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N° 3667

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 6 mars 2002.

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l'article 146 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN (1), sur
le
recouvrement des aides à l'emploi indues aux entreprises,

ET PRÉSENTÉ

PAR M. Gérard BAPT,

Rapporteur spécial,

Député.

--

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Emploi.

La Commission des finances, de l'économie générale et du plan est composée de :

M. Henri Emmanuelli, président ; M. Didier Migaud, rapporteur général ; M. Michel Bouvard, M. Jean-Pierre Brard, M. Yves Tavernier, vice-présidents ; M. Pierre Bourguignon, M. Jean-Jacques Jégou, M. Michel Suchod, secrétaires ; M. Didier Migaud, Rapporteur Général ; M. Maurice Adevah-Poeuf, M. Philippe Auberger, M. François d'Aubert, M. Dominique Baert, M. Jean-Pierre Balligand, M. Gérard Bapt, M. François Baroin, M. Alain Barrau, M. Jacques Barrot, M. Christian Bergelin, M. Éric Besson, M. Augustin Bonrepaux, M. Jean-Michel Boucheron, Mme Nicole Bricq, M. Christian Cabal, M. Jérôme Cahuzac, M. Thierry Carcenac, M. Gilles Carrez, M. Henry Chabert, M. Jean-Pierre Chevènement, M. Didier Chouat, M. Alain Claeys, M. Charles de Courson, M. Christian Cuvilliez, M. Arthur Dehaine, M. Yves Deniaud, M. Michel Destot, M. Patrick Devedjian, M. Laurent Dominati, M. Tony Dreyfus, M. Jean-Louis Dumont, M. Daniel Feurtet, M. Pierre Forgues, M. Dominique Frelaut, M. Gérard Fuchs, M. Gilbert Gantier, M. Jean de Gaulle, M. Hervé Gaymard, M. Louis Guédon, M. Jacques Guyard, M. Pierre Hériaud, M. Edmond Hervé, M. Jean-Louis Idiart, Mme Anne-Marie Idrac, M. Jean-Pierre Kucheida, M. Marc Laffineur, M. Jean-Marie Le Guen, M. Maurice Ligot, M. François Loos, M. Alain Madelin, Mme Béatrice Marre, M. Pierre Méhaignerie, M. Louis Mexandeau, M. Gilbert Mitterrand, M. Jean Rigal, M. Gilles de Robien, M. Alain Rodet, M. José Rossi, M. Nicolas Sarkozy, M. Gérard Saumade, M. Philippe Séguin, M. Georges Tron, M. Jean Vila, M. Kofi Yamgnane.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I.- LES CONDITIONS DU CONTRÔLE DES AIDES À L'EMPLOI : UN DISPOSITIF ÉCLATÉ ENTRE PLUSIEURS INTERVENANTS 7

A.- LA PLACE DES REDRESSEMENTS PORTANT SUR DES AIDES À L'EMPLOI DANS LES RÉSULTATS D'ENSEMBLE DU CONTRÔLE DES COTISATIONS SOCIALES PAR LES URSSAF 8

1.- Les résultats généraux du contrôle 8

2.- Les redressements portant sur les mesures dérogatoires en faveur de l'emploi 10

B.- LA DIVERSITÉ DES AIDES À L'EMPLOI AU REGARD DES PROBLÈMES DE RECOUVREMENT DE L'INDU 11

1.- Diversité ou complexité des aides ciblées ? 11

2.- La gestion administrative des dispositifs : les conséquences de la pluralité des intervenants 14

II.- LE CAS DU RECOUVREMENT DES INDUS AU TITRE DES CONTRATS INITIATIVE EMPLOI 17

EXAMEN EN COMMISSION 23

Mesdames, Messieurs,

Au cours de sa première session, la Mission d'évaluation et de contrôle (MEC) de la Commission des finances a retenu les aides à l'emploi parmi les thèmes qu'elle a approfondis. Il a été rendu compte de cet examen en annexe au rapport présenté par votre Rapporteur général en conclusion des travaux de la mission d'évaluation et de contrôle constituée le 3 février 1999 (1).

A la suite de cet examen, votre Rapporteur spécial a entrepris de faire porter sa recherche des moyens d'améliorer l'efficacité de la dépense publique en s'attachant aux modalités du contrôle des aides à l'emploi et à la question du recouvrement des aides indues aux entreprises, en particulier s'agissant du contrat initiative emploi.

Depuis lors, le contenu de ces questions a été profondément modifié :

- pour les conditions du contrôle sur les aides à l'emploi, par l'institution de la Commission nationale des aides publiques aux entreprises et des commissions régionales des aides publiques prévues par la loi n° 2001-7 du 4 janvier 2001 relative au contrôle des fonds publics accordés aux entreprises ;

- pour le recouvrement des aides indues, visant les spécificités du contrat initiative-emploi (CIE), par l'article 141 de la loi de finances pour 2002 (n° 2001-1275 du 28 décembre 2001), qui a supprimé l'exonération de cotisations patronales de sécurité sociale au titre d'un salarié en CIE et lui a substitué un relèvement du montant de l'aide directe versée par l'Etat (2).

Néanmoins, votre Rapporteur spécial a souhaité rendre compte de l'examen auquel il s'est livré qui comporte quelques enseignements utiles.

I.- LES CONDITIONS DU CONTRÔLE DES AIDES À L'EMPLOI : UN DISPOSITIF ÉCLATÉ ENTRE PLUSIEURS INTERVENANTS

Votre Rapporteur spécial s'est rendu à la Mission d'Aide au Recouvrement et au Contrôle (MIAREC) de l'Agence centrale des organismes de Sécurité Sociale (ACOSS), qui élabore les principales orientations relatives au contrôle du recouvrement des cotisations de sécurité sociale et centralise les données chiffrées relatives à celui-ci.

Aux termes de l'article L. 225-1-1 du code de la sécurité sociale, l'ACOSS a la responsabilité « de proposer et de promouvoir les orientations en matière de recouvrement et de contrôle des cotisations et contributions (...) et de coordonner et de vérifier leur mise en _uvre par les organismes locaux ».

À ce titre, la convention d'objectifs et de gestion signée, le 3 avril 1998, a fixé pour la période 1998-2001 les engagements mutuels de l'ACOSS et de l'Etat. En ce qui concerne les orientations relatives au contrôle, la convention insiste sur la nécessité d'une approche en termes de « gestion du risque déclaratif », entendu comme la mise au point d'un dispositif et de méthodes de contrôle contribuant de la façon la plus efficace possible à « maîtriser les risques potentiels relatifs à l'assiette des cotisations et contributions ».

De ce point de vue, le risque déclaratif révèle une grande variété de situations allant de la simple méconnaissance des textes à l'utilisation du travail illégal, par exemple : erreur, interprétation de la législation ou de ses failles, utilisation de la prescription, sous-déclaration.

En outre, l'efficacité du contrôle « ne peut pas reposer sur l'espoir que la maîtrise totale du risque découlerait d'une visite systématique de tous les employeurs dans les trois ans, au cours de laquelle seraient examinés tous les documents concernant tous les salariés pour toutes les périodes. Le contrôle est donc par nécessité sélectif. La sélection permet de centrer les efforts sur les principaux risques. Une part des contrôles doit néanmoins demeurer aléatoire et donc dissuasive en n'excluant du champ aucune catégorie de cotisants » (3).

C'est dans cet esprit que la convention précitée a comporté l'engagement de l'ACOSS d'élaborer un plan national de contrôle sur pièces (« projet Fiabilisation des données fournies par le cotisant »), en vue de régulariser rapidement les erreurs déclaratives. À la suite des expérimentations engagées dans six URSSAF en 1998, trois axes prioritaires ont été retenus en raison du risque financier en jeu ou de la nature des catégories de cotisants, peu concernés par le contrôle sur place. À côté des contrôles des documents récapitulatifs et de ceux des déclarations de revenus pour les employeurs et travailleurs indépendants, le troisième axe retenu vise les droits aux allégements et exonérations pour les entreprises.

Dans son avis au Parlement portant sur la mise en _uvre de la convention d'objectifs et de gestion entre l'Etat et l'ACOSS, du 26 septembre 2000, rendu en application de l'article L. 228-1 du code de la sécurité sociale, le président du Conseil de surveillance (4) relevait que : « axe prioritaire de la convention, le dispositif de contrôle sur pièces n'est pas encore généralisé et devrait être étendu à l'ensemble du réseau avant la fin de l'année 2000 ». Les trois priorités précitées, retenues dans l'expérimentation de 1998, constituent désormais des orientations nationales en matière de fiabilisation des données.

Il convient, à cet égard, d'insister sur l'intérêt de la démarche de fiabilisation des données qui consiste à contrôler la cohérence et la validité de l'information, pour, dans la majorité des cas la valider, ou, en cas d'anomalie, engager un traitement immédiat en vue de rechercher l'information exacte auprès du cotisant ou de diligenter un contrôle sur place. A terme, la rapidité de régularisation permet une incidence financière moindre pour le cotisant et, pour l'URSSAF, un recouvrement plus rapide.

A.- LA PLACE DES REDRESSEMENTS PORTANT SUR DES AIDES À L'EMPLOI DANS LES RÉSULTATS D'ENSEMBLE DU CONTRÔLE DES COTISATIONS SOCIALES PAR LES URSSAF

1.- Les résultats généraux du contrôle

L'activité de contrôle s'articule autour du contrôle comptable d'assiette. Il s'agit d'un contrôle sur place d'une entreprise, dont la situation d'ensemble est examinée au regard de la législation globale et non sur un point particulier. Ce contrôle représente la mission principale des services de contrôle. D'après les résultats publiés par l'ACOSS pour 2000, il a représenté 76% des actions de contrôle, concerné 92% des cotisants dont le contrôle a débouché sur un redressement et 92% des redressements ont été réalisés à ce titre.

Selon les données cumulées pour les trois dernières années disponibles (1998-2000), il apparaît que ce contrôle a concerné 23% des personnes, 69% des salariés et 63 % des cotisations susceptibles d'être contrôlées, ce qui traduit bien un contrôle centré sur les cotisants aux enjeux déclaratifs les plus importants.

RÉSULTATS CUMULÉS DU CONTRÔLE DE 1998 À 2000

 

1998 à 2000

Nombre de personnes contrôlées

456.221

Nombre de personnes du fichier

2.021.932

Taux de contrôle des personnes

22,56%

Salariés des personnes contrôlées

15.576.480

Salariés des personnes du fichier

22.539.381

Taux de contrôle des salariés

69,11%

Cotisations liquidées des personnes contrôlées

649.023.200.324

Cotisations liquidées des personnes du fichier

1.030.435.885.222

Taux de contrôle des cotisations

62,99%

Source : ACOSS - Bilan du contrôle des cotisants, 2000.

En termes de résultats, les données disponibles font apparaître un accroissement du montant des redressements de plus de 1,5 milliard de francs sur cinq ans, passant de 2,57 milliards de francs en 1996 à 4 milliards de francs en 2000, soit une augmentation de 56 %, alors que la proportion des entreprises contrôlées et redressées est demeurée globalement stable par rapport :

- au nombre d'entreprises contrôlées (38% en 1996, 41% en 1998 et 43% en 2000) ;

- au nombre d'entreprises enregistrées (3,2% en 1996, 3,4% en 1998 et 3% en 2000).

ÉVOLUTION DES CONTRÔLES DE 1996 À 2000

 

1996

1997

1998

1999

2000

Evolution 1999
/2000
(en %)

Nombre de personnes contrôlées et redressées

61.794

60.601

64.658

61.259

64.546

5,37

Taux de redressement des personnes

38,84%

38,45%

41,24%

41,02%

43,00%

4,82

Montant des
redressements

2.574.736.547

3.023.841.352

3.122.313.001

3.880.187.421

4.068.975.636

4,87

Taux de redressement des cotisations
contrôlées

1,48%

1,54%

1,39%

1,91%

1,84%

4,87

Source : ACOSS - Bilan du contrôle des cotisants, 2000.

Si l'on s'attache aux résultats du contrôle des 50 plus grandes entreprises du fichier de chaque URSSAF, conformément à l'orientation arrêtée par la convention d'objectifs entre l'Etat et l'ACOSS, pour les 1.448 entreprises en cause, qui représentent 1% de l'ensemble des contrôles d'assiette et 18% des salariés et des cotisations contrôlés, 85% d'entre elles (soit 1.237 entreprises) ont été redressées pour un montant de plus de 460 millions de francs.

Quant aux résultats cumulés du contrôle des entreprises, c'est-à-dire en tenant compte, à côté du contrôle comptable d'assiette, des résultats tenant au contrôle partiel, au contrôle d'assujettissement, aux actions préventives et aux compléments à la suite de contrôles (5), il apparaît que de 1996 à 2000, le montant des redressements a augmenté de 52%.

RÉSULTATS CUMULÉS DU CONTRÔLE DES ENTREPRISES

 
 

1996

1997

1998

1999

2000

Evolution 1996 2000
(en %)

Nombre d'actions de contrôle

169.040

170.561

167.643

160.396

160.809

- 4,86

Nombre d'actions de con-trôle avec redressement

63.504

62.980

66.713

63.089

66.170

+ 4,20

Montant des redressements

2.722.673.293

3.192.329.429

3.426.421.486

4.036.234.450

4.148.097.068

52

Personnes redressées/
Personnes contrôlées

37,57%

36,93%

39,79%

39,33%

41,15%

9,53

Redressement par personne redressée

42.874

50.688

51.361

63.977

62.688

46,21

Redressement par personne contrôlée

16.107

18.717

20.439

25.164

25.795

60

Source : ACOSS - Bilan du contrôle des cotisants, 1998, 1999 et 2000.

Ces données témoignent de l'existence d'un dispositif de contrôle dynamique et orienté vers la recherche d'une efficacité accrue. En termes de ressources humaines, il convient de relever que la fonction de contrôle est essentiellement assurée par 1.400 inspecteurs répartis entre 105 URSSAF.

2.- Les redressements portant sur les mesures dérogatoires
en faveur de l'emploi

Si l'on prend en compte la typologie des redressements (6) selon leur nature, il convient de relever que la part la plus importante de leur montant est liée à la réintégration, dans l'assiette, des cotisations de rémunérations non soumises à cotisation (45%), la deuxième cause de redressement concernant toutefois les mesures dérogatoires en faveur de l'emploi dont la proportion a été ramenée à 17% de l'ensemble des redressements en 2000, après un pic à 19% en 1999 (et après 9% en 1996, 13% en 1997, 18% en 1998).

Exprimés en pourcentage du nombre total de redressements effectués, ceux relatifs aux mesures dérogatoires en faveur de l'emploi ont représenté 27% en 2000 (après 28% en 1999 et 1998). Parmi les mesures en cause, celles relatives aux allégements des charges sur les bas salaires ont produit le plus d'irrégularités (56%).

RÉPARTITION DES REDRESSEMENTS AU TITRE DES MESURES DÉROGATOIRES EN FAVEUR DE L'EMPLOI

Source : ACOSS - Bilan du contrôle des cotisants, 2000.

B.- LA DIVERSITÉ DES AIDES À L'EMPLOI AU REGARD DES PROBLÈMES DE RECOUVREMENT DE L'INDU

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1.- Diversité ou complexité des aides ciblées ?

Au moyen des aides ciblées, la politique de l'emploi tend à utiliser des mesures d'exonération ou d'abattement de charges sociales pour améliorer les conditions dans lesquelles les personnes les plus éloignées du marché du travail sont susceptibles de trouver un emploi.

Cet aspect de la politique de l'emploi avait suscité plusieurs observations divergentes de la part des personnalités auditionnées par la MEC lors de sa première session consacrée aux aides à l'emploi :

- en tant que chef d'entreprise dans le secteur de la métallurgie, M. Arnaud Leenhart avait tendu, le 27 mai 1999, à relativiser la portée des aides ciblées par rapport aux aides générales, en particulier concernant la formation : « Concernant les aides ciblées (...), contrats initiative emploi et contrats de qualification et d'apprentissage, je répondrai plus en tant que chef d'entreprise (...). Je n'ai, pour ma part, jamais beaucoup pris de décisions en fonction de la fiscalité liée à telle ou telle aide. (...) je n'ai jamais tellement pris de décisions en pensant, par exemple, qu'il fallait attendre que telle ou telle personne soit dans le cadre d'un contrat d'initiative emploi pour pouvoir tirer un bénéfice fiscal de son embauche. Je n'ai jamais embauché que les gens que j'avais envie d'embaucher, rarement avec l'idée d'avoir telle ou telle prime » ;

- en tant que représentant des artisans, M. Jean Lardin avait également critiqué, le 27 mai 1999, les aides ciblées : « (...) les aides ciblées sont contestables. Elles ont des effets pervers pour les entreprises. Elles peuvent créer des effets d'aubaine et troubler le jeu de ce que doit être la véritable embauche » ;

- en tant que responsable du service public de l'emploi au niveau déconcentré, M. Christian Lhote, Directeur départemental du travail, avait relativisé, le 6 mai 1999, le sentiment de la complexité des aides et du désintérêt des entreprises pour les aides ciblées : « (...) je ne pense pas que toutes les aides puissent être modifiées, à un moment ou à un autre, pour que l'Etat puisse mieux répondre aux besoins d'entreprises ou de populations spécifiques. (...) le procès fondé sur la multiplication d'aides subsistant les unes à côté des autres est maintenant un débat dépassé. Depuis une dizaine d'années, les aides mises en place se substituent à d'autres qui sont supprimées. (...) d'après les constats que je peux faire sur le terrain ce sont, plutôt que les grosses entreprises, les petites entreprises qui accèdent aux aides à l'emploi [comme] l'apprentissage, le contrat de qualification, le CIE ; ce sont d'abord les entreprises commerciales, les entreprises de services dans l'hôtellerie et la restauration qui accèdent au CIE, beaucoup plus que les entreprises industrielles. Les entreprises industrielles recherchent souvent un personnel plus qualifié et plus capable de suivre une formation qu'elles envisagent tout à fait de mettre en place ».

L'existence d'une diversité des comportements des entreprises au regard des aides ciblées, selon leur taille et leur secteur d'activité, apparaît confirmée dans une étude récente réalisée par la Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) du ministère de l'emploi et de la solidarité (7). L'enquête a visé à mettre en évidence quel type d'entreprise a plus volontiers recours à un type déterminé d'emploi aidé, en prenant pour référence le contrat d'apprentissage destiné aux jeunes de 16 à 26 ans, le contrat de qualification destiné au même public, désirant obtenir ou améliorer sa qualification professionnelle, le contrat initiative emploi, qui vise à faciliter l'insertion professionnelle des demandeurs d'emploi durablement exclus du marché du travail ou rencontrant de grandes difficultés, et l'abattement lié au travail à temps partiel, destiné à faciliter l'embauche de salariés en contrat à durée indéterminée à temps partiel ou à transformer des CDI à temps plein en CDI à temps partiel.

Les principaux enseignements de cette enquête sont les suivants :

- le recours aux mesures d'aide à l'emploi est majoritairement le fait des très petites entreprises : plus de la moitié des salariés des entreprises de 1 à 5 salariés ont été embauchés sous contrat aidé alors que ces salariés représentent 4% des effectifs des entreprises de plus de 200 salariés, lesquelles ne regroupent que 16% des contrats aidés alors qu'elles emploient la moitié des salariés de l'ensemble des entreprises bénéficiaires ;

- le type d'aide utilisée dépend étroitement du champ d'activité économique. Par exemple, l'abattement de cotisations sociales pour l'embauche à temps partiel représente plus de la moitié des contrats aidés, plus de 71% de l'ensemble des contrats aidés utilisés dans les grandes entreprises, 44% des contrats aidés dans l'industrie et 59% dans les services aux entreprises, alors que le CIE est le dispositif dominant dans les entreprises du secteur des transports ;

- globalement, les performances économiques et financières des entreprises utilisatrices des contrats aidés apparaissent moins favorables, surtout lorsqu'elles sont utilisatrices régulières des contrats aidés. La DARES observe ainsi que : « les entreprises recrutant des salariés en CIE, mesure la plus avantageuse au niveau financier, cherchent (...) par ce biais à réduire leurs charges de personnel et augmenter leur marge d'exploitation. L'effet d'aubaine du dispositif, souvent dénoncé, n'est donc pas mis en évidence ici, au contraire ».

TAUX D'UTILISATION DES DIFFÉRENTS TYPES DE CONTRATS SELON LA TAILLE ET LE SECTEUR D'ACTIVITÉ DES ENTREPRISES

 

Part des différents types de contrat
(en % du nombre total de contrats dans chaque groupe d'entreprises)

Proportion d'entreprises utilisatrices selon le type de contrat
(en %)

C.I.E.

T.P.

C.Q.

APP.

C.I.E.

T.P.

C.Q.

APP.

Selon la taille

               

1 à 5 salariés

27,6

44,9

6,0

22,3

41,5

43,6

11,4

29,5

6 à 9 salariés

25,8

40,6

7,1

26,4

45,3

43,4

17,7

39,9

10 à 19 salariés

26,5

39,2

8,0

25,7

50,6

41,7

23,4

41,2

20 à 49 salariés

20,1

57,2

7,2

15,3

55,5

41,3

30,8

40,0

50 à 199 salariés

18,5

57,3

9,2

14,8

54,1

44,6

42,4

46,6

200 salariés ou plus

8,3

71,5

8,9

11,4

53,6

53,9

62,4

64,4

Selon le secteur d'activité

               

Industrie

24,3

44,0

8,1

23,5

49,0

39,2

19,5

39,7

BTP

26,4

19,5

8,0

46,2

40,8

23,5

14,9

57,4

Transports

41,5

39,2

14,0

5,3

63,6

38,4

24,2

11,2

Commerce

23,3

47,7

8,8

20,2

43,7

44,3

18,8

33,9

Services aux entreprises

25,3

59,1

8,9

6,7

47,0

52,7

19,3

14,6

Services aux particuliers

12,6

67,9

3,6

15,9

43,3

55,1

14,7

37,1

Ensemble

21,8

51,2

7,4

19,8

45,4

43,2

18,0

35,1

Lecture : dans l'industrie, 44% des salariés employés en contrat aidé font bénéficier leur employeur de l'exonération temps partiel, contre 24,3% pour le CIE, 8,1% pour le CQ et 23,5% pour l'apprentissage. 49% des entreprises industrielles comptent au moins un salarié en CIE dans leurs effectifs, contre 39,2% pour l'exonération temps partiel, 19,5% pour le CQ et 39,7% pour l'apprentissage.

Champ : entreprises utilisant au moins un contrat en 1999.

Source : MES-DARES.

Il ressort de cette étude que le rapprochement des logiques sociales et des logiques économiques conduit à ce que la notion d'aide à l'emploi trouve une traduction concrète différente en fonction des publics ciblés, qu'il s'agisse des demandeurs d'emplois et des salariés concernés, ou des entreprises incitées à les recruter. Il y a là une source indéniable de complexité de la réglementation.

2.- La gestion administrative des dispositifs : les conséquences de la pluralité des intervenants

Dans une circulaire du 6 mars 2000, tendant à expliciter les compétences respectives du service public de l'emploi et des organismes de recouvrement en ce qui concerne la mise en place et la gestion des mesures pour l'emploi, l'ACOSS a dressé le constat suivant : « la gestion des mesures d'exonération de charges liées à l'emploi souffre de la multiplicité des acteurs appelés à intervenir dans leur mise en _uvre. (...) Il peut en résulter une mise en place difficile de la concertation entre partenaires, des interprétations et des applications erronées ou divergentes qui peuvent engendrer, d'une part, une moindre efficacité alors que les enjeux financiers des mesures ne cessent de s'accroître, d'autre part, une insécurité juridique pour les cotisants ».

La circulaire précitée a eu précisément pour objet d'apporter une première réponse à cette question en clarifiant les compétences respectives des services déconcentrés du travail et de l'emploi et des organes de recouvrement dans l'octroi et la mise en _uvre des différents dispositifs d'aide.

Un exemple de cette complexité est clairement mis en évidence dans le cas des mesures ciblées selon qu'elles sont liées ou non à des contrats aidés. Dans la première hypothèse, en effet, les organismes chargés du recouvrement ne peuvent opérer eux-mêmes de redressements, en cas de conventions conclues ou d'habilitations données par les services compétents, qu'ils soient centraux ou déconcentrés, du service public de l'emploi. S'il leur apparaît que les conditions d'obtention du bénéfice de la mesure ne sont pas réunies ou que des irrégularités existent, ils doivent en informer les échelons déconcentrés du service public de l'emploi (ANPE, DDTEFP).

Pour l'illustrer, on comparera l'exemple du contrat initiative emploi avec celui de l'abattement forfaitaire de cotisations patronales pour les emplois à temps partiel.

Dans le cas du CIE, le rôle du service public de l'emploi et celui de l'organisme de recouvrement des cotisations sociales doivent être envisagés lors de la conclusion de la convention et à l'occasion de son exécution.

S'agissant de la conclusion, depuis le 24 janvier 1999, en application du décret du 8 décembre 1998, la demande de convention est impérativement présentée à l'ANPE avant l'embauche (8). Les imprimés de la convention comportent plusieurs feuillets qui sont adressés à différents destinataires :

- la DDTEFP, qui est également destinataire d'une copie du contrat de travail. Elle doit vérifier le respect de la réglementation relative au licenciement économique, au non-cumul d'aides et le fait que l'embauche ne résulte pas du licenciement d'un salarié sous contrat à durée indéterminée. Si ces conditions ne sont pas respectées, la DDTEFP doit informer immédiatement le service instructeur de l'ANPE pour déclarer la convention nulle, ce qui entraîne le reversement des aides éventuellement perçues y compris le montant des exonérations spécifiques de cotisations patronales de sécurité sociale ;

- l'employeur, destinataire de deux feuillets, qui doit en adresser un à l'URSSAF ;

- l'URSSAF. En principe, le feuillet qui lui est destiné doit lui être transmis par l'employeur en même temps que le premier bordereau mensuel ou trimestriel des cotisations suivant la signature de la convention. Mais aucun texte ne prévoit de limiter dans le temps la transmission de ce document.

S'agissant de la résiliation de la convention, les intervenants sont :

- l'ANPE, qui informe la DDTEFP et l'URSSAF de la date de résiliation de la convention ;

- l'URSSAF, qui, compte tenu de la date de résiliation, calcule le montant des cotisations sociales exonérées pendant la période courant jusqu'à cette résiliation. Il convient de noter que l'URSSAF ne peut remettre en cause l'exonération ; elle peut seulement informer l'ANPE de l'existence d'une irrégularité ou du non-respect des conditions prévues pour le bénéfice de l'exonération. En outre, l'URSSAF ne vérifie pas l'effectivité de la mise en recouvrement des cotisations dont l'exonération a été remise en cause, le décret du 19 août 1995 prévoyant expressément que l'employeur reverse à l'Etat le montant des cotisations sociales dont il a été exonéré ;

- la DDTEFP, qui au vu des documents de l'URSSAF, émet un ordre de reversement selon les règles de la comptabilité publique et transmet le dossier au trésorier payeur général.

● Dans le cas de l'abattement forfaitaire de cotisations patronales pour les emplois à temps partiel, le dispositif a été en revanche conçu pour fonctionner selon un mode essentiellement déclaratif et le rappel des cotisations exonérées relève de la seule compétence de l'organisme de recouvrement :

- l'employeur fait par écrit la déclaration à l'autorité administrative (par exemple la DDTEFP) dans les soixante jours suivant la prise d'effet du contrat ou de l'avenant ;

- la DDTEFP dispose d'un mois à compter de la réception de la déclaration (article L. 322-12 du code du travail) pour vérifier la conformité du contrat aux dispositions régissant le travail à temps partiel. A défaut de notification d'une décision de refus de l'aide dans ce délai, le contrat est présumé remplir les conditions requises pour ouvrir droit à l'abattement ;

- l'URSSAF, au titre de sa mission de contrôle de la régularité des déclarations et de l'exactitude du montant des cotisations, peut détecter des cas de non-respect des conditions posées par la législation sur le travail à temps partiel.

Diverses situations sont alors envisageables :

· l'inéligibilité du contrat au bénéfice de l'abattement : l'URSSAF informe la DDTEFP d'une omission détectée dans l'instruction. Il appartient alors à la DDTEFP de notifier une décision de refus à l'employeur, mais l'URSSAF est fondée à recouvrer les cotisations exonérées, même si sa démarche auprès de l'autorité administrative reste sans réponse de la part de cette dernière ;

· le non-respect de la durée du travail : l'URSSAF procède aux redressements sur la base des cotisations normalement dues, même en l'absence de toute décision de la DDTEFP ;

· de fausses déclarations ou une inexactitude dans l'assiette des cotisations : l'URSSAF recouvre les exonérations indûment pratiquées et en informe la DDTEFP ;

· des modifications du contrat de travail non conformes à la législation sur le travail à temps partiel : l'URSSAF informe l'employeur et la DDTEFP, sans que cette constatation puisse avoir de conséquences en matière de reversement des cotisations.

Au total, il apparaît que l'efficacité du dispositif de contrôle des aides à l'emploi sera d'autant plus grande que les modalités de son intervention prendront en compte :

- la situation et la nature des entreprises ayant recours à certains types d'aide ;

- la répartition habituelle des compétences entre le service public de l'emploi et les organismes de recouvrement.

Les difficultés rencontrées dans le recouvrement des indus au titre des contrats initiative emploi en ont apporté, de manière certaine, la démonstration.

II.- LE CAS DU RECOUVREMENT DES INDUS
AU TITRE DES CONTRATS INITIATIVE EMPLOI

Les caractéristiques mêmes du contrat initiative emploi ont eu des répercussions sur ses modalités de gestion et ont suscité des difficultés en ce qui concerne le remboursement des avantages indûment accordés.

Le premier élément a été le choix initial de la nature de la sanction en cas de rupture anticipée du CIE. Alors que le dispositif de contrat de retour à l'emploi, auquel le CIE a été substitué, ne prévoyait pas de reversement des aides obtenues en cas de rupture anticipée, une telle obligation a été instituée pour le CIE. Le bénéfice des aides, prime et exonération de cotisations sociales, est donc subordonné à la justification périodique, par l'employeur, du maintien de l'emploi, la rupture du contrat de travail entraînant l'obligation de reverser l'intégralité des aides perçues. L'objectif poursuivi apparaît tout à fait pertinent :

- au regard de la bonne gestion des deniers publics ;

- au regard de la politique de l'emploi elle-même, puisque le CIE peut être analysé comme l'engagement pris par l'entreprise de contribuer à l'insertion professionnelle des personnes les plus fragiles, en échange d'une forme d'indemnisation de cette action de solidarité.

Ces principes généraux louables se sont heurtés à des difficultés d'ordre administratif ainsi qu'à l'insuffisante prise en compte de la nature de la plupart des entreprises utilisatrices du CIE.

● Dans son rapport public pour 1999 sur les aides au retour à l'emploi dans le secteur public marchand, la Cour des comptes a abordé la question de la récupération des avantages indus en matière de contrat initiative emploi (CIE).

S'agissant en particulier de la récupération des aides à la suite d'une rupture du CIE avant son échéance, la Cour des comptes a relevé que « la récupération des indus sur exonérations de charges reste marginale » et que les « résultats des procédures sont insignifiants ».

● Votre Rapporteur spécial a interrogé l'Agence nationale pour l'emploi sur les modalités de recouvrement des indus au titre du CIE.

S'agissant des résultats du recouvrement des aides forfaitaires, l'ANPE a indiqué que : « le nombre des titres émis en recouvrement des aides forfaitaires est annuellement de 5000 à 10000 pour un montant de 80 à 90 millions de francs. Leur taux de recouvrement est d'environ 50% ».

S'agissant des exonérations de charges sociales, la réponse apportée conduit à mettre en évidence deux éléments :

- en premier lieu, la complexité des procédures administratives. Cet élément de réponse est reproduit dans l'encadré ci-après. Cette complexité est manifeste et ses effets sont sans doute particulièrement aggravés en raison du choix fait dans le décret de 1995 de confier à l'Etat, et non pas à l'URSSAF, le recouvrement des cotisations ;

- en second lieu, l'ANPE a souligné que : « dans de nombreux cas, l'employeur ne fournit pas de justificatifs à l'échéance et ne répond pas aux relances faites par l'ANPE. En ce cas, en l'état actuel des textes, l'Agence doit présumer la rupture du contrat de travail et initier la procédure de recouvrement, alors que le contrat de travail peut n'avoir pas été rompu ou que la rupture ne doive pas donner lieu à reversement. L'étude d'un échantillon a montré qu'en ce qui concerne les exonérations de charge, 80% des dossiers relèveraient de ces situations. L'Agence, interlocuteur direct des employeurs, a donc à faire face à de nombreuses contestations de leur part ». Ce deuxième aspect peut s'analyser comme une conséquence de l'excès « d'impôt papier » à l'égard d'entreprises qui sont les moins préparées à y faire face, s'agissant d'abord de petites entreprises.

DESCRIPTION DE LA PROCÉDURE ACTUELLE DES RUPTURES

1.- Rupture des CIE avec aide forfaitaire

L'entreprise adresse à son agence locale pour l'emploi (ALE) la feuille de paye du 3e mois, du 12e mois, du 24e mois ou de la fin du CDD. Au reçu de ces justificatifs, l'ALE saisit le « service fait ».

Celui-ci déclenche le paiement de l'aide pour la période écoulée effectué par la direction régionale ANPE (DRA) concernée.

Lorsque les entreprises bénéficient d'une aide, celle-ci étant versée par l'ANPE, la relance éventuelle adressée par l'ALE aux entreprises qui tardent à envoyer le justificatif est généralement suivie d'effet. L'absence de réponse correspond fréquemment à une rupture sur l'initiative de l'employeur, ce qui conduit l'agence à poursuivre ses investigations.

L'ANPE demande alors le reversement des aides indues (50% d'entre elles sont récupérées) et transmet à l'URSSAF le nom de ces entreprises pour reversement des exonérations.

L'enjeu de la prime amène à un suivi régulier du CIE « primé ». Il n'en va pas de même pour les CIE sans aide forfaitaire (entreprises ne bénéficiant que de l'exonération des charges sociales).

2.- Rupture des CIE sans aide forfaitaire

Les entreprises doivent adresser le justificatif de la présence du salarié en CIE aux 12e et 24e mois (ou fin de contrat à durée déterminée). Au vu du justificatif, le « service fait » est saisi pour le 3e et le 12e mois, puis pour le 24e mois ou en fin de CDD.

Dans les faits, on constate cependant que beaucoup d'entreprises n'envoient pas spontanément ces justificatifs. Une procédure lourde est alors mise en _uvre dont le schéma ci-après donne l'illustration.

Source : Agence nationale pour l'emploi.

PROCÉDURE DE TRAITEMENT DES CIE SANS PRIME EN CAS DE RUPTURE DE CONTRAT IMPUTABLE À L'ENTREPRISE OU D'ABSENCE DE JUSTIFICATIF DE L'ENTREPRISE

 

graphique
         

DG

         

DRA

 

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graphique
         

(2) Courrier de relance en cas d'absence de justificatifs

   

(3) Réception justificatifs suite à la relance et service fait

 
   

(1) Service fait
après réception des justificatifs envoyés sponta-nément

                 

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ALE

ENTREPRISE

 

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(11) Ordre de virement

 

(6) Réponses chiffrées ou contestation

     

(4) Etat URSEL

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TPG
                   

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(10) Pour exécution de
l'ordre de reversement

   

(5) Demande de chiffrage des exonérations

     

(7) Demande
d'informations complémentaires
pour certains cas
de contestation

                         
                         
                         

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Préfet
   

(9) Pour visa

DDTEFP

 

(8) Transmission liste des entreprises et des montants à faire reverser

 

URSSAF

         
                         

(1) Si le justificatif est fourni aux échéances, le « service fait » est saisi en ALE ; dans le cas contraire, l'absence de « service fait » est repérée automatiquement..

(2) Les entreprises pour lesquelles le « service fait » de la mesure n'a pas été réalisé font l'objet d'une relance automatique par mailing.

(3) Certaines des entreprises contactées par ce mailing indiquent en retour, à la DRA dont elles dépendent, la situation du salarié dans leur entreprise (présence, départ imputable au salarié, départ imputable à l'entreprise).

(4) Les conventions pour lesquelles aucune réponse n'a été apportée de la part des entreprises sont considérées comme rompues automatiquement Ces entreprises ainsi que celles qui ont répondu en indiquant une rupture qui leur est imputable sont intégrées dans un état adressé mensuellement par chaque DRA aux URSSAF concernées.

Il faut noter qu'un nombre important d'entreprises dont les coordonnées comportent une anomalie (mauvaise adresse, Siret erroné, etc...) ne peuvent être relancées. Elles ne sont pas indiquées dans l'état des ruptures transmis aux URSSAF et les conventions ne sont pas soldées.

(5) Les URSSAF contactent les entreprises indiquées sur cet état pour qu'elles chiffrent le montant des exonérations dont elles ont bénéficié depuis l'embauche.

(6) Les entreprises communiquent aux URSSAF les calculs demandés ou contestent la décision de reversement prise à leur encontre ou encore ne répondent pas.

(7) Certaines URSSAF reviennent alors vers la DRA pour demander des informations complémentaires sur les entreprises qui contestent le bien-fondé du reversement. D'autres poursuivent la procédure sans tenir compte des protestations reçues.

(8) Les URSSAF transmettent aux DDTEFP la liste des entreprises et le montant des reversements à poursuivre.

(9) Les ordres de reversement sont visés par le préfet ou le DDTEFP par délégation, avant transmission au trésorier-payeur général (TPG).

(10) Les ordres de reversement sont transmis au TPG.

(11) Le TPG adresse l'ordre de reversement aux entreprises.

Cette description d'une procédure complexe ne fait pourtant pas état de la démultiplication d'échanges de courriers, de contacts téléphoniques, éventuellement de visites ou de recours entre les URSSAF, les DRA, les ALE et les entreprises...

Source : Agence nationale pour l'emploi.

● En application de l'article 141 de la loi de finances pour 2002 (n° 2001-1275 du 28 décembre 2001), le CIE n'ouvre désormais plus droit, en tant que tel, à une exonération de cotisations sociales, qui a été remplacée par un relèvement du montant de la prime. A titre transitoire, l'exonération reste applicable aux conventions relatives aux CIE en cours au 1er janvier 2002.

En conséquence, la procédure de récupération des avantages indus au titre du CIE se limitera désormais à celle de la récupération des aides forfaitaires, qui est moins complexe à mettre en _uvre.

*

* *

Au terme de cet examen, plusieurs observations peuvent être faites. Les choix en ce qui concerne les sanctions pour rupture d'un CIE et leur mise en _uvre, s'ils peuvent apparaître satisfaisants sur le plan des principes généraux, ont sans doute insuffisamment pris en compte plusieurs données concrètes.

1° Sur le choix de la sanction, le choix du « tout ou rien » semble avoir méconnu les caractéristiques mêmes du CIE. L'avantage est certes important, mais il est la contrepartie de l'emploi de personnes parmi les plus éloignées du marché du travail, c'est-à-dire que l'entreprise ne les emploieraient pas « spontanément ».

On peut douter, dès lors, que leur stratégie soit d'organiser une pratique systématique des « ruptures anticipées ». Aussi le choix de ne pas récupérer rétroactivement les aides déjà versées aurait-il pu être tout à fait justifié. Les données en ce qui concerne les entreprises ayant recours au CIE resultant de l'étude précitée de la DARES vont aussi dans ce sens.

2° Sur le choix des modalités de recouvrement des cotisations exonérées, le choix fait en 1995 de ne pas confier à l'URSSAF le recouvrement des cotisations n'a pas tenu compte de ce qu'aurait été un partage des compétences en fonction des « métiers ». Il a donc ajouté un facteur supplémentaire de complexité à une situation déjà marquée par la multiplicité des intervenants. Le fait que l'exonération de cotisation soit compensée par l'Etat est sans incidence sur la répartition des compétences dans le contrôle et le recouvrement effectif des cotisations. On peut penser qu'il aurait été possible de distinguer le recouvrement des cotisations confié aux organismes qui en sont traditionnellement chargés et la question des relations financières entre les régimes sociaux et l'Etat, qui relève plus d'une approche centralisée. Or le choix fait en 1995 a abouti à ce que, comme l'a relevé la Cour des comptes dans les termes employés par la mission de contrôle économique et financier auprès des organismes de sécurité sociale : « la procédure en vigueur présente la particularité de faire intervenir successivement plusieurs organismes dont aucun n'a un intérêt personnel à agir ».

3° Sur l'importance des formalités exigées, le nombre des cas où, selon l'ANPE, une procédure de récupération serait engagée sans fondement, parce que le CIE n'aurait pas été rompu mais un formulaire seulement non adressé dans les délais, souligne, une nouvelle fois, les inconvénients de l'excès d'« impôt papier ». Au-delà de la réforme réalisée par l'article 141 de la loi de finances pour 2002, on peut légitimement considérer que la portée de ces observations dépasse le seul cas du CIE.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent rapport d'information au cours de sa séance du mardi 5 mars 2002.

Après la présentation de votre Rapporteur spécial et les observations du Président Henri Emmanuelli, de M. Augustin Bonrepaux et de M. Didier Migaud, Rapporteur général, M. Jean-Jacques Jégou a demandé des précisions sur les propositions formulées au regard des précédents travaux de la MEC.

Votre Rapporteur spécial a indiqué qu'il émettait trois types de propositions : la modulation de la sanction en cas de rupture du CIE, la simplification des modalités de recouvrement des aides à l'emploi indues et un allégement des formalités exigées.

M. Pierre Méhaignerie a souhaité aborder la question des aides à l'emploi accordées par les collectivités locales en considérant que le recouvrement des aides indues était rendu difficile lorsque l'entreprise avait disparu ou lorsque sa pérennité était rien moins qu'assurée.

Votre Rapporteur spécial a indiqué que son rapport n'abordait pas les aides accordées par les collectivités locales. Il a considéré que les commissions régionales de contrôle nouvellement instituées seraient d'un grand intérêt pour l'étude des aides des collectivités locales dans le sens d'une meilleure efficacité et d'un meilleur contrôle. Il a rappelé que la région Centre avait préfiguré cette orientation par la mise en place d'une commission dédiée à cette fin.

M. Jean-Jacques Jégou a demandé des précisions sur la proportion des aides indues récupérées par rapport aux aides globales.

Votre Rapporteur spécial a expliqué qu'il avait travaillé d'après les données de la mission d'aide au recouvrement et au contrôle (MIAREC) de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) qui ne visent que les allégements de cotisations sociales. Compte tenu du caractère foisonnant des aides à l'emploi, il est difficile d'établir un ratio synthétique. Il a considéré que, s'agissant des autres formes prises par les aides, les montants recouvrés représentaient une proportion faible des aides accordées par l'Etat.

*

* *

La Commission a ensuite autorisé, en application de l'article 146 du Règlement, la publication du rapport d'information.

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3667 - Rapport d'information de M. Gérard Bapt sur recouvrement des aides à l'emploi indues aux entreprises,

() Rapport d'information n° 1781, 7 juillet 1999, annexe 3, Les aides à l'emploi, présentée par M. Gérard Bapt.

() Projet de loi de finances pour 2002, rapport spécial sur les crédits du travail et de l'emploi, annexe n°23, présentée par M. Gérard Bapt, pages 43 et suivantes.

() ACOSS-MIAREC, convention d'objectifs 1998-2001, document d'orientation du contrôle.

() M. Charles Descours, ancien sénateur.

() Sans tenir compte des contrôles au titre du travail illégal et des contrôles sur les travailleurs indépendants.

() Les redressements peuvent être positifs (dette de l'entreprise) ou négatifs (créance de l'entreprise).

() DARES, Emplois aidés et performances des entreprises, Premières informations et premières synthèses , janvier 2002, N° 02-01 .

() Auparavant la demande de convention devait être présentée dans le délai d'un mois après l'embauche.