Question au Gouvernement n° 1033 :
hôpitaux

11e Législature

Question de : Mme Nicole Bricq
Seine-et-Marne (6e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 23 décembre 1998

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. La semaine dernière, vous avez, semble-t-il, laissé publier un volumineux rapport qui détaille, région par région, les transferts d'activités et les rapprochements d'hôpitaux qui «composeraient» une prochaine restructuration hospitalière. Je parle au conditionnel. Au passage, je vous signale un souhait de mes collègues, surtout de ceux qui sont concernés parce qu'ils ont des hôpitaux sur leur territoire: nous aurions bien aimé être les destinataires de ce volumineux rapport (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance) dont vos services me disent qu'il est épuisé et qu'il ne sera pas disponible avant trois semaines.
Quoi qu'il en soit, la restructuration hospitalière concernera de nombreux hôpitaux en milieu urbain comme en milieu rural, puisque 330 regroupements seraient programmés et plusieurs milliers de lits fermés - 6 000 rien qu'en Ile-de-France. Indéniablement, il s'agit d'une réforme d'importance. Je crois que la représentation nationale souhaiterait connaître plus précisément les volontés du Gouvernement dans ce domaine, puisque vous avez montré, à plusieurs reprises, que vous étiez attachés à deux composantes essentielles de la vie de tous nos concitoyens, l'hôpital et la santé.
Si cette réforme est nécessaire, il faut l'expliquer. J'appelle votre attention particulièrement sur le cas de l'Ile-de-France qui, avec plus de 12 millions d'habitants, a d'énormes besoins. De profondes inégalités internes apparaissent de façon marquée entre les départements, notamment entre le centre, pour ne pas dire Paris, et la grande couronne. Je pense en particulier à la Seine-et-Marne et au Val-d'Oise dont mon collègue Blazy a parlé il y a quelques semaines.
Du reste, le 28 octobre, Mme Martine Aubry, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale avait déclaré qu'en ce qui concerne la péréquation, le Gouvernement avait l'intention d'aller vite et qu'au sein de l'Ile-de-France «existaient des différences inacceptables».
Je souhaiterais donc connaître les dispositions que le Gouvernement compte prendre - à moins qu'il ne les ait déjà prises -, en matière de directives écrites aux agences régionales hospitalières au sujet des rééquilibrages nécessaires à l'Ile-de-France et sans doute à d'autres régions. Je voudrais qu'il nous éclaire sur la place de ce rapport dans le cadre général de la restructuration hospitalière. («Très bien !» et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. André Santini. Très bonne question.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Madame la députée, je vous remercie d'avoir souligné le succès de cet ouvrage, qui retrace sommairement l'histoire et la raison d'être de trois cent trente mouvements dans notre pays, un succès tel que pour le moment le rapport est épuisé et que nous allons procéder à un nouveau tirage. Dès qu'il a été proposé au public, au ministère, tout le monde s'est précipité. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Philippe Auberger. Tout de même ! La représentation nationale aurait dû être la première destinataire !
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Je vous assure que la représentation nationale sera évidemment la première destinataire dès la réimpression et, madame la députée, il y aura un petit mot pour vous. (Exclamations sur divers bancs.)
Mme Nicole Bricq. Avant Noël.
M. le président. Mes chers collègues, un peu de silence !
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Mais sur le fond, je suis content,...
Mme Nicole Bricq. Il nous faut le document avant Noël !
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Excusez-moi, quand le ministère de la santé rend public un tel rapport, cela veut dire qu'il est accessible à tous, et si tous s'y intéressent, il est vité épuisé ! Il n'y a pas d'autre raison. (Exclamations sur divers bancs.)
M. Jean-Pierre Brard. Les parlementaires d'abord !
M. Philippe Auberger. Oui, c'est inadmissible; il fallait l'envoyer aux parlementaires !
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Je suis content de mettre un peu d'animation, car les débats m'avaient paru un peu ternes jusqu'à présent. (Sourires.)
L'entreprise de rapprochement, de mise en harmonie ou en complémentarité des hôpitaux n'était pas un secret. Aucune directive particulière n'a été adressée aux agences régionales d'hospitalisation. Il s'agit d'un mouvement qui se poursuit depuis plus de dix-huit mois pour tout mettre en résonance, pour que des services se complètent. Cette entreprise n'est pas destinée essentiellement à fermer des lits, madame la députée (Exclamations sur divers bancs) mais à donner aux Françaises et aux Français la possibilité d'être soignés pour une pathologie donnée de manière équitable. Et il convient de s'en féliciter. Les petites structures hospitalières, appelées improprement «de proximité», ont travaillé toute la journée de vendredi, à Châteaubriant, sur ce plan. Elles s'en sont trouvées satisfaites parce qu'il ne s'agissait ni de fermer arbitrairement des lits, ni de procéder par oukases, mais bien d'harmoniser, en fonction des besoins, l'offre hospitalière.
Vous ne m'avez pas interrogé sur les petites structures mais sur l'Ile-de-France pour laquelle un effort particulier a été consenti. N'en jugez pas négativement avant que je vous réponde. Certaines régions étaient singulièrement sous-dotées par rapport à d'autres mieux dotées. Si l'on veut harmoniser, il faut permettre que des hôpitaux se développent dans des régions où il n'y en a pas. Le Nord - Pas-de-Calais, la Picardie, la région Poitou-Charentes mettront cinq ans pour rattraper le quatrième de la liste, c'est-à-dire leur suivant immédiat. Nous avons donc fait des efforts de dotation pour celles-là.
S'agissant de l'Ile-de-France, je vais vous donner des chiffres précis, madame la députée.
M. Robert Pandraud. Notre collègue a quand même raison.
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Non, elle n'a pas vraiment raison, monsieur, et je vais vous dire pourquoi. En 1997, pour la dotation de l'Ile-de-France, moins 0,8 %, et pour la dotation de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, moins 34 %. En 1998, première année dont nous assumons la responsabilité en totalité, ces chiffres se sont améliorés, puisqu'ils sont passés respectivement à 0,35 et 0,30 par rapport à 1997. Enfin, et c'est le chiffre qui vous intéresse, en 1999, la dotation francilienne est de 1,117 %, celle adoptée pour l'Assistance publique - hôpitaux de Paris de 1 %.
M. François d'Aubert. Deux fois moins que la moyenne !
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. C'est dire que nous avons amorcé le renversement de tendance qu'apparemment vous souhaitez, et il se poursuivra en 1999.
Cette évolution de tendance, si elle s'opère au détriment de l'APHP, procède d'un constat simple. Dans cette région, les disciplines dites MCO, médecine-chirurgie-obstétrique, affichent des capacités excédentaires - en d'autres termes, il y en a trop par rapport aux besoins - et des coûts élevés au regard de l'activité. Le point ISA atteint 15,18 dans l'APHP contre 14,64 pour l'ensemble de la région. Nous en avons tiré les conclusions.
M. Robert Pandraud. Et les hôpitaux de Paris en sont victimes, une fois de plus !
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Non, monsieur le député.
M. le président. Voulez-vous conclure, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Je ne vous donnerai qu'un chiffre: on compte à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris quarante-deux services de chirurgie digestive.
M. Robert Pandraud. Mais l'Assistance publique, ce n'est pas le problème !
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Croyez-vous qu'on ait besoin de quarante-deux services de chirurgie digestive à Paris ? Non. Nous tenons compte de la situation et nous entendons la rééquilibrer à l'échelle de l'Ile-de-France, sans pénaliser pour autant l'Assistance publique - hôpitaux de Paris. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Données clés

Auteur : Mme Nicole Bricq

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Établissements de santé

Ministère interrogé : santé et action sociale

Ministère répondant : santé et action sociale

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 décembre 1998

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