Question écrite n° 69138 :
capital social

11e Législature

Question de : M. Olivier de Chazeaux
Hauts-de-Seine (5e circonscription) - Rassemblement pour la République

M. Olivier de Chazeaux souhaite appeler l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la possibilité, pour le conseil d'administration ou le directoire d'une société dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, de déléguer au président le pouvoir de fixer le prix des actions de la société offertes aux salariés dans le cadre d'une augmentation de capital réservée aux salariés du groupe. L'article L. 443-5 du code du travail autorise les sociétés à procéder à des augmentations de capital réservées aux « adhérents » au plan d'épargne d'entreprise (« PEE »). Lorsque les titres sont cotés, le prix de souscription ne peut être ni supérieur à la moyenne des cours cotés aux vingt séances de bourse précédant le jour de la décision du conseil d'administration ou du directoire, selon le cas, fixant la date d'ouverture de la souscription, ni inférieure de plus de 20 % à cette moyenne. Aux termes de l'article L. 225-129 du nouveau code de commerce (« NCC »), l'assemblée générale extraordinaire, (« AGE ») est seule compétente pour décider une augmentation de capital. Cependant, l'article L. 225-129 III du NCC prévoit la faculté pour l'AGE de déléguer au conseil d'administration ou au directoire, selon le cas, les pouvoirs de fixer les modalités de l'augmentation de capital. L'article L. 225-129 V du NCC prévoit quant à lui, expressément, s'agissant de sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, la faculté pour le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, de déléguer au président les pouvoirs nécessaires à la réalisation de l'augmentation de capital. La délégation prévue à l'article L. 225-126 V en faveur du président (texte d'ordre général) peut-elle s'étendre aux augmentations de capital réservées aux salariés ? L'ANSA a confirmé, dans sa communication n° 2806 de janvier-février 1996, que le champ d'application de la subdélégation au président en matière d'augmentations de capital réservés est identique à celui de la délégation accordée par l'assemblée générale extraordinaire au conseil d'administration en vertu de l'article 180-III de la loi du 24 juillet 1966 (désormais art. L. 225-129 III du NCC), à condition qu'il s'agisse de titres cotés, et qu'une émission de titres cotés réservée aux salariés en vertu de l'article 186-3 de la même loi (désormais art. L. 225-138 du NCC) peut donc être licitement décidée par une subdélégation au président. Cette prise de position est basée sur une analyse des textes, et en particulier des articles L. 225-129 et L. 225-138 du NCC, ainsi que des travaux parlementaires préalables à la loi DDOEF du 8 août 1994 qui a modifié l'actuel article L. 225-129, de même qu'une analyse de ceux qui ont précédé la loi du 1er février 1995, qui a modifié l'ancien article 180-III pour y insérer dans la liste des résolutions obligatoirement séparées la mention expresse des augmentations de capital visées aux articles L. 225-138 et L. 443-5 du code du travail relatifs aux émissions réservées aux salariés. Cette prise de position de l'ANSA ne semble pas devoir être contredite par les dispositions de l'article L. 443-5 du code du travail qui ne fait référence qu'à une décision du conseil d'administration fixant la date d'ouverture de la souscription car cette disposition est de toute façon antérieure au régime de l'article L. 225-129 qui instaure la délégation au conseil d'administration et la subdélégation au président. La question qui se pose alors est de savoir si une telle délégation peut s'étendre à la détermination du prix des actions offertes aux salariés dans la mesure où cette détermination est nécessaire à la réalisation de l'augmentation de capital en faveur des salariés. Le 2e alinéa de l'article L. 443-5 du code du travail fixant les modalités de détermination du prix des actions offertes aux salariés et qui stipule que celui-ci ne peut être « ni supérieur à la moyenne des cours cotés aux vingt séances de bourse précédant le jour de la décision du conseil d'administration ou du directoire, selon le cas, fixant la date d'ouverture de la souscription, ni inférieur de plus de 20 % à cette moyenne », il est clair que l'AGE peut valablement déléguer au conseil d'administration ou au directoire, selon le cas, le soin de fixer le prix. Dans la mesure où l'AGE peut valablement déléguer au conseil d'administration ou au directoire, selon le cas, la faculté de fixer le prix des actions offertes aux salariés, dans la limite bien sûr de la fourchette définie par le 2e alinéa de l'article L. 443-5, il semblerait admissible, sur un plan strictement juridique, que le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, puisse subdéléguer au président cette faculté. Mais la question demeure entière sur le plan fiscal et social. En effet, les opérations régies par l'article L. 443-5 du code du travail ne bénéficient d'un régime fiscal et social particulièrement avantageux pour les salariés que si l'opération remplit les conditions prévues par la réglementation des PEE, et notamment l'article L. 443-5 précité. Or l'alinéa 2 de cet article prévoit expressément que le prix de souscription est calculé par rapport à la moyenne des vingt cours de bourse précédant la date et la décision du conseil d'administration fixant la date d'ouverture de la période de souscription, une possibilité de subdélégation au président ne figurant pas expressément dans cet article. S'il est admis que le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, puisse déléguer au président le soin de fixer les modalités de l'augmentation de capital en application des articles L. 225-129 III et V du NCC, la mise en oeuvre de ce principe pour les besoins d'une augmentation de capital réservée aux salariés adhérents à un plan d'épargne d'entreprise en application de l'article L. 443-5 du code du travail est-elle conforme aux dispositions de cet article, nonobstant l'absence de référence expresse à la possibilité d'une délégation au président et, en particulier, permet-elle à ce dernier de fixer la date d'ouverture de la souscription ainsi que le prix de souscription par référence à la moyenne des cours cotés aux vingt séances de bourse précédant le jour de la fixation du prix de souscription par celui-ci ? Le non-respect par les entreprises des textes applicables en matière d'épargne salariale étant, notamment - tant pour les salariés adhérents au PEE que pour les sociétés qui offrent à leurs salariés la souscription d'actions dans le cadre d'augmentation de capital qui leur sont réservés -, la perte des avantages fiscaux et sociaux qui y sont attachés, et à un moment où la loi du 19 février 2001 a pour objectif de promouvoir l'épargne salariale, il apparaît essentiel qu'elle se prononce sur cette question.

Données clés

Auteur : M. Olivier de Chazeaux

Type de question : Question écrite

Rubrique : Sociétés

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 19 novembre 2001
Réponse publiée le 25 mars 2002

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