télévision
Question de :
M. Olivier de Chazeaux
Hauts-de-Seine (5e circonscription) - Rassemblement pour la République
Question posée en séance, et publiée le 16 décembre 1998
M. le président. La parole est à M. Olivier de Chazeaux.
M. Olivier de Chazeaux. Monsieur le Premier minisre, je voudrais revenir sur l'échec personnel que représente votre décision de reporter sine die le projet de réforme de l'audiovisuel public.
C'est un échec politique, puisque vous avez démontré ainsi que vous manquiez de clairvoyance et d'ambition concernant l'industrie de l'audiovisuel français. Un échec méthodologique aussi, puisque force est de constater que votre méthode, c'est d'abord le flou, ensuite le cafouillage et enfin le bricolage. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Christian Bourquin. Rigolo !
M. Olivier de Chazeaux. Par votre seule décision, monsieur le Premier ministre, vous avez réussi le double tour de force de semer le désarroi dans l'audiovisuel public et de vous ridiculiser aux yeux de l'Union européenne en oubliant la date butoir du 31 décembre 1998 pour transposer la directive «Télévision sans frontières», dont la France était pourtant à l'origine.
Ce dernier élément est d'une gravité telle qu'il vous oblige à tenter d'organiser cette transposition dans la précipitation, au détriment d'un débat national sur l'audiovisuel - que vous aviez appelé de vos voeux le 19 juin 1997 -, au détriment des intérêts audiovisuels et des téléspectateurs français.
Enfin, monsieur le Premier ministre, il est remarquable de constater que, selon votre méthode, la loi audiovisuelle française sera dorénavant proposée par le ministère des affaires étrangères. Exit le ministère de la culture et de la communication. De fait, celui-ci semble avoir perdu toute utilité.
Nous en sommes là parce que vous avez cru utile de faire prévaloir votre ambition présidentielle sur les intérêts de la France qui, seuls, devraient déterminer votre politique.
M. Christian Bourquin. La question !
M. Olivier de Chazeaux. Monsieur le Premier ministre, il est clair aujourd'hui que le mythe d'Icare vous a rattrapé.
Quand allez-vous cesser de faire du bricolage juridique sur le dos de la France et sur le dos de l'audiovisuel français ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur de Chazeaux, vous allez bien vite en besogne et vous devriez vous méfier: Icare n'est pas celui que vous pensez ! La loi concernant la réforme de l'audiovisuel public n'est pas repoussée sine die, mais reportée. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Elle n'est pas retirée.
S'agissant de la directive, je tiens à vous rassurer. Si vous l'aviez lue - mais alors vous auriez formulé votre question autrement - vous sauriez que le projet que j'ai déposé et qui a été adopté par le conseil des ministres prévoit trois sortes de dispositions.
M. Pierre Lellouche. Le Conseil d'Etat l'a mis en pièces, madame Trautmann !
Mme la ministre de la culture et de la communication. Des dispositions concernant la protection des mineurs, les critères de compétence - c'est-à-dire la détermination de la législation nationale applicable en fonction du lieu de l'établissement d'une chaîne - et les obligations réglementaires des chaînes étrangères figurent dans le projet de loi tel qu'il a été adopté, tel qu'il a été déposé sur le bureau de l'Assemblée.
M. Laurent Dominati. Mais il n'y a plus de projet de loi !
Mme la ministre de la culture et de la communication. Mais il manque une disposition, pour répondre complètement à la Commission européenne. Elle concerne le régime satellitaire.
Je voudrais faire une remarque. Lorsque j'ai pris mes fonctions, le projet de loi préparé par M. Douste-Blazy faisait l'impasse sur deux griefs principaux de la Commission: la protection des mineurs et les critères de compétence. J'ai, pour ma part, tenu à intégrer ces dispositions dans le projet de texte qui vous sera soumis. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
Du point de vue juridique, la France sera, le plus tôt possible, en concordance avec la transposition et l'application de la directive européenne.
M. Laurent Dominati. Langue de bois !
Mme la ministre de la culture et de la communication. Rappelez-vous les directives de 1989 et de 1997 et la bataille que la France a menée, avec l'appui des parlementaires français, pour que les programmes diffusés soient majoritairement des programmes nationaux. La bataille fut gagnée.
La Commission avait décidé d'intervenir et de déposer un recours avant même le report de la loi. Par conséquent, il faut bien comprendre que les choses sont indépendantes et que, juridiquement, le Gouvernement fait acte de responsabilité en prenant des dispositions incontestables de la part de la Commission. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Monsieur de Chazeaux, à propos de l'ambition du Gouvernement, je vous signale que, pour la première fois, les décisions prises par le Gouvernement et arbitrées par le Premier ministre ont permis de garantir le financement de la baisse de la publicité tout en renforçant le service public de l'audiovisuel, dont les moyens progresseront en 1999. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
M. Laurent Dominati. Mais il n'y a pas de loi !
Mme la ministre de la culture et de la communication. Nous sommes loin de ce que vous aviez vous-mêmes organisé: la pénurie du public, sa privatisation larvée, en bref, la casse du service public ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Nous construisons et nous construisons solidement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Auteur : M. Olivier de Chazeaux
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Audiovisuel et communication
Ministère interrogé : culture et communication
Ministère répondant : culture et communication
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 décembre 1998