurs internationaux, en particulier ceux de l'Organisation des États américains (OEA),37 ont estimé que les nombreux problèmes administratifs survenus au cours du processus électoral ne pouvaient aucunement remettre en question la qualité « démocratique » du scrutin. Malgré l'échec de Daniel Ortega, le Front sandiniste de libération nationale (FSLN) reste la principale formation politique du Nicaragua, obtenant à lui seul 37 sièges sur 93 à l'Assemblée nationale, tandis que la coalition de Arnoldo Aleman, l'Alliance libérale, en a obtenu 42. Grâce à l'appui de cinq autres députés conservateurs, le président nouvellement élu disposait donc de la majorité absolue au Parlement.

Immédiatement après l'annonce officielle de sa victoire, Arnoldo Aleman a proposé à ses adversaires un pacte national pour favoriser la réconciliation et prendre les mesures nécessaires pour que le Nicaragua ne soit plus le pays le plus pauvre d'Amérique latine après Haïti.

Même si le gouvernement libéral issu des élections de 1996 est parvenu à un accord avec l'opposition sandiniste pour régler la question des propriétés confisquées au cours de la période révolutionnaire (1979-1990), l'âpreté des négociations a montré que la démocratisation de la vie politique était encore bien fragile. Quoi qu'il en soit, le Front sandiniste de libération nationale (FSLN) a accepté le principe d'une indemnisation au profit des anciens propriétaires spoliés.38 Mais les cadres du FSLN ont réussi à obtenir, en contrepartie, que le gouvernement accorde des facilités de paiement aux bénéficiaires qui ne disposent pas des ressources nécessaires pour payer les biens mal acquis.

2. LE NICARAGUA DANS L'_IL DU CYCLONE

C'est donc un pays encore meurtri par des années de guerre civile, en proie aux tensions politiques et aux incertitudes en matière de politique économique qui a dû subir le passage d'un cyclone39 d'une rare violence. En quelques jours, les inondations et les glissements de terrain provoqués par ce cyclone ont fait plusieurs milliers de morts et plus d'un million de sinistrés. Pour ajouter au drame, un volcan, le Cerro Negro, est entré en éruption le 2 novembre. Quant au glissement de terrain qui a fait environ un millier de victimes sur les flancs d'un autre volcan, le Casitas, il compte parmi l'un des plus meurtriers survenus dans le monde depuis 1985.

Les effets du cyclone « Mitch » sur l'économie ont immédiatement été jugés catastrophiques. Ainsi, avant même que l'on puisse envisager d'en mesurer avec précision l'étendue, on estimait qu'entre 10% et 20% de la production de café du Nicaragua étaient d'ores et déjà perdus et que 50% seraient gravement compromis. La destruction des routes, des ports et de toutes les infrastructures par la pluie ne pourra qu'alourdir le bilan. En effet, même s'ils ont réussi à conserver une partie de leur récolte, les planteurs auront toutes les peines du monde à la transporter et donc à la vendre.

Les dommages provoqués par les désastres naturels et les mesures du programme d'ajustement structurel sont venus alimenter une mobilisation sociale déjà élevée. Ils ont aussi eu pour conséquence de grossir les rangs des candidats à l'exil. Or l'émigration est déjà une cause de tension avec les pays voisins. Ainsi, la présence au Costa Rica d'un nombre de Nicaraguayens en situation illégale, estimé entre 300 000 et 800 000 (pour une population totale de 3,5 millions d'habitants), provoque régulièrement des incidents. Le 12 août 1998, le Nicaragua avait interdit aux forces de police costariciennes de patrouiller sur le Rio San Juan, la rivière marquant la frontière, mais sous souveraineté nicaraguayenne. Toutefois, le 9 novembre 1998, à la suite du passage de « Mitch », les présidents centraméricains décidaient qu'aucun centraméricain vivant illégalement hors de son pays ne serait expulsé, ouvrant la voie à une régularisation des Nicaraguayens du Costa Rica. Les présidents souhaitaient ainsi éviter le genre de dérives qui avaient conduit le Honduras et le Salvador à s'affronter dans une courte guerre en 1969. Entre le 1er février et le 31 juillet 1999, le Costa Rica a procédé à la régularisation de la situation de près de 100 000 sans-papiers, Nicaraguayens pour la plupart.

3. LES ELECTIONS MUNICIPALES DE 2000

Au plan intérieur, la poursuite du dialogue avec les Sandinistes, condition indispensable de la possibilité d'un gouvernement au Nicaragua, s'est révélée difficile, le dirigeant Daniel Ortega réclamant des réformes sociales radicales. Toutefois, en juin, le Parti libéral constitutionnel (PLC) du président Alemán et le Front sandiniste de libération nationale (FSLN) ont signé un accord ouvrant la voie à des réformes constitutionnelles. Cet accord a permis la désignation d'un Procureur des droits de l'homme, mettant un terme à quatorze ans de paralysie. Le député libéral Benjamín Pérez Fonseca a été désigné procureur, et le sandiniste Julián Ces, son adjoint. L'accord envisage aussi de lever l'interdiction aux Nicaraguayens ayant perdu leur nationalité de présenter leur candidature aux élections présidentielles. Plusieurs personnalités s'étant exilées aux États-Unis durant la révolution sandiniste (1979-1990) pourront ainsi se placer dans la course à la présidence. Vingt ans après la victoire historique du 19 juillet 1979 sur la dictature Somoza, et près de dix ans après la fin de la révolution sandiniste, le Nicaragua avance lentement mais fermement vers la réconciliation nationale et la normalisation politique.

Le Front Sandiniste de Libération Nationale (FSLN), qui était dans l'opposition depuis 1990 et qui avait récolté plusieurs défaites, est entré à nouveau énergiquement sur le devant de la scène politique nicaraguayenne, puisqu'il est le principal vainqueur des élections municipales qui ont eu lieu le dimanche 5 novembre 2000.

Dans le débat public autour des élections municipales, ont été mis en présence la confrontation de deux partis et de deux projets politiques : le FSLN, organisation qui a gouverné le pays dans les années 80 sous l'étendard de la justice sociale, et le parti libéral, au gouvernement actuellement. Secondairement, il existe aussi un débat de fond à l'intérieur du sandinisme lui-même, entre la direction "historique" représentée par l'ex-président Daniel Ortega, accusé entre autres de faire un pacte avec le gouvernement, et de nouveaux acteurs critiques dans la direction du parti.

Le FSLN a gagné dans 11 des 17 villes ou chefs-lieux départementaux les plus importants, parmi lesquels se trouvent Matagalpa, Chinandega, León, Estelí, Ocotal, Somoto, Juigalpa, Bluefields et d'autres encore. Il a fait un tabac dans la capitale, où la bataille électorale a été présentée par les uns comme par les autres comme une élection présidentielle anticipée et miniature, puisque Managua représente le tiers de l'électorat total au niveau national.

Les élections municipales ont fait resurgir le problème de la région Atlantique nord, peuplée d'indiens et fief du parti indigéniste Yatama. Sous protectorat britannique de 1678 à 1894, cette région éloignée géographiquement et culturellement du reste du pays a été laissée à l'abandon par Managua. Des incidents violents ont précédé le scrutin et la consigne d'abstention du parti indigéniste a été suivie, atteignant 80% sur l'ensemble de cette région autonome. Ce territoire, potentiellement riche, qui a activement participé à la lutte contre le FMLN au sein des contras, est livré à lui-même et aux trafics.

D.- 2001 : UNE ANNÉE D'ÉCHÉANCES ÉLECTORALES

Le 4 novembre 2001 auront lieu des élections présidentielle et législatives. Ces dernières permettront de renouveler, au scrutin proportionnel, la chambre unique de 90 membres. L'élection présidentielle focalisera l'attention et désignera, au scrutin majoritaire, un successeur au Président Alemán, élu en 1996, qui ne peut se représenter pour un deuxième mandat consécutif. Elle permettra également d'élire, « sur le même ticket », un vice-président.

Cette élection opposera, le 4 novembre 2001, trois « tickets » de deux candidats40 :

- Enrique Bolaños, soutenu par le Parti Libéral Constitutionnaliste du Président Alemán. M. Bolaños était vice-président de la République et a démissionné en octobre 2000 afin de pouvoir se présenter aux élections. Il fut président du patronat pendant la période sandiniste. Tout en cherchant à se démarquer du Président Alemán, il annonce une campagne très dure contre les sandinistes. Son colistier, candidat à la vice-présidence, José Rizo Calderon, a fait ses études en France ;

- Daniel Ortega,41 ancien chef d'État, chef historique du Front sandiniste. Il a été battu en 1990 par Violeta Chamorro et en 1996 par Arnoldo Alemán. Il bénéficie de la confiance que les milieux populaires, déçus par l'absence d'une vraie politique sociale, placent dans le sandinisme. Son colistier, Augustin Jarquin, est un social-chrétien, ancien contrôleur général de la République, qui a une réputation de rigueur et de compétence ;

- Noël Vidaurre, soutenu par le Parti Conservateur, cherche à rassembler ceux qui considèrent que le pacte de partage d'influence conclu au début de l'année 2000 par le Président Alemán et l'opposition sandiniste s'est traduit par un recul de la démocratie. Son objectif est de créer la troisième force que Violeta Chamorro a un temps envisagé de conduire. Son colistier, ancien libéral proche du Président Alemán, dont il fut trois fois ministre avant de fonder le parti libéral démocratique, est José Antonio Alvarado.

Lors du séjour de la délégation française à Managua, le Conseil Suprême Électoral était mobilisé sur le dossier de la validation de la candidature de M. Alvarado. En effet, ce conseil de sept membres (dont quatre sont proches de la majorité libérale) a reçu instruction du chef de l'État d'invalider la candidature de M. Alvarado en utilisant une interprétation particulièrement restrictive des dispositions législatives sur la renonciation à une nationalité étrangère éventuellement acquise par un candidat. Cette politisation d'un des organes principaux de la République est l'aboutissement d'un accord, en janvier 2000, entre le parti du président Aleman et l'opposition sandiniste. Le Conseil Suprême Électoral s'est réuni le 18 juin 2001 et a déclaré irrecevable la candidature de M. Alvarado. Au mois de juillet, M. Vidaurre a retiré sa candidature. Le parti conservateur présentera un nouveau « ticket » lors des élections du mois de novembre : M. Alberto Saborio sera le candidat du parti à la présidence et Mme Consuelo Sequeira la candidate à la vice-présidence.

Un sondage, diffusé le 21 avril, octroyait 33% des intentions de vote au sandiniste Daniel Ortega, contre 25% au libéral Enrique Bolaños et 14% au conservateur Noël Vidaurre. La campagne électorale a commencé officiellement au mois d'août. Le résultat final allait être tout autre et permettre au Parti Libéral Constitutionnaliste de se maintenir à la présidence de la république avec l'élection, à 73 ans, de son candidat, Enrique Bolaños.

E.- UNE ECONOMIE DEPENDANTE DE L'AIDE INTERNATIONALE

La structure de la politique économique nicaraguayenne est fondée d'une part sur les caractéristiques et capacités physiques et écologiques du territoire, et d'autre part sur la décision et la volonté de la population agricole et ouvrière qui, par leur travail organisé, leur technique et les plans d'État, utilisent les éléments et les ressources de l'espace physique, pour contribuer au développement de la nation et au bien être communautaire.

1. UNE AGRICULTURE EN DIFFICULTE

L'agriculture est la base de l'économie du pays, (les cultures et les prairies occupent 12% du territoire). Le premier produit d'exportation est le coton, suivi du café.

Si en Europe, la situation économique semble s'améliorer - et, on l'espère, de manière durable - avec un taux de chômage qui reflue et une augmentation de la richesse collective, le contexte mondial est très défavorable au Nicaragua.

Partons simplement de l'exemple du café, produit symbolique s'il en est, de cette région du monde. Le Nicaragua a exporté pour 573,5 millions de dollars en 1998 (dont 79,2% de produits agricoles et 21,8% de produits manufacturés). A titre de comparaison les exportations françaises sont constituées de 80% de produits manufacturés et de 16% de produits agricoles et la France est considérée comme une "grande puissance" agricole. Le café, à lui seul, représentait 30,2% du total soit 173,4 millions de dollars. L'agriculture génère 28% du PIB et occupe 43% de la population économiquement active, soit de l'ordre de 624 000 personnes.

Mais le café - avec des prix "normaux" - est incapable de faire vivre normalement les petits producteurs. Ceux-ci finissent par délaisser la maintenance de leurs plants, la fertilisation et la lutte contre les parasites et constater passivement à la chute des rendements.

Au cours de la saison 1999-2000, le Nicaragua a exporté 1,7 million de quintaux. Si l'on suppose que 700 000 quintaux sont consommés dans les familles et 1 million au détail, on peut calculer que les importateurs ont fait un bénéfice de 238 millions de dollars et les distributeurs 2 milliards 400 millions de dollars.

La production nationale du café pèse toujours plus sur les épaules du paysan nicaraguayen à la fois entrepreneur et travailleur (sans profit ni salaire) puisqu'il ne gagne pas suffisamment pour manger et ne mange pas suffisamment pour reconstruire la force de travail de sa famille.

Les autres cultures importantes, destinées à l'exportation, sont la canne à sucre et la banane. Parmi les principaux produits destinés à la consommation courante (marché national), se trouvent le maïs, le riz, la pomme de terre, le haricot rouge, etc. L'élevage bovin, dans la région pacifique, est favorisé par l'abondance des prairies. Les ressources minières sont peu exploitées. Les principaux produits sont l'or, l'argent et le cuivre. Des mines de zinc et de tungstène sont également exploitées. On a découvert en 1974 de grand dépôts de gaz naturel.

2. UNE INDUSTRIE PEU DEVELOPPEE

L'industrie revêt une importance très relative : elle est surtout concentrée dans les domaines suivants : sucre, ciment, conserves de fruits, légumes, viandes, chantiers navals, brassage de bière et raffineries.

3. UN DEFICIT COMMERCIAL TRES ELEVE

En 1990, le Nicaragua exportait des marchandises pour 331 millions de dollars et en importait pour 638 millions de dollars, soit un déficit commercial de 307 millions de dollars. Il importait près de 2 fois plus qu'il n'exportait. En 1998, il a exporté pour 573 millions de dollars et importé pour 1 492 millions de dollars. Le déficit a atteint 919 millions, le Nicaragua importait 2,6 fois qu'il n'exportait. En 1999, il a exporté moins : 509 millions et a continué à importer davantage, 1 723 millions de dollars (+15%) : le déficit est passé à 1 214 millions de dollars. Désormais le Nicaragua importe près de 3,4 fois plus qu'il n'exporte. Mais si le café représente 30% des exportations et voit son prix diminuer de 35%, la perte sera de l'ordre de 60 millions de dollars soit près de 12% des exportations.

Cette différence qui s'agrandit, il faut bien la financer. Cette différence c'est nécessairement, au bout du compte, une dette vis à vis de l'extérieur et un accroissement drastique de la dépendance. Le Nicaragua fait partie des 41 pays qualifiés de pauvres et hautement endettés par le FMI, c'est à dire ceux dont la dette est considérée comme impayable. Il est donc depuis septembre 1999 "bénéficiaire" de l'initiative HIPC (High Indebted Poor Countries = pays pauvres hautement endettés) des institutions financières internationales qui vise normalement à mettre en place une stratégie de lutte contre la pauvreté, et des méthodes de transparence dans la gestion publique.

Le Nicaragua a déjà subi depuis 1994 un programme d'ajustement structurel renforcé qui a abouti à la suppression de 200 000 emplois publics (de 285 000 en 1990 on est descendu à 85 000) et significativement dans l'armée et l'éducation, à la suppression des entreprises publiques et des "aires de propriété du peuple" régies par la CORNAP (Corporation Nacional de Empresas del Sector Publico), à la réduction du pouvoir d'achat des salaires du fait de la hausse des tarifs publics, à la réduction de la dépense publique, à l'augmentation très importante des taux d'intérêt réels et à la suppression des organismes de financement à long terme qui permettaient la reconversion et le développement du secteur productif.

À la même date, le Nicaragua avait une population économiquement active de l'ordre de 1 450 000 personnes. 200 000 emplois supprimés cela représentait 14% de celle-ci.

Ce programme d'ajustement structurel a permis un ralentissement spectaculaire de l'inflation (870% en 1991 et 9,3% en 1997) et de la dette publique (11 milliards de dollars en 1991 et 6,2 milliards en 1999), mais la dette équivaut encore à 2,7 fois le produit intérieur brut. A titre de comparaison la dette publique en France (État + collectivités locales + sécurité sociale) représente 59% du PIB, en Allemagne 61%, aux États-Unis 65,5%. Pour rembourser sa dette l'État français a besoin de 6,3 années. De combien d'années aurait besoin le Nicaragua ?

L'inflation a été réduite mais la monnaie nationale, le cordoba, est à présent surévaluée, ce qui décourage les acheteurs étrangers et donc les exportations.

4. VERS UNE DOLLARISATION ?

Le Nicaragua va-t-il alors être obligé de renoncer à sa monnaie nationale, le cordoba, pour la remplacer par le dollar ? Pour sortir d'une crise structurelle, l'Équateur a décidé en 2000 de remplacer sa monnaie nationale, le sucre, par le dollar. Le Salvador a fait de même en 2001. En clair, ceci veut dire que les réserves en devises internationales de ces deux pays sont désormais à Washington et que la politique économique se décide là-bas.

De fait, la dollarisation de l'économie du Nicaragua est déjà, en grande partie, une réalité puisque 70 % des dépôts dans les banques se font en dollars et 80 % des crédits que celles-ci accordent sont en dollars. Le dollar est toujours la référence extérieure pour mesurer la valeur et l'inflation. Mais l'État et la Banque centrale du Nicaragua seraient dans l'impossibilité de retirer tous les cordobas en circulation car ils ne détiennent pas les 180 millions de dollars nécessaires.

Maintenir un cordoba "fort" face au dollar avec une faible inflation, permet par exemple d'acheter le carburant et les produits pétroliers en général (que le Nicaragua ne produit pas) à un prix encore "supportable". Un cordoba fort permet aussi à ceux qui ont emprunté en dollars de rembourser. Laisser l'inflation s'installer - et elle pourrait le faire à grande vitesse - aboutirait immédiatement à faire grimper le prix des carburants et pourrait provoquer certainement le blocage du pays, à commencer par une grève des transports et sans doute aussi des émeutes.

Mais la politique voulue à la fois par les institutions financières internationales et par le Gouvernement du Nicaragua d'un cordoba fort a une redoutable et terrible contrepartie. Elle est contre les plus démunis. Il y a moins d'argent en circulation, le cycle productif est altéré, il y a moins de possibilité de travail. Seuls les riches pouvant accumuler des cordobas et des dollars sont favorisés.

5. LES CATASTROPHES NATURELLES A L'ASSAUT DE L'ECONOMIE

Les catastrophes naturelles relativement récentes (tremblement de terre en 1972, ouragan de 1988, cyclone de 1998), combinées à des excès de planification centralisée et à l'embargo commercial imposé par les États-Unis, eurent de très graves conséquences sur l'économie du Nicaragua. Au cours des années quatre-vingt, le niveau de vie des Nicaraguayens diminua significativement, au point de se rapprocher de celui des années quarante. Au début des années quatre-vingt-dix, la dette extérieure représentait l'équivalent de huit fois la valeur du produit intérieur brut (PIB) annuel, tandis que le chômage touchait 40% de la population active.

Malgré le retour à une économie de marché permettant de juguler une inflation excessive et de diminuer le taux de chômage, la situation reste difficile : 70% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté. L'économie repose essentiellement sur l'aide extérieure et sur les exportations de produits agricoles

Par ailleurs, la guerre civile et la confusion qui s'ensuivit entravèrent le développement des infrastructures. Le réseau de chemin de fer est en grande partie inopérant, et la plupart des routes n'étant pas goudronnées, de nombreuses régions ne sont accessibles que par des chemins muletiers. Enfin, la plupart des régions rurales ne disposent pas de services postaux, télégraphiques ou téléphoniques.

Le passage du cyclone « Mitch »42 sur l'Amérique centrale en octobre 1998 a provoqué des dommages importants. Différents communiqués de presse ont fait part de l'ampleur des désastres occasionnés. Ainsi, les informations données dans les jours qui ont suivi la catastrophe faisaient état de centaines de morts, de milliers de disparus, et de 200 000 sinistrés qui avaient tout perdu : logement, affaires, etc. Les chiffres officiels ont rapidement été revus à la hausse quelques jours plus tard, plus de 4 000 morts étaient recensés uniquement dans le nord du pays. Les infrastructures sur place furent également fortement endommagées : ponts partiellement ou totalement détruits, certains demeurant totalement recouverts par les eaux plusieurs jours après le passage de l'ouragan. Les régions du centre, de l'ouest et du nord restèrent longtemps privées de moyens de communication. Au total, plus d'un millier de kilomètres de routes fut détruit.

Le passage du cyclone a accru le déficit commercial en raison de la réduction des exportations agricoles, du fait des destructions des plantations de café et de banane, et d'une hausse des importations liée aux besoins de reconstruction. Le déficit commercial a atteint 36,7% du PIB en 1999.

Le Nicaragua demeure très dépendant de l'aide internationale. Suite au passage du cyclone « Mitch », qui a effacé des années de développement, un différé de paiement a été accordé par le Club de Paris et certains pays ont annulé tout ou partie de leur dette bilatérale ou ont déclaré un moratoire.

Le Nicaragua fait partie des « pays pauvres très endettés » et bénéficie de mesures connues sous le nom de PRGF (Powerty Reduction Growth Facility) au titre desquelles les créanciers du Club de Paris abandonnent 80% des intérêts et du remboursement du capital contractuel des emprunts. Les perspectives immédiates sont des plus sombres et la dépendance vis à vis de l'extérieur va s'accroître. Dans le budget du Nicaragua de 2001, le déficit est de 470 millions de dollars soit 18% du PIB. Mais ce ne n'est pas tout : arrive la fin du moratoire quant au paiement de la dette extérieure vis à vis du Club de Paris accordé après l'ouragan « Mitch » et, malgré l'HIPC (High Indebted Poor Countries), c'est au total 1,4 milliard de dollars que le gouvernement du Nicaragua devra trouver.

6. L'IMPERATIF D'UN CHANGEMENT EN PROFONDEUR

Après avoir fortement diminué (passant de 10,4 milliards de dollars en 1995 à 5,9 en 1996), la dette externe du pays est en constante progression depuis ces dernières années : 5,7 Md $ en 1997 ; 6,0 Md $ en 1998 ; 6,2 Md $ en 1999 et 6,4 Md $ en 2000. Bien qu'en très légère augmentation (425 $/h en 1997, 440$/h en 1998, 470 $/h en 1999 et 475 $/h en 2000), le PIB du Nicaragua est un des plus faibles de la région.

Depuis dix ans, les différents gouvernements ont entrepris des efforts d'assainissement avec le soutien du FMI, permettant une évolution favorable de l'économie. C'est un problème politique au sens fort du terme. Les élections présidentielles du mois de novembre 2001 devront être l'occasion d'avancer dans ce domaine.

Mais rien de durable ne sera possible sans que les partenaires du pays, c'est à dire les institutions financières internationales : FMI, Banque Mondiale, BID, Union européenne, ne changent leur point de vue et leur horizon. Elles pensent bien souvent à court terme. Selon les propres dires du représentant du FMI au Nicaragua, « 3 ans, c'est déjà du long terme ! ».

Malgré toutes les difficultés que rencontre le Nicaragua, le pays, qui reste le plus pauvre de l'Amérique centrale et un des plus pauvres des amériques, a entrepris de rebâtir son économie, et le gouvernement encourage maintenant l'investissement étranger. L'accord de libre-échange que le Mexique et le Nicaragua ont signé en 1997 devrait stimuler les exportations agricoles.

F.- ENTRETIENS DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE LORS DE SON SÉJOUR AU NICARAGUA

1. M. OSCAR MONCADA REYES, PRÉSIDENT DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Né le 28 février 1935 à Masatepe, M. Moncada Reyes est diplômé en administration d'entreprises. Membre du Parti Libéral Constitutionnaliste, il est élu député du département de Masaya en 1996. Dans les années qui suivent, il assume les fonctions de premier vice-président de la Commission spéciale du tourisme, de premier vice-président de la Commission de la Communication, des Transports, de l'Energie et de la Construction. Il est également membre de la Commission spéciale anti-corruption et de la Commission des Finances.

Il fût premier vice-président de l'Assemblée nationale et président de la Commission Economique avant de diriger les débats de la chambre nicaraguayenne.

M. Moncada Reyes remercie les députés français de leur visite à l'Assemblée nationale nicaraguayenne et souligne le geste de la France et du président Chirac à la suite du passage du cyclone « Mitch ».

Le président de l'Assemblée nationale indique que la démocratie est quasiment débutante au Nicaragua, en comparaison des pays européens. Parmi ces derniers, la France est perçue -notamment au travers de l'histoire de sa révolution- comme un guide intellectuel.

Après avoir présenté les membres de la délégation française, M. Jean-Jacques Filleul précise que la France, très attachée au développement de la démocratie dans le monde, suivra avec un intérêt certain le déroulement des élections du 4 novembre 2001 au Nicaragua. M. Moncada Reyes insiste fortement pour que les députés français puissent intervenir auprès de M. Raymond Forni, président de l'Assemblée nationale française, afin que la France envoie des observateurs lors des élections du mois de novembre.

M. Moncada Reyes a ensuite rappelé que le Nicaragua est organisé, dans le domaine politique et administratif, en quatre organes différents : le pouvoir exécutif, le pouvoir judiciaire, le pouvoir électoral et le pouvoir législatif. Ce dernier est exercé par l'Assemblée nationale par délégation et mandat du peuple. Ce pouvoir a la prérogative de représenter les intérêts de tous les nicaraguayens, en élaborant la loi.

La Constitution précise que l'Assemblée nationale est composée, d'une part, de 20 députés élus au niveau national, d'autre part, de 70 députés élus -avec leurs suppléants- dans chaque département, et enfin, des candidats à la présidence de la République qui n'ont pas été élus mais qui ont toutefois recueilli un pourcentage minimum.

Différents organes de l'Assemblée nationale lui permettent d'exercer sa fonction législative :

● Le Bureau, qui est composé du président de l'Assemblée nationale, de trois vice-présidents et de trois secrétaires et qui reflète le pluralisme politique de la Chambre. Les membres du Bureau sont élus, tous les ans, par l'ensemble des députés. Le Bureau est ainsi composé :

- président : Oscar Moncada Reyes (Alianza Liberal)

- premier vice-président : José Damicis Sirias Vargas (Alianza Liberal)

- deuxième vice-président : Edwin Castro Rivera (FSLN)

- troisième vice-président : Maximino Rodriguez Martinez (Bda Patriotica)

- premier secrétaire : Pedro Joaquin Rios Castellon (Alianza Liberal)

- deuxième secrétaire : Walmaro Gutiérrez Mercado (FSLN)

- troisième secrétaire : Carlos Hurtado Cabrera (ALCON)

● Les commissions parlementaires de l'Assemblée nationale sont au nombre de dix-huit :

- justice

- affaires étrangères

- environnement et ressources naturelles

- femme, jeunesse, enfant et famille

- défense

- santé et sécurité sociale

- réforme agraire

- affaires syndicales

- intégration centraméricaine

- affaires économiques, finances et budget

- production, distribution et consommation

- affaires ethniques et communautés de la côte Atlantique

- éducation, moyens de communication sociale, culture et sports

- population et développement communal

- communication, transports, énergie et construction

- anti-drogue

- droits de l'homme et paix

- affaires municipales

Il existe également six commissions spéciales :

- anti-corruption

- tourisme

- affaires territoriales

- affaires interparlementaires

- affaires interinstitutionnelles

- contrôle des dossiers

● Les groupes parlementaires. Un nombre minimum de quatre députés est nécessaire pour constituer un groupe parlementaire qui leur donne le droit d'avoir des locaux et des moyens matériels pour assurer leur fonction. Ces frais sont couverts par le budget de l'Assemblée nationale, en fonction du nombre de députés de chaque groupe.

● L'assemblée plénière est composée de 93 députés ainsi répartis :

- 41 députés à l'Alliance libérale (AL), coalition du président Arnoldo Aleman incluant le parti libéral constitutionnel (PLC) ;

- 36 députés au front sandiniste de libération nationale (FSLN) ;

- 4 députés au chemin chrétien nicaraguayen - parti évangélique - (CCN) ;

- 3 députés au parti conservateur du Nicaragua (PCN) ;

- 2 députés au projet national (PRONAL), centriste ;

- 1 député à l'unité sociale chrétienne (USC) ;

- 1 député au parti de résistance nicaraguayenne (PRN) ;

- 1 député au parti libéral nationaliste (PLN) ;

- 1 député au parti libéral indépendant (PLI) ;

- 1 député à l'alliance nationale conservatrice (ANC) ;

- 1 député à l'union nationale de l'opposition (UNO) ;

- 1 député au mouvement rénovateur sandiniste (MRS).

Le président de la république a un droit de veto sur les lois votées par l'Assemblée nationale. Pour passer outre ce veto, l'Assemblée nationale doit recueillir une majorité de 48 voix.

2. M. ARNOLDO ALEMAN, PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

Né à Managua en 1946, M. Aleman a effectué ses études primaires dans la capitale avant de quitter le pays à 11 ans pour aller étudier chez les Frères Chrétiens au Honduras dans l'intention d'entrer au séminaire. Il reviendra au Nicaragua trois ans plus tard, obtiendra son baccalauréat avant d'entreprendre des études de droit. De 1968 à 1979, il exerce la profession d'avocat d'affaires au service de grandes entreprises locales.

En 1980, il est condamné à 3 ans de prison par le régime sandiniste pour avoir défendu des personnes spoliées par le régime. Il est libéré au bout de sept mois mais la quasi totalité des biens familiaux sont confisqués. De 1978 à 1990, tout en exerçant sa profession d'avocat, il présidera l'Union des producteurs de café du Nicaragua.

Sa carrière politique débute en 1990 avec son entrée au conseil municipal de Managua, puis sa cooptation au poste de maire. Les améliorations qu'il a apportées à la capitale ont assis sa notoriété dans tout le pays. Dans la foulée, il prend la tête du Parti Libéral Constitutionnel dont l'appareil s'est converti, le moment venu, en une puissante machine électorale jouant un rôle moteur au sein de l'Alliance Libérale.

En septembre 1995, il démissionne de la mairie de Managua afin d'être en mesure de présenter sa candidature à la Présidence de la République. Soutenu par les milieux d'affaires et par la communauté nicaraguayenne de Floride, il est élu le 20 octobre 1996 avec 51,02% des voix face à Daniel Ortega (37,75%).

Le président Aleman remercie les députés français d'effectuer cette mission en Amérique centrale. Il rappelle que la France bénéficie d'un « capital sympathie » réel au Nicaragua et que la visite du président de la République française, M. Jacques Chirac, juste après le passage de l'ouragan « Mitch », a été fortement appréciée.43

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Après avoir présenté la délégation, M. Jean-Jacques Filleul a tenu à préciser que la France suivait avec beaucoup d'intérêt le processus démocratique au Nicaragua.

M. Arnoldo Aleman rappelle que son pays a vécu plus d'un demi siècle sous des régimes dictatoriaux. L'aspiration du peuple à un développement rapide de la démocratie est très forte mais la mise en place de l'organisation des élections, qui sont à la base de toute démocratie, a un coût très important.

M. Aleman demande le soutien de la France dans le processus qui doit amener son pays au point d'achèvement de l'initiative PPTE44 (pays pauvres très endettés).

La dette de 6,2 milliards $ a diminué de moitié depuis 1990, le passage au Club de Paris en 1998 ayant notamment permis une réduction de 67% de la dette. Toutefois, son service représente encore 40% des exportations. Initiée en 1996 à l'occasion du sommet du G7 de Lyon, l'initiative PPTE45 vise à trouver une solution au problème, chaque jour plus aigu, de la dette des pays les plus pauvres. La pression des Organisations Non Gouvernementales (ONG) et de l'opinion publique internationale a été un élément déterminant dans sa mise en _uvre.

Les produits des exportations nicaraguayennes sont en baisse, notamment à cause de la chute des cours du café, la principale richesse du pays, alors que le coût du pétrole, importé, est en hausse. Il convient également d'ajouter la cessation des programmes de reconstruction des dégâts causés par le cyclone « Mitch ». Le président estime que tous ces faits mettent en péril la démocratie. En effet, le taux de chômage risque d'augmenter et la misère sociale s'aggraver. Il a jugé excessivement difficiles les conditions de l'accord économique intérimaire signé avec le FMI.

3. MME BERTHA MARINA ARGUELLO, VICE-MINISTRE DES RELATIONS EXTÉRIEURES

Mme Arguello, jeune ministre du gouvernement nicaraguayen, est née à Granada en 1970. Après avoir obtenu la plupart de ses diplômes à l'étranger (baccalauréat et doctorat en droit à l'Université centraméricaine de San José, au Costa Rica, maîtrise en droit international à l'Université d'Harvard, aux Etats-Unis), elle débute sa carrière hors du pays, s'occupant notamment des droits de l'homme (Costa Rica), puis devenant secrétaire exécutive de la présidence temporaire du Nicaragua au SICA (Sistema de Integracion Centroamericana) et ministre conseillère à la mission du Nicaragua à l'OEA (Washington).

De retour à Managua en 1999, elle deviendra successivement Directrice des affaires juridiques du ministère de la famille, puis vice-ministre de la famille et enfin vice-ministre des relations extérieures.

Mme Arguello rappelle l'aide exceptionnelle apportée par la France après le passage de l'ouragan « Mitch » en 1998. Elle demande instamment aux députés que la France participe à l'observation des prochaines élections du 4 novembre 2001.

M. Jean-Jacques Filleul indique qu'il fera part de cette demande au Bureau de l'Assemblée nationale française. Il ajoute qu'il souhaite que le Nicaragua et la France entretiennent les meilleurs rapports et que la France soit plus présente dans cette partie du monde.

Mme la vice-ministre des relations extérieures souhaite coopérer davantage avec la France. Elle propose que la France soit associée à des réunions des représentants des pays d'Amérique centrale, par exemple tous les deux ans. Elle a instamment demandé aux députés que son pays puisse faire partie de la zone de solidarité prioritaire (ZSP).

La Zone de solidarité prioritaire (ZSP)46 a été définie par le Gouvernement français en février 1998 comme celle où l'aide publique, engagée de manière sélective et concentrée peut produire un effet significatif et contribuer à un développement harmonieux des institutions, de la société et de l'économie. Elle se compose de pays parmi les moins développés en termes de revenus, n'ayant pas accès au marché des capitaux et avec lesquels la France entend nouer une relation forte de partenariat dans une perspective de solidarité et de développement durable qui répond à plusieurs objectifs :

· La consolidation de l'état de droit et l'enracinement de la démocratie ;

· Le soutien à une croissance durable fondée sur des économies équilibrées, plus diversifiées et moins vulnérables ;

· La couverture des besoins sociaux essentiels ;

· La gestion rationnelle du territoire et des ressources et la protection de l'environnement ;

· La promotion du développement participatif et culturel ;

· La stabilité et l'intégration régionale.

La Zone de solidarité prioritaire (ZSP) dont les contours peuvent évoluer sur décision du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) a été déterminée lors de la première réunion de cette instance en janvier 1999.

Répondant à une question de M. Filleul sur les besoins du Nicaragua, Mme Arguello sollicite une augmentation des bourses d'études ainsi qu'une intervention des organismes français de recherche agronomique afin d'aider le pays, dont les cours de sa principale richesse, le café, ont chuté, à diversifier ses productions.

4. M. HERTY LEWITES, MAIRE DE MANAGUA

Le maire de Managua, deuxième personne la plus puissante dans le pays après le président de la République, s'appelle Herty Lewites. Né en décembre 1939 à Jinotepe, 60 kms à l'est de la capitale, frère d'un combattant sandiniste historique, mort au combat peu de temps avant la victoire sandiniste contre Somoza en juillet 1979, ex-ministre du tourisme pendant une longue période du gouvernement sandiniste (1979-1990), il s'est éloigné du FSLN car il avait de graves contradictions avec la direction et s'est reconverti dans les affaires. En 1996, il s'était présenté aux élections comme candidat indépendant et avait obtenu moins de 20% des voix. Puis il s'est réintégré au FSLN pour se présenter pendant la dernière campagne électorale comme candidat sandiniste autonome de la direction du parti, avec un discours consensuel et nuancé. Il a gagné les élections municipales du 5 novembre 2000 à Managua, avec presque 44% des suffrages exprimés.

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M. Herty Lewites indique qu'il est à la tête de la mairie depuis quelques mois. Avec le soutien du Frente Sandinista de Liberación Nacional, il a été élu en janvier 2001 avec 44% des suffrages exprimés, devançant largement les autres candidats (Wilfredo Navarro du Partido Liberal Constitucionalista a obtenu 29,2%, William Baez du Partido Conservador de Nicaragua 25,2% et Carlos Guadamuz du Partido Camino Cristiano seulement 1,6%). Pour la première fois dans l'histoire du Nicaragua, des élections municipales séparées des élections présidentielles ont eu lieu. C'était le résultat d'une loi, votée en 1995, qui voulait organiser séparément les élections locales et nationales pour éviter la prédominance d'un seul parti politique.47 Le maire s'est engagé, vis à vis de la population de la capitale nicaraguayenne, à gérer la ville de manière totalement transparente et à ne pas procéder, comme cela avait pu être le cas dans le passé (en 1990, Arnoldo Aleman, élu maire de Managua, avait exclu des centaines de sandinistes du personnel administratif), à une « chasse aux sorcières » au sein du personnel communal (sur 2 800 personnes concernées, seules 55 d'entre elles ont quitté la mairie).

M. Lewites estime que les élections communales ont clairement tranché entre perdants et gagnants ; le FSLN a gagné dans 11 des 17 villes importantes, les nicaraguayens ayant voté contre la corruption du président Arnoldo Aleman. Il déplore l'absence totale de rencontre avec le Président de la République. Ce manque de dialogue est fortement préjudiciable dans la mesure où, par exemple, les prêts internationaux doivent nécessairement transiter par le pouvoir exécutif.

M. François Asensi souhaite connaître les priorités de la nouvelle majorité municipale ainsi que les premières difficultés rencontrées sur le terrain.

M. Lewites souligne la très forte concentration de la population dans la capitale nicaraguayenne. La guerre a notamment ``poussé'' des centaines de milliers de personnes qui fuyaient les conflits vers Managua. En 20 ans, les habitants de la capitale sont ainsi passés de 500 000 à 1,2 million. Encore maintenant, 40% de ces personnes habitent Managua de façon illégale, sans accès aux principales commodités (électricité, eau, etc.). Le maire souhaite légaliser et améliorer au plus vite la situation de tous ces gens. Il espère que le prochain gouvernement prendra les mesures nécessaires afin de stopper ces flux migratoires vers la capitale.

Répondant à une question de M. Asensi sur les rentrées fiscales de la commune, M. Lewites indique que Managua ne bénéficie d'aucune subvention et que seulement 15% des habitants paient des impôts. Ce dernier problème étant essentiellement du au manque de registres communaux. Le budget total est de 30 millions $ ; 80% de cette somme est destinée à rémunérer le personnel communal.

Le conseil municipal attache une grande priorité à la résolution du problème de la collecte des ordures ménagères. La municipalité ne possède que 20 camions pour assurer la collecte quotidienne de 1 100 tonnes de déchets ; il en faudrait quatre fois plus. Le maire a obtenu un prêt américain afin d'acheter 25 véhicules supplémentaires et espère le don d'autres véhicules de villes étrangères (Montréal, Barcelone).

M. Alain Cousin souhaite savoir si l'implantation d'entreprises sur la ville est prévue.

M. Lewites estime important d'avoir une planification nationale ; le maire pouvant difficilement travailler seul. L'électricité et les télécommunications sont privatisées, l'eau est exploitée par le gouvernement. Les maires ont peu de pouvoir dans ce domaine et souhaitent acquérir plus d'indépendance.

5. MEMBRES DU GROUPE D'AMITIÉ NICARAGUA-FRANCE

Le groupe d'amitié Nicaragua-France est présidé par M. Pedro Alejandro Matus Gonzalez. Il a obtenu, en 1944, son diplôme de cadet à l'Académie militaire du Nicaragua qu'il a décidé de quitter en 1947, en désaccord avec le coup d'État du Général Somoza.

Il a exercé des activités commerciales et la profession d'avocat jusqu'à ce jour. Il fait partie du Parti Libéral Constitutionnaliste dont il est le fondateur.

Le président Pedro Alejandro Matus Gonzalez souhaite la bienvenue aux députés français et présente ses collègues du groupe d'amitié.48

Le groupe est constitué de 17 députés.49 Il veut multiplier les échanges entre les deux pays et propose d'envoyer en France une délégation nicaraguayenne dès qu'une invitation officielle parviendra à Managua. Il souhaite que les députés qui seront nouvellement élus au mois de novembre, ainsi que des fonctionnaires de l'Assemblée nationale nicaraguayenne soient assistés et formés par la division de la coopération interparlementaire de l'Assemblée nationale française.

Après avoir présenté ses collègues, M. François Asensi, président du groupe d'amitié France-Nicaragua à l'Assemblée nationale, propose de recenser les besoins du parlement nicaraguayen afin de proposer des aides adaptées.

Les membres du groupe d'amitié ont, eux aussi, demandé à leurs collègues français d'intervenir auprès du gouvernement français pour que des observateurs soient envoyés au Nicaragua lors des prochaines élections et contribuent à leur bon déroulement.

M. Matus Gonzalez remercie le peuple français pour l'aide qu'il a fait parvenir au Nicaragua, à la suite du cyclone « Mitch ».

6. MEMBRES DU FRONT SANDINISTE DE LIBÉRATION NATIONALE (FSLN)

M. Edwin Castro, chef du groupe parlementaire, rappelle que le 4 novembre 2001, les Nicaraguayens se rendront aux urnes pour élire les députés et le président de la République. Onze ans après les élections perdues face à Violetta Chamorro et le début de réformes néolibérales, le Front sandiniste de libération nationale (FSLN) entrevoit à nouveau la possibilité de prendre le pouvoir. Pour la première fois, les élections municipales ne se dérouleront pas en même temps.

Il indique qu'à quelques mois des échéances électorales, et selon les derniers sondages, le candidat FSLN, Daniel Ortega, obtient de 33 à 39% des intentions de votes, tandis que le représentant du Parti libéral constitutionnaliste (PLC), Enrique Bolaños, stagne aux alentours de 28%. Ces chiffres, à analyser avec prudence, prennent toutefois une certaine crédibilité après la nette victoire sandiniste lors du scrutin municipal de novembre dernier, où le FSLN avait conquis onze des dix-sept départements nicaraguayens. Il souhaite que la France envoie des observateurs lors des futures élections du 4 novembre.

M. Bayardo Arce, député, ancien commandant de la révolution pense que l'usure du pouvoir des libéraux, la faillite économique et la corruption généralisée expliquent les résultats des premiers sondages. De plus, le refus du parti conservateur, qui pèse entre 11 et 14% des voix, de s'allier avec le PLC renforce les chances du FSLN. Il rappelle que lors des élections du 25 février 1990, Violetta Chamorro avait pu battre Daniel Ortega car elle était à la tête d'une large coalition regroupant quatorze formations politiques.

M. Samuel Santos, responsable des relations internationales du parti, demande à ce que la France intervienne auprès du Club de Paris afin de soulager la dette du Nicaragua.

M. Bayardo Arce indique que les adversaires du FSLN essaient de faire peur à la population en diabolisant un retour au pouvoir des sandinistes. Ils indiquent notamment que les relations avec les États-Unis risquent de se détériorer considérablement. L'ambassadeur des États-Unis, Oliver Garza, a exprimé plusieurs fois, publiquement et dans la presse, la préoccupation de Washington à l'égard d'une victoire sandiniste. « La préoccupation de notre gouvernement se base sur l'expérience des années 80. » estime le diplomate. À l'époque, sous la présidence sandiniste de Daniel Ortega, le Nicaragua était l'allié de Cuba et de l'Union soviétique et l'hostilité dominait ses relations avec les États-Unis. Abandonnant toute prudence diplomatique, l'ambassadeur Oliver Garza déclare franchement qu'Ortega « ne représente pas les intérêts nord-américains ». Il ajoute ne pas croire que le Front sandiniste de libération nationale (FSLN), dirigé par Daniel Ortega depuis plus de vingt ans, ait changé sa conception de la démocratie et des droits de l´homme.50

M. Samuel Santos estime que ces attaques contre le candidat du FSLN51 sont destinées à détourner l'attention des nicaraguayens des accusations dont est la cible le chef de l'État. M. Aleman est en effet la cible de diverses accusations de corruption liées à son enrichissement fulgurant et à la construction avec des fonds publics d'un héliport dans l'enceinte de sa résidence privée.

Le candidat présidentiel du PLC au scrutin du 4 novembre, Enrique Bolaños, admet lui-même que le président Aleman a commis l'erreur de ne pas clarifier sa situation financière devant le peuple nicaraguayen.

La population pauvre n'a pas oublié la guerre, mais se souvient aussi que du temps du sandinisme elle avait le riz, les haricots rouges et la tortilla assurés, qu'elle avait accès à l'éducation et à la santé et espère donc ardemment une victoire du FSLN. À la veille de l'ouverture de la campagne électorale, Daniel Ortega a affirmé devant la presse qu'il n'y aurait aucune confiscation de biens ou de propriétés et que le futur gouvernement respectera et défendra la propriété privée de tous les Nicaraguayens. Il s'est même engagé à entretenir des relations fondées sur le respect avec les Etats-Unis.

M. Jacques Guyard demande quelle est la position du FSLN sur la dollarisation et sur l'intégration en Amérique centrale.

M. Edwin Castro souhaite ardemment que tous les pays d'Amérique centrale se regroupent pour ne former qu'un seul pays. Par contre, à ses yeux, la dollarisation ne peut rien amener de bien pour le pays ; une monnaie centraméricaine serait beaucoup plus intéressante pour les économies locales.

M. Bayardo Arce insiste sur les besoins d'« autonomie municipale » et préconise également la multiplication des relations avec des collectivités locales françaises. Il déplore certains choix du gouvernement qui ne font qu'enfoncer un peu plus une partie de la population dans la misère.

Un instituteur perçoit un salaire de 830 cordobas par mois (480 F ou 63 $), c'est à dire environ le salaire minimum alors que le prix du panier de la ménagère, était évalué en 1999 à 1620 cordobas par mois. En France, il y a eu le SMIG puis le SMIC - salaire minimum interprofessionnel garanti puis de croissance - mais il a toujours été considéré comme assurant un peu plus que le strict panier de la ménagère (cela, c'est la fonction du RMI, c'est à dire 50% du SMIC), c'est à dire de se loger, de se déplacer, etc. Au Nicaragua, le Gouvernement fixe officiellement un salaire minimum inférieur à la moitié.

De plus, dans le domaine scolaire, chaque école est sommée de se débrouiller pour couvrir son budget de fonctionnement, c'est à dire de demander de l'argent aux parents et d'avoir de petits commerces annexes. Alors les plus démunis renoncent à envoyer leurs enfants à l'école. C'est ainsi que forcé par l'extérieur - mais aussi l'acceptant lui-même sur le plan idéologique - le gouvernement du Nicaragua a renoncé progressivement à son principe constitutionnel de l'éducation obligatoire et gratuite.

Le gouvernement du Nicaragua semble n'avoir aucune politique agricole digne de ce nom et n'apporter aucune réponse à la chute du prix du café. Sa politique agricole consiste à subventionner de manière importante les producteurs de sucre, c'est à dire qu'il fait en sorte que ceux-ci perçoivent un prix bien supérieur au cours international car si la production de café est très dispersée, celle du sucre et des produits dérivés (rhum) est concentrée entre les mains de quelques familles.

Le Nicaragua devra donc tôt ou tard se réformer en profondeur, c'est à dire se démocratiser, faire participer toutes les couches de la société au débat (Il existe la Comision Nacional de Planificacion Economica mais le Gouvernement la traite par le mépris) sur les choix économiques et sociaux mais comment réussir cela sans vouloir réellement réduire l'abîme des inégalités - notamment par une réforme fiscale - sans lutter contre la corruption - qui atteint des proportions scandaleuses - sans résoudre le problème de la propriété, sans stabiliser les institutions, sans créer progressivement, mais de façon opiniâtre, un État de droit ?

7. MEMBRES DU PARTI LIBÉRAL CONSTITUTIONNALISTE (PLC)

Les membres du PLC souhaitent la bienvenue à Managua aux représentants de l'Assemblée nationale française. Ils rappellent que leur parti est celui du président de la République, M. Arnoldo Aleman. Ce dernier, ancien maire de Managua, nie être somoziste,52 et déclare s'inscrire dans la tradition de Sandino. De fait, il n'appartient pas aux grandes familles de l'oligarchie locale, avec lesquelles il n'entretient pas de bonnes relations.53 Lorsqu'on l'accuse d'être somoziste, il rétorque que « le somozisme n'est pas une philosophie et qu'il est un libéral ».

Son slogan à la tête de la capitale a été « Managua change, la mairie tient ses promesses ». Sa première action à ce poste a été de supprimer le sigle FSLN sur le mont Motastepe, situé au sud de la ville.54 « S'il avait pu bénéficier d'une force coercitive, sous son commandement, affirment ses partisans, Managua serait encore plus différente. Nous n'aurions pas ces asentamientos illégaux, et nous aurions pu construire de nouvelles avenues. ».

Arnoldo Aleman a donc trouvé un écho certain dans la population lorsqu'il a promis d' accomplir pour le Nicaragua ce qu'il avait fait pour la capitale.

Les membres du parti libéral évoquent les futures élections. Ils indiquent que ces élections sont vécues comme une fête par les Nicaraguayens. Les armes ont été remplacées par les bulletins de vote et d'énormes progrès ont été faits, depuis 1990, sur le chemin de la démocratie. Parallèlement, le gouvernement se bat pour que l'économie nationale reste à flot. La plupart des investissements sont bloqués dans l'attente du résultat des élections. Ils déplorent l'utilisation de la violence et de la grève par le FSLN.

Les sondages publiés dans la presse sont défavorables au PLC mais ses membres restent résolument optimistes et estiment que le retard sera comblé d'ici le mois de novembre.

M. Jean-Jacques Filleul souhaite que le démocratie soit respectée par tous et indique que la France coopérera avec un Nicaragua démocratique.

M. Michel Meylan souhaite connaître le message adressé aux jeunes du pays.

Une ouverture importante (40%) des postes du parti libéral constitutionnel seront réservés à des jeunes et à des femmes.

M. Jean Besson fait remarquer que toutes les personnes rencontrées par la délégation française ont insisté sur la nécessité de développer la démocratie au Nicaragua en étant de plus et plus ouverts et tolérants ; or, le reproche le plus souvent entendu de la part des opposants au PLC est le manque d'ouverture de la majorité, qui se traduit par exemple au travers du droit de veto présidentiel ou du refus du Président de la République de rencontrer le maire de Managua.

8. DIRECTEUR DU COLLÈGE FRANCO-NICARAGUAYEN DE MANAGUA

M. Gilbert Tournié, Directeur du collège franco-nicaraguayen « Victor Hugo » de Managua, a reçu les députés français et leur a présenté l'établissement.

Depuis 10 ans, le collège fait partie du réseau scolaire français à l'étranger qui scolarise 24 000 élèves dans 400 établissements. Créé il y a 30 ans dans les anciens locaux de l'Alliance française, le collège Victor Hugo compte maintenant 600 élèves de 14 nationalités différentes. Il comprend une section à programme français55 homologuée allant de la maternelle au CM2 (184 élèves, dont 29 français), une section de secondaire dont l'enseignement est assuré par le CNED avec répétiteurs (45 élèves, dont 18 français), une section bilingue à programme national (158 élèves en primaire, 203 élèves en secondaire).

Sur le plan juridique, le collège est un établissement privé à but non lucratif. Il est homologué par le Ministère de l'Éducation et de la Culture du Nicaragua et par le Ministère de l'Éducation Nationale français. Il est géré par une « junta directiva » de huit membres : six sont élus par les membres de l'association éducative et culturelle franco-nicaraguayenne « Victor Hugo » (parents et personnel), auxquels s'ajoutent un représentant de l'Ambassade de France et le Directeur de l'établissement.

Le collège est financé directement par les familles (écolages et droits d'inscription) et par l'AEFE (salaires des personnels français expatriés et résidents, subventions diverses).

Le projet d'établissement qui couvre la période 2001-2003 met en _uvre des stratégies destinées à faire du collège un établissement d'excellence. La qualité de l'enseignement, mais aussi la formation de l'individu et du citoyen dans un cadre biculturel, sont les priorités. Pour cela, le collège organise pour ses élèves des ateliers artistiques, des activités sportives, des projets sociaux, une formation technologique, des dispositifs d'aide à l'orientation, sans oublier de nombreuses sorties pédagogiques culturelles ou de découverte de l'environnement.

Les locaux existants ne permettent pas d'accueillir tous les élèves en même temps. Un projet de construction d'un bâtiment supplémentaire de 11 classes a été établi ; en attendant, la journée est divisée en « deux tours » :

- de 7h à 12h : maternelle, primaire, CNED et deux classes de secondaire ;

- de 12h30 à 18h : les autres classes de secondaire.

Diviser la journée en « deux tours » oblige à organiser la matinée selon un rythme scolaire peu favorable de six périodes de 45 minutes entrecoupées de deux récréations de 15 minutes, soit une journée continue de 5 heures sur 192 jours de classe. L'après-midi est divisée en 7 périodes de 45 minutes et 15 minutes de récréation, soit 5 h 30 en continu. De plus, l'après-midi, les conditions de travail sont difficilement supportables (30 à 40° dans les salles).

IV.- LE HONDURAS

A.- GENERALITES

En plein c_ur de l'isthme centraméricain, le Honduras est entouré du Guatemala à l'ouest, du Salvador au sud-ouest et du Nicaragua au sud-est. Quant à ses confins septentrionaux, ils sont marqués par 644 km de littoral de la mer des Caraïbes et par 124 km d'océan Pacifique, le long du golfe de Fonseca, une baie peu profonde que le Honduras partage avec le Salvador et le Nicaragua.

D'une superficie de 112 492 km2, le Honduras, deuxième État de l'Amérique centrale par sa superficie, fait environ la moitié de la taille de l'Angleterre. Parmi les pays d'Amérique centrale, seul le Nicaragua occupe un territoire plus important. La population approche les 6,6 millions, soit à peine plus que le Salvador, son voisin beaucoup plus densément peuplé.

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Le caractère montagneux de la topographie hondurienne,56 doublé d'un réseau routier pratiquement inexistant dans de vastes portions du pays, a contribué au fil des siècles à accentuer l'isolement de certaines régions. D'ailleurs, de nos jours encore, ce facteur contribue à freiner le développement social et économique.

Ce pays très montagneux d'Amérique centrale bénéficie d'une façade côtière sur les Caraïbes, au Nord, et d'une petit côte sur le Pacifique, au sud. Sa capitale, Tegucigalpa est à l'intérieur des terres.

Le territoire national est constitué pour 66% de forêts, 25% de terres cultivables et 9% de marais et de mangroves. Le climat est tropical, avec une alternance de périodes humides et de périodes sèches propice au développement d'une grande diversité d'espèces végétales et animales terrestres et aquatiques.

Le Honduras, qui possède une gamme étendue de richesses agricoles, minières et industrielles, surprend pourtant par son sous-développement économique et social. Il se range en effet parmi les territoires les plus démunis de la zone des Caraïbes. Environné de voisins turbulents, il n'a, depuis son indépendance en 1823 dans un cadre fédéral, jamais pu déployer, ni affirmer sa personnalité propre. Le Honduras subit les vicissitudes des économies bloquées qui dépendent des monopoles nord-américains.

L'agriculture, principale activité économique, emploie deux travailleurs sur trois et fournit les deux tiers des exportations. Cependant, la productivité reste sommaire. L'agriculture hondurienne a deux visages : d'une part, de petites fermes familiales permettant une agriculture de subsistance ; d'autre part, de grandes exploitations commerciales alimentant le commerce extérieur. Appartenant à des descendants de colons espagnols ou à des occidentaux de souche plus récente, ces dernières sont consacrées à la banane, au café ou à l'élevage bovin.

La principale culture est le maïs, mais les Honduriens cultivent aussi le sorgho et les haricots. L'importance relative de la banane a diminué au cours des dernières années, avec le développement des plantations de café, de coton et de tabac. Le Honduras dispose de ressources forestières dont l'exploitation va en s'accroissant ; le pays exporte par ailleurs des crevettes et des langoustes.

L'hydroélectricité satisfait totalement la demande intérieure. Mis en service en 1985, le barrage d'El Cajón assure à lui seul 60% de la production. Par contre, la production minière est peu importante ; le secteur industriel, peu diversifié, se concentre sur la consommation intérieure et la transformation des produits agricoles. Le secteur des services, incluant l'administration publique, emploie 27% de la main-d'_uvre.

L'économie hondurienne dépend largement des États-Unis, son principal partenaire commercial. Les investissements américains se dirigent surtout vers les cultures fruitières, le pétrole et les mines (argent, plomb).

Au début de la décennie 1990, le Honduras était confronté à plusieurs problèmes : taux de croissance démographique élevé, chômage important, pénurie de services essentiels, secteur public surdéveloppé et inefficace, dépendance face aux fluctuations des marchés du café et de la banane, principaux produits d'exportation.

B.- RAPPEL HISTORIQUE

1. DE L'EMPIRE MAYA A LA COLONISATION ESPAGNOLE

Avant l'arrivée des Espagnols, le Honduras était peuplé de Mayas, dont le centre de civilisation fut Copan, dès 150 de notre ère et, seconde métropole Maya, après Tikal. La civilisation Maya rayonnait jusqu'à Tela, sur le golfe du Honduras, mais ne dépassait pas le territoire des Indiens Lenca dont la limite territoriale était fixé par le rio Ulua. Le reste du territoire hondurien constitua pendant longtemps une voie de passage pour les pays qui longeaient les côtes des Caraïbes. Le pays fut envahi ensuite par les Aztèques, puis par les Mosquitos.

Découvert par Christophe Colomb qui remarque la profondeur de ses eaux à son arrivée, en 1502, le pays tirera son nom de l'espagnol Hondo (profond). Pendant un moment, le Honduras ne fut pas une priorité pour les Conquistadores qui étaient polarisés par le Mexique. Mais entre 1510 et 1520, des raids esclavagistes espagnols eurent lieu régulièrement dans la baie du Honduras pour capturer des autochtones et les vendre aux îles dont la population amérindienne était déjà décimée. Très vite cependant, les peuples se mélangèrent et les métis devinrent le groupe ethnique dominant du Honduras.

Dans la seconde moitié du XVIème siècle, 4 chefs de bande se disputent le Honduras : un ancien lieutenant de Cortès, Cristobal de Olid ; Pedro de Alvarado ; Francisco de Montejo et Pedrarias Davila. À cette époque le pays est déjà convoité pour ses ports et ses richesses minières. Cristobal de Olid fut le premier gouverneur du Honduras.

Toutes les colonies espagnoles situées dan l'Amérique centrale et dans l'Amérique du Sud, à l'exception du Nicaragua, du Honduras et du Guatemala, furent placés en 1535-1537 sous la juridiction d'une audience siégeant à Panama. En 1539, le Nicaragua et le Honduras, qui jusqu'alors avaient appartenu à Saint Domingue, furent placés également sous la juridiction de cette audience. L'audience de Panama fut supprimée en 1542, et remplacée par deux autres, celle de « los confines » qui comprenait l'Amérique centrale, Chiapas et le Yucatán, et celle du Pérou. Le président de l'audience de « los confines » était en même temps capitaine-général du Guatemala, c'est à dire de l'Amérique centrale toute entière. Ces gouvernements ont dépendu, jusqu'en 1776, du vice-roi de Nueva-España (Mexique).

2. L'INDEPENDANCE

À la fin de la période coloniale, la majeure partie du Honduras était une province peu peuplée, rattachée à la capitainerie générale du Guatemala, sous administration espagnole, et dont la plupart des habitants se consacraient à l'agriculture ou à l'élevage de subsistance. Le pays, après avoir fourni essentiellement des métaux, procura de grandes quantités de denrées alimentaires et de bétail aux régions exportatrices d'indigo du Salvador et du Guatemala.

En 1821, la ville de Comayagua choisit de suivre le Mexique qui s'était engagé dans une guerre d'indépendance, tandis que Tegucigalpa optait pour le Guatemala où l'indépendance avait été proclamée le 15 septembre. Après une période d'anarchie et de guerre civile entre villes et la constitution des Provinces-Unies de l'Amérique centrale, où s'affrontaient libéraux et conservateurs, le Honduras promulgua sa propre constitution en décembre 1825. Le territoire est alors été divisé en sept départements : un au nord (Yoro), un au sud (Choluteca), deux au centre du pays (Comayagua et Tegucigalpa), deux à l'ouest (Gracias et Santa Bárbara) et un à l'est (Olancho). Actuellement, le pays compte 18 départements57, 296 communes, 3735 villages et 27 502 hameaux, le hameau étant l'unité territoriale la plus petite.

La Fédération d'Amérique centrale, créée le 22 novembre 1824, fut dirigée de main de maître par Francisco Morazán, né en 1790 près de Tegucigalpa, secrétaire général du Honduras dans le gouvernement libéral de Dionisio Herrera depuis 1824. Partisan de la généralisation de l'instruction, anticlérical convaincu et souhaitant réformer la société, Morazán se heurta aux forces conservatrices. Le Honduras se sépara de la fédération en 1839, mais Morazán, qui s'était fait proclamer chef du Salvador, et qui occupa le Guatemala le 18 mars 1840, s'exila au Panamá puis au Pérou et au Costa Rica.

3. LES TENTATIVES D'UNION

Une fois débarrassé de la tutelle espagnole, le Honduras déploya une énergie constante à proposer, à participer ou à favoriser l'unité des cinq républiques de l'isthme centraméricain. Les procédures s'enlisèrent le plus souvent, par suite des antagonismes toujours latents entre les pays concernés. Entre 1813 et 1903, cependant, le Honduras joua un rôle souvent déterminant dans le processus d'union.

Après l'échec de plusieurs tentatives de fédération entre les pays d'Amérique centrale à la fin du XIXème siècle, plusieurs structures furent créées, dont un tribunal d'arbitrage centraméricain, en 1902, et une cour de justice qui siégea à partir de 1908. En 1912, le Honduras refusait de reconnaître le traité Bryan-Chamorro passé entre le Nicaragua et les États-Unis, qui autorisait ces derniers, à perpétuité, à construire un canal et à établir une base navale dans le golfe de Fonseca.

Les cinq États de l'isthme conclurent cependant un traité de fraternité centraméricain, le 12 avril 1934. En septembre 1942, ils signaient à San José de Costa Rica une convention d'extradition des criminels fugitifs. En 1951, la charte de San Salvador, ratifiée par les cinq États, organisait, sans les États-Unis, une union douanière, une université centraméricaine et une flotte commune.

Le pays, perpétuellement agité par de sanglantes guerres civiles depuis 1838, sans appareil d'État, était livré à la merci de petites oligarchies locales. Les groupes oligarchiques locaux s'associèrent aux étrangers, leur assurant des conditions institutionnelles et politiques favorables, leur laissant toute latitude sur le plan économique et financier. Ce qui caractérisa de manière déterminante cette phase d'intégration économique du Honduras fut l'hégémonie du capital étranger dans son économie, et son rôle déterminant dans les activités d'exportation.

4. LA MONTEE DES MILITAIRES

Le Honduras où règnent, à la fin du XIXème siècle, caudillos et caciques subit la dictature de Policarpo Bonilla (1894-1899) et de Miguel R. Davila (1907-1911). Occupé par les troupes nord-américaines de 1911 à 1933, après avoir connu les dictatures de T. Carias Andino (1933-1949), de J. M. Gálvez (1949-1954) et de J. Lozano Díaz (1954-1956), le pays revint pour une brève période à un régime constitutionnel. Le président régulièrement élu en 1957, Ramón Villeda Morales, chef des libéraux fit adhérer le pays au Marché commun centre-américain (MCCA) et lança des programmes en faveur d'une réforme agraire et de l'éducation. En 1963, sa politique contestée, associée à l'appréhension provoquée par la montée du communisme à Cuba, déboucha sur un coup d'État. Il fut renversé en octobre 1963, quelques jours avant les élections, par le général Oswaldo López Arellano, qui se proclama chef de l'État et gouverna jusqu'en 1971 en s'appuyant sur le parti nationaliste.

La guerre qui opposa le Honduras au Salvador le 14 juillet 1969, dite « guerre du football »,58 mit un terme au Marché commun centraméricain59. Cette explosion eut de profondes répercussions sur les structures économiques et sociales des deux pays. Au Honduras, la guerre développa les contradictions accumulées en liaison avec le marché commun régional. L'État du Honduras vit dans cette confrontation armée l'occasion d'obtenir un consensus national orienté à son profit. Confronté à un mouvement de résistance paysanne qui prônait l'occupation massive des terres, l'État proclamait la nécessité de l'« unité nationale ». L'armée elle-même y trouva son compte en s'arrangeant pour apparaître, malgré une déroute incontestable, comme une force neuve aux yeux de la population.

La défaite mit cependant à nu la décomposition interne de l'armée, qui est rongée par la corruption et minée par les dissensions au niveau du commandement, et favorisa une nouvelle donne. Le 4 décembre 1972, les militaires commandés par le général López Arellano renversèrent le gouvernement de Ramón Ernesto Cruz, qui lui avait succédé en 1971. Les militaires se proposaient de moderniser le pays et de réussir ce qu'ils appelaient l'« actualisation historique du Honduras ». Une longue grève de soixante-neuf jours en 1954 avait permis l'émergence d'un mouvement syndical ouvrier qui avait conquis sa légalité et s'affirmait en tant que force politique.

5. UNE POLITIQUE REFORMISTE, PUIS D'ENDETTEMENT

La réforme agraire fut déclarée « objectif fondamental », et le nouveau pouvoir tenta de s'adjoindre l'appui du mouvement ouvrier et des associations paysannes pour détendre le climat social, veillant en même temps à ne pas s'aliéner l'oligarchie dominante. Sa marge de man_uvre était donc très étroite. La redistribution des moyens de production (terre, capital et technologie) fut associée à la réforme forestière, qui visait à permettre à l'État de contrôler la production du bois. Le Honduras, demeuré un pays à vocation forestière, était toujours livré, sur le plan de la coupe et de l'exportation du bois, aux mains des entrepreneurs étrangers.

Le Plan national de réforme agraire (P.N.R.A.) suscita une violente opposition de la part des grands propriétaires, des compagnies multinationales et des banques. En 1973, au moment du lancement du train de réformes, 120 000 familles représentant 67% de la population agricole occupaient moins de 12% des terres affermées. En revanche, 600 familles de grands propriétaires, qui constituaient 0,3% de la population rurale, détenaient 27% des terres. Le P.N.R.A. prévoyait la distribution de 600 000 hectares à 120 000 familles paysannes, de 1975 à 1979. Ce projet, combattu par les classes dominantes, ne put jamais être réalisé. Les auteurs d'une étude faite en 1980 par l'Instituto hondureño de desarrollo rural (I.H.D.E.R.) concluaient que, « au rythme actuel de l'adjudication des terres, il faudrait 1 029 années pour atteindre l'objectif global pour lequel le P.N.R.A. s'était donné cinq ans. ».

Après le virage à droite des militaires, en 1977, le projet de réforme agraire fut remplacé par une simple tentative de « migration incitée » : il s'agissait de transférer des paysans de zones à forte tension sociale vers des territoires à faible peuplement ; ce qui entraîna une reprise des luttes paysannes pour la possession de la terre.

La chute du général López Arellano et de son gouvernement réformiste, en 1975, après un scandale spectaculaire, coïncida avec une période de récession sur le plan économique. Le pays avait été durement frappé en septembre 1974 par le cyclone « Fifi » et subissait une sécheresse prolongée.

Le gouvernement militaire pratiquait une politique d'endettement accéléré qui accentuait la position de dépendance financière du Honduras vis-à-vis de l'étranger. La dette extérieure était de 700 millions de dollars en 1980. Des calculs officiels ont établi que la diminution des recettes provenant de la vente du café atteignit 30 à 40 millions de dollars. La production de bananes diminua après le passage du cyclone de 1974 et fut affectée par la chute des cours et les mesures restrictives prises par les États-Unis, principal importateur.

La baisse des prix des produits d'exportation se produisit au moment où augmentait, par contre, le prix du pétrole. Ces difficultés économiques furent aggravées par la fluctuation du système monétaire capitaliste, qui se répercuta sur la monnaie du Honduras. Le déficit de la balance des paiements, qui était de 200 millions de dollars en 1978, atteignit 300 millions de dollars en 1980. Le gouvernement militaire se trouva donc dans l'obligation de poursuivre sa politique d'endettement pour couvrir le déficit croissant de la balance des paiements.

6. L'AGGRAVATION DU SOUS-DÉVELOPPEMENT

Les liens de dépendance et le sous-développement du Honduras s'aggravaient à mesure que se renforçait l'activité des puissants centres financiers nord-américains dans l'économie du pays. Le gouvernement militaire renforça son alliance avec le capital étranger en élaborant deux projets : la Corporación forestal industrial de Olancho (Corfino), qui visait à devenir le plus grand producteur de papier du continent et nécessitait un investissement de 540 millions de dollars, et le projet hydroélectrique de El Cajón, un barrage gigantesque qui devait permettre au Honduras d'exporter de l'énergie électrique, dont le coût total était estimé à 6 000 millions de dollars. En 1979, trente-deux entreprises multinationales et soixante et onze filiales étrangères étaient établies au Honduras.

Le capital étranger, qui est parvenu à s'imposer dans tous les secteurs productifs du pays, a même réussi à établir son contrôle sur le système bancaire du Honduras, ce qui lui permet d'utiliser les biens des Honduriens pour accroître sa domination sur l'économie du pays. En 1980, le capital étranger représentait 54% du capital bancaire hondurien et contrôlait 66% des dépôts effectués par les Honduriens.

7. UNE POLITIQUE D'EXTRÊME DROITE

Le gouvernement militaire issu du coup d'État de décembre 1972 s'entoura de politiciens indépendants et de technocrates « apolitiques » pour réaliser le projet de modernisation économique et sociale. Ce gouvernement réformiste rechercha l'alliance de représentants syndicaux liés à l'Organisation régionale interaméricaine du travail (O.R.I.T.) et à l'Institut américain pour le développement du syndicalisme libre (I.A.D.S.L.). Il rechercha également le concours de l'Asociación nacional de campesinos de Honduras (A.N.A.C.H.). La campagne d'opposition orchestrée par la grande bourgeoisie commerciale, les grands propriétaires et éleveurs avec les compagnies bananières et les militaires conservateurs reçut le soutien de l'ex-dictateur du Nicaragua, Anastasio Somoza. Autour du Honduras se constitua un glacis d'États, le Guatemala, le Salvador et le Nicaragua cherchant par des pressions constantes à l'inciter à revenir sur la voie de la « normalité traditionnelle ».

Au sein des forces armées, les militaires ultra-conservateurs étaient parvenus à occuper des positions importantes. Le 15 mars 1975, Oswaldo López Arellano fut démis de ses fonctions de chef des forces armées. Le 8 avril éclata le scandale financier dénoncé par le Wall Street Journal, une affaire de corruption : la compagnie United Brands, ex-United Fruit Co., versait des pots-de-vin au ministre de l'Économie pour obtenir une réduction des nouvelles taxes à l'exportation. Le 15 avril, le Conseil supérieur des forces armées - organisme collégial composé de vingt-sept hauts chefs militaires - désigna le nouveau chef d'État, le colonel Juán Alberto Melgar Castro, connu pour ses opinions conservatrices et ses tendances répressives. Deux mois après sa nomination, le gouvernement Melgar se lança, avec l'aide des propriétaires terriens, dans une brutale répression contre les paysans du département de Olancho, qui se termina par les massacres de la « matanza de los horcones ».

Sous le gouvernement Melgar Castro (22 avril 1975 - 7 août 1978), la corruption atteignit un niveau record, et le rôle joué par le Honduras dans le trafic international des stupéfiants apparut au grand jour. Le trafic de drogue, la lutte pour le pouvoir au sein de l'armée et l'antagonisme qui opposait l'extrême droite aux dirigeants du Parti national (conservateur) causèrent la chute du général Melgar. Il fut remplacé le 7 août 1978 par une junte militaire présidée par le général Policarpo Paz García, nouveau chef des forces armées, et les lieutenants-colonels Amilcar Zelaya, chef de la force de sécurité publique et Domingo Álvarez, chef de la force aérienne.

8. LE RETOUR DES CIVILS AU POUVOIR

Entre 1821 et 1981 le Honduras a connu 159 changements de gouvernement, 24 guerres, et pas moins de 260 révoltes armées. L'armée a conservé le pouvoir de manière intermittente entre 1956 et 1981. À la fin de cette période, cédant aux pressions du président américain Jimmy Carter, elle autorisa le retour des civils au pouvoir et l'instauration du multipartisme. Le Parti Libéral et le Parti National se sont depuis succédés à la tête de l'État, bien que les divergences idéologiques entre les deux partis soient infimes.

Lors des élections de novembre 1981, le candidat du Parti libéral, Roberto Suazo Córdova, anticommuniste convaincu, remporta la présidence, marquant le retour des civils au pouvoir. Les militaires, cependant, gardèrent une influence considérable. Le Honduras devint une base pour les guérilleros luttant contre le gouvernement du Nicaragua et les États-Unis entreprirent alors une série d'exercices militaires, afin d'exercer une pression supplémentaire sur le gouvernement sandiniste du Nicaragua.

Jusqu'à la défaite électorale des sandinistes nicaraguayens en 1990, le Honduras, qui abrite des réfugiés du Nicaragua et du Salvador, a servi de base de repli aux contras (contre-révolutionnaires) soutenus par les États-Unis. Cette situation géopolitique et économique a entraîné de violentes manifestations anti-américaines au cours de l'année 1989. La fin des hostilités dans ces deux pays entraîna une diminution de l'aide américaine au Honduras. Privé de ces fonds, le pays est confronté à une situation très difficile, où le chômage, les réformes agraires et l'amélioration de la condition des paysans honduriens dépourvus de terre sont au centre des préoccupations gouvernementales.

En 1985, José Simón Azcona Hoyo fut élu président. Un nouveau pas est franchi avec la participation active de l'armée hondurienne aux opérations menées au Salvador et la pénétration sur le territoire hondurien de l'armée nicaraguayenne à la poursuite des contras.

Rafael Leonardo Callejas, est élu président en 1989. Son gouvernement fut accablé par des grèves, alors qu'il était aux prises avec une situation économique désastreuse. Pendant ce temps, le plan de paix pour l'Amérique centrale du président Oscar Arias, auquel s'opposent les États-Unis et le Honduras, est finalement adopté, plaçant les Honduriens dans une position intenable.

En novembre 1993, le candidat du parti libéral Carlos Roberto Reina, ancien président de la Cour Interaméricaine des droits de l'Homme, remporte l'élection présidentielle face à Rafael Leonardo Callejas. Il s'engage alors dans la voie des réformes économiques et des mesures d'austérité.

Il a réussi a initier un programme de démilitarisation de l'État, mais des lenteurs apparaissent en ce qui concerne la réforme du système judiciaire et la lutte contre la fraude fiscale. De plus, peu de résultats ont été notés dans le combat contre la corruption.

C.- DEUX PARTIS DE DROITE DOMINENT LA VIE POLITIQUE

Il n'existe au Honduras aucune interdépendance entre la situation économique et le droit de vote, si bien que les électeurs, qui choisissent en majorité les partis traditionnels (le parti national et le parti libéral), sont propriétaires terriens et paysans, entrepreneurs et ouvriers, instruits et analphabètes. L'adhésion aux idées de tel ou tel parti s'est toujours faite suivant les traditions familiales. Néanmoins, on assiste depuis quelque temps à l'émergence d'un électorat fluctuant tantôt en faveur du parti national, tantôt en faveur du parti libéral, le premier issu d'une scission du second intervenue en 1902 se distingue par un conservatisme plus prononcé. On observe également un désintérêt manifeste de la population vis-à-vis de l'exercice du droit de vote, qui se traduit par un nombre élevé d'abstentions lors des scrutins.

1. LES ELECTIONS DU 30 NOVEMBRE 1997

Dans ce pays pauvre du continent américain, l'agitation sociale, la délinquance et la criminalité font partie du quotidien. Pourtant, durant l'année 1997 ce ne sont ni la recrudescence des actions des bandes armées, ni l'augmentation des enlèvements qui ont retenu l'attention des observateurs étrangers, mais bien plutôt les élections générales du 30 novembre, à l'issue desquelles la droite a été reconduite aux affaires.

Les Honduriens ont choisi la continuité en renouvelant le bail du parti libéral (conservateur), dont le candidat à la présidence, Carlos Flores, ingénieur formé aux États-Unis, ancien président du Congrès, a recueilli 53 % des suffrages. Avec 67 députés sur 128, les libéraux disposaient donc de la majorité absolue au Parlement. Leurs rivaux nationalistes ayant obtenu 55 sièges. Bien qu'ayant perdu la mairie de Tegucigalpa, le parti libéral contrôle plus de la moitié des municipalités du pays. En dépit de ses divisions, la gauche s'est adjugé 4 sièges, soit deux fois plus que lors du scrutin précédent, en 1993. Pour la gauche, qui n'est jamais parvenue à ébrécher les positions des conservateurs depuis le début du siècle, ce score est sans précédent.

S'appuyant sur les statistiques officielles selon lesquelles près de 80% de la population est touchée par la pauvreté, la gauche estime que le gouvernement doit cesser d'appliquer une politique « immorale » pour se consacrer au développement d'« un projet national répondant aux intérêts du pays et non à ceux du FMI ». Un point de vue partagé par les deux candidats de la droite, qui déploraient, pendant la campagne électorale, l'indifférence de la communauté financière internationale à l'égard des problèmes sociaux.

Le nouveau président s'est engagé à donner un caractère plus « humain » à la politique conduite par son prédécesseur, Carlos Roberto Reina, en faisant de la création d'emplois la priorité de son action. Élu en novembre 1997, le président Carlos Flores Facussé a pris officiellement ses fonctions au début de l'année 1998 et trouvé de nombreux dossiers délicats sur son bureau. Qu'il s'agisse de la question indienne et de l'attribution des terres ou de l'importante vague de criminalité qui s'est abattue sur le pays depuis quelques années. Mais tous ces problèmes ont été relégués au second plan par le passage du cyclone « Mitch » et son cortège de désolations.

En s'abattant sur un des pays les plus pauvres d'Amérique, le cyclone a ruiné les timides espoirs que pouvait encore former le gouvernement à la fin du mois d'octobre eu égard à la sensible amélioration des ratios économiques. Ainsi, la poussée des exportations, grâce aux produits agricoles, notamment bananes et café, a favorisé la croissance du PIB, l'inflation a été contenue et le déficit fiscal considérablement réduit. Des résultats qui n'ont pas laissé le Fonds monétaire international indifférent. D'ailleurs, le satisfecit du FMI a ouvert la porte à une renégociation de la dette extérieure avec les pays du Club de Paris. Il est vrai que le seul service de la dette, particulièrement important, suffit à empêcher le décollage économique et, par conséquent, ne permet pas de résoudre le problème de la pauvreté.

2. LES ECHEANCES ELECTORALES DE 2001

En novembre 2001 auront lieu des élections générales qui concerneront les maires, les députés et le président de la République. Ces échéances troublent la vie politique du pays, mettant en exergue la fragilité de la démocratie, comme en témoigne la tentative du parti libéral d'écarter M. Ricardo Maduro, candidat du parti national à l'élection présidentielle. La nationalité hondurienne de M. Maduro a été contestée par la majorité et, en dépit des conclusions de l'expert international brésilien consulté pour régler ce litige, le Tribunal Électoral a rejeté sa candidature.

Après quelques rebondissements, ce dossier a pu se terminer de manière positive pour M. Maduro qui sera bien présent, au mois de novembre, parmi les candidats à la présidence de la République.

Cette affaire, outre le fait qu'elle pourrait se retourner, lors des élections, contre le parti libéral, démontre la politisation de l'administration.

D.- LE CYCLONE « MITCH » AU HONDURAS

Il y a plus d'un an, le 29 octobre 1998, le Honduras subissait les foudres de l'ouragan « Mitch ».60 Des pluies diluviennes ont fait déborder la rivière Cangrejal au nord du pays. La forte masse d'eau s'est rapidement répandue sur les terres en emportant avec elle sur son passage arbres, maisons et tout ce qui se trouvait sur son chemin. Les récoltes furent dévastées et de nombreuses personnes ont perdu la vie durant cette catastrophe naturelle. Le pont de la Rio Viejo, à 25 km en amont de la zone de la Ceiba, a été emporté par la force des eaux et des débris transportés par celle-ci, coupant ainsi toute forme de circulation ou de communication entre les deux rives.

Le cyclone « Mitch » a frappé une population que l'on pouvait déjà qualifier de sinistrée. La pauvreté alourdit le bilan d'une catastrophe naturelle. Un cyclone en Floride s'abat sur une population prévenue, évacuée, assurée. Sur les 100 000 maisons détruites au Honduras combien de maisons en tôle ou en carton ? Comment s'étonner des épidémies quand, avant « Mitch », 35% de la population n'avait pas accès aux services de santé et que plus de la moitié des enfants souffrait de malnutrition ? Aujourd'hui, beaucoup de familles n'ont même pas les moyens de s'acheter de l'eau minérale.

Le Honduras est, avec le Nicaragua, le pays le plus pauvre de l'Amérique centrale. Réduire la vulnérabilité sociale est donc une nécessité de la reconstruction qui s'impose au gouvernement comme à tous les acteurs nationaux ou internationaux.

Encore aujourd'hui, les ravages de « Mitch » se font sentir. La population touchée par l'ouragan, déjà très pauvre, s'est rapidement retrouvée encore plus démunie et défavorisée. Grâce à l'aide internationale, le pays se rebâtit peu à peu, mais beaucoup de travail reste encore à faire.

L'ouragan « Mitch » a été l'une des tempêtes les plus destructrices qui n'ait jamais frappé l'Amérique centrale. Au plus fort de l'ouragan, les 26 et 27 octobre, les vents continus soufflaient à plus de 280 km/h. Le 30 octobre, « Mitch » s'est abattu sur le Honduras et, en dépit d'un relâchement de la force des vents, y a semé la dévastation. Des pluies torrentielles se sont abattues sur le pays durant plusieurs jours alors que la tempête s'attardait sur la côte nord avant de poursuivre sa route sur la zone continentale les 30 et 31 octobre. Les inondations et les dommages causés par les vents ont touché la totalité du pays, mais c'est la côte nord qui a été la plus dévastée.

On estime les pertes de vie humaines à plus de 5 000, et à 10 000 le nombre de personnes portées disparues suite aux inondations. La tempête a lourdement endommagé les infrastructures nationales ; de nombreux ponts sont touchés ou complètement détruits, ce qui a grandement ralenti les efforts des équipes de secours qui devaient approvisionner les communautés isolées en nourriture, en eau et en matériel de toute sorte. La destruction d'environ 70% des récoltes vient s'ajouter au désastre.

Le cyclone « Mitch » s'est abattu sur un espace particulièrement dégradé. Les plantations du nord et les haciendas d'élevage du sud ayant accaparé les terres les plus plates et les plus fertiles, la polyculture vivrière s'est développée sur les pentes ou les fonds de vallée.

La déforestation a été massive au cours des trente dernières années, conséquence des brûlis forestiers, d'une exploitation prédatrice du bois d'_uvre, de l'insécurité foncière et de la pression sur la terre qui conduisent à défricher sans cesse plus loin.

Pour éviter une réforme agraire, les gouvernements ont attribué les importantes réserves foncières à la petite colonisation familiale qui s'est installée sur les pentes boisées les plus fortes et les plus retirées.

Ainsi se déclenche le cycle déforestation-pluies diluviennes-perte de sol cultivable-glissement de terrain-crues de boue. Tout projet à venir (route, barrage, captage) doit donc désormais prendre en compte cette vulnérabilité physique. Il ne s'agit plus seulement de réparer mais d'analyser le risque, de réaliser la solution la mieux adaptée pour éviter, autant que faire se peut, que les nouveaux équipements ne soient emportés à la prochaine et inévitable menace.

Avant l'ouragan « Mitch », les deux tiers de la population vivaient en dessous du seuil de la pauvreté, dont 50% à un niveau d'extrême pauvreté. L'ouragan a non seulement eu des répercussions sur le niveau de l'emploi, mais également sur les niveaux de revenu des pauvres et sur leur accès à l'éducation, à la santé et au logement.

Lors de son déplacement vers le nord et vers l'ouest au-dessus du Guatemala et du sud ouest du Mexique, l'ouragan a perdu de sa force. L'ouragan a ensuite bifurqué vers le nord-est au-dessus du golfe du Mexique pour enfin venir mourir au-dessus de l'Atlantique vers le 5 novembre.

Le Honduras a été le pays le plus gravement atteint par l'ouragan « Mitch » : le total des pertes a dépassé le PIB du pays et 1,5 million de personnes ont été affectées.

Les responsables du gouvernement et d'autres au Honduras reconnaissent généralement que l'ampleur de la catastrophe causée par « Mitch » a été, entre autres, le résultat direct d'un modèle de développement inadéquat, d'une utilisation anarchique des terres et de failles dans la conception de l'infrastructure publique et privée. Le plan national de reconstruction et de transformation du Honduras (PNRT), dont le but est de réduire au maximum les risques futurs, se concentre sur la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir la gestion durable des ressources naturelles et la protection de l'environnement.

Les désastres causés par l'ouragan ont aggravé le sous-emploi (estimé à 5% de la population active) et relancé l'immigration. La lenteur du processus de reconstruction et de transformation a entraîné une augmentation du flux des émigrés honduriens réguliers et irréguliers vers l'Amérique du nord. Des milliers de personnes ont perdu leur travail dans les bananeraies du nord, propriété de Chiquita, et tenté de gagner les États-Unis, s'arrêtant parfois au Mexique, où le nombre de jeunes femmes se prostituant est en hausse.

Il y aurait 600 000 Honduriens aux États-Unis, dont quelque 100 000 sans-papiers. Après « Mitch », le Président Clinton a accordé un asile à titre humanitaire à ces personnes. Le gouvernement hondurien demande au Président Bush de prolonger cette protection. Le retour des émigrants serait une catastrophe pour le Honduras.

« Mitch » peut être l'occasion à saisir pour que les pays de l'Amérique centrale coordonnent enfin leurs économies. Une reconstruction durable ne peut être que régionale. « Le drame causé par le cyclone « Mitch » nous donne l'occasion unique de reconstruire l'Amérique centrale, en mieux », a affirmé le président hondurien Carlos Roberto Flores.

Pour réduire la vulnérabilité, la coopération devrait d'abord porter sur l'interconnexion des réseaux électriques et des transports terrestres. Lors d'une récente sécheresse, le principal barrage du Honduras était à sec, l'électricité était rationnée, le renchérissement du fuel a entraîné celui des transports routiers, puis celui des denrées alimentaires. Pendant ce temps les pays voisins connaissaient un excès de pluviosité.

Il faut de même améliorer les liaisons terrestres régionales. La panaméricaine ne passe pas par la capitale du Honduras. Les réseaux ferroviaires sont nationaux et le rail ne relie même pas la rive atlantique à la côte pacifique du Honduras. Comment s'étonner qu'en cas d'urgence l'acheminement des secours soit ausi difficile ?

La Commission économique pour l'Amérique latine (CEPAL) estime le coût des dégâts matériels à 5 milliards de dollars (c'est-à-dire 10 % du produit intérieur brut régional).

E.- ENTRETIENS DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE LORS DE SON SÉJOUR AU HONDURAS

1. ENSEIGNANTS DU LYCÉE FRANCO-HONDURIEN DE TEGUCIGALPA

Les députés français, lors de leur passage au lycée franco-hondurien de Tegucigalpa, ont pu longuement s'entretenir avec les enseignants. Leur discussion a porté sur les conditions d'enseignement dans ce lycée, mais aussi sur la situation des enseignants du réseau français à l'étranger.

Les enseignants ont fait une présentation du statut des enseignants français à l'étranger (les chiffres cités correspondent à ceux relevés au Honduras pour l'année scolaire 2000-2001).

Les établissements français de l'étranger fonctionnent sous la responsabilité de l'Agence pour l'Enseignement du Français à l'étranger du Ministère des Affaires Étrangères. Dans ces établissements, enseignent, pour la partie française, trois catégories de professeurs :

Les recrutés locaux :

Français ou étrangers, ils sont recrutés par l'organisme gestionnaire localement de l'établissement (souvent une association de parents). Leurs salaires sont donc entièrement à la charge de l'établissement et décidés localement au vu d'une grille salariale interne, en fonction de la réalité économique de chaque pays (environ 5000 F mensuels).

Ils n'ont donc aucun lien administratif avec la France et n'ont pas de statut reconnu. A noter, toutefois, qu'au cours des années 90, les contrats locaux se sont vus reconnaître le droit de se présenter aux concours internes de l'Éducation Nationale.

Par ailleurs, ils ont pendant des années perçus du Ministère des Affaires Étrangères une allocation exceptionnelle dont la finalité était de leur permettre de se constituer, par cotisation volontaire, une retraite en France. Cette allocation, toujours demeurée exceptionnelle, et donc jamais mentionnée sur une ligne budgétaire, a disparue en 1998. L'Agence s'était engagée à la substituer par autre chose. Rien n'a été fait à ce jour et la question semble maintenant tombée dans l'oubli. A noter que cela a représenté pour les locaux du Honduras une perte équivalente à plus de 2 mois de salaire.

Les contrats locaux représentent environ 50% des enseignants du réseau.

Les titulaires de l'Éducation nationale :

Ils se répartissent en deux catégories. Tous détachés de leurs académies ou rectorats d'origine auprès du Ministère des Affaires Etrangères :

D'une part les "expatriés" qui, parce que l'Agence les recrute en France pour enseigner à l'étranger pour une durée limitée, bénéficient d'une indemnité d'expatriation (environ 33 000 F) en sus de leur traitement de base ; d'une prime par enfant (3 500 F) ; d'une prime pour le conjoint s'il est sans emploi (3 000 F). L'ensemble de ces primes mensuelles existe dans le but de compenser les charges de l'expatriation. À ces primes s'ajoutent un voyage annuel (ou tous les 2 ans selon les pays) pour toute la famille, ainsi que la prise en charge à l'arrivée et au départ du poste d'un déménagement d'effets personnels. Les primes perçues sont modulées périodiquement en fonction des fluctuations des taux de change. A noter que depuis quelques années l'Agence gèle le traitement de base de l'expatrié pendant toute la durée de son contrat. Celui-ci ne récupérant alors son avancement indiciaire qu'à la fin de son ou de ses contrats d'expatrié.

D'autre part les "résidents" qui, recrutés sur place parce qu'ils résident dans le pays et peuvent obtenir un contrat renouvelable sans limitation de durée, n'ont que la garantie de leur traitement parisien (environ 10 000 F), éventuellement assorti d'une "prime de cherté de vie" mise en place depuis peu et à la charge des établissements. Cette prime octroyée selon des calculs du coût de vie est en pratique perçue dans des pays reconnus chers. (États-Unis, Japon, etc.). Dans la réalité, par manque d'enseignants titulaires résidents à l'étranger, l'AEFE recrute en France des titulaires, qu'elle contraint à s'installer sur place pendant trois mois dans le cadre d'une disponibilité pour convenance personnelle, ce qui permet de les regarder alors comme "résidents" du pays, aux termes mêmes du décret du 31 mai 1990, taillé sur mesure pour exclure ces enseignants du décret de 1967 régissant les rémunérations de tous fonctionnaires en poste hors de France.

Le résident commence donc son travail à l'étranger avec trois mois d'arrêt de sa carrière (pas de retraite, d'avancement, de protection sociale) et un salaire local versé par l'établissement ( 3 500 F ).

Ni frais de déménagement ni frais de transport aérien pendant la durée du contrat ne sont pris en compte.

Les enseignants instituteurs perdent également leur indemnité de logement payée en France par les académies depuis la loi de décentralisation (1 100 F mensuels).

Toutes les prestations familiales versées par les caisses d'allocations familiales sont également perdues dès lors que les enfants ne résident plus sur le territoire français (allocations familiales : 700 F pour deux enfants, congé parental d'éducation : 3 000 F, allocations jeune enfant 900 F, allocations de rentrée scolaire, aide au logement, etc.).

Les résidents ont leur foyer fiscal en France et sont donc imposés sur les mêmes bases que s'ils résidaient en France.

Au cours des années 90, les résidents ont essayé de négocier localement des aides financières auprès des associations de parents gestionnaires. Cela s'est donc concrétisé dans certains pays par le paiement d'un billet d'avion à l'enseignant, d'exemptions partielles ou totales des frais de scolarités des enfants d'enseignants de ces établissements, toujours payants. Ces établissements étant à la charnière entre un statut local de lycée privé et un statut de lycée public financé en partie par l'Agence. L'Agence ne s'impliquant jamais dans ces négociations dont elle feignait d'ignorer l'existence.

Les enseignants ont fait le point sur les négociations actuelles, soulignant que cette situation paradoxale, faisant se côtoyer trois statuts d'enseignants différemment rémunérés, a généré des tensions qui ont débouché à partir de 1998 sur des mouvements de grève pour revendiquer des modifications pour les contrats locaux et les contrats de résidents. Des négociations entre l'Agence et les représentations syndicales des personnels ont ainsi démarré. Actuellement elles ont abouti aux décisions suivantes :

Pour les recrutés locaux :

- Généralisation des contrats à durée indéterminée lorsque ce n'était pas le cas ;

- Mise en place d'une protection sociale au Maroc ;

- Proposition d'une affiliation à la Caisse des Français de l'étranger avec un coût réparti pour 40% à l'établissement et 60% à l'enseignant.

Pour les contrats résidents :

- Versement à compter de septembre 2000 d'une majoration familiale (1 065 F pour un enfant de moins de 10 ans) correspondant à 30 % de la prime enfant perçue par les expatriés. Cette prime étant incompatible avec le supplément familial de traitement, celui-ci est donc retiré aux résidents (environ 500 F pour 2 enfants) ;

- Versement à compter de septembre 2001 d'une majoration familiale (1 420 F pour un enfant de moins de 10 ans) correspondant à 40% de la prime enfant perçue par les expatriés ;

- Possibilité de travailler à temps partiel lorsque les conditions locales le permettent. Ce temps partiel est soumis à l'accord du directeur de l'Agence. Pour cette année celui-ci vient de refuser toutes les demandes non motivées par des problèmes de santé alors qu'un grand nombre de ces demandes avaient reçu un avis favorable lors de l'examen en CCPLA ;

- Attribution hypothétique d'une indemnité spécifique mensuelle dont une esquisse avait été présentée lors d'une réunion au mois de février. Cette indemnité calculée par l'Agence reprendrait pour base les calculs utilisés antérieurement pour la prime de cherté de vie.

Depuis le début des négociations, l'Agence a travaillé sur les bases d'un budget à coût constant ne lui permettant pas d'aller au-delà de ses propositions.

Afin de se dégager un peu de marge de man_uvre, la décision a été prise de transformer des postes d'expatriés en poste de résidents au cours des 6 années à venir. Cela se concrétise pour la prochaine rentrée par la suppression de 95 postes d'expatriés (sur les 1 100 existants).

L'ANALYSE DE CE BILAN

Pour les locaux :

- La question de la protection sociale est loin d'être résolue. Les 60% de cotisations à leur charge pour la CFE restant prohibitif au regard du niveau de rémunération de la grande majorité ;

- Les aides pour scolariser leurs enfants n'ont pas été évoquées ;

- La reconnaissance d'un véritable statut d'auxiliaire de la fonction publique n'est pas à l'ordre du jour.

Pour les résidents :

- L'attribution d'une indemnité spécifique hypothétique de quelques centaines de francs pour la plupart ne modifiera en rien la situation des titulaires exerçant hors de France. Actuellement, il n'y a aucun engagement de l'administration concernant le rythme et le mécanisme d'évolution de cette indemnité. Dans ces conditions, même dans les pays où cette indemnité donnerait satisfaction, il y a fort à parier que, sans accrochage aux indemnités d'expatriation, sa valeur en pouvoir d'achat serait très rapidement laminée ;

- Les résidents sont opposés à la volonté de l'Agence d'obliger tous les résidents à payer les scolarités de leurs enfants depuis la mise en place des majorations familiales sans tenir compte des droits acquis localement. Les exonérations ont été accordées par des associations étrangères et les résidents ne voient pas en quoi l'État français pourrait intervenir. Si tel était le cas, il faudrait alors que ce même État respecte les bases fondamentales de notre système éducatif qui sont : laïcité, obligation et gratuité. Les résidents n'ont jamais admis le fait de devoir payer la scolarité de leurs enfants ou de négocier des exemptions quand dans le même temps ils s'acquittent de l'ensemble des impôts dus à l'État français. Ce même État qui exhorte les enseignants à promouvoir au maximum l'éducation à la citoyenneté. Il est à noter que certains pays n'ont jamais accepté que les résidents ne paient pas la scolarité de leurs enfants. C'est sur cette différence que l'Agence se base pour mettre tout le monde sur un pied d'égalité. Égalité pour tous sur la base du système le plus défavorable. En ce qui concerne le Honduras, les majorations familiales demeurent inférieures au coût de la scolarité pour l'année 2000-2001, dégageront pendant deux ans un solde positif de quelques centaines de francs puis redeviendront inférieures à cause de l'évolution des scolarités liée à l'inflation locale (+ de 15% par an).

En conclusion, les enseignants pensent que la sortie de la gestion à coût constant de leurs situations est une impasse.

La France est le seul pays au monde à posséder un réseau d'établissements de cette qualité. C'est une fierté nationale mise en avant à l'heure de la promotion de la francophonie.

Ce réseau doit continuer à exister avec des moyens financiers nécessaires, en donnant aux enseignants qui le font vivre des conditions de vie tenant réellement compte des coûts de l'expatriation.

Le bilan de plus de 2 ans de négociations est largement négatif. Officiellement, le paiement des scolarités de nos enfants ne doit pas entraîner un recul financier par rapport à notre situation actuelle. Or la réalité démontre que cela sera le cas.

Notre refus de payer ces scolarités est un moyen d'exprimer aux responsables de l'Agence notre désillusion et notre refus de continuer à être considérés comme des « sous-fonctionnaires ».

2. MEMBRES DU CONGRÈS

Les deux principales formations politiques, toutes deux conservatrices, sont le Parti national (PN) et le Parti libéral (PLH). Le Parti national d'innovation et d'unité (PINU) ainsi que le Parti démocrate-chrétien représentent des formations moins importantes.

Le Congrès national se compose de 128 députés et d'un nombre équivalent de suppléants. Les députés et leurs suppléants, ainsi que les membres des conseils municipaux, sont élus pour quatre ans, le dernier dimanche du mois de novembre de la dernière année du mandat du gouvernement, et le nouveau gouvernement entre en fonction au mois de janvier de l'année suivante.

Plusieurs députés des différentes formations présentes au Congrès se sont entretenus avec la délégation française.

M. Jean-Jacques Filleul indique que les députés français sont très honorés d'être reçus au Congrès hondurien. Il rappelle que la France attache beaucoup d'importance à maintenir d'excellentes relations avec le Honduras et suivra avec attention les élections générales du mois de novembre.

Toutes tendances confondues, les députés honduriens tiennent à remercier la France pour l'annulation de la dette hondurienne (166 MF) après le passage de l'ouragan « Mitch » et pour le rôle positif joué par le président de la République française à cette occasion.

M. Michel Meylan, président du groupe d'amitié France-Honduras, s'interroge sur le poids très important de la dette et rappelle que les rentrées fiscales du gouvernement sont relativement limitées. De lourdes charges pèsent sur l'État : aménagement des zones franches, financement des infrastructures, dépenses militaires, etc. et si le Honduras a pu faire face tant qu'il vivait avec l'aide importante des Etats-Unis,61 la gestion financière s'avère beaucoup plus délicate depuis le désengagement américain.

Les députés honduriens ont évoqué les lourds problèmes de l'après-« Mitch » qui subsistent encore. La production a été totalement perdue à court terme et les terres ont été rendues inutilisables pour des années. Les infrastructures ont été en grande partie détruites et, bien que de nombreuses aides destinées à la reconstruction soient parvenues à Tegucigalpa, une partie de celles-ci ont été orientées différemment, de manière à compenser le manque de production agricole.

La chute des prix du café a également eu un effet négatif sur l'économie du Honduras.

Ils rappellent également que l'hymne national hondurien fait état de la révolution française et que tous les intellectuels honduriens ont été inspirés par les idées philosophiques françaises.

M. Michel Meylan insiste sur le rôle que peut jouer la France au Honduras, dans un registre différend de celui des États-Unis. Il pense que les projets de reconstruction ne pourront être totalement efficaces que s'ils sont discutés au plus près avec les populations locales.

M. Jean-Jacques Filleul pense qu'il faudrait faciliter l'installation des entreprises françaises au Honduras. Il rappelle le passage à Tegucigalpa d'une délégation du MEDEF et conseille aux membres du Congrès de prendre également contact avec des PME françaises.

M. Meylan déplore la vague de criminalité qui déferle sur le pays. Il pense que le président de la République qui sera prochainement élu devra s'atteler au délicat dossier de la drogue et notamment au transit de cette dernière en direction des États-Unis.

M. Filleul estime enfin qu'une coopération universitaire entre les deux pays est nécessaire et qu'il serait possible d'augmenter fortement le nombre d'étudiants honduriens reçus dans les universités françaises.

3. M. ROBERTO FLORES BERMUDEZ, MINISTRE DES RELATIONS EXTÉRIEURES

Roberto Flores Bermúdez, né le 15 août 1949, a été nommé ministre des Relations extérieures en 2000.

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Il a été directeur général du protocole diplomatique (1984-1986), directeur général de la politique étrangère (1986-1987), chef de cabinet (1988-1989), directeur général des organisations internationales (1990) avant d'être nommé ambassadeur du Honduras aux Nations Unies (1990-1992), puis ambassadeur à Washington, D.C. (États-Unis) (1994-1998) et enfin ambassadeur à Londres (Royaume-Uni), de 1998 à 1999.

Il est diplômé de l'Université du Honduras (UNAH), dont il détient un diplôme en droit, et a fait des études supérieures en droit international, en sciences politiques, en relations internationales, en économie et en administration des affaires.

Il a été membre de la délégation hondurienne qui a participé aux négociations préliminaires à la création et à l'organisation du Parlement de l'Amérique centrale.

Il a aussi dirigé la délégation technique lors du processus de négociation de la paix en Amérique centrale.

M. Roberto Flores Bermúdez est heureux de recevoir des députés qui viennent d'un pays, la France, très écouté dans le monde, et principalement en Amérique centrale.

Il évoque le différend au sujet de la délimitation des zones maritimes relevant respectivement du Nicaragua et du Honduras dans la mer des Caraïbes.62 Le Nicaragua a soumis ce différend à la Cour Internationale de Justice le 8 décembre 1999.

Le Nicaragua soutient que sa frontière maritime avec le Honduras dans la mer des Caraïbes n'a pas été déterminée.

Le Honduras estime qu'il existe bel et bien une ligne de délimitation qui suit directement vers l'est le parallèle de latitude partant de l'embouchure du fleuve Coco.63

La position adoptée par le Honduras a été constamment contestée par le Nicaragua et a donné lieu à des affrontements répétés ainsi qu'à la saisie de part et d'autre de navires des deux pays dans la zone de la frontière en général et dans ses environs.

Le Honduras et le Nicaragua ont conclu un accord au mois de mars sur des mesures détaillées visant à prévenir d'éventuels accrochages issus du différend relatif à la détermination de la frontière maritime entre les deux États.

Lors de leur troisième réunion avec le représentant spécial de l'OEA, les Ministres des Affaires étrangères du Honduras et du Nicaragua ont conclu un accord visant à prévenir les incidents militaires et apaiser les tensions suscitées par une zone litigieuse dans la mer des Caraïbes.

Les deux nations centraméricaines se sont entendues sur une série de mesures, dont un mécanisme mixte de patrouille qui requiert la coopération de tierces parties.

Le mécanisme comportera certaines mesures telles la prévention d'accrochages entre les forces navales, la surveillance de l'observation des accords récents, l'interdiction de drogues, le contrôle de la piraterie contre les pêcheurs et l'exécution d'opérations de secours.

Le Honduras et le Nicaragua ont convenu d'assurer qu'il n'existerait, d'ici trente jours, aucun poste militaire ou policier dans la mer des Caraïbes à l'exception de ceux établis avant le 1er septembre 1999.

Selon les termes de l'accord, les deux pays éviteront également de mener des actions militaires ou policières dans la mer des Caraïbes qui risqueraient de provoquer des incidents ou des controverses.

La Cour Internationale de Justice de la Haye se prononcera sur le fond du différend maritime ; elle devra déterminer le tracé d'une frontière maritime unique entre les mers territoriales, les portions du plateau continental et les zones économiques exclusives relevant respectivement du Nicaragua et du Honduras, les deux pays se sont par ailleurs engagés à se soumettre à la décision de la Cour. Les accords récents visent à maintenir des relations pacifiques pendant que les parties attendent la décision de la Cour internationale.

L'Ambassadeur Einaudi, un diplomate des États-Unis à la retraite, a salué la volonté manifestée par les deux pays d'éviter de briser la paix dans la région pendant leur recours à une instance judiciaire pour résoudre leur différend. « Avec cet accord, le Honduras et le Nicaragua démontrent qu'ils méritent le respect et l'appui de la communauté internationale. » affirmait-il.

M. Roberto Flores Bermúdez souligne que le Nicaragua a décidé d'établir des droits d'entrée de 35% pour tous les produits honduriens.

M. le ministre évoque également le différent territorial et insulaire avec le Salvador.64 Ce différend qui avait été soumis à la Cour Internationale de Justice comportait trois éléments : un différend relatif à la frontière terrestre ; un différend concernant la situation juridique des îles (dans le golfe de Fonseca) ; et un différend concernant la situation juridique des espaces maritimes (à l'intérieur et à l'extérieur du golfe de Fonseca).

Dans le passé, des incidents frontaliers ont donné lieu à des tensions et, par la suite, à un conflit armé en 1969. Mais, en 1972, El Salvador et le Honduras ont pu se mettre d'accord sur la plus grande partie de leurs frontières terrestres, qui n'avaient pas encore été délimitées, tout en laissant cependant six secteurs à régler. Une procédure de médiation, commencée en 1978, a conduit à la conclusion d'un traité général de paix, signé et ratifié en 1980 par les deux parties, qui a défini les secteurs de la frontière convenues d'un commun accord.65

La Cour Internationale de Justice a délimité le tracé de la frontière entre le Honduras et El Salvador dans les six secteurs concernés ; elle a, par ailleurs, considéré que le Honduras avait succédé à la souveraineté de l'Espagne sur l'île El Tigre alors qu'El Salvador avait succédé à l'Espagne sur les îles Meanguera et Meanguerita. Concernant les espaces maritimes, la Cour a estimé que « la situation juridique des eaux situées en deçà de la ligne de fermeture du golfe est celle de la souveraineté conjointe, les trois souverains conjoints doivent tous avoir droit à une mer territoriale, un plateau continental et une zone économique exclusive à l'extérieur de la ligne de fermeture. Qu'une telle situation continue d'exister ou soit remplacée par une division et une délimitation en trois zones distinctes, c'est là, comme à l'intérieur du golfe, une question qu'il incombe aux trois États de régler. Une délimitation des zones maritimes devra être effectuée par voie d'accord sur la base du droit international. ».

M. Roberto Flores indique aux députés français que le Salvador ne respecte pas les décisions de la Cour Internationale de Justice.

Il a également fait état du projet Puebla Panama66, du président mexicain Vicente Fox. Son projet favoriserait la construction de chemins de fer et d'autobus, de canalisations de gaz naturel et de connexions électriques, ainsi que de ports et d'aéroports qui relieraient l'Amérique centrale et le Mexique. Il nécessiterait 4 milliards $. Le plan a reçu le soutien de la banque interaméricaine de développement, bien qu'aucun financement spécifique n'ait été promis. Une première tranche pourrait être réalisée dans les cinq années à venir ; la totalité du projet demandant 25 ans.

Ce plan ambitieux de développement économique et social favorisera l'intégration de la région dans la future Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA).

Le Plan Puebla-Panama (PPP), dont le nom désigne un axe allant de la ville de Puebla, à 100 km au sud de Mexico, jusqu'à la frontière colombienne, a été signé par les présidents du Mexique, du Salvador, du Guatemala, du Honduras, du Nicaragua, du Costa Rica et du Panama, ainsi que par le premier ministre du Belize.

L'arrimage de l'Amérique centrale au Mexique, lui-même intégré à l'Accord de libre-échange nord-américain signé avec les États-Unis et le Canada, est un pas évident vers la concrétisation de la ZLEA annoncée pour décembre 2005 lors du sommet des Amériques réuni en avril dernier à Québec.

Le PPP, tel qu'annoncé par le président Fox qui, par ailleurs, prétend vouloir « sauvegarder le mode de vie » des indiens du pays, comprend quatre volets :

1. Modernisation et construction d'infrastructures de transport (routes, ports, aéroports) pour rompre « l'isolement » des communautés et surtout pour permettre la circulation des marchandises et des ressources naturelles de la région à un coût avantageux.

2. Transformation complète de l'agriculture par la création de vastes monocultures (incluant les biotechnologies) destinées à l'exportation.

3. Incitation des transnationales à venir installer leurs « maquilas » dans la région.

4. Enfin, exploitation du potentiel touristique de la région avec hôtels de luxe, complexes récréatifs, nouvelles routes et sentiers « touristiques » de toutes sortes.

Le Plan Puebla-Panama bénéficiera aux 64 millions d'habitants de la région, 43% étant du sud mexicain et 57% d'Amérique centrale. La moitié de ces populations vit actuellement dans la pauvreté et les en sortir est défini comme l'objectif essentiel.

Parallèlement à l'application du PPP, le Mexique négociera avec le Panama et le Belize des accords de libre-échange, que Mexico a déjà conclus avec les cinq autres pays d'Amérique centrale.

M. le ministre des Relations extérieures a présenté aux députés les initiatives régionales du Honduras : liaison routière Pacifique - Caraîbes qui aboutirait au Salvador (permettant à ce pays de proposer ses produits à l'est), liaison routière avec le Nicaragua, processus d'union douanière qui permettrait d'installer des postes de douane communs.

Après avoir remercié M. le ministre, M. Jean-Jacques Filleul souhaite savoir si le gouvernement hondurien entretient des contacts avec les oppositions aux régimes en place dans les pays voisins, du Nicaragua et du Salvador.

M. Roberto Flores déclare que les relations sont claires et directes avec l'opposition salvadorienne, notamment grâce aux députés du Parlacen, le parlement centraméricain. Toutefois, des contacts ne sont pas encore établis avec les membres du FSLN au Nicaragua.

M. Roberto Flores estime qu'il est nécessaire de maintenir un dialogue avec l'Union européenne. C'est ce que l'Amérique centrale fait au travers du « dialogue de San José ». En septembre 1984, les représentants de l'Union européenne et ceux des pays d'Amérique centrale (Costa Rica, Guatemala, Honduras, Nicaragua, Panama et El Salvador) s'étaient rencontrés à San José, au Costa Rica, pour examiner la situation dans la région alors en crise. Ils ont continué à se retrouver chaque année, dans une capitale centraméricaine ou européenne.67

La réunion de 1993 à San Salvador a vu la signature d'un nouvel accord de coopération (dit de "troisième génération"), remplaçant celui de 1985. Lors de la dernière conférence ministérielle (la XVIème) qui a eu lieu à Vilamoura (Portugal) le 22 février 2000, le plan d'action communautaire pour la reconstruction de l'Amérique centrale (déjà adopté par la XVème conférence) à la suite de l'ouragan « Mitch », en faveur des pays les plus affectés (Honduras, Nicaragua, El Salvador et Panama) a été renforcé. Les participants se sont réjouis des progrès accomplis dans la démocratisation de la région (élections à El Salvador et au Panama, efforts du Guatemala pour mettre en _uvre les accords de paix) et du développement de l'intégration régionale.

M. Jean-Jacques Filleul indique que la délégation française, qui est sur le point de terminer sa mission, quittera le sol centraméricain avec beaucoup d'espoir.

ANNEXES

Annexe 1 : Le Marché Commun Centre-Américain

Annexe 2 : La doctrine de Monroe

Annexe 3 : Monseigneur Romero

Annexe 4 : José Napoleon Duarte

Annexe 5 : Le cyclone « Mitch »

Annexe 6 : Les tremblements de terre au Salvador

Annexe 7 : Les « Maquilas »

Annexe 8 : La Communauté économique de l'isthme centraméricain

Annexe 9 : Le Front Sandiniste de Libération Nationale

Annexe 10 : Monseigneur Obando y Bravo

Annexe 11 : Eden Pastora

Annexe 12 : Daniel Ortega

Annexe 13 : L'organisation des États américains

Annexe 14 : L'enseignement du français à Managua

Annexe 15 : Mines antipersonnel en Amérique centrale

Annexe 16 : L'initiative PPTE

Annexe 17 : Le plan Puebla Panama

ANNEXE 1 : Marché Commun Centre-Américain (MCCA)

A la fin des années 50 et dans une région divisée depuis le début du XIXème siècle, l'insuffisance de la production et l'étroitesse des marchés internes rendent très difficile le décollage des économies, souvent freinées par des structures sociales archaïques, des cinq petits pays d'Amérique centrale : Guatemala, Costa Rica, Nicaragua, Salvador et Honduras. Or, il s'avère impossible d'élargir les marchés internes de ces pays sans effectuer de profondes transformations, notamment au niveau de la structure agraire. Le projet de l'intégration économique s'impose donc comme la seule alternative pour sortir le système de l'impasse, donner une possibilité d'expansion aux industries locales, réduire les importations, sans procéder à une redistribution structurelle dont les oligarchies ne veulent pas.

Le processus d'intégration économique débuta avec une vague de signatures de traités de libre-échange bilatéraux entre le Guatemala, le Honduras, le Salvador, le Nicaragua et le Costa Rica qui s'étala de 1950 et 1956. À la fin de cette période de négociation bilatérale, chaque pays faisait partie d'au moins un traité impliquant le libre-échange de certains produits. Cette tendance vers l'intégration régionale fut davantage renforcée par la création en 1951 de l'Organisation des États de l'Amérique centrale (Organización de Estados Centroamericanos : ODECA), une organisation politique. En plus de ce mouvement de coopération bilatérale, un mouvement de coopération multilatérale prit forme sous les auspices de la CEPAL qui en août 1952 commença à patronner les réunions du Comité de coopération économique dont faisaient parti les ministres des affaires économiques de chacune des cinq républiques centraméricaines.

À l'époque, trois traités importants d'intégration économique furent signés. Mais plus le processus d'intégration promu par la CEPAL avançait, plus les États-Unis s'y opposaient. Graduellement la vision étatsunienne gagna du terrain et c'est ainsi que les pays futurs membres du marché commun centraméricain adhérèrent au plan d'intégration proposé par les États-Unis en échange de leur soutien financier (100 millions de dollars) aux institutions du futur marché et de leur assistance économique à l'Amérique centrale. Ils signèrent le Traité général d'intégration économique, en rupture avec la CEPAL.

Signée le 14 octobre 1951 et entrée en vigueur le 14 décembre, la Charte de San Salvador devait marquer une nouvelle étape dans le rapprochement entre le Costa Rica, le Guatemala, le Honduras, le Nicaragua et le Salvador. La Charte s'inspirait directement de celle qui avait été signée à Bogota le 30 avril 1948 lors de la neuvième conférence panaméricaine. Cette Charte constitue l'acte de naissance de l'Organisation des États américains (OEA). Il faut noter qu'une nouvelle convention sera signée entre les cinq pays d'Amérique centrale le 12 décembre 1962. Cette Charte devait doter l'Organisation des États de l'Amérique centrale (ODECA) de nouvelles institutions, notamment d'une cour de justice, comme cela avait été le cas entre 1907 et 1917. Elle devait aussi marquer un changement d'attitude de la part des pays d'Amérique centrale, sur le plan économique en particulier.

Il faut en effet rappeler que lorsque fut signée la Charte de Bogota, les pays de la région attachaient déjà une très grande importance aux questions économiques et ils attendaient notamment des États-Unis qu'ils ouvrent davantage leurs marchés à leurs produits et qu'ils les aident de manière concrète à développer leurs économies.

Un projet de Charte économique panaméricaine avait d'ailleurs été élaborée lors de la conférence de Bogota de 1948, mais ce projet était resté lettre morte. Le seul résultat concret fut l'adoption par les États-Unis en janvier 1949 d'un programme d'assistance technique, programme qui répondait d'ailleurs moins à des préoccupations d'ordre économique qu'à celle plus immédiate de contrer l'influence potentielle des idéologies communistes dans une région où les inégalités sociales et l'instabilité politique ont toujours été très grandes. Quoi qu'il en soit, il faudra attendre la conférence économique interaméricaine qui allait se tenir à Buenos Aires du 22 août au 3 septembre 1957 sous les auspices de l'OEA pour que les questions économiques soient de nouveau abordées. À cette occasion, deux propositions furent amenées par la Commission permanente de l'OEA. La première de ces propositions était la signature d'une Convention économique générale ; la seconde, la mise sur pied d'un Fonds de développement économique. Devant l'opposition des États-Unis, la proposition de Convention, qui devait jeter les bases d'une nouvelle solidarité économique dans les Amériques, fut à toutes fins pratiques abandonnée et remplacée par une "déclaration économique" dite de Buenos Aires, trop générale pour être opérante. Quant à la seconde proposition, elle n'eut guère plus de succès.

Devant le peu de résultats concrets et le peu d'intérêt porté par les États-Unis aux problèmes de l'Amérique latine, cette région ayant perdu pour ces derniers son caractère stratégique au profit de l'Europe, les pays membres de l'ODECA, fortement impressionnés par l'expérience européenne, allaient, par l'entremise du Conseil économique de l'Organisation, s'orienter dans la voie de l'intégration économique.

Une première étape dans ce sens sera franchie avec la signature, le 10 juin 1958 à Tegucigalpa (Honduras), d'un traité de libre-échange et d'intégration économique, avec pour perspective la formation d'une union douanière. Une deuxième étape sera franchie avec la signature, le 15 décembre 1960, à Managua (Nicaragua), du Traité général d'intégration économique (ou Traité de Managua). Ce Traité, signé par le Salvador, le Guatemala, le Honduras et le Nicaragua devait donner naissance au Marché commun centraméricain (MCCA), permettre l'organisation d'un développement industriel intégré et jeter les bases d'une infrastructure devant faciliter l'intégration et le développement industriel de la région. Il entra en vigueur en juin 1961. Le Costa Rica y adhéra à son tour en novembre 1962.

Constitué sur le modèle de la Communauté économique européenne, ce Marché commun centraméricain est l'un des tout premiers regroupements régionaux parmi les pays en voie de développement. Il prévoyait notamment d'éliminer graduellement les tarifs douaniers et autres obstacles au commerce entre les pays signataires, de mettre en place un tarif extérieur commun ainsi qu'une politique commerciale commune et d'harmoniser les politiques industrielles et fiscales des pays membres en vue de favoriser un développement industriel équilibré à l'intérieur d'un marché intégré.

Les deux premiers objectifs furent rapidement réalisés : le tarif extérieur commun fut institué dès 1965 et la libéralisation des échanges, en dehors des cas où il s'agissait d'éviter les pertes de recettes fiscales ou les ajustements trop brutaux, fut poursuivie avec un certain succès. L'application d'un traitement préférentiel aux seuls échanges de biens produits par les États membres et les restrictions très fortes appliquées aux importations de biens de consommation non durables sont venus renforcer la protection des marchés contre la concurrence des pays tiers et soutenir un développement industriel par substitution aux importations.

Une banque fut aussi créée pour financer les projets de développement : la Banque centraméricaine d'intégration économique (Banco Centroamericano de Integración Económica : BCIE). Le siège social de la banque se trouve à Tegucigalpa (Honduras).

La formation du Marché commun centraméricain exigea un effort institutionnel considérable. En plus de l'instauration dans le domaine financier de la BCIE, un Conseil économique (l'instance décisionnelle suprême composée des ministres de l'économie de chaque pays membre), un Conseil éxécutif et un Secrétariat général permanent (Secretaría Permanente del Tratado General de Integración Económica Centroamericana : SIECA) furent crées dans le domaine économique.

Au plan monétaire, on assista à la création de la Chambre de compensation centraméricaine (Cámara Centroamericana de Compensación de Monedas) et le Conseil monétaire centraméricain (Consejo Monetario Centroamericano). En matière de commerce, on procéda à la mise en place d'une nomenclature douanière commune (Nomenclatura Arancelaria Común : NAUCA).

Reflet de ces premiers succès, la part des exportations intra-régionales passa, entre 1960 et 1970, de 7,5% à 26,8% des exportations totales. Le projet de marché commun se heurta cependant rapidement à de nombreux obstacles. Tout d'abord, l'élaboration d'une politique industrielle commune, l'objectif sans doute le plus ambitieux du projet, ne fut jamais atteint. Il fut même à la source de nombreux conflits commerciaux qui finirent par semer la division au sein de l'entente. Ensuite, la région fut continuellement aux prises avec des conflits politiques : conflit frontalier entre le Honduras et le Salvador en 1969, révolution sandiniste de 1977-1979, guerre civile au Salvador et au Guatemala, déplacements massifs de population. Enfin, il faut ajouter les difficultés financières et économiques : fuites de capitaux, endettement, inflation, déséquilibres commerciaux, etc. Ces différents facteurs conjugués les uns aux autres firent en sorte que la cohésion du marché commun commença à s'effriter au début des années soixante-dix et, qu'à toutes fins pratiques, le Marché commun centraméricain perdit rapidement sa raison d'être, notamment après que le Honduras s'en soit retiré en 1970.

Face à la faiblesse des entrepreneurs nationaux et en l'absence imposée de toute réglementation restrictive, les firmes multinationales, en grande majorité d'origine nord-américaine, peuvent mettre en _uvre sans entrave leurs propres stratégies de production et de commercialisation à l'intérieur du MCCA et, provoquant un processus croissant de dénationalisation de l'industrie centre-américaine, adapter le marché commun à leurs propres objectifs.

L'intégration régionale se borne à une circulation des produits, contribuant peu à la valeur ajoutée régionale mais accroissant la dépendance et la concentration des revenus, principalement au profit des capitaux étrangers. Dans une étude connue sous le nom de Rapport Rosenthal et publiée en 1973, les firmes multinationales apparaissent comme l'un des facteurs clés des distorsions et des blocages auxquels est confronté le processus d'intégration.

Si dans chacun des pays on constate une augmentation de la part de l'industrie dans la production totale, l'exportation des produits agricoles traditionnels demeure dominante, laissant aux oligarchies locales un poids déterminant et décisif dans la direction des États-Unis. Cette permanence d'un pouvoir économique et politique concentré dans quelques mains, reposant sur des structures agraires et sociales fondamentalement inégalitaires et conflictuelles, ne sera pas pour rien dans le déclenchement des luttes révolutionnaires qui vont voir le jour au Nicaragua, au Salvador et au Guatemala, dans le courant et à la fin des années 70.

De plus, le développement très inégal des cinq économies constitue un obstacle très lourd, les pays les plus industrialisés profitant davantage du MCCA que leurs partenaires les plus pauvres. Le Salvador et le Guatemala voient leur commerce régional favorisé au détriment du Honduras, envahi par leurs produits, et qui ne bénéficie pas de la relative modernisation occasionnée dans les deux pays précités.

Les données relatives au commerce intra-régional sont à cet égard significatives : tout au long des années 1970, le commerce intra-régional plafonna autour de 21,7% des exportations totales, pour tomber brutalement durant la décennie suivante jusqu'à atteindre le niveau du début des années 1960, soit 10-11%. [Malgré les difficultés que connaît la région durant toute la décennie des années 80 et la débâcle du projet du MCCA (le Traité expira en 1982), l'Accord de coopération du Luxembourg est signé en 1985 avec la communauté européenne et un tarif douanier uniforme pour les importations est établi].

On croyait, depuis la période des affrontements armés des années 80, le projet d'un marché commun mort et enterré. Or la région a connu une accalmie certaine et, depuis le début des années 90, on assiste à une réactivation du processus d'intégration économique et à une réactivation du MCCA. Indice du progrès que connaît la région en matière d'intégration, le commerce en Amérique centrale et les exportations continuent de croître à un taux de 25% par année.

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Le principal partenaire commercial actuel des pays du MCCA sont les États-Unis et le commerce avec le reste de l'Amérique latine ne représente qu'une infime partie de leur commerce extérieur à l'exception du Mexique

Voir également : annexe 8, page 159 ; la Communauté économique de l'isthme centraméricain (CECA)

ANNEXE 2 : Doctrine de MONROE

Élu en 1816 cinquième président des États-Unis, James Monroe énonce le 2 décembre 1823 les lignes générales de la conduite de son pays en matière diplomatique et fait savoir que les États-Unis ne toléreront pas l'implantation dans leur hémisphère de nouvelles colonies ou possessions européennes. Monroe affirme ce faisant, dans ce qui ne sera érigé en doctrine qu'au milieu du XIXème siècle, à la fois le principe de l'indépendance nationale des jeunes États latino-américains et celui d'une souveraineté implicite des États-Unis sur la région.

Lorsque le président Monroe formule son message au Congrès, les États-Unis se sont déjà emparés en 1819 de la Floride, ont entrepris la colonisation systématique du Texas et avancé la théorie de l'attraction géographique en ce qui concerne Porto Rico et Cuba.

Dans le prolongement de cette politique, la doctrine de Monroe va se maintenir en contradiction avec l'un des principes fondamentaux de la loi internationale, le droit de toutes les nations à la souveraineté, l'indépendance, l'autodétermination, et devenir l'alibi d'une politique interventioniste.

Remise sévèrement en cause une première fois par la révolution cubaine (1959) et son alignement ultérieur sur l'Union soviétique, la doctrine de Monroe a volé en éclats lors du soutien apporté par les États-Unis à l'Angleterre contre l'Argentine lors de la guerre des Malouines (1982). Les Latino-américains accusent les États-Unis d'avoir trahi l'Organisation des États américains (OEA) en prenant fait et cause pour un adversaire extérieur au continent, bafouant ainsi ouvertement la doctrine de Monroe, référence imposée depuis toujours au nom d'intérêts communs.

Bien qu'elle se heurte à l'opposition croissante des Républiques latino-américaines, lesquelles remettent en cause la position dominante des États-Unis sur le continent, la doctrine de Monroe demeure d'actualité, dépositaire d'une charge historique, politique, affective, qui en fait l'un des concepts les plus symboliques des relations internationales et de l'hégémonie des États-Unis.

ANNEXE 3 : Monseigneur ROMERO

Fils d'un modeste télégraphiste de Ciudad Barrios au Salvador, Oscar Arnulfo Romero naît en 1917. Il part pour Rome à dix-neuf ans et six années de formation théologique à l'Université grégorienne lui forgent une mentalité très traditionnelle. Ordonné prêtre en 1942, il rentre au pays et y demeure relativement effacé. Les conditions misérables de ses concitoyens l'amènent à travailler avec les communautés chrétiennes de base mais en 1977, c'est en raison de ses positions conservatrices qu'il est choisi pour prendre la tête de l'Église salvadorienne.

Il commence son ministère pastoral d'archevêque à l'époque la plus dure de la répression contre le peuple et l'Église. Le 28 janvier 1977, alors qu'il n'a pas encore été intronisé, plusieurs prêtres étrangers sont expulsés par le gouvernement, dont certains après emprisonnement et tortures. L'assassinat, le 12 mars 1977, de son ami le jésuite Rutilio Grande, l'assassinat encore du prêtre Alfonso Navarro, les menaces de mort portées par l'Union guerrière blanche - escadron de la mort paramilitaire - contre tous les jésuites, le touchent profondément et marquent un tournant dans sa vie. Il déclare alors : « L'Église ne peut être absente de la lutte pour la libération » et bascule dans l'opposition.

Durant trois années, alors qu'une répression féroce s'abat sur les populations et qu'en conséquence se développe la lutte armée, tandis que six prêtres et de nombreux catéchistes sont exécutés, sa voix s'élève, dépasse les frontières du seul Salvador. Il devient une figure mondiale de l'Église engagée. Défenseur acharné des Droits de l'Homme, Monseigneur Romero appuie le développement des communautés de base. Le 17 février 1980, se prononçant contre toute ingérence étrangère, il adresse une lettre au président Carter pour lui demander de cesser l'aide militaire, dénonçant ainsi la responsabilité historique de la démocratie chrétienne et le rôle qu'elle joue au gouvernement.

Ses dernières homélies mettent fortement l'accent sur l'encouragement à l'union de la classe populaire pour la recherche d'une solution pacifique. Il n'en ménage pas pour autant l'opposition dont il dénonce en particulier le sectarisme, les divisions et la violence.

Le 23 mars 1980, dans sa dernière homélie, il appelle les soldats à la désobéissance : « Frères, vous êtes du même peuple que nous, vous tuez vos frères paysans. Devant l'ordre de tuer donné par un homme, c'est la loi de Dieu qui doit prévaloir, la loi qui dit : tu ne tueras point. Un soldat n'est pas obligé d'obéir à un ordre qui va contre la loi de Dieu. Une loi immorale, personne ne doit la respecter. Au nom de Dieu, au nom du peuple souffrant dont les cris toujours plus grands montent jusqu'au ciel, je vous en supplie, je vous le demande, je vous l'ordonne : arrêtez la répression ! ».

Face à l'opinion internationale, le discours présentant la junte salvadorienne comme un gouvernement démocratique ne tient plus. L'enjeu devient capital. Le lendemain, l'archevêque de San Salvador est assassiné.

ANNEXE 4 : José Napoleon DUARTE

Né en 1925 au Salvador, cet ingénieur nourri de la doctrine sociale de l'église catholique, maire très populaire de San Salvador de 1964 à 1970, fonde le parti démocrate chrétien (PDC) en 1962. Incarnant les aspirations au changement de la classe moyenne et des couches populaires, candidat à la présidence en 1972 au nom de toute l'opposition, il remporte les élections, est arrêté, brutalisé et doit s'exiler au Venezuela.

Quand, en 1979, le général Romero est destitué par une junte militaire à l'origine modérée, il rentre dans son pays et, hissé à la présidence de la junte militaro-civile (reprise en main par les secteurs les plus conservateurs et les plus répressifs de l'armée), il va couvrir de son nom la période la plus cruelle de la répression. Le 13 décembre 1980, appuyé par Washington, Napoleon Duarte est nommé président de la République.

En raison de l'avancée du mouvement révolutionnaire et des guérillas du Front Farabundo Marti pour la libération nationale (FMLN), mais aussi de l'intransigeance de l'oligarchie qui ne lui pardonne pas l'ébauche de réforme agraire et la nationalisation des banques effectuée en 1981, José Napoleon Duarte éprouve les plus grandes difficultés à consolider son pouvoir.

Lors d'élections législatives organisées en mars 1982 pour légitimer le pouvoir, et en l'absence de toute opposition de gauche, le PDC est mis en minorité face à une coalition des droites extrêmes, animées par l'Alliance républicaine nationaliste (ARENA) du major Roberto d'Aubuisson. Alvaro Magana, président de la banque d'El Salvador, est nommé président provisoire par l'Assemblée constituante, en attendant les élections présidentielles.

En mai 1984, alors qu'une immense volonté de paix se manifeste dans le pays et en l'absence de l'opposition armée qui a décidé le boycott, Napoleon Duarte est élu président de la République avec 53,6% des suffrages exprimés, résultat conforté par les législatives du 31 mars 1985 qui permettent à la démocratie chrétienne de s'imposer.

Jusque-là, les autorités de l'État s'étaient systématiquement refusées à répondre aux propositions de négociation des groupes de l'opposition armée. Le 15 octobre 1984, cinq mois après son élection, Napoleon Duarte a le courage physique et politique de tendre la main aux dirigeants de la guérilla.

Immédiatement après ce premier dialogue, Duarte lance une grande offensive militaire dans le Chalatenango, l'un des sanctuaires de la guérilla, et perd trois de ses meilleurs chefs militaires.

En septembre et octobre 1985, l'enlèvement de sa fille Inès affaiblit considérablement le président de la République. Tout au long des sept semaines de négociations avec la guérilla, les militaires acceptent très mal l'effacement de l'homme d'État devant la douleur du père et accusent les autorités civiles « de ne pas assumer la responsabilité historique qui leur incombe ». Le 24 octobre 1985, Inès Duarte est libérée en échange de 22 prisonniers politiques et 96 guérilleros blessés.

Violemment contesté par un nouveau Mouvement d'action nationale (MAC), d'extrême droite, qui exige son renoncement, par l'oligarchie et une partie de l'armée, délaissé sur le plan économique par les États-Unis, Napoleon Duarte signe le 7 août 1987 les accords de paix d'Esquipulas (Guatemala) en compagnie des quatre autres chefs d'Etat centre-américains.

Napoleon Duarte est mort le 23 février 1990.

ANNEXE 5 : le cyclone « Mitch »

Cette tempête insignifiante dans les premiers jours va devenir un des ouragans les plus puissants et les plus meurtriers du XXème siècle dans le bassin Atlantique. Il provoqua des dégâts extrêmement graves en Amérique centrale (Guatemala, Salvador et surtout Nicaragua et Honduras), région déjà en crise, où on dénombra 10 035 morts, 9 346 disparus et 2 millions de personnes sinistrées. Les infrastructures des ces pays ont été complètement anéanties, routes détruites, ponts emportés, sources et puits obstrués par la boue, récoltes détruites, villages emportés par des torrents de boue. La commission économique pour l'Amérique latine estime le coût des dégâts matériels à 5 milliards $, soit 10% du PIB régional.

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Trajectoire du cyclone

Le cyclone « Mitch » prit naissance le 21 octobre 1998 à environ 500 km au sud de la Jamaïque dans la mer des Caraïbes. Du 21 au 23 octobre il demeure une tempête tropicale insignifiante. Mais subitement à partir du 24 il va se renforcer à un rythme extrêmement rapide pour atteindre son apogée le 26 octobre. Il est alors classé ouragan de catégorie 5 avec un minimum de pression de 905 Hpa et des vents soutenus de 290 km/h, ce qui le classe dans les quatre plus forts cyclones du XXème siècle dans l'Atlantique. Son _il atteint la taille exceptionnelle de 50 km de diamètre, il est devenu un monstre destructeur.

Les 27 et 28 Octobre il commence à s'affaiblir mais il s'approche dangereusement des côtes d'Amérique centrale. Entre le 28 et le 31 octobre il se déplace lentement au dessus du Honduras où il déverse des trombes d'eau noyant et dévastant tout sur son passage.

Du 31 octobre au 2 novembre il s'est encore affaibli et poursuit sa course au Guatemala et au Mexique où les dégâts sont plus légers. Le 3 novembre, il amorce un virage vers l'est et continue de s'affaiblir. Il atteint les côtes de Floride le 5 novembre mais n'occasionnera pas de gros dégâts car il est redevenu un cyclone de moindre importance.

Les conséquences directes du cyclone.

Comme tous les cyclones de forte intensité touchant des zones habitées, « Mitch » a provoqué morts et destructions. Mais ici, ce qui choque c'est l'importance du bilan tant humain que matériel. Cette réalité s'explique par le fait que le cyclone « Mitch », de nature très pluvieuse car formé sur des eaux particulièrement chaudes, s'est abattu sur des régions montagneuses. Le relief a donc joué un rôle multiple :

- de par son orientation nord-ouest / sud-est il a formé un obstacle insurmontable pour l'ouragan contribuant ainsi à le faire stagner au-dessus du Nicaragua, du Honduras et du Guatemala. Comme toute chaîne de montagne, la Cordillère d'Amérique centrale contraint les masses d'air à l'ascendance orographique, phénomène ayant pour conséquence d'accroître les quantités d'eau précipitées ;

- la présence de nombreux édifices volcaniques actifs aux flancs non encore stabilisés a entraîné, suite à une pluviométrie record ces derniers mois et lors du passage de « Mitch », des coulées boueuses destructrices ;

- l'existence de fortes pentes, la nature des sols propres aux régions tropicales et les forts abats pluviométriques ont provoqué de nombreux glissements de terrain qui ont coupé les routes et emporté les villages installés sur les flancs instables des montagnes.

Le fait que ce type de cyclone survienne en fin de saison des pluies explique également l'importance des inondations. En effet, les sols déjà gorgés d'eau n'ont pu jouer leur rôle de rétention des eaux si bien que l'on a assisté à des crues particulièrement brutales. Ce phénomène a été accentué par les glissements de terrains qui, en de nombreux endroits, avaient préalablement formés des embâcles dans les lits des cours d'eau et qui, en cédant, ont provoqués des « crues éclairs ».

De plus, on peut noter l'absence de mesures de gestion des risques naturels (inondations, cyclones, glissement de terrain) qui se matérialise par une occupation humaine très importante dans des zones exposées (lit des rivières, flanc de volcan, etc.).

Par ailleurs, on notera que les autorités des pays touchés n'ont pas averti leur population de l'arrivée imminente du cyclone. Des milliers de vie auraient pu être sauvées, comme en 1988 avec l'ouragan « Juana ». A l'époque, les brigades de sauvetages avaient été organisées avant que l'ouragan ne frappe.

Enfin, les trois pays les plus affectés sont des États de très petite taille si bien que c'est la totalité de leur territoire qui a été touchée par l'ouragan. Les destructions étant générales, il n'existe donc pas de solution de replis pour les populations.

Les conséquences indirectes du cyclone.

Celles-ci concernent des échelles de temps assez variables puisqu'elles vont du court terme au long terme. Les premières conséquences indirectes découlent des destructions et des morts provoqués par le passage de l'ouragan. En effet, ce sont près de 3 millions de personnes qui se retrouvent dépourvues de tout et qu'il faut nourrir, vêtir et loger. Or, « Mitch » a dévasté des pays déjà pauvres, ceux-ci sont donc dans l'impossibilité de faire face à une telle masse de réfugiés.

De par le nombre de victimes, la dégradation des conditions de vie et d'hygiène et le contexte tropical dans lequel s'inscrivent ces pays, entraînent un risque sanitaire réel. Celui-ci se matérialise déjà par la réapparition de maladies endémiques propres aux régions tropicales (diphtéries, paludisme,etc.) et par l'apparition d'épidémies diverses telles que le choléra ou la malaria.

En détruisant la quasi-totalité des récoltes (banane, café, etc.), le cyclone prive non seulement ces pays de leur principal poste d'exportation pour plusieurs années mais fait craindre la famine à l'ensemble des populations. Cette menace est d'autant plus réelle que nombre d'axes routiers et de ponts ont été détruits par les glissements de terrains et les crues, rendant particulièrement difficile l'acheminement des aides. De nombreux jours après le passage de « Mitch », des régions étaient encore coupées du monde. Les conséquences économiques du cyclone sont donc gigantesques pour de si petits pays : certains experts estiment que ces nations ont fait un bond de 20 à 30 ans en arrière.

Le Honduras et le Nicaragua, les pays les plus touchés par le cyclone « Mitch », ont perdu la majorité de leurs ponts et routes. Et certaines régions sinistrées restent difficiles d'accès, même aux hélicoptères, notamment dans la région atlantique du Nicaragua où 1 200 Indiens misquitos étaient accrochés aux cimes des arbres avec le même désespoir que les 1 400 victimes rejetées par les flancs du volcan Casitas à 140 kilomètres au nord-ouest de Managua, capitale du Nicaragua.

L'ampleur du désastre est telle que 70% de la production agricole a été anéantie au Honduras. Là, comme au Nicaragua, le cyclone a fait plus de dégâts qu'en vingt ans de guerre civile et toutes les infrastructures du pays sont à reconstruire. Pratiquement, il faut s'employer à nourrir toute la population, 6,6 millions au Honduras et 4,9 millions au Nicaragua.

A moyen ou long terme, cette catastrophe risque de poser des problèmes sociaux tels qu'un exode rural massif vers les principales villes de ces pays. Or, comme cela est le cas de la plupart des pays en développement, les cités du Honduras ou du Nicaragua ne sont pas en mesure d'accueillir un tel surplus de population.

Au niveau macro-économique il est à prévoir une accentuation de la dépendance économique de ces pays déjà surendettés vis-à-vis des grandes puissances économiques et des différentes institutions financières internationales. Les gouvernements du Honduras et du Nicaragua ont demandé un gel du remboursement de leur dette auprès de la Banque Mondiale et du FMI.

Conséquences des glissements de terrains et des crues, la dispersion sur plusieurs centaines de kilomètres carrés de quelques 75 000 mines anti-personnel résistantes à l'eau. Héritées des affrontements « contras » et sandinistes qui ont fait rage dans les années 80 le long de la frontière Nicaragua-Honduras, les zones minées étaient connues des gouvernements et des habitants locaux. Aujourd'hui, ces engins ont été déplacés et personne ne sait exactement où ils se trouvent.68

Enfin, le risque géopolitique n'est pas absent de cette crise. En effet, les deux pays les plus affectés par « Mitch » n'entretiennent pas de très bonnes relations diplomatiques et ce, depuis la révolution sandiniste de 1979 au Nicaragua. Ainsi, au plus fort de la crise les deux pays tentaient d'attirer à eux l'aide internationale d'où l'accentuation des tensions diplomatiques entre les deux nations. Par ailleurs, il semblerait que l'aide apporté par les États-Unis se dirige préférentiellement vers le Honduras (qui a toujours été « Contra » c'est-à-dire anti-sandiniste) plutôt que vers le Nicaragua. Néanmoins, c'est une aide humanitaire et financière massive qui s'est organisée à l'échelle de la planète pour venir au secours de ces pays dévastés.

L'aide internationale.

Selon le Programme alimentaire mondial, les besoins de ces pays sont estimés à 3,2 milliards de dollars. Et il leur faudra, peut-être, des dizaines d'années pour connaître la normalité. Déjà 150 millions de dollars ont été débloqués par les pays d'Europe et d'Amérique. Mais l'aide fournie reste nettement en-deçà de leurs besoins. Aussi, leurs responsables se sont-ils hâtés de solliciter l'annulation de leurs dettes extérieures aux fins de la reconstruction. Message entendu par la France.

Le monde n'est resté ni sourd, ni aveugle devant la catastrophe survenue en Amérique centrale. D'abord, les voisins immédiats se sont portés à son secours : le Mexique et les États-Unis (l'aide de Cuba ayant été refusée pour raison politique par le président conservateur du Nicaragua Arnoldo Aleman, sévèrement critiqué depuis). Ensuite, par l'ensemble du monde occidental et diverses organisations internationales.

Les États-Unis ont avancé un montant de 70 millions de dollars et envoyé sur place 130 militaires de la marine américaine et 20 hélicoptères. L'ex-président Carter est venu exprimer sa sympathie aux sinistrés, suivi de l'ancien président George Bush. Leur a emboîté le pas Tipper Gore, épouse de l'ancien vice-président Al Gore, venue à la tête d'une mission présidentielle de haut rang comprenant des membres du Congrès pour "montrer l'engagement des États-Unis à aider les habitants d'Amérique centrale".

La France, également, s'est hâtée d'envoyer des secours : des tonnes de vivres, de matériel, des médicaments et équipes médicales. Le "Jeanne d'Arc" a mis le cap sur l'Amérique centrale. Et le président Chirac lui-même y a débarqué pour exprimer à son tour sa solidarité avec la population si durement éprouvée.

Le manque de contrôle de la répartition de l'aide.

Réunis à San Salvador, les chefs d'État d'Amérique centrale ont lancé un appel à une aide internationale pour la reconstruction de leurs pays. Cette aide pose toutefois plus d'un problème, la distribution des vivres étant « politisée » et la corruption étant un des maux endémiques de la région. D'ailleurs, Mgr Oscar Andres Rodriguez, archevêque de Tegucigalpa, capitale du Honduras, pays considéré par l'Institut privé de transparence (IPT) siégeant à Washington, comme le troisième le plus corrompu au monde, a mis en garde contre le détournement de l'aide internationale et déclaré « maudits » les usurpateurs.

L'ouragan « Mitch » a créé une caste de "nouveaux riches" en Amérique centrale, en raison du manque de contrôle collectif sur les aides fournies par la coopération internationale pour reconstruire la région.

Telle est l'une des conclusions du rapport "Inventaire des risques et de la fragilité en Amérique centrale et au Mexique" présenté au début de ce mois à Tegulcigalpa par l'organisation non-gouvernementale OXFAM/Grande-Bretagne. Ce rapport a fait l'objet d'un compte-rendu détaillé en provenance de la correspondante hondurienne de l'agence de presse latino-américaine "Notimex".

L'accent y est mis sur les risques naturels importants dont souffre la région (ouragans, séismes, inondations et sécheresses).

En ce qui concerne les ouragans et les tempêtes, on estime que 1,3 millions de Nicaraguayens (sur un total de 5 millions) y sont exposés, et plus particulièrement les 500 000 habitants de la côte Atlantique, même si l'ouragan « Mitch » et les dernières tempêtes tropicales de cette année ont frappé surtout la zone Pacifique. Au Honduras, 2,9 millions de personnes courent de sérieux risques, particulièrement dans les zones côtières, même si les dernières catastrophes ont sévèrement touché la capitale, Tegucigalpa, située à 300 km de la mer des Caraïbes.

Concernant les secousses sismiques, l'Amérique centrale se trouve dans l'une des zones du monde les plus exposées en raison de l'interaction de 5 plaques tectoniques : celles du Coco, du Pacifique, de l'Amérique du Nord, de la Caraïbe et de Rivero.

Lors de la présentation de cette étude dans la capitale hondurienne, son auteur - Amado Ordoñez - a dénoncé les anomalies constatées dans l'utilisation des fonds pour la reconstruction. Il a critiqué les gouvernements centro-américains, qui n'ont eu aucune capacité politique de faire face aux désastres, en insistant sur le fait que "les avancées après « Mitch » ne sont pas vraiment significatives, aucun progrès n'a été enregistré en matière de prévention des désastres". Il souligne qu' "avec l'arrivée de l'aide internationale pour la reconstruction, le besoin d'un contrôle collectif s'est fait sentir, parce que « Mitch » a augmenté le capital de certains. Il y a aujourd'hui des nouveaux riches en Amérique centrale".

Au Nicaragua, par exemple, le président Arnoldo Aleman a demandé à l'Assemblée nationale de lui permettre de conclure directement des contrats, ce qui a facilité la légalisation de combines douteuses et les constructions non durables. "Au Nicaragua, de nombreux édifices construits après « Mitch » n'existent plus, et c'est du reste une réalité dans toute l'Amérique centrale".

Selon le rapport, l'ouragan représente un signal "de la plus grande critique environnementale de ces dernières années, ainsi qu'une sévère remise en cause des actuelles politiques socio-économiques. « Mitch » n'a pas été seulement le troisième ouragan le plus fort du siècle, il incarne le visage de la pauvreté et de la fragilité qui se développent dans cette région du monde".

ANNEXE 6 : Les tremblements de terre au Salvador

34 millions d'habitants vivent en Amérique centrale, cette région de 536 000 km2 fortement exposée aux catastrophes naturelles. De juin à septembre, durant la saison des pluies, l'Amérique centrale est exposée aux ouragans et aux inondations, alors que de novembre à mai les tremblements de terre, les incendies de forêts et la sécheresse constituent les risques principaux.

Les tremblements de terre des 13 janvier et 13 février 2001 sont dus au phénomène de subduction, bien connu depuis la découverte de la tectonique des plaques, c'est à dire le passage d'une de ces plaques sous une autre. Ces plaques sont des pièces indépendantes qui forment la croûte terrestre. Au niveau de l'Amérique centrale, la plaque Cocos, située à l'ouest, dans le Pacifique, avance vers l'est et s'enfonce sous la petite plaque de la mer des Caraïbes. Elle progresse régulièrement de 6 à 7 centimètres par an.

Il est malheureusement sûr qu'une région à forte sismicité, telle que l'Amérique centrale, connaîtra d'autres catastrophes, mais il est actuellement impossible de savoir à l'avance quand et dans quel endroit exactement elles se produiront. Le précédent grand séisme qui a frappé le Salvador, en 1986, et a fait plus de 1 400 morts dans la capitale, tout comme ceux qui ont fait 5 000 morts au Nicaragua en 1972, 22 000 au Guatemala, quatre ans plus tard, et 5 000 au Mexique, en 1985, en témoignent.

Le tremblement de terre du 13 janvier 2001

Le 13 janvier, El Salvador et les régions voisines ont été victimes d'un tremblement de terre dévastateur. Le séisme a tué plus de 800 personnes et détruit plus de 160 000 foyers laissant d'innombrables personnes sans abri. Des milliers de personnes n'ont pas été retrouvées. Ce séisme, qui a atteint 7,6 degrés sur l'échelle de Richter,69 a également touché le Guatemala, le Nicaragua et le Honduras.

Sa puissance a été telle que son intensité s'est faite sentir du Mexique méridional jusqu'à Panama.

Le président salvadorien Francisco Florès, dans une allocution télévisée, a proclamé l'état d'urgence dans tout le pays et a décidé de prendre la direction des opérations de secours. Il a indiqué que les régions les plus touchées étaient la localité de Santa Tecla, un faubourg de la capitale, et la province côtière de La Libertad.

La partie du Salvador la plus touchée était sujette à un urbanisme massif et une forte pression démographique qui l'ont fragilisée. L'urbanisation à Las Colinas, un quartier de la ville de Santa Tecla, à une douzaine de kilomètres de la capitale, a été rapide et massive, à flanc de collines, en raison de la pression urbaine d'une capitale qui croit très vite. Les habitations ont été emportées par une colline qui s'est totalement effondrée lors de la secousse. Plus d'un millier de personnes ont été portées disparues. La région a souffert de la déforestation et la planification urbaine est, sinon défaillante, du moins problématique.

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La délégation française s'est rendue sur les lieux du drame en compagnie du maire de la ville, M. Oscar Ortiz.

Le tremblement de terre du 13 février 2001

Un nouveau séisme est intervenu un mois jour pour jour après le précédent qui avait fait 827 morts et près de 2000 disparus (depuis cette date, plus de 3 200 répliques ont été enregistrées). Des centaines d'immeubles se sont effondrés, faisant au moins 260 morts et 2 200 blessés. La secousse, d'une magnitude de 6,6 sur l'échelle de Richter, s'est produite à 8 h 22 dans la matinée, alors que le pays tentait de se remettre du fort séisme du 13 janvier.

Ce sont les départements de La Paz, San Vicente et Cuscatlan, situés dans le centre du pays, le long d'une chaîne de volcans, qui ont été les plus touchés. La population a été prise de panique dans la capitale, où chacun a voulu se précipiter hors des immeubles.

Des malades sur leurs lits d'hôpital ont été alignés dans les rues en attendant que les bâtiments soient inspectés. Le gouvernement a fermé les écoles et les services publics, dont les hôpitaux pour vérifier la sécurité des bâtiments et s'assurer qu'ils n'avaient pas subi de dommages. L'aéroport de San Salvador a également été fermé brièvement.

Dans la capitale, San Salvador, les habitants terrifiés sont descendus précipitamment dans la rue lorsque la terre s'est mise à trembler.

Le président du Salvador, Francisco Flores, a qualifié les dégâts de « considérables » et a lancé un appel à l'aide internationale, notamment en équipes médicales. Il a rappelé que presque tous les secours arrivés de l'étranger au lendemain du précédent séisme pour venir en aide aux sinistrés, avaient quitté le pays depuis une dizaine de jours.

L'aide européenne.

Une première enveloppe de 2 millions d'euros avait été engagée aussitôt après le tremblement de terre du 13 janvier et, lorsque la catastrophe a frappé une nouvelle fois, un mois plus tard, la Commission a annoncé un octroi d'une assistance complémentaire, pour un montant se situant entre 5 et 8 millions d'euros. C'est ce dernier chiffre qui a finalement été retenu, en raison de l'ampleur des besoins suscités par ces deux désastres. L'aide humanitaire totale apportée aux victimes des tremblements de terre du Salvador est ainsi portée à 10 millions d'euros.

Cette assistance, véhiculée par l'Office d'aide alimentaire (ECHO) par l'intermédiaire d'un large éventail d'ONG partenaires et d'autres agences internationales, permettra de financer des projets. Compte tenu du nombre de constructions détruites, le défi principal consistera à fournir des abris temporaires et à entamer la rénovation des habitations. Plus de la moitié de l'enveloppe de 8 millions d'euros a été réservée à cette fin. Les autres grandes priorités sont la santé, l'eau et les équipements sanitaires.

ANNEXE 7 : Les « Maquilas »

« L'alternative pour les Coréens et les Taïwanais est de chercher des pays qui soient plus proches de leur principal marché. Des pays qui ont peu ou pas de quotas pour exporter leurs produits aux États-Unis, et qui, de plus, disposent d'une main-d'oeuvre abondante, bon marché et productive. Où peuvent-ils aller pour obtenir le plus de profits ? Bingo ! Au Salvador. » (« La Prensa Grafica », 7 mars 1995)

Jusqu'en 1980, les gouvernements des pays en voie de développement ont assuré un développement de l'économie nationale basé sur un modèle de substitution aux importations, une protection des industries nationales par des barrières douanières élevées et un contrôle des investissements étrangers. Ce modèle autonome de développement a perduré grâce au consensus créé par une certaine redistribution interne de la richesse et une croissance faible mais continue. L'impossibilité de rembourser la dette, au début des années 80, a placé ces pays sous l'autorité des institutions financières internationales.

Les organismes internationaux, Fonds Monétaire International (FMI), Banque Mondiale (BM), OCDE, Union européenne (UE) etc., conseillent aux PVD d'assurer leur développement en facilitant les investissements privés étrangers. Les mesures de libéralisation, privatisation et déréglementation préconisées (consensus de Washington) se traduisent notamment par la mise en place de zones franches et l'intégration des pays dans des zones de libre-échange. Créé en 1985, le FIAS (Foreign Investment Advisory Service) est une commission de la Banque Mondiale au service des PVD. En partenariat avec les dirigeants des grandes entreprises, le FIAS a conseillé 117 pays sur les moyens d'attirer les capitaux étrangers grâce à la mise en _uvre des zones franches et diverses incitations financières.

Les usines de sous-traitance étrangères - ou « maquilas » - fleurissent dans les zones franches d'Amérique centrale. Elles sont nées de la volonté de délocalisation du Nord et de la nécessité de création d'emploi au Sud. Caricatures de la mondialisation accélérée de l'économie, fer de lance d'une politique fondée sur l'exportation de produits manufacturés, ces entreprises peuvent compter avec les gouvernements qui musellent les syndicats alors même que les droits des travailleurs sont violés de façon massive. Les employeurs ont, bien souvent, toute latitude pour imposer à la main-d'_uvre, en grande majorité féminine, des semaines de 60 à 70 heures, et des salaires extrêmement faibles.

Les maquilas sont des usines d'assemblage qui produisent pour exporter toute leur production en bénéficiant de conditions financières très intéressantes. Le seul produit local est la main d'oeuvre. Au Salvador, il existe 208 de ces usines, dont 143 dans le textile et la confection. Dans ce secteur, 35 maquilas sont la propriété de groupes étrangers, principalement coréens, taïwanais et nord-américains.

Les conflits sociaux se multiplient dans les maquilas. Elles emploient une très forte majorité de femmes. Les maquilas sont installées dans des zones franches qui les exemptent des taxes d'importation et d'exportation et de l'impôt sur les bénéfices pendant les quinze premières années suivant la mise en route de l'usine et où la plus grande tolérance en matière de droit du travail est de mise.

Pour les propriétaires d'usines, le Salvador ressemble à un paradis, en revanche, pour les travailleurs, il ressemble plus à l'enfer. Leurs droits en tant qu'humains ne sont pas respectés et le code du travail est totalement ignoré par les dirigeants des usines. Les salaires en vigueur dans les zones franches sont inférieurs de moitié au salaire minimum salvadorien.

Le Honduras est le pays d'Amérique centrale qui a connu la plus forte implantation de maquilas au cours des dix dernières années. En effet les entreprises asiatiques ont tourné les quotas textiles imposés par les États- Unis en se délocalisant dans des zones franches créées pour elles sur les bords de l'Atlantique.

193 entreprises, principalement coréennes, emploient 90 000 personnes, des jeunes femmes surtout et parfois des mineures, pour fabriquer des chemises, des jeans, des tee-shirts. Le gouvernement les exempte de droits de douanes, d'impôts, muselle les syndicats. On travaille de 12 à 14 h par jour pour un salaire mensuel de 816 F. Pour un pantalon vendu 120 F à New York, le salaire représente 1F20 ! La maquila est un espace clos : les ouvrières n'y résident pas. Elles logent dans des cités précaires qui ont été dévastées par le cyclone.

Les zones de libre échange ont vraiment décollé en Amérique centrale vers la fin des années 80 et durant les années 90 en raison de l'arrêt des guerres civiles. Pour les investisseurs, l'existence d'un haut niveau de chômage, de personnes qui veulent travailler, de salaires très compétitifs et de la situation géographique privilégiée - à deux heures de vol des États-Unis - sont des attraits non négligeables.

Pour les entreprises asiatiques, qui, dans leurs pays d'origine, ont rempli leurs quotas textiles à destination des États-Unis, l'Amérique centrale, qui bénéficie d'accords préférentiels, est une plate-forme inespérée pour accroître leurs exportations. Pour les firmes américaines (comme pour les autres), un pantalon qui représente 0,20 dollar en salaire se vend au moins 20 dollars à New York, Boston ou Chicago. Une entreprise américaine peut donc réduire considérablement ses coûts de production rien qu'en se déplaçant à quelques centaines de kilomètres.

Le destin de l'Amérique centrale et des Caraïbes dans le contexte nouveau du néolibéralisme et de la globalisation de l'économie mondiale est d'être transformée en une grande zone franche pour produire des marchandises au coût des salaires du tiers monde et consommer ensuite, au prix du premier monde.

ANNEXE 8 : La Communauté économique

de l'isthme centraméricain (CECA)

Les accords de paix (Esquipulas II) signés en août 1987 ainsi que les changements politiques intervenus au Nicaragua et au Salvador allaient contribuer à relancer la coopération régionale. La réactivation du processus d'intégration fut d'abord politique puis elle revêtit de plus en plus un caractère économique. Ainsi le projet du Guatemala de créer un Parlement centraméricain fut-il officiellement entériné par les pays de la région (Traité constitutif du Parlement centraméricain), à l'exception toutefois du Costa Rica.

Un nouveau programme d'intégration économique a aussi été adopté en juin 1990 lors du Sommet présidentiel d'Antigua (Guatemala), le Plan d'action économique pour l'Amérique centrale (Plan de Acción Económica para Centroamérica : PAECA) , en vue de restructurer, fortifier et réactiver le procesus d'intégration et ses organismes. Ce Plan a pour objectif la création d'une Communauté économique de l'isthme centraméricain (Comunidad Económica Centroamericana : CECA) et prévoit, entre autres, l'adoption d'un tarif extérieur commun à partir du 1er janvier 1993 et l'établissement d'un nouveau système de paiement régional (Sistema Regional de Pagos) avec le soutien financier de la Communauté économique européenne afin de régler les dettes intra-régionales.

En août 1992, un accord cadre de libre-échange a été signé entre les cinq pays d'Amérique centrale et le Mexique établissant les fondements pour la création d'une zone de libre-échange avec le Mexique d'ici 1996. L'inclusion de l'Amérique centrale dans un espace de libre-échange avec la Colombie et le Venezuela a aussi été envisagée dans l'engagement de Caracas en février 1993.

Le Honduras s'est joint au processus d'intégration en février 1992 avec la signature du Traité de transition multilatéral de libre-échange avec les autres Républiques centraméricaines (Transitional Multilateral Free Trade Agreement), et a créé avec le Guatemala et le Salvador le "triangle du nord", qui allait conduire à la mise en place en 1993 d'une zone de libre-échange, après que le Nicaragua se soit joint aux trois autres pour former le Groupe des quatre. Ces quatre pays devaient signer en octobre 1993 le protocole de Guatemala (protocole au Traité général d'intégration économique centraméricaine). Finalement les cinq pays d'Amérique centrale (Costa Rica, Salvador, Guatemala, Honduras, Nicaragua) et le Panama signèrent ce protocole qui vient modifier le Traité général d'intégration économique de 1960 et confirmer le projet de mettre en place un tarif extérieur commun à quatre taux : 5 %, 10 %, 15 % et 20 %. Le protocole inclut également des dispositions en vue de favoriser une plus grande circulation des marchandises et des capitaux.

De loin le pays le plus actif de la région, le Costa Rica a cependant ouvert de nombreuses brèches dans ce projet d'intégration, préférant faire cavalier seul et signer des ententes commerciales séparées avec le Mexique et les États-Unis notamment.

L'Initiative du Bassin des Caraïbes, lancée en 1982 par le président Reagan, est un autre facteur qui est venu perturber les projets d'intégration en Amérique centrale, les États-Unis incitant par là les pays à se détourner de projets excentriques pour s'engager plutôt dans des négociations commerciales privilégiées avec eux.

Néanmoins, en dépit de ces difficultés, les cinq membres du MCCA n'en continuent pas moins d'afficher leur volonté d'intégration. Ainsi, ont-ils mis en place une nouvelle organisation en février 1993 (date de son entrée en fonction), le Sistema de Integración Centroamericana (SICA) créé en 1991 par le protocole de Tegucigalpa à la Charte de l'Organisation des États centraméricains (ODECA). Ce protocole vint établir les fondations d'une nouvelle Charte régionale d'intégration et de coopération plus moderne et fonctionnelle que son prédécesseur (la Charte de l'ODECA) et modifier de nombreuses institutions du MCCA en les incorporant au SICA.

Ainsi, le SICA est la nouvelle organisation parapluie qui regroupe les organisations d'intégration économique, la Cour centraméricaine de Justice, le Parlement centraméricain (PARLACEN) et le Comité consultatif multisectoriel. Elle chapeaute aussi les réunions présidentielles. Elle est composée des pays membres du MCCA et du Panama, et compte comme pays observateurs le Belize et la République Dominicaine. Elle a comme tâche, entre autres choses, d'exécuter et de coordonner les mandats des sommets présidentiels centraméricains et de veiller à la mise en _uvre des décisions du conseil des ministres des relations extérieures. Elle fournit le cadre tant juridique qu'institutionnel de l'intégration globale de l'Amérique centrale. Sa mission est tant politique qu'économique.

En mars 1995, les pays membres du SICA souscrivirent au Traité d'intégration social centraméricain (ou Traité de San Salvador) pour y inclure l'intégration sociale. Selon ce traité, le secteur social constitue un sous-système du SICA et consiste en la promotion de meilleures opportunités et d'une meilleure qualité de vie pour tous par l'entremise d'un développement intégral, durable et équitable.

En juillet 1997, une restructuration du SICA fut décidée et approuvée (au XIXème sommet présidentiel tenu au Panama). Cette réforme institutionnelle du SICA envisage l'éventuelle adhésion du Belize et de la République Dominicaine, le renforcement du Parlement centraméricain, une réforme de la cour de Justice centraméricaine et l'unification des secrétariats en un seul secrétariat général avec un siège unique au Salvador. À cette réunion, il fut aussi question de la négociation d'un traité de libre-échange entre les pays centraméricains et le Panama.

De son côté, le MCCA, qui est un sous-système du SICA, est constitué du Conseil des ministres de l'intégration, du Conseil éxécutif de l'intégration économique (Comité Ejecutivo de Integración Económica : CEIE) et du Secrétariat de l'intégration économique centraméricaine (Secretaría de Integración Económica Centroamericana : SIECA).

Le SICA n'est pas la seule initiative originale entreprise par les pays centraméricains. Le 12 octobre 1994, le Costa Rica, le Guatemala, le Honduras, le Nicaragua, le Panama, le Salvador et le Belize ont signé un accord créant l'Alliance pour le développement soutenable (Alianza Centroamericana para el Desarrollo Sostenible : ALIDES). L'Accord prévoit un plan d'action national et régional en matière d'environnement et de développement soutenable dont la portée est également économique.

Faisant suite à cette initiative, les pays de l'isthme invitèrent la communauté internationale à se joindre à eux afin de les aider dans la réalisation de leur projet de développement soutenable. Seuls les États-Unis répondirent à l'appel, devenant ainsi le premier partenaire extrarégional de l'Alliance avec la signature au Sommet des Amériques de Miami en 1994 d'un Accord conjoint Amérique centrale-États-Unis (Conjunta Centroamérica-USA : CONCUSA). Par cet accord, les États-Unis s'engagent à soutenir l'ALIDES et à fournir de l'assistance technique afin d'améliorer la protection de l'environnement et d'assurer la bonne application des normes environnementales dans l'isthme via, par exemple, les programmes de l'USAID ou de la BID. Pour assurer la réalisation des engagements de cet accord, un plan d'action fut mis sur pied et adopté par les deux parties.

Les deux sommets biannuels qui furent tenus en 1995, à San Salvador et à San Pedro Sula, ainsi que le sommet extraordinaire tenu à Costa del Sol (Salvador) ont servi de cadre de réévaluation des réalisations et des capacités institutionnelles de l'ALIDES. Ainsi, à la suite du sommet de San Salvador, la décision fut prise d'accélérer la modernisation de ses agences et de ses organes, d'accorder davantage de place aux questions sociales et d'investir dans le "capital humain", d'où la signature du Traité d'intégration sociale centraméricaine (ou Traité de San Salvador). Le sommet de San Pedro Sula (Honduras) marqua, quant à lui, la deuxième phase de l'ALIDES et en rétablit les priorités. L'année 1995 fut, par ailleurs, l'année de l'entrée à l'OMC des membres du MCCA.

Étant donné l'érosion des préférences de l'Initiative du bassin des Caraïbes, la proposition d'un accord réciproque de libre-échange entre les États-Unis et l'Amérique centrale a été faite en mars 1997, au lieu de poursuivre la voie de la négociation d'un accord de non-réciprocité rendue par ailleurs difficile en raison du blocage du Congrès. De plus, la même année, le 20 mai, lors du sommet de San José (Costa Rica), les présidents d'Amérique centrale (Costa Rica, Guatemala, Honduras, Nicaragua et Salvador), de la République Dominicaine, des États-Unis et le premier ministre du Belize ont réaffirmé, avec la déclaration de San José, leur engagement de Miami de travailler pour l'établissement d'une zone de libre-échange des Amériques (ZLEA) d'ici 2005 d'une part, leur désir d'améliorer les relations commerciales avec les États-Unis d'autre part.

De là, la signature avec ces derniers de six accords d'ouverture de l'espace aérien (Open Skies Agreements) en vue de renforcer les relations commerciales et touristiques, une première dans l'hémisphère. En plus de ces accords, les dirigeants se sont entendus pour instituer un comité ministériel conjoint sur le commerce et l'investissement (U.S.-Central America Ministerial Trade and Investment Council) afin de faire avancer le dossier de l'intégration hémisphérique. Les pays centraméricains jouent d'ailleurs un rôle constructif dans le processus de négociation de la ZLEA. En mars 1998, le Costa Rica fut l'hôte de la quatrième conférence des ministres du Commerce extérieur des Amériques. Suite à la cinquième conférence, tenue à Toronto en novembre 1999, le Costa Rica va présider durant les prochains le groupe de négociation sur le règlement des différends, et le Guatemala, le groupe consultatif sur les économies de petite taille.

Parmi les autres événements importants du dossier de l'intégration économique centraméricaine, on peut noter qu'un accord de complémentarité économique a été signé le 13 septembre 1997 entre le Costa Rica, le Guatemala, le Honduras, le Nicaragua et le Salvador et la Chine (Acuerdo de complementación económica entre las Repúblicas de Costa Rica, El Salvador, Guatemala, Honduras y Nicaragua con la República de China). Cet accord vise à renforcer les relations entre l'Amérique centrale et la Chine dans les domaines de l'économie, du commerce, de l'investissement, du transfert de technologie et du domaine financier. On cherche ainsi à jeter les bases permettant une éventuelle négociation d'un traité de libre-échange avec la Chine. En plus de cet accord avec la Chine, les pays centraméricains ont des accords spéciaux de commerce avec la Colombie, le Mexique et le Venezuela ainsi qu'avec les États-Unis et l'Union européenne.

Compte tenu du succès de l'accord bilatéral de libre-échange entre le Costa Rica et le Mexique, entré en vigueur le 1er janvier 1995, et de l'accord bilatéral de libre-échange entre le Nicaragua et le Mexique, entré en vigueur en 1997, à partir de la troisième réunion des présidents centraméricains et du Mexique (Tuxtla III), qui a eu lieu en juillet 1998 à San Salvador, les travaux se sont intensifiés en vue d'un accord de libre-échange entre le Mexique, les pays du triangle du Nord (Salvador, Guatemala, Honduras) et le Panama. C'est la déclaration conjointe de la IIIème Réunion de Tuxtla.

Un autre fait à noter est celui de la signature d'un accord de libre-échange entre les pays centraméricains et le Chili le 18 octobre 1999. En plus de ces démarches, les membres du MCCA se sont rapprochés du Marché commun du Cône Sud (MERCOSUR) avec la ratification d'un accord cadre sur le commerce et l'investissement le 18 avril 1998 (Acuerdo marco de Comercio e Inversión entre MERCOSUR y el MCCA), de la communauté andine avec l'élaboration d'un accord de complémentarité économique, d'autre part. Un accord de tarifs préférentiels est actuellement en négociation entre la communauté andine et les pays dits du Triangle du Nord de l'Amérique centrale (Guatemala, Honduras, Salvador).

ANNEXE 9 : Le FSLN

En 1961, les mercenaires anticastristes, appuyés par la CIA, partent du port de Puerto Cabezas au Nicaragua pour renverser le gouvernement socialiste de Cuba. Ils sont écrasés par les forces révolutionnaires cubaines. Pendant ce temps au Nicaragua, on assiste à la formation du FSLN (Front Sandiniste de Libération Nationale) qui vise principalement à renverser la dictature en place. Carlos Fonseca, Tomas Borge et Silvio Mayorga en sont les fondateurs. Le parti attire à ce moment des étudiants issus des classes moyennes fascinés par l'aventure cubaine.

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1974 : un commando du FSLN commandé par Jaime Wheelock prend 35 dignitaires en otage dont l'ambassadeur américain Turner B. Shelton. Il obtient la libération de 14 prisonniers politiques, dont Daniel Ortega, la publication d'un long communiqué anti-somoziste ainsi qu'une rançon de 1 million de dollars contre la libération de ces otages.

1977 : suite aux attaques du FSLN dans les villes d'Ocotal et de San Carlos, un décret de Somoza rend suspect tout homme âgé de douze à soixante ans. La Garde Nationale a la liberté totale d'action.

1978 : le leader du mouvement modéré d'opposition, Pedro Joaquin Chamorro, directeur de la Prensa, est assassiné par les services secrets somozistes. Les modérés s'allient aux guérilleros du FSLN. Une grève générale est déclenchée par le Front Uni d'Opposition (FAO). Le FSLN passe au devant de la lutte en prenant possession du palais national durant 48 heures. Les luttes se succèdent durant toute l'année, la garde somoziste continuant de sévir. Des villes sont détruites, la population civile est massacrée ; il y a 10 000 morts.

En mars 1979, les trois fractions du FSLN signent un accord de réunification. Fin mai, c'est l'offensive finale. Le 19 juillet 1979, après 18 ans de lutte, le FSLN triomphe, renversant la dictature. En plus d'assumer de lourdes pertes d'effectifs humains (près de 50 000 morts), les Sandinistes doivent s'accommoder de bien peu de ressources matérielles : le clan Somoza s'est enfui du pays avec les coffres de l'État. Le 20 juillet, la Junte du Gouvernement de reconstruction nationale entre triomphalement à Managua.

1984 : à l'approche des premières élections libres au Nicaragua, les forces armées américaines minent le port de Corinto, survolent le Nicaragua à basse altitude et envahissent ses eaux territoriales. Le Nicaragua décrète l'état d'urgence. Le 4 novembre, le FSLN remporte l'élection avec 67% des voix. Cependant, les Américains ne reconnaissent pas la validité de ces élections.

Le 10 janvier 1985, Daniel Ortega entre en fonction. En mai, Ronald Reagan impose un embargo commercial au Nicaragua et continue d'appuyer massivement la Contra. Le 15 octobre est proclamé à nouveau l'état d'urgence. La Contra gagne du terrain et la guerre au Nicaragua s'intensifie. La Maison Blanche choque l'opinion publique internationale par le scandale de l'Irangate. La vente illégale d'armes à l'Iran permet de financer la Contra.

1987 : la Constitution est promulguée. En août, les cinq chefs d'État d'Amérique centrale adoptent un plan de paix, c'est le plan d'Esquipulas présenté par le Président du Costa Rica, Oscar Arias.

1988 : l'état d'urgence est levé. En mars, les accords de Sopoa sont signés. L'argent consacré à la défense constituait 60% du budget total du gouvernement nicaraguayen.

1989 : les Sandinistes proclament un cessez-le-feu unilatéral. On annonce des élections pour février 1990.

1990 L'UNO (Union nationale d'opposition), coalition de 14 partis politiques de toutes tendances, remporte les élections. Violetta Chamorro devient présidente du pays le 25 avril. À la même période, il y a un accord de cessez-le-feu avec la Contra.

Les Recontras, des anciens rebelles de la Contra, mènent toujours une campagne de terreur dans le nord du pays, poussant la population de cette région à se déplacer vers d'autres parties du pays. Des groupes d'anciens conscrits sandinistes, (les Recompas) sèment aussi la violence dans diverses régions du pays. Les deux groupes s'affrontent dans une série d'engagements.

1993 : l'élection de Bill Clinton ne semble pas avoir modifié les rapports entre Washington et Managua. Il est vrai que Washington est plus occupé à conquérir le nouveau marché d'Europe de l'Est. Le Nicaragua attend toujours une aide plus consistante.

Des tensions se font sentir au sein de l'UNO et du FSLN.

1994 : les divisions s'amplifient au c_ur de l'UNO et du FSLN. Le parti au pouvoir fait face à de multiples dissensions ; les représentants de la droite quittent la coalition. Le FSLN est aussi partagé en deux tendances : l'une est pour la lutte populaire, l'autre pour la diminution des effets néfastes du néolibéralisme. Pour garantir une certaine stabilité politique, l'UNO et le FSLN doivent s'allier pour certaines décisions.

Le 13 décembre 1995, une importante manifestation étudiante a lieu. Cette manifestation opposera les étudiants aux forces policières : elle fera deux morts du côté étudiant et de nombreux blessés dans les deux camps.

En novembre 1996, des élections ont lieu. L'Alliance libérale, avec à sa tête Arnoldo Aleman, est portée au pouvoir.

ANNEXE 10 : Mgr OBANDO Y BRAVO

Première révolution réussie à laquelle les masses chrétiennes ont participé de façon décisive, la révolution sandiniste donne lieu depuis la chute du dictateur Somoza à un conflit politico-religieux dont sont partie prenante tant la hiérarchie que la base chrétienne du Nicaragua. Dans le pays, comme à l'extérieur, Monseigneur Obando y Bravo est devenu le symbole de l'opposition aux sandinistes.

Historiquement, et depuis l'indépendance, la hiérarchie de l'église du Nicaragua a apporté un soutien aux conservateurs, se plaçant sur la défensive face aux libéraux.

A partir de 1972, la hiérarchie rompt son silence face à la dictature. En 1977, alors que le FSLN passe à l'offensive, l'épiscopat condamne implicitement les actions armées. Alors que la crise s'approfondit et qu'une répression féroce s'abat sur le pays, Mgr Obando y Bravo, à la fin de 1978, lance un appel au président Carter, lui demandant de suspendre toute aide au régime Somoza.

Le 17 juillet 1979, deux jours avant la victoire sandiniste, l'archevêque de Managua se trouve encore à Caracas, tentant de mettre sur pied un projet alternatif au somozisme, de concert avec les secteurs de la démocratie chrétienne vénézuélienne, les partis politiques traditionnels et la grande entreprise nicaraguayenne.

Au moment de la victoire sandiniste (19 juillet 1979), à l'enthousiasme de la Conférence nationale des religieux du Nicaragua s'opposent les réserves des évêques nicaraguayens. La présence de quatre prêtres dans les structures gouvernementales crée dans les relations entre l'Église et l'État révolutionnaire une situation sans précédent.

De concert avec la bourgeoisie nationale qui rompt peu à peu avec le régime sandiniste, et tandis que se développe l'agression économique et armée des États-Unis et des contre-révolutionnaires basés au Honduras, les évêques introduisent de nouveaux éléments de polémique, s'estimant provoqués par un gouvernement à « forte coloration marxiste ».

Les chrétiens, dans leur majorité, soutiennent cependant le FSLN. Au cours d'un voyage à New-York, en mai 1985, Mgr Obando y Bravo rencontre un représentant de l'ordre de Malte, organisation qui a acheminé plusieurs millions de dollars de fournitures médicales aux contras. Les relations se dégradent encore plus avec la fermeture autoritaire, début 1986, de Radio Catolica.

A l'occasion du carême de 1986, un groupe de 70 prêtres organise un chemin de croix, en pleine zone de guerre, pour arriver quinze jours plus tard à Managua. Au même moment, Mgr Obando y Bravo et Mgr Vega, président de la Conférence épiscopale nicaraguayenne, effectuent une visite aux États-Unis, sur invitation de heritage Foundation, organisation connue pour être l'un des supports idéologiques de la politique du président Reagan. Le Congrès nord-américain débat alors de l'octroi d'une aide de 100 millions de dollars demandée par la Maison Blanche pour les contras. L'accusation de « traître au peuple », lancée depuis le chemin de croix au cardinal Obando, déclenche la polémique la plus vive jamais survenue à l'intérieur de l'église depuis l'arrivée des sandinistes au pouvoir. Devant l'émotion soulevée dans le pays par ses positions, l'épiscopat nicaraguayen doit déclarer qu'est condamnable « toute forme d'aide ».

Dans les semaines qui suivent la signature du plan de paix présenté par le président costaricien Oscar Arias (7 août 1987), les sandinistes lèvent l'interdiction d'entrée au Nicaragua de certaines personnalités religieuses - dont Mgr Vega -, autorisent la réouverture de Radio Catolica. Une Commission de réconciliation nationale est mise en place, présidée par Mgr Obando y Bravo à qui Daniel Ortega demande le 6 novembre 1987 de servir de médiateur pour des négociations indirectes avec la contra.

ANNEXE 11 : Eden PASTORA

Sous le nom de guerre de Commandant Zéro, Eden Pastora se rend célèbre en août 1978, durant la lutte du Front sandiniste de libération nationale (FSLN) contre la dictature de Somoza, au Nicaragua. A la tête d'un commando de 23 hommes, il prend en otages 500 personnes dont 49 membres du Congrès nicaraguayen, et occupe pendant 45 heures le Palais national. Il obtient la libération de 58 prisonniers du Front sandiniste.

Initialement incorporé au sein des tercéristes (tendance du FSLN favorable à l'alliance avec certains secteurs de la bourgeoisie), il devient chef du front sud en 1979 et acquiert, tout au long de la lutte, une notoriété immense, tant auprès du peuple nicaraguayen que sur le plan international.

Cette popularité, ses liens avec la bourgeoisie anti-somoziste lui valent, après le triomphe de la révolution, le poste de vice-ministre de la Défense, chargé d'organiser les milices populaires. Confronté aux contradictions et à la dégradation des rapports entre la bourgeoisie et les sandinistes, il ne peut influer notablement sur le processus en cours et démissionne de son poste en juin 1981. Il part alors au Guatemala rejoindre les guérillas de l'Union nationale révolutionnaire guatémaltèque (UNRG) qui l'éconduisent peu après pour « immaturité politique ».

Il rompt en avril 1982 avec le régime qu'il a contribué à établir et, depuis le Costa Rica, dénonce les massacres d'Indiens Miskitos, accuse ses anciens compagnons sandinistes de trahir la révolution nationale nicaraguayenne au profit du marxisme, de Cuba et de l'Union soviétique. Il en appelle aux armes pour renverser le gouvernement.

Entendant bien ne pas se laisser confondre avec les somozistes de la Force démocratique nicaraguayenne (FDN) qui, depuis le Honduras, attaquent le Nicaragua, il prend les armes au printemps 1983 et s'installe le long du fleuve San Juan, à la frontière avec le Costa Rica. Il y constitue un front d'opposition, l'Alliance révolutionnaire démocratique (ARDE), en compagnie d'Alfonso Robelo, riche industriel, social-démocrate, ancien membre, comme lui, de la junte sandiniste.

N'obtenant sur le terrain militaire aucun résultat significatif, déçu par l'absence de soutien des démocraties européennes et des États-Unis qui réservent leur aide aux somozistes basés au Honduras, il suspend une première fois sa lutte armée en juin 1983. Il la reprend peu après mais est expulsé de l'ARDE le 25 juin 1984 pour avoir refusé de s'allier à la Force démocratique nicaraguayenne.

Ce nationaliste convaincu qui s'oppose vigoureusement à toute intervention nord-américaine au Nicaragua échappe de peu à un attentat en novembre 1984, tandis qu'Alfonso Robelo se rallie à la FDN.

Lorsqu'en mai 1986, six des sept chefs militaires de son mouvement le quittent pour rejoindre les rangs somozistes, il cesse définitivement le combat et s'établit pêcheur de requins au Costa Rica.

ANNEXE 12 : Daniel ORTEGA

Daniel Ortega Saavedra est né le 11 novembre 1945 à La Libertad, au Nicaragua. Dès 1963, il milite au sein du Front sandiniste de libération nationale (FSLN) qui a déclenché la lutte contre la dictature de Somoza. Nommé responsable du mouvement des étudiants du secondaire, il fonde le journal « L'Etudiant ». Il fait très rapidement partie de l'exécutif du FSLN et devient responsable de la résistance urbaine en 1966.

Capturé à Managua en septembre 1967, il est condamné à sept ans de prison. Un commando sandiniste arrive à le libérer quelques années plus tard et il réintègre ses fonctions de membre de la direction nationale du FSLN.

Au sein des tercéristes (tendance des sandinistes favorable à une alliance avec les secteurs anti-somozistes de la bourgeoisie), puis du FSLN réunifié, il participe activement à l'offensive insurrectionnelle, d'octobre 1977 à juillet 1979, offensive qui provoque la chute du dictateur.

Ce pragmatique, modéré, membre de la Junte de reconstruction nationale, en devient coordonnateur en 1981.

Il est élu président de la République en novembre 1984, à l'occasion des premières élections organisées depuis la révolution. En 1987, il signe avec les Présidents des pays d'Amérique centrale la déclaration d'«  Esquipulas II » qui prépare la voix aux accords de paix.

Battu par trois fois aux élections présidentielles de 1990, 1996 et 2001, il est actuellement chef du groupe parlementaire sandiniste à l'Assemblée nationale.

ANNEXE 13 : Organisation des États américains (OEA)

Première tentative d'organisation de l'ensemble du continent, une conférence panaméricaine est convoquée dès 1889 à Washington. Il faut pourtant attendre le 30 avril 1948 pour que la charte de Bogota crée l'Organisation des États américains (OEA). Signée au début de la guerre froide, la charte, qui réunit 21 pays70 du continent, affirme que ses buts sont de parvenir à « un ordre de paix et de justice », de maintenir la solidarité entre ses membres, de renforcer leur collaboration et de défendre leur souveraineté, leur intégrité territoriale et leur indépendance, mais vise surtout à renforcer le bloc américain face au bloc soviétique, et à empêcher celui-ci de s'infiltrer sur le continent. Sous l'impulsion des États-Unis, l'OEA tend donc à faire étendre l'application de la doctrine de Monroe. Le siège de l'organisation se trouve à Washington et le gouvernement des États-Unis jouit en son sein du droit d'adopter, sans consultation préalable des autres États, toute mesure de « légitime défense ». Depuis lors, les nations de la Caraïbe ainsi que le Canada se sont joint à l'OEA.71 L'Union européenne fait partie de ses « observateurs permanents ».

Alors que les Latino-Américains ne partagent pas l'obsession antisoviétique de leur mentor et se soucient bien davantage de leurs problèmes de développement, les États-Unis profitent, en 1954, de la conférence de Caracas pour proclamer que « toute activité communiste en Amérique latine est une intervention dans les affaires intérieures américaines » et que « l'installation d'un régime communiste constituerait une menace pour le système, entraînant la réunion immédiate de ses membres qui prendraient les mesures appropriées ».

La charte de l'OEA prévoit un comité consultatif de défense susceptible d'être constitué si le Conseil de l'organisation le juge utile : il ne sera jamais réuni. En revanche, Washington s'assure un contrôle indirect sur la majeure partie des armées latino-américaines qu'il équipe et entraîne.

Après la victoire de Fidel Castro (1959) à Cuba, l'OEA condamne le régime puis l'exclut de toute participation au système interaméricain avec 14 voix contre 6 (Argentine, Brésil, Bolivie, Equateur, Mexique et Chili). Cuba demeure membre de l'OEA, mais son gouvernement ne peut voter ou prendre part aux activités de l'Organisation.

Après avoir apporté son soutien à Washington dans tous les conflits importants du continent, l'OEA décide en juillet 1975 d'accorder aux États membres pleine liberté de rétablir ou non leurs relations avec La Havane, adopte en 1978 une série de résolutions reflétant le mécontentement latino-américain face à la politique commerciale discriminatoire pratiquée par les États-Unis, rejette en 1979 la proposition nord-américaine de créer une force de paix interaméricaine destinée à intervenir au Nicaragua pour sauver la garde nationale de Somoza, condamne l'escalade de la présence militaire américaine en Amérique centrale et dans les Caraïbes.

L'affrontement anglo-argentin de 1982 aux Malouines et la « trahison » de Washington remet en question l'équilibre de l'organisation. La possibilité de créer une nouvelle instance, l'Organisation des États latino-américains (OELA), dont seraient évincés les États-Unis, est évoquée avec insistance, portant un coup sévère à la politique reaganienne, tout particulièrement face à l'Amérique centrale.

S'il est vrai qu'aucun État de la région n'est encore disposé à prendre la place de Washington pour apporter les deux tiers du budget que l'OEA reçoit annuellement du nord, il n'en demeure pas moins vrai que l'Organisation des États américains échappe de plus en plus à l'emprise totale des États-Unis.

En 1986 est créée la Commission interaméricaine de lutte contre l'abus des drogues (CICAD), pour faire face au problème croissant de la consommation, la production et le trafic illicite des drogues.

En 1991, l'OEA s'est affirmée déterminée à passer outre le sacro-saint principe de non-ingérence pour voler au secours des gouvernements légitimes en cas de coup d'État (résolution 1080). Elle est cependant demeurée inactive, du fait de la réticence de nombreux pays membres (notamment le Mexique), lors du renversement du régime du président haïtien Aristide, puis en 1992, lors du coup d'état civil de M. Alberto Fujimori au Pérou. Plus récemment, et malgré les nombreuses irrégularités qui ont entaché sa réélection en mai 2000, l'OEA a entériné le maintien au pouvoir de ce même Fujimori. Pourtant la résolution 1080 oblige chaque pays membre à respecter et à renforcer leurs institutions démocratiques.

Avec l'arrivée tardive du Canada en 1990, du Belize et de la Guyana en 1992, l'OEA comprend 35 membres. Se pose depuis plusieurs années la question de la réintégration de Cuba souhaitée par la majorité des États membres mais rejetée par l'Argentine (du président Carlos Menem), le Venezuela (avant l'arrivée de M. Hugo Chavez) et les États-Unis.

En 1996 : établissement du Conseil interaméricain pour le développement intégré, conçu pour promouvoir la coopération entre les pays et encourager le développement et la lutte contre la pauvreté et adoption d'un traité historique contre la corruption, le premier instrument international de cette nature.

En 1997, réforme de l'OEA par le protocole de Washington. Cette Convention renforce la démocratie représentative en habilitant l'OEA à suspendre un État membre dont le gouvernement démocratiquement élu aura été renversé par la force.

ANNEXE 14 : L'enseignement du français à Managua

I.- L'enseignement du français dans le primaire

Le français est enseigné dans trois écoles primaires privées de Managua, ainsi qu'au collège franco-nicaraguayen « Victor Hugo ». Au total, 872 enfants sont concernés.

II.- L'enseignement du français dans le secondaire

Le français est enseigné dans treize collèges publics de Managua et de Tipitapa comme matière obligatoire en quatrième et cinquième année du secondaire, et ce, à un rythme de trois heures hebdomadaires minimum. Seulement 21 professeurs sont chargés d'enseigner le français à 5 837 étudiants. Les classes sont surchargées (plus de 60 élèves) et les enseignants ne disposent que de très peu de moyens pédagogiques. Dans ce contexte, l'Ambassade de France :

- tient des permanences deux fois par semaine, au service culturel, afin d'aider les enseignants dans la préparation de leurs cours ;

- organise des séminaires et des ateliers pédagogiques et linguistiques ;

- met à disposition une bibliothèque approvisionnée en documents, cassettes et méthodes pédagogiques.

Le français est également enseigné dans trois établissements privés : le collège franco-nicaraguayen Victor Hugo (280 élèves), le collège américain (70 élèves) et le collège centroamérica unida (46 élèves).

III.- L'enseignement du français à l'université

1. L'université nationale autonome du Nicaragua (UNAN Managua)

Le département de français de l'université propose, en 5 ans, trois licences de français. Il y a actuellement un total de 218 étudiants. Avec la réforme universitaire mise en place en 2000, les étudiants doivent choisir, dès la première année, la filière de leur choix (il y avait jusque là trois ans de tronc commun avant la spécialisation).

2. L'université centraméricaine (UCA) de Managua

Le département de langues propose le français comme matière optionnelle aux étudiants de la carrière d'anglais.

3. Bluefields Indian and Caribbean University (BICU)

Le BICU vient d'intégrer dans le plan d'études de la carrière d'administration d'entreprises touristiques le français comme deuxième langue.

ANNEXE 15 : Mines antipersonnel en Amérique Centrale

L'Amérique centrale est une des régions du monde où restent disséminées un grand nombre de mines -d'origines diverses- , malgré la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction.

graphique

Le cyclone « Mitch », au travers des glissements de terrains et des crues, a dispersé des milliers de mines antipersonnel, qui avaient été auparavant localisées, et sont devenues désormais autant de dangers pour les habitants des régions concernées.

Provenance des mines trouvées en Amérique centrale

COSTA RICA

Modèles mines

Pays producteur

PP MI Sr

Tchécoslovaquie

M18A1

USA

GUATEMALA

Modèles mines

Pays producteur

M18A1 "Claym"

USA

HONDURAS

Modèles mines

Pays producteur

PMD-6 / M

ex-URSS

PMN

ex-URSS

PMN-2

ex-URSS

PP Mi Sr 2

Tchécoslovaquie

NICARAGUA

Modèles mines

Pays producteur

M/966-B

Portugal

M/969

Portugal

PP-Mi-Sr

Tchécoslovaquie

PP Mi-Sr II

Tchécoslovaquie

MON-50

ex-URSS

OZM-4

ex-URSS

PMD-6

ex-URSS

PMD-6 / M

ex-URSS

PMN

ex-URSS

PMN-2

ex-URSS

POMZ-2

ex-URSS

POMZ-2M

ex-URSS

SALVADOR

Modèles mines

Pays producteur

Arce 1

El Salvador

Atlacatl

El Salvador

Atonal El

El Salvador

Catapultas

El Salvador

Chuchito

El Salvador

Morazan

El Salvador

Rampas

El Salvador

Tepesquintle

El Salvador

M14

USA

M18A1

USA

Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction

La Conférence diplomatique sur l'interdiction totale internationale des mines antipersonnel (Oslo, 1er-18 septembre 1997) a adopté, le 18 septembre 1997, la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction. Le traité sera ouvert à la signature à Ottawa, les 3 et 4 décembre 1997, puis au siège des Nations Unies, à New York

Préambule

Les États parties déterminés à faire cesser les souffrances et les pertes en vies humaines causées par les mines antipersonnel qui tuent ou mutilent des centaines de personnes chaque semaine, pour la plupart des civils innocents et sans défense, en particulier des enfants ; entravent le développement et la reconstruction économiques ; empêchent le rapatriement des réfugiés et des personnes déplacées sur le territoire ; et ont d'autres graves conséquences pendant des années après leur mise en place.

Convaincus qu'il leur est nécessaire de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour contribuer de manière efficace et coordonnée à relever le défi que représente l'enlèvement des mines antipersonnel disséminées dans le monde et pour veiller à leur destruction.

Désireux de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour apporter une assistance pour les soins et la réadaptation des victimes des mines, y compris pour leur réintégration sociale et économique.

Reconnaissant qu'une interdiction totale des mines antipersonnel constituerait également une importante mesure de confiance.

Se félicitant de l'adoption du Protocole sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi des mines, pièges et autres dispositifs, tel qu'il a été modifié le 3 mai 1996, annexé à la Convention sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination, et appelant tous les États qui ne l'ont pas encore fait à le ratifier dans les meilleurs délais.

Se félicitant également de l'adoption, le 10 décembre 1996, par l'Assemblée générale des Nations Unies, de la Résolution 51/45S exhortant tous les États à s'employer à mener à bien dès que possible les négociations relatives à un accord international efficace et juridiquement contraignant pour interdire l'emploi, le stockage, la production et le transfert des mines terrestres antipersonnel. Se félicitant de plus des mesures d'interdiction, des restrictions et des moratoires, décidés multilatéralement au cours des dernières années en ce qui concerne l'emploi, le stockage, la production et le transfert des mines antipersonnel.

Soulignant le rôle de la conscience publique dans l'avancement des principes humanitaires comme en atteste l'appel à une interdiction totale des mines antipersonnel et reconnaissant les efforts déployés à cette fin par le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, la Campagne internationale contre les mines terrestres et de nombreuses autres organisations non gouvernementales du monde entier.

Rappelant la Déclaration d'Ottawa du 5 octobre 1996 et la Déclaration de Bruxelles du 27 juin 1997 exhortant la communauté internationale à négocier un accord international juridiquement contraignant interdisant l'emploi, le stockage, la production et le transfert des mines antipersonnel.

Soulignant l'opportunité de susciter l'adhésion de tous les États à la présente Convention et déterminés à s'employer énergiquement à promouvoir son universalisation dans toutes les enceintes appropriées, notamment les Nations Unies, la Conférence du désarmement, les organisations régionales et les groupements ainsi que les conférences d'examen de la Convention sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination.

Se fondant sur le principe du droit international humanitaire selon lequel le droit des parties à un conflit armé de choisir des méthodes ou moyens de guerre n'est pas illimité, sur le principe qui interdit d'employer dans les conflits armés des armes, des projectiles et des matières ainsi que des méthodes de guerre de nature à causer des maux superflus, et sur le principe selon lequel il faut établir une distinction entre civils et combattants.

Sont convenus de ce qui suit :

Article 1 - Obligations générales

1. Chaque État partie s'engage à ne jamais, en aucune circonstance :

a) employer de mines antipersonnel ;

b) mettre au point, produire, acquérir de quelque autre manière, stocker, conserver ou transférer à quiconque, directement ou indirectement, de mines antipersonnel ;

c) assister, encourager ou inciter, de quelque manière, quiconque à s'engager dans toute activité interdite à un État partie en vertu de la présente Convention.

2. Chaque État partie s'engage à détruire toutes les mines antipersonnel, ou à veiller à leur destruction, conformément aux dispositions de la présente Convention.

Article 2 - Définitions

1. Par "mine antipersonnel", on entend une mine conçue pour exploser du fait de la présence, de la proximité ou du contact d'une personne et destinée à mettre hors de combat, blesser ou tuer une ou plusieurs personnes. Les mines conçues pour exploser du fait de la présence, de la proximité ou du contact d'un véhicule et non d'une personne, qui sont équipées de dispositifs antimanipulation, ne sont pas considérées comme des mines antipersonnel du fait de la présence de ce dispositif.

2. Par "mine", on entend un engin conçu pour être placé sous ou sur le sol ou une autre surface, ou à proximité, et pour exploser du fait de la présence, de la proximité ou du contact d'une personne ou d'un véhicule.

3. Par "dispositif antimanipulation", on entend un dispositif destiné à protéger une mine et qui fait partie de celle-ci, est relié à celle-ci, attaché à celle-ci ou placé sous celle-ci, et qui se déclenche en cas de tentative de manipulation ou autre dérangement intentionnel de la mine.

4. Par "transfert", on entend, outre le retrait matériel des mines antipersonnel du territoire d'un État ou leur introduction matérielle dans celui d'un autre État, le transfert du droit de propriété et du contrôle sur ces mines, mais non la cession d'un territoire sur lequel des mines antipersonnel ont été mises en place.

5. Par "zone minée", on entend une zone dangereuse du fait de la présence avérée ou soupçonnée de mines.

Article 3 - Exceptions

1. Nonobstant les obligations générales découlant de l'article 1, sont permis la conservation ou le transfert d'un certain nombre de mines antipersonnel pour la mise au point de techniques de détection des mines, de déminage ou de destruction des mines, et pour la formation à ces techniques. Le nombre de ces mines ne doit toutefois pas excéder le minimum absolument nécessaire aux fins susmentionnées.

2. Le transfert des mines antipersonnel aux fins de destruction est permis.

Article 4 - Destruction des stocks de mines antipersonnel

Sous réserve des dispositions de l'article 3, chaque État partie s'engage à détruire tous les stocks de mines antipersonnel dont il est propriétaire ou détenteur ou qui sont sous sa juridiction ou son contrôle, ou à veiller à leur destruction, dès que possible, et au plus tard quatre ans après l'entrée en vigueur de la présente Convention pour cet État partie.

Article 5 - Destruction des mines antipersonnel dans les zones minées

1. Chaque État partie s'engage à détruire toutes les mines antipersonnel dans les zones minées sous sa juridiction ou son contrôle, ou à veiller à leur destruction, dès que possible, et au plus tard dix ans après l'entrée en vigueur de la présente Convention pour cet État partie.

2. Chaque État partie s'efforce d'identifier toutes les zones sous sa juridiction ou son contrôle où la présence de mines antipersonnel est avérée ou soupçonnée et s'assure, dès que possible, que toutes les zones minées sous sa juridiction ou son contrôle où se trouvent des mines antipersonnel soient marquées tout au long de leur périmètre, surveillées et protégées par une clôture ou d'autres moyens afin d'empêcher effectivement les civils d'y pénétrer, jusqu'à ce que toutes les mines antipersonnel contenues dans ces zones minées aient été détruites. Ce marquage sera conforme, au minimum, aux normes prescrites par le Protocole sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi des mines, pièges et autres dispositifs, tel qu'il a été modifié le 3 mai 1996, annexé à la Convention sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination.

3. Si un État partie ne croit pas pouvoir détruire toutes les mines antipersonnel visées au paragraphe 1, ou veiller à leur destruction, dans le délai prescrit, il peut présenter, à l'Assemblée des États parties ou à une Conférence d'examen, une demande de prolongation, allant jusqu'à dix ans, du délai fixé pour la destruction complète de ces mines antipersonnel.

4. La demande doit comprendre : a) la durée de la prolongation proposée ; b) des explications détaillées des raisons justifiant la prolongation proposée, y compris : -la préparation et l'état d'avancement du travail effectué dans le cadre des programmes de déminage nationaux ; -les moyens financiers et techniques dont dispose l'État partie pour procéder à la destruction de toutes les mines antipersonnel ; -les circonstances qui empêchent l'État partie de détruire toutes les mines antipersonnel dans les zones minées. c) les implications humanitaires, sociales, économiques et environnementales de la prolongation ; et d) toute autre information pertinente relative à la prolongation proposée.

5. L'Assemblée des États parties, ou la Conférence d'examen, en tenant compte des facteurs énoncés au paragraphe 4, évalue la demande et décide à la majorité des États parties présents et votants d'accorder ou non la période de prolongation.

6. Une telle prolongation peut être renouvelée sur présentation d'une nouvelle demande conformément aux paragraphes 3, 4 et 5 du présent article. L'État partie joindra à sa demande de prolongation supplémentaire des renseignements additionnels pertinents sur ce qui a été entrepris durant la période de prolongation antérieure en vertu du présent article.

Article 6 - Coopération et assistance internationales

1. En remplissant les obligations qui découlent de la présente Convention, chaque État partie a le droit de chercher à obtenir et de recevoir une assistance d'autres États parties, si possible et dans la mesure du possible.

2. Chaque État partie s'engage à faciliter un échange aussi large que possible d'équipements, de matières et de renseignements scientifiques et techniques concernant l'application de la présente Convention et a le droit de participer à un tel échange. Les États parties n'imposeront pas de restrictions indues à la fourniture, à des fins humanitaires, d'équipements de déminage et des renseignements techniques correspondants.

3. Chaque État partie qui est en mesure de le faire fournira une assistance pour les soins aux victimes des mines, pour leur réadaptation, pour leur réintégration sociale et économique ainsi que pour des programmes de sensibilisation aux dangers des mines. Cette assistance peut être fournie, entre autres, par le biais des organismes des Nations Unies, d'organisations ou institutions internationales, régionales ou nationales, du Comité international de la Croix-Rouge, des Sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et de leur Fédération internationale, d'organisations non gouvernementales ou sur une base bilatérale.

4. Chaque État partie qui est en mesure de le faire fournira une assistance au déminage et pour des activités connexes. Cette assistance peut être fournie, entre autres, par le biais des organismes des Nations Unies, d'organisations ou institutions internationales ou régionales, d'organisations ou institutions non gouvernementales ou sur une base bilatérale, ou bien encore en contribuant au Fonds d'affectation spéciale des Nations Unies pour l'assistance au déminage ou à d'autres fonds régionaux qui couvrent le déminage.

5. Chaque État partie qui est en mesure de le faire fournira une assistance pour la destruction des stocks de mines antipersonnel.

6. Chaque État partie s'engage à fournir des renseignements à la base de données sur le déminage établie dans le cadre des organismes des Nations Unies, particulièrement des renseignements concernant différents moyens et techniques de déminage, ainsi que des listes d'experts, d'organismes spécialisés ou de points de contact nationaux dans le domaine du déminage.

7. Les États parties peuvent demander aux Nations Unies, aux organisations régionales, à d'autres États parties ou à d'autres instances intergouvernementales ou non gouvernementales compétentes d'aider leurs autorités à élaborer un programme national de déminage afin de déterminer, entre autres : a) l'étendue et l'ampleur du problème des mines antipersonnel ; b) les ressources financières, technologiques et humaines nécessaires à l'exécution du programme; c) le nombre estimé d'années nécessaires pour détruire toutes les mines antipersonnel dans les zones minées sous la juridiction ou le contrôle de l'État partie concerné ; d) les activités de sensibilisation aux dangers des mines qui réduiront l'incidence des blessures ou des pertes en vies humaines attribuables aux mines ; e) l'assistance aux victimes de mines ; f) la relation entre le gouvernement de l'État partie concerné et les entités gouvernementales, intergouvernementales ou non gouvernementales pertinentes qui participeront à l'exécution du programme.

8. Les États parties qui procurent ou reçoivent une assistance selon les termes du présent article coopéreront en vue d'assurer l'exécution rapide et intégrale des programmes d'assistance agréés.

Article 7 - Mesures de transparence

1. Chaque État partie présente au Secrétaire général des Nations Unies, aussitôt que possible, et de toute manière au plus tard 180 jours après l'entrée en vigueur de la présente Convention pour cet État, un rapport sur :

a) les mesures d'application nationales visées à l'article 9 ;

b) le total des stocks de mines antipersonnel dont il est propriétaire ou détenteur ou qui se trouvent sous sa juridiction ou son contrôle, incluant une ventilation par type, quantité et, si cela est possible, par numéro de lot pour chaque type de mines antipersonnel stockées ;

c) dans la mesure du possible, la localisation de toutes les zones minées sous sa juridiction ou son contrôle où la présence de mines antipersonnel est avérée ou soupçonnée, incluant le maximum de précisions possibles sur le type et la quantité de chaque type de mines antipersonnel dans chacune des zones minées et la date de leur mise en place ;

d) les types et quantités et, si possible, les numéros de lots de toutes les mines antipersonnel conservées ou transférées pour la mise au point de techniques de détection des mines, de déminage ou de destruction des mines, et pour la formation à ces techniques, ou bien celles transférées dans un but de destruction, de même que les institutions autorisées par un État partie à conserver ou à transférer des mines antipersonnel conformément à l'article 3 ;

e) l'état des programmes de reconversion ou de mise hors service des installations de production des mines antipersonnel ;

f) l'état des programmes de destruction des mines antipersonnel visés aux articles 4 et 5, y compris des précisions sur les méthodes qui seront utilisées pour la destruction, la localisation de tous les lieux de destruction et les normes à observer en matière de sécurité et de protection de l'environnement ;

g) les types et quantités de toutes les mines antipersonnel détruites après l'entrée en vigueur de la présente Convention pour cet État partie, y compris une ventilation de la quantité de chaque type de mines antipersonnel détruites, conformément aux articles 4 et 5, respectivement, de même que, si possible, les numéros de lots de chaque type de mines antipersonnel dans le cas d'une destruction conformément à l'article 4 ;

h) les caractéristiques techniques de chaque type de mines antipersonnel produites, dans la mesure où elles sont connues, ainsi que de celles dont l'État partie est actuellement propriétaire ou détenteur, y compris, dans une mesure raisonnable, le genre de renseignements qui peuvent faciliter l'identification et l'enlèvement des mines antipersonnel ; au minimum, ces renseignements incluront les dimensions, le type d'allumeur, le contenu en explosif et en métal, des photographies couleur et tout autre renseignement qui peut faciliter le déminage ; et

i) les mesures prises pour alerter dans les plus brefs délais et de manière effective la population au sujet de toutes les zones identifiées conformément au paragraphe 2 de l'article 5.

2. Les États parties mettront à jour annuellement, en couvrant la dernière année civile, les renseignements fournis conformément au présent article et les communiqueront au Secrétaire général des Nations Unies au plus tard le 30 avril de chaque année.

3. Le Secrétaire général des Nations Unies transmettra les rapports reçus aux États parties.

Article 8 - Aide et éclaircissements au sujet du respect des dispositions

1. Les États parties conviennent de se consulter et de coopérer au sujet de l'application des dispositions de la présente Convention, et de travailler dans un esprit de coopération afin de faciliter le respect, par les États parties, des obligations découlant de la présente Convention.

2. Si un ou plusieurs États parties souhaitent éclaircir des questions relatives au respect des dispositions de la présente Convention par un autre État partie, et cherchent à y répondre, ils peuvent soumettre, par l'intermédiaire du Secrétaire général des Nations Unies, une demande d'éclaircissements sur cette question à cet État partie. Cette demande sera accompagnée de tous les renseignements appropriés. Les États parties s'abstiendront de demandes d'éclaircissements sans fondement, en prenant soin d'éviter les abus. L'État partie qui reçoit une demande d'éclaircissements fournira à l'État partie demandeur, par l'intermédiaire du Secrétaire général des Nations Unies, tous les renseignements qui aideraient à éclaircir cette question, dans un délai de 28 jours.

3. Si l'État partie demandeur ne reçoit pas de réponse par l'intermédiaire du Secrétaire général des Nations Unies dans ce délai, ou juge insatisfaisante la réponse à la demande d'éclaircissements, il peut soumettre la question à la prochaine Assemblée des États parties par l'intermédiaire du Secrétaire général des Nations Unies. Le Secrétaire général des Nations Unies transmettra cette requête, accompagnée de tous les renseignements appropriés relatifs à la demande d'éclaircissements, à tous les États parties. Tous ces renseignements devront être transmis à l'État partie sollicité, qui aura le droit de formuler une réponse.

4. En attendant la convocation d'une Assemblée des États parties, tout État partie concerné peut demander au Secrétaire général des Nations Unies d'exercer ses bons offices pour faciliter la présentation des éclaircissements demandés.

5. L'État partie demandeur peut proposer, par l'intermédiaire du Secrétaire général des Nations Unies, la convocation d'une Assemblée extraordinaire des États parties pour examiner la question. Le Secrétaire général des Nations Unies communiquera alors cette proposition et tous les renseignements présentés par les États parties concernés à tous les États parties, en leur demandant d'indiquer s'ils sont favorables à une Assemblée extraordinaire des États parties pour examiner la question. Au cas où, dans un délai de 14 jours après cette communication, au moins un tiers des États parties optent pour une telle Assemblée extraordinaire, le Secrétaire général des Nations Unies convoquera cette Assemblée extraordinaire des États parties dans un nouveau délai de 14 jours. Le quorum est atteint à cette Assemblée si la majorité des États parties y assistent.

6. L'Assemblée des États parties, ou l'Assemblée extraordinaire des États parties, selon le cas, déterminera en premier lieu s'il est nécessaire d'examiner davantage la question, compte tenu de tous les renseignements présentés par les États parties concernés. L'Assemblée des États parties, ou l'Assemblée extraordinaire des États parties, s'efforcera de prendre une décision par consensus. Si, malgré tous ces efforts, aucun accord n'est ainsi trouvé, la question sera mise aux voix et la décision sera prise à la majorité des États parties présents et votants.

7. Tous les États parties coopéreront pleinement avec l'Assemblée des États parties ou avec l'Assemblée extraordinaire des États parties à l'examen de la question, y compris à toute mission d'établissement des faits autorisée conformément au paragraphe 8.

8. Si de plus amples éclaircissements sont nécessaires, l'Assemblée des États parties, ou l'Assemblée extraordinaire des États parties, autorisera l'envoi d'une mission d'établissement des faits et en fixera le mandat à la majorité des États parties présents et votants. À n'importe quel moment, l'État partie sollicité peut inviter une mission d'établissement des faits à venir sur son territoire. Cette mission n'aura pas à être autorisée par une décision de l'Assemblée des États parties ou d'une Assemblée extraordinaire des États parties. La mission, composée d'un maximum de neuf experts, désignés et agréés conformément aux paragraphes 9 et 10, peut recueillir des informations supplémentaires sur place ou en d'autres lieux directement liés au cas de non-respect présumé et se trouvant sous la juridiction ou le contrôle de l'État partie sollicité.

9. Le Secrétaire général des Nations Unies prépare et actualise une liste indiquant, tels que fournis par les États parties, les noms et nationalités d'experts qualifiés ainsi que tout autre renseignement pertinent à leur sujet, et la communique à tous les États parties. L'expert figurant sur la liste sera considéré comme désigné pour toutes les missions d'établissement des faits, à moins qu'un État partie ne s'oppose par écrit à sa désignation. L'expert récusé ne participera à aucune mission d'établissement des faits sur le territoire ou tout autre lieu sous la juridiction ou le contrôle de l'État partie qui s'est opposé à sa désignation, pour autant que la récusation ait été signifiée avant la désignation de l'expert pour une telle mission.

10. Dès la réception d'une demande de la part de l'Assemblée des États parties ou d'une Assemblée extraordinaire des États parties, le Secrétaire général des Nations Unies désignera, après consultation de l'État partie sollicité, les membres de la mission, y compris son chef. Les ressortissants des États parties sollicitant la mission d'établissement des faits, et ceux des États qui en sont directement affectés, ne pourront être désignés comme membres de la mission. Les membres de la mission d'établissement des faits jouiront des privilèges et immunités prévus par l'article VI de la Convention sur les privilèges et immunités des Nations Unies, adoptée le 13 février 1946.

11. Après un préavis d'au moins 72 heures, les membres de la mission d'établissement des faits se rendront aussitôt que possible sur le territoire de l'État partie sollicité. L'État partie sollicité prendra les mesures administratives nécessaires pour accueillir, transporter et loger la mission. Il lui incombera aussi d'assurer, dans toute la mesure du possible, la sécurité des membres de la mission tant qu'ils seront sur un territoire sous son contrôle.

12. Sans préjudice de la souveraineté de l'État partie sollicité, la mission d'établissement des faits ne peut apporter sur le territoire de l'État partie sollicité que l'équipement qui sera exclusivement utilisé pour la collecte de renseignements sur le cas de non-respect présumé. Avant son arrivée, la mission informera l'État partie sollicité de l'équipement qu'elle entend utiliser au cours de son travail.

13. L'État partie sollicité ne ménagera aucun effort pour donner aux membres de la mission d'établissement des faits la possibilité de s'entretenir avec toutes les personnes susceptibles de fournir des renseignements sur le cas de non-respect présumé.

14. L'État partie sollicité accordera à la mission d'établissement des faits l'accès à toutes les zones et toutes les installations sous son contrôle où il pourrait être possible de recueillir des faits pertinents relatifs au cas de non-respect en question. Cet accès sera assujetti aux mesures que l'État partie sollicité jugera nécessaires pour : a) la protection d'équipements, d'informations et de zones sensibles ; b) la protection des obligations constitutionnelles qui pourraient incomber à l'État partie sollicité en matière de droits de propriété, de fouilles et de saisies, et autres droits constitutionnels ; ou c) la protection physique et la sécurité des membres de la mission d'établissement des faits. Au cas où il prendrait de telles mesures, l'État partie sollicité déploiera tous les efforts raisonnables pour démontrer par d'autres moyens qu'il respecte la présente Convention.

15. La mission d'établissement des faits ne peut séjourner sur le territoire de l'État partie concerné plus de 14 jours, et sur un site particulier, plus de sept jours, à moins qu'il n'ait été convenu autrement.

16. Tous les renseignements fournis à titre confidentiel et non liés à l'objet de la mission d'établissement des faits seront traités d'une manière confidentielle.

17. La mission d'établissement des faits communiquera ses conclusions, par l'intermédiaire du Secrétaire général des Nations Unies, à l'Assemblée des États parties ou à l'Assemblée extraordinaire des États parties.

18. L'Assemblée des États parties, ou l'Assemblée extraordinaire des États parties, examinera tous les renseignements pertinents, notamment le rapport présenté par la mission d'établissement des faits, et pourra demander à l'État partie sollicité de prendre des mesures en vue de corriger la situation de non-respect dans un délai fixé. L'État partie sollicité fera un rapport sur les mesures ainsi prises en réponse à cette demande.

19. L'Assemblée des États parties, ou l'Assemblée extraordinaire des États parties, peut recommander aux États parties concernés des mesures et des moyens permettant de clarifier davantage la question examinée ou de la régler, notamment l'ouverture de procédures appropriées, conformément au droit international. Au cas où le non-respect serait imputable à des circonstances échappant au contrôle de l'État partie sollicité, l'Assemblée des États parties, ou l'Assemblée extraordinaire des États parties, pourra recommander des mesures appropriées, notamment le recours aux mesures de coopération visées à l'article 6.

20. L'Assemblée des États parties, ou l'Assemblée extraordinaire des États parties, s'efforcera de prendre les décisions dont il est question aux paragraphes 18 et 19 par consensus ou, à défaut, à la majorité des deux tiers des États parties présents et votants.

Article 9 - Mesures d'application nationales

Chaque État partie prend toutes les mesures législatives, réglementaires et autres, qui sont appropriées, y compris l'imposition de sanctions pénales, pour prévenir et réprimer toute activité interdite à un État partie en vertu de la présente Convention, qui serait menée par des personnes, ou sur un territoire, sous sa juridiction ou son contrôle.

Article 10 - Règlement des différends

1. Les États parties se consulteront et coopéreront pour régler tout différend qui pourrait survenir quant à l'application ou l'interprétation de la présente Convention. Chaque État partie peut porter ce différend devant l'Assemblée des États parties.

2. L'Assemblée des États parties peut contribuer au règlement du différend par tout moyen qu'elle juge approprié, y compris en offrant ses bons offices, en invitant les États parties au différend à entamer la procédure de règlement de leur choix et en recommandant une limite à la durée de la procédure convenue.

3. Le présent article est sans préjudice des dispositions de la présente Convention sur l'aide et les éclaircissements au sujet du respect de ses dispositions.

Article 11 - Assemblée des États parties

1. Les États parties se réuniront régulièrement pour examiner toute question concernant l'application ou la mise en oeuvre de la présente Convention, y compris : a) le fonctionnement et l'état de la présente Convention ; b) les questions soulevées par les rapports présentés en vertu des dispositions de la présente Convention ; c) la coopération et l'assistance internationales conformément à l'article 6 ; d) la mise au point de technologies de déminage ; e) les demandes des États parties en vertu de l'article 8 ; f) les décisions associées aux demandes des États parties prévues à l'article 5.

2. Le Secrétaire général des Nations Unies convoquera la première Assemblée des États parties dans un délai d'un an après l'entrée en vigueur de la présente Convention. Le Secrétaire général des Nations Unies convoquera aussi annuellement les assemblées ultérieures jusqu'à la première Conférence d'examen.

3. En vertu des conditions prescrites à l'article 8, le Secrétaire général des Nations Unies convoquera une Assemblée extraordinaire des États parties.

4. Les États non parties à la présente Convention, de même que les Nations Unies, d'autres organisations ou institutions internationales pertinentes, des organisations régionales, le Comité international de la Croix-Rouge et les organisations non gouvernementales pertinentes peuvent être invités à assister à ces assemblées en qualité d'observateurs, conformément au règlement intérieur convenu.

Article 12 - Conférences d'examen

1. Le Secrétaire général des Nations Unies convoquera une Conférence d'examen cinq ans après l'entrée en vigueur de la présente Convention. Les Conférences d'examen ultérieures seront convoquées par le Secrétaire général des Nations Unies si un ou plusieurs États parties le demandent, pourvu que l'intervalle entre les Conférences d'examen ne soit en aucun cas inférieur à cinq ans. Tous les États parties à la présente Convention seront invités à chaque Conférence d'examen.

2. La Conférence d'examen aura pour buts : a) de revoir le fonctionnement et l'état de la présente Convention ; b) d'évaluer la nécessité de convoquer des Assemblées supplémentaires des États parties mentionnées au paragraphe 2 de l'article 11, et de déterminer l'intervalle entre ces assemblées ; c) de prendre des décisions concernant les demandes des États parties prévues à l'article 5 ; d) d'adopter dans son rapport final, si cela est nécessaire, des conclusions relatives à l'application de la présente Convention.

3. Les États non parties à la présente Convention, de même que les Nations Unies, d'autres organisations ou institutions internationales pertinentes, des organisations régionales, le Comité international de la Croix-Rouge et les organisations non gouvernementales pertinentes peuvent être invités à assister à chaque Conférence d'examen en qualité d'observateurs conformément au règlement intérieur convenu.

Article 13 - Amendements

1. À tout moment après l'entrée en vigueur de la présente Convention, un État partie peut proposer des amendements à la présente Convention. Toute proposition d'amendement sera communiquée au Dépositaire, qui la diffusera à l'ensemble des États parties et recueillera leur avis quant à l'opportunité de convoquer une Conférence d'amendement pour examiner la proposition. Si une majorité des États parties notifient au Dépositaire, au plus tard 30 jours après la diffusion de la proposition, qu'ils sont favorables à un examen plus approfondi, le Dépositaire convoquera une Conférence d'amendement à laquelle l'ensemble des États parties seront conviés.

2. Les États non parties à la présente Convention, ainsi que les Nations Unies, d'autres organisations ou institutions internationales pertinentes, des organisations régionales, le Comité international de la Croix-Rouge et les organisations non gouvernementales pertinentes peuvent être invités à assister à chaque Conférence d'amendement en qualité d'observateurs conformément au règlement intérieur convenu.

3. La Conférence d'amendement se tiendra immédiatement après une Assemblée des États parties ou une Conférence d'examen, à moins qu'une majorité des États parties ne demandent qu'elle se réunisse plus tôt.

4. Tout amendement à la présente Convention sera adopté à la majorité des deux tiers des États parties présents et votants à la Conférence d'amendement. Le Dépositaire communiquera tout amendement ainsi adopté aux États parties.

5. Un amendement à la présente Convention entrera en vigueur, pour tous les États parties à la présente Convention qui l'ont accepté, au moment du dépôt auprès du Dépositaire des instruments d'acceptation par une majorité des États parties. Par la suite, il entrera en vigueur pour tout autre État partie à la date du dépôt de son instrument d'acceptation.

Article 14 - Coûts

1. Les coûts des Assemblées des États parties, des Assemblées extraordinaires des États parties, des Conférences d'examen et des Conférences d'amendement seront assumés par les États parties et les États non parties à la présente Convention participant à ces assemblées ou conférences selon le barème dûment ajusté des quotes-parts des Nations Unies.

2. Les coûts attribuables au Secrétaire général des Nations Unies en vertu des articles 7 et 8 et les coûts de toute mission d'établissement des faits seront assumés par les États parties selon le barème dûment ajusté des quotes-parts des Nations Unies.

Article 15 - Signature

La présente Convention, faite à Oslo, Norvège, le 18 septembre 1997, sera ouverte à la signature de tous les États à Ottawa, Canada, du 3 décembre 1997 au 4 décembre 1997, et au Siège des Nations Unies à New York du 5 décembre 1997 jusqu'à son entrée en vigueur.

Article 16 - Ratification, acceptation, approbation ou adhésion

1. La présente Convention est soumise à la ratification, l'acceptation ou l'approbation des Signataires.

2. La présente Convention sera ouverte à l'adhésion de tout État non signataire.

3. Les instruments de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion seront déposés auprès du Dépositaire.

Article 17 - Entrée en vigueur

1. La présente Convention entrera en vigueur le premier jour du sixième mois suivant celui au cours duquel le 40ème instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion aura été déposé.

2. Pour tout État qui dépose son instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion après la date de dépôt du 40ème instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion, la présente Convention entrera en vigueur le premier jour du sixième mois après la date à laquelle cet État aura déposé son instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion.

Article 18 - Application à titre provisoire

Un État peut, au moment de la ratification, de l'acceptation, de l'approbation de la présente Convention, ou de l'adhésion à celle-ci, déclarer qu'il en appliquera, à titre provisoire, le paragraphe 1 de l'article 1, en attendant l'entrée en vigueur de la présente Convention.

Article 19 - Réserves

Les articles de la présente Convention ne peuvent faire l'objet de réserves.

Article 20 - Durée et retrait

1. La présente Convention a une durée illimitée.

2. Chaque État partie a le droit, dans l'exercice de sa souveraineté nationale, de se retirer de la présente Convention. Il doit notifier ce retrait à tous les autres États parties, au Dépositaire et au Conseil de sécurité des Nations Unies. Cet instrument de retrait inclut une explication complète des raisons motivant ce retrait.

3. Le retrait ne prend effet que six mois après réception de l'instrument de retrait par le Dépositaire. Cependant, si à l'expiration de ces six mois, l'État partie qui se retire est engagé dans un conflit armé, le retrait ne prendra pas effet avant la fin de ce conflit armé.

4. Le retrait d'un État partie de la présente Convention n'affecte en aucune manière le devoir des États de continuer à remplir leurs obligations en vertu des règles pertinentes du droit international.

Article 21 - Dépositaire

Le Secrétaire général des Nations Unies est désigné par les présentes comme le Dépositaire de la présente Convention.

Article 22 - Textes authentiques

L'original de la présente Convention, dont les textes rédigés en anglais, arabe, chinois, espagnol, français et russe sont également authentiques, est déposé auprès du Secrétaire général des Nations Unies.

Signatures, ratifications/adhésions à la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction

(au 21 août 2001)

Etats

signature

ratification/adhésion

Afrique du Sud

3.12.1997

26.6.1998

Albanie

8.9.1998

29.02.2000

Algérie

3.12.1997

 

Allemagne

3.12.1997

23.7.1998

Andorre

3.12.1997

29.6.1998

Angola

4.12.1997

 

Antigua-et-Barbuda

3.12.1997

3.5.1999

Argentine

4.12.1997

14.9.1999

Australie

3.12.1997

14.1.1999

Autriche

3.12.1997

29.6.1998

Bahamas

3.12.1997

31.7.1998

Bangladesh

7.5.1998

06.09.2000

Barbade

3.12.1997

26.01.1999

Belgique

3.12.1997

4.9.1998

Belize

27.2.1998

23.4.1998

Bénin

3.12.1997

25.9.1998

Bolivie

3.12.1997

9.6.1998

Bosnie-Herzégovine

3.12.1997

8.9.1998

Botswana

3.12.1997

01.03.2000

Brésil

3.12.1997

30.4.1999

Brunéi Darussalam

4.12.1997

 

Bulgarie

3.12.1997

4.9.1998

Burkina Faso

3.12.1997

16.9.1998

Burundi

3.12.1997

 

Cambodge

3.12.1997

28.07.1999

Cameroun

3.12.1997

 

Canada

3.12.1997

3.12.1997

Cap-Vert

4.12.1997

14.05.2001

Chili

3.12.1997

 

Chypre

4.12.1997

 

Colombie

3.12.1997

06.09.2000

Congo-Brazaville

4.05.2001

 

Îles Cook

3.12.1997

 

Costa Rica

3.12.1997

17.3.1999

Côte d'Ivoire

3.12.1997

30.06.2000

Croatie

4.12.1997

20.5.1998

Danemark

4.12.1997

8.6.1998

Djibouti

3.12.1997

18.5.1998

Dominique

3.12.1997

26.3.1999

Équateur

4.12.1997

29.4.1999

Erythrée

27.8.2001

 

Espagne

3.12.1997

19.01.1999

Éthiopie

3.12.1997

 

Fidji

3.12.1997

10.6.1998

France

3.12.1997

23.7.1998

Gabon

4.12.1997

5.5.1999

Gambie

3.12.1997

23.4.1999

Ghana

3.12.1997

17.7.1998

Grèce

3.12.1997

30.9.1998

Grenade

11.8.1998

13.11.1998

Guatemala

5.12.1997

23.01.2001

Guinée

4.12.1997

08.10.1998

Guinée Bissau

4.12.1997

2.12.1998

Guinée équatoriale

4.12.1997

5.5.1999

Guyana

3.12.1997

23.4.1999

Haïti

3.12.1997

17.7.1998

Honduras

3.12.1997

30.9.1998

Hongrie

11.8.1998

13.11.1998

Indonésie

5.12.1997

23.01.2001

Irlande

3.12.1997

07.09.2000

Islande

4.12.1997

5.5.1999

Italie

3.12.1997

23.4.1999

Jamaïque

3.12.1997

17.7.1998

Japon

3.12.1997

30.9.1998

Jordanie

11.8.1998

13.11.1998

Kenya

5.12.1997

23.01.2001

Kiribati

-

07.09.2000

Lesotho

4.12.1997

2.12.1998

Libéria

-

23.12.1999

Liechtenstein

3.12.1997

5.10.1999

Lituanie

26.02.1999

 

Luxembourg

4.12.1997

14.06.1999

Ex-République yougoslave de Macédoine

-

9.9.1998

Madagascar

4.12.1997

16.9.1999

Malaisie

3.12.1997

22.4.1999

Malawi

4.12.1997

13.8.1998

Maldives

1.10.1998

07.09.2000

Mali

3.12.1997

2.6.1998

Malte

4.12.1997

07.05.2001

Îles Marshall

4.12.1997

 

Maurice

3.12.1997

3.12.1997

Mauritanie

3.12.1997

21.07.2000

Mexique

3.12.1997

9.6.1998

Moldova (République)

3.12.1997

08.09.2000

Monaco

4.12.1997

17.11.1998

Mozambique

3.12.1997

25.8.1998

Namibie

3.12.1997

21.9.1998

Nauru

-

07.09.2000

Nicaragua

4.12.1997

30.11.1998

Niger

4.12.1997

23.3.1999

Nioué

3.12.1997

15.4.1998

Norvège

3.12.1997

9.7.1998

Nouvelle-Zélande

3.12.1997

27.1.1999

Ouganda

3.12.1997

25.02.1999

Panama

4.12.1997

7.10.1998

Paraguay

3.12.1997

13.11.1998

Pays-Bas

3.12.1997

12.4.1999

Pérou

3.12.1997

17.6.1998

Philippines

3.12.1997

15.02.2000

Pologne

4.12.1997

 

Portugal

3.12.1997

19.2.1999

Qatar

4.12.1997

13.10.1998

Roumanie

3.12.1997

30.11.2000

Royaume-Uni

3.12.1997

31.7.1998

Rwanda

3.12.1997

08.06.2000

Saint-Kitts-et-Nevis

3.12.1997

2.12.1998

Saint-Marin

3.12.1997

18.3.1998

St-Vincent-et- Grenadines

3.12.1997

1.8.2001

Sainte-Lucie

3.12.1997

12.4.1999

Îles Salomon

4.12.1997

26.01.1999

El Salvador

4.12.1997

27.01.1999

Samoa

3.12.1997

23.7.1998

Saint-Marin

3.12.1997

18.03.1998

Sao Tomé-et-Principe

30.4.1998

 

Sénégal

3.12.1997

24.9.1998

Seychelles

4.12.1997

02.06.2000

Sierra Leone

29.7.1998

25.04.2001

Slovaquie

3.12.1997

25.02.1999

Slovénie

3.12.1997

27.10.1998

Soudan

4.12.1997

 

Suède

4.12.1997

30.11.1998

Suisse

3.12.1997

24.3.1998

Surinam

4.12.1997

 

Swaziland

4.12.1997

22.12.1998

Tadjikistan

-

12.10.1999

Tanzanie

3.12.1997

13.11.2000

Tchad

6.7.1998

6.5.1999

Tchèque (République)

3.12.1997

26.10.1999

Thaïlande

3.12.1997

27.11.1998

Togo

4.12.1997

09.03.2000

Trinité-et-Tobago

4.12.1997

27.4.1998

Tunisie

4.12.1997

9.7.1999

Turkménistan

3.12.1997

19.1.1998

Ukraine

24.02.1999

-

Uruguay

3.12.1997

07.06.2001

Vanuatu

4.12.1997

-

Vatican

4.12.1997

17.12.1998

Venezuela

3.12.1997

14.4.1999

Yémen

4.12.1997

1.9.1998

Zambie

12.12.1997

23.02.2001

Zimbabwe

3.12.1997

18.8.1998

ANNEXE 16 : Initiative PPTE

(pays pauvres très endettés)

La communauté financière internationale a reconnu en 1996 que la situation d'endettement extérieur d'un certain nombre de pays pauvres était devenue extrêmement difficile et avait un impact négatif sur leurs perspectives de développement. Pour ces pays, même l'utilisation totale des mécanismes traditionnels de rééchelonnement et d'annulation (termes de Naples) - accompagnés de l'apport de financement concessionnel et la poursuite de saines politiques économiques n'était peut-être pas suffisant pour atteindre un niveau de dette soutenable en un délai raisonnable et sans apport d'une nouvelle assistance. Un groupe de 41 pays72 dans cette situation, potentiellement considérés pour l'initiative PPTE a été défini par les institutions financières internationales.

L'initiative PPTE se base sur une action coordonnée de la communauté financière internationale, y compris les institutions multilatérales, visant à réduire le poids de la dette extérieure à un niveau soutenable. L'initiative PPTE a été renforcée en septembre 1999.

Elle ne va pas résoudre en elle-même toutes les difficultés de ces pays. Même si toute la dette extérieure de ces pays était annulée, la plupart auraient toujours besoin de mobiliser d'importantes ressources extérieures pour financer leurs investissements productifs et se développer. Au-delà de la mise en _uvre de saines politiques économiques et de mobiliser davantage de ressources intérieures, beaucoup de pays dépendront aussi de l'octroi d'un niveau important de financements extérieurs concessionnels.

1.- Histoire

En septembre 1996, les Comité du développement et Comité intérimaires du FMI et de la Banque mondiale ont adopté un programme proposé de manière conjointe par les deux institutions pour répondre à cette situation. L'Initiative sur la dette des "Pays pauvres très endettés" (Initiative PPTE) est conçue pour apporter une assistance exceptionnelle aux pays qui y sont déclarés éligibles à la suite de saines politiques économiques, afin de les aider à réduire le poids de leur dette extérieure à un niveau soutenable, c'est à dire à un niveau qui leur permette de servir leur dette de manière confortable avec leurs ressources d'exportations, ainsi que les dons et investissements en capital qu'ils reçoivent. Cette assistance conduit à une réduction de la valeur actuelle nette (VAN) des créances sur le pays endetté.

L'initiative PPTE requiert la participation de tous les créanciers multilatéraux, au-delà des allègements de dette traditionnels octroyés par les créanciers publics bilatéraux et les créanciers privés.

2.- Eligibilité

Un pays doit satisfaire un ensemble de critères pour être éligible à cette assistance. Il doit spécifiquement :

· n'être éligible qu'à une assistance concessionnelle de la part du FMI et de la Banque mondiale ;

· faire face à un niveau d'endettement insoutenable, même après mise en _uvre des mécanismes traditionnels d'allégement de dette comme les termes de Naples (pour lesquels les pays à bas revenu peuvent recevoir une réduction de la dette extérieure éligible de 67% en valeur actuelle nette) ;

· avoir parfaitement mis en _uvre des réformes et de saines politiques économiques dans le cadre de programmes soutenus par le FMI et la Banque mondiale.

3.- Participation des créanciers du Club de Paris à l'initiative PPTE

3.1. Première phase. Pour être éligible à cette assistance, le pays doit adopter un programme d'ajustement et de réformes soutenu par le FMI et la Banque mondiale et mettre en _uvre ce programme pendant trois ans.

Pendant cette période, le pays continue à recevoir des allégements de dette du Club de Paris73 et des autres créanciers publics bilatéraux et privés, ainsi qu'une assistance concessionnelle traditionnelle de la part de tous les donateurs et institutions multilatérales.

3.2. Point de décision. A la fin de cette première phase, une analyse de soutenabilité de la dette est réalisée afin de déterminer la situation d'endettement extérieur du pays. Si le ratio de dette extérieure reste au-dessus de 150% des exportations en valeur actuelle nette après mise en _uvre des traitements de dette traditionnels, le pays peut être éligible à une assistance dans le cadre de l'initiative. Dans le cas particulier des économies très ouvertes (avec un ratio d'exportations sur PIB de plus de 30%) et un poids élevé du stock de la dette en dépit de ressources budgétaires importantes (supérieure à 15% du PIB), l'objectif de valeur actuelle nette de la dette peut être fixé à moins de 150% des exportations, de manière à ce que la Valeur Actuelle Nette de la dette soit de 250% des revenus budgétaires.

Au point de décision, les conseils d'administration du FMI et de la Banque mondiale décident formellement de l'éligibilité d'un pays, et la communauté internationale s'engage à apporter une assistance suffisante d'ici au point d'achèvement (cf. ci-dessous) pour que le pays débiteur atteigne l'objectif de soutenabilité de la dette calculé au point de décision.

3.3. Seconde phase. Les créanciers du Club de Paris peuvent octroyer au cas par cas un allégement intérimaire entre le point de décision et la date attendue du point d'achèvement, au travers d'un traitement de flux avec un taux d'annulation de 90%, l'assiette du traitement variant au cas par cas, ou au travers d'une réduction des montants devant être facturés en application des précédents accords en Club de Paris. Les pays qui avaient précédemment reçu un traitement de stock selon les termes de Lyon ou pour lesquels les termes de Cologne n'apportent pas d'allégement de dette significatif au-delà de leurs traitements précédents ne bénéficient pas d'allégement de dette supplémentaire dans le cadre des termes de Cologne.

3.4. Point d'achèvement. L'assistance résiduelle est apportée à cette date, au travers d'une réduction du stock de la dette éligible jusqu'à un taux de 90% en valeur actuelle nette par les créanciers du Club de Paris (ou plus si nécessaire), les autres créanciers devant réaliser un effort comparable.

De nombreux créanciers du Club de Paris ont annoncé qu'ils octroieraient également des annulations de dette allant au-delà de celles qu'ils font dans le cadre de l'initiative PPTE, en particulier sur la dette APD.

ANNEXE 17 : Le Plan Puebla Panama

La vitesse moyenne des poids lourds qui transportent des marchandises d'un pays à l'autre sur les grandes routes de l'Amérique centrale n'est que de dix kilomètres à l'heure !

Le mauvais entretien des routes, l'absence d'accotements revêtus et les bouchons ne sont pas les seuls responsables de cette situation.

Pour bien comprendre les problèmes qui affligent le réseau de transport terrestre dans cette région, il suffit d'emprunter le tronçon de 130 kilomètres qui relie La Unión (Salvador) à Chinandega (Nicaragua) en passant par le Honduras. Les camions nicaraguayens mettent souvent 24 heures pour effectuer le périple, car il faut croiser aussi deux postes-frontières. En fait, il arrive que les routiers y passent 60 % de leur temps. Du fait de ce type d'obstacles, les pays d'Amérique centrale font beaucoup moins de commerce entre eux qu'avec des pays hors de la région. Qui plus est, le fret en Amérique centrale est généralement le double de ce qu'il est en Europe.

Le Plan Puebla-Panamá (PPP) a été conçu pour traiter ces problèmes. Les gouvernements centraméricains et mexicain ont lancé cette initiative afin d'impulser l'intégration et le développement durable de la région méso-américaine, qui englobe les sept pays de l'Amérique centrale ainsi que les neufs États du Mexique méridional et sud-oriental.

Ce plan est destiné à donner à la région les équipements, les moyens et les mesures sociales dont elle a besoin pour combler son retard historique. Riche de sa biodiversité et de sa culture, la Méso-Amérique s'étend sur plus de 1 million de kilomètres carrés et abrite quelque 65 millions d'habitants. Malgré l'abondance de ses richesses naturelles et la proximité de marchés importants, elle affiche un indice de pauvreté extrême qui est trois fois plus élevé que la moyenne latino-américaine. Elle est très sujette aussi à des catastrophes naturelles comme les cyclones, les inondations et les séismes.

Lorsque le PPP a été dévoilé au Mexique le 12 mars 2001, le président Vicente Fox a expliqué que le gouvernement mexicain pourrait ouvrir des débouchés dans la partie méridionale de son pays en nouant des liens plus étroits avec les pays frères du Mexique en Amérique centrale. « Nous pensons que, forts des liens qui nous unissent déjà et de nos similitudes, nous pouvons créer une vaste chaîne du développement. Le Mexique méridional et sud-oriental regorge de richesses naturelles et dispose d'un capital humain exceptionnel mais hélas il vit dans des conditions d'extrême pauvreté et d'exclusion inacceptables contre lesquelles nous nous empressons de lancer une offensive directe. (...) En conjuguant la détermination et les talents du Mexique à ceux des pays centraméricains, nous pourrons créer une zone d'échange et de coopération ayant la même envergure que les autres zones qui ont été mises en place dans le monde. ».

Le Plan Puebla-Panamá est né de la communauté des objectifs de deux initiatives distinctes. D'un côté, le nouveau gouvernement mexicain avait manifesté sa volonté de réduire les disparités régionales entre les États du nord et du centre et les États du sud et du sud-est. De l'autre, les pays centraméricains avaient monté leurs propres projets d'intégration régionale qu'ils ont présentés cette année à la communauté internationale lors d'une réunion du groupe consultatif à Madrid.

Pour définir le contenu exact du PPP, les pays ont demandé à la Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), à la Banque centraméricaine d'intégration économique (BCIE) et à la Banque interaméricaine de développement (BID) d'analyser les convergences entre l'initiative mexicaine et celle de l'Amérique centrale.

Lorsqu'ils se sont réunis à San Salvador le 15 juin dernier pour réaffirmer leur attachement au plan d'intégration, les chefs d'État et de gouvernement de la région méso-américaine ont défini huit grands chantiers, dits "initiatives méso-américaines", sur lesquels leurs gouvernements pourraient collaborer utilement.

Ces initiatives concernent le développement durable, le développement humain, la prévention des risques naturels et la lutte contre les catastrophes, l'encouragement au tourisme vert, l'intégration routière, l'interconnexion des réseaux électriques et le développement des télécommunications.

Les chefs politiques méso-américains ont fait remarquer que pour être intégrées dans les projets du PPP, les propositions devaient avoir une portée régionale, préserver l'environnement et respecter les populations locales concernées.

Ils ont convenu aussi d'une structure organisationnelle pour la réalisation du plan. Les orientations politiques ont été confiées à des délégués présidentiels, qui généralement ont le rang de ministre. Dans le même temps, les chefs méso-américains ont mis sur pied une commission de financement du PPP qui se compose des ministres des Finances de la région et du président de la BID Enrique V. Iglesias.

Les chefs politiques ont souligné que les projets du PPP devaient être de nature extrêmement pratique. Lors d'une conférence de presse concernant le plan, le président salvadorien Francisco Flores a résumé la chose ainsi : « La Méso-Amérique, qui compte plus de 60 millions d'habitants, a d'immenses potentialités... qui ne peuvent s'éclore que dans le cadre de projets concrets qui la doteront d'un marché unifié de l'électricité, d'un couloir routier permettant la circulation des individus et des marchandises, de projets en faveur de l'éducation et du développement et de projets qui protègent notre environnement et qui, à terme, permettront à nous tous d'en faire bénéficier celles et ceux qui y ont droit, les populations les plus pauvres de la région. »

Le Plan Puebla-Panamá propose aussi aux pays de la région un mécanisme de coopération pour faire face aux défis communs et canaliser les aides de la communauté internationale, qui a manifesté un intérêt pour ce projet d'intégration.

L'initiative en faveur de l'intégration énergétique en est un bel exemple. Elle vise à unifier les marchés de l'électricité de la région pour ainsi attirer des investissements plus lourds dans la production d'électricité et réduire le prix de l'électricité, qui est élevé. La pierre angulaire de cette initiative, c'est le Projet de système d'interconnexion électrique pour l'Amérique centrale (dont le sigle est SIEPAC en espagnol), qui vise à relier les réseaux électriques du Costa Rica, du Guatemala, du Honduras, du Nicaragua, du Panamá et du Salvador. L'idée de ce projet remonte aux études menées par la CEPALC il y a près de trente ans. C'est seulement au cours de la dernière décennie toutefois que les pays ont conclu les accords politiques nécessaires pour lancer le SIEPAC, mais les négociations pourraient fort bien s'étaler sur plusieurs années. Malgré ces difficultés, le projet a obtenu l'appui du Gouvernement espagnol, qui a proposé 60 millions de dollars U.S. sous forme de financement à des conditions avantageuses en vue de sa mise en _uvre. Il a également attiré une grande compagnie d'électricité mondiale, Endesa S.A., qui détient désormais une part dans la firme qui est propriétaire des lignes de transmission du SIEPAC. D'autres sociétés suivent de près le déroulement des choses et peaufinent les détails de leurs propres projets. Des investissements plus importants dans la production d'électricité, en plus de faire baisser le prix de l'électricité en Amérique centrale, accroîtraient la fiabilité des réseaux énergétiques, et c'est là un facteur qui a un grand poids pour les industries de transformation.

Dans le cadre de la proposition faite pour le PPP, le projet SIEPAC serait parachevé par l'interconnexion des réseaux électriques de l'Institut national d'électricité du Guatemala et de la Commission fédérale d'électricité du Mexique. Par la suite, les réseaux du Guatemala et du Belize seraient reliés eux aussi.

PROGRAMME DE LA MISSION

mardi 5 juin 2001

17 h 50 :

Arrivée de la délégation à l'aéroport de San Salvador - Accueil par Mme Lydie Gazarian, Ambassadrice de France en El Salvador

mercredi 6 juin 2001

08 h 30 :

Entretien avec M. Walter Araujo, président du parti Arena (Alliance républicaine nationaliste)

09 h 30 :

Visite du centre ville de San Salvador

11 h 30 :

Entretien avec M. Walter Araujo, président de l'Assemblée législative et les membres du Bureau

12 h 30 :

Entretien avec les membres de la Commission des Affaires étrangères de l'Assemblée législative

13 h 00 :

Déjeuner offert par Mme Carmen Elena Calderón de Escalón, Présidente de la Commission des Affaires étrangères de l'Assemblée législative

14 h 00 :

Entretien avec les membres du parti de conciliation nationale (PCN)

16 h 00 :

Entretien avec M. Hector Gonzalez Urrutia, vice-ministre des Relations extérieures

18 h 00 :

Entretien avec les membres du Front Farabundo Marti de Libération Nationale (FMLN)

20 h 30 :

Dîner à la Résidence de Mme Lydie Gazarian, Ambassadrice de France en El Salvador

jeudi 7 juin 2001

08 h 00 :

Petit déjeuner offert par M. Antonio Saca et les directeurs de l'ANEP (Association nationale de l'entreprise privée)

10 h 00 :

Entretien avec M. Oscar Ortiz, maire de Santa Tecla et président de COMURES (Corporation des municipalités d'El Salvador)

12 h 00 :

Entretien avec M. Hector Silva, maire de San Salvador et M. Facundo Guardado, adjoint au maire

13 h 00 :

Déjeuner avec Mme Lydie Gazarian, Ambassadrice de France en El Salvador

16 h 00 :

Reprise de l'entretien avec les membres du Front Farabundo Marti de Libération Nationale (FMLN)

19 h 00 :

Réception à la Résidence de Mme Lydie Gazarian, Ambassadrice de France en El Salvador

vendredi 8 juin 2001

06 h 45 :

Départ de l'hôtel pour l'aéroport de San Salvador

08 h 25 :

Départ de la délégation de l'aéroport de San Salvador à destination de Managua (Nicaragua)

09 h 20 :

Arrivée à Managua de la délégation. Accueil par M. Michel Vandepoorter, Ambassadeur de France au Nicaragua

10 h 30 :

Entretien avec M. Oscar Moncada, Président de l'Assemblée nationale

11 h 30 :

Audience au Palais présidentiel avec son Excellence M. Arnoldo Alemăn, Président de la République du Nicaragua

12 h 45 :

Déjeuner offert par M. Mario Salvo Horvilleur, Ambassadeur du Nicaragua en France

14 h 00 :

Entretien avec Mme Bertha Marina Arguello, Vice-Ministre des relations extérieures

15 h 00 :

Entretien avec M. Herty Lewites, Maire de Managua

16 h 00 :

Rencontre avec les membres du groupe d'amitié Nicaragua-France de l'Assemblée nationale du Nicaragua

17 h 00 :

Entretien avec les membres du Front Sandiniste de Libération Nationale (FSLN)

18 h 30 :

Entretien avec les membres du Parti libéral constitutionnaliste (PLC)

20 h 00 :

Réception à la Résidence de M. Michel Vandepoorter, Ambassadeur de France au Nicaragua

samedi 9 juin 2001

09 h 00 :

Visite du collège franco-nicaraguayen « Victor Hugo » de Managua

10 h 00 :

Visite de l'Alliance française de Managua

11 h 00 :

Départ de Managua à destination de Granada

13 h 00 :

Déjeuner à Granada avec M. Michel Vandepoorter, Ambassadeur de France au Nicaragua

15 h 00 :

Visite de la ville de Granada

17 h 00 :

Retour à Managua

20 h 00 :

Dîner à la Résidence de M. Michel Vandepoorter, Ambassadeur de France au Nicaragua

dimanche 10 juin 2001

04 h 30 :

Départ de l'hôtel pour l'aéroport de Managua

06 h 40 :

Départ de la délégation de l'aéroport de Managua à destination de Tegucigalpa (Honduras) via San Salvador

09 h 10 :

Arrivée à Tegucigalpa de la délégation. Accueil par M. Michel Avignon, Ambassadeur de France au Honduras

11 h 00 :

Visite de la ville de Tegucigalpa

13 h 00 :

Déjeuner avec M. Michel Avignon, Ambassadeur de France au Honduras à Valle de Angeles

15 h 00 :

Visite de la ville

19 h 30 :

Dîner avec M. Michel Avignon, Ambassadeur de France au Honduras

lundi 11 juin 2001

08 h 15 :

Visite du lycée franco-hondurien de Tegucigalpa

09 h 30 :

Visite des locaux de l'Ambassade de France

10 h 30 :

Entretien avec M. Raphaël Pineda Ponce, Président du Congrès hondurien

11 h 00 :

Entretien avec des députés du Congrès hondurien

12 h 00 :

Déjeuner offert par le Congrès hondurien

15 h 00 :

Entretien avec M. Roberto Flores Bermudez, Ministre des relations extérieures

16 h 30 :

Visite de l'Alliance française de Tegucigalpa

19 h 00 :

Réception à la Résidence de M. Michel Avignon, Ambassadeur de France au Honduras et entretien avec M. Ricardo Maduro, candidat à la présidence de la République

mardi 12 juin 2001

07 h 45 :

Départ de l'hôtel pour l'aéroport de Tegucigalpa

 

Départ de la délégation de l'aéroport de Tegucigalpa à destination de Paris via San Salvador et Miami

CARTES

Carte n°1 : carte du Salvador

Carte n°2 : carte du Nicaragua

Carte n°3 : carte du Honduras

Carte du Salvador

Carte du Nicaragua

Carte du Honduras

CONCLUSION

Dans cette partie de l'Amérique, si durement éprouvée par les luttes armées d'hier et par les catastrophes naturelles de toujours, on ne peut qu'être frappé par le contraste entre les beautés naturelles de la région, l'incroyable bonté de ses habitants, l'abnégation sans limite, et l'irruption périodique de grandes catastrophes naturelles.

Qu'expriment ces peuples dans le vaste espace de globalisation des effets mondiaux, qu'ils soient économiques, sociaux, politiques ? Rien d'autre semble-t-il qu'un développement équilibré dans la zone Amérique centrale, la mise à niveau de la population au regard des droits des citoyens à plus de justice sociale, des régions stables convaincues des grands principes qui régissent les Etats démocratiques... et la paix.

L'histoire du monde compte peu de périodes durant lesquelles nous avons vécu en paix. Leur histoire qui, dans certaines périodes se confond avec la nôtre, a rencontré trop de conflits, des milliers de disparus, trop d'insécurité, de terrorismes, de misères pour les femmes, les hommes, pour qu'ils accordent spontanément leur confiance dans les institutions politiques et militaires, dans les médias et dans tant d'autres institutions, dont on ne saurait exclure les organismes financiers.

Pourtant, les centraméricains savent bien que la nécessité de bâtir des régimes démocratiques est plus présente que jamais. Tout comme ils ont compris que la démocratie est beaucoup plus que la tenue d'élections libres, ils ont bien conscience que ses bienfaits ne sont pas automatiques, qu'il faut les conquérir. Cette obligation de transparence de la vie démocratique se heurte aux grandes menaces qui pèsent sur les traditionnelles politiques locales profondément enracinées dans l'inertie de la classe dirigeante : la concentration de la richesse, du pouvoir politique aux mains de quelques-uns ; la dégradation de l'environnement ; l'accroissement de la pauvreté sont les défauts d'une classe moyenne active.

Durement secoués par des raz de marée, de multiples tremblements de terre, des éruptions volcaniques et des cyclones destructeurs, ces pays doivent faire face alors qu'ils sont malheureusement démunis. Ces catastrophes jalonnent la vie de cette partie du continent, entraînant toujours plus de pauvreté et de désespoir. Leur recherche du bonheur est parfaitement justifiée et nous avons le devoir de nous mobiliser pour activer les aides au développement, aides au conseil, co-développement, investissements de toutes natures aptes à fournir des moyens nouveaux pour la production de richesses, de services, de sécurité publique.

L'Europe, la France en particulier, bénéficient dans cette région d'un "capital sympathie" élevé. Il se peut que ces pays réussissent leur rapprochement économique et politique, nous ne pouvons que le souhaiter, pourtant le besoin de rééquilibrage en faveur du continent européen restera fort au regard de la puissance omniprésente des États-Unis. Nous devons être attentifs, solidaires et croire en leur désir de régulation.

La délégation a pu, tout au long du séjour, mesurer les aspirations de tous ses interlocuteurs au développement contrôlé et à la paix. Au-delà des souvenirs de voyages, c'est cette volonté d'existence, de fierté de ces peuples au devenir qui nous inspire tant de sympathie et d'encouragement.

______________

DIAN 68.- Rapport d'information de MM. Filleul, Asensi et Meylan présenté à la suite de la mission effectuée en Amérique centrale du 5 au 12 juin 2001 par une délégation des groupes d'amitié France-el Salvador, France-Nicaragua et France-Honduras.

1 Marché Commun Centre-Américain : voir annexe n°1, page 131.

2 Doctrine de Monroe : voir annexe n°2, page 137.

3 Ronald Reagan, alors Président des États-Unis, déclarait en 1983 :  « L'importance de l'Amérique centrale ne tient pas seulement à sa proximité avec les États-Unis. Ses côtes sont baignées par les eaux des Caraïbes, notre principale voie d'accès au monde extérieur. Les deux tiers de tout notre commerce extérieur et du pétrole traversent le canal de Panama et les Caraïbes. En cas de crise en Europe, au moins la moitié du matériel que nous enverrions à l'OTAN traverserait ces régions par mer. ».

4 Henry Kissinger affirmait : « Si nous ne pouvons régler la question de l'Amérique centrale, il sera impossible de convaincre les nations menacées dans le golfe Persique et ailleurs que nous sommes capables de préserver l'équilibre global. ».

5 Le FMLN, qui a longtemps été la guérilla la plus puissante d'Amérique centrale, et a souvent forcé l'admiration pour sa créativité, son réalisme et son enracinement dans les «montagnes du peuple», est né de l'union, en 1980, de cinq partis présentés, ci-après, par ordre décroissant d'importance numérique et symbolique : - Forces populaires de libération (FPL), scission du PC salvadorien, secrétaire général : M. Leonel Gonzalez ; - Expression rénovée du peuple (ERP), secrétaire général : l'ancien commandant Joaquin Villalobos ; - Parti communiste (PC), secrétaire général : M. Jorge Schafik Handal ; - Résistance nationale (RN), scission de l'ERP, secrétaire général : M. Eduardo Sancho (l'ancien commandant Ferman Cienfuegos) ; - Parti révolutionnaire des travailleurs centraméricains (PRTC), secrétaire général : M. Francisco Jovel (l'ancien commandant Roberto Roca).

6 Monseigneur Oscar Arnulfo Romero : voir annexe n°3, page 139.

7 José Napoleon Duarte : voir annexe n°4, page 141.

8 M. Ruben Zamora, allié traditionnel de la guérilla (mais non guérillero lui-même), conduisit ainsi la coalition de toute la gauche, comprenant le FMLN, la Convergence démocratique (CD) et le Mouvement national révolutionnaire (MNR). La proximité des élections et l'ampleur de la tâche amenèrent à repousser à l'après-mars la continuation de la démocratisation tout juste entamée, et les nombreux débats internes au FMLN. Parmi ceux-ci, la question de l'éventuelle «social-démocratisation» du parti préconisée, depuis 1993, par le secrétaire général de l'ERP, l'ancien commandant Joaquin Villalobos. Quelque peu handicapée par ses contradictions internes, et soucieuse de donner des gages de bonne volonté à l'ONU et aux États-Unis, la coalition décida d'autocensurer son passé révolutionnaire afin de tenter de convaincre la population non politisée et le centre avec un programme modéré d'« économie populaire de marché » et un mot d'ordre peu mobilisateur : « Les gens d'abord, avec Zamora. ».

9 La Convergence démocratique ne conserve qu'un seul de ses 8 sièges. Le nouveau Mouvement unité (MU, évangéliste) obtient de justesse un député. Le Mouvement authentiquement chrétien (MAC), le MNR et le nouveau Mouvement de solidarité nationale (MSN, confessionnel), ont obtenu moins de 1% des suffrages.

10 Cette alliance représente 46 députés sur un total de 84. Le bloc des gauches étant composé de 35 députés.

11 Le PDC qui était la première force politique du pays, dans les années 80, lorsque Napoleon Duarte était Président de la République, n'obtient que 7 députés avec 8,4% des suffrages.

12 Pour beaucoup, Mme Nidia Diaz reste la responsable de l'action armée menée en 1986 contre des militaires américains dans un restaurant de San Salvador qui se solda par la mort d'une dizaine d'entre eux. M. Facundo Guardado est maire adjoint de San Salvador. La délégation française a eu l'occasion de s'entretenir avec les deux candidats du FMLN.

13 FMLN : 31 députés, Arena : 29 députés, PCN : 14 députés, PDC : 5 députés, CDU : 3 députés, PAN : 2 députés.

14 Le cyclone « Mitch » : voir annexe n°5, page 143.

15 Le 13 janvier 2001, un séisme de 7,4 degrés sur l'échelle de Richter, considéré comme le plus violent depuis 20 ans dans la région, frappait tout le territoire national, débutant une période de deux mois d'activité sismique, caractérisée par plus de 3 500 secousses et un second tremblement de terre de 6,6 degrés, le 13 février 2001. Voir annexe n°6, page 151.

16 L'état d'urgence a été déclaré dans le pays. La principale cause de dégâts sont les nombreux glissements de terrain que les séismes ont provoqués. De nombreuses récoltes ont été emportées par ces mouvements de terrain. Dans les campagnes, des villages ont été coupés du monde. De nombreuses infrastructures sont détruites ou manquent d'eau et d'électricité, en particulier des écoles et des hôpitaux. Les dégâts sont estimés à près de 3 milliards de dollars. En plus des incertitudes matérielles, la population salvadorienne vivait dans la peur à cause des très nombreuses répliques qui ont suivi les secousses les plus importantes.

17 L'Amérique centrale est la région qui reçoit la plus forte aide communautaire par habitant.

18 3 millions d'habitants (49,74% de la population) vivent dans une situation de pauvreté ou d'extrême pauvreté et plus de 400 000 enfants se voient obligés de travailler pour survivre.

19 Au Salvador, 64% de la population infantile ne participent pas à l'école maternelle. Le taux d'analphabétisme est d'environ 30%. La plus grande concentration de personnes touchées par l'analphabétisme est dans les milieux ruraux, avec un taux supérieur à 40%. Dans les milieux urbains, le taux est de 15,6%.

20 Les maquilas : voir annexe n°7, page 155.

21 Départements de : San Salvador : 16 députés, Santa Ana : 6 députés, San Miguel : 5 députés, La Libertad : 5 députés, Usulutan : 4 députés, Sonsonate : 4 députés, La Union : 3 députés, La Paz : 3 députés, Chalatenango : 3 députés, Cuscatlan : 3 députés, Ahuachapan : 3 députés, Morazan : 3 députés, San Vicente : 3 députés, Cabanas : 3 députés.

22 La communauté économique de l'isthme centraméricain : voir annexe n°8, page 159.

23 La BEI a été créée en 1958 par le Traité de Rome pour financer, à l'aide de prêts, des investissements favorisant la réalisation des objectifs de l'Union européenne, en particulier pour ce qui concerne le développement régional, les infrastructures européennes, l'énergie, l'industrie et l'environnement. En dehors de l'Union, la BEI contribue à la politique européenne de coopération au développement, conformément aux conditions fixées dans les différents accords unissant l'Union à quelque 130 pays d'Europe centrale et orientale, du Bassin méditerranéen, d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d'Asie et d'Amérique latine.

24 1,8% en 1996, 4,1% en 1997, 3,2% en 1998, 3,4% en 1999 et 2,5% en 2000.

25 9,8% en 1996, 4,5% en 1997, 2,5% en 1998, 0,6% en 1999, 2,5% en 2000.

26 Actuellement, les compagnies suivantes opèrent au Salvador : Groupe TACA, composé par les 5 lignes aériennes d'Amérique centrale (LACSA, LANICA, AVIATECA, TACA Honduras et TACA) ; COPA du Panama, IBERIA d'Espagne, UNITED, AMERICAN, DELTA et CONTINENTAL des États-Unis, et MEXICANA du Mexique. TACA, la compagnie aérienne nationale dessert le Mexique, le Belize, l'Amérique centrale, le Panama, sept villes des États-Unis, le Canada, l'Amérique du Sud, et actuellement se déroulent des négociations pour travailler avec les pays des Caraïbes.

27 Au dessous de la première tranche, l'exemption d'impôts est totale. Les trois autres tranches, outre le prélèvement d'un montant forfaitaire, permettent le prélèvement de 10%, 20% et 30% des revenus perçus.

28 Un rapport de la Commission pour la Défense des droits de l'homme en Amérique centrale indique que « ... la destruction de l'environnement dans les Pays d'Amérique centrale est loin d'être véritablement éradiquée. Cela a pour effet d'aggraver la vulnérabilité de la population devant les catastrophes naturelles et de multiplier les risques d'épidémies. Les tremblements de terre subis par le Salvador ont causé la mort de milliers de personnes dans des zones où il a déjà été question d'interdire le développement urbain. D'autre part, la région, connue comme la `'Cordillère de Balsamo'', a fait l'objet d'une demande pour la déclarer réserve forestière et de nombreuses études ont démontré qu'il fallait cesser toutes constructions pour ne pas occasionner des dommages irréversibles. Toutefois le Parlement a laissé de côté cette initiative, ce qui amène les entreprises à urbaniser le secteur. ».

29 Sur invitation de l'A.M.F., M. Ortiz s'est rendu en France du 18 au 23 novembre 2001. Il a également été reçu au Sénat et à l'Assemblée nationale.

30 À San Salvador, où le taux d'analphabétisation est très élevé, la municipalité a créé une section spéciale destinée à former de jeunes étudiants à l'enseignement. Ces derniers deviendront ensuite à leur tour des agents volontaires de campagnes d'alphabétisation.

31 César Augusto Sandino (1893-1934) dirigea la guérilla contre les troupes américaines d'occupation jusqu'à leur départ en 1933. Assassiné par les membres de la Garde nationale, il est devenu un héros du nationalisme latino-américain.

32 Front sandiniste de libération nationale : voir annexe n°9, page 165.

33 Mgr Obando y Bravo : voir annexe n°10, page 169.

34 Edén Pastora : voir annexe n°11, page 171.

35 Daniel Ortega : voir annexe n°12, page 173.

36 L'UNO, ancien parti du gouverment de Violetta Chamorro comprenait : le Parti National Conservateur Démocratique, le Parti Démocratique de Confiance Nationale, l'Alliance Populaire Conservatrice, le Parti Libéral Indépendant, le Parti Libéral Constitutionnaliste, le Parti Néolibéral, le Parti Socialiste Nicaraguayen, le Parti Communiste Nicaraguayen, le Parti Social Démocrate, le Parti Action Nationale, le Mouvement Démocratique Nicaraguayen.

37 Organisation des Etats américains : voir annexe n°13, page 175.

38 L'actuel gouvernement doit faire face aux revendications de plusieurs milliers de personnes qui réclament des compensations financières à la spoliation foncière dont elles ont été victimes : les autorités estimaient à quelque 500 millions de dollars le montant des indemnisations. Conscient qu'il lui était indispensable de régler la question de la dévolution des propriétés confisquées, pour rassurer les investisseurs étrangers, le gouvernement cherchait des financements auprès de la communauté internationale.

39 Le cyclone « Mitch » : voir annexe n° 5, page 143.

40 Lors d'une réception à la Résidence de l'Ambassadeur de France, les députés ont pu s'entretenir avec MM. Enrique Bolaños, José Rizo Calderon et Augustin Jarquin.

41 Daniel Ortega : voir annexe n°12, page 173.

42 Le cyclone « Mitch » : voir annexe n°5, page 143.

43 M. Jacques Chirac a été le premier chef d'État à se rendre sur place, à la suite de la catastrophe, et a annulé la dette bilatérale.

De plus, l'Union européenne a mis en _uvre une intervention d'urgence qui, ajoutée à celle des États membres, a approché 200 M euros, à quoi s'ajoute le programme régional pour la reconstruction en Amérique centrale, d'un montant de 250 M euros sur 4 ans.

44 L'initiative PPTE : voir annexe n°16, page 203.

45 · La nouveauté de cette initiative repose dans la prise en considération de l'ensemble de la dette publique de ces pays, autant bilatérale que multilatérale. Le changement d'attitude des institutions financières internationales (IFI) est ici important puisque l'annulation des créances multilatérales ne pouvait être envisagée auparavant.

· La première version de l'initiative PPTE s'est rapidement avérée très insuffisante puisque sur les 41 pays initialement sélectionnés par la Banque mondiale, seuls 7 étaient finalement concernés, pour des montants très faibles et sous des conditions tout à fait inadaptées.

· Sous la pression de l'opinion publique internationale, des améliorations ont été proposées par les pays créanciers (dont l'initiative française le 12 mars 1999).

· Les propositions des différents pays créanciers ont fait l'objet de négociations et ont abouti lors du G7 à Cologne le 19 juin 1999 à un ensemble de mesures appelées "l'initiative de Cologne".

· La mise en _uvre de ces mesures d'annulation ayant été confiée aux IFI (FMI et Banque mondiale), le détail des mesures prises a été élaboré à l'occasion des assemblées annuelles des deux institutions à Washington fin septembre 1999.

· Malgré un certain nombre d'améliorations, l'initiative PPTE reste très partielle par manque de volonté politique et d'accord sur les modalités de financement.

46 Elle comprend actuellement les pays suivants :

Proche Orient : Liban,Territoires autonomes palestiniens.

Afrique du Nord : Algérie,Maroc,Tunisie.

Afrique sub-saharienne et Océan indien : Afrique du Sud, Angola, Bénin, Burkina-Faso, Burundi, Cameroun, Cap-Vert, Centrafrique, Comores, Congo, Côte d'Ivoire, Djibouti, Erythrée, Ethiopie, Gabon, Ghana, Gambie, Guinée, Guinée-Bissao, Guinée-Equatoriale, Kenya, Libéria, Madagascar, Mali, Mauritanie, Maurice, Mozambique, Namibie, Niger, Nigéria, Ouganda, R.D. du Congo, Rwanda, Sao-Tomé et Principe, Sénégal, Seychelles, Sierra Léone, Tanzanie, Tchad, Togo, Zimbabwe.

Péninsule indochinoise : Cambodge, Laos, Vietnam.

Caraïbes : Cuba, Haïti, Petites Antilles, République Dominicaine.

Amérique latine : Surinam.

Pacifique : Vanuatu.

47 Il s'agissait, en même temps, des premières élections depuis l'adoption de la nouvelle loi électorale en 2000, une conséquence directe du pacte conclu entre le Frente Sandinista (FSLN) et le parti libéral du président Aleman (PLC). Cette nouvelle loi électorale stipule que les partis politiques qui n'ont pas obtenu 3% des votes lors des élections nationales de 1996 doivent désormais collecter les signatures de 3% des votants enregistrés pour pouvoir participer à l'avenir. De cette manière, seulement 4 des 27 partis sont restés en lice.

48 Il existe, à l'Assemblée nationale nicaraguayenne, 10 groupes d'amitié avec : le Parlement européen, la Belgique, la Bulgarie, la Finlande, la France, la Grande-Bretagne, l'Italie, le Japon, la Libye et la Russie.

49 Le groupe d'amitié est constitué des députés suivants : Pedro Alejandro Matus Gonzalez (PLC), William Mejia Ferrti (PLC), Victor Manuel Talavera Huete (PLC), Luis Urbina Noguera (PLC), Francisco Javier Perez Ortega (PLC), Eduardo Callejas Deshon (PLC), Martha Valle Valle (FSLN), Eduardo Jose Rizo Lopez (PLC), Jaime Bonilla Lopez (PLC), Jose Manuel Espinoza Cantillano (FSLN), Alcala Blandon Cruz (PLC), Angeles Castellon Casco (PLC), Leonel Pantin Wilson (PLC), Pedro Pablo Martinez Tellez (FSLN), Omar Cabezas Lacayo (FSLN), Victor Manuel Miranda Vargas (PLC), Cesar Augusto Lopez (PLC).

50 Le représentant des États-Unis critique même la "corruption" des sandinistes qui "laissa la société et l'économie en ruines". "Des individus chargés de la réforme agraire, poursuit Oliver Garza, sont devenus eux-mêmes de grands propriétaires terriens. On a volé toutes sortes de propriétés au nom de la révolution.".

51 Daniel Ortega, âgé aujourd'hui de 55 ans, ne s'émeut pas de l'hostilité que lui témoigne l'ambassadeur américain. Il estime que les Etats-Unis "vont tenter d'avoir une influence sur les élections", mais que "l'important est qu'ils vont reconnaître les résultats et qu'ils ne parlent plus d'en revenir au blocus ou à la guerre contre le Nicaragua". "De la même façon que nous ne nous mêlons pas de l'élection (du président Bush) contestée par le peuple nord-américain, ironise Daniel Ortega, j'espère que les États-Unis seront respectueux du résultat des prochaines élections nicaraguayennes.".

52 Toutefois, son organisation, le P. L. C., est l'héritière de celle d'Anastasio Somoza et a des relations avec les Nicaraguayens vivant à Miami, en particulier avec ceux qui dans les années 60 et 70 avaient un grade militaire.

53 Cet homme politique populiste n'en a pas moins rassemblé les votes de rejet du sandinisme, recueillant ceux destinés aux conservateurs traditionnels.

54 Il envisageait de le remplacer par une immense vierge de la conception, patronne de la ville, en marbre italien. Les travaux n'ont jamais commencé.

55 L'enseignement du français au Nicaragua : voir annexe n°14, page 179.

56 Les montagnes couvrent les quatre cinquièmes du territoire et forment un obstacle à la circulation.

57 Les 18 départements du Honduras : Atlántida, Colón, Comayagua, Copán, Cortés, Choluteca, El Paraíso, Francisco Morazán, Gracias a Dios, Intibucá, Îles de la Baie, La Paz, Lempira, Ocotepeque, Olancho, Santa Bárbara, Valle, Yoro.

58 Une guerre contre le Salvador commença pendant un match de football en 1969. Les deux pays étant déjà à couteaux tirés à cause de la migration de Salvadoriens au Honduras ; les incidents dégénérèrent.

59 Marché Commun Centre-Américain : voir annexe n°1, page 131.

60 Le cyclone « Mitch » : voir annexe n°5, page 143.

61 Alors que les guerres civiles faisaient rage au Nicaragua (révolution sandiniste), au Salvador (la Contra) et au Guatemala, les États-Unis avaient développé à Soto Cono une énorme base militaire, centre d'entraînement pour les armées des pays pro-américains de la région. En échange, l'USAID réalisait ses programmes de santé, d'éducation, de planning familial.

La paix revenue, l'aide américaine qui atteignait 222 millions $ en 1985 est passée, dix ans plus tard, à 19,3 millions.

62 Depuis 1945, le droit international général a progressivement pris en compte les droits souverains afférents à l'exploration et à l'exploitation des ressources du plateau continental ainsi que le droit à une zone économique exclusive d'une largeur de 200 milles. Les dispositions de la convention sur le droit de mer de 1982 ont reconnu et confirmé ces intérêts juridiques des États côtiers. Dans le sens de cette évolution, la Constitution du Nicaragua, dès 1948, a affirmé que, tant dans l'océan Atlantique que dans l'océan Pacifique, le plateau continental fait partie du territoire de l'État.

63 La frontière terrestre entre le Nicaragua et le Honduras a été délimitée par la sentence arbitrale rendue par S. M. le roi d'Espagne le 23 décembre 1906. Quelques points de détail ont été réglés en 1962 par l'entremise de la commission interaméricaine de la paix de l'OEA (Organisation des États américains). Le Nicaragua, qui jusqu'à cette date avait occupé de facto les territoires situés au nord du fleuve Coco et de son embouchure que la sentence a attribués au Honduras, s'est alors retiré au sud de la ligne de délimitation tracée par le roi d'Espagne.

Le Ministre des Affaires étrangères du Honduras, Roberto Flores Bermúdez, et son homologue nicaraguayen, Eduardo Montealegre Rivas, ont signé un protocole d'entente au siège de l'OEA le 7 mars. L'accord traite plusieurs questions, notamment la continuité des communications entre les forces armées des deux pays et la restriction des activités militaires le long de la frontière. L'organisation de patrouilles conjointes dans la mer des Caraïbes figure également au nombre des mesures fixées.

64 Le Salvador et le Honduras sont issus de l'éclatement de l'Empire espagnol en Amérique centrale ; leurs territoires correspondent aux subdivisions administratives de cet Empire. Dès l'origine, il était admis que les nouvelles frontières internationales devraient suivre les limites administratives coloniales.

Après que l'Amérique centrale eut proclamé son indépendance à l'égard de l'Espagne le 15 septembre 1821, le Honduras et El Salvador ont tout d'abord constitué, avec le Costa Rica, le Guatemala et le Nicaragua, la République fédérale d'Amérique centrale, dont les limites correspondaient à l'ancienne capitainerie générale de Guatemala ou Royaume de Guatemala. Lors de la désintégration de cette république en 1839, El Salvador et le Honduras, ainsi que les autres États qui la composaient, sont devenus des États distincts.

65 Le traité prévoyait aussi qu'une commission mixte de délimitation devrait délimiter la frontière dans les six secteurs restant à régler et "déterminer la situation juridique des îles et des espaces maritimes". Il stipulait que si, à l'expiration d'un délai de cinq ans, elles n'avaient pas pu régler entièrement leurs désaccords, les Parties, dans les six mois suivants négocieraient et concluraient un compromis afin de soumettre toute controverse éventuelle à la Cour internationale de Justice.

66 Le Plan Puebla Panama : voir annexe n°17, page 207.

67 L'Union européenne compte sur ce dialogue pour promouvoir dans les pays la pacification, la stabilisation politique, la démocratie, le respect des droits de l'homme et l'intégration régionale. Cette dernière a progressé entre temps avec la constitution en 1991 du "système d'intégration centraméricain".

68 Voir dossier « Mines antipersonnel en Amérique centrale », annexe n°15, page 181.

69 Un séisme de magnitude 5,0 correspond à l'énergie dégagée par la bombe nucléaire qui détruisit Hiroshima.

70 21 membres originellement membres de l'OEA (1948: Argentine, Bolivie, Brésil, Chili, Colombie, Costa Rica, Cuba, République dominicaine, Equateur, El Salvador, Guatemala, Haïti, Honduras, Mexique, Nicaragua, Panama, Paraguay, Pérou, Etats-Unis, Uruguay, Venezuela.

71 14 pays devenus membres par la suite : Barbade, Trinité et Tobago (1967) ; Jamaïque (1969) ; Grenade (1975) ; Surinam (1977) ; Dominique, Sainte-Lucie (1979) ; Antigua-et-Barbuda, Saint-Vincent-et-Grenadines (1981) ; Les Bahamas (1982) ; Saint-Kitts-et-Nevis (1984) ; Canada (1990) ; Belize, Guyana (1991).

72 Liste des PPTE : Angola, Bénin, Bolivie, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, Centrafrique, Congo, République démocratique du Congo, Côte d'Ivoire, Ethiopie, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Guyana, Honduras, Kenya, Laos, Liberia, Madagascar, Malawi, Mali, Mauritanie, Mozambique, Myanmar, Nicaragua, Niger, Ouganda, Rwanda, Sierra Leone, Sao Tomé et Principe, Sénégal, Somalie, Soudan, Tanzanie, Tchad, Togo, Vietnam, Yémen, Zambie.

73 Le Club de Paris est un groupe informel de créanciers publics dont le rôle est de trouver des solutions coordonnées et durables aux difficultés de paiement de nations endettées. Les créanciers du Club de Paris conviennent de rééchelonner les dettes qui leur sont dues. Les rééchelonnements sont un moyen d'apporter un allégement de dette en reportant et, dans le cas des rééchelonnements concessionnels, en annulant des échéances dues sur la dette.

La première réunion avec un pays débiteur eut lieu en 1956 lorsque l'Argentine accepta de rencontrer ses créanciers publics à Paris. Depuis, le Club de Paris ou des groupes ad hoc de créanciers publics membres du club de Paris ont conclu 338 accords (répartition par année) relatifs à 76 pays endettés. Depuis 1983, le montant total de dette couverte par ces accords s'élève à 375 Milliards de $ (répartition par année).

Les pays créanciers se réunissent 10 à 11 fois par an, dans le cadre de sessions de négociations, pour discuter entre eux de la situation de la dette extérieure des pays endettés ou pour traiter des questions méthodologiques liées à la dette des pays en développement.


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