Question écrite n° 14599 :
prise illégale d'intérêts

11e Législature

Question de : M. Jacques Pélissard
Jura (1re circonscription) - Rassemblement pour la République

M. Jacques Pélissard appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'inadaptation à la réalité du monde rural de l'article 432-12 du code pénal interdisant aux élus des petites communes exerçant la profession d'agriculteur de louer un terrain communal. De nombreux maires de petites communes rurales, notamment dans le Jura, exercent parallèlement à leur fonction élective la profession d'agriculteur. Or, les maires concernés qui louent, souvent depuis de nombreuses années, des terrains communaux par bail à ferme, sont, au regard de la loi, dans une situation très délicate. En effet, aux termes de l'article L. 411-46 du code rural, ils ont droit au renouvellement de leur bail parvenu à échéance. Toutefois, selon l'article 432-12 du code pénal, ils remplissent les conditions du délit de prise illégale d'intérêts dès lors qu'ils sont investis d'un mandat public électif, qu'ils ont en outre un intérêt personnel dans l'opération et, enfin, qu'ils assument la charge d'administrer les biens communaux. La seule alternative qui semblerait s'offrir à eux serait ainsi de renoncer à l'une de leurs activités. Pourtant, cette décision paraît difficilement acceptable au regard des dispositions de l'article 432-12, alinéa 4, permettant aux maires des communes de 3 500 habitants « d'acquérir un bien appartenant à la commune pour la création ou le développement de leur activité professionnelle ». La logique voudrait donc que la location d'un terrain communal leur soit autorisée. Ce n'est pas le cas aujourd'hui. Cette situation et d'autant plus pénalisante qu'elle peut impliquer, comme c'est le cas pour une petite commune du Jura de 85 habitants, que le maire, se voyant refuser le renouvellement du bail qu'il avait conclu avant d'être élu, patisse non seulement d'une perte de sa surface exploitée, mais aussi, et c'est plus grave, de ses quotas laitiers correspondants. Dès lors, afin de remédier à cette situation véritablement problématique, induite par les dispositions de la loi du 22 juillet 1992 modifiant les éléments constitutifs du délit d'ingérence (dit désormais « prise illégale d'intérêts »), élaborée, certes, dans l'optique louable de fixer des règles de moralisation de la vie publique, mais inadaptée à la réalité des petites communes rurales, le Sénat a adopté le 10 février dernier une proposition de loi visant à autoriser les élus des communes de moins de 3 500 habitants à conclure des baux ruraux avec leur collectivité. Compte tenu de la pertinence de l'objet de ce texte, il souhaite savoir si le Gouvernement est favorable à sa transmission et à son examen à l'Assemblée nationale, ou, à défaut, s'il entend élargir le champ de la dérogation prévue par l'article 432-12 du code pénal afin d'autoriser la location, par les élus des communes de moins de 3 500 habitants exerçant la profession d'agriculteur, d'un terrain communal.

Données clés

Auteur : M. Jacques Pélissard

Type de question : Question écrite

Rubrique : Droit pénal

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 18 mai 1998
Réponse publiée le 29 juin 1998

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