relations culturelles
Question de :
M. Jack Lang
Loir-et-Cher (1re circonscription) - Socialiste
M. Jack Lang attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie sur le projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. La France développe à l'étranger, dans le respect de la souveraineté nationale des Etats, une action de service public qui dépasse largement la diplomatie et qui concerne notamment la culture de milliers d'agents public français ou étrangers qui relèvent, pour l'essentiel, du droit public français y compris lorsqu'ils sont recrutés localement. Or, le « projet de loi tirant les conséquences de l'arrêt du tribunal des conflits du 25 mars 1996, Berkani » qui a été soumis au Conseil supérieur de la fonction publique le 12 octobre dernier, tend à inverser le régime de droit applicable aux recrutés locaux par la disposition suivante de son article 2 : « Lorsque les nécessités du service le justifient, les services de l'Etat à l'étranger peuvent faire appel à des personnels contractuels recrutés sur place par des contrats de travail soumis au droit local pour exercer toute fonction concourant au fonctionnement desdits services. » Ce qui est en cause, c'est implicitement le rappel, avec l'arrêt Berkani, que les recrutés sur place relèvent de notre droit public. Ainsi, bon nombre de nos administrations se trouvent en situation de porte à faux. En effet, celles-ci ont, pour des raisons budgétaires, massivement recruté sous contrat de droit local, soit en contournant les textes applicables, soit en excluant de leur champ d'application certaines catégories d'agents publics. Ce n'est donc pas un ajustement technique qui est proposé, mais bien une modification du régime des agents publics en poste à l'étranger. Ainsi de l'exception, on veut faire la règle. Par ailleurs, il faut souligner qu'en mentionnant, sans les définir, les « personnels contractuels recrutés sur place », l'article 2 vise aussi bien les agents non titulaires que les titulaires, également recrutés localement, le cas échéant, et par la voie d'un contrat. Une telle mesure, s'agissant d'une telle masse de fonctionnaires, serait sans précédent. L'application de ce dispositif reviendrait à admettre en premier lieu que les agents participant à l'exécution directe du service public pourraient être soumis à des autorités étrangères, notamment juridictionnelles. Une telle démarche remettrait en cause les soubassements même de la conception française des services publics. Ainsi, dans le domaine de l'action culturelle extérieure de la France, ce serait une rupture radicale dans la stratégie suivie jusqu'alors. Plusieurs années ont été nécessaires aux autorités françaises pour faire admettre à l'étranger que les activités de leurs services publics culturels exprimaient l'action de l'Etat français en tant que puissance publique. La permissivité du droit international, mais aussi l'influence des concepts juridiques français à l'étranger, ont permis de soustraire, dans la plupart des cas, les services publics culturels français à l'étranger à la législation des pays sur le territoire desquels ils opéraient. C'est parce que les agents de l'Etat français sont soumis au droit public français que leurs différends avec l'administration seront soumis au juge administratif français et que le juge étranger ne connaîtra pas ces différends. Modifier cet état de fait reviendrait à ballotter, au gré des évolutions pouvant affecter les législations locales la situation juridique des agents visés par l'avant-projet de loi. Compte tenu de la régression qu'entraînerait l'adoption de cette mesure, il souhaite connaître la position du Gouvernement à ce sujet.
Auteur : M. Jack Lang
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : éducation nationale, recherche et technologie
Ministère répondant : fonction publique, réforme de l'Etat et décentralisation
Dates :
Question publiée le 5 juillet 1999
Réponse publiée le 24 janvier 2000