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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIIIe législature
Session ordinaire de 2011-2012

Compte rendu
intégral

Première séance du mercredi 26 octobre 2011

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Bernard Accoyer

1. Questions au Gouvernement

Horaires de la SNCF

M. Pascal Deguilhem

M. Thierry Mariani, ministre chargé des transports

Sommet de l’euro

M. Dominique Le Mèner

M. François Baroin, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie

Agences de notation

M. Jean-Claude Sandrier

M. François Baroin, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie

Approvisionnement en électricité

M. Pascal Brindeau

M. Éric Besson, ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique

Pension de réversion pour les couples pacsés

Mme Marie-Françoise Clergeau

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement

Élections en Tunisie

M. Jean-Louis Christ

M. Alain Juppé, ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes

Sort de Mme Asia Bibi

M. Claude Leteurtre

M. Alain Juppé, ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes

Situation de PSA

M. Gérard Gaudron

M. Éric Besson, ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique

Handicap

Mme Martine Carrillon-Couvreur

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Avenir de l’école

M. Bernard Debré

M. Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

Droits de plantation

M. Jean-Paul Dupré

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement

Sport à l’école

M. Robert Lecou

M. Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

Vie chère en outre-mer

M. Apeleto Albert Likuvalu

Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l’outre-mer

Santé mentale

M. Guy Lefrand

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Accès aux soins des plus démunis

Mme Gisèle Biémouret

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé

Présidence de M. Marc Le Fur

2. Rappel au règlement

M. Jean Mallot

3. Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 (suite)

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé

Première partie

Article 1er

M. Jean Mallot

Mme Marisol Touraine

M. Jean-Pierre Door, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour l’assurance maladie et les accidents du travail

Article 2 et Annexe A

M. Jean-Luc Préel

M. Gérard Bapt

Amendement no 252

M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour les recettes et l’équilibre général

Amendements nos 253, 254 rectifié, 255, 256, 301, 257, 258, 259, 260

Deuxième partie

Article 3

Amendement no 423

Article 4

Article 5

Mme Marisol Touraine

Article 6

M. Jean-Luc Préel

M. Jean-Marie Le Guen

Mme Valérie Pécresse, ministre

Mme Marisol Touraine

Article 7

Mme Marisol Touraine

Amendement no 138, 741 (sous-amendement), 742 (sous-amendement)

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales

Article 8

Article 9

Mme Jacqueline Fraysse

M. Jean-Marie Le Guen

M. Jean Mallot

M. Michel Liebgott

Troisième partie

Avant l'article 10

Amendements nos 518 rectifié, 519 rectifié, 357, 481, 358, 480, 726, 251 rectifié, 359, 361 rectifié, 362 rectifié

Article 10

M. Jean-Luc Préel

M. Jean Mallot

Mme Marisol Touraine

M. Michel Issindou

Amendements nos 121, 276, 139, 292, 302, 312, 360 rectifié, 644, 277, 749, 140, 141, 282

Après l'article 10

Amendements nos 442, 512

Présidence de M. Jean Mallot

4. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Bernard Accoyer

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Questions au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par une question du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Horaires de la SNCF

M. le président. La parole est à M. Pascal Deguilhem.

M. Pascal Deguilhem. Monsieur le ministre chargé des transports, vous n’avez évidemment pas le pouvoir de faire partir et arriver les trains à l’heure. Il y a pourtant bien des choses à dire sur ce sujet : la réalité vécue aujourd’hui par les usagers n’est pas conforme à la satisfaction affichée de la direction de la SNCF.

Mais si vous n’avez pas ce pouvoir, vous avez un devoir : celui de ne pas laisser des centaines de milliers d’usagers du train sans solution acceptable dans le grand chambardement des horaires SNCF annoncé pour le 11 décembre prochain. À partir de cette date en effet, des centaines de milliers de salariés, d’étudiants, de lycéens, d’apprentis vont voir leur temps de trajet considérablement rallongé, leur arrêt supprimé, quand ce n’est pas leur train, puisque d’ici là seules quelques modifications à la marge pourront être apportées. Bref, ceux qui ont le plus besoin d’une solution de transport collectif, moderne, durable, ceux qui ont organisé leur vie en fonction de la desserte ferroviaire, vont en être privés du fait d’une gestion technocratique de cette réorganisation massive. À aucun moment une réelle concertation n’a été mise en place avec les usagers, les élus locaux, les acteurs économiques, alors même que de très nombreux itinéraires se verront appliquer ces nouveaux horaires totalement déconnectés des besoins des usagers, aujourd’hui ulcérés.

Qui plus est, ce chamboulement intervient dans un contexte de fonctionnement dégradé par les réductions de personnel, la vétusté de quantité de matériels, les incidents de réseau, le quasi-abandon de certaines lignes, et ce malgré les efforts notables des régions.

Monsieur le ministre, vous avez la possibilité de réunir rapidement, dans chaque département, sous l’autorité des préfets, l’ensemble des acteurs concernés pour faire évoluer cette grille horaire car l’inquiétude, l’incompréhension et le mécontentement prédominent. En avez-vous l’intention ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé des transports.

M. Thierry Mariani, ministre chargé des transports. Monsieur le député, mon intention est que notre pays conserve un réseau ferroviaire moderne et qui sache s’adapter.

Quel est le problème de la France ?

M. Patrick Lemasle. C’est vous, le problème !

M. Thierry Mariani, ministre. Pendant des années, tous gouvernements confondus, nous avons su développer la grande vitesse. Mais peut-être avons-nous aussi, les uns comme les autres, un peu oublié le réseau classique.

Depuis des années, on rénovait traditionnellement cinq cents kilomètres de lignes classiques chaque année. Nous avons décidé, avec Nathalie Kosciusko-Morizet, de passer à plus de mille kilomètres par an afin que, au-delà de la grande vitesse, les dessertes d’aménagement du territoire restent opérationnelles.

Cela va-t-il poser des problèmes ? Oui, il faut dire la vérité. Dix-sept mille trains circulent chaque jour, qui marquent, en moyenne, six arrêts et demi. Pour nous mettre en capacité de rénover deux fois plus de voies classiques et garantir à nos concitoyens, dans les années à venir, des lignes classiques toujours au niveau, mais également pour permettre au réseau d’absorber les nouvelles lignes de TGV – je pense à la ligne Rhin-Rhône que nous avons inaugurée avec le Président de la République –, 85 % des horaires vont effectivement changer le 11 décembre. Je le dis à tous les Français, en vous remerciant de votre question : oui, il y aura des changements. Je reconnais qu’un certain nombre de concitoyens auront des horaires qui leur conviendront moins. Permettez-moi aussi de penser qu’un certain nombre d’autres auront des horaires qui leur conviendront mieux.

Ce 11 décembre, c’est simplement une révolution pour faire en sorte que la France préserve le haut niveau de ses voies ferrées, qui a toujours constitué son atout et qui doit le rester dans les années à venir.

M. le président. Je vous remercie, monsieur le ministre.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Temps de parole écoulé !

M. Thierry Mariani, ministre. J’en profite, monsieur le président, pour dire que tous les voyageurs de la SNCF se verront distribuer ce tract pour mieux les informer. (Protestations sur plusieurs bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. Allons, mes chers collègues ! M. le ministre a pris un tout petit peu de retard pour une annonce supplémentaire. Ce n’est pas bien méchant !

Sommet de l’euro

M. le président. La parole est à M. Dominique Le Mèner, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire

M. Dominique Le Mèner. Ma question s’adresse à François Baroin, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

Monsieur le ministre, assurément, ce mercredi 26 octobre 2011 fera date dans l’histoire de l’Union européenne. Nous voici, en quelque sorte, à la croisée des chemins en Europe. Ce soir, se tiendra, en effet, à Bruxelles le sommet des chefs d’États et de gouvernements, le sommet de la dernière chance, pourrait-on dire. Sur les bancs de la majorité, nous sommes particulièrement conscients de l’importance de ces prochaines heures, et le Gouvernement peut naturellement compter sur notre appui le plus total.

Depuis le début de la crise des dettes souveraines, les Français ont pu voir le Président de la République, le Premier ministre et tout le Gouvernement déterminés à tout faire pour préserver l’avenir de notre continent, de nos citoyens et de notre économie. À cet égard, le travail effectué par le couple franco-allemand, a été plus que jamais déterminant. En Allemagne, Angela Merkel a d’ailleurs reçu un large soutien, allant au-delà de sa coalition au Bundestag. Nous aurions apprécié que ce bel esprit de responsabilité des socialistes allemands puisse inspirer leurs camarades français. Nul doute que cette solidarité dont ont fait preuve nos collègues allemands aurait été un atout supplémentaire pour donner une chance aux négociations d’aujourd’hui.

Au moment où chacun retient son souffle, pouvez-vous nous présenter les grandes lignes que défendra la France pour sortir l’Europe de cette crise ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – « Allô ! Allô ! » sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

M. François Baroin, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Monsieur le député, depuis l’accord du 21 juillet, la France poursuit avec méthode, détermination et sans faiblesse une stratégie impulsée par le Président de la République qui consiste à décliner cet accord dans un calendrier rapide, en coordination avec nos amis allemands et avec la volonté d’atteindre l’objectif souhaité par tous, la stabilité de la zone euro.

Est-il besoin de vous rappeler que nous avons été aux avant-postes de la présentation au Conseil des ministres de l’accord du 21 juillet ? Est-il besoin de vous rappeler que la France a été le premier pays à faire voter par son parlement, au cours d’une session extraordinaire début septembre, la déclinaison de cet accord ?

Certains, ici ou là, commettant une grave erreur d’analyse, considèrent que nous nous rallions in fine à telle ou telle position. Nous avons, au contraire, poursuivi une stratégie qui permettait de ne faire prendre aucun risque, notamment vis-à-vis de nos amis allemands, qui sont dans une coalition, avec des prises de position politiques parfois différenciées entre, d’une part, le ministre de l’économie et, d’autre part, le ministre des finances. Nous avons accompagné l’Allemagne dans sa capacité de valider devant le Bundestag l’accord du 21 juillet.

Que reste-t-il actuellement en discussion sous l’autorité des chefs d’États ? Essentiellement la question du levier du fonds européen et celle de l’implication du secteur privé sur une base volontaire pour accompagner la Grèce dans la soutenabilité de sa dette.

Depuis cinq jours, nous avons bien avancé. Nous avons trouvé un accord sur le versement de la dernière tranche du précédent programme pour la Grèce. Nous avons trouvé un accord, qui n’était pas évident et sur lequel les Allemands ont su faire évoluer leurs positions dans le sens de l’intérêt général, sur le niveau de recapitalisation des établissements bancaires et sur le calendrier proposé pour la fin juin de l’année prochaine. Nous avons également trouvé un accord sur les modalités de la gouvernance de la zone euro.

Nous avons avancé. Il reste encore du travail, c’est aux chefs d’États de se prononcer ce soir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Agences de notation

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Sandrier, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine

M. Jean-Claude Sandrier. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre. Quelle déchéance de voir des États, la corde au cou, devant des officines de notation privées ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Officines à la solde de marchés financiers responsables de la crise, qui demandent d’en faire payer aux peuples les conséquences.

M. Yves Nicolin. Ça n’a rien à voir !

M. Jean-Claude Sandrier. Une nation digne de ce nom ne peut accepter un tel diktat.

Oui, il faut réduire les déficits, mais en faisant payer ceux qui les ont provoqués, c’est-à-dire ceux qui, depuis des années, détournent les richesses du pays à leur profit.

En quinze ans, les plus grosses fortunes françaises ont progressé six fois plus vite que les richesses du pays. Les rémunérations des PDG des banques françaises ont augmenté de 45 % en un an. Le journal Les Échos vient de révéler que 400 sociétés européennes cotées présentent « un insolent profil ». Leurs marges de profits étant revenues au niveau d’avant la crise, elles possèdent aujourd’hui un coussin de sécurité de 3 000 milliards d’euros, soit plus de dix fois le budget de la France, placés pour l’essentiel dans des paradis fiscaux ! Voilà la réalité ! L’argent coule à flots pour les uns pendant que vous demandez aux autres de payer l’addition.

Pour sortir de la crise et réduire les déficits, il faut avoir le courage de mettre un terme au détournement organisé des richesses nationales par une petite caste de nantis. L’urgence aujourd’hui, c’est taxer le capital comme le travail, taxer les transactions financières et spéculatives, interdire les paradis fiscaux, réduire les cadeaux fiscaux et les exonérations de cotisations sociales inefficaces pour l’emploi qui représentent, avec l’évasion fiscale, deux fois le montant du déficit budgétaire prévu cette année. Il faut construire une grande banque publique afin d’orienter l’argent vers la relance de l’économie et le progrès social.

En aurez-vous le courage ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

M. François Baroin, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Monsieur le député Sandrier, vous posez, à travers une question, plusieurs petites questions. Un peu comme les poupées russes,…

M. Michel Herbillon et M. Charles de La Verpillière. Comme des poupées soviétiques plutôt !

M. François Baroin, ministre. …elles sortent les unes des autres, sont d’inégale valeur, et, sans aller jusqu’à dire qu’elles sont d’inégal intérêt, il me semble qu’elles appellent des réponses décidées.

Si vous m’interrogez sur les agences de notation, je vous dirai que nous avançons, depuis la grande crise de 2008, vers une réglementation accrue sur le plan international, vers des directives européennes qui nous rendront moins dépendants de leur activité, vers une surveillance plus étroite, et vers une transparence plus élargie de la réalité de ce marché.

Néanmoins, il ne sert à rien de taper sur les agences de notation. Le problème des pays avancés, et singulièrement au sein de la zone euro, est d’abord un problème de dette. C’est comme si vous disiez à un malade : « Lève-toi et casse ton thermomètre ! » Cela ne sert à rien. Nous écartons ce débat. Nous devons réduire nos dettes et les agences de notation poursuivront leurs travaux.

Si vous m’interrogez sur les rémunérations excessives, notamment des banquiers, qu’il me soit permis de vous remettre en mémoire que c’est le Premier ministre François Fillon qui, le premier, au cours du premier trimestre de cette année, a qualifié ces rémunérations d’extravagantes. (Protestations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

M. Jean-Paul Lecoq. Il n’a rien fait !

M. François Baroin, ministre. C’est sur la base de cette impulsion politique qu’un groupe de travail a été mis en place. Dans un souci de justice sociale, au moment où nous demandons des efforts aux Français dans le cadre de l’équilibre budgétaire, il s’agit d’établir une taxation sur les plus hauts revenus qui soit non pas dissuasive mais utile pour financer le bien public et mieux répartir l’effort.

Qu’il me soit permis de conclure sur les efforts produits par celles et ceux qui ont le plus de moyens. Je ne vous rappellerai pas ce qui a été fait sur la tranche supérieure dans la réforme des retraites concernant l’impôt sur le revenu, sur l’augmentation des prélèvements sociaux, sur les plus-values immobilières, sur la suppression du bouclier fiscal. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Paul Lecoq. Et les 3 000 milliards cachés dans les paradis fiscaux ?

M. François Baroin, ministre. Vous le constaterez avec objectivité et justice, oui, il y a un équilibre entre l’effort demandé (« Non ! » sur les bancs des groupes GDR et SRC) à ceux qui peuvent le fournir et ceux qui bénéficient de la solidarité nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Michel Issindou. Vous parlez d’un équilibre !

Approvisionnement en électricité

M. le président. La parole est à M. Pascal Brindeau, pour le groupe Nouveau Centre.

M. Pascal Brindeau. Monsieur le ministre de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique, l’étude annuelle de Capgemini sur l’énergie en Europe qui vient d’être publiée, fait état « de menaces réelles sur la continuité de la fourniture électrique pendant l’hiver 2011-2012 et les hivers suivants ».

Elle invite les autorités de régulation de l’énergie en Europe et les gouvernements des pays de l’Union à mettre en place un nouveau cadre réglementaire incitant les acteurs à réaliser les 1 100 milliards d’euros d’investissements nécessaires d’ici 2020 afin de garantir la continuité de la fourniture d’énergie.

Compte tenu de la situation actuelle, l’étude conclut notamment, à moyen terme, à une augmentation des prix de l’énergie et à des conséquences négatives sur la sécurité d’approvisionnement énergétique, sous l’effet notamment d’une dépendance accrue vis-à-vis du gaz russe.

La France, grâce à la qualité de sa filière industrielle énergétique, est globalement exportatrice d’électricité. Mais elle est importatrice pendant les grands pics de consommation, en hiver autour de 19 heures.

Ainsi, l’an passé plus de 8 000 mégawatts ont été importés d’Allemagne. Or cette énergie ne sera plus disponible en raison de l’arrêt décidé au printemps de huit de ses dix-sept réacteurs nucléaires. L’Allemagne sera elle-même importatrice nette d’électricité durant le prochain hiver.

À l’heure où, sous la pression des écologistes, le Parti socialiste et son candidat annoncent une sortie du nucléaire tantôt planifiée, tantôt plus hypothétique, sans jamais dire aux Français quel serait le coût économique et industriel, donc en termes d’emplois, de ce choix, pouvez-vous nous indiquer les choix du Gouvernement pour garantir l’indépendance énergétique de la France, garantir à nos concitoyens la sécurité de l’approvisionnement en électricité à des coûts maîtrisés, garantir enfin l’avenir d’une filière industrielle performante ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur quelques bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique.

M. Éric Besson, ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique. Monsieur le député, je suis contraint de répondre en deux minutes à une question qui mériterait de longs développements et de vrais débats.

La décision allemande est souveraine ; le Président de la République comme le Premier ministre ont demandé qu’elle ne soit pas commentée. En même temps, nous avons dit très clairement qu’elle aurait des conséquences pour l’Allemagne, pour la France et pour l’ensemble de l’Union européenne.

Le rapport que vous venez de citer pointe deux risques réels qu’il ne faut pas surestimer – évitons le catastrophisme –, mais qu’il ne faut pas sous-estimer – nous devons être vigilants.

Le premier risque à court terme porte sur les approvisionnements cet hiver, si des facteurs très défavorables étaient réunis : hiver très froid, retard dans la mise en œuvre des centrales à gaz et à charbon en Allemagne, arrêt immédiat des centrales allemandes. Dans ce scénario, oui il pourrait y avoir des difficultés. C’est pourquoi j’ai demandé à Réseau de transport d’électricité de me remettre un rapport dès le 10 novembre. Le lendemain je réunirai le comité de veille que j’ai créé au lendemain de la décision allemande pour que nous puissions prendre toutes les précautions nécessaires. Vous savez qu’à plus long terme la loi NOME nous apportera des capacités de pointe.

L’autre risque, vous avez raison, c’est celui d’une plus grande dépendance à l’égard du gaz russe. C’est pourquoi ce rapport me paraît conforter la politique énergétique française, qui est faite d’efficacité énergétique, de développement des énergies renouvelables dans des proportions importantes : biomasse, biogaz, éolien multiplié par quatre, photovoltaïque multiplié par cent.

Mais, vous l’avez souligné, le socle repose quand même sur un nucléaire civil de grande qualité…

M. Yves Cochet. Non ! Non !

M. Éric Besson, ministre. …qui nous permet de réduire notre dépendance, d’offrir à nos consommateurs et à nos industriels une électricité de qualité et bon marché. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. François de Rugy et M. Yves Cochet. Faux !

Pension de réversion pour les couples pacsés

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Mme Marie-Françoise Clergeau. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Alors que le Parlement examine le dernier budget de la sécurité sociale de cette législature et avant que les Français eux-mêmes, en mai prochain, ne fassent le bilan de l’action de Nicolas Sarkozy et de son Gouvernement, il nous paraît important, avec mon collègue Tony Dreyfus, député de Paris, de rappeler une promesse…

M. Michel Lefait. Une de plus !

Mme Marie-Françoise Clergeau. …que le candidat non encore président, avait formulée par écrit dans la presse en avril 2007 : « je suis pour une union civile qui entraînera une égalité fiscale, sociale, patrimoniale totale avec les couples mariés, qui ira jusqu’au droit à la pension de réversion pour le conjoint homosexuel ».

Cette promesse, vous avez eu cinq ans pour la tenir ; rien n’est venu.

M. Michel Lefait. Eh oui ! Que des boniments !

Mme Marie-Françoise Clergeau. Cette semaine encore, vous avez rejeté les amendements déposés par les députés socialistes visant à ouvrir le bénéfice des pensions de réversion aux couples liés par un pacte civil de solidarité.

De nombreuses associations, des citoyens se mobilisent, vous ne voulez pas les entendre. Après la HALDE et le Médiateur de la République en 2010, c’est le Défenseur des droits, Dominique Baudis, qui vous a interpellé hier, considérant les dispositifs légaux actuellement en vigueur dans notre pays, discriminatoires et en contradiction avec le droit européen. Il vous a demandé de faire droit à cette préconisation d’évolution du droit.

Le PACS engage à des droits et devoirs, notamment un devoir d’aide matérielle et d’assistance réciproque qui diffère peu du devoir de secours et d’assistance qui lie les époux. Ce lien de solidarité qui unit les couples pacsés comme les couples mariés doit donc se traduire par le droit à la pension de réversion, sans discrimination envers les couples de même sexe.

Cette évolution législative correspond à une légitime attente de nos concitoyens pour l’égalité des droits. Allez-vous enfin y répondre ou n’était-ce qu’une promesse de campagne ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Madame la députée, vousm’interrogez sur le droit à pension de réversion des couples pacsés.

Permettez-moi tout d’abord de vous dire que l’extension de ce droit a été chiffrée : il en coûterait à terme, en année pleine, 7,8 milliards d’euros au régime général ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Frédéric Cuvillier. C’était une promesse !

M. Michel Sapin. Pourquoi l’avoir promis ?

M. le président. Je vous en prie !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Mais ce n’est pas pour des raisons de coût et du budget et que nous ne souhaitons pas étendre le droit à pension de réversion aux couples pacsés ; c’est pour des raisons de principe. Vous le savez, madame la députée, puisque nous avons travaillé ensemble en 2006 sur cette question lorsque nous participions toutes deux à la mission d’information sur la famille, en charge de moderniser le PACS.

Ce dernier n’est pas un contrat de la même nature que le mariage ; il comporte beaucoup moins de devoirs et beaucoup moins d’obligations de solidarité entre les partenaires. Notamment, la rupture d’un PACS est beaucoup plus simple que la rupture d’un mariage : elle peut être unilatérale et il n’y a pas, par exemple, de prestation compensatoire d’un partenaire vis-à-vis de l’autre, ce qui veut dire qu’il n’y a pas en fait l’obligation de solidarité qui est la caractéristique du mariage.

Dès lors, moins de devoirs, cela veut dire moins de droits.

M. Frédéric Cuvillier. Pourquoi l’avez-vous promis alors ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. C’est pour cela que nous réservons le droit à pension de réversion au conjoint survivant d’un assuré décédé.

M. Frédéric Cuvillier. On a donc menti !

Mme Marie-Françoise Clergeau. Et les promesses ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Cette analyse – plus de droits égale plus de devoirs – a été confirmée par le Conseil constitutionnel. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Élections en Tunisie

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Christ, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Jean-Louis Christ. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. Alain Juppé, ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes.

Ce week-end, la Tunisie a connu un moment historique, avec le déroulement d’élections libres. Le peuple tunisien a pu s’exprimer démocratiquement, comme l’attestent les rapports publiés hier par les observateurs internationaux ; comme le confirme aussi notre collègue Dino Cinieri, président du groupe d’amitié France-Tunisie, qui s’est rendu sur place et a pu visiter de nombreux bureaux de vote. Il s’agissait, rappelons-le, pour les Tunisiens d’élire une assemblée chargée de poser les bases de ce qui sera demain la Constitution tunisienne.

Notre propre histoire, notamment en référence à 1789, nous enseigne qu’une société sans Constitution ne peut assurer la garantie des droits. Nous souhaitons que les peuples qui ont initié le Printemps arabe soient animés de la volonté de mettre au cœur de leur nouveau pacte les valeurs universelles de liberté et de respect des droits, les droits des femmes en particulier. C’est donc aujourd’hui une immense attente populaire et internationale qui pèse sur les 217 représentants élus par les Tunisiens.

Dans ce contexte, pouvez-vous, monsieur le ministre d’État, revenir sur les conditions dans lesquelles s’est déroulé ce scrutin ? Comment faut-il interpréter le résultat de ces élections ? Faut-il s’en inquiéter, notamment au regard du respect des libertés fondamentales ? Pouvez-vous également nous dire de quelle façon la France continuera d’accompagner le peuple tunisien et ses représentants ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes.

M. Alain Juppé, ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes. Monsieur le député, comme vous, je pense que ce qui s’est passé dimanche dernier en Tunisie est une formidable bonne nouvelle. Après des décennies d’élections contestables et contestées, le scrutin s’est déroulé dans d’excellentes conditions : aucun incident notable et une très forte participation des électrices et des électeurs tunisiens. Le peuple tunisien a voté dans la liberté et l’enthousiasme.

Il ne nous appartient pas de porter un jugement sur les choix qu’il a faits. Ce sont les Tunisiens et les Tunisiennes qui vont construire la Tunisie de demain. Mais, en tant qu’amis de la Tunisie et du peuple tunisien, nous sommes évidemment concernés par ce qui va se passer, et nous souhaitons de tout cœur que l’aspiration à la liberté, qui était au cœur de la Révolution du jasmin, ne soit confisquée par personne. C’est la raison pour laquelle il nous faut agir à trois niveaux.

D’abord à celui du multipartisme en Tunisie. Il y a des partis attachés à l’islam et des partis laïcs. Tous doivent pouvoir s’exprimer, se développer et convaincre l’opinion publique tunisienne de la justesse de leurs vues.

Ensuite, le dialogue avec le parti Ennhada, qui appartient à la mouvance des Frères musulmans. Il y a des tendances diverses – des durs et des modérés –, et nous devons continuer à parler avec eux pour faire en sorte que le respect qu’ils ont exprimé jusqu’à présent des principes qui nous sont chers soit assuré.

Enfin, la vigilance sur les principes. Vous savez que, dans le cadre du Partenariat de Deauville, la France est en première ligne pour aider la Tunisie et d’autres pays des printemps arabes. Dans ce cadre, nous devons vérifier que sont respectées nos valeurs, c’est-à-dire l’alternance démocratique, l’État de droit, la liberté d’expression, et notamment la liberté des minorités religieuses, les droits de l’homme et l’égalité entre l’homme et la femme.

Pour conclure, ma conviction est que les peuples musulmans ne sont pas condamnés à devoir choisir entre la dictature ou la théocratie ; il y a aussi, pour eux, un chemin vers la liberté et nous devons les accompagner sur ce chemin. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC et sur plusieurs bancs des groupes SRC et GDR.)

Sort de Mme Asia Bibi

M. le président. La parole est à M. Claude Leteurtre, pour le groupe Nouveau Centre.

M. Claude Leteurtre. Ma question s’adresse à M. Alain Juppé, ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes.

Le 5 juillet dernier, au nom du groupe Nouveau Centre, je vous ai interrogé à propos de la situation de Mme Asia Bibi. Cette jeune femme pakistanaise a été condamnée à mort au nom de la loi sur le blasphème pour s’être affirmée chrétienne lors d’un incident avec d’autres femmes musulmanes. Depuis, elle est enfermée à l’isolement dans une prison de son pays. Cette mère de famille de trois enfants ne peut voir son mari que tous les quinze jours pendant un quart d’heure.

Rappelons que le ministre des affaires interreligieuses et le Gouverneur du Penjab, qui avaient pris position contre la loi sur le blasphème, ont été assassinés.

À l’approche de l’hiver, il faut mesurer la précarité de la situation d’Asia Bibi, victime de mauvais traitements répétés, et l’on doit craindre pour sa vie.

Elle a fait appel de son jugement, mais la cour n’a pas encore déclaré recevable cet appel. À l’opposé, le meurtrier de l’ancien ministre des relations interreligieuses a, lui aussi, fait appel de sa condamnation à mort, appel aussitôt déclaré recevable. Le contraste est saisissant : il y a vraiment deux poids, deux mesures.

Monsieur le ministre d’État, un nouvel ambassadeur de notre pays va prendre son poste au Pakistan. Saisissons cette occasion pour rappeler à ce grand pays les règles du droit international et les traités qu’il a acceptés et signés. Mme Asia Bibi et sa famille comptent sur la France. La patrie des droits de l’homme a le devoir de ne pas les abandonner. (Applaudissements sur divers bancs.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes.

M. Alain Juppé, ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes. Monsieur le député, la France est particulièrement soucieuse du sort de Mme Asia Bibi.

D’abord, nous considérons que l’existence même du délit de blasphème porte gravement atteinte aux libertés fondamentales. Le Pakistan a d’ailleurs ratifié le pacte international relatif aux droits civils et politiques, vous l’avez rappelé, et un tel engagement international n’est pas compatible avec le maintien du délit de blasphème dans le corpus juridique pakistanais.

Ensuite, nous ne pouvons qu’être heurtés par l’application de la peine de mort. Partout sur la planète, nous luttons contre cette peine de mort dont nous considérons qu’aucun acte ne saurait la justifier.

Face à l’intolérable, nous nous sommes mobilisés. En présentant ses vœux aux autorités religieuses, le 7 janvier dernier, le Président de la République a dénoncé cette condamnation dans des termes très fermes. Le ministère des affaires étrangères s’est aussi engagé. J’ai personnellement exprimé la vive préoccupation des autorités françaises lors de mon entretien avec le Premier ministre pakistanais, le 3 mai dernier. J’ai rencontré, fin septembre, le conseiller du Premier ministre pour les minorités, qui est le frère du ministre des minorités religieuses assassiné. Le ministère a également reçu l’époux et la fille d’Asia Bibi à la fin du mois de juillet.

Au niveau européen, notre pays a soutenu, dès l’annonce de la condamnation, le principe d’une intervention de la Délégation de l’Union européenne à Islamabad. Au mois de juillet, une nouvelle démarche a été effectuée auprès des autorités pakistanaises.

Enfin, notre nouvel ambassadeur, dont vous avez signalé la présence au Pakistan, M. Philippe Thiébaud, a reçu l’instruction de renouveler ces démarches. Nous poursuivons nos efforts et nous les poursuivrons aussi longtemps que cette affaire n’aura pas trouvé une issue favorable. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Situation de PSA

M. le président. La parole est à M. Gérard Gaudron, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Gérard Gaudron. Monsieur le ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique, ce matin, le groupe PSA Peugeot Citroën a présenté à son comité de groupe européen un plan d’économies de 800 millions d’euros pour 2012, le groupe ayant subi un recul de ses ventes en Europe de 7 % depuis le début de l’année.

M. Philippe Plisson. Il a gagné 3 % !

M. Jean-Paul Lecoq. Les autres groupes aussi ont reculé ! Heureusement qu’il reste Toyota !

M. Gérard Gaudron. Ce plan d’économies équivaut, selon le président du groupe PSA, à une réduction des effectifs de 10 %.

M. Alain Bocquet. C’est scandaleux !

M. Gérard Gaudron. Il prendrait la forme, d’après les informations entendues, de non-reconductions de contrats de prestations de services extérieurs, de non-remplacements de départs naturels à la retraite et de mesures de reconversions et de mobilité au sein du groupe. En France, PSA a annoncé que ces économies concernaient essentiellement les sous-traitants non automobiles et les intérimaires. Ces mesures inquiètent tous les salariés du groupe PSA, et notamment ceux de l’usine d’Aulnay-sous-Bois, dans ma circonscription.

M. Roland Muzeau. Il faut les défendre !

M. Gérard Gaudron. Vous avez, dès ce matin, annoncé que vous alliez vous entretenir avec Philippe Varin, président de PSA, sur l’impact de ce plan d’économies.

Pouvez, monsieur le ministre, nous informer de la teneur des échanges que vous avez eus avec le président de PSA ? Pouvez-vous, surtout, nous confirmer que l’impact de ce plan d’économies sera limité, et que vous serez, avec votre collègue en charge du travail et de l’emploi, Xavier Bertrand, particulièrement attentif à ce dossier ?

Pouvez-vous enfin nous dire comment le Gouvernement continuera à soutenir l’industrie automobile dans un contexte de ralentissement de son activité européenne ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique.

M. Éric Besson, ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique. Monsieur Gérard Gaudron, le groupe PSA a effectivement rendu public ce matin un plan d’économies prévoyant des économies sur les achats et une réduction de ses effectifs européens. Dès ce midi, je me suis entretenu avec son président, Philippe Varin. Il m’a confirmé ce que vous venez de suggérer, à savoir que ce plan était adopté en raison du ralentissement incontestable de la demande automobile européenne et de la pression tout aussi incontestable sur les prix à la baisse. Il s’agit pour PSA, m’a-t-il dit, de préserver, dans un contexte difficile, ses capacités industrielles plutôt que de procéder – ça, ce sont mes mots – à des fermetures d’usines.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C’est scandaleux !

M. Éric Besson, ministre. Philippe Varin m’a confirmé qu’aucun plan de licenciement ou de départs volontaires n’était envisagé à ce jour. La présence industrielle de PSA, en France, et notamment à Aulnay et Sevelnord, n’est pas remise en cause.

M. Roland Muzeau. Ce n’est pas la peine de nous lire la lettre du PDG !

M. Éric Besson, ministre. J’ai demandé à Philippe Varin que la mise en œuvre des économies envisagées sur les achats ne fragilise pas la position des sous-traitants français qu’il est indispensable de préserver pour les temps de reprise. Jean-Claude Volot, le médiateur de la sous-traitance, procédera à un suivi approfondi des entreprises concernées de façon à ce qu’aucune ne soit fragilisée.

M. Christian Eckert. Avec ça, on est rassurés !

M. Éric Besson, ministre. J’ai également demandé au groupe PSA de mettre en place un accompagnement renforcé pour les salariés intérimaires, comme cela se fait dans plusieurs bassins d’emploi.

Au-delà de PSA, il n’échappe à personne que plusieurs incertitudes pèsent actuellement sur le marché automobile. Nous espérons tous qu’il s’agit d’une situation temporaire. Avec Xavier Bertrand, ministre de l’emploi et du travail, nous allons convoquer, le 23 novembre, le comité stratégique de la filière automobile, lequel se réunit, en moyenne, tous les deux mois, pour dresser, avec les industriels et les représentants salariés, le diagnostic actualisé de la situation de la filière.

En 2008, l’État n’a pas mesuré, vous avez raison, son soutien à la filière.

M. Christian Eckert. Bla-bla-bla !

M. Éric Besson, ministre. Nous le poursuivrons grâce à quantité de mesures que vous connaissez : investissement d’avenir, fonds de modernisation des équipementiers automobiles et maintien du bonus écologique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. Christian Eckert. Nous ne sommes pas rassurés !

Handicap

M. le président. La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Madame la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, dès 2009, les services d’aide à domicile nous alertaient sur les graves difficultés financières qu’ils rencontrent. Depuis, tout le monde s’accorde à reconnaître la nécessité de mettre en œuvre des mesures d’urgence et, notamment, d’instaurer un fonds d’intervention pour venir en aide à ce secteur sinistré qui concerne des centaines de milliers de personnes. La perspective d’instauration de ce fonds se dessinait dans les mesures que le chef de l’État devait annoncer dans le cadre de la réforme du financement de la dépendance. Malheureusement, bien que ce problème soit posé depuis maintenant trois ans, il n’y aura pas de réforme du financement de la dépendance…

M. Patrick Lemasle. Une promesse non tenue de plus !

Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C’est scandaleux !

Mme Martine Carrillon-Couvreur. …repoussant d’autant les mesures d’urgence et structurelles à prendre pour le maintien des services d’aide à domicile. Cette décision est dramatique aussi bien pour les familles que pour les emplois de l’aide à la personne. Hier soir, vous avez annoncé que le fonds d’aide d’urgence doté de 50 millions d’euros serait mis en œuvre en 2012 et qu’un nouveau rapport serait présenté fin décembre. Nous en prenons acte ; mais à force de retarder l’échéance, près de 10 000 emplois auront déjà été sacrifiés et les aides apportées aux centaines de milliers de familles continueront de diminuer. Dans le même temps, ces services aux personnes fragiles, majoritairement associatifs, ont vu leur situation budgétaire se dégrader encore un peu plus par la suppression des exonérations de charges sociales que vous avez adoptées.

Madame la ministre, au regard de l’urgence de cette situation, quelles réponses concrètes et surtout pérennes allez-vous apporter pour maintenir l’aide à domicile dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Madame la députée Carrillon-Couvreur, certains services à domicile, même si ce n’est pas le cas de tous, rencontrent effectivement de réelles difficultés d’ordre conjoncturelles ou structurelles. Certains n’atteignent pas la taille critique, d’autres se heurtent à des difficultés de gestion. Très sensible à cette situation, le Gouvernement a décidé la création d’un fonds d’urgence doté de 50 millions d’euros destiné à ces services. Ce fonds ne sera pas créé dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, car cela reviendrait à « recycler » un argent déjà destiné au secteur. Ces 50 millions d’euros seront présentés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2012 : ce sera donc, pour ces structures qui se consacrent aux personnes âgées, des personnes handicapées et des familles, de l’argent frais.

Mais il faut aller plus loin, car leurs difficultés sont le plus souvent d’ordre structurel. C’est pourquoi nous réfléchissons, avec Marie-Anne Montchamp, à la tarification de ces services, qui est source de bien des difficultés. Une mission a été confiée à l’IGAS et à l’IGF, lesquelles nous ont proposé un certain nombre de mesures. Nous travaillons avec l’Assemblée des départements de France, dont j’ai rencontré longuement le président, Claudy Lebreton. Nous lançons enfin une série d’expérimentations dans six départements, toujours dans le but de lever ces difficultés de tarification. Mais sans attendre, des mesures d’urgence vont être immédiatement prises avec ce fonds doté de 50 millions d’euros ; j’insiste sur cet effort consenti par le Gouvernement dans une période particulièrement difficile. Mais nous tenons également à restructurer le secteur qui rend des services éminents. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Avenir de l’école

M. le président. La parole est à M. Bernard Debré, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Bernard Debré. Monsieur le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, nous entendons beaucoup de choses quand il s’agit de l’éducation nationale. Bien entendu, ce sujet nous intéresse tous. Je voudrais donc vous poser un certain nombre de questions, que je vous livrerai pêle-mêle.

Quelle a été l’évolution du nombre de professeurs depuis dix ans ? On entend tout ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Plusieurs députés du groupe SRC. Allô ! Allô !

M. le président. On se calme, allons !

M. Bernard Debré. On affirme qu’il y en a de moins en moins, mais quel a été le nombre d’élèves sur la même période ?

Quelle est la part d’enseignants détachés au sein de cette administration ? (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Nous aurions, en dix ans, perdu 500 000 élèves, mais il semblerait que cette baisse d’effectifs n’ait pas permis une réduction du nombre d’enseignants.

Autre question, qui interpelle le médecin que je suis : l’absentéisme dans cette administration est, semble-t-il, supérieur à la moyenne nationale. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Je connais les difficultés de cette mission, de ce métier, je sais qu’il est parfois exténuant de tenir tête à une classe. (Brouhaha sur les mêmes bancs.)

M. Jean-Paul Lecoq. Scandaleux ! C’est le ministre qui a rédigé la question !

M. Bernard Debré. Enfin, comme beaucoup de Français, j’ai écouté le dialogue des Carmélites, ou plutôt des socialistes. M. Hollande envisage de créer 60 000 postes dans l’éducation nationale. Cela fait beaucoup de bruit. (Mêmes mouvements.)

M. Jean Glavany. Nous ne sommes pas dans un salon du 16e arrondissement, mais à l’Assemblée nationale !

M. Bernard Debré. Cette affirmation, elle aussi, pose des questions : où trouver l’argent ? Certains, au parti socialiste, affirment qu’il ne s’agirait que d’un transfert de postes, comme le voudrait le Sapeur Camember, qui creusait un trou pour en remplir un autre. (Mêmes mouvements.) De quels effectifs parle M. Hollande ? On pourrait dire, comme Victor Hugo, que M. Hollande voudrait fermer des prisons pour ouvrir des écoles. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)

Plusieurs députés du groupe SRC. Quelle honte !

M. Jean-Paul Lecoq. Quelle méthode !

M. le président. On se calme !

La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.

M. Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur le député, la proposition de François Hollande de créer 60 000 postes supplémentaires dans l’éducation nationale (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC) a laissé pantois plus d’un observateur, en particulier au parti socialiste !

M. Jean Glavany. Bravo ! Quel talent, ce Luc Chatel !

M. Luc Chatel, ministre. Je souscris aux propos de Mme Aubry quand elle affirme qu’il ne suffit pas de créer des postes d’enseignants pour obtenir des résultats à l’éducation nationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Nous avons créé 100 000 postes en dix ans. Les élèves nés à la fin des années 90, qui viennent d’être évalués par les enquêtes internationales comparatives PISA, se classent au vingt-quatrième rang. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) CQFD !

Cette proposition de créer 60 000 postes, elle est, tout d’abord, techniquement impossible. (Mêmes mouvements.)

M. Frédéric Cuvillier. Laissez-nous faire !

M. Luc Chatel, ministre. Pour pourvoir 12 000 postes supplémentaires par an, en plus du remplacement de 100 % des départs en retraite, il faudrait recruter 40 000 enseignants chaque année.

M. Frédéric Cuvillier. Attendez quelques mois !

M. Luc Chatel, ministre. C’est aujourd’hui le nombre de candidats qui se présentent au concours. Un système de qualité recruterait-il 100 % des candidats ? C’est absurde ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Ensuite, cette proposition est politiquement irresponsable. (Brouhaha sur les bancs du groupe SRC.) Au moment où tous les pays dans le monde sont mobilisés sur la maîtrise de la dépense publique, elle coûterait18 milliards d’euros.

J’ai entendu M. Sapin amorcer un virage sur l’aile en expliquant que cela serait au détriment d’autres administrations, mais lesquelles, monsieur Sapin ? (Mêmes mouvements.) Allez-vous supprimer 60 000 postes de policiers ou d’infirmières ? Les Français ont le droit de savoir. En tout cas, cette proposition, c’est une fable irresponsable ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Droits de plantation

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Dupré, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Jean-Paul Dupré. Monsieur le président, ma question s’adresse au ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire. Le devenir de la viticulture française est aujourd’hui en jeu. Le 12 octobre, la Commission européenne a publié sa proposition législative sur la réforme de la PAC. Ce texte acte la disparition des droits de plantation au 1er janvier 2016. La Commission persiste ainsi dans sa volonté de libéraliser le régime des droits de plantation malgré l’opposition, déjà, de douze États.

Alors que la nécessité de réguler les marchés s’impose chaque jour à tous avec plus de force et de vigueur, la Commission va à contre-courant de l’histoire et s’apprête à commettre une erreur tragique. La suppression des droits de plantation se traduirait inévitablement par une surproduction à l’échelle de l’Europe, avec la disparition des exploitations familiales au profit de grands ensembles gérés par des groupes financiers plus soucieux de profits spéculatifs hasardeux que de pérennisation.

À l’heure où la viticulture voit les prémices d’une sortie de crise, tous les espoirs dans l’avenir seraient anéantis. La nécessité d’encadrer la production viticole est apparue très tôt dans notre histoire puisque ce sont les Romains qui ont été les premiers à la mettre en pratique.

M. Henri Emmanuelli. Vive les Romains ! (Sourires.)

M. Jean-Paul Dupré. Et l’histoire nous montre que, chaque fois que l’on a cessé d’encadrer, une crise en a résulté.

Dois-je aussi rappeler que notre viticulture est, aux côtés de notre gastronomie, associée à un certain art de vivre et qu’elle est une référence mondiale de l’image de la France ? Aujourd’hui, 12 000 maires de communes viticoles françaises en appellent solennellement à la raison et au bon sens. Aurez-vous la volonté de faire en sorte que la Commission européenne nous écoute ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, je vous prie tout d’abord d’excuser M. Bruno Le Maire, qui se trouve à Berlin pour évoquer, avec son homologue, l’avenir du programme européen d’aide alimentaire aux plus démunis.

Vous l’avez très bien dit, le maintien d’un dispositif de régulation des droits de plantation dans le secteur vitivinicole est indispensable pour garantir la santé économique de ce secteur.

M. Robert Lecou. Très bien !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Le Gouvernement est pleinement mobilisé pour obtenir de la Commission européenne qu’elle revienne sur la suppression de ce régime décidée en 2008.

M. Jean Glavany. C’est bien ce qui nous inquiète !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Les conséquences de la suppression de ce régime seraient l’augmentation de 30 % des surfaces cultivées en France, la baisse immédiate de la qualité de la production et, évidemment, la baisse des revenus de nos viticulteurs, avec des prix tirés vers le bas.

Ce n’est pas cette logique de libéralisation que nous soutenons. Au contraire, nous avons adopté une position commune avec l’Allemagne sur ce sujet, et M. Bruno Le Maire, vous le savez, avec une dizaine de ses homologues, a saisi la Commission de cette question.

Plusieurs députés du groupe SRC. Barnier !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Tout l’enjeu des négociations en cours sur la future PAC, c’est justement de mettre en œuvre des mécanismes de régulation renforcée des marchés agricoles, qui sont indispensables, à nos yeux, pour assurer à nos agriculteurs des revenus décents et stables. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Plusieurs députés du groupe SRC. Barnier !

Sport à l’école

M. le président. La parole est à M. Robert Lecou, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Robert Lecou. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative ; elle concerne le sport scolaire. Avant de la formuler, je rends hommage aux enseignants et éducateurs, notamment aux bénévoles, qui forment et accompagnent nos enfants et qui les préparent à leur vie de citoyen, en en faisant parfois même des champions. Je salue plus particulièrement l’école de rugby du Pic-Saint-Loup, dans l’Hérault (« Ah ! » sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC), qui a formé deux joueurs d’exception qui viennent de participer à la belle aventure du XV de France. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC.) Qu’ils aient été ou pas sur la feuille de match, ils ont démontré les qualités que l’on aime chez les sportifs. Il s’agit de François Trinh-Duc et de Fulgence Ouedraogo (Mêmes mouvements), issus du sport scolaire et du sport fédéral, dont l’excellent état d’esprit hors et sur le terrain est un bel exemple pour la jeunesse, deux sportifs qui sont reconnaissants envers leur club d’origine en allant certains mercredis encourager les jeunes du Pic-Saint-Loup.

M. Jean Glavany. Et les autres ?

M. Robert Lecou. À l’occasion de la rentrée, monsieur le ministre, vous avez décidé d’étendre à 120 établissements de plus l’expérimentation « cours le matin, sport l’après-midi ».

M. Jean Glavany. Chic alors !

M. Robert Lecou. Celle-ci a suscité des réactions diverses, notamment de la part du syndicat SNEP-FSU qui, curieusement, voit dans ce projet une façon de reléguer l’après-midi l’éducation physique et sportive comme si c’était une discipline secondaire, ou encore de la part de l’Association nationale des directeurs et coordonnateurs territoriaux de l’éducation des villes et des départements de France, qui s’inquiète des rythmes proposés et argue du fait qu’une expérimentation similaire en Allemagne n’a pas été concluante.

Après une année d’expérimentation, est-il possible, monsieur le ministre, de faire un premier bilan ? Pouvez-vous aussi préciser ses objectifs quantitatifs et qualitatifs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Raymond Durand. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.

M. Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur Robert Lecou, le sport et l’école partagent finalement les mêmes valeurs : le dépassement de soi, le goût de l’effort, la volonté de respecter les règles.

M. Paul Giacobbi. Et vous, les respectez-vous ?

M. Luc Chatel, ministre. C’est en raison de ces valeurs communes qu’il y a dix-huit mois j’ai lancé un plan de développement du sport à l’école : « Éducation physique et sportive et pratiques sportives au sein des établissements scolaires ». Cela s’est traduit, vous venez de l’indiquer, par une expérimentation initiée en septembre 2010. Elle concernait au départ 120 collèges ; elle a été doublée à la dernière rentrée et touche désormais près de 250 collèges et 15 000 élèves. Il s’agit de réaménager les rythmes scolaires : cours le matin, sport l’après-midi.

Les premiers enseignements dont nous disposons sont très encourageants puisque les études menées auprès des chefs d’établissement font apparaître une meilleure relation entre les professeurs et les élèves, une amélioration du climat et même, selon la moitié des chefs d’établissement, une amélioration des résultats scolaires, ce qui est particulièrement encourageant. Nous allons donc continuer dans cette direction.

Je vous remercie, monsieur le député, d’avoir accepté une mission parlementaire pour améliorer la pratique du sport dans les établissements scolaires. Je serai évidemment très attentif à vos propositions. Vous savez que je veux également développer la pratique dans les associations sportives, avec un plan de développement des ambassadeurs du sport et des élèves qui sont aujourd’hui vice-présidents de leurs associations sportives dans les lycées : un tiers d’entre elles ont aujourd’hui un vice-président lycéen. C’est la volonté du Gouvernement que de responsabiliser nos jeunes. Nous le rendons possible grâce à la majorité associative à seize ans.

Vous voyez que notre développement du sport à l’école est particulièrement ambitieux. Je vous remercie par avance pour vos propositions parce qu’elles viendront conforter cette politique qui, à mon sens, est indispensable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Vie chère en outre-mer

M. le président. La parole est à M. Apeleto Albert Likuvalu, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et. divers gauche

M. Apeleto Albert Likuvalu. Madame la ministre chargée de l’outre-mer, tout l’outre-mer est confronté au problème de la cherté de la vie. Des manifestations de mécontentement, je dirai même de désespoir, se déroulent partout : après celles que nous avons connues aux Antilles-Guyane en 2009, puis en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, c’est actuellement le cas à Mayotte depuis maintenant un mois – mon collègue Patrick Lebreton vous en a parlé la semaine dernière. Les conséquences de la crise se traduisent par un renchérissement du coût des produits, surtout ceux de première nécessité, face auquel les populations sont impuissantes et désarmées.

Pour prendre le cas particulier du territoire de Wallis-et-Futuna, qui vous a accueilli en juillet, la situation est grave et même, malgré les apparences, pire que dans le reste de l’outre-mer. Les monopoles locaux, que ce soit dans la desserte aérienne, dans l’importation des carburants ou d’autres produits de consommation, dans la gestion de l’eau et de l’énergie sont à l’origine de la pratique de tarifs hors normes. Ainsi, le dernier audit financier effectué sur la société EEWF montre que le prix du kilowattheure est six fois plus élevé qu’en France métropolitaine et trois fois plus élevé que dans une vingtaine d’îles du Pacifique, dont la Nouvelle-Calédonie.

Devant cette situation particulièrement grave, comme à Mayotte, en lutte contre la vie chère, la population de Wallis-et-Futuna, par ses représentants syndicaux, interpelle elle aussi le Gouvernement afin que de vraies mesures soient prises, à même de répondre aux mouvements sociaux et d’y mettre fin.

Ma question, madame la ministre, est double : comment envisagez-vous concrètement le règlement de ces mouvements sociaux contre la vie chère ? Quelles mesures urgentes allez-vous prendre pour que la situation dans l’outre-mer, à Mayotte comme à Wallis-et-Futuna, corresponde enfin aux réalités égalitaires de la République ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée de l’outre-mer.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l’outre-mer. Monsieur Apeleto Albert Likuvalu, vous m’interrogez sur les inquiétudes manifestées par nos compatriotes face au coût de la vie en outre-mer. Votre question est, je l’imagine, en lien avec les événements de Mayotte.

Malgré le contexte international, le conseil des ministres de ce matin a pris le temps de faire le point sur les décisions du conseil interministériel de l’outre-mer du 6 novembre 2009. La lutte contre la vie chère est, vous le savez, au cœur des priorités du plan de modernisation des outre-mer. (Exclamations sur nombreux bancs du groupe SRC.) Oui, l’État est intervenu fortement pour jouer son rôle de régulateur : il a procédé à une réforme des prix des carburants ; il a mis en place un observatoire des prix garantissant une plus grande transparence sur l’évolution de la disponibilité des produits de première nécessité. (Mêmes mouvements.) J’ajoute que la loi de juillet 2010, que vous avez votée, a permis d’abaisser le seuil de contrôle des concentrations d’entreprises dans le domaine de la distribution pour favoriser la concurrence. Dans le cadre d’un groupement d’intervention régional « concurrence », nous avons lutté contre les pratiques abusives en matière de prix : 112 enquêtes ont été menées, et je vous renvoie aux condamnations importantes qui ont été rendues, notamment dans le secteur de la téléphonie mobile.

Le Gouvernement a également agi pour soutenir le développement de la production agricole : grâce à des crédits supplémentaires – plus de 40 millions –, nous avons pu développer la filière viande, ce qui a permis de baisser les prix de plus de 20 % à La Réunion. S’agissant de Mayotte, nous avons obtenu qu’un protocole soit signé avec l’organisation syndicale FO. S’agissant de Wallis-et-Futuna, l’observatoire des prix est mis en place, qui se réunit, vous le savez, deux fois par mois. J’ajoute que la Nouvelle-Calédonie, dans le cadre de l’accord particulier conclu avec elle, celle-ci vous apporte son soutien pour permettre le suivi de l’évolution des prix.

Voilà l’action de ce gouvernement. Voilà la réalité : jamais un gouvernement n’avait autant fait pour l’outre-mer. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. Raymond Durand. Très bien !

Santé mentale

M. le président. La parole est à M. Guy Lefrand, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Guy Lefrand. Ma question s’adresse à Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.

Madame la secrétaire d’État, notre assemblée discute aujourd’hui le projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui se donne les moyens de poursuivre son effort en faveur de l’ensemble de nos concitoyens et en particulier des plus fragiles d’entre eux.

La semaine dernière, notre pays se mobilisait pour la journée mondiale du refus de la misère. Une semaine plus tôt, nous célébrions, à l’initiative de l’Organisation mondiale de la santé, la journée mondiale de la santé mentale. Ces deux sujets, qui sont souvent traités de manière indépendante, sont pourtant intrinsèquement liés.

Alors que 4 000 suicides par an, en France, seraient dus à une maladie mentale, la terrible agression commise récemment sur un contrôleur de la SNCF et le meurtre d’une policière à Bourges, vendredi dernier, mettent en lumière, une fois de plus, des gestes dramatiques accomplis sur elles-mêmes ou autrui par des personnes en souffrance psychique.

Ces événements graves viennent nous rappeler l’urgence de traiter la question de l’accompagnement et de la prise en charge des personnes atteintes de troubles psychiques. Il est tout simplement impératif que ces troubles soient mieux connus, mieux acceptés et accompagnés par notre société. Nous devons en parler sans tabou, sans stigmatiser celles et ceux qui en sont les victimes.

À l’occasion du débat sur la loi du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques, dont j’étais le rapporteur, j’avais rappelé l’urgente nécessité d’un grand plan sur la santé mentale, afin de répondre à ce défi majeur pour notre société.

Madame la secrétaire d’État, vous avez annoncé, lors de la journée mondiale de la santé mentale, le prochain lancement de ce plan. Au-delà et en complémentarité du soin, quel projet de cohésion sociale ce plan proposera-t-il aux familles et aux patients douloureusement touchés par les troubles mentaux ? Comment permettra-t-il de lutter contre l’exclusion sociale qui est, trop souvent, la conséquence tragique de ces troubles ? Comment, enfin, pourra-t-on articuler le sanitaire et le social sur ce sujet ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Monsieur le député Guy Lefrand, vous avez raison : ce sujet est extrêmement important. Vous le connaissez bien pour avoir été rapporteur, avec beaucoup de sensibilité et de sens de la mesure, de la loi du 5 juillet 2011.

Il est vrai que nombre de nos compatriotes sont frappés par des pathologies psychiatriques qui brisent leurs parcours, qui percutent très souvent de plein fouet leurs familles, qui modifient leur mode de vie, leur accès à l’emploi et leur état de santé d’une manière générale. Très souvent, ils sont aussi confrontés à des formes de stigmatisations douloureuses qui sont insupportables.

Rappelons quelques chiffres importants. En France, les troubles psychiatriques représentent la première cause d’invalidité et la deuxième cause d’arrêt de travail ; 60 % de nos compatriotes frappés par ces troubles sont au chômage ; ils occasionnent 13,5 milliards d’euros de coûts de santé et 6,5 milliards d’euros de coûts médico-sociaux.

Au bout du compte, le Président de la République, très sensible à ces sujets, a décidé d’initier un plan de santé mentale. Il l’a confié à Roselyne Bachelot, Xavier Bertrand, Nora Berra et moi-même. Ce plan, qui verra le jour à la fin de l’année, se fixe plusieurs objectifs : lutter contre la stigmatisation de ces personnes fragilisées ; permettre les préventions qui existent et sont possibles même si elles sont complexes ; enfin et surtout, de permettre la vie avec la maladie. Vous avez raison, monsieur le député, d’insister sur ce dernier aspect.

Il s’agit de maladies comme les autres et il faut permettre à nos compatriotes qui en sont frappés de bénéficier de soins – soins psychiatriques et accompagnement par des professionnels – mais aussi de vivre avec ces troubles et de retrouver toute leur citoyenneté. Merci donc de cette question. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Accès aux soins des plus démunis

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Biémouret, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche

Mme Gisèle Biémouret. Ma question s’adresse à monsieur le ministre de la santé et du travail.

Dans son rapport annuel, Médecins du monde pointe un décrochage très net sur le plan sanitaire, caractérisé par une augmentation du nombre des consultations médicales, et une hausse de la proportion de publics fragiles, comme les femmes enceintes et les mineurs. On voit apparaître la résurgence d’épidémies d’une autre époque, qui oblige l’association à mettre en place des interventions de nature humanitaire, normalement utilisées en zone de conflit ou après une catastrophe naturelle.

Par ailleurs, nous notons que les moyens en faveur de l’aide médicale de l’État, notamment sur la question d’urgences sanitaires, sont une nouvelle fois mis mal, ce qui aggrave les pathologies contagieuses.

L’association dénonce sévèrement un « krach sanitaire ». C’est un fait, l’accès aux soins des plus démunis continue de se dégrader.

Cette situation inacceptable est le résultat des effets conjugués de la crise économique et des politiques publiques menées depuis plusieurs années, à savoir : franchises médicales, déremboursements des médicaments, dépassements d’honoraires, augmentation du coût des mutuelles, restrictions d’accès à l’aide médicale d’État, baisse des indemnités journalières.

De nouvelles orientations laissent craindre une accentuation de ces disparités et de trop nombreux Français se mettent à différer voire renoncent à des soins.

Alors que notre assemblée examine depuis hier le budget spécifique de la sécurité sociale, votre gouvernement a-t-il l’intention de fixer la réduction des inégalités de santé comme un objectif prioritaire ? Comprenez-vous que la santé est un droit fondamental et non un privilège ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la santé.

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. Madame la députée Gisèle Biémouret, la situation que vous décrivez ne correspond pas tout à fait à la réalité en France.

En effet, le reste à charge des ménages a diminué pour la deuxième année consécutive, passant à 9,4 %. D’ailleurs, la France se situe en tête des pays de l’OCDE qui ont le reste à charge le plus faible, juste derrière les Pays-Bas (« Mensonge ! » sur un banc du groupe SRC.) Le reste à charge est même extrêmement faible pour les soins à l’hôpital et également pour les pathologies les plus lourdes qui sont prises en charge à 100 % dans notre pays.

M. Henri Emmanuelli. Demandez à M. Debré !

Mme Nora Berra, secrétaire d’État. S’agissant des dépassements d’honoraires, je vais être très claire : à défaut d’accord entre les partenaires conventionnels, sachez que le Gouvernement prendra toute sa responsabilité dans le cadre du PLFSS.

Pour éviter les renoncements aux soins, nous avons deux outils à notre disposition : la couverture maladie universelle complémentaire ; l’aide à la complémentaire santé.

La CMUC concerne actuellement 4,3 millions de personnes, qui bénéficient du tiers payant intégral et du remboursement à 100 % des dépenses de soins. En matière de complémentaire santé, le Gouvernement a renforcé le dispositif depuis le début du quinquennat, et cette majorité a décidé d’aller plus loin.

M. Patrick Lemasle. Il y a des gens qui n’ont plus les moyens de se soigner !

Mme Nora Berra, secrétaire d’État. Sous l’impulsion de Pierre Méhaignerie, un amendement gouvernemental proposera, dans le cadre du PLFSS, un plafond de ressource de cette aide égal à celui de la CMUC augmenté de 35 %, ce qui portera le nombre de ses bénéficiaires à près d’un million. Ce dispositif s’adresse aux actifs mais également aux étudiants.

Le Gouvernement a le souci de justice vis-à-vis des Français (« Absolument pas ! » sur un banc du groupe SRC) en conciliant l’accès aux soins des plus modestes et le retour à l’équilibre des finances sociales.

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Marc Le Fur.)

Présidence de M. Marc Le Fur,
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

2

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Jean Mallot, pour un rappel au règlement.

M. Jean Mallot. Un très bref rappel au règlement, monsieur le président, fondé sur l’article 58, alinéa 1, de notre règlement, que nous connaissons bien les uns et les autres et qui, malgré l’affirmation de M. Jacquat, est toujours en vigueur. Je tenais simplement à dire combien nous avions amèrement regretté l’absence hier soir de M. le ministre en charge de la santé au banc des ministres, alors que la plupart des interventions de la discussion générale traitait de la santé et de l’assurance-maladie dans notre pays.

Mme la ministre du budget répondra probablement aux orateurs inscrits dans la discussion générale, car il me semble que M. Bertrand, ministre de la santé, ne sera pas encore aujourd’hui assis au banc des ministres.

Cette absence dénote non le mépris mais quasiment de ce dernier à l’égard des travaux parlementaires. Lui qui donne des leçons à la terre entière ferait bien de respecter certains principes élémentaires pour mettre en adéquation ses fonctions avec les travaux du Parlement.

M. le président. Vos propos me semblent exagérés, mon cher collègue.

3

Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 (suite)

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 (nos 3790, 3869, 3865).

La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, je veux tout d'abord remercier tous les orateurs qui sont intervenus au cours de cette discussion générale, qui a fait ressortir tout ce qui sépare aujourd’hui la majorité de l’opposition. Cette ligne de fracture a le mérite de la clarté avec, d'un côté, une majorité qui prend toutes ses responsabilités face à la crise et, de l'autre, une opposition qui refuse par principe toute mesure de maîtrise des dépenses et conteste toutes les recettes nouvelles.

M. Jean Mallot. Le jour, la nuit ; le blanc, le noir : on vous reconnaît bien là. Et, manifestement, la nuit ne vous a pas porté conseil !

Mme Valérie Pécresse, ministre. C’est une citation socialiste, monsieur Mallot !

D'un côté, le rétablissement des comptes conjugué au maintien d'un très haut niveau de soins ; de l'autre, la fatalité du déficit, encore et toujours…

M. Jean Mallot. Le déficit, c’est vous !

Mme Valérie Pécresse, ministre. …, et le refus de toute réforme. Oui, la différence est nette, très nette même.

Bien sûr, entre le Gouvernement et la majorité, il y a naturellement un dialogue. Mais ce dialogue se fait dans un esprit de coresponsabilité, que je tiens à saluer…

M. Jean Mallot. C’est cela !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur le président Pierre Méhaignerie, nous pouvons affiner le détail de telle ou telle mesure, mais nous en avons tous conscience : la réduction des déficits est aujourd'hui une nécessité absolue. Nous veillerons, je le sais, à ce que nos débats n'aient aucun impact négatif sur les soldes sociaux et continuerons à avancer ensemble sur le chemin du rétablissement.

Ce qui nous unit, c'est également le souci de l'efficience, comme l'a parfaitement dit M. Yves Bur. Il est au cœur de notre politique de réforme, qui permet de conjuguer maîtrise des dépenses et renforcement de notre protection sociale. Par exemple en matière de médicament – sujet qui vous est cher, monsieur le rapporteur général : à service médical rendu équivalent, nous savons que nous pouvons dépenser moins, notamment sur les génériques.

Monsieur le rapporteur général, vous le savez, nous sommes en total accord sur le fond. La seule question est celle des modalités qui nous permettront de bénéficier rapidement de ces économies.

Monsieur Jean-Luc Préel, je ne peux qu'être sensible à votre volonté d'assainir les comptes sociaux. Je sais toute l'importance que nos amis du Nouveau Centre attachent, depuis bien longtemps, à la question du retour à l'équilibre. Tout est une question de dosage : augmenter automatiquement la CSG comme vous le proposez, risquerait de peser sur le pouvoir d'achat et sur la croissance.

M. Jean Mallot. Vous, vous envisagez d’augmenter la TVA. Allez y comprendre quelque chose !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Notre conviction est qu'il faut aujourd'hui tracer un chemin de désendettement, avec des étapes balisées et des efforts constants. Au bout de ce chemin, il y a le retour à l'équilibre, un retour à l'équilibre qui est à portée de main pour l'assurance maladie, comme le rappelait M. Bernard Perrut.

Le chemin du désendettement est au cœur de la « politique raisonnée » évoquée par M. Jean-Pierre Door. La réforme des retraites en est le meilleur exemple, et je remercie M. Denis Jacquat d'avoir mis en évidence un point absolument essentiel : le coeur de cette réforme, c'est le maintien du niveau des pensions.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour l’assurance vieillesse. Merci, madame la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. À la différence de tous nos voisins étrangers, nous avons agi sur l'âge légal et sur la durée de cotisations. On ne peut agir sur l’un sans agir sur l’autre. Mais nous avons intégralement préservé le pouvoir d'achat des retraités. Certes, nous demandons un effort aux Français ; un effort qui se traduit dès 2012 par 5,5 milliards d'euros d'économie. Mais c'est cela qui nous permet de préserver notre système de répartition sans toucher au niveau des prestations. Voilà comment nous défendons notre modèle social !

Là encore, la différence est nette : le retour en arrière sur la réforme des retraites que Mme Marisol Touraine souhaitait hier, représente 21 milliards de dépenses supplémentaires à l'horizon 2018. Cela reviendrait à saborder purement et simplement l'assurance vieillesse et à réduire, un jour ou l'autre, le niveau des pensions.

M. Michel Issindou. Souvenez-vous de votre projet !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Pour le médico-social, cette politique raisonnée nous a conduits à fixer l'ONDAM à 4,2 %. Nous ne relâchons pas nos efforts, mais nous nous donnons les moyens d'avancer : par exemple, en respectant cette année encore les créations de places prévues dans le plan de solidarité grand âge et le plan handicap, comme l'a rappelé Mme Bérengère Poletti ; ou encore, autre exemple, en poursuivant la revalorisation de 25 % de l'allocation adulte handicapée, comme l'ont souligné MM. Paul Jeanneteau et Guy Lefrand.

M. Michel Issindou. Et la dépendance ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Les engagements très forts du Président de la République sont tenus. Il en va de même avec la hausse sans précédent du minimum vieillesse évoquée par M. Arnaud Robinet. Nous réduisons nos déficits, mais nos filets de protection n'ont jamais été aussi solides.

Sur l'hôpital, je partage le souci de M. Jean Bardet de voir tous les hôpitaux revenir à l'équilibre. Leur déficit global se réduit rapidement…

M. Michel Issindou. Mais à quel prix !

Mme Valérie Pécresse, ministre. …avec plus d'un tiers des centres hospitalo-universitaires à l'équilibre. C'est une excellente chose, mais nous devons aller plus loin. C'est pourquoi, au-delà des outils prévus par la loi HPST, nous développons les contrats de performance qui permettent d'apporter des réponses ciblées et efficaces aux fragilités propres à chaque établissement.

M. Jean-Marie Rolland, fort de son expérience, a souligné l'efficacité de l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé…

M. Philippe Vitel. C’est sûr.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Une aide que nous élargissons encore cette année. Je l'en remercie d'autant plus que l'opposition a fait l'impasse sur cette mesure forte du PLFSS, à l'exception notable de Mme Catherine Lemorton, qui ne va malheureusement pas jusqu'au bout de sa démarche : en élargissant encore cette aide, c'est l'accès aux soins que nous renforçons.

M. Guy Malherbe a exprimé l'attente des pharmaciens de voir évoluer la structure de leur rémunération. Vous le savez, elle a été entendue et c'est tout l'objet de l'article 39 de ce PLFSS, avec le passage d'une logique commerciale centrée sur les marges à une logique de santé publique axée sur le conseil pharmaceutique et la performance. Nous sommes naturellement prêts à travailler pour poursuivre ce mouvement avec vous, monsieur le député.

Sur le financement de la CADES, M. Philippe Vitel a témoigné de la bonne gestion de cet établissement et je l'en remercie.

M. Gérard Bapt. Ainsi que de la mauvaise gestion par le Gouvernement. Il l’a dit aussi.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Vous avez exprimé vos interrogations sur la diversification des ressources affectées à la CADES. Il est vrai que cela pose une question de lisibilité. Mais cette diversification est dans l'ordre des choses et elle se fait avec des ressources qui sont aussi robustes et pérennes que la CRDS. Un seul exemple, la CSG, dont le produit est ventilé entre les différentes branches : l'affecter aussi au remboursement de la dette sociale, c'était franchir un pas, certes, mais un pas logique.

M. Gérard Bapt. Vous lui avez enlevé ses revenus pour les mettre à la CADES !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Le point essentiel, à mes yeux, c'est que la CRDS bénéficie à la seule CADES. C'est un facteur majeur de clarté et de sécurité.

À Mmes Martine Pinville, Isabelle Vasseur, Véronique Besse, je veux dire que je suis, moi aussi, préoccupée par le déséquilibre de la branche famille. Vous l'avez toutes dit, il n'y a pas aujourd'hui de perspectives de rétablissement rapide sans un effort structurel. Cela veut dire des efforts supplémentaires. Notre conviction, c'est que tous les revenus de remplacement, CLCA compris, doivent financer la protection sociale. Je le rappelle à l'ensemble des orateurs, cette mesure représente à elle seule 35 % de la réduction du déficit de la branche famille cette année. Nous devons aller plus loin, j'en suis convaincue, mais encore faut-il franchir cette première marche !

J'ajoute que la famille est une priorité de ce Gouvernement. Je pense aux 200 000 places d'accueil pour les jeunes enfants, que nous aurons créées en cinq ans. Je pense au renforcement du complément mode de garde, sur lequel M. Michel Heinrich a insisté, et je l'en remercie. Je sais que Roselyne Bachelot ou Marie-Anne Montchamp y reviendront certainement.

Enfin, sur la fraude sociale, vous le savez, la détermination du Gouvernement est totale. C’est raison pour laquelle nous appuierons nombre des propositions de MM. Dominique Tian et Alfred Trassy-Paillogues et de tous ceux qui, comme nous, refusent la culture de l'excuse.

M. Philippe Vitel. Bravo !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Ce PLFSS nous permettra de renforcer l'arsenal mis en place depuis 2007 avec, en particulier, la création de la Délégation nationale à la lutte contre la fraude, qui nous a permis de détecter 40 % de fraudes sociales supplémentaires depuis cette date.

La question de l'isolement, posée notamment par M. Dominique Tian, est effectivement un sujet crucial, puisque la CNAF estime qu'un tiers des fraudes y est directement lié. C'est pour cela que nous avons demandé aux CAF de cibler leurs contrôles et de vérifier l'existence d'une communauté d'intérêts financiers entre les bénéficiaires de prestation. C'est une priorité absolue.

Toujours sur cette question de la fraude, je remercie M. Jean Mallot de ses propos, même s'il ne va pas, lui aussi, jusqu'au bout de son raisonnement. Tous ceux qui se sont sérieusement penchés sur le sujet, comme les membres de la MECSS, savent que la fraude est une réalité insupportable, une réalité qui appelle des réponses extrêmement fermes, même si l'estimation de son montant reste, j'en conviens, un exercice très délicat.

M. Jean Mallot. C’est une litote.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Sur ce point comme sur les autres, l'opposition reste fidèle à elle-même et persiste dans le déni. Au fond, vous n'avez que deux mots d'ordre : détricoter l'ONDAM et remettre en cause toutes les recettes ciblées. Cette politique, c'est celle qui nous a condamnés au déficit permanent, et cela ne semble pas vous troubler un instant !

Sur l'ONDAM, tout d'abord : la formule de Mme Dominique Orliac, qui parlait « d'ONDAM insuffisant à 2,8 % », est éloquente. Vous considérez encore la tendance spontanée d'évolution des dépenses comme la norme et la maîtrise volontariste des dépenses comme l'exception. Vous restez ainsi en marge de la révolution copernicienne…

M. Michel Issindou. Tout va bien ! C’est parfait, madame la ministre, n’en jetez plus !

Mme Valérie Pécresse, ministre. …que nous avons accomplie en respectant l'ONDAM depuis 2010. Partir de la maîtrise médicalisée des dépenses, c'est le cœur de notre stratégie, qui porte à présent tous ses fruits.

Madame Michèle Delaunay, vous avez parlé de « krach sanitaire ». Mais ne voyez-vous pas que ce krach – et je le dis également à M. Simon Renucci – c'est en Espagne, c'est en Italie, c'est au Royaume-Uni qu'il se produit, et non en France ?

À la différence de nos voisins, nous n'avons diminué aucune prestation sociale. Notre politique de maîtrise des dépenses nous a permis de préserver nos filets de protection sociale. C'est un fait.

Mme Danièle Hoffman-Rispal s'inquiète de l'évolution des dépenses médico-sociales. Mais notre action en matière de dépendance – Mme Roselyne Bachelot le dira mieux que moi – doit se construire sur des bases financières solides.

Ce PLFSS marque des avancées en matière médico-sociale et je remercie Mme Martine Carrillon-Couvreur de le reconnaître.

Vous vous inquiétez des effets des mises en réserve. Je vous rappelle qu'elles concernent l'ensemble des sous-objectifs de l'ONDAM, pour un total de 545 millions d'euros. Nous avons créé cette ceinture de sécurité dans le droit fil du rapport Briet, pour nous permettre de réagir rapidement et efficacement en cas de risque de dépassement de l'objectif.

Sur les aides au logement, évoquées par Mme Marie-Françoise Clergeau, je rappelle que la mesure prise l'année dernière relevait du bon sens : la rétroactivité sur trois était en effet une souplesse devenue une source d'abus. La logique des choses était donc d'aligner le moment d'entrée dans le logement, ou d'ouverture des droits, à celui du versement des aides.

À M. Christian Hutin, je veux dire que le Gouvernement est mobilisé pour apporter des réponses aux victimes du drame de l'amiante. En 2009, nous avons revalorisé de 20 % le montant minimum de l'allocation de cessation anticipée d'activité, le portant à 180 euros par mois. Nous avons aussi renforcé les conditions d'indemnisation par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, avec un délai de prescription qui est passé de quatre à dix ans.

Sur la question du régime minier, évoquée par M. Michel Liebgott, je rappelle que l’intégration du financement du risque maladie au régime général se fait sans remise en cause des garanties propres au régime minier. Nous nous y étions engagés, nous l’avons fait.

M. Denis Jacquat, rapporteur. Très bien !

Mme Valérie Pécresse, ministre. L’article 42 du PLFSS garantit ainsi le remboursement à 100 % des dépenses de soins. En gravant ce principe dans la loi, nous donnons ainsi une garantie très forte aux mineurs. Je rappelle également que le régime minier est le seul régime spécial à ne pas appliquer les dispositifs de participation forfaitaire et de franchises médicales. J’ajoute enfin que, dès le 1er novembre prochain, nous allons engager la revalorisation des pensions minières voulue par le Président de la République.

M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les recettes et l’équilibre général. Les engagements sont tenus.

M. Jean Mallot. Il serait temps.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Sur la prévention, je remercie Mme Gisèle Biémouret de reconnaître toute l’efficacité de la hausse des prix dans l’action contre le tabagisme. Je tiens à vous rassurer, la lutte contre la contrebande est une priorité absolue. Elle produit d’ores et déjà de bons résultats, puisque 5 % seulement du tabac consommé en France est d’origine illégale. Mais ce chiffre est encore trop élevé et c’est pourquoi j’ai lancé, au début de mois de septembre, un nouveau plan d’action qui frappera plus vite et plus fort l’ensemble des filières de contrebande.

Je ne peux que le constater, mesdames et messieurs de l’opposition, vous êtes restés étonnamment silencieux sur les recettes.

M. Michel Issindou. Et sur les déficits, vous n’avez rien à dire ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Peut-être commencez-vous à vous rendre à la réalité : la hausse générale des impôts n’a pas d’avenir dans l’un des pays les plus imposés au monde.

M. Jean Mallot. Vous allez voter nos amendements alors ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Madame Jacqueline Fraysse, vous avez appelé à faire converger la contribution des revenus du travail et du patrimoine sur la protection sociale. Je me demande donc pourquoi vous vous êtes opposée à la hausse des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine lors du dernier collectif budgétaire ?

Mme Isabelle Vasseur, rapporteure pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Eh oui. Il faut être cohérent !

Mme Valérie Pécresse, ministre. L’équité sociale et fiscale, vous en parlez beaucoup, mais c’est nous qui la rétablissons.

Mme Jacqueline Fraysse. Oh !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Les mots et les actes, voilà, au fond, mesdames et messieurs de l’opposition, ce qui nous sépare.

M. Jean Mallot. Vous concourrez au Prix de l’humour ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Avec la majorité, le Gouvernement travaille, dialogue et avance sur le chemin du désendettement, en prenant des décisions fortes pour réduire les déficits qui minent notre système de soins et nos politiques de solidarité.

M. Michel Issindou. Qu’est-ce qu’il est bien ce Gouvernement ! Pourvu qu’on le garde !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Ce modèle social dont vous aimez tant parler, c’est nous qui nous le préservons, c’est notre responsabilité. Quelles que soient les circonstances, nous serons au rendez-vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Monsieur le président, mesdames et messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, je veux remercier tous ceux qui ont participé à cette discussion jusque fort tard dans la nuit, tout spécialement les rapporteures qui se sont plus spécialement consacrées aux sujets qui sont les nôtres à Marie-Anne Montchamp, à Claude Greff et à moi-même, c’est-à-dire Mmes Isabelle Vasseur, Bérengère Poletti et Martine Pinville. Je souhaite répondre de façon très précise aux différentes observations qui m’ont été faites au cours de cette discussion.

S’agissant des personnes âgées et handicapées, ainsi que certains l’ont rappelé, notamment Mme Bérengère Poletti, l’effort de solidarité en leur faveur progressera de 4,2 % en 2012. Cette augmentation importante des moyens est bien le signe d’une politique ambitieuse, comme l’ont souligné à juste titre M. Paul Jeanneteau et M. Arnaud Robinet, elle-même justifiée par l’allongement de l’espérance de vie, comme l’a relevé M. Philippe Vittel.

Mme Carrillon-Couvreur m’a interrogée sur les modalités de mise en réserve des crédits de l’ONDAM médico-social en 2012. Conformément aux préconisations du rapport Briet, une mise en réserve à hauteur de 0,3 % de l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie a été effectuée en 2011, soit 501,3 millions d’euros, dont 100 millions d’euros pour le secteur médico-social. Pour 2012, cette mise en réserve sera de 545 millions d’euros au total, dont 100 millions d’euros à nouveau pour l’ONDAM médico-social. La répartition de cette mise en réserve sera décidée ultérieurement, une fois connue l’exécution de l’objectif global de dépenses pour 2011.

Sur les moyens du secteur des personnes âgées, vous êtes nombreux, et je vous en remercie, à avoir souligné l’effort de l’État. Ces moyens vont progresser de 6,3 % l’année prochaine, soit 400 millions d’euros de mesures nouvelles. M. Guy Lefrand a d’ailleurs rappelé la progression de 75 % de l’ONDAM personnes âgées depuis 2007, ainsi que l’effort qui sera réalisé en 2012. Je ne partage pas l’analyse de Mmes Hoffman-Rispal, Orliac et Touraine selon laquelle la prise en charge des personnes âgées ne progresserait pas. Bien au contraire. La réforme de la dépendance n’est ni annulée, ni reportée, elle ne fait que commencer ; seules les mesures les plus lourdes ont été reportées, étant entendu qu’elles seront mises en œuvre lorsque les équilibres financiers le permettront.

Mme Isabelle Vasseur, rapporteure pour avis. Très bien.

M. Jean Mallot. La réforme a bien été reportée.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. L’effort de l’État en faveur des personnes âgées dépendantes est significatif depuis 2007. L’effort public en direction des personnes âgées dépendantes représente déjà 25 milliards d’euros en 2011. Le plan Alzheimer lancé par Nicolas Sarkozy représente un effort de plus de 1,5 milliard d’euros, et sa mise en œuvre se poursuivra en 2012. Chaque année depuis 2007, nous créons 7 500 places d’EHPAD en loi de financement de la sécurité sociale – en 2011, cela a représenté un effort nouveau de 400 millions d’euros.

En outre, les lois financières pour 2012 apporteront des réponses concrètes aux problèmes de nos concitoyens. Ainsi, nous apporterons notre soutien à certaines entreprises ou associations dans le secteur des services d’aide à domicile qui se trouvent en difficulté. Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, lors de la séance des questions au Gouvernement, à Mme Carillon-Couvreur, un fonds exceptionnel d’aide à la restructuration des services d’aide à domicile sera créé l’année prochaine. Il résulte des travaux très approfondis qui ont été menés par Mme Bérengère Poletti. Il sera hébergé par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie et abondé par l’État à hauteur de 50 millions d’euros en projet de loi de finances.

Nous lancerons également un plan d’aide à l’investissement doté de 50 millions d’euros, destiné à poursuivre l’effort de rénovation du parc existant.

Je rappelle, je l’ai déjà annoncé hier, que nous allons consacrer à la médicalisation des EHPAD 140 millions d’euros. Cela permettra la médicalisation de 83 000 nouvelles places d’EHPAD ainsi « pathossifiées », ce qui représente 44 % des places restant à médicaliser.

Mme Bérengère Poletti souhaitait obtenir des précisions sur l’expérimentation prévue à l’article 37 du PLFSS, notamment sur la modulation de la dotation soins des établissements qui participeront à l’expérimentation. Je confirme que la modulation se traduira systématiquement par une augmentation de cette dotation. La question était précise, la réponse est tout aussi précise. Nous devrons élaborer, en concertation avec le secteur, les indicateurs pertinents qui serviront de base à cette modulation. Je rappelle enfin que ces expérimentations seront conduites uniquement dans des établissements qui se porteront volontaires.

Sur les services de soins infirmiers à domicile, Mme Bérengère Poletti a insisté sur la nécessité d’une réforme de leur tarification. J’ai pris connaissance des amendements qui ont été déposés à ce sujet. Nous aurons cette discussion, je vous rendrai compte des travaux qui ont été menés et Marie-Anne Montchamp, qui a suivi cette affaire avec un grand soin, vous donnera très certainement des renseignements précis. Je souhaite toutefois vous dire d’emblée qu’une base législative ne me paraît pas nécessaire, ni même souhaitable, car cela figerait un mode de tarification ne correspondant pas complètement aux travaux menés en étroite concertation avec les représentants du secteur.

Mme Bérengère Poletti s’est également demandée s’il fallait transformer les pôles d’activité et de soins adaptés, qui sont des structures destinées à accueillir des malades d’Alzheimer dont les troubles du comportement sont modérés, en structures d’accueil de jour pour ces patients. Je le dis tout net, je suis défavorable à une telle évolution : le PASA est avant tout un mode d’accompagnement destiné aux résidents d’EHPAD, avec des critères d’inclusion qui privilégient les personnes souffrant de troubles psycho-comportementaux modérés. L’accueil de personnes dont les troubles sont moins avancés risquerait de créer des difficultés pour les usagers comme pour les professionnels. France Alzheimer n’est d’ailleurs pas favorable à une telle évolution. Il faudra néanmoins regarder avec les ARS la nature des difficultés rencontrées par certains PASA.

Sur le suivi du Plan solidarité grand âge, vous avez raison, madame Isabelle Vasseur, le changement de budgétisation de la CNSA nous permet de donner l’argent nécessaire aux agences régionales de santé pour financer les créations de places nouvelles et cette nouvelle méthode de budgétisation nous permettra de suivre finement le déroulement de ce plan. Comme l’a rappelé Mme Bérengère Poletti, le PSGA a donc été notifié à 87 %. Nous tenons, là aussi, nos engagements.

Je voudrais aborder maintenant un sujet qui tient particulièrement à cœur au président Méhaignerie, les gains d’efficience dans le secteur médico-social. Je ne peux qu’aller dans son sens. Nous avons conscience que, pour maintenir un haut niveau de prise en charge, nos concitoyens nous demandent que chaque euro dépensé soit correctement utilisé. C’est l’objet à la fois des expérimentations sur la tarification des EHPAD, qui permettront d’aller vers une prise en charge de meilleure qualité, et de l’amendement que le Gouvernement va déposer pour mettre en œuvre les expérimentations proposées par le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, ces expérimentations ayant pour but une meilleure organisation des parcours de soin des personnes âgées dépendantes. Les ARS, cher Jean-Luc Préel, joueront bien entendu un rôle important dans cette recherche d’efficience, comme vous l’avez rappelé à juste titre.

Vous m’avez également interpellée, monsieur Préel, sur les ORDAM que vous appelez de vos vœux. Vous connaissez mon point de vue sur la question : j’y suis tout à fait favorable car ce serait l’aboutissement de la réforme que j’ai portée avec la loi Hôpital, patients, santé et territoires. Mais il fallait solidifier le socle que constituent les agences régionales de santé : elles ont à peine un an et demi d’existence, il faut leur laisser encore un peu de temps. La création du Fonds d’intervention régionale qui vous est proposée dans ce PLFSS constitue un premier pas, que vous avez salué, pour aller dans cette direction.

S’agissant de l’expérimentation de la réintégration des médicaments dans le forfait soins versés aux EHPAD, sur laquelle M. Guy Malherbe a appelé notre attention, elle a été prolongée de deux années par le Parlement en PLFSS pour 2011. Nous mettons à profit ce délai supplémentaire pour continuer le travail. Je vous rassure cependant : les établissements précédemment dans l’expérimentation continuent de recevoir un forfait pour les médicaments. Parallèlement, nous avons souhaité analyser finement l’impact sur les pratiques de prescription médicamenteuse, sur la prise en charge des résidents et sur la soutenabilité à moyen terme des dépenses de médicaments d’une pharmacie à usage intérieur ainsi que des travaux initiés à la fois par les agences régionales de santé et les caisses primaires d’assurance maladie, dans le cadre de la gestion des risques. Ces études permettront de révéler forces et faiblesses de chacune des pratiques. La mission qui a été confiée à l’IGAS se terminera avant les discussions du PLFSS pour 2013.

Je reviens sur les services d’aide à domicile. J’ai longuement répondu pendant les questions au Gouvernement à Mme Carillon-Couvreur sur le fonds. Celui-ci s’imputera non pas sur le PLFSS mais au niveau du PLF car nous voulons que ce soit vraiment de l’argent frais qui accompagne la restructuration des services d’aide à domicile. Je dis bien restructuration car il faut que cet argent soit utile, qu’il s’accompagne d’un retour à l’équilibre des services en difficulté, sachant que l’autorité de tarification est non pas l’État mais bien le conseil général.

Si j’ai pu obtenir cette aide exceptionnelle, c’est pour deux raisons : d’une part, parce que les débats sur la dépendance ont permis de mettre en exergue la place centrale de ces services à domicile, les familles souhaitant garder la personne âgée le plus longtemps possible à son domicile et ce souhait étant partagé par la personne elle-même ; d’autre part, parce que de nombreux rapports ont relevé les difficultés conjoncturelles et structurelles auxquelles ces services se heurtent. C’est donc un signe fort que nous adressons aux départements, je tiens à le souligner.

S’agissant de la création de places nouvelles pour les personnes handicapées, vous connaissez mon engagement, avec Marie-Anne Montchamp, aux côtés des personnes en situation de handicap. Mme Poletti nous a interpellés sur l’évolution des crédits de paiement supplémentaires pour ce secteur. En 2011, ce sont 130 millions d’euros de crédits de paiements qui ont été budgétés pour financer 4 600 places nouvelles. En 2012, 100 millions d’euros de crédits de paiements permettront de financer 4 200 places nouvelles.

Par ailleurs, et comme je vous l’ai dit hier, nous notifierons, en 2011 et 2012, 363 millions d’enveloppes anticipées pour solder le plan pluriannuel de créations de places annoncé par le Président de la République. Nous tenons donc nos engagements.

Sur l’évolution des moyens prévue dans le PLFSS 2012 pour le secteur du handicap, je réaffirme avec force, avec Marie-Anne Montchamp, que les personnes handicapées ne seront pas la variable d’ajustement face à la crise : ce secteur bénéficiera de 186 millions d’euros de mesures nouvelles, dont 100 millions d’euros pour le financement des 4 200 places nouvelles qui ouvriront en 2012. Le Plan autisme, en particulier, prévoit la création de 4 100 places supplémentaires dédiées aux personnes autistes, soit 2 100 places pour enfants et 2 000 places pour adultes, ce qui représente un engagement financier de 170 millions d’euros. À mi-parcours, 88,5 % des places ont déjà été autorisées et 1 330 places ont été ouvertes, ce qui représente près des deux tiers des prévisions du plan. Nous sommes en avance sur le calendrier que nous avions nous-mêmes fixé.

Vingt-quatre structures expérimentales, mettant en œuvre les méthodes dites comportementalistes, encore trop peu implantées dans notre pays, ont également été autorisées. Nous tenons donc nos engagements, et les 363 millions d’euros de mesures nouvelles seront notifiées dans les prochains jours.

Enfin, j’ai confié à Valérie Létard, dont vous connaissez l’engagement sur ce sujet, une mission d’évaluation du plan Autisme 2008-2011 ; elle doit me remettre fin novembre un rapport qui devrait nous permettre d’aller plus loin.

Guy Lefrand m’interrogeait sur le besoin de prise en charge des frais de transports des enfants et adolescents handicapés. Le Gouvernement ne s’opposera pas aux amendements tendant à prendre en charge 100 % des frais de transport des enfants et des adolescents en accueil de jour dans les CMPP et les centres d’action médico-sociale précoce.

Nous sommes en charge, avec Claude Greff, de la famille, et nombre de vos questions concernent ce volet du PLFSS. Ce PLFSS porte un objectif de dépenses de la branche famille pour l’année 2012 de 57,1 milliards d’euros pour l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, soit une augmentation de 2,8 % par rapport à l’objectif 2011.

Comme le rappelait Bernard Perrut, cet objectif tient compte des mesures nouvelles en dépenses visant à améliorer les aides aux familles monoparentales, au travers du relèvement du plafond de ressources de 40 % pour l’obtention du complément de mode de garde de la PAJE et de l’aménagement de l’allocation de soutien familial, et celles aux parents handicapés, grâce à l’augmentation de 30 % du complément de mode de garde.

Je ne rejoins donc pas Martine Pinville, qui estime que la politique familiale est le parent pauvre de ce PLFSS 2012 ! Rappelons quelques chiffres : les prestations et autres dépenses en faveur des familles représentent 99,7 milliards d’euros – disons donc 100 milliards –, soit 5,1 % du PIB, contre 4,7 % seulement au début du quinquennat de Nicolas Sarkozy ; elles sont en constante augmentation et devraient atteindre 103,4 milliards d’euros en 2011.

D’ailleurs, un certain nombre d’indicateurs montrent que cette politique ambitieuse porte ses fruits : 828 000 enfants sont nés en 2010 dans notre pays, niveau de fécondité d’autant plus remarquable qu’il se conjugue avec un taux d’activité professionnel féminin atteignant 85 %. Cette natalité s’appuie notamment sur le développement des maisons d’assistantes maternelles, des microcrèches, des aides directes aux familles et de la PAJE, véritable congé parental qui permet à 600 000 personnes, si elles le souhaitent, de rester auprès de leur enfant.

La question de la garde d’enfants a été évoquée par Martine Pinville, Anny Poursinoff, Jacqueline Fraysse et Marie-Françoise Clergeau. Vous avez d’ailleurs pris acte des efforts du Gouvernement en matière d’offre d’accueil de la petite enfance ainsi qu’en matière de partage des responsabilités familiales et professionnelles.

Le plan de création de places, annoncé par Nadine Morano, est tenu : 200 000 solutions de garde en plus – 100 000 en collectif et 100 000 en individuel. Cet effort s’accompagne d’une diversification des modes de garde, grâce à des moyens supplémentaires, très importants en période de crise : 1,3 milliard d’euros inscrits dans la convention d’objectifs et de gestion 2009-2012. À mi-parcours de l’objectif de création de places, les taux de réalisation de ces objectifs ambitieux sont conformes au calendrier. L’engagement est donc, là encore, tenu !

Nous constatons aujourd’hui que près de 50 % des enfants de moins de trois ans sont accueillis dans des structures individuelles ou collectives. Ce taux progresse depuis trois ans. C’est beaucoup, rapporté à nos voisins européens, surtout si l’on tient compte du fait que parmi les 50 % restants, nombreux sont les enfants pris en charge par la famille – parents ou grands-parents. Néanmoins, des difficultés demeurent, je le reconnais. L’investissement des collectivités locales est inégal sur cette question, et les CAF ne peuvent à elles seules lever ces freins ; l’État mobilise la CNAF et ses moyens, mais, sans volonté des collectivités locales, pas de projets !

Un mot enfin sur le taux d’emploi féminin, évoqué par Martine Pinville et Marie-Françoise Clergeau. Ce taux s’établit à 80 % pour les femmes entre vingt-quatre et quarante-neuf ans, soit un des meilleurs d’Europe. Il y a bien sûr des progrès à faire, mais sur un autre terrain : celui du partage des responsabilités. J’ai organisé sur cette question du partage des responsabilités professionnelles et familiales une conférence le 28 juin dernier et j’achève une série de discussions avec les partenaires sociaux, au cours desquelles nous avons naturellement évoqué le congé parental et son éventuelle réforme au service de l’égalité entre les femmes et les hommes.

Pour ce qui concerne, en conclusion, l’assujettissement du CLCA et du COLCA à la CSG, prévu à l’article 13 de ce PLFSS, Valérie Pécresse a été exhaustive sur le sujet. La mesure doit rapporter 140 millions d’euros, et l’on ne peut donc pas, madame Poursinoff, la traiter de « mesurette ». Je rappelle que l’assujettissement participe certes à l’effort de réduction des niches sociales mais qu’il permet au surplus de traiter équitablement tous les revenus de remplacement. C’est assez logique, et je suis surprise de voir que ceux qui réclament la suppression des niches fiscales et sociales s’opposent à cette mesure de bonne gouvernance.

J’espère, mesdames et messieurs les députés, avoir été la plus exhaustive possible. Nous vous apporterons bien entendu, avec Claude Greff et Marie-Anne Montchamp, les éclaircissements nécessaires, au fur et à mesure des amendements en discussion. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé.

Mme Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, mesdames et messieurs les rapporteurs, monsieur le président de la commission des affaires sociales, Mme Touraine et Mme Poursinoff nous ont interpellés sur l’absence du projet du Gouvernement pour ce PLFSS.

M. Michel Issindou et M. Jean Mallot. C’est clair !

Mme Nora Berra, secrétaire d’État. Le Gouvernement a pourtant rappelé à plusieurs reprises son ambition : maintenir un haut niveau de prise en charge des assurés, tout en maîtrisant les dépenses sociales.

J’illustrerai ce propos en me penchant sur l’assurance maladie et le champ de l’accès aux soins. Vous nous parlez d’un désengagement de l’assurance maladie obligatoire ; pourtant, d’après les données de la Commission des comptes de la santé, la part de fonds publics dans la dépense de santé atteignait 77 % en 2010 et reste stable par rapport à 2006 : c’est une des plus élevées au monde.

Valérie Pécresse l’a rappelé hier, le reste-à-charge des ménages a diminué en 2010, pour la deuxième année consécutive ; il s’élève à 9,4 % en 2010, ce qui place la France en deuxième position, derrière les Pays-Bas, parmi les pays de l’OCDE, pour la faiblesse de ce reste-à-charge.

Certes, le reste-à-charge est une moyenne qui cache des disparités. Il est par exemple extrêmement faible à l’hôpital ainsi que pour les pathologies les plus lourdes, prises en charge à 100 % pour la sécurité sociale. S’agissant des dépassements d’honoraires, qui préoccupent à juste titre nos concitoyens, à défaut d’accord entre les partenaires conventionnels, le Gouvernement prendra ses responsabilités dans le cadre du PLFSS, comme l’a rappelé hier Xavier Bertrand.

Vous nous interpellez également sur les renoncements aux soins, qui touchent 15 % de la population adulte. Pour éviter ces renoncements, deux outils sont mobilisés : la CMUC et l’aide à la complémentaire santé. La CMUC concerne 4,3 millions de personnes, qui bénéficient du tiers payant intégral et du remboursement à 100 % de leurs dépenses de santé.

M. Michel Issindou. Ce n’est pas vous qui l’avez mis en place !

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Quant à la complémentaire santé, nous nous sommes attachés, depuis le début du quinquennat, à renforcer ce dispositif, et la majorité a décidé d’aller plus loin puisque, sous l’impulsion du président Méhaignerie, un amendement gouvernemental au PLFSS fixera le plafond de ressources de cette aide à 135 % du plafond de ressources pour la CMUC. Cela portera à près d’un million le nombre de bénéficiaires de ce dispositif, qui s’adresse non seulement aux actifs mais aussi aux étudiants.

Vous nous questionnez également sur la politique du médicament. Je rappelle que le Gouvernement a fait preuve d’un grand volontarisme concernant la contribution de l’industrie pharmaceutique à l’ONDAM 2012. Elle s’élève à 1,2 milliard d’euros, ce qui représente un effort historique.

M. Gérard Bapt. On peut faire mieux encore !

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Nous reviendrons sur la question des médicaments génériques au cours de nos débats, mais le Gouvernement relancera leur développement dans l’ONDAM 2012. Le prix du générique sera désormais fixé à 40 % du prix princeps, contre 45 % actuellement. Les mécanismes de tarif forfaitaire de responsabilité seront renforcés pour accroître le taux de pénétration des génériques, et nous aurons l’occasion de reparler de la question des appels d’offre.

En matière de prévention, vous estimez, madame Delaunay, que le Gouvernement est insuffisamment mobilisé. Au contraire, nous avançons ! Je ne reviendrai pas sur le plan Alzheimer, qu’a cité tout à l’heure Roselyne Bachelot, ni sur le plan Cancer. J’évoquerai des campagnes thématiques, comme « M’T dents », pour la prévention bucco-dentaire chez les jeunes, la relance de la vaccination contre la rougeole, la mise en place, depuis le 1er septembre dernier, du forfait à 150 euros pour la prise en charge du sevrage tabagique chez les femmes enceintes, ainsi que la campagne d’information sur la prise en charge des accidents vasculaires cérébraux, qui débute en ce moment.

En matière de psychiatrie, grâce à la loi sur les soins sans consentement du 5 juillet 2011, la prise en charge des personnes souffrant de troubles mentaux va se diversifier. Nous offrons la possibilité d’une prise en charge en ville, et non plus uniquement à l’hôpital, des personnes qui nécessitent un suivi psychiatrique. Comme je m’y étais engagée lors de nos débats, j’ai lancé nos travaux sur le plan Psychiatrie et santé mentale, qui est en cours d’élaboration et devrait permettre de réduire les ruptures de prise en charge par une meilleure coordination des dispositifs, afin que les personnes touchées vivent mieux avec la maladie.

Concernant enfin la réforme du régime spécial de sécurité sociale minier, le Gouvernement a entrepris une réforme ambitieuse, afin de garantir la pérennité de son offre de soins et de conforter les droits de ses affiliés et salariés. Comme vous l’avez rappelé, monsieur Door, nous nous y étions engagés et nous l’avons fait. Le Gouvernement a inscrit au sein du texte initial du PLFSS un article qui garantira le remboursement à 100 % des dépenses de soins pour tous les affiliés.

Je souhaiterais également faire un point sur les mesures de recettes et de dépenses proposées par la commission des affaires sociales. La commission des affaires sociales a effectué un travail très poussé pour trouver de nouvelles sources de recettes et d’économies, dans le but notamment de les substituer à la mesure sur les indemnités journalières maladie. Je comprends les objectif de ce travail ; les échanges se poursuivent actuellement. Je rappelle que nous avons un impératif : trouver des économies dont le rendement permette de garantir la tenue de l’ONDAM.

S’agissant de la proposition de baisse des dotations de l’ONIAM, du FMESPP et de l’EPRUS, nous n’y sommes pas favorables, car ces dotations ont déjà été calibrées au plus juste, au regard des besoins estimés. Si nous réduisons ces dotations, cela signifie que nous entamons sérieusement notre capacité à réagir efficacement face à une crise sanitaire ou que nous remettons en cause l’indemnisation des victimes, ce que personne ne peut souhaiter.

M. Gérard Bapt. Est-ce qu’on va racheter les vaccins ? On est en train de les brûler !

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. En ce qui concerne la taxation de l’industrie du tabac, j’entends votre demande, monsieur Bur, et, à l’instar de Xavier Bertrand qui s’est exprimé en ce sens aux Nations unies, je ne considère pas que la taxation de l’industrie soit un sujet tabou.

M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les recettes et l’équilibre général. Merci, madame !

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. J’attends la remise de votre rapport de mission, à la mi-janvier, pour avoir une vision d’ensemble du travail législatif et réglementaire à mener.

Je souhaiterais à présent vous parler de la branche vieillesse, qui illustre les mesures responsables prises par ce gouvernement.

Monsieur Jacquat, vous avez rappelé que dans le contexte budgétaire actuel, nous pouvions nous féliciter d’avoir mené à bien la réforme des retraites de 2010. Nous avons en effet pris nos responsabilités et sauvé notre système de retraite par répartition.

Madame Touraine, vous nous avez indiqué que les socialistes nourrissaient le projet d’accorder la retraite à soixante ans à ceux qui avaient cotisé quarante et un ans et demi. Or, près de la moitié des Français rempliraient aujourd’hui ces conditions. L’avancée que propose le parti socialiste revient à faire table rase des mesures d’âge de la réforme de 2010. Comment comptez-vous garantir la pension de retraite des Français ? Si une telle mesure était mise en œuvre, il vous faudrait trouver les 5 milliards qui manqueront l’année prochaine aux caisses de retraite, puis 10 milliards en 2015 et 20 milliards en 2018. N’importe qui verra que votre proposition ne tient pas la route ! Notre majorité continuera dans la voie de la maîtrise responsable puisque le PLFSS 2012 prévoit l’amélioration du solde du régime des exploitants agricoles, qui connaîtra un déficit cumulé de 3,8 milliards fin 2011.

Concernant la mesure de prise en charge par l’État des cotisations de retraite des sportifs amateurs de haut niveau, vous avez souligné, monsieur Jacquat, qu’elle encouragera l’investissement personnel des athlètes.

Madame Poursinoff, vous souhaitez que les disciplines sportives très médiatisées financent les sports moins suivis du grand public, mais la redistribution est importante au sein du monde sportif, grâce au centre national pour le développement du sport, et les recettes publicitaires sont déjà soumises à l’impôt.

Quant à la branche accident du travail – maladies professionnelles, et plus particulièrement l’exposition à l’amiante, sachez, monsieur Hutin, que le sort des personnes exposées à l’amiante est une préoccupation constante du Gouvernement. Un amendement gouvernemental a été déposé au PLFSS 2012 pour améliorer la coordination des dispositifs de cessation anticipée en prenant en compte l’intégralité des périodes d’exposition à l’amiante quels que soient les régimes auxquels l’intéressé a été affilié.

Le Gouvernement répond ainsi à une question régulièrement soulevée par les parlementaires, notamment M. Lefrand. Éric Woerth s’était d’ailleurs engagé en novembre 2011, devant le Sénat, à ce que cette question soit réglée dans le PLFSS 2012.

Vous le voyez, notre majorité est soucieuse de justice, pour concilier l’accès aux soins des plus modestes et le retour à l’équilibre de nos finances sociales dans un esprit de responsabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. J’appelle maintenant les articles du projet de loi.

Première partie

M. le président. Nous abordons la première partie du projet de loi, concernant les dispositions relatives à l’exercice 2010.

Article 1er

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 1er.

La parole est à M. Jean Mallot.

M. Jean Mallot. Nous allons bientôt examiner les très nombreux amendements des députés de l’UMP…

Mme Bérengère Poletti, rapporteur de la commission des affaires sociales pour le secteur médico-social. Autant que le parti socialiste !

M. Jean Mallot. …qui a manifestement quelques difficultés avec le projet de loi qu’elle prétend soutenir.

Nous revenons avec l’article 1er sur l’exercice 2010 de la sécurité sociale. Cet article retrace rapidement le tableau d’équilibre et en particulier le solde puisque, nous l’avons vu à plusieurs reprises notamment dans les travaux de la Cour des comptes cet automne, le total du déficit de la sécurité sociale s’élève cette année à 29,6 milliards d’euros, quasiment 30, ce qui est un record absolu.

M. Michel Issindou. Historique ! J’espère qu’il ne sera jamais battu.

M. Jean Mallot. Personne en effet n’a envie de le revoir.

Nous devons en tirer les leçons ! Vous écrivez par ailleurs dans votre exposé des motifs que ces déficits s’inscrivent à un niveau très inférieur à ceux prévus dans les tableaux d’équilibre votés en loi de financement initiale. Qu’est-ce que cela aurait été !

Selon vous, cette moindre dégradation tiendrait principalement aux évolutions macro-économiques plus favorables qu’initialement prévues, en particulier celles de la croissance de la masse salariale du secteur privé.

J’en tire deux conclusions.

Nous avons tout d’abord intérêt, si nous voulons aider la sécurité sociale, à augmenter de manière conséquente la masse salariale. Il vaudrait donc mieux que les entreprises augmentent les salaires plutôt que de recourir à des modes de rémunération annexes, de type prime de partage des profits, dont on a vu qu’elle aboutissait à des montants dérisoires.

Surtout, de ce passé de 2010, nous devons tirer des enseignements sur la fragilité des hypothèses économiques que vous retenez pour l’exercice 2012. Si la sensibilité à l’évolution de la masse salariale est si importante, attention ! Il est très inquiétant de lire, dans votre annexe B que vous comptez sur une évolution de la masse salariale de 3,7 % en 2011, 3,7 % en 2012, 4 % les années suivantes, avec des hypothèses de croissance globale du PIB de 1,75 % en 2012 alors que tout le monde sait qu’on tournera plutôt autour de 0,9 %.

La rédaction de votre article 1er ne peut que nous inquiéter pour les années à venir. Il faudrait tirer les leçons de la fragilité de ces hypothèses économiques et envisager de rectifier le PLFSS, dont les prévisions sont erronées.

M. le président. La parole est à Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. Nous abordons l’examen de ce projet de loi en prenant acte du déséquilibre pour 2010. L’année 2010 fut, de très loin, celle qui a détenu le triste record du déficit de la sécurité sociale puisque tout au long des années écoulées, jamais l’équilibre ne fut atteint, jamais même il ne fut tenté de s’en approcher.

M. Michel Issindou. Depuis 2002 !

Mme Marisol Touraine. Cet article traduit le laissez aller de la politique gouvernementale que nous avions dénoncé à l’époque et qui se trouve aujourd’hui inscrit dans les faits et dans les chiffres. Il montre que la politique que vous avez suivie ces dernières années a été irresponsable.

Permettez-moi par ailleurs, madame la ministre, de trouver fatigantes les leçons de bonne gestion que vous voulez nous donner quand on voit de tels chiffres.

Mme Isabelle Vasseur, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. C’est vrai qu’elle n’en donne jamais, des leçons, elle.

Mme Marisol Touraine. Au fond, vous passez votre temps à nous donner des leçons de responsabilité alors que votre seul bilan est celui de l’irresponsabilité.

Vous nous donnez des leçons de crédibilité alors que, manifestement, vous vous étiez engagés à l’époque sur un certain nombre de réalisations qui n’ont pas été tenues.

Je crois que les Français seront amenés à se demander ce que signifient les termes de crédibilité et de responsabilité lorsqu’ils sont prononcés par des ministres, par des responsables gouvernementaux, qui doivent faire état de résultats calamiteux. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Isabelle Vasseur, rapporteur pour avis de la commission des finances. Quand ils verront le projet socialiste, c’est certain !

Mme Marisol Touraine. Nous ne désespérons pas pour autant, madame la ministre, car nous sommes d’un tempérament optimiste et positif, d’obtenir une réponse à notre question : qu’allez-vous faire pour permettre à la sécurité sociale de faire face à la réduction prévue du taux de croissance en France ?

Vous ne pouvez pas nous expliquer, d’un côté, qu’il faut être responsable et crédible, et de l’autre nous présenter d’emblée un texte qui ne l’est pas, tout en refusant, malgré toutes nos interpellations, de nous répondre sur ce point.

M. Gérard Bapt. Très bien !

M. le président. La parole est à Jean-Pierre Door, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour l’assurance maladie et les accidents du travail.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour l’assurance maladie et les accidents du travail. M. Jean Mallot, à l’occasion de son rappel au règlement, a évoqué l’absence du ministre de la santé dans des termes assez particuliers. Sans vouloir polémiquer, je vous informe que le ministre de la santé est en ce moment au Sénat où il répond à la loi sur le médicament et la sécurité sanitaire. La présence, ici, de cinq ministres au banc témoigne que l’ensemble du Gouvernement se préoccupe des questions de santé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

(L'article 1er est adopté.)

Article 2 et Annexe A

M. le président. Plusieurs députés sont inscrits sur l’article 2 et l’Annexe A.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. Il s’agit, par cet article, d’approuver les modalités de couverture constatées de l’exercice 2010.

Cet article, pour la première fois suite à la loi organique de 2010, présente la situation patrimoniale de la sécurité sociale. Je ne suis pas sûr qu’elle soit tout à fait exacte ni exhaustive, mais c’est tout de même un progrès que je salue.

Je voudrais cependant rappeler que le déficit 2010 du régime général s’est élevé à 23,9 milliards. Le besoin de trésorerie a été assuré tout au long de l’année par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale – ACOSS – que nous avons autorisée à porter à 69 milliards son besoin de trésorerie. Était-ce raisonnable à l’époque ? L’année s’est tout de même déroulée dans d’assez bonnes conditions.

Mais, l’année dernière, nous avons transféré les déficits cumulés et les prévisionnels pour la retraite et le fonds de solidarité vieillesse jusqu’en 2018 à la caisse d’amortissement de la dette sociale – CADES – en modifiant la loi organique pour permettre de prolonger la durée de vie de la CADES, ce que le Nouveau Centre a dénoncé à l’époque.

Nous souhaitons donc, comme la Cour des comptes, que le projet de loi de financement de la sécurité sociale, madame la ministre, soit voté en équilibre – c’est ce que nous appelons la « règle d’or sociale ». Comme vous êtes favorable à la règle d’or, je pense que vous pourrez n’être que favorable à une règle d’or sociale car il n’est pas acceptable de laisser se creuser à nouveau le déficit. Chaque génération doit financer ses propres dépenses. J’aurai l’occasion d’intervenir pour tenter de vous convaincre, madame la ministre, de voter dès cette année la loi en équilibre avec une augmentation très modérée de la CRDS de 0,05 % : le pouvoir d’achat en serait-il affecté ? Je ne le crois pas alors que par ailleurs on propose 6 milliards de recettes supplémentaires qui, elles, ne porteront pas davantage atteinte au pouvoir d’achat. Notre proposition me semble assez raisonnable.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Je souhaite faire écho à l’intervention de M. Préel, pour faire remarquer à Mme la ministre qu’elle a rendu hommage – c’était sans doute mérité, mais pour d’autres qualités – à M. Vitel, excellemment intervenu hier soir sur la CADES.

Nous siégeons d’ailleurs tous les deux au conseil de surveillance de la CADES pour l’Assemblée nationale.

Mme la ministre a eu cette habilité extraordinaire de reconnaître la véracité des termes de M. Vitel en rendant hommage à la bonne gestion de la CADES, alors que M. Vitel a critiqué la manière dont le Gouvernement avait, depuis quelques années, pollué la clarté, la limpidité des ressources de la CADES. En effet, la reprise de dette en 2011 s’était accompagnée d’une part de l’affectation de 0,28 point de CSG supplémentaire autrefois affecté à la Caisse nationale d’allocations familiales que l’on a ainsi structurellement mise en déficit puisqu’on lui a enlevé des ressources dynamiques en leur substituant des ressources stables et aléatoires et d’autre part de l’affectation de 1,3 point du prélèvement social portant sur les revenus du capital antérieurement affecté au fonds de réserve des retraites. Selon la bonne théorie du sapeur Camember, le Gouvernement creuse des trous en essayant d’en boucher d’autres.

Il reste, madame la ministre, qui donnez des leçons, qu’à la fin de cette année qui précède les élections présidentielle et législatives, vous nous laisserez 140 milliards d’euros de dette sociale, et vous en rajouterez un petit peu pour faire bon poids dans votre projet de loi pour 2012.

Au total, vous aurez emmagasiné dans la CADES 200 milliards d’euros, laissant néanmoins à vos successeurs politiques, mais aussi à nos enfants et petits-enfants une dette sociale majeure, parce que je ne doute pas que la date butoir, sous réserve d’une amélioration rapide, sera appelée à être de nouveau reculée. C’est la confirmation de ce que disait à l’instant Mme Marisol Touraine : vous donnez beaucoup de leçons pour l’avenir, mais votre mot d’ordre, pour ce qui est d’aujourd'hui, est plutôt : « Ne faites pas ce que je fais » !

M. Jean Mallot et Mme Marisol Touraine. Très bien !

M. le président. Sur l’article 2, je suis saisi de l’amendement n° 252 présenté par M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les recettes et l’équilibre général.

M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour les recettes et l’équilibre général. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, comme d’autres qui vont suivre.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Favorable.

(L'amendement n° 252 est adopté.)

M. le président. Sur l’annexe A, je suis saisi d'un amendement rédactionnel n° 253 de M. Yves Bur.

(L'amendement n° 253, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement de précision n° 254 rectifié de M. Yves Bur.

(L'amendement n° 254 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement rédactionnel n° 255 de M. Yves Bur.

(L'amendement n° 255, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement rédactionnel n° 256 de M. Yves Bur.

(L'amendement n° 256, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 301.

La parole est à Mme Marisol Touraine, pour le soutenir.

Mme Marisol Touraine. Par cet amendement, nous entendons rappeler la manière cavalière avec laquelle le Gouvernement – comme l’indiquait à l’instant mon collègue Gérard Bapt – a géré la dette sociale, ce qui se traduit par certaines conséquences pour l’année 2010.

Le Gouvernement a systématiquement refusé, contrairement à ce que nous essayons, en vain, d’obtenir de lui, de mettre en place des mesures structurelles afin d’enrayer l’accroissement de la dette. C’est ainsi qu’au lieu d’engager, lorsque cette dette est apparue excessive, une politique résolue de rétablissement de l’équilibre, il a fait le choix d’une autorisation de découvert auprès de l’ACOSS pour 2010. Écartant toutes les autres mesures, il a ainsi mis en place un dispositif qui ne pouvait être couvert, puisque les sommes en jeu étaient considérables – 65 milliards d’euros –, que par le recours à des billets de trésorerie à court terme et à des mesures ne pouvant s’apparenter qu’à de la cavalerie financière. À l’époque, pourtant, le ministre en charge nous avait indiqué que de telles mesures ne pourraient tenir qu’une année et qu’il n’était pas question de les reproduire.

Il nous semble de bonne politique que nos concitoyens, dans le cadre d’une annexe à la loi, soient informés des mécanismes qui ont été mis en œuvre par le Gouvernement pour tenter de couvrir la dette sociale.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Bur, rapporteur. Contrairement à ce qu’indique l’exposé sommaire de l’amendement, l’annexe A porte bien sur 2010, et non pas sur 2009. Le choix des modalités de financement des déficits en 2010 a été cohérent et parfaitement assumé dans un contexte de taux d’intérêt historiquement bas. Ces déficits, je le rappelle, reflétaient l’impact de la crise la plus profonde que nous ayons eu à traverser depuis la guerre. Vouloir à due concurrence générer des recettes supplémentaires aurait impliqué de demander aux Français un effort considérable dans un contexte de croissance faible. Pour ne pas augmenter les prélèvements obligatoires et pour ne pas peser sur une conjoncture déjà suffisamment difficile, il convenait de recourir aux moyens traditionnels de financement, principalement la Caisse des dépôts et consignations, ainsi qu’à l’émission de billets de trésorerie, de sécuriser le montant restant à financer avec l’appui de l’Agence France Trésor, enfin de procéder à une large reprise de dette exhaustive jusqu’à 2011 inclus – et même au-delà, jusqu’en 2018, pour la branche vieillesse et le FSV.

Enfin, le découvert de trésorerie s’est révélé finalement moins élevé que prévu, soit 50 milliards d’euros, par rapport au plafond d’autorisation de plus de 65 milliards d’euros que nous avions accordé.

C’est la raison pour laquelle cet amendement, qui n’a pas été examiné en commission, reçoit de ma part un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je ne répéterai pas ce qu’a excellemment dit le rapporteur. Simplement, madame Touraine, nous attendons toujours vos propositions structurelles pour réduire le déficit de la sécurité sociale.

M. Gérard Bapt. Vous n’écoutez donc pas les conférences de presse de François Hollande ?

M. le président. La parole est à Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. Je m’étonne de la position adoptée par le rapporteur. À l’époque où nous avions déjà à en débattre, il était moins enthousiaste qu’il ne semble l’être aujourd'hui concernant les propositions qui nous sont faites. Et je ne parle pas de ceux que nous avons entendu hier encore regretter qu’il n’y ait pas eu recours, pour alimenter la CADES, par exemple à un prélèvement pérenne de la CRDS – ce qui n’est pas nécessairement notre position.

Quant à nos mesures structurelles, madame la ministre, refuser des hausses de prélèvements qui ne disent pas leur nom, n’en est-ce pas déjà une ? Votre pratique n’a en effet rien à voir avec votre discours : vous nous expliquez que vous n’augmentez pas les prélèvements, mais PLFSS après PLFSS – on l’a vu à l’occasion du PLFSS de 2010 dont nous soldons en quelque sorte les comptes, et on le verra encore pour l’actuel – vous procédez à des augmentations de taxes et de prélèvements masqués. S’agissant en l’occurrence de la CADES, plutôt que d’engager une politique de restructuration de la dette et, à plus long terme, de restructuration structurelle du système de santé, vous avez préféré faire de la cavalerie budgétaire et tenté de cacher sous le tapis la poussière peu esthétique de la dette que vous avez accumulée.

(L'amendement n° 301 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement rédactionnel n° 257 de M. Yves Bur.

(L'amendement n° 257, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement rédactionnel n° 258 de M. Yves Bur.

(L'amendement n° 258, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement rédactionnel n° 259 de M. Yves Bur.

(L'amendement n° 259, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement rédactionnel n° 257 de M. Yves Bur.

(L'amendement n° 260, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L'article 2 et l’annexe A, amendés, sont adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de la première partie du projet de loi.

(L'ensemble de la première partie du projet de loi est adopté.)

Deuxième partie

M. le président. Nous abordons maintenant la deuxième partie du projet de loi, concernant les dispositions relatives à l’année 2011.

Article 3

M. le président. Sur l’article 3, je suis saisi d'un amendement de conséquence n° 423 de M. Yves Bur.

(L'amendement n° 423, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L'article 3, amendé, est adopté.)

Article 4

M. le président. Sur l’article 4, je ne suis saisi d’aucun amendement.

(L'article 4 est adopté.)

Article 5

M. le président. La parole est à Mme Marisol Touraine, inscrite sur l’article 5.

Mme Marisol Touraine. Je souhaite évoquer le Fonds de réserve pour les retraites qui fait l’objet d’un siphonnage progressif...

M. Gérard Bapt. D’un hold-up !

Mme Marisol Touraine. ...pour alimenter la CADES.

Vous nous demandez, madame la ministre, quelles sont nos politiques structurelles. Mais celles que nous avons mises en œuvre, et qui devaient produire leurs effets dans quelques années, vous les avez supprimées !

M. Jean Mallot. Exactement !

Mme Marisol Touraine. Puisque vous faites du benchmarking avec les politiques sociales des autres pays – comparaisons d’ailleurs que vous faites toujours dans le même sens –, vous devriez savoir que certains pays ont mis en place des fonds de réserve précisément pour faire face au pic démographique au moment où il sera le plus difficile à absorber.

Nous souhaitons donc, à l’occasion de l’examen de l’article 5, réaffirmer que supprimer le Fonds de réserve pour les retraites était de mauvaise politique et relevait d’une mauvaise prévision. Vous avez mis en place une réforme qui ne nous permet pas d’aborder sereinement l’avenir de nos régimes de retraite. Elle nous laissera, au moment où nous aurons à affronter le déséquilibre le plus fort, sans aucune ressource pour garantir la retraite de nos concitoyens.

(L'article 5 est adopté.)

Article 6

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel, inscrit sur l’article 6.

M. Jean-Luc Préel. L’article 6, qui concerne la déchéance des crédits du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés, tend à diminuer de près de 58 millions d’euros sa dotation d’un peu plus de 347 millions d’euros pour 2011. Ce fonds sert en principe à financer les actions de modernisation des conditions de travail des personnels et, surtout, les dépenses d’investissement et de fonctionnement dans le cadre d’opérations de modernisation des établissements.

Mon interrogation, madame la ministre, monsieur le rapporteur, est très simple. Alors que les besoins des établissements sont importants – nous sommes un certain nombre ici à en connaître et à demander en leur faveur des aides –, il nous est répondu que les fonds manquent. Or, curieusement, alors que les sommes dont dispose le Fonds sont relativement modestes – soit, je le répète, 347,71 millions d’euros –, non seulement elles ne sont pas utilisées, mais chaque année on nous demande de les diminuer – de près de 58 millions aujourd'hui – faute justement d’être utilisées.

Pourrait-on savoir pourquoi ces fonds ne sont pas utilisés alors que de réels besoins existent en matière de modernisation des établissements de santé publics et privés ?

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Dans le même ordre d’idée que notre collègue, j’essaierai, en allant peut-être un peu plus loin, de préciser les raisons de cette non-utilisation de fonds structurels. En effet, alors que notre offre de soins en matière tant hospitalière que de soins ambulatoires aurait bien besoin d’une action de restructuration, nous nous apercevons que ces fonds – qu’il s’agisse de ceux en question ou de tous ceux fléchés, en quelque sorte, santé publique au sens large, c'est-à-dire les programmes prioritaires de l’action publique – ne sont pas utilisés pour l’essentiel parce qu’ils font l’objet de la régulation budgétaire.

Chaque année, on nous propose une diminution des dépenses annuelles, et on annonce un plan d’économies, en l’occurrence de 2 milliards. Si, pour certains postes, l’objectif est atteint, d’autres restent à l’écart de la diminution des dépenses faute d’intensité de l’action politique voire de chiffres réalistes. En conséquence, des arbitrages sont rendus concernant ces fameux fonds structurels de santé publique – je pense, notamment, au gel des crédits MIGAC qui est l’une des propositions du rapport Briet que vous avez adopté et qui a entraîné un retour au point de départ du montant des crédits de ces missions d’intérêt général.

Avec la régulation budgétaire, ce sont donc toutes les actions prioritaires de restructuration en matière de santé publique qui sont victimes de l’action des pouvoirs publics – ici du Gouvernement.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. L’article 6 tire simplement les conséquences de la déchéance légale des crédits qui n’ont pas été attribués par les agences régionales de santé ou qui, après avoir été attribués, n’ont pas été réclamés à la Caisse des dépôts par les établissements. Il s’agit donc d’une procédure légale.

Cela dit, pour répondre complètement aux intervenants, il se peut aussi que des demandes faites auprès des agences régionales de santé ne satisfassent pas aux conditions et aux critères de choix de ces agences. Mais le sujet est alors tout autre : il s’agit d’une question non plus financière, mais de stratégie régionale de santé, laquelle dépend évidemment des agences.

Je le dis en tout cas à M. Le Guen : cet article est un mauvais support s’agissant de ses remarques, car il ne fait que tirer les conséquences légales de la déchéance.

M. le président. La parole est à Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. Il ne nous échappe pas, madame la ministre, que la présentation en question est légale. C’est bien le moins que l’on puisse attendre de vous !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Appliquer le droit est bien un minimum !

Mme Marisol Touraine. La question n’est pas de savoir si le processus est légal ou pas, mais ce qu’il reflète. Vous passez votre temps à nous reprocher de ne pas pouvoir présenter de politiques structurelles. Non seulement c’est faux, mais cet article est exactement la traduction du contraire.

Ce serait, semblez-vous dire, la faute à pas de chance si les dossiers présentés par les établissements de santé ne répondent pas aux critères des agences régionales de santé. Il y a une façon très simple pour en arriver là : on ouvre un fonds doté de ressources pour faire en sorte que les différentes structures concernées puissent travailler mieux ensemble – ce qui était d’ailleurs l’objectif des ARS –, mais on fait en sorte que les critères de présentation des dossiers conduisent à ce qu’une demande sur deux tombe à l’eau ! Cette faute à pas de chance, voilà ce à quoi aboutit la disposition que nous examinons.

Cet article est extrêmement grave parce qu’il traduit en réalité le renoncement ou l’absence de volonté gouvernementale de mettre en place à l’égard des établissements de santé des politiques qui soient structurelles et pas simplement comptables ! (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

(L'article 6 est adopté.)

Article 7

M. le président. La parole est à Mme Marisol Touraine, inscrite sur l’article 7.

Mme Marisol Touraine. Nous ne nous étions pas opposés à la création des agences régionales de santé ; aujourd’hui, il est peut-être temps de regretter la façon dont elles sont mises en place.

L’article 6 le montre bien : les ARS ne disposent pas encore des moyens qui permettraient de mener des politiques territorialisées en matière sanitaire et sociale.

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 138, qui fait l'objet des sous-amendements nos 741 et 742.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Yves Bur, rapporteur. Avant de présenter l’amendement, je précise à l’attention de Mme Touraine que les agences régionales de santé se mettent actuellement en place. On exige beaucoup d’elles…

Mme Marisol Touraine. On attend beaucoup !

M. Yves Bur, rapporteur. Dans le peu de temps durant lequel elles ont été opérationnelles, elles ont déjà effectué un gros travail, notamment en mettant en oeuvre les plans régionaux de santé et les schémas régionaux de santé, qui seront quasiment achevés d’ici à la fin de l’année.

Par ailleurs, nous débattrons ultérieurement de la mise à disposition des ARS d’un fonds d’intervention régional qui leur donnera davantage de moyens et de marges de manœuvre sur le plan régional. Nous proposerons quelques amendements afin d’améliorer le dispositif prévu par le Gouvernement : madame la députée, ils vont dans votre sens.

J’en viens à l’amendement n° 138. Il a été adopté par la commission sur la proposition de M. Tian. Il vise à améliorer l’information du Parlement sur l’utilisation de la dotation de gestion des ARS. Le dépassement constaté de quelques dizaines de millions d’euros s’explique en partie par le fait que cette dotation avait été mal calibrée en raison des incertitudes pesant sur l’organisation définitive des agences.

Sur ce sujet, la commission est favorable à la remise d’un rapport au Parlement par le Gouvernement. Pour ma part, j’ai déposé deux sous-amendements qui visent à préciser, pour l’un, que ce document sera transmis aux assemblées avant le 31 janvier 2012, et, pour l’autre, qu’il ne porte que sur l’année 2011.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Plutôt que de se voir imposer le dépôt formel d’un rapport, le Gouvernement se propose de vous donner satisfaction.

Je vous demande donc de retirer votre amendement et les sous-amendements, et je m’engage, au nom du Gouvernement, à tenir à votre disposition, et à celle de l’ensemble des membres de la commission, toutes les informations relatives à la mise en place des agences régionales de santé.

Un budget était initialement prévu pour les ARS, mais nous nous conformons à celui de 161 millions d’euros que propose la mission de contrôle que nous avons créée.

Je vous rappelle qu’un contrôle de la Cour des comptes est en cours sur la mise en place des ARS. Nous vous communiquerons ce rapport.

Par ailleurs, vous savez que les ARS sont soumises aux règles nouvelles relatives aux économies que nous avons demandées à tous les opérateurs de l’État. Cela explique que le budget soit en baisse.

M. le président. La parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, nous avons beaucoup cru aux agences régionales de santé.

M. Roland Muzeau. Vous en avez avalé des couleuvres !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales. Nous observons d’abord que le système reste extraordinairement centralisé.

Mme Jacqueline Fraysse. Et comment !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales. Les ARS se retrouvent aujourd’hui dans un moule imposé par les directions centrales, et leur marge d’initiative est relativement limitée.

Ensuite, nous constatons qu’il leur est demandé beaucoup de plans d’ensemble et qu’elles rencontrent des difficultés sur le terrain pour s’adapter à la diversité des situations.

Je tenais à faire ces remarques car j’estime qu’il ne faut pas oublier notre orientation initiale lorsque nous avons voulu les ARS – nous étions quelques-uns à aller jusqu’à défendre l’idée de la mise en place d’objectifs régionaux pour les dépenses de santé.

Les politiques de proximité permettent de faire des économies et de s’adapter à la diversité des moyens alors que, dans l’ensemble des pays du monde, les politiques centralisées rendent l’âme les unes après les autres. Ne tombons pas dans ce travers bien français !

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. J’ai défendu et salué la création des ARS qui mettent fin à une coupure absurde entre la prévention et le soin, entre la médecine de ville et l’hôpital, et entre le sanitaire et le médico-social.

À l’époque de leur création, le Nouveau Centre estimait toutefois que cette réforme restait malheureusement jacobine et centralisatrice. Sans être suivi, j’avais ainsi fait deux remarques. D’une part, constatant le manque de démocratie sanitaire, j’avais souhaité renforcer le rôle des conférences régionales de santé. D’autre part, je soutenais la création des ORDAM pour aller jusqu’au bout de la réforme. J’espère que ce nouveau pas sera franchi prochainement.

M. le président. Monsieur le rapporteur, retirez-vous votre amendement et vos sous-amendements ?

M. Yves Bur, rapporteur. Étant donnés les engagements pris par Mme la ministre, je les retire.

Je mettrai les informations que me fournira le Gouvernement à la disposition de la commission et je les transmettrai à notre collègue Dominique Tian, qui avait sollicité le dépôt d’un rapport devant le Parlement.

(L’amendement n° 138 et les sous-amendements nos 741 et 742 sont retirés.)

(L'article 7 est adopté.)

Article 8

(L'article 8 est adopté.)

Article 9

M. le président. Mme Jacqueline Fraysse a demandé la parole sur l’article 9.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet article maintient l’objectif national des dépenses d’assurance maladie pour 2011 au niveau fixé par la dernière loi de financement de la sécurité sociale.

Le Gouvernement constate néanmoins que les dépenses des établissements de santé connaissent « une forte dynamique ». Il faut bien dire que les hôpitaux publics n’avaient guère le choix. En effet, l'ONDAM pour 2011 était fixé à 2,8 %, soit un niveau bien inférieur à l'augmentation inéluctable de leurs dépenses, évaluée à 3,3 %. Cette progression est due à l'augmentation des prix de l'énergie, à celle des prix des médicaments ou aux quelques revalorisations salariales qui ont eu lieu dans la fonction publique hospitalière.

Ainsi, pour avoir osé tenter de reprendre des parts de marchés aux cliniques privées, les hôpitaux ont subi une double peine : d’un côté, leurs tarifs ont été diminués, dans le cadre de la régulation prix-volume de 0,7 %, alors que la baisse de ceux des cliniques était limitée à 0,05 % ; de l’autre, ils ont été privés de 530 millions d’euros censés financer leurs missions de service public et leur modernisation. Gelés dans un premier temps, ces crédits ont finalement été purement et simplement supprimés.

Dans ces conditions, il ne faut évidemment pas s’étonner des difficultés financières que rencontrent les hôpitaux. En lisant l’article 9, comme bien d’autres, je peux dire, sans risque de me tromper, que ces difficultés sont véritablement organisées par vos soins. Vous portez atteinte délibérément au service public hospitalier de notre pays.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Si le Gouvernement avait l’intention de présenter des comptes honnêtes et transparents, il corrigerait l’ONDAM 2011 en tenant compte des déficits d’ores et déjà connus des hôpitaux publics, notamment ceux des CHU.

Sur les vingt-cinq CHU nationaux, seulement deux sont bénéficiaires, tous les autres étant déficitaires. C’est que la tarification à l’activité a eu un impact négatif, en particulièrement en matière sociale, sur l’ensemble des hôpitaux développant une grande technicité – sans parler de la retenue des MIGAC que vous avez maintenue pour des raisons purement budgétaires. Au final, les CHU sont globalement déficitaires pour un montant total qui doit se situer entre 600 et 700 millions d’euros – je m’exprime sous le contrôle de la ministre du budget, qui pourra nous donner le montant exact du déficit.

En toute logique, ces déficits devraient être intégrés aux comptes que vous présentez de façon à fixer un ONDAM réel – d’autant que c’est sur cette donnée que s’appuieront ceux qui, en juin prochain, devront reprendre les comptes de l’assurance maladie et de la sécurité sociale.

M. le président. La parole est à M. Jean Mallot.

M. Jean Mallot. Madame la ministre, en l’absence du ministre de la santé, je souhaite vous poser deux questions.

La situation budgétaire des établissements de soins est très contrainte. Si des équilibres sont progressivement atteints, c’est aussi par le biais de la mise en réserve de certains crédits et de la limitation de l’activité. Est-il exact que des consignes aient été données par l’administration centrale aux ARS, qui les transmettraient aux établissements hospitaliers, afin que ceux-ci limitent leur activité jusqu’à la fin de l’année 2011 pour essayer de tenir les objectifs qui leur ont été fixés ?

Ma seconde question porte sur une situation un peu particulière. En effet, les collectivités locales ne sont pas seules à avoir contracté des emprunts toxiques : des établissements hospitaliers l’ont fait également, y compris pour financer certaines opérations prévues dans le cadre du plan « Hôpital 2007 ». Ces emprunts, souvent indexés sur le franc suisse ou le dollar, ont connu des évolutions extrêmement dommageables pour la santé financière des établissements concernés, qu’ils placent dans une situation financière très difficile. À ma connaissance, environ un tiers des établissements hospitaliers français sont concernés, soixante-six ou soixante-sept étant très gravement atteints. Le Gouvernement peut-il nous dire ce qu’il entend faire pour aider les établissements en question à se sortir de ce mauvais pas ?

M. le président. La parole est à M. Michel Liebgott.

M. Michel Liebgott. M. Méhaignerie a constaté le manque de proximité des ARS par rapport aux établissements hospitaliers qui rencontrent des difficultés.

Dans ma région, j’ai pu constater que les sous-préfets n’avaient en général aucun contact avec les ARS qui fonctionnent, il est vrai, de façon indépendante et autonome. Il me paraît toutefois souhaitable que l’administration d’État est organisée de telle manière que les ARS connaissent le territoire sur lequel intervient un hôpital. Cela est d’autant plus vrai que, comme la quasi-totalité des CHU, les établissements qui participaient autrefois au service public hospitalier, qui, aujourd’hui, ont vocation à fonctionner comme des établissements privés, sont en déficit du fait de l’application du tarif à l’activité.

Ces établissements qui ne pourront plus assumer financièrement un fonctionnement normal vont finir par devoir licencier du personnel et par se retrouver en cessation de paiement. Alors que les CHU peuvent faire appel à « la générosité publique », ces établissements n’ont pas cette possibilité : ils seront déclarés en faillite. Il y a donc une urgence absolue. Nous risquons en effet de voir disparaître des services entiers de chirurgie ou même de médecine alors même qu’il y a quelques années, ces établissements ont parfois été contraints de récupérer des hôpitaux en grande difficulté contre des promesses extraordinaires qui n’ont pas été tenues depuis.

La situation est extrêmement grave : TAA, ARS et ONDAM se percutent, laissant augurer dans certains territoires, au motif de réductions drastiques des coûts, du déménagement d’hôpitaux dont les conséquences seront dramatiques.

M. Guy Malherbe. Vous devriez vraiment arrêter de raconter n’importe quoi !

M. Michel Liebgott. Nous devrions au moins prendre un peu de temps pour installer les ARS et pour agir en concertation avec les élus locaux – qui président souvent les conseils d’administration des établissements – et avec l’administration de l’État sur le territoire, qui, souvent, n’est même pas associée aux décisions.

(L'article 9 est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble de la deuxième partie du projet de loi.

(L’ensemble de la deuxième partie du projet de loi est adopté.)

Troisième partie

M. le président. Nous abordons maintenant la troisième partie du projet de loi, concernant les dispositions relatives aux recettes et à l’équilibre général pour 2012.

Avant l'article 10

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n°518 rectifié portant article additionnel avant l’article 10.

La parole est à Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. Nous l’avons répété tout au long de la discussion de ce projet de loi de financement : pour nous, il est injuste d’augmenter le taux de la taxe payée par les mutuelles, en particulier sur les contrats d’assurance maladie solidaires. En effet, cela revient à accroître la charge pesant sur les patients. Nous dénonçons cette mesure et notre amendement vise à la supprimer.

On nous rétorque que cette taxe est finalement naturelle sans que nous arrivions à comprendre les raisons avancées pour justifier sa hausse. Mme la ministre a même affirmé hier que nous ne disions pas la vérité – en d’autres termes, elle nous accusait de mentir – car nous aurions prétendu que le reste à charge pour les patients était en augmentation.

Votre écoute est sans doute sélective, car nous ne prétendons pas que le reste à charge direct a augmenté pour les patients ; nous indiquons simplement qu’en raison des transferts de la sécurité sociale vers les organismes complémentaires, le reste à charge indirect a de facto augmenté pour les Français, puisque les contrats proposés par ces organismes varient en fonction des revenus.

Vous allez certainement me dire que ce n’est pas vrai, mais le prix des mutuelles a augmenté, en moyenne, de 6 % à 8 % par an, au cours des dernières années. En effet, entre 2008 et 2010, que ce soit en leur imposant de nouvelles taxes – taxe CMU et, maintenant, taxe sur les contrats responsables et solidaires –, qui représentent une augmentation de 10,4 % de leur coût, ou en créant de nouveaux transferts de l’assurance maladie vers les complémentaires – création d’une vignette à 15 %, obligeant ces dernières à prendre en charge la différence avec le taux de remboursement précédent, ou déremboursement du forfait journalier –, vous avez contribué à accroître la charge qui pèse sur les mutuelles, de sorte que leur coût a renchéri pour nos concitoyens. Face à cette avalanche de contraintes supplémentaires qui leur sont imposées, les mutuelles n’ont en effet d’autre solution que de répercuter ces coûts sur les assurés. C’est la raison pour laquelle nous vous demandons de revenir sur l’augmentation de la taxe sur les contrats responsables et solidaires.

En commission, M. Bertrand a déclaré, à ce propos, que les mutuelles devaient prendre exemple sur la GMF. Or, non seulement celle-ci n’est pas une mutuelle, mais elle ne consacre que 0,02 % de son activité aux contrats de santé.

M. Gérard Bapt. Eh oui, c’est une falsification !

Mme Marisol Touraine. Il est donc relativement facile pour ce groupe de ne pas répercuter l’évolution du coût de la santé sur ses adhérents.

Cet amendement est un amendement important : il y va du coût de la santé pour nos concitoyens.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Bur, rapporteur. Ce débat a été tranché lors de l’examen d’un collectif budgétaire, au cours duquel tous les arguments ont été échangés.

M. Gérard Bapt. Il n’est jamais trop tard pour corriger une erreur !

M. Yves Bur, rapporteur. J’ai pu organiser, dans le cadre du PLFSS pour 2012, une audition commune de l’Autorité de contrôle prudentiel, du Fonds CMU et de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et de la statistique – DREES –, afin d’analyser la situation financière des assureurs complémentaires, plus particulièrement des mutuelles.

De cette analyse, il ressort non seulement que le chiffre d’affaires de l’ensemble du secteur a progressé de 4,2 % en 2010 et de 3 % à 3,3 % en 2011, mais aussi et surtout que les frais de gestion des assureurs complémentaires sont extrêmement élevés : 28 % pour les assurances privées – dans ce cas, ils comprennent les honoraires des agents généraux d’assurances –, 18 % pour les institutions de prévoyance et 21 % pour l’ensemble des mutuelles. Il me semble que les organismes complémentaires, en particulier les mutuelles, pourraient engager une réflexion et consentir des efforts dans ce domaine.

J’ajoute que le secteur des assurances complémentaires a, aujourd’hui encore, la capacité de supporter la taxation supplémentaire proposée par le Gouvernement. Toutefois, il est évident que la situation ne pourra pas évoluer indéfiniment dans cette direction ; la profitabilité du système n’est peut-être pas aussi importante qu’on l’imagine.

En tout état de cause, nous devons inciter la Mutualité à mener une réflexion sur ses frais de gestion et sur les réserves dont disposent ses différents organismes. Au demeurant, c’est aux adhérents, plutôt qu’à nous, de se saisir de ces questions lors des assemblées générales. S’agissant des réserves des assureurs complémentaires, je précise qu’elles ne sont pas aussi importantes qu’elles l’étaient lorsque j’ai soulevé cette question, il y a quelques années. Depuis, ils ont dû respecter les obligations prudentielles. Certes, ils avaient un peu anticipé leur application, mais, si la mise en œuvre de « Solvabilité I » s’est bien passée, « Solvabilité II » est d’une grande complexité et les oblige à la prudence.

L’Autorité de contrôle prudentiel nous a indiqué que l’ensemble du secteur présentait un excédent de l’ordre de 3 milliards d’euros de réserves libres de tout engagement prudentiel, tout en soulignant que ces sommes pouvaient être mobilisées pour abonder un fonds de garantie de l’ensemble du secteur. Des sinistres peuvent en effet survenir, le dernier en date étant celui de la Mutuelle des Landes, qui, alors qu’elle présentait des critères de solvabilité tout à fait corrects, s’est trouvée en très grande difficulté, au point qu’elle a dû être absorbée par une autre structure.

Telles sont les informations que je voulais porter à la connaissance de l’Assemblée.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je souhaiterais tout d’abord répondre très précisément à Jean-Marie Le Guen en ce qui concerne le rétablissement des comptes des établissements publics de santé. Leur déficit a été divisé par trois, passant de 475 millions en 2007 à 181 millions en 2010. Le nombre des CHU à l’équilibre était de deux en 2007 ; il est de dix aujourd’hui.

M. Michel Issindou. À quel prix !

M. Jean-Marie Le Guen. Ce n’est pas possible, madame : ce n’est même pas le déficit de l’Assistance publique !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Ces chiffres figurent dans le rapport de votre excellent rapporteur, Jean-Pierre Door. S’ils ne sont pas conformes à la vérité, faites-les rectifier par l’Assemblée.

M. Jean-Marie Le Guen. Vous avez dû vous tromper de chiffres !

Mme Valérie Pécresse, ministre. J’en viens maintenant à l’amendement n° 518 rectifié, car la question des mutuelles est importante.

Madame Touraine, vous faites passer la suppression d’un avantage fiscal pour une augmentation d’impôt. Nous ne créons pas un impôt nouveau sur les mutuelles.

M. Jean-Marie Le Guen. Non, c’est un impôt renforcé !

Mme Valérie Pécresse, ministre. La taxe spéciale sur les conventions d’assurance – TSCA – appliquée aux contrats de complémentaires santé est de 7 %, et elle a toujours été de 7 %. Néanmoins, nous appliquions jusqu’à présent un taux minoré à un certain type de contrats, les contrats solidaires et responsables, afin de favoriser leur développement.

M. Guy Malherbe. Eh oui !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Puisque vous faites semblant d’oublier l’histoire, mesdames, messieurs de l’opposition, je vais vous la rappeler.

Le contrat solidaire et responsable est ainsi nommé, car il a pour vertu de ne pas rembourser les franchises – c’est son aspect responsable – et de ne pas tenir compte de l’état de santé des assurés : c’est son aspect solidaire. Parce que nous voulions que ce type de contrat se développe, nous l’avons fait bénéficier d’un avantage fiscal. Or, aujourd’hui, il se trouve que 90 % des contrats de complémentaire santé sont responsables et solidaires. Dès lors que ce type de contrat est devenu la norme du contrat mutualiste et du contrat assurantiel en matière de complémentaire santé, nous estimons qu’il n’est plus justifié de maintenir cette niche fiscale. C’est pourquoi nous la supprimons. Mais je sais bien que, dans notre pays, il est beaucoup plus difficile de supprimer un avantage fiscal que de créer un nouvel impôt.

Par ailleurs, les mutuelles ont-elles les moyens de ne pas répercuter la suppression de cet avantage fiscal sur leurs prix ? La GMF nous prouve que c’est possible. Du reste, certaines mutuelles s’abstiennent de le faire.

Pourquoi le ministre de la santé et moi-même croyons que les mutuelles peuvent, si elles le veulent, ne pas répercuter la suppression de cet avantage fiscal sur leurs prix ? Tout simplement parce que, pendant trois années consécutives, nous avons respecté l’objectif national d’assurance maladie, fixé à 2,8 %, alors que le tendanciel de croissance des dépenses d’assurance maladie est de 4,4 %. C’en est en effet fini des années Jospin, durant lesquelles on votait un ONDAM de 3 % et on réalisait un ONDAM de 5 % ou 6 %. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Yves Bur, rapporteur. Voire 7 % !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Aujourd’hui, c’est l’inverse : nous le votons en dessous de 3 % et nous le réalisons en dessous de 3 %. Je tiens à dire que votre irresponsabilité, lorsque vous étiez aux affaires, a coûté à l’assurance maladie 13 milliards d’euros !

Mme Bérengère Poletti, rapporteure pour le secteur médico-social. Quel programme !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Notre choix, qui consiste à respecter l’ONDAM en dépit de la tendance naturelle à l’augmentation des dépenses d’assurance maladie, a rapporté à la collectivité 11 milliards d’euros au cours du quinquennat. Nous avons fait faire 11 milliards d’euros d’économie à l’assurance maladie !

M. Jean Mallot. Au détriment de la santé des patients !

Mme Valérie Pécresse, ministre. À votre avis, madame Touraine, qui profite de ces 11 milliards d’euros d’économies ?

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Vous !

Mme Valérie Pécresse, ministre. La croissance des dépenses de santé étant due à 80 % aux affections de longue durée, qui sont prises en charge à 100 % par l’État, ce sont les mutuelles qui bénéficient du respect de l’ONDAM et de nos mesures d’économie.

M. Guy Malherbe. Eh oui !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Elles pourraient donc faire un geste en internalisant la suppression de cet avantage fiscal qui, aujourd’hui, n’est plus justifié.

Telles sont les raisons pour lesquelles je suis défavorable à votre amendement, madame Touraine. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Madame la ministre, tout à l’heure, j’ai rendu hommage à l’habileté avec laquelle vous avez soigneusement sélectionné les propos qui vous agréaient dans l’intervention de M. Vitel concernant la CADES. Mais vous venez de faire preuve d’une habileté encore supérieure lorsque vous avez affirmé que la taxation supplémentaire sur les mutuelles était en fait la suppression d’une niche fiscale.

En effet, une niche fiscale est une réduction d’impôt ciblée, décidée en vue d’atteindre un objectif particulier.

Mme Valérie Pécresse, ministre, et M. Yves Bur, rapporteur. C’est exactement cela !

M. Gérard Bapt. Or, dans le cas qui nous concerne, on avait créé d’emblée deux niveaux d’imposition : l’un sur les contrats non solidaires, l’autre sur les contrats solidaires. Il est donc inexact de dire que l’on avait diminué une taxe dans le but de privilégier les seconds par rapport aux premiers. Pourtant, vous voulez faire accroire, par une espèce de pirouette intellectuelle, que vous réduisez une niche fiscale. Qui plus est, vous profitez de l’occasion pour augmenter le prélèvement sur les contrats non solidaires.

En 2002, la sécurité sociale était revenue pratiquement à l’équilibre.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Grâce à la croissance !

M. Gérard Bapt. Vous pouvez accuser Lionel Jospin de tous les maux : au 31 décembre 2011, le montant de la dette prise en charge par la CADES sera de 140 milliards d’euros.

M. le président. Merci, mon cher collègue.

M. Gérard Bapt. Je conclus, monsieur le président. J’entends dire que Mme Pécresse pourrait être la porte-parole du candidat de l’UMP lors de la prochaine campagne présidentielle.

M. Yves Bur, rapporteur. Ne mélangez pas tout !

M. Gérard Bapt. Eh bien, continuez comme cela, madame Pécresse : votre arrogance, les Français la jugeront au mois de mai 2012 !

M. Jean Mallot. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Guy Lefrand.

M. Guy Lefrand. Puisque l’on parle d’arrogance et que l’on évoque le jugement des Français, je souhaiterais vous soumettre une citation : « Je vous propose d’instaurer une grande loi sur les mutuelles, afin de les rendre plus transparentes et plus solidaires. Il est dérangeant qu’elles aient constitué des réserves financières. Des sommes colossales, mises de côté, servent soi-disant à veiller aux risques, alors qu’en réalité, elles servent à réaliser des placements financiers, ce qui est extrêmement problématique. » Savez-vous de qui est cette citation ? De Jean-Marie Le Guen ! (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. Je veux d’abord féliciter notre cher collègue pour ses excellentes lectures (Rires et exclamations)

M. Dominique Tian. Nous ne sommes pas sectaires !

M. Jean-Marie Le Guen. …et puisqu’il aime tant me citer, je l’invite à intervenir aussi souvent qu’il en a envie lors du débat sur le PLFSS.

Pour ce qui est des propos qui viennent d’être rapportés, ils reprennent une idée que j’ai avancée il y a une dizaine d’années. Mais ce que je propose consiste à taxer les réserves exagérées. Cette idée, que j’assume parfaitement…

M. Philippe Vitel. Nous aussi !

M. Jean-Marie Le Guen. …n’a rien à voir avec une taxation sur les contrats d’assurance. C’est, en réalité, une taxation sur les structures qui épargnent au-delà de ce qui est légitime.

Mme Bérengère Poletti, rapporteure. Incroyable !

M. Jean-Marie Le Guen. Par ailleurs, cette idée va dans le sens de ce qu’a dit Yves Bur, qui a lui-même fait la distinction, dans son intervention, entre la taxe sur les contrats d’assurance, payée par le consommateur, et la taxe sur les réserves, payée par les entreprises qui thésaurisent. Ce n’est pas la même chose…

M. Dominique Tian. Mais si !

M. Jean-Marie Le Guen. …et personnellement, j’y vois la même différence qu’entre l’impôt sur la fortune et l’impôt sur les sociétés ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) La taxe que je propose n’a pas un caractère uniforme, puisqu’elle ne vise que les sociétés qui engrangent des réserves au-delà de leurs droits.

Par ailleurs, comme le disait Yves Bur, le niveau de réserves a eu tendance à baisser, notamment en raison des transferts de prise en charge en direction des mutuelles, que vous avez enclenchés il y a quelques années et qui ont eu pour effet de les obliger à piocher dans leurs réserves.

Mme Bérengère Poletti, rapporteure. Nous avons appliqué vos directives, monsieur Le Guen !

M. le président. La parole est à Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. Je veux simplement rappeler que l’essentiel est de connaître le véritable coût de la santé pour les Français, et de savoir à combien vous les taxez pour avoir le droit d’accéder à un médecin, à un médicament.

Vous pouvez enrober votre politique de n’importe quel habillage, la vérité sera toujours la même : vous ne taxez pas les réserves – qui, en ce qui concerne les mutuelles, ne sont pas des bénéfices –, mais vous demandez aux Français de payer plus cher pour la même chose, c’est-à-dire pour pouvoir bénéficier de remboursements complémentaires que les nombreux désengagements de l’assurance maladie rendent de plus en plus nécessaires.

Quelle que soit la façon dont vous présentez les choses, les Français voient bien que, pour un contrat qui leur coûtait naguère 100 euros, il leur faut aujourd’hui débourser entre 105 et 110 euros.

M. le président. La parole est à M. Michel Liebgott.

M. Michel Liebgott. Sans vouloir faire de provocation, je veux souligner un point qui me paraît significatif : on a renoncé à taxer les parcs d’attraction, mais on va taxer les mutuelles ! Cette société est de plus en plus bizarre…

Si nous en arrivons là, si ce gouvernement se trouve aujourd’hui obligé d’augmenter la taxe sur les mutuelles, c’est bien parce qu’il a diminué précédemment les remboursements de médicaments, augmenté les forfaits hospitaliers et la part obligatoire au fonds de financement de la CMU.

M. Yves Bur, rapporteur. Ah non !

M. Michel Liebgott. Les Français vont devoir payer deux fois : d’une part, parce que les remboursements sont moindres, d’autre part, parce que les mutuelles vont devoir répercuter le coût de cette taxe sur leurs tarifs.

M. le président. La parole est à M. Yves Bur, rapporteur.

M. Yves Bur, rapporteur. Je ne peux laisser M. Liebgott dire que la politique du médicament a nui aux assureurs complémentaires ! Les médicaments déremboursés ne sont pas à la charge des complémentaires, pas plus que les baisses de prix qui ont été négociées. Je rappelle que la politique du médicament menée en 2000, par exemple, a abouti à une hausse de 11 % en valeur et en volume. En 2010, l’évolution est limitée à 2,8 % en valeur : nous sommes enfin sortis de ce laxisme qui conduisait à l’époque, comme l’a rappelé Mme la ministre, à laisser filer les ONDAM qui, annoncés à 3,5 %, finissaient à 7 % ! Il a été très difficile de se mettre fin à ce laisser-aller, devenu une habitude dans notre système de santé.

(L’amendement n° 518 rectifié n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 519 rectifié.

Pouvons-nous considérer cet amendement comme défendu, monsieur Issindou ?

M. Michel Issindou. Non, je vais le défendre, monsieur le président. Puisque l’heure est aux citations, je citerai, pour ma part, un rapport de l’inspection générale des finances, qui recommande de maintenir un taux réduit de taxation : « Grâce à la mesure d’exonération dont ont bénéficié les contrats solidaires jusqu’ici, l’objectif a été parfaitement atteint (…). Le maintien d’un régime privilégié, avec un taux réduit de 3,5 %, est de nature à préserver un avantage compétitif sur les contrats non encadrés et, en conséquence, à ne pas affaiblir l’incitation qu’ils constituent sur le comportement des usagers ». Ce n’est pas nous qui le disons, mais l’inspection générale des finances, dans un rapport très récent.

Pour ce qui est de savoir si les mutuelles doivent, ou non, répercuter l’augmentation de la taxation, la réalité est en passe de nous rattraper, puisqu’elles ont d’ores et déjà annoncé une augmentation de 3 % à 5 % de leurs tarifs. On peut toujours protester, souligner qu’il leur serait possible de faire autrement : la réalité, c’est qu’il coûtera toujours plus cher aux exclus de se soigner, notamment à cause des mesures que vous prenez !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Bur, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Vous ne pouvez dire que les exclus sont concernés par cette mesure, monsieur Issindou, puisqu’ils ont vocation à bénéficier de la CMUC – la couverture maladie universelle complémentaire –, qui concerne 4 millions de Français. Par ailleurs, une aide supplémentaire spécifique va être mise en œuvre pour les personnes situées juste au-dessus du seuil prévu pour bénéficier de la CMUC, ce qui intéresse, cette fois, un million de Français. Ne venez donc pas nous parler d’exclusion dans ce domaine ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean Mallot.

Je vous remercie d’être bref, monsieur Mallot. Nous n’allons tout de même pas refaire tout le débat…

M. Jean Mallot. Je veux simplement répondre à ce que vient de dire madame la ministre, monsieur le président. Le dispositif de soutien aux plus démunis évoqué par Mme Pécresse est un simple mécanisme de redistribution au sein du fonds CMU, qui pèsera, lui aussi, sur les régimes assurantiels et complémentaires mutualistes.

Pour conclure le débat sur la taxation des mutuelles, je soulignerai la perversité du Gouvernement et de sa majorité (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) : durant des années, ils ont instauré des déremboursements et des franchises médicales, encouragé les dépassements d’honoraires, et caetera, faisant glisser progressivement la prise en charge des soins vers les régimes complémentaires et notamment les mutuelles – pour nous dire aujourd’hui que ces mutuelles sont mal gérées, qu’elles ont des coûts de gestion trop élevés !

Par ailleurs, alors que les mêmes encourageaient, à une époque, le recours aux contrats solidaires et responsables – ceux qui ne sélectionnent pas leurs assurés et encouragent au respect du parcours de soins – et le développement de ces contrats ; ils ont aujourd’hui changé d’avis.

Enfin, le Gouvernement qui – notamment par la voix du ministère des finances – encourageait les mutuelles à constituer des réserves prudentielles allant au-delà du montant obligatoire, est le même que celui qui s’attaque aujourd’hui aux réserves. Tout cela se fait, bien entendu, au détriment des assurés sociaux et des plus démunis de notre société.

(L’amendement n° 519 rectifié n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 357 et 481, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n° 357.

Mme Jacqueline Fraysse. Jusqu’à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, les contrats d’assurance maladie solidaires et responsables étaient exonérés de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance, afin de favoriser le développement de la couverture complémentaire santé de la population.

L’an dernier, le Gouvernement a estimé que l’objectif de cette exonération était atteint, près de 99 % des bénéficiaires d’une complémentaire étant couverts par des contrats solidaires et responsables. Vous en avez conclu que cette exonération ne se justifiait plus, et la loi de finances pour 2011 l’a donc supprimée au profit d’une taxe spéciale sur les conventions d’assurances, à un taux de 3,5 %.

Vous avez ensuite décidé de doubler cette taxe en la portant à 7 % le 1er octobre dernier. Vous soumettez ainsi les contrats solidaires et responsables à une pression fiscale sans précédent – il ne s’agit pas, ici, de supprimer une niche –, puisqu’en comptant la taxe CMU à 6,27 %, on en arrive à plus de 13 % de prélèvement. Cette situation fait mécaniquement augmenter les cotisations de l’immense majorité des titulaires de contrats solidaires et responsables. Je sais que vous prétendez le contraire, madame la ministre, mais l’UFC table pourtant sur une progression de 4,7 à 8 % en moyenne, ce qui paraît une prévision de bon sens.

En agissant de cette manière, vous contraignez bon nombre de ceux qui souhaiteraient s’assurer à renoncer au bénéfice d’une complémentaire santé – et je ne parle même pas des soins spécifiques tels les soins dentaires et d’optique. Quoi que vous en disiez, le « reste à charge » est de plus en plus élevé. Afin d’éviter que la situation ne se dégrade encore, nous vous demandons, avec notre amendement n° 357, de ramener au taux réduit de 3,5 % la taxe sur les conventions d’assurance souscrites par les bénéficiaires de l’ACS.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour soutenir l’amendement n° 481.

M. Jean-Luc Préel. Nous avons assisté, tout à l’heure, à des échanges dont le caractère passionné n’a rien d’étonnant, puisque nous parlons de la santé des Français. Ce qui me surprend, c’est que nous ne puissions nous accorder pour faire certains constats élémentaires en toute sérénité.

Sur ce point, je ferai quelques remarques. Le régime complémentaire est composé d’institutions de prévoyance, d’assureurs et de mutuelles, qu’il ne faut pas confondre. Comme l’a dit Yves Bur, les frais de gestion sont importants et, de ce point de vue, les mutuelles ont des efforts à faire. Pour ce qui est des réserves, pour importantes qu’elles soient, elles appartiennent d’abord aux adhérents et aux mutualistes, à qui il appartient de veiller à ce qu’elles ne débordent pas. Enfin, il ne faut pas perdre de vue que la réforme Solvabilité II a instauré des règles prudentielles prévoyant l’existence de réserves.

J’en viens l’amendement n° 481. Je ne reviendrai pas sur la taxation des contrats solidaires – pour un profit estimé de 1,1 milliard d’euros par an –, une mesure un peu excessive et qui me paraît avoir été prise sans concertation suffisante. Les contrats solidaires avaient été mis en place pour favoriser le parcours de soins, conformément à un souhait largement partagé et qui ne paraît pas devoir être remis en cause.

Chacun conviendra que, depuis quelques années, des transferts sont progressivement opérés des régimes de base vers les régimes complémentaires. Sur la base de ce constat, il me semble que nous pourrions débattre de la part actuelle des complémentaires dans la protection sociale. Notre amendement propose de maintenir, pour les bénéficiaires de la CMUC, un montant de taxe de 3,5 %, dans l’esprit qui avait présidé à la création des contrats solidaires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Bur, rapporteur. La commission est défavorable à ces deux amendements. Le débat a, me semble-t-il, été tranché : il n’est pas de bonne politique de rétablir une niche sociale après avoir supprimé une niche fiscale ! Nous sommes en effet engagés dans une politique au long terme visant à clarifier l’ensemble de la fiscalité.

M. Gérard Bapt. Et la prime ? Ce n’est pas une niche ?

M. Yves Bur, rapporteur. Je suis d’accord en revanche pour dire qu’il convient d’encourager l’aide à la complémentaire santé, un dispositif d’aide sociale trop peu connu, et sans doute insuffisamment promu par les différents organismes, ce qui explique qu’une faible proportion des bénéficiaires potentiels y ait recours. Je me félicite de l’augmentation de l’aide à la complémentaire santé proposée par le président Méhaignerie, à laquelle le Gouvernement sera sans doute favorable, mais j’insiste sur le fait qu’il faut aussi faire connaître ce dispositif.

Si les bénéficiaires du RSA suivis au titre de l’insertion sont généralement bien informés, il me semble qu’un progrès pourrait être accompli en ce qui concerne les bénéficiaires du RSA-activité. Dans la mesure où ces personnes renvoient, tous les trimestres, leur déclaration de revenus à la caisse d’allocations familiales, cette caisse pourrait, sur la base des documents reçus, informer les personnes concernées de la possibilité de percevoir l’aide à la complémentaire santé et les inciter à entreprendre les démarches nécessaires auprès de leur caisse primaire ou de leur assureur complémentaire. Ce serait là un progrès en vue de l’objectif consistant à permettre à l’ensemble des Français de bénéficier d’une assurance complémentaire.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Quand j’entends M. le rapporteur, j’ai l’impression que le système qu’il défend ressemble fort à un serpent qui se mord la queue. D’un côté, vous augmentez la taxation, donc vous renchérissez le coût des contrats ; de l’autre, vous augmentez l’aide à la souscription de la complémentaire santé. Avouez que c’est une politique de Gribouille !

Vous taxez sur le chiffre d’affaires de façon indifférenciée. Ce sont non seulement les classes moyennes qui sont touchées, mais aussi les familles nombreuses puisque, lorsqu’il y a beaucoup d’enfants dans une famille, le contrat est plus élevé. Cela veut donc dire qu’en augmentant la taxe, vous taxerez encore davantage les familles nombreuses, ce qui va à l’encontre de la politique familiale, dont vous vous faites régulièrement les chantres.

Il ne faut pas oublier que, par ailleurs, ce sont les organismes complémentaires qui financent intégralement, à l’heure actuelle, le Fonds CMU. En effet, la subvention de l’État pour ce fonds est égale à zéro. Plus encore, le petit excédent annuel est reversé à la caisse de l’assurance maladie.

M. Yves Bur, rapporteur. En quoi cela vous gêne-t-il ?

M. Gérard Bapt. On porte la taxation à 13 %. Cela veut dire que, sur cent euros de chiffre d’affaires réalisé sur un contrat, treize vont au Fonds CMU – et à votre nouvelle taxe. C’est tout l’inverse d’une politique de solidarité ! Si vous aviez véritablement voulu faire la chasse aux niches fiscales et sociales dans ce domaine, vous vous en seriez pris aux 4 ou 5 milliards d’avantages fiscaux et sociaux consentis aux contrats collectifs, que dénonce la Cour des Comptes. Mais vous n’avez pas touché à cette niche-là. Sans doute auriez-vous risqué de faire de la peine aux grandes entreprises, qui sont seules capables de payer une bonne partie – parfois jusqu’à 75 % – du montant des contrats pour leurs salariés.

M. Jean Mallot. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Qu’il faille faire des efforts, tout le monde en convient. Nous, centristes, avons toujours soutenu le Gouvernement dans sa politique de réduction des dépenses.

M. Michel Issindou. Ça, c’est vrai !

M. Gérard Bapt. Hélas !

M. Roland Muzeau. Et aussi dans la création de nouvelles taxes !

M. Charles de Courson. Nous assumons cette position. Nous sommes mêmes l’un des rares courants politiques à proposer au Gouvernement un certain nombre d’économies sur la dépense et de hausses des recettes.

Mais nous ne pouvons mener cette politique – qu’il faudra d’ailleurs durcir au plus tard dans les deux mois qui viennent – si nous ne faisons pas des économies justes et si nous ne procédons pas à des augmentations de la pression fiscale qui le sont également.

Il nous semble que, dans cette affaire, nous devons protéger de la hausse de 3,5 % les couches sociales les plus modestes. Que représentent-elles ? Si l’on se cale sur la CMU – comme nous le faisons dans cet amendement –, c’est un peu moins de 20 %. Cela nous paraît équilibré : 80 % des Français contribueront, mais les couches sociales les plus modestes seront exonérées de cet effort.

M. Jean Mallot. Très bien !

M. Charles de Courson. En effet, la réponse de M. le rapporteur consiste à dire que l’on aura un peu plus loin une amélioration du dispositif d’aide à la complémentaire santé. Mais il a lui-même admis qu’il y avait un vrai problème s’agissant de la diffusion de ce produit. Si c’est là votre solution, elle est donc moins efficace que celle que nous proposons. En plus, la nôtre aurait l’avantage d’éviter d’avoir d’abord une dépense, et seulement ensuite une compensation. Le dispositif que nous proposons me semble plus simple. Voilà pourquoi nous, centristes, défendons cette position.

(Les amendements nos 357 et 481, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 358 et 480.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour présenter l’amendement n° 358. C’est le même débat.

M. Gérard Bapt. Pas du tout, monsieur le président !

Mme Jacqueline Fraysse. Nous formulons ici la même demande de réduction à 3,5 % du taux de la taxation spéciale sur les contrats d’assurance gérés par les mutuelles étudiantes.

Pour vous convaincre, ou au moins vous aider – nous aider tous – à réfléchir, je voudrais rappeler quelques statistiques : 10 % de la population ne sont pas couverts par une complémentaire santé ; 14 % des chômeurs et 8,5 % des ouvriers non qualifiés n’ont pas ou plus de couverture complémentaire et, parmi les étudiants, la proportion monte à 19 %, en hausse de plus de six points depuis 2008 ; 16,5 % de la population déclarent renoncer à des soins faute de moyens, ce taux montant à 34 % chez les étudiants.

Chacun d’entre nous doit mesurer la gravité de cette situation ; il faut créer les conditions pour la surmonter. La disposition qui est prévue ici va évidemment dans le sens inverse car elle tourne le dos au progrès de la couverture des étudiants.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour soutenir l’amendement n° 480.

M. Jean-Luc Préel. Je vous ai entendue hier soir, madame la ministre, rappeler que vous aviez aidé les étudiants à adhérer à une complémentaire. Je n’oublie pas cette parole et reconnais bien volontiers votre action en la matière.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Vous avez bonne mémoire !

M. Jean-Luc Préel. Vous savez que c’est la mémoire récente qui part la première ! (Sourires.)

Les étudiants rencontrent malgré tout des difficultés. Nous avons tous reçu récemment un rapport des mutuelles étudiantes montrant que les étudiants peinent aujourd’hui à adhérer à une complémentaire santé. Une part importante – de l’ordre de 25 % – n’en dispose pas. C’est pourquoi, à travers cet amendement, nous proposons de rester pour les étudiants à la taxe de 3,5 %, pour éviter une répercussion sur les cotisations des mutuelles étudiantes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Bur, rapporteur. La commission a également repoussé ces amendements. Je rappellerai simplement ce que j’ai dit tout à l’heure sur les frais de gestion des mutuelles étudiantes, qui sont de l’ordre de 20 %. Si elles faisaient un effort dans ce domaine, elles pourraient ne pas augmenter leurs tarifs et peut-être aussi consacrer davantage de moyens à la promotion de la santé et à l’accompagnement des étudiants les plus fragiles.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je partage l’avis du rapporteur. Je trouve choquant que les mutuelles étudiantes répercutent sur les tarifs des contrats la suppression de cet avantage fiscal.

Mais je vais être plus précise sur les actions du Gouvernement. Vous le savez, nous avons augmenté de plus de 20 % en cinq ans les bourses pour les étudiants. Nous avons surtout créé une aide à la mutuelle complémentaire de 200 euros pour les 150 000 étudiants boursiers les plus défavorisés.

Mme Jacqueline Fraysse. Mais c’est autre chose !

Mme Valérie Pécresse, ministre. La région Île-de-France a décidé de mettre en place un dispositif complémentaire destiné aux boursiers un peu moins défavorisés : 100 euros d’aide à la souscription auprès d’une mutuelle. Or j’ai eu la surprise de constater que ce dispositif est sous-consommé.

M. Gérard Bapt. Le vôtre aussi !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Cela veut dire que, si un certain nombre d’étudiants n’ont pas de complémentaire santé, c’est peut-être dû à une absence d’information de la part de ces organismes sur la nécessité d’une mutuelle. Il faut rappeler aux étudiants l’importance de contracter une assurance complémentaire.

M. Michel Issindou. Oui, certainement !

Mme Valérie Pécresse, ministre. La situation des étudiants est donc tout à fait spécifique. La sous-consommation des crédits de la région Île-de-France pour l’aide à la complémentaire santé étudiante montre bien que la non-couverture des étudiants s’explique par plusieurs facteurs.

Mme Jacqueline Fraysse. Il faut faire des efforts pour les informer.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je recommande donc pour ma part aux mutuelles étudiantes d’informer les étudiants sur l’intérêt d’avoir une complémentaire santé et de consommer les crédits qui sont ouverts notamment par les régions. S’agissant plus spécialement de l’Île-de-France, je rappelle que cette région rassemble 25 % des étudiants de France.

En outre, il est très important que les mutuelles étudiantes ne répercutent pas la perte de cet avantage fiscal. Le rapporteur a très justement souligné l’importance de leurs frais de gestion. Quelques économies seraient les bienvenues.

M. Michel Issindou. Encore faudrait-il le prouver !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Nous allons le démontrer avec l’amendement suivant.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Madame la ministre, vous venez de dire que le dispositif mis en place par la région Île-de-France est sous-consommé.

Mme Valérie Pécresse, ministre. En effet !

M. Gérard Bapt. Je vous demande donc, en retour, le niveau de consommation du vôtre.

Je voudrais savoir si la sous-consommation en région Île-de-France ne s’explique pas par le fait que votre dispositif à vous – celui des 200 euros – est tellement grevé de conditions qu’il devient inaccessible aux étudiants.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Mais non !

M. Gérard Bapt. Première condition, ce n’est pas la mutuelle étudiante délégataire du service public, la LMDE, qui le gère. Il faut aller à la CPAM pour constituer un nouveau dossier.

M. Yves Bur, rapporteur. Évidemment !

M. Gérard Bapt. Deuxième condition, il ne faut pas être rattaché fiscalement au foyer de ses parents. Troisième condition, il faut que la cohabitation avec les parents ait cessé. Or toutes les études montrent que de plus en plus d’étudiants n’ont pas assez de ressources et vivent chez leurs parents. Voilà pourquoi j’aimerais bien connaître le niveau de consommation de votre propre dispositif, madame la ministre.

Ensuite, l’état de santé des étudiants se dégrade. On observe dans le milieu étudiant des records en matière de renoncement aux soins, en dépit des efforts des mutuelles, qui réalisent des campagnes de promotion de la santé sur un certain nombre de thèmes.

Enfin, monsieur le rapporteur, les mutuelles étudiantes n’ont pas de réserves. Si, dans deux ou trois mois, l’une d’entre elles dépose le bilan pour cette raison, ce problème se posera à vous au début de la campagne présidentielle. Voilà qui sera intéressant !

M. Yves Bur, rapporteur. J’ai parlé des coûts de gestion, pas des réserves !

M. Gérard Bapt. Si, vous en avez parlé tout à l’heure !

M. le président. La parole est à Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. On peut s’interroger, madame la ministre, sur la question de savoir pourquoi les étudiants ne connaissent pas les dispositifs qui existent et qui leur sont proposés, au niveau national comme au niveau régional. Dans ma région il y a, comme en Île-de-France, un dispositif un peu plus large que celui que vous présentez.

La première leçon à en tirer, c’est que votre dispositif est centré sur les plus pauvres des étudiants. Nous sommes d’accord pour dire qu’il vaut mieux commencer par eux, mais nous constatons aujourd’hui que beaucoup d’étudiants sont confrontés à des difficultés financières pour se loger et s’installer. Ils sont un certain nombre à devoir travailler pour payer leurs études. Face à cette augmentation de leurs charges, ils se disent que, comme ils sont jeunes, le risque de maladie est moins important pour eux que pour d’autres. Ils en viennent à faire sciemment et quasiment rationnellement – de leur point de vue – un arbitrage en défaveur de la santé.

Un certain nombre de collectivités viennent donc compléter les dispositifs trop restrictifs mis en place par l’État. C’est le cas de mon conseil général, comme je vous l’ai dit hier, mais vous avez balayé l’exemple d’un revers de la main : vous considérez que ce n’est pas possible puisque vous avez vous-même mis en place une aide.

L’enjeu est véritablement d’accompagner et d’informer les jeunes, de mettre en place des actions à leur intention. Cela s’appelle engager des politiques de santé publique, passant notamment par la mise en place de centres de santé qui soient accessibles aux jeunes.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Là-dessus, on est d’accord !

Mme Marisol Touraine. Mais cela veut dire aussi mettre en place une aide à l’acquisition d’une mutuelle,…

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Cela existe déjà !

Mme Marisol Touraine. …puisque aujourd’hui, malheureusement, c’est le premier poste de dépenses auquel les étudiants renoncent.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Les études récentes sur la situation du milieu étudiant au regard de la santé montrent en effet, comme l’ont dit plusieurs collègues, une dégradation. On en est à peu près à 35 % d’étudiants qui renoncent partiellement à se soigner pour des raisons financières.

De nombreuses raisons expliquent cette situation, parmi lesquelles l’évolution de la famille – par exemple des problèmes de ruptures familiales – et le fait que toutes les familles ne soutiennent pas forcément leurs enfants. On ne peut donc pas dire que la situation soit bonne. Surtout, elle se dégrade – peut-être pas fortement, mais il est vrai qu’elle se dégrade.

Notre rapporteur nous dit que les mutuelles peuvent répercuter les 3,5 % en réduisant leurs frais de fonctionnement, que ce n’est pas un problème pour elles. À cet égard, je confirme qu’il n’a pas parlé de réserves. Mais à quelle hauteur ces frais de gestion se situent-ils ? Vous avez parlé de 20 %. En fait, c’est une moyenne ; le taux réel varie suivant les organismes. Certaines mutuelles sont mieux gérées que d’autres, comme dans toute situation humaine.

Mais, monsieur le rapporteur, compenser la hausse de la taxe en réduisant les frais de fonctionnement, cela impliquerait de réduire ceux-ci d’environ 15 %. Croyez-vous qu’elles le pourront ? Cela n’est pas raisonnable. Quand on réussit à les réduire de 2 %, de 3 % ou même de 4 % par an, ce n’est déjà pas mal. Je pense donc, monsieur le rapporteur, que votre argument se heurte à la réalité des choses.

Par ailleurs, Mme la ministre a dit, avec raison, que le système d’aide mis en place par la région Île de France complexe. Mais celui de l’État l’est aussi.

Mme Marisol Touraine. Il est même très complexe !

M. Charles de Courson. La vraie question est la suivante : pourquoi ces systèmes – tant celui de l’État que ceux des collectivités locales – fonctionnent-ils mal ? Parce que, quand on est étudiant, on n’est pas spécialiste de ces choses-là. C’est là une des raisons du faible taux de consommation.

Quant au système d’aide de l’État, il ne concerne que les boursiers, c’est-à-dire moins de 15 % des étudiants. Il y a toujours un problème d’information et de diffusion auprès d’eux. Il suffit de discuter avec les responsables des mutuelles étudiantes pour le constater. Faisant un travail de prévention, tenant quelques centres sociaux, ils voient bien que beaucoup d’étudiants ne se soignent pas.

Comme j’ai fait un travail sur ce sujet, je me permets également de vous rappeler qu’il y a un problème en matière de médecine scolaire. Celle-ci ne fonctionne pas très bien et la situation s’aggrave à mesure que l’on progresse dans son cursus scolaire et universitaire. Mes chers collègues, ceux d’entre vous qui ont fait des études supérieures ont-ils été examinés une seule fois par des médecins ? En six ans d’études supérieures, je n’ai jamais fait l’objet d’un examen quelconque !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Charles, enfin, c’était il y a trente ans ! (Sourires.)

M. Charles de Courson. Que ceux qui ont été examinés lorsqu’ils étaient étudiants lèvent la main ! Deux collègues !

M. le président. Ce n’est pas un vote, mon cher collègue !

M. Charles de Courson. Si, c’est un vote indicatif !

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Charles de Courson. La mesure proposée n’aurait qu’un impact extrêmement faible en termes financiers, elle ne représenterait que quelques millions d’euros d’exonération ou plutôt de non-hausse.

Franchement, un petit effort !

M. le président. La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. J’ai énormément de respect pour Charles de Courson, dont la parole est d’or, mais je lui rappellerai que la période où il était étudiant remonte à un certain nombre d’années. (Sourires.) Les services universitaires de médecine préventive existent dans toutes les universités et, je le rappelle, il faut produire un certificat médical pour pratiquer le sport à l’université.

M. Charles de Courson. Non !

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Si ! C’est obligatoire !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Bien sûr que si, monsieur le député ! Aujourd’hui, il faut produire un certificat médical obligatoire !

Pour avoir été ministre de l’enseignement supérieur pendant quatre ans, je peux vous dire – j’en suis désolée – que les services universitaires de médecine préventive existent et fonctionnent bel et bien et – je suis navrée de vous le dire – les étudiants sont mieux couverts qu’à l’époque où vous étiez étudiant. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Très bien !

(Les amendements identiques nos 358 et 480 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 726.

La parole est à M. Sébastien Huyghe.

M. Sébastien Huyghe. Cet amendement a pour objet de taxer les réserves excessives des mutuelles.

Comment le système fonctionne-t-il ? Il existe, pour les mutuelles, un système de réserves légales obligatoires, c’est-à-dire qu’elles doivent chaque année mettre leurs bénéfices en réserve jusqu’à ce que ces réservent atteignent 17 % du montant de leurs cotisations. On dit alors que leur marge de solvabilité est de 100 %. Au-delà, il s’agit de réserves libres.

Les commissaires aux comptes du secteur estiment que, pour assurer la pérennité des mutuelles et permettre leur développement, les mutuelles ont besoin d’une marge de solvabilité de 300 %, mais l’on s’aperçoit que la marge de certaines mutuelles dépasse 800 %.

Par cet amendement, nous vous proposons de mettre en place, au-delà de 350 % de solvabilité, une taxe qu’elles cesseront de devoir payer lorsque leur excédent de réserves aura été restitué à leurs adhérents sous la forme d’une baisse de leurs cotisations. Il s’agit donc d’inciter les mutuelles dotées de réserves excessives à faire payer le juste prix à leurs adhérents. Cela va aussi dans le sens de ce dont Mme la ministre exprimait tout à l’heure le souhait : il s’agit d’inciter les mutuelles qui le peuvent à ne pas répercuter sur leurs adhérents la diminution de l’avantage fiscal.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Bur, rapporteur. Je comprends naturellement les motivations de notre collègue Huyghe. J’ai cependant le sentiment que la suppression de la niche fiscale suscite déjà de vives réticences. Aller au-delà me paraît donc bien hasardeux.

Pour compléter mon propos de tout à l’heure, il ressort des auditions des représentants de la direction de la recherche, de l’évaluation et des statistiques, des mutuelles, du fonds CMU et de l’Autorité de contrôle prudentiel que la situation des organismes mutualistes a beaucoup évolué depuis quelques années. Les critères des directives Solvabilité I et, surtout, de Solvabilité II sont notamment venus complexifier l’approche prudentielle et, aujourd’hui, le secteur dispose de trois milliards d’euros de réserves au-delà des réserves exigées par l’Autorité de contrôle prudentiel. Celle-ci nous invite à ne pas toucher à ce surplus de réserves, car il n’est pas exclu que quelque sinistre puisse survenir ici ou là et que les mutuelles doivent alimenter un fonds de garantie interne.

Si votre amendement concerne les mutuelles, vous avez laissé complètement de côté les réserves que j’avais naguère évoquées, celles des instituts de prévoyance, qui, elles non plus, ne sont plus ce qu’elles étaient. Je crois me rappeler que leur montant s’élevait il y a trois ans à quatre milliards d’euros.

M. Jean-Marie Le Guen. Et AXA ?

M. Yves Bur, rapporteur. Vous ne parlez pas du tout, non plus, des assurances privées. Dans ce secteur, une fois les obligations prudentielles remplies, les réserves sont, au bout d’un certain temps, distribuées aux actionnaires.

Votre amendement tend donc à traiter un peu différemment les mutuelles.

Le secteur mutualiste doit fournir des efforts et analyser ses frais de fonctionnement et de gestion. À l’évidence, les assemblées générales doivent se saisir de ce sujet, même si ce n’est pas un sujet facile pour des organismes mutualistes. Se posera peut-être, ici ou là, la question de l’emploi.

Par ailleurs, il appartient aux assemblées générales de se prononcer, dans la transparence, sur le niveau des réserves libres de toute obligation prudentielle, et de décider, également en toute transparence, au nom de l’ensemble des adhérents, quel doit en être l’usage. Ces réserves doivent-elles être utilisées pour lisser les augmentations ? Doivent-elles servir à renforcer l’action de prévention en matière de santé publique ? Telles sont les questions que doivent se poser les assemblées générales et les membres des mutuelles, et il n’appartient pas à la puissance publique de se substituer à cette forme de démocratie.

C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable au nom de la commission des affaires sociales.

Rappelons aussi que la valeur des actifs du secteur a profondément pâti des effets de la crise et que la question de l’assujettissement, à un rythme assez rapide, des mutuelles à l’impôt sur les sociétés se profile. Restons-en donc à la taxation prévue.

Je me permets simplement, madame la ministre, de vous rappeler que j’avais souhaité, il y a quelques années, obtenir un rapport sur la situation financière de l’ensemble du secteur des assurances complémentaires. Il avait été décidé qu’il serait élaboré par la DREES et qu’il nous serait remis avant le 15 octobre dernier. Je sais que la DREES y travaille encore, mais nous sommes le 26 octobre et je n’ai toujours pas reçu ce rapport. Il aurait pourtant permis d’éclairer nos débats d’aujourd’hui, c’est pourquoi je regrette un peu de ne pas en disposer. Heureusement, donc, que nous avons organisé une audition commune de l’ensemble des acteurs du secteur pour y voir un peu plus clair.

Je souhaiterais en tous cas qu’à l’avenir, pour nous permettre de débattre en toute sérénité, nous bénéficiions dans les temps de l’éclairage souhaité.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur le rapporteur, le rapport est pratiquement bouclé. Nous avons eu les données un petit peu tard, mais le rapport sera rendu dans les prochains jours.

L’amendement déposé par M. Huyghe et Mme Rosso-Debord est intéressant, mais il ne nous paraît pas possible de l’adopter en l’état, pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, il ne concerne que le secteur mutualiste. Or il existe tout un secteur assurantiel qui, lui aussi, propose des complémentaires santé. L’adoption de l’amendement introduirait donc une distorsion de concurrence au détriment du secteur mutualiste.

Ensuite, et ceci me paraît encore plus problématique, votre dispositif ne permettrait pas de distinguer les mutuelles qui auraient un comportement extrêmement responsable, en décidant, par exemple, d’intégrer le coût de la suppression de la niche DSCA dans leur prix, et celles qui décideraient de le répercuter. De même, nous ne pourrions pas distinguer les mutuelles qui font des efforts en vue de réduire leurs frais de gestion et celles qui n’en font pas.

Je vous propose donc, monsieur le député, de retirer cet amendement au profit du suivant, l’amendement n° 251 rectifié, dont vous êtes également l’auteur, qui traite de la nécessaire transparence des frais de gestion des mutuelles. Les organismes de sécurité sociale fournissent effectivement de très importants efforts d’économie en matière de frais de gestion pour que chaque euro prélevé sur les Français soit utilisé au mieux, essentiellement pour le système de santé et le système de soins, alors que les mutuelles ont malheureusement des frais de gestion trop élevés. Ce n’est pas acceptable.

Je vous propose donc de retirer cet amendement au profit du suivant, auquel le Gouvernement donnera un avis favorable.

M. le président. Retirez-vous donc l’amendement n° 726, mon cher collègue ?

M. Sébastien Huyghe. Tout d’abord, je rappelle au rapporteur que les règles fiscales ne sont pas les mêmes pour les mutuelles que pour les sociétés capitalistiques. C’est pourquoi nous pouvons proposer des mesures complètement différenciées. Ainsi, tandis qu’une société capitalistique peut distribuer des bénéfices, les mutuelles ne peuvent rendre de l’argent à leurs adhérents autrement qu’en réduisant leurs cotisations. C’est d’ailleurs l’un des principes fondateurs du mutualisme : lorsque des bénéfices sont engrangés, on les restitue aux adhérents.

Cela dit, je comprends la difficulté mais je reprendrai l’argumentation développée tout à l’heure par notre collègue Jean-Marie Le Guen. Il rappelait qu’il existe une différence entre la taxation du capital et celle qui pèse sur le chiffre d’affaires. Tel est bien l’esprit de l’amendement n° 726.

Dernier argument, on ne propose pas de taxer toutes les mutuelles. Il ne s’agirait que de taxer les mutuelles disposant de réserves excessives, au-delà d’une marge de solvabilité de 350 %.

Cet amendement était donc bien calibré. J’entends cependant les arguments tant du rapporteur que de la ministre : Solvabilité II, notamment, va venir redistribuer les cartes, et le monde mutualiste va être soumis à l’impôt sur les sociétés. Je retire donc l’amendement n° 726, en comptant bien lire le rapport qui nous est promis pour les prochains jours, et je serai attentif aux chiffres qui résulteront de l’application de Solvabilité II et de l’impôt sur les sociétés.

Je précise au passage que Mme Rosso-Debord et moi-même ne sommes pas les seuls auteurs de cet amendement. Nous étions cinquante co-signataires.

(L'amendement n° 726 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 251 rectifié.

La parole est à M. Sébastien Huyghe.

M. Sébastien Huyghe. Cet amendement vise à inciter les mutuelles à une plus grande transparence s’agissant de leurs frais de gestion. Il a pour objet de leur imposer de publier chaque année un rapport sur le montant de ces frais de gestion.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Bur, rapporteur. L’amendement n’a pas été examiné par la commission mais, à titre personnel, je donne un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Pierre Méhaignerie.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales. J’ai compris le précédent amendement de M. Huyghe. Il s’agit d’un amendement d’appel qui a une fonction pédagogique.

Lorsque vous observez nos voisins européens, vous pouvez constater que, dans une période de crise, très peu de pays acceptent d’augmenter de 2,8 % leurs dépenses collectives de santé. Il ne serait pas compréhensible que les mutuelles, par facilité ou pour des raisons politiques, ne fassent pas les mêmes efforts pour la nation en maîtrisant certaines de leurs dépenses.

Nous les avons rencontrées, avec Yves Bur. Dans une année délicate où le pouvoir d’achat des salariés est un élément clé, beaucoup d’entre elles ont la possibilité d’établir des hausses inférieures à 3 % l’an prochain.

M. Gérard Bapt. Ne les taxez pas alors !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales. Le Gouvernement fait des efforts pour conserver un système de santé très efficace. On peut donc demander exceptionnellement aux mutuelles de faire un effort du même ordre au cours de l’année 2012, en établissant une hausse de moins de 3 % de leurs cotisations.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. À la différence de l’amendement précédent que nous n’aurions pas voté, nous voterons l’amendement n° 251 rectifié.

En effet, il n’est pas discriminatoire alors que le précédent était même anti-constitutionnel, à mon avis, puisqu’il impliquait une rupture d’égalité entre différentes formes d’organisations, comme l’a rappelé excellemment M. le rapporteur.

Par ailleurs, l’amendement n° 251 rectifié est un soutien à la bonne gestion alors que l’amendement précédent la sanctionnait. En effet, il faut analyser d’où viennent les excédents : dans certaines organisations les frais de gestion s’élèvent à 10 %, alors que dans d’autres ils sont de 20 % , comme l’a indiqué M. le rapporteur général. L’amendement n° 251 rectifié est donc un amendement vertueux.

Par ailleurs, n’oublions pas la dimension communautaire. Nous admettons comme hypothèse implicite que tout le monde s’assure auprès d’une mutuelle ou d’une société d’assurance française. Or l’on peut aussi s’assurer auprès d’assurances étrangères à travers une distribution en France. C’est la seule réserve que j’émettrai. M. le rapporteur et Mme la ministre auront peut-être une opinion sur cette question. On ne peut imposer cette mesure qu’aux sociétés et aux mutuelles implantées en France. Comment procéder lorsqu’une personne est assurée auprès d’une société luxembourgeoise, anglaise ou suisse ?

M. Michel Issindou. Quelle drôle d’idée !

M. Charles de Courson. Cela existe.

M. Yves Bur, rapporteur. C’est le marché unique.

M. Charles de Courson. Peut-être le rapporteur pourrait-il nous expliquer comment cette mesure s’applique à ceux qui ne sont pas situés en France et quelles sanctions seraient possibles dans ce cas.

(L'amendement n° 251 rectifié est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 359.

La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. En mars, un grand quotidien national dont la ligne éditoriale penche toujours en faveur du Gouvernement révélait que les coûts de gestion de la sécurité sociale étaient en baisse. Pour 2010, ils s’établissaient à 3 %, contre 4 % en 2005. Un score « imbattable pour 400 milliards d’euros de prestations servies et 360 de cotisations recouvrées », jugeait Dominique Libault, directeur de la sécurité sociale.

En dépit des saignées dans les effectifs, la sécurité sociale multiplie ses services en ligne, modernise son accueil et se lance dans des expérimentations nombreuses.

Le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux et les suppressions de postes semblent d’ailleurs jouer un rôle marginal dans cette performance de gestion, à côté des gains de productivité permis par l’informatisation et de l’effet de taille de l’assurance maladie.

Dès lors, nous nous interrogeons sur la pertinence des choix du Gouvernement, notamment sur l’intérêt et la rentabilité de nouveaux transferts de dépenses vers les mutuelles, non seulement pour l’État mais aussi, et en premier lieu, pour les assurés.

D’abord, les transferts coûtent cher à la collectivité en termes d’aides de l’État aux mutuelles, d’exonérations, d’aides fiscales et sociales pour les contrats collectifs en entreprises ou d’aide à l’acquisition d’une complémentaire.

Ensuite, nous doutons du bénéfice de ces transferts pour les assurés dont une partie toujours plus grande de la couverture santé est prise en charge par les concurrents privés de l’assurance maladie qui paient avec leurs cotisations diverses dépenses étrangères à la sécurité sociale – marketing, publicité, coût de distribution des prestations, salaires des dirigeants ou dividendes des actionnaires.

C’est pourquoi nous souhaiterions que la représentation nationale soit dûment éclairée à l’aide d’un rapport analysant comparativement les coûts de gestion et le niveau des prestations servies au regard des cotisations versées, des organismes de sécurité sociale, d’une part, et des mutuelles et des organismes privés d’assurance complémentaire, d’autre part.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Bur, rapporteur. Avis favorable. Cette évaluation comparative de l’ensemble des produits sur le marché est extrêmement intéressante.

Néanmoins, les auteurs de l’amendement seraient-ils d’accord pour apporter une modification rédactionnelle à l’amendement en ajoutant après les mots « assurance complémentaire » les mots « d’autre part » pour plus de cohérence. (Mme Jacqueline Fraysse et M. Roland Muzeau acquiescent.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Avis favorable.

Ce rapport permettra à la représentation nationale de constater qu’il existe malheureusement, à côté de l’effort très important fourni par les organismes de sécurité sociale pour réduire leurs frais de gestion, des postes de sous-productivité, notamment dans le secteur mutualiste.

(L'amendement n° 359, tel qu’il vient d’être rectifié, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 361 rectifié.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Comme dans le précédent amendement, il s’agit d’un rapport, mais le sujet est sensiblement différent.

Mme la ministre a affirmé au cours du débat que l’augmentation du taux des taxes sur les complémentaires étudiantes n’aurait pas d’impact. Nous pensons qu’il serait opportun de vérifier cette affirmation et de l’étayer dans le cadre d’un travail sérieux.

Tel est l’objet de cet amendement par lequel nous proposons un rapport sur les conséquences pour les mutuelles étudiantes du doublement de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance et sur l’opportunité d’exonérer de taxe sur les conventions d’assurance les contrats d’assurance maladie complémentaire couvrant les ressortissants du régime étudiant.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Bur, rapporteur. Avis défavorable.

Les rapports de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, la DREES, qui nous parviendront peut-être à temps l’année prochaine, complétés par le rapport que nous venons d’adopter, nous permettront d’éclairer suffisamment la situation des différentes mutuelles, notamment des mutuelles étudiantes.

Vous avez manifesté le souci d’une bonne gestion des assurances complémentaires. C’est pourquoi je ne doute pas que vous nous accompagnerez lorsque je proposerai, plus tard dans le débat, de confier aux caisses primaires la gestion déléguée à certains organismes de l’assurance maladie obligatoire, qui coûte 250 millions d’euros de frais de gestion supplémentaires. Il y a là une ressource rapidement mobilisable pour améliorer la gestion de l’assurance maladie. Je vous proposerai de la lisser dans le temps.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen. J’écoute depuis une dizaine de minutes les propos de nos collègues de la majorité, de Mme la ministre et de M. le rapporteur et je suis très étonné.

En effet, chers collègues, vous ne cessez de dénoncer les mutuelles et, plus largement, toutes les assurances complémentaires alors que, d’un point de vue pratique, vous transférez de plus en plus de dépenses sur ces mêmes mutuelles que vous fustigez ! Et ce d’un point de vue non seulement pratique mais aussi théorique – soyons honnêtes –, puisque vous avez l’intention de faire en sorte que ces assureurs complémentaires prennent de plus en plus la place de l’assureur obligatoire.

Voir un tel acharnement est un premier sujet d’étonnement pour moi. Vous dénoncez le caractère profondément malin des assurances complémentaires mais vous ne cherchez pas à réguler le marché ni à améliorer la transparence. Vous vous contentez de les critiquer.

Deuxième sujet d’étonnement : votre argumentaire permanent consiste à parler de reste à charge en éliminant le coût des complémentaires. Lorsque nous évoquons le coût de plus en plus élevé de la santé pour les Français et les inégalités qui en découlent, vous nous répondez : « Pas du tout ! » – mais vous ne parlez que du reste à charge hors assurance complémentaire.

Maintenant que nous discutons de la protection sociale, vous venez nous expliquer que les assurances complémentaires sont tout sauf transparentes, sont affreusement chères, ont la capacité d’augmenter les tarifs et de faire payer les Français indépendamment de leur jugement !

Il faudrait que vous choisissiez pour que votre discours soit cohérent !

Ou bien vous considérez que les assurances complémentaires sont le relais naturel et satisfaisant de la protection sociale obligatoire, et vous parlez, d’une façon, certes, hypocrite mais du moins logique, du reste à charge hors assurance complémentaire.

Ou bien vous considérez que, dans ce pays, on a un problème de protection sociale complémentaire, et, dans ce cas, ne vous contentez pas de les taxer ou de les dénoncer, faites en sorte d’établir une véritable transparence et une concurrence satisfaisante.

Assumez l’un ou l’autre de ces discours, par pitié !

M. Jean Mallot. Très bien.

(L'amendement n° 361 rectifié, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 362 rectifié.

La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Nous souhaitons que le Gouvernement puisse remettre au Parlement, « avant le 31 août 2012, un rapport sur les conséquences pour les assurés de l’augmentation du prix des complémentaires santé ; les conséquences pour les assurés de l’augmentation constante des frais médicaux restant à leur charge ; les raisons de l’augmentation préoccupante du renoncement aux soins. »

Notre souci de compréhension et d’audit des pratiques de protection sociale et d’assurance, quelles qu’elles soient, est partagé à l’unanimité. Il mériterait que cet amendement recueille la même unanimité.

(L'amendement n° 362 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Article 10

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel, sur l’article.

M. Jean-Luc Préel. L’article 10 concerne l’augmentation du forfait social.

Ce forfait qui est à la charge de l’employeur a été créé en 2009. Il porte notamment sur les rémunérations accessoires qui ont tendance à augmenter, comme l’intéressement, la participation, les prestations de retraite supplémentaire, les plans d’épargne d’entreprise, ou PEE, et les plans d’épargne pour la retraite collectifs, ou PERCO.

Créé à un taux de 2 %, il s’élève aujourd’hui à 6 % et le Gouvernement propose de le porter à 8 %, comme notre collègue Dominique Tian l’avait d’ailleurs prévu dès l’origine. Il s’agit d’une sorte de niche sociale.

Le Gouvernement propose de modifier, par voie de décret, le calcul des indemnités journalières, autre débat important qui n’est pourtant pas inscrit dans le texte lui-même. Ces indemnités ne seront plus calculées sur 50 % du salaire brut mais sur 60 % du net, ce qui revient à diminuer l’indemnité de 6 % pour 7 millions de nos concitoyens malades.

Autant il est juste de lutter contre la fraude, lutte chère à notre collègue Tian, autant il est anormal de taxer les malades qui ont besoin des arrêts de travail.

Cette mesure permettrait une économie de 200 millions d’euros. Au nom du Nouveau Centre, je vous invite, madame la ministre, à renoncer à cette décision en rétablissant le calcul des indemnités à 50 % du brut. Et pour, compenser l’économie de 200 millions d’euros, je vous propose de porter le forfait social à 9 %.

Madame la ministre, si vous vous engagez à ne pas modifier le calcul des indemnités journalières, je retirerai l’amendement que j’ai déposé sur cette question. Je vous propose un moyen pour compenser ces 200 millions d’euros afin que vous renonciez à cette mesure.

M. le président. La parole est à M. Jean Mallot, sur l’article.

M. Jean Mallot. L’article 10 a en effet pour objet d’augmenter le forfait social pour le porter à 8 %. Le forfait social porte sur les rémunérations qu’a rappelées Jean-Luc Préel, notamment l’intéressement et la participation.

Votre propre étude d’impact fournit des éléments qui vont dans le sens des arguments que nous allons développer. Vous indiquez ainsi : « Dans le cadre de leur activité professionnelle, les salariés bénéficient aujourd’hui de rémunérations qui échappent aux cotisations de sécurité sociale et ne leur ouvrent pas de droits ».

Ces rémunérations sont prélevées à 8 %. Vous-mêmes déclarez dans l’étude d’impact : « Ce taux est très modéré surtout si on le compare aux taux appliqués aux rémunérations salariales ordinaires : autour de 43 points de cotisations patronales ». Entre 8 et 43 points, il y a effectivement de la marge !

Les deux commentaires que je retiendrai de votre étude suffiront à étayer ma démonstration. Vous dites que « le rythme des éléments assujettis au forfait social est très supérieur à celui de la masse salariale ». Il y a donc bel et bien un glissement des rémunérations du salaire vers les éléments que j'évoque : épargne salariale, intéressement et participation. Cela ne peut pas être totalement étranger au différentiel des taux de prélèvement.

Vous écrivez par ailleurs vous-même que « l'augmentation du forfait social n'est pas de nature à porter atteinte au dynamisme des avantages consentis aux salariés ». Donc vous constatez vous-même que cette démarche d’augmentation du forfait social n'est pas de nature à réduire le caractère dynamique de ce mode de rémunération.

Voilà pourquoi nous considérons que l'on peut aller bien plus loin qu’un taux de 8 % – nous défendrons des amendements en ce sens – sans dommage pour ce mode de rémunération. Cela permettrait de compenser un certain nombre de mesures que nous contestons, notamment la diminution des indemnités journalières pour arrêt de maladie.

M. le président. La parole est à Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. Le Gouvernement a-t-il l'intention de procéder chaque année à une augmentation de 2 % du forfait social ? Si tel est le cas, qu'on nous dise clairement que, par souci de ne pas passer d'un seul coup à une contribution bien plus importante, il a choisi d'engager une stratégie d'augmentation progressive, étalée sur plusieurs années. Rétrospectivement, c'est bien ce qui apparaît.

Lorsque nous avions précédemment demandé une contribution sur le forfait social, on nous avait d'abord dit qu'il n'était pas bon de taxer ce type de rémunération, puis qu'il fallait le faire un taux très faible pour marquer une différence avec le taux des cotisations de droit commun. Aujourd'hui ce raisonnement n'est plus d'actualité.

Si la contribution est aussi malvenue qu'on nous l’avait dit, pourquoi augmente-t-elle année après année ? Si elle est bienvenue et si l'objectif est de rapprocher ce revenu du droit commun, pourquoi ne va-t-on pas immédiatement plus loin à un moment où les ressources font cruellement défaut ? Faute de discerner clairement la cohérence du Gouvernement en la matière, j'aimerais être éclairée à ce propos.

Enfin, puisque vous nous demandez souvent ce que nous proposons, voilà une ressource qui pourrait être mobilisée assez simplement.

M. le président. La parole est à M. Michel Issindou.

M. Michel Issindou. Je vais dire sensiblement les mêmes choses mais je crois utile de les répéter.

Vous nous répétez sans cesse, madame la ministre, que nous n’avons pas de solution, pas de recettes, pas de projet, pas d'idées.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Pas de réforme structurelle !

M. Michel Issindou. En tout cas voilà une idée, à laquelle vous n'adhérez sans doute pas, mais qui est concrète et qui rapporterait pas mal d'argent.

Nous n'avons rien contre l'intéressement et la participation : ce sont plutôt de bons dispositifs. Mais, s’il s'agit de salaires différés, ce sont néanmoins des salaires comme les autres. Comme vient de le souligner Marisol Touraine, ou bien il s'agit d'une bonne mesure et il ne faut pas la taxer du tout, ou bien il faut la taxer autour de 40 % comme le reste des salaires, la solution intermédiaire retenue n’étant pas satisfaisante.

Chaque année, en fonction de votre besoin de recettes, vous augmentez le taux du forfait social. Vous dénaturez de la sorte le dispositif et vous restez au milieu du gué : on ne sait plus s’il est bon ou non de taxer ces rémunérations. Le mieux serait d’appliquer le régime de droit commun, ce qui permettrait de mieux maîtriser les politiques salariales et éviterait les pratiques curieuses de certaines entreprises où, afin d'échapper aux cotisations patronales, on augmente la participation et l'intéressement plutôt que les salaires.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 121 et 276.

La parole est à M. Jean-Marie Rolland pour présenter l’amendement n° 121.

M. Jean-Marie Rolland. Cet amendement vise à supprimer cet article qui présente à mes yeux l’inconvénient d'augmenter une nouvelle fois le forfait social, mais aussi de renchérir le coût du travail. Surtout, il va à l'encontre de l'objectif de développer la participation dans les PME et de faire profiter les salariés de la valeur ajoutée par l'entreprise.

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian pour soutenir l’amendement n° 276.

M. Dominique Tian. Je propose également de supprimer cet article.

M. Préel a eu la gentillesse de rappeler qu’en 2009, quand on a créé ce forfait social, j'avais indiqué qu'il n'y avait a priori pas de raison qu’il n'atteigne pas par la suite 4, 6 ou 8 %. C'est ce qui se passe et je puis donc d'ores et déjà vous annoncer qu'il atteindra 10 % l'année prochaine, quand l'actuelle majorité aura été reconduite. (Sourires.)

Mme Valérie Pécresse, ministre. Sinon, ce sera 20 %... (Nouveaux sourires.)

M. Dominique Tian. Par malheur, car c’est que proposent nos collègues socialistes !

Mais je suis contre le principe même de ce forfait social, tout simplement parce qu'il me semble contraire à la pensée du Président de la République (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR.) qui avait indiqué en 2008 son souhait de voir les entreprises développer l'intéressement et la participation. En militant sarkozyste dévoué, je considère que cette mesure n'est pas conforme à la pensée du Président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Bur, rapporteur. La commission a donné un avis défavorable à ces amendements de suppression.

La majoration de 2 % du taux du forfait social permet de renforcer la contribution de ces exemptions d'assiette au financement du système de protection sociale, auquel il apparaît souhaitable que l'ensemble des produits de l'activité économique participe, de manière proportionnée. Il convient en outre que la dynamique de croissance qu'entretiennent ces dispositifs bénéficiant d'exemptions d'assiette contribue aux recettes de la sécurité sociale.

La majoration proposée du taux du forfait social n'est pas de nature à remettre en cause les incitations au développement des dispositifs d'épargne salariale, quel qu'ils soient : leur dynamisme montre que l'instauration du forfait social n'a pas nui à l'intérêt que les salariés comme les entreprises peuvent porter à ces produits.

Le taux de 8 % reste modéré si on le compare notamment à celui des cotisations patronales de droit commun, qui est de l'ordre de 27 %.

Il est vrai que dans mon rapport sur les exonérations de cotisations sociales, j'avais proposé une flat tax à 5 % sur l'ensemble des niches sociales, dont le total était à l'époque évalué à 40 milliards d'euros. Cette proposition s'est naturellement heurtée à des réticences et à la volonté d'exempter tel ou tel secteur. C'est pourquoi nous avons finalement abouti à cette taxe concentrée essentiellement sur les produits de l'épargne salariale alors qu’une véritable flat tax aurait porté, à un taux très réduit, sur l'ensemble des 40 milliards. Nous sommes aujourd'hui dans une autre logique, qui vise davantage les produits d'épargne salariale qui sont effectivement du salaire différé.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je ne reprendrai pas les excellentes explications du rapporteur : même avis.

(Les amendements identiques nos 121 et 276 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Yves Bur, rapporteur, pour présenter l’amendement n° 139.

M. Yves Bur, rapporteur. Les contributions patronales au financement de la prévoyance complémentaire, bien qu’elles répondent à la définition des sommes entrant dans le champ du forfait social, en étaient jusqu’à présent expressément exclues puisqu’elles sont soumises à une contribution ad hoc au taux de 8 %.

Le rehaussement à 8 % du taux du forfait social permet de supprimer cette taxation et d’élargir à ces sommes l’assiette du forfait social. La cohérence de ce dernier s’en trouvera renforcée, ce qui permettra notamment de traiter de manière uniforme l’ensemble de la protection sociale complémentaire.

L’amendement procède également aux coordinations rédactionnelles requises. Ainsi, les employeurs de moins de dix salariés dont les contributions patronales au financement de la prévoyance complémentaire sont exclues de l'assiette de la taxe ad hoc ne seront pas redevables duforfait social.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Avis favorable à cette mesure très pertinente de simplification.

(L'amendement n° 139 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Michel Diefenbacher pour soutenir l’amendement n° 292.

M. Michel Diefenbacher. Ma préoccupation est d’éviter que l'augmentation continue du forfait social depuis trois ans n'en vienne à compromettre le bon fonctionnement des dispositifs d'intéressement et de participation ou, plus précisément, n’en diminue l'attractivité.

Il paraît indispensable, surtout dans la conjoncture économique actuelle, d'inciter les salariés à constituer une épargne de précaution par le moyen des plans d'épargne d'entreprise ou des plans d'épargne pour la retraite collectifs, les PERCO.

L'objectif de cet amendement est donc de concilier deux nécessités opposées. La première est de trouver des ressources complémentaires pour combler les déficits – je suis bien conscient de cette nécessité. La seconde est de préserver l'efficacité des mécanismes d'intéressement et de participation.

Le moyen qui vous est proposé est de moduler le taux du forfait social, avec une exonération des sommes épargnées. Cette mesure n'a rien de révolutionnaire puisqu'on en reviendrait de la sorte à ce qui existait avant 2009. En revanche, lorsque les sommes ne sont pas épargnées, le taux serait porté non pas à 8 mais à 14 %. Au regard de l'ensemble des sommes en cause, cela correspondrait à un taux moyen de 8 % qui est précisément celui qui figure dans le projet de loi de financement.

L'opération devrait donc être neutre financièrement et c'est uniquement par précaution que j'ai prévu un gage.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Bur, rapporteur. La commission a donné un avis défavorable à cet amendement.

En effet, ce dispositif reviendrait à créer une niche dans une niche déjà existante, alors que le forfait social s'efforce précisément de faire contribuer ceux qui en bénéficient au financement de la sécurité sociale.

Je ne crois pas non plus qu'il soit nécessaire de diriger le choix de l’affectation par les salariés des sommes qu'ils reçoivent au titre de la participation et de l'intéressement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Même si je comprends la volonté tout à fait justifiée de Michel Diefenbacher, je crois comme le rapporteur général que l'on ne peut pas créer une niche dans la niche car les choses deviendraient très complexes. J'ajoute que le coût de cette mesure serait de 85 millions d'euros. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Michel Diefenbacher.

M. Michel Diefenbacher. Voyant comment le débat va se terminer, je préfère retirer l'amendement.

(L'amendement n° 292 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements, nos 302, 312, 360 rectifié, 644 et 277, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 302, 312 et 360 rectifié sont identiques.

La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur pour présenter l’amendement n° 302.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Par cet amendement, nous proposons d'aller un peu plus loin, au nom de l’exigence de justice sociale et de l'impératif de responsabilité financière.

Nous devons aujourd'hui rechercher de nouvelles sources de financement en mettant à contribution toutes les formes de revenus : en effet, il n’est pas acceptable que certaines d’entre elles soient exonérées de l’effort de solidarité nationale. C’est pourquoi le présent amendement vise à relever de 6 à 20 % le taux du forfait social appliqué à l’intéressement et à la participation.

M. le président. La parole est à Mme Anny Poursinoff pour présenter l’amendement n° 312.

Mme Anny Poursinoff. Nous proposons également de porter à 20 % le taux du forfait social. Le rapport lui-même montre que cela ne mettrait pas les entreprises en péril et qu'il est possible d'aller vers plus de justice sociale et fiscale. On voit là que nous faisons des propositions raisonnables et efficaces : contrairement à ce que dit Mme la ministre du budget dans sa lancinante ritournelle…

M. Guy Lefrand. Pas d’attaques personnelles…

Mme Anny Poursinoff. …nous ne sommes pas silencieux en ce qui concerne les recettes.

Au cas, fort peu probable, où elle refuserait cet amendement, j'aimerais entendre de sa part de véritables arguments.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse pour présenter l’amendement n° 360 rectifié.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet article qui porte de 6 à 8 % le taux du forfait social est la traduction législative d'une mesure annoncée par le Gouvernement dans le cadre du plan de lutte contre les déficits. Depuis sa création en 2009, le taux de cette contribution, qui était alors de 2 %, aura été multiplié par quatre.

Évidemment, l'assujettissement des éléments de rémunération au forfait social est légitime puisqu'ils découlent du travail. Le Gouvernement nous montre, ce dont nous nous félicitons, qu'il est possible de faire contribuer tous les revenus au financement de la protection sociale, ce qui est à la fois juste et légitime. En effet, le rythme d'augmentation du recours aux formes de rémunération assujetties – intéressement, participation, plans épargne entreprise et plans épargne retraite – est bien plus élevé que celui de la masse salariale. Le rapport Cotis de mai 2009 évaluait à près d’un point de PIB, soit près de 20 milliards d’euros, l’effet de substitution entre ces dispositifs de rémunération et la masse salariale.

L’augmentation que vous proposez à l’article 11 est certes positive, mais elle est très loin du niveau qui devrait être le sien. Comme vous le savez, nous plaidons pour que tous les revenus du travail contribuent au financement de la sécurité sociale et pour une convergence des taux de cotisations patronales vers le taux applicable aux rémunérations salariales de droit commun. C’est pourquoi nous proposons d’augmenter cette participation en portant le taux de ce forfait à 20 %.

Je précise que notre proposition n’est pas extraordinaire, et encore moins révolutionnaire, puisque la Cour des comptes elle-même considère qu’il serait possible de porter le forfait social au niveau des taux cumulés des cotisations maladie et famille, soit environ 19 %. Cela rapporterait beaucoup d’argent, ce dont nous avons précisément besoin pour la protection sociale.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour soutenir l’amendement n° 644, lequel propose une augmentation plus modérée…

M. Guy Lefrand. M. Préel est toujours modéré !

M. Jean-Luc Préel. Il s’agit d’un amendement auquel le Nouveau Centre est particulièrement attaché. C’est pourquoi il est cosigné par le président du groupe et l’ensemble des députés du Nouveau Centre.

Nous tenons également à un autre amendement qui propose de voter en équilibre la loi de financement de la sécurité sociale. Ce sont les deux amendements majeurs que nous proposons.

Bien entendu, nous ne sommes pas des « fanas » de l’augmentation des prélèvements. Pour autant, nous ne souhaitons pas la modification du calcul des indemnités journalières, car si j’ai dit tout à l’heure qu’il fallait lutter contre la fraude, il n’est pas acceptable de baisser de 6 % les indemnités journalières pour les malades « vraiment » malades, comme les cancéreux. Il s’agit donc de trouver 200 millions pour éviter cette modification.

Vous proposez vous-même, madame la ministre, de passer de 6 % à 8 %. Vous ne touchez pas au pouvoir d’achat, certes, et cela ne change rien au coût du travail. Par conséquent, un petit effort supplémentaire pour arriver à 9 % ne changera pas grand-chose. Cela fait seulement 1 % de plus. Pourquoi s’arrêter en si bon chemin ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. On se croirait dans les souks !

M. Jean-Luc Préel. En passant à 9 % le taux du forfait social, celui-ci rapportera les 200 millions attendus. Ainsi, nous ne modifions pas les indemnités journalières et, par conséquent, le Nouveau Centre et l’ensemble des Français seront satisfaits !

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Ah bon ?

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n° 277.

M. Dominique Tian. Il est retiré.

(L'amendement n° 277 est retiré.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Bur, rapporteur. La commission a donné un avis défavorable à ces amendements.

Faire passer le taux du forfait social à 20 %, c’est tuer tous les dispositifs d’aide, de soutien et d’encouragement à l’épargne salariale qui sont nécessaires et appréciés par ceux de nos concitoyens qui en bénéficient.

Il y a peut-être un débat à mener sur le niveau de ce que doit être une flat tax et, pour répondre à Dominique Tian,sur le niveau auquel situer la limite du forfait social, afin qu’il n’augmente pas les charges pour les entreprises, tout en jouant son rôle de flat tax et en contribuant aux dépenses sociales.

Concernant l’amendement n° 644, je reconnais le pragmatisme de M. Préel qui mobilise l’augmentation du forfait social qu’il propose au bénéfice de la suppression de la réforme des IJ. Cela pose problème, car supprimer cette réforme des IJ revient à augmenter des dépenses liées à l’ONDAM. Vous proposez une recette nouvelle, monsieur Préel. Mais nous cherchons, avec le Gouvernement, des économies à faire dans les dépenses concernées par l’ONDAM, afin de ne pas être obligés de prendre réellement ce décret sur les indemnités journalières.

Nous aurons un débat sur le fond à l’article 34 où, dans l’un de vos amendements, monsieur Préel, vous souhaitez modifier, dans le dispositif, le taux de remplacement des indemnités journalières. Nous sommes en discussion avec le Gouvernement. J’espère que, d’ici à l’article 34, nous trouverons un accord pour sortir de cette impasse.

L’ensemble des parlementaires, sur tous les bancs de cette assemblée, souhaite que les personnes malades bénéficiant de congés maladie, notamment lorsqu’elles sont atteintes d’une maladie de longue durée ou d’une maladie chronique, ne soient pas pénalisées. Elles le sont déjà suffisamment à travers leur situation de santé pour que nous ne contribuions pas à aggraver leur malheur. Voilà pourquoi ce débat doit avoir lieu.

J’émets donc un avis défavorable à ces quatre amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Ces amendements sont révélateurs, car ils permettent de comprendre quel est le projet alternatif de la gauche pour rétablir l’équilibre de la sécurité sociale : cela s’appelle le matraquage fiscal !

M. Michel Issindou. Nous y revoilà !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Car c’est bien ce que vous voulez faire en faisant passer le taux du forfait social de 6 % à 20 %. Mais comme l’a très bien dit le rapporteur général, « trop d’impôt tue l’impôt ». Si nous augmentions le forfait social en le faisant passer de 6 % à 20 %, nous tuerions les mécanismes d’épargne salariale ou d’intéressement salarial, que nous voulons, au contraire, développer.

Nous ne triplerons donc pas le forfait social, mais nous l’augmenterons de manière extrêmement mesurée…

M. Jean Mallot. Homéopathique !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Oui, monsieur Mallot, et parce que l’effort est nécessaire, ce mot, « homéopathique », ne me dérange pas.

Nous essayons d’équilibrer cet effort entre la baisse des dépenses et la hausse des recettes. De votre côté, vous ne proposez que des hausses d’impôts. C’est absolument illusoire ! Cela tue la croissance et c’est extrêmement dommageable pour les Français.

S’agissant de l’amendement de M. Préel, les choses sont un peu différentes…

M. Thierry Benoit. Totalement différentes !

Mme Valérie Pécresse, ministre. …puisqu’il propose une hausse très modérée d’impôt. Je reconnais dans cette modération la sagesse du Nouveau Centre…

Néanmoins, monsieur Préel, nous avons besoin de faire un effort équilibré en termes de recettes et de dépenses. Nous avons besoin de faire des économies et de tenir l’ONDAM. C’est – malheureusement – pour cette raison que je n’accepterai pas une augmentation d’impôt pour compenser la suppression d’une mesure d’économie.

M. Michel Issindou. Cela lui aurait fait plaisir, pourtant…

M. le président. La parole est à M. Jean Mallot.

M. Jean Mallot. Je ferai trois observations.

D’abord, les arguments de Mme la ministre contre l’augmentation du forfait social sont les mêmes que ceux utilisés par ses prédécesseurs au moment de la création du forfait social. Pourtant, tous les malheurs annoncés ne se sont pas produits…

Ensuite, je rappelle aux quelques gaullistes qui pourraient se trouver dans cet hémicycle, s’il en reste encore,…

M. Guy Lefrand. Oui !

M. Jean Mallot. …que les concepteurs de la participation, au début de la VRépublique, avaient exclu que les rémunérations issues de la participation fassent l’objet d’un traitement fiscal ou social particulier.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Ne parlez pas de ce que vous ne connaissez pas !

M. Jean Mallot. Elles devaient être soumises aux mêmes prélèvements que les salaires.

Enfin, un point de forfait social représente 200 millions d’euros. Nous proposons de passer de 8 % à 20 %. C’est votre étude d’impact qui dit que le taux de droit commun serait à 43 %. Car quand on passe de 8 % à 20 %, on ne passe pas à 43 %.

M. Michel Issindou. Il y a de la marge !

M. Jean Mallot. On est bien loin du matraquage fiscal que Mme la ministre invoque dans son argumentaire excessif.

Pour conclure, je rejoins l’argumentaire de M. Préel. Si un point de forfait social représente 200 millions, on obtiendrait 2,4 milliards en passant à 20 %, ce qui serait à la mesure des efforts qu’il faut consentir pour ramener progressivement la sécurité sociale à l’équilibre.

M. le président. La parole est à M. Thierry Benoit.

M. Thierry Benoit. Je soutiens l’amendement de mon collègue Jean-Luc Préel et je souhaite amplifier son propos.

Comme vous, madame la ministre, je ne suis pas favorable au matraquage fiscal. C’est en ce sens que l’on ne peut pas accéder à la demande de nos collègues de l’opposition, qui veulent faire passer à 20 % le forfait social.

Pour ma part, je défends la position de la juste mesure dans le sens où nous ne pouvons pas non plus faire peser des efforts inconsidérés sur les couches sociales « modérées » de notre pays. Je vivrais comme une agression à l’endroit de ces populations aux revenus modestes deux décisions si celles-ci étaient prises : je veux parler, d’une part, de l’augmentation de la taxe sur les conventions d’assurances mutuelles, d’autre part, de l’impact qu’aurait sur ces populations la décision que vous pourriez prendre aujourd’hui de baisser les indemnités journalières. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean Mallot. Nous sommes d’accord !

M. Thierry Benoit. Aujourd’hui, nous cherchons une recette de 200 millions. Jean-Luc Préel a fait une proposition tout à fait raisonnable visant à une légère réévaluation du forfait social de +1 % par rapport à la proposition du Gouvernement, ce qui permet de trouver la recette et de ménager les bénéficiaires des indemnités journalières.

La baisse des indemnités journalières ne pèsera pas d’un grand poids sur les personnes fortunées, mais elle sera très lourde pour celles et ceux qui bénéficient d’un revenu modeste.

M. Jean Mallot. Il a raison !

M. Thierry Benoit. C’est en ce sens que l’amendement n° 644 doit être examiné avec la plus grande attention. J’aimerais que la ministre et le rapporteur puissent s’ouvrir à des perspectives plus « lumineuses » concernant cette proposition.

M. Michel Issindou. Voilà un discours modéré !

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Madame la ministre, monsieur le rapporteur, l’amendement de M. Préel et de ses collègues du Nouveau Centre est très astucieux.

M. Jean-Luc Préel. Merci !

M. Gérard Bapt. En passant de 8 % à 9 %, il n’encourt pas votre reproche de matraquage fiscal.

M. Jean Mallot. C’est le début du matraquage…

M. Gérard Bapt. Il n’encourt pas non plus le reproche de devoir augmenter inconsidérément l’ONDAM – car c’est l’épaisseur du trait.

Cela étant, madame la ministre, si l’on prend en considération votre argument concernant les dépenses, il y a encore beaucoup de grain à moudre, notamment en ce qui concerne le médicament – M. Bur le sait fort bien. Au fond, 667 millions d’euros d’économies sur le médicament lui-même, c’est peu de chose. Sur les seuls génériques, la différence de prix en moyenne entre les génériques en France, en Allemagne et en Angleterre est telle que nous ferions une économie de 1 milliard d’euros si nous nous mettions au niveau de l’Allemagne et de 2 milliards si nous nous alignions sur l’Angleterre.

Je rejoins la préoccupation du Nouveau Centre. Nous terminons l’année 2011 qui est celle des patients. Or on a vu dans la presse quelques témoignages, notamment d’hommes et de femmes actifs, frappés par la maladie, et notamment par le cancer, qui se retrouvent en arrêt maladie et subissent une perte importante de revenu. Ces personnes seront encore plus pénalisées par la mesure que vous proposez aujourd’hui, madame la ministre. Si 2011 était l’année des patients, 2012 sera celle de leur désespérance au cas où cette funeste mesure serait adoptée par notre assemblée. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. C’est du Zola !

(Les amendements identiques nos 302, 312 et 360 rectifié ne sont pas adoptés.)

(L'amendement n° 644 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 749 et 140, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n° 749.

Mme Jacqueline Fraysse. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Yves Bur, pour soutenir l’amendement n° 140.

M. Yves Bur, rapporteur. D’abord, j’émettrai un avis défavorable à l’amendement n° 749.

J’en viens maintenant à l’amendement n° 140.

Les contributions patronales au financement de la prévoyance complémentaire, bien qu’elles répondent à la définition des sommes entrant dans le champ du forfait social, en étaient jusqu’à présent expressément exclues puisqu’elles sont soumises à une contribution ad hoc au taux de 8 %.

Tout à l’heure, nous avons modifié ce dispositif. En effet, l’amendement n° 140 et l’amendement n° 141 – que je vais défendre en même temps, si vous me le permettez, monsieur le président – visent à affecter le produit du forfait social à la CNAM pour la part correspondant à un taux de 5 % et au FSV pour la part correspondant au taux de 3 %, dont une part correspondant à un taux de 0,5 % à une section comptable spécifique du FSV.

Ce sont des amendements de conséquence.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Défavorable à l’amendement n° 749 de Mme Fraysse et favorable à l’amendement n° 140.

(L'amendement n° 749 n'est pas adopté.)

(L'amendement n° 140 est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 141 de M. le rapporteur vient d’être défendu.

(L'amendement n° 141, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 282.

La parole est à M. Dominique Tian, pour le soutenir.

M. Dominique Tian. Défendu !

(L'amendement n° 282, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

(L'article 10, amendé, est adopté.)

Après l'article 10

M. le président. Nous en venons à une série d’amendements portant articles additionnels après l’article 10.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 442 et 512.

La parole est à M. Michel Issindou, pour soutenir l’amendement n° 442.

M. Michel Issindou. Par cet amendement nous proposons encore une mesure permettant de combler 4 milliards d’euros, ce qui n’est pas rien. Nous ne nous contentons pas, en effet, de mesures à 100 millions d’euros, mais leur préférons celles s’élevant à quelques milliards !

Notre proposition porte sur le scandale des heures supplémentaires, mesure que vous avez votée et qui a, certes, favorisé les employeurs et les salariés qui en ont bénéficié, mais qui coûte 4 milliards d’euros. Expliquez-nous, là aussi, pourquoi ces salaires perçus, au titre des heures supplémentaires, seraient dispensés de participer au renflouement de la protection sociale. Vous devez faire un choix. Vous ne pouvez pas, en effet, satisfaire tout le monde et vous étonner, parallèlement, de l’accumulation des déficits ! Mme la ministre nous explique qu’il ne faut pas taxer, pas matraquer et pas imposer. Elle n’a que cela à la bouche ! Mais en agissant ainsi, vous tenez des déficits au chaud depuis dix ans, sans avoir la moindre solution pour les combler. Ils seront de 140 milliards fin 2012. Comment fera-t-on si aucune mesure courageuse n’est prise ? Les heures supplémentaires doivent être certes possibles, mais elles sont mauvaises pour l’emploi – les chiffres pour le mois de septembre qui viennent d’être publiés montrent que sa situation s’est encore aggravée – et des gens vont continuer à faire des heures supplémentaires défiscalisées pendant que d’autres seront éternellement au chômage. Telle est votre politique ! Vous ne travaillez pas pour les chômeurs et encore moins pour la protection sociale.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n° 512.

Mme Jacqueline Fraysse. Vous prétendez que les baisses de prélèvements sociaux seraient le meilleur atout de la compétitivité de l'économie française, arguant que près de 800 000 emplois auraient ainsi été créés ou pérennisés. Mais la vérité est tout autre, puisque, comme cela vient d’être souligné, le chômage est en augmentation constante. D’ailleurs, le Conseil des prélèvements obligatoires, institution associée à la Cour des comptes, dans son rapport sur l'exonération des cotisations au titre des heures supplémentaires, préconise leur suppression. Leur effet sur l'emploi y est décrit comme ambigu car « l'accroissement de la durée du travail » a pu « inciter les entreprises à substituer des heures de travail aux hommes ». En effet, depuis le début de la crise, ces heures supplémentaires ont notamment été utilisées dans les entreprises qui, dans le même temps, licenciaient. En 2008, près de 40 millions d'heures auraient ainsi été effectués par les salariés, ce qui correspond à l'équivalent de 90 000 emplois à temps plein qui n'ont donc jamais été créés. De plus, cette mesure est très coûteuse pour l’État : 4,5 milliards en 2011, dont 3,2 milliards d’exonération d'impôt au bénéfice des salariés et 1,3 milliard pour les employeurs sous forme de réduction de cotisations sociales sur la rémunération de ces heures, selon le rapport des députés Jean Mallot et Jean-Pierre Gorges.

C’est pourquoi nous demandons, une fois encore, la suppression de cette mesure.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Bur, rapporteur. Nous abordons une série d’amendements qui sont quelque peu, et je le dis très gentiment, les « marronniers du PLFFS ». Nous les examinons chaque année. C’est un passage obligé.

La commission a donné un avis défavorable aux amendements qu’elle a été amenée à examiner. L’article 11 réintégrera les heures supplémentaires dans le calcul de la réduction générale des cotisations patronales pour un montant de 600 millions d’euros. Je rappelle aussi que nous avions indiqué qu’il convenait peut-être de nous désengager progressivement des exonérations de charges sociales ou d’évoluer sur ce sujet. Mais j’ai également précisé dans mon rapport que cela ne pouvait se faire que dans une situation de croissance soutenue qui permette à l’économie d’assumer le coût de ce désengagement. Aujourd’hui, alors que l’économie européenne et l’économie française donnent des signes de faiblesse, nous devons évoluer prudemment en la matière.

Enfin, quatre à cinq millions de salariés bénéficient aujourd’hui de ces heures supplémentaires. Pour eux, c’est davantage un plus qu’une charge.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Eh oui, c’est un treizième mois !

M. Yves Bur, rapporteur. Je ne suis pas non plus certain que la suppression de l’exonération des heures supplémentaires entraînera mathématiquement la création de 90 000 emplois.

M. Jean-Marc Lefranc. C’est comme les 35 heures !

M. Yves Bur, rapporteur. Je crois qu’il faut laisser aux entreprises une certaine souplesse.

M. Roland Muzeau. Vous y viendrez, comme pour le bouclier fiscal ! Vous verrez !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. On ne peut, en la matière, dire une chose et son contraire. J’ai entendu François Hollande accuser le Président de la République de ne pas être le candidat du pouvoir d’achat ou le président du pouvoir d’achat.

M. Gérard Bapt. Il a raison !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Eh bien, je l’affirme : cette mesure d’exonération des heures supplémentaires est une mesure de pouvoir d’achat.

M. Roland Muzeau. C’est une escroquerie !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Elle conduit neuf millions de Français qui gagnent en moyenne 1 500 euros par mois, à toucher, en moyenne, 500 euros par an d’heures supplémentaires !

M. Michel Issindou. Et les chômeurs ?

M. Roland Muzeau. Et l’effet d’aubaine ? Les chômeurs voudraient pouvoir travailler !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Le lien entre une heure supplémentaire pour un salarié d’une PME et une heure supplémentaire pour un enseignant n’est pas arithmétique ! Vous ne le savez peut-être pas, mais permettez-moi de vous dire que, dans la fonction publique, cette défiscalisation des heures supplémentaires bénéficie pour 90 % à des enseignants. Je voudrais que vous compreniez bien qu’il ne s’agit pas d’un effet d’éviction automatique et arithmétique vis-à-vis de l’emploi.

M. Christian Paul. C’est un effet de clientélisme !

Mme Valérie Pécresse, ministre. C’est une mesure de pouvoir d’achat, une mesure de souplesse pour un certain nombre d’entreprises. Écoutez-les ! Écoutez les témoignages !

M. Roland Muzeau. On y va plus souvent que vous, dans les entreprises !

Mme Bérengère Poletti, rapporteure. Ce n’est pas sûr !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Il y avait, effectivement, un effet d’aubaine de double exonération. C’est pourquoi nous réintégrons, à l’article 11, ces heures supplémentaires dans le calcul des allégements de charges Fillon. Cela signifie que l’employeur ne touchera plus d’exonération dès lors qu’il sera dans le cadre des allégements de charges Fillon. En revanche, le salarié continuera d’être totalement exonéré sur ses heures supplémentaires.

M. Christian Paul. Une minorité de salariés !

M. Roland Muzeau. Et ceux qui sont au chômage y resteront !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je rappelle, monsieur Paul, puisque vous m’interpellez, que les cadres sont, eux, au forfait-jour…

M. Roland Muzeau. Le forfait-jour, c’est vous qui l’avez inventé !

Mme Valérie Pécresse, ministre. …et n’en bénéficient donc pas.

M. le président. La parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales. Comme l’a dit le rapporteur, ce débat revient tous les ans. Je ne comprends pas la position de la gauche sur ce point. Cela vient d’être souligné, c’est une mesure de pouvoir d’achat. Au-delà de cela, savez-vous comment fonctionnent l’industrie, le bâtiment et les travaux publics ?

M. Roland Muzeau. Oui !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales. Croyez-vous qu’une entreprise qui a un marché de six semaines peut trouver très facilement des salariés compétents dans l’industrie ou le BTP ? La réponse est non ! Il y a, aujourd’hui, plusieurs dizaines de milliers d’emplois qu’il est impossible de pourvoir !

M. Roland Muzeau. L’industrie du bâtiment a toujours fait appel à l’intérim !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales. Il est donc nécessaire de s’adapter au monde industriel. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Puis-je m’exprimer ?

M. le président. Nous écoutons le président Méhaignerie !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales. Nous sommes dans un pays où nous comptons vingt-quatre prestations entre la naissance et la mort. Savez-vous que, faute de défiscalisation, un salarié au SMIC qui fait des heures supplémentaires perdra des avantages tels que l’allocation logement, les bourses pour ses enfants et la prime pour l’emploi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Comment voulez-vous que la société française s’adapte aux besoins du marché dans le secteur industriel et du bâtiment et travaux publics ? Vous méconnaissez totalement ce secteur ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean Mallot.

M. Jean Mallot. Je me tournerai vers Mme la ministre et vers M. le président Méhaignerie pour leur répondre, puisqu’ils nous encouragent à écouter les entreprises, que c’est exactement ce que Jean-Pierre Gorges et moi-même avons fait pour le compte du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques.

M. Christian Paul. Le résultat était clair !

M. Jean Mallot. Il est clair, tout le monde le sait, que ce qui commande les heures supplémentaires dans une entreprise n’est pas leur statut fiscal ou social, mais le carnet de commandes. Quand il y a des commandes, les salariés font des heures supplémentaires.

Mme Bérengère Poletti, rapporteure. Quand il y avait les 35 heures, c’était impossible !

M. Jean Mallot. Vous parlez toujours des 35 heures. Qu’ont-elles modifié ? Elles ont défini le seuil à partir duquel une heure supplémentaire était majorée de 25 %. Cette majoration n’est pas en cause, elle existe toujours. Nous avons effectivement écouté les entreprises. Nous avons auditionné tous les partenaires sur ce dossier. Dans notre rapport n° 3615 – cela ne s’invente pas –, Jean-Pierre Gorges, qui n’est pas connu pour être un gauchiste invétéré, et moi-même avons conclu au même diagnostic : celui d’un effet d’aubaine massif. Ce dispositif n’a créé aucune heure supplémentaire « supplémentaire », il a simplement donné un avantage à des heures supplémentaires qui auraient été faites de toute façon. En outre, c’est, pour les économistes, un dispositif totalement aberrant qui consiste à verser des compléments de rémunérations financés par la dette. Car cet argent public distribué dans les entreprises est financé par la dette !

M. Roland Muzeau. Bien sûr !

M. Jean Mallot. En outre ce dispositif coûte plus aux finances publiques qu’il ne rapporte à l’économie ! Les 4,5 milliards représentent, en coût, 0,23 % du PIB et ne produisent, en richesse, que 0,15 % du PIB. Le jour où vous mettrez un terme à cette mesure, vous enrichirez l’économie de notre pays.

Je ne développerai pas les effets négatifs sur l’emploi qui ont été décrits maintes fois. En effet, le DRH de l’entreprise aura vite fait son choix, entre l’accomplissement d’heures supplémentaires qui coûtent moins cher que l’heure normale et l’embauche d’un intérimaire.

Je conclurai sur un dernier point. Il est un fait que ce dispositif est beaucoup utilisé dans la fonction publique, alors qu’il n’était pas fait pour cela. Madame la ministre, si vous voulez rémunérer davantage les enseignants, il est inutile de recourir à l’usine à gaz qu’est la défiscalisation et l’exonération des cotisations sociales, augmentez tout simplement les rémunérations !

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Nous l’avons fait !

M. Jean Mallot. Le budget de l’État paie les fonctionnaires ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) C’est ce qui se passe ! Ce sont les finances publiques qui paient les fonctionnaires ! Raccourcissez le circuit ! Faites preuve de bon sens tout de même !

(M. Jean Mallot remplace M. Marc Le Fur au fauteuil de la présidence.)

Présidence de M. Jean Mallot,
vice-président

M. le président. La parole est à M. Thierry Benoit.

M. Thierry Benoit. Nous devons saisir l’occasion de ce débat en séance publique pour rappeler aux Français que, si la défiscalisation des heures supplémentaires a été instituée voici quelques années, c’est parce que se pose dans notre pays la question de la durée hebdomadaire du temps de travail. Nous devrons, dans les mois ou les années qui viennent, faire preuve de lucidité et l’admettre. Nous nous trouvons tout de même, en France, dans une sacrée situation. Ainsi, le budget finance les 35 heures pour environ 25 à 30 milliards d’euros par an ; et on explique parallèlement aux Français que, s’ils travaillent davantage, les heures supplémentaires seront défiscalisées, ce qui représente une somme supplémentaire de 4 à 5 milliards d’euros. Les 35 heures et la défiscalisation des heures supplémentaires posent la question de la compétitivité de nos entreprises, notamment industrielles. Ceux qui sont élus dans des bassins industriels savent que les entreprises ont dû s’adapter à la réduction hebdomadaire du temps de travail et à la mise en œuvre des 35 heures. Cela se traduit souvent par des quatre fois six heures. Dans mon entourage immédiat, je connais de jeunes mères de famille qui, une semaine, commencent leur activité à minuit et la terminent à six heures du matin et, la suivante, la commencent à six heures pour l’achever à midi. Telles sont les conséquences néfastes de la réduction hebdomadaire du temps de travail mise en œuvre il y a dix ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Je conclurai mon propos en associant durée hebdomadaire du temps de travail, durée de cotisation des salariés et âge d’ouverture des droits à la retraite. En effet, ces questions sont liées. Il faudra bien que, dans les mois qui viennent, le pays en parle lucidement et que l’opinion publique soit prise à témoin.

M. Gérard Bapt. Cela fait dix ans que vous parlez et que vous ne faites rien !

M. Thierry Benoit. Nous payons aujourd’hui les décisions néfastes prises il y a un peu plus de dix ans ! (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. Ce doit être l’approche des élections présidentielles qui produisent une telle crispation et de telles caricatures sur les bancs du Gouvernement et de la majorité.

Qui, à gauche, monsieur le président de la commission, a prétendu qu’il voulait supprimer les heures supplémentaires ?

M. Marc Le Fur. C’est la logique même de votre amendement !

Mme Marisol Touraine. Vous ne pourrez trouver aucune déclaration, aucune phrase de l’un d’entre nous affirmant une telle chose !

Ce n’est pas cette mesure de 2007 qui a créé les heures supplémentaires, car celles-ci existent depuis toujours.

Mme Bérengère Poletti, rapporteure pour le secteur médico-social. Non, elles étaient très limitées !

Mme Marisol Touraine. Quelle que soit la durée légale du temps de travail, les heures supplémentaires ont toujours été utilisées dans des périodes de surcroît d’activité, quand l’entreprise doit faire preuve de réactivité et qu’il est plus facile pour elle de trouver de la main-d’œuvre disponible en son sein que d’aller chercher des intérimaires.

M. Guy Geoffroy. Vous avez un discours à géométrie variable !

Mme Marisol Touraine. Le sujet n’est absolument pas celui-là et vous le savez très bien ! Il ne porte nullement sur la réalité des heures supplémentaires ; en réalité, il s’agit de savoir si l’on doit exonérer celles-ci de cotisations.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail. La réponse est oui !

Mme Marisol Touraine. Le sujet n’est donc pas non plus celui du pouvoir d’achat. Nous sommes même prêts à envisager que soient maintenues des mesures strictes de pouvoir d’achat ; ce serait un amendement de repli qui consisterait à dire que l’on ne touche pas aux avantages dont bénéficient les salariés en ce qui concerne cette ressource complémentaire. En revanche, dès lors que l’entreprise fait travailler un salarié, que ce soit en heures supplémentaires ou autrement, elle doit payer des cotisations.

M. Mallot, quand il était encore dans l’hémicycle,…

M. Robert Lecou. Il a pris de la hauteur ! (Sourires.)

Mme Marisol Touraine. …a fait référence au rapport qu’il a rendu sur le sujet il y a quelque temps et qui montre que, dans la mesure où les entreprises pratiquaient déjà les heures supplémentaires, elles ont simplement transformé en heures exonérées des heures qui faisaient auparavant l’objet de cotisations.

Ne caricaturez donc pas le débat ! Il n’y a pas, d’un côté, ceux qui défendent les heures supplémentaires et, de l’autre, ceux qui sont contre. En réalité, il y a ceux qui veulent faire profiter les entreprises d’effets d’aubaine et ceux qui souhaitent que ces heures supplémentaires, comme les autres heures travaillées, fassent l’objet de cotisations de la part des entreprises.

M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Il me tardait de m’exprimer car je trouve ce débat passionnant. S’il prend de l’importance, croyez-moi, cela nous ouvrira des perspectives pour les élections présidentielles !

M. Christian Paul. Cela ne vous suffira pas !

M. Marc Le Fur. Car qui serait victime de la proposition que vous portez, chers collègues ? Ce serait essentiellement le monde ouvrier, qui est le bénéficiaire des heures supplémentaires.

M. Yves Bur, rapporteur. Exactement !

M. Marc Le Fur. Ce sont les ouvriers qui perdraient au change, et je crois que nombre d’entre eux sont en train de s’en rendre compte. Ils y perdraient comme ils ont perdu avec les trente-cinq heures. Si j’ai été réélu à l’Assemblée en 2002, c’est grâce aux 35 heures, car une grande partie du monde ouvrier s’est rendu compte de la perte de pouvoir d’achat que cette mesure a provoquée.

M. Gérard Bapt. C’est pourquoi vous n’y avez pas touché !

M. Marc Le Fur. Cet éloignement du monde ouvrier n’est pas une surprise. Je vous renvoie aux travaux de Terra Nova, le think-tank du parti socialiste, qui préconise : « Éloignons-nous du monde ouvrier (Exclamations sur les bancs du groupe SRC),…

Mme Catherine Quéré. Caricature !

M. Marc Le Fur. …il devient minoritaire, il est éloigné de nos thèses sociétales… » Cet éloignement, vous le confirmez par les amendements que vous défendez ce soir !

Vous commettez la même erreur que sur les trente-cinq heures : vous vous imaginez que le marché du travail est un marché fluide, alors que c’est faux ! Pourquoi les chefs d’entreprise recourent-ils aux heures supplémentaires ? Comme l’a dit le président Méhaignerie, c’est souvent une obligation momentanée ; mais il arrive aussi que ces heures supplémentaires s’inscrivent dans la durée, quand les entreprises ne trouvent pas de salariés ayant les qualifications requises. Si le monde du transport, par exemple, recourt massivement aux heures supplémentaires, c’est qu’il est difficile dans bien des régions de France, dont la mienne, de trouver des camionneurs.

Les heures supplémentaires ne vont nullement contre l’emploi, et il convient de maintenir cette disposition de 2007 qui était l’un des socles de la campagne de Nicolas Sarkozy. C’est une décision extrêmement favorable en termes de pouvoir d’achat : neuf millions de personnes bénéficient de plus de 500 euros par an. J’espère que ce débat prospérera, car alors il démontrera un certain nombre de choses qui ne vous seront guère favorables, mes chers collègues ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Ce débat est un peu irréel…

M. Guy Lefrand. Pas du tout, il est passionnant !

Mme Marie-Françoise Clergeau. Étant au pouvoir depuis dix ans, vous aviez amplement le temps de supprimer les trente-cinq heures si elles sont si dommageables que cela, en particulier pour les ouvriers ! Qu’avez-vous fait ? Pas grand-chose ! On pourrait aussi évoquer la dégradation des conditions de vie des salariés et des familles modestes.

Lorsqu’on travaille, on doit payer des cotisations, que l’on soit salarié ou employeur. Cela doit être ainsi dans tous les cas. Ensuite, il convient d’examiner les situations afin d’ajuster au mieux les services qui doivent être apportés aux familles.

M. Guy Lefrand. C’est ce que nous faisons !

Mme Marie-Françoise Clergeau. M. le président Méhaignerie affirme que la refiscalisation des heures supplémentaires supprimerait 30 % des prestations sociales. Mais je pourrais aussi évoquer le fait qu’aujourd’hui de nombreux couples sont malheureusement amenés à se séparer et que les revenus sur lesquels l’administration se base pour évaluer la pension alimentaire dans ces cas-là sont les revenus déclarés sur la feuille d’imposition, laquelle ne mentionne pas les heures supplémentaires défiscalisées. Ne regardez donc pas qu’un seul côté de la médaille !

Certes, il peut être justifié de recourir à des heures supplémentaires, en cas de charge de travail accrue ; personne ne l’a jamais interdit. Toutefois, vous ne dites rien des emplois qui pourraient être créés autrement et qui permettraient à des chômeurs de retrouver du travail. Nous avons eu raison de déposer cet amendement.

M. Dominique Tian. Il fallait choisir Martine Aubry !

M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Ce débat nous aura au moins permis d’apprendre que notre collègue Marc Le Fur a été réélu grâce aux trente-cinq heures. Nous comprenons mieux pourquoi, avec ses collègues de l’UMP et du Nouveau Centre, ils n’ont pas voulu les supprimer, car ils pensent à leur réélection, même si ce n’est pas très crédible ! (Rires sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

M. Guy Geoffroy. L’argumentation s’épuise…

M. Roland Muzeau. Monsieur Méhaignerie, on ne peut pas vous reprocher de ne pas connaître le monde de l’entreprise ; je ne vous ferai pas ce procès, ne me le faites pas non plus. Toutefois, quand vous affirmez que les trente-cinq heures ont pénalisé les entreprises, vous oubliez de rappeler ce qu’elles ont apporté à l’économie nationale.

M. Dominique Tian et M. Paul Jeanneteau. Pardon ?

M. Roland Muzeau. Je suis obligé d’aller chercher mes sources dans un monde que je combats en permanence, le monde patronal, dont notre collègue Dominique Tian est un fervent défenseur ! Que disent le MEDEF, la CGPME, toutes les études, de l’apport des trente-cinq heures ? Ils parlent de flexibilité accrue – je ne prétends pas que j’en suis satisfait, mais c’est un fait –, d’efficacité économique au taux horaire la meilleure au monde…

M. Paul Jeanneteau. À quel prix pour les salariés ?

M. Roland Muzeau. Parfois, les analyses se contredisent, mais, en l’occurrence, les études nationales et celles de l’OCDE concordent.

Les heures supplémentaires, monsieur Méhaignerie, ont toujours été utilisées quand les charges des entreprises connaissent des pics qui ne justifient pas de recruter des emplois permanents sur une longue durée. Dans le monde du BTP, que je connais bien puisque je suis maire adjoint à l’urbanisme et aux travaux de ma commune, ces heures supplémentaires permettent depuis toujours de répondre aux crêtes des carnets de commande. Je vous signale toutefois qu’il existe aussi les CDD et l’intérim.

Comme les rapports l’ont montré, le volume général des heures supplémentaires n’a pas augmenté avec votre mesure. Il s’est produit un effet d’aubaine extraordinaire, ainsi que les dérives que chacun sait.

Au cours de leurs dix années de pouvoir, l’UMP et le Nouveau Centre n’ont pas osé supprimer les heures supplémentaires. Nous savons maintenant pourquoi !

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Le dispositif de défiscalisation et d’allègement des charges sociales sur les heures supplémentaires avait deux objectifs. Il s’agissait, tout d’abord, d’améliorer le pouvoir d’achat, dans une période difficile. Depuis quatre ans, nous recevons beaucoup de leçons sur le sujet, de la part de nos collègues socialistes. Ce dispositif bénéficie à neuf millions de salariés ; c’est loin d’être insignifiant !

On nous rétorque qu’il aurait fallu plutôt embaucher du personnel, notamment dans la fonction publique. Ainsi, nos collègues trouvent scandaleux que les heures supplémentaires soient financées par la dette, mais que la dette finance l’emploi public ne les choque pas du tout ! Il existerait une bonne utilisation de la dette, à gauche, et une mauvaise, à droite ; un tel discours est scandaleux ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Roland Muzeau. La dette, c’est vous !

Mme Marie-Christine Dalloz. L’enjeu de cette exonération était également de renforcer la compétitivité de nos entreprises.

M. Yves Bur, rapporteur. C’est bien de le rappeler !

Mme Marie-Christine Dalloz. Elle présentait ces deux aspects : le pouvoir d’achat et la compétitivité. Vous qui plaidez pour l’emploi à longueur de séances,…

Mme Marisol Touraine. Nous avons tort ?

Mme Marie-Christine Dalloz. …vous devriez comprendre que la compétitivité des entreprises, c’est aussi de l’emploi. On ne peut pas toujours parler d’effet d’aubaine ! Il s’agit de créer des emplois supplémentaires…

M. Roland Muzeau. Cette mesure n’a pas permis d’en créer !

Mme Marie-Christine Dalloz. …et de permettre, dans un contexte économique difficile, de vraies stratégies dans les entreprises. Nos propositions sont fondées, réalistes, et nous pouvons dire, nous, que nous travaillons à la fois sur le pouvoir d’achat et sur la compétitivité pour les emplois de demain. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Michel Issindou, avant que nous passions au vote.

M. Michel Issindou. Le président Le Fur est descendu du perchoir pour la circonstance ; cela lui a fait du bien de se vider le cœur et les tripes. C’est la première fois que je vois un président quitter son siège pour intervenir ; il fallait donc vraiment que cela presse…

M. Roland Muzeau. Il veut être réélu !

Mme Laure de La Raudière. Il le fait souvent !

M. Michel Issindou. Pardon, c’est un député actif en même temps !

De temps à autre, Pierre Méhaignerie cède à la caricature. Il parle des cas où se présente un marché supplémentaire qui ne permet pas à l’entreprise de trouver en temps voulu le jeune adapté à l’emploi. C’est vrai, mais cela n’enlève rien au fait que beaucoup d’employeurs ont aujourd’hui recours aux heures supplémentaires défiscalisées parce qu’elles coûtent moins cher et que cela leur évite l’effort de trouver des apprentis. Sans cette défiscalisation, peut-être aurions-nous une politique plus dynamique en faveur des jeunes ! Mais là c’est l’effet d’aubaine, l’effet de facilité : il suffit de recourir aux heures supplémentaires.

Que le dispositif ait amélioré le pouvoir d’achat de certains, soit, mais cela ne le justifie pas plus. Il y a des heures supplémentaires, mais faisons-les rentrer dans le droit commun du travail. Pendant fort longtemps et jusqu’à récemment, elles ont été normalement taxées. L’exonération sociale des heures supplémentaires est une mesure démagogique par laquelle vous avez propagé l’image du Président du pouvoir d’achat ; il en a effectivement créé, mais en aggravant la situation de l’emploi, celui des jeunes en particulier. Je suis convaincu qu’une part de l’aggravation de la situation de l’emploi est liée aux heures supplémentaires.

De plus, la mesure a aggravé le déficit de la sécurité sociale. Si on avait, depuis 2007, ces 4,5 milliards d’euros en plus dans nos caisses, l’on serait déjà un peu moins pauvres. En temps normal, en dehors des périodes de crise, la sécurité sociale ne serait alors pas très loin de l’équilibre.

M. Yves Bur, rapporteur. Sans les exonérations de charges liées aux 35 heures, on serait en excédent aujourd’hui !

M. Michel Issindou. Si on y ajoutait la réforme du forfait social et quelques autres mesures, on y serait.

Vous et votre majorité avez fait des choix. On ne peut pas gagner sur tous les tableaux, et en choisissant le pouvoir d’achat, vous avez de fait sacrifié l’emploi et le budget de la sécurité sociale.

M. le président. Mes chers collègues, je considère que l’Assemblée est suffisamment éclairée. Je vais donc mettre aux voix les deux amendements identiques.

(Les amendements identiques nos 442 et 512 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

4

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures.)